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1 Le mardi 12 avril 2005
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 03.
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, oui.
6 M. NICE : [interprétation] J'ai demandé à ce que l'on garde le témoin à
7 l'extérieur du prétoire pour quelques minutes. La Chambre se souviendra que
8 la semaine passée, le témoin présent a fourni un témoignage à caractère
9 d'expert, et il a touché à des questions dont a traité le témoin de la
10 Chambre, le Dr Helena Ranta. J'ai demandé à la Chambre de m'autoriser à
11 contacter le Dr Ranta, et hier, elle est arrivée ici et se trouve ce matin
12 ici.
13 Etant donné qu'il s'agit d'un témoin de la Chambre, je lui ai d'abord
14 demandé si elle a reçu une transcription, et nous lui avons demandé ses
15 commentaires au sujet du dit témoignage. Nous vous demanderions de
16 l'autoriser à suivre le procès dans la galerie du public, et au cas où cela
17 s'avérerait approprier, elle pourrait fournir des conseils à M. Saxon, qui
18 se chargera de contre-interroger le témoin que nous avons ici.
19 Cela a été fort aimable de sa part de s'être mise à notre disposition dans
20 un délai aussi bref. Aussi, estimons que compte tenu de toutes ces
21 circonstances et de l'évolution des événements, il serait utile de
22 poursuivre nos activités de cette façon-ci.
23 [La Chambre de première instance se concerte]
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Kay.
25 M. KAY : [interprétation] Le professeur Ranta -- le Dr Ranta était, bien
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1 sûr, un témoin de la Chambre plutôt qu'un témoin à charge. La Chambre se
2 souviendra qu'elle avait rendu une ordonnance à laquelle elle a répondu et
3 elle a donc témoigné. Elle n'est le témoin d'aucune des deux parties, et
4 nous estimons qu'il serait approprié qu'elle adopte une position
5 particulière avec le Procureur. Bien sûr, elle pourrait être à la
6 disposition pour que l'une ou l'autre partie puisse la consulter avec
7 l'autorisation de la Chambre. Bien sûr, nous estimons qu'il serait peu
8 approprié qu'elle témoigne ici en temps que témoin de l'Accusation et un
9 instrument de l'Accusation. Si elle doit remplir une telle fonction, je
10 crois qu'il serait important qu'elle soit mise à la disposition des deux
11 parties et qu'elle ne se mette pas en position où elle souhaiterait
12 s'associer avec l'une des parties.
13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Au sujet de Mme Ranta, vous voulez dire.
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] En ce qui me concerne, vous pouvez décider
17 comme bon vous semble. Cela ne me dérange pas du tout qu'elle prenne part à
18 notre travail.
19 J'aurais une autre question en matière de procédure que j'aimerais
20 soulever. Veuillez garder cela à l'esprit, je vous prie.
21 M. NICE : [interprétation] En réponse au point soulevé par
22 Me Kay, si elle n'est pas en mesure de nous contacter directement et de
23 nous parler directement, cela deviendra un petit peu artificiel et très
24 lent. Nous avons demandé cette permission qu'elle puisse venir ce week-end,
25 car en réalité, elle a déjà coopéré avec nous en tant qu'expert ordinaire,
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1 et je souhaite simplement qu'elle puisse répondre à un certain nombre de
2 questions.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je crois que le point soulevé par Me
4 Kay est autre. Il s'agit de question de perception et de mise à disposition
5 de façon générale. S'il s'agit d'avoir des échanges qui seront murmurés
6 devant la Chambre de première instance, je ne pense pas que ce soit une
7 façon appropriée de traiter un témoin qui est un témoin de la Chambre.
8 Compte tenu de ceci, elle devrait pouvoir être mise à la disposition des
9 deux parties et pouvoir être consultée par les deux, je crois qu'elle peut
10 être présente lors du témoignage d'un autre témoin, à savoir, où elle doit
11 être assise et c'est comme cela que je vais considérer la question.
12 M. NICE : [interprétation] Je suis sûr qu'elle sera disposée à parler à
13 d'autres membres de la Chambre ou d'autres parties de la Chambre. Si la
14 Chambre souhaite insister pour qu'il y ait des consultations, je crois qu'à
15 ce moment-là nous pourrions le faire à part en dehors de son témoignage.
16 Cela rendra simplement la procédure plus longue.
17 [La Chambre de première instance se concerte]
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je crois que Mme Ranta devrait être
19 assise dans la galerie du public et pourra répondre aux questions des deux
20 parties si cela s'avère nécessaire.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Au sujet de ce que vous avez dit vous-même la
24 fois passée, je tenais à demander à ce qu'après le témoin Dobricanin, l'on
25 ait le témoin Jasovic tout de suite. Je voudrais vous rappeler, Monsieur
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1 Robinson, que vous avez dit, et je vais donner lecture dans le compte rendu
2 d'audience, en vous adressant à moi, vous avez dit : "Si vous avez
3 l'intention de citer une personne en la qualité de témoin, cette personne
4 sera citée à comparaître au plus tôt."
5 Comme ceci est précisément le plus tôt dont vous avez parlé, conformément à
6 votre ordonnance, je suis passé par l'officier de liaison et je suis entré
7 en contact aux fins de m'entretenir avec le témoin, le témoin a disposé, a
8 témoigné, et l'opportunité la plus proche serait celle qui prendrait
9 commencement après le témoignage de ce témoin-ci.
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice.
11 M. NICE : [interprétation] Je m'oppose à l'ajout du nom de ce témoin à la
12 liste des témoins. Cela n'a pas été traité. Je peux expliquer quelque chose
13 par l'intermédiaire de la Chambre de première instance à l'accusé. Il
14 pensait avoir pris une observation particulière en estimant que c'était la
15 décision prise par l'Accusation pour appeler ce témoin. L'Accusation ne
16 s'occupe pas de procédure. En tout cas, faites très attention de ne pas le
17 faire. Il est essentiel que l'accusé comprenne que lorsqu'il a été averti
18 de la présence de Jasovic dans ce bâtiment est un des nombreux exemples qui
19 indique ou illustre que l'Accusation tente d'aider l'accusé. L'accusé
20 n'était pas un avocat professionnel et il y a un certain nombre de choses
21 qu'il ne sait pas, et nous essayons de lui faciliter la tâche.
22 Nous n'avons aucunement suggéré que ce témoin devrait être cité à la barre,
23 ni admettre qu'il serait approprié de l'appeler à la barre. Cela eut été
24 notre position de produire à ce moment-là trois déclarations de témoin qui
25 ont une certaine importance dans cette affaire, puisqu'il s'agit de
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1 personnes qui viennent de Racak, qui sont décédées, qui étaient membres de
2 l'UCK lorsque l'Accusation a présenté ses moyens dans le sens contraire.
3 Aucune explication n'a été fournie. C'est la raison pour laquelle le témoin
4 ne devrait pas être cité à la barre et pourquoi leurs déclarations
5 devraient être présentées, qu'il s'agisse en fait d'ouï-dire, double ouï-
6 dire.
7 Dans son témoignage précédent, Mme Ranta ou le Dr Ranta, je suis
8 tombé par hasard sur une demande présentée par l'accusé, demandant à ce que
9 des déclarations de Dunjic, de Dobricanin soient lues au cours de ce
10 témoignage, et M. le Juge May a fait la remarque à ce moment-là pour dire
11 que cela n'était pas la pratique communément adoptée de présenter des
12 déclarations d'individus lorsqu'une procédure existait aux fins de les
13 fournir en vertu du Règlement de procédure et de preuve, puisqu'il
14 s'agissait de citer directement des témoins à la barre.
15 Nous avons été très clairs à ce sujet depuis le début, malgré les efforts
16 qui ont été faits pour citer ces témoins. Nous estimons que le témoin doit
17 venir de même témoigner. Il n'y a aucune raison ou motif qui justifie
18 l'audition d'un témoignage par ouï-dire, et au plan technique, ceci n'est
19 pas recevable en ce qui concerne Jasovic.
20 Je vais essayer de vous retrouver la référence en question, vu ce week-end.
21 A la page 17 762, en réponse à l'accusé, M. le Juge May a dit : "Vous savez
22 que notre règle habituelle qui s'applique ici, nous n'acceptons pas de
23 déclaration de témoin à moins qu'une règle particulière n'ait été adoptée à
24 cet égard. Cette déclaration de témoin, si vous souhaitez citer le témoin à
25 la barre, vous pouvez le faire, mais lorsque, en général, les documents sur
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1 lesquels un contre-interrogatoire n'a pas été mené sur les documents qui en
2 général ne sont pas recevables."
3 En outre, on vient de me remettre un dossier, un dossier qui émane de la
4 Défense et par l'intermédiaire de Jasovic, il souhaite maintenant présenter
5 quelque chose comme 80 déclarations de témoins que je vous ai montrées, et
6 aucune de ces déclarations n'est pas traduite. Si cela porte sur des
7 questions essentielles présentées par la Défense, il me semble que les
8 témoins devraient être cités à la barre. Si la Chambre de première instance
9 décide que cela est approprié, nonobstant le fait que nous nous y opposons
10 que ces témoins peuvent être entendus bien qu'il s'agisse d'ouï-dire, à ce
11 moment-là, il faudrait mener une enquête là-dessus avant l'audition du
12 témoin.
13 J'ai deux objections à soulever ici : la première, c'est qu'il n'y a
14 aucun motif pour permet de justifier l'ajout du nom de ce témoin à la liste
15 de témoins. Deuxièmement, le témoignage qu'il souhaite présenter n'est pas
16 admissible car s'il concerne des sujets importants, il devrait émaner
17 directement de la bouche du témoin; et troisièmement, je ne suis pas en
18 mesure de traiter ce genre de documents à ce stade de la procédure.
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, est-ce que vous êtes
20 en train de dire en somme que l'Article 92 bis et 89(F) sont des articles
21 exhaustifs si on tient compte des circonstances dans lesquelles des
22 déclarations de témoins peuvent être présentées ?
23 M. NICE : [interprétation] Je ne pense pas que je puisse dire cela, bien
24 que ce soit une remarque qui ait été faite par les Juges de la Chambre, M.
25 le Juge Kwon. Ce sujet a été abordé dans ce cadre-là. Je ne pense pas qu'il
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1 s'agisse ici d'articles exhaustifs, car les dispositions permettant
2 d'accepter de façon générale les témoignages par ouï-dire sont entendus au
3 sens large, quelquefois, remplaceraient si vous voulez. Cela signifie ou
4 cela correspond à dire qu'il y a certaines limites qui sont imposées au
5 89(F) et 92 bis.
6 Ce que je puis dire c'est que dans la pratique de cette Chambre consiste à
7 dire qu'un témoignage important doit venir de témoins qui ont été
8 identifiés, reconnus, et qui sont en vie et qui doivent venir témoigner de
9 vive voix - Jovic est un très bon exemple de cela - et dans le cas de
10 témoins ou de personnes qui sont décédés. M. le Juge May avait fait cette
11 observation au cours du témoignage de Mme Ranta. Il s'agit ici en fait
12 d'une pratique communément adoptée.
13 Je crois que ce témoignage pourrait être important, pourrait, voire même,
14 très important par rapport au récit de Racak et l'histoire de Racak. Aucune
15 enquête n'a été menée par l'accusé pour savoir si ces témoins étaient
16 disponibles et pouvaient venir témoigner. Il n'a fait aucun effort pour les
17 citer à la barre, aucun effort pour vérifier si ces déclarations qui ont
18 été, semble-t-il, recueillies par un officier de police, sont retrouvables
19 ou non.
20 Je crois que ces documents devraient être fournis par le -- je crois
21 que ce témoin devrait venir témoigner de vive voix. Aucun motif ne peut
22 être invoqué dans la pratique de cette Chambre ou conformément au
23 Règlement, qu'il s'agit d'éléments entendus, d'ouï-dire au deuxième degré,
24 et que cela pourrait être entendu de la bouche du dernier témoin ou qu'il
25 s'agirait plutôt d'un ouï-dire tel que cela est cité par le témoin.
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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je crois que le critère important
2 ici est que cela ait une incidence sur les agissements et la conduite de
3 l'accusé.
4 M. NICE : [interprétation] J'aurais souhaité plutôt le premier, non pas le
5 dernier, parce que nous avons suffisamment d'exigences ici qui s'appliquent
6 au témoin comme Jovic. J'entends, Jovic peut évoquer les agissements à la
7 conduite de l'accusé. Il y en a d'autres aussi qui pourraient venir
8 témoigner.
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le point que vous voulez
10 soulever ici, il s'agit de savoir si l'on suit l'Article 92 bis, si cela
11 porte sur les agissements à la conduite de l'accusé, si la déclaration
12 n'est pas admissible. En tout cas, cela soulève la question, à savoir, si
13 les parties à ce moment-là peuvent décider si ce témoin est disponible pour
14 le contre-interrogatoire, en vertu du 89(F), à savoir, s'il est disponible
15 pour le contre-interrogatoire.
16 Monsieur Kay.
17 M. KAY : [interprétation] Je crois qu'il est important de repartir un petit
18 peu en arrière. Ces déclarations étaient présentées par le témoin. Mme le
19 Témoin avait mené une enquête sur les circonstances concernant le meurtre
20 de Racak. Elle avait un dossier qu'elle avait préparé. Il s'agissait
21 d'éléments pertinents et à valeur probante. Il s'agissait de documents sur
22 lesquels elle s'est reposée. Si on n'avait pas produit de tels documents et
23 de preuves, ceci à l'époque était tout à fait pertinent et avait une valeur
24 probante et portait directement sur les points qui ont été soulevés à
25 l'époque.
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1 Cette question est posée parce que le Procureur souhaite contre-interroger
2 le témoin. M. le Juge se souviendra que M. Nice a allégué au témoin que les
3 déclarations de trois de ces témoins signés par l'homme répondant au nom de
4 Jasovic, avait été recueillies dans des circonstances difficiles, de
5 pression, de mauvaise foi et de conduites inacceptables. Il est même allé
6 plus loin. Il a même allégué au témoin, elle-même, qu'elle connaissait
7 l'existence de telles techniques exercées par les officiers de police. Elle
8 était tout à fait disposée à accepter cela. Voilà les circonstances dans
9 lesquelles les enquêtes ont été menées à Racak. C'est, en tout cas, ainsi
10 que le Procureur voyait les choses concernant les incidents de Racak et
11 d'autres meurtres.
12 Ayant présenté ces allégations, M. Nice souhaitait présenter différents
13 moyens de preuves, des interviews, des cassettes vidéo dans lesquelles ces
14 allégations ont été faites, et il se trouve que M. Jasovic, qui était
15 interrogateur à l'époque de ces trois témoins, était, à ce moment-là, un
16 témoin à charge.
17 Je crois qu'il est tout à fait approprié qu'un accusé puisse répondre
18 à de telles allégations qui sont graves en citant à la barre le témoin en
19 question pour qu'il puisse traiter cette question de façon correcte,
20 puisque M. Nice a lui, pu présenter ses moyens et que l'accusé devrait
21 pouvoir présenter ses moyens également.
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Qu'en est-il des déclarations, les
23 déclarations que l'accusé souhaite verser par l'intermédiaire de M.
24 Jasovic.
25 M. KAY : [interprétation] Est-ce que je puis parler de ceci dans la
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1 deuxième partie de ma question. Il s'agit ici de M. Jasovic, puisque sa
2 question a été citée à propos du contre-interrogatoire. Dans les
3 circonstances nous ne connaissions pas le sens que pouvait avoir ce nom,
4 jusqu'au jour où M. Nice en a parlé. Nous avons relevé son nom dans les
5 déclarations qui ont été traduites.
6 Il s'agit d'un témoin à charge. Le Procureur a recueilli ses
7 déclarations, l'a fait venir dans ce bâtiment, connaissent les documents
8 qui ont été présentés par l'intermédiaire du témoin Marinkovic, et sont
9 tout à fait capables de l'appeler si l'accusé souhaite le citer.
10 Pour ce qui est d'un point différent, à savoir, la présentation de
11 différentes déclarations par l'intermédiaire de ce témoin, je n'ai
12 personnellement reçu aucune instruction à cet égard. Je ne puis être
13 d'aucune utilité à la Chambre de première instance, parce que ce n'est pas
14 quelque chose dont on m'a signé l'existence. Je sais simplement qu'il y a
15 des documents ici qui répondent à l'exigence de l'Article 89(F) [comme
16 interprété], que d'autres déclarations ont été enregistrées par ce témoin
17 Jasovic, et que ceci se trouve dans notre système électronique. Néanmoins,
18 nous ne savons pas comment ceux-ci doivent être utilisés.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je ne sais pas si M. le Juge Robinson
20 avait l'intention de procéder ainsi, mais je crois que cette question
21 portait sur les trois déclarations également. Est-ce que vous acceptez que
22 leur pertinence et valeur probante est limitée à un simple exercice qui
23 consisterait à démontrer quelles étaient les informations en possession du
24 juge Marinkovic à l'époque de l'enquête; par conséquent, des documents en
25 possession des autorités du gouvernement au sens général du terme.
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1 M. KAY : [interprétation] Oui, effectivement, il s'agit d'une question de
2 temps. Je n'ai été tenu informé d'aucune élément qui indiquerait le
3 contraire, à savoir, les allégations contre M. le Juge Marinkovic sont tout
4 à fait appropriées. On peut l'entendre de ce témoin et peut être utilisé
5 par la Defense. Pour ce qui est de l'autre point, je crois qu'il faudrait
6 une communication particulière, et il faudrait faire une demande officielle
7 pour demander à ce que ce témoin puisse être ajouté à la liste de témoins,
8 de façon à ce qu'il y ait des documents, et la communication entre les
9 différentes parties et les différentes pièces qui doivent être traduites. A
10 ce moment-là, on peut étudier la question. A ce stade, je ne suis pas en
11 mesure de répondre à cette question.
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Merci, Maître Kay.
13 Monsieur Milosevic, vous souhaitez répondre à ceci ?
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur Robinson, M. Jasovic a
15 témoigné. J'ai eu une entrevue avec lui. J'ai vu les documents qu'il a en
16 sa possession à ce moment-ci. Il témoigne au sujet de déclarations
17 recueillies par ses soins à lui, pendant une période de temps prolongée,
18 relativement longue, donc en 1998 et en 1999. Toutes ces déclarations ont
19 été recueillies conformément à la loi régissant l'Intérieur en sa qualité
20 d'enquêteur chargé d'investigations et un autre enquêteur qui a également
21 contresigné ces déclarations. On voit quelle est la façon dont il a
22 procédé.
23 Autre chose, j'estime qu'il est tout à fait utile, et je ne savais pas, je
24 n'avais aucune idée de la présence de ce témoin, mais je pense qu'il serait
25 utile de voir que dans ces déclarations, on retrouve bon nombre
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1 d'informations indiquant, ne serait qu'en partie, qu'il y a des
2 renseignements recueillis par les instances de l'Intérieur, portant sur les
3 activités des terroristes au niveau des villages de Racak, Rana [phon],
4 Petrovo, Melo Rana [phon]. Tout ceci sont des villages qui se trouvent dans
5 un segment ou un secteur assez restreint. Entre autres, dans bon nombre de
6 ces déclarations recueillies par ses soins dans le courant de 1998 et 1999,
7 avant qu'il y ait eu intervention de la police à Racak.
8 On peut voir que dans ces déclarations l'on retrouve bon nombre de
9 noms dans un grand nombre de déclarations, bon nombre de noms, disais-je,
10 de personnes qui ont péri à Racak; ce qui fait que l'on peut, par
11 recoupement de renseignements, avoir une idée très claire de ce qui s'est
12 produit là-bas. J'estime qu'il serait très utile d'entendre le témoignage
13 de ce témoin. Quand vous avez dit qu'il fallait que je le contacte et que
14 je vous informe pour qu'il vienne comparaître au plus tôt, vous avez dit
15 que cette personne sera citée à la barre à l'opportunité la plus proche
16 possible, je me suis efforcé d'en faire autant étant donné qu'il a témoigné
17 au sujet de ce qu'il a fait, au sujet de déclarations recueillies par ses
18 soins, et nous parlons que de déclarations recueillies par lui, pas
19 recueillies par des tiers. Donc, lui et d'autres collègues qui ont
20 contresigné en leur qualité d'enquêteur les mêmes déclarations, on y
21 retrouve bon nombre de déclarations qui nous seront des plus utiles pour
22 mieux comprendre ce qui s'est passé.
23 C'est pourquoi je vous demande d'autoriser son témoignage toute suite
24 après le témoignage de M. Dobricanin. Vous allez avoir le Juge Marinkovic,
25 Dobricanin, Jasovic en sa qualité d'enquêteur, et vous allez vous faire une
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1 idée des plus claires au sujet de ce qui s'est véritablement produit là-
2 bas.
3 [La Chambre de première instance se concerte]
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons rendre une décision sur
5 ce point à la première heure demain matin, ce à propos de votre demande
6 demain matin. Entre-temps, le témoin doit rester, bien sûr, à La Haye.
7 Faites entrer le Dr Dobricanin, s'il vous plaît.
8 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
9 LE TÉMOIN: SLAVISA DOBIRCANIN [Reprise]
10 [Le témoin répond par l'interprète]
11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, vous pouvez y aller, Monsieur
12 Milosevic.
13 Interrogatoire principal par M. Milosevic : [Suite]
14 Q. [interprétation] Professeur Dobricanin, nous en étions à vos
15 explications concernant le texte du gant à la paraffine. J'aimerais vous
16 poser, à présent, quelques questions au sujet de vos observations si tant
17 est qu'il y en a ou s'il y en a eu.
18 Vous avez certainement remarqué que sur l'autre des photos de la
19 mosquée qui a été prise où il y avait des cadavres, on voyait des femmes en
20 noir qui faisaient le deuil de leurs morts. Vous avez longtemps vécu au
21 Kosovo-Metohija et vous connaissez les us et coutumes. Avez-vous trouvé
22 quoi que ce soit d'étrange sur cette photo ?
23 R. En effet. J'ai vu cette photo auparavant déjà en surfant sur
24 l'Internet, et j'ai trouvé quelque chose de fort bizarre pour deux raisons.
25 D'un, les femmes musulmanes n'entrent pas dans la mosquée.
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1 Deuxièmement, le noir, les vêtements noirs, la couleur noire n'est pas une
2 couleur de deuil chez les Musulmans. Cela m'a étonné. Je n'ai aucune
3 explication à apporter à ce sujet-là.
4 Q. Bien, Professeur. Etant donné que nous avons parcouru toute une série
5 d'aspects que vous avez étudiés vous-même, lorsqu'il s'agit de vos
6 constatations sur les lieux et lorsqu'il s'agit de votre intervention
7 professionnelle au sujet des personnes décédées, je vous demanderais à
8 présent, et compte tenu de la totalité des questions soulevées, de
9 parcourir certains éléments du 66(A) qui, entre autres dit : "Après le
10 pilonnage, les forces ont commencé à fouiller le village en allant d'une
11 maison à l'autre. Ils ont tiré sur les villageois qui s'efforçaient de
12 fuir." Tout cela, ce sont des allégations figurant au chef 66(A). Il est
13 question d'un groupe de 25 hommes qui ont tenté de se cacher dans un
14 bâtiment. Ils ont été découverts par les forces de l'armée de la police.
15 Les allégations qui y figurent, disent qu'ils ont été battus, puis emmenés
16 vers une colline non loin de là pour y être exécutés, et ainsi de suite.
17 Professeur, vous avez dit ici que vous avez été à Racak, et qu'il n'y avait
18 pas de traces de pilonnage là-bas. S'il y a eu pilonnage, auriez-vous
19 remarqué des traces de pilonnage ?
20 R. Non, je n'ai remarqué aucune trace de pilonnage.
21 Q. Bien. Professeur, veuillez nous dire s'il y avait eu pilonnage, et
22 penchons-nous sur un autre aspect à ce sujet. Si on dit ici qu'il y a eu
23 d'abord pilonnage, puis intrusion des forces dans le village, est-ce que
24 l'on attendrait que les forces de la RFY et de la Serbie accèdent au
25 village pour pilonner ? Est-ce que c'est là une supposition logique ?
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1 R. Je pense que c'est une réaction normale de la part de personnes qui
2 auraient été attaquées par quelque force armée que ce soit. Il est logique
3 de fuir le village et de se mettre à l'abri à un endroit où on serait en
4 sécurité.
5 Q. Professeur, s'il y a eu pilonnage, l'hypothèse, c'est de penser qu'il y
6 aurait eu des personnes tuées par obus.
7 R. Oui, certainement. Sur les 40 personnes mortes, nous n'avons trouvé
8 aucune trace d'éclats d'obus --
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, cela n'est pas
10 utile de lui demander si on peut supposer que quelqu'un ait été tué suite à
11 un pilonnage. Cela ne nous permet pas d'avancer du tout.
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien, Monsieur Robinson. Je vous prie de
13 considérer comme si je lui avais posé la question de savoir s'il y a eu des
14 personnes tuées par éclats d'obus. Le Pr Dobricanin a répondu par la
15 négative.
16 M. MILOSEVIC : [interprétation]
17 Q. On dit ensuite que dans le village on a tiré en direction des
18 villageois qui fuyaient. Cela figure au 66(A) où on dit que ces hommes ont
19 été -- on a tiré sur ces hommes pendant qu'ils fuyaient. On s'imagine alors
20 que quelqu'un aurait pu être touché aux membres inférieurs.
21 R. Je suppose, que si, forcément.
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Encore une fois, Monsieur Milosevic,
23 il s'agit d'une question subjective. On ne peut pas supposer - je crois que
24 si vous commencez à faire des suppositions de ce type, il s'agit de
25 questions subjectives. Entendez simplement le témoignage que ce témoin est
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1 en mesure de vous donner. Vous avez déjà abordé ce sujet avec le témoin.
2 Veuillez, s'il vous plaît, aborder d'autres sujets.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien. Fort bien, Monsieur Robinson.
4 M. MILOSEVIC : [interprétation]
5 Q. Ce que je voulais seulement, c'est constater qu'il n'y a pas eu de
6 blessures de quelque nature que ce soit aux membres inférieurs. Toutes les
7 blessures se situaient au haut du corps. On a parlé de tranchées que vous
8 avez vues. Cela peut probablement être la conséquence du fait qu'ils se
9 trouvaient dans des tranchées.
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, j'ai la très
11 nette impression que vous êtes à l'affût de questions, et vous essayez de
12 finir en beauté. Je crois que vous allez rencontrer des difficultés. Si
13 vous n'avez pas de nouvelles questions à poser à ce témoin, nous allons
14 mettre un terme à l'interrogatoire principal.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien, Monsieur Robinson. Je ne vais plus
16 poser de questions au Pr Dobricanin au sujet de Racak, parce que, et je
17 l'espère, il a présenté de façon assez générale les éléments qui en
18 parlent, qui l'illustrent.
19 Je vais m'attarder sur quelques autres éléments.
20 M. MILOSEVIC : [interprétation]
21 Q. Professeur Dobricanin, ici dans les intercalaires, pour gagner du
22 temps, je propose de parler des trois intercalaires; les intercalaires 13,
23 14 et 15. Je vous prie de vous pencher sur l'intercalaire 13 d'abord.
24 Il s'agit ici de ce que vous avez rédigé après le bombardement de l'autocar
25 qui a été touché par une bombe d'avion alors qu'il se trouvait sur un pont.
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1 Il s'agit de l'identification des personnes tuées, à savoir, identification
2 de ceux qui encore étaient identifiables.
3 R. Oui. Il s'agit de l'événement du 1er mai 1999, au village de Luzane sur
4 le pont. L'événement a eu lieu à 13 heures.
5 Q. Partant des renseignements que vous avez pu recueillir, il apparaît que
6 vous avez essayé de procéder à des examens en médecine légale s'agissant
7 des 40 victimes qui ont été tuées. Sur ce chiffre, il y avait quatre
8 soldats qui ont été identifiés. Pour ce qui est des 36 autres, vous vous
9 êtes efforcé de les identifier. Parmi les victimes et les personnes
10 identifiées, il y avait 18 Albanais et huit Serbes.
11 R. Oui, ce renseignement est tout à fait exact.
12 Q. Vous n'avez pas pu conduire à son terme votre travail puisque vous
13 n'avez plus eu la possibilité de procéder à toutes les activités qui
14 étaient nécessaires.
15 R. Oui. En effet, je tiens à vous dire qu'après nous les collègues
16 albanais qui ont travaillé avec moi et qui sont restés à l'institut ont
17 déterminé l'identité des autres personnes aussi bien.
18 Q. S'agissant de cette bombe d'avion, combien de morts y a-t-il eu ? Vous
19 avez dit qu'il y a avait un quarante-et-unième, un vieillard, qui a été
20 gravement blessé et qui est mort au bout d'un an.
21 R. Oui.
22 Q. Pratiquement tous les passagers de cet autocar sont morts ?
23 R. Oui, tous les passagers de cet autocar ont été tués.
24 Q. Vous n'avez pas pu procéder à une identification détaillée parce que la
25 température dégagée par cette bombe a été de l'ordre de plus de 2 000
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1 degrés Celsius.
2 R. Oui. En général, nous avons eu des corps calcinés. Il n'y a pas eu un
3 seul cadavre qui n'était pas totalement ou partiellement calciné.
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourriez-vous m'aider et me dire à
5 quoi ceci se rapporte, s'il vous plaît, par rapport à l'affaire qui nous
6 concerne ?
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous voulez parler des questions que je pose ?
8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cet intercalaire en particulier.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je veux qu'on voie une chose, que l'on voie la
10 façon de procéder des instances des autorités et des instances
11 professionnelles lorsqu'il s'agit de constater des décès ou des morts
12 brutales. Il s'agit ici d'un travail qui a toujours été réalisé suite à une
13 instruction de la part du juge d'instruction, à chaque fois qu'il y a un
14 décès par mort brutale. Il y a eu une procédure habituelle d'intervention
15 des organes officiels et des experts qui se trouvent au sein de ces
16 organes. Cela est repris au niveau des intercalaires 13, 14, 15.
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] S'il vous plaît, cette enquête se
18 rapporte à quel paragraphe de l'acte d'accusation ?
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il n'y a pas de chef d'accusation spécifique
20 qui se trouverait lié, mais il est question de discrimination à chaque fois
21 d'exécution d'albanais par les forces serbes, et ainsi de suite. Or, ici,
22 de façon tout à fait concrète suite à une procédure tout à fait concrète de
23 la part des autorités en matière de justice et en matière de médecine
24 légale, on peut constater qu'il n'y a pas de différences de traitement en
25 vertu de l'appartenance ethnique d'une victime, mais il y a une façon de
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1 constater décès par et mort pour causes violentes, et cela sous-entend une
2 procédure.
3 Je tiens à faire tomber une thèse erronée qui affirmerait que les
4 organes sont intervenus non pas à l'avantage de tout un chacun ou plutôt au
5 profit d'un groupe ethnique, chose qui est tout à fait inexacte, et que
6 l'on veut faire apparaître avec clarté. Parce qu'à l'intercalaire 14 on
7 parle de conclusions générales portant sur un grand nombre de cas. Là,
8 l'intercalaire 15, je précise encore, au niveau de l'intercalaire 14, que
9 les constats ont été établis suite à une instruction de la part du juge
10 d'instruction de Pec, et au numéro 15, c'est le juge d'instruction de
11 Prizren qui a donné des ordres pour qui soit procédé à des instructions. On
12 voit qu'à chaque fois, il y a la même façon de traiter les dossiers
13 lorsqu'il y a eu mort ou décès suite à des causes où il y a raison de
14 violence subie.
15 M. MILOSEVIC : [interprétation]
16 Q. Je voulais que vous nous montriez comment ont été diligentées ces
17 enquêtes au niveau de ces décès.
18 R. Oui. La procédure est habituelle et elle est utilisée dans tous les
19 conflits armés d'une façon uniforme. Nous recevions des ordres de la part
20 de juges d'instruction, et les autopsies donnaient lieu à des conclusions
21 que nous leur communiquions, indépendamment du fait de savoir s'il
22 s'agissait d'Albanais, de Serbes, de policiers, d'insurgés, ou de qui que
23 ce soit d'autre.
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je souhaite ici aborder la question
25 d'impertinence, comme l'a abordée le Juge Bonomy.
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1 Monsieur Saxon.
2 M. SAXON : [interprétation] Pour être tout à fait juste envers l'accusé,
3 l'Accusation admet qu'il y a une certaine pertinence par rapport au
4 document ici, portant sur la responsabilité pénale de l'accusé en vertu de
5 l'Article 7(3), les allégations portant sur le manquement ou omission
6 d'avoir empêché ou d'avoir omis d'adopter des mesures disciplinaires contre
7 des personnes responsables de ces actes, et une partie de ces chefs
8 d'accusation serait de savoir si des procédures appropriées avaient été
9 adoptées pour mener une enquête dans cela.
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vois. Il est en train de
11 démontrer qu'il y avait un système en place qui fonctionnait.
12 M. SAXON : [interprétation] On pourrait effectivement présenter un argument
13 à cet égard. Je ne suis pas en train de dire que c'est un argument très
14 fort, mais simplement j'admets que l'argument peut être présenté.
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien sûr, bien sûr, il faut avancer
16 dans ce sens, mais est-ce que les services médico-légaux de ce pays
17 fonctionnaient correctement ou pas ?
18 M. SAXON : [interprétation] En tout cas, pas dans l'acte d'accusation,
19 Monsieur le Président.
20 M. KAY : [interprétation] Je crois qu'il s'agissait d'un point qui se
21 reportait à Racak, que le juge d'instruction est celui qui a mené le
22 contre-interrogatoire, a précisé que l'on critiquait le système qui émanait
23 en réalité de l'accusé -- ou un système de haut en bas, comme l'a dit à
24 plusieurs reprises M. Nice il s'agit d'une affaire qui a été prise en main
25 par le juge d'instruction et qui travail étroitement avec les services
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1 médico-légaux. Je crois que l'on peut l'associer à cela.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons entendre le témoignage.
3 Avançons, s'il vous plaît, le plus rapidement possible, ces trois
4 intercalaires.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Dans tous ces documents que vous voyez, on peut
6 constater que la police scientifique s'adresse au juge d'instruction qui
7 lui a donné l'ordre de procéder à des analyses médico-légales pour
8 déterminer en matière d'instruction de quoi il s'agit et quelles sont les
9 causes du décès.
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Milosevic.
11 M. MILOSEVIC : [interprétation]
12 Q. Soyons bref, Professeur, s'agissant de ces trois intercalaires. Vous
13 pourriez peut-être nous dire si cela était la procédure habituelle, et si,
14 dans toutes les affaires, dans tous les dossiers, vous êtes intervenu d'une
15 façon analogue indépendamment du fait de savoir s'il s'agissait là
16 d'enquêtes dont vous avez fait partie.
17 R. Vous avez tout à fait raison. Aucune fois nous n'avons fait des
18 exceptions à la procédure habituelle pour ce qui est de la procédure
19 médico-légale. Notre école s'appuie sur l'école européenne, à savoir,
20 l'école allemande et française. C'est la vielle école à partir de laquelle
21 nous avons été formés. Nous sommes intervenus suite à un ordre du juge
22 d'instruction et nous avons fait, ni plus ni moins, que ce qu'on nous a
23 demandé de faire.
24 Q. Merci.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, je n'ai plus de questions au
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1 sujet du témoignage du Pr Dobricanin, s'agissant de l'objet de son
2 témoignage. Mais, avec votre autorisation, j'aimerais sortir quelque peu de
3 ce cadre-là.
4 Etant donné que M. Nice a fourni une dizaine de rapports où l'on peut voir
5 la signature du Pr Dobricanin, lorsqu'il a contre-interrogé le Juge Danica
6 Marinkovic et le Pr Dobricanin, avec deux autres collègues, a, à chaque
7 fois, examiné des détenus où l'on a constaté des blessures légères.
8 M. Nice a présenté ces éléments de preuve pour vous dire que l'on
9 voyait là qu'il y a eu des tortures à l'encontre des détenus. Je voudrais
10 demander au Pr Dobricanin de parcourir en l'espace d'une minute ses
11 constatations qui ont été adressées au juge d'instruction, Danica
12 Marinkovic, par Slavisa Dobricanin, membre de la commission, et laissez-moi
13 voir encore Muharem Rama, et Tefik Gashi, docteurs, tous les trois, où l'on
14 peut voir que dans tous les cas sauf un cas, il n'y a pas de blessures, mis
15 à part ces blessures légères. Je voudrais à ce sujet lui poser une
16 question. Puis-je le faire ou pas ?
17 [La Chambre de première instance se concerte]
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Saxon.
19 M. SAXON : [interprétation] Monsieur le Président, l'Accusation ne s'oppose
20 pas à ce que des questions soient posées sur ce point.
21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, vous pouvez poser la question
22 au témoin, Monsieur Milosevic.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais que Monsieur l'Huissier fournisse au
24 Pr Dobricanin ce document pour qu'il puisse se pencher dessus.
25 M. MILOSEVIC : [interprétation]
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1 Q. Vous n'avez pas à nous donner lecture des noms ou quoi que ce soit
2 d'autre. Je vous demande seulement de vous pencher sur les quelques
3 constats, et à chaque fois il est question de blessures légères, comme vous
4 l'avez constaté vous-même à l'époque, je vous demande de vous pencher
5 dessus ?
6 R. Messieurs les Juges, je me souviens de façon assez vague. Mais, j'ai
7 cette documentation en présence sous les yeux; il s'agit de décembre 1994,
8 date à laquelle on nous a amené des personnes qui auraient, dit-on, c'est
9 ce que l'on nous a dit, auraient été battues à l'occasion d'une détention
10 ou d'une garde à vue.
11 En tout état de cause, lorsqu'il y a eu des blessures, voire des décès
12 d'Albanais, au cours d'une instruction dans n'importe quelle phase de
13 l'instruction, je constituais obligatoirement une commission pluriethnique
14 avec des Albanais en son sein, pour que les choses soient faites de la
15 façon la plus objective possible.
16 Dans ce cas-ci, mes collègues qui étaient tous deux des assistants à
17 l'époque, parce que nous étions en 1994, ont examiné avec moi les personnes
18 concernées. Auparavant, nous avons interrogé chacun d'entre eux pour savoir
19 de quelle façon ils avaient obtenu ce type de blessures, et nous avons
20 décrit les blessures dans nos constats. Nous avons donné des descriptifs
21 détaillés. On a également indiqué quels sont les objets qui pouvaient
22 porter ce type de blessures et nous avons apporté nos qualifications et
23 opinions.
24 S'agissant de tous ces intéressés, et je crois me souvenir de certains
25 d'entre eux, puisque je les ai connus personnellement moi-même --
Page 38262
1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je souhaite tout simplement
2 clarifier ceci, s'il vous plaît : La question que vous venez de soumettre
3 au témoin, sont des documents qui ont été versés au dossier par
4 l'Accusation ?
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. Il s'agit de constats d'une commission de
6 médecins que M. Nice a versé au dossier et où l'on peut voir que sept,
7 huit, ou je ne sais combien de détenus, je vais peut-être me tromper,
8 avaient obtenu des blessures légères, choses constatées par la commission.
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous n'avons pas encore pris de
10 décision sur la recevabilité de ceci.
11 Nous sommes désavantagés dans la mesure où nous n'avons pas les documents
12 sous les yeux.
13 M. SAXON : [interprétation] Ecoutez, c'est une coïncidence extraordinaire,
14 mais je crois que l'Accusation est en mesure de vous remettre des
15 exemplaires de ces documents.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur Saxon.
17 C'est un exemplaire. Veuillez le placer sur le rétroprojecteur, s'il vous
18 plaît.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, puis-je continuer ?
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Quelle est la question concrète
21 que vous voulez poser ?
22 M. MILOSEVIC : [interprétation]
23 Q. La question concrète est la suivante : avez-vous constaté à ce moment-
24 là que l'une quelconque de ces personnes aurait été torturée en prison ?
25 R. Ils avaient sans contestation aucune des blessures qui ont été
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1 qualifiées de blessures physiques et légères. Ils peuvent être obtenues de
2 façon variée et peuvent être la conséquence de mauvais traitements dans le
3 courant de l'instruction dans un régime pénitentiaire. Il faut procéder de
4 façon régulière et il s'agissait régulièrement d'hématomes qui peuvent
5 survenir suite à des pressions exercées par la main, par des tortures ou
6 autres circonstances qui seraient survenues. Je ne peux en exclure aucune.
7 Q. Mais, Professeur, dans votre pratique avez-vous eu des cas ou quelqu'un
8 aurait été malmené en prison et partant de blessures physiques légères,
9 aurait été contraint à faire des déclarations sous pression ou quoi que ce
10 soit d'autre ?
11 R. J'ai procédé à des examens, mais je n'ai pas su ce qui s'est produit au
12 niveau de l'instruction, parce que dès que sorti de l'institut, sans être
13 convoqué par un tribunal pour témoigner à ce sujet, je ne sais pas ce qui
14 s'est passé par la suite.
15 Q. Mais dans l'un ou l'autre de ces cas, les défenseurs ont-ils été
16 convoqués pour vous permettre de confirmer telle ou telle affirmation
17 relative à des mauvais traitements ?
18 R. Cela n'a pas été mon cas, mais peut-être celui d'un de mes collègues
19 qui a apposé sa signature. Moi, en tout cas, cela ne m'est jamais arrivé.
20 Peut-être ceci a-t-il été le cas de l'un ou l'autre de mes collègues
21 albanais.
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] J'aimerais tirer ce point au clair.
23 Le médecin que nous avons devant nous n'a jamais été impliqué
24 personnellement dans l'examen de l'une ou l'autre de ces personnes.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je l'ai été. Je l'ai été. La commission se
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1 composait de trois membres, mais je ne suis pas allé au tribunal ou peut-
2 être la chose qui vient d'être évoquée a été soulevée. Mais il est possible
3 que l'un ou l'autre de mes collègues albanais ait été convoqué au tribunal.
4 J'ai participé aux examens physiques et je suis l'un des signataires de ce
5 document.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] D'accord. D'accord.
7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais n'y a-t-il pas allégations
8 d'usage d'instruments contondants contre ces personnes ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Absolument, Monsieur le Président. Il est
10 question d'instruments contondants et de pressions exercées par le poing.
11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Y a-t-il la moindre référence au poing
12 à l'endroit où il est question d'instruments contondants. Je ne me souviens
13 pas de cela. Malheureusement, je n'ai pas de documents sous les yeux. Nous
14 les avions lors de l'audition d'un autre témoin et on ne nous a pas demandé
15 de les apporter aujourd'hui.
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] En effet, sous le rétroprojecteur, il
17 est question de "coups violents portés à l'aide d'un objet mécanique
18 contondant."
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais, qu'est-ce que l'on peut entendre
20 par la conséquence de l'emploi d'un "objet mécanique contondant." Ce n'est
21 pas une question stupide.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, pas du tout, Monsieur le Juge.
23 La conséquence de l'emploi d'un objet mécanique contondant peut supposer
24 tout et n'importe quoi, en tout cas, toutes les conséquences liées à
25 l'instrument en question. Cela va d'une simple pression des doigts ou des
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1 conséquences du recours à une matraque de police ou à quelque bâton que ce
2 soit, tout ce qui permet d'utiliser la force et d'infliger un coup. C'est
3 ce que nous entendons en médecine légale --
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous êtes en train de me dire qu'il
5 peut être question ici de pression exercée par les doigts. Est-ce que ce
6 que vous voulez dire par rapport à ce document ? Je trouve cela très
7 étonnant.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Absolument. Conformément à notre
9 classification telle que nous l'appliquons, c'est tout à fait cela.
10 M. MILOSEVIC : [interprétation]
11 Q. Professeur, est-ce que vous voulez dire qu'une distinction existe entre
12 objets acérés et objets contondants ? Tout ce qui n'est pas objet acéré, y
13 compris les pieds et les poings, peut être considéré comme un instrument
14 contendant ?
15 R. Oui, c'est exact, Monsieur Milosevic. En médecine légale, pas seulement
16 en Serbie d'ailleurs mais un peu partout dans le monde, nous distinguons
17 entre les objets pointus, acérés tels que des armes à feu et les objets
18 contondants. Tout ce qui n'est pas pointu peut être considéré comme un
19 objet contondant, y compris la pression des poings dès lors que nous
20 parlons d'armes.
21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le terme "mécanique", Professeur, en
22 quoi est-ce qu'il s'applique à cette catégorie ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'applique à cette catégorie, Monsieur le
24 Président, car il est question de pression et d'objet mécanique. Il ne
25 s'agit pas d'une arme, mais d'un objet qui exerce une pression mécanique,
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1 une force mécanique.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.
3 M. MILOSEVIC : [interprétation]
4 Q. Merci, Professeur. Je n'ai plus de questions à vous poser.
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Saxon, c'est à vous.
6 M. SAXON : [interprétation] Monsieur le Président, je vous demande un
7 instant pour mettre de l'ordre dans mes documents.
8 M. KAY : [interprétation] Puisque nous avons quelques secondes, parlons des
9 documents si vous voulez bien.
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.
11 M. KAY : [interprétation] Les intercalaires 13, 14, 15 et 16, si j'ai bonne
12 mémoire, n'ont pas été officiellement versés au dossier de l'affaire.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] L'intercalaire 12 étant identique à la
14 pièce D2 ?
15 M. KAY : [interprétation] Oui.
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Qui a déjà été enregistré aux fins
17 d'identification.
18 M. KAY : [interprétation] Oui. Entre le 13 et le 16 mai.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] La pièce D2 doit être officiellement
20 admise.
21 M. KAY : [interprétation] Oui, elle a été traduite.
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous admettons la pièce D2 ainsi que
23 les intercalaires 13, 14, 15 et 16.
24 Monsieur Saxon, c'est à vous.
25 Contre-interrogatoire par M. Saxon :
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1 Q. [interprétation] Professeur Dobricanin.
2 R. Oui.
3 Q. Je m'efforcerai de prononcer correctement votre nom, mais je ne puis
4 garantir que j'y parviendrai à chaque fois.
5 Professeur, il y a une chose que vous avez dite vers la fin de votre
6 déposition vendredi dernier, qui m'est restée en mémoire. Vous avez dit, je
7 cite : "Je ne veux pas séparer les gens entre Serbes et Albanais, car ils
8 ont tous deux beaucoup souffert au cours de cette guerre qui a été un grand
9 malheur."
10 J'aimerais à présent consacrer un instant à vous poser quelques questions,
11 car si j'ai bien compris, dans votre profession, depuis les événements de
12 1999, vous avez œuvré de votre côté pour essayer d'alléger un peu ce
13 malheur. Ce que je veux dire par là, c'est que vous avez participé aux
14 exhumations, et vous vous êtes efforcé d'identifier les personnes qui ont
15 péri au Kosovo en 1999. Ce que je viens de dire est-il exact ?
16 Il faut que vous répondiez avec des mots, Professeur.
17 R. Vous avez tout à fait raison. Ce que vous venez de dire est tout à fait
18 exact.
19 Q. Est-il permis de partir du principe, puisque votre bureau a été
20 transféré dans une région plus septentrionale de la Serbie après 1999, que
21 pour poursuivre votre enquête au Kosovo, vous auriez eu besoin de l'aide et
22 de la coopération des responsables de la MINUK ?
23 R. C'est absolument exact.
24 Q. Vous rappelez-vous, par exemple, à quel moment vous avez eu vos
25 premiers contacts avec les responsables de la MINUK à cette fin, à quel
Page 38268
1 moment la MINUK vous a apporté son aide pour la première fois ?
2 R. J'ai eu mes premiers contacts avec les experts de la MINUK en 2001, je
3 pense, lors d'un attentat terroriste contre un autocar qui se trouvait sur
4 la liaison Merdari et Podujevo, c'est-à-dire, sur la frontière
5 administrative. Onze personnes ayant été tuées durant cet attentant. J'ai
6 pris la route avec mes collègues de la MINUK pour enquêter au sujet de cet
7 événement, procéder aux autopsies. Ces responsables de la MINUK étaient
8 d'appartenances ethniques très diverses. Les autopsies ont été pratiquées à
9 l'hôpital britannique de Pristina.
10 Q. Fort bien. A partir de 2001, vous avez eu des contacts, et vous
11 avez collaboré avec des responsables de la MINUK pour mener à bien votre
12 travail de légiste dans la province du Kosovo. Ceci est-il exact ?
13 R. Oui.
14 Q. Vous rappelez-vous si cela s'est passé au début de l'année 2001, au
15 milieu de l'année 2001 ou à la fin de l'année 2001 ?
16 R. Je ne saurais vous le dire avec précision. C'était l'année 2001. C'est
17 en 2001, que pour la première fois, par le biais d'une commission, la
18 République fédérale de Yougoslavie a établi une coordination sur ce
19 problème avec la MINUK. J'ai commencé à travailler avec des collègues de la
20 MINUK, qui avaient des nationalités diverses, qui venaient de pays très
21 différents, et qui ont travaillé et mes collègues. Nous avons travaillé
22 ensemble à certaines exhumations. Nous avons examiné quelques cadavres déjà
23 exhumés à l'institut de médecine légale de Pristina. C'est la première
24 chose que nous avons faite. Excusez-moi, si j'ai répondu un peu longuement
25 à votre question.
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1 Cette collaboration a été d'une qualité exceptionnelle, et elle se poursuit
2 encore aujourd'hui de façon très fructueuse.
3 Q. Très bien. La MINUK vous apporte-t-elle également son aide si vous avez
4 besoin de récupérer des documents qui, peut-être, seraient restés, par
5 exemple, à l'institut de médecine légale de Pristina depuis 1999 ?
6 R. Non, ces documents je ne les ai plus jamais eus sous les yeux. On ne
7 nous a remis que les documents relatifs aux enquêtes portant sur des décès
8 de Serbes et parfois d'Albanais uniquement pour 1999 , ainsi que les
9 rapports d'autopsie établis par, éventuellement, des enquêteurs de La Haye
10 ou des médecins venus avec quorum.
11 Q. Si vous avez demandé de l'aide pour récupérer des documents, si à cette
12 fin vous avez demandé l'aide de la MINUK, cette aide vous a-t-elle été
13 refusée d'après vous ?
14 R. Non. Je vous ai déjà dit tout à l'heure que la collaboration entre nous
15 a été d'une qualité exceptionnelle, à un niveau très élevé de qualité.
16 Q. J'aimerais également que nous revenions quelques minutes sur quelque
17 chose que vous avez dit aujourd'hui et qui, je crois, ressort très
18 clairement de votre déposition. M. Milosevic vous a demandé si vous
19 connaissiez les us et coutumes des habitants du Kosovo. Vous rappelez-vous
20 avoir entendu cette question il y a peu près une heure ou un peu moins ?
21 R. Oui.
22 Q. Très manifestement, Professeur, puisque si je ne m'abuse, vous êtes né
23 au Kosovo. Vous y avez grandi, vous y avez fait vos études et vous y avez
24 mené une longue carrière jusqu'en 1999. D'ailleurs, votre travail là-bas
25 continue encore aujourd'hui, si je ne me trompe. Sommes-nous en droit de
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1 comprendre, que pendant votre vie et votre carrière, vous vous êtes fait de
2 nombreux amis, de nombreux collègues parmi des gens qui étaient
3 d'appartenances ethniques diverses au Kosovo ?
4 R. Bien sûr. Mes voisins mes collègues, mes amis, parmi eux, il y avait
5 des Albanais avec lesquels je travaillais. J'avais de très bons contacts.
6 Personnellement, je n'ai jamais eu de problèmes avec eux.
7 Q. Vous connaissiez leurs habitudes, leurs traditions, leurs modes de vie.
8 Je parle des coutumes, des traditions et du mode de vie des Albanais du
9 Kosovo, en tout cas, de ceux qui étaient vos amis.
10 R. Lorsque j'ai parlé des habitudes de la population albanaise dans la
11 présente affaire, je parlais des habitudes des Albanais musulmans et pas
12 des Albanais catholiques, qui ont des habitudes un peu différentes peut-
13 être. Oui, oui, je connais les habitudes des deux populations car j'ai vécu
14 à leur coté pendant 46 ans.
15 Q. Pendant ces 46 ans, est-ce que vous ne vous êtes jamais trouvé dans une
16 situation où vous auriez appris ou remarqué que l'un ou l'autre de vos amis
17 ou collègues albanais était connu sous plusieurs noms ?
18 R. Je n'ai pas compris votre question, pourriez-vous reformuler ou
19 répéter. Je ne vois pas très bien ce que vous me demandez. Je n'ai pas
20 compris; je vous demanderais de répéter.
21 Q. Je vais essayer d'être plus précis dans mon exemple. Par exemple, est-
22 ce qu'il vous est arrivé d'avoir un ami ou un collègue d'appartenance
23 ethnique albanaise qui, éventuellement, était connu sous un nom particulier
24 inscrit sur sa carte d'identité, mais que vous-même ou d'autres amis
25 connaissaient sous un autre nom, par exemple, le prénom de son père ? Est-
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1 ce que vous ne vous êtes jamais trouvé dans une situation de ce genre ?
2 R. Je n'ai pas souvenir de cela. Je crois ne m'être jamais trouvé dans une
3 telle situation.
4 Q. Très bien. Je vais maintenant vous demander votre aide sur un point
5 particulier. Pour cela, j'aurai également besoin de l'aide de M.
6 Prendergast, l'Huissier dans notre affaire. J'aimerais que l'on soumettre
7 au témoin un exemplaire de la pièce à conviction D291.
8 Je vous indique, Monsieur le Témoin, que ce document a été présenté à la
9 Chambre par Mme le Juge Marinkovic. C'est un document écrit en cyrillique
10 qui sera plus utile à M. le Pr Dobricanin qu'aux autres personnes présentes
11 dans le prétoire. Je crois que nous en avons également des exemplaires en
12 langue anglaise pour ces autres personnes. Je demanderais qu'un exemplaire
13 soit placé sur le rétroprojecteur, et que l'on se penche sur la page 2 de
14 ce document.
15 Professeur Dobricanin, nous voyons ici une "liste de noms établie par
16 quelqu'un que vous connaissez manifestement. Il s'agit de Danica
17 Marinkovic. Ces noms sont ceux des cadavres des personnes découverts à
18 Racak." Je vous demanderais d'examiner de plus près les noms 32, 33 et 34
19 de la page 2 de ce document, qui sont en bas de page dans la version
20 anglaise, et un peu plus haut sur la page dans la version serbe.
21 Vous voyez ces trois noms ? Le premier étant celui de Shukri Jashari
22 correspondant au numéro 32. Puis, numéro 33 Raif Jashari, et numéro 34,
23 Jashar Jashari. Vous voyez ces trois noms ?
24 R. Oui.
25 Q. J'aimerais maintenant rapidement vous montrer une annexe à l'acte
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1 d'accusation dans la présente affaire, car le Procureur, dans la présente
2 affaire, a également soumis à la Chambre une liste des personnes tuées à
3 Racak. Je vais en remettre un exemplaire. Je demanderais qu'on place la
4 page 43 de mon exemplaire de l'acte d'accusation sur le rétroprojecteur.
5 Voilà.
6 Est-ce que vous avez à présent sous les yeux cette liste dressée par le
7 bureau du Procureur dans la présente affaire, Professeur Dobricanin ? Vous
8 les voyez ces noms ?
9 R. Oui, je les vois.
10 Q. A peu près au milieu de la page, vous constatez sans doute que nous
11 trouvons les mêmes noms que ceux que nous venons de lire sur la liste
12 dressée par le Dr Marinkovic, à savoir, Jashar Jashari, Raif Jashari et
13 Shukri Jahsari. Vous les voyez ?
14 R. Oui, je les vois.
15 Q. Nous constatons que ces deux noms figurent sur les deux listes, n'est-
16 ce pas ?
17 R. Oui, c'est exact.
18 Q. Je vous demanderais maintenant de lire ce qui est écrit un petit peu
19 plus bas sur cette même page, où vous trouverez deux personnes dont le nom
20 de famille est Salihu; l'un ayant pour prénom Jashar et le second ayant
21 pour prénom Shukri. Vous voyez cela ?
22 R. Oui, je vois.
23 M. SAXON : [interprétation] Très bien. Monsieur l'Huissier, vous pouvez
24 maintenant retirer ces listes du rétroprojecteur car j'ai besoin d'utiliser
25 un autre document.
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1 Madame Dicklich, j'aurais besoin de la déclaration préalable de Rizah
2 Salihu, je vous prie.
3 Il serait sans doute bon que l'on place cette déclaration sur le
4 rétroprojecteur également à l'intention du public.
5 Q. Professeur Dobricanin, je ne sais pas si vous connaissez bien la langue
6 anglaise, mais je vais donner lecture à haute voix d'une partie de ce
7 document, de façon à ce que cela puisse vous être interprété oralement. Il
8 s'agit d'une déclaration préalable de témoin, remise à des représentants du
9 bureau du Procureur. L'homme concerné s'appelle Rizah Salihu. Si nous
10 prenons maintenant le corps du texte, nous voyons au deuxième paragraphe,
11 M. Salihu explique qu'il habite dans le village de Racak, qu'il est le plus
12 âgé d'une fratrie de six frères, que trois de ses frères ont été tués à
13 Racak le 15 janvier 1999. Juste en dessous, il fournit les noms de ses
14 frères décédés; Jashar Salihu, Raif Salihu et Shukri Salihu.
15 Vous vous souviendrez sans doute que nous avons déjà eu sous les yeux ces
16 trois prénoms; Jashar, Raif et Shukri sur les deux listes que je viens de
17 vous montrer, il y a quelques minutes. Simplement, ils étaient suivis d'un
18 autre patronyme, à savoir, le nom de famille de Jashari.
19 Au paragraphe 3 de sa déclaration, M. Salihu explique, qu'à la naissance,
20 ses frères ont reçu le nom de Salihu. Au paragraphe 4, il explique qu'il
21 avait un oncle dont le nom était Jashar Salihu, et que parfois, dans le
22 village de Racak, les gens s'adressaient à des membres de sa famille en
23 leur donnant le nom de famille Jashari. Au paragraphe 5, il explique que
24 lorsque les corps de ses frères ont été découverts en janvier 1999,
25 quelqu'un, par erreur, a donné à ses trois frères le patronyme de Jashari,
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1 au moment de l'identification des trois cadavres. J'ajouterais qu'au
2 paragraphe 7, il déclare également que sur les stèles funéraires de ces
3 frères figure le nom de famille de Salihu.
4 M. SAXON : [interprétation]
5 Q. Voilà des photos qui ont été prises, il y a dix jours environ, au
6 cimetière de Racak. Nous voyons ici le nom de Jashar Salihu sur une stèle,
7 et de Raif Salihu prise sur une deuxième stèle, prise en photo, et une
8 troisième stèle où figure le nom de Shukri Salihu.
9 Merci beaucoup, Monsieur l'Huissier.
10 M. SAXON : [interprétation]
11 Q. Il est également expliqué dans cette déclaration préalable de témoin
12 que ce dernier a fourni les certificats de décès de ces frères où figure le
13 nom de famille Salihu.
14 Alors, je sais que vous avez vécu de longues années au Kosovo, et que vous
15 avez vu désormais les deux listes que je viens de vous montrer, Professeur
16 Dobricanin, à savoir, la première établie par le Juge Marinkovic, et la
17 deuxième établie par le bureau du Procureur de ce Tribunal. Pouvons-nous
18 convenir dès lors qu'une erreur a été commise sur les deux listes, à savoir
19 que le fait de trouver les trois prénoms, Jashar, Raif et Shukri, associés
20 au nom de famille Jashari, est en fait une erreur ou, en tout cas, ce n'est
21 pas le nom de famille le plus couramment utilisé pour ces personnes ? Est-
22 ce que vous êtes d'accord avec cela là-dessus?
23 R. Je suis d'accord.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous demanderais, Monsieur le Juge
25 Robinson, de consacrer deux ou trois phrases pour expliquer quelque chose
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1 en rapport avec cette question.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, je vous en prie.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous qui faisions partie de l'équipe de
4 médecins légistes, nous n'avons pas participé au travail d'identification
5 qui était la tâche des techniciens de la police scientifique. Nous savons
6 que sur les 40 cadavres de Racak, 37 ont été identifiés, et je crois qu'il
7 y a eu là une confusion liée à ces trois personnes. Mais, la chose très
8 importante dont nous n'avons cessé de discuter sans parvenir à nous mettre
9 d'accord, c'est que trois individus autopsiés, originaires du village de
10 Racak, n'étaient pas circoncis. Car la circoncision est une coutume de tous
11 les Musulmans du monde, y compris les Albanais, Musulmans du
12 Kosovo-Metohija. Je crains que ces trois cadavres n'aient été,
13 intentionnellement ou par négligence, emportés au moment de
14 l'identification, et que c'est en raison de cela qu'ils n'ont pas été
15 identifiés, car ils n'ont été identifiés ni sur la base de leurs papiers
16 d'identité ni sur la base de leurs empreintes digitales. On faisait
17 également appel aux familles parfois pour reconnaître les corps, mais ces
18 trois cadavres ont été sans doute emportés et enterrés à un autre endroit,
19 alors que les trois frères Jashari, bien entendu, ont été enterrés au
20 cimetière où sont également enterrés les autres membres de leur famille.
21 Voilà ce que je tenais à dire au sujet de ces trois personnes, de ces
22 cadavres qui n'ont pas été identifiés.
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce qu'il s'ensuit, Monsieur Saxon,
24 qu'il y avait trop de cadavres sur votre liste ?
25 M. SAXON : [interprétation] Monsieur le Président, je m'en tiens pour le
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1 moment aux problèmes d'identification. Avec le respect que je vous dois, je
2 ne puis répondre à votre question pour le moment.
3 Q. Professeur Dobricanin, je n'ai pas un seul instant voulu laisser
4 entendre que vous ayez pu commettre une erreur dans le processus
5 d'identification. Ce n'était pas du tout mon intention. J'essayais
6 simplement de tirer au clair le problème des noms.
7 M. SAXON : [interprétation] Monsieur le Juge Bonomy, vous vous souviendrez
8 que Mme le Juge Marinkovic a soumis cette liste. J'aimerais que l'on place
9 à présent sur le rétroprojecteur la pièce D291, la liste qui a été soumise
10 à la Chambre par le Juge Marinkovic. Page 3, je vous prie.
11 Q. Professeur Dobricanin, j'appelle votre attention sur le cadavre
12 correspondant au numéro 37. Vous le voyez ? Le prénom est Syla.
13 R. Syla.
14 Q. -- Syla
15 R. Syla.
16 Q. Merci de m'avoir corrigé. Donc, Syla est le nom de famille et le prénom
17 est Sabri.
18 M. SAXON : [interprétation] Monsieur l'Huissier, je vous demanderais de
19 placer une nouvelle fois la liste établie par le Juge Marinkovic sur le
20 rétroprojecteur. Il s'agit de l'annexe A à l'acte d'accusation.
21 Q. Professeur Dobricanin, si vous lisez tous les noms qui figurent sur
22 cette liste, vous n'en voyez aucun, n'est-ce pas, qui soit celui de Syla
23 Sabri ?
24 R. Non. Non. En effet, il y a Sheremet Syla et Shyqeri Syla.
25 Q. Donc, pas de Sabri Syla, n'est-ce pas ?
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1 R. Non.
2 M. SAXON : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce une heure
3 acceptable pour la pause ?
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Saxon. Nous allons
5 faire une pause de 20 minutes.
6 --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.
7 --- L'audience est reprise à 10 heures 55.
8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Saxon.
9 M. SAXON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
10 Q. Professeur Dobricanin, avant la pause -- est-ce que vous m'entendez ?
11 R. Oui.
12 Q. Avant la pause, nous avons établi qu'à l'annexe A de l'acte
13 d'accusation, nous avons pu retrouver le nom de Sabri Syla ou Sabri Sulja;
14 est-ce exact ?
15 R. Oui.
16 M. SAXON : [interprétation] Avec l'aide de M. Prendergast, s'il vous plaît,
17 veuillez remettre, je vous prie, déclaration de Milazim, s'il vous plaît,
18 aux personnes présentes dans le prétoire, s'il vous plaît. Est-ce qu'on
19 peut placer un exemplaire de ce même document sur le rétroprojecteur, s'il
20 vous plaît.
21 Il s'agit là d'une déclaration qui a été faite par Milazim Syla ou
22 Sulja, au bureau du Procureur. C'est également quelqu'un qui vit à Racak.
23 Au paragraphe 2, il nous dit qu'en 1999, c'était un membre de l'armée de
24 libération du Kosovo, et le 15 janvier, il ne se trouvait pas à Racak.
25 Q. Ensuite si nous passons au paragraphe 3, Professeur Dobricanin, il dit
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1 que les membres mentionnés ci-dessous ont été tués à Racak le 15 janvier
2 1999 : Sabri Syla ou Sulja, qui était le père du déclarant; Haki Metushi,
3 qui était son oncle; Arif Metushi, un autre oncle; et Sahide Metushi, sa
4 tante.
5 Ensuite, au paragraphe 5, M. Syla explique qu'à sa naissance son père et
6 ses autres frères ont reçu le surnom de Sulja, mais au cours des années
7 1990, ils ont décidé de changer leur nom de famille et d'utiliser le nom de
8 Metushi. C'était une tradition familiale.
9 Au paragraphe 6, néanmoins, il est précisé qu'à ce moment-là, le père du
10 déclarant, Sabri Syla, travaillait en Macédoine, et n'a pas pu changer son
11 nom de famille. A son retour de Macédoine au Kosovo, il n'était pas en
12 mesure de changer officiellement son nom de famille de Syla à Metushi.
13 Au paragraphe 7, la déclaration stipule que le père de ce déclarant est
14 enterré en même temps que ses frères au cimetière de Racak dans une tombe
15 sur lequel figure le nom de Sabri Metushi.
16 M. SAXON : [interprétation] Encore une fois, je vais demander à Monsieur
17 l'Huissier de nous aider, et je vais lui demander de placer trois photos
18 sur le rétroprojecteur, s'il vous plaît.
19 Q. Voyez-vous la première photographie du frère Arif Metushi. Photographie
20 suivante, s'il vous plaît. La photographie ici de Sabri Metushi, le père du
21 déclarant, également connu sous le nom de Sabri Syla. Et Haki Metushi.
22 Nous pouvons lire au dernier paragraphe, le paragraphe 9, annexé à la
23 déclaration nous trouvons le nom de Sabri Syla, le nom qui figure sur la
24 liste qui a été fournie par Mme le Juge Marinkovic.
25 Je vous demande de bien vouloir vous tourner à l'annexe A de l'acte
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1 d'accusation. Professeur Dobricanin, si vous parcourez cette liste, le bas
2 de cette liste, vous voyez les noms d'Arif Metushi et Haki Metushi. Nulle
3 part nous voyons, nous, le nom de Sabri Metushi, également connu sous le
4 nom de Sabri Syla. Etes-vous d'accord avec ce que je viens de dire ?
5 R. Il se peut qu'il en soit ainsi. Je voudrais cependant attirer votre
6 attention sur le fait que : s'agissant de ces noms, je n'ai aucune idée de
7 ces derniers. Lorsque nous avons procédé aux autopsies à l'institut, nous
8 n'avons pas reçu les noms, et cela ne nous a pas intéressé outre mesure,
9 parce qu'ils ont été transférés à la morgue. Il y a eu processus
10 d'identification d'effectuer, et les documents ont été transmis à la police
11 scientifique du SUP de la province. Tout ce que je peux vous dire c'est que
12 j'ai constaté ces noms ici, parce que je les ai retrouvés ici. Je ne sais
13 pas pourquoi vous me posez la question parce que je n'en sais absolument
14 rien. Ni ces noms me sont connus, ni j'ai connaissance des différents
15 dilemmes au sujet des différents noms et de leurs changements. C'est la
16 première fois que je vois ceci s'agissant de ces documents. Nous avons
17 procédé aux autopsies, à l'identification, et cela a été envoyé à la
18 morgue.
19 Peut-être a-t-on eu besoin de cela ultérieurement pour ce qui est des
20 vérifications de noms pour la rédaction des protocoles, mais ce n'est pas
21 un document qui m'est parvenu à quelque moment que ce soit.
22 Q. Professeur --
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Saxon, le nom de Sabri Syla
24 se trouve-t-il sur la liste de Mme le Juge Marinkovic ?
25 M. SAXON : [interprétation] Oui, absolument.
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Où je peux le trouver ?
2 M. SAXON : [interprétation] Oui, absolument numéro 37.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
4 M. SAXON : [interprétation]
5 Q. Monsieur Dobricanin, je vous pose cette question, parce que vous
6 connaissez très bien la culture albanaise. C'est la raison pour laquelle je
7 pose ces questions pour essayer de clarifier ces points. C'est tout.
8 R. Permettez-moi de vous répondre brièvement. Premièrement, je suis un peu
9 confus. Il y a chez les Albanais, des familles dont les membres portent des
10 noms de famille différents. Il n'y a pas que les Albanais; il y a des
11 parties du Kosovo où les Serbes changent de nom de famille; ce qui fait que
12 deux frères peuvent ne pas porter le même nom de famille. C'est le résidu
13 d'une culture qui s'est développée simultanément chez les uns et les
14 autres.
15 Quand nous avons des Albanais, quand que quelqu'un vient les
16 identifier, on dit Miftar Banushi, mais il s'appelle Maftu Miftar, et il
17 est fils de Banushi. C'est son père qui est Banushi. Il se peut qu'au lieu
18 de donner le nom de famille, au lieu de dire Salihu Jashari ou Jasharit, on
19 dit Jasharem [phon], et on ne dit pas Jasharevic [phon], Jasharem, et ainsi
20 de suite. Il y a des noms de famille chez des Musulmans qui ne sont pas
21 Albanais, qui sont des noms de famille du style Jasharevic. Il se peut que
22 cela puisse constituer une source de confusion, mais je ne sais vraiment
23 pas.
24 Q. Merci, Monsieur Dobricanin. Je ne souhaite pas vous ennuyer ni
25 ennuyer d'autres personnes présentes dans ce prétoire. Je souhaite aborder
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1 encore un autre nom avec vous, ensuite, nous aborderons un autre sujet.
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce qu'il s'agit de quelque
3 chose que le témoin peut apporter une réponse ? Est-ce qu'il ne s'agit pas
4 d'un argument juridique portant sur les faits tels qu'ils sont cités dans
5 l'acte d'accusation ?
6 M. SAXON : [interprétation] L'Accusation estime, qu'en raison de la
7 connaissance qu'a ce témoin de la culture albanaise ainsi que de la culture
8 serbe locale, et compte tenu de la réponse qu'il vient de nous fournir,
9 nous pensons qu'il peut confirmer que cette confusion est quelque chose qui
10 peut se produire assez souvent, en tout cas, dans la culture qu'il connaît
11 bien et dans la région dans laquelle il a résidé pendant un certain nombre
12 d'années. J'essaie simplement d'expliquer des discordances qui existent ici
13 sur cette liste.
14 Monsieur le Président, pour essayer de gagner du temps, je souhaite
15 présenter à la Chambre un aide-mémoire. Que ceci soit marqué aux fins
16 d'identification, et qu'on donne un numéro de cote provisoire de cette
17 pièce, s'il vous plaît. Je vous demande, s'il vous plaît, à ce que l'on
18 place un exemplaire de ce texte sur le rétroprojecteur.
19 Monsieur le Président, il s'agit d'un tableau que l'Accusation a
20 dessiné. Nous voyons ici une liste des noms dans la colonne de gauche en
21 annexe à l'acte d'accusation. Dans les autres colonnes, nous avons précisé
22 les éléments de preuve portant sur l'utilisation d'autres noms ou d'autres
23 noms de famille. Je mets ceci à la dispositon de la Chambre parce que nous
24 estimons que cela pourra être utile. A l'avenir, nous allons soumettre une
25 demande par écrit concernant ce point-là, aux fins de proposer à la Chambre
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1 une liste révisée des noms qui correspondent aux sections Racak dans l'acte
2 d'accusation.
3 Si une ordonnance aurait été soumise par l'accusé, à ce moment-là,
4 nous aurions été plus coopératifs, nous aurions pu négocier. Si cela n'est
5 pas approprié, cela ne correspond pas aux circonstances ici, qui sont
6 celles de cette affaire.
7 Je n'ai plus de questions.
8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.
9 M. KAY : [interprétation] Peut-être qu'il s'agirait de déposer une demande
10 de modification de l'acte d'accusation. Cela revient à dire cela. Car les
11 noms cités en annexe A, ont peut-être été dupliqués, ou simplement certains
12 noms ont été omis. Peut-être qu'il serait plus approprié de déposer une
13 requête sur ce sujet en fournissant une explication sur l'historique de
14 tout ceci, éléments de preuve à l'appui.
15 [La Chambre de première instance se concerte]
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Saxon, les autres exemples
17 fournis par l'Accusation, cas où vous avez envoyé des écritures à
18 l'Accusation aux fins de rechercher un accord sur certains points, vous
19 n'avez pas réussi à progresser dans la matière car s'il n'y a rien.
20 Remettez ceci à l'Accusation, et faites référence au débat qui a eu lieu
21 dans le prétoire, et voir s'il est possible de se mettre d'accord là-
22 dessus.
23 M. SAXON : [interprétation] Monsieur le Président, je travaille dans cette
24 affaire depuis la mise en détention de cet accusé au cours de l'été 2001. A
25 mon sens, aucune indication n'a été fournie par l'accusé depuis cette date-
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1 là, en vertu de quoi il s'est disposé à communiquer avec les membres du
2 bureau du Procureur. Je sais que beaucoup de temps est passé depuis, mais
3 en tout cas, c'est l'impression que j'ai.
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Autrement dit, vous êtes en train de
5 renverser toute la situation. J'entends très bien de quoi il s'agit; j'ai
6 parfaitement compris. Si vous avez un point en particulier sur lequel vous
7 souhaitez tomber d'accord, je crois que cela vaut la peine d'être essayer;
8 vous n'avez rien à perdre. Il faut au moins essayer.
9 M. SAXON : [interprétation] Oui, je vous ai parfaitement compris. Je crois
10 qu'il serait bon, à ce moment-là, d'utiliser des moyens à notre disposition
11 pour ce faire.
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Sujet suivant, s'il vous plaît.
13 M. SAXON : [interprétation]
14 Q. Monsieur Dobricanin, je souhaite maintenant passer à un certain nombre
15 de questions que j'ai à propos du témoignage que vous avez fait la semaine
16 dernière. Je pense, qu'étant donné que certains jours se sont écoulés
17 depuis, vous avez eu peut-être le temps d'y réfléchir, temps de réfléchir
18 aux commentaires que vous avez faits la semaine dernière. Y a-t-il quelque
19 chose que vous souhaitez modifier, corriger à cet égard ?
20 R. Je n'aurais rien à ajouter ni à retrancher. Il se peut que certaines
21 formulations aient pu être mieux faites, de façon plus claire, mais je ne
22 pense pas avoir dit quoi que ce soit de pas clair. Je n'ai évidemment rien
23 à ajouter.
24 M. SAXON : [interprétation] Si M. Prendergast pourrait montrer, s'il vous
25 plaît - ou peut-être que le Pr Dobricanin a déjà ce document sous les yeux.
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1 Q. Je vais vous demander de vous reporter à l'intercalaire numéro 6, s'il
2 vous plaît. Il s'agit là de conclusions générales fournies par les médecins
3 légistes de l'équipe yougoslave, datées du 30 janvier 1999, et remises à
4 Mme le Juge Danica Marinkovic.
5 Est-ce que vous l'avez sous les yeux, Professeur ?
6 R. Oui, je l'ai.
7 Q. Pourriez-vous vous concentrer sur le dernier paragraphe, le paragraphe
8 14, où en anglais on peut lire : "Il faut insister sur le fait que le
9 travail de tous les experts et médecins légistes qui ont participé à ces
10 efforts d'enquête, ont été menés par une équipe à un niveau professionnel
11 très élevé dans une atmosphère de respect et de confiance mutuelle."
12 Est-ce que vous voyez ce passage ?
13 R. Oui.
14 Q. A partir du 30 janvier 1999, vous n'aviez aucune difficulté ou aucune
15 critique à faire à l'égard du Dr Helena Ranta,
16 n'est-ce pas ?
17 R. Certainement pas. J'ai coopéré avec cette dame de façon exceptionnelle.
18 Q. Si nous pouvons maintenant nous reporter à l'intercalaire numéro 11, où
19 étaient les commentaires recueillis par une conférence de presse du Dr
20 Ranta le 17 mars 1999, si vous voulez bien passer à la page 3.
21 M. SAXON : [interprétation] Effectivement, ce document porte également le
22 numéro C1, Messieurs les Juges. Pardonnez-moi.
23 Q. Professeur Dobricanin, est-ce que vous pouvez lire la dernière phrase
24 de ce premier paragraphe, la phrase se lit comme suit : "Aucune indication
25 concernant les personnes autres que les civils sans arme." Est-ce que vous
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1 voyez cette phrase ?
2 R. Oui, je la vois.
3 Q. Manifestement vous et vos collègues -- je devrais dire vous et vos
4 collègues yougoslaves, vous n'étiez pas d'accord avec cette phrase, n'est-
5 ce pas ?
6 R. Nous n'avons pas été d'accord avec cette phrase, en effet.
7 Q. Le problème, si je peux utiliser ce terme, concernant les travaux menés
8 par le Dr Ranta, ont surgi ou a surgi le 17 mars 1999, lors de cette phrase
9 citée lors de la conférence de presse.
10 R. Oui. Je crois que cela a été l'une de nos observations formulées suite
11 à l'exposé présenté par notre collègue Mme Helena Ranta. Si vous le
12 permettez, je me proposerais de vous expliquer pourquoi.
13 Q. Je crois que nous avons déjà compris pourquoi, Professeur Dobricanin.
14 Si vous voulez bien vous reporter à l'intercalaire 3.1, s'il vous plaît.
15 Pardonnez-moi, c'est en premier lieu l'intercalaire 3. Dans votre
16 témoignage la semaine dernière, vous avez dit qu'il y avait un certain
17 nombre de désaccords entre le Dr Ranta et d'autres membres de l'équipe
18 d'enquêteurs concernant les événements de Racak.
19 A l'intercalaire numéro 3, nous avons un article qui a été publié dans
20 "Forensic Science International" au mois de février 2001. Il s'agit d'un
21 des articles que vous avez-vous même présentés. Est-ce qu'il y a quelque
22 chose avec lequel -- un point ou plusieurs points avec lesquels vous n'êtes
23 pas d'accord dans cet article ?
24 R. Il n'y a absolument rien où je ne serais pas d'accord. C'est un article
25 qui reprend le travail que nous avons réalisé en commun.
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1 Q. Est-ce vous pourriez nous dire à quel moment dans cet article on fait
2 allusion à ce désaccord avec Mme Helena Ranta ?
3 R. J'ai sous les yeux la variante en anglais, enfin, la version anglaise,
4 et je ne comprends pas l'anglais.
5 Il n'y a pas de désaccord fondamental. Il n'appartient pas aux
6 experts en médecine légale de parler d'origine des événements ou des
7 raisons ayant motivé les événements survenus à un endroit quelconque. Je
8 crois que c'est là un point de désaccord. S'il y a d'autres points de
9 désaccord, elle n'a qu'à les indiquer elle-même.
10 Q. Docteur Dobricanin, êtes-vous en train de dire, qu'au cours de votre
11 témoignage la semaine dernière, vous ne parliez pas de ce qui s'est passé à
12 Racak ?
13 R. Je vous demande de reformuler la question. Je n'ai pas compris ce que
14 vous m'avez demandé. Pouvez-vous le redire au moins ?
15 Q. Vous venez de dire à la Chambre de première instance, vous avez dit :
16 "Je ne pense pas qu'il y ait des désaccords très prononcés." Ceci est
17 clair. "Mais je crois que des médecins légistes ne doivent pas parler des
18 raisons et de ce qui s'était passé à cet endroit-là et à l'endroit où les
19 corps ont été trouvés."
20 Ne pensez-vous pas que jeudi et vendredi dernier, lorsque vous avez fait
21 votre déposition devant cette Chambre, c'est exactement ce que vous
22 faisiez ? Autrement dit, vous avez donné votre avis ou vos différents
23 points de vue, devrais-je dire, sur ce qui s'est passé à Racak le 15
24 janvier 1999.
25 R. Monsieur, je n'ai pas pu formuler une opinion de cette nature suivant
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1 quelque critère que ce soit. Si on m'avait laissé entrer dans Racak le jour
2 J, vous auriez eu un rapport bien plus précis que de nos jours. Lorsqu'un
3 des Juges m'a posé la question de savoir pourquoi j'ai dit qu'il ne
4 s'agissait pas d'exécution, j'ai apporté certaines explications qui sont
5 les miennes. C'est la seule chose, la seule constatation dont j'ai parlé
6 s'agissant des événements de Racak. Je ne dirais jamais rien de plus au
7 sujet de Racak mis à part ce que j'ai vu. Cela ne fournit à personne le
8 droit ou l'opportunité de tirer des conclusions quelles qu'elles soient.
9 Q. Je vais poursuivre mes questions. Si vous vous tournez au paragraphe 4,
10 on peut lire cette phrase : "Les médecins légistes sont en mesure de
11 déterminer la raison et la manière dont les personnes sont décédées --" à
12 la page 8 -- "ils prennent note des autres blessures, ainsi que des
13 changements pathologiques et différents faits, qui leur permettent de
14 procéder aux indentifications; ce qui leur permet de comprendre les raisons
15 de ces événements, le sens politique et moral qu'on peut leur donner. S'il
16 y a un lien avec les victimes et les circonstances politiques ou d'autres
17 organisations, sont des questions qui vont au-delà du champ d'étude des
18 médecins légistes. Ceci doit être conduit par les autorités, mais également
19 par une équipe de médecins légistes."
20 Vos commentaires, la semaine dernière, ont porté justement sur ces liens
21 avec les victimes, les victimes de Racak et certaines organisations, comme
22 par exemple, la garde villageoise que vous avez citée la semaine dernière.
23 Ceci tomberait dans cette catégorie, n'est-ce pas ?
24 R. On m'a posé la question d'expliquer les plusieurs couches de vêtements
25 que ces gens portaient. Il s'agissait d'expliquer qu'est-ce que j'ai vu au
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1 fil de ces mois et années au Kosovo. J'ai fourni mon opinion, non pas en ma
2 qualité d'expert en médecine légale, mais en ma qualité de personne
3 connaissant les circonstances, étant que j'étais constamment en
4 déplacement. J'ai constamment voyagé pour procéder à des autopsies sur le
5 terrain, et rien de plus. Partant de ce que nous avons fait au niveau des
6 autopsies à l'institut de médecine légale, c'est de là qu'ont été tirées
7 toutes les autres conclusions présentées.
8 Q. Autrement dit, simplement, pour clarifier tout ceci, Professeur, vous
9 dites : "J'ai donné mon avis non pas en tant qu'expert dans le domaine de
10 la médecine légale," autrement dit, est-ce que l'on peut aujourd'hui
11 comprendre ceci de la manière suivante : les points de vue que vous avez
12 donnés la semaine dernière sur un scénario possible à Racak du 15 janvier
13 1999, ne se fondaient pas sur votre expertise en tant que médecin légiste.
14 C'était simplement un avis que vous nous avez donné ?
15 R. A partir du moment où j'ai vu les cadavres dans la mosquée de Racak, et
16 par la suite lorsque j'ai vu les cadavres dans les locaux de notre
17 institut, donc, tout ce que j'ai vu en ma qualité de citoyen qui a traversé
18 le village et en ma qualité d'équipe chargée de l'instruction, sous les
19 tirs de la partie adverse, donc, je dis est équipe d'investigation,
20 d'instruction, oui; mais tout le reste, je le dis en ma qualité de
21 professeur et de spécialiste en médecine légale. Il y a là deux éléments
22 qu'il convient de distinguer.
23 Q. Très bien, je vous remercie d'avoir bien voulu faire cette distinction.
24 A moment donné, au cours de votre témoignage la semaine dernière, je sais
25 que vous avez dit aujourd'hui, il y a quelques instants, qu'il n'y avait
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1 pas de désaccords très profonds ou réels entre les membres de l'équipe
2 finlandaise et vous-même. La semaine dernière, vous dites que les
3 Finlandais ont publié un rapport et que les collègues du Dr Ranta ont
4 publié ce rapport quelque part, et M. le Juge Bonomy vous a demandé où on
5 pouvait trouver ce rapport et où il a été publié. Vous n'avez pas été en
6 mesure de nous fournir une réponse très précise à ce moment-là. Avez-vous
7 eu le temps d'y réfléchir depuis ?
8 R. Je n'ai pas dit qu'ils l'ont publié. J'ai dit que j'ai ouï dire, mais
9 je ne sais pas où, parce que dans nos conversations, nous avons beaucoup et
10 longuement débattu en tant que collègues. Il se peut que nous en ayons
11 parlé à ce moment-là. Nous avons réfléchi à la façon dont on devrait
12 expliquer les positions des cadavres où il y a eu plusieurs blessures de
13 constater. On a dit à cette occasion-là que cela ne ressemblait en aucune
14 façon à des exécutions. Nous n'étions pas les témoins oculaires des faits.
15 Moi, non plus.
16 Un médecin légiste parle de probabilités plus ou moins grandes, de
17 causes d'événements qui ont donné lieu à telle ou telle blessure. C'est
18 ainsi que vous devriez comprendre mon intervention.
19 Q. Professeur Dobricanin, vous avez utilisé le pronom personnel "nous".
20 Vous dites que : "Nous avons parlé de tout cela entre nous, entre
21 collègues. Nous y avons réfléchi. A ce moment-là, nous avons dit que cela
22 ne ressemblait à des exécutions." Est-ce que lorsque vous dites "nous",
23 ici, vous entendez les membres de l'équipe finlandaise. Je devrais dire
24 l'équipe européenne lorsque vous utilisez ce pronom; si oui, pourriez-vous
25 nous dire de quel membre de l'équipe finlandaise il s'agit dans ce cas ?
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1 R. Tout d'abord, nous n'avons pas dit que ce n'était pas une exécution.
2 Nous avons dit que cela ne ressemblait pas à une exécution. Mais tous les
3 membres de l'équipe, aussi bien serbes que finlandais et biélorusses, nous
4 nous sommes entretenus au niveau de chaque cas particulier, parce que nous
5 avons eu nos pauses, que nous mettions à profit pour -- par ailleurs, en
6 tant que collègues, amicalement. De nos jours encore, je ne pense pas
7 pouvoir expliquer clairement chacune des blessures. C'est tout à fait
8 normal. Nous parlons de "probabilité plus ou moins grande". Nous ne pouvons
9 jamais être à 100 % sûrs.
10 Q. Professeur Dobricanin, une dernière question sur ce point.
11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous avez obtenu la réponse
12 à cette question ?
13 M. SAXON : [interprétation] Non.
14 Q. Pourriez-vous nous citer le nom d'un des membres de cette équipe
15 finlandaise de médecins légistes qui était d'accord avec vos conclusions
16 pour dire que c'est ce qui s'est passé à Racak et aux gens de Racak ne
17 ressemblaient pas à une exécution. Pouvez-vous citer un seul nom de cette
18 équipe ?
19 R. Je ne peux pas renommer ni un membre de l'équipe finlandaise, ni de la
20 nôtre, d'ailleurs. Ce sont des conversations qui sont faites en commun et
21 ensemble, en salle. Je ne peux pas vous donner davantage de précision à ce
22 sujet.
23 Q. Je sais que cela s'est passé déjà depuis un certain nombre d'années. Je
24 souhaite maintenant regarder l'intercalaire numéro 12, de cette série de
25 documents.
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1 C'est un article rédigé par vous-même, Professeur Dobricanin, et trois de
2 vos collègues. J'aimerais vous demander de vous reporter à la page 13 de la
3 version anglaise. Vers le milieu de la page, à la page 13, vous et vos
4 collègues, vous vous mettez à parler de Helena Ranta, qui dirigeait
5 l'équipe des enquêteurs experts finlandais. Je crois que vous avez
6 également fait référence à l'Article 11, la conférence de presse du 17 mars
7 1999. C'est ce que vous dites dans la version anglaise : "En utilisant les
8 termes qui relèvent du registre politique et non pas de la terminologie
9 médicale, le Dr Ranta condamne les Serbes pour le massacre de civils
10 innocents et sans armes." Le texte poursuit en disant que la diphénylamine
11 n'est pas quelque chose qui permet de décréter avec certitude, et cetera,
12 et cetera.
13 Professeur Dobricanin, est-ce que vous voyez cette phrase ?
14 R. Je la vois.
15 Q. Pourrions-nous repartir un petit peu en arrière et nous reporter à
16 l'intercalaire numéro 11. Il s'agit-là du texte qui rapporte les propos du
17 Dr Ranta, lors de la conférence de presse du 17 mars. Pourriez-vous nous
18 dire, s'il vous plaît, à quel endroit dans cet article le Dr Ranta condamne
19 les Serbes ?
20 R. Monsieur, il y a des indications directes ou indirectes de ce dont il
21 est question dans mon article d'expert. Si nous disons que ce document-ci,
22 de par son titre, rapport de médecine légale de l'équipe des Nations Unies,
23 chargée de diligenter les instructions à Racak, on dit que les commentaires
24 constituent l'opinion personnelle du rapport. Donc, il est question ici non
25 pas de commentaires de l'équipe finlandaise ou de l'Union européenne, mais
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1 de Mme Helena Ranta elle-même. C'est elle qui l'a dit. Ce n'est pas mon
2 commentaire à moi. C'est elle qui le dit. Si elle dit et conclut qu'il
3 s'agit --
4 Q. Pardonnez-moi, je croyais que je vous avais posé une question simple et
5 directe. Ma question était celle-ci --
6 R. Je cherche le passage.
7 Q. Où le Dr Ranta condamne les Serbes pour les événements qui se sont
8 passés à Racak ?
9 R. Non, il n'y a pas de phrase de cette nature. Je n'ai pas trouvé cette
10 phrase dans son commentaire, et je crois que cette phrase n'avait pas
11 trouvé sa place dans le commentaire. Mais, indirectement parlant, la
12 conséquence négative de cet exposé a consisté ou s'est traduite par un
13 bombardement de la Serbie et du Monténégro à ce moment-là. En disant qu'il
14 s'agissait de civils non-armés, il s'agissait d'une exécution brutale selon
15 elle, et le fait d'avoir trouvé ces victimes dans une ravine, chose dont
16 nous ne pouvons avoir aucun renseignement, puisque nous n'avons été ni
17 témoin oculaire; ni Mme Ranta, ni moi-même. Il est question ici d'adopter
18 des réflexions qui nous diraient qu'il s'agirait-là d'une espèce de
19 représailles vis-à-vis de la population albanaise du village de Racak.
20 J'ai apporté, je pense, des explications détaillées pour ce qui est
21 des tests à la diphénylamine ou à l'acide sulfurique que l'on appelle dans
22 notre jargon, test à la paraffine, et s'il y a encore quelque dilemme que
23 ce soit à ce niveau-là, je suis prêt tout à fait à disposer à vous et à
24 apporter mes explications.
25 Q. Oui, effectivement, Professeur Dobricanin. Vous venez de reconnaître
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1 que dans un article professionnel qui a été publié en votre nom, vous avez
2 dit quelque chose qui n'était pas vrai à propos d'un autre collègue. Est-ce
3 que vous estimez qu'il s'agit d'une attitude responsable ?
4 R. Je n'ai rien dit d'inexact. J'ai fait un commentaire en disant que les
5 médecins légistes ne veulent pas faire de commentaires politiques de nature
6 à causer éventuellement une réaction des plus graves de la part de
7 l'opinion publique mondiale.
8 Q. Monsieur Professeur Dobricanin, pourriez-vous vous rapporter à nouveau
9 à l'intercalaire numéro 12, s'il vous plaît. A la page 13, à nouveau, du
10 texte anglais. Vers le milieu de la page, après la phrase que je vous ai
11 lue précédemment, on peut lire ce qui suit : "Ce type de point de vue
12 politique, qui ne tient pas compte des avis d'un médecin légiste, on
13 conclut que cette opinion indiquait qu'il n'y avait aucune raison de croire
14 que ces individus étaient des membres de l'UCK."
15 Est-ce que vous voyez ce passage ?
16 R. Oui, je le vois.
17 Q. Retournez, je vous prie, à l'intercalaire numéro 11, le commentaire du
18 Dr Ranta. A la fin de ses commentaires, où voyez-vous que l'on fasse état
19 d'un tel point de vue ?
20 R. Je retrouve cela à la page 4, paragraphe 2, dernière phrase. Elle dit :
21 "il n'y a pas d'indications aux termes desquels il s'agirait de personnes
22 autres que des civils dépourvus d'armes."
23 Elle n'avait pas le droit de déclarer une chose pareille. Elle
24 n'avait aucun élément de preuve pour dire ceci. Nous, tous ensemble, son
25 équipe et la nôtre, avions eu des éléments de preuve indirects disant que
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1 ces personnes avaient des traces de particules de poudre ou plutôt des
2 nitrates -- excusez-moi, des nitrates. C'est de cela que nous pouvons
3 parler. Mais partant des documents, de la documentation, nous n'avions
4 aucun constat qui nous permettrait de tirer la conclusion qu'il s'agissait-
5 là de civils dépourvus d'armes. Ce n'est pas une qualification en matière
6 de médecine légale de ce qui s'est passé là-bas.
7 Q. Poursuivons, Professeur Dobricanin, et parlons maintenant des
8 événements de Racak.
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je souhaite qu'une chose soit
10 clarifiée, s'il vous plaît, Monsieur Saxon. Je dois certainement être au
11 courant de ceci, mais j'ai oublié. Le Dr Ranta a-t-elle accepté que le test
12 à la paraffine avait permis ou avait fourni les conclusions qui ont été
13 présentées ici ? Ce que j'entends par là, conclusions au plan physique.
14 Quelles conclusions avez-vous tiré sur ce sujet, ou, autrement dit, quelles
15 étaient les quatre causes possibles qui ont été présentées à ce moment-là à
16 la lumière des résultats obtenus ?
17 M. SAXON : [interprétation] Je crois que la réponse à la question est non,
18 parce que d'après ce que j'ai compris, de telles conclusions n'ont jamais
19 été fournies aux membres de l'équipe hollandaise, et que c'est les tests de
20 résidu de poudre de paraffine ont été faits avant l'arrivée du groupe
21 d'experts finlandais. Evidemment le Dr Ranta aurait pu fournir peut-être
22 une réponse plus précise.
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Peut-être que le témoin connaît la
24 réponse, en tout cas, pour nous faire une explication plus précise.
25 L'équipe de médecin légiste de l'Union européenne a-t-elle reçu le
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1 détail des conclusions auxquelles étaient parvenus les techniciens qui ont
2 fait ces tests à la paraffine.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense qu'ils n'ont pas obtenu, ils n'ont
4 pas reçu, mais je n'en suis pas certain. Je pense que cela n'est pas le
5 cas.
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
7 M. SAXON : [interprétation]
8 Q. Professeur Dobricanin, je souhaite résumer certains de vos propos de la
9 semaine dernière à propos des événements de Racak.
10 Vous nous avez fait part de votre avis - d'après ce que je comprends
11 maintenant, il s'agit de votre avis en tant que citoyen - autrement dit,
12 les victimes de Racak ont été tuées dans quelque chose qui ressemblerait à
13 une situation de combat, et vous fondant sur cet avis. C'est ainsi que je
14 comprends votre témoignage. Vous vous fondez sur quatre éléments. Je suis
15 simplement en train d'essayer de comprendre.
16 Le premier facteur est ceci : les victimes portaient différentes
17 couches de vêtement. Le deuxième facteur est que bon nombre de victimes
18 portait des vêtements qui étaient de couleur sombre. Troisième facteur :
19 les conclusions obtenues après les tests de résidu de poudre; et le
20 quatrième facteur est que les corps avaient présentés différentes traces
21 d'impact de balle. Autrement dit, les coups étaient venus de différentes
22 directions.
23 S'agit-il là d'un résumé exact de votre témoignage ?
24 R. Oui, je pense qu'on pourrait le dire.
25 Q. Bien. Maintenant, je souhaite visionner une courte séquence vidéo, s'il
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1 vous plaît.
2 Vous vous souvenez avoir dit dans votre témoignage que vous n'avez vu aucun
3 signe de destruction sur les maisons de Racak lorsque vous vous y êtes
4 rendu. Regardons cette vidéo en premier. Il s'agit de la vidéo datée du 17
5 janvier, première séquence que nous allons voire. Cette vidéo fait partie
6 d'une série de documents que Mme le Juge Danica Marinkovic a présenté au
7 cours de son témoignage ici devant ce Tribunal.
8 [Diffusion de cassette vidéo]
9 M. SAXON : [interprétation]
10 Q. Nous voyons ici une tranchée, des bois. Une pelle.
11 Est-ce que nous pouvons faire un arrêt sur l'image pendant quelques
12 instants, s'il vous plaît ?
13 Professeur Dobricanin, je crois que c'est vous qui êtes sur cette
14 photographie accroupi entre les deux voitures. Est-ce bien vous ?
15 R. Oui, oui, c'est moi.
16 Q. Corrigez-moi si je me trompe. Je crois qu'il s'agit ici du 17 janvier.
17 Bien sûr, nous sommes en hiver puisque vous portez des vêtements chauds.
18 R. Oui, je n'avais qu'une seule jaquette.
19 Q. Vous ne portiez rien sous votre veste ou votre anorak ?
20 R. Non, Monsieur.
21 Q. Que portiez-vous ce jour-là sous votre veste ou anorak ?
22 R. Je pense que j'avais un pull ou une chemise plus épaisse. J'avais cette
23 veste dont je me servais pour aller sur le terrain notamment.
24 Q. Vous portez cette veste, vous portez un pull-over, vous portez une
25 chemise chaude. Est-ce que vous portiez un sous-vêtement peut-être ?
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1 R. Monsieur, vous vous trompez. J'ai dit, j'avais une veste et soit un
2 pull-over ou une chemise épaisse; l'un ou l'autre. En dessous, je ne porte
3 qu'un T-shirt sans manche. Rien d'autre.
4 Q. Je vois. Je me suis peut-être trompé. C'est peut-être une erreur au
5 niveau de la traduction.
6 Là où je veux en venir est ceci : vous portiez plus d'une couche de
7 vêtements ce jour-là, n'est-ce pas, vous aviez plusieurs couches sur vous ?
8 R. Si vous comptez le T-shirt et la chemise, oui, certainement.
9 Q. Fort bien. Dois-je supposer que la personne qui porte un parka bleu qui
10 vous accompagnait, portait également des vêtements sous son parka ?
11 R. Je n'ai pas cherché à le déterminer, Monsieur. Je n'ai vu que le parka.
12 Q. Je sais que vous êtes un homme qui a beaucoup de bon sens. Vous êtes un
13 homme intelligent. Vous savez que la plupart des gens, lorsqu'en hiver vont
14 dehors, ils portent une veste ou quelque chose de chaud, et qu'ils portent
15 quelque chose sous cette veste -- de ce vêtement.
16 R. Certainement, certainement. On ne met pas une veste de cette nature à
17 même la peau.
18 Q. Est-ce que nous devons tirer des conclusions particulières, à la
19 lumière du fait que vous et votre collègue ou vos collègues vous portiez
20 plusieurs couches de vêtements au mois de janvier 1999 dans la région de
21 Racak, hormis le fait, évidemment, de dire qu'il faisait froid à ce moment-
22 là ?
23 R. Si vous parlez de couches multiples de vêtements s'agissant des
24 personnes tuées à Racak, et si vous comparez avec les vêtements que nous
25 portions, l'histoire est tout à fait autre. Ils portaient deux blousons,
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1 deux ou trois pulls chacun, plusieurs sous-vêtements, plusieurs pantalons
2 l'un par-dessus l'autre, et des pyjamas en dessous avec des bottines. Ils
3 étaient fort bien équipés. Nous portions, nous, quant à nous, ce qui est
4 tout à fait normal avec un veston, une chemise ou un pull. Nous ne nous
5 n'apprêtions pas à rester longtemps dans des conditions de basse
6 température hors de toutes pièces chauffées.
7 Q. Oui, j'entends bien, Professeur Dobricanin. J'aimerais comparer les
8 vêtements que vous portiez avec les vêtements qui ont été découverts sur
9 les victimes de Racak, parce que très honnêtement, et je n'entends pas
10 vous manquer de respect, mais vous et vos collègues vous vous trouviez sans
11 doute dans un endroit qui, sur le plan socio-économique, était bien
12 différent de l'endroit où se trouvaient la plupart des résidents de Racak,
13 n'est-ce pas ?
14 R. Je ne vous ai pas compris. Je n'étais pas un homme riche, si c'est ce
15 que vous voulez dire. Je n'ai pas pu faire montre de beaucoup de vêtements.
16 Nous avions des salaires. C'est un système qui prévalait chez nous. Je
17 vivais de mon salaire. Bon nombre de ces personnes dans les villages
18 vivaient d'agriculture et de commerce, et leurs enfants, frères ou autres
19 travaillaient à l'étranger; ce qui fait que ce niveau de vie ne serait être
20 comparé de façon analogue à celui que vous avez utilisé.
21 Je vais vous dire que je n'ai eu mon premier logement véritable où
22 j'ai pu résidé ou être chez moi, que dix mois avant d'avoir à fuir
23 Pristina.
24 Q. Bon nombre de ces habitants de la région de Racak ont des membres de
25 leur famille qui vivent en Suisse, car il y a très peu de travail ou
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1 d'emploi dans la région de Racak sauf l'agriculture comme moyen de
2 subsistance.
3 R. Non seulement s'agissant d'Albanais, nous étions dans une grave crise;
4 nous étions sous embargo. Vous n'ignorez pas le fait que nous étions
5 exposés à des sanctions économiques depuis longtemps. Pas seulement les
6 Albanais, les Serbes aussi dans les villages et dans les villes. Là où il y
7 avait cette misère urbaine, les gens ont également beaucoup souffert. J'ai
8 visité bon nombre de villages albanais en ma qualité de médecin qui a
9 vacciné en temps utile les gens.
10 Lorsque nous avions cette épidémie de variole, j'ai inspecté bon
11 nombre de villages dans la Metohija, et je sais que les gens vivaient --
12 Q. Je vais vous interrompre. Je crois que vous avez tenté de répondre à ma
13 question.
14 L'objet de ma question est comme suit : si vous n'êtes pas un professeur de
15 l'université, si vous n'avez pas une source de revenu régulière, si vous
16 êtes pauvre, vous ne pouvez pas vous permettre d'acheter ces beaux
17 vêtements d'hiver que l'on vous voit porter vous et votre collègue. Vous
18 êtes obligé de vous lever tôt le matin en hiver. A ce moment-là, vous
19 mettriez peut-être plusieurs couches de vêtements pour vous tenir chaud,
20 n'est-ce pas ?
21 R. Monsieur, je n'ai pas dit que j'étais pauvre. En ma qualité de
22 professeur à l'université, je vivais nettement mieux que bon nombre de ces
23 villageois, mais je n'étais pas riche pour pouvoir en jeter par les
24 fenêtres de l'argent.
25 Je pouvais m'acheter la veste que je voulais, en effet - je m'excuse aux
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1 interprètes de parler si vite - la veste que je portais pour le terrain
2 parce que c'était plus épais et cela me tenait chaud. L'avantage, c'est
3 qu'il y avait beaucoup de poches, et je pouvais prendre et emporter tous
4 mes carnets de notes.
5 Bien entendu, le matin, je ne serais pas parti, mais j'ai vu hier des gens
6 prendre des bains de soleil, et j'avais un pull-over et une veste, et je
7 n'avais pas chaud.
8 Q. Hier, vous portiez également plusieurs couches de vêtements. Je crois
9 qu'il ne faut en tirer aucune conclusion par rapport à votre affiliation
10 politique en nous fondant sur cela, n'est-ce pas ?
11 R. En effet, Monsieur. Je suis une personne assez âgée. J'aime bien me
12 couvrir. Je ne porte pas qu'un seul vêtement à moins que d'être vraiment à
13 la plage.
14 Q. Bien. Professeur Dobricanin, je souhaite maintenant poursuivre et
15 demander la question de test sur les résidus de poudre auxquels nous avons
16 fait référence ici sous le nom de test à la paraffine. Peut-être que vous
17 pourriez expliquer quelque chose, s'il vous plaît. Je crois que je suis --
18 je dois faire une pause car je suis allé trop vite.
19 Je souhaite que nous montrions la vidéo suivante de Dobricanin numéro 3,
20 s'il vous plaît, 2 et 3. Très bien.
21 [Diffusion de cassette vidéo]
22 M. SAXON : [interprétation] Est-ce que nous pouvons faire un arrêt sur
23 image ici, s'il vous plaît.
24 Q. Professeur Dobricanin, encore une fois, c'est une vidéo qui nous a été
25 remise par Mme Danica Marinkovic. Ceci montre la région de Racak. Est-ce
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1 que vous voyez cette maison qui se trouve à droite de l'image ? Il
2 semblerait que ce soit une maison qui ait été incendiée. Est-ce que vous
3 voyez cette maison ?
4 R. Oui, je le vois.
5 Q. Vous souvenez-vous si oui ou non vous avez vu cette maison le 17
6 janvier lorsque vous vous êtes rendu dans ce village ?
7 R. Cette photo, je ne l'ai jamais vue. Pas de photos analogues, non plus.
8 M. SAXON : [interprétation] Pourrions-nous regarder le reste de cette
9 séquence vidéo, s'il vous plaît ?
10 [Diffusion de cassette vidéo]
11 M. SAXON : [interprétation] Pouvons-nous faire un arrêt sur image ici, s'il
12 vous plaît.
13 Q. Professeur Dobricanin, il s'agit là d'une maison qui se trouve à Racak.
14 Je crois que la date est le 17 janvier. Il se peut que ce soit le 18
15 janvier. La maison est encore en train de fumer. Est-ce que vous voyez la
16 fumée sortir de la maison ?
17 R. Je le vois sur la photo. Croyez-moi bien que là-bas je ne l'ai pas vue.
18 Je suis certain de l'avoir vue ou de pouvoir le voir, parce que j'ai monté
19 sur la côte la plus élevée sur les hauteurs de Racak. Personne d'entre nous
20 n'a vu ce que vous êtes en train de nous montrer ici.
21 Vous avez parlé du 17 ? Le 17, je ne l'ai pas vue. Le 18, j'ai retourné à
22 Racak et je ne l'ai pas vue, non plus.
23 Q. D'après vous, qu'est-il arrivé à cette maison ?
24 R. On voit une maison qui a brûlé. Je ne sais pas ce qui a pu lui arriver.
25 Je ne sais pas si cette maison se trouvait à Racak. D'après ce que nous
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1 avons vu, cela m'est assez inexplicable. Il se peut que ce soit dans la
2 banlieue du village, derrière la colline, endroit que je n'ai pas pu voir,
3 parce que si je l'avais vu, je m'en serais souvenu; c'est certain.
4 Q. Est-il possible qu'une maison qui se trouve à l'extérieur du village de
5 Racak ait été endommagée par le feu un 15 janvier, peut-être un feu tiré
6 par un canon ?
7 R. Vous me posez une question à laquelle je ne saurais y répondre. Je vous
8 ai dit que je m'y connaissais en armes, mais je ne m'y connais pas en
9 dégâts sur les maisons, les routes et le reste de l'infrastructure. Je ne
10 sais pas vous répondre à votre question; je le regrette.
11 Q. Professeur Dobricanin, je vais poursuivre et aborder la question de
12 résidus, de poudre et des tests qui ont été faits.
13 Est-ce que vous pourriez clarifier ceci ? Quel jour ces tests ont-ils
14 été faits sur les 40 corps qui ont été emmenés de Racak à la morgue ?
15 Etait-ce le 19 janvier, le jour où les corps ont été transportés à la
16 morgue ou s'agissait-il d'un autre jour ? Pourriez-vous nous le dire, s'il
17 vous plaît ?
18 R. Cela s'est passé le 19 lorsqu'on a entamé les autopsies. On a
19 fonctionné successivement au niveau des cadavres au fur et à mesure qu'on
20 les apportait sur la table d'autopsie. Une autre équipe travaillait sur les
21 cadavres qui se trouvaient à la morgue.
22 Ce sont des analyses qui sont faites de façon tout à fait simples.
23 Je crois qu'en quatre ou cinq jours, à peu près, enfin je n'en sais pas
24 tout à fait certain, on a dû faire les analyses au niveau de tous les cas
25 pour ce qui est des échantillons pris au niveau des mains des intéressés.
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1 Q. D'après ce que j'ai compris, vous avez également pris des empreintes ou
2 des échantillons d'empreintes sur les corps pour vous aider dans votre
3 système d'identification, n'est-ce pas ?
4 R. Oui, tout à fait exact. On a pris des empreintes digitales.
5 Q. Est-ce que vous avez pris des empreintes digitales le 19 janvier
6 également ?
7 R. Les empreintes ont été prises après les tests au nitrate pour qu'il n'y
8 ait pas perturbation de l'emplacement, et pour ne pas dissimuler la
9 présence de particules de nitrate éventuellement. On n'a pas fait cela en
10 parallèle, en même temps. On a d'abord procédé au test de la paraffine,
11 ensuite, on a procédé à la prise des empreintes digitales aux fins de
12 l'identification des individus.
13 Q. Je pose simplement la question. Je me rends compte que ces deux tests
14 n'ont pas été effectués en même temps, de façon simultanée. Je souhaite
15 simplement savoir si ces tests ont été faits le même jour ou si les
16 empreintes digitales ont été relevées longtemps après ?
17 R. Pas mal de temps après. Quand je dis pas mal de temps, cela fait sans
18 doute cinq ou six jours après le test au gant de paraffine et l'examen des
19 avant-bras.
20 Q. J'aimerais maintenant vous montrer une autre séquence vidéo.
21 [Diffusion de cassette vidéo]
22 M. SAXON : [interprétation]
23 Q. Ce sont des images fournies par Mme le Juge Marinkovic. Selon elle, il
24 s'agit des armes retrouvées à Racak le
25 15 janvier 1999, des armes et des munitions. Nous voyons des grenades à
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1 main. Ici, nous commençons à voir des fusils légers. Vous voyez qu'il y en
2 a un certain nombre.
3 Cela suffira, je pense.
4 Professeur Dobricanin, nous avons déjà parlé, en tout cas, vous avez déjà
5 dit que ce qu'il est convenu d'appeler le test à la paraffine n'est pas un
6 test parfaitement efficace pour indiquer la présence de poudre. J'ai une
7 chose à vous demander. Bien entendu, tout votre travail vise à tenter de
8 fournir autant de renseignements que possible aux autorités judiciaires, et
9 ce, dans la plus grande précision possible, de façon à ce que ces autorités
10 judiciaires soient en mesure de se prononcer sur les événements de Racak.
11 C'est bien cela, n'est-ce pas ?
12 R. Oui.
13 Q. Ce que je m'efforce de comprendre dans ces conditions, c'est la chose
14 suivante, parce que vous aviez à votre disposition les empreintes
15 digitales, en tout cas, quelqu'un les avait à sa disposition les empreintes
16 de ces cadavres. Y a-t-il eu quelqu'un qui peut-être, aurait effectué des
17 tests sur ces fusils légers, nombreux et si bien alignés, afin de
18 rechercher éventuellement des empreintes des corps de Racak sur ces
19 fusils ?
20 R. Je ne suis pas au courant de cela.
21 Q. Voyez-vous, si tout cet exercice avait pour but d'aboutir à la vérité,
22 c'est-à-dire, finalement de découvrir la vérité, dans les conditions les
23 plus claires, les plus précises, les plus objectives possibles, ne serait-
24 ce pas été tout à fait logique d'appliquer une procédure relativement
25 simple, à savoir, vérifier si les empreintes digitales relevées sur les
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1 cadavres de Racak se retrouvaient éventuellement sur l'un ou l'autre de ces
2 fusils automatiques ?
3 R. Monsieur, ceci ne fait pas partie du champ de mon travail en tant que
4 professionnel. Je suppose que ceci aurait dû être fait, mais est-ce que
5 cela a été fait effectivement, je n'en sais rien et je ne peux pas vous en
6 dire plus. J'ai vu ces armes plus tard. Est-ce que les empreintes ont été
7 relevées ou pas sur ces armes, je ne sais vraiment pas. Il appartient aux
8 responsables de l'enquête judiciaire de faire ce genre de travail; ce n'est
9 pas le mien.
10 Q. Mais même si cela dépasse le champ de votre travail, nous pourrions
11 peut-être poursuivre notre conversation en tant que simple citoyen. Nous
12 savons qu'il existe pour le moins quelques inquiétudes quant à la fiabilité
13 de ce test connu sous le nom de test à la paraffine. N'aurait-il pas été
14 beaucoup plus précis et beaucoup plus utile de déterminer si les personnes
15 qui avaient trouvées la mort à Racak avaient utilisé les armes en question
16 en se contentant de faire une comparaison des empreintes digitales ? Je
17 vous parle en tant que simple citoyen. Est-ce que vous seriez d'accord avec
18 cela ?
19 R. Ce serait là un des éléments qu'il serait possible d'utiliser dans ce
20 but.
21 Q. Si les autorités de la République fédérale de Yougoslavie ou de la
22 République de Serbie avaient vraiment tenu à démontrer la vérité de ce qui
23 s'était passé à Racak --
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Saxon, j'ai l'impression
25 que vous entrez dans une polémique ici.
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1 M. SAXON : [interprétation] Très bien, je vais passer à autre chose.
2 Q. Je vais, à présent, parler de deux autres éléments que vous avez
3 évoqués la semaine dernière Professeur Dobricanin; à savoir la couleur
4 foncée des vêtements et les différences entre les cheminements des balles
5 dans les cadavres découverts à Racak. Afin de faire cela, je vais demander
6 à chacun dans ce prétoire un peu de patience car j'ai pas mal de pièces à
7 conviction à utiliser, mais je vais m'efforcer de le faire le plus
8 efficacement et le plus rapidement possible.
9 M. SAXON : [interprétation] J'aurais, sans doute, besoin de l'aide de
10 l'huissier pour placer une partie du rapport d'Helena Ranta sur le
11 rétroprojecteur, mais je dois d'abord retrouver ce rapport.
12 Prenons, si vous le voulez bien, l'annexe 2 au rapport du Dr Ranta. Plus
13 précisément, la page 9 de cette annexe 2. Nous allons voir trois cadavres.
14 Peut-être, pourrait-on placer la page 9 sur le rétroprojecteur. Les numéros
15 de page sont dans le coin, voyez-vous ? Monsieur l'Huissier, je vous
16 demanderais de prendre la page 9 pour le placer sur le rétroprojecteur. Le
17 numéro de page est sans doute plus facile à utiliser que le numéro ERN.
18 Je ne sais pas pourquoi, mais je n'ai pas d'image sur mon écran. Cela
19 fonctionne.
20 Q. Professeur Dobricanin, je vous demanderais de jeter un coup d'œil à ce
21 que nous voyons ici. Ce sont les cadavres des trois frères Metushi qui ont
22 été découverts à Racak.
23 M. SAXON : [interprétation] Je dis aux Juges de la Chambre pour information
24 que ces cadavres ont été retrouvés dans ce que l'on a l'habitude d'appeler
25 la scène de crime numéro 2, site numéro 2.
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1 Q. Derrière moi, Professeur Dobricanin, vous verrez une affiche de
2 grande taille que j'aimerais que les Juges de la Chambre voient ainsi que
3 vous, bien sûr. A cette fin, je vais enlever mes écouteurs de façon à faire
4 ce qu'il faut pour que vous voyiez bien cette partie de Racak où les
5 photographies ont été prises et les cadavres retrouvés.
6 M. SAXON : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être est-ce le
7 moment pour une pause ?
8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, c'est un moment opportun, 20
9 minutes de pause.
10 --- L'audience est suspendue à 12 heures 12.
11 --- L'audience est reprise à 12 heures 40.
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Maître Kay.
13 M. KAY : [interprétation] Avant que M. Saxon ne poursuive, j'ai un point à
14 évoquer. J'ai eu le temps d'examiner le problème des autres documents liés
15 à Jasovic, à savoir 57 déclarations préalables de témoins. Je pourrais
16 présenter un argument juridique qu'il serait utile, à mon avis, que je
17 soumette aux Juges de la Chambre à un moment ou à un autre.
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Maître Kay. Nous vous
19 entendrons plus tard.
20 Veuillez poursuivre, Monsieur Saxon.
21 M. SAXON : [interprétation]
22 Q. Professeur Dobricanin, sur votre droite, vous voyez cette grande
23 affiche ou plutôt ce panneau sur le trépied. C'est un panneau qui pourra
24 vous être utile ainsi qu'aux autres personnes présentes dans le prétoire.
25 Nous l'avons orienté du mieux possible pour qu'il puisse être utilisable.
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1 Vous voyez que c'est une photo aérienne de la région de Racak avec un
2 certain nombre de lieudits et de localités qui y sont marqués.
3 Vous constaterez, Professeur Dobricinin, qu'on y voit une série de
4 numéros allant de 1 à 13 en différents lieux dans le village de Racak,
5 ainsi que sur les collines qui surplombent le village. Ces numéros
6 concernent ce que nous avons appelé ici dans ce prétoire, les différentes
7 scènes du crime, différents lieux où des crimes se sont produits avec
8 plusieurs scènes dans chacun de ces lieux. Je rappelle que toutes les
9 personnes qui ont été tuées à Racak en 1989 ne sont pas mortes en un seul
10 et même endroit. Il y a eu 13 endroits différents où on a retrouvé des
11 cadavres dans les environs de Racak et à Racak, d'où ces numéros.
12 Vous verrez également qu'il y a des annotations qui concernent votre
13 visite dans le village. Vous voyez, par exemple, un carré noir en bas, à
14 gauche du panneau, avec une flèche qui pointe vers la colline. C'est là que
15 se trouve le site de ce qu'il est convenu d'appeler la casemate ou le
16 bunker de l'UCK que vous avez vu, si je ne m'abuse, lorsque vous marchiez
17 dans les rues du village. Il y a tellement un petit drapeau, un peu en
18 dessous du village. Cela est l'endroit de ce qu'il est convenu d'appeler le
19 quartier général de l'unité de l'UCK basée à Racak, et je crois que vous
20 êtes entré également dans cette maison.
21 Voilà ce que nous vous soumettons à vous et aux autres personnes
22 intéressées pour vous permettre de vous orienter un peu mieux s'agissant de
23 difficultés des victimes du 15 janvier.
24 Professeur Dobricanin, j'aimerais que vous regardiez la photographie qui se
25 trouve sur le rétroprojecteur à présent, et que vous examiniez d'un peu
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1 plus près ces trois cadavres. Avant de comment, d'ailleurs, j'ai une
2 question à vous poser. Est-ce que vous avez déjà vu des photographies de
3 ces cadavres sur les lieux où ils ont été découverts après les événements
4 du 15 janvier ? Est-ce que vous avez déjà vu des photographies de ce
5 genre ?
6 R. Non. Je n'ai jamais eu l'occasion d'en voir.
7 Q. Fort bien. Nous voyons sur cette photographie trois cadavres. Ce sont
8 les cadavres des trois frères Metushi; Sabri Metushi, que l'on connaît
9 également sous le nom de Sabri Syla, Arif Metushi, et Haki Metushi.
10 J'aimerais que nous reprenions certaines des conclusions de l'équipe de
11 médecins légistes finlandais, suite aux autopsies pratiquées sur ces trois
12 corps, si vous voulez bien.
13 D'abord je demande que l'on enlève la photographie du rétroprojecteur
14 puisque je vais commencer par parler du corps qui se trouvait au milieu de
15 la photographie, à savoir, le corps référencé sous le code RA37. Il s'agit
16 du corps de Sabri Metushi. Pour gagner du temps, je vais remettre ce
17 document à l'Huissier. Vous pouvez utiliser mon exemplaire pour le placer
18 sur le rétroprojecteur afin que chacun puisse le voir.
19 Vous voyez, Professeur Dobricanin, il s'agit d'une photographie qui a été
20 faite pendant l'autopsie de M. Sabri Syla, et ce que nous voyons au niveau
21 de la photographie du haut. Bien, nous voyons deux points d'entrée de
22 balle. Si nous regardons un peu plus bas dans la partie basse de la
23 photographie, nous voyons qu'apparemment il n'y a qu'un orifice de sortie
24 après cheminement du haut vers le bas. Vous êtes d'accord ?
25 R. Oui.
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1 Q. Est-ce que j'ai bien décrit la situation ?
2 R. Plus ou moins, oui.
3 Q. Fort bien.
4 R. Je pense que je me souviens de cette affaire, effectivement. Je crois
5 me rappeler cette situation, à en juger par les éléments que j'ai
6 actuellement sous les yeux.
7 Q. Pour ma part, je ne suis pas spécialiste.
8 Je demande que l'on retire la photographie du rétroprojecteur, et que
9 maintenant nous jetions un coup d'œil à la photographie RA38 qui correspond
10 à la photographie du premier cadavre que nous avons vu tout à l'heure sur
11 place, à savoir, le cadavre d'Arif Metushi. A présent, je vais vous montrer
12 une autre photographie prise par les médecins légistes finlandais ou plutôt
13 c'est un schéma qui a été dessiné par ces experts finlandais.
14 Bien, selon les résultats de l'autopsie qui a été pratiquée, l'homme
15 que vous voyez là a été frappé par plusieurs coups de feu, des coups de feu
16 qui ont été tirés derrière le dos de M. Metushi, et à partir d'une position
17 située en avale par rapport à lui. Est-ce une façon exacte de décrire la
18 situation, Professeur ?
19 R. Sur la base de ce croquis, tout à fait. Il y avait aussi des plaies
20 latérales. La plaie numéro V, par exemple, une plaie dont l'origine était
21 latérale par rapport au corps.
22 Q. La plaie numéro IV est, sans doute également, ce que vous appelleriez
23 une plaie latérale, n'est-ce pas ? Le coup de feu ayant atteint le corps en
24 passant entre les doigts. C'est exact, c'est un peu latéral, n'est-ce pas ?
25 R. Oui.
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1 Q. Fort bien. Je demande ce qu'on le retire cette photographie du
2 rétroprojecteur également ou plutôt, ce croquis. Nous allons maintenant
3 voir la photographie de Haki Metushi, photographie RA39, dans les
4 protocoles d'autopsie. Il s'agit du cadavre qui se trouvait en position
5 inférieure sur la photographie où on voyait les trois corps. Je demanderais
6 que l'on place ce croquis à présent sur le rétroprojecteur.
7 Là, encore, nous constatons que M. Haki Metushi a été atteint par
8 plusieurs balles tout en bas. On a l'impression qu'il a reçu une balle
9 juste en dessous du genou gauche, n'est-ce pas, dans le mollet gauche ?
10 R. Cela a l'air d'une plaie, et, bien entendu, je n'ai pas la moindre
11 raison de mettre en doute l'existence de cette plaie, mais cette plaie peut
12 avoir été provoquée au cours des combats ou au cours de la fuite ou au
13 cours d'une forme d'opération armée, mais toutes ces plaies ont été
14 infligées à peu près au même moment.
15 Je me permettrais quelques mots supplémentaires. Ceci n'a rien de
16 particulier, si c'est cela que vous voulez dire. Les trajets des balles
17 sont très différents, les cheminements de balles sont très différents, je
18 suppose que vous l'avez remarqué. Il y en a qui parte du haut pour aller
19 vers le bas, d'autres, de la droite vers la gauche, et d'autres d'une autre
20 direction vers une autre direction. C'est une illustration parfaite de ce
21 que je disais l'autre jour, à savoir que les trajets de balle sont très
22 différents les uns des autres.
23 Q. Je me rends bien compte, Professeur, et c'est la raison pour laquelle
24 je souhaitais vous poser quelques questions. Il y a autre chose que vous
25 avez dit également l'autre jour s'agissant des raisons qui vous faisaient
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1 croire que ces personnes avaient été tuées au cours de combat. Vous avez
2 dit avoir ce sentiment parce que la plupart des blessures se situaient dans
3 la partie supérieure du corps ou au niveau de la tête, ce qui, à votre
4 avis, indiquerait que ces hommes étaient debout dans des tranchées au
5 moment où ils ont été touchés par ces balles. Ici, par exemple, sur ce
6 croquis, nous voyons le croquis d'un homme qui a été frappé au mollet
7 gauche,
8 n'est-ce pas ?
9 R. Oui.
10 Q. Je vous ai montré, il y a quelques instants, le croquis correspondant à
11 Sabri Metushi, qui a été touché au pied à deux reprises à travers la
12 semelle de sa chaussure. Ce type de blessures ne correspond pas à quelqu'un
13 qui est debout dans une tranchée, n'est-ce pas ?
14 R. Pourquoi dites-vous ce que vous dites, Monsieur ? Qu'est-ce que vous
15 avez en tête ? J'essaie de fournir des explications aux Juges de la
16 Chambre, et, Monsieur le Juge Robinson, si vous me le permettez, je vais
17 m'efforcer d'apporter quelques explications complémentaires au sujet de
18 cette affaire.
19 Si une blessure au cou vient de là pour aller par là, du haut vers le bas,
20 est-ce qu'on peut penser que l'homme frappé atteint de cette blessure était
21 dans une tranchée lorsqu'il a été touché ? Ici, nous voyons une plaie
22 latérale gauche qui vient de la direction inverse. Quant à la blessure que
23 l'on voit à la cuisse droite, elle vient de l'arrière et du côté. La balle
24 est entrée sous un certain angle.
25 Maintenant je vais vous imager mon explication, parce que je pourrais vous
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1 répondre plus précisément si nous allions à Racak et que nous étions en
2 présence des cadavres sur les lieux. Si un homme essaie de fuir vers la
3 colline, la colline est en pente, et il est frappé à ce moment-là, donc il
4 peut être touché à l'avant-bras gauche, à la cuisse gauche ou ailleurs. Il
5 y a des trajets, des cheminements de balle qui peuvent être parallèles et
6 qui correspondent à une seule et même situation. Ici, nous avons fourni des
7 explications les plus simples. Je ne saurais admettre toutes explications
8 qui ne correspondent pas au résultat des autopsies, car je suis un
9 professionnel, il faut se rendre sur le site, là où les cadavres ont été
10 retrouvés. Ce sont des conclusions qui ont été tirées post-mortem par moi-
11 même et mes collègues. Mais, il aurait été préférable que nous puissions
12 savoir exactement où les corps ont été retrouvés, où ils ont été tués,
13 comment on les a déplacés si on les a déplacés, s'ils ont été déshabillés
14 et ré-habilliés, et cetera, et cetera. Nous aurions dû savoir qui avaient
15 été autorisé à pénétrer sur la scène du crime, et cetera.
16 Je regrette d'avoir été un peu long dans ma réponse, mais je devais
17 fournir ces explications.
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Professeur, vous parlez de blessures
19 dans la partie inférieure du corps qui pourraient être expliquées par le
20 fait que la personne fuyait vers la colline.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Oui, oui, Monsieur le Président. Si vous
22 me permettez de poursuivre, je peux le faire. Je vais vous donner un autre
23 exemple correspondant au premier croquis. C'est quelque chose que je n'aie
24 pas encore eu la possibilité de dire.
25 Sur ces cadavres, les deux hommes qui grimpaient la colline, on voit
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1 que les couvre-chefs sont dans la position que j'ai indiquée vendredi, et
2 il est impossible de trouver des couvre-chefs dans une position opposée à
3 celle-là, ce qui, si tel est tel cas, signifierait que les cadavres ont été
4 manipulés. Puis, je vais vous dire encore une chose : si on est touché sur
5 la pente d'une colline, on n'a absolument pas la moindre chance de rester à
6 l'endroit où la balle nous a frappés. Le cadavre dégringole en roulant la
7 pente de la colline et se retrouve finalement dans une position et à un
8 endroit très différent de l'endroit où il a été touché. Donc, c'est la
9 raison pour laquelle tous ces cadavres ont été retournés, ce qui indique
10 qu'ils ont été touchés lorsque ces hommes grimpaient les pentes de la
11 colline.
12 M. SAXON : [interprétation]
13 Q. Professeur Dobricanin, est-il vraisemblable qu'un incident de ce genre,
14 un incident comparable à celui de Racak, se produise et que des gens
15 survivrent. Bien entendu, il n'est pas rare de voir des cadavres retournés
16 dans une situation de ce genre, un cadavre qui est tombé, mais ce n'est pas
17 le corps de quelqu'un de vivant, n'est-ce pas ? Ce n'est pas rare ?
18 R. Il n'est pas rare de voir cela si nous parlons du meurtre d'une
19 personne isolée. Mais si nous parlons d'un massacre qui a eu lieu au cours
20 d'un combat, c'est plus rare car les gens se mettent à courir un peu
21 partout là où ils peuvent. Vous savez, il est justifié d'avoir peur quand
22 on participe à un conflit de ce genre et qu'on risque de perdre la vie très
23 facilement.
24 Q. Professeur Dobricanin, n'avez-vous pas dit il y a un instant que vous
25 ne pouviez commenter des questions hors du champ de votre autopsie ? Parce
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1 que comment est-ce que vous expliquez votre dernière réponse ?
2 R. J'espère que vous m'avez interrogé en tant que simple citoyen et pas en
3 tant que légiste. C'est l'explication que peut fournir un simple citoyen.
4 Mon comportement, cependant, serait différent si l'on m'interrogeait en ma
5 qualité de médecin légiste. Votre question ne portait pas sur le champ
6 précis de la médecine légale, je suppose ?
7 Q. Votre commentaire de la semaine dernière, donc, quant au fait que les
8 blessures se situaient dans la partie supérieure du corps est que cela
9 indiquait que les personnes se trouvaient avant cela dans une tranchée n'a
10 rien à voir avec le champ circonscrit de la médecine légale non plus, je
11 suppose ?
12 R. Ce commentaire entre tout à fait dans le champ de la médecine légale.
13 Je n'ai pas dit qu'aucun des corps n'avait de blessures sur la partie
14 inférieure du corps. J'ai dit que la plupart présentaient des blessures sur
15 la partie supérieure du corps, sur le haut du torse, et que cela pouvait
16 laisser penser que ces blessures avaient été infligées alors que ces hommes
17 étaient dans une tranchée ou en train de combattrent. Tout dépend de la
18 configuration du terrain au moment des faits. Là, nous sommes en présence
19 d'un terrain avec des collines, des terrains vallonnés, ce qui permet
20 d'expliquer les trajets différents des balles. Mais le trajet de la balle
21 n'a rien à voir avec le champ de la médecine légale.
22 Q. Est-ce que vous connaissez le rapport du pathologiste dont le nom est
23 Eric Baccard ?
24 R. Non. Je n'ai jamais entendu parlé de lui. Il n'a jamais travaillé avec
25 nous.
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1 Q. Il a soumis un rapport dans la présente affaire en avril 2002, et dans
2 son rapport il fait état du fait que 18 % des blessures enregistrées durant
3 les autopsies pratiquées sur les victimes de Racak se situent dans la
4 partie inférieure des membres. Donc, cela fait presque un cinquième, 20 %,
5 autrement dit, c'est-à-dire une proportion importante des blessures
6 découvertes sur les membres des victimes en question. Est-ce que vous avez
7 un commentaire à faire par rapport à cela ?
8 R. Oui. Cela signifie que quatre cinquièmes des blessures ont été
9 constatées dans la partie supérieure du corps, et c'est ce que j'ai dit.
10 J'ai dit que la majeure partie des blessures. Quatre cinquièmes c'est une
11 majorité importante. Mais, en tout cas, quatre cinquièmes ou plus de ces
12 blessures ont été constatées dans la partie supérieure du corps; le thorax,
13 et cetera.
14 Q. Fort bien. J'aimerais maintenant vous montrer un dessin que l'on trouve
15 dans le rapport du Dr Helena Ranta. Annexe 2, toujours, et il est toujours
16 question de la même scène de crime, à savoir, lieu de crime numéro 2, scène
17 de crime ou site numéro 2, l'affaire des frères Metushi.
18 M. SAXON : [interprétation] Je demanderais que ce document soit placé sur
19 rétroprojecteur. Il a pour numéro ERN : K0204205. Monsieur l'Huissier,
20 veuillez le placer sur le rétroprojecteur.
21 Q. Professeur Dobricanin, cette photographie a été prise au mois de mars
22 de l'an 2000, parce que l'équipe de médecins légistes finlandaise a eu
23 l'occasion de retourner sur le site de Racak. Ils se sont rendus sur
24 plusieurs lieux du crime, et avec l'aide d'un détecteur de métaux, ils ont
25 cherché des douilles et des balles ou des restes de balles par rapport aux
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1 différents endroits où des cadavres ont été retrouvés. Cette photographie
2 montre en particulier la position où se trouvait la victime numéro 37, qui
3 est dans cette photographie correspondant au numéro 13; la victime numéro
4 10 qui, d'après votre rapport d'autopsie, porte le numéro RA39; et la
5 victime qui était un peu plus haut, en haut de la colline, le numéro 7 014
6 est en fait la victime numéro 38. C'est le chiffre que vous lui avez donné
7 dans vos travaux.
8 Derrière ces marqueurs ou ces petites fiches de couleur qui indiquent à
9 quel endroit le corps a été retrouvé, vous avez des marqueurs bleus, des
10 marqueurs blancs. Chaque marqueur bleu représente l'endroit où une balle ou
11 un fragment de balle a été retrouvé sur la colline.
12 Je peux également vous montrer une autre photographie, mais avant de le
13 faire, la présence de balles dans le sol si près de l'endroit où ces trois
14 corps ont été retrouvés n'indiquent-t-ils pas que l'on a tiré sur ces
15 hommes à l'endroit où ils reposaient ?
16 R. Vous me posez une question à laquelle je ne pourrais pas vous répondre,
17 et ceci pour la raison suivante : d'où et qui sait si effectivement cela a
18 été le site même de l'événement puisque les instances officielles n'ont pas
19 pu procéder à un constat le jour même.
20 Il est possible, par exemple, d'inspecter toute localité au Kosovo-
21 Metohija et de retrouver des balles. Mais, à une balle qui n'a pas été
22 identifiée, qui n'a pas été étudiée balistiquement parlant, ne serait
23 constituer un élément de preuve quelconque. Les photographies assez vagues
24 qu'on nous a montrées ici, je ne pourrais pas les commenter. Je ne peux
25 vous répondre qu'à la question que vous avez posée. Mais au Kosovo on a
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1 tant et si bien tiré qu'on peut trouver des projectiles, des balles, à
2 n'importe quel endroit, et autant que vous vous en voudrez. Si vous n'avez
3 aucun renseignement sur l'identité des autres ou sur la qualité du
4 projectile, il est inutile d'en parler.
5 Q. Professeur Dobricanin, je vais essayer de vous soumettre d'autres
6 faits. J'essayais simplement de recueillir votre avis. Je vous demanderais
7 simplement de pouvoir répondre de façon courte, de façon à ce que nous
8 puissions avancer rapidement. Je crois que nous avons tous entendu la
9 réponse que vous avez donnée.
10 Je souhaite vous montrer la photographie suivante, qui est extraite du
11 rapport d'Helena Ranta. Il s'agit d'une photographie portant le numéro 14,
12 annexe 2, numéro ERN K020-2411. Je me demande si nous pourrions peut-être
13 déplacer la photographie s'il vous plaît un petit peu, repartir à gauche.
14 C'est parfait, merci.
15 Encore une fois, Professeur Dobricanin, au mois de mars de l'an 2000,
16 lorsque l'équipe du médecin légiste finlandaise est retournée sur ce lieu,
17 non seulement ils ont retrouvé des balles, des fragments de balles sur la
18 colline, comme vous le constatez à gauche de la photographie, mais ils ont
19 également retrouvé des douilles dans les débris, dans le sol. Les tous
20 petits rectangles blancs ici, représentent l'endroit où on a retrouvé une
21 douille.
22 Tout ceci a été retrouvé dans les débris et le limon. Nous avons des
23 photographies de corps in situ à gauche sur la colline, nous avons des
24 balles qui ont été retrouvées dans le sol, derrière l'endroit où les corps
25 ont été découverts. Nous avons des douilles qui ont été retrouvées en bas à
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1 droite, et quelques -- des blessures, que l'on a constatées au niveau des
2 corps des personnes décédées sont des blessures qui ont été infligées du
3 bas et de derrière. D'après vous, en tant que professionnel où en tant que
4 citoyen, est-ce qu'on pourrait conclure que les personnes qui tiraient les
5 coups de feu se trouvaient dans la partie droite, ici dans la partie droite
6 et en bas de la photographie, et qu'ils tiraient vers le haut, vers la
7 gauche, à l'endroit où les corps ont été retrouvés. Est-il possible de
8 conclure cela ?
9 R. Pour pouvoir confirmer ou plutôt répondre affirmativement, je pense que
10 cela ferait de moi un grand profane en termes de médecine légale. Parce que
11 ce qui est utile ici, ce serait peut-être pertinent, mais on peut par
12 exemple retrouver des balles et des douilles de balles à côté des
13 tranchées, mais cela ne prouvera pas qu'on ait tiré à l'extérieur ou à
14 l'intérieur des tranchées.
15 Q. Comment pouvez-vous faire cela de manière scientifique, professeur
16 Dobricanin ? Comment pouvez-vous montrer quelque chose, autrement dit,
17 qu'une fusillade venait d'une certaine direction, si une autopsie est
18 faite, si un étude est menée à propos de la trajectoire des balles ?
19 Comment est-ce possible de faire ce que vous entendez ?
20 Par exemple, dans cette photographie on voit un arbre. Je ne suis pas en
21 train de suggérer que quelqu'un aurait pu falsifier ces résultats, de façon
22 à ce qu'on puisse retrouver les cartouches tout en haut de l'arbre. Ce
23 n'est quand même pas ce que vous êtes en train de dire ?
24 R. Tout est possible, Monsieur.
25 Q. Je vois. Bien.
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Saxon, vous êtes en train de
2 dire qu'il s'agit là de quelque chose qui est extrait du rapport du Dr.
3 Helena Ranta ?
4 M. SAXON : [interprétation] Oui, en annexe 2 du rapport du Dr. Ranta.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'il s'agit d'une pièce à
6 conviction versée ?
7 M. SAXON : [interprétation] Pièce 156, intercalaire numéro 12. Pardonnez-
8 moi si je n'ai pas été très clair sur ce point.
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Saxon, quel moyen de preuve
10 avez-vous pour dire que les balles ont été trouvées dans le sol, à côté des
11 corps ? Dans le rapport ?
12 M. SAXON : [interprétation] Oui, dans le rapport du Dr. Ranta également.
13 Q. Dans la photographie que je viens de vous montrer, et à propos de
14 laquelle nous avons parlée, est-ce que certains éléments porteraient à dire
15 que les hommes qui sont morts ont riposté, et ont tiré sur les hommes qui
16 les ont tués ?
17 R. Je ne sais pas qui est-ce qui pourrait l'affirmer, partant de là,
18 partant de ce qu'on a vu ici, rien ne saurait être dit.
19 Q. Vous ne voyez pas les douilles des balles, ici, en haut à gauche, à
20 côté des corps ? Les petites étiquettes qui ont été placées là ?
21 R. Cela peut-être des marquages de quoi que ce soit, il se peut que cela
22 l'ait été.
23 Q. Est-ce que vous mettez en doute la véracité de ce rapport définitif
24 remis par l'équipe finlandaise, est-ce que c'est ce que vous insinuez,
25 qu'ils ont falsifié ceci ?
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1 R. Monsieur, si notre équipe s'est vue interdire l'accès à Racak le 15, le
2 16 et le 17, il se peut probablement que quelque chose se soit passé, je ne
3 dis pas certainement, mais probablement que quelque chose se soit passé
4 pour qu'on nous l'interdise. La seule personne à avoir l'autorisation de
5 procéder à une enquête, c'était Mme Danica Marinkovic. Si ce jour là nous
6 étions entrés dans Racak, soit nous l'aurions confirmé, soit nous aurions
7 trouvé autre chose.
8 Vous ne pouvez pas, un an plus tard, confirmer où les cadavres s'étaient
9 trouvés au moment du décès des intéressés, et où est-ce qu'on a retrouvé
10 les douilles. Mais on peut monter les choses sur les lieux ultérieurement
11 comme on peut le faire -- comme on le veut. Je n'ai pas dit que mes
12 collègues l'ont fait, quelqu'un d'autre aurait pu le faire, puis emmener
13 mes collègues pour qu'ils le constatent. Pourquoi ne nous a-t-on pas
14 conviés nous-mêmes, pour qu'ensemble, nous nous déplacions vers les lieux,
15 le site.
16 Q. Vous avez évoqué Mme Danica Marinkovic et l'autorité qu'elle avait en
17 la matière. Est-ce que Mme Marinkovic avait besoin de demander
18 l'autorisation du procureur du district pour pouvoir mener son enquête ?
19 R. Au moment du déplacement sur les lieux, il y avait le procureur
20 départemental adjoint, qui a toutes les compétences requises, qui sont
21 celles du procureur lui-même dans le cas concret.
22 Q. Mme le Juge Marinkovic, a-t-elle dû recueillir ou obtenir
23 l'autorisation du procureur public pour interroger ce témoin ?
24 R. Ils le faisaient ensemble, elle faisait la totalité de ce qu'elle
25 faisait, suite aux demandes du ministère public de Pristina. Elle était
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1 tenue d'entreprendre toutes les activités nécessaires.
2 Q. Je souhaite aborder un autre point concernant une photographie, qui a
3 été fournie par l'équipe finlandaise. Simplement ceci, dans ce rapport, en
4 annexe 2, il est précisé que ces douilles qui sont représentées par des
5 rectangles, en bas à droite de cette photographie, sont des douilles qui
6 viennent de deux types d'armes. Chacune des douilles étaient des douilles
7 de munition de deux marques différentes. Il y avait la marque Igman et il y
8 avait l'autre marque connue sous le nom de PPU. Est-ce que ces marques de
9 munitions sont fabriquées en Serbie ou non ?
10 R. S'il est question de munitions, l'usine ne se trouve pas en Serbie mais
11 en Bosnie-Herzégovine. Alors PPU, cela veut dire Prvi Partizan Uzice; c'est
12 l'usine qui se trouve à Uzice qui a fabriquée les munitions.
13 Q. Ces deux types de munitions ont été utilisés par l'armée et la police
14 en Yougoslavie et en Serbie, n'est-ce pas ?
15 R. Il n'y a pas qu'eux, il y a tous ceux qui ont participé à cette guerre.
16 Les membres albanais de l'UCK se servaient de l'une et de l'autre. Les
17 Albanais se servaient des munitions qui se trouvaient dans les entrepôts de
18 la Défense territoriale qu'ils ont pillés, et ils se servaient de munitions
19 chinoises apportées d'Albanie. L'armée se servait essentiellement du PPU,
20 de cette marque fabriquée en Serbie. Des munitions fabriquées en Serbie, ou
21 plutôt je me reprends : pas l'armée, mais la police, excusez-moi, parce que
22 moi, l'armée, je ne sais pas du tout ce qu'elle utilisait.
23 Q. Donc, votre point de vue en tant que citoyen, non pas en tant que
24 médecin légiste.
25 A propos de cette scène, il y a trois hommes. Ces trois hommes sont plus
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1 âgés, ils sont morts, on les retrouve sur la colline, ils portent des
2 vêtements civils. Certaines des blessures ont été provoquées par quelque
3 chose tiré d'en bas ou de dos. D'après un groupe de médecins légistes, on
4 retrouve des balles dans le sol près de l'endroit où les corps ont été
5 retrouvés. On retrouve plus bas des douilles.
6 Peut-on raisonnablement conclure, ou est-ce qu'une des possibilités ici
7 serait de dire, à la lumière de ces éléments-là, que ces trois hommes ont
8 été assassinés; est-ce possible ?
9 R. Seulement au cas où nous aurions pu être présents à l'enquête, lorsque
10 les corps se trouvaient là où ils étaient tombés, nous aurions pu adopter
11 des conclusions pertinentes; ces types de conclusions ne peuvent être
12 tirées qu'après la reconstruction des événements, après le constat sur les
13 lieux, les photographies des corps sur le site et autres examens
14 balistiques. Pour ce qui d'analyser le sens des tirs, la direction des
15 tirs, et ce n'est pas seulement les pathologistes et les médecins légistes,
16 il y a aussi les experts en matière de balistique, et je ne vois pas
17 pourquoi on ne nous a pas autorisé l'accès immédiatement ? Pourquoi on ne
18 nous a pas autorisé à accéder en l'an 2000, lorsqu'on a procédé à cette
19 reconstitution en miniature, parce que si nous avons procédé ensemble à
20 l'autopsie des cadavres à Racak, nous aurions pu le faire également
21 ensemble ici.
22 Q. Professeur Dobricanin, êtes-vous au courant d'aucun rapport ou compte
23 rendu ou documents qui précisent que des armes ont été retrouvées à
24 l'endroit où les corps ont été retrouvés à Racak, tels que ces trois
25 corps ?
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1 R. Non, je n'ai pas de rapport de cette nature, et je peux dire que cela
2 ne m'a pas intéressé.
3 Q. Je vais maintenant passer à un autre lieu de crime, scène différente.
4 Professeur Dobricanin, je vais maintenant aborder le lieu du crime numéro
5 4, scène numéro 9, qui se trouve sur la fiche qui est un peu plus haut ici,
6 et qui se trouve un peu plus haut que le lieu du crime que nous venons
7 d'évoquer.
8 Veuillez m'accorder quelques instants. Nous n'avons pas de photographies in
9 situ des corps sur ce lieu de crime. Nous avons néanmoins des photographies
10 d'autopsie et je souhaite évoquer l'une d'entre elles avec vous.
11 M. SAXON : [interprétation] Pardonnez-moi, Monsieur l'Huissier, Monsieur
12 Prendergast, je vais vous demander de revenir ici.
13 Q. Je vais vous montrer une des photographies d'une des personnes qui est
14 décédée à cet endroit. Il s'agit d'un garçon qui s'appelait Halim Zeqiri.
15 Il avait 14 ans lorsqu'il est mort à Racak le 15 janvier; il a reçu une
16 balle qui a été tirée dans le dossier, et l'orifice de sortie se trouve au
17 niveau du cou. Il s'agit donc de l'orifice de sortie, n'est-ce pas,
18 Professeur Dobricanin ?
19 R. Oui, on peut le voir ici.
20 Q. Bien.
21 R. Mais on voit assez mal sur la photo.
22 Q. Pour vous aider et aider toutes les parties présentes, je vais vous
23 indiquer à quel endroit se trouve l'orifice d'entrée de la balle.
24 R. On voit assez mal, mais c'est marqué. Je suppose que cela doit être
25 cela.
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1 Q. Encore une fois, on a tiré dans le dos ou du bas. Est-ce que nous
2 pourrions revoir l'autre photographie, s'il vous plaît ?
3 Halim avait 14 ans à l'époque. Professeur Dobricanin, pensez-vous que ce
4 garçon était un simple civil, est-ce possible ? Un simple civil innocent ?
5 R. Je ne sais pas ce qui vous permet de tirer cette conclusion. A 14 ans
6 chez les Albanais, ce sont des jeunes hommes qui sont assez mûrs, et bon
7 nombre d'entre eux portaient déjà des armes. Cette position de la blessure
8 du dos vers le haut, donc vers le cou, cela nous démontre qu'il se trouvait
9 sur une espèce de pente. Etant donné que le terrain était assez accidenté,
10 il se peut qu'il ait été tué à n'importe quel endroit de ces lieux. C'est
11 assez caractéristique pour une blessure reçue par une personne montant,
12 escaladant une pente. cela serait assez probable. Il se peut que, par
13 exemple, que ce soit une personne couchée recevant une balle, alors que,
14 encore allongée.
15 Q. Professeur, pardonnez-moi. Peut-être que ma question n'était pas
16 suffisamment claire. Je vais reformuler ma question. La seule question que
17 je vous ai posée est celle-ci. Est-ce possible que ce garçon n'était qu'un
18 simple civil, un civil innocent ? Pensez-vous que c'est possible ?
19 R. Je ne peux pas répondre à cette question. Je n'ai aucun élément qui me
20 permettrait de vous fournir une réponse. Si vous ne vous référez qu'à
21 l'âge, cela ne veut rien dire du tout.
22 Q. Ma question consistait simplement à vous demander si c'était possible.
23 Je ne vous ai pas demandé de tirer des conclusions définitives ?
24 R. Je pense avoir répondu à votre question.
25 Q. Je vais repartir en arrière et vous dire que vous avez dit vous-même
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1 qu'il s'agissait d'une trajectoire de balle tout à fait normal pour
2 quelqu'un qui gravit la pente. Ne serait-ce pas une trajectoire de balle
3 tout à fait normale, pour quelqu'un qui s'enfuit et qui gravit la pente
4 parce qu'il tente de s'échapper ?
5 R. Je ne peux pas vous le dire. Je ne peux pas vous dire s'il fuyait, s'il
6 courrait ou s'il allait lentement. Je n'ai aucune caractéristique, partant
7 des blessures sur le corps, qui pourraient m'indiquer quelle a été la
8 vitesse d'un déplacement d'un homme au moment où il a été frappé par une
9 balle.
10 Q. Je crois que je vais mettre cette question de côté pour l'instant.
11 Professeur, ce garçon Halim Zeqiri, son père a également été tué le 15
12 janvier, et sa mère et sa sœur ont été blessées et ont été emmenées à
13 l'hôpital afin d'y recevoir des soins. Ne leur avez-vous jamais parlé ?
14 R. Non. Je n'ai plus été à Racak, plus jamais après le
15 18 janvier, et je n'ai jamais rencontré l'un quelconque des habitants de ce
16 village de Racak.
17 Q. Cela ne vous aurait-il pas permis de faire la clarté sur les événements
18 qui se sont déroulés ce jour-là, en allant parler aux personnes qui avaient
19 survécu et qui avaient été blessées. Ils auraient pu vous raconter ce
20 qu'ils avaient vécu ce jour-là ?
21 R. Monsieur, cela ne fait pas partie de mon domaine d'intervention. Si
22 quelque devait s'entretenir avec ces gens, c'était le juge d'instruction.
23 Autre chose, s'ils ont été transférés vers l'hôpital de Pristina, il se
24 peut que le juge d'instruction ait eu une conversation. Pour autant que je
25 le sache, ils avaient leurs services de santé locaux où ces gens
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1 transportés ont été soignés. Je ne sais pas où exactement, mais à proximité
2 immédiate de Racak. Ils avaient leurs médecins et leur service sanitaire
3 auprès des unités.
4 Q. Au moment où vous avez pratiqué ces autopsies et que vous meniez ces
5 enquêtes médicolégales, avez-vous eu accès aux comptes rendus, aux archives
6 concernant ces blessés, ces survivants blessés qui avaient été blessés ?
7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Saxon, nous allons nous
8 arrêter dans cinq minutes pour entendre les arguments juridiques.
9 M. SAXON : [interprétation]
10 Q. Pourriez-vous répondre à ma question, s'il vous plaît, Professeur ?
11 Avez-vous eu accès aux archives concernant les blessés, les survivants qui
12 avaient été blessés ?
13 R. Non, aucune documentation. Je n'ai vu aucune documentation. Je ne pense
14 pas que ces personnes aient été soignées au centre hospitalier de Pristina.
15 Il n'y a aucune trace dans les registres. Je devrais forcément le savoir;
16 quelqu'un du secteur de la chirurgie me l'aurait fait savoir. D'habitude,
17 on me disait qu'il y avait des blessés graves, et qu'il s'agissait
18 d'examiner ces personnes. Personne ne me l'a dit. Je crois, je crois, dis-
19 je bien, que personne d'entre eux n'a été soigné là-bas.
20 Q. N'est-il pas possible que ces personnes aient été soignées à Stimlje,
21 ces survivants, Monsieur le Docteur ?
22 R. Il n'y a pas de centre hospitalier à Stimlje.
23 Q. Il y a un jeune garçon de 9 ans qui a été blessé à la jambe le 15
24 janvier, et qui a reçu des soins dans quelque chose qui ressemblait à un
25 dispensaire à Stimlje. Efrem Salmi [phon], je crois qu'il s'appelait.
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1 R. Je ne pense pas. Je ne crois pas que cela ait pu se faire à Stimlje.
2 Les Albanais blessés de Racak n'ont pas pu atteindre Stimlje. Il y avait
3 pas mal de polices autour. Ce qui se peut, c'est que dans le dispensaire du
4 village à Racak ou en direction de Racak dans la banlieue de Stimlje,
5 Petrovo Selo et ailleurs.
6 D'après ce que j'en sais et d'après ce que mes collègues albanais
7 m'ont dit, il existait auprès de toute unité et dans chaque village avant
8 la guerre, il y avait une infirmerie où se faisaient les interventions des
9 médecins, non seulement en raison de blessures au combat, mais en raison de
10 la présence de malades, de patients. Ces médecins là-bas n'étaient que des
11 Albanais puisqu'à Stimlje c'étaient des villages environnant purement
12 albanais.
13 Il se peut qu'ils aient créé et mis sur pied une sorte d'hôpital sur place,
14 mais cela je ne le sais pas.
15 Q. Je sais que nous n'avons plus beaucoup de temps, mais vous avez dit
16 quelque chose de l'ordre comme quoi : "Ces unités avaient toutes quelque
17 chose comme un dispensaire." A quoi faisiez-vous allusion ici, des unités
18 de l'UCK ?
19 R. Oui, oui, des unités de l'UCK, certainement. Si vous me posez la
20 question, je vous dirai que nos unités aussi avaient une assistance
21 médicale. Je ne vous parle pas, enfin, je ne parle pas des médecins
22 légistes. N'allez pas croire que j'en faisais partie, mais dans toute
23 armée, il y a des services sanitaires qui accompagnent les unités.
24 Q. Etes-vous en train de dire que cette victime Halim Beqiri était un
25 membre de l'UCK ?
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1 R. Non, je n'ai jamais dit cela.
2 M. SAXON : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que c'est un
3 moment opportun d'en terminer avec mes questions.
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.
5 Nous allons maintenant entendre des arguments juridiques. Je crois qu'il
6 serait plus facile pour vous de rester simplement dans le prétoire.
7 Maître Kay.
8 M. KAY : [interprétation] Oui. La question concerne les déclarations de
9 Jasovic qui ont été signifiées à l'Accusation récemment. Il s'agit d'un
10 dossier contenant quelque 57 déclarations de témoins qui doivent être
11 présentées par l'intermédiaire du témoin Jasovic. Il s'agit de déclarations
12 de témoins portant sur la période 1998, 1999 indiquant ou précisant les
13 activités de l'UCK. Dans ces déclarations, il y a d'autres noms qui sont
14 cités, ainsi que des redites eu égard à d'autres noms qui ont déjà été
15 cités dans les intercalaires 45 à 53, je crois, de la pièce 293 qui était
16 les déclarations de témoins présentées par l'intermédiaire du témoin
17 Marinkovic, qui précise que le nombre de personnes décédées évoquées à
18 l'annexe A de l'acte d'accusation, avaient des liens avec l'UCK où on avait
19 fait mention de leurs noms comme étant des gens qui avaient des liens avec
20 l'UCK. Ce sont des sources obtenues par la police concernant la période
21 1998 à 1999.
22 Cela revient à dire qu'il y a une trentaine de noms qui figurent à l'annexe
23 A et qui tombent dans cette catégorie. Ils sont bien identifiés dans les
24 déclarations de témoins recueillies par l'intermédiaire de Jasovic au cours
25 de cette période 1998, 1999, ayant pris part aux activités de l'UCK.
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1 C'est quelque chose de très différent ici par rapport à la déclaration de
2 Barney Kelly, Kevin Curtis, qui était tout à fait différent ici, sur lequel
3 se reposait l'Accusation, qui avait résumé le contenu des déclarations de
4 témoins prises sur une période allant de 1999 à des périodes plus tardives.
5 L'Accusation avait tenté d'inclure les éléments présentés par ces témoins
6 sous forme de résumé. Comme la Chambre de première instance le sait, la
7 Chambre d'appel a rendu une décision contre ce type de pratique. Il ne
8 s'agit pas d'utiliser les rapports des enquêteurs et les résumer et ni de
9 résumer des déclarations de témoins. Le Procureur ne souhaitait pas
10 utiliser l'ensemble des déclarations de témoins; il souhaitait simplement
11 utiliser ce qu'avaient dit les enquêteurs lorsqu'ils résumaient les
12 déclarations de témoins.
13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Kay, si nous devions admettre
14 ces déclarations, ne seriez-vous pas d'accord pour dire que les déclarants
15 devraient être entendus au cours du contre-interrogatoire, ou devraient
16 être mis à la disposition de la Chambre pour le contre-interrogatoire ?
17 M. KAY : [interprétation] Si je puis aider la Chambre de première instance,
18 il s'agit de documents qui avaient été produits à l'époque, documents
19 contemporains et de dossiers qui avaient été fournis par les agences
20 chargées de faire respecter la loi. Il ne s'agit pas de documents qui ont
21 été produits pour, ou qui ont été présentés dans le cadre de cette affaire.
22 C'est quelque chose de différent. Il s'agit de documents qui ont été
23 compilés pour être utilisés dans cette procédure.
24 Dans ce cas-ci, on parle de la responsabilité criminelle de l'accusé,
25 la responsabilité pénale de l'accusé, et on parle de son état d'esprit.
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1 S'il y a, ou s'il existe des archives officielles de l'époque qui n'ont pas
2 été consultées sur ce point, dans ce cas, dans ce procès, nous ne sommes
3 pas dans un système où ces agences chargées de faire respecter la loi
4 pourraient fournir ce type de documents. Il est exact de dire que l'accusé
5 serait en droit, à ce moment-là, de se reposer sur le contenu de ces
6 informations pour prouver certains éléments pertinents à l'égard d'un point
7 qui a été soulevé, à savoir, son état d'esprit.
8 La question importante ici, est de savoir si l'accusé savait ou
9 aurait dû savoir ou ce qu'il était censé comprendre par rapport aux faits
10 qui ont été mis à sa disposition. C'est quelque chose -- des questions qui
11 ont été posées au cours du contre-interrogatoire par le Procureur.
12 Si ce représentant est quelqu'un qui, au cours de ses fonctions,
13 était en mesure de présenter un certain nombre de documents originaux et de
14 pièces originales sur des points qui n'ont rien à voir avec l'accusé à
15 l'époque, et qui, pour des raisons toute autre que ceci semblait indiquer
16 que la question du pouvoir, du contrôle, de l'autorité, de savoir des
17 agissements de la conduite de l'UCK, nous estimons, qu'à ce moment-là, il
18 s'agit de document sur lequel l'accusé serait en droit de se reposer dans
19 sa défense, s'il s'avère que c'est quelque chose qui est dans sa faveur.
20 C'est tout à fait différent des autres documents. Cette procédure n'a pas
21 été mise en place pour qu'il puisse appeler ces 58 témoins [comme
22 interprété] s'ils devaient être cités pour évoquer ces questions-là, parce
23 que c'est comme cela que M. Nice a présenté la question ce matin.
24 Ce qui est important ici, je crois que le point essentiel ici, c'est
25 que savait-on à l'intérieur de ce système qu'est-ce qui avait été fourni ou
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1 remis dans le cadre de système. Ceci n'a rien à voir avec cette procédure-
2 ci, et c'est totalement indépendant. Ceci faisait partie de la présentation
3 d'informations ou d'éléments à l'époque.
4 Nous pouvons établir un parallèle ici : le Procureur s'est reposé sur
5 des déclarations présentées par le capitaine Dragan. La Chambre d'instance
6 s'en souvient certainement, son vrai nom était Vasiljkovic. L'Accusation
7 s'est reposée sur quelque 10 000 pages de CD-ROM qui étaient des rapports
8 de soldats qui avaient été blessés, et qui ont reçu l'appui d'une
9 fondation. Dans ses rapports, figurait une déclaration sur l'origine des
10 soldats, à savoir, s'il venait de Serbie ou d'ailleurs, qui il avait servi,
11 dans quel rang il avait servi, et quelles étaient ses blessures. L'accusé
12 s'y est opposé ainsi que les Amici Curiae. Le témoignage a été accepté, car
13 il s'agissait d'éléments qui faisaient partie d'archives officielles, et
14 que ceci n'avait rien à voir avec ce procès, mais fournissait des éléments
15 qui permettaient à l'Accusation -- que l'Accusation pouvait utiliser non
16 seulement à cause des faits qui y figuraient, mais à cause de la vérité
17 qu'elle révélait. Le but étant de prouver que des soldats serbes avaient
18 pris part au conflit en Croatie et en Bosnie-Herzégovine.
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je suppose que l'accusé avait tenté
20 de produire ces déclarations de témoins en application de l'Article 92 bis.
21 Est-ce que l'Accusation ne serait pas en droit de demander le contre-
22 interrogatoire ?
23 M. KAY : [interprétation] Il ne s'agit pas simplement d'une question de 92
24 bis. Il ne serait pas cité à la barre pour parler de ce qu'il pense
25 maintenant. Ils ont été appelés pour être interrogés sur ce qui avait dit à
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1 l'époque, j'entends les éléments contemporains, ce qui avait été dit à
2 l'époque. De même, l'Accusation a utilisé la pièce 391, intercalaires 4 à
3 8. Ce sont des documents présentés par l'intermédiaire du capitaine Dragan
4 sur ce qui a été dit à l'époque sur une question qui les intéressait et qui
5 avait un rapport avec la thèse qu'ils présentaient contre l'accusé. Cet
6 accusé, d'après nous, devrait être en droit d'utiliser ce témoignage
7 original. Il ne se repose pas sur les déclarations du témoin; il se repose
8 sur ce qui a été dit et sur ce que l'on savait à l'époque. Ils ne viennent
9 pas ici en tant que témoins, puisque ce contenu-là a été versé par
10 l'intermédiaire du témoin et constitue des pièces. Ce ne sont pas des
11 pièces qui ont été préparées au cours du week-end comme l'Accusation a
12 tenté de le faire pour essayer d'établir un parallèle entre les deux cas.
13 Il s'agissait de pièces qui ont été préparées avant l'existence. C'est un
14 acte d'accusation qui n'avait rien à voir avec ce procès-ci et qui tombe
15 dans la catégorie de ces documents tout à fait classiques recevables par
16 n'importe quelle Chambre sur -- parce qu'il s'agit de documents qui
17 existaient à l'époque et qui sont particulièrement pertinents ici pour la
18 défense de l'Accusation portant sur le sujet de son état d'esprit.
19 Si nous avions un corpus important de documents dans les archives du MUP au
20 Kosovo déclarant que tout à fait contraire à ce qui est présenté ici, bien
21 sûr, l'Accusation aurait souhaité utiliser cela et se reposer dessus pour
22 pouvoir poursuivre l'accusé. La manière dont la Chambre d'appel et la
23 Chambre de première instance ont traité cette question, il ne faut pas
24 simplement fermer la porte et déclarer qu'on ne peut pas utiliser les
25 documents originaux. Je crois que l'Article 92 bis n'a pas été appliqué au
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1 pied de la lettre pour ne s'appliquer qu'à des déclarations. Le 92 bis
2 s'applique aux déclarations prises dans le cadre de cette procédure par un
3 représentant du Greffe. C'est là que cela a un sens limité.
4 Ici, il s'agit de pièces qui permettent de montrer ce qui existait à
5 l'époque, qui constitue l'élément essentiel sur lequel se repose l'accusé
6 dans sa défense. Ce sont des circonstances bien autres que celles
7 présentées par le Procureur.
8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice.
9 M. NICE : [interprétation] Quelques minutes simplement.
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne souhaite pas dépasser le temps
11 qui nous est imparti ici.
12 [La Chambre de première instance se concerte]
13 M. NICE : [interprétation] Messieurs les Juges, j'ai également besoin de
14 vous poser une question, une question de type administratif. Si Helena
15 Ranta peut venir demain - je ne sais pas si elle peut venir demain - peut-
16 être que la Chambre -- si elle est appelée par la Chambre de première
17 instance et la Chambre souhaite l'entendre. Si la Chambre ne souhaite pas
18 l'entendre demain, si par ailleurs elle est là demain et disponible, à ce
19 moment-là, nous prendrons la décision demain, à savoir, s'il faut
20 l'importuner d'avantage.
21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] En ce qui me concerne, je ne
22 souhaite pas l'entendre. Nous allons y réfléchir.
23 M. NICE : [interprétation] Bien évidement je serai obligé de lui faire
24 savoir cette après-midi, car elle a pris deux jours pour venir ici, et je
25 ne souhaite pas l'importuner d'avantage.
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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, je crois que nous
2 allons poursuivre demain matin.
3 M. NICE : [interprétation] Pardonnez-moi, mais je me demande si la Chambre
4 -- les Juges de la Chambre pouvaient poser une question à l'accusé , si
5 comme le dit M. Kay, enfin tous ces différents documents sont des documents
6 que je vois pour la première fois qui n'ont pas été traduits. Si ces
7 documents semblent indiquer qu'il s'agit de noms qui figurent à l'annexe A
8 et qu'il s'agit de membres de l'UCK, Me Kay, dans son argument, précise que
9 l'accusé souhaite utiliser ce document pour dire que les personnes tuées à
10 Racak étaient des membres de l'UCK. Si tel est le cas, c'est tout à fait
11 différent de l'argument de Me Kay, et je dois pouvoir répondre à cela.
12 Je ne sais pas si la Chambre de première instance peut m'aider sur ce
13 point.
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons poursuivre tout cela
15 demain. C'est l'heure, nous ne souhaitons pas dépasser notre temps.
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Nice, peut-être que vous
17 pourriez-vous pencher sur ceci. Il y a deux procès en cours dans ce
18 prétoire. Il y a les -- peut-être les mêmes témoins sont entendus. D'après
19 ce que je comprends, la position du Procureur est bien différente dans ce
20 cas-ci par rapport à l'autre affaire. Ce qui m'intéresse, c'est de vous
21 entendre davantage sur ce point. Je ne sais pas si c'est une position
22 adéquate pour le Procureur.
23 M. NICE : [interprétation] C'est une question à laquelle j'ai déjà
24 réfléchi, et j'y reviendrai demain.
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons lever l'audience et
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1 reprendre demain matin à 9 heures.
2 M. LE GREFFIER : [interprétation] Veuillez vous lever.
3 --- L'audience est levée à 13 heures 44 et reprendra le jeudi 13 avril
4 2005, à 9 heures 00.
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