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1 Le jeudi 26 juin 2003
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.
6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Nice, vous avez la parole.
7 LE TÉMOIN: PETER GALBRAITH [Reprise]
8 [Le témoin répond par l'interprète]
9 Interrogatoire principal par M. Nice: [Suite]
10 M. NICE : [interprétation] A la suspension de l'audience hier après-midi,
11 l'accusé a demandé au juriste en place que lui soit communiqué la
12 déclaration du 1er novembre 1995 qui porte sur un élément de preuve dont
13 nous avons parlé hier. Ce document lui a été fourni mais je vais interroger
14 le témoin à son sujet.
15 Q. Monsieur l'Ambassadeur Galbraith, après la fin de la séance hier, avez-
16 vous restitué cet article de presse en les négociations ?
17 R. Oui.
18 Q. Etes-vous retourné à Dayton ou avez-vous passer un temps limité à
19 Dayton ?
20 R. Je suis retourné à Dayton, tout à fait. à la fin après la signature de
21 l'accord de paix en Croatie.
22 Q. La conversation que vous avez eue avec l'accusé et dont vous avez parlé
23 ici, hier, a-t-elle été confirmée ou infirmée grâce à une conversation que
24 vous avez eue avec Milan Milanovic ?
25 R. Oui. Lorsque nous avons repris les négociations, dans le cadre de
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1 séances, navettes organisées à Zagreb et parfois aussi à Osijek ou à Erdut
2 en Slavonie orientale, nous nous sommes rendus compte que nous ne
3 progressions pas et à un certain moment. Milan Milanovic nous a proposé un
4 nouveau projet de textes et je crois que c'était le 5 novembre ou le 6
5 novembre qu'il a dit :
6 "Et bien, je vais signer ce projet de textes puisque M. Milosevic me dit de
7 le faire."
8 Q. Donc d'après vous, quel était le degré d'influence ou de contrôle
9 exercé par l'accusé sur la partie orientale de la Slavonie aux négociations
10 de Dayton jusqu'à la fin de ces négociations ?
11 R. Pour moi, il était tout à fait clair que nous ne parviendrions pas à un
12 accord tant que l'accusé n'aurait pas décidé qu'un accord devait être
13 conclu. Et tout cela dépendait de la Slavonie orientale où en tout état de
14 cause, du moment où il estimerait qu'il était opportun dans le cadre du
15 processus global de parvenir à un accord.
16 Q. S'agissant du processus global, vous nous avez dit ce que vous avez vu
17 de vos yeux, bien sûr mais, en dehors de la Slavonie orientale, les autres
18 éléments de la négociation ont-ils été traités par d'autres ?
19 R. J'ai participé de façon très limitée aux négociations sur certaines des
20 questions relatives à la Fédération bosniaque, mais vraiment de façon très
21 limitée.
22 Q. Pièce à conviction 471, intercalaire 2, pouvez-vous nous parler de ce
23 document ?
24 R. Oui. C'est l'accord d'Erdut du 12 novembre 1995. L'accord de paix
25 croate qui prévoyait la réintégration pacifique de la Slavonie orientale de
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1 la Baranja et du Srem occidental à la Croatie après une période de deux
2 années, d'ailleurs transitoire.
3 Vous remarquerez que c'est un accord en 14 points qui est pratiquement
4 identique à ce qui avait été convenu le 3 octobre à Erdut également.
5 Q. Un thème général maintenant. Vous avez parlé de la résistance de
6 l'accusé vis-à-vis des plans et propositions relatifs à la Slovénie
7 orientale. Vous nous avez dit quelques mots du fait qu'il fallait une
8 majorité de Serbes dans la population pour pouvoir demander l'autonomie
9 dans le cadre du
10 plan Z-4. Quel a été le motif qui vous a été révélé au cours de vos
11 négociations avec l'accusé s'agissant de sa réticence à conclure un accord
12 au sujet de la Slovénie orientale ?
13 R. Et bien, cette question est assez vaste. A mon avis au début de la
14 guerre en Croatie et peut-être même au début de la guerre en Bosnie,
15 l'accusé espérait sans doute pouvoir créer une grande Serbie avec une
16 grande partie de la Bosnie et une partie de la Croatie et bien sûr la
17 Slovénie orientale, la Slovénie occidentale et la région de la Krajina
18 ainsi que la région de Dubrovnik en ferait partie.
19 En 1994, il est apparu de façon très claire que ce projet ne pouvait pas
20 être réalisé mais il espérait obtenir un accord grâce auquel il permettrait
21 à la Croatie de récupérer la Krajina par des moyens militaires sans doute
22 et en échange de cela, il espérait une espèce de règlements territoriaux
23 dans le cadre duquel la Serbie obtiendrait une partie du territoire croate,
24 à savoir la Slovénie orientale, c'est-à-dire soit la totalité de cette
25 région qui était très agricole et dans laquelle il y avait du pétrole, soit
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1 une partie de cette région.
2 En tout cas, à mon avis, il a été encouragé dans cette voie par des
3 médiateurs internationaux, Lord David Owen en particulier qui disait
4 fréquemment que la possibilité de tels échanges de territoire existait même
5 si la communauté internationale dans son ensemble, à savoir les Etats-Unis
6 et la communauté européenne étaient très opposés à toute modification des
7 frontières, notamment si celles-ci étaient obtenues par la force.
8 Cependant, des discussions ont été engagées dans cette voie.
9 Je dois dire également que de temps en temps, le président Tudjman lui-même
10 a envoyé des signaux indiquant semble-t-il qu'il s'intéressait à l'abandon
11 au moins de la partie orientale de la Slovénie. Donc, je pense que l'accusé
12 a été encouragé dans cette voie, a été encouragé donc à penser qu'un tel
13 règlement était possible.
14 Je ne pense pas qu'il s'intéressait de quelque façon au bien-être des
15 Serbes résidant en Krajina. Je pense que le plan Z-4 à ses yeux, ne lui
16 apparaissait pas comme un résultat que les Serbes de Krajina pouvaient
17 obtenir ou qu'ils leur permettraient de demeurer en Croatie avec une
18 autonomie assez importante et que ce précédent aurait pu s'appliquer
19 ensuite au Kosovo.
20 Q. Avant de passer à autre chose, j'aimerais que vous me donniez quelques
21 détails sur les sources de cette proposition notamment s'agissant du lien
22 avec les difficultés du Kosovo si l'autonomie était accordée à la Slovénie
23 orientale ?
24 R. J'ai entendu parler de cela de la bouche d'un certain nombre de
25 médiateurs internationaux qui traitaient avec l'accusé ainsi que de la
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1 bouche Hrvoje Sarinic, le chef d'état major de Tudjman qui a eu un certain
2 nombre de rencontres à ce sujet, de réunions à ce sujet.
3 Q. Quel était votre préoccupation, votre inquiétude lorsque vous avez
4 entendu cela de la bouche des hommes que vous venez d'évoquer ?
5 R. Ce qui inquiétait l'accusé en tout cas, c'était que la Krajina si elle
6 était relativement autonome dans le cadre du plan Z-4 et puisque la Krajina
7 représentait une minorité au sein de la Croatie, il y aurait peut-être une
8 majorité locale mais au niveau de la région, mais ce serait tout de même
9 une minorité au niveau du pays. Donc, cela créerait un précédent pour la
10 majorité des Albanais résidant au Kosovo qui pourrait éventuellement
11 demander le même genre d'autonomie.
12 M. NICE : [interprétation] Merci beaucoup, votre Excellence. Je n'ai plus
13 de questions.
14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Milosevic, à vous.
15 Contre-interrogatoire par M. Milosevic.
16 Q. [interprétation] M. Galbraith, êtes-vous au courant du fait que le 4
17 juillet 1992, le Congrès mondial croate a soumis officiellement --
18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous n'entendons pas les interprètes.
19 Pouvez-vous reprendre ?
20 Veuillez reprendre maintenant.
21 M. MILOSEVIC : [interprétation]
22 Q. Etes-vous au courant du fait que le Congrès mondial croate en date du 4
23 juillet 2002, a soumis une demande officielle à Mme Del Ponte pour qu'une
24 enquête soit engagée contre des officiers à la retraite de l'armée
25 américaine, compte tenu de l'aide qu'ils avaient donnée, qu'ils avaient
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1 apportée à la réalisation de l'Opération éclaire et de l'Opération tempête,
2 ainsi qu'à l'encontre d'un certain nombre de responsables des Etats-Unis
3 d'Amérique, y compris vous-même ?
4 R. Oui. Je sais que ceci a eu lieu. En tout cas, j'en ai vu des traces sur
5 l'Internet.
6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Quelle est la pertinence de cette
7 question ?
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Au cours de l'Opération tempête qui fait
9 l'objet des thèmes abordés par M. Galbraith dans sa déposition, les plus
10 terribles crimes ont été commis contre la population serbe. Plus de 250 000
11 personnes ont été expulsées de Krajina.
12 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Pas de discours, je vous prie. Quelle est
13 la question que vous souhaitez poser au témoin ? Et je vous prierais, de ne
14 pas faire de discours.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Le thème de mon propos c'est que des crimes ont
16 été commis en Croatie contre des Serbes au cours de cette opération --
17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Non. Nous ne parviendrons à rien de cette
18 façon. Quel est le thème que vous souhaitez soumettre au témoin ?
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai obtenu une réponse. Il m'a été dit qu'il
20 était au courant que le Congrès mondial croate avait soumis une demande
21 officielle --
22 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous savez ce que veut dire le mot
23 "pertinence." Quelle est la pertinence de votre propos ?
24 Il est peut-être justifié, mais quelle est sa pertinence ?
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] La pertinence Monsieur May, vient du fait que
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1 dans toute sa déposition, M. Galbraith justifie ce crime et apporte pour le
2 justifier un certain nombre d'explications politiques --
3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Fort bien. Nous savons maintenant quelle
4 est la pertinence. La question peut donc être posée au témoin ?
5 Monsieur l'Ambassadeur, ce qui vient d'être dit c'est que votre déposition
6 est je suppose que le mot à utiliser est le mot partial, compte tenu de
7 votre souci de justifier le rôle des Etats-Unis dans toute cette affaire ?
8 Quelle est votre réponse à cette allégation ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois que les Etats-Unis ont fait tout ce
10 qui était possible pour tenter d'obtenir un règlement pacifique du problème
11 de la Krajina. Nous avons consacré des efforts très importants et nous
12 avons payé un lourd tribut s'agissant de la qualité de nos rapports avec la
13 Croatie pour mettre en place un plan viable qui pourrait accorder un degré
14 d'autonomie élevé aux Serbes de la région. Nous avons poursuivi les
15 négociations dans ce sens jusqu'au dernier moment.
16 Et j'ai expliqué hier que les options qui nous ont été présentées en
17 juillet 1995 étaient très -- nous mettaient dans une situation très
18 difficile. En effet, nous nous sommes trouvés dans un dilemme contraint de
19 choisir entre d'une part la chute très vraisemblable de Bihac et le
20 massacre vraisemblable de 40 000 hommes et jeunes gens partant de
21 l'hypothèse que les Serbes de Bosnie feraient exactement la même chose que
22 ce qui avait été fait une semaine avant ou dix jours avant à Srebrenica. Et
23 j'ai parlé de l'opération militaire que nous estimions très vraisemblable
24 et qui créerait de très nombreux réfugiés. Donc, le dilemme était terrible
25 à nos yeux. Nous avons fait tout ce qui était possible pour essayer
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1 d'éviter cela par le biais d'un règlement pacifique.
2 M. MILOSEVIC : [interprétation]
3 Q. Puisque vous abordez la question de Bihac, M. Galbraith, je vous
4 demande si vous savez qu'à Bihac, il n'y a eu -- il n'y a absolument pas eu
5 d'affrontement entre les forces de la Republika Srpska et les forces du 5ième
6 Corps d'armée de l'armée de Bosnie-Herzégovine qui était sur place mais
7 qu'il s'agissait d'un conflit entre Musulmans. Car, toute la région avait
8 été proclamée région autonome de Bosnie occidentale sous la présidence de
9 Fikret Abdic à ce moment-là.
10 R. Le problème qui s'est posé en juillet 1995 n'avait rien à voir avec un
11 conflit entre Musulmans. Il n'avait rien à voir avec le conflit --
12 l'opposition entre Fikret Abdic et le 5ième Corps d'armée de Bosnie-
13 Herzégovine. Et c'était une offensive qui avait été lancée par l'armée de
14 la Republika Srpska en Krajina tout le long de la frontière internationale
15 avec les zones de sécurité des Nations unies. Et, il y a eu une attaque du
16 même genre de la part de l'armée serbe de Bosnie à Bihac dans des
17 conditions dont nous avions toutes les raisons de penser qu'elle
18 provoquerait des assassinats systématiques, des milliers de victimes, si
19 les assaillants l'emportaient.
20 Q. J'ai ici sous les yeux la déclaration dans la traduction anglaise m'a
21 été fournie par la patrie d'en face. La date de ce document est celle du 23
22 octobre et nous voyons que Radovan Karadzic et Fikret Abdic mettent au
23 point un accord de paix qui permet de normaliser totalement les rapports
24 entre eux. Il est question de la province autonome de Bosnie occidentale --
25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je crois que le témoin devrait avoir sous
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1 les yeux un exemplaire de ce document. Avez-vous un exemplaire de ce
2 document Monsieur Nice ?
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je peux en fournir un exemplaire le cas
4 échéant.
5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous essaierons de trouver ce document et
6 de le remettre au témoin. Veuillez poursuivre, Monsieur Milosevic.
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai sous les yeux une traduction anglaise.
8 Donc, M. Galbraith pourra y jeter un coup d'œil lorsque j'aurai terminé de
9 lui poser ma question.
10 M. MILOSEVIC : [interprétation]
11 Q. Nous lisons dans le document ce qui suit. Je cite :
12 "Assurer une paix durable entre les Serbes et les Musulmans dans la région
13 de l'ex-république de Bosnie-Herzégovine. Le président de la Republika
14 Srpska, Radovan Karadzic et le président de la province autonome de Bosnie
15 occidentale, la république de Bosnie, Fikret Abdic, se rencontraient à
16 Belgrade et ont décidé de proposer ensemble avec la participation du
17 président de la république de Serbie, Slobodan Milosevic la déclaration
18 suivante."
19 Et ensuite, nous voyons les 12 points de cette déclaration en date du 23
20 octobre 1993, où ce qui est prévu est une normalisation complète des
21 rapports entre eux. La -- le rétablissement de la liberté de circulation,
22 le respect mutuel, coopération économique et coopération dans tous les
23 autres domaines signés par le président de Republika Srpska, Radovan
24 Karadzic, signés par le président de la région autonome de Bosnie
25 occidentale, Fikret Abdic.
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1 Et il est écrit :"Témoin de l'accord assumant l'obligation d'intervenir en
2 tant que médiateur en cas de difficulté de mise en œuvre de cet accord,
3 président de la république de Serbie, Slobodan Milosevic."
4 Donc, ma signature figure également sur ce document. Voilà, vous pouvez y
5 jeter un coup d'œil et vous constaterez que la région autonome de Bosnie
6 occidentale est reconnue ici et chacun a estimé que cet accord constituait
7 un pas en avant très important vers la paix car toutes les hostilités
8 cessent désormais entre les Serbes et les Musulmans. Mais les hostilités se
9 poursuivent entre Mus -- entre certains Musulmans et Alija, le 5ième Corps
10 d'armée fidèle Alija Izetbegovic qui était stationné à Bihac.
11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur l'Ambassadeur, vous avez obtenu
12 l'exemplaire de ce document ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Avez-vous des commentaires ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne vois pas quel est l'intérêt de discuter
16 de ce document pour le moment. Il y a eu une attaque de la République serbe
17 de Krajina contre l'armée de Bosnie-Herzégovine à Bihac et l'enclave de
18 Bihac courrait le risque de tomber. Donc, cela ne change rien à la
19 situation qui prévalait en juillet 1995.
20 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Est-il exact que cet accord fait
21 référence à la possibilité d'une médiation par l'accusé ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai vraiment pas lu l'intégralité du
23 texte, mais je vais le faire maintenant.
24 En fait, j'ai lu ce texte, j'ai survolé ce texte car je sais que l'accusé
25 ne dispose pas de beaucoup d temps. Mais je ne vois pas de référence ici au
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1 rôle de médiateur de l'accusé. Ce que je vois dans ce document, c'est que
2 Karadzic et Abdic expriment leur gratitude pour la contribution importante
3 de l'accusé au rétablissement d'une paix durable entre la Republika Srpska
4 et la province autonome de Bosnie occidentale au sein de la république de
5 Serbie. Mais pour que les choses soient claires, j'ajouterais que le
6 problème qui se pose ici c'est qu'Abdic n'était pas -- ne contrôlait pas
7 Bihac. Il est vrai que Abdic était sur la même ligne que la partie serbe
8 mais il ne contrôlait pas Bihac. Donc, je ne comprends pas très bien la
9 pertinence de tout cela.
10 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.
11 M. MILOSEVIC : [interprétation]
12 Q. Savez-vous Monsieur Galbraith, puisqu'à l'époque vous étiez ambassadeur
13 en Croatie, que M. Abdic, de la même façon qu'il venait me rendre visite à
14 moi, rendait visite à M. Tudjman et même plus fréquemment ? Et il a
15 également établi de très bonnes relations avec la Croatie ?
16 R. Je sais avec certitude qu'il se rendait très fréquemment en Croatie. En
17 fait, il avait même une résidence personnelle à Rijeka. On lui a accordé ou
18 bien il avait la citoyenneté croate, il a eu des rencontres avec Sarinic.
19 Et au moins une fois, je l'ai rencontré.
20 Q. Mais il rencontrait également le président Tudjman, comme vous le
21 savez ?
22 R. Je ne m'en souviens pas mais je n'ai aucune raison de mettre cela en
23 doute.
24 Q. Donc, la région autonome de Bosnie occidentale ne pouvait pas
25 constituer un danger pour la Croatie. Les forces de Fikret Abdic
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1 souhaitaient s'emparer de la totalité du territoire et souhaitaient,
2 enchâsser le 5e Corps d'armée d'Alija Izetbegovic, n'est-ce pas ?
3 Oui ou non ?
4 R. Et bien, je suis certain que Fikret Abdic souhaitait l'emporter sur le
5 5e Corps d'armée de Bosnie-Herzégovine afin de contrôler la totalité de la
6 poche de Bihac, mais ce n'est pas ce qui s'est passé. Bihac a été contrôlé
7 principalement par Dudakovic et par le 5e Corps d'armée, et a été attaqué
8 par l'armée Republika Srpska et par les forces de la RSK.
9 Q. Vous estimez que Bihac n'a pas été attaqué par les forces de Fikret
10 Abdic ?
11 R. Et bien, Fikret Abdic a été à plusieurs reprises un allié assez peu
12 fiable de la RSK. L'attaque qui a mis en cause la frontière internationale,
13 je le répète a été une offensive lancée par les forces de l'armée de ce
14 qu'il était convenu d'appeler la République serbe de Krajina.
15 Q. Savez-vous quelle a été la position adoptée par Belgrade ? Qui
16 affirmait que personne ne devait être autorisée à s'ingérer dans ce
17 conflit, indépendamment du fait qu'une alliance existait entre les
18 dirigeants de la Republika Srpska et la République serbe de Krajina et que
19 les relations étaient assez bonnes avec Fikret Abdic et les dirigeants qui
20 coopéraient avec lui ?
21 R. Mais, j'imagine que si vous souhaitez lancer une offensive, vous devez
22 chercher quelqu'un dans la partie adverse. Donc, si vous vous appartenez à
23 la partie serbe et que vous souhaitez attaquer l'enclave de Bihac, il vous
24 faut trouver un Musulman dans l'enclave de Bihac qui serait de votre côté.
25 Mais cela ne change à rien en fait que l'offensive était lancée par l'armée
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1 des Serbes de Bosnie et par l'armée de la République serbe de Krajina. Il
2 ne s'agissait pas d'une offensive lancée par les forces d'Abdic qui ont
3 peut-être participées mais pour l'essentiel cette attaque était due aux
4 deux composantes, aux deux armées serbes.
5 Q. Mais n'est-ce pas un fait que c'est Abdic qui tenait la plus grande
6 partie de la région autonome de Bosnie occidentale, qui était reconnue par
7 la République serbe de Krajina, par la Republika Srpska ainsi que par la
8 République de Croatie, qui avait également de bon rapport avec Fikret
9 Abdic ? Donc, tout cela ne prouve t-il pas que la région autonome de Bosnie
10 occidentale ne pouvait constituer un danger pour la Croatie ? Vous avez dit
11 vous-même que Fikret Abdic avait la nationalité croate et qu'il résidait à
12 Rijeka, comme il avait également une résidence à Kladusa en région autonome
13 de Bosnie occidentale. Donc, que cela ne pourrait pas être un prétexte pour
14 attaquer Knin ?
15 R. Abdic a contrôlé une partie de l'enclave de Bihac pendant
16 -- à certain moment, mais la majorité de l'enclave de Bihac était contrôlé
17 par le 5e Corps d'armée de Bosnie-Herzégovine, et ceci était vrai notamment
18 de la ville de Bihac.
19 Ce qui inquiétait la Croatie si l'enclave de Bihac tombait, si elle était
20 battue militairement par l'armée des Serbes de Bosnie et par l'armée de la
21 République serbe de Krajina, cela créerait un état Serbe distinct à
22 l'ouest. Et il y aurait donc réunification de la République serbe de
23 Krajina et de la Republika Srpska de Bosnie ce qui entraînerait -- ce qui
24 aboutirait sur le fait que les forces serbes n'auraient plus à se trouver
25 face aux forces que -- qui combattaient à Bihac. Donc, il faudrait qu'il y
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1 ait transfert sur le front de Krajina et il deviendrait impossible pour la
2 Croatie de récupérer cette partie de son territoire. Voilà quelles étaient
3 les inquiétudes stratégiques de la Croatie.
4 Q. Mais vous savez fort bien que la position officielle adoptée par
5 Belgrade consistait à s'opposer à une quelconque réunification de la
6 Republika Srpska et la République serbe de Krajina qui comme cela a été
7 écrit dans la presse. Ce n'était pas un secret, c'était un thème assez
8 récurant dans les négociations entre les dirigeants de la Republika Srpska
9 et la République serbe de Krajina. Mais Belgrade estimait que cette idée
10 était totalement irréalisable. Vous vous souvenez peut-être de cela ?
11 R. Je me souviens des déclarations qui ont été faites à cet effet mais je
12 sais tout aussi bien qu'en même temps vous aviez apporté votre soutien aux
13 armées des deux entités serbes.
14 Q. Nous avions apporté notre soutien à la Republika Srpska et la RSK pour
15 qu'elles puissent subsister -- survivre. Cela n'est pas contesté, nous les
16 avons aidés à survivre. Vous avez dit vous-même que c'était une région très
17 pauvre qui ne pouvait pas subsister sans notre aide, sans vivres, sans
18 médicaments et toutes autres sortes d'aides que nous leur apportions. Quoi
19 d'étrange à cela ?
20 R. Je vais vous dire ce qu'il y a d'étrange à cela. Si vous aviez
21 véritablement tenu à la survie des Serbes en Krajina, pourquoi n'avez vous
22 pas apporté vos soutiens au plan qui leur fournissait une autonomie
23 substantielle et qui leur permettrait de -- qui leur aurait permis de
24 rester là-bas ? Pourquoi en date du 2 et 3 août n'avez vous pas rencontré
25 Babic ? Pourquoi en date du 2 au 3 août ou plutôt le 3 août vous avez
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1 refusé à rencontrer le chargé d'affaires des Etats-Unis ? Vous n'avez pas
2 envoyé un message qui était susceptible d'empêcher la tragédie qui est
3 arrivée qui est survenue pour ce qui est des Serbes de la Krajina. Pourquoi
4 avez-vous refusé de nous rencontrer en janvier 1995 ?
5 Q. Je vais vous expliquer mais c'est moi qui vous pose des questions ici.
6 Vous souvenez vous, Monsieur Galbraith, pour être tout à fait équitable
7 pour ce qui est notamment de la constatation des faits si ce n'est pour
8 autre chose, donc le 19 janvier 1994, à savoir un an et demi avant tous ces
9 événements à -- au palais des Nations à Genève, il a été signé une
10 déclaration conjointe concernant normalisation graduelle des relations
11 entre la République fédérale de Yougoslavie et la République de Croatie. On
12 a prévue à ce moment-là, l'ouverture de mission officielle des deux
13 gouvernements tant à Belgrade que Zagreb, qui était censée faciliter des
14 relations entre ces deux états ainsi que les contacts entre ceux-ci et puis
15 contribuer à d'édification d'une confiance mutuelle y compris la mise en
16 place d'un processus de normalisation des relations serbo-croates. Tout
17 ceci avait été avancé dans la déclaration en question. Cela a été signé par
18 le ministre des Affaires étrangères de Yougoslavie, Radoslav Jovanovic et
19 le ministre des Affaires étrangères de Croatie, Mate Granic en présence des
20 présidents de la République de Croatie de la Serbie --
21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous devons entendre votre question ?
22 Monsieur l'Ambassadeur, attendez. Monsieur l'Ambassadeur, vous avez été
23 interrogé au sujet de cet accord du 19 janvier 1994. Vous en souvenez-
24 vous ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je me souviens, oui, de cet accord. Je ne me
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1 souviens pas, certes pas de la date précise mais je sais qu'il y a eu
2 accord de ce type.
3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Poursuivez, s'il vous plaît.
4 M. MILOSEVIC : [interprétation]
5 Q. Donc, à ce moment-là, en présence de Tudjman, en ma présence à moi, les
6 deux ministres ont signé un accord portant normalisation, et nous avons
7 estimé à ce moment-là que l'avenir des relations était celle de
8 l'édification de la confiance, de l'édification de bonnes relations entre
9 la Croatie et la Yougoslavie. Et que les questions qui demeuraient un
10 suspens devaient forcément être résolues par des moyens politiques entre
11 Knin et Zagreb. Etait-ce bien exact, Monsieur Galbraith ? Ce n'était pas
12 une question qui concernait la Yougoslavie mais il y avait déjà démarrage
13 et normalisation des relations et les questions étaient censées être
14 résolues entre Knin et Zagreb directement, n'est-ce pas ainsi que cela
15 s'est passé Monsieur Galbraith ?
16 R. Vous vous étiez le facteur déterminant qui allait établir ou faire
17 qu'il y aurait règlement ou pas entre Zagreb et Knin. C'est vous qui
18 déterminiez les choses et ceci ça été prouvé dans le processus concernant
19 la Slavonie orientale. Le négociateur, Milan Milanovic, le négociateur
20 serbe est allé à Belgrade avant qu'une solution définitive soit trouvée et
21 nous nous menions, Stoltenberg et moi, des pourparlers entre Zagreb et
22 Erdut et finalement la solution n'a pas été trouvée. Elle a été trouvée à
23 Dayton au moment où vous et le président Tudjman en présence de Christopher
24 Warren, vous avez bouclé l'accord définitif en se servant de ce document
25 qui avait été élaboré le 3 octobre. C'est à ce moment-là que les
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1 conclusions ont été trouvées. Sarinic a emmené le document à Zagreb, moi
2 j'avais reçu des instructions très claires. Il ne devait y avoir aucun
3 changement. Il n'y a pas eu de changements d'ailleurs, et le document a été
4 signé.
5 Soit dit entre parenthèse, à l'inverse de ce qui s'est passé en Bosnie, ou
6 tout du moins, vous aviez ce qu'on avait appelé le document du patriarche,
7 c'est-à-dire un document signé par Karadzic et d'autres selon lequel ils
8 marquaient leurs accords à ce que vous preniez décision en leur nom. Ici,
9 il n'y avait même pas un document de ce genre, vous avez pris l'initiative
10 et vous êtes allé.
11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je suppose que la question posée par
12 l'accusé était celle-ci. Veuillez y répondre. Pour autant, pour autant bien
13 sûr que ce soit vrai, nous verrons en obtenant une copie du document si
14 c'est vrai. Pour autant qu'il y eu un accord à Genève ou du moins qu'on
15 comprenait à Genève qu'il fallait qu'une solution se trouve entre Knin et
16 Zagreb, est-ce que ceci a été suivi d'effets appliqués ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.
18 M. MILOSEVIC : [interprétation]
19 Q. Monsieur Galbraith, hélas! Les faits sont là pour vous démentir. Vous
20 dites qu'à Dayton, nous avons signé un accord. Je n'avais pas son texte.
21 J'ai demandé au greffier de me confier le texte de cet accord. Je viens de
22 le recevoir lorsque je suis arrivé ce matin ici. Et c'est bien parce que
23 l'on estime que l'accord en question, je dirais de ma part à moi et de la
24 part de la Croatie, avait fait en sorte que la question de la Slavonie
25 orientale ait été résolue. Et je voudrais maintenant, comme le texte de
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1 l'accord est véritablement très court, je voudrais qu'ensemble nous
2 constations que cela n'est pas vrai.
3 Voici ce que dit cet accord-là. Vous pouvez le placer sur le
4 rétroprojecteur.
5 M. NICE : [interprétation] Il y a des copies disponibles.
6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il faut que tout le monde dispose d'un
7 exemplaire.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Si vous avez des copies, alors je voudrais de
9 prendre soin de ce qui est écrit.
10 M. MILOSEVIC : [interprétation]
11 Q. Et avant cela, je voudrais que nous tirions une chose au clair. Nous
12 sommes arrivés à Dayton pour résoudre la question afférente à la Bosnie-
13 Herzégovine. C'est bien cela, Monsieur Galbraith, n'est-ce pas ? Il
14 s'agissait de rétablir la paix en Bosnie-Herzégovine.
15 R. Effectivement, même s'il n'allait pas être possible de parvenir à la
16 paix en Bosnie-Herzégovine sans qu'un accord de paix soit conclu, qui
17 permettait le retour de la Slavonie orientale en Croatie.
18 Q. Penchez-vous maintenant sur le texte de cet accord. Il s'agit ou plutôt
19 d'une déclaration conjointe.
20 On dit : "Président Tudjman et Milosevic ont demandé à l'ambassadeur
21 Galbraith"--- et on dit plutôt que c'est un intitulé et on donne une date
22 qui est celle de 1995. On me dit ensuite --- "Les auspices du Secrétaire
23 d'état Christopher, les présidents Tudjman et Milosevic, qui se sont
24 rencontrés à la base aérienne Wright-Patterson de Dayton, ces hommes se
25 sont mis d'accord pour trouver une solution pacifique à la question de la
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1 Slavonie orientale et on demandait à l'ambassadeur Galbraith et à M.
2 Stoltenberg de reprendre leurs efforts de médiation."
3 Il s'agissait d'efforts de médiation entre Knin et Zagreb. Puis on dit dans
4 la suite : "L'ambassadeur Galbraith a préparé une déclaration qui a été
5 signée par les deux présidents."
6 Alors que dit-on dans cette déclaration-là. Voici maintenant le texte de la
7 déclaration que vous appelez accord portant solution et décision de ma part
8 portant sur cette même solution.
9 On dit : "A la demande du secrétaire d'état Christopher, le président
10 Tudjman et le président Milosevic, se sont rencontrés cet après-midi. Cette
11 réunion comme vous vous en souvenez n'a pas été prévue. J'étais en retard
12 parce que cela a été prévu mais parce que cela a été fixé ultérieurement.
13 Ils se sont mis d'accord pour avoir une complète normalisation des
14 relations entre leurs pays sur la base de."
15 Nous avions convenu de procéder à une pleine normalisation entre nos pays
16 respectifs sur la base de ce qui suit. Il y a trois points seulement. Trois
17 petits tirets, ce ne sont même pas des numéros, ce sont des petits tirets.
18 "Respect absolu des droits de l'homme reconnu internationalement pour tous
19 les citoyens de leur pays."
20 C'est le premier point, deuxième point : "Le droit qu'on tous les réfugiés
21 et toutes les personnes déplacées de ces deux pays de rentrer chez eux et
22 de récupérer leurs biens ou de recevoir une compensation adéquate."
23 Troisième point : "Appui à une résolution pacifique du problème posé par la
24 Slavonie orientale à Baranja et le Srem occidental dans les meilleurs
25 délais à prendre grâce à des négociations entre le gouvernement de la
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1 Croatie et les représentants des Serbes de la région.
2 Ce sont les trois alinéas en question, Monsieur Galbraith. Il n'est pas
3 question ici d'accord de quelque sorte que ce soit auquel nous aurions
4 abouti mais ce que -- mais c'est plutôt ce que j'affirme, à savoir, entre
5 le gouvernement de Zagreb et les représentants du peuple serbe dans cette
6 région-là. Moyennant négociations, il s'agissait d'aboutir à une solution
7 et à la fin, on dit :
8 "En cette esprit, les deux présidents ont demandé à l'ambassadeur Galbraith
9 et à M. Stoltenberg de repartir dans la région demain afin de poursuivre et
10 d'intensifier la médiation." C'est tout.
11 Par conséquent, on confirme de la sorte que le problème est censé être
12 résolu entre les représentants du gouvernement croate et les représentants
13 des Serbes de cette région-là. Par conséquent, nous n'avons pas abouti à
14 quelque accord que ce soit, Tudjman et moi et j'ai encore moins décidé de
15 l'aspect qu'aurait cette Slavonie orientale. Voilà le papier dont vous avez
16 parlé.
17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Posez une question.
18 M. MILOSEVIC : [interprétation]
19 Q. [aucune interprétation]
20 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Etes-vous en mesure de répondre, Monsieur
21 l'Ambassadeur ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur Milosevic, il ne s'agit pas ici d'un
23 accord portant sur la Slavonie orientale et ce n'est pas l'accord auquel je
24 faisais allusion. Je faisais moi, allusion à un accord qui est celui
25 d'Erdut en date du 12 novembre. Le texte définitif dudit accord qui
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1 manifestement ressemble beaucoup au texte du 3 octobre. Ce texte définitif,
2 il a été élaboré par vous et le président Tudjman en présence du secrétaire
3 d'état Christopher et de Chris Hill à Dayton.
4 Il y a eu tout particulièrement une question qui n'avait pas été résolue le
5 3 octobre, c'était la durée de la période de transition. C'est vous qui
6 avez mis ceci au point avec le président Tudjman. Vous avez dit que ce
7 serait une période d'une année qui pouvait être renouvelable. Le texte
8 comportant ce point a été remis en main propre part Hrvoje Sarinic. Il m'a
9 été remis, il a été envoyé par télécopie avec pour instruction de ne rien
10 changer car c'était là le texte convenu entre les deux présidents. Et moi,
11 je fais référence à cet accord-là.
12 En passant, je dirais que si vous maintenez votre position selon laquelle
13 tout ceci devait être résolu dans la région, pourquoi à cette réunion
14 précise où vous et le président Tudjman, vous étiez d'accord sur cette
15 déclaration, pourquoi à cette réunion-là même avez-vous posé des questions
16 de fond ? Vous avez notamment insisté sur la tenue d'un référendum.
17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Un instant. Il faudra donner une cote à
18 cette déclaration conjointe.
19 L'INTERPRÈTE : Dans la période précédente, ne pas tenir compte du
20 remplacement de la date du 3 octobre par celle du 23 octobre mais gardez 3
21 octobre.
22 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] C'est la pièce à conviction 151 de la
23 Défense.
24 M. MILOSEVIC : [interprétation]
25 Q. Monsieur Galbraith, nous venons de nous pencher sur ce qui a été signé
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1 à Dayton, à savoir que nous souhaitions une normalisation des relations et
2 que nous employons en faveur d'un -- du respect des droits de l'homme
3 internationalement reconnus. Nous nous employons en faveur du retour de
4 tous les réfugiés et d'une solution pacifique des problèmes et que cette
5 solution pacifique relevait des attributions du gouvernement Zagreb et des
6 représentants de Serbie dans cette Slovénie orientale, et c'est ainsi en
7 effet que cela s'est passé. C'est du reste tout ce que nous avons signé.
8 C'est vous qui aviez formulé ce projet de texte.
9 Et par la suite, à l'occasion des pourparlers en votre qualité de
10 médiateur, d'après ce que j'ai pu voir dans les papiers que j'ai en ma
11 possession, j'ai pu constater qu'au nom des représentants des Serbes en
12 Slovénie orientale, cela a été signé par Milanovic que vous avez mentionné
13 et au nom de la communauté internationale, c'est Stoltenberg qui a signé et
14 vous avez signé en votre qualité de témoin. C'est bien ainsi que ça c'est
15 passé, Monsieur Galbraith ?
16 R. C'est vrai ce document a été signé par Milanovic, moi-même, Stoltenberg
17 et Hrvoje Sarinic. Cependant, ceci ne veut pas dire pour autant que le
18 texte définitif eut été négocié par nous. Celui-ci, il a fait l'objet de
19 négociations par vous-même à Dayton.
20 Q. Bien, Monsieur Galbraith, je n'ai pas le temps nécessaire pour -- j'ai
21 pas suffisamment de temps pour le gaspiller. On voit la pièce à conviction,
22 on voit les trois points dont il a été question et l'accord que vous avez
23 signé avec Milanovic existe également non pas en tant qu'accord entre moi
24 et Tudjman, mais en tant qu'accord entre le gouvernement Zagreb et les
25 Serbes de la région. Et je ne vais pas --
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1 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Si vous avez une question, posez-là. Mais
2 vous n'êtes pas ici pour faire des commentaires. Finalement, c'est nous qui
3 devrons statuer sur la question.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien, Monsieur May. Très bien.
5 M. MILOSEVIC : [interprétation]
6 Q. En sus des explications que vous avez apportées concernant le fait que
7 la province autonome de la Bosnie occidentale avait constitué une menace à
8 l'égard de la Croatie et que c'est ce qui avait été la raison de l'attaque
9 lancée par la Croatie sur Knin, est-ce qu'en votre qualité d'ambassadeur
10 des Etats-Unis en Croatie, vous avez eu conscience du fait que sur le
11 territoire de la Bosnie-Herzégovine de façon tout à fait illégale, il y
12 avait des troupes de l'armée régulière de la Croatie ?
13 R. Soyons clair, Monsieur Milosevic, jamais je n'ai dit que la province
14 autonome de la Bosnie occidentale eut constitué une menace pour la Croatie.
15 Je ne suis pas d'accord avec cette idée. Ce que j'ai dit, c'est que les
16 Croates estimaient que s'il y avait une prise de Bihac par l'armée des
17 Serbes de Bosnie, par l'armée de la RSK, que ceci pourrait constituer un
18 danger sérieux pour les intérêts de la Croatie. C'est ce que j'ai dit.
19 Vous avez posé une deuxième question, j'y réponds. Nous avons su à des
20 moments différents qu'il y avait présence de l'armée de Croatie en Bosnie.
21 Nous avons estimé parfois que c'était là une présence illégale. Cependant,
22 à un moment donné, nous avons estimé que ce fut une présence légale. Quand
23 est-ce que ça c'est passé ? C'est au moment où le gouvernement
24 internationalement reconnu de la Bosnie-Herzégovine a invité l'armée croate
25 à venir les aider. Et ceci c'est passé au mois de juillet 1995.
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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. Je voudrais que nous tirions au
2 clair une chose. Monsieur May, avez-vous pris comme pièce à conviction cet
3 accord entre Karadzic et Abdic ? Pour ce qui est de conclure le
4 rétablissement de la paix entre la Republika Srpska et cette province
5 autonome de la Bosnie-Herzégovine pour que soit en réalité expliqué la
6 situation réelle telle quelle était ?
7 L'INTERPRÈTE : Il s'agissait de Bosnie occidentale plutôt que Bosnie-
8 Herzégovine.
9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je ne sais pas si nous l'avons déjà. Une
10 cote s'il vous plaît, Madame la Greffière.
11 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce de la Défense
12 152.
13 M. MILOSEVIC : [interprétation]
14 Q. Monsieur Galbraith, serait-il exact de dire que toutes ces années-là,
15 si ce n'est du côté des Croates, il n'y a pas eu d'attaques de la part de
16 la RSK sur la partie croate ?
17 R. Non. Ce n'est pas exact.
18 Q. Ecoutez, penchez-vous maintenant sur le 16 juillet 1993. Le
19 gouvernement de la République de Croatie et de la République de la Krajina
20 serbe ont signé un accord à Erdut au terme duquel la Croatie s'est engagée
21 à faire en sorte de retirer ses troupes des territoires occupées du
22 territoire de la RSK, Ravni Kotor, Maslenica, Miljevac plateau, centrale
23 hydroélectrique de Peruca et Zemunik en échange de l'ouverture du pont sur
24 le canal de Maslenica et la restitution de l'aéroport ou la réouverture de
25 l'aéroport en date du 16 juillet 1993.
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1 Donc, avant l'attaque sur cette -- contre cette région, il avait été
2 convenu que le 16 juillet 1993, l'armée croate se retire de là et qu'en
3 échange l'on rouvre les passages par le -- la traversée du pont de
4 Maslenica et l'aéroport de Zemunik. C'est exact ou pas ?
5 R. Il existait un accord qui allait dans ce sens. Il faudrait que je voie
6 le document de plus près, ce document dont vous citez un extrait. Mais je
7 ne sais pas où vous voulez en venir. Je dois cependant relever que par la
8 suite, les forces serbes de Krajina ont déclenché -- ou ont dirigé leurs
9 canons vers le pont de Maslenica, pont qui avait été construit par les
10 Croates.
11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Montrez ce document au témoin si vous
12 voulez vous en servir. Il faut que le témoin puisse voir le document.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'ai pas le document. J'ai l'ordre
14 chronologique des événements et je suppose que M. Galbraith est au courant
15 de ces événements. Mais si lui dit que --
16 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Mais tout dépend d'où vous donnez cette
17 chronologie. Soumettez ce document au témoin. Il vous dira s'il est
18 d'accord ou pas.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais moi -- je l'ai mis au témoin ces faits.
20 S'il affirme qu'il n'y a pas eu accord et à Erdut avec une teneur analogue,
21 je vous propose de poursuivre avec mes questions. Cela ne pose aucun
22 problème ?
23 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Poursuivez.
24 M. MILOSEVIC : [interprétation]
25 Q. Vous en souvenez-vous Monsieur Galbraith ou pas ?
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1 R. Je vous l'ai déjà dit, à un moment donné, il a existé un accord qui
2 prévoyait l'ouverture de l'aéroport à Zadar, l'ouverture du pont, mais
3 puisque je n'ai pas la chronologie des événements ni le document,
4 impossible de vous donner le détail. Effectivement, il y a eu un accord qui
5 s'inspirait de ces idées que vous venez d'énumérer. Il est fort probable
6 que ça été adopté le 16 juillet mais vous me demandez de me prononcer sur
7 une chose alors que franchement je ne me souviens pas de la date précise ni
8 des détails de ce document. Mais ça m'a l'air juste. Effectivement, ça m'a
9 l'air de quelque chose qui s'est bien passé à ce moment-là.
10 Q. Très bien. Je prends en considération la réponse que vous avez
11 apportée. J'en prends bonne note, mais je crois qu'il y quelque chose qui
12 vous sera plus familier. La Résolution 802 du Conseil de sécurité adoptée
13 au mois de février avait prévu ce qui a figuré dans les accords d'Erdut à
14 savoir, retrait de l'armée croate de ces territoires-là. Je parle
15 maintenant d'une résolution du Conseil de sécurité qui porte le numéro 802.
16 Parce que cela mettait en péril les accords obtenus et les éléments du plan
17 de Vance qui avaient commencé à se réaliser sur le territoire en question ?
18 R. Une fois de plus, ça m'a l'air juste. Je me souviens bien de cette
19 résolution du Conseil de sécurité. C'était sans doute la Résolution 802,
20 mais en l'absence du texte je ne peux pas me prononcer de façon
21 catégorique.
22 Q. Bien. Monsieur Galbraith, ce sont des choses qu'il est facile de
23 vérifier. Parce que ces documents existent.
24 R. Je n'en doute pas mais je n'ai pas le document sous les yeux. C'est
25 tout.
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1 Q. Vous souvenez-vous, Monsieur Galbraith, que le 4 février 1994, le
2 Conseil de sécurité des Nations unies a adopté…
3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] On vient de distribuer un document. Je ne
4 sais pas d'où il vient.
5 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit d'une
6 -- de la pièce à conviction de la Défense numéro 66.
7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Peut-être pourriez-vous nous dire de quoi
8 il s'agit, Monsieur l'Ambassadeur.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous parlez du document que je viens de
10 recevoir.
11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit de la Résolution 802 du Conseil de
13 sécurité des Nations unies. Je peux la lire si vous le voulez. "Il est
14 exigé un arrêt immédiat des hostilités de la part des forces armées croates
15 dans les zones protégées par les Nations unies ou immédiatement aux abords
16 de ces zones, et le retrait des forces armées de Croatie de ces zones. Les
17 attaques sur les membres de la FORPRONU sont condamnées. Il est exigé que
18 les armes lourdes qui ont été saisies dans les entrepôts de la FORPRONU
19 soient immédiatement restituées à la FORPRONU. Je pense qu'il s'agissait
20 des armes prises par les Serbes. Il est exigé que toutes les parties
21 respectent strictement le cessez-le-feu conclu, coopère totalement avec les
22 -- avec la -- dans le but de réaliser le plan de paix des Nations unies. Il
23 est exigé que toutes les parties respectent les -- le personnel des Nations
24 unies dans les zones protégées par les Nations unies."
25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je pense que nous avons le texte.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous ferai remarquer que la date de
2 document est celle du 25 janvier 1995. C'est-à-dire cinq mois avant que je
3 ne prenne mes fonctions.
4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous avez la parole.
5 M. MILOSEVIC : [interprétation]
6 Q. Donc, il n'est pas contesté, je suppose, qu'il s'agissait d'une
7 offensive lancée par les Croates, lancée contre les zones protégées, n'est-
8 ce pas ?
9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Le témoin ne peut dire que ce qui est
10 écrit dans le document. Il l'a sous les yeux. Veuillez poursuivre, Monsieur
11 Milosevic.
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien, fort bien, Monsieur May.
13 M. MILOSEVIC : [interprétation]
14 Q. Monsieur le témoin, savez-vous que le 4 février 1994, le Conseil de
15 sécurité des Nations unies a adopté une déclaration présidentielle qui
16 mettait en garde la Croatie quant au fait qu'elle serait soumise à des
17 conséquences graves si dans un laps de temps de deux semaines, elle ne
18 réduisait pas le nombre de ses soldats réguliers présents en Bosnie. Et du
19 -- et n'est-il pas clair que le problème était bien connu. Donc, depuis
20 1992, à savoir que la -- les forces croates régulières étaient stationnées
21 en Bosnie-Herzégovine ?
22 R. Oui. Je connais très bien cette déclaration présidentielle du 4 février
23 1994. J'avais d'ailleurs pour tâche de transmettre cette déclaration au
24 président Tudjman et aux autres responsables croates. Cette déclaration
25 utilisait une formulation très ferme pour indiquer notre insistance quant à
Page 23149
1 la nécessité de retirer les troupes régulières de Croatie, du territoire
2 bosniaque et de mettre un terme aux attaques des -- aux attaques lancées
3 contre les forces gouvernementales croates. Cette déclaration avait
4 également pour but d'annoncer que les conséquences seraient graves si ces
5 dispositions n'étaient pas respectées et qu'elles pourraient aller jusqu'à
6 la position de sanctions. D'ailleurs, j'en ai parlé publiquement dans une
7 allocution que j'ai prononcée dans une salle de concert le 17 février 1994.
8 Q. Monsieur Galbraith, essayons de procéder par ordre. Vous avez donc lu
9 cet accord relatif à la normalisation des rapports entre la Yougoslavie et
10 la Croatie. Je suppose que, vous vous souviendrez de la position de la
11 Serbie et de ma position personnelle sur ce point à savoir, que trois
12 étapes indispensables devaient être mises en œuvre pour que le problème
13 soit réglé. Et que ces trois étapes devaient se faire dans l'ordre.
14 D'abord, interruption de toutes les hostilités ensuite, rétablissement des
15 relations, des rapports de la vie économique -- des transactions
16 économiques et troisièmement, règlements politiques.
17 La cessation de toute hostilité était donc d'une certaine façon la
18 condition préalable au rétablissement de rapports économiques normaux. Et
19 la normalisation des relations économiques qui permettait donc, de remettre
20 à l'ordre du jour une co-existence entre toutes les populations, permettait
21 et était une condition préalable pour un règlement préalable -- pour un
22 règlement politique aux problèmes qui existaient à l'époque. N'était-ce pas
23 depuis le début la position soutenue par la Serbie et par moi
24 personnellement ?
25 R. Vous venez de décrire le processus Z-4, auquel nous avons participé. Un
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1 processus qui était destiné à déboucher sur le cessez-le-feu. Après quoi,
2 des efforts seraient mis en œuvre pour obtenir un accord économique ou en
3 tout cas mettre en place des mesures de confiance sur le plan économique.
4 Et, à tout cela devait succéder un accord politique. Mais le problème,
5 c'est que les Serbes de Krajina ont refusé de s'engager sérieusement
6 pendant un temps suffisamment long dans la mise en place de mesures de
7 confiance sur le plan économique. Ils ont joué un petit jeu ridicule
8 annulant des rencontres prévues. Parce que les Croates souhaitaient que
9 cinq journalistes soient présents au lieu de deux, par exemple. Ils se sont
10 livrés à toutes sortes de petites manœuvres très étranges, très bizarres
11 qui nous ont permis de comprendre à nous, les médiateurs. Et je dois dire
12 que le gouvernement croate l'a compris également : Qu'ils n'étaient pas
13 sérieux. Et lorsque le moment est venu de signer des mesures de confiance
14 sur le plan économique et un accord économique, et de présenter un projet
15 de plan politique, ils ont même refusé de prendre en main physiquement le
16 document dans lequel était décrit ce plan politique. Donc, vous qui avez
17 apporté votre aide à tout cela à l'époque n'avait pas fait.
18 Q. Monsieur Galbraith, quand avez-vous élaboré le plan Z-4, quand en avez-
19 vous entendu parler pour la première fois ?
20 R. Je pense que la décision a été prise à la fin de l'été 1994, compte
21 tenu du fait que les négociations économiques et les mesures de confiance
22 n'aboutissaient pas, compte tenu du fait que la situation devenait très
23 dangereuse et que le gouvernement croate s'impatientait, compte tenu du
24 fait que la meilleure façon d'éviter la guerre consistait à passer à
25 l'étape politique pour préparer un plan qui pourrait être soumis aux deux
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1 parties et ce plan ne devrait pas être présenté dans un cadre de -- à
2 prendre ou à laisser. Il fallait que des négociations réelles aient lieu,
3 des négociations qui ne seraient pas identiques à celles qui étaient menées
4 par le groupe de contact pour la Bosnie mais des négociations tout de même.
5 Nous souhaitions démontrer à la partie serbe qu'il était possible d'obtenir
6 un certain degré d'autonomie à l'intérieur de la Croatie et c'est ce que le
7 document cherchait à établir. Le projet de document donc date de la fin
8 août au début septembre 1994, et le document a été achevé en janvier 1995,
9 même si c'est seulement en septembre -- si c'est déjà en septembre ou au
10 début du mois d'octobre 1994 que sa rédaction existait.
11 Q. Fort bien, le plan dont on en a entendu parler pour la première fois en
12 janvier 1995, le plan sur lequel vous avez travaillé c'est bien cela ?
13 R. J'ai dit que le plan a été connu de façon publique en septembre,
14 octobre 1994. Il a été commenté largement da la presse croate. À l'époque,
15 certaines des idées qu'il contenait étaient connues du gouvernement croate,
16 et également des Serbes de Krajina avant janvier 1995.
17 Q. Mais vous parlez de quelques idées, moi je vous demande quand le plan
18 en tant que tel a été rendu public, connu.
19 R. On savait qu'il existait un plan de ce genre à partir de la fin 1994.
20 Mais le plan en tant que tel a été présenté officiellement auprésident
21 Tudjman le 30 janvier 1995, et des tentatives ont été faites pour le
22 présenter aux dirigeants de la Krajina serbe le même jour ainsi que pour le
23 présenter à vous.
24 Q. Donc, c'est le 13 janvier que le plan a été présenté pour la première
25 fois à Tudjman, n'est-ce pas ? Et c'est la première personne qu'il l'a eu
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1 entre les mains ?
2 R. Le 30 janvier.
3 Q. 1995 ?
4 R. C'est exact.
5 Q. Vous dites que parce que les pourparlers au sujet de la normalisation
6 des rapports économiques n'avaient pas abouti, vous avez en hâte conclu la
7 rédaction de ce plan. Mais vous souvenez-vous que c'est le 30 novembre
8 1994, c'est-à-dire deux mois avant que vous arriviez avec le plan Z-4, donc
9 c'est le 30 novembre 1994 que le gouvernement de la Republika Srpska lors
10 d'une session tenue à Knin a adopté un ensemble de mesures relatives à la
11 normalisation des rapports économiques avec la Croatie. Et le chef du
12 gouvernement là
13 -- je vais réparer une erreur de traduction. Car ici il est tout le temps
14 question de Nikolic, alors qu'il ne s'agit pas de Nikolic mais de Mikelic.
15 Donc Mikelic, le chef du gouvernement, ce jour-là à montrer encore une fois
16 qu'il était favorable au rétablissement de la paix, à la coopération avec
17 la communauté internationale.
18 Vous connaissez l'initiative destinée à obtenir une normalisation des
19 relations économiques et vous savez que c'est le gouvernement dirigé par
20 Borislav Mikelic, soutenu très largement par Belgrade qui l'encourageait à
21 poursuivre dans cette voie. Et par la suite, Stoltenberg s'est joint à
22 cette initiative également et diverses réunions ont été tenues, mais vous
23 savez que cette initiative pour des relations économiques normalisées était
24 due à Borislav Mikelic et à son gouvernement.
25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Non, non c'est trop long, arrives-en à la
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1 question.
2 Monsieur l'Ambassadeur, je ne sais pas si vous pouvez commenter ce qui
3 vient d'être dit par l'accusé.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] L'histoire est intéressante, mais elle laisse
5 de coté un certain nombre de faits tout à fait fondamentaux à savoir, que
6 l'accord de cessez-le-feu a été conclu le 30 mars. Et qu'une réunion devait
7 se tenir dans les locaux de l'ambassade russe deux semaines plus tard. Tout
8 cela pour entamer des négociations de normalisation économique. Et la mise
9 en place de mesure de confiance, les Serbes de Croatie ont refusé de se
10 présenter. Nous avons essayé de prévoir une autre réunion à Plitvice.
11 Ils n'ont pas voulu venir à Plitvice, parce que les Croates souhaitaient y
12 amener cinq journalistes. Ils se sont engagés dans toute sorte de petits
13 jeux et le résultat de tout cela c'est que nous avons commencé le processus
14 politique, et chacun savait très bien ce que nous faisions dans le cadre du
15 plan Z-4 à l'époque.
16 Donc, très tard dans la journée alors que six mois s'étaient déjà écoulés,
17 un accord a été donne au sujet des mesures de confiance et du
18 rétablissement des relations économiques mais ces décisions n'ont été
19 appliquées que partiellement. Mais je ne vois pas l'importance de tout cela
20 ici.
21 Le fait est que pour éviter la guerre il fallait un accord politique. La
22 patience des Croates était à bout, et les petits jeux dont je viens de
23 parler n'ont fait qu'aggraver les choses. Nous avons fait de notre mieux
24 pour trouver une solution, et l'accusé, a joué un rôle tout à fait décisif.
25 Il avait une influence décisive sur toutes ces personnes, en dépit de cela,
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1 il a refusé de coopérer. D'ailleurs, il n'a pas seulement refusé de
2 coopérer mais selon plusieurs dirigeants de la Krajina serbe, il leur a
3 conseillé de ne pas accepter le plan Z-4. Et la conséquence a été une
4 guerre et la création de 180,000 réfugiés serbes.
5 M. MILOSEVIC : [interprétation]
6 Q. Je ne sais pas de qui sont les propos que vous venez d'évoquer, en tout
7 cas tout cela est assez peu défini, mais poursuivons, Monsieur Galbraith.
8 Est-il notoire que l'assemblée de la République serbe de Krajina en Knin a
9 adopté un accord relatif à la coopération économique entre la Republika
10 Srpska et la république de Croatie, et que les accords ont été signés par
11 Hrvoje Sarinic et Borislav Mikelic ? Et que ceci s'est passé à la fin de
12 l'année 1994 ?
13 Donc le gouvernement accepte d'abord, ce texte je l'ai dit tout à l'heure,
14 et ensuite l'assemblée le vote également. Êtes-vous au courant de cela ?
15 R. Bien sûr. Je suis au courant en fait, j'ai apposé ma signature à ces
16 documents. Mais permettez-moi de dire une nouvelle fois que ce qui est
17 pertinent c'est qu'ils ont joué à de petits jeux pendant six mois. Qu'ils
18 ont fait en sorte que la situation soit pratiquement une situation de
19 guerre et que l'accord est arrivé beaucoup trop tard. Nous nous rendions
20 bien compte que le temps était l'aspect fondamental. C'est la raison pour
21 laquelle nous estimions qu'il était indispensable de s'engager dans le
22 processus politique et c'est ce que nous avons fait.
23 Q. Mais Monsieur Galbraith, un tout petit détail que j'aimerais tirer au
24 clair avec vous. Ce dont je viens de parler a eu lieu avant même
25 l'apparition du plan Z-4. Donc ils ne jouaient à aucun petit jeu lors de la
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1 séance de l'assemblée de la République serbe de Krajina le 1er décembre
2 1994. Ils ont accepté la normalisation des relations économiques. Et vous
3 avez connaissance d'un fait également à savoir, le 11 janvier 1995, avant
4 même que vous ne proposiez le plan Z-4 à Tudjman, de nouvelles négociations
5 ont commencé entre des délégués croates et la RSK au sujet du règlement des
6 problèmes économiques signées au début du mois précédent. Ces négociations
7 ont eu lieu sur la base de la FORPRONU de l'aéroport Pleso. Et ensuite il
8 est dit que les pourparlers se sont tenus à huis clos et que les
9 participants étaient les médiateurs internationaux Stoltenberg et Owen. Que
10 les -- que l'équipe -- les délégués qui négociaient pour la Krajina étaient
11 dirigés par Borislav Mikelic, la partie croate est engagée par Sarinic.
12 Donc tout cela s'est passé avant que vous n'arriviez avec votre plan Z-4,
13 et quelque chose qui est survenu après ne peut pas provoquer, ne peut pas
14 être la cause de quelque chose qui a eu lieu avant.
15 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je ne comprends pas ce que vous essayez
16 de faire comprendre au témoin. C'est tout à fait peu claire. Qu'est-ce que
17 vous essayez de dire au témoin, que vous n'aviez aucune influence sur tout
18 cela ? C'est cela que vous voulez lui faire comprendre ?
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] L'élément intéressant, Monsieur May, c'est que
20 ces pourparlers relatifs aux rapports économiques, à la coopération, aux
21 développements de mesures de confiance, tous ces pourparlers ont eu lieu
22 dans le cadre des relations entre le gouvernement croate et Knin avec la
23 médiation de Stoltenberg et de Owen avant la rédaction du plan Z-4, ou en
24 tout cas avant la publication du plan Z-4.
25 Donc, tout cela se passait avec une dynamique propre et cela n'avait rien à
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1 voir avec une initiative alarmante qu'aurait pu provoquer la guerre entre
2 les Serbes de Krajina et d'autres. Voilà l'argument que j'avance, Monsieur
3 May.
4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Fort bien. Fort bien. Permettez au témoin
5 de répondre à cela.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Et bien, les faits parlent d'eux-mêmes,
7 Monsieur le Président.
8 Il y a eu une guerre. Elle a été désastreuse et la guerre pouvait être
9 évitée. Elle pouvait absolument être évitée s'il y avait eu des
10 négociations sérieuses au sujet des règlements politiques avec la Croatie.
11 Et d'ailleurs, il est absurde de dire que les choses se passaient très bien
12 en novembre, décembre 1994 et janvier 1995. En janvier 1995, la Croatie a
13 annoncé qu'elle s'apprêtait à étendre le mandat de la FORPRONU au-delà du
14 31 mars. Elle n'allait pas demander à la FORPRONU donc représentants des
15 Nations unies de se retirer, compte tenu de la situation alarmante sur le
16 plan militaire.
17 Donc, si les choses s'étaient passées si bien, il aurait été assez
18 surprenant de voir la Croatie adopté ce genre d'attitude. Les événements
19 étaient graves. Il y avait escalade qui semblait mener à la guerre. Je peux
20 vous décrire tout cela en détail mais en tout cas il y a eu la crise de
21 Bihac qui a été le premier élément dans tout cela et qui a joué un rôle
22 important.
23 Le 12 novembre, une série d'attaques ont eu lieu sur Bihac. C'est ce que
24 j'appelle la crise de Bihac et l'expiration du mandat de la FORPRONU ainsi
25 qu'un certain nombre d'autres facteurs montrent que l'on allait vers la
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1 guerre. D'ailleurs la guerre a eu lieu.
2 M. MILOSEVIC : [interprétation]
3 Q. Monsieur Galbraith, est-ce que ce n'est pas exactement le contraire qui
4 s'est passé, à savoir, ce que j'ai dit tout à l'heure qui constitue des
5 faits que vous ne pouvez pas nier. Le fait qu'une solution pacifique
6 pouvait être trouvée grâce à ce processus et la dynamique que j'ai décrite
7 tout à l'heure qui prenait de l'ampleur et le fait que la direction croate
8 n'avait pas intérêt à une solution pacifique parce qu'elle ne pouvait pas
9 dans ces conditions, expulser 250 000 Serbes de Croatie. Je veux dire dans
10 le cas d'une solution pacifique, ces Serbes n'auraient pas pu être
11 expulsés. C'est bien cela, Monsieur Galbraith ?
12 R. Le fait est que le président de la Croatie était prêt à adopter le
13 document établi par les Etats-Unis d'Amérique qui n'est pas un tout petit
14 pays du monde, par l'Union européenne, par la Russie et les Nations unies.
15 Et Milan Martic et ses collègues de Knin ont littéralement refusé
16 d'accepter ce document. Quant à vous, vous avez refusé de rencontrer les
17 représentants de ces pays.
18 Je ne vois pas comment un tel comportement peut être qualifié par
19 quiconque, de comportement menant à la paix ou de comportement faisant
20 partie d'un processus dynamique dont l'objectif était la paix. Je ne
21 comprends pas cela et je crois que ce que je dis correspond à la réalité.
22 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Milosevic, si vous contestez le
23 fait que vous avez refusé de rencontrer ces émissaires, il faut que vous le
24 disiez au témoin dans le cas où vous contestez cela.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien sûr, que je conteste cela. Par ailleurs,
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1 M. Galbraith n'était pas à Belgrade. Il était ambassadeur en Croatie et moi
2 je recevais --
3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Le témoin déclare que vous avez refusé de
4 rencontrer le chargé d'affaires.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, il est question ici de Rudy
6 Perina qui était chargé d'affaires en Yougoslavie. Je n'ai jamais refusé de
7 le rencontrer et je n'ai jamais refusé de rencontrer non plus l'ambassadeur
8 Roberts. Ce qui vient d'être dit est tout à fait contraire à la vérité,
9 mais avançons.
10 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Non, non, non. Nous devons traiter de la
11 source de l'information dont dispose le témoin pour dire que vous avez
12 refusé de rencontrer le chargé d'affaires.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, nous parlons de deux
14 choses différentes.
15 Je tiens à être clair à ce sujet. Le premier événement a eu lieu en janvier
16 1995 lorsque les représentants détenteurs du plan Z-4 ont demandé une
17 rencontre avec M. Milosevic. En effet, c'est moi qui aurais été le
18 représentant chargé de le rencontrer au côté de l'ambassadeur Ahrens qui
19 était le représentant allemand. Il n'était pas ambassadeur bilatéral en
20 Croatie. Je portais deux casquettes à l'époque. Et puis, il y avait
21 l'ambassadeur des Nations unies également et l'ambassadeur russe.
22 Lord Owen nous a dit que M. Milosevic avait rejeté la proposition de
23 rencontre avec nous et ceci nous a été confirmé par l'ambassade américaine
24 de Belgrade. Donc, la demande de rencontre avec M. Milosevic avait suivi la
25 voie hiérarchique et cette rencontre avait pour but de lui soumettre le
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1 plan. Je parle donc de janvier 1995.
2 Ensuite, il y a un autre événement qui date d'août 1995, le 2 août, date
3 d'une rencontre que j'ai eu à Belgrade avec Babic qui m'a soumis l'accord
4 de dernière minute avec la RSFY. Et le lendemain une demande de rencontre a
5 été proposée à M. Milosevic pour qu'il donne son accord à cet accord
6 Galbraith-Babic. Mais il a refusé cette rencontre en date du 3 août, et le
7 lendemain l'armée croate attaquait la Krajina. Il a donc à ce moment-là
8 refusé de rencontrer Rudy Perina, le chargé d'affaires américain.
9 M. MILOSEVIC : [interprétation]
10 Q. Monsieur Galbraith, je n'ai jamais refusé de recevoir Rudy Perina. Je
11 n'étais pas à Belgrade à ce moment-là.
12 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il ne sert à rien de répéter cela. Vous
13 avez entendu ce qu'a déclaré le témoin. Si vous pouvez présenter des
14 éléments de preuve à cet égard, vous le ferez en temps utile, sans aucun
15 doute.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je ne sais pas si
17 l'accusé était à Belgrade ou pas à cette date, mais les téléphones existent
18 et nous utilisions souvent le téléphone pour parler à des dirigeants
19 lorsque les questions étaient urgentes.
20 M. MILOSEVIC : [interprétation]
21 Q. Mais pourquoi est-ce qu'ils ne m'ont pas parlé par téléphone ? Ils ne
22 voulaient pas parler avec moi, Monsieur Galbraith. Pourquoi est-ce que vous
23 n'admettez pas cela ?
24 R. Nous étions désespérément désireux de parler avec vous. Nous étions
25 désespérément désireux d'obtenir votre appui à cet accord de dernière
Page 23160
1 minute. Nous étions désespérément désireux d'écarter le danger de guerre.
2 M. Babic souhaitait également vous rencontrer pour obtenir de vous votre
3 accord à ce plan de dernière minute. Comme je l'ai déjà dit, une phrase de
4 vous suffisait pour que Knin donne son accord et je pense que les chances
5 étaient très grandes à ce moment-là d'écarter le danger de l'Opération
6 tempête si ce projet d'accord avait été accepté ce qui aurait pu éviter que
7 180 000 Serbes de Krajina deviennent des réfugiés en étant chassé de chez
8 eux dans le cas d'une catastrophe humanitaire qui aurait pu être éviter.
9 Q. Monsieur Galbraith, Babic a témoigné ici. Il a demandé à me rencontrer.
10 Il a entendu la réponse, à savoir, que je n'étais pas à Belgrade. Il a
11 demandé mon numéro de téléphone à des gens au ministère de l'Intérieur,
12 d'ailleurs mon numéro était connu de tous mes associés. Dans tous les cas,
13 j'étais en vacances. Il m'a obtenu au bout du fil. Il a même expliqué ici
14 dans ce prétoire qu'on ne pouvait même pas se rendre compte que je parlais
15 de loin tellement la communication était bonne. Mais la ligne n'était pas
16 très bonne en fait, j'étais à la montagne. La seule chose qu'il a dite,
17 c'est qu'il acceptait le plan Z-4 et il a témoigné ici. Je ne me souviens
18 pas de l'ensemble, de l'intégralité de la conversation qu'il a eue avec moi
19 mais il a dit, comme je viens de le dire, que la conversation a été très
20 amicale et il en a témoigné ici, je le répète. Il n'a jamais été dit --
21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Le témoin ne peut pas commenter ce que M.
22 Babic a dit.
23 Pendant la pause Monsieur Nice, pourriez-vous vérifier les propos tenus par
24 M. Babic dans ce prétoire, dans le compte rendu d'audience. Le témoin
25 pourra alors être informé.
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1 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, Monsieur Tapuskovic. Vous demandez
2 la parole.
3 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai vérifié cela
4 hier. J'ai le document dont vous avez besoin si vous le voulez.
5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Fort bien.
6 M. MILOSEVIC : [interprétation]
7 Q. Personne, même Babic, selon son propre témoignage et bien sûr, c'est de
8 notoriété publique, tout le monde est au courant, personne n'a jamais dit à
9 ce qu'il a eu au téléphone lorsqu'il a demandé mon numéro, par exemple ou à
10 quelque responsable que ce soit du ministère de l'Intérieur. Personne n'a
11 jamais parlé de dangers de guerre ou d'invasions ou de quoi que soit de ce
12 genre qui aurait pu faire penser que l'Opération tempête était une -- un
13 danger réel. Et que les Serbes pouvaient ne pas être expulsés de Croatie.
14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Quant à ce que M. Babic a dit ou n'a pas
15 dit, nous allons vérifié pendant la pause.
16 Monsieur l'Ambassadeur, quelles sont les informations dont vous disposez à
17 ce sujet ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] M. Milosevic était sans doute isolé au sommet
19 de sa montagne parce que tout le monde dans le monde savait bien en août
20 1995 que l'Europe était au seuil de la plus grande guerre menée sur son
21 territoire depuis la Deuxième guerre mondiale. Comment est-il possible
22 qu'un dirigeant, un dirigeant responsable soit en vacances lorsque tout
23 cela se passe, lorsque le sort de tant de personnes est en jeu, tant de
24 Serbes dirais-je en outre, ça je ne peux pas le comprendre. Mais vous
25 savez, il est clair que les Croates allaient attaquer. C'était dans la
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1 presse, un peu partout les armées étaient en train de se mobiliser. Je
2 pense que ce fait n'était ignoré de personne. Que puis-je ajouter à ça.
3 M. MILOSEVIC : [interprétation]
4 Q. A en juger parce que nous avons appris ici, Monsieur Galbraith, il
5 semble que la seule personne qui était bien informée au sujet de ce que M.
6 Milan Babic avait en tête et cela a été confirmé dans son propre
7 témoignage, il n'en a informé personne. Donc, à part la -- à part lui,
8 personne ne pouvait savoir que la Croatie risquait d'attaquer les zones
9 sous protection des Nations unies, vraiment personne.
10 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Le témoin a répondu. Il a dit que
11 personne - - que tout le monde était au courant et lorsqu'il dit tout le
12 monde, cela inclut sans doute vous également, c'est ce que dit le témoin.
13 Il nous appartiendra de trancher sur ce point en temps utile pour
14 déterminer si vous le saviez ou pas ? Mais avançons. Passons à autre chose.
15 L'heure de la pause est arrivée d'ailleurs.
16 M. NICE : [interprétation] Au cas où la Chambre serait intéressée, la page
17 dont il était question tout à l'heure est la page 13265, la page que l'on
18 recherche.
19 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Et bien, les recherches seront faites.
20 Vingt minutes de pause.
21 --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.
22 --- L'audience est reprise à 10 heures 55.
23 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Le Juge Kwon a trouvé ce qui est
24 apparemment est le passage qui nous intéresse. Il y est dit qu'il était en
25 contact avec Milosevic et puis nous lisons ce qui suit :
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1 "Il a répété, il a murmuré comme s'il parlait dans un rêve. Il a simplement
2 dit oui, oui, tout doucement, tout doucement, tout sera réglé calmement. Ce
3 sont les mots qu'il a utilisés au téléphone. Et il a ajouté. Je cite :
4 'Contactez Zlatko Jovanovic. Consultez-le.'"
5 M. NICE : [interprétation] Mais pour être juste à l'égard de l'accusé, il
6 faut voir ce qui a été dit au cours de l'interrogatoire principal. L'accusé
7 a indiqué que -- qu'il y avait un mot qui était mal interprété et je pense
8 que le problème qui se posait concernait le mot doucement ou calmement. Et
9 à la page suivante, le témoin indique que le mot "mirno" signifie calmement
10 ou pacifiquement.
11 Et puis, j'aimerais établir un lien entre cela et les autres points évoqués
12 par l'accusé. La Chambre se souviendra peut-être que le témoin Babic a
13 parlé d'une conversation qui a eu lieu en avril 1995 avec l'accusé au cours
14 de laquelle l'accusé a fait référence au plan Z-4 comme étant un bon plan.
15 Ce qui n'était pas l'opinion du témoin. Le témoin ne pensait pas que
16 Milosevic croyait à ce qu'il lui a dit, et qu'il aurait dit cela à
17 l'ambassadeur Galbraith. Et Babic a également parlé de la pièce à
18 conviction 352. Ce télégramme du Royaume-Uni qui indique que Babic a -- n'a
19 pas obtenu une rencontre avec l'accusé. C'est -- cela figure au paragraphe
20 6 de ce document et qui semble donc confirmer ce fait, donc la séquence des
21 événements, à part le contact qui a eu lieu en avril 1995, était marqué par
22 un refus de communication avec l'ambassadeur Galbraith, c'est ce que dit le
23 témoin Babic dans sa déposition. Et puis ensuite, il y a eu cet appel au
24 téléphone organisé par Stanisic et Babic mais l'ambassadeur Galbraith n'a
25 pas été informé de cet appel téléphonique.
Page 23164
1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et pour être à l'égard de l'accusé en
2 réponse à la question posée par Madame Uertz-Retzlaff
3 Qui lui demandait : "Est-ce que vous avez reçu un ultimatum de M. Galbraith
4 qui vous demandait d'accepter le plan immédiatement et, dans le cas
5 contraire, qui vous parlait des conséquences négatives qui s'en
6 suivraient ?"
7 M. Babic a répondu, je cite : "Ce que nous pouvions penser au cas où le
8 plan ne serait pas accepté était clair à savoir, qu'il y aurait une attaque
9 croate et que nos pouvions nous attendre à la même chose en Slavonie
10 occidentale."
11 Et le numéro de page est 13256, avez-vous un commentaire Monsieur
12 l'Ambassadeur, oui ou non ?
13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous avez trois
14 quarts d'heure à votre disposition pour contre-interroger encore ce témoin
15 si vous le souhaitez.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Cela ne me suffit pas Monsieur May.
17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous estimons que ce temps est suffisant.
18 Veuillez procéder.
19 M. MILOSEVIC : [interprétation] Ce que Monsieur Kwon a dit il y a une
20 minute portait sur la conversation entre ce témoin et M. Babic, et comme
21 vous vous en souviendrez, au cours de sa déposition, il n'a pas dit un mot,
22 en tout cas, il n'a pas dit qu'il aurait fait mention d'un quelconque
23 danger d'une attaque sur la Krajina. Vous pourrez le vérifier dans la
24 déclaration écrite.
25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui. Nous avons déjà traité de cela.
Page 23165
1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Par ailleurs, Monsieur May vient d'expliquer
2 qu'il y avait eu demande de correction d'un mot, l'explication était assez
3 mal habile d'ailleurs, mais Babic a déclaré que, répondant à l'information
4 que je lui donnais selon laquelle des contacts avaient eu lieu avec
5 Galbraith, qu'il avait accepté le plan Z-4. Il a répondu :
6 "Oui, oui. Calmement, calmement."
7 Il n'a pas dit doucement, il a dit calmement, donc calmement et le mot
8 juste dans le sens de pacifiquement. Je parlais donc d'une solution
9 pacifique.
10 M. LE JUGE MAY : [interprétation] La question a déjà été soumise au témoin.
11 Il n'a pas eu de commentaire. Il s'agit de la déposition d'un autre témoin.
12 Veuillez procéder.
13 M. MILOSEVIC : [interprétation]
14 Q. Je suis d'accord avec vous quant au fait qu'il était extrêmement
15 irresponsable de me voir en là-haut en vacances à la montagne alors qu'une
16 guerre se préparait. Personne, Monsieur Galbraith, personne en Serbie ne
17 savait et ne pouvait même supposer que la Croatie allait attaquer les zones
18 protégées par les Nations unies.
19 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Excusez moi, mais donnez le temps au
20 témoin de répondre à cette affirmation.
21 Monsieur l'Ambassadeur, vous avez dit chacun ou tout le monde savait, je
22 reprends les mots prononcés par vous, chacun donc savait que la Croatie
23 allait attaquer. Quelle est la base de cette affirmation ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] L'armée croate était mobilisée. Elle était
25 stationnée aux frontières avec la Krajina. La presse ne cessait de parler
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1 de la menace éminente de guerre. Certains responsables croates ont prononcé
2 des déclarations qui ne disaient pas nécessairement que la guerre était
3 pour demain mais qui indiquaient, de toute sorte de façons, que la guerre
4 était imminente. Il y avait des avertissements lancés par des responsables
5 des Nations unies à ce sujet. Et il y avait les avertissements que j'ai
6 transmis à M. Babic, que j'ai transmis également aux responsables des
7 Nations unies, en tout cas, j'ai eu des entretiens -- des conversations
8 avec les dirigeants des Nations unies et par leur biais, ces avertissements
9 ont été transmis aux dirigeants de Knin également. Donc, tout cela n'avait
10 absolument rien de secret à l'époque.
11 M. MILOSEVIC : [interprétation]
12 Q. Manifestement ce n'était pas un secret pour Babic, mais Babic n'a
13 communiqué ce secret à personne d'autre. Est-ce que cela au moins est clair
14 à vos yeux, Monsieur Galbraith ?
15 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Non, ce que dit le témoin pour que vous
16 le compreniez bien c'est que la presse en parlait largement et que l'armée
17 était mobilisée et que donc, il était prévisible que la guerre allait
18 éclater. Vous avez mal interprété les propos du témoin, en disant que
19 c'était un problème centré sur Babic. Le témoin a été tout à fait clair en
20 disant que chacun à l'époque était au courant. C'est l'argument qu'il
21 défend si vous voulez le contester, bien sûr, vous pouvez le faire en
22 disant que personne ne le savait.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien sûr, je conteste cela car en Serbie
24 personne n'était au courant apparemment. Nous sommes responsables parce que
25 nous n'avons pas pensé, nous n'avons pas supposé que la Croatie pourrait
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1 attaquer des zones protégées par les Nations unies. En fait, à l'époque des
2 négociations étaient prévues à Genève entre les représentants de la
3 République serbe de Krajina et la Republika Srpska et la Yougoslavie ou la
4 Serbie n'étaient pas invité à ses pourparlers puisque c'était un problème
5 qui opposait les Serbes de Knin et Zagreb.
6 M. MILOSEVIC : [interprétation]
7 Q. Donc, Monsieur Galbraith, il y avait des zones protégées par les
8 Nations unies. Il n'y a aucun doute à ce sujet. Des négociations se
9 menaient à Genève. Elles étaient prévues, en tout cas, entre les
10 représentants serbes de Krajina et des représentants de la Republika
11 Srpska. Et vous affirmez que, s'agissant de nous, nous étions tenus de
12 supposer que les forces croates allaient attaquer les zones protégées par
13 les Nations unies au moment même où des pourparlers étaient prévus; une
14 réunion avait été convoquée à laquelle devaient participer des
15 représentants de la RSK et de la Republika Srpska. C'est bien ce que vous
16 affirmez, n'est-ce pas ?
17 R. L'armée croate a pris le contrôle d'une zone protégée par les Nations
18 unies au début du mois de mai 1995, c'est-à-dire trois mois avant les
19 événements dont nous parlons. Donc, je ne comprends pas bien la déclaration
20 que vous venez de faire quant au fait qu'il était impensable que cela se
21 passe, puisque cela s'était passé dans le secteur ouest une zone protégée
22 par les Nations unies, trois mois auparavant.
23 Quand la réunion prévue à Genève, les Croates ont utilisé cette réunion
24 comme moyen de soumettre leur dernier ultimatum. Ils prévoyaient que la
25 réponse ne serait pas positive et ils ont mené à bien leur offensive. Je ne
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1 pense pas que les Croates ont estimé une minute que les négociations
2 allaient être significatives. Et il était clair à mes yeux comme aux yeux
3 de tous les autres diplomates présents à Zagreb, et je pense aux yeux de la
4 communauté internationale, dans son ensemble, que la rencontre prévue à
5 Genève était simplement une réunion convoquée de façon théorique; que la
6 situation était très dangereuse, que Tudjman allait réitérer les exigences
7 qu'il avait déjà présentées auparavant, et que les Serbes allaient rejeter
8 ces exigences et créer le prétexte à la guerre.
9 Je dis également et, on peut le vérifier en regardant ce qui était écrit
10 dans la presse quelques jours dans les premiers jours du mois d'août 1995.
11 Je crois qu'à la lecture de tous ces articles, il est impossible de penser
12 que la crise n'était pas imminente et que la probabilité de la guerre
13 n'était pas très forte.
14 Q. Monsieur Galbraith, vous venez de fournir un argument à l'encontre de
15 vos affirmations, car il est exact que l'attaque du premier, deux mai,
16 contre la Slavonie occidentale a eu lieu, une attaque contre une zone
17 protégée par les Nations unies. Mais les Nations unies ont condamné cette
18 attaque, et la Croatie a été avertie que de tels événements ne devaient
19 plus se reproduire. C'est bien cela ou ce n'est pas cela, Monsieur
20 Galbraith ?
21 R. Les Nations unies s'est effectivement opposées à cela mais aucune
22 conséquence négative n'a été mise en œuvre concrètement en juillet 1995, la
23 Croatie et la Bosnie étaient en crise aiguë, crise due à l'action de Ratko
24 Mladic et des Serbes de Bosnie qui avait pris en otages des membres de la
25 FORPRONU, qui s'étaient emparés de l'enclave de Srebrenica, qui avaient
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1 massacré 7 000 hommes et jeunes gens, qui avaient attaqué Zepa, une autre
2 zone protégée par les Nations unies, s'en étaient emparée également et
3 étaient sur le point de lancer leur offensive sur Bihac.
4 Pendant ce temps, l'armée de Croatie avançait dans la vallée de Livno et
5 progressait à grand pas. La guerre donc se préparait dans un climat très
6 échauffé à l'époque. Et je pense que n'importe quel observateur doté de
7 certaines informations l'ont fait effectivement. Ils se sont rendus compte
8 que l'escalade était une réalité et il se sont rendu compte que les Etats-
9 Unis et les autres membres de la communauté internationale étaient très
10 inquiets de ce qu'était en train de se produire car en effet, nous nous
11 rendions bien compte que la crise était une crise majeure à ce moment-là.
12 Et je pense que personne n'aurait pu penser que la communauté
13 internationale allait adopter la même position vis-à-vis d'une éventuelle
14 action militaire croate en août 1995. Donc, personne n'aurait pu penser que
15 la communauté internationale allait adopter à cet égard la même attitude
16 que celle qu'elle avait adopté par exemple en 1994, lorsque la première
17 crise de Bihac avait eu lieu.
18 En tout état de cause, il était impossible de ne pas remarquer la réponse
19 relativement tiède de la communauté internationale à la prise du secteur
20 ouest par la Croatie.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense que l'accusation pourra
22 produire un peu plus tard des journaux serbes qui traitent de cette
23 question pour que nous puissions voir de quelle façon ces événements ont
24 été traités.
25 M. NICE : [interprétation] J'ai déjà inscrit cela sur la liste de ce que
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1 j'avais à faire.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Veuillez procéder.
3 M. MILOSEVIC : [interprétation]
4 Q. Je serais très heureux de voir ces articles de presse car en Serbie
5 personne ne pensait à cette éventualité. Mais Monsieur Galbraith, il est
6 tout à fait clair que la Croatie a eu le front d'attaquer la Krajina et
7 qu'elle l'a fait avec votre autorisation. Lorsque je dis "votre
8 autorisation," je ne parle pas de vous personnellement. Je parle de
9 l'autorisation fournie par votre pays.
10 Et pas seulement avec la coopération active des représentants de votre
11 pays, de vos instructeurs qui ont apporté leur aide à cette attaque sur la
12 Krajina. Bien sûr, personne d'autre ne pouvait être au courant. Ceci est-il
13 exact ou pas, Monsieur Galbraith ?
14 R. J'ai déjà dit quelle était la position des Etats-Unis hier et je vais
15 le répéter. Notre position consistait à dire que nous ne soutenions et que
16 nous n'entérinions pas l'action militaire de la Croatie. Nous avons lancé
17 des avertissements, je l'ai fait personnellement. Ayant reçu instruction de
18 le faire, j'ai donc lancé un avertissement officiel à l'encontre de M.
19 Tudjman en lui disant qu'une action militaire était un danger inhérent, que
20 s'il se résolvait à lancer une telle action militaire, il ne bénéficierait
21 pas de l'aide des Etats-Unis. Et que les conséquences seraient graves pour
22 les rapports américano-croates si des membres du personnel des Nations
23 unies étaient attaqués.
24 Et j'ajouterais entre parenthèses, parce que la Croatie n'a pas respecté
25 les propriétés, les biens des civils Serbes et qu'elle a toléré que des
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1 Serbes soient assassinés, j'ajoute donc que cela également devait entraîner
2 des conséquences graves dans les rapports américano-croates.
3 Quant à la deuxième partie de votre question, j'y répondrai en disant que
4 les Etats-Unis n'ont pas aidé militairement les Croates au cours de cette
5 opération. Pour autant que je le sache, ils n'ont fourni aucune instruction
6 aux Croates sur un quelconque aspect de cette opération militaire en dépit
7 de très nombreuses articles de presse qui permettraient de penser le
8 contraire.
9 Q. Et bien, vous savez fort bien, n'est-ce pas, qu'en 1994 déjà au mois de
10 septembre, un accord a été signé à Washington entre le ministre de la
11 Défense croate, Gojko Susak et MPRI, une entreprise américaine. Les
12 directeurs Vernon Lewis et un autre directeur --
13 L'INTERPRÈTE : Dont l'interprète n'a pas entendu le nom.
14 M. MILOSEVIC : [interprétation]
15 Q. -- ont également signé cet accord n'est-ce pas ? Vous vous souvenez de
16 cet accord ?
17 R. Oui.
18 Q. Et cette entreprise américaine planifiait en fait l'Opération tempête
19 et y a participé en apportant son soutien à l'offensive lancée par la
20 Croatie contre une zone protégée par les Nations unies. Vous estimez que
21 cela était légal, n'est-ce pas ?
22 R. Pour autant que je le sache, l'entreprise en question n'a planifié
23 aucun des aspects de l'Opération tempête et elle n'a participé à aucun
24 aspect de cette opération. Le contrat qu'elle avait signé n'avait aucun
25 rapport avec une telle planification militaire.
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1 Si cette entreprise a fait ce que vous venez de dire, il est tout à fait
2 certain qu'elle l'a fait sans l'autorisation du gouvernement américain. Et
3 je pense que dans ce cas cela aurait constitué une violation du droit en
4 vigueur aux Etats-Unis.
5 A cette époque-là, il y avait embargo interdisant tout aide militaire aux
6 parties belligérantes et les Etats-Unis ont respecté cet embargo.
7 L'entreprise MPRI a fourni des possibilités de formation aux droits de
8 l'homme et elle avait inscrit à son budget la formation à la direction des
9 hommes d'un certain nombre de personnes. Tout cela était considéré comme
10 légal en application du droit américain et n'était en aucun cas une
11 violation de la Résolution 713 du conseil de Sécurité des Nations unies.
12 Q. Je vous en prie, avant de passer à autre chose. Vous avez déclaré que
13 vous n'aviez pas pu me rencontrer. Vous avez déclaré que Perina et Roberts
14 n'avaient pas pu me rencontrer car j'étais en congés, en vacances. Mais si
15 vous souhaitiez transmettre des informations au sujet de cette question à
16 quelqu'un, pourquoi ne l'avez-vous pas transmis au ministre des Affaires
17 étrangères, au Premier ministre ou à -- un quelconque représentant
18 officiel, y compris moi par téléphone ? C'était tout à fait possible à
19 l'époque ?
20 R. Nous parlons bien, n'est-ce pas, de ce qui s'est passé le 3 août ?
21 C'est le chargé d'affaires des Etats-Unis qui était sensé essayer d'entrer
22 en contact avec vous. Il a essayé de le faire d'ailleurs. Je ne sais pas ce
23 qui s'est passé dans le détail, mais certains de ces représentants n'ont
24 pas pu être -- n'ont pas pu être vus par les représentants américains parce
25 que nous n'avions pas reconnu à l'époque le gouvernement de ce qu'il était
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1 convenu d'appeler la République fédérale de Yougoslavie.
2 Q. Non, ceci est inexact. Car Perina a eu des contacts avec le ministère,
3 avec le ministre des Affaires étrangères, Jovanovic et un grand nombre
4 d'autres représentants officiels yougoslaves. Donc, si vous aviez
5 réellement tenu beaucoup à faire ce que vous dites avoir voulu faire, si
6 vous aviez réellement voulu transmettre des informations ou entreprendre
7 une démarche particulière -- parce que, qu'est-ce que vous essayez de dire
8 que le chargé d'affaires américain ne m'aurait pas rencontré dans mon
9 bureau et qu'il ne pouvait pas de ce fait, me contacter par téléphone pour
10 transmettre ces informations ? En fait, il n'a pas demandé à me contacter
11 par téléphone. Il a simplement demandé à ce que je le reçoive et il a reçu
12 pour réponse à cette demande que je n'étais pas à Belgrade et les choses se
13 sont arrêtées là.
14 Nous avons un dicton en Serbie, Monsieur Galbraith, selon lequel lorsqu'une
15 personne demande quelque chose, elle peut en même temps prier Dieu de ne
16 pas l'obtenir. Je pense que c'est exactement ce qui s'est passé.
17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous en avons terminé avec ce sujet mais
18 si vous souhaitez répondre, Monsieur l'Ambassadeur, vous pouvez le faire.
19 Après quoi, nous passerons à autre chose.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien ceci n'a aucun sens.
21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Milosevic, laissez répondre le
22 témoin.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous avons désespérément essayé d'éviter la
24 guerre. Nous avons lancé cette initiative et jusqu'à la dernière minute,
25 nous avons essayé de vous contacter pour obtenir votre appui. Nous pensions
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1 que votre appui public aurait pu permettre d'éviter la guerre. Vous étiez
2 en vacances à ce moment-là, au moment où la catastrophe se produisait.
3 Catastrophe qui a fait 280 000 Serbes de Krajina, des réfugiés.
4 M. MILOSEVIC : [interprétation]
5 Q. C'est exact. C'est une catastrophe qui s'est préparée dans le plus
6 grand secret et qui a été mis en œuvre à la plus grande surprise de chacun
7 en Serbie, y compris, à ma surprise à moi. Mais tous les citoyens serbes
8 ont été surpris comme moi.
9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous en avons fini avec ce sujet. Passons
10 à autre chose.
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous prie.
12 M. MILOSEVIC : [interprétation]
13 Q. Est-il exact que cette organisation dont il vient d'être question,
14 cette entreprise militaire américaine, la MBRI avait un programme destiné à
15 créer une école d'officiers qui existait bien avant l'attaque sur la
16 Krajina et bien avant l'attaque dont nous parlons ? Et qu'un séminaire a
17 été organisé à l'intention des plus hauts officiers concernés, le 17
18 juillet 1995 à Brioni.
19 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous interprétez de façon erronée la
20 preuve, les éléments de preuve qui sont présentés. Et ce n'est pas la
21 première fois que vous agissez ainsi. Cette entreprise n'est pas
22 l'entreprise du témoin, c'est une entreprise privée.
23 Donc, si vous voulez continuer à interroger le témoin à ce sujet, il
24 s'agira de questions tout à fait distinctes. Ce qui est dit, ici, c'est que
25 cette entreprise a créé une école d'officiers ou en tout cas mis en place
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1 un programme destiné à une école d'officiers en Croatie sans doute. Etes-
2 vous au courant de cela, Monsieur l'Ambassadeur ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était une entreprise privée donc je n'ai pas
4 suivi toutes ses activités mais elle a effectivement organisé une sorte de
5 séminaire, qui je crois, devait se dérouler pour la première fois un peu
6 avant juillet 1995. Elle était destinée aux officiers de l'armée croate et
7 elle avait pour but de les former aux droits de l'homme et à la bonne
8 direction d'hommes sur le plan juridique.
9 Donc, il s'agissait de leur transmettre une série de techniques et pour
10 autant que je le sache, rien de tout cela n'avait été planifié à l'avance.
11 J'ai reçu des documents à ce sujet de la part de l'attaché chargé de la
12 défense au moment où le programme a commencé à être appliqué et après
13 l'Opération tempête, ce qui correspond donc à tout ce que je viens de dire.
14 Mais je peux vérifier. Et à ma connaissance, il n'y a eu aucune
15 planification militaire de la part de cette entreprise. Aucune
16 planification militaire quelle qu'elle soit.
17 Mais en tout état de cause, il est absurde de penser qu'une poignée
18 d'officiers à la retraite de l'armée américaine pourraient arriver en
19 juillet 1995 sur les lieux et transformer la situation qui prévalait sur le
20 plan militaire dans l'ex-Yougoslavie à l'époque.
21 M. MILOSEVIC : [interprétation]
22 Q. Mais puisque vous insistez tant sur le fait que cela a été une
23 entreprise privée, croyez-vous vraiment que cette entreprise privée
24 rassemblant 200 généraux d'élite américains retraités à vrai dire pouvaient
25 faire quelque chose de contraire à la politique des Etats-Unis ?
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1 R. Je ne dispose d'aucune information indiquant qu'ils auraient violé la
2 loi telle qu'elle s'applique aux Etats-Unis, pas plus que la politique
3 pratiquée par les Etats-Unis. Je n'ai aucune information qui montrerait
4 qu'ils auraient d'une quelconque façon, le gouvernement croate au niveau
5 d'une planification monétaire.
6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Et est-ce qu'il y avait effectivement 200
7 généraux d'élite à la retraite ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était une entreprise de militaires à la
9 retraite qui se composait surtout de militaires américains à la retraite.
10 Difficile d'imaginer qu'il y ait eu 200 généraux. Ça fait un sacré nombre
11 de généraux. Mais c'était, c'est toujours une entreprise privée. Impossible
12 de me prononcer sur le personnel qui la compose. Je veux dire je sais qui
13 est à la tête de cette entreprise. Je connais les personnes qui se
14 trouvaient en Croatie. Je pense qu'il y avait de 10 à 15 officiers qui
15 avaient travaillé en Croatie à différents moments. C'était des officiers à
16 la retraite.
17 M. MILOSEVIC : [interprétation]
18 Q. Fort bien, Monsieur Galbraith. A cette époque-là, avez-vous souvenance
19 d'une affaire qui avait éclaté pour ce qui est de votre participation, la
20 participation du Pentagone et du CIA dont a parlé la presse croate en date
21 du 28 juillet. Vous en souvenez-vous de cela ? Le journal Slobodna
22 Dalmacija a écrit à ce sujet-là pour ce qui est de l'Opération tempête.
23 R. Je ne vois pas de quoi vous parlez au fait.
24 Q. Bien. Nous allons d'abord terminer le sujet entamé. Vous estimez que
25 rien n'a été d'illégal, n'a été fait en s'attaquant à une zone protégée par
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1 les Nations unies et que l'objectif n'avait pas été d'aboutir à une guerre
2 à expulsions des peuples, mais au contraire, d'aboutir à la paix. C'est
3 bien ce que vous nous affirmez ici, Monsieur Galbraith ?
4 R. Non. Non. Ce n'est pas du tout ce que j'affirme.
5 Q. N'est-il pas évident que ni vous, ni le gouvernement croate, ne teniez
6 guère à la paix. Parce que dans la paix, on ne saurait réaliser cette
7 agression brutale sur la Krajina et l'expulsion de 200 000 Serbes de cette
8 Krajina.
9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Une fois de plus vous déformez
10 grossièrement les éléments de preuve qui sont présentés. Je ne pense pas
11 que ceci mérite une réponse de votre part. Cependant, si vous voulez en
12 fournir une, faites-le.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je me contenterai de dire ceci. Tout d'abord
14 que le gouvernement américain a fait tout ce qu'il a pu en faveur de la
15 paix. Le témoignage qui vous est fourni en est la preuve, Monsieur le
16 Président.
17 Deuxième chose, le gouvernement de Croatie avait manifestement opté pour la
18 guerre et Ratko Mladic et les Serbes de Krajina soutenus par l'accusé
19 furent ceux qui ont donné le prétexte qui était nécessaire à l'armée de
20 Croatie pour déclencher la guerre créant un environnement où il était
21 difficile pour les organisations internationales de limiter la volonté des
22 Croates.
23 Troisième chose, la Croatie s'est livrée à des actes très illégaux, tout à
24 fait criminels, au cours de l'Opération tempête. Il y a eu parmi ces
25 agressions le fait qu'on a autorisé l'incendie de maisons ou de biens
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1 appartenant aux Serbes après le départ de ceux-ci. Des centaines de
2 personnes ont été tuées et à mon avis, Tudjman était raciste. Il a empêché
3 le retour des citoyens croates chez eux.
4 Nous n'avons eu de cesse de formuler des critiques très vives face à un tel
5 comportement immoral. Nous avons imposé des sanctions à la Croatie. Nous
6 avons essayé de renverser la vapeur et je crois que nous y sommes parvenus
7 dans une certaine mesure puisque finalement, au bout du compte, le
8 gouvernement croate a accepté le retour des Serbes de Krajina chez eux, ont
9 permis à ces personnes de retrouver leur citoyenneté et le nouveau
10 gouvernement croate a encouragé le retour des citoyens serbes chez eux.
11 Nous avons eu des négociations en vue d'un accord sur la Slavonie orientale
12 et une des premières priorités, c'est de permettre aux citoyens serbes de
13 la région de rester dans cette région qui allait faire partie de la
14 Croatie. Et je suis fier de dire que ça s'est passé comme cela. C'est la
15 seule fois en ex-Yougoslavie, qu'un territoire a passé -- a changé de main
16 et où les personnes, les habitants sur place alors que c'était le groupe
17 ethnique qui avait effectivement perdu le contrôle.
18 M. MILOSEVIC : [interprétation]
19 Q. Monsieur Galbraith, étant donné que vous définissez de quelque sorte
20 l'action ou l'opération en question et vous établissez la corrélation entre
21 le général Mladic et les événements en Bosnie, comme ayant servi de
22 prétexte à l'attaque sur la Krajina, je vous demanderais d'avoir
23 l'amabilité de commenter ce que j'ai reçu hier. Notamment, de la part de M.
24 Nice. Une information, j'en -- j'ai deux exemplaires à ma disposition, je
25 me propose de vous en convier -- confier l'un des deux. Je pourrais peut-
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1 être demander à l'Huissier de placer cela sur le rétroprojecteur. Et
2 j'aimerais que vous me disiez si vous savez quelque chose à ce sujet-là.
3 On m'a raccourci, réduit le temps imparti, mais je crois que nous aurons
4 tout le temps qu'il nous faudra pour placer ces faits-là à la place qui est
5 la leur.
6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Apparemment, aidez-nous Monsieur Nice,
7 sur ce point. Donc, il est peut-être préférable que vous examiniez vous-
8 même le document, plutôt que je vous fasse une suggestion. Il s'agit d'une
9 lettre qui vient de vous. Voyez s'il est utile de la présenter au témoin.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais me corriger. Je l'ai reçue de la part
11 du greffier, mais cela est signé par M. Nice.
12 M. NICE : [interprétation] Ceci s'inscrit dans la procédure habituelle
13 régie par l'Article 68 du Règlement. Sont ainsi fournies des informations à
14 la Chambre sans en avoir l'obligation, ceci ne dit rien quant à notre
15 fiabilité ou à ce que nous croyons.
16 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je veux recevoir ce document.
17 Quelle est la question vous voulez soumettre au témoin. Pourquoi présentez-
18 vous ce document au témoin ? A quoi voulez-vous en venir ? On peut demander
19 au témoin si vous voulez, mais quand même.
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je veux entendre le commentaire de M. Galbraith
21 concernant les assertions dont j'ai déjà parlé, d'ailleurs, précisément à
22 cet endroit-ci.
23 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui. Poursuivez.
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] On attendra que Messieurs May, Kwon et
25 Robinson, se penchent sur ce document. On dit que le -- l'Accusation a reçu
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1 les informations suivantes.
2 M. MILOSEVIC : [interprétation]
3 Q. "Apparemment, Izetbegovic aurait donné l'ordre qu'il y ait une réunion
4 le 28 septembre 1993, réunissant M. Izetbegovic et neuf dirigeants de la
5 poche de Srebrenica."
6 Si on dit qui sont ces gens-là et, par la suite,
7 On précise :
8 "Ces personnes sont arrivées dans un hélicoptère de la FORPRONU à partir de
9 -- ils ont été amenés à Sarajevo. La réunion a eu lieu au Holiday Inn.
10 Izetbegovic a dit à la délégation qu'il avait demandé cette réunion et
11 qu'il voulait Srebrenica contre Vogosca. Izetbegovic a déclaré que le
12 président Clinton lui avait proposé de laisser entrer les Chetniks à
13 Srebrenica afin que soient tués 5,000 Musulmans. Après quoi, il y aurait
14 une intervention militaire internationale. La délégation a déclaré qu'elle
15 ne soutiendrait pas une telle proposition. La source de ces informations
16 estime que ce qui a été proposé en 1993, s'est en fait produit en 1995."
17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Remettons ce document au témoin. Inutile
18 de placer ceci sur le rétroprojecteur. Ce n'est pas nécessaire. Et on peut
19 montrer le document au témoin.
20 Un instant Monsieur Milosevic.
21 Veuillez examiner ce document, Monsieur Galbraith. Nous ne savons du tout
22 quelle est la source de ces informations. Apparemment, c'est présenté comme
23 étant des renseignements venant d'une certaine source et adressé au bureau
24 du Procureur. Il se peut que vous n'ayez aucune connaissance à ce propos.
25 Avez-vous jamais entendu parlé d'une telle proposition, d'une telle
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1 suggestion ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Ecoutez, je ne vois pas quel commentaire je
3 pourrais apporter, sur quelle partie de ce -- enfin, c'est presque
4 ridicule. C'est tout à fait incroyable à mes yeux. Incroyable de penser que
5 le président Izetbegovic fasse une telle déclaration. Et de surcroît, au
6 gens de Srebrenica. Bien entendu, personne n'imaginerait, ne saurait
7 imaginer que le président Clinton ferait cette proposition de laisser les
8 Chetniks entrer dans Srebrenica pour tuer 5,000 personnes. C'est tout à
9 fait absurde.
10 M. MILOSEVIC : [interprétation]
11 Q. Le Chetnik, c'est le terme d'Izetbegovic pour désigner les Serbes.
12 Donc, quand on dit que Clinton autoriserait les Chetniks, ça veut dire les
13 Serbes.
14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous allons voir ce que le bureau du
15 Procureur a à dire.
16 M. NICE : [interprétation] Je le répète pour éviter toute confusion, nous
17 avons pour devoir de transmettre des informations qui risquent de tomber
18 sous le coup de l'Article 68. Mais ceci ne veut pas pour autant dire que
19 nous accordions la moindre crédibilité à un tel document. Sinon, nous
20 risquerions d'être victimes d'informations intentionnellement déformées qui
21 nous parviendraient. Nous avons ces devoirs en application de l'Article 68
22 et nous transmettons ces documents sans y apporter la moindre valeur de
23 départ.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Permettez-moi d'intervenir puisque j'ai suivi
25 des événements pendant de nombreuses années en ex-Yougoslavie. A
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1 l'évidence, c'est quelque chose d'absurde, de c'est épatant. Je pense que
2 ceci peut être tout à fait qualifié de désinformations.
3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il nous faudra peut-être demander quelle
4 est la source de ces informations, si nous voulons prononcer un jugement
5 quel qu'il soit à ce propos.
6 M. NICE : [interprétation] Nous pourrons peut-être évoquer cette question
7 plus tard. Puisque c'est une question de procédure.
8 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui. Poursuivez, Monsieur Milosevic. Je
9 pense qu'il faut remettre ce document à l'accusé. Ceci ne sera pas versé au
10 dossier. Non.
11 M. MILOSEVIC : [interprétation]
12 Q. J'espère qu'il ne sera pas difficile de le faire. Parce que l'on parle
13 ici d'un grand nombre de noms, de personnes présentes à cette réunion-là.
14 Donc, l'on a identifié toutes les personnes présentes, si ce n'est pas
15 toutes, la plupart des personnes présentes et il ne sera pas difficile de
16 vérifier tout cela. Mais revenons à ce que vous avez mentionné au sujet des
17 crimes perpétrés par les forces croates dans la Krajina. Il n'est point de
18 doute que, qu'un grand nombre de crimes ont été commis à l'encontre des
19 Serbes, n'est-ce pas vrai, Monsieur Galbraith ?
20 R. Oui. Je l'ai dit dans ces crimes, il y avait aussi la destruction
21 systématique dédiée, appartenant aux Serbes de Krajina. Il y avait aussi le
22 fait que plusieurs centaines de personnes étaient tués et que les gens
23 n'ont pas pu rentrer chez eux, qu'ils en ont été empêchés.
24 Q. Vous avez dit hier en expliquant dans votre interview à la BBC, qu'il
25 ne s'agissait pas d'un nettoyage ethnique parce que les gens avaient fui
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1 avant que des formations paramilitaires n'arrivent là-bas. Mais ne savez-
2 vous que ces gens ont fui les pilonnages parce que Knin a été gravement
3 pilonné. Knin ainsi que ses environs. Ou alors, pensez vous qu'ils ont fui
4 par peur, à cause de la proximité de l'armée croate tout simplement ? Ne
5 vous souvenez pas que l'attaque ait commencé par un pilonnage intense de
6 Knin.
7 R. Je suis sûr que des gens ont voulu échapper au pilonnage et je suis sûr
8 que des gens sont partis parce qu'ils avaient peur de l'armée croate. Le
9 pilonnage a été assez court parce qu'il n'a pas eu de véritable résistance.
10 Je pense que Knin est tombé en espace de 24 heures.
11 Q. Donc, vous affirmez qu'il n'y a pas nettoyage ethnique que lorsque
12 moyennant obus l'on détruit une ville et on incite la population à s'en
13 fuir. Ce n'est un nettoyage qu'à partir du moment où il y a des troupes qui
14 accèdent et qui commencent à égorger et incendier ? Est-ce là la limite qui
15 vous permet de délimiter ou de définir s'il y a nettoyage ethnique ou pas ?
16 R. Première chose, c'est un fait Knin n'a pas été détruit. Et les dégâts
17 ne furent pas si conséquents que cela. Nous avions, en quelques jours, pu
18 dépêcher sur place des membres d'une ambassade, après quelques jours après
19 la prise de pouvoir par les Croates.
20 Quant à savoir ce qui constitue l'épuration ou le nettoyage ethnique, je
21 dirais que plusieurs facteurs interviennent et c'est bien cela qui compte.
22 C'est qu'il y a un alliage si vous voulez, d'actions et d'opérations
23 militaires dont. Il peut y avoir des actes de pilonnage, le fait d'entrée
24 d'effectif militaire sur un territoire, mais pour qu'il y ait épuration
25 ethnique il faut aussi qu'il y ait aussi des exécutions des habitants, des
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1 mauvais traitements, des tortures infligées, des actes de viol, d'incendie
2 volontaire, d'actes destinés à semer la terreur dans la population pour
3 qu'elle s'en aille.
4 Q. Mais n'est-ce pas là des choses qui sont survenues, tout ce que vous
5 venez d'énumérer, tout cela ensemble ?
6 R. Ça s'est passé en Bosnie-Herzégovine et ça s'est passé en Croatie. Est-
7 ce que ça s'est passé dans le cadre de l'Opération tempête également ? Je
8 dirais non, parce que pratiquement toute la population était déjà partie
9 avant l'entrée des militaires croates dans les villes.
10 Q. Par conséquent, il n'y avait plus personne qui aurait pu être
11 terrorisée par ces militaires et ceux qui sont restés ont été abattus en
12 gros. Ainsi ça s'est passé, Monsieur Galbraith ?
13 R. Oui, oui. Plusieurs centaines de ces personnes qui étaient restées ont
14 été tuées et ça été des crimes très graves parfois. Et des personnes âgées,
15 qui étaient dans des maisons isolées, qui étaient trop malades pour partir,
16 qui étaient infirmes ont été tuées. Ce sont-là des crimes indicibles.
17 Q. Bien, Monsieur Galbraith. Mais vous souvenez-vous que du fait, le 28
18 juillet 1995, la Croatie avec ses troupes a fait intrusion à Glamoc et à
19 Grahovo ? Et cela s'est fait au 50e anniversaire du soulèvement populaire
20 du peuple serbe contre l'état Oustacha.
21 Et ne savez-vous pas que cette intrusion a été précédée par un accord entre
22 Izetbegovic et Tudjman, pour ce qui est d'une aide militaire mutuelle à
23 Split, et auquel accord vous avez été personnellement présent. N'est-ce
24 pas, Monsieur Galbraith ?
25 R. Oui, c'était précédé par un sommaire unissant Izetbegovic et Tudjman à
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1 Split et j'étais présent, effectivement.
2 Q. Bien. Mais ne pensez vous pas que vous êtes, ainsi que le gouvernement
3 des Etats-Unis, responsables des crimes perpétrés à l'encontre des Serbes ?
4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ce n'est pas utile de répondre à cette
5 question. La question est absurde. Vous avez entendu ce que le témoin a
6 dit. Il vous reste une minute. Autant posez votre dernière question.
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je regrette beaucoup de ne pas avoir le temps
8 d'interroger ce témoin, ce qui est une façon de procéder habituelle ici.
9 M. MILOSEVIC : [interprétation]
10 Q. Mais dites, Monsieur Galbraith, puisque vous avez passé cinq ans à
11 Zagreb d'après les assertions de Chris Hedges du New York Times du 24
12 décembre 1997, vous occupez une place de choix parce que vous n'avez pas
13 présenté la position des autorités croates véritablement à l'égard des
14 Serbes avant que ces Serbes n'aient été expulsés pour de bon de Croatie.
15 Est-ce que exact ?
16 R. Non.
17 Q. Bien. Mais John Galvin, un général à la retraite, qui a pris part aux
18 négociations avec les parties belligérantes en Yougoslavie, avec Charles
19 Redman, qui lui était un expert pour ce qui est de la doctrine du conflit à
20 basse intensité, a été conseillé à Alija Izetbegovic, je préciserais
21 conseiller militaire; n'est-ce pas bien vrai ?
22 R. Charles Redman, vous dites ? C'était un ambassadeur des Etats-Unis et
23 c'était le représentant américain dans le groupe de contact. Je ne pense
24 pas qu'il eut été expert en conflit à faible intensité.
25 Q. Bien. Mais dites-moi seulement. Serait-il exact de dire que pour ce qui
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1 est des fournissons iraniennes d'armes à l'intention de la Bosnie-
2 Herzégovine, votre président était au courant, Bill Clinton était au
3 courant. Et dans son témoignage devant le congrès, Holbrooke a reconnu que
4 ces armes sont arrivées en Bosnie-Herzégovine en provenance de l'Iran et en
5 transitant par la Croatie ?
6 R. Oui.
7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] C'était votre dernière question. Votre
8 temps est épuisé.
9 M. MILOSEVIC : [interprétation]
10 Q. Est-il exact et notoirement connu que vous étiez -- que vous avez
11 participé à cette affaire d'importation clandestine d'armes en Croatie --
12 en Bosnie-Herzégovine.
13 R. Et bien, d'abord je dirais que je n'ai trempé en aucune façon dans une
14 histoire de contrebande d'armes vers la Bosnie. Tout ceci a fait l'objet de
15 plusieurs audiences, de nombreux rapports du congrès, il y a eu tout un
16 débat dans la presse aussi. Et ce que j'ai fait est apparu clairement. Mon
17 action était très simple.
18 Voilà ce qui s'est passé le 28 avril 1994. Je pense le président Tudjman
19 m'a demandé. Ceci ne m'a pas surpris. Il m'a demandé quelle serait
20 l'attitude des Etats-Unis si la Croatie accédait à la demande formulée par
21 la Bosnie-Herzégovine, qui constitua à demander l'autorisation de faire
22 transiter par la Croatie, des armes venant d'Iran et d'autres pays en
23 direction de la Bosnie-Herzégovine.
24 J'avais reçu bien des instructions et je lui dis, en fait, je n'avais reçu
25 aucun mandat, aucune instruction. Il a compris ce que je voulais dire et il
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1 a compris que les Etats-Unis ne soulèverait pas d'objection. Effectivement,
2 il y a eu transit de ces cargaisons.
3 Un mot d'explication, l'administration Clinton n'était pas en faveur de la
4 résolution 713, du conseil de Sécurité. Les Etats-Unis estimaient que
5 l'embargo favorisait la Serbie, l'agresseur, donc la Serbie et ses alliés
6 en Croatie et en Bosnie, puisque au fonds toutes les armes de l'ex-JNA
7 étaient là, avaient utilisé par les victimes, à savoir, le gouvernement de
8 Bosnie-Herzégovine était sans défense.
9 Les Etats-Unis n'ont jamais violé cet embargo en matière d'arme à aucun
10 moment que ce soit. Par ailleurs, nous estimions que la Résolution 713 ne
11 devait pas être la seule résolution du conseil de Sécurité qui soit
12 respectée puisque toutes les autres résolutions n'étaient pas respectées et
13 c'était surtout vrai du côté serbe. Il y avait notamment dans ces
14 résolutions celles qui exigeaient la protection de civils innocents. Cela
15 signifie --
16 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Non. Non. Ceci met terme à votre contre-
17 interrogatoire.
18 Je pense qu'il faut apporter une correction au compte rendu d'audience.
19 Dans ma dernière intervention, j'ai décris la question de l'accusé. Je l'ai
20 qualifié de ridicule et ceci n'a pas été repris dans le compte rendu
21 d'audience. Or ce devrait l'être.
22 Oui, Maître Tapuskovic, vous avez la parole.
23 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
24 Questions de l'Amicus Curiae, M. Tapuskovic :
25 Q. [interprétation] Monsieur Galbraith, je voudrais vous poser quelques
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1 questions au sujet uniquement de faits et de documents précis que je
2 suppose ne pas vous être inconnus; et ou alors du moins ne devoir pas, ne
3 pas devoir vous être inconnu, se corrige l'interprète.
4 Si j'ai bien compris et, je me suis penché sur le compte rendu d'audience,
5 je vous avais dis hier que le processus afférant au plan Z-4 a commencé le
6 23 mars 1994 et cela s'est étendu jusqu'à l'Opération tempête, cela sera
7 évolué en suivant trois phases. En est-il été ainsi ?
8 R. Oui, c'est bien ce que j'ai dit.
9 Q. J'ai ici un rapport daté du 29 mars 1994 qui m'a été confié par le
10 bureau du Procureur en application de l'Article 68, aux Règlements de
11 procédures et de preuves, et cela porte sur un rapport journalier d'une
12 mission d'observation de l'Union européenne datée du 29 mars 1994. Nous
13 sommes bien d'accord pour dire que cela se situe à quelques jours avant la
14 -- ou plutôt après le lancement de ce processus au terme du plan Z-4 ?
15 R. Ce n'est pas le processus de ce plan Z-4, c'est plutôt un processus
16 dans le cadre duquel la Russie et les Etats-Unis, en fait on rejoint le
17 président de la conférence internationale pour l'ex-Yougoslavie dans le
18 processus de paix en Croatie. Mais à ce moment-là, nous n'avions pas
19 envisagé de préparer ce qui a été appelé plus tard, était connu sous le nom
20 de plan Z-4.
21 M. NICE : [interprétation] Nous avons maintenant le document. Je ne sais
22 pas si le témoin veut l'examiner. Il n'a pas eu l'occasion. Je sais qu'il a
23 réussi à avoir ce document au cours de la préparation, donc il devrait être
24 au courant.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je pourrais voir ce document ?
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, remettez-le document au témoin.
2 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] J'ai des copies à l'intention des Juges,
3 si besoin est.
4 Q. Je voudrais savoir d'abord ce qui suit : d'abord donc ce qui figure au
5 point 2(a). Vous en avez déjà parlé.
6 On dit : "L'ambassadeur des Etats-Unis d'Amérique en Croatie, M. Peter
7 Galbraith, a dit que les Etats-Unis et la Russie se sont mis d'accord pour
8 que la réintégration de la Krajina au sein de la Croatie doit se faire de
9 façon pacifique et nous nous sommes mis d'accord sur le fait que les Serbes
10 devaient bénéficier d'une autonomie certaine, considérable."
11 R. C'est exact.
12 Q. Cette "autonomie considérable," Monsieur l'Ambassadeur, à ce moment-là,
13 suite au lancement des préparatifs qui ont précédé la présentation du plan
14 Z-4 avait-il, sous-entendu, une autonomie dans ces cadres-là ou alors dans
15 des cadres tout à fait autres ?
16 R. Ce que je pensais en tout cas c'est que tout règlement qui
17 conviendraient aussi bien au gouvernement de Croatie qu'aux Serbes de
18 Krajina, tout accord susceptible de préserver l'intégrité territoriale de
19 la Croatie permettant aux Croates déplacés de rentrer chez eux, de
20 réintégrer leurs foyers et de veiller au maintien en toute sécurité des
21 Serbes de Krajina, que tout accord aurait convenu aux Etats-Unis et à moi
22 aussi. Donc je pense que nous n'étions pas attaché à un cadre particulier.
23 Nous voulions un accord de paix qui respecte certains principes de base.
24 Q. C'est bien ce que j'ai pu comprendre. Toutefois ce plan Z-4 a déjà été
25 préparé au mois de septembre et comme nous l'avons su de votre bouche hier,
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1 vous l'avez présenté pour la première fois aux leaders de la Krajina serbe
2 tout comme auprésident Tudjman. J'ai cru comprendre cela hier, j'ai cru
3 comprendre aussi que ça s'est passé le 30 janvier 1995, n'est-ce pas ?
4 R. C'est surtout au mois de septembre et au mois d'octobre 1995 que ce
5 plan a été préparé mais la dernière main n'a pas été apportée avant janvier
6 1995, je voulais parler de septembre 1994. Sinon, ce que vous dites est
7 exact.
8 Q. Par conséquent, à l'occasion de cette première rencontre alors que vous
9 aviez présenté le plan à Martic, à Babic et à Mikelic, vous aviez reçu une
10 réponse négative, c'est ce que j'ai cru comprendre. Or M. Babic a dit aussi
11 qu'il regrettait, n'est-ce pas ?
12 R. A mon avis la réponse n'était pas du tout relative. La réponse était
13 claire; ils ont refusé ce plan. Martic a littéralement refusé de prendre ce
14 plan au moment où on lui a remis et on l'a posé sur la table. Il n'a pas
15 voulu le soulever. C'était l'objection la plus forte et la plus vigoureuse
16 possible que la sienne. Et il avait vraiment l'intention d'insulter, ce
17 faisant, les Etats-Unis, la Russie et l'union européenne.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le compte rendu d'audience dit que c'est
19 M. Abdic qui a dit qu'il était désolé, est-ce exact ? Est-ce que ce n'était
20 pas plutôt M. Martic ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. C'est M. Babic, Babic qui a dit qu'il
22 était désolé.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vois.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Et Monsieur le Juge, c'est Martic qui a refusé
25 de prendre le plan en mains. Je dois peut-être ajouter un mot pour --
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1 attirer -- pour attirer davantage de lumière sur ceci. Ce plan ne
2 représentait pas du tout l'avis du collège des dirigeants de la Krajina
3 serbe. Manifestement, Babic était embarrassé par ce qui c'était passé.
4 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
5 Q. Certes, Monsieur Galbraith, mais ce que j'ai ici en mains c'est que le
6 procureur m'a confié, c'est un rapport spécial de la mission d'observation
7 de l'Union européenne au sujet du plan Z-4 et daté du 31 janvier 1995. Je
8 l'ai ici en nombre suffisant d'exemplaires. Je n'ai un pour vous notamment
9 et je voudrais que vous penchiez sur ce document.
10 L'INTERPRÈTE : Précise pour ce qui est de la dernière du témoin, il faut
11 dire que Babic m'a dit en tant qu'à parte, que ce n'était pas du tout
12 l'avis des dirigeants des Serbes de Krajina.
13 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
14 Q. Il s'agit de la pièce dont la cote Reine est 2358335834 et il s'agit de
15 -- du 31 janvier 1995, un jour après la rencontre que vous avez eue avec le
16 monsieur avec qui vous vous étiez entretenu et vous dites -- et on l'y dit
17 l'ambassadeur Galbraith a admis que le plan Z-4 avait été présenté avant
18 que prévu en raison des pressions exercées par leprésident Tudjman aux fins
19 d'accélérer les négociations. C'est bien ainsi que cela c'est passé, n'est-
20 ce pas ? Est-ce exact?
21 R. Non. Je ne pense pas que ce rapport traduise finalement ce que je
22 pensais ou dit -- ou ce que j'ai dit.
23 A mon avis, le plan Z-4 a été présenté trop tard.
24 Q. Non, non, Monsieur Galbraith, non. Je voudrais savoir seulement si vous
25 avez dit cela ou pas.
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'aimerais un exemplaire de ce document
2 ainsi que celui du 29 mars. A l'intention des Juges.
3 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
4 Q. On vous demande donc de répondre à la Chambre et de nous dire si ce qui
5 figure dans ce rapport spécial des observateurs de cette mission, des
6 observateurs de l'Union européenne, correspondent à ce que vous avez dit où
7 cela ne correspond pas à la réalité ?
8 R. A mon avis, cette déclaration ne traduit pas fidèlement mon avis, ne
9 traduit donc pas à mon avis ce que j'aurais dit. Je pense qu'il est tout à
10 fait probable que j'ai dit que nous avions à faire à des pressions
11 considérables afin de poursuivre les négociations puisque le président
12 Tudjman avait annoncé la fin du mandat de la FORPRONU et pour nous, nous
13 voyons là une situation qui devait aboutir à la guerre. Mais je ne pense
14 pas que je l'aurais dit parce que ça n'aurait pas été juste de le dire. Je
15 ne pense pas avoir dit que le plan Z-4 avait été présenté trop tôt. Au
16 contraire, je pense qu'il a été présenté trop tard.
17 Q. Je vous remercie. Mais dans ce même rapport, on dit ce qui suit :
18 "Le ministre des Affaires étrangères, Babic, dans une déclaration récente
19 aurait affirmé que pour ce qui est du stade du futur de la RSK, c'est le
20 peuple de la RSK qui devait en décider."
21 Donc, il s'agissait du 31 janvier 1995. Il n'est pas question pour sa part
22 d'avoir dit, je regrette. Mais il aurait dit qu'il ne pouvait être question
23 d'adopter un plan de cette nature si la population de la Krajina serbe ne
24 se prononçait pas en faveur de celui-ci. Est-ce véritablement ce qu'il a
25 dit pour sa part ou pas ?
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1 R. Si vous me demandez s'il est vrai que Babic, ministre des Affaires
2 étrangères, avait dit dans une déclaration que l'avenir de la population de
3 la RSK doit être décidée par un référendum qui les interrogent, je n'ai
4 aucune raison de douter de ce qu'il aurait déclaré cela dans une
5 déclaration récente. Mais je relève que le document que vous me présentez,
6 dit à juste titre, que Babic avait une réunion privée la semaine dernière,
7 la semaine précédente, et qu'il avait dit qu'effectivement il est
8 impossible d'avoir ce genre de situations.
9 Et il dit au paragraphe 7, qu'il y a une opinion première venant
10 d'entretiens très limités avec des habitants de la RSK qui dit qu'il se
11 peut qu'il y ait un certain degré d'autonomie très indépendante pour ceux
12 qu'on appelait la RSK même si la Croatie est tout à fait réticente à cela
13 et estime que c'est un problème au niveau des hostilités, de l'isolement et
14 de la pauvreté.
15 Q. Mais le lendemain déjà, vous avez rencontré Tudjman et si mes souvenirs
16 sont bons, Tudjman avait dit qu'il était d'accord pour ce qui était de
17 négocier dans ces cadres-là mais il a dit sans ambiguïté qu'ultérieurement,
18 il n'y avait pas possibilité de tester les positions de la Croatie en
19 raison précisément du refus opposé par les Serbes. C'est bien ainsi que
20 cela s'est passé ?
21 R. Oui. Oui. C'est bien ce que j'ai dit.
22 Q. Merci. Mais étant donné que vous avez parlé de l'autonomie sous entendu
23 qui devait être mise en place et qu'il devait conduire à la paix, est-ce
24 qu'il est vrai de dire que dans cette période, à compter du 23 mars 1994
25 jusqu'au 4 août 1995, la Croatie, à savoir, le président Tudjman, ont-ils
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1 avancé une proposition de leur part pour ce qui est de la façon dont ils
2 voyaient cette autonomie de la RSK dans le cadre de la Croatie ? Est-ce
3 qu'à quelque moment que ce soit, ils ont avancé une proposition de cette
4 nature-là ?
5 R. Oui.
6 Q. Sous quelle forme ?
7 R. Il y avait des dispositions concernant l'autonomie qui était ancrée
8 dans le droit constitutionnel croate. Et c'était des dispositions tout à
9 fait conséquentes, manifestement inférieures à ce qui se trouvait dans le
10 plan Z-4. Mais le droit constitutionnel croate prévoyait un degré important
11 d'autonomie.
12 Q. Monsieur l'Ambassadeur, je ne vous ai pas posé cette question-là. Je
13 connais très bien ces constitutions, toutes celles qui étaient en vigueur
14 et qui sont encore en vigueur dans ces régions. Ce qui m'intéresse, moi,
15 c'est s'il y avait eu une offre d'aspect formel sous la forme d'un document
16 quelconque ou y en a-t-il pas eu du tout ?
17 R. A de nombreuses reprises, le président de la Croatie, le président
18 Tudjman et ses principaux collaborateurs ont renvoyé à la constitution de
19 la Croatie en tant que document et on dit que celle-ci que c'était la base
20 qu'il fallait prendre pour un règlement de la situation. Je crois avoir
21 indiqué que c'était peut-être pour certaines parties, négociables.
22 Q. Merci. Mais dans le document du 29 mars, il est dit au point 2A/2 : La
23 direction yougoslave, de façon évidente, et c'est toujours la mission
24 européenne qui le dit, exerce des pressions sur la Krajina aux fins de
25 contraindre à signer cet accord parce que pour la RFY, c'était la seule
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1 façon de faire lever les sanctions imposées à la Serbie et au Monténégro.
2 Donc, la mission européenne avait-elle disposé de renseignements, oui ou
3 non, qui disaient que c'était là l'intérêt de la Yougoslavie, à savoir, la
4 Serbie et du Monténégro.
5 R. Vous faites référence à ce document qui porte la date du 29 mars 1994.
6 Je n'ai plus ce document entre les mains.
7 Q. Oui, c'est à cela que je me réfère.
8 L'INTERPÈTE : L'interprète se corrige pour ce qui est de la réponse du
9 témoin concernant Babic. Babic avait une première opinion à partir
10 d'entretiens limités avec des habitants de la RSK selon laquelle un certain
11 degré d'autonomie pour la RSK serait préférable à la poursuite des
12 hostilités et de l'isolement.
13 M. LE JUGE MAY : [aucune interprétation]
14 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je m'efforcerai de le faire mais j'ai des
15 documents que j'estime que la Chambre devrait -- donc j'estime que la
16 Chambre devraient avoir connaissance.
17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Fort bien, mais accélérez la cadence.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai aucune raison de mettre en doute
19 l'exactitude de cette déclaration à savoir, que les dirigeants yougoslaves
20 font pression sur la Krajina pour qu'elle saigne -- signe l'accord de
21 cessez-le-feu. C'était l'accord d'application. Mais ceci n'a rien à voir
22 avec le plan politique. C'est là un accord de cessez-le-feu très limité qui
23 crée des zones de séparation et régit l'intervention de forces de police se
24 trouvant dans la région. Ça règle ce genre de chose.
25 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
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1 Q. Monsieur Galbraith, je n'ai pas le droit de faire de commentaires à ce
2 sujet. Je vous ai posé une question à cet effet. Mais, ce que je voudrais
3 vous demander aussi c'est de savoir, si dans cette période-là donc, entre
4 le 29 mars et le 4 août 1995, est-ce qu'il y a eu pour la mission
5 d'observation de la communauté européenne et quelque raison que ce soit de
6 douter que la position de la direction yougoslave n'avait pas été celle que
7 l'on vient d'avancer ?
8 R. Une première chose. Je ne suis pas en droit de me prononcer sur les
9 informations que risque d'avoir l'Union européenne. Les Etats-Unis ne font
10 pas partie de l'Union européenne. Et à fortiori de leur -- de la mission
11 ou des missions de l'Union européenne. A mon avis, la déclaration qu'on
12 trouve ici est exacte -- était exacte et le demeure à savoir, que les
13 dirigeants yougoslaves voulaient que la Krajina et le gouvernement de
14 Krajina signent l'accord de cessez-le-feu et le respectent. Une fois de
15 plus, ceci n'a rien à voir ou à très peu de rapport avec la question
16 principale qui consistait à obtenir au sein de la Croatie un accord, un
17 règlement politique.
18 Q. Merci. Je vous demanderais maintenant, vu que je possède aussi un
19 rapport spécial du chef de la mission d'observation de l'Union européenne
20 pour ce qui des positions croates et serbes à l'occasion des négociations
21 de Genève de 1995, du 3 août 1995. Je dispose de copies à votre intention
22 et de copies à l'intention des Juges, si besoin est.
23 Voilà ce qui est dit, en résumé au tout début. Après les entretiens de
24 Belgrade avec l'ambassadeur des Etats-Unis d'Amérique en Croatie, le 2 août
25 1995, le premier ministre, le nouveau premier ministre de la RSK, le Dr
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1 Babic a dit que la Krajina -- la délégation de la Krajina devait se rendre
2 à Genève pour accepter là-bas le plan Z-4 en sa qualité de point de départ
3 pour les négociations à venir avec la Croatie. Le même jour, il aurait
4 déclaré que le président serbe, M. Milosevic, avait appuyé l'idée de ces
5 négociations partant de ce plan Z-4.
6 Un peu plus loin, on dit : "Le 3 août, le nouveau premier de la RSK, Milan
7 Babic, a déclaré que les Serbes étaient disposés à entamer des négociations
8 politiques avec Croatie, partant d'un plan modifié et amélioré Z-4. Il a
9 précisé qu'il avait rencontré à Belgrade, M. Peter Galbraith, ambassadeur
10 des Etats-Unis d'Amérique en Croatie et celui-ci avait promis que les
11 Etats-Unis essaieraient de dissuader la Croatie de toute attaque à lancer
12 sur la Krajina."
13 Ne savez-vous pas que la mission d'observation de la -- de l'Union
14 européenne disposait déjà de renseignements au terme de laquelle M.
15 Milosevic, conformément à ce que Babic lui avait communiqué, était d'accord
16 avec ce plan Z-4 ?
17 R. Je suis au courant de l'existence de ce rapport.
18 Q. Donc, les négociateurs à Genève avaient des signaux très clairs et des
19 éléments de preuves disant que M. Milosevic acceptait ce plan Z-4, avant
20 même que les négociations n'aient commencé pour ce qui est de la solution
21 de la situation sur le terrain, solution pacifique ?
22 R. Tout d'abord, cette mission d'observation de l'Union européenne,
23 l'ECMM, n'était pas une partie négociant à Genève. Deuxième chose, M.
24 Milosevic n'a pas soutenu ce processus de négociations basé sur le plan Z-4
25 ou encore sur la réintégration de la Krajina, la Croatie. M. Milosevic n'a
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1 pas fait une seule tentative pour soutenir cette idée. En tout cas, pas de
2 tentative qui aurait suffi pour influencer ou impressionner Tudjman. Il n'a
3 pas fait de déclaration publique. Je ne suis pas au courant de la
4 discussion qu'il a eu avec Babic. Mais d'après ce que j'ai entendu, on ne
5 peut pas qualifier ce qui s'est dit comme étant un appui quelconque, un
6 appui soutenu. Ce qu'il fallait, c'est que Milosevic se prononce
7 catégoriquement et sans aucune ambiguïté en faveur d'un règlement politique
8 en Croatie. Or, ceci ne s'est pas passé.
9 Q. Si je puis terminer avec une question dans cette partie-ci de mon
10 interrogatoire. Deux choses encore. Mais l'essentiel n'est-il pas de dire
11 que les observateurs et la mission européenne avaient disposé de cette
12 information-là. Et c'est suite à cela que la délégation serbe a signé
13 l'accord. Avait accepté suite à cela, le plan Z-4. N'est-ce pas, c'est
14 exact ?
15 R. Ce qui est dit ici, ce n'est pas cela. On dit ici que la délégation
16 serbe a accepté le plan en sept points, même si la délégation a dit qu'il
17 fallait consulter Knin avant de donner un aval officiel. Et ainsi créer
18 suffisamment d'ambiguïté pour semer le doute dans l'esprit de certains
19 observateurs internationaux. Et ceci a été le prétexte parfait donné aux
20 Croates pour que ceux-ci disent que la partie serbe n'a pas véritablement
21 accepté ce plan.
22 Je me permets de rappeler aux Juges ce qu'avait dit le président Tudjman.
23 Celui-ci avait dit qu'à son avis, Babic n'avait pas suffisamment de pouvoir
24 pour traduire en action ce qui avait été promis et ainsi qui manquait
25 manifestement c'est un appui fort et clair de la part de Martic et de
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1 Milosevic.
2 Q. Et Monsieur Galbraith, les Croates n'ont pas signé cet accord, eux.
3 Cela n'est pas contesté, n'est-ce pas ?
4 R. Non. Ceci n'est pas contesté. Les Croates non pas signé l'accord. Et je
5 ne pense pas non plus que les Serbes aient signé quoi que ce soit.
6 Q. Je voudrais vous donner lecture de la dernière partie de ce rapport qui
7 importe pour ce qui a fait l'objet d'une assistance de la part du Juge Kwon
8 --
9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Là, je pense que l'heure est venue de la
10 pause. Je dois vous demander Maître Tapuskovic, d'accélérer parce que vous
11 poser vos questions depuis une demi-heure. Vous contre-interrogez depuis
12 une demi-heure. Essayez d'être un peu plus rapide, vous aurez un peu plus
13 de temps mais essayez de vous limiter.
14 Vous avez un autre témoin Monsieur Nice ?
15 M. NICE : [interprétation] Oui. Nous avons un témoin. L'application du 92
16 bis, moi je ne prendrai que quelques minutes. Il va être contre-
17 interrogé. Et puis j'ai quelques questions d'intendance à vous soumettre
18 avant la fin de l'audience.
19 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Fort bien. Pause de 20 minutes.
20 --- L'audience est suspendue à 12 heures 18.
21 --- L'audience est reprise à 12 heures 39.
22 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Maître
23 Tapuskovic.
24 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je ne pense pas avoir
25 besoin. Je voulais en effet lire la conclusion en entier de ce rapporteur
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1 spécial de cette mission d'observations mais je voulais d'abord vous
2 demander si ces trois documents-là, vous vouliez les verser au dossier en
3 tant qu'élément de preuve ou pas ?
4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Non. Ils disposeront de cote C, seront
5 ainsi versé à dossier mais ne lisez pas la totalité du texte. Nous avons
6 peu de temps en effet. Si vous voulez poser une question brève au témoin,
7 libre à vous de le faire.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais auparavant, l'accusation pourrait-
9 elle nous expliquer la présentation de ce document parce que ce n'est pas
10 un original qu'est celui-ci. Et apparemment, ça devait être un document du
11 Procureur qui fait la synthèse d'un document original.
12 M. NICE : [interprétation] C'est un document -- ce sont des documents que
13 nous avions et que nous avons. Vous le voyez à l'entête. C'était déterminé
14 par certaines conditions qui ne s'appliquent plus aujourd'hui. Quant à la
15 forme qu'a pris ce document, il y a une certaine mesure d'expurgation. On
16 ne peut pas modifier le format, la forme actuelle de ces documents.
17 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
18 Q. Et au sujet de ce dernier des documents, je voulais dire que dans cette
19 conclusion, le rapporteur spécial a déterminé que ce jour-là, le 3 août
20 1995, à 19 heures 30 aux informations les plus importantes, la première des
21 nouvelles communiquée avait été celle du refus des Serbes pour ce qui est
22 de réintégrer pacifiquement le territoire croate. Et savez-vous que la
23 nouvelle publiée c'était celle du rejet des Serbes de réintégrer la Croatie
24 de façon pacifique.
25 R. Je ne dispose pas du document que vous mentionnez. Cependant, je suis
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1 au courant du fait qu'il y a eu ce programme diffusé et si je me souviens
2 bien, une heure ou deux avant ce programme, il y avait une annonce plus
3 positive concernant la mission que j'effectuais à Belgrade.
4 Q. Monsieur Galbraith, quelques questions seulement au sujet du dernier
5 des problèmes soulevés. Cela concerne encore le plan en question.
6 Vous avez dit en effet que le 1er août à Brioni, vous avez eu une
7 conversation avec Tudjman sur le problème en corrélation avec Babic et la
8 nécessité de rencontrer au plus vite Babic, n'est-ce pas ?
9 R. Mais ce n'était pas une des raisons principales de ma mission à Brioni.
10 Cependant, lorsque je me suis trouvé à Brioni, j'ai indiqué que Babic
11 voulait me rencontrer et j'ai demandé l'avis de Tudjman.
12 Q. Je comprends bien. Vous êtes allé à Brioni, le 31 juillet 1995
13 également, n'est-ce pas ?
14 R. Non. J'ai été à Brioni le 1er août.
15 Q. J'ai sous les yeux une déclaration que vous avez faite auprès des
16 enquêteurs, les 9 et 10 décembre 2002, où il est dit que le 31 juillet
17 1995, vous étiez à Brioni et que vous les avez conseiller de protéger la
18 population civile si tentait qu'ils envisageaient une opération.
19 R. Je m'étais trompé au niveau de la date. La date exacte était celle du
20 1er août. Je m'excuse de l'erreur qui fut commise.
21 Q. Merci. Je crois aussi que vous vous êtes trompé. Mais vous y étiez donc
22 le 1er août. Savez-vous qu'il y a eu une réunion. Vous étiez là-bas le 1er
23 août mais il y a eu une réunion entre leprésident Tudjman et ses généraux,
24 ses officiers en date du 31 juillet, le jour qui a précédé. Savez-vous
25 qu'il y a eu une réunion de ce genre ou pas ?
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1 Si vous y étiez le 1er août, vous devriez savoir ou peut-être ne savez-vous
2 pas que Tudjman à Brioni avait eu une réunion importante avec ses généraux
3 et ses officiers le jour d'avant le 31 juillet, le jour avant votre
4 visite ?
5 R. Oui. Je savais qu'il y avait eu une telle réunion le 31 juillet.
6 Q. Et saviez-vous qu'à cette réunion-là, Tudjman a dit aux généraux
7 présents, je ne sais pas s'il vous l'a retransmis par la suite, pour ce qui
8 est du problème de Bihac, ce qui suit : "La situation se présente de telle
9 façon que les représentants des Nations unies, Akashi et Stoltenberg, nous
10 ont enlevé les raisons avancées de notre argumentation, ça veut dire ont
11 combattu les arguments." Ils se réfèrent à Bihac et ils estiment qu'il
12 fallait retirer les forces de Bihac parce qu'il n'y aurait pas d'attaques.
13 Ils avaient accepté que les Nations unies et la mission d'observation se
14 déploient là-bas pour que l'information puisse être communiquée au reste du
15 monde.
16 Saviez-vous donc que Tudjman avait dit cela pour ce qui était des mesures
17 déployées par Akashi et Stoltenberg pour arrêter les Serbes et que cela
18 avait été convenu ?
19 R. Je savais que les Nations unies essayaient d'apporter une amélioration
20 à la situation qui prévalait à Bihac et aux alentours et essayaient d'avoir
21 sur place des observateurs.
22 Q. Monsieur Galbraith, je vous cite ce que Tudjman a dit à l'occasion de
23 cette réunion en date du 31 juillet. C'est un PV de cette réunion-là qui
24 m'a été communiqué par le bureau du Procureur. C'est une réunion qui date
25 donc du 31 juillet et au PV on dit dans la suite, ce qui suit, je ne sais
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1 si vous l'avez appris le 1er août ou ultérieurement mais il dit :
2 "Qu'il n'y a plus de justification pour ce qui est d'essayer de débloquer
3 Bihac et nous avons les propos des Etats-Unis d'Amérique. Il avait dit
4 qu'il y avait une improbation de ce qui était d'engager une attaque comme
5 on l'a fait en Slavonie ?"
6 Le savez-vous ?
7 R. Oui, je le sais. Je sais qu'il a dit quelque chose qui revient à dire
8 cela en effet avant-hier. Je pense que j'ai eu l'occasion d'examiner ce
9 procès verbal. Je ne savais pas qu'il avait fait une déclaration de ce
10 genre à l'époque.
11 Q. Mais savez-vous qu'il avait entamé les débats, en disant que :
12 "C'est la finalité de nos débats. Il s'agissait de porter des coups de
13 telle nature aux Serbes pour faire en sorte que ces Serbes ne soient plus
14 pratiquement."
15 R. Une fois de plus je précise que j'ai vu ce procès verbal il y a de deux
16 jours de cela. Je savais très bien que la Croatie planifiait une opération
17 militaire et c'est précisément là la raison pour laquelle je tenais à ce
18 point à trouver une résolution pacifique.
19 Q. Encore une question. Savez-vous qu'il avait déclaré ou plutôt qu'il
20 avait donné instruction à Sarinic, instruction d'aller négocier à Genève,
21 mais cela devait masquer les choses et qu'il était absolument exclu
22 d'accepter quelque plan de paix que ce soit ?
23 R. Je n'étais pas au courant de l'existence de déclaration de ce genre à
24 l'époque je le répète que j'ai maintenant passé en revu de ce procès verbal
25 et, avant d'accepter tout ce que vous dites, je voudrais revoir la totalité
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1 de ce compte rendu ou de ce procès verbal plus exactement.
2 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Est-ce sera votre dernier document ?
3 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Oui, c'est la dernière question que je
4 voulais poser. C'est le dernier des documents, Monsieur le Président, mais
5 je ne vois pas du tout la raison de votre réaction de cette nature. Je
6 traite de problème sérieux. J'estime vraiment que vous devriez être au
7 courant. Si vous estimez que ce n'est pas nécessaire, interrompez-moi et je
8 vais cesser de parler.
9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Mais avancez, avancez, Maître Tapuskovic,
10 c'est tout.
11 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] C'est ma dernière question et je m'efforce
12 de faire en sorte que mes questions soient des plus brèves possible, mais
13 M. Galbraith a le droit de parler autant de temps qu'il le voudra. Ma
14 dernière question est donc la suivante.
15 Q. Savez-vous que Boutros-Ghali le 3 août a appelé le président Tudjman et
16 l'a supplié de ne pas lancer cette attaque ? Il a suffisamment d'éléments
17 de preuve le disant ici. Je voulais savoir si vous étiez au courant vous-
18 même, n'est-ce pas ? Je parle du secrétaire général des Nations unies à
19 l'époque.
20 R. Aujourd'hui, je ne me souviens s'ils étaient au courant de cet appel
21 téléphonique.
22 Q. Je vous remercie, M. Galbraith.
23 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Et je vous remercie, Messieurs les Juges.
24 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Jusqu'à présent, nous avons trois
25 documents que nous allons les verser au dossier. S'il y en a un quatrième,
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1 nous verrons quel traitement lui réserver.
2 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vous remets les documents dont il
3 s'agit. Il s'agit d'un pour vous d'une réunion entre Franjo Tudjman avec
4 son commandement suprême, et je vous le fais parvenir.
5 Monsieur l'Huissier, prenez-les en possession. C'est la réunion du 31
6 juillet 1995.
7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le rapport de spécial des observateurs
8 de l'Union européenne, en date du 31 janvier 1995, porte la cote de pièce
9 de la Chambre 8; le rapport quotidien, en date du 29 mars 1994, la pièce de
10 la Chambre 9; le rapport spécial du chef de la mission des observateurs de
11 l'Union européenne, en date du 3 août 1995, pièce de la Chambre 10; et le
12 procès verbal que je viens de recevoir portera la côté pièce de la Chambre
13 11.
14 Nouvel interrogatoire par M. Nice :
15 M. NICE : [interprétation]
16 Q. Deux éléments qui découlent de l'examen de document, on a fait
17 référence au fait que Bihac ne pourrait pas être un prétexte à la guerre
18 impliquer l'opération de Livno; un commentaire, s'il vous plaît.
19 R. Oui. Les Croates avaient entrepris une opération militaire longeant la
20 vallée de la Livno ou plutôt -- suivant la vallée de la Livno, et ceci
21 avait eu pour effet de soulager un peu la pression exercée sur Bihac,
22 puisque l'armée des Serbes de Bosnie a du procéder à un redéploiement de
23 force pour parer à la menace que posait à ce moment-là l'arrivée par la
24 vallée de la Livno de l'armée Croate -- la vallée de Livno [se corrige
25 l'interprète].
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1 Q. Pièce de la Chambre numéro 9, il s'agit du document de l'ECMM, en date
2 du 29 mars. Je pense qu'il y a un passage qui est peut-être dans tout ce
3 matériel en contraste avec votre récit. Il a laissé entendu que le
4 principal obstacle à l'accord c'est le fait que Martic, partisan
5 inconditionnel du Milosevic, qui le soutenait, n'avait pas une majorité au
6 parlement alors que les extrémistes serbes.
7 C'est ainsi qu'on les qualifie ayant à leur tête Babic eux s'opposaient à
8 cette idée. Savez-vous pourquoi ce rapport de l'ECMM a été soumis au bas de
9 la première page ? Pourquoi ce rapport est en contraste avec ce que vous
10 avez dit dans votre déposition et avec vos souvenirs ?
11 R. Je ne pense pas que ce soit en contraste avec ce que j'ai dit dans mon
12 témoignage, ni ce que j'ai dans mes souvenirs des événements. Je l'ai dit
13 hier en 1994, au moment où ceci a lieu, Babic se servait de ces
14 négociations pour en faire un club politique opposé à Martic. Mais, vous le
15 savez, je n'ai pas rencontré Babic en 1994 parce qu'il a refusé de d'avoir
16 un entretien avec moi cependant en 1995 alors que la situation s'aggravait
17 devenait de plus en plus éminente. J'ai l'impression qu'il était beaucoup
18 plus ouvert à l'idée de règlement politique en d'autre terme. Lorsque la
19 situation est devenue critique, le moment crucial est au moment où la
20 survie de la RSK ou des Serbes du Krajina était en jeu. Il a compris la
21 réalité et il semblait prêt à faire le type de concession qui aurait pu
22 permettre d'éviter la guerre.
23 Q. Le juge Kwon a soulevé la question de la façon dont les medias ont
24 relaté l'Opération tempête. Êtes-vous au courant de la façon dont les
25 medias ont parlé de ces événements ? Et la façon dont on parlait les medias
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1 de Belgrade avait-elle d'autres objectifs que simplement le fait de fournir
2 des informations ?
3 R. Il n'y avait pas de presse libre à Belgrade, loin de là à l'époque. La
4 presse de Belgradoise reflétait sans doute dans ses écrits ce que voulait
5 le gouvernement serbe et ce que voulait que l'accusé dise.
6 Quand je parlais de la couverture médiatique, je pensais à des sujets qui
7 éventuellement ont été évoqués dans la presse internationale et d'ailleurs
8 aussi dans la presse croate. Je comprends qu'il y avait des sanctions, mais
9 je suis sur à 100% que ce qui était écrit ou propagé par les médias du
10 monde était transmis en Croatie aux officiels -- [se corrige l'interprète]
11 était relevé par les fonctionnaires de Serbie par leurs agences de
12 renseignements.
13 Et permettez-moi d'ajouter ceci. Il y avait un représentant de la
14 Yougoslavie à Zagreb à l'époque et, si celui-ci n'a pas compris ce qui se
15 passait par les signes qui se dégageaient, c'était sans doute un des
16 diplomates les plus incompétents du monde.
17 M. NICE : [interprétation] Il se peut aussi qu'il faille s'appuyer sur les
18 publications non seulement en Croatie mais aussi à Knin pour nous guider.
19 Q. Mais vous venez de parler des renseignements et vous avez parlé du fait
20 que ces renseignements sont donc indiqués que l'accusé ne connaissait
21 l'imminence de l'attaque. Est-ce que vous pensez que Belgrade avait des
22 capacités en matière de renseignements ?
23 R. Je sais qu'ils étaient en mesure de s'infiltrer à Zagreb au niveau de
24 renseignements et qu'aussi les Croates avaient des moyens de savoir ce qui
25 se passait en Serbie. Les juges le savent sans doute. Après tout, ce
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1 n'était qu'un seul et même pays. Les gens se connaissaient, nombreuses
2 étaient les connexions, les connaissances et quel que soit le niveau de
3 pénétration des agences de renseignements serbes en Croatie, je suis sûr
4 qu'elles suffisaient pour permettre de penser qu'il y avait un risque très
5 probable d'action militaire.
6 Q. Autre question. J'en ai encore trois, je pense. On a fait référence au
7 fait que des Serbes étaient partis avant le début de l'Opération tempête.
8 Étiez-vous au courant de cela et si c'est le cas, quelle était la
9 signification que vous avez attachée à cet événement ?
10 R. Oui, j'étais au courant. Il est clair qu'une partie de la population
11 serbe est partie sous ordre donné par les dirigeants et non pas à la suite
12 d'une réponse à une action militaire. Mais ceci laisse entendre qu'on soit
13 au courant de l'éminence d'une opération militaire.
14 M. NICE : [interprétation] Je crois que je pourrais laisser de côté mes
15 deux autres questions et m'en tenir là.
16 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic, vous n'aurez pas
17 le loisir de poser d'autres questions, vous le savez. Qu'est ce que vous
18 voulez dire ?
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je sais que je n'ai pas de questions à poser
20 maintenant, j'en aurais toutefois beaucoup à poser mais le temps viendra
21 pour moi de les poser. Je voulais pour les besoins du compte rendu
22 d'audience qui soit procédé à une rectification. Il s'agit d'une
23 constatation qui est tout à fait incorrect pour ce qui est du comportement
24 de Martic. J'ai cru comprendre que le témoin a dit autre chose par rapport
25 à l'interprétation qui vient d'être faite à l'occasion des questions posées
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1 par M. Tapuskovic.
2 Je tiens à dire et que l'on confirme cela au compte rendu d'audience :
3 Martic n'a pas dit qu'il ne voulait pas se pencher sur le plan Z-4, qu'il
4 ne voulait pas l'étudier. Il a dit qu'il ne voulait pas étudier le plan
5 avant que d'avoir résolu le problème du mandat de la FORPRONU et je crois
6 que cela constituerait l'explication intégrale et non pas seulement la
7 première partie de sa phrase à lui. N'est-ce pas ainsi que ça c'est fait,
8 Monsieur Galbraith ?
9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vous remercie mais nous pouvons
10 vérifier ceci à l'examen du compte rendu d'audience.
11 Monsieur l'Ambassadeur, vous avez terminé votre déposition. Merci d'être
12 venu au Tribunal pénal international en tant que témoin. Vous pouvez
13 maintenant disposer.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Messieurs les Juges.
15 [Le témoin se retire]
16 M. NICE : [interprétation] Avant l'arrivée du témoin suivant qui est en
17 application de l'Article 92 bis --
18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Permettez-moi de vous interrompre. C'est
19 un témoin visé par l'Article 92 bis et vous -- nous devons rendre notre
20 décision pour ce qui est du calendrier. Voici notre décision : S'agissant
21 des témoins d'application de l'Article 92 bis à savoir, des témoins dont la
22 déclaration au préalable sont admises en l'application de cet article, mais
23 qui devront se prêter à un contre-interrogatoire, le temps accordé pour
24 l'interrogatoire sera en règle générale d'une heure. Nous nous basons sur
25 l'expérience acquise antérieurement. Nous avions commencé par une heure et
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1 puis c'était passé à trois quarts d'heure, mais nous voulons accorder à
2 l'accusé un délai supplémentaire. Et aussi, dans l'intérêt de la justice il
3 est important qu'il bénéficie d'un peu plus de temps. Il aura donc une
4 heure. Mais il va de soi que les circonstances peuvent évoluer en fonction
5 des témoins et que cette décision n'a pas de valeur absolue.
6 M. NICE : [interprétation] Merci Monsieur le Président. Nous avons
7 maintenant fourni une nouvelle liste. J'espère que vous aurez eu l'occasion
8 de la voir. Elle sera fournie de façon périodique avec des révisions.
9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, je l'ai vue. Je ne suis pas content
10 de voir qu'elle s'est allongée cette liste. Elle est plus longue que celle
11 qu'on a vue au départ.
12 M. NICE : [interprétation] J'espère que vous serez satisfait de la forme.
13 Ce que j'ai fait, intentionnellement d'ailleurs, c'est de fixer la taille
14 générale de la liste. Je crois qu'on a plus - plus de facilité à consulter
15 un document si on connaît bien son format. Il y a quatre volets. Je ne sais
16 pas si vous l'avez sous les yeux ce document; il a les deux dernières
17 parties des témoins en application du 92 bis et dans chaque fois on avait
18 prévu une heure pour la déposition. Il faudra que ce soit un peu plus mais
19 je n'espère pas trop.
20 Deuxième volet; ce sont des témoins que nous n'allons pas appelés mais nous
21 voulions que vous sachiez ce que nous avions en réserve dans la catégorie
22 de témoins qui sont peut être intéressants et que vous allez souhaiter
23 appeler à la barre.
24 Fin de la première partie de cette liste. Je remercie nos assistants qui
25 ont fait le travail extraordinaire pour présenter ce document de façon plus
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1 aisé. Vous avez une compilation arithmétique des différentes composantes.
2 Ceci vous montre les coupes qu'il faut faire pour tenir les délais. Nous
3 avons un chiffre un peu inférieur. Nous avions commencé par une coupe de 38
4 jours par rapport aux témoins qui tomberaient sous le coût des listes 1, 3
5 et 4.
6 Si nous avons une liste un peu plus longue maintenant, c'est que nous
7 fournissons davantage de détails destinés à vous aider. Mais si nous avons
8 des témoins que nous ne voulons plus appeler, que nous rejetons, vous les
9 verrez en rayure, en zone rayée. Vous verrez ce qui reste comme témoins.
10 J'espère que ce document sera très utile. Vous le reverrez sous une forme
11 un peu différente dans un mois ou à peu près.
12 Nous fournissons également un autre document à case que vous avez reçu de
13 façon régulière. Vous l'aurez pour la Bosnie avant les vacances
14 judiciaires, ceci vous montrera ce que nous avons déjà prouvé et ce qui
15 n'est pas encore prouvé. J'avais espéré pouvoir appliquer un nouveau
16 système informatique. J'en avais discuté avec le greffe mais finalement
17 nous n'avons pas eu de réunions conjointes. J'ai pris une réunion tout seul
18 mais ce nouveau système, j'espère en temps utile, nous permettra de
19 retrouver des informations plus facilement grâce au système informatique
20 qui vous donnera également des documents qui ont le même format que le
21 support papier que vous avez eu jusqu'à présent. Ce qui veut dire que vous
22 resterez familier avec les documents.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quel que soit la nature du nouveau
24 système, je pense que l'accusation essaie d'avoir un index des pièces
25 n'est-ce pas dont j'ai parlé ?
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1 M. NICE : [interprétation] Oui, c'est pratiquement terminé. Ça nécessite
2 beaucoup de temps pour élaborer ce document. Nous avons maintenant terminé
3 celui-ci. Celui-ci permettra une modification tout à fait aisée chaque
4 mois. Et la liste elle est en cours.
5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il faudrait dans cette liste des cotes de
6 chaque pièce, Pourquoi ? Pour le moment on se sert d'intercalaires,
7 difficile de tenir compte du nombre véritable de pièces à conviction ?
8 M. NICE : [interprétation] Oui.
9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Pour des raisons historiques notamment,
10 il nous faut une cote pas nécessairement la cote attribuée en prétoire mais
11 plutôt cette cote ou ce numéro de pièces que vous donnez lorsque vous
12 répertoriez vos documents.
13 On peut commencer par un, donc on peut avoir, par exemple, la pièce 352 qui
14 compte 76 intercalaires mais chaque intercalaire va recevoir un numéro
15 distinct.
16 M. NICE : [interprétation] Nous verrons ce qu'il en est. Si vous tenez, ce
17 faisant, à savoir combien de pièces il y a en tout --
18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Tout à fait.
19 M. NICE : [interprétation] C'est tout à fait faisable. Ce n'est pas trop
20 compliqué à savoir si on peut avoir une seule liste avec tous les numéros.
21 Je ne sais pas.
22 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Quoi qu'il en soit, il nous faut savoir
23 exactement combien de pièces à conviction vous soumettez. Et puis vous
24 devez le savoir vous aussi.
25 M. NICE : [interprétation] Tout à fait. Dernière observation. Donc, j'ai
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1 arrêté le format de la liste que vous avez dans la deuxième colonne, chaque
2 numéro de témoin. Vous dites que la liste est un peu plus longue. Oui,
3 parce que nous avons ajouté des noms plutôt que de changer la numérotation.
4 Parce ce que sinon, on crée la confusion.
5 Donc, maintenant vous avez des numéros qui sont faits des lettres A, B, C,
6 D. Mais ceci vous permettra de voir combien il reste de témoins car, de
7 toute façon il faut couper de 38 jours le temps consacré aux dépositions.
8 Et ça veut dire que si le temps n'est pas disponible ces témoins ne seront
9 pas appelés à la barre. Et nous ferons un commentaire pour indiquer ceux
10 qui tombent en bas de liste et ceux qui peuvent vraiment être cités.
11 Le témoin suivant est un témoin factuel sur la base des infractions. En
12 général, vous savez que la démarche retenue pour ces témoins visés par
13 l'Article 92 bis est la suivante. Il est appelé à la barre. Ce témoin
14 bénéficie d'un jeu de pièces en application du 92 bis. Il y aura peut-être
15 l'une ou l'autre pièce supplémentaire, une carte, la liste des personnes
16 tuées. Il y aura un résumé dont je vais donner lecture, résumé très court
17 qui prendra une minute ou deux. Nous avons fait la demande pour certains
18 témoins et si cette demande est accordée, ces témoins pourront ajouter
19 quelques phrases en plus du contre-interrogatoire.
20 Il s'agit ici du témoin qui s'appelle Suad Dzafic.
21 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
22 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vais demander au témoin de prononcer
23 la déclaration solennelle.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
25 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
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1 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur. Veuillez vous
2 asseoir.
3 LE TÉMOIN: SUAD DZAFIC [Assermenté]
4 [Le témoin répond par l'interprète]
5 Interrogatoire principal par M. Nice :
6 Q. [interprétation] Veuillez décliner votre identité, Monsieur.
7 R. Suad Dzafic.
8 Q. Monsieur Dzafic, ces derniers jours ici au ICTY, avez-vous parcouru
9 votre déclaration préalable en présence d'un officier instrumentaire. Bien
10 sûr, sur réserve de corrections que vous avez relevées, est-ce que vous
11 avez attesté de l'exactitude de cette déclaration. Est-ce que vous avez
12 signé celle-ci ?
13 R. Oui.
14 M. NICE : [interprétation] Je demande une cote pour ce jeu de pièces.
15 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce d'accusation
16 472.
17 M. NICE : [interprétation]
18 Q. Avez-vous également annoté une carte qui permettra de mieux comprendre
19 votre déposition ?
20 R. Oui.
21 Q. Ceci deviendra la pièce 336, Suad Dzafic, vous avez surligné des
22 villages. Mais outre ceux-ci, est-ce que vous avez annoté les lettres DJ à
23 votre village ?
24 R. Oui.
25 Q. Une dernière chose, je vais demander une cote distincte pour ceci. Il
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1 s'agit d'une liste que vous avez rédigée des personnes tuées le 21 mai
2 1992, à proximité de Nova Kasaba dans la municipalité de Vlasenica ?
3 R. Oui.
4 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La liste portera la cote, pièce de
5 l'accusation 473.
6 M. NICE : [interprétation] Il y a 21 noms dans cette liste. Et je pense que
7 ce sont des personnes qui pour la plupart sont apparentées à ce témoin.
8 Parlons maintenant du résumé de ce témoin. Il est originaire de Vitkovici
9 ou d'un lieu à proximité de Vitkovici, municipalité de Bratunac.
10 Il est entré de Serbie dans son village natal, dans cette municipalité en
11 mars 1992. Le témoin sera en mesure de relater ce qui lui est arrivé et aux
12 autres villageois. Il a entendu parler de la prise de pouvoir de la ville
13 de Bratunac et d'autres villages de la municipalité en avril et en mai
14 1992.
15 Krasno Polje, c'est un village voisin, qui a été attaqué le 10 mai 1992. Ce
16 jour-là, des voisins serbes du témoin sont venus lui dire à lui, et à
17 d'autres villageois, qu'ils seraient davantage en sécurité s'ils prenaient
18 la fuite en direction des bois, ce qu'ils ont fait. Ils sont rentrés cette
19 nuit-là.
20 A partir de ce jour-là et jusqu'au 18 mai, des patrouilles de la police
21 serbe ont patrouillé le village. Mais le 17 mai, le chef de la police est
22 venu leur demander de donner les armes qu'ils étaient susceptibles de
23 posséder.
24 Dans la matinée du 18 mai, des voisins serbes désormais armés ont encerclé
25 le village. Ce témoin et d'autres villageois ont été placés dans des bus et
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1 transférés à Bratunac. Vers 15 heures ce jour-là, les autobus sont partis
2 en direction de -- ou quitter Bratunac et sont partis vers Vlasenica.
3 Chaque bus avait un garde armé à bord.
4 Ils sont arrivés à Vlasenica, ils se sont garés à proximité de la gare
5 routière. Les autobus étaient entourés par un groupe mixte de soldats. Le
6 témoin a identifié certains de ces gardes comme étant des Tigres d'Arkan ou
7 des Beli Orlovi. Les hommes en âge de combattre et aussi des mineurs d'âge
8 ont été emmenés au SUP de Vlasenica. Ces jeunes étaient au nombre de cinq.
9 Ces hommes ont été détenus au SUP de Vlasenica où ils ont subi des mauvais
10 traitements.
11 Le 21 mai 1992, les hommes en âge de combattre ont été emmenés dans un bus
12 du SUP de Vlasenica, il y avait un véhicule blindé garé à proximité du bus.
13 Et qui a rejoint ce bus pour former un convoi avec quatre autres voitures.
14 Il y avait un crâne qui était placé ou l'emblème d'un crâne qui était
15 placée sur une de ces voitures. Ces véhicules ont formé un convoi qui a
16 quitté Bratunac -- Vlasenica en direction de Bratunac. Le convoi s'est
17 arrêté et les personnes qui sont descendues de ces bus ont été tuées en
18 groupe.
19 Le témoin a été blessé, a été touché. Mais il a finalement réussi à
20 s'enfuir du site d'exécution pour parvenir à un territoire tenu par les
21 Musulmans.
22 Il y a des ajouts éventuels, des éclaircissements apportés par vous,
23 Monsieur le Témoin, sur une feuille distincte séparée. N'est-ce pas ?
24 Paragraphe 10.
25 Q. Au moment où vous êtes entré, dans l'endroit où on vous a détenu à
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1 Vlasenica, pourriez-vous nous dire d'après votre estimation, combien de
2 personnes sont restées dans les autobus ?
3 R. 120 environ.
4 Q. Et je pense que c'est votre femme qui vous a dit plus tard, qu'avec les
5 enfants, elle avait été amenée à Tisca qui se trouve entre Vlasenica et
6 Kladanj et que de là, ils avaient reçu l'autorisation de partir à pied vers
7 un territoire musulman. N'est-ce pas ?
8 R. Oui.
9 Q. Paragraphe 12. Les soldats qui vous surveillaient au moment où vous
10 avez été embarqués dans ces bus le 21 mai, avaient-ils, portaient-ils
11 plusieurs types d'uniforme ? Avez-vous constaté cela ?
12 R. Oui.
13 Q. Est-ce que sur l'un de ces uniformes, vous avez vu Beli Orlovi ainsi
14 que l'emblème d'un crâne ?
15 R. Ils ne portaient cela, mais c'était sur la voiture que se trouvait cet
16 emblème. Mais je n'ai pas bien compris votre question.
17 Q. J'allais de toute façon vous poser cette question. Il y avait une
18 voiture qui vous a accompagné jusqu'au lieu d'exécution. Est-ce qu'il y
19 avait sur la portière de cette voiture un emblème ?
20 R. Il n'y avait pas un emblème, il y en avait plusieurs. Il y avait les
21 Aigles blancs et il y avait ces crânes de dessinés. C'était une voiture
22 Lada Niva, blanche.
23 Q. Je vous remercie, Monsieur Dzafic. Des questions vont maintenant vous
24 être posées.
25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous avez la parole.
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1 Contre-interrogatoire par M. Milosevic :
2 Q. [interprétation] Monsieur Dzafic, d'après ce que je vois ici, c'est
3 depuis 1989 à 1992 que vous avez résidé en Serbie ?
4 R. Oui. J'étais là-bas au titre de travail temporaire.
5 Q. Dans votre déclaration en page 1, paragraphe 4, vous dites qu'au mois
6 de mars 1992, vous avez entendu parler du fait de certains Musulmans tués
7 par des Serbes de Bosnie à Bascarsija, à Sarajevo ?
8 R. Oui. Cela a figuré dans une première version de ma déclaration. Je n'ai
9 pas été tout à fait certain. Je ne sais pas qui a tué qui mais je sais
10 qu'il y a eu un meurtre à Bascarsija.
11 Q. Mais est-ce se sont là des Serbes qui ont tué des Musulmans à
12 Bascarsija ?
13 R. Ça ne le sait pas. Je ne sais pas qui a tué qui. J'ai ouï-dire qu'il y
14 a eu meurtre.
15 Q. Bien, Monsieur Dzafic. Mais ce que vous avez ouï-dire a motivé votre
16 retour vers votre village, n'est-ce pas ?
17 R. Oui.
18 Q. Est-ce qu'à ce moment-là, vous aviez envisagé un retour rapide et bref
19 ou plutôt avez-vous envisagé d'y rester ?
20 R. J'avais prévu de revenir. Je voulais juste voir ce qui se passait. Je
21 voulais entendre ce qui se passait.
22 Q. Qu'avez-vous ouï-dire alors ? Est-ce qu'on vous a confirmé ce que vous
23 avez déclaré ou avez-vous ouï-dire que cela n'était pas vrai ?
24 R. J'ai ouï-dire qu'il y a eu meurtre.
25 Q. Meurtre de qui ?
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1 R. Il y a eu meurtre et que c'était un mariage mais je ne sais pas qui a
2 été tué.
3 Q. Vous ne savez pas que c'est des gens qui étaient à un mariage serbe qui
4 auraient été tués ?
5 R. Je ne le sais pas.
6 Q. Bien. Alors nous allons sauter certaines choses et nous penchez sur
7 autre chose. Au paragraphe 5, vous dites qu'à l'entrée des forces serbes
8 dans Bratunac, tous les Musulmans ont été licenciés de leurs postes de
9 travail et que tous les postes clés ont été pris par des Serbes, que l'ex-
10 MUP a été nettoyé complètement des Musulmans. C'est bien ce que vous avez
11 dit ?
12 R. Oui.
13 Q. Mais qu'est-ce qui s'est passé avant cela ? Est-ce qu'avant cela, il y
14 a eu des événements importants ?
15 R. De quelle période parlez-vous ?
16 Q. De la période jusque-là, justement, avant la rentrée des forces serbes
17 comme vous le dites vous-même, n'entrent dans Bratunac.
18 R. Vous parlez de la période avant la prise de Bratunac ou dans le courant
19 même de la prise de Bratunac ?
20 Q. Ecoutez, je vais être tout à fait précis. Savez-vous ce qui s'est passé
21 aux ouvriers du groupe ethnique serbe ou plutôt à la population serbe en
22 général avant le début des conflits à Bratunac ?
23 R. Non.
24 Q. Bien. Mais savez-vous au moins qu'en 1992, toutes les fonctions
25 importantes à Bratunac étaient détenues précisément par des Musulmans.
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1 C'est bien cela ?
2 R. Je ne suis pas au courant de cela.
3 Q. Il y a au point 2 la liste des dirigeants municipaux.
4 R. Les dirigeants de quoi ?
5 Q. De la municipalité.
6 R. De quel groupe ethnique ?
7 Q. Du groupe ethnique musulman.
8 R. Est-ce que c'est moi qui aie donné cette liste.
9 Q. Je l'ai vu.
10 R. Ce n'est certainement pas moi qui l'aie donnée.
11 Q. Vous n'avez pas ce type de renseignements ?
12 R. Certainement pas.
13 Q. Bien. Mais dites-nous, êtes-vous au courant du fait que dans la Défense
14 territoriale, dans le courant de la même année, toutes les fonctions depuis
15 le poste de commandement jusqu'au niveau des chefs de compagnies étaient
16 détenues par des Musulmans ?
17 R. Non.
18 Q. Mais ne savez-vous pas que l'autorité politique, économique et
19 militaire était aux mains de personnes du groupe ethnique musulman,
20 précisément ?
21 R. Non, je ne le sais pas.
22 Q. Savez-vous que les autorités de l'époque à Bratunac avaient adopté des
23 plans contraire pour ce qui est de blocus de villages serbes et des routes
24 y menant ?
25 R. Non.
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1 Q. Savez-vous qu'auprès de tous les comités du Parti de l'action
2 démocratique, au niveau des communautés locales, il y avait déjà création
3 de QG, de crises illégales, au moment où vous êtes arrivé là-bas ?
4 R. Non.
5 Q. Donc, la tâche était de préparer l'organisation des activités armées ?
6 R. Non.
7 Q. Vous ne savez rien de tout cela ?
8 R. Non, rien de tout cela.
9 Q. Savez-vous qu'avant cela, il a été créé une Ligue patriotique à
10 Vlasenica ?
11 R. Non.
12 Q. Ça non plus, vous ne le savez pas.
13 R. Je ne sais pas.
14 Q. Mais savez-vous quoi que ce soit au sujet de l'organisation
15 d'entraînement militaire à l'intention de Musulmans sur le territoire de la
16 municipalité de Bratunac ?
17 R. Non.
18 Q. Bien. Mais savez-vous quoi que ce soit au sujet de l'armement accéléré
19 des extrémistes musulmans à Bratunac ?
20 R. Non. Et je ne pense qu'il y avait eu des gens de ce genre-là, d'après
21 ce que j'en sais.
22 Q. Mais savez-vous qui était Nezir Muratovic et Senad Hodzic, chef et
23 adjoint du chef du poste de police à Bratunac ?
24 R. J'ai entendu parler de Senad mais je n'arrive pas à me souvenir si je
25 l'ai connu personnellement. J'ai ouï-dire son nom et son prénom.
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1 Q. Savez-vous me dire quoi que ce soit au sujet des activités pour ce qui
2 est de l'approvisionnement et distribution d'armes et pour ce qui est de
3 l'entraînement effectué la nuit, pour ce qui est du maniement d'armes à
4 l'intention de Musulmans de Bratunac ?
5 R. Non.
6 Q. Avez-vous entendu parler de Nurif Rizvanovic ?
7 R. Oui.
8 Q. Et vous souvenez-vous de sa déclaration à l'occasion d'une assemblée
9 des citoyens de Bratunac ?
10 Je cite maintenant la déclaration qu'il a faite :
11 "Il faut égorger les enfants serbes si l'on ne peut rien faire d'autre aux
12 Serbes."
13 R. Non.
14 Q. Et savez-vous qui étaient l'Imam et Efendi Munib Ahmetovic, originaires
15 de Vlasenica ? Munib Ahmetovic, avez-vous entendu parler de lui ?
16 R. Non.
17 Q. Avez-vous entendu parler d'Osman Halilovic ?
18 R. Le nom me dit quelque chose. Je ne suis pas sûr.
19 Q. Vous n'êtes pas sûr, bien. Avez-vous entendu parler de Ramic, chargé de
20 l'armement dans l'assemblée municipale de Bratunac ?
21 R. Oui.
22 Q. Savez-vous quoi que ce soit à son sujet ?
23 R. Non.
24 Q. Mais avez-vous eu l'opportunité de prendre connaissance de ce programme
25 de la cellule de Crise du Parti du SDA en Bratunac ? Où, entre autre, il
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1 est question d'élaborer un plan de blocus des communications routières et
2 de faire une liste de renégats musulmans, à savoir, ceux qui ne voulaient
3 pas se battre contre les Serbes et qu'il fallait donc liquider avant que
4 tout cela ne commence. Il fallait faire des listes, d'actes au combat, des
5 listes de membres d'unités, de recenser les armes ?
6 R. Non.
7 Q. Vous ne savez rien de tout cela ?
8 R. Non.
9 Q. Mais cette cellule de Crise de votre village existait-elle ou pas ?
10 Savez-vous quoi que ce soit au sujet des activités de cette cellule de
11 Crise dans votre village ?
12 R. Non. Je ne sais du tout s'il y a en eu et s'il y a eu un agenda
13 d'activités.
14 Q. Bon. Si vous ne savez pas que cela existait, je ne vous poserai pas de
15 questions à ce sujet-là.
16 Vous avez dit en page 1 de votre déclaration, aux paragraphes 6 et 7, que
17 les Serbes ont commencé à emmener les représentants les plus -- les
18 militaires musulmans de cette population musulmane et vous avez ouï-dire
19 qu'on avait exécuté une partie de ces gens-là et qu'on les avait jetés dans
20 la Drina.
21 R. Oui.
22 Q. Savez-vous me donner au moins quelques noms de ces personnes qu'on
23 avait emmenés à l'extérieur de la ville ?
24 R. Je pense qu'il y avait un surnom, Suljic. Je ne sais pas ce qu'il avait
25 été son nom.
Page 23224
1 Q. Cet homme a été emmené de la ville ?
2 R. Oui.
3 Q. Vous l'avez entendu dire ?
4 R. Je l'ai entendu dire mais je n'ai pas vu moi-même.
5 Q. Mais qui les a emmené ces gens-là ? Qui a emmené ce Suco ?
6 R. D'après ce que l'on m'a dit, c'était des membres de l'armée Serbe.
7 Q. Mais cet homme aurait été tué n'est-ce pas ?
8 R. Oui.
9 Q. Vous avez oui dire de la chose ?
10 R. C'est que j'ai voulu dire en effet.
11 Q. Vous n'avez entendu parler de personne d'autre, si ce n'est ce Suco ?
12 R. J'ai entendu parler d'un homme qui avait été commerçant. Je n'arrive
13 plus à me souvenir de son nom. Je ne connaissais pas son nom et son prénom.
14 Q. Mais vous avez donc oui dire que cet homme avait lui aussi été emmené
15 et tué, exécuté ?
16 R. Oui.
17 Q. Mais vous n'arrivez pas à vous souvenir de qui, de la bouche de qui
18 vous avez entendu cela ?
19 R. Non.
20 Q. En page 3, paragraphe 1 de votre déclaration, vous dites : que le
21 village de Glogova a été attaqué le 9 mai et que l'on a tué quelques 60
22 habitants de ce village, alors que Krasno Polje a été attaqué le 10 mai
23 d'après ce que vous affirmez ?
24 R. C'est cela.
25 Q. Et à Krasno Polje, y a-t-il eu des victimes ?
Page 23225
1 R. Oui.
2 Q. Savez-vous nous dire quoi que ce soit au sujet de combats dans les
3 villages de Glogova et dans le village de Krasno Polje, étant donné que ça
4 se trouve à proximité du vôtre ?
5 R. Non.
6 Q. Mais c'est tout près de chez vous ?
7 R. Je ne sais pas quel type de combats il y a eus.
8 Q. Bon. Mais je suppose que vous deviez forcément savoir puisque ça se
9 trouvait à proximité de Glogova et Krasno Polje, ça serait à proximité de
10 chez vous et que c'était là les plus grandes des places fortifiées des
11 extrémistes musulmans ?
12 R. C'est la première fois que j'en entends parler.
13 Q. Donc il n'y a pas eu de formation musulmane et il n'y a pas eu de
14 combats ?
15 R. Non, je connais personnellement ces gens-là et les gens qui ont été
16 tués c'était des civils.
17 Q. Vous voulez dire par là que c'était des civils musulmans qui ont été
18 tués ?
19 R. Oui.
20 Q. Et savez-vous nous dire quoi que ce soit au sujet de civils Serbes qui
21 ont été tués ?
22 R. Non je ne sais pas. Je ne sais pas que l'un quelconque d'entre eux ait
23 été tué à Krasno Polje.
24 Q. Mais pour ce qui est de Bratunac, avez-vous eu vent de meurtres de
25 civils Serbes ?
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1 R. Non. Et je ne pense pas que ce soit arrivé.
2 Q. Mme Florence Hartmann n'y croit pas non plus parce qu'elle a déclaré --
3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Peut importe ce que pense Mme Florence
4 Hartmann. Ce n'est pas une question qu'il faut poser à ce témoin.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, mais cela concerne ce témoin-ci. Le fait
6 qu'il ne croît pas que l'on ait tué à Bratunac des civils Serbes. Or cela
7 se trouve être très pertinent, Monsieur May, parce que la partie adverse
8 n'accuse pas les commandants de la partie musulmane pour les civils qui ont
9 été tués, parce qu'elle dit que les tueries de civils n'ont pas été
10 établies.
11 Et comme le témoin affirme que telle chose n'a pas pu se passer, j'ai ici
12 un document portant sur les victimes Serbes à Bratunac. Il y en a beaucoup
13 bien entendues. Je ne vais pas vous donner lecture de tout cela.
14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous parlez de quelle date ?
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je parle de l'année 1991 et des années
16 suivantes. Je parle des victimes Serbes à Bratunac mais je ne propose pas
17 de donner lecture, ne vous inquiétez guerre, je voulais juste citer
18 quelques noms pour essayer de rafraîchir la mémoire du témoin puisqu'il
19 affirme que tout rien de tout cela n'est arrivé et qu'il n'y a pas eu de
20 victimes parmi les civils Serbes.
21 Voilà par exemple et je vais parcourir rapidement tout ceci.
22 Q. Vucetic Radojka né en 1946, femme au logis. On ne peut pas contester le
23 fait que ce soit là un civil. Cedo Milutinovic, né en 1975. Jovanovic
24 Radojka, Zekic Kosana, une ménagère, née en 1928, donc une personne âgée.
25 Tout ceci s'est passé sur le territoire de Bratunac. Stipanovic Stojka,
Page 23227
1 ménagère; Stanija Vasic, née en 1930, ménagère, date de naissance 1930;
2 Cirkovic Vujadin, né en 1974, étudiant ou élève; Paunovic Dusanka, né en
3 1954, retraité; Mileva Dimitric, ménagère; Rada Milosevic, ménagère,
4 massacrée et lynchée; Ilinka Rankovic, une ménagère également; Mladjenovic
5 Slavka, ménagère; Miloslav Stjepanovic, né en 1919 un retraité.
6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Que voulez-vous que le témoin fasse de
7 tout cela ?
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce que je demande au témoin qui vient de
9 déclarer qu'il n'y croyait pas qu'il y ait eu des civils Serbes de tuer à
10 Bratunac, étant donné que j'ai choisi dans cette liste énorme de Serbes
11 tués, égorgés auxquels on a mis le feu et c'était pour l'essentiel des
12 femmes, des ménagères, des enfants, des étudiants, pour qu'il me dise --
13 Kristina Eric, ménagère, immolée; Risto Popovic, égorgé.
14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ce n'est pas vous qui déposez vous savez.
15 Vous êtes en train de contre interroger ce témoin. On peut simplement
16 demander au témoin s'il connaît l'un quelconque de ces noms.
17 Monsieur le Témoin, il est affirmé que toutes ces personnes auraient été
18 tuées. Pouvez-nous dire quoi que ce soit, êtes-vous au courant de ces
19 allégations ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.
21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Inutile de poursuivre votre lecture.
22 Passons à autre chose.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien, Monsieur May. Je comprends que pour
24 vous cela n'a aucun sens, une signification. Je me propose de passer à
25 autre chose. Du reste c'est la position prise par la partie adverse
Page 23228
1 également à savoir que les Musulmans ne sont pas responsables de tueries
2 civiles.
3 Q. Savez-vous qui est Ejub Ganic ?
4 R. Golic. Ejub Golic.
5 Q. Oui. Ejub Golic.
6 R. J'ai entendu parler de lui.
7 Q. Avait-il été le commandant de ce bataillon de montagne de la 28e
8 division de l'armée de BH ?
9 R. Oui. Je ne sais pas s'il était mal famé.
10 Q. Justement c'était des gens originaires du village de Glogova qui
11 avaient complété ce bataillon montagnard. Ne savez-vous pas qu'ils ont mis
12 le feu à tous les villages Serbes et qu'ils ont tué des centaines de civils
13 dans Kravica, Mijesici [phon], Jelestica, Kijevci, Siljkovici, Bacici,
14 Bjelovac, ---
15 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Non. Non. Laissez le temps au témoin de
16 répondre plutôt que de continuer à lui soumettre ces allégations.
17 Monsieur Dzafic, qu'en est-il ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous en prie. Je voudrais que l'on me pose
19 des questions au sujet de ce que j'ai vécu moi-même. Je ne sais rien au
20 sujet des autres cas.
21 M. MILOSEVIC : [interprétation]
22 Q. Très bien. Parlons de vous. Est-il vrai de dire que dans votre village,
23 les Serbes avaient garanti la sécurité à tout et chacun au cas où les armes
24 auraient été restituées ?
25 R. C'est exact.
Page 23229
1 Q. En page 3, paragraphe 5, vous dites que : quatre personnes de votre
2 village en date du 17 mai ont été emmenées au poste de police ?
3 M. NICE : [interprétation] Le témoin n'a pas encore demandé sa déclaration
4 au préalable mais il est peut-être prudent qu'il l'ait et il faut rappeler
5 à l'accuser que nous avons délibérément numéroté les paragraphes. Pour ce
6 qui est des témoins visés par l'Article 92 bis, il serait préférable que
7 l'accusé mentionne les numéros de pages et de paragraphes, ceci permettra
8 au témoin de se replacer pour le paragraphe.
9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Et la version B/C/S, elle est numérotée
10 aussi ?
11 M. NICE : [interprétation] J'espère que oui. Elle devrait l'être.
12 Apparemment c'est le cas.
13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Fort bien. Remettons au témoin une copie
14 de sa déclaration au préalable.
15 M. NICE : [interprétation] Il l'a d'ailleurs semble-t-il.
16 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous avez entendu Monsieur Milosevic, je
17 me fais l'écho de ce qui vient d'être dit : Veuillez référer à la
18 numérotation de paragraphe dans la copie que vous avez me semble t-il.
19 Servez-vous en.
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, je suppose que j'ai été tout à
21 fait précis; j'ai dit page 3 paragraphe 5 de la déclaration et le témoin a
22 confirmé pour sa part ce qu'il a dit lui même à savoir, 4 personnes de son
23 village en date du 17 mai ont été conduites vers le poste de police de
24 Bratunac, je lui ai posé la question. Il m'a répondu par l'affirmative.
25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ce qu'on fait valoir c'est ceci. Nous
Page 23230
1 avons maintenant des déclarations préalables qui sont -- dont les
2 paragraphes sont numérotés. Il se peut que vous vous serviez d'une mouture
3 antérieure qui elle n'est pas numérotée. Il serait plus commode lorsque
4 vous contre interrogez des témoins de vérifier quel est le no du paragraphe
5 concerné. Parce qu'il est beaucoup plus facile de suivre le no de
6 paragraphe que d'avoir simplement le no des pages tenues en compte au
7 moment de la préparation de votre contre-interrogatoire. Poursuivez.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne perds pas de vue la chose et pour moi
9 aussi ce serait plus facile, Monsieur May. Mais moi, j'ai reçu une
10 déclaration du témoin sans cette numérotation et la déclaration avec la
11 numérotation je l'ai obtenu que tout à l'heure, ce qui fait que je ne peux,
12 à présent, prendre toutes les notes que j'ai faites pour moi-même par
13 paragraphe et par page. Ce sont des notes très précises. Je ne peux pas
14 avoir retrouvé cela dans l'autre version que l'on m'a donné ou cela va du
15 no 1 à je ne sais quel no du reste.
16 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Très bien. Si vous estimez que vous ne
17 pouvez pas nous aider de cette façon nous aurons besoin de plus de temps
18 pour vous suivre mais continuez, continuez de cette façon-là, mais allons
19 de l'avant.
20 M. MILOSEVIC : [interprétation] Monsieur May, peut-être pourriez-vous
21 donner -- faire une ordonnance au terme de laquelle les déclarations avec
22 ces numérotations-là me soient confiées en temps utile. Il me serait
23 également plus facile de procéder de la sorte, mais la déclaration avec
24 cette numérotation m'a été confiée tout à l'heure c'est-à-dire, juste avant
25 la comparution de ce témoin.
Page 23231
1 Q. Donc, on avait dit que quatre hommes avaient été conduits au poste de
2 police de cette localité, le 17 mai.
3 R. Oui.
4 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Il s'agit du paragraphe 15, Messieurs les
5 Juges.
6 M. MILOSEVIC : [interprétation]
7 Q. Combien d'habitants y a-t-il dans votre village ?
8 R. Mon village avait 12 maisons. Je ne sais pas vous dire combien
9 d'habitants cela représentait mais je peux maintenant vous donner les noms
10 de -- les membres de toutes les familles par noms et prénoms.
11 Q. Mais bon, disons, est-ce que cela fait une centaine d'habitants ?
12 R. A peu près.
13 Q. Pourquoi la police avait-elle réclamé ces quatre hommes précisément.
14 R. Pas seulement ces quatre-là. Elle avait demandé quelqu'un pour les
15 accompagner et mon père qui s'était--qui avait répondu à l'appel, mon frère
16 et un cousin et un autre cousin, un voisin à la fois.
17 Q. Bien. Mais je ne comprends pas Monsieur Dzafic; je ne vous pose pas de
18 piège dans mes questions je ne comprends pas pourquoi on a demandé quatre,
19 pourquoi s'ils ne les avaient pas demandé eux, pourquoi en ont-ils demandé
20 quatre, sur les 100 habitants ?
21 R. Vous voulez dire est-ce qu'ils les ont demandé par leur nom ou ils ont
22 demandé quatre.
23 Q. Mais pourquoi en a-t-on emmené quatre.
24 R. Vous parlez de ce chiffre.
25 Q. Oui, pourquoi quatre. Pourquoi avait-il réclamé ces gens là ?
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1 R. Excusez moi. Je n'ai pas bien compris cette question.
2 Q. Savez-vous nous donner la raison pour laquelle quatre personnes ont été
3 emmenées au poste de police.
4 R. Je connais cette raison.
5 Q. Laquelle était-ce ?
6 R. Parce que le commandant du secteur Vidoje, un policier, avait apporté
7 une liste et d'après la liste en question il y avait une disposition des
8 hommes en fonction des armes qu'on leur avait confiées.
9 Q. Ah! Ils avaient pris en charge des armes auparavant ils étaient dans
10 la défense territoriale.
11 R. Oui, on disait qu'ils avaient des armes.
12 Q. Mais savez-vous nous dire combien d'armes il y avait en tout pour tout
13 dans votre village ?
14 R. Oui je le sais.
15 Q. Bien. Dites-nous combien.
16 R. Alors je vais aller par nom.
17 Q. Vous n'allez pas nous donner les noms.
18 R. Si, si j'ai--je dois le faire parce que cela me permet de m'orienter
19 pour ce qui est du nombre.
20 Q. [aucune interprétation]
21 R. Mon père avait un pistolet avec un permis de port d'arme, mon cousin
22 avait un pistolet et un fusil de chasse, les deux avec permis de port
23 d'arme, un autre parent avait aussi un pistolet et un fusil de chasse, un
24 troisième cousin et voisin avait un fusil de chasse; ça fait longtemps
25 qu'il possédait ce fusil de chasse.
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1 Q. Mais est-ce que j'ai bien compris ce que vous nous dites ? Pratiquement
2 -- ils ont été pratiquement désarmés par recours à la force.
3 R. Ah non, ils ont de leur plein gré restitué ces armes suite aux ordres
4 qui sont venus de la police de Bratunac qui disaient qu'il fallait
5 restituer les armes. Donc, ils sont allés de leur plein gré restituer ces
6 armes au poste de police et ils ont reçu des attestations pour le
7 certifier.
8 Q. C'est alors là qu'on les a emmené au poste de police ?
9 R. Non ça s'est passé avant. Au moment-là où les a emmené au poste de
10 police ils n'avaient plus rien.
11 Q. Mais pourquoi les a-t-on emmenés, alors.
12 R. Je n'en sais rien. Ils étaient sur une liste. Ils ne croyaient pas que
13 nous n'avions plus d'armes. Ils nous avaient donné un délai pour expliquer
14 le reste des armes et si l'on ne restituait pas les armes l'on ne nous
15 garantissait plus notre sécurité.
16 Q. Bien. Le président, je crois que le moment est venu de lever la --
17 l'audience.
18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur le Témoin, l'audience est
19 maintenant suspendue. Veuillez à être ici présent dans ce prétoire demain
20 matin 9 h, dans l'intervalle vous n'êtes censé à -- parler à personne de
21 votre déposition pas non plus au bureau du Procureur tant que cette
22 déposition n'ait pas terminé.
23 M. NICE : [interprétation] Je sais qu'il y a des problèmes de calendrier
24 pour le témoin prochain parce que je crois que nous avons pris peut-être un
25 retard de l'audition des derniers témoins. Nous avions prévus deux témoins
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1 pour demain. Impossible de vous dire maintenant si nous allons demander une
2 modification de l'ordonnance actuelle.
3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, j'accorde un certain sérieux à ceci.
4 Je crois qu'il faut tenir compte des autres protagonistes dans ce procès;
5 ce témoin est préparé depuis longtemps, je ne vois pas pourquoi il ne
6 pourra pas être ici demain.
7 M. NICE : [interprétation] Oui. Le problème c'est sa date de rentrer et de
8 retour. Je ne sais pas si ceci aura des conséquences; je ne sais si ceci va
9 libérer du temps d'audience pour demain. Je voulais simplement vous
10 informer qu'il y a un problème qui se présente à l'horizon mais
11 j'essaierais d'y parer du mieux que je peux.
12 M. LE JUGE MAY : [interprétation] S'il vous plaît, faite-le. Moi, je ne
13 vois pas le genre de problèmes qui peuvent se poser vu les circonstances
14 entourant ce témoin; il devrait être mis à notre position, mais il se peut
15 que votre assistante soit en train de vous donner des informations.
16 M. NICE : [interprétation] Oui. Vous pensez sans doute à un autre témoin.
17 Vous avez sans doute en tête Monsieur le Président, un témoin qui n'est pas
18 possible de ne pas avoir ici.
19 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, celui d'après.
20 Oui Monsieur Milosevic.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux savoir quel est l'ordre de
22 comparution des témoins après ce témoin si l'on modifie -- si en fait, l'on
23 modifie la liste qu'on m'a donnée.
24 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Mais c'est bien là ce qui nous inquiète,
25 et nous verrons ce que ceci donne demain.
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1 M. NICE : [interprétation] Votre ordonnance aura-t-elle application ? Je ne
2 sais si nous pouvons demander une modification.
3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je pense qu'il fallait maintenir votre
4 ordonnance.
5 L'audience commencera demain 9h
6 --- L'audience est levée à 13 heures 50 et reprendra demain à 27 juin à 9
7 heures.
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