Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   (Lundi 18 novembre 2002.)

  2   (L'audience est ouverte à 9 heures 3.)

  3   (Audience publique avec mesures de protection.)

  4   (M. Babic est dans le prétoire.)

  5   M. le Président (interprétation): Oui, Madame Uertz-Retzlaff, vous avez la

  6   parole.

  7   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Bonjour, Messieurs les Juges, bonjour

  8   Monsieur le Témoin.

  9   Le témoin n'a pas encore prononcé sa déclaration solennelle.

 10   M. le Président (interprétation): C'est exact; je vais demander au témoin

 11   de prononcer la déclaration solennelle.

 12   Il y a des difficultés à entendre la cabine, me semble-t-il.

 13   Je vais demander au témoin de prononcer la déclaration solennelle.

 14   M. Babic (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la

 15   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 16   M. le Président (interprétation): Merci, Monsieur. Veuillez vous asseoir.

 17   M. Babic (interprétation): Merci.

 18   (Interrogatoire principal du M. Babic par Mme Uertz-Retzlaff.)

 19   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Bon. Vous m'entendez, Monsieur le

 20   Témoin?

 21   M. Babic (interprétation): Oui.

 22   Question: Je pense que M. l'Huissier pourra montrer au témoin le feuillet

 23   d'identification préparé par nos soins. Je pense que tout le monde doit en

 24   disposer.

 25   (Intervention de l'huissier.)

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  1   Monsieur l'Huissier, cette page doit être montrée uniquement au témoin.

  2   Est-ce que ce qu'on voit sur ce feuillet vos coordonnées, à savoir votre

  3   nom, votre prénom, votre lieu et date de naissance.

  4   Réponse: Oui, c'est exact.

  5   Question: Votre appartenance ethnique, votre état civil ainsi que votre

  6   profession également?

  7   Réponse: Oui.

  8   Question: Et, sur ce feuillet, voit-on aussi le métier que vous exerciez

  9   avant la guerre?

 10   Réponse: C'est exact.

 11   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je pense que ce feuillet doit devenir

 12   une pièce à conviction qui sera déposée sous pli scellé.

 13   Mme Ameerali (interprétation): Il s'agira de la pièce d'accusation 354,

 14   conservée sous pli scellé.

 15  Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Au cours de cette audition, nous nous

 16 adressons à vous comme étant le M. Babic. Monsieur le Président, et Messieurs

 17    les Juges, il faudra passer à huis clos partiel pour quelque 15 minutes.

 18    M. le Président (interprétation): Oui, passons à huis clos partiel.

 19   (Audience à huis clos partiel à 9 heures 7)

20    [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

 21   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je vous remercie.

 22   Avez-vous été entendu à plusieurs reprises en novembre 2001 et en janvier,

 23   février de cette année-ci en tant que suspect?

 24   M. Babic (interprétation): C'est exact.

 25   Question: Pourriez-vous expliquer dans quelles circonstances s'est

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  1   effectué ce contact avec le Bureau du Procureur?

  2   Réponse: Par les médias, j'ai appris que mon nom figurait sur un acte

  3   d'accusation dressé par le Tribunal contre Slobodan Milosevic et, par

  4   l'intermédiaire de quelques organisations, de quelques personnes de

  5   Belgrade, j'ai demandé à prendre contact avec le Tribunal de La Haye; et

  6   plus particulièrement avec les représentants du Bureau du Procureur. De

  7   cette façon, je voulais d'abord tirer au clair le rôle que j'ai joué

  8   personnellement dans ces événements mentionnés et je voulais aussi pouvoir

  9   dire tout ce que je savais à propos de ces événements. Par la suite, j'ai

 10   eu des contacts avec des représentants du Bureau du Procureur.

 11   C'est de cette façon-là que cela s'est fait.

 12   Question: Et pensiez-vous que le fait de participer à une audition de

 13   suspect pourrait vous être utile dans votre cas?

 14   Réponse: Effectivement, je voulais tirer au clair tout ce qui passait et

 15   puis établir la vérité. Et pour montrer comment, dans le cadre de cette

 16   vérité, j'ai participé aux événements.

 17   Question: Et est-ce que vous êtes toujours l'objet d'une enquête menée à

 18   votre propos par le Bureau du Procureur?

 19   Réponse: Pour autant que je sache, c'est le cas.

 20   Question: Savez-vous que le Tribunal militaire de Split vous a jugé par

 21   contumace, ainsi que 18 autres Serbes de Croatie, et vous a condamné à 15

 22   ans de prison pour avoir commis l'acte criminel d'avoir mis en péril

 23   l'intégralité territoriale de l'Etat croate? Etes-vous au courant de cela?

 24   Réponse: Oui, je suis au courant; je le sais. Je sais que des poursuites

 25   ont été engagées contre moi pour des crimes politiques.

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  1   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je voudrais que soit montrée au

  2   témoin la pièce 352, intercalaire 169.

  3   Il s'agit d'un jugement rendu en première instance ainsi que l'arrêt

  4   d'appel.

  5   M. le Président (interprétation): Un instant. Où est-ce que nous allons

  6   trouver ce document, Madame Uertz-Retzlaff?

  7   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Il s'agit de la pièce 352, c'est un

  8   classeur, le classeur des pièces qui seront versées par l'intermédiaire

  9   des témoins.

 10   M. le Président (interprétation): Je ne me souviens pas qu'on a attribué

 11   des cotes. Est-ce qu'on l'a fait la dernière fois?

 12   (Mme Ameerali fait un signe affirmatif de la tête.)

 13   Le Greffe pourrait-il nous rappeler cela?

 14   Mme Ameerali (interprétation): Pour ce qui est de l'Article 92bis, c'est

 15   le 351; 352, c'est le classeur des pièces et les écoutes téléphoniques ont

 16   reçu la cote P353.

 17   M. le Président (interprétation): Merci.

 18   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Et pour ce qui est de la pièce 352,

 19   c'est l'intercalaire 169 qui nous intéresse.

 20   Monsieur le Témoin, je vais vous demander d'examiner rapidement la page 4

 21   de ce jugement rendu en première instance.

 22   M. Babic (interprétation): Oui.

 23   Question: On dit que les accusés n°1 à 19 ont commis des actes mettant en

 24   péril l'intégrité territoriale de l'Etat, passibles de sanctions en vertu

 25   de l'Article 236-b CL1-KZHR. On dit qu'il y a une peine de 15 ans de

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  1   réclusion assortie à ce verdict.

  2   Examinez également la première page de l'arrêt d'appel, arrêt rendu par le

  3   Tribunal de Zagreb. Il est dit ici que "l'appel concernant le procureur

  4   militaire et les accusés –et les noms sont mentionnés-, l'appel est

  5   débouté comme étant sans motif. Et le jugement rendu en première instance

  6   est affirmé".

  7   Je vous remercie, Monsieur l'Huissier. Nous n'avons plus besoin de ce

  8   document.

  9   Monsieur le Témoin, à l'époque, lorsque ce jugement a été rendu en

 10   première instance, étiez-vous au courant de la procédure? Est-ce que vous

 11   avez participé d'une quelconque façon à cette procédure?

 12   Réponse: Non, c'est plus tard que j'en ai entendu parler.

 13   Question: Et est-ce que vous avez interjeté appel de ce jugement?

 14   Réponse: Non.

 15   Question: Merci. Puisque nous parlons d'une enquête menée à votre encontre

 16   ici à La Haye, savez-vous qu'après qu'on eut terminé ou qu'on aura terminé

 17   cette enquête, vous risquez d'être mis en accusation pour les actes que

 18   vous avez commis et votre comportement personnel dans le cadre de ces

 19   événements?

 20   Réponse: Oui, j'en suis conscient.

 21   Question: Après votre arrivée à La Haye, avez-vous eu plusieurs entretiens

 22   avec moi et d'autres membres du Bureau du Procureur, en vue de préparer

 23   votre déposition?

 24   Réponse: Oui.

 25   Question: Au cours des auditions de suspects à Belgrade ainsi qu'au cours

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  1   de vos entretiens menés ici à La Haye, est-ce que des promesses, quelles

  2   qu'elles soient, vous auraient été faites s'agissant de l'issue de

  3   l'enquête diligentée contre vous?

  4   Réponse: Aucune promesse ne m'a été faite.

  5   Question: Est-ce qu'on vous a promis une forme d'immunité quelconque ou

  6   est-ce qu'on vous l'a accordée?

  7   Réponse: On m'a accordé des mesures de protection en vue de ma déposition,

  8   rien d'autre.

  9   Question: Est-ce que des promesses vous ont été faites au cas où vous

 10   accepteriez de témoigner dans le procès Milosevic?

 11   Réponse: Aucune promesse ne m'a été faite.

 12   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, et Messieurs

 13   les Juges, à ce stade-ci de l'audition, je pense qu'il faut mettre le

 14   témoin en garde en application de l'Article 90E).

 15   M. le Président (interprétation): Oui, je pense que ceci s'impose.

 16   Monsieur le Témoin...

 17   (Le Président s'interrompt pour s'entretenir avec le Juge Kwon.)

 18   Monsieur le M. Babic, veuillez comprendre dans quelle situation vous

 19   vous trouvez actuellement en votre qualité de témoin à la lumière de ce

 20   qui vient d'être dit à propos de votre situation générale et aussi à

 21   propos de cet entretien.

 22   En tant que témoin, vous pouvez vous opposer à faire toute déclaration,

 23   quelle qu'elle soit, déclaration qui serait de nature à vous incriminer.

 24   Cela veut dire que ceci vous amènerait à admettre toute participation à un

 25   délit pénal. Si vous prononcez et exprimez ce type d'objection, il

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  1   reviendra à la Chambre de première instance de déterminer si l'on peut

  2   vous forcer à répondre aux questions qui vous sont posées ou pas.

  3   Si vous étiez forcé à répondre et si vous répondiez sous la contrainte,

  4   les éléments de preuve que vous donneriez ne pourraient, ne sauraient être

  5   utilisés contre vous dans toute poursuite engagée ultérieurement eu égard

  6   à tout délit, hormis le cas de poursuite pour faux témoignage.

  7   Qu'est-ce que ceci veut dire? Cela veut dire que vous avez le droit de

  8   vous opposer à fournir des éléments de preuve concernant quoi que ce soit

  9   qui serait de nature à vous incriminer. Il vous revient de décider si vous

 10   voulez vous opposer ou pas.

 11   Nous relevons bien sûr que votre situation est assez inhabituelle puisque

 12   vous avez ici, présent, dans le prétoire, un avocat qui vous représente.

 13   Mais il est logique et juste qu'on vous explique quelle est votre

 14   situation de façon à ce que vous soyez au courant.

 15   Oui, Madame Uertz-Retzlaff, veuillez poursuivre.

 16   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

 17   Monsieur le Témoin, vous venez d'entendre cette mise en garde. Qu'est-ce

 18   qui vous pousse à témoigner ici, dans ce procès? Pourriez-vous nous le

 19   dire?

 20   M. Babic (interprétation): Je tiens à dire ici, dans ce procès, toute

 21   la vérité concernant les événements qui se sont produits, dire tout ce que

 22   je sais et parler des événements auxquels j'ai participé. J'estime

 23   également assumer une certaine responsabilité pour une partie de ce qui

 24   s'est passé, à l'époque, sur le territoire de l'ex-Yougoslavie. Et je

 25   pense que le rôle que j'ai joué fera l'objet d'une évaluation correcte de

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  1   la part de l'organe de poursuite du Bureau du Procureur et des autres

  2   institutions ici, dans ce Tribunal, si ceci est nécessaire. Et, le cas

  3   échéant, j'espère que je pourrai être traité avec clémence.

  4   Question: Parlons des fonctions que vous avez exercées avant la guerre. Il

  5   vous suffira de répondre par un simple oui ou non, puisque nous

  6   reviendrons sur ces questions avec davantage de détails par la suite.

  7   Est-ce que vous avez été, avant la guerre, membre de la Ligue des

  8   communistes en Croatie?

  9   Réponse: Oui.

 10   Question: Avez-vous participé au dernier congrès de décembre 1989 à

 11   Zagreb, dernier congrès de la Ligue des communistes de Croatie?

 12   Réponse: C'est exact.

 13   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Au cours de ce congrès, le Parti a-t-

 14   il adopté une proposition visant à le rendre indépendant de la Ligue des

 15   communistes de Yougoslavie?

 16   M. le Président (interprétation): Oui, un instant. Oui, qu'est-ce qu'il y

 17   a, Monsieur Milosevic?

 18   M. Milosevic (interprétation): Je vous demandais pourquoi on était à huis

 19   clos partiel. Puisque le témoin est un témoin protégé, on ne peut pas voir

 20   les traits de son visage, sa voix est déformée… Pourquoi avoir un huis

 21   clos partiel pour ces questions?

 22   M. le Président (interprétation): Pourquoi avons-nous besoin d'un huis

 23   clos partiel, Madame Uertz-Retzlaff?

 24   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je vais parler des fonctions exercées

 25   par ce témoin et, en particulier,…

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  1   M. le Président (interprétation): Fort bien, fort bien. Mais essayons

  2   d'être le plus rapide possible, surtout si vous voulez revenir sur ces

  3   éléments par la suite en audience publique.

  4   M. Kwon (interprétation): Excusez-moi, Monsieur le Président. Ici, à

  5   l'audience comme dans le résumé, il y a une erreur, vous en conscients?

  6   L'année… L'année de naissance du témoin, ce n'est pas la même date.

  7   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je comprends.

  8   M. Kwon (interprétation): Il est bien né en 1956, donc ce n'est pas 1959?

  9   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui. Ce n'est pas en 1959 qu'il est

 10   né, mais en 1956.

 11   Vous n'avez toujours pas répondu à ma dernière question, Monsieur le

 12   Témoin.

 13   M. Babic (interprétation): Oui, c'est exact.

 14   Question: Est-ce qu'en 1990, en février 1990, vous êtes devenu membre du

 15   comité principal, du comité central du SDS en Croatie?

 16   Réponse: Oui, c'est exact.

 17   Question: En avril ou en mai 1990, êtes-vous devenu président du comité

 18   municipal du SDS pour la municipalité de Knin?

 19   Réponse: C'est exact.

 20   Question: Est-ce que, par la suite, vous êtes devenu président du comité

 21   central du SDS?

 22   Réponse: Du comité central? Non. Du comité régional du SDS pour la

 23   Krajina.

 24   Question: Et vous avez exercé cette fonction pendant combien de temps?

 25   Réponse: Plusieurs mois, dans le deuxième semestre 1992.

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  1   Question: Mis à part la fonction que vous avez exercée dans le SDS, est-ce

  2   que vous êtes devenu président de la municipalité de Knin?

  3   Réponse: C'est exact.

  4   Question: Et vous avez exercé cette fonction pendant combien de temps?

  5   Réponse: Environ quatre ans.

  6   Question: Etes-vous devenu président de l'association des municipalités de

  7   la Dalmatie du Nord et de Lika?

  8   Réponse: C'est exact.

  9   Question: Etes-vous devenu président du Conseil national serbe, à un

 10   moment donné?

 11   Réponse: Oui.

 12   Question: Etes-vous devenu président du conseil exécutif de la SAO de la

 13   Krajina?

 14   Réponse: Oui.

 15   Question: Et vous avez occupé ce poste combien de temps et quand

 16   exactement?

 17   Réponse: A partir du 21 décembre 1990 jusqu'au 30 avril 1991. Et j'étais

 18   président temporaire du conseil exécutif donc et j'ai été président du 30

 19   avril 1991 au 29 mai 1991.

 20   Question: Est-ce qu'à un moment donné, vous êtes également devenu

 21   président du gouvernement de la SAO de Krajina?

 22   Réponse: C'est exact. Ça s'est passé le 29 mai 1991.

 23   Question: Et vous avez exercé cette fonction jusque quand?

 24   Réponse: Jusqu'au 19 décembre 1991.

 25   Question: Au moment de la création de la RSK, avez-vous été son premier

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  1   président?

  2   Réponse: Oui.

  3   Question: Et vous avez été président combien de temps?

  4   Réponse: Du 19 décembre 1991 jusqu'au 16 février 1992.

  5   Question: En 1993 et en 1994, est-ce que vous avez été le rival de Milan

  6   Martic en tant que candidat pour les élections présidentielles?

  7   Réponse: J'ai effectivement participé à la campagne électorale au poste de

  8   président de la RSK et Milan Martic était un autre candidat.

  9   Question: Est-ce que vous avez obtenu un poste dans le gouvernement de la

 10   RSK en 1994?

 11   Réponse: Oui, je suis devenu ministre des Affaires étrangères dans le

 12   gouvernement de la RSK.

 13   Question: Est-ce qu'enfin vous êtes devenu Président, une fois de plus, de

 14   la RSK en 1995?

 15   Réponse: Je suis devenu Premier ministre du gouvernement de la RSK le 27

 16   juillet 1995 jusqu'au 5 août 1995.

 17   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je pense que maintenant, nous pouvons

 18   revenir en audience publique, Monsieur le Président.

 19   (Audience publique avec mesures de protection à 9 heures 27.)

 20   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Merci.

 21   Je vais demander l'aide de l'huissier pour que soit montrée au témoin la

 22   pièce 326, intercalaire 11. C'est une carte.

 23   (Intervention de l'huissier.)

 24   Cette carte porte pour titre: "République serbe de la Krajina".

 25   Connaissez-vous cette carte?

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  1   M. Babic (interprétation): Oui.

  2   M. le Président (interprétation): C'est une carte qui a déjà été versée au

  3   dossier? Je ne m'en souviens pas, Madame Uertz-Retzlaff.

  4   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): C'est une nouvelle carte, Monsieur le

  5   Président.

  6   M. le Président (interprétation): Est-ce que nous pouvons recevoir copie?

  7   Apparemment, nous n'avons qu'une copie.

  8   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous avons fourni toutes les copies

  9   nécessaires au Greffe et il devrait y avoir une copie par Juge.

 10   (Intervention de la Greffière.)

 11   M. le Président (interprétation): Veuillez poursuivre, Madame Uertz-

 12   Retzlaff.

 13   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, avez-vous par

 14   hasard sur vous l'original de cette carte?

 15   M. Babic (interprétation): Oui.

 16   Question: Avez-vous fourni personnellement cette carte au Bureau du

 17   Procureur?

 18   Réponse: Oui.

 19   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, l'original est

 20   de meilleure qualité. Je pense qu'il serait préférable de le placer,

 21   davantage que la copie, sur le rétroprojecteur.

 22   Est-ce que vous accepteriez de demander au témoin de se servir de cette

 23   carte?

 24   M. le Président (interprétation): Oui. Si l'on peut la placer sur le

 25   rétroprojecteur, c'est bon.

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  1   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, vous pouvez vous

  2   servir de votre carte à vous.

  3   (Intervention de l'huissier.)

  4   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Merci.

  5   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, en fait, la carte originale

  6   est imprimée des deux côtés: d'un côté, on a la carte en tant que telle;

  7   au verso, il y a des photographies et beaucoup de texte qui décrit ce

  8   qu'on voit sur la carte.

  9   Vous disposez de la traduction de ce texte normalement en même temps que

 10   la carte. La traduction va de gauche à droite pour le recto et c'est

 11   pareil pour le verso.

 12   Monsieur le Témoin, peut-on placer le côté carte sur le rétroprojecteur?

 13   Je vous remercie.

 14   (Intervention de l'huissier.)

 15   Savez-vous qui est l'auteur de cette carte? Est-ce qu'il est indiqué sur

 16   la carte qui l'a établie?

 17   Réponse: C'est dit au verso: cela a été publié par les services

 18   militaires, une maison d'édition militaire à Belgrade.

 19   Question: Est-ce qu'il s'agit de la maison d'édition de la RSK, de la VJ

 20   ou bien d'une autre institution?

 21   Réponse: Il s'agissait de la VJ, l'armée de Yougoslavie à Belgrade.

 22   Question: Et est-ce qu'on peut voir à quel moment cette carte a été

 23   éditée?

 24   Réponse: En 1994. Un instant, je n'arrive pas à le voir très clairement.

 25   J'ai vu quelque part dans le texte qu'on mentionnait 1994. Après les

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  1   élections de 1993 dans la Krajina.

  2   Question: Monsieur le Témoin, sur la partie de la carte en propre, on voit

  3   la carte elle-même. Pouvez-vous placer la carte de sorte qu'on voie la

  4   partie en bleu au milieu. Merci.

  5   (Intervention du témoin.)

  6   Monsieur le Témoin, au milieu de cette carte, on voit la répartition des

  7   Serbes par ville en Croatie au terme du recensement du 31 mars 1981. Et ce

  8   qui figure en bleu, ce sont les zones habitées par les Serbes, n'est-ce

  9   pas, c'est le pourcentage des Serbes dans ces diverses régions, qui est

 10   présenté ici, n'est-ce pas? Est-ce qu'il en allait de même en 1990?

 11   Réponse: Oui.

 12   Question: Toujours sur cette partie du document où l'on voit la carte, à

 13   droite, on a une carte de génocide oustachi dans l'Etat indépendant de

 14   Croatie. Ça se trouve à droite sur cette carte. Pouvez-vous nous expliquer

 15   pourquoi?

 16   Réponse: Eh bien, cela se situe dans un contexte où, lorsqu'il a été

 17   question du génocide à l'égard du peuple serbe par l'Etat indépendant

 18   croate pendant la Deuxième Guerre mondiale, cela a été particulièrement

 19   présent.

 20   Ce contexte ou plutôt le message de ce contexte a été le suivant: les

 21   Serbes étaient tenus de prendre en compte ce qui avait été perpétré à leur

 22   égard par les Oustachis croates afin que cela ne se répète pas dans les

 23   conflits qui ont eu lieu entre 1990 et 1995 sur les territoires de la

 24   Croatie et, d'après cette carte, sur le territoire de la Bosnie-

 25   Herzégovine également.

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  1   Question: Monsieur le Témoin, en dessous de cette carte verte, on voit un

  2   autre élément: il s'agit d'un tableau bleu dans lequel figure un certain

  3   nombre de données relatives à la composition ethnique de la Slavonie

  4   orientale, Srem occidental et Baranja.

  5   En premier lieu, veuillez, s'il vous plaît, plier la carte différemment

  6   pour qu'on puisse voir ce dont je parle. Il faut ouvrir la carte tout

  7   d'abord.

  8   Monsieur le Témoin, pouvez-vous nous indiquer cette région s'il vous

  9   plaît: la région de Baranja, Slavonie orientale et Srem occidental? Il

 10   faut déplacer un petit peu la carte pour mieux voir cela.

 11   Réponse: C'est cette région-ci.

 12   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Dans le texte qui figure dans le

 13   tableau bleu, on voit que la population est de 135.800, et on peut voir

 14   "95% de Serbes, 2% de Croates et 1% d'autres".

 15   Savez-vous d'où viennent ces chiffres ou plutôt à quelle période ils

 16   s'appliquent?

 17   M. Babic (interprétation): C'est une évaluation faite par l'armée à

 18   l'époque; c'est donc la période courant de 1993 à 1994.

 19   M. Kwon (interprétation): Je crois que ça se trouve à droite, en bas de la

 20   carte.

 21   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Certes, mais ce n'est pas nécessaire

 22   de placer sur le rétroprojecteur. Nous voulons simplement voir la région

 23   telle qu'elle se présentait.

 24   Et quelle était la situation en 1990 et 1991? Le savez-vous?

 25   M. Babic (interprétation): Juste une petite remarque auparavant. Est-

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  1   ce que donc ces renseignements-là sont afférents à ce tableau-ci, ou est-

  2   ce que nous parlons de ce tableau de ce côté-là?

  3   Question: Je parle de ce qui se trouve à droite de la carte, de l'encadré

  4   bleu qui se trouve à droite. On voit que cela s'applique à la Slavonie,

  5   Srem et Baranja, etc.: "2% de Croates, 95% de Serbes, 2% de divers". Et ma

  6   question à moi… Ou 1% de divers. Et je voudrais savoir comment se

  7   présentait la situation en 1990-1991?

  8   Réponse: Je n'ai pas encore retrouvé les données dont vous étiez en train

  9   de parler tout à l'heure, Madame. Est-ce que vous parlez des

 10   renseignements afférents à la Slavonie orientale?

 11   Question: En fait, je suis en train d'examiner l'encadré bleu qui se

 12   trouve… Je vais de la gauche vers le bas. Et la première, la première

 13   partie de cet encadré s'applique à la Slavonie occidentale, Baranja et

 14   Srem.

 15   Réponse: J'ai compris. Pouvez-vous répéter, s'il vous plaît?

 16   Question: La question que je posais, c'est de savoir ce qu'il en était de

 17   la composition ethnique en 1990 et 1991 pour cette région. Le savez-vous?

 18   Réponse: A peu près, oui. Sur le territoire de la Slavonie orientale, du

 19   Srem occidental et de la Baranja, la composition ethnique, de par leur

 20   composition ethnique, avait été constituée par une moitié de Serbes et

 21   l'autre moitié étant des Croates et autres.

 22   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Maintenant, si l'on descend et si

 23   l'on s'intéresse à la région qui s'appelle Banija, on peut voir ici…

 24   M. Robinson (interprétation): Madame Uertz-Retzlaff, les choses sont un

 25   petit peu vagues pour moi, car l'encadré auquel vous faites référence sur

Page 12871

  1   cette carte n'est pas en anglais. Donc j'imagine que nous, nous devons

  2   nous référer à la traduction qui se trouve sur le document que j'ai dans

  3   la main?

  4   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui.

  5   M. Robinson (interprétation): Donc les éléments qui viennent de nous être

  6   donnés, je les retrouverai dans la traduction sous l'intitulé "Slavonie

  7   orientale, Srem occidental et Baranja"?

  8   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui.

  9   M. Robinson (interprétation): Or cela ne semble pas correspondre pas à ce

 10   que je vois ici.

 11   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): En fait, nous sommes en train de

 12   comparer la situation telle qu'elle se présentait en 1993 et telle qu'elle

 13   est représentée sur la carte; maintenant, je demande au témoin ce qu'il en

 14   était de 1990 et 1991: lui, il nous donne ces chiffres qui ne figurent pas

 15   sur la carte, mais qu'il nous donne parce qu'il les sait.

 16   M. Robinson (interprétation): Merci.

 17   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Passons maintenant à Banja. On peut

 18   voir ici, sur la carte, qu'en 1993, la population était de 82.406 et que

 19   la composition ethnique était de 97% de Serbes, de 2% de Croates et de 1%

 20   de divers. A ce sujet, j'ai les questions suivantes à vous poser:

 21   premièrement, veuillez avoir l'amabilité de nous indiquer où se trouve

 22   cette région de Banja sur la carte, pour que tout le monde puisse la voir.

 23   Et ensuite, pouvez-vous nous faire part de la composition ethnique en 1990

 24   et 1991, si vous détenez cette information?

 25   (Le témoin s'exécute.)

Page 12872

  1   Le témoin indique du pointeur la région de Banija.

  2   M. Babic (interprétation): C'est bien la région de Banija.

  3   Question: Oui. Pouvez-vous nous dire quelle était la composition ethnique

  4   en 1990, 1991?

  5   Réponse: Eh bien, quelque 75% avaient été des Serbes. Le reste était les

  6   groupes ethniques autres.

  7   Question: Vous souvenez-vous combien de Croates habitaient dans cette

  8   région en 1990, à peu près?

  9   Réponse: Eh bien, entre un quart et un tiers, autrement dit, quelque 25% à

 10   30%.

 11   Question: Bien. Maintenant, nous passons à la région de Kordun.

 12   Pouvez-vous nous indiquer où se trouve cette région sur la carte?

 13   Réponse: Voici la région de Kordun.

 14   Question: Et sur la carte pour Kordun pour 1993, on peut voir qu'il y

 15   avait 98% de Serbes, 2% de Croates. Savez-vous quelle était la situation

 16   en 1990?

 17   Réponse: Entre 75 et 80%, c'étaient les Serbes, alors que les 20 ou 25%

 18   restants étaient des Croates.

 19   Question: Maintenant, passons à Lika. Pouvez-vous nous dire où se situe

 20   cette région sur la carte? Pouvez-vous nous le montrer?

 21   (Le témoin s'exécute.)

 22   Réponse: Voici la région de Lika.

 23   Question: Sur la carte, on peut lire pour Lika qu'il y avait 48.389

 24   habitants, 93% étant des Serbes, 5% des Croates et 2% appartenant à

 25   d'autres communautés ethniques. Pouvez-vous nous dire quelle était la

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  1   situation en 1990?

  2   Réponse: En 1990, il y avait deux tiers à trois quarts de Serbes, donc

  3   quelque 75 à 80% de Serbes, alors que les Croates étaient au nombre de 20

  4   à 25%, Croates et autres.

  5   Question: Passons maintenant, plus bas, à la Dalmatie du Nord.

  6   Pouvez-nous nous l'indiquer sur la carte, s'il vous plaît?

  7   (Le témoin s'exécute.)

  8   Réponse: Voici la région de la Dalmatie du Nord.

  9   Question: Sur la carte, on peut lire que la population était de 87.000

 10   habitants et qu'il y avait 90% de Serbes et 10% d'autres. Pouvez-vous nous

 11   dire ce qu'il en était en 1990?

 12   Réponse: 80% étaient Serbes et à peu près 20% étaient Croates.

 13   Question: Sur la carte, on peut lire qu'il y avait 10% d'autres groupes,

 14   d'autres pour la Dalmatie du Nord. Est-ce que cela désigne les Croates?

 15   Réponse: Dans la structure ethnique de la population, à l'occasion du

 16   recensement de la population sur ce territoire-là, les peuples qui étaient

 17   en présence étaient des Serbes, des Croates et ceux qui se déclaraient

 18   comme étant yougoslaves. Et moins de 1% était constitué par d'autres

 19   groupes ethniques.

 20   Question: Monsieur le Témoin, la dernière région, c'est celle de la

 21   Slavonie occidentale, mais nous avons déjà entendu beaucoup de témoins à

 22   ce sujet; nous n'avons donc pas besoin d'y revenir maintenant.

 23   Je souhaiterais, s'il vous plaît, que vous puissiez retourner la carte

 24   maintenant, car j'ai un certain nombre de questions à vous poser au sujet

 25   du recto de cette carte.

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  1   Je vais demander aux Juges de bien vouloir se référer à la page 3 de la

  2   traduction qui leur a été communiquée de cette carte. Il y a une liste de

  3   municipalités de la RSK; il s'agit de 28 municipalités.

  4   Avez-vous trouvé la liste de municipalités, Monsieur le Témoin?

  5   Avez-vous trouvé cette liste de municipalités?

  6   J'ai deux questions seulement à vous poser. Au n°23, il y a la

  7   municipalité de Plaski?

  8   Réponse: Je ne sais pas si ici, c'est numéroté.

  9   Question: Monsieur le Témoin, vous avez la photographie, la photo avec

 10   Knin?

 11   Réponse: Oui, oui, j'ai trouvé.

 12   Question: J'ai une question au sujet du point 23, Plaski. Quand Plaski

 13   est-il devenu une municipalité?

 14   Réponse: Eh bien, cette localité a été reconnue comme étant municipalité

 15   et le représentant a fait partie de l'assemblée de la Krajina serbe au

 16   mois de décembre 1991.

 17   En d'autres termes, c'est à cette période-là qu'ils ont constitué une

 18   municipalité. Jusque-là, ils avaient fait partie de la municipalité de

 19   Korenica. Ils se sont dissociés de la municipalité de Korenica peut-être

 20   en automne 1991, mais, en fin de compte, leur délégation a fini par être

 21   présente à l'assemblée de la SAO de Krajina en décembre seulement de

 22   l'année 1991.

 23   Maintenant, de là à vous dire la date exacte de la proclamation de cette

 24   municipalité, je ne saurais le faire. Mais je sais qu'ils ont dû se

 25   constituer en tant que municipalité avant le mois de décembre, quelque

Page 12875

  1   part vers le mois de novembre 1991.

  2   Question: Cette ville de Plaski, est-ce qu'auparavant elle faisait partie

  3   de la municipalité d'Ogulin qui se trouvait en Croatie?

  4   Réponse: La localité de Plaski et quelques agglomérations environnantes en

  5   1990 faisaient partie de la municipalité d'Ogulin mais, suite au

  6   référendum en 1991, avec cette population majoritaire serbe, ils se sont

  7   adjoints à la municipalité serbe de Korenica.

  8   Question: Ma deuxième question a trait au n°26, la municipalité serbe de

  9   Zadar.

 10   Quand la municipalité serbe de Zadar a-t-elle vu le jour et quels villages

 11   appartenaient à cette municipalité?

 12   Réponse: S'agissant de cette ex-municipalité de Zadar, qui est devenue

 13   municipalité en 1990, deux agglomérations serbes, Donji Zemunik et

 14   Smokovic, se sont adjointes, début 1991, suite au référendum, à la

 15   municipalité de Benkovac. La situation a été précisément celle-là dans le

 16   courant de l'année 1991.

 17   Pour ce qui est des années 1992 et 1993, je ne sais pas exactement quand

 18   est-ce que cette municipalité serbe de Zadar a été mise en place. Cela

 19   s'est défini à l'occasion des élections en la République serbe de Krajina

 20   en 1993. Cette municipalité de Zadar avait un délégué à l'assemblée de la

 21   République serbe de Krajina.

 22   Maintenant, pour vous dire ce qu'avait englobé cette municipalité serbe de

 23   Zadar, je pourrais peut-être vous dire qu'il s'agissait là de parties du

 24   territoire de l'ex-municipalité de Zadar qui avaient été sous le contrôle

 25   de la République de Yougoslavie jusqu'en mai 1992.

Page 12876

  1   Question: Est-ce qu'elle comprenait les villages de Skabrnja et Nadin?

  2   Réponse: Territorialement parlant oui, en 1993, 1994, 1995.

  3   Question: Il y a un autre texte sur le recto de la carte où l'on voit le

  4   titre: "République de la Krajina serbe". On nous donne ici un certain

  5   nombre d'informations au sujet des régions que nous venons d'évoquer. Je

  6   n'ai que quelques questions à vous poser à ce sujet.

  7   S'agissant de la Dalmatie du Nord, on peut voir qu'il est écrit que Knin

  8   est le centre administratif. Etait-ce bien le cas?

  9   Réponse: Oui.

 10   Question: On peut lire également, pour la Dalmatie du Nord, que c'était

 11   une région qui était assez peu développée. Est-ce que cela avait toujours

 12   été le cas?

 13   Réponse: Excusez-moi, pour répondre à votre première question, Knin

 14   n'avait pas constitué formellement parlant le centre de cette Dalmatie du

 15   Nord mais c'était la localité principale. C'était le siège de cette région

 16   de la Dalmatie du Nord.

 17   Et pour répondre à l'autre question, c'était essentiellement une région en

 18   effet sous-développée, tout comme les autres régions qui faisaient partie

 19   de la Krajina serbe.

 20   Question: J'ai une question à vous poser au sujet de Banija. Pour Banija,

 21   on nous mentionne les cinq municipalités de Petrinja Glina, Kostajnica,

 22   Dvor na Uni et Caprak. Les villages de Dubica, Cerovljani et Bacin

 23   appartiennent-ils à Kostajnica?

 24   Réponse: Oui.

 25   Question: Au recto de la carte, on voit un autre article qui s'intitule:

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  1   "Comment est apparue la République de la Krajina serbe?"

  2   Veuillez, s'il vous plaît, vous référer à cet article. Plus tard, nous

  3   reviendrons sur les détails, si bien que je n'ai qu'une seule question à

  4   vous poser sur ce sujet à l'instant.

  5   Je signale à l'attention des Juges que cela se trouve à la page 9 de la

  6   version anglaise. Je n'ai donc qu'une seule question à vous poser au sujet

  7   du premier paragraphe.

  8   On peut lire -je cite-: "En 1989, le peuple serbe a réagi au nationalisme

  9   exacerbé de plus en plus agressif des Croates en mettant en place la

 10   société culturelle serbe "Zora" à Kistanje, ainsi qu'en présentant un

 11   front uni s'agissant des symboles et des mythes nationaux". (Fin de

 12   citation.)

 13   Quand cette société a-t-elle été mise en place et dans quel objectif?

 14   Réponse: Cette société a été mise en place pour la première fois vers le

 15   début du mois de juillet 1989. En termes formels, cela a été légalisé

 16   comme étant une société culturelle serbe vers l'automne de l'année 1990.

 17   Question: Qui a créé cette société?

 18   Réponse: C'étaient des gens du groupe ethnique serbe originaire de Knin,

 19   de Benkovac, ou plutôt des gens originaires de la Dalmatie et de la Lika.

 20   Et le président de cette association, de cette société était Jovan Opacic,

 21   originaire de Knin.

 22   Question: Nous n'avons plus besoin de cette pièce à conviction.

 23   (Intervention de l'huissier.)

 24   Monsieur le Témoin, alors que vous étiez toujours membre de la Ligue des

 25   communistes de Croatie, est-ce que la région de Knin avait une réputation

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  1   particulière au sein de la Ligue des communistes?

  2   Réponse: Eh bien, depuis février 1989 et depuis juillet 1989, Knin avait

  3   été, dans les milieux de la Ligue des communistes de Croatie, donc du

  4   parti du pouvoir à l'époque, avait été désigné comme étant un centre de

  5   nationalisme serbe, en raison des événements qui ont eu lieu en février,

  6   puis en juin et juillet de cette année sur le territoire de Knin

  7   notamment.

  8   Question: Quels événements avaient eu lieu?

  9   Réponse: En février 1989, pendant la grève des mineurs albanais dans la

 10   mine de Trepca au Kosovo, il y a eu une polarisation politique, autour de

 11   cet événement, sur le territoire tout entier de la Yougoslavie. La

 12   confédération des syndicats de Croatie a apporté son soutien aux grévistes

 13   albanais dans la mine de Trepca. En même temps, à Belgrade, il s'est tenu

 14   un grand meeting pour manifester le soutien de la population à la

 15   politique de la direction de la République de Serbie concernant encore une

 16   fois…, au sujet des événements de Trepca, de la mine de Trepca. C'est ce

 17   qui a suscité la solidarité des syndicats dans les grandes entreprises,

 18   les grandes sociétés s'agissant de la politique conduite par Belgrade à

 19   l'égard des événements au Kosovo. Et c'était fait pour protester contre la

 20   politique suivie par la centrale des syndicats en Croatie qui s'était

 21   solidarisée avec ces grévistes à Trepca.

 22   Et s'agissant d'autres événements...

 23   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Merci. Nous n'avons pas besoin de

 24   tous les détails, Monsieur.

 25   S'est-il passé quelque chose à Kosovo Polje, aux environs de Knin?

Page 12879

  1   M. Babic (interprétation): La célébration de l'anniversaire de la

  2   bataille du Kosovo s'est tenue cette année-là à Kosovo Polje, à proximité

  3   de Knin. A quelques jours de la date de la célébration de cette grande

  4   bataille dans la localité de Kosovo Polje, à proximité de Pristina, c'est

  5   là une cérémonie à laquelle ont pris les évêques de l'Eglise orthodoxe

  6   serbe; cela avait été là un événement culturel et religieux, et, à la fin

  7   de cette cérémonie, cela s'était mué en incident politique. Et le

  8   Président de cette association Zora, Jovan Opacic, a tenu...

  9   M. le Président (interprétation): M. Babic, vous comprendrez bien que

 10   d'autres témoins nous ont déjà parlé de ces événements. S'agissant de

 11   votre déposition, l'importance de ces événements, c'est simplement

 12   l'impact qu'ils auraient eu sur votre région, l'impact éventuel qu'ils

 13   auraient pu avoir sur votre région.

 14   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Est-ce qu'au sein de la société

 15   croate, ce qui s'était passé à Knin, ce qui s'était passé à Kosovo Polje

 16   près de Knin a été interprété comme un événement à caractère nationaliste?

 17   M. Babic (interprétation): Les représentants du parti au pouvoir, à

 18   savoir de la Ligue des communistes de Croatie, avaient eu essentiellement

 19   cette réaction ainsi que la population croate: ils avaient qualifié la

 20   chose comme étant un événement ou une manifestation nationaliste serbe.

 21   Question: Pourquoi êtes-vous devenu membre du SDS? Pouvez-vous nous

 22   l'expliquer?

 23   Réponse: Eh bien, compte tenu du fait que j'avais suivi les événements

 24   pour ce qui est de la position politique adoptée par le parti au pouvoir,

 25   à savoir la Ligue des communistes de Croatie, et l'attitude de ce dernier

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  1   à l'égard de Knin et de la région, des environs de Knin, j'ai compris,

  2   partant de là, qu'un parti nouveau était nécessaire; un parti qui serait

  3   là pour représenter les intérêts spécifiques de cette région. Cela avait

  4   été l'une des raisons pour lesquelles j'avais rejoint les rangs du SDS,

  5   parti qui -outre le programme de réforme de la société- comportait une

  6   partie dans son programme qui avait trait à l'amélioration de la condition

  7   économique dans cette région.

  8   Question: Est-ce que les Serbes en Croatie se trouvaient dans une position

  9   défavorable à cette époque?

 10   Réponse: Le fait est que les municipalités, qui étaient habitées

 11   essentiellement par les Serbes, faisaient en Croatie partie des régions

 12   économiquement sous-développées. D'autre part, il y avait une façon de

 13   voir, chez bon nombre de Serbes, disant que les autorités communistes

 14   précédentes avaient procédé à une sorte de discrimination et cette

 15   discrimination avait pour visée d'effacer l'identité culturelle et

 16   linguistique serbe sur ce territoire-là de la Croatie. A l'époque, il y a

 17   également eu une présentation médiatisée de la condition du peuple serbe

 18   en Croatie, en faisant en sorte de montrer que cette situation était plus

 19   mauvaise ou détériorée par rapport à celle de la population croate

 20   majoritaire.

 21   Question: Cette campagne médiatique, elle a été menée par qui? Pouvez-vous

 22   nous le dire?

 23   Réponse: Cette campagne avait été conduite par les médias appartenant à

 24   l'Etat serbe, à Belgrade notamment.

 25   Question: Avez-vous participé au meeting fondateur du SDS à Knin?

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  1   Réponse: Oui.

  2   Question: Quand cette manifestation a-t-elle eu lieu et où?

  3   Réponse: Le 17 février 1990, sur la place face à la gare ferroviaire de

  4   Knin.

  5   Question: Combien y avait-il de participants et qui était président de ce

  6   nouveau parti?

  7   Réponse: Il y avait 5 à 10.000 personnes de présentes. Et le président du

  8   parti est devenu l'académicien, le professeur et docteur Jovan Raskovic,

  9   une personne originaire de Sibenik.

 10   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les

 11   Juges, j'ai deux questions à poser à huis clos partiel puisque je vais

 12 évoquer le poste et la position du témoin par rapport à ce meeting politique.

 13   (Audience à huis clos partiel à 10 heures 06.)

 14   [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

 15   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Merci. Avez-vous prononcé un discours

 16   lors de cette manifestation?

 17   Réponse: Oui. On m'avait proposé de m'adresser à l'assemblée; cela m'avait

 18   été proposé par l'initiateur, M. Jovan Opacic. Et j'ai, en effet, fait un

 19   petit discours qui a duré deux ou trois minutes.

 20   Question: Et pourquoi vous a-t-on donné la possibilité de prononcer un

 21   discours? Est-ce que, à cette époque, vous étiez déjà très impliqué dans

 22   la vie politique?

 23   Réponse: Non, c'est par hasard que j'ai eu des contacts avec les

 24   organisateurs de cette assemblée, Jovan Opacic et Marko…

 25   (L'interprète n'a pas donné son nom.)

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  1   On avait demandé, au niveau de cette association de "Zora", des personnes

  2   qui prendraient la parole. J'avais demandé à savoir comment les

  3   préparatifs avançaient et on m'avait demandé, en s'adressant à moi, en

  4   disant: "Docteur, est-ce que vous voudriez prendre la parole?" et j'ai

  5   accepté.

  6   Question: Et… Non, je pourrai poser cette question en audience publique.

  7   Qu'avez-vous déclaré pendant votre allocution? Vous nous avez dit que vous

  8   avez prononcé un petit discours: qu'avez-vous dit?

  9   Réponse: A l'occasion de ce discours, j'avais été sous les impressions,

 10   les effets de ce que j'avais pu voir sur mon chemin du retour de ce

 11   congrès du parti auquel j'avais insisté. J'avais réfléchi, j'avais pensé

 12   au texte du journal "Duga" qui disait que les églises serbes n'avaient pas

 13   été reconstruites après la guerre, que les Serbes quittaient leurs

 14   agglomérations et le parc de Plitvice. Et l'image que j'en ai retirée

 15   avait été poignante, ce qui fait que j'avais dit au discours que le régime

 16   précédent avait établi un désert entre Karlovac et Knin, chose qui avait

 17   été applaudie par les participants à l'assemblée.

 18   J'ai, à cette occasion-là, apporté mon soutien à la mise en place d'un

 19   parti, du SDS, qui était censé prendre soin de la population de la région.

 20   Et cela avait été la raison pour laquelle l'un des membres de ce comité

 21   initiateur a fini par me proposer pour devenir membre du comité central du

 22   parti.

 23   Question: Nous pouvons revenir en audience publique.

 24   (Audience publique avec mesures de protection à 10 heures 09.)

 25   Question: Vous avez parlé de Jovan Opacic. Quel poste occupait-il, à cette

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  1   époque?

  2   Réponse: Il avait été président de cette association culturelle "Zora" et

  3   il avait été l'un des leaders politiques du SDS. Et je crois que,

  4   formellement parlant, il avait été vice-président du parti ou quelque

  5   chose, quelque fonction de ce genre.

  6   Question: Est-ce que des représentants de parti politique venant de Serbie

  7   ont participé à cette manifestation?

  8   Réponse: Il y avait pas mal de représentants de parti. Le représentant

  9   principal avait été l'un des fondateurs du parti, M. Kosta Cavoski.

 10   Question: Est-ce que des membres du parti de M. Milosevic étaient

 11   également présents?

 12   Réponse: Non, je ne connaissais pas… Enfin, je ne sais pas, je ne

 13   connaissais pas assez les personnes en question.

 14   Question: Monsieur Milosevic soutenait-il Jovan Raskovic sur le plan

 15   politique? Le savez-vous?

 16   Réponse: Mon impression avait été la suivante: après la création du SDS,

 17   et peut-être vers la période médiane de la guerre, le SDS n'avait pas, aux

 18   termes de cette impression-là, bénéficié du soutien de Belgrade, à savoir

 19   de Milosevic. Et ce n'est que vers cette période-là, au travers des

 20   médias, donc à partir de l'été 1990, que l'on pouvait sentir qu'il

 21   existait un certain appui pour ce parti. De là à savoir si Jovan Raskovic

 22   avait bénéficié de ce soutien, je ne saurais vous le dire. Mais M. Jovan

 23   Raskovic avait entretenu des contacts avec le Président de la Serbie à

 24   l'époque, à savoir M. Milosevic.

 25   Question: Pendant que le SDS était créé en Croatie, y avait-il un parti

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  1   également dirigé par Borislav Mikelic?

  2   Réponse: Il y avait une fraction au sein de la Ligue des communistes de

  3   Croatie et à la tête de cette fraction se trouvait Borislav Mikelic; et au

  4   début de l'été 1990, il avait mis en place, créé un parti socialiste de la

  5   Croatie qui avait une orientation pro-yougoslave. Par la suite, ce parti

  6   avait été connecté à un groupement de partis de gauche, dont le siège se

  7   trouvait à Belgrade.

  8   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je vais maintenant demander l'aide de

  9   l'huissière pour pouvoir présenter au témoin le programme politique du

 10   SDS. Il s'agit de la pièce à conviction 353, onglet n°1.

 11   (Intervention de l'huissière.)

 12   Monsieur le Témoin, est-ce que nous avons ici le programme politique du

 13   SDS, en date du 17 février 1990?

 14   M. Babic (interprétation): Oui.

 15   M. le Président (interprétation): Je ne pense ça que ce soit la bonne

 16   cote.

 17   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, c'est de moi que vient l'erreur.

 18   Je me suis trompé: il s'agit de la pièce 351, pas 353; et c'est

 19   l'intercalaire n°1.

 20   Monsieur le Témoin, je vous demande de vous référer aux cinq premières

 21   pages de ce document. Est-ce que ce document fait référence à l'opposition

 22   du SDS au système communiste?

 23   M. Babic (interprétation): Oui, certainement. C'est là l'approche

 24   fondamentale qui figurait au programme, à savoir suppression du monopole

 25   du parti communisme et mise en place d'un système pluripartite. Il

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  1   s'agissait donc de mettre en place un système politique et économique

  2   fondé sur le pluripartisme, sur une économie de marché et sur la propriété

  3   privée.

  4   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Bien.

  5   M. Robinson (interprétation): Madame Uertz-Retzlaff, de quelle manière

  6   ceci traduit-il l'opposition du SDS au système communiste?

  7   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Juge, dans ce programme

  8   politique on peut voir un grand nombre de passages relatifs à cette

  9   question. Je peux vous en donner lecture.

 10   M. Robinson (interprétation): Je pense qu'il faut vaut mieux que ce soit

 11   le témoin qui le fasse.

 12   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Pouvez-vous, Monsieur le Témoin, nous

 13   indiquer les passages de ce programme politique où l'on peut lire que le

 14   SDS était opposé au Parti communiste et aspirait à des changements

 15   démocratiques?

 16   M. Babic (interprétation): Dès la première page, cela se retrouve… On

 17   retrouve tout cela dans tout le texte, mais on trouve, par exemple en

 18   première page, un passage où l'on dit que "le mouvement communiste a

 19   échoué, historiquement échoué". Indépendamment de ses succès, ce mouvement

 20   a connu un échec historique.

 21   Puis, vient une phrase: "Ce mouvement est devenu l'obstacle principal à la

 22   démocratisation politique de ce pays-ci. L'issue à la crise, qui n'est pas

 23   seulement économique ou politique mais aussi éthique, doit se résumer en

 24   la mise en place de nouveaux partis et mouvements nouveaux". C'est ce qui

 25   figure dans le programme.

Page 12886

  1   Nous pourrions, si vous le voulez, traverser le texte entier, mais je ne

  2   sais pas si cela est véritablement nécessaire.

  3   Question: Peut-être encore simplement un extrait au sujet de cette même

  4   question.

  5   Dans la version en anglais, ça se trouve au paragraphe 2, page 4. Et en

  6   BCS, cela se trouve dans un paragraphe qui commence par les mots: "Nous

  7   sommes prêts à coopérer avec tout parti cherchant une solution

  8   démocratique à cette solution. Nous sommes un parti d'opposition

  9   naturellement enclin à coopérer avec des partis d'opposition, mais nous

 10   refuserons de coopérer avec tout parti répressif ou agressif; en

 11   particulier, les partis qui se prononcent en faveur d'un égocentrisme

 12   national de la haine et de la paranoïa ethnique". (Fin de citation.)

 13   Est-ce que vous avez retrouvé ce passage?

 14   Réponse: Je me souviens de cela, mais il faudrait encore que je retrouve.

 15   Vous avez dit: page 4?

 16   Question: Page 4. Mais, en fait, c'est deux paragraphes après la dernière

 17   citation que vous avez faite et que vous avez lue il y a quelques

 18   instants.

 19   Réponse: Oui, je l'ai retrouvée. Chez moi, c'est la page 2.

 20   Question: Bien. Et maintenant, j'aimerais que vous passiez au paragraphe

 21   qui commence par le titre suivant: "Système de gouvernement et question

 22   ethnique". Cela figure à la page 4 de votre texte et, dans la version en

 23   anglais, aux pages 8 et 9.

 24   Au premier paragraphe, Monsieur le Témoin, on peut lire la chose suivante:

 25   "Pour le Parti démocratique serbe, la question ethnique étant

Page 12887

  1   essentiellement une question démocratique".

  2   Et quelques lignes plus bas, on fait référence à "la question ethnique

  3   encore non résolue".

  4   Qu'est-ce qu'on entend par là? Qu'est-ce que signifie ces expressions? A

  5   quoi font-elles référence?

  6   Réponse: Pour ce qui est des problèmes nationaux en Croatie, on avait

  7   estimé que la chose n'avait pas été résolue de façon satisfaisante,

  8   notamment eu égard à la population serbe, étant donné que les territoires

  9   où avaient résidé les Serbes, par ce partage administratif territorial de

 10   la Croatie, sont devenus des régions ou des municipalités périphériques.

 11   C'est la raison pour la quelle on avait estimé que les Serbes avaient été

 12   soumis à une dépopulation régionale et que cela n'avait pas été favorable

 13   à leur développement. On avait négligé la langue serbe, l'alphabet serbe,

 14   la presse serbe, les établissements culturels et les programmes scolaires

 15   également.

 16   Question: Bien.

 17   Maintenant, je voudrais vous renvoyer à la page 6 en BCS, en anglais à la

 18   page 11.

 19   Sous le titre "Fédéralisme démocratique", on peut lire -je cite-: "Nous

 20   croyons que le destin du peuple serbe en Croatie dépend du fédéralisme

 21   démocratique. C'est pourquoi nous faisons le choix d'une organisation

 22   interne fédérative de la Yougoslavie à la condition que ceci soit accepté

 23   par tous les peuples constitutifs de la Yougoslavie". (Fin de citation.)

 24   Est-ce que, dans cette partie du programme, par "fédéralisme

 25   démocratique", on fait déjà référence à une autonomie territoriale au sein

Page 12888

  1   de l'organisation fédérale?

  2   Réponse: Non, pas dans ce paragraphe-ci, mais dans d'autres paragraphes

  3   oui, cela est mentionné. Ici, on met l'accent sur une option en faveur

  4   d'un modèle d'aménagement de l'Etat yougoslave en tant que fédération

  5   démocratique.

  6   Question: Est-ce que cela veut dire que l'on parle ici d'autonomie serbe

  7   au sein de la Croatie? Est-ce que le SDS envisageait une autonomie serbe

  8   au sein d'une structure croate?

  9   Réponse: Dans d'autres parties de ce document, il y a des passages

 10   afférents sur ce qui a été concrètement dit à ce sujet. Le Parti

 11   démocratique serbe était favorable à un partage fédéral administratif

 12   nouveau, donc en faveur d'une autonomie territoriale, là où

 13   géographiquement, historiquement, économiquement ou ethniquement parlant,

 14   les raisons ou la situation en place l'exigeaient.

 15   Question: Oui, en fait, c'est dans ce paragraphe.

 16   Je voudrais vous renvoyer au passage où l'on peut lire: "Il est nécessaire

 17   de garantir des possibilités constitutionnelles pour créer des territoires

 18   autonomes au sein de la structure fédérale pour que la population de ces

 19   territoires, ayant une composition ethnique particulière et une identité

 20   historique culturelle particulière, puisse se décider lors d'un

 21   référendum".

 22   Ceci se trouve dans le même paragraphe, dernier paragraphe de ce chapitre,

 23   page 12 et page 13 de la version en anglais; je le signale à l'attention

 24   des Juges.

 25   Est-ce que vous avez trouvé le passage en question, Monsieur? Page 7,

Page 12889

  1   c'est le dernier paragraphe avant le point IV.

  2   Réponse: C'est sous quel numéro?

  3   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Cela se trouve à la page 7, c'est le

  4   dernier paragraphe avant la section suivante du document, juste avant

  5   l'intitulé IV (en chiffres romains): "Economie de marché". Nous pouvons

  6   remettre au témoin un autre exemplaire du document.

  7   M. le Président (interprétation): Oui, effectivement. Si vous avez indiqué

  8   le passage concerné sur un document, ce serait une bonne idée.

  9   Monsieur le M. Babic, veuillez, s'il vous plaît, vous référer à cet

 10   exemplaire annoté du document. Maintenant, veuillez avoir l'amabilité de

 11   reposer la question, Madame Uertz-Retzlaff.

 12   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le témoin?

 13   M. Babic (interprétation): Oui, je l'ai retrouvé maintenant, je sais

 14   ce que c'est.

 15   Question: Je voulais vous demander si, à l'époque, vous aviez déjà

 16   envisagé l'autonomie serbe au sein de la Croatie dans certaines régions?

 17   Réponse: En principe, mais pas de façon concrète.

 18   Question: Est-ce que cela signifiait, plus ou moins, une autonomie

 19   culturelle?

 20   Réponse: Pour être plus précis, cela sous-entendait une autogestion

 21   régionale et locale, donc une autonomie territoriale avec une autogestion

 22   municipale et une autogestion régionale.

 23   Question: Bien.

 24   Maintenant, je vous demande de passer à un autre passage du texte où sont

 25   indiqués les objectifs du Parti démocratique serbe.

Page 12890

  1   Je signale à l'attention des Juges que cela se trouve à la page 13 du

  2   document; nous avons indiqué quel était le passage qui nous intéresse sur

  3   cet exemplaire, que je prie l'huissier de bien vouloir donner au témoin.

  4   Je vous demande de vous référer à l'objectif n°8 -je cite-: "Le

  5   fédéralisme démocratique yougoslave doit garantir des possibilités

  6   constitutionnelles au sein des unités fédérales individuelles pour que

  7   l'autonomie territoriale de ces régions puisse être établie si les

  8   populations de ces territoires se caractérisant par une composition

  9   ethnique particulière ou une identité historique ou culturelle bien

 10   distincte en décident lors d'un référendum".

 11   Est-ce que c'est cela à quoi vous pensiez tout à l'heure?

 12   Réponse: Oui.

 13   Question: D'autre part, il y a un autre objectif qui est l'objectif n°15;

 14   dans ce document, page 17 en anglais.

 15   Est-ce que vous avez trouvé le passage en question, Monsieur le Témoin?

 16   Réponse: Oui.

 17   Question: S'agissant de cet objectif, on peut lire –je cite-: "Les partis

 18   politiques récents nous ont mis dans une situation politique très

 19   difficile. Certaines parties de la Croatie dans lesquelles les Serbes

 20   représentent la majorité de la population sont sous-développées

 21   économiquement.".

 22   Et un peu plus bas, on voit la chose suivante -je cite-: "Le statut

 23   économique des Serbes dans cette région s'affaiblit et la situation

 24   devient de plus en plus défavorable." (Fin de citation.)

 25   En réalité, c'est ce que vous avez déjà évoqué lorsque vous parliez de

Page 12891

  1   l'insatisfaction des Serbes, s'agissant de leur position économique?

  2   Réponse: C'est cela.

  3   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Et maintenant, si on passe à

  4   l'objectif n°16, on voit qu'on fait référence ici à la division régionale

  5   de la Croatie. On peut lire –je cite-: "La division régionale de la

  6   Croatie est démodée et ne correspond pas au principe moderne de

  7   coexistence, et en particulier elle ne correspond pas aux intérêts

  8   historiques du peuple serbe." (Fin de citation.)

  9   Pouvez-vous expliquer ce que l'on entend par là exactement? Dans quelle

 10   mesure la division régionale de la Croatie allait-elle à l'encontre des

 11   intérêts historiques du peuple serbe?

 12   M. Babic (interprétation): Eh bien, les régions, où des Serbes avaient

 13   depuis longtemps vécu au cours de l'histoire, s'étaient retrouvées à la

 14   périphérie des unités administratives dans les municipalités et de la

 15   région, et c'était là la raison principale cette espèce de dépeuplement de

 16   la région.

 17   M. le Président (interprétation): Il est déjà 10 heures et demie et il

 18   faudra bientôt faire une pause. Est-ce que le moment est bien choisi?

 19   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, Monsieur le Président, car je

 20   pense que nous en avons encore au moins pour cinq minutes avec ce

 21   document.

 22   M. le Président (interprétation): Monsieur le Témoin, nous allons

 23   maintenant faire une pause de 20 minutes.

 24   Au cours de la pause qui va suivre ainsi que de toutes les autres, je vous

 25   demande de bien vouloir ne parler à personne de votre déposition jusqu'à

Page 12892

  1   la fin de celle-ci; et par personne, j'entends également les membres de

  2   l'équipe du Bureau du Procureur.

  3   Vingt minutes de pause.

  4   M. Babic (interprétation): J'ai bien compris.

  5   (L'audience, suspendue à 10 heures 32, est reprise à 10 heures 55.)

  6   M. le Président (interprétation): Il faudra qu'on ajuste le micro du

  7   témoin.

  8   (Intervention technique.)

  9   Vous nous entendez, Monsieur le Témoin?

 10   M. Babic (interprétation): Oui. Merci.

 11   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les

 12   Juges, lorsque nous avons discuté de la carte qu'avait le témoin, j'ai

 13   oublié de mentionner qu'il s'agissait ici d'une nouvelle pièce qui est

 14   désormais reprise dans la pièce 326; c'est un classeur de documents. C'est

 15   une nouvelle pièce que cette carte et je dois en demander officiellement

 16   le versement.

 17   Monsieur le Témoin, nous parlions de l'objectif n°16 et vous avez fait

 18   état de la frustration qui prévalait au niveau de la division régionale de

 19   la Croatie et du préjudice que subissaient les Serbes. Cette division

 20   régionale de la Croatie, était-ce quelque chose que le Gouvernement de

 21   Croatie avait créé ou était-ce quelque chose qui existait déjà depuis un

 22   certain temps avant 1990?

 23   M. Babic (interprétation): Ça existait avant 1990.

 24   Question: Donc ce n'était là rien de neuf?

 25   Réponse: Non.

Page 12893

  1   Question: Un peu plus loin dans le texte, on trouve le statut du Parti

  2   démocratique serbe. Ceci commence dans la version anglaise à la page 20;

  3   je crois que ceci commence en version BCS à la page 12, Monsieur le

  4   Témoin.

  5   Je voudrais seulement évoquer quelques questions. A l'article 6, il est

  6   dit que le Parti démocratique serbe a son siège à Knin. Est-ce que c'est

  7   quelque chose qui avait été décidé?

  8   Réponse: Oui.

  9   Question: Et à l'article 7, "Les organes du parti", on dit que "ce sont

 10   l'assemblée, le comité principal, les conseils ou comités régionaux, les

 11   comités municipaux et locaux et les militants du parti".

 12   Est-ce que c'est de cette façon-là que ça fonctionnait?

 13   Réponse: Oui.

 14   Question: On trouve une annexe à ce programme politique du parti, à cette

 15   plate-forme, et c'est la résolution du SDS à propos du Kosovo. Nos sommes

 16   ici aux deux dernières pages du document en anglais. Je pense que ce sont

 17   aussi les deux dernières pages en version BCS.

 18   Pourquoi est-ce que ceci était annexé à ce programme politique, à ce

 19   manifeste? Qu'est-ce que le Kosovo a à voir avec la situation qui régnait

 20   à Knin?

 21   Réponse: Le Kosovo est en rapport avec tous les événements politiques qui

 22   se produisaient sur le territoire de l'ex-Yougoslavie, surtout parmi les

 23   Serbes. En fait, la situation des Serbes au Kosovo, telle que celle-ci

 24   était perçue par l'opinion publique, a donné lieu à une solidarité

 25   nationale qui s'est manifestée par rapport aux positions des Serbes. Et le

Page 12894

  1   parti a ressenti la nécessité de se définir dans ce cadre.

  2   Question: Je vous remercie, Madame l'Huissière, je n'ai plus besoin de

  3   cette pièce.

  4   (Intervention de l'huissière.)

  5   Monsieur le Témoin, est-ce que le SDS était inscrit, enregistré

  6   officiellement en Croatie ainsi qu'à l'échelon fédéral?

  7   Réponse: Oui. Le parti était enregistré ou reconnu, inscrit officiellement

  8   aussi bien en Croatie que dans les organes de la Fédération croate, ainsi

  9   qu'au ministère de la justice de la RSFY.

 10   Question: J'aimerais rapidement montrer au témoin la pièce 351,

 11   intercalaire 2.

 12   (Intervention de l'huissier.)

 13   Simplement pour confirmer qu'il y avait eu inscription du SDS auprès du

 14   registre des organisations sociales de la RSFC, République socialiste

 15   fédérative de Croatie, ceci en date du 6 mars 1990. Reconnaissez-vous ce

 16   document?

 17   Réponse: Oui, c'est bien ce document.

 18   Question: Merci. Inutile d'en discuter.

 19   Le SDS a-t-il participé à des élections qui se sont tenues…, aux premières

 20   élections qui se sont tenues en Croatie après la création?

 21   Réponse: Oui, le SDS a effectivement participé aux élections en vue de

 22   l'assemblée, ou Sabor, de la République de Croatie, ainsi qu'aux élections

 23   municipales sur le territoire de la République de Croatie.

 24   Question: Et est-ce que le SDS est sorti vainqueur et majoritaire dans

 25   certaines municipalités?

Page 12895

  1   Réponse: Dans quatre municipalités, oui.

  2   Question: Quelles étaient ces municipalités?

  3   Réponse: A Knin, à Donji Lapac, à Gracac et à Benkovac. A Benkovac, il y a

  4   eu des élections supplémentaires; il est sorti vainqueur de ces deux

  5   élections.

  6   Question: En août 1990, est-ce que Jovan Raskovic s'est opposé au SDS

  7   suite à des négociations secrètes avec le Président Tudjman?

  8   Réponse: Je ne comprends pas votre question. Veuillez la répéter, Madame.

  9   Question: En août 1990, est-ce que Jovan Raskovic s'opposait… Est-ce qu'il

 10   a fait l'objet d'une opposition dans le parti SDS, après des négociations

 11   secrètes avec le Président Tudjman? Et si c'est le cas, qui s'est opposé à

 12   lui?

 13   Réponse: Oui, c'est bien le cas. Une faction a été constituée contre le

 14   Président du parti au sein du comité central. Il y avait Branko Peric,

 15   Dusan Zelenbaba, Jovan Opacic qui s'étaient opposés dans cette faction.

 16   Question: Savez-vous si M. Milosevic a exercé une influence quelconque sur

 17   cette opposition? Est-ce qu'il était mêlé, d'une quelconque façon, à cette

 18   opposition qui s'était formée contre Raskovic et contre les négociations

 19   avec les Croates?

 20   Réponse: Je ne sais pas si M. Milosevic y a participé de façon

 21   personnelle; en tout cas, la presse de Belgrade a attisé les flammes et a

 22   incité à cette absence de tolérance, surtout à l'égard de Jovan Raskovic,

 23   après que celui-ci a eu des entretiens avec M. Tudjman. Un journaliste de

 24   la TV Belgrade, la veille de la réunion du comité central du SDS, qui

 25   devait discuter de certains de ces événements, un journaliste a préparé au

Page 12896

  1   préalable un rapport, un article pour dire que le représentant du parti et

  2   le président du SDS, Jovan Raskovic, avaient déjà été remplacés.

  3   Question: Est-ce qu'il avait été remplacé?

  4   Réponse: Non, il n'avait pas encore été remplacé. C'était un groupe

  5   minoritaire au sein du comité. Par la suite, un ou deux mois plus tard,

  6   ces personnes ont démissionné du parti.

  7   Question: Est-ce que M. Raskovic a fini par quitter la région de la

  8   Krajina? S'il est parti, où est-il allé?

  9   Réponse: Le Dr Raskovic est parti de Sibenik, il est parti à Belgrade,

 10   après avoir été conseillé dans ce sens par l'académicien Dobrica Cosic.

 11   Question: Est-ce que le SDS était censé être limité à la seule Krajina ou

 12   est-ce qu'il était censé avoir comme sphère d'influence la totalité de la

 13   Yougoslavie?

 14   Réponse: Le SDS avait été créé en vue de couvrir tout le territoire de la

 15   RSFY; c'était la vocation première de sa constitution. Il avait été

 16   inscrit auprès des autorités compétentes de Zagreb, mais aussi de

 17   Belgrade.

 18   Question: Est-ce qu'un parti portant le même nom SDS a été constitué en

 19   Bosnie, en juillet 1990? Et si c'est le cas, qui était la figure de proue

 20   de ce parti en Bosnie?

 21   Réponse: Oui, le nom était le même SDS -Parti démocratique serbe de

 22   Bosnie-Herzégovine- et son président était le Dr Radovan Karadzic.

 23   Question: Est-ce que Raskovic a soutenu M. Karadzic? Et est-ce qu'ils ont

 24   même été jusqu'à mener une campagne conjointe?

 25   Réponse: Oui, M. Raskovic a soutenu Karadzic et j'ai entendu dire par lui-

Page 12897

  1   même que l'élection de Karadzic, dans une large mesure, c'était du fait du

  2   soutien que lui avait apporté Jovan Raskovic. Ensemble, ils ont mené une

  3   campagne électorale et le Dr Raskovic a été très actif dans la

  4   constitution du Parti démocratique serbe de Bosnie-Herzégovine.

  5   Question: Est-ce qu'il y a eu entre Knin ou Raskovic et le SDS de Bosnie-

  6   Herzégovine un contentieux, un litige au cours duquel les comités locaux

  7   du SDS Bosanska Krajina, autour de Banja Luka, se ralliaient au SDS de

  8   Knin ou plutôt au SDS de Sarajevo? Etes-vous au courant de cela?

  9   Réponse: Oui, il y a eu de telles discussions, de telles polémiques entre

 10   Raskovic et Karadzic. Ou plutôt on peut dire qu'il y a eu un conflit au

 11   sein des comités du SDS dans la zone de Bosanska Krajina où l'on se

 12   demandait à quel parti se rallier: à celui de Knin ou à celui de Bosnie-

 13   Herzégovine.

 14   Question: Et comment ce conflit a-t-il été résolu? A quel parti SDS, cette

 15   région s'était considérée appartenir?

 16   Réponse: C'est comme ceci que cela s'est passé. Tous les comités

 17   appartenaient au SDS de Bosnie-Herzégovine avec pour siège Sarajevo.

 18   Question: Est-ce que Raskovic a créé des comités régionaux du SDS à Novi

 19   Sad et à Belgrade? Et s'il l'a fait à quel moment l'a-t-il fait?

 20   Réponse: Oui, des comités ont été formés, plus exactement c'est le Dr

 21   Raskovic qui a commencé à les former au début de l'été 1990, à Belgrade et

 22   à Novi Sad.

 23   Question: Est-ce qu'ils ont participé à des élections qui se sont tenues

 24   en Serbie?

 25   Réponse: Au cours de l'automne 1990, après la convocation des élections en

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  1   Serbie, ces comités se sont mis à part pour constituer le Parti

  2   démocratique serbe de Serbie et ce parti, ces comités ont effectivement

  3   participé aux élections en Serbie.

  4   Question: Est-ce que des tentatives ont été déployées à divers moments en

  5   vue de rejoindre les partis de Croatie et de Bosnie-Herzégovine, le parti

  6   SDS de Croatie et de Bosnie-Herzégovine?

  7   Réponse: Vous parlez de quel parti?

  8   Question: Je parlais du SDS en Croatie et en Bosnie. Pour vous aider, je

  9   vais peut-être vous soumettre une pièce; la pièce 351, intercalaire 4.

 10   (Intervention de l'huissier.)

 11   C'est un avis public du SDS de Krajina concernant les pourparlers avec la

 12   délégation du SDS de la Republika Srpska, la date est celle du 21 juillet

 13   1993. Dans le texte, premier paragraphe, on fait mention d'une visite

 14   faite à la capitale de la RSK par des représentants, des dirigeants du

 15   parti et de l'Etat de Republika Srpska, dirigés par le président Radovan

 16   Karadzic, le 19 juillet.

 17   Vous souvenez-vous s'il y a eu une initiative entreprise pour qu'il y ait

 18   rassemblement de ces partis?

 19   Réponse: J'aimerais dire auparavant que, pendant que le Dr Raskovic était

 20   en vie, ce type de désintégration s'opérait au sein du Parti démocratique

 21   serbe, ce qui veut dire que des partis autonomes du SDS ont été établis en

 22   Bosnie-Herzégovine, en Serbie et au Monténégro. Après sa mort, en 1992, le

 23   Parti démocratique serbe de la Krajina a été établi à partir de la fin

 24   1992 ou plutôt vers le début de l'année 1993, et Radovan Karadzic a pris

 25   l'initiative de rassembler tous ces partis sous sa tutelle, sous sa

Page 12899

  1   houlette à Nahum où il s'agirait d'un parti qui serait appelé "le Parti

  2   démocratique des pays serbes, ou des terres serbes" dont il serait

  3   président.

  4   Question: Au dernier paragraphe, on dit qu'il a été conclu que la base du

  5   programme ou l'orientation du programme doit être l'unité dans la

  6   recherche de l'intérêt national serbe. Qu'est-ce que cela veut dire

  7   exactement?

  8   Réponse: L'unité, c'est-à-dire qu'on unifie, on fédère les Serbes du

  9   territoire de l'ex-Yougoslavie en un seul Etat.

 10   Question: Le texte se poursuit dans le document pour dire ceci: "Avec la

 11   réalisation finale de cet intérêt, les raisons de l'existence des partis

 12   démocratiques serbes dans les Républiques disparaîtraient. Mais, en l'état

 13   actuel de la lutte pour le maintien de la souveraineté de l'Etat, que ce

 14   soit en RSK ou en Republika Srpska, l'existence de ces partis à ce niveau-

 15   là est inévitable". (Fin de citation.)

 16   Etait-ce l'avis que vous défendiez à l'époque? Vouliez-vous être séparés,

 17   distincts?

 18   Réponse: C'était effectivement la position que nous défendions, alors que

 19   le Dr Karadzic avait pour opinion que le parti devait s'unifier.

 20   Question: Fort bien. Nous allons maintenant passer des partis à

 21   l'association des municipalités de Dalmatie du Nord et de Lika.

 22   A cet égard, je dispose d'une série de documents qui viennent de la pièce

 23   P351. Le premier document sera l'intercalaire 5.

 24   (Intervention de l'huissier.)

 25   C'est la décision de la municipalité de Knin, du 6 juin 1990, qui approuve

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  1   l'initiative visant à relier les municipalités de Dalmatie du Nord et de

  2   Lika.

  3   Le document suivant fait partie de la même pièce, mais c'est

  4   l'intercalaire 6.

  5   (Intervention de l'huissier.)

  6   Il s'agit d'un projet de statut de l'Association des municipalités de la

  7   Dalmatie du Nord et de Lika.

  8   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, dans la traduction en anglais,

  9   du moins dans la version que j'ai, il y a une erreur: on parle de la

 10   Dalmatie du Sud, alors qu'on devrait parler de la Dalmatie du Nord. C'est

 11   une erreur qui se trouve dans le texte traduit.

 12   Est-ce que c'est bien là le statut de cette association, Monsieur le

 13   Témoin?

 14   Réponse: C'est un document qui a été créé plusieurs mois après la création

 15   de l'association des municipalités de la Dalmatie du Nord et de Lika;

 16   c'était un projet de texte de statut. Après ce document, il y en a eu deux

 17   autres qui ont été rédigés. Le premier, c'est celui que nous avons ici;

 18   c'était la conclusion suite à l'initiative visant à établir ce lien entre

 19   les municipalités de Dalmatie du Nord et de Lika. Et l'autre, c'est le

 20   document relatif à la constitution de cette association, en date du 27

 21   juin 1990.

 22   Je vous l'ai déjà dit: ce document-ci que vous me présentez, c'est un

 23   projet de statut. Ce qui en fait le troisième document pourtant sur le

 24   même sujet.

 25   Question: Il faut faudra donc que nous soumettions au témoin la pièce 351,

Page 12901

  1   intercalaire 8; c'est en fait le document que vous venez de mentionner: en

  2   l'occurrence, la décision portant établissement et constitution de

  3   l'association régionale des municipalités de Dalmatie du Nord et de Lika,

  4   en date du 27 juin 1990.

  5   C'est bien cela? C'est bien de ce document dont vous parliez?

  6   Réponse: Oui.

  7   Question: Et ici, il est dit à l'article 1er: "Ceci, l'association

  8   régionale des municipalités de Dalmatie du Nord et de Lika, inclut

  9   également les municipalités de Knin, Benkovac, Gracac, Donji Lapac,

 10   Obrovac et Titova Korenica. Est-ce que ce sont là les municipalités qui

 11   ont rejoint cette association?

 12   Réponse: Oui. D'abord, ça a été les municipalités de Knin, Donji Lapac et

 13   Gracac. Les autres ont suivi.

 14   Question: Nous revenons à ce projet de statut, à ce document. Parlons du

 15   préambule de ce statut.

 16   Page 2, en anglais, Monsieur le Président, Messieurs les Juges. Nous

 17   sommes à l'intercalaire 6 de ce document sur lequel nous nous penchons

 18   rapidement.

 19   Dans ce préambule, il est dit ceci: "Ce statut a pour objet d'apporter une

 20   sanction légale ou d'entériner de façon légale l'association établie des

 21   municipalités de Dalmatie du Nord et de Lika, et de tenir compte du

 22   souhait manifesté par la population serbe de cette région d'introduire une

 23   autonomie serbe en Croatie". (Fin de citation.)

 24   Pour quelle raison voulait-on établir cette association?

 25   Réponse: La première raison de la création de cette association, fin

Page 12902

  1   mai/début juin 1990, c'était d'améliorer la situation économique des

  2   personnes visées par cette initiative dans ces municipalités. Et Knin

  3   était présentée comme étant le siège de cette association ou communauté

  4   régionale.

  5   Par la suite, une fois que le Sabor, le parlement croate, a lancé…, ou

  6   plutôt la présidence de la République de Croatie a lancé cette initiative

  7   afin de modifier la Constitution de la République de Croatie, il y a eu en

  8   fait une troisième raison et initiative politique principale qui visait à

  9   préserver cette communauté, cette association. Cette troisième raison,

 10   c'est qu'il fallait faire quelque chose pour maintenir l'égalité nationale

 11   s'agissant des Serbes vivant en Croatie.

 12   Question: Deuxième chapitre de ce document; il s'agit de la page 3 en

 13   version anglaise, Messieurs les Juges.

 14   Vous voyez le chiffre romain "II" -et je cite-: "Les compétences

 15   réglementaires seront mentionnées par noms et il est essentiel qu'elles

 16   incluent les droits et les institutions en rapport avec l'utilisation de

 17   l'alphabet, le nom de la langue, les écoles et d'autres associations ou

 18   institutions culturelles et d'éducation, en ce qui concerne aussi la

 19   liberté de culte, et doivent prévoir des associations appropriées qui

 20   tiennent compte des caractéristiques historiques et culturelles

 21   spécifiques au peuple serbe."

 22   Cette association, est-ce qu'elle renvoie, au fond, à une autonomie

 23   culturelle, à une certaine autonomie régionale au sein de la Croatie?

 24   Réponse: C'est exact.

 25   Question: Je vais demander l'aide de l'huissier pour montrer au témoin la

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  1   pièce P351, intercalaire 9.

  2   (Intervention de l'huissier.)

  3   Il s'agit d'une lettre en date du 3 juillet 1990, émanant de l'association

  4   des municipalités de Dalmatie du Nord et de Lika, à 17 municipalités pour

  5   proposer une réunion qui se tiendrait le 6 juillet 1990 à Knin; réunion de

  6   toutes les municipalités dans lesquelles se trouve un nombre important de

  7   Serbes afin que ces municipalités adoptent une position commune au regard

  8   de cette proposition de modification constitutionnelle de la Croatie.

  9   Voici ma question: est-ce qu'une telle réunion a eu lieu et est-ce que

 10   vous, vous avez effectivement fait des propositions en vue de la

 11   modification de la Constitution croate?

 12   Réponse: Cette réunion a bien eu lieu. Il y a beaucoup de personnes qui

 13   ont participé, beaucoup de représentants des municipalités, des

 14   parlementaires d'appartenance ethnique serbe à l'assemblée, au Sabor

 15   croate; et des vues ont été exprimées, s'agissant de ces modifications à

 16   apporter telles que proposées par la Présidence de la République de

 17   Croatie.

 18   Question: J'aimerais maintenant vous montrer une autre pièce. C'est la

 19   pièce P351, intercalaire 10.

 20   (Intervention de l'huissier.)

 21   Il s'agit de la déclaration de souveraineté et d'autonomie du peuple serbe

 22   en date du 25 juillet 1990.

 23   Dites-moi: qui est à l'origine de cette déclaration d'autonomie?

 24   Réponse: Ceux qui sont à l'origine de cette convocation, de cette réunion,

 25   comptent parmi eux le directeur du Parti démocratique, le Président du

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  1   parti, le docteur Raskovic; il y avait d'autres personnes, d'autres

  2   membres du SDS. Et cette déclaration est le fruit de cette initiative.

  3   Question: Y avait-il une raison particulière au fait que cette initiative

  4   se soit exprimée le 25 juillet 1990?

  5   Réponse: Oui, il y avait une raison particulière à cela. Le Parlement, le

  6   Sabor de Croatie était en réunion et, à l'ordre du jour de cette réunion

  7   parlementaire, se trouvait l'adoption des amendements à la Constitution de

  8   la République fédérative de Croatie. Et du fait de ces amendements, a été

  9   écartée la possibilité d'avoir une association de municipalités. Les

 10   amendements ont introduit de nouveaux symboles ou emblèmes de l'Etat pour

 11   la Croatie; le nom de la Croatie a été modifié ainsi que la langue.

 12   L'objectif recherché était d'avoir le Sabor à Srb avec des représentants

 13   élus du peuple serbe en Croatie qui pourraient contester la validité de

 14   l'adoption de modifications constitutionnelles sur cette base, ce qui

 15   serait fait en mettant de côté le droit d'avoir une égalité de traitement

 16   entre les Croates et les Serbes. Et ces amendements auraient été mis en

 17   question et le vote majoritaire serait pris par les Croates au Parlement

 18   croate ou Sabor.

 19   Question: Et qui a participé à cette réunion serbe à Srb?

 20   Réponse: Se trouvaient là les représentants élus des assemblées

 21   municipales, des représentants du Parlement de la République de Croatie,

 22   des représentants des partis politiques, des représentants de l'Eglise

 23   orthodoxe serbe. Il y a eu aussi à peu près 100.000 citoyens venant des

 24   quatre coins de la Croatie.

 25   Question: Est-ce qu'il y avait aussi la présence de représentants

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  1   officiels, politiques, de Serbie?

  2   Réponse: Non.

  3   Question: J'examine la déclaration. Paragraphe premier, premier chapitre;

  4   page 1 en version anglaise et je pense que c'est la première page aussi en

  5   version BCS.

  6   Il est dit ici ceci: "Dans le cadre de l'établissement de nouvelles

  7   relations en Yougoslavie, la nation serbe, en République de Croatie, a

  8   tout à fait le droit de choisir pour un système fédéré ou confédéré de

  9   gouvernement étatique, soit de façon conjointe avec la nation croate ou de

 10   façon indépendante." (Fin de citation.)

 11   Quelles étaient les options dont vous avez discuté à l'époque?

 12   Réponse: Eh bien, l'option prédominante sur le territoire de la

 13   Yougoslavie en matière de restructuration, c'était l'option fédérale

 14   surtout, ainsi que l'option confédérale pour cette nouvelle Constitution

 15   de la Yougoslavie.

 16   Question: Le texte se poursuit, toujours au premier paragraphe: "La nation

 17   serbe affirme qu'elle a le droit de déterminer, sur des territoires

 18   historiques unis au sein des frontières existantes de la Croatie, de

 19   déterminer avec qui elle va coexister et de quelle façon ce régime va

 20   exister, et comment les rapports vont s'établir avec les autres nations de

 21   Yougoslavie." (Fin de citation.)

 22   Deuxième paragraphe: "Sur la base de sa souveraineté, la nation serbe en

 23   Croatie a le droit à l'autonomie. La portée de cette autonomie sera

 24   fonction de la question de savoir si la Yougoslavie va avoir un système

 25   fédéral ou confédéral de gouvernement. Et puis aussi dans un système

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  1   fédéral de gouvernement la nation serbe a le droit d'utiliser sans entrave

  2   et sans contraindre à des fins officielles comme privées la langue

  3   littéraire serbe -le cyrillique- et a le droit d'avoir des écoles et

  4   programmes serbes, des institutions culturelles et politiques serbes,

  5   ainsi que des entreprises, journaux, radios et télévisions serbes." (Fin

  6   de citation.)

  7   Dans cette première option, est-ce que cela revient à dire qu'il y a

  8   autonomie culturelle serbe dans le cadre de la République de Croatie?

  9   Réponse: Si j'ai bien compris, on parle ici d'une autogestion régionale au

 10   sein de la République de Croatie.

 11   Question: Et quelle était l'option confédérale?

 12   Réponse: Là, on aurait ce type d'autonomie mais avec une teneur plus

 13   importante, un niveau supérieur; pour parler juridique et politique ou

 14   autonomie territoriale cela veut dire qu'il y aurait une autonomie

 15   territoriale avec davantage de pouvoir de prise de décision, mais toujours

 16   dans le cadre de la République de Croatie.

 17   Question: Est-ce que cela était synonyme de sécession d'avec la Croatie?

 18   Est-ce que cette option était incluse?

 19   Réponse: L'intégrité territoriale politique ne revenait pas à dire

 20   sécession de la Croatie; c'était simplement un degré, un niveau supérieur

 21   d'autogouvernement au sein de la Croatie.

 22   Question: Troisième paragraphe de ce document, on dit ceci: "Le Sabor

 23   serbe, avec son siège Srb, sera constitué en tant que politique de la

 24   nation serbe de la Croatie." (Fin de citation.)

 25   Est-ce que cela veut dire qu'on voyait une assemblée serbe en tant

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  1   qu'organe parallèle ou miroir de l'assemblée croate? Qu'est-ce que cela

  2   voulait dire exactement?

  3   Réponse: Pour reprendre une explication politique de cette époque, cela

  4   aurait dû être la deuxième partie du Sabor croate, car, étant donné que

  5   les partis politiques nationaux croates avaient la majorité au Sabor, au

  6   parlement, nous étions le deuxième peuple constitutif; et ce peuple avait

  7   également droit d'avoir voix au chapitre dans le cadre du Gouvernement de

  8   la Croatie.

  9   Et c'est ainsi que cela s'est présenté. Du point de vue politique, on peut

 10   dire que c'est ainsi que les choses ont été expliquées: c'était la

 11   deuxième moitié du Sabor croate, du Parlement croate. On ne peut pas dire

 12   que c'était un organe parallèle, mais donc pas un organe parallèle, mais

 13   un organe qui participe au même système qu'au parlement, si l'on peut

 14   dire.

 15   Question: Au paragraphe 4, il est stipulé que "le conseil national serbe

 16   est en droit d'organiser un référendum au sein du peuple serbe sur toutes

 17   les questions relatives au statut du peuple serbe en Croatie et

 18   Yougoslavie, ainsi que s'agissant de toutes les questions ayant trait à

 19   l'établissement de la souveraineté et de l'autonomie serbe." (Fin de

 20   citation.)

 21   Est-ce que cela signifie que vous aviez déjà l'intention de procéder à un

 22   référendum?

 23   Réponse: Pour autant que je m'en souvienne, il n'y avait pas de plan, mais

 24   le référendum avait constitué la forme suprême de l'expression

 25   démocratique de la volonté de tout un chacun. Et c'est ainsi que les

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  1   choses ont été définies, du moins au moment où il a été procédé à

  2   l'élaboration de ce projet. Donc il n'avait pas été stipulé d'ores et déjà

  3   qu'un référendum allait avoir lieu, mais qu'il y avait possibilité de

  4   tenue d'un référendum, oui.

  5   Question: Dans ce document, on parle du conseil national serbe. Est-ce que

  6   cette institution a été mise en place le même jour?

  7   Réponse: Ce jour-là, les membres du conseil ont été élus et le conseil,

  8   pour sa part, a été mis en place quelques jours plus tard, le 31 juillet.

  9   Question: Et sur l'initiative de qui? Est-ce que c'était également sur

 10   l'initiative de ce M. Opacic que vous avez déjà évoqué?

 11   Réponse: Non. L'initiative de création d'un organe exécutif est survenue à

 12   l'occasion de la rédaction du texte de cette déclaration. C'est à ce

 13   moment-là qu'elle a été acceptée par toutes les personnes qui se sont

 14   penchées sur ce texte, par les représentants des partis, puis les

 15   représentants des municipalités et de l'Eglise. Ce texte de déclaration,

 16   avant que d'être publié pour être acclamé par les citoyens, a été étudié

 17   au préalable au niveau que je vous ai précisé tout à l'heure.

 18   Question: Est-ce que le Conseil national serbe a préparé l'organisation

 19   d'un référendum en août 1990?

 20   Réponse: Le 31 juillet 1990, à l'occasion de la première session du

 21   Conseil national serbe, il a été décidé de procéder à la tenue d'un

 22   référendum relatif à l'autonomie serbe en Croatie. Le Conseil national

 23   serbe était censé être l'instance chargée de l'organisation de ce

 24   référendum au niveau des communautés locales.

 25   Question: Y avait-il une raison spécifique pour laquelle on a décidé

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  1   d'organiser ce référendum au cours du mois d'août 1990?

  2   Réponse: Eh bien, c'était uniquement dû à ce concours de circonstances.

  3   Donc, chronologiquement parlant, il s'agissait de confirmer par

  4   acclamations la déclaration relative à cette autonomie. Et c'est une

  5   déclaration qui a déjà été adoptée, par acclamations, au niveau du Sabor

  6   tenu à Srb; cela culminait donc… c'était la culmination, le point

  7   culminant de cette initiative politique qui avait pris naissance le 25

  8   juillet à cette assemblée de Srb.

  9   Question: Quelle est la question qui a été posée aux élections en mesure

 10   de s'exprimer lors du référendum?

 11   Réponse: Sur les bulletins de vote, il y avait une rubrique qui demandait

 12   à se déclarer pour ce qui est de l'autonomie. Et il y avait le texte de la

 13   déclaration adoptée à l'assemblée de Srb.

 14   Question: Les électeurs ont-ils eu la possibilité de choisir entre les

 15   deux possibilités que nous venons d'évoquer, en cas de fédération ou de

 16   confédération?

 17   Réponse: Les électeurs optaient en faveur du texte de la déclaration ou

 18   contre le texte de cette déclaration. En d'autres termes, ceux qui

 19   optaient en faveur du texte de la déclaration optaient en faveur des deux

 20   options.

 21   Question: Qui a pu s'exprimer lors de ce référendum? Est-ce uniquement les

 22   Serbes qui ont pu voter ou des gens qui habitaient dans une région bien

 23   précise?

 24   Réponse: Eh bien, ont été sollicités à se prononcer les membres du groupe

 25   ethnique serbe en Croatie, qui était une catégorie constitutionnelle, à

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  1   savoir une catégorie dont les droits avaient été mis en danger. Donc c'est

  2   eux qu'on avait conviés à voter; les autres n'avaient pas interdiction de

  3   se prononcer.

  4   Question: Maintenant, je souhaiterais l'aide de l'huissier pour présenter

  5   au témoin la pièce 351, intercalaire 11.

  6   (Intervention de l'huissier.)

  7   Il s'agit d'un rapport relatif aux résultats du référendum qui a eu lieu

  8   entre le 19 août et le 2 septembre 1990.

  9   (Intervention de l'huissier.)

 10   On peut voir que ce document est en date du 30 septembre 1990. Au

 11   paragraphe 3, on peut lire quels sont les résultats.

 12   Quels étaient les résultats?

 13   Réponse: S'agissant de ces résultats constatés par la commission chargée

 14   de l'application de ce référendum -et cela a été présenté à l'opinion

 15   publique générale-, ce sont donc les résultats publiés ici, à savoir

 16   567.127 pour, 144 contre, et 46 bulletins de vote non valides. Ce sont les

 17   résultats présentés à l'opinion publique par la commission chargée de

 18   l'affaire.

 19   Question: Quelle position adoptaient les autorités croates s'agissant de

 20   ce référendum?

 21   Réponse: Je dois dire au préalable une chose. Ce référendum a été prévu,

 22   les citoyens ont été conviés à se présenter au référendum en date du 31

 23   juillet 1990; donc il s'agissait d'un plébiscite, qui est un autre terme

 24   pour référendum.

 25   Mais, le 16 août 1990, le conseil national serbe a décidé que le vote des

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  1   citoyens ne devait pas se faire en faisant référence à un référendum, mais

  2   en faisant référence à une chose qui fait partie d'une réglementation

  3   légale tout à fait à part.

  4   Mais je vous demanderai de me reformuler la question que vous avez posée

  5   tout à l'heure. Je ne sais plus ce que vous m'avez demandé.

  6   Question: Ma question était la suivante: quelle position ont prise les

  7   autorités croates, s'agissant de ce plébiscite? Est-ce qu'elles se sont

  8   prononcées en faveur de ce référendum? Est-ce qu'elles s'y sont opposées

  9   ou bien est-ce qu'elles sont restées indifférentes?

 10   Réponse: Les autorités croates se sont employées contre ce plébiscite de

 11   façon active. Le Président de la République, M. Tudjman, a publiquement

 12   déclaré qu'il n'y aurait pas de plébiscite. Le ministre de la Justice

 13   avait envoyé un courrier interdisant la tenue de ce référendum. Le

 14   ministre de l'Intérieur, M. Benkovac, avait menacé d'empêcher par la force

 15   la tenue du référendum.

 16   Question: Quelle a été l'attitude des Serbes vis-à-vis des autorités

 17   croates, à ce moment-là?

 18   Réponse: Vous entendez là, la population serbe à l'égard du Gouvernement

 19   croate; c'est bien la teneur de votre question?

 20   Question: Oui.

 21   Réponse: La population serbe en Croatie, comme cela s'est avéré être vrai

 22   au Sabor de Srb, a montré qu'elle n'était pas d'accord avec les décisions

 23   politiques prises par le Gouvernement croate à l'époque.

 24   Question: La population serbe a-t-elle commencé la mise en place des

 25   gardes armées dans les régions où elle résidait? Et si c'est le cas, qui

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  1   organisait ces gardes?

  2   Réponse: Eh bien, ce type de conflit politique avait suscité des

  3   appréhensions auprès du peuple serbe. Et les Serbes ont commencé à

  4   s'armer, d'abord avec des fusils de chasse puis, par la suite, ils se sont

  5   procuré d'autres armes encore.

  6   Question: Et qui a organisé tout cela?

  7   Réponse: La première répartition organisée des armes a été faite par des

  8   policiers du poste de police de Knin. Et par la suite, cela s'est fait au

  9   niveau de plusieurs autres postes de police.

 10   Question: Et à partir de quand tout ceci a-t-il commencé?

 11   Réponse: Le 17 août 1990, dans l'après-midi.

 12   Question: Est-ce que des Serbes venant d'autres régions que la Krajina ont

 13   participé à ces actions, au départ?

 14   Réponse: Pour autant que j'aie pu l'apprendre, certains Serbes de Bosnie

 15   avaient fait venir des armes jusqu'à Knin.

 16   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, je

 17   souhaiterais maintenant passer à huis clos partiel. En effet, j'ai des

 18   questions assez précises à poser au témoin, des questions qui le

 19   concernent personnellement.

 20   (Audience à huis clos partiel à 11 heures 44.)

 21   [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

 22   Mme Ameerali (interprétation): Nous sommes à huis clos partiel.

 23  Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, pendant cette

 24  période d'août 1990, avez-vous essayé d'entrer en contact avec M. Milosevic?

 25   M. Babic (interprétation): En date du 10 août 1980, plusieurs

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  1   personnes de Knin, plusieurs personnes du poste de police de Knin, à

  2   savoir des personnes qui faisaient partie de la direction du Parti

  3   démocratique serbe, m'ont demandé d'établir un contact avec le Président

  4   de la République de Serbie à l'époque, M. Milosevic, à savoir pour lui

  5   rapporter les événements survenus à Knin.

  6   Question: Monsieur le Témoin, au compte rendu d'audience, on voit que vous

  7   avez parlé du 10 août 1980, mais est-ce que ce n'est pas plutôt 1990 dont

  8   vous vouliez parler?

  9   Réponse: 1990. 1990, en effet. Je ne sais pas si c'est moi qui ai commis

 10   un lapsus linguae ou les interprètes, mais il s'agit de l'année 1990.

 11   Question: Et vous avez dit que plusieurs personnes venant du poste de

 12   police de Knin ont pris contact avec vous, ainsi que des dirigeants du

 13   parti du SDS, mais de qui parlez-vous? Pouvez-vous être plus précis?

 14   Réponse: Le 9 août au soir, il est venu me voir chez moi un inspecteur de

 15   la police de Knin, M. Milan Martic, en pleine tenue de combat, en bottes,

 16   fusil automatique et le reste. Et il m'a dit que la police croate, avec

 17   des blindés de transport de troupe, s'était dirigée vers Knin et que je

 18   devais fuir, et plutôt chercher un abri quelconque pour cette nuit-là. Et

 19   pour sa part, avec un autre groupe de personnes, il avait trouvé un

 20   logement autre pour moi-même et ma famille. Le jour d'après, il est venu

 21   et il est venu David Rastovic, le Président de la municipalité de Donji

 22   Lapac; il est venu M. Popovic, Bogoljub Popovic. Donc David Rastovic et

 23   Bogoljub Popovic, qui m'ont conseillé d'aller voir M. Milosevic.

 24   Ils m'avaient dit de demander Slobodan Jovanovic, le rédacteur en chef du

 25   journal "Ekspres Politika" pour me dire où je pourrais rencontrer

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  1   Milosevic; et c'est ce que j'ai fait.

  2   Question: Et est-ce que le rédacteur en chef, M. Jovanovic, savait où se

  3   trouvait M. Milosevic et est-ce qu'il vous a aidé à entrer en contact avec

  4   lui?

  5   Réponse: Oui. Il m'avait dit qu'il se trouvait à Kupari, en vacances, et

  6   qu'il fallait que je m'adresse à un membre de la Présidence de Serbie; je

  7   n'arrive plus à me remémorer son nom à ce moment-ci, mais je pourrai me le

  8   rappeler plus tard. Il m'a dit que ce membre de la Présidence se trouvait

  9   à Bilusi et qu'il m'aiderait à établir le contact avec le Président

 10   Milosevic.

 11   Question: Est-ce que Slobodan Jovanovic était un collaborateur de M.

 12   Milosevic? Le savez-vous?

 13   Réponse: Oui, cela avait été l'un des militants ou des dirigeants qui

 14   faisaient donc partie de la direction au sommet du Parti socialiste de

 15   Serbie. Et je crois qu'à l'époque, ce parti du SPS existait déjà. Enfin,

 16   c'était l'un des collaborateurs du Président Milosevic au niveau du parti.

 17   Question: Vous a-t-il dit avec qui M. Milosevic se trouvait à Kupari?

 18   Réponse: Non, c'est Slobodan Vucetic qui me l'a dit; c'est l'homme que

 19   j'ai mentionné tout à l'heure. Et lui avait été membre de la Présidence de

 20   Serbie; de nos jours, il est Président de la Cour constitutionnelle de

 21   Serbie. C'est Slobodan Vucetic qui avait servi d'intermédiaire entre moi-

 22   même et M. Bogoljub Popovic, en me disant que les trois se trouvaient à

 23   Kupari. Il n'y avait que Slobodan Milosevic, Jovic et Kadijevic, tous

 24   trois à Kupari.

 25   Question: Vous voulez parler du général Kadijevic?

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  1   Réponse: Oui, secrétaire fédéral à la Défense.

  2   Question: Vous avez évoqué M. Jovic. De quel M. Jovic s'agit-il

  3   exactement?

  4   Réponse: Borisav Jovic, Président de la Présidence de la RSFY.

  5   Question: Avez-vous été en mesure de prendre contact avec M. Milosevic à

  6   Kupari?

  7   Réponse: Indirectement, par le biais de Slobodan Jovanovic. C'est Slobodan

  8   Jovanovic qui a transmis notre message et qui a ramené un message vers

  9   nous en provenance de M. Slobodan Milosevic.

 10   Question: Quelle était la teneur de ce message?

 11   Réponse: La teneur du message de M. Milosevic était celle de demander une

 12   réception officielle auprès du Président de la Présidence, M. Jovic, et

 13   que celui-ci allait nous recevoir aux fins de nous permettre de lui

 14   présenter nos problèmes.

 15   Question: Pourquoi vous-même et les autres personnes qui vous l'ont

 16   proposé, qui vous l'ont suggéré… Pourquoi souhaitiez-vous rencontrer M.

 17   Milosevic?

 18   Qu'attendiez-vous de lui?

 19   Réponse: Eh bien, Slobodan Milosevic avait été le leader politique de la

 20   Serbie et du peuple serbe en Yougoslavie; et le peuple serbe en Croatie, à

 21   Knin, voyait en lui le protecteur des intérêts du peuple serbe dans son

 22   ensemble sur le territoire de la Yougoslavie. Son option politique avait

 23   été avancée par les médias au niveau de la République socialiste

 24   fédérative de Yougoslavie, et son idée avait été de sauvegarder cette

 25   République socialiste fédérative de Yougoslavie.

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  1   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Vous dites que l'on vous a conseillé

  2   de rencontrer Borislav Jovic. Est-ce que vous l'avez rencontré à cette

  3   époque?

  4   M. le Président (interprétation): Oui, Madame Higgins?

  5   Mme Higgins (interprétation): Vu les éléments que nous venons d'entendre,

  6   je me demande s'il est nécessaire que nous restions à huis clos partiel.

  7   Du moment que le Procureur et le témoin s'efforcent de ne pas révéler le

  8   poste du témoin, je pense que l'essentiel de cette déposition peut être

  9   faite à huis clos partiel. Je pense que c'est une partie d'ailleurs très

 10   importante de la déposition puisqu'elle a trait à des contacts éventuels

 11   entre le témoin et M. Milosevic.

 12   M. le Président (interprétation): Oui, cela me semble être un argument

 13   valable.

 14   Madame Uertz-Retzlaff?

 15   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Certes, Monsieur le Président, mais

 16   quand on entrera dans le détail de ces contacts et également quand on

 17   parlera des contacts entre M. Jovic et le témoin, il apparaîtra très

 18   clairement aux spectateurs qui est le témoin.

 19   M. le Président (interprétation): Essayons de limiter au maximum la durée

 20   des sessions à huis clos partiel. Veuillez, s'il vous plaît, évoquer les

 21   questions pertinentes maintenant. Et ensuite, nous reviendrons en audience

 22   publique.

 23   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Est-ce que vous avez rencontré

 24   Borisav Jovic en août 1991? Et, si oui, où? Qui était avec vous?

 25   M. Babic (interprétation): Nous nous sommes rencontrés le 13 août

Page 12917

  1   1990, au siège de la présidence de la Yougoslavie à Belgrade. Il y avait

  2   avec lui l'un quelconque de ses collaborateurs au niveau technique. Et il

  3   y avait avec moi David Rastovic, Président de la municipalité de Donji

  4   Lapac, et l'homme que j'ai déjà mentionné tout à l'heure, Bogoljub

  5   Popovic.

  6   Question: Quelle a été la nature de vos discussions avec M. Jovic?

  7   Réponse: Eh bien, nous avons présenté les problèmes afférents à la

  8   négation par le Gouvernement de la Croatie de la tenue du référendum dont

  9   la date avait déjà été fixée. Puis, on lui a parlé de l'organisation de

 10   gardes dans les villages serbes; c'est de cela que nous avons parlé.

 11   Borislav Jovic, lui, avait dit qu'il a pu apporter son soutien au combat

 12   politique du peuple serbe. Il a dit que, pour notre combat politique, nous

 13   allions bénéficier du soutien et de la protection de l'armée. Et il avait

 14   dit aussi qu'une loi était en train d'être préparée pour ce qui est du

 15   droit des peuples à l'autodétermination jusqu'à la sécession.

 16   On nous a suggéré… ce n'est pas lui, mais l'un de ses collaborateurs nous

 17   a laissé entendre… Ou plutôt, c'est lui qui nous avait dit qu'il fallait

 18   adapter le référendum aux dispositions légales et l'un de ses

 19   collaborateurs nous a précisé les dispositions légales pour ce qui est de

 20   rendre la tenue de ce référendum juridiquement valide.

 21   Question: Lui avez-vous demandé de l'aide en cas d'intervention croate

 22   contre le référendum?

 23   Réponse: Nous avons présenté nos problèmes. Et c'est lui qui a, de son

 24   propre gré, dit qu'il nous apportait son soutien et nous a affirmé que

 25   nous allions être protégés par la JNA à l'occasion de ce combat politique

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  1   qui serait le nôtre.

  2   Question: Avez-vous vu d'autres personnes à cette occasion à Belgrade? Je

  3   parle, bien entendu, de représentants officiels du gouvernement?

  4   Réponse: Après lui, c'est avec Petar Gracanin que nous avons discuté. Et

  5   Petar Gracanin était ministre fédéral de l'Intérieur.

  6   Question: Quel a été le sujet de vos discussions avec lui?

  7   Réponse: Les mêmes questions ont été débattues, mais l'accent a été placé

  8   sur les changements intervenus au niveau de la police; les uniformes

  9   notamment. La police en Croatie avait changé ses insignes et avait procédé

 10   à une réorganisation des services de la police.

 11   Question: Est-ce que M. Gracanin vous a offert une assistance quelconque,

 12   vous a donné des conseils sur ce qu'il convenait de faire?

 13   Réponse: Il a dit que les organes fédéraux allaient établir des contacts

 14   avec le Gouvernement de la Croatie. Et par la suite, M. Gracanin m'a dit

 15   qu'il avait recommandé aux Serbes de Knin de placer des barricades. Je ne

 16   sais pas si… Comme c'est Bogoljub Popovic qui s'était entretenu avec lui,

 17   je ne sais pas si c'est à lui qu'il avait dit la chose ou à la délégation

 18   qui avait été présidée par Milan Martic, à savoir la délégation de la

 19   police.

 20   Question: Et quand M. Gracanin vous l'a-t-il dit? Vous dites: plus tard,

 21   il vous a dit qu'il vous recommandait d'ériger des barricades. Quand vous

 22   l'a-t-il dit exactement?

 23   Réponse: Il a déclaré cela à la presse quelques années plus tard. Il

 24   s'était vanté d'avoir apporté son soutien aux Serbes et du fait de leur

 25   avoir recommandé d'ériger des barricades.

Page 12919

  1   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, nous pouvons

  2   retourner en audience publique.

  3   (Audience publique avec mesures de protection à 11 heures 58.)

  4   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, vous avez évoqué

  5   à plusieurs reprises David Rastovic au cours des événements. Quel a été

  6   son rôle? En a-t-il eu un?

  7   M. Babic (interprétation): David Rastovic avait été Président de la

  8   municipalité de Donji Lapac et a été vice-Président de la communauté des

  9   municipalités de la Dalmatie du Nord et de la Lika; et il avait été membre

 10   du comité central du Parti démocratique serbe.

 11   Question: Est-ce qu'il a occupé des fonctions quelconques pendant la

 12   guerre ou après la guerre?

 13   Réponse: Il a conservé sa fonction de président de l'assemblée municipale.

 14   En 1993, il a été ministre au sein du Gouvernement de la RSK et, cette

 15   même année, il avait été membre de la commission chargée de la

 16   réorganisation de l'armée serbe de la RSK. Il avait été l'un des membres

 17   de la présidence du comité régional du SDS pour la Krajina. Et, d'après

 18   moi, il faisait partie des structures parallèles, ou des structures que

 19   l'on disait "être parallèles" dans la Krajina.

 20   Question: Qu'entendez-vous par cette soi-disant structure parallèle dans

 21   la Krajina?

 22   Réponse: J'entends par là un groupe de personnes, qui se composait de

 23   membres du ministère de l'Intérieur de Serbie, à savoir de la sécurité de

 24   l'Etat de Serbie, de gens donc de la police dans les municipalités serbes

 25   en Croatie, et d'autres personnes encore en liaison étroite avec ceci.

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  1   Cela n'avait rien à voir avec les organes légaux du pouvoir des Serbes en

  2   Croatie ou ailleurs. Ils avaient un rôle à jouer, un rôle particulier,

  3   dans tous les événements, depuis août 1990 et au fil des années qui ont

  4   suivi.

  5   Question: Parmi les personnages principaux, pouvez-vous nous citer ceux

  6   qui se trouvaient au coeur de cette structure parallèle?

  7   Réponse: La personnalité centrale avait été le chef de la sûreté d'Etat de

  8   Serbie, M. Jovica Stanisic, puis son assistant Franko Simatovic, puis

  9   Dragan Vasiljkovic appelé "capitaine Dragan". Et d'autres personnes encore

 10   appartenant à la sûreté d'Etat de Serbie. Puis Milan Martic, originaire de

 11   la police à Knin. Et quelques autres personnalité nouvelles. Puis, par la

 12   suite, la police tout entière de ces municipalités serbes. Puis, Dusan

 13   Orlovic, Nebojsa Mladinic, Jovo Vitas, et les présidents des assemblées

 14   municipales qui étaient en corrélation étroite. Rastovic, puis Bozanic, le

 15   président de l'assemblée de Benkovac. Puis, quelques autres personnalités

 16   encore.

 17   Question: Nous évoquerons plus en détail la structure parallèle; c'est ce

 18   qu'on appelait "la structure parallèle" plus tard dans le cadre de la

 19   déposition du témoin.

 20   Vous avez déjà parlé de David Rastovic, Monsieur le Témoin. Qu'en est-il

 21   de Bogoljub Popovic? Où se trouvait-il, lui, dans cette structure?

 22   Réponse: Eh bien, c'était un proche de ces gens-là. De là à savoir dans

 23   quelle mesure il était inclus de façon organisationnelle, ça je ne sais

 24   pas vous le dire. Mais il était en lien avec ces gens-là.

 25   Question: Est-ce que c'était un policier? Est-ce que c'était un militaire?

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  1   Je parle toujours de Bogoljub Popovic.

  2   Réponse: C'était un colonel de la JNA à la retraite.

  3   Question: A-t-il joué un rôle quelconque pendant les événements?

  4   Réponse: Pas de façon importante. C'est dans le secteur de Benkovac qu'il

  5   avait joué un rôle de conseiller en 1991. Et en 1990, il avait été

  6   Président de cette commission chargée de la sécurité au niveau du SDS. Et,

  7   de façon inhabituelle, il avait tenu des discours au meeting, et il avait

  8   parlé "d'approvisionnement de planches"; cela devait sous-entendre

  9   "armes". Mais je ne sais pas dans quelle mesure il avait directement pris

 10   part à tout cela.

 11   Question: Quand a-t-il prononcé ces discours et fait référence à des

 12   fusils en parlant de "planches"?

 13   Réponse: Vers la fin de l'automne 1990. C'était l'époque où il y avait eu

 14   bon nombre de meetings, des assemblées constituant du SDS et autres types

 15   de rassemblement.

 16   Question: Après avoir rencontré M. Jovic, avez-vous été en mesure de vous

 17   faire une idée sur l'indépendance de M. Jovic s'agissant de ses actions et

 18   de son point de vue politiques?

 19   Réponse: D'après l'impression que je me suis faite et d'après ce que j'ai

 20   pu apprendre de ce que les autres personnes ont dit, il avait été membre

 21   du parti dont le président était M. Milosevic. Ma conclusion était la

 22   suivante: à savoir que, dans la hiérarchie politique, il était subordonné

 23   au Président de la Serbie, au Président Milosevic qui était Président de

 24   la Serbie à l'époque.

 25   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Vous avez dit que la question de

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  1   l'autodétermination avait été débattue et qu'une loi était en préparation.

  2   Monsieur Jovic vous avait dit qu'une loi était en phase de préparation au

  3   sujet de l'autodétermination.

  4   Est-ce qu'il a donné suite à ce projet de loi?

  5   M. Babic (interprétation): Pour être précis, il avait parlé du droit

  6   des peuples à l'autodétermination… Il n'avait pas parlé du droit du peuple

  7   serbe à l'autodétermination, mais, dans le cadre de cette législation

  8   nouvelle visant à réglementer le droit des peuples à l'autodétermination

  9   jusqu'à l'autodétermination; cela faisait donc partie intégrante de la loi

 10   qui étaient en cours de préparation. Et à la télévision, d'après ce que

 11   j'ai pu entendre, il avait expliqué ce que cela signifiait, donc de quelle

 12   façon l'autodétermination de parties du peuple ou de parties de la

 13   Yougoslavie qui étaient favorables à la préservation de la Fédération

 14   yougoslave par rapport à ceux qui n'étaient pas favorables à la

 15   préservation de cette Fédération.

 16   M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Milosevic?

 17   M. Milosevic (interprétation): La dame en face est en train de poser des

 18   questions incorrectes et explique qu'il avait dit, que le témoin avait

 19   affirmé qu'une loi relative à l'autodétermination serbe était en cours de

 20   préparation, alors que cela n'est pas exact. Il vient de rectifier la

 21   chose lui-même. Mais de la façon dont cela a été présenté, c'était entendu

 22   de façon inappropriée.

 23   M. le Président (interprétation): Oui? Oui, Madame Uertz-Retzlaff?

 24   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je souhaiterais demander l'aide de

 25   l'huissier pour présenter au témoin la pièce 352, intercalaire 1.

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  1   (Intervention de l'huissier.)

  2   Il s'agit d'une pièce qui a trait à la séance du Conseil national serbe

  3   qui a eu lieu à Dvor na Uni, le 16 août 1990. Vous avez déjà mentionné la

  4   chose, Monsieur le Témoin; vous avez déjà mentionné cette séance.

  5   Ici, au premier point de l'ordre du jour, on fait référence à des

  6   déclarations entre les représentants serbes et le Président de la

  7   Présidence, M. Jovic. Est-ce que vous vous souvenez de ce point de l'ordre

  8   du jour?

  9   M. Babic (interprétation): Oui.

 10   Question: Est-ce que ces discussions ont incité le Conseil national serbe

 11   à poursuivre et à aller de l'avant, s'agissant du référendum?

 12   Réponse: Oui, cela a exercé de l'influence pour ce qui est notamment du

 13   changement du terme ou de la notion terminologique qui avait été utilisée

 14   pour ce qui était du fait de se prononcer, donc de changer le terme

 15   "référendum" pour dire… pour remplacer ce terme par "déclaration politique

 16   de leur volonté". Et Borislav Jovic avait tenu à ce que cette déclaration

 17   politique de la volonté devait faire partie des notions juridiques en

 18   usage, à savoir de se référer à un article déterminé de la Constitution.

 19   Donc la réunion avait été importante pour ce qui était de préciser la

 20   déclaration politique de la volonté.

 21   Question: Pourriez-vous, s'il vous plaît, répéter la dernière partie de

 22   votre réponse? Les interprètes n'ont pu vous entendre.

 23   Réponse: Alors moi, je vous demanderai également de répéter la question.

 24   Question: Je peux vous lire ce qui a été traduit jusqu'à présent. Je cite:

 25   "C'est ce qu'un de ses assistants nous a expliqué lorsqu'il a dit que

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  1   certaines dispositions de la Constitution s'y appliquaient."

  2   Je constate qu'en fait, ils n'ont pas… Ce n'est pas qu'ils n'aient pas

  3   entendu votre réponse, c'est qu'ils ont plutôt, qu'ils n'ont pas entendu

  4   ma question.

  5   S'agissant de ce procès-verbal, au point 1, on peut lire -je cite-:

  6   "Rastovic, l'armée est la garantie de notre déclaration.". Est-ce qu'on

  7   fait ici référence à ce qu'avait dit M. Jovic ou à ce qu'il entendait?

  8   Réponse: Oui. Ici, il s'agit d'un rapport fait par Rastovic au sujet de ce

  9   que Jovic a dit.

 10   Question: Le terme de "révolution des troncs d'arbre" fait référence à

 11   quel incident particulier?

 12   Réponse: Eh bien, ce sont des termes utilisés par les médias croates pour

 13   les événements survenus en date du 17 août et par la suite, tant à Knin

 14   qu'à proximité de Knin.

 15   Question: Que s'est-il passé le 17 août à Knin?

 16   Réponse: Le 17 août, il y a eu plusieurs événements.

 17   Le premier de ces événements avait été l'annonce faite par certaines

 18   personnes de Knin et de Obrovac, disant que le Gouvernement croate, avec

 19   des véhicules de police spéciaux, venait empêcher les déclarations

 20   politiques de la volonté de cette population. Puis, ce jour-là, les médias

 21   ont déclaré que le Président de l'assemblée municipale avait proclamé

 22   l'état de guerre. Et on avait dit que la police avait distribué des armes

 23   à la population.

 24   Et le soir, le Président de l'assemblée municipale a démenti la

 25   déclaration de l'état de guerre, puis on a démenti que les blindés de

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  1   transports de troupe se trouvaient à proximité de Knin, comme affirmé le

  2   matin. Et puis, par la suite, la population a appris que les hélicoptères

  3   de la JNA avaient empêché des hélicoptères de la police croate de venir

  4   jusqu'à Knin.

  5   Question: Est-ce que des barricades ont été érigées? Et, si c'est le cas,

  6   par qui?

  7   Réponse: Oui, les barricades ont été érigées en masse, de façon massive.

  8   Cela a été fait par les membres du SDS, par des citoyens dans des

  9   villages, sur leur propre initiative, ainsi que par la police et des

 10   groupes proches de la police à Knin, tout aussi bien que sur leur terrain

 11   ou le territoire d'autres municipalités: Obrovac, Gracac.

 12   Question: Vous dites que l'on a annoncé que la police croate allait

 13   s'approcher de Knin. Est-ce qu'ils sont effectivement venus à Knin, ou

 14   bien est-ce qu'il s'agissait d'une fausse information?

 15   Réponse: Il avait été question de désinformation de la part de Dusan

 16   Orlovic et désinformation de la part du Président de l'assemblée

 17   municipale de Obrovac, Sergej Veselinovic.

 18   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, pouvons-nous

 19   passer à huis clos partiel?

 20   M. le Président (interprétation): Mais je regarde ma montre et je pense

 21   qu'il convient de faire une pause pour 20 minutes.

 22   (L'audience, suspendue à 12 heures 16, est reprise à 12 heures 41.)

 23  (Audience à huis clos partiel.) [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

 24   M. le Président (interprétation): Oui, Madame Uertz-Retzlaff?

 25   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Sommes-nous à huis clos partiel?

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  1   Mme Ameerali (interprétation): Oui.

  2   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Merci. Bien. Merci beaucoup.

  3   Monsieur, vous nous avez dit que de fausses informations sont arrivées

  4   s'agissant de l'approche de la police croate. Après réception de ces

  5   fausses informations, qu'avez-vous fait?

  6   M. Babic (interprétation): J'ai quitté le bâtiment de l'assemblée

  7   municipale de Knin et je me suis rendu vers l'un des villages avoisinants.

  8   Chemin faisant, j'ai donné des instructions à l'un quelconque des

  9   fonctionnaires de l'assemblée municipale de mettre en marche la sirène

 10   d'alarme qui se trouvait sur le toit. Et une fois arrivés au village, j'ai

 11   dit à l'un des députés de l'assemblée municipale qui était à mes côtés

 12   d'aller vers la poste qui se trouvait à proximité pour téléphoner et

 13   d'informer le centre chargé des informations de la mise en place d'un état

 14   d'exception. Et on pourrait dire… Je lui ai dit: "Tu peux même dire "état

 15   de guerre"", en guise de commentaire. L'homme est parti; il avait contacté

 16   le centre chargé d'informer la population; c'est une sorte de centre

 17   d'alerte. Ce centre, enfin les gens du centre ont transmis l'information,

 18   non pas à l'intention des communautés locales à qui cela était destiné,

 19   mais à l'intention de Radio Knin. Là-bas, l'un des correspondants de

 20   l'agence de l'Etat "Tanjug", l'agence "Tanjug" a communiqué la chose en

 21   disant, sur l'agence "Tanjug" à Zagreb, que le Président de l'assemblée

 22   municipale, Milan Babic, a proclamé "l'état d'exception" ou "l'état de

 23   guerre". Quelque temps après, je suis arrivé à Golubic et j'ai vu que

 24   quelques policiers originaires du poste de police de Knin étaient en train

 25   de distribuer des armes à l'intention des civils. J'ai demandé où étaient

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  1   les blindés de transports de troupes de la police croate; ils ont

  2   plaisanté, ils ont dit qu'il n'y avait pas de blindés transports de

  3   troupe.

  4   Je suis donc rentré et j'ai fait un démenti, et j'ai envoyé le démenti à

  5   l'agence "Tanjug", à son siège de Belgrade, en disant qu'il n'y avait pas

  6   d'état de guerre ni d'exception à Knin.

  7   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, pouvez-vous vous

  8   rapprocher du micro afin que les interprètes puissent mieux vous entendre?

  9   Nous pouvons retourner en audience publique.

 10   (Audience publique avec mesures de protection.)

 11   M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Milosevic?

 12   M. Milosevic (interprétation): Les auditeurs à l'extérieur se plaignent de

 13   ne presque rien entendre, étant donné que votre témoin parle à voix basse,

 14   et, en plus, il y a des mesures de protection de déformation de la voix.

 15   Pratiquement ce qu'il est en train de dire est incompréhensible; donc il

 16   faudrait qu'il parle d'une part plus haut, mais que vous augmentiez

 17   également le volume également.

 18   M. le Président (interprétation): Monsieur le M. Babic, veuillez avoir

 19   l'obligeance de parler plus fort, s'il vous plaît, afin que tout le monde

 20   puisque vous entendre.

 21   Veuillez continuer.

 22   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, vous avez évoqué

 23   Dusan Orlovic qui était une des origines des fausses informations au sujet

 24   de la police croate. Plus tôt, vous nous avez mentionné qu'il faisait

 25   partie de la structure parallèle. Je voudrais savoir quel était le poste

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  1   qu'il a occupé pendant ces événements?

  2   M. Babic (interprétation): Au cours de l'été 1990, c'était une

  3   personne qui était vue un peu partout. Je n'étais pas au courant de sa

  4   position, de ses fonctions, à l'époque; je ne savais pas ce qu'il faisait

  5   de façon précise.

  6   (Le témoin se racle la gorge.)

  7   Excusez-moi. Donc, depuis fin septembre et début octobre, sur un plan

  8   formel et en réalité, il avait fait partie d'une structure qui s'appelait

  9   "Conseil populaire de lutte contre l'oppression du peuple serbe"; et

 10   c'était la forme institutionnelle dans laquelle il intervenait en sa

 11   qualité de structure parallèle. Et en 1991, époque à laquelle, dans la SAO

 12   de Krajina, il a été mis en place un secrétariat à l'Intérieur, le

 13   secrétaire de ce secrétariat, M. Milan Martic, l'avait nommé chef de la

 14   sûreté d'Etat dans la Krajina. A mon avis, c'était un homme qui

 15   travaillait dans la sûreté d'Etat de Serbie, qui était responsable devant

 16   Jovica Stanisic.

 17   Il est resté à ces fonctions-là jusqu'en 1993 et, par la suite, il a été

 18   transféré vers la Serbie. J'ai appris par d'autres personnes qu'il est

 19   intervenu au niveau de la sûreté d'Etat de Serbie sur le territoire de la

 20   Serbie; je ne sais pas si cela est exact, c'est ce que j'ai ouï dire. Mais

 21   on m'avait dit qu'il travaillait, depuis, dans la région de Smederevo.

 22   Question: Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je ne sais pas si

 23   l'on peut y faire quelque chose, mais maintenant, j'entends le témoin en

 24   serbe très fort, si bien que je n'entends pratiquement plus l'anglais,

 25   plus l'interprétation. Ah, apparemment, on me signale qu'il s'agissait de

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  1   quelque chose qui se situe au niveau de mon contrôle de… mon

  2   potentiomètre.

  3   (Intervention technique.)

  4   Merci. Bien. Vous avez parlé d'un village, le village de Golubic. Qu'avez-

  5   vous vu, à cet endroit? Est-ce que, dans ce village, vous avez vu quoi que

  6   ce soit de particulier?

  7   Réponse: Le 17 août 1990, dans l'après-midi, vers disons 17 heures, j'ai

  8   vu là-bas que des policiers du poste de police de Knin étaient en train de

  9   distribuer des armes à des citoyens. Par la suite, à Golubic, pendant un

 10   certain temps, pendant une semaine ou deux, il a été mis en place une

 11   sorte de QG -c'est ainsi qu'on l'appelait- qui prenait soin de la pose ou

 12   de l'érection de barricades dans la région en attendant la tenue du

 13   référendum. Et ce QG a été démantelé début septembre parce que sur ce

 14   territoire-là, dans l'agglomération de Golubic, il s'était créé une

 15   formation armée qui était chargée de monter la garde aux entrées de

 16   l'agglomération et autour de ce QG qui était donc devenu une sorte de

 17   campement militaire; c'était la raison pour laquelle le conseil exécutif

 18   du Parti démocratique serbe a révoqué formellement le QG. Et ce QG avait

 19   appuyé sa légitimité sur une décision du comité central du SDS qui datait

 20   de l'année 1990. 18 août 1990.

 21   Question: Vous dites que le conseil exécutif a demandé la révocation. Est-

 22   ce que les formations armées ont effectivement été démantelées dans cette

 23   région, ou bien est-ce qu'elles ont continué à exister?

 24   Réponse: Le SDS, le conseil exécutif du SDS a donc pris la décision de

 25   démanteler ce QG de Golubic. Donc ce QG a été dissous, mais les formations

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  1   armées ont continué d'exister et elles ont continué à exister comme étant

  2   conseil de la résistance populaire. Et ce conseil n'avait pas été

  3   constitué ou formé par le SDS ou par quelque autre autorité politique de

  4   Knin.

  5   Question: Qui était responsable de ces formations armées? Qui était à la

  6   tête de ce conseil de la résistance?

  7   Réponse: D'après ce que j'ai pu voir, à Knin il s'agissait là d'un groupe

  8   composé par Milan Martic, Dusan Orlovic, Nebojsa Mladinic, Jovo Vitas et

  9   d'autres personnes. Il y avait là des personnes qui n'étaient pas

 10   originaires de Knin, un journaliste qui s'appelait "Cvele" Cvetkovic qui

 11   disait qu'il envoyait directement les informations par fax vers le cabinet

 12   du Président de la Serbie, M. Milosevic, pour l'informer des événements à

 13   Knin; puis, il y avait là un homme qui se cachait de moi, que je ne

 14   connaissais d'ailleurs pas et qui contrôlait le bureau chargé du codage

 15   pour le centre d'information à Knin, et d'autres personnes encore.

 16   Réponse: Ce journaliste vous a-t-il expliqué pourquoi ces informations

 17   étaient envoyées au bureau de M. Milosevic? Et quand avez-vous eu cette

 18   discussion avec ce journaliste, Cvetkovic?

 19   Réponse: Eh bien, août, septembre; je le rencontrais, je m'entretenais

 20   avec lui. Il n'a pas dit pourquoi, mais il se vantait d'avoir accès au

 21   cabinet et qu'il envoyait des informations en direct, tant au Président

 22   qu'à l'intention des autres agences de presse à Belgrade. Toutefois, ses

 23   informations à lui étaient tellement exagérées que certains milieux

 24   journalistiques m'ont laissé entendre que cela était toujours soumis à

 25   vérification et qu'il était là pour servir de paravent à un autre homme

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  1   que je n'ai pas connu moi-même mais qui contrôlait, lui, la pièce spéciale

  2   pour le codage, pour l'envoi de messages codés à l'extérieur de Knin. Je

  3   n'ai jamais découvert à l'intention de qui ces messages étaient transmis,

  4   mais Jovica Stanisic, au mois d'août de l'année 90, se trouvait également

  5   à Knin en compagnie de Martic. C'est là que je l'ai connu. Et ma

  6   conclusion par la suite, postérieure, j'ai par la suite déduit qu'il se

  7   pouvait que c'est à lui que ces informations aient été envoyées.

  8   Question: Revenons au 17 août 1990. Vous nous dites que des armes ont été

  9   distribuées.

 10   Est-ce que ces armes, ultérieurement, ont été rendues ou est-ce que les

 11   personnes qui les avaient reçues les ont conservées?

 12   Réponse: Les personnes en question ont conservé ces armes. On les avait

 13   convoquées le 10 septembre pour restituer les armes, mais ces armes n'ont

 14   pas été restituées. Et le 10 septembre, après les entretiens des maires de

 15   Knin, Lapac et Gracac avec le ministre de l'Intérieur de la Croatie et le

 16   président du conseil des municipalités dans le Sabor de Croatie, les gens

 17   n'ont pas restitué ces armes. Ces armes ont été restituées en janvier 1991

 18   seulement, lorsque la présidence de la Yougoslavie a donné des ordres pour

 19   le désarmement des groupes paramilitaires sur le territoire de la Croatie.

 20   C'est alors qu'une partie de ces armes ont effectivement été restituées à

 21   la JNA.

 22   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Est-ce que les barricades ont été

 23   démantelées une fois qu'on a appris que les Croates ne s'approchaient pas

 24   de la ville?

 25   M. Babic (interprétation): Les barricades ont été érigées pour

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  1   permettre la tenue du référendum, et ces barricades n'ont pas été enlevées

  2   par la suite. Fin août, début septembre il y a eu escalade d'incidents,

  3   notamment dans la région de Knin, autour de Knin, dans les municipalités

  4   avoisinantes. Ce qui fait que la situation pratiquement parlant n'a fait

  5   que se détériorer. Et après le 10 septembre 1990, au lieu d'avoir une

  6   accalmie, un apaisement, on a eu le contraire. Les barricades n'ont pas

  7   été enlevées jusqu'en avril 1991, date à laquelle la police a établi un

  8   contrôle permanent et a placé à ces postes-là des hommes à elle. Donc

  9   c'est à partir de cette année 1991 que la police, de par ses fonctions,

 10   avait tenu…

 11   M. le Président (interprétation): Monsieur le M. Babic, nous devons

 12   passer en revue un grand volume d'informations dans ce procès. Il nous

 13   serait donc utile que vous parveniez à vous concentrer sur les questions

 14   qui vous sont posées pour y répondre aussi brièvement que possible afin

 15   d'attendre la question suivante. De cette manière, votre déposition pourra

 16   se dérouler aussi rapidement que possible.

 17   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Est-ce que la police croate a repris

 18   le contrôle de Knin, avant 1995?

 19   M. Babic (interprétation): Non.

 20   Question: Et quand vous parlez de la police qui avait repris le contrôle

 21   en 1991, de quelle police parlez-vous?

 22   Réponse: Je parle de la police de la Krajina, qui avait collaboré avec des

 23   instructeurs originaires de Serbie et qui était placée sous le contrôle

 24   d'instructeurs émanant du ministère de l'Intérieur de Serbie.

 25   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, il est

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  1   nécessaire que nous passions à huis clos partiel pour quelques instants.

  2  (Audience à huis clos partiel) [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

  3   Mme Ameerali (interprétation): Nous sommes à huis clos partiel.

  4   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur, vous nous avez déjà dit

  5   qu'en août 1990, vous aviez rencontré un représentant officiel du

  6   ministère de l'Intérieur de Serbie. Dans quelle circonstance cela s'est-il

  7   produit? A la suite de quels événements et où et quand?

  8   M. Babic (interprétation): Fin août 1990, j'ai été convoqué par Milan

  9   Martic dans un restaurant, à "Vrelo", entre Knin et Golubic. Je suis allé

 10   là-bas, il m'a présenté un homme en disant que c'était là quelqu'un de

 11   Serbie. Je ne sais pas s'il avait dit MUP de Serbie ou autre chose. Je

 12   n'ai pas établi de contact important avec cet homme. Mais l'homme en

 13   question était Jovica Stanisic. Il m'a été présenté par Martic en janvier

 14   1991. Et il m'a dit, en guise de commentaire, que j'avais été réservé et

 15   que j'avais été plutôt défiant à son égard.

 16   Question: Ce qui veut dire que vous avez rencontré Jovica Stanisic à Knin,

 17   à Golubic, mais qu'à ce moment-là, vous ne saviez pas qui il était. C'est

 18   uniquement plus tard que vous l'avez appris. Est-ce bien ce que vous nous

 19   dites?

 20   Réponse: C'est exact.

 21   Question: Quel était l'objectif de votre rencontre avec Stanisic?

 22   Réponse: Martic voulait me présenter cet homme-là. Cet homme avait de

 23   l'importance à ses yeux et c'était avec lui qu'il se trouvait en relation.

 24   Question: Et en août 1990 que faisait Stanisic à Knin?

 25   Réponse: Je ne sais pas au juste, je sais seulement qu'il avait contacté

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  1   Martic.

  2   Question: Avant de retourner en audience publique, encore une question.

  3   Au cours de l'été 1990, avez-vous été invité à des pourparlers avec

  4   Tudjman?

  5   Réponse: Oui. Après le 10 septembre, quelque temps après, donc dans le

  6   courant de l'année 1990, M. Vukas, le président de cette municipalité de

  7   Sinj, m'a transmis un message disant que le Président Tudjman voulait

  8   s'entretenir avec moi.

  9   Question: Oui. Et avez-vous participé à des pourparlers avec lui?

 10   Réponse: J'ai accepté et j'avais demandé que la rencontre soit publique, à

 11   savoir que ce soit là une rencontre dont le public aurait été mis au

 12   courant. Mais il n'y a pas eu, par la suite, d'invitation, une fois de

 13   plus, de sa part, donc point de rencontre.

 14   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je pense que, afin que nous puissions

 15   être plus souvent en audience publique, il vaut mieux que je ne parle pas

 16   au témoin, que je ne lui pose pas des questions directes, mais que je lui

 17   demande ce que faisait le président de la municipalité. De cette façon,

 18   cela faciliterait les choses.

 19   Donc, Monsieur le Témoin, je vais vous demander de parler de vous-même à

 20   la troisième personne peut-être. De cette manière, nous pourrons rester

 21   plus souvent en audience publique. Si bien que lorsque vous ferez

 22   référence à un organe -le conseil exécutif ou à un organe quelconque-,

 23   cela posera moins de problème que si vous faites référence à vous-même. Et

 24   lorsque cela s'avérera très important, nous passerons à huis clos partiel.

 25   Réponse: J'ai bien compris.

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  1   (Audience publique avec mesures de protection.)

  2   Question: Est-ce que les hommes politiques du SDS à l'époque, est-ce que

  3   le conseil exécutif a recherché une solution pacifique en essayant de

  4   négocier avec les Croates, au cours de l'été 1990?

  5   Réponse: Oui. Le 10 septembre, il y a eu une rencontre entre les

  6   présidents des municipalités de Knin, Lapac et Gracac avec les

  7   représentants du Gouvernement croate. Et à cette réunion, il a été convenu

  8   que tous les litiges soient surmontés au travers des institutions de la

  9   République de Croatie et que l'on commence à restituer les armes prises

 10   dans les postes de police de Knin et autres localités. Il avait été

 11   question de lancer une initiative au sein du ministère de la République de

 12   Croatie pour créer un département du ministère de l'Intérieur à Knin.

 13   Question: Je souhaiterais présenter au témoin la pièce 352, intercalaire

 14   2.

 15   (Intervention de l'huissier.)

 16   Il s'agit d'une déclaration du 10 septembre 1990 pour régler les

 17   différents avec les Croates, par le biais des négociations.

 18   Est-ce que c'est ce dont vous venez de nous parler, cette tentative de

 19   trouver une solution pacifique au problème?

 20   Réponse: C'est exact. C'est bien de cela qu'il s'agit.

 21   Question: Est-ce qu'il a été prévu que la police croate retournerait à

 22   Knin?

 23   Réponse: La police croate n'a jamais quitté la région de Knin sur le plan

 24   organisationnel. Il avait été convenu que le ministère de l'Intérieur de

 25   la Croatie s'organise, sur le territoire de Knin, pour mettre en place un

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  1   département du ministère de l'Intérieur et non pas un poste de police qui

  2   serait subordonné au commissariat de police de Sibenik.

  3   Question: Cette tentative de négocier une solution pacifique, est-ce qu'à

  4   Knin la structure parallèle s'y est opposée?

  5   Réponse: C'est exact. De façon très énergique. Et ce, par des menaces de

  6   liquidation physique à l'encontre de l'un des signataires de cet accord,

  7   du côté serbe.

  8   Question: Et qui a formulé ces menaces? Est-ce que vous pouvez nous nommer

  9   l'une de ces personnes?

 10   Réponse: Jovo Vitas.

 11   Question: Et de qui s'agit-il?

 12   Réponse: D'un homme proche de Martic et de Dusan Orlovic, à savoir un

 13   membre de ces structures parallèles, telles que je les ai définies.

 14   Question: Est-ce que M. Milosevic avait une position déterminée concernant

 15   les négociations entre les Serbes locaux et les autorités croates? Est-ce

 16   que vous le savez?

 17   Réponse: Je ne suis pas du tout au courant de la chose.

 18   Question: Vous avez fait état de ces groupes armés. Vous avez ajouté

 19   qu'ils avaient continué d'exister. Est-ce que quelque chose s'est passé à

 20   cet égard en octobre 1990, à Banija et à Kordun?

 21   Réponse: L'escalade des incidents, à savoir ce nombre accru d'incidents

 22   est survenu dans la région autour de Knin. Et notamment, il y a eu un

 23   grand nombre d'incidents et de conflits entre la population serbe, des

 24   groupes armés, la police serbe et la police croate sur le territoire des

 25   régions de Banija et de Kordun jusqu'en octobre. Ce qui est

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  1   caractéristique, c'est que l'intensité de ces conflits et de ces incidents

  2   a déménagé, sur le plan figuratif, de Knin pour aller vers la région de

  3   Banija.

  4   Question: Vous parlez d'incidents, mais que voulez-vous dire par là?

  5   Qu'est-ce qui s'est passé? Qui a fait quoi?

  6   Réponse: Dans les environs de Knin, je sais qu'il y a eu des explosifs

  7   placés sur la voie ferrée, puis des explosifs au niveau de magasins de

  8   certaines personnes, au niveau de kiosques de ventes de journaux, puis des

  9   appareils de transmission vers Sibenik. Et sur le territoire de Banija, ce

 10   qui a été reproduit par les médias et choses que nous savions de par les

 11   médias, c'étaient les conflits entre la police croate et les Serbes de la

 12   région.

 13   Question: Vous parlez de magasins, de commerces, de kiosques… A qui

 14   appartenaient-ils et qui a provoqué tout cela? Qui est l'origine de ces

 15   provocations?

 16   Réponse: Les propriétaires étaient des entreprises publiques de Zagreb

 17   telles que, par exemple, la maison d'édition "Vjesnik" ou alors des

 18   citoyens du groupe ethnique albanais ou du groupe ethnique croate.

 19   Question: Qui est à l'origine de ces provocations?

 20   Réponse: Les gens de ce groupe qui s'appelait lui-même "Conseil de la

 21   résistance populaire".

 22   Question: Est-ce que ces activités ont provoqué des réactions de la part

 23   de la police croate?

 24   Réponse: Il y avait eu des réactions de la police croate même avant, pour

 25   ce qui est de la prise du contrôle à Knin.

Page 12938

  1   A l'époque, donc au mois d'octobre, il y avait tout simplement des

  2   informations qui circulaient en provenance de la police croate, mais il

  3   n'y a pas eu de réactions sur le terrain parce que la police croate

  4   n'avait pas accès à la région. La police: j'entends là la police qui se

  5   trouvait relever des compétences du Gouvernement croate et les postes de

  6   police dans la région. Je n'ai pas su que ces postes avaient procédé à des

  7   enquêtes pour découvrir qui avait été les auteurs de ces incidents; du

  8   moins, cela n'a pas été communiqué au public.

  9   Question: Si je vous ai bien compris, vous avez déclaré que les personnes

 10   qui étaient les auteurs de ces provocations se trouvaient dans ce Conseil

 11   de la résistance nationale, ou est-ce que je vous ai mal compris?

 12   Réponse: Oui, c'est exact.

 13   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Et pourquoi ont-ils fait cela?

 14   M. Babic (interprétation): Eh bien, d'après la façon dont j'ai de voir

 15   les choses, ils visaient à provoquer, à créer des incidents, et ceci, dans

 16   un objectif fondamental qui, à mon avis, est le suivant: à savoir faire

 17   monter la crise sociale sur le territoire de la Croatie afin que, de la

 18   part de la Yougoslavie, il puisse être déclaré un état d'exception qui

 19   suspendrait l'exercice des attributions du pouvoir local, à savoir du

 20   pouvoir croate.

 21   M. le Président (interprétation): De quelle appartenance ethnique était ce

 22   groupe ou cette alliance de la résistance nationale, ce Conseil de la

 23   résistance nationale?

 24   M. Babic (interprétation): C'étaient des Serbes.

 25   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Si je vous ai bien compris, Monsieur

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  1   le Témoin, c'étaient les Serbes qui entouraient ou qui s'étaient ralliés

  2   autour de Milan Martic?

  3   M. Babic (interprétation): C'est exact.

  4   M. le Président (interprétation): Maître Tapuskovic?

  5   M. Tapuskovic (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les

  6   Juges, j'ai une petite requête. Je ne comprends absolument rien de ce que

  7   dit le témoin; il parle à voix très basse et on n'arrive pas à entendre.

  8   Je demanderai au témoin de parler un peu plus fort ou alors de rapprocher

  9   le micro.

 10   M. le Président (interprétation): Monsieur le M. Babic, vous avez

 11   entendu cette demande?

 12   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Les hommes politiques serbes de Knin

 13   et du conseil exécutif du SDS, est-ce qu'ils ne pouvaient pas empêcher les

 14   provocations de la part de ces groupes armés?

 15   M. Babic (interprétation): Non. Vasil Tupurkovski, membre de la

 16   Présidence de la Yougoslavie, a été mis au courant de la chose lorsque,

 17   début octobre, il est venu à Knin. Il ne se trouvait pas sous le contrôle

 18   des autorités locales, pas plus que sous l'autorité du SDS, quoique dans

 19   le groupe en question il y ait eu, en effet, des membres du SDS aussi.

 20   Question: Et Vasil Tupurkovski, savez-vous s'il a pris des mesures quelles

 21   qu'elles soient, après avoir entendu ce que disaient les gens de Knin?

 22   Réponse: Le ou les membres de la Présidence de Yougoslavie, puis le

 23   gouvernement fédéral ont envoyé des observateurs provenant du secrétariat

 24   fédéral à l'Intérieur. Et je pense que le résultat de leur activité s'est

 25   soldé par un apaisement de la situation, un certain apaisement de la

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  1   situation en octobre 1990.

  2   Question: Je vais demander l'aide de l'huissier pour montrer au témoin la

  3   pièce P351, intercalaire 14.

  4   (Intervention de l'huissier.)

  5   Il s'agit du statut du district autonome serbe de Krajina, plus

  6   exactement… et d'une décision de l'assemblée de la municipalité de Knin en

  7   date du 20 décembre 1990, portant sur la mise en place ou la mise en

  8   œuvre, plus exactement, du statut de la SAO de Krajina.

  9   Monsieur le Témoin, pourquoi cette mesure a-t-elle été prise en décembre

 10   1990? Pourquoi a-t-on formé la SAO de Krajina?

 11   Réponse: Eh bien, cela a été créé pour parachever la constitution de cette

 12   communauté des assemblées municipales de Dalmatie du Nord et de Lika, pour

 13   mettre en place un district autonome serbe de Krajina, et ceci, sur la

 14   base de la Constitution de la République de Croatie jusque-là en vigueur;

 15   et ceci en négligeant les amendements apportés à la Constitution en date

 16   du 25 juillet. Donc il a été constitué une Région autonome de la Krajina

 17   pour que cela soit proclamé avant le 23 décembre, date à laquelle la

 18   nouvelle Constitution de Croatie devrait entrer en vigueur. Et la finalité

 19   avait été de faire en sorte que les Serbes ne soient pas effacés de la

 20   Constitution croate comme étant une nation constituante.

 21   Question: S'agissant de l'article 1er de ce statut, on dit que "les Serbes

 22   ou le District autonome serbe de Krajina va constituer une forme

 23   d'autonomie territoriale au sein de la composition de la République de

 24   Croatie." (Fin de citation.)

 25   Quel type d'autonomie recherchait-on?

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  1   Réponse: C'est exact.

  2   Question: Quelle est la forme d'autonomie qu'impliquait ce statut?

  3   Réponse: Une autonomie régionale au sein de la Croatie.

  4   Question: Et l'article 4: là, sont énumérés les territoires inclus dans la

  5   SAO de Krajina. On dit que "celle-ci se compose des territoires, des

  6   municipalités de la Dalmatie du Nord et de Lika; des territoires, des

  7   municipalités où il y a une majorité serbe qui adopte les décisions visant

  8   à rejoindre la SAO de Krajina, et de lieux où la population se compose

  9   majoritairement de personnes qui ont voté à l'occasion d'un référendum en

 10   faveur du ralliement à l'une des municipalités existantes ou nouvellement

 11   établies, là où il y a une population majoritaire serbe."

 12   Quelles sont ces municipalités qui, en fait, ont rejoint cette association

 13   par rapport à celles qui se trouvaient déjà dans l'union des municipalités

 14   de Dalmatie du Nord et de Lika?

 15   Réponse: En plus des six municipalités de la Dalmatie du Nord et de la

 16   Lika, il s'est adjoint à cette association la municipalité de Dvor na Uni,

 17   Glina, Kostajnica, Vrgin Most, Vojnic et Pakrac, mais pas toutes à la

 18   fois.

 19   Question: Article 5: on mentionne la capitale ou le siège de cette SAO; il

 20   s'agit de Knin.

 21   Dans tout ce document on trouve des références au cadre légal dans lequel

 22   va fonctionner cette SAO. J'en prends un exemple. A l'article 6, point 7:

 23   "Mettre en oeuvre les lois et autres réglementations ainsi que les lois

 24   générales adoptées par la République de Croatie et par la Fédération dont

 25   la mise en oeuvre est confiée aux organes du district." (Fin de citation.)

Page 12942

  1   Est-ce que cette SAO était censée fonctionner au sein de la République de

  2   Croatie et de la Fédération de Yougoslavie?

  3   Réponse: Ce qui était prévu, c'était de fonctionner à l'intérieur de la

  4   République de Croatie, qui elle était membre de cette Fédération

  5   yougoslave.

  6   Question: Article 8: on mentionne les organes de cette SAO. On les décrit,

  7   ces organes, comme étant l'assemblée, le conseil exécutif, ainsi que le

  8   président du conseil exécutif.

  9   Est-ce que c'est de cette façon-là que se sont faites les choses?

 10   Réponse: Depuis le 21 décembre 1990 jusqu'au 30 avril 1991, ils existaient

 11   en guise d'organes provisoires et les présidents des assemblées

 12   municipales étaient là à exercer des fonctions à titre intérimaire ou

 13   provisoire. Donc ma réponse est oui, mais de la façon que j'ai précisée.

 14   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, je voudrais en

 15   l'espace de deux questions passer à huis clos partiel.

 16   (Signe affirmatif du Président.)

 17  (Audience à huis clos partiel) [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

 18   Mme Ameerali (interprétation): Nous sommes à huis clos partiel.

 19   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Qui a rédigé ce statut?

 20   M. Babic (interprétation): Le projet de statut a été fait par Borivoj

 21   Rasuo et par le professeur Ratko Markovic.

 22   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous pouvons revenir en audience

 23   publique, Monsieur le Président.

 24   (Signe affirmatif de la Greffière.)

 25   (Audience publique avec mesures de protection à 13 heures 21.)

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  1   Qui était le professeur Ratko Markovic?

  2   M. Babic (interprétation): C'est un professeur de la faculté de droit

  3   à Belgrade et membre de la direction du Parti socialiste de Serbie.

  4   Question: Le Parti socialiste de Serbie, c'est le parti de M. Milosevic?

  5   Réponse: C'est exact.

  6   Question: Qui était M. Borivoj Rasuo?

  7   Réponse: Borivoj Rasuo était un collaborateur professionnel au centre

  8   marxiste auprès du comité central de la Ligue des communistes de Serbie.

  9   Par la suite, il est devenu directeur de l'institut yougoslave du

 10   journalisme. C'était un homme très proche des milieux politiques de

 11   Belgrade.

 12   Question: Je vais demander à Mme l'huissière de montrer au témoin la pièce

 13   P351, intercalaire 15.

 14   Il s'agit là d'un projet de décision portant date du 19 décembre 1990; il

 15   porte sur la mise en oeuvre du statut de la Région autonome serbe de

 16   Krajina.

 17   Reconnaissez-vous ce document, Monsieur le Témoin?

 18   Réponse: Oui, ceci était le projet présenté et cela a été présenté avec le

 19   statut, en date du 21 décembre.

 20   Question: De nouveau avec l'aide de l'huissière, je voudrais que soit

 21   montré au témoin l'intercalaire 19 de cette pièce 351.

 22   C'est une décision portant sur l'application, la mise en oeuvre du statut

 23   de la région autonome serbe de Krajina. Et ici on donne la date du 26

 24   décembre 1990. Est-ce bien exact?

 25   Réponse: Ici cela a été rectifié à titre erroné. Cela a eu lieu le 20

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  1   décembre et quelqu'un est venu rectifier ultérieurement.

  2   Question: Et quelle est la date exacte? Celle du 20?

  3   Réponse: Celle du 20, oui.

  4   Question: D'après le statut, de nouvelles municipalités pouvaient

  5   rejoindre la SAO. J'aimerais que nous prenions un exemple d'un tel

  6   ralliement. Celui-ci est montré dans la pièce P352, intercalaire 3. Je

  7   vais vous demander de l'examiner.

  8   (Intervention de l'huissier.)

  9   Il s'agit d'une décision portant adoption du statut de la Région autonome

 10   serbe de Krajina. En l'occurrence, ici il s'agit de la municipalité de

 11   Knin qui rejoint la Région autonome. Est-ce exact?

 12   Réponse: Oui.

 13   Question: Vous avez déjà mentionné les municipalités qui avaient rejoint

 14   la région et vous avez parlé aussi du fait qu'il y avait le ralliement de

 15   la municipalité de Pakrac. Est-ce que celle-ci a travaillé aux activités

 16   des organes de la SAO?

 17   Réponse: Non. La municipalité de Pakrac, à mon avis, a adopté une décision

 18   le 20 février 1991 pour ce qui est de son adjonction à cette union des

 19   municipalités de la SAO Krajina, mais elle n'a jamais été appliquée; la

 20   municipalité de Pakrac n'a jamais rejoint les institutions de la SAO de

 21   Krajina.

 22   Question: Merci. Nous n'avons plus besoin de discuter de ce document.

 23   (Intervention de l'huissier.)

 24   Outre les municipalités qui ont rejoint la SAO, est-ce que des

 25   municipalités locales l'ont fait également? Et si ce fut le cas, quelles

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  1   ont été les modalités?

  2   Réponse: Il y a eu adjonction de communautés locales. Et d'abord, il

  3   s'agissait pour elles de procéder à un référendum pour ce qui est de

  4   rejoindre telle ou telle autre municipalité; et c'est ainsi que ces

  5   municipalités pouvaient devenir parties intégrantes de la SAO de Krajina.

  6   C'est ainsi que bon nombre de communautés locales des environs sont

  7   devenues membres de la SAO Krajina, alors qu'elles ne faisaient pas partie

  8   de ces municipalités. Je crois peut-être qu'un quart de ces territoires et

  9   de la population afférente ont rejoint la SAO de Krajina de cette façon.

 10   Question: Au début, lorsque nous avons vu la carte, vous avez déjà

 11   mentionné Plaski et une partie de la municipalité de Zadar. Quelles sont

 12   les autres communautés locales qui ont rejoint la SAO? Surtout dans la

 13   région de Knin, quelles sont les communautés qui l'ont fait?

 14   Réponse: Eh bien, d'abord des communautés locales de Sinj, Otisic,

 15   Koljane, Laktas et d'autres communautés locales de la municipalité de

 16   Drnis, puis Obodol, Tepruh, Tanjane, Mijocic, Stikovo; par la suite

 17   Baljci. De la municipalité de Sibenik, bon nombre de communautés locales

 18   comme Bratiskovci, Bribir, et d'autres. Je ne vais pas vous les énumérer

 19   toutes. Ce sont là des communautés locales qui ont rejoint la municipalité

 20   de Knin et qui appartenaient aux territoires d'autres municipalités

 21   auparavant.

 22   Question: Est-ce que c'était là toutes des municipalités où il y avait une

 23   majorité serbe? Excusez-moi, je parlais de communes ou communautés

 24   locales.

 25   Réponse: Oui, oui.

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  1   Question: Et avant la formation de la SAO, comment les municipalités

  2   étaient-elles financées?

  3   Réponse: Elles se finançaient à partir des recettes prévues par la

  4   législation en vigueur. Celles du moins qui revenaient aux municipalités.

  5   Puis, il y avait des recettes complémentaires en provenance du budget de

  6   la République.

  7   Question: Cela veut dire que cela venait du budget de la Croatie?

  8   Réponse: Du budget de la République de Croatie, oui.

  9   Question: Est-ce que, finalement, cette source de recette s'est tarie? Et

 10   à quel moment est-ce ça s'est passé, si c'est le cas?

 11   Réponse: Eh bien, partir du mois d'octobre de l'année 1990. Donc, pour se

 12   resservir des termes croates: depuis la "Révolution des troncs d'arbre",

 13   le Gouvernement croate a coupé l'afflux des fonds budgétaires à

 14   l'intention des municipalités qu'elle jugeait faire défaut de respect des

 15   décisions du Gouvernement croate; donc c'était fin 1990/début 1991 que

 16   toutes les recettes qui étaient destinées à ces municipalités-là se sont

 17   vu couper l'afflux de ces moyens, de ces fonds budgétaires.

 18   Question: Examinons, si vous le voulez bien avec l'aide de l'huissier, la

 19   pièce P352, intercalaire 8.

 20   (Intervention de l'huissier.)

 21   J'ai ici, dans la conclusion, que "les conseils exécutifs des assemblées

 22   municipales, ci-dessus mentionnées, doivent soumettre à l'assemblée

 23   municipale un projet de décision pour enrayer le financement ou le

 24   paiement des fonds au budget de la République de Croatie, outre les

 25   montants supplémentaires destinés aux budgets municipaux qui ont été

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  1   bloqués". (Fin de citation.)

  2   Est-ce que cela a été la réaction des municipalités de la SAO face à

  3   l'arrêt des fonds, à l'arrêt du financement?

  4   Réponse: C'est exact, oui.

  5   Question: Quelles étaient les ressources locales dont bénéficiaient les

  6   municipalités? Et qu'est-ce que les municipalités n'ont plus envoyé comme

  7   fonds au Gouvernement croate?

  8   Réponse: Eh bien, le système de perception des impôts, des taxes et autres

  9   redevances était ainsi fait, ce qui fait que le service de comptabilité

 10   social affectait les recettes par utilisateur. Donc, sur le territoire des

 11   municipalités, les services de comptabilité publics distribuaient les

 12   recettes en provenance de taxes à l'intention des budgets des

 13   municipalités; c'est ainsi que cela se faisait. Les autres recettes, à

 14   savoir les impôts de l'Etat, étaient directement perçues par le budget de

 15   la République de Croatie. Et comme nous l'avons commenté tout à l'heure,

 16   ces fonds-là étaient réaffectés vers les municipalités par la suite.

 17   Donc la municipalité a décidé et s'est adressée au service de comptabilité

 18   public pour dire que les fonds destinés au budget de l'Etat de Croatie ne

 19   soient pas envoyés vers l'Etat de Croatie, mais soient stoppés sur place

 20   pour être réaffectés à la municipalité. Donc les taxes et les recettes à

 21   la source n'allaient plus au budget de l'Etat, mais étaient conservées au

 22   niveau municipal.

 23   Question: Les recettes locales recueillies au niveau de la municipalité ou

 24   des municipalités suffisaient-elles à financer toutes les activités de ces

 25   municipalités ou est-ce que vous avez eu besoin d'aide venant de

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  1   l'extérieur?

  2   Réponse: On voit bien, partant de là, que les municipalités de la SAO de

  3   Krajina étaient des régions sous-développées; elles n'avaient pas

  4   suffisamment de moyens pour financer les administrations municipales.

  5   C'est la raison pour laquelle, en provenance du budget de la République de

  6   Croatie où l'on percevait les taxes, il était redistribué des fonds pour

  7   administration des municipalités. Une fois que la République de Croatie a

  8   supprimé ces ressources supplémentaires, les municipalités ont dû adresser

  9   des demandes d'aide à l'intention de qui pouvait les aider.

 10   Question: Et vers qui vous êtes-vous tournés, à qui vous êtes-vous adressé

 11   pour obtenir de l'aide? Pas vous personnellement, mais les municipalités.

 12   Réponse: Eh bien, toute municipalité s'adressait à une municipalité amie

 13   en Serbie, ou alors auprès des représentants des autorités de la

 14   République de Serbie.

 15   Question: Et comment est-ce que ça s'est passé, cela, à Knin? De quelle

 16   façon, en pratique, vous êtes-vous débrouillés pour obtenir, disons, les

 17   fonds nécessaires au financement du secteur de la santé ou pour les

 18   retraites?

 19   Réponse: Eh bien, Knin, c'était un centre plus développé que le reste dans

 20   la Krajina et était en mesure de satisfaire à une bonne partie de ses

 21   propres besoins.

 22   Mais s'agissant des besoins matériels complémentaires, pour ce qui est

 23   notamment des services de santé et ultérieurement des services de

 24   l'enseignement, on devait forcément s'adresser ailleurs. Par exemple, on

 25   avait obtenu une aide en livres, en manuels scolaires au Monténégro; on

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  1   avait demandé une aide pour le service de santé en Serbie. Puis, il y

  2   avait 40 ou 60 millions de dettes pour l'usine de vis à Knin, ce qui été

  3   résolu ou surmonté avec l'aide, l'appui du Président de la République de

  4   Serbie.

  5   Question: Avant que nous ne revenions à ce que vous avez dit en dernier

  6   lieu, parlons de ceci: vous avez dit que les municipalités faisaient

  7   partie du système de la comptabilité sociale, SDK, en Croatie. Est-ce que

  8   ceci a changé? Est-ce que vous avez, par la suite, adopté un autre système

  9   de comptabilité?

 10   Réponse: Eh bien, au début, nous nous étions adressés à d'autres services

 11   de ce type parce que le service de comptabilité public de Croatie, sur

 12   ordre du gouvernement croate, avait bloqué les comptes courants des

 13   entreprises sur le territoire de la Krajina. Et afin que ces entreprises

 14   puissent fonctionner dans leurs paiements, il fallait bien qu'elles

 15   prennent appui sur d'autres services. Donc certaines entreprises de la

 16   Krajina ont ouvert des comptes complémentaires, des comptes doubles auprès

 17   du service de comptabilité public en Serbie, à savoir la SDK, filiale n°6,

 18   dont le siège se trouvait à Novi Beograd; c'est ce qu'on appelait des

 19   comptes non résidents.

 20   Par la suite, dans le courant de l'année 1991, les services de

 21   comptabilité publics de la Krajina ont été unifiés aux services de

 22   comptabilité publics de Serbie par le biais de cette filiale n°6 à Novi

 23   Beograd.

 24   Question: Dans ces contacts avec la filiale du service SDK de Novi

 25   Beograd, lorsque ces contacts ont été établis, qui a négocié avec cette

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  1   filiale du côté de la SAO et du côté de Belgrade?

  2   Réponse: Eh bien, d'après ce que j'en sais, c'est Slavko Cvijan, ministre

  3   chargé des Serbes hors de Serbie, et un autre personnage le remplaçant,

  4   l'adjoint du directeur de ce service de comptabilité public à Novi

  5   Beograd. Et dans la Krajina, c'étaient les directeurs d'entreprise, les

  6   PDG d'établissement.

  7   Question: Le directeur adjoint de cette filiale de SDK à Belgrade, qui

  8   était-ce?

  9   Réponse: Mirko Konjikusic.

 10   Question: Est-ce qu'il avait une affiliation quelconque avec Slobodan

 11   Milosevic?

 12   Réponse: Ils pouvaient être en relation par le biais du service de sûreté

 13   d'Etat. J'ai appris qu'il avait, avant cela, travaillé au service de

 14   sûreté d'Etat et qu'il était en contact avec Jovica Stanisic. Et le

 15   directeur de ce service est en contact avec le ministre de l'Intérieur de

 16   Serbie, à savoir l'ex-ministre de l'intérieur de Serbie, Radmilo

 17   Bogdanovic. Mais il était ministre en 1990; c'est ce que j'ai entendu de

 18   leurs bouches.

 19   Question: Quand avez-vous entendu parler du fait que Mirko Konjikusic

 20   aurait été membre des services de sûreté de l'Etat? Qui vous dit cela et

 21   quand ceci vous a-t-il été dit?

 22   Réponse: Il me l'a dit dans la deuxième quinzaine du mois de janvier 1991,

 23   en une occasion, lorsqu'il avait vu des employés du service de sûreté

 24   d'Etat dans une escorte. Et il avait dit qu'il savait enlever, par

 25   exemple, une roue de voiture; il avait décrit ces gens-là comme étant des

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  1   gens très particuliers. Donc, c'est en cette occasion-là qu'il avait parlé

  2   de lui-même aussi.

  3   Question: Je voudrais que soit maintenant montrée au témoin la pièce P352,

  4   intercalaire 9.

  5   (Intervention de l'huissier.)

  6   Il s'agit d'une décision précisant le mode temporaire de financement des

  7   municipalités de la SAO de Krajina, document portant la date du 19 janvier

  8   1991.

  9   Article 2: il est dit, s'agissant des modalités de paiement, que "le

 10   paiement de la taxe de vente de base est interrompu et, après consultation

 11   et accord avec les organes fédéraux, ce paiement sera calculé et versé au

 12   compte de la Fédération". 

 13   Est-ce que ceci renvoie à ce que vous venez de nous dire à propos du SDK

 14   de Serbie à Novi Beograd? Qu'est-ce que ça veut dire?

 15   Réponse: Cela signifie un pas de plus par rapport à l'association, de

 16   l'afflux de fonds supplémentaires en provenance du budget de la République

 17   de Croatie. Donc là, il y a une cessation des impôts perçus par la

 18   République de Croatie sur le territoire de la SAO de Krajina. Là, nous

 19   nous trouvons à un palier au-dessus, pour ce qui est du financement. Et

 20   là, il est prévu que ces impôts-là soient calculés et versés sur le compte

 21   de la Fédération, et que c'est de là que seraient financés les besoins de

 22   la SAO de Krajina.

 23   Pour ce qui est des services de comptabilité publique, cela a été une

 24   façon tout à fait légale pour ce qui est de l'accomplissement de sa tâche,

 25   de l'exercice des fonctions de paiement et de l'enregistrement des

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  1   paiements de façon publique.

  2   Question: Une fois de plus, je vais demander l'aide de l'huissier pour

  3   montrer au témoin la pièce P352, intercalaire 10.

  4   (Intervention de l'huissier.)

  5   Ceci renvoie à la séance de travail qui s'est tenue le 19 janvier 1991 à

  6   Knin. On trouve ici, une fois de plus, une référence, au niveau de l'ordre

  7   du jour, au financement des municipalités. Est-ce que c'est au cours de

  8   cette séance-là que les décisions ont été prises?

  9   Réponse: Oui, c'est de cela que nous parlions tout à l'heure.

 10   Question: En pratique, la filiale de Novi Beograd et du SDK de Serbie,

 11   comment était-elle intégrée dans la filière des opérations et transactions

 12   financières? En pratique, comment ça se passait? Quels étaient les

 13   rouages?

 14   Réponse: Au début, j'ai dit que tous les intervenants prenant part aux

 15   transactions et aux paiements, à savoir les établissements publics, les

 16   entreprises, les municipalités, tous ceux qui avaient un compte courant

 17   ouvraient des comptes courants auprès de cette filiale 6, celle de Novi

 18   Beograd; et c'est par le biais de ce compte-là que se faisaient tous les

 19   paiements à partir de la mi-1991. Puis, on a réunifié, on a réuni ces SDK,

 20   ces services de comptabilité publique sur le territoire de la Krajina. Et

 21   c'est le SDK de Krajina qui était en corrélation avec la filiale 6 à Novi

 22   Beograd: de la sorte, elle était intégrée au système de transactions et de

 23   paiements sur le territoire de la Yougoslavie.

 24   Question: Est-ce que cela veut dire que le SDK de la SAO de Krajina

 25   faisait partie, était une partie à ce moment-là, au moment où il a été

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  1   établi, de la SDK de Serbie?

  2   Réponse: En réalité, oui.

  3   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je voudrais que soient maintenant

  4   montrées au témoin deux pièces en rapport avec cette question. Il s'agit

  5   de l'intercalaire 11 de la pièce 352, l'autre étant l'intercalaire 12.

  6   (Intervention de l'huissier.)

  7   Intercalaire 11: il s'agit de la décision, prise le 16 mai 1991, en ce qui

  8   concerne le service de comptabilité public de la SAO de Krajina.

  9   Monsieur le Témoin, je vais vous demander de consulter l'article 5: "Dans

 10   l'exercice de ses fonctions, le service va collaborer avec les organes de

 11   la Krajina et de la République de Serbie".

 12   L'autre document est de la même date. C'est une décision portant

 13   désignation du directeur du service de comptabilité public. Inutile d'en

 14   discuter dans le détail.

 15   M. le Président (interprétation): Madame Uertz-Retzlaff, nous allons

 16   travailler jusqu'à 2 heures moins 5. Vous avez dix minutes de plus. Et

 17   nous commencerons du même coup l'audience suivante dix minutes plus tard.

 18   Mais je ne sais pas si nous avons reçu une traduction officielle du SDK?

 19   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): On utilise diverses expressions en

 20   anglais: on parle d'un service de contrôle des comptes publics, on dit

 21   quelquefois aussi service d'audit public. Oui, je pense qu'on parle aussi

 22   de service de comptabilité publique, mais nous allons avoir un expert

 23   appelé par le Bureau du Procureur, c'est M. Torkildsen; celui-ci va se

 24   pencher sur la question. Il va nous dire comment fonctionnaient les

 25   services de SDK du service de comptabilité publique. C'est pratiquement un

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  1   système de contrôle des opérations financières, des transferts de fonds.

  2   Ce système, au cours de quelle période a-t-il fonctionné, ce service de

  3   comptabilité publique? Pendant combien de temps a-t-il fonctionné en

  4   passant par la Serbie où cette coopération entre les deux services de SDK?

  5   Est-ce qu'elle s'est poursuivie jusqu'au moment de l'opération "Tempête"?

  6   Réponse: C'est exact. De mai 1991 à août 1995.

  7   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Est-ce que M. Milosevic était au

  8   courant de l'existence de ce système de coopération?

  9   M. le Président (interprétation): Je ne sais pas si le témoin est en

 10   mesure de répondre à cette question. Avez-vous des éléments d'informations

 11   nous permettant de savoir ce qu'a peut-être su M. Milosevic à l'époque?

 12   M. Babic (interprétation): Tout ce que je puis dire, c'est qu'il

 13   pouvait savoir par le biais du Gouvernement de la Serbie qui contrôlait le

 14   système. Maintenant, de là à affirmer qu'il le savait, vraiment je ne puis

 15   l'affirmer. Mais je crois bien que c'est bien le cas.

 16   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): J'ai une autre pièce à soumettre au

 17   témoin, c'est la pièce P352, intercalaire 14.

 18   (Intervention de l'huissière.)

 19   C'est une lettre qui porte la date du 12 mai 1992. Elle est adressée au

 20   Gouvernement de Serbie, au Premier ministre, au Gouvernement de la

 21   République du Monténégro et au gouverneur de la banque nationale

 22   yougoslave. Et cette lettre fait référence aux réglementations

 23   s'appliquant à la banque nationale.

 24   On trouve ici la phrase suivante: "Avec la création de la République de la

 25   Krajina serbe, RSK, les réglementations légales de la République de

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  1   Croatie cessent d'être valables et la loi et les réglementations légales

  2   de la RSFY continuent d'être applicables." (Fin de citation.)

  3   On dit aussi un peu plus loin: "Parmi les autres lois restant

  4   d'application en République de Krajina serbe et qui sont toujours valables

  5   aujourd'hui, on trouve la loi portant sur la banque nationale yougoslave

  6   et le système unique de transactions financières des banques nationales

  7   des Républiques et des banques nationales des provinces autonomes." (Fin

  8   de citation.)

  9   Et on dit plus loin: "Depuis le premier jour de l'état de guerre en

 10   République de Krajina serbe, les transactions bancaires, les transferts de

 11   fonds se font par le truchement des banques commerciales et par les

 12   filiales du service de comptabilité publique de la République de Serbie."

 13   (Fin de citation.)

 14   Est-ce que cela veut dire que, pendant l'existence de la RSK, ce système

 15   s'est maintenu?

 16   Réponse: Oui.

 17   Question: Et la nouvelle Constitution de la République fédérale de

 18   Yougoslavie n'a pas changé, cet état de choses non plus en 1991, ou est-ce

 19   que cette nouvelle Constitution a eu un certain effet?

 20   Réponse: Je m'excuse, de quelle année parlez-vous? De la Constitution de

 21   quelle année?

 22   Question: 1992.

 23   Réponse: Non, je ne sais pas quelles sont les dispositions

 24   constitutionnelles, mais rien n'a été changé. Je crois même que cette

 25   coopération s'est vue raffermie sur le plan institutionnel, y compris au

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  1   niveau de la banque nationale de Yougoslavie.

  2   Question: La SAO de Krajina, a-t-elle eu un budget à un moment donné?

  3   Réponse: Oui. La mise en place de ce budget de la SAO de Krajina date de

  4   la mise en place d'un gouvernement de la SAO de Krajina, à savoir depuis

  5   l'année 1991 au mois de mai.

  6   Question: Et ce budget, comment était-il financé?

  7   Réponse: A partir des impôts et des taxes perçus sur le territoire de la

  8   Krajina.

  9   Question: Est-ce que ces recettes suffisaient ou est-ce que vous avez

 10   bénéficié d'un appui venant de l'extérieur de la Krajina?

 11   Réponse: Non, cela ne suffisait pas, pas même pour le fonctionnement de

 12   l'administration seule. Nous recevions de l'assistance en provenance de

 13   Serbie.

 14   Question: Et de quelle façon ceci se faisait-il?

 15   Réponse: Eh bien, soit tel ministre au gouvernement ou directeur de

 16   société, directeur d'établissement pour leurs propres besoins, président

 17   des assemblées municipales pour leurs besoins, allaient en Serbie au

 18   niveau des entreprises, des établissements, des municipalités, pour

 19   demander soutien et aide.

 20   Question: S'agissant de la police, comment était-elle financée?

 21   Réponse: Eh bien, la police ne s'est pas financée à partir du budget de la

 22   Krajina, exception faite d'une petite tranche de ce financement en été

 23   1991. Pour ce qui est du reste, la police était financée par le ministère

 24   de l'Intérieur de Serbie.

 25   Question: Mais, en pratique, comment est-ce que ça se passait? Est-ce

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  1   qu'ils ont reçu des sommes en liquide, en espèces, ou est-ce qu'ils

  2   avaient un compte auprès du SDK? Le savez-vous?

  3   Réponse: Tout au début, ils recevaient des espèces, je sais qu'ils

  4   touchaient des espèces et des moyens matériels et techniques, puis des

  5   espèces. Ultérieurement, un compte a été ouvert. Le ministère de

  6   l'Intérieur de la Krajina a ultérieurement disposé d'un compte à soi.

  7   Question: Mais pourquoi est-ce que le financement de la police n'était pas

  8   prévu ou inclus dans le budget de la SAO?

  9   Réponse: En 1991, il n'y avait pas eu de recettes et de dépenses

 10   planifiées pour le budget, mais ce n'était pas là la raison principale. La

 11   raison principale, c'était le défaut de fonds, le manque de fonds, et la

 12   SAO de Krajina était seulement en train d'être constituée à partir de

 13   municipalités autogestionnaires. Ses recettes étaient minimes; elle

 14   n'avait, en tout état de cause, pas assez de fonds.

 15   Question: Et la Défense territoriale –serbe, s'entend-, comment était-elle

 16   financée, à l'époque?

 17   Réponse: Jusqu'en août 1991, les employés dans les QG municipaux de la TO

 18   qui étaient employés à temps plein touchaient leur salaire à partir de

 19   leur municipalité. Puis, une fois qu'il y a eu éclatement des conflits,

 20   une fois que la guerre…, que la JNA est entrée en guerre, la TO a été

 21   financée par le biais du système de financement de l'armée populaire

 22   yougoslave, de la JNA. Par la suite, il a été prévu un financement à part,

 23   mais cela ne s'est fait qu'à partir de l'année 1992; alors qu'en 1991, les

 24   choses se sont passées, dans la plupart des cas, de la façon que je vous

 25   ai indiquée.

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  1   Question: J'aimerais que soit soumise au témoin la pièce P352,

  2   intercalaire 76.

  3   (Intervention de l'huissier.)

  4   C'est une requête précise présentée par Milan Martic au ministère de la

  5   Défense de Belgrade, et qui porte la date du 18 septembre 1991. Si vous

  6   examinez l'en-tête, la signature, le tampon, pensez-vous qu'il s'agit ici

  7   d'un document authentique? Pouvez-vous commenter ceci?

  8   Réponse: Oui, c'est un document authentique. Mais le cachet n'est pas

  9   celui du QG principal de la TO; le cachet est celui de la TO de la

 10   municipalité de Knin. S'agissant du deuxième de ces documents… Oui, celui-

 11   là aussi. Les documents sont authentiques.

 12   Question: Nous n'avons pas entendu la dernière partie de votre réponse;

 13   vous avez parlé trop bas.

 14   Réponse: Le document est authentique, à l'exception près qu'à la place des

 15   cachets du QG principal, il a été fait usage des cachets de la Défense

 16   territoriale de Knin.

 17   Question: Reconnaissez-vous la signature de M. Martic?

 18   Réponse: C'est… Oui, la signature habituelle que j'ai eu coutume de voir,

 19   à l'époque.

 20   Question: Il a un autre signataire, Savic Radulovic. Qui est cet homme?

 21   Réponse: C'est le commandant du QG municipal de la TO à Knin, à l'époque.

 22   Question: Sans trop aborder les détails, disons ceci: c'est une requête

 23   concernant plusieurs TO, Knin, Benkovac, Obrovac, Gracac, Virgin Most,

 24   Vojnic, Dvor, Glina… Et ceci concerne des munitions et du matériel, des

 25   armes. C'est bien exact?

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  1   Réponse: C'est exact.

  2   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, l'heure est

  3   venue.

  4   M. le Président (interprétation): Oui. Nous allons lever l'audience.

  5   Madame Uertz-Retzlaff, nous nous sommes préoccupés du temps, nous l'avons

  6   déjà dit. Je ne pense même pas que vous ayez parcouru un quart du chemin.

  7   Nous sommes tenus par des contraintes de temps, vous le savez

  8   pertinemment. La conclusion qui s'impose est celle-ci: on avait prévu, au

  9   départ, 14 heures. Nous allons vous donner 16 heures en tout, ce qui fait

 10   quatre journées. Nous avions dit trois journées, vous en aurez quatre.

 11   Mais veillez à terminer d'ici là.

 12   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Merci beaucoup, je vous en sais gré.

 13   Je pense qu'on avance assez vite, en fait.

 14   M. le Président (interprétation): Fort bien.

 15   Monsieur le M. Babic, veillez à être de retour à l'audience à 9 heures

 16   demain matin pour poursuivre votre déposition.

 17   M. Babic (interprétation): Oui.

 18   M. le Président (interprétation): L'audience est levée.

 19   (L'audience est levée à 13 heures 59.)

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