Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 18823

1 (Mercredi 9 avril 2003.)

2 (L'audience est ouverte à 9 heures 10.)

3 (Début de la vidéoconférence avec le Témoin B-104 qui est à l'écran.)

4 (Audience publique avec mesures de protection.)

5 (Le Président faisant signe à M. Milosevic de poursuivre.)

6 (Contre-interrogatoire du Témoin B-104 par l'accusé, M. Milosevic.)

7 M. Milosevic (interprétation): Maintenant, ça va.

8 Avant de continuer, je voudrais verser au dossier cet extrait de l'article

9 approprié du Code pénal de Yougoslavie qui a été mentionné par le témoin,

10 comme ayant servi de base pour le jugement qui a été rendu à son égard. Et

11 (expurgé)

12 (expurgé)

13 (expurgé)

14 (expurgé)

15 (expurgé)

16 (expurgé)

17 (expurgé)

18 (expurgé)

19 (expurgé)

20 (expurgé)

21 (expurgé)

22 M. le Président (interprétation): Très bien. Nous allons entendre d'abord

23 quelle est la cote suivante.

24 Mme Thompson (interprétation): La cote de cette pièce à conviction sera le

25 D126.

Page 18824

1 M. le Président (interprétation): Bon.

2 M. Milosevic (interprétation): Je crois que nous sommes en session

3 publique?

4 M. le Président (interprétation): Oui.

5 M. Milosevic (interprétation): Monsieur B-104, s'agissant des événements

6 que vous avez cités dans le secteur de Bajina Basta, je voudrais que vous

7 précisiez la période de temps pendant laquelle vous avez séjourné à Bajina

8 Basta. De quand à quand avez-vous séjourné à Bajina Basta, je vous prie?

9 Témoin B-104 (interprétation): Je répète qu'il s'agissait de périodes

10 variées: cela s'est passé en 1993 et en 1994. Cependant, j'ai une mauvaise

11 mémoire pour ce qui est des années, aussi se peut-il que je me trompe, et

12 ne m'en voulez pas parce qu'il s'est passé beaucoup de temps depuis.

13 M. Milosevic (interprétation): Et vous y avez séjourné dans le courant de

14 1993? Alors, si vous avez une mauvaise mémoire pour ce qui est des années,

15 sans parler des mois, je ne comprends pas comment il se pourrait que vous

16 soyez cité à comparaître pour témoigner de ces événements. Quand êtes-vous

17 allé là-bas? En 1993 et en 1994, d'après ce que vous dites?

18 M. le Président (interprétation): Il vous a répondu: il vous a dit 1993 et

19 1994. Il en est ainsi, vous ne pouvez pas aller au-delà. Si vous voulez

20 lui poser la question de savoir quand au juste en 1993...

21 M. Milosevic (interprétation): Justement. Dites-nous quand vous avez été

22 là-bas en 1993 et quand en 1994? Avez-vous une idée de la période de temps

23 où vous avez été engagé?

24 Témoin B-104 (interprétation): Je pense qu'il s'agissait de printemps/été,

25 c'est à peu près cela.

Page 18825

1 Question: Printemps/été 1993, dites-vous, n'est-ce pas?

2 Réponse: A peu près. Je vous ai dit que je n'arrivais pas à me souvenir.

3 Question: Et, en 1994, jusqu'à quand?

4 Réponse: Je tiens à préciser que j'y ai été dans des périodes de temps

5 variées. J'allais et je venais.

6 Question: Bon, il semblerait que cela soit difficile à déterminer.

7 Toujours est-il que je voudrais que vous m'expliquiez quand est-ce que

8 vous y avez été pour la dernière fois en 1994. Vous en souvenez-vous?

9 Réponse: Non, je ne m'en souviens pas.

10 Question: Cela non plus vous ne vous en souvenez pas? Mais y êtes-vous

11 allé en 1995?

12 Témoin B-104 (interprétation: Non.

13 M. Milosevic (interprétation): Vous n'avez pas été là-bas? Puisque vous

14 n'y avez pas été en 1995, comment se peut-il qu'en page 8, paragraphe 9,

15 vous disiez que Franko Simatovic a quitté Bajina Basta lorsque cette

16 région a été ethniquement nettoyée vers la fin de l'année 1995? Donc vous

17 n'y avez pas été depuis 1994 et vous affirmez quand même qu'il a été là-

18 bas jusqu'à la fin 1995, période à laquelle cette région a été

19 ethniquement nettoyée. D'où sortez-vous cette assertion? L'avez-vous

20 inventée de toute pièce comme tout le reste?

21 M. le Président (interprétation): Non, c'est un commentaire que vous êtes

22 en train de faire. Monsieur Milosevic, je vous demande de poser une

23 question en bonne et due forme.

24 M. Milosevic (interprétation): La forme est tout à fait appropriée,

25 Monsieur May.

Page 18826

1 M. le Président (interprétation): Non, non, ce n'est pas le cas. Cela n'a

2 été qu'un commentaire.

3 M. Milosevic (interprétation): Vous n'avez pas été là-bas en 1995, vous

4 affirmez qu'il a été là-bas jusqu'en 1995 et qu'il a quitté la région au

5 moment où la région a été ethniquement nettoyée. D'où sortez-vous une

6 allégation de cette nature?

7 Témoin B-104 (interprétation): Je vous ai déjà dit que j'ai ouï dire cela

8 de la bouche de personnes qui ont séjourné là-bas.

9 Question: Ah! Vous avez ouï dire cela de la bouche de certaines personnes

10 qui étaient là-bas?

11 Réponse: Oui.

12 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, cela n'est pas du tout

13 sérieux. Cela manque complètement de sérieux. Je vais quand même

14 poursuivre mon contre-interrogatoire.

15 Savez-vous…

16 M. le Président (interprétation): Non! Vous venez de faire un commentaire,

17 une fois de plus. Vous allez pouvoir faire des commentaires le moment

18 venu; mais pour le moment, vous êtes censé poser des questions. Et vous

19 êtes en train de perdre du temps à faire des commentaires.

20 M. Milosevic (interprétation): Bajina Basta se trouve en Serbie?

21 Témoin B-104 (interprétation): Oui, cela se trouve en Serbie.

22 Question: Mais de quel nettoyage ethnique parlez-vous, alors? Parce que

23 vous dites qu'il a quitté Bajina Basta une fois que la région a été

24 ethniquement nettoyée. De qui a-t-on nettoyé ethniquement Bajina Basta et

25 la région autour de Bajina Basta?

Page 18827

1 Réponse: Je tiens à préciser que les unités étaient logées, installées,

2 hébergées à Bajina Basta; alors que les opérations, elles, se faisaient de

3 l'autre côté de la Drina.

4 Question: Mais vous avez répondu à une de mes questions qui était celle de

5 savoir si vous avez participé, si vous avez eu des activités de combat, et

6 vous avez répondu que vous n'avez réalisé que des vols de reconnaissance

7 et des vols de transports ou d'évacuation médicale. C'est bien ce que vous

8 nous avez dit?

9 Réponse: C'est ce que j'ai eu moi-même. Mais les autres unités, elles,

10 avaient des missions différentes.

11 M. Milosevic (interprétation): Mais que savez-vous nous dire au sujet des

12 missions des autres unités?

13 Témoin B-104 (interprétation): Pour être concret, rien. Mais, d'une

14 manière générale, je sais qu'ils se trouvaient dans le secteur de Drina et

15 qu'ils réalisaient des opérations de combat là-bas, de l'autre côté de la

16 Drina.

17 M. le Président (interprétation): Tirons une chose au clair. On laisse

18 entendre que vous avez tort à propos de quelque chose de précis, mais

19 précisons ce qu'il en est. Vous dites d'une région qu'elle a été nettoyée

20 ethniquement en 1995. Mais à quelle région pensez-vous?

21 Témoin B-104 (interprétation): Je me réfère à la région de l'autre côté de

22 la Drina, donc le secteur de Skelani, de Osmace et cette partie-là du

23 territoire.

24 M. Milosevic (interprétation): Bon. Mais dites-nous: d'où le savez-vous?

25 Témoin B-104 (interprétation): J'ai déjà répondu à cette question.

Page 18828

1 Question: Mais vous n'avez fait que dire que vous avez ouï dire des récits

2 de ce type, soit. Dites-moi, je vous prie… Comme vous avez précisé que

3 vous n'avez pas eu de mission de combat vous-même, je me propose de vous

4 poser des questions sur ce que vous avez inscrit en page 8 de votre

5 déclaration préalable. Et je ne vais pas citer de noms pour ne pas passer

6 à huis clos partiel, mais je vous demande de prêter attention à la chose.

7 Donc vous avez cela sous les yeux. Page 8, paragraphe 3; paragraphes 4 et

8 5 aussi.

9 Vous y dites que "Frenki" était revenu de Belgrade. Il avait convoqué… Je

10 ne vais pas citer de noms; c'étaient des collègues à vous, des pilotes et

11 vous-même… Donc vous-même, vous le précisez clairement, puisque vous y

12 avez été. Et il vous a dit qu'il avait eu une rencontre avec moi -quoique

13 lui ne m'ait jamais rencontré, mais peu importe- et je lui aurais donné

14 des ordres demandant de détruire quatre villages dans le secteur de

15 Srebrenica, dans les nuits à venir. C'est ce qui est dit dans votre

16 déclaration préalable. Alors, vous dites que vous ne connaissez pas les

17 noms de ces villages et ainsi de suite. Puis, vous expliquez comment les

18 choses se sont passées.

19 Je voudrais que vous me disiez: est-ce que quelqu'un a effectivement

20 détruit ces villages et est-ce que ce qui figure dans cette déclaration

21 est exact?

22 Réponse: Eh bien, voilà. Pour ce qui est de cette mission…

23 M. Milosevic (interprétation): Pardon? Moi, je ne vous entends pas bien.

24 Je tiens mes écouteurs sur les oreilles, mais le son a l'air d'être très

25 faible.

Page 18829

1 (L'interprète de la cabine française confirme que lui aussi entend très

2 mal.)

3 M. le Président (interprétation): Laissez le témoin répondre.

4 Témoin B-104 (interprétation): Pour ce qui est de cette mission, disais-

5 je, M. "Frenki" est rentré effectivement de Belgrade et il nous a demandé

6 ce que l'on pouvait faire avec les hélicoptères.

7 M. Milosevic (interprétation): Attendez, attendez. Répondez-moi d'abord.

8 Est-ce qu'il vous a bien dit qu'il avait été chez moi? Vous avez mentionné

9 mon nom dans votre entretien avec les enquêteurs.

10 Témoin B-104 (interprétation): Je ne me souviens plus de ce détail.

11 Question: Ah? Vous ne vous souvenez plus de ce détail? Allons de l'avant.

12 Bon. Expliquez-nous maintenant ce qu'il en a été de cette mission. Quelle

13 a été la mission qu'il vous a confiée?

14 Réponse: Non, il ne m'a confié aucune mission.

15 Question: Mais écoutez, vous avez dit qu'il avait convoqué…, vous avez

16 cité un homme, deux hommes, trois hommes, puis vous avez dit "et moi-

17 même".

18 Réponse: Il nous a convoqués pour nous demander ce qu'un hélicoptère

19 pouvait transporter.

20 Question: Ah? Il vous a demandé ce qu'un hélicoptère pouvait transporter?

21 Bien.

22 Dans le paragraphe qui vient juste après, vous indiquez qu'ils vous ont

23 dit qu'ils avaient jeté de l'hélicoptère quatre tonneaux remplis de

24 produits chimiques liquides, de poison; et "Frenki" leur aurait dit que la

25 teneur d'un tonneau était capable, était donc de nature à tuer des gens

Page 18830

1 dans le secteur d'un grand terrain de foot. C'est ce qui est écrit.

2 Alors, savez-vous nous dire si l'une quelconque des parties sur le

3 territoire de l'ex-Yougoslavie a effectivement, pendant cette guerre,

4 utilisé des produits chimiques de combat?

5 Réponse: C'est ce qu'on m'a dit et ce que j'ai indiqué.

6 Question: Donc on a jeté des tonneaux à partir d'hélicoptères et on a

7 détruit des villages entiers ainsi. C'est ce qui est inscrit dans votre

8 déposition, ou est-ce que vous avez dit autre chose, quelque chose de

9 différent?

10 Réponse: J'ai déjà répondu à votre question.

11 Question: Non, vous ne m'avez pas répondu. Avez-vous effectivement dit aux

12 enquêteurs qu'ils avaient jeté des tonneaux remplis de produits chimiques,

13 et toute cette science-fiction que vous avez montée de toutes pièces, pour

14 détruire soi-disant des villages ainsi? C'est bien ce que vous avez dit?

15 Réponse: J'ai indiqué qu'on m'a dit que cela avait été fait.

16 M. Milosevic (interprétation): Mais avez-vous ouï dire que l'on a utilisé

17 des poisons de combat sur terre, dans les airs ou n'importe où ailleurs?

18 Témoin B-104 (interprétation): Je pense avoir répondu à cette question.

19 M. le Président (interprétation): Non. Avez-vous entendu la question?

20 Avez-vous entendu dire que des produits toxiques et des produits chimiques

21 toxiques ont été utilisés, comme cela est indiqué dans votre déclaration

22 préalable? Est-ce que cela aussi vous en avez entendu parler?

23 Témoin B-104 (interprétation): Oui.

24 M. Milosevic (interprétation): Mais quand cela s'est-il passé? Je vous

25 prie de me l'indiquer.

Page 18831

1 Témoin B-104 (interprétation): Je ne peux vraiment pas me rappeler la

2 date.

3 M. Milosevic (interprétation): Ça non plus vous ne vous en souvenez pas?

4 Bien. Dites-moi…

5 M. Kwon (interprétation): Monsieur le Témoin, pouvez-vous nous dire de qui

6 avez-vous entendu dire cela? Vous pouvez le dire, si vous le souhaitez, à

7 huis clos partiel.

8 Témoin B-104 (interprétation): Oui, je l'indiquerai, mais en session à

9 huis clos partiel.

10 M. le Président (interprétation): Oui.

11 (Huis clos partiel à 9 heures 26.)

12 (expurgé)

13 (expurgé)

14 (expurgé)

15 (expurgé)

16 (expurgé)

17 (expurgé)

18 (expurgé)

19 (expurgé)

20 (expurgé)

21 (expurgé)

22 (expurgé)

23 (expurgé)

24 (expurgé)

25 (expurgé)

Page 18832

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11

12

13 Page 18832 –expurgées– audience à huis clos partiel.

14

15

16

17

18

19

20

21

22

23

24

25

Page 18833

1 (expurgé)

2 (Audience publique avec mesure de protection à 9 heures 30.)

3 M. Milosevic (interprétation): Pouvons-nous constater maintenant que ce

4 qui est contenu dans cette déclaration n'est pas exact? Parce que vous

5 dites: "Il a convoqué les personnes que vous avez indiquées" -et vous

6 dites-: "Et moi-même. Et il nous a confié la mission afférente à ces

7 quatre villages". Et, maintenant, vous venez de nous dire que vous n'étiez

8 pas présent lorsqu'il a confié cette mission.

9 M. le Président (interprétation): Le témoin a déjà témoigné à ce sujet-là

10 et je vous demanderai de passer à un autre sujet.

11 M. Milosevic (interprétation): Soit, nous allons passer à d'autres

12 questions. Il y a beaucoup d'autres questions à poser, mais ce témoin ne

13 se souvient de rien et ne sait rien nous dire.

14 En répondant à l'une des questions de M. Kwon…

15 M. Kwon (interprétation): Votre micro n'est pas branché.

16 M. le Président (interprétation): Votre micro n'est pas branché.

17 M. Milosevic (interprétation): Est-ce que l'on m'entend maintenant? Est-ce

18 que vous m'entendez maintenant, Monsieur B-104?

19 Témoin B-104 (interprétation): Oui, je vous entends.

20 Question: En répondant hier à une question de M. Kwon, qui vous a précisé

21 que Jadar était une rivière, vous avez dit que c'était une colline. Et en

22 votre qualité de pilote, vous êtes forcément censé vous débrouiller sur

23 une carte. Alors, Monsieur B-104, je tiens à vous informer que Jadar,

24 c'est effectivement une rivière. Le saviez-vous? Mais Zeleni Jadar, ce

25 n'est pas une colline, c'est un village. Le savez-vous ou pas?

Page 18834

1 Réponse: Monsieur le Juge, j'avais, moi, parlé de Zeleni Jadar.

2 Question: Qu'avez-vous dit? De quoi s'agissait-il?

3 Réponse: Zeleni Jadar.

4 Question: Mais Zeleni Jadar, ce n'est pas une colline, c'est un village!

5 Et qu'est-il arrivé avec ce Zeleni Jadar?

6 Réponse: Je ne comprends pas votre question.

7 M. Milosevic (interprétation): Ecoutez, vous avez mentionné Zeleni Jadar.

8 Je voudrais que vous m'expliquiez ce qui s'est passé avec ce Zeleni Jadar.

9 Avez-vous eu une opération quelconque à réaliser au niveau de Zeleni

10 Jadar?

11 Témoin B-104 (interprétation): J'ai répondu hier que je n'ai pas eu

12 d'opération à réaliser à Zeleni Jadar.

13 Je vais également répondre à la deuxième des questions que vous venez de

14 poser et dire qu'à Zeleni Jadar, il y a eu des opérations réalisées par

15 une unité de parachutistes, par les "Loups de la Drina" et la 6e Brigade

16 des paras. Donc la 6e Brigade des parachutistes et les "Loups de la

17 Drina".

18 M. le Président (interprétation): Mais laissez-le finir!

19 Témoin B-104 (interprétation): J'allais dire que je le savais parce que le

20 monsieur qui a travaillé avec moi a été à Osmace et à Zeleni Jadar. Et les

21 autres personnes qui ont été à Zeleni Jadar m'ont parlé, m'ont relaté les

22 opérations de combat.

23 M. Milosevic (interprétation): Donc je crois que les questions devraient

24 êtres posées à ces messieurs-là et non pas à vous, à ce sujet. Savez-vous

25 nous dire ce qu'était "Frenki"?

Page 18835

1 Témoin B-104 (interprétation): Pour autant que je le sache, "Frenki" était

2 le chef d'une unité qui a séjourné dans ce secteur-là.

3 Question: Bien. Saviez-vous qu'il était responsable d'un département du

4 renseignement au service de sécurité, qu'il vaquait à la collecte des

5 renseignements? Le saviez-vous ou pas?

6 Réponse: Non, je ne le savais pas.

7 Question: Mais était-ce là un officier de la JNA?

8 Réponse: Pour autant que je le sache, non.

9 Question: Et dans votre déclaration préalable, vous dites qu'il avait

10 commandé la 73e Brigade de parachutistes, la 74e Brigade de la Garde et

11 ainsi de suite. Expliquez-moi, je vous prie, ce qui suit: vous l'avez dit

12 de façon erronée ou vous maintenez vos dires aux termes desquels il aurait

13 commandé des unités militaires?

14 Réponse: Pour expliquer davantage...

15 Question: Allez-y.

16 Réponse: Monsieur "Frenki" n'a pas commandé cette 73e troisième Brigade de

17 parachutistes. Et j'ai dit qu'il était avec moi. Mais M. "Frenki" était

18 chargé de toutes les opérations conduites à Bajina Basta; c'est ce qu'on

19 m'a dit pendant que je me trouvais dans ce secteur.

20 Question: Mais hier, M. Groome ne vous a-t-il pas demandé si c'était lui

21 qui donnait des ordres? Et vous avez répondu que vous n'avez pas remarqué

22 personnellement qu'il donnait des ordres à qui que ce soit. Puis, il vous

23 a demandé si on le saluait comme un officier supérieur; et vous avez

24 répondu que vous n'avez jamais vu quelqu'un le saluer en tant que

25 supérieur hiérarchique. C'est bien ce que vous avez dit?

Page 18836

1 Réponse: (Inaudible.)

2 Question: Mais d'où tenez-vous, alors, ces renseignements au terme

3 desquels un chef de service de renseignement commanderait une unité

4 militaire quelconque? D'où tenez-vous ce type d'idée?

5 Réponse: Je vais répondre. Mon unité, ou la partie de mon unité qui

6 s'était trouvée dans ce secteur, avait un officier supérieur qui, lui,

7 collaborait avec M. "Frenki". Ils se concertaient sur toutes les actions

8 entreprises sur ce territoire.

9 M. Milosevic (interprétation): Mais étiez-vous présent?

10 M. le Président (interprétation): Laissez-le terminer sa réponse! Laissez

11 le témoin terminer.

12 Nous avons entendu son témoignage, Monsieur Milosevic. Il n'est pas vrai

13 qu'il n'a jamais affirmé qu'il n'y ait guère eu de salut. Il l'a dit, mais

14 le fait qu'il a soulevé, c'est qu'il n'avait jamais vu "Frenki" donner des

15 ordres aux membres de la JNA et qui l'auraient salué. Mais il était le

16 supérieur des unités de police et des "Loups", et ces derniers le

17 saluaient. Donc il était chargé de tout ce qui se passait à Bajina Basta

18 et il y avait un officier de la VJ qui a été chargé de communiquer avec

19 lui.

20 Ceci dit, allez de l'avant.

21 M. Milosevic (interprétation): Etiez-vous présent lorsque les ordres dont

22 vous parlez ont effectivement été donnés?

23 Témoin B-104 (interprétation): Je n'ai pas entendu la question.

24 Question: Je vous ai demandé: étiez-vous présent lorsque des ordres

25 quelconques auraient été donnés à l'intention d'un officier de la JNA ou

Page 18837

1 lors d'une concertation quelconque avec des officiers de la JNA?

2 Réponse: Je ne m'en souviens plus exactement. Je pense que si, mais je

3 n'arrive pas à m'en rappeler au juste.

4 Question: Vous ne pouvez pas vous en rappeler? Bien.

5 Vous dites à la page 6, paragraphe 8, que "Frenki" et "Arkan" ont créé

6 l'unité des "Loups de la Drina". Vous ajoutez que ceci a été fait à Knin

7 et que l'unité portait le "Knindze"?

8 Réponse: C'est ce que M. Max, M. Nedjo et l'autre homme, qui se trouvaient

9 dans la région, m'ont dit.

10 Question: Fort bien. Que savez-vous personnellement de ces événements?

11 Vous le savez sans doute, puisque vous dites que vous saviez d'où venaient

12 ces Loups de la Drina. Ils venaient de Bosnie, n'est-ce pas? Est-ce qu'il

13 s'agissait ici d'une unité de la police de la Republika Srpska ou est-ce

14 que ce n'est pas sûr?

15 Réponse: Posez-moi une question à la fois.

16 Question: Vous parlez d'une unité que vous appelez "les Loups de la

17 Drina". Est-ce que c'était une unité de police de la Republika Srpska?

18 Réponse: Non.

19 Question: Mais c'était une unité appartenant à qui?

20 Réponse: Les "Loups de la Drina" se composaient de policiers de la

21 République de Serbie et de villageois de la région, de la région de Bajina

22 Basta et de Skelani, de Bosnie.

23 Question: Fort bien. Et ces villageois, ils étaient de Bosnie?

24 Réponse: C'étaient des villageois de Bosnie.

25 Question: Bon. Mais alors, expliquez-moi comment cette unité a pu être

Page 18838

1 créée à Knin et porter le nom de "Knindza"? C'est ce que vous avez

2 déclaré.

3 Réponse: Messieurs les Juges, cette unité qui a été constituée à Knin

4 s'appelait "Knindza". Certains effectifs appartenant à cette unité sont

5 arrivés et ont créé les "Loups de la Drina" à Bajina Basta.

6 Question: En d'autres termes, ils sont venus de la Krajina. Est-ce que les

7 "Knindza" sont venus de la Krajina à Bajina Basta pour établir les "Loups

8 de la Drina"? C'est ce que vous nous dites?

9 Réponse: Ce que je dis, c'est que certains hommes sont arrivés; et ils

10 constituaient, si vous voulez, le cśur même, la base de cette unité, cette

11 unité qui s'appelait "Knindza". Et ces hommes ont créé les "Loups de la

12 Drina".

13 Question: Mais comment êtes-vous au courant de cela?

14 Réponse: Je pense avoir déjà répondu à cette question.

15 Question: Est-ce qu'il vous est arrivé de vous trouver à Knin?

16 Réponse: Non.

17 M. Milosevic (interprétation): Mais vous dites que ces gens étaient à

18 Knin. Comment le savez-vous?

19 M. le Président (interprétation): Il a déjà répondu. Il a dit qu'on lui

20 avait raconté cela.

21 M. Milosevic (interprétation): Bon, bon, Monsieur May.

22 M. le Président (interprétation): Vous avez encore deux minutes. Votre

23 temps est pratiquement épuisé.

24 M. Milosevic (interprétation): Mais deux minutes ne me suffiront pas;

25 parce que toutes ces bêtises, il faut quand même les évacuer. Il faut

Page 18839

1 tirer tout ceci au clair.

2 Vous dites que l'armée portait un uniforme de camouflage vert, la police

3 un uniforme de camouflage bleu et que les "Loups" étaient en uniforme

4 noir. C'est cela?

5 Témoin B-104 (interprétation): La police portait un uniforme de camouflage

6 vert; la police et les "Loups de la Drina" étaient en tenue de camouflage

7 bleue.

8 Question: Fort bien, mais… Oui, poursuivez.

9 Réponse: Certains "Loups de la Drina" étaient aussi en uniforme noir.

10 Question: Fort bien.

11 Réponse: Et il y avait même des "Loups de la Drina" en uniforme vert.

12 Question: Donc ils étaient soit en uniforme vert, bleu ou noir, ces "Loups

13 de la Drina", mais vous ne savez pas combien ils étaient? Je vous ai posé

14 la question hier; je voulais savoir combien de "Loups de la Drina" il y

15 avait, combien vous en avez vu.

16 Réponse: Monsieur le Président, Messieurs les Juges, ces "Loups de la

17 Drina", je ne sais pas combien ils étaient; parce que la plupart des

18 membres de l'unité étaient déjà engagés dans des combats de l'autre côté

19 de la Drina, sur l'autre rive. C'est uniquement le noyau de base de

20 l'unité et le soutien logistique qui se trouvaient cantonnés à l'hôtel de

21 Bajina Basta.

22 Question: Mais vous avez décrit l'uniforme de personnes que vous avez vues

23 et vous avez dit de ces hommes qu'ils n'étaient pas sur l'autre rive de la

24 Drina; vous avez dit les avoir vus à Bajina Basta. Ils étaient combien?

25 Réponse: J'ai vu ce noyau dur de l'unité à Bajina Basta, mais je les ai

Page 18840

1 vus également dans des jeeps blanches de type "Defender" qui étaient la

2 propriété de la République de Serbie. Je les ai vu franchir la Drina.

3 M. Milosevic (interprétation): Mais ceux que vous avez vus, ils étaient

4 combien?

5 Témoin B-104 (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

6 hier, j'ai déclaré qu'ils étaient environ une centaine. J'en ai vu, moi,

7 une centaine; mais je n'ai pas de chiffre exact parce que je n'ai jamais

8 fait le décompte.

9 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, ce sera votre

10 dernière question.

11 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, c'est absolument insuffisant.

12 Ça ne saurait être permis. Parce que ce témoin a fait toutes sortes

13 d'affirmations; sa déclaration préalable est très longue. Comment voulez-

14 vous que je l'interroge en si peu de temps?

15 M. le Président (interprétation): En fait, la déclaration préalable fait

16 huit ou neuf pages. Par rapport à beaucoup d'autres déclarations que nous

17 avons vues, ce n'est pas autant que cela.

18 Je vous ai donné un délai et vous devez en tenir compte pour poser vos

19 questions. Mais enfin, vous avez encore le temps de poser une question.

20 M. Milosevic (interprétation): Dites-moi, je ne vois pas, dans votre

21 déclaration, que vous parlez de la présence de condamnés dans cette unité.

22 Monsieur Groome vous a posé une question à ce propos hier et vous avez dit

23 qu'il y avait dans cette unité un certain "Pacov"; en français: "Rat".

24 Témoin B-104 (interprétation): Hier, en réponse, j'ai dit qu'il y avait

25 une dame, la secrétaire de "Frenki", et qu'elle m'avait dit que "Pacov"

Page 18841

1 était un ancien condamné qui avait purgé une peine au Kosovo. C'était

2 "Frenki" qui l'avait sorti de prison et qui l'avait amené sur ce champ de

3 bataille.

4 Question: Ça, c'est la secrétaire de "Frenki" qui vous l'a dit?

5 Réponse: (Inaudible.)

6 Question: Est-ce qu'elle vous a dit autre chose? Elle vous a parlé de la

7 présence d'autres personnes qui avaient déjà subi une peine de prison et

8 étaient condamnées dans cette unité?

9 Réponse: Je ne sais pas.

10 Question: Est-ce que, puisque vous êtes soldat ou ancien soldat, vous

11 trouvez important d'avoir la présence de condamnés dans une unité?

12 Réponse: Je pense que c'est important.

13 Question: Si vous estimez que c'est important, pourquoi ne pas l'avoir

14 mentionné dans votre déclaration préalable lorsque vous avez été interrogé

15 par les enquêteurs? Pourquoi avoir oublié ce fait important?

16 Réponse: J'ai sans doute oublié.

17 M. Milosevic (interprétation): Comment se fait-il que vous vous en soyez

18 souvenu hier?

19 Témoin B-104 (interprétation): Eh bien, je m'en suis souvenu.

20 M. le Président (interprétation): Fort bien.

21 Monsieur Tapuskovic, vous pouvez poser vos questions.

22 (Questions de l'amicus curiae, M. Tapuskovic, au témoin B-104.)

23 M. Tapuskovic (interprétation): Merci.

24 Monsieur le Témoin, en premier lieu, je voudrais revenir sur ce que vous

25 avez dit dans le cadre de l'interrogatoire principal, en réponse aux

Page 18842

1 questions posées par le Procureur. Hier, vous avez déclaré avoir vu en

2 Bosnie-Herzégovine, dans certains endroits, un grand nombre de victimes.

3 Est-ce exact?

4 Témoin B-104 (interprétation): Non.

5 Question: Ce n'est pas ce que vous avez dit hier, qu'en une occasion vous

6 aviez vu des victimes, alors que vous étiez à bord de votre hélicoptère?

7 Réponse: Non.

8 Question: Vous n'avez pas du tout fait état de victimes, hier?

9 Réponse: Si.

10 Question: Expliquez, s'il vous plaît, aux Juges dans quel contexte vous

11 avez mentionné ces victimes.

12 Réponse: J'ai dit qu'un collègue qui était avec moi m'en avait parlé.

13 Question: Donc vous ne l'avez pas vu de vos propres yeux?

14 Réponse: Non.

15 Question: Est-il exact que vous avez déclaré hier qu'à deux reprises, vous

16 aviez participé à la livraison de certains équipements?

17 Réponse: Oui.

18 Question: Est-ce que vous avez livré des armes?

19 Réponse: Je ne m'en souviens plus.

20 Question: Mais ce n'est pas ce que vous avez dit en réponse aux enquêteurs

21 du Tribunal. Dans votre première déclaration préalable, vous ne faites pas

22 du tout état de votre participation à de telles activités. Pourriez-vous

23 expliquer cela aux Juges?

24 Réponse: Je ne sais pas.

25 Question: Merci. Vous avez dit n'appartenir ou n'avoir appartenu à aucune

Page 18843

1 unité se trouvant sous le commandement de "Frenki"?

2 Réponse: C'est exact.

3 Question: Toutefois, dans votre déclaration fournie aux enquêteurs… Je ne

4 sais pas si vous l'avez sous les yeux?

5 Réponse: Non.

6 Question: Mais ça se trouve à la page 5, sixième paragraphe en version

7 anglaise. Je vais vous donner lecture de ce qui s'y trouve dans la version

8 en BCS. Vous dites que, lorsque vous êtes allé à Bajina Basta, vous avez

9 été versé dans une unité se trouvant sous le commandement de "Frenki";

10 est-ce exact ou pas?

11 Réponse: Oui. C'est vrai que j'étais affecté à une unité dont le chef

12 était M. "Frenki".

13 Question: Vous dites que vous vous êtes… Vous avez dit, il y a un instant,

14 que vous étiez dans une autre unité, sous le commandement de quelqu'un

15 d'autre?

16 Réponse: Je vous ai expliqué comment fonctionnait la filière de

17 commandement, la structure de commandement.

18 Question: Oui. Dans votre déclaration, page 5, paragraphe 5 en version

19 anglaise, il est dit que vous êtes arrivé à Bajina Basta et à Skelani au

20 cours de l'hiver 1993. Or, il y a un instant, vous avez parlé du printemps

21 et de l'été. Qu'est-ce qui est vrai: ce qui se trouve dans votre

22 déclaration ou ce que vous avez déclaré ici?

23 Réponse: La première fois que je me suis trouvé à Bajina Basta et à

24 Skelani, c'était au cours de la période intervenant entre l'hiver et le

25 printemps.

Page 18844

1 Question: Fort bien. Mais ce que vous avez déclaré à l'époque, c'est ceci:

2 vous avez dit que, la toute première fois où vous vous êtes trouvé à

3 Bajina Basta, vous êtes descendu dans un hôtel?

4 Réponse: Je n'y ai passé qu'une seule nuit.

5 Question: Mais où avez-vous passé le reste de vos nuits?

6 Réponse: A l'école élémentaire de Skelani.

7 Question: Combien de fois avez-vous transporté "Frenki" en hélicoptère?

8 Réponse: Je ne m'en souviens pas.

9 Question: Même pas à peu près?

10 Réponse: Non.

11 Question: Hier, vous avez déclaré que vous avez emmené "Frenki" à

12 Belgrade. Où est-ce que vous étiez?

13 Réponse: A l'arrière.

14 Question: Pourquoi l'arrière, alors que vous étiez quand même un

15 opérateur, un navigateur, un pilote? Qui est-ce qui était à votre place

16 d'opérateur?

17 Réponse: Monsieur "Frenki".

18 Question: Est-ce que ce n'était pas dangereux pour le vol?

19 Réponse: Si.

20 Question: Dites-moi autre chose: vous avez dit à plusieurs reprises que

21 des gens de l'unité de "Frenki" vous avaient raconté ce qui se planifiait,

22 ce qui devait se faire. Or, dans votre déclaration préalable, vous dites

23 que jamais il n'a été fait mention des missions censées être exécutées par

24 les hommes de son unité. Est-ce bien cela?

25 Page 8, premier paragraphe en version anglaise. Est-il exact de dire que

Page 18845

1 jamais ces hommes n'ont parlé des missions qu'ils étaient censés

2 effectuer?

3 Réponse: "Frenki" et ses hommes n'ont jamais parlé des opérations, des

4 actions qu'ils entreprenaient. Mais il y avait des récits, ce que les

5 hommes racontaient à leur retour de ces missions. Et de cette façon, il

6 était possible de prendre connaissance de certains détails.

7 M. Tapuskovic (interprétation): Je vous remercie. Je n'ai plus de

8 questions à vous poser.

9 (Interrogatoire principal supplémentaire du Témoin B-104 par M. Groome.)

10 M. Groome (interprétation): Encore quelques questions, Monsieur le

11 Président.

12 Monsieur Tapuskovic vient de vous poser une question et vous avez répondu

13 que, la plupart du temps, lorsque vous vous êtes trouvé à Bajina Basta,

14 vous avez passé la nuit à l'école élémentaire de Skelani. Est-ce exact?

15 C'est là que vous restiez?

16 Témoin B-104 (interprétation): Non, c'était uniquement la première fois où

17 je me suis trouvé à Bajina Basta.

18 Question: Lorsque vous étiez à l'école élémentaire, est-ce que c'est

19 quelqu'un qui vous a dit d'y aller, quelqu'un qui avait un poste de

20 responsabilité? Est-ce que c'est une telle personne qui vous a dit de

21 rester à l'école élémentaire, ou est-ce que vous avez décidé de le faire

22 vous-même?

23 Réponse: C'est M. Maxi (phon.) qui m'a dit d'aller à cette école

24 élémentaire. Ce sont des instructions que mes associés et moi nous avons

25 reçues.

Page 18846

1 Question: Skelani se trouve dans quelle République?

2 Réponse: En Bosnie-Herzégovine.

3 M. Groome (interprétation): Je n'ai plus d'autres questions. Je vous

4 remercie, Monsieur le Président.

5 (Questions de M. le Juge Kwon au Témoin B-104.)

6 M. Kwon (interprétation): Monsieur le Témoin B-104, je vais reposer une

7 question pour tirer quelque chose au clair.

8 Je vais vous donner lecture d'un passage de votre déclaration préalable

9 qui se situe à la page 7, aux alentours du sixième paragraphe: "Je me

10 souviens d'un incident ou d'un événement, sans me souvenir de la date ni

11 même de l'année, au cours duquel 'Frenki' est revenu de Belgrade".

12 Alors, il a appelé certains de vos collègues, que je ne mentionnerai pas

13 ici. Et moi, je poursuis la citation: "pour nous dire qu'il avait

14 rencontré le Président Milosevic qui avait donné l'ordre de détruire

15 quatre villages de la région de Srebrenica, au cours des quatre nuits

16 suivantes."

17 Vous avez répondu à l'accusé que vous ne vous souveniez pas de ceci. Est-

18 ce, là aussi, quelque chose que vous ont raconté des collègues ou pas?

19 Vous dites que vous ne vous en souvenez pas. Si c'est vrai, comment se

20 fait-il que ce passage figure dans votre déclaration préalable?

21 Témoin B-104 (interprétation): Monsieur le Juge, à son retour de Belgrade,

22 "Frenki" nous a invités à une réunion informelle; il nous a demandé de

23 quelle façon on pouvait se servir d'un hélicoptère. Je l'ai déjà expliqué,

24 j'ai dit ce qu'il en était. Mais je ne sais pas qui "Frenki" a rencontré à

25 Belgrade.

Page 18847

1 M. Kwon (interprétation): Je vous remercie.

2 M. le Président (interprétation): Monsieur le Témoin B-104, ceci met fin à

3 votre déposition. Merci de vous être mis à notre disposition en tant que

4 témoin. Votre déposition est terminée.

5 (Le Témoin B-104 disparaît de l'écran.)

6 (Fin de la vidéoconférence avec le Témoin B-104.)

7 (Audience publique.)

8 (Questions relatives à la procédure.)

9 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Groome?

10 M. Groome (interprétation): Le prochain témoin attend à l'extérieur du

11 prétoire. Et nous avons un substitut présent pour évoquer les questions

12 relatives à l'Article 92bis.

13 M. le Président (interprétation): Nous allons poursuivre les dépositions,

14 l'audition des témoins, tout d'abord.

15 M. Groome (interprétation): Le témoin suivant est un témoin protégé.

16 M. le Président (interprétation): Nous avons besoin des mesures de

17 protection. Est-ce qu'il y avait une ordonnance à cet égard?

18 M. Groome (interprétation): Oui, je peux vous en donner le détail.

19 M. le Président (interprétation): Avant d'oublier, je me rappelle que

20 l'accusé avait produit une pièce. Est-ce que nous l'avons déjà? Est-ce que

21 nous avons reçu le document de la part de l'accusé? Si ce n'est pas le

22 cas, essayons de l'obtenir maintenant.

23 Je pense qu'il est préférable de poursuivre l'audition des témoins. Nous

24 trouverons bien un moment, au cours de la journée, pour aborder ces

25 questions de droit.

Page 18848

1 M. Groome (interprétation): Nous appelons à la barre le témoin B-1493.

2 M. le Président (interprétation): Oui.

3 Le micro de l'accusé n'est pas branché.

4 (expurgé)

5 (expurgé)

6 (expurgé)

7 (expurgé)

8 M. le Président (interprétation): Une demande a été faite, une décision a

9 été prise, s'agissant des mesures de protection. Nous n'allons pas revenir

10 sur celle-ci. Nous verrons ce qu'il en est au moment où cet homme va

11 déposer.

12 (Audience publique avec mesure de protection à 10 heures 01.)

13 (Le Témoin B-1493 est introduit dans le prétoire.)

14 M. le Président (interprétation): Je vais demander au témoin de prononcer

15 la déclaration solennelle.

16 Témoin B-1493 (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la

17 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

18 M. le Président (interprétation): Veuillez vous asseoir. Merci.

19 (Le témoin s'assoit.)

20 M. Groome (interprétation): Pour être prudent, je voudrais demander à la

21 Greffière d'audience si la dernière intervention, le dernier échange a été

22 effectué en audience publique? Nous parlions du poste ou de la fonction

23 occupée par le témoin; est-ce que cela s'est fait en audience publique?

24 (Mme Thompson fait un signe affirmatif de la tête.)

25 Mme Thompson (interprétation): Oui, ceci a été dit en audience publique.

Page 18849

1 Si la demande en est faite, nous procéderons à une expurgation.

2 M. le Président (interprétation): Oui. Poursuivons.

3 (Interrogatoire principal du Témoin B-1493 par M. Groome.)

4 M. Groome (interprétation): Peut-on montrer au témoin l'intercalaire 1 du

5 recueil de pièces qui seront produites par son truchement? Peut-on aussi

6 attribuer une cote à ce document?

7 (Intervention de l'huissière.)

8 Mme Thompson (interprétation): Il s'agira de la pièce P425.

9 M. Groome (interprétation): Monsieur le Témoin B-1493, examinez la pièce

10 425, intercalaire 1.

11 Voit-on, sur ce feuillet, votre nom et votre date de naissance?

12 Témoin B-1493 (interprétation): J'ai examiné ce document. Toutes les

13 informations qui y sont consignées sont exactes.

14 Question: Et est-ce que votre nom figure sur ce document?

15 Réponse: Oui. J'ai signé ce document le 24 mars 2003.

16 Question: Est-ce qu'il y a, dans ce document, un résumé de votre parcours

17 professionnel et de votre formation?

18 Témoin B-1493 (interprétation): Effectivement, on trouve dans ce document

19 toutes les informations relatives à ma formation et à mon expérience

20 professionnelle.

21 M. Groome (interprétation): Je vous remercie. J'en ai terminé de ce

22 document. Je vais demander que l'on passe à huis clos partiel l'espace de

23 quelques questions de contexte.

24 (Huis clos partiel à 10 heures 05.)

25 (expurgé)

Page 18850

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11

12

13 Page 18850 –expurgées– audience à huis clos partiel.

14

15

16

17

18

19

20

21

22

23

24

25

Page 18851

1 (expurgé)

2 (expurgé)

3 (expurgé)

4 (expurgé)

5 (expurgé)

6 (expurgé)

7 (expurgé)

8 (expurgé)

9 (expurgé)

10 (expurgé)

11 (expurgé)

12 (expurgé)

13 (expurgé)

14 (expurgé)

15 (expurgé)

16 (expurgé)

17 (expurgé)

18 (expurgé)

19 (expurgé)

20 (expurgé)

21 (expurgé)

22 (expurgé)

23 (expurgé)

24 (expurgé)

25 (Audience publique avec mesures de protection à 10 heures 10.)

Page 18852

1 Mme Thompson (interprétation): Nous sommes en audience publique.

2 (expurgé)

3 (expurgé)

4 (expurgé)

5 (expurgé)

6 M. le Président (interprétation): Il n'est pas interrogé de manière

7 secrète. Comme vous le savez, l'essentiel de sa déposition se passe en

8 audience publique, même si l'on doit parfois passer à huis clos partiel.

9 Il ne s'agit donc pas de secret, il s'agit de huis clos partiel. Il y a

10 une différence entre les deux. Poursuivons.

11 M. Groome (interprétation): Je vais demander à ce que la dernière question

12 soit expurgée pour éviter d'identifier le moins.

13 M. le Président (interprétation): Bien.

14 M. Groome (interprétation): Monsieur, nous sommes en audience publique.

15 Première question: en mars 1991, en tant que haut gradé de la JNA, avez-

16 vous eu connaissance de l'élaboration d'un plan d'urgence?

17 Témoin B-1493 (interprétation): Oui. En mars 1991, mon commandement, où

18 j'occupais un poste de haut niveau s'agissant de la planification

19 opérationnelle et en temps de guerre, notre commandement a reçu l'ordre de

20 préparer un plan destiné à l'emploi de certaines unités en cas d'urgence.

21 Et, lorsque j'ai étudié ce plan, il faut savoir que jusqu'à ce moment-là

22 et jusqu'en 1988 j'avais déjà réalisé beaucoup de plans de ce genre. Cela

23 m'a paru étrange car c'était la première fois que l'on avait un plan de ce

24 type.

25 J'ai participé à la préparation de ce plan, c'est-à-dire à la préparation

Page 18853

1 de cartes du territoire de Croatie sur laquelle figurait l'ethnicité des

2 habitants. Il fallait que pour chaque village, même le plus petit qui

3 soit, on utilise un code couleurs qui permettent de déterminer quelle

4 était l'appartenance ethnique de la majorité de la population croate et

5 autres. Il fallait également indiquer sur cette carte les ponts, les

6 émetteurs radio, les centres de communication, toutes les installations

7 militaires ou civiles.

8 Question: Vous nous dites que ce plan se distinguait des autres plans sur

9 lesquels vous aviez travaillé par le passé. En quoi se distinguait-il de

10 ces plans?

11 Réponse: Ce plan était différent parce que jusqu'à cette époque-là, nous

12 n'avions jamais préparé de plan qui reposait sur l'appartenance ethnique

13 des habitants. On préparait des plans qui faisaient entrer en ligne de

14 compte tous les habitants de la Yougoslavie, quelle que soit leur

15 appartenance ethnique. Deuxième chose, dans ce plan, on évoquait la

16 possibilité d'un ennemi interne, de l'existence d'un ennemi interne.

17 Question: Est-ce que vous avez été en mesure de déterminer qui était cet

18 ennemi interne? Est-ce que c'était précisé?

19 Réponse: Oui.

20 Question: Pouvez-vous élaborer?

21 Réponse: Dans le plan, il était précisé que l'ennemi interne pouvait être

22 constitué par des extrémistes du HDZ.

23 Question: Est-ce que ce plan prévoyait un scénario qui permettait sur

24 lequel reposait ce plan?

25 Réponse: Comme je l'ai dit, je n'ai travaillé que sur une partie de ce

Page 18854

1 plan, c'est-à-dire sur les cartes.

2 Le premier document constituant ce plan, c'était l'ordre relatif à

3 l'emploi d'unité de la JNA et d'unités de la Défense territoriale. Chaque

4 unité se verrait affecter une zone de responsabilité dans la région.

5 Question: Avez-vous achevé le travail qui vous avez été confié sur ce

6 plan?

7 Réponse: Oui.

8 Question: Qui vous a donné l'ordre de travailler sur ce plan?

9 Réponse: C'était intitulé "Synthèse de préparation d'un plan". Notre unité

10 a reçu cette instruction de la part du commandement de la 1ère Région

11 militaire de Belgrade.

12 Question: Vous avez parlé de mars 1991, c'est le moment où l'on vous a

13 demandé de vous atteler à la préparation de ce plan. Est-ce qu'il a été

14 réalisé à ce moment-là ou est-ce que cela a duré un peu plus longtemps que

15 le mois de mars?

16 Réponse: A la fin du plan, il y avait une date butoir qui indiquait quand

17 le plan devait être finalisé et un exemplaire devait être remis au

18 commandement de la 1ère Région militaire de Belgrade; la date butoir étant

19 avril 1991.

20 M. Groome (interprétation): J'aimerais maintenant que nous parlions des

21 événements qui ont eu lieu en Croatie en mai 1991.

22 M. le Président (interprétation): Auparavant, je souhaiterais poser

23 quelques questions au témoin afin de préciser un certain nombre de points.

24 Je souhaiterai que l'on passe à huis clos partiel.

25 (Huis clos partiel à 10 heures 16.)

Page 18855

1 (expurgé)

2 (expurgé)

3 (expurgé)

4 (expurgé)

5 (expurgé)

6 (expurgé)

7 (expurgé)

8 (expurgé)

9 (expurgé)

10 (expurgé)

11 (expurgé)

12 (expurgé)

13 (expurgé)

14 (expurgé)

15 (expurgé)

16 (expurgé)

17 (expurgé)

18 (expurgé)

19 (expurgé)

20 (Audience publique avec mesures de protection à 10 heures 18.)

21 Mme Thomson (interprétation): Nous sommes en audience publique.

22 M. Groome (interprétation): J'aimerais que l'on parle maintenant des

23 événements qui ont eu lieu en Croatie en mai 1991. J'indique aux Juges de

24 la Chambre que les lieux auxquels va faire référence le témoin, se

25 retrouvent dans l'atlas fourni par l'accusation: pièce P336, page 23,

Page 18856

1 intersection D2.

2 Monsieur le Témoin, en mai 1991, avez-vous été membre d'un détachement qui

3 a été envoyé à Borovo Selo en Croatie?

4 Témoin B-1493 (interprétation): En mai… en fait le 2 mai 1991, après les

5 événements de Borovo Selo, mon commandant m'a convoqué et m'a ordonné de

6 commander un détachement conjoint qui devait aller se poster à Vinkovci

7 où, à ce moment-là, on lui communiquerait une mission plus détaillée.

8 Question: Veuillez expliquer aux Juges de la Chambre quelles étaient les

9 unités qui composaient ce détachement conjoint?

10 Réponse: On appelle cela un "détachement conjoint" ou "mixte", parce qu'il

11 ne s'agit pas d'une unité qui s'inscrit dans le cadre de la hiérarchie

12 habituelle. C'est un détachement constitué de plusieurs unités.

13 Il y avait un peloton ou une section de véhicules de transport de troupes

14 blindés, une section de "Praga", une section de policiers militaires, une

15 section de personnes chargées de la reconnaissance et une section du

16 génie.

17 Question: Vous utilisez le terme "Praga". A quoi faites-vous référence

18 exactement?

19 Réponse: Un "Praga" est un véhicule de marque, de fabrication tchèque,

20 blindé. Un véhicule de combat qui est destiné à viser des cibles qui se

21 trouvent dans les airs. Un véhicule très utile pour l'infanterie.

22 Question: Et quand vous avez commencé cette mission? Quel était, selon

23 vous, la nature de ce que l'on exigeait de ce détachement?

24 Réponse: Lorsque je suis parti pour participer à cette mission, je savais

25 à peu près parce que j'avais été informé du fait que des détachements

Page 18857

1 semblables avaient été constitués en Slavonie. Il y avait déjà un

2 détachement qui était en route, en passant Osijek, Nustar, Borovo Selo. Et

3 notre mission, c'était d'empêcher tout conflit entre les communautés

4 ethniques dans la région.

5 Question: Est-ce qu'une partie de ce détachement est arrivé à un certain

6 moment à Vinkovci?

7 Réponse: Nous sommes arrivés comme prévu vers 9 heures ou 9 heures 30 du

8 soir à Vinkovci. Nous nous sommes installés dans la caserne de Vinkovci.

9 J'ai dit aux hommes de se reposer, et moi-même aussi je me suis reposé

10 dans la nuit du 2 au 3 mai 1991.

11 Question: Pendant cette première nuit que vous avez passée à Vinkovci,

12 avez-vous entendu quoi que ce soit autour de vous, dans la zone qui vous

13 entourait?

14 Réponse: Pendant toute la nuit, il y a eu des tirs, des tirs qui

15 provenaient essentiellement d'armes d'infanterie.

16 Question: Pouvez-vous nous dire d'où venaient ces tirs, de quelle

17 direction ils venaient?

18 Réponse: Oui. On pouvait déterminer que cela venait des villages de

19 Mirkovci et Jankovci.

20 Question: Quelle est l'appartenance ethnique des habitants de ces

21 villages?

22 Réponse: Pour ce qui est du village de Mirkovci, il se trouve à 7,5 voire

23 8 kilomètres de Vinkovci. Et Jankovci se trouve à 10 voire 10,5 kilomètres

24 de Vinkovci. A Mirkovci, 100% des habitants sont serbes. Et Jankovci est

25 un village qui est habité de Croates pour 95% de la population. Il y a 6

Page 18858

1 maisons où il y avait 6 familles de Serbes.

2 Question: Sur la carte, il y a deux lieux qui s'appellent "Mirkovci" et

3 "Jankovci". Mais est-ce que Jankovci porte également une autre

4 dénomination? Une dénomination ou un toponyme plus précis.

5 Réponse: Il y a une route qui va de Vinkovci au village de Mirkovci. Et

6 ensuite, en poursuivant, on atteint le village de Jankovci.

7 M. Groome (interprétation): Je vais demander à ce que la page 23 de la

8 carte soit placée sur le rétroprojecteur. Et, Monsieur le Témoin, vous

9 voudrez bien vous munir du pointeur pour nous indiquer où se trouve

10 Vinkovci?

11 M. Kwon (interprétation): Ici, on voit qu'il y a deux Jankovci sur cette

12 carte: Stari Jankovci et Novi Jankovci. Veuillez, s'il vous plaît, nous

13 expliquer et nous préciser la chose, s'il vous plaît?

14 Témoin B-1493 (interprétation): Donc on parle de Vinkovci, on arrive au

15 village de Mirkovci, et ensuite il y a le village du vieux Jankovci, Stari

16 Jankovci. C'est ce qui est écrit sur la carte, c'est Jankovci le Vieux.

17 Mais Stari Jankovci et Novi Jankovci constituent pratiquement une seule et

18 même agglomération. Et c'est ici, près de Stari Jankovci, à ce carrefour,

19 en direction de Mirkovci, juste à côté de la route, c'est là qu'il y a

20 trois familles serbes. Il y a une maison qui se trouve de l'autre côté du

21 carrefour.

22 M. Groome (interprétation): Maintenant, j'aimerais que nous parlions de la

23 première journée que vous avez passé dans son intégralité à Vinkovci, et

24 je voudrais que vous nous expliquiez quelles ont été les activités du

25 détachement pendant cette journée-là?

Page 18859

1 Réponse: Le matin, nous nous sommes levés, nous avons pris notre petit

2 déjeuner, comme d'ordinaire, et nous avons commencé à nous préparer.

3 Et vers 11 heures, j'ai été appelé par la radio. Et, sur le télex, j'ai

4 reçu un ordre de mon commandant aux fins du déploiement de mon unité.

5 Question: Et de quelle manière vous a-t-on demandé de déployer votre

6 unité?

7 Réponse: Je vais ajouter que ce matin-là aussi on entendait des tirs. Et,

8 dans l'ordre, il était précisé que je devais organiser une colonne en

9 formation de combat pour me rendre le long de l'itinéraire indiqué et voir

10 ce qui se passait entre les villages de Mirkovci et Jankovci, pour faire

11 éventuellement le lien, faire la jonction avec l'autre détachement

12 conjoint qui avait été envoyé depuis Osijek.

13 Question: Et c'est ce que vous avez fait?

14 Réponse: Vers 11 heures et quart à peu près, j'ai pris la route avec la

15 colonne. Je suis arrivé au niveau des premières maisons avant le village

16 de Mirkovci et, sur la route, je suis tombé sur un barrage. C'est la

17 première fois que je voyais cela depuis que j'étais officier de l'armée

18 yougoslave.

19 Question: Vous nous parlez d'un barrage. Pouvez-vous être un peu plus

20 précis? Quelle était la nature de ce qui bloquait la route?

21 Réponse: Sur cette route, il y avait des chevaux, trois chevaux de frise,

22 ou plutôt quatre chevaux de frise. Et, à gauche et à droite, il y avait

23 des sacs, des empilements de sacs de sable. Et derrière ces sacs entassés,

24 on voyait une mitraillette, une mitrailleuse qui était braquée sur

25 Vinkovci. Et au milieu de ce barrage, il y avait un soldat qui portait un

Page 18860

1 uniforme; c'est pour cela que je dis que c'est un soldat. Quand je l'ai

2 vu, j'étais stupéfait, complètement, totalement stupéfait, parce qu'il

3 portait un uniforme de Tchetnik; il avait un chapeau en fourrure sur la

4 tête et il avait une mitraillette, un baudrier, des sortes… des pantalons

5 un petit peu spéciaux. Et il a arrêté la colonne. Il s'est placé devant

6 nous, il nous a arrêtés. Il disait que l'on ne pouvait pas passer sans

7 qu'il obtienne l'autorisation de son commandant.

8 Question: Vous nous parlez de ces chevaux de frise. En fait, il s'agit

9 d'une structure en fer qui est organisée de telle manière qu'il est

10 impossible à tout véhicule de franchir l'obstacle ou même de contourner

11 l'obstacle?

12 Réponse: Oui.

13 Question: Et, au moyen de vos doigts, vous formez un "X" pour nous

14 indiquer exactement à quoi ressemble cet obstacle?

15 Réponse: Il s'agit généralement d'obstacles qui sont faits de fer et qui

16 sont constitués de trois structures en fer pour bloquer les routes.

17 Question: Cet homme que vous nous avez décrit, qui portait un uniforme de

18 Tchetnik, est-ce que vous avez discuté avec lui?

19 Réponse: Non. Il m'a simplement dit, parce que je me trouvais en tête de

20 la colonne, il m'a dit: "Vous ne pouvez pas passer tant que mon commandant

21 ne vous y autorise pas". Et je lui ai demandé: "C'est qui ton

22 commandant?". Il m'a répondu: "Il est dans cette maison", une maison qui

23 se trouvait à une vingtaine de mètres. Je lui ai dit: "Est-ce que tu peux

24 appeler ton commandant?". Et à ce moment-là, il a appelé son commandant,

25 il est allé là-bas.

Page 18861

1 Au bout de dix minutes environ, un homme habillé exactement de la même

2 façon que lui est arrivé. Il a dit: "Qui êtes-vous?". Je lui ai répondu

3 que nous étions une unité de l'armée populaire yougoslave, que nous avions

4 reçu un ordre aux fins de rétablir l'ordre dans cette zone; et je lui ai

5 demandé d'enlever ces obstacles pour que puissions passer.

6 Il a répondu: "Pour cela, je dois recevoir l'autorisation de mon

7 commandant". A ce moment-là, je lui ai demandé qui était son commandant et

8 il m'a répondu que son commandement se trouvait à Sremska Mitrovica. Il

9 m'a donc demandé…, il a dit qu'il devait aller téléphoner pour obtenir

10 l'autorisation ou pas de nous laisser passer; c'est effectivement ce qu'il

11 a fait. Il est parti, il est revenu au bout de quelques minutes et il a

12 dit: "Sremska Mitrovica m'a donné l'autorisation". Et à ce moment-là, le

13 premier soldat, le soldat qu'on avait vu en premier, a poussé les

14 obstacles et nous avons traversé le village de Mirkovci pour arriver

15 jusqu'au village de Jankovci.

16 M. Groome (interprétation): Avant que je pose la question suivante, je

17 voudrais savoir quand la Chambre souhaite que nous fassions une pause.

18 M. le Président (interprétation): Nous allons faire la pause tout de

19 suite.

20 Monsieur le Témoin B-1493, nous allons faire une pause de 20 minutes. Au

21 cours de cette pause ainsi que de toute autre pause qui pourrait suivre

22 pendant votre déposition, je vous demande de ne parler à personne de votre

23 déposition, et ceci, jusqu'à ce que vous en ayez terminé. Et n'autorisez

24 personne à vous parler de cette déposition; et par "personne", j'entends

25 également les membres de l'équipe du Bureau du Procureur.

Page 18862

1 Audience suspendue pendant 20 minutes.

2 (L'audience, suspendue à 10 heures 32, est reprise à 10 heures 56.)

3 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Groome, allez-y.

4 M. Groome (interprétation): Monsieur, avant de continuer, j'aimerais vous

5 poser plusieurs questions encore sur ces chevaux de frise, ces obstacles

6 sur la route. Est-il exact ou serait-il exact de dire qu'il y avait, en

7 tout et pour tout, trois hommes se trouvant là?

8 Témoin B-1493 (interprétation): Oui, c'est exact. A ce barrage routier, il

9 y avait deux hommes allongés à côté de mitrailleuses et il y avait un

10 homme en plein milieu de ce barrage routier.

11 Question: Parlant de ces trois hommes, est-ce que vous comprenez la

12 personne qui était le commandant ou le chef, qui se trouvait à l'intérieur

13 de la guérite?

14 Réponse: Non.

15 Question: Vous nous avez décrit l'uniforme porté par l'un d'entre eux.

16 Comment étaient vêtus les deux autres hommes qui se trouvaient à ce

17 barrage routier?

18 Réponse: Le commandant et les autres hommes portaient le même uniforme,

19 avec les mêmes insignes.

20 Question: Vous nous avez dit que la première des personnes avec qui vous

21 vous étiez entretenu… Ou plutôt, je me reprends. Le commandant de ce

22 barrage routier, lorsque vous vous êtes entretenu avec lui, a dit qu'il

23 devait vérifier quelque chose avec son commandant à Sremska Mitrovica.

24 Dans quelle République se trouve Sremska Mitrovica?

25 Réponse: Sremska Mitrovica se trouve en République de Serbie.

Page 18863

1 Question: Est-ce que l'une quelconque des personnes se trouvant à ce

2 barrage routier aurait dévoilé le nom de l'organisation ou de l'unité à

3 laquelle ils appartenaient?

4 Réponse: Ni le commandant arrivé ultérieurement ni les soldats se trouvant

5 au barrage routier ne m'ont dit quelle était l'unité qui se trouvait à

6 Sremska Mitrovica.

7 Question: Combien d'hommes aviez-vous dans votre colonne?

8 Réponse: Il y avait, en tout et pour tout, quelque 120 hommes.

9 Question: Pouvez-vous nous expliquer pour quelle raison vous avez accepté

10 qu'ils se procurent d'abord une autorisation? Pourquoi n'avez-vous pas

11 forcé le passage à travers de ce barrage routier?

12 Réponse: D'abord, j'ai été surpris de voir sur la route des hommes dans

13 ces uniformes-là. Quoique j'aie eu vent, auparavant, de choses de ce

14 genre. Mais c'était la première fois que je vivais la rencontre avec un

15 barrage routier et des hommes en tenue de Tchetniks. Et ma mission n'avait

16 pas été celle-là; elle était tout à fait le contraire; mon commandant

17 m'avait donné instruction d'aller remettre de l'ordre et de faire en sorte

18 qu'il n'y ait plus d'échanges de tirs sur ce territoire-là.

19 Question: Combien de temps vous a-t-on gardé à ce barrage routier avant de

20 vous laisser passer?

21 Réponse: Ça a duré… 25 minutes à 30 minutes.

22 Question: Et où êtes-vous allé, une fois franchi le barrage routier?

23 Réponse: Une fois franchi ce barrage routier, j'ai traversé, donc, le

24 village de Mirkovci. Il y a un petit virage. Et lorsque je suis arrivé là-

25 bas, vers la fin du village de Jankovci, j'ai vu une maison en feu et j'ai

Page 18864

1 constaté qu'il y avait des coups de feu de tirés, là-bas; et je suis allé,

2 donc, avec cette colonne en direction de ce village de Jankovci.

3 Question: Laissez-moi vous poser une question au sujet de Mirkovci. Une

4 fois que vous avez traversé ce village, avez-vous remarqué quoi que ce

5 soit d'inhabituel? Y avait-il quoi que ce soit qui indiquerait qu'il y a

6 eu des combats ou des maisons en flammes là-bas?

7 Réponse: Dans le village de Mirkovci, il n'y a pas eu de choses

8 inhabituelles. Au bout du village, on entendait des tirs en direction de

9 Jankovci. Mais à l'entrée du village et dans le village même, il ne se

10 passait rien du tout, sauf le fait que je n'ai pratiquement vu aucune

11 personne dans les rues ou à proximité des maisons à côtés desquelles

12 passait la route, d'ailleurs.

13 Question: Et qu'avez-vous fait, une fois arrivé à Jankovci?

14 Réponse: Avant d'arriver à Jankovci, j'ai vu une maison brûler; c'était à

15 un demi kilomètre peut-être, ou un peu plus. J'ai stoppé le déplacement de

16 la colonne, j'ai réparti les blindés de transport de troupes et les

17 "Praga" en position de combat, et j'ai donné l'ordre à un homme de la

18 police militaire d'aller là-bas et d'étudier les raisons de cet incendie,

19 à la maison que l'on voyait, et de voir de quoi il en retournait au sujet

20 des tirs.

21 Question: Pendant le temps passé à Jankovci, avez-vous eu la possibilité

22 de vous entretenir avec l'un des responsables de la communauté locale du

23 village?

24 Réponse: Lorsque ma patrouille de police militaire et les policiers sont

25 revenus, ils m'ont dit qu'il y avait un groupe d'hommes armés qui

Page 18865

1 s'étaient enfuis en direction du village de Mirkovci lorsque la patrouille

2 est arrivée là-bas. Je leur ai alors fait prendre une formation de combat

3 et nous nous sommes déployés au niveau d'une maison entre Mirkovci et

4 Jankovci. Puis j'ai envoyé des éclaireurs pour que ceux-ci puissent

5 essayer de retrouver les présidents des communautés locales de ces

6 villages de Mirkovci et de Jankovci.

7 Question: La police militaire qui est venue vous présenter un rapport,

8 vous a-t-elle décrit quels étaient les uniformes portées par ces hommes en

9 arme?

10 Réponse: Ils m'ont dit qu'ils en ont vu quatre, et que l'un des quatre

11 portait un petit émetteur-récepteur, un walkie-talkie. Ils ont rapporté

12 qu'ils étaient vêtus de façon analogue aux personnes que nous avions déjà

13 vues au barrage routier.

14 Question: Le walkie-talkie qui vous a été confié, avez-vous reconnu là une

15 partie des équipements de la JNA?

16 Réponse: La JNA, à cette époque-là, n'avait pas de moyens de communication

17 de ce type. Elle disposait de moyens de communication de petite portée,

18 les RUP-3 que l'on utilisait au niveau ou à l'échelle des unités

19 militaires de la taille d'une compagnie.

20 Question: Avez-vous, par la suite, convoqué une réunion; réunion à

21 laquelle auraient participé des représentants des communautés locales de

22 ces deux villages, de Mirkovci et de Jankovci?

23 Réponse: Aussitôt après, il est arrivé un représentant du MUP, originaire

24 de Mirkovci. Dix minutes plus tard, il est venu le président de la

25 communauté locale de Jankovci. Et au bout d'une demi-heure, donc c'était à

Page 18866

1 peu près vers 6 heures et demie du soir, il y a le représentant de la

2 communauté locale de Mirkovci qui est arrivé, et nous avons pu entamer une

3 réunion conjointe dans cette maison-là.

4 Question: Je vous demanderai de nous décrire brièvement ce que l'on vous a

5 dit à cette réunion.

6 Réponse: Je me dois souligner la chose suivante: j'ai dit qu'au village de

7 Jankovci, les trois dernières maisons avant le carrefour et la maison

8 après le carrefour étaient des maisons serbes.

9 Il est donc venu les propriétaires de ces maisons; ils avaient demandé que

10 l'armée reste là pour protéger le village et leurs maisons. Et ils ont

11 précisé que c'étaient des personnes qui étaient venues là d'ailleurs, qui

12 n'étaient pas de Mirkovci. Et j'ai dit que la colonne, ce détachement a

13 été envoyé précisément pour protéger la population. Et, avec les

14 représentants de ces communautés locales et du MUP de Mirkovci, j'ai

15 d'abord expliqué quelle avait été ma tâche, quelle était la mission

16 confiée par mon commandant. Et j'ai demandé que soit mis un terme à toutes

17 les activités de combat parce que, dans le cas contraire, je me verrais

18 contraint de recourir à la force pour calmer la situation.

19 Question: Les personnes qui ont participé à cette réunion vous ont-elles

20 décrit ou indiqué quelles étaient les personnes qui s'étaient infiltrées

21 dans la région? Vous ont-ils décrit cela?

22 Réponse: Le président de l'assemblée communale de Mirkovci a dit que les

23 gens qui avaient érigé un barrage routier à Mirkovci et Jankovci m'avaient

24 affirmé que ce n'étaient pas des gens de cette localité, mais que

25 c'étaient des gens qui s'étaient infiltrés, qui venaient d'ailleurs. Puis,

Page 18867

1 il m'a dit que dans ces deux villages-là, pendant des siècles, il n'y

2 avait eu aucune sorte de conflit, que la coexistence était très bonne; et

3 qu'à toutes les fêtes de Noël ou de Pâques il y avait des visites

4 d'échangées, et qu'il y avait même des couples mixtes qui s'étaient

5 constitués entre les villageois de Mirkovci et de Jankovci.

6 Question: Pour que les choses soient tout à fait claires au compte rendu

7 d'audience, je vous demande de nous confirmer si vous nous dites bien

8 qu'on vous a précisé que les gens étaient venus ou s'étaient infiltrés

9 d'ailleurs, et que c'étaient ces gens-là qui ont détérioré les trois

10 maisons dont on a parlé à Jankovci?

11 Réponse: Moi, on m'a dit que c'étaient des gens qui s'étaient infiltrés;

12 c'est le président de l'assemblée communale de Mirkovci.

13 Et il n'y a qu'une maison de Croates à Mirkovci qui a été endommagée

14 jusqu'à la première maison qui se trouvait au carrefour. Au rez-de-

15 chaussée, il y avait une cafétéria; et aux deux étages du dessus, il y

16 avait des gens… enfin les occupants y habitaient, donc ce n'est qu'une

17 maison qui a été endommagée ou qui a été incendiée.

18 Question: Et dans la soirée du 3 mai, avez-vous envoyé un rapport à vos

19 supérieurs pour faire état des observations sur la situation dans cette

20 région?

21 Réponse: Après l'accomplissement de toute mission de combat, le commandant

22 d'une unité était censé présenter un rapport avant 22 heures du soir;

23 c'était un rapport de combat régulier. Après la réunion avec les

24 représentants que je vous ai cités, c'est précisément ce que j'ai fait.

25 J'ai envoyé directement un rapport à mon commandement et j'ai indiqué là

Page 18868

1 quand j'étais parti, ce que j'avais vu, ce que j'avais fait, la manière

2 dont j'ai déployé l'unité, j'ai décrit les obstacles rencontrés, j'ai

3 précisé les personnes que j'avais rencontrées. Et le chef du centre au

4 commandement a reçu ce rapport et l'a transmis directement au commandement

5 du 1er District militaire à Belgrade.

6 Question: Et dans ce rapport-là, avez-vous parlé de ce qui s'était passé

7 au barrage routier?

8 Réponse: Précisément, j'ai décrit ce que j'ai énuméré dans ce rapport que

9 j'ai rédigé.

10 Question: Vous nous avez précisé que votre police militaire vous avait

11 informés du fait de l'existence d'un groupe de gens infiltrés qui

12 s'étaient enfuis par la suite en direction de Mirkovci. Est-ce qu'il y a

13 eu, par la suite, des échanges de tirs ou des confrontations autres, si

14 vous vous en souvenez, du temps où vous étiez là-bas?

15 Réponse: Dans la nuit du 3 au 4 mai de l'année 1991, il n'y a plus eu -en

16 gros- d'échanges de tirs. On a entendu des tirs sporadiques en provenance

17 de Mirkovci ou au bout… en provenance du bout du village de Mirkovci. Mais

18 on ne pourrait pas décrire cela comme des coups de feu échangés au village

19 de Jankovci. Il y avait peut-être des tirs d'intimidation ou des gens qui

20 étaient saouls et qui ouvraient le feu, mais la situation s'était en fait

21 calmée.

22 Question: Avez-vous convoyé des hommes placés sous votre commandement? Les

23 avez-vous disposés de façon à prévenir les conflits futurs, des conflits

24 ultérieurs?

25 Réponse: Comme je l'ai dit, lorsque cette colonne est arrivée à Mirkovci

Page 18869

1 et Jankovci, c'est justement ce que j'ai fait. Au moment où je suis

2 arrivé, les conflits battaient leur plein et j'ai fait prendre une

3 formation de combat à mon unité.

4 Après l'arrivée de cette patrouille de la police militaire, nous avons

5 réajusté ce déploiement des effectifs, parce que la nuit approchait et,

6 s'agissant des blindés de transports de troupes et des "Praga", il fallait

7 sécuriser, moyennant personnels, dans le courant de la nuit pour éviter

8 toute surprise.

9 Question: Est-ce que, plus tard, vous avez reçu une réponse quelconque au

10 rapport que vous aviez expédié en date du 3 mai, à vos supérieurs?

11 Réponse: Le 4 au matin, j'ai reçu une réponse de mon supérieur me disant

12 de maintenir ce déploiement et de rester là pour assurer l'ordre et la

13 paix publique. Et en réalité, ce 4 mai, dans le secteur, on ne pouvait

14 plus entendre que des coups de feu sporadiques. Il n'y a pas eu

15 d'activités ou d'opérations proprement dites.

16 Question: Que s'est-il passé le 5 mai?

17 Réponse: Le 5 mai, vers 10 heures, un de mes collègues est arrivé à bord

18 d'une voiture "Zastava 101", avec des ordres de mon commandant, où il

19 était dit que c'était lui qui était nommé à la tête de ce détachement

20 conjoint et que moi, je devais revenir au commandement. Nous avons donc

21 procédé à une passation de fonctions.

22 On m'a également donné l'ordre de retourner vers Sid, où je devais prendre

23 en charge deux soldats qui se dirigeaient vers Belgrade. C'est ce que j'ai

24 fait, précisément.

25 Question: Est-ce que cela était inaccoutumé que de recevoir des ordres de

Page 18870

1 cette nature, en pleine opération que vous étiez en train de réaliser?

2 Réponse: Probablement, oui.

3 Question: Après avoir quitté ce secteur, avez-vous ouï dire ce qui s'était

4 passé avec ce détachement conjoint qui était stationné dans le secteur?

5 Réponse: Suite à mon départ, vers le 7 mai, ou du 7 au 8 mai, il y a eu

6 des confrontations violentes dans le secteur, donc entre ces villages de

7 Mirkovci et Jankovci, et c'est pratiquement à ce moment-là que l'on peut

8 dire que la vraie guerre a commencé dans le secteur.

9 Ce que je puis ajouter, c'est que s'agissant des propriétaires de ces

10 quatre maisons, à compter du 6 mai ils ont envoyé une lettre à mon

11 commandement supérieur en demandant que je revienne d'urgence sur ce

12 territoire. Le document peut être retrouvé au centre opérationnel du 1er

13 District militaire.

14 Question: Lorsque vous êtes rentré au commandement qui était le vôtre,

15 vous êtes-vous entretenu avec votre supérieur au sujet de ce qui s'était

16 passé en Croatie?

17 Réponse: Une fois rentré au commandement supérieur, j'ai, d'office, dû me

18 rendre chez le commandant qui m'avait nommé à ce poste pour lui présenter

19 un rapport oral. Mais dès que je suis entré dans son bureau, il m'a posé

20 la question de savoir quel était ce rapport que j'avais envoyé. C'était un

21 rapport de combat ordinaire. Il m'a dit: "Mais quel type, quel genre de

22 Tchetnik tu as pu voir? Tu n'as vu que des 'matous'".

23 (Note de l'interprète de la cabine française: ce sont des voyous.)

24 Question: Que lui avez vous répondu?

25 Réponse: Je lui ai dit: "Mon commandant, j'ai vu de véritables Tchetniks

Page 18871

1 tels que je les avais vus dans le film appelé 'Kozara', puis le film

2 'Sutjeska', et le film intitulé 'Neretva'.". Et il m'a dit: "Mais c'est

3 impossible!".

4 Question: Vous a-t-il dit quelle avait été la réponse du 1er District

5 militaire s'agissant de votre rapport?

6 Réponse: Il ne me l'a pas dit. Mais c'est le chef du centre opérationnel

7 qui m'a précisé qu'il y a eu une réaction du 1er District militaire

8 demandant pourquoi un rapport de cette nature leur était parvenu. Et mon

9 commandant supérieur a été critiqué pour cette raison; on lui a demandé

10 d'expliquer pourquoi il n'avait pas, d'abord ou au préalable, procédé à

11 des vérifications lui-même s'agissant de ce rapport.

12 Question: Mais, à peu près à cette époque-là, quelle était la composition

13 ethnique des officiers dans votre corps? Et est-ce que cette composition

14 ethnique a évolué?

15 Réponse: A cette époque, au commandement -au sens restreint du terme- où

16 je me trouvais, pour ce qui est des non-Serbes, il n'y avait que moi et un

17 autre officier du groupe ethnique croate. Tous les autres, le commandant,

18 le chef de l'état-major, les adjoints dans leur totalité étaient tous des

19 Serbes.

20 Question: Est-ce qu'il en a toujours été ainsi?

21 Réponse: Il n'en a pas été ainsi toujours depuis la formation de mon

22 unité, mais à compter de 1988, date de sa formation jusqu'en 1990, la

23 composition était mixte. Or, le commandement du corps, lui, était de cette

24 composition-là.

25 Au niveau des unités inférieures, il y avait au commandement des brigades

Page 18872

1 des gens qui n'étaient pas serbes. Mais à compter de 1990, pratiquement

2 aucun commandant, à partir du bataillon jusqu'au commandement le plus

3 élevé, il n'y avait pratiquement pas d'officiers non-serbes.

4 Question: Dans le courant de cette période-là, été/début automne 1991,

5 votre accès aux informations se trouvait-il restreint ou pas?

6 Réponse: Je vous ai dit au tout début qu'au commandement supérieur qui

7 était le mien, j'ai exercé un rôle important, sinon décisif, pour ce qui

8 est de la planification opérationnelle. Une fois revenu là-bas, donc au

9 bout de 15 jours, on m'a donné l'ordre de procéder à une passation de ces

10 fonctions. On m'a pratiquement interdit l'accès à la salle opérationnelle

11 où l'on élaborait les plans de combat. Mes fonctions n'étaient plus en

12 corrélation avec quelque planification que ce soit.

13 Question: Mais avez-vous été critiqué ou sanctionné sur un plan

14 disciplinaire, ou vous a-t-on accusé de quelque chose pour expliquer

15 l'interdiction aux informations, vous concernant?

16 Réponse: Je n'ai pas eu de sanction disciplinaire, mais j'ai été

17 suffisamment puni du fait de me voir interdire l'exercice des tâches que

18 j'avais accomplies jusqu'en 1988, jusque-là.

19 Question: Au cours de cette même période-là, avez-vous assisté à un

20 discours où quelqu'un se serait adressé à un groupe important de soldats

21 de la JNA, et cela vous a-t-il troublé?

22 Réponse: Vers l'automne -je crois qu'il devait s'agir du mois d'octobre-,

23 j'ai fait partie d'une équipe qui s'était vu confier la mission de

24 procéder à la mobilisation d'une brigade à Bijeljina. Je me souviens que

25 l'on avait désigné le colonel Simic Novica aux fonctions de commandant de

Page 18873

1 cette brigade. Et cette brigade, elle, avait pour mission, une fois la

2 mobilisation achevée, de procéder à une marche forcée pour se diriger vers

3 le secteur de Okucani et de Gradiska.

4 Dans le courant de cette mobilisation, nous avons dû accomplir des

5 missions variées; et j'ai été l'un des rapporteurs chargés de la

6 mobilisation. Donc je n'ai plus occupé les fonctions que je vous ai citées

7 auparavant; j'ai été révoqué et affecté à des fonctions subalternes, dans

8 un département autre. La mobilisation a duré deux jours. Un bataillon de

9 cette brigade a été mobilisé à partir du territoire de Bijeljina et des

10 alentours de cette localité de Bijeljina, et un autre bataillon provenait

11 du secteur ou de la région de Sabac et de ses environs. Un autre Bataillon

12 provenait de Sremska Mitrovica et de ses alentours.

13 Les hommes… plutôt les soldats qui venaient dans le cadre de ces

14 bataillons et qui venaient du territoire de la Serbie, portaient des

15 uniformes de la JNA. Toutefois, 90% d'entre eux ne portaient plus, sur

16 leur couvre-chef, les insignes de la JNA; ils portaient des insignes de

17 Tchetniks. En sus, il n'y a pas eu de réaction. Notre chef d'équipe n'a

18 pas réagi, on a procédé à la mobilisation. Nous avons constitué des unités

19 à compter des pelotons, sections, jusqu'aux compagnies, et nous avons

20 constitué cette brigade.

21 Le premier jour, vers 15 heures, il a été procédé à un alignement des

22 hommes de la brigade. Et à l'occasion de cet alignement, il a été présenté

23 un rapport au chef de mon équipe qui avait un niveau, un grade de général.

24 Il a salué les personnes présentes et, comme la coutume l'exigeait, il a

25 tenu un discours, un discours de préparation sur le plan du moral des

Page 18874

1 troupes, avant le déplacement de cette brigade pour l'accomplissement de

2 missions.

3 Alors, on n'a pas dit "Camarades soldats, salut!" comme à l'accoutumée,

4 mais on a dit: "Dieu vous vienne en aide, héros!".

5 Puis, il leur a dit: "Vous êtes des soldats serbes courageux appelés à

6 vous en aller d'ici pour vous diriger vers des territoires où il vous

7 appartiendra de protéger le peuple serbe en Croatie". Quelques autres

8 éléments de phrases ont été prononcés, mais c'est ce que j'ai gardé en

9 mémoire. Et nous autres, mes collègues et moi, même mes collègues serbes,

10 étions surpris de cette façon de procéder, de la part de notre commandant.

11 Question: Quelques brèves questions au sujet de cet événement. Pouvez-vous

12 nous dire combien d'hommes compte généralement une brigade?

13 Réponse: Tout dépend. Cela dépend de la brigade. Ici, il s'agissait d'une

14 brigade légère qui compte 1.500 à 2.000 hommes.

15 Question: Ce qui s'est passé, cet événement, ce discours, il a été

16 prononcé devant 1.500 à 2.000 hommes? C'est bien exact?

17 Réponse: Oui, c'est exact.

18 Question: Vous nous dites que les personnes qui ont été mobilisées en

19 Serbie avaient des couvre-chefs qui étaient différents de ceux qui étaient

20 généralement portés par les soldats de la JNA. Est-ce qu'on pouvait

21 considérer qu'il s'agissait là d'une infraction au règlement de la JNA?

22 Réponse: Les soldats qui ont été mobilisés dans la région de Samac et

23 Sremska Mitrovica, pour beaucoup d'entre eux, ne portaient pas le couvre-

24 chef Titovka qui était porté par les membres de la JNA. Ils portaient des

25 sajkaca, ce sont d'autres types de couvre-chefs. Et, sur ces couvre-chefs,

Page 18875

1 ils ne portaient pas l'étoile à cinq branches, mais un insigne tchetnik.

2 Question: Ce qui constituait donc une infraction au règlement en vigueur

3 dans la JNA?

4 Réponse: Oui, dans des circonstances normales, cela n'aurait pas pu se

5 produire, vu les circonstances qui existaient à ce moment-là. Mais on peut

6 considérer que c'était indéniablement une infraction très grave au

7 règlement existant dans l'Armée populaire yougoslave, à l'époque. Et

8 auparavant, les gens auraient dû rendre compte d'un acte de ce genre et

9 auraient même été mis aux arrêts.

10 Question: S'agissant de la teneur du discours qui a été prononcé, est-ce

11 que l'on peut considérer que c'était un discours approprié? Un discours

12 approprié pour être prononcé devant les soldats de la JNA?

13 Réponse: C'était la première fois que j'entendais quelqu'un s'adresser à

14 une unité de la JNA, de ce qui était encore de la JNA, de cette manière.

15 Deuxième chose, jamais jusqu'alors je n'avais rien entendu de tels propos

16 être prononcés devant une unité qui s'apprêtait à aller en mission.

17 Jamais, même en temps de paix, je n'avais entendu un discours de ce genre.

18 Question: Maintenant, Monsieur, j'aimerais que nous passions à un autre

19 sujet. Dans le cadre de vos fonctions, avez-vous eu connaissance du fait

20 que des membres de la Défense territoriale de Serbie aient été déployés à

21 l'extérieur du territoire de la République de Serbie?

22 Réponse: Dans le cadre de mes fonctions, j'ai appris et j'ai pu voir

23 d'ailleurs que des membres de la Défense territoriale venant de République

24 de Serbie étaient employés ou déployés sur des territoires situés à

25 l'extérieur de la République de Serbie. Une brigade de la Défense

Page 18876

1 territoriale de Loznica est, à plusieurs reprises, venue de Loznica, dans

2 la région où je me trouvais. Et cette unité est venue pour assurer son

3 ravitaillement, pour se reposer, pour se ravitailler, et ensuite pour

4 mener à bien des opérations de combat en Croatie.

5 Je sais, d'autre part, qu'un bataillon de la Défense territoriale de

6 Serbie a été employé pendant l'attaque contre Zvornik et aux fins de cette

7 attaque.

8 Question: Afin que les choses soient bien claires, pouvez-vous nous dire à

9 quelle République appartient Loznica, où se situe Loznica?

10 Réponse: Cela se situe en République de Serbie.

11 Question: Pouvez-vous dire aux Juges de la Chambre ce qui doit être fait,

12 quelles autorisations doivent être données pour que des unités de la

13 Défense territoriale d'une République soient déployées à l'extérieur de

14 cette République?

15 Réponse: En Yougoslavie, la Défense territoriale était constituée au

16 niveau des Républiques. Il y avait un état-major, au niveau de la

17 République, pour la Défense territoriale et qui dépendait des dirigeants

18 militaires, donc des dirigeants politiques, donc du Président de la

19 République.

20 Et la Défense territoriale et l'état-major de la Défense territoriale au

21 niveau des Républiques relevaient du Président de la République en

22 question. C'était la même chose dans toutes les Républiques constituant la

23 Yougoslavie.

24 Question: Passons maintenant à un autre sujet. Dans le cadre de vos

25 fonctions, avez-vous eu connaissance de tentatives effectuées pour

Page 18877

1 s'emparer des armes entreposées dans les dépôts de la Défense territoriale

2 en Bosnie-Herzégovine?

3 Réponse: L'état-major général de l'armée… enfin, non. C'est l'état-major

4 général de la JNA qui a donné un ordre, selon lequel toutes les armes de

5 la Défense territoriale qui étaient entreposées dans les entrepôts de la

6 Défense territoriale, qui étaient gardées, nettoyées, employées lors

7 d'exercices militaires; donc ordre pour que toutes ces armes soient

8 confisquées et soient placées dans des entrepôts contrôlés par la JNA.

9 Ceci a été réalisé à 100% en Bosnie-Herzégovine, et presque au même niveau

10 en Croatie. Mais cela n'a pas été possible en Slovénie parce que les

11 Slovènes s'y sont opposés.

12 Question: Mais s'agissant des zones que vous connaissez, des régions que

13 vous connaissez, est-ce que ceci a été fait de manière systématique et

14 uniforme quelle que soit l'appartenance ethnique de la majorité de la

15 population?

16 Réponse: Les armes de la Défense territoriale ont été confisquées et mises

17 sous le contrôle et dans les entrepôts de la JNA, et ceci de manière

18 uniforme, quelle que soit l'appartenance ethnique des zones concernées.

19 Question: Avez-vous appris plus tard que certaines de ces armes avaient

20 été ensuite redistribuées après avoir été confisquées et placées sous la

21 garde de la JNA?

22 Réponse: Au cours du printemps de 1992 -au cours du mois de février, du

23 mois de mars-, on a commencé à distribuer des armes de la Défense

24 territoriale et à les transporter à partir des entrepôts de la JNA, pour

25 être distribuées, généralement aux états-majors municipaux de la Défense

Page 18878

1 territoriale, dans les municipalités habitées par des Serbes.

2 Question: Comment avez-vous appris cela?

3 Réponse: J'ai moi-même vu et assisté au chargement d'armes et j'ai vu des

4 colonnes partir transportant ces armes.

5 Question: Est-ce que vous pouvez nous donner des noms de lieux, de

6 localités dont vous savez personnellement quelles ont reçu des armes de

7 cette manière?

8 Réponse: D'où je me trouvais, on a amené des armes à Sekovici, Vlasenica,

9 Lopare, Ugljevik. C'est ce que j'ai vu. J'ai vu des colonnes partir et

10 j'ai assisté au chargement des armes. Ceci s'est déroulé à peu près au

11 mois de mars 1992.

12 Question: La Chambre a déjà entendu des dépositions ou des témoignages au

13 sujet du retrait de troupes de Croatie et de Slovénie. Je ne veux pas que

14 nous nous concentrions exclusivement sur le retrait des troupes, mais

15 j'aimerais que vous nous disiez si les troupes se sont retirées, où ces

16 troupes se sont postées, où elles se sont installées en Bosnie?

17 Réponse: Le plus souvent, les unités qui venaient de la République de

18 Croatie et de la République de Slovénie, venaient en Bosnie-Herzégovine où

19 elles étaient ensuite déployées.

20 Dans la région où je me trouvais, où j'étais posté, on a vu arriver une

21 unité aux très forts effectifs, qui venait de Jastrebarsko en Croatie, la

22 4e Brigade blindée. Et cette brigade a été déployée là où se trouvaient

23 des municipalités dont la population était à majorité serbe. Je peux vous

24 dire que cette unité était constituée d'un bataillon de chars T-84, et il

25 y avait également deux bataillons avec des T-55.

Page 18879

1 Il y avait un bataillon dans la région de Sekovici et dans les villages de

2 la municipalité de Sekovici; un bataillon au niveau de l'aéroport pour y

3 assurer la sécurité, ainsi qu'un bataillon à partir de Zvornik et vers

4 Bijeljina.

5 Question: Vous parlez d'un bataillon de chars. Combien de chars cela

6 représente-t-il?

7 Réponse: 31.

8 Question: Et êtes-vous en mesure de vous souvenir de la période où cela

9 s'est passé?

10 Réponse: Cette brigade est arrivée à l'automne 1991. Et je sais que le

11 commandant de la brigade, ainsi que les autres commandants dans cette zone

12 de cette responsabilité, a été reçu par le Président de la municipalité

13 -c'était la plus grande municipalité de la région-, et ceci, vers le 31

14 décembre.

15 Question: Est-ce qu'au bout d'un moment, les principaux entrepôts qui se

16 trouvaient dans la région où vous étiez ont été vidés et les marchandises

17 qui s'y trouvaient ont été transportées ailleurs?

18 Réponse: Pour ce qui est des entrepôts, des commandements et des unités

19 sur le territoire de Bosnie-Herzégovine, on a essayé d'éliminer au

20 maximum… ou d'éviter les erreurs qui avaient été commises par la JNA en

21 Slovénie et en Croatie. On a essayé de ne pas reproduire les mêmes

22 erreurs, les mêmes oublis.

23 Et dans toutes les zones où la population était à majorité croate ou

24 bosnienne, on a fait en sorte de vider tous les entrepôts pour aller

25 réinstaller tout cela dans les zones à majorité serbe. Même chose

Page 18880

1 d'ailleurs pour les commandements et postes de commandement ou les

2 quartiers généraux; ils ont été réinstallés dans les villes où la majorité

3 de la population était serbe. Et à la fin du mois de mars 1992, ce

4 processus avait été achevé.

5 Question: Quelle a été la réaction des officiers se trouvant dans votre

6 commandement, à ce transfert de troupes, ce transfert de marchandises?

7 Réponse: A cette époque, nous, officiers qui n'étions pas serbes, avions

8 déjà compris qu'il se préparait quelque chose en Bosnie-Herzégovine

9 également. C'est apparu tout à fait manifeste parce qu'il n'y a aucun

10 officier non serbe qui ait suivi ces commandants supérieurs pour se

11 déplacer. Mais généralement, les officiers qui n'étaient pas serbes ou les

12 Serbes qui étaient mariés avec des Croates ou avec des Bosniennes, ces

13 gens-là sont restés sur l'ancien poste de commandement et on leur confiait

14 des missions subalternes.

15 M. Groome (interprétation): Je souhaiterais m'adresser à la Chambre avant

16 de présenter une nouvelle pièce au témoin.

17 Le témoin a fourni récemment une cassette vidéo au Bureau du Procureur. Ce

18 n'est que demain matin que nous disposerons des exemplaires pour

19 communication aux parties. Je souhaiterais simplement demander qu'une cote

20 soit attribuée à ce document ou à cette vidéo aux fins d'identification.

21 Je voudrais poser quelques questions au témoin à ce sujet. Et une fois que

22 nous disposerons des transcriptions de ce qui figure dans cette vidéo, on

23 pourra la communiquer à toutes les parties.

24 M. le Président (interprétation): Bien.

25 M. Groome (interprétation): Donc je demande que la pièce qui figure à

Page 18881

1 l'intercalaire n°5 du document P425 soit présentée au témoin.

2 (Intervention de l'huissière.)

3 Monsieur le Témoin, hier, est-ce que vous avez pu visionner la copie d'une

4 cassette vidéo que vous avez remise au Bureau du Procureur?

5 Témoin B-1493 (interprétation): Oui.

6 Question: Est-ce que c'est la cassette vidéo que vous avez en main?

7 Réponse: Oui.

8 Question: Comment savez-vous qu'il s'agit de cet exemplaire?

9 Témoin B-1493 (interprétation): Je le sais parce que je l'ai visionnée; et

10 j'ai signé moi-même sur cette cassette, le 8 avril 2003.

11 M. Groome (interprétation): En quelques mots, pouvez-vous nous dire quel

12 est le contenu de cette cassette, ce qu'on peut y voir?

13 Réponse: Sur cette cassette, le commandant de la 2e Région militaire, le

14 général Kukanjac, donne une interview à Risto Djogo en juin 1992. Il donne

15 une interview à un journaliste de la chaîne serbe "Srna". Et ce qui est

16 important ici…

17 M. le Président (interprétation): Je vais vous interrompre. Je pense qu'il

18 va falloir s'interroger sur la possibilité ou non d'admettre cet élément

19 de preuve. Lorsque nous aurons une transcription des propos tenus sur

20 cette cassette, nous pourrons les examiner. Parfois, ce genre d'éléments

21 de preuve donne lieu à objection. Probablement que cela ne sera pas le cas

22 en l'espèce, mais nous attendrons d'avoir la transcription.

23 M. Groome (interprétation): Mais est-ce que je peux lui demander comment

24 il est entré en possession de cette cassette?

25 M. le Président (interprétation): Oui.

Page 18882

1 M. Groome (interprétation): Monsieur le Témoin, comment se fait-il que

2 vous possédiez cette cassette vidéo?

3 Témoin B-1493 (interprétation): Il s'agit d'un enregistrement,

4 enregistrement d'une émission qui est passée sur la chaîne de télévision

5 serbe "Srna".

6 Question: Dans le cadre de vos fonctions, est-ce que vous avez eu des

7 contacts avec le général Kukanjac? Est-ce que vous connaissez sa voix?

8 Réponse: J'ai travaillé avec lui longtemps, pendant de nombreuses années.

9 Question: Et vous connaissiez sa voix? C'est bien sa voix qu'on entend sur

10 cette cassette?

11 Réponse: C'est sa voix et puis, c'est aussi lui qu'on voit.

12 Question: Merci. Maintenant, j'aimerais que nous parlions du référendum

13 qui s'est tenu en Bosnie-Herzégovine au cours du mois de mars 1992.

14 Pouvez-vous nous dire quelle a été votre réaction à vous, ainsi que la

15 réaction d'autres officiers ou soldats au sein du commandement, à ce

16 référendum?

17 Réponse: En premier lieu, je dois vous dire qu'à l'époque je n'avais aucun

18 homme sous mes ordres parce que, comme je vous l'ai dit, on m'avait confié

19 des fonctions tout à fait subalternes. Et je dois dire que la plupart des

20 officiers qui travaillaient au commandement où j'étais moi-même, même

21 d'ailleurs des officiers serbes, avaient voté lors de ce référendum.

22 Vu les événements et l'évolution de la situation en Yougoslavie, il était

23 tout à fait normal qu'il y ait un tel référendum sur le territoire de la

24 Bosnie-Herzégovine.

25 Alors que, quand toutes les autres tentatives ont été couronnées d'échec,

Page 18883

1 on menait à un échec, confédération, etc., nous avons considéré que

2 c'était tout à fait normal.

3 Monsieur le Président (interprétation): Nous avons déjà entendu beaucoup

4 de témoins à ce sujet. Mieux vaut se concentrer sur ce que le témoin a

5 personnellement entendu ou vu.

6 M. Groome (interprétation): J'aimerais que l'on passe à la fin du mois de

7 mai 1992, après le retrait officiel de la JNA de Bosnie. Pouvez-vous nous

8 faire part d'informations que vous auriez au sujet de la présence de la

9 JNA en Bosnie après cette période?

10 Témoin B-1493 (interprétation): Après le retrait de l'Armée populaire

11 yougoslave du territoire de Bosnie-Herzégovine, et une fois que cette JNA

12 a virtuellement cessé d'exister en tant qu'Armée populaire yougoslave

13 -puisque je crois que c'est le 19 mai qu'elle est devenue l'Armée de la

14 Yougoslavie- en tout cas, je sais qu'après cette période des unités de

15 l'armée de la Yougoslavie, de la VJ ont participé à des opérations sur le

16 territoire de la Bosnie-Herzégovine.

17 Question: Pouvez-vous nous donner des exemples précis de cette

18 participation dont vous avez personnellement connaissance?

19 Réponse: Tout d'abord, je peux vous dire que la participation du Corps de

20 Novi Sad, on a pu la constater à plusieurs reprises dans la zone du

21 corridor de la Posavina. Et ceci, plus particulièrement, au cours du mois

22 d'octobre 1992 lorsqu'on avait décidé de sécuriser et d'élargir le

23 corridor de la Posavina.

24 Et ceci a été confirmé par un officier qui, au cours de l'opération du

25 Corps de Novi Sad, a été capturée avec trois autres soldats. Il a donc été

Page 18884

1 fait prisonnier et nos institutions l'ont interrogé. Il a donc pu

2 confirmer qu'il appartenait au Corps d'armée de Novi Sad, et cet homme a

3 fait l'objet d'un échange quelque mois plus tard.

4 Question: Est-ce qu'il y a d'autres exemples que vous pouvez nous donner

5 dont vous soyez personnellement au courant?

6 Réponse: D'abord, il y a ce que je viens de vous dire. Et puis, j'ai eu

7 des contacts personnellement avec ce commandant. Je sais que le Corps

8 d'Uzice a également été présent dans la zone de Skelani, près de Bratunac

9 et à Srebrenica. Et je sais également que le Corps d'Uzice a été présent

10 dans la région de Gorazde, ainsi que le long de la Drina, dans la vallée

11 de la Drina. Il est sûr que ces unités se trouvaient sous le commandement

12 direct du général Ojdanic puisque c'était lui qui commandait le Corps

13 d'armée d'Uzice.

14 Question: Je vais vous demander d'être aussi précis que possible en nous

15 disant quand le Corps d'Uzice a été présent ainsi et a participé à ces

16 opérations?

17 Réponse: Le Corps d'Uzice était dans la zone de Skelani et de Gorazde de

18 mai 1992 jusqu'à à peu près juillet 1992; du moins d'après les

19 informations que j'ai reçues des services chargés du renseignement dans

20 mon organisation.

21 Question: Parlons maintenant des unités paramilitaires. Pouvez-vous nous

22 dire ce que vous savez de l'emploi d'unités paramilitaires dans le cadre

23 des événements qui se sont déroulés en Bosnie ou du moins de certains de

24 ces événements?

25 Réponse: Sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine, comme sur le

Page 18885

1 territoire de Croatie, avec les événements que j'ai décrits à Mirkovci,

2 l'agression contre la Bosnie-Herzégovine a commencé par de l'infiltration

3 et des opérations menées par ces unités paramilitaires.

4 Et la première unité paramilitaire impliquée, la première unité de ce

5 type, une unité fort bien entraînée, très bien organisée a été infiltrée

6 en Bosnie-Herzégovine à partir de la République de Serbie dans la région

7 de Bijeljina. Nous savons bien ce qui s'est passé à Bijeljina, il est

8 inutile que je revienne sur ces événements.

9 De plus, pour ce qui est de ces unités paramilitaires -d'ailleurs, je ne

10 dirais pas "unité paramilitaire", mais "unité spéciale", unités bien

11 entraînées, en tout cas ces unités ont été employées tout au long de la

12 guerre en Bosnie-Herzégovine. L'utilisation même de ces unités en 1995 est

13 indéniable.

14 Au moment où l'armée de Bosnie-Herzégovine s'apprêtait à libérer

15 Bijeljina, à ce moment-là on a vu arriver la Brigade de "Arkan" qui a

16 interrompu la progression des unités de l'armée de Bosnie-Herzégovine, un

17 point vital sur la ligne.

18 Question: Pouvez-vous nous dire, sur la base de votre expérience

19 militaire, quelle était la fonction remplie par ces troupes spéciales dans

20 le cadre des opérations militaires dont vous avez connaissance?

21 Réponse: Une fois encore, moi, je n'emploierai que la dénomination

22 d'unités spéciales pour les décrire. Et leur mission était la même que

23 celle que lors de l'agression contre la Bosnie-Herzégovine. Au début de la

24 guerre, ils étaient chargés d'infiltrer certaine région, par exemple

25 Bijeljina, Zvornik, pour y causer la confusion et tuer des civils, 30/50

Page 18886

1 civils, des gens de premier plan dans la société civile; c'était toujours

2 ce qui se passait.

3 On liquidait des notables dans une ville donnée, on procédait à des

4 pillages pour semer le trouble. Ensuite, on voyait arriver les unités de

5 la JNA qui imposait un blocus sur la zone et qui occupaient les régions en

6 question.

7 Question: Est-ce que le commandement dont vous faisiez partie dans la JNA

8 était conscient de la présence et des activités de ces unités spéciales,

9 pour reprendre le terme que vous utilisez?

10 Réponse: Dès qu'on a vu arriver la première unité, en Bosnie-Herzégovine,

11 le commandement dont je faisais partie était au courant et savait que

12 cette unité était venue de République de Serbie, et savait pertinemment ce

13 qu'avait fait cette unité à Bijeljina.

14 Question: Et votre commandant, le commandant de votre corps d'armée,

15 quelle était sa position s'agissant de ces unités spéciales?

16 Réponse: Le commandant du corps, à l'époque, ainsi que les unités de

17 l'Armée populaire yougoslave -puisque ça s'appelait encore comme ça à

18 l'époque-, le commandant donc n'a pas réagi de manière quelconque aux

19 activités des unités spéciales. Il n'y a pas eu de réaction au fait que

20 l'on ait vu arriver d'un autre Etat -c'était un Etat complètement

21 différent-, qu'on ait vu arriver des unités infiltrées pour commettre des

22 crimes contre la population civile. Or, il était du devoir de l'Armée

23 populaire yougoslave d'intervenir, puisque c'est écrit noir sur blanc dans

24 notre règlement que, en plus d'assurer la protection de l'intégrité de la

25 Yougoslavie, la JNA avait pour mission de garantir la sécurité de la

Page 18887

1 population de Yougoslavie.

2 Question: Je voudrais que nous parlions de Bijeljina. La Chambre a déjà

3 entendu de nombreux témoins, au sujet des événements qui ont eu lieu à cet

4 endroit. Mais je souhaiterais, dans la mesure où cela vous est possible,

5 que vous nous disiez quelles étaient les ressources de la JNA qui était

6 présente à Bijeljina ou dans les environs, à l'époque de fin mars/début

7 avril 1992?

8 Réponse: A Bijeljina même, on trouvait le commandement de la division. Et

9 à partir de Zvornik vers Sepak-Janja, on trouvait l'essentiel du

10 bataillon, du 2e Bataillon de la 4e Brigade blindée. Et, à l'entrée de

11 Bijeljina…, en tout cas, toutes les entrées de Bijeljina étaient bloquées

12 par des unités de l'Armée populaire yougoslave.

13 Question: Pouvez-vous, s'il vous plaît, nous expliquer de manière tout à

14 fait simple, quels étaient les effectifs de la JNA qui étaient présents

15 sur place, nous donner à peu près le nombre de soldats qui étaient

16 déployés, le type d'équipements dont ils disposaient?

17 Réponse: A Bijeljina même, il n'y avait pas beaucoup d'hommes dans la

18 caserne. Il était peut-être 100, 100 et quelques, je le sais pour sûr; en

19 tout cas, moins de 200. Et autour de Bijeljina, il était déployé environ

20 18 chars et trois bastions d'infanterie ainsi qu'un bataillon motorisé.

21 Question: Et ce bataillon motorisé, c'était constitué de quoi?

22 Réponse: Un bataillon motorisé, en général, il s'agit d'infanterie avec

23 des véhicules à moteur. Donc, c'était pratiquement un bataillon

24 d'infanterie avec des véhicules. Et dans sa composition, il y a des armes

25 d'infanterie, d'une manière générale, puis des mortiers de 82 millimètres,

Page 18888

1 de 120 millimètres, ainsi que des canons antiaériens de calibre de 40

2 millimètres.

3 Question: D'après les règles et réglementations régissant la JNA, quelle

4 devait être la réponse attendue au cas où, en présence de tels effectifs,

5 il y aurait incursion de forces armées non régulières?

6 Réponse: En vertu de la réglementation régissant les tâches exercées par

7 la JNA, mon commandant… en vertu de ces règlements et de cette

8 réglementation, devait donner l'ordre de bloquer le déplacement de ces

9 groupes-là, de les arrêter, en somme de les placer sous contrôle.

10 Question: Je voudrais maintenant attirer votre attention sur la fin de la

11 première semaine d'avril 1992. Je voudrais savoir si, à la télévision,

12 vous avez vu un enregistrement vidéo de la visite de Mme Biljana Plavsic à

13 Bijeljina?

14 Réponse: Après les événements de Bijeljina, après le massacre perpétré, il

15 est arrivé à Bijeljina un membre de la Présidence de Bosnie-Herzégovine à

16 savoir Mme Biljana Plavsic, un autre membre de la Présidence de Bosnie-

17 Herzégovine est arrivé, M. Fikret Abdic en l'occurrence, et le chef de

18 l'état-major du 2e District militaire, le lieutenant-colonel Prasovic.

19 J'ai vu que Biljana Plavsic, en sa qualité de membre de la Présidence de

20 Bosnie-Herzégovine, faisait la bise et avait fait des embrassades avec

21 l'homme qui avait perpétré ce massacre à Bijeljina.

22 J'ai vu le chef de l'état-major, le général de division Prasovic,

23 présenter un rapport à "Arkan" et lui rendre hommage pour la mission bien

24 accomplie, plutôt que d'arrêter tous ces hommes-là.

25 Question: Ce 2e District militaire était chargé de quel territoire, en

Page 18889

1 réalité?

2 Réponse: Le 2e District militaire a été constitué après la décomposition

3 de ce qui avait été le 5e District militaire, le District de Zagreb, avec

4 pour siège à Sarajevo. On a nommé M. Milutin Kukanjac, le général de

5 division Prasovic; et leurs zones de responsabilité se résumaient, en

6 pratique, au territoire de la Bosnie-Herzégovine avec des parties de la

7 Krajina, la Krajina de Knin, des parties de Slavonie, de Baranja; et tout

8 ceci allait pratiquement jusqu'au bord des fleuves Danube et Drina.

9 Question: Je vais à présent vous poser… ou plutôt vous demander de

10 visionner un enregistrement vidéo.

11 Je voudrais que les segments de vidéo se déroulent assez rapidement. J'ai

12 préparé des extraits à l'intention de la Chambre, et je voudrais que vous

13 vous penchiez sur ce qui sera présenté. Et, par la suite, nous vous

14 demanderons d'en parler.

15 (Intervention de l'huissière.)

16 Monsieur, je vais donc vous demander de visionner ce qui se passe au

17 niveau du moniteur, à présent, sous vos yeux. Reconnaissez-vous cette

18 photo?

19 Réponse: Sur cette photo, je reconnais le chef du 2e District militaire,

20 le général Prasovic. Il a le bras… la main à la tempe, puis il est en

21 train de saluer quelqu'un, de donner un salut militaire. Après la

22 présentation du rapport, il sert la main à "Arkan".

23 Question: Ces deux photos-là proviennent-elles de la vidéo de l'événement?

24 Réponse: Ces deux photographies sont identiques à ce qu'on a vu, à ce

25 qu'on a vu ce jour-là à la télévision de la Bosnie-Herzégovine.

Page 18890

1 Question: Je demande maintenant qu'on nous fasse visionner la vidéo et je

2 souhaite entendre de votre bouche des commentaires.

3 Ce que je puis noter, c'est qu'il s'agit d'un enregistrement vidéo de la

4 télévision serbe. Et je pense pouvoir préciser qu'il s'agit ici de la

5 pièce à conviction de l'accusation 425, intercalaire 4.

6 (Diffusion de la vidéo.)

7 Réponse: On voit ici le chef de l'état-major du 2e District militaire, le

8 général de division Prasovic. Puis, à sa droite, on voit Fikret Abdic et,

9 à sa gauche, on voit Mme Biljana Plavsic.

10 Question: Je vous demanderai de présenter au témoin la pièce à conviction

11 425, intercalaire 2…

12 (Intervention de l'huissière.)

13 …et que le texte en BCS soit confié au témoin.

14 Monsieur, je vous demande de vous pencher sur le document en question. Je

15 voudrais d'abord savoir qui est l'auteur de ce texte.

16 Réponse: Ceci est un document réalisé auparavant au quotidien, avant 22

17 heures pile, pour être envoyé au commandement supérieur. Il s'agit ici

18 d'un rapport opérationnel quotidien, journalier, que le commandement

19 envoyait au commandement supérieur.

20 Question: Je voudrais que vous nous donniez lecture de la première phrase,

21 après le chiffre 2. Vous pouvez la lire à voix haute, cette phrase.

22 Réponse: "L'état de l'aptitude au combat des unités du Corps permet

23 d'assurer la réalisation des tâches. Toutes les unités sont en plein degré

24 d'aptitude au combat, et notamment les effectifs du groupe opérationnel 1

25 dans la garnison de Bijeljina. Dans la 38e Division de Partizans..."

Page 18891

1 Question: Monsieur, je vous demande au préalable de nous donner un petit

2 commentaire, s'agissant de cette phrase. Est-ce que cela signifie que la

3 JNA, dans la garnison de Bijeljina, est en pleine aptitude aux combats,

4 donc complétée dans sa totalité?

5 Réponse: Selon le rapport présenté par ce commandant, cela signifie que

6 les unités sur le territoire de Bijeljina se trouvent en pleine aptitude

7 de combat, complétées tant pour ce qui est des effectifs que pour ce qui

8 est des équipements matériels.

9 Question: En fonction de l'expérience qui est la vôtre, cette garnison de

10 Bijeljina en aptitude de combat était-elle en mesure d'en venir à bout

11 avec les incursions de "Arkan" et de ses hommes dans la région, dans le

12 secteur?

13 Réponse: Les unités se trouvant à Bijeljina, sans parler des unités qui se

14 trouvaient dans les alentours de Bijeljina, à proximité de Janja, où il y

15 avait bon nombre de chars, eh bien, ces unités pouvaient aisément en venir

16 à bout, de cette unité spéciale de "Arkan" qui a procédé à une agression

17 qui, elle, n'était pas armée de chars ou de blindés de transports de

18 troupes. Elle disposait, en général, d'armes légères et de canons

19 antiaériens à canons simples ou canons multiples. Donc les unités de la

20 JNA se trouvant dans les casernes pouvaient aisément régler le compte à

21 ces unités de "Arkan".

22 Question: Maintenant, je voudrais que vous nous donniez lecture de ce qui

23 figure au n°4.

24 Réponse: "La situation sur le territoire se trouve être extrêmement

25 complexe. A Bijeljina, la ville est placée sous le contrôle du SDS et des

Page 18892

1 hommes de "Arkan" qui ne permettent même pas à notre unité de blindés de

2 sortir pour occuper des postes déterminés dans la ville." (Fin de

3 citation.)

4 Question: Je voudrais que vous nous fassiez un commentaire, s'agissant de

5 cette phrase.

6 Réponse: J'ai appris de la bouche d'un officier, un lieutenant colonel,

7 avec unité et avec un char… Je précise que dans la caserne, il y avait

8 deux chars. Donc avec un char et avec un peloton de soldats, il a essayé

9 de quitter la caserne. Et cet officier du grade de lieutenant-colonel

10 s'est fait gifler par "Arkan", et son commandement supérieur, suite à

11 cela, lui a donné l'ordre de regagner sa caserne.

12 Question: Je voudrais que nous nous référions à deux autres phrases dans

13 ce même document.

14 La première de ces phrases se trouve au huitième alinéa. "La situation

15 relative à la sûreté et la situation politique dans la zone de

16 responsabilité du Corps est des plus complexes; et dans certains secteurs,

17 elle est même critique (Bosanski Brod, Bijeljina). Il y a péril de voir la

18 situation se détériorer de façon notable sur le territoire des

19 municipalités de Zvornik, Tuzla et Zivinice ainsi que Brcko; le péril

20 consistant à voir survenir des conflits interethniques à conséquences

21 incommensurables." (Fin de citation.)

22 Question: Dans le cadre des opérations habituelles de la JNA, est-ce que

23 le chef de l'état-major était informé de l'évaluation réalisée par ce

24 commandant s'agissant de la situation qui prévalait dans la municipalité?

25 Réponse: Il était obligatoire, pour le chef d'état-major, d'avoir

Page 18893

1 connaissance de la situation parce que c'est lui, la personne qui planifie

2 et conduit les activités de combat.

3 M. Groome (interprétation): Je vous demande de donner lecture de la

4 dernière phrase, dans ce document, qui se trouve juste au dessus de la

5 signature du commandant.

6 M. le Président (interprétation): Oui?

7 M. Milosevic (interprétation): J'ai l'impression qu'ici les choses ne sont

8 pas tout à fait claires. J'ai cru comprendre que M. Groome demandait si le

9 chef de l'état-major de la JNA avait connaissance de tout ceci. Le témoin,

10 lui, a parlé du chef d'état-major d'une unité d'échelon inférieur. Pour

11 écarter le malentendu, je pense qu'il serait bon de poser une question

12 appropriée.

13 M. le Président (interprétation): Oui, nous allons tirer ceci au clair.

14 Qu'en est-il, Monsieur Groome?

15 M. Groome (interprétation): La question que je vous posais concernée le

16 chef du grand état-major du grand quartier général. Etait-il informé du

17 développement habituel des opérations?

18 Témoin B-1493 (interprétation): En principe, pour ce qui est de toutes les

19 réglementations militaires en vigueur dans la JNA à l'époque, le chef

20 d'état-major, l'officier le plus haut gradé à diriger les activités de cet

21 état-major, est responsable de la planification et de la réalisation des

22 opérations de combat, donc il doit être au courant des situations normales

23 et anormales dans cette zone. Donc le chef de l'état-major doit être

24 complètement au courant de la situation complète, entière, sur le

25 territoire, sur le terrain, ainsi que dans les unités de la JNA.

Page 18894

1 Question: Veuillez lire la dernière phrase de ce document.

2 Réponse: "Les mesures d'aptitude au combat accrues dans les unités sont en

3 mesure d'assurer une protection appropriée des hommes, des vies humaines,

4 de l'armement et des équipements dans la totalité des unités appartenant

5 aux corps d'armée".

6 Question: Est-ce que cette phrase-ci en particulier indique que, de l'avis

7 du commandant, il était en mesure d'assurer correctement la protection des

8 vies et de la population qui vivait dans son ressort?

9 Réponse: Je pense personnellement que lorsqu'il dit dans cette partie "la

10 protection adéquate des hommes et des vies humaines", eh bien, je crois

11 qu'il a à l'esprit-là la protection des hommes et des vies humaines de ses

12 soldats, de son unité. Il ne sous-entend pas là les hommes et les vies

13 humaines de la population qui fait partie de sa zone de responsabilité.

14 Question: Je demanderai que soit montré au témoin l'intercalaire 3 de la

15 pièce 425.

16 (Intervention de l'huissière.)

17 Il s'agit ici d'un télégramme, d'examiner plus particulièrement une

18 mention manuscrite apportée à ce télégramme. Reconnaissez-vous l'écriture?

19 Réponse: Je reconnais parfaitement bien l'écriture. J'ai eu bon nombre de

20 fois l'occasion de lire cette écriture-là et je reconnais également la

21 signature. L'écriture est celle du général de Division Milutin Kukanjac,

22 commandant du 2ème District militaire.

23 Question: Veuillez maintenant lire une partie de ce télégramme et

24 commencer par la première ligne. Et si ceci ne vous dérange pas, je vous

25 interromprai vers le milieu du texte.

Page 18895

1 Réponse: "Je vous informe du fait que le négociateur principal à Mali

2 Zvornik, avec les représentants de l'assemblée municipale de Zvornik et la

3 municipalité serbe de Zvornik, se trouvait être 'Arkan'. Aux négociations,

4 il y avait également le capitaine Obrenovic Dragan, puis Abdulah et Alija,

5 ainsi que Jovo Mijatovic. "Arkan" a été le négociateur principal pour la

6 partie adverse et deux autres représentants ont auparavant été passés à

7 tabac. Zvornik s'est vu proposer de déposer les armes. Aussi, la cellule

8 de crise de l'assemblée municipale de Zvornik se devait-elle de décider du

9 sort réservé à cet ultimatum avant 16 heures précises.

10 J'estime que l'ultimatum en question ne sera pas accepté et que s'ensuivra

11 un massacre sans précédent à l'égard d'une population innocente dépourvue

12 de protection. Il y aura également des séquelles écologiques graves qui

13 découleront des actions suicidaires de la part d'une population

14 renforcée...".

15 Mais je crois que non, il faut lire "désespérées"!

16 "Je vous envoie donc la présente dépêche pour vous prier instamment, au

17 nom des traditions les plus nobles de la JNA et des normes morales les

18 plus en valeur prévalant dans nos populations, de procéder à une

19 protection...".

20 M. Tapuskovic: On ne dit pas "notable" (sic), mais on dit "ugrozeno". Le

21 terme "ugrozeno" signifiant "en péril".

22 Témoin B-1493 (interprétation): Oui, oui, "ugrozeno"; c'est bien cela.

23 (Le témoin poursuit la lecture.)

24 "…population mise en péril, péril d'une catastrophe jamais vécue à ce

25 jour, dans le courant de l'histoire passée."

Page 18896

1 M. Groome (interprétation): Merci beaucoup, Monsieur. Qui est l'auteur de

2 ce télégramme?

3 Témoin B-1493 (interprétation): Ce télégramme a été rédigé par Izet

4 Mehinagic; il était directeur d'une direction chargée de la construction

5 de la voie ferrée de Tuzla à Zvornik. C'était un grand ami du général

6 Milutin Kukanjac. Je sais qu'ils se fréquentaient de façon exceptionnelle

7 pendant que ce monsieur-là se trouvait à Tuzla.

8 Question: Pourriez-vous, en quelques mots, nous dire quelles étaient les

9 ressources de la JNA se trouvant à Zvornik et à Mali Zvornik, qui aurait

10 pu être… les équipements qui auraient pu être utilisés à l'arrivée de

11 Zvornik?

12 Réponse: J'ai dit que s'agissant de cette 4e Brigade blindée arrivant de

13 Zvornik, que cette brigade seule était déjà en mesure de se confronter, de

14 s'opposer à "Arkan"; ce Bataillon seul était en mesure de le faire. Mais à

15 proximité de Zvornik, il y avait une autre unité importante, à quelque 30

16 ou 40 kilomètres de là, des unités donc motorisées et bien armées qui

17 auraient pu arriver rapidement à Zvornik. Et si un ordre de cette nature

18 avait été donné, elles auraient pu donc réagir et interdire ou prévenir

19 tout massacre à Zvornik.

20 M. Kwon (interprétation): Est-ce que vous pourriez lire la partie

21 manuscrite?

22 M. Groome (interprétation): C'est ce que j'allais poser comme question

23 également, Monsieur le Juge.

24 Monsieur le Témoin, veuillez lire la mention manuscrite du général

25 Kukanjac.

Page 18897

1 Témoin B-1493 (interprétation): "Informer le général Jankovic pour

2 entreprendre toute mesure en vue de la protection des citoyens à Zvornik".

3 D'abord, on dit "informer le général Jankovic"… Oui, c'est ainsi qu'on

4 dit, que c'est écrit; "informer le général Jankovic de la nécessité de

5 prendre toute mesure aux fins de protéger les citoyens à Zvornik." (Fin de

6 citation.)

7 Question: A votre avis, est-ce que toutes les mesures nécessaires à la

8 protection des citoyens de Zvornik ont été prises?

9 Réponse: Nous savons quelle a été l'issue des opérations conduites par les

10 unités de "Arkan" et autres qui se sont attaquées à Zvornik. En termes

11 pratiques, aucune unité de la JNA ne s'est engagée pour empêcher, de

12 quelque façon que ce soit, ce que "Arkan" a fait à Zvornik.

13 M. Groome (interprétation): Merci. Je n'ai plus de questions à poser à ce

14 témoin.

15 M. le Président (interprétation): Nous allons maintenant faire la pause.

16 Pause de 20 minutes.

17 Et nous allons réserver un certain temps de l'audience à la question de la

18 procédure, en application de l'Article 92bis.

19 Donc nous commencerons cette discussion à 1 heure 30 et nous poursuivrons

20 le contre-interrogatoire après la pause de 20 minutes.

21 (L'audience, suspendue à 12 heures 19, est reprise à 12 heures 43.)

22 M. le Président (interprétation): Monsieur Groome, poursuivez.

23 M. Groome (interprétation): Excusez-moi, j'ai oublié de poser quelques

24 questions concernant des biens culturels, ce que connaît l'accusé.

25 Pourrais-je poser ces questions?

Page 18898

1 M. le Président (interprétation): Oui.

2 M. Groome (interprétation): Monsieur, avez-vous des connaissances

3 personnelles s'agissant de la destruction notamment de mosquées mais aussi

4 d'autres édifices culturels. Est-ce que vous étiez présent sur les lieux

5 aux moments où cela s'est passé?

6 Témoin B-1493 (interprétation): Dans la zone de responsabilité où j'avais

7 un commandement, je me trouvais donc présent et j'ai vu un grand nombre de

8 constructions culturelles ou religieuses qui ont été minées ou que l'on a

9 détruites à coup d'artillerie.

10 Question: Pourriez-vous énumérer les municipalités où, d'après ce que vous

11 savez, des biens culturels et autres édifices religieux ont été détruits?

12 Réponse: Dans la municipalité de Gradacac, toutes les mosquées ont été

13 détruites à coups de tir d'artillerie. Dans la municipalité de Brcko,

14 toutes les mosquées ont été détruites à l'explosif. Dans la municipalité

15 de Bijeljina, on a détruit toutes les mosquées en plaçant dynamitant, en

16 plaçant des explosifs pour détruire. Dans la municipalité de Kladanj, on a

17 détruit le minaret de la mosquée en ciblant directement à l'artillerie

18 celui-ci.

19 Question: Vous avez des connaissances personnelles qui vous indiquent que

20 s'agissant des pièces d'artillerie utilisées pour endommager, c'est bien…

21 Il semblait d'après vos indications que ce n'étaient pas des dégâts

22 occasionnés par accident, des dégâts collatéraux comme on les appelle,

23 mais que c'étaient des dégâts occasionnés intentionnellement?

24 Réponse: Les constructions religieuses ont pas été détruites non pas à

25 l'occasion d'opérations de combats mais, comme je l'ai dit, en ciblant

Page 18899

1 blanc directement le minaret par exemple ou autre chose. Et dans la

2 localité de Rahic, la mosquée a été détruite par ciblages directs à

3 l'obus.

4 Donc ces bâtiments confessionnels ont été détruits non pas au cours

5 d'opérations de combats mais de façon intentionnelle pour qu'il n'y ait

6 plus trace de l'existence de tels bâtiments sur place.

7 M. Gromme (interprétation): Je vous remercie. Je n'ai plus d'autres

8 questions.

9 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, vous avez la parole.

10 (Contre-interrogatoire du Témoin B-1493 par l'accusé M. Milosevic.)

11 M. Milosevic (interprétation): Monsieur le Témoin B-1493, ce matin vous

12 avez commencé votre déposition par une explication. Vous avez expliqué

13 comment des plans étaient préparés. J'ai pris des notes.

14 Voici les termes que vous avez utilisés: "danger de la présence d'un

15 ennemi interne potentiel" à savoir les extrémistes du HDZ. C'est bien

16 cela?

17 Témoin B-1493 (interprétation): J'ai déclaré que ce plan avait pour titre

18 "Engagement des unités -des unités dont j'avais le commandement- en cas

19 d'instauration d'un état d'urgence". Et dans le texte même, le dispositif

20 même de l'ordre, on parlait d'un ennemi intérieur potentiel que pourraient

21 être les extrémistes du HDZ.

22 Question: Merci. C'est ce que je souhaitais établir. Vous avez reçu cette

23 mission qui consistait à élaborer un plan en mars 1991, n'est-ce pas?

24 Réponse: Oui.

25 Question: Fort bien. Etiez-vous au courant des événements qui se

Page 18900

1 produisaient en Croatie en 1990 jusqu'en mars 1991 au moment où on vous a

2 donné pour mission d'établir ce plan? Qu'est-ce qui se passait, qu'est-ce

3 qu'il arrivait aux Serbes de Croatie jusqu'à cette date?

4 Réponse: Je sais bien ce qui se passait dans ces régions de la Croatie. Je

5 suis au courant de la révolution que l'on appelait "Balvan", "la

6 révolution des troncs d'arbres en Krajina de Knin", et je sais qu'au lac

7 de Privice des policiers ont été tués. Je suis au courant d'incidents

8 analogues.

9 Question: Savez-vous que précisément à cette époque, en d'autres termes en

10 1990 jusqu'au mois de mars 1991, on a persécuté les Serbes en Croatie,

11 persécution dans l'acception large du terme? Etiez-vous au courant de

12 cela?

13 Réponse: Une bonne partie de la Croatie se trouvait dans la zone de

14 responsabilité de l'unité dont je faisais partie. Par conséquent, je me

15 suis rendu à plusieurs reprises dans des zones dont la population était

16 surtout serbe, et je ne connais pas un seul exemple de persécution de

17 Serbes en Croatie.

18 Question: Dans la zone de responsabilité des unités dont vous faisiez

19 partie, est-ce qu'on trouve normalement la Baranja, le Srem occidental, la

20 Slavonie orientale, ce genre d'endroits?

21 Témoin B-1493 (interprétation): Oui, c'est précisément à ces endroits que

22 je pense. Et, jusqu'au mois d'avril 1991, à ma connaissance, il n'y a pas

23 eu un seul cas de persécution organisée à l'encontre de la population

24 civile de ces régions.

25 M. Milosevic (interprétation): Vous souvenez-vous qu'il y a eu toute une

Page 18901

1 série de liquidations secrètes, silencieuses de Serbes qui vivaient dans

2 ces régions? Est-ce que vous vous souvenez de ce qu'ont fait normalement

3 les hommes de Mercep, Tomislav Mercep en Slavonie orientale? Rappelez

4 vous, il y a eu l'armement en secret du HDZ. Rappelez-vous, il y a eu le

5 licenciement de personnes, surtout dans les rangs de la police, de

6 l'administration d'Etat, dans les services publics...

7 M. le Président (interprétation): Nous allons sérier les questions. La

8 première était... Un instant, un instant. Je sais que vous dites que c'est

9 cumulatif, mais le témoin ne peut répondre qu'à une question à la fois,

10 pas à toute une série de questions.

11 La première question était celle ci: êtes-vous au courant de la

12 liquidation de Serbes, de particuliers serbes? Y a-t-il eu de tels cas à

13 votre connaissance?

14 Témoin B-1493 (interprétation): En fonction des connaissances dont je

15 dispose, je peux dire ceci: les autorités en place à l'époque dans la

16 République de Croatie n'ont pas effectué de liquidation silencieuse,

17 individuelle, pas de façon organisée. S'il y a eu de tels cas, c'était

18 peut-être un règlement de compte, une vendetta opposant des individus,

19 mais je peux vous dire que dans la zone où moi je travaillais, où je

20 vivais, il est certain qu'il n'y a pas eu de liquidation organisée de

21 Serbes qui aurait été le fait de non-Serbes. Je dis que ceci était le cas

22 jusqu'au mois de mai 1991.

23 M. Milosevic (interprétation): Fort bien. Mais j'ai parlé d'autres

24 tendances. Est-ce que vous vous souvenez que les Serbes ont été exclus de

25 la Constitution en tant que peuple constitutif? Est-ce que vous vous

Page 18902

1 souvenez de la décision prise en ce qui concerne la cessation de la

2 Croatie?

3 (Interruption par le Président.)

4 M. le Président (interprétation): Avant de passer aux questions

5 politiques, examinons ce que vous avez déjà dit.

6 Etes-vous au courant des activités de Tomislav Mercep?

7 Témoin B-1493 (interprétation): En ce qui concerne les activités de ce

8 groupe, non, je ne suis pas du tout au courant.

9 M. le Président (interprétation): Il a été suggéré qu'il y avait une armée

10 secrète… un armement en secret du HDZ. Savez-vous si ça a été le cas?

11 Avez-vous des informations à ce propos?

12 Témoin B-1493 (interprétation): Si vous parlez du fait d'armer en secret,

13 c'est de notoriété publique. On sait que cela s'est fait.

14 M. Milosevic (interprétation): Bon. Est-ce que vous dans la JNA, et

15 jusqu'au moment où l'on vous a confié cette mission consistant à préparer

16 un plan, est-ce que vous saviez qu'il y avait en fait une résurrection,

17 une renaissance du mouvement oustachi en Croatie et que la sécession par

18 la force d'avec les autres parties de la Yougoslavie était sur le point de

19 se produire?

20 Témoin B-1493 (interprétation): Jusqu'au moment où j'ai commencé à

21 m'atteler à ce plan -en d'autres termes, jusqu'en 1991-, je ne savais pas

22 que, dans la région où je me trouvais, il y eût constitution d'une seule

23 unité ou qu'il y aurait des groupements oustachis organisés.

24 Question: Donc vous n'aviez aucune connaissance en matière de sécession?

25 Réponse: Là, oui, j'étais au courant.

Page 18903

1 Question: Et étiez-vous au courant de licenciements massifs de Serbes dans

2 la police, dans les services publics?

3 Réponse: Dans les forces de police de la République de Croatie, après

4 1991, j'ai effectivement rencontré des cas à Zagreb, à Slavonski Brod, à

5 Osijek, des cas où il y avait des policiers serbes. Il y a peut-être eu

6 des licenciements ailleurs, ceux qui n'ont pas respecté le règlement.

7 Question: Bien. Il y a un instant, vous avez dit que vous étiez au courant

8 de la sécession?

9 Réponse: C'est exact.

10 Question: Dans l'armée, estimez-vous que la JNA avait le devoir de

11 respecter l'intégrité du pays? Est-ce que ce n'était pas là l'une des

12 missions primordiales de la JNA?

13 Réponse: J'ai dit que la tâche primordiale de la JNA était d'assurer la

14 protection de l'unité et de l'intégrité territoriale de la Yougoslavie.

15 Question: Mais dans ce cas, pourquoi n'était-il pas logique que l'armée

16 prépare un plan destiné à réaliser cette tâche, à assurer cette intégrité?

17 Malheureusement, ça a échoué, mais est-ce qu'il n'était pas normal

18 d'essayer? En quoi ceci était-il inhabituel?

19 Réponse: J'étais un haut gradé de la JNA. J'avais des connaissances

20 limitées, modestes, mais je pense que la direction suprême s'est trouvée

21 sous l'influence directe de la direction politique. Et les militaires

22 n'ont pas pris les mesures que le grand état-major aurait dû prendre sous

23 la direction du Secrétariat fédéral. Parce que, finalement, l'appareil

24 militaire a succombé à l'influence et aux ordres des dirigeants politiques

25 qui étaient à la tête de l'Etat, à l'époque.

Page 18904

1 Question: Mais savez-vous qu'en mars 1991, même avant et même après, ces

2 dirigeants militaires suprêmes étaient vraiment, en matière d'appartenance

3 ethnique, pas serbes du tout?

4 Réponse: Le chef du grand état-major était Hadzic; c'était un Serbe de

5 Nevesinje, de Gracko

6 Le secrétaire fédéral était Veljko Kadijevic; il était de Imotsko. Il

7 venait d'un mariage mixte, n'est-ce pas?

8 Question: C'était un Yougoslave, n'est-ce pas?

9 Réponse: Oui.

10 Question: Et qui était le commandant de votre région militaire?

11 Réponse: Pendant peu de temps, Spirkovski a été le commandant de la 1er

12 Région militaire, mais il a été relevé de ses fonctions peu de temps

13 après.

14 Question: Qui était le commandant de la 5e Région militaire à Zagreb?

15 Réponse: D'abord, ça a été un Croate, mais il a été relevé de ses

16 fonctions aussi peu de temps après.

17 Question: Quand? En 1991?

18 Réponse: Oui.

19 Question: Mais en 1991, il n'était pas le commandant?

20 Réponse: Spegelj n'était plus le commandant en 1991.

21 Question: Donc il n'a commandé qu'en 1990?

22 Réponse: C'est exact.

23 Question: Revenons au sujet que vous avez ensuite examiné, au début de

24 votre interrogatoire principal. Le 2 mai, vous avez reçu un ordre et vous

25 êtes allé à Vinkovci avec un détachement conjoint; c'est cela?

Page 18905

1 Réponse: Oui.

2 Question: Il y avait cinq pelotons dans ce détachement, comme vous l'avez

3 dit, et ce détachement comptait 120 hommes; est-ce exact?

4 Réponse: Oui.

5 Question: Quelle était la mission qui vous avait été confié? N'était-elle

6 pas d'empêcher des conflits interethniques dans la région où vous étiez

7 dépêché? Donc on parle ici des alentours de Vinkovci.

8 Réponse: C'est exact. A partir de Vinkovci jusqu'à Borovo Selo.

9 Question: Et que s'est-il passé à Borovo Selo, aussitôt auparavant? Est-ce

10 que vous savez qu'il y a eu une incursion de la police qui a ouvert le feu

11 sur la population de Borovo Selo?

12 Réponse: Oui, je suis au courant. Mais ça a été une réaction. Il y a eu

13 envoi de deux détachements de la JNA, mais ça, c'est intervenu après.

14 Question: Et saviez-vous que, puisque ces effectifs étaient envoyés à cet

15 endroit pour cette raison, pourquoi est-ce que les policiers ont ouvert le

16 feu sur des paysans à Borovo Selo?

17 Réponse: Parce qu'on a tiré sur les policiers.

18 Question: Donc je vois. La police est venue à Borovo Selo pour qu'on lui

19 tire dessus?

20 Réponse: Mais la police était déjà à Borovo Selo!

21 Question: Mais vous ne savez pas que la police est arrivée à Borovo Selo

22 dans deux bus et beaucoup d'autres véhicules, les policiers sont sortis de

23 ces véhicules et ont ouvert le feu sans aucune raison sur la population.

24 Réponse: Oui, je sais, mais la police était arrivée pour intervenir après

25 qu'un conflit eût éclaté.

Page 18906

1 M. Milosevic (interprétation): Et ce conflit opposait qui, à Borovo Selo?

2 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, ce témoin n'a pas de

3 connaissance directe de ce qui s'est passé à Borovo Selo. Inutile de

4 polémiquer à ce propos avec lui. Passons à autre chose, quelque chose dont

5 il aurait une connaissance personnelle directe.

6 M. Milosevic (interprétation): Fort bien, j'avance.

7 Au cours de la nuit du 2 au 3 mai, vous êtes arrivé à Vinkovci. Le matin,

8 vous êtes parti à Mirkovci. Puis, vous avez relaté un incident qui s'est

9 produit dans la région qui se trouve entre Mirkovci et Jankovci. C'est

10 bien cela?

11 Témoin B-1493 (interprétation): Oui.

12 Question: Vous dites qu'aux abords de Mirkovci vous avez rencontré un

13 barrage routier tenu par trois hommes?

14 Réponse: Oui.

15 Question: Avez-vous rencontré ou vu d'autres barrages routiers à Mirkovci,

16 à la sortie, en direction de Jankovci?

17 Réponse: Lorsque j'ai quitté le village de Mirkovci, il n'y avait pas de

18 barrage.

19 Question: Mis à part ces trois hommes et leurs commandants qu'ils ont

20 appelés pour qu'ils vous parlent, est-ce que vous avez vu d'autres hommes

21 armés?

22 Réponse: D'après ce que m'ont dit mes patrouilles de police militaire, il

23 y avait une maison en flammes. Ils ont vu quatre hommes armés revêtus du

24 même uniforme que celui porté par les hommes du barrage routier, et ces

25 hommes sortaient de la maison en flammes.

Page 18907

1 Question: Fort bien. Vous étiez le chef de cette unité, il y avait trois

2 hommes au barrage routier avec un commandant, et vous avez établi qu'il y

3 avait quatre autres hommes qui ont été vus, observés à Jankovci. C'est

4 cela?

5 Réponse: C'est ce que j'ai vu! Mais le président de la communauté locale

6 de Mirkovci m'a dit, à l'occasion d'une réunion que j'ai eue avec lui,

7 qu'une unité importante en taille était arrivée à Mirkovci et s'était

8 déployée dans le village.

9 Question: Vous avez vu cette unité?

10 Réponse: Non, je ne l'ai pas vue. J'ai uniquement vu quatre hommes qui se

11 trouvaient au barrage routier; et la patrouille m'a informée du fait que

12 quatre hommes avaient mis le feu à une maison.

13 Question: Et vous, vous aviez un détachement de 120 hommes. C'était une

14 unité régulière de la JNA.

15 Vous affirmez avoir vu des hommes en uniforme, mettons tchetnik, et il est

16 maintenant établi que vous en avez vu 3, plus 4, donc en tous 7, 8 en

17 tout, fort bien, fort bien. Pourquoi n'avez-vous pas pensé que c'étaient

18 ces hommes-là qui avaient provoqué le conflit? Est-ce la conclusion que

19 vous avez tirée?

20 Réponse: Lorsque j'ai trouvé sur la route ce barrage routier, je n'ai pas

21 tiré pour conclusion que c'étaient les hommes tenant ce barrage routier

22 qui avaient provoqué le conflit.

23 Il y avait des hommes allongés à proximité de la mitrailleuse, ils avaient

24 des munitions en bandoulière et des mitrailleuses étaient braquées sur

25 Vinkovci, donc la direction dont venait mon détachement, et ils n'ont pas

Page 18908

1 ouvert le feu. Mais, manifestement, il y a eu des hommes, ces autres

2 hommes ont tiré à cet endroit où j'avais envoyé la patrouille militaire et

3 ce sont ces hommes-là qui ont mis le feu à la maison, donc ce sont eux qui

4 ont provoqué le conflit.

5 Question: Mais, si je comprends, ils faisaient partie du même groupe?

6 Réponse: Je ne comprends pas.

7 Question: Vous avez vu quatre hommes au barrage routier, puis vous en avez

8 vu quatre qui incendiaient une maison à Jankovci. Ils faisaient partie du

9 même groupe, n'est-ce pas?

10 Réponse: Pas du tout! Puisqu'il y en a trois, ces trois qui sont restés au

11 barrage routier, et quatre qui ont mis le feu à la maison, ils se sont

12 retirés en direction de Mirkovci.

13 Question: Mais vous étiez déjà quelque part entre Mirkovci et Jankovci,

14 donc vous aviez déjà la maîtrise de cette région?

15 Réponse: Je vous ai expliqué que j'étais passé par Mirkovci. La tête de

16 colonne est arrivée à Jankovci. Là, j'ai vu une maison en flammes, j'ai

17 entendu des tirs. Et je vous l'ai expliqué, j'ai arrêté la colonne et j'ai

18 donné l'ordre au détachement de se déployer en formation de combat.

19 Question: Mais dites-moi, vous étiez un officier haut gradé. Est-ce qu'à

20 ce moment-là ou plus tard vous avez compris qu'il s'agissait là d'une

21 formation paramilitaire?

22 Réponse: Vous voulez dire ceux qui étaient au barrage et les quatre

23 autres?

24 Question: Oui.

25 Réponse: J'ai compris clairement qu'il ne s'agissait pas là d'une unité de

Page 18909

1 la JNA.

2 Question: Donc cela n'aurait pu être qu'un groupe paramilitaire ou une

3 bande de criminels, n'est-ce pas?

4 Réponse: Précisément, ce qu'on appelle les "formations paramilitaires"

5 mais, à mon avis, c'était une unité bien organisée, puisque ce commandant

6 qui est sorti vers l'endroit du barrage routier m'a dit qu'il me

7 laisserait franchir ce barrage une fois qu'il aurait l'autorisation de son

8 commandant de Mitrovica, de Sremska Mitrovica; il semblerait donc que la

9 voie hiérarchique fonctionnait bien, était bien établie.

10 Question: Ne parlons même pas de contrôle et de commandement dans une

11 unité qui compte huit hommes. Mais vous avez été envoyé sur place pour

12 rétablir l'ordre. Pourquoi n'avez-vous pas arrêté et désarmé ces hommes?

13 Réponse: Je ne l'ai pas fait parce que, si je l'avais fait, j'aurais sans

14 doute provoqué un conflit entre mon détachement et cette unité-là.

15 Question: Mais est-ce que ce n'était pas votre travail de faire

16 précisément cela puisque vous avez dit, vous-même, qu'on vous avait confié

17 cette mission consistant à rétablir l'ordre. Est-ce qu'un groupe armé de

18 soldats de la JNA, qui a reçu une telle mission, n'a pas eu l'obligation

19 de désarmer une telle unité et d'arrêter ces hommes? Pourquoi est-ce que

20 vous allez sur place, à ce moment-là, sinon?

21 Réponse: Je suis allé là-bas pour empêcher un conflit inter ethnique entre

22 les villages en présence.

23 Question: Bien. Mais n'avait-il pas été clair, à vos yeux, que ces gens-là

24 étaient partie prenante au conflit?

25 Réponse: Précisément.

Page 18910

1 Question: Pourquoi n'avez-vous pas désarmé et arrêté ces gens-là?

2 Réponse: Parce que telle n'avait pas été ma mission.

3 Question: Donc votre mission n'englobait pas l'utilisation de cette unité

4 mais plutôt la nécessité de constater la situation.

5 Réponse: Et empêcher tout conflit entre les habitants de Mirkovci et de

6 Jankovci.

7 Question: Mais dites-nous: qui est-ce qui s'était battu entre les

8 habitants de Mirkovci et Jankovci? Est-ce que c'étaient des Serbes qui se

9 battaient entre eux ou est-ce que c'étaient des effectifs serbes et des

10 effectifs croates qui se battaient entre eux? Qui se bagarrait là-bas?

11 Réponse: Lorsque je suis arrivé là-bas, il n'y avait pas de confrontation

12 entre la population de Mirkovci et Jankovci. Je crois vous avoir expliqué

13 qu'une maison était en train de brûler. Et, au rez-de-chaussée de cette

14 maison, il y avait une cafétéria. D'après les habitants serbes de la

15 localité qui se trouvaient donc dans les trois ou quatre maisons à côté de

16 cette cafétéria, ils m'ont expliqué que le groupe en question avait chassé

17 tous les indigènes qui se trouvaient dans la cafétéria susmentionnée et

18 qu'ils ont chassé l'homme qui était propriétaire de la cafétéria, et c'est

19 eux qui ont mis le désordre. Et ce sont les Serbes habitant là-bas qui ont

20 demandé à être protégés de cette unité.

21 Question: Donc les Serbes qui habitaient là-bas vous avaient demandé de

22 les protéger contre eux?

23 Réponse: C'est cela.

24 Question: Et en dépit de tout cela, vous ne les avez pas arrêtés. Tout à

25 l'heure, vous avez dit que vous ne vouliez pas les arrêter pour ne pas

Page 18911

1 donner lieu à des confrontations entre ces deux villages. On vous a dit

2 que ce n'étaient pas des gens du village, que c'était un groupe venu de

3 l'extérieur et, nonobstant cela, vous ne les désarmez pas, vous ne les

4 mettez pas aux arrêts en dépit du fait que ce n'était pas un conflit entre

5 le village puisque le groupe était venu de l'extérieur. Les choses me

6 semblent asses claires.

7 Réponse: La politique consistait à infiltrer des unités paramilitaires

8 pour engendrer des désordres, des conflits et, ensuite, des unités plus

9 grandes s'amenaient et c'était un peu le scénario qui s'était mis en

10 place. Aussitôt après mon départ, il y a eu précisément attaque de cette

11 unité de Mirkovci en direction de Jankovci, et le village de Jankovci a

12 été occupé, tout comme la population de cette localité.

13 Question: Mais n'était-ce pas là une raison de plus pour intervenir

14 puisque vous aviez été envoyé là-bas?

15 Réponse: J'y ai remis de l'ordre. Ces activités ont cessé pendant que j'y

16 étais… et les tirs également.

17 Question: Bon. Je vois qu'il ne nous est pas possible de nous entendre à

18 ce sujet.

19 Réponse: Mais c'est précisément parce que j'ai remis de l'ordre là-bas que

20 j'ai été révoqué. Il est arrivé un autre commandant et, au bout de

21 quelques jours de séjour le concernant, il y a eu une confrontation où le

22 détachement que j'avais amené et le reste de la JNA ont participé au

23 conflit et ont pratiquement bloqué le village de Jankovci.

24 Question: Donc le détachement que vous avez amené est ultérieurement

25 intervenu contre la population de Jankovci. C'est bien ce que j'ai

Page 18912

1 compris?

2 Réponse: Oui, avec cette unité spéciale paramilitaire.

3 Question: Donc cela me semble assez incroyable. Vous avez envoyé un

4 rapport par écrit sur ce qui s'était passé sur le terrain?

5 Réponse: J'ai déjà précisé que j'ai envoyé un rapport de combat régulier

6 à mes supérieurs.

7 Question: Fort bien. Avez-vous sur vous ce rapport?

8 Réponse: Non, je ne pouvais pas garder ce rapport.

9 Question: Vous n'avez pas pu garder une copie du rapport que vous avez

10 envoyé, de votre rapport que vous avez envoyé. Vous n'avez pas votre copie

11 à vous?

12 Réponse: Nous n'avons jamais eu le droit de garder des copies de rapport

13 parce que c'étaient des rapports de nature strictement confidentielle qui

14 étaient envoyés exclusivement au commandement de la part de la Brigade.

15 Question: Vous avez envoyé ce rapport et, partant de celui-ci, on vous a

16 répondu qu'il fallait rester là et vous assurer que la situation soit

17 apaisée. C'est bien cela?

18 Réponse: Oui.

19 Question: Et la personne qui est venue vous remplacer, était-ce un

20 officier d'un rang inférieur au vôtre ou pas?

21 Réponse: Il était du même rang.

22 Question: Du même rang. Bon, mais comment expliquez vous ce remplacement?

23 Réponse: Je n'avais rien à expliquer du tout. J'ai reçu des ordres de la

24 part de mon commandant supérieur. C'est lui qui a donné des ordres disant

25 qu'il fallait que je procède à une passation de fonction vers cet autre

Page 18913

1 homme, cet autre officier et que je retourne à l'unité.

2 Question: Vous dites que votre commandant, votre supérieur hiérarchique,

3 une fois que vous êtes rentré et que vous lui avez expliqué que vous aviez

4 vu des Tchetniks comme vous l'avez dit vous-même, j'ai noté, moi, le mot

5 que vous avez prononcé. Il vous a répondu que cela était impossible.

6 Réponse: Il ne m'a pas dit que c'était impossible. Il m'a dit à la lettre:

7 "Tu as vu des matous".

8 Question: Mais est-ce que cela ne vous dit pas qu'il n'y avait pas de

9 contestation? Vous auriez dû arrêter ces gens-là et emmener ces gens-là où

10 il fallait, donc il eût fallu que vous jouiez le rôle qui était le vôtre.

11 Réponse: Ce qui est certain, c'est qu'il y aurait eu un conflit dans le

12 village. Il est probable qu'il y ait eu davantage de membres de cette

13 unité et que le conflit n'éclate, et je n'étais pas prêt à faire ce

14 travail.

15 Question: Donc vous n'étiez pas prêt à accomplir votre mission?

16 Réponse: J'ai très bien accompli ma mission, mon rôle, et les habitants de

17 la localité de Jankovci l'ont reconnu. Les quatre familles serbes de

18 Jankovci qui, en date du 6 ou du 7 mai, ont demandé à mon commandement

19 supérieur de me réaffecter à ce territoire.

20 Question: Mais qu'en est-il advenu? Qui a décidé de ne pas vous réaffecter

21 là-bas et aider au rétablissement d'une situation normale là-bas?

22 Réponse: Mon officier supérieur.

23 Question: Bon. Donc vous estimez que vous avez accompli votre mission

24 quoique n'étant pas intervenu, alors que vous avez été envoyé là-bas pour

25 intervenir précisément?

Page 18914

1 Réponse: Je crois que ma tâche, ma première mission de guerre a été

2 réalisée de façon très honorable et je crois que même les ressortissants

3 du groupe ethnique serbe ont reconnu la chose en tant que telle puisqu'ils

4 ont demandé au commandement supérieur, par écrit, que je sois ramené là-

5 bas.

6 Question: Bien. Vous nous avez parlé de l'organisation de la Brigade à

7 Bijeljina; c'est l'événement suivant. Vous avez dit que l'un des généraux,

8 je crois que vous aviez bien précisé qu'il s'agit-là d'un général et qu'il

9 s'était adressé aux hommes de façon inaccoutumée. En d'autres termes, il

10 ne s'est pas comporté de façon usuellement pratiquée au sein de la JNA.

11 Pouvez-vous nous dire comment s'appelait ce général?

12 Réponse: Ce général s'appelait Général de Brigade Marko Lacic.

13 Question: Il était commandant de cette Brigade ou quoi?

14 Réponse: Non, il était commandant du corps.

15 Question: En quoi consiste le problème?

16 Réponse: Il était chef d'état-major d'une unité de rang supérieur.

17 Question: Ah, de rang supérieur? Vous avez donc estimé que son discours

18 était tout à fait contraire au comportement auquel l'on s'attendait

19 d'habitude de la part d'un haut gradé de la JNA?

20 Réponse: J'ai fait une déclaration préalable. Et dans celle-ci, j'ai bien

21 précisé que dans ma longue carrière militaire, c'était la première fois

22 que j'entendais un tel salut et une telle préparation morale et politique

23 des soldats pour l'accomplissement de leur mission.

24 Question: Bien. Mais en dépit du fait que vous ayez entendu cela pour la

25 première fois, à votre avis, c'était contraire à toutes les règles en

Page 18915

1 vigueur dans la JNA?

2 Réponse: Précisément.

3 Question: Donc, ayant occupé des fonctions assez importantes, en avez-vous

4 informé votre commandement supérieur et avez-vous pris l'initiative, comme

5 votre devoir l'exigeait, pour que des mesures soient prises à l'encontre

6 de tels comportements?

7 Réponse: Je vous ai indiqué qu'à ce moment-là, je n'étais plus en train

8 d'occuper des fonctions imminentes. Parce qu'en septembre 1991, j'ai été

9 révoqué de mes fonctions et j'ai occupé un poste mineur dans un

10 département chargé de la mobilisation.

11 Deuxièmement, ce que je puis vous confirmer, c'est que le général Kukanjac

12 occupait les fonctions de commandant de corps d'armée en Macédoine. Le

13 soir même, étant donné que nous avons longuement travaillé ensemble et que

14 nous nous connaissions très bien, vers minuit, donc dans la nuit, je l'ai

15 appelé et je l'ai informé de ce qui s'était passé. Parce qu'auparavant, il

16 avait été le supérieur immédiat de cet homme-là.

17 Et ce que je puis vous dire aussi, c'est que l'homme qui a fait ce

18 discours a rapidement été révoqué de ce poste et ramené, renvoyé à

19 Belgrade.

20 Question: Expliquez-moi un peu: comment se peut-il… Si je vous ai bien

21 compris, vous avez téléphoné au général Kukanjac en Macédoine pour

22 l'informer de la chose. Et vous n'êtes pas allé vous adresser à l'instance

23 compétente qui vous était plus accessible en votre qualité d'officier haut

24 gradé, compte tenu du poste que vous occupiez à ce moment-là, pour

25 l'informer de la chose et réclamer la prise de mesures appropriées?

Page 18916

1 Réponse: Je n'avais plus ce rang-là. Il y avait, au-dessus de moi, des

2 officiers plus haut gradés, de par les positions qu'ils occupaient, qui

3 faisaient partie de l'équipe et qui étaient censés, eux, informer le

4 commandant de ce qui s'était passé. Ce n'était pas mon devoir à moi que de

5 le faire; je n'avais pas le droit d'informer le commandant en direct.

6 Et j'ai appelé Kukanjac précisément parce que nous avons longuement

7 travaillé ensemble, que je le connaissais bien et que ledit Kukanjac

8 s'était longtemps trouvé sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine. Et

9 c'est partant, donc, de cette espèce d'amitié, que je l'ai informé de la

10 chose et pas de par les devoirs qui étaient les miens à son égard.

11 Question: Mais ce que vous nous dites, c'est qu'en votre qualité

12 d'officier, vous n'aviez pas pour mission d'informer quelque officier

13 supérieur que ce soit?

14 Réponse: Non, ce n'était pas ma tâche. J'étais l'un des moins haut gradés

15 parmi la vingtaine d'officiers présents. Donc j'étais l'un des moins haut

16 gradés de l'équipe. Et c'est celui qui a fait ce type de discours, celui

17 qui était juste de son rang ou du rang en dessous, qui était censé

18 informer le commandement supérieur.

19 Question: Et s'il ne l'a pas fait, personne d'autre n'a l'obligation…?

20 Réponse: Ils n'ont pas l'obligation de le faire.

21 Question: Ah! Ils n'ont pas l'obligation de le faire? Très bien.

22 Tirons au clair une autre question. Vous avez parlé de l'usage de

23 l'utilisation de la Défense territoriale; c'est bien cela? Vous nous avez

24 parlé de la Défense territoriale?

25 Réponse: Ce que j'ai dit… J'ai dit quelles étaient les modalités de

Page 18917

1 subordination de cette Défense territoriale à l'égard de la JNA.

2 Question: Mais serait-il exact de dire que le QG de… la TO était commandée

3 par le QG de la Défense territoriale de la République?

4 Réponse: C'est bien ce que j'ai dit.

5 Question: Mais s'agissant du commandement des TO des Républiques, c'était

6 subordonné au commandement de l'état-major général de la JNA?

7 Réponse: La TO de la République était subordonnée aux autorités de la

8 République.

9 Question: Mais je dis précisément le contraire! J'ai versé au dossier une

10 pièce à conviction en ce sens.

11 Réponse: Lorsqu'on a dépossédé la Défense territoriale de ses armes,

12 lorsque l'on a procédé aux préparatifs de ce qui s'était passé par la

13 suite, en sus de cette dépossession d'armes et dépossession des

14 compétences, les Etats… le QG de la TO des Républiques ont été placés sous

15 les ordres du grand Etat-major.

16 Question: Donc ces QG des Républiques ont été sous la compétence, les

17 attributions du grand état-major de la JNA?

18 Réponse: Juste avant la guerre?

19 Question: Mais oui, avant la guerre. Le reste ne nous intéresse pas.

20 Donc cet état-major a décidé, a donné l'ordre de confisquer les armes de

21 la TO et cela n'a pas été fait seulement en Slovénie?

22 Réponse: Ce sont des ordres émanant du grand état-major de la JNA.

23 Question: Et vous avez dit que les armes étaient confisquées

24 indépendamment de l'appartenance ethnique; c'est bien cela?

25 Réponse: C'est exact. Toutes les armes, dans la zone où je me trouvais,

Page 18918

1 indépendamment de l'appartenance ethnique, ont été placées sous le

2 contrôle de mon commandement.

3 Question: De la JNA?

4 Réponse: Oui.

5 Question: Donc dans les arsenaux de la JNA et sous la surveillance de la

6 JNA?

7 Réponse: C'est exact.

8 Question: Bon. Maintenant, vous nous avez parlé de février/mars et vous

9 avez dit qu'il y a eu une sorte de distribution des armes à l'intention

10 des QG municipaux de la TO, là où il y avait des Serbes. C'est ce que vous

11 avez affirmé, c'est cela?

12 Réponse: Je n'ai pas dit "d'une certaine façon", j'ai dit "de façon

13 organisée". C'est de façon organisée que l'on a prélevé les armes de la TO

14 au niveau des QG municipaux. Et j'ai mentionné Sekovici, Vlasenica,

15 Lopare, et... -je n'arrive plus à maintenant à me remémorer ce que j'ai

16 dit- mais essentiellement là où la population était majoritairement serbe.

17 Ce n'était pas fait d'une certaine façon, cela était fait de façon

18 organisée. Donc tous les équipements, les armements des TO municipaux ont

19 été prélevés, et on a organisé des colonnes d'acheminement de ces armes

20 vers un emplacement désigné par MZ pour la distribution desdites armes.

21 Question: Bien, mais…

22 Réponse: J'ai personnellement été présent lorsque de telles armes ont été

23 distribuées sur le terrain de sport de Sekovici.

24 Question: Bien. Vous nous avez dit ce matin ici que vous aviez vu les

25 armes en train d'être acheminées, que vous l'aviez vu vous-même.

Page 18919

1 Réponse: Oui.

2 Question: Mais comment pouviez-vous savoir où ces armes étaient

3 acheminées? Vous vous trouviez au point à partir duquel les armes étaient

4 parties. Comment saviez-vous où cela était parti? Est-ce que cela était

5 rangé dans des entrepôts ou des arsenaux plus sûrs ou est-ce que cela

6 était distribué? Vous ne pouviez pas vous trouver en même temps,

7 simultanément aux deux endroits.

8 Réponse: Je vous répète que j'étais présent, à la localité de Sekovici,

9 lorsqu'il a été procédé à une distribution des armes.

10 Question: Je vais juste consulter certains points de votre déclaration

11 préalable; et je suis en train de suivre l'ordre de l'exposé tel que vous

12 l'avez présenté ce matin. Donnez-moi un instant, je vous prie.

13 J'ai noté cela ici. Voilà. Vous avez dit qu'il s'est tenu un référendum en

14 Bosnie-Herzégovine. Vous l'avez mentionné ce matin. C'est bien cela?

15 Réponse: On sait que le référendum...

16 Question: Pardon?

17 Réponse: On sait très bien que le référendum s'est tenu le 1er mars.

18 Question: Bien. Et vous avez dit également que cela était tout à fait

19 normal parce que voilà, la Croatie et la Slovénie faisaient sécession et

20 il était tout à fait normal que la Bosnie-Herzégovine le fasse.

21 Et j'espère que vous avez vos déclarations sous les yeux. En page 3,

22 paragraphe 8, vous dites bien que les officiers serbes et non-serbes

23 avaient estimé que ce référendum pour la Bosnie-Herzégovine indépendante

24 constituait dans ce courant de mars 1992 une trahison de la RSFY.

25 Témoin B-1493 (interprétation): Ce n'est pas ma déclaration. Je ne l'ai

Page 18920

1 pas sous les yeux, mais ce n'est pas ce que j'ai déclaré.

2 M. Milosevic (interprétation): Bien. Je me propose de vous la montrer

3 parce qu'il faut bien...

4 (Intervention de l'huissière.)

5 M. Kwon (interprétation): Veuillez remettre cette déclaration au témoin.

6 M. Milosevic (interprétation): Trouvez cette page n°3 et retrouvez ce

7 paragraphe n°8. Je vous prie de nous donner lecture de celui-ci.

8 M. Groome (interprétation): En fait, il y a deux déclarations: il y en a

9 une en date du 20 avril 2002, et il y en a une autre déclaration qui est

10 en date du 23 avril 2002 et 22 mai 2002. A quelle déclaration fait

11 référence M. Milosevic? Peut-il nous le dire?

12 M. le Président (interprétation): Veuillez nous le dire, s'il vous plaît.

13 Il faut que nous soyons exactement à quelle déclaration on fait référence.

14 De quelle déclaration s'agit-il?

15 M. Milosevic (interprétation): Je n'arrive pas à la retrouver au juste,

16 mais je crois que voilà. Voilà! Peut-être peut-on m'aider?

17 M. Tapuskovic (interprétation): Messieurs les Juges, peut-être pourrais-je

18 vous être d'une utilité? Je crois que c'est la déclaration du 20 avril

19 2002, et c'est précisément ce qui vient d'être cité. Cela se trouve en

20 page 3, deuxième paragraphe du bas.

21 Témoin B-1493 (interprétation): D'abord, laissez-moi vous dire que je n'ai

22 jamais fait ce type de déclaration parce que je suis l'un des premiers,

23 peut-être le tout premier à avoir été au bureau de vote où l'on a voté

24 pour l'indépendance de la Bosnie-Herzégovine. Peut-être y a-t-il eu un

25 lapsus linguae dans la traduction?

Page 18921

1 M. Milosevic (interprétation): Auriez-vous l'amabilité de nous donner

2 lecture de ce petit paragraphe constitué de deux lignes seulement?

3 Témoin B-1493 (interprétation): Je ne peux pas vous en donner lecture, ce

4 n'est pas ce que j'ai dit.

5 M. le Président (interprétation): Que quelqu'un d'autre le lise. Pouvez-

6 vous nous le lire en serbe pour que nous sachions de quoi il s'agit?

7 M. Tapuskovic (interprétation): Il s'agit d'un phrase qui s'énonce comme

8 suit: "Nous -officiers serbes et non-serbes de la JNA- avons estimé que ce

9 référendum pour l'indépendance de la Bosnie-Herzégovine qui s'est tenu en

10 mars 1992 constituait une trahison à l'égard de la RSFY."

11 M. le Président (interprétation): Nous avons entendu l'explication du

12 témoin. Vous avez encore deux minutes, Monsieur Milosevic, avant la

13 suspension.

14 M. Milosevic (interprétation): Oui. Nous avons entendu le témoin dire que

15 ce n'était pas ce qu'il avait dit. Et nous avons entendu également que

16 j'avais donné une citation exacte de ce qui figurait dans le texte de sa

17 déclaration. J'espère que la chose n'est pas contestée.

18 Je voudrais que vous me disiez encore, Monsieur B-1493, si vous vous

19 souvenez que nous tous en Yougoslavie, en RSFY, avons estimé que la

20 Bosnie-Herzégovine c'était une Yougoslavie en tout petit, parce que,

21 précisément, il y résidait trois nations?

22 Témoin B-1493 (interprétation): Tant que la Yougoslavie existait telle

23 qu'elle avait été, nous tous en Bosnie-Herzégovine et en Yougoslavie, nous

24 étions fiers de cette Yougoslavie. Toutefois, après la mort du camarade

25 Tito, après toutes sortes de changements, cela commençait tout doucement à

Page 18922

1 se perdre. Et voilà à quoi on en était venu.

2 M. Milosevic (interprétation): Mais bon. Dites-moi, si à vos yeux -sans

3 pour autant entrer sur le terrain de la moralité, restons sur le plan

4 politique, militaire, matériel et tout ce que vous voulez d'autre- était-

5 ce donc, à votre avis, logique de voir une telle Bosnie-Herzégovine et une

6 Yougoslavie en tout petit constituées de trois peuples se dissocier de la

7 Yougoslavie? Est-ce que cela était logique à vos yeux? Vous avez dit que

8 vous avez voté, vous avez été le premier à voter pour.

9 Témoin B-1493 (interprétation): Je pense avoir été le premier à voter à ce

10 bureau de vote. Cela était tout à fait logique, suite à l'évolution des

11 événements, suite à la trahison perpétrée par les dirigeants politiques et

12 militaires.

13 La Slovénie avait été mise de côté; elle a été abandonnée en tant que

14 République, et on lui avait pratiquement accordé son indépendance. On

15 rejetait toute proposition faite par les membres de la Présidence des

16 autres Républiques demandant que les Républiques demeurent dans les

17 frontières en présence et d'organiser une vie normale sur des bases

18 confédérales. Mais la direction au sommet avait estimé, au contraire, que

19 la Yougoslavie devait rester telle qu'ils l'avaient imaginée eux-mêmes.

20 M. le Président (interprétation): Nous allons maintenant interrompre le

21 contre-interrogatoire qui se poursuivra demain, car nous devons traiter

22 d'un certain nombre de questions d'ordre administratif ayant trait à la

23 procédure. Vous aurez encore une heure et quart demain. Une fois de plus,

24 vous aurez bénéficié de plus de temps que l'accusation.

25 M. Milosevic (interprétation): Je vous demande d'essayer de m'accorder un

Page 18923

1 peu plus d'une heure et quart.

2 M. le Président (interprétation): Nous verrons comment nous avançons

3 demain.

4 Monsieur le Témoin B-1493, nous en avons terminé de votre déposition

5 aujourd'hui. Nous devons aborder d'autres questions. Et je vais vous

6 demander de revenir demain dans ce même prétoire à 9 heures pour finir

7 votre déposition.

8 (Le témoin B-1493 est reconduit hors du prétoire.)

9 (Audience publique à 13 heures 33.)

10 (Questions relatives à la procédure.)

11 M. Nice (interprétation): Monsieur le Président, avant que M. McKeon ne

12 vous parle des témoins 92bis, je voudrais rappeler aux Juges et plus

13 particulièrement à l'accusé, par le truchement des Juges, que demain nous

14 aurons le témoin financier, l'expert financier, M. Torkildsen.

15 Et je signale donc à l'accusé que mon interrogatoire principal sera sans

16 doute très bref. Il ne s'agit nullement pour moi de limiter le temps dont

17 disposera l'accusé, mais c'est parce que je pense que c'est la meilleure

18 façon d'en traiter avec les témoins experts. Je n'aurai donc pas besoin de

19 beaucoup de temps pour l'interroger lors de l'interrogatoire principal; et

20 ensuite, on passera toute de suite au contre-interrogatoire par l'accusé.

21 Autre question d'ordre administratif que je souhaite aborder: si la

22 Chambre se prononce au sujet de l'interrogatoire principal des témoins

23 dans le cadre de l'Article 92bis, l'ordre de comparution de nos témoins

24 est plus ou moins déterminé jusqu'à Pâques. Cependant, je vous signale que

25 nous sommes en mesure de fournir plus de témoins après Pâques et

Page 18924

1 d'augmenter le nombre des témoins.

2 M. le Président (interprétation): Nous en prenons bonne note et nous

3 allons maintenant traiter de ces témoins 92bis.

4 J'ai une liste, ici: 1154, 1168, 1187, 1230, 1232, 1234. Et M. McKeon a

5 ajouté 1197 et 1210.

6 Tout d'abord, 1154. Il s'agit d'un médecin, d'après mes notes, qui vient

7 de Boranja, Beli Menastir, qui a réalisé un certain nombre d'autopsies.

8 Nous avons, par le passé, admis ce type d'éléments de preuve sans contre-

9 interrogatoire.

10 Objection? Monsieur Kay?

11 M. Kay (interprétation): Je n'ai rien à dire à ce sujet.

12 M. le Président (interprétation): Fort bien. Passons donc au suivant.

13 1168. Ici encore, il s'agit d'un témoin qui vient de Baranja, qui parle de

14 l'arrestation de son époux ainsi que des mauvais traitements dont il a été

15 victime avant d'être assassiné. Elle parle des efforts qu'elle a entrepris

16 pour le retrouver. Avez-vous quelque chose à dire à ce sujet, Monsieur

17 McKeon?

18 M. McKeon (interprétation): Je note simplement que la victime a déjà été

19 évoquée par le témoin C-25. Il s'agirait donc d'un témoignage cumulatif,

20 vu ce qui a déjà été communiqué à la Chambre par le truchement du

21 précédent témoin.

22 M. le Président (interprétation): Peut-être pouvons-nous donner à M. Kay

23 une ou deux minutes pour s'y retrouver?

24 Témoin 1187: un témoin qui présente beaucoup d'analogies avec le

25 précédent; quelqu'un dont le fils a été arrêté dans la même région. Et ce

Page 18925

1 témoin, cette femme nous dit qu'il s'agit de deux Serbes, me semble-t-il,

2 mais je me trompe peut-être. Et la personne, l'homme qui a disparu, n'a

3 pas refait surface depuis. Avez-vous des observations à faire à ce sujet?

4 M. McKeon (interprétation): Je souhaiterais simplement ajouter la chose

5 suivante: vous nous avez déjà permis de présenter par le biais de 92bis le

6 témoin C-1052 dont le témoignage est très semblable à ce témoin. Le témoin

7 C-1052 nous parle du premier massacre de Dalj, alors que ce témoin nous

8 parle du deuxième massacre.

9 M. le Président (interprétation): Et le deuxième témoin doit donc être

10 contre-interrogé, c'est cela?

11 M. McKeon (interprétation): Oui.

12 M. le Président (interprétation): Monsieur Kay, pouvez-vous nous parler de

13 ces deux témoins?

14 M. Kay (interprétation): Le témoin 1168, intercalaire 41, éléments de

15 preuves cumulatifs au sujet du minibus ou de la fourgonnette blanche; la

16 Chambre a déjà peut-être entendu ou se souvient peut-être que le témoin C-

17 25 nous en a déjà parlé. On parle également d'un capitaine de la JNA, ici.

18 Il s'agit là d'un événement de preuve par ouï-dire. On aurait rapporté des

19 propos relatifs à l'époux.

20 M. le Président (interprétation): Cela se trouve où, exactement? Ah oui!

21 Ça y est, oui. Je cite: "Mon mari devait se présenter deux fois par jour.

22 Il m'a dit que, la plupart du temps, il devait se présenter à un capitaine

23 de la JNA." (Fin de citation.)

24 M. Kay (interprétation): Oui, c'est la question qui se pose ici.

25 M. le Président (interprétation): Il s'agit d'une seule phrase. Si on

Page 18926

1 expurgeait cette phrase, et vous signalez à très juste titre qu'il s'agit

2 d'éléments de preuve par ouï-dire, est-ce qu'à ce moment-là on ne pourrait

3 pas verser au dossier cette déclaration sans contre-interrogatoire?

4 M. Kay (interprétation): La question de la fourgonnette blanche est une

5 question d'importance, puisqu'on la retrouve mentionnée à l'Acte

6 d'accusation quand on évoque le cas de ces personnes que l'on a emmenées.

7 M. le Président (interprétation): Et pour 1187?

8 M. Kay (interprétation): Quand j'examine la déclaration de 1187, je ne

9 vois aucun lien -apparent du moins- avec C-25; c'est ce qui m'est apparu

10 après avoir examiné les déclarations. J'ai procédé à de nombreuses

11 vérifications. Je me trompe peut-être s'agissant de la pertinence de cette

12 déclaration, mais il me semble qu'il n'y a pas de liens entre ces deux

13 témoins a priori. Je ne sais pas si le Procureur sera en mesure d'apporter

14 des éléments supplémentaires à la Chambre, sur ce point précis.

15 M. le Président (interprétation): Bon, il s'agira peut-être d'une question

16 que nous devrons examiner un peu plus en détail.

17 Oui, Monsieur le Procureur?

18 M. McKeon (interprétation): Monsieur le Président, je m'apprêtais à vous

19 signaler que le témoin C-25 a déposé au sujet de l'arrestation d'une

20 personne se trouvant dans la zone de Baranja; il s'agissait d'une victime

21 qui a été transportée à Dalj, comme le dit ce témoin. D'autres éléments

22 indiquent que cette personne a ensuite été tuée. Et voilà le lien entre ce

23 témoin et C-25.

24 M. le Président (interprétation): Pour les trois témoins suivants, on

25 passe à autre chose. Mais vous vouliez intervenir?

Page 18927

1 M. Kay (interprétation): Non, je n'ai rien d'autre à ajouter à ce sujet.

2 M. le Président (interprétation): Les trois témoins suivants nous parlent

3 de la zone de Saborsko, je crois, Poljanac.

4 Le premier témoin, C-1230, nous parle de l'attaque de Poljanac. Il

5 identifie les unités spéciales de Nis de la JNA. Et j'imagine, Monsieur

6 Kay, que vous allez nous dire qu'il s'agit là d'un élément essentiel?

7 M. Kay (interprétation): Oui, c'est l'essence même de mon objection -qui

8 va se retrouver d'ailleurs.

9 M. le Président (interprétation): Témoin suivant, 1232: exécutions,

10 pilonnage de Poljanac, exécution du mari du témoin. On identifie des

11 soldats serbes. Qu'avez-vous à dire à ce sujet?

12 M. Kay (interprétation): Ici, on revient au témoignage de Babic, qui

13 présente de cette manière l'attaque de Poljanac, et qui dit qu'en 1991 il

14 y avait des combats à cet endroit, mais il les a simplement vus; il a

15 simplement vu les lieux abandonnés, détruits en 1994, et a parlé de

16 Vukovici. La question est donc de savoir si ces éléments de preuve sont

17 vraiment cumulatifs. C'est vrai, c'est certes la même région, mais il n'a

18 pas été très précis quant aux localités exactes auxquelles il faisait

19 référence.

20 M. le Président (interprétation): Monsieur McKeon, souhaitez-vous faire

21 des observations à ce sujet?

22 M. McKeon (interprétation): Elément de preuve de nature cumulative, au

23 sens où la Chambre l'a définit le 7 avril, étant donné qu'il y a eu des

24 attaques par les forces serbes contre des villages, contre un certain

25 nombre de villages. Ce sont des éléments qui ont déjà été évoqués, qui

Page 18928

1 figurent à l'Acte d'accusation, d'autres témoins en ont parlé. Donc je

2 pense que c'est pour cela qu'il devrait être admis en vertu de l'Article

3 92bis.

4 M. le Président (interprétation): Il y a deux autres déclarations venant

5 de témoins de Dubrovnik.

6 1210: attaque croate du village de Hrtkovci, Dubrovnik, base navale, des

7 canonnières qui tirent sur la ville. J'imagine, Monsieur Kay, que vous

8 allez nous dire qu'il y a lieu d'autoriser un contre-interrogatoire, ici?

9 M. Kay (interprétation): Oui, on fait référence à de très nombreuses

10 reprises à la JNA dans cette déclaration.

11 M. le Président (interprétation): Et pour ce qui de 1197, Monsieur McKeon,

12 pouvez-vous nous dire de quoi il s'agit exactement ici?

13 M. McKeon (interprétation): Oui. Ce témoin a été accusé d'être une

14 Oustacha -donc c'est une femme-, elle a été accusée de ce fait parce que,

15 contrairement aux autres villageois, elle n'a pas quitté son village. Elle

16 parle de civils qui ont été emprisonnés. Son fils de 16 ans, son mari ont

17 été détenus à Baranja. Son mari a été tué. Elle a été emmenée au camp de

18 Kumbor un jour seulement. Elle peut parler du fait qu'il y a eu des

19 pillages, des destructions des maisons brûlées, etc. Le village dont elle

20 est originaire, Zvikovica, a été mentionné par deux autres témoins:

21 Poljanak et Hausvicka.

22 M. Kwon (interprétation): Et son mari était membre des ZNG.

23 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Kay?

24 M. Kay (interprétation): Ici encore, on parle beaucoup de la JNA. On dit

25 que ce témoin a été arrêté par la JNA, on parle de l'implication de la JNA

Page 18929

1 dans les événements qui ont eu lieu au cours de l'année 1992, dans cette

2 région.

3 M. le Président (interprétation): Merci.

4 Oui, Monsieur Milosevic, nous n'avons pas oublié que vous pouvez

5 intervenir à la fin; ce qui fait que, parfois, vous avez un petit moins de

6 temps que le reste des parties, mais ne vous inquiétez pas, nous vous

7 entendrons. Est-ce que vous souhaitez dire quelque chose au sujet des

8 témoins que nous venons d'évoquer?

9 M. Milosevic (interprétation): Vraiment, cela ne vaut pas la peine. Cela

10 ne vaut vraiment pas la peine que je fasse des commentaires au sujet des

11 manigances du Procureur, complètement illégales dans le cadre de cette

12 affaire. Et s'agissant également de ce qui a été fait au sujet de ma

13 famille…

14 M. le Président (interprétation): Nous sommes en train de parler, ici, de

15 questions bien précises, et des allégations de cette sorte, de nature

16 générale, n'ont absolument aucune place ici.

17 Encore une chose: Monsieur Milosevic, nous savons que vous vous êtes

18 plaint de ne pas avoir suffisamment de temps pour vous préparer. Nous

19 n'avons pas encore complètement réglé la question de la communication des

20 pièces. Cependant, nous avons choisi une semaine, la semaine du mois de

21 mai où il n'y aura pas d'audience; c'est la semaine du 14 et du 15 mai où

22 il n'y a que deux jours de travail. Il nous est apparu que le plus simple

23 serait d'annuler ces deux jours d'audience pour donner plus de temps à

24 l'accusé. Vous aurez également une semaine supplémentaire en avril,

25 Monsieur Milosevic, puisqu'il y a une semaine au cours du mois d'avril

Page 18930

1 après Pâques au cours de laquelle nous n'allons pas siéger.

2 M. Nice (interprétation): Monsieur le Président, les documents ont été

3 présentés sous forme de tableau, les documents à communiquer à l'accusé,

4 et je pourrais peut-être demain ou vendredi vous donner des informations

5 supplémentaires à ce sujet.

6 M. le Président (interprétation): Oui. D'autre part, vous pourrez y

7 ajouter -si cela n'a pas été fait- tous les éléments qui ont été

8 communiqués depuis le 31 janvier.

9 M. Nice (interprétation): Oui. Bien entendu, il sera un petit peu

10 difficile de dire quels documents ont été fournis en double, parce que

11 c'est dans un effort positif, pour aider l'accusé, que nous avons parfois

12 fourni des documents en double. Mais nous allons faire de notre mieux

13 cependant.

14 M. le Président (interprétation): Merci.

15 L'audience est suspendue jusqu'à demain 9 heures.

16 (L'audience est levée à 13 heures 50.)

17

18

19

20

21

22

23

24

25