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1 Le jeudi 17 juin 2004
2 [La Conférence préalable à la présentation des moyens à décharge]
3 [Audience publique]
4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 10 heures 01.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, je ne vais pas
7 demander aux parties de se présenter car nous nous connaissons bien, n'est-
8 ce pas ?
9 Nous sommes ici en Conférence préalable au procès, et cette conférence
10 tient en application de l'Article 73 ter. Elle a pour but de permettre à la
11 Chambre de prendre les décisions nécessaires dans le cadre de la gestion du
12 procès. Les mesures à adopter ont pour but d'assurer une présentation des
13 éléments de preuve de la Défense la plus rapide possible tout en respectant
14 bien sur l'équité due à l'accusé.
15 J'aimerais vous dire comment nous allons procéder aujourd'hui. La Chambre a
16 reçu des écritures de l'Accusation ainsi que des amis de la cour. Nous
17 disposons également d'écritures venant de l'accusé. Lors de la Conférence
18 en application de l'Article 15 bis du règlement qui s'est tenue le 25 mars,
19 la Chambre elle-même a émis un certain nombre d'idées. Sur la base de ces
20 sources, j'ai établi une liste de questions qu'il convient de traiter
21 aujourd'hui. Je vais indiquer d'abord la façon générale dont la Chambre se
22 propose d'agir après quoi j'inviterais les parties et les Amici à formuler
23 leurs commentaires. De temps à autre, des commentaires pourront être
24 formulés avant la prise de décision. Ce que je ne souhaite pas, c'est que
25 les parties s'expriment en ordre dispersé.
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1 Quand j'en aurais terminé de la lecture de ma liste, si les parties ont un
2 tel ou tel point à évoquer, elles auront toutes libertés de le faire bien
3 entendu.
4 Je m'appuierais principalement sur les écritures de l'Accusation, et dans
5 les paragraphes 8 à 13 de la requête de l'Accusation, nous trouvons mention
6 de la première question qui sera abordée. Maître Kay, y a-t-il un
7 problème ?
8 M. KAY : [interprétation] Plus maintenant, Monsieur le Président.
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci. Dans ces paragraphes de ces
10 écritures, l'Accusation estime qu'il conviendrait d'établir un nombre
11 limite de témoins de la Défense qui seront entendus par la Chambre. La
12 Chambre a réfléchi longuement à cette question et à décider de ne pas
13 limiter le nombre des témoins. Cette limitation du nombre des témoins sera
14 réalisée de la façon suivante : premièrement, la Chambre exécutera
15 l'ordonnance rendue préalablement, à savoir, la décision de limiter à 150
16 jours d'audience l'audition des témoins de la Défense. Deuxièmement et
17 deuxième façon dont se fera la limitation du nombre des témoins, et cela se
18 fera bien entendu par l'application normale du règlement de preuve. Nous
19 savons quels sont les critères et, notamment, les critères de pertinence,
20 donc aucun élément de preuve ne sera admis à moins d'être pertinent.
21 Cela étant et tout en imposant pas de limite au nombre des témoins,
22 je tiens à vous dire, Monsieur Milosevic, qu'il importe que vous ne perdiez
23 pas de vue le fait qu'au cours de ces 150 jours d'audience qui sont
24 assignés à l'audition des témoins de la Défense, compte tenu du fait c'est
25 le nombre de jours qui a été utilisé par l'Accusation pour présenter ses
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1 propres éléments de preuve, et pendant cette durée, l'Accusation a entendu
2 environ 300 témoins, mais elle a également utilisé la procédure prévue aux
3 Articles 89(F) et
4 92 bis du règlement qui permettent le versement au dossier de déclarations
5 écrites d'un certain nombre de témoins. Il serait bon que vous teniez
6 compte de cette possibilité également.
7 Quant à la pertinence, je constate, Monsieur Milosevic, que dans vos
8 écritures en application de l'Article 65 ter, nous lisons qu'une catégorie
9 importante de témoins se composera de témoins qui parleront de leur
10 détention. A ce sujet la Chambre sera très vigilante et suivra de près la
11 teneur de ces dépositions pour s'assurer de la pertinence de ces
12 témoignages.
13 Un autre moyen dont dispose la Chambre pour réduire le nombre des
14 témoins consiste à veiller, dans la mesure du possible, à ce qu'il n'y ait
15 pas un cumul exagéré de témoignages. C'est là que la Chambre pourra
16 recourir à son pouvoir discrétionnaire. En tout cas, il est indiqué
17 aujourd'hui que les témoignages ne devront pas être présentés, de façon
18 cumulative, en tout cas pas à l'excès. La Chambre suivra cette
19 problématique de très près.
20 Je tiens à dire dans un cadre plus général que la gestion de la
21 présentation des éléments de preuve de la Défense constituera un processus
22 continu qui sera toujours sous l'œil vigilant des Juges.
23 Autre question qui figure sur ma liste; l'ordre d'audition des
24 témoins. Il en est question au paragraphe 20 à 26 des écritures de
25 l'Accusation.
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1 Monsieur Milosevic, je tiens beaucoup à ce que vous compreniez de la
2 façon la plus claire qu'il soit que nous vous demanderons de présenter vos
3 preuves de façon ordonnée, c'est-à-dire, dans l'ordre des points figurant à
4 l'ordre d'accusation. Bien sûr, nous sommes bien conscients qu'il y aura un
5 certain nombre de témoignages qui porteront sur plusieurs points de l'acte
6 d'accusation, mais ce que nous ne souhaitons pas c'est que vous présentiez
7 un jour un témoin qui parlera du Kosovo, pour ensuite le lendemain on
8 entend un autre qui parlera de la Croatie, et entendre un troisième le
9 troisième jour qui parlera de la Bosnie. En dehors des témoignages qui
10 porteront sur plusieurs points de l'acte d'accusation, il importe que les
11 témoignages soient présentés dans l'ordre respecté dans la rédaction de
12 l'acte d'accusation. Bien sûr, l'ordre dans lequel vous souhaiterez que ces
13 points soient abordés dépendra de vous.
14 La Chambre exige de l'accusé qu'il produise la liste de ces 50
15 premiers témoins, ainsi qu'une estimation de l'ordre d'audition de ces
16 témoins. Quant à l'Accusation, elle doit également recevoir une fois par
17 semaine la liste des témoins prévus pour la semaine prochaine. Le dernier
18 jour d'une semaine, l'Accusation doit recevoir la liste pour la semaine
19 suivante, et ainsi de suite. De façon générale, cette liste devrait être
20 produite le jeudi et même parfois le mercredi. Sur ces listes devront
21 figurer le nom du témoin ainsi que le numéro associé à ce témoin dans le
22 cadre de l'application de l'Article 65 ter, et la durée estimée de
23 l'audition de ce témoin au principal.
24 Troisième question, qui est évoqué au paragraphe 14 à 18 des
25 écritures de l'Accusation, et qui concerne le nom des témoins. La Chambre a
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1 déjà ordonné à l'accusé de produire les noms des témoins sur la liste au
2 titre de l'Article 65 ter fourni à la Chambre, toute identification se
3 situe, bien sûr, dans les limites prévues par la possibilité de protection
4 vis-à-vis de l'Accusation et des Amici dans le cadre de la communication
5 des pièces.
6 Monsieur Milosevic, le délai est désormais passé s'agissant de
7 l'établissement de cette liste, donc il importe que vous entreteniez
8 immédiatement.
9 Je vous demande, par conséquent, de nous dire combien de témoins, qui
10 figureront sur votre liste, feront l'objet d'une communication retardée.
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'en connais pas le nombre exact
12 aujourd'hui même, Monsieur Robinson. Vous avez reçu, en tout cas, je
13 l'espère --
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Arrêtez-vous, je vous prie.
15 Nous n'entendons pas l'interprétation. Vous pouvez maintenant reprendre.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne suis pas en mesure, à l'heure
17 actuelle, de vous dire avec exactitude -- maintenant j'entends
18 l'interprétation en anglais. Enfin, cela n'a pas d'importance.
19 Vous avez demandé que des noms vous soient communiqués, et je pense,
20 en tout cas j'espère que vous avez reçu une liste de 1 300 ou de 1 400 noms
21 depuis ce moment-là. Ici il n'est pas question de protection, mais il
22 importe de dire que dans un délai aussi court, il m'a été impossible à moi
23 et à mes collaborateurs d'avoir un entretien avec les personnes qui
24 souhaitent témoigner, mais qui doivent donner leur accord pour que leurs
25 noms soient publiés d'ores et déjà.
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1 Ces 1 300 ou 1 400 noms, enfin le nombre de noms que vous avez reçus,
2 sont ceux des témoins avec lesquels j'ai eu un entretien et qui ont donné
3 leur accord pour que leur nom soit communiqué uniquement à vous, bien
4 entendu. Evidemment, il y a encore un certain travail à faire avec les
5 autres. Il vous sera facile de déduire sur la base de ce que vous avez dit
6 tout à l'heure, s'agissant de la limitation du nombre de témoins, il vous
7 sera facile de comprendre si l'on en reste, à ce que vous venez de dire
8 qu'une nouvelle sélection s'imposera. Nouvelle sélection qu'il me faudra
9 réaliser, et c'est un travail assez difficile. Je reviendrai sur cette
10 question puisque vous avez annoncé qu'il convenait de s'exprimer point par
11 point. Lorsque vous annoncerez que le débat est ouvert à la discussion de
12 ce point, je m'exprimerai à nouveau à ce sujet, à moins que vous ne
13 souhaitiez que je le fasse maintenant.
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non. Attendez que nous en
15 venions à ce point particulier. Ce que vous êtes en train de dire c'est que
16 vous avez besoin davantage de temps pour déterminer les témoins pour
17 lesquels vous demanderez une communication de pièces retardée. Vous n'avez
18 pas eu la possibilité de vous entretenir encore avec tous les témoins.
19 Avez-vous une idée de temps qui vous sera nécessaire pour en
20 terminer ?
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il me faudra quelques semaines encore pour
22 terminer ce travail. Pendant que je ferai cela, je ne ferai pas autre
23 chose, un autre travail, tout à fait, indispensable pour la préparation de
24 la Défense, nous en reparlerons.
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] L'autre question évoquée par
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1 l'Accusation, il s'agit de la nécessité pour l'accusé de fournir la date de
2 naissance de tous les accusés sur la liste. Au titre de l'Article 65 ter,
3 la Chambre demandera à l'accusé chaque fois que la chose sera possible de
4 fournir cette information.
5 J'aimerais, à présent, faire observer, de façon générale, que ce que
6 l'Accusation a fait dans le domaine de la communication d'information à
7 l'accusé n'est pas forcément la base la plus opportune pour permettre de
8 déterminer la responsabilité de l'accusé car l'Accusation, au titre du
9 règlement, est soumise à des obligations qui ne pèsent pas sur la Défense.
10 En revanche, la Défense jouit de droit dont l'Accusation ne jouit pas. La
11 Chambre, toutefois, a le pouvoir inhérent de gérer le procès.
12 Ceci m'amène à la question suivante que je voudrais évoquer que l'on
13 trouve évoquer également au paragraphe 9 [comme interprété] des écritures
14 de l'Accusation, à savoir, la demande faite à l'accusé de produire des
15 résumés de témoignages plus détaillés. Sur ce point, j'aimerais inviter les
16 parties et les Amici à s'exprimer très rapidement. La question est
17 importante sur le plan juridique. La question consiste à se demander
18 jusqu'où on peut aller pour demander des détails complémentaires à un
19 accusé à ce stade du procès. La Défense, à ce stade du procès, a le droit
20 de garder le silence, elle a le droit de ne pas communiquer sa stratégie.
21 Il importe de veiller à ce que ce droit ne soit pas supprimer par la
22 fourniture de ce qu'il est convenu d'appeler des "résumés de dépositions
23 plus détaillés". Sur le plan juridique, c'est une question importante, et
24 par conséquent j'aimerais entendre brièvement, très brièvement les
25 différentes parties sur ce point en commençant par M. Milosevic.
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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] L'objectif de tout ce que j'entends faire ici,
2 c'est de faire éclater la vérité. Vous savez bien que les accusations les
3 plus graves ont été formulées ici. Dans le même temps, je suis bien au
4 courant, d'ailleurs, je ne suis pas le seul puisque l'opinion publique dans
5 son ensemble en Serbie sait bien qu'ici les mensonges les plus graves ont
6 également été proférés. Le seul moyen pour contrer tout cela, c'est de
7 faire éclater la vérité.
8 Devant l'opinion ici même, je tiens à démontrer que ces accusations, qui
9 ont été portées contre la Serbie et contre la République fédérale
10 d'Yougoslavie ainsi que contre moi personnellement, sont des accusations
11 mensongères. Dès lors que l'on parle de ce que l'on appelle ici les forces
12 serbes, l'église, l'académie des Sciences, les forces serbes, et d'autres -
13 -
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, je vous
15 interromps et je vous demande de traiter précisément de la question que je
16 vous ai posée, à savoir, prononcer quelques mots brefs au sujet de la
17 demande provenant de l'Accusation qui a demandé des résumés de témoignages
18 plus détaillés. Nous ne souhaitons pas entendre ici une allocution. Si vous
19 n'avez rien à dire à ce sujet sur le plan juridique puisque la question est
20 de nature juridique, dites-le. Après quoi, nous pourrons donner la parole à
21 l'Accusation et aux Amici. Ce point uniquement et exclusivement, Monsieur
22 Milosevic.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien, Monsieur Robinson. Vous avez dit, à
24 très juste titre, que cette obligation ne pesait pas sur moi. Bien sûr,
25 vous avez le pouvoir de décréter que tout constitue une obligation, mais je
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1 ne vois pas pour quelles raisons je devrais préparer le résumé d'un
2 témoignage et remettre à l'avance ces résumés de témoignages. Notamment, si
3 l'on tient compte, non seulement, de l'aspect juridique que vous venez
4 d'évoquer, mais, également, du temps qu'il me faudrait consacrer à cette
5 tâche. Il y a un instant, vous avez dit que, désormais, vous exigez de moi
6 que je vous fournisse la date de naissance de tous les témoins. Je n'ai pas
7 recueilli ces éléments car je les ai considérés tout simplement comme pas
8 important. Toutes ces personnes sont des personnes majeures et il ne m'est
9 pas venu à l'esprit que je devais demander à chacun des témoins qui
10 viendrait ici sa date de naissance. Cela signifie qu'il faut que je
11 reprenne contact avec 1 500 personnes au moins pour simplement leur
12 demander leur date de naissance.
13 Quant aux résumés des dépositions, je considère que c'est une
14 enfreinte à mes droits de quelque façon que l'on regarde la chose. C'est
15 une enfreinte à mes droits de me contraindre de fournir, à la partie
16 adverse, des résumés des témoignages à l'avance. Je dirais rapidement que
17 sur la liste que je vous ai fournie, j'ai fait une note du sujet qui fera
18 l'objet de la déposition de chacun des témoins, qu'il s'agisse de choses
19 que le témoin connaît, personnellement, d'événements vécus par lui ou
20 d'autre chose. La plupart de temps, il s'agit de témoignages qui concernent
21 des choses que le témoin sait personnellement, et j'indique également tout
22 ce qui est pertinent à mon avis. J'estime que ce sont des informations
23 suffisantes que j'ai fournies à la partie adverse.
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Milosevic. Je
25 comprends bien que vous pouvez avoir des objections sur le plan juridique à
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1 ce qui vient d'être proposé, et que vous puissiez considérer que c'est une
2 charge de travail exagérée. J'aimerais, également, vous dire s'agissant de
3 la date de naissance des témoins et je l'ai dit de la façon la plus claire,
4 nous vous demandons de la fournir le plus rapidement possible.
5 Oui, Monsieur Nice.
6 M. NICE : [interprétation] La Chambre a parlé de nos écritures. Il s'agit
7 d'écritures déposées confidentiellement et le passage qui traite de ce
8 point se trouve au paragraphe 19, je n'ai pas besoin de le relire. Nous
9 proposons une procédure générale applicable à ce problème des résumés de
10 dépositions qui pourrait aider la Chambre et se trouverait, tout à fait,
11 dans le cadre du droit et de la pratique de la Chambre.
12 L'aspect juridique est décrit à l'Article 65 ter (G) du règlement où
13 est défini la nature exacte des résumés de dépositions qui peuvent être
14 fournis à la partie adverse. Il y est question de résumés des faits qui
15 font l'objet de la déposition du témoin. Il y est question de définir dans
16 une certaine mesure la nature de ces faits selon l'obligation qui pèse sur
17 la Défense dans l'acte d'accusation car il convient de déterminer quel sera
18 le témoin qui s'exprimera et il est difficile de se prononcer ne serait-ce
19 que superficiellement sur l'aspect intéressant du témoignage sans ce genre
20 de renseignements que l'on tient des résumés de dépositions.
21 Par ailleurs, la Chambre peut penser que ceci rentre dans le cadre de
22 l'Article 73 ter du règlement, par exemple, où il est question de
23 l'estimation de la durée de l'interrogatoire principal de façon à ce que
24 l'on ait une idée de la durée raisonnable que durera le témoignage par la
25 Défense.
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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, la question qui se
2 pose est la suivante : si l'accusé n'a pas rempli son obligation au titre
3 de l'Article 65 ter (G) du règlement en fournissant les documents sous la
4 forme de résumés de dépositions sur les faits. Je comprends ce que vous
5 venez de dire comme constituant une demande d'informations plus détaillées.
6 Mais ce qu'il importe de voir, c'est si cette demande de détails
7 complémentaires porte atteinte ou pas aux droits de l'accusé qui a le droit
8 de ne pas communiquer sa stratégie. Comme vous le savez, la pratique de ce
9 Tribunal consiste à penser qu'un accusé n'est pas tenu de produire des
10 déclarations au préalable de témoins par écrit. Vous demandez des détails
11 complémentaires, et ce que vous demander se rapproche beaucoup d'une
12 déclaration au préalable écrite de témoin. Voilà quel est le problème.
13 J'aimerais savoir si la pratique du Tribunal peut venir étayer cette
14 proposition, proposition d'obtenir des résumés de témoignages plus
15 détaillés. Avez-vous étudié la pratique du Tribunal à cet égard ?
16 Nous avons trouvé un cas dans lequel une demande a été présentée qui
17 portait sur un document très proche d'une déclaration écrite de témoin, et
18 la Chambre de première instance a souligné que c'était une demande non
19 autorisée par le règlement qui, en revanche, autorisait la production de
20 résumés. Cela, c'est un cas que nous avons découvert.
21 Il y en a eu un autre qui remonte à une date encore antérieure, avant
22 l'introduction de l'Article 65 ter (G) dans le règlement. Dans ce cas, le
23 vent soufflait en sens inverse. C'est la raison pour laquelle nous avons
24 demandé que les parties s'expriment sur cette question afin de voir quelle
25 est la pratique exacte du Tribunal en la matière. Bien entendu, il
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1 appartiendra aux Juges de la Chambre de se prononcer sur l'aspect
2 directement juridique de la chose. Ce que je veux dire, c'est que la
3 pratique est une chose, mais qu'il faudra se prononcer en matière de droit
4 également.
5 M. NICE : [interprétation] Sur la pratique, nous n'avons rien d'autre que
6 ce que vous venez d'évoquer, Monsieur le Président. J'appellerais votre
7 attention sur des points plus particuliers de ces deux cas si vous m'en
8 donner la possibilité, plus tard, dans la matinée.
9 Quand à l'aspect juridique, l'aspect droit, je pense que la rédaction est
10 très précise, la rédaction du règlement. Les documents, qui sont censés
11 nous être communiqués, sont uniquement des documents susceptibles de nous
12 guider, je le comprends bien. Cela doit se faire avec les pouvoirs qui sont
13 définis à l'Article 73, et vous ne pouvez exercer ces pouvoirs, octroyés
14 aux Juges, que dans le cadre d'un résumé de témoignage qui fournit
15 suffisamment de détails pour vous permettre l'exercice de ces pouvoirs.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, mais rappelez vous que le
17 règlement doit, également, être lu en accord avec le Statut.
18 M. NICE : [interprétation] Bien sûr.
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le règlement précise qu'un résumé
20 peut être fourni, et là, je donne mon avis personnel, et qu'il doit
21 permettre aux Juges de la Chambre de définir suffisamment en détail la
22 nature du témoignage, mais il n'en reste pas moins que l'accusé n'est pas
23 obligé de communiquer sa stratégie.
24 M. NICE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Mais avec le respect
25 que je vous dois, je dirais que je ne suis pas, tout à fait, d'accord avec
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1 vous. Le résumé n'est pas équivalent à la communication détaillée de la
2 stratégie de la Défense. Dans certains cas, des mesures d'efficacité
3 doivent être prises pour que le procès se mène dans les meilleures
4 conditions possibles, et il faut, raisonnablement, appliquer le règlement à
5 cette fin tout en respectant, bien sûr, les droits de chacun. Il y a,
6 également, le fait que la Chambre, vous l'avez dit très clairement dans
7 votre opinion séparée récente, les Juges sont toujours en mesure de sortir
8 de leur esprit certains documents qu'ils ont pu lire puisque la Chambre est
9 composée de Juges professionnels, cela est possible si les Juges estiment
10 que la nature probante d'un élément de preuve n'est pas suffisante.
11 Si l'on met en concurrence les intérêts de l'accusé et le droit qui est le
12 sien de ne pas communiquer sa stratégie en détail, et le devoir de la
13 Chambre de gérer le procès de la façon la plus efficace qui soit en
14 exerçant les pouvoirs qui sont ceux des Juges en application de l'Article
15 73 du règlement. On nous a invité à dire ce que nous pensions, et nous
16 pensons que l'accusé doit fournir beaucoup plus que ce qu'il a fourni, pour
17 l'instant, dans les résumés exigus qu'il a communiqués, tout en n'arrivant
18 pas à communiquer une déclaration complète. Je pense qu'il y a une grande
19 marge entre les deux.
20 Si vous avez autre chose à me demander sur la pratique, je répondrai avec
21 grand plaisir, mais pour l'instant, je veux m'exprimer sur les
22 renseignements que nous avons déjà reçus. Dans la pratique, je ne sais pas
23 s'il y a des cas qui sont, tout à fait, équivalents à celui où nous nous
24 trouvons. Je me souviens, bien sûr, de la façon dont la Chambre a traité la
25 chose dans l'affaire Kordic où l'accusé était représenté par des conseils
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1 et où les résumés de dépositions étaient considérablement limités. Je ne
2 sais pas si vous avez besoin que je poursuivre dans cette veine.
3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, merci.
4 Monsieur Nice.
5 M. NICE : [interprétation] Accordez-moi une minute.
6 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
7 M. NICE : [interprétation] Je remercie mes collègues de l'Accusation.
8 Monsieur le Président, vous avez expliqué que les témoignages ne doivent
9 pas être cumulatifs. En dehors des autres exigences de la Chambre
10 concernant la fourniture de documents, il faut que les Juges puissent
11 exercer leurs pouvoirs. Il faudra, tout de même, qu'un résumé de déposition
12 soit remis, dans le respect du règlement, à l'avance de façon à veiller à
13 ce qu'il n'y ait pas cumul des dépositions. Nous prévoyons des conséquences
14 assez négatives si la Chambre ne pouvait pas, à l'avance, s'assurer de cet
15 aspect des choses, avant l'arrivée du témoin dans le prétoire. Il faut que
16 la Chambre soit informée, à l'avance, de ce dont le témoin va traiter dans
17 sa déposition, et il serait inadmissible que les Juges n'apprennent cela
18 qu'au moment où le témoin ouvre la bouche. La Chambre rendra sa décision
19 s'agissant de l'admissibilité des pièces et des éléments de preuve durant
20 l'audience.
21 Pour que l'affaire puisse être gérée convenablement, c'est un souci
22 de la Chambre, il faut que davantage de détails soient fournis.
23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Nice.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] S'agissant du résumé des témoignages, je
25 me demande si M. Nice ou Me Kay pourrait répondre à la question suivante.
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1 Je viens de recevoir ce calendrier confidentiel d'auditions des témoins
2 provenant de l'accusé juste avant de pénétrer dans le prétoire. Nous
3 pouvons considérer cela comme un résumé bref. La question que je me pose,
4 c'est si ce résumé est identique à celui qui est évoqué à l'Article 65 ter
5 du règlement et dans les écritures relatives à cet article, ou si du point
6 de vue contexte, le contexte est plus large.
7 M. NICE : [interprétation] Selon nous, et j'ai vérifié, c'est identique au
8 document au titre de l'Article 65 ter. Je pense que nous pouvons nous
9 exprimer plus clairement sur ce point.
10 M. KAY : [interprétation] Cela relève des écritures en application de
11 l'Article 65 ter (G).
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
13 M. NICE : [interprétation] On me dit, nous saurons vérifier pendant la
14 pause, car nous pensons qu'il y aura une pause, que dans deux cas, des
15 renseignements plus détaillés ont été exigés de la Défense. L'un de ces
16 deux cas, c'est l'affaire Tuta/Stela, et l'autre, l'affaire Blagojevic.
17 J'essaierai d'obtenir, pendant la pause, des exemples de résumés de
18 dépositions qui ont été demandés à l'accusé dans ces deux affaires.
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Nice.
20 Maître Kay.
21 M. KAY : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
22 Nous nous sommes penchés sur le règlement et il importe que les choses
23 soient dites comme elles sont dès le début s'agissant de la définition du
24 mot "résumé" qui est utilisé au dépend du mot "déclaration écrite" ou
25 "proposition de témoignage". C'est une question importante pour la Défense
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1 ainsi que pour tous les autres participants à l'affaire. Le temps consacré
2 à l'élaboration de résumés détaillés contenant tous les faits et tous les
3 détails, même s'il n'est pas présenté sous forme narrative, comme on le
4 fait dans une déclaration au préalable, est un temps important, et ce
5 travail nécessite, également, des moyens importants que, de façon générale,
6 la Défense n'a pas à sa disposition dans mon expérience. Il y a des tâches
7 qu'il est exagéré de demander à la Défense d'accomplir, compte tenu des
8 moyens qui sont les siens, dans la préparation pendant un procès. Il est
9 facile pour l'Accusation de faire ce travail, car l'Accusation a des locaux
10 dans ce bâtiment et de nombreux moyens administratifs à sa disposition, un
11 personnel important qui est bien supérieur à celui dont dispose l'accusé.
12 L'Accusation peut fournir des informations plus détaillées dans ses résumés
13 de dépositions que nous avons reçus pendant la présentation des éléments de
14 preuve de l'Accusation au cours des deux ans et demi, qui se sont écoulés
15 depuis le début de ce procès.
16 Quant à la défense, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, vous
17 avez constaté à juste titre que la Défense jouait du privilège et du droit
18 de ne pas s'incriminer. C'est une caractéristique qui est établie par les
19 règlements de ce Tribunal. Les informations demandées ici, il est important
20 de vérifier qu'elles ne porteront pas atteindre aux droits de l'accusé, et
21 à notre avis, les Juges ont bien montré, même si le sujet de l'objet des
22 témoignages sera abordé plus tard dans la journée. En tout cas, les Juges
23 ont déjà donné des indications quant à la nature exacte de ce qui est
24 demandé à l'accusé. Il faut que des espèces de panneaux indicateurs soient
25 fournis à l'accusé pour bien comprendre de quoi il est question dans
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1 l'utilisation de ce mot résumé de déposition. Les Juges, bien sûr, ont
2 toute latitude de dire à l'accusé : "Nous avons beaucoup entendu parlé de
3 tel ou tel camp ou de tel ou tel fait, et tout témoignage supplémentaire
4 n'est pas indispensable, compte tenu de ce que nous avons déjà entendu sur
5 ce sujet, puisque aucun autre témoignage ne pourra nous présenter sous un
6 jour nouveau cette question. La défense pourra-t-elle réfléchir à cela ?"
7 Ce genre de chose, c'est un panneau indicateur, comme je l'appelle. A
8 notre avis, il est important que ces panneaux indicateurs soient fournis
9 pour que le règlement s'applique correctement. Le règlement n'a pas pour
10 but de demander à l'accusé des détails exagérés qui permettront à
11 l'Accusation de contrer le témoignage d'un témoin de la Défense. Il ne faut
12 pas non plus que l'Accusation puisse, dans son contre-interrogatoire,
13 d'emblée et à chaque fois mettre en cause la déposition d'un témoin. Il
14 faut que l'accusé et ses collaborateurs puissent pleinement jouir des
15 droits qui sont les siens. Tel n'est pas le but de l'opération en tout état
16 de cause. Ce qui est demandé, c'est simplement un panneau indicateur quant
17 aux questions qui seront abordées par le témoin dans sa déposition.
18 Nous devons nous rappeler le principe fondamental qui régit
19 l'application des règlements de ce Tribunal, dont certains de ces principes
20 n'existent pas d'ailleurs dans le droit international coutumier. Etant
21 reconnu un peu partout dans le monde, il est clair que le règlement de ce
22 Tribunal va également dans ce sens.
23 Quant à la pratique dans d'autres affaires, la première c'est
24 l'affaire Tadic qui a déjà réfléchi à la question. La décision rendue a été
25 en faveur de la Défense, et il y a eu ensuite un débat sur l'aspect
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1 juridique de la question également.
2 D'autres affaires où il a été question de ces résumés, de
3 dépositions, ou des déclarations préalables proposées par le conseil de la
4 Défense pour aider la partie adverse ou les Juges, de façon volontaire,
5 l'examen de ce problème a été fait attentivement pour citer la pratique en
6 la matière. Nous dirons qu'il n'y a jamais eu contrainte, mais qu'il s'est
7 toujours agi d'une concession de la part de la Défense, et donc d'un acte
8 volontaire, lorsque la Défense souhaitait entendre de très nombreux témoins
9 disponibles à l'époque, et qu'elle cherchait à ce que les auditions soient
10 faites rapidement, tout dépend, bien sûr, des conditions particulières de
11 chaque affaire.
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] En effet, et je crois comprendre,
13 comme vous venez de le souligner, que la pratique dans un certain nombre
14 d'affaires jugé par ce Tribunal a consisté à fournir ce type d'information
15 dans le cadre d'une collaboration entre la Défense et l'Accusation est de
16 façon volontaire. Bien sûr, la Chambre examinera la question de très près
17 afin de se prononcer sur le sujet.
18 Oui. Le Juge Bonomy voudrait prendre la parole.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'ai une question pour
20 M. Nice, et M. Kay a un commentaire également. Il me semble, sur la base de
21 ce que vous venez de dire, Monsieur Nice, que votre préoccupation
22 principale consiste à veiller à ce que la Chambre dispose des informations
23 nécessaires pour gérer au mieux la présentation des éléments de preuve de
24 la Défense. Vos écritures semblent se limiter à cela. Si je lis bien le
25 paragraphe 19 de votre requête, selon ce que vous nous invitez à faire,
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1 vous pensez que ces documents demandés par vous devraient pouvoir nous
2 aider à mieux gérer la présentation des moyens de preuve de la Défense,
3 n'est-ce pas ?
4 M. NICE : [interprétation] Bien sûr, nous pensons que des résumés plus
5 détaillés aideraient également la préparation des contre-interrogatoires,
6 et je pense que, dans d'autres affaires, sur accord entre les parties ou
7 sur conclusion tirée par la Chambre de première instance, quant à la
8 nécessité de créer une obligation s'agissant de la fourniture de résumer
9 des dépositions plus détaillées, le principe fondamentale était de limiter,
10 d'un point de vue réglementaire, la présentation des faits dans ces
11 dépositions. Il faut, bien entendu, des résumés plus détaillés, de façon à
12 voir si les besoins des Juges sont respectés s'agissant de la possibilité
13 qu'ils ont de gérer au mieux le procès.
14 Je n'exclus pas un autre objectif d'ailleurs, qui n'est cependant pas la
15 raison principale de la demande de l'Accusation en l'espèce, à savoir,
16 l'efficacité nécessaire dans la gestion du procès par la Chambre, et je
17 pense que sur cette base aussi, des résumés plus détaillés sont
18 nécessaires.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il serait permis de dire que tous
20 détails complémentaires risquent de porter atteinte au droit au silence ou
21 au droit à la non-communication de l'accusé.
22 M. NICE : [interprétation] Selon moi, je l'ai déjà un peu abordé dans mes
23 observations précédentes, la Chambre, si elle dispose de détails plus
24 importants, peut également les laisser de côté et ne pas les prendre en
25 compte. Cela n'a pas une signification particulière s'agissant des droits
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1 de l'accusé. Le fait que les Juges aient une idée préalable de la teneur de
2 la déposition n'a pas une importance très grande à cet égard.
3 Avec le respect que je dois à la Chambre, je ferais adopter que cette
4 observation que vous venez de faire va tout à fait dans le sens de mes
5 arguments.
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Maître Kay.
8 M. KAY : [interprétation] J'aimerais traiter du paragraphe 19. Je
9 commencerai en page 10. Des témoins politiques et militaires d'haut rang.
10 On demande des détails complémentaires à ce genre de témoin en demandant
11 dans quelle qualité ils témoignent, quels sont les objectifs poursuivis par
12 le témoin, ce que savait l'accusé, ou qu'a dit l'accusé. A notre avis, ceci
13 est une enfreinte aux droits de l'accusé, et il importe que la Chambre de
14 première instance en tienne compte car, en fait, c'est donné une arme
15 supplémentaire à l'Accusation. En effet, cela supprime tout le bénéfice du
16 droit de l'accusé de ne pas communiquer sa stratégie, et de garder un
17 certain nombre de choses secrètes. Il n'est pas question ici de la
18 possibilité ou pas pour les Juges d'exclure certains aspects des moyens de
19 preuve qui sont mis à leurs dispositions et de laisser de côté des
20 questions qui n'ont pas été évoquées. C'est une question directement liée
21 au travail des Juges. Ce qui est dans le domaine public, cela concerne
22 également les Juges, va être connu par les Juges et également par le
23 Procureur. C'est nécessairement quelque chose que l'Accusation pourra
24 utiliser contre l'accusé en adoptant une ligne différente dans sont
25 argumentation.
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1 Ce qui signifie : "plus les évènements sont écrits de façon
2 détaillés, plus les lieux, les réunions importantes, les fonctions de tel
3 ou tel personne, ou les structures des différentes hiérarchies seront
4 écrites par le témoin en détail, plus chacun aura des connaissances
5 détaillées sur ce sujet." Le témoin est ensuite inviter à justifier les
6 éléments qu'il abordera dans sa déposition dans ces résumés. On demande au
7 témoin de communiquer, en fait, le contexte général de sa déposition : les
8 conversations, dont il parlera, quel endroit elles ont eu lieu, et toute
9 sorte d'autres choses. A notre avis, ceci n'est pas absolument nécessaire
10 au stade du résumé de déposition entre l'Accusation et le témoin. Cela
11 permettra à l'Accusation de dire : "Et bien, vous avez tel et tel avis,
12 vous avez tel et tel attitude à l'avance." C'est une source importante pour
13 la préparation du contre-interrogatoire.
14 Si nous passons à l'étape suivante, les témoins d'un rang moins élevé sur
15 le plan de la police militaire, des paramilitaires, des autres forces
16 armées, il est demandé des détails complémentaires et précis au sujet des
17 forces armées dans lesquels le témoin a combattu à tel ou tel période
18 pertinente. Cela n'a rien à voir avec un résumé des dépositions. Ce sont
19 des détails au sujet du contexte qui va bien au-delà des raisons pour
20 lesquelles une déposition est demandée à des Musulmans de Bosnie en
21 présence de l'accusé et des Juges de cette Chambre.
22 Par ailleurs, des détails complémentaires au sujet de dates,
23 d'événements, de lieux, et de personnes qui seront abordés dans le
24 témoignage d'un témoin, permettent de se renseigner sur ce que le témoin
25 connaît d'un certain nombre de choses, et on peut se poser la question de
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1 la pertinence de la déposition des témoins, grâce à ces détails pour
2 concentrer l'interrogatoire sur les points les plus importants.
3 Certaines de ces questions peuvent être débattues, bien entendu, par
4 les Juges au cours de la déposition du témoin, comme cela s'est souvent
5 passé pendant la présentation des moyens de preuve de l'Accusation. L'un
6 des Juges a dit» : "Nous avons déjà parlé de cela. Nous avons déjà entendu
7 un autre témoin sur ce sujet. Passons à autre chose." Ce n'est pas un
8 aspect de la question qui nécessite des renseignements préalables avant
9 l'audition du témoin. S'agissant des détails relatifs au contexte, en fait,
10 on demande des détails complémentaires très détaillés à un témoin qui
11 normalement n'ont pas de pertinence dans les documents communiqués avant
12 l'audition des témoins, à notre avis, n'ont pas de pertinence en
13 application de l'Article 65 ter (G).
14 Si nous examinons la liste des témoins victimes serbes, pour voir
15 dans quelle mesure ils doivent figurer dans la liste, l'Accusation affirme
16 qu'ils ne devraient pas s'y trouver. Maintenant, des détails de la
17 composition de la police militaire, des paramilitaires ou d'autres forces
18 armées dans lesquelles a combattu tel ou tel témoin à la période pertinente
19 devraient être fournis. Je répète, ceci concerne également les témoins
20 victimes serbes. Détails de ce qu'ils faisaient et de l'endroit où ils ont
21 combattu, dans quelle mesure ceci a un rapport quelconque avec l'Article 65
22 ter (G), je ne le vois vraiment pas.
23 "Par ailleurs, détails complémentaires au sujet de l'endroit où le
24 témoin a été détenu (dans tel ou tel camp), durée de la détention, détails
25 complémentaires au sujet des crimes qui font l'objet de la déposition du
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1 témoin, dates et détails au sujet des auteurs de ces crimes." Ceci, en
2 fait, si nous regardons les paragraphes en question, confine à la
3 fourniture d'une déclaration écrite préalable. Cela n'a plus rien à voir
4 avec un résumé. Je ne soulignerais jamais assez combien les moyens de la
5 Défense sont réduits pour qu'elle ait la possibilité de fournir ce genre
6 d'analyse détaillée. Ce serait vraiment une demande trop onéreuse à faire à
7 la Défense.
8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Cela aiderait sans aucun doute
9 l'Accusation à préparer le contre-interrogatoire, mais vous affirmez,
10 n'est-ce pas, que l'accusé n'est pas dans l'obligation de fournir ce genre
11 d'informations ?
12 M. KAY : [interprétation] Ce n'est pas l'objectif de l'Article du règlement
13 dont nous discutons ici. Il s'agit d'une décision qui l'appartient aux
14 Juges de rendre éventuellement dans le cadre de la meilleure façon de gérer
15 le procès, quant à savoir si la communication à la partie adverse doit être
16 absolument complète ou pas. Ce n'est pas l'objectif poursuivi dans le
17 règlement.
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Maître Kay.
19 Monsieur Nice ?
20 M. NICE : [interprétation] J'ai un mot à dire brièvement. Je ne sais pas
21 quels sont les exemples que vous avez pu trouver, Messieurs les Juges,
22 mais, dans l'affaire Galic -- et je remercie l'un de mes collègues d'avoir
23 porté cet exemple à mon attention -- le Juge Orie parle de la justification
24 ou de la raison pour laquelle il convient de demander des résumés plus
25 détaillés. Il dit que le droit d'entendre des témoins disponibles à la
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1 Défense doit être associé à un certain nombre de devoirs, et il estime que
2 l'un des devoirs de la Chambre consiste à accorder à la Défense les résumés
3 en application de l'Article 65 ter, lorsque l'Accusation est en mesure de
4 les établir pour son contre-interrogatoire.
5 Je ne sais pas si cette décision vous aidera à réfléchir à la
6 question. Si tel n'est pas le cas, nous vous disons simplement que nous
7 mettons cela à votre disposition. Je pense qu'il y a également d'autres
8 passages, de la décision du Juge Liu dans l'affaire Blagojevic, qui
9 pourront vous être fournis dans le même cadre.
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Nice. La
11 Chambre va examiner cette question et rendra prochainement sa décision,
12 peut-être même un peu plus tard aujourd'hui.
13 Autre question : les témoins experts qui sont abordés aux paragraphes
14 27 à 32 des écritures de l'Accusation, en application de l'Article 94 bis
15 du règlement, la Chambre de première instance demande à l'accusé de fournir
16 à l'Accusation et aux Amici tous les rapports d'experts six semaines avant
17 la date prévue pour la déposition du témoin expert en question.
18 Monsieur Milosevic, puis-je vous demander si vous avez l'intention
19 d'entendre un expert avant les vacances judiciaires.
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] De façon générale, Monsieur Robinson, ce
21 qui m'intéresse c'est d'entendre un certain nombre de témoins experts dès
22 le début de la présentation de mes moyens de preuve, ce qui permettra à
23 chacun de se faire une idée générale de la situation dès le début. Il ne
24 fait aucun doute que, dans la première vague de témoins qui seront cités à
25 la barre, il se trouvera un certain nombre de témoins experts.
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1 Puisque nous parlons de témoins experts, j'aimerais tirer une
2 question au clair avec vous cette question et celle que l'on trouve
3 exprimer dans l'Article 94 bis du règlement traitant de l'audition de
4 témoins experts.
5 S'agissant de témoignages d'experts, où il y aura plusieurs éléments
6 qui me préoccupent quelque peu, parce que les experts, que je vais citer à
7 la barre, sont des experts que personne ne saurait contester du point de
8 vue de leur compétence, vraiment personne, du point de vue de leur
9 compétence, ils ne sauraient en aucune façon être comparés avec les experts
10 qui ont été cités à comparaître par la partie adverse. Ce qui me préoccupe,
11 toutefois, c'est ce paragraphe (C). Justement je vous demande de me fournir
12 une réponse à présent, afin que nous puissions déterminer la chose en guise
13 de règle, parce que le paragraphe (C) dit : "Si la partie adverse fait
14 savoir qu'elle accepte le rapport du témoin expert, ce rapport peut-être
15 admis comme élément de preuve par la Chambre de première instance sans que
16 le témoin soit appelé à déposer en personne."
17 On dit ici que vous pouvez admettre l'élément de preuve si la partie
18 adverse accepte une déclaration. Il vous appartient à vous de décider de ne
19 pas citer à comparaître ce témoin. Or, ma requête à ce sujet là serait de
20 vous demander de décider d'entendre le témoin indépendamment de la position
21 adoptée par la partie adverse, en raison de la grande importance revêtue
22 par les questions qui seront étudiées en raison de la nécessité de faire en
23 sorte que leur travail d'expert serve de fondement ou de base pour un
24 témoignage d'expert qui sera sans nul doute un témoignage des plus
25 compétents. Vous pouvez en être certain.
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1 J'ai dit, d'ores et déjà, que j'avais des experts à citer.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, lorsque je
3 vous pose une question de façon générale, ne répondez pas en me posant une
4 autre question. Vous avez répondu à la question que j'ai posée en disant
5 que vous aimeriez citer certains experts au cours de la première série de
6 témoins. Vu la décision que nous avons rendue, vous aurez l'obligation de
7 signifier à l'Accusation les rapports six semaines avant la date prévue
8 pour la déposition de cet expert. Un problème se poserait si cette règle
9 était appliquée. Si vous avez l'intention de citer un expert dans les
10 quatre semaines que nous prévoyons au mois de juillet, et c'était là le
11 sens de ma question, si vous avez l'intention de le faire, il faudrait que
12 nous, en tant que Juges, nous apportions certains aménagements à la
13 condition qui prévoit un délai de 30 jours permettant à la partie adverse
14 de dire si elle va procéder au contre-interrogatoire ou accepter le rapport
15 de l'expert.
16 Il vous faut nous dire, de façon très claire, et la Chambre va vous
17 donner un délai de sept jours afin que vous nous disiez si vous avez
18 l'intention de citer un expert. De cette façon, en tant que de besoin, la
19 Chambre envisagera d'apporter des modifications au règlement.
20 Je vois que M. Nice prépare à intervenir. Je crois savoir pourquoi.
21 Monsieur Nice ?
22 M. NICE : [interprétation] Deux choses, Monsieur le Président. Voici la
23 première. Six semaines -- est-ce que ce serait six semaines à courir à
24 partir de la fourniture du rapport en anglais ? Car vous savez que le
25 rapport, s'il nous est présenté en serbe, en B/C/S, cela veut dire que,
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1 pratiquement, on a que trois semaines, deux, voire une car il nous faut la
2 traduction en anglais de ce rapport.
3 Dans nos écritures déposées au départ, nous laissions entendre que le
4 délai à respecter ce serait deux mois. Nous avons réagi à la réponse
5 fournie par les amis de la Chambre et nous avons dit que nous demandions,
6 respectueusement, six semaines à courir du moment où nous aurions ce
7 rapport en anglais.
8 Autre chose, et c'est là un point distinct, cet avantage a rapport
9 avec la question soulevée précédemment par vous, Messieurs les Juges. Si
10 vous examinez la liste, la dernière liste des témoins fournie par la
11 Défense, on commence par le numéro 5 de cette liste, c'est-à-dire que c'est
12 le numéro 1331 en application du 65 ter. Il semble inévitable, à nos yeux,
13 que ce témoin-là, je ne sais pas si j'ai le droit de donner ce nom en
14 audience publique. Je précise simplement que c'est un témoin 65 ter. Ce
15 témoin 1331 et les trois témoins, qui suivent, ce sont certain 1115, 1114
16 et 1098, ce sont autant de témoins dans la déposition constituera ou
17 comportera un élément d'expert. A notre avis, ceci n'est pas satisfaisant.
18 Il n'est pas correct que des témoins experts ou des témoins qui vont
19 fournir un avis d'expert soient présentés sous forme de témoin factuel,
20 alors qu'ils vont chercher à déposer sur des points d'expert par la suite.
21 Examinez, par exemple, le Témoin 1331, la première personne que j'ai
22 mentionnée, il s'agit d'un avocat, d'un juriste qui va forcément présenter
23 un avis d'expert juridique sur des questions de constitution, des preuves
24 constitutionnelles. Prenons le Témoin 1115, les mêmes réflexions
25 s'appliquent ici, alors qu'ici nous parlons, disons, d'un historien
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1 davantage.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne pense pas qu'il faille aborder
3 ces détails maintenant parce que la recevabilité des rapports sera régie
4 par les normes qui s'appliquent.
5 M. NICE : [interprétation] Tout à fait, Monsieur le Président, il n'y avait
6 qu'une chose qui me préoccupait. Il ne faudrait pas que l'accusé croit que
7 le fait de présenter un témoin comme un témoin factuel va nécessairement en
8 faire un témoin factuel. Nous avons certaines restrictions imposées par les
9 résumés visés par le 65 ter que nous avons reçu jusqu'à présent. Tout ce
10 qu'on dit, par exemple, que c'est un universitaire, c'est tout ce qu'on
11 sait à son propos.
12 [La Chambre de première instance se concerte]
13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Kay, vous voulez intervenir ?
14 M. KAY : [interprétation] Excusez-moi, Messieurs les Juges, mais je viens
15 de recevoir des renseignements très précieux de Mme Anoya qui établit la
16 liaison sur ces questions.
17 Deux des témoins devaient avoir un rapport d'expert prêt d'ici au 1er
18 juillet. Ils sont arrivés en B/C/S, il s'agit du Témoin 1115 et du Témoin
19 1114. Pour ce qui est du 1098 et du 1331, on y travaille toujours, mais une
20 date est prévue pour ces deux témoins que j'ai cités au départ, qui est
21 celle du 1er juillet.
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Fort bien. Y a-t-il eu traduction ?
23 M. KAY : [interprétation] Oui, elle est en cours à l'heure actuelle, et la
24 traduction devrait être prête d'ici au 1er juillet. C'est là-dessus que
25 compte le Greffe.
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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est très utile comme
2 renseignement, ces deux rapports pourront être abordés. Si ceci pose des
3 problèmes pratiques pour ce qui est des délais à observer, M. Nice a raison
4 de le dire, ces rapports il faut les traduire en anglais.
5 Comme le souligne le Juge Bonomy, ces deux seront prêts le 1er juillet.
6 Nous serons en mesure d'examiner ces rapports puisqu'ils ont été traduits
7 en anglais.
8 M. NICE : [interprétation] Sur le plan technique, ceci va poser problème
9 parce que ce délai de six semaines va nous mener au mois d'août. Sans
10 prendre des mesures qui pèseraient sur moi à l'avenir, je dirais que si ces
11 documents sont disponibles le 1er juillet, en anglais, nous ferons
12 l'impossible pour ne pas, nécessairement, respecter cette considération
13 technique, si c'est possible nous les examinerions en juillet.
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous ne demanderiez pas les 30
15 jours ?
16 M. NICE : [interprétation] Je ferai de mon mieux pour faire preuve de
17 souplesse.
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous avez, à votre disposition,
19 beaucoup de ressources, Monsieur Nice.
20 M. NICE : [interprétation] Quelques unes.
21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La Chambre a latitude, en
22 l'application de l'Article 127, de réduire cette période.
23 M. NICE : [interprétation] Bien entendu.
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est à cela que pensait la Chambre.
25 M. NICE : [interprétation] Si c'est à cela que vous pensez, nous n'allons
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1 pas nous y opposer, si ceci ne pose pas trop de problèmes.
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous avons, également, pensé au fait
3 que la période de six semaines, c'était en prévision d'une traduction qui
4 n'aurait pas encore été faite. Ici, vous avez des documents qui seront déjà
5 en anglais d'ici au 1er juillet.
6 M. NICE : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge. La question des
7 ressources que vous avez évoquées me pousse à évoquer un point général.
8 C'est certain le bureau du Procureur dispose de ressources considérables,
9 mais pour ce qui est des experts, souvent, afin d'aider la Chambre de
10 première instance, nous avons recours à des experts venant de l'extérieur.
11 Ceci se répercutait dans la décision rendue récemment par les Juges.
12 Lorsque nous recevons des rapports venant de l'extérieur, il faut les
13 examiner, ce qui veut dire qu'il faut reparler à ce même expert ou demander
14 l'assistance d'autres experts extérieurs afin de veiller à ce que notre
15 avis soit, tout à fait, informé et intègre. Nous avons, bien sûr, des
16 ressources internes, mais elles ne sont pas, sans limite, loin de là, et
17 elles ne couvrent pas tous les domaines. Vous vous souvenez, Messieurs les
18 Juges, des difficultés auxquelles nous sommes toujours en butte, par
19 exemple, pour le droit constitutionnel dans le volet Kosovo. Rappelez-vous
20 aussi que nous avions un historien, et beaucoup de ces témoins, qui
21 semblent être touchés par cela, cet historien ce n'est pas du tout
22 quelqu'un que nous avons ici, il vient des Etats-Unis.
23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous ne voudrions pas vous mettre
24 mal à l'aise en disant que vous aviez trop de ressources.
25 [La Chambre de première instance se concerte]
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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Kay, vous dites qu'il y
2 aura une traduction prête d'ici au 1er juillet. Cela concerne quel témoin ?
3 M. KAY : [interprétation] Le Témoin 1115. Il s'agit aussi du Témoin 1114.
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] S'agissant de ces deux témoins,
5 Monsieur Nice, la Chambre va réduire le délai prévu par l'Article 94. Ce
6 sera une période de deux semaines et l'accusé devra être prêt à citer ces
7 témoins, compte tenu du fait de ce délai réduit.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, étant donné que vous êtes en
9 train de parler de délai, j'estime qu'il conviendrait que vous ayez
10 connaissance, vous et l'opinion publique, de certains faits qui revêtent de
11 l'importance pour ce qui est de la définition des délais que vous êtes en
12 train de commenter, justement.
13 Dans les conditions dans lesquelles je me trouve, mes préparatifs se
14 trouvent être des plus ralentis, et les possibilités de préparation, dans
15 certaines phases, n'existent même pas. Je vais vous présenter quelques
16 éléments de faits qui se trouvent être des faits matériel précis. Ce sont
17 des faits au sujet desquels il est des écritures pour les confirmer. Vous
18 avez interrompu ou plutôt la partie adverse a communiqué qu'elle avait
19 terminé la présentation de son affaire pendant que j'étais alité. J'ai
20 commencé à travailler, moi-même, je ne me suis pas levé du lit lorsque vous
21 avez interrompu la présentation des éléments à charge.
22 J'ai commencé à travailler et à effectuer mes préparatifs à compter du 25
23 mars. Je dis bien 25 mars. En raison de vos délais à vous j'ai dû investir
24 beaucoup de temps, beaucoup de travail pour vous fournir, le 13 avril,
25 cette liste de témoins sur 4 500 pages. Cela est un fait. J'ai commencé à
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1 travailler dès le 25 mars.
2 Deuxième fait que je voudrais soulever, c'est que le 14 avril, les médecins
3 m'ont interdit de travailler. J'ai même dû éloigner mes collaborateurs.
4 Troisième fait : Conformément à la décision des médecins, j'ai continué à
5 travailler le 25 mai, au bout de 41 jours d'interruption. Depuis, il s'est
6 passé entre-temps trois semaines, et je vois que vous êtes au courant parce
7 que j'ai reçu moi-même une copie du rapport en question, je ne puis
8 travailler que trois jours par semaine.
9 Ma requête, à votre égard, est tout à fait concrète, Messieurs. Les raisons
10 que j'ai présentées sont, je pense, évidentes. Il convient de me prolonger
11 le délai imparti afin que je puisse procéder, ne serait-ce qu'à des
12 préparatifs des plus élémentaires. D'autant plus, de par les cadences que
13 vous avez imposées, vous avez détérioré mon état de santé. Il s'agit, pour
14 moi, de faire en sorte que je puisse, dans les délais temporels impartis,
15 procéder à des entretiens avec une trentaine, au moins, vous avez demandé
16 50 témoins, mais au moins une trentaine de témoins.
17 Si vous me privez de temps et si vous me privez de toute possibilité
18 de procéder à des préparatifs, ne serait-ce qu'élémentaire, cela revient à
19 dire, en termes pratiques, que vous supprimez mon droit à la défense. Vous
20 vous souviendrez, et je parle de vous, Monsieur Robinson et Monsieur
21 Groome, qu'ici, à plusieurs reprises, j'ai soulevé la question de savoir
22 quand est-ce que vous estimeriez que je devrais avoir trouvé le temps de
23 lire les milliers et les milliers de pages qu'on m'a remises pendant la
24 durée, ici, de ce que vous avez désigné le volet de l'affaire concernant
25 Kosovo. A chaque fois, on m'a répondu que la chose serait étudiée. Or,
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1 entre les deux volets, j'ai eu quelques semaines pour préparer la partie
2 suivante et lire 600 000 pages.
3 Ma demande, à votre égard, c'est de prendre vous-même, vous avez les
4 dates que je viens de citer, les services doivent en disposer. Il s'agit de
5 me proroger le temps imparti pour les préparatifs afin que je puisse
6 procéder aux préparatifs, ne serait-ce que les plus élémentaires ?
7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Milosevic. Je crois
8 que là, ce n'est pas, tout à fait, respecter l'ordre que j'avais prévu.
9 Nous allons aborder cette question plus tard, mais nous prenons acte des
10 arguments que vous venez de présenter.
11 J'en arrive au paragraphe 34 des écritures, la signification des pièces.
12 L'Article 65 ter (G) exige de l'accusé qu'il communique à l'Accusation
13 copies de toutes les pièces à conviction qu'il prévoit dans sa liste du 65
14 ter avant le début de la présentation des moyens à décharge, et l'accusé
15 doit le faire dans un délai de sept jours consécutifs à la présente
16 conférence.
17 J'examine, maintenant, les paragraphes 35 à 38 qui parlent de la
18 participation de l'accusé. La Chambre se bornera à dire que chaque fois
19 qu'elle informe l'accusé qu'il est tenu de déposer des écritures, il devra
20 se conformer à cette demande de la Chambre.
21 Paragraphe 39 parle de l'imposition d'un conseil de la Défense.
22 L'Accusation soulève, une fois de plus, cette question. La Chambre rappelle
23 la décision qu'elle a déjà prise en la matière, et elle ne reviendra pas,
24 pour le moment, sur la question.
25 Paragraphe 43, la déposition de l'accusé en personne. La Chambre relève que
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1 l'accusé n'a pas inclus son propre nom dans la liste des témoins avisés par
2 le 65 ter. S'il a l'intention de déposer en personne, il devra le dire à la
3 Chambre et préciser à quel moment il voudra le faire et quelle sera la
4 durée prévisible de sa déposition.
5 D'autres arguments sont présentés par l'Accusation à propos d'une
6 déclaration liminaire de l'accusé. De façon générale, l'Accusation s'oppose
7 à cette idée, mais la Chambre de première instance rappelle qu'elle a déjà
8 statué en la matière, compte rendu d'audience 8675. Cette question a été
9 examinée par les Juges qui ont, d'abord, entendu les parties et ont,
10 ensuite, décidé que l'accusé serait autorisé à faire une déclaration
11 liminaire. Par conséquent, il aura le droit de présenter ses arguments
12 pendant deux heures et l'Accusation n'aura pas le loisir de répondre.
13 Paragraphes 44 à 46. Il s'agit des éléments à décharge. La Chambre prend
14 acte des préoccupations manifestées par les amis de la Chambre s'agissant
15 de la communication en vertu de l'Article 68. Cependant, elle estime que ce
16 que propose l'Accusation est raisonnable et suffisant.
17 Paragraphes 48 à 50, des écritures. Il s'agit, ici, de témoins, cinq en
18 l'occurrence que l'Accusation avait eu l'intention de citer avant la fin de
19 la présentation de ses moyens. La Chambre ne permettra pas à l'Accusation
20 de citer ces cinq témoins qu'elle n'a pas pu citer, mais ceci est sans
21 préjudice à la possibilité qui est réservée à la Chambre de citer ces
22 témoins en application de l'Article 98 du règlement. La même chose
23 s'applique aux paragraphes 51 à 53, les témoins de la liste, dite B.
24 Paragraphe 54 des écritures, M. Nice a fait référence à des
25 difficultés qu'il y a à trouver un expert en droit constitutionnel. Sous
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1 peu la Chambre rendra une ordonnance exigeant des arguments en temps utile
2 de la part des parties sur ce point.
3 Paragraphes 55 à 64, des écritures de l'Accusation, là se pose la
4 question des écoutes des Croates. L'Accusation ne sera pas autorisée à
5 citer les témoins C-1249 ou C-1250 qui permettrait d'authentifier les
6 interceptions téléphoniques qui n'ont pas été versées au dossier au moment
7 de la présentation des moyens à charge. Mais quant à savoir si on peut se
8 servir de ces écoutes dans le contre-interrogatoire, c'est une question
9 qu'il faudra régler au moment où la question se posera si elle se pose.
10 Paragraphes 65 à 68 des écritures, il s'agit de questions
11 confidentielles. La Chambre se contente de prendre acte de ces paragraphes
12 et ne va pas aujourd'hui aborder cette question.
13 J'en arrive, maintenant, aux questions soulevées par l'accusé, lors
14 de l'audition consacrée à l'Article 15 bis, le 25 mars. La première
15 question qu'il avait soulevée, c'était la prolongation du temps de trois
16 mois qui lui avait été accordée pour sa préparation. L'accusé a présenté
17 des arguments sur ces points, inutile de lui redonner la parole.
18 La Chambre a apporté des modifications nécessaires au délai qui avait
19 été accordé à l'accusé pour la préparation de sa Défense, et la
20 présentation commencera le 5 juillet 2004 comme prévu.
21 Lors de l'audience visée par le 15 bis, l'accusé avait aussi demandé
22 davantage que 150 jours pour la présentation de ses moyens. La Chambre s'en
23 tient à l'ordonnance qu'elle avait rendue, à savoir que l'accusé a 150
24 jours d'audience pour présenter ses moyens.
25 Lors de cette même audience, l'accusé avait répété sa demande aux fins de
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1 mise en liberté provisoire. Il a présenté des arguments qui ont été
2 examinés par les Juges, mais la Chambre rejette cette demande aux fins de
3 mise en liberté provisoire.
4 J'aimerais évoquer d'autres questions, au moment de la présentation de ses
5 moyens, l'accusé va respecter les règles qui régissent l'interrogatoire
6 principal. Il n'est pas censé poser les questions qui guident les témoins,
7 et il n'est pas censé lui-même déposer, il n'est pas censé faire des
8 discours.
9 Présentation et production de documents, il faut que l'accusé présente de
10 façon organisée et structurée les documents qu'il a l'intention de
11 soumettre. S'il produit des documents qui ne sont pas déjà versés au
12 dossier en l'espèce, il faudra veiller à fournir suffisamment d'exemplaires
13 pour les Juges, l'Accusation et aussi pour le témoin.
14 N'oubliez pas, Monsieur Milosevic, que les documents qui n'auraient pas
15 déjà été traduits en anglais devront l'être. Ne l'oubliez pas, je le
16 répète. Veillez à ce qu'il y ait suffisamment de temps qui soit réservé à
17 la traduction de ces documents.
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Comment, Monsieur Robinson, comment faire pour
19 vous permettre d'avoir suffisamment de temps, alors que vous ne m'en
20 accordez pas autant que vous avez déjà décidé de m'en accorder. Faites le
21 calcul vous-même.
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, je vous
23 interrompe. Nous vous avons accordé un délai de trois mois, et nous avons,
24 ce faisant, tenu compte du fait que vous avez été malade pendant une
25 certaine période. Nous avons fait des calculs et nous avons prorogé ce
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1 délai. D'abord, vous avez eu un supplément de deux semaines, et deux
2 semaines supplémentaires encore. Il serait tout à fait erroné de votre part
3 de dire que vous n'avez pas reçu le temps nécessaire ou tous ces trois
4 mois.
5 La Chambre était tout à fait préoccupée par votre état de santé, et elle a
6 toujours tenu compte du temps dont vous aviez besoin.
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, je veux bien croire que vous
8 êtes bien intentionné, mais je crois que vous êtes mal informé. Vous avez
9 indiqué ce que j'ai soulevé comme question lors de l'audience du 25 mars.
10 Ni vous, ni moi ne pouvions savoir à ce moment que, le 14 avril, on
11 m'interdirait de travailler pendant 41 jours. Se 25 mars constitue un point
12 de départ, le 25 juillet, cela fera trois mois, mais, si vous ajoutez 41
13 jours, le 25 juin, c'était trois mois, mais si vous ajoutez 41 jours, cela
14 nous fait arriver au 6 août au minimum parce que vous ne pouvez pas me
15 calculer ces 41 jours suite à une ordonnance de votre part. Je ne dis pas
16 de votre part en personne, mais, suite à une ordonnance de la part des
17 autorités qui sont celles de l'unité de détention, je n'ai pas pu
18 travailler, j'ai été écarté de toute possibilité de travailler. Vous ne
19 pouvez pas passer outre ces 41 jours. Je vois que vous aimeriez passer
20 outre le fait que l'on m'ait autorisé par la suite à ne travailler que
21 trois jours par semaine.
22 Ce qui fait, si vous faites le calcul, le moment où j'ai été malade
23 après l'interruption de l'audience, et le début de calcul à compter du 25
24 mars, et si vous ajoutez les 41 jours, où j'ai eu interdiction de travail,
25 cela nous fait arriver vers le 6 ou la date du 7 août. Si vous ajoutez en
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1 plus que je n'ai le droit de travailler que trois jours par semaine, cela
2 nous fait arriver à un délai bien plus long, même si l'on ne fait que tenir
3 compte de votre délai qui a été à partir, à savoir, de trois mois -- le
4 délai de trois mois.
5 Il faut que je me batte pour des droits de l'homme les plus
6 élémentaires pour vous démontrer que les mathématiques sont une science
7 exacte, que la médecine est une science exacte également et que le temps
8 existe et qu'on peut le compter, le calculer et le constater. Si vous
9 voulez me priver en sus de tout ce que j'ai et de ces trois mois où l'on a
10 vraiment économisé sur le temps, si vous voulez me priver de cela aussi,
11 j'estime que cela manquerait de correction parce qu'on m'a interdit de
12 travailler, et on a même, qui plus est, éloigné mes collaborateurs de
13 l'unité de détention. Par voie de conséquence, je vous prie de prendre cela
14 en sorte. Je veux bien croire que vous voulez être attentif et préoccupé,
15 mais je me dois de vous dire que vous vous êtes trompé quelque part dans
16 vos calculs parce que j'ai attentivement pris les choses en considération,
17 j'ai fait le calcul du temps.
18 D'ailleurs, la chose est aisément calculable, à compter du 25 mars
19 jusqu'au 25 juin, cela nous fait trois mois; ajoutez les 41 jours, cela
20 nous fait arriver déjà au 6 août, rien que si vous n'ajoutez que cela. Si
21 vous mettez complètement de côté le fait que l'on m'ait interdit de
22 travailler pendant plus de trois jours -- une semaine, par hasard, j'ai
23 pris quatre jours pour pouvoir recevoir un autre témoin, et le Greffier m'a
24 fait savoir que je ne pouvais pas ajouter cette quatrième journée puisque
25 l'on ne m'a autorisé à travailler que trois jours. Dans le papier qu'on m'a
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1 remis ce matin, je vois que ce régime se trouve être, non seulement
2 maintenu, mais qu'il y a des raisons des plus sérieuses de faire en sorte
3 qu'il soit poursuivi.
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Milosevic. La
5 Chambre estime qu'elle a fait preuve d'une très grande équité à votre égard
6 sur ce point, elle n'a pas l'intention de modifier le délai qui vous a été
7 imparti.
8 Je pense que l'heure est venue de procéder à une pause. Je vais, d'abord,
9 en discuter avec mes collègues.
10 [La Chambre de première instance se concerte]
11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons maintenant procéder à
12 une pause et nous reprendrons les débats à midi.
13 Monsieur Nice.
14 M. NICE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, s'il m'est possible
15 de le faire, je vais obtenir et vous fournir les décisions prises dans les
16 affaires Galic, Krstic, Tuta, Stela et Blagojevic. S'agissant de la nature
17 des résumés, en guise d'exemple, j'ai ici un jeu de résumés fournis dans
18 l'affaire Blagojevic, résumés qui ont été jugés inappropriés avec une autre
19 version qui semblait plus raisonnable et suffisante toujours. J'aimerais
20 revenir sur les décisions prises dans ces affaires, mais j'aimerais que
21 vous ayez ces documents, ces décisions prises par d'autres Chambres avant
22 de vous présenter mes arguments, si vous me le permettez.
23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, je vais demander au Greffe de
24 prendre ces documents.
25 M. NICE : [interprétation] L'ordre dans lequel vous sont présentés ces
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1 documents, n'est pas significatif.
2 --- L'audience est suspendue à 11 heures 28.
3 --- L'audience est reprise à 12 heures 46.
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La pause a été plus longue, parce
5 que nous devions nous saisir des questions soulevées. Tout d'abord, je
6 donne à parole à Monsieur Nice.
7 M. NICE : [interprétation] Je veux simplement dire que si vous avez
8 l'occasion d'examiner la décision dans l'affaire Tuta/Stela, il y a aussi
9 un passage de l'affaire Krstic qui parle de ce sujet, de même que dans
10 l'affaire Blagojevic. La décision Galic n'a pas encore été trouvée, en
11 dépit des recherches effectuées. Je peux apporter de nouveaux commentaires
12 sur les passages que vous avez examinés, mais il suffira, peut-être, de
13 retenir la distinction établie par M. Harmon dans l'affaire Krstic entre
14 les sujets et les faits. Les règles traitant des faits et les résumés dont
15 il s'est plaint, qui étaient trop brefs selon lui, ils l'étaient parce
16 qu'on évoquait que les sujets, ce qui semblait insuffisant.
17 Vous verrez que, dans d'autres affaires, les Juges ont retenus et
18 soutenus cette notion, à savoir que, grâce à ces résumés, l'Accusation
19 devrait pouvoir se préparer à l'interrogatoire des témoins à venir, en plus
20 des informations qui permettent aux Juges de s'acquitter de leur mission.
21 Si vous avez d'autres questions, j'y répondrai, mais il se peut que nous
22 disposions sous peu de la décision Galic.
23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci. Maître Kay ?
24 M. KAY : [interprétation] Excusez moi de vouloir intervenir sur un point
25 qui est apparu ce matin. Nous avons le devoir de vous saisir de questions
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1 si elles nous semblent importantes. Nous parlerons de la durée de la
2 période nécessaire à la préparation des moyens à décharge.
3 Nous savons que, dans cette période qui s'est écoulée depuis le début
4 de février jusqu'à la date d'aujourd'hui, période au cours de laquelle il
5 n'y a pas eu d'audience, nous savons que M. Milosevic a eu des problèmes de
6 santé. La Chambre de première instance a reçu, de façon régulière, des
7 bulletins de santé, et elle est au courant du traitement qu'il a subi, des
8 conditions qui ont les siennes au cours de cette période.
9 M. Milosevic a fait état d'une période de 41 journées qui ont été perdues
10 dans le cadre du temps qui lui était réservé pour sa préparation à cause de
11 sa maladie. Je n'ai pas vérifié ce chiffre moi-même, mais je savais que
12 cela représentait plus d'un mois. Je pensais que cela faisait six semaines,
13 et je suis convaincu qu'il a fait un décompte précis de ces journées.
14 Vous le savez, bien sûr, M. Milosevic est sous traitement
15 médicamenteux. Il a reçu l'avis des médecins. Ceux-ci lui ont dit qu'il
16 devait arrêter le travail qu'il faisait pour se préparer, et l'ordonnance
17 initiale rendue par la Chambre, disait qu'il fallait qu'il y ait une
18 interruption de trois mois avant le début de la présentation des moyens à
19 décharge après la fin de la présentation des moyens à charge.
20 Vu ces circonstances, si l'on pense au temps dont il a, véritablement,
21 disposé pour travailler vu son état de santé, et sur conseil des médecins,
22 si on ajoute à cela les circonstances qui sont les siennes depuis février
23 jusqu'à tout récemment, il a connu des revers de santé de nouveau, et
24 c'était régulier. Les rapports des médecins montrent que quand il s'est
25 remis à travailler, ceci a eu une incidence négative sur son état de santé.
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1 On pourrait dire qu'il était, vraiment, aux prises avec la préparation de
2 ses moyens à décharge au cours de cette période, et que c'était une
3 bataille de sa part.
4 Ceci pour étayer ce que M. Milosevic disait ce matin, s'agissant du
5 temps disponible. Normalement, d'après l'ordre prévu, nous devrions
6 commencer le 5 juillet. Il y aura neuf ou dix journées d'audience avant les
7 vacances judiciaires. Nous aimerions faire valoir ceci. Si l'on prenait ces
8 journées et si on les supprimaient, et si l'on disait que le procès devrait
9 recommencer fin août, au cours de la troisième semaine du mois d'août, ceci
10 permettrait à la Chambre de ne pas avoir perdu trop de temps, du temps
11 consacré à la présentation des moyens à décharge. Ceci donnerait, à M.
12 Milosevic, ces quelques journées précieuses dont il a besoin pour préparer
13 ses moyens, et lui donner un semblant d'ordre.
14 Ce qui a été dit ce matin montre clairement qu'il devra modifier,
15 aménager, sa liste de témoins, et qu'il n'aura que 150 journées d'audience.
16 Ceci doit être prise en compte par M. Milosevic, mais aussi pas ses
17 collaborateurs. Il faudra réaménager l'ordre des témoins, tout en ventilant
18 ces témoins par volets de l'acte de l'accusation, Kosovo, Croatie, Bosnie.
19 C'est la première fois, au fond, que nous avons tendu une décision
20 aujourd'hui quant aux modalités de présentation des témoins.
21 Ce que je fait valoir à cet égard : c'est que si, de l'avis de la Chambre,
22 ces dix journées pourraient être reportées dans le calendrier des
23 audiences, on ne perdrait pas trop de temps, et on pourrait avoir une
24 meilleure administration de la justice, si davantage de temps était, ainsi,
25 consacré et donné à l'accusé pour qu'il se prépare mieux, vu les décisions
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1 prises aujourd'hui et vu la nécessité pour l'accusé de bien préparer sa
2 défense.
3 Vous savez, il a interrogé des témoins au Quartier pénitentiaire.
4 Puisqu'il se défend lui-même, ceci lui a été rendu possible, et sans nul
5 doute, ceci a représenté pour lui tout une somme de travail, travail
6 nécessaire à la préparation de sa défense. Si on lui donnait ces quelques
7 jours de plus, il se pourrait que ceci aide grandement à terme la Chambre
8 de première instance, car sa défense serait mieux préparée, il pourrait
9 vous dire s'il va, d'abord, apporter des questions relatives au Kosovo, ou
10 plutôt la Croatie ou à la Bosnie.
11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie. Merci beaucoup de
12 ces arguments.
13 [La Chambre de première instance se concerte]
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice ?
15 M. NICE : [interprétation] Rien à ajouter. Nous savons que la Chambre a
16 déjà statué quant à la date de réouverture du procès, ou de poursuite du
17 procès, plus exactement. A notre avis, l'accusé a eu le temps de préparer
18 des témoignages prévus d'ici à la fin de cette période, avant les vacances
19 judiciaires, et il aura le temps de se préparer pour septembre. Il serait
20 malheureux de reporter cette date de reprise, et je pense que, bien sûr, il
21 faut que le procès reprenne dans le plein respect de ses droits, et aussi
22 la Chambre a tenu compte de ses droits, elle les a respectés en lui donnant
23 un temps supplémentaire.
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci. Je vais aborder trois
25 questions. Il y a d'abord les renseignements fournis par l'accusé à propos
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1 des 41 journées, vu son état de santé. Ceci est en rapport direct avec ce
2 que vient de dire Me Kay.
3 La Chambre va ordonner au Greffe de fournir des informations quant au
4 nombre de journées de travail perdues par l'accusé dû à sa maladie. Autre
5 chose, lorsque les collaborateurs de M. Milosevic ont été empêchés de le
6 rencontrer, vu la maladie de l'accusé. La Chambre a demandé ces
7 renseignements de cette façon elle sera à même de parer à tout problème que
8 connaîtrait l'accusé au moment de la présentation de ces moyens.
9 Deuxième question. L'Accusation demande des résumés plus détaillés. La
10 Chambre relève que le motif principal invoqué par l'Accusation à cette fin,
11 est que la Chambre bénéficierait d'une meilleure assistance pour la gestion
12 et la tenue du procès s'il y avait ces résumés plus détaillés. A ce stade,
13 la Chambre a l'impression que les renseignements fournis dans ces résumés
14 suffisent. Nous n'allons pas demander de résumés plus détaillés. Bien sûr,
15 sans que ceci porte préjudice au droit intrinsèque dont dispose la Chambre
16 quant à la tenue du procès. La Chambre pourra, quand elle le voudra,
17 demander les suppléments d'informations.
18 Troisième question. L'ordonnance que j'ai déjà rendue, à savoir que
19 l'accusé devait fournir une liste de témoins comprenant les 50 premiers
20 témoins, dans l'ordre probable de comparution. Ceci devra se faire dans un
21 délai de sept jours, à compter de la présente Conférence préalable à la
22 présentation des moyens à décharge.
23 [La Chambre de première instance se concerte]
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Une question d'intendance encore.
25 Oui, Monsieur Milosevic.
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1 L'INTERPRÈTE : Micro pour M. Milosevic.
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous avez parlé des questions dont nous allons
3 parler. Vous avez dit que nous allons procéder par ordre, et que
4 probablement il me sera fourni l'occasion de parler au sujet des questions
5 soulevées. Je suppose, par conséquent, que vous me donnerez la possibilité
6 de dire quelque chose aussi à ce sujet. Sans attendre ma réaction, de
7 quelque façon que ce soit, ou quelque argument de ma part que ce soit, vous
8 avez pris des décisions. Au début, vous avez été vous-même la personne qui
9 a dit que nous allions procéder par ordre, les témoins, l'ordre de
10 comparution, les noms et j'ai pris bonne note de tous les sujets que vous
11 avez mentionnés vous-même.
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous interromps, Monsieur
13 Milosevic. Je vous reçois cinq sur cinq. Ce que vous dites est exact. Vous
14 avez, longuement, parlé, alors que vous n'avez pas respecté l'ordre que
15 j'avais proposé. Vous avez, longuement, parlé de la question de cette
16 période de trois mois. Vous avez présenté des arguments, tout à fait,
17 circonstanciés sur ce point. C'est la raison pour laquelle je ne vous ai
18 pas invité à vous prononcer maintenant une fois de plus.
19 Vous n'avez pas été précis, vous n'avez pas parlé de façon précise de
20 la question des 150 journées de travail. Si vous voulez le faire, faites-
21 le. Mais soyez succinct, très succinct.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Voilà, je serai très succinct. Tout d'abord,
23 pour ce qui est de la liste des témoins, je veux que tout et chacun
24 comprennent et sachent que, puisque vous avez jugé que cette liste était
25 trop grande, 1 631 témoins, j'estime qu'il convient de tenir compte du fait
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1 qu'il y a plusieurs dizaines de milliers de personnes qui se sont
2 présentées d'elles-mêmes pour témoigner, stupéfaites par les mensonges
3 qu'elles ont pu entendre ici. Mes collaborateurs et mes camarades, au sein
4 de ce comité appelé Liberté, et autres comités de soutien, ont réduit le
5 chiffre à 5 000. Avec plusieurs collaborateurs, j'ai réduit le chiffre au
6 chiffre que je vous ai communiqué.
7 La question qui se pose, c'est de savoir si vous êtes intéressé du
8 tout à entendre la vérité car j'ai entendu des observations au sujet du
9 fait d'avoir 200 témoins sur ma liste rien que pour témoigner des camps de
10 détention. C'est exact, mais il ne s'agit pas de 200 témoins concernant la
11 détention, mais il est question de 200 camps de détention. Je n'en ai mis
12 qu'un seul et il faut que je ramène ce chiffre à un chiffre inférieur. Je
13 le vois. Or, j'estime que la question doit être prise en considération et
14 il doit être tenu compte aussi des limites que vous avez imposées.
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Continuez, Monsieur Milosevic.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ces limites que vous avez imposées, disais-je
17 concernant les 150 jours. Vous êtes arrivé à ce chiffre là par une
18 arithmétique qui m'échappe complètement. Tout le monde sait que la partie
19 adverse a disposé de 300 journées pour la présentation de ses éléments de
20 preuve, et même ces 300 journées se sont passées au détriment du principe
21 de la publicité des débats. Parce que l'on s'est souvent servi du 92 bis
22 pour présenter des déclarations par écrit, et du 89(F) pour présenter des
23 milliers et des milliers de pages ici, en un temps négligeable, pour ce qui
24 est du principal rien que pour verser au dossier ces milliers et milliers
25 de pages. Ce que je veux, moi, c'est que les témoignages de mes témoins
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1 soient publics. Tous les témoignages seront publics, je ne demanderai pas
2 d'huis clos partiel pour aucun de mes témoins, et il semblerait que cela
3 constitue un défaut.
4 Cette décision à la va-vite de réduire le temps à 150 jours, est un
5 élément qui ne correspond pas du tout avec la règle fondamentale, à la
6 nécessité fondamentale d'entendre la vérité. En tout état de cause, cela
7 illustre une position, tout à fait, inéquitable vis-à-vis de la partie
8 adverse. Parce que si nous négligeons le fait que la partie dispose d'une
9 machine énorme qui a été mise à sa disposition, à l'époque et qui est
10 toujours à sa disposition, de nos jours.
11 Pour poursuivre pour ce qui est de l'ordre, je vais parler de
12 l'organisation. Compte tenu des limitations objectives dont je vous ai déjà
13 parlé, j'ai eu l'opportunité de ne m'entretenir qu'avec quelques uns des
14 témoins seulement à ce jour, or vous disposez de renseignements qui vous
15 indiqueront que je n'ai manqué aucune journée ouvrable qui m'avait été
16 attribuée, et à l'occasion de ces journées ouvrables je n'ai fait que
17 recevoir des témoins. Ici, lorsque l'on prépare des témoins, on les garde
18 ici sept jours, quinze jours. Moi, je m'entretiens avec mes témoins un jour
19 en me disant que j'aurai, au moins, un jour ou deux à la veille du
20 témoignage.
21 C'est là aussi une question qui parle de l'attitude qui est prise à
22 mon égard, et le temps que j'ai avec mes témoins, et je n'ai pas
23 l'intention de présenter, de faire citer ici à comparaître des criminels,
24 des terroristes ou quoi que ce soit de ce genre, des gens qui se
25 disqualifieraient d'eux-mêmes de par leur comportement ou acte passé. Vous
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1 voulez que, dans un délai de sept jours, je vous communique 50 noms de
2 témoins. Je vais vous donner lecture à partir de cette liste que vous avez
3 déjà vue, je me suis déjà entretenu avec le 1341, 1331, 1323, les Témoin 6,
4 7, 1062, le numéro 25, le numéro 625 et le numéro 1170. Comme vous pouvez
5 le voir, cela fait une dizaine de témoins.
6 Expliquez-moi, si vous avez à l'esprit, pour toutes les journées qui
7 m'ont été mises à disposition pour ce qui est de leur utilisation en tant
8 que journées ouvrables, si j'ai eu pour toutes ces journées-là jamais une
9 journée entière, parce que je ne peux pas passer une journée complète à
10 travailler. Comment voulez-vous que je vous donne une liste avant que je ne
11 m'entretienne avec lesdits témoins dont je dois vous communiquer les noms
12 et une liste de ces noms ? J'estime que c'est, tout à fait, inconsistant
13 avec toute logique. D'un côté, on ne me laisse pas l'opportunité de
14 m'entretenir avec les témoins. D'autre part, on me demande de communiquer
15 une liste et un ordre donné, alors que je ne me suis pas encore entretenu
16 avec ces gens-là. Je pense que cela ne peut, absolument, pas être
17 catégorisé comme étant dans l'intérêt de la justice et de l'équité.
18 Si ici, je vois que l'on s'efforce de m'empêcher au maximum de présenter la
19 vérité parce que cela semble être redouté, vous avez des instructions dans
20 ce sens, cela s'est une chose qui vous regarde. Ce que je veux dire moi,
21 c'est que j'ai encore plusieurs revendications.
22 Vous avez dit, sans pour autant me demander de me prononcer de
23 quelque façon que ce soit, que vous alliez m'accorder deux heures pour mon
24 exposé liminaire, je ne peux pas en croire mes oreilles. Monsieur Robinson,
25 ici dans cette salle même, dans ce même prétoire, lorsque M. Nice a fait
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1 une observation pour ce qui est de savoir si j'ai le droit ou pas d'avoir
2 des propos liminaires du tout, vous avez dit que j'avais le droit à cela,
3 vous avez dit que j'ai fait des déclarations et vous avez dit, qu'étant
4 donné que je me défendais moi-même, que j'avais le droit à une déclaration
5 et à des propos liminaires. Or, pour ce qui est de ma déclaration et le
6 fait d'avoir fait des déclarations ne sauraient limiter mes propos
7 liminaires.
8 D'autre part, je tiens à vous rappeler que la partie adverse, au
9 début, a disposé de deux journées pour ces propos liminaires et vers la mi-
10 chemin, lorsqu'on est passé à la Bosnie-Herzégovine et à la Croatie, elle
11 a, également, bénéficié d'une journée de présentation d'exposés. Je demande
12 à ce que l'on me permette d'avoir également, moi aussi, ces trois jours de
13 présentation de mon exposé parce qu'il est, tout à fait, impossible de
14 présenter autrement des propos liminaires. Je vais même m'abstenir de
15 présenter des éléments de preuve, je les présenterai au travers des
16 témoignages de témoins, peu importe mais pour abréger, je veux bien, mais
17 je veux avoir mes trois journées pour mon allocution liminaire.
18 Ensuite, laissez-moi juste me pencher quelques instants sur ce que vous
19 avez dit. J'ai déjà demandé et je vous l'ai indiqué de par le passé déjà
20 que vous devriez donner une ordonnance pour ce qui est de la communication
21 des documents des services secrets qui ont pris part aux événements en
22 Yougoslavie, je parle ici de services étrangers de la Grande Bretagne, de
23 l'Amérique, de l'Allemagne en premier lieu, de donner une ordonnance de
24 divulgation. Je l'ai écrit lorsque j'ai présenté un aperçu des éléments de
25 preuve et des documents en possession de l'Yougoslavie. J'ai demandé
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1 également une ordonnance, de votre part, pour que les personnes, que j'ai
2 citées sur ces listes, il y a quelques mois déjà de cela, que j'ai,
3 d'ailleurs, communiqué comme étant des témoins hostiles. Il s'agit de
4 Clinton, de Genscher, de Clark et de toute une série d'autres personnes.
5 Vous avez la liste. Je vous ai demandé une ordonnance pour que ces gens-là
6 viennent comparaître ici, en tant que témoin.
7 Nous en avons eu un ici qui a dicté les conditions sur lesquelles il
8 allait témoigner, c'était Clark. En même temps, il n'a même pas respecté
9 votre ordonnance à vous, à savoir, ne pas communiquer avec les autres parce
10 qu'en plein milieu de son témoignage, il a apporté une attestation de
11 Clinton, disant qu'il avait été bon, qu'il a eu du succès dans ses
12 activités, et cetera. Il a communiqué avec autrui tout le temps. Clinton
13 doit venir, également, comparaître ici. Schroeder doit comparaître ici,
14 Blair aussi et bon nombre d'autres. Ils ont occupé des fonctions de chef
15 d'état et j'ai été chef d'état. Vous êtes en train de me juger en ma
16 qualité d'ex-chef de l'état. J'ai fourni une liste et j'exige, de votre
17 part, que cette ordonnance soit faite, cette ordonnance pour ce qui est de
18 la divulgation de la documentation des différents services et de la
19 comparution de ces différentes personnalités et de la divulgation des
20 documents en possession de l'Yougoslavie et de la Serbie.
21 Autre question technique, je demande une ordonnance pour un laissez-passer
22 pour ce qui est de trois témoins. J'entends là, une immunité et tout ce qui
23 s'en suit, qui ont été haut responsable de l'Yougoslavie, de la République
24 de la Krajina Serbe, de la République serbe, j'entends nommément les
25 témoins que je dois retrouver sur ma liste. Je ne vais pas donner lecture
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1 de leurs noms, mais je vais dire qu'il s'agit de 1068, 1329 et 327. Ils
2 figurent sur la première des listes de témoins. Je suppose, bien entendu,
3 qu'il faut me fournir la possibilité de m'entretenir avec eux et leur
4 fournir la possibilité de venir ici, par la suite, pour témoigner pour ce
5 qui est de la première liste.
6 Maintenant, pour ce qui est de votre décision que vous avez,
7 également, communiquée sans pour autant demander quelques réactions ou
8 opinions de ma part à ce sujet, je suis censé préparer des témoins en
9 partant des actes d'accusation ainsi appelés ou prétendus actes
10 d'accusation pour le Kosovo, la Bosnie et la Croatie, or j'ai dit déjà
11 qu'il n'y a eu qu'une seule guerre, une guerre contre la Yougoslavie. Du
12 reste, vous-même avez réuni ces actes d'accusation de façon spontanée pour
13 que les choses soient rendues plus difficile. Je crois me souvenir que M.
14 Kay avait été contre cela, il a dit qu'il n'y avait pas d'être humain à
15 même d'étudier toute cette affaire de façon conjointe ou unifiée, mais vous
16 l'avez fait quand même.
17 Avant le délai imparti, vous me dites que je devrais parler de Kosovo
18 à part, de Croatie à part et de Bosnie-Herzégovine à part. En principe,
19 cela ne saurait être accepté parce que la guerre qui a été conduite a été
20 une guerre conduite contre l'Yougoslavie pendant toute une dizaine
21 d'années. Deuxièmement, je ne vois pas de raison du tout à ce que l'on
22 m'imposa, cela a été fait, bien entendu, dans bon nombre d'autres cas, des
23 limitations que vous n'avez pas imposées à l'autre partie, à la partie
24 adverse.
25 Quand Clark est venu témoigner sur le Kosovo, il a témoigné en plein
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1 milieu de témoignages de Bosnie-Herzégovine. Il y a eu bon nombre d'autres
2 témoins qui sont venus, qui ont été parachutés à des moments où ici, nous
3 voyions d'autres témoins venir de région tout à fait autre. Or, c'est une
4 chose que, par voie de conséquence, je ne saurais admettre.
5 Mis à part cela, vous avez indiqué qu'il fallait que je vous présente
6 des écritures et je n'ai aucunement, aucunement l'intention de vous
7 présenter des écritures pour des raisons de principe, Monsieur Robinson. Je
8 ne vous ai jamais présenté de requêtes par écrit, parce que je ne reconnais
9 pas ce tribunal. Je considère que ce Tribunal est, tout à fait, illégal et
10 j'estime que c'était là un moyen de guerre, un outil de guerre contre mon
11 pays. C'est du reste le traitement qui est réservé à ce qui devrait
12 constituer l'exercice de mon droit. Cela l'illustre bien, parce que tout ce
13 que vous avez dit, aujourd'hui, vise à limiter au maximum les possibilités
14 de faire entendre ici la vérité.
15 J'ai soulevé toute une série de questions au sujet desquelles, je
16 vous demanderais de prendre des décisions.
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Une décision sera rendue sous peu.
18 [La Chambre de première instance se concerte]
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous avez
20 soulevé bon nombre de questions. La Chambre les a examinées avec soin.
21 S'agissant de votre déclaration liminaire, vous avez, tout à fait, raison.
22 J'étais favorable à vos droits, aux droits que vous avez de faire cette
23 déclaration liminaire. La question est de savoir quel devrait être le temps
24 qui vous est réservé pour le faire. C'est vrai, l'Accusation a nécessité
25 quelques journées pour le faire, mais, à ce moment là, vous vous avez le
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1 droit de répondre.
2 Cependant, nous tenons compte de ce que vous avez dit, vous aurez désormais
3 quatre heures, donc deux heures de plus, à peu près une journée d'audience,
4 pour faire cette déclaration préalable.
5 Question suivante, vous demandez la production de documents par des états.
6 Ceci est régi par l'Article 54 bis, lequel dit qu'une partie peut demander
7 des informations de la part d'un état, mais qu'elle doit le faire par
8 écrit. Il faut que vous déposiez des écritures, dans ce sens.
9 Vous avez demandé, de notre part, que nous exigions, que nous sommions la
10 comparution de certaines personnes. Vous nous demandez une injonction de
11 produite et de comparaître. Il faudra que vous motiviez, par écrit, cette
12 demande d'ordonnance et de sommation par les Juges à comparaître.
13 S'agissant de témoins là, je suis très clair.
14 Ne m'interrompez pas, lorsque j'aurais terminé, je vous donnerai la parole.
15 Question suivante, l'ordre de comparution des témoins. J'avais dit que ceci
16 se ferait acte d'accusation par acte d'accusation. Nous ne changeons pas
17 notre décision. La façon que vous avez de voir l'acte d'accusation, c'est
18 la vôtre. La Chambre, elle a le devoir d'assurer la bonne tenue, une tenue
19 efficace, de ce procès. De l'avis de la Chambre, il faudrait que les
20 témoins comparaissent volet par volet, sauf lorsque, bien sûr, il y a
21 chevauchement.
22 Vous avez demandez un sauf conduit pour trois témoins, les Témoins 1068,
23 1329 et le Témoin 327. Normalement, ceci devrait être demandé par écrit,
24 mais nous allons nous saisir de cette requête que vous venez de formuler
25 oralement.
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1 La Chambre conserve cette période de trois mois et le concept des 150
2 journées d'audience, sous réserve, bien sûr, de ce que j'ai dit déjà. Nous
3 demandons, en effet, des renseignements au Greffe quant au nombre de
4 journées que vous avez perdues, du fait de votre état de santé. Lorsque
5 nous recevrons ces informations, nous serons a même de tenir compte des
6 difficultés que vous avez, peut-être, rencontrées pour la préparation de
7 votre défense. Je ne veux pas en dire davantage.
8 La Chambre sera, peut-être, prête à faire preuve d'une certaine souplesse
9 s'agissant de la présentation de vos moyens à décharge si, effectivement,
10 vous avez été en butte à des difficultés. Tout sera fonction des
11 renseignements que nous allons obtenir du Greffe, à propos du nombre de
12 journées que vous avez perdues.
13 Je crois que j'ai abordé tous les points que vous aviez soulevés. Inutile
14 de prolonger cette audience outre mesure. Est-ce que vous avez quelque
15 chose à ajouter, Monsieur Milosevic ?
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce que je veux vous dire, c'est que j'ai donné
17 sur papier à l'officier de liaison que vous avez désigné à mon attention,
18 ou plutôt que le Greffe a désigné à mon attention. Je lui ai fourni les
19 noms de ces personnalités, les raisons pour lesquelles ces personnalités
20 doivent comparaître. Par exemple, pour Clinton, c'est tout à fait clair.
21 C'est lui qui a décidé de bon nombre de choses qui concernaient
22 l'Yougoslavie. C'est lui qui a proféré bon nombre de mensonges pour
23 prétexter le bombardement de l'Yougoslavie. C'est lui qui a donné l'ordre
24 ou les ordres de --
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous ai coupé le micro. Car là,
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1 vraiment, c'est incorrect. Nous avons rendu une décision, nous allons nous
2 y tenir. Vous devez la respecter également. Si vous voulez qu'une sommation
3 ou une injonction à comparaître soit délivrée par la Chambre, il faudra
4 motiver votre demande, les raisons qui justifieraient de la délivrance
5 d'une telle injonction. Je crois que dans tout les tribunaux du monde,
6 c'est ainsi qu'on agirait. C'est tout ce que j'ai à dire. Si vous continuez
7 sur votre lancée, nous allons nous interrompre sur le champ.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, est-il logique si vous
9 m'avez désigné vous-même, quand je dis ceci, je ne parle pas de vous-même
10 en personne, mais je parle de l'organisation ici présente, si vous m'avez
11 désigné un officier de liaison, j'estime que ce que je demande, par de
12 l'officier de liaison, doit vous parvenir et doit être étudié par les soins
13 de la Chambre ou cet officier de liaison est inutile ou il sert de
14 couverture seulement pour faire savoir que vous m'aviez fourni une
15 assistance en matière administrative.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] L'officier de liaison sert de lien
17 de liaison, ce n'est pas votre conseil. Vous, vous vous défendez
18 vous-même. C'est vous qui devez nous présenter, par écrit, vos arguments au
19 regard des sujets que je viens d'évoquer.
20 Y a-t-il d'autres questions ?
21 L'audience est levée.
22 --- La Conférence préalable au procès est levée à 13 heures 27.
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