Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mardi 21 octobre 2003

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 03.

5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous avons des mesures de protection qui

6 sont demandées pour le témoin suivant. Elles sont accordées par la Chambre.

7 Mais en attente de l'arrivée du témoin, je vais m'occuper de quelques

8 questions d'ordre administratif. S'agissant des audiences prévues fin

9 novembre et début décembre, nous avons une semaine qui commence le lundi 24

10 novembre. Il y a dans cette semaine un congé onusien le mercredi 26

11 novembre. Pour en tenir compte, cette semaine-là, nous aurons des audiences

12 lundi 24 novembre, mardi 25 novembre, ainsi que le jeudi 27 novembre.

13 Le Juge Robinson ne pourra pas être présent le mardi 25 novembre, ainsi que

14 le jeudi 27 novembre, ceci pour des raisons médicales, ce qui fait que le

15 Juge Kwon et moi-même siègerons seul en application du règlement ces jours-

16 là.

17 S'agissant de la semaine du mardi 2 au jeudi 4 décembre, nous aurons les

18 journées d'audience habituelles de mardi à jeudi; cependant, pour ces mêmes

19 raisons, le Juge Robinson est dans l'impossibilité d'assister à ces

20 audiences. Le Juge Kwon et moi-même siègerons donc seuls.

21 La semaine commençant le lundi 8 décembre, une plénière des Juges est

22 prévue. Par conséquent, quand il n'y aura pas d'audience ces jours-là, à

23 savoir, le jeudi 11 et vendredi 12 décembre. Par conséquent, la Chambre

24 siègera, cette semaine-là, le lundi 8 jusqu'au mercredi 10 décembre.

25 Oui. Avant l'arrivée du témoin, voulez-vous aborder d'autres questions ?

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1 M. GROOME : [interprétation] Juste deux questions préliminaires. Je ne vais

2 pas demander que soient présentés des éléments de preuve à huis clos et, si

3 les amis de la Chambre ou l'accusé veulent s'enquérir du poste occupé par

4 le témoin dans la municipalité, qu'ils le fassent à huis clos.

5 Je demanderais aussi -- puisque sa femme et sa fille ont été victimes de

6 violences sexuelles très graves, par respect pour les membres de sa

7 famille, je demanderais que ces questions-là aussi soient abordées à huis

8 clos.

9 Vous avez dans un classeur trois pièces. Je voudrais qu'une cote soit

10 attribuée.

11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui. Je crois comprendre qu'il y a une

12 question relevant de l'application du 92 bis, s'agissant de ce témoin.

13 Apparemment, cet aspect-là n'a pas été abordé. Nous avions rendu une

14 ordonnance, mais vous n'aviez pas ceci sous forme écrite, mais c'est

15 accordé comme mesure.

16 M. GROOME : [interprétation] Je vous remercie.

17 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vais demander au témoin de prononcer

19 la déclaration solennelle.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

21 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

22 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur. Veuillez vous

23 asseoir.

24 LE TÉMOIN: Témoin B-1122 [Assermenté]

25 [Le témoin répond par l'interprète]

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1 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Quelle sera la cote ?

2 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] 566, avec les intercalaires 1, 2, 3,

3 sous pli scellé.

4 Interrogatoire principal par M. Groome :

5 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin, j'attends que les stores soient

6 relevés. Monsieur, des mesures de protection vous ont été accordées en

7 application d'une ordonnance rendue par la Chambre. Vous serez donc, pour

8 nous, le Témoin B-1122. Commençons votre déposition. Et je vous demande

9 l'intercalaire 1, de la pièce 566. Reconnaissez-vous ce document ?

10 R. Oui.

11 Q. Voit-on votre nom de famille en haut du document, et est-ce que là

12 aussi c'est un bref résumé -- une brève synthèse de votre parcours

13 professionnel ?

14 R. En effet.

15 Q. Veuillez maintenant examiner l'intercalaire 2 de ce document. Il se

16 compose de deux volets. Il y a une traduction en anglais d'une déclaration

17 préalable ainsi que la déclaration elle-même en B/C/S. Reconnaissez-vous

18 l'auteur de cette déclaration ?

19 R. Oui. C'est ma déclaration à moi.

20 Q. Vous êtes venu à La Haye. A votre arrivée, avez-vous revu cette

21 déclaration, et est-ce que vous avez fait part au bureau du Procureur de

22 quelques corrections que vous désiriez apporter ?

23 R. Oui.

24 Q. Examinez l'intercalaire 3, de la pièce 566. Est-ce là l'addendum

25 apporté à votre déclaration, où l'on voit plusieurs modifications à la

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1 déclaration initiale ?

2 R. Oui, c'est cela.

3 Q. Revenons, si vous le voulez bien, à la page 11, de l'intercalaire 1.

4 Voici ce que je vous demande. Voit-on votre signature apposée à cette

5 page ?

6 R. Oui.

7 Q. Avez-vous paraphé chacune des pages de la déclaration préalable ?

8 R. Oui.

9 Q. Avez-vous vérifié l'exactitude de la précision de ces propos,

10 maintenant que vous avez prononcé la déclaration solennelle ?

11 R. Je le confirme.

12 Q. Veuillez maintenant revenir une fois de plus à l'intercalaire 3, et

13 plus précisément à la deuxième page. Y voit-on là aussi la signature que

14 vous avez apposée à l'addendum de cette déclaration préalable ?

15 R. Oui.

16 Q. Vous avez maintenant prêté serment. Vous avez vérifié l'exactitude de

17 cette addendum ?

18 R. Oui.

19 M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, en application de

20 l'Article 89(F), je demande le versement des intercalaires 2 et 3.

21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.

22 M. GROOME : [interprétation]

23 Q. Monsieur le Témoin --

24 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Mais excusez-moi, est-ce que vous

25 pourriez nous situer cette municipalité dans l'atlas parce que je pense que

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1 c'est le premier témoin qui va en parler ?

2 M. GROOME : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, je n'ai

3 pas ici, sous la main, notre exemplaire de l'atlas. Je vais peut-être

4 demander au témoin de nous expliquer où se trouve Gacko. Je pourrais vous

5 fournir une référence, quant à la page, après la pause.

6 Q. Monsieur le Témoin, pourriez-vous dire aux Juges de cette Chambre où se

7 trouve Gacko en Bosnie-Herzégovine ?

8 R. Gacko se trouve en Herzégovine de l'Est. Les municipalités voisines au

9 nord sont celles de Foca et Kalinovik; à l'est, il y a le Monténégro; au

10 sud, il y a Bileca et Stolac; et à l'ouest, Nevesinje.

11 Q. La Chambre dispose de votre déclaration préalable qui fournit un récit

12 complet des événements, dont vous avez été témoin, à Gacko. Moi, j'avais à

13 vous poser quelques questions plus précises dans le cadre de votre

14 déposition.

15 Voici ma première question. Dans votre déclaration, vous parlez de la

16 présence des Aigles blancs à Gacko. Pourriez-vous nous dire à quel moment

17 vous avez, pour la première fois, vu des Aigles blanc à Gacko ?

18 R. C'était en mars 1992.

19 M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, ceci se trouve à la

20 page 33, coordonnée 3D.

21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Merci.

22 M. GROOME : [interprétation]

23 Q. Comment saviez-vous qu'il s'agissait d'Aigles blancs ?

24 R. Ils portaient des insignes d'Aigles blancs. Ils avaient cela sur leurs

25 manches.

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1 Q. Pendant leur présence à Gacko, est-ce que vous vous êtes fait une idée

2 des rapports qui existaient entre les Aigles blancs et les membres

3 officiels de la JNA ?

4 R. Voyez-vous, lorsque les Aigles blancs sont arrivés à Gacko, ils ont été

5 stationnés dans la caserne. C'est une petite localité à 3 kilomètres à

6 l'est de Gacko. C'étaient des casernes utilisées par l'armée populaire

7 yougoslave. Ensuite, nous pouvions les voir se fréquenter mutuellement,

8 être ensemble dans les différents locaux de la ville et d'après ce que nous

9 avons pu voir, ils étaient tout le temps ensemble.

10 Q. Avez-vous constaté quoi que ce soit s'agissant des armes que portaient

11 les Aigles blancs ?

12 R. Oui. Ils portaient des armes de l'armée yougoslave. C'étaient en

13 général des fusils automatiques. Ils avaient aussi des armements lourds,

14 des mortiers, ils disposaient de cannons. On a pu le voir lorsqu'ils sont

15 allés sur le champ de bataille sur les lignes de front vers Mostar. Ils

16 avaient des uniformes, ils avaient donc toute la logistique qui était celle

17 de la JNA, c'était évident.

18 Q. J'avance pour arriver à cette réunion dont vous faites état dans votre

19 déclaration qui s'est tenue le 28 avril 1992, y participait le général

20 Momcilo Perisic. Pourriez-vous dire pour les juges ce que la communauté

21 musulmane recherchait obtenir du général Perisic en guise d'assurance, et

22 pourriez-vous aussi nous dire ce qu'il a promis à la communauté musulmane ?

23 R. Je me souviens qu'il y avait une réunion des représentants des peuples

24 serbes et musulmans à cette réunion-là, et il y avait le général Perisic,

25 c'était lui qui avait commandé les opérations sur Mostar. Etant donné

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1 qu'ils survenaient des événements ou des incidents des violences à l'égard

2 des Musulmans, des représentants de la population bosnienne ont demandé des

3 garanties au général Perisic pour ce qui est de protéger la population

4 civile. Il n'y avait rien d'autre que de la population civile. Le général

5 Perisic dans ses propos a promis la chose, et les représentants de la

6 partie musulmane avaient demandé qui étaient ces formations paramilitaires,

7 et ce qu'ils faisaient à Gacko.

8 Et Perisic avait dit que, dans sa zone de responsabilité, il n'allait pas

9 tolérer quelque organisation ou formations paramilitaires que ce soit.

10 Alors, on lui a demandé : mais qui sont alors ces Aigles blancs ? Et il a

11 passé la chose sous silence, il n'a pas répondu, mais il a promis qu'il

12 allait protéger la population civile sur le territoire de la municipalité

13 de Gacko. Or il n'a pas tenu sa promesse.

14 Q. Le lendemain de ce jour où Perisic avait promis qu'il n'y aurait pas de

15 paramilitaires dans la région, que s'est-il passé s'agissant des membres

16 des Aigles blancs à Gacko ?

17 R. Ce que je sais, c'est que les représentations du côté bosnien ont

18 demandé au général Perisic, après lui avoir parlé des activités des Aigles

19 blancs et au lendemain de ces entretiens, les Aigles blancs sont allés au

20 front de Mostar et, en passant par la ville sur place en ville, ils avaient

21 ouvert le feu en tirant dans le ciel, mais c'était pour fêter je ne sais

22 quoi ou marquer je ne sais quoi, donc on avait tiré en l'air avec toute

23 sorte d'armes. Ils sont partis vers Mostar et je crois qu'ils sont restés

24 là-bas peu de temps à peu près une semaine. Ils sont revenus à Gacko et ils

25 ont été une fois de plus réinstallés dans cette caserne militaire de Gacko.

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1 Q. Cela veut dire que le lendemain de la journée où M. Perisic s'était

2 adressé aux deux communautés, les Aigles blancs sont partis. Ils sont

3 restés absents pendant une semaine avant de revenir à Gacko, c'est bien

4 cela ?

5 R. Tout à fait.

6 Q. Parlons maintenant du 1er juin 1992. Dans votre déclaration, vous faites

7 état d'une autre réunion avec le colonel Parezanin de la JNA. Pourriez-vous

8 dire aux Juges ce qu'a dit le colonel Parezanin aux personnes qui étaient

9 présentes à l'occasion de cette réunion ?

10 R. Oui. Le 1er juin 1992, il y a commencé y avoir des arrestations de

11 membres de la population musulmane à Gacko et il y a eu une réunion entre

12 représentants du Parti musulman et du Parti serbe ce jour-là. Ça s'est tenu

13 le matin à l'assemblée municipale et, dans l'après-midi, dans

14 l'administration de la police.

15 Pendant la durée de la réunion, il est entré un homme qui s'est présenté en

16 disant qu'il était colonel -- le colonel Parezanin. Il était commandant

17 adjoint du Corps chargé de la Logistique. Le sujet des entretiens avait été

18 le suivant : les Serbes avaient demandé que les Musulmans restituent des

19 armes qu'ils n'avaient pas, et le colonel Parezanin a dit : "Ecoutez, voyez

20 cela avec les instances officielles -- les autorités officielles et, si

21 vous ne faites pas, je suis en mesure de raser complètement la colline que

22 vous voyez là-bas," et il a montré de sa main la direction d'un village

23 musulman. Il l'a dit et il allait quitter la pièce.

24 Q. Et, à un moment donné, il est revenu et a présenté une autre personne

25 qui participait à cette réunion ?

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1 R. Oui. Il allait quitter et est arrivé à la porte, et il est revenu et il

2 a dit : "J'ai oublié de vous présenter cette homme." Il y avait un homme

3 qui était assis que je ne connaissais pas. Il nous a dit -- il a dit :

4 "Colonel, c'est le colonel -- " mais j'ai oublié le nom et le prénom, et il

5 avait précisé que c'était le commandant des Bérets rouges. Et c'était la

6 première fois que j'ai entendu parler de ce terme -- de ces termes "Bérets

7 rouges".

8 Alors, cet homme a dit -- s'est présenté, il a dit son nom et prénom et il

9 a dit : "Faites ce que vous demandaient les représentants -- les autorités

10 civiles, à savoir, les représentants du Parti du SDS." Et il a dit que :

11 "Dans le cas contraire, il était en mesure de faire venir quelques 5 000

12 membres des unités spéciales." Cela dit, les deux sont partis -- ont quitté

13 la pièce.

14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic, vous voulez

15 intervenir.

16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, le témoin a dit, pour autant que

17 je puisse l'interpréter ce qu'il a dit en langue serbe, à savoir qu'il

18 s'agissait de tenir leurs promesses et qu'il avait de quoi raser la colline

19 là-bas en montant -- en montrant une colline, et là-bas a précisé le témoin

20 se trouvait un village musulman. Et la traduction dans le texte dit : "Si

21 vous ne tenez pas votre promesse

22 -- vos promesses, vos engagements, je raserai ce village musulman." Donc la

23 traduction est tout à fait autre de ce qu'il a dit. C'est ce qui a été

24 écrit sur le compte-rendu.

25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Un instant, un instant -- inutile de

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1 poursuivre. Nous allons tirer ceci au clair. Qu'a dit le colonel ?

2 Nous allons préciser ceci, nous allons demander au témoin de nous

3 expliquer ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je peux vous aider à ce sujet. Le colonel

5 en question s'est adressé à nous en demandant de faire ce que nous

6 demandaient les représentants de la partie serbe et au cas où nous ne le

7 ferions pas. Il a dit : "Qu'il était en mesure de raser la colline là-bas -

8 - de raser complètement la colline là-bas." Et il a montré de la main la

9 direction de ce village-là où il y avait un village musulman Fasaluci

10 [phon].

11 L'INTERPRÈTE : Si l'interprète a bien entendu son nom.

12 M. GROOME : [interprétation]

13 Q. Revenons, non pas au colonel Parezanin, mais à ce colonel dont vous ne

14 vous souvenez pas du nom, mais qui a été présenté comme étant le commandant

15 des Bérets rouges. Je vous demande ceci : que portait-il à ce moment-là ?

16 Est-ce qu'il avait sur la tête un couvre-chef qui aurait été de couleur

17 rouge ?

18 R. Non, non.

19 Q. Il a parlé de 500 [sic] hommes d'unités spéciales, de spécialistes.

20 Pour vous qu'est-ce que c'étaient ces "spécialistes" ?

21 R. Je ne savais pas qui étaient les Bérets rouges. Je suis tout à fait

22 sincère, je ne savais pas du tout de qui il s'agissait. Et, à ce moment,

23 j'ai compris, nous étions sous une pression très grande. Nous étions très,

24 très mal à l'aise et j'ai pris ces propos très au sérieux.

25 Q. Mais est-ce que vous saviez ce qu'il voulait dire quand il a parlé de

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1 "spécialistes" ou "hommes d'unités spéciales" ?

2 R. Il parlait d'une unité spéciale. J'ai -- par la suite, j'ai appris qui

3 était les Bérets rouges. C'étaient des membres des unités spéciales de Nis,

4 c'était une unité spéciale de l'armée yougoslave. Mais à ce moment-là, je

5 ne sais pas du tout de qui il s'agissait.

6 Q. Mais quelles sont les sources qui vous ont fourni ces renseignements

7 concernant l'origine de ces Bérets rouges ?

8 R. Et bien, ça on l'apprend par le biais des gens. On se pose des

9 questions en parlant avec des personnes. Mais je n'ai rien appris

10 d'officiel. Nous n'avons cherché qu'à survivre, qu'à sauver notre peau.

11 M. GROOME : [interprétation] Pas d'autres questions, Monsieur le

12 Président. Je vous remercie.

13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic, vous avez la

14 parole.

15 Contre-interrogatoire par M. Milosevic :

16 Q. [interprétation] Monsieur 1122, vous nous avez dit, vous avez précisé

17 dans votre déclaration, qu'avant les élections et là vous parlez je pense

18 des élections de Bosnie-Herzégovine, je suppose, n'est-ce pas ?

19 R. Oui, en effet.

20 Q. Dans la période précédente à ces élections, "le Parti démocratique

21 serbe," et vous le dites au point 4 de votre déclaration, "avait tenu de

22 grands meetings au Kosovo, à Belgrade, et dans d'autres localités."

23 S'agissait-il là des meetings du Parti démocratique serbe quand vous dites

24 que, "bon nombre de Serbes, originaires de Gacko ont assisté à ces

25 meetings" ? Et il s'agissait de "nationalistes serbes, des plus âpres, des

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1 plus acharnés."

2 R. C'est ce qui ait dit. Et j'ai corrigé mes propos. J'ai dit qu'à

3 l'époque où il se tenait des grands meetings au Kosovo, à Belgrade, à

4 Gazimestan, et Usce, un grand nombre de nationalistes originaires de Gacko,

5 des Serbes de Gacko y avaient pris part, s'étaient rendus à ces

6 manifestations. Je l'ai rectifié dans l'addendum.

7 Q. Bien, Monsieur 1122. Ces grands meetings à Gazimestan et à Usce, avez-

8 vous ouï dire ou avez-vous entendu prononcer quelques propos que ce soit à

9 l'occasion de ces meetings à Usce ou à Gazimestan qui pourraient être

10 qualifiés de nationaliste ?

11 R. Je crois que la teneur et la thématique de ces meetings sont

12 notoirement connues.

13 Q. Bien, donc vous affirmez que c'est bien le cas, n'est-ce pas ?

14 R. Oui.

15 Q. A l'occasion de cet interrogatoire très bref, je ne vais pas, vous n'en

16 allez pas parler. Je vous -- cela nous prendrait bien l'heure qui m'est

17 impartie, donc je voudrais que vous nous précisiez si vous avez assisté à

18 des meetings du SDA ?

19 R. Oui.

20 Q. Serait-il exact de dire que le 1er parti national avoir été créé en

21 Bosnie-Herzégovine avait été précisément ce Parti musulman de l'action

22 démocratique, et ce parti a été créé le 26 mai 1990, n'est-ce pas ?

23 R. Je ne sais pas vous dire de date.

24 Q. Vous ne savez pas les dates ?

25 R. Non, je ne sais vous dire aucune date pour ce qui est du SDA, du SDS,

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1 enfin ses dates de création. Je n'en sais rien. Ce que je sais, c'est qu'au

2 niveau local de Gacko, le Parti démocratique serbe a été créé le 2 août

3 1990, et le Parti de l'action démocratique a été créé en date du 1er

4 septembre. Donc je ne sais vous parler que du niveau local.

5 Q. Pouvez-vous nous parler de l'apparence de ces meetings du Parti de

6 l'action démocratique ?

7 R. C'étaient des activités préélectorales où le Parti politique de

8 l'action démocratique a essayé d'obtenir l'approbation du corps électoral.

9 C'était une lutte pour le pouvoir.

10 Q. Mais à ces meetings-là, avez-vous remarqué qu'il y avait une sorte

11 d'exclusivité pour ce qui est des positions prises par le Parti de l'action

12 démocratique, qui pouvaient donc se résumer en propos aux termes desquels

13 il n'y avait en Bosnie-Herzégovine que de la place -- de la place que pour

14 les Musulmans ?

15 R. Non, cela n'a jamais figuré au programme de l'action -- du Parti de

16 l'action démocratique.

17 Q. Bon, serait-il exact de dire que pour ce qui est des fondements de

18 l'activité déployée par ce parti, ces fondements ont pris source, leur

19 source, dans la déclaration islamique de Izetbegovic ?

20 R. Je ne suis pas au courant, et je pense ne pas être en mesure de

21 répondre à cette question. Je n'ai pas lu la déclaration islamique.

22 Q. Vous ne l'avez même pas lue ?

23 R. Non, cela certainement pas.

24 Q. Mais vous étiez un responsable du SDA ?

25 R. Je crois que cela n'a rien à voir avec ce fait-là. J'étais responsable

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1 du parti mais je n'ai pas eu à lire cette déclaration.

2 Q. Vous dites au point 4, qu'il y a eu de la propagande qui promouvait le

3 nationalisme serbe, et on avait, dites-vous, inventer des crimes perpétrés

4 par des Musulmans à l'encontre de Serbes. Certains avaient parlé de Gacko

5 et on a inventé au sujet de Gacko, des crimes, des incidents dont les

6 auteurs auraient été des Musulmans. C'est ce que vous dites.

7 R. C'est ce qui ait dit, et ce qui correspond à la vérité.

8 Q. Etait-ce là un rappel d'événements de l'histoire ? Alors que l'on a vu

9 revivre l'intégrisme islamique, notamment lors de démantèlement de la

10 Yougoslavie ?

11 R. Quand j'ai fait cette déclaration, j'avais à l'esprit ce qui s'était

12 passé à Gacko. Alors le fait de faire revivre certaines choses ou de

13 renforcer le nationalisme serbe, ça se faisait à des soirées littéraires

14 qui ne ressemblaient du tout à des soirées littéraires, mais à des

15 manifestations politiques. Ensuite, j'avais parlé des soirées où l'on avait

16 joué de l'instrument guslevski, qui est un instrument à caractéristique

17 pour cette région. Vous n'ignorez pas, Monsieur Milosevic, le fait que cela

18 fait revivre le nationalisme. On a parlé -- on a assisté à des discours de

19 personnalité, qui venaient à Gacko mais qui ne vivaient pas à Gacko, qui

20 étaient originaires de Gacko, mais qui vivaient ailleurs.

21 J'ai là à l'esprit les livres qui ont influé de façon très négative sur les

22 gens dans cette région, cela a fait revivre les nationalismes. Je me réfère

23 notamment au livre de Vuk Draskovic, intitulé Noz, en traduction, Le

24 Glaive.

25 Q. Monsieur 1122, c'est ce que vous dites dans ce point 4. Vous indiquez

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1 également qu'elles sont les auteurs qui présidaient à Belgrade ou ailleurs,

2 et qui étaient originaires de cette région-là.

3 R. Il n'y a pas que les écrivains, des personnalités éminentes.

4 Q. Vous avez parlé de Gojko Djogo, de Draskovic, n'est-ce

5 pas ?

6 Vous venez de mentionner le livre de Draskovic, mais pour autant que je le

7 sache, ce sont des choses qui ont été publiées bien avant, bien avant les

8 événements en question.

9 R. Oui, mais cela a servi de thème favorable au sein des nationalistes.

10 Q. Mais serait-il exact de dire que les événements décrits dans ces livres

11 se fondaient sur des événements historiques, sur des événements réels, sur

12 des cruautés qui ont été perpétrées. Le livre a été publié bien avant tous

13 ces événements-là.

14 R. Je crois que cette région était très sensible, très sismique de ce

15 point de vue là, et à chaque fois qu'il y a eu des situations instables

16 dans la région, il y a eu de part et d'autres, des cruautés, des crimes,

17 des meurtres, mais il y en a eu bien plus du côté serbe que du côté

18 bosnien. L'histoire l'a d'ailleurs prouvé.

19 Q. Vous parlez de la Deuxième guerre mondiale ?

20 R. Pendant la Deuxième guerre mondiale et avant la Deuxième guerre

21 mondiale.

22 Q. Bon, maintenant que vous expliquez qu'il y a eu des soirées où on a

23 joué de l'instrument guslevski, pour ceux qui ne le savent pas, le

24 guslevski c'est un instrument populaire, n'est-ce pas ? Et on chante en

25 jouant de cet instrument des chansons populaires. Ce sont des chansons qui

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1 existent pendant -- depuis des centaines d'années, ou des dizaines

2 d'années, et ainsi de suite.

3 R. Oui.

4 Q. Mais cela sert que d'accompagnement pour des chants nationalistes.

5 C'est de cela qu'il s'agit.

6 Q. Donc, les gusle, ont également contribué au développement du

7 nationalisme, n'est-ce pas ?

8 R. Absolument.

9 Q. Et ces soirées des instruments tels que la musique des gusle sont, à

10 votre avis, des manifestations nationalistes aussi ?

11 R. Absolument.

12 Q. Bien, Monsieur le Témoin 1122. Si ces gens-là qui étaient originaires

13 de ces régions qui ont des membres de leur famille là-bas, qui ont des

14 maisons là-bas, c'était des gens, des hommes de lettres, des personnalités

15 éminentes de la vie culturelle ou autre qui ont prit part des événements

16 culturels, ou appelez les comme vous voulez. Qu'est-ce que cela peut bien à

17 voir avec la Serbie ?

18 R. Monsieur Milosevic, je me souviens fort bien d'un meeting du Parti

19 démocratique serbe de Gacko où a pris la parole Budimir Kosutic. Il était

20 originaire de Gacko. C'était un proche du SPS. Donc, quelqu'un de très

21 proche de votre parti. Il a pris la parole. On a vu quels étaient le sujet

22 et l'objectif de son intervention. C'était apparent tout ce qu'il disait et

23 on voyait bien quelle était l'orientation qui était la sienne.

24 Q. Mais vous n'ignorez pas que Budimir Kosutic était professeur de la

25 faculté de droit ?

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1 R. Oui.

2 Q. Et vous avez indiqué que Budimir Kosutic était chef de mon cabinet ?

3 R. C'est ainsi qu'on l'avait présenté. Je crois qu'à la télévision, on a

4 souvent précisé qu'il avait cette qualité-là. Je parle là de la télévision

5 de Yougoslavie, de l'ex-état.

6 Q. Monsieur le Témoin 1122, ce n'est certainement pas en cette qualité-là

7 qu'il a pu se présenter. Il n'a jamais travaillé dans mon cabinet. Il a

8 encore moins été mon chef de cabinet et pendant toute cette période que

9 vous êtes en train de mentionner, il a été professeur à la faculté, et le

10 fait d'avoir été présenté à la télévision comme étant mon chef de cabinet,

11 c'est tout à fait erroné. Il n'a jamais pu se présenter comme tel.

12 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Toutes les fonctions de ce qu'a dit cet

13 homme à la télévision. Quant à savoir s'il disait la vérité ou pas, ça

14 c'est une autre chose.

15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais, Monsieur May, pouvez-vous imaginer un

16 professeur de l'université de la faculté de droit qui se présente à la

17 télévision, qui est connu par tant de gens et qui dirait que, "Je suis chef

18 de cabinet du président Milosevic." Mais c'est complètement dénué de sens,

19 vraiment.

20 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Les professeurs de droit peuvent dire pas

21 mal de choses. Vous le savez. Avançons.

22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je suis bien d'accord avec vous. Je suis bien

23 d'accord avec vous. Cela est d'une manière générale, quelque chose de

24 valable et de valide pour les juristes en tant que tel.

25 M. MILOSEVIC : [interprétation]

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1 Q. Mais Monsieur 1122, n'est-ce pas là une chose qui était tout aussi

2 valable pour les Serbes que pour les Musulmans ou les Croates, pour les

3 Macédoniens ou les Slovènes ? Donc, indépendamment de l'endroit où ils

4 résidaient, ils avaient une relation déterminée avec leur région natale.

5 Ils y allaient de temps à autre et pour y prendre part à des activités

6 quelconques. Ça n'avait rien de spécifique à Gacko.

7 R. Monsieur Milosevic, son allocution était empreinte de nationalisme.

8 Cela n'était pas approprié pour ce qui est d'une manifestation si l'on

9 tenait véritablement à préserver la paix. On a cherché à renforcer le

10 nationalisme.

11 Q. Ce discours de Budimir Kosutic, quand est-ce qu'il a eu lieu ?

12 R. C'était une manifestation. Je ne me souviens pas de la date exacte. Je

13 crois qu'il devait s'agir de l'automne 1991.

14 Q. Etait-ce là une manifestation culturelle ?

15 R. Non, une manifestation politique du Parti démocratique serbe.

16 Q. Donc, c'était une réunion du Parti démocratique serbe. Etait-il membre

17 de ce parti ?

18 R. Ecoutez. Cette manifestation du Parti démocratique serbe se tenait à

19 Gacko et à cette manifestation, il y a eu beaucoup d'intervenants. L'un de

20 ces intervenants a été Budimir Kosutic.

21 Q. Bien. Je ne dispose pas de ce discours de Kosutic. Je ne pense pas que

22 l'on doive débattre ici du discours qu'il a tenu, pas avec vous, du moins.

23 Mais étant donné qu'au point 10, vous dites que le premier grand meeting du

24 Parti démocratique serbe s'est tenu le 1er août 1990 au village de

25 Nadanici ?

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1 R. Nadanici.

2 Q. Oui. Je ne connais pas si bien ces localités. Donc, je me suis trompé

3 de nom. Cela a été organisé par l'église et ça s'est tenu devant l'église

4 et cela a eu lieu, notamment, à l'occasion d'une fête orthodoxe ?

5 R. Oui.

6 Q. Bon. Pouvez-vous nous fournir une explication pour ce qui est de savoir

7 la chose suivante : Si une fête religieuse est organisée par l'église ? Il

8 y a rassemblement de citoyens, de Serbes donc qui sont de confession

9 orthodoxe. Ils se sont rassemblés devant l'église orthodoxe à une fête

10 religieuse orthodoxe. Quoi de mal à cela ?

11 R. Voyez-vous, cette fête orthodoxe du 2 août.

12 Q. Oui, c'est St-Elijah.

13 R. Oui. Elijahdan, au St-Elijah.

14 Q. Tout le monde le sait.

15 R. A cette date-là, il y a eu chaque fois des événements, mais ce jour-là

16 et cette fête-là, il a été mis à profit pour créer une cellule du Parti

17 démocratique serbe. Je crois que la centrale du SDS avait envoyé là-bas

18 Velimir Ostojic.

19 Q. Velimir Ostojic était quelqu'un de venu depuis la centrale qui se

20 trouvait à Sarajevo ?

21 R. En effet.

22 Q. Donc, à la fête de St-Elijah, ils ont créé une branche du Parti

23 démocratique serbe pour Gacko. C'est cela ?

24 R. Oui.

25 Q. Bon. Est-ce que cela s'est fait après la création du SDA ?

Page 27773

1 R. Non, avant la création du SDA.

2 Q. Nous parlons de Gacko ?

3 R. Oui.

4 Q. Mais après la création de cellules du parti SDA tout au large de la

5 Bosnie-Herzégovine ?

6 R. Je sais qu'à Gacko, le SDA a été créé le 1er septembre.

7 Q. Il s'est créé après le Parti démocratique serbe. Mais pour ce qui est

8 de la Bosnie-Herzégovine, le SDA a été créé bien avant.

9 R. Oui. Mais le Parti démocratique serbe a été créé d'abord à Sarajevo

10 puis à Gacko.

11 Q. Mais en sus du SDA, il a été créé une alliance des jeunesses musulmanes

12 du Parti de l'action démocratique ?

13 R. Pas à Gacko.

14 Q. Vous n'avez pas eu cette alliance musulmane des jeunesses musulmanes ?

15 R. Non, Monsieur Milosevic. A Gacko, il y avait 3 800 musulmans seulement.

16 Notre objectif était de survivre, de sauver notre peau.

17 Q. Donc, vous ne savez rien nous dire au sujet de cette alliance musulmane

18 des jeunesses musulmanes ?

19 R. Non.

20 Q. Vous ne savez rien du tout ?

21 R. Rien du tout.

22 Q. Bon. Je ne vous poserai plus de questions à ce sujet. Pour ce qui est

23 des élections de 1990, en automne 1990, donc, date de ces élections, avez-

24 vous créé une coalition de quelque nation que ce soit ?

25 R. Non.

Page 27774

1 Q. Donc, vous vous êtes présenté de façon autonome ?

2 R. Il y avait trois partis politiques; le SDS, le SDA et le SDP. Ces trois

3 partis ont présentés des listes électorales.

4 Q. Il n'y avait pas de HDZ ?

5 R. Il n'y avait pas de Croates à Gacko du tout. Il n'y avait pas de

6 population croate.

7 Q. Et le SDP, c'est le Parti social démocrate ?

8 R. Oui. Oui.

9 Q. Dites-moi, je vous prie, quelle avait été la répartition des différents

10 postes après les élections dans votre municipalité ? Est-ce que cela était

11 fait suivant un modèle proportionnel, pour ce qui est des Serbes et des

12 Musulmans ? Je me réfère au point 8 que vous -- dont vous avez parlez. Vous

13 dites que les SDS avaient occupé toutes les positions d'influence, et que

14 personne du SDA ne pouvait intervenir de façon autonome. Mais, Safet

15 Skaljic, n'a-t-il pas été secrétaire chargé de la Défense nationale ?

16 R. Oui.

17 Q. Il était membre du SDA ?

18 R. Oui.

19 Q. Il était chargé de la Défense ?

20 R. Non. Le chef de la Défense territoriale était un Serbe. Lui, était

21 secrétaire. Donc, c'était un représentant du personnel administratif.

22 Q. Mais c'était le ministre de la Défense ?

23 R. Non, non. Dans une municipalité, la structure est tout à fait autre.

24 Q. Mais attendez. Le commandant de la police, n'était-il pas Elvedin

25 Zugur, un membre du SDA ?

Page 27775

1 R. Oui, sur le papier, mais il n'avait aucune influence.

2 Q. Comment le commandant de la police, le chef de la police, ne peut --

3 peut ne pas avoir d'influence, si le commandant est le commandant de la

4 police ?

5 R. Mais son adjoint est Popic, un Serbe.

6 Q. Mais attendez. Le commandant est Musulman, et son adjoint est Serbe ?

7 R. Oui. Cela est vrai, sur le papier.

8 Q. Je ne sais ce que vous voulez dire par en lisant sur le papier ?

9 R. Permettez-moi de vous expliquer. Le président de l'Assemblée municipale

10 était un Serbe. Le chef du gouvernement municipal était un Serbe. Le

11 responsable du MUP était un Serbe. Le commandant de la Défense territoriale

12 était un Serbe. Ce sont des positions clés, pour ce qui est des organes de

13 la municipalité. Le commandant de -- le chef du poste de police est

14 subordonné au chef du MUP. Donc, en réalité, il était là pour la forme. Les

15 directeurs d'entreprise, avant ces élections, il y a eu des Musulmans. Mais

16 il n'y en a plus eu après. Ce sont les Serbes qui ont pris toutes les

17 positions importantes. Il y avait, je crois un chef -- un directeur de

18 l'hôpital qui était Musulman, mais lui aussi a été révoqué. Ensuite, c'est

19 un technicien qui a pris son poste.

20 Q. Mais attendez. Ce Safet Skaljic, secrétaire chargé de la Défense, était

21 membre du SDA, et Elvedin Zugur, était lui aussi, membre de la SDA. Ce

22 n'est pas contesté ?

23 R. Ce n'est pas contesté, en effet.

24 Q. Pour ce qui est de la structure de la police, y a-t-il eu des policiers

25 musulmans, à peu près en même nombre ou en nombre équivalent à ce que

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1 constituait le groupe musulman, ou la population musulmane dans la

2 municipalité ?

3 R. Oui. Avant que l'on ait créé la SAO de l'Herzégovine, la région

4 autonome serbe de l'Herzégovine. Et c'est à ce moment-là, que les policiers

5 musulmans ont quitté ces structures policières.

6 Q. Donc, ils l'ont quitté ?

7 R. Oui, parce qu'ils n'avaient aucune fonction. Ils n'avaient pour rôle

8 que d'être figurants. Mais ils n'avaient aucune responsabilité.

9 Q. Vous dites au point 10, que lorsque les conflits en Croatie ont

10 commencé, les Serbes ont organisé, vous dites, un bataillon d'assaut. C'est

11 un nom qui avait été utilisé pendant la Deuxième guerre mondiale par une

12 unité de Chetnik ?

13 R. C'est exact.

14 Q. Serait-il juste de dire que des crimes perpétrés par les Serbes

15 pourraient être, ou devraient être comparés aux crimes perpétrés contre les

16 Serbes pendant la Deuxième guerre mondiale. C'est à côté de Gacko que se

17 trouve la fosse de Koritsca [phon] ?

18 R. Oui. Mais ça s'appelait Dizdarusa avant. Et en 1918, c'est là qu'a péri

19 un très grand nombre de Musulmans. Et ils étaient de Dizdaruvic. Cela

20 s'appelait pour cela, Dizdarusa. Il y a eu des crimes en 1941, en effet.

21 Q. Mais attendez. En 1941, n'a-t-on pas jeté dans cette fosse-là, des

22 Serbes ?

23 R. J'en ai entendu parler. J'ai lu des textes à ce sujet-là, mais je n'ai

24 pas -- je n'étais pas avec eux à l'époque.

25 Q. Mais vous n'étiez pas vivant en 1918, et vous mettez ça au premier

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1 plan.

2 R. Je voulais dire que c'était une région très sensible, une région

3 sismique, de ce point de vue-là. Il y a eu des crimes perpétrés, de part et

4 d'autres.

5 Q. Combien de femmes et d'enfants a-t-on jeté dans cette fosse de

6 Koritsca ?

7 R. Je ne sais pas. Je ne sais pas vraiment vous le dire.

8 Q. Bien. Vous dites que le SDA a convié les soldats et les officiers de

9 cette région à quitter la JNA. Et en même temps, l'on a empêché le

10 recrutement des conscrits de la JNA --

11 R. Où est-ce que j'ai dis cela ? Où est-ce que vous avez pu lire cela ?

12 Q. Je vais vous le retrouver.

13 Je m'excuse, il s'agit du paragraphe 9. Le dernier paragraphe, ou plutôt,

14 la dernière partie : "Nous avons recommandé aux membres de la SDA de ne pas

15 répondre aux appels à la mobilisation. Nous avons déclaré que la guerre en

16 Croatie et en Slovanie n'était pas une guerre à nous, et que nous nous

17 joindrions à ces efforts lorsque l'on s'attaquerait aux frontières de notre

18 municipalité. C'est la raison pour laquelle personne du côté musulman, n'a

19 pris part à la -- n'a répondu présent à l'appel à la mobilisation."

20 R. Ça, c'est exact. Avant la création d'une commission inter partite du

21 SDA et du SDS, le SDA a précisé qu'il ne voulait pas participer au conflit.

22 Que ce n'était pas notre conflit à nous. Nous ne voulions pas la guerre.

23 Nous voulions la paix. Et nous avons précisé que nous allions faire la

24 guerre à toute partie quelle qu'elle soit, si elle s'attaquait à notre

25 municipalité.

Page 27778

1 Q. Oui, mais comme vous le savez, la JNA était constituée des forces -- la

2 force armée de tous les peuples de Yougoslavie ?

3 R. Tout ceci s'est passé, je pense, après la reconnaissance internationale

4 de la Bosnie-Herzégovine.

5 Non, non. C'est exact. Ça s'est fait avant, en 1991. Donc, nous n'avons pas

6 répondu présents à la mobilisation.

7 Q. Mais ne savez-vous pas que la JNA s'était forcée d'empêcher les

8 conflits, et c'était là son rôle essentiel. Justement à l'époque, où vous

9 ne vouliez pas répondre aux appels à la mobilisation ?

10 R. Je ne crois pas que c'est ainsi que cela s'est passé.

11 Q. Bon. Ne savez-vous pas que le SDA a constamment délégitimé les forces

12 armées de la Yougoslavie, et que cela a été l'une des positions permanentes

13 que vous aviez prises à l'époque, à savoir qu'il fallait quitter la JNA,

14 qu'il ne fallait pas répondre aux appels à la mobilisation. Donc, il

15 fallait que les Musulmans, de toute façon ou de toute manière, boycottent

16 la JNA. Vous souvenez-vous du fait que le SDA avait proclamé la création de

17 son propre commandement militaire ?

18 R. Non, je ne suis pas au courant de la chose.

19 Q. Est-ce que le parti du SDA a proclamé que le QG de la Défense

20 territoriale, était proserbe, et que la JNA était une force d'occupation ?

21 R. Je crois que le commandant du QG de la Défense territoriale de Bosnie-

22 Herzégovine était un général, répondant au nom de Gosaluvic.

23 Q. C'était donc un Serbe ?

24 R. Oui. Ça, je le sais. Je sais que c'était le commandant de la Défense

25 territoriale à l'époque.

Page 27779

1 Q. Il a été ensuite révoqué. On a supprimé de la Défense TO, et on en a

2 créé un autre ?

3 R. Ecoutez, j'étais dans les montagnes. Je me cachais. Je ne sais pas ce

4 qui se passait à Sarajevo. Je ne suis pas au courant de ces détails.

5 J'étais dans les forêts de Zelengora, de Temnia, avec ces femmes et ces

6 enfants, en train d'essayer de sauver nos vies respectives. Donc, je

7 n'avais pas la possibilité de suivre de tout ce qui se passait à ce moment-

8 là.

9 Q. Bon. Si vous n'avez pas pu suivre, je ne vous poserai pas de questions,

10 ou davantage de questions à ce sujet. Il y aura probablement quelqu'un

11 d'autre qui pourra nous en dire plus long.

12 Vous avez dit que les armes de la Défense territoriale avaient été

13 entreposées dans votre région, et qu'en 1989, les instances de la

14 république ont décidé de transférer les armes de la TO de Gacko vers

15 Konjic ?

16 R. Ça s'est passé dans toutes les municipalités, et on a décentralisé les

17 entrepôts d'armes. Donc, on a transféré des armes de Gacko vers Konjic.

18 Q. Mais pour les garder en sécurité ?

19 R. Oui. Mais trois camions ont été mis de côté, et ce sont les armes qui

20 ont été distribuées aux Serbes de Gacko, et cela a servi à leur formation -

21 - à leur entraînement. On a pu entendre des tirs dans les collines autour

22 de Gacko.

23 Q. Bon, penchons-nous sur cette question-là. Vous parlez du 10 juillet

24 1991 et vous parlez du cas où une patrouille de la police de Gacko, une

25 patrouille qui aurait essayer d'arrêter un camion ?

Page 27780

1 R. Oui.

2 Q. Il s'agissait d'une patrouille constituée d'un Musulman et d'un Serbe ?

3 R. Oui.

4 Q. Ils ont arrêté ce camion à la sortie de la ville ?

5 R. Oui.

6 Q. Ils ont pris le chauffeur vers le poste de la police. Ils l'ont gardé

7 là-bas un jour ou deux et ensuite, le 12 juillet, il est arrivé 50 voitures

8 de Nevesinje jusqu'au poste de police, voitures pleines de gens, et ils ont

9 libéré ce chauffeur ?

10 R. Entre guillemets.

11 Q. Bien. Bien. Et ils ont ouvert le feu à l'arme automatique, je suppose

12 qu'ils ont tiré en l'air ?

13 R. Oui. Oui.

14 Q. Donc ils ont eu un comportement de sauvage.

15 R. C'est cela. C'est exact.

16 Q. Donc apparaît-il clairement ou pas ici qu'il s'agit d'une contrebande

17 locale d'armes ?

18 R. Ce n'est pas évident. Ce n'est pas de la contrebande locale, Monsieur

19 Milosevic. L'armée yougoslave a armé la population serbe. Il est vrai de

20 dire qu'il y a eu cette patrouille mixte avec Savo Stojanovic, mais, s'il

21 est l'un des Serbes, cela ne veut pas dire qu'il était de ces gens-là et

22 qu'il avait pris part à l'armement. Ce qui est vrai, c'est qu'ils ont

23 arrêté ce chauffeur et ils l'ont emmené à Gacko et que, le 12 juillet, je

24 crois que c'est encore une fête, un saint orthodoxe quelconque. Le 12

25 juillet, oui, ils sont venus donc de Nevesinje, une colonne de voitures

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1 devant le poste de police. Personne n'avait osé s'opposer à eux. Ils se

2 sont comportés en sauvage. Ils ont tiré en l'air et ils ont voulu que le

3 chauffeur soit libéré.

4 Q. Donc ce chauffeur était originaire de Nevesinje ?

5 R. Oui.

6 Q. Et les autres auteurs, c'étaient deux policiers un Serbe et un Musulman

7 qui n'ont rien à voir avec les événements, n'est-ce pas ?

8 R. C'est exact.

9 Q. Donc ce sont ceux de Nevesinje qui sont venus et qui se sont comportés

10 en sauvage, c'est bien ce que vous dites ?

11 R. Oui.

12 Q. Ça ce sont les auteurs de l'incident ?

13 R. Oui.

14 Q. Bon. Mais qu'est-ce que cela à avoir ? Nevesinje c'est une municipalité

15 voisine. C'était un contrebandier d'armes, les policiers étaient de là, les

16 gens étaient arrivés de Nevesinje pour se comporter en sauvage, mais

17 qu'est-ce que cela a à avoir avec la Serbie ou avec la JNA ?

18 R. Les armes ne sont pas produites à Nevesinje, elles ne sont pas

19 produites à Gacko non plus. Ce sont des armes qui sont produites dans des

20 usines de l'ex-Yougoslavie et qui avaient été placées sous le contrôle de

21 l'armée populaire yougoslave.

22 Q. Oui, sous contrôle de l'armée populaire yougoslave.

23 R. Vous pouvez aller au kiosque pour s'acheter des armes.

24 Q. Bien sûr que non. On ne pouvait pas le faire. Donc vous mettez cela

25 dans le contexte de l'intervention des paramilitaires et d'un armement

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1 illégal. Mais savez-vous que la 1ère Unité paramilitaire formé en Bosnie-

2 Herzégovine était précisément une formation de la SDA portant le nom de la

3 Ligue patriotique ?

4 R. Ça, pour être tout à fait sincère, je ne le sais pas. Je ne connais pas

5 ces détails. Je ne sais pas si cette Ligue patriotique était une formation

6 militaire, une unité ? Qu'est-ce que c'était exactement ?

7 Q. C'était une formation qui existait dans toute la Bosnie-Herzégovine.

8 R. Mais pas à Gacko.

9 Q. Pas à Gacko ?

10 R. Certainement pas.

11 Q. Vous souvenez-vous qu'il y a avait dix [sic] états majors régionaux et

12 103 états majors municipaux ?

13 R. Non. Ça je ne suis pas au courant. Ça se passait à un niveau supérieur.

14 Q. Savez-vous que dans le cadre de ces activités, 28 brigades ont été

15 constituées en août 1991 --

16 L'INTERPRÈTE : L'interprète demande à Monsieur Milosevic de ralentir.

17 M. MILOSEVIC : [interprétation]

18 Q. [aucune interprétation]

19 R. Ça je ne suis pas au courant, je pense qu'il s'agit uniquement de

20 propagande pure et simple.

21 Q. Fort bien.

22 M. LE JUGE MAY : [interprétation] On vous demande de ralentir votre débit,

23 Monsieur Milosevic. Ce sont les interprètes qui vous le demandent.

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien.

25 M. MILOSEVIC : [interprétation]

Page 27783

1 Q. Et bien, savez-vous que la direction de cette Ligue patriotique a été

2 confiée à d'anciens officiers de la JNA,

3 Sefer Halilovic, qui est devenu ensuite commandant principal de l'armée de

4 Bosnie-Herzégovine et puis le lieutenant-colonel

5 Meho Karisik --

6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Le témoin dit qu'il ne sait rien de cela.

7 Il en parle comme étant de la propagande, à savoir si ce fait est

8 réellement déterminé, il nous appartiendra d'en juger en temps utile.

9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien.

10 M. MILOSEVIC : [interprétation]

11 Q. Et bien, dites-moi, ces affrontements -- je parle de tous les

12 affrontements que vous avez évoqués -- ont-ils commencé à partir du 6 avril

13 1992, donc après ce qu'il est convenu d'appeler la reconnaissance

14 internationale de la Bosnie-Herzégovine, à partir de ce référendum tronquer

15 qui a eu lieu ? Ceci est-il exact ?

16 R. Et bien, voyez-vous, avant cela, les Musulmans, qui vivaient dans ma

17 municipalité ont subi de mauvais traitements. Deux jeunes gens sont morts

18 en mars, si je me souviens bien, Boskovic et Grebovic. Dans Gacko, un

19 certain nombre d'habitants ont été frappés. Les commerces des Musulmans ont

20 été plastiqués, bombardés -- les cafés appartenant aux Musulmans notamment.

21 Donc, à l'époque, nous subissions des mauvais traitements graves et nous

22 n'étions pas au courant de ce qui ce passait plus loin.

23 Q. Puisque vous ne savez rien de ce qui ce passait en dehors de votre

24 municipalité, êtes-vous au moins au courant de la directive émanant de ce

25 qu'il est convenu d'appeler les Bérets verts et de toutes les unités

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1 militaires musulmanes qui prescrivaient de s'attaquer aux casernes et aux

2 soldats de la JNA ?

3 R. A Gacko cela n'a pas eu lieu. Il n'y a rien eu de cela à Gacko.

4 Q. Mais vous savez que la présidence de la Yougoslavie a décidé le 4 mai

5 que la JNA devait se retirer du territoire de Bosnie-Herzégovine ?

6 R. De quelle présidence parlez-vous ? Je ne comprends pas très bien ?

7 Q. Je parle de la présidence de la RSFY.

8 R. Je suis au courant de cela. Mais est-ce que cette décision a été

9 exécutée, c'est une autre question. Je ne crois pas qu'elle ait été

10 largement exécutée.

11 Q. Mais pensez-vous aujourd'hui que le retrait de la JNA du territoire de

12 Bosnie-Herzégovine a été une bonne chose alors que toutes ces formations

13 paramilitaires se comportaient comme des sauvages dans toute la Bosnie-

14 Herzégovine ?

15 R. Savez-vous -- voyez-vous, tous ces hommes faisaient partie de la JNA.

16 Les Aigles blancs faisaient partie de la JNA et toutes les autres

17 formations paramilitaires dépendaient de la JNA. C'est la JNA

18 qui les armait. En tout cas, dans notre région, c'est ce que j'ai vu, c'est

19 ce que j'ai vécu.

20 Q. Mais les unités de la JNA -- le HVO et tout ce qui était présent là-bas

21 dépendaient également de la JNA ?

22 R. Il n'y avait pas d'unités de ce genre sur notre territoire -- dans

23 notre région, donc je ne peux pas en parler.

24 Q. Je ne vais pas vous interroger au sujet de réalité que vous ne

25 connaissez pas. Mais un instant, s'il vous plaît.

Page 27785

1 Au paragraphe 17, vous dites que : "Ce que vous appelez ce bataillon

2 d'assaut s'est armé d'armes automatiques, qu'il a vécu des manœuvres

3 militaires, que les soldats n'étaient pas en uniforme à ce moment-là. En

4 mars 1991, une Unité spéciale de la police a été envoyée à Bileca pour

5 apaiser la situation, alors que les armes étaient saisies, lorsque cette

6 Unité de la police a voulu retourner à Sarajevo, les Serbes du bataillon

7 d'assaut et d'autres unités paramilitaires conduites par Obren Govedarica,

8 chef des Aigles blancs en Herzégovine --" Et je m'arrête ici dans ma

9 lecture.

10 Cet homme, dont je viens de citer le nom, à partir de votre déclaration,

11 était-il originaire d'Herzégovine ?

12 R. Oui.

13 Q. Cette Unité des Aigles blancs, dont vous avez parlé, était-elle

14 également originaire d'Herzégovine ?

15 R. Je parlais d'un Bataillon d'assaut à ce niveau-là.

16 Q. Moi je vous parle des Aigles blancs. Vous avez dit, au début de votre

17 interrogatoire ici, qu'il y avait des Aigles blancs, ces Aigles blancs

18 étaient-ils originaires d'Herzégovine ?

19 R. Voyez-vous, leur commandant était un certain Ljubo et une chanson a été

20 écrite au sujet de l'héroïsme, dont il a fait preuve, héroïsme manifesté en

21 tuant des civils désarmés durant l'attaque sur Kula, qui était un village

22 musulman. Ce Ljubo a été tué, le capitaine Ljubo qui était à cet endroit,

23 et un poème a été écrit au sujet de son héroïsme dans lequel il était

24 question de sa naissance à Valjevo. Ce sont les paroles de la chanson qui

25 le disaient, elle a été publiée en 1992. C'est une chanson qui a été créée

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1 spécialement à ce moment-là ?

2 Q. Govedarica, le commandant des Aigles blancs en Herzégovinem, était

3 originaire d'Herzégovine, ainsi que les membres de son unité.

4 R. Ce que je voulais dire, c'est que Govedarica n'était pas un commandant

5 militaire. Il était là en tant que président du conseil régional,

6 représentant l'Herzégovine, et très normalement, en tant que commandant

7 civil, il a exercé une certaine influence sur les Aigles blancs. Et puis il

8 y avait un autre commandant, un certain Moljevic ou Mocevic, je ne sais

9 plus exactement.

10 Q. Mais, écoutez, dans votre déclaration, vous dites que Govedarica était

11 dirigeant des Aigles blancs en Herzégovine, et puis ensuite vous ajoutez

12 que le commandant de l'Unité spéciale de la police, s'appelait Vikic.

13 R. Oui.

14 Q. C'était également un Serbe, n'est-ce pas ?

15 R. Je l'ai dit, dans ma déclaration préalable, qu'il s'agit d'un certain

16 Dragan Vikic qui était dirigeant d'une Unité spéciale du MUP de la

17 république, donc je ne parle pas du MUP de Gacko, mais du MUP au niveau de

18 la république.

19 Q. Mais ce Dragan Vikic était sans doute un Serbe ?

20 R. Non, il n'était pas nécessairement Serbe, je ne sais pas exactement ce

21 qu'il était. Dragan Vikic était un commandant bien connu, chargé de la

22 défense de Sarajevo. Il vit toujours à Sarajevo et c'est une personne très

23 connue. Je ne suis pas au courant.

24 Q. Mais je vous cite ce que vous avez dit. Je cite : "Je pense que, dans

25 cette affaire, cette Unité spéciale de la police a fait quelque chose qui

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1 était contraire aux desiderata des Serbes. Dans l'embuscade, ils auraient

2 pu être tués."

3 R. Oui.

4 Q. Donc ils n'ont pas été effectivement tirés, mais vous pensez qu'ils

5 auraient pu tirer si la partie adverse avait agi dans le même sens ?

6 R. Oui. Pourquoi est-ce qu'ils se seraient rassemblés autrement pour

7 dresser cette embuscade.

8 Q. Mais est-ce qu'il y a eu une embuscade ?

9 R. Et bien, ils n'ont pas tiré, Monsieur Milosevic --

10 Q. Parlez-moi -- dites-moi simplement s'ils ont tiré ou pas.

11 R. Et bien, les choses se sont passées ainsi, Monsieur Milosevic. Cet

12 homme répondant au nom d'Obren Govedarica est arrivé dans la municipalité

13 portant un uniforme militaire. Il s'est rendu dans le bureau du président.

14 C'est là que je -- qu'il a été vu. Notre représentant était présent et,

15 lorsque Obren est arrivé et que tout le monde s'est assis, tout le monde

16 connaissait les interlocuteurs présents. Et vous savez de quoi il était

17 question à l'époque. Il s'agissait de la capture d'armes provenant de

18 l'armée yougoslave, à partir -- par le MUP de la république par apaiser la

19 situation, et je pense que vous savez qu'ils ont fait toute sorte de choses

20 pour sauver leur peau à Bileca.

21 Q. De qui parlez-vous ?

22 R. Je parle des forces spéciales du MUP de la république -- de la

23 république. Ces hommes s'en sont sortis. Il y a eu une embuscade alors que

24 rien ne se passait à Bileca, et aucun coup de feu n'a été tiré, mais tout

25 était coordonné, bien sûr, et ces gens simplement n'ont pas été obligés de

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1 tirer.

2 Q. Mais comment pouvez-vous dire que je suis au courant, mais est-ce que

3 je pourrais être au courant de ce qui s'est passé dans une république

4 différente à Gacko ? Qu'est-ce que la Serbe avait à faire avec ce genre de

5 trafic ?

6 R. Je vois que vous disposez de nombreux renseignements.

7 Q. J'ai reçu des renseignements, mais je ne sais rien de Gacko, pour être

8 très sincère.

9 R. Fort bien, mais ceci est la vérité.

10 Q. Et puis vous ajoutez que ce jour-là : "J'étais assis dans ma --" --

11 vous dites : "J'étais assis dans le café de la Lazetic, et à partir des

12 réponses de Govedarica." Après les événements, dont vous avez parlés, vous

13 dites qu'il portait un uniforme de la JNA, donc de l'armée régulière sans

14 aucun insigne particulier, que rien n'indiquait qu'il était armé et prêt à

15 agir. Donc les Aigles blancs, dont vous parlez, étaient dirigés par Obren

16 Govedarica, et c'était un groupe de volontaires de la région qui ont pris

17 des insignes des Aigles blancs, et ne souhaitaient pas porter les insignes

18 de la JNA.

19 R. Il est dit dans ce texte que : "Le bataillon d'assaut serbe et d'autres

20 unités paramilitaires existaient, en particulier, les Aigles blancs." C'est

21 ce qui est écrit.

22 Q. Donc tous ces hommes étaient en fait issus de la population locale,

23 n'est-ce pas ?

24 R. Les choses se sont passées ainsi. Dans l'Unité des Aigles blancs, il y

25 avait quelques habitants de la région en effet, mais le commandant était à

Page 27789

1 l'époque cet homme répondant au prénom de Ljubo.

2 Q. Vous parlez du Ljubo qui a été tué ?

3 R. Oui.

4 Q. Et il a bien été tué en 1991, n'est-ce pas ?

5 R. Il a été tué durant l'attaque sur un village musulman le 17 juin 1992,

6 ou plutôt juillet -- je voulais dire juillet.

7 Q. Fort bien.

8 R. Donc il est absolument certain qu'il faisait partie des Aigles blancs.

9 Ces hommes étaient de Serbie et j'ai même passé quelques temps avec ce

10 Ljubo et d'autres représentants. Il y avait un homme qui exerçait des

11 fonctions politiques, et on parlait beaucoup de tous ces hommes. A ce

12 moment-là, ce Ljubo leur a parlé et a dit qu'il était commandant des Aigles

13 blancs, et qu'il avait des anciens combattants sous ses ordres. Et je

14 répète, ils s'agissaient d'anciens combattants des champs de bataille de

15 Vukovar, entre autres, les hommes de cette unité.

16 Q. Qui les a organisés ?

17 R. Et bien, ils étaient organisés par le SDS. C'est le mécanisme qui s'est

18 mis en place à l'époque.

19 Q. Fort bien, vous parlez d'incidents qui ont eu lieu entre le SDA et SDS,

20 donc entre les Serbes et les Musulmans de votre région ?

21 R. Oui, mais où est-ce que ceci est écrit ?

22 Q. Ceci figure au paragraphe 22, alors il y avait-il eu un ordre destiné à

23 réduire les tensions et est-ce pour cela que la JNA est allée à Gacko ?

24 R. Je ne vous suis pas. Est-ce que vous parlez des Musulmans ou des Serbes

25 du SDS ?

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1 Q. Je parle des Musulmans et des Serbes, et des tensions qui existaient à

2 l'époque.

3 R. Oui, je vois.

4 Q. Ma question est la suivante : tout cela a-t-il été causé par les

5 tensions existant à l'époque ? Est-ce pour cela que la JNA est arrivée à

6 Gacko ?

7 R. La JNA est arrivée à Gacko parce qu'elle s'était retirée de Croatie et,

8 avant d'attaquer la caserne de Bileca bien connu, le Corps de l'Herzégovine

9 et d'autres Unités du corps d'Uzice se sont

10 déplacés vers Mostar. Et je ne pense pas que je puisse dire que ces hommes

11 étaient arrivés pour calmer la situation puisqu'ils avaient des taches très

12 différences à accomplir.

13 Q. Fort bien, mais, à ce moment-là, l'armée existait déjà, n'est-ce pas ?

14 R. Je crois en effet.

15 Q. J'espère que vous ne contestez pas que cette armée était composée de

16 soldats et d'officiers qui étaient soit natifs de la région, soit avaient

17 résidé dans la région avant la guerre. Je parle des membres de l'armée de

18 la Republika Srpska ?

19 R. L'armée de la Republika Srpska, et bien, nous avions quitté Gacko à ce

20 moment-là, mais je sais qu'il y a des gens de la région de la Republika

21 Srpska et de la zone frontalière avec la Serbie également qui sont

22 intervenus, ainsi que des habitants du Montenegro.

23 Q. Fort bien, mais expliquez-moi ce qui suit. Vous avez parlé un moment de

24 quelqu'un qui s'est fait tuer en mars 1992. Vous avez dit -- mars 1992,

25 vous avez dit qu'à ce moment-là, les Aigles blancs ont tué un certain Zoran

Page 27791

1 Grebovic, qui était marié avec une femme d'une autre appartenance ethnique

2 que la sienne, c'est bien cela ?

3 R. Oui, mais dites-moi, dans quel paragraphe cela se trouve ?

4 Q. Je pense que c'est au paragraphe 23, où vous dites que vous êtes au

5 courant de cela.

6 Vous dites que : "Le 2 mars 1992, des Unités paramilitaires de la Serbie

7 avaient un poste de contrôle dans la direction de Foca, qu'ils ont attaqué

8 deux Musulmans qui venaient de Foca, qu'ils les ont emmenés dans leur

9 voiture jusqu'à la montagne Cemerno et les ont tués."

10 R. Oui.

11 Q. Et les noms en question étaient les noms de Zoran Grebovic, qui était

12 marié avec une femme d'une autre appartenance que le sienne et l'autre

13 homme était un certain Amir, sans doute, Poskovic de nom de famille, un

14 Musulman.

15 R. Oui.

16 Q. Et, ensuite, vous parlez de certains qui se sont fait tués.

17 R. Oui.

18 Q. Et vous parlez de Vukovic, originaire de Gacko. Les cadavres ont été

19 découverts par un policier et puis vous ajoutez tout le reste, n'est-ce pas

20 ?

21 R. Oui.

22 Q. Par conséquent, tout cela a eu lieu entre les Serbes de la région et

23 les Musulmans de la région, n'est-ce pas ?

24 R. Cet événement particulier, oui. Mais il s'agit d'un événement bien

25 particulier.

Page 27792

1 Q. Est-ce que ceci a quoi ce que ce soit à voir avec la Serbie ?

2 R. Bien sûr, parce que c'était organisé en Serbie. Ces hommes étaient

3 arrivés pour s'organiser. Ljubo était venu pour les organiser. Et je sais

4 qu'un jour --

5 Q. Mais n'avons nous pas établi, il y a un instant, que cet événement

6 n'avait rien à voir avec d'autres personnes que des Serbes ou des Musulmans

7 de la région ?

8 R. En effet. Nous pouvons admettre cela pour cet incident particulier.

9 Q. Fort bien. Mais avançons. Vous avez dit, il y a un instant, que l'armée

10 se retirant de Croatie, avait donc quitté la région ?

11 R. Oui, entre autres.

12 Q. Mais où est-ce que l'armée aurait pu aller à partir de la Croatie ?

13 Elle devait bien passer par la Bosnie pour aller en Serbie ou au

14 Monténégro. Comment est-ce que l'armée aurait pu autrement quitter la

15 Slovénie et la Croatie parce que tout cela était le territoire sur lequel

16 elle agissait, le territoire de l'état dont relevait cette armée.

17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous n'avez pas à répondre à cette

18 question. Monsieur Milosevic, veuillez procéder.

19 M. MILOSEVIC : [interprétation]

20 Q. Fort bien. Donc, la tuerie dont nous avons parlé, il y a un instant,

21 ceci a été établi, est un incident qui a impliqué exclusivement les gens de

22 leurs régions et qui a créé un grand émoi à Gacko.

23 R. Oui.

24 Q. Ce qui est tout à fait compréhensible, n'est-ce pas ?

25 R. Oui, absolument.

Page 27793

1 Q. Et puis vous avez parlé d'une réunion ou plutôt d'un meeting important

2 qui a eu lieu après ces assassinats parce que les gens étaient émus,

3 étaient troublés. Et vous avez parlé de général Perisic qui a participé à

4 ce meeting.

5 R. Non. Perisic n'a pas participé au meeting.

6 Q. Mais le meeting s'est tenu en raison de l'incident en question.

7 R. Non, pas à cause de cela parce que le meeting a eu lieu en mars et, le

8 2 avril, Perisic a participé à une réunion, effectivement, donc il n'y a

9 pas de lien entre les deux événements.

10 Q. Mais la situation générale était cohérente ?

11 R. En effet. Pas la réunion en tant que telle, mais la situation était

12 marquée par ces événements.

13 Q. Et à quelle réunion a participé Perisic ?

14 R. Ce n'était pas une réunion d'un parti.

15 Q. Avez-vous assisté, vous-même, à cette réunion ? Est-ce que vous étiez

16 présent ?

17 R. Et bien, je n'aimerais pas répondre à cette question.

18 Q. Fort bien. Vous n'êtes pas obligé.

19 R. Cette réunion s'est tenue à la frontière, présidée par le président du

20 SAO d'Herzégovine et les représentants des municipalités serbes de la

21 région depuis la vieille Herzégovine et plus loin étaient présents ainsi

22 que quelques représentants des Musulmans de Gacko. Je pense que cette

23 réunion a été présidée par le premier ministre du gouvernement de la région

24 autonome serbe de l'Herzégovine de l'époque. Un certain Milan Bojovic, et à

25 cette réunion, le commandant de l'armée yougoslave a participé également,

Page 27794

1 pour autant que je le sache, et j'ajoute que le SAO d'Herzégovine n'a

2 jamais été une entité légale constitutionnelle en Bosnie-Herzégovine.

3 Q. C'est une réunion à laquelle Perisic a assisté, a-t-il dit qu'il

4 commandait l'armée yougoslave ce jour-là ?

5 R. Oui.

6 Q. Cette armée était composée de ressortissants de tous les groupes

7 ethniques, n'est-ce pas ?

8 R. C'est l'histoire qu'on racontait, mais ne correspondait pas à la

9 vérité. Cela n'était pas vrai.

10 Q. Comment est-ce que vous pouvez dire que cela n'était pas vrai. L'armée

11 yougoslave, n'était-elle pas composée de représentants de tous les groupes

12 ethniques, de toutes les nations ?

13 R. Ça c'était avant, mais pas à ce moment-là.

14 Q. Mais cet homme a donc souligné qu'il demeurerait le commandant jusqu'à

15 ce que les trois groupes ethniques fussent représentés au sein de l'armée

16 yougoslave, n'est-ce pas ?

17 R. Oui. C'est ce qu'il a dit.

18 Q. Il a souligné cela. Il a souligné que l'armée yougoslave était l'armée

19 de toutes les nations, de tous les groupes ethniques du pays ?

20 R. Oui. C'est ce qu'il a dit.

21 Q. A-t-il également dit qu'il interdisait l'existence des formations

22 paramilitaires et leurs activités dans sa zone de responsabilités ?

23 R. C'est ce qu'il a dit, mais il n'a rien interdit de ce genre.

24 Q. Savez-vous combien d'efforts ont été déployés par la JNA pour que les

25 paramilitaires soient contrôlés par la JNA ?

Page 27795

1 R. Et bien, non. Dans la région où j'habitais, la JNA a apporté un appui

2 logistique aux paramilitaires.

3 Q. Fort bien. Mais savez-vous que Radovan Karadzic a réagi par rapport aux

4 opérations menées par les paramilitaires à Gacko ?

5 R. Je ne suis pas au courant de cela. J'aimerais voir un document qui le

6 stipule.

7 Q. Je vous soumettrai un ordre écrit dont je dispose ici.

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, ce texte est traduit en anglais.

9 Il date du 3 juillet 1992. C'est la date qu'on voit sur le texte.

10 M. MILOSEVIC : [interprétation]

11 Q. La présidence de la République serbe de Bosnie-Herzégovine lors d'une

12 réunion tenue le 3 juillet, a proclamé un ordre diligentant une enquête au

13 sujet des activités des groupes paramilitaires dans la région comprenant

14 les municipalités de Gacko et de Nevesinje, c'est-à-dire, dans votre

15 municipalité ainsi que la municipalité voisine. Et le ministre de

16 l'Intérieur de la République serbe de Bosnie-Herzégovine est chargé de

17 mener une enquête au sujet des actions des groupes paramilitaires dans ces

18 municipalités de Gacko et de Nevesinje. Suite à cet enquête, le ministre

19 était censé rendre un rapport volumineux évoquant les faits établis par le

20 ministère dans la région des deux municipalités mentionnées et tout cela

21 sous la direction du président de la présidence, le Docteur Radovan

22 Karadzic, qui est signataire du texte, et vous pouvez y jeter un coup d'œil

23 à ce texte.

24 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Fort bien. J'aimerais que l'on remette

25 l'original de ce texte en B/C/S au témoin. Quant à nous, nous disposons de

Page 27796

1 la traduction.

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne suis pas au courant de l'existence de ce

3 document, ni de son contenu, mais manifestement ce document existe et il a

4 un seul objectif -- en tout cas, c'est mon avis -- et cet objectif consiste

5 à lancer le nettoyage ethnique à Gacko, qui d'ailleurs, a eu lieu très

6 rapidement après la publication de ce document, Monsieur Milosevic. Je ne

7 pense pas que M. Karadzic a considéré que les Unités serbes étaient des

8 formations paramilitaires, mais c'est la population civile musulmane qui

9 est mentionnée ici, une population désarmée qui avait les mains vides et

10 dans ce document, ce sont ces habitants désarmés qui sont considérés comme

11 des formations paramilitaires. Et c'est cela qui est traité dans le texte

12 qui annonce les événements à suivre. En effet, ceci a laissé tout le temps

13 nécessaire à la préparation du nettoyage ethnique de Gacko qui a commencé

14 le 17 juillet de cette même année, à savoir, 1992.

15 M. MILOSEVIC : [interprétation]

16 Q. Fort bien, Monsieur 1122. Vraiment, j'ai entendu toute sorte de choses

17 ici, mais je vous demande si à la lecture de ce document qui stipule que

18 les actions des formations paramilitaires doivent être établies dans les

19 municipalités de Gacko et Nevesinje, je vous demande donc de dire très

20 précisément que ces formations paramilitaires -- et c'est une réalité --

21 sont bien mentionnées dans le texte et pas les habitants civils musulmans.

22 C'est un fait qui est manifeste à la lecture d'un certain nombre

23 d'instructions et qui n'ont rien à voir avec le nettoyage ethnique. Est-ce

24 que c'étaient bien les bases sur lesquelles tout cela s'est passé ? Vous

25 pouvez lire le texte depuis le début. Je vous ai donné lecture de deux

Page 27797

1 passages intéressants.

2 R. Fort bien. Cet ordre est très clair. Je vois bien ce qui est écrit dans

3 ce texte, mais je pense qu'en fait, il avait un objectif très différent de

4 celui qui est écrit ici parce que je ne pense pas que la JNA aurait pu

5 apporter un appui logistique à ces groupes et un appui général si ces

6 hommes relevaient des forces armées régulières. Mais il fallait bien que

7 l'ennemi soit visé clairement et l'ennemi c'était, en tout état de cause,

8 les Musulmans.

9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Un instant. Une objection est proposée

10 par M. Groome.

11 M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, je conteste la

12 possibilité pour ce témoin de répondre au sujet de cet ordre écrit. L'ordre

13 parle d'un rapport volumineux. Je demanderais à ce que ce rapport soit

14 passé sous les yeux du témoin s'il est disponible de façon à lui permettre

15 de répondre en toute connaissance de cause.

16 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Le témoin peut répondre. Il a prononcé

17 des commentaires à ce sujet. Monsieur Milosevic, votre temps arrive à

18 expiration. Il vous reste deux minutes.

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien. J'aurais voulu vous demander un

20 certain temps supplémentaire -- un peu de temps supplémentaire car je ne

21 parviendrai pas à terminer mon contre-interrogatoire de ce témoin en deux

22 minutes.

23 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Fort bien.

24 [La Chambre de première instance se concerte]

25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Et bien, nous allons faire la pause

Page 27798

1 maintenant. Ensuite nous vous accorderons dix minutes pour terminer votre

2 contre-interrogatoire.

3 Souhaitez-vous verser au dossier ce document, Monsieur Milosevic ?

4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.

5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Fort bien. Je demande la cote suivante.

6 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agira de la

7 pièce à conviction de la Défense 202.

8 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Suspension.

9 Monsieur le Témoin, B-1122, vous avez entendu que le contre-interrogatoire

10 allait durer une dizaine de minutes supplémentaires après la pause, et il y

11 aura encore d'autres petites questions. Je vous demanderais de ne parler à

12 personne pendant la pause du contenu de votre déposition. Vous ne pouvez en

13 parler à personne jusqu'à ce quelle soit terminée en fait.

14 --- L'audience est suspendue à 10 heures 29.

15 --- L'audience est reprise à 10 heures 52.

16 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Milosevic, poursuivez.

17 M. MILOSEVIC : [interprétation]

18 Q. Monsieur 1122, je vous demanderais de répondre brièvement parce que je

19 n'ai que très peu de temps à ma disposition.

20 Serait-il exact de dire que le général Perisic, à l'occasion de la réunion

21 en question, a accepté la proposition que vous avez faite, à savoir, de

22 procéder à la mise en place de patrouilles conjointes avec un Serbe, un

23 Musulman et un soldat de la JNA, ensemble, pour protéger tout le monde ?

24 R. Oui.

25 Q. Pour éliminer les unités paramilitaires de cette municipalité. Vous

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1 avez même fait une déclaration dans ce sens.

2 R. Oui.

3 Q. Serait-il exact de dire que plusieurs centaines de Serbes s'étaient

4 rassemblés devant le poste de police et que c'est pratiquement la JNA qui

5 vous avait sauvé à ce moment-là ?

6 R. Monsieur Milosevic, Perisic avait promis la chose, mais n'a pas réalisé

7 ce qu'il a promis.

8 Q. Je ne vous entends pas très bien.

9 R. Le commandant, le général Perisic, avait promis de le faire pour ce qui

10 est de ces patrouilles conjointes, mais cela n'a pas été fait du tout. Ça

11 été des histoires en l'air pour ce qui est des arrestations dont vous avez

12 parlé. Il s'agit du 1er juin, donc il est exact de dire que, devant

13 l'administration de la police, pendant que les uns et les autres étaient en

14 train de négocier, il y avait plusieurs centaines de gens. Ce n'était pas

15 des paramilitaires, c'étaient des réservistes. Ils avaient tiré en l'air.

16 Ils avaient fêté cela à l'arme à feu et les négociateurs musulmans se

17 trouvaient, de ce fait-là, sous une grande pression.

18 Q. Et l'armée vous a sauvé à ce moment-là ?

19 R. Mais il n'y avait pas d'armée à ce moment-là.

20 Q. Mais il ne s'est rien passé ?

21 R. Il a commencé à y avoir des arrestations et les arrestations se sont

22 poursuivies.

23 Q. Dites-moi, le 16 avril 1992, n'avez-vous pas adressé un message au nom

24 de la population musulmane de Gacko à l'intention du QG, de la TO de la

25 Bosnie-Herzégovine, où vous avez dit que : "La population musulmane de la

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1 Bosnie-Herzégovine, depuis la création de la TO de la Bosnie-Herzégovine, a

2 été placée sous le commandement de cette institution-là." Et vous dites :

3 "Nous vous prions de compter sur notre pleine contribution pour ce qui est

4 de la réalisation des missions que vous nous aurez confiées."

5 R. Je ne suis pas au courant de ce que vous êtes en train de dire.

6 Q. Ce n'est pas exact ?

7 R. Je ne suis pas au courant du document. Je ne dis pas que ce n'est pas

8 exact. Je ne suis pas au courant du tout.

9 Q. Bien. Serait-il exact de dire qu'en mai 1992, après cela, il y a eu un

10 sabotage au niveau de la centrale thermo électrique ?

11 R. Non.

12 Q. D'après l'enquête, cela a été fait par Zijad Mehic qui a détruit une

13 ligne industrielle.

14 R. Je ne suis pas au courant. Je sais qu'il y a eu endommagement d'une

15 ligne, mais ce n'était pas un sabotage.

16 Q. Mais ce Mehic, s'est-il enfui vers Fazlagica Kula au-dessus de Gacko ?

17 R. Il ne s'est pas enfui là-bas, il était résident là-bas. Il vivant dans

18 Kljuic.

19 Q. Mais la tentative des forces de l'ordre, pour ce qui était de

20 l'appréhender, s'était soldée par des coups de feu sur les représentants de

21 l'ordre ?

22 R. Ce n'est pas exact. Ce n'était pas d'abord des représentants de l'ordre

23 -- je crois que le 1e juin, une patrouille, ou plutôt, une vingtaine

24 d'hommes armés s'étaient dirigés vers le village en question. C'était la

25 première fois ils étaient là-bas, pour soi-disant, l'arrêter. C'est là que

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1 les arrestations ont commencé. Mais il n'est pas vrai de dire que c'est lui

2 qu'on voulait arrêter. Et il n'est pas vrai de dire qu'on leur avait tiré

3 dessus. Ce n'est pas exact.

4 Q. Bon. Est-il exact de dire qu'entre-temps, la population musulmane

5 s'était retirée vers Fazlagica Kula et l'autre municipalité de Borac ?

6 R. Oui, Borac. Et une partie des Musulmans était restée dans la ville de

7 Gacko même. En tout état de cause, les intellectuels qui avaient pensé que

8 rien n'allaient leur arriver, qu'ils n'avaient été fautifs de rien. Donc,

9 ici, c'est un récit à part. On en n'a pas parlé. Ils ont été ramassés par

10 la suite avec les membres de leur famille. On les séparé de leur famille à

11 la sortie de Gacko. Et ils ont été arrêtés, alors que les membres de leur

12 famille ont fait l'objet de violences de toute sorte.

13 Q. Est-il exact de dire pour ce qui est de la période au sujet de laquelle

14 vous êtes en train de témoigner, que vous aviez quelque 1 500 hommes dans

15 vos formations à vous ?

16 R. Nous n'avions ni formation armée, ni formation non armée. Nous n'en

17 avions pas du tout. Nous vivions d'une vie tout à fait inhabituelle. Nous

18 n'étions pas organisés. Nous étions dans des forêts, mais ce n'était pas

19 organisé.

20 Q. Vous n'étiez pas organisé, dites-vous. Vous n'étiez pas armés, dites-

21 vous. Et moi, j'ai des renseignements disant que vous étiez 1 500 à être

22 armés. Qui est-ce qui a procédé à cette attaque terroriste sur le village

23 de Zaborani dans la municipalité de Nevesinje, en date du 28 juin, à la

24 fête du Vidovdan ?

25 R. Cela ne tient pas debout. Ce n'est pas vrai. Pour ce qui est de la

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1 municipalité de Gacko, j'en entends parler pour la première fois. Et ça, je

2 l'affirme en toute responsabilité.

3 Q. Vous souvenez-vous de l'assassinat de six Serbes à ce moment-là ? Et il

4 y avait parmi eux, Milan Milovic [phon], un vieillard de 90 ans, et Asanka

5 Milovic [phon], son épouse ?

6 R. De quel village, parlez-vous ?

7 Q. Zaborani.

8 R. Près de Nevesinje ?

9 Q. Oui.

10 R. Je n'en ai aucune idée. Ce n'est pas ma municipalité. J'entends pour la

11 première fois, parler de la chose.

12 Q. Mais c'est une municipalité voisine de la votre, n'est-ce pas ?

13 R. Oui.

14 Q. Et il n'y a pas eu de combattants à l'époque ?

15 R. Non.

16 Q. Il n'y a pas eu de combat entre les effectifs serbes et les effectifs

17 musulmans en face de Fazlagica Kula ?

18 R. Il n'y a pas eu de combat. Les Musulmans, une fois attaqués, une fois

19 le village attaqué, ont été plusieurs à avoir un peu d'armes de chasse,

20 mais très peu d'armes de chasse. Je ne sais pas, je ne pense pas que

21 quelqu'un ait disposé d'armes militaires. Il y en a quelques uns qui ont

22 riposté. Mais cela était si insignifiant que l'on ne pourrait pas parler de

23 riposte. Les familles ont fui vers Bjelasnica, vers la montagne de

24 Bjelasnica.

25 Q. Mais dites-moi alors, que savez-vous nous dire au sujet de la création

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1 de ce bataillon de Gacko, en Bosnie-Herzégovine ?

2 R. Je n'en sais rien du tout.

3 Q. Vous parlez du bataillon de Gatacki.

4 R. Je m'excuse, ça, c'est sur le territoire de Mostar que ça s'est créé,

5 lorsque nous avons été chassés de Gacko vers Mostar.

6 Q. Mais attendez. Ce bataillon de Gacko [sic], n'a-t-il pas été créé en

7 date du 3 novembre 1992, et n'a-t-il pas fait partie de la Brigade de

8 Mostar ?

9 R. Je ne sais pas, et je ne suis pas au courant de ces renseignements. Je

10 sais qu'il y a eu un bataillon de Gacko [sic] à un moment donné, mais rien

11 d'autre.

12 Q. Quand ce bataillon de Gacko [sic] a-t-il été formé ?

13 R. Il a été créé à Mostar une fois que nous sommes arrivés là-bas,

14 expulsés de Gacko. Et c'est là qu'il a été formé. Mais je ne sais pas vous

15 dire la date.

16 Q. Vous voulez dire qu'il n'y a pas eu de formations musulmanes armées sur

17 le territoire de Gacko pour la période au sujet de laquelle vous êtes venu

18 témoigné ici ?

19 R. Oui. C'est exact.

20 Q. Mais est-il exact de dire que ce bataillon autonome des Musulmans de

21 Gacko s'appelait Sargan ?

22 R. Ça, c'est exact.

23 Q. Donc, il est d'abord ici appelé Sargan et ensuite, il a fait partie de

24 la Brigade de Mostar, suite à une décision du commandement Suprême de

25 l'armée de la Bosnie-Herzégovine. Quand est-ce qu'il s'est créé sous

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1 l'appellation de Sargan ?

2 R. Je vous l'ai dit. Une fois arrivée à Mostar, sur le territoire libre.

3 Q. Mais il s'appelait Sargan, avant que d'arriver à Mostar --avant qu'il

4 ne soit arrivé à Mostar ?

5 R. Non. Il n'existait pas du tout.

6 Q. Bon. Est-il exact de dire que les conflits dans votre région étaient

7 des conflits entre les unités serbes de la région et des unités musulmanes

8 de cette région ?

9 R. Il n'y a pas eu de conflit ni d'affrontement. Il y a eu expulsion. La

10 partie musulmane elle, n'avait avec quoi se battre. Elle ne voulait

11 d'affrontement. Elle a fui pour sauver sa peau. C'était une petite

12 communauté. Il y avait 3 800 civils en tout et pour tout. Donc, tout

13 confondu, femmes, enfants, vieillards et le reste.

14 Q. Au point 39, vous indiquez que vous avez laissé les femmes et les

15 enfants dans les villages musulmans, et que les hommes ont essayé d'opérer

16 une percée. Comment ont-ils essayé de faire une percée s'ils n'avaient pas

17 d'armes ?

18 R. Je ne suis pas un militaire. Alors, pour ce qui est de ce terme de

19 "procéder à une percée", c'est exact. Mais je ne sais pas si cela avait une

20 connotation militaire. Ils se sont dirigés vers la municipalité de

21 Kalinovik. Ils se sont -- ils ont cherché refuge dans la municipalité de

22 Kalinovik, et nous avons traversé la montagne de Zelengora.

23 Q. Bon. Qui est-ce qui a organisé le départ des Musulmans, un grand nombre

24 de Musulmans de Gacko ?

25 R. C'était auto organisé. Tout le monde avait fui pour se sauver.

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1 Q. Mais attendez. Y a-t-il eu des problèmes ? D'après les renseignements

2 dont je dispose, il y a eu des scènes émouvantes. Les voisins pleuraient.

3 Les Serbes et les Musulmans pleuraient les uns et les autres, lorsque les

4 Musulmans s'en allaient.

5 R. Attendez. Ce n'était pas si théâtral que cela. Il y a eu des exemples

6 très positifs. Il y a eu des cas où les Serbes ont sauvé certaines

7 familles, des amis à eux. C'était très positif. Il y a eu des cas de ce

8 genre.

9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Milosevic, votre temps est

10 expiré. Il vous reste le temps de poser une dernière question.

11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien.

12 M. MILOSEVIC : [interprétation]

13 Q. Y a-t-il eu beaucoup d'exemples de bonne relation entre les Serbes et

14 les Musulmans, à Gacko; exemple où les Musulmans n'ont pas été contraints à

15 quitter Gacko ?

16 R. Non, Monsieur Milosevic. Ils ont été contraints à quitter Gacko. Gacko,

17 d'après le nombre des victimes, occupe le sommet des statistiques. Ils ont

18 été 5 % à -- il y a 5 % de la population qui ont été tuée ou blessée. Mais

19 il y a eu des exemples positifs, en effet.

20 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Maître Kay, vous avez la parole.

21 Questions de l'Amicus Curiae, M. Kay :

22 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin, je vais reprendre un aspect

23 soulevé un instant par M. Milosevic. Vous étiez un membre important du SDA

24 dans votre région. En tant que tel, est-ce que vous avez aidé à

25 l'organisation des Musulmans ? Est-ce que vous les avez aidés à quitter ce

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1 territoire ?

2 R. Pour être tout à fait sincère, je n'étais un membre aussi éminent que

3 cela de ce parti, tel que vous semblez l'affirmer. Et c'était une débandade

4 générale parmi la population qui ne cherchait qu'à sauver sa peau. Cela n'a

5 pas été organisé.

6 Q. Une décision avait été prise auparavant par le SDA qui consistait à ne

7 pas répondre à l'appel à la mobilisation, pour ce qui est de la JNA, au

8 cours de la guerre en Slovénie. Par rapport avec ceci, est-ce que c'est une

9 décision prise au niveau politique par votre parti ?

10 R. Et bien, voyez-vous, pendant ces conflits et lorsque les attaques sur

11 la Slovénie et la Croatie ont commencé, cette soi-disant armée populaire

12 yougoslave qui était devenue mono ethnique ou presque, n'avait pas -- il

13 n'y avait pas de concertation entre les parties le SDA et le SDS. Et nous

14 avions au départ convenu de ne pas prendre partie à cette guerre, mais que

15 nous allions nous défendre lorsque notre municipalité serait elle attaquée.

16 C'est de cela qu'il s'agit. Je crois que le SDS doit disposer de ces

17 documents de ce genre. Nos représentants n'ont pas pu emporter ces

18 documents. Ils ont fui pour sauver leur vie.

19 Q. Par conséquent, il y a eu un appel à mobilisation adressé à tous les

20 citoyens, cependant les citoyens membres de votre parti du SDA n'ont pas

21 répondu à cette convocation, est-ce exact ?

22 R. Voyez-vous, c'était un appel à la mobilisation des effectifs de réserve

23 du bataillon de Gacko [sic]. Je ne sais pas si c'était un bataillon ou un

24 brigade. Sur le territoire de Gacko avant la guerre, il y avait une

25 organisation de ce type. C'était une unité de réserve. Il s'agissait

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1 d'exercices de manœuvres de cette unité. Je crois qu'un ou deux Bosniens

2 ont répondu présent à l'époque mais je ne pense pas que le parti ait dit à

3 quiconque d'y aller ou de ne pas y aller. Chacun avait donc la liberté de

4 décision pour ce qui était d'y aller ou pas.

5 Q. Cependant au paragraphe 9 de votre déclaration au préalable, il est dit

6 ceci : "Nous avons discuté de l'appel à la mobilisation de cette façon-là

7 et nous avons fait -- présenté une recommandation à savoir que le SDA ne

8 devait pas répondre à cette appel à mobilisation."

9 Il semblerait donc que sur le plan politique que vous disiez à vos

10 adhérents, à ceux qui vous soutenaient, qu'il était possible d'éviter cette

11 convocation. Au paragraphe 10, vous déclarez ceci : "Il y a eu d'autres

12 appels à la mobilisation, cependant nous avons réussi à ne pas répondre à

13 ces appels."

14 La question se pose donc : De savoir si votre parti, vous étiez membre de

15 ce parti, si votre parti n'a pas créé des conditions permettant aux vôtres

16 de ne pas s'impliquer, de ne pas aider à la JNA, vous créiez se faisant des

17 conditions dont vous vous êtes plaint par la suite ?

18 R. Et bien, dans ce paragraphe 9, on dit bien : "Au mois de mai ou juin

19 1991, avant que ne commence la guerre en Slovénie, le SDS a organisé une

20 première mobilisation des réservistes. Le SDS et le SDA avaient des

21 commissions distinctes des partis respectifs, puis ces commissions se sont

22 rencontrées pour prendre une décision conjointe." Cette décision a fini par

23 être prise. Et aux termes de celle-ci, les Musulmans n'allaient pas

24 participer à cette guerre. C'était donc ce qui avait été convenu entre le

25 SDS et le SDA. Par la suite tout se fondait sur le document en question.

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1 Q. Mais comment comprenez-vous ce qui est dit au

2 paragraphe 10, à savoir que : "D'autres appels à la mobilisation ont été

3 délivrés mais que nous avions, dites-vous, réussi à les éviter."

4 Ceci donne l'impression qu'au niveau national, on vous demandait de vous

5 engager, vous et les membres de votre parti, cependant vous, vous aviez

6 essayé d'éviter de vous engager au service de la JNA.

7 R. Vous allez constater, partant du document, que j'ai mentionné que

8 personne n'avait envie d'aller faire la guerre, donc si l'on pouvait

9 remettre la chose ou la rejeter et je dirais que l'armée yougoslave à ce

10 moment-là était mono ethnique.

11 Q. Nous allons uniquement revenir sur les réunions politiques qui eurent

12 lieu à l'époque. Aux paragraphes 5 et 6 de votre déclaration au préalable,

13 vous faites mention de réunions du SDS, mais serait-il tout aussi vrai de

14 dire que votre parti, le SDA, a tenu des meetings ou rassemblements

15 populaires au niveau local ?

16 R. Le parti du SDA a été créé en date du 1er septembre pour ce qui est de

17 Gacko. Donc dans la ville même, ou plutôt sur un pré, nous ne sommes pas

18 allés dans les églises, ni dans des mosquées. Nos efforts, nos tendances

19 visaient à des objectifs uniquement démocratiques. Nous avons donc œuvré

20 dans ce sens. Nous ne nous cachions pas du tout derrière des établissements

21 religieux ou autres quels qu'ils soient.

22 Q. Vous répondez donc à la question par l'affirmatif : Effectivement votre

23 parti le SDA a lui aussi organisé des meetings.

24 R. Oui. Il y a eu des rassemblements de création. Mais nous n'avons pas

25 organisé de manifestations. Nous avons procédé à des organisations

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1 internes, à la tenue de réunions, à la création de comités, et en public,

2 nous n'avons tenu qu'une assemblée constituante.

3 Q. Donc les réunions organisées par votre parti ou ces meetings, seuls les

4 membres du SDA pouvaient participer ?

5 R. Non. Tout ceux qui souhaitaient participer pouvaient prendre part à la

6 chose.

7 M. KAY : [interprétation] Je vous remercie. Je n'ai pas d'autres questions

8 à vous poser.

9 M. GROOME : [interprétation] Pas de questions supplémentaires, Monsieur le

10 Président.

11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur le Témoin B-1122, ceci met fin à

12 votre déposition. Je vous remercie. Nous vous remercions d'être venu

13 témoigner auprès du Tribunal pénal international. Vous pouvez maintenant

14 vous retirer, mais attendez pour ce faire que les stores soient baissés.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

16 [Le témoin se retire]

17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, Monsieur Nice.

18 M. NICE : [interprétation] Nous sommes à huis clos pour le moment --

19 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes en audience publique.

20 M. NICE : [interprétation] Excusez-moi. Pourrions-nous passer rapidement à

21 huis clos partiel pour que j'évoque deux questions.

22 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

23 [Audience à huis clos partiel]

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24 [Audience publique]

25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Nice, vous avez la parole.

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1 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, on avait accordé le

2 pseudonyme C-028 au témoin qui va maintenant déposer en audience publique.

3 Vous disposez d'un résumé de sa déposition. Il a été recueilli au moment où

4 ce témoin se trouvait à La Haye, mais n'a pas pu comparaître étant donné

5 que l'accusé était indisposé. L'accusé l'a reçu la semaine dernière, ou il

6 y a deux semaines plus exactement, une copie de ce résumé en anglais, et

7 une en B/C/S. Le témoin de retour depuis hier a signé la version en B/C/S,

8 et sous réserve d'une seule correction, indique que son contenu était

9 exact. Je vous avais dit que nous avions une requête concernant tous les

10 témoins, je la répète pour ce témoin-ci. Vous disposez de tous les

11 documents depuis hier. Vous déterminerez s'il suffira s'agissant de

12 l'interrogatoire principal de tenir compte du résumé.

13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous avons cette requête, voici un

14 premier cas. Nous n'avons pas eu l'occasion d'examiner de façon détaillée

15 ce document. Est-ce qu'il y a dans ce document une partie qui attrait à

16 l'accusé ?

17 M. NICE : [interprétation] Il y en a plusieurs, pour ne pas dire beaucoup.

18 Je peux vous parler des paragraphes, vous donnez un numéro de paragraphe où

19 il en est question. Paragraphe 2, 6, 10, 11, 12, 13, 14, puis il y a un

20 passage assez long qui commence au paragraphe 16, et qui va jusqu'au

21 paragraphe 22. En fait, jusqu'au paragraphe 25. On parle là du soutien

22 apporté et le nom de l'accusé est mentionné expressément en paragraphe 18,

23 20, 21, 22, 23, et 25. Pour ce qui est de cet élément de preuve-là, si vous

24 estimez que c'est là une bonne démarche à suivre, nous pourrions résumer

25 les événements sans que soit fait référence à l'accusé à partir du résumé,

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1 mais on pourrait demander à ce témoin les détails qu'elle connaît

2 s'agissant du comportement de l'accusé.

3 On reparle de l'accusé aux paragraphes 26, et 27. Je tourne la page, le

4 reste du paragraphe 29, paragraphe 33, 34 et 35, 38, 41, 42. L'accusé est

5 une fois de plus mentionné au paragraphe 48.

6 M. KAY : [interprétation] 50 et 51.

7 M. NICE : [interprétation] Effectivement, ainsi qu'au 53. Je remercie mon

8 confrère, Maître Kay.

9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, à

10 quelle date l'accusé a-t-il reçu ce document ? Est-ce que ceci était

11 confirmé par l'accusé et les amis de la Chambre ?

12 M. NICE : [interprétation] Les amis de la Chambre et l'accusé ont reçu ceci

13 il y a deux semaines. Les deux versions étaient signifiées, anglais et

14 B/C/S. La version en anglais a été fournie il y a deux semaines, et je n'ai

15 pas de date précise, ou plus précise. La version B/C/S a été envoyée il y a

16 une semaine et demie.

17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Et là, je vois qu'il est fait mention

18 d'un livre.

19 M. NICE : [interprétation] Je ne demanderai que le témoin produise le livre

20 au dossier en le mentionnant, ce qui a comme aspect significatif s'agissant

21 de ce livre, c'est que tout ce qu'elle dit se retrouve dans ce livre,

22 document qu'il est possible de contester de façon publique, mais qui, en

23 plus, a été adopté par le ministre Simovic dont il est longuement question

24 dans son témoignage. Vous avez plusieurs pièces qu'il signe et ce qui

25 montre qu'il a vérifié l'exactitude de ce qu'elle avait consigné dans cet

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1 ouvrage.

2 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je m'inquiète d'un principe qui

3 permettrait admission au dossier de ce livre. Je ne suis pas satisfait du

4 fait qu'il y aurait comme ça toute une masse d'informations qui serait

5 versée au dossier. En mon nom personnel, je refuserais que ceci soit versé

6 au dossier s'il n'y a quelque partie significative au cours de la

7 déposition de ce témoin qu'elle voudrait évoquer, peut-être, ces passages

8 seront-ils déclarés recevables. Mais vous avez ici un livre écrit par

9 quelqu'un, d'ailleurs ? Il n'est quand même pas logique de déclarer ceci

10 recevable.

11 M. NICE : [interprétation] En fait, c'est elle qui a écrit ce livre.

12 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, je me trompe là. Fort bien. Si c'est

13 elle qui l'a écrit, bien sûr, la situation est différente, mais, une fois

14 de plus, il faut nous assurer que ce sont uniquement les parties

15 pertinentes qui sont versées au dossier.

16 M. NICE : [interprétation] Je ne suis pas en désaccord avec vous, mais

17 pourriez-nous refaire le point à la fin du contre-interrogatoire car, dans

18 une telle situation, si vous avez un témoin qui dépose à partir de choses

19 contenues dans un livre et si le livre n'est pas contesté, le livre n'aura

20 pas beaucoup d'importance. Il ne va pas être ajouté à la déposition du

21 témoin. Mais prenons ceci au cas par cas parce qu'il se peut qu'il y ait

22 d'autres témoins qui produisent des livres. Il serait peut-être logique de

23 travailler de cette façon.

24 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui. Ça me semble marquer du coin du bon

25 sens. Nous verrons le traitement réservé à ce livre à la fin de la

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1 déposition de ce témoin pour voir quelles seraient les parties de ce livre

2 qu'il faudrait verser au dossier.

3 Est-ce que nous allons déclarer ce résumé recevable en application du

4 89(F) ? Moi, je pense personnellement que là où il est question de

5 l'accusé. Il faudrait que tout ceci soit présenté au cours des débats.

6 Aussi pour d'autres questions d'ailleurs, je pense que pour toutes les

7 questions qui sont importantes pour les Juges et pour l'accusé afin qu'il

8 comprenne l'importance que revêtent ces documents.

9 Oui, Maître Tapuskovic, vous avez la parole.

10 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je voudrais quand

11 même vous prévenir d'une chose, à savoir que, suivant les dires de cette

12 dame, il n'est pas contesté qu'elle ait travaillé sur ce livre, mais ce

13 livre a été rédigé pratiquement dans sa totalité par M. Simovic. Elle le

14 dit elle-même à un endroit, donc jamais elle n'a affirmé l'avoir rédigé

15 toute seule. Il semblerait que son texte, à chaque fois, était remanié par

16 M. Simovic. Et je voudrais que vous ne perdiez pas de vue ce fait-là dans

17 la suite de l'affaire.

18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vous remercie. Nous allons conférer

19 sur le siège.

20 [La Chambre de première instance se concerte]

21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous faisons droit à la requête en

22 application du 89(F), sous réserve des paragraphes ou de tout élément de

23 preuve relatif à l'accusé qui doivent être présentés de viva voce.

24 Monsieur Nice, je vous remercie. Faisons entrer le témoin.

25 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

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1 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vais demander au témoin de prononcer

2 la déclaration solennelle.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

4 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

6 LE TÉMOIN: DOBRILA GAJIC-GLISIC [Assermenté]

7 [Le témoin répond par l'interprète]

8 Interrogatoire principal par M. Nice :

9 Q. [interprétation] Madame, veuillez décliner votre identité.

10 R. Je m'appelle Dobrila Gajic-Glisic.

11 Q. Avez-vous fourni une déclaration au préalable à des représentants du

12 bureau du Procureur ? Et, au moment où vous vous êtes retrouvée ici à

13 La Haye, est-ce qu'un résumé de votre déposition a été rédigé, un résumé de

14 11 pages en anglais et en B/C/S ? Avez-vous eu l'occasion d'étudier ce

15 document de façon détaillée, notamment, hier ?

16 R. Oui.

17 Q. Avez-vous vérifié -- contrôlé l'exactitude de la version en B/C/S et

18 avez-vous signé ce document hier montrant ainsi que c'était le récit

19 fidèle, bien que sommaire, de vos dires ?

20 R. Oui.

21 M. NICE : [interprétation] Je vais demander une cote pour ce document qui

22 sera versé au dossier.

23 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Pièce 567.

24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous avons reçu la version signée ?

25 M. NICE : [interprétation] Vous devriez en disposer, Messieurs les Juges.

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1 M. NICE : [interprétation]

2 Q. Madame Gajic-Glisic, --

3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, Monsieur Nice.

4 M. NICE : [interprétation]

5 Q. Madame le Témoin, la Chambre de première instance a décidé d'accepter

6 le résumé signé, comme étant votre interrogatoire principal, pour autant

7 que vous parliez ici au cours de débat de tout ce qui est en rapport avec

8 l'accusé en personne. Mes questions vont donc se concentrer sur ce que vous

9 êtes susceptible de dire à propos de sujets particuliers en rapport avec

10 l'accusé. Me comprenez-vous ?

11 R. Oui.

12 Q. Il faut remettre ceci dans son contexte puisqu'il s'agit, en fait, d'un

13 interrogatoire principal abrégé. Est-il vrai de dire que, suite aux

14 expériences que vous mentionnez dans votre résumé, vous avez rédigé un

15 ouvrage relatif à ces événements, notamment ?

16 R. Oui. J'ai rédigé un livre intitulé, "L'armée serbe", qui a été publié

17 pour une première fois en 1992, dans le courant du mois d'août. Avant cela,

18 j'ai également publié un grand feuilleton en dix parties qui a été publié

19 par un hebdomadaire qui s'appelle "Nin", quant à lui.

20 Q. Ce livre ne sera pas pour le moment versé au dossier. Les Juges ne vont

21 pas l'emmener, mais l'accusé, les amis de la Chambre disposent de cet

22 ouvrage en tant qu'ouvrage de références. Est-ce que le contenu de cet

23 ouvrage a été contrôlé par Simovic, dont vous allez parler en temps utile ?

24 R. Ce livre-là et les notes émanent du cabinet du ministre de l'Armée, qui

25 ont été rédigées suite aux ordres émanant du général Simovic. Une fois

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1 achevée cette période de travail-là, le général Simovic a procédé à des

2 vérifications concernant l'exactitude du manuscrit de toutes pages dont je

3 dispose un original sur moi. Il a, par la suite, également procédé à des

4 vérifications du texte imprimé une fois que le livre portant sur l'armée

5 serbe a été publié et cela a été fait par les bons soins du cabinet du

6 ministre de l'Armée.

7 Q. Vous dites "vérifier", est-ce que c'est vérifié ou contrôlé pour

8 déterminer l'exactitude du contenu ou bien est-ce qu'il a apporté votre

9 attention sur des erreurs ou des éléments qui, à son avis, devraient être

10 modifiés ?

11 R. L'un et l'autre. Il n'y a pas eu beaucoup d'erreurs, d'ailleurs.

12 Certaines petites corrections ont été apportées et au cas où la Chambre

13 souhaiterait le voir, je dispose de ce texte sur moi. Je l'ai ici.

14 Q. Je vous remercie. Nous ne le ferons que ceci s'avère nécessaire.

15 Nous allons suivre la chronologie des événements. Paragraphe 2, ce sera

16 très bref. Etant donné que les Juges disposent du résumé en tant qu'élément

17 de preuve, est-ce que vous avez rencontré des difficultés sur votre lieu de

18 travail en mai 1989 et plus tard ? Et est-ce que, de ce fait, vous êtes

19 allée à Belgrade avec un certain Moma Brkic et est-ce que cet homme vous a

20 emmené voir l'accusé ?

21 R. Oui. J'ai eu certains problèmes en raison de mes écrits et en raison de

22 mes opinions également, du fait des accords que j'ai eus avec les gens du

23 milieu de travail qui était le mien.

24 Q. Je vais vous interrompre car les Juges disposent déjà de ces éléments.

25 Vous avez été voir l'accusé. Vous avez été emmené voir l'accusé. Dites-moi

Page 27820

1 ceci tout simplement. A qui vous a-t-il conseillé de vous adresser ?

2 R. M. Moma Brkic, mon rédacteur en chef du journal, Komunist, dont j'étais

3 le correspondant, m'a emmené -- m'a conduit jusqu'au bureau et m'a conduit

4 directement au bureau du président, le camarade Slobodan Milosevic. Le

5 camarade Milosevic a convié Kertes et Kertes, lui, a appelé Radmilo

6 Bogdanovic. Grâce à l'aide que m'a apporté le camarade Slobodan Milosevic à

7 ce moment-là, j'ai traversé bon nombre de difficultés. Et de nos jours

8 encore, j'estime que je suis vivante grâce à M. Slobodan Milosevic. Et ceci

9 est une bonne opportunité pour moi de le remercier.

10 Q. Fort bien. Passons maintenant au paragraphe 5 du résumé. Vous n'avez

11 pas le résumé sous les yeux. Vous pourriez en disposer, si vous voulez, un

12 exemplaire, mais aidez-nous à partir des souvenirs que vous avez.

13 Vous êtes devenue le chef de cabinet du ministre Tomislav Simovic ?

14 R. Oui.

15 Q. Il vous a dit de consigner tous les événements qui survenaient, donc là

16 nous sommes au dernier trimestre de 1991, n'est-ce pas ? Dites-nous, en

17 l'espace d'une seule phrase, s'il vous plaît, Madame le Témoin, ce qu'il

18 vous a dit. Pourquoi vous a-t-il dit qu'il fallait consigner ces

19 événements ?

20 R. Puis-je répondre en plus d'une phrase ?

21 Q. Soyez le plus bref possible.

22 R. Je suis venu chez M. Tomislav Simovic en pensant qu'il s'agissait là du

23 général Jokic pour me plaindre des problèmes que j'avais connus à Cacak --

24 Q. Je dois vous interrompre, Madame, car les Juges disposent déjà de ces

25 éléments. Ils connaissent tout l'historique. Ils peuvent le lire. Je vous

Page 27821

1 demande simplement de nous expliquer le plus succinctement possible

2 pourquoi Tomislav Simovic ou pourquoi, d'après lui, il vous fallait

3 consigner les événements qui étaient en train de se produire ?

4 R. Général Simovic a dit qu'il n'était pas d'accord avec la politique

5 conduite par le président de la Serbie, M. Slobodan Milosevic parce que les

6 gens nés en Serbie étaient mobilisés, étaient conviés à des exercices, des

7 entraînements militaires puis étaient envoyés dans des régions où il y

8 avait une guerre qui battait son plein et il n'y avait pas de lois de la

9 guerre régissant le conflit. En sa qualité de général et en sa qualité

10 d'homme tout simplement, il ne pouvait pas le supporter. Il n'était pas

11 d'accord. Il voulait que soient respectées toutes les mesures de sécurité

12 et toutes les précautions possibles. Il fallait d'abord proclamer un état

13 de danger de guerre éminent, puis un état d'alerte et seulement ensuite,

14 envoyer des gens à la boucherie.

15 Vous voulez que je sois plus longue ?

16 Q. Non. Ceci suffira, Madame. A la fin du paragraphe 5, vous donnez des

17 observations qui sont en rapport avec l'accusé. Les Juges pourront le lire.

18 Et puis vous dites aussi que les événements, qui se produisaient alors en

19 Yougoslavie, allaient être quelque chose pour lequel le monde entier allait

20 nous poursuivre. C'est ce qu'il a dit, n'est-ce pas ?

21 R. Oui. Oui. Je voudrais poursuivre quelques éclaircissements, quand même.

22 M. Simovic --

23 Q. Je suis désolé Madame. Je suis vraiment navré, mais écoutez-moi. Il se

24 peut que ces questions se posent au moment du contre-interrogatoire. Nous,

25 nous devons poursuivre et passer au paragraphe 6.

Page 27822

1 Simovic, il avait été nommé ministre de la Défense en Serbie, et c'est lui

2 qui vous l'a dit du fait de vos fonctions dans son bureau que vous avez

3 appris qui l'avait nommé à ce poste. Dites-le nous : qui l'avait nommé

4 ministre M. Simovic et pourquoi avait-il été nommé à ce poste ?

5 R. Le général Simovic était commandant de la région du district militaire

6 de Skopje. D'après ce qu'il m'a dit à moi, il avait été convié par le

7 général Kadijevic en Serbie pour des entretiens urgents. Il a dit qu'il

8 devait s'entretenir avec le président Milosevic pour ce qui est d'une

9 nomination au poste de ministre de la Défense de Serbie. Le général Simovic

10 a repris d'urgence ces fonctions des mains du général Jokic et, d'après la

11 réglementation en vigueur, le ministre est nommé par le président du

12 gouvernement de Serbie, à savoir, le premier ministre, M. Zelenovic, et

13 cela est entériné par le parlement. Le général Simovic est officiellement

14 nommé ministre de la Défense de Serbie, le 26 septembre, à l'occasion d'une

15 session du parlement de la Serbie.

16 Q. Est-ce que l'accusé lui aurait dit qu'elle devait être sa fonction

17 principale ? Qu'est-ce que l'accusé lui aurait dit du caractère public

18 qu'aurait sa fonction ou pas ?

19 R. Le général Simovic m'a dit que sa tâche première et sa tâche principale

20 était d'œuvrer sur un projet de loi pour ce qui est des forces armées de

21 Serbie. La constitution de Serbie venait d'être adoptée quelques mois

22 auparavant. Et en vertu de cette constitution, toutes les lois connexes

23 devaient être adoptées avant le 31 décembre 1991. D'après ce que le général

24 Simovic m'a dit, la loi régissant les forces armées de Serbie devait être

25 faite vite dans le secret également. L'axe majeur de ces forces serbes

Page 27823

1 devait être constitué par des volontaires et les volontaires devaient être

2 révoqués avec l'armée populaire yougoslave pour se muer en une armée serbe.

3 M. NICE : [interprétation] Nous devrons produire plusieurs pièces,

4 plusieurs documents par votre truchement. Je vais demander une cote. Je

5 sais et nous savons que l'élément principal devrait être finalement retiré.

6 Mais est-ce qu'il est possible d'avoir une cote pour le classeur de

7 documents ?

8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agira de la

9 pièce 568.

10 M. NICE : [interprétation]

11 Q. Examinons, très rapidement, l'intercalaire premier. Il y a des parties

12 surlignées, destinées à aider les juges. Nous voyons à cet intercalaire 1

13 de la pièce 568, un article de presse. Il y a trois passages surlignés. Le

14 premier est le suivant, émanant de votre ministère : "La JNA en tant que --

15 " c'est la première page -- "La JNA qui est le fondement de nos forces

16 armées a engagé les unités de la Défense territoriale également et a

17 jusqu'à présent pour fonction de protéger la population des régions

18 frontières serbes par ses activités de combats."

19 Deuxième page ou plus exactement la deuxième colonne, dans l'article dans

20 le journal, mais deuxième page en version anglaise : "Il est clair que par

21 la transformation de nos forces armées actuelles, la JNA, avant tout, est

22 dans le contexte de l'issu de la crise de Yougoslave est une réponse à ce

23 qu'on appelle les forces armées de la république de Serbie."

24 Puis le troisième passage surligné se trouve à la page 3, le voici :

25 "Difficile de déterminer avec exactitude," ceci n'apparaît pas par

Page 27824

1 affichage électronique, c'est à la page 3 vers le milieu de la page : "Il

2 est difficile de déterminer avec précision le nombre exact de volontaires

3 pour le moment puisqu'il y a plusieurs façons de se porter volontaires et

4 plusieurs façons d'affecter ces volontaires. Cependant, ce qui est certain

5 c'est qu'il constitue le cadre pour le moment des forces déployées en même

6 temps que les conscrits et les soldats qui font leur service militaire dans

7 la JNA."

8 Répondez par un simple oui ou par un simple non, Madame. Cet article de

9 presse qui reprend un entretien donné par votre ministre, est-ce qu'il

10 reflète bien les fonctions qui lui avaient été données et pour lesquelles

11 il avait été engagé ?

12 R. Cette interview, à mon avis, a été fait avec M. Ivica Dacic qui a été

13 envoyé directement vers notre cabinet, du cabinet du président Milosevic et

14 ce sont là des phrases qui sont sorties du contexte général. Je crois que

15 dans l'esprit de notre langue, il faudrait quand même prendre en

16 considération les paragraphes entiers si ce n'est pas le texte entier. Mais

17 je répondrai à votre question par l'affirmative.

18 Q. Bien sûr. Je vous remercie, Madame. Paragraphe 10 au résumé. Vous aviez

19 veillé à ce que votre ministre donne un communiqué de presse, est-ce que

20 là-dessus votre ministre a dû aller voir l'accusé et dites-nous ce que vous

21 avez appris à propos de cette réunion qu'il a eue avec l'accusé ?

22 R. Pourriez-vous poser votre question de façon plus claire ?

23 Q. Bien entendu. Je crois que vous avez persuadé le ministre Simovic de la

24 nécessité de donner un communiqué de presse. Après que celui-ci a été

25 publié, est-ce que M. Simovic est allé voir l'accusé et avez-vous appris ce

Page 27825

1 que l'accusé a dit à M. Simovic ?

2 R. Est-ce que vous êtes en train de parler de l'information portant sur le

3 projet de lois afférent aux forces armées de Serbie ? Si c'est cette

4 information là --

5 Q. Oui.

6 R. Alors j'ai estimé que tout ce qui n'avait pas été publié, tout ce qui

7 ne serait pas noté un jour risquait de passer comme si cela ne s'était pas

8 passé du tout. Donc j'ai voulu à ce qu'une information soit rédigée pour ce

9 qui est de la création ou la mise en œuvre d'un projet portant sur les

10 forces armées de Serbie. Le ministre Simovic est allé voir le président

11 Milosevic aux fins de lui présenter un rapport à ce sujet et lui dire

12 pourquoi cette information était parvenue aux médias.

13 Pour autant que je m'en souvienne, le président Milosevic avait estimé que

14 cette information avait été publiée par Budimir Kosutic qui était vice-

15 président du gouvernement, parce que c'est surtout lui qui prenait la

16 parole pour ce qui est des médias d'une manière générale. Et M. Simovic,

17 quant à lui, m'a dit : "Nous avons placé Buda, Budimir, dans une situation

18 désagréable, le président Milosevic a ensuite reproché des choses à Budimir

19 alors qu'il n'en était pas fautif du tout." En fait, c'était moi la

20 responsable.

21 Q. Est-ce que l'accusé a dit que lui privilégiait la publicité et qu'il

22 devrait y avoir plus de communiqués de presse, s'agissant de vos

23 activités ?

24 R. D'après ce que le ministre m'a dit, l'accusé ou plutôt le président

25 Milosevic aurait dit qu'il fallait œuvrer à la chose dans le secret et

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1 qu'il ne fallait plus communiquer de détails aux médias pour ce qui est de

2 cette loi relative aux forces armées de la Serbie. C'est ce qui a été dit.

3 Q. Dans le compte rendu d'audience, on parle de Buda Kosutic à un certain

4 endroit, mais n'avez-vous pas parler d'un certain "Budimir" ?

5 R. C'est Budimir Kosutic, oui. Il était vice-premier ministre de Serbie.

6 Je crois qu'il était professeur à l'université, et à l'époque, c'était une

7 personnalité des plus éminentes.

8 Q. Paragraphe 12, 11 plutôt. Le 12 décembre 1991, est-ce que normalement

9 il devait y avoir au sein du gouvernement de Serbie un débat sur l'adoption

10 du projet de lois portant sur les forces armées ?

11 R. Oui. Nous avions convenu avec le premier ministre Zelenovic que ce

12 projet de texte de lois sur les forces armées de Serbie soit présenté

13 devant le gouvernement au sens restreint de ce terme et qu'il y ait un

14 débat à l'occasion d'une session de ce gouvernement.

15 Q. Avez-vous, cette fois-là, appris par la secrétaire de l'accusé ce qui

16 s'était passé dans le cabinet de l'accusé ?

17 R. Avant le début même de cette session du gouvernement, la secrétaire

18 Mira, la secrétaire du cabinet du président Milosevic m'a appelé et elle

19 m'a dit : "Dobrila ne donne aucune information aux médias pour ce qui est

20 du projet de lois sur les forces armées de Serbie parce que cela pourrait

21 constituer de gros problèmes. Le général Panic vient de faire éruption en

22 pleine tenue de combat et avec toute son escorte chez le président

23 Milosevic et une solution ne saurait tarder."

24 Q. Et qu'avez-vous appris de cette solution ? Suite à l'arrivée de Panic

25 dans cet accoutrement, qu'est-ce qui s'est passé ?

Page 27827

1 R. Je n'ai pas prise la secrétaire Mira au sérieux. Je n'ai pas tout de

2 suite transmis cette information au général Simovic. Et lorsque le général

3 Simovic est revenu de cette session du gouvernement, il est revenu assez

4 vite de celle-ci et il a dit : "Zelenovic vient de démissionner." Alors

5 j'ai dit : "Mais comment démissionner ?" Je demande au général : "Comment

6 se fait-il ?" Alors il a dit : "Bien, je n'en sais rien. Il n'a fait

7 qu'argumenter brièvement. Il nous a distribué une déclaration de sa part en

8 une ou deux phrases et il nous a dit qu'il démissionnait. Et en réalité,

9 personne d'entre nous, les ministres, ne savaient de quoi il en

10 retournait." Alors j'ai dit : "Mais de quoi s'agit-il ?" Alors il dit :

11 "Mais le gouvernement vient d'être renversé." J'ai dit : "Comment

12 renverser et nous tous avec le gouvernement on est parti pour de bon, on a

13 sauté. "Alors savez-vous ce que m'a dit la secrétaire du président

14 Milosevic ? Elle m'a dit que le général Panic a fait éruption chez le

15 président Milosevic et qu'une solution allait très vite se dessiner." Alors

16 le général Simovic a dit : "Mais mon Dieu, tu sais ce que ça veut dire ?"

17 Alors je dis : "Mon général qu'est-ce que ça veut dire ?" Alors il a dit :

18 "Cela signifie que le général Panic vient de faire un putsch." "J'ai dit :

19 "Mais de quel putsch parlez-vous." Alors il m'a dit : "Mais c'est un coup

20 d'état, c'est de coup d'état que je parle."

21 Q. Ceci se passe au mois de décembre. Est-ce que Simovic lui-même a été

22 relevé de ses fonctions et remplacé à la suite de ces événements par le

23 général Marko Negovanovic ?

24 R. Oui.

25 Q. Ce qui veut dire que vous avez travaillé avec Simovic du mois de

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1 septembre jusqu'au 12 décembre. Votre résumé le montre. Vous êtes restée à

2 vos fonctions jusque vers la mi-janvier 1992, est-ce exact ?

3 R. Oui.

4 Q. Autre sujet, des rapports existant entre Simovic et l'accusé. Là, nous

5 parlons des paragraphes 12 à 15. Lorsque vous avez travaillé dans ce

6 bureau, quelle était la fréquence des conversations entre Simovic et

7 l'accusé ?

8 R. Pour autant que je m'en souvienne, le général Simovic s'est entretenu

9 avec le président Milosevic presque tous les jours. Je dis bien "presque

10 tous les jours," parce qu'il y a eu des journées où ils se sont entretenus

11 plusieurs fois. Mais il y a eu des journées où ils ne se sont pas

12 entretenus du tout. Et je puis vous citer exactement les journées --

13 quelles sont les journées où ils ne se sont pas entretenus du tout.

14 Q. Ce sera peut-être nécessaire de le faire. Je suppose que -- je suis sûr

15 d'ailleurs, que nous pourrons examiner cette question.

16 Est-ce que le ministre Simovic avait des renseignements à propos de ce qui

17 se passait sur les champs de bataille, qui lui étaient transmis ? Si vous

18 répondez par l'affirmative, dites-nous dans quelle mesure il a transmis ces

19 dits renseignements, à l'accusé ?

20 R. Les informations, pour ce qui est des événements sur les territoires où

21 il y avait des combats, elles venaient de plusieurs sources. Elles étaient

22 plutôt rares et incomplètes. Elles venaient de ceux qui venaient dans le

23 cabinet pour se plaindre. Et nous avons surtout reçu des informations

24 émanant du QG de Vojislav Seselj. Puis, nous avons obtenu des informations

25 de la part de M. le ministre Zoran Sokolovic. De temps en temps, il nous

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1 venait des informations de la bouche du général Aco Vasiljevic. Mais toutes

2 les informations importantes, celles qui nécessitaient des réactions

3 rapides; et bien, ces informations étaient transmises immédiatement au

4 président Slobodan Milosevic.

5 Q. Ces informations, renseignements venant des champs de bataille, est-ce

6 qu'elles comprenaient des faits héroïques de volontaires. Mais est-ce qu'il

7 y avait aussi par exemple, des actes de pillage ?

8 R. Il y a surtout eu des informations concernant les combats héroïques des

9 volontaires pour la protection de la population serbe sur les territoires

10 où la guerre faisait rage. Puis, concernant la libération de certaines

11 personnes emprisonnées, de malades se trouvant sur ce territoire, il y a eu

12 de terribles informations pour ce qui est des enfants détenus dans des

13 casernes, en Croatie. Il y a également eu des informations portant sur

14 différentes sortes de pillages; pillages perpétrés pour ce qui est tant de

15 maisons serbes, que de maisons croates.

16 Q. Lorsque le ministre Simovic allait voir l'accusé, lorsqu'il allait voir

17 le gouvernement, est-ce que c'était toujours lui qui prenait lui-même

18 l'initiative ? Est-ce qu'il donnait sa propre opinion, ou est-ce que dans

19 une mesure quelconque, il était soumis à l'avis de l'accusé ? Où est-ce

20 qu'il suivait l'avis de l'accusé ?

21 R. Et bien que le ministre Simovic, pour qu'il aille chez le président

22 Milosevic, il fallait qu'il y ait une convocation du cabinet du président

23 Milosevic. Le général prenait alors son couvre-chef, et il y allait

24 rapidement. Il présentait des rapports et nous faisions des résumés sur ce

25 qu'il fallait absolument qu'il dise au président Milosevic. Et le cabinet

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1 du président Milosevic -- il revenait du cabinet du président Milosevic,

2 très souvent assez irrité.

3 Q. Vous est-il arrivé de le voir en une occasion, dans le cabinet de

4 l'accusé ? Est-ce que vous avez pu voir quelle était l'espèce de dynamique

5 qui avait entre ces deux hommes ? La façon dont ils se positionnaient ?

6 R. Je n'étais souvent pas d'accord avec mon chef, mon ministre le général

7 Simovic. Je lui demandais : "Pourquoi n'as-tu pas dit cela au camarade

8 Milosevic, pourquoi ne lui as-tu pas dit cela ?" Alors il m'a dit : " Mais

9 c'était mon président. Moi je ne peux pas parler comme toi Dobrila. Toi --

10 il n'a que toi à pouvoir dire les choses comme cela de but en blanc, à tout

11 un chacun." Alors je lui ai dit : "Mais moi, je lui dirai tout ce que vous

12 ne savez pas lui dire, je lui dirai moi-même." Alors, il m'a dit : "Tu

13 viendras avec moi." Alors, je suis allé une fois avec le général, dans

14 l'intention de me placer, de me camper devant le président Milosevic, et de

15 lui dire tout ce que j'ai rédigé, et tout ce que j'avais sur le cœur.

16 Lorsque nous sommes arrivés à la porte du président Milosevic, le général

17 est entré en uniforme. Il est passé devant moi. Le président Milosevic

18 était assis sur une chaise. Je crois qu'il était en train de fumer. Le

19 général s'est mis au garde à vous. Et Goran Milinovic, le chef du cabinet

20 du président Milosevic, est venu. Il s'est mis à côté de moi. Et il m'a dit

21 : "Toi et moi, on va dans mon bureau. Parce que tu es chef et moi je suis

22 chef de cabinet. Donc, on s'entretiendra entre nous." Le général Simovic

23 s'attendait à ce que je le rejoigne. Et cependant, je ne pouvais m'opposer

24 à ce qu'on m'avait dit. Je suis allé au bureau du chef de cabinet du

25 président Milosevic, et c'est avec lui que je me suis entretenue.

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1 Q. Fort bien. Pour ce qui est des rapports entre le ministre et le

2 président, est-ce qu'à votre avis, ils étaient sur un pied d'égalité, ou

3 plutôt sur un pied d'inégalité manifeste et patente ?

4 R. Bien, le président c'est le président. Le général Simovic disait

5 toujours qu'il fallait qu'il respecte forcément son président. Le général

6 Simovic était dans son uniforme de général. Il était au garde à vous, et le

7 président est resté assis. Je pensais, j'estimais --

8 Q. Fort bien. Avançons, avançons. Est-ce que vous vous êtes rendu compte

9 de l'existence de certaines choses qui, à votre avis, n'étaient pas de la

10 compétence du général ? Il y avait notamment, cette question de la mise en

11 retraite de généraux ?

12 R. Le général Simovic n'avait aucune attribution, en fait. D'ailleurs,

13 j'ai dit que s'agissant de ses compétences, il n'était même pas compétent,

14 en tant que comptable. Le ministre de la Défense, était un ministre sans

15 armée. Il n'avait aucune compétence. Il avait en fait, deux assistants qui

16 lui avaient été imposés par le gouvernement, et qui étaient répartis sur

17 des zones de responsabilité respective. Le ministre Simovic n'avait de

18 contact, ou en tout cas ces contacts les plus nombreux, étaient avec le

19 parlement; et ce, sur instruction du président Milosevic. Et après le

20 départ du président Milosevic, le ministre Simovic ne pouvait rien faire de

21 sa propre initiative. Et il pouvait encore moins prendre la moindre

22 décision. Moi, je ne comprenais pas une chose. C'est qu'en tant que chef du

23 service de surveillance et de mise en état d'alerte, j'avais davantage de

24 compétences qu'un ministre, dans le gouvernement de Serbie.

25 Q. Fort bien. Mais revenons un peu en arrière à la fin du paragraphe 13,

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1 là où il est question de la mise à la retraite de généraux pour cause

2 d'incompétence, si je ne m'abuse. Que s'est-il passé entre l'accusé et le

3 ministre Simovic, à cet égard ?

4 R. Et bien, selon ce que m'a dit le général Simovic, le président

5 Milosevic a demandé au général Simovic de dresser la liste des généraux

6 incompétents. Et cette liste devait être préparée en vue de leur mise à la

7 retraite. J'ai demandé au général, comment il pouvait imaginer qu'il

8 pourrait rédiger une telle liste. Alors, qu'il n'était pas compétent pour

9 ce faire. Qu'il n'avait aucune attribution à ce sujet. Pourquoi n'a-t-il

10 pas souligné ceci devant le président. Il m'a répondu : "Mais le président

11 est sans doute au courant de cela." Je lui ai dit: "Mais comment est-ce que

12 le président ne peut pas être au courant -- comment il peut vous dire

13 cela." Et il m'a dit: "Il me demande de mettre à la retraite des généraux

14 incompétents et de préparer une liste, alors que je ne sais pas à qui

15 m'adresser pour ce faire. Et d'ailleurs, je ne suis pas en mesure de le

16 faire."

17 Q. Passons maintenant à un autre sujet. L'appui apporté aux volontaires,

18 dont il est question dans le résumé de votre déposition, très largement

19 entre le paragraphe 16, et le paragraphe 25.

20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, je vous prie. J'aimerais

21 demander au témoin, quel était son rôle exact, en tant que chef de cabinet,

22 j'aimerais des détails complémentaires à ce sujet.

23 M. NICE : [interprétation]

24 Q. Madame le Témoin, vous avez entendu ce qu'a demandé, Monsieur le Juge

25 Kwon ?

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1 R. Merci. Mon rôle consistait à être en permanence au côté du général, à

2 prendre notes de tout ce qui se passait, à préparer donc, des notes

3 officielles destinées à informer à ce sujet, le président Milosevic. Donc,

4 les notes officielles que je rédigeais, et que je tapais moi-même, la

5 plupart du temps, j'avais le devoir de les apporter personnellement au

6 cabinet du président Milosevic. Mais je m'arrêtais à la porte de son

7 bureau. Et puis, j'avais pour responsable principale, parce que j'étais

8 également conseiller du ministre de l'Information. J'avais pour tâche

9 principale de maintenir les contacts avec la presse.

10 Le ministre Simovic, pendant la durée de mon contrat de travail, donc,

11 pendant la durée de mon intervention en tant que chef de cabinet, le

12 ministre Simovic, a fait à peu près 200 interviews aux médias du pays, et

13 70 environ destinés à des journaux étrangers. J'ai annexé certaines de ces

14 interviews à mon rapport. Certaines, je les ai encore en ma possession.

15 D'autres, je n'ai pas pu les retrouver, malheureusement. Mais je pense

16 qu'il est possible de les retrouver.

17 En dehors de cela, je maintenais un certain nombre de contacts en rapport

18 avec l'équipement et l'approvisionnement des volontaires. Et c'était sans

19 doute, mon travail le plus difficile. Et puis, j'avais une autre

20 responsabilité qui n'entrait pas dans mon profil de poste, mais en fonction

21 de ma personnalité. Donc, personnellement, je connaissais un certain nombre

22 de chefs d'entreprises. Ce qui fait que je les appelais souvent pour leur

23 demander de fournir des autobus destinés à transporter les volontaires

24 jusqu'au champ de bataille. Mais l'une de mes tâches les plus terribles,

25 les plus difficiles, consistaient à fournir ces autobus quant aux mères des

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1 jeunes gens qui étaient prisonniers de guerre et qui, à ce moment-là,

2 étaient emprisonnés dans les casernes et les prisons de Croatie, et il y en

3 avait des dizaines de milliers à ce moment-là, ou peut-être même davantage.

4 Donc, je devais veiller à ce que les mères de ces jeunes gens, puissent

5 rendre visite à leurs fils, dans ces prisons, sur le territoire de Croatie.

6 Ces femmes étaient des femmes éplorées qui suppliaient pour pouvoir

7 rencontrer leurs fils. C'étaient des femmes qui venaient voir le

8 gouvernement de Serbie pour supplier de voir leurs fils ou leurs maris, qui

9 étaient partis se battre sur les champs de bataille. Et elles demandaient

10 également, que -- elles demandaient cela simplement pour sauver la tête de

11 leurs enfants. Malheureusement --

12 M. LE JUGE KWON: [interprétation] Excusez-moi de vous interrompre, Madame

13 Gajic-Glisic. Mais lorsque vous parlez de fournitures, enfin de fournir des

14 autobus, est-ce que ceci entrait dans le cadre d'une mission logistique

15 relevant du travail accompli par le ministre ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. C'est moi qui accomplissais cette tâche.

17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] En tant que chef de cabinet, n'est-ce

18 pas ?

19 R. Au poste de chef de cabinet. Il y avait aussi trois conseillers, cinq

20 dactylos, et trois secrétaires techniques, comme on les appelait, dans ces

21 services du cabinet.

22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Nice. Je vous rends la

23 parole.

24 M. NICE : [interprétation] Oui --

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame le Témoin, vous avez dit que

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1 le ministre, M. Simovic, ne jouissait pas d'un pouvoir important.

2 Vous avez même ajouté que vous pensiez jouir d'un pouvoir supérieur au

3 sien. Je ne suis pas sûr qu'il convienne de tenir compte de cette

4 expression d'une illusion, sans doute. Mais pouvez-vous me dire si le

5 ministre ne jouissait pas d'un pouvoir important, qui jouissait du

6 pouvoir ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Malheureusement, non. En tant que général, il

8 ne pouvait présenter sa démission. Il était tenu d'exécuter les ordres

9 qu'il recevait. Et cet ordre --

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je n'ai pas parlé de "démission." Ce

11 que je vous ai dit, c'est qu'entendant le commentaire venant de vous, qui

12 avez dit, que le ministre ne jouissait pas d'un pouvoir important; j'ai

13 demandé entre les mains de qui résidait ce pouvoir ? J'ai employé en

14 anglais le mot "reside", et non "resign", qui veut dire démission.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Selon les lois de chez nous, il y avait un

16 certain nombre de lois qui portaient sur la défense de la Serbie. Et dans

17 le cadre de ces lois, le SUP, la Défense territoriale, était dirigé par le

18 président Milosevic. Je viens de citer une disposition de la loi, et j'ai

19 en ma possession le texte de cette loi, ici dans ce prétoire. C'est une loi

20 qui octroie tous les pouvoirs au président de la république, en la matière.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci. Monsieur Nice, je vous rends

22 la parole.

23 M. NICE : [interprétation]

24 Q. Le 26 septembre, comme vous le dites dans le résumé de votre

25 déposition, vous avez appris d'un certain Mira, qui était un volontaire,

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1 que des armes avaient été transportées de Serbie jusqu'aux zones où le

2 conflit faisait rage.

3 Et je crois savoir que c'est le 30 septembre, que le ministre Simovic a

4 participé à une réunion avec l'accusé. Pouvez-vous nous aider sur ce point,

5 je vous prie, sur la question de l'armée. Quelles étaient de façon

6 générale, les tâches confiées aux volontaires ?

7 R. Les volontaires étaient censés constituer l'arrière de l'épine dorsale

8 de l'armée. Les volontaires devaient donc, être au-dessus des partis

9 politiques. Une armée nationale devait agir pour défendre la Serbie et ses

10 intérêts.

11 Lorsque le président -- lorsque le ministre Simovic [sic] est revenu de son

12 entrevue avec le président Milosevic, il était très courroucé. Il a

13 commencé à dicter un texte. Et il disait que le président Milosevic, lui,

14 avait annoncé qu'un bataillon de volontaires de 1 200 hommes devait être

15 créé, et que ce groupe supplémentaire de volontaires devait être mobilisé

16 pour être envoyé dans les zones où la guerre faisait déjà rage. Donc, j'ai

17 établi la liste d'un certain nombre de points qu'il m'a dictés. J'ai pris

18 cela en note. J'ai, d'ailleurs, encore ces notes dans mon journal intime.

19 Et je peux vous les soumettre si vous le souhaitez.

20 Q. Je pourrais vous aider sans aller contre le règlement en vigueur dans

21 ce Tribunal, mais est-ce que quelque chose a été dit dans cet entretien au

22 sujet de la formation des hommes, de la formation de ces unités d'élite ?

23 R. La formation était achevée déjà. Elle avait eu lieu avant l'arrivée du

24 général Simovic sur place, dans des centres de formations de volontaires, à

25 Knin d'abord, et ensuite à Erdut. Et puis, d'autres centres ont ensuite été

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1 créés en d'autres lieux.

2 Q. Excusez-moi. Je vais vous interrompre. Je vous demande simplement, s'il

3 a été question de formations et d'unités d'élites, par l'accusé lorsqu'il a

4 parlé à Simovic ?

5 R. Le général Simovic m'a dit que tous ces volontaires avaient vu leur nom

6 transmis à des centres particuliers, et qu'ils devaient d'abord être

7 entraînés dans les centres de formations militaires. Ils devaient donc,

8 soit achever une formation initiale, soit compléter leur formation

9 antérieure. Et une fois prêts, ils devaient être envoyés dans les centres

10 plus spécialisés d'Erdut et de Knin, d'où ils devaient ensuite être envoyés

11 au sein des unités de la Défense territoriale dans les zones où la guerre

12 faisait rage.

13 Q. Est-ce que l'accusé vous a parlé du fait que le ministre Simovic aurait

14 parlé ce jour-là de Goran Hadzic ?

15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May.

16 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui. Vous avez un instant. Que voulez-

17 vous, Monsieur Milosevic ?

18 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai vraiment les plus grandes difficultés du

19 monde à comprendre le sens qu'il peut bien y avoir à demander à ce témoin

20 ce qu'elle a dit lors d'un entretien auquel elle n'a pas participé ou d'une

21 réunion où elle n'était pas présente si j'ai bien compris ce qu'elle a dit.

22 Alors, que peut-elle dire dans son témoignage à ce sujet. Je ne comprends

23 pas bien.

24 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous savez que le ouï-dire est accepté

25 dans ce prétoire. Vous pouvez poser des questions au cours du contre-

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1 interrogatoire à ce sujet.

2 Le moment est-il opportun pour la pause ?

3 M. NICE : [interprétation] Certainement.

4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous allons donc suspendre l'audience

5 pendant 20 minutes.

6 Madame Gajic-Glisic, je vous demanderais de veiller pendant toute la durée

7 de la pause et d'ailleurs pendant toutes les autres pauses qui auront lieu

8 avant la fin de votre déposition, de ne parler à personne du contenu de

9 celle-ci, même pas aux membres du bureau du Procureur.

10 Vingt minutes de pause.

11 --- L'audience est suspendue à 12 heures 17.

12 --- L'audience est reprise à 12 heures 45.

13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Nice, à vous la parole.

14 M. NICE :

15 Q. [interprétation] Madame Gajic-Glisic, avant la pause nous parlions de

16 ce que M. Simovic disait que l'accusé lui avait dit durant cette réunion du

17 30 septembre. J'ai encore une ou deux questions à poser à ce sujet.

18 L'accusé a-t-il dit quoique que ce soit à M. Simovic au sujet d'une aide

19 quelconque à Hadzic ?

20 R. Oui. Il a dit qu'il importait d'apporter un soutien plein et entier à

21 Goran Hadzic, le président de la SAO de Slavonie, de Baranja, et du Srem

22 occidental.

23 Q. A-t-il dit quoique ce soit --

24 R. Mais il a parlé d'un soutien médiatique plein et entier. Il a dit qu'il

25 fallait le présenter sous un genre favorable à la presse et aux médias et

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1 lui apporté également une certaine aide matérielle et militaire. Mais comme

2 le président Milosevic l'a dit, il y a un instant, il est exact que je n'ai

3 pas entendu cela de la bouche du président Milosevic. Je vous rapporte

4 simplement ce que le général Simovic m'a dit à moi.

5 Q. Quelque chose a-t-il été dit par l'accusé suite à la réunion du 30

6 septembre, au sujet de la nomination de Radovan Stojicic au poste de

7 commandant de la Défense territoriale en Slavonie orientale, Baranja et

8 Srem occidental ?

9 R. Oui. Mais j'ai aussi surpris une conversation téléphonique entre le

10 président Milosevic et le général Simovic où le président Milosevic a dit

11 au général Simovic, "Et bien, encore une fois des problèmes là-bas en

12 Slavonie occidentale. Imagine un peu ce qui se serait passé si Goran Hadzic

13 avait nommé ce Radovan Stojicic au poste de président de la Défense

14 territoriale là-bas." Et le général Simovic, ensuite, lorsqu'il m'a parlé

15 de tout cela, a dit qu'il y avait eu un problème et que Goran Hadzic avait

16 nommé Stojicic au poste de président de la SAO de Slavonie, Baranja et du

17 Srem occidental.

18 Q. Avant d'aller plus loin dans ce que vous vous apprêtez à dire au sujet

19 des volontaires, je me rends compte que j'ai omis de vous poser une

20 question. En effet, il y a quelques instants, vous avez parlé de ce que

21 l'on peut lire au paragraphe 14 de votre déclaration. Vous nous avez dit

22 quelques mots des visites rendues par Simovic et du fait qu'il agissait sur

23 les ordres de l'accusé. Vous a-t-il quelque chose au sujet de la présence

24 de tierces personnes lors de ces réunions avec l'accusé ? Et lorsque je

25 dis, je parle du ministre Simovic.

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1 R. Votre question se divise en deux, en fait. Je répondrai d'abord que le

2 général Simovic allait très rarement à des réunions du gouvernement serbe

3 auxquelles participaient, en général, celui qui à l'époque était colonel

4 avant de devenir général. Je parle du colonel Mladen Kovacevic, qui allait

5 également à ces réunions du gouvernement serbe. Et bien, il y avait le

6 général Branko Kuzmanovic, selon les services concernés, selon le sujet à

7 l'ordre du jour de ces réunions gouvernementales, l'identité de celui qui

8 participait changeait. A plusieurs reprises, le général Simovic a

9 participé, également, à une telle réunion et je l'accompagnais. J'étais

10 dans ce cas-là, assise à côté de lui pour prendre des notes. Mais cela

11 arrivait très rarement.

12 Et pour répondre à la deuxième partie de votre question, je dirais que le

13 général Simovic allait voir, en général, le président Milosevic avant de

14 participer aux séances de l'assemblée de Serbie. Et il me disait toujours

15 qu'il était tenu de lire à haute voix devant l'assemblée ce qui avait été

16 écrit au préalable, donc, préparé. Autrement dit, il présentait un rapport

17 à l'assemblée et ce rapport devait, au préalable, être agréé par le

18 président Milosevic.

19 Puis, je me souviens d'un jour parce qu'il y avait de très bons rapports

20 avec Vojislav Seselj, donc, je parle dans mes écrits du fait que le général

21 Simovic était censé lire à haute voix devant l'assemblée des phrases très

22 sympathiques, très appréciatives de Vojislav Seselj, et à ce moment-là --

23 Q. Excusez-moi de vous interrompre mais j'aimerais vous ramener au sujet.

24 J'ai eu tort de vous poser deux questions sur le même sujet en une seule.

25 Mais lors de ces réunions que vous aviez avec l'accusé, y avait-il d'autres

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1 personnes présentes ? Et si oui, s'agissait-il de membres de votre

2 ministère ou d'un autre ministère.

3 R. Le général Simovic me disait, en général, qu'aux réunions avec le

4 président Milosevic, se trouvaient des personnes qui allaient soit se

5 présenter à son ministère, soit au ministère de l'Intérieur. Et il allait

6 seul avec Zoran aux réunions de la Défense territoriale. Mais il disait

7 toujours que Radmilo Bogdanovic était présent et que le général Simovic lui

8 demandait conseil. Pendant un certain temps, il ne se passait rien, aucun

9 conseil n'était donné, aucune instruction n'était donnée. Mais en tout cas,

10 il était présent physiquement. C'est ce que le général Simovic m'a dit.

11 Q. Je vais maintenant avancer dans le résumé de votre déposition pour

12 parler des paragraphes 17 à 25. Simovic a été chargé donc d'équiper les

13 volontaires lorsque la caisse nationale s'est trouvée vide. Et dans votre

14 résumé de déposition, vous expliquez que des contacts ont été pris avec des

15 experts financiers, un certain Vasiljevic et d'autres hommes, notamment. Et

16 que suite à ces réunions, cela figure dans votre résumé de déposition, des

17 dispositions ont été prises pour acquérir toute sorte de matériel, des

18 jumelles, des véhicules blindés, des Land Rovers, des pistolets, des choses

19 de ce genre. C'est exact ou pas ? Répondez par oui ou par non.

20 R. Excusez-moi, mais les jumelles n'ont rien à voir avec votre question.

21 Non. Les moyens de transmissions n'ont rien à voir avec le contenu de votre

22 question. Je n'ai jamais dit que des moyens de transmissions à long terme

23 figuraient dans ces équipements. En effet, il s'agit d'équipements du génie

24 chargés des outils électriques. Nous n'avions rien à voir avec cela. Mais

25 nous avions quelque chose à voir avec le matériel qui était fourni aux

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1 volontaires parce que les caisses de la Défense nationale étaient vides. Le

2 général Simovic revenait de chez le président Milosevic et à ce moment-là,

3 il m'a dit que : "Nous devions équiper et trouver des moyens

4 supplémentaires pour les volontaires." Et j'ai dit : "Général, appelons des

5 experts des services financiers." Il a rétorqué : "Quels experts ?" Et je

6 lui ai dit que : "Je connaissais un expert dont j'espérais qu'il était

7 compétent et qu'il travaillait auprès des directeurs financiers d'une

8 entreprise." Il m'a dit de l'appeler et je l'ai appelé et je lui ai soumis

9 notre problème. Je lui ai dit que nous travaillerions avec lui en privée et

10 il est venu avec un certain Vasiljevic.

11 Q. Faites une pause. Faites une pause. Les détails figurent par écrit dans

12 votre texte et dans le détail tout cela est reconnu exact. Nous pouvons

13 donc passer à autre chose. Y a-t-il eu une rencontre entre Simovic et

14 l'accusé au sujet de cela, le 1er octobre 1991 ? Et si oui, Simovic vous a-

15 t-il dit quelle a été la réponse de l'accusé au projet que vous aviez

16 préparé ? Paragraphe 18 de votre texte.

17 R. Ce matin-là, le général Simovic devait informer le président Milosevic

18 de tous les détails de ce qui s'était passé pendant la nuit. Et il est

19 revenu de cette réunion en déclarant que le président Milosevic lui avait

20 dit qu'un nouveau compte pouvait être ouvert pour aider les volontaires. Et

21 Jezdimir Vasiljevic avait donné un chèque en dinars, qui devait être déposé

22 sur ce compte à ouvrir un peu plus tard pour servir aux besoins de

23 l'entreprise Crvena Zastava qui fabriquait des matériels et des armes pour

24 les volontaires.

25 Q. Et ce chèque était de quel montant à peu près, si vous vous en

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1 souvenez ? Paragraphe 22, je ne me m'abuse.

2 R. J'ai vu le chèque. Cependant, je ne me souviens pas du montant qui y

3 était inscrit. Il devait se situer entre 750 et 1 million de marks

4 allemands. La contre-valeur en dinars, en tout cas, car le dinar était

5 utilisé à l'époque, c'est le chiffre qui m'a été annoncé, mais je ne l'ai

6 pas vu de mes yeux.

7 Q. Vous établissez la chronologie de trois réunions au sujet desquelles je

8 voudrais obtenir des détails de vous. Paragraphe 21 de votre résumé de

9 déposition. Y a-t-il eu un projet établi à une certaine époque qui

10 impliquait de traverser la frontière en portant des valises ?

11 R. Et bien, je ne dirais pas les choses exactement de cette façon. Il

12 était nécessaire de se procurer des casques, des gilets par balle de

13 l'étranger. Et pour cela, il fallait des devises étrangères. Comme nous

14 n'avions pas d'argent dans les comptes, il était difficile d'arriver avec

15 de l'argent. Donc, nous avons cherché des moyens pour obtenir des devises

16 étrangères destinées à payer ces biens à l'étranger. Le ministre Zoran

17 Sokolovic a dit que puisque Jezdimir avait l'argent, cela pourra être utile

18 à Savic et cela pourrait être transporté de l'autre côté de la frontière

19 dans une valise avec de l'argent à l'intérieur. Et que cet argent serait

20 utilisé par Jezdimir Vasiljevic pour payer les gilets par balle et les

21 autres pièces d'équipements qui étaient nécessaires pour les volontaires.

22 Q. L'accusé a-t-il été mis au courant des détails de ce plan ? Et si oui,

23 quelle a été son attitude à l'égard de ce plan ?

24 R. A en juger par ce qui s'est passé au sein de notre cabinet,

25 le président Milosevic était impliqué dans le détail de tous ces

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1 arrangements dans les détails du plan. Et pour autant que je le sache, il

2 n'a rien interdit.

3 Q. Paragraphe 20, à présent, nous parlons des détails de ce que vous dites

4 dans votre résumé de déposition, lorsque vous dites que Jezdimir Vasiljevic

5 a pris contact avec des services de sécurité de l'état israélien et qu'il a

6 échoué dans cette entreprise et que Dusan Matkovic a repris les

7 négociations en question. Quelque chose

8 -- est-ce que ceci dépendait du ministère de l'Industrie ? Est-ce que ceci

9 avait quelque chose à voir avec l'accusé ?

10 R. Lorsque Jezdimir Vasiljevic est allé rencontrer

11 Mme Klara Mandic en rapport avec ce qui était organisé avec Israël, il a

12 été décidé au niveau gouvernemental, au niveau du président Milosevic, en

13 fait, que cela allait se passer mais je n'étais pas présente, bien entendu.

14 Cela dit, Dusan Matkovic, qui était ministre de l'Industrie, pourrait

15 confirmer ce qui c'est passé à l'époque. Il pourrait confirmer l'exactitude

16 du fait que nous avions besoin d'aide en provenance d'Israël, ceci est

17 vrai. Vous voulez que je vous en dise plus ?

18 Q. Non, non, pas pour le moment. Merci.

19 Je pense que suite à cela -- ceci figure au paragraphe 23 -- Vasiljevic

20 est revenu et a entrepris des efforts pour obtenir un financement destiné à

21 l'achat d'armes en provenance de Yougoslavie et tout cela dans le cadre

22 d'un crédit de la Jugo Banque, n'est-ce pas ?

23 R. Et bien l'argent destiné aux achats provenaient de l'entreprise Crvena

24 Zastava, pour autant que je le sache, et d'autres entreprises qui

25 participaient à la fabrication d'armes, ailleurs. Mais avant tout, c'était

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1 la Défense nationale qui était chargée de veiller à cela. Et puis nous

2 recevions de l'argent des grandes entreprises et Jezdimir Vasiljevic nous a

3 aussi aidé.

4 Q. L'accusé était-il au courant de cela ? Est-ce qu'il avait approuvé tout

5 cela ?

6 R. Pour autant qu'on me l'a dit, il était informé de tout cela et personne

7 ne m'a dit qu'il avait exprimé son désaccord.

8 Q. Finalement, paragraphe 25 de votre déclaration au préalable, le reste

9 se trouve dans le résumé. Avez-vous été mis au courant du fait que Jezdimir

10 Vasiljevic aurait éventuellement demandé quelque chose à l'accusé en

11 compensation de l'aide apportée par lui ?

12 R. Et bien, le premier service concerné était les services du président

13 Milosevic qui le recevait dans son bureau. Nous avons insisté pour que le

14 président Milosevic reçoive M. Jezdimir Vasiljevic. Cependant, celui-ci,

15 d'après ce qu'on m'a dit : "Demandait de qui il s'agissait exactement ?

16 Quelle était la personnalité de cet homme ?" Et savoir si plus tard, il y a

17 eu des contacts réels entre les deux hommes, je ne saurais le dire parce

18 que je ne le sais pas s'il y a eu effectivement des contacts entre le

19 président Milosevic et Jezdimir Vasiljevic.

20 Mais en tout cas, Jezdimir Vasiljevic a demandé au gouvernement de prendre

21 certaines décisions en rapport avec la banque nationale de Yougoslavie et

22 Jezdimir Vasiljevic a demandé que soit créée une station de télévision qui

23 lui appartiendrait ou qu'il dirigerait ainsi qu'une banque lui appartenant

24 Jugoskandik.

25 Q. Pour ce qui est de l'organisation et de l'entraînement des volontaires,

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1 c'est ce qui apparaît au paragraphe 26, vous dites qu'il y avait divers

2 types de volontaires, vous expliquez qui les contrôlait, il y avait le

3 ministère de l'Intérieur, la TO serbe ou la JNA ou encore c'étaient des

4 volontaires de partis politiques.

5 Sous quelle tutelle se trouvaient les Tigres d'Arkan ?

6 R. Je voudrais rectifier ce que vous venez de dire. Les volontaires ne

7 faisaient pas partie du ministère de la Défense de Serbie. Par le centre

8 chargé de la surveillance, nous obtenions tout renseignement concernant les

9 volontaires qui se présentaient devant les centres destinés à la mise en

10 état de l'alerte qui faisaient partie du ministère de la Serbie. Ces

11 volontaires étaient en corrélation avec la Défense territoriale de la

12 localité où ils se trouvaient. Mais d'après ce que j'en sais, il y avait

13 plusieurs types de volontaires, il y avait des volontaires --

14 Q. Ceci se trouve dans le résumé. Je vous demande qui contrôlait les

15 Tigres d'Arkan ? Sous quelle institution ils tombaient ?

16 R. Ils tombaient sous la coupe du ministère de l'Intérieur de Serbie

17 d'après ce que M. Zoran Sokolovic nous avait dit. Vous en voulez

18 davantage ?

19 Q. Non. Je vous remercie. Est-ce qu'il est arrivé à Sokolovic de parler de

20 voyous se trouvant parmi les forces d'Arkan ?

21 R. Il est venu une fois pour dire que certains criminels avaient été

22 relâchés de prison et qu'ils étaient partis sur le champ de bataille et

23 qu'ils ont rejoint les forces d'Arkan. Simovic était stupéfait et il a dit

24 : "Qui a approuvé cela ? Comment cela se peut-il ? Ce n'est pas possible ?"

25 L'autre a haussé ses épaules et a

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1 dit : "Le patron."

2 Q. A votre avis, à qui faisait-il référence lorsqu'il a dit "le patron ?"

3 R. Moi, j'ai crû comprendre que c'était le président mais je ne suis plus

4 sûr pour ce qui est de savoir qui encore était patron là-bas.

5 Q. Est-ce qu'un décret a été promulgué et en force de lois visant à

6 l'établissement de centres d'instructions pour volontaires ?

7 R. Oui. Ce décret, avec force de lois portant sur les volontaires, a été

8 adopté avant la nomination de Simovic et de moi-même au ministère de la

9 Défense. Le ministre Simovic m'a montré ce décret dès le début de mon

10 intervention au ministère de la Défense et j'ai vu ce décret chez-vous dans

11 les locaux du bureau du Procureur. Je crois que ce décret avait force de

12 lois et je crois que toute chose faite en corrélation avec les volontaires

13 et ce que nous avons fait au sujet des volontaires se trouvait être couvert

14 par la législation qui était les nôtres et à laquelle je prêtais foi.

15 Q. Est-ce que l'accusé a, d'après ce que vous savez, d'après les

16 renseignements que vous avez reçus, avait quoi que ce soit à voir avec

17 l'établissement de ces centres ?

18 R. Je crois que le président Milosevic devait forcément être au courant

19 d'une telle décision.

20 Q. Il se peut que vous ayez déjà dit que le premier centre de formation

21 d'instructions se trouvait sous l'égide ou sous la tutelle de Vasiljkovic;

22 le second sous celle d'Arkan. Nous en avons parlé, vous le dites dans votre

23 résumé. Mais parlons de certains documents qui deviendront pièces à

24 conviction et se trouvant dans le classeur. De quelle pièce Madame la

25 Greffière ?

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1 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Pièce 567. Excusez-moi --

2 c'est la pièce 568.

3 M. NICE : [interprétation] Je m'excuse encore davantage.

4 Q. Intercalaire 2. Soyons bref, s'il vous plaît. Vous avez examiné ce

5 document, c'est Vasiljkovic qui le signe sous son nom ou sous le nom de

6 Dragan, et il est dit, c'est surligné dans la version en anglais qui

7 apparaît à l'écran, dans une lettre du 8 novembre 1991, il dit ceci : "J'ai

8 des obligations envers la Sûreté de l'état de la République de Serbie et

9 mes activités au sein de la TO doivent être en pleine conformité avec ce

10 dit service de la Sûreté de l'état."

11 Est-ce que ceci correspond bien à la façon dont Vasiljkovic voyait

12 l'exercice de ses fonctions ?

13 R. Le ministre Sokolivic avait insisté auprès de nous pour que le ministre

14 Simovic reçoive Dragan Vasiljkovic, et se faisant, il a dit que c'était un

15 homme à eux et le service de Sûreté de l'état avait organisé une réunion

16 dans la villa de Botic avec Dragan Vasiljkovic et nous avions des

17 informations disant que c'était un employé ou un collaborateur des services

18 de la Sûreté de l'état. Par la suite, ce que vous m'avez montré et j'ai ici

19 un document signé par la main de Dragan, c'est un document qui a été envoyé

20 par Dragan au ministre de la Défense de Serbie où figure précisément cette

21 phrase-là.

22 Q. Intercalaire 3 de la pièce 568. Vous avez examiné ce document, Madame.

23 C'est le procès verbal d'une réunion de M. Simovic. Et Dragan y est

24 présent. Est-ce qu'à la page de 2, en anglais, vers le milieu de la page,

25 est-ce qu'on trouve en fait, l'historique de la vie de Dragan ? Et il dit

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1 que "Le SDB, la Sûreté de l'état, l'avait invité dans notre pays. Qu'il

2 avait collaboré avec Stanisic et Radmilo Bogdanovic. Qu'il avait pour

3 mission de former des volontaires, et de coopérer avec, ou de travailler en

4 coopération avec Martic et Babic.

5 R. Et avec Stanisic.

6 Q. Oui Stanisic, je pense l'avoir dit, n'est-ce pas ? Peu importe.

7 Des renseignements concernant l'instruction des volontaires du type de ce

8 que vous avez expliqué. Est-ce que ceci franchissait les différents

9 échelons de la voie hiérarchique ? Et est-ce que ce faisant, ces

10 informations parvenaient à l'accusé ?

11 R. Les informations afférentes à l'entraînement suivaient certainement la

12 chaîne hiérarchique. J'ai déjà dit que Dragan Vasiljkovic était censé

13 former des volontaires sur proposition de Stojkovic [sic] et, suite à la

14 proposition de Sainovic. Et je ne sais qui, encore. Il y avait eu des

15 pressions pour ce qui est de le recevoir chez le général Simovic. Il a

16 affirmé avoir travaillé pour le service de la Sûreté de l'état. Et il a dit

17 que ses adjoints étaient des employés du service de la Sûreté de l'état. Il

18 a dit aussi qu'il procédait à un entraînement avec eux, et qu'il avait des

19 obligations vis-à-vis de ce service de Sûreté de l'état. Dans mon carnet de

20 notes, en manuscrit, j'ai ce qu'a dit Dragan Vasiljkovic à l'occasion de sa

21 visite à Bor, et lorsqu'il a visité Arkan. Lorsque le général Simovic lui a

22 demandé, est-ce que ça s'est fait dans la régie ou dans la mise en scène de

23 Stanisic, l'autre a répondu que, oui. Et il a continué son récit.

24 Q. Et ce type d'information était transmis à l'accusé en passant par cette

25 voie hiérarchique ?

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1 R. Écoutez, cette note de service, je lai faite moi-même. J'étais présente

2 à cet entretien. Et cette note de service, je l'ai portée personnellement,

3 dans le cabinet du président Milosevic. Mais j'affirme, encore une fois,

4 que je n'arrivais que jusqu'à la porte de son bureau. Pas plus loin, je

5 n'allais pas plus loin.

6 Q. Le paragraphe suivant, ne parle pas directement de l'accusé. Mais

7 examinons rapidement les intercalaires 4 et 5. Est-ce qu'on trouve à

8 l'intercalaire 4, un article de presse que vous avez lu. Et est-ce que dans

9 les premières lignes, -- je n'ai malheureusement pas la date de parution de

10 cet article. Ça se trouve dans le sommaire, je suppose. Non. De toute

11 façon, nous trouverons la date. En tout cas, dans ces premières lignes, on

12 dit qu'en espace seulement de quatre jours, du 25 au 29 septembre 1991, 1

13 377 volontaires se sont présentés aux unités de la JNA et de la Défense

14 territoriale.

15 Intercalaire 5 de la pièce 568, se trouve un article qui a pour titre

16 "L'étoile rouge." Il compte 7 pages. A la troisième, je pense que c'est

17 vers le tiers de la page, on dit que la "Serbie a un devoir constitutionnel

18 de protéger les intérêts des Serbes en dehors des frontières

19 administratives de la république, telle qu'elle existe. Et elle remplit ses

20 devoirs en engageant son potentiel militaire, et en déployant les hommes

21 dans des unités de la JNA et en mobilisant ces hommes au sein de la JNA."

22 Est-ce que ceci, Madame, correspond bien à l'expérience que vous avez

23 acquise ?

24 R. Ces textes se rapportent exactement à la fin du mois de septembre, et

25 au début du mois d'octobre. En d'autres termes, c'est la période qui

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1 précède la reconnaissance des républiques en tant qu'états à part, par les

2 soins de la communauté internationale. A mon avis donc, cela était tout à

3 fait conforme à notre constitution et à notre législation, à l'époque. Pour

4 ce qui est maintenant, de ce chiffre de 1 377 volontaires qui s'étaient

5 présentés en trois jours, par le biais de ces services chargés de la

6 formation, ce sont des d'informations recueillies par ces centres, chargés

7 de l'information. Et j'ai ce type de notes dans mon cahier, dans mon

8 calepin. Cela s'est fait -- j'ai communiqué la chose aux médias, avec

9 approbation du ministre.

10 Pour ce qui est de l'autre texte, où vous parlez de l'étoile à cinq

11 branches; il s'agit d'une interview accordée par le ministre Simovic [sic]

12 à Zoran Bogavac. Mais cette interview n'a jamais été publiée.

13 Q. Sujet suivant, les rapports existant entre le ministère de la Défense

14 et Arkan. Vous donnez beaucoup de détails à ce propos dans votre résumé.

15 Cependant, est-ce que le 3 octobre, Arkan s'est trouvé encerclé, à

16 Vukovar ? Est-ce que des mesures ont été prises pour assurer sa

17 libération ? Et si c'est le cas, quel aurait été le rôle joué par l'accusé

18 ? Soyez bref s'il vous plaît.

19 R. Nous avons reçu une information de la part de Dusan Stupar. Et kum, qui

20 était en communication avec nous, disait qu'Arkan était resté encerclé dans

21 le secteur de Vukovar. Et je suis certaine pour ma part, que le président

22 Milosevic avait été informé de tout cela. D'après ce que le général Simovic

23 m'a dit, le président Milosevic lui avait demandé de demander lui-même, à

24 l'aviation de guerre, de survoler Vukovar, pour que les volontaires qui

25 sont restés encerclés là-bas à Vukovar, puissent se sortir de cet

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1 encerclement. Nous avons alors passé quarante-huit heures au bureau. Le

2 général Simovic a véritablement supplié l'aviation de ne faire que survoler

3 Vukovar, pour que les volontaires qui se trouvaient encerclés là-bas, avec

4 les hommes d'Arkan, puissent s'en sortir et revenir vivants.

5 Q. Le lendemain, est-ce qu'Arkan a fait son apparition dans le bâtiment du

6 gouvernement ?

7 R. Oui. Oui il a fait son apparition dans le bâtiment du gouvernement avec

8 son témoin, au mariage. Et il portait sur l'épaule un fusil à lunettes. Et

9 sur ce fusil, un bonnet d'Oustachi taché de sang. Et je pense qu'ils sont

10 allés voir le général Milisav Djordjevic, et d'autres groupes de travail.

11 Et je les ai conviés à entrer chez le général Simovic. D'entrer chez nous,

12 parce que nous n'étions pas encore partis du ministère. Nous nous trouvions

13 là, encore, en attendant de voir ce qu'il allait advenir de tout cela. Et

14 ils sont venus nous dire qu'ils s'étaient libérés de l'encerclement, et

15 qu'ils sont arrivés au ministère. Et nous avons eu une réunion à cette

16 occasion-là, avec eux. Il est vrai, une réunion brève, mais c'est la seule

17 que nous avons eue --

18 Q. Est-ce qu'on a parlé de la prise de prisonniers par Arkan, au moment où

19 il s'est échappé de Vukovar ?

20 R. Vous m'avez interrompu tout à l'heure, justement à l'endroit où je

21 voulais dire que c'était la seule réunion que le général Simovic a eue avec

22 Arkan. Or, oui le général Simovic lui a demandé entre autres : "Que faites-

23 vous des prisonniers ?" Et l'autre lui a répondu : "Mon général, nous avons

24 deux poules que nous avons faites prisonnières, les autres…" il a fait

25 signe du doigt en passant par le cou. En terme pratique, il a dit qu'il ne

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1 faisait pas de prisonniers du tout. Alors le général lui a demandé : "Mais

2 comment se fait-il que, dans une guerre, vous n'ayez pas de prisonniers ?"

3 Alors, l'autre lui a dit : "Mon général, nous n'avons pas de prisonniers,

4 nous autres." Et il a dit qu'il avait tué 24 Oustachis, en les liquidant

5 dans le silence. J'étais stupéfaite, je lui dis : "Comment ?" Alors, lui a

6 dit -- il m'a dit : "Madame, si vous ne pouvez pas écouter cela, sortez."

7 Alors, l'autre lui a dit : "Mais elle est plus homme, que tu ne le penses."

8 Q. Vous vous en souviendrez, Messieurs les Juges, je précise aux fins du

9 dossier d'audience, qu'il y avait ce geste fait par le témoin, comme-ci on

10 tranchait la gorge, geste qu'elle attribue à Arkan. Ce récit vous a été

11 donné d'horreurs, est-ce qu'on en a fait état à l'accusé ?

12 R. Oui. M. Simovic a juré, à ce moment-là, qu'il n'allait plus jamais

13 recevoir Arkan, et qu'il s'entretiendrait de quoi que ce soit avec lui. En

14 sa qualité de général, il ne pouvait pas s'entretenir avec quelqu'un qui

15 conduisait une guerre, sans avoir de prisonniers de guerre. Et il se

16 demandait comment il se pouvait que l'on fasse la guerre sans avoir de

17 prisonniers de guerre.

18 M. NICE : [interprétation] Très brève séquence vidéo qui se trouve à

19 l'intercalaire 6 du moins, pour ce qui est de sa transcription, de la pièce

20 568.

21 [Diffusion de cassette vidéo]

22 [Voix sur voix]

23 "Nous ne prenons plus de prisonniers. Nous allons tuer chacun des fascistes

24 que nous trouvons." Question des journalistes : "Pas de prisonniers ?"

25 Arkan : "Non, pas de prisonniers, parce qu'ils ont pris deux de nos

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1 prisonniers. Voici un soldat de 19 ans, capturé par les fascistes, par

2 l'armée croate fasciste, l'armée oustachi. Il a été torturé à mort.

3 Impossible d'oublier le passé, quand 33 membres de ma famille ont été tués

4 pendant la Deuxième guerre mondiale; torturés comme l'a été mon soldat de

5 cette façon-ci."

6 M. NICE : [interprétation] Je vous remercie.

7 Q. Est-ce que ces propos d'Arkan cadrent bien avec ce qu'il a dit à

8 l'occasion de la réunion qu'il a eue avec le ministre Simovic ?

9 R. Je tiens à dire d'abord, que je n'ai rien à voir avec cet

10 enregistrement vidéo. Je ne l'ai pas vu à l'époque avant que je ne vienne

11 ici. Tout simplement, Arkan a dit qu'il n'avait pas de prisonniers. C'est

12 tout.

13 Q. Fort bien. Paragraphe 35. Le 5 octobre, est-ce que Dusanka Vorkapic de

14 Sid, membre de la TO serbe locale de Vukovar, est venu à votre ministre

15 pour dire que les forces croates se servaient du système d'égout à Vukovar,

16 en guise d'abri, à partir duquel ils attaquaient les Serbes ? Si c'est le

17 cas, qu'est-ce que Simovic a fait ?

18 R. Il est venu dans notre cabinet, une femme toute de noir vêtue. Elle ne

19 voulait pas se présenter. J'ai insisté. Et elle a dit qu'elle s'appelait

20 Dusanka Vorkapic, mais qu'elle ne voulait pas que son nom soit publié, à

21 quelque moment que ce soit. Je le souligne, parce que, de nos jours encore,

22 je ne sais pas si son nom véritable est Dusanka Vorkapic. Mais toujours

23 est-il vrai qu'elle a apporté des plans des couloirs souterrains, des vieux

24 égouts qui, à Vukovar, ont été transformés en abri. Et c'est là que

25 cherchaient abri les Oustachi, les ZNG et tous les paramilitaires qui se

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1 trouvaient à Vukovar, et qui ressortaient de là, du côté arrière et qui

2 tombaient sur les arrières des volontaires et de l'armée, pour liquider un

3 grand nombre de soldats et de volontaires serbes.

4 Nous étions tous très surpris parce que, pour ce qui est de ces couloirs de

5 cette vieille canalisation, et bien, nous n'en savions rien, tout

6 simplement.

7 Q. Madame, vous comprenez que beaucoup de ces éléments se retrouvent dans

8 le résumé, et nous essayons de gagner du temps. Pour ce faire, partons de

9 ce résumé que fait cette madame, qui se dit être Madame Dusanka Vorkapic, a

10 la solution pourrait trouver à ce problème, Simovic. Est-ce que l'accusé

11 était au courant de ce plan ? Est-ce qu'un plan a été tramé ?

12 R. Le général Simovic est allé avec ses plans d'après ce qu'il m'a dit. Il

13 est allé voir le président Slobodan Milosevic. Une fois revenu de là-bas,

14 il a dit : "Dobrila, il a -- le président a dit que les volontaires d'Arkan

15 se fassent confier la mission de plastiquer et de bétonner ces couloirs, et

16 que Badza, avec ses unités à lui, devrait les aider à le faire."

17 J'ai œuvré à la réalisation de cela. J'ai établi un contact entre Arkan et

18 Badza. Et plusieurs années plus tard, lorsque j'ai demandé protection pour

19 ma vie et la vie de ma famille, de la part du président Milosevic, je lui

20 ai envoyé à l'époque, une lettre ouverte qui a été publiée dans le journal,

21 la revue de Nin. La chose, pour moi, avait été des plus pénible.

22 Q. Paragraphe 36, 37, et 38. Vous parlez des armées constituées par les

23 partis. Je vais simplement vous importuner pour un passage, Madame.

24 Vous avez préparé, à un moment donné, un rapport concernant les volontaires

25 de Seselj et leur combat courageux. Est-ce que l'accusé a donné des

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1 instructions à Simovic sur la question de savoir si ce rapport devait être

2 soumis au parlement ?

3 R. J'ai préparé un document à l'intention de l'assemblée, de la session de

4 l'assemblée. Et j'y ai magnifié Seselj, et ses combattants. J'ai demandé au

5 général Simovic de présenter cela au parlement comme -- en guise d'exemple

6 positif. Lorsque j'ai vu le rapport présenté par le général Simovic à

7 l'assemblée, il n'y avait pas du tout ce passage-là. Une fois revenue de la

8 session de l'assemblée, j'ai demandé au général Simovic : "Pourquoi ne

9 l'avez-vous pas dit ? C'est exact. Nous recevons quotidiennement de la part

10 du M. Seselj, des rapports. Pourquoi ne l'avoir pas dit pour que tout le

11 monde le sache ?" Alors, il m'a dit : "Le président a donné l'ordre de le

12 faire ainsi. Pourquoi le magnifier ?"

13 Q. Je pense qu'à autre moment, est-ce que de l'aide n'a pas été fournie à

14 Seselj, au moment où ces hommes se trouvaient sur la ligne de front ? Et

15 est-ce que l'accusé a participé à cela ?

16 R. Oui. Mais cela s'est passé avant. Cela, ça s'est passé lorsque M.

17 Seselj avait demandé un hélicoptère pour rendre visite aux combattants, sur

18 la première ligne de front. Il avait demandé un hélicoptère de la part du

19 ministère de la Défense. Et cet hélicoptère devait lui permettre de se

20 déplacer jusqu'aux lignes du front. Et je lui ai dit que nous n'avions pas

21 d'hélicoptère, et que nous ne pouvions pas lui en donner. Le général

22 Simovic, a dit, lui : "Que je pouvais lui donner le téléphone de Brovet."

23 Et l'autre a répondu : "Brovet, ce n'est pas un Serbe, c'est un traître

24 serbe." Alors, je lui ai dit : "Kadijevic." Alors, l'autre a répondu :

25 "Non, Kadijevic, c'est le cadre des Croates." Alors je lui ai dit : "Mais

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1 vous voulez le général Adzic ?" Alors, il a accepté de parler avec Adzic.

2 Et le général Adzic lui a présenté un rapport de la ligne de front.

3 Q. Vous parlez des crimes aux paragraphes 39 et 40. Vous venez d'en

4 parler. Paragraphe 41. Est-ce qu'un représentant, un fonctionnaire des

5 Nations Unies, un certain Marek Goulding, est venu à Belgrade le 18

6 novembre 1991 ?

7 R. Oui. C'était un sous secrétaire aux Nations Unies. Il avait commandé

8 des effectifs des Nations Unies à l'époque de la guerre. Et c'était un

9 grand ami avec le général Slavko Jovic. Il est venu à Belgrade. D'après ce

10 qu'on nous a dit, il est venu clandestinement. Et il a rencontré dans un

11 restaurant, le général Jovic, un soir.

12 Au matin, nous avons reçu des informations du domaine du renseignement,

13 disant que le général Jovic avait eu un interlocuteur très intéressant,

14 mais que les services de sûreté n'ont pas pu enregistrer et identifier, ou

15 plutôt filmer, enregistrer la conversation entière. On a demandé au général

16 Simovic de téléphoner au général Jovic, et lui demander de quoi il en

17 retournait. Le général Jovic, après cet appel, est venu au cabinet. Et

18 entre-temps, le général Simovic a informé le président Milosevic de

19 l'arrivée du général Jovic à notre cabinet. Et dès que le général Jovic est

20 arrivé, or il y avait là le président Adzic et quelques autres personnes,

21 on a téléphoné par une ligne spéciale au président Milosevic. Et le général

22 Slavko Jovic a relaté au président Milosevic les détails de leur

23 conversation de la veille.

24 Moi, j'avais pour mission de prendre des notes concernant cette

25 conversation ou plutôt sur ce que Slavko Jovic était en train de raconter.

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1 Q. Vous avez pris certaines notes mais vous n'entendiez qu'une partie de

2 la conversation qu'un des interlocuteurs mais vous avez pu reconstituer la

3 conversation à partir de ce que cela qu'a dit l'accusé à Jovic en ce qui

4 concerne le nombre de volontaires se trouvant sur la ligne de front.

5 R. Ecoutez. Nous ne nous sommes pas très bien compris. J'ai entendu les

6 deux parties parce qu'il y avait un haut-parleur de mis en marche. Je

7 n'avais pas les attributions pour ce qui était de prendre les notes de ce

8 que disait le président Milosevic et des questions qu'il avait posées. Mais

9 lui s'était essentiellement tût. Il n'a prononcé que quelques phrases et

10 quelques questions. Mais j'ai donc, pour l'essentiel, noté ce que disait le

11 général Jovic.

12 Q. Vous souvenez-vous de ce que l'accusé a dit à Jovic à propos du nombre

13 de volontaires se trouvant sur les lignes de front et de quelle façon il

14 fallait en parler ?

15 R. Le général Jovic qui avait été mis à la retraite depuis plusieurs

16 années déjà, me semble-t-il, a dit au président Milosevic qu'il avait dit à

17 Merak Goulding qui se trouvait sur les lignes de front, quelque mille

18 volontaires. Le président Milosevic, sur ce, lui a rétorqué qu'il y a

19 quelque 500 paramilitaires ou quelque chose de ce genre.

20 Q. Et là-dessus, qu'a dit Jovic ?

21 R. Il a dit : "Camarade, président, je ne savais pas qu'ils étaient 500.

22 Moi, je lui ai dit qu'il n'était pas plus de 1 000."

23 Q. Ceci se trouve à l'intercalaire 7, n'est-ce pas de la pièce 568. C'est

24 là le procès verbal que vous avez préparé de cette réunion mais vous

25 n'étiez autorisé qu'à rédiger, disons, votre protagoniste à vous. Et on

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1 trouve à la page 3 sur 9, cette partie-là : "Je ne savais pas qu'ils

2 étaient 500. Je lui ai dit que le nombre n'excédait pas 1 000. Nous n'avons

3 pas fini la conversation." A votre avis, il y avait combien de

4 volontaires ?

5 R. Lorsqu'il demandait des équipements et de l'aide, il parlait toujours

6 de 6 000 à 8 000. Il demandait 8 000 casques, 8 000 canons longs. Il

7 demandait 2 000 -- enfin, il a toujours été question de plusieurs milliers.

8 Je le dis partant de ce qu'ils avaient demandé comme aide.

9 En réalité, pour ce qui est de savoir combien ils étaient, cela doit

10 certainement existé au niveau des centres chargés de l'information parce

11 que les volontaires qui sont allés légalement sur les lignes de front et

12 qui voulaient défendre les Serbes en danger sur le territoire de la

13 Croatie, ont été recensés au niveau des centres chargés de l'information

14 tout au large de la Serbie.

15 Q. Fort bien. Paragraphe 42.

16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je note que le paragraphe 40 parle aussi

17 de l'accusé puisque, apparemment là, on dit qu'il a reçu les renseignements

18 de M. Simovic.

19 M. NICE : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Juge. J'ai oublié ce

20 passage.

21 Q. S'agissant de l'information relative à des crimes de la guerre ou à

22 propos de la guerre, est-ce que vous avez reçu des renseignements disant

23 que l'unité Dusan Silni, Mirko Jovic et qu'il y avait aussi d'autres

24 groupes chetniks indépendants ?

25 R. Nous recevions de la part de ceux qui revenaient du front et qui

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1 manifestaient devant le bâtiment du gouvernement, et bien, nous obtenions

2 de leur part des informations disant qu'il y avait un grand nombre

3 d'invalides qui restaient devant le gouvernement et qui attendaient d'être

4 reçus. Puis, il y avait les mères qui protestaient pour le fait que leurs

5 fils soient emprisonnés dans des casernes en Croatie. Et de là, nous

6 venaient des informations disant que certains groupes de volontaires

7 perpétraient un bon nombre de crimes et ils avaient redouté que les Croates

8 et les Oustachi finiraient par se venger sur leurs fils prisonniers de tout

9 ce que faisaient ces unités de volontaires sur le champ de bataille.

10 Je dois également souligner un fait --

11 Q. Terminez ce que vous vouliez dire.

12 R. Merci beaucoup de m'avoir autorisé de terminer. Je voulais juste

13 ajouter que cette unité Dusan Silni, les unités de Paroski, les unités d'un

14 certain Mauzer que l'on disait appartenir au Parti démocratique et bien, je

15 tiens à dire que nous n'avions rien à n'en voir avec eux. Nous n'avions

16 qu'une information sur leur nombre concernant le moment où ils allaient sur

17 le front et en revenaient qui leur commandait, et cetera. Nous, au

18 ministère, nous n'avions aucun renseignement là-dessus.

19 Je voulais dire que, sur les lignes de front, il y avait des gens qui

20 n'appartenaient pas, qui ne rentraient pas dans le cadre du système mis en

21 place.

22 Q. Ces informations relatives à des crimes commis par des unités

23 identifiées, est-ce que ces informations ont été transmises à l'accusé ?

24 R. Le général Simovic se rendait chez le président Milosevic et j'espère

25 bien qu'il lui transmettait tout cela.

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1 Q. Paragraphe 42. Est-ce qu'un jour Simovic était censé apparaître à la

2 télévision avec Arkan et ces volontaires mais que finalement c'est

3 quelqu'un qui l'a remplacé. Pourriez-vous nous expliquer les circonstances

4 de ce changement ?

5 R. J'avais convenu avec M. Alimpijevic de la télévision Studio B de faire

6 venir des représentants de volontaires et des représentants des autorités

7 pour que les uns est les autres parlent de leur intégration aux systèmes

8 légaux afin que les volontaires soient placés sur un pied d'égalité avec

9 les réservistes réguliers et avec les conscrits militaires ordinaires. Il

10 avait été convenu que le général Simovic se rendrait à la télévision avec

11 un groupe de volontaires -- un groupe de volontaires et leurs

12 représentants, j'entends.

13 Juste avant le départ ou plutôt avant que d'y aller, lorsque le général

14 Simovic devait se rendre à cette réunion-là, il est venu au cabinet, un

15 colonel Mladen Kovacevic qui a dit : "Général, je vais à la télévision au

16 moment même. J'ai été contacté par le président Milosevic et il m'a dit de

17 représenter les autorités, d'être là-bas avec les volontaires à la

18 télévision."

19 Nous sommes restés coi. Et c'est lui qui est allé à la télévision et nous

20 nous sommes postés devant les écrans pour suivre le programme. Nous étions

21 tous étonnés. Le colonel Mladen Kovacevic avec son apparence très stricte,

22 très militaire, et il disait qu'il n'avait rien à voir avec les

23 volontaires, que c'étaient des paramilitaires et que nous ne savions pas

24 combien ils étaient, que nous ne savions rien du tout à leur sujet. Et je

25 n'oublierai jamais le visage du général Simovic qui disait : "Mais de quoi

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1 est-ce qu'il en retourne ?"

2 Q. Puis, vous parlez dans votre résumé des groupes de coordination au

3 ministère de la Défense. Là, vous n'évoquez pas en personne l'accusé mais

4 ici, je vous pose une question de contexte. Le paragraphe 45 le révèle,

5 l'activité principale ou la tâche principale de ces groupes de

6 coordination, c'était la coordination des activités au sein du gouvernement

7 de Serbie avec la Défense territoriale, des forces de la police des SAO

8 ainsi qu'avec l'armée. C'est exact ?

9 R. Oui.

10 Q. Effectivement, ces régions de Croatie bénéficiaient d'un appui, d'un

11 soutien juridique, financier, militaire de la Serbie, du gouvernement de

12 Serbie et ceci passait par tous les ministères du gouvernement. Votre

13 résumé le révèle, n'est-ce pas ?

14 R. Oui.

15 Q. Passons rapidement au sujet suivant; Goran Hadzic. Le 29 septembre

16 1991, est-ce que votre ministre s'est entretenu avec l'accusé par téléphone

17 et est-ce qu'à la suite de cette conversation, vous avez dû aller vous

18 rendre au cabinet, plus exactement du cabinet du Premier ministre Zelenovic

19 en rapport avec Hadzic ?

20 R. Cette conversation téléphonique, je ne l'ai pas entendue,

21 mais c'est le ministre Simovic qui m'a dit que le président Milosevic avait

22 dit qu'il fallait que j'aille voir le Premier ministre Zelenovic. Il y

23 avait là-bas le ministre Zoran Sokolovic, et avec lui Goran Hadzic, Arkan

24 et son Kum, son témoin au mariage. Et on m'a dit à moi que je devais

25 présenter Goran Hadzic à l'intention de l'opinion publique serbe afin qu'il

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1 bénéficie de la notoriété et parce qu'il était président et qu'il était

2 sensé représenter les Serbes à La Haye.

3 Alors j'ai demandé à Goran Hadzic de quoi il était président, je ne savais

4 pas quoi dire.

5 J'ai contacté Zoran Bugavac, un journaliste, et je lui ai dit qu'il

6 s'agissait de former Goran Hadzic, qui était président de quelque chose,

7 pour qu'il dise de quoi il était président et ce qu'il était sensé dire

8 devant les médias et à la radio. J'ai fait venir mon ex-rédacteur en chef

9 Momir Brkic et je lui ai demandé de recevoir des représentants des unités

10 de volontaires ainsi que des représentants des régions qui étaient des

11 régions de combats et de les présenter à radio Belgrade à un certain temps.

12 Après Brkic m'a dit : "Mais demande donc au ministre pourquoi il m'a envoyé

13 ces criminels à la station radio ? Ils sont venus en pleine tenue de

14 combat. Ils ont fait peur à tout le monde ici. Alors quand tu m'envoies

15 quelqu'un, dis-moi ce que tu m'envoies pour que nous ne recevions pas des

16 criminels."

17 Après il ne disait plus que Goran Hadzic et Arkan étaient des criminels.

18 Q. Est-ce que vous avez expliqué à Momir Brkic que vous aviez contacté,

19 qui vous avez donné pour instruction d'assurer la promotion de cet homme à

20 la télévision ?

21 R. Bien sûr. Comment voulez-vous que j'assure sa promotion sans que je

22 l'ais expliquer auparavant ? Donc il s'est tu et il a continué à faire son

23 travail.

24 Q. Paragraphe 49, là on parle de la Krajina. Babic est-il venu souvent

25 régulièrement au ministère de la Défense pour demander de l'aide ? Répondez

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1 par oui ou par non ?

2 R. Me permettriez-vous de revenir à la question précédente, juste pour

3 quelques instants.

4 Q. D'accord, d'accord.

5 R. Le président Milosevic, à l'occasion d'une conversation téléphonique, a

6 demandé qu'on lui dise qui était ce dénommé

7 Goran Hadzic ? Le général Simovic a appelé le général Nenezic pour que

8 celui-ci explique de qui il s'agissait ? Qui était ce Goran Hadzic ? Et ils

9 ont conclut à ce moment-là que Goran Hadzic était arrivé trop loin, qu'il

10 était arrivé jusqu'à La Haye et que l'on ne pouvait plus faire marche

11 arrière.

12 Je voulais dire donc par là que le général Nenezic avait placé ce Goran

13 Hadzic entre les pattes du président Milosevic, et le président Milosevic

14 ne savait pas du tout de qui il s'agit. Lorsqu'il l'a contacté, je

15 m'explique auprès du président Milosevic de ce que je viens de dire, mais

16 c'était ce que j'ai appris et cela m'a toujours fait mal et cela m'a crevé

17 la conscience que de voir les choses ainsi faites.

18 Pour ce qui est de savoir si nous avons eu des contacts avec Milan Babic,

19 je voudrais d'abord entendre la question que vous voulez me poser.

20 Q. Est-ce que l'accusé a fait une remarque à Simovic au fait que Babic

21 avait pris l'initiative de nommer des personnes dans la Krajina ?

22 R. Oui. Le président Milosevic s'était plaint auprès du général Simovic du

23 comportement de Milan Babic. La secrétaire Mira et moi-même, pendant des

24 heures, avons dû rechercher Milan Babic pendant des heures et des heures à

25 Belgrade. Il n'est jamais arrivé à l'heure à des réunions qu'il avait

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1 fixées dans les bureaux du président Milosevic. Et ensuite --

2 Q. Nous n'avons pas beaucoup de temps, Madame. Je voulais simplement

3 savoir si l'accusé avait dit quoi que ce soit à propos du fait que Babic

4 prenait l'initiative de désigner lui-même des personnes à des fonctions en

5 Krajina ?

6 R. Il disait : "Il ne demande à personne, ni à Kadijevic, ni a toi, ni à

7 moi. Il nomme Djujic, il nomme le lieutenant-colonel Mladic, des gens à qui

8 on a tué des membres de la famille et qui vont finir par se venger là-bas.

9 Que font-ils là-bas ? Ce Milan Babic, je ne sais pas s'il travaille au

10 courant électrique ou sur pile -- ?"

11 Q. Fort bien Madame. Est-ce que vous avez assisté à une réunion où se

12 trouvait le général Djujic ?

13 R. Oui.

14 Q. Ceci dans le bureau de Simovic au moment où il voulait de l'argent ? Et

15 si c'est le cas, quelle fut la résolution du problème et quelle part jouait

16 l'accusé, quel rôle a joué l'accusé dans la résolution du problème ? Soyez

17 bref, s'il vous plaît, nous avons peu de temps.

18 R. Certes. Je me trouvais au cabinet lorsque le général Djujic est entré

19 avec son escorte, donc plusieurs accompagnateurs qui sont restés devant la

20 porte, et à ce moment-là plus personne ne pouvait entrer dans le cabinet.

21 Le général Djujic disait : "Du fric, Tomo; du fric; des sous." Et le

22 général a téléphoné à Zebic et il a téléphoné au président Milosevic, et il

23 a pris ces clics et ces claques et il est allé voir le président Milosevic.

24 Moi, je ne pouvais pas quitter le cabinet et je n'étais pas sensé répondre

25 au coup de fil.

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1 Le général Djujic attendait dans le cabinet même qu'on lui apporte des

2 sous. Lorsque le général Simovic est revenu, il a

3 demandé : "Alors qu'est-ce que tu as fait ? Qu'est-il arrivé ?" Le général

4 se taisait.

5 Au bout d'un certain temps, Zebic est arrivé. Il a apporté une valise, une

6 mallette plus grande qu'une mallette d'attaché affaire. Il a placé cela sur

7 la table devant le général Djujic. Le général Djujic a ouvert cette valise,

8 le couvercle, puis l'a refermé. Il a soulevé la valise pour la soupeser, et

9 il a pris ça et il s'est dirigé vers la porte.

10 Le général Simovic et Zebic ont haussé les épaules, ils ont écarté les bras

11 en se regardant l'un et l'autre en qui le général Simovic n'a plus prononcé

12 une seule parole.

13 Q. Dans votre résumé, vous parlez de l'influence qu'avait le Parti

14 socialiste de Serbie. Vous faites mention également de la propagande. A ce

15 propos, lorsque Radovan Karadzic a été promu par Jevrem Damjanovic,

16 rédacteur en chef d'Ilustrovana Politika et d'Ekspres, il l'a été sur les

17 instructions de qui ?

18 R. La question, vous l'avez posée d'une façon erronée. J'ai rédigé un

19 texte, en effet, que j'ai porté à mon rédacteur en chef du journal

20 Ilustrovana Politika, M. Jevrem Damjanovic. Je m'excuse d'avoir à vous le

21 dire, mais c'est ainsi que ça c'est passé. Dans ce texte là, j'ai traité

22 d'un sujet où il était question de Zoran Raskovic, de Karadzic et de bon

23 nombre d'autres personnes. Mon rédacteur en chef, Jevrem Damjanovic m'a dit

24 : "Dobrila, personne n'ose te publier ce texte." "Pourquoi ? A cause de

25 Radovan Karadzic ?" Et, "pourquoi ? Parce que le président Milosevic a

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1 donné l'ordre de promouvoir Radovan Karadzic en leader serbe. Et c'est moi

2 qui suis nommé au poste de rédacteur en chef d'Ekspres Politika pour

3 réaliser cette mission, tu risques ta tête avec tes bêtises."

4 Donc je m'excuse une fois de plus pour ce qui est de la rectification de

5 tirs à laquelle j'ai procédée pour votre question.

6 Q. De rien, Madame. On vous a demandé d'écouter ce que vous avez fait, une

7 conversation interceptée. Donc, on voit la transcription à l'intercalaire

8 8, de la pièce 568. Je n'ai pas l'intention de diffuser cette écoute. Mais

9 est-ce que vous vous souvenez de cette conversation interceptée, dont vous

10 voyez la teneur, nous allons rapidement examiner ce document. Ma question

11 sera simple, la voici : Quelles sont les voix que vous avez reconnues dans

12 cet enregistrement ? C'est la seule question que je vous poserai.

13 R. C'est à deux reprises que j'ai réécouté cette conversation. J'ai été

14 très surprise parce que ces voix ressemblent d'abord à la mienne, puis

15 ensuite à la voix du général Simovic, puis à la voix de Radovan Karadzic.

16 Mais avec tout le respect que je dois à ce Tribunal et à vous-même, je me

17 dois de vous dire que cette conversation-là, je ne m'en souviens pas du

18 tout. Et que cette conversation, je ne l'ai notée nulle part.

19 Q. Je vous remercie Madame. Nous avons déjà entendu parler de ce livre. Je

20 ne sais pas si des questions vont vous être posées à ce propos. Mais

21 maintenant nous examinons l'intercalaire 10 de cette pièce 568. C'est une

22 lettre manuscrite --

23 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, n'oubliez pas le temps.

24 Oui bien sûr, l'écoute téléphonique recevra une cote provisoire.

25 M. NICE : [interprétation] Bien sûr. Mais je n'ai plus que quelques

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1 questions à poser, Monsieur le Président.

2 Q. Intercalaire 10, voici une lettre que vous avez examinée, qui se

3 termine par une signature, vous le verrez, Messieurs les Juges, c'est à la

4 8e page, c'est la signature de qui ?

5 R. Cette lettre-là a été destinée au général Simovic, ou plutôt c'est le

6 général Simovic qui l'a adressée à Marko Negovanovic et au président de la

7 République, Slobodan Milosevic pour me protéger. Donc c'est une lettre

8 qu'il a rédigée lui-même. Et dans les documents, vous retrouverez la lettre

9 intégrale, manuscrite. Vous y trouverez sa signature à la fin de la lettre.

10 Q. Je vais lire un passage que j'aimerais présenter aux Juges, passage

11 surligné le voici :

12 "C'est simplement parce que c'est seulement avec mon -- uniquement avec mon

13 autorisation qu'elle a consigné ces événements, les conversations avec

14 différents interlocuteurs, et qu'elle a repris ceci dans un journal dont

15 les extraits sont parus dans le magazine Nin. J'ai donné mon aval personnel

16 pour ce qui est des parties importantes. Pour les parties moins

17 importantes, je pense qu'elle en a fait une consignation exacte, et j'ai

18 voulu vérifier plus tard que c'était bien exact. Et c'est bien ce que

19 c'est, c'est tout à fait exact, je l'ai constaté à la lecture de la série

20 parue dans Nin."

21 Voilà, je n'ai plus que deux questions, car j'en ai terminé des pièces.

22 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je pense qu'il y a une autre affaire, cet

23 après-midi dans ce prétoire. Parlons-en demain.

24 M. NICE : [interprétation] Il nous vient un témoin qui allait peut-être

25 commencer jeudi. Je ne sais pas quelle sera la durée du contre-

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1 interrogatoire pour ce témoin-ci. Nous pourrions avoir un témoin après

2 Madame le Témoin. Je demanderais simplement aux amis de la Chambre et à

3 l'accusé de se préparer pour le témoin prévu jeudi.

4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] C'est lequel ?

5 M. NICE : [interprétation] Il s'agit du témoin C-36 qui est toujours

6 protégé.

7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] 62.

8 M. NICE : [interprétation] Oui. Monsieur le Témoin C-62.

9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] C-062.

10 M. NICE : [interprétation] Oui. Nous espérons pouvoir commencer son

11 audition jeudi.

12 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Fort bien. L'audience est suspendue, elle

13 reprendra demain 9 heures.

14 --- L'audience est levée à 13 heures 53 et reprendra le mercredi 22 octobre

15 2003, à 9 heures 00.

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