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1 Le mercredi 27 août 2003
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 06.
6 LE TÉMOIN : COLM DOYLE [Reprise]
7 [Le témoin répond par l'interprète]
8 Contre-interrogatoire par M. Milosevic :
9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic, vous avez la
10 parole.
11 M. MILOSEVIC : [interprétation]
12 Q. Monsieur Doyle, pour en finir, s'il vous plaît, avec ce rapport
13 concernant une rencontre chez moi, car M.May nous a interrompus notamment,
14 là où nous avions un entretien -- nous étions à la fin même. Vous avez dit
15 si c'est moi donc qui s'est mis d'accord…
16 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Assurons-nous que nous avons le bon
17 intercalaire. C'est l'intercalaire numéro 12. Il faut le remettre au
18 témoin.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je suppose que c'est là où nous arrêtions hier.
20 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Assurons-nous que le témoin a le bon
21 endroit.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je l'ai trouvé, Monsieur le Président.
23 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Milosevic.
24 M. MILOSEVIC : [interprétation]
25 Q. "Il n'y avait pas d'autres choix que cette conférence pour la paix
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1 organisée par la Communauté européenne afin de trouver une solution à la
2 crise qui régnait en Bosnie-Herzégovine. Elle se poursuit. Personne
3 n'aurait pu sortir vainqueur de la guerre se déroulant dans la république,
4 il n'y avait pas de partie innocente à ce conflit. La Bosnie-Herzégovine
5 est un état se composant de trois groupes ethniques sur pied d'égalité et
6 Belgrade respectera tout accord." Je suppose que c'est plutôt "agreement"
7 et pas "argument." Tout "accord" plutôt qu'"argument" disais-je, se basant
8 sur un consensus des trois parties.
9 M. LE JUGE MAY : [aucune interprétation]
10 L'INTERPRÈTE : [aucune interprétation]
11 M. MILOSEVIC : [interprétation]
12 Q. Puis après, moi je dis : "La Communauté internationale avait été mal
13 avisée de reconnaître la Bosnie-Herzégovine au moment où elle l'a fait mais
14 Belgrade, sur le plan politique, faisait tout ce qu'elle pouvait afin
15 d'établir la paix. Il était manifestement dans son intérêt de le faire.
16 Alors que pour ce qui est des Musulmans, Izetbegovic refusait la
17 négociation et semblait plutôt enclin à poursuivre la guerre civile.
18 Belgrade était prêt à prendre toutes les mesures concrètes nécessaires afin
19 de favoriser un accord -- un règlement."
20 Et puis après il y a le texte qui suit en manuscrit. Vous l'avez rajouté
21 vous-même je crois que même des gens qui auraient fait uniquement des
22 études élémentaires chez-nous est sensé savoir que Sarajevo devait être
23 évidemment pas seulement une ville musulmane mais multiethnique. Moi, je
24 dis pour ma part que M. Izetbegovic refusait de participer à des
25 négociations, des pourparlers et qu'il était plutôt enclin à voir la guerre
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1 se poursuivre. Or moi, ma question est la suivante, étant donné que sous
2 mes yeux j'ai notamment le texte qui suit. Monsieur May, qu'on se comprenne
3 bien, ce n'est pas que je veux offrir maintenant cette déclaration pour en
4 traiter, tout simplement je voulais poser une question à M. Doyle, c'est-à-
5 dire, dans une déclaration faite ici par le général MacKenzie, il s'agit de
6 la page ERN 0010012, où nous pouvons lire comme suit.
7 Autrement dit, je voudrais vous demander, Monsieur Doyle, si vous vous en
8 souvenez ?
9 "Le 23 avril, Philip Morillon et moi, nous nous sommes rencontrés avec Lord
10 Carrington et l'envoyé spécial de l'union européenne, Colm Doyle. Nous lui
11 avons dit que nous étions d'avis que la présidence de Bosnie s'était
12 décidée à contraindre la Communauté internationale de faire une
13 intervention internationale sans respecter le cessez-le-feu. Le président
14 Izetbegovic a dit que la Bosnie est un pays international reconnu et que
15 comme tel devait être sauvé de ces -- contre ces ennemis."
16 Ça est-ce que vous vous en rappelez ?
17 R. Non, je me souviens des commentaires que vous avez faits en rapport
18 avec la réunion qui vous a réunie -- qui nous a réunie plus exactement,
19 vous et moi, mais je n'ai pas de rappel précis sur quoi que ce soit
20 d'autre.
21 Q. Lorsque MacKenzie dit qu'il vous a rencontré vous, Carrington et que
22 Morillon avec tous les trois vous ont dit que la partie musulmane en fait
23 ne souhaitait pas avoir un cessez-le-feu --
24 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous en avez fait lecture et le témoin ne
25 se rappelle cela. Inutile de répéter cette lecture.
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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien.
2 M. MILOSEVIC : [interprétation]
3 Q. Je voulais tout simplement indiquer le fait que ce qui a été dit par
4 eux à cette occasion-là semble concordé avec l'appréciation de la situation
5 faite par moi et que les Musulmans ne voulaient pas obtenir le cessez-le-
6 feu mais voulait imposer la poursuite de la guerre. Or la direction serbe
7 de Pale, quant à elle, a fait comprendre qu'elle souhaitait un cessez-le-
8 feu et obtenir également une solution pour l'aider. Je crois que Monsieur
9 Doyle, vous ne deviez pas être sans le savoir.
10 R. Ce que je peux dire ici c'est que j'essaie de refléter fidèlement les
11 commentaires que vous m'avez communiqués au moment de notre réunion dans
12 vos bureaux. C'est tout ce que je peux dire. Quant à savoir si ceci a été
13 réalité en pratique, c'est une autre chose. J'avais reçu des instructions
14 en vue de cette réunion de Londres, j'étais sensé aller vous voir dans vos
15 bureaux puisque vous l'avez demandé. J'était sensé écouter ce que vous
16 aviez à dire puisque nous supposions que ce que vous vouliez me dire était
17 ce que vous vouliez dire à la mission chargée de la conférence pour la
18 paix et j'ai essayé de m'acquitter du mieux que j'ai pu de cette tâche.
19 Q. Bien. Hier, lors de votre déposition, vous avez évoqué les événements
20 qui concernaient la retenue d'Izetbegovic après son retour de Lisbonne. Je
21 voudrais que vous me confirmiez ou que vous le contestiez le fait qu'évoqué
22 par le général MacKenzie là-dessus à la même page, lorsqu'il s'agit de la
23 citation faite par moi tout à l'heure étant donné que lui aussi il était un
24 de ceux qui ont été impliqué dans les événements. Je suppose que vous vous
25 en souvenez vous, n'est-ce pas, Monsieur Doyle ?
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1 R. Je suppose, Monsieur Milosevic, que vous pensez à la date du retour du
2 président Izetbegovic des pourparlers à Lisbonne ?
3 Q. Voilà ce qu'en dit le général MacKenzie. A vous de me dire si c'est
4 avec exactitude qu'il le fait ou à moins que ce ne soit une impression qu'y
5 est la mienne que votre approche est différente. "Le 3 de ce mois-ci, le
6 vice-président, Ejub Ganic, est venu dans mon bureau pour me rencontrer moi
7 et Colm Doyle." Donc Ganic vous a rencontré, vous et MacKenzie également.
8 Ganic a expliqué que le président Izetbegovic a été kidnappé à l'aéroport
9 de Sarajevo lors de son retour de Lisbonne et que la JNA le retenait en
10 détention dans sa caserne de Lukavica, à l'est du Tarmac [sic]. Ganic a dit
11 que lui n'était pas suffisamment fort et qu'il avait besoin d'un leader,
12 c'est-à-dire, le président de la Défense territoriale de Bosnie."
13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Arrêtez un instant. Laissez le temps au
14 témoin d'apporter un commentaire dans la mesure où il peut le faire suite à
15 ce qu'il vient d'entendre.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Le 3 mai, c'est vrai je me trouvais avec
17 le général MacKenzie. Nous essayons d'obtenir par voie de négociations, la
18 libération de l'otage qu'était le président Izetbegovic. C'était un échange
19 avec le général Kukanjac. Cette négociation s'est faite dans le bureau du
20 général MacKenzie en présence d'un représentant du vice-président Ejub
21 Ganic et du général Aksentijevic.
22 M. MILOSEVIC : [interprétation]
23 Q. Donc Ganic a dit qu'il n'était pas suffisamment en tant que leader et
24 qu'il avait besoin de son président pour mettre sous contrôle les éléments
25 radicaux de la Défense territoriale de Bosnie qui eux échappaient à tout
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1 contrôles et cela très rapidement. Vous vous en souvenez, n'est-ce pas ? Et
2 puis le général MacKenzie dit ensuite les forces de la TO tenaient sous
3 contrôle --
4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. Laissez le
5 temps au témoin de répondre.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Le souvenir que j'ai de ce commentaire fait
7 par M. Ganic est le suivant : Etant donné qu'il était un seul membre de la
8 présidence, il n'était pas à même de signer un accord quelqu'il soit
9 s'agissant de la libération d'un otage à moins que ceci nous soit
10 sanctionné par le président en personne. Une référence est faite ici par
11 vous aux Musulmans radicaux, peut-être qu'il a dit cela mais je ne m'en
12 souviens --
13 M. MILOSEVIC : [interprétation]
14 Q. Donc vous ne pouvez pas vous en souvenir d'après ce que le général
15 MacKenzie a dit. Est-ce que vous vous rappelez peut-être, lorsqu'il dit
16 comme suit ? "Avec Colm Doyle, je me suis rendu donc avec vous dans la
17 caserne de Lukavica pour lui trouver le président avec sa fille et un de
18 ses gardes du corps." Lorsque je suis arrivé, le président Izetbegovic
19 était à parler au téléphone avec le général Kukanjac. Il m'a dit que le
20 général Kukanjac avait accepté des échanges de nous deux. "Est-ce que vous
21 voulez organiser cela pour nous ?" Est-ce que vous en souvenez ?
22 R. Je me souviens du fait que j'ai accompagné le général MacKenzie dans ce
23 véhicule blindé à la caserne de Lukavica. Arriver sur place, le général
24 MacKenzie est allé lui rencontrer le président. Moi, je suis resté à
25 l'extérieur pendant environ deux heures. Une fois ce temps écoulé, le
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1 général MacKenzie m'a demandé d'entrer, de rencontrer le président pour
2 essayer de le persuader de procéder à l'échange tel que nous en étions
3 convenus au départ. Mais je ne me suis pas trouvé dans le bureau, au moment
4 où le général MacKenzie a rencontré le président. Moi, j'étais à
5 l'extérieur. Il y a un reportage télévisé qui était fait à ce moment-là qui
6 le prouve.
7 Q. Bien, Monsieur Doyle. Est-ce que vous saviez que des forces de la
8 Défense territoriale, par conséquent forces musulmanes, avaient mis sur le
9 siège l'appartement du général Kukanjac en dehors de la ville, n'est-ce pas
10 ?
11 R. C'est exact.
12 Q. Le général MacKenzie dit que par la suite une évacuation du général
13 Kukanjac a été obtenue, de même que l'ensemble de son personnel, soit un
14 effectif de 400 personnes, contre un échange contre le président. Doyle
15 devait rester avec le garde du corps du président à Lukavica pendant que je
16 devais me rendre avec la fille du président pour mettre au point les
17 détails de l'échange, n'est-ce
18 pas ?
19 R. Oui, j'en conviens.
20 Q. Et maintenant, ces événements pour lesquels je crois que vous avez a eu
21 écho, et que vous devez tout de même été obligé de vous informer de tout.
22 Vous dites nous sommes partis en convoi, et vus sur le haut des hauteurs
23 surplombant vers Sarajevo, nous avons pu nous rendre compte du fait que la
24 ville était un théâtre de bataille âpre. Et à mesure qu'on s'approchait du
25 centre ville, nous avons pu rencontrer des transports de troupes, et chars
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1 dévastés. Nous avons vu beaucoup de cadavres. Je n'ai jamais pu voir une
2 telle scène qui explique toute la bêtise de la guerre. Une fois arrivée à
3 l'état major de Kukanjac, au quartier général de Kukanjac, les détails
4 concernant les échanges ont été mis au point. Le temps venu, ainsi que
5 prévu, il nous a été dit que toute rencontre a été ajournée, annulée. Le
6 président nous a dit qu'il a fallu poursuivre la route ainsi avec le
7 président et avec sa fille. Nous étions montés dans un des transports de
8 troupes. Une fois partie, notre convoi est tombé dans une embuscade dressée
9 par la Défense territoriale. Pendant un échange de feu, de plusieurs
10 officiers, de six à sept officiers de la JNA ont été tués avec sang froid.
11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Un instant. Il est impossible de demander
12 à ce témoin d'apporter un commentaire sur la totalité de ce que vous nous
13 dites. Prenez-le par petit morceau chacun à la fois.
14 Avez-vous quelque chose à dire, Monsieur le Témoin ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Ce que j'aimerais dire ici, c'est ceci :
16 M. Milosevic l'a lui même dit, au moment il a été décidé de déplacer le
17 président, moi je suis resté à Lukavica. Je ne l'ai pas fait de façon
18 spontanée, de mon plein gré. Disons que j'étais gardé au cas où il se
19 passerait quelque chose. C'est parce qu'on avait procédé à la négociation
20 de libération du président. On essayait de faire sortir le président, et
21 l'officier le plus haut gradé à Lukavica m'a dit en se tournant vers moi,
22 "Voilà, vous n'avez négocié que la libération du président. Ceci n'inclus
23 pas la fille du président ni les personnes chargées de sa sécurité." J'ai
24 élevé une protestation énergique et nous sommes arrivés à un compromis
25 selon lequel je devais rester à Lukavica. Par conséquent, tous les
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1 événements qui s'ensuivirent, dont celui du convoi, sont des choses qui se
2 sont passées sans que j'en sois témoin. J'ai vu ce qui s'est passé à la
3 télévision. Je sais que certains des rapports sont parvenus à Lukavica,
4 mais il y avait eu des exagérations extraordinaires de la part des
5 officiels de la JNA parce qu'on m'a fait sortir et on m'avait placé un
6 pistolet sur la tempe; c'était un officier supérieur qui me l'a fait.
7 Heureusement, j'étais en contact avec un membre de l'ECMM. J'avais un
8 portable et il m'a dit que les choses étaient très exagérées. Cependant, je
9 suis d'accord avec M. Milosevic lorsqu'il dit qu'il y a une embuscade dans
10 laquelle est tombé le convoi, qu'il y avait eu des tirs dirigés vers
11 certains des officiels de la JNA, et que certains membres de la JNA avaient
12 été capturés. Moi, je devais jusqu'à la fin de cette opération, rester là
13 pour assurer la réalisation de l'accord, essayer de tout faire pour que les
14 soldats soient ensuite libérés. Ce qui s'est passé, je ne suis pas en
15 mesure de vous donner une version définitive de ce qui s'est passé dans le
16 convoi, puisqu'à ce moment-là moi je me trouvais à la caserne de Lukavica.
17 M. MILOSEVIC : [interprétation]
18 Q. Bien. Vous m'avez dit avoir entendu que des officiers ont été arrêtés,
19 MacKenzie a dit que de six à sept officiers de la JNA ont été tués, et cela
20 de sang froid, alors qu'environ 200 soldats de troupes ont été capturés,
21 c'est ce que MacKenzie a dit. Ceci a été connu de vous. Vous avez dû
22 prendre connaissance de cela, je suppose ?
23 R. Je viens de vous dire que j'étais d'accord là-dessus. Il y a eu
24 effectivement morts d'officiers de la JNA. Il y a eu une embuscade et des
25 soldats ont été faits prisonniers, ont été capturés. Il n'y a pas de
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1 contestation à ce propos.
2 Q. Bien. Est-il vrai ce que nous lisons, dit par le général MacKenzie :
3 "En date du 5 mai," lui parle de la venue de Marrack Goulding, un des
4 premiers remplacements du secrétaire général chargé des questions
5 politiques qui lui s'est rendues à Pale ?
6 Il dit que la Communauté européenne a refusé de faire entrer dans les
7 négociations portant la paix des Serbes de Bosnie. Ceci devait avoir un
8 certain sens diplomatique pour eux, mais pour un simple soldat ceci était
9 plutôt saugrenu de ne pas avoir une des parties belligérantes des plus
10 importantes dans ces négociations de paix. Ma question est la suivante :
11 Pourquoi avez-vous exclu les Serbes de Bosnie de ces négociations portant
12 sur le cessez-le-feu ? Pourquoi cette approche discriminatoire étant donné
13 l'ensemble des événements survenus ?
14 R. En vertu de cet accord qu'il fallait négocier, au moment de la
15 libération du président, et le général Kukanjac avait levé le cordon qui
16 avait été établi tout autour de la caserne, le président et le général
17 devaient être amenés au bâtiment, plus exactement des PTT, qui était à ce
18 moment-là, le QG des Nations Unies à Sarajevo. Et moi, je devais présider
19 aux négociations afin d'obtenir la poursuite du cessez-le-feu. Après les
20 événements concernant le convoi, tout ceci a changé. J'ai arrangé une
21 réunion de tous les partis au QG des Nations Unies afin que de négocier à
22 un cessez-le-feu. La délégation serbe a refusé de venir à ce bâtiment parce
23 qu'elle ne se sent pas en sécurité, a-t-elle dit. Donc moi, j'ai poursuivi
24 les négociations avec toutes les parties prêtes à se déplacer, dont M.
25 Abdic, Stjepan Kljujic , un représentant des Nations Unies, et un autre
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1 général. Et à ce moment-là, les Serbes n'ont pas voulu venir au bâtiment
2 des PTT.
3 Q. Je n'en suis pas à parler maintenant d'aspect technique. Je parle de ce
4 que le général MacKenzie a dit : La Communauté européenne a refusé
5 d'incorporer dans ces négociations portant sur la paix des Serbes de Bosnie
6 --
7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Fort bien. Et bien, posons la question au
8 témoin afin qu'il puisse répondre. Ce que vous soumet l'accusé, Monsieur le
9 Témoin, c'est que la Communauté européenne a refusé d'inclure les Serbes de
10 Bosnie dans ces négociations en vu d'un cessez-le-feu. Je pense que vous
11 avez expliqué la genèse de tout ceci, puisqu'ici, il est affirmé que la
12 Communauté européenne a refusé d'inclure les Serbes de Bosnie. Je dois vous
13 demander si c'est exact ou pas.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ce n'est pas exact, Monsieur le
15 Président.
16 Permettez-moi d'ajouter ceci. J'étais le représentant pour la conférence de
17 la Paix. Je ne représentais pas la Communauté européenne; cependant, il n'y
18 a pas eu de refus catégorique d'assister. On nous a dit que les Serbes de
19 Bosnie ne pouvaient pas venir parce qu'ils s'inquiétaient de leur sécurité
20 à ce moment-là. Sarajevo était un lieu dangereux.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Juste une toute petite remarque pour corriger
22 ce que vous venez de dire. Ce n'est pas moi qui l'avais dit. Je ne faisais
23 que citer les paroles de Gerald MacKenzie où il a dit littéralement, la
24 Communauté européenne a refusé de faire inclure dans les négociations et
25 suit le texte --
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1 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous avons reçu le message, mais ce que
2 le général dit dans sa déclaration n'est pas nécessairement une pièce à
3 conviction -- un élément du dossier et c'est ce que vous, vous soumettez au
4 dossier. Mais enfin, poursuivez.
5 M. MILOSEVIC : [interprétation]
6 Q. Donc, quant à vous, vous dites que ce qui a été dit par le général
7 MacKenzie n'était pas exact, n'est-ce pas, Monsieur Doyle ?
8 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Là vous faites un commentaire.
9 M. MILOSEVIC : [interprétation]
10 Q. Avez-vous une connaissance quelconque de ce qui a été dit par le
11 général MacKenzie en date du 6 mai ?
12 "J'ai passé toute la journée avec M. Goulding. Je lui ai fait rapport,
13 après quoi nous nous sommes rendus en ville pour faire un tour de la ville
14 avec le président Izetbegovic. Nous avons été exposé à des coups de feu
15 modérés en plein centre-ville de Musulmans. Des indices forts font croire
16 qu'il ne s'agit qu'un spectacle à l'intention de représentants de médias
17 qui, eux, nous accompagnaient, et cela pour présenter les Serbes sous un
18 mauvais jour. Les feux émanaient d'une direction d'environ de 75 mètres de
19 nous et cela à partir du territoire se trouvant sous contrôle des Bosniens.
20 A la fin, Budding a donné une conférence de presse. Nous avons senti comme
21 nécessaire de condamner l'attaque par la Défense territoriale contre la
22 JNA."
23 Est-ce que vous vous en souvenez ? Est-ce que vous rappelez ce spectacle
24 qui devait servir à culpabiliser les Serbes et les incriminer au centre-
25 ville. Comme quoi tout ce feu ne servait que tout simplement pour animer
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1 les représentants des médias. Est-ce que vous en savez quoi que ce soit
2 pour ce qui est de cette pratique empruntée souvent pour faire une espèce
3 de théâtre de la part des forces musulmanes, et cela à l'intention des
4 médias et à l'intention de la Communauté internationale ? Tout court.
5 R. Mon journal montre que toute la journée du 6 mai, le 7 mai et le 8 mai,
6 je me trouvais au bâtiment des PTT. J'essayais de négocier le retrait de
7 l'armée fédérale de la totalité de la Yougoslavie. Je ne savais pas du tout
8 ce qui se passait en ville.
9 Q. Soit. Donc, parlant de certaines choses, vous ne faites que vous
10 limiter à des choses que vous avez cru voir alors qu'en principe, vous avez
11 été chef de la mission des observateurs en Bosnie-Herzégovine ?
12 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Mais cette question n'est pas bien poser.
13 Je ne vois pas sur quoi vous fondez cette critique. Qu'est-ce que vous
14 voulez dire ? A quoi faites-vous référence ?
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Et bien, cela dit, Monsieur May, je voulais
16 dire qu'il était logique de s'attendre à ce qu'un chef de la mission
17 d'observateurs puisse avoir des informations, qui parle de mission
18 d'observateurs, parle de l'ensemble de la Bosnie-Herzégovine.
19 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Et bien. Posez une question à ce propos
20 au témoin.
21 Même si vous étiez ce jour-là au bâtiment des PTT, mon colonel, avez-vous
22 reçu des informations s'agissant de ce qui se passait à l'extérieur et, en
23 particulier, cette attaque qui se serait produite et dont a parlé
24 l'accusé ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Permettez-moi de corriger une chose, Monsieur
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1 Milosevic. A ce moment-là, je n'étais pas chef de ECMM. Je travaillais en
2 tant que représentant personnel de Lord Carrington, je travaillais seul,
3 mais je sais que ce jour-là, j'étais au courant du fait que le général
4 MacKenzie accompagnait le président dans le centre-ville de Sarajevo. Ceci
5 dit, ceci mis à part, je ne sais pas ce qui se passait d'autre.
6 M. MILOSEVIC : [interprétation]
7 Q. Bien, Monsieur Doyle.
8 Et "Après plusieurs jours," est-ce vrai de dire que "le 11 mai," ainsi que
9 nous pouvons le lire dans le rapport de la déclaration du général MacKenzie
10 qui s'agit de la page 00124 [sic], déclaration du général MacKenzie --
11 "Depuis plusieurs jours, la Communauté européenne entame des négociations
12 marathons. La Communauté européenne voulait exclure les Serbes de Bosnie de
13 ces négociations. Par conséquent, ces gens-là sont devenus de moins en
14 moins bien vus par les Serbes. Entre-temps, les Serbes de Bosnie, avec le
15 Dr Radovan Karadzic à leur chef, étaient de plus en plus indépendants de la
16 JNA. Même des rapports indiquent des attaques lancées par des Serbes de
17 Bosnie contre la JNA lorsqu'il y a eu une tentative d'obtenir les armes par
18 le JNA et cela, notamment, pour pouvoir sortir, sans problème de la
19 Bosnie."
20 Est-ce que vous en savez quelque chose là-dessus, Monsieur Doyle, pour ce
21 qui est des propos du général MacKenzie ?
22 R. Je n'ai aucune connaissance de cette information dans la bouche du
23 général MacKenzie et, en tout cas, je ne suis pas au courant de ce
24 commentaire que vous formulez, à savoir que nous avons essayé d'exclure les
25 Serbes de Bosnie. En effet, ceci me semble tout à fait inexact --
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1 incorrect.
2 Q. D'accord. Mais lui, quant à lui, il dit que vous continuiez de les
3 exclure de toutes ces négociations. Dans le fragment qui suit, nous lisons
4 :
5 "Au cours de l'après-midi, M. Colm Doyle nous a rendu visite, représentant
6 de la Communauté européenne. Il était venu de concert avec Santos. Colm
7 nous a dit que les Serbes de Bosnie étaient une menace pour lui et ses
8 collègues et que ces négociations ne menaient à rien de bon."
9 Par conséquent, le général MacKenzie dit, lui aussi, que vous excluiez des
10 Serbes de toute négociation alors que vous parlez d'eux pour dire que comme
11 quoi les négociations avec eux ne menaient à rien et qu'ils étaient plutôt
12 une menace contre vous. Est-ce exact, Monsieur Doyle, ou pas ?
13 R. Je ne sais absolument rien de cette déclaration.
14 Q. Bien. Je dois sauter quelques-unes des questions.
15 Monsieur MacKenzie -- le général MacKenzie parle de blocus de la caserne
16 maréchal Tito en plein centre de Sarajevo pour dire que les forces de la TO
17 bosniennes, pendant des mois, ont bloqué la caserne. Toutes les fois où les
18 forces de la TO, moyennant un sniper aurait tué quelqu'un de la caserne,
19 c'est de la base de Lukavica que les Serbes ripostaient par un feu
20 d'artillerie. Donc eux ne faisaient que riposter, riposter à des meurtres.
21 Il s'agissait d'assassinats exécutés par des forces musulmanes qui ont
22 imposé un blocus de la caserne. Est-ce vrai ou pas ?
23 R. C'est la première fois que j'entends faire une référence au fait que
24 cette caserne n'aurait été assiégée pendant des mois. C'est impossible.
25 Moi, je me suis trouvé dans cette même caserne quelques semaines avant le
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1 début de ce siège. Alors dire qu'il y a eu un siège de plusieurs mois, ce
2 n'est pas exact. Si je me souviens bien, il se
3 -- qu'il y ait siège. Et quand je parle de siège, ça veut dire que la
4 caserne était encerclée et que personne n'était entré dans cette caserne.
5 Et ça a duré à mon avis, environ deux jours.
6 Ce que dit le général MacKenzie, c'est son avis. Je ne suis pas en mesure
7 de vérifier si c'est vrai. En effet, lui travaillait avec les Nation Unies,
8 et moi je travaillais pour la conférence de la Paix. Je ne peux pas vous
9 faire de commentaire tant qu'aux propos éventuels du général MacKenzie, car
10 je ne peux pas vérifier ses commentaires dans un sens ni dans un autre.
11 Q. Donc, vous n'avez pas une idée là-dessus pour savoir, par exemple, que
12 ces gens-là ne faisaient que riposter à des assassinats qui ont été l'œuvre
13 des snipers qui, eux, imposaient le siège de la caserne. Ce dont parle le
14 général MacKenzie, vous n'en savez rien quant à vous ?
15 R. Tout ce que je peux vous dire à ce stade, c'est que je savais qu'il y
16 avait un conflit qui se produisait dans le centre de Sarajevo, et là il
17 faut qu'il y ait plusieurs parties belligérantes, mais je ne peux pas vous
18 doter de commentaires sur tel ou tel incident. Mais je suis un militaire et
19 je sais que, quand il y a conflit, il y a participation de toutes les
20 parties au conflit.
21 Q. Et pour ce qui est de cette constatation du général MacKenzie, était-
22 elle exacte ou pas :
23 "En effectif d'après leur nombre, les Serbes étaient moins nombreux,
24 faibles par rapport aux forces de la Défense territoriale, les fantassins
25 de la force territoriale nombreux et bien entraînés. Ils étaient plutôt en
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1 proie à la peur d'être écrasés par les Bérets verts, qui, eux, étaient
2 beaucoup plus nombreux. Par conséquent, ils étaient obligés de les
3 combattre de loin."
4 Est-ce exact ?
5 R. Je ne sais rien à son propos. Et je n'ai pas de commentaire à faire.
6 Q. Bon. Essayons de vous poser des questions au sujet des rencontres de
7 Nambiar et de MacKenzie. Je vois que, d'ailleurs vous n'y étiez pas
8 présent.
9 MacKenzie dit :
10 "Les forces de la TO, tout comme les Serbes, représentaient un obstacle
11 également important pour essayer de mettre fin à cette effusion de sang."
12 Etait-ce bien une impression que vous auriez partager ou que vous auriez su
13 partager ou pas ?
14 R. Je pense que j'ai passé suffisamment de temps dans cette ville où j'ai
15 travaillé pour dire que ça valait pour toutes les parties, tant qu'il y a
16 poursuite d'un conflit, tant que des personnes sont tuées. C'est vrai, moi,
17 en tant que représentant de la conférence de la Paix, je voulais négocier à
18 cesser le feu afin de mettre fin à ces décès -- à ces morts. Mais qui était
19 est intervenu, qui a fait quoi que ce soit, ceci ou cela, impossible de
20 vous fournir un commentaire.
21 Q. Bien. Vous n'avez pas de commentaire à faire là-dessus. Mais est-ce
22 exact cette assertion du général MacKenzie ? "Il n'y avait pas de doute
23 qu'il s'agissait là d'un échange de feu généralisé." Etait-ce bien votre
24 impression à vous ?
25 R. Je ne comprends pas la question que vous posez. Vous dites qu'il ne
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1 fait l'ombre d'un doute qu'il y a eu des échanges de feu, de tirs
2 généralisés. Pourriez-vous préciser votre pensée ?
3 Q. Et bien, le général MacKenzie, quant à lui, dit que "le cessez-le-feu
4 en date du 17 juin avait échoué," et que, par la suite, il dit, parlant
5 d'observateurs, il parle de John Wilson et d'autres qui étaient sur le toit
6 du bâtiment et qui étaient sous leur contrôle, pour pouvoir constater par
7 qui le feu était ouvert, d'où, et cetera.
8 "Rarement, les parties belligérantes étaient prêtes à reconnaître que des
9 actions et opérations étaient faites à l'aéroport et dans la vieille ville.
10 On pouvait se rendre compte de reflet qu'il y témoignait d'importants
11 incendies. A chaque dix minutes, on pouvait entendre des obus qui
12 atterrissaient des deux côtés. Par conséquent, il n'y avait pas de doute --
13 aucun doute qu'il s'agissait d'un échange de feu généralisé."
14 Je vous ai donné lecture de l'ensemble du fragment du rapport du général
15 MacKenzie. Par conséquent, est-ce que, quant à vous, vous pouvez dire que
16 les Serbes auraient attaqué des Musulmans ? Est-ce que vous allez
17 poursuivre de telles assertions ou est-ce que plutôt vous seriez prêt à
18 dire qu'il s'agissait d'un conflit notamment provoqué par des Musulmans, à
19 commencer par cet assassinat de quelqu'un en plein centre ville de
20 Sarajevo, et cetera --
21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Rien n'a été établi. Il est certain que
22 nous pourrons rétablir ces éléments de preuve en temps utile, mais ne vous
23 livrez pas à ce genre de généralisation. Quelle est votre question
24 suivante ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Permettez-moi d'intervenir. Lorsque M.
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1 Milosevic parle du 17 juin et de la présence des d'observateurs dans le
2 bâtiment, toute l'équipe des -- de la CNM a été retirée de Sarajevo le 12
3 juin, et à été envoyée à Split en Croatie. Moi, j'ai été évacué de la ville
4 de Sarajevo le 12 juin. J'ai été amené à Belgrade et, 24 heures plus tard,
5 je me trouvais à Londres. Donc, quand vous parlez du 17 juin, je n'étais
6 pas dans le pays, pas plus que ne l'étaient les observateurs. Il y avait
7 peut-être des observateurs militaires des Nations Unies sur place, mais
8 ceci ne faisait pas partie de mon mandat, la question des Nations Unies.
9 M. MILOSEVIC : [interprétation]
10 Q. Bien. Je crois qu'avec pas mal de détails, il me semble, nous sont
11 passés outre. Cet événement, l'événement survenu du
12 2 ou 3 mai, il s'agissait notamment de cette attaque contre le convoi. Le
13 tout étant lié à l'échange d'Izetbegovic et des gens de son quartier
14 général. Et pour ce qui est de l'assertion du général Nambiar, le
15 commandant en chef des forces en présences dans
16 l'ex-Yougoslavie, était-il exact qu'il s'agit de 009638, pour ce qui est de
17 l'ERN de cette page ? Le général Nambiar, dit lui :
18 "Le pilonnage commençait en général -- a commencé en général après
19 l'événement du 3 mai. Avant le 3 mai, il n'y a pas eu d'attaque dans
20 Sarajevo parce que la JNA s'y trouvait toujours. Des coups de feu ont été
21 ouverts à l'encontre des troupes en ville. Il s'agissait de scènes,
22 d'ailleurs, déjà connues et banales en ville."
23 Par conséquent, Monsieur Doyle, peut-on dire qu'il était bien visible et
24 évident, patent comme fait à l'origine du conflit en escalade pour parler
25 de cet événement-là, l'attaque contre le convoi, assassinat de gens, mise
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1 en captivité de plus de 200 troupes, et cetera, le tout fait par des forces
2 extrémistes de la force musulmane ?
3 Le général Nambiar, quant à lui, il a dit que le tout suit après la date du
4 3 mai. Est-ce exact ou pas ?
5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il faut que vous posiez une question.
6 Oui, mon colonel, êtes-vous à même de répondre à ce qu'aurait dit le
7 général dans sa déclaration ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas commenté sur les dires du général
9 puisque je ne sais pas ce qu'il a dit. Mais mon expérience me montre
10 qu'après le 3 mai, il y a eu escalade du conflit. C'est évidemment ce jour-
11 là que le président était libéré, mais c'est aussi le jour où le général
12 Kukanjac de la JNA était libérée. A son retour à Lukavica, il a fait
13 comprendre qu'il allait s'occuper de Sarajevo de la manière qui lui
14 semblait exacte et nous savions, à ce moment-là, qu'il pouvait parfaitement
15 prendre des mesures contre la ville parce qu'il avait été gardé en
16 captivité dans son propre QG, ce qui est très gênant pour lui. Apparemment,
17 il y a eu intensification du conflit après cet incident, mais je ne suis
18 pas en mesure de vous dire qui est la partie ou la personne responsable de
19 cette intensification du conflit.
20 M. MILOSEVIC : [interprétation]
21 Q. Monsieur Doyle, qui a attaqué la colonne de militaires qui a tué avec
22 sang froid, comme l'a dit le général MacKenzie, tous ces officiers ? Qui a
23 provoqué cette infusion de sang ? Qui a capturé 200 --
24 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ce que le témoin a dit c'est qu'il n'est
25 pas à même de vous dire qui a provoqué l'intensification du conflit. C'est
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1 ce qu'il a dit. S'il n'est pas à même d'apporter un commentaire, il ne sert
2 à rien de lui poser davantage de questions à ce propos.
3 M. MILOSEVIC : [interprétation]
4 Q. Le général Nambiar a dit :
5 "L'ensemble de cet incident a commencé par cette embuscade adressé contre
6 le convoi de la JNA en date du 3 mai. Tout cela a été vu par mes propres
7 troupes, mes soldats."
8 C'est ce qu'il dit, lui. Ce qui a dû être vu par les troupes du général
9 Nambiar qui était le commandant en chef des forces de l'ONU me semble être
10 véridique à moins que ce ne soit inexact d'après vous, Monsieur Doyle ?
11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui. Libre à vous d'appeler à la barre,
12 en temps utile, le général Nambiar. Inutile de poser à ce témoin une
13 question à propos de ce qu'aurait vu le général Nambiar.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne lui demande pas au sujet de ce qui a été
15 dit par le général Nambiar, mais tout simplement en faisant une citation de
16 propos du général Nambiar. Je voulais savoir si lui en avait une
17 information sur cela parce que lui et le général Nambiar, avec leurs
18 soldats, s'y trouvaient, mais pas moi. Or, je n'ai qu'à regarder ce qui a
19 été dit par le général Nambiar.
20 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ce que vous faites et ce que vous faites
21 souvent c'est pour polémiquer avec le témoin pour essayer d'obtenir de lui
22 qu'il dise quelque chose qui ne lui est pas possible de dire. Il ne peut
23 pas dire plus que ce qu'il a dit dans sa déposition. Il ne sert vraiment
24 pas à grand-chose de polémiquer afin de vous faire valoir pour que vous
25 fassiez valoir votre argument. Vous n'avez plus que 20 minutes à votre
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1 disposition. Je vous le rappelle. Il y a peut-être d'autres sujets que vous
2 voulez aborder avec ce témoin. Vous auriez intérêt à le faire rapidement.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Certainement. Sans doute, Monsieur May.
4 M. MILOSEVIC : [interprétation]
5 Q. Mais permettez-moi de préciser encore un autre fait là-dessus, Monsieur
6 Doyle. Ce que Nambiar a dit au sujet de la retenue d'Izetbegovic me semble
7 différer quelque peu de ce qui a été dit par vous. Or, je voudrais vous
8 demander d'en faire un commentaire. Lui dit que :
9 "Lorsque le 2 mai 1992, il était de retour --" -- il lui parle
10 d'Izetbegovic -- "-- il n'a pas informé nous ou qui que ce soit d'autre de
11 sa venue. Une fois venue, les Serbes l'ont emmené et ont informé Colm
12 Doyle, préposé aux négociations au nom de la Communauté européenne, du fait
13 qu'Izetbegovic était leur invité." Etait-ce bien vrai ou pas ?
14 R. Les dispositifs mis en place à l'intention du président Izetbegovic
15 étaient les suivants : au moment où la présidence allait me faire savoir
16 qu'il revenait en ville, je devais assurer une escorte des Nations Unies.
17 Ce matin-là, il y avait d'âpres combats qui se déroulaient dans la ville.
18 J'étais très occupé. En plein milieu, j'ai reçu un appel téléphonique,
19 apparemment émanant de la présidence. On m'informait du fait que de la
20 recrudescence des combats dans la ville, le président Izetbegovic n'allait
21 pas revenir à Sarajevo ce jour-là. Plus tard, j'ai appris que cet appel
22 téléphonique ne venait pas de la présidence, mais venait d'une autre source
23 qui voulait, manifestement, que je veille à ce qu'il n'y ait pas d'escorte
24 des Nations Unies pour le président. En effet, au moment où j'ai reçu ce
25 premier appel téléphonique, j'ai dit au Nations Unies qu'il ne fallait plus
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1 cette escorte puisque le président ne rentrait pas, mais je m'étais trompé
2 se faisant. Le président est bien rentré ce jour-là et a été placé en
3 détention à l'aéroport. Plus tard, il devait être emmené à la caserne de
4 Lukavica. Tout ce que je peux supposer c'est que ce n'est pas la présidence
5 qui m'a fait savoir par téléphone qu'il n'allait pas rentrer ce jour-là.
6 Q. Le général Nambiar dit, lui, que l'autre n'avait informé personne de
7 son retour. Cela me semble différer un petit peu de ce que vous dites.
8 R. Je ne peux pas faire de commentaires sur les dires du général Nambiar.
9 Je ne peux vous faire part que de ce que je sais des événements en ce qui
10 me concerne.
11 Q. Bien, Monsieur Doyle. D'une manière générale, le rôle de la Communauté
12 européenne dont vous fûtes le représentant, comment se présentait-il ?
13 Etant donné le fait que vous vous trouviez en mission qui s'appelait
14 officiellement Mission d'observation de la Communauté européenne en
15 Yougoslavie, c'est ainsi qu'on l'appelait, est-ce que vous, en tant que
16 tel, vous saviez que le parlement européen, organe de la communauté, le 9
17 juillet 1991, a soutenu une résolution sur la Yougoslavie, laquelle
18 résolution n'acceptait aucun acte de sécession en Yougoslavie. Est-ce que
19 vous en saviez quelque chose ?
20 R. A ce moment-là, au mois de juillet 1991, j'étais encore officier des
21 forces de Défense irlandaise. Je n'avais aucune participation aux activités
22 de la Communauté européenne. Je n'ai donc aucune connaissance par rapport à
23 ce dont vous faites référence.
24 Q. Oui, Monsieur Doyle, mais puisque vous vous rendiez en mission
25 d'observation en Yougoslavie, c'est ainsi que s'intitulait cette mission
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1 pour représenter la Communauté européenne. Est-ce que vous avez dû prendre
2 connaissance des attitudes ou de principes de la Communauté européenne à
3 l'égard du pays de la Yougoslavie vers lequel pays vous devez être envoyé ?
4 Ou peut-être personne ne vous a avisé de quoi que ce soit pour vous
5 informer de quoi que ce soit ?
6 R. J'ai reçu un briefing habituel dans mon propre QG par rapport à la
7 situation qui se présentait à ce moment-là en ex-Yougoslavie, mais ce
8 briefing -- cette séance d'informations ne concernait pas du tout le sujet
9 que vous vous avez mentionné.
10 Q. Donc personne ne vous a rien dit au sujet de l'attitude du parlement
11 européen au sujet de la crise en Yougoslavie. Si personne ne vous a parlé
12 de l'attitude du parlement de Strasbourg, vous a-t-on dit que le conseil
13 des Ministres de la Communauté européenne et le conseil de l'Europe, les
14 deux instances de la Communauté européenne, avaient soutenu l'intégrité
15 territoriale de la RSFY et qu'une déclaration sur la Yougoslavie de la
16 Communauté européenne a été publié pour savoir que la Yougoslavie avait les
17 meilleures chances pour s'intégrer dans l'Europe nouvelle. La déclaration
18 de la Communauté européenne sur la Yougoslavie vous a-t-elle été connu,
19 vous qui étiez représentant de la Communauté européenne qui devait se
20 rendre dans ce pays.
21 R. De façon générale, je savais qu'à l'époque, on dit que les intérêts de
22 la Yougoslavie seraient mieux défendus si c'était encore une fédération de
23 républiques, mais je ne connais pas les détails exacts. J'avais une
24 compréhension générale de la situation sans en connaître le détail.
25 Q. Avez-vous eu connaissance du fait que le conseil des Ministres de la
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1 OSCE, c'est-à-dire, à cette époque-là, qu'on appelait la OSCE, à sa
2 rencontre de Berlin, a adopté une déclaration pour soutenir l'intégrité
3 territoriale et l'unité de la Yougoslavie. Il s'agissait du mois de juin
4 1991.
5 R. Non, je ne suis pas au courant.
6 Q. Saviez-vous que le secrétaire d'état des Etats-Unis d'Amérique, James
7 Baker, à la fin de sa visite en Yougoslavie, fin juin 1991, a dit que l'USA
8 soutenaient l'intégrité de la Yougoslavie démocratique et que l'avenir de
9 ce pays devait être recherché moyennant un accord et que l'USA ne devait
10 pas reconnaître aucun acte unilatéral portant sécession ? Le saviez-vous ?
11 R. Oui, je connais la teneur de la déclaration faite par James Baker.
12 Q. Connaissiez-vous des déclarations de Carrington, de Cyrus Vance ou de
13 toute une série d'hommes politiques qui, dans leurs déclarations, disaient
14 qu'une reconnaissance prématurée de ces républiques ne faisait que saper le
15 processus de paix en Yougoslavie. Il ne s'agit pas de parler d'un processus
16 de paix, mais politique, en Yougoslavie parce que la paix y régnait déjà
17 dans ce pays encore.
18 R. Oui, je suis au courant de ce qu'a dit Lord Carrington lors de cette
19 réunion de la conférence de la Paix à Berlin. Il a dit que, s'il y avait
20 reconnaissance prématurée de la république, ceci n'allait pas favoriser la
21 situation qu'il essayait de régler en Bosnie. Je connaissais la situation
22 de façon générale sans en connaître le détail.
23 Q. Bien, puisque vous savez tout cela, je vous en prie, vous connaissiez
24 toutes ces attitudes et vues de l'USA, de l'OSCE, de la Communauté
25 européenne -- de l'Europe unie, quelle était l'explication donnée par vous,
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1 qui était chef d'une mission de la Communauté européenne, au sujet de ce
2 qui semble être tout à fait contraire à ce qui était le traitement général
3 de la crise en Yougoslavie, ces différentes reconnaissances, et cetera ?
4 Vous a-t-on donné une explication du fait quelconque ?
5 R. On ne m'a donné aucune explication et je n'en ai pas demandé non plus.
6 Q. Mais estimez-vous que le fait de se déclarer favorable au soutien et à
7 la poursuite de l'existence d'un état et d'un autre côté, n'estimez-vous
8 pas que cela est un peu hypocrite ?
9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Non, non, ce n'est pas une question
10 opportune.
11 M. MILOSEVIC : [interprétation]
12 Q. Monsieur Doyle, dans votre déclaration, vous ne parlez que du fait que
13 les Serbes commencent à s'armer. En page 3, vous dites :
14 "La Communauté européenne a commencé à se rendre compte qu'une partie de la
15 population à savoir les Serbes commençaient à s'armer."
16 Mais étiez-vous au courant du fait que les Musulmans étaient en train de
17 s'armer ? Puisque vous ne dites pas un mot de cela. Vous étiez observateur
18 européen sur place, donc vous pouviez voir ce qui était en train de se
19 passer.
20 R. Pendant la période où je dirigeais la Mission des observateurs
21 européens et avant cela, j'avais été membre de la mission à Banja Luka. Je
22 suis allé à Doboj, Teslic, Maglaj, Derventa et d'autres endroits et dans
23 toutes ces localités, nous avons eu des rencontres avec les dirigeants
24 serbes, les dirigeants musulmans, les dirigeants croates. Dans la plupart
25 des cas, les membres de la mission se sont rendus compte que c'était la
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1 communauté serbe qui était en train de s'armer principalement à l'aide
2 d'armes qui provenaient de la JNA. Ceci se passait parce que le président
3 Izetbegovic a déclaré qu'il n'y aurait pas d'appel à la mobilisation des
4 citoyens de Bosnie, donc la plupart des Musulmans et des Croates ne se sont
5 pas présentés à la mobilisation alors que les Serbes l'ont fait. Et comme
6 les Serbes étaient mobilisés, ce qui signifiait qu'ils allaient passer deux
7 mois à faire un service militaire dans les rangs de la JNA, ils ont eu
8 l'autorisation de conserver leurs armes, une fois que leur période de
9 formation dans le cadre de cette mobilisation était achevée. C'est en tout
10 cas ce que les membres de la mission ont compris. La conséquence de cela
11 était tout à fait claire, c'est que les Serbes ont donc pu conserver leurs
12 armes après avoir accompli cette période de classe et que le nombre d'armes
13 présent dans la population serbe allait donc croître et c'est un élément
14 que nous avons constaté de plus en plus fréquemment dans les différentes
15 municipalités visitées par les membres de la mission à l'époque.
16 Q. Donc, le fait que les Croates et les Musulmans s'armaient ne vous
17 intéressaient pas. Vous n'aviez aucune connaissance à ce sujet ?
18 R. Je n'ai aucune connaissance à ce sujet, mais je ne dis pas que cela ne
19 m'intéressait pas. Bien entendu, il était de mon devoir de remplir dans
20 toute son amplitude le rôle assigné à la mission, à savoir, observer ce qui
21 se passait et rendre compte. Et ceci a fait l'objet d'un rapport.
22 Q. Je n'ai remarqué nulle part dans votre déclaration que vous ayez fait
23 la moindre mention des autres parties au conflit, mais peut-être ai-je raté
24 quelque chose ?
25 R. Cela n'a jamais été une question dans les rapports de la mission
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1 d'observation car les Serbes à l'époque n'ont jamais proféré la moindre
2 allégation quant au fait que les Musulmans ou les Croates étaient en train
3 de s'armer. Les renseignements dont nous disposions à l'époque et ce que
4 nous pouvions voir sur le terrain nous permettaient de penser qu'il serait
5 très difficile pour les Croates et les Musulmans d'obtenir des armes parce
6 qu'ils n'avaient aucun moyen pour se faire. Je ne dis pas qu'ils n'ont pas
7 obtenu des armes de quelque part. Mais nous n'avons aucune preuve de cela
8 et les Serbes ne nous en ont jamais fait état. Mais les Musulmans et les
9 Croates ne cessaient de nous répéter que les Serbes étaient en train de se
10 fournir en armes.
11 Q. Vous dites qu'il n'y a aucune preuve. Et bien, je vous parlerai de Lord
12 Owen qui, comme vous le savez, n'était impliqué dans aucune mission
13 d'observation du processus d'armement ou de quoi que ce soit de ce genre.
14 Comme vous le savez, il était négociateur au nom de la Communauté
15 internationale, négociateur pour la paix et dans son ouvrage intitulé,
16 "l'Odyssée balkanique", en page 146, il dit, et je cite ses propos :
17 "L'image des Musulmans bosniaques totalement sans arme, donc cette image
18 qui a été décrite un peu partout, l'image de Musulmans de Bosnie qui
19 n'aurait eu aucune arme, n'a pas été modifiée même lorsque Alija
20 Izetbegovic a ouvertement reconnu à la télévision que le gouvernement
21 bosniaque avait introduit en fraude dans le pays des armes grâce à des --
22 par des voies secrètes."
23 Et un peu plus loin, il parle de millions de pièces de munitions, de mines,
24 de fusils, et cetera, sans parler d'autres armements confisqués et saisis à
25 la JNA, donc l'image des Musulmans de Bosnie sans arme qui a été diffusée
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1 par les médias pendant toute cette période, et bien même lui, Lord Owen,
2 dit que cette image est fausse. Pensez-vous qu'il dit cela sans le moindre
3 fondement ?
4 R. Je ne ferai pas de commentaire général sur Lord Owen ou sur ce qu'il a
5 pu dire. Je sais qu'il n'était pas dans le pays lorsque je m'y trouvais
6 moi-même, à savoir, en 1991, et je témoigne ici de ce que je savais à
7 l'époque sur la base de mon expérience de présence dans le pays et de
8 tournées, de visites dans un grand nombre de municipalités. Je n'ai aucun
9 commentaire à faire sur les avis de Lord Owen quant à la situation. Je ne
10 suis pas en train de déclarer qu'aucunes armes n'étaient fournies aux
11 Musulmans, et Lord Owen ne dit pas à quel moment exactement ces armes ont
12 été fournies. Je ne sais pas à quoi il fait référence exactement, donc je
13 préférais ne pas commenter ce qui lit dans son ouvrage.
14 Q. Fort bien, Monsieur Doyle, mais nous avons une question précise à
15 aborder ici. Je suppose que la Mission d'observation de la Communauté
16 européenne en Yougoslavie, et vous-même personnellement, avaient été --
17 avaient appris que des groupes croates et musulmans -- et lorsque je dis
18 "croates", je parle de l'armée croate régulière. Par exemple, prenons ce
19 qui s'est passé dans le village de Sijekovac près de Bosanski Brod. L'armée
20 régulière croate y a commis un massacre contre des Serbes désarmés, le 26
21 mars 1992, date à laquelle une douzaine de civils ont été tués, et plus de
22 50 maisons incendiées et détruites. Ces civils étaient des vieillards, des
23 enfants, et cetera. Vous êtes sûrement au courant du fait, en tant que chef
24 de la Mission d'observation en paix dans Yougoslavie, et ceci s'est passé
25 sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine le 26 mars 1992. Est-ce que vous
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1 avez fait rapport à ce sujet ?
2 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Laissez répondre le témoin.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Le 26 mars, j'étais en Irlande. J'avais
4 terminé ma mission en tant que chef de la mission d'observation, donc je
5 n'ai pas de commentaire à faire. Je n'étais pas au courant.
6 M. MILOSEVIC : [interprétation]
7 Q. A quelle date êtes-vous revenu par la suite, Monsieur Doyle ?
8 R. Je suis rentré -- je suis revenu le 10 avril.
9 Q. Donc, 14 jours après le massacre dont je viens de parler dans le
10 secteur de Bosanski Brod, et vous n'avez rien entendu à ce sujet,
11 absolument rien ?
12 R. Lorsque je suis revenu le 10 avril, nous avons immédiatement commencé
13 des négociations avec les dirigeants des partis politiques, comme je le dis
14 dans ma déclaration écrite. J'ai également dit que les membres de l'équipe
15 d'observation étaient éprouvés des difficultés de plus en plus grandes à se
16 rendre sur les lieux où certaines choses étaient éventuellement survenues.
17 Je parle, par exemple, de Zvornik, et il est devenu pratique courante de ne
18 pas transmettre de commentaire sur la base de rumeur, quant à ce qui aurait
19 pu -- quant à ce qui ce serait éventuellement passé, mais dont les membres
20 de la mission n'avaient pas de connaissance de première main. Donc, nous
21 savions que les affrontements, que le conflit était en train de
22 s'intensifier. Je ne ferai pas de référence précise à tel ou tel incident
23 parce que celui dont vous parlez s'est passé pendant que j'étais en
24 Irlande, mais je peux vous dire que nous nous inquiétons beaucoup sur ce
25 qui se passait sur terrain, et que beaucoup d'énergie était dépensée à
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1 cette époque-là par chacun.
2 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous avez deux minutes encore, Monsieur
3 Milosevic, si vous avez encore des questions à poser au témoin.
4 M. MILOSEVIC : [interprétation]
5 Q. Bon, vous êtes rentré le 10, mais est-ce que vous savez que du 3 au 6
6 avril, donc quatre jours avant la date de votre retour, l'armée de la
7 République de Croatie a assassiné 56, à Kupres, des gens originaires de
8 diverses localités, et que 168 autres personnes ont été faites
9 prisonnières ? Vous êtes sûrement au courant de cela. Ce n'était pas un
10 incident négligeable.
11 R. Mon travail se concentrait sur la République de Bosnie. Je ne savais
12 pas ce qui se passait en Croatie. Cela ne faisait pas partie de mes
13 attributions, donc je n'ai pas de commentaire à faire car je n'étais pas au
14 courant.
15 Q. Mais ceci était en Bosnie, et Kupres est en Bosnie, Monsieur Doyle.
16 R. Je vous demande pardon, excusez-moi.
17 Q. Je vous parle de la présence de l'armée croate régulière sur le
18 territoire de la Bosnie-Herzégovine, et de ces événements qui se sont
19 produits sur ce même territoire. Savez-vous quelque chose de la présence de
20 l'armée, des forces croates régulières sur le territoire de la Bosnie-
21 Herzégovine, et de ce massacre qui a eu lieu à peine quatre jours avant
22 votre retour dans la région, massacre commis à Kupres ? Avez-vous des
23 informations à ce sujet ?
24 R. Je n'ai pas de détail sur cela. Excusez-moi de vous avoir mal compris.
25 Je croyais que vous parliez d'un lieu situé en République de Croatie. Oui,
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1 je sais effectivement que Kupres se trouve en Bosnie, mais je n'ai aucun
2 détail au sujet de cet incident, en dehors du fait que je sais qu'un
3 incident s'est produit et que des Serbes ont été tués.
4 Q. Mais avez-vous la moindre information quant à la présence des forces
5 croates régulières sur le territoire de Bosnie-Herzégovine, pendant la
6 période où vous étiez membre de l'équipe d'observation européenne, où que
7 vous dirigiez cette mission, où que vous avez travaillé en tant qu'envoyé
8 de Lord Carrington ?
9 R. Oui, cela m'inquiétait beaucoup ces incidents où l'on voyait des
10 soldats de la République de Croatie pénétrer sur le territoire de
11 l'Herzégovine occidentale. D'ailleurs cela fait partie d'un rapport que
12 j'ai envoyé au quartier général.
13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ceci doit être votre dernière question,
14 Monsieur Milosevic.
15 M. MILOSEVIC : [interprétation]
16 Q. Bon, je ne parle ici que des incidents et des événements les plus
17 énormes vraiment, et je vous demande si vous savez qu'en plein centre de
18 Tuzla, le 15 mai 1992, lors de l'évacuation des hommes de la caserne de la
19 JNA, qui étaient encore sur place, l'évacuation donc de ces hommes et de
20 leur équipement. Une embuscade a été tendue, la caserne est celle de
21 Bosanska Buna [phon]. Donc savez-vous qu'une embuscade a été tendue et
22 qu'une colonne d'hommes a été attaquée et qu'ils ont brûlé comme des
23 torches ? C'est un véritable massacre qui a lieu à cet endroit, le savez-
24 vous ? Est-ce que vous avez établi un rapport à ce sujet ? Est-ce que vous
25 avez réagi ?
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1 R. Ce n'était pas -- je n'avais pas pour tache de rendre compte sur les
2 événements militaires qui survenaient, et je n'étais plus chef de la
3 mission d'observation à ce moment-là. A ce moment-là, j'étais le
4 représentant personnel de Lord Carrington, donc je ne connais pas cet
5 incident précis.
6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Maître Tapuskovic, à vous.
7 Questions de l'Amicus Curiae, M. Tapuskovic :
8 Q. [interprétation] Monsieur Doyle, j'aimerais vous interroger uniquement
9 au sujet des événements liés à la période que vous avez passé à Sarajevo.
10 Vous êtes arrivé à Sarajevo le 24 novembre en tant que chef de la Mission
11 d'observation européenne en Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas ?
12 R. Oui.
13 Q. Et si je comprends bien, à la lecture de votre déclaration écrite,
14 jusqu'au 24 août 1992, vous avez fait plusieurs séjours à Sarajevo, avec un
15 certain nombre d'interruptions ?
16 R. Non, j'étais évacué de Sarajevo le 12 mai 1992, donc, à partir de cette
17 date, j'étais principalement basé à Belgrade. Je suis retourné à Sarajevo
18 un certain nombre de fois, mais pas très souvent.
19 Q. Merci. Au paragraphe 55 de la déclaration que vous avez faite devant
20 les enquêteurs de ce Tribunal, vous dites à peu près ce qui suit :
21 "La JNA n'a pas participé au référendum, n'a pas participé à l'encerclement
22 de différent lieux, et les soldats sont principalement restés dans leur
23 caserne."
24 N'est-ce pas ? C'est plus ou moins ce que vous dites ?
25 R. Oui, c'est plus ou moins exact, ça correspond plus ou moins à ce que
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1 j'ai dit.
2 Q. Des déplacements importants à partir des casernes ont eu lieu le 3 mai,
3 n'est-ce pas ? Et pour cette date vous décrivez ce qui s'est passé dans
4 votre déclaration, c'est bien le jour où des officiers et des soldats ont
5 été tués ?
6 R. Oui.
7 Q. Et puis au paragraphe suivant, paragraphe 56, vous dites dans la
8 première phrase que :
9 "Des tirs ont commencé aux environs de la ville, avec des coups de feu
10 tirés ça et là, à partir des casernes."
11 Cela signifie-t-il que, le 1er mars ou plutôt le lendemain, toutes les
12 parties en présence étaient manifestement armées puisqu'il leur était
13 possible de tirer à partir des casernes, et vers les casernes, donc il
14 fallait bien que, sur des deux côtés, les gens soient armés ?
15 R. Les gens étaient très certainement armés à ce moment-là. Je ne veux pas
16 dire que tout le monde l'était, mais je me souviens d'un incident à l'hôtel
17 Bristol où des tirs ont éclaté des deux côtés, donc, manifestement ils
18 étaient armés en effet.
19 Q. Est-ce que la JNA s'est mêlée au conflit lié aux casernes ?
20 R. À ma connaissance, non.
21 Q. Puis aux paragraphes 57 et 58, vous dites que la JNA a apporté son aide
22 au convoi qui se rendait vers l'aéroport. Je vous citerai d'ailleurs, je
23 cite :
24 "Nous avons dû franchir huit barrages routiers et, à chacun de ces
25 barrages, un officier de liaison de la JNA était présent. Et c'est avec lui
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1 que je négociais notre passage."
2 C'est bien cela, n'est-ce pas ?
3 R. C'est exact.
4 Q. Il y a un instant, vous avez entendu une question à laquelle vous
5 n'avez pas répondu car votre attention n'a pas été rappelée sur un sujet
6 particulier. Dans la déclaration faite par le général MacKenzie devant le
7 Procureur de ce Tribunal, il est dit, je cite :
8 "Il y a même eu des rapports évoquant des attaques de la part
9 -- dues aux Serbes de Bosnie, sur des unités de la JNA qui essayaient de
10 remettre leurs armes, leurs munitions et leurs équipements militaires au
11 forces de la Défense -- aux soldats pour en échange obtenir la possibilité
12 de quitter en toute sécurité la Bosnie."
13 Est-ce que vous êtes au courant de tels rapports ? Et ces rapports, sont-
14 ils véridiques ?
15 R. Je ne suis pas au courant de tels rapports.
16 Q. A présent, je n'aurai plus qu'un point sur lequel j'aimerais vous
17 interroger. Aux paragraphes 13, 14 et 15 de votre déclaration écrite, vous
18 parlez de l'époque où vous êtes arrivé dans ce qui s'appelait la
19 Yougoslavie à l'époque. Donc, c'était en octobre 1991. Au paragraphe 15,
20 dernière phrase, vous êtes sensé avoir dit, je cite. C'est ce que je lis
21 dans votre déclaration écrite :
22 "L'armée fédérale devenait de plus en plus une armée serbe."
23 Et vous pensiez à ce qui était de se passer à Sarajevo. Alors, je vous
24 demande si, à Sarajevo, l'armée était du côté des uns ou des autres, si
25 elle avait partie pour les uns ou pour les autres.
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1 R. Je me rendais compte que la majorité des membres de l'armée étaient
2 des Serbes. La mission d'observation a noué des contacts avec la JNA qui,
3 au départ, ne reconnaissait pas la légitimité de notre mission. Mais
4 lorsque j'ai rencontré le général Kukanjac et que j'ai fait une série de
5 visites un peu partout dans le pays, j'ai rencontré tous les commandants de
6 division et, par la suite, la JNA a reconnu devant moi qu'elle avait commis
7 une erreur en n'accueillant pas favorablement la mission d'observation. Par
8 la suite, nous avons créé une équipe de liaison avec l'armée fédérale avec
9 laquelle nous avions des contacts fréquents.
10 Q. Mais, Colonel, ce qui m'intéresse principalement, c'est le point
11 suivant. Lorsque vous êtes arrivé sur place en octobre, parce qu'au
12 paragraphe 15, vous parlez d'événements survenus à ce moment-là, et c'est
13 au sujet de ce moment-là -- de cette période que vous dites que la JNA
14 devenait de plus en plus une armée serbe. Ceci est-il le fruit de votre
15 réflexion ? Correspond-il à votre opinion personnelle ou bien est-ce c'est
16 quelque chose que vous avez entendu de la bouche d'un tiers ?
17 R. Ceci correspond à mon opinion de l'époque sur la base de ma réflexion
18 personnelle.
19 Q. Déjà en octobre ?
20 R. Non. Je dirais que c'est seulement quelque temps après le moment où
21 j'ai pris la tête de la mission d'observation que ceci s'est produit, donc
22 je dirais vers la fin de l'année 1991.
23 Q. Merci. Au paragraphe 70 de votre déclaration, vous dites que la
24 Communauté européenne a reconnu la souveraineté de la Bosnie en tant
25 qu'état, et ceci s'est passé le 7 avril. Ceci n'est pas contesté, n'est-ce
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1 pas ? Mais j'aimerais vous soumettre un autre élément qui est issu, encore
2 une fois, de la déclaration du général MacKenzie et qui a rapport avec ce
3 que vous avez dit lors de l'interrogatoire principal. Il s'agit de la
4 période de votre présence à Sarajevo. Dans la déclaration du général
5 MacKenzie, nous lisons ce qui suit, je cite :
6 "Jusqu'au 20 ou 21 avril, les actions menées par les forces de la Défense
7 territoriale de Bosnie, un peu partout dans le nouvel état, ont eu des
8 répercussions graves pour Sarajevo."
9 Et un peu plus tard, nous lisons, je cite :
10 "Le 12 avril ou à peu près à cette date, la Défense territoriale a reçu
11 l'ordre d'assiéger les casernes de la JNA, d'occuper ses dépôts d'armes et
12 ses centres de transmission et d'attaquer les hommes de la JNA et les
13 membres de leurs familles en vue de les faire partir de Bosnie."
14 Donc, il déclare dans sa déclaration que ceci s'est bien passé, et il le
15 relit au mois d'avril, date à laquelle vous vous trouviez à Sarajevo.
16 Savez-vous quelque chose à ce sujet ?
17 R. Je n'ai pas de connaissance précise à ce sujet. Il ne vous faut pas
18 perdre de vue que le général MacKenzie commandait une entité très
19 importante à Sarajevo. Moi, j'étais simplement une personne -- un individu
20 qui travaillait pour la conférence de Yougoslavie, et j'ai limité mon
21 travail à cela. Donc, je n'ai aucun doute quant à la réalité des -- de ce
22 décrit le général MacKenzie, mais je ne peux pas non plus le vérifier.
23 Q. Je comprends très bien, mais ma question porte sur ce dont vous avez
24 parlé hier, à savoir, cette tentative de votre part pour vous rendre à
25 Foca, afin de vérifier ce qui vous avait été dit au sujet des réfugiés dans
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1 cette région. Ce qui est évoqué dans la déclaration du général MacKenzie,
2 c'est l'une des raisons pour lesquelles la JNA n'a pas pu garantir la
3 sécurité de votre voyage jusqu'à ce lieu où se trouvaient les réfugiés.
4 Pouvez-vous expliquer cela aux Juges, je vous prie ?
5 R. Et bien, tout d'abord, je ferai une correction. Ce n'est pas moi qui me
6 suis -- qui ai fait une tentative pour me rendre à Foca. Je savais
7 simplement qu'une équipe de la mission d'observation, dont je ne faisais
8 plus partie, a essayé de se rendre à Foca. Je n'ai aucune idée quant aux
9 raisons pour laquelle -- pour lesquelles la JNA a dit aux membres de cette
10 équipe d'observateurs qu'ils ne pouvaient arrivé jusqu'à Foca. Tout ce
11 qu'eux m'ont dit c'est :
12 "Nous ne pouvons pas garantir votre sécurité. Par conséquent, vous ne
13 pouvez plus bénéficier de la sécurité, de la liberté de circulation."
14 Mais pourquoi cela s'est passé ? Je n'en sais rien tout simplement.
15 Q. Merci. Au paragraphe 96 de votre déclaration écrite, vous dites qu'à
16 partir du mois de mai, vous avez présidé au quotidien des réunions entre
17 des membres de la présidence, M. Abdic, M. Kljuc, le général Aksentijevic
18 et d'autres, au sujet de l'avenir de la JNA. Et vous dites que vous avez
19 acquis l'impression très claire que la JNA souhaitait se retirer de Bosnie.
20 Est-ce bien cela ?
21 R. C'est exact.
22 Q. Et au cours des négociations dont vous avez parlé, au sujet de
23 l'aéroport, de l'échange de prisonniers de guerre, de l'échange d'armes,
24 donc, au cours de ces pourparlers, comme vous l'avez dit, le thème
25 principal était l'obtention d'un accord de cessez-le-feu, n'est-ce pas ?
Page 25400
1 R. Exact.
2 Q. Colonel, je pense que les Juges de cette Chambre s'intéressent, bien
3 sûr, au contenu de ces pourparlers, à leur évolution et aux résultats qui
4 en sont issus. Je n'ai pas tout à fait bien compris, donc, au profit des
5 Juges de cette Chambre, je vous demande un commentaire supplémentaire. Le
6 général MacKenzie déclare qu'il a eu une réunion avec vous-même et Lord
7 Carrington le 23 avril. Vous souvenez-vous si une telle réunion a eu lieu ?
8 R. Oui. Le 23 avril, j'ai participé à une réunion parce que j'avais
9 organisé cette réunion à l'aéroport pour que Lord Carrington et M. Pinhiero
10 du Portugal puissent venir à Sarajevo. Donc, j'étais présent à cette
11 réunion.
12 Q. Mais moi, ce qui m'intéresse c'est comme le dit le général MacKenzie,
13 et je suis certain que les Juges de cette Chambre trouveront cela très
14 intéressant, si vous pouvez leur apporter des explications complémentaires.
15 Mais vous souvenez-vous de ce qui vous a été lu il y a quelques instants, à
16 savoir que Philip Morillon et le général MacKenzie ont appelé votre
17 attention sur le fait que la présidence de Bosnie n'était pas prête à
18 accepter un cessez-le-feu. Donc c'est quelque chose que la présidence de
19 Bosnie vous aurait dit. Vous souvenez-vous de cela ?
20 R. Non, non.
21 Q. Merci. Mais j'aimerais maintenant vous montrer un autre rapport adressé
22 par MacKenzie, le 22 juin 1992 au siège des Nations Unies, à Nambiar. Vous
23 souvenez-vous de ce document qui est un document officiel ? Au paragraphe 2
24 de ce document, on lit ce qui suit, je cite : "Nous, en tant que majorité,
25 avons le sentiment que le président --" le mot "Izetbegovic" n'est pas
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1 écrit mais il est question du président Izetbegovic, je poursuis la
2 citation, "souhaite une intervention militaire importante destinée à lui
3 restituer son pays et sa capitale." Et un peu plus loin dans le même texte,
4 on lit ce qui suit, je cite : "Il est vrai que les forces de la Défense
5 territoriale ont provoqué des escarmouches et ont tiré des grenades et
6 peut-être des projectiles d'artillerie sur la plus importante base serbe au
7 sud-est de l'aéroport." Et finalement, on lit également la phrase suivante,
8 je cite : "Tant que l'une des parties ne verra pas dans avantages
9 stratégiques à un cessez-le-feu, les combats se poursuivront."
10 Vous souvenez-vous avoir lu ce rapport ou pas ?
11 R. Vous faites référence à ce rapport dont vous dites qu'il s'agit d'un
12 document envoyé au siège des Nations Unies par le général MacKenzie, par le
13 billet du commandant des forces des Nations Unies, le général Nambiar. Je
14 n'avais absolument pas accès à ces instruments. Je ne suis pas membre des
15 Nations Unies. Je ne travaillais pas à l'époque pour les Nations Unies. Par
16 conséquent, il n'y a aucune raison pour laquelle j'aurais eu accès à ce
17 rapport.
18 Et le deuxième point que je tiens à évoquer c'est celui-ci : Le 22 juin
19 1992, j'étais basé à Belgrade. J'avais été évacué de Sarajevo. Donc, il n'y
20 avait aucune raison que j'ai eu accès à ce rapport à ce moment-là. Je ne
21 sais rien à son sujet.
22 Q. Je ne voudrais pas perdre de temps, donc terminons en avec quelques
23 éléments tirés toujours du rapport du général MacKenzie. Ils ont un lien
24 avec les événements de Sarajevo. Et j'aimerais vous demander d'avoir
25 l'obligeance d'expliquer si vous avez des connaissances à ce sujet. A un
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1 endroit de ce rapport, on lit, je cite : "Sarajevo était souvent la cible
2 de pilonnage féroce. Les dommages les plus importants étaient dus aux
3 canons des Serbes de Bosnie situé sur les collines environnant Sarajevo
4 mais les habitants de la ville n'étaient pas au courant du fait que les
5 forces gouvernementales, la Défense territoriale était à l'origine de
6 nombreux incidents." Etes-vous au courant de cela ou pas ?
7 R. Je suis au courant du fait que l'une des conséquences du pilonnage
8 continu que subissait Sarajevo à partir des collines environnantes a été
9 une tentative faite par les habitants de la ville d'agir pour tenter de se
10 défendre. Ce que la population a fait exactement et à quel endroit, je ne
11 le sais pas. Mais comme je l'ai dit hier, dans un conflit de ce genre
12 auquel participe deux parties, il est tout à fait clair que des deux côtés
13 il y a des armes, et que des deux côtés des actions sont menés. Donc je
14 n'ai aucune raison de mettre en doute de quelque façon que ce soit ce que
15 dit le général MacKenzie.
16 Q. J'aimerais maintenant vous parler encore de deux événements uniquement
17 décrits par le général MacKenzie. Si vous êtes au courant, dites que vous
18 êtes au courant. Si tel n'est pas le cas, dites que vous n'êtes pas au
19 courant parce que ceci se passe à un moment où vous n'étiez pas sur place.
20 Il est vrai que le premier de ces incidents a lieu le 16 juillet. Le
21 deuxième a lieu le 22 juillet. Vous êtes entré à Sarajevo au mois d'août.
22 Donc si vous ne pouvez pas confirmer la réalité de ce qui est dit ici,
23 dites-le. Mais si vous le pouvez, faites-le.
24 Le général MacKenzie décrit le premier incident de la façon suivante, il
25 dit que : "Le 16 juillet s'est déroulé -- que cette journée du 16 juillet a
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1 été consacrée à fournir des explications à une délégation de la Croix rouge
2 internationale quant aux raisons pour lesquelles il aurait été insensé de
3 notre part de défendre l'hôpital de Kosovo." Je cite : "J'ai dit que cette
4 idée aurait une signification particulière pour toute mission pour la paix.
5 Mais à Sarajevo, dès que nous avons placé nos hommes autour de l'hôpital,
6 les forces de la Défense territoriale ont rapproché leurs mortiers du
7 bâtiment et tiré sur la façade opposée en provoquant des représailles. Ce
8 qui aurait permit d'accuser les Serbes du pilonnage de l'hôpital. Est-ce
9 que si l'hôpital avait été dans le quartier tenu par les Serbes de Bosnie,
10 les Serbes n'auraient pas agi de même." Est-ce que vous avez entendu parler
11 de cet incident ?
12 R. Non, je ne suis pas au courant de cet incident. Comme je l'ai dit à ce
13 moment-là, le 16 juillet, je n'étais pas en Bosnie. Donc je ne suis pas en
14 mesure de confirmer ou d'affirmer ce que dit le général MacKenzie dans son
15 rapport. Je n'ai aucune raison de le contester, cela dit.
16 Q. Colonel, le 22 juillet, l'après-midi précédent, deux soldats des forces
17 d'une compagnie des Nations Unies ont remarqué que les forces de la Défense
18 territoriale préparaient une position de mortiers à 50 mètres de la base
19 des Nations Unies. Ils l'ont fait savoir à leur commandant et ont présenté
20 une protestation. Cependant, dès la tombée de la nuit, les mortiers et les
21 hommes qui tenaient les mortiers étaient toujours présents. Après minuit,
22 tout le monde a sauté en bas de son lit lorsque le feu a été ouvert par ces
23 mortiers. Donc en une minute, 300 soldats se trouvaient dans leurs bunkers
24 et étaient la cible de nombreux projectiles dont certains ont même explosé
25 dans la cuisine, la salle à manger, le poste de commandement. Etes-vous au
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1 courant de cet incident ?
2 R. Je ne sais rien à ce sujet.
3 Q. Encore une chose seulement qui a un rapport avec ce que vous avez dit
4 lors de l'interrogatoire principal. Vous avez déclaré avoir parlé à
5 Karadzic d'un certain nombre d'événements et vous avez dit qu'il avait
6 répondu qu'un conflit allait éclater. C'est le mot que vous avez utilisé,
7 je crois.
8 R. Si vous parlez de ma question à Radovan Karadzic quant à qu'est-ce qui
9 se passerait au cas où l'indépendance serait accordée, oui, c'est ce qu'il
10 m'a répondu.
11 Q. Et vous avez compris que cela voulait dire qu'il y aurait une guerre ?
12 R. Oui.
13 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Merci. Je n'ai plus de questions, Monsieur
14 le Président.
15 Q. Merci, Mon Colonel.
16 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je regarde la montre.
17 M. NICE : [interprétation] J'ai quatre questions simplement, Monsieur le
18 Président.
19 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Bien. Quatre questions, allez-y.
20 Nouvel interrogatoire par M. Nice :
21 Q. [interprétation] Intercalaire 5, qui est le rapport extraordinaire au
22 sujet de la réunion de l'assemblée le 24 janvier. En page 2, sous le titre
23 "Commentaires," puisque c'est une réunion au sujet de laquelle l'accusé
24 vous a posé un grand nombre de questions. Donc sous le titre
25 "Commentaires", vous dites ce qui suit, je cite : "Il semblerait que le
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1 SDS, bien qu'ayant donné son accord pour participer à cette réunion de
2 l'assemblée, n'était présente que pour la façade et qu'elle ne donnerait
3 son appui au référendum que si les concessions demandées étaient
4 raisonnables." Pouvez-vous nous expliquer pourquoi vous vous êtes fait
5 cette opinion, à savoir que les Serbes n'étaient présents que pour la
6 façade et ne donneraient pas leur accord à des concessions déraisonnables ?
7 R. Pendant le temps que j'ai passé au parlement, j'ai rencontré un grand
8 nombre de députés de tous les partis. Je ne me souviens pas exactement qui
9 était les députés serbes que j'ai rencontrés. Mais j'ai acquis le sentiment
10 très clair qu'il n'était pas question pour eux de soutenir un référendum au
11 sujet de l'indépendance si les Serbes se trouvaient dans la minorité au
12 parlement parce qu'ils savaient que les Croates et les Musulmans risquaient
13 de les dépasser en nombre, d'être plus nombreux qu'eux.
14 Et puisqu'ils avaient quitté, ils ne participaient plus au fonctionnement
15 quotidien du parlement. Ça faisait longtemps qu'ils n'avaient pas participé
16 à une séance parlementaire, comme M. Milosevic l'a dit hier, mon sentiment
17 général a été qu'ils ne sont venus, ce jour-là, que pour apprendre, que
18 pour en savoir plus sur ce qui était en train de se passer et pour
19 s'opposer à tout ce qui aurait pu permettre d'aller de l'avant. Les
20 discussions ont duré des heures pendant ce débat qui m'a été interprété par
21 mon interprète et c'est dans ce cadre que j'ai acquis cette impression.
22 Q. Donc ceci était le résultat d'un face à face direct avec les députés
23 serbes de Bosnie ?
24 R. Oui.
25 Q. Intercalaire 12, rapport de votre conversation avec l'accusé -- page 4
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1 qui commence par le mot "Sarajevo," on y trouve les paragraphes 7 et 8.
2 Avant de revenir aux détails, je vous poserais trois questions au total,
3 deux questions sur ce document : Vous nous avez pas dit si l'accusé vous
4 est apparu comme quelqu'un de très bien informé au sujet des questions qui
5 vous intéressaient ?
6 R. J'ai acquis l'impression très claire à partir des rencontres -- de ma
7 rencontre avec M. Milosevic, d'abord qu'il était très bien informé sur qui
8 j'étais. Il m'a adressé des compliments, il m'a dit : "Que les Serbes de
9 Bosnie lui avaient dit ce que je faisais en Bosnie et que j'étais quelqu'un
10 en qui on pouvait -- à qui on pouvait faire confiance." Donc mon sentiment
11 à ce moment-là était que M. Milosevic avait été informé sur qui j'étais et
12 sur ce que je m'efforçais de faire.
13 Et puis, deuxième point : J'ai acquis l'impression que
14 M. Milosevic souhaitait passer un message aux gens qui avaient des contacts
15 avec moi et que j'étais sensé rendre compte de ce que
16 M. Milosevic m'avait dit au sujet de cette nécessité de participer à la
17 séance parlementaire parce que les instructions jusque-là étaient de ne pas
18 y participer. Donc c'est l'impression que j'ai acquise lors de cette
19 rencontre. M. Milosevic a évoqué un certain nombre d'éléments relatifs ou
20 irréguliers à des forces irrégulières serbes présentent sur le territoire
21 de Bosnie et sur l'entrée illégale d'armes.
22 Q. Fort bien.
23 R. Et cetera, et cetera.
24 Q. Paragraphe 8, il vous dit, selon mes notes, je cite : "Belgrade ne
25 pouvait pas cesser l'arrivée de l'aide humanitaire à destination des Serbes
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1 de Bosnie." Et dans la parenthèse, il y a une référence aux vêtements, aux
2 vivres, à de l'argent et d'autres équipements. Est-ce qu'il a précisé ce
3 qu'il voulait dire par "argent" ?
4 R. Non.
5 Q. Ma dernière question est la suivante : Ces protestations au sujet du
6 caractère illégal de l'attaque sur Sarajevo, ville musulmane, est-ce qu'il
7 vous a dit quelque chose au sujet du fait que la VRS pouvait se retirer de
8 la ville ?
9 R. Non.
10 Q. Bien. Fort bien. Rien de plus. Merci, je n'ai pas de questions.
11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Mon Colonel, ceci met fin à votre
12 déposition. Merci d'être venu devant le Tribunal pénal international pour
13 témoigner. Vous êtes maintenant libre de repartir.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
15 [Le témoin se retire]
16 M. NICE : [interprétation] Nous avons tout réglé au sujet des documents. Il
17 me semble que la pièce 515, intercalaires 13, 14 et 19 à 29 sont des
18 enregistrements vidéo; l'intercalaire 11 est une transcription et par
19 conséquent, leur situation -- leur statut n'est pas tout à fait le même.
20 M. NICE : [interprétation] En effet.
21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Mais les pièces -- les intercalaires 13,
22 14 et 19 à 29 ne semblent pas recevoir de par le biais de ce témoin.
23 M. NICE : [interprétation] Comme cela plaira à vous -- aux juges, Monsieur
24 le Président, le document 19 est un document qui permet d'identifier --
25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous avez tout à fait raison.
Page 25408
1 M. NICE : [interprétation] Donc à mon avis, il devrait être admis, les
2 autres peuvent être retirés.
3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous avez raison. Les intercalaires 20 à
4 29 doivent être retirés, 13 et 14 également.
5 Ce sera donc fait. Ces documents pourront être présentés par le biais d'un
6 autre témoin.
7 M. NICE : [interprétation] Fort bien.
8 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Merci.
9 Vingt minutes de pause.
10 --- L'audience est suspendue à 10 heures 42.
11 --- L'audience est reprise à 11 heures 07.
12 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
13 M. KAY : [interprétation] Monsieur le Président, êtes-vous prêt à
14 m'entendre ?
15 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.
16 M. KAY : [interprétation] Avant que le témoin ne fasse sa déclaration
17 solennelle, il y a en effet une question administrative importante à
18 régler. Il s'agit de la déposition -- du dépôt d'une écriture le 8 août en
19 rapport avec une requête déposée par le procureur tombant sur le coup de
20 l'Article 92 bis. Il y a trois classeurs de documents et de pièces jointes.
21 Or les amis de la Chambre n'ont reçu ces documents que dans les 15
22 dernières minutes. Il y avait eu retrait de ces documents pour des raisons
23 techniques. Est-ce qu'on pourrait faire courir le délai à partir de
24 maintenant, plutôt qu'à partir du 8 août, puisque nous n'avions pas reçu
25 ces pièces auparavant. Mais je pense pouvoir aborder touts ces documents en
Page 25409
1 l'espace de sept jours, donc j'espérais déposer ma réponse d'ici à jeudi
2 [sic] prochain.
3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ceci est concernant Sarajevo.
4 M. KAY : [interprétation] Oui.
5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Mais, je pense qu'il sera possible de
6 vous accorder ce délai supplémentaire.
7 M. KAY : [interprétation] Je vous en remercie. J'essaierai d'agir au plus
8 vite.
9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Merci.
10 M. KAY : [interprétation] Oui.
11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, Monsieur Saxon.
12 M. SAXON : [interprétation] Il y a une question d'ordre administrative
13 également. J'ai cru comprendre que des mesures de protection avaient été
14 accordées pour le témoin qui suivra,
15 M. Kraljevic. Aux fins du dossier de l'audience, je rappelle qu'il faudra
16 modifier l'ordre de comparutions des témoins.
17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.
18 Je vais demander au témoin de prononcer la déclaration solennelle.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
20 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
21 LE TÉMOIN: STIPAN KRALJEVIC [Assermenté]
22 [Le témoin répond par l'interprète]
23 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, vous avez la parole.
24 M. SAXON : [interprétation] Messieurs les Juges, ce témoin va parler dans
25 sa déposition de questions relatives à la page 23 de votre atlas montrant
Page 25410
1 la Croatie.
2 Interrogatoire principal par M. Saxon :
3 Q. Vous appelez-vous Stipan Kraljevic, Monsieur ?
4 R. Oui.
5 Q. Etes-vous né le 8 janvier 1937 ?
6 R. Oui.
7 Q. En novembre 1995, avez-vous fourni une déclaration à un enquêteur du
8 bureau du Procureur ? Cette déclaration portait sur ce que vous avez vécu
9 dans la région de Ilok au cours du conflit armé qui a sévi en Croatie en
10 1991 ?
11 R. Oui, oui, j'ai fait une déclaration dans ce sens-là.
12 Q. A l'époque, dans le cadre de cette déclaration, avez-vous également
13 fourni plusieurs documents à l'enquêteur du bureau du Procureur, documents
14 qui parlaient de la situation qui prévalait à Ilok en 1991 et qui parlait
15 de l'expulsion d'habitants de Ilok entre 1993 et 1995 ?
16 R. Oui.
17 Q. Plus récemment, à savoir le 17 juin 2003, avez-vous eu l'occasion de
18 revoir cette déclaration que vous aviez faite et d'y apporter un addendum ?
19 R. Oui.
20 Q. Avez-vous attesté en présence d'un représentant du Greffe de ce
21 Tribunal que le reste de votre déclaration était tout à fait exacte et
22 fidèle à la réalité ?
23 R. Oui.
24 M. SAXON : [interprétation] Je demande maintenant le versement de la
25 déclaration du témoin de l'addendum et des documents relatifs au dossier en
Page 25411
1 application du 92 bis.
2 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce de l'Accusation
3 516.
4 M. SAXON : [interprétation] En 1991, M. Kraljevic vivait dans la ville qui
5 était surtout croate, la ville de Ilok en Croatie. Ilok faisait partie de
6 la municipalité de Vukovar et se trouve sur les rives du Danube, près de
7 Backa Palanka en république de Serbie. Il y a plusieurs autres villages
8 proches de Ilok, dont Lovas, Bapska, Sarengrad ainsi que Tovarnik. Avant le
9 début du conflit armé, la plupart des habitants de ces villages étaient
10 Croates. Arrivée le mois de septembre 1991, beaucoup d'habitants de ces
11 villages avaient cherché refuge à Ilok, qui était tout à fait encerclé par
12 des effectifs de la JNA et par l'artillerie.
13 M. Kraljevic a été désigné président d'une commission
14 pluriethnique qui avait pour tâche de négocier une solution pacifique à la
15 crise, négociation qu'il devait mener avec la JNA. Le 7 octobre 1991, au
16 moment où la commission a rencontré le colonel Grahovac, l'officier qui
17 avait le commandement de la zone, celui-ci lui a dit, aux membres de la
18 commission, qu'Ilok serait détruit en deux heures si la ville ne cédait pas
19 le contrôle à la JNA. La commission est rentrée à Ilok, a poursuivi les
20 discussions, et suite à ça a dit à la JNA que les habitants d'Ilok ne
21 pouvaient pas accepter les termes de cet accord.
22 Le 11 octobre 1991, la commission chargée de la négociation a assisté à une
23 réunion dans la ville Sid à laquelle assistait le colonel Grahovac ainsi
24 que le général Arandjelovic qui commandait le Corps de Belgrade. La
25 commission a dit que les habitants d'Ilok devaient être autorisé à remettre
Page 25412
1 leurs armes à la police locale et demandaient que la JNA n'entre pas dans
2 la ville d'Ilok. Les officiers de la JNA ont fourni une liste écrite de
3 conditions qu'ils posaient à la cession du pouvoir à Ilok. Le général
4 Arandjelovic leur a dit que si les habitants d'Ilok ne se conformaient pas
5 aux revendications de la JNA, la ville allait être rasée de la carte.
6 La commission est rentrée à Ilok et a décidé d'organiser un référendum
7 public le 13 octobre 1991. Les habitants d'Ilok et les personnes déplacées
8 qui se trouvaient à Ilok ont été priés d'examiner et de répondre à deux
9 questions : Première question, êtes-vous favorable à l'idée de remettre
10 toutes vos armes et de signer un accord avec la JNA; oui ou non ? Deuxième
11 question, êtes-vous favorable à ce qu'il y ait déplacement collectif vu la
12 situation de crise prévalant ? Réponse : oui ou non ? Soixante-treize pour
13 cent des personnes qui se sont prononcées ont choisi de quitter Ilok.
14 D'autres négociations ont eu lieu avec la JNA, suite à quoi un grand
15 convoie a été formé le 17 octobre 1991. Quelque 8 000 personnes, surtout
16 des Croates, ont quitté Ilok escortées par les forces serbes vers un
17 territoire se trouvant sous le contrôle de forces croates. Au cours des
18 quelques années qui s'ensuivirent, 1 500 personnes supplémentaires surtout
19 des Croates ont été chassées, expulsées d'Ilok.
20 Permettez-moi maintenant de demander au greffe de présenter au témoin le
21 document qui se trouve à l'intercalaire 8. Je demanderais également que la
22 traduction de ce document soit passée sur le rétroprojecteur. Excusez-moi.
23 J'ai dit l'intercalaire 8, je parlais de l'intercalaire 6. Mais comme
24 d'habitude, notre assistante,
25 Mme Dicklich a l'information exacte au bout des doigts.
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1 Il s'agit ici d'un document qui dit ceci : "Voici le texte se trouvant sur
2 le premier bulletin de votes." Sont énumérées, les deux questions que je
3 viens de vous donner, et en dessous de la deuxième question, on dit :
4 "Indiquer le nombre des personnes qui seront sensées se déplacer ou être
5 déplacées, déménagées." Puis en dessous, on voit : "En partie constitutive
6 du référendum, c'est aussi le texte de l'accord tel qu'il a fini par être
7 présenté par le général Arandjelovic qui représentait la JNA, le 11 octobre
8 1991."
9 Q. Monsieur Kraljevic, est-ce là un des documents que vous avez fournis à
10 l'enquêteur du bureau du Procureur ?
11 R. Oui.
12 Q. Est-ce que ce document montre bien les questions posées à l'occasion du
13 référendum, question posée aux habitants d'Ilok le 13 octobre 1991 ?
14 R. Oui.
15 Q. Pourriez-vous fournir une explication aux juges, pourquoi ces deux
16 questions ont-elles été présentées comme les deux seules solutions offertes
17 aux habitants, ou options offertes aux habitants d'Ilok à l'époque ?
18 R. Je vous remercie de cette question. Je ferai de mon mieux pour
19 expliquer. Une première question se lisait comme suit : "Etes-vous
20 favorable à ce que l'on remette l'ensemble des armements pour signer
21 notamment l'accord tel que présenté par la JNA ?" Au référendum, dans la
22 plupart des cas, la population a répondu par la négative, par un non. La
23 raison en étant que dans les rapports existant jusqu'alors avec la JNA,
24 nous avons pu nous rendre compte de très mauvaises expériences. Par
25 exemple, à Tovarnik, à Ilaca, à Lovas, à Bapska, voir dans d'autres
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1 localités aussi. Partout où étaient entrées les unités de la JNA, d'énormes
2 problèmes furent provoqués qui n'ont pas été sans voir périr la population
3 locale. Or, le seul espoir à leurs yeux s'était notamment d'agir comme ils
4 se préparaient d'agir pour maintenir leur sécurité en ville.
5 Pour ce qui est de la seconde question : "Etes-vous favorable à un
6 déplacement, une évacuation collective de votre localité ?" Et bien, il
7 faut dire qu'Ilok se trouvait sous le siège pendant plus d'un mois. Il y a
8 eu une coupure de courant pendant tout ce temps-là à Backa Palanka. Ilok,
9 étant visé par des attaques incessantes et pratiquement, la seule
10 possibilité offerte à la population n'était autre que de partir, c'est-à-
11 dire, de se voir évacuer de ce secteur.
12 Q. Permettez-moi de tirer la dernière chose au clair. Vous dites que "le
13 seul espoir était de sauvegarder la sécurité de la ville de cette façon-
14 là." Quand vous dites "de cette façon-là --", est-ce que vous pensez à la
15 première question posée dans le cadre de ce référendum ? Est-ce que vous
16 voulez dire que ça aurait gardé -- sauvegardé la sécurité de la ville
17 d'Ilok si les gens avaient rendu leurs armes et s'ils avaient signé cet
18 accord avec la JNA ou est-ce que vous dites quelque chose qui est
19 différent ?
20 R. Je veux dire, comme suit : à Ilok régnait la paix. Il n'y avait aucun
21 conflit ethnique ou interethnique. La police pouvait maintenir l'ordre
22 public. Tout simplement ce que nous avons demandé en ville c'est que la
23 police puisse assurer le contrôle de l'ordre public, de la paix et nous ne
24 voulions pas voir entrer l'armée dans notre ville.
25 Q. Fort bien. Si on répondait par la négative à la première question, à
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1 savoir qu'il ne fallait pas que l'armée entre dans la ville, pourquoi est-
2 ce que l'option qui restait, l'autre option, c'était une espèce de
3 déménagement -- de départ collectif ?
4 R. La seconde option concernant un déplacement collectif, et bien, cette
5 option existait à cause de ce que j'ai dit tout à l'heure, c'est-à-dire, à
6 cause de très mauvaises expériences ressenties avec l'armée yougoslave,
7 notamment dans les villages qui se trouvaient sous le contrôle du
8 commandement de l'armée yougoslave. Il y a eu beaucoup de victimes
9 extrêmement importantes et pratiquement l'ensemble de la population civile
10 expulsée de ces différentes localités.
11 Q. Par conséquent, vous et vos voisins, que craigniez-vous si la ville
12 devait être cédée à la JNA -- se rendre à la JNA ?
13 R. Et bien, nous l'avons bien redouté parce que dans le cadre de
14 l'ultimatum imposé par l'armée, il a été dit que l'armée était habilitée à
15 entrer dans chaque maison, faire des fouilles et punir toute personne
16 qu'elle considérait être punissable.
17 M. SAXON : [interprétation] Fort bien. Je n'ai pas d'autres questions à
18 poser à ce témoin. Je vous remercie, Monsieur le Président.
19 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous avez la parole.
20 Contre-interrogatoire par M. Milosevic :
21 Q. [interprétation] Monsieur Kraljevic, vous occupiez des fonctions
22 politiques à Ilok. Pour autant que je puis voir, vous êtes doté d'une
23 formation universitaire, n'est-ce pas ?
24 R. Oui.
25 Q. Je suppose que vous devez être bien informé des circonstances, des
Page 25416
1 conditions qui y régnaient là-bas et que vous avez pu comprendre les
2 circonstances qui prévalaient pour parler de l'époque dont vous êtes venu
3 déposer.
4 R. Oui.
5 Q. Vous dites, quant à vous, que, pendant des années, la population à Ilok
6 vivait dans la paix avec ses voisins également que pour parler de la ville
7 même, la composition démographique était mixte. Disons que les Croates
8 étaient à majorité et qu'après les élections de 1990, des tensions étaient
9 accrues ?
10 R. Oui.
11 Q. Jusqu'à là, les décennies durant, il n'y a eu aucun problème, n'est-ce
12 pas ?
13 R. On ne saurait pas le dire de cette façon-là.
14 Q. Seriez-vous prêt à apporter des éclaircissements à ce que vous dites,
15 on ne pourrait pas le dire de la sorte. Qui a-t-il eu comme problèmes au
16 préalable ?
17 R. Disons d'abord que l'égalité n'était pas vraiment bonne et vraie. Pour
18 parler de la police, du point de vue de sa composition, elle était plutôt
19 en majoritaire en Serbes. Pour ce qui est des fonctions dirigeantes, dans
20 la ville même, étant donné que 70 % de la population se présentait comme
21 telle, et bien, les fonctions dirigeantes, politiques et autres étaient
22 tout à fait autres.
23 Q. Lorsque vous dites "fonctions dirigeantes", vous vous référez,
24 j'espère, à la municipalité ?
25 R. Oui.
Page 25417
1 Q. Et ces dirigeants municipaux étaient les élus de qui et par qui ?
2 Etait-ce bien les citoyens qui les désignaient pour l'assemblée et dans
3 l'assemblée municipale, laquelle assemblée municipale devait élire son
4 président et son conseil exécutif, n'est-ce pas ?
5 R. Oui, à sa façon, l'assemblée l'a faite, mais on sait très bien comment
6 se présentaient ces désignations et élections au temps du socialisme.
7 Q. Etait-ce bien de dire que c'est vous qui avez élu vos délégués à
8 l'assemblée ?
9 R. Monsieur Milosevic, vous n'êtes pas sans savoir que c'était un régime
10 d'un seul parti et que tout se passait sur des ordres.
11 Q. Je ne sais pas que tout se passait sur des ordres -- selon des ordres,
12 mais je sais, par contre, qu'il y avait toujours plus de candidats désignés
13 lors des élections et que les citoyens étaient appelés à faire élire et
14 désigner leurs candidats pour chaque fonction.
15 R. Oui, théoriquement, mais pas en pratique.
16 Q. Jusqu'en 1990, avez-vous occupé une fonction quelconque ?
17 R. Oui, j'ai été directeur dans une école secondaire jusqu'en 1993 [sic],
18 après quoi j'étais, pour ainsi dire, nulle part pour parler fonctions à
19 moins de dire que j'ai été à titre d'ingénieur d'agronomie employé dans une
20 école secondaire. Jusqu'en 1990, après les élections plus répartîtes,
21 j'étais au comité local de la ville d'Ilok pour ne pas occuper d'autres
22 fonctions du tout.
23 Q. D'après ce que vous venez de dire, il découle qu'à Ilok ou parlant de
24 la population, les Croates étaient en majorité -- nous devons parler d'une
25 commune -- d'une municipalité ?
Page 25418
1 R. Jusqu'en 1963, il y avait bien lieu de parler d'une commune. Depuis
2 1963 à 1993, ce n'était qu'une collectivité locale.
3 Q. Dans le cadre de la commune de Vukovar ?
4 R. Oui, en effet. Il s'agissait de la commune de Vukovar.
5 Q. Et qui c'est qui était à la tête de cette localité locale, un Serbe ou
6 un Croate ?
7 R. C'était un Serbe.
8 Q. Et avez-vous connu des Croates qui, eux, étaient également élus et
9 dirigeants ?
10 R. Oui, il y en avait.
11 Q. Mais vous dites que des Serbes prévalaient à ces différentes
12 fonctions ?
13 R. Oui.
14 Q. Et semble-t-il, suivant certaines directives, les Serbes auraient été
15 là pour prévaloir ?
16 R. Je souhaiterais ne plus répondre à de telles questions.
17 Q. Bon. Etant donné que vous venez de dire que, dans les rangs de la
18 milicia -- de la police, c'est-à-dire, des organes de l'intérieur, les
19 Serbes étaient en majorité. Peut-on dire que, partout en Yougoslavie,
20 suivant telles ou telles directives ou ordres, des gens devaient être
21 embauchés ou bien les gens présentaient leur candidature, une fois sorti de
22 l'intérieur, et cetera ?
23 R. Ce que j'ai dit c'était une constatation faite par moi, je ne souhaite
24 plus répondre de telle question. On sait très bien par qui les gens ont été
25 nommés à tel ou tel poste dans les rangs de la police.
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1 Q. Pour autant que je comprenne, comme dans tout autre domaine pour parler
2 de la police, les gens devaient être embauchés par simple contrat de
3 travail.
4 R. Peut-être des services qui en étaient compétents devraient être cités
5 ici pour répondre, moi je n'en étais pas responsable.
6 Q. Bien, Monsieur Kraljevic, dites-moi, qu'est-ce qui a été à l'origine de
7 ces tensions, lesquelles tensions étaient accrues, quand vous le dites vous
8 à la suite des élections de 1990 ?
9 R. Avant les élections mêmes de 1990, élections pluri parties, à Ilok
10 survint un événement, à savoir, un groupe prétendument du genre non
11 identifié, jamais ceci n'a été révélé a profané en détruisant plusieurs
12 monuments d'Orthodoxes, et notamment dans le cimetière d'Ilok. Tout de
13 suite, ceci a été imputé à des Croates, pourtant la chaîne de télévision de
14 Novi Sad, s'était rendue sur le cimetière avant que la police n'en prenne
15 écho, le matin même. Cela me semble avoir été organisé d'une certaine
16 façon. Voici un exemple de ce qui devait être à l'origine de ces tensions.
17 De même, au mois d'août 1991, l'organe le journal, "Express Politika",
18 publie un article. Dans le cadre de l'article, il dit qu'à Ilok, 11 civils
19 se sont faits tuer, et que ceci devait servir d'avertissement à tout
20 nationaliste. Par conséquent, on ne peut pas parler d'événement quelconque
21 qui serait survenu. Ce n'était qu'un montage tout simplement de fait, ne
22 serait-ce, que pour donner lieu à une tension ?
23 De même, la presse belgradoise, rapporte t-elle, pour dire que l'hôpital de
24 Principovac, qui se trouve à la limite administrative même entre la Croatie
25 et la Serbie, c'est-à-dire, une partie de l'hôpital se trouve dans le
Page 25420
1 territoire de la Croatie et l'autre de la Serbie, se voit viser par des
2 Oustachi qui ont fait une incursion pour harceler et maltraiter des
3 enfants, le tout pour créer une méfiance parmi les habitants.
4 Q. N'y a-t-il eu pas d'incident à cette époque-là dans les cas de la
5 commune de Vukovar ? Pas d'incident du tout ?
6 R. Oui, si. Le 2 mai 1991, à Borovo, 12 policiers ont été tués. De même,
7 peut-on dire qu'il y a eu des barrages routiers érigés à Trpinje, à Borovo,
8 à Negoslavci, et ainsi de suite.
9 L'INTERPRÈTE : [aucune interprétation]
10 M. MILOSEVIC : [interprétation]
11 Q. Maintenant, je vous entends parler vous souvenir du fait d'avoir été
12 désigné à telle ou telle fonction. Vous vous rappelez les changements
13 intervenus en Croatie en 1990, dus à des modifications de la constitution,
14 vous vous rappelez d'une série d'événements, d'une loi qui, parait-il,
15 aurait dû créer des menaces pour des Serbes, et cetera. Est-ce que vous en
16 savez quelque chose ? Et que les Serbes ont été concernés ?
17 R. J'en sais quelque chose. Un bon nombre de policiers de nationalité
18 serbe, une fois que la décision a été adoptée, que l'insigne socialiste,
19 l'étoile rouge devait être remplacée ce qui devait être le blason de la
20 Croatie, ont eux quitté leurs postes -- postes de policier pour passer à
21 Backa Palanka, pour poursuivre leurs activités de professionnel.
22 Q. Et pourquoi ces policiers ont-ils réagi à ce blason qui était celui de
23 damier ?
24 R. Vous parliez de "damier", nous disons qu'il s'agit tout simplement des
25 armoiries enfin de l'état de Croatie. Monsieur Milosevic, je ne sais quelle
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1 aurait dû être la raison pour laquelle
2 -- leur réaction s'était présentée comme tel. Ceux qui demeuraient à Ilok
3 continuaient de travailler comme ils l'auraient fait préalablement encore
4 que nationalité serbe.
5 Q. Bien, mais à la lumière de ces modifications, la constitution, savez-
6 vous que le statut du peuple serbe a été modifié, aboli et qu'il y avait
7 une série de lois et décrets qui ont été adoptés, choses que j'ai énumérées
8 ici, je n'ai guerre besoin de vous les rappeler. Vous êtes quelqu'un de
9 bien formé, vous n'êtes pas sans le savoir. Est-ce que vous ne trouvez pas
10 que ceci devait être une source d'inquiétude, auprès de ces gens-là ? Est-
11 ce qu'ils ont été objets de pression quelconque à leur encontre ?
12 R. A Ilok, ceci n'était pas le lieu d'en parler -- pour parler de pression
13 encore que je sais que certain membre de tel ou tel groupe démographique se
14 rendait à Backa Palanka au cours de la journée, par exemple, pour retourner
15 de nuit. Encore que rien de fâcheux n'était arrivé, ni de jour, ni de nuit,
16 non plus qu'à leur domaine, aux biens, ou à propriété, le tout étant
17 préservé et sous la garde, comme l'ensemble des domaines et biens.
18 Q. Bien, pour ceux qui ne le savent pas, Backa Palanka se trouve de
19 l'autre côté du pont.
20 R. Oui, on pouvait l'atteindre moyennant les transports en commun, ligne
21 ordinaire. Il y avait, je dois le dire, deux autobus, l'un desservi par
22 Backa Palanka, et l'autre par Ilok, pour assurer les services normaux entre
23 ces deux villes, Backa Palanka et Ilok.
24 Mais voilà, qu'un jour ce qui est arrivé, c'est que des individus ont
25 pénétré dans le bus de Shasna Trans [phon] pour le prendre sous contrôle,
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1 et puis on n'a jamais pu restituer ce bus -- cet autocar.
2 Q. C'est-à-dire, on l'a tout simplement confisqué ?
3 R. Oui.
4 Q. Bon, au temps, pendant lequel temps d'après vous ces événements étaient
5 survenus ? Je me réfère aux amendements de la constitution, modification à
6 cette série de lois, que l'on peut parler d'une discrimination dont les
7 Serbes étaient l'objet en Croatie ?
8 R. A mon sens, il ne s'agit pas de parler de discrimination. Il y avait
9 tout simplement une tendance à voir régner l'égalité entre et pour tous le
10 citoyens serbes et autres citoyens de Croatie.
11 Q. Mais d'après vous, comment peut-on parler de pied d'égalité si, par
12 exemple, les Serbes en tant que peuple ont été exclus dans la constitution
13 de la Croatie ?
14 R. Je ne sais pas que ceci était le lieu, et le fait qu'ils étaient
15 exclus.
16 Q. Mais jusqu'à cette constitution-là, la Croatie était un état composé de
17 Croates, de Serbes, et d'autres citoyens. D'après la nouvelle constitution,
18 les Serbes ont été éliminés à titre de peuple.
19 R. Je ne me propose pas de traiter de ces actes juridiques. Je crois que
20 ceci devrait être laissé à des experts.
21 Q. Bon, mais sans entrer dans les détails d'ordre juridique, juste qu'aux
22 modifications intervenues, ne trouvez-vous pas que le damier ne devait pas
23 être une résurgence menaçante pour les Serbes, et d'attendre la Seconde
24 guerre mondiale ?
25 R. Je ne sais pas ce que ceci devait rappeler des Serbes, mais lorsqu'on
Page 25423
1 parle de damier, on parle de blason de la Croatie ancien, pas d'Oustachi.
2 Q. Oui, vous le savez, vous le dites, mais vous n'êtes pas sans connaître
3 des exactions dont l'objet fut les Serbes, et du temps de la Seconde guerre
4 mondiale ?
5 R. Je crois que je suis là pour déposer sur l'année 1992, et pendant les
6 années qui suivent, pas de l'année 1941.
7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, nous avons déjà examiné la question
8 avec beaucoup d'autres témoins. C'est une pure perte de temps. Parlons
9 maintenant d'événements plus récents.
10 M. MILOSEVIC : [interprétation]
11 Q. Vous dites dans le cadre du point-ci de votre déclaration que :
12 "En vertu de la constitution de 1994, toutes les villes ont été habilitées
13 à former ces unités de Défense territoriale dont les effectifs ne devaient
14 pas dépasser 500 membres, n'est-ce pas ?
15 R. Oui.
16 Q. Vous l'avez rejetée, cette constitution, une fois qu'elle a été
17 modifiée.
18 R. Cela, je l'ignore.
19 Q. Après la proclamation de l'indépendance de la Croatie, la ville de
20 Ilok, a-t-elle formé une unité de protection civile qui devait être liée à
21 la police, comme vous en parlez dans le cadre du point 6 de votre
22 déposition ?
23 R. Oui.
24 Q. Est-ce vrai que c'est la police croate qui les a armés, les gens de
25 cette unité ?
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1 R. Les armes de la Défense territoriale prévues pour la ville d'Ilok ont
2 été saisies par l'armée populaire yougoslave. Bien plutôt, pour parler de
3 ces armes-là, disons qu'il ne s'agissait que de quelques fusils
4 automatiques.
5 Q. A quelles fins, la protection civile devait être armée à cette époque-
6 là ?
7 R. Pour maintenir l'ordre public, en ville.
8 Q. Y a-t-il eu des désordres ou des débordements en ville, et qu'il a
9 fallu pour maintenir l'ordre, engager la protection civile avec la police,
10 également ?
11 R. Il y avait des troupes venues à la frontière même qui voulaient
12 pénétrer dans le territoire.
13 Q. Mais si nous parlons de l'armée au temps dont vous disposez, il
14 s'agissait de parler d'une armée régulière qui devait être déployée sur
15 l'ensemble des territoires de la RSFY.
16 R. Non, je ne le pense pas vraiment qu'il en soit ainsi.
17 Q. Et bien, si vous le prétendez, il s'agit de votre opinion à vous. Vous
18 ne trouvez pas que la JNA était la seule force armée à cette époque-là, et
19 légale ?
20 R. Elle n'agissait pas de la même façon partout.
21 Q. Saviez-vous qu'il y a eu un licenciement en masse de Serbes en Croatie
22 pour ne pas parler que de policiers, mais il s'agissait également de
23 Croates qui ont été licenciés qui ne correspondaient pas aux convenances ?
24 R. Nous parlons d'Ilok, ceci n'était pas le cas.
25 Q. Par conséquent, tous les Serbes policiers étaient restés là pour
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1 travailler dans le domaine qui était le leur ?
2 R. Oui. Au moins je n'ai pas d'indication contraire. Enfin, je n'ai pas
3 d'information qui dirait le contraire.
4 Q. Bon. Est-ce qu'il y a eu des problèmes en terme de Défense territoriale
5 dans Ilok, même au préalable pendant ce qu'on appelait la maspok, le
6 mouvement masse dans les années 70.
7 R. Je ne saurais vous en parler.
8 Q. Mais en savez-vous quelque chose ou quoi que ce soit ?
9 R. Je sais qu'il y a eu des revirements d'ordre politique à cette époque-
10 là, mais je ne sais vraiment pas ce qu'il était advenu de la Défense
11 territoriale.
12 Q. Est-ce qu'à cette époque-là, il y eu des tentatives de voir dans le
13 cas de la Défense territoriale créer des unités dites de jeunes ?
14 R. Je ne le sais pas.
15 Q. Pourquoi donc le président Tito a-t-il rappelé de ses fonctions
16 l'ensemble des dirigeants de la Croatie ?
17 R. Je ne souhaite vraiment en parler de cela. Je ne sais pas ce qui
18 s'était passé.
19 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Effectivement, 20 ans avant les
20 événements qui nous concernent. C'est tout à fait dénué de pertinence.
21 Passons à autre chose. Avançons.
22 M. MILOSEVIC : [interprétation]
23 Q. Bien. Vous dites que la JNA a mis sous son contrôle les armes qui se
24 trouvaient déposées dans les entrepôts de la Défense territoriale, n'est-ce
25 pas ?
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1 R. Oui.
2 Q. Est-ce que vous avez connaissance du fait que cette décision suivant,
3 laquelle l'armée devait prendre sous son contrôle les armes de la Défense
4 territoriale, concernait l'ensemble du territoire de la Yougoslavie,
5 l'ensemble de toutes les républiques.
6 R. Je pense que je l'ai déjà dit qu'il ne s'agissait pas toujours du même
7 rapport établi par la JNA à l'égard de toutes les régions, de toutes les
8 parties et de toutes les républiques. Par conséquent, je ne sais pas si des
9 armes ont été prises à la Défense territoriale de Serbie, de Bosnie, et
10 cetera. Mais pour parler d'Ilok, j'en sais.
11 Q. Les armes n'ont pas été saisies, mais il y avait une décision de la
12 présidence de RFY que la JNA devait mettre sous son contrôle des armements
13 dans toutes les républiques.
14 R. Je sais que la JNA a armé également la population serbe, ce qui n'était
15 pas en vertu de la constitution.
16 Q. Est-ce que c'est peut-être à Ilok que la JNA avait armé des Serbes ?
17 R. Je ne le sais pas avec précision.
18 Q. Bien. Vous dites qu'en juillet, la JNA a pilonné Ilok ?
19 R. Oui.
20 Q. Et cela sans prétexte ou raison quelconque et sur le pont du 25 mai.
21 R. Oui.
22 Q. N'est-il pas vrai de dire juste le contraire qu'un char a été détruit
23 près du pont, lequel char voulait passer de l'autre côté de la rive. Et
24 ceci ne devait pas être l'œuvre de quelqu'un qui était des rangs de la
25 JNA ?
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1 R. L'événement s'était déroulé comme suit. Il y avait un point de contrôle
2 sous le contrôle de la JNA à Ilok, du côté du pont où se trouvait également
3 posé un point de contrôle de la police. A une distance de 200 mètres, donc
4 se trouvaient l'armée yougoslave et la police de la ville d'Ilok, tout d'un
5 coup et subitement, moyennant les fusils mitrailleurs, le véhicule de MUP
6 de la police d'Ilok. Un policier y a trouvé la mort, trois autres policiers
7 ont été blessés. Ils étaient quatre. Et le véhicule a été incendié,
8 incinéré. Un de ces membres qui se trouvait là -- un policier qui se
9 trouvait là -- non loin de là, aurait tiré un coup de lance-roquettes
10 portatifs pour détruire un char, dans lequel char il devait y avoir de six
11 ou sept personnes. Je ne sais plus, d'ailleurs.
12 Q. Lequel char et lesquels genres d'équipage se trouvaient
13 déployés là-bas ?
14 R. Oui.
15 Q. D'après vous, était-ce bien la raison pour laquelle la JNA demandait à
16 ce que les armements soient mis sous son contrôle ?
17 R. Par la suite, il a été demandé que les armements soient mis sous
18 contrôle, mais sous le contrôle de la JNA, pas sous celui de la police
19 d'Ilok.
20 Q. La police d'Ilok, devait-elle disposer de lance-roquettes, par exemple,
21 moyennant lesquelles dans ces panoplies, on pouvait -- dans ces arsenaux,
22 on pouvait entre autres détruire un char ? Est-ce que ça fait partie de ces
23 horreurs-là ?
24 R. Non.
25 Q. Bon. Est-ce que vous avez eu connaissance du fait qu'au début de la
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1 crise, nous parlons de l'année 1990 ou début de l'année 1991, l'ensemble de
2 ces activités, et à la lumière de la sécession de la Croatie, était
3 notamment cette guerre contre la JNA visant à détruire la JNA ?
4 R. Il s'agit de vos propos à vous. Je n'en savais pas
5 grand-chose dans ce sens-là.
6 Q. Est-ce que vous vous rappelez qu'il y a eu des sièges contre ces
7 casernes de la JNA ?
8 M. LE JUGE MAY : [interprétation] La déposition de ce témoin porte sur
9 Ilok. Bornez-vous à poser des questions qui portent sur des sujets dont il
10 peut parler, donc des questions pertinentes. Nous avons déjà entendu
11 d'autres témoins. Il y aura peut-être d'autres témoins susceptibles de
12 parler de la question, mais vous parlez d'Ilok.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien. Mais ce qui s'était passé le 8 juillet
14 1991, sur ce pont, lorsque le char a été détruit, il s'agit bien de parler
15 de l'une des attaques perpétrées contre la JNA.
16 R. Oui. Mais préalablement c'était des policiers qui ont été tués de
17 l'autre côté. Et puis en représailles, la journée suivante, les appareils
18 de la JNA ont mitraillé Principovac pour blesser plusieurs membres de la
19 police pour tuer également un des membres de la police. Et ces gens-là
20 étaient là pour jouer au foot.
21 Q. Vous dites : "Mitraillez et que des policiers ont été des victimes de
22 cet événement." Avant cet événement-là d'ailleurs, d'Ilok ?
23 R. Oui.
24 Q. Qui -- c'est qui a tiré sur ces policiers ?
25 R. Les gens de la JNA.
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1 Q. Vous le savez avec certitude ?
2 R. Il ne devait pas y avoir personne d'autre.
3 Q. Vous dites qu'il n'y avait personne d'autre pour le faire et que vous
4 imputez tout cela à la JNA. Vous n'étiez pas là pour le voir.
5 R. Bien entendu que je n'ai pas vu.
6 Q. Pourquoi voulez-vous que la JNA se mette à tirer à l'encontre d'un
7 véhicule de la police sans aucune raison apparente ? D'où vient cette
8 idée ?
9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il faudra que ce soit la JNA qui réponde,
10 pas ce témoin.
11 Disons-le de la façon suivante, Monsieur le Témoin, est-ce qu'il y avait
12 une raison quelconque -- une raison évidente qui aurait poussé la JNA à
13 tirer sur la police ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas et avec exactitude quelle
15 devait en être la raison parce que jusqu'à là, il y avait une
16 communication, une circulation normale des citoyens entre les deux villes,
17 Ilok et Backa Palanka. Quand je dis "normale" -- "circulation normale", je
18 veux dire par là que tout s'est passé sous le contrôle de le police, mais
19 aussi de la JNA, c'est-à-dire, des troupes de la JNA. Nous ne pouvons faire
20 des conjectures. Moi, je ne veux pas maintenant le faire, mais avec une
21 très grande probabilité pour ne pas dire à 100 %, ceci devait être l'œuvre
22 de la JNA, laquelle erreur a été reconnue par cette dernière d'ailleurs. Le
23 capitaine Grahovac, quant à lui, a reconnu que ceci a été l'œuvre de la
24 JNA. Je le sais en personne.
25 M. MILOSEVIC : [interprétation]
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1 Q. Mais si lui a dit qu'ils ont tiré contre et sur ce véhicule de la
2 police, quelle en fût la raison puisque vous dites que lui-même l'a
3 confirmé et vous le saviez vous ?
4 R. Il y aurait eu, par exemple, un incident quelconque, paraît-il,
5 prétendument sans que l'on sache, où et comment.
6 Q. Vous n'allez pas dire qu'il y a eu un débordement quelconque et que
7 quelqu'un se mette à tirer sur un véhicule de la police ?
8 R. Il n'y a pas eu vraiment d'incident, mais le fait est que le véhicule
9 de police a été anéanti.
10 Q. Bon. Vous l'avez vu et vous dites que ceci ne devait être que l'œuvre
11 de la JNA ?
12 R. Non, non, non. Il s'agit tout simplement de se référer à cet aveu fait
13 par le capitaine Grahovac qui l'a dit ainsi et la police toute entière le
14 savait bien.
15 Q. Et bien, j'en ai vu des documents qui s'y rapportaient. J'ai vu des
16 gens qui déposaient ici, là-dessus, pour dire que les unités de la JNA,
17 tant qu'elles n'étaient devenues objet d'attaques avaient pour rôle de, en
18 quelque sorte, désengager les deux parties pour rendre impossible tout
19 conflit. Est-ce exact ou pas ?
20 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Le témoin ne peut, dans sa réponse, ne
21 peut parler que d'Ilok.
22 C'est une impression que vous avez eue à Ilok et dans les environs d'Ilok
23 que la JNA n'était présente sur les lieux que pour séparer les parties en
24 présence ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Ils ont dit plutôt clairement qu'ils
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1 voulaient entrer dans Ilok pour la mettre sous leur contrôle. A toutes les
2 réunions, c'était le mot d'ordre principal. Par conséquent, il ne peut y
3 avoir de raisons pour lesquelles on devrait dire qu'il n'y avait que la
4 nécessité de se préserver.
5 M. MILOSEVIC : [interprétation]
6 Q. Monsieur Kraljevic, un char a été détruit. La JNA demande d'y entrer
7 pour placer ce secteur sous son contrôle en demandant la remise des armes.
8 C'est ainsi que les événements se succèdent ensuite ?
9 R. Oui, il y avait de ces demandes exigeantes bien avant cela.
10 Q. Bon. Vous dites que, le 28 octobre, la population de Bapska s'est vue
11 imposée un ultimatum, à savoir, si jusqu'à 16 heures.
12 Je vous cite : "On ne remets pas les armes. Votre village ne figurerait
13 plus sur la carte géographique." Le tout couché sur le papier.
14 R. Oui.
15 Q. Il s'agit bien de ce papier-là ou manuscrit. Nous pouvons voir en
16 manuscrit ce texte-là ?
17 R. Oui.
18 Q. Prétendument, le tout signé par un commandant de grade dont la
19 signature est illisible. S'agit-il bien de cela ?
20 R. Il s'agit de Slobodan Barjaktarevic.
21 Q. Connaissiez-vous cet homme-là ? L'avez-vous connu ?
22 R. Non.
23 Q. Cet homme-là existait-il au moins ou du tout ?
24 R. Si, certainement il existe.
25 Q. Qui dit commandant -- parle de quelqu'un capable de commander un
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1 bataillon. Est-ce que cela vous semble vraiment un acte émanent de la JNA.
2 Chaque compagnie est dotée d'un soldat secrétaire, doté évidemment d'une
3 machine à écrire. Par conséquent, on devrait le faire de façon opportune et
4 régulière. Ceci me semble être un faux.
5 R. Ce document nous a été remis, apporté par un ouvrier. Je crois qu'il
6 s'appelle Boro Todorovic, excusez-moi, Tomic. Boro Tomic, qui lui est
7 originaire de Sid, employé dans la coopérative Zazutga [phon] de Bapska.
8 C'est lui qui nous a remis ce document. Il l'a remis au représentant de la
9 collectivité locale de Bapska.
10 Q. Donc, même la personne qui vous l'a apporté n'était pas, lui non plus,
11 membre de la JNA ?
12 R. Non, mais, par la suite, le même homme, Slobodan de prénom, ce
13 commandant s'était entretenu avec les représentants de la collectivité
14 locale, ces derniers s'étant rendus pour le rencontrer, auprès de lui et
15 ils disent tous que ce document était lequel --
16 Q. Non, non. Ce que nous pouvons lire dans ce document n'est pas à
17 contestation, mais ce qui est contestable est que cela puisse être un
18 document émanant de la JNA.
19 R. Et bien, c'est parce que le document a été envoyé par lui et signé par
20 lui.
21 Q. Vous le savez-vous ?
22 R. Ainsi me l'ont dit les représentants de la collectivité locale, à qui
23 le document a été adressé et lesquels représentants ont pu s'entretenir
24 avec lui.
25 Q. Bien. Ce document porte la date du 28 septembre 1991.
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1 R. Oui.
2 Q. Vous savez qu'avant cette date-là, c'est notamment grâce aux activités
3 qui, à cette époque-là, sont vues présider par Lord Carrington. On était
4 parvenu à un accord au terme de tel accord. Toute activité armée devait
5 prendre fin et que le tout a été soutenu par nous tous ?
6 R. Nous nous en souvenons et ceci nous a donné des espoirs en vue d'une
7 solution à l'amiable et pacifique pour l'ensemble de la région.
8 Q. L'on peut lire également qu'il est nécessaire que tous se retirent à
9 des distances souhaitables, qu'il faut obtenir un cessez-le-feu, un
10 désarmement de toutes les unités paramilitaires et qu'il a fallu dissoudre
11 des armées, les réservistes et surtout ceux de la Garde nationale croate,
12 et que les gens démobilisés devraient être retournés à la caserne. Savez-
13 vous que ce sont justement ces conditions-là qui n'ont pas été remplies ?
14 R. A Ilok, à Sarengrad et à Bapska, nos gens a organisé nos sentinelles,
15 uniquement nos gardes à l'entrée de localités et au sein de la localité
16 sans aller au-delà.
17 Q. Ecoutez, je ne veux pas m'étendre maintenant sur ce qui devait
18 appartenir en dehors d'Ilok, mais vous qui étiez dans le monde de la
19 politique à cette époque-là et qui est un homme bien formé, vous saviez que
20 ces accords n'ont pas été respectés et que des attaques contre la JNA
21 s'étaient poursuivies à l'encontre de la JNA. Kadijevic, lui-même, qui est
22 de Croatie, a parlé de cela à Lord Carrington. Est-ce que vous vous en
23 souvenez ?
24 R. Oui, je sais, mais l'armée gagnait du terrain. D'abord Tovarnik a été
25 rasée, ensuite Ilica a été attaquée, Lovas également où l'armée et des
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1 unités paramilitaires étaient entrées. Des gens étaient sortis de leurs
2 maisons respectivement, 23 personnes se sont faits tuer, le tout ayant été
3 fait pendant ces jours-là auxquels vous vous référez.
4 Q. Est-ce que vous faites une distinction entre les troupes de l'armée et
5 les unités paramilitaires ?
6 R. Oui.
7 Q. Ne serait-ce que pour parler des informations que vous déteniez ? Ne
8 devez-vous pas dire qu'il ne s'agissait pas de parler d'œuvres, troupes de
9 l'armée, mais plutôt de celles de paramilitaires et qu'ils étaient plutôt
10 en conflit avec l'armée ?
11 R. Monsieur Milosevic, une chose est sure. Ces unités paramilitaires,
12 certaines d'entre elles nous venaient toujours sous l'égide de l'armée.
13 Elles se faisaient armer par l'armée et elles portaient -- ces unités-là
14 portaient les uniformes de l'armée.
15 Q. Ce sont des réservistes qui portaient un uniforme militaire et cela
16 tout le long de la Yougoslavie, dans l'ensemble d'un territoire, vous
17 n'êtes pas sans le savoir ?
18 R. Ainsi, venaient-ils, affichant ces uniformes-là.
19 Q. Bon. Revenons à cette entrevue avec la JNA. Vous avez dit que ces gens-
20 là ont rencontré le colonel Grahovac.
21 R. Oui.
22 Q. La seule demande était la remise des armes.
23 R. Oui. La remise des armes et leurs dépôts près du pont, c'est-à-dire,
24 sous la supervision de la JNA.
25 Q. Y a-t-il eu quelque chose de tout à fait anormale et déraisonnable pour
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1 que le tout soit placé sous le contrôle de la JNA ?
2 R. Oui. Mais supposons que l'armée devrait s'y établir pour commander.
3 Q. Pour venir et commander parce qu'il a fallu voir si les armes ont été
4 vraiment remises et si l'accord a été observé sans plus n'est-ce pas ?
5 R. La police d'Ilok était capable de préserver l'ordre public et il n'y
6 avait aucune raison pour que les troupes de l'armée pénètrent dans la
7 ville.
8 Q. L'armée se considérait-elle comme légale pour prendre toutes les armes
9 qui pouvaient être à l'origine d'incidents fâcheux ou de malheurs ?
10 S'agissait-il bien de parler d'une opération de l'armée ?
11 R. Non. Plutôt ceci devenait de telles opérations de la police.
12 Q. Après quoi l'armée a été attaquée, un char a été détruit ?
13 R. Non, non. L'armée n'a pas été attaquée. Il a été strictement interdit
14 de tirer sur --
15 Q. A moins de parler de ce char détruit sur le pont ?
16 R. Oui, et cela sans plus. Aucun autre coup n'a été tiré à l'encontre de
17 l'armée yougoslave.
18 Q. Vous parlez d'Ilok ?
19 R. Oui.
20 Q. Mais tout le long de territoire croate, ceci était le cas.
21 R. Je parle d'Ilok.
22 Q. Mais, ne s'agit-il pas évidemment de parler de l'attitude de l'armée à
23 l'égard d'Ilok uniquement ? Mais il a fallu parler de l'ensemble de la
24 situation qui prévalait en Croatie où maintes casernes se trouvaient sous
25 le siège et où les gens se faisaient tuer.
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1 R. C'est à d'autres -- avec d'autres d'en parler.
2 Q. Est-ce que cela fait partie de ce contexte général ou pas ?
3 Ilok ne représentait-il pas une des questions clés ?
4 R. Ilok se trouvait dans -- je dirais -- la proximité de quelque chose qui
5 devait être à distance de plus de 60 kilomètres où il y aurait eu des
6 problèmes. Par conséquent, pour Ilok, il ne devait pas y avoir de dangers
7 du tout.
8 Q. Je ne me propose pas de vous interroger sur d'autres faits. Encore vous
9 êtes d'accord avec moi pour dire qu'il est difficile de retirer du contexte
10 général une ville toute seule parce qu'il faut prendre en considération
11 l'ensemble de la situation et vous êtes censé savoir que l'armée devait
12 s'en occuper dans l'intégralité.
13 Vous vous rappelez, par exemple, le fait que la Yougoslavie tout entière
14 savait que 13 soldats ont été massacrés, qui est -- et ces soldats
15 appartenaient aux baraques de Karlovac, il s'agissait de parler de la date
16 du 27 septembre 1991. Vous savez quelle était l'attitude à l'égard de la
17 JNA ?
18 R. Je dois vous dire qu'Ilok, on avait peu ou trop d'informations. Tous
19 les moyens de communication étaient anéantis, à commencer par parler de
20 relais de la télévision de Papuk et de Tovarnik. Par conséquent, Ilok se
21 trouvait dans un isolement en matière de communication. Ensuite nous
22 manquions de courant et même pour suivre évidemment une radio à
23 transistors, on ne pouvait écouter que la radio Belgrade.
24 Q. Vous pouvez entendre Radio Belgrade, sûr, et cetera.
25 R. Oui. Lorsqu'on est muni d'un bon radio à transistors.
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1 Q. Vous vous rappelez que le 1er novembre et dans la période qui a suivi,
2 les forces croates ont été responsables de cette attaque générale et bien
3 connue sur le Slovanie occidentale et que la population serbe pour
4 l'essentiel a été victime de cette action puisqu'elle a été chassée de chez
5 elle et que le plus grand chaos a régné à l'époque ? Vous souvenez-vous de
6 cela, Monsieur Kraljevic ?
7 R. Je vais vous dire les choses de la façon suivante : pour autant que je
8 le sache, ceci s'est passé lorsque nous sommes partis en exil. Mais j'ai
9 entendu de nombreuses déclarations de la bouche d'habitants d'Ilok, qui
10 étaient restés à Ilok, qui ont dit que -- qui ont entendu, de la bouche de
11 ses réfugiés, que l'armée leur avait dit de partir pour l'exil et de passer
12 par Banja Luka pour se rendre à Backa Palanka et à Ilok, et que donc un
13 grand nombre d'entre eux ont été contraints par l'armée de partir. Je ne
14 dis pas que c'était le cas de tous.
15 Q. Les habitants d'Ilok ?
16 R. Non, la population serbe de Slovanie occidentale.
17 Q. Quelle armée les a forcés à partir ?
18 R. L'armée yougoslave.
19 Q. Voyons, Monsieur Kraljevic, vous ne pouvez pas --
20 R. Ceci c'est ce que prétende un certain nombre d'habitants d'Ilok qui
21 n'ont pas quitté Ilok, mais moi je ne peux pas me prononcer d'une façon --
22 dans un sens ou dans un autre.
23 Q. Pour gagner du temps, je dirais que moi non plus, je ne peux pas me
24 prononcer dans un tel sens. Il y a tout de même le bon sens commun qui doit
25 intervenir lorsqu'on parle de l'agression subie par la Slovanie
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1 occidentale. Tout ceci est de notoriété publique, des gens ont été tués, on
2 sait qui était responsable de cette attaque, tout ceci est bien connu du
3 public.
4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui. Si vous avez d'autres questions,
5 posez-les, mais pas de commentaires.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien.
7 M. MILOSEVIC : [interprétation]
8 Q. Monsieur le Témoin, vous dites que, le 8 novembre, trois observateurs
9 européens sont arrivés dans la ville et que, les trois jours suivants, deux
10 autres observateurs sont arrivés, n'est-ce pas ?
11 R. C'était les 8 et 10 octobre.
12 Q. J'ai pris note du fait que vous avez parlé du mois de novembre ?
13 R. Non. Pas en novembre, mais en octobre.
14 Q. Ah, en octobre. Très bien, d'accord, en octobre. Mais parmi ces hommes-
15 là, y avait Hugh Cunningham et un certain Petr Kypr, d'après le rapport ?
16 R. Nous avons demandé à Hugh Cunningham d'aller vérifier la situation à
17 Sarengrad et à Bapska. L'armée yougoslave l'a autorisé à se rendre à
18 Sarengrad, mais il n'a pas obtenu l'autorisation de se rendre à Bapska. A
19 ce moment-là, les deux localités étaient endommagées et, pour l'essentiel,
20 contrôlées par l'armée yougoslave.
21 Et puis deuxième chose, le lendemain le 10 -- excusez-moi, ce n'était pas
22 le 10, c'était le 11, le 10 ils étaient encore à Ilok et le 11, ils sont
23 partis pour Lovas. Et à ce moment-là, ils m'ont fait savoir, à moi et à
24 d'autres représentants officiels d'Ilok, qu'ils avaient eu un entretien
25 avec le président de la nouvelle communauté locale de Lovas. Et je peux
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1 dire en trois phrases ce qu'il m'a déclaré. Il m'a dit : ils ont une
2 communauté locale composée de cinq membres : lui-même, donc un Serbe qui
3 présidait la communauté locale; son adjoint, qui était également un Serbe;
4 et trois Croates. Il m'a dit qu'à Lovas, il y avait 50 % de la population
5 qui était composée d'habitants originaires de la localité et les autres 50
6 % étant composés de réfugiés venus de Lika, et il a ajouté que 80 % de ces
7 personnes provenant de Lika devaient être expulsées. Selon la déclaration
8 en question, il était totalement ivre, mais enfin tant pis. Il a également
9 reçu une liste de 21 victimes enterrées dans une fosse commune et tuées par
10 des unités de l'armée la veille.
11 Q. Donc, cette direction locale se composait de deux Serbes et de trois
12 Croates ?
13 R. Oui.
14 Q. Et des protestations ont été émises contre le comportement des
15 réfugiés, un peu partout en Croatie, venant d'autres régions de Croatie,
16 n'est-ce pas ?
17 R. Non, les réfugiés ne venaient pas -- non, les réfugiés étaient venus de
18 la partie serbe de Croatie. C'était juste avant noël.
19 Q. Mais d'où exactement venaient ces personnes ? Pourquoi est-ce qu'elles
20 ont changé, pourquoi se sont-elles déplacées ?
21 R. C'était la population qui s'était déjà établie à cet endroit
22 précédemment.
23 Q. Vous parlez de la période ultérieure à la Deuxième guerre mondiale.
24 R. Oui.
25 Q. Ah, je vois. Mais dites-moi ce qui suit, je vous prie, parce que tout
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1 cela me semble vraiment absolument incroyable. Alors expliquez-moi ce qu'il
2 en est, si vous voulez bien. Vous dites que vous étiez présent lorsque cet
3 observateur a demandé au général Arandjelovic pourquoi certaines personnes
4 avaient été tuées à Lovas, et qu'il a répondu :
5 "C'était une vengeance pour le meurtre d'un soldat de la JNA, et le fait
6 qu'on a découvert son corps dans un champ de maïs."
7 Alors est-il possible que vous ayez entendu une telle conversation entre un
8 général de la JNA et un autre homme qui expliquait que la JNA, aurait fait
9 tout cela par esprit de vengeance ?
10 R. Non, ce que j'ai entendu c'était des représentants de la ville d'Ilok,
11 lors d'une réunion. Il y avait une commission, composée de représentants de
12 divers groupes ethniques, de Serbes, de Slovaques, de Musulmans, et
13 d'autres à la réunion de cette commission.
14 Q. Si je vous comprends bien, ces propos sont une interprétation de la
15 raison qui a motivé ces actions, mais ne signifient pas que la JNA a
16 effectivement agi pour se venger.
17 R. Non, la JNA a fait cela pour se venger.
18 Q. La JNA ? Fort bien, Monsieur Kraljevic. Cette déclaration je la trouve
19 absolument incroyable. C'est d'ailleurs sur ce point que je voulais faire
20 la clarté avec vous.
21 Vous avez parlé du référendum. Il y a un instant, M. Saxon vous a interrogé
22 à ce sujet, mais, lorsque vous avez parlé des élections, je vous demande si
23 vous savez qu'aux élections 1990, la majorité des Serbes avait voté pour la
24 Ligue des communistes de Croatie. Le SDP d'Ivica Racan n'est que suite à
25 ces résultats, et donc un certain nombre de Serbes ont siégé à l'assemblée
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1 croate, sous la base de cette liste, donc les Serbes de la région n'ont pas
2 voté pour le Parti nationaliste serbe, mais bien pour la Ligue des
3 communistes de Croatie, est-ce que vous savez cela ?
4 R. Il y a eu des élections multipartites, avec participation des
5 représentants des différents groupes ethniques. Il y avait donc plusieurs
6 parties, tout le monde a voté comme il le souhaitait. Je connais les
7 résultats de ces élections.
8 Q. Ces résultats correspondent-ils à ce que je viens de vous dire ?
9 R. Je ne sais pas, mais je connais les résultats des élections.
10 Q. Pour le référendum, vous avez donné vos explications. Je ne voudrais
11 pas perdre de temps plus que cela n'est nécessaire. Tout ce que je sais
12 c'est ce que je lis dans les documents qui m'ont été soumis, je ne sais
13 rien de plus au sujet du contenu de votre déposition. Donc je lis ce texte
14 que je l'ai reçu des représentants de M. Saxon qui vous a interrogé tout à
15 l'heure.
16 "Article 1 : sur la base d'une demande d'Ilok de Bapska, et de Sarengrad,
17 et suite --"
18 M. SAXON : [interprétation] Monsieur le Président, pourrions-nous savoir de
19 quel document il est question ? Quel est le document que M. Milosevic est
20 en train de lire ?
21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Et le témoin devrait disposer d'un
22 exemplaire de ce document.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est l'intercalaire 7.
24 M. LE JUGE MAY : [interprétation] L'intercalaire 7, Monsieur Milosevic.
25 L'intercalaire 7, c'est un accord où il est question de Sid.
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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, en effet. Effectivement, c'est bien
2 l'intercalaire 7.
3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Un instant que le témoin reçoive d'abord
4 ce texte. Ce texte va vous être remis, Monsieur le Témoin.
5 Oui, Monsieur Milosevic, vous pouvez maintenant poursuivre.
6 M. MILOSEVIC : [interprétation]
7 Q. Donc, à l'Article 1 de ce document, qui est donc le texte d'un accord,
8 d'ailleurs c'est parce qu'on lit -- ce qu'on lit à l'Article 1, que j'ai du
9 mal à comprendre ce que vous dites au sujet d'un comportement tout à fait
10 inacceptable de la JNA, j'ai cet accord sous les yeux, c'est la raison pour
11 laquelle je vous pose des explications. Parce qu'en haut du texte, on voit
12 quels sont les participants. Entre autres, on trouve votre nom, participant
13 aux pourparlers qui ont donné lieu à cet accord, et ensuite à l'Article 1,
14 on lit ce qui suit :
15 "Sur la base d'une demande des habitants d'Ilok, de Bapska et de Sarengrad,
16 et suite au référendum, tous les habitants de ces localités, ainsi que les
17 réfugiés qui se sont retrouvés dans ces localités, ont la possibilité de
18 déménager s'ils souhaitent le faire, en compagnie des membres de leurs
19 familles."
20 Donc ceux, qui souhaitent partir accompagner des membres de leurs familles,
21 peuvent le faire.
22 Et à l'Article 5 de ce même accord, nous lisons, je cite :
23 "Au moment du départ des habitants qui quittent les localités sus
24 mentionnées, et avant la constitution des convois, les membres de la JNA,
25 en présence des représentants du MUP et des membres de la Mission
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1 d'observation de la Communauté européenne, fouillent tous les objets en cas
2 de nécessité."
3 Donc, en vertu de cet article qui a été signé en présence d'un représentant
4 de la Mission de la Communauté européenne, la JNA accepte devant chacun la
5 possibilité pour ceux qui le souhaitent de partir. Et puis ensuite, nous en
6 arrivons à l'Article 6. Je vous prie, regarder cela, je cite :
7 "Les membres de la JNA sont tenus de garantir la sécurité personnelle et la
8 sécurité des biens des habitants qui resteront dans ces localités, ainsi
9 que la sécurité des biens des habitants qui habitaient auparavant dans ces
10 localités."
11 Donc, si on lit bien cet article et si je le comprends bien, il y est dit
12 que les habitants qui souhaitent partir peuvent le faire en toute sécurité
13 et que, compte tenu des circonstances, une demande est présentée à la JNA
14 pour que la JNA permette aux habitants d'obtenir ce qu'ils demandent. Donc
15 il est demandé à la JNA de permettre à ceux qui veulent partir d'obtenir
16 satisfaction, et de garantir la sécurité des biens et des personnes, des
17 biens des personnes qui souhaitent rester, ainsi que la sécurité de ces
18 mêmes personnes. C'est cela ou pas, Monsieur Kraljevic?
19 R. Il importe de connaître les conditions dans lesquelles cet accord a été
20 conclu. Je dirais avant tout que les représentants de la Communauté
21 internationale avaient fait effectivement la signature de cet accord, comme
22 s'est écrit dans le texte. Le comportement de l'armée yougoslave était tout
23 à fait différent, lors de cette réunion par rapport à ce qu'il avait été
24 lors de la réunion précédente, à laquelle n'assistaient pas les
25 représentants de la Communauté internationale.
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1 Q. Monsieur Kraljevic --
2 R. Donc, c'est ce que je voulais dire avant tout. C'est écrit
3 effectivement. Et puis cet accord a bien été conclu à la demande des
4 habitants. Il est écrit ici que cet accord a été conclu à la demande des
5 habitants d'Ilok. Mais en fait ce libellé a été dicté parce que les
6 habitants d'Ilok ne souhaitaient pas partir. Ils ne souhaitaient pas
7 déménager. Nous avons dit très clairement, lors de cette réunion, que nous
8 ne souhaitions pas l'entrée dans la ville de l'armée. Nous avons dit que
9 les armes seraient restituées, mais qu'elles seraient à la police, et que
10 l'armée elle ne devait pas pénétrer dans la ville. Cependant, l'armée n'a
11 pas accepté cela et nous savons ce qui s'était passé dans la période
12 antérieure, je l'ai déjà dit à plusieurs reprises. Dans tous les endroits
13 où l'armée a pénétré, les paramilitaires entraient également sous la
14 protection de l'armée. Et bien sûr, il se perpétrait des massacres.
15 Q. Je vous en prie, ils n'ont pas été forcés de partir. Ils ont exprimé le
16 désir de quitter cet endroit.
17 R. Mais après la guerre, ils sont revenus. Alors, s'il vous plaît, qui
18 est-ce qui serait prêt à quitter sa maison, avec un désir personnel de le
19 faire. De toute façon, vous savez quand l'épée de Damoclès pèse sur votre
20 tête, un tel désir est toujours suspect.
21 Q. Mais il y avait des affrontements, à ce moment-là ?
22 R. Oui, il y avait des affrontements.
23 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Un instant, je vous prie, parce que vous
24 parlez en même temps.
25 Nous allons suspendre l'audience. Il vous reste cinq minutes, Monsieur
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1 Milosevic. Après quoi, les amis de la Chambre pourront poser leurs
2 questions, s'ils en ont.
3 Monsieur Kraljevic, je vais maintenant vous informer, vous lancer un
4 avertissement qui concerne tous les témoins. Vous êtes invité à ne parler à
5 personne du contenu de votre déposition, jusqu'à la fin de cette déposition
6 et, lorsque je dis personne, cela concerne également l'équipe de
7 l'Accusation.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, je vous demande vraiment quelques
9 minutes de plus. Cinq minutes, c'est tout simplement insuffisant pour
10 terminer mon contre-interrogatoire.
11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous y réfléchirons. Vingt minutes de
12 pause.
13 --- L'audience est suspendue à 12 heures 20.
14 --- L'audience est reprise à 12 heures 47.
15 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous disposerez de dix minutes, Monsieur
16 Milosevic.
17 M. MILOSEVIC : [interprétation]
18 Q. Très bien. Dans ce cas, Monsieur Kraljevic, nous allons essayer d'aller
19 un peu plus rapidement.
20 Vous avez dit que tout cela s'était fait selon les vœux de la population
21 d'Ilok, lors de cette réunion. Comme nous l'avons constaté, les
22 représentants de la Communauté internationale étaient présents. Et dans ce
23 document, il est également stipulé que les habitants qui souhaitent rester,
24 donc, qui ne veulent pas partir, se verront garantir leur sécurité
25 personnelle et la sécurité de leurs biens, et cetera, et cetera. Et à
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1 l'Article 7, nous lisons, je cite : "Les membres de la JNA et du MUP
2 assureront la sécurité pendant le voyage de sortie d'Ilok. Les organes du
3 MUP d'Ilok, une soixantaine des hommes du MUP qui possèdent offi -- qui
4 possèdent des armes de fonction, les conserveront." Donc, il s'agit des
5 policiers qui étaient à Ilok, qui étaient donc autorisés à conserver leurs
6 armes de fonction, et qui allaient accompagner les personnes quittant la
7 ville pour assurer leur sécurité.
8 Donc, est-il tout à fait clair, à la lecture de cet accord, qu'il s'agit
9 d'une demande venant des citoyens, des habitants, que
10 l'armée satisfait aux désirs de cette population et que donc les habitants
11 qui veulent partir pourront partir. On leur assurera leur sécurité et les
12 habitants qui souhaitent rester, pourront rester. Est-ce bien cela qui est
13 écrit dans ce document ?
14 R. Suite à la signature de cet accord, dont il importe de dire que tout de
15 même, qu'en grande majorité, il a été dicté. Il a été dicté par un juriste
16 à Sid dans les bâtiments qui portait un uniforme militaire. Donc suite à la
17 conclusion, à la signature de cet accord, nous avons expliqué aux habitants
18 qui souhaitaient restés, qu'ils pouvaient le faire et à ceux qui
19 souhaitaient partir, qu'ils partiraient dans le cadre d'un convoi organisé.
20 Et puis, l'accord a donc été signé. L'armée affirmant qu'elle assurerait la
21 sécurité de ces personnes et c'est ce qui s'est passé. Cependant, il y a eu
22 d'autres exemples également.
23 Q. Je vous en prie. Moi, je vous posais une question.
24 R. Je vous en prie, comment ?
25 Q. Je vous posais une question. Je vous demandais s'il était tout à fait
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1 clair, à la lecture de ce document qu'aucune coercition n'a été exercée,
2 que les choses se sont faites conformément aux vœux des habitants. Ceux qui
3 souhaitaient restés pouvaient rester.
4 R. Monsieur Milosevic, dans cet ultimatum, il est stipulé que l'armée va
5 pénétrer dans la ville, qu'elle va prendre le contrôle de la ville et c'est
6 exactement ce qui s'est passé. Donc, que nous soyons resté ou pas, elle
7 aurait agi de même. Et bien entendu, il y a d'autres exemples en d'autres
8 lieux, dans d'autres localités.
9 Q. Ce qui aurait pu se passer au cas où, nous ne pouvons pas émettre de
10 supputations à cet égard. Nous n'allons pas jouer aux devinettes.
11 Mais tirons quelque chose au clair. Vous nous dites que lorsque les
12 représentants de la Communauté internationale étaient présents, la réunion
13 se tenait d'une certaine façon, dans un certain climat différent de ce
14 qu'il était lorsque les représentants internationaux n'étaient pas
15 présents. Mais vous auriez pu dire, lors de cette réunion, nous souhaitons
16 une modification de l'Article 1 ou de l'Article 7, ou de l'Article 6 ou de
17 l'Article 8, dans tel ou tel sens et sur le fond. Ceci est un accord tout
18 de même qui est conclu entre deux parties.
19 R. Monsieur Milosevic, nous avons demandé que l'armée ne pénètre pas dans
20 la ville. Nous avons dit que la police était tout à fait apte à assurer la
21 sécurité en ville mais ceci a été refusé.
22 Et puis, autre chose, que s'est-il passé ce qui s'est passé, c'est passé.
23 Nous voyons que les gens qui sont restés dans la ville ont bien été
24 contraints au cours des cinq années qui ont suivi de quitter leurs foyers.
25 Donc, on voit bien quel était l'objectif de tout cela.
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1 Q. A la lecture de cet accord, ce n'est pas le cas. On ne le voit pas.
2 Mais vous affirmez que d'autres éléments permettent de le voir.
3 R. On voit bien que l'armée n'était pas contente de voir la population
4 partir et qu'il fallait qu'il y ait nettoyage ethnique du secteur.
5 Q. Sur quelle base dites-vous cela ? Qu'est-ce qui vous permet de tirer la
6 conclusion que l'armée n'était pas contente de voir la population partir
7 puisqu'elle proposait d'assurer la sécurité de ceux qui voulaient partir et
8 de ceux qui voulaient rester ?
9 R. Et bien. Elle voulait que certains dans la population partent.
10 Q. Donc, que serait-il passé si l'armée n'avait pas assurer la sécurité de
11 ceux qui voulaient rester ? Les habitants qui voulaient partir, c'était
12 leurs désirs qu'ils exprimaient, pas celui de l'armée.
13 R. Monsieur Milosevic, des garanties de ce genre sont donnés à l'avance
14 mais elles ne sont jamais respectées. Parler c'est une chose, agir s'en est
15 une autre.
16 Q. Fort bien. Mais est-ce que cet accord a été rédigé noir sur blanc ?
17 R. Oui.
18 Q. Est-ce que les policiers ont conservé leurs armes ?
19 R. Oui.
20 Q. Est-ce que les gens ont été transportés en toute sécurité hors de la
21 ville par la police croate ?
22 R. Oui. Oui. Je veux dire que d'un point de vue politique, du point de vue
23 de la propagande politique, tout se tenait tout à fait bien.
24 Q. Si c'est de la politique et de la propagande, si ce sont des motifs
25 politiques qui ont fait tout cela, d'accord. Il me semble qu'il fallait
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1 tout de même tirer un peu au clair le contenu de cet accord.
2 Mais voyons cet autre document. Je vois en haut, à droite, sur le texte de
3 cet accord, les lettres "SK2". Page 0036002 [sic], la liste des victimes de
4 guerre de la patrie en 1992. Veuillez jeter un coup d'œil sur ce document.
5 Pas un seul tué à Ilok.
6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Laissez le témoin regarder ce document,
7 s'il peut l'identifier.
8 Monsieur Saxon, pouvez-vous nous aider en nous disant de quel document il
9 s'agit.
10 M. SAXON : [interprétation] Je ne le sais pas avec certitude. Ce n'est
11 peut-être pas un document fourni par nous.
12 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Très bien.
13 Monsieur Milosevic, quelle est la question que vous avez au sujet de ce
14 document et veuillez faire remettre le document au témoin.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est la liste des victimes civiles de la
16 patrie au cours de la guerre jusqu'au 17 octobre.
17 M. MILOSEVIC : [interprétation]
18 Q. Monsieur le Témoin, veuillez jeter un coup d'œil à ce document. Pas un
19 seul tué à Ilok.
20 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Voyons cela d'un peu plus près et que le
21 document soit remis au témoin.
22 M. MILOSEVIC : [interprétation]
23 Q. Il y a onze noms sur cette liste.
24 R. Samjuel Fabri et Frano Dobrinja sont morts dans leur voiture, touchée
25 par un obus. Nada Vrbanic est mort à Bapska sur le territoire de la
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1 municipalité d'Ilok pratiquement au moment où l'accord en question était
2 signé, le 14 octobre, tué à Bapska.
3 Q. Moi, je voulais simplement faire une constatation. Je vous ai fait
4 remettre ce document et j'ai dit que sur cette liste, on voyait qu'aucun
5 habitant d'Ilok n'avait été tué. Vous parlez bien d'Ilok. Tout à l'heure,
6 vous m'avez dit que vous ne parliez que d'Ilok.
7 R. Oui, je parle d'Ilok, Sarengrad, Bapska, Mohovo, font partie de la
8 municipalité d'Ilok.
9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Que le témoin identifie le document.
10 Monsieur Kraljevic, quel est exactement le document qui vient de vous être
11 remis ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] L'INTERPRÈTE : Tends le document en levant la
13 main.
14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Pouvez-vous nous dire de quel document il
15 est question ici ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit de la liste des victimes civiles de
17 la patrie au cours de la guerre. Nous avons simplement établi la liste des
18 personnes tuées au cours de la guerre.
19 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Est-ce un document produit par vous ou à
20 la rédaction duquel vous avez participé ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. En 1996, lorsque j'étais maire, j'ai fait
22 ce travail. J'ai recueilli les données de la bouche des personnes qui se
23 faisaient connaître à moi pour me parler d'un membre de leur famille qui
24 avait été tué, des conditions dans lesquelles ces personnes avaient été
25 tuées. J'ai fait ce travail sans aucune prétention. Il y aurait Jule
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1 Saracevic, par exemple, est mort au moment du bombardement de Sarengrad par
2 la JNA, par exemple. Miroslav Kolak et Tivic [phon] sont morts lorsqu'ils
3 ont voulu quitter cette région en dépit du fait qu'ils faisaient partie
4 d'une colonne. Et c'est la même chose pour pas mal des gens dont les noms
5 figurent sur cette liste. Il y a pas mal de gens qui ont voulu quitter la
6 ville avant que la colonne ne soit créée mais ils ont été emmenés dans un
7 camp à Begejci. Ils ont subi des sévices. Il y a beaucoup de choses qu'on
8 pourrait dire. C'est vraiment très pénible.
9 M. MILOSEVIC : [interprétation]
10 Q. Bon. Nous avons vu cette liste mais maintenant regardons le document
11 suivant, présenté par vous également puisqu'en haut, à droite, on lit,
12 "SK3", "La liste des victimes après le 17 octobre [sic]." C'est un document
13 signé par vous.
14 R. Là encore, il s'agit d'un enregistrement que j'ai effectué de personnes
15 qui sont mortes en diverses endroits et dans des conditions diverses. Il
16 s'agit toujours des membres de leur famille, par exemple, qui se faisaient
17 connaître auprès de moi, qui m'appelaient, et cetera.
18 Q. Les membres des familles se faisaient connaître auprès de vous. Je vois
19 la signature. Je vois le titre, liste des victimes de la guerre mais
20 regardons les choses d'un peu plus près. Au paragraphe 2, "tué devant sa
21 maison", c'est ce qu'on lit, à Foca. Est-ce que vous avez des données
22 précises ?
23 M. SAXON : [interprétation] Monsieur le Président.
24 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Un instant. Laissez l'accusé terminer sa
25 question. Après quoi le témoin pourra regarder ce document.
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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais je n'ai qu'un seul exemplaire, Monsieur
2 May. Et j'ai plusieurs questions à poser au sujet de ce document.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je connais le document. Allez-y.
4 M. MILOSEVIC : [interprétation]
5 Q. Et bien, c'est la liste des victimes de guerre, et au paragraphe 3,
6 nous voyons l'intitulé ou plutôt le mot "Suicide." Au point 4, "suicide."
7 Au point 5, "suicide." C'est vous qui avez écrit cela. Et au point 6, vous
8 avez écrit "décédé." Au point 7, vous avez écrit "décédé en janvier 1992,"
9 et cetera.
10 R. Oui.
11 Q. Et au point 9, vous avez écrit "décédé à Opatija." Et puis au point 11,
12 un homme qui a le même patronyme que vous, Kraljevic, et à côté de lui on
13 voit le mot "décédé." Numéro 12,"décédé à Ilok en raison de blessures
14 subies au cours d'un cambriolage." Numéro 13, toujours "décédé."
15 R. Puis-je apporter des explications ?
16 Q. Et puis pour l'un de ces hommes, on dit qu'il est mort à l'hôpital. Et
17 puis numéro 32, "suicide." Numéro 34, "suicide."
18 Numéro 36, une femme est morte aux environs d'une certaine date. Numéro 39,
19 "accident de la circulation." Numéro 40, "a marché sur une mine." Et puis
20 ensuite, encore plusieurs fois, deux fois,"marché sur une mine," "marché
21 sur une mine." Et puis ensuite, quelqu'un qui est mort à l'hôpital de
22 Vukovar.
23 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vous interromps parce que j'aimerais
24 savoir quel est l'objet de votre question. Que souhaitez-vous demander au
25 témoin ?
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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande au témoin de quelles victimes de la
2 guerre pour la patrie il est question ici, dans cette liste signée par le
3 témoin.
4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Fort bien, fort bien, nous avons compris.
5 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'entends pas. Le micro est coupé. L'interprète
6 n'entend pas.
7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] J'ai arrêté tout cela. J'ai arrêté tout
8 cela. D'abord, il faut que le témoin reçoive le document, qu'il puisse le
9 lire et après quoi, il pourra répondre aux questions.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai surliqné au marqueur la plupart des noms
11 que je viens de citer.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Numéro 2, Sopta Matisa, "tué devant sa maison
13 par la JNA, une patrouille militaire." Il a donc été tué parce qu'il a été
14 allé chez des amis deux jours après le départ de la colonie. Il a
15 simplement traversé la route. C'était un retraité de la JNA.
16 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Kraljevic.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Comme vous le comprendrez, le temps nous
19 est compté. Ce qui vient d'être dit, c'est que les noms de certaines
20 personnes figurent sur cette liste, au regard du mot "suicide" ou "accident
21 de la circulation." Or l'intitulé de la liste est "Victimes de guerre."
22 Donc, ce qui vient de vous être dit, c'est que ces personnes ne semblaient
23 pas pour être considérées comme des victimes de guerre si elles s'étaient
24 ou elles étaient décédées suite à un accident de la circulation. Peut-être
25 pourriez-vous apporter quelques explications complémentaires.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] M. Milosevic a tout simplement lu le mot
2 "suicide." Mais à côté de ce mot, on lit le mot "sévice" qui n'a pas grand-
3 chose à voir.
4 Dans la majorité des cas, on a ici des gens qui sont -- qui ont subi des
5 sévices. Quant à celui qui est mort des suites d'un accident de la
6 circulation, la cause de cet accident n'a jamais été confirmée. Et les
7 causes de l'accident peuvent être diverses. Je ne sais pas ce que la cause
8 était dans ce cas précise. Mais dans la majorité des cas qui sont écrits
9 sur cette liste, on voit par exemple "Zoran Urban", tué la nuit dans la rue
10 Matija Gubac." Alors, vous voyez. Il n'a pas été tué par la JNA, mais au
11 cours de l'occupation d'Ilok. Donc, il a été tué pendant l'occupation
12 d'Ilok, au cours de laquelle un certain nombre d'assassinats se sont
13 produits. Parce que l'ordre public n'était pas maintenu, et que beaucoup de
14 gens partaient et circulaient un peu dans tous les sens.
15 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Est-ce que vous souhaitez demander le
16 versement au dossier de ces deux listes, Monsieur Milosevic ?
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, oui.
18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Fort bien. Donc, elles seront versées au
19 dossier. Je demande une cote.
20 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Pièce à conviction de la Défense 175,
21 Monsieur le Président.
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Kraljevic, j'ai une
23 question à vous poser. Etes-vous en train de me dire que, même en cas
24 d'accident de la circulation, les personnes concernées auraient pu subir
25 des sévices de la part de la JNA avant l'accident d'automobile ?
Page 25455
1 LE TÉMOIN : [interprétation] En fait, dans la réalité, il y a si je ne
2 m'abuse, un sinon deux accidents de la circulation. Mais aucun de ces
3 hommes, à mon avis, n'a subi des sévices de la part de l'armée yougoslave.
4 Cela dit, ces personnes ont pu être des victimes pour d'autres raisons.
5 Donc, ce que je réponds à votre question, c'est que tout à fait
6 précisément, dans ces deux cas la JNA n'était pas impliquée.
7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Une question encore, Monsieur Milosevic,
8 parce que votre temps est pratiquement écoulé.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien, Monsieur May.
10 M. MILOSEVIC : [interprétation]
11 Q. J'ai encore une question à vous poser au sujet des documents que vous
12 avez soumis à ce Tribunal. Nous avons où l'on voit "SK/4," liste des
13 personnes qui sont restées à Ilok après le 17 octobre, mais qui ont été
14 expulsées par la suite. Alors, dites-moi je vous prie, dans quelle
15 direction ces personnes ont été chassées et par qui ?
16 R. Les pressions de la police de Krajina au pouvoir à Ilok étaient
17 incessantes. Et il y avait aussi des pressions exercées par un certain
18 d'habitants.
19 Q. Mais vous avez une liste ici de personnes expulsées en 1995. Qui les a
20 expulsées en 1995 ?
21 R. En 1995, c'est la période qui fait suite à l'entrée dans la ville
22 d'Ilok des réfugiés originaires de Knin et d'autres localités. A ce moment-
23 là, encore une fois, des pressions énormes ont été exercées sur les
24 habitants d'Ilok qui n'étaient pas encore partis.
25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Maître Tapuskovic.
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1 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je demanderais à M. Kraljevic de nous
2 apporter quelques explications complémentaires au sujet de sa déclaration
3 faite le 8 novembre 1995.
4 Questions par Me Tapuskovic :
5 Q. [interprétation] Au paragraphe 4, vous dites que le nombre total des
6 habitants d'Ilok à ce moment-là, était de 6 797 habitants, n'est-ce pas ?
7 R. Six mille sept cents, selon le recensement de 1991. Effectivement,
8 d'après le recensement 1991, c'était bien 6 797 habitants.
9 Q. Puis au paragraphe 6, vous dites qu'en juin 1991, les unités de la
10 Défense territoriale étaient toujours associées ou attachées à la JNA. Mais
11 vous dites qu'après la proclamation de l'indépendance en juin, la ville
12 d'Ilok avait constitué une force de Défense civile qui, elle était
13 rattachée à la police.
14 R. Je ne sais pas où se trouve exactement ce passage.
15 Q. Il s'agit du paragraphe 6, page 2, en version B/C/S. C'est le deuxième
16 paragraphe à partir du bas.
17 R. Les unités de la Défense civile de Ilok, se composaient d'environ 500
18 hommes.
19 Q. J'aurai une question à ce propos plus tard. Mais vous dites un peu plus
20 bas que la ville, en juin, après la proclamation de l'indépendance, qui
21 s'était fait au cours de ce mois de juin, avait constitué une force de
22 Défense civile attachée à la police. C'est bien cela, n'est-ce pas ?
23 R. Oui.
24 Q. Une dernière phrase : "L'unité de cette Défense civile d'Ilok se
25 composait d'environ 200 hommes, qui étaient armés par la police et payés
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1 par des dons fait dans la municipalité. Et leurs armes se composaient
2 surtout de fusils, plus tard, ils se sont procurés cinq lance- roquettes.
3 Et leur commandait c'était Josip Vuletic, n'est-ce pas ?
4 R. Oui.
5 Q. Pourquoi, aussitôt après la proclamation de l'indépendance en juin,
6 alors qu'il n'y avait pas de conflits dans les alentours, pourquoi est-ce
7 qu'il était nécessaire d'armer 200 hommes sur une population de 6 997
8 personnes et de les doter de fusils et de lance-grenades ?
9 R. Je ne pense pas que ce soit ce qui est écrit ici.
10 Q. Mais c'est ce que vous avez déclaré.
11 R. Je pense qu'ils étaient environ une trentaine. Cependant en juin, il se
12 peut qu'ils aient disposé de quelques fusils, le reste du matériel, des
13 armes a été procuré plus tard. Et ceci mis à part, il y a eu les événements
14 qui sont survenus au niveau du pont et qui étaient antérieur.
15 Q. Mais là je cite vos propres termes au moment où vous parlez du mois de
16 juin, juin 1991, et vous parlez de 200 hommes qui sont munis de fusils ?
17 R. Ce n'est pas exact. Non, il n'y avait pas autant de fusils à l'époque.
18 Q. Je vous remercie. Cependant, si nous regardons maintenant
19 l'intercalaire 2, ils sont contenus, s'agissant de l'ultimatum. C'est un
20 document adressé aux habitants du village de Bapska. Dans la première
21 phrase, nous sommes ici à l'examen de l'intercalaire 2 du document, on dit
22 : "Depuis un certain temps, les unités de la JNA cantonnées dans la
23 municipalité de Vukovar ont été en butte à des attaques lancées par des
24 membres du Corps de la garde nationale, DNG, le MUP de Croatie et des
25 civils en armes." Est-ce bien exact ? Parce que vous dites qu'à certains
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1 égards, qu'ils avaient formulé un ultimatum. Mais est-ce que cette première
2 phrase est exacte, est-il exact de dire qu'il y a eu des incidents de ce
3 genre, à savoir que des civils armés ont attaqué des unités de la JNA ?
4 R. C'est ce qu'écrit ce commandant de la JNA, personne d'autres. Et cet
5 homme affiche ici son avis personnel.
6 Q. C'est bien comme ça que j'ai compris la chose. Cependant, vous dites au
7 paragraphe 15 de votre déclaration au préalable, et c'est ce dont vous avez
8 parlé il y a à peine un instant, vous avez dit que vous étiez prêt à
9 remettre vos armes à la police parce que c'est la police qui avait pour
10 tâche de maintenir l'ordre public. Et on dit ici : "Nous n'étions pas prêts
11 à donner nos armes à la JNA."
12 R. C'est exact.
13 Q. Par conséquent, vous étiez prêt à donner vos armes à la police, police
14 qui vous a, au départ, déjà donné ses armes. Mais vous n'étiez pas prêt à
15 les donner à la JNA.
16 R. C'est exact.
17 Q. Je n'ai que quelques questions supplémentaires à vous poser. Elle porte
18 sur le document se trouvant à l'intercalaire 6. Vous ne vouliez pas rendre
19 ou donner vos armes, restituer ces armes à la JNA, à la place de cela, vous
20 avez décidé de quitter ce territoire ?
21 R. Enfin de compte, les armes ont été laissées à la JNA. Au moment de
22 partir, nous avons donné ces armes à la JNA.
23 Q. Vous ne l'avez pas dit une seule fois jusqu'à ce moment même.
24 R. Mais, c'est écrit dans l'accord.
25 Q. Mais, est-ce que vous l'avez vraiment fait cela ?
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1 R. Oui.
2 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Saxon, avez-vous des questions
3 supplémentaires.
4 Nouvel interrogatoire par M. Saxon :
5 Q. [interprétation] Au cours du contre-interrogatoire qui vient de se
6 terminer, M. Milosevic vous a demandé si vous et vos concitoyens vous avez
7 été contraints de partir au moment où le convoie est parti d'Ilok le 17
8 octobre. Dans votre réponse, vous avez fait référence à une épée de
9 Damoclès qui se trouvait au-dessus de vos têtes. Est-ce que vous êtes
10 partis ce 17 octobre, ce sera ma première question ?
11 R. Oui.
12 Q. Est-ce que vous aviez un choix quelqu'il soit ?
13 R. J'avais le sentiment de ne pas avoir le choix, de décider quoi que ce
14 soit.
15 Q. M. Milosevic vous a montré le document de l'intercalaire 9, s'y trouve
16 une liste de personnes chassées, expulsées de la région d'Ilok au cours de
17 l'année 1993. Est-ce que c'est vous qui avez constitué cette liste ?
18 R. Oui.
19 Q. Vous avez dit que des pressions avaient été exercées sur ceux qui
20 étaient restés à Ilok. Pourriez-vous nous dire quelle était la nature de
21 ces pressions qui fit que ces gens se sont sentis forcer de partir ?
22 Pourriez-vous être plus précis ?
23 R. Dès le départ de notre convoie d'Ilok, l'armée est entrée.
24 Mais la police s'était également organisée. A mon avis, en fin de compte,
25 il n'y a plus qu'un seul policier à Ilok. Beaucoup de citoyens ont été
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1 placés en détention, au QG de la police, dans les sous-sols de la police,
2 ont été soumis à des mauvais traitements. Beaucoup d'habitants ont dû
3 essayer de voir où se trouvaient des mines, ont subi des sévices divers. On
4 peut dire que c'était effectivement une situation, des souffrances atroces
5 pour ces personnes. Il y a beaucoup de gens qui ont été aussi victimes
6 d'ostracisme. On les montrait du doigt. On disait qu'ils faisaient partie
7 du HDZ, qu'ils dissimulaient des armes, ça s'est passé un peu partout, à
8 Sarengrad, à Bapska, mais aussi dans notre ville d'Ilok.
9 Q. Est-ce qu'il y a des réfugiés serbes venant d'autres parties de la
10 région qui sont arrivés à Ilok après 1991 ?
11 R. Des réfugiés sont arrivés d'autres parties du pays et ça commencé vers
12 le Noël 1991. Peu de temps auparavant, certains réfugiés étaient arrivés de
13 Vukovar. Ces réfugiés se sont installés près des maisons vacantes, des
14 maisons vides, mais aussi parfois dans des maisons où habitaient des
15 Croates, après que ceux-ci en furent chassés.
16 Q. L'arrivée de réfugiés serbes à Ilok a-t-elle accru la pression exercée
17 sur ceux des habitants qui étaient restés en ville ?
18 R. Oui.
19 M. SAXON : [interprétation] Je vous remercie. Je n'ai pas d'autres
20 questions à vous poser.
21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ceci met fin à votre déposition, Monsieur
22 Kraljevic. Merci d'être venu en tant que témoin au Tribunal pénal
23 international. Vous pouvez désormais disposer.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.
25 [Le témoin se retire]
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1 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Le témoin suivant est un témoin
2 bénéficiant de mesures de protection. Il s'agit du témoin
3 C-1175, il faudra donc prendre des dispositions dans ce sens.
4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vais demander au témoin de prononcer
6 la déclaration solennelle.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirais la
8 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
9 LE TÉMOIN : TÉMOIN C-1175.
10 [Le témoin répond par l'interprète]
11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vous remercie, veuillez vous asseoir.
12 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le
13 Président, de me donner la parole.
14 Interrogatoire principal par Mme Uertz-Retzlaff :
15 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin, je vais vous demander d'examiner
16 la feuille que vous avez sous les yeux, où figure le pseudonyme. Est-ce
17 qu'on voit bien votre nom qui figure à la première ligne ?
18 R. Oui.
19 Q. Vous serez, pour les besoins de votre déposition, le témoin C-1175,
20 puisque les mesures de protection que vous avez demandées vous ont été
21 accordées ?
22 Avez-vous fourni une déclaration aux enquêteurs du bureau du Procureur en
23 2001 ?
24 R. Oui.
25 Q. Est-ce que, par la suite, vous avez de nouveau rencontré ce même
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1 enquêteur, et celui-ci vous a-t-il montré des photos, qui vous ont permis
2 de reconnaître une photographie d'amateur, que vous connaissiez de
3 Vukovar ?
4 R. Oui.
5 Q. Avez-vous passé en revue votre déclaration en présence d'un
6 représentant du Tribunal, du greffe du Tribunal, et avez-vous à cette
7 occasion précisé que ces déclarations étaient exactes, mise à part une
8 correction ?
9 R. Oui.
10 Q. Monsieur le Président, l'Accusation demande le versement des pièces
11 composant, en application de l'Article 92 bis, dont deux croquis et une
12 photo qui ont été utilisés au cours des entretiens, et mentionnés dans les
13 applications.
14 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce d'Accusation 517.
15 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, je vais
16 maintenant vous donner lecture des résumés concernant ce témoin et poser
17 quelques questions à peine supplémentaires.
18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.
19 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Le témoin C-1175 est d'origine serbe.
20 Il a grandi dans la ville de Vukovar, mais au cours des événements de 1991,
21 il habitait à Dalj. Fin août, début septembre 1991, ce pendant une période
22 de trois semaines, il a servi dans les rangs de la Défense territoriale de
23 Dalj et était assigné au QG de la TO. Par la suite, après avoir quitté la
24 Défense territoriale, il avait coutume de se rendre fréquemment au QG de la
25 Défense territoriale.
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1 Ce QG se trouvait dans le bâtiment de la communauté locale. Le commandant
2 à l'époque de la TO s'appelait Pavle Milanovic, surnommé Pajo. Un certain
3 Milorad Stricevic, qui se qualifiait lui-même de colonel, était responsable
4 de la sécurité de la Défense territoriale et était à la tête d'une unité de
5 la police. Il habitait dans un bâtiment, se trouvant derrière le bâtiment
6 de la communauté locale. Le témoin a pu constater que Zeljko Raznjatovic,
7 surnommé Arkan, a rendu visite à Milanovic et à Stricevic. Il a aussi vu
8 Radovan Stojcevic, surnommé Badza et un certain Zavisic, qui sont venus au
9 QG de la TO. Le témoin a fourni un croquis, montrant la configuration du
10 bâtiment de la communauté locale.
11 Ce témoin C-1175 a vu que des habitants non-serbes, des Croates et des
12 Hongrois, étaient interrogés, maltraités et soumis à des passages à tabac,
13 ainsi que détenus par la TO et par les membres de l'unité de la police
14 commandée par Stricevic. Des volontaires sont également venus de
15 Prigrevica, à Dalj, pour interroger et frapper les détenus. Le témoin a
16 fait ces observations pendant le temps qu'il a passé dans la Défense
17 territoriale et au cours des visites ultérieures qu'il a effectuées.
18 Je vais demander que l'intercalaire 4, de la pièce 517 soit soumis au
19 témoin. Madame l'Huissière, voulez-vous bien placer ce croquis sous notre
20 rétroprojecteur.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que ce n'est pas sous pli
22 scellé ?
23 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oh, oui, j'avais oublié.
24 En fait nous pouvons placer ce croquis sous notre rétroprojecteur, sans
25 montrer le paraphe. S'il y a dépôt sous pli scellé, c'est parce qu'il y a
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1 eu paraphe apposé à ce croquis, des initiales en tout cas du témoin.
2 Q. Veuillez vous servir du pointeur pour nous indiquer dans quel bâtiment
3 vous, vous avez travaillé et où se trouvait le QG de la Défense
4 territoriale ?
5 R. [Le témoin s'exécute]
6 Q. Aux fins du dossier d'audience, je voudrais que soit consigné que le
7 témoin indique le bâtiment de la communauté locale, comme étant le QG de la
8 TO.
9 Monsieur, veuillez indiquer l'endroit où habitait Milorad Stricevic ?
10 R. [Le témoin s'exécute]
11 Q. Le témoin indique, à l'aide du pointeur, le bâtiment qui se trouve à
12 droite, derrière le bâtiment de la communauté locale, où il est indiqué que
13 ce sont des bureaux et la prison.
14 Fort bien, Monsieur le Témoin, vous avez dit qu'il y avait des gens qui
15 étaient gardés en détention, des Croates et des Hongrois, et que ces gens
16 étaient soumis à des passages à tabac dans ces locaux. Pourriez-vous nous
17 dire où vous avez vu ceci se produire ?
18 R. Ici.
19 Q. Le témoin indique le bâtiment se trouvant à droite, où est apposé le
20 mot "prison". Vous avez dit qu'il y avait aussi des volontaires de
21 Prigrevica. Où avez-vous vu ces volontaires frapper des gens ?
22 R. Ici, et aussi à la prison.
23 Q. Une fois de plus le témoin indique le bâtiment qui porte la mention
24 "prison".
25 Je vous remercie, ce sera suffisant. Encore une question. Où se trouve
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1 Prigrevica ?
2 R. Prigrevica se trouve entre Apatin et Sombor.
3 Q. Voulez-vous nous dire que c'est un endroit qui se trouve à Serbie ?
4 R. Oui, en Serbie.
5 Q. Ces volontaires venus de Prigrevica, à quoi ressemblent-ils ?
6 R. Ils portaient la barbe, ils avaient ces coiffes en fourrure de Sajkaca.
7 Q. Etaient-ils associés ou affiliés à un parti politique précis ?
8 R. Pour autant que je sache, ce n'était pas le cas.
9 Q. Et ces hommes coopéraient-ils avec la TO de Dalj ou avec Stricevic ?
10 R. Ils sont uniquement venus voir Stricevic.
11 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je poursuis maintenant la lecture du
12 résumé.
13 A la suite de la chute de Vukovar, un grand nombre d'habitants de Vukovar
14 ont été amenés à Dalj en autocars et en camions sous escorte de la JNA. Les
15 autocars et les camions ont d'abord été emmenés au QG de la JNA à Dalj qui
16 se trouvait dans le bâtiment IPK de Ratarstvo, se trouvant lui-même près de
17 la station ferroviaire de Dalj. Les femmes, elles, ont été emmenées à la
18 Croix rouge et transférées au cinéma de Dalj, au cours de la nuit, pour
19 passer la nuit, et puis elles sont envoyées par bus en Serbie le lendemain.
20 Un groupe d'hommes de Vukovar ont été détenus dans le bâtiment de la police
21 de Dalj, qui était situé dans le bâtiment Stara Zadruga. D'autres ont été
22 détenus au QG de la TO ou dans ce bâtiment où était installé Stricevic.
23 Parmi les détenus, il y avait donc ces personnes qui étaient détenues au QG
24 et le témoin C-1175 a pu obtenir la libération de personnes qu'il
25 connaissait en obtenant une autorisation écrite de Pavle Milanovic.
Page 25466
1 Q. En paragraphe 16, vous expliquez que vous avez essayé d'obtenir la
2 libération d'un de vos amis. Vous craigniez que le pire ou quelque chose de
3 mauvais ne leur arrive. Quelles étaient vos craintes à l'encontre de ces
4 personnes ?
5 R. J'avais peur qu'éventuellement que les gens de Prigrevica puissent
6 s'emparer d'eux ou des gens du même genre.
7 Q. En paragraphe 13 de votre déclaration, vous faites référence au QG de
8 la JNA à Ilok. Est-ce qu'il y a eu coopération entre la JNA et la TO ? Est-
9 ce qu'éventuellement vous le savez si c'était le cas ?
10 R. Il y a eu un certain degré de collaboration, mais je ne suis pas
11 vraiment au courant de cela.
12 Q. Est-ce qu'il vous est arrivé de voir qu'il y a eu des rencontres -- je
13 parle ici de M. Milanovic -- qui aurait eu des rencontres avec des
14 personnes de l'état major de la JNA ?
15 R. J'ai vu Milovanovic aller à la JNA.
16 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je poursuis la lecture du résumé.
17 Plusieurs jours après la chute de Vukovar, le commandant de la TO,
18 Milanovic, est venu à la maison du témoin. Il lui a dit qu'il avait besoin
19 de son aide pour enterrer les cadavres. Le témoin C-1175, en compagnie de
20 Milanovic et d'une tierce personne, sont allés en voiture à la ferme de
21 Lovas. Ils y ont trouvé de dix à onze cadavres en vêtements civils qui
22 étaient éparpillés sur une pente qui descendait vers le Danube. Le témoin a
23 fait un croquis indiquant l'endroit où il a trouvé ces corps.
24 Milanovic a dit au témoin que ces victimes avaient été tuées par des
25 membres de la TO de Borovo Selo. Un officier, un haut membre de la police,
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1 M. Obradovic de Vukovar, est arrivé également sur les lieux et a donné des
2 instructions au témoin et à cette tierce personne pour dire quoi faire avec
3 des cadavres. Avec l'aide de cette tierce personne, le témoin C-1175 a
4 chargé les corps, qui étaient déjà en partie décomposés, sur la pelle du
5 bulldozer. Ce bulldozer a emmené des cadavres vers un autre endroit se
6 trouvant dans le périmètre de la ferme. Le témoin a reconnu un des cadavres
7 comme étant celui d'un vitrier et un photographe amateur qu'il connaissait
8 de Vukovar.
9 Q. Monsieur, je vous pose la question suivante : Obradovic, cet officier
10 de police, a-t-il expliqué pourquoi il fallait enlever les corps ?
11 R. Il a dit tout d'abord qu'il fallait les enterrer et que des
12 observateurs internationaux étaient attendus. Il fallait donc qu'on ne
13 trouve pas à l'arrivée de ces observateurs les cadavres se trouvant à cet
14 endroit.
15 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions à
16 poser au nom de l'Accusation.
17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic, vous avez la
18 parole.
19 Contre-interrogatoire par M. Milosevic :
20 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin C-1175, vous êtes à Dalj, n'est-ce
21 pas ?
22 R. Non. Non. Moi, je suis né à Vukovar.
23 Q. Mais vous parlez dans le cadre de votre déposition du temps où vous
24 habitiez à Dalj ?
25 R. Oui.
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1 Q. Et tout ce qui fait partie de votre déposition porte sur Dalj ?
2 R. Oui.
3 Q. Est-ce qu'il y avait à Dalj des unités de la JNA ?
4 R. Il y a une unité qui est venue à PP Dalj.
5 Q. Qu'est-ce que c'est "PP Dalj" ?
6 R. C'est une exploitation, une coopérative agricole.
7 Q. A quel moment a-t-elle arrivée ?
8 R. Je ne peux pas vous donner la date exacte de sa venue, mais c'était
9 après la chute de Vukovar.
10 Q. Fort bien. C'est unité était-elle présente au moment où sont survenus
11 les événements qui font l'objet de votre déposition ?
12 R. Ils se trouvaient, ces hommes -- ou les membres de l'unité se
13 trouvaient à la coopérative.
14 Q. Et les membres de la JNA ont-ils eu quoi que ce soit à voir avec ces
15 activités illégales ?
16 R. Nous, nous étions des civils et en tant que tel on n'avait pas vraiment
17 la possibilité d'accéder à cette coopérative où ils se trouvaient.
18 Q. Est-ce que vous avez vu cette unité ? Vous souvenez-vous de quelque
19 activité que ce soit ?
20 R. Non.
21 Q. Avez-vous vu cette unité commettre des actes, des exactions envers qui
22 que ce soit ?
23 R. Non.
24 Q. En juger -- parce que j'ai entendu au début, pendant un certain temps,
25 vous avez été membre de la Défense territoriale, n'est-ce pas ?
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1 R. Oui.
2 Q. Combien de temps l'avez-vous été ?
3 R. Un mois à peu près.
4 Q. A quel moment avez-vous rejoint la Défense territoriale ?
5 R. Vers le 25 août 1991.
6 Q. 1991, je vois. Est-ce qu'il n'y avait que des Serbes dans la Défense
7 territoriale ?
8 R. En grande partie.
9 Q. Mais qui avait-il d'autres mis à part les Serbes à la Défense
10 territoriale ?
11 R. Il y avait peut-être l'un ou l'autre Hongrois.
12 Q. Des personnes d'autres appartenances ethniques ?
13 R. Non.
14 Q. En tant que Serbes, vous avez rejoint la Défense territoriale de votre
15 plein gré. Il n'y a pas eu mobilisation ?
16 R. Non. Non. Je me suis porté volontaire.
17 Q. Et puis vous êtes parti aussi quand vous l'avez voulu ?
18 R. Oui.
19 Q. Personne ne vous a obligé de rester ?
20 R. Non.
21 Q. En d'autres termes, la Défense territoriale de Dalj et tous ses membres
22 étaient des volontaires de la localité ?
23 R. C'est exact.
24 Q. Est-ce que tous les hommes étaient de Dalj ou est-ce qu'il y avait des
25 gens qui venaient des environs ?
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1 R. C'était surtout des gens de Dalj.
2 Q. Et mis à part ceux qui étaient originaires de Dalj, d'où venaient les
3 autres ?
4 R. Certains venaient d'Erdut.
5 Q. Je vois donc des environs.
6 R. C'est exact.
7 Q. Je vous remercie. Dans votre déclaration au préalable, vous dites qu'à
8 Dalj, les problèmes ont surgi entre les Serbes et les Croates du côté du
9 mois de mars 1991. C'est bien cela, Monsieur le Témoin C-1175 ?
10 R. Oui.
11 Q. Alors dites-moi ceci : quand vous parlez de "problèmes", pensez-vous à
12 un conflit armé ou pensez-vous à autre chose, un autre type de problème ?
13 R. Je pense à un conflit armé.
14 Q. Je vois. Donc cela ça s'est passé en mars 1991.
15 R. Oui.
16 Q. Qui a provoqué ce conflit armé ?
17 R. Je pense que ce sont les Croates qui sont à l'origine.
18 Q. Et comment le sont-ils à l'origine de ces affrontements armés ?
19 R. Il y a eu des coups de tirs qui ont été échangés. Il y a eu des
20 querelles, des combats qui ont éclatés. Des gens étaient placés en
21 détention.
22 Q. Appréhendés par la police croate ?
23 R. Oui.
24 Q. Et jusqu'aux élections de 1990 et jusqu'au moment où on a formé ces
25 nouvelles forces de polices, est-ce que la paix régnait à Dalj et les
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1 rapports entre les différents groupes de la population étaient bons ?
2 R. Oui.
3 Q. Il n'y avait pas de haine, d'affrontements interethniques, pas de
4 disputes ?
5 R. Non.
6 Q. En juger par votre déclaration au préalable, il semblerait que certains
7 Croates du village ont commencé à recevoir des armes, c'est bien cela ?
8 R. Oui.
9 Q. Si je comprends bien, ces armes sont arrivées dans un camion de marque
10 TAM et puis distribuées parmi les Croates ?
11 R. Oui.
12 Q. Savez-vous par hasard combien il y avait de ces armes qui ont été
13 distribués aux habitants Croates de Dalj ?
14 R. Beaucoup, pas mal.
15 Q. Mais, est-ce que vous pourriez être un peu plus précis ?
16 R. Une centaine, je dirais.
17 Q. Qu'est-ce que vous voulez dire comme "armes", des fusils automatiques ?
18 R. Oui.
19 Q. Et avant que ces gens reçoivent les armes, avant cet incident du camion
20 de marque TAM dans ces armes, est-ce qu'il y a eu des incidents provoqués
21 par les Serbes contre les Croates ?
22 R. Non.
23 Q. Est-ce que les Croates ont provoqué des incidents contre les Serbes
24 auparavant ?
25 R. Oui, il y a eu des provocations de ce genre.
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1 Q. Mais dites-moi, après la distribution des armes, qu'est-ce qui a
2 commencé à se passer ?
3 R. Je ne sais pas comment le dire. On a commencé à voir des patrouilles,
4 des gardes qui fréquentaient les rues.
5 Q. Est-il exact de dire que, dès le mois d'avril 1991, puisque vous avez
6 dit que les affrontements ou les heurts avaient déjà commencé en mars, est-
7 il exact de dire qu'à Dalj dès avril 1991, plusieurs Serbes ont été arrêtés
8 et emmenés à Osijek ?
9 R. Oui.
10 Q. Est-il vrai que ces personnes ont été sévèrement passées à tabac ?
11 R. Oui.
12 Q. Savez-vous peut-être ce qui a provoqué leurs arrestations et leurs
13 détentions ainsi que les passages à tabac ?
14 R. Non.
15 Q. Est-ce que ces personnes auraient fait quelque chose -- du moins
16 d'après ce que vous avez entendu dire ou d'après ce que vous saviez ?
17 R. Non.
18 Q. Alors pourquoi, à votre avis, ces personnes ont-elles été arrêtées et
19 ont passé à tabac -- emmenées là et passées à tabac ?
20 R. Difficile d'expliquer la raison de tout cela.
21 Q. L'incident qui est survenu au mois d'avril, au cours duquel plusieurs
22 Serbes ont été appréhendés, emmenés, passés à tabac, est-ce que ceci a
23 provoqué de graves inquiétudes dans la population serbe de Dalj ?
24 R. Oui.
25 Q. Est-ce que spontanément il y a eu un rassemblement de personnes devant
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1 le poste de police de Dalj ?
2 R. Oui.
3 Q. Et qu'est-ce qui s'est passé ? Est-ce que les personnes se sont
4 rassemblées à cet endroit en guise de protestation pour poser des
5 revendications ?
6 R. Oui, elles ont exigé ces personnes la libération immédiate des autres.
7 Q. Mais, il n'y a pas eu de violence.
8 R. Non.
9 Q. Alors, quelle est la réponse donnée à ces personnes ?
10 R. Il leur a été dit que les autres allaient être libérés sous peu, ce qui
11 s'est passé dans l'après-midi vers 16 heures.
12 Q. Puis vous avez découvert que ces personnes avaient subi des passages à
13 tabac ?
14 R. Oui.
15 Q. Est-ce que vous avez eu l'occasion de parler à ces gens ? Que leur a-t-
16 on demandé ?
17 R. Apparemment ces gens avaient été trouvés dans un parc, avaient été
18 appréhendés, placés en détention, passés à tabac.
19 Q. Simplement parce qu'elles se trouvaient dans ce parc ?
20 R. D'après ce que j'ai entendu dire, ces personnes avaient été arrêtés
21 dans un parc.
22 Q. Il y a eu cet incident, mais celui-ci mis à part, incident qui
23 d'ailleurs manifestement a accru des inquiétudes de la population serbe de
24 Dalj, vous l'avez confirmé ici même. Vous souvenez-vous d'un événement qui
25 s'est produit à Borovo Selo, village voisin ?
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1 R. Oui.
2 Q. Est-ce que là aussi cet incident a eu un effet négatif sur le climat
3 qui régnait parmi les Serbes sur leurs sentiments ? Est-ce que cela a accru
4 la peur qu'il ressentait dans la région ?
5 R. Oui.
6 Q. Et savez-vous qu'il y a eu un conflit armé grave qui a surgi entre la
7 police croate et qui avait attaqué la population serbe de Borovo Selo ?
8 Est-ce bien cela ce qui s'est passé ?
9 R. Oui.
10 Q. Est-il exact de dire qu'ils ont fait irruption dans le village et
11 qu'ils ont ouvert le feu sur les habitants ?
12 R. Oui.
13 Q. Sans avoir tiré ou sans avoir fait d'avertissements au préalable ?
14 R. Oui, sans sommation.
15 Q. Oui, et ça s'est passé au centre même de Borovo Selo ?
16 R. Oui, au centre même de la ville.
17 Q. J'ai ici des renseignements. Est-ce qu'ils sont exacts, Monsieur le
18 Témoin C-1175, puisque ceci s'est passé près de chez-vous ? Est-ce qu'un
19 des habitants de la localité a été tué ? Est-ce qu'ils ont pris en otages à
20 la clinique des femmes ainsi que le personnel de l'établissement
21 hospitalier et des patients ambulatoires, ainsi que des enfants ?
22 R. Oui.
23 Q. Est-il exact de dire que, grâce à l'intervention de la JNA, ces soldats
24 ou plutôt ces policiers croates ont pu être sauvés et ont pu quitter le
25 village ?
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1 R. C'est exact.
2 Q. A la vue de vos connaissances personnelles, pouvez-nous dire si
3 l'annonce faite par le commandant de la 1ière armée le lendemain est exact ?
4 Les membres de la JNA, au cours des événements tragiques de Borovo Selo ne
5 sont pas servis d'armes à feu et n'ont pas tiré un seul coup, mais grâce à
6 l'intervention d'une unité de la JNA, il a pu être possible d'empêcher un
7 conflit armé et toute effusion de sang ?
8 R. Exact.
9 Q. Donc, vous êtes au courant de cet incident qui s'est produit dans votre
10 quartier ? La JNA est arrivée et, sans se servir d'armes, a réussi à
11 enrayer le conflit et à sauver la police croate ou les policiers croates
12 qui avaient attaqué les habitants de Borovo Selo ?
13 R. Oui.
14 Q. Savez-vous quoi que ce soit à propos du fait qu'après cette opération
15 qui a heureusement échoué à Borovo Selo, des groupes ont été organisés et
16 destinés à terroriser la population serbe ? On les a qualifié de groupes
17 servant à la liquidation silencieuse ?
18 R. Oui.
19 Q. Savez-vous quoi que ce soit à propos des victimes de ces groupes ?
20 R. Non.
21 Q. Vous souvenez-vous que le 3 mai 1991, le restaurant Sareka [phon] a été
22 dynamité à l'explosif. Il était la propriété de Djordje Pesic [phon] de
23 Borovo Selo ?
24 R. Oui.
25 Q. Le 15 avril 1991, le café Krajisk [phon] a été dynamité à l'explosif,
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1 c'était aussi la propriété d'un Serbe ?
2 R. Oui.
3 Q. Et le 6 mai, un café appelé Tufo [phon] a été attaqué, d'autres des
4 mines ont été placées ailleurs, il y a eu des attaques armées sur des
5 propriétés, qui étaient la propriété de Serbes ?
6 R. Oui.
7 Q. Est-ce que c'était là des actes qui auraient dû faire comprendre -- ou
8 qui devaient faire comprendre clairement aux Serbes qu'ils devaient partir
9 car ils n'étaient pas souhaités dans la région ?
10 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je pense que l'heure est venu de lever
11 l'audience. Vous vous disposerez de trois quarts d'heure supplémentaire
12 pour terminer votre contre-interrogatoire si vous en avez besoin.
13 Monsieur le Témoin C-1175, je vous rappelle que vous n'êtes sensé parler à
14 personne de la nature -- de la teneur de votre déposition pendant que
15 l'audience est levée et d'ailleurs pendant que vous comparaissez en tant
16 que témoin. Ceci concerne également les représentants du bureau du
17 Procureur. Veuillez être de retour à l'audience dans ce prétoire demain
18 matin à 9 heures pour terminer votre déposition.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
20 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Fort bien.
21 --- L'audience est levée à 13 heures 50 et reprendra le jeudi 28 août 2003,
22 à 9 heures.
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