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1 Le mardi 4 novembre 2003
2 [Audience publique]
3 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 03.
6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous avez la parole.
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, avant de poursuivre je voudrais
8 vous poser la question suivante : Avez-vous pris en considération la
9 possibilité de m'accorder davantage de temps parce que Lord Owen a passé
10 trois ans aux fonctions de négociateur international primordial principal.
11 Il est impossible de parcourir en trois heures ne serait-ce que de façon
12 superficielle autant de questions.
13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous avons étudié la question -- nous
14 vous l'avions dit. Vous aurez le premier volet de la journée, une heure et
15 demie. Vous pourriez gagner du temps, économiser du temps en posant des
16 questions plus concises, plus concentrées plutôt que de vous éterniser
17 lorsque vous les posez. Allez-y.
18 LE TÉMOIN: DAVID OWEN [Reprise]
19 [Le témoin répond par l'interprète]
20 Questions de la Défense, M. Milosevic : [Suite]
21 Q. [interprétation] Lord Owen, nous avons levé l'audience hier sur vos
22 propos au sujet des crimes perpétrés par les Serbes et pour ce qui est de
23 ma constatation au sujet des crimes perpétrés par toutes les parties en
24 présence. J'espère que vous vous souviendrez du fait que nous avons parlé
25 des camps en Bosnie-Herzégovine. Et vous vous souviendrez j'espère que
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1 vous-même, Stoltenberg, et moi-même, ainsi que d'autres participants aux
2 entretiens, le président Bulatovic notamment qui était présent, avions
3 obtenu des assurances de la part de la direction de la Republika Srpska
4 disant que mis à part les prisonniers de guerre et les prisons régulières,
5 il n'y avait rien d'autres. Et on nous a affirmé que Radovan Karadzic avait
6 convié Paddy Ashdown à venir pour s'assurer de lui-même. Il l'a fait et il
7 a fait une déclaration par la suite, et il s'est avéré que ce qui a été
8 repris par la presse ne s'est pas arrivé exact, vous en souvenez-vous ?
9 R. Pour ce qui est du premier volet de nos conversations avec M. Karadzic,
10 je m'en souviens, c'est certain. Et elles se sont bien déroulées dans ce
11 sens-là, nous avons reçu beaucoup d'assurance que ce soit à propos des
12 camps ou à propos des otages. Il avait des gens qui avaient été faits
13 prisonniers. Il est tout à fait exact de dire que ces questions étaient
14 soulevées fréquemment par moi-même puis par M. Vance, avec M. Vance plus
15 exactement, et puis quand même avec M. Stoltenberg et vous. Vous avez
16 exhorté ces hommes pour veiller à ce que leur pratique soit acceptable aux
17 yeux de la communauté internationale et à nos yeux.
18 Q. Et j'ai demandé la présence constante de la Croix rouge internationale.
19 J'ai demandé qu'il soit procédé aux échanges de prisonniers suivant un
20 principe tous pour tous. En a-t-il été ainsi ou pas, Lord Owen ?
21 R. Il est certain que toujours vous avez cherché à faire participer la
22 communauté internationale le CICR, et vous avez vu le chef du CICR de temps
23 à autre. Je crois que nous avons eu un bien meilleur accès au camp. La
24 situation était bien pire à mon arrivée début septembre 1992. Je pense que
25 la situation s'est améliorée mais d'après ce que j'ai entendu dire plus
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1 tard, les améliorations n'étaient pas ce qui avait été promis -- elles
2 n'étaient pas aussi bonnes que celles qui avaient été promises.
3 Q. Oui, mais mon impression a été la suivante, et j'espère que vous avez
4 eu la même impression, parce qu'un bon moment après la guerre il nous est
5 parvenu des rumeurs disant qu'il y a eu des violations du droit de guerre
6 internationale au niveau de certaines prisons, mais à l'époque quand la
7 direction de la Republika Srpska, et j'entends là Karadzic, Koljevic,
8 Krajisnik et autres qui avaient pris part aux activités politiques
9 n'avaient pas connaissance de ses violations là. C'est du moins ce qu'on
10 nous avait assuré. Et mon impression à moi était celle de croire qu'ils
11 étaient sincères en nous le disant. Etait-ce votre impression à vous
12 aussi ?
13 R. Je pense qu'un changement est intervenu au niveau de
14 M. Karadzic. Au début, en 1992 ainsi qu'en 1993, cet homme donnait
15 l'impression de comprendre la pression exercée par l'opinion internationale
16 à propos des questions du droit humanitaire. Pour exemple, s'il arrivait
17 que quelqu'un soit fait prisonnier, un étranger par exemple, et qu'on
18 intervenait pour le libérer, il disait que ce n'était pas une prise
19 d'otage, que c'était simplement une question de droit commun et qu'une
20 procédure serait instaurée et que lui n'avait rien à voir dans tout cela.
21 Au début, on avait l'impression que c'était juste mais il a essayé de
22 bafouer l'opinion internationale sur les champs de bataille, et plus les
23 plans se sont succédés, moins il est devenu digne de confiance, et on avait
24 l'impression que ce n'était pas simplement des prisonniers mais des otages.
25 Il nous a posé beaucoup de problèmes en 1994 et 1995 puisqu'il a eu à ce
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1 moment-là des prises d'otages. Il devenait épatant. Il était beaucoup plus
2 manifeste que c'était des otages politiques que ce n'était pas des gens qui
3 avaient commis des délits.
4 Mais vous le saviez cependant, nous ne pouvons rien faire de plus. Nous
5 avons reçu des assurances de la part de M. Karadzic. Et moi, je n'étais pas
6 d'accord avec vous selon lesquels ces engagements à lui étaient sincères.
7 De plus en plus ils étaient moins sincères et moins convaincants.
8 Q. Je ne puis m'aventurer à étudier le degré de sincérité, mon impression
9 était celle qu'ils avaient été sincères. Il a contribué le fait, si vous en
10 souvenez, que certaines délégations, et même en arrivant en Serbie, avaient
11 posé des questions sur des camps qui auraient été créés en Serbie. Vous en
12 souvenez-vous de cela ?
13 R. Oui, je n'en ai pas un souvenir parfait, je l'avoue, mais je pense
14 effectivement qu'on a parlé du camps en Serbie.
15 Q. Alors, vous en souvenez-vous alors du fait que face à une assertion
16 aussi absurde que cela, je l'ai contestée non pas en fournissant des
17 garantis disant qu'il n'y en avait pas, mais à chaque délégation qui posait
18 ce type de question, je proposais de se servir de l'hélicoptère de
19 permanence de la police et de placer sur un doigt sur la carte de la Serbie
20 pour se déplacer vers l'endroit où ils avaient des doutes au sujet ou des
21 suspicions, au sujet de l'existence de camps de quelle que nature que ce
22 soit et j'ai dit qu'il n'en avait pas. Vous en souvenez-vous ?
23 R. Non, je ne m'en souviens pas, mais je n'ai aucune raison de douter de
24 vous. Je pense que vous étiez assez confiant à propos de ce qui se passait
25 dans votre pays dont vous étiez responsable, la Serbie et puis la
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1 République fédérale de Yougoslavie. Mais je pense que vous saviez que ce
2 qui se passait en Serbie au Monténégro. Je n'en ai pas le moindre doute.
3 Q. Mais je pense que vous devez forcément savoir qu'il n'y avait aucun
4 camp sur le territoire de la Serbie et du Monténégro.
5 R. Le problème pour moi ce serait d'affirmer quelque chose que je ne sais
6 pas. Ce n'est pas quelque chose qui est apparue sur mon radar si vous
7 voulez de façon massive. Je m'intéressais surtout à l'époque aux camps qui
8 existaient en Bosnie-Herzégovine. Je m'intéressais aux violations des
9 droits de l'homme en Croatie au Kosovo ainsi qu'en Bosnie-Herzégovine.
10 Souvent j'ai parlé avec vous de violation des droits de l'homme au Kosovo,
11 et rappelez-vous je n'étais pas d'accord avec ce qui se faisait au Kosovo
12 qui se trouvait sur le contrôle serbe.
13 Q. Le Kosovo est un sujet à part. Il s'agit-là d'une question de principe.
14 J'ai estimé que le Kosovo était une question intérieure à nous et cela
15 n'avait rien à voir du tout avec la guerre en Bosnie-Herzégovine en
16 Croatie, d'une manière générale, avec les événements liés au démantèlement
17 de la Yougoslavie, et ça vous le savez pertinemment.
18 R. Oui, je sais que c'était votre avis. Et bien sûr je n'étais pas
19 d'accord avec vous. Et il nous fallait parvenir à une espèce de modus
20 vivendi. Mais vous avez accepté que le mandat de la conférence de Londres,
21 mandat que vous aviez accepté, signifiait que cette conférence
22 internationale sur l'ex-Yougoslavie avait le droit de regard sur le Kosovo,
23 et vous n'avez jamais exclu d'en parler. Vous avez montré de façon très
24 claire que vous n'étiez pas prêt à en parler, que vous estimiez que nous
25 n'avions pas le droit d'intervenir. Bien sûr, nous n'étions pas là pour
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1 parler du Kosovo, mais si on parle de dialogue, je pense que le dialogue à
2 propos du Kosovo a été le plus frustrant de tous. Vous en conviendrez, je
3 suis sûr.
4 Q. Nous n'en avons pas parlé du tout parce que j'ai toujours considéré que
5 c'était-là une affaire intérieure.
6 R. Ce n'est pas le souvenir que j'en ai. Nous avons bien parlé du Kosovo.
7 Souvent vous avez dit que c'était une question de politique intérieure,
8 mais ni moi-même, ni M. Stoltenberg, ni
9 M. Vance n'avons accepté ceci. Il y avait désaccord très profond entre nous
10 à ce propos.
11 Q. Pour ce qui est du désaccord à ce sujet-là, oui. Il a existé. Je ne
12 conteste pas.
13 Il est quelques sujets, Lord Owen, que j'essaierai de mettre sur le tapis
14 pour profiter du peu de temps, du temps limité qui m'est imparti. Je vous
15 demanderais donc à cette fin de me répondre de la façon la plus concise
16 possible.
17 D'abord, au sujet de la nature de la guerre. A plusieurs endroits dans
18 votre ouvrage, dans votre livre sur la guerre en Bosnie-Herzégovine et au
19 sujet des guerres sur le reste des territoires de l'ex-Yougoslavie, vous
20 les qualifiez de guerres civiles et de guerres de sécessions. Par exemple,
21 en page 5, paragraphe 1, moi j'ai ce CD-ROM que la partie adverse m'a
22 confié, et la pagination de ce que vous avez sous les yeux, ce n'est pas de
23 ma faute si ce n'est pas la même.
24 Mais vous dites que toutes les guerres apportent du mal mais notamment les
25 guerres civiles, et cela l'histoire entière l'a enregistré. Le fait que ces
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1 guerres de Yougoslavie ont contenu des éléments de guerre de sécession et
2 de guerre civile n'ont fait que contribuer à la gravité des conflits et à
3 la difficulté d'apporter des jugements objectifs.
4 Avez-vous estimé véritablement que ces conflits étaient d'une guerre civile
5 et de sécession ?
6 R. Je crois qu'il y a eu dans ce conflit des éléments d'agression et qu'il
7 était impossible de qualifier ce conflit de guerre civile dès le moment où
8 la communauté internationale avait accepté l'indépendance de ce qui avait
9 été jusqu'alors des républiques dans la région de l'ex-Yougoslavie.
10 Cependant, dans mon livre, je ne nie pas que j'aie dit qu'il y avait des
11 aspects de cette guerre qui relevaient de la guerre civile. A mon avis, la
12 communauté internationale n'a jamais vraiment compris notamment cela, en
13 tout cas, des parties importantes de la problématique.
14 Q. Je pense également que la communauté internationale n'a pas compris et
15 c'est la raison pour laquelle votre explication est très utile parce que
16 vous êtes la personne la plus compétente pour l'apporter.
17 Nous avons constaté en effet hier que l'Armée populaire yougoslave se
18 trouvait sur tout son territoire à elle et que, suite à la reconnaissance
19 de l'indépendance de la république, elle s'est retirée de la Croatie une
20 fois que le plan Vance a été adopté et que les Nations Unies sont arrivées,
21 puis elle s'est retirée de la Bosnie-Herzégovine à la période que nous
22 avons citée hier. Il a été par la suite créé une armée de la Republika
23 Srpska. Depuis lors, il n'y pas eu de soldats étrangers du moins pour ce
24 qui est de la Serbie ou du Monténégro, en d'autres termes, la République
25 fédérale de Yougoslavie sur le territoire de cette république-là. Et
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1 j'imagine que vous devez forcément vous en souvenir assez bien parce
2 qu'avant cela, le tout était une Yougoslavie.
3 R. Oui, l'histoire est complexe. Et je ne prétends pas la maîtriser de
4 façon complète, mais c'était une partie importante de la tâche qui
5 m'incombait de comprendre comment était née la Yougoslavie, comment les
6 frontières internes des différentes nations, des différentes régions de la
7 Yougoslavie avait été établies, comment les cartes avaient été tracées. Et
8 je ne suis pas à ce propos en désaccord avec vous.
9 Q. Je tiens à vous rappeler, et je ne lis votre livre, mais j'ai une
10 chronologie des événements. Je crois que vous allez vous en rappelez, le 23
11 juillet 1993, comme le dit cette chronologie, le co-président de la
12 conférence internationale sur l'ex-Yougoslavie, Lord David Owen, a rejeté
13 la possibilité d'une intervention militaire en Bosnie-Herzégovine et a
14 argumenté la chose en affirmant qu'il était difficile d'intervenir dans une
15 situation qui n'est pas une agression.
16 Et ensuite, on cite vos propos : "C'est ainsi qu'en partie que cette guerre
17 a commencé, mais cela a toujours été un conflit entre les Serbes de Bosnie,
18 les Croates de Bosnie, et les Musulmans de Bosnie."
19 C'est ce que vous avez déclaré en juillet 1993. J'imagine que vous vous en
20 souvenez de cela ?
21 R. Hélas, je ne me souviens pas de chacun des mots que j'ai eu l'occasion
22 de prononcer, mais je pense qu'en principe la guerre en Bosnie-Herzégovine
23 était une guerre opposant ceux qui y vivaient, mais il serait fou ou
24 stupide de croire que c'était-là le seul aspect de cette guerre. Pendant
25 toute cette période, cette période de mon mandat, il y avait des forces de
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1 la JNA, des gens qui n'étaient nés en Bosnie-Herzégovine et qui opéraient à
2 l'intérieur de la Bosnie-Herzégovine et qui recevaient l'aide et
3 l'assistance de l'armée yougoslave. Dans la même veine, il y avait des
4 forces conséquentes venant de Croatie qui opéraient aux côtés des Serbes de
5 Croatie et qu'ils leurs donnaient des armes et des munitions. Par
6 conséquent, les deux états voisins limitrophes de la Bosnie-Herzégovine qui
7 avaient été partis de la Yougoslavie dans le passé, à savoir, la Serbie et
8 la Croatie, étaient parties prenantes à cette guerre et c'était-là des
9 aspects en faisant une guerre civile qui traversait la Yougoslavie. Mais
10 c'était aussi une guerre civile à l'intérieur de la Bosnie-Herzégovine.
11 Puis il fallait que la guerre change sur le plan de la communauté
12 internationale. Je pense que vous et beaucoup de Serbes ont trouvé ça
13 difficile et s'étaient posés de beaucoup de Croates. Mais une fois qu'il y
14 avait eu la reconnaissance, à ce moment-là, il fallait qu'il y ait un
15 changement. Il fallait traiter ces pays en tant que pays indépendants.
16 On peut discuter évidemment de l'opportunité de la reconnaissance, mais le
17 droit qu'avait la communauté internationale de déclarer un état en passe de
18 dissolution, de déclarer certaines parties de cet ancien état indépendant,
19 ceci est un droit qui est inscrit dans la charte des Nations Unies, et
20 c'est ce qui s'est passé, et ça a changé la situation. Par conséquent, à
21 partir de ce moment-là, toute activité déployée par un pays à l'extérieur
22 de la Bosnie-Herzégovine, aux yeux du droit international, était une
23 agression. Ce n'était plus une guerre civile.
24 Q. Ce serait exact si nous avions eu des troupes sur les territoires de la
25 Bosnie-Herzégovine après la reconnaissance de celle-ci. Vous n'ignorez
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1 toutefois pas que nous n'avions pas de troupes sur son territoire. Et je
2 vous ai dit à vous et à Stoltenberg qu'il y a une seule exception, à savoir
3 que j'avais envoyé un peloton de la police sur le territoire de la Bosnie-
4 Herzégovine à la gare ferroviaire de Strpce, là où un crime a été perpétré
5 parce qu'on a fait descendre des gens du train. C'est la voie ferrée de
6 Belgrade à Bar et ça passait par le territoire de la Republika Srpska, mais
7 nous n'avions pas confiance pour ce qui est d'une perpétration, à nouveau,
8 d'un autre crime par des paramilitaires et cela se trouve seulement à neuf
9 kilomètres de cette ligne de voie ferrée entre Belgrade et Bar.
10 Et je vous ai informé, vous-même et Stoltenberg de la chose. C'était la
11 seule exception. J'ai envoyé un peloton de police pour monter la garde à
12 cette station et prévenir toute éventualité de renouvellement de ce type
13 d'événements.
14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vous avais averti. Il ne faut pas que
15 vous perdiez votre temps. Quelle est la question posée ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Je me souviens de cet incident et je ne pense
17 que ce fût vraiment un incident sur tout ce qui s'est passé, mais c'est un
18 fait. Cette voie ferrée passait sur un tout petit bout de territoire dans
19 la Bosnie-Herzégovine, neuf kilomètres à peine, peut-être un peu plus au
20 plus.
21 M. MILOSEVIC : [interprétation]
22 Q. Mais c'est précisément à l'exception de la présence de ce peloton que
23 j'ai -- c'est de cela que je vous avais parlé et si l'on accepte cela, il
24 n'y avait pas d'autres forces de la République fédérale de Yougoslavie sur
25 le territoire de la Bosnie-Herzégovine. J'imagine que vous vous en
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1 souvenez ?
2 R. Je me souviens de l'interprétation que vous avez livrée. On en a parlé
3 hier et rappelez-vous pourquoi je n'étais pas d'accord avec vous. Je crois
4 que c'était une façon assez habile de faire venir des forces yougoslaves
5 pour soutenir, pour renforcer l'armée des Serbes de Bosnie sans en donner
6 l'apparence ainsi en Croatie. C'était quelque chose de tout à fait apparent
7 à un moment donné de la guerre. Il y avait des forces, c'est indubitable,
8 des détachements tous entiers qui avaient été déployés, donc dépêchés en
9 Bosnie-Herzégovine. Vous, vous avez utilisé un subterfuge, mais je
10 n'accepte pas votre interprétation selon laquelle il n'y aurait pas eu de
11 Serbes combattants en Bosnie dont on aurait dû croire qu'il faisait partie
12 de la JNA, et qui vous rendait des comptes à vous, en Serbie, en
13 Monténégro.
14 Je peux me tromper. En tout cas, c'est l'avis que j'avais, et que je n'ai
15 eu de cesse d'avoir. Et j'ai des éléments de preuve qui corroborent ce que
16 je pensais et qui étaient aussi à la base de l'avis que nous nous étions
17 fait.
18 Q. Vous n'avez jamais présenté quelque observation que ce soit concernant
19 la présence d'une unité quelconque de la JNA intervenant sur le territoire
20 de la Bosnie-Herzégovine. Est-ce exact ou pas ? Vous vous êtes entretenu
21 avec moi je ne sais combien de fois.
22 R. Une fois de plus, je tiens à le répéter, je ne pense pas que vous avez
23 envoyé des unités toutes entières en Bosnie-Herzégovine. C'étaient plutôt
24 des gens qui servaient dans des unités qui n'étaient pas toujours résidants
25 de Bosnie-Herzégovine, qui n'avaient pas passé toute leur vie en Bosnie-
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1 Herzégovine. Il y avait un peu un mélange des deux. Mais c'est ce que vous
2 niez, et je suis sûr qu'il y aura eu des éléments de preuve soumis ici à ce
3 propos. Moi, je vous livre seulement mon avis, celui que j'avais à
4 l'époque.
5 Q. Mais pensiez-vous que ces gens-là étaient des volontaires qui étaient
6 partis là-bas ? Vous n'ignorez pas que de Sandzak, il y a eu énormément de
7 gens qui s'étaient battus dans les rangs de l'armée de Bosnie-Herzégovine,
8 au côté des gens de Alija Izetbegovic. Et c'étaient des gens qui étaient
9 originaires de Serbie. Mais je suppose que vous n'avez pas estimé qu'ils
10 étaient envoyés par la Serbie pour se battre là-bas. Donc la question des
11 volontaires est une question tout à fait dissociée.
12 R. Oui, c'est tout à fait séparé. Il est certain que ça s'est passé. Je me
13 souviens qu'à Sarajevo, on m'avait, avec fierté, présenté un commandant des
14 forces du gouvernement de Bosnie. On m'avait -- et j'avais été présenté par
15 ce commandant, un général serbe qui servait, qui s'était porté volontaire
16 dans l'armée de Bosnie-Herzégovine. C'est pour ça que cette question est
17 aussi complexe. Elle est loin d'être simple.
18 Q. C'est bien exact. Et c'est précisément de cela qu'il s'agit. En page
19 552, vous dites que l'un des plus grands historiens a conclu que les gens
20 allaient en guerre en raison, -- pour l'honneur, parce qu'ils ont peur, ou
21 par intérêt. Il n'y a pas que des coupables et des victimes. Et cela est
22 valable pour les guerres entre les états différents lorsque ces guerres
23 sont en partie ou totalement des guerres civiles comme cela a été le cas
24 pour ce qui est des guerres qui ont eu lieu en Yougoslavie. Nous nous
25 tromperions si nous prenions ces -- si nous considérions ces -- cette
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1 guerre comme une chose simple, et comme un combat entre bons et méchants.
2 Donc vous parlez de guerre, de quelle guerre êtes-vous en train de parler ?
3 R. Vous savez qu'il y a toujours eu un problème de définition. Il y a eu
4 dans un premier temps, une guerre qu'on a quelquefois qualifiée de guerre
5 entre la Serbie et la Slovénie. Si l'on pense que c'était une guerre
6 séparée, elle n'a duré que quelques semaines. Puis elle s'est terminée.
7 Ensuite, il y a eu une guerre opposant la Serbie et la Croatie, bien sûr,
8 mise en exergue que par les sièges, et notamment le siège de Vukovar. A ce
9 moment-là, il y a eu les sanctions, et l'interdiction de transfert d'armes
10 en direction de ce qui était alors l'ex-Yougoslavie, et ceci a lésé des
11 Croates. Il ne faut pas l'oublier. Et bien sûr, par la suite, ça a surtout
12 lésé les Musulmans de Bosnie.
13 Enfin, il y a eu une guerre opposant la Serbie à la Bosnie-Herzégovine. Il
14 y a eu donc cette guerre-là. On peut discuter de la définition à donner,
15 était-ce uniquement un guerre avec la Republika Srpska ou pas ?
16 S'en suivi, une guerre interne entre les Croates de Bosnie et les Musulmans
17 de Bosnie, guerre qui a fait rage et qui a connu des moments très durs,
18 notamment au cours du printemps 1993. Il y a eu une nouvelle recrudescence
19 plus tard, en 1994. Puis il y a la guerre à propos du Kosovo.
20 Difficile de dire combien il y a eu de guerres. Mais il y a eu un thème
21 commun à tout ceci. Et le thème commun c'est la dissolution de l'ex-
22 République de Yougoslavie.
23 Q. Cela n'a été qu'une seule guerre, une guerre unique entre la
24 Yougoslavie, et la Yougoslavie a été dissoute, brisée. Mais cela n'a rien à
25 voir au niveau d'une guerre entre la Serbie et la Slovénie. C'était une
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1 intervention de l'armée fédérale en Slovénie. Et il a été -- c'est une
2 chose qui a été décidé par le gouvernement fédéral. J'espère que vous le
3 savez ?
4 R. Je n'ai pas été parti prenant de façon directe à cette part de
5 l'histoire. Et je ne pensais pas qu'il était intéressant d'examiner ce
6 moment-là de l'histoire. Vous avez sans doute une connaissance plus
7 complète, plus précise sur ce qui s'est passé exactement. Moi, ma lecture
8 des événements que c'était une guerre qui posait des jalons sur la voie de
9 la dissolution.
10 Q. Oui. Il est exact de dire que c'est une guerre qui a été très
11 préjudiciable. Mais nous n'avions rien à voir avec cette guerre, et nous ne
12 savions même pas qu'il allait y avoir une intervention. Pour ce qui est de
13 la Croatie maintenant, j'ai une lettre ici que j'avais envoyé à Cyrus
14 Vance, notamment après quelques rondes d'entretiens que nous avons eus dans
15 le courant de novembre, 24 novembre 1991, avant la reconnaissance
16 internationale. Donc d'ex-Yougoslavie qu'il s'agit encore. Et il m'écrit le
17 24 novembre, lui. Et moi je réponds le 27 novembre. Je m'excuse d'avoir
18 confondu ces deux dates.
19 Et je lui dis que je voulais exprimer mon approbation pour ce qui est de
20 l'importance des questions qui ont été soulevées dans sa lettre. Il s'agit
21 de questions afférentes à la définition des territoires qui seraient
22 protégés par les forces du maintien de paix des Nations Unies, il était
23 indubitable, le soutien de la Serbie et la présidence de Yougoslavie pour
24 ce qui est de la venue de ces Casques bleus en Croatie -- pour ce qui est
25 de l'arrivée de ces Casques bleus.
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1 Et je dis, étant donné que la définition des territoires où l'on a une fois
2 de plus essayé, et malheureusement réussi à procéder à réaliser un génocide
3 à l'encontre de ressortissants du peuple serbe, la définition des
4 territoires est une question de fait. Et nous estimons pour notre part, que
5 c'était la seule réponse objective à apporter, parce qu'ils s'étaient
6 enquis pour savoir où ces troupes devaient être réparties. Alors je lui ai
7 dit que le territoire entier où il y a eu des conflits devrait bénéficier
8 d'une protection efficace des forces de maintien de la paix des Nations
9 Unies. Et j'explique que la liberté et la sécurité des populations qui y
10 résidaient relevaient des intérêts vitaux de ces populations. J'ai estimé
11 que toute définition de ces territoires devait forcément être vérifiée et
12 confirmée sur le terrain, à savoir, là où des conflits ont surgi.
13 Et je parle de l'importance des décisions prises par la présidence de
14 Yougoslavie au sujet de cette question dans l'intérêt de --
15 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vous interromps. De toute façon, il y
16 a des limites à ce que ce témoin tout comme tout autre témoin peut dire.
17 Quelle est votre question au fond, Monsieur Milosevic ? Vous posez des
18 questions à ce témoin. Quelle est celle-ci ?
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je présente au témoin une question, et je lui
20 demande de nous dire s'il est exact d'affirmer que sur les territoires où
21 avaient résidé des Serbes il y a eu d'énormes représailles à l'égard de ces
22 Serbes. Ces Serbes se sont soulevés. Et la Yougoslavie, dès le départ,
23 s'est efforcé de faire en sorte que ces conflits soient empêchés. Quand je
24 dis "Yougoslavie", j'entends l'Armée populaire Yougoslave, les institutions
25 fédérales qui existaient encore à l'époque. Et nous, nous étions nous-mêmes
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1 employés en faveur d'un traitement impartial de toutes ces questions, et en
2 faveur de l'arrivée d'une mission des Nations Unies.
3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Une fois de plus, vous ramassez toute une
4 série de choses. Le premier point que vous avancez, c'est qu'il y a eu
5 d'énormes représailles à l'encontre des Serbes dans les régions où ils
6 habitaient. C'était une chose. Vous ajoutez que dès le départ, la
7 Yougoslavie s'est employé à empêcher la survenue d'un conflit, là à savoir,
8 la JNA. Je ne sais pas si Lord Owen a le sentiment qu'il est en mesure
9 d'apporter en commentaire sur cette hypothèse-là.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] A ce moment-là, je n'étais partie prenante,
11 mais il est certain que Cyrus Vance était un très bon ami à moi. Nous en
12 avons discuté.
13 Vous avez soulevé la question de savoir si vous avez été utile dans ces
14 négociations à M. Vance. Malheureusement, il n'est plus vivant pour
15 répondre à cette question, mais je suppose que vous avez eu son adjoint,
16 l'ambassadeur Okun qui est venu déposer. Il pourrait en parler. Mais à mon
17 avis, M. Vance avait le sentiment que vous aviez été très utile dans ces
18 négociations. Je ne suis pas en désaccord avec vous là-dessus.
19 Pour ce qui est de la deuxième série de questions. Toute cette question est
20 problématique, à savoir, qu'il y avait des communautés serbes importantes,
21 pas seulement en Bosnie-Herzégovine, mais aussi en Croatie. Certes c'est un
22 fait indubitable. Et il est certain que les zones de sécurité qui faisaient
23 partie du plan des Nations Unies avaient pour objectif de régler cette
24 question. Mais en l'absence de négociations sérieuses, en l'absence d'un
25 accord en Bosnie-Herzégovine qui aurait permis de trouver une solution à ce
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1 problème en Croatie, à cause de tout ça, il y a eu exode massif des Serbes
2 de la Krajina et tout ceci démontre qu'on peut parcourir une fois de plus
3 l'histoire. Il y a tellement d'histoire dans cette région que ceci empêche
4 de parler de l'avenir.
5 Et tout ce que je peux vous dire c'est que vous avez à mon avis un grief
6 justifié. C'est que le monde occidental s'est dit que la seule façon de
7 créer des pays indépendants à partir de ce qui avait été la Yougoslavie
8 c'était d'accepter la carte régionale de la Yougoslavie telle quelle avait
9 été tracée au moment de la guerre en 1944 notamment par M. Djilas. Et là je
10 pense que c'est un grief parfaitement justifié. Je l'ai toujours dit haut
11 et clair. Nous aurions dû être plus disposer à apporter des changements à
12 ces cas afin que soit pris en compte le règlement durable pour ces
13 individus, pour les Croates et surtout pour les Serbes. Mais ce n'est pas
14 la décision qui a été prise en 1991 par l'Union européenne, et mon livre en
15 parle.
16 Ça était une décision lourde de conséquences mais prise de bonne foi
17 convaincue qu'on était, qu'il ne serait pas possible de parvenir à un
18 accord sur d'autres tracés de frontières et ce jugement était sans doute
19 juste, mais ceci a lésé, a été préjudiciable aux Serbes.
20 M. MILOSEVIC : [interprétation]
21 Q. Malheureusement il me faut accélérer ma démarche.
22 En page 274, vous parlez de Ratko Mladic et vous dites que : "Lorsqu'en
23 juin 1991 la guerre serbo-croate a commencé, et il était à la tête d'un
24 corps d'armée à Knin. Et ce corps d'armée s'est démantelé étant donné que
25 les officiers commencèrent à se prononcer comme étant des Croates, des
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1 Slovènes, et cetera, à quitter la JNA pour regagner les rangs de leur armée
2 nationale. Et certains ont même quitté le pays. Et les Serbes qui sont
3 restés dans la JNA n'avaient pas du tout la liberté de faire, de se
4 déplacer et bon nombre d'entre eux avaient été encerclés par l'armée croate
5 dans leur caserne. C'est la raison pour laquelle la JNA avait réagi aussi
6 fort dans des localités telles que Vukovar. C'est à partir de cette phase-
7 là que s'est développée une guerre civile avec scission au niveau des rangs
8 de l'armée et sécession des amitiés entre officiers du même régiment qui
9 ont commencé à se battre entre eux."
10 Et vous qualifiez cette guerre de guerre civile classique, Lord Owen.
11 Peut-on en déduire que la scission qui est intervenue dans les rangs d'une
12 armée où les gens qui étaient membres d'une même armée ont commencé à se
13 battre les uns contre les autres, et que cela ne peut être le propre que
14 d'une guerre civile et d'aucune autre forme de guerre. Quelle autre forme
15 de guerre pourrait avoir lieu entre membres d'une même armée qui s'est
16 scindée et où les membres ont commencé à se battre entre eux ?
17 R. Je suis d'accord avec les termes utilisés par moi dans mon livre. Cela
18 ne vous ne surprendrait pas. Et je suis d'accord aussi avec la citation que
19 vous venez de donner.
20 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Un instant. Je voudrais aborder une
21 question avec le Procureur. Puisque vous allez produire ces documents, je
22 pense qu'il serait utile d'avoir des références en temps utile à ces
23 passages du CD-ROM. De cette façon nous pourrons établir le lien avec nos
24 propres copies.
25 M. NICE : [interprétation] Hors micro. Nous allons y veiller pas
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1 nécessairement aujourd'hui mais dans les meilleurs délais.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit des pages 155 et 156.
3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Merci, Lord Owen. Veuillez poursuivre,
4 Monsieur Milosevic.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] 165 et 166.
6 M. MILOSEVIC : [interprétation]
7 Q. Par conséquent, s'il s'agit là d'une guerre civile et s'il y a eu
8 guerre de sécession, il apparaît clairement que la faute pour la guerre, la
9 culpabilité de la guerre est celle de ceux qui procèdent à une sécession
10 par la force. Est-ce que la chose a été contestée, Lord Owen, ou pas ?
11 R. Je crois que là c'est une simplification exagérée d'un contexte
12 complexe. Vous avez vu que des opinions se sont partagées. Il y a eu des
13 divisions qui sont intervenus dans les structures, les anciennes
14 républiques de la Yougoslavie. Vous les avez pertinemment puisque vous en
15 avez été partie prenante, vous avez été président, il y avait un roulement
16 à la présidence et les structures instaurées par Tito ne se sont effondrées
17 pas seulement avec le début de la guerre mais bien des mois, voir des
18 années avant que la guerre n'éclate.
19 Q. J'aimerais à présent en raison du peu de temps qu'il me reste -- j'ai
20 quelque chose qui cloche avec mon micro.
21 Je voudrais en finir avec la Croatie : Le 16 juillet 1993 et j'ai ici la
22 façon dont les médias ont rapporté la chose. Le gouvernement de la Croatie
23 et de la république serbe de la Krajina ont signé un accord aux termes en
24 vertu duquel la Croatie s'était engagée à retirer ses troupes des
25 territoires occupés de la Krajina Serbe, à savoir, Ravni Kotor, Maslenica,
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1 Miljevac Plateau et la centrale d'hydroélectrique de Peruca à l'aéroport de
2 Zemunik en échange de l'ouverture du pont par le canal de Maslenica et
3 l'ouverture des accès vers l'aéroport de Zemunik.
4 Il est question du président de la République de Serbie, Slobodan
5 Milosevic, du président de la République de Croatie,
6 M. Franjo Tudjman, après la réunion qui s'est tenue dans l'organisation des
7 co-présidents de la conférence sur l'ex-Yougoslavie Lord Owen et Thorvald
8 Stoltenberg, je vais sauter un certain point et je vais dire qu'au point 3,
9 ils ont exprimé le plaisir d'avoir résolu ces problèmes cruciaux de
10 Maslenica Most et de Zemunik, et les parties aux négociations saluent
11 l'accord obtenu et il estime que toutes les parties à l'accord doivent
12 assumer une responsabilité pleine et entière pour ce qui est de l'accord
13 obtenu. Les présidents indiquent que l'importance de celui-ci et l'avance
14 en -- le mettre en qualité d'exemple permettant de résoudre de façon
15 pacifique les relations entre Serbes et Croates dans leur ensemble.
16 Donc, est-il exact d'affirmer qu'une fois que ces zones ou ces sites ont
17 été placés sous la protection des Nations Unies, il n'y a pas eu de cas où
18 les forces Serbes de la Krajina serbe se soient attaquées à l'extérieur de
19 ces zones sur quelque territoire que ce soit ? Mais il y a eu comme on n'a
20 pu le voir par la suite, des violations très graves des zones protégées des
21 Nations Unies par les unités croates et nous étions efforcés de faire en
22 sorte que cela ne se fasse -- n'arrive plus. En a-t-il été ainsi, Lord
23 Owen, ou pas ?
24 R. Je pense que la Chambre doit recueillir des éléments de preuve des
25 différents commandants de la FORPRONU à Zagreb. Parce que là vous me
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1 demandez des détails qui me sont impossibles de vérifier dans un sens ou
2 dans l'autre.
3 Q. Bien. Passons alors à un autre sujet. Et pour vous faciliter la tâche,
4 je vais tout de suite vous dévoilez mon intention quel est le sujet. Le
5 sujet ce dont je veux parler c'est la Grande Serbie.
6 Il y a plusieurs endroits dans ce livre et dans un télégramme où vous
7 parlez de l'idée de la Grande Serbie et vous placez dans ce contexte mon
8 nom. On s'y attend compte tenu de la terrible propagande et de la
9 satanisation qui s'est opérée dans les médias occidentaux, qui ont
10 construit cette histoire montée toute pièce sur la Grande Serbie.
11 Et en page 228, paragraphe 1, vous dites, à partir de ce moment-là, à
12 savoir à compter du 25 avril vous parlez de l'année 1993, et au-delà,
13 "Milosevic a renoncé formellement de créer une Grande Serbie et dans les
14 deux années qui ont suivi, il n'a jamais cessé de rechercher une solution.
15 Mais la satanisation de Milosevic est arrivée à tel point où
16 l'administration le congrès et les autres intervenants n'ont plus pu
17 s'adapter à la réalité nouvelle, et on continuait à dire que Milosevic
18 était un adepte de cette cause de Grande Serbie."
19 Et au lieu de cela, Milosevic s'est engagé en faveur de la recherche d'une
20 solution pacifique, au terme du plan Vance-Owen. Et si j'ai bien compris ce
21 que vous y dites dans ce texte à compter de ce 25 avril, je n'ai plus été
22 favorable à la création d'une Grande Serbie, exact ou pas ?
23 R. C'est vrai par rapport à la Bosnie-Herzégovine. Certains ont eu une
24 lecture différente à propos du Kosovo, mais je pense que le Kosovo faisait
25 partie de la Serbie, elle l'est toujours, tout du moins jusqu'au moment où
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1 le conseil de Sécurité et les Nations Unies apportent des délimitations
2 différentes au Kosovo. Mais je pense que vous disiez que la seule façon
3 qu'il y avait de parvenir à un règlement c'est que la partie de la
4 Republika Srpska en Bosnie-Herzégovine soit reliée géographiquement,
5 parlant à la Serbie et au Monténégro. Vous teniez toujours à ce qu'il y ait
6 des liens étroits, et à mon avis et même si après, dans tous ces plans que
7 vous avez soutenus, il y avait toujours une frontière, un maintien des
8 frontières de la Bosnie-Herzégovine on avait maintenu les frontières qui
9 avaient été acceptées en mai 1992 par le conseil de Sécurité au moment où a
10 été définie la Bosnie-Herzégovine.
11 Q. Par conséquent, vous êtes en train de parler d'une chose à savoir que
12 je ne m'employais pas en faveur de la Grande Serbie à compter du moment où
13 vous avez pris part à ces négociations. Mais vous ne savez pas si
14 auparavant je m'étais employé en faveur de celle-ci. Avez-vous des
15 connaissances quelconque à ce sujet ou était-ce là pure propagande ?
16 R. La connaissance est difficile à cerner lorsqu'il s'agit d'arrêter une
17 période précise. Toutefois mon impression et ce jusqu'en janvier 1993,
18 c'est que toute chose étant égale, vous auriez préféré une division de
19 certaines parties ou en différentes parties de la Bosnie-Herzégovine et
20 vous auriez préféré qu'une partie de la Bosnie-Herzégovine devienne partie
21 de la Serbie et du Monténégro et qu'une partie revienne à la Croatie.
22 Si vous me demandez si je peux le prouver, si j'ai des preuves à l'appui de
23 ce que j'avance, je dois répondre que non.
24 M. KAY : [interprétation] Le passage se trouve dans la version souple à la
25 page 153.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que, Monsieur Milosevic, que vous
2 étiez un pragmatiste. Nous avons eu des pourparlers à Genève au début, et
3 au cours de l'évolution du plan de paix Vance-Owen et même avant cela,
4 lorsque vous avez eu des discussions avec M. Vance, vous aviez fini par
5 comprendre qu'il devrait y avoir un processus long, mais que finalement les
6 Serbes de Croatie devraient vivre en Croatie. Et vous n'auriez pas eu --
7 vous n'avez pas eu cet avis tout de suite. Il n'est intervenu que --
8 qu'une partie des pourparlers se soit déjà déroulée.
9 Nous avons eu une réunion plus tard à Paris. C'était une réunion importante
10 à mes yeux. Vous aviez compris que si vous pouviez parvenir à un règlement
11 en Bosnie-Herzégovine, le président Mitterrand allait faire intervenir la
12 France pour que soient levées les sanctions, et vous l'avez promis
13 d'ailleurs explicitement. Et à partir de ce moment-là, je pense que vous
14 avez commencé à voir une voie de sortie qui vous satisferait, ou qui vous
15 satisferait s'agissant de ce qui était à votre avis les besoins des Serbes,
16 mais qui ne signifierait pas une division de la Bosnie-Herzégovine.
17 C'est tout du moins là lecture que je fais moi de ce que vous pensiez, il
18 se peut que je me trompe.
19 M. MILOSEVIC : [interprétation]
20 Q. Vous n'avez pas raison dans la mesure où vous avez pensé que je m'étais
21 employé dans le passé en faveur d'une Grande Serbie. Cette formulation de
22 Grande Serbie, c'est une création de l'Autriche- Hongrie qui date de la
23 période après l'annexion de la Bosnie-Herzégovine, et tout ce qui était
24 serbe avait été qualifié de Grand Serbe à l'époque. Mais jamais personne
25 parmi les hommes politiques serbes et parmi ceux qui faisaient parties des
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1 structures du pouvoir n'aient jamais allé devant le public pour avancer des
2 idées de Grande Serbie.
3 Et dans le même passage du reste vous indiquez, "Que pour ce qui est de
4 Milosevic, les Serbes de Bosnie ont procédé à la protection des intérêts
5 vitaux qui étaient les siens. Et de ce point de vue là ils étaient
6 gagnants. Et il ne s'agissait pas d'une Serbie qui irait de Belgrade à
7 Banja Luka. Cela n'était pas important depuis nos réunions du mois de
8 janvier à Genève."
9 Donc dès le mois de janvier, vous dites qu'il ne s'agissait pas de Grande
10 Serbie, et avant cela nous avons eu des contacts et vous avez quand même
11 justifié ou fondé ces récits de Grande Serbie en disant qu'il s'agissait
12 d'une propagande qui était conduite à l'époque. Et je pense que cela devait
13 être des récits de Milan Panic, mais cela ne devait pas, certainement pas,
14 se fonder sur des arguments objectifs que vous aviez pu avoir en votre
15 possession. Vrai ou faux ?
16 R. Vous n'y allez pas de même ordre lorsque vous prononcez ces
17 allégations. Mais la différence qu'il y avait entre vous et le président
18 Tudjman c'est que ce dernier n'a jamais caché le fait qu'il aimait bien la
19 carte telle qu'elle existe, et qu'à son avis la carte de la Bosnie-
20 Herzégovine n'était pas correcte jamais. La Bosnie-Herzégovine avait été un
21 pays indépendant et ne devrait jamais l'être. Il voulait en revenir à
22 l'ancienne carte des Badovan [phon].
23 Ce n'était pas votre avis tel que vous l'exprimiez explicitement, mais
24 cela ne veut pas dire que pour autant que vous n'étiez pas du même avis que
25 lui. Je vous entends, je vous écoute, c'est tout ce que je peux accepter
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1 comme étant votre avis. Et mais je l'avais entendu dire de façon plus
2 concise que cela avant au moment des négociations. Mais je suppose que
3 c'est l'avis que vous exprimez.
4 Q. Certes mais, Lord Owen, je vous demande de vous pencher, et je tiens à
5 vous rappeler une chose. Voici la carte de Cutileiro pour ce qui est du
6 partage de la Bosnie, partage cantonal partant des recensements de 1981,
7 1991, et cetera. Donc les territoires serbes ici sont en blancs, les
8 territoires occupés par les Croates sont en rayure -- sont rayurés, [sic]
9 et les Musulmans sont dans les zones noires.
10 J'attire votre attention sur ce fait et c'est Cutileiro qui avait établi ce
11 plan. Nous avions emporté notre soutien à celui-ci, et on peut voir que
12 lorsque le plan de Cutileiro avait été d'actualité, il était question de
13 territoire où l'on ne saurait en aucune façon parler de Grande Serbie.
14 C'est le plan de Cutileiro, c'est la carte que les Serbes avaient acceptée
15 et celle-là avait été signée par Izetbegovic, Karadzic et Boban. Tout cela
16 s'est passé avant l'éclatement des conflits. Et il n'y aurait pas eu de
17 guerre si l'on avait accepté ou si l'on était resté à ce que prévoyait le
18 plan de Cutileiro. Et depuis cette époque-là, on peut constater que dès
19 cette période-là, il ne pouvait en aucune façon être question de Grande
20 Serbie. Il y avait des territoires à l'intérieur de la Bosnie-Herzégovine
21 les Serbes ont accepté. Radovan Karadzic l'a signé. Et Izetbegovic, après
22 avoir signé, a retiré sa signature après avoir été persuadé de le faire par
23 Warren Zimmermann, et Zimmermann lui-même, le confirme dans son propre
24 livre, vous le savez vous-même.
25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Un instant. Posez une question. Qu'est-ce
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1 que vous essayez de faire valoir que ce plan illustre le fait que vous ne
2 preniez pas la Grande Serbie ? C'est ça que vous voulez dire ?
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ceci démontre bien que la direction de la
4 Republika Srpska, à la tête de laquelle il y avait Radovan Karadzic avait
5 apporté son soutien, avait signé ce plan et n'avait en aucune façon l'idée
6 de créer une Grande Serbie. Ce plan de Cutileiro avait --
7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Fort bien. Fort bien.
8 Non, je vous arrête. Je vous empêche de continuer. Je pense qu'il est temps
9 de laisser l'occasion au témoin de répondre à l'hypothèse que vous avancez.
10 Avez-vous un commentaire, Lord Owen.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que c'est là un avis tout à fait
12 raisonnable ce que vient de dire M. Milosevic. Ça montre que ce que j'ai
13 dit à propos du moment où il est passé à cette idée, il a abandonné l'idée
14 d'une Grande Serbie pour autant qu'il l'ait jamais eu. C'est évidemment
15 quelque chose de raisonnable, effectivement le plan Cutileiro n'a pas été
16 accepté. Regardez-le une fois de plus, ce plan il présente un problème. On
17 peut se demander s'il aurait permis d'avoir en Bosnie-Herzégovine un
18 gouvernement cohérent. Mais je ne m'oppose pas à ce qu'essayait de faire
19 l'ambassadeur Cutileiro, et on retrouve bon nombre de ces éléments dans la
20 carte des provinces, des dix provinces en Bosnie-Herzégovine, ce qui
21 constituait la base du plan de paix Vance-Owen.
22 Vous pourrez peut-être convaincre pas mal de gens de croire que vous n'avez
23 jamais été en faveur d'une Grande Serbie et parmi ces éléments, il y a
24 peut-être celui-ci. Mais ça ne veut pas dire que moi, personnellement,
25 j'accepte la façon dont vous interprétez l'histoire. A mon avis il y a eu
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1 une aspiration qui était nourrie par vous, mais pas beaucoup de
2 nationalistes serbes. A savoir qu'il pourrait y avoir une autre carte et en
3 théorie bien sûr il y aurait pu en avoir une. Il y a eu des étapes dans des
4 négociations au cours desquelles le président Izetbegovic en personne s'est
5 beaucoup intéressé à l'idée d'un était musulman dans les confins de la
6 Bosnie-Herzégovine. Mais des limitations exactes n'ont jamais fait l'objet
7 de discussions, ne serait-ce que parce que ceci outrepassait le mandat
8 donné à la conférence internationale sur l'ex-Yougoslavie. Ce mandat qui
9 nous avait été conféré en août 1992 et qui consistait à nous demander de
10 trouver une solution pacifique dans le cadre des frontières
11 internationalement reconnues de la Bosnie-Herzégovine. Et j'ai déjà indiqué
12 que c'était là un mandat qui était trop rigide et qu'on aurait dû être prêt
13 à retracer les frontières beaucoup plutôt.
14 Mais ça c'est de l'histoire. C'est bien sûr important, mais c'est une
15 histoire aussi au moment où moi je n'occupais pas ces fonctions, il m'est
16 donc impossible d'ajouter beaucoup plus à ce qui est contenu dans la carte
17 Cutileiro.
18 M. MILOSEVIC : [interprétation]
19 Q. Lord Owen, bien entendu il aurait possible de décider des cartes très
20 différentes. Mais trois cartes, de toute façon, ont été dessinées avec
21 l'aide de son excellence, l'ambassadeur M. Cutileiro. Mais le fait que
22 Radovan Karadzic et dirigeants de la Republika Srpska aient signé ce plan
23 qui signifiait l'indépendance de la Bosnie-Herzégovine et la création de
24 cantons qui en tout état de cause ne peut avoir aucun rapport avec une
25 quelconque idée de Grande Serbie, suffit je suppose, à prouver que tel
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1 n'était pas l'idée qui se trouvait à la base des conceptions mêmes de la
2 direction de la Republika Srpska et y compris avant que les conflits
3 n'éclatent, y compris avant qu'il n'y ait la moindre victime. Cette
4 signature dont je parle a bien été apposée au bas de ce texte. Est-ce que
5 cela ne fait pas de doute, Lord Owen ?
6 R. Vous êtes très fort pour poser des questions qui contiennent leurs
7 réponses, Monsieur Milosevic. Mais je ne nierai pas que si votre thèse
8 consiste à dire que si vous aviez été partisan de la Grande Serbie, ce que
9 vous venez de dire suffit effectivement à prouver ce que j'ai dit moi-même
10 dans ma déclaration, et que j'ai rappelé tout à l'heure, à savoir que c'est
11 en avril 1993 que vous aviez admis l'erreur de la chose et que vous aviez
12 peut-être même admis cela plutôt.
13 J'espère que -- vous me comprenez. Je pense que vous devez pouvoir
14 présenter votre thèse, que vous devez pouvoir avoir un procès équitable et
15 présentez la thèse qui est la vôtre à l'aide des éléments de preuve que
16 vous jugerez bon de présenter. Je ne suis pas là pour vous combattre sur ce
17 point. En avril 1993, en effet peut-être d'ailleurs, est-ce un point de vue
18 trop étroit que de parler d'avril 1993, puisque je n'étais partie prenante
19 aux négociations que depuis septembre 1992.
20 Q. Mais j'affirme ici comme vous pouvez le constater, que Radovan Karadzic
21 non plus n'était pas un tenant de la Grande Serbie lui aussi. Toute la
22 direction de la Republika Srpska a apposé sa signature au plan Cutileiro.
23 R. Monsieur Milosevic, vous et moi savons que M. Radovan Karadzic a signé
24 pas mal de choses, et si nous nous penchions sur tout ce qu'il a signé et
25 comparions ces signatures aux intentions qui étaient les siennes, nous ne
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1 retrouverions face à un problème. Parce que de façon constante, il lui
2 arrivait de prendre des positions dans un sens à un endroit et ensuite de
3 prendre des positions dans un sens contraire ailleurs.
4 Cela ne présente aucune difficulté que d'apposer sa signature au bas d'une
5 carte pour ensuite prendre toutes les régions de la carte Cutileiro qui
6 figurent en blanc, qui sont donc les régions peuplées par les Serbes pour
7 en faire une république.
8 Je pense également qu'il est tout à fait possible que
9 M. Radovan Karadzic ait eu à l'esprit une Republika Srpska reliée à la
10 Serbie pendant un moment, et puis ensuite il a acquis plus de confiance en
11 lui. Et il a fini par souhaiter que la Republika Srpska ne fasse pas
12 partie, ne soit pas reliée à la Serbie, tout cela c'est une -- je ne crois
13 pas que sur ce point il partageait votre idéologie. Il ne m'appartient pas
14 de lire l'esprit de M. Radovan Karadzic mais je pense que j'ai le droit de
15 dire que j'éprouve le plus grand scepticisme par rapport aux signatures
16 apposées par
17 M. Radovan Karadzic -- ou plutôt par le Dr Radovan Karadzic au bas de
18 quelque document que ce soit.
19 Q. Votre scepticisme c'est votre droit, mais vous vous souvenez très bien
20 qu'en 1992, lorsque la République fédérale yougoslave a été créée en avril,
21 une déclaration a été faite selon laquelle l'état en question annonçait ubi
22 et orbi n'avoir aucune prétention territoriale par rapport à quelque
23 ancienne république de la Yougoslavie que ce soit. Je parle du moment où
24 s'est créé la République fédérale yougoslave, c'est-à-dire lorsque la
25 Serbie et le Monténégro constituaient cette République fédérale yougoslave.
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1 Vous vous en souvenez, j'en suis sûr.
2 R. Oui, mais il ne s'ensuit pas logiquement que cette déclaration
3 permettait la reconnaissance de la Bosnie-Herzégovine. Nous avions passé
4 des heures à discuter des raisons pour lesquelles vous ne souhaitiez pas
5 reconnaître la Bosnie-Herzégovine, son indépendance. Et si vous l'aviez
6 fait, je pense donc si la Serbie et le Monténégro avaient reconnu le
7 gouvernement de Bosnie-Herzégovine, les choses auraient été beaucoup plus
8 facile dans les négociations que nous menions même si vous aviez apporté
9 une nuance supplémentaire en disant que le gouvernement aurait dû s'appuyer
10 sur des bases différentes de celles sur lesquelles elles s'appuyaient. Mais
11 je ne vais pas vous faire perdre votre temps sur cette question. Vous avez
12 fait cette déclaration. Il ne s'ensuivait pas logiquement que la Bosnie-
13 Herzégovine était reconnue aux termes du droit international.
14 Q. D'abord, premier règlement politique c'était une nécessité il fallait
15 que ce soit le premier résultat obtenu en Bosnie-Herzégovine. Vous-même,
16 vous dites que le gouvernement ne contrôlait que 10 % du territoire. Alors
17 qui est-ce qui aurait pu traiter en tant que partenaire égal un
18 gouvernement qui n'avait le contrôle que sur 10 % de sont territoire ? Nous
19 insistions nous-mêmes pour obtenir d'abord un règlement politique
20 susceptible de défendre les intérêts des trois peuples à égalité sur la
21 base d'un accord entre eux. Et plus tard, lorsque la paix était -- la paix,
22 une fois rétablie, vous vous souviendrez que Izetbegovic et moi-même
23 profitant de l'hospitalité offerte par la France au moment de la signature
24 des accords de Dayton. Donc profitant de l'hospitalité de M. Chirac, à
25 Paris. D'ailleurs, Tudjman, à ce moment-là, est intervenu. Une demande a
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1 été présentée pour que la Yougoslavie revienne au sein des Nations Unies.
2 Mais ça c'est une autre question.
3 Donc lorsque tout cela, tous les problèmes ont été réglés, lorsque les
4 parties se sont entendues, lorsque les intérêts des trois nations ont été
5 reconnus, il n'y avait plus de problèmes. Jusqu'à ce moment-là, les débats
6 faisaient rage. Mais ne trouvez-vous pas cela logique ?
7 R. Et bien, ça c'est la façon dont vous voyez les choses. Comme vous le
8 savez, le groupe de contact a essayé à plusieurs reprises, et pendant des
9 mois, de vous pousser à reconnaître la Bosnie-Herzégovine. Et vous aviez
10 recours à tous les arguments possibles pour refuser cette reconnaissance.
11 Alors qu'aujourd'hui, vous dites que vous n'auriez pas agi de cette façon
12 s'il y avait eu un règlement définitif. Donc vous êtes demeuré conséquent
13 dans votre thèse. Mais nous sommes nombreux à penser que la reconnaissance
14 de la Bosnie-Herzégovine avec la nuance permettant de penser que le
15 gouvernement aurait dû être différent de ce qu'il était, si vous le
16 souhaitez, donc que tout cela était de la propagande favorable à la Grande
17 Serbie.
18 Certainement, je croyais à votre intérêt de nuancer cette reconnaissance.
19 Q. Mais le gouvernement dont vous parlez, a commis des crimes très graves
20 contre les Serbes, à cette époque-là, ce même gouvernement. Ce n'était pas
21 un gouvernement où étaient représentés les Serbes, les Croates et les
22 Musulmans.C'était un gouvernement qui avait commis des crimes graves contre
23 les Serbes à l'époque. Même si certaines personnes affirment que les crimes
24 commis par les Serbes sont plus graves, ces crimes-là ont bel et bien
25 existés. Ils ont été établis.
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1 Et ce gouvernement est responsable des crimes les plus graves contre les
2 Serbes et les Croates d'ailleurs, dans la période mentionnée, c'est-à-dire
3 1993, 1994.
4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il faut que nous avancions sur ce sujet.
5 Nous n'allons pas le faire en continuant de cette manière. Est-ce que vous
6 avez des questions à adresser à ce témoin ? Le temps court.
7 M. MILOSEVIC : [interprétation]
8 Q. Je suis tout à fait d'accord avec votre citation selon laquelle je
9 souhaitais que les Serbes de Bosnie-Herzégovine et de Croatie, et
10 d'ailleurs, puissent défendre leurs intérêts vitaux, et que je n'allais pas
11 au-delà de cela. Ces intérêts, une fois protégés, ils pouvaient être des
12 éléments égaux les uns aux autres. Mais j'espère que vous conviendrez avec
13 moi que la notion d'égalité concerne les Serbes également, et que donc les
14 autres devaient être égaux à eux, et les Serbes égaux aux autres. C'est un
15 processus qui va dans les deux sens.
16 Donc dites-moi, je vous prie, si je n'ai jamais à quelque moment que ce
17 soit demandé autre chose pour les Serbes où qu'ils résident que l'égalité
18 avec tous les autres peuples. Et ce, pendant les trois ans des
19 négociations ?
20 R. Ce mot "égal" ou "égalité", est un mot très compliqué. Je ne veux pas
21 être pédant, mais je crois si nous avions bénéficié d'une bonne volonté
22 plus importante que celle que nous avons trouvée, nous aurions pu parvenir
23 à une solution grâce à laquelle les Croates de Croatie auraient pu
24 continuer à résider chez eux. Nous sommes, en ce moment, concentrés sur la
25 Bosnie-Herzégovine, mais il ne faut pas oublier que les plus grands
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1 nettoyages ethniques des Balkans ont concerné les Serbes qui ont fui la
2 Krajina au début de l'été 1995. Et lorsque nous parlons de ce problème très
3 complexe, il nous faut bien reconnaître que l'un de nos plus grands échecs
4 est venu du fait que les Croates -- les habitants de Croatie, des gens très
5 simples qui étaient Serbes, n'ont pas pu continuer à vivre en Croatie.
6 Donc nous avons passé pas mal de temps à discuter de cette question, et
7 nous n'avons jamais pu obtenir de la part des dirigeants serbes de Croatie,
8 le degré de réalisme nécessaire pour que leur peuple puisse être défendu
9 comme il le fallait. De temps en temps, il y a eu quelques dirigeants qui
10 étaient prêts à faire preuve de ce degré de réalisme. Mais en tout cas, les
11 choses n'ont pas pu avancer suffisamment. Je pense que s'agissant de ce que
12 vous faisiez à ce moment-là, vous avez essayé d'obtenir une égalité dans le
13 rôle de citoyens pour les Serbes de Croatie et les Croates de Croatie,
14 grâce à la création des zones protégées, et grâce au premier plan Vance.
15 Mais eux, ne se sont pas aidés eux-mêmes.
16 Je veux dire que les mois que nous avons passés en 1994 et 1995, à essayer
17 de concocter un accord économique, ont été des mois de grande désillusion
18 où il a été très difficile d'obtenir une quelconque compréhension de
19 Zagreb, quant aux concessions qu'il fallait accepter qui étaient
20 nécessaires, et la même chose vaut pour Knin. Et de bien des façons, les
21 dirigeants de Knin se sont montrés encore moins compréhensifs par rapport
22 aux obligations qui étaient les leurs vis-à-vis des citoyens qu'ils
23 représentaient. Et la conséquence de tout cela a été un nettoyage ethnique
24 massif des Serbes de Croatie.
25 Q. Puisque vous avez abordé à nouveau ce sujet, j'aimerais vous donner
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1 lecture d'une citation de Thorvald Stoltenberg datant de septembre de cette
2 année lors d'une visite faite par lui, qui parle des événements que vous
3 venez d'évoquer. Il dit, je cite :
4 "Au cours des négociations entre Knin et Zagreb, à la veille de l'opération
5 Tempête, à laquelle a également participé Franjo Tudjman, j'ai proposé que
6 la SAO, donc région serbe autonome de Krajina, demeure au sein de la
7 Croatie, mais ait le droit à l'autodétermination. Les deux parties ont
8 accepté cette proposition. Mais la réponse n'a été valable que pendant
9 quelques heures, parce que Tudjman était toujours prêt à ordonner une
10 offensive avec l'accord des Américains. Je fais remarquer que les Nations
11 Unies ne savait rien des préparatifs des Croates, ni de l'accord donné par
12 la Maison blanche à cette opération Tempête. Lorsque l'offensive a
13 commencé, j'ai eu l'impression qu'on m'avait trompé. Et ce que je dis ici,
14 est l'entière vérité."
15 Est-ce bien ce qu'a dit M. Thorvald Stoltenberg, Lord Owen ?
16 R. Je ne sais pas. Mais cela me surprendrait que Thorvald Stoltenberg ait
17 parlé ainsi. Thorvald était mon partenaire dans les négociations, dans le
18 cadre de la mission des Nations Unies, après Cyrus Vance se soit retiré de
19 ces négociations. Et c'était un homme remarquablement honnête, un dirigeant
20 politique très droit qui déployait d'énormes efforts pour se faire
21 comprendre, notamment à partir où il est devenu le représentant des Nations
22 Unies responsable de la FORPRONU, et qu'il s'est retrouvé à Zagreb, ainsi
23 que pendant la période où il coprésidait la conférence internationale sur
24 l'ex-Yougoslavie. Donc il a toujours déployé d'énormes efforts pour faire
25 comprendre le plus clairement qu'ils soient les obligations du monde et des
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1 Nations Unies, vis-à-vis des Serbes de Croatie, et imposer un traitement
2 équitable pour ces Serbes de Croatie. Je crains fort qu'à ce moment-là, il
3 était tout à fait clair que le président croate avait conquis le cœur, si
4 vous voulez, mais en tout cas, l'esprit des Américains à un tel point que
5 certaines réalités n'étaient plus possibles.
6 Mais encore une fois, c'est de façon tout à fait désespérée que
7 l'acceptation de l'entrée des forces armées croates en Bosnie-Herzégovine a
8 eu lieu, compte tenu du fait qu'il était clair que cela allait détruire
9 l'équilibre des forces en Bosnie-Herzégovine. Et c'est exactement ce qui
10 s'est passé au cours de l'été 1995. Si nous cherchons d'où venait le
11 réalisme et bien, finalement les Serbes de Bosnie ont abouti à Dayton et
12 votre participation à Dayton est un signe de ce réalisme dû, sans doute en
13 partie, à la défaite des Serbes sous les coups de l'armée croate en Bosnie
14 occidentale.
15 Q. Mais ce réalisme, sans doute, était le résultat de nos efforts pour la
16 paix, Lord Owen ?
17 R. Non. Je pense que la réalité c'est que même le général Mladic a dû
18 faire face au fait que les Serbes commençaient à perdre la guerre, que le
19 fait que les pays occidentaux toléraient l'intrusion de l'armée croate en
20 Bosnie-Herzégovine signifiait que le rapport des forces avait changé au
21 désavantage des Serbes de Bosnie et que l'armée croate n'apportait pas son
22 aide simplement aux Serbes de Croatie mais également aux forces
23 gouvernementales de Bosnie-Herzégovine. Donc lorsque le bombardement de
24 l'OTAN a eu lieu au mois août, fin août début septembre, l'équilibre des
25 forces était devenue très différent et je crois que c'est de là qu'est venu
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1 le degré accru de réalisme de la part du général Mladic.
2 Mais malgré cela, il a bien fallu deux semaines de bombardements avant
3 d'obtenir ce résultat. Cela dit, vous le savez mieux que moi. Je n'étais
4 plus dans la course. J'étais devenu, si vous voulez, davantage un
5 observateur intéressé à l'époque.
6 Q. Mais le choix à l'époque impliquait soit la guerre, soit la paix. Que
7 se serait-il passé si la Yougoslavie s'était trouvé impliquée de la même
8 façon que la Croatie s'est impliquée ? Les Balkans tout entier auraient
9 pris feu, or le résultat obtenu c'est la paix et l'accord de Dayton a été
10 signé. C'est bien la Serbie qui a défendu au maximum cet accord de Dayton.
11 Sans l'intervention de la Serbie, il n'y aurait pas eu signature de
12 l'accord de Dayton. Ça au moins, j'espère que c'est exact d'après vous,
13 Lord Owen, n'est-ce
14 pas ?
15 R. Oui. A mon avis, ceci est indubitablement exact. Je pense également que
16 vous avez raison de dire que si la Serbie et le Monténégro, c'est-à-dire la
17 République fédérale de Yougoslavie, si les forces armées de la RFY avaient
18 franchi la frontière de la Bosnie-Herzégovine pour pénétrer en Bosnie-
19 Herzégovine, nous aurions eu une guerre affreusement sanglante.
20 Q. Donc, nous nous sommes prononcés en faveur de la paix. Nous nous sommes
21 employés à défendre la paix.
22 R. Je suppose, je suppose oui. Je crois bien. Je veux croire que vous
23 souhaitiez la paix. Je l'ai d'ailleurs déjà dit à partir du mois d'avril
24 1993, vous avez commencé à soutenir une autre solution que par le passé.
25 Mais ce que j'aurais souhaité c'est que l'appui que vous fournissiez
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1 verbalement à l'idée de la paix se soit traduit par des pressions
2 militaires et des actions militaires. Nous en avons parlé hier. A ce
3 moment-là, la paix aurait pu être rétablie beaucoup plus tôt. Je crois que
4 si vous aviez fait pièce aux efforts d'obstruction des Serbes, opposés par
5 les Serbes de Bosnie, au rétablissement de la paix et bien vous auriez pu
6 le faire deux ans et demi plus tôt.
7 Q. Lord Owen, j'aimerais que nous fassions toute la clarté sur les faits.
8 Je crois que vous êtes quelqu'un de tout à fait droit par rapport à la
9 description des faits.
10 Alors, examinez les différents plans de paix. Le plan Cutileiro en date du
11 mars 1992. Les Serbes l'ont adopté. Ensuite, pendant une longue période, il
12 n'y a plus rien. Mais il y a toute cette correspondance. Je n'ai pas le
13 temps de vous citer des passages de ces courriers où les Serbes insistent
14 dans des courriers adressés à Carrington et Cutileiro sur le fait que les
15 négociations doivent se poursuivre même si Izetbegovic ne veut plus y
16 participer et qu'il a retiré sa signature au plan Cutileiro. Donc il y
17 avait ce plan Cutileiro, et ensuite le plan de 1993, et ensuite vous me
18 reprochez de n'avoir pas insister pour prendre des mesures encore plus
19 draconiennes en faveur de plan de paix Vance-Owen.
20 Vous dites que c'est moi qui ai abandonné les efforts nécessaires pour
21 appuyer ce plan, alors qu'en fait se sont bien les Américains qui ont
22 abandonné ce plan, n'est-ce pas ? Vous ne direz pas que ce n'est pas
23 exact ? Ils ont fait savoir, ils ont prétendu que c'étaient les Serbes qui
24 considéraient que ce plan n'était pas un plan acceptable. Et à partir de
25 Belgrade, dans le même temps, ils ont agit de leur côté pour montrer qu'ils
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1 n'étaient pas favorables à l'adoption de ce plan. Et c'est donc la plus
2 grande puissance mondiale et la communauté internationale qui a agit de
3 cette façon. Est-ce exact ou pas, Lord Owen ?
4 R. Il y a beaucoup de vérité dans ce que vous venez de dire.
5 Q. Et bien, Lord Owen, lorsque ce plan dont vous venez de parler, je ne
6 sais plus quel nom on peut lui donner, vous, vous l'avez baptisé plan Owen-
7 Stoltenberg, enfin le nom importe peu, mais nous parlons bien du même plan.
8 Vous vous en souvenez, n'est-ce pas ?
9 R. Oui, en septembre 1993.
10 Q. Donc en septembre 1993, effectivement. Il y avait ce plan Vance-Owen et
11 tous les efforts et les pressions exercés par nous. Et ce plan est
12 immédiatement abandonné par la communauté internationale et dès le mois de
13 septembre, il y a ce plan Stoltenberg qui est sur la table et que les
14 Serbes acceptent encore une fois. Donc nous faisions pression à partir du
15 moi de mai et jusqu'au mois de septembre pour l'adoption d'un plan de paix,
16 mais c'est bien la communauté internationale qui a abandonné ces différents
17 plans de paix parce que ces plans ne leur paraissaient pas suffisant et que
18 les Musulmans l'avait rejeté alors que les Serbes les avaient acceptés. Ce
19 n'est pas ainsi que les choses se sont passées ?
20 R. Non. Je ne pense pas que la communauté internationale ait laissé tomber
21 ce plan. Le plan de l'Union européenne prévoyait trois républiques et
22 augmentait la part de territoire accordé au gouvernement bosnien qui
23 passait de 33 -- 33,3 %. Ce plan a été étudié en décembre 1993 et hier,
24 nous en avons parlé. Il a été dit que c'était sans doute la meilleure
25 occasion de paix qui se sont offerte et que si ce plan avait été mis en
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1 œuvre, il aurait grandement facilité la réconciliation entre les parties en
2 présence, davantage en tout cas que le plan de Dayton, y compris. Je pense
3 que les frontières créées entre les Musulmans, enfin la région, la
4 république majoritairement peuplé de Musulmans et la république
5 majoritairement peuplé de Croates auraient signifié une beaucoup plus
6 grande stabilité pour la Bosnie-Herzégovine.
7 Mais enfin, ce plan n'a pas été adopté, et il y a eu une différence de 0,5
8 % dans le territoire accordé au gouvernement bosniaque, discutait donc
9 entre le Docteur Karadzic et le président Izetbegovic à Bruxelles. Et tout
10 cela a abouti au plan du Groupe de contacts en juillet 1994, et le plan de
11 Dayton en 1995. Et j'ajouterais que vous avez toujours soutenu tous ces
12 plans, mais pour qu'un accord soit réellement conclu, il fallait bien qu'il
13 y ait accord sur la carte géographique, et les Serbes de Bosnie opposaient
14 de temps en temps des obstacles tellement importants qu'on en arrivait à un
15 point de blocage à l'égard de propositions d'accords qui aurait été
16 considérées comme raisonnables et rationnelles par la majorité des gens.
17 Q. Lord Owen, je suis d'accord avec vous. Il est absolument insensé
18 d'imaginer qu'un plan peut échouer pour une différence de 0,5 % dans les
19 territoires octroyés. C'est vraiment inimaginable mais il y avait sans
20 doute plus que cela dans les raisons de cet échec. Regardez de nouveau ces
21 plans de paix, et la chronologie de ces plans de paix. Donc, le plan de
22 Cutileiro en 1992, le plan Vance-Owen en 1993, le plan Invincible en
23 septembre 1993, le plan Kinkel-Juppe, ou plutôt le plan de l'Union
24 européenne, le plan ensuite du Groupe de contacts, et ensuite le plan de
25 Dayton.
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1 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je suis désolé, mais je dois vous
2 interrompre. Nous recevons l'interprétation française sur le canal anglais.
3 L'INTERPRÈTE : L'interprète s'excuse c'est un problème technique.
4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Peut-on reprendre.
5 L'INTERPRÈTE : Reprend la fin de l'interprétation.
6 M. MILOSEVIC : [interprétation]
7 Q. Donc nous étions dans une question de M. Milosevic, il y a eu ensuite
8 le plan Vance-Owen en 1993, le plan Invincible en septembre 1993 le plan
9 Kinkel-Juppe, le plan de l'Union européenne du Groupe de contact, et
10 ensuite Dayton.
11 Les Serbes ont accepté le plan Cutileiro, le plan Invincible, ils ont
12 accepté le plan d'action de l'Union européenne, et ils ont accepté Dayton.
13 Par conséquent, si l'on veut être équitable à l'égard des dirigeants de
14 Pale, il faut dire qu'ils ont accepté quatre plans, n'est-ce pas ?
15 R. Non, ce n'est pas tout à fait exact. Vous dites que vous avez apporté
16 votre appui aux quatre plans en question, mais les Serbes de Bosnie ont
17 rejeté le plan Vance-Owen à Pale. Les Serbes de Bosnie n'ont pas [sic]
18 accepté le plan Cutileiro, les Serbes de Bosnie ont accepté le plan
19 Invincible et nous étions nombreux à penser que le président Izetbegovic, à
20 son retour à Sarajevo, allait également proposé que ce plan soit accepté,
21 mais le plan d'action de l'Union européenne n'a jamais obtenu un accord
22 définitif enfin de compte. Donc nous aurions pu -- nous ne pouvions pas
23 imposer un règlement et nous essayons bien sûr d'obtenir que les deux
24 parties donnent leur accord. Les Croates avaient donné leur accord. En
25 fait, ils avaient donné leur accord à tous ces plans mais il y avait cette
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1 différence dans les territoires octroyés qui n'étaient pas de 0,5 % et vous
2 savez qu'il était dans -- possible pour Karadzic et Krajisnik de s'entendre
3 sur les territoires et leur distribution. Donc il est tout à fait insensé
4 qu'il ne l'est pas fait.
5 Et à Dayton, en tout cas c'est mon interprétation, vous avez bénéficié
6 d'une voix prépondérante au sein de la délégation des Serbes, et vous avez
7 fini par obtenir un accord.
8 Q. J'apporterai juste une petite correction. Je n'ai pas empêché le vote
9 des Serbes de Bosnie mais ils ont appris sur la base d'expérience très
10 amère que, comme vous le savez aussi bien que moi, avant d'aller à Dayton,
11 j'ai donc rédigé un accord. Et c'est cet accord qui a fini par être
12 l'accord définitif que vous connaissez sans doute. Il était signé par
13 Karadzic et Koljevic ainsi que par Plavsic et Krajisnik et Kosic. Le
14 premier ministre Buha et Mladic également avaient apporté leur accord. Du
15 côté yougoslave, il y avait Lilic, Kontic, le premier ministre fédéral, il
16 y avait Bulatovic, le ministre de la Défense, le chef de l'état major et
17 également le patriarche Paul de l'église orthodoxe serbe.
18 Alors, pourquoi tout cela ? Pourquoi avoir agi de la sorte au préalable.
19 Parce que je ne voulais pas un renouvellement de ce qui s'était passé à
20 Athènes au moment du rejet du plan Vance-Owen. Et je souhaitais que nous
21 ayons entre les mains un document qui permettrait une adoption définitive
22 des conditions proposées à Dayton, de façon à ce qu'il n'y ait pas
23 changement ou amendement ultérieur. Et si les votes se répartissaient à
24 égalité, c'est-à-dire 3-3, trois pour la Republika Srpska et trois pour la
25 Yougoslavie, je voulais avoir un vote prépondérant. Parce que mon vote
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1 devait être décisif pour l'emporter effectivement, pour éviter les dangers
2 dont nous venons de parler, que cette disposition a été prise, vous le
3 savez sans doute. Je n'ai pas donc empêché les Serbes de Bosnie de voter
4 comme ils le voulaient, mais à Dayton un accord a été obtenu, accord qui
5 était réaliste et qu'il était possible de mettre en œuvre, et qui d'un
6 certain point de vue défendait les intérêts des trois nations. Ce n'était
7 pas ainsi les choses se sont passées, Lord Owen ?
8 R. Oui, je pense en effet. Je ne plaisantais pas totalement lorsque j'ai
9 dit que je souhaitais que vous ayez eu un vote prépondérant à Athènes, et
10 que le patriarche Paul était présent pour attester de tout cela.
11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Suspension de 20 minutes.
12 --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.
13 --- L'audience est reprise à 10 heures 57.
14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous avez la parole, Monsieur Milosevic.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Si j'ai bien compris, Monsieur May, vous m'avez
16 accordé encore 15 minutes; c'est bien cela ?
17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] C'est exact.
18 M. MILOSEVIC : [interprétation]
19 Q. Lord Owen, au sujet de ces plans, étant donné il m'apparaît nécessaire
20 de tirer au clair ces questions afférentes au plan d'action dont vous avez
21 parlé tout à l'heure. Je tiens à vous rappeler une citation de votre livre
22 en page 407 de la version anglaise que j'ai sur CD-ROM, et vous y dites :
23 "Il y a été perdu quatre initiatives de paix dit le plan de Carrington, le
24 plan de Cutileiro et ceux avant le commencement de la guerre, le plan
25 Vance-Owen, le plan du bateau Invincible et le plan d'action de l'Union
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1 européenne. La plupart des européens, à mon avis, ont estimé que les
2 efforts ultérieurs, tant que les Etats-Unis se gardaient de côté, étaient
3 voués à l'échec parce que cela permettait aux Musulmans de continuer à
4 éviter les compromis qui sont inhérents à toute négociation."
5 Estimez-vous donc, Monsieur le Témoin, que l'absence de succès pour ce qui
6 est de ce plan d'action de l'Union européenne devrait être attribué
7 notamment à la partie musulmane, y compris les Etats-Unis ?
8 R. Non. Ce n'est pas ce que je pense. Je pense que le président
9 Izetbegovic avait à faire face à une question extrêmement difficile. Il
10 s'agissait en effet de tomber d'accord avec un plan qui était en réalité
11 susceptible de définir une république à prédominance musulmane et c'était-
12 là la substance des structures dont nous parlions. Nous avions abandonné la
13 structure cantonale qui était prévue par le plan Cutileiro, la structure
14 par province du plan Vance-Owen et il s'agissait maintenant de créer au
15 sein de la Bosnie-Herzégovine, trois secteurs autonomes.
16 Et cette carte avait prévu l'acceptation de l'existence de trois enclaves
17 en Bosnie de l'est était très étroite. Donc nous avions procédé à un
18 élargissement. Nous avions établi une corrélation où des espèces de
19 couloirs entre Gorazde, Zepa et Srebrenica, mais ça demeurait étroit. Et le
20 président Izetbegovic avait un grand problème à convaincre sa propre
21 population de la nécessité de faire de la sorte.
22 Et en plus, il y avait en plus de cet Bosnie de l'est un problème réel en
23 Bosnie occidentale où il leur fallait beaucoup plus de territoires. Et
24 comme je l'ai dit, ceux qui avaient ces territoires, c'était le Dr
25 Karadzic, à savoir, le leader des Serbes de Bosnie. Et il y avait une
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1 personne qui avait le moins de territoire et qui avait peut-être la
2 majorité de la population. Peut-être n'avait-il pas le territoire le plus
3 petit mais c'était toujours un territoire inférieur à ceux des Serbes, donc
4 et c'était les Musulmans de Serbie, donc je pense qu'il n'était pas
5 déraisonnable de demander aux Serbes de renoncer à 0,5 % de leur
6 territoire.
7 Vous êtes resté jusque tard dans la nuit cette nuit-là, et je crois que
8 vous avez véritablement quitté Bruxelles en passant que Karadzic et
9 Krajisnik allaient finir par approuver ces 0,5 %, mais ils ne l'ont pas
10 fait le jour d'après. Et c'était une chose qui ne tenait qu'à eux de faire.
11 Ils devaient donc quitter le point mort pour ce qui est de ces deux parties
12 du territoire pour que le plan d'action de l'Union européenne puisse être
13 accepté à Bruxelles.
14 Q. Il n'en fait pas de doute. Je crois que vous-même et moi-même ne
15 pouvions pas supposer à ce moment-là que les choses pouvaient être freinées
16 pour ce qui est d'un problème de seulement 0,5 % de territoire. Les choses
17 étaient tout à fait claires de ce point de vue.
18 Mais je tenais à vous rappeler la citation qui est la vôtre, à savoir que
19 cette position-là des Américains avait permis aux Musulmans d'éviter la
20 nécessité d'aboutir à un compromis, compromis absolument indispensable dans
21 toutes négociations. Et c'était là le point où je voulais en venir pour ce
22 qui est de la citation que j'ai faite de votre livre.
23 R. Là-dessus, je suis d'accord, et à titre privé j'avais depuis longtemps
24 été d'avis que le format de ces négociations conduites par l'Union
25 européenne et les Nations Unies était insuffisant et qu'il fallait
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1 impliquer les Etats-Unis. Et dans les mois qui ont suivi j'ai affirmé qu'il
2 fallait opérer davantage au travers de l'OTAN, et j'avais été la personne
3 qui s'était employée en faveur du plan du Groupe de contact qui prévoyait
4 quant à lui, que l'Union européenne soit représentée par l'Angleterre, la
5 France et les Etats-Unis. Et il y avait un autre élément complémentaire,
6 c'était la fédération Russe et les Etats-Unis. A partir de ce moment-là,
7 les Etats-Unis sont devenus un partenaire aux négociations.
8 Le plan du Groupe de contact différait en vérité peu du plan d'action de
9 l'Union européenne ou du plan de Dayton, pour être tout à fait honnête. Le
10 51 % pour la Republika Srpska était prévue dans tous ces plans-là, tant
11 pour ce qui est du plan de l'Union européenne que du plan qui avait été
12 élaboré sur le bateau Invincible. Les Américains avaient accepté le
13 principe des 51 % et ce sont eux qui ont influé sur la fédération croato-
14 musulmane. J'estime donc qu'il a été d'une importance cruciale que de voir
15 l'administration du président Clinton impliquée, et nos positions sont
16 devenues plus cohérentes. Mais pour ce faire comme je l'ai déjà dit, nous
17 avons décidé que l'Union européenne devait être représentée par ses membres
18 les plus importants, ces trois pays que j'ai mentionnés.
19 Q. Ce n'est pas contesté. Je voudrais que nous passions à d'autres
20 questions qui concernent un fait, notamment celui où il est question
21 d'erreurs qui ont été à l'origine d'une guerre civile, à savoir, une
22 reconnaissance prématurée de la Croatie, de l'indépendance de la Croatie et
23 de la Slovénie.
24 Est-il contesté ou pas, Lord Owen, que ce n'est qu'en Yougoslavie que tous
25 les peuples qui la constituaient avaient fait en sorte de ne pas être
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1 morcelés, subdivisés en plusieurs états, donc tous les Croates, tous les
2 Serbes, tous les Musulmans avaient vécu dans un seul et même pays, et dans
3 cette espace yougoslave indivisible il y avait tout un tas d'avantages pour
4 les citoyens, tous les citoyens qui résidaient sur ce territoire-là ? Il y
5 avait ce plan et tous les autres plans, et c'est d'ailleurs la raison pour
6 laquelle les états s'associent en une Union européenne ? Je crois que les
7 choses ne sont pas contestées de ce côté-là.
8 R. Non, je pense que les choses auraient été plus simples s'il n'y avait
9 pas eu dissolution de la Yougoslavie.
10 Q. Et c'est précisément de cela que je parle. L'ex-Yougoslavie avait
11 offert des avantages pour tous les peuples qui y vivaient. Vous n'ignorez
12 pas, je l'imagine, que toute une série d'états et d'organisations
13 internationales, une personnalité internationale s'étaient employés en
14 faveur de l'intégrité de la Yougoslavie et au début de la crise yougoslave
15 s'étaient employés en faveur de la préservation de son unité, n'est-ce pas
16 ?
17 R. Oui, c'était l'attitude adoptée par les Etats-Unis et par le président
18 Bush ainsi que par le secrétaire d'état, James Baker. C'était aussi
19 l'attitude retenue par la Communauté européenne.
20 Q. Vous n'ignorez pas le fait que le parlement européen, le 9 juillet
21 1991, avait adopté une résolution sur la Yougoslavie qui n'a pas soutenu
22 les actes de sécession unilatéraux intervenus en Slovénie et Croatie.
23 R. Oui, je ne suis pas au courant, mais je crois ne pas pouvoir vous
24 accorder foi, c'est tout à fait cohérent.
25 Q. Ne savez-vous pas que le conseil des Ministres de la Communauté
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1 européenne et le conseil des Ministres de l'Union européenne avaient
2 apporté leur soutien à l'intégrité territoriale de la RSFY, et en mars
3 1991, la Communauté européenne avait adopté une déclaration sur la
4 Yougoslavie disant que : "Seul, une Yougoslavie unifiée et démocratique qui
5 avait des chances de s'intégrer de façon harmonieuse à cette Europe unie."
6 C'est une citation que je fais de la déclaration adoptée à l'époque.
7 R. C'est exact.
8 Q. Saviez-vous que le conseil des Ministres de la OSCE à une réunion à
9 Berlin, le 19 juin 1991, a adopté une déclaration disant entre autres qu'il
10 apportait son soutien à l'unité, à l'intégrité territoriale de la
11 Yougoslavie ?
12 R. Oui.
13 Q. Et maintenant s'agissant de ce revirement, je tiens à vous rappeler ce
14 que vous avez indiqué dans votre livre, version anglaise de mon CD-ROM,
15 page 46, paragraphe 1, c'est donc tout de suite après votre nomination, et
16 vous vous référez à ces événements, vous dites :
17 "Dimanche, nous avons pris la voiture pour Londres et chemin faisant nous
18 avons pris le thé chez Peter Carrington à sa ferme de Buckinghamshire.
19 Comme d'habitude, Peter était détendu, décontracté mais dans sa voix,
20 pendant qu'il parlait de la façon s'était comporté à son égard les
21 ministres européens des Affaires étrangères, il y a eu des moments de
22 gravité. Il n'a pas mis en doute que la décision prise par l'Union
23 européenne en décembre 1991 avait été une trahison. Et lorsqu'il a évoqué
24 la chronique des événements je m'étais posé à haute voix la question --"
25 c'est ce que vous dites vous-même -- "Que vont-ils me faire à moi-même ?
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1 Alors, lui, il a ri en jubilant." Et il m'a dit : "Ne t'inquiètes pas. Il
2 ne reste plus grand-chose à faire."
3 Donc Carrington a estimé que la reconnaissance a fait tomber à l'eau, dans
4 l'eau les efforts de paix, n'est-ce pas ?
5 R. Oui. Il a d'ailleurs dit dans une lettre où il essaie de consigner plus
6 officiellement ce qu'il pensait, ceci fut vrai aussi de Cyrus Vance et de
7 Perez de Cuellar, qui était alors secrétaire général des Nations Unies. Ce
8 qui veut dire que les trois principaux protagonistes des pourparlers de
9 paix s'opposaient tous à la décision prise par la Communauté européenne qui
10 assurait cette reconnaissance, et il y avait bien sûr certains mérites à
11 cette question slovène et à la question croate on pensait que ces pays --
12 il était inévitable de passer à une reconnaissance prématurée de la Bosnie-
13 Herzégovine; et c'est précisément ce qui s'est passé et ce fut là une
14 erreur grave.
15 Q. Je dirais même tragique, Lord Owen, j'espère que vous serez d'accord
16 avec moi pour le dire aussi.
17 Souvenez-vous de la déclaration de James Baker du 13 janvier 1991, devant
18 le Congrès américain lorsqu'il a dit que : "Le fait est que la Slovénie et
19 la Croatie avaient unilatéralement proclamé leur indépendance. En dépit de
20 nos avertissements, ils prévenaient du recours à la force pour ce qui est
21 de la prise des passages frontières et c'est ce qui a provoqué ou suscité
22 la guerre civile."
23 C'est ce que James Baker a dit à l'occasion de son audition devant le
24 Congrès le 13 janvier 1991.
25 R. Je ne suis pas au courant de cela mais je n'ai pas de raisons de mettre
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1 en doute ces dires.
2 Q. Vous souvenez-vous de la déclaration de Cyrus Vance le 9 février 1995,
3 et il dit : "La reconnaissance prématurée des ex-républiques yougoslaves a
4 été une erreur terrible."
5 R. C'est ce qu'il pensait, c'est ce qu'il a continué de croire jusqu'à sa
6 mort.
7 Q. "Il aurait été préférable de s'en tenir aux accords de La Haye, qui
8 n'acceptaient pas la reconnaissance des ex-républiques yougoslaves avant
9 l'aboutissement à une solution globale. Cela n'a pas été respecté, et
10 j'estime que cela a été une erreur terrible." Je le cite. Vous souvenez-
11 vous de cela ?
12 R. Oui. J'étais au courant, et je suis d'accord avec ce qu'il pensait.
13 Q. Lord Carrington, a, dans une interview à l'hebdomadaire viennois
14 Profile, dit au sujet des tentatives d'aboutir à la paix, il dit :
15 "Dans cette tâche, j'aidais Cyrus Vance qui était le négociateur principal.
16 Les négociations se passaient assez bien. Nous étions sur le point
17 d'aboutir à une solution pour ce qui est des problèmes de la Krajina et de
18 la Slavonie. La Communauté européenne, fin 1991, a toutefois, décidé de
19 reconnaître la Slovénie et la Croatie." Il indique que, "Le comportement de
20 l'Union européenne a renversé les résultats de la conférence de paix, la
21 Croatie également.
22 Et il n'avait plus aucunement envie de continuer la conférence de paix. Et
23 chose plus importante encore, il fallait permettre la chose à d'autres, et
24 en premier lieu, à la Bosnie-Herzégovine. Alija Izetbegovic ne s'est pas
25 décidé en faveur d'autre chose si ce n'est de l'indépendance, et il savait
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1 pertinemment bien qu'une telle option allait signifier la guerre. Hans
2 Dietrich Genscher voulait la reconnaissance internationale de la Slovénie
3 et de la Croatie. Et presque tous les autres avaient été contre."
4 Alors, Lord Carrington fait une observation où il dit qu'on lui avait
5 reproché d'avoir été pro-Serbe. Et il a dit : "C'est insensé." Il n'a pas
6 été facile de dire qui est le bon, et qui est le méchant. Lorsque les
7 Croates ont proclamé leur indépendance, ils n'ont pas attribué aux Serbes
8 qui étaient 600 000 dans leur pays, aucune espèce de garantie. Il était
9 tout à fait compréhensible de voir les Serbes préoccupés par la chose,
10 notamment si l'on ne perd pas de vue les sauvageries commises par les
11 Serbes, les Croates, et les Musulmans pendant la Deuxième guerre mondiale."
12 Est-ce que vous vous souvenez des positions exprimées par Lord Carrington,
13 à l'époque ?
14 R. Non, je ne m'en souviens pas. Mais c'est vous qui êtes responsable de
15 cette citation, et Lord Carrington est parfaitement en mesure de répondre
16 de ce qu'il aurait dit lui-même.
17 Q. Et vous souvenez-vous de ce que le monde diplomatique [sic] avait dit,
18 le chancelier Kohl, au sommet de l'Union européenne à Bruxelles au 30 juin
19 1991, quatre jours après la proclamation de la sécession par la Slovénie à
20 la Croatie, et quoique cela n'a pas été à l'ordre du jour, avait demandé de
21 reconnaître momentanément l'indépendance de ces républiques-là.
22 R. Je sais, sans aucun doute, que c'était-là son avis, mais quant à savoir
23 si c'est ce qu'il a dit expressément, je ne le sais pas.
24 Q. Et avez-vous connaissance de ce qui s'était passé le 16 décembre 1991,
25 au sommet de l'Union européenne où Genscher a
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1 déclaré --
2 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Non, non. Un instant. Inutile de poser ce
3 genre de questions au témoin. Ce sont des sujets qu'il n'est pas en mesure
4 d'aborder. Vous avez disposé de ce quart d'heure. Vous avez encore le temps
5 de poser quelques questions pour autant qu'elles soient pertinentes, et que
6 ce soit sur des sujets dont peut parler le témoin. De la pure propagande de
7 votre part, ne nous aidera aucunement.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne fais aucunement de la propagande.
9 J'essaie, au contraire, de parler de faits uniquement.
10 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, oui. Et vous aurez l'occasion d'en
11 parler lorsque vous déposerez. Mais inutile de poser à un témoin des
12 questions auxquelles il ne peut pas répondre. Il faut lui poser des
13 questions pour lesquelles il est en mesure de fournir des réponses.
14 M. MILOSEVIC : [interprétation]
15 Q. Et bien, en page 556 et 557, de votre livre, vous indiquez que : "Lord
16 Carrington et Perez de Cuellar, par leurs lettres, avaient attirer
17 l'attention de tout un chacun, disant que la reconnaissance prématurée de
18 la Slovénie et de la Croatie pouvait transférer la crise sur la Bosnie-
19 Herzégovine. Et vous êtes allé même au-delà de cela." Au premier paragraphe
20 de la page suivante, vous dites : "L'erreur de la Communauté européenne
21 aurait pu être surmontée si la situation n'avait pas été compliquée par la
22 reconnaissance de la Bosnie-Herzégovine, indépendamment des séquelles que
23 cela pouvait avoir. Et il s'agit de la fin 1991. Et il y a eu opposition à
24 la reconnaissance de -- il y a eu de la part des USA qui s'était opposé à
25 la reconnaissance de la Croatie et de la Slovénie, une reconnaissance de la
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1 Bosnie-Herzégovine, en 1992, au printemps. Donc il était inévitable et
2 logique -- et pas logique du tout de reconnaître la Bosnie-Herzégovine.
3 C'était une république qui était composée de trois nations constitutives.
4 Et on peut dire qu'on allait d'une erreur à l'autre."
5 Et le prix que cela a coûté a été exprimé en vie humaine, Lord Owen. Et
6 comme vous avez vous-même établi, toutes ces guerres dont vous avez parlé,
7 comme une seule guerre, une guerre contre la Yougoslavie, une guerre qui
8 visait à briser la Yougoslavie. En est-il été ainsi ou pas ?
9 R. A mon avis, ça était une erreur profonde de procéder à la
10 reconnaissance de la Bosnie-Herzégovine, simplement qu'on avait déjà
11 reconnu la Slovénie et la Croatie. Et le faire en l'absence de véritables
12 effectifs de maintien de la paix des Nations Unies dans le pays avant la
13 reconnaissance. Parce qu'au moins de cette façon, on aurait pu diminuer le
14 risque de l'irruption d'une guerre.
15 Un des problèmes qui s'est posé, c'est que les Nations Unies, à ce moment-
16 là, était en butte à des difficultés, ne parvenait pas à rassembler
17 suffisamment d'effectifs des pays susceptibles d'en fournir pour maintenir
18 les quatre zones de sécurité des Nations Unies en Croatie. D'une certaine
19 façon, notre problème, il a perduré tout au long de la crise, on a eu une
20 habitude magnifique et merveilleuse des hommes politiques qui s'engagent en
21 parole au conseil de Sécurité, mais ceci n'est pas soutenu par la présence
22 des forces et des ressources sur le terrain. Et hélas, c'est bien là
23 l'histoire de l'ex-Yougoslavie, et rien ne le montre mieux que Srebrenica
24 là, on a donné l'impression qu'on était en mesure d'assurer la protection
25 des gens sans en avoir les moyens.
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1 Et il ne faut pas en blâmer les Nations Unies. Souvent on se sert des
2 Nations Unies de façon générique pour reprocher des choses. Mais il faut
3 reprocher ces événements au conseil de Sécurité de l'époque, et plus
4 particulièrement à ses membres permanents.
5 Q. Lord Owen, vous avez parlé du général Morillon, et j'apprécie partant
6 de ce que vous avez dit à son sujet dans votre livre, que votre opinion à
7 son sujet est des meilleurs, n'est-ce
8 pas ?
9 R. Tout à fait.
10 Q. Vous n'ignorez pas qu'il a témoigné devant le parlement français, et
11 j'ai ici le texte authentique de L'audition de Générale Philipe Morillon,
12 commandant de la FORPRONU, octobre 1992, 1993, et ainsi de suite, devant le
13 parlement de la République française, étant donné que M. Nice vous a posé
14 des questions au sujet de Srebrenica, et quoique vous ayez mis des réserves
15 puisque vous n'étiez pas en fonction à l'époque. Dans son document, il est
16 dit :
17 "Je n'ai pas hésité à dire et à écrire que Mladic est tombé dans un piège à
18 Srebrenica. Il s'attendait à une résistance qu'il n'a pas trouvée. Il ne
19 s'attendait pas à ce qu'il y ait massacre, mais il a sous-estimé la haine
20 amoncelée chez les uns et les autres. Je ne pense pas qu'il ait donné
21 l'ordre de commettre ces massacres. Mais je ne le sais pas. C'est ma
22 conviction personnelle."
23 Et je vous parle, moi-même, d'une conviction personnelle à moi. Je n'arrive
24 pas à y croire. Vous avez connu le général Mladic, et j'imagine que vous-
25 même ne pourrez pas croire qu'il ait pu donner l'ordre de commettre quelque
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1 chose d'aussi déshonorable.
2 R. Je crains que maintenant nous ne soyons vraiment pas d'accord. Je n'ai
3 pas pour tâche de me livrer à des conjectures s'agissant de ce qui s'est
4 passé à Srebrenica en 1995. Mais ce qui est certain, c'est que mon devoir
5 est de vous dire à vous, Monsieur Milosevic, et aux Juges, que je ne
6 partage pas votre avis, en ce qui concerne M. Mladic. Il y a beaucoup de
7 traits de sa personnalité qui en font un être très ambigu, très ambivalent.
8 Mais à mon avis, vu ses antécédents, il aurait être complice dans ce
9 massacre des Musulmans. Je pense que c'était un homme raciste et qu'il
10 avait beaucoup d'attitudes tout à fait irrationnelles à l'égard de la
11 population musulmane. Je crois que ces antécédents en tant que général
12 montre qu'il était tout à fait brutal à ce point qu'il aurait pu prendre de
13 telles décisions. Je ne le sais pas. Je ne suis pas prêt ici à vous livrer
14 des hypothèses mais pour ce qui est de sa personnalité, je ne serais pas
15 prêt à comparaître en tant que témoin de moralité quant à sa capacité en
16 tant que général à comment dire, je pèse mes mots. Je ne pense pas
17 nécessairement à son comportement mais à apporter son acquiescement pour ce
18 qui est du massacre des Musulmans.
19 Q. Lord Owen, je vous ai cité le général Morillon. Je vous ai dit que je
20 ne croyais pas personnellement qu'il ait pu donner un ordre de ce genre, et
21 Morillon dit qu'il ne pensait pas que celui-ci ait pu ordonner ce massacre.
22 Mais partant des connaissances datant de 1993, et compte tenu du témoignage
23 de Morillon devant le parlement français, il parle de haine. Il en a
24 informé les Nations Unies. Il ajoute :
25 "J'ai informé de la chose, Belgrade. Je suis allé voir Milosevic et je lui
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1 ai dit ce qu'il allait se passer. Il m'a aidé. Le fait que j'ai gagné la
2 bataille à ce moment-là, c'était grâce à la position prise par Milosevic à
3 ce moment-là, mais New York était au courant également."
4 Je suppose que vous êtes au courant de ce qui s'était passé en 1993, du
5 moins ?
6 R. Monsieur Milosevic, je l'ai dit très clairement, et certains n'aiment
7 pas ce que j'ai dit mais je crois, effectivement, que vous avez été très
8 utile en 1993 lorsque vous avez empêché que Mladic s'empare de Srebrenica.
9 Je vous ai téléphoné en personne. Il y a beaucoup d'autres personnes qui
10 sont intervenues auprès de vous et l'histoire le montre, vous êtes
11 intervenu et vous avez été d'une aide précieuse face à cette situation.
12 Vous connaissiez les périls graves qui pesaient sur la réputation des
13 Serbes au cas où les Serbes seraient entrés dans Srebrenica. Il y aurait eu
14 d'âpres combats dans les rues. Il y a eu vraiment des affrontements autour
15 de Srebrenica, notamment à Bratunac et ceci aurait pu déborder sur
16 Srebrenica avec des scènes effroyables.
17 Je ne sais pas si des arguments vous ont été présentés à ce propos en 1995.
18 Je ne connais pas cette circonstance. Je le répète, je n'étais plus
19 négociateur à ce moment-là. Cependant, je pense que c'est l'épisode
20 singulier le plus honteux qui se soit produit en Bosnie-Herzégovine, le
21 massacre autour de Srebrenica en 1995, et j'y ai, peut-être à certains
22 égards, contribué en n'alertant pas suffisamment de monde, en ne montrant
23 pas suffisamment clairement tout ce qui avait comme danger dans cette
24 situation. Je le regrette profondément. Mais je vous l'ai dit, je me suis
25 opposé du début à la fin à cette politique des zones de sécurité. C'était
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1 une farce. Je l'ai dit au ministre. Je me suis opposé au plan d'action
2 conjoint en 1993. Et en fait, je me suis gagné l'hostilité des Etats-Unis
3 se faisant. Et chacun des membres du conseil de Sécurité au moment où ils
4 ont adopté cette résolution sur les zones de sécurité savait qu'il n'y
5 aurait pas suffisamment de soldats pour la faire s'appliquer. Les Nations
6 Unies savait qu'il fallait au moins 35 000 nouveaux hommes de plus pour
7 mener cette politique à bien. Ces hommes n'ont pas été fournis et nous
8 sommes en partie responsables de ce massacre effroyable.
9 Q. Je partage entièrement votre opinion, Lord Owen. Il n'y a rien eu de
10 plus honteux à pouvoir survenir et rien ne s'est fait plus au détriment de
11 ces gens qui ont péri et en même temps au détriment des Serbes eux-mêmes.
12 C'est la raison pour laquelle je suis si intéressé par les événements de
13 1995 et par l'éclaircissement de toutes les circonstances.
14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il vous reste cinq minutes, Monsieur
15 Milosevic.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien, Monsieur May. Je ne perds pas de vue
17 le fait que vous soyez très généreux du point de vue du temps qui m'est
18 accordé.
19 M. MILOSEVIC : [interprétation]
20 Q. Dans son témoignage devant le parlement de l'assemblée Nationale
21 française, le général Philippe Morillon a répondu à Marie-France Aubert
22 [sic][phon] et la question était la suivante : "Estimez-vous qu'il y a eu
23 un agresseur et des victimes de cette agression et qu'il fallait défendre
24 les agresseurs ?"
25 Le général Morillon a dit : "J'étais présent là-bas. Non. J'ai traversé
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1 cette crise depuis son début en avril 1992 et j'ai toujours refusé
2 d'estimer qu'il y a eu des agresseurs et des victimes de cette agression.
3 C'est la raison pour laquelle les Bosniens me l'ont reproché pendant si
4 longtemps."
5 A la différence de Philippe Morillon, vous n'avez pas été en
6 Bosnie-Herzégovine au début même de la guerre. Vous êtes venu six mois
7 après. Partant de vos expériences et de vos connaissances, seriez-vous
8 d'accord avec le général Morillon pour dire ou pour formuler une
9 appréciation analogue à la sienne ?
10 R. Je pense qu'il est un peu trop simpliste de voir la guerre en Bosnie-
11 Herzégovine comme une guerre entre agresseurs et victimes. Je le dis très
12 clairement, à mon avis, le mal a été fait de part et d'autres par toutes
13 les parties au conflit. Les dirigeants politiques ont fait preuve d'un
14 manque de compassion, de compréhension. Ils n'étaient pas prêts à un
15 compromis de qu'il soit. Il n'en demeure pas moins qu'il est dangereux
16 d'essayer de se montrer équitable lorsqu'il s'agit d'attribuer à part égale
17 la responsabilité de dire que tous étaient fautifs. Ce n'était pas le cas,
18 à mon avis. Je l'ai dis hier et je le répète aujourd'hui. Il n'est pas
19 facile de déterminer qui était responsable. Si on peut établir un rapport
20 de culpabilité et de comportements irresponsables, si on essaie de le
21 faire, je crois que les Serbes de Bosnie sont les premiers fautifs, suivi
22 de près par les dirigeants musulmans et par leurs effectifs et, je
23 m'excuse, par les Croates de Bosnie.
24 D'abord, il y a au niveau de la culpabilité des Serbes de Bosnie pour ce
25 qui est des mauvais comportements, suivi par les Croates de Bosnie et
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1 arrive aussi des Musulmans de Bosnie. Mais je ne suis pas Dieu. Je ne suis
2 pas ici pour attribuer sa part de responsabilités à chacun. Je vous livre
3 mon avis personnel car lorsqu'on a une guerre de propagande comme ce fût le
4 cas, chacun affirme qu'il est le bon et que l'autre est toujours le
5 mauvais. Malheureusement, il va être nécessaire de se faire une idée, de
6 formuler un jugement mais il faut voir la totalité du problème. Et les
7 choses n'étaient jamais ce qu'elle donnait l'apparence d'être. A première
8 vue, on pouvait attribuer la responsabilité d'un événement à une partie
9 mais il y avait beaucoup d'agents provocateurs. Donc il faut faire preuve
10 de scepticisme lorsqu'on se demande qui était responsable d'un incident
11 particulier. Mais je pense que les Serbes n'ont pas aidé à la réputation
12 mondiale des Serbes vu le comportement qu'ils ont affiché en Bosnie.
13 Q. Quand vous parlez de ces incidents et de l'image déformée qui s'est
14 créée, prenons l'explosion au marché de Sarajevo, à Markale, le samedi 5
15 février 1994. Cela a constitué l'un des carrefours du tournant de cette
16 guerre, et on avait accusé les Serbes. Le blâme est tombé sur les Serbes,
17 n'est-ce pas ? Et en page 419, vous dites :
18 "Une délégation du gouvernement bosniaque qui était censé négocier et cela
19 s'est répété par la suite, n'est pas venu à l'aéroport de Sarajevo. Rose
20 était furieux. Il est allé à la présidence bosniaque pour convaincre le
21 président Izetbegovic et son commandant militaire, le général Delic, de
22 venir à cette réunion. Et ils n'ont jamais dissimulé devant le général Rose
23 qu'à cette réunion, il a précisé aux chefs musulmans qu'il avait reçu des
24 informations techniques et montrant que ce tir de mortier n'était pas
25 arrivé de régions contrôlées par les Serbes mais de secteurs contrôlés par
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1 les Musulmans à Sarajevo."
2 "Si cette information était diffusée, l'issu de la réunion de l'OTAN allait
3 être tout à fait autre -- Izetbegovic a fait traîner les choses et Rose
4 s'était tenu obligé de publier les résultats de l'enquête des Nations
5 Unies."
6 Vous le dites, en page 419 de votre livre. "Alors si l'équipe de
7 négociations du gouvernement ne venait pas à l'aéroport le jour d'après en
8 février, il allait organiser une conférence de presse." On savait que les
9 Musulmans avaient pilonné cet endroit et il ne l'a pas publié, il s'en est
10 servi d'instrument de pression en dépit de l'opinion publique mondiale qui
11 était prise déjà d'une hystérie anti-Serbe. En a-t-il été ainsi ou pas,
12 Lord Owen ?
13 R. Vous avez raison en partie, malheureusement, vous n'avez pas dit toute
14 l'histoire. A la demande de M. Karadzic, et de toute façon c'était
15 inévitable, il y a eu une enquête complète indépendante suite à cette
16 attaque de mortier. L'enquête onusienne diligentée par Boutros Boutros-
17 Ghali a conclu qu'il était impossible de déterminer qui était à l'origine
18 de cette attaque, de savoir si ce mortier venait d'une zone contrôlée par
19 l'armée musulmane ou d'une région où se trouvaient des forces musulmanes ou
20 des forces serbes. Et vous avez raison de dire qu'au départ, au stade
21 préliminaire de l'enquête, il semblait que cet obus venait d'une zone tenue
22 par les forces musulmanes. C'était une situation tout à fait extraordinaire
23 que celle-là, on a vu l'OTAN, l'Union européenne qui était plus que prête à
24 prendre une décision partant automatiquement de l'hypothèse que l'obus
25 devait venir d'une région tenue par les Serbes. Et ceci n'a jamais été
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1 prouvé, je le répète. Le contraire n'a pas non plus été prouvé.
2 Mais l'impression initiale c'était cet obus venait d'une zone tenue par les
3 forces musulmanes. C'est donc un épisode tout à fait frustrant et la
4 diplomatie à l'époque était telle qu'il était important que les Nations
5 Unies conservent leur intégrité, et en dépit de critique incessante, le
6 général Rose a insisté. Il faut le dire à ces Juges beaucoup de membres des
7 Nations Unies ont perdu leur vie en Bosnie-Herzégovine pour lutter en
8 faveur de l'impartialité, s'opposant à des forces très vives. Il y avait
9 une certaine attitude de la part de l'Union européenne, et je n'en suis pas
10 fier, je l'avoue, de même que de l'OTAN, qui tenait à arriver à une
11 conclusion, à une seule, à savoir qu'il fallait blâmer les forces serbes de
12 Bosnie.
13 Cependant, il faut comprendre que l'Union européenne et l'OTAN se
14 trouvaient face à un contexte de particulier, à savoir que jour après jour
15 il y avait des obus qui tombaient dans Sarajevo de mortier de canon tenu
16 par les Serbes. Je me suis trouvé moi-même avec le général Morillon et
17 j'étais réveillé au milieu de la nuit par des tirs d'artillerie dirigés,
18 braqués directement sur le QG des Nations Unies.
19 Donc il y avait tout un contexte. Et si vous prenez cet incident
20 particulier là, on risquait de voir l'impartialité, l'intégrité des Nations
21 Unies qui soit mise en pièce. Ça n'a pas été le cas, heureusement, on n'a
22 pas pu déterminer qui était l'auteur de ces tirs, mais on savait qu'il y
23 avait trop d'armes de positions où se trouvaient des armes tout autour de
24 Sarajevo, qui a plus d'aisance de tirer sur Sarajevo. Il fallait que ces
25 pièces soient enlevées. Mladic s'est trouvé face à un ultimatum. Il fallait
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1 assurer le retrait de ces troupes, tout à fait correcte comme attitude.
2 Il a refusé. C'est ça la réalité. Il les a fait tourner autour de Sarajevo.
3 Il les a fait revenir par d'autres voies de communication. C'est seulement
4 au moment-là où les Russes d'abord à notre demande, mais ils sont aussi
5 très vite réagi. Ils ont déplacé des forces des Nations Unies qui avaient
6 été assignées en Croatie, et ils les ont fait passer vers Sarajevo pour
7 renforcer ce secteur de Sarajevo afin de rassurer les Serbes.
8 Et puis vous avez vos généraux à vous qui ont forcé le général Mladic à
9 commencer à retirer non pas ses hommes, mais ces armes lourdes. Et nous
10 avons réussi à avoir une zone d'expulsion à Sarajevo, et finalement à
11 rétablir la paix à Sarajevo pendant de nombreux mois avec seulement
12 quelques incidents épisodiques. Cela n'a pas duré longtemps.
13 Ce ne sont là que certains détails. Ces des faits dont qu'il est difficile
14 d'établir, si on veut établir la vérité d'une période très difficile qui a
15 duré dix à quatorze jours.
16 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous avez eu plus de
17 temps qu'est-ce qui vous avez été accordé, mais vous avez encore le temps
18 de poser une dernière question.
19 M. MILOSEVIC : [interprétation]
20 Q. Si ce n'est qu'une dernière question que je puis poser, alors puisqu'il
21 a également été question de mes positions politiques, Lord Owen, j'ai pris
22 bonne note de ce que vous avez dit hier, et vous avez été explicite. Vous
23 avez dit que j'avais exprimé et était une opinion prépondérante serbe.
24 Qu'est-ce que j'étais censé exprimer en tant que représentant élu en Serbie
25 si ce n'est l'opinion prépondérante de cette population serbe qui m'a élu ?
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1 R. Monsieur Milosevic, quant à savoir si vous avez été élu au sens reconnu
2 dans les démocraties occidentales, c'est une autre question. Mais je n'ai
3 jamais eu le moindre doute dans mon esprit vous avez été le dirigeant élu
4 du peuple serbe. Vous représentiez l'avis majoritaire. Je ne contexte pas
5 ici le processus électoral, mais je pense que pendant tout un temps vous
6 avez représenté l'avis des Serbes.
7 Et ceci, investir un dirigeant politique d'une responsabilité particulière,
8 car quelquefois certains sont prêts à adopter une position minoritaire
9 contre leur opinion publique, en s'opposant à l'avis de cette opinion.
10 Malheureusement, vous, lorsqu'on pense à l'avis nationaliste serbe à propos
11 du Kosovo, mais aussi par rapport à d'autres facettes de ce conflit, cela
12 ne justifie pas de dire que on a toujours représenté l'avis majoritaire. La
13 démocratie n'est pas simplement un référendum perpétuel dans lequel les
14 dirigeants sont censés représentés l'avis de la majorité. Il est essentiel
15 que ces dirigeants soient prêts à défendre des avis qui représentent aussi
16 la minorité. Ce qui est juste au plan international et en droit
17 international, doit être préservé, maintenu et vous aviez pour devoir de
18 faire respecter ce droit international même si ce n'était pas ce qu'a
19 accepté la majorité de l'opinion publique serbe.
20 Désolé de terminer sur un mode de leçon à vous donner, mais vous savez que
21 tout au long de l'histoire, le poste d'un dirigeant politique est le mieux
22 rempli lorsque les dirigeants sont prêts à affronter l'opinion publique.
23 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Kay.
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je puisse seulement --
25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Non, maintenant le tour est venu à M. Kay
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1 d'intervenir.
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voulais juste --
3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Si vous avez des pièces à verser au
4 dossier nous en parlerons plus tard.
5 Maître Kay, vous avez la parole.
6 Questions de l'Amicus Curiae, M. Kay :
7 Q. [interprétation] Je vais maintenant vous poser quelques questions qui se
8 fondent sur la pièce C18, votre livre l'Odyssée Balkanique. Je vais en
9 extraire quelques pages.
10 Prenons d'abord la page 94, chapitre 3. Vous parlez à cet endroit du plan
11 de paix Vance-Owen. Nous sommes en janvier 1993, vous avez pris part à ce
12 processus de paix à partir du mois de septembre 1992. Intervient donc une
13 période allant de septembre à janvier et manifestement vous avez fait une
14 étude de fond pour comprendre le contexte, vous avez des réunions pour
15 déterminer ce que vous alliez proposer comme modalité aux protagonistes.
16 Est-ce là un résumé fidèle de votre situation ?
17 R. Je l'espère.
18 Q. Voyons maintenant le plan page 94. Nous voyons là les principes
19 constitutionnels, on définit la Bosnie-Herzégovine comme étant un état
20 décentralisé et vous accordez une importante autonomie aux provinces toutes
21 en refusant de reconnaître à ces provinces un caractère légal
22 international. Donc finalement dans ce plan de paix qui était le vôtre à
23 l'époque, ce qui était important c'est qu'il y avait la reconnaissance déjà
24 accordée à la Bosnie-Herzégovine par la communauté internationale et votre
25 prémisse c'était que la Bosnie-Herzégovine allait rester à l'état reconnu.
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1 Il était impossible de faire marche arrière. C'était bien votre idée, votre
2 principe directeur, n'est-ce pas ?
3 R. Exact. C'était le mandat qui nous avait été donné par la conférence de
4 Londres. Et de toute façon, c'était le droit international qui prévalait.
5 Q. Oui. Et dans le cadre de cet état décentralisé, vous n'alliez pas
6 déterminer quels étaient les groupements ethniques de ces provinces qui
7 allaient s'y trouver ?
8 R. Non. Nous n'avons pas attribué de bases ethniques au niveau des noms,
9 ni dans nos descriptions, mais il a toujours été manifeste vue la situation
10 qui se présentait en ex-Yougoslavie, que certains affirmeraient que
11 certaines provinces allaient probablement avoir telle ou telle majorité.
12 Q. Janvier 1993, à ce moment-là, les Serbes de Bosnie se trouvaient dans
13 la position la plus forte, n'est-ce pas ?
14 R. Oui. Ils occupaient quelque 70 % du territoire.
15 Q. A ce stade, si on avait reconnu le plan de paix, ça aurait signifié
16 qu'ils auraient dû abandonner certains des gains militaires conséquents
17 qu'ils avaient obtenu au cours des années précédentes ?
18 R. Oui. Ils étaient censés abandonner quelque 23 % du territoire en
19 Bosnie-Herzégovine. C'était donc là un renversement assez conséquent du
20 fruit de la guerre si vous voulez, ou du fruit du nettoyage ethnique. Et
21 ceci devait être réalisé par la voie de négociation sur la force. Il ne
22 fait pas l'ombre d'un doute que c'était un plan ambitieux.
23 Q. Page 97 de ce livre, vous dites clairement que vous demandiez un
24 vainqueur d'abandonner une portion territoriale importante qui est assez
25 inusité dans un contexte historique ?
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1 R. Oui, 38,6 % du territoire.
2 Q. Et vous avez défié les critiques de ce plan de retrouver dans
3 l'histoire un cas analogue où il y aurait eu une telle générosité d'un
4 vainqueur.
5 R. Exact. Et moi, je n'ai en tête aucun exemple de ce genre.
6 Q. Replaçons ceci dans son contexte en rapport à M. Milosevic à Belgrade,
7 pour qu'il gagne l'adhésion à ce plan, vous le reconnaissez, ce aurait été
8 un défi, une gageure politique considérable pour lui dans ces contacts avec
9 les dirigeants serbes de Bosnie ?
10 R. Oui, je le reconnais, mais c'était une revendication qui ne
11 s'adressait pas qu'à lui tout seul. Il était président de la Serbie à
12 l'époque et nous essayions de faire participer aussi l'autorité de Cosic,
13 qui était alors président de la RFY, nationaliste notoire, ainsi que nous
14 voulions la participation de Bulatovic, président du Monténégro.
15 Q. Au moment où a été révélé ce plan de paix, page 99, vous dites que
16 nombreuses furent les critiques du président Izetbegovic qui se plaignait
17 de la teneur même du plan. On a utilisé l'appareil de propagande. Il a
18 utilisé cet appareil de propagande pour donner l'impression qu'il était
19 forcé à accepter moins de choses que ce à quoi il avait droit dans ce
20 processus.
21 R. En fait, on a entendu dire que les Musulmans de Bosnie avaient accepté
22 ce plan, M. l'ex-ambassadeur, c'est normal qu'il avait entendu dire et nous
23 aussi, nous avions cette impression. Il est vrai, bien sûr de dire, que
24 sachant qu'il y allait bientôt avoir une nouvelle administration
25 américaine, bizarrement, on s'était dit que ce plan était trop favorable
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1 pour les Serbes et ils voulaient plus de territoire.
2 Q. Vous abordez la question qui allait être la mienne. Si nous voyons la
3 page 100 de votre livre, vous pensiez que le ministère des Affaires
4 étrangères américain a déformé la situation, a encouragé Izetbegovic à
5 revendiquer un territoire qu'il ne pouvait pas être accepté par les Serbes,
6 forçant ce plan de paix à capoter ?
7 R. Je ne pense que c'était quelque chose de délibérer. Je pense qu'ils
8 n'ont pas compris ce plan. Ils n'ont pas compris l'histoire à l'époque.
9 C'était une nouvelle administration qui se mettait en place, bien sûr, ils
10 y avaient des gens qui comprenaient, cependant, certains à New York et
11 ailleurs avaient des avis assez catégoriques, à Washington notamment, on
12 estimait qu'on avait été trop généreux à l'égard des Serbes.
13 Q. Page 100, vous dites que Vance et Okun s'étaient plaints de la façon
14 dont les Etats-Unis avait présenté vos intentions ainsi que les détails de
15 ce plan ?
16 R. Exact. C'est exact.
17 Q. Et on pensait peut-être que derrière tout ça, la raison c'était que les
18 Russes soutenaient ce plan et les Américains craignaient une initiative
19 soutenue par les Russes.
20 R. Ça peut-être été un des facteurs qui a contribué.
21 Q. Si nous revenons à l'histoire politique de M. Milosevic, c'était un
22 communiste qui venait d'un parti socialiste. Son gouvernement entretenait
23 de bons rapports avec la Russie.
24 R. Là, vous allez un peu loin mais c'est vrai.
25 Q. Mais est-ce que ce n'était pas une des composantes ?
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1 R. Je ne pense pas que la Fédération de Russie, à ce moment-là, soutenait
2 les Serbes comme ceux-ci auraient voulu être soutenus par les Russes
3 puisque c'était tous des Slaves. Il y avait M. Kosyrev qui était le
4 ministre des Affaires étrangères de la fédération. Il a essayé d'être
5 équitable et je pense que la Russie a été très utile dans tout ce processus
6 jusqu'au moment de la négociation de Dayton et même au-delà pour ce qui est
7 de la mise en œuvre de ce plan.
8 Q. Là, je fais peut-être un bond audacieux, mais est-ce que finalement les
9 états qui examinaient ces questions de l'extérieur voyaient en fait leurs
10 intérêts politiques bien servis, n'est-ce pas ?
11 R. Nous ne vivons dans un monde idéal, ni parfait.
12 Q. Page 102, vues les difficultés rencontrées par ce plan dans la façon
13 dont il allait être perçu par les Serbes de Bosnie, le fait que M.
14 Milosevic ait soutenu ce plan, n'était-ce pas un élément en votre faveur ?
15 R. Oui. A ce moment-là, au mois de janvier, nous n'avions pas son soutien
16 inconditionnel, mais il était utile car il comprenait que nous essayions
17 d'établir des principes, des principes de coopération et je pense le dire
18 quelque part dans mon livre. Il a eu l'idée de faire une fusion de deux
19 principes. Il voulait en représenter neuf plutôt que dix et c'est lui qui a
20 fourni le fondement d'un compromis. Karadzic avait dit avoir proposé huit,
21 le président ou le co-président en avait offert dix, on en est arrivé à
22 neuf. C'était un trait de génie et j'en serai gré M. Milosevic.
23 Q. Milieu de la page 102, "M. Milosevic a offert une formule qui nous a
24 permis de sauver la face."
25 R. Exact.
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1 Q. Et manifestement, vous avez été en mesure de comprendre et de
2 reconnaître qu'il y avait pour lui, lui aussi, des conséquences politiques
3 importantes s'il vous aidait à soutenir et à présenter un plan qui était
4 contraire aux autres aspirations des dirigeants serbes de Bosnie de
5 l'époque ?
6 R. Oui. Il faut se souvenir du fait que la plupart des parties
7 d'opposition soutenaient le Dr Karadzic, dont certains qui sont devenus
8 dirigeants et chefs de la République fédérale de Yougoslavie après la
9 défaite électorale de M. Milosevic.
10 Q. Et pour replacer ceci dans son contexte, à Belgrade, vous savez que
11 lui, il avait besoin de poursuivre ceci jusqu'au bout et de leur faire
12 comprendre ceci, et de faire accepter ceci par les hommes politiques de
13 Belgrade en Serbie ?
14 R. Dans une certaine mesure seulement. Ce n'est pas une démocratie telle
15 qu'elle fonctionne à l'ouest, bien sûr il devait tenir compte des critiques
16 formulées à l'encontre de son plan que ces critiques viennent de Draskovic
17 ou de Seselj ou d'autres dirigeants.
18 Q. Vous avez essayé de voir dans quelle mesure il soutenait ce plan et
19 pour ce faire il vous fallait comprendre qu'il fallait la preuve que
20 Karadzic essayait de faire passer, de faire accepter ce plan par son
21 électorat ?
22 R. Mais, ça aurait été utile qu'il le fasse.
23 Q. Mais il essayait de présenter ceci comme étant une victoire acquise par
24 lui ?
25 R. Voulez-vous parler de ce plan ?
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1 Q. Oui. Le fait qu'il ait accepté.
2 R. Vous voulez parler de Karadzic ?
3 Q. Oui.
4 R. Tout du contraire. En fait, Karadzic il essayait de répartir ses
5 atouts. Il se disait que s'il y avait une défaite des Serbes, il devrait
6 abandonner tous ces territoires, il devrait abandonner un territoire où il
7 y avait des sites industriels et au contraire Karadzic n'a jamais accepté
8 ce plan. Il ne le voulait pas. Les faits de la vie, c'est qu'en fait Dayton
9 a donné aux Serbes 6 % de territoire en plus que ne le faisait le plan
10 Vance-Owen.
11 Q. Page 103 de votre livre, vous montrez clairement que c'est la pression
12 exercée par M. Milosevic qui était alors président, pression exercée sur
13 Mladic et Karadzic et sur les autres dirigeants qui a forcé l'adoption de
14 ce plan ?
15 R. Il a exercé des pressions et il a obtenu d'eux qu'ils signent ce plan à
16 Athènes, mais à ce moment-là ils sont revenus sur leur signature, donc M.
17 Karadzic à Pale. Il est apparemment allé pour soutenir ce plan à Pale, mais
18 ce n'était qu'une apparence d'après ce que j'ai entendu dire à propos du
19 discours qu'il a prononcé, c'était un discours tellement mou qu'en fait il
20 est de ceux qui allaient voter contre ce plan.
21 Q. Vous dites que Karadzic s'effondre et abandonne à la 25e heure pour ce
22 qui est de ce plan ?
23 R. Oui. En fait il a négocié pratiquement toute la nuite avec lui, il n'y
24 avait pas que le président Milosevic, il y avait le président Cosic, il y
25 avait Bulatovic et aussi le premier Ministre grec, Mitsotakis qui a joué un
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1 rôle très utile.
2 Q. C'était là des mesures tout à fait essentielles prises par M. Milosevic
3 en faveur du plan de paix afin que de son côté, du côté des Serbes de
4 Bosnie on donne l'aval à ce plan ?
5 R. Oui. Je n'ai pas le moindre doute quant à l'engagement de M. Milosevic
6 -- je ne pense pas qu'il est allé à Pale pour que ce plan soit rejeté.
7 Parce qu'il a été très humilié de retour à Belgrade car il n'avait pas pu
8 faire intervenir sa volonté, il n'avait pas pu gagner à Pale. Tout le monde
9 n'est pas de mon avis, il y a une théorie du complot mais je ne sais pas si
10 c'est la vérité.
11 Q. Vous dites qu'il a eu une défaite à Pale puisqu'il y a seulement deux
12 voix en sa faveur alors que l'autre partie en obtient 51 et puis qu'il
13 quitte l'assemblée par une porte de secours.
14 R. Je n'étais pas là pour le dire mais on en a fait la description dans
15 les journaux. Et il y a eu surtout l'intervention cruciale du général
16 Mladic mais aussi de Mme Plavsic.
17 Q. En janvier au moment où on essaie de faire passer ce plan de paix --
18 page 105 de votre livre-là -- pour établir un bon rapport de force, il ne
19 fallait pas pour conserver l'appui des Serbes, la dernière chose que vous
20 vouliez c'était l'attaque militaire déclenchée par le président Tudjman sur
21 les Serbes de Croatie pour s'emparer de leur territoire ?
22 R. Oui, c'était quelque chose de tout à fait contre productif. Tout le
23 monde s'intéressait à la Bosnie-Herzégovine, au plan de paix. Il en a
24 profité pour faire passer son action militaire.
25 Q. Toujours à ce moment-là l'administration Clinton prenait des mesures
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1 qui pour vous revenaient à tuer ce plan de paix Vance-Owen ?
2 R. Je pense qu'il s'intéressait surtout à la Croatie. Vous savez c'était
3 un nouveau gouvernement. Je pense qu'il a prêté serment le président
4 Clinton le 20 janvier. Le 23 janvier, on attaque le pont de Maslenica. Je
5 ne pense pas qu'on pouvait attendre du gouvernement Clinton d'avoir un avis
6 très clair sur la question, sur ce volet-là, le volet Croate. Mais le
7 gouvernement américain avait déjà montré qu'il n'était pas très satisfait
8 du plan de paix Vance-Owen plusieurs semaines avant l'entrée en fonction.
9 Et vous connaissez le système américain, les élections avaient eu lieu au
10 mois de novembre, et il y a une période de deux mois qui va du mois de
11 novembre à l'entrée en fonction en janvier, et en règle générale c'est une
12 politique bipartisane qui intervient à ce moment-là, et qui, tient compte
13 de la politique que va adopter le nouveau président en matière de politique
14 étrangère, c'est tout à fait compréhensible comme système.
15 Q. Page 114. Vous dites que la nouvelle administration s'était déjà fait
16 une idée très claire de la situation et voulait faire avorter ce plan de
17 paix.
18 R. C'est très clair pour moi. La question qui se posait pour moi et Cyrus
19 Vance c'était de savoir si nous allions accepter cela. Et c'était surtout
20 grave pour Cyrus Vance, d'abord parce qu'il est Américain et puis il avait
21 été secrétaire d'Etat, ministre des Affaires étrangères et son adjoint,
22 Warren Christopher, était devenu ministre des Affaires étrangères. Donc si
23 Cyrus Vance s'opposait à une nouvelle administration démocrate pour
24 laquelle il y avait des sympathies, c'était une situation très pénible dans
25 laquelle il se trouvait. Nous en avons discuté et j'ai convenu d'endosser
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1 la responsabilité d'accuser l'attaque frontale américaine. Il a accepté et
2 c'est ce qu'ils ont fait. Exemple d'une question très ardue il aurait pu ne
3 rien faire et nous pouvions aussi relever le défi et j'estimais que l'Union
4 européenne unit sur la question, unanime devait relever le défi. On ne
5 disait pas ça passe ou ça casse aux Américains, on disait simplement
6 examinez-le ce plan, ne le rejetez pas tout de go, parce que ce sont ici
7 vos alliés, vos amis, qui font cette proposition dans le cadre d'une
8 conférence où était représenté les Etats-Unis, ainsi que la Fédération de
9 Russie et d'autre pays non européens -- non-membres de l'Union européenne,
10 et nous ne voulons pas que ce plan soit mis sur la touche sans combattre.
11 Et nous voulions avoir un appui ne serait-ce que théorique des Etats-Unis.
12 Ils ont peut-être donné cet accord deux ou trois semaines plus tard. Mais
13 ce n'était jamais un accord véritable.
14 Q. Puis arrive le mois de mai, se fait la réunion de Pale, vous saviez à
15 ce moment-là que M. Milosevic n'avait cessé de faire pression sur Radovan
16 Karadzic, et vous dites qu'il avait presque forcé Karadzic à accepté ce
17 plan et à accepter ce réalisme politique.
18 R. Oui, et je l'ai tout à fait soutenu.
19 Q. Oui. Pages 148 [sic] et 149 [sic].
20 R. Oui.
21 Q. Vous estimiez qu'en l'occurrence Karadzic n'était pas un dirigeant, ne
22 dirigeait pas. Il n'était pas prêt à suivre jusqu'au bout ce qui était ce
23 plan face à son électorat, pour exhorter cet électorat à participer ?
24 R. Exact.
25 Q. Page 163, vous décrivez l'assemblée de Pale, vous parlez de l'attitude
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1 dure tenue par Mme Plavsic qui s'opposait à la signature du plan. Vous avez
2 Krajisnik et Karadzic lui se préoccupait plutôt de son rôle de dirigeant
3 des Serbes de Bosnie davantage que d'essayer de faire aboutir ce plan de
4 paix ?
5 R. Oui. Je pense qu'on a commencé à ce moment-là à voir l'émergence de
6 Krajisnik en tant que personnalité très influente. Il se trouvait à
7 Athènes, mais là il est un peu mis à l'écart et n'a pas joué un rôle
8 principal, mais après Pale, Krajisnik -- une influence. Plus tard, il faut
9 voir en fait dans Krajisnik et Karadzic un binôme. Ils étaient pratiquement
10 unifiés. Je pense que Karadzic n'aurait pas beaucoup bougé s'il n'avait pas
11 eu à ses côtés Krajisnik.
12 Q. Page 165. Ceci ne porte pas seulement sur la dimension politique, elle
13 englobe aussi la dimension militaire dans la situation. Vous avez le
14 général Mladic, personnalité puissante à ce moment-là, qui fait
15 pratiquement cavalier seul. Il échappe au contrôle du parlement serbe de
16 Bosnie. Il est en mesure d'exercer ses propres influences, et de chercher
17 ses propres -- et d'avoir ses propres alliés parmi les cercles politiques,
18 les regroupements politiques du parlement ?
19 R. Oui. Je pense que Mladic est devenu très, très puissant à partir de ce
20 moment-là. Non pas qu'il l'aurait été uniquement sur le plan militaire,
21 mais il a commencé à avoir, si voulez, un suivi politique parmi les députés
22 de Pale. Et plus tard aussi.
23 Q. A quelle situation faisiez-vous face en mai ? Pale pouvait à ce moment-
24 là rejeter Belgrade sans problème.
25 R. Oui. Et défier le reste du monde.
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1 Q. Tout simplement, parce que Pale pouvait représenter une force
2 conséquente dans la région, et avait un ordre du jour politique tout à fait
3 cohérent établi par eux-mêmes ?
4 R. Oui.
5 Q. Comme le montre le vote à l'assemblée de Pale ?
6 R. Oui. Il faut se souvenir du fait que ces gens n'étaient pas du même
7 parti politique que celui qui était le parti du président Milosevic. Il
8 était président à ce moment-là. Ils avaient une lecture de l'histoire serbe
9 qui était la leur. Il est vrai de dire que Karadzic a commencé à se voir
10 comme une espèce de Mihajlovic serbe, une autre tradition que celle
11 instaurée par Tito et les partisans.
12 Q. Tout à fait en mesure de penser tout seul, et d'avoir son royaume à
13 lui, dissocié, divorcé de la Serbie.
14 R. C'est peut-être vrai de temps à autres, mais ce qui s'est passé c'est
15 que Belgrade a occasionnellement rappelé à Pale ce qui se passerait sans la
16 prise de Belgrade. Il y avait ces artères de communication qui passaient
17 par la Serbie, le Monténégro, pour arriver aux Serbes de Bosnie. Mais
18 lorsqu'ils étaient un peu trop impétueux, on les ramenait à la réalité qui
19 était celle de leur dépendance, à l'égard de Belgrade.
20 Q. Pourtant à Belgrade, on se demandait comment contrôler ces Serbes qui
21 étaient alors en Bosnie. On ne peut pas attaquer les siens. Le programme
22 politique, l'ordre du jour politique de l'époque ne l'aurait pas autorisé.
23 R. On en a discuté hier.
24 Q. Oui.
25 R. Et j'ai été très franc. Il aurait irréaliste de demander au président
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1 Milosevic, à quelque moment que ce soit, de faire intervenir les forces de
2 la JNA contre les Serbes, militairement. Ceci est politiquement
3 impraticable.
4 Q. Il faut ici admettre les liens ethniques qui existent entre les
5 différents groupes de population.
6 R. Oui. Et que ce soit Belgrade ou les Serbes de Bosnie, vous savez les
7 Serbes de Bosnie se vantaient de l'établissement du fait qu'ils n'étaient
8 pas communistes, même si beaucoup l'avaient été. Mais je pense que les
9 rapports avec la Russie étaient un peu plus ambigus. Mais il y avait aussi
10 des forces d'opposition en Russie, d'opposition au président Yeltsin qui se
11 mettait du côté des Serbes de Bosnie.
12 Q. A ce stade-là, en mai 1993, vous aviez compris que le président
13 Milosevic n'était pas une espèce de balle magique qu'on pouvait tirer pour
14 obtenir ce qu'on voulait.
15 R. Oui. Je ne pouvais pas l'utiliser cette balle. Pas plus que d'autres.
16 Bien sûr, il avait des limites qui lui étaient imposées. Il serait absurde
17 de ne pas le reconnaître. Mais je l'ai déjà dit clairement. A mon avis, il
18 a exagéré les contraintes qui pesaient sur lui, que ce soit à dessein ou
19 pas, je ne sais pas. Mais il ne serait pas le premier homme politique à
20 être très prudent quant à l'exercice du pouvoir lorsque ce pouvoir signifie
21 qu'on met -- qu'on endommage ou qu'on met en question cette base, ce socle
22 sur lequel repose les hommes politiques.
23 Q. Donc à partir de ce moment-là, à partir du mois de mai, la plus grande
24 incertitude régnait sur le plan politique. Il y avait cette phase sauvage
25 de la guerre entre les Musulmans et les Croates en Bosnie-Herzégovine. Vous
Page 28565
1 en parlez à la page 171, de votre ouvrage.
2 R. Oui.
3 Q. Et donc il y a eu un changement de politique de la part des Etats-Unis,
4 cité en page 180, de votre ouvrage. Au départ, les revendications
5 territoriales ont été plus importantes pour les Musulmans. Et ensuite elles
6 se sont muées en revendications territoriales plus importantes pour les
7 Serbes. Ce qui constituait un revirement complet, n'est-ce pas ? Assez --
8 une grande contradiction ?
9 R. Oui, c'était extraordinaire. Au mois de mai, nous avions en face de
10 nous une administration américaine qui condamnait le plan de paix Vance-
11 Owen en disant qu'il était trop généreux pour les Serbes. Et que les Serbes
12 -- et ensuite disant que les Serbes devraient disposer de plus de
13 territoires. Et que ce plan était irréaliste. Les circonstances étaient
14 vraiment étonnantes.
15 Q. Et les Russes qui, au départ, étaient satisfaits, ont ensuite demandé
16 plus de territoires pour les Serbes ?
17 R. Oui. Il est difficile pour le ministre des Affaires étrangères russe
18 confronté au secrétaire d'Etat américain qui souhaite qu'il n'y ait aucune
19 concession faite à l'égard des Serbes, de dire, "Non merci, je pense que
20 vous devriez être plus dur sur les Serbes." Ce n'était pas une position
21 réaliste à adopter. Donc je ne critique pas le plan conjoint. Je pense que
22 les problèmes étaient tout à fait évidents. Et qu'il était tout à fait
23 compréhensible qu'il ait agi de la sorte.
24 Q. Et ceci était un encouragement aux diverses parties d'essayer de
25 continuer à défendre leurs intérêts respectifs ?
Page 28566
1 R. Oui.
2 Q. Même si c'était aux dépens du cessez-le-feu ou de la paix. Ils se
3 rendaient compte que le territoire était à prendre. Et la chasse aux
4 territoires a commencé.
5 R. Oui. Et je pense que ce genre de personnes, des gens qui, sur le plan
6 politique ne sont pas très matures, et qui exercent la force pour obtenir
7 satisfaction, si une concession l'aurait fait, ils considèrent cette
8 concession comme une autorisation d'exiger de nouvelles concessions. Et
9 l'attitude occidentale par rapport à ces différents plans de paix -- je
10 tiens à souligner que le plan Vance-Owen est le seul plan de l'époque qui
11 était un cercle vicieux. Donc c'était le plan le plus important. Il était
12 plus important que le plan du Groupe de contact. Le fait qu'ils aient
13 renoncé à négocier sur la base de la carte, et cela a donné à Karadzic et à
14 Krajisnik ainsi qu'à Mladic, l'impression qu'ils pouvaient défier Belgrade.
15 Et défier en fait, n'importe qui.
16 Q. A l'époque du plan du Groupe de contact, donc lorsque ce plan a vu le
17 jour sur le plan politique, le président Milosevic souhaitait que le Groupe
18 de contact soit pris au sérieux, parce qu'il y avait eu tellement
19 d'hésitations, tellement de modifications qu'il devenait difficile pour qui
20 que ce soit de savoir qui était vraiment sérieux, et qui ne l'était pas.
21 R. Je ne sais exactement de qui vous parlez ici, mais si vous parlez de
22 cela -- de Tolkenson [sic] [phon], je pense qu'il était sérieux.
23 Q. Je parle de la page 69 [sic] de votre ouvrage. Nous y voyons la
24 conclusion que je viens de citer.
25 R. Vous avez mieux lu mon ouvrage que moi-même.
Page 28567
1 Q. Mais entre temps, parce que le président Milosevic avait apporté son
2 soutien au plan de paix Vance-Owen, son autorité avait été mise en cause
3 par les Serbes de Bosnie.
4 R. Je crois que c'est exact. Je crois pouvoir dire qu'il y a eu des étapes
5 diverses et très intéressantes dans la réalité du pouvoir dont jouissait le
6 président Milosevic sur les Serbes. Au départ, ce pouvoir, cette influence
7 était assez grande. Et après un certain temps, après ce qui s'est passé à
8 Pale, il y a eu un moment où son influence a commencé à diminuer. Et le
9 plan a fini par ne plus jouir du même soutien. Donc je pense qu'il a
10 commencé à leur en vouloir, de lui refuser le soutien du plan qu'il
11 soutenait lui-même.
12 Et en septembre 1994, la décision de réduire les approvisionnements qui
13 arrivaient aux Serbes de Bosnie a constitué une tentative pour recouvrer
14 une influence perdue. Donc, je crois que c'est en 1995, sans doute ou en
15 tout cas à l'été 1995, que l'on peut dire qu'il avait récupéré, recouvré
16 une grande partie de son influence. Et que donc, il a pu obtenir cette voix
17 prépondérante dans les négociations relatives au plan de Dayton. A ce
18 moment-là, les Serbes avaient perdu la Krajina. Les Serbes de Bosnie
19 étaient en train de voir la réalité telle qu'elle était. Les Serbes donc de
20 Croatie avaient été expulsés de Krajina. Le gouvernement croate agissait
21 très ouvertement en Bosnie-Herzégovine ce qui avait modifié le rapport de
22 force. Les Serbes de Bosnie et leurs forces armées avaient été réduites en
23 nombre. Il y avait des restrictions. Nous pouvons discuter longtemps de
24 tout cela, notamment de l'efficacité des restrictions imposées. Je pense
25 que les pouvoirs du président Milosevic étaient probablement plus
Page 28568
1 importants et il les a exercés. Quiconque a lu l'ouvrage de Richard
2 Holbrooke au sujet des négociations de Dayton sait qu'au dernier moment au
3 sujet de Brcko, le débat est devenu très animé et que les discussions ont
4 duré plusieurs mois.
5 Donc la position qu'il a prise au sujet de Brcko était prévisible. C'est la
6 position qu'il avait toujours maintenue dans les négociations sur Brcko
7 depuis le début.
8 Q. Oui.
9 R. Donc il y a une continuité dans tout cela.
10 Q. Mais à partir de mai 1993 jusqu'à l'été 1995 --
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May.
12 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Pour qu'il n'y ait pas de confusion sur les
14 dates, cette réunion, au cours de laquelle la direction de la Yougoslavie,
15 à mon initiative, a accepté un accord avec la direction de la Republika
16 Srpska au sujet de l'envoi d'une délégation unie à Dayton, s'est tenue le
17 29 août 1995, 29 août 1995, autrement dit, longtemps après les événements
18 de Bosnie et de Croatie, en tout cas, plusieurs semaines plus tard.
19 M. KAY : [interprétation]
20 Q. Oui, mais jusqu'à ce moment-là, jusqu'à 1995 et après ce qui s'était
21 passé en 1993, il avait vécu une période où son pouvoir avait été remis en
22 cause et ou finalement c'est Karadzic qui exerçait le contrôle politique
23 sur les Serbes de Bosnie.
24 R. Et/ou Mladic.
25 Q. Oui.
Page 28569
1 R. Oui, je suis d'accord.
2 Q. Il est difficile --
3 R. Oui. Cette position a été défendue par pas mal de gens mais ce n'est
4 pas la mienne.
5 Q. Bon.
6 R. Ces personnes qui participaient de très près aux négociations, qui
7 s'agisse du général Wahlgren, de certains des experts russes, d'un grand
8 nombre de personnes qui donc ont participé aux négociations, ces personnes
9 estiment qu'il y a une baisse dans l'influence du président Milosevic et je
10 suis d'accord avec votre analyse.
11 Q. Les Russes accordaient un soutien très ouvert au président Milosevic et
12 essayaient d'influer sur Karadzic et d'exercer une pression sur lui.
13 R. Oui. Je veux dire que les Russes ou plutôt les Américains dans le cadre
14 de la nouvelle initiative américaine, après les débats animés au sujet du
15 plan Vance-Owen en février 1993, donc les Américains à ce moment-là avaient
16 nommé l'ambassadeur Bartholomew à son poste. C'était un diplomate très
17 compétent et il représentait les Etats-Unis. Les Russes ont répliqué en
18 nommant l'ambassadeur Churkin. Et l'ambassadeur Churkin a exercé des
19 efforts sans relâche en allant sur le terrain pour tenter d'influer sur les
20 différentes factions serbes.
21 Q. Oui. Page 307 de votre ouvrage.
22 Dans la même période, bien sûr, il y avait les frappes aériennes de l'OTAN.
23 Je rappelle que c'était donc en mai 1995. Nonobstant le fait que les
24 frappes aériennes de l'OTAN avaient eu lieu, le président Milosevic a
25 néanmoins continué à apporter son soutien au plan du groupe de contacts.
Page 28570
1 R. Oui.
2 Q. Page 330. Alors que Karadzic tenait toujours les manettes du pouvoir et
3 le président Milosevic, agissant en tant que représentant politique, a pris
4 une position dont je suis pratiquement sûr que vous la considérerez comme
5 très courageuse car en dépit des frappes aériennes de l'OTAN, il a continué
6 à soutenir le plan de paix du groupe de contacts.
7 R. Il est certain qu'il a continué à soutenir ce plan et je crois qu'il
8 avait quelques doutes quant aux pressions qu'il serait prêt à mettre en
9 œuvre pour en obtenir l'application. Et bien sûr, il pensait que suite à
10 son attitude, les sanctions contre son pays seraient levées.
11 Donc la question est très difficile au sein de l'Union européenne, les
12 positions étaient contradictoires. Pour parler de façon générale, l'Union
13 européenne estimait que nous aurions dû user du bâton et de la carotte et
14 qu'en allégeant les sanctions contre la Serbie et le Monténégro, nous
15 agirions de façon raisonnable pour obtenir en retour la coopération que
16 nous demandions de Belgrade. Les Américains pensaient de façon globale
17 qu'un allégement des sanctions serait sans retour et que donc il était
18 préférable de maintenir fermement les sanctions sur la République fédérale
19 de Yougoslavie.
20 C'était une thèse légitime car du point de vue de la diplomatie
21 internationale, il était légitime de discuter de la meilleure manière de
22 traiter la situation et les arguments étaient valables de tous les côtés.
23 Mais cela a créé une situation plus difficile pour le président Milosevic
24 car les pays occidentaux ne semblaient pas prêts à le récompenser de ses
25 efforts en allégeant les sanctions et donc la perspective pour la Serbie et
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1 le Monténégro n'était pas très positive.
2 Q. A ce moment-là, il y a l'attaque sur la Krajina serbe de la part de la
3 Croatie, page 343 de votre ouvrage, une fois que Martic coupe la route
4 principale, et le président Milosevic est très mécontent, apparemment, car
5 pour lui c'est un risque d'anéantissement du plan de paix du groupe de
6 contacts.
7 R. Et bien, le président Tudjman avait montré à ce moment-là qu'il jugeait
8 de façon assez juste la situation politique. Il avait fourni aux Américains
9 une possibilité d'agir autrement. Il pouvait donc s'en sortir et attaquer
10 son problème. Il n'a pas été aidé par le fait que celui que l'on appelait
11 le dirigeant des Serbes de Krajina, Martic en l'occurrence, était un homme
12 très déraisonnable et malheureusement il y avait cet autre homme qui
13 s'appelait Mikelic, qui lui était beaucoup plus raisonnable, beaucoup plus
14 sérieux et qui était très entendu, très écouté à Knin mais qui n'a pas été
15 en mesure de prendre la direction des négociations. Les Serbes de Croatie
16 ont fait preuve d'un esprit provocateur absolument absurde en coupant la
17 route principale, ce qui a fourni à Tudjman une excuse pour les attaquer et
18 bien sûr, violer le droit international et l'accord existant au sujet des
19 zones protégées par les Nations Unies. Mais il s'en est sorti.
20 Q. Et dans le cadre de cette situation très complexe, vous, vous étiez
21 très sceptique quant au chien qui n'aboyait pas -- excusez-moi d'utiliser
22 cette expression mais quant au fait que les Serbes de Bosnie et Karadzic
23 avaient décidé de conclure un accord avec Tudjman au sujet des fournitures
24 de produits pétroliers.
25 R. Et bien, oui, je suis bien forcé de sourire ici parce que la situation
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1 était comique. Je crois me souvenir que j'ai écrit à Douglas Hurd et je lui
2 ai dis d'ailleurs, je l'ai écrit dans ma déposition devant ce Tribunal,
3 fait par écrit, j'ai dit que je ne voyais pas quelle stratégie permettait
4 de discuter et d'agir en plein milieu d'un cloaque. Donc il y avait cette
5 République fédérale de Yougoslavie. Il y avait le président Milosevic qui
6 faisait parvenir ses tankers jusqu'aux Serbes de Croatie et un peu de
7 produits pétroliers étaient sans doute perdus en route, ici ou là, qui peut
8 le savoir. Mais en tout cas, nous voyons tout d'un coup ce président
9 Tudjman qui offre à Karadzic et aux Serbes de Bosnie des approvisionnements
10 en pétrole. Alors où est-ce que nous en sommes pour recevoir les
11 approvisionnements en question dont il avait besoin. Par ailleurs il offre
12 des produits pétroliers aux Serbes de Bosnie.
13 Vous savez, à un certain moment, on lit les commentaires formulés par telle
14 ou telle personne et vous n'avez pas idée du caractère extraordinaire de la
15 situation dans laquelle nous opérions avec ces résolutions des Nations
16 Unies et du conseil de Sécurité et toutes sortes de contradictions.
17 Q. Et Tudjman vous a dit qu'il défendait ses propres intérêts et qu'il
18 était tout à fait prêt à le faire en agissant contre un ennemi déjà
19 ancien ?
20 R. Oui. Il avait l'avantage, c'était tout à fait clair. Ce qu'il voulait
21 était évident. Il voulait contrôler totalement le territoire de la Croatie
22 et il ne s'inquiétait beaucoup des méthodes qu'il utiliserait pour ce
23 faire.
24 M. KAY : [interprétation] Merci. Je n'ai pas d'autres questions.
25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Lord Owen, ceci met un terme à votre
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1 déposition. Merci d'être venu devant le Tribunal pénal international pour
2 témoigner.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je ne suis pas
4 sûr d'être autorisé à formuler un commentaire mais je pense que la dernière
5 période des questions montre bien que les Amis de la Chambre ont pu très
6 utilement intervenir dans cette déposition.
7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Merci. Nous suspendons l'audience pendant
8 20 minutes.
9 --- L'audience est suspendue à 12 heures 28.
10 --- L'audience est reprise à 12 heures 45.
11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous avons quelques questions
12 d'intendance à régler avant le début de l'audition de ce témoin.
13 Monsieur Milosevic, il y a un certain nombre de documents qui sont en votre
14 possession et dont vous souhaitez le versement au dossier, n'est-ce pas ?
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, je les ai déjà remis à la Greffière
16 d'audience.
17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Fort bien. Nous allons les examiner un
18 par un. Le premier de ces documents est un exemplaire du plan Cutileiro,
19 qui a été évoqué à de très nombreuses reprises dans la présente affaire
20 mais je ne me souviens pas qu'il ait été versé au dossier. Donc il convient
21 de lui affecter la cote suivante -- des pièces à conviction de la Défense.
22 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] D209, Monsieur le Président.
23 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Le document suivant, c'est la lettre du
24 27 novembre 1991 de l'accusé à M. Cyrus Vance. Cote suivante, s'il vous
25 plaît.
Page 28574
1 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce à conviction de
2 la Défense 210, Monsieur le Président.
3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ensuite l'interview avec le général
4 Morillon, document rédigé en français. Je vais consulter mes collègues
5 quelques instants.
6 [La Chambre de première instance se concerte]
7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous en acceptons le versement au
8 dossier. Cote suivante des pièces à conviction de la Défense, s'il vous
9 plaît.
10 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Pièce à conviction de la Défense 211,
11 Monsieur le Président.
12 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Y a-t-il d'autres documents que vous
13 auriez voulu soumettre au témoin, mais vous n'en avez pas eu le temps ?
14 C'est bien cela qui s'est passé ?
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. Il y en a effectivement. Mais je crois
16 pouvoir les utiliser dans le cadre de l'audition d'autres témoins.
17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Fort bien. Merci.
18 Madame Pack, à vous la parole.
19 Mme PACK : [interprétation] Monsieur le Président, le témoin suivant est le
20 Témoin B-1531.
21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Faisons entrer le témoin.
22 Mme PACK : [interprétation] Monsieur le Président, je me permettrai
23 quelques mots sur une question administrative. Le témoin B-1524 sera
24 entendu après M. Harland. Au départ, il était prévu qu'il soit entendu
25 jeudi dernier, mais l'ordre a été inversé. Donc pour demain et la semaine
Page 28575
1 prochaine, l'ordre sera celui que je viens d'indiquer.
2 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui. Je ne pense pas que nous pourrons
3 aller beaucoup plus loin que l'audition du témoin Harland, aujourd'hui, de
4 toute façon. Mais nous verrons.
5 Mme PACK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
6 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vous demanderais, Monsieur le Témoin,
8 de bien vous lever pour prononcer la déclaration solennelle.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
10 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous pouvez vous asseoir.
12 LE TÉMOIN: Témoin B-1531 [Assermenté]
13 [Le témoin répond par l'interprète]
14 Interrogatoire principal par Mme Pack :
15 Mme PACK : [interprétation] Je demande que l'on remette au témoin la
16 première page de couverture de l'intercalaire 1. Je voudrais donc que le
17 témoin ait sous les yeux la version en B/C/S de document. La page de la
18 couverture de l'intercalaire 1.
19 Q. Monsieur le Témoin, je vous demanderais donc de relire ce qui est écrit
20 sur cette page de couverture. Et je vous demande si les détails vous
21 concernant c'est-à-dire, vos nom et prénom notamment, sont exacts ?
22 Je répète la question si c'est nécessaire. Monsieur le Témoin, je vous
23 demande si les détails vous concernant qui figurent sur cette page de
24 couverture sont exacts ?
25 R. Oui.
Page 28576
1 Q. Monsieur le Témoin, avez-vous bien fourni deux déclarations aux
2 représentants du bureau du Procureur, en date du 25 juin 1996, et du 28
3 juin 1997 ?
4 R. Oui.
5 Mme PACK : [interprétation] J'aimerais maintenant que l'on remette au
6 témoin l'intercalaire 2, et en particulier la page de la couverture de la
7 déclaration en langue anglaise qui constitue donc, cet intercalaire 2.
8 Q. Monsieur le Témoin, pouvez-vous confirmer qu'il s'agit bien de votre
9 signature, au bas de la page de garde de cette déclaration émanant de vous,
10 et faite le 28 juin 1997 ?
11 R. Oui.
12 Q. J'aimerais maintenant que vous vous rendiez en page 5 de cette
13 déclaration. Donc la dernière page. Et que vous confirmiez que c'est
14 également votre signature que l'on trouve à ce niveau.
15 R. Oui.
16 Mme PACK : [interprétation] J'aimerais maintenant que l'on remette au
17 témoin l'intercalaire 3. Donc la page de couverture de la déclaration en
18 langue anglaise qui constitue l'intercalaire 3.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
20 Mme PACK : [interprétation]
21 Q. Donc cette déclaration que l'on voit ici, émane bien de vous, n'est-ce
22 pas ?
23 R. C'est bien cela.
24 Q. Veuillez je vous prie, vous rendre en page de cette déclaration pour
25 nous dire s'il s'agit bien encore une fois de votre signature que l'on
Page 28577
1 trouve donc à la dernière page de cette déclaration.
2 R. Oui.
3 Q. Monsieur le Témoin, avez-vous eu la possibilité de lire ces deux
4 déclarations depuis votre arrivée à La Haye ? Et avez-vous établi un
5 addendum à ces déclarations, à la date d'hier ? C'est-à-dire le 3 novembre.
6 Et trouve-t-on dans cet addendum, un certain nombre de modifications que
7 vous souhaitiez apporter à ces deux déclarations, avec également un certain
8 nombre d'ajouts ?
9 R. Oui.
10 Mme PACK : [interprétation] J'aimerais que l'on redonne au témoin
11 l'intercalaire 1.
12 Q. Version B/C/S de l'intercalaire 1. Veuillez, Monsieur, vous rendre à la
13 dernière page de cette déclaration. Est-ce bien votre signature que l'on
14 voit à la dernière page de la version en B/C/S de cette déclaration ?
15 R. Oui.
16 Q. Monsieur le Témoin, la teneur des deux premières déclarations émanant
17 de vous, est intégrée aux modifications et ajouts que vous avez apportés
18 dans l'addendum, correspond-elle à la vérité ? Et est-elle donc exacte
19 d'après vos souvenirs ?
20 R. Oui.
21 Mme PACK : [interprétation] J'aimerais que ces trois déclarations soient
22 versées au dossier, et qu'une cote leur soit affectée.
23 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Pièce à conviction 581, Monsieur le
24 Président, conservée sous pli scellé, donc confidentiel.
25 Mme PACK : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas de questions
Page 28578
1 pour ce témoin. Je vais simplement donner lecture du résumé de sa
2 déposition.
3 Le témoin était une personnalité publique importante dans la ville de Foca,
4 à l'époque où le conflit a éclaté. Il décrit les tensions ethniques sur
5 base de photographies. Il dit que Velibor Ostojic, Petko Cancar, et
6 Vojislav Maksimovic étaient à Foca très souvent, dans l'année qui a précédé
7 le début de la guerre. Au cours du premier semestre 1992, ils ont passé
8 tout leur temps à Foca. Ils distribuaient des ordres aux forces
9 paramilitaires et aux volontaires venus du Monténégro et de Serbie, ainsi
10 qu'à certaines formations de la JNA.
11 Le témoin décrit des réunions auxquelles assistaient Ostojic, Maksimovic
12 Cancar Stanic le président du SDS de Foca. Réunion tenue dans les locaux de
13 l'église de Cerazuluk à Foca.
14 Les Serbes y avaient leur quartier général en 1990 l'assemblée constituante
15 du SDS de Foca se tient. Petko Cancar est l'une des personnes chargée
16 d'organiser cette assemblée. L'affaire transe commence à Foca elle se
17 déroule à l'époque de quoi s'agit-il. Il s'agit d'ouvriers serbes qui
18 avaient quitté la société Focatrans et qui donc faisaient grève depuis
19 plusieurs mois. Ils avaient bloqué les rues de la ville et empêcher la
20 circulation des habitants en ville. Ces ouvriers ont reçu des instructions
21 de la part de Ostojic et de Maksimovic ainsi que de Cancar au niveau de la
22 République. Ils se réunissaient régulièrement avec le comité de grève.
23 Les dirigeants du SDS incitaient les travailleurs les ouvriers serbes à
24 créer leur propre entreprise et essayer de créer le même sentiment parmi la
25 population serbe qui résidait dans un certain nombre de villages
Page 28579
1 environnant.
2 Le témoin parle de la distribution d'armes aux civils serbes de Foca. Il
3 rappelle un jour six mois avant le début de la guerre où un policier
4 musulman avait arrêté deux véhicules de longue taille dans lesquels on a
5 retrouvé des armes d'infanterie et des armes d'artillerie.
6 Le 6 et le 7 avril tous les policiers serbes de Foca sont invités à
7 participer à une réunion avec Ostojic, Cancar et Maksimovic. Réunion
8 présidée par Stanisic et qui -- réunion présidée par Stanic et au cours de
9 laquelle les Serbes -- les Musulmans --réunion présidée par Stanic et qui
10 se tient dans les locaux du SDS. Les Serbes se voient soumis à un ultimatum
11 ils leur est enjoint de créer une police distincte de la police musulmane.
12 Peu après tous les policiers serbes quittent le MUP de Bosnie-Herzégovine
13 et ils se créent donc deux postes de police distincts même s'ils sont
14 abrités sous le toit du même bâtiment.
15 Le témoin parle de négociations entre les membres du SDS et le SDA qui
16 commencent environ à cette époque. A son avis les négociations n'étaient
17 qu'une façon pour le SDS de gagner du temps. L'attaque armée sur Foca
18 démarre le 8 avril 1992. le témoin parle des barrages qui sont érigés par
19 les Serbes aux abords de la ville il y avait également un barrage tenu par
20 les Musulmans à Donje Polje qui est érigé en réponse aux barrages dressés
21 par les Serbes.
22 La première nuit de l'attaque le témoin entend de nombreux des coups de feu
23 très nourris. Les paramilitaires serbes possédaient des mitrailleuses qui
24 visaient les quartiers musulmans de Foca. Le témoin parle de Donje Polje de
25 Sukovac qui sont prises pour cible par les tirs d'artillerie. Une certaine
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1 résistance est opposée mais elle n'est que sporadique et peu importante.
2 Plus tard le témoin apprend que des directives arrivent à Foca directement
3 de Radovan Karadzic et que Cancar Maksimovic Ostojic lorsqu'ils
4 interviennent le font en se contentant de transmettre les ordres aux
5 dirigeants locaux tels que Stanic.
6 Après le premier jour de l'attaque le témoin quitte la ville de Foca et se
7 dirigent vers Ustikolina et à partir de là au mois d'avril il part pour
8 Gorazde.
9 Monsieur le Président je n'ai pas de question à poser à ce témoin, mais
10 j'aimerais attirer votre attention sur les questions que vous pouvez voir
11 résumer dans les premières pages du résumé de la déposition. Ce témoin à
12 des problèmes est inquiet pour sa sécurité. Et j'invite la Chambre à
13 entendre sa déposition à huis clos partiel car il craint que si son
14 identité est révélée au public cela ne lui crée des problèmes. J'ai décrit
15 en détail les questions qui l'inquiètent et qui risquent de révéler son
16 identité. Vous les trouverez en première page du résumé de la déposition du
17 témoin ainsi que dans les pages suivantes. Dans les parties soulignées du
18 texte.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une chose s'il vous plaît Madame Pack.
20 Nous avons accepté comme pièce à conviction toutes les déclarations
21 préalables du témoin, ainsi que l'addendum. Mais je constate que l'addendum
22 n'a été établi qu'hier donc il contient sans doute des modifications et des
23 ajouts importants. Et compte tenu du fait que l'accusé ne l'a eu entre les
24 mains qu'aujourd'hui, il n'a sans doute pas eu le temps de se préparer à en
25 parler. Donc je crois que ces modifications et ajouts sont des parties
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1 importantes de sa déposition qu'ils conviendraient de traiter en public ou
2 en tout cas, -- sur lesquelles il conviendrait que vous lui posez des
3 questions, ou en tout cas que vous lui demandiez quelques explications.
4 Mme PACK : [interprétation] Monsieur le Juge, en effet la position est la
5 suivante. Ce témoin par une ordonnance du 10 octobre de cette année était
6 accepté en tant que témoin déposant dans le cadre de l'application de
7 l'article 92 bis et le Procureur n'a donc pas recueilli de déclarations de
8 sa bouche. L'addendum se situe dans le même contexte, c'est un ajout aux
9 déclarations préalables du témoin qu'il est tout à fait courant de
10 recueillir de la part des témoins 92 bis. Donc au paragraphe 8 vous verrez
11 un certain nombre d'éléments plus importants que dans le reste du texte,
12 mais de toute façon les modifications sont contenues dans l'addendum.
13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Le témoin pourrait donc traiter de cela
14 verbalement le cas échéant à huis clos partiel. Je veux parler du
15 paragraphe 8.
16 Mme PACK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous pourrons
17 passer maintenant à huis clos partiel.
18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.
19 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.
20 [Audience à huis clos partiel]
21 (expurgé)
22 (expurgé)
23 (expurgé)
24 (expurgé)
25 (expurgé)
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11 [Audience publique]
12 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous avez la parole.
13 Contre-interrogatoire par M. Milosevic :
14 Q. [interprétation] Monsieur 1531, dans le résumé introductif présenté par
15 Mlle Pack, et il a été dit dès le début que vous aviez été une personnalité
16 respectée dans la vie politique de Foca. Je suppose que vous connaissez
17 parfaitement bien les événements survenus à l'époque. En est-il ainsi ou
18 pas ?
19 R. Je pense que la demoiselle que vous avez citée avait parlé de la vie
20 publique, et non pas de la vie politique de Foca.
21 Q. Soit. Qu'il en soit ainsi. Moi j'ai cru entendre politique, mais vie
22 publique me convient. De toute façon, vous étiez une personnalité respectée
23 à Foca. Ce n'est pas contesté, n'est-ce pas ?
24 R. Non. Ce n'est pas contesté.
25 Q. Bien. Vous parlez de la situation à Foca avant et juste après
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1 l'éclatement des conflits armés en 1992. Et il découle de ce que vous avez
2 dit que les Serbes s'étaient préparés pour la guerre, et que les Musulmans
3 ne s'étaient pas préparés pour cela.
4 Donc, est-ce que vous maintenez cette affirmation ?
5 R. Je n'ai pas participé aux préparatifs des Musulmans. Et je n'ai aucune
6 information afférente à ces préparatifs.
7 Q. Vous n'avez pas été partie intégrante à ces préparatifs. Mais est-ce
8 que les Musulmans se préparaient à la guerre, et si oui comment ?
9 R. Je ne peux pas le confirmer. Je ne peux pas l'infirmer non plus. Je
10 n'avais pas d'information à ce sujet.
11 Q. Bien. Serait-il exact de dire que le 25 août 1990, il s'est tenu un
12 grand rassemblement public de promotion du parti du SDA à Foca ?
13 R. Je ne me souviens pas de la date exacte. Mais je sais qu'il y a eu une
14 assemblée promotionnelle du SDA.
15 Q. Serait-il exact de dire que c'est un rassemblement qui a été -- où il
16 s'est réuni plus de 150 000 personnes ?
17 R. Je crois que le nombre était un peu moins important. Mais il y avait un
18 grand nombre de citoyens.
19 Q. Si le chiffre était moins important. Dites-nous combien ?
20 R. Je dirais à peu près 100 000 hommes, ou plus de 100 000 hommes.
21 Q. Fort bien. Et parmi ces gens-là, il y avait 20 000 hommes qui étaient
22 venus de Serbie, du Sandzak. Et à la tête desquels se trouvait Sulejman
23 Ugljanin ?
24 R. Un certain nombre de gens étaient venus de cette région, en effet. Mais
25 je ne peux pas vous confirmer combien ils étaient.
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1 Q. Mais qu'est-ce que vous pourriez nous confirmer comme chiffre ?
2 R. Je ne le peux pas -- je ne puis parler que de ceux dont je suis
3 certain. Et l'une de ces personnes, c'est celle dont vous avez mentionné le
4 nom tout à l'heure.
5 Q. Dites-moi combien d'habitants y avait-il à Foca avant la guerre ?
6 R. Environ 42 000 habitants.
7 Q. Par conséquent, dans cette ville d'environ 42 000 habitants comme vous
8 le dites vous-même, il s'est rassemblé disons, le chiffre inférieur qui est
9 celui que vous présentez; plus de 100 000 personnes dans une si petite
10 ville. Donc, un aussi grand nombre de personnes réunies dans une si petite
11 ville, c'est véritablement un événement ou une secousse tectonique, n'est-
12 ce pas ?
13 R. Il est venu un grand nombre de gens, de personnes de l'intérieur de la
14 Bosnie-Herzégovine. Le transport avait été organisé. On avait organisé les
15 parkings pour ces autocars, aux fins d'accueillir les personnes désireuses
16 d'assister à cette assemblée promotionnelle.
17 Q. Bien. Donc, nous pouvons constater que sur le plan politique, le parti
18 de l'action démocratique à Foca a démarré ses activités à plein rendement ?
19 R. Je ne partage pas votre avis.
20 Q. Mais vous dites que dans cette ville de 40 000 habitants à peu près, il
21 en est venu plus de 100 000. Il en est venu de l'intérieur du pays, de
22 Serbie, du Sandzak avec Sulejman Ugljanin à leur tête. Est-ce que l'on
23 pouvait imaginer en accueillir davantage ?
24 R. Pour ce qui est de la situation à Foca, je dirais que ça avait commencé
25 dans la première moitié de cette année-là.
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1 Q. Non, non. Ce n'est pas ce que je vous demande. Je vous parle du
2 rassemblement. Nous avons constaté ensemble,
3 peut-être en n'étant pas d'accord sur les chiffres. Mais nous ne divergeons
4 pas tant que cela. L'ordre de grandeur des chiffres est incontesté. Donc,
5 si une telle activité d'un parti dans une localité aussi petite, cela
6 signifie forcément que la localité en question est une place forte de ce
7 parti-là, n'est-ce pas ? Répondez-moi par un oui ou par un non pour que
8 l'on gagne du temps.
9 R. A l'occasion de la tenue de ce rassemblement promotionnel, il a été dit
10 entre autres que cela serait organisé à la mémoire des victimes tombées
11 pendant la Deuxième guerre mondiale, afin que cela ne se réitère pas.
12 Q. Monsieur 1531, je ne vous demande pas ce qui avait été dit. Je vous
13 demande s'il y a eu un rassemblement aussi -- considérable. Comme vous le
14 dites vous-même, il y avait plus de 100 000 hommes -- 100 000 personnes
15 venues de régions variées, y compris des régions de Serbie; ne signifie-t-
16 il pas que le SDA avait un appui important dans cette localité-là ?
17 R. Je puis dire que certains individus de Foca avaient été des militants
18 de ce parti. En effet.
19 Q. Fort bien, Monsieur 1531. Et parmi ces plus de 100 000 personnes, il y
20 avait des individus qui étaient militants du parti. Cela me semble assez
21 convainquant. Mais allons de l'avant.
22 Ne serait-il pas exact d'affirmer que la famille Cengic était l'une des
23 plus respectées des familles de Foca ?
24 R. Je puis dire que la famille Cengic, se trouvait en effet, être
25 influente pour ce qui est de l'aile politique du SDA.
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1 Q. Et la tête de la famille, c'était Halid Cengic,
2 n'est-ce pas ?
3 R. Oui.
4 Q. Et le fils de Halid, Hasan Cengic avait été arrêté en 1983 et condamné
5 à une peine de prison avec Alija Izetbegovic, n'est-ce pas ?
6 R. Oui.
7 Q. Et savez-vous qu'on les avait jugés pour leur position extrémiste
8 islamique; pour ce qui est d'Izetbegovic notamment, référence faite à sa
9 déclaration islamique publiée dans les années 1970.
10 R. Je n'ai pas eu l'occasion de lire cet ouvrage. Mais les médias ont
11 parlé de leur arrestation et de leur condamnation.
12 Q. Vous savez pourquoi ils ont été condamnés ?
13 R. J'en sais ce qui a été publié dans les médias.
14 Q. Il s'agissait de la déclaration islamique où Izetbegovic disait, qu'il
15 ne serait y avoir de paix, de coexistence entre la religion islamique et
16 les religions non islamiques.
17 R. Je n'ai pas eu l'occasion de prendre connaissance de ce document.
18 Q. Monsieur 1531, si vous affirmez être une personnalité éminente dans la
19 vie publique; se peut-il qu'en votre qualité de membre éminent du SDA, vous
20 n'ayez pas pris connaissance d'un tel ouvrage rédigé de la main de votre
21 président ?
22 R. Je n'ai pas été membre du SDA.
23 Q. Bon. Etes-vous au courant que cette déclaration a été rééditée en 1990
24 en Bosnie-Herzégovine ? Le fait est, que cela a joué un rôle considérable
25 dans la campagne électorale de M. Izetbegovic.
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1 R. Je ne suis pas au courant de cela.
2 Q. Fort bien. Pour ce qui est de la condamnation de Hasan Cengic, les
3 raisons étaient analogues à celles qui ont été prononcées pour ce qui est
4 d'Izetbegovic. Ils avaient des positions islamiques, intégristes ou
5 extrémistes, qui les ont fait condamner les deux, ainsi que d'autres
6 personnes en même temps.
7 R. Je sais qu'ils ont été condamnés à l'occasion du même procès.
8 Q. Savez-vous que dans les années 1980, Hasan Cengic --
9 -- dans le courant de l'année 1990, Hasan Cengic est devenu un haut
10 responsable de ce parti ?
11 R. Ce que j'en sais, c'est ce que les médias ont publié. Je sais qu'il
12 était dans la direction du parti de l'Action démocratique.
13 Q. Vous devez savoir également qu'il est devenu par la suite, vice-premier
14 ministre du gouvernement de Bosnie-Herzégovine ?
15 R. Non, pas Hasan Cengic. Muhamed Cengic.
16 Q. Mais Hasan Cengic, avait-il un titre quelconque pour ce qui est de la
17 hiérarchie religieuse musulmane, islamique ?
18 R. Je ne suis pas au courant.
19 Q. Est-ce qu'avant son arrestation et sa condamnation, les Cengic à Foca,
20 avaient constitué un appui considérable pour ce qui est des activités
21 illégales de Alija Izetbegovic jusqu'à son arrestation en 1983 ? Etes-vous
22 au courant de la chose ou pas ?
23 R. Je ne suis pas au courant.
24 Q. Dans la deuxième des déclarations que vous avez faites, vous avez parlé
25 des grèves et des protestations des employés dans l'entreprise Focatrans.
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1 Cette grève et ces protestations avaient été motivées par des raisons
2 sociales. Et vous leur attribuez des motifs politiques, n'est-ce pas ?
3 R. Tout ce qui se passait à l'époque, et par la suite encore, nous fait
4 tirer ces conclusions-là.
5 Q. Mais en général, les ouvriers, ils font la grève pour des raisons
6 sociales. Quelles seraient les motivations politiques de la grève en
7 question ?
8 R. Les ouvriers du groupe ethnique serbe de Focatrans dans le courant de
9 la première moitié de l'année 1990, ont quitté l'entreprise. Et je crois
10 qu'ils avaient emmené une partie des véhicules avec eux. Et ils ont formulé
11 des revendications. Et si mes souvenirs sont bons, ils avaient exigé la
12 révocation ultimative du directeur de l'époque de cette entreprise
13 Focatrans. Je sais que cela s'est étiré sur des mois. Et à l'époque, l'on
14 s'apprêtait déjà à mettre sur pied des partis nationaux. Ce qui fait que
15 certaines personnes qui avaient souvent été en contact avec les grévistes
16 et le comité de grève par la suite, après les élections, sont venues au
17 premier plan pour ce qui est de la direction du SDS. Et se sont vues
18 attribuer des fonctions importantes dans le pouvoir exécutif en Bosnie-
19 Herzégovine. Je sais donc, au travers de cette période de la grève, que les
20 relations interethniques étaient déjà gravement détériorées. Et en donnant
21 leur soutien à ces gens-là, on avait visé à démontrer que la vie et le
22 travail conjoint étaient devenus impossibles. On les avait conviés à
23 plusieurs reprises à revenir à leur poste de travail. Et l'aggravation des
24 problèmes au niveau des institutions locales et au niveau des institutions
25 de la république, n'ont fait que compliquer les circonstances, pour les
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1 acheminer vers une culmination.
2 Q. Mais comme vous l'avez dit, parmi les faits matériels, vous avez dit
3 que cette grève a duré pendant des mois. Et l'une des revendications avait
4 été celle de remplacer le directeur. Mais pour autant que je le sache, il
5 n'y a pas eu de grève du tout à ce jour ou jusqu'à cette date-là, qui se
6 serait déroulée sans que l'on ait exigé le remplacement du directeur.
7 Expliquez-moi, s'il vous plaît, quelle était la motivation politique à
8 laquelle vous faites allusion. Parce que jusque-là ils n'ont demandé, que
9 le directeur soit remplacé.
10 R. Et bien, ils ont refusé de retourner au travail. Ils ont persisté dans
11 cette décision. Et ils ont persisté à vouloir se séparer des autres, et à
12 créer une autre entreprise avec les ressources qu'ils avaient reçues de
13 Serbie. Je parle là, de véhicules.
14 Q. Mais c'étaient des ouvriers d'une entreprise de transport. Vous
15 indiquez que par la suite, certains des individus, je dis bien individus,
16 certains de ces grévistes pouvaient être vus parmi les membres du Parti
17 démocratique serbe. C'est ce que vous avez dit tout à l'heure, n'est-ce pas
18 ?
19 R. Oui.
20 Q. Ne savez-vous pas que le Parti de l'action démocratique, le parti
21 musulman, a été créé bien avant le Parti démocratique serbe ?
22 R. Je ne sais pas vous dire à quelle date l'un et l'autre ont été créés.
23 Je n'exclus pas la réalité de ce que vous affirmez.
24 Q. Et bien, le 27 mars 1990, le comité d'initiative du Parti du SDA, a dit
25 que l'on allait mettre sur pied ce parti. Et le président de ce parti,
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1 Alija Izetbegovic a dit au mois de mai que, "Le SDA constituait une
2 alliance politique des citoyens de Yougoslavie qui font partie du cercle
3 historique et culturel musulman, mais d'autres citoyens également."
4 Donc, ce cercle culturel et historique musulman, vous êtes au courant de
5 son existence. Et nous sommes encore au mois de mars 1990.
6 R. A l'époque, le SDA n'avait pas du tout pris part au litige entre les
7 employés de l'entreprise Focatrans.
8 Q. Quand est-ce que cette grève de Focatrans a commencé ?
9 R. Je pense que c'était la première moitié de l'année 1990, lorsque les
10 ouvriers du groupe ethnique serbe se sont dissociés et ont commencé à faire
11 la grève.
12 Q. Vous voulez dire que ce n'est que les Serbes qui avaient fait la grève
13 dans Focatrans. Ce n'est pas les autres ?
14 R. Les employés, les ouvriers du groupe ethnique serbe pour l'essentiel.
15 Il y avait peut-être quelques Serbes qui étaient restés travailler. Mais je
16 parle d'une grande majorité de ceux qui avaient fait la grève.
17 Q. Mais les Serbes n'avaient-ils pas été majoritaires parmi les employés
18 de cette entreprise Focatrans ?
19 R. Je ne sais pas vous dire le pourcentage exact des uns et des autres.
20 Mais je ne pense pas qu'il y ait eu une très grosse différence entre le
21 nombre des Musulmans et des Serbes employés par cette entreprise.
22 Q. Bien. Mais y avait-il des Musulmans qui avaient fait la grève
23 également ?
24 R. Je n'ai pas d'information de cette nature.
25 Q. Vous n'avez pas d'information. Mais est-ce que vous affirmeriez que pas
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1 un seul Musulman n'a pris part à la grève ?
2 R. Je ne l'affirme pas. Je n'ai pas d'information.
3 Q. Bon. Quelle avait été la structure de la population à Foca à l'époque,
4 avant la guerre d'après le recensement de 1991, pour ce qui est du rapport
5 des populations serbes et musulmanes respectivement ?
6 R. Les plus nombreux étaient les Bosniens, les Musulmans. Ensuite venaient
7 les Serbes. Et il y avait un certain pourcentage, 18 à 19 % de ceux qui se
8 déclaraient être Yougoslaves.
9 Q. Donc, un cinquième s'était déclaré comme étant des Yougoslaves à Foca ?
10 R. Je crois qu'ils étaient à peu près 18 %.
11 Q. Et quel était le pourcentage des Serbes, je vous prie ?
12 R. Je pense qu'ils étaient environ 38 %.
13 Q. Bien. Avec les Yougoslaves, ça fait 56 %. Donc vous voulez dire par là
14 que 44 % de la population était des Musulmans à Foca ? Vous connaissez les
15 données qui émanent de ce recensement de 1991.
16 R. Je ne saurais être précis en ce moment-ci. Ce que je sais, c'est que la
17 population musulmane avait été la plus nombreuse. Puis venaient les Serbes.
18 Et il y a un certain pourcentage de personnes qui s'étaient déclarées
19 Yougoslaves.
20 Q. Bien. Je n'irai pas plus avant avec vous, parce qu'il y a des chiffres
21 exacts à ce sujet. Dans votre déclaration, vous avez dit que vous n'étiez
22 pas membre du SDA, mais que le SDA vous avait nommé aux fonctions qui ont
23 été par la suite, les vôtres.
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1 Q. Oui. Vous avez été proposé donc, par le SDA. Il y a donc là, toutes les
2 raisons pour vous de savoir ce que faisait le SDA à Foca, d'abord les
3 relations proches que vous aviez avec le SDA. Parce que j'imagine qu'ils ne
4 vous auraient pas proposé à des fonctions importantes, si vous n'étiez pas
5 très proche d'eux, et s'il ne vous faisait pas confiance. N'en est-il pas
6 ainsi ?
7 R. Si je voulais répondre plus en détails à cette question, je crois que
8 très certainement, il me faudrait dévoiler mon identité. Je demanderais
9 donc --
10 Q. Non. Je n'insiste pas. Le deuxième fondement pour ce qui est de la
11 connaissance des activités du SDA, c'était votre (expurgé)
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15 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Passons à huis clos partiel pour que le
16 témoin puisse répondre.
17 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.
18 [Audience à huis clos partiel]
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17 [Audience publique]
18 M. MILOSEVIC : [interprétation]
19 Q. J'aimerais un commentaire de votre part, Monsieur le Témoin 1531.
20 Puisqu'on a déjà parlé de M. Halid Cengic. Commentaire à propos d'un
21 entretien accordé à l'hebdomadaire de Sarajevo Liljan, numéro 279, pages 11
22 à 13, le tire est un Cengic, le responsable de la logistique dans l'armée
23 de la Bosnie-Herzégovine, un soldat et un --
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1 Dans cette interview, Cengic mentionne des renseignements relatifs à
2 l'activité du SDA à Foca et forcément, à mon avis, vous devez connaître ces
3 renseignements. D'après ce qu'il dit : "Les Musulmans de Foca dès le 1er
4 août 1990, apparemment afin de défendre Focatrans, disposaient d'un peloton
5 d'hommes équipés d'armes automatiques, d'une mitrailleuse et d'un mortier.
6 Ils étaient tous en tenue de camouflage. Ils ont prêté serment à la mosquée
7 de Ustikolina en posant la main sur le Coran."
8 Voilà donc une citation, un extrait que je tire de cette interview. A mon
9 avis, vous devriez, vous devez être au courant de cela pour les raisons que
10 j'ai avancées. Etes-vous au courant, Monsieur le Témoin 1531 ?
11 R. Il aurait été préférable de me poser la question à huis clos partiel,
12 ainsi j'aurais pu vous donner une explication à vous, à l'Accusation et aux
13 Juges.
14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous revenons à huis clos partiel.
15 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel,
16 Monsieur le Président.
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8 [Audience publique]
9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous reprendrons l'audience demain matin
10 9 heures. Il vous reste 20 minutes, Monsieur Milosevic, pour le contre-
11 interrogatoire de ce témoin.
12 Monsieur le Témoin B-1531, je vous rappelle, nous le faisons pour tous les
13 témoins que vous n'êtes censé parler à personne de votre déclaration tant
14 qu'elle n'est pas terminée.
15 L'audience est levée.
16 --- L'audience est levée à 13 heures 49 et reprendra le mercredi 5 novembre
17 2003, à 9 heures 00.
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