Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mercredi 10 novembre 2004

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 03.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Kay, est-ce que vous aviez

6 terminé ?

7 M. KAY : [interprétation] Non, non, Monsieur le Président.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez poursuivre.

9 M. KAY : [interprétation] Merci. Hier, Messieurs les Juges, nous avions

10 abordé deux questions, c'est ce qui s'est avéré. Il y avait notre requête

11 aux fins de nous décharger de ce mandat, mais aussi la question de savoir

12 comment fonctionnera le mandat d'un conseil commis d'office à l'avenir.

13 Nous avions l'impression que le débat s'était déplacé. Il y avait, bien

14 sûr, la requête dont vous étiez saisi, mais se posaient les questions de

15 projection dans l'avenir du fonctionnement d'un conseil commis d'office.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pensez que votre cause en a été

17 lésée ?

18 M. KAY : [interprétation] Il se peut que la Chambre ait perdu de vue les

19 questions qui nous concernaient s'agissant de notre demande à être déchargé

20 de notre mandat, et des raisons qui nous ont poussés à formuler cette

21 requête.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelque part, je pense que la

23 question vous dépasse. Personnellement, vous posez une question qui vous

24 concerne personnellement, mais quelque part dans un sens, cela dépasse vos

25 intérêts personnels, et cela concerne le fonctionnement de ce procès, et

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1 c'est peut-être là, la raison pour laquelle il y a eu ce déplacement.

2 M. KAY : [interprétation] Cela ne me pose aucun problème si l'on prend ces

3 prémisses, mais je voulais peut-être vous demander de recentrer votre

4 attention sur la question centrale se posant ici à l'audience, et sur la

5 façon d'aborder les devoirs qui reviennent à un conseil commis d'office car

6 manifestement, ceci aura des répercussions une fois la décision prise,

7 s'agissant de notre demande de révocation. Ce sont des questions

8 distinctes, cependant ces questions comprennent des éléments communs. Hier,

9 nous avons eu des débats, et il nous a semblé que la Chambre n'accordait

10 pas au Greffier l'importance que nous, en tant que conseils, nous lui

11 accordons.

12 Je voudrais vous rappeler, Messieurs les Juges, que la décision qui nous

13 avait désignés avait tenu compte du statut du Tribunal, avait tenu compte

14 du règlement du Tribunal, de la directive pratique portant conseil commis

15 d'office, et aussi en tenant compte du Greffier des avocats exerçant devant

16 le Tribunal pénal international.

17 Ce Greffier si nous le violions, c'est nous qui en serions tenus

18 responsables. Ce qui ne serait pas le cas pour vous, Messieurs les Juges ni

19 pour l'Accusation. Les questions concernant le Greffier sont en rapport

20 avec nous, nous concernent nous, et notre devoir en tant qu'avocats, et

21 nous serions vraiment vivement préoccupés. Nous ne voudrions à aucun prix

22 commettre des actes qui seraient en violation des dispositions du Greffier.

23 C'est une partie fondamentale du fonctionnement de ce Tribunal. C'est

24 quelque chose que nous nous sommes censés respecter, tout comme le

25 Procureur est supposé respecter les conditions d'emploi régissant les

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1 substituts du Procureur. C'est là quelque chose qui demeure l'apanage et la

2 responsabilité du Procureur. Quant au Greffier, c'est un code que nous nous

3 devons de respecter, appliquer dans les confins de ce code, et nous devons

4 veiller à ce que tout le monde s'y conforme.

5 Je le précise, parce qu'il y avait peut-être une fusion des deux questions,

6 même si elles sont distinctes. Si nous déposons une requête aux fins de

7 révocation, c'est parce que nous avons un conflit avec l'accusé. Les

8 questions qui se posent pour des conseils qui seront à l'avenir conseils

9 commis d'office, et s'agissant des règles à suivre à modifier, tout ceci

10 doit se situer dans les paramètres du Greffier. Quelle est la situation qui

11 se pose à vous aujourd'hui ? Elle est neuve. Elle est nouvelle.

12 Nous avons à plusieurs reprises fait référence à l'affaire et la décision

13 Blagojevic. C'était là un procès tout à fait différent. Dans ce procès-là,

14 l'accusé avait donné des instructions, avait dit à son avocat comment mener

15 sa défense. Il y avait l'aide juridictionnelle qui avait été donnée. Il y

16 avait des rémunérations tout à fait considérables qui avaient été fournies

17 par le Greffe, alors que plus tard, ce même accusé dépose une demande parce

18 qu'il veut changer le conseil. Cela voulait dire qu'il fallait revoir tout

19 le système de rémunération. Il fallait qu'un nouveau conseil arrive et cela

20 pouvait être considéré comme un gaspillage, parce qu'au départ, il n'était

21 pas censé se défendre lui-même.

22 Dans beaucoup de systèmes de "common law" on rencontre ce cas de figure. Il

23 est résolu par les Tribunaux de la façon suivante et ce que j'ai moi-même

24 connu : vous défendez les intérêts d'un client. Il veut changer d'avocat,

25 mais l'affaire, le procès est déjà à une étape telle, des dépenses ont déjà

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1 été tellement considérables que les Juges disent : "Non. Vous devez garder

2 ce conseil. Si vous ne le voulez pas, vous devez vous défendre vous-même."

3 C'est ce qui se passe dans mon système. Dans de telles circonstances,

4 l'accusé peut décider de défendre lui-même ses intérêts, mais dans 99 % des

5 cas, il va garder l'avocat qu'il avait parce qu'énormément de fonds auront

6 déjà été dépensés à ce moment-là. Ceci ne pose aucun problème.

7 Bien sûr, il peut y avoir des cas de figure. Bien sûr, l'aide

8 juridictionnelle passe d'un conseil à un autre si c'est nécessaire. Si les

9 Juges estiment que l'intérêt supérieur de la justice le commande mais si à

10 un moment donné, l'accusé demande à changer d'avocat et la Chambre refuse

11 cette demande, c'est la solution de rechange, se défendre lui-même. Cela

12 arrive souvent.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Si un accusé demande à changer de

14 conseil ou à se défendre lui-même, pour moi la décision Blagojevic, elle

15 dit qu'un accusé n'a pas le droit de détruire unilatéralement ce lien de

16 confiance et de loyauté qu'il y a entre lui et son avocat, et pour

17 bénéficier de cette dégradation. Je pense que même si les faits sont

18 différents en l'espèce, on peut maintenir le principe qui figure au

19 paragraphe 21, où la Chambre d'appel a confirmé la conclusion de la Chambre

20 de première instance et où l'on dit qu'un accusé n'a pas le droit de

21 détruire unilatéralement ce lien de confiance avec son client. Il n'a pas

22 non plus le droit d'affirmer qu'il y a abandon ou détérioration de cette

23 communication parce que lui-même aurait pris des mesures unilatéralement en

24 refusant d'accepter les documents fournis par son conseil dans l'espoir que

25 ceci aboutira à la révocation du conseil. Je pense que ce principe

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1 s'appliquait ici.

2 Vous avez fait état du Greffier, et j'ai eu l'avantage de pouvoir y

3 réfléchir depuis hier. Aucun des codes, que vous avez mentionnés et pas le

4 nôtre non plus, ne présente explicitement le cas où vous avez un conseil

5 commis d'office contre la volonté de l'accusé. Pourtant le droit a évolué

6 pour effectivement avoir cette possibilité. Des systèmes disposent de cette

7 possibilité. Il faut prévoir un système dont l'économie prévoit une

8 interaction entre un conseil commis d'office, et un accusé récalcitrant qui

9 ne veut pas de ce procès. C'est ce qui manque dans ce code. Par contre, on

10 doit interpréter les codes où cette disposition manque pour les interpréter

11 dans le contexte du droit évolutif. Je pense que c'est là ce que doit faire

12 la Chambre de première instance, lorsqu'elle se saisit de votre requête.

13 M. KAY : [interprétation] Vous évoquez plusieurs questions. Permettez-moi

14 d'apporter les réponses au cas par cas en cernant les problèmes.

15 Dans la décision Blagojevic, le conseil n'a pas dit qu'il y avait un

16 problème de déontologie. La requête avait été déposée par l'accusé. Son

17 conseil n'a pas soulevé qu'il y aurait eu un problème de déontologie.

18 Quelle était sa position ? Il avait reçu des instructions de son client et

19 on lui avait précisé des objectifs de sa représentation. Il connaissait la

20 position et la stratégie générale de son client pour ce qui est de la

21 conduite du procès et de la présentation des moyens à décharge. La Chambre

22 et Blagojevic se trouvaient face à une situation où, après avoir emprunté

23 cette voie, l'accusé a refusé de poursuivre la coopération qui avait

24 existé jusque-là.

25 Je vous ai dit qu'ici on se trouvait dans une situation sans

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1 précédent, c'est parce qu'ici jamais il n'y a eu une telle relation entre

2 l'accusé et son conseil. Nous avons ici le conseil de la Défense de

3 Blagojevic et nous avons dans notre équipe ici quelqu'un qui a travaillé

4 avec lui. Le conseil de la Défense de Blagojevic avait présenté les moyens

5 à décharge à partir des instructions qu'ils avaient déjà reçues. Il n'a pas

6 posé un problème ou soumis à la Chambre un problème de déontologie.

7 L'accusé a fait ce qu'il a fait pour essayer peut-être de manipuler ce

8 qu'il pouvait faire et de voir s'il pouvait changer de conseil en pensant

9 que ceci influerait sur le procès, mais il a été conclu que ceci était

10 inacceptable et que la Chambre allait refuser de nommer un autre conseil,

11 avec tout ce que ceci avait comme implication et que l'accusé n'avait

12 jamais cherché à se défendre lui-même.

13 D'où l'énorme différence qu'il y a par rapport à ce procès-ci. Je pense

14 qu'il serait périlleux de reprendre quelques-unes de ces voies pour dire

15 que ceci donne lieu à une nouvelle jurisprudence. Ce n'est pas le cas à nos

16 yeux. Revenons et revenez aux principes essentiels.

17 Prenons l'affaire Seselj qui a été citée hier. Seselj, son procès n'a pas

18 encore commencé. Il n'en est qu'à la phase de la mise en état. Le conseil

19 représentant Seselj lui a dit d'aller se faire paître. Dans le fond, il est

20 dans une situation et il n'a reçu aucune instruction. Vous avez une

21 ordonnance de l'affaire Seselj dont les termes reviennent à dire que le

22 conseil doit assister l'accusé dans la préparation de sa défense et dans la

23 présentation des moyens au procès, pour qu'il reçoive des documents, qu'il

24 soit présent dans le prétoire, pour qu'il ait une participation active à la

25 préparation de l'affaire pour participer au débat, pour être prêt à

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1 reprendre les activités lorsque l'accusé n'est plus en mesure de le faire.

2 En présence de circonstances exceptionnelles, il peut assurer la défense de

3 l'accusé si la Chambre avertit l'accusé qu'il a un comportement

4 perturbateur qui pourrait entraîner le fait qu'il ne soit interdit d'accès

5 dans le prétoire.

6 C'est très différent de la situation qui est la nôtre. Ce conseil-là

7 n'a pas encore soulevé la question de la déontologie. N'oubliez pas qu'en

8 fait c'est là le deuxième conseil qui a déjà été commis d'office à M.

9 Seselj.

10 Vous voyez, il a un rôle, au fond, de conseil d'appoint tout à fait

11 différent de l'ordonnance plus extrême que vous vous avez rendue, Messieurs

12 les Juges, le 3 septembre. La donne est très différente dans l'affaire

13 Seselj. Il perturbe les débats. Il a un comportement perturbateur.

14 Quant à savoir si cela va marcher, si ce système va fonctionner, cela

15 reste à voir. On a peut-être raison de s'inquiéter, je pense, quand je dis,

16 "on," à tout avocat participant à ce procès car il devra savoir ce qu'il

17 doit faire exactement.

18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourquoi n'avoir pas évoqué la question

19 à l'audience en appel.

20 M. KAY : [interprétation] Nous avions interjeté appel de la question de la

21 commission d'office du conseil. C'est une question isolée et singulière

22 dont était saisie la Chambre. Nous avons soulevé toutes les facettes qui

23 comprennent de la difficulté à défendre cet accusé.

24 Je reviens à l'ordonnance portant sur les règles à suivre. Nous avons

25 fait tellement de travail ces derniers mois, malheureusement dans ce procès

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1 qu'on oublie souvent quel était le point de départ et ce qui est dit au

2 départ, et j'en suis coupable. Permettez-moi de vous rappeler ceci. Nous

3 avons effectivement consulté le compte rendu d'audience du 1er septembre. Le

4 Juge Robinson a dit ceci : "Dans l'éventualité où la Chambre décidait de

5 commettre d'office un conseil, la Chambre dit aux parties d'être prêts à

6 présenter des arguments demain matin à 9 heures sur les modalités à suivre,

7 sur les règles à suivre. Ces règles à suivre ce sont les règles qui vont

8 régir une telle commission d'office."

9 A ce moment-là, nous étions encore ami de la Chambre, et nous nous élevions

10 contre le principe de la commission d'office. Du jour au lendemain, en

11 l'espace d'une nuit, nous avons dû rédiger des règles, des modalités dont

12 nous pensions qu'elles conviendraient à la Chambre, vu ce que la Chambre

13 avait dit la veille, s'agissant de la production forcée de témoins,

14 s'agissant de la reprise de la présentation à des moyens à décharge,

15 s'agissant des modes de fonctionnement de ce procès. La Chambre était très

16 claire. Elle a dit très clairement ce qu'elle voulait. Reprenez le compte

17 rendu d'audience et vous le verrez.

18 Le 2 septembre, M. Nice a présenté ses conclusions, puis on m'a prié de

19 dénoncer les règles et les modalités que nous avions rédigées à l'intention

20 des Juges. C'est la page 32380 du compte rendu d'audience et page suivante.

21 Je crois que c'est important que nous les consultions ces pages. Ceci va

22 être affiché à l'écran. Je suis sûr que le Juge Kwon, qui est maître en la

23 matière, saura comment les retrouver.

24 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, poursuivez, Maître Kay.

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1 M. KAY : [interprétation] Merci. C'était la page 32 380, ligne 22, je cite

2 : "Vu les indications données hier par la Chambre de première instance pour

3 l'étude des règles et modalités, j'ai hier préparé un texte pour essayer de

4 donner forme à ce que pourrait être l'ordonnance rendue par la Chambre. Ce

5 serait utile --

6 "Bien sûr, on peut toujours améliorer une mouture, c'est pour cela

7 que la mienne a pour titre mouture numéro 1. Nous exhortons la Chambre à

8 renverser l'ordre prévu par le Procureur, à savoir que l'accusé aurait sept

9 jours en dedans desquels il peut désigner le ou les conseils que va lui

10 désigner le Greffe."

11 Nous estimons qu'il est important ici qu'il soit à même d'exercer et

12 de manifester sa volonté. Cela ne s'est pas passé.

13 "J'ai inclus une mention manuscrite. Par la suite, l'accusé peut,

14 s'il le veut, désigner un conseil supplémentaire."

15 J'ai dit qu'il y a peut-être une question importante qui va se poser,

16 celle du cas où il voudrait changer de conseil, parce que celui qu'il

17 voulait n'était pas immédiatement disponible.

18 "Avant d'aller plus loin, je voudrais préciser qu'au moment de rédiger

19 ceci, je suis tenu par quelque chose qui me tient et qui me dicte ma

20 conduite; c'est le Greffier. Ceci répond peut-être à plusieurs questions

21 posées par la Chambre de première instance, notamment à celle-ci. Article

22 10, il y a des dispositions qui parlent de la compétence, de l'intégrité et

23 de l'indépendance." Je cite ceci, cet article dit : "Dans l'exécution de

24 son mandat, le conseil agit avec compétence, aptitude, conscience,

25 honnêteté et loyauté, exerce son jugement de façon professionnelle et

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1 indépendante, et rend des avis francs et honnêtes, ne se laisse influencer

2 en aucune circonstance, préserve sa propre probité ainsi que celle de

3 l'ensemble de la profession, ne transige pas sous l'effet de pression

4 extérieure sur son indépendance, sa probité et ses principes.

5 "Il y a aussi mention de l'Article 11. Le conseil représente son client

6 avec diligence et promptitude de façon à préserver les intérêts de celui-

7 ci, à moins qu'il ne soit déchargé du mandat ou qu'il y mette fin.

8 L'article se poursuit. A l'Article 14, on parle aussi de la

9 confidentialité, puis du conflit d'intérêt. Il y a ici l'intérêt de

10 l'administration de la justice.

11 "Le conseil a un devoir de loyauté envers son client. Il a pour devoir

12 envers le Tribunal d'agir en toute indépendance dans l'intérêt de la

13 justice, qu'il fait passer avant ses propres intérêts et ceux de toute

14 autre personne, organisation ou état.

15 "Tout conseil se présentant en tant que conseil de la Défense, dont les

16 Amis de la Chambre, sont tenus par ce Greffier. Il se peut que vu les

17 circonstances dans l'espèce présentées par la Chambre, la Chambre souhaite

18 préciser des conditions supplémentaires, mais il faut tenir à l'esprit

19 qu'il y a un Greffier qui s'applique."

20 Le Juge Bonomy, à ce moment-là, voulait donner un exemple manifeste. "Je

21 pense ici, qu'il y a en l'espèce, M. Kay, un conflit d'intérêt, parce

22 qu'effectivement, c'est celui dont parlait M. Nice. Il faudrait

23 effectivement vous protéger de tous griefs supplémentaires éventuels vu

24 cette commission."

25 J'ai dit : "Oui, c'est une question qui se pose. Il y a peut-être des

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1 témoins que l'accusé ne voudrait pas appeler [comme interprété]. L'art,

2 c'est de permettre l'insertion, l'intégration de toutes ces données. C'est

3 un exercice d'équilibrage, pour lequel il faut exercer un pouvoir

4 discrétionnaire.

5 Paragraphe 2, le Juge Bonomy intervient. Il dit ceci : "Avant que vous ne

6 parliez de cela, je voudrais vous poser simplement une autre question sur

7 la situation générale dans laquelle se trouve un conseil ainsi commis.

8 Pensez-vous qu'il soit nécessaire de définir cette obligation de façon plus

9 détaillée qu'elle n'est déjà énoncée dans le Greffier, sur lequel vous avez

10 déjà appelé notre attention ? Cette obligation étant d'agir dans l'intérêt

11 de l'accusé ou du client. On a fait référence à l'intérêt de la justice,

12 mais on pourrait penser que l'intérêt général de la justice est mieux servi

13 si on agit dans l'intérêt supérieur de l'accusé."

14 Je répond : "Tout à fait. C'est la raison pour laquelle j'ai ressorti le

15 Greffier. Lorsque j'ai rédigé ces notes hier soir, c'est dans ces

16 paramètres, les paramètres du Greffier que j'ai rédigé, parce que nous

17 sommes tenus par ceci, par cet acte, les associés de l'accusé aussi. Il

18 faut tenir compte de cela. Nous sommes tous tenus. C'est la raison pour

19 laquelle je dis que l'accusé nomme le conseil et lui donne comme

20 prérogative de le représenter au cours des débats. Les prémisses, le

21 postulat, pour tout avocat, c'est que vous êtes sous le coup du Greffier

22 que vous devez respecter."

23 Paragraphe 3. Bien sûr, il y a un fardeau très lourd auquel ont pensé les

24 Juges. J'avais rédigé ce projet de modalités en tant qu'ordonnance destinée

25 aux Amis de la Chambre, parce que c'était censé aider la Chambre pour

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1 l'aider à déterminer la conduite future du procès suite aux arguments

2 présentés la veille. Ce n'était pas en tant que conseil commis d'office

3 représentant les intérêts de l'accusé que je parlais. Je dis ceci : "Nous

4 avons tenu compte du droit qu'a l'accusé à se défendre lui-même, et je

5 propose que l'accusé soit autorisé à continuer à se défendre lui-même,

6 notamment en posant les questions aux témoins, en présentant des moyens de

7 preuve et en présentant des conclusions de droit aux Juges de la Chambre

8 avec l'aide ou de concert avec son conseil commis d'office. Il se peut que

9 ceci, ce projet soit amélioré. Il pourrait interroger en premier lieu, un

10 peu comme les Amis de la Chambre l'ont fait jusqu'à présent, s'il

11 ressentait le besoin d'ajouter quoi que ce soit ou d'attirer l'attention

12 sur d'autres détails de la déposition d'un témoin, pourrait-on travailler à

13 présenter à partir des arguments présentés par l'accusé, à lui présenter,

14 ou a présenter des éléments en son nom --

15 L'INTERPRÈTE : [interprétation] Veuillez ralentir pour les interprètes.

16 M. KAY : [interprétation] -- mais de façon à complémenter le travail fait

17 par l'accusé lui-même au moment de se défendre lui-même. C'est la raison

18 pour laquelle j'ai ajouté 'en conjonction avec'. L'intention n'est pas du

19 tout de permettre à ce conseil commis d'office d'interroger en premier

20 lieu, avant l'accusé. Là, c'est un choix que lui doit faire pour désigner

21 la personne qui va le représenter et la façon dont il structure sa

22 défense."

23 Peut-être que l'accusé est arrivé au bout du rouleau pour ce qui est du

24 droit qu'il a à se défendre, vu les arguments présentés la veille et vu la

25 décision effectivement prise par la Chambre. J'espérais que ceci

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1 permettrait à l'accusé de voir que le moment était venu de coopérer pour ce

2 qui est de la présentation de ses moyens à décharge.

3 Je poursuis les paragraphes. Paragraphe 4 : "Il faut voir cette autre

4 situation, celle où l'accusé ne désignera pas un conseil. A ce moment-là,

5 le Greffier du Tribunal -- "Ligne 11. C'est la

6 page 32 385. "A ce moment-là, le Greffier du Tribunal désignera un conseil

7 qui va représenter l'accusé dans des circonstances où l'accusé ne peut pas

8 ou ne veut pas participer aux débats. A ce moment-là, il sera autorisé à le

9 représenter. Bien sûr, ceci pourrait être étoffé. Si l'accusé où toute

10 autre personne le représentant, à savoir, ceux qui travaillent pour le

11 moment a préparer sa défense, refusent de coopérer avec le conseil commis

12 d'office pour ce qui est de la présentation de témoins retenus par l'accusé

13 en tant que témoins potentiels, un conseil d'office peut," et c'est là le

14 mot qu'il faut retenir peut, "a le pouvoir de citer ces témoins, témoins

15 qu'il cite important pour la présentation des moyens à décharge." Je dis

16 qu'il y a, comme document de travail, la liste des témoins préparée par

17 l'accusé."

18 Je dis que je ne suis pas d'accord avec l'Accusation, qui dit que le

19 conseil peut choisir tous les témoins de sa liste. Je dis que ce n'est pas

20 dans l'intérêt de la justice, et je dis qu'il faut se souvenir de qui on

21 fait le procès ici. C'est le procès de l'accusé. Quoi qu'on pense, quoi

22 qu'on sache, un conseil commis d'office ne se verra jamais dans une

23 situation où c'est son procès à lui, où c'est lui qui est l'accusé. Ceci

24 doit être la prémisse essentielle. Pour moi, cela veut dire qu'il faut

25 essayer, quelque soit la personne désignée à cette fonction, il faut

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1 travailler de façon consensuelle à la préparation et à l'élaboration de

2 cette liste avec l'accusé.

3 Paragraphes 6 et 7, à leur propos je dis, à la ligne 15 : "Et ceci

4 est tout à fait le fruit, le résultat de la décision de la Chambre de

5 première instance. Ils voulaient agir vite, et c'est pour cela qu'ils ont

6 pris cette décision aujourd'hui." Je fais allusion au financement, ligne 22

7 : "Ce système fonctionne très bien comme base. Mais pour qu'il marche, il

8 faut que ce soit l'accusé qui commence le premier à interroger. Un conseil

9 qu'il désignera sera tenu par le Greffier tout comme c'est le cas pour tout

10 autre avocat. Une telle ordonnance lui permettrait de fonctionner et de

11 travailler, en parlant du conseil, en conjonction avec l'accusé. Un conseil

12 commis d'office qui n'aurait pas été nommé par l'accusé, ce serait vraiment

13 là une toute dernière solution, un dernier recours. Mais il faudrait

14 essayer, et ceci serait pour essayer de continuer à faire fonctionner ce

15 procès."

16 J'ai dit que le rôle de l'Amicus Curiae est tout à fait différent. Le Juge

17 Kwon, à la page 32 388, ligne 5, il évoque, effectivement, ce qui pouvait

18 se préparer.

19 "Merci de ces propositions, Maître Kay. Je vous pose une question générale.

20 Vous savez que la Chambre a décidé de commettre un d'office un conseil,

21 mais ceci peut revêtir diverses formes. Une des modalités serait celle-ci;

22 plutôt que de désigner un conseil d'office, on pourrait élargir le rôle

23 attribué à un Ami de la Chambre, pas nécessairement vous, Maître Kay."

24 Le Juge Kwon dit que les Amis de la Chambre pourraient jouer un rôle

25 analogue à celui d'un conseil de la Défense. C'est peut-être simplement une

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1 question de nomenclature. Mais si la Chambre redéfinit et élargit le rôle

2 d'un Ami de la Chambre pour y inclure une représentation active de

3 l'accusé, que diriez-vous d'une telle proposition ? J'ai dit que moi, il

4 faudrait préférer, privilégier l'option numéro 1 où c'est l'accusé qui se

5 défend lui-même. Si on ne peut pas retenir cette phase, dit le Juge Kwon, à

6 ce moment-là, c'est une option que l'accusé a à tout moment.

7 A la page 32 389 : j'avais indiqué que l'on pourrait utiliser la

8 nomenclature de l'ami de la Chambre afin que cela permette de prêter main-

9 forte ou d'aider l'accusé. Il y aurait un élargissement du rôle de l'ami de

10 la Chambre par rapport à ce que nous faisions auparavant.

11 Monsieur le Président, j'ai parlé du Greffier en terme direct, et indiquer

12 que toute personne devrait véritablement utiliser ce code. Nous avons

13 préparé un projet de texte à l'intention de la Chambre de première

14 instance, puisque la Chambre nous avait demandé de faire quelque chose pour

15 elle. En fait, la responsabilité est la responsabilité de la Chambre de

16 première instance. J'avais dit de façon très claire, il se peut que vous

17 souhaitiez faire référence au Greffier. J'ai utilisé le terme "il se peut".

18 Il s'agissait d'une spéculation à l'époque. Il faut savoir que la question

19 de la défense de l'accusé n'était pas réglée.

20 Je pense que le problème a été le problème des modalités et des règles à

21 suivre et de leur forme extrême. Je pense que cela a provoqué une rupture

22 des rapports, ce qui fait que maintenant, nous nous trouvons dans une phase

23 où nous sommes en conflit avec le client en tant que conseil commis

24 d'office. C'est pour cela que nous avons dû présenter cette requête aux

25 fins d'être déchargés de nos fonctions. Cela a été provoqué par son

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1 attitude puisqu'il a critiqué notre professionnalisme. Il a également

2 essayé de manipuler le témoin Kanelli. Il a également déposé un rapport

3 auprès du barreau néerlandais pour se prononcer contre notre façon de gérer

4 cette affaire. Nous avons continué à nous battre pour qu'il puisse avoir le

5 droit de se défendre lui-même. Ce faisant, la Chambre d'appel a dû dire,

6 "Il s'agit de son procès, il s'agit de sa défense. Il s'agit de quelque

7 chose que lui seul peut présenter." D'ailleurs, comme cela a été cité dans

8 mon texte, il est fait référence à une relation qui était cordiale et qui a

9 subi une détérioration, et nous ne pouvons plus prendre contact avec lui.

10 Cela a bien été énoncé par rapport à ce qui aurait pu se passer. Il s'agit

11 de notre décision. Nous devons prendre en considération les conséquences de

12 ce fait. Nous pensons que nous avons un problème éthique, et nous avons

13 maintenant atteint le point de non retour. A l'avenir, il sera très

14 difficile à quiconque de dire, "Bien sûr, il ne s'agit pas de sa défense,

15 puisque Me Kay l'avait dit à la Chambre d'appel lorsqu'il a dit qu'il ne

16 pouvait pas en quelque sorte présenter sa défense." Le Juge Bonomy, hier, a

17 dit, vous pouvez véritablement rattraper la situation. Dans une certaine

18 mesure, vous pouvez le faire en tant qu'amis de la Chambre, mais à un

19 moment donné, vous vous rendez compte que tout s'écroule et que vous n'êtes

20 pas en mesure de fonctionner de façon correcte et de façon déontologique,

21 de façon éthique.

22 Si la Chambre avait suspendu le procès en attendant l'appel, la question

23 aurait été différente. Si la Chambre avait permis à l'accusé de poser des

24 questions au témoin en premier et de jouer le premier rôle pour ce qui est

25 de la présentation des moyens à décharge de son procès, il se peut que la

Page 33242

1 question ait été ou la situation ait été différente, et il se peut que cela

2 ne provoque pas de problème éthique. Nous nous trouvons dans une situation

3 unique.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Kay, ce qui me pose un

5 problème, c'est que tout cela a été envisageable. A l'époque, comme vous

6 l'avez indiqué à juste titre, j'ai été très préoccupé par l'application du

7 Greffier. A l'époque, j'avais considéré votre réaction comme indiquant que

8 le code va être appliqué. Il n'est absolument pas question d'essayer de le

9 modifier ou de l'amender au vu des circonstances. Donc, nous avons œuvré

10 dans le cadre de ce contexte. Nous avons examiné vos arguments dans le

11 cadre de ce contexte. C'est à partir de cette base, que nous avons présenté

12 ces propositions. Dans ces propositions, nous avions inclus une situation

13 qui était tout à fait envisageable; la situation de manque total de

14 coopération. Nous avons indiqué que vous pourriez vous trouver dans la

15 situation où vous vous trouvez aujourd'hui.

16 Nous avions indiqué qu'il y aurait -- qu'il se peut qu'il y ait un problème

17 de déontologie pour vous. Le problème, c'est que maintenant il y a une

18 équation puisque vous avez été critiqué.

19 M. KAY : [interprétation] Non, non, pas du tout. J'aborderai le problème

20 des codes tout à l'heure. C'est notre conduite, notre comportement qui est

21 contesté. Il ne s'agit pas d'un problème de litige à propos de nos

22 tactiques; il s'agit d'un problème entre l'accusé et nous-mêmes afin de

23 savoir si nous sommes le conseil ou les conseils idoines et les conseils

24 qui doivent être compétents pour gérer son procès.

25 Il se peut qu'il soit dans l'erreur. Mais il y a eu contestation de notre

Page 33243

1 professionnalisme. Il ne s'agit pas d'un litige ou d'un contentieux à

2 propos de la façon de poser des questions au témoin ou à propos d'une

3 tactique qui a été retenue ici et là, c'est quelque chose de plus

4 personnel. Toute personne qui étudiera ce procès, si à l'avenir nous

5 devrons y prendre part, dira, "Il a appelé, ou il a indiqué que son conseil

6 se comportait comme un représentant de l'Accusation. Il a présenté un

7 rapport auprès du barreau néerlandais pour comportement peu professionnel.

8 Le conseil a dû, à l'appel, présenter des arguments contre sa propre

9 situation. Le conseil a ensuite soulevé auprès des Juges le problème, et a

10 indiqué qu'il était préoccupé par un problème de déontologie. Les Juges n'y

11 ont accordé aucune intention, mais tous ces signes indiquent qu'il y avait

12 un conflit d'intérêt pour ce qui est de l'accusé qui était représenté par

13 un conseil commis d'office."

14 Certes ces événements pouvaient être prédits mais comme je l'ai dit,

15 nous devons travailler en respectant le Greffier. J'avais utilisé le mot,

16 "il se peut." Vous ne savez pas qu'elle va être la tournure des événements.

17 J'avais dit, à la suite de mon expérience en tant qu'ami de la Chambre,

18 qu'il n'y avait pas, en quelque sorte, de reconnaissance entre l'accusé et

19 nous-mêmes. Le premier jour, il y a même eu des indices d'hostilité. Mous

20 avions été nommés par la Chambre et nous n'avions pas de relations

21 professionnelles avec l'accusé et nous avons essayé d'assumer notre

22 fonction pour aider l'accusé, mais sans pour autant qu'il y ait cette

23 relation qui doit exister entre son conseil et l'accusé.

24 Nous avons forgé une relation cordiale qui était manifeste, et M. Milosevic

25 ne l'a pas dissimulé et a fait référence à certains arguments que nous

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1 avions présentés à l'occasion, lors de questions qui ont été posées. Nous

2 avions fait un certain chemin depuis cela. J'espérais, comme tout un

3 chacun, que cela aurait pu donner de bons résultats. Nous avons agi en

4 toute bonne foi et nous voulions faire en sorte que l'accusé puisse jouer

5 le rôle principal.

6 Très souvent dans un procès, il y a des moment où des décisions doivent

7 être prises, des moments de crise. Au début du mois de septembre, nous

8 pensions qu'il aurait pu se réjouir de l'aide apportée lors de la

9 présentation de ses moyens à décharge. Comme je l'ai indiqué en citant le

10 compte rendu d'audience, nous aurions pu aspirer à l'évolution d'une

11 relation entre nous, qui fait que la Défense aurait pu être présentée.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est lui qui joue maintenant le

13 rôle principal. Est-ce que cela ne règle pas les nombreux problèmes que

14 vous avez soulevés.

15 M. KAY : [interprétation] Il y a deux problèmes différents. Tout d'abord,

16 ma situation déontologique, telle que je l'ai expliquée aujourd'hui, et le

17 fait que la Chambre pourra décider de ce que nous allons faire à l'avenir.

18 Comme vous l'avez dit, vous-même, Monsieur le Président, le Greffier n'est

19 pas la panacée universelle qui permettra de régler toute situation.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avant que vous ne poursuiviez, c'est

21 toujours à propos du même sujet ? Pourriez-vous me rappeler quand est-ce

22 que vous avez fait référence à un conflit d'intérêt qui serait le

23 problème ?

24 M. KAY : [interprétation] Quand, Monsieur le Juge ?

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Dans les documents que vous avez

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1 présentés avec votre requête de retrait. Où avez-vous identifié le problème

2 du conflit d'intérêt ?

3 M. KAY : [interprétation] Nous avons cité toutes les règles.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, vous pouvez tout à fait citer les

5 règles et nous laisser le soin de retrouver cela, ou vous pouvez peut-être

6 nous orienter.

7 M. KAY : [interprétation] Il s'agit de la page 14 --

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Page 14, merci.

9 M. KAY : [interprétation] -- paragraphe 38. J'ai cité l'Article 14 du code

10 de conduite. Le conseil a un devoir de loyauté envers son client. Le

11 conseil a pour devoir envers le Tribunal d'agir en toute indépendance dans

12 l'intérêt de la justice qu'il fait passer avant ses propres intérêts, et

13 ceux de toute autre personne, organisation ou état. C'est peut-être le

14 problème qui se pose maintenant.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci. Cela a répondu à ma question.

16 M. KAY : [interprétation] Oui. J'ai justement soulevé cette question de la

17 loyauté vis-à-vis du client qui ne veut pas se voir attribuer un conseil

18 commis d'office.

19 Il n'y a pas de rapport de confiance, de rapport fiduciaire entre nous.

20 Nous ne pouvons pas lui fournir des conseils, puisqu'il ne veut pas de

21 conseils. Nous ne pouvons pas le consulter puisqu'il ne le souhaite pas. En

22 fin de compte, nous avons essayé de faire de notre mieux pour que cela

23 donne de bons résultats. J'en ai pour preuve ce que j'avais dit au départ,

24 mais comme je vous l'ai dit hier, cela s'est véritablement écroulé comme un

25 château de cartes.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous avons entendu cela à maintes

2 reprises. Je comprends tout à fait ce que vous souhaitez dire.

3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Kay.

4 M. KAY : [interprétation] Monsieur le Juge Kwon.

5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous avez dit vous-même aujourd'hui que

6 tous les problèmes émanaient des règles à suivre qui sont assez extrêmes et

7 qui ont d'ailleurs été annulées par la Chambre d'appel. Comme vous l'a

8 indiqué Monsieur le Président, nous vous demanderions de vous concentrer

9 sur le nouveau régime, qui nous est donné par la décision de la Chambre

10 d'appel.

11 M. KAY : [interprétation] Oui. C'est vrai, il va jouer le rôle principal,

12 c'est la phrase qui a été utilisée. C'est probablement la formule la plus

13 appropriée en vue des circonstances.

14 Ce que nous indiquons c'est que les événements des huit dernières semaines

15 sont tels qu'ils ont provoqué ce conflit et ce problème éthique. Nous avons

16 été critiqués publiquement et nous avons été contestés. Nous pensons et

17 nous craignons que cela a créé une situation pour ce qui est de notre

18 situation. Ce n'est pas une situation saine, lorsque vous êtes conseil

19 commis d'office, parce

20 qu'il y a ce conflit entre lui et nous.

21 C'est un conflit qu'une ordonnance qui annule des règles à suivre ne peut

22 pas régler. C'est ce que nous avons dit à la Chambre de première instance.

23 Nous sommes préoccupés par notre situation professionnelle.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Kay, cela signifie en fin de

25 compte, que vous ne pourrez jamais commettre d'office un conseil à un

Page 33247

1 client intransigeant.

2 M. KAY : [interprétation] C'est ce qu'ils font au conseil commis

3 d'office, qui peut être le problème.

4 C'est la façon également de se comporter car très souvent vous pouvez

5 avoir un accusé que vous rencontrez pour la première fois que ne veut pas

6 vous voir. Vous êtes un conseil qui remplace un autre conseil. Vous

7 parvenez à avoir plus de cinq minutes de son temps, dix minutes, un quart

8 d'heure, vingt minutes, et vous essayez en quelque sorte de construire une

9 relation qui aboutira. Il ne s'agit pas d'une science exacte, et parfois

10 nous sommes conseils de la Défense, pour certains d'entre nous, parce que

11 nous savons très bien traiter avec les gens.

12 Vous avez parfois des cas extrêmes. C'est justement la situation

13 d'aujourd'hui.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Kay, j'aimerais dire deux

15 choses. Dans un premier temps, ne pensez-vous pas qu'il y a un certain

16 élément de prématurité dans votre requête ? Car à plus d'une reprise, comme

17 l'a indiqué justement maintenant, le Juge Kwon, vous avez souligné la base

18 du problème, le fond du problème qui est posé par les règles à suivre. Ces

19 règles à suivre ont été changées de façon tout à fait efficace et ce, par

20 la Chambre d'appel. Vous ne savez absolument pas, et vous ne savez pas avec

21 certitude quelle relation va être créée par ce changement entre vous-même

22 et l'accusé. Il se peut que votre requête soit présentée de façon

23 prématurée.

24 Deuxièmement, j'aimerais parler du régime relatif à la commission d'office

25 d'un conseil contre la volonté d'un accusé, qui comme je l'ai dit, n'est

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1 pas traité de façon précise par le code.

2 Si ce que vous avancez est exact, comme vient de le dire le Juge Bonomy, il

3 ne sera pas possible de commettre d'office un conseil dans le cas d'un

4 client intransigeant.

5 Mais si cela est tout à fait licite comme l'a indiqué de façon très

6 claire et manifeste la Chambre d'appel et s'il est de notre compétence, ou

7 si l'on peut véritablement commettre d'office un conseil, alors il faut

8 qu'il y ait une méthode permettant de mettre en application cette

9 commission. Car on ne peut pas avoir une commission d'office seulement si

10 l'accusé coopère avec son conseil et communique avec son conseil.

11 Manifestement, la Chambre d'appel envisage des activités de la part

12 du conseil commis d'office parce que dans son ordonnance, la Chambre

13 d'appel fait état de situations prévoyant, par exemple, une maladie de

14 l'accusé et le fait que le conseil commis d'office prendra, assumera ce

15 rôle pendant l'absence temporaire du client dans le Tribunal.

16 Si la Chambre d'appel a envisagé cela, cela signifie qu'elle envisage

17 également que le conseil commis d'office doit déployer des activités. Il se

18 peut également que ces activités doivent être menées à bien sans les

19 instructions de l'accusé. Puisque la Chambre d'appel envisage, qu'en

20 l'absence de l'accusé, le conseil commis d'office devra continuer à œuvrer.

21 Il y a des questions qui sont soulevées par votre requête, et je dois vous

22 dire que ces éléments transcendent votre intérêt personnel et a une

23 incidence sur l'administration de la justice dans cette affaire. J'ai des

24 problèmes à accepter le fait que vous avez une situation en vertu de

25 laquelle la Chambre de première instance peut tout à fait faire quelque

Page 33249

1 chose mais que du point de vue juridique, il n'est pas possible d'exécuter

2 une décision qui est tout à fait en conformité avec cette compétence. Je

3 pense que le code ou les codes devraient peut-être être renforcés pour être

4 en conformité avec le droit, car je pense que dans certaines situations, il

5 y a compétence pour commettre d'office un conseil. La Chambre d'appel a

6 affirmé cette partie de sa décision et a tout simplement envisagé un rôle

7 pour le conseil commis d'office, qui est un rôle qui est loin d'être un

8 rôle de passivité, pur et simple.

9 Le problème de la Chambre de première instance à accepter vos arguments

10 vient du fait qu'il se peut que dans ce cas, il ne peut pas y avoir

11 commission d'office de conseil, à moins que l'accusé ne coopère avec le

12 conseil, ou ne communique avec le conseil, ou à moins que l'on n'envisage

13 pour le conseil, un rôle qui ne dépasserait pas un rôle passif.

14 M. KAY : [interprétation] Parfois les résultats des événements qui se

15 produisent ailleurs devraient peut-être être pris en considération ici,

16 pour donner un nouveau souffle à la question. Dans le cadre de ma

17 juridiction, par exemple, le problème est aussi simple que cela, si vous ne

18 voulez pas avoir un conseil, vous n'obtenez pas un conseil, vous vous

19 représentez vous-même. Dans le cadre d'un système contradictoire, voilà

20 quelle est la situation.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] J'aimerais vous dire quelque chose à

22 ce sujet. Nous aussi nous avons eu quelques problèmes avec l'essence du

23 système. Vous avez parlé de système contradictoire, et je, moi-même, je

24 connais et j'ai travaillé dans le cadre des systèmes contradictoires que je

25 connais très, très bien, mais j'ai dû en quelque sorte adapter mon

Page 33250

1 cheminement intellectuel pour comprendre comment le Tribunal opère. Il est

2 vrai qu'en principe le système de présentation des éléments de preuve est

3 un système contradictoire. Il n'est pas seulement contradictoire car de

4 nombreux éléments émanant de la tradition du droit civil ont été introduits

5 dans notre système, et si vous continuez à avoir cette approche, vous allez

6 dégager des conclusions erronées. J'ai dû, moi-même, apprendre cela.

7 Vous connaissez la position, par exemple, que j'ai prise lors du contre-

8 interrogatoire et lors de la présentation des moyens à charge. Dans le

9 cadre du système contradictoire que je connais, il s'agit de la

10 présentation à charge pour l'Accusation qui connaît au mieux ces éléments.

11 Par conséquent, il doit y avoir autorisation de contre-interrogatoire.

12 C'est pour cela que j'avais exprimé une opinion dissidente par rapport à

13 cette décision.

14 Il n'est pas vrai de dire que le système que nous avons ici est

15 exclusivement contradictoire parce qu'à certains égards, il s'agit de la

16 présentation des moyens de l'accusé. Il ne faut pas oublier que nous avons

17 quand même également introduit des éléments du droit civil, ce qui fait que

18 le procès appartient également au Tribunal et à la Chambre de première

19 instance.

20 Je ne pense pas qu'il soit exact de dire que nous avons un système

21 entièrement contradictoire. Je pense qu'il faudrait dire qu'il est

22 essentiellement contradictoire, et qu'il y a des éléments qui ne font pas

23 partie ou qui ne viennent pas du système contradictoire. C'est là où nous

24 avons des problèmes et je pense aux problèmes qui sont posées aux avocats

25 qui émanent du système contradictoire.

Page 33251

1 M. KAY : [interprétation] Le problème que j'ai moi-même se trouve pris en

2 considération dans le Greffier néerlandais, c'est le même problème. Il ne

3 s'agit pas d'un dilemme déontologique qui serait seulement un dilemme pour

4 les avocats du "common law".

5 Le président de la Chambre d'appel m'a demandé quelles étaient mes

6 suggestions. Je suis ici depuis 1996 et j'ai une certaine expérience des

7 tribunaux internationaux. J'ai dit : c'est son procès, sa responsabilité,

8 laissez-le agir et laissez-le être responsable de ses actions. Si le

9 Tribunal souhaite traiter toute question relative à la Défense, qui n'a pas

10 été bien présentée, qui n'a pas été suffisamment avancée, ils peuvent

11 demander des éléments de preuve qui seront apportés par leur propre

12 conseil. Je pense que c'est ainsi que le Tribunal pourrait fonctionner de

13 façon hybride à propos de ces éléments.

14 Il faut savoir qu'une des dimensions du problème qui nous préoccupe

15 vient du fait que nous sommes dans un système contradictoire, et il ne faut

16 pas oublier que c'est le procès de l'accusé. Il y a des moyens qui

17 pourraient être introduits, qui pourraient être des moyens judiciaires, et

18 qui pourraient venir du système judiciaire, et qui pourraient représenter

19 des éléments importants.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Permettez-moi de vous interrompre.

21 Dans le système judiciaire, et ceci concerne aussi le système du pays de

22 l'accusé, il est obligatoire d'avoir un conseil aux regards de certaines

23 infractions. Soyons clairs. S'il était jugé dans son propre pays, un

24 conseil lui aurait été commis d'office contre son gré dès le début. Dans

25 les systèmes judiciaires et d'autres qui sont cités, où le droit, la loi

Page 33252

1 dit qu'en l'absence de coopération ou de communication de la part de

2 l'accusé, le conseil agit pour défendre ses meilleurs intérêts possibles, à

3 son avis. Le concept, le principe à la base de ces démarches, ce n'est pas

4 un principe dit contradictoire, parce qu'il prime sur les intérêts des

5 parties, de l'accusé. Nous, c'est la démarche que nous avons retenue, ce

6 principe. Or là, on ne suit pas le principe de l'accusatoire parce que si

7 c'était le cas, le conseil ne serait pas autorisé à déterminer quels sont

8 les meilleurs intérêts possibles de l'accusé. C'est lui, et uniquement lui,

9 qui en déciderait.

10 Dans certains systèmes, on envisage le cas où le conseil et les Juges

11 peuvent, si l'accusé est intransigeant ou refuse la collaboration et la

12 communication, où le conseil et les Juges disais-je peuvent prendre des

13 mesures pour veiller à la bonne administration de la justice qui est

14 l'intérêt plus général.

15 M. KAY : [interprétation] Dans le système romano-germanique dont vous avez

16 parlé, l'Accusation en a parlé souvent sans jamais présenter le Greffier

17 yougoslave. Il n'y a pas d'obligation de présenter les moyens à décharge,

18 que ceci soit fait par un conseil d'appoint ou un conseil désigné par la

19 Chambre. C'est là la différence considérable qu'il y a entre un système

20 romano-germanique et un système où ce sont les parties qui sont les

21 locomotives de ce procès. C'est ce qu'on attend ici. On attend ici la

22 présentation des moyens à décharge, ce qui se fait par la défense. C'est ce

23 à quoi on s'attend. C'est là que le code de "common law" et le code du

24 présent Tribunal s'applique aux circonstances précises de l'espèce ici, de

25 ce cas.

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1 Nous estimons que notre Greffier, il est très clair s'agissant de ce qu'un

2 conseil commis d'office ou un conseil choisi par l'accusé peut faire, ou ne

3 peut pas faire. Il est peut-être utile de voir ces dispositions, ce

4 qu'elles disent à propos de ces devoirs, de ces obligations, car elles sont

5 énoncées pour répondre à ce cas de figure.

6 La Chambre d'appel, au paragraphe 20, dit ce qui va, peut-être, se passer à

7 l'avenir dans ce procès. Ce faisant, elle parlait uniquement de la question

8 de la commission d'office, cela c'est le point de droit. La question du

9 Greffier, elle n'en avait pas été saisie. Ce qui nous a poussé ici à

10 soulever cette question, ce sont deux questions distinctes.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous pourriez mentionner

12 directement toute disposition qui serait en conflit avec des codes de

13 tradition romano-germanique.

14 M. KAY : [interprétation] Non, je pense que je ne pourrais pas vous dire ce

15 qui serait en conflit avec ces codes civilistes. Nous avons ici le code

16 néerlandais et nous avons le code international. Cela pourrait être une

17 solution, mais je ne peux pas, au débotté, ici vous répondre.

18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous avez un avocat écossais qui est

19 commis dans une affaire où il y a eu voie de faits sexuels et l'accusé ne

20 veut pas de cet avocat.

21 M. KAY : [interprétation] Ce sont des réglementations, des règles

22 nationales qui concernent des commissions d'office dans les questions

23 graves comme celle de viol, et si l'accusé décide de se représenter et de

24 contre-interroger des victimes de viol.

25 Nous faisons humblement valoir qu'ici ce n'est pas le cas dans ce procès,

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1 ce genre de questions ne se pose pas ici.

2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le président a fait remarquer que notre

3 Greffier ou ceux auxquels vous faites allusion ne prévoyaient pas des cas

4 comme le nôtre, vous avez un conseil commis d'office contre la volonté de

5 l'accusé, surtout pour des raisons de santé.

6 M. KAY : [interprétation] Le Greffier a été mis au point après

7 interventions et collaborations ou consultations de bon nombre d'instances

8 extérieures dont les Juges aussi afin de donner des consignes au travail

9 des conseils de la Défense et aussi pour les protéger, et s'il y a des

10 violations de ce code, c'est nous qui sommes tenus responsables dans notre

11 barreau national ou ici.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je crois que M. le Juge Kwon veut dire

13 que ces modifications se font aussi dans des systèmes de "common law." Je

14 pense que dans mon pays, on a les modifications les plus radicales dans la

15 mesure où un accusé présumé coupable de violence sexuelle ne peut même pas

16 comparaître à la comparution initiale sans conseil, même s'il le voulait.

17 Le code du barreau n'a pas été modifié en conséquence à l'avenant, il faut

18 voir ceci dans ce cadre. Vous, vous faites valoir qu'il y a des

19 réglementations qui tenaient compte de ce cas de figure, qu'il y a peut-

20 être des législations qui déterminent les fonctions d'un conseil, il n'en

21 demeure pas moins que le code s'applique et doit se lire dans le contexte

22 de la législation. Le Juge Robinson l'a dit, c'est précisément le travail

23 qui est le nôtre ici, il faut lire et interpréter ce code dans le cadre de

24 notre législation.

25 M. KAY : [interprétation] Oui. Si vous prenez des circonstances aussi

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1 extrêmes que celui de violence sexuelle, cela pose un problème. Il se situe

2 au niveau de la victime, du rapport entre la victime et l'accusé par

3 rapport à ce qui est censé ou présumé s'être produit, ici, nous parlons ici

4 d'un acte d'accusation beaucoup plus vaste, beaucoup plus général, et je ne

5 pense qu'un état quel qu'il soit commencerait à modifier sa législation

6 pour ôter le droit à une personne à se défendre elle-même dans un procès

7 tel que celui-ci. Ce serait là une mesure très extrême qui serait, sans

8 doute, mal reçue.

9 Vous parlez de violence sexuelle, cela pose souvent des difficultés. Il y a

10 plusieurs dispositions de notre Règlement qui concerne le contre-

11 interrogatoire de personnes présumées victimes de violence sexuelle. Cela

12 représente, si vous voulez un cheminement tout à fait différent, un modus

13 operandi qui est tout à fait différent de celui qui s'applique ici dans ce

14 procès.

15 J'aimerais appeler votre attention sur le préambule de ce code. Vous avez

16 reçu une liasse de documents et vous avez le numéro d'identification du

17 Greffe 39454, et c'est le Greffier pour les avocats exerçant devant le

18 Tribunal international, tel que modifié le 12 juillet 2002. Vous savez,

19 bien sûr, que c'est en juillet 2001, qu'a commencé la procédure engagée

20 contre le Tribunal, cela veut dire que ce code exigeait déjà, à ce moment-

21 là, manifestement un document qu'on peut modifier pour tenir compte de

22 l'évolution de la situation. Il a été modifié après que l'accusé eut

23 commencé à se défendre lui-même et à connaître des problèmes de santé.

24 Le greffier du Tribunal, vu le Statut du Tribunal, vu les Règlements, vu la

25 directive, attendu que les conseils doivent, c'est obligatoire, se

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1 conformer à un Greffier dans l'accomplissement de leur fonction, attendu

2 que les conseils exerçant devant le Tribunal viennent de différents

3 systèmes juridiques, et qu'il est dans l'intérêt de la justice qu'ils se

4 conforment tous au même Greffier, attendu que cette première révision est

5 adoptée.

6 Cela ne vient pas simplement de la tradition du "common law". C'est

7 un document qui accueille et englobe plusieurs systèmes et traditions

8 juridiques, il y a des avocats britanniques, yougoslaves, serbes,

9 américains qui peuvent ainsi exercer leur profession dans ce Tribunal.

10 L'Article 8, c'est la page du Greffe 39 452, l'Article 8 porte sur le

11 champ de la représentation. Ce champ a été limité pour déterminer les

12 paramètres de l'exercice de notre mandat. "Le conseil donne des avis à son

13 client et le représente tant que ce dernier ne met pas fin à son mandat.

14 Lorsqu'il représente un client, le conseil doit se conformer aux décisions

15 de son client quant aux objectifs de la représentation. Il consulte son

16 client au sujet des moyens à mettre en œuvre pour réaliser lesdits

17 objectifs sans toutefois être lié par les décisions de son client, et ne

18 demande ou n'accepte que les instructions qui émanent de son client, et qui

19 ne sont pas données à l'instigation d'une personne d'une organisation ou

20 d'un état."

21 On tient compte, dans cet énoncé, de la fonction du conseil, qui doit

22 se définir dans ces paramètres ou dans ces termes, des termes que nous,

23 nous qualifions d'instructions. C'est cela qu'on veut dire quant on parle

24 des objectifs de la représentation.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il est aisé de lire ces dispositions à

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1 la lumière des circonstances présentes, on ne saurait dire que vous violez

2 ces dispositions.

3 M. KAY : [interprétation] Mais c'est le socle même, c'est la base de cette

4 charpente. Prenez l'Article 3. Article 3, on parle des principes

5 fondamentaux, les clients ont le droit à l'assistance juridique. "En tant

6 que praticien du droit, le conseil se conforme à des règles de déontologie

7 rigoureuses." C'est pour cela que c'est important à nos yeux de savoir

8 comment on nous considère. "En tant qu'auxiliaire de justice chargé de

9 défendre les intérêts d'une partie, le conseil doit agir avec honnêteté,

10 indépendance, loyauté, compétence, diligence, efficacité, et courage. Le

11 conseil a un devoir de loyauté envers son client, et un devoir envers le

12 Tribunal, celui de concourir, en toute indépendance, à l'administration de

13 la justice."

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Kay, une chose doit être

15 claire. Vous parlez de l'obligation de maintenir ou de se conformer à des

16 règles de déontologie rigoureuses. Ce n'est pas parce que l'accusé dit que

17 vous n'êtes pas professionnel que vous ne l'êtes pas. Vous ne l'êtes pas

18 simplement parce que l'accusé vous qualifie de substitut du Procureur.

19 Soyons bien clair là-dessus.

20 M. KAY : [interprétation] D'accord, Monsieur le Président. Dans d'autres

21 circonstances, je pourrais marquer mon différend avec vous, si vous m'en

22 donnez l'occasion, un autre jour. Mais pas aujourd'hui.

23 Article 4, conflit : "En cas de divergence entre le présent code et tout

24 autre code applicable aux conseils, c'est le premier qui l'emporte, pour

25 toutes questions de déontologie qui se posent devant le Tribunal."

Page 33258

1 Je pense que c'est un document de base qui détermine les obligations qui

2 sont les nôtres, et les définit aussi.

3 J'ai déjà parlé de l'Article 8. Article 10. Compétence, intégrité et

4 indépendance. Vous voyez ces dispositions. Elles font notamment état de la

5 loyauté. "Ne pas transiger sous l'effet de pressions extérieures." Ce qui

6 est important, c'est le point 4 : "Préserve sa propre probité, ainsi que

7 celle de l'ensemble de la profession." Vous avez raison de dire que ceci

8 aura des retombées plus larges. "Ne transige pas sous l'effet de pressions

9 extérieures sur son indépendance, sa probité, et ses principes." C'est pour

10 cela que je résiste à ce que vous m'exhortez de faire. Je ne veux pas ici

11 transiger et violer le Greffier. Nous avons aussi un devoir de diligence.

12 Il y a la question du conflit d'intérêt.

13 Article 14, que nous avons déjà cité : "Le conseil a un devoir de

14 loyauté envers son client. Il a pour devoir envers le Tribunal d'agir en

15 toute indépendance et de veiller à ce qu'il n'y ait pas de conflits

16 d'intérêt."

17 C'est ce code-ci qui exige de nous de nous conformer aux objectifs de

18 la représentation de l'accusé. Mais qu'est-ce qu'ils sont, ces objectifs ?

19 Il dit, je ne veux pas que vous citiez mes témoins, je ne veux pas que vous

20 participiez à ma défense, je ne veux pas vous parler. Cela représente quand

21 même, entre autres, certains objectifs de la représentation. C'est cela,

22 mon contexte à moi, le contexte dans lequel j'opère. Ceci a été dit

23 clairement, parce qu'il y a eu des ballons d'essais, et on sait à quoi ceci

24 nous a mené, à partir du 3 septembre jusqu'à la décision en appel. Nous

25 avons pu constater que cette situation ne nous permettait pas de bien

Page 33259

1 fonctionner.

2 Etant donné que ceci revêt beaucoup d'importance à nos yeux, à la

3 page 39 436, j'ai cité ce qui vient de mon propre barreau, et ce qui

4 s'applique à tous les avocats. C'est important, car s'il y a un conflit

5 entre ce code-ci et le code de mon barreau, c'est ce code-ci que je dois

6 suivre. Mais si celui-ci reste muet, je dois faire s'appliquer le code de

7 mon barreau, car c'est dans mon système juridique que je suis tenu

8 responsable de tous mes actes, où qu'ils se déroulent.

9 "L'avocat doit tenir compte d'une situation dans laquelle il ne peut

10 pas être en conflit, si cette situation est susceptible de réduire la

11 confiance que l'opinion publique peut avoir en la profession de l'avocat,

12 dans l'administration de la justice, ou de jeter le discrédit sur la

13 profession d'avocat."

14 J'ai discuté pour cet homme, afin que soient maintenus ses droits.

15 J'ai dit fermement à la Chambre d'appel que je n'ai pas la maîtrise de ses

16 moyens de Défense. Je l'ai dit aussi clairement, quiconque examinera les

17 annales de ce procès à l'avenir pourra dire, "Mais voilà ce que vous avez

18 dit à propos de sa Défense. Comment pourra-t-on jamais dire que ce que vous

19 avez dit était exact ? Car il y avait conflit d'intérêt."

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je reviens à l'Article 14.

21 M. KAY : [interprétation] Oui.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Dans le contexte, apparemment, ce

23 n'est pas une question de conflit qui se pose entre le client et le

24 conseil, mais plutôt une situation où le conseil a un conflit d'intérêt

25 pour d'autres raisons, n'est-ce pas ?

Page 33260

1 M. KAY : [interprétation] Toutes les questions relatives au conflits

2 d'intérêt sont reprises dans le même article. On parle de la

3 responsabilité, le fait de représenter des co-accusés, des intérêts

4 financiers. Tout ceci est regroupé sous un même titre, une même rubrique.

5 Le conflit d'intérêt concerne le conseil davantage que l'accusé, parce que

6 c'est vu de ce bout-là de la lorgnette. On dit que le conseil veille avec

7 le plus grand soin à éviter tout conflit d'intérêt. Donc, conflit d'intérêt

8 avec le client, avec le bureau du Procureur, quel que soit le cas de

9 figure.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais là non plus, on ne serait

11 dire que vous êtes en violation de ces dispositions-là.

12 M. KAY : [interprétation] Pour ce qui est de la représentation des

13 objectifs de sa représentation, représentation de l'accusé, cela pourrait

14 se poser, parce que j'ai dit que je n'ai pas la maîtrise, je n'ai pas la

15 connaissance de ces moyens. Il ne me l'a pas confié, et il est possible de

16 dire qu'il y a, dès lors, conflit d'intérêt si la Chambre m'ordonne de

17 faire ce que je ne peux pas faire. Conflit d'intérêt manifeste au regard de

18 l'Article 14.

19 Nous avons un devoir de loyauté envers le client. Notre client dit : "Je ne

20 vous veux pas. Sortez d'ici. Ne me défendez pas."

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous savez, nous avons essayé de parer

22 à cette éventualité de la meilleure façon possible, dans l'ordonnance

23 relative aux règles qui stipulent que vous deviez toujours agir dans les

24 meilleurs intérêts de l'accusé. Nous avons précisément fait ce que dit le

25 Statut, le Règlement, une fois que quelqu'un n'a plus le droit de se

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1 défendre. Nous avons couvert la situation du conseil en disant que vous

2 devez agir de la façon qui vous semble être la plus favorable au client.

3 M. KAY : [interprétation] Mais vous avez fait de moi son conseil. Ce

4 faisant, j'ai maintenant un devoir envers lui, et pas envers vous. J'ai un

5 devoir de loyauté envers lui et pas vous. C'est explicite.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais vous avez pour devoir de faire de

7 votre mieux, pour éviter un conflit d'intérêt, pour essayer de défendre

8 mieux ses intérêts. Nul ne saura dire que vous allez faire autre chose que

9 cela.

10 M. KAY : [interprétation] Nous en sommes à un stade où on met en cause

11 notre qualité. Il y a un conflit quant à la façon de mener cette défense,

12 un conflit essentiel. J'ai un devoir de loyauté envers lui, parce qu'il dit

13 qu'il ne me veut pas. "Je ne veux pas que vous fassiez quoi que ce soit."

14 Et ma loyauté à moi, elle se situe envers lui. On a essayé de faire marcher

15 les choses. Cela n'a pas fonctionné. Je ne peux pas aller plus loin en la

16 matière, puisque de façon expresse, l'accusé a manifesté des intentions. Je

17 l'ai dit aussi devant la Chambre d'appel. J'ai défendu de la meilleure

18 façon possible ses intérêts. J'ai interjeté appel de la décision pour le

19 défendre et défendre ses intérêts pour que ses droits lui soient restitués.

20 C'est une obligation pour laquelle il y avait une certaine cohérence entre

21 nous.

22 Pour ce qui est de ma loyauté aujourd'hui, c'est là qu'elle prend sa

23 source. On ne peut pas m'en dissocier. C'est un problème qu'il y a quand on

24 a un conseil commis d'office.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je peux vous donner un exemple de ce

Page 33262

1 qui pourrait se produire après. Supposons que

2 M. Milosevic cite un témoin et il fait l'objet d'un interrogatoire

3 circonstancié. Plusieurs points pertinents sont fournis par ce témoin.

4 Beaucoup d'éléments de preuve pertinents sont présentés dans sa déposition.

5 Prenons ce cas de figure, cette hypothèse.

6 Etant donné, par exemple, parce que la concentration de l'accusé

7 aurait été un peu distraite par des points de peu d'importance, vous, vous

8 avez beaucoup d'expérience. Qu'est-ce que vous feriez, s'il y a des points

9 qu'il a laissé passer, si une fois l'interrogatoire mené par l'accusé,

10 c'était à vous de présenter des questions ?

11 M. KAY : [interprétation] Si j'étais conseil commis d'office

12 davantage qu'ami ?

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui.

14 M. KAY : [interprétation] En tant que conseil, je devrais demander ses

15 instructions.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Précisément.

17 M. KAY : [interprétation] S'il refusait, c'est tout.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais vous auriez eu des instructions.

19 Supposons qu'il dise "Faites ce que vous voulez," c'est bien possible ?

20 M. KAY : [interprétation] C'est peut-être à ce moment-là une réponse

21 ambiguë, ambivalente et je pourrais peut-être l'aborder pour l'examiner.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous devez respecter ses intérêts.

23 Vous ne seriez pas, si vous voulez, immobilisé, paralysé ?

24 M. KAY : [interprétation] S'il me donnait une réponse négative, je ne

25 connais pas ses moyens de défense. Je ne sais pas pourquoi il n'a pas posé

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1 cette question au témoin, et cela pourrait être une question qui lui porte

2 préjudice. Si c'est le cas, et si je pose cette question, et si, si vous

3 voulez, je mets à mal sa défense, parce que j'aurais posé cette question,

4 alors que j'ai les meilleures intentions du monde, les meilleures

5 motivations du monde, mais, je n'aurais pas eu ses instructions. Si je

6 recevais en réponse à cette question une mauvaise réponse, alors je fais du

7 tort à sa défense. Je suis en violation du code, je ne lui ai pas été

8 loyal.

9 Ce n'est pas la même situation si vous voulez que l'ami de la Chambre que

10 nous étions, et il n'y a pas ce rapport de confidentialité.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense que vous avez tout à fait

12 tort pour ce qui est des conséquences de la situation telles que vous les

13 présentez, vous. Les dispositions sont très claires dans l'ordonnance.

14 S'agissant des règles, vous devriez vous conformer pour défendre au mieux

15 les intérêts de votre client tels que vous les voyez.

16 M. KAY : [interprétation] Vous voyez, cela est supposé qu'on connaît la

17 stratégie de défense, les moyens de défense. C'est là que le problème se

18 pose. Si vous rencontrez un témoin ou si vous l'interrogez, vous discutez

19 de sa défense avec l'accusé, on essaie de ne pas avoir des réponses qui

20 vont lui faire du tort. On va lui

21 dire : "Ecoutez, je ne pense pas que ce soit une bonne question. Si cela

22 tourne mal, qu'est-ce qu'on va faire ?" Le client va peut-être dire : "Ne

23 posez pas cette question. Abstenez vous de poser cette question. Je vais

24 vous dire pourquoi, parce qu'on aura un autre témoin à qui la poser." Cela

25 se présente dans un contexte où il y a une poursuite du dialogue, de la

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1 communication. Il y a un rapport de confiance et cela peut marcher. Cela

2 marche. En l'absence d'instructions, si vous posez une telle question, avec

3 les meilleures intentions du monde, en pensant que vous défendez au mieux

4 les intérêts de l'accusé, c'est bien cela le problème. Vous pensez que vous

5 agissez au mieux pour lui, mais que cela tourne mal, à ce moment là,

6 l'accusé pourrait interjeter appel et dire "Je n'ai pas donné

7 d'instructions pour que cette question soit posée, elle m'a fait du tort.

8 Mon conseil a fait preuve de négligence, d'incompétence, et je veux un

9 nouveau procès."

10 Cela se pose souvent lorsque vous avez des procès importants, des procès

11 historiques. Ils sont à ce point examinés à la loupe. C'est devenu

12 effectivement toute une industrie qui s'est développée dans tous les

13 barreaux du monde contre les avocats de la Défense, d'où notre vive

14 préoccupation aujourd'hui. Nous ne sommes plus aussi solides, aussi

15 robustes que les conseils de la Défense ne l'étaient, il y a 20 ou 30 ans.

16 Vous avez maintenant un système d'appel, un système de contrôle, un système

17 de défense des droits de l'accusé. Tout ceci est devenu à ce point fort que

18 ceci a eu des retombées sur tous les systèmes juridiques et exige la plus

19 grande circonspection de la part des avocats de la Défense s'agissant de

20 leur comportement.

21 J'espère avoir examiné de façon exhaustive cette question. Je voulais vous

22 renvoyer à mon code national. Je vois qu'il est 10 heures et demie.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Merci. Nous prendrons une pause

24 de 20 minutes.

25 --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.

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1 --- L'audience est reprise à 10 heures 58.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Maître Kay.

3 M. KAY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Juste avant la

4 pause, qui fut brève, nous étions sur le point d'examiner le Greffier

5 anglais. Il s'agit de la page 39 435, coin supérieur du jeu de documents du

6 Greffe.

7 Il faut savoir que la règle 307 qui se trouve en note de bas de page,

8 stipule : "qu'un avocat ne peut dans un premier temps absolument pas plier

9 sous des pressions extérieures. Il ne peut pas faire en sorte que son

10 indépendance absolue ne soit lésée, doit faire de son mieux pour faire en

11 sorte que son indépendance ne puisse pas être lésée."

12 Puis vous avez le C : "L'avocat ne peut pas porter tort à ses normes

13 professionnelles afin de convenir à son client, à la Chambre ou à un parti

14 tiers."

15 Peut-être que la Chambre comprendra maintenant, pourquoi nous nous

16 trouvons dans la situation où nous sommes.

17 Vous avez ensuite la Règle 609 du Greffier, qui stipule que, sous

18 réserve du paragraphe 6.10, un avocat peut se dégager d'un procès,

19 lorsqu'il est d'avis que ses instructions lui ont été retirées, sa conduite

20 professionnelle fait l'objet de contestation. C, que les conseils qu'il a

21 accordés n'ont pas été pris en considération. D, s'il a des raisons

22 importantes ou d'autres raisons importantes pour ce faire.

23 Nous prenons en considération cette perspective pour étudier et examiner

24 les questions professionnelles que nous avons soulevées.

25 A la page 39 422, nous faisons référence au Greffier néerlandais, qui

Page 33266

1 est intitulé "Relation avec le client." L'intérêt du client plutôt que tout

2 autre intérêt pour les avocats déterminera la façon dont les avocats

3 géreront le procès. Il s'agit de la

4 page 39 422. C'est le système inverse pour répertorier tout cela, ce qui

5 fait que nous devons utiliser nos cellules grises, mais il s'agit du 39

6 422. Vous avez également la Règle 5 du Greffier néerlandais qui indique que

7 "l'intérêt du client plutôt que tout intérêt personnel déterminera la façon

8 dont les avocats gèreront les procès."

9 Vous avez ensuite la Règle 9 du code qui stipule que "les avocats ne

10 peuvent pas échapper à cette responsabilité, en invoquant les instructions

11 qu'ils ont reçues de la part de leur client. Toutefois, ils n'agiront

12 jamais contre les souhaits manifestes de leur client. Les avocats,' la

13 première ligne étant, 'les avocats assument la responsabilité totale du

14 procès."

15 Vous avez la règle où est l'alinéa numéro 2 qui indique : "S'il

16 existe une différence d'opinion entre l'avocat et son client sur la façon

17 dont la Défense est gérée, que cette dispute ne peut pas être réglée par

18 une consultation mutuelle, l'avocat sera dégagé de ses fonctions."

19 Nous avons ensuite le Greffier destiné aux avocats de l'Union

20 européenne.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Rappelez-moi, Maître Kay, avant

22 de passer à cela, est-ce que vous pourriez nous dire si au vu du système

23 néerlandais, il y a une règle qui oblige ou -- refusait à être représenté

24 au pénal.

25 M. KAY : [interprétation] Non. Je réfléchis à la discussion que j'ai eue

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1 avec un avocat néerlandais lorsque cela a été soulevé le 3 septembre, peut-

2 être que nous pourrions prendre cela en considération.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, je peux obtenir la réponse

4 ultérieurement. Poursuivez.

5 M. KAY : [interprétation] Je m'excuse, je savais exactement quelle était la

6 situation, mais je ne m'en souviens pas pour le moment.

7 En fait, pour ce qui est d'un avocat néerlandais, un avocat néerlandais ne

8 participerait pas au vu des circonstances. Voilà la synthèse des conseils

9 qui nous ont été fournis par un membre du barreau néerlandais. En fait, il

10 n'essaierait même pas de faire en sorte que les règles à suivre et les

11 modalités fonctionnent. Il ne participerait pas, il se retirerait, et il

12 s'en tiendrait à cela.

13 Pour ce qui est du Greffier destiné aux avocats de l'Union européenne, il

14 s'agit de la page 39 408, et 39 403, vous avez le paragraphe 2.7, qui

15 considère les intérêts du client, par rapport à la dimension européenne.

16 "Sous réserve du respect de la conduite professionnelle et du droit, un

17 avocat doit toujours agir pour défendre les intérêts de son client, et doit

18 toujours placer ses intérêts ou les intérêts de ses confrères ou consoeurs

19 de la profession juridique après."

20 Vous avez ensuite ce qui a été exprimé par l'accusé à notre égard, par

21 rapport à notre participation, il s'agit de son intérêt et il souhaite être

22 le propre gardien de ses intérêts.

23 Dans le projet de code de la Cour pénale internationale qui se trouve à la

24 page 39 393 du document du Greffe, l'indépendance des conseils est énoncée

25 à la page 39 389. Le paragraphe 7, alinéa 2, stipule que : "Le conseil ne

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1 doit pas, A, faire en sorte que son indépendance absolue, son intégrité et

2 sa liberté ne soient compromises par des pressions extérieures."

3 B : "Faire quoi que ce soit qui pourrait compromettre son

4 indépendance; et C, compromettre ces normes professionnelles afin de

5 convenir aux clients, au Tribunal, ou à une partie tierce."

6 Vous vous souviendrez que cela se trouvait à la Règle 609 du code anglais.

7 C'est la raison pour laquelle nous avançons que nous sommes tenus par le

8 Greffier, ce Greffier qui nous exhorte à agir conformément à ce Greffier

9 plutôt que conformément à des règles à suivre qui entreraient en conflit

10 avec ce code.

11 La loyauté, l'intégrité, et il s'agit du paragraphe 2 : "Tout en continuant

12 à avoir à montrer un respect envers la Chambre ou le Tribunal, le conseil

13 défendra les intérêts de son client de façon honnête et sans appréhension,

14 sans pour autant prendre en considération les intérêts personnels du

15 conseil, ou les conséquences pour le conseil ou tout autre personne."

16 C'est ce que je disais, et c'est pour cela que je disais que maintenant il

17 est mon "client". Il a indiqué de façon très claire quel était son avis, il

18 l'a énoncé, et c'est la raison pour laquelle je suis ce qui a été dit et ce

19 qui correspond à ses instructions apparentes, en l'espèce.

20 A la page 39 384, au paragraphe 20, section 3, il s'agit du champ

21 d'application et de la teneur de l'accord. A la CPI, vous avez, en fait,

22 l'idée sur laquelle il y a un accord entre le client et le conseil pour que

23 la défense puisse être gérée. Cela, ils l'ont indiqué de façon beaucoup

24 plus formelle. C'est ce dont il est question ici.

25 Il s'agit de l'alinéa 1 : "La relation entre le client et le conseil est

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1 une relation qui se fonde sur la confiance et sur un échange franc et

2 honnête contraignant le conseil à agir de bonne foi par rapport au client.

3 Dans l'acquittement de ses fonctions vis-à-vis de son client, le conseil

4 doit toujours agir avec équité, honneur, franchise et fidélité, vis-à-vis

5 du client."

6 Bien que nous pensions que nous sommes loyaux dans la mesure du possible,

7 je pense, par exemple, à l'appel, et nous avons tenu à être fidèles à ses

8 intérêts tels que nous les avons représentés.

9 A la page 39 373, il s'agit de l'Union internationale des avocats, qui

10 présente la Charte internationale des droits de la Défense, et vous avez

11 l'Article 5 qui se trouve à la page du Greffe 39 372, il est indiqué que :

12 "Toute personne aura la possibilité de choisir librement son avocat", il

13 s'agit de l'Article 4. Vous avez l'Article 5 qui stipule que : "La

14 participation de l'avocat de la Défense doit être effective et efficace. Ce

15 qui fait qu'il a le devoir de s'acquitter de sa tâche de façon compétente."

16 Vous avez également, dans ce code, le concept de devoir fiduciaire.

17 Vous avez l'Article 13 de la page 39 370 qui stipule

18 que : "Les devoirs de l'avocat par rapport à son client consistent A, à

19 fournir des conseils; B, "à prendre des mesures juridiques telles que

20 nécessaires pour le protéger ainsi que pour protéger ses intérêts; C, "à le

21 représenter et à l'aider devant le Tribunal ou devant les autorités

22 administratives, ainsi que lors d'enquêtes policières. Lorsque l'avocat

23 s'acquitte de sa tâche, il devra agir de tout temps en disposant d'une

24 liberté complète, il devra agir de façon diligente et de façon courageuse

25 conformément au droit en respectant les souhaits exprimés par son client et

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1 par la déontologie de sa profession, sans pour autant être préoccupé de

2 pressions et de restrictions dont il pourrait faire l'objet de la part des

3 autorités ou du public."

4 Vous avez également les documents de l'Association internationale du

5 Barreau qui ont été, en fait, établis à la suite de la conférence de cette

6 association à New Delhi en 1982, il s'agit de différentes règles qui

7 régissent l'indépendance judiciaire et l'indépendance des avocats.

8 Si vous prenez dans le chapitre relatif aux avocats, à la page 39

9 365, le texte -- je vais apporter une petite correction, parce qu'en fait

10 cela se trouve à la page 39 365. Il s'agit du conseil de l'Europe. La page

11 précédente est une page que vous avez extrait des documents de

12 l'Association internationale du Barreau, il s'agissait de leur groupe de

13 travail relatif ou qui a étudié le code pour la CPI.

14 A la page 39 365, recommandations du conseil de l'Europe, il est

15 indiqué que : "Les devoirs de l'avocat vis-à-vis de son client sont les

16 suivants. Ils doivent lui indiquer quelles sont ses obligations," C, il

17 est indiqué "qu'il doit prendre toutes mesures juridiques afin de protéger

18 les intérêts de son client; D, il doit éviter des conflits d'intérêt; E, il

19 ne doit pas accepter davantage de travail qu'il ne peut en faire."

20 A la page 39 363, principes de base relatifs au rôle des avocats,

21 cela est un résultat ou une des conclusions de la Conférence des Nations

22 Unies qui s'est tenue en Cuba en 1990, il s'agit d'une déclaration générale

23 afférente aux normes. Un petit moment, je vous prie. Il s'agit du

24 paragraphe 12, qui correspond à la page du Greffe 39 361.

25 "Les avocats devront, en tout temps, préserver l'honneur et

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1 l'intégrité de leur profession en tant qu'agent essentiel de

2 l'administration de la justice." Le paragraphe 13 énonce les devoirs des

3 avocats vis-à-vis de leurs clients, notamment : "le devoir de conseil,

4 d'assistance, de protection des droits du client afin de promouvoir la

5 cause de la justice, l'avocat devra s'efforcer de préserver les droits de

6 l'homme et les libertés fondamentales reconnues par le droit national et

7 international et devra, en tout temps, agir de façon diligente et en toute

8 liberté conformément aux droits et aux normes reconnus et à la déontologie

9 de la profession juridique. Les avocats devront toujours respecter de la

10 façon la plus loyale les intérêts de leurs clients."

11 Nous pouvons observer à l'instar des autres documents internationaux,

12 lorsqu'il est question du client, lorsqu'il est question d'un procès, il

13 faut prendre en considération les intérêts du client, la déontologie de la

14 profession, et nous devons également respecter, en toute loyauté, les

15 intérêts du client.

16 Nous avons également inclus le projet de principes, les principes

17 NOTO, il s'agit des projets de principes de l'indépendance de la profession

18 juridique. Vous avez l'Article 17 qui se trouve à la page du Greffe 39 357

19 qui indique quels sont les droits et les devoirs des avocats qui sont

20 importants pour l'indépendance de leur profession.

21 "Les devoirs d'un avocat vis-à-vis de son client inclus l'octroi de

22 conseils, le fait de protéger le client et ses intérêts, la représentation

23 du client auprès des tribunaux, auprès des chambres de première instance et

24 auprès des autorités administratives. Ce faisant, l'avocat devra, en tout

25 temps, agir de façon diligente et sans crainte conformément au droit et

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1 conformément au souhait de son client et sous réserve des normes établies

2 et de la déontologie de la profession juridique."

3 Nous avons également, toujours dans ce même jeu de documents, à la

4 page 39 346, devoirs et droits des avocats. "Les devoirs d'un avocat vis-à-

5 vis de son client comprennent le devoir de conseil, le devoir de fournir un

6 conseil au client pour ce qui est de ses droits juridiques et de ses

7 obligations et pour ce qui est du fonctionnement du système judiciaire.

8 L'avocat doit aider le client et doit le représenter devant les Tribunaux."

9 A la page 83, il est indiqué : "L'avocat, lors de l'acquittement de sa

10 tâche, devra, en tout temps, agir de façon diligente en toute liberté et

11 sans crainte conformément au souhait de son client, sous réserve des règles

12 établies, des normes et de la déontologie de sa profession sans aucune

13 inhibition ou pression exercée par les autorités ou par le public."

14 Au 85, il est indiqué : "Aucun avocat ne devra pâtir, souffrir, ou ne

15 devra être menacé de sanctions pénales, administratives, économiques ou

16 autres, du fait des conseils ou de l'aide à apporter à un client ou de ce

17 qu'il a fait lors de la représentation de tout client."

18 Il y a également d'autres documents qui nous viennent de

19 l'Association internationale du Barreau qui ne sont pas inclus dans ce jeu

20 de documents, vous avez, par exemple, le Greffier de l'Association

21 internationale du Barreau qui date de l'année 1988, la Règle 8 stipule que

22 l'avocat devra toujours respecter le Tribunal. "Les avocats devront

23 toujours défendre les intérêts de leurs clients sans crainte, et

24 appréhension, et sans avoir à prendre en considération toutes conséquences

25 désagréables pour eux-mêmes ou pour toute autre personne."

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1 Vous avez également un autre document de l'Association internationale

2 du Barreau, il s'agit des principes généraux destinés aux avocats, au

3 numéro 2, il est indiqué : "Les avocats devront considérer comme d'une

4 importance capitale les intérêts de leurs clients, sous réserve de leurs

5 devoirs vis-à-vis des tribunaux et sous réserve des intérêts de la justice

6 car ils devront toujours respecter le droit et maintenir les normes de

7 déontologie."

8 Au 4, il est indiqué : "Les avocats ne devront jamais se mettre dans

9 une position en vertu de laquelle il y a conflit d'intérêt entre leurs

10 clients et eux-mêmes, leurs partenaires, ou un autre client."

11 Ce sont des documents supplémentaires qui nous viennent de documents

12 de l'Association internationale du Barreau que j'avais. Il y a des

13 exemplaires dont nous disposons.

14 Ce que nous disons pour le moment c'est qu'en fait nous voyons

15 qu'il y a pléthore d'informations sur la façon dont les avocats doivent se

16 comporter. En fait, et ils doivent suivre et respecter les souhaits de

17 leurs clients, qu'il s'agisse d'ailleurs d'un conseil commis d'office ou de

18 tout autre conseil, parce que lorsqu'il s'agit d'un conseil commis

19 d'office, ils ne sont pas des conseils du tribunal, de la chambre, ils sont

20 des conseils auprès de l'accusé, et c'est envers l'accusé qu'il y a

21 loyauté.

22 Il se peut qu'il y ait différentes dispositions qui peuvent être prises

23 pour les amis de la chambre ou pour un conseil de la chambre ou des juges,

24 mais lorsque vous avez cette relation fiduciaire qui exige entre l'accusé

25 et la personne qui le représente, il faut savoir que les normes sont telles

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1 qu'elles exigent de la part d'un avocat qui se trouve dans notre situation

2 de respecter ces codes et de ne commettre aucun acte qui serait une

3 violation de ces codes, car cela n'est pas la responsabilité des juges,

4 cela correspond à notre responsabilité, et l'Association des conseils de la

5 Défense de ce bâtiment a un comité disciplinaire. Nous pourrions devoir

6 répondre à des questions de leur part.

7 Il y a une question qui a été posée hier par le Juge Bonomy à propos de

8 l'Association des conseils de la Défense. Cette association a été établie

9 en consultation avec les Juges de ce Tribunal, et en matière de

10 déontologie, il y a une exigence de la part des Nations Unies qui indique

11 que le conseil a un organe qui a été structuré et qui opère en leur nom,

12 qu'il s'agisse d'un état ou d'un tribunal tel que celui-ci, il est

13 absolument primordial que le conseil de la Défense puisse avoir un organe

14 collectif qui représente leurs intérêts, parce qu'ils traitent avec le

15 Greffe, avec la partie exécutive, ou avec les Juges et leurs points de vue

16 doivent être considérés et respectés.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est justement ce que je disais,

18 Maître Kay. Je remettais en question la façon dont cette représentation a

19 été présentée.

20 M. KAY : [interprétation] J'avais cru comprendre que le comité

21 disciplinaire de l'Association du conseil de la Défense avait, en fait,

22 présenté une déclaration que je n'ai pas d'ailleurs. Donc je pensais que

23 cela allait être présenté au Greffe, et que c'est par ce truchement qu'on

24 pourrait l'avoir, mais leur comité disciplinaire s'est penché sur cette

25 question. Je sais qu'il y a un document qui va être transmis au greffier

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1 sur la question. Je pense que les Juges voudront certainement en prendre

2 connaissance.

3 Je suis également redevable vis-à-vis de mon code en Angleterre, vis-

4 à-vis du barreau anglais, lorsqu'il s'agit de questions qui ne sont pas

5 englobées et prises en considération par le code déontologie du TPIY. C'est

6 pour cela que j'ai fait référence aux paragraphes qui sont particulièrement

7 essentiels en l'espèce, lorsqu'un client a contesté la personnalité d'un

8 conseil, lorsqu'il y a des instructions qui ont été retirées.

9 Nous, nous avons essayé d'obtenir des conseils de la part du conseil

10 général du barreau au début de cette affaire, qui nous avait dit qu'il

11 pouvait avoir commission d'office, que nous devions essayer de travailler

12 compte tenu de ce que nous avait été demandé, mais ce furent les propos du

13 Queen's Counsel qui s'est penché sur la question et qui a dû étudier la

14 question. Ses propos ont été comme suit : "Il se peut qu'à un moment donné,

15 vous ne pourrez tout simplement plus opérer. Il se peut que les choses

16 aillent trop loin, soit pour ce qui est de votre méthode de travail, soit

17 pour ce qui est de votre relation avec l'accusé, et il se peut que vous

18 deviez demander à être déchargé de vos fonctions. Il se peut que vous

19 deviez franchir ce cap fatidique."

20 Nous pensons que nous avons demandé au comité déontologique du

21 barreau anglais à Londres, nous leur avons demandé leur avis, et nous

22 pensons que cette une question qui est non seulement essentielle pour nous,

23 mais essentielle également pour la Chambre.

24 Je m'excuse, Monsieur le Juge Kwon, parce que je pense que j'ai été

25 un peu long.

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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, ce n'est pas un problème. Maître

2 Kay, si vous pouviez peut-être nous indiquer ce que l'accusé a dit lors de

3 l'audience de l'appel qui a eu lieu le 21 octobre. Je ne retrouve plus la

4 cote du Greffe. Cela se trouve au compte rendu d'audience à la page 41,

5 ligne 24. Il répondait à une question qui lui a été posée par M. le Juge

6 Meron qui lui demandait quelle est la meilleure solution.

7 M. KAY : [interprétation] Je me souviens. Oui.

8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je cite. Il a dit : "Quelle est la

9 meilleure solution ? La meilleure et la seule solution est, d'après moi,

10 passe par le fait que vous devez me restaurer mes droits." Ensuite, il a

11 été fait référence au conseil d'appoint. Il a dit, et je cite à nouveau :

12 "Votre conseil d'appoint ne m'intéresse absolument pas. Me Kay est un ami

13 de la Chambre. Lui-même, ainsi que son confrère sur l'autorisation de la

14 Chambre de première instance, posera des questions au témoin s'il le juge

15 nécessaire. En ce qui me concerne, je n'ai aucune objection à cette

16 pratique. En ce qui me concerne, il pourra continuer ainsi s'il le juge

17 nécessaire. Il pourra continuer à poser des questions au témoin, ou il

18 pourra s'acquitter de toute autre tâche."

19 M. KAY : [interprétation] Fin de la relation professionnelle qui est vue

20 d'une autre façon. En fait, la réponse de l'accusé a été une réponse

21 pragmatique, si nous pouvons nous permettre d'observer cela à nouveau,

22 parce qu'auparavant, il n'y avait aucun rapport qui existait, ce qui fait

23 qu'il n'y avait aucune interférence par rapport à sa position dans le cadre

24 du procès. C'était tout à fait différent. Nous n'avions aucun mandat de sa

25 part, et nous n'avons jamais dit que nous avions reçu un mandat de sa part.

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1 Cela n'a jamais fait partie de la commission d'office, et c'est à dessein,

2 d'ailleurs.

3 Alors le problème c'est que cela pourrait fonctionner, mais depuis la

4 situation a beaucoup trop évolué. En fait, nous nous sommes véritablement

5 écartés de cette situation. A la suite des événements, à la suite du fait

6 de ce conflit, nous pensons qu'il est peu professionnel au vu des critiques

7 de continuer à agir et de continuer à défendre ses intérêts. Nous serions

8 extrêmement préoccupés si nous devions le faire. Un nouvel ami de la

9 Chambre pourrait très certainement maîtriser la situation comme l'a fait

10 l'ancien ami de la Chambre, sans pour autant supporter les conséquences que

11 nous pensons devoir supporter au vu de la situation.

12 J'ai fait une citation, Monsieur le Juge Kwon, et je faisais référence à la

13 situation de l'ami de la Chambre. C'était le compte rendu d'audience du 3

14 septembre que nous avons étudié. Nous avons pris en considération ce rôle,

15 afin de voir si cela pourrait nous permettre d'aller de l'avant dans cette

16 situation. Cela aurait pu donner les résultats escomptés, mais nous pensons

17 maintenant que la situation est telle que nous avons été critiqués. Notre

18 professionnalisme a fait l'objet de contestation, et nous ne pensons pas

19 qu'il serait judicieux et honnête de vouloir poursuivre au vu des relations

20 qui existent maintenant entre lui et nous. Il s'agirait de quelque chose

21 qui serait tout à fait anathème par rapport à la procédure. Nous pensons,

22 et nous le pensons de façon très claire, il nous appartient de le dire, que

23 nous devons respecter le Greffier. C'est ce qui devra se passer. Nous ne

24 pensons pas que les relations entre lui et nous pourront s'améliorer, à

25 moins, bien entendu, qu'il ne nous ait lui-même choisi comme conseil. Ce

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1 sera tout à fait différent.

2 M. le Juge Kwon, hier nous a demandé, est-ce que vous pensez que vos

3 relations pourraient s'améliorer ? Je lui avais répondu qu'il lui

4 appartenait de répondre à cela. Bien entendu, s'il voulait recruter mes

5 services, je serais tout à fait à sa disposition. Le problème n'est pas là,

6 mais il faudrait savoir quelle serait notre relation de confiance. Mais au

7 vu des événements qui se sont déroulés au cours des huit dernières

8 semaines, nous pensons que nous avons atteint le point de non retour.

9 Du point éthique, il se peut que nous puissions obtenir des avis, comme la

10 Chambre le sait, il se peut que la Chambre envisage de nommer un ami de la

11 Chambre qui pourrait présenter ou produire un mémoire sur les questions

12 éthiques, du fait de ce que M. le Président Robinson à indiqué à juste

13 titre, lorsqu'il avait dit que nous trouvions à l'extrême du spectre. Nous

14 le savons, et nous savons ce que cela représente et signifie pour le

15 Tribunal. Il y a un certain nombre de conseils de la Défense qui nous ont

16 indiqué ce qu'ils pensaient de notre honnêteté lors de la présentation de

17 cela. C'est pour cela que nous pouvons recommander la chose suivante : La

18 Chambre de première instance ainsi que nous-mêmes pourraient identifier un

19 avocat qui pourrait fournir un conseil d'ami de la Chambre sur la question.

20 Voilà ce que nous voulons dire à ce sujet. Je ne sais pas si je peux

21 maintenant aborder d'autres thèmes.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non. Je vous remercie vivement,

23 Maître Kay.

24 Monsieur Milosevic, je comprendrais si vous estimiez que vous vous trouviez

25 dans une situation d'isolement magnifique, si vous refusiez de présenter

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1 des conclusions, mais si vous vouliez le faire, allez-y.

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] En ce qui concerne toutes ces questions, je

3 serais très bref. D'emblée, vous le savez, j'ai adopté une position, et je

4 ne l'ai pas modifiée depuis. Je ne pense pas que j'aurais pu semer la

5 confusion chez qui que se soit s'agissant de ma décision de me défendre

6 moi-même. Je pense que ce n'est pas là une position extravagante. Bien au

7 contraire, elle se fonde sur les garanties minimales de mes droits. Elle se

8 fonde sur les normes pertinentes, sur les impératifs du droit

9 international, sur le jus cogens qui ne serait faire l'objet d'aucune

10 contestation.

11 En l'occurrence ici, force de constater que Me Kay ne pouvait avoir

12 le moindre doute sur ma position, à savoir que je rejetais un conseil en

13 dépit de ce fait, alors qu'il connaissait bien ma position précisée avec

14 moult de force par moi-même. Il s'est trouvé sous pression exercée par

15 vous. Contrairement à son propre Greffier, il a accepté le rôle qui lui

16 était confié en dépit de la position très claire que j'avais affichée. Par

17 conséquent, la question qui se pose ici est celle de critique s'agissant de

18 son attitude professionnelle, mais c'est une critique au niveau de

19 l'éthique même. Professionnellement, c'est inacceptable.

20 Une deuxième chose : il me sera peut-être plus facile de citer votre

21 décision du 2 novembre lorsque vous citez la décision. Vous dites : "A tout

22 le moins, ce régime doit se fonder sur l'idée que lorsqu'il n'est pas en

23 mesure de le faire, Milosevic prendra le premier rôle dans la présentation

24 de ses moyens, interrogera ses témoins, présentera toutes les conclusions

25 juridiques éventuellement nécessaires, il pourra présenter ses plaidoiries,

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1 et cetera."

2 La question qui se pose ici, elle est claire. Manifestement, vous

3 essayez de définir le rôle que doit continuer à jouer un conseil commis

4 d'office, et je continue à m'opposer à cette idée. Vous voulez que ce

5 conseil d'appoint intervienne si par malheur je tombe malade, et si par

6 malheur je ne suis pas en mesure de faire ce que je dois faire en assurant

7 ma propre défense. Il essaie là quand même faire pression pour moi pour que

8 jamais je ne sois malade.

9 J'ajouterai à cela que si vous voulez confier à quelqu'un d'autre la

10 présentation de mes moyens à décharge, si je suis malade, je voudrais vous

11 rappeler le jugement de la cour européenne des droits de l'homme dans

12 l'affaire Colozza contre l'Italie, jugement rendu en 1985. Voici ce que le

13 jugement dit : "La cour réitère que le droit de l'accusé est un droit

14 fondamental de l'accusé." Au paragraphe 27 : "Même si ce n'est pas

15 mentionné de façon expresse au paragraphe 1 de l'Article 6, l'objectif

16 poursuivi dans cet article dans son ensemble, montre qu'une personne

17 accusée d'une infraction au pénal, doit ou a le droit de participer à

18 l'audience. De plus, les alinéas C, D, et E garantissent à quiconque accusé

19 d'une infraction au pénal, accorde à cette personne le droit de participer

20 au procès, d'interroger ou de veiller à l'interrogatoire des témoins. Il

21 est difficile de voir de quel manière cet accusé pourrait exercer ce droit

22 en étant absent."

23 Le jugement continue en disant que : "Un accusé peut renoncer à ce droit.

24 Pour ce faire, sa décision de ne pas comparaître ou de ne pas assurer sa

25 propre défense doit être établie sans équivoque."

Page 33281

1 Par conséquent, je répète une fois de plus pour que ceci soit acté au

2 dossier de l'audience et pour informer l'opinion publique, que je n'ai pas

3 l'intention de renoncer au droit qui est le mien. Si vous décidez que c'est

4 quelqu'un d'autre qui devrait me représenter au cas où je serais malade,

5 une fois de plus, vous le feriez en violations des normes impérieuses que

6 vous ne pouvez pas violer.

7 J'ai compris que vous, et surtout M. Bonomy, vous pensez que quelqu'un

8 d'autre a le droit de juger quels sont mes intérêts. Je pense que c'est là

9 mon droit exclusif. C'est moi seul qui a le droit d'en décider de mes

10 intérêts.

11 Monsieur Bonomy, vous, tout comme M. Nice, vous avez dit hier que votre

12 règlement ne prévoit pas le cas où un avocat est commis d'office à un

13 accusé qui n'en veut pas. Ce n'est pas par hasard, à mon avis. Ce cas n'est

14 pas envisagé, car ceci serait contraire à toutes les normes du droit

15 international. Si vous prenez un cas extrême, comme vous l'avez fait

16 lorsque vous invoquez un cas où il y a des voies de fait sexuelles, où ont

17 prend cette mesure pour protéger les intérêts de la victime, cela n'a rien

18 à voir avec ce qui se fait ici. C'est sans aucune pertinence. Je pense, par

19 conséquent, qu'il faut que vous gardiez ceci à l'esprit.

20 Monsieur Robinson, vous avez également dit que l'accusé, puis vous avez

21 citez une disposition du règlement, vous avez dit que l'accusé n'a pas le

22 droit de détruire le rapport de confiance qu'il y a entre lui et son

23 conseil. J'aimerais vous poser une question. Comment serait-il possible de

24 détruire quelque chose qui n'existe pas au départ ?

25 J'ai refusé un conseil. J'ai évoqué pour ce faire les droits minimaux qui

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1 me sont accordés. Il ne saurait, dès lors, y avoir eu aucun rapport de

2 confiance entre cet avocat et moi, puisqu'il n'y a jamais eu de contact

3 entre nous.

4 Par conséquent, ceci est intenable quelque soit l'angle sous lequel vous le

5 prenez. Dès lors, vu la décision rendue, j'ai l'intention de citer à la

6 barre des témoins, de les interroger, de décider de leur ordre de

7 comparution. Je vais les interroger, et je pense être en mesure de le

8 faire. J'attends de vous que vous vous absteniez d'exercer la moindre

9 pression sur moi, toute pression qui ne serait pas normale ou réaliste. Je

10 pense pouvoir fonctionner de façon parfaitement normale. Je vous ai cité le

11 jugement de la cour européenne des droits de l'homme. Je reviens. Pourquoi

12 y aurait-il un conseil commis d'office ? Je n'en vois aucunement le lieu.

13 Vous m'avez donné l'occasion de prendre la parole, j'en profite pour

14 ajouter quelque chose. Ici, dans ce prétoire, on a dit que pour prendre des

15 décisions stratégiques dans la représentation des moyens à décharge, ici

16 vous avez cité la décision de la Chambre d'appel. A cet égard, je souhaite

17 vous dire que le 20 février 2004, il y a beaucoup de temps, j'ai déposé

18 auprès de la personne chargée de la liaison une liste de témoins.

19 J'insistais pour que vous citiez ces témoins. J'ai intitulé cette liste,

20 Liste de témoins hostiles. Je crois qu'ils sont hostiles à ma cause,

21 pourtant je veux les interroger. Je suis convaincu que j'en ai parfaitement

22 le droit, un droit qui est tout à fait fondé.

23 Beaucoup de temps s'est écoulé depuis la date du 20 février. Il y a eu

24 énormément d'échanges --

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous interromps, parce que ceci

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1 n'est pas en rapport avec la question dont nous sommes saisis, à savoir, la

2 requête déposée par Me Kay. Essayez de vous bornez dans vos remarques à la

3 question dont nous sommes saisis.

4 L'ACCUSÉ : [interprétation] D'accord. Dans ce cas, je vous demanderais de

5 me donner l'occasion de formuler mes demandes avant de terminer l'audience

6 d'aujourd'hui. En effet, ceci porte sur les préparatifs à effectuer, sur

7 des questions de procédure et sur des questions relatives à ma défense.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, le Juge Bonomy.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourriez-vous préciser au moins une

10 chose pour moi. Est-ce que vous êtes en train de dire qu'à aucune phase du

11 procès, il n'y a eu aucun rapport de travail, disons convenable, efficace,

12 entre vous et Me Kay ?

13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien sûr que non. Jamais je n'ai rencontré Me

14 Kay, sauf si vous estimez que le fait que nous soyons dans le même prétoire

15 équivaut à une réunion. C'est vrai ce que dit Me Kay. Parfois, lorsque j'ai

16 contre-interrogé des témoins, j'ai fait référence à des questions fort bien

17 posées par Me Kay ou par

18 Me Tapuskovic, car ces deux hommes se sont relayés pour poser des questions

19 à des témoins après que je les avais contre-interrogés, bien sûr, en vertu

20 de votre décision et avec votre autorisation. Mais jamais je n'ai donné la

21 moindre instruction à Me Kay, ni d'ailleurs à Me Tapuskovic. Je vais plutôt

22 le formuler autrement. J'ai effectivement rencontré Me Tapuskovic, mais

23 c'est après qu'il est cessé d'être Ami de la Chambre. C'est un homme très

24 courtois. Avant de partir, il est venu me voir au quartier pénitentiaire

25 pour prendre congé de moi. C'est ce qu'on fait normalement lorsqu'on a un

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1 ami de la Chambre. C'était vraiment une visite de courtoisie puisque son

2 mandat s'était terminé. Il venait me voir avant de rentrer à Belgrade.

3 Sinon, je n'ai jamais rencontré ni Me Kay, ni

4 Me Tapuskovic.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, mais vos associés ont bien

7 rencontré, ont eu des contacts avec Me Kay, n'est-ce pas ?

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Quiconque participe à ce procès, rencontrera

9 tôt ou tard d'autres confrères dans la salle réservée aux avocats de la

10 Défense. Mais cela ne m'intéresse pas. Aucun de mes associés n'a reçu

11 d'instructions destinées à prévoir une rencontre avec Me Kay, pas même

12 lorsque Me Kay dit -- et je ne pensais pas qu'il serait nécessaire

13 d'apporter un commentaire à ses dires ni nécessaire de le corriger

14 lorsqu'il l'a dit. Vous savez, que dans sa présentation, il a dit qu'il

15 avait reçu une liste de témoins que j'avais fournie. Il l'a obtenue du

16 chargé de liaison, pas de mes associés. Mes associés et moi-même, nous

17 avons communiqué avec la personne chargée en tant que personne nommée par

18 le Greffe de liaison. Je vous ai dit ici dans ce prétoire, lorsque vous

19 m'avez demandé si j'avais des objections ou quelque chose du goût, je ne

20 sais plus exactement comment vous avez formulé votre question, mais j'ai

21 répondu que peu m'importait, que cela ne me dérangeait pas que Me Kay

22 utilise quelque chose que j'avais fourni au chargé de liaison.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur

24 Milosevic.

25 Monsieur Nice, vous avez la parole.

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1 M. NICE : [interprétation] Il faut sans aucun doute voir cette requête dans

2 un contexte plus large, car je suppose qu'il faut prévoir la poursuite du

3 procès de façon générale. Alors, faisons le bilan de la situation actuelle;

4 faisons un rapport d'étapes.

5 Vous avez maintenant l'accusé qui vient de fournir des observations. Je

6 voudrais réagir avant de les oublier.

7 Je suis assez d'accord avec lui sur un point, enfin, il ne l'a pas dit que

8 je le dirais, mais il dit qu'il n'est pas possible de détruire quelque

9 chose qui n'a jamais existé. C'est ainsi qu'il qualifiait les rapports avec

10 Me Kay. Me Kay a longtemps parlé en utilisant un vocable "client". J'ai

11 consulté un dictionnaire, et apparemment, un client c'est quelqu'un qui

12 demande l'avis d'un avocat. Cela n'a jamais été le cas ici. Si vous voulez,

13 l'accusé et Me Kay sont ad idem. Jamais il n'y a eu de rapport de client à

14 avocat. Ce n'est pas ce que nous sommes en train d'étudier, nous essayons

15 de voir si la requête de Me Kay, aux fins de révocation de son mandat,

16 aboutira ou pas.

17 Nous avons entendu ce qu'a dit l'accusé. Rappelez-vous ce que la Chambre a

18 fait pour l'aider. Certains diront pour lui convenir, on aurait quelquefois

19 l'impression que c'est lui qui mène la danse, qui dirige les débats. Nous

20 pensons que pour régler la question concernant Me Kay, il faut tenir ceci à

21 l'esprit. Jusqu'où sommes-nous allés ?

22 Nous avons eu trois amis de la Chambre qui ont été désignés pour l'aider,

23 pour présenter des arguments lorsqu'il daigne les autoriser à le faire, ou

24 lorsque lui ne veut pas présenter ses arguments. Nous avons Mme Anoya,

25 chargée de liaison, qui a été fournie aussi pour offrir ses services, et a

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1 fait un travail admirable. Parce qu'il refuse de présenter des requêtes

2 officielles, il ne veut pas communiquer comme le ferait un être humain

3 raisonnable. Il a fait fi de tous les moyens qui lui avaient été offerts

4 pour montrer qu'il est tout à fait indépendant de ce procès. Il en est

5 partie prenante, mais il refuse de le reconnaître, ou de participer à ce

6 procès.

7 Maintenant, rétrospectivement et prospectivement, on peut se dire que nous

8 en sommes à une phase du procès, où si l'on tient trop compte des avis de

9 l'accusé, le moment est quand même venu que la Chambre se demande quel est

10 son pouvoir, son autorité apparente ou réelle, s'interroge sur le maintien

11 de cette autorité qu'il faut conserver en dépit de tout ce qu'a fait

12 l'accusé, qui a tenté d'y porter atteinte à cette autorité.

13 Avant d'aborder la question au fond, mais en gardant à l'esprit ces

14 observations générales, j'aimerais que nous pensions à l'avenir et que nous

15 pensions à ce qu'a imposé la Chambre d'appel, à supposer que Me Kay ne soit

16 pas déchargé de ses fonctions actuelles.

17 Le Juge Bonomy a présenté un cas de figure concret. Je propose deux autres

18 hypothèses. La plus probable, l'accusé en a parlé lui-même. C'est

19 l'hypothèse ou à un moment donné, parce que le travail qu'il a est un

20 fardeau trop lourd, vu sa situation de santé, donc il tombe malade.

21 Jusqu'alors, il a fait venir des témoins, il a dit aux témoins que

22 l'interdiction qu'il avait donnée de comparaître est levée, donc maintenant

23 on a un afflux de témoins.

24 La Chambre est --

25 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai une objection.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Excusez-moi. Attendez, Monsieur

2 Milosevic. Monsieur Nice, nous n'avons pas la preuve que l'accusé ait

3 demandé aux témoins de ne pas comparaître. Je suppose que c'est pour cela

4 qu'il veut prendre la parole. Je vous demande peut-être de retirer ce que

5 vous venez de dire.

6 M. NICE : [interprétation] J'en ai déjà parlé, Monsieur le Président, et je

7 pensais à ceci. Une question avait été posée à l'accusé, une question

8 directe par M. le Juge Bonomy, qui lui avait demandé s'il voulait que les

9 témoins comparaissent. Il a refusé de donner une réponse claire. Il a donné

10 une réponse cryptée qu'auront peut-être utilisée des témoins, et je l'ai

11 dit très clairement à la Chambre d'appel. Cela veut dire que peut-être les

12 témoins devaient contribuer à entraver la justice de façon collective. Je

13 ne retire pas ce que j'ai dit, même s'il y a un concept positif lorsqu'on

14 dit "signalisé" cela ne montre pas la façon tout à fait subtile dont

15 l'accusé a manipulé le problème. Cela ne veut pas dire qu'il ne va pas

16 changer d'avis à l'avenir.

17 On pourrait très bien entrevoir cette hypothèse : le procès se poursuit,

18 puisque maintenant l'accusé a eu ce qu'il voulait et de façon apparemment

19 satisfaisante. Me Kay, faisant mon Dieu ce qu'il lui reste à faire. Arrive

20 le moment où Me Kay doit jouer un rôle plus important comme cela à

21 l'improviste. L'accusé n'a pas intérêt à la poursuite du procès. Il va

22 redire au témoin de ne pas venir, et on sera de retour à la case départ.

23 J'ai évoqué une solution de rechange que je n'ai aucune peine à répéter.

24 L'accusé vous l'a dit, je n'ai pas la note in extenso mais il a dit qu'il

25 allait lui-même citer les témoins, qu'il allait lui-même les interroger.

Page 33288

1 Attendons de voir si la façon dont il va citer des témoins va répondre aux

2 conditions imposées par la Chambre, à savoir que la dignité de la Chambre

3 doit être préservée. La Chambre n'oubliera pas que j'ai posé la question de

4 savoir comment un Tribunal, une Chambre peut permettre à un accusé, qui

5 assure sa propre défense, de citer ou de demander la comparution de

6 témoins, enfin lui qui parle d'un Tribunal "illégal." A supposer que cette

7 démarche ne soit pas acceptée par la Chambre, cela veut dire que quelque

8 part, il va entraver le déroulement de la justice, et Me Kay ne pourra pas

9 prendre la relève.

10 Ceci donne lieu à une troisième éventualité. Vous serez peut-être poussé à

11 y réfléchir par le tout dernier point avancé par l'accusé. Que va-t-on

12 faire lorsqu'il veut la comparution de témoins dont il pense que vous devez

13 veiller à ce qu'ils soient contre-interrogés ? Il va demander peut-être un

14 système spécial. Est-ce qu'il va demander la participation de Me Kay pour

15 que viennent des témoins qui refuseraient de venir s'ils étaient accusés

16 directement ou interrogés directement par l'accusé mais qui accepteraient

17 de venir si l'invitation était formulée de façon plus polie par son

18 conseil ?

19 Je pense qu'il faut penser à ce cas de figure, et nous devons voir comment

20 nous pourrons faire progresser l'affaire.

21 Quelle sera notre conclusion ? C'est que vous ne trouverez en droit

22 aucun motif vous forçant à faire droit à la requête de Me Kay. Vous pouvez

23 le débouter. Il y a peut-être des raisons pratiques, pragmatiques qui vous

24 pousseront à prendre un autre cap, à vous d'en décider. Peut-être pourrais-

25 je intervenir sur ce point un peu plus tard.

Page 33289

1 Me Kay a envoyé une lettre malencontreuse tant dans sa teneur mais

2 surtout dans sa date. Si vous la regardez de plus près, vous verrez que

3 dans cette lettre, il n'y a rien qui n'aurait pas été disponible avant la

4 décision ou l'audience en appel. On ne peut que se perdre en conjecture sur

5 l'avenir que ceci aurait eu ou le résultat que ceci aurait eu si on avait

6 retardé l'envoi de la lettre pour ne l'envoyer qu'après la décision rendue.

7 C'est le Juge Bonomy qui a présenté cette possibilité, et cela est

8 clair. Le seul facteur supplémentaire à ce dont disposaient déjà

9 Me Higgins et Me Kay avant l'audience en appel, ce sont les critiques

10 publiques et les autres griefs déposés à leur encontre. Me Kay nous dit que

11 sa probité et son professionnalisme ont été mis en cause, et qu'il ne veut

12 pas rester ici si l'accusé pense qu'il n'est pas à la hauteur de sa

13 profession.

14 Vous savez, je suis au banc du Procureur, depuis pratiquement le

15 début du procès, et des critiques publiques, ou autres, j'en ai reçues.

16 Cela va de pair si vous voulez, c'est dans le bagage de notre profession.

17 Des critiques, il y en a eues. Les Juges ont été embus à des critiques, y

18 compris feu le Juge May, mais ceci ne nous empêche pas de poursuivre notre

19 travail.

20 J'avais presque oublié, Mme le Procureur, moi-même, d'autres membres

21 de l'équipe ont même été l'objet d'accusation contre nous en Serbie. La

22 Serbie qui affirmait qu'on voulait nuire à l'accusé, voir le tuer. Ceci ne

23 nous a pas empêché de continuer. C'est dans ce cadre juridique que nous

24 opérons et nous devons répondre à ces conditions.

25 Vous savez que dans des procès de ce genre, on ne peut pas s'attendre

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1 à ce que la publicité nous soit toujours favorable. On devrait de toute

2 façon l'oublier, parce que cela ne joue dans l'intérêt de personne.

3 Après bon examen de la question, nous avons le sentiment que Me Kay

4 et Me Higgins essaient maintenant de résilier un contrat, un contrat qu'ils

5 ont conclu, qu'ils ont accepté en parfaite connaissance des problèmes qui

6 risquaient de se présenter. Inutile de réciter la litanie des problèmes,

7 vous avez toutes les décisions de la Chambre, toutes les écritures de

8 l'Accusation. Vous avez toutes les réponses de ceux qui étaient alors des

9 amis de la Chambre et la proposition qu'ils ont présentée. Tout ceci montre

10 que la non coopération catégorique de l'accusé était quelque chose qu'il

11 fallait prendre en compte dans la commission d'office d'un conseil. Me Kay

12 et Me Higgins le savaient lorsqu'ils ont accepté le contrat du greffier.

13 Sauf preuve du contraire, ce n'était pas un contrat conditionnel qui était

14 subordonné à la collaboration de l'accusé.

15 C'est un contrat qui n'est pas possible maintenant de résilier ou de

16 défaire dans la mesure où les parties redeviendraient ce qu'elles étaient

17 au départ, et ceci pour au moins trois raisons. Tout d'abord, parce que,

18 c'est de façon publique, que les conseils commis d'office ont dit qu'il

19 serait impossible à quiconque de remplir leurs fonctions. Ce qui veut dire

20 que cela diminue ou que cela pratiquement empêche la possibilité d'avoir

21 d'autres personnes qui prennent leur relève.

22 Deuxième motif, l'appel qu'ils avaient interjeté a été couronné de

23 succès par rapport à la décision prise au départ par la Chambre de première

24 instance.

25 Troisième motif, ils ont déjà cité des témoins.

Page 33291

1 Je crois que les choses auraient été différentes ou auraient pu l'être si

2 la requête aux fins de révocation s'était faite de façon privée sans

3 publicité. En disant, "Désolé, vu les circonstances, nous ne sommes pas à

4 la hauteur de la tâche." Ce n'est pas ce qui s'est passé. Forcément, on se

5 rappelle la fable d'Ésope, du chien dans la grange. Voir note de

6 l'interprète, p.4

7 Vous avez l'ordonnance du Tribunal, elle est très claire. Un conseil commis

8 d'office, ceci ne relève pas du rapport de confidentialité avec un client.

9 Là, je suis d'accord avec l'accusé. Un conseil commis d'office était censé

10 le représenter indépendamment de ses desiderata éventuels pour autant, bien

11 sûr, pour autant, et je suis sûr qu'ils auraient essayé de le faire, pour

12 autant qu'ils obtiennent sous une forme ou une autre des instructions,

13 certaines consignes de sa part.

14 Que dit l'ordonnance : "Représenter l'accusé en présentant à

15 l'accusé tous les arguments de faits et de droits qu'ils estiment utiles de

16 présenter, de solliciter auprès de la Chambre de première instance la

17 délivrance de toute ordonnance qu'ils estiment nécessaire pour leur

18 permettre de plaider convenablement la cause de l'accusé, y compris celle

19 d'ordonnance de production ou de comparution forcée, de discuter avec

20 l'accusé de la conduite du procès, de s'efforcer d'obtenir des instructions

21 de sa part et de tenir compte des opinions qu'il a exprimées tout en

22 conservant le droit de décider de la marche à suivre".

23 Me Kay a dit qu'il n'y avait pas eu de consultation. En se servant du

24 vocable "consultation. En fait, il y a eu des consultations de Me Kay.

25 Manifestement, puisqu'il a essayé de parler avec l'accusé et c'est la

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1 décision unilatérale de l'accusé de ne pas le consulter qui a engendré le

2 problème. Je suis sûr que Me Kay et Me Higgins ont essayé de parler avec

3 l'accusé de la conduite de la représentation de ses moyens, qu'il serait

4 utile d'obtenir des instructions de sa part, et de tenir compte de son

5 avis.

6 On dit dans l'ordonnance "qu'il faut préserver en tout temps les

7 intérêts de l'accusé," mais qu'est-ce que cela veut dire ? En termes

8 judiciaires, en termes de technique judiciaire, ce sont les intérêts dans

9 le cadre judiciaire, ce ne sont pas nécessairement ses intérêts en termes

10 de publicité ou de propagande pour lui. Il est tout à fait possible qu'un

11 conseil, s'il se retrouve aux manettes une fois de plus, parce que l'accusé

12 serait malade, il peut, sur le plan de la technique judiciaire, déterminer

13 cet intérêt de l'accusé. Il se peut que l'accusé, en présentant ses moyens

14 lui-même, n'ait pas servi ses propres intérêts judicaires, mais ses avocats

15 n'auraient aucune peine à le faire. Je parle ici de Me Kay et de Me

16 Higgins.

17 L'INTERPRÈTE : L'interprète précise que la fable d'Ésope c'était de

18 l'empêcher de tourner en rond.

19 Vous avez eu de longs discours dans ce Tribunal. J'essaie de retrouver un

20 passage pertinent. Je pense que l'accusé a été, c'est assez surprenant,

21 très circonspect, lorsqu'il a expliqué quelle était sa position juridique.

22 Nous avons beaucoup de rhétoriques qui viennent de lui, mais ce n'est pas

23 important. On trouve très bien ici en quelques mots la stratégie, le

24 fondement même de sa défense. C'est quelque chose qu'il a dit au début

25 dans ses déclarations liminaires.

Page 33293

1 Il a dit notamment ceci : "Le camp serbe avait trois objectifs que l'on

2 peut prendre en considération lorsqu'on analyse l'ensemble de la situation

3 politique. Premièrement, il s'agissait de préserver la Fédération

4 yougoslave et, dans la mesure du possible, d'obtenir le droit à

5 l'autodétermination tel que ce droit dont jouissaient les autres peuples de

6 la Yougoslavie. Puis si cet objectif était impossible, il fallait essayer

7 de trouver des mécanismes par le truchement des négociations pour faire en

8 sorte que les Serbes de Bosnie-Herzégovine se trouvent dans une position

9 équitable.

10 Plus tard, il a dit à propos du Kosovo : "Lorsque l'on parle du

11 Kosovo, il n'y a pas une seule once de preuve indiquant qu'un crime, un

12 seul délit a été commis. Non seulement pour exécuter les ordres de

13 quelqu'un, mais il n'y a pas non plus eu de connaissance préalable des

14 généraux qui étaient au commandement. Aucun d'eux n'avaient ce genre de

15 connaissance."

16 Puis, plus tard, il explique par le menu sa défense suivant lesquels

17 si des crimes, si et quand ils ont été commis, ont fait l'objet de

18 sanctions. Il y a d'autres extraits de ses interventions qui représentent

19 des instructions tout à fait appropriées pour les conseils de la Défense

20 qui devront savoir quoi étudier et comment les présenter, s'ils sont à

21 nouveau aux commandes.

22 Vous avez le paragraphe numéro 2 de l'ordonnance qui indique : "L'accusé

23 peut, avec l'autorisation de la Chambre de première instance, continuer à

24 participer de façon active au procès, notamment lorsque cela est approprié

25 lors de l'interrogatoire de témoins." C'est une phrase qui a été inversée.

Page 33294

1 L'accusé a le droit de présenter à tout moment une requête raisonnable

2 devant la Chambre de première instance par laquelle il sollicite

3 l'autorisation de désigner lui-même un conseil. Il faut savoir que l'ordre

4 a été inversé.

5 Cette ordonnance qui, bien entendu, existait avant que Me Kay et Me Higgins

6 n'acceptent de jouer le rôle de conseil commis d'office, indique de façon

7 très claire et très pragmatique qu'ils sont en quelque sorte à la

8 disposition du Tribunal, qu'ils doivent servir le Tribunal, bien que leur

9 devoir est d'identifier les meilleurs intérêts de l'accusé et de le

10 défendre. Ce n'est pas une position exclusive des avocats qui œuvrent ou

11 qui opèrent dans le contexte du système de "common law." Je pense, par

12 exemple, aux personnes, aux auteurs ou aux procès de délits sexuels.

13 La Chambre d'appel m'avait demandé, lorsque nous examinions le régime

14 précédent, avant que ne soit inversé l'ordre de poser les questions, on

15 m'avait demandé s'il y avait des raisons qui seraient abordées et qui

16 pourraient indiquer pourquoi les témoins refusent de connaître. On m'avait

17 demandé ce qui se produirait s'il y avait un changement. J'avais indiqué

18 que Me Kay et Me Higgins feraient de leur mieux. Ils citeraient les témoins

19 qu'ils peuvent citer, et s'il y en a aucun, ou s'il n'y a aucun,

20 véritablement aucun témoin qui souhaite venir, à la suite de la non

21 coopération de l'accusé, il ne pourrait, en fait, que se faire des

22 reproches à lui-même.

23 Si Me Kay et Me Higgins ne sont pas autorisés à être déchargés de leurs

24 fonctions, il se peut qu'à un moment donné il faudra qu'ils présentent les

25 moyens à décharge et ce, de façon active. A ce moment- là, s'il y a des

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1 obstructions de la part de témoins ou d'autres, ils feront de leur mieux et

2 ils ne pourront jamais être critiqués pour ce faire.

3 Les affaires au pénal sont potentiellement terminées à la fin de la

4 présentation des moyens à charge. Si un accusé rend la présentation des

5 moyens à décharge impossible ou choisit de ne pas présenter de moyens à

6 décharge, il n'est pas besoin de présenter ces moyens à décharge.

7 Dans l'affaire Blagojevic, et cela a déjà été résumé par Monsieur le Juge

8 Bonomy, dans la Chambre d'appel, il y a un paragraphe dont nous sommes

9 particulièrement tributaires, qui inclus une note en bas de page. Il s'agit

10 du paragraphe 27 et il s'agit des circonstances factuelles dans l'affaire

11 Blagojevic et peut-être que je devrais vous donner lecture de l'ensemble du

12 paragraphe, mais je suis conscient du temps que j'ai déjà pris. Le

13 paragraphe 27

14 stipule :

15 "Que la Chambre d'appel rejette l'argument présenté par l'appelant suivant

16 lequel le nombre d'heures passées par l'appelant avec le conseil au niveau

17 du quartier pénitentiaire 'ne permet pas de divulguer ou de communiquer ce

18 qui a fait l'objet de discussions,' ou 'ne permet pas de divulguer ou de

19 communiquer si M. Blagojevic a eu véritablement la possibilité de coopérer

20 et d'influencer

21 Me Karnavas sur la façon de procéder.' L'appelant ne se contenterait pas de

22 la révocation du co-conseil, pour ce qui est du travail de ce co-conseil,

23 et de la façon dont la Chambre de première instance dépend de ces dossiers,

24 lorsque les parties travaillent et font partie d'une équipe pour ce qui est

25 de présenter la défense d'un appelant --"

Page 33296

1 L'INTERPRÈTE : Veuillez ralentir.

2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nice, on vous demande de

3 ralentir.

4 M. NICE : [interprétation] Je suis désolé, mais il serait très difficile de

5 jauger la vitesse de lecture.

6 "La Chambre d'appel réfute l'argument de l'appelant, à savoir, il

7 s'agit d'un point de vue 'subjectif' sur la façon dont son procès pourrait

8 être poursuivi, et que cela en fait pourrait porter tort à l'obligation

9 professionnelle de son conseil qui doit agir pour défendre les meilleurs

10 intérêts de son appelant. Le conseil n'est pas [comme interprété] obligé de

11 consulter son appelant, et il n'est tenu par le point de vue de son

12 appelant sur la façon où la meilleure méthode qui permettrait de parvenir à

13 l'objectif qui est d'assurer la défense de l'appelant."

14 Si un conseil commis d'office se retrouve maître de la situation et

15 aux manettes, c'est un principe de droit qui émane de la Chambre d'appel et

16 qui est sans réserve.

17 Paragraphe 31 stipule que : "La Chambre d'appel rejette l'affirmation

18 de l'appelant suivant laquelle la Chambre de première instance n'a pas

19 accordé suffisamment de poids à l'allégation de l'appelant suivant laquelle

20 il n'a pas eu de contact avec l'équipe de la Défense depuis…" une date

21 précise. "La Chambre de première instance considère que les circonstances

22 qui sont relatives à la détérioration de la communication, étaient d'avis

23 que cette détérioration a été le résultat du refus de l'appelant à

24 communiquer avec le conseil, et que le conseil doit maintenir ses

25 obligations professionnelles vis-à-vis de l'appelant. En fait, l'appelant

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1 n'a pas contesté cette conclusion. La Chambre d'appel est d'avis que la

2 conclusion de la Chambre de première instance à propos de la détérioration

3 de la communication, ou la dégradation de la communication, a été le

4 résultat des mesures prises par l'appelant et que ces mesures ont été

5 prises par l'appelant 'uniquement afin d'avoir une base pour pouvoir avoir

6 un nouveau conseil.' La Chambre d'appel marque son accord avec la Chambre

7 de première instance suivant laquelle cette mesure est utilisée comme

8 méthode de protestation et n'est pas autorisée."

9 Je souhaiterais revenir à un sentiment que cette Chambre de première

10 instance a car nous avons déjà pris des mesures pour convenir à l'accusé,

11 et je pense que nous aurions dû nous trouver dans une situation entre

12 l'ordonnance rendue par la Chambre de première instance et la décision

13 prise par la Chambre d'appel. Car, lorsqu'une ordonnance rendue par la

14 Chambre de première instance, et je pense à l'ordonnance d'origine, cette

15 ordonnance était en vigueur, aurait dû être respectée par tout le monde, y

16 compris par l'accusé. Nous nous trouvions dans cette situation.

17 Par conséquent, si l'accusé n'était pas contraint de coopérer de

18 façon active avec Me Kay, mais il devait. C'est son devoir vis-à-vis de ce

19 Tribunal. Il devait en tout cas ne pas faire preuve d'obstructionnisme vis-

20 à-vis de Me Kay. En fait, la Chambre de première instance décidera et

21 prendra une décision à propos de ce qu'il a fait, et décidera afin de voir

22 si les sentiments de désarroi et d'anxiété exprimés par Me Kay et Me

23 Higgins sont tels, et il faudra faire référence au paragraphe 31 de la

24 décision de la Chambre d'appel dans l'affaire Blagojevic.

25 Je passe maintenant au paragraphe 50. "La Chambre d'appel refuse

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1 l'affirmation de l'appelant suivant laquelle la Chambre de première

2 instance a commis une erreur lorsqu'elle a accepté la conclusion du

3 greffier, qui a indiqué que le manque de confiance que l'appelant a vis-à-

4 vis de son conseil, ne doit jamais être regardé comme plus important que le

5 tort qu'il a causé à ce procès.

6 Dans la décision contestée, la Chambre de première instance a fait

7 référence à ce qui a été présenté par le greffier, mais il n'a pas fondé sa

8 décision sur la décision du greffier, de refuser la requête présentée par

9 l'appelant suivant laquelle un nouveau conseil devrait être commis

10 d'office. Il y a également la confirmation de la Chambre de première

11 instance, confirmation de cette décision qui se fonde sur le fait. Etant

12 donné qu'il n'y a pas eu de fondement pour révoquer le conseil, un

13 remplacement inutile d'un conseil serait une violation du droit de

14 l'appelant qui doit être défendu par un conseil qui connaît très bien

15 l'affaire, et qui a déjà consacré de nombreuses centaines d'heures pour

16 assurer cette défense. Par conséquent, la Chambre de première instance

17 indique le fait de conserver ce conseil commis d'office pour l'appelant,

18 lui permettra non seulement de protéger son -- de faire en sorte que son

19 droit soit protégé, et qu'il pourra bénéficier d'un procès juste et

20 équitable, mais il pourra faire en sorte de protéger son droit qui consiste

21 à être jugé de façon rapide. A moins donc que la santé de l'accusé ne soit

22 pas mauvaise, il me semble quasiment inévitable d'envisager la situation

23 suivante. Lorsque l'accusé et surtout si l'accusé veut procéder à toutes

24 les séances de récolement avec les témoins lui-même, il faudra envisager

25 l'emploi d'un conseil commis d'office.

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1 Tout ce qui a été dit dans ce paragraphe, il s'agit du paragraphe 50

2 de l'affaire Blagojevic, me semble porter sur des questions de principe,

3 qui ne sont pas liées au fait. Il me semble que cela pourra être

4 entièrement appliqué ici.

5 Puis finalement, il s'agit toujours de la fin de l'Article 50 dans

6 l'affaire Blagojevic. Il s'agit de la fin de la page 24. Vous avez les

7 observations de la Chambre de première instance qui se trouvent citer, et

8 c'est la Chambre de première instance que l'on cite : Un accusé n'a pas le

9 droit unilatéral de détruire la confiance instaurée entre lui-même, et son

10 conseil. De même un accusé n'a pas le droit de revendiquer une perturbation

11 de la communication, et je pense à des actions unilatérales, telles qu'un

12 refus de recevoir des documents, un reçu [comme interprété] d'avoir des

13 réunions avec son conseil, en espérant que ces mesures engendreront ou

14 aboutiront à la révocation du conseil de la part du greffier. Nous pouvons

15 voir différents parallèles entre ces faits et les faits de cette affaire.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, est-ce que nous

17 arrivons maintenant, nous sommes très prêts ou très proches plutôt de

18 l'heure pour la pause.

19 M. NICE : [interprétation] Pour ce qui est du droit, j'aimerais très

20 brièvement évoquer un passage, et je souhaiterais également faire quelques

21 observations d'ordre pratique.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il a été dit qu'il avait

23 incompatibilité avec les codes, ne l'oubliez pas.

24 M. NICE : [interprétation] J'étudierais cette question.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons lever la séance ou

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1 l'audience pour 20 minutes.

2 --- L'audience est suspendue à 12 heures 24.

3 --- L'audience est reprise à 12 heures 55.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, poursuivez.

5 M. NICE : [interprétation] Avant d'évoquer l'affaire suivante, il y a un

6 autre passage de la décision Blagojevic qu'il conviendrait que je cite. Je

7 rappelle à la Chambre ceci. Me Kay a dit que c'était sans pertinence, mais

8 Blagojevic demandait la révocation du conseil en application de l'Article

9 19, de la directive pratique. Donc, c'est tout à fait pertinent. Paragraphe

10 53 de ladite décision Blagojevic, on parle des conditions dans lesquels on

11 peut mettre fin à un mandat où il peut y avoir une demande de révocation en

12 application de l'Article 9(B) du Greffier, où il est dit que la fin de ce

13 mandat peut se faire si ceci se fait sans effet délétère pour le client. Il

14 y a quatre autres alinéas. Deux nous intéressent. Si le client insiste pour

15 poursuivre un objectif que le conseil juge odieux ou imprudent. Si le

16 client ne rempli pas une obligation envers le conseil concernant les

17 services de ces dernier, et a été raisonnablement averti que le conseil

18 mettra fin à sa représentation, ou demanderait à en être déchargé s'il ne

19 s'acquittait pas de son obligation, ou s'il existe une autre raison

20 valable.

21 Au paragraphe 54 de la décision Blagojevic, la Chambre d'appel dit

22 ceci : "Dans des tels circonstances, lorsqu'un appelant, sans raison

23 justifiée, s'oppose à ce que son conseil commis d'office le représente, les

24 obligations professionnelles de ce conseil à poursuivre la représentation

25 de l'accusé demeurent."

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1 Lorsque tous les faits, envisagés au fin du présent débat, présentés

2 par moi ou par les Juges, feraient que le conseil commis d'office, s'il

3 était maintenu, se trouverait dans la situation que résume le paragraphe

4 54, en effet. L'appelant, à toutes fins utiles, s'opposerait sans raison

5 justifiée, comme c'est le cas ici, s'opposerait explicitement à la

6 représentation de ses intérêts, et ceci n'exonère pas le conseil commis

7 d'office de ses devoirs.

8 Dans l'affaire Barayagwiza du TPIR, vous la connaissez cette affaire,

9 y est concerné un accusé qui refuse d'être présent dans le prétoire. La

10 question posée était de savoir si cette condition et les instructions

11 données à son conseil justifiaient que ceci mette fin à leur mandat.

12 Réponse, négative, en l'espèce. Paragraphe 24 du jugement en première

13 instance, ce point est exposé de façon succincte. En l'espèce, M.

14 Barayagwiza boycott, en fait, le Tribunal des Nations Unies. Il a choisi

15 aussi bien d'être absent aux débats que de donner des instructions quant à

16 la façon dont ses intérêts devraient être représentés au cours du procès,

17 pas plus qu'il n'a précisé sa stratégie. Dans une telle situation, son

18 conseil ne peut pas simplement répondre à ses "instructions" de ne pas le

19 défendre. Des telles instructions, de l'avis de la Chambre, devraient

20 plutôt être interprétées comme étant une tentative d'entraver le cours de

21 la justice. Ceci étant, il n'est pas possible de faire valoir que le

22 conseil a l'obligation d'appliquer ces instructions, et que ne pas le faire

23 constituerait un motif de fin de mandat.

24 Est-ce que ceci s'applique ? Est-ce que cette décision, cette

25 jurisprudence tout à fait persuasive et convaincante, s'applique ici ? Oui.

Page 33302

1 D'autant que Me Kay savait pertinemment quelle était la portée de son

2 mandat, puisque maintenant l'ordre, suivi pour les interrogatoires, a été

3 renversé.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous interrompe. Vous venez de

5 citer Barayagwiza. C'était la Chambre de première instance ?

6 M. NICE : [interprétation] Oui.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ceci a été porté en appel ?

8 M. NICE : [interprétation] Je pense que oui.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je me demande si cet aspect-là était

10 confirmé par la Chambre d'appel.

11 M. NICE : [interprétation] Nous allons vérifier.

12 Mais ce qui me frappe particulièrement, c'est le fait que Me Kay savait

13 quelle était la portée de ses responsabilités en tant que conseil commis

14 d'office, puisque l'ordre suivi pour l'interrogatoire des témoins était

15 renversé. Car il était très clair dans ses explications, il a dit qu'il ne

16 poserait deux questions que s'il recevait des instructions dans ce sens, ou

17 en l'absence d'instruction contraire.

18 Je ne sais pas si je rends bien ce qu'il a dit. Ce n'est peut-être

19 pas l'impression que je donne, mais c'est un fait. Il ne se considérait pas

20 comme ayant les coups de franches, lui permettant d'exercer son libre

21 arbitre, et qu'il allait d'abord demander des instructions à l'accusé.

22 J'espère que ceci répond à la question de

23 M. Bonomy, qui s'inquiétait peut-être de ne pas me voir bien rendre les

24 propos de Me Kay.

25 M. KAY : [interprétation] Cette question n'a pas été abordée dans l'affaire

Page 33303

1 Barayagwiza, et la question posée à la Chambre de première instance était

2 de savoir s'il avait donné des instructions suffisamment claires à son

3 conseil pour son retrait. Cela a été fait. Il y a eu retrait. Il lui

4 arrivait de nouveau conseil, et qui n'a pas contesté sa position.

5 Me Higgins se trouvait partie prenante dans l'affaire des médias, une

6 affaire connexe au TPIR.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Maître Kay.

8 M. NICE : [interprétation] Merci de ce rappel. Cette partie-là du procès et

9 la décision y afférente, c'était avant que des instructions explicites nous

10 étaient fournies par l'accusé pour le retrait de son conseil.

11 Messieurs les Juges, nous avons reçu, il y a quelques jours de cela,

12 plusieurs documents portant sur les codes de déontologie.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît, Monsieur

14 Nice. Il n'y a rien de déraisonnable dans la réponse fournie par Me Kay, à

15 savoir que la première chose à faire se serait de consulter l'accusé. Il

16 l'a dit, dans le contexte où il lui dirait que l'avis s'est forgé quant au

17 défaut, et lui donnerait l'occasion de demander les instructions faites

18 dans le droit fil de l'ordonnance sur les règles à suivre.

19 M. NICE : [interprétation] Effectivement. La première chose qu'il devrait

20 faire, c'est se tourner vers l'accusé, mais c'est assez manifeste, sinon

21 limpide, vu les explications de l'accusé, qui a dit qu'il ne recevait pas

22 d'instructions. A ce moment-là, le conseil doit exercer son libre arbitre

23 ou, à défaut, il ne se conformerait pas aux obligations qui lui ont été

24 confiées. Rien dans les dires de l'accusé, sous une forme ou une autre, ne

25 montre que s'il tombait malade ou si, en vu d'une décision de la Chambre,

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1 où il ne serait pas en mesure d'assurer lui-même sa défense, rien ne semble

2 dire qu'il donnerait des instructions à Me Kay ou à qui que ce soit

3 d'autre.

4 Nous n'avons pas vraiment eu l'occasion d'examiner à fond ces codes de

5 déontologie, mais, en tout état de cause, on peut aborder cette question de

6 façon assez générale. Me Kay exprime des préoccupations, c'est-à-dire qu'il

7 y a un conflit d'intérêt, qu'il y a une rupture ou détérioration de la

8 communication, et qu'il n'a pas d'instructions de la part de son client.

9 Première chose. Ces codes, que ce soit le Greffier du TPIY ou du barreau

10 d'Angleterre et du pays de Galles, ou de l'équivalent en Ecosse, n'évoque

11 pas ce cas de figure, comme l'a dit assez clairement, me semble-t-il, le

12 Juge Bonomy.

13 Deuxième point, le conflit d'intérêt ce n'est pas du tout ce qui nous

14 concerne ici. En général, un conflit d'intérêt est indépendant de la

15 personne qu'on représente. Il surgit lorsque les devoirs et obligations que

16 vous avez envers la personne que vous représentez se trouvent en conflit

17 avec vos propres intérêts. En finalité, on s'inquiète ici d'une rupture de

18 communication avec quelqu'un que Me Kay qualifie de client, c'est cela qui

19 le perturbe en l'absence d'instructions. Nous l'avons déjà constaté, je

20 l'ai d'ailleurs fait remarqué précédemment et l'accusé, lui-même, l'a

21 confirmé, il n'y a pas de rapports, pas de relations entre client et avocat

22 ici. Par conséquent, l'accusé l'a dit lui-même, on ne peut pas dire qu'il y

23 aura eu "rupture" ou détérioration. C'est sans intérêt. De même, on ne peut

24 pas s'attendre à ce que l'accusé donne des instructions. L'ordonnance

25 rendue par la Chambre de première instance avait été façonnée dans

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1 l'attente que cette situation soit probable, très probable, ou certaine, ce

2 qui veut dire que le code ne s'applique, à moins qu'on ne puisse extraire

3 de ces codes un principe général, qui, s'il était violé, Me Kay et Me

4 Higgins se trouveraient en violation en ayant accepté ce rôle de conseil,

5 et parce que quelque chose serait intervenu dans l'intervalle. Mais on peut

6 répondre de la façon suivante, rien qui se serait présenté dans

7 l'intervalle n'a été mentionné et qui aurait été en violation d'un principe

8 général. Ce principe général n'ayant pas été précisé, du moins comme ayant

9 une incidence sur ce procès.

10 Nous avons une liasse reprenant la jurisprudence et la doctrine.

11 Prenons rapidement le Greffier des avocats de l'Union européenne. C'est le

12 document 4. Malheureusement, je n'ai pas le numéro de la page du Greffe.

13 C'est la page 5, en tout cas. Le préambule qui dit que les fonctions d'un

14 avocat lui imposent toute une série d'obligations juridiques et morales qui

15 peuvent paraître être en conflit les unes avec les autres, obligations

16 envers le client, le tribunal et d'autres autorités devant lesquelles le

17 conseil plaide la cause de son client ou agit en son nom. Je passe le point

18 suivant ou le public, l'opinion publique pour laquelle l'existence d'une

19 profession libre et indépendante est tenue par des règles établies par la

20 profession, elle-même, est une manière de sauvegarder les pouvoirs de

21 l'Etat et d'autres intérêts de société, la fonction est quelque peu plus

22 vaste.

23 Page 8, c'est le numéro qui se trouve au bas de la page, le point

24 2.4, respect du règlement d'autres barreaux ou d'autres ordres d'avocats.

25 "En vertu des lois régissant l'Union européenne et la zone économique

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1 européenne, un avocat d'un autre état membre peut être tenu de se conformer

2 aux règlements du barreau de l'état membre où il exerce. Les avocats ont le

3 devoir de s'informer des règles qui régiront l'accomplissement d'une

4 activité juridique quelle qu'elle soit."

5 Il faut garder ceci à l'esprit. Aujourd'hui, tous les arguments avancés à

6 l'appui de la requête quant à ce qui pouvait signifier en puissance, Me Kay

7 le savait avant même d'accepter ce mandat. En invoquant maintenant les

8 codes de déontologie comme ils l'ont fait aujourd'hui, les avocats commis

9 d'office auraient dû savoir, à ce moment-là déjà, qu'ils se trouvaient dans

10 une position où il leur aurait été impossible d'exercer leur profession, et

11 auraient dû prendre des dispositions dans ce sens. C'est peut-être en vertu

12 des restrictions de la marge de manœuvre de la Chambre aujourd'hui qui

13 constitue la raison primordiale poussant à maintenir le mandat de Me Kay et

14 de Me Higgins, s'il en était ainsi décidé.

15 Page 9, point 2.7 --

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice. Ce pragmatisme en soi

17 n'est pas une base suffisante pour décider de maintenir le mandat de Me

18 Kay, n'est-ce pas ? En fait, la Chambre a, peut-être, très peu de marche de

19 manœuvre.

20 M. NICE : [interprétation] Je n'en suis pas sûr. Je ne sais pas si, par la

21 force des choses, on doit seulement qualifier ceci de pragmatisme. Je ne

22 suis pas non plus sûr que ce soit pertinent. Vous connaissez l'historique

23 de ce procès. Il faut mettre ceci en équation avec l'obligation des Juges

24 qui est d'assurer un procès équitable et rapide, responsabilité

25 essentielle. Une autre responsabilité, un autre intérêt qui est l'autorité

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1 et la dignité du Tribunal, quelquefois c'est exprimé de façon autonome ou

2 en rapport avec le premier intérêt, c'est la nécessité de mener ce procès à

3 son terme dans des délais raisonnables. Si l'on conclut qu'en dépit de ce

4 que souhaite les avocats commis d'office, on peut exiger des avocats commis

5 d'office qu'ils poursuivent leur mandat dans ce procès, même s'il était

6 décidé qu'il fallait un avocat commis d'office de plus, ceci aurait des

7 retombées sur la durée du procès. C'est une considération qui va, peut-

8 être, influer sur la décision prise par la Chambre. C'est à cet égard que

9 je ne suis pas d'accord avec votre observation.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.

11 M. NICE : [interprétation] J'essaie de trouver la partie pertinente dans

12 deux de ces codes. L'un de ces codes exige du conseil qu'il agisse sans

13 tarder lorsqu'il reconnaît un problème et de ne pas tarder à prendre des

14 mesures. J'essaierai de retrouver le passage.

15 Mme Graham me dit que je vous ai donné le mauvais numéro de page. Je

16 vous demande d'examiner le paragraphe 2.7, page du Greffe

17 39 403, le voici : "L'intérêt du client, pour autant que soient respectées

18 toutes les règles de droit et la conduite professionnelle, un avocat doit

19 toujours agir dans l'intérêt de son client et doit placer l'intérêt de son

20 client avant son intérêt personnel ou avant l'intérêt de confrères."

21 Pour les raisons déjà avancées, il n'y a aucun problème si Me Kay

22 fait passer avant ses propres intérêts, les intérêts d'une personne qu'il

23 décrit comme étant son client, mais qui, au fond, ne l'a jamais été.

24 Le numéro 3. "Les rapports avec le client. Acceptation et fin des

25 instructions. Un avocat ne va pas présenter les moyens d'une partie, sauf

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1 s'il en a reçu les instructions. Mais il peut plaider au cas où il a été

2 reçu des instructions d'un autre avocat qui, lui, agit au nom de la partie

3 concernée, ou si l'affaire ou le mandat lui a été confié par une instance

4 compétente."

5 A première vue, ceci reprend une situation du système civiliste, où vous

6 avez les circonstances où il est approprié d'avoir commission d'office d'un

7 conseil. Nous allons, peut-être, ici parler du retrait immédiat. Point 3.2.

8 Conflit d'intérêt. Non. Je ne pense pas que ceci va nous assister.

9 Ce matin ceux qui connaissent bien le système en vigueur en ex-

10 Yougoslavie et en Bosnie-Herzégovine m'ont dit que le droit régissant la

11 profession d'avocat ne mentionne pas l'absence de coopération de la part de

12 l'accusé comme étant une raison valable de se décharger de cette fonction

13 lorsqu'un avocat a été commis d'office. Au début de la présente audience,

14 hier ou aujourd'hui, vous avez dit qu'une telle commission se ferait

15 automatiquement.

16 Il m'a également été dit que le droit ou la loi de la RFY dit que

17 s'il y a conflit d'intérêt et que s'il y a obligation de retrait du conseil

18 de la Défense, que tout ceci est stipulé dans le droit, et que l'accusé

19 n'est pas mentionné lorsqu'on parle de conflit d'intérêt.

20 Il se peut que ceci ait été évoqué ici même ou devant la Chambre

21 d'appel, mais je pense que c'est ici. L'absence de coopération en ex-

22 Yougoslavie cela ne se présentait pas. La culture juridique est différente

23 avec le système civiliste. L'imposition d'un conseil, il n'y a pas absence

24 de collaboration de l'accusé en pratique. Donc, il n'était pas nécessaire

25 que ceci soit mentionné dans le Greffier.

Page 33309

1 Nous avons été en mesure d'étudier une partie du code allemand, qui est un

2 code civiliste qui peut vous intéresser. Je n'ai pas les documents ici sous

3 la main. En Allemagne, si je comprends bien, c'est ce qu'on m'a dit, un

4 accusé n'a pas le droit d'avoir un conseil particulier lorsqu'il y a

5 commission d'office d'un conseil. Le président d'un tribunal ou d'une

6 chambre allemande ne remplacera ce conseil que s'il y a des faits concrets

7 qui montrent qu'il y a rupture d'une relation de confiance, et que si la

8 bonne administration et l'administration rapide de la justice n'est pas

9 lésée par une telle décision.

10 Nous avons examiné d'autres codes qui, tous, prennent comme

11 postulat un rapport consensuel entre le client et l'avocat. J'ai peut-être

12 fait l'impasse sur tel ou tel code, vous attirerai mon attention là-dessus

13 si c'est le cas, mais ceci ne concerne pas notre affaire.

14 Je le répète, ceci aurait dû pousser Me Higgins et Me Kay à ne pas

15 accepter ce mandat lorsque celui-ci leur a été proposé.

16 J'essaie de terminer assez rapidement. Je n'aurais plus que quelques

17 points à évoquer. En droit, quelle est la position de l'accusé en vertu de

18 l'ordonnance rendue par la Chambre d'appel ? Il y a eu, hier, une

19 discussion qui a été lancée par ce que disait le Juge Robinson. La

20 prémisse, c'était que l'accusé avait maintenant l'autorisation de préparer

21 la comparution de ses témoins. En fait, si vous analysez la décision, elle

22 ne le dit pas de façon expresse. On ne parle pas de la préparation, du

23 récolement des témoins.

24 Vous voudrez, peut-être, consulter la décision concernée avant que je

25 n'aille plus loin. C'est à la fin de la décision dans le dispositif, pages

Page 33310

1 15 et 16. Voici ce qui est dit, paragraphe 19, ligne 5 : "Ces règles

2 doivent, au moins, se fonder sur la présomption par défaut que lorsqu'il

3 sera en état de le faire, Slobodan Milosevic prendra en main sa Défense en

4 choisissant ses propres témoins, en les interrogant avant que les conseils

5 commis d'office n'aient la possibilité de le faire, en présentant lui-même

6 les arguments à l'appui de toutes requêtes qu'il jugera utile de présenter

7 devant la Chambre, en prononçant lui-même la plaidoirie et en prenant les

8 décisions stratégiques essentielles concernant la préparation et la

9 présentation de sa défense. Mais ce n'est qu'une présomption. Dans les

10 circonstances présentes, alors que M. Milosevic était suffisamment en bonne

11 santé pour pouvoir prononcer deux jours durant une vigoureuse déclaration

12 liminaire, la décision de restreindre aussi radicalement son droit à

13 participer au procès pour des raisons de santé constituait une erreur

14 d'appréciation. La Chambre d'appel peut toutefois, difficilement, prévoir

15 tous les problèmes de santé à venir ou saisir cette occasion pour essayer

16 de parer à toute éventualité. Elle laisse à la Chambre de première instance

17 le soin de trouver un juste équilibre qui permette à Slobodan Milosevic

18 d'exercer son droit fondamental à se défendre lui-même tout en préservant

19 l'intérêt fondamental qu'a le Tribunal de parvenir à un règlement

20 raisonnablement rapide des affaires dont il est saisi."

21 Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de lire autre chose. Je me

22 contenterai de dire qu'au paragraphe 21, il est répété que la Chambre

23 pourra rendre des ordonnances pour améliorer autant que de besoin le

24 déroulement des débats.

25 Il se pourrait que la Chambre d'appel n'ait pas abordé la question de

Page 33311

1 la préparation des témoins en raison de certaines choses qu'a dites

2 l'accusé à la Chambre d'appel lorsqu'il a parlé de ce qui lui semblait être

3 ses droits, j'en conviens dès lors, nous devons inscrire cette question

4 dans un contexte plus large que ce que ne semblent dire Me Kay et l'accusé.

5 Car l'accusé a pris soin de ne pas donner sa position et de ne pas afficher

6 cette position pour faire en sorte que la Chambre ne le fasse pas

7 travailler plus que trois jours par semaine en tout.

8 Je n'ai pas, en fait, je le crains la numérotation ou le numéro de la

9 page du compte rendu d'audience. Je n'ai pas le numéro complet. Il s'agit

10 de la page 27 du compte rendu d'audience. Non, en fait, il ne s'agit pas de

11 la page 27.

12 Il s'agit de la page 40 du compte rendu d'audience. Voilà ce qu'il a

13 dit : "Je vous ai prévenu Monsieur Meron, la dernière fois que nous avons

14 eu une discussion ici, et lorsqu'il était question que je devrais avoir

15 trois mois de préparation par opposition aux plusieurs années dont a

16 bénéficié l'autre partie, j'ai attiré votre attention sur la décision des

17 médecins qui indiquent je ne peux travailler que trois jours par semaine ce

18 qui est une période de temps très brève. A l'époque, vous aviez dit que

19 vous alliez examiner ces éléments, et il n'y a pas eu d'examen de ces

20 éléments."

21 Mme Graham me dit que les numéros de page étaient exacts, je pensais

22 qu'il s'agirait de numéros beaucoup plus élevés. J'ai oublié que la Chambre

23 d'appel commence au numéro 1.

24 A la page 41, ligne 6, il est dit : "J'aimerais dire à ce sujet que

25 lorsque ce régime de trois jours par semaine était respecté, ces trois

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1 jours de travail représentent non seulement des jours de travail passés

2 dans le prétoire, mais trois jours de travail en règle générale. Cela n'a

3 pas été pris en considération. Il n'y avait pas de problème à l'époque,

4 mais je reviendrai là-dessus ultérieurement." Au bas de la page 47 --

5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pourriez me donner la

6 date de l'audience de la Chambre d'appel ?

7 M. NICE : [interprétation] Il s'agissait du 21 octobre.

8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'accord.

9 M. NICE : [interprétation] A la page 47, à la ligne 21. Voilà ce qui est

10 écrit : "Voilà ce qui provoque le stress, le manque de sommeil et d'autres

11 problèmes. Cela représente un mépris profond de la règle qui avait été

12 indiquée et qui stipulait que je devais travailler seulement trois journées

13 par semaine, ce qui fait que l'attention a augmenté. En d'autres termes,

14 c'est la Chambre de première instance qui a provoqué cela du fait de leur

15 décision et des dates butoir qui ne peuvent pas respecter. A la page 49, il

16 fait référence à quelque chose que j'avais dit. Il dit : "Même M. Nice,

17 lorsqu'il a présenté ses arguments à la Chambre de première instance, a

18 essayé de faire en sorte que l'on me refuse une prorogation, en disant que

19 je travaillais de façon tout à fait efficace, et que je n'avais pas besoin

20 que ce nombre de trois jours par semaine soit augmenté."

21 A la page 51, il a indiqué qu'il devait avoir le droit de recevoir

22 des témoins lors des vacances judiciaires, et ce, toujours sur la base des

23 trois jours par semaine. A la page 52, voilà ce qu'il a dit à ligne 7. "Je

24 pense que nous pouvons préserver la dynamique du régime de trois jours par

25 semaine, avec la condition suivante : de temps à autre, je devrais avoir la

Page 33313

1 possibilité, pendant certaines semaines, de procéder au récolement des

2 témoins que j'ai l'intention de citer. Cela me semble être un calendrier de

3 travail tout à fait raisonnable qui devrait nous permettre de travailler de

4 façon tout à fait normale."

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, j'ai entendu votre

6 argument, je pense que ce que vous nous dites à propos du paragraphe 19 de

7 la décision de la Chambre d'appel, peut faire l'objet de différentes

8 interprétations. Je ne conclurais pas que le fait d'avoir omis une

9 référence à l'accusé, le fait d'avoir omis d'indiquer le droit de l'accusé

10 qui doit ou qui peut procéder au récolement des témoins, cela ne signifie

11 pas que la Chambre d'appel souhaitait l'inclure dans l'une de ses règles à

12 suivre.

13 Si vous prenez le paragraphe 20, il est indiqué : que la Chambre d'appel

14 tient à souligner que concrètement, -- si tout se passe bien, le procès

15 continuera comme lorsque l'accusé était en bonne santé.

16 Pour moi, cela signifie que tous les aspects, tous les rouages de la

17 préparation de la présentation de ses moyens à décharge, sont de son

18 ressort.

19 M. NICE : [interprétation] Je pense à cela, et je me demande s'il s'agit

20 d'une omission tout simplement. Puisque dans la phrase suivante, je

21 mettrais en exergue un mot, le mot qui est pour le profane. Pour le profane

22 qui verra Slobodan Milosevic tenir le rôle principal à l'audience, la

23 différence ne sera peut-être pas perceptible. D'une façon ou d'une autre,

24 bien entendu, si la Chambre conclut qu'elle devrait se prononcer en faveur

25 de l'interprétation de l'accusé --

Page 33314

1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, on me dit que nous

2 devons conclure à 13 heures 45.

3 M. NICE : [interprétation] Ce sera fait. D'une façon ou d'une autre, la

4 Chambre de première instance va devoir peut-être se débrouiller avec un

5 calendrier de travail, et l'accusé nous dit que le calendrier de travail

6 qui lui convient est un calendrier de travail de trois jours par semaine,

7 ce qui fait que vous devrez siéger une journée et demie, voire une journée

8 par semaine. C'est une possibilité que la Chambre d'appel a envisagée. Je

9 dois dire que les réponses obtenues de la part de l'accusé ont été

10 particulièrement peu satisfaisantes. Me Kay avait indiqué qu'il se pourrait

11 que cela représente deux jours ou deux journées et demie par semaine. Je

12 vous le dis, parce que lorsque vous avez un conseil commis d'office, le

13 conseil commis d'office doit être disponible pour préparer les témoins, et

14 ce, afin d'optimaliser le temps qui sera mis à la disposition de l'accusé

15 au sein du prétoire. Le problème vient du fait qu'il se peut que cela

16 demande la coopération de l'accusé. Je ne sais pas si nous pourrons

17 bénéficier de cette coopération.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelle serait l'utilité, ou pourquoi

19 est-ce qu'un conseil commis d'office devrait préparer et procéder aux

20 séances de récolement des témoins si l'accusé posera les questions au

21 témoin ?

22 M. NICE : [interprétation] Si l'accusé refuse d'expliquer sur quels faits

23 il souhaite poser des questions au témoin, ou sur quels faits il souhaite

24 procéder aux séances de récolement avec le témoin, alors personne -- rien

25 ne pourra être fait. Ce sera son choix. Nous devons revenir à la situation

Page 33315

1 suivant laquelle l'accusé essaiera de contrôler la situation en mettant des

2 obstacles. Si nous revenons à la réalité suivant laquelle il va utiliser sa

3 situation pour pouvoir damer le pion aux autres, il faut envisager de façon

4 précise ce que pourra faire un conseil commis d'office.

5 La Chambre de première instance a entendu ce qu'il avait à dire à propos du

6 régime de travail. Il ne faut pas oublier non plus ce qu'a dit précisément

7 la Chambre d'appel, bien que je comprenne tout à fait la question. Je

8 suppose qu'il s'agit tout simplement d'une omission. Je pense que la

9 Chambre de première instance devrait se rappeler des extraits ou des

10 passages du compte rendu d'audience, lorsque nous avons étudier de cela de

11 façon assez longue, avant finalement, de décider d'accorder une

12 interprétation à ce paragraphe.

13 Quelles sont les différentes possibilités qui s'offrent à la Chambre de

14 première instance ? Me Kay, lorsqu'il a présenté ses arguments a à moultes

15 reprises avancé une suggestion. Il a indiqué que d'une certaine façon, il

16 appartenait à l'accusé de déterminer ce qui se passerait. Il a expliqué

17 comment l'accusé n'avait pas véritablement mis des obstacles aux questions

18 qui avaient été posées au cinq premiers témoins, mais il a expliqué comment

19 leur tâche était impossible. Je dirais qu'il n'y a rien d'impossible s'ils

20 avaient accepté les décisions de la Chambre. J'ai observé que Me Kay avait

21 dit que la Chambre de première instance avait décidé qu'il poserait les

22 questions en premier, et que cela avait été un véritable choc pour lui. Je

23 dirais que dans les tribunaux, il appartient aux avocats et à toutes les

24 autres parties de réagir et de respecter les décisions légitimes qui sont

25 rendues par les tribunaux.

Page 33316

1 A la fin de la présentation des arguments de Me Kay, il semblerait

2 que si l'accusé venait à mettre des obstacles dans la tenue du procès, ou

3 s'il y avait un manque total de relation harmonieuse avec Me Kay, il n'y a

4 absolument rien que quiconque pourrait faire, si ce n'est, faire en sorte

5 que l'accusé puisse avoir le contrôle de la situation. Ce qui ne peut pas

6 être la bonne solution.

7 Comment régler et résoudre ce problème ? Comme je l'ai dit d'entrée, il n'y

8 a rien dans le droit qui obligerait cette Chambre de première instance à

9 décharger Me Kay et Me Higgins de leurs obligations. Bien entendu, personne

10 ne souhaite voir quelqu'un faire quelque chose qu'il ne souhaite absolument

11 pas faire. Je pense que c'est quelque chose qui devra être considéré par la

12 Chambre de première instance. Nous pensons et nous le disons

13 respectueusement à la Chambre de première instance, que cette Chambre devra

14 voir si le conseil commis d'office peut véritablement s'acquitter de sa

15 fonction soit maintenant, soit à une date ultérieure à l'avenir si les

16 choses évoluent comme elles devraient évoluer. Pour le moment, il pourrait

17 poser des questions supplémentaires. Dans un premier temps, ils pourraient

18 participer à la préparation des témoins si l'accusé disposait à coopérer et

19 à faire preuve de pragmatisme. Je pense que ce serait une fonction qui

20 serait utile pour eux, une fonction qu'ils pourraient mener à bien à

21 l'extérieur du Tribunal, ce qui fait qu'il ne pourrait plus faire l'objet

22 de critiques publiques qu'ils ne semblent pas apprécier.

23 Lorsque aussi, l'accusé donne le ton et pose des questions, s'il n'y

24 a pas lieu de poser d'autres questions, et si l'accusé est tout à fait

25 capable de poser ses questions et de maîtriser le système judiciaire au

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1 sein de ce prétoire.

2 Je pense que lorsque si, ou quand, l'accusé n'est pas en mesure de

3 poser des questions ou s'il n'est pas autorisé à le faire, alors, dans un

4 premier temps, il faudra savoir si les problèmes seront soulevés, s'il fait

5 preuve de non coopération ou s'il fait preuve d'obstructionnisme à l'égard

6 de me Kay, ce qui fait qu'il ne pourra pas faire son travail en bonne et

7 due forme. Parce que si c'est la situation dans laquelle nous allons nous

8 trouver, je pense qu'il est très difficile de voir quelle sera l'utilité

9 d'un conseil.

10 Si les conseils peuvent véritablement s'acquitter de certaines

11 tâches, et je pense à la progression des arguments juridiques. Nous avons

12 M. le Pr McCormack, qui va se pencher sur des questions de droit très, très

13 précises, et qui peut se pencher sur ces questions de droit. Jusqu'à

14 présent, l'accusé a indiqué de façon très, très claire qu'il ne présentera

15 jamais de requêtes relatives à procédure. A un moment donné, lorsque nous

16 savons que nous avons affaire à un homme qui a son intelligence et qui a

17 une compréhension parfaire du système, il faudra se demander pourquoi il

18 souhaiterait que des requêtes soient présentées en son nom.

19 Par exemple, si vous deviez opposer ou imposer un nouveau régime, un

20 régime tout à fait différent pour ce qui est de la conduite du procès, s'il

21 exprime son mécontentement, pourquoi est-ce que d'aucuns devraient

22 présenter en son nom ce genre de requêtes ? Pourquoi est-ce que nous

23 devrions prendre soin de lui alors qu'il a adopté l'attitude qu'il a

24 adoptée vis-à-vis de cette Chambre de première instance, ou alors qu'il a

25 adopté l'attitude qu'il a adoptée vis-à-vis de Me Kay ou de Me Higgins ?

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Les résultats de ces mesures se

2 passent d'explication, Monsieur Nice. Vous ne pouvez pas critiquer un

3 conseil commis d'office par le Tribunal qui interjette un appel. Lorsqu'il

4 est fait droit à cet appel, il est évident que cette personne a défendu au

5 mieux les intérêts de son client.

6 M. NICE : [interprétation] Il l'a fait, il l'a fait, je l'accepte. Mais le

7 fait est, Monsieur le Juge, que je pose la question, jusqu'où doit aller le

8 Tribunal avec un accusé qui s'est comporté de la façon dont il s'est

9 comporté ?

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous n'abordez pas la question

11 essentielle qui est la question de sa santé. Voilà ce qui se trouve au cœur

12 de la situation. Vous nous suggérez qu'il ne sert à rien, ou en fait, au vu

13 de la situation, vous suggérez qu'il n'est pas utile de conserver les

14 services de Me Kay et de Me Higgins.

15 M. NICE : [interprétation] Pour ce qui est de la préparation des témoins,

16 je pense qu'un conseil commis d'office peut véritablement jouer un rôle

17 lorsque l'accusé, du fait d'une mauvaise santé, n'est pas en mesure de le

18 faire lui-même. Le conseil, alors, doit citer les témoins. Cela dépend de

19 la période d'invalidité de l'accusé. Il doit véritablement préparer les

20 témoins et procéder à des séances de récolement avec les témoins.

21 Ce qui me préoccupe, c'est ce qui a été dit aujourd'hui lorsqu'il a

22 été question de difficultés insurmontables. Me Kay a indiqué qu'il ne

23 pouvait pas obtenir des instructions. Je pense qu'il n'a jamais été obligé

24 ou contraint d'obtenir des instructions. C'est la position qu'il a

25 exprimée, mais cela n'est pas au cœur du problème. Si vous donnez droit à

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1 sa requête, je ne sais pas qu'elles seraient ses fonctions résiduelles.

2 Je vous rappellerai ce que nous avons compris à la suite de votre

3 ordonnance. Le conseil ne devra pas être perturbé par le manque de

4 coopération, et ne devra pas être perturbé par le fait que l'accusé ne

5 souhaite pas coopérer. Il se contentera de citer des témoins, de préparer

6 ces témoins. Si les témoins, ou le témoin, pour une raison ou une autre ne

7 viendra pas, il ne devra pas présenter une requête aux fins d'être dégagé

8 de ses fonctions; il devra tout simplement dire qu'il a fait de son mieux.

9 Le problème, c'est que compte tenu de l'approche de Me Kay aujourd'hui et

10 hier, s'il se trouve dans cette situation, nous pouvons tout à fait nous

11 attendre à voir sa situation préservée, ou la situation perdurera. Il

12 pourra dire qu'il n'a pas pu agir. Voilà le problème.

13 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, si nous voulons placer

14 cette affaire dans un contexte beaucoup plus ample, nous vous inviterions à

15 prendre en considération pour résoudre ce problème, en sus de l'objectif à

16 long terme que s'est fixé la Chambre de première instance, qui ont été

17 identifiés, puisqu'il faudra qu'un terme soit mis à ce procès dans un délai

18 de temps considéré comme raisonnable, j'aimerais inviter très

19 respectueusement la Chambre de première instance à considérer l'élément

20 suivant : si nous prévoyons un temps ou une date pour la conclusion de ce

21 procès, il faudra faire en sorte que les règles à suivre soient telles

22 qu'elles permettent de le faire.

23 Je pense que c'est une façon d'aborder le problème, car l'accusé crée

24 des problèmes pour ce qui est du régime de travail en n'utilisant pas les

25 services de l'avocat, en s'efforçant de faire cavalier seul et en

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1 travaillait d'arrache-pied à telle enseigne, qu'il s'en trouve mal. Je

2 pense qu'à un moment donné, cette conjugaison de différents facteurs et

3 obstacles devra être prise en considération. Il faudra dire à l'accusé

4 "Vous pourrez disposer de tant de temps; cette période de temps sera

5 identifiée. Vous pourrez utiliser ce temps à bon escient, comme il vous

6 siéra pour présenter vos moyens à décharge. Parce que sinon, cette Chambre

7 de première instance est maîtrisée et contrôlée à bien des aspects pour ce

8 qui est de la conduite de ce procès. En fait, c'est l'accusé qui contrôle

9 cela.

10 Monsieur le Président, pour répondre à M. Bonomy, nous pensons que Me Kay

11 et Me Higgins ne doivent pas être autorisés à être déchargés de leurs

12 fonctions. Nous l'indiquons à la suite de tout ce que nous avons dit

13 aujourd'hui et hier. Maître Kay.

14 M. KAY : [interprétation] Oui. J'ai une réponse de fond à apporter. Je sais

15 que j'en aurais pour une demi-heure, et je sais que ce prétoire sera occupé

16 cet après-midi.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je pensais que nous allions pouvoir

18 terminer aujourd'hui avec cette affaire pour pouvoir reprendre les

19 dépositions des témoins demain.

20 [La Chambre de première instance se concerte]

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous avez

22 un témoin qui est prévu demain. Quelle sera la durée de sa déposition ?

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voulais vous soumettre la question en

24 urgence aujourd'hui, Monsieur Robinson. Aujourd'hui, j'étais censé préparer

25 l'audition de ce témoin. Malheureusement, et ce n'est pas de ma faute, la

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1 journée a été consacrée à autre chose. Je vous demande donc l'autorisation

2 de procéder au récolement de ce témoin demain et de le faire témoigner la

3 semaine prochaine. C'est une chose.

4 Autre chose, vous êtes au courant du fait que depuis deux mois, je

5 n'ai plus de contact avec les témoins. J'ai commencé à les rétablir suite à

6 la décision de la Chambre d'appel, qui m'a restitué le droit que j'avais de

7 citer et d'interroger des témoins. J'ai besoin d'une semaine, d'une période

8 de transition, parce qu'avant, je n'avais pas le moindre contact avec les

9 témoins. J'ai besoin de cette semaine pour préparer la première série de

10 témoins qui sont censés comparaître en vertu d'un calendrier de trois

11 journées d'audience par semaine. Je peux préparer l'audition de ce témoin

12 aujourd'hui. J'étais censé faire cela aujourd'hui, ce qui n'est pas

13 possible pour des raisons manifestes. J'aimerais vous demander cela. Je

14 vous demande aussi un délai me permettant de rétablir ces contacts et de

15 préparer l'audition de plusieurs témoins pour assurer un flux continu selon

16 le calendrier prévu.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous formulez deux requêtes. La

18 première étant que vous soit accordée la journée de demain afin d'assurer

19 le récolement du témoin qui devait déposer demain. Ce témoin déposerait

20 alors la semaine prochaine. Votre deuxième requête, c'est celle d'avoir une

21 période, un délai d'une semaine au cours de laquelle vous allez vouloir

22 rétablir les contacts avec les témoins.

23 Nous allons nous consulter.

24 [La Chambre de première instance se concerte]

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, le témoin, il

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1 devait être entendu par vous aujourd'hui à 15 heures. C'est ce qui nous

2 avait été dit, mais cette phase de récolement ne devait pas prendre toute

3 une journée.

4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, aujourd'hui, nous avons

5 passé toute la journée à nous occuper de ces questions. Je suis aussi ici

6 toute la journée. Maintenant, j'aurais une heure et demie, de trois à

7 quatre heures et demie. Cela ne me suffit pas pour préparer l'audition de

8 ce témoin. Toute chose étant égale.

9 Vous le savez, M. Nice, il a pris jusqu'à une semaine pour préparer

10 l'audition d'un témoin; je ne peux pas faire cela en l'espace d'une heure.

11 Je pense que ma requête est raisonnable. Je ne vous demande pas de

12 privilèges ici; je vous demande un délai raisonnable pour m'acquitter de la

13 tâche qui m'est confiée et qui m'est nécessaire. Vous pouvez accepter ou

14 rejeter; à vous de décider. Je pense que ma requête est raisonnable.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce témoin, il pourrait déposer la

16 semaine prochaine si ce récolement se fait demain ? Est-ce que vous savez

17 s'il est disponible la semaine prochaine ?

18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Pour autant que je le sache, oui.

19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le président de la Chambre vous a

20 demandé si ce témoin, il était censé être entendu par vous à 15 heures. Il

21 vous demandait s'il y avait effectivement un rendez-vous qui avait été pris

22 à 15 heures.

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] On m'a dit, il y a quelques jours, que je

24 pourrais préparer l'audition de ce témoin aujourd'hui, que c'est

25 aujourd'hui que cela se ferait. On ne m'a pas dit à partir de 15 heures;

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1 cependant, aujourd'hui, lorsqu'on a constaté que l'audience se poursuivait

2 toute la journée, on a dit que ce témoin peut venir à 15 heures. Cela ne me

3 donne pas assez de temps s'il vient me voir à 15 heures. Je n'ai pas assez

4 de temps pour bien préparer sa déposition.

5 [La Chambre de première instance se concerte]

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Voici ce que nous allons faire,

7 Monsieur Milosevic. Demain matin, nous reprendrons l'audience consacrée à

8 la requête de Me Kay. Cela durera au maximum 40 minutes. Vous disposerez du

9 reste de la journée pour procéder à la préparation de votre témoin, qui

10 pourra déposer la semaine prochaine. Est-ce que nous avons -- oui, la

11 semaine, c'est mardi pas lundi que nous reprenons l'audience.

12 Demain, nous allons rendre notre décision relative à votre deuxième

13 requête, qui consistait à demander un délai d'une semaine afin de renouer

14 les contacts avec les témoins prévus dans votre liste.

15 L'audience reprendra demain à 9 heures 00.

16 --- L'audience est levée à 13 heures 51 et reprendra le jeudi 11 novembre

17 2004, à 9 heures.

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