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1 Le mercredi 10 septembre 2003
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 05.
5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, Monsieur Nice.
6 M. NICE : [interprétation] Brièvement, deux choses avant le retour du
7 témoin. Première chose, hier nous vous avions dit que nous allions demander
8 à modifier l'ordre de comparutions des deux témoins suivants. On avait
9 prévu Van Baal, puis le témoin C-007. Nous avions voulu les permuter, nous
10 vous avions avisé de la chose, parce que d'après ce que nous avions
11 compris, le témoin C-007 ne serait libre que demain, et il y aurait de
12 grosses dépenses occasionnées par les déplacements. Je me suis enquis de la
13 situation, mais ceci n'aura pas de répercussions considérables.
14 Excusez-moi, on aurait pu éviter de vous aviser de cette demande. Je ne
15 sais pas si nos amis de la Chambre et l'accusé se sont préparés en fonction
16 de ce que j'avais annoncé, mais nous pouvons poursuivre la comparution des
17 témoins, suivant l'ordre prévu au départ.
18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il faudrait limiter au maximum ces
19 modifications. Je comprends ça que certaines fois des questions de
20 logistique vous pose des problèmes, mais ceci impose d'énormes contraintes
21 sur les parties au procès.
22 M. NICE : [interprétation] J'en suis conscient.
23 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous allons donc avoir M. Van Baal, comme
24 nous en avions été informé initialement, puis nous aurons le témoin C-007.
25 M. NICE : [interprétation] Effectivement, à moins bien sûr que l'accusé et
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1 les amis de la Chambre qui auraient été avisés hier, comme je l'avais dit,
2 préféraient l'ordre proposé.
3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Maître Kay.
4 M. KAY : [interprétation] Nous avions pris des dispositions, mais nous
5 sommes tout à fait prêts à revenir à l'ordre initial.
6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous venez d'entendre
7 ce qui vient d'être dit. Je ne sais pas si vous aviez compris qu'ils
8 avaient d'abord l'intention du côté du bureau du Procureur d'appeler
9 d'abord à la barre le témoin C-007. Si en fait nous commençons par la
10 comparution de M. Van Baal, est-ce vous seriez satisfait ?
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Et bien, Van Baal, d'après la liste que j'ai
12 reçue, est prévu dans l'immédiat mais c'est pour la première fois que
13 j'entends parler du 007 qui passerait après. Mais ma foi, je suis au
14 courant.
15 Toutefois, je profite de l'occasion pour dire autre chose, Monsieur May.
16 Hier soir, --
17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Attendez. Attendez que nous précisions
18 les choses. Nous allons terminer l'audition du témoin qui a commencé puis
19 nous entendrons M. Van Baal. Cependant, il y a d'abord une question à
20 régler et puis nous reviendrons à ce que vous vouliez dire.
21 L'autre question concernait le témoin B-1610. Est-ce vous vouliez, le
22 concernant, lui poser des questions supplémentaires ?
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est celui où on m'a donné des transcriptions
24 supplémentaires hier ?
25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Effectivement, oui, des questions
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1 supplémentaires ou sujets supplémentaires.
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Non. Je n'ai pas de raisons ou de questions à
3 poser concernant ces transcriptions supplémentaires. Mais je tiens à tirer
4 votre attention sur le fait que là-bas, dans ces documents-là aussi, il
5 peut être aperçu qu'il avait indiqué la présence d'un officier de façon
6 explicite et il a affirmé que celui-ci s'était trouvé sur les lieux. Et il
7 a affirmé que cet officier-là était un représentant de l'armée de la
8 Republika Srpska et non pas de la JNA. Mais je ne vois pas de raison de
9 l'interroger à titre complémentaire rien que pour cela. Je tenais juste à
10 attirer votre attention sur ce fait-là.
11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Fort bien. Un instant. Un instant, s'il
12 vous plaît.
13 Nous relevons ce que vous avez dit. Vous pourrez, le moment voulu, attirer
14 notre attention sur ce point.
15 Monsieur Nice, apparemment ce témoin ne devra plus revenir dans ce
16 prétoire.
17 M. NICE : [interprétation] Autre question très brève.
18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Un instant. Un instant.
19 M. Milosevic voulait soulever un autre point.
20 Que voulez-vous dire, Monsieur Milosevic ?
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voulais dire, Monsieur May, qu'avec la
22 pratique qui est celle de ne pas me fournir de réponses concernant la
23 documentation énorme qui m'est communiquée ces derniers jours, il y a autre
24 chose en plus de cela. J'ai reçu cette liasse de documents qui concerne M.
25 Van Baal, hier soir. Ce matin, avant de venir ici en salle d'audience, j'ai
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1 reçu encore un addendum qui porte également sur M. Van Baal qui va passer
2 tout à l'heure. Avant-hier soir, j'ai reçu cette grosse liasse de papiers
3 qui concerne M. Ramic alors que lui est en train de témoigner. Donc, je
4 l'ai eu le soir d'avant son témoignage. J'estime que ce n'est pas là une
5 pratique qui devrait être autorisée.
6 Je voudrais également vous rappeler autre chose et une fois de plus, qu'à
7 plusieurs reprises déjà, il y a plusieurs mois et par la suite également,
8 je vous ai demandé quand est-ce, qu'à votre avis, je pourrais examiner les
9 milliers de cassettes et un demi million de pages qu'on m'a donné. Vous
10 avez toujours dit que vous alliez vous penchez sur la question mais je n'ai
11 jamais obtenu la réponse en question. Et cette pratique d'amoncellement de
12 documents et de communication au moment même de l'interrogatoire du témoin,
13 à mon avis, est tout à fait inacceptable. Du reste, cela est aussi valide
14 pour l'amoncellement de documents pour lesquels, physiquement parlant, je
15 n'ai pas la possibilité de les examiner.
16 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous savez qu'au cours de ce procès,
17 nombreuses furent les interruptions qui vous ont permis de passer en vue
18 d'autres questions. Certes, s'il y a un point particulier qui vous
19 préoccupe, nous l'examinerons. Je serai plus précis encore, nous allons
20 nous enquérir auprès du bureau du Procureur pour savoir quelle est la
21 situation se présentant actuellement.
22 Il n'est pas satisfaisant que des documents soient communiqués, surtout
23 s'ils sont nombreux, trop tard. Bien sûr, je tiens compte du fait de ce que
24 vous dites. Vous allez dire ces documents ont déjà été communiqués
25 auparavant.
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1 M. NICE : [interprétation] Pas nécessairement, cette fois-ci. En ce qui
2 concerne M. Ramic, il y avait certains documents en application de
3 l'Article 68 qui avaient été communiqués assez tard. J'apprendrai pourquoi
4 et je trouverai pourquoi ceci n'avait été communiqué auparavant. Et pour ce
5 qui est du général Van Baal, je verrai ce qu'il en est. Mais effectivement,
6 en ce qui concerne le témoin Ramic, on a communiqué assez tardivement
7 certaines archives de tribunal et peut-être que l'accusé va parler ce
8 matin.
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelle est la quantité totale des
10 documents communiqués tardivement ?
11 M. NICE : [interprétation] En ce qui concerne M. Ramic, je ne peux pas vous
12 le dire maintenant mais c'est une répétition, si vous voulez, de la
13 communication.
14 Vous le savez, l'Article 68 du règlement de procédure et de preuve nous
15 impose quelques obligations, des obligations, en fait, considérables. Hier,
16 nous avons eu une autre réunion avec les amis de la Chambre pour être bien
17 sûr que nous avions fait tout ce qui était possible de faire.
18 Malheureusement, les associés de l'accusé refusent d'assister à ces
19 réunions même s'ils y sont invités.
20 Nous faisons ces réunions pour veiller à ce que les paramètres soient bien
21 retenus et arrêtés de façon à ce qu'il y ait production et communication
22 dans les documents relevant de l'Article 68. Je ne sais pas pourquoi, ici,
23 il y a eu communication tardive de certains documents mais je vais
24 m'enquérir et je vous ferai rapport des raisons ainsi que de la somme de
25 documents.
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1 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il faudra réserver un temps d'audience au
2 cours de la semaine prochaine pour étudier ces questions. Mais je pense que
3 maintenant il faudrait poursuivre l'audience du témoin.
4 Oui, Monsieur Milosevic.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, voilà ce que j'ai reçu au sujet
6 de Ramic, c'est cette liasse-ci qui concerne Ramic, avant-hier soir en
7 l'unité de détention et l'interrogatoire a commencé hier.
8 Deuxièmement, hier, vous m'avez donné encore 45 minutes pour Ramic. Or,
9 moi, j'ai beaucoup trop de documents à parcourir et j'ai encore des
10 questions à poser par surcroît, ce qui fait que les 45 minutes ne suffiront
11 pas. Je voulais donc vous demander d'ores et déjà de m'accorder une
12 rallonge.
13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Commençons ou reprenons le contre-
14 interrogatoire. Nous ferons le point en temps utile.
15 M. NICE : [interprétation] Encore très brièvement, une autre chose. Vous
16 vous souviendrez, Messieurs les Juges, que le témoin Lilic avait produit
17 des documents venant des réunions du Conseil chargé l'harmonisation. Il y
18 avait des notes sténographiques de ce qu'on dit tous les participants, dont
19 l'accusé. Ceci a été présenté à la traduction. Nous avons maintenant des
20 projets de traduction qui font quelque 700 pages en anglais. La version
21 définitive va nécessiter encore plusieurs semaines. Nous n'y pouvons rien.
22 L'accusé a l'original de ces documents. S'il veut les utiliser dans son
23 contre-interrogatoire, il comprendra le texte.
24 Je sais que les Juges voudraient avoir les documents qui sont, en
25 puissance, intéressants et qui pourraient être de nature à exonérer
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1 l'accusé et l'accusé va peut-être vouloir s'en servir. Je ne sais pas si
2 l'on veut attendre la version définitive de cette traduction ou s'il faut
3 fournir les documents maintenant.
4 [La Chambre de première instance se concerte]
5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, nous voudrons obtenir le projet de
6 traduction.
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voulais juste vous dire, Monsieur May, que
8 je n'ai aucun document relatif à une harmonisation quelconque auquel viens
9 de se référer, M. Nice.
10 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, Monsieur Nice, est-ce que voulez
11 bien vérifier.
12 M. NICE : [interprétation] Je le ferai.
13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Faisons entrer le témoin.
14 M. NICE : [interprétation] Dans l'attente de l'arrivée du témoin, je
15 demande à l'accusé de vérifier la pièce 469, intercalaires 39 à 46, d'après
16 les informations que je viens de recevoir.
17 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
18 LE TÉMOIN: MUSTAFA RAMIC [Reprise]
19 [Le témoin répond par l'interprète]
20 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Désolé de vous avoir faites
21 attendre, Monsieur le Témoin. Nous avions des questions de procédure et
22 d'intendance à régler, en premier lieu. Hier, au moment de la suspension,
23 je vous ai dit que vous devriez pouvoir examiner la pièce D184. Je vais
24 maintenant demander que cette pièce soit présentée au témoin.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
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1 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Voulez-vous commenter ce document ou
2 pas ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai jamais vu ce document à ce jour. C'est
4 la première fois que je le vois, donc. Mais il s'agit de ce que l'on a
5 mentionné, hier. A savoir, une action, une opération terroriste consistant
6 à miner, comme l'a dit M. Milosevic, un train destiné à la Serbie. C'était
7 un train d'équipements militaires, d'armements qui se seraient trouvés à
8 Brcko.
9 D'abord, il se peut que ceci soit un document véridique parce qu'il porte
10 la date de 1991. Deuxièmement, ce que je remarque ici, c'est que tous les
11 signataires du document en question sont des personnes qui, par la suite,
12 dans le courant de la guerre, ont en fait été des tortionnaires et des
13 criminels à l'égard des citoyens qui étaient détenus dans la ville,
14 encerclés dans la ville. Ce sont des signataires de ces documents, ce sont
15 ces mêmes gens. Troisièmement, je répète qu'il n'y a pas eu d'équipements
16 de sortis de Brcko pour aller en Serbie. C'est l'inverse qui s'est fait. Et
17 je voulais donc dire ce qui suit. Pourquoi quelqu'un qui souhaiterait se
18 protéger, détruirait-il des armes qui allaient sortir de là où il se
19 trouvait ? Il ne pouvait que se féliciter que de voir ces armes s'en aller.
20 Et si étant -- et quand bien même cela était vrai, je ne suis pas au
21 courant. Il est évident que c'est une chose que ne m'a pas été présentée à
22 l'époque. Je ne me souviens pas du tout d'une réaction éventuelle du
23 commandant de la garnison, M. Milinkovic. Parce que je n'ai pas eu vent
24 d'observation de cette nature. Je m'en serais rappelé, si cela était vrai.
25 Alors, s'il y a eu des préparatifs d'action et d'opérations terroristes, il
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1 se peut que des individus aient envisagé de faire une chose pareille. C'est
2 tout ce que je voudrais dire.
3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Un instant, Monsieur Milosevic. Ces
4 signataires dont vous dites que ce sont des tortionnaires, des criminels,
5 des voyous. Pourriez-vous nous donner ces noms ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] On dit ici, dans le premier document, noté par
7 Petar Kaurinovic. Cela a été l'un des tortionnaires et des enquêteurs
8 pendant la guerre dans les locaux de SUP de l'époque. A savoir, des
9 instances de la police, du côté de l'agresseur.
10 Ensuite, c'était Kondic Zoran qui, lui aussi, se trouvait membre de cette
11 équipe, puis encore un dénommé Mihajlovic Krsto, un autre enquêteur qui se
12 trouvait être membre de l'équipe. On répète le nom de Kondic Zoran et
13 Mihajlovic Krsto, est un nom qui apparaît une fois de plus.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May.
15 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense que la teneur de la déclaration n'a
17 rien à voir du tout avec ces accusations forfaitaires que M. le Témoin --
18 arbitraires que M. le Témoin a adressé à l'intention des personnes qui ont
19 signé ces déclarations.
20 Contre-interrogatoire par M. Milosevic [Suite]:
21 Q. [interprétation] C'étaient des personnes habilitées à signer ces
22 documents au secrétariat municipal de l'Intérieur à Brcko. N'aurait-il pas
23 été ainsi, Monsieur Ramic ?
24 R. C'étaient des personnes qui faisaient partie de la police, qui ont été
25 chargées de l'enquête du côté de l'agresseur après les événements ou les
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1 combats. Ils sont restés à ces fonctions après les actes d'agression et
2 l'occupation de Brcko.
3 Q. Mais Monsieur Ramic, ceci concerne l'année 1991. Il s'agit d'actes
4 terroristes qui ont fait l'objet d'une enquête, et votre explication
5 concernant les rôles ultérieurement joués par ces personnes n'ont rien à
6 voir avec la déclaration en question. Je vous interroge au sujet de cette
7 déclaration, pour ma part.
8 R. Monsieur Milosevic, je n'ai pas vu à ce jour les documents présentés
9 ici. Ils ont été signés par des personnes que j'ai décrites tout à l'heure.
10 Alors, j'exprime tout d'abord, un doute à savoir, que ces documents ont
11 peut-être été rédigés à titre rétroactif. Et s'ils ont toutefois été
12 rédigés à l'époque même, ils ont probablement visé à causer des dissensions
13 sur des bases ethniques. C'est mon opinion.
14 Q. Donc, cette confiscation d'explosifs et l'enquête afférente c'était,
15 cela avait pour viser la provocation de conflits sur les bases ethniques.
16 R. J'ai lu hier qu'il y a eu beaucoup de contrebandes d'armes. Je ne nie
17 pas le fait qu'il y en ait eu. Je ne vais pas nier non plus le fait ou la
18 possibilité qu'il y ait eu confiscation ou saisie d'explosifs. Ce que je
19 nie, c'est que cette construction disant que cela avait pour viser la
20 destruction d'un train d'équipements militaires qui était dirigé vers la
21 Serbie.
22 Q. Mais cela est écrit dans la déclaration qu'on vous a montrée ?
23 R. Mais la déclaration est faite par les personnes que je viens de vous
24 décrire.
25 Q. Cette déclaration a été faite par la personne que l'on a attrapée sur
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1 le fait avec des explosifs. N'est-il pas vrai que les personnes à savoir,
2 Zeljko Gasparevic, Marko Kovacic et Antun Terzic, étaient tous membres du
3 MUP de la République de Croatie, membres de cette unité, affectation
4 spéciale. Et que c'est sur ordre de leur supérieur, Martin Matkovic, qu'ils
5 sont partis réaliser cette opération de sabotage qui consistait à miner un
6 train d'équipements militaires dans la guerre ferroviaire de Brcko ? C'est
7 ce qui est dit dans la déclaration. Vous avez les déclarations de Ivanovic,
8 de Vucicevic et Gasparevic. Est-ce que vous contestez la chose ?
9 R. Je ne conteste pas cela, Monsieur Milosevic. Il se peut que cela soit
10 exact. Mais je vous répète que je n'ai pas vu à ce jour, les documents en
11 question, et je n'ai pas connaissance de ces événements, à l'époque. Je ne
12 me souviens pas d'une situation analogue.
13 Q. Fort bien, fort bien, Monsieur Ramic. Dites-moi maintenant, serait-il
14 exact de dire que les ponts sur la Sava à Brcko a été sécurisé d'un côté
15 par des membres du poste de police de Brcko, qui se trouvaient sous votre
16 contrôle à vous, et de l'autre côté du fleuve par des membres du MUP de
17 Croatie. Donc, en est-il été ainsi ou pas ?
18 R. Oui. Il en est été ainsi.
19 Q. Pourquoi affirmez-vous alors que ces ponts-là, le 1er mai, ont été
20 détruits par les Serbes ?
21 R. C'est tout à fait clair. A plusieurs reprises à ce jour, la chose a été
22 prouvée. Tout d'abord, nous avons des témoins qui sont encore en vie de nos
23 jours, et qui ont été présents sur les lieux. Deuxièmement, toute une série
24 d'événements indique que cela a été réalisé par l'armée du côté bosnien, du
25 côté de Brcko. Nous avons des témoins vivants qui ont été des gardiens, des
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1 policiers sur le pont, et qui ont été emprisonnés. Jusqu'au dernier, ils
2 affirment tous qu'un véhicule militaire est venu avec des hommes vêtus en
3 uniforme de l'armée. Ils ont d'abord emprisonné le groupe qui se trouvait
4 sous le pont et, par la suite, il est arrivé un deuxième groupe qui a été
5 emprisonné par la patrouille de la police qui se trouvait sur le pont. Un
6 troisième groupe a emmené un véhicule qui était également de couleur vert
7 olive et l'a poussé jusqu'au pont. Les prisonniers ont entendu les
8 conversations entre les personnes concernées qui parlaient dans un langage
9 ékavien, donc le parler de la Serbie, et ils ont déduit qu'il s'agissait là
10 d'un groupe de membres des unités spéciales arrivées de Serbie.
11 Q. Et c'est partant de là que vous avez déduit de la chose -- chose qui
12 n'a pas été prouvée. Ce qui a été prouvé, c'est qu'il y a eu sabotage; il y
13 a eu cette composition du groupe avec les noms qui figurent dans la
14 déclaration. Donc en dépit de la déclaration, les noms qui ont été
15 présentés ce sont les Serbes, donc la JNA, d'après ce que vous venez de
16 dire ?
17 R. Précisément. C'est la JNA qui a détruit le pont ou cela a du moins été
18 organisé par la JNA.
19 Q. Très bien. Vous avez des preuves à cet effet ? Pourquoi ne les avez-
20 vous pas présentées ?
21 R. Mais je viens de vous donner des preuves. Je ne savais pas que vous
22 alliez me poser des questions, mais je vous dis qu'il y a des témoins qui
23 sont en vie encore et qui étaient policiers, qui étaient gardiens là-bas et
24 qui affirment avoir été emprisonnés par des hommes en uniforme de
25 camouflage de l'armée.
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1 Q. Oui. Vous l'avez déjà dit. Vous n'avez pas à le répéter. Donc vous avez
2 d'un côté une déclaration qui parle de sabotage et qui parle de tous les
3 participants en donnant les noms et les prénoms des intéressés et, d'autre
4 part, vous avez une assertion disant que des personnes non identifiées --
5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Non, Monsieur Milosevic, c'est de la
6 polémique. Nous perdons notre temps. Il n'y a pas à polémiquer avec le
7 témoin et nous avons entendu ce qu'il a dit.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien. Nous allons de l'avant.
9 M. MILOSEVIC : [interprétation]
10 Q. Monsieur Ramic, en votre qualité de Président de l'assemblée
11 municipalité de Brcko, vous savez certainement où se trouve la communauté
12 locale de Dizdarusa, ai-je raison ou pas ?
13 R. Oui.
14 Q. Est-il exact que c'est précisément grâce à l'autorisation que vous avez
15 mise, ainsi que votre frère, c'est bien dès 1991 dans le domaine de
16 Dizdarusa, qu'il y a eu constitution d'une unité armée, c'était la 3e
17 Compagnie de la 108e Brigade ?
18 R. Non, ceci n'est pas exact.
19 Q. Je vous présenterai un document. A l'époque il y a eu confiscation,
20 saisie de ce document et il en ressort que, dans la zone de Dizdarusa, 284
21 soldats étaient présents. Voici ce document.
22 En dernière page il a été certifié ainsi que le reste de ces documents,
23 donc certifiés, conforme à l'original. Dizdarusa, liste des personnes pour
24 être enrôlées dans l'unité, allons donc du point 1 jusqu'à la personne en
25 position de 184. Et vous avez ici toutes sortes de soldats, y compris des -
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1 - de l'équipage, des cannons anti-aériens allant de 1 à 284, liste des
2 hommes, la date de l'arrivée le 1er mai -- le 1er mai, ainsi de suite avec
3 toutes les dates d'entrée.
4 Avec également les numéros de séries des fusils automatiques dont ils ont
5 accusé l'inscription. Je vous en prie, consultez cette liste.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je la propose au versement en tant que pièce à
7 conviction. C'est la 108e Brigade, 3e Compagnie de cette brigade, Dizdarusa,
8 liste des hommes allant de 1 à 284. Je vous en prie.
9 Mme PACK : [interprétation] Quelques observations, si vous me le permettez,
10 Monsieur le Président, au sujet des pièces que produit l'accusé. Il s'agit
11 de documents que l'Accusation n'a pas eu l'occasion de voir au préalable et
12 j'ai essayé de vérifier hier soir si nous l'avions dans notre base de
13 données, mais nous ne l'avons pas. De par le passé, la pratique a été de
14 proposer -- de ne pas proposer au versement ces documents, mais de les
15 proposer à l'identification et, tout précisément, nous avions une pièce qui
16 a reçu la cote, me semble-t-il, 279 [sic] et également la pièce 280 [sic],
17 également 284 [sic], et bien, ce témoin n'a pas pu confirmer leur
18 authenticité. Il a dit très précisément au sujet de la pièce D179 ainsi que
19 la pièce 180, il s'agit de documents qui portent la date de 1995. Il
20 estimait que ces pièces étaient des faux.
21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, tout à fait. Quelle est l'origine de
22 ces documents à votre avis ?
23 Mme PACK : [interprétation] Il me semble qu'elles émanent des autorités de
24 la Republika Srpska puisque c'est leur en-tête qui l'indique, donc il
25 s'agit du poste de sécurité publique de Brcko en Republika Srpska. Et au
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1 moins certains de ces documents portent un sceau. Je dois dire que je ne
2 suis pas en mesure de l'interpréter -- de le lire, mais l'accusé pourrait
3 nous aider. Donc je suppose que c'est de là que proviennent ces documents.
4 Je ne voudrais pas insister là-dessus actuellement, mais, de manière
5 générale, le procureur devrait avoir la possibilité de consulter ces
6 documents et il me semble que ces pièces devraient être proposées pour
7 identification et non pas pour versement au dossier en tant que pièce à
8 conviction.
9 [La Chambre de première instance se concerte]
10 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Madame Pack, la réponse sera la suivante.
11 Nous ne procéderons pas à une modification telle quelle soit de notre
12 position s'agissant de ces documents, mais s'il s'avère en temps utile
13 qu'il ne s'agit pas de documents authentiques et si vous disposez des
14 preuves pour contester ces documents, et bien, je vous en prie, vous aurez
15 la possibilité de le faire. Et donc, qui plus est-ce, ceci nous permettra
16 de savoir quel est leur source et leur origine. D'autre part, si ces
17 documents sont bels et bien authentiques et il va falloir quel poids nous
18 leurs accorderons. Le fait que ces pièces sont versées au dossier ne
19 signifie pas qu'on les considère comme véridiques.
20 Est-ce que vous souhaitez vous prononcer au sujet de ce document, Monsieur
21 Ramic ? Il s'agit d'une liste -- permettez-moi de terminer -- il s'agit
22 d'une liste que l'on nous présente comme étant la liste des membres d'une
23 compagnie, donc d'une compagnie qui a été concession en 1991, de 284
24 membres ou d'une brigade en fait on nous présente ce document comme étant
25 ceci. Souhaitez-vous exprimer un commentaire là-dessus ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
2 j'ai bien des choses à dire au sujet de ce document. Tout d'abord pour ce
3 qui est de la page de garde de ce document, il est dit qu'il s'agit de la
4 108e Brigade, de la 3e Compagnie de cette brigade, la Compagnie de
5 Dizdarusa. Permettez-moi de fournir quelques éléments d'information
6 supplémentaire. La 108e Brigade quant à elle a été constituée le 17 mai
7 1992. Or la guerre et l'occupation de Brcko se sont produites le 1er mai,
8 donc 17 jours après l'occupation. C'est au moment où les opérations armées
9 de l'agresseur sont déjà très intenses envers la partie de la zone de Brcko
10 qui était restée libre jusqu'à ce moment-là et cette liste représente enfin
11 l'ensemble de la population masculine de la communauté locale de Dizdarusa.
12 De toute évidence, cette liste a été dressée dans l'intention de --
13 vraisemblablement de rassembler un certain nombre d'hommes, dont les noms
14 figurent sur cette liste. Mais je répète que cela n'a pu se produire
15 qu'après le 17 mai 1992 puisque l'intitulé comme tel donc de la 108e
16 Brigade n'a pas existé, donc il n'a pas pu en être question.
17 Un deuxième point, ce document porte sceau de la Republika Srpska. En
18 d'autres termes, il a été vraisemblablement localisé et certifié à un
19 moment ultérieur. Ce qui nous permet d'en conclure que sa valeur
20 conformément à cela, donc son poids est vraisemblablement était clair.
21 Donc ceci me permet d'en conclure que ce document ne prouve nullement, que
22 certaine soi-disant 3e Compagnie, de la 108e Brigade ait existé au moment du
23 début des opérations militaires.
24 M. MILOSEVIC : [interprétation]
25 Q. Mais, Monsieur Ramic, vous voyez que les dates d'entrée des soldats --
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1 ou des membres figurent sur le document, on voit le 1e mai allant de la
2 première personne, puis ainsi de suite on voit que la première date
3 d'entrée le 1er mai, puisque c'est le moment où la guerre a éclaté, à cet
4 endroit-là.
5 Et, deuxièmement, est-il vrai que, lorsque vous parlez du sceau de la
6 Republika Srpska, vous êtes en fait en train de parler où a été certifié
7 conforme ce document, puisque sur l'ensemble de ces documents, en verso, on
8 voit que le document a été certifié pour prouver qu'il s'agit d'une
9 photocopie certifiée conforme à l'original. Donc il s'agit d'un formulaire
10 qui porte un cachet où l'on voit le texte conforme à l'original dans
11 l'ensemble de ces pages, donc simplement pour certifier cette conformité à
12 la documentation qui a été localisée, donc autrement dit la 3e Compagnie -
13 -
14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous n'avez pas
15 l'autorisation de tenir des discours, vous avez à poser des questions au
16 témoin.
17 Monsieur Ramic, l'accusé semble infirmer qu'il s'agit d'un document
18 authentique de la Republika Srpska archivé par les autorités Republika
19 Srpska, et il porte leur sceau. L'accusé semble indiqué qu'il s'agit d'une
20 date antérieure, 17 mai 1992, la date que vous citez. Pouvez-vous nous
21 apporter des compléments d'informations ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, j'essaie de dire la
23 chose suivante : cette liste comporte les noms des hommes qui habitaient
24 cette communauté locale de Dizdarusa, il ne s'agit pas de membres d'une
25 compagnie. Il n'y a pas de signature d'une personne compétente sur ce
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1 document, d'une personne qui aurait été membre du commandement de la
2 brigade ou de la compagnie, donc il n'y aucune signature de ce genre ici,
3 donc n'importe qui aurait pu être l'auteur de ce document.
4 Deuxièmement, Monsieur le Président, ce que j'essaie de dire c'est quand
5 bien même qu'on accepterait que cette liste était véridique et authentique,
6 et bien elle ne peut en aucun cas signifier qu'elle a été dressée avant que
7 la 108e Brigade ne soit constituée. Or je répète encore une fois, cette
8 Brigade -- et c'est un fait connu -- a été constituée en date du 17 mai
9 1992.
10 M. MILOSEVIC : [interprétation]
11 Q. Pouvez-vous, Monsieur Ramic, lire la date d'entrée dans cette unité. Au
12 numéro 1, par exemple, c'est bien la date du 1er mai, n'est-ce pas ?
13 R. Monsieur Milosevic, ce que vous appelez la date d'enrôlement, et bien,
14 elle n'y figure pas. Ce qu'on voit ici c'est date d'arrivée, n'est-ce pas ?
15 Q. Oui, date d'arrivée dans l'unité.
16 R. Non, pas date d'entrée dans l'unité, c'est date d'entrée ce qui ne
17 signifie pas qu'il s'agit de la date d'entrée dans une unité.
18 Q. Mais c'est bien le 1er mai ?
19 R. Oui, c'est 1er mai, mais aussi d'autres dates, pas uniquement le 1er mai.
20 Or ceci ne signifie pas, j'affirme, plutôt qu'aucune compagnie n'a pu être
21 constituée le 1er mai puisqu'il n'y avait pas de 108e Brigade.
22 Q. Mais ceci aurait pu être déclaré proclamer quelques jours plus tard et
23 puis le nom de la brigade aurait pu être modifié, c'est la 3e Compagnie de
24 Dizdarusa.
25 R. Monsieur Milosevic, c'est le 1er mai qu'il y a eu occupation de Brcko,
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1 même si on acceptait ce que vous êtes en train d'avancer, et bien cela n'a
2 pu se produire -- n'a pu se créer qu'après le début de l'occupation.
3 Q. Fort bien, Monsieur Ramic, je vais vous montrer autre chose, j'ai ici -
4 -
5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Non, nous allons d'abord en terminer avec
6 ce document.
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais fournissez cela aux amis de la cour. L'un
8 des amis parle serbe. Il peut vous dire de quel document il s'agit.
9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous allons procéder de la manière
10 suivante, Monsieur Milosevic. Nous allons examiner le document nous-même,
11 donc je demanderais à l'huissier de bien vouloir nous apporter le document
12 -- d'apporter le document à la Chambre.
13 [La Chambre de première instance se concerte]
14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous allons attribuer une cote pour
15 identification à ce document, puisqu'il y a contestation au sujet de la
16 nature du document.
17 Mme LA GREFFIÈRE : [aucune interprétation]
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges --
19 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.
20 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce 185.
21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Pièce D. Nous allons à présent
22 communiquer cette pièce au bureau du Procureur pour qu'il puisse l'examiner
23 brièvement, et nous allons également la communiquer aux amis de la Chambre
24 et, par la suite, le bureau du Procureur peut la reprendre.
25 Monsieur Milosevic, vous avez la parole.
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1 M. MILOSEVIC : [interprétation]
2 Q. Monsieur Ramic --
3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Ramic, excusez-moi vous avez la
4 possibilité de prendre la parole, je vous en prie.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je
6 voulais dire qu'il s'agissait d'une liste de la population résidant dans
7 cette communauté locale. Cela signifie uniquement qu'en la date, en date
8 indiquée sur le document, ces gens résidaient sur le territoire de la
9 communauté locale.
10 M. MILOSEVIC : [interprétation]
11 Q. Donc, lorsqu'on voit ici mention de la 3e Compagnie de Dizdarusa, cela
12 ne veut pas dire qu'il s'agit d'une formation militaire, simplement il
13 s'agit d'une liste de civils qui résidaient à cet endroit ?
14 R. Oui, je crois que c'est cela.
15 Q. Et bien, s'il en est ainsi, je me propose de vous présenter un autre
16 document qui concerne la même compagnie, rédigé également à la main. Il
17 s'agit d'un original, de même il s'agit -- il porte également un sceau le
18 certifiant conforme, un sceau de l'autorité compétente. Puis nous avons les
19 pelotons cités dans l'ordre avec l'ensemble des hommes qui le composaient,
20 les différentes sections 1e, 2e, 3e Peloton ou section. On voit qui sont les
21 hommes répartis dans les différentes unités, que ce soit Reconnaissance,
22 que ce soit Anti-char, ou autre et, comme vous le voyez, il s'agit ici
23 d'une formation de l'armée musulmane.
24 Je vous prie de consulter ce document. Vous avez ici les pelotons, les
25 sections, canons sans recul, canons anti-aériens, lance-roquettes, donc il
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1 s'agit de Dizdarusa, de sa 3e Compagnie. Je vous prie, examinez ce
2 document. Il s'agit d'une formation militaire. Si le premier document
3 n'était pas suffisamment explicite pour vous, lorsque vous voyez qu'il
4 s'agissait de la 3e Compagnie. Ici vous avez également des commandants des
5 sections.
6 Monsieur Ramic, pendant que vous examinez ce document, je vous prie de
7 vérifier s'il est vrai que le chef de la 1ère Section était Dedovic Ramiz ?
8 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Non. Un instant, s'il vous plaît. Le
9 témoin doit d'abord avoir la possibilité d'examiner le document et il ne
10 pourra répondre aux questions qu'après avoir pris connaissance du document.
11 Il a peut-être un commentaire à formuler.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je suis en train de
13 feuilleter ce document et, pour moi, il s'agit d'une liste où l'on voit les
14 commandements des compagnies ou des sections, l'intitulé "108e Brigade de
15 Brcko, Dizdarusa, la 3e Compagnie." Aucune date ne figure sur l'original
16 pour qu'on puisse en déduire la date de rédaction de ce document. Donc ceci
17 est bel et bien peut-être un document qui nous parle de la composition de
18 quelque chose, mais il ne peut, en aucun cas, être daté d'avant le 17 mai.
19 Et un second point, Monsieur Milosevic, il ne s'agit pas d'armée musulmane,
20 si jamais c'était une armée, c'était l'armée de Bosnie-Herzégovine. Et vous
21 avez une composition multiethnique ici, exactement, dans la 5e Section. Ici
22 dans ce document, on en voit que Hajduk Dragan était le chef de cette
23 section. Ce n'était certainement pas un Musulman.
24 M. MILOSEVIC : [interprétation]
25 Q. Mais, s'il vous plaît, consultez la liste; 95 % de Musulmans figurent
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1 sur cette liste.
2 R. Oui, exactement. Il y avait 95 % de Musulmans sur le territoire de
3 cette communauté locale de Dizdarusa.
4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Ramic, il s'agit d'un document
5 manuscrit ou dactylographié ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit d'une liste manuscrite. Elle n'est
7 pas du tout dactylographiée. Et je ne vois aucun signataire digne de foi,
8 aucune personne qui aurait été compétente ou qui aurait occupé un poste de
9 commandement au sein de la 108e Brigade de Brcko. Il n'y a aucune
10 signature. Autrement dit, il s'agit d'une liste rédigée à la main.
11 N'importe qui pourrait en être l'auteur.
12 M. MILOSEVIC : [interprétation]
13 Q. Monsieur Ramic, êtes-vous en train d'affirmer qu'il ne s'agit pas
14 d'hommes qui faisaient partie d'une formation militaire ? Donc la formation
15 militaire appelé la 3e Compagnie qu'il ne s'agit pas de sections. Donc là
16 nous avons Dedovic Ramiz, Amir Serifovic, Halilovic Ramiz, Hazim Hasanovic
17 et Dragan Hajduk, comme étant des chefs des Pelotons allant du 1er au 5e.
18 Est-ce bien tout cela qui figure sur cette liste ? Pouvez-vous me commenter
19 cela ? Est-ce la vérité ou non ?
20 R. Monsieur Milosevic, mais je ne suis pas en train de nier cela. Vous
21 m'avez mal compris. Ce que je souhaite dire c'est la chose suivante : on ne
22 voit pas clairement à quel moment cette liste a été dressée, donc ce n'est
23 pas clair.
24 Deuxièmement, si cette liste est effectivement une liste authentique, et
25 bien, elle n'aurait pu être composée qu'après le 17 mai.
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1 En troisième point, je ne nie pas qu'il y avait une Compagnie de Dizdarusa
2 au sein de la 108e Brigade, mais elle a été constituée qu'après le 17 mai
3 1992.
4 Q. [interprétation] Bon s'agissant de la date --
5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous allons examiner ce document.
6 [La Chambre de première instance se concerte]
7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Ramic, il s'agit d'un document
8 rédigé à la main. Bien entendu, nous n'arrivons pas à décrypter cette
9 écriture, mais d'après la manière dont j'ai compris votre déposition, il
10 s'agit de la 3e Compagnie, de la 108e Brigade. Il semblerait qu'il s'agit
11 ici de formations, mais vous confirmez que cette compagnie a existé au sein
12 de cette brigade; cependant, qu'elle n'a été constituée qu'après
13 l'occupation. Est-ce bien cela ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
15 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Donc il n'est pas contesté que cette
16 unité a existé. La seule question -- la seule contestation en fait concerne
17 la date de sa constitution, n'est-ce pas ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est cela.
19 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Très bien. Nous allons verser au dossier
20 cette pièce.
21 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce D186.
22 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vous prie de communiquer ce document à
23 tout le monde.
24 Monsieur Milosevic, vous avez la parole.
25 M. MILOSEVIC : [interprétation]
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1 Q. Monsieur Ramic, je vous en prie, je vous ai montré un premier document
2 au sujet de la 3e Compagnie de Dizdarusa et, comme vous l'avez lu vous-
3 même, ce document portait la date du 1er mai.
4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Attendez. Nous n'allons pas revenir à
5 cela. Nous avons déjà abordé cela. Il ne faut pas polémiquer avec les
6 témoins. Nous avons entendu sa déposition. Il nous faudra nous prononcer
7 là-dessus, le moment voulu.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien.
9 M. MILOSEVIC : [interprétation]
10 Q. Mais est-il clair que, sur ce document -- sur cette liste
11 -- dans cette liste, on voit également les numéros de séries des armes qui
12 ont été données -- fournies à ces gens ? Avez-vous pu lire cela ? Et là, je
13 parle de la première liste -- de la première liste de Dizdarusa.
14 R. Oui, l'on voit des numéros -- des sortes de numéros.
15 Q. AP, c'est bien fusil automatique avec un numéro de série qui porte
16 plusieurs chiffres, qui y figure à côté ?
17 R. Je ne sais pas ce que cela signifie. Je ne nie pas, je n'exclue pas
18 votre interprétation, mais l'on peut comprendre cela autrement aussi. Et
19 puis je répète, la compagnie en question n'a pu être constituée qu'à partir
20 du 17 mai. Les armes qui concernent les effectifs de cette compagnie donc
21 tombent dans la même remarque.
22 Q. Je pense que nous allons comprendre mieux les questions qui concernent
23 le temps maintenant. Monsieur Ramic, dès 1991, tout comme à Dizdarusa, à ce
24 que j'affirme, cette pièce à l'appui, et bien, il y a eu également dans la
25 communauté locale de Stari Rasadnik, une unité de manœuvres qui était
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1 constituée de compagnies et de sections? Est-ce bien exact ?
2 R. Non, ceci n'est pas exact.
3 Q. Ce n'est exact. A ce moment-là, je vais vous communiquer ce document
4 avec l'entête Stari Rasadnik, unité chargée de manœuvre ou unité de
5 manœuvre qui porte la signature du commandant de l'état major de la Défense
6 territoriale de la communauté locale, Imamovic Meksud. Vous connaissez, je
7 suppose, Imamovic Meksud ?
8 R. Je n'arrive pas à me rappeler cet homme, mais je ne nie pas qu'il ait
9 existé.
10 Q. Vous ne le niez pas. Très bien, c'est lui qui a signé ce document.
11 C'est lui qui a écrit de sa main sur chacune des pages :
12 "Lieu de rassemblement sera tenu secret. En cas d'urgence, les membres de
13 l'unité seront convoqués par écrit." Donc, si cette unité a été comme
14 constituée après le début de la guerre, pour quelle raison en cacherait-on
15 l'existence ? Donc, Meksud, a signé cela. Et en chaque page, l'on voit
16 l'endroit de rassemblement, le point de rassemblement indiqué. Et l'on voit
17 qu'il est dit que les soldats seront convoqués par écrit. Et nous avons
18 ici, la signature du commandant de l'état major de la Défense territoriale
19 de la communauté locale, Imamovic Meksud.
20 Avec des lance-roquettes de 82 millimètres, des camions, nous avons aussi
21 la spécialité, la répartition des différents hommes au sein de l'unité. Et
22 comme je peux le voir, il s'agit de Musulmans, ils sont tous des Musulmans.
23 Et c'est bien la communauté locale Stari Rasadnik, une unité de manœuvre.
24 Il s'agit de ces sections. Et il est précisé que le lieu de rassemblement
25 sera tenu secret, et il sera communiqué en cas d'urgence. Je vous prie de
Page 26260
1 consulter ce document. Il porte la signature d'Imamovic Meksud, dont vous
2 ne vous rappelez pas. C'est cela ?
3 R. Il se peut que je le connaisse. Je ne le nie pas.
4 Q. Il est possible que vous le connaissiez. Bien.
5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Laissez le temps au témoin de se pencher
6 sur ce document.
7 M. MILOSEVIC : [interprétation]
8 Q. Je viens de vous ouvrir à la page -- le document à la page où il y a la
9 signature. Et il lui appartiendra de revenir à la première page, pour y
10 examiner le reste.
11 R. Messieurs les Juges, je voudrais commenter ce document, et j'aimerais
12 le faire de la façon suivante. Il s'agit une fois de plus, d'une liste
13 d'hommes de la communauté locale. Cette liste se répartit par sections de
14 la Défense territoriale. Ce qui n'est pas clair, c'est la date de création
15 de ce document. Ça c'est premièrement.
16 Deuxièmement, Monsieur Milosevic, ici il est question de la Défense
17 territoriale de la communauté locale.
18 Messieurs les Juges, ce que je voudrais dire, c'est que suite aux
19 événements du 1er mai et suite à la diffusion -- enfin ce qui a été diffusé
20 à la télévision locale, et suite à la communication du fait que la guerre
21 avait commencé, par la voie de télévision. Donc, il s'agissait d'une
22 attaque de la JNA contre la communauté locale de Dizdarusa, qui a commencé
23 dans l'après-midi, vers 4 heures. J'ai réussi, moi, a me tiré de cet
24 encerclement, de fuir l'encerclement. Et le même jour, au soir, en ma
25 qualité de président de la municipalité, j'ai donné l'ordre de créer une
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1 Défense territoriale sur la partie libre du territoire. Donc, s'il s'agit
2 ici, de la liste des membres de cette Défense territoriale, je ne le nie
3 pas. Mais je répète une fois de plus, qu'ici, ce qui manque, c'est la date.
4 Et ça, c'est une chose à discuter.
5 Q. Mais écoutez, vous avez à la première page, à la deuxième page et à la
6 troisième page, en marge de droite, des remarques qui ont été, à chaque
7 fois, signées par Imamovic Meksud, qui dit que le poste de mobilisation
8 devra être gardé secret. Et en cas d'urgence, la convocation indiquera le
9 lieu de rassemblement.
10 R. Monsieur Milosevic, on parle ici de lieu de mobilisation.
11 Q. Oui, qui est gardé secret.
12 R. Quand je tiens à vous rappeler que le mot de "mobilisation" signifie
13 rassemblement et création d'une unité militaire. Cela signifie que cette
14 unité n'a pas encore été créée.
15 Q. Monsieur, mais enfin, il doit y avoir une unité militaire de créée;
16 celle qui est instituée. Et c'est à cette unité-là, que l'on se réfère en
17 parlant de poste de rassemblement secret, pour qu'elle soit mobilisée en
18 cas de besoin. Donc, les sections sont prêtes pour constituer une unité. Et
19 le point de mobilisation est gardé secret. En cas d'urgence, le point de
20 rassemblement sera indiqué sur la fiche de convocation.
21 R. Je ne nie pas, Monsieur Milosevic, le fait que l'on ait créé une
22 Défense territoriale par communauté locale qui se défendait de l'agression,
23 suite au début de l'agression qui a commencé le
24 1er mai, vers 4 heures, l'après-midi. Je ne le nie pas. Et donc, suite à
25 cette agression, il a été créé une Défense territoriale. Je n'en
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1 disconviens pas. Donc, c'est après l'agression, qu'il a été créé, une
2 Défense territoriale dans les communautés locales qui étaient libres. Ça,
3 oui, c'est bien vrai.
4 Q. Et là aussi, on gardait le point de rassemblement dans le secret. La
5 Défense territoriale n'était pas intervenue. C'est bien ce que vous voulez
6 dire ?
7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Non, je vais mettre fin à ceci. Vous avez
8 eu l'occasion de poser vos questions
9 contre-interrogatoires à propos de cela. Maintenant, vous commencez une
10 fois de plus à polémiquer avec le témoin. Quelle sera la cote suivante ?
11 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] [Inaudible]
12 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous demandons à récupérer le document.
13 Oui, Monsieur Milosevic.
14 M. MILOSEVIC : [interprétation]
15 Q. Fort bien. Monsieur Ramic, je suppose que vous n'ignorez pas le fait ou
16 l'existence d'une communauté locale qui s'appelle Brod.
17 R. Oui, tout à fait.
18 Q. Bien. Je dispose ici, de renseignements complets concernant la
19 communauté locale de Brod; le commandant Pasic Ismet. Puis, on dit, unité
20 de manœuvre par sections, puis les compagnies. On dit qu'ils ont les
21 estafettes. Nous avons ici, un document assez volumineux qui nous parle
22 d'une formation militaire assez importante, rien que sur le territoire de
23 la communauté locale de Brod. On y indique même, une partie de la police
24 militaire. Et on dit en fin de compte, poste de rassemblement Johak, de
25 l'autre côté du pont. C'est ce qui est dit à la fin de ce document-ci, qui
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1 comporte plusieurs pages, et qui est également visé pour certifier de sa
2 conformité à l'original, par les bons soins des autorités de la Republika
3 Srpska, étant donné qu'il s'agit là d'une documentation qui a été saisie
4 par leurs soins pendant la guerre. Je voudrais que vous vous penchiez sur
5 ce document qui se réfère à la communauté locale de Brod, et ce document-ci
6 est lui, tapé à la machine.
7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous voulez examiner ce document,
8 Monsieur Ramic ? Apparemment, il n'y a pas de date si je l'ai bien évalué.
9 Et si vos commentaires seraient de même nature, dites-le nous simplement.
10 Ceci nous permettra peut-être d'avancer. Puis, nous donnerons une cote pour
11 ce document.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, il s'agit d'un document
13 analogue à celui qui a été présenté par M. Milosevic. Il s'agit d'une liste
14 de noms de personnes vivant sur le territoire d'une communauté locale qui
15 ont constitué des sections ou des unités analogues de la Défense
16 territoriale de cette communauté locale. Il n'y a pas de date et ce que
17 j'affirme c'est que, c'est là une liste si tant est quelle est originale et
18 authentique parce qu'il n'y a pas de preuves disant que c'est là un
19 document authentique. C'est tapé à la machine. Il y a une -- un visa de la
20 Republika Srpska mais qui a été apposé à titre rétroactif. Il n'y a pas de
21 signature, il n'y a pas de nom du représentant de la personne responsable,
22 d'un commandant quelconque. Mais si ce document est effectivement original
23 ou authentique cela a pu être créer suite à la formation des unités de la
24 Défense territoriale dans les communautés locales libres, et ceci suite à
25 l'occupation d'une partie du territoire de la communauté de Brcko -- de la
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1 municipalité de Brcko.
2 M. MILOSEVIC : [interprétation]
3 Q. Monsieur Ramic, étant donné que vous avez été président de l'assemblée
4 municipale, je suppose que vous devez savoir qu'il y a un secrétariat
5 autorisé à viser ce type de document, C'est là que l'on appose d'un cachet
6 certifiant qu'un document ou une photocopie de document est conforme à
7 l'original. Donc à cet effet, c'est au verseau de toutes les pages que vous
8 avez le cachet de l'instance compétente de l'assemblée municipale qui
9 indique que la photocopie est conforme à l'originale. En est-il ainsi ou
10 pas ?
11 R. Monsieur Milosevic, je ne nie pas votre récit relatif aux modalités de
12 certification d'une copie du document mais je dis qu'il s'agit là d'un
13 cachet de la Republika Srpska de 1994, donc un cachet apposé à titre
14 rétroactif.
15 Q. Ce n'est pas rétroactif, ce n'est ici au moment de la saisie de ces
16 documents. Une fois les documents saisis, quelque temps plus tard, ils ont
17 fait des copies et ils ont certifié la conformité des copies que nous avons
18 à notre disposition ici.
19 R. Monsieur Milosevic, êtes-vous en train de nier le fait
20 que : En 1994, la Republika Srpska, au bout de quelques années de guerre,
21 pouvait très clairement connaître tous les noms des combattants de la 108e
22 brigade ? En sus, toute la documentation afférente aux citoyens est restée
23 dans ces archives et c'est partant de là que celle-ci a pu rédiger ces
24 listes. Est-ce que vous pouvez affirmer que ce n'est pas un document monté
25 de toute pièce en 1994 par les organes de la Republika Srpska ?
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1 Q. Bien sûr, c'est certain. --
2 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous prendrons -- rendrons une décision à
3 propos de ce document. Inutile de poursuivre cette polémique. Une cote,
4 s'il vous plaît.
5 Mme PACK : [interprétation] Permettez-moi de relever qu'il faudrait peut-
6 être accorder une cote provisoire à ce document ?
7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous allons d'abord voir ce document. Il
8 n'est pas contesté qu'il existait une unité territoriale. Et il n'est pas
9 contesté non plus que ceci ait pu être une liste même si la date de
10 confection du document n'est pas indiquée. Y a effectivement un tampon
11 apposé à ce document. C'est une liste pour ce qu'elle vaut. La question de
12 savoir c'est, à quel moment cette liste a été constituée et le document ne
13 le prouve pas.
14 Le document est considéré recevable. Vous pourrez peut-être essayer
15 d'attester de l'authenticité, si ce n'est pas le cas, le document ne sera
16 pas pris en cour, mais pour le moment le document est déclaré recevable.
17 Mme PACK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
18 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit du document D188.
19 M. MILOSEVIC : [interprétation]
20 Q. Monsieur Ramic, dites-moi, je vous prie, ces communautés locales là --
21 Brod, Dizdarusa, Stari Rasadnik -- se trouvent-elles sur un territoire qui
22 était sous votre contrôle à vous pendant la guerre, ou étaient-ce des
23 communautés locales sous le contrôle des forces serbes ? Donc est-ce que ce
24 sont là des territoires qui étaient sous votre contrôle pendant toute la
25 durée de la guerre : Dizdarusa, Stari Rasadnik et Brod ?
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1 R. Au moment de l'occupation, à savoir au 1er mai 1992, ce sont là des
2 territoires libres et c'est là les territoires où nous nous trouvions.
3 Q. Et jusqu'à quel moment sont restés des territoires libres comme vous
4 les désignez ? Pour reprendre les termes que vous utilisez vous-même, quand
5 est-ce que cela a cessé d'être des territoires libres ?
6 R. Pendant la guerre, les opérations de combat se déroulaient de part et
7 d'autres, et l'agresseur nous a repoussé, nous a chassé de ces territoires-
8 là. Je ne sais pas vous dire maintenant avec précision quand, mais des
9 parties de la ville libre ont été défendues par nos soins.
10 Q. Ecoutez, moi je vous pose la question au sujet des trois communautés
11 locales. Donc ont-elles été et jusqu'à quand sous le contrôle de vos
12 effectifs à vous ? Dites-moi juste cela.
13 R. Elles sont restées libres dans le courant -- pour ce qui est de la
14 communauté locale de Dizdarusa et de celle de Rasadnik puis celle de Brod.
15 Elles sont donc restées libres quelques mois, peut-être même un an entier,
16 à compter du début de la guerre, donc suite au 1er mai 1992.
17 Q. Donc ces formations-là ont exercé le contrôle -- sur ces territoires-
18 là, n'est-ce pas ?
19 R. Ce territoire libre a été défendu et tenu ou passé sous le contrôle des
20 unités de la 108e brigade. Je ne le nie pas et je ne nie pas que dans ces
21 unités, il y ait eu des pelotons, des sections venues de ces communautés
22 locales-là. Elles constituaient des parties intégrantes de cette 108e
23 brigade qui était la nôtre.
24 Q. Nous allons patienter quelques instants pour que les juges remettent
25 leurs écouteurs.
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1 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous allez bénéficier
2 du temps qui reste jusqu'à la fin de ce premier volet de l'audience. Vous
3 aurez donc 20 minutes de plus que ce qui était prévu au départ donc une
4 augmentation de 50 %, ça devrait être amplement suffisant.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Dans ce cas, je vais essayer de verser ces
6 documents-ci.
7 M. MILOSEVIC : [interprétation]
8 Q. Savez-vous qui est Sakovic Semso ?
9 R. Oui.
10 Q. Etait-il, lui, président de la communauté locale de Brodusa, et à la
11 fois directeur de l'entreprise Sava ?
12 R. Oui.
13 Q. Etait-ce lui qui s'occupait de l'approvisionnement des Musulmans en
14 armes ?
15 R. Je n'en ai pas connaissance.
16 Q. Bien. Serait-il exact de dire que pour ce qui est de la réception des
17 armes à Stari Rasadnik, c'était Meksud Imamovic, Becirevic Nedzad, Nejdelko
18 Esad, Asic Ahmed [phon], Sukalac Mujo [phon], Mustafa Halilovic, et Ismail
19 Semsudin qui en avaient la charge ? Est-ce exact ou pas ?
20 R. Monsieur Milosevic, pour vous répondre je dois vous dire d'abord que je
21 ne sais pas de quelles armes vous êtes en train de parler.
22 Q. Bon, bon. Si vous ne savez pas de quelles armes je suis en train de
23 parler, cela signifie qu'il n'y a pas eu d'armes du tout, et les armes qui
24 figurent sur les listes qu'on a vues, c'est inventé de toute pièce, n'est-
25 ce pas ?
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1 R. Il n'y a pas eu d'armements organisés systématiques de connu jusqu'au
2 moment où il y a eu l'agression, donc jusqu'à la date du 1er mai.
3 Q. Très bien. J'ai ici des informations analogues à celles que j'ai
4 fournies hier dès le début de l'audience où il est précisé : Que sur le
5 trajet de Brcko, Brka, Maoca, la route a été sécurisé par des policiers
6 musulmans seulement. Par la suite, il s'est avéré que leurs
7 objectifs étaient de garder cette composition-là aux fins de transporter en
8 toute sécurité des armes. Et c'est Isakovic Semso [sic], président de
9 l'assemblée municipale de Brodusa [phon] pour diriger les activités au
10 niveau de l'entreprise Sava pour ce qui concerne l'armement --
11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ne lisez pas trop vite, Monsieur
12 Milosevic. Vous souvenez-vous qu'il y a des interprètes.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, je comprends, Monsieur May. Je tiendrai
14 compte de cette nécessité également. Mais je suis coincé par le temps.
15 M. MILOSEVIC : [interprétation]
16 Q. On dit que : "L'armement des membres du parti du SDS, s'est passé par
17 les frères Ramic", vous donc et votre frère, "puis, Vejzovic Ibrahim; le
18 directeur de la zone douanière, Didais Ismet [phon]; le directeur de
19 l'entreprise Zitopromet, Drpljanin Saban. Et les armes venaient
20 essentiellement de Croatie par le vieux pont sur la Sava. Les activités
21 opérationnelles pour ce qui est de l'acheminement des armes, étaient faites
22 par Hasim et Zekerija. L'un tenait un magasin ou un point de vente d'armes,
23 et c'est avec l'aide des policiers --
24 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ecoutez, là vous perdez votre temps à
25 faire la lecture intégrale de ce document. Essayer d'en faire la synthèse
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1 et posez une question au témoin. Vous voulez en venir à quoi dans tout
2 cela ?
3 M. MILOSEVIC : [interprétation]
4 Q. Ce que je viens de vous lire, est-il exact, Monsieur Ramic, ou pas ?
5 R. Non, ce n'est pas exact.
6 Q. Donc serait-il vrai de dire que des hommes du groupe ethnique serbe, à
7 savoir, Ilic Zivko, qui avait un magasin, une épicerie à Gornji Rahic, et
8 un an avant l'éclatement des conflits, il a dû quitter cet endroit-là. Il a
9 quitté la maison, sa maison de Stari Rasadnik, où il n'a pas dormi cinq
10 mois avant l'éclatement, le début de la guerre parce qu'il avait craint
11 pour sa sécurité. Etait-ce là quelque chose de répandue ?
12 R. Permettez-moi un petit commentaire. Monsieur Milosevic, vous venez
13 d'entrer en collision à ce que vous avez dit hier. Hier, vous êtes efforcé
14 de prouver que la police, à savoir, police du groupe ethnique bosniaque se
15 chargeait de stopper la contrebande des armes, et maintenant vous affirmez
16 que cette même police a autorisé la contrebande d'armes, et vous dites que
17 c'est moi-même qui m'en suis occupé.
18 Q. Mais écoutez, Monsieur --
19 R. Attendez, je n'ai pas fini, Monsieur Milosevic.
20 Vous avez affirmé hier, qu'il y a eu une réunion à Rasadnik portant sur
21 l'organisation de combat.
22 Q. Nous n'avons pas le temps.
23 R. Si, nous avons le temps. Il faut que je vous réponde. Vous parlez d'un
24 homme, d'un Serbe et vous dites que certaines personnes du groupe ethnique
25 serbe ont dû fuir Stari Rasadnik. Mais n'entrez-vous pas en collision à ce
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1 que vous avez dit hier ?
2 Q. Je vous cite une note officielle faite par le poste de sécurité
3 publique du Brcko, qui décrit les activités qui étaient les vôtres avant la
4 guerre. Je voudrais que ceci soit versé au dossier comme élément de preuve.
5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Présentons ce document au témoin et
6 demandons lui un commentaire.
7 M. MILOSEVIC : [interprétation]
8 Q. Je vous ai surligné les endroits que j'estime être importants, et ceci
9 pour gagner du temps. Vous devez connaître forcément ces gens-là ? Et ont-
10 ils fait ce qui est décrit dans ce texte ou pas ?
11 R. Je connais ici un grand nombre de personnes. La liste est longue. Vous
12 avez mentionné Semso Isakovic, que je connais fort bien. Je connais bien
13 les autres que vous avez mentionnés. Ce que je nie, c'est qu'ils aient
14 organisé et escorté des livraisons d'armes avant le 1er mai 1992. Ça je le
15 nie.
16 Deuxièmement, le document que vous désignez en tant que tel, porte la date
17 du 18 octobre 1995.
18 Q. Oui, comme les documents précédents qui portent sur les événements de
19 l'époque.
20 R. Ce document était rédigé vers la fin de la guerre, peut-être la guerre
21 était-elle déjà terminée.
22 Q. Fort bien. Mais dites-moi, serait-il exact d'affirmer que partant
23 d'arsenaux quelconque, et j'affirme que ce sont les armes que vous êtes
24 procurés de la sorte, et ces armes-là ont servi, vous ont servi pour tirer
25 les membres de la JNA, et la garnison de la JNA elle-même ?
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1 R. Je n'en ai pas connaissance.
2 Q. Fort bien. Vous affirmez en page 8 de votre déclaration, que le reste
3 de la guerre, vous l'avez passé à Brcko. Et tout de suite après la guerre
4 vous l'avez donc passé, vous précisez, dans la partie libérée de Brcko. Ce
5 sont les termes que vous utilisez vous-même.
6 R. Il se peut que j'aie pu dire cela ainsi. Quand je dis partie libre, je
7 parle toujours de la municipalité de Brcko.
8 Q. Donc ce sont-là les communautés locales que vous avez décrites et dont
9 nous en avons parlé. Elles en faisaient parties, ou pas ?
10 R. Elles en faisaient parties.
11 Q. Jusqu'à quand ?
12 R. On l'a dit tout à l'heure. Rasadnik et Dizdarusa sont restés libres
13 pendant quelques mois, je ne sais pas vous dire exactement.
14 Q. Mais si c'est resté libre, comment avez-vous pu défendre -- avec quoi
15 avez-vous pu défendre ces parties-là que vous désignez comme étant libres
16 ou libérées si vous n'aviez pas eu d'armes ?
17 R. Monsieur Milosevic, les choses sont claires. Même dans la Yougoslavie
18 qui a disparu, il y avait des personnes qui avaient des armes à titre
19 privé, des armes de chasse, ou autre.
20 Q. Bien --
21 R. Mais attendez que je vous réponde. Donc un certain nombre de personnes
22 avaient fait partie d'une organisation tout à fait légale, qui était
23 l'organisation de la Défense territoriale. Ils avaient donc des armes, il y
24 avait des hommes qui étaient des policiers professionnels, ou des
25 réservistes de la police, et qui disposaient d'armes, ce sont ces armes-là.
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1 Q. Bien, Monsieur Ramic. Je n'ai vraiment pas le temps -- je n'ai vraiment
2 pas le temps d'entrer plus en détail, mais il est clair que vous deviez
3 forcément avoir des armes, si vous avez réussi comme vous l'affirmez à
4 préserver des parties de Brcko pour qu'elles ne soient pas prises. Donc ne
5 savez-vous pas que contre vous et votre frère, et contre un certain nombre
6 de personnes d'autres à Brcko, en date du 5 novembre 1995, il a été déposé
7 une plainte au pénal, et on vous reproche un délit pénal d'insurrection
8 armée ? Le saviez-vous ou pas ?
9 R. Je ne le savais pas. J'en ai entendu parler de façon tout à fait
10 fortuite, mais seulement après la guerre. Je pense que cela se passe fin
11 1995, début 1996, donc c'est là que j'ai appris que nous avons été accusés
12 de crime de guerre quelconque. C'est ce que j'ai appris à l'époque.
13 Q. Bon, je vais donner ces quelques documents au témoin pour qu'il les
14 examine. Ce sont là des documents de justice. Le Procureur, le ministère
15 public de Brcko, le 9 juillet 1994, a dressé un acte d'accusation à votre
16 encontre pour crime de guerre contre la population civile. Le saviez-vous
17 Monsieur ? En d'autres termes, le 9 juin 1994, déjà.
18 R. Oui, c'est le document dont vous avez parlé. C'est de cela que j'ai eu
19 vent après la guerre seulement.
20 Q. Niez-vous que vous ayez lancé un ordre d'attaquer l'un des villages
21 serbes, celui de Bukovac, attaque qui a été réalisée en septembre 1992 ?
22 R. Bien sûr que je le nie.
23 Q. Vous le niez. Et vous avez tué à ce moment-là un grand nombre de
24 Serbes, et les autres ont été emmenés par vos soins vers des camps de
25 concentration. Ils ont été torturés, malmenés et liquidés physiquement pour
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1 ce qui est de certains d'entre eux. C'est ce qui est mentionné dans cet
2 acte d'accusation.
3 R. Monsieur Milosevic, c'est ce qui est écrit dans un document qui, comme
4 vous le dites, a été rédigé en 1994, et qui porte sur des événements de
5 1992.
6 Messieurs les Juges, je vous demande votre permission pour ce qui est d'un
7 commentaire de ma part. Messieurs les Juges, je veux commenter ce qui suit.
8 L'acte d'accusation qui vient d'être mentionné à mon encontre et à
9 l'encontre de quelques autres personnes à la fin de la guerre est une
10 construction de toute pièce, qui était assez caractéristique pour les
11 agissements de l'agresseur; suite aux crimes perpétrés que d'accuser les
12 victimes de ses propres crimes. Ça c'est d'un.
13 Deuxièmement, Monsieur Milosevic, je voulais dire ni théoriquement et
14 encore moins en pratique je n'ai pu donner d'ordre de lancer une attaque
15 quelconque contre le village que vous avez mentionné, et ceci pour une
16 raison; c'est qu'il existait déjà une armée de la Bosnie-Herzégovine qui
17 avait une ligne hiérarchique dont je ne faisais pas partie. Et en ma
18 qualité de représentant des autorités civiles, cela donc n'a pas été
19 possible même du point de vue théorique.
20 Q. Donc vous n'avez pas ordonné d'attaque contre la population civile et
21 tous les civils qui sont mentionnés ici--
22 M. LE JUGE MAY : [interprétation] C'est ce que le témoin a déjà dit. Il en
23 a déjà parlé.
24 M. MILOSEVIC : [interprétation]
25 Q. Mais les civils qui sont mentionnés dans cet acte d'accusation, ont-ils
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1 été tués ou pas ? Ont-ils été emmenés vers des camps de concentration ou
2 pas ? Ont-ils été torturés ou pas ? Répondez-moi.
3 R. Monsieur Milosevic, c'est un montage de toute pièce. C'est une farce.
4 Et je vous demande de ne pas perdre de vue le fait que l'on accuse, ici, la
5 victime et non pas celui qui a commis les crimes. C'était caractéristique
6 pour la partie serbe, notamment.
7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Ramic, nous gardons tout ceci à
8 l'esprit. Ce type d'allégations portées contre des témoins, nous les avons
9 déjà entendues. Comprenez bien que si nous admettons ces documents, c'est
10 uniquement à titre de documents qu'ils sont considérés. Nous n'attribuons à
11 ces documents aucune valeur probante. C'est à la lumière des éléments de
12 preuve fournis que nous établissons cela. Nous avons entendu proférer des
13 allégations contre les victimes. Nous savons que ceci s'est déjà passé et
14 nous gardons tout ceci à l'esprit.
15 Maintenant, essayons de tirer au clair la question des documents. Il y a
16 d'abord le document du 18 octobre -- un instant, Monsieur Milosevic -- ce
17 document du 18 octobre recevra une cote provisoire d'identification. Je
18 l'ai sous la main. Je le remets à Madame la Greffière et je lui demande une
19 cote pour ce document.
20 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit du document D189 ID, document
21 avec cote provisoire.
22 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic. Vous demandez le
23 versement au dossier de cet acte d'accusation, Monsieur Milosevic ?
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai déjà cité trois documents, Monsieur May,
25 parce que j'essaie de gagner du temps et j'en ai encore mais je cherche,
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1 une fois de plus, à gagner du temps.
2 M. MILOSEVIC : [interprétation]
3 Q. Ne savez-vous pas, Monsieur, qu'il y a un acte d'accusation de dresser
4 à votre encontre pour une attaque et meurtre de plusieurs personnes de
5 nationalité serbe dans le village de Vujicici, Gajevi et Bukovac en
6 septembre 1992 ? Le saviez-vous ou pas ?
7 R. Messieurs les Juges, je voudrais faire un commentaire à ce sujet-là.
8 Monsieur Milosevic, vous êtes en train de parler de la même chose.
9 Q. Ce n'est pas exact.
10 R. Vous êtes en train de parler du cas de Bukvik. Et je le sais mieux que
11 vous, Monsieur Milosevic. Je sais qu'à côté de Bukvik, il y a Bukovac,
12 Vitanovici, ce sont des hameaux ce que vous avez mentionnés. Cela fait
13 partie du même dossier et du même territoire.
14 Messieurs les Juges, en septembre 1992, l'armée de Bosnie-Herzégovine, à
15 savoir, la 108e Brigade, a eu des conflits, des combats avec l'agresseur à
16 ces endroits-là et suite à ces combats. Il y a eu des victimes que
17 probablement Monsieur Milosevic a mentionnées.
18 Q. Et ceux que l'on a emmené vers des camps de concentration où on leur a
19 brisé les crânes, où on leur a coupé la tête, ça aussi ce sont des victimes
20 --
21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Or de question. Vous avez déjà présenté
22 ce type d'allégations rejetées par le témoin. Elles ne s'améliorent pas à
23 les répéter. Il vous reste deux minutes.
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, il s'agit ici d'actes
25 d'accusations variés pour les différents villages mentionnés ici, quoique
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1 M. Ramic dit que c'est la même chose. Alors, je voudrais que vous ne
2 perdiez pas cela de vue.
3 M. MILOSEVIC : [interprétation]
4 Q. Ensuite, savez-vous, Monsieur, que suite à un jugement du Tribunal de
5 Brcko, cas 6894 du 5 juillet 1995, vous avez été condamné pour les actes
6 criminels perpétrés par vos soins ainsi que votre frère Ibrahim. Vous avez
7 un jugement de prononcer pour des peines de 15 ans d'emprisonnement.
8 R. Vous parlez d'un document que j'ai mentionné. Je vous ai dit que j'en
9 ai entendu parler en 1995. C'est ce que j'ai effectivement entendu dire.
10 J'ai appris qu'un Tribunal quelconque m'avait condamné pour une sorte de
11 crimes de guerre, ce qui n'est qu'une farce. On ne fait que jouer ici avec
12 les crimes perpétrés par une partie que l'on veut attribuer à l'autre.
13 Q. Ecoutez. Il s'agit, ici, d'un jugement prononcé par un Tribunal --
14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il a déjà répondu. Il a dit que c'était
15 une farce. Avançons.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Et bien. Je crois que c'est plutôt une farce
17 que nous avons ici, Monsieur May. Et ceci, ce sont des faits. Ce sont des
18 documents émanant de tribunaux, et ce sont des jugements. Donc, ce ne sont
19 pas des actes d'accusation mais ce sont des jugements de prononcer. --
20 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Votre temps est épuisé. Vous avez fait
21 valoir votre argument. Nous verrons le traitement réservé à tous ces
22 documents de justice. Après la pause, nous entendrons les amis de la
23 Chambre pour voir s'ils ont des questions à poser et puis la parole
24 reviendra au bureau du Procureur.
25 Nous faisons maintenant une pause de vingt minutes.
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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, je vous ai demandé de verser au
2 dossier ces documents émanant d'un Tribunal. J'espère que M. Ramic ne
3 contestera pas leur authenticité.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce vous me demandez ma réponse là ?
5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Non. Non. Attendez. Nous connaissons
6 votre réponse. Nous verrons ce que nous allons faire de ces documents après
7 la pause.
8 --- L'audience est suspendue à 10 heures 34.
9 --- L'audience est reprise à 10 heures 55.
10 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Les documents provenant des tribunaux
11 seront admis sans, bien sûr, pour autant nous prononcer à leurs propos et
12 sans dire, non plus, si on peut leur attribuer une valeur probante. Nous
13 voulons simplement, de ce fait, de consigner le fait que ces documents
14 existent. Nous allons commencer par les actes d'accusation.
15 Vous les avez, Monsieur Milosevic ? Si c'est le cas, transmettez-nous les
16 deux actes d'accusation et nous aborderons, de façon séparée, le jugement.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Voilà de quoi il s'agit, Monsieur May, nous
18 allons procéder dans l'ordre. Il y a d'abord un acte d'accusation du 9
19 novembre 1995, puis un acte d'accusation du 9 juin 1994, puis un acte
20 d'accusation du 14 juillet 1994, un acte d'accusation du 16 juillet 1994,
21 un acte d'accusation du 26 juillet 1994 et un jugement porté par le --
22 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. Commençons
23 par tous les actes d'accusation et nous leur donnerons une cote collective.
24 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce D190.
25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ce sont donc les actes d'accusation.
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1 Quand est-il du jugement ? Il va recevoir la cote suivante. Veuillez le
2 remettre à l'huissière.
3 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce D191.
4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] La cote pour le jugement --
5 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Oui, c'est D191.
6 M. LE JUGE MAY : Merci.
7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Ramic, étiez-vous au
8 courant de l'existence de ces actes d'accusation et des charges retenues
9 contre vous ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je n'étais pas au courant. Je l'ai
11 appris, j'en ai eu vent tout à fait par hasard et ceci après la date qui a
12 été citée pour ce qui est du jugement porté. Je crois que ça c'est situé --
13 je n'en suis pas sûr, novembre, décembre 1995 ou alors janvier, février
14 1996, c'est là que je l'ai appris.
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je suppose que vous n'avez jamais
16 été interpellé, ni arrêté suite à ces actes d'accusation.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Et bien, Messieurs les Juges, bien sûr, il
18 n'en a pas été question. Et j'estime que c'est là la farce pure et simple.
19 Je pourrais vous en dire très long à ce sujet.
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le jugement prononcé, il a donc été
21 prononcé in absentia ?
22 R. Probablement. Probablement. Je n'en avais aucune idée moi-même.
23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] --
24 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Excusez-moi, je vous ai interrompu.
25 Maître Tapuskovic, vous avez la parole.
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1 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, il y a quelques jours
2 -- ou pour être plus précis, le 8 septembre 2003 -- en notre qualité d'amis
3 de la Chambre, nous avons reçu un grand nombre de documents en vertu des
4 termes de l'application 68, pour ce qui est des éléments à décharge, et
5 parmi ces documents -- et je ne vais pas vous grever ou surcharger avec
6 tous les détails -- mais je me réfère à ce qu'a déjà mentionné M. Slobodan
7 Milosevic et partant de ce qu'il a cité, j'ai choisi quelques documents
8 seulement qui datent de 1993, donc qui datent d'avant la création du
9 présent Tribunal. Il y a deux documents qui datent de janvier 1993 du tout
10 début de cette année-là et il y en a deux qui datent du mois de février de
11 la même année.
12 Alors dans les quatre cas que je viens de citer pour ce qui est des
13 documents en question, il se rapporte à des plaintes portant délit pénal,
14 délit de crime de guerre contre la population civile qui sont prévus par
15 l'Article 142 du code pénal de la RSFY. Et ensuite à ces plaintes au pénal,
16 on cite les localités, les dates, les victimes. Et pour ce qui est de ces
17 quatre plaintes au pénal, l'accusé -- ou le suspect c'est Ramic Mustafa. Je
18 ne vais pas vous parler des autres documents, mais je pense que ceux-ci
19 pourraient constituer des documents qu'il vous appartiendra d'apprécier
20 étant donné que cela nous provient du bureau du Procureur.
21 Questions de l'Amicus Curiae, M. Tapuskovic :
22 Q. [interprétation] Je voudrais demander au témoin s'il est au courant des
23 événements qui sont englobés par ces plaintes au pénal où vous avez été
24 reconnu par des habitants, des villageois de Bukovac où vous avez participé
25 à des actes déterminés qui sont décrits dans ces plaintes au pénal ou pas ?
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1 R. Si vous me permettez d'éclaircir les choses. Je crois comprendre que
2 vous me demandez de parler des événements.
3 Q. Oui, par exemple, prenez l'événement du 11 février [sic] 1992 à telle
4 heure, à 17h30, on parle de personnes qui ont perdu la vie et on affirme
5 ici qu'un certain nombre de villageois de Bukovac vous aurait reconnu comme
6 étant l'auteur de ces crimes. Cela est-il exact et savez-vous nous dire
7 quoi que ce soit à ce sujet ?
8 R. Tout à l'heure vous avez dit le 11 février 1992.
9 Q. Non, le 11 septembre, à 17h30, acte perpétré par une unité de la 108e
10 Brigade de Brcko, où l'on cite votre nom en premier et on dit que les
11 personnes ci mentionnées sont reconnues par un certain nombre de villageois
12 de Bukovac. Savez-vous nous dire quoi que ce soit à ce sujet ou pas ?
13 R. Messieurs les Juges, permettez-moi d'expliquer ce qui se passe. Pour
14 répondre à ce qui a été dit, il faut que j'apporte des explications, voilà
15 de quoi il s'agit. Au sein du territoire libéré de Brcko où je me trouvais
16 moi-même et qui a été défendu par la 108e Brigade, il y avait un secteur,
17 le village de Bukvik avec les autres villages, qui ont été cités tout à
18 l'heure, donc cela se trouvait en profondeur derrière les lignes de front,
19 à peu près à sept ou dix kilomètres à l'intérieur de ces lignes-là. Ce
20 secteur-là est un secteur ethniquement habité par des Serbes uniquement et
21 nous savions qu'il y avait là un groupe armé d'organiser. L'armée de la
22 Bosnie-Herzégovine ne s'est pas aventurée dans ce secteur et il n'y a pas
23 eu d'incidents du tout pendant quatre mois entiers. Donc l'agression a déjà
24 eu lieu, l'occupation de Brcko a eu lieu le 1er mai 1992. Il s'est passé le
25 mois de mai, le mois de juin, le mois de juillet et août, et ces événements
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1 surviennent en début septembre.
2 Pendant tout ce temps-là, donc la brigade en question, à plusieurs
3 reprises, a essayé de s'entretenir -- de négocier avec ces hommes armés, à
4 savoir, ces membres d'une structure quelconque armée pour que celle-ci se
5 désarme de façon pacifique afin que cette région-là fasse partie de la
6 défense du territoire défendu. Et les négociations ont duré un certain
7 temps, il n'y a pas eu de conflits.
8 Toutefois, à plusieurs reprises, il y a eu une situation inverse, à savoir,
9 l'occupant a fait irruption dans des secteurs qu'il voulait -- dont il
10 voulait s'emparer et il y a eu des crimes -- toute une série de crimes de
11 commis. Donc, conscient de ce fait et suite à des informations qui nous
12 sommes parvenues suite à la coupure de certaines voies de communication par
13 l'agresseur, par l'assaillant et par ce groupe de villageois, la
14 communication se faisant par le territoire libéré, une fois ces voies de
15 communication coupées, nous avons constaté que l'occupant s'apprêtait à
16 accéder à ces territoires-là.
17 Je l'ai appris, par la suite, donc à titre ultérieur par le commandement de
18 la 108e Brigade parce que je n'ai pas pris part à tout ce qui s'est passé,
19 étant donné que j'étais représentant des autorités civiles, moi-même. Il
20 est arrivé donc ce qui suit : un représentant de la brigade a essayé une
21 fois de plus, en se servant d'un drapeau blanc, d'entrer dans ce village,
22 de parler aux gens du village. Il a été tué. Suite à quoi a éclaté un
23 conflit qui a échappé à tout contrôle, je ne sais pas ce qui s'est passé,
24 mais en tout cas la 108e Brigade s'est emparé du contrôle de la région et
25 je dois dire que la 108e Brigade a trouvé beaucoup d'armes, quatre
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1 mitrailleuses lourdes, plusieurs lance-roquettes, de 100 à 120 [sic] fusils
2 automatiques, beaucoup d'explosifs, des projectiles divers --
3 Q. Est-ce que, du côté serbe, il y a eu des victimes ?
4 R. Je pense qu'il y en a eu. Cependant ce que j'essaie de dire c'est que
5 toutes ces victimes étaient armées.
6 Q. Pourriez-vous nous parler des charges retenues ailleurs contre vous ?
7 Pour ce qui est de l'attaque Bijela, village de la municipalité de Brcko le
8 11 juin entre 11 heures 30 et 14 heures 00, et d'après ces chefs
9 d'accusation, vous êtes le premier suspect -- le suspect principal. Là, une
10 fois de plus, plusieurs victimes sont tombées.
11 Etes-vous au courant ?
12 R. Le village de Bijela se trouve en profondeur dans le territoire libéré,
13 derrière les lignes de front, je dirais à 15 ou 20 kilomètres de la ligne
14 de front. Tenez-en compte c'est une première chose.
15 Autre chose, c'était un village à population mixte, 70 % des habitants
16 étaient Croates, 30 % Serbes. D'emblée, dès le départ du conflit armé, dès
17 l'occupation qui a commencé le 1er mai, les civils ont participé, le village
18 a participé à la défense avec d'autres structures. Je ne nie pas qu'il y
19 ait eu attaque dirigée sur ce village. Je ne peux pas nier que se soit
20 passée quelque chose dont je n'étais pas au courant. Ce que j'aimerais dire
21 en guise de commentaires et que j'aimerais que vous -- et que j'aimerais
22 que vous preniez en compte c'est que moi qui étais à la tête des autorités
23 civiles, à l'époque. Mention est faite de mon nom dans le contexte de la
24 guerre, de ce conflit, des combats. C'est là quelque chose de tout à fait
25 absurde.
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1 Q. Je ne voudrais pas m'appesantir davantage sur ces documents, mais je
2 pense qu'il faudrait que les Juges en disposent, les examinent car ces
3 documents ont été communiqués par le bureau du Procureur. Il y a quatre
4 rapports de justice et je voudrais en demander le versement.
5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ces documents recevront une cote C, à
6 savoir, document de la Chambre.
7 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, vous
8 trouverez ma signature à la première page, mais c'est dans ces conditions
9 que j'ai reçu ce document.
10 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui. Une cote sera attribuée dans un
11 instant. Poursuivez, Maître Tapuskovic.
12 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
13 Q. Messieurs les Juges, je n'ai pas grand-chose à demander au témoin. Je
14 voudrais, cependant, lui demander ce qu'a fait la JNA au moment où tout
15 ceci a commencé le 1er mai. C'est en rapport avec les événements qui se sont
16 produits sur le pont.
17 Des questions nombreuses vous ont été posées à propos de cet événement
18 survenu où ces questions ont été posées les 10 et 12 décembre par le bureau
19 du Procureur. Je voudrais que le bureau du Procureur remette au témoin la
20 déclaration que ce témoin lui a fourni en décembre 1998.
21 Veuillez examiner la page numéro 7, quatrième paragraphe. Voici ce que vous
22 avez dit à l'époque, s'agissant des événements en rapport avec le
23 dynamitage des ponts. Quatrième paragraphe, vous dites ceci : "Trois jours
24 avant le dynamitage des ponts, j'ai été tellement inquiété par la
25 perspective d'un conflit que j'ai envoyé ma famille à Zagreb." C'est bien
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1 exact ?
2 R. Oui.
3 Q. Paragraphe suivant : "A ce moment-là, j'ai constaté qu'on me suivait."
4 Qui vous suivait ?
5 R. Pour répondre à cette question, il faut que je vous fournisse un
6 complément d'informations.
7 Q. Ce n'est pas une explication essentielle. Vous dites simplement,
8 Monsieur le Témoin, que : "La nuit, on a fait sauté ces ponts. J'ai passé
9 la nuit chez ma sœur." C'est bien cela ?
10 R. Oui.
11 Q. Par conséquent, vous n'aviez pas de connaissances directes s'agissant
12 de ce qui se passait éventuellement sur les ponts ?
13 R. Je n'ai pas tout à fait compris votre question. Qu'est-ce que vous
14 voulez dire que je n'avais pas de connaissances ? A propos de quoi ?
15 Q. Vous avez dit que vous aviez passé la nuit, cette nuit-là, chez votre
16 sœur et ceci vous le dites dans toute votre déclaration. Nulle part, vous
17 ne faites mention d'une intervention, d'une participation quelconque de la
18 JNA dans ce dynamitage des ponts.
19 Regardez le paragraphe 3, à la page 8. Vous y faites une déclaration et
20 vous avez été interrogé par le bureau du Procureur à propos de cette date.
21 Vous dites : "Quelqu'un a essayé de provoquer un conflit en faisant sauter
22 les ponts." Mais nulle part, vous ne dites que la JNA aurait eu une
23 implication quelconque dans le fait de faire sauter ces ponts. Vous ne
24 dites, nulle part, dans votre déclaration de décembre 1998.
25 R. Maître Tapuskovic, vous disiez il y a un instant que le dynamitage des
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1 ponts a été le fait de la JNA, de ces représentants. C'est elle qui l'a
2 organisé.
3 Q. Je comprends bien. Mais je vous demande pourquoi vous ne l'avez pas dit
4 dans votre déclaration préalable ?
5 R. Vous avez mal compris ce paragraphe. Ce que je dis, c'est qu'au cours
6 des conversations que j'ai eues ce jour-là, le 30 mai dans la matinée, la
7 veille de l'occupation, dans le cadre des pourparlers avec l'armée, il
8 m'est apparu -- il nous est apparu clairement qui l'avait fait et pourquoi.
9 Moi, j'ai essayé d'empêcher que n'éclate le conflit. Et ce qu'il me fallait
10 surtout faire dans ce cas, c'était de parler avec l'armée qui était la
11 partie opposée en puissance. Et au cours de ces pourparlers, ce que j'avais
12 comme objectif, c'était de ramener le calme, de calmer la situation plutôt
13 que de provoquer un conflit et je ne pouvais pas entamer ces pourparlers en
14 leur portant des accusations.
15 Q. Je comprends bien, mais pourquoi ne pas avoir dit aux enquêteurs du
16 bureau du Procureur ce que vous avez dit aujourd'hui, à savoir que c'est la
17 JNA qui a fait sauté ces ponts ? Pourquoi ne pas l'avoir dit dès 1998 ? Je
18 comprends parfaitement que vous ne l'avez pas dit deux jours après les
19 événements, mais pourquoi ne pas l'avoir dit en 1998 ? Pourquoi ne pas
20 l'avoir dit d'emblée aux enquêteurs du bureau du Procureur ? Comment
21 expliquez-vous cette omission ?
22 R. C'est sans doute que la conversation n'a pas abordé ce point, que la
23 question ne m'a pas été posée par les enquêteurs. Il se peut qu'à ce
24 moment-là, je ne l'aie pas dit. Mais je ne l'ai pas dit que quelqu'un
25 d'autre l'aurait fait ou que je ne savais pas qui était l'auteur de ces
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1 faits.
2 Q. Quel était l'intérêt qu'aurait eu la JNA qui disposait d'artilleries
3 lourdes, qui avait des chars, qui venait en Serbie, qui partait de Serbie,
4 il y avait donc des déplacements. Quel intérêt la JNA avait-elle à être
5 privée de ponts ? Parce qu'une armée aussi sérieuse que la JNA, la JNA de
6 l'époque, était incapable de fonctionner sans ponts ? Comment serait-il
7 dans l'intérêt de la JNA de détruire ces ponts alors que le conflit n'avait
8 même pas commencé ?
9 R. Et bien, c'est là que se trouve la réponse. L'intérêt de la JNA c'est
10 que ce pont était le cordon ombilical qui reliait Brcko à la Croatie. A ce
11 moment-là, déjà, la Croatie était en train de gagner la guerre menée contre
12 cette armée. Ce qui veut dire que de l'autre côté, il y avait un territoire
13 libéré qui aurait pu aider Brcko libéré et l'armée. Elle voulait couper
14 cette artère, cette voie de communication, voulait nous couper de nos
15 arrières.
16 Et la deuxième raison c'était qu'en détruisant ces ponts, on a utilisé trop
17 d'explosifs et ceci de façon délibérée, de façon à semer la panique en
18 ville ce qui a rendu impossible toute défense digne de ce nom.
19 Q. Mais hier, vous avez dit qu'à l'époque, il y avait environ 150 civils
20 au moment où le pont a sauté. C'est bien cela ?
21 R. Oui. C'étaient des civils qui étaient en train de franchir ce pont qui
22 venait de Croatie. C'étaient des citoyens qui rentraient chez eux, qui
23 avaient travaillé quelque part, qui étaient des travailleurs, disons
24 émigrés, des "gastarbeiters" qui rentraient chez eux pour les vacances, les
25 femmes et des enfants.
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1 Q. Au moment où le pont a sauté, ils étaient tous sur ce pont ?
2 R. Oui.
3 Q. Est-ce que ça veut dire qu'il y a eu beaucoup de pertes de vies
4 humaines ? Vous n'en avez fait mention nulle part dans votre déclaration
5 préalable. Vous n'avez même pas dit connaître une seule victime.
6 R. Maître Tapuskovic, ce n'est peut-être pas dit explicitement dans ce
7 document écrit, mais nombreuses sont les preuves. Je pense à des
8 déclarations qui montrent qu'il y a plus de 100 pertes de vies humaines.
9 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vous remercie.
10 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Mme Pack, vous avez la parole.
11 Mme PACK : [interprétation] Je vais demander que soit présenté au témoin
12 les pièces de la Défense D190 et D191.
13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous allons demander la cote pour le
14 document de la Chambre.
15 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce C13.
16 Nouvel interrogatoire par Mme Pack :
17 Q. [interprétation] Veuillez examiner les premières pages de ces deux
18 documents qu'on vient de vous remettre, uniquement les pages de garde.
19 R. Oui.
20 Q. Avez-vous, avant la date d'aujourd'hui, vu l'un ou l'autre de ces
21 documents ?
22 R. Je n'ai vu ces documents qu'hier, au moment où vous, vous me les avez
23 montrés, Madame, mais pas auparavant.
24 Q. Avez-vous déjà vu un acte d'accusation ou un jugement rendu par les
25 autorités de la Republika Srpska ?
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1 R. Jamais.
2 Q. Aujourd'hui, vous habitez Sarajevo. Etes-vous rentré à Brcko depuis
3 votre départ de la ville ?
4 R. Oui. J'y vais assez souvent.
5 Q. Est-ce que vous avez de la famille à Brcko ?
6 R. Oui. Deux de mes frères, ma sœur et d'autres membres de ma famille y
7 vivent.
8 Q. Est-ce que vous, ou des membres de votre famille, avez reçu des
9 documents portant sur des charges au pénal retenues contre vous, ou des
10 détails précis s'agissant de chefs d'accusation dressés contre vous ?
11 R. Pour répondre à ce que vous dites, et à ce que vous m'avez montré,
12 jamais l'un d'entre nous n'a reçu ce genre de chose. Jamais je n'ai reçu
13 d'informations.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais je n'ai pas compris au moment où il
15 dit qu'il avait vu des documents hier.
16 Mme PACK : [interprétation] Je vais demander la question -- ou poser la
17 question au témoin. Mais prenons-les, un à la fois.
18 Q. D'abord, le document portant la cote D190, examinez la première page de
19 ce document, et l'intitulé -- le titre. Est-ce que c'est un acte
20 d'accusation dont il est question ?
21 R. Il est dit : "Rapport de justice, en date du 9 novembre 1995", émis par
22 le ministère de l'Intérieur de la Republika Srpska.
23 Q. Est-ce qu'hier, vous avez vu ce document précis, ou à votre arrivée à
24 La Haye ?
25 R. Non, pas hier. Excusez-moi, Messieurs les Juges, je me suis trompé. A
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1 mon arrivée à La Haye, un moment donné, vous me l'avez montré, mais ce
2 n'était pas hier, non.
3 Mme PACK : [interprétation] Peut-on maintenant remettre au témoin le
4 document qui porte la cote C, C13 plus exact ?
5 Q. Monsieur Ramic, je ne veux pas semer la confusion dans votre esprit,
6 mais il s'agit là d'un troisième document. Vous constaterez que l'intitulé
7 est différent. Pourriez-vous nous donner la date de rédaction de ce
8 document, et nous en donner le titre, ou l'intitulé ?
9 R. Il s'agit de "Plaintes au pénal", présentées par le procureur militaire
10 de Bjelinja, le 18 janvier 1993.
11 Q. Et est-ce que ce document, et des documents analogues à celui-ci, qui
12 vous ont été présentés à votre arrivée à La Haye ?
13 R. Tout à fait.
14 Mme PACK : [interprétation] Je ne voulais pas semer la confusion dans
15 l'esprit du témoin, mais ces documents, qu'a utilisés l'accusé aujourd'hui,
16 sont des documents que possède le bureau du Procureur.
17 Q. Je n'ai que quelques questions supplémentaires à vous poser. Est-ce que
18 des mesures ont été prises pour que vous, ou d'autres individus mentionnés
19 dans ces documents, soyez traduits en justice ?
20 R. Je n'étais pas au courant.
21 Q. Pourriez-vous nous dire dans quelle circonstance vous avez été mis au
22 courant de l'existence de la question précédente posée par le substitut? Ce
23 ne sont pas des documents que possède le bureau du Procureur.
24 R. Mais je l'ai déjà dit, il y a un instant. Lorsque je parlais du
25 jugement porté au regard de ce prétendu acte d'accusation pour crimes de
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1 guerre, je ne sais plus exactement dans quelle circonstance je l'ai appris.
2 Peut-être que quelqu'un m'en a-t-il parlé, ou est-ce qu'on m'a montré un
3 article de journal de l'époque. Ça venait du côté de la Brcko occupée, mais
4 c'était en 1995 ou 1996, et le titre disait ceci : "Accusé de crimes de
5 guerre", et mon nom était mentionné dans ce contexte. C'est là, la première
6 fois que j'ai entendu parler de tout cela.
7 Q. Pourriez-vous dire aux Juges si depuis vous avez appris qu'il y avait
8 une suite donnée à ces premières charges retenues contre vous ?
9 R. Oui. Ça s'est passé il y a un an et demi. J'ai lu dans les journaux que
10 le Tribunal de Brcko -- dans l'arrondissement de Brcko, c'est comme on
11 l'appelle aujourd'hui -- que ce Tribunal de Brcko avait gracié ou pardonné
12 les personnes accusées de crimes de guerre. Mon nom faisait partie de ces
13 personnes. Mais j'aimerais apporter un autre commentaire. Est-ce que je
14 peux en parler ?
15 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, mais soyez bref.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai été surpris. J'ai envoyé une lettre au
17 Tribunal. J'ai réussi à trouver le numéro de téléphone du Juge, et je lui
18 ai demandé quels étaient les crimes de guerre concernés. Et j'ai envoyé une
19 lettre de protestation. J'ai demandé que soit mis fin à toute cette
20 procédure pénale, et que je ne sois pas mentionné en tant que criminel de
21 guerre, et que je n'accepterais pas de d'être amnistié, d'être pardonné
22 pour quelque chose que je n'avais jamais fait.
23 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je pense qu'il faut tirer cette histoire
24 au clair puisque des allégations ont été formulées. S'il est vrai que le
25 Tribunal a prononcé une amnistie, il faut que nous nous en soyons informés
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1 car ceci risque d'avoir un incident sur la façon dont nous comprenons la
2 situation. Je demanderais au bureau du Procureur de mener une enquête à ce
3 propos.
4 Mme PACK : [interprétation] Nous le ferons, mais nous n'avons pour seuls
5 documents que ceux qui ont été communiqués lundi. Et l'ami de la Chambre a
6 posé des questions à partir de ces documents aujourd'hui, mais je veillerai
7 à ce que ceux-ci soient examinés, davantage.
8 Q. Monsieur le Témoin, encore une question. Vous avez vu une liste où sont
9 mentionnées les personnes accusées dans cet acte d'accusation. On a là
10 l'acte d'accusation de façon générale. Quelles sont ces personnes ? Ne
11 donnez pas les noms, mais dites-nous de quelle catégorie de personnes il
12 s'agit.
13 R. Pour ce qui est de toutes ces plaintes au pénal, pour tout ce qui est de
14 tous ces actes d'accusation, ce sont pratiquement toujours les mêmes
15 personnes qui sont concernées. Ce sont les personnalités les plus éminentes
16 parmi les autorités civiles de Brcko libérée. Il y a le commandant de la
17 108e Brigade aussi, puis des gens qui viennent des services de la Sûreté de
18 l'état. Et comment dire l'un ou l'autre individu que je ne connais pas.
19 Mais, de façon générale, ce sont toujours les mêmes personnes, celles qui
20 se trouvaient au sommet des autorités civile et militaire de Brcko libérée.
21 Q. Et leur appartenance ethnique ?
22 R. Ce sont des Musulmans et des Croates de Bosnie.
23 Q. Une dernière question. Quelle fut votre réaction au moment où vous avez
24 appris que vous aviez été amnistié ?
25 R. Je vous l'ai dit il y a un instant. J'étais tout à fait en émoi. J'ai
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1 téléphoné à ce Juge. Je lui ai dit tout simplement qu'il devait mettre un
2 terme à tout ceci. Je lui ai demandé d'où ça venait. Il m'a répondu qu'il
3 n'avait pas d'autres recours, légalement, rien d'autre que ce qu'il avait
4 fait déjà, à savoir, prononcer une amnistie. Cependant, j'ai envoyé une
5 demande officielle par écrit à ce Tribunal, en disant que je refusais cette
6 amnistie et que ce procès qui avait été confectionné de toute pièce soit
7 annulé, qu'un non-lieu soit prononcé.
8 Mme PACK : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions, Messieurs les
9 Juges.
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Pack, essayez de savoir
11 également si cette amnistie a été prononcée en rapport avec les charges qui
12 avaient porté condamnation et le jugement. Je ne vois plus très bien.
13 Mme PACK : [interprétation] Je vais tirer ceci au clair. Je n'ai pas vu
14 tous ces documents communiqués par l'accusé, mais, apparemment, il y a un
15 ordre chronologique des événements, s'agissant des actes d'accusation. Et
16 je pense que l'amnistie est consécutive dans le temps ultérieur.
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, pourriez-vous
18 m'aider sur ce point ? Des documents ont été produits par l'accusé, en
19 l'occurrence d'un jugement. A l'évidence, c'était un jugement prononcé par
20 contumace à la suite d'un procès, in absentia, je suppose, que Republika
21 Srpska -- une procédure est prévue pour la tenue d'un procès par contumace.
22 Cependant, ma question est la suivante : est-ce qu'on peut tenir un procès
23 par contumace, in absentia, sans essayer d'exécuter -- d'appliquer l'acte
24 d'accusation ? Est-ce qu'on peut entamer un procès par contumace sans
25 essayer de signifier l'acte d'accusation à l'accusé ?
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1 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] En vertu de la loi, la loi en vigueur sur
2 tout ce territoire à l'époque, et on peut dire que les lois étaient
3 appliquées sur tout le territoire, en dépit de la situation qui prévalait.
4 En vertu de cette loi-là, le Tribunal doit faire tout ce qui est en son
5 pouvoir pour veiller à assurer la présence de l'accusé. Il faut d'abord
6 signifier l'acte d'accusation à la personne concernée et, en cas d'échec,
7 il faut sommer cette personne à se présenter au procès. Là une fois de
8 plus, si cette tentative échoue, on peut procéder à un procès par
9 contumace, ce sur quoi est prononcé un jugement. S'il arrive à un accusé de
10 comparaître devant un Tribunal, après il faudra en prévision un nouveau
11 procès. Ici nous voyons qu'il y a un jugement qui est prononcé, ce qui est
12 a été cas ici. A ce moment-là il faudrait recommencer tout le procès et
13 ceci est conforme aux règlements en vigueur en RSFY.
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Maître Tapuskovic.
15 Mme PACK : [interprétation] Peut-être faudrait-il poser quelques questions
16 à propos de la compétence du Tribunal de Brcko.
17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, mais brièvement.
18 Mme PACK : [interprétation]
19 Q. A votre connaissance aujourd'hui, lorsqu'on parle du Tribunal de police
20 de Brcko, est-ce que celui-ci a hérité de toutes les procédures qui
21 s'appliquaient pendant la guerre au Tribunal, qui était alors le Tribunal
22 serbe de Brcko ?
23 R. Oui, précisément, je vous ai déjà fait état de cette conversation que
24 j'ai eue avec le juge de ce Tribunal, et la question s'est posée dans ce
25 contexte. J'ai demandé comment on pouvait amnistier des personnes
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1 concernées par des procédures, ou des procès menés par comment dire ce
2 Tribunal de guerre de la Republika Srpska. Il m'a été répondu que
3 l'administration de l'arrondissement de Brcko avait légalement hérité de
4 tous les actes juridiques, de tous les actes judiciaires, et de toutes les
5 procédures appliquées alors.
6 Mme PACK : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions à poser à ce
7 témoin.
8 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Ramic, ceci met fin à votre
9 déposition. Merci d'être venu témoigner au Tribunal pénal international,
10 vous pouvez disposer.
11 [Le témoin se retire]
12 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je voudrais que le juriste d'un Chambre
13 s'approche des Juges.
14 Monsieur Nice, vous pourrez peut-être nous aider à propos de Brcko. Je ne
15 veux pas que ceci se prolonge; cependant, tôt ou tard, il faudra nous
16 mettre au courant de la situation, telle qu'elle se présente aujourd'hui.
17 M. NICE : [interprétation] Ça fait partie d'une gestion différente, mais
18 nous veillerons à vous aviser des dates pertinentes. J'ai vu récemment les
19 documents concernés, et je vais examiner la question au cours de la pause.
20 Je suppose que vous aimeriez que ceci soit présenté comme élément de
21 preuve, davantage qu'une simple déclaration d'un substitut.
22 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Si le substitut nous dit qu'il y a
23 polémique à ce propos, il faudrait que ce soit en présenté comme élément de
24 preuve.
25 M. NICE : [interprétation] Je verrais à ce qu'il y ait un ordre
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1 chronologique des événements, qui sont présentés de façon concise, et vous
2 l'aurez après la pause.
3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, il ne faudrait pas que ce soit une
4 question de débat raisonnable.
5 M. NICE : [interprétation] Nous avons une question qui a surgi avec la
6 communication tardive d'élément relevant de l'Article 68, vous le savez --
7 en vertu de cet Article 68. Le règlement exige que nous communiquions à
8 l'accusé une quantité considérable de documents, ce que nous faisons. Puis
9 pour ce qui est de chaque témoin, peut-on
10 -- avant la comparution de ce témoin, nous lui communiquons de nouveau ces
11 documents. C'est beaucoup plus utile pour l'accusé, et s'il y a des témoins
12 qui finissent par ne pas venir, nous ne fournissons pas ces documents parce
13 que ceci ne ferait l'importuner davantage.
14 Ici en l'occurrence, nous avons examiné la situation un peu plus tard. Je
15 ne sais pas si c'est à la suite des vacances ou pas, mais nous avons accusé
16 un certain retard, et il a reçu une liasse de documents qu'il vous a
17 montrés un jour plus tard que d'habitude. Son contre-interrogatoire a
18 révélé que les documents que nous lui avons communiqués étaient semblables,
19 mais comment dire, dans une certaine mesure, des documents moins forts que
20 ceux qu'il avait. Bien sûr, nous n'avons pas pu les comparer, mais on a
21 l'impression que les actes d'accusation, que l'accusé nous a produits et
22 que nous, nous n'avions pas, étaient les documents qui ont succédé au
23 recueil des charges que nous avions pu produire. Donc il n'a pas subi de
24 préjudice quel qu'il soit. Mais nous faisons l'impossible pour qu'il
25 reçoive tous les documents possibles, en application de l'Article 68, et
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1 que ceci soit fait suffisamment de jours avant la venue du témoin censé
2 comparaître, afin de l'aider dans les préparatifs de ce témoignage.
3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pour le moment, le bureau du
4 Procureur a pour pratique d'essayer de trouver tous les documents pour voir
5 s'il y a, dans ces documents, des éléments relevant éventuellement de
6 l'Article 68.
7 M. NICE : [interprétation] Oui, rappelez-vous, toutes les dispositions de
8 l'Article 68 sont évoquées dans les nombreux rapports que nous avons
9 présentés. Nous essayons de retenir quelques critères de recherche,
10 rappelez-vous. Nous vous rappelons -- vous, aux amis, et à l'accusé --
11 quels sont ces critères de recherche, de façon régulière, nous faisons
12 cette recherche.
13 Outre cela lorsqu'il y a venue d'un témoin, il y a recherche du nom de ce
14 témoin dans le système que nous avons. Et en fonction du témoin, ça peut
15 donner peu de documents ou une quantité énorme de documents. On les
16 récupère, ils sont présentés sur support papier, les substituts les passent
17 en revue pour voir si, dans ces documents, il y a des documents qui sont
18 sur le coup de la communication en application de l'Article 68.
19 Il y a peut-être eu chevauchement entre ce qui est l'Article 68, pour un
20 témoin précis, et ce qui a été déjà communiqué pour ce qui est de la
21 disposition générale de recherche de documents à décharge. Mais,
22 indépendamment de cela, lorsqu'un témoin vient déposer, nous faisons une
23 recherche de documents, fournissons ce qu'il nous faut produire, nous
24 passons ces documents en revue --
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous pose la question parce que
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1 je commence à me dire que l'Article 68 n'entraîne pas nécessairement
2 l'équité voulue pour toutes les parties au procès. A mon avis, ce n'est pas
3 quelque chose qui puisse se pratiquer, c'est indûment onéreux et lourd
4 comme procédure. Mais je pense qu'il faudra étudier la question, il faudra
5 peut-être revoir cet article, cette procédure afin qu'elle puisse mieux
6 s'appliquer, sans cause de préjudice à l'accusé.
7 M. NICE : [interprétation] Votre avis m'intéresse grandement, et je sais
8 qu'il y a examen général de la question en ce moment, et nous apportons
9 notre écho en tant que bureau du Procureur dans cet examen. Mettant que le
10 règlement n'aura pas été modifié, il nous faut appliquer le règlement
11 entier.
12 Maintenant, vous parlez du général Van Baal. L'accusé vous a dit qu'il
13 avait reçu certains documents assez tardivement, plus tardivement que je ne
14 voulais.
15 Apparemment, nous avons constaté que -- qu'il y avait plusieurs classeurs
16 de documents qu'il fallait revoir, à savoir, environ 130 documents. Pour
17 des raisons internes que je vous épargne, cet examen est intervenu plus
18 tardivement qu'il n'aurait dû l'être. Une quinzaine de documents auraient
19 dû être communiqués. Un dernier document hier soir a été retenu comme tel.
20 Voilà la somme de documents communiqués à l'accusé, je les ai en main. On y
21 trouve des articles de journaux, des rapports de situation, des "Sitreps"
22 comme on les appelle, vous les connaissez. Ce n'est pas une lecture trop
23 ardue, mais, bien sûr, il aurait été préférable que l'accusé dispose de ces
24 documents plus tôt.
25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous allons avoir l'interrogatoire
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1 principal du témoin, le contre-interrogatoire commencera, et puis nous
2 verrons si des questions vont surgir.
3 M. NICE : [interprétation] Pendant qu'on va chercher le
4 témoin --
5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je pense que la greffière d'audience
6 voulait me dire quelque chose ?
7 On nous a dit que le témoin allait déposer et qu'il avait besoin
8 d'interprète.
9 M. NICE : [interprétation] J'aurais dû vous le dire. Pour nous, il parle un
10 anglais parfait, mais vous le savez qu'au Pays-Bas, il y a une tradition
11 absolument merveilleuse de connaissances des langues étrangères. Il tient à
12 parler par le truchement d'un interprète qui traduira ces propos, qui
13 interprètera ces propos du néerlandais vers l'anglais.
14 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
15 M. NICE : [interprétation] Vous le constaterez que M. Ierace nous a
16 rejoint. Il connaît bien la situation de Sarajevo. Il sera présent avec
17 nous lorsque nous allons aborder les témoins de Sarajevo.
18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vais demander au témoin de prononcer
19 la déclaration solennelle.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
21 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
22 LE TÉMOIN: ADRIANUS VAN BAAL [Assermenté]
23 [Le témoin répond par l'interprète]
24 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur. Veuillez vous
25 asseoir.
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1 M. NICE : [interprétation] Avant d'oublier, Messieurs les Juges, même si je
2 ne vais pas y faire référence à cette grande carte de Sarajevo, elle est à
3 votre disposition si le témoin veut l'utiliser. Nous allons essayer de
4 trouver un chevalet pour l'afficher.
5 Interrogatoire principal par M. Nice :
6 Q. [interprétation] Votre identité, Monsieur le Témoin.
7 R. Adrianus Van Baal.
8 Q. Vous êtes général de l'armée néerlandaise.
9 M. NICE : [interprétation] Et, Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
10 ce témoin a déjà déposé dans le procès Galic. Le compte rendu d'audience
11 est admis au dossier sous réserve des dispositions de l'Article 92 bis D
12 avec contre-interrogatoire. Par conséquent, je vais ici vous faire lecture
13 du résumé de la déposition déjà faite par ce témoin dans un autre procès.
14 J'aurais quelques questions à évoquer de viva voce et nous allons vous
15 demander d'accepter une pièce collective.
16 Q. Mon général, je vais commencer de lire le résumé de la déposition que
17 vous avez faite. J'essaierai de le faire à un débit raisonnable et j'espère
18 que les interprètes me rappelleront si je vais trop vite.
19 Ce témoin était membre de l'armée néerlandaise depuis 1966, chef d'état
20 major de la FORPRONU à partir du 24 février 1994. A son arrivée à Sarajevo,
21 à la suite de l'incident du marché de Markale, il a compris que
22 l'atmosphère qui régnait dans la ville était une atmosphère caractérisée
23 par l'horreur et un appel explicite à l'aide.
24 Il a pu observer qu'il existait un système de commandement centralisé et
25 efficace au sein de la VRS, qui menait la bataille de Sarajevo par le
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1 truchement du Corps de la Roumanija-Sarajevo, qui avait à sa tête le
2 général Galic, un homme qui avait beaucoup de popularité auprès de ses
3 soldats et qui avait beaucoup d'autorité.
4 Son supérieur hiérarchique immédiat était le général Mladic; cependant, le
5 général Milovanovic, chef du Grand état major de la VRS, a exercé une
6 influence considérable sur le général Galic pour ce qui est du
7 fonctionnement quotidien des affaires du corps.
8 Le témoin confirmera la tenue d'un document produit le 12 avril 1994,
9 document qui dit que rien, je cite, ne s'est produit dans les régions se
10 trouvant sous le contrôle de l'armée des Serbes de Bosnie sans la
11 connaissance de ces faits par l'état major, ce qui montre qu'il règne une
12 discipline militaire excellente.
13 Une des tâches principales revenant à ce témoin était d'organiser le
14 rassemblement des armes lourdes tenues par les deux factions belligérantes
15 dans le cadre d'une proclamation de zone d'exclusion totale, décision
16 unilatérale prise par l'OTAN et qui était respectée par les parties
17 belligérantes.
18 C'était une zone circulaire d'un rayon de 20 kilomètres, qui avait pour
19 centre précis Sarajevo, décision prise et zone établie par le conseil de
20 l'OTAN, dans laquelle il était interdit de déployer des armes lourdes, qui
21 devaient donc être enlevées ou placées sous le contrôle de la FORPRONU dans
22 des endroits appelés "lieux de collectes d'armes". De façon générale, on
23 peut dire que ces zones ont été respectées et le témoin a pu constaté que
24 99 % des armes lourdes des Serbes étaient placées sous le contrôle des
25 forces serbes. Cependant, plusieurs systèmes d'armes, qui ont été enlevées
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1 par les Serbes sans permission, ont été déployées et utilisées.
2 De surcroît, au cours de l'été 1994, des unités serbes ont entrepris plus
3 tentatives afin d'enlever des armes d'un lieu de rassemblement. De façon
4 peu fréquente, suite à l'application de cet accord portant sur la zone
5 d'exclusion totale, les Serbes ont utilisés ces armes lourdes, ont tirés à
6 l'aide de ces armes et il y a eu une légère augmentation d'utilisation de
7 ces armes après le 5 août 1994.
8 Durant le temps de la mission du témoin à Sarajevo, celui-ci a vu le succès
9 relatif remporté par la zone d'exclusion totale, a pu constaté que
10 l'essentiel des destructions s'est faite dans le cadre d'escarmouches qui
11 sont intervenus sur certains points de la ligne de confrontation.
12 A la suite de cet accord, de zone d'exclusion totale, il y a eu au départ
13 une forte réduction de l'utilisation des armes légères ainsi que les armes
14 lourdes de la part des parties belligérantes. Il y a eu des incidents de
15 tireurs embusqués qui ont fait l'objet d'enquêtes suite à l'ordre donné par
16 le commandant du secteur Sarajevo, le général Soubirou. Ces enquêtes ont
17 été effectuées sous la tutelle du chef de la mission d'observation des
18 Nations Unies. Cependant, au mois de mars 1994, des rapports de la
19 FORPRONU, montrent qu'il y a eu utilisation accrue de tireurs embusqués à
20 Sarajevo et le général Van Baal a soulevé cette question auprès du général
21 Milovanovic lorsqu'il l'a rencontré pour la première fois, le 16 mars 1994
22 à Pale.
23 Le général Milovanovic a dit qu'il ne faudrait pas que les trames à
24 Sarajevo fonctionnent si le système des bus ne fonctionnait pas -- système
25 serbe, et que, si la FORPRONU autorisait que roulent les trames, et bien,
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1 ils veilleraient à ce qu'on tire sur ces tramways et leurs passagers.
2 A la suite de cette réunion, on a fait rouler les tramways et les passagers
3 ont été pris pour cible par les tireurs embusqués. Le général Van Baal
4 s'est donc dit que le général Milovanovic avait exercé une influence pour
5 ce qui est de l'activité des tireurs embusqués à l'encontre des tramways.
6 Le témoin a lu la teneur d'un rapport du 3 août 1994, qui montre que ce
7 jour-là, vers une heure de l'après-midi, un tireur embusqué, à partir d'un
8 immeuble serbe, a tiré sur un tramway causant des blessures légères chez
9 trois civils bosniens et l'équipe chargé des activités anti-tireurs
10 embusqués qui étaient à l'hôtel Holiday Inn, se trouvant le long de ce
11 qu'on a appelé l'avenue des tireurs embusqués, a riposté après les tirs de
12 ce tireur embusqué.
13 Le témoin pourra vous dire qu'en juillet et août 1994, il y a eu plusieurs
14 incidents de ce genre. Il ne sait pas si l'équipe chargée des activités
15 anti-snipers de la FORPRONU avait également pris pour cible les tireurs
16 embusqués bosniens. Mais il indique qu'il y a eu des incidents de ce genre
17 de part et d'autres.
18 A son avis, il était peu probable que les tramways se trouvent
19 accidentellement dans le cadre d'un échange de tirs le long de la ligne de
20 confrontation. Il rejette carrément la suggestion selon laquelle ces
21 tramways auraient été touchés par des tri croisés de tireurs embusqués ou
22 par des balles qui auraient fait ricochées. Il dit aussi que le fait qu'il
23 y ait plusieurs soldats, qui sont des passagers dans un tramway,
24 transportant des civils, ne rend pas cette cible ou cet objectif légitime
25 en ferait un objectif militaire légitime.
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1 La FORPRONU a commencé ces négociations avec les deux parties belligérantes
2 par parvenir à un accord anti-sniper en mai 1994, l'accord a été signé en
3 août 1994 à la suite d'un incident survenu le 14 août où un enfant de 11
4 ans a perdu la vie après avoir été abattu alors qu'il était dans un
5 tramway. Les deux parties ont affirmé n'avoir aucun contrôle sur ces
6 tireurs embusqués qui opéraient à partir de leur territoire respectif.
7 Mais le témoin conclu que c'était quelque chose, une activité dont ils
8 étaient tout à fait capables. Ces activités de tireurs embusqués venant de
9 territoire contrôlé par l'armée des Serbes de Bosnie, c'était là des
10 activités intentionnelles, délibérées, destinées à semer la terreur.
11 L'objectif, il était clair pour le témoin, c'était de provoquer la terreur
12 parmi les citoyens sans défense, les femmes, les enfants qui ne pouvaient
13 pas se protéger ou se défendre dans des lieux où ils ne s'attendaient pas à
14 ce genre de choses, à des moments où ils ne s'y attendaient pas. Et,
15 apparemment, les femmes et les enfants ont été les plus nombreux parmi les
16 pertes civiles.
17 Le général Rose, le général de la Presle et Viktor Andreev
18 ont de façon répété et avec beaucoup de véhémence élevé des protestations
19 auprès des dirigeants de la VRS, s'agissant des activités de tireurs
20 embusqués à l'encontre de civils à Sarajevo. Le général Soubirou a souvent
21 essayé de protester auprès du général Galic et de ses officiers de liaison,
22 mais, à la suite de la crise de Gorazde d'avril 1994, le général Mladic a
23 interdit tout contact avec la FORPRONU à un niveau qui serait inférieur à
24 celui du général
25 Van Baal ou du général Milovanovic. En particulier, le général Mladic a dit
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1 qu'il ne voulait pas traiter avec le général Rose, ou seulement avec le
2 général de la Presle. De temps à autre, le général Van Baal a pu protester
3 oralement -- verbalement auprès de l'officier de liaison du Corps de
4 Roumanija-Sarajevo, le commandant Indjic, pour ce qui étaient des incidents
5 délibérés et à la replète de tireurs embusqués ou de pilonnages de civils à
6 Sarajevo du côté VRS des lignes de confrontation. Ce qu'Indjic et
7 Milovanovic répondaient c'était, soit un dénie catégorique, ils niaient
8 contrôler les activités des tireurs embusqués où ils ont attribué la faute
9 à l'ennemi qui y prenait, disaient-ils, pour cible leurs propres civils.
10 Le général Van Baal -- au cours de sa déposition antérieure, le témoin a lu
11 un document produit par les observateurs des Nations Unies le 13 juillet
12 1994 qui relève que, le 12 juillet, le commandant du 1er Bataillon de
13 l'armée des Serbes de Bosnie, la Brigade Ilidza a reconnu des activités de
14 tireurs embusqués du fait de cette armée, dans un lieu appelé "la maison
15 des aveugles".
16 Pour ce qui est du principe de la proportionnalité, le témoin estime que
17 l'utilisation de l'artillerie serbe, destinée à neutraliser un terrain
18 embusqué qui opérera à partir d'une pièce ou d'un nid de tireurs embusqués
19 dans un immeuble d'habitations, était quelque chose de disproportionner.
20 Pour ce qui est de la proclamation de la zone d'expulsion totale, le
21 conflit a été minimisé. Par exemple, pour ce qui est de la
22 proportionnalité, une attaque sur les positions bosniennes dans la caserne
23 du maréchal Tito à Sarajevo n'était plus justifiée. Et puis il y a eu
24 utilisation d'armes lourdes par l'armée bosnienne, mais cette armée lourde
25 était contrôlée par la FORPRONU à l'exception d'un mortier utilisé très
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1 sporadiquement, un mortier de 120 millimètres, qui était posté à proximité
2 de l'aéroport. Et, par rapport aussi à des tirs de chars venant d'un lieu
3 proche de l'hôpital du Kosovo, donc c'était là des positions serbes. Il
4 doute qu'il y ait eu une usine fabriquant des uniformes et qu'en tout cas,
5 ça aurait pu constituer un objectif légitime. Mais je pense qu'il pourra en
6 parler plus clairement si on lui pose des questions.
7 Il y avait un centre de Commandement dans la ville au rez-de-chaussée, qui
8 aurait été pu être considéré comme une cible légitime s'il n'y avait pas eu
9 de civils dans cet immeuble. Le témoin vous dira que, fin du mois de mars
10 1994, le général Mladic a dit à plusieurs reprises qu'il faudrait imposer
11 un cessez-le-feu dans toute la Bosnie-Herzégovine à condition que les zones
12 de sécurité dont Sarajevo soient démilitarisées. Le témoin a admis qu'il y
13 avait un grand nombre d'installations militaires à Sarajevo dont des
14 objectifs mobiles tels que des camions militaires. Il a entendu des rumeurs
15 selon lesquelles il y avait aussi un atelier où se fabriquaient des armes,
16 à la caserne du maréchal Tito, mais il dit que ce n'était là qu'une rumeur.
17 J'aimerais maintenant produire la première pièce par le truchement de ces
18 témoins. Vous avez le compte rendu d'audience où sa déposition faite
19 antérieurement et il y a trois parties à cette intercalaire. Quelle sera la
20 cote ?
21 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce 534.
22 M. NICE : [interprétation] Je vous ai dit que le témoin était chef de la
23 FORPRONU, mais je me suis trompé. M. Ierace me rappelle, il était chef de
24 l'état major. La pièce, c'est la pièce 524 [sic], je pense qu'il nous faut
25 maintenant examiner l'intercalaire 2. Un document en trois volets, il y a
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1 un câble -- un télégramme envoyé le
2 8 août puis une partie de l'accord portant sur la zone d'exclusion totale
3 et ensuite la question de voir comment les Serbes peuvent avoir
4 l'utilisation des armes confisquées.
5 Q. C'est bien exact ?
6 R. Oui.
7 Q. En deuxième page, on voit les points d'accord au sujet de la zone
8 d'exclusion totale. Nous pouvons en donner lecture si nécessaire, mais, au
9 point 1, il est question donc d'autoriser une application, sans limite,
10 sans restriction, des patrouilles de vérification de la FORPRONU lorsque
11 cela est possible avec un officier de liaison de l'armée des Serbes de
12 Bosnie.
13 Et puis en page 3, nous avons un protocole d'accord entre les représentants
14 civils militaires de la République serbe et de la FORPRONU. Et, au point 4,
15 ce qui est au cœur même de cet accord, nous voyons que, ni du côté serbe,
16 ni du côté musulman, il ne devrait y avoir la possibilité de s'engager dans
17 des activités militaires de quelque ordre que ce soit et ceci comprend même
18 la fortification des tranchées où toutes avancées de leurs troupes. Est-ce
19 exact ?
20 R. Oui.
21 Q. Le 20 mars de l'année 1994, Général, avez-vous reçu un rapport disant
22 qu'il y avait des mines qui auraient été placées sous des transporteurs
23 blindés de troupes du Bataillon canadien et, par la suite, avez-vous
24 cherché à rencontrer Karadzic, donc des mines activables à distance ?
25 R. Je n'ai reçu qu'un rapport oral, il n'y a pas eu de rapports écrits,
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1 mais cette information est exacte.
2 Q. Suite à vos premières démarches, à votre connaissance, ces mines ont-
3 elles été retirées, mais avez-vous pu constater par la suite quelles ont
4 été de nouveau placées sous un autre TBT et que ceci vous a incité à vous
5 rendre à Pale le 21 mars pour rencontrer Karadzic et Galic ?
6 R. C'est exact.
7 Q. Vous vous êtes adressé à Karadzic, vous lui avez demandé de résoudre le
8 problème. Pouvez-vous nous résumer la situation et était-il -- occupait-il
9 un poste de responsabilité ? Avait-il autorité en la matière ?
10 R. Il a reconnu le fait que les armes lourdes qui se trouvaient près de
11 Sertici ont été placées à l'intérieur de ce périmètre de 20 kilomètres et
12 il a demandé au général Galic de sortir ces armes de les retirer du rayon
13 de la zone d'exclusion totale en direction de Visoko à une distance
14 d'environ 800 mètres vers le nord-ouest.
15 Q. Ces armes lourdes devaient être retirées. Galic semblait-il être
16 d'accord avec Karadzic ou non ? Ou s'il y a eu un désaccord, quel a-t-il
17 été ?
18 R. Galic a dit que, si les armes lourdes étaient retirées, et bien, elles
19 se trouveraient à vue d'œil depuis la ville de Visoko où se trouvaient les
20 positions de l'armée musulmane, et donc elles seraient dans une position
21 vulnérable. Galic a reçu l'ordre de retirer néanmoins les armes, de les
22 enfouir, de les rendre moins vulnérables.
23 Q. Et c'était en accord avec l'accord portant sur la zone d'exclusion
24 totale et il a fallu un certain temps pour qu'il se mette en place, c'est
25 exact ?
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1 R. Oui, c'est exact. Et bien, ces armes n'ont pu être identifiées que
2 longtemps après la mise en place de la zone d'exclusion totale.
3 Premièrement, on a tenté de retirer ces armes et puis le 19 mars, le
4 général Rose a décidé -- a donné l'ordre de placer ces armes sous le
5 contrôle de la FORPRONU.
6 Q. A votre sens, ces mines qui ont été placées sous le transporteur blindé
7 de troupes et au sujet de ces mines, comment ce problème a-t-il été résolu
8 lors de la réunion qui a eu lieu ?
9 R. Ceci a été la deuxième fois que les transporteurs blindés de troupes
10 ont été menacés de mines. M. Karadzic s'est montré très étonné, très
11 frappé. Il en a fait part au général Galic. Il s'attendait à ce que ces
12 mines aient été retirées de l'endroit où elles étaient placées, sous les
13 TBT. Je lui ai dit qu'il y a eu confirmation, que les mines n'avaient pas
14 été retirées. Par la suite, il a donné l'ordre à Galic de s'assurer que ces
15 mines avaient bien été retirées de l'endroit où elles étaient, sous les
16 TBT. Et il a été fait rapport à la fois par le général Galic et par le
17 truchement de mes contacts à Sarajevo, que les mines ont été retirées de
18 dessous des TBT du Bataillon canadien.
19 Q. Lors de cette réunion, qu'a fait Karadzic, et comment Galic a-t-il --
20 ce que Karadzic a fait, et la manière dont Galic a réagi, est-ce que cela
21 vous a montré qu'il y avait une chaîne de commandement et de contrôle, et
22 qu'elle était centralisée ?
23 R. Tout d'abord, Galic recevait les ordres de Karadzic, et il les
24 acceptait. Un deuxième point est qu'il a cherché à s'assurer par la voie de
25 son système de commandement et de contrôle de recevoir l'information. Et
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1 donc, il pouvait être informé rapidement que les mines avaient retirées du
2 dessous des TBT. Et ceci n'était possible, que s'il y avait exécution
3 précise des ordres et un système de communication -- de communication
4 technique qui lui permettait d'avoir des informations de Bosnie-Herzégovine
5 au sujet de ce qui a été entrepris.
6 Q. Je vous remercie. D'autres questions, à présent.
7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous avez la parole.
8 Contre-interrogatoire par M. Milosevic :
9 Q. [interprétation] Le 27 janvier 1994, vous étiez général de brigade au
10 sein de l'armée néerlandaise. Vous avez été nommé à ce poste, pour autant
11 que je m'en souvienne, en Bosnie. Est-ce exact ?
12 R. Le 24 février, je me suis rendu en Bosnie, pour agir -- en Bosnie, pour
13 agir en tant que chef d'état major.
14 Q. Vous avez été nommé précédemment, et c'est le 24 février, que vous êtes
15 entré en fonction du chef d'état major.
16 Q. J'ai été nommé par le gouvernement néerlandais, le 24 janvier, et je
17 suis entré en fonction le 24 février.
18 Q. C'est précisément ce que je vous ai demandé, général. Vous avez été
19 nommé en janvier, et vous n'êtes entré en fonction que le 24 février 1994.
20 C'est cela ?
21 R. J'ai été nommé et cette nomination s'est faite par les Nations Unies, à
22 partir du 24 février.
23 Q. Et c'est à partir de ce moment-là que vous étiez en exercice réel de
24 ces fonctions ? A partir du 24 février ?
25 R. A partir du 24 février. C'est cela.
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1 Q. Vous vous êtes acquitté de cett -- vous êtes resté à exercer cette
2 fonction, si je le vois bien, jusqu'au 28 août 1994 ?
3 R. C'est exact.
4 Q. Dites-moi, général. Au moment où vous avez accepté l'exercice de cette
5 fonction, puisque vous êtes devenu chef d'état major, à ce moment-là, n'y
6 avait-il pas trop peu d'officiers des Nations Unies qui étaient nécessaires
7 pour recueillir des informations sur le terrain, ou plutôt des
8 renseignements sur le terrain ?
9 R. Il y avait suffisamment d'hommes en Bosnie-Herzégovine, au sein du
10 commandement. Et il y avait suffisamment d'observateurs militaires des
11 Nations Unies pour s'acquitter de la collecte des renseignements
12 militaires.
13 Q. Au paragraphe 6, page 2, de votre déclaration, vous dites qu'à la place
14 de 26 -- au lieu de 26 hommes qui ont été affectés à la collecte des
15 renseignements, seuls cinq personnes faisaient effectivement ce travail.
16 Est-ce bien cela, Général ?
17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Peut-on fournir un exemplaire de cette
18 déclaration au témoin ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact. Et la raison en est
20 l'organisation du commandement en Bosnie-Herzégovine où, de manière
21 explicite, il a été dit que le mandat ne prévoyait pas la collecte de
22 renseignements militaires. Le contenu du mandat -- les effectifs étaient
23 suffisants pour recueillir des renseignements militaires et pour conduire
24 des enquêtes.
25 M. MILOSEVIC : [interprétation]
Page 26311
1 Q. Je voulais tirer cela au clair car c'est précisément ce que l'on voit
2 ici. C'est le dernier paragraphe en page 2, du moins pour ce qui est de la
3 traduction serbe. Vous dites, par exemple, que 26 hommes ont été affectés à
4 la cueillette de renseignements militaires. Mais la structure des Nations
5 Unies ne permettait pas que ces fonctions soient remplies. En pratique,
6 seuls cinq hommes étaient chargés de cela.
7 R. Cette information qui figure dans le texte est exacte. Le QG du
8 commandement de Bosnie-Herzégovine était constitué à l'image du modèle
9 d'organisation de l'OTAN, en situation de guerre. Donc, initialement, 26
10 personnes devaient se charger du travail de renseignements, mais, compte
11 tenu du contexte dans lequel était placé le commandement de Bosnie-
12 Herzégovine, ces 26 hommes n'étaient pas nécessaires puisque les Nations
13 Unies ont supposé que ces informations allaient être fournies par les
14 parties belligérantes. Donc il n'a pas été nécessaire de mettre sur pied
15 leur propre organisation de structure. Je voulais que ce soit clair.
16 Q. Oui. C'est une explication très utile, Général. Est-ce que cela
17 signifie qu'en fait, les Nations Unies, en s'acquittant de ses devoirs --
18 ses fonctions, ne pouvaient pas se fier exclusivement à ses propres sources
19 de renseignements, mais devaient se fier à ce que lui fournissaient les
20 parties belligérantes, voire même les médias ?
21 R. Le mandat, pour ce qui est de notre commandement en Bosnie-Herzégovine,
22 était de mettre sur pied une collaboration avec les parties qui nous ont
23 invités à conduire notre mission. C'est exact.
24 Q. Très bien. Pendant que vous étiez chef d'état major, pendant la
25 totalité de votre mission, vous étiez placé sous le commandement direct du
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1 général Rose. C'est exact ?
2 R. C'est exact.
3 Q. Est-il exact qu'en sa qualité du commandant des forces onusiennes en
4 Bosnie-Herzégovine, il lui est arrivé souvent de reprocher non seulement
5 aux journalistes travaillant pour les médias, mais aussi à d'autres
6 missions, de ne pas faire des rapports objectifs, de -- sur la situation
7 qui prévalait sur le terrain ?
8 R. Je n'ai pas de commentaire à formuler à ce sujet.
9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Est-il exact que vous avez l'intention de
10 citer à la barre le général Rose ?
11 M. NICE : [interprétation] Son nom figure sur la liste des témoins, quant à
12 nos possibilités de le citer, et bien, il ne m'est jamais possible de
13 confirmer que -- les témoins pour en venir, mais il figure sur la liste des
14 témoins.
15 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Donc il faudrait mieux lui poser à lui ce
16 genre de question.
17 M. NICE : [interprétation] Monsieur May, ma question concerne les faits.
18 Elle ne concerne pas les personnalités. C'est la raison par laquelle je
19 souhaite entendre le point de vue du général Van Baal à ce sujet.
20 M. MILOSEVIC : [interprétation]
21 Q. Donc, compte tenu de cette diversité, d'élément d'information, puisque
22 vous vous appuyez comme vos venez de le dire vous-même à des sources
23 extérieures aux forces onusiennes, est-ce que ceci a eu une influence sur
24 la situation générale sur le terrain ?
25 R. L'ensemble des renseignements, qui vous parviennent, exerce une
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1 influence sur vous, sur l'opinion que vous avez formulée, bien entendu, il
2 y avait un impact. Mais, quant à savoir quelle a été l'influence de ces
3 sources extérieures sur la manière dont le général Rose a formulé ces
4 opinions, ça je ne saurais vous le dire.
5 Q. Oui, mais vous-même pouvez-vous nous dire quel a été l'impact de ces
6 sources extérieures à vos forces sur vous ? Comment est-ce que cela vous a
7 influencé dans la manière dont vous avez tiré vos conclusions ?
8 R. Pour ce qui est -- j'ai fondé mon opinion sur les faits qui m'étaient
9 rapportés, communiqués par l'intermédiaire des voies de communication en
10 Bosnie-Herzégovine, et au sein du commandement de Bosnie-Herzégovine, et
11 d'autres sources qui me fournissaient des informations, tel le HCR.
12 Q. Très bien. Durant votre mission, au moment où il y a eu aussi la crise
13 de Gorazde, l'activité des forces de l'OTAN à l'encontre des forces de la
14 Republika Srpska, vous étiez en mission à ce moment-là également ?
15 L'INTERPRÈTE : Corrigez au complet la réponse précédente. Les sources
16 d'information étaient également les Médecins sans frontières.
17 R. C'est exact.
18 M. MILOSEVIC : [interprétation]
19 Q. Et vous avez eu de nombreux entretiens avec les plus hauts
20 représentants des autorités de la Republika Srpska, est-ce exact ?
21 R. C'est exact.
22 Q. Je vois dans votre déclaration que vous avez rencontré pour la première
23 fois le président de la Republika Srpska, le docteur Radovan Karadzic, à
24 Pale le 20 mars.
25 R. C'est exact.
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1 Q. On voit ici que cette réunion a duré environ trois heures, et qu'elle a
2 été due à toute une série de raisons : "Ce jour-là le général Rose a pris
3 une semaine de congé. Avant son départ nous avons parlé de la confiscation
4 des armes lourdes, non autorisées dans la zone d'exclusion totale près de
5 Visoko," et ainsi de suite.
6 Autrement dit, la teneur de cet entretien était l'accord dans son ensemble,
7 et non un incident particulier. Si j'ai bien compris votre réponse à une
8 question que vous a posée M. Nice, vous avez dit que vous vous êtes rendu à
9 cause d'un incident.
10 R. C'est exact, nous avons parlé d'un incident il y a un instant, et
11 c'était au sujet de ces mines déclenchables [sic] à distance qui ont été
12 placées sous des transporteurs blindés de troupes.
13 Q. Mais vous êtes en train de me dire autre chose, Général. Vous dites --
14 et je lis dans ce paragraphe où vous parlez de votre entretien avec le
15 docteur Radovan Karadzic, président de la Republika Srpska, vous dites :
16 nous avons parlé de la confiscation des armes lourdes dans la zone
17 d'exclusion totale, et vous dites qu'il a été question donc de cet endroit
18 près de Visoko, et que cela concernait les membres du Bataillon canadien.
19 Donc, c'était ça la teneur de votre entretien qui a duré trois heures ?
20 Vous avez dit que cet entretien a duré trois heures.
21 R. L'entretien a duré trois heures, c'est exact. Il a été convoqué la
22 veille lorsque j'ai donné l'ordre, au nom du général Rose à l'attention du
23 Bataillon canadien, de placer sur le contrôle de la FORPRONU les armes
24 lourdes. En fait, les forces serbes de la Brigade d'Ilijas menaçaient les
25 membres du Bataillon canadien. Et j'ai pris des mesures à ce moment-là, et
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1 j'ai décidé de discuter de cela à Pale le lendemain sur demande du général
2 Radovan Karadzic. Donc j'ai reçu l'invitation de la part de M. Karadzic et,
3 plus tard ce soir, nous avons eu un autre contact. Il s'est avéré que ces
4 mines avaient été placées sous les transporteurs blindés de troupes, donc
5 la raison directe était la menace que représentaient les soldats serbes
6 pour la FORPRONU.
7 Q. Le général Van Baal dit, d'après la transcription, qu'il s'est adressé
8 au général Karadzic, mais ça doit être une erreur puisqu'il était président
9 de la Republika Srpska. Est-il exact, Général, que la zone d'exclusion
10 totale comprenait un rayon de 20 kilomètres, en partant du centre de la
11 ville de Sarajevo ?
12 R. Oui, son point central, et les coordonnées ont été établis par la
13 décision du conseil de l'OTAN, donc ils ont décidé à partir d'où il fallait
14 dessiner ce cercle avec un rayon de 20 kilomètres.
15 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous allons suspendre l'audience à
16 présent.
17 Général, nous allons suspendre l'audience. Ceci fait partie des
18 interruptions d'audience régulières, qui durent 20 minutes. Je vous
19 préviens, comme je le fais à l'adresse de tous les témoins, que vous ne
20 devriez pas aborder la question du contenu de votre déposition avec qui que
21 ce soit, y compris avec les membres du bureau du Procureur. Je vous prie de
22 revenir dans 20 minutes.
23 --- L'audience est suspendue à 12 heures 16 p.m.
24 --- L'audience est reprise à 12 heures 40.
25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic, vous avez la
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1 parole.
2 M. MILOSEVIC : [interprétation]
3 Q. Général, lorsque vous parliez des mines, d'après les informations que
4 j'ai, il en ressort que ce sont des pièces d'artillerie de l'armée de la
5 Republika Srpska qui avaient été minées au cas où elles se retrouvaient
6 entre les mains adverses et que ce n'étaient pas les transporteurs du
7 bataillon canadien. Est-ce exact ou non ?
8 R. Ceci n'est pas exact. Le bataillon canadien, sans se servir de ces
9 armes, des armes appartenant à l'armée des Serbes de Bosnie, les armes
10 lourdes, et bien, ces armes ont été confisquées sans qu'il y ait eu de
11 coups de feu, sans qu'il y ait eu de tirs.
12 Q. Oui, je comprends cela. Mais ce que j'ai compris du document que j'ai,
13 c'est que ce sont ces pièces abandonnées, laissées par l'armée de la
14 Republika Srpska qui ont été minées et non les transporteurs blindés du
15 bataillon canadien [sic]. Ai-je bien raison ?
16 R. Je ne peux ni confirmer, ni infirmer cela. Je n'ai pas eu la
17 possibilité de m'assurer de mes propres yeux où étaient placées les pièces
18 d'artillerie et lorsqu'elles étaient sous l'autorité serbe, mais ce que
19 j'ai pu confirmé grâce à plusieurs ressources, c'est que les soldats serbes
20 de la Brigade Ilijas ont dit aux soldats canadiens qu'ils devaient restés à
21 bord de leurs propres véhicules pour leur propre sécurité. Ils leur ont dit
22 qu'il y avait des mines déclenchables à distance. Donc, c'est ce qui m'a
23 été dit et que j'ai appris de plusieurs sources.
24 Q. Mais je suppose que ce n'étaient pas les TBT, ces mines étaient placées
25 sous les pièces de l'armée de la Republika Srpska.
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1 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous devriez écouter les réponses du
2 témoin. Ceci n'est pas ce qu'a dit le témoin.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien, Monsieur May.
4 M. MILOSEVIC : [interprétation]
5 Q. Lorsque vous vous êtes entretenu au sujet de l'emplacement des armes,
6 des représentants de l'armée de la Republika Srpska affirmaient, à ce
7 moment-là, que leurs armes se trouvaient à l'extérieur de la zone
8 d'exclusion totale ou plutôt en bordure de cette zone. Est-ce exact ?
9 R. C'est sur une carte russe que M. Karadzic m'a montré où, d'après lui,
10 étaient les armes, à savoir, dans le périmètre de la zone d'exclusion
11 totale. Le centre de ce cercle devait être le centre historique, le vieux
12 centre de Sarajevo. En fait, on ne pouvait pas l'identifier précisément
13 puisque le centre de la zone d'exclusion totale a été décrété par le
14 Conseil de l'OTAN sur la base des coordonnés qui se situaient à 800 mètres
15 de distance du point où Karadzic a tracé le cercle. Et pour cette raison-
16 là, les armes se trouvaient à 800 mètres du périmètre de la zone
17 d'exclusion totale, mais se trouvaient à l'intérieur du périmètre ou de la
18 zone d'exclusion totale en même temps. Et à plusieurs endroits, le GPS nous
19 a permis de le confirmer.
20 Q. Général, puisqu'il s'agit d'une zone d'un rayon de 20 kilomètres et
21 bien, il y a 800 mètres de distance selon la carte que l'on utilise, entre
22 la carte de Karadzic et votre GPS, c'est bien cela ?
23 R. Ce n'est pas sur les cartes qu'il y avait cette différence, mais la
24 zone d'exclusion totale a été décrétée d'une manière -- d'une certaine
25 manière, et les deux parties se sont mises d'accord sur ce qui serait le
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1 centre de cette zone. Donc, cela ne pouvait pas dépendre des cartes.
2 C'était quelque chose qui était décrété par le conseil de l'OTAN.
3 Q. Très bien. Alors, j'ai compris qu'il s'agissait de quelques pièces
4 d'artillerie qui se sont retrouvées donc, à l'intérieur de cette zone. Mais
5 j'aimerais savoir s'il y a eu une activité quelle qu'elle soit, en
6 utilisant des armes. Donc, pendant la période où on a pu constater leur
7 présence, est-ce qu'il y a eu une activité sur Sarajevo ?
8 R. A l'intérieur de ce rayon de 20 kilomètres, aucun armement lourd
9 n'était autorisé qui ne soit pas placé sous le contrôle de la FORPRONU.
10 Donc, c'était ça la question. Et cela s'appliquait à tous les systèmes
11 d'armements, qu'ils soient à l'intérieur du périmètre de 800 kilomètres --
12 de 800 mètres ou non, toutes les armes dans un rayon de 20 kilomètres.
13 Q. Je comprends. Mais je vous pose ma question au sujet de ces pièces, qui
14 elles, sont restées à l'intérieur de ces 800 mètres. Est-ce qu'elles ont
15 été utilisées pour une activité quelle qu'elle soit contre les cibles ?
16 R. La question n'était pas de savoir si on les a utilisées, mais s'il a
17 été possible de les utilisées. Elles pouvaient être déplacées. Et après
18 avoir été placées au lieu de collecte d'armes, elles se sont trouvées sous
19 la responsabilité de la Brigade d'Ilijas. On pouvait les déplacer, les
20 déployer. Il aurait été possible de les déplacer à tout moment. Donc, nous
21 voulions les sortir de la zone d'exclusion totale, puisque c'était
22 contraire à l'accord.
23 Q. Très bien, très bien. Je comprends la zone d'exclusion totale. Il
24 fallait les écartées de cette zone. Mais pendant cette période-là, bien que
25 ces pièces se situent à l'intérieur des 800 mètres, elles n'ont pas été
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1 utilisées. On ne s'est pas servi de ces pièces pour tirer, général. Est-ce
2 exact ?
3 R. Ce n'est pas ça, la question.
4 Q. Très bien. Est-ce qu'on a tiré de ces armes ?
5 R. Quoi qu'il en soit, au moment où nous les avons découvertes, c'était
6 fin mars, les observateurs militaires les avaient sous contrôle. Ils les
7 inspectaient régulièrement. Et pendant cette période-là, nous n'avons pas
8 pu constater qu'elles étaient utilisées.
9 Q. Très bien. Je vous remercie. Donc, le 20 mars, à
10 17 heures 30, vous avez pris contrôle de ces armes, et vous dites que c'est
11 à ce moment-là, que des soldats de la Brigade d'Ilijas, environ 600 hommes
12 de cette brigade, vous ont encerclés. Est-ce exact ?
13 R. Ce n'était pas exactement à 15 heures 30, ce n'est que plus tard dans
14 l'après-midi que ceci s'est produit. A savoir, un grand nombre de soldats
15 de la Brigade d'Ilijas, la brigade serbe ont encerclé la brigade
16 canadienne. C'est exact.
17 Q. Mais vous dites, dans ce paragraphe, à 17 heures 30, les Canadiens,
18 avec 45 transporteurs blindés, se sont rendus à l'endroit où se trouvaient
19 les armes non autorisées, près de Visoko et ont pris contrôle de ces armes.
20 A ce moment-là, ils se sont trouvés encerclés par environ 600 Serbes de
21 Bosnie, membres de la Brigade d'Ilijas. Autrement dit, à 17 heures 30, vous
22 avez pris -- vous avez assumé le contrôle. Est-ce bien cela, général ?
23 R. C'est exact.
24 Q. Lorsqu'ils vous ont encerclés, est-ce qu'il y a eu un quelconque membre
25 de cette brigade serbe qui a ouvert le feu sur vous ? Est-ce qu'il y a eu
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1 un incident quel qu'il soit ? Est-ce qu'il y a eu des blessés parmi vos
2 hommes, ou est-ce qu'il y a eu un conflit quel qu'il soit provoqué par ces
3 hommes ?
4 R. Les soldats serbes ne se sont pas servis de leurs armes. Ça était une
5 menace en disant qu'à partir de 19 heures 30, ils allaient ouvrir le feu.
6 Q. Très bien. C'est par téléphone que vous avez eu un premier contact avec
7 Karadzic, après cet événement. Et vous dites, qu'il a donné l'ordre peu
8 après que les membres des unités de la Republika Srpska se retirent de ses
9 positions. Et ceci a eu lieu dans un délai de 15 à 20 minutes. Est-ce
10 vrai ?
11 R. C'est exact.
12 Q. Au paragraphe 4, page 4, vous dites que ceci vous est montré
13 clairement, que l'armée de la Republika Srpska a un système de commandement
14 très centralisé et un excellent système de communication.
15 R. C'est exact.
16 Q. Vous étiez en contact avec le président de la Republika Srpska. Vous
17 êtes entré en contact avec lui. Vous lui avez demandé qu'il y ait repli des
18 membres de l'armée de la Republika Srpska, et il a agit conformément à vos
19 exigences. Est-ce bien cela ?
20 R. C'est exact.
21 Q. Et vous dites que la structure du commandement était très centralisée.
22 Etait-elle plus ou moins centralisée que tout autre système équivalent dans
23 une autre armée ? Est-ce bien naturel et normal que lorsqu'il y a un ordre
24 d'émis, lorsque le commandant suprême émet un ordre, que cet ordre soit
25 exécuté. N'est-ce pas naturel et logique ?
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1 R. C'est logique.
2 Q. En page 4, paragraphe 4, vous dites que des membres du bataillon
3 canadien, sur le terrain, après le repli des forces serbes, ont constaté
4 que sous certaines des pièces d'artillerie, il y avait eu des engins
5 explosifs. Donc, certaines pièces.
6 R. C'est exact.
7 Q. Mais cela veut dire que puisque ces armes étaient sous votre contrôle,
8 que ceci avait été fait précédemment. Puisque les soldats de l'armée de la
9 Republika Srpska, puisque ces pièces avaient été placées sous votre
10 contrôle, n'avaient pas de contact avec ces armes. N'est-ce pas, général ?
11 R. Quant à savoir, s'ils y avaient accès ou non, et bien, il faudra
12 laisser cela sans réponse. Mais ce que je peux dire, c'est que nous avons
13 eu un rapport disant que des soldats serbes étaient entrés en contact avec
14 les forces canadiennes dans l'obscurité. Ils leur avaient dit que pour des
15 raisons liées à leur propre sécurité, et bien, il fallait qu'ils se placent
16 à bord de leurs véhicules, qu'ils ne restent pas dehors, et ce, pour toute
17 une série de raisons. Les soldats canadiens ont suivi ce conseil. Dans la
18 nuit, quand ils sont sortis, ils ont découvert que sous les TBT, il y avait
19 des mines -- des mines, donc déclenchant à distance.
20 Q. J'ai compris que c'était sous les pièces d'armements qu'on les avait
21 placées. Mais enfin --
22 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il me semble que nous sommes revenus à
23 cela à plusieurs reprises. Nous avons entendu la déposition du témoin à ce
24 sujet. Je vous prie de passer à autre chose.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien.
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1 M. MILOSEVIC : [interprétation]
2 Q. Vous avez eu un entretien avec Radovan Karadzic à ce sujet. Cette
3 réunion s'est déroulée en la présence du général Galic qui était le
4 commandant du Corps de Sarajevo-Romanija.
5 R. C'est exact.
6 Q. Est-il exact qu'à un moment Karadzic a dit à Galic que celui-ci lui
7 avait promis que ces engins explosifs avaient être enlevés la nuit
8 précédente ?
9 R. C'est exact.
10 Q. Vous dites dans ce paragraphe que même si vous aviez l'impression que
11 Galic n'a pas apprécié cet ordre de Karadzic, et bien qu'il ait néanmoins
12 exécuté, qu'il a donc exécuté l'ordre de son président ?
13 R. Tout d'abord, cela c'est passé dans la nuit, mais tôt le matin, il y
14 avait toujours des mines sous les TBT des forces canadiennes lorsque je
15 suis arrivé à Pale vers 10 heures du matin. J'ai demandé de nouveau, en
16 fait, j'ai fait -- j'ai informé de nouveau qu'il y avait ces mines sous les
17 transporteurs de troupes.
18 Q. Mais c'est à ce moment-là qu'il y a eu donc cet entretien que j'ai cité
19 et où vous dites que Karadzic a demandé que les mines soient enlevées ?
20 R. La deuxième fois lorsqu'il y a eu cette deuxième occasion, Galic a
21 suivi, a exécuté l'ordre de Karadzic avisant à enlever les mines.
22 Q. Très bien. Et vous dites que lorsque vous vous rencontriez avec la
23 partie musulmane, c'est le général Divjak qui était présent, qui d'après
24 vous, n'avait aucun pouvoir, même s'il n'avait aucun pouvoir. C'est en page
25 6, paragraphe 2, c'est exact ?
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1 R. C'est exact.
2 Q. Pourquoi si vous le saviez déjà, avez-vous rencontré une personne qui
3 n'avait aucune compétence ? N'était-ce pas là une pure et simple perte de
4 temps ?
5 R. C'était le seul contact qui m'était autorisé, le général Delic ne
6 voulait pas parler avec le général Rose ou avec moi, quant au général
7 Halilovic [sic] et au général Hasanovic, ils n'étaient pas toujours
8 disponibles, ce qui fait que j'ai quand même utilisé cette offre qui
9 m'avait été faite de parler avec le général Divjak, et ces conversations
10 établies à ce moment-là ont été transmises aux autres généraux. Il ne
11 pouvait pas prendre des décisions, lui-même, s'agissant des sujets dont je
12 voulais m'entretenir avec lui. Il n'avait pas les compétences pour le faire
13 et chaque fois que j'ai pu le constater qu'il n'avait pas ces compétences.
14 Q. Vous avez eu des réunions avec Hadzihasanovic et Halilovic aussi,
15 n'est-ce pas ?
16 R. Oui, j'ai plusieurs fois parlé avec Hadzihasanovic [sic] et Halilovic,
17 c'est exact, mais ils n'étaient pas toujours disponibles. C'est la raison
18 pour laquelle j'ai quand même utilisé des contacts que j'avais avec le
19 général Divjak.
20 Q. Bien. Mais eux deux, quand je dis eux deux, j'entends Hadzihasanovic et
21 Halilovic, était-ce là des personnes qui avaient des compétences
22 déterminées, oui ou non ?
23 R. J'ai constaté que c'était bien le cas, effectivement.
24 Q. Mais qui avait compétence de négocier de façon autorisée et prendre des
25 décisions du côté musulman, êtes-vous en mesure de nous le dire ?
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1 R. De façon générale, c'était le général Delic et les généraux Halilovic
2 et Hadzihasanovic, comme je viens de vous le dire.
3 Q. Fort bien, merci, Général. En page 6, paragraphe 3, vous dites que vous
4 avez rencontré Fikret Abdic à l'occasion de la crise et des conflits à
5 Bihac. N'est-ce pas ?
6 R. Exact.
7 Q. Serait-il exact de dire que lui n'avait pas voulu collaborer à l'époque
8 avec la présidence de la Bosnie-Herzégovine et si oui, savez-vous pour
9 quelle raison ?
10 R. D'après ce que j'ai pu constater au cours de la conversation, il
11 n'avait pas de compétences et puis il n'était pas intéressé à l'idée
12 d'avoir des contacts avec le gouvernement central de Sarajevo. Qu'il
13 n'avait pas confiance. Il comptait beaucoup sur ses propres forces et ses
14 propres liens qu'il avait établis dans le cadre de la coalition.
15 Q. Bien. Mais avez-vous connaissance du fait que votre commandant, le
16 général Rose avec M. Ejub Ganic, avaient visité Bihac et a eu des contacts
17 avec Abdic et Atif Dudakovic, commandant du 5e Corps, qui avait participé
18 de façon directe dans les opérations de combats ?
19 R. Je ne sais pas de quel moment vous voulez parler. Je ne peux pas vous
20 dire comme ça tout de go que je sache de quelle conversation vous parlez.
21 Q. Mais êtes-vous au courant des visites effectuées par le général Rose à
22 la région de Bihac de concert avec Ejub Ganic et des contacts qu'ils ont eu
23 avec M. Dudakovic, le commandant du 5e Corps d'armée de la Bosnie-
24 Herzégovine ?
25 R. La visite du général Rose, oui, je m'en souviens bien. Quant à savoir
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1 si Ganic a rencontré le général Rose, je ne m'en souviens pas. Mais je sais
2 bien qu'avant mon départ pour Bihac, le général Rose a rencontré le général
3 Dudakovic mais aussi a eu des conversations avec Abdic.
4 Q. Dites-moi, je vous prie, mon général, seriez-vous d'accord avec
5 l'appréciation faite par le général Rose et c'est une impression --
6 appréciation qu'il a formulée lui-même à propos d'une rencontre qu'il a eue
7 avec Dudakovic. Il dit : "Je connaissais sa stratégie depuis -- avant déjà
8 parce que cela ne différait pas des façons de procéder de l'armée musulmane
9 sur quelque bout du territoire que ce soit. D'abord, des attaques autour de
10 ses propres positions, puis retrait vers les zones protégés avec multi
11 protestations pour les souffrances de la population civile et invitation
12 adressée à l'OTAN pour ce qui était de bombarder les positions des Serbes."
13 Etes-vous au courant de ce type de déclaration ?
14 R. Je ne peux pas vérifier s'il s'agit bien d'une citation faite par le
15 général Rose, là, je n'ai pas de commentaires à faire s'agissant de cette
16 question, à lui de le dire.
17 Q. Je peux vous le citer. C'est en page 127 de son livre, paragraphe 4. Et
18 on dit : "Je connaissais cette stratégie depuis -- avant cela ne différait
19 pas des façons de procéder de l'armée musulmane sur quelque territoire que
20 ce soit."
21 "Tout d'abord --
22 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous avez déjà donné lecture de ce
23 passage et le témoin a déjà répondu, puisqu'il a dit qu'il n'avait pas
24 commenté ceci.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien.
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1 M. MILOSEVIC : [interprétation]
2 Q. Mais votre expérience à vous, elle a été nettement plus courte que
3 c'est fait le général Rose mais est-elle analogue pour ce qui est de la
4 stratégie générale de la partie musulmane dans le cours de la guerre en
5 Bosnie ?
6 R. L'expérience que j'ai c'est que toutes les parties au conflit ont
7 essayé en fait de se gagner la cause et les faveurs du commandement en
8 Bosnie-Herzégovine.
9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] On parle là du commandement de la
10 FORPRONU ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Pour moi, le commandement en Bosnie-
12 Herzégovine faisait partie de la FORPRONU. Et donc, c'était là, la totalité
13 du commandement.
14 M. MILOSEVIC : [interprétation]
15 Q. Avez-vous connaissance du fait que le colonel français,
16 M. Legrier [phon] avait informé de la violation de cette zone d'exclusion
17 aérienne par les avions croates qui fournissaient des équipements de
18 combats à l'intention du 5e Corps d'armée de Bosnie-Herzégovine. Etiez-vous
19 au courant de ce fait-là ? Je pense que, si le général Rose en a parlé,
20 vous deviez forcément être au courant de la chose.
21 R. Il y a plusieurs rapports fait au cours de ma mission, selon lesquels
22 des petits avions. Des hélicoptères avaient survolés le territoire de
23 Bosnie-Herzégovine alors que ce n'était pas autorisé. Ceci nous a été
24 rapporté par le truchement des canaux de l'OTAN, sans pour autant que nous
25 puissions le confirmer. Mais si le général Rose a dit quelque chose avec
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1 certitude, il doit en avoir la certitude. Mais moi, je ne peux pas vous
2 apporter de confirmation.
3 Q. Et saviez-vous qu'en date du 1er avril 1994, Alija Izetbegovic a appelé
4 tôt le matin, à 2 heures 30 du matin, le général Rose et il lui a dit que,
5 dans les rues de Gorazde, il y avait des chars ?
6 R. Impossible de le confirmer s'il s'agit de cette conversation
7 téléphonique-là. Ce que je sais, cependant, c'est qu'avant la crise de
8 Gorazde, il y a eu des contacts réguliers entre le général Rose et le
9 gouvernement musulman de Sarajevo.
10 Q. Bien. Mais avez-vous connaissance alors du fait que l'on avait demandé
11 au général Rose, à savoir, Alija Izetbegovic a demandé au général Rose de
12 faire en sorte que l'OTAN intervienne avec ses forces aériennes contre les
13 positions militaires serbes parce que d'après ses assertions à lui, les
14 Serbes étaient présents dans une zone d'exclusion où ils n'étaient pas
15 censés être présents ?
16 R. C'est exact. Dans le cadre de la crise de Gorazde, il y avait la
17 résolution des Nations Unies 836 et on avait dit, dans ce cadre, qu'en cas
18 de nécessité, éventuellement, il faudrait une intervention aérienne, des
19 frappes aériennes ou un appui aérien rapproché, et ceci avait été souhaité
20 de façon très insistante par les autorités musulmanes dans le cadre de
21 cette crise.
22 Q. Et la précession du général Rose est-elle exacte ? Qui est celle de
23 dire qu'au sujet de ces exigences-là ? Il avait conscience du fait qu'il
24 s'agissait d'exagérations et il avait estimé que les informations au niveau
25 des pertes étaient démesurément exagérées. Il avait demandé des
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1 informations de la part des services de Renseignements. Il a pu apprendre
2 que les activités étaient poursuivies, mais que les informations n'étaient
3 nullement préoccupantes ou -- et alarmantes.
4 Est-ce exact ou pas ?
5 R. En tant que chef d'état major, j'ai reçu des informations qui se
6 basaient sur les observations faites par le HCR et le MSF au centre de
7 Gorazde et, d'après ces rapports, il y avait manifestement des tirs -- des
8 tirs de chars et d'artillerie sur l'hôpital de Gorazde mais aussi sur la
9 ville même. Ce sont des confirmations qui m'ont été apportées par le
10 bâtiment des PTT à Gorazde où se trouvaient ces observateurs. Ce qui veut
11 dire, qu'à mon avis, une pression extrême était exercée sur la ville. Il y
12 avait utilisation d'armes lourdes et, plus tard, il s'est avéré qu'il y
13 avait eu 300 victimes.
14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vais soulever une question pendant que
15 nous avons encore le compte rendu à l'écran. Il s'agit de l'avant-dernière
16 réponse du témoin à propos de la prise de Gorazde. D'après le transcript,
17 on dit : "J'ai insisté régulièrement pour dire qu'en vertu de la résolution
18 des Nations Unies, il fallait protéger la zone de sécurité de Gorazde en
19 dernier recours par des frappes aériennes." Je pense que le témoin avait
20 dit que c'était Izetbegovic qui avait insisté régulièrement pour dire qu'en
21 application de la résolution, et cetera, en dernier recours, il fallait
22 utiliser des frappes aériennes.
23 Oui, Monsieur Milosevic, poursuivez.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il s'agit de la page 84, ligne 17.
25 M. MILOSEVIC : [interprétation]
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1 Q. Dites-moi, mon général, est-il exact de dire que l'appel et
2 l'information présentés par Izetbegovic étaient inexacts et qu'il avait
3 pour objectif une intervention des frappes de l'OTAN sur les positions des
4 Serbes uniquement ?
5 R. Je n'ai pas fondé mon avis sur les conversations téléphoniques des
6 dirigeants musulmans de Sarajevo. Je me suis appuyé sur les rapports que je
7 recevais de Gorazde même. Et la teneur exacte des conversations qui se sont
8 tenues entre les dirigeants musulmans et le général Rose, je n'en sais
9 rien. Mais ce que je sais, c'est que le général Rose m'a dit, à moi, que
10 les autorités musulmanes avaient insisté pour qu'il y ait intervention des
11 forces aériennes de l'OTAN.
12 Q. Bien. Est-il exact de dire et cela figure en page 6, paragraphe 3, de
13 votre déclaration, que vous avez indiqué que vous avez été à une réunion
14 avec le général Mladic et le général Delic. Mladic a alors proposé un
15 cessez-le-feu général sur tout le territoire de la Bosnie-Herzégovine et
16 non pas seulement sur le territoire du secteur Gorazde. En est-il été ainsi
17 ou pas ?
18 R. C'est exact. Ceci était au moment où on s'acheminait vers la crise de
19 Gorazde, en d'autres termes, aux alentours du mois de mars 1994.
20 Q. Bien. Mais serait-il exact de dire que Delic, lui, a refusé. Delic a
21 proposé à un cessez-le-feu général en Bosnie-Herzégovine, et Delic l'a
22 refusé ?
23 R. C'est exact. Ce que voulait le général Delic c'est éviter ou mettre
24 terme aux escarmouches qu'il y avait tout autour de Gorazde.
25 Q. Mais la cessation de toutes les activités sous-entendaient également la
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1 cessation de ce type d'activités au niveau de Gorazde, n'est-ce pas ? Or
2 Delic n'acceptait pas. Il ne demandait que l'on cesse à Gorazde, mais que
3 l'on n'accepte pas le cessez-le-feu général sur le territoire entier de la
4 Bosnie-Herzégovine. En est-il été ainsi ou pas, mon général ?
5 R. C'est exact en partie parce que le général Delic avait posé une
6 condition, à savoir, la démilitarisation de tout le personnel militaire
7 dans les zones protégées, donc, Tuzla, Srebrenica, Gorazde et Bihac. Pour
8 lui, c'était quelque chose qui ne s'agissait pas de discuter. Ce n'était
9 pas négociable comme condition.
10 Q. N'était-ce pas là une revendication logique, une cessation générale des
11 activités militaires et sécurité pour tout le monde, donc démilitarisation
12 des zones de sécurité. Cela ne sous-entendait pas une démilitarisation des
13 zones sous protection des Nations Unies, là où les Nations Unies étaient
14 présentes ?
15 R. C'était une démilitarisation unilatérale des domaines où les Musulmans
16 de Bosnie avaient le contrôle. Donc c'était une sécession totale pour ce
17 qui est de l'armée -- une démission totale pour l'armée des Musulmans de
18 Bosnie et ça c'était quelque chose d'inacceptable aux yeux de Delic.
19 Q. Mais c'était des zones protégées, donc il y avait des effectifs à vous
20 là-bas. Mais dites-vous que les Serbes n'ont jamais attaqué ? Vrai ou faux,
21 Général ?
22 R. C'étaient des zones protégées, c'est vrai. Je ne vous dit pas ce qui
23 est mon avis. D'ailleurs, je vous ai présenté l'avis du général Delic.
24 C'est là-dessus que portait votre question et c'est le fait que le général
25 Delic trouvait cette condition inacceptable parce que, pour lui, ça voulait
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1 dire que c'était une démilitarisation de la totalité de l'armée de Bosnie-
2 Herzégovine et que ceci équivalait, en fait, une --
3 Q. Et ne savez-vous pas que le général Delic a demandé le 7 avril
4 d'atteindre un accord politique complet, pour ce qui était du partage de la
5 Bosnie-Herzégovine, et de négocier par la suite d'une cessation des
6 activités ou des hostilités, répliques militaires sur le territoire de
7 cette Bosnie-Herzégovine ?
8 R. Je ne me souviens plus si le général Delic a fait des propositions
9 aussi concrètes que cela.
10 Q. Mais Michael Rose dit son livre :
11 "Delic a maintenant demandé que l'on a aboutisse à un accord politique
12 complet, avant que de négocier sur le plan militaire d'un cessez-le-feu."
13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Le témoin vous a dit ce dont il s'en
14 souvient à cet égard, je crois qu'il est inutile de lui présenter des
15 propos tenus par quelqu'un d'autre.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien.
17 M. MILOSEVIC : [interprétation]
18 Q. Le témoin dit lui-même que Delic, si j'ai bien compris, avait d'abord
19 demandé un accord politique au préalable, et puis ensuite, mais peut-on en
20 déduire général que la partie musulmane n'était pas intéressée par un
21 cessez-le-feu, mais en premier lieu par un partage des territoires, avant
22 que de procéder au cessez-le-feu.
23 R. Pour le général Delic, et dans ces négociations avec le général Rose,
24 il voulait que soient cessées les activités de combat autour de Gorazde,
25 avant de pouvoir parler d'un cessez-le-feu complet.
Page 26332
1 Q. Bien, toutefois vous étiez chef d'état major à l'époque, et le général
2 Rose dit que les messages des officiers de l'UNMO, de la mission
3 d'observation des Nations Unies, semblaient avoir été dictés par les
4 officiers musulmans, parce que cela était contraire et à l'opposé carrément
5 de ce qui avait été présenté par le porte parole des Nations Unies à
6 Sarajevo. Parce que les Serbes n'ont jamais essayé de prendre le contrôle
7 de la ville elle-même, est-ce que cela concorde avec ce que vous en savez
8 général, ou pas ?
9 R. Ce que je sais à propos de cette période, c'est que le général Rose
10 avait plus confiance dans les hommes à lui, qu'il avait à Gorazde, les
11 militaires britanniques, davantage confiance en eux, que dans les
12 observateurs des Nations Unies qui se trouvaient sur place. Moi je n'ai pas
13 pu parler aux observateurs militaires qui avaient, mais j'ai pu parler aux
14 observateurs des Nations Unies, au HCR, et au MSF, et c'est là-dessus que
15 j'ai fondé mon opinion.
16 Ce que j'ai pu constater en personne, lorsque je suis allé plus tard, une
17 semaine plus tard à Gorazde, c'est que les traces, les traces des activités
18 de combat étaient encore visibles, et qu'il y avait des chars manifestement
19 en bordure de Gorazde. Il y avait effectivement, il n'était pas question
20 d'avoir des milliers de réfugiés, mais je sais qu'il y avait eu des
21 combats, des combats de chars, et d'artilleries au pourtour même de la
22 ville.
23 L'INTERPRÈTE : se corrige, l'intention n'était pas de prendre la ville avec
24 ces 30.000 réfugiés.
25 Q. Mais serait-il exact de dire mon général, que c'est précisément à cette
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1 époque-là qu'il y a eu de nombreux incidents, à savoir, de nombreuses
2 attaques de la part des forces musulmanes en provenance de Gorazde, vers
3 l'extérieur de la zone protégée, et il y a eu mis a feu d'un grand nombre
4 de villages serbes, à l'est de la Drina, exact ou pas ?
5 R. A deux reprises tout du moins, il m'a été dit que le général
6 Milovanovic avait dit que des militaires musulmans avaient attaqué des
7 villages serbes, que des morts avaient été constatés, ça été dit deux fois,
8 mais personnellement je n'ai pas pu contrôler ces informations.
9 Q. Mais étiez-vous en position de vérifier ce que le général Rose en a
10 dit, parce qu'il en a parlé dans son livre également, il a dit qu'ils
11 avaient fait des sorties dans des zones protégées pour mettre le feu à un
12 grand nombre de villages serbes à l'est, pour incendier un grand nombre de
13 villages à l'est de la Drina. Est-ce là, quelque chose qui concorde avec
14 votre expérience ou pas ?
15 R. Personnellement, je n'ai pas pu le constater, et je n'ai pas eu non
16 plus la possibilité d'obtenir des observateurs des Nations Unies dans la
17 zone, c'était le général Rose qui disposait de son propre personnel, de ses
18 effectifs qu'il a fait intervenir et c'est peut-être à partir de leur
19 constations qu'il a tiré ces conclusions, mais je lui laisse le soin de le
20 dire en tant que chef d'état major, je n'ai pas pu envoyer sur place les
21 personnes qui étaient chargées d'enquêter.
22 Q. Mais en votre qualité de chef d'état major, ne saviez-vous pas ce que
23 savait le commandant ? C'est-à-dire, n'aviez-vous pas les mêmes
24 connaissances que lui ?
25 R. Je ne veux pas prétendre que j'ai toujours su dans tous les cas
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1 exactement, ce que savait le général Rose.
2 Q. Bien, serait-il exact de dire général, que le 9 avril 1994 au hangar,
3 dans un hangar de l'aéroport de Sarajevo, il s'est tenu une réunion
4 conjointe avec la présence d'un émissaire américain, M. Redmond ?
5 R. Je ne m'en souviens pas. C'est bien possible, mais je ne m'en souviens
6 pas.
7 Q. Mais étiez-vous présent à cette réunion ou pas, vous-même ?
8 R. Je ne me souviens plus s'il y a eu effectivement ce genre de rencontre,
9 ou si j'étais présent, il faudrait que je consulte mes notes de l'époque,
10 pour savoir si c'était le cas ou pas. Mais maintenant, je ne me souviens
11 pas.
12 Q. Mais partant du livre du général Rose, il découle que l'émissaire
13 Redmond --
14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je crois qu'il est inutile de poser au
15 témoin une question, quand il ne sait pas s'il était présent ou pas,
16 préférable de poser la question au général Rose en personne.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais j'ai supposé, Monsieur May, que M. Van
18 Baal, en sa qualité de chef d'état major, savait exactement les mêmes
19 choses que le général Rose.
20 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Mais vous l'avez entendu, vous avez
21 entendu ce qu'il a dit. Avançons, s'il vous plaît.
22 M. MILOSEVIC : [interprétation]
23 Q. Aviez-vous connaissance du fait qu'Izetbegovic avait à ce moment-là,
24 rejeté un accord proposé en date du 9 avril à cet aéroport de Sarajevo ?
25 R. Je ne sais pas.
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1 Q. Mais vous devez forcément être au courant des accords de l'état.
2 R. Bien sûr.
3 Q. Et ne pensez-vous pas que cela concorde à un bon nombre de points, avec
4 l'accord qui avait été proposé à ce moment-là, en 1994, et Izetbegovic
5 avait à l'époque rejeté ce qui avait été suggéré par Redmond ?
6 R. J'essaie de vous donner la meilleure réponse possible, mais moi je vous
7 parle du temps où j'étais chef d'état major en Bosnie. Les accords de
8 Dayton, c'est en 1995. Et je ne peux pas vous donner une réponse que
9 j'improviserais, pour essayer d'établir une comparaison, entre un accord
10 prévu en 1994 à propos de Gorazde, et les accords de Dayton.
11 Q. Bon Général, n'est-il pas exact de dire que c'est précisément vous le
12 10 avril 1994, suite au retour du général Rose de Split, avait informé ce
13 dernier que les tanks de la Republika Srpska, se trouvaient aux abords de
14 Gorazde, et qu'ils tiraient, qu'ils visaient ou ciblaient les bâtiments de
15 la ville, et que des gens des villages avoisinants étaient en feu. En est-
16 il été ainsi ou pas ?
17 R. Au retour du général Rose, il a été informé, mis au courant de toute
18 l'information que j'avais, moi, à ma disposition.
19 Q. Mais dans votre déclaration, vous parlez de chars serbes qui ont ciblé
20 l'hôpital de Gorazde. Et vous dites, qu'ils l'ont touché à plusieurs
21 reprises. Vous le dites au paragraphe 3, de la page 7.
22 R. Effectivement, j'ai pu constater que les rapports qui nous sont
23 parvenus à l'époque, se basaient sur la vérité. J'ai pu en faire la
24 constatation personnelle, à Gorazde.
25 Q. Mais avez-vous établi vous-même que l'on avait ciblé l'hôpital ?
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1 R. Je l'ai constaté en personne, lorsque j'ai effectué une visite à
2 Gorazde. Que ce soit accompagné par les autorités musulmanes locales, ou
3 par les représentants de la FORPRONU présents sur place. Et il y avait eu
4 des rapports faits par les observateurs militaires des Nations Unies. Il y
5 en a un qui était revenu de Gorazde. Après la crise, il m'en a parlé, et il
6 a confirmé de la véracité de ses rapports.
7 Q. Bon. Mais dites-moi, est-il cependant exact de dire, qu'à proximité
8 immédiate de l'hôpital, il y avait plusieurs positions de tirs de mortier
9 appartenant aux forces musulmanes ? Ça, vous avez forcément dû le
10 constater ?
11 R. Oui. Ça fait l'objet de rapports. Ça été dit, effectivement.
12 Q. Alors, n'est-il pas clair, partant de là, que les effectifs de l'armée
13 de la Republika Srpska ciblaient les positions de feu, à partir desquelles,
14 on leur tirait dessus, et non pas l'hôpital lui-même ?
15 R. Je ne peux pas confirmer, ni affirmer d'ailleurs. Ce que j'ai pu
16 constater, c'est que l'hôpital avait été touché.
17 Q. Bien. Pour ce qui est de la zone de sécurité, elle se situait à un
18 pourtour de 3 kilomètres autour du centre-ville. Vrai ou faux ?
19 R. Ça été constaté après qu'on avait en fait, interrompu un cessez-le-feu.
20 Dans la Résolution 836, on mentionne Gorazde et les deux parties avaient
21 été mises au courant du fait qu'il y avait une zone de sécurité à Gorazde,
22 qui faisait environ 300 ou 400 -- 300 kilomètres carré. Les militaires
23 serbes, ont ramené tous les citoyens. C'était en rapport avec l'accord. Il
24 y avait eu des combats, des tirs, qui étaient intervenus avant qu'on ne
25 parvienne à cet accord. On avait tiré à ce moment-là, sur l'hôpital. Et
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1 cette zone de sécurité de Gorazde, en vertu de cette Résolution 836, fait
2 une surface d'environ 300 kilomètres carrés.
3 Q. Et ça se situe à 3 kilomètres du centre-ville. N'est-ce pas ?
4 R. Dans l'accord ultime, avait été arrêté un domaine, une zone, où il n'y
5 aurait pas de combats, qui faisait un rayon de
6 3 kilomètres, à partir de la ville. Ça c'est vrai. Mais c'était après qu'on
7 soit passé de 300 kilomètres carré à environ 27 kilomètres carré.
8 Q. Bien. Est-ce que ça s'est passé avant ou après les frappes de l'OTAN ?
9 Frappes de l'OTAN contre les positions de l'armée de la Republika Srpska
10 autour de Gorazde ?
11 R. Après. L'accord a été signé après.
12 Q. Bon. Etant donné qu'il y a eu ces frappes aériennes contre les
13 positions de l'armée de la Republika Srpska, soi-disant pour détruire les
14 chars qui se trouvaient dans la zone interdite, la zone d'exclusion. Savez-
15 vous nous dire combien de chars, il y avait -- qui avaient billonné soi-
16 disant Gorazde, et qui se sont -- qui ont été détruits dans le courant de
17 ces frappes ?
18 R. Les chars ont progressé vers Gorazde, ont commencé à tirer.
19 Effectivement, les frappes aériennes de l'OTAN n'ont pas été vraiment très
20 efficaces. Elles n'ont pas vraiment anéanti des chars, d'après ce que je
21 sais. Mais elles ont eu pour effet, qu'il y a eu enfin, une réunion entre
22 le général Mladic et la FORPRONU. Ceci, afin de parvenir à un accord.
23 Q. Mais savez-vous, qu'à ce moment-là, l'on a détruit rien qu'une
24 ambulance de l'armée de la Republika Srpska, et pas un seul char, puisqu'il
25 n'y avait pas de chars dans ce secteur. Donc, cet acte, ou ces frappes
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1 aériennes ont été tout à fait injustifiées.
2 R. Effectivement, vu une photo, on voyait une trace visible montrant
3 qu'une ambulance avait été touchée. On ne voit pas trop le genre de
4 projectile utilisé. Et on avait raconté à cet égard, que c'était à la suite
5 des moyens investis par l'OTAN. Mais moi, je n'ai pas pu obtenir de
6 confirmation.
7 Q. Savez-vous, et là je vais vous donner une citation autre que du livre
8 du général Rose. Il est dit que :
9 "Le 13 avril, il est arrivé bon nombre d'invités à Sarajevo, y compris Lord
10 Owen en compagnie de Stoltenberg. On leur a fourni des rapports mis à jour,
11 émanant des observateurs qui se trouvaient sur les lieux. Et ils ont dit
12 que les activités étaient dirigées contre les hauteurs autour de la ville,
13 à l'opposé des rapports qui faisaient de la propagande, et qui disaient que
14 les Serbes, visaient ce type de cible. Mais cela avait pour effet, de
15 mettre en péril les positions musulmanes, ou plutôt de l'armée musulmane en
16 ville même." Etiez-vous au courant de ce que nous précisons, ici, le
17 général Rose. A savoir, que les Serbes n'avaient pas visé des cibles
18 civiles ?
19 R. Je laisse le soin à l'auteur de cet ouvrage de se prononcer. Moi, ce
20 que j'ai pu constater, c'est que la crise de Gorazde a provoqué des
21 centaines de morts, des centaines de blessés; provoqués par l'attaque
22 d'unités serbes sur Gorazde.
23 Q. Nous nous sommes tous efforcés d'user de notre influence, pour que les
24 combats autour de Gorazde soient menés à terme. Il y a eu des messages qui
25 venaient à cette fin de toutes parts. Il y a eu bon nombre d'appels à cette
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1 fin à l'attention des parties belligérantes. Vous en souvenez-vous ?
2 L'INTERPRÈTE : L'interprète demandera que soit vérifiée la teneur de la
3 réponse précédente.
4 R. Mais ceci ne s'est pas avéré efficace.
5 Q. Bien. Général, en page 8, paragraphe 3, vous dites qu'après la crise de
6 Gorazde, il y a eu une réunion à l'aéroport de Sarajevo, entre Haris
7 Silajdzic et Momcilo Krajisnik, n'est-ce pas ?
8 R. Exact. J'ai accompagné M. Silajdzic jusqu'à l'aéroport, et je l'en ai
9 ramené, vers la ville.
10 Q. Bien. Est-il exact de dire qu'à l'occasion d'une de vos rencontres avec
11 Silajdzic, vous m'aviez demandé s'il était possible de faire passer les
12 gens des enclaves est, vers le territoire de la fédération ?
13 R. Je lui ai demandé sur le chemin du retour, depuis l'aéroport de façon
14 officieuse.
15 Q. Bien. En page 8, paragraphe 3, vous indiquez qu'il vous a répondu,
16 "Qu'ils étaient des victimes de cette guerre. Et qu'ils bénéficiaient des
17 sympathies de la communauté internationale, et d'un soutien très puissant
18 des Etats-Unis. Et que pour le moment, leur objectif était de décrocher la
19 médaille d'or."
20 R. Exact.
21 Q. Mais est-ce que cela ne signifie pas que c'était là une option en
22 faveur de la guerre, une option qui signifiait, sacrifier son propre peuple
23 pour s'obtenir les faveurs de cette partie du monde qui s'appelle, ou qui
24 se désigne soi-même comme étant la communauté internationale ?
25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ce n'est là, rien d'autre qu'un
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1 commentaire. Nous verrons quelle signification, pour autant qu'il y ait une
2 signification à donner; il faudra accorder à tout ceci. Mais il ne revient
3 pas au témoin de se prononcer à cet égard.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais le témoin dans sa déclaration a dit que
5 Silajdzic lui a précisé qu'ils avaient bénéficié d'un soutien très fort des
6 Etats-Unis, et que leur intention était de décrocher la médaille d'or.
7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui. Et le témoin a confirmé que c'était
8 là bien, ses dires. Quant à l'interprétation qu'il faudra en faire, c'est
9 une décision que nous devrons prendre en temps utile pour voir s'il faut
10 lui accordez la moindre signification. Mais poursuivons.
11 M. MILOSEVIC : [interprétation]
12 Q. A la fin du paragraphe que je viens de vous citer en partie : "Qu'il
13 était évident, qu'il s'attendait à une assistance militaire de la part des
14 Etats-Unis." En a-t-il été ainsi ou pas, général ?
15 R. C'est exact.
16 Q. Et ils ont obtenu cette assistance militaire.
17 N'est-ce pas ?
18 R. Le gouvernement musulman de Bosnie a effectivement reçu un soutien
19 militaire et politique. C'est bien vrai.
20 Q. Bien. En page 9, paragraphe 6 de votre déclaration. Or, c'est là une
21 chose que vous avez mentionnée également dans le courant
22 de l'interrogatoire principal. Vous avez parlé des activités de tireurs
23 embusqués. Et vous précisez que vous croyez bien que les autorisations au
24 niveau de l'armée de la Republika Srpska pour ce qui est de ces tirs de
25 tireurs embusqués, venaient du poste le plus haut placé. C'est bien ce que
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1 vous avez déclaré, n'est-ce pas ?
2 R. Oui, certainement. Et c'est ce que j'ai conclu des conversations que
3 j'ai eues avec le général Milovanovic [sic].
4 M. MILOSEVIC : [interprétation]
5 Q. Et partant de quoi pensez-vous que cela soit venu du point ou du poste
6 le plus haut placé. Vous précisez que vous croyez que l'autorisation pour
7 ce faire, venait du lieu le plus haut placé au sein de la Republika Srpska.
8 Donc, partant de quoi avez-vous pensé cela ?
9 R. Partant d'une première chose, le général Milovanovic me l'a dit
10 clairement. Si la FORPRONU autorise les trames à rouler à Sarajevo, ça veut
11 dire que c'est la paix à Sarajevo; aucune question. Et puis, ça voudrait
12 dire que du côté serbe, les bus peuvent circuler. Mais vous avez une idée
13 tout à fait erronée de ce qui se passe. Parce qu'en Bosnie, il règne encore
14 la guerre. Et à ce point, qu'on tire sur les passagers de ces tramways, ce
15 qui c'est bien passé.
16 A d'autres moments, j'en ai discuté aussi avec le général Milovanovic, où
17 il a dit clairement, qu'il pouvait faire intervenir les tireurs embusqués
18 ,et qu'il pouvait aussi mettre fin à leurs activités.
19 Q. Bien, général. Je vous prie de prêter attention maintenant à ce qui
20 figure en même page, paragraphe 3. Vous parlez de tireurs embusqués
21 musulmans, et je vous cite : "Il y a eu des tireurs isolés qui tiraient
22 depuis des bâtiments du gouvernement bosnien." C'est bien ce que vous avez
23 déclaré; je vous ai cité à la lettre. Vous dites : "Qu'il y a eu des
24 tireurs isolés, des tireurs embusqués qui tiraient depuis des bâtiments du
25 gouvernement bosnien."
Page 26342
1 R. Ça été constaté par la FORPORNU, par des militaires de la FORPRONU du
2 secteur Sarajevo. Exact.
3 Q. Fort bien. Etant donné que ceci est une constatation des plus claire, à
4 savoir que des tireurs embusqués tiraient depuis des bâtiments du
5 gouvernement bosnien; ne vous semble-t-il pas illogique que l'on accuse la
6 partie serbe partant d'une conviction, disant que c'est au point le plus
7 haut placé que l'on décidait des tireurs embusqués et les Musulmans qui
8 tuaient des Serbes aux fusils à lunettes, et qui tiraient depuis des
9 bâtiments du gouvernement bosnien, chose que vous avez constaté de fait sur
10 le terrain. Cela ne vous fournit-il pas une preuve qui indiquerait que
11 c'est précisément les tireurs embusqués musulmans qui interviennent suite à
12 des directives émanant de leur gouvernement. Puisqu'ils tirent à partir des
13 bâtiments du gouvernement ?
14 R. Vous me posez une question -- mais portait d'abord sur les tireurs
15 embusqués serbes. Et dans ma déclaration, je dis que du côté musulman
16 aussi, on s'est servi de tireurs embusqués. Et là aussi, l'autorité
17 militaire venait du sommet le plus élevé. Ceci a été constaté par le
18 secteur Sarajevo, je ne l'ai pas constaté en personne. Ce sont des rapports
19 qui sont parvenus du secteur Sarajevo, et qui était érigé vers mon QG
20 principal.
21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui. L'heure est venue de suspendre
22 l'audience. Avez-vous d'autres questions à poser à ce témoin, Monsieur
23 Milosevic ?
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Quelques questions encore seulement.
25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous aurez suffisamment de temps si nous
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1 vous donnons cinq ou dix minutes aujourd'hui pour essayer de terminer
2 l'audition de ce témoin aujourd'hui ?
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Et bien, on en finira aujourd'hui, pour ne pas
4 attarder ou retarder le général et ne pas le faire revenir demain.
5 M. MILOSEVIC : [interprétation]
6 Q. Général, précisons les choses suivantes. S'agissant de vos convictions,
7 s'agissant de ces tirs de tireurs embusqués quand il s'agissait des Serbes,
8 vous exprimez une conviction, et vous dites que l'autorisation venait des
9 postes les plus hauts placés. Et d'autre part, vous avez des renseignements
10 précis disant que ces tireurs embusqués de l'autre côté tiraient depuis le
11 bâtiment du gouvernement musulman -- du gouvernement bosnien. Et vous ne
12 faites pas, vous ne prononcez pas de qualificatif analogue pour dire que
13 c'est du point le plus haut placé que les instructions venaient du point le
14 plus haut placé. Pourquoi le faites-vous, est-ce seulement pour accuser les
15 Serbes, que vous le faites ?
16 R. J'ai discuté personnellement avec le général Milovanovic, des tireurs
17 embusqués. Pour ce qui est des tireurs embusqués du côté bosnien, là, je
18 n'ai pas parlé personnellement avec des dirigeants du gouvernement bosnien.
19 C'est là, que se trouve la différence.
20 Q. Mais vous n'avez tout de même pas affirmé que le général Milovanovic
21 vous a dit que c'était eux qui, au niveau le plus haut placé, qui
22 décidaient de ce qu'allaient faire les tireurs embusqués.
23 R. Le général Milovanovic m'a dit, que si on laissait rouler les tramways,
24 si la FORPRONU autorisait les tramways de Sarajevo; que lui allait tirer
25 sur ces tramways. C'est ce qu'il a dit explicitement, en long et en large.
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1 Q. Mais il n'a pas dit qu'il allait utiliser des tireurs embusqués. Il a
2 dit qu'il demanderait la réciprocité à savoir, si l'on faisait tourner les
3 trams, que l'on fasse tourner aussi les autobus du côté serbe. Donc, si les
4 tramways étaient des moyens de transport surs, il fallait que soient tout
5 aussi sûrs les autocars ou les autobus. C'est bien ce qu'il vous a dit,
6 n'est-ce pas, Général ?
7 R. Techniquement, c'était uniquement avec des petits calibres, ce sont
8 donc des armes de tireurs embusqués. C'est de ça qu'on a besoin pour
9 pouvoir toucher les tramways. Ça c'est un élément technique.
10 Mais il y un autre élément. Il ne s'agissait pas simplement du fait qu'il
11 voulait permettre la circulation des tramways en conjugaison avec le
12 carburant qu'il fallait pour les autobus. Mais il a dit que tout c'était un
13 signal donné à la communauté internationale pour montrer une image qu'ii
14 régnait la paix en Bosnie-Herzégovine alors qu'à l'extérieur de Sarajevo,
15 les combats étaient encore âpres en Bosnie-Herzégovine. Et il voulait aussi
16 que des véhicules puissent être utilisés par les Serbes.
17 Mais il y a le fait que depuis les positions serbes, on ne pouvait tirer
18 sur ces tramways qu'à de longues distances avec des petites armes puisqu'on
19 ne pouvait pas utiliser les autres armes qui n'étaient pas autorisées dans
20 la zone.
21 Q. Mais mon général, je voulais juste constater que le général Milovanovic
22 parlait, lui, de réciprocité, de trames et d'autobus et il n'a pas parlé de
23 tireurs embusqués, de fusils à lunettes. Il ne les a pas mentionnés, cela,
24 n'est-ce pas ?
25 R. Il parlait du fait de tirer sur les tramways.
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1 Q. Mais il n'a pas mentionné les tireurs embusqués --
2 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je crois qu'il est inutile de poursuivre
3 sur ce point.
4 M. MILOSEVIC : [interprétation]
5 Q. Mon général, vous avez exclu, de façon détaillée et contrôlée,
6 l'exclusion des armes lourdes de l'armée de la Republika Srpska pour ce qui
7 est de la zone d'exclusion totale à Sarajevo. Pourquoi n'avez-vous pas pu
8 exclure l'utilisation des armes lourdes que vous avez constaté présentes du
9 côté musulman à proximité de l'aéroport et à proximité de l'hôpital.
10 Pourquoi n'avez-vous pas instauré une exclusion de recours à ces armes-là
11 également ?
12 R. Pour ce qui est de l'hôpital, les armes lourdes avaient été placées
13 dans un tunnel et à proximité du tunnel. En tant que FORPRONU, on n'avait
14 pas d'accès. J'ai dû le constater à mon arrivée à Sarajevo et ça n'a pas
15 changé. Pour ce qui est des mortiers positionnés près ou d'un mortier placé
16 près de l'aéroport, il était mobile. On le faisait, on l'utilisait puis il
17 disparaissait. Donc, on n'a jamais pu trouver cette arme. Nous avons
18 constaté que cette arme était utilisée pour tirer des projectiles. Cela a
19 pu être observé.
20 Q. J'ai cru comprendre, partant de ce que vous avez dit, que vous n'avez
21 pas lu le livre du général Rose portant sur sa mission en Bosnie.
22 R. Je ne l'ai pas dit. Je l'ai bien lu ce livre.
23 Q. Et bien, puisque vous avez lu ce livre, dites-moi si vous êtes d'accord
24 avec ce qu'il a dit dans l'épilogue, à savoir, la conclusion en page 304.
25 Je vais vous donner lecture de ce passage. Puisque vous l'avez lu, le
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1 général Rose dit :
2 "J'étais particulièrement en colère à l'encontre des journalistes en raison
3 de leurs textes et de leurs rapports partiaux et non objectifs, pour ce qui
4 est des commentaires qu'ils ont fait, du parti pris qu'ils ont adoptés pour
5 ce qui est de leurs rapports en provenance de Gorazde pendant l'année 1994
6 et des difficultés économiques et autres de la population. Ils ont parlé
7 des maisons détruites mais la vérité était autre. Ces maisons ont été
8 filmées par les avions de reconnaissance américains et ces maisons ont été,
9 pour la plupart, détruites en 1992 alors que les Serbes et les Musulmans se
10 battaient les uns avec les autres pour avoir la suprématie en ville --"
11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Arrêtez-vous. Il faut donner le temps au
12 témoin de répondre.
13 Etes-vous en mesure de commenter ce que dit le général Rose ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Je le sais, en diverses occasions, le général
15 Rose s'est inquiété du parti pris de plusieurs journalistes. C'est un fait.
16 Le général Rose comprenait aussi que les journalistes n'avaient pas
17 vraiment accès à la Republika Srpska. Et ils devaient se servir des
18 possibilités qui leur étaient données à Sarajevo et autour de la ville. Il
19 comprenait bien que les gens avaient une certaine façon de voir les choses
20 mais n'avaient pas les moyens d'obtenir d'autres informations. Il a
21 exprimé, à plusieurs reprises, son inquiétude à ce propos.
22 M. MILOSEVIC : [interprétation]
23 Q. Mais voyez-vous ce qu'il dit par la suite, là où j'ai été interrompu
24 par Monsieur May, justement, dans ma lecture. Il dit que les avions de
25 reconnaissance américains ont filmé les maisons détruites et ainsi de
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1 suite.
2 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ecoutez, Monsieur Milosevic, c'est
3 vraiment inutile de poursuivre sur votre lancée. Vous demandez maintenant
4 un commentaire à ce témoin mais à propos de ce qu'a dit quelqu'un d'autre,
5 à propos de l'opinion de quelqu'un d'autre. En tout état de cause, mais
6 qu'est-ce que ça fait comme différence pour ce qui est du présent procès ?
7 Est-ce qu'il est important de savoir s'il y a eu un parti pris de la part
8 des journalistes ou pas ? Puisque ce ne sont pas des témoins à ce procès,
9 ces journalistes. Nous, nous ne nous appuyons pas sur ce qu'ont fait, ces
10 journalistes, alors, est-ce que c'est vraiment important ?
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais lui, il parle ici, des avions de
12 reconnaissance américains et non pas de journalistes. Et la pertinence,
13 c'est ce qu'il dit plus loin, il s'agissait de maisons serbes qui n'avaient
14 plus de toits, plus de fenêtres et de portes, maisons que les Musulmans
15 avaient --
16 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ecoutez. Inutile de poser une question à
17 ce témoin à propos de ce qu'a dit le général Rose. Vous pourrez citer à la
18 barre, en tant que témoin, le général Rose mais vous savez, le temps est
19 compté.
20 Est-ce que vous avez d'autres questions à poser au général, sur un autre
21 sujet ?
22 M. MILOSEVIC : [interprétation]
23 Q. Mon Général, Monsieur le général Van Baal, êtes-vous, vous aussi
24 convaincu de ce qui est dit ici. A savoir, ce que l'on a présenté être des
25 victimes du côté musulman, c'était en réalité des maisons de Serbes qui ont
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1 été détruites et pillées par des Musulmans et c'est ce qu'on a présenté
2 pour justifier, dans les médias, de façon médiatique, l'agression à
3 l'encontre de la partie serbe. Exact ou pas, général ?
4 R. Je n'ai pas de commentaires à faire sur ce que vous présentez comme
5 avis général.
6 Q. Bien. Je vous remercie, général.
7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Maître Kay.
8 Questions de l'Amicus Curiae, M. Kay :
9 Q. [interprétation] Très brièvement, un sujet. Mon Général, vous avez eu
10 affaire avec M. Karadzic. Vous avez eu des entretiens personnels avec lui,
11 n'est-ce pas ?
12 R. Non. Nos entretiens se sont situés à un niveau de fonctions --
13 fonctionnel.
14 Q. Excusez-moi mais j'avais oublié de chausser mes écouteurs. Vous ne
15 m'avez pas bien compris. Ce que je veux dire, dans l'exercice de vos
16 fonctions, vous avez eu des rencontres avec le Docteur Radovan Karadzic,
17 n'est-ce pas ?
18 R. C'est exact.
19 Q. Et dans le cadre de ces contacts avec M. Karadzic, il a exercé un
20 contrôle sur les questions ou les sujets pour lesquels vous lui demandiez
21 une réaction, une réponse, n'est-ce pas ?
22 R. Exact.
23 Q. Il vous a dit, de façon claire et nette, que c'était lui, le chef, le
24 dirigeant des Serbes de Bosnie, n'est-ce pas ?
25 R. Exact.
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1 Q. Et pour ce qui est du général Mladic, là aussi, vous avez eu des
2 contacts avec ce général, qui était le commandant des forces serbes de
3 Bosnie, n'est-ce pas ?
4 R. Exact.
5 Q. Et pour vous, il a semblé clair qu'il exerçait le contrôle sur ces
6 forces.
7 R. Exact.
8 M. KAY : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions.
9 M. NICE : [interprétation] Si je puis tirer au clair un point. D'après ce
10 que je vois à l'écran, c'est 13137 -- 13:37.
11 Nouvel interrogatoire par M. Nice :
12 Q. [interprétation] Général, on vous a posé des questions au sujet des
13 propos du général Rose, dans son livre, au sujet des Serbes qui ne
14 prenaient pas pour cible certains endroits à Gorazde. On vous a posé une
15 question où l'on disait que le général Rose disait que néanmoins, ils
16 avaient mis en danger, de manière très sérieuse, l'armée musulmane dans la
17 ville.
18 Et à présent, je me propose de donner lecture de la totalité de votre
19 réponse. Et j'aimerais savoir si ceci a été bien consigné. Je cite :
20 "Cela signifie que je laisserai cela à l'auteur du livre, le général Rose.
21 Ce que j'ai pu remarquer, c'est que pendant la crise de Gorazde, il y a eu
22 des victimes, il y a eu des morts et des blessés et que pendant les dix
23 jours qui -- pendant les prochains dix jours, ceci n'a pas été provoqué par
24 l'attaque serbe sur Gorazde." Premièrement, est-ce que c'est bien la
25 réponse que vous vouliez donner ?
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1 R. Ce que je voulais dire, c'était la conséquence de l'attaque serbe sur
2 Gorazde. Apparemment, on l'a présentée sous forme négative. Les blessés et
3 les morts, pendant la crise de Gorazde, ont été la conséquence de l'attaque
4 serbe.
5 Q. Il y a une question supplémentaire seulement, Monsieur le Président.
6 Vous avez déjà expliqué, mais je voudrais être tout à fait sûr de vous
7 avoir bien compris. Donc, Mladic exerçait des pressions pour qu'il y ait
8 l'application totale du cessez-le-feu. Et ceci -- c'est une chose qui a été
9 constamment rejetée par des Musulmans. S'ils l'avaient acceptée, quel
10 aurait été l'effet ? Donc, il y aurait eu un cessez-le-feu total et
11 démilitarisation ?
12 R. Oui, tout à fait. Un désarmement d'un seul côté, et la fédération
13 croate ou musulmane aurait été affaiblie par cela. Et tout ceci aurait été
14 facile pour la Republika Srpska. C'est ça la conséquence qui aurait été et
15 c'est ça que le général Delic soulignait :
16 "Je n'aurais pas de protection si j'acceptais ce désarmement unilatéral."
17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Très bien. C'est ainsi que se termine
18 votre déposition. Je vous remercie d'être venu déposer devant ce Tribunal.
19 Vous êtes libre. Vous pouvez disposer.
20 Nous allons suspendre jusqu'à demain matin.
21 [Le témoin se retire]
22 M. NICE : [interprétation] Je tiens à répondre à votre demande précédente
23 au sujet des informations au sujet de Brcko. Pour autant que j'ai pu m'en
24 assurer, nous avons uniquement un site Web de 2001. Nous avons uniquement
25 les informations du haut représentant, et représentant du gouvernement
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1 fédéral. Je pense que cela contient -- concerne les faits des deux derniers
2 paragraphes et un certain nombre d'éléments de description supplémentaire.
3 Donc, rien ne s'est produit d'important depuis.
4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Voulez-vous nous communiquer cela.
5 --- L'audience est levée à 14 heures 03 et reprendra le jeudi 11 septembre
6 2003, à 9 heures.
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