Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Lundi 3 mars 2003.)

2 (L'audience est ouverte à 9 heures 10.)

3 (Audience publique.)

4 (Questions relatives à la procédure.)

5 (Le Juge Robinson est absent du prétoire.)

6 M. le Président (interprétation): Vous l'aurez constaté, le Juge Robinson

7 n'est pas présent. Il n'est pas bien. Il était déjà malade la semaine

8 dernière, et il ne s'est pas remis. Par conséquent, il ne siégera pas avec

9 nous demain non plus. Et la Chambre, invoquant les pouvoirs qui sont les

10 siens en application de l'Article 15bis, va siéger en sa présente

11 composition avec les deux Juges ici présents, puisqu'il est dans l'intérêt

12 de la justice de poursuivre l'audience et d'assurer un déroulement du

13 procès aussi rapide que possible. A moins bien sûr qu'il n'y ait des

14 objections. Il n'y en a pas? Fort bien.

15 Monsieur Nice, cela signifie bien sûr -et je le précise à tous- que la

16 Chambre ne peut pas rendre de décision n'étant composée que de Juges; à

17 l'exception, bien sûr, de décisions absolument impératives pour la

18 poursuite de l'audience aujourd'hui. Et, plus précisément, nous ne

19 prendrons pas de décisions s'agissant des arguments que nous allons

20 entendre portant sur Torkildsen ou d'autres questions relatives à la

21 conduite du procès.

22 Le Juge Robinson, à son retour, aura l'occasion de prendre connaissance

23 des arguments par écrit; et c'est alors seulement que la Chambre rendra sa

24 décision.

25 M. Nice (interprétation): Si le Juge Robinson a des questions qu'il veut

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1 soulever auprès des parties, je suis sûr qu'il pourra le faire à notre

2 retour. Je le sais, et je le dis, parce que le dossier de l'audience

3 montre que quelquefois les Juges me posent des questions, et l'accusé sait

4 qu'il est possible de suivre l'audience.

5 Pourrais-je aborder le reste des arguments s'agissant du rapport

6 financier?

7 M. le Président (interprétation): Oui.

8 M. Nice (interprétation): De façon séparée, les amis de la Chambre

9 voudront peut-être intervenir.

10 M. le Président (interprétation): Oui, je parlais de M. Torkildsen; je

11 n'étais peut-être pas très courtois.

12 M. Nice (interprétation): Eh bien, il se trouve aujourd'hui présent dans

13 le prétoire, vous l'aurez deviné.

14 A la fin de l'audience, la semaine dernière, l'accusé voulait ajouter une

15 phrase, a t-il dit. Mais si vous ne m'empêchez pas de le faire, je vais

16 terminer et puis, l'accusé pourra revenir à cette phrase et à d'autres

17 s'il le veut.

18 M. le Président (interprétation): Si je me souviens bien, nous avions

19 entendu vos arguments et vous aviez préparé un tableau à notre égard, à

20 notre intention?

21 M. Nice (interprétation): Oui, c'est ce qu'on trouve à la page 54 du

22 rapport, du premier rapport qui porte sur le Kosovo, mais aussi une partie

23 antérieure. Et elle avait été modifiée, cette partie du tableau, pour

24 tenir compte d'autres éléments repris dans des petites cases. Ces éléments

25 étant les sources sur lesquelles se basait M. Torkildsen, les différentes

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1 thèses présentées par ce tableau. Je vous ai fait parcourir ce tableau

2 rapidement, mais je crois que cela suffit pour notre objet.

3 En effet, ce tableau révèle qu'il y a un contrôle des mouvements

4 financiers de la part de l'accusé. Il révèle également qu'il y a contrôle

5 de la façon dont les fonds ont été utilisés pour financer les opérations,

6 dont les opérations se trouvant au cœur même de ces allégations.

7 Je n'en dirai pas plus. Je sais, en effet, que la Chambre se sera saisie

8 de ces détails, et le fera davantage au moment où elle aura besoin de se

9 pencher sur les détails de ce rapport.

10 J'ai déjà perdu quelque chose.

11 Ce premier rapport porte bien sûr sur le Kosovo, mais a une portée un peu

12 plus large puisqu'il dresse la situation historique. Et, dans son

13 ensemble, il révèle que l'accusé, même lorsqu'il était Président de la

14 Serbie et non pas Président de la République, avait le contrôle d'un

15 organe de la République, l'administration des douanes, utilisé afin de

16 fournir des fonds à ses fins précises. Cela peut être un élément de preuve

17 important. Nous avons peut-être des choses qui sont dites par les témoins

18 ici à l'audience, mais la façon dont tout ceci est repris dans ce tableau

19 est très précieuse, car ce tableau montre que l'accusé, dans le contrôle

20 qu'il avait des fonds et de leur utilisation, était en mesure de et a

21 effectivement négligé les lois qui s'appliquaient aux recettes fédérales

22 et à la façon dont celles-ci devaient être utilisées.

23 Ce rapport montre aussi que ces fonds ont été acheminés par des filières

24 extérieures aux filières habituelles en direction du MUP de Serbie, et

25 ceci sur ordre de l'accusé. Ce qui montre que l'accusé avait un contrôle

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1 direct, une responsabilité directe de ces forces, et exerçait sur celles-

2 ci un contrôle qui n'est pas le contrôle qu'on pourrait attendre de la

3 part d'une personne occupant l’une ou l'autre de ces fonctions, Président

4 de Serbie ou Président, plus tard, de la République.

5 Il est intéressant de constater -plus loin, nous le verrons dans le résumé

6 des conclusions, je pense, s'agissant de ce premier rapport- qu'ici dans

7 le cas national, paragraphe 13, en ce qui concerne cet accusé et d'autres,

8 l'accusé se trouve en rapport relié à Sainovic, Milutinovic, Stanisic et

9 Markovic; autant de noms avec qui il est associé aussi s'agissant des

10 crimes allégués dans ce procès.

11 C'est un rapport très détaillé qui se présente en deux volets. Pour le

12 moment je ne souhaite pas l'aborder dans le détail car ceci nécessiterait

13 trop de temps. Mais si la Chambre veut se pencher sur ces détails, je

14 pourrai les aborder.

15 La Chambre sait que les amis de la Chambre avaient présenté un calendrier

16 détaillé des questions soulevées auxquelles il faudrait répondre; et je

17 pense que ceci a fait l'objet d'une réponse dans notre réponse du 16 juin,

18 de façon très détaillée. Et je ne pense pas qu'il serait utile de

19 parcourir tous ces détails car je perdrais trop de temps.

20 Il y a une question d'ouï-dire sur laquelle se basent les amis de la

21 Chambre. On peut toujours se baser sur ce point ou l'invoquer dans tout

22 rapport d'expert. On peut dire que des rapports d'experts ont déjà été

23 produits; rapports qui se basent sur des observations faites hors

24 prétoire, des déclarations faites hors prétoire par l'un ou l'autre

25 individu. Ce n'est en rien différent de ces cas-là. Et j'irai même plus

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1 loin: les amici disent qu'il faut présenter tout ceci en direct, mais cela

2 voudrait dire que tout sujet évoqué par des experts signifierait un volume

3 incontrôlable de documents.

4 Je l'ai déjà dit la semaine dernière: j'avais espéré que la question de

5 savoir si M. Torkildsen est expert ou pas est une question qui n'a plus

6 lieu d'être. Ce que font les experts et ce que tous les experts que nous

7 avons déjà entendus font, c'est qu'ils examinent un volume conséquent de

8 documents auxquels ils appliquent leur domaine de savoir spécialisé qui

9 est le leur, donc le savoir qu'ils ont en matière d'analyse, de façon à

10 rendre ces documents utiles et utilisables par la Chambre.

11 Je reviens maintenant au deuxième rapport. Permettez-moi d'aborder ceci

12 rapidement. Il porte plus précisément sur la première période, une période

13 antérieure. Ce rapport montre qu'au moment où l'accusé était Président de

14 Serbie, il y a établissement d'une fédération économique, concernant au

15 fond la République, la Republika Srpska et la RSK, financée par la Serbie,

16 sous le contrôle de l'accusé. C'est lui qui était celui qui prenait les

17 décisions au niveau de l'approvisionnement en fonds et de ce qui,

18 effectivement, était corollaire de ce financement, et financement à

19 destination de toutes les organisations ou organismes serbes en dehors de

20 la Serbie. Et il a reconnu ceci –nous nous basons là-dessus-; c'est

21 produit dans le rapport: la nature même des allégations portées contre

22 l'accusé, des charges retenues contre lui s'agissant du contrôle qu'il a

23 sur les événements en RS, en RSK et sur les territoires où il y avait des

24 organes est telle que ce moyen de preuve doit être recevable et doit être

25 précieux pour les Juges. La façon dont ces moyens de preuve sont présentés

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1 est idéale pour ceux qui mènent des enquêtes.

2 Nonobstant le caractère contradictoire des débats, la Chambre mène elle-

3 même des enquêtes à la recherche de la vérité. Et… Comment est-ce que je

4 me suis exprimé? Je recherche le début de ma phrase. C'est une façon

5 idéale car à tous moments, à tous les stades, la Chambre peut exiger de la

6 part de l'accusé qu'il sache ce sur quoi il est contesté et les raisons

7 pour lesquelles on porte les accusations que l'on porte contre lui. Les

8 Juges peuvent décider d'aller plus loin dans leurs investigations s'il y a

9 des questions qui ne sont pas encore assez étoffées, et un expert tel que

10 celui-ci peut le faire puisqu'il a déjà examiné un ensemble extraordinaire

11 de documents. Et ceci peut être plus utile, davantage que d'avoir

12 quelqu'un qui dirait: "Oui, j'ai transporté un sac contenant autant

13 d'argent". Mais la Chambre pourra faire ceci, si elle le veut: appeler un

14 tel témoin pour être sûr qu'elle a réuni tous les moyens de preuve

15 adéquats.

16 Puis-je m'en tenir là et, éventuellement, reprendre la parole lorsque les

17 amis de la Chambre seront intervenus et l'accusé aussi?

18 M. le Président (interprétation): Maître Kay, vous avez la parole.

19 M. Kay (interprétation): Monsieur le Président, Monsieur le Juge,

20 l'accusation vient de présenter la base à partir de laquelle elle a

21 formulé ses allégations pour ces questions financières. Elle a présenté

22 les éléments de preuve qui seront les siens.

23 Mais la question qui se pose à vous aujourd'hui, c'est celle de la

24 recevabilité de ces moyens de preuve étayés ou présentés par le truchement

25 de M. Torkildsen. Les documents que ce dernier va présenter sont-ils

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1 effectivement recevables dans la forme que l'accusation utilise pour

2 chercher à vous les présenter?

3 Revenons sur la question du savoir-faire, de l'expérience d'un expert. Il

4 y a un bref résumé des connaissances de M. Torkildsen qui est déposé en

5 même temps que le rapport. Nous avons demandé des éclaircissements pour

6 savoir quel est son domaine de connaissances, car c'est une objection que

7 l'accusé pouvait raisonnablement soulever; l'accusé avait le droit d'en

8 savoir davantage sur le statut, l'état de ce témoin.

9 Depuis ces écritures, nous avons reçu un résumé bien plus circonstancié;

10 vous aussi, d'ailleurs. Ce résumé vous a été soumis. Il se pourrait que

11 les Juges acceptent ce domaine de connaissance de la part de l'expert.

12 Mais ce qui est intéressant ici, dans ce débat, c'est qu'en premier lieu

13 et surtout, cet homme est un enquêteur; c'est ce bagage qu'il a. J'indique

14 ce point, car je pense qu'il est pertinent dans l'argument que je vais

15 vous soumettre.

16 La Chambre doit se convaincre que ce moyen de preuve qui peut vous être

17 présenté, est un moyen ou un élément de preuve qui nécessite un expert.

18 Les documents qu'on cherche à produire à travers ce témoin relèvent de

19 cette catégorie d'éléments de preuves pour lesquels les Juges, en tant que

20 juges des faits, ont besoin d'un expert.

21 Le processus, la procédure qu'est ce procès ne nécessite pas la

22 comparution de témoins experts qui viennent présenter leurs conclusions

23 sur toute une gamme de sujets qui sont, en fait, l'apanage des Juges.

24 Nous, nous avons soulevé cette question; nous avons demandé si ceci

25 constitue un sujet qui, véritablement, nécessite la déposition d'un

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1 expert, si l'on veut présenter des conclusions venant de ce témoin expert

2 à l'attention des Juges.

3 Il se peut que ce soit détaillé, que ce soit complexe, en ceci qu'il y a

4 beaucoup de documents. Mais quant à savoir si les Juges sont capables de

5 comprendre la nature de ce document, nous estimons que les Juges sont fort

6 à même de le faire, sont parfaitement capables de comprendre les arguments

7 qui leur sont soumis.

8 Examinons maintenant les documents eux-mêmes pour voir ce qu'on cherche à

9 vous présenter par l'intermédiaire de M. Torkildsen. L'accusation a déjà

10 fait allusion à l'annexe déposée le 16 décembre 2002 par les amis de la

11 Chambre, et c'est de ce document que je vais me servir car il précise

12 plusieurs points qu'il est possible de vous soumettre de cette façon-là.

13 M. le Président (interprétation): C'est le premier ou le deuxième rapport?

14 M. Kay (interprétation): Le deuxième.

15 Cette annexe cerne plusieurs questions d'ordre mineur, à mon avis, qui

16 sont reprises dans ce rapport. Nous avons présenté des observations sur ce

17 point; notamment à la page 5, paragraphe 9.

18 M. le Président (interprétation): C'est une question de poids à donner,

19 n'est-ce pas?

20 M. Kay (interprétation): Oui.

21 M. le Président (interprétation): Parce qu'il n'y a pas de référence

22 adéquate. Et puis, le point suivant, c'est un livre.

23 M. Kay (interprétation): Examinons la page 5, paragraphe 11, Annexe R1. Je

24 suis à la partie A de ce recueil d'objections.

25 Ici, nous avons des notes d'interviews, d'interrogations de quelqu'un qui

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1 est en puissance un témoin. Depuis le dépôt de ces écritures, l'accusation

2 a produit d'autres éléments de preuve dans lesquels le professeur

3 Ognjanovic a confirmé son interview. Malheureusement, ces détails

4 faisaient défaut dans les premières écritures. Mais ce qu'on cherche à

5 produire, c'est une interview ou un interrogatoire fait par M. Torkildsen

6 du professeur Ognjanovic. Ce n'est donc pas là un élément de preuve

7 observé ou recueilli par l'expert à partir de l'examen de documents, de

8 preuves documentaires. C'est, au contraire, un interrogatoire ou une

9 interview qu'il a mené lui-même, par lequel il va ensuite produire la

10 déclaration provenant de ce témoin potentiel.

11 Si on cherche à s'appuyer sur ce type de moyen de preuve, il serait bien

12 préférable et dans l'intérêt de la justice que ce professeur soit appelé à

13 la barre. De cette façon, l'accusé pourra l'interroger directement pour

14 savoir quel est son avis et quelles sont les allégations qu'il formule. Si

15 on utilise M. Torkildsen comme intermédiaire entre les deux, nous avons en

16 fait un mécanisme de blocage qui est installé.

17 Passons maintenant au point suivant de la partie 1, pages 6 à 15,

18 paragraphes 12 à 26 du rapport concernant le Kosovo.

19 C'est un extrait d'une transcription d'un enregistrement d'une

20 conversation, d'une interview avec Kertes, et aussi une transcription de

21 déclaration faite par Kertes. Ceci est produit par M. Torkildsen avec la

22 cote R2. Mais il n'y a, en fait, que des extraits de cette transcription

23 des conversations recueillies par le Bureau du Procureur.

24 Monsieur Torkildsen passe en revue des documents, en tire des extraits. Il

25 résume en fait ce que M. Kertes, un accusé en puissance lui-même -ou peut-

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1 être est-il même accusé-, ce que cet homme a dit; et il va produire ses

2 dires par le rapport que, lui, établit.

3 En annexe à ceci, nous avons les points R2-B, C et D et E. Ce sont quatre

4 déclarations préalables recueillies dans le cadre de procédures pénales

5 nationales intentées contre M. Kertes. Là, nous avons une autre catégorie

6 de documents par rapport aux documents précédents. Ce ne sont pas des

7 documents du Bureau du Procureur ou des documents relevant d'enquêtes

8 menées par le Bureau du Procureur. Une fois de plus, ce que M. Kertes dit

9 à ce propos: si ceci n'est introduit que par le biais de Torkildsen, cela

10 veut dire que l'accusé n'aura pas la possibilité d'interroger l'auteur des

11 déclarations sur lesquelles va se baser M. Torkildsen. C'est là aussi un

12 mécanisme de blocage, une entrave.

13 Nous abordons maintenant la question suivante: paragraphe 27, page 16,

14 "Les notes de déplacement de M. Kertes dans le contexte de ses arguments".

15 C'est une question d'ordre mineur, je ne vais pas m'attarder longtemps sur

16 ce point; je vais plutôt m'intéresser au principe qui est au cœur de ses

17 arguments puisque c'est là aussi le cœur de ces débats, sans doute.

18 Page 17 à 19: "Charges retenues dans un procès national contre M.

19 Milosevic au pénal". Il y a les déclarations qu'il a faites dans cette

20 procédure nationale le 1er avril 2001, déclarations recueillies le 2

21 avril. Ce sont des déclarations recueillies par d'autres personnes que

22 Torkildsen -j'ai dit "Torkildsen", je m'excuse: M. Torkildsen-,

23 déclarations qui concernent un procès intenté dans son pays contre

24 l'accusé, sur des questions qui ne sont pas à la base de ce procès-ci.

25 Monsieur Torkildsen passe en revue ces documents, les résume. Et nous,

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1 nous mettons en doute l'utilité que peut avoir un enquêteur financier qui

2 passe en revue ces documents, ces déclarations, et les résume.

3 M. le Président (interprétation): Excusez-moi de vous interrompre, mais

4 les déclarations, vous dites qu'elles peuvent être recevables en tant que

5 documents officiels d'un tribunal?

6 M. Kay (interprétation): Eventuellement. Sous cet angle-là, nous n'avons

7 pas vraiment étudié la question. Ici, pour le moment, nous voyons le rôle

8 que joue M. Torkildsen dans cette procédure, et nous mettons en cause

9 l'utilité qu'il peut y avoir à utiliser un expert qui se contente de

10 passer en revue et de résumer la teneur de ces déclarations.

11 Nous examinons maintenant la page 20, paragraphe 34; l'annexe suivante qui

12 porte la cote R5.

13 Nous avons des extraits de la déclaration faite par M. Zebic, ancien vice-

14 Premier ministre de la République fédérale de Yougoslavie, ministre

15 fédéral des Finances. Déclaration non signée, nous l'avons relevé. Est-ce

16 que la totalité de la déclaration est produite? Ce n'est pas clair. La

17 terminologie, la traduction de cette déclaration, s'il y en a eu une…, en

18 fait, il n'y a aucune confirmation par M. Zebic de ses dires.

19 Une fois de plus, M. Torkildsen remplit ce rôle, rôle essentiel et

20 central, dans la quintessence de nos arguments à l'intention des Juges. Ce

21 qu'il fait, c'est prendre des extraits, et il répercute ces morceaux de

22 déclaration dans son rapport; et ceci revient à empêcher l'accusé

23 d'aborder directement des questions avec l'auteur de ces déclarations. A

24 notre avis, ce n'est pas là véritablement la fonction que devrait avoir un

25 témoin expert.

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1 Nous revenons dans ce domaine que nous avons déjà exploré au moment du

2 volet "Kosovo" du procès. Nous avons reçu des résumés de déclarations

3 préalables à ce moment-là, rappelez-vous. Beaucoup de témoins, depuis,

4 sont passés à la barre. J'ai oublié le nom de l'officier qui avait fait

5 ces résumés. Manifestement, nous avons déjà abordé cette question. Je

6 pense que c'était M. Curtis, n'est-ce pas?

7 M. le Président (interprétation): Barney Kelly?

8 M. Kay (interprétation): Oui, Barney Kelly, mais aussi M. Curtis ont joué

9 ce rôle.

10 Dans le fond, c'est ce qui se passe de nouveau ici, par le truchement de

11 M. Torkildsen. Cette fois-ci, ce n'est pas présenté par une personne qu'on

12 présente comme étant un enquêteur, mais qu'on présente comme étant un

13 expert.

14 Ici, je ne veux pas parler de la question de savoir si un enquêteur peut

15 ou ne peut pas être un expert. Ce que j'indique à vous, Messieurs les

16 Juges, c'est qu'au fond, c'est ce qui se passe, s'agissant de ces

17 documents.

18 Avançons, si vous le voulez bien, pour passer à l'annexe suivante,

19 l'annexe R6, page 20, paragraphe 35.

20 Nous avons ici un interrogatoire de M. Sainovic; il était, avant, vice-

21 Premier ministre de la République fédérale de Yougoslavie. Ce sont des

22 documents qui proviennent du procès au pénal qui a été intenté contre lui

23 dans son pays, et qui proviennent de la déclaration qu'il a faite dans ce

24 contexte. Ce n'est pas là une déclaration recueillie par M. Torkildsen ou

25 par le Bureau du Procureur, comme ceci avait été le cas pour d'autres

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1 annexes que nous venons d'examiner. Ici, c'est M. Sainovic, et ce qu'il

2 déclare dans le cadre des poursuites intentées contre lui dans son pays.

3 Une fois de plus, ces moyens de preuves reprenant les dires de M. Sainovic

4 montrent que c'est une situation où il cherche à se protéger, lui; et il

5 ne sera que trop content de faire des déclarations qui ne sont pas exactes

6 à propos de quelqu'un d'autre. Je ne sais pas si c'est le cas ou pas, mais

7 c'est l'argument que je fais valoir.

8 Il est souvent préférable, si on veut s'appuyer sur des déclarations d'un

9 co-accusé, il est préférable d'avoir la présence de l'autre co-accusé pour

10 voir si ces deux hommes s'entendent, s'ils sont d'accord sur ce qui avait

11 été dit dans une déclaration à l'époque.

12 Et ici, si cette déclaration a été produite par M. Torkildsen, c'est

13 logique. Monsieur Torkildsen, tout ce qu'il pourra dire et, tout à fait

14 conformément à la vérité, ce qu'il pourra dire à M. Milosevic, il pourra

15 dire: "Voilà, c'est ce que ce M. Sainovic a dit". Et ceci aura pour effet

16 d'empêcher de bloquer M. Milosevic; il ne pourra jamais revenir sur ce

17 qu'a dit M. Sainovic sur la façon dont ce dernier voit les choses. C'est

18 la raison pour laquelle nous pensons que ce moyen de preuve n'est pas

19 véritablement quelque chose sur quoi un témoin peut déposer.

20 C'est, en règle générale, la base même d'un témoignage fait au procès,

21 témoignage que les Juges devraient pouvoir entendre et apprécier au moment

22 où il voit comment les témoins sont interrogés.

23 M. le Président (interprétation): Monsieur Kay, étant donné les limites de

24 temps que nous avons, pour ce qui est de ces éléments-là… Et si j'ai bien

25 compris, vous établissez une corrélation avec tout un nombre important

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1 d'autres témoins ou de déclarations de témoins dans ces interviews à cette

2 page-ci et à la page suivante des écritures. Ici, il est donc procédé à

3 une présentation d'éléments de preuve de deuxième main par le biais de

4 dépositions, et…

5 M. Kay (interprétation): Oui, en effet.

6 M. le Président (interprétation): …et si l'on voulait vérifier la chose,

7 il faudrait que le Bureau du Procureur cite à comparaître ces témoins-là.

8 M. Kay (interprétation): C'est précisément de cela qu'il s'agit. Cela

9 concerne Stanisic, Markovic, Borka Vukic, et ensuite Dusan Lalic, Mladen

10 Dinkic. Tous ceux-ci sont des responsables en Yougoslavie, des directeurs,

11 des directeurs de la Banque de Yougoslavie, et M. Slobodan Ras/Rasuo. Et

12 je pense que les Juges de cette Chambre disposent de notre calendrier sur

13 lequel se trouvent des observations particulières relatives à chacun de

14 ces hommes.

15 M. le Président (interprétation): Oui. Ensuite, on y trouve les arguments

16 que vous nous avez déjà présentés.

17 M. Kay (interprétation): Oui.

18 M. le Président (interprétation): Peut-être pourriez-vous en venir à la

19 partie B de vos écritures? Que pouvez-vous en dire? Quels sont vos

20 arguments bien entendu?

21 M. Kay (interprétation): Oui. La partie B donc, on y trouve les aspects

22 techniques de notre argumentation où il est fait état de l'absence de

23 notes en bas de page et de références.

24 Or dans un rapport d'expert habituel, l'accusé, s'il veut lui-même

25 recourir au service d'un expert nommé par lui, doit pouvoir vérifier les

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1 sources de telles argumentations. Et nous avons présenté un certain nombre

2 de détails au sujet de cette question. Je ne voudrais pas rentrer dans les

3 noms de personnes précises, cela nous prendrait trop de temps; nous allons

4 simplement nous référer au tableau.

5 Alors, nous avons les rapports de Mme Ljiljana Radenkovic notamment, ainsi

6 que des déclarations recueillies de la bouche de personnes travaillant au

7 Tribunal. Et nous voyons qu'un expert agit en temps qu'enquêteur chargé de

8 synthétiser les éléments de preuves.

9 Nous présentons un certain nombre d'arguments qui sont définis très

10 clairement et appuyés par des exemples; je vous renvoie par exemple à la

11 page 38, paragraphe 68, où nous voyons que l'expert fournit en fait des

12 conclusions qui relèveraient normalement de la compétence des Juges de la

13 Chambre de première instance, donc qu'il s'écarte de son rôle. Et ceci

14 semble être le cas à de très nombreuses reprises dans le courant du procès

15 sur lequel nous nous sommes penchés, et nous citons un certain nombre

16 d'exemples de ce genre.

17 Donc ce que nous avons fait dans la partie B de notre document, c'est

18 mettre le doigt sur un certain nombre de points au sujet desquels nous

19 disons: si tel ou tel document doit effectivement être placé sous les yeux

20 des Juges de la Chambre de première instance, il doit l'être selon les

21 modalités habituelles, donc dans le respect de la forme, et donc le

22 document doit être un peu nettoyé.

23 Je dis cela en ne voulant manquer de respect à personne. Simplement, le

24 document, s'il doit être présenté aux Juges doit, à notre avis, être

25 complet, de façon à ce que chacun puisse comprendre ce qu'il contient

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1 précisément et donc sur quelles sources M. Torkildsen appuie les

2 conclusions et les avis exprimés par lui. Et tout ceci apparaît très

3 clairement à la lecture du tableau, je le répète.

4 Prenons, par exemple, la page 33, paragraphe 60; c'est encore un de ces

5 exemples de références et de notes en bas de page qui ne sont pas fournies

6 par M. Torkildsen à l'appui d'un certain nombre de déclarations émanant de

7 lui, et sur lesquelles il s'appuie pour fournir aux Juges de la Chambre ce

8 qu'il est convenu de considérer comme une aide d'expert. Et puis nous

9 trouvons cette phrase -je cite-: " L'examen des dossiers bancaires révèle

10 que nombre de transactions menées par ces huit entreprises ont été

11 réalisées sur instruction de Mme Borka Vucic" (Fin de citation.)

12 Là encore, si cette action doit être prise en compte après lecture du

13 rapport, il faut que toute contestation ou remise en cause de ce qui est

14 dit ici devant la Chambre de première instance, puisse l'être sur la base

15 d'une description complète de la situation. C'est ce que nous disons. Et

16 ce genre de chose se reproduit très souvent.

17 Je pense qu'il serait ennuyeux que je vous donne tous les détails contenus

18 dans la partie B du document, mais je tiens à souligner certains points

19 donc contenus dans ce document. Est-ce que ceci est d'une quelconque aide

20 pour les Juges de la Chambre?

21 M. le Président (interprétation): Oui. Souhaitez-vous parler de l'autre

22 rapport?

23 M. Kay (interprétation): Là encore, il s'agit, pour l'essentiel, d'un

24 enquêteur qui résume et qui synthétise les éléments de preuve, donc les

25 questions qui se posent sont à peu près les mêmes.

Page 17216

1 La question consiste également à se demander si ces documents sont bien

2 ceux qu'il est opportun, pour un expert, de soumettre à une Chambre dans

3 cette forme. C'est à l'accusation de décider si elle veut utiliser ce

4 genre de document en tant qu'élément de preuve contre l'accusé.

5 Si tel est le choix de l'accusation, si l'accusation s'engage dans cette

6 voie qui consiste à traiter d'une question très délimitée, d'un domaine

7 très délimité, eh bien, dans ce cas l'accusation devra supporter les

8 conséquences de cette décision du point de vue du temps et de la façon de

9 procéder.

10 Les amici, pour leur part, ont eu le sentiment que ce que disait le

11 Procureur était notre avis, c'est qu'il convient de prendre en compte

12 l'essentiel des éléments de preuve.

13 Nous aimerions que les Juges de la Chambre tirent la conclusion qui est la

14 nôtre, les documents en question sont très volumineux et très nombreux.

15 Donc nous devrions soumettre aux Juges ce volume très important de

16 documents, et nous utilisons ce moyen pour atteindre notre objectif. Mais

17 ceci peut être, d'une certaine façon, non équitable pour l'accusé dans la

18 mesure où cela crée pour lui des contraintes de temps très importantes.

19 Si la question est importante pour l'accusation, elle l'est nécessairement

20 également pour l'accusé. Il en découle donc que l'accusé doit avoir le

21 droit de contester, si tel est son choix, l'ensemble des éléments

22 présentés par l'accusation en présentant sa thèse à lui et en présentant

23 ses arguments, de façon à ce que les Juges de la Chambre puissent avoir

24 une idée complète de la situation.

25 Mais recourir à ce genre d'éléments de preuve en les présentant comme le

Page 17217

1 fait le Procureur pour le moment, est une façon en fait d'empêcher

2 l'accusé de répondre spécifiquement à chacun des arguments de

3 l'accusation, car cet enquêteur, qui est présenté comme un expert, pourra

4 toujours déclarer: "Eh bien, voilà, c'est ce qu'a dit M. Sainovic, c'est

5 ce qu'a dit Mme Vukic. Etc.".

6 Et lorsqu'on multiplie ce genre de déclarations par ouï-dire -et nous en

7 avons huit à dix dossiers ici-, cela revient, d'après nous, à mener un

8 procès d'une façon tout à fait non satisfaisante en empêchant l'accusé de

9 rétorquer comme il devrait pouvoir le faire.

10 Maintenant, il appartient à l'accusation de décider si elle souhaite

11 s'appuyer sur ce genre de documents mais, de la même façon que pour

12 l'accusation ces documents sont importants -et l'accusation l'a dit-, ils

13 le sont par conséquent pour l'accusé. Mais les choses, s'agissant de

14 l'accusé, se présentent en sens inverse et le courant court en sens

15 inverse.

16 M. le Président (interprétation): Merci.

17 Monsieur Milosevic, vous avez la parole.

18 M. Milosevic (interprétation): Je pense qu'ici, comme dans bon nombre

19 d'autres situations, la partie adverse a mis les choses sens dessus

20 dessous. Ici, il ne s'agit pas de placer une documentation financière au

21 service de preuves à apporter pour une culpabilité qui n'existe pas. Mais,

22 ici, il s'agit d'une autre chose, il s'agit de semer la confusion de façon

23 délibérée.

24 Pour ce qui est donc de déterminer ce qui a été la politique économique

25 d'un pays d'une part -et ce, d'un pays qui a fonctionné dans des

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1 conditions de sanctions internationales- et autre chose ou d'autre part,

2 mesure de réalisation de cette politique, chose qui est réalisée par bon

3 nombre d'institutions de l'Etat.

4 Je vais citer M. Nice lui-même. La dernière fois, si mes souvenirs sont

5 bons, il a dit qu'il s'était efforcé de contourner le problème des

6 sanctions introduites à l'encontre de la Yougoslavie.

7 Et alors? Bien sûr que dans des circonstances de sanctions, qui ont en

8 fait été une forme de génocide en douceur des quelque 15 millions

9 d'habitants de la Yougoslavie, 1.200.000 habitants de la Republika Srpska,

10 quelque 300.000 habitants de la RSK, c'était un génocide en douceur, un

11 génocide dissimulé.

12 Dans ces circonstances-là, vous auriez pu déclarer que toute importation

13 et exportation étaient de la contrebande. Mais -et alors!- peut-être

14 n'est-il pas du devoir des organes de l'Etat qui se sont placés sous des

15 sanctions, mais peut-être fallait-il faire plaisir à M. Nice, et ceux qui

16 l'ont dirigé ici, qu'on laisse notre peuple crever de faim, qu'il n'y ait

17 pas de carburant, qu'il n'y ait rien d'autres et ainsi de suite?

18 Par conséquent, là, il y a une confusion que l'on essaie d'établir entre

19 ce que M. Nice évidemment ne sait pas ou ce que M. Torkildsen est peut-

20 être le seul à comprendre; et je ne pense pas pouvoir dire que c'est là la

21 seule personne qualifiée dans ce prétoire. Mais quelle est la politique

22 économique d'un pays dans des circonstances de sanctions économiques, et

23 quels sont, d'autre part, les mécanismes utilisés par les instances de

24 l'Etat pour utiliser telle ou telle politique?

25 Cette divergence, cette différence n'est pas visible, mais c'est de façon

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1 délibérée que l'on a installé une confusion. C'est mal intentionné d'une

2 part et -en partie- il y a ignorance complète concernant la matière du

3 côté de la partie adverse. Par conséquent, de là à savoir si la direction

4 d'un pays s'emploie en faveur de la solution de certains problèmes

5 économiques, c'est une chose.

6 Et maintenant, est-ce que ces problèmes sont résolus de façon objective et

7 concrète par ces institutions de l'Etat compétentes? C'est une autre

8 question.

9 Monsieur Nice vient de dire tout à l'heure qu'il a énuméré plusieurs

10 personnes. L'une de ces personnes est le ministre adjoint chargé de

11 l'Economie, l'autre un ministre des Finances. Le quatrième, c'est encore

12 un ministre. Le cinquième, c'est le directeur général des services des

13 douanes. Ce sont des fonctionnaires de l'Etat qui exercent leurs fonctions

14 dans des circonstances de sanctions économiques introduites à l'encontre

15 de la Yougoslavie.

16 Qu'est-ce qu'on dit encore? Il a été donné 100 millions de dinars pour

17 payer les soldats, les réservistes au Kosovo Metohija. Et alors? Mais tout

18 ceci porte sur les années 1994 et suivantes.

19 Puis, on dit également: "Il a été donné une quantité énorme de

20 médicaments, plusieurs centaines d'ambulances, plusieurs centaines de

21 tonnes de médicaments et de vivres". Donc on traite de la question et on

22 dit que des marchandises étaient échangées contre des marchandises.

23 Par exemple, à la page 837, on dit: "Le 30 avril 1997, la Direction

24 fédérale des douanes a fait un accord de compensation pour ce qui est des

25 fournisseurs du pétrole et des dérivés du pétrole, à l'intention de

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1 l'armée de Yougoslavie, ainsi que s'agissant de produits médicaux et de

2 vivres à l'intention de l'armée de la Yougoslavie".

3 Et alors? Voulez-vous, je vous prie, que la direction d'un pays dans le

4 cadre de sa politique économique, et nous avons la direction générale des

5 douanes, avec la direction des finances du gouvernement fédéral, qu'il

6 trouve les moyens pour aider l'armée de son propre pays? Et le fait

7 d'aider l'armée de notre propre pays de cette façon-là, c'est quelque

8 chose qui se trouverait être répréhensible et qui ne serait pas conforme à

9 la réglementation, en dépit des conditions de sanctions, et cela est

10 accumulé ici comme étant un élément de preuve d'importance.

11 Monsieur Kay vient d'ailleurs de dire qu'il y a une énorme quantité de

12 papiers. Et dans cette énorme quantité de papiers, j'aimerais que M.

13 Torkildsen trouve, parmi ces milliers de documents, un seul se rapportant

14 à des manipulations de ma part concernant des fonds, quels qu'ils soient,

15 qui appartiennent à l'Etat, à des privés, n'importe. Il s'agit ici donc,

16 d'une part, d'une politique économique qui a été conduite, et les moyens

17 ont été gérés par des instances compétentes de l'Etat.

18 Est-ce que cela s'est fait en fonction des lois? Certainement pas dans ces

19 circonstances de sanctions. Mais M. Torkildsen va vous expliquer au mieux

20 que, dans ces fonctionnements bancaires et financiers, ces transactions

21 financières, il y a toujours une trace; il n'y a pas de transaction qui ne

22 laisse pas de trace. Et personne n'est suffisamment fou pour donner de

23 l'argent moyennant… sans demander en échange une signature, un bordereau

24 qui démontrerait où l'argent est parti.

25 Et alors, si on a aidé l'armée? Et alors, si on a aidé la Republika Srpska

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1 et la RSK? Mais le Vatican a bien aidé la Croatie! Est-ce que la Turquie

2 et l'Arabie Saoudite et je ne sais combien d'autres pays, n'ont pas aidé

3 les Musulmans en Bosnie-Herzégovine, et ainsi de suite. Les Allemands ont

4 aidé les Croates, les Américains eux-mêmes les ont aidés. Et alors? Et

5 alors, si les Serbes ont aidé les Serbes? Où voyez-vous une logique à

6 cela? Mais nous serions les derniers des misérables si nous n'avions pas

7 aidé ce peuple-là, parce que ce peuple aurait crevé de faim pendant les

8 sanctions.

9 Alors, par conséquent, de quoi s'agit-il? De quels éléments de preuve est-

10 on en train de parler? Mais comme je n'ai pas du tout l'intention de

11 gaspiller ni mon temps, ni le temps de ceux qui sont là, ni de ceux qui

12 sont en train de regarder ce qui se passe ici… Je sais que vous allez

13 débattre des questions exclusivement à partir d'une position formellement

14 juridique, seule, et je crois que la documentation est tout à fait

15 inadéquate.

16 Mais comme M. Kay l'a souligné, je suis tout à fait d'accord avec lui pour

17 ce qui est de cette partie-là: tout ceci se fonde sur des déclarations de

18 personnes. Il a cité plusieurs noms de personnes; je ne vais pas répéter,

19 je ne vais pas gaspiller notre temps. Donc il a parlé de déclarations de

20 personnes auxquelles ces éléments de preuve se réfèrent; on ne saurait les

21 accepter, les verser avant que de faire en sorte que ces personnes-là

22 soient soumises à des contre-interrogatoires. Parce qu'ici, on ne sait

23 même pas comment ces déclarations ont été recueillies; est-ce qu'elles ont

24 été recueillies dans leur totalité? Ou plutôt, on sait que cela ne s'est

25 pas fait conformément à la réglementation gérant la chose et il faudrait

Page 17222

1 que l'on détermine les circonstances. Et si l'on s'appuie sur les dires de

2 qui que ce soit, celui qui a fait cette déclaration doit forcément être

3 soumis ici à un contre-interrogatoire, plutôt que de prendre cela tel

4 quel.

5 Et en dépit des efforts que j'ai déployés, je n'ai pas réussi à retrouver

6 dans ces documents-là quoi que ce soit qui serait à charge pour ce qui me

7 concerne, si l'on excepte le fait d'avoir conduit la politique économique

8 dans des circonstances de sanctions. Et je l'ai su bien mieux que

9 quiconque d'autre, parce qu'il est évident que nous avons réussi à

10 survivre dans ces circonstances de sanctions. Et le fait de savoir et de

11 voir comment nous avons conduit notre économie dans des circonstances de

12 sanctions, va être étudié par la suite comme exemple de défense exemplaire

13 à l'encontre de mesures de génocide dissimulées contre notre peuple.

14 Et vous allez voir, au travers de ces documents, que la majeure partie de

15 ces moyens a été dirigée vers l'assistance à des secteurs, à des domaines

16 de l'industrie, l'industrie textile, l'armée, bien sûr, la police, l'aide

17 à la RSK et à la RS. Mais, une fois de plus: et alors? Cela nous regarde,

18 comment nous allons dépenser notre argent!

19 Est-ce que l'un quelconque des documents qui a été présenté ici montrerait

20 qu'un centime a été placé au service de la perpétration d'un crime

21 déterminé? A moins que le souci du bien-être matériel, le souci afférent

22 au bien-être de l'industrie textile ou du secteur métallurgique ne soit

23 pas considéré comme étant un crime. Mais, comme nous avons connu des

24 difficultés, nous avons résisté à ces sanctions et nous avons réussi à

25 survivre. Ce sont là des choses qu'il faut tirer absolument au clair.

Page 17223

1 Aucune de ces déclarations de ces personnes ne saurait être versée avant

2 que ces personnes ne soient contre-interrogées et avant que nous ne

3 recevions un rapport final de M. Torkildsen. Et lorsque ceci sera fait, M.

4 Torkildsen devra lui-même venir ici s'asseoir sur ce siège et être contre-

5 interrogé.

6 C'est ce que je pourrai vous dire de plus bref sur le monceau de documents

7 que M. Nice a utilisés par ignorance complète. Parce que s'il savait quoi

8 que ce soit à ce sujet, il ne servirait certainement pas de documents de

9 cette sorte à cette Chambre.

10 M. le Président (interprétation): A quel moment les sanctions ont-elles

11 été imposées, Monsieur Milosevic? Vous en souvenez-vous?

12 M. Milosevic (interprétation): Les sanctions ont été introduites en 1992

13 déjà. Mais ces sanctions meurtrières et ce blocus complet -quand je dis

14 "complet", c'est qu'on a hermétiquement fermé les frontières-, cela a été

15 fait en 1993, après le rejet du plan Vance-Owen, quoique la Yougoslavie

16 s'était en grande mesure employée en faveur de l'acceptation de ce plan

17 Vance-Owen. C'est elle qui a été l'objet des sanctions, parce que la

18 Republika Srpska a rejeté le plan Vance-Owen en 1993.

19 Et en 1993, Monsieur May, puisque vous me posez la question de le savoir,

20 nous avons eu une inflation, une hyper-inflation en raison de ces

21 sanctions terrifiantes. Et cette hyper-inflation a été de quelques

22 centaines de millions par an. Nous avons, en 1994, réduit cette inflation

23 à zéro et nous avons mis en place une stabilité du dinar, avec quelques

24 petites hésitations jusqu'en l'an 2000. Cela entrera dans les annales de

25 la politique économique et des sciences politiques d'autres pays que la

Page 17224

1 Yougoslavie, le fait d'avoir réussi à le faire dans des circonstances

2 analogues. Mais ça, c'est un sujet à part, un sujet tout à fait distinct.

3 Je vous rends service, je réponds à cette question, quoique je ne sois pas

4 tenu de répondre à des questions tant que je ne serai pas assis sur

5 l'autre siège, là-bas. Mais donc, que vous le sachiez: en 1993, il a été

6 introduit des sanctions criminelles à l'encontre de mon pays.

7 M. le Président (interprétation): Je l'ai dit dès le début: vous n'avez

8 aucune obligation, en effet, de répondre à des questions. Mais parfois, il

9 peut être utile de faire la clarté sur un certain nombre de points au fur

10 et à mesure de l'avancée de l'affaire. Et si vous pouvez le faire, tant

11 mieux.

12 Monsieur Nice, vous avez la parole.

13 M. Nice (interprétation): Monsieur le Président, la position de la

14 situation de l'expert n'est guère différente de celle d'autres experts qui

15 apportent le même genre de témoignages.

16 Les experts qui témoignent dans des affaires commerciales ou criminelles

17 doivent évidemment soumettre leur savoir à l'examen d'une série de

18 documents qui, pour certains, sont lus rapidement -comme par exemple des

19 relevés bancaires, etc.- et, pour d'autres, doivent être compris de façon

20 plus approfondie avec remontée dans le temps par l'expert sur un certain

21 nombre de mois.

22 L'expert dont nous parlons est bien entendu un expert, car il a toute

23 compétence pour s'exprimer comme il le fait. Mais en tout état de cause,

24 comme nous l'expliquons dans nos écritures et dans d'autres documents

25 également, si je ne m'abuse, l'importance de ses connaissances peut être

Page 17225

1 très utile à la Chambre car c'est un expert qui aborde les choses de

2 façon… comme le ferait un intellectuel, donc il examine la globalité du

3 problème. Il a également des compétences universitaires aussi bien que

4 concrètes, et bien entendu, les experts doivent se pencher dans leurs

5 témoignages sur un éventail très diversifié de sujets et analyser en

6 particulier des documents, ce pourquoi ils doivent être compétents. Et

7 c'est exactement ce que fera ce témoin.

8 Quelques questions de détail à présent. L'interrogatoire d'Ognjanovic a

9 été fait par l'enquêteur Thore Soldal, ainsi qu'un autre enquêteur

10 financier; et il revêt la même forme que toutes les déclarations faites

11 devant le Tribunal.

12 J'aimerais maintenant un huis clos partiel de quelques instants.

13 (Huis clos partiel à 10 heures 08.)

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14 (Audience publique à 10 heures 11.)

15 Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique.

16 M. Nice (interprétation): Les déclarations de l'accusé hors du Tribunal

17 ont été la source qui a fourni le cadre, ou en tout cas partiellement le

18 cadre, que l'expert a pu examiner en rapport avec les documents pour voir

19 s'il y avait concordance entre les deux. C'est la raison pour laquelle les

20 deux éléments de cette source sont valables puisque le premier confirme le

21 second et vice-versa.

22 Les déclarations de Zebic ont été signées -nous en avons déjà parlé-, il

23 n'est pas question pour le témoin de synthétiser ces déclarations. Nous

24 avons dit que les documents sont tous disponibles pour les Juges dans leur

25 intégralité, donc n'ont aucun rapport avec une quelconque synthèse

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1 documentaire; mais ces documents pourraient révéler un certain nombre de

2 choses et également permettre de voir s'il y a concordance ou pas.

3 Et puis, la Chambre a entendu ce que mon collègue Kay a dit au sujet d'un

4 certain nombre d'autres témoins et de la recevabilité de leur déclaration

5 ou pas. Leurs noms apparaissent dans les petites cases qui sont dans le

6 tableau qui vous a été distribué. Je n'en parle pas parce qu'ils sont

7 particulièrement importants ou qu'ils ont joué un rôle particulièrement

8 critique dans l'affaire, mais simplement parce que, même si Zebic ne

9 figure pas dans ces personnalités, ils permettent d'accéder à des

10 documents qui peuvent être utiles pour établir la vérité.

11 Et bien sûr, il y a également des choses qui se font dans d'autres

12 systèmes judiciaires. Il faut toujours peser la valeur d'une déclaration

13 personnelle par rapport à l'intérêt que les Juges peuvent en tirer.

14 L'indice de fiabilité doit être apprécié par la Chambre.

15 En ce qui concerne Slobodan Raj, vous verrez que sa déclaration est

16 mentionnée dans le tableau. D'une certaine façon, on peut dire que c'est

17 une déclaration du TPIY dont il est fait état dans ce rapport déclaration,

18 "Déclaration TPIY MC2" pour être précis. C'est une déclaration, parce que

19 cette personne a été interrogée et que le résultat de cet interrogatoire a

20 été un document manuscrit qui relève de l'Article 89 du Règlement.

21 Avec le respect que nous devons à la Chambre, nous pensons qu'il est tout

22 à fait normal que l'expert ait à analyser ce document, il s'agit des

23 déclarations de M. Raj et de Mme Radenkovic.

24 La référence qu'a faite M. Kay à des experts mentionnés dans le document

25 de l'accusation date du 16 janvier de cette année.

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1 Et bien sûr, il y a des dossiers documentaires auxquels l'accusation fait

2 référence pour lesquels il y a des notes en bas de page, et d'autres pour

3 lesquels il n'y en a pas. Nous avons présenté une requête informelle au

4 sujet d'un certain nombre de documents.

5 Les droits de l'accusé de contester la thèse de l'accusation sont

6 absolument pleins et entiers: il a accès à tous les documents en question.

7 Et sur le fond, il n'est pas question de réduire le temps auquel il aurait

8 accès ou la possibilité d'entendre des témoins pour réfuter ce qui figure

9 dans les documents présentés par l'accusation.

10 Monsieur Kay déclare que les choses doivent se passer régulièrement. Bien

11 sûr, aucun tribunal, je pense, n'accepterait que l'on cite à la barre des

12 témoins dans le cadre d'une telle réfutation, car ce n'est pas nécessaire.

13 En l'absence de ces éléments de preuve, si l'on prend tel ou tel papier

14 dans cette masse documentaire, on se rend compte qu'un tel défaut

15 d'analyse de la part de l'accusation aurait été une défaillance dans son

16 travail, une négligence.

17 Les préoccupations de l'accusé ont été évoquées par M. Kay. L'accusé a

18 répondu en parlant d'une espèce de miracle économique ou de réforme

19 économique miraculeuse qui serait un signe de son grand talent économique.

20 Mais les choses ne doivent pas nécessairement être interprétées comme

21 signant le talent de l'accusé. Il existe des éléments de preuve qui seront

22 soumis à la Chambre, qui montrent que l'accusé était bien concerné au

23 premier chef par ce qui se passait et qu'il ne s'est pas contenté

24 d'utiliser le pouvoir qui était le sien au sommet de la chaîne économique.

25 Donc une analyse faite par un expert économique et financier, à notre

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1 avis, est un élément de preuve utile sur le fond.

2 L'accusé déclare qu'aucun document ne pourra prouver qu'il était au centre

3 du contrôle exercé sur l'argent. Peut-être en est-il ainsi des documents.

4 Mais les témoins qui seront entendus concordent entièrement avec l'analyse

5 de l'expert et permettent de prouver -pour être bref- que la thèse de

6 l'accusation est exacte aussi bien sur les documents que sur la réalité

7 des choses. Donc, l'expertise prouve que personne d'autre que l'accusé

8 n'avait le pouvoir d'ordonner le déplacement de l'argent selon des

9 modalités illicites d'un endroit à un autre.

10 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, pour les autres arguments que

11 nous avons entendus, nous y répondrons par écrit.

12 Monsieur Torkildsen, je pense, m'indiquera si j'ai manqué tel ou tel

13 argument. Mais avant de lui poser la question, je voudrais revenir un

14 instant sur la liste des témoins, car certains ont été inscrits par erreur

15 sur la liste en tant que témoins prioritaires alors qu'en fait, ils seront

16 entendus plus tard.

17 Un témoin, en revanche, doit être considéré comme prioritaire et n'est pas

18 indiqué comme prioritaire. Donc nous manquerions à tous nos devoirs si

19 nous ne disions pas aux Juges de la Chambre que cet expert de la situation

20 financière est, s'agissant de l'accusé et des organes du pouvoir, un

21 témoin susceptible de prouver qui était aux commandes dans la période

22 pertinente.

23 Très bien. Je vous remercie.

24 La déclaration de Raj est annexée. Elle n'est pas manuscrite,

25 contrairement à ce que j'ai dit tout à l'heure, mais tapée.

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1 M. le Président (interprétation): Très bien. La Chambre examinera les

2 arguments et rendra sa décision en temps utile.

3 M. Nice (interprétation): Maintenant, Monsieur le Président, j'aimerais

4 parler de quelques questions de procédure. Je pense que c'est important

5 car cela n'a pas été possible depuis Noël, pour diverses raisons.

6 D'abord, des observations générales, si vous me le permettez. Après quoi,

7 j'expliquerai le problème des tableaux. Je vois que les tableaux sont en

8 cours de distribution; j'espère qu'ils ne vous intéresseront pas dans

9 l'immédiat davantage que moi-même et les propos que je tiens à vous

10 soumettre pour expliquer clairement la situation.

11 Dans la conduite de la partie du procès incombant à l'accusation, nous

12 avons, pour ce qui nous concerne, deux principes fondamentaux: d'abord, le

13 principe selon lequel il nous appartient de prouver les accusations

14 retenues contre l'accusé et, deuxième principe, celui qui nous appelle à

15 faire tout ce qui est en notre pouvoir pour répondre au mieux aux

16 ordonnances de la Chambre.

17 Donc il serait tout à fait inopportun pour nous de laisser passer le temps

18 et puis de dire, à un certain moment: "Voilà, à présent nous avons besoin

19 de davantage de temps pour accomplir notre tâche". Ce serait façon tout à

20 fait inopportune de faire notre travail.

21 Mais depuis le début du procès, bien entendu, des limites de temps ont été

22 évoquées; elles nous ont toujours semblé un peu trop rigides. Nous savions

23 que la tâche serait difficile, et j'ai d'ailleurs évoqué le sujet devant

24 la Chambre régulièrement au fil du temps; la plupart du temps, d'ailleurs,

25 dans des écritures confidentielles.

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1 Mais j'aimerais aujourd'hui revenir en public sur ces questions. Nous

2 avons régulièrement proposé des réformes de la procédure et nous avons

3 alerté la Chambre quant à la difficulté qui serait la nôtre, sauf votre

4 respect, pour régler comme il se doit le problème de notre responsabilité

5 collective. En effet, nous devons gérer le temps qui est à notre

6 disposition, comme c'est le cas dans toutes les autres affaires jugées par

7 ce Tribunal. Mais la réalité, je pense, c'est qu'en temps utile il nous

8 faudra demander un délai supplémentaire.

9 Je ne présente pas une demande dans ce sens aujourd'hui-même pour une

10 raison très simple: en effet, il reste de ma responsabilité de faire

11 rentrer la présentation des éléments de preuve, autant que faire se peut,

12 dans le temps qui nous a été imparti. Mais il est donc possible que, dans

13 les jours qui viennent, certains exercices prennent moins de temps que

14 prévu. Il est possible que des témoins importants nous fassent savoir

15 qu'ils sont disponibles, ce qui permettrait de ne pas appeler à la barre

16 d'autres témoins et, donc, permettrait de gagner du temps. Mais je dois

17 dire que, dans un mois à peu près, je pense qu'il nous faudra demander un

18 délai supplémentaire.

19 M. le Président (interprétation): Je vous interromps, si vous me le

20 permettez.

21 Vous nous avez dit qu'un certain temps a été perdu en raison des maladies

22 de l'accusé. Je vous informe que, si cela peut vous être utile, d'après

23 les calculs réalisés par les Juges, il vous reste environ une trentaine de

24 jours, les jours perdus en raison de la maladie de l'accusé étant pris en

25 compte.

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1 M. Nice (interprétation): Monsieur le Président, nous avons effectué ce

2 calcul également et nous sommes arrivés à peu près au même résultat. Donc

3 je dois vous dire que nous aurons sans doute besoin de davantage de temps.

4 M. le Président (interprétation): Bien sûr.

5 M. Nice (interprétation): Monsieur le Président, j'ajouterai ce qui suit:

6 en plusieurs occasions, nous avons dit être très préoccupés par la

7 différence qui existe entre le fait d'apporter suffisamment d'arguments

8 juridiques à l'appui d'une thèse particulière, et le fait d'apporter aux

9 Juges un nombre suffisant d'éléments de preuve particulièrement

10 intéressants, susceptibles donc d'aider les Juges à se prononcer sur les

11 aspects absolument essentiels, de façon à ce que le jugement rendu le soit

12 en toute connaissance des aspects juridiques et en toute connaissance des

13 faits. Je reviendrai sur cette distinction un peu plus tard, lorsque nous

14 parlerons des tableaux.

15 Bien sûr -et je peux m'exprimer ainsi en une phrase, si vous me le

16 permettez, car je suppose que je suis assez bien placé pour le faire-,

17 j'ai été chargé de présenter la thèse de l'accusation contre une personne

18 qui est un ancien chef d'Etat dans une affaire où il est question de trois

19 guerres, et je me permets de vous rappeler que ceci est une tâche

20 particulièrement exigeante et passionnante.

21 En fait, je consacre la majeure partie de mon temps à interpréter un

22 certain nombre de choses qui me sont soumises aussi bien en anglais que

23 dans d'autres langues. La procédure est donc devenue un problème de

24 calendrier peu à peu, qui nous préoccupe de plus en plus, du côté de

25 l'accusation.

Page 17233

1 J'ai proposé à la Chambre diverses solutions pour gagner du temps; il nous

2 semble qu'aucune de ces solutions n'a réellement été bien accueillie par

3 la Chambre. Mais chacune de ces solutions proposées par l'accusation

4 était, en fait, une forme de concession pour cette dernière. Car dans

5 d'autres lieux, nous avons déjà dit -mais je peux le redire maintenant en

6 public- que la meilleure façon d'obtenir le maximum d'éléments de preuve

7 dans un temps aussi limité que possible, c'était d'admettre des pièces à

8 conviction sous forme écrite, comme le font bien sûr aujourd'hui un grand

9 nombre de systèmes judiciaires très évolués, sans parler des procès soumis

10 à un seul juge, par exemple; mais en tout cas dans des systèmes assez

11 semblables à celui qui nous intéresse ici. Nous avons donc fait ce genre

12 de propositions à plusieurs reprises et je reviendrai ici sur les mots

13 prononcés par M. le Juge May, lui-même, qui a dit qu'il y avait quelque

14 chose d'un petit peu démodé à cette pratique qui consiste à entendre des

15 témoins physiquement présents dans le prétoire et à contre interroger de

16 même.

17 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, j'aimerais à présent m'écarter

18 un petit peu de la comparaison qui ne cesse d'être établie entre la durée

19 des interrogatoires principaux et celle des contre-interrogatoires. Et là,

20 je ne parlerai pas d'un procès mais d'émissions de télévision que la

21 Chambre a d'ailleurs eu l'occasion de voir qui portaient sur l'ex-

22 Yougoslavie, où l'on voit donc quelqu'un exprimer un point de vue et,

23 quelque temps après, quelqu'un d'autre présenter un point de vue opposé.

24 Ici, dans ce prétoire, nous ne pouvons pas être aussi denses dans la

25 présentation des informations auxquelles nous faisons référence. Et, bien

Page 17234

1 sûr, ces émissions de télévision ne durent que quelques heures, "Vie et

2 mort de l'ex-Yougoslavie", quelques heures de plus que la plupart des

3 autres émissions. Mais, aux termes de ces émissions, chacun estime avoir

4 obtenu une description équilibrée de la situation.

5 Eh bien, sauf le respect que nous devons à cette Chambre, nous disons que

6 nous devrions avoir le temps d'en faire autant et que, pour ce faire, nous

7 devons tout de même disposer du temps nécessaire.

8 Le recours à des éléments de preuve écrits au principal serait une manière

9 de gagner du temps et une manière, pour l'accusé, de se concentrer sur ce

10 qui est réellement pertinent pour lui au cours du contre-interrogatoire.

11 De cette façon, la Chambre aurait pu disposer plus rapidement de tous les

12 éléments pertinents et importants dont elle dispose aujourd'hui, à l'issue

13 des interrogatoires principaux et des contre-interrogatoires.

14 Donc, un certain nombre de propositions, je le répète, ont été faites par

15 nous. Nous nous efforcions, de la sorte, de réduire la durée du procès; et

16 je pense que cela correspondait aux obligations qui sont les nôtres,

17 notamment après avoir entendu ces propos au sujet des procès et des

18 procédures pénales un peu démodées appliquées par les Etats-Unis ou par

19 l'Angleterre où il est possible, bien sûr, de faire valoir l'aspect

20 affectif et émotionnel d'un certain nombre d'arguments grâce à des effets

21 de manche et à d'autres effets.

22 Mais j'insiste sur la nécessité pour la Chambre de première instance, ici,

23 de bénéficier au maximum des éléments de preuve présentés dans un temps

24 aussi bref que possible. Donc, nous avons fonctionné dans ces conditions.

25 Nous pensons -je le répète- que la présentation principale d'éléments par

Page 17235

1 écrit pourrait permettre de gagner du temps, un contre-interrogatoire

2 ayant lieu pour permettre à l'accusé de faire valoir ses thèses. Ce serait

3 une manière d'optimiser et de maximiser l'utilisation du temps qui est

4 faite dans ce prétoire, tout en présentant l'ensemble des documents

5 nécessaires.

6 Monsieur le Président, avec le respect que nous devons à la Chambre, nous

7 disons que s'agissant de l'accusé il est tout à fait clair qu'il pourra

8 toujours procéder au contre-interrogatoire aussi longtemps qu'un témoin

9 témoignera physiquement dans le prétoire. Mais la solution que nous

10 proposons permet en fait de réduire le temps consacré à des témoins moins

11 importants pour augmenter le temps consacré aux témoins plus importants.

12 Les amici, pour leur part, n'ont proposé aucune méthode permettant aux

13 Juges de disposer d'un volume plus important de pièces à conviction dans

14 le temps alloué à ce procès. Apparemment, les amici préfèrent défendre les

15 droits à l'interrogatoire, notamment en ce qui concerne le contre-

16 interrogatoire. Et je pense que ce type de procès n'est pas celui auquel

17 il convient d'accorder la préférence ici.

18 J'aimerais, à présent, que nous jetions quelques instants un coup d'œil

19 sur les tableaux dont j'ai parlé tout à l'heure et que l'on place au

20 préalable ce tableau sur le rétroprojecteur.

21 M. le Président (interprétation): Pourquoi est-ce que le tableau doit être

22 placé sur le rétroprojecteur?

23 M. Nice (interprétation): Il sera plus visible.

24 M. le Président (interprétation): C'est une question qu'il nous appartient

25 de résoudre.

Page 17236

1 M. Nice (interprétation): Je pense qu'il est sans doute préférable de

2 commencer par le tableau dans le coin inférieur droit, parce qu'il

3 concerne ce qui est encore en souffrance pour la Bosnie. Vous savez, on

4 n'a pas encore commencé l'audition des témoins pour la Bosnie.

5 Nous avons calculé ce qui reste pour la Bosnie, à droite. Vous le saurez

6 après avoir pris connaissance de la liste fournie vendredi. Nous avons

7 réparti les témoins à ce stade de la procédure, et aussi bien sûr, à titre

8 provisoire, en deux catégories. La première catégorie qui nous semble

9 essentielle, c'est la priorité n°1, pour ainsi dire. Et l'autre catégorie,

10 c'est cette catégorie reprenant des témoins, dont je dis que, à notre

11 avis, ils pourraient présenter la totalité des thèses de l'accusation,

12 administrer la preuve totale.

13 Un exemple, je parle ici de négociateurs internationaux qui ont eu des

14 tractations avec l'accusé -et, si nous en avons le temps, nous aimerions

15 que la Chambre les entende-, ce sont des personnes haut placées sur le

16 plan militaire international. Ce serait certains de ces témoins que l'on

17 appelle "de priorité n°2".

18 A droite, nous avons le temps qui nous reste, d'après nos calculs. A

19 gauche, en bleu, vous avez les témoins prioritaires pour la Bosnie. Si

20 vous examinez maintenant le haut de la colonne en bleu, ici, nous avons

21 ajouté ces témoins qui présentent des bases factuelles, s'agissant des

22 infractions commises et qui sont nécessaires pour ce qui est de

23 l'application du 92bis B) ou D), et pour lesquels il y aurait un contre-

24 interrogatoire d'une heure pour chacun d'entre eux. Et puis, je vais

25 aborder les deux autres éléments repris dans cette colonne, mais,

Page 17237

1 auparavant, je vais vous dire jusqu'où nous sommes parvenus.

2 Il nous faut administrer la preuve des crimes. On ne peut pas simplement

3 établir une preuve en établissant des liens. Le volet "Bosnie" a commencé

4 par un nombre très important de municipalités. Et puis, vous voyez dans la

5 partie en bas, nous voyons 79 jours; y sont repris les témoins de viva

6 voce pour trois municipalités. Nous avons réduit le nombre de municipalité

7 en Bosnie à trois.

8 M. le Président (interprétation): Un instant, je pense que nous verrons à

9 la pause.

10 M. Nice (interprétation): Tout à fait.

11 M. le Président (interprétation): J'essaie de comprendre la situation en

12 matière de Bosnie, pour ce qui est de la Bosnie. Vous dites qu'il y a donc

13 trois municipalités, mais 79 journées d'audience?

14 M. Nice (interprétation): Oui, les autres sont des preuves par lien, nous

15 établissons un lien. Il y a des témoins qui vont comparaître pour

16 uniquement trois municipalités. Pour ce qui est des autres municipalités

17 que nous aimerions vous soumettre, c'est en application du 92bis B) ou D).

18 Et même si on se disait qu'on ne donnait qu'une heure pour le contre-

19 interrogatoire par témoin, cela nous donnerait environ 31 jours

20 d'audience.

21 Avant de poursuivre -je poursuivrai peut-être après la pause- j'aimerais

22 dire ceci: vous prenez n'importe quel exemple de ces cases, vous comptez

23 les cases rouges et vous verrez l'impact de ceci s'agissant du temps qui

24 nous est imparti.

25 J'aimerais dire ceci, avant que vous ne procédiez à un examen complet du

Page 17238

1 tableau. Si vous prenez le bloc avant le dernier à gauche, "Priorité n°2

2 pour la Bosnie", là, nous avons cette catégorie de témoins dont nous

3 pensons et nous n'avons eu de cesse de dire qu'ils seraient très utiles

4 pour avoir un tableau complet de la situation.

5 La dernière case représente la "Priorité n°5", nous en parlons dans notre

6 liste de témoins, et ce sont des témoins dont la Chambre a dit qu'elle

7 voulait, elle-même, les entendre. Il n'y en a pas beaucoup, il n'y en a

8 que 9 pour la Bosnie en ce moment, mais vous verrez qu'il y a d'autres

9 chiffres pour d'autres situations dans les autres tableaux.

10 M. le Président (interprétation): Après la pause, vous pourrez peut-être

11 nous aider sur ce point: Srebrenica, que voulez vous faire à propos de

12 Srebrenica, à propos de ces domaines?

13 M. Nice (interprétation): J'y reviendrai sans nul doute.

14 M. le Président (interprétation): Nous faisons maintenant une pause de 20

15 minutes.

16 (L'audience, suspendue à 10 heures 34, est reprise à 11 heures.)

17 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Nice.

18 M. Nice (interprétation): Nous examinons toujours le tableau concernant la

19 Bosnie. Avant de parler de Srebrenica et de Sarajevo, vous vous

20 souviendrez, Messieurs les Juges, que les charges au départ retenues

21 concernant l'accusé concernaient quelque 47 municipalités. Vu les

22 contraintes de temps, nous avons réduit ce nombre à 3, dont nous

23 apporterons la preuve en direct, mais par le truchement d'un nombre très

24 limité de témoins. A peu près une semaine de cinq journées chacun, pour

25 Zvornik, Bijeljina et Bratunac.

Page 17239

1 Et, dans le cadre du temps limité qui nous est imparti, nous voudrons vous

2 présenter certains documents d'une certaine étendue géographique. Nous

3 n'apporterons la preuve que de six autres municipalités en application du

4 92bis, Visegrad, Foca, Brcko, Bosanski Samac, Prijedor et Sanski Most.

5 Mais c'est là une réduction considérable, vu la taille prévue au départ!

6 Je reviens à ce tableau. Je sais que vous vouliez que ce tableau ne soit

7 pas communiqué au public. Dans l'exercice des fonctions qui incombent à

8 l'accusation envers la Chambre et envers la communauté internationale,

9 nous tenons à nous acquitter de notre devoir, c'est une contrainte qui

10 nous est imposée, et nous estimons dans ce cadre que ceci doit être

11 communiqué au public.

12 M. le Président (interprétation): Non, non, c'est une question qui nous

13 concerne, nous, Chambre de première instance, qui conduisons ce procès. Ce

14 n'est pas un exercice de relations publiques.

15 M. Nice (interprétation): Mais ce n'est pas ce que nous voulons faire.

16 Nous voulons, depuis le début, aider la Chambre en lui faisant part de nos

17 problèmes sans les divulguer au public, et nous persistons dans notre

18 volonté d'agir de la sorte. Mais le Procureur et l'accusation ne

19 s'intéressent pas à faire un exercice de relations publiques, elle tient

20 bien entendu à montrer qu'elle fait bien son travail.

21 Srebrenica et Sarajevo présentent un problème particulier. Ces deux lieux

22 ont, bien sûr, fait l'objet d'autres procès intentés contre d'autres

23 accusés. Un de ces procès est terminé. Un autre est en passe de se

24 terminer. et un de ces procès a duré énormément de temps; plus d'un an, je

25 pense.

Page 17240

1 A l'évidence, ce type de procès n'est manifestement pas possible dans le

2 contexte d'un procès tel que le nôtre. Il se peut aussi qu'il y ait

3 certaines parties de l'Acte d'accusation dressé contre cet accusé qui

4 nécessitent plus de témoins que moins, plus de moyens de preuve qu'il

5 faudra examiner séparément. Le tableau que vous avez sous les yeux le

6 révèle en effet. Nous avons préparé un nombre de preuves très limité, dont

7 nous pensons qu'elles suffiront pour l'administration juridique de la

8 preuve s'agissant de chacun de ces deux endroits. Mais même à partir d'une

9 base aussi limitée, Sarajevo devrait, d'après nos prévisions, occuper 20

10 journées, Srebrenica 21 journées.

11 Etant donné que, d'après nos calculs, il ne reste que 70 journées pour ce

12 qui est du temps consacré à la Bosnie, et étant donné que les témoins

13 prioritaires pour le reste du volet "Bosnie", à l'exception des témoins du

14 92bis, vont nécessiter 79 ou 80 journées d'audience, il est clair qu'il

15 est impossible de présenter tous ces points en ayant ce peu de temps

16 imparti. Je vous l'ai déjà expliqué, nous n'appliquons pas la totalité du

17 92bis sans contre-interrogatoire; il faudrait 30 journées de plus pour

18 l'appliquer dans sa totalité.

19 Voilà comment se présente la situation pour la Bosnie pour vous, Messieurs

20 les Juges. La situation est difficile, et ce n'est pas surprenant vu la

21 taille de ce volet qui est peut-être le volet le plus important des trois.

22 Je fais l'impossible ceci étant -je vous en dirai davantage dans un

23 instant- afin de réduire encore davantage ces 79 ou 80 journées

24 d'audience. Il se peut que les témoins ne soient pas disponibles, que

25 certains en disent plus que d'autres, ce qui voudrait dire qu'on pourrait

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1 ne pas citer d'autres témoins qui étaient prévus. Mais voilà comment se

2 présente le problème.

3 Je reviens maintenant aux modalités que nous avons utilisées et vous

4 verrez que nous essayons de calculer ceci au plus près. Nous vous avons

5 présenté les modalités de calcul dans un document confidentiel. Les

6 ordonnances de la Chambre limitent le temps d'audience et le nombre de

7 témoins, et précisent le temps pour chaque volet.

8 Pour le Kosovo, lorsque nous avons terminé dans les temps, vous savez

9 qu'il y avait encore des documents qu'il nous fallait présenter.

10 Voici comment nous avons analysé les choses: il faut encore 11 journées

11 d'audience pour les témoins de la catégorie n°1, de priorité n°1, quelques

12 jours pour les témoins dont la Chambre voulait que nous les citions, et

13 environ 7 journées pour les témoins qui, si tout était idéal, devraient

14 être cités sur injonction de la Chambre.

15 Je l'ai déjà dit et je le répète: tous les moyens à charge concernant le

16 Kosovo, au principal, ont occupé environ cinq semaines; cinq semaines qui

17 seraient des semaines d'un procès national devant un tribunal national. Et

18 nous vous exhortons à nous croire, nous faisons l'impossible pour

19 respecter vos ordonnances et pour vous présenter nos thèses dans le cadre

20 d'une procédure pratiquement de commun law pour ce qui est de

21 l'interrogatoire principal en cinq semaines. Et c'est là quelque chose de

22 très rapide, vous le savez, Monsieur le Président. Lorsqu'on a des cas de

23 fraude dans un contexte national ou des problèmes de douane, ça prend

24 quelques semaines ou même des mois, que ce soit au Royaume-Uni ou dans des

25 pays du même système. Or nous n'avons utilisé que cinq semaines pour le

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1 Kosovo.

2 Pour la Croatie, d'après nos calculs, il nous reste encore une dizaine de

3 journées.

4 M. le Président (interprétation): Votre aide pour les calculs de journée,

5 ça, ce sont les périodes prévues au départ, et puis ce qui vous semble

6 vous revenir à cause de la maladie de l'accusé?

7 M. Nice (interprétation): Oui. Vous le saurez grâce à nos écritures

8 déposées de façon confidentielle. En application de vos ordonnances, nous

9 vous disons ceci: nous avons pris le temps autorisé comme nous l'avions

10 calculé. Vous vous rappelez, nous n'avions pas, à ce moment-là, tenu

11 compte de l'état de santé de l'accusé. Et puis, nous avons pris le temps

12 que vous nous impartissiez pour chaque volet, pour voir ce qui vous aurait

13 semblé approprié comme ajout supplémentaire. Et nous avons donc prévu un

14 temps pour le Kosovo, pour la Bosnie; et nous avons fait des déductions

15 nous faisant comprendre bien sûr qu'il n'y avait pas de journées

16 disponibles pour le Kosovo. Pour la Croatie, il reste 10 jours à partir

17 d'aujourd'hui. Et il y a 70 journées qui nous restent pour la Bosnie.

18 Permettez-moi, Messieurs les Juges, de vous exhorter à accepter ce plan.

19 Je pense que l'accusation s'en est bien sortie, vu le conflit qui est très

20 difficile et très important en Croatie. Nous avons encore 22 journées pour

21 les témoins prioritaires, cela représente 10 journées de plus, mais il

22 faudrait 16 journées si les témoins en application du 92bis doivent faire

23 l'objet d'un interrogatoire d'une heure; ce qui semblait être l'intention

24 générale des Juges.

25 Mais nous nous permettons de rappeler aux Juges que, au moment du volet

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1 "Kosovo", ils avaient fait comprendre clairement que d'autres

2 considérations pourraient intervenir pour ce qui est du contre-

3 interrogatoire de témoins factuels en Croatie et en Bosnie vu ce qui

4 c'était passé au Kosovo. Puisque, au Kosovo, l'accusé avait une thèse

5 différente: il évoquait les bombardements de l'OTAN au Kosovo, ce qui

6 manifestement ne saurait être le cas en Bosnie et en Croatie. La Chambre

7 avait dit explicitement qu'elle se réservait de changer d'avis pour

8 déterminer si le 92bis permettait un contre-interrogatoire ou pas.

9 Ce que nous avons fait manifestement, c'est préparer un tableau complet

10 d'après les meilleurs calculs que nous pouvions faire jusqu'à ce jour. Ce

11 qui nous donne 80 jours restants pour tous les volets du procès, 113 jours

12 de témoins prioritaires n°1, encore 41 jours pour Srebrenica et Sarajevo,

13 et 49 jours de plus pour les témoins en application du 92bis si ceux-ci

14 vont faire l'objet d'un contre-interrogatoire.

15 Outre ces chiffres, nous prévoyons quatre journées de témoignage de

16 témoins prioritaires n°5. Il s'agit là de témoins que la Chambre voudrait

17 nous voir citer. Nous avons également relevé 33 jours supplémentaires qui

18 relèvent de témoins prioritaires n°2; pour dresser un tableau complet de

19 notre thèse.

20 Nous nous trouvons manifestement dans une situation difficile -je le

21 répète, je pense, pour la troisième fois-; nous essayons de poursuivre les

22 réductions et il se peut que nous soyons en mesure de réduire davantage.

23 Par exemple, je peux vous dire, Messieurs les Juges, qu'aujourd'hui -du

24 moins je l'espère- vous allez être saisi de deux requêtes: une requête

25 publique, une autre confidentielle, consistant à citer à comparaître des

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1 témoins qui vont donner des éléments absolument centraux, essentiels, qui

2 ne sont pas des témoins de personnalité; et ils nous permettraient de

3 gagner du temps. Jusqu'à présent, ces témoins n'étaient pas disponibles,

4 nous souhaiterions les ajouter à la liste. Je devrais en citer un

5 publiquement à la fin, parce que je pense que ceci aidera l'accusé.

6 Nous ne cessons de poursuivre ces efforts, mais la Chambre sait que

7 lorsqu'on a un procès public -comme c'est le cas ici- ceci a plusieurs

8 conséquences. Maintenant, que les témoins ont eu le courage de témoigner,

9 il y en a de plus en plus maintenant qui sont prêts à venir à la barre et

10 nous aident à mieux comprendre la situation, nous aurons ainsi un jugement

11 de meilleure qualité.

12 Nous allons gagner du temps et nous avons des témoins qui sont prêts

13 maintenant à venir témoigner à la suite de ce qui s'est passé ces

14 dernières semaines. Certains de ces témoins sont absolument capitaux. Ceci

15 explique partiellement ce qu'il en est. Je ne vais pas vous demander,

16 maintenant, de statuer par voie de requête, nous allons voir comment nous

17 avançons, mais je vous demande de tenir compte de ceci.

18 Soit dit entre parenthèses, vous vous souvenez, Messieurs les Juges, que

19 je vous avais fourni des documents, ce que nous appelons des "documents

20 d'ajouts", qui nous permettent de faire le point. La Chambre verra si nous

21 nous sommes acquittés de cette charge de la preuve face à ces chefs

22 d'accusation.

23 M. le Président (interprétation): Nous vous encouragerions à présenter ce

24 genre de documents.

25 M. Nice (interprétation): La Chambre sait que j'avais offert de présenter

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1 ce document au cas où la Chambre souhaiterait examiner ces témoins. Je

2 suis conscient des problèmes, mais nous aimerions demander à la Chambre

3 d'envisager cette possibilité tôt ou tard. En l'état, nous avons préparé

4 des listes, j'espère que vous avez eu l'occasion de les examiner; j'en

5 dirai plus dans un instant. Nous, nous avons préparé ces listes à partir

6 des témoignages fournis de façon conventionnelle. Nous pensons que c'est

7 là la base que nous allons utiliser. Donc, vous avez les estimations de

8 temps à partir de cette modalité conventionnelle de déposition, avec le

9 temps prévu, et la Chambre pourra voir si ce sont des témoins…

10 M. le Président (interprétation): Nous aimerions comprendre. Si le 92bis

11 continue à être appliqué, vous nous demandez d'appliquer cette Règle à

12 tous les témoins?

13 M. Nice (interprétation): Oui. Sauf dans des circonstances absolument

14 exceptionnelles.

15 M. le Président (interprétation): Et sauf là où ceci ne s'applique pas, ce

16 serait pour les actes et comportements de l'accusé?

17 M. Nice (interprétation): Oui, car ceci a une incidence sur la durée

18 totale du procès. Et aussi parce que le 92bis a été introduit dans le

19 Règlement pour permettre ces modalités de déposition.

20 M. le Président (interprétation): Mais nous leur accorderions le même

21 traitement que celui réservé aux deux témoins de Dubrovnik la semaine

22 dernière, où ça s'est effectivement passé? Ils ont subi un contre-

23 interrogatoire; je parle du général Mangan et de M. Davies.

24 M. Nice (interprétation): Je crois que là, c'est un peu un dialogue de

25 sourds. Ici, nous demandons le traitement complet du 92bis pour les

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1 témoins factuels, les bases de crimes.

2 M. le Président (interprétation): Oui, je comprends. Mais pour les autres

3 témoins?

4 M. Nice (interprétation): Donc application totale du 92bis. Il suffit de

5 voir le tableau des témoignages pour comprendre que les témoins du 92bis

6 concernent un nombre limité de municipalités –six, en l'occurrence- où il

7 n'y aura pas administration de la preuve de viva voce. Et puis, il y a

8 encore, pour la Croatie, pour la base des crimes… en application du 92bis,

9 49 des 81 journées prévues seraient utilisées.

10 M. le Président (interprétation): Excusez-moi, je vous ai interrompu.

11 M. Nice (interprétation): Pas du tout. J'étais prêt à vous laisser, à

12 vous, le soin de décider quels seraient les témoins concernés, davantage

13 que moi, parce que je pense que c'est la marche à suivre dans une

14 procédure de ce type. Parce qu'en plus de l'aspect "procès", il y a

15 l'aspect "enquête", "instruction".

16 Mais je vous suggère ceci: je pense que le moment est venu pour la Chambre

17 de ne pas envisager une limite de temps, mais plutôt une limite en

18 fonction du nombre de témoins. Je pense que, dès lors, il est important

19 que la Chambre sache quels sont les témoins qui sont les plus essentiels.

20 Lorsque la Chambre a rendu son ordonnance en matière de limite temporelle,

21 elle n'était pas en mesure de prévoir dans quelle mesure l'accusé allait

22 optimiser le temps qu'il a au niveau du contre-interrogatoire. En tout

23 état de cause, la Chambre n'a pas pu, à ce moment-là, saisir pleinement…

24 Et que ce soit pour le raisonnement débouchant sur la limite temporelle ou

25 la limite en matière de témoins, peu importe. Il y avait certaines

Page 17247

1 contraintes qui avaient été posées mais, maintenant, elles ne peuvent plus

2 s'appliquer.

3 Notre principe n°1, c'est qu'il faut administrer la preuve; d'où ces

4 priorités. Deuxième principe: il faut faire l'impossible pour se conformer

5 à toutes les ordonnances de la Chambre.

6 M. le Président (interprétation): Nous avions fait des propositions pour

7 ce qui est de la réduction de la portée des charges et pour ce qui est de

8 la taille des Actes d'accusation. Comment l'avez-vous fait?

9 M. Nice (interprétation): Mais, regardez, on est passé de 47 municipalités

10 à 3; on a maintenant uniquement 6 municipalités couvertes par le 92bis,

11 alors que la taille du territoire est considérable en Bosnie. C'est une

12 énorme réduction.

13 M. le Président (interprétation): Est-ce que ceci va se refléter dans

14 l'Acte d'accusation?

15 M. Nice (interprétation): Il y a des chefs qui ne seront pas couverts,

16 mais il y en a d'autres qui le seront dans le détail.

17 M. le Président (interprétation): Ce serait utile d'avoir un Acte

18 d'accusation révisé ou ajusté, de façon à savoir où nous en sommes.

19 M. Nice (interprétation): Ce sera fait.

20 Rappelez-vous, Monsieur le Président, nous avons réduit les charge en

21 matière de violences sexuelles en Croatie; nous avons abandonné plusieurs

22 chefs à cet égard. Mais, pour autant que nos calculs soient plus ou moins

23 justes -nous avons fait de notre mieux pour établir ces calculs à partir

24 des documents disponibles-, je crois que nous respectons assez bien les

25 délais en Croatie, comme nous l'avons fait d'ailleurs pour le Kosovo.

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1 On pourrait dire que l'imposition des délais de temps nous a aidés,

2 puisque nous avons ainsi été obligés de vous présenter les documents dans

3 les temps. Mais s'agissant de ce dernier volet, apparemment, le problème

4 est trop considérable pour être résolu uniquement par nos efforts; surtout

5 le temps considérable qu'il faudra consacrer à Srebrenica et à Sarajevo.

6 Les allégations sont de telle nature qu'il n'est possible de les aborder

7 et de les régler que par une procédure complète.

8 Est-ce que le temps n'est pas venu… -je m'interroge et je suis prêt à me

9 débattre avec le temps pour essayer de le maîtriser du mieux que je peux-,

10 est-ce que le moment n'est pas venu, dans la suite du procès, de se fonder

11 davantage sur la nature des témoignages que sur les contraintes de temps

12 ou les délais? Et, soit dit entre parenthèses, c'est la raison pour

13 laquelle je vous ai présenté cette liste. Ce genre de listes est toujours

14 provisoire, bien entendu; et je suis extrêmement reconnaissant à toute mon

15 équipe qui a aidé à les élaborer. Mais celle-ci est un document excellent

16 qui nous permet de voir où nous allons. Bien sûr, elle sera modifiée, on

17 va retirer certains noms, on va en ajouter. Elle sera mise à jour, mais

18 c'est un bon document de travail qui montre la voie que nous allons

19 suivre. Elle permettra à la Chambre de prendre les devants et de voir

20 quels seront les témoins qui vont comparaître, et dire: "Bon, est-ce que

21 ce témoin va vraiment ajouter quelque chose à quelque chose qui a déjà été

22 prouvé? Voyons ce qui a été déjà été prouvé; est-ce que ceci ne fait pas

23 doublon?".

24 Et si vous faites signe –quelquefois, c'est préférable à quelque chose qui

25 est dit-, nous verrons ce qu'il en est, nous laisserons tomber tel ou tel

Page 17249

1 témoin.

2 La dernière chose que nous voulons, c'est nous trouver dans une situation

3 où nous serions en désaccord absolument irréconciliable avec la Chambre,

4 pour ce qui est de ce dernier volet.

5 Si nous prenons cette liste, nous pourrons apporter la preuve de tous les

6 chefs d'accusation dans les temps sans porter préjudice à l'accusé, mais

7 aussi sans porter préjudice à l'accusation.

8 M. le Président (interprétation): Je vous remercie, Monsieur Nice. Nous

9 allons étudier la question à la lumière de ce document. Il ne fait pas

10 l'ombre d'un doute que les contraintes de temps resteront en place, mais

11 nous tiendrons compte des difficultés esquissées maintenant par

12 l'accusation. Nous verrons s'il est utile d'apporter une modification à

13 nos procédures, si de telles modifications deviennent nécessaires. Mais,

14 de toute façon, vu l'absence du Juge Robinson, nous ne pourrons pas

15 statuer; il aura cependant l'occasion de prendre connaissance de tout

16 ceci.

17 M. Nice (interprétation): Avant d'en terminer puisque c'est Mme Uertz-

18 Retzlaff qui va interroger le prochain témoin, je vous avais dit que

19 j'allais mentionner un témoin en particulier. Nous aimerions citer un

20 témoin dès mardi prochain, il a des problèmes d'horaires. Nous n'avons pas

21 encore pu faire une requête dans ce sens. Il ne se trouve pas dans la

22 liste et cette requête n'a pas pu être déposée aujourd'hui, parce que ce

23 témoin n'a pas encore le feu vert de ses autorités. C'est seulement

24 maintenant qu'il est autorisé à le faire. C'est un ancien ambassadeur en

25 Croatie, il s'appelle Peter Galbraith; vous avez déjà vu son nom dans le

Page 17250

1 compte rendu d'audience. Il est très utile. Nous devrions pouvoir vous

2 fournir son résumé aujourd'hui.

3 J'espère pouvoir m'acquitter de toutes les autres obligations qui sont les

4 miennes en matière de communication, aujourd'hui ou demain. Je ne vous

5 demande pas de trancher aujourd'hui, puisque vous ne sauriez le faire en

6 l'absence du Juge Robinson et sans avoir un document écrit sous les yeux

7 pour ce faire, mais je vous informe le plus tôt possible et j'informe

8 l'accusé le plus tôt possible. Je prévois qu'une demande écrite sera

9 déposée aujourd'hui.

10 Et nous vous demandons de lever toutes les contraintes en matière de

11 logistique afin qu'il puisse comparaître mardi. Cette requête sera déposée

12 en même temps qu'une autre requête concernant un témoin, un autre témoin

13 très important, pour l'octroi d'un pseudonyme. Nous espérons ainsi gagner

14 du temps.

15 M. le Président (interprétation): Fort bien.

16 Oui, Monsieur Milosevic, nous n'avons pas à vous demander de commentaires

17 sur la façon dont l'accusation mène la présentation de ses témoins, c'est

18 un problème qui concerne l'accusation, pas vous. Et nous ne serons saisis

19 d'aucune requête concernant des témoins. Nous allons obtenir tout ceci par

20 écrit, et nous vous demanderons votre avis en temps utile.

21 Oui, Madame Uertz-Retzlaff?

22 Non, Monsieur Milosevic, il n'y a rien de pertinent que vous êtes en

23 mesure de dire pour le moment.

24 M. Milosevic (interprétation): Mais si, j'ai quelque chose de pertinent à

25 dire. Il ne s'agit pas de technique de présentation d'éléments de preuves

Page 17251

1 ou de soi-disant éléments de preuve, mais il s'agit de positions de

2 principe et d'affirmations absurdes que nous avons entendues ici; et

3 j'imagine que je dois avoir le droit de réagir à cela.

4 M. le Président (interprétation): Non, non, c'est une question qu'il

5 appartient à l'accusation d'aborder. C'est une question qui concerne la

6 Chambre et l'accusation sur la façon dont l'accusation présente ses

7 témoins. S'il y a des modifications de procédure qui sont proposées, si

8 par exemple on entend les témoins sous forme de déclaration avant de

9 statuer sur une telle question, bien sûr vous aurez le loisir de nous

10 présenter vos arguments.

11 Mais, pour le moment, nous ne sommes pas en mesure de prendre une telle

12 décision, une telle décision n'a pas encore été prise par nous. Il n'y a

13 pas encore de requête déposée en ce sens dont les Juges seraient saisis,

14 et pour laquelle nous devrions vous demander votre avis. Mais si, à un

15 moment donné, nous avons l'intention d'étudier l'un quelconque des

16 suggestions faites par l'accusation qui aurait une incidence sur les

17 modalités de déposition, bien sûr, nous vous demanderons votre avis.

18 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, mais auriez-vous au moins

19 l'amabilité de me fournir alors une explication?

20 M. le Président (interprétation): Ça dépend laquelle.

21 M. Milosevic (interprétation): Eh bien, nous avons entendu M. Nice, il a

22 dit que, ici, il y avait une tâche collective qui consistait à prouver les

23 allégations de l'Acte d'accusation. Moi, je croyais que le devoir de tout

24 tribunal légal dans le monde était de prouver ce qu'était la vérité. Et,

25 s'agissant des positions prises par ce soi-disant Bureau du Procureur,

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1 elles devraient le contraindre à déterminer la vérité et non pas à prouver

2 les allégations figurant à l'Acte d'accusation.

3 Nous avons entendu bon nombre d'absurdités. Monsieur Nice a même dit, tout

4 à l'heure, que les sanctions de la communauté internationale nous

5 avantageaient; et cela peut être comparé aux allégations disant que la

6 Yougoslavie a perpétré une agression contre soi-même.

7 (Interruption du Président.)

8 M. le Président (interprétation): Le temps est compté. Si c'était une

9 question générale, une question que nous allions examiner et qui aurait

10 une incidence sur votre situation, bien sûr, nous vous donnerions la

11 parole. Mais, pour le moment, nous allons poursuivre les auditions de

12 témoins. Le temps est compté, je le répète.

13 Ce sera M. Grujic, Madame Uertz-Retzlaff?

14 Non, Monsieur Milosevic. Non, Monsieur Milosevic, vous essayez de faire

15 des discours.

16 Faites entrer M. Grujic.

17 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, ce n'est pas un discours que

18 je fais. Je fais référence au contexte qu'il nous a été donné d'entendre

19 s'agissant des écritures présentées par la partie adverse, et dont le

20 volume est important pour ce qui est de prendre en considération les faits

21 qui ont déjà fait l'objet de décisions. Ce qui…

22 M. le Président (interprétation): Non, nous n'allons pas trancher là-

23 dessus aujourd'hui, ni d'ailleurs plus tard, sans vous entendre, avant de

24 déclarer recevable tel ou tel moyen de preuve. Vous aurez l'occasion de

25 vous adresser à nous. Et je peux vous dire que, pour le moment, nous

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1 allons poursuivre les éléments de preuve concernant la Croatie. Nous avons

2 d'abord tous les témoins en application du 92 bis, avant de passer aux

3 faits qui ont fait l'objet d'un accord.

4 Oui, faisons entrer le témoin.

5 (Le témoin, M. Ivan Grujic, est introduit dans le prétoire.)

6 M. le Président (interprétation): Je vais demander au témoin de donner

7 lecture de la déclaration solennelle.

8 M. Grujic (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la

9 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

10 M. le Président (interprétation): Merci, Monsieur. Veuillez vous asseoir.

11 (Le témoin s'assoit.)

12 (Interrogatoire principal du témoin, M. Ivan Grujic, par Mme Uertz-

13 Retzlaff.)

14 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur Grujic, veuillez décliner

15 votre identité et nous indiquer quelle est votre profession, à l'intention

16 du dossier de l'audience.

17 M. Grujic (interprétation): Je n'ai pas la traduction.

18 (Intervention de l'huissier.)

19 Question: Vous m'entendez maintenant?

20 Réponse: Oui. Maintenant, je vous entends.

21 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Veuillez décliner votre identité et

22 nous dire quelle est votre profession.

23 M. Grujic (interprétation): Non, je n'ai pas de traduction.

24 (Intervention de l'huissier.)

25 M. le Président (interprétation): Essayons une fois de plus. Madame Uertz-

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1 Retzlaff, veuillez répéter la question.

2 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Vous m'entendez maintenant? Vous

3 m'entendez?

4 M. Grujic (interprétation): Très mal.

5 M. le Président (interprétation): En quoi réside le problème?

6 (Intervention de l'huissier.)

7 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Vous m'entendez, maintenant, Monsieur

8 Grujic?

9 M. Grujic (interprétation): Maintenant, ça va.

10 Question: Monsieur, veuillez nous donner votre nom et votre profession.

11 Réponse: Je m'appelle Ivan Grujic, et je travaille à présent en fonction

12 de directeur du gouvernement d'un département, auprès du Gouvernement

13 croate, chargé des personnes détenues et des personnes disparues.

14 Question: En votre qualité de chef de ce bureau, est-ce que vous avez

15 préparé un rapport d'expert portant sur les personnes portées disparues,

16 les personnes déplacées et les personnes tuées en République de Croatie

17 pendant la guerre, au cours des années 1990-1992?

18 Réponse: Oui.

19 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): L'accusation demande le versement de

20 ce rapport d'expert et de ces annexes en tant que pièce à conviction.

21 (Intervention de l'huissier.)

22 Ce rapport d'expert a été déposé le 5 février 2003. Et il y avait quelques

23 annexes consacrées aux activités de ce bureau. Mais, en sus de cela, le

24 témoin a préparé des tableaux portant sur toutes les questions abordées

25 dans ces rapports. Il y a des chiffres contenus dans ces rapports qui sont

Page 17255

1 repris dans ces tableaux que nous avons placés dans des classeurs.

2 M. le Président (interprétation): Est-ce que ce sont ces classeurs que

3 nous venons de recevoir?

4 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Dans le classeur n°1, il y a ces

5 tableaux préparés par le témoin et son bureau. Il y a aussi l'annexe à

6 l'Acte d'accusation consacré à la Croatie dans le classeur 1; ce sont les

7 personnes tuées par lieu d'infraction, et les conclusions tirées par M.

8 Grujic par rapport à cette annexe. En d'autres termes, il a annoté les

9 annexes.

10 En plus de cela, nous avons préparé les documents à la base de tout ceci,

11 à savoir les questionnaires concernant les personnes portées disparues et

12 les rapports d'exhumations. Ceci est repris dans les classeurs 2 à 10,

13 avec une section séparée pour chaque lieu d'infraction.

14 M. le Président (interprétation): Est-ce qu'on ne pourrait pas s'y prendre

15 comme ceci: nous allons donner une cote au rapport d'expert avec ses

16 annexes? Le premier classeur recevra une cote distincte. Quant aux autres

17 classeurs, il serait peut-être préférable de leur donner le même

18 traitement que celui donné au classeur consacré aux villages dans le volet

19 "Kosovo" du procès, cotes distinctes 2 à 10, et on les appellera "Classeur

20 Grujic". Est-ce que ceci serait plus commode?

21 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, Monsieur le Président.

22 M. le Président (interprétation): Vous avez les autres classeurs de 2 à

23 10? Madame la Greffière m'indique qu'elle ne les a pas, elle. Nous allons

24 leur donner des cotes maintenant.

25 (Le Président s'entretient avec Mme Anoya.)

Page 17256

1 Mme Anoya (interprétation): Le rapport d'expert et ses annexes…

2 M. Tapuskovic (interprétation): (…)

3 M. le Président (interprétation): Un instant. N'interrompez pas, Monsieur

4 Tapuskovic. Oui, oui, nous allons vous entendre dans un instant, mais

5 laissez le temps à la Greffière d'audience d'en terminer.

6 Mme Anoya (interprétation): Monsieur le Président, le rapport d'expert et

7 ses annexes seront la pièce de l'accusation 401; premier classeur, cote

8 402. Et les autres classeurs qui demeurent, commençant par le n°2 et

9 finissant par le n°10, recevront la cote 403.

10 M. Tapuskovic (interprétation): Je n'ai pas grand-chose de nouveau à vous

11 communiquer, mis à part le fait que ces dix classeurs ne nous ont été

12 remis qu'aujourd'hui. Si j'ai bien compris et d'après ce que j'ai vu, M.

13 Slobodan Milosevic n'a reçu cela qu'aujourd'hui. Donc jusqu'à aujourd'hui,

14 nous n'avons pu soumettre tout ceci à quelque analyse que ce soit. Je

15 voulais juste présenter aux Juges le fait en tant que tel.

16 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.

17 Poursuivez, Madame.

18 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Permettez-moi de réagir. Tout a été

19 communiqué plus tôt, auparavant, lorsque nous avons fait la communication

20 de la liste des témoins et des pièces en rapport avec celle-ci.

21 Aujourd'hui, vous avez simplement une nouvelle communication de ces

22 documents qui sont maintenant triés en fonction des lieux d'infraction;

23 alors que dans la liste des pièces, ce n'était pas présenté de cette

24 façon-là.

25 La seule chose qui soit nouvelle, ce sont les tableaux préparés par le

Page 17257

1 témoin. Ces tableaux se contentent de refléter ce qu'il donne dans la

2 partie de son rapport consacrée aux résultats, aux conclusions. Ce sont

3 ces chiffres qui sont repris sous forme de tableau. Donc là, rien de neuf

4 non plus!

5 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.

6 M. Milosevic (interprétation): (Hors micro.)

7 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Milosevic?

8 M. Milosevic (interprétation): (Hors micro.)

9 M. le Président (interprétation): On ne vous entend pas.

10 M. Milosevic (interprétation): Je voudrais rectifier ce qu'a dit M.

11 Tapuskovic, du moins pour ce qui me concerne moi-même. Les dix classeurs

12 qui m'ont été confiés, ces dix gros classeurs, on me les a remis quand je

13 suis entré tout à l'heure, après la pause de tout à l'heure. Je ne

14 comprends pas du tout. Et je voudrais que vous m'expliquiez… Comment

15 pensez-vous que je puisse voir de quoi il s'agit et à quoi cela se

16 rapporte?

17 M. le Président (interprétation): Si j'ai bien compris, ce sont des

18 documents déjà mentionnés dans le rapport d'expert que vous avez depuis un

19 certain temps. C'est bien cela, Madame?

20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui.

21 M. le Président (interprétation): Et ce sont des documents déjà

22 communiqués il y a un certain temps de cela?

23 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): La plupart de ces documents -huit des

24 classeurs- sont des fiches individuelles des victimes, des lieux de crime;

25 et ces documents ont déjà été communiqués auparavant, le 31 mai 2002.

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1 Aujourd'hui, vous avez simplement les mêmes documents, mais organisés

2 différemment, organisés de façon à vous faciliter la recherche d'une fiche

3 individuelle si ceci s'avère nécessaire.

4 L'expert, lui, il va aborder la question de façon plus générale. Il vous

5 donnera la somme de tous ces résultats, de toutes ces recherches

6 individuelles. Mais au cas où quelqu'un veut rechercher une fiche

7 concernant une victime particulière, ce sera plus facile de la retrouver,

8 cette fiche, dans ces classeurs, au cas où ceci s'avérerait nécessaire.

9 Les parties auront le soin de le faire ou pas.

10 M. le Président (interprétation): Oui, nous allons entendre le témoin.

11 Oui, Monsieur Tapuskovic?

12 M. Tapuskovic (interprétation): Messieurs les Juges, je me dois de vous

13 apporter une explication afin que la Chambre en ait connaissance.

14 Il se peut et il est probable que cela ait été présenté auparavant, comme

15 dit par l'accusation à présent, mais, rangé de façon chronologique tel que

16 cela a été fait maintenant, cela ne nous permet que de procéder maintenant

17 aux comparaisons nécessaires avec ce que dira le témoin. Donc il était

18 difficile de comparer, à l'époque, ce qui y figurait, avec ce que le

19 témoin va dire ici. Comme on l'a dit, cela a été fourni auparavant.

20 J'ai déjà rencontré des documents de cette sorte, mais nous n'étions pas

21 du tout en mesure de comparer avec ce que le rapport du témoin, ici

22 présent, contient et que vous avez sous les yeux.

23 M. le Président (interprétation): Est-ce qu'il y a la moindre contestation

24 ici, en l'espèce, que ces personnes soient portées disparues ou ont été

25 détenues? Est-ce que ceci est objet à contestation?

Page 17259

1 M. Tapuskovic (interprétation): Ce n'est pas contesté. Mais, pour procéder

2 à une analyse des dires du témoin, nous aurions dû recevoir cela rangé

3 chronologiquement pour pouvoir en tirer des conclusions. Mais la chose

4 n'est pas contestée en tant que telle, Monsieur le Juge May.

5 M. le Président (interprétation): Il nous faut d'abord entendre ce témoin.

6 Nous allons entendre sa déposition et ensuite, au cas où il y a des

7 objections et si celles-ci ne concernent que la forme, qu'elles sont

8 dépourvues de tout intérêt, si ce sont des objections de fond, s'il y a

9 une véritable contestation quant aux dires à venir du témoin, bien sûr,

10 nous allons nous en saisir. Mais à mon avis -et je ne parle qu'en mon nom

11 personnel, bien sûr-, pour le moment, ce ne sont pas des sujets qui sont

12 vraiment contestés. Mais entendons d'abord ce que le témoin a à nous dire.

13 Et puis, nous verrons le contre-interrogatoire et ainsi de suite.

14 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, ce que je voulais seulement

15 dire, c'est que, pour ma part, cela est contesté, parce qu'on ne peut pas

16 accepter a priori que ce qui figure ici est tout à fait vérifié, est tout

17 à fait déterminé. Donc la chose est tout à fait contestée.

18 M. le Président (interprétation): Fort bien. Poursuivons.

19 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui.

20 Monsieur le Témoin, vous avez fourni ce rapport écrit. Par conséquent, je

21 n'ai quelques questions supplémentaires à vous poser à propos de tel ou

22 tel chapitre, et aussi pour votre travail, pour ce qui est de votre

23 travail.

24 Vous êtes policier depuis 1992. Est-ce que, pendant toute votre carrière,

25 vous vous êtes attaché à recueillir des renseignements, à les traiter, et

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1 ce, surtout depuis ces dix dernières années?

2 M. Grujic (interprétation): J'ai été policier à partir de 1972. J'ai

3 occupé des fonctions variées. Et ce n'est qu'au cours des dix dernières

4 années que je me suis consacré à ces tâches-là, aux analyses et à la

5 collecte d'informations de ce type.

6 Question: Est-ce que votre bureau, que ce soit la commission d'abord et,

7 plus tard, le bureau du Gouvernement, est-ce que ce bureau s'est occupé

8 des personnes détenues ou portées disparues de tous les côtés, que ce

9 soient des Croates, donc, des Serbes ou des Musulmans ou d'autres… des

10 personnes d'autres appartenances ethniques?

11 Réponse: Oui. D'après sa fonction, le bureau en question recueille et

12 élabore tout renseignement portant personne portée disparue, portant

13 personne détenue et personne exhumée ou dépouille exhumée. Et cela ne

14 tient nullement compte de l'appartenance ethnique ou religieuse ou autre

15 des personnes qui font l'objet des activités de notre bureau.

16 Question: Est-ce que la commission s'est occupée également d'échanges?

17 Réponse: Oui. Cela a été l'une des tâches principales de cette commission

18 qui, en tant que telle, a été déterminée, définie par le Gouvernement de

19 la République de Croatie. Donc l'une des tâches avait été celle de

20 procéder à des échanges de prisonniers de guerre.

21 Question: Vous avez expliqué dans quelles circonstances le bureau a été

22 établi, et aussi les modifications qui sont intervenues; tout ceci se

23 trouve dans votre rapport. Est-ce que vous pouvez nous donner une idée de

24 la taille de votre bureau? Comment ce bureau est-il structuré?

25 Réponse: Le bureau lui-même répond directement au Gouvernement de la

Page 17261

1 République de Croatie. Et dans ses fonctions permanentes, il y a, pour

2 l'exercice de ses fonctions, quatre employés à temps plein: un

3 psychologue, un ingénieur en informatique; il y a deux personnes qui ont

4 une formation technique secondaire qui se chargent de faire des analyses

5 ou de tenir à jour des registres. Et nous avons des collaborateurs

6 externes, nous avons un agent opérationnel sur le terrain et un

7 collaborateur dans le bureau chargé du secteur de Vukovar. Et nous avons

8 des unités organisationnelles autres qui sont rattachées à des ministères

9 différents.

10 Question: Au paragraphe 5 de votre rapport, vous énumérez d'autres choses,

11 vous énumérez les noms des experts et des organes extérieurs avec lesquels

12 vous travaillez. Ma question portait sur une éventuelle collaboration avec

13 le CICR. Est-ce qu'il existe une telle collaboration également?

14 Réponse: Pendant l'existence de cette commission et par la suite, avec la

15 création du bureau, l'un des paragraphes dans le décret régissant la

16 création de ce bureau entend et sous-entend la collaboration et la

17 coopération avec les organisations internationales; ce qui sous-entend,

18 bien entendu, la collaboration avec le CICR.

19 Question: De quelle façon se fait cette collaboration?

20 Réponse: Nous procédons à des échanges d'informations directes pour ce qui

21 est des personnes disparues, et nous avons des échanges d'informations

22 indirectes par le biais du Service national de recherche au niveau de la

23 Croix-Rouge nationale. Et, de la part du comité international, nous

24 transmettions des informations à l'intention des familles. Donc la

25 collaboration s'est faite dans les deux sens.

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1 Question: Paragraphe 4 de votre rapport: vous précisez la portée de votre

2 travail, votre domaine d'activité. Je ne veux pas aborder ceci dans le

3 détail, si ce n'est pour un de ces détails. Ici, vous mentionnez, parmi

4 les tâches, le fait d'organiser des entretiens à propos de détenus et de

5 personnes portées disparues, avec la République fédérale de Yougoslavie et

6 la Bosnie-Herzégovine. C'est à la page 2, Monsieur le Président et

7 Messieurs les Juges.

8 J'aimerais savoir ceci: est-ce que vous avez aussi eu des entretiens avec

9 les autorités de la RSK?

10 Réponse: Oui. La Republika Srpska Krajina, la République de la Krajina

11 serbe, donc la RSK, avaient également une commission analogue pour ce qui

12 est des échanges de prisonniers. Et nous nous sommes entretenus avec eux

13 pour procéder à des libérations de détenus.

14 Question: Votre homologue du côté de la RFY, de la Bosnie-Herzégovine et

15 de la RSK… est-ce que ça veut dire qu'il y avait, chez eux aussi, des

16 commissions organisées comme la vôtre?

17 Réponse: Oui. Ces commissions ont été organisées de façon très analogue à

18 celles que nous avons eues en Croatie, en effet.

19 Question: Est-ce que la Republika Srpska avait une commission spéciale ou

20 est-ce uniquement dans le cadre de la commission de Bosnie-Herzégovine que

21 vous les avez rencontrés?

22 Réponse: Ils avaient une commission centrale qui se composait de deux

23 segments, deux segments militaires, le 1er et le 2e Corps de la Krajina

24 qui, eux, couvraient une bonne partie de ce territoire. Nous nous sommes

25 donc entretenus avec cette commission centrale qui avait compétence au

Page 17263

1 niveau de ces deux… appelons-les "sous-commissions". Peut-être convient-il

2 de souligner ici le fait que, très souvent, la commission ou la sous-

3 commission de la Republika Srpska se présentaient ou représentaient des

4 commissions serbes autres.

5 Question: Qu'est-ce que cela veut dire? A quoi faites-vous référence?

6 Réponse: Cela signifie qu'ils se présentaient ensemble, pour ce qui est

7 des négociations relatives aux échanges de prisonniers. Très souvent, cela

8 était conditionné par des transferts de prisonniers sur des listes de

9 libérations ou d'échanges. Il en va de même pour ce qui est de la

10 Republika Srpska et de la RSK, de la République de la Krajina serbe.

11 Question: Vous dites "ils". Mais qu'est-ce que ça veut dire? A quelles

12 commissions faites-vous référence?

13 Réponse: Je parle des commissions de la République Fédérale de

14 Yougoslavie, de la RSK et de la RS.

15 Question: Depuis quand avez-vous eu ces réunions conjointes avec ces trois

16 instances?

17 Réponse: Dans la plupart des cas, il s'agissait de réunions bilatérales.

18 Ça a commencé en 1991 et, pratiquement, cela dure de nos jours encore.

19 Question: Lorsque vous aviez ces réunions de commissions conjointes avec

20 ces trois instances, est-ce qu'il y avait une commission qui assurait la

21 direction les débats, qui avait préséance?

22 Réponse: Eh bien, voyez-vous, il était clair que la commission de la

23 République fédérale de Yougoslavie jouait un rôle prédominant.

24 Question: Comment ceci se manifestait-il? Est-ce que vous pourriez nous

25 l'expliquer?

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1 Réponse: Eh bien, cette commission de la République fédérale de

2 Yougoslavie a convié à ces réunions et a placé au sein de sa délégation à

3 elle des membres d'autres délégations. Pour être concret, dans la

4 composition de la délégation de la République fédérale de Yougoslavie, il

5 y avait un représentant de la République de la Krajina serbe aussi.

6 Question: Pour résoudre des cas individuels de détenus, détenus en RS ou

7 en RSK, est-ce qu'il vous était possible de trouver cette solution en

8 passant par la RFY?

9 Réponse: Dans certains cas, oui.

10 Question: Est-ce que des détenus étaient transférés d'installations de la

11 RSK vers la RS ou vers la RFY?

12 Réponse: Nous avons eu toute une série d'exemples de ce genre, exemples où

13 des détenus étaient transférés d'un territoire vers l'autre; donc du

14 secteur de la Yougoslavie vers le territoire de la Bosnie et vice-versa,

15 depuis les territoires occupés de la Croatie vers ceux de la Yougoslavie,

16 et inversement.

17 Question: Avez-vous une liste des personnes transférées? Est-ce que vous

18 avez suivi ces mouvements?

19 Réponse: Dans tous les cas où cela a été possible, nous avons recensé les

20 cas. Et je crois que, selon nos fichiers, les choses sont confirmées par

21 la commission du CICR, parce qu'on peut suivre le déplacement de certains

22 prisonniers au travers de plusieurs Etats. Et nous avons, dans nos

23 fichiers, des noms et prénoms de plusieurs personnes de ce type.

24 Question: Etes-vous au courant d'un prêtre s'appelant Josip Bogovic et de

25 la façon dont il est passé par plusieurs camps? Ce n'est là qu'un exemple.

Page 17265

1 Réponse: Je suis au courant du cas de M. Bogovic qui a été transféré d'un

2 camp à l'autre. Mais je ne puis, en ce moment-même, vous dire de quel camp

3 il s'agit. Il faudrait que je consulte mes registres et puis, que j'en

4 parle de façon sûre.

5 Question: Et est-ce que vous avez ces informations sur vous à ce propos, à

6 propos de cet homme, ou est-ce qu'il vous faut vérifier ces données dans

7 votre bureau?

8 Réponse: Je voudrais vérifier au bureau. Mais j'ai peut-être des noms

9 d'autres personnes sur moi.

10 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Uniquement à titre d'exemple, pour

11 nous faire une idée des conclusions ou des résultats de votre recherche à

12 propos de tels transferts…

13 Monsieur le Président, le témoin a apporté certaines documentations de son

14 bureau. Je vous demande s'il est autorisé à consulter ces documents.

15 M. le Président (interprétation): Oui, si ce sont les siens. Si c'est une

16 documentation officielle, oui, il est autorisé à le faire.

17 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Donnez-nous un exemple ou deux de

18 tels transferts, s'il vous plaît.

19 M. Grujic (interprétation): Je n'ai pas trop à consulter ma documentation

20 pour pouvoir dire ce qui suit. Par exemple, un certain Vanin Zlatko; c'est

21 un homme qui avait été en Yougoslavie, puis transféré… Il avait été dans

22 une prison d'instruction à Belgrade, une prison militaire d'instruction;

23 puis, ensuite, il a été transféré dans le secteur… vers le secteur de

24 Knin. Il a été, par la suite, libéré moyennant échange.

25 Question: En quelle année cela s'est-il passé? De quelle période parlons-

Page 17266

1 nous lorsque nous parlons de cette personne?

2 Réponse: Cet homme a été arrêté en 1993 et arrêté à la mi-mai 1994, si je

3 ne m'abuse.

4 Question: Pouvez-vous nous donner un autre exemple?

5 Réponse: Eh bien, je vais essayer d'en trouver un.

6 (Le témoin consulte ses documents.)

7 Eh bien, je peux vous apporter une réponse tout à fait concrète: Predrag

8 Vukusic, arrêté le 2 juillet 1992. Il a été enfermé dans le camp de

9 Kerenica, ensuite à Zeljava, après quoi à Knin; donc sur le territoire de

10 la Croatie, ensuite sur le territoire de la Bosnie et puis, à nouveau, sur

11 le territoire de la Croatie.

12 Nous avons l'exemple de M. Slavko Dajic qui était dans le camp de Morin au

13 Monténégro, et puis transféré à Bileca, sur le territoire de Bosnie-

14 Herzégovine, avant d'être relâché.

15 Nous avons ensuite l'exemple de Tihomir Dujnovic qui, le 12 décembre 1991,

16 a été arrêté à Ston, en Croatie, transféré au Monténégro dans le camp de

17 Morin et puis ensuite en Bosnie, dans le camp de Bileca, avant d'être

18 échangé à Cavtat en 1992. Et à Cavtat, il a été transféré le 2 juillet.

19 Question: Cela suffira. J'aimerais maintenant que nous parlions des

20 personnes portées disparues. Aux paragraphes 6 et 7, vous décrivez la

21 méthodologie que vous appliquez dans le cadre des questionnaires relatifs

22 aux personnes portées disparues. Je n'ai donc pas besoin de rentrer dans

23 les détails, mais je me contenterai de vous poser une question: pourquoi

24 cette campagne de renouvellement des demandes relatives aux personnes

25 portées disparues a-t-elle été nécessaire en 1993 et 1994?

Page 17267

1 Réponse: Eh bien, comme je l'ai déjà dit, en 1993, la commission

2 gouvernementale conjointe a été mise en place, et cette commission a eu à

3 traiter d'un certain nombre de cas de personnes disparues pour lesquelles

4 les formulaires avaient mal été remplis par les familles. De même, il nous

5 est apparu très clairement que nous aurions affaire à un grand nombre de

6 personnes en fait décédées et considérées jusqu'à ce moment-là comme des

7 personnes portées disparues. Donc il était nécessaire d'obtenir des

8 éléments supplémentaires pour réussir à les identifier. C'est la raison

9 pour laquelle nous avons renouvelé la demande de remplissage de

10 formulaires.

11 Nous avons demandé, par le biais des médias, à toutes les personnes

12 résidant sur le territoire de Croatie et disposant de renseignements au

13 sujet de personnes disparues, qu'il s'agisse de membres de la famille ou

14 de personne faisant parties de l'entourage, de nous faire connaître ces

15 éléments.

16 Question: Eh bien, nous n'allons pas rentrer dans les détails. Mais en

17 1994, vous avez, sur la base de ce travail, déterminé qu'il restait 3.052

18 personnes portées disparues; cela figure au paragraphe 7. Et là, il est

19 question de 1994. Et puis, au paragraphe 34F, vous citez un autre chiffre

20 de 1.348 personnes portées disparues. Etait-ce la situation au moment où

21 vous avez déposé le rapport, votre rapport?

22 Réponse: C'est tout à fait cela. Au départ, donc après le recensement que

23 nous avons effectué en 1994, le chiffre était de 3.052. Et au moment où

24 j'ai soumis mon rapport, le chiffre correspondait au deuxième chiffre cité

25 par vous. Ce qui signifie que, s'agissant de la différence entre ces deux

Page 17268

1 chiffres, eh bien, il s'agit du nombre de personnes qui ont été retrouvées

2 par nous.

3 Question: Et qu'en est-il aujourd'hui? Le chiffre actuel est-il encore

4 moindre?

5 Réponse: Oui, il est encore moindre aujourd'hui. D'ailleurs, aujourd'hui,

6 il reste à travailler sur 1.283 cas de personnes encore portées disparues.

7 Question: Tout cela signifie-t-il que vous mettiez vos dossiers

8 régulièrement à jour?

9 Réponse: Nous mettons nos dossiers régulièrement à jour dans notre bureau.

10 Dès qu'un élément d'information est reçu par nous, il est immédiatement

11 introduit et enregistré dans nos dossiers.

12 Question: Avez-vous procédé à des vérifications avec les dossiers d'autres

13 organisations, comme par exemple le CICR, au sujet de ces personnes?

14 Réponse: L'une des façons pour nous de coopérer avec le CICR, en

15 particulier, consiste à contrôler les listes des personnes portées

16 disparues précisément. Notre liste de personnes portées disparues

17 auxquelles s'ajoutent les noms des personnes que nous découvrons

18 quotidiennement est immédiatement transmise au CICR. C'est de cette façon,

19 entre autres, que nous contrôlons et vérifions nos dossiers.

20 Question: Dans ces chiffres, est-ce que les personnes portées disparues

21 dont les noms ont été fournis par des personnes résidant sur le territoire

22 de la RFY ou de la Republika Srpska y figurent? Je veux parler des

23 personnes portées disparues dans le cadre des opérations "Eclair" et

24 "Tempête".

25 Réponse: Ces éléments sont conservés de façon séparée. Toutes les

Page 17269

1 personnes qui sont venues rechercher des personnes portées disparues dans

2 notre bureau sont incluses dans les listes de cette période -je veux

3 parler de la liste des 1.300 noms pour partie- mais, en majorité, les

4 listes en question sont distinctes.

5 Question: S'il était nécessaire -je veux parler sur requête des Juges de

6 ce Tribunal ou d'autres parties- que vous fournissiez des renseignements

7 supplémentaires en rapport avec l'opération "Eclair" et l'opération

8 "Tempête", est-ce que vous pourriez le faire?

9 Réponse: Oui.

10 Question: Monsieur le Président, je ne vais pas rentrer dans le détail car

11 il s'agirait d'une thèse distincte de l'accusation.

12 Monsieur le Témoin, vous nous avez décrit, au paragraphe 12, vos analyses

13 quant aux modalités de recueil des informations. J'aimerais que vous nous

14 disiez, notamment, si vous commencez par vérifier si les disparitions sont

15 liées aux conflits armés ou pas? Et, si tel est bien le cas, veuillez nous

16 dire sur quelle base vous vous fondez pour établir une telle distinction.

17 Réponse: Dans les questionnaires que nous proposions, des questions

18 claires sont posées au sujet du lieu de disparition de la personne

19 concernée. Lorsqu'une localité figurant dans la réponse à ce niveau, se

20 situe en dehors des champs de bataille et n'a aucun rapport avec les lieux

21 où des conflits se sont menés, ce lieu indique automatiquement que la

22 personne ne peut pas avoir disparu dans le cadre du conflit armé. Nous

23 nous interrogeons également au sujet du moment de la disparition, qui nous

24 indique si un lien existe avec le conflit ou pas.

25 Et puis, il y a d'autres questions relatives aux conditions personnelles

Page 17270

1 de la personne portée disparue, à la façon, aux circonstances dans

2 lesquelles cette personne a disparu. Tous ces éléments nous indiquent si

3 cette personne a disparu en rapport ou pas avec le conflit armé.

4 Question: Lorsque vous traitez toutes ces données, vérifiez-vous les

5 doublons et, si oui, comment?

6 Réponse: Une fois les éléments d'informations sont recueillis, ils sont

7 introduits dans l'ordinateur. L'ordinateur permet de comparer les éléments

8 d'informations et de rejeter automatiquement, par conséquent, les cas où

9 la personne a été enregistrée deux fois; ce qui arrive car les familles se

10 trouvent parfois dispersées en divers lieux et plusieurs questionnaires

11 sont remplis pour la même personne.

12 Par ailleurs, une autre vérification est effectuée qui est une

13 vérification personnelle due au travail individuel des employés de notre

14 bureau. De cette façon, nous réussissons à éliminer tous les doublons.

15 Question: Où sont conservés les dossiers personnels des personnes portées

16 disparues? Et trouve-t-on dans ces dossiers uniquement des questionnaires

17 ou d'autres documents également?

18 Réponse: Chaque fois qu'une personne fait enregistrer le cas d'une

19 personne disparue, un dossier est créé au nom de cette personne, dans

20 lequel on range tous les éléments de preuve qu'il a été possible de

21 recueillir au sujet de la disparition, tous les documents trouvés, parfois

22 y compris d'ailleurs des séquences vidéo ou des articles parus dans la

23 presse. Et sont inclus également dans ces dossiers tous les documents

24 médicaux éventuellement trouvés au sujet de la personne qui permettraient

25 plus tard de l'identifier. Tous ces dossiers sont conservés dans le bureau

Page 17271

1 chargé des personnes disparues et enregistrées.

2 Question: A partir de la page 6 de votre rapport, vous expliquez la

3 méthodologie que vous appliquez aux exhumations et vous y annexez un

4 organigramme où l'on trouve le nom de tous les experts qui ont participé

5 aux exhumations. La question que je vous pose est la suivante: quel a été

6 le rôle de votre bureau dans ce processus et, notamment, quel a été votre

7 rôle, personnel, à vous?

8 Réponse: Dans l'un des paragraphes relatifs aux instances responsables des

9 personnes portées disparues, il est disposé que c'est le bureau que je

10 représente qui est responsable des exhumations réalisées en Croatie. Notre

11 bureau a donc pour fonction, entre autres, de procéder à toutes les

12 exhumations. Donc les informations trouvées dans diverses localités au

13 sujet de fosses communes sont traitées par notre bureau et tous les

14 acteurs compétents à procéder à des exhumations nous informent de leur

15 intention de procéder à une exhumation d'abord, puis nous présentent

16 l'ordonnance d'un juge d'instruction. Et la procédure est suivie pas à pas

17 selon les pratiques en vie vigueur en la matière.

18 En tant que chef du bureau, je participe directement à toutes les

19 exhumations. J'assiste à celles-ci et je suis donc toutes les exhumations.

20 J'essaie de coordonner le travail des diverses instances intervenant dans

21 les exhumations; notamment, je coordonne et je participe au travail des

22 différents ministères qui participent à ce processus.

23 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): La documentation relative aux

24 exhumations et à l'identification des victimes est-elle conservée dans

25 votre bureau?

Page 17272

1 M. Grujic (interprétation): Chaque fois qu'il y a exhumation, la

2 documentation complète relative à ses exhumations, partant des documents

3 du juge d'instruction en allant jusqu'aux séquences vidéo et autres

4 documents, toute cette documentation est conservée dans le bureau chargé

5 des personnes portées disparues.

6 M. le Président (interprétation): Madame Uert-Retzlaff, je crois que le

7 moment de la pause est arrivé.

8 Monsieur Grujic, j'ai un point à vous rappeler: il vous est interdit de

9 parler à qui que ce soit pendant la pause de la teneur de votre

10 déposition.

11 Vingt minutes de pause.

12 (L'audience, suspendue à 12 heures 14, est reprise à 12 heures 36.)

13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur Grujic, s'agissant des

14 exhumations dont vous parlez au paragraphe 14 de votre rapport, il est

15 question des organisations…

16 Donc au paragraphe 14 de votre rapport, dans le dernier sous-paragraphe de

17 ce paragraphe, il est question des organisations avec lesquelles vous avez

18 collaboré. Et vous faites également référence à la période récente en

19 disant que, dans cette période, vous avez également travaillé avec la

20 République fédérale de Yougoslavie et avec les commissions de la Republika

21 Srpska.

22 Que voulez-vous dire par "dans la période récente"? Depuis quelle date

23 collaborez-vous, dans ce domaine, avec ces organisations?

24 M. Grujic (interprétation): Pour être très précis, au sujet des

25 exhumations, un accord a été conclu quant à la supervision de ces

Page 17273

1 exhumations; ce qui signifie que, si des exhumations sont réalisées et que

2 la République fédérale de Yougoslavie ou la Bosnie-Herzégovine

3 s'intéressent à ces exhumations réalisées sur le territoire de la

4 République de Croatie, un suivi doit être possible, c'est-à-dire que des

5 experts doivent pouvoir y participer. La pratique de ces dernières années

6 nous a montré que ce suivi contribuait également aux identifications; et

7 cela se passe depuis un an à peu près.

8 Question: Avez-vous également participé au suivi des exhumations et

9 identifications qui ont été réalisées sur le territoire de la Republika

10 Srpska et de la RFY depuis un an?

11 Réponse: Oui. Depuis un an, j'ai assisté, en tant que représentant de la

12 République de Croatie, avec nos légistes, à des exhumations qui ont été

13 réalisées à Novi Sad, à Sabac et à Sremska Mitrovica .

14 Question: Ces commissions de Croatie, de la Republika Srpska et de la RFY

15 appliquent-elles toutes la même méthodologie, s'agissant des exhumations

16 et identifications?

17 Réponse: La méthodologie est très semblable, s'agissant du processus même

18 d'exhumation et aussi du processus d'identification. Mais lorsqu'il est

19 question d'identification par analyse de l'ADN, ces analyses sont

20 réalisées exclusivement dans nos laboratoires de Croatie et également,

21 pour d'autres, dans des laboratoires internationaux.

22 Question: Vous expliquez également dans votre rapport que vous collaborez

23 avec le TPIY. Je vous demande si la procédure d'exhumation et

24 d'identification est semblable…, si votre procédure d'exhumation et

25 d'identification est semblable ou différente de celle qui est mise en

Page 17274

1 oeuvre par le TPIY?

2 Réponse: La réalisation des exhumations… Enfin, la procédure appliquée

3 dans ce cas est très semblable, hormis quelques détails mineurs qui

4 portent notamment sur le transfert depuis le lieu d'exhumation jusqu'à

5 l'endroit où est effectuée l'identification.

6 Question: En quoi réside cette différence?

7 Réponse: La différence réside dans les éléments suivants: lorsque

8 l'exhumation est due au Tribunal international, des véhicules bien

9 particuliers sont utilisés pour le transfert des restes humains. Ce qui

10 n'est pas le cas chez nous. Pour ce qui nous concerne, nous informons les

11 autorités policières compétentes du transfert qui sera effectué à l'aide

12 d'un véhicule qui passera donc sur leur territoire. Et le Tribunal, pour

13 sa part, utilise ses propres véhicules.

14 Question: Passons maintenant aux résultats de votre recherche et aux

15 premières informations que vous avez obtenues au sujet des personnes

16 exhumées; cela figure au paragraphe 31 de votre rapport.

17 Vous avez établi un tableau contenant des chiffres; on le trouve à

18 l'intercalaire 4 dans le classeur, Monsieur le Président. J'aimerais que

19 le tableau soit remis au témoin. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de

20 placer le tableau sur le rétroprojecteur; nous gagnerons du temps en ne le

21 plaçant pas sur le rétroprojecteur.

22 (Intervention de l'huissier.)

23 Je vous demande si votre bureau est bien à l'origine de ce tableau où l'on

24 trouve le nombre des cadavres exhumés, leur sexe, leur âge…?

25 Réponse: Oui, ce tableau a été élaboré dans les locaux du bureau chargé

Page 17275

1 des personnes disparues.

2 Question: S'agissant de la situation des cadavres exhumés et identifiés,

3 je crois qu'il serait bon de placer la page intitulée "Situation" sur le

4 rétroprojecteur.

5 (Intervention de l'huissier.)

6 J'ai quelques questions à vous poser à ce sujet.

7 Donc, s'agissant de la situation des cadavres exhumés et identifiés, vous

8 citez le nombre de 1.640 civils, 898 défenseurs. Je vous demande sur

9 quelle base vous vous fondez pour établir cette distinction.

10 Réponse: Lorsque nous établissons l'identité d'une victime, nous procédons

11 à une vérification quant à la situation de cette personne. En République

12 de Croatie, un ministère est chargé des défenseurs croates; ce ministère

13 possède des registres où l'on trouve le nom de tous ceux qui ont participé

14 au conflit armé et qui sont des ressortissants de la République de

15 Croatie.

16 Donc si l'on trouve un de ces noms sur une liste, la liste du ministère,

17 cela signifie que cette personne était rémunérée et avait pour statut le

18 statut de défenseur croate. Donc dans ce cas, la victime est enregistrée

19 en tant que victime entrant dans la catégorie des défenseurs.

20 Question: Les défenseurs recouvrent-ils les soldats et les policiers ou,

21 uniquement, les membres de l'une seule de ces deux catégories?

22 Réponse: Le titre officiel est celui de "défenseurs croates". Donc sous

23 cette dénomination, on trouve les soldats et les policiers.

24 Question: Les membres de la protection civile, on voit le chiffre de 199

25 correspondant à cette catégorie. Que recouvre exactement cette catégorie?

Page 17276

1 Réponse: Il s'agit d'une catégorie distincte qui englobe les personnes

2 qui, pendant le conflit armé, accomplissaient un certain nombre de tâches

3 liées à la défense civile. Il peut s'agir de sapeurs-pompiers,

4 d'électriciens ou autres, qui étaient donc tenus de remplir leurs tâches

5 dans la ville où ils travaillaient. C'était, pour eux, une obligation.

6 Question: Je vous interroge maintenant au sujet du tableau, du graphique

7 où il est question de composition ethnique. Et je vous interroge au sujet

8 des Serbes qui sont mentionnés dans ce graphique.

9 Est-il question ici des opérations "Eclair" et "Tempête"? Et si tel n'est

10 pas le cas, de quelle période parlons-nous en rapport avec ce graphique?

11 Réponse: Toutes les victimes indiquées ici ont trouvé la mort entre 1991

12 et 1994, donc il n'est pas question spécifiquement des opérations "Eclair"

13 et "Tempête".

14 Question: Merci. Nous pouvons maintenant passer au graphique suivant,

15 relatif aux personnes portées disparues. Il s'agit de l'intercalaire 1

16 annexée au tableau.

17 Dans votre rapport, vous citez le chiffre –au paragraphe 34A, Monsieur le

18 Président- de 220.338 personnes portées disparues. Je vous demande à

19 quelle période se rapporte ce nombre?

20 (Intervention de l'huissier.)

21 Réponse: La période concernée est celle qui va de 1991 à 1992; 1991-1992

22 jusqu'à 1994. Mais la partie la plus importante de ce chiffre, à savoir

23 186.903, est le chiffre relatif aux victimes qui ont trouvé la mort avant

24 1992.

25 Question: Donc vous avez produit ce graphique relatif aux personnes

Page 17277

1 déplacées où l'on trouve également le chiffre de 186.903, qui est le

2 chiffre le plus important pour 1992, n'est-ce pas? Vous avez établi

3 également la liste des personnes déplacées en fonction des régions?

4 Réponse: Oui. On trouve, sur ce graphique, la période concernée et les

5 régions d'origine des personnes déplacées.

6 Question: Je pense que ces tableaux parlent d'eux-mêmes, donc nous n'avons

7 pas besoin de rentrer dans les détails.

8 Groupe suivant: le paragraphe 44B de votre rapport, où il est question de

9 11.834 personnes tuées. Ceci constitue l'intercalaire 2.

10 (Intervention de l'huissier.)

11 34B, intercalaires 1 et 2 annexées au tableau. Là encore, vous apportez

12 des détails relatifs à la distinction entre la catégorie des défenseurs et

13 la catégorie des civils; et vous indiquez l'âge des victimes, la région où

14 ces victimes ont été tuées, la répartition ethnique. Et dans votre rapport

15 écrit, vous faites référence à un registre des organismes compétents dont

16 vous avez utilisé les données pour aboutir aux résultats qui sont les

17 vôtres.

18 Pouvez-vous nous dire ce que l'on trouve derrière cette expression?

19 Réponse: Un certain nombre d'organismes se sont occupé, en République de

20 Croatie, des personnes tuées. Le ministère de la Santé et de l'information

21 a été chargé de travailler sur le terrain et d'enregistrer les éléments

22 découverts. Par ailleurs, des membres des forces armées ont fait le même

23 travail et conservaient le même genre de registres qui sont du ressort du

24 ministère de la Défense. Et le ministère des défenseurs croates a repris

25 la succession dans ce cas précis.

Page 17278

1 Donc il y a deux registres qui, sur certains plans, se recoupent. On

2 trouve un registre des personnes exhumées dans les fosses communes; et les

3 victimes découvertes, dans ce cas, entrent également dans la catégorie des

4 personnes tuées. Chaque fois, donc, les renseignements sont conservés par

5 la commission chargée des personnes détenues et portées disparues, et il

6 est possible d'avoir des doublons. Mais le chiffre total est de 11.834

7 personnes; c'est un chiffre établi au minima et on trouve le nom et le

8 patronyme de la victime, ainsi qu'un certain nombre de données

9 personnelles au sujet de chacune des personnes tuées.

10 Question: Lorsque vous recevez des éléments provenant de différents

11 bureaux, est-ce que vous triez les doublons avant d'enregistrer toutes ces

12 données?

13 Réponse: Oui. Toutes les données sont vérifiées à plusieurs reprises,

14 aussi bien par ordinateur que manuellement. Donc les doublons inutiles

15 sont éliminés.

16 Question: Vous avez un nombre relativement élevé qui figure dans la

17 répartition par origine ethnique. Le nombre cité est celui de 4.173,

18 s'agissant des personnes pour lesquelles vous n'avez pas de données, pas

19 d'appartenance ethnique. Pouvez-vous expliquer ce fait?

20 Réponse: Nous n'avons pas d'information au sujet de l'appartenance

21 ethnique. Et lorsque cet élément d'information n'est pas disponible, la

22 personne est classée comme inconnue. Dans ce groupe, on trouve également

23 les personnes qui ne se sont pas prononcées au sujet de leur appartenance

24 ethnique et pour lesquelles, donc, il n'existe pas de documents officiels

25 avérant l'appartenance ethnique.

Page 17279

1 Question: Dans vos tableaux, s'agissant de la situation des personnes

2 tuées, on voit d'abord le graphique où l'on trouve la répartition

3 générale, et puis un autre tableau relatif aux personnels médicaux,

4 journalistes, personnels religieux et étrangers. De quelle façon avez-vous

5 recueilli ces renseignements?

6 Réponse: Dans le questionnaire, qui est ce document spécifique relatif à

7 chaque personne tuée, diverses rubriques sont présentes. Là, nous parlons

8 de personnes qui sont protégés par les Conventions de Genève, il s'agit de

9 personnel religieux, de journalistes, d'étrangers, de personnels médicaux,

10 pour lesquels nous demandons bien sûr des renseignements particuliers et

11 nous enregistrons ces renseignements au cas où nous les obtenons.

12 Question: Passons maintenant au paragraphe 34C de votre rapport, où vous

13 citez le chiffre de 3.052 personnes portées disparues ou enlevées de

14 force. Pourquoi cette distinction? Qu'est-ce qui distingue ces deux

15 groupes de personnes?

16 Réponse: Une personne portée disparue est une personne pour laquelle aucun

17 renseignement n'est disponible, alors que s'agissant des personnes

18 enlevées de force, un élément existe, à savoir la certitude que ces

19 personnes ont été enlevées de force et emmenées hors de chez elles. Des

20 témoins peuvent en attester. Donc ceci est enregistré dans le

21 questionnaire et, éventuellement, le nom du témoin qui a attesté du fait

22 que la personne a été enlevée de force, ainsi que son patronyme figurent

23 également dans le questionnaire.

24 Question: Ce chiffre de 3.052 personnes portées disparues et enlevées de

25 force englobe-t-il les victimes originaires de Croatie et de Bosnie

Page 17280

1 également, même si nous parlons de ressortissants de Croatie?

2 Réponse: En effet. Lorsque la liste a été renouvelée, toutes les personnes

3 portées disparues ont été enregistrées. Certaines de ces personnes portées

4 disparues avaient disparu sur le territoire bosniaque. A ce moment-là, il

5 s'agissait de 137 personnes, ce qui implique que 2.915 personnes étaient

6 portées disparues sur le territoire de la République de Croatie, alors

7 qu'aujourd'hui le nombre de ces personnes ayant disparu sur le territoire

8 bosniaque a été réduit et n'est plus que de 72.

9 Question: J'aimerais que l'on soumette au témoin l'intercalaire 3, qui est

10 un autre graphique où l'on trouve des chiffres un peu inférieurs à ceux

11 qui sont cités dans le rapport.

12 (Intervention de l'huissier.)

13 Je vous demande, Monsieur, si ce graphique rend bien compte de la

14 situation relative exclusivement au territoire croate?

15 Réponse: Oui. Il s'agit ici du nombre de personnes portées disparues sur

16 le territoire de la République de Croatie pour ce qui est de la période

17 1992/1994. On établit des parallèles de 1994 à 2002.

18 Question: Je vous remercie. Je pense que les tableaux se passent de

19 commentaire.

20 Examinons maintenant le paragraphe 34D et le paragraphe 34E. Si on les

21 prend ensemble, on voit qu'on a un chiffre de 2.746 personnes exhumées et

22 identifiées, de 3.356 personnes exhumées y compris les personnes non

23 identifiées. Ce chiffre de 2.746 personnes identifiées, est-ce que ceci a

24 un rapport avec le travail d'exhumations fait dans le cadre de votre

25 bureau ou est-ce que sont incluses également les exhumations faites dans

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1 le cadre de commissions précédentes, 1991 et 1992?

2 Réponse: Non, ici on parle d'exhumations qui ont été réalisées par mon

3 bureau à moi. Ces exhumations ont commencé en 1995. Elles ont toutes été

4 réalisées sur des territoires qui avaient été occupés auparavant.

5 Question: Est-ce que cela inclut aussi les personnes trouvées dans des

6 fosses ou dans des tombes à Novi Sad ou dans d'autres endroits mentionnés

7 en RFY?

8 Réponse: Non, cela se rapporte uniquement aux victimes que nous avons

9 retrouvées dans des fosses communes, et il s'agit de 135 fosses communes

10 et 1.200 tombes individuelles.

11 Question: Avant de parler du dernier chapitre "Les lieux de détention",

12 j'aimerais que l'on parle des lieux des crimes particuliers, du travail

13 que votre bureau a fait et des résultats qu'il a obtenus s'agissant de ces

14 sites.

15 Dans le cadre de la préparation de votre rapport, vous a-t-on demandé

16 d'examiner les résultats de vos activités par rapport aux personnes

17 reprises dans les annexes ou les listes annexées à l'Acte d'accusation

18 portant sur la Croatie?

19 Réponse: C'est exact, je viens de revoir cela.

20 Question: Vous êtes venu pour déposer à La Haye. Est-ce que vous ou l'un

21 des membres de votre personnel a vérifié ces listes et indiqué à la main

22 vos résultats sur ces listes?

23 Réponse: Oui, chacune de ces listes a été vérifiée. Et les résultats sont

24 portés à la main sur chacune de ces listes.

25 Question: Avez-vous également examiné les documents relatifs à ces lieux

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1 d'infraction? Je pense plus particulièrement aux questionnaires pour

2 personnes portées disparues et aux rapports d'exhumation.

3 Réponse: Oui, cela a été examiné, oui.

4 Question: Est-ce que les documents qui vous ont été montrés étaient

5 authentiques? Est-ce qu'ils émanaient bien de votre bureau?

6 Réponse: Absolument.

7 Question: J'aimerais maintenant parler des résultats et des corrections

8 apportées par le témoin. Nous n'avons pas inclus Vocin dans cet examen.

9 Pourquoi, Monsieur? Pouvez-vous nous l'expliquer?

10 Réponse: A Vocin même, il n'y a pas eu d'exhumation. Et les victimes qui

11 ont été retrouvées à Vocin ont été retrouvées dès 1991. Elles ont été

12 identifiées sur place, ces personnes-là, et leur nom figure dans la liste

13 des personnes décédées; c'est la liste de 11 000 et quelques personnes.

14 C'est la raison pour laquelle les personnes en question ne sont pas

15 recensées par notre bureau comme étant des personnes exhumées.

16 Question: Merci. Parlons maintenant de Bacin, annexe 1, paragraphe 40. Au

17 regard des noms, vous avez indiqué: "ID", qu'est-ce que cela veut dire?

18 Est-ce que cela veut dire: exhumé et identifié?

19 Réponse: "ID", ça veut dire identifié.

20 Question: Monsieur le Président, il s'agit de l'intercalaire 6.

21 Et vous avez apporté une correction à un nom et à une date de naissance:

22 Vera Jukic. Est-ce exact?

23 Réponse: C'est exact. Sur la liste du Bureau du Procureur, on avait dit

24 Veronika. La personne en question s'appelle Vera Jukic, elle est née en

25 1920 et non pas en 1919.

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1 Question: Vous avez également porté une correction à la rubrique

2 concernant Ana Blinja, vous avez constaté que la date de naissance n'était

3 pas correcte?

4 Réponse: C'est exact. Ana Blinja est identifiée, et elle est née en 1923.

5 Question: Deux autres corrections. Elles concernent Mato Bahunovic et

6 Loncar Stefan, là aussi vous avez constaté qu'il y avait une erreur au

7 niveau des noms?

8 Réponse: C'est exact. Ce n'est Mato, c'est Matija Bahunovic. Et ce n'est

9 pas Stefan Loncar, mais Stjepan Loncar.

10 Question: Au regard de certains noms, vous avez apposé un "M". Qu'est-ce

11 que ce "M" indique? Que cette personne est toujours portée disparue

12 d'après vos fichiers?

13 Réponse: Oui, ce sont là les lettres qui désignent la personne portée

14 disparue.

15 Question: Et s'agissant de certains noms, vous avez ajouté la mention

16 "ND". Qu'est-ce que cela veut dire?

17 Réponse: Cela veut dire que le bureau ne dispose pas de renseignements

18 afférents à la personne en question.

19 Question: Nous parlons de cette liste de Bacin, est-ce qu'elle inclut

20 également les victimes de Cerovljani et de Dubica?

21 Réponse: Il s'agit d'une liste de victimes Cerovljani et Dubica, en effet.

22 Question: Dans combien de fosses communes avez-vous trouvé ces corps?

23 Réponse: Nous avons découvert ici une fosse commune avec 56 cadavres, 56

24 victimes, à Bacin même. En dessus, nous avons retrouvé plusieurs victimes

25 individuelles qui n'ont pas été ensevelies dans des fosses communes. Et,

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1 au total, on a exhumé à Bacin 59 personnes. Et sur les 59, 56 victimes se

2 trouvaient dans une fosse commune, alors que les trois autres étaient des

3 personnes que l'on a retrouvées dans des tombes individuelles. A

4 Cerovljani, on a retrouvé trois tombes individuelles.

5 Question: Et à Dubica?

6 Réponse: Et à Dubica même, on a retrouvé 6 cas individuels.

7 Question: Nous passons maintenant au tableau suivant, en ce qui concerne

8 les victimes de Lipovanic, paragraphe 42, intercalaire 11. Ici, vous avez

9 apporté également une correction; vous avez corrigé un nom qui était mal

10 épelé. Vous avez là, identifié sept corps, est-ce exact?

11 Réponse: C'est exact. Sept personnes à Lipovanic qui ont été identifiées.

12 Et c'est ce nombre de personnes qui avaient été portées disparues là-bas.

13 Alors, sur la liste il y a… on a dit Sindric, mais ce n'est pas Sindric.

14 C'est Cindric, il s'agit probablement d'une erreur de frappe. Donc c'est

15 la première lettre qui change.

16 Question: Et à propos de Marija Cindric?

17 Réponse: Alors, Marija… Ou plutôt, pas Maria. Katja, Katja Cindric.

18 Question: Je vois. Est-ce que vous avez des résultats à propos de Marija

19 Cindric? Savez-vous si elle a été tuée?

20 Réponse: Non, nous ne savons rien, nous n'avons pas de renseignements à ce

21 sujet. Et nous estimons que c'est par erreur que l'on a fait porter sur

22 liste deux personnes portant le même nom de famille. Et comme on a

23 retrouvé sept personnes dans cette fosse commune et qu'on les a

24 identifiées, cela coïncide précisément avec la liste sans ladite Marija

25 Cindric.

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1 Question: Messieurs les Juges, là manifestement il y a une erreur. Cette

2 personne, il faut l'enlever de la liste. Nous parlons maintenant de

3 Vukovici, intercalaire 13. Ici, vous avez corrigé l'année de naissance

4 plutôt que la date toute entière, n'est-ce pas? Qu'avez-vous à nous dire à

5 ce propos?

6 Réponse: Eh bien, cela signifie que sur la liste il y a neuf personnes

7 dont deux ont été identifiées. L'une des personnes identifiées, Vukovic

8 Nikola, nous avons ajouté son année de naissance; il s'agit de l'année

9 1938.

10 Question: Par rapport à ceci, vous n'avez pas identifié ces corps. Est-ce

11 qu'il figure parmi la liste des 11.800 personnes enregistrées ou recensées

12 comme étant mortes ou est-ce que vous ne savez rien à son propos?

13 Réponse: On n'en sait rien. Il ne figure pas sur la liste des 11.000. Il

14 ne figure pas sur la liste des personnes identifiées non plus.

15 Question: Poursuivons, pour parler des victimes de Saborsko, paragraphe 44

16 de l'Acte d'accusation. Ici, vous avez l'intercalaire 15 et examinons

17 également l'intercalaire 16.

18 Ici, vous recensez toutes ces personnes du paragraphe 44 qui sont

19 identifiées mais, en plus de ces corps, vous avez trouvé d'autres corps

20 dans la même fosse commune, est-ce bien cela?

21 Réponse: C'est exact. Ici, sur la liste, il y a 18 personnes identifiées.

22 Mais il convient de préciser que, à Saborsko, nous avons exhumé 30

23 personnes. Sur ces 30, 27 ont été identifiées et ces personnes-là ont été

24 retrouvées dans deux fosses distinctes et 10 fosses individuelles.

25 Question: Vous avez effectivement donné une liste comprenant les noms

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1 supplémentaires, qui se trouve à l'intercalaire 16, n'est-ce pas?

2 (Intervention de l'huissier.)

3 Réponse: Oui, c'est là une liste additionnelle qui couvre, avec ce qui

4 figure en annexe, toutes les victimes identifiées.

5 Question: Pour ce qui est de Skabrnja, nous avons deux listes différentes.

6 Une liste pour les victimes de Nadin, qu'on retrouve ici à l'intercalaire

7 19, et on mentionne aussi Skabrnja II.

8 Pour ce qui est de la première liste, les victimes des 18 et 19 novembre

9 1991, avez-vous obtenu des résultats en ce qui concerne ce premier groupe

10 de victimes de Skabrnja? Et si ce n'est pas le cas, pourquoi ne l'avez-

11 vous pas fait?

12 Réponse: Dans le premier groupe, donc dans le cas de Skabrnja I, il s'agit

13 d'un cas où les dépouilles, quelques jours après les événements, ont été

14 restituées aux familles par les représentants des autorités locales. Ces

15 personnes ont toutes été identifiées et figurent sur une liste, sur la

16 liste des personnes mortes, des 11.000 dont on a parlé, et notre bureau

17 n'a pas pris part à ce travail-là.

18 Question: Ceci renvoie au paragraphe 45 de l'Acte d'accusation. Nous

19 n'avons pas repris ces données dans cette liste, car le témoin n'avait

20 rien d'autre à ajouter que ce qu'il a dit ici. Aussi pour Nadin, vous

21 n'aviez pas d'informations supplémentaires, c'est bien cela?

22 Réponse: C'est exact.

23 Question: Parlons maintenant de Skabrnja II, paragraphe 47 de l'Acte

24 d'accusation. Là, vous avez en fait identifié toutes les personnes

25 recensées. Combien de fosses y avait-il? Avez-vous trouvé des corps

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1 supplémentaires?

2 Réponse: Toutes les personnes qui figurent sur la liste ont été retrouvées

3 dans une fosse commune à Skabrnja. On y a retrouvé, en tout et pour tout,

4 27 personnes. L'exhumation s'est faite le 6 juin 1996. Et toutes ces

5 personnes sur la liste Skabrnja sont identifiées.

6 Question: Parlons maintenant de Bruska. Bruska ne se trouve pas non plus

7 dans les classeurs. Pouvez-vous nous expliquer, Monsieur le Témoin, si la

8 même explication vaut ici, à savoir que vous ne vous en êtes pas occupés?

9 Réponse: Oui, nous ne nous sommes pas occupés du volet Bruska.

10 Question: Savez-vous si les personnes recensées dans cette liste de Bruska

11 sont effectivement mortes? Est-ce que ces personnes comptent parmi ces

12 11.800 victimes recensées dans la liste ou ne le savez-vous pas?

13 Réponse: Je ne saurais pas vous le dire à ce moment-ci.

14 Question: La ferme d'Ovcara, outre les annotations habituelles que vous

15 apportez à savoir "ID" et "ND", maintenant vous faites une référence en

16 indiquant "ID" avec astérisque. Qu'est-ce que cela veut dire?

17 Réponse: Cela veut dire que cette personne figure sur la liste des

18 personnes qui ont été identifiées mais qu'on ne l'a pas retrouvée dans une

19 fosse commune, telle qu'Ovcara, mais sur un site autre.

20 Question: Monsieur le Président, il s'agit ici des intercalaires 22 et 23.

21 Vous avez parcouru cette liste. Est-ce que vous avez trouvé le nom d'une

22 personne vivante? Et est-ce que vous avez indiqué cela au Procureur?

23 Réponse: Oui. Par examen de la liste, nous avons retrouvé une personne

24 répondant au nom de Vilenica Zarko, cette personne est vivante. Cette

25 personne s'est trouvée sur la liste, ainsi que dans les documents du

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1 bureau où l'on a précisé qu'il s'agissait d'une personne portée disparue

2 et que c'était une personne que l'on avait vue pour la dernière fois à

3 l'hôpital de Vukovar. La mère de l'intéressé avait déclaré que celui-ci

4 était porté disparu. Nous avons lancé des recherches et, après coup, nous

5 avons déterminé que c'était quelqu'un de vivant.

6 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Messieurs les Juges, cette personne

7 c'est Zarko Vilenica.

8 M. le Président (interprétation): Madame Uertz-Retzlaff, en temps utile et

9 au vu de cette déposition ou d'autres dépositions qui exigeront des

10 modifications de l'Acte d'accusation, il faudra que vous demandiez

11 officiellement une modification de l'Acte d'accusation, à ce moment-là.

12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, Monsieur le Président, mais je

13 propose que nous le fassions à la fin de la présentation de nos éléments

14 de preuve, lorsque nous aurons tous les détails exacts.

15 M. le Président (interprétation): Oui, mais n'oubliez pas de le faire.

16 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, Monsieur le Président, bien sûr.

17 Monsieur le Témoin, s'agissant de Vukovar, pouvez-vous nous dire au bout

18 de combien de temps vous avez trouvé des cadavres de victimes, pour

19 certains identifiés et pour d'autres non identifiés?

20 M. Grujic (interprétation): Sur le territoire de la ville de Vukovar, il a

21 été découvert quatre fosses communes, et on a exhumé au total 1.319

22 personnes. Là-dessus, on en a identifié 1.094, alors que les autres se

23 trouvent encore en processus d'identification. Ces personnes sont

24 enterrées dans des caves ou des tombeaux qui se trouvent à Zagreb ou

25 Osijek.

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1 Question: Vous avez également apporté quelques corrections à d'autres noms

2 dans la liste. Il y avait cette personne qui, en fait, est vivante. Mais

3 vous avez également corrigé l'orthographe de certains noms et certaines

4 dates de naissance; inutile d'y revenir.

5 Mais j'ai une question à vous poser. Vous avez inscrit dans la liste, en

6 tant que personne identifiée, une femme répondant au nom de Janja

7 Pothorski, dont vous dites que son corps a été découvert dans les fosses

8 communes où l'on a trouvé les cadavres des personnes provenant de

9 l'hôpital de Vukovar. Avez-vous trouvé une autre victime femme?

10 Réponse: Pothorski?

11 Question: Oui, oui. C'est le nom d'une personne de sexe féminin qui figure

12 dans la liste. Avez-vous trouvé d'autres victimes femmes dans cette même

13 fosse commune?

14 Réponse: Oui, nous avons retrouvé une personne qui s'appelait Ruzica

15 Markobasic. Elle n'a pas été enregistrée comme étant une personne blessée.

16 Elle a probablement dû chercher refuge. Et je dois préciser qu'elle était

17 à un stade avancé de grossesse.

18 Question: Oui. Passons maintenant à Dalj, si vous le voulez bien,

19 paragraphe 50 de votre rapport. Dans quelle fosse ces corps ont-ils été

20 retrouvés?

21 Réponse: Ces cadavres ont été retrouvés dans une fosse commune dans la

22 localité de Celije, et cette fosse a été exhumée le 23 février 1998. On y

23 a retrouvé les dépouilles de 14 personnes.

24 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, nous allons

25 maintenant examiner l'intercalaire 25.

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1 Monsieur le Témoin, vous avez noté ici, également, que le corps de l'une

2 des personnes dont le nom figure sur la liste, à savoir à Daljski Atar, a

3 été trouvée dans une autre fosse commune. De quelle tombe s'agit-il?

4 Réponse: A Daljski Atar, on a retrouvé une fosse commune, il s'agissait en

5 fait d'un puits. On y a retrouvé des dépouilles de plus de 20 personnes.

6 Question: Avez-vous indiqué dans la liste suivante, établie en rapport

7 avec les lieux de crime, que ce puits était l'un des endroits où vous

8 aviez trouvé des cadavres?

9 Réponse: Oui. Les dépouilles qui sont citées aux cas 2 et 3 ont été

10 retrouvées dans les fausses commune de Dalj et de Celije.

11 Question: S'agissant des victimes 2 et 3, stipulées au paragraphe 51 qui

12 correspondent à l'intercalaire 29 et aux deux intercalaires suivants, nous

13 voyons ici le nom de Vinko Oroz et de Marinko Somodjvorac. Savez-vous où

14 ces corps ont été retrouvés?

15 Réponse: Marinko Somodjvorac et Vinko Oroz ont été découverts sur le

16 territoire de la République fédérale de Yougoslavie à Novi Sad. Et, à

17 l'issue de pourparlers bilatéraux avec les représentants de la RFY, ces

18 dépouilles ont été transférées et l'identification a été réalisée. Par

19 ailleurs, les documents relatifs aux autopsies et autres du même genre

20 existent à leur sujet.

21 Question: Ces documents que vous avez reçus indiquent-ils comment ces

22 cadavres se sont retrouvés à Novi Sad?

23 Réponse: Selon les documents que nous avons reçus, il est indiqué que ces

24 corps ont été trouvés dans le Danube, juste en face d'Ilok, dans ce

25 secteur- là.

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1 Question: Savez-vous si d'autres cadavres de personnes tuées au cours du

2 même incident ont également été jetés dans le Danube?

3 Réponse: Oui. Les autres cadavres ont également été jetés dans le Danube,

4 mais nous les avons trouvés dans la fosse commune d'Ilok en septembre

5 1999. Après quoi, nous avons entrepris leur identification. Et j'ajouterai

6 que, si vous me le permettez, selon certains témoins qui ont témoigné

7 devant nous, ces corps ont été sortis des eaux du Danube avant d'être

8 placés dans cette fosse commune.

9 Question: Vous parlez de la fosse commune d'Ilok, n'est-ce pas?

10 Réponse: Oui. Je parle de la fosse commune dont nous avons déjà parlé.

11 Question: Passons maintenant au paragraphe 52 intercalaire 33, à savoir

12 intercalaire 33 et intercalaires suivants qui portent sur les victimes de

13 la mine de Lovas. Je vous demande: où ces cadavres ont été découverts?

14 Réponse: Les dépouilles des personnes dont les noms figurent sur la liste,

15 ont été découvertes dans une fosse commune dans la localité de Lovas.

16 Cette fosse a été exhumée en juin 1997 et il y a été découvert les reste

17 de 68 personnes.

18 Question: Passons maintenant à Erdut, premier volet, paragraphe 53. Que

19 pouvez-vous nous dire de l'appartenance ethnique de ces victimes?

20 Réponse: Il est évident qu'il s'agit ici de membres de la minorité

21 ethnique hongroise. Il y a, sur la liste, 12 personnes dont on en a

22 identifié 10; et les dépouilles mortelles ont été retrouvées dans une

23 fosse commune à Celije. Et dans cette fosse-là, il y avait 16 victimes en

24 tout.

25 Question: Volet 2, paragraphe 53. Nous avons, sur cette liste, le nom de

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1 trois personnes supplémentaires, dont je vous demande si ce sont également

2 des personnes appartenant à la minorité ethnique hongroise? Et je me

3 réfère à l'intercalaire 40.

4 Réponse: Il s'agit de trois personnes qui ont été retrouvées à Borovo

5 Selo, non loin de Dalj, dans un puits. L'exhumation a eu lieu en septembre

6 2000 et ces trois personnes ont été identifiées. Il s'agit aussi de

7 ressortissants de la minorité nationale hongroise; on a déterminé qu'il y

8 avait des liens de famille avec l'une des victimes de Celije.

9 Question: Dans le tableau précédent, nous avions un certain Franjo Pap né

10 en 1934. Et sur le tableau dont nous parlons actuellement, nous trouvons

11 le nom d'un Franjo Pap né 1960. S'agit-il d'un père et de son fils?

12 Réponse: Il y a le père, le fils et l'épouse née en 1930.

13 Question: Passons maintenant au tableau suivant: Erdut, volet n°7,

14 paragraphe 53, intercalaire 44, Monsieur le Président.

15 Nous voyons ici le nom d'une seule personne. S'agit-il d'une personne

16 appartenant à la famille des victimes hongroises dont il a été question il

17 y a un instant?

18 Réponse: Oui, c'est une personne du groupe ethnique hongrois qui a été

19 retrouvée dans un puits à proximité de Dalj. Dalj se trouve non loin

20 d'Erdut.

21 Question: Tableau suivant, Klisa, paragraphe 54, intercalaires 48 et 49.

22 Vous avez identifié toutes les victimes dont les noms figurent sur cette

23 liste et je vous demande où ces cadavres ont été retrouvés.

24 Réponse: Les cinq personnes identifiées sur cette liste ont été retrouvées

25 dans une fosse commune de la localité de Celije. C'étaient des personnes

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1 qui se trouvaient dans la même fosse commune que celles qui sont citées au

2 paragraphe 53.

3 Question: Nous parlons maintenant des victimes de Vukovar, paragraphe 55.

4 Vous avez identifié toutes ces victimes et je vous demande où ces cadavres

5 ont été retrouvés.

6 Réponse: Sur la liste, il y a 11 personnes; ces 11 personnes ont été

7 toutes identifiées. Les quatre premières ont été retrouvées à la ferme de

8 Lovas, à proximité de Dalj, dans une fosse commune où il y avait 24

9 victimes au total. Et les autres ont été retrouvées dans une fosse commune

10 au cimetière catholique de la localité de Dalj. Et dans la fosse, en tout

11 et pour tout, on a retrouvé 11 victimes.

12 Question: Nous allons maintenant parler d'Erdut. Le volet n°4, d'abord,

13 correspondant aux intercalaires 54 et 55. Où ces cadavres ont-ils été

14 retrouvés, Monsieur?

15 Réponse: Ces cadavres ont été retrouvés dans une fosse commune, celle qui

16 s'appelle Daljski Atar. On a retrouvé là-bas 23 victimes; elles ont été

17 exhumées en octobre 1998.

18 Question: Dans tous ces graphiques, lorsqu'on voit la lettre "M" à côté du

19 nom d'une personne, cela signifie qu'il s'agit d'une personne portée

20 disparue; et lorsqu'on voit les lettres "ND", comme vous l'avez déjà dit…

21 Mais les noms accompagnés des lettres "ND" et les autres dont nous avons

22 déjà parlé, se trouvent-ils sur la liste des personnes tuées où l'on voit

23 le chiffre de 11.800 personnes, ou est-ce qu'il s'agit d'autre chose?

24 Réponse: Eh bien, les personnes qui portent un "M" sont des personnes qui

25 sont portées disparues et figurent sur la liste des personnes portées

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1 disparues; il s'agit là des 1.883 personnes dont on a parlé. Et lorsqu'il

2 s'agit d'un "ND", cela signifie que nous n'avons aucune connaissance et

3 que les membres de leur famille ne les ont pas fait porter disparues, nous

4 n'avons pas d'information qui confirmerait qu'il s'agit de personnes

5 décédées.

6 Question: Dernier tableau relatif à Erdut, paragraphe 57. Là encore, vous

7 avez identifié toutes les victimes, moins une. Je vous demande si ces

8 cadavres ont également été retrouvés dans le puits dont vous avez déjà

9 parlé?

10 Réponse: Oui, c'est exact. Ces personnes sont retrouvées dans le même

11 puits, dans ce que l'on appelle "Daljski Atar".

12 Question: Parlons de la façon dont ces corps étaient placés dans le puits.

13 Est-ce que la façon dont ces corps étaient disposés vous a apporté des

14 indications quant au moment où ils ont été jetés dans le puits?

15 Réponse: Etant donné qu'il y a des renseignements afférents aux périodes

16 de disparition de la plupart de ces personnes, il y a aussi des

17 annotations concernant les modalités selon lesquelles on les a retrouvées.

18 Certaines personnes ont été retrouvées au fond du puits. Et les derniers,

19 les dernières personnes disparues ont été retrouvées au sommet du puits.

20 C'est ainsi que l'on arrive à déterminer ou à reconstruire la succession

21 des faits, reconstituer les modalités. Les personnes qui ont disparues en

22 premier se retrouvaient au fond et les personnes qui ont disparues en

23 dernier ont été retrouvées au sommet des personnes se retrouvant dans le

24 puits.

25 Question: Parlons maintenant de la dernière fosse commune qui fait l'objet

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1 de votre rapport, à savoir la fosse de Grabovac, paragraphe 59 de l'Acte

2 d'accusation, intercalaires 63 et 64. Où ces cadavres ont-ils été

3 retrouvés?

4 Réponse: Les cinq victimes qui figurent sur la liste sont identifiées. On

5 les a retrouvées dans une fosse commune à Beli Manastir. D'après les

6 informations dont nous disposons, et nous avons prouvé la chose par la

7 suite, ces victimes-là ont d'abord été ensevelies dans une localité qui

8 s'appelle Tikves, c'est un lieu de chasse. C'est entre 1993 et 1994 qu'on

9 les a transportées vers cette fosse commune de Beli Manastir qui se

10 trouvait dans un cimetière catholique.

11 Question: Dans cette fosse primaire, je veux parler du lieu de chasse,

12 avez-vous trouvé des parties des dépouilles de ces personnes? Et, si tel

13 n'est pas le cas, comment avez-vous pu déterminer que ces restes humains

14 avaient été transférés d'une fosse primaire à une fosse secondaire?

15 Réponse: D'après les personnes qui sont chargées de ce transfert, on nous

16 a indiqué les emplacements des sites, puis on a procédé à des exhumations.

17 Au premier endroit, on a retrouvé de menus restes d'os humains. Les autres

18 objets, tels que vêtements et autres nous indiquaient qu'il s'agissait de

19 personnes dont nous avions exhumé les dépouilles à l'autre site.

20 Question: Cette fosse primaire de Tikves est-elle près de Grabovac ou, si

21 tel n'est pas le cas, quel est le rapport qui existe entre cette fosse et

22 les victimes?

23 Réponse: La localité de Grabovac se trouve à environ dix kilomètres de cet

24 endroit, de l'endroit où on les a retrouvées. J'ai déjà indiqué qu'il

25 s'agissait d'un terrain de chasse où avaient leur siège des formations

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1 paramilitaires du temps de l'occupation de cette région.

2 Question: De quelle force paramilitaire êtes-vous en train de parler?

3 Réponse: Eh bien, d'après les déclarations du témoin qui a décrit le

4 transfert, c'est là que se trouvaient des membres de ce que l'on appelait

5 "les Bérets rouges". Il s'agit très probablement de membres des formations

6 de "Arkan" et du capitaine Dragan, c'est du moins ce qu'on nous a dit.

7 Question: C'est ce que vous a dit la personne qui vous a indiqué

8 l'emplacement de la fosse, n'est-ce pas?

9 Réponse: C'est cela.

10 Question: Nous avions un tableau où il était question des victimes de

11 Dubrovnik. Avez-vous eu quelque chose à voir avec les victimes de

12 Dubrovnik? Etes-vous en mesure de dire quelque chose à leur sujet?

13 Réponse: Non et je ne puis rien vous dire, si ce n'est que ces personnes

14 figurent sur la liste des personnes mortes, sur la liste des 11.000 dont

15 nous avons déjà parlé.

16 Question: Oui. Nous allons maintenant parler des lieux de détention. Vous

17 avez déjà dit avoir travaillé également sur la question des lieux de

18 détention et des échanges. Vous décrivez la méthode suivie par vous dans

19 votre rapport. Nous n'avons pas besoin d'y revenir ensemble aujourd'hui.

20 Je vous demande simplement quand a eu lieu le dernier échange?

21 Réponse: Le dernier échange s'est fait en 1996.

22 Question: Un échange qui s'est produit où?

23 Réponse: La personne en question, d'après son témoignage, était détenue à

24 Erdut. Elle a été échangée sur la ligne de démarcation de ce territoire à

25 l'époque occupé, à proximité de Lipovac.

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1 Question: Vous avez également élaboré des graphiques qui portent sur les

2 lieux de détention. Il s'agit de l'intercalaire 5.

3 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je vous indique que le témoin

4 a sous les yeux ce document, mais que la première page où l'on voit le

5 chiffre de 7.666 et les catégories suivantes "portées disparues",

6 "capturées", "tuées", cette page ne correspond plus à la réalité. Donc il

7 est demandé de la supprimer du document.

8 Monsieur le Témoin, s'agissant du sexe et de la situation des détenus, je

9 vous demande sur quoi vous vous fondez pour établir une distinction entre

10 les soldats et les civils. Suivez-vous toujours à cette fin la même

11 méthode que celle que vous avez déjà décrite?

12 Réponse: Oui, de la même façon qui a déjà été décrite; il s'agit de

13 registres officiels.

14 Question: Oui. J'aimerais simplement savoir une chose car il y a tout de

15 même pas mal de personnes, à savoir 3614, pour lesquelles la situation ne

16 semble pas avoir pu être déterminée de façon précise. Pouvez-vous nous

17 expliquer pourquoi ce chiffre est si élevé dans ce cas?

18 Réponse: Parce que nous n'avons pas de renseignements officiels. Il est

19 clair que ces personnes ne font pas partie de la catégorie membres des

20 forces armées; car, dans ce cas-là, ils seraient recensés et ils auraient

21 droit à certains droits. Et ils sont tous intéressés par ces droits. Donc

22 je crois que nous pouvons, en tout état de cause, les placer dans la

23 catégorie civile.

24 Question: S'agissant des autres graphiques, vous distinguez un groupe de

25 personnes spécifiques bénéficiant de certains privilèges, à savoir, comme

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1 tout à l'heure, du groupe incluant les personnes blessées, les personnels

2 médicaux, les personnels religieux, les journalistes, les étrangers.

3 J'aurais une question à vous poser au sujet des éléments que vous indiquez

4 dans ce tableau en rapport avec la détention. On trouve ici aussi un

5 nombre élevé de personnes ayant subi une détention dont la durée

6 d'emprisonnement est inconnue. Comment expliquez-vous cela?

7 Réponse: Par une mauvaise…. Parce qu'on apportait des renseignements

8 erronés. Un certain nombre de détenus ont été portés sur des listes et ils

9 ont été…, comme s'ils avaient été échangés par le biais de la commission,

10 et ce au niveau local, et c'est la raison pour laquelle il y avait des

11 données qui ne se recoupaient pas.

12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, j'aimerais à

13 présent discuter avec le témoin d'un certain nombre de localités qui, dans

14 l'Acte d'accusation, sont indiqués comme ayant été des lieux de détention,

15 mais cela me prendra une quinzaine de minutes. Donc je pense qu'il serait

16 préférable de nous interrompre ici.

17 M. le Président (interprétation): Très bien.

18 Suspension. Retour dans le prétoire demain à 9 heures.

19 Monsieur le Témoin… Monsieur Grujic, je vous demande d'être retour dans ce

20 prétoire demain à 9 heures.

21 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, j'aurais un

22 élément à ajouter au sujet de ce témoin. Il s'agit d'un témoin expert,

23 donc l'accusation est tenue de l'accompagner lorsqu'il entre et sort du

24 prétoire. Sommes-nous autorisés à le faire?

25 M. le Président (interprétation): A condition de ne pas discuter de sa

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1 déposition avec lui.

2 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, bien sûr.

3 (L'audience est levée à 13 heures 47.)

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