Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le jeudi 5 mai 2005

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 07.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Milosevic, hier vous aviez

7 pratiquement terminé l'interrogatoire du témoin s'agissant des allégations

8 découlant du paragraphe 63 et, plus précisément, dans son alinéa (e). Je

9 vous avais suggéré de terminer là-dessus, mais vous avez dit que vous aviez

10 d'autres questions à soulever. Pourriez-vous nous dire quels sont les

11 domaines que vous aimeriez évoquer dans le reste de votre interrogatoire

12 principal ?

13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais vous le dire, je me propose d'en finir

14 avec ce point (e), qui parle d'expulsion; ensuite, brièvement je parlerai

15 du comportement des policiers en cas d'attaque aérienne, et la question de

16 subordination de la police à l'armée partant de l'expérience de ce colonel

17 qui était à Pec. Ensuite, on parlera de ce que la police a entrepris aux

18 fins d'empêcher les cas avec des séquelles fatales, et ce qui est contenu

19 dans les tableaux, puis une question au sujet de la coopération avec la

20 KFOR et la MUNIK, puis je souhaite parcourir certaines données numériques

21 qui figurent aux intercalaires. Ensuite, je dois m'attarder un peu plus

22 longtemps sur le point. Je vais vous dire tout de suite. C'est le 6(K).

23 Puisque le témoin était présent sur les lieux, cela se trouve sur son

24 secteur, la prison de Dubrava, nous avons un enregistrement vidéo qui

25 provient de la documentation liée à l'enquête.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce point semble être le domaine le

2 plus important, le plus substantiel pour ce qui est de la poursuite de

3 votre interrogatoire. Il est peut-être souhaitable que vous vous

4 concentriez là-dessus.

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais me concentrer sur ce point-là très

6 certainement, Monsieur Robinson. Je voulais que l'on en finesse avec les

7 éclaircissements apportés sur les points précis.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Poursuivez.

9 LE TÉMOIN: RADOVAN PAPONJAK [Reprise]

10 [Le témoin répond par l'interprète]

11 Interrogatoire principal par M. Milosevic : [Suite]

12 Q. [interprétation] Mon Colonel, vous nous avez décrit hier, l'apparence

13 de ce centre de Pec, avec la masse de gens qui s'étaient rassemblés et

14 ainsi de suite, vous étiez sur place, n'est-ce pas ?

15 R. Oui

16 Q. Veuillez nous dire comment vous avez fait pour vous déplacer dans cette

17 foule ? Comment vous étiez vêtue ? Dites-nous si vous étiez armé; si oui,

18 comment ?

19 R. J'étais armé pendant tout ce temps de mon pistolet. J'avais mon

20 ceinturon, mon revolver et un uniforme de police avec mon grade.

21 Q. Vous étiez dans un uniforme de police dont le pistolet faisait partie ?

22 R. Oui.

23 Q. Aviez-vous une autre arme ?

24 R. Non, je n'en portais pas, jamais d'autre.

25 Q. Est-ce que vous étiez accompagné par un policier avec une arme longue,

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1 un canon long, j'entends pour vous escorter ?

2 R. Non.

3 Q. Est-ce qu'il y avait un cordon de police, au sujet du faible nombre de

4 policiers que vous avez mentionné, donc y avait-il des cordons de police à

5 quelque endroit que ce soit ?

6 R. Non, non.

7 Q. Cordon qui serait intervenu ?

8 R. Non. La population se trouvait sur les trottoirs et sur la place. Dans

9 la rue, on avait ménagé un passage, mais ce n'était pas la police qui avait

10 ménagé ce passage. Il y avait une espèce de passage qui permettait aux

11 voitures de passer. Je suis arrivé jusqu'au centre, jusqu'au siège de la

12 municipalité, sur la place.

13 Q. Bien. Vous nous avez décrit que personne ne s'était adressé aux

14 citoyens et c'est les citoyens eux-mêmes qui s'étaient servis de mégaphone

15 pour prendre la parole ?

16 R. Exactement.

17 Q. Quand est-ce que les citoyens ont quitté la place ?

18 R. Je ne peux pas dire qu'ils ont quitté. Je crois qu'ils s'en sont allés

19 au fur et a mesure. Il y avait un grand nombre de personnes, certains s'en

20 allaient, d'autres arrivaient. Ce ne s'est pas fait en une heure ou deux;

21 en un jour ou deux, peut-être.

22 Q. Ils se rassemblaient pendant un jour ou deux, certains arrivaient,

23 d'autres partaient.

24 R. Oui, exactement.

25 Q. Vous avez également dit que vous avez vu des autocars.

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1 R. Oui.

2 Q. Mais vous avez dit que vous n'avez pas vu de camions ?

3 R. Non. J'ai dit que j'ai vu des autocars qui transportaient des

4 personnes. J'ai vu des camions aussi, mais je ne les ai pas vu transporter

5 des gens. Je n'ai pas pu voir ce qu'il y avait sous les bâches.

6 Q. Bien. Dites-nous maintenant, dans ce point(e), on dit qu'à Prizren, les

7 albanais de Kosovo ont été forcés à quitter les autocars et ainsi de suite.

8 Est-ce que les autocars circulaient régulièrement entre Pec et Prizren ?

9 R. Il y avait plusieurs lignes, des lignes régulières entre Djakovica-Pec,

10 Belgrade-Pec, Prizren-Pec, et cetera.

11 Q. Bien. Mais je voulais seulement que nous déterminions ce qui suit.

12 S'agissant de cette ligne Pec-Prizren --

13 R. Oui.

14 Q. -- est-ce qu'elles allaient jusqu'à Prizren, ou elles allaient jusqu'à

15 la frontière albanaise ?

16 R. Je ne sais pas. Je ne peux pas vous le dire. Je ne sais pas ce qui se

17 passait sur le territoire de Prizren. Je peux parler de ce qui se passait

18 sur mon territoire à moi -- dans mon secteur à moi.

19 Q. Indiquez-nous encore, dans quelle direction s'en allaient les gens qui

20 quittaient la ville.

21 R. Ils allaient dans toute direction possible. Ils s'en allaient vers

22 Prizren, en passant par Decani et Djakovica, puis vers Pristina en passant

23 par Klina, puis en direction de Mitrovica vers Istok, et vers le Monténégro

24 en passant par Kula.

25 Q. Ce sont les quatre directions qui permettaient de quitter la ville.

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1 Donc, le nord Mitrovica, puis au sud Pristina, au sud-est vers Prizren,

2 vers l'ouest pour aller au Monténégro ?

3 R. Exactement. Il y avait une autre direction en passant par Cakor, par le

4 canyon de Rugova, mais c'est un itinéraire vers avec une route en macadam

5 et la route était assez mauvaise, ce qui fait qu'on a évité. Les serbes

6 l'évitaient constamment parce que ce terrain était gardé par l'UCK. Il y a

7 eu plusieurs enlèvements de serbes et d'albanais dans ce secteur et le

8 terrain était considéré comme étant tout à fait impraticable du point de

9 vue de la sécurité.

10 Q. Tirons des conclusions maintenant. Est-ce que vous êtes en train de

11 nous affirmer qu'aucune autorité -- vous avez, d'abord, dit que l'armée ne

12 s'y trouvait pas du tout et qu'il n'y avait que la police, et que les

13 autorités n'ont pas obligé les citoyens à quitter la ville de Pec.

14 R. C'est ce que j'affirme. On ne pouvait pas les obliger de toute manière.

15 Comment pouvez-vous obliger une telle masse de gens à s'en aller ? Enfin,

16 tous ceux qui exercent mon métier savent que, s'il y a 10 000 personnes, 10

17 policiers ne peuvent rien faire. Même quand ils voudraient, 50 ou 100

18 policiers ne sont pas à même de les déplacer s'ils ne veulent pas bouger.

19 Nous avons eu des expériences de cette nature depuis le tout début des

20 manifestations massives au Kosovo-Metohija. Aucune sorte d'effectif

21 policier ne saurait apporter une solution quelconque.

22 Q. Indiquez-nous maintenant quel a été le comportement des policiers

23 prévus pour les attaques aériennes.

24 R. En cas d'attaques aériennes, notre objectif c'était de situer

25 l'emplacement de l'attaque. Si ce n'était pas, par exemple, à l'endroit que

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1 nous sommes en mesure de voir. Il s'agit de localiser l'endroit, d'arriver

2 au plus vite là-bas et de faire en sorte que les blessés soient évacués,

3 qu'on leur vienne en aide pour sécuriser les lieux, et procéder à un

4 marquage pour le cas où il y aurait des bombes à fragmentation qui

5 resteraient sans avoir exposé au précédent. Donc, procédez à des activités

6 liées au constat sur les lieux. Je précise qu'il y a des endroits où nous

7 ne pouvions pas accéder et ils étaient inaccessibles parce que sous

8 contrôle de l'UCK, du moins pour ce qui est des routes d'accès, ce qui fait

9 que nous n'avons pas pu procéder à un certain nombre de constats sur les

10 lieux.

11 Pour ce qui est des plaintes au pénal, nous n'en avons pas présenté

12 du tout, nous avons fait que recenser les cas d'attaques.

13 Q. Pendant cet état de guerre - et nous sommes en train de parler de ce

14 que vous savez nous dire au sujet du secrétariat de Pec - est-ce qu'il y a

15 eu ce resubordination de la police vis-à-vis de l'armée ?

16 R. Oui.

17 Q. Sous quels aspects cela s'est-il fait ?

18 R. Du point de vue des activités de combats. S'il y a eu des activités de

19 combats, les membres de la police sont resubordonés à l'armée. Dans le

20 cadre de la sécurisation du terrain, voir de l'assainissement du terrain,

21 ils sont chargés de ce type de tâches.

22 Q. Mais, outre ce type d'activités, la police avait à faire quoi ?

23 R. La police devait exercer ses fonctions normales. S'il n'y avait pas

24 d'opération de combat - et je dirais qu'à l'époque - nous n'avons pas eu

25 d'opération de combat, du moins pas sur le terrain où j'étais. Nous avons

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1 fait notre travail régulier.

2 Q. Lorsqu'il y a eu remplacement de nos effectifs par les effectifs de la

3 KFOR, dans quelle mesure la population serbe a-t-elle quitté le Kosovo-

4 Metohija et, si oui, quand l'a-t-elle fait ?

5 R. S'agissant de mon secteur, je dirais que pratiquement tous sont partis.

6 Pour ce qui est du secteur de Pec, il est resté quelque mille habitants

7 dans les villages de Gorazdevac, et une vingtaine de personnes au village

8 de Sokolac. Les autres sont partis, tous.

9 Q. Est-ce qu'à l'époque il y a eu des crimes perpétrés contre les serbes ?

10 R. Mais c'est la raison précisément pour laquelle les serbes s'en allaient

11 de cette raison. Après l'arrivée des effectifs de la KFOR, après la prise

12 du contrôle à l'égard du territoire, par leurs soins, et j'ai été celui qui

13 a remis aux forces de la KFOR, les compétences qui étaient les nôtres, ils

14 avaient garanti la sécurité de toutes les personnes et ils avaient garanti

15 le rétablissement de l'ordre public, mais cela ne s'est pas produit. Peut-

16 être en même temps qu'au moment où ils sont arrivés, il est arrivé des

17 membres de l'UCK, en uniforme. Ils ont patrouillé dans la ville, ils ont

18 cherché soi-disant des criminels serbes, des membres de l'armée ou de la

19 police. Ils vérifiaient les pièces d'identité des gens. Ils emmenaient bon

20 nombre de ces personnes, ils faisaient irruption dans les maisons. Un grand

21 nombre de personnes ont été tuées, plus de 50 personnes ont été tuées. Bon

22 nombre de femmes ont été violées puis tuées; on a même tué des enfants, des

23 vieillards.

24 La population a quitté ces maisons, et je suis parti, moi-même, le 25

25 juin, donc, 14 jours après leur arrivée.

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1 Q. Ce que vous venez de décrire ressemble à une situation chaotique avec

2 des crimes en masse ?

3 R. C'est précisément comme cela que cela s'est passé.

4 Q. Mais KFOR a-t-elle réalisée sa mission qui était celle de sécuriser la

5 population ?

6 R. Non. Ils ont ouvertement dit qu'ils ne pouvaient pas nous garantir

7 notre sécurité, cela s'est fait après le 20 juin, lorsque des colonnes

8 interminables d'Albanais arrivaient, affluaient. Comme des sauvages ils

9 faisaient irruption dans la maison, ils occupaient la maison, ils

10 chassaient les Serbes de là. Alors, les forces de la KFOR nous ont dit

11 qu'elles ne pouvaient pas nous garantir notre sécurité et c'est sous leur

12 protection à eux que nous avons quitté les lieux. Il s'agissait de convois

13 entier de Serbes protégés par les forces de la KFOR avec des chars, des

14 véhicules blindés.

15 Q. Peut-on dire, puisque nous sommes en train de nous pencher sur la

16 période entière qui fait l'objet de votre témoignage, et dans ces

17 documentations ici, il est bon nombre de renseignements. Peut-on partant de

18 là dire que tous les morts Albanais et Serbes ou membres des autres

19 minorités ethniques ou communautés ethniques ont été retrouvés parce que

20 chez vous on a constaté dans le détail tous les cas individuels recensés

21 dans la documentation ?

22 R. Non, on ne peut pas dire qu'on a découvert tous les cadavres. Tout

23 simplement, nous n'étions pas en mesure de le faire. Il y a eu bon nombre

24 d'endroits qui nous étaient inaccessibles. Ensuite, les membres de -- qu'on

25 appelait l'armée de libération du Kosovo, ont évité ou plutôt ont emportés

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1 leurs morts de là où ils se trouvaient. Ils emportaient les autres aussi

2 avant que nous n'arrivions, ils emportaient ces cadavres pour plusieurs

3 raisons. Parce que, si nous retrouvions les morts nous allions les

4 identifier et notre attention allait être centrée sur l'identification et

5 les mesures de poursuite en justice à prendre. C'était l'une des raisons.

6 Ils voulaient dissimuler leurs propres crimes, ce qui fait que les

7 Serbes tuaient. Tous les cadavres qu'ils pouvaient trouver ont été

8 dissimulés. Nous ne pouvions pas nous rendre sur les lieux dans l'immédiat

9 parce qu'il y avait danger d'être attaqué -- des risques d'être attaqué, et

10 les constats devaient être réalisés avec une sécurisation très ample des

11 lieux. Cela ne s'est pas fait seulement en 1999, mais cela était le cas en

12 1997 et 1998. En 1997, nous avons dû d'abord sécuriser en profondeur les

13 lieux pour être prêts à riposter une attaque éventuelle et, ensuite,

14 seulement une équipe d'enquête venait avec un Juge d'instruction ou sans

15 Juge d'instruction; c'est ce qui se passait en 1997 et tout au fil, tout au

16 long de l'année 1998. Lorsqu'on a procédé à un constat sur les lieux sur ce

17 qui est du décès de Vasic Desimir, nous avons sécurisé les lieux avec un

18 hélicoptère.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous arrête, Monsieur Milosevic,

20 pour donner le temps de poser une question.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je voudrais vous demander quelque

22 chose, permettez-moi d'intervenir brièvement.

23 Monsieur Paponjak, dans le document que nous avons examiné hier,

24 l'intercalaire 1.4, vous avez parlé des pertes humaines, des décès dans le

25 cadre de conflits armés; est-ce qu'on vous remettre l'espace de quelques

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1 instants ce document ?

2 Dans ce document, il y a mentions de beaucoup d'incidents à partir du 25

3 juin jusqu'au mois de juillet, même jusqu'au mois d'août. Je suppose que

4 c'est là le récit d'incidents qui ont fait l'objet d'enquête ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je dois d'abord voir de quoi il s'agit ici

6 juste.

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] L'intercalaire 1.4 constitue la liste des

8 événements avec décès fatals concernant les conflits armés au Kosovo et

9 Metohija pour la période du 1er janvier 1998 au 1er juin 2001.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Si je pose la question c'est parce que

11 vous disiez qu'après le 25 juin, c'était l'UCK qui était responsable de la

12 mort de plusieurs personnes âgées et d'enfants; est-ce qu'on trouvera ces

13 chiffres à l'intercalaire 1.4 ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce que nous avons pu déterminer à prendre est

15 donné. Dans d'autres intercalaires, il y a des renseignements au sujet des

16 personnes dont le destin nous est -- ou le sort nous est inconnu. Nous

17 avons tout un chapitre dans ces documentations qui porte sur les personnes

18 enlevées ou disparues. Nous ne savons pas ce qu'il est advenu de ces gens

19 là, mais, étant donné que nous ne savons pas ce qu'il est advenu depuis

20 cinq ans avec eux, on suppose que --

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, non. Mais essayons d'être précis,

22 Monsieur le Témoin. Vous avez déclaré que plusieurs personnes âgées et des

23 enfants avaient été tués par l'UCK après l'arrivée de la KFOR, et j'aurais

24 voulu que vous nous donniez quelques exemples en utilisant ce document.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Voilà, dans ce même document, au numéro 225,

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1 le 12 juin --

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, non, je parle d'événements

3 ultérieurs, à la date du 25 juin, parce que vous avez dit que c'est ce

4 jour-là que la KFOR est arrivée.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Les effectifs de la KFOR sont arrivés là-bas

6 le 13 juin.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Alors, nous ne parlons pas du 12 juin.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous pouvez prendre le 14, si vous le voulez.

9 A compter du 14, on peut compter dans l'ordre. Je vais vous donner

10 l'exemple individuel, il y au moins un cadavre.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais est-ce que vous pourriez nous

12 montrer l'endroit où on parle des personnes âgées et des enfants qui ont

13 été tués ? C'est cela qui me préoccupe. Dès que vous donnez ce que l'UCK

14 tuait des enfants et des personnes âgées, et j'espère que vous comprenez

15 bien le sens de ma question.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Je comprends parfaitement, ici nous n'avons

17 pas les renseignements afférents aux dates de naissances, mais, dans les

18 dossiers, on pourra retrouver quelles sont les personnes qui étaient âgées,

19 ou qui étaient les enfants.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le problème c'est que ce document n'a

21 pas été traduit. Donc vous devez m'orienter dans l'examen de ce document,

22 mais si c'est trop difficile, n'insistons pas et nous allons demander à M.

23 Milosevic de poursuivre l'interrogatoire.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Si vous me le permettez, j'aimerais vous

25 apporter une petite explication. Cette documentation n'a pas été faite pour

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1 les besoins de ce Tribunal, et c'est la raison pour laquelle elle n'est

2 peut-être pas tout à fait appropriée à ce qu'il vous faille. Mais nous

3 pouvons par dossier retrouver les dates de naissances des personnes tuées.

4 Nous l'avons fait pour les besoins qui étaient les nôtres, pour les besoins

5 de la police, et nous avons profité de cette opportunité pour vous les

6 présenter.

7 M. MILOSEVIC : [interprétation]

8 Q. Mon Colonel,

9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je continuer, Monsieur Bonomy ?

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui.

11 M. MILOSEVIC : [interprétation]

12 Q. Mon Colonel, est-ce qu'il apparaît clairement ici, vu ce tableau est

13 donner l'explication demandée par M. Bonomy. Si on prend à partir du 229,

14 donc, la date du 14 juin, le lendemain de l'arriver de la KFOR, jusqu'au

15 numéro 285, c'est la fin de la liste, là sont tous les cas qui concernent

16 des personnes qui avaient été tuées. D'après les renseignements dont vous

17 disposez, il y a 56 personnes qui ont été tuées au cours de cette personne

18 qui intéressait

19 M. Bonomy d'après vos renseignements ?

20 R. Je peux vous dire que c'est vraiment au bas mots que c'est un minimum

21 parce qu'il y a bon nombre de personnes qui sont toujours disparues, on ne

22 sait toujours pas ce qu'il est devenu de ces personnes, au moins 56

23 personnes ont été tuées.

24 Q. Vous avez des renseignements à propos de 56 personnes ?

25 R. Oui.

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1 Q. Pour d'autres, vous n'avez pas de renseignements ?

2 R. Non.

3 Q. Donc, le chiffre ne peut être que significatif.

4 R. C'est exact.

5 Q. Dites-moi ceci : si vous prenez tous les cas de décès, est-ce qu'on a

6 mentionné tous les cas de décès à la police ?

7 R. Cela, je ne peux pas vous le dire. Je suppose qu'on n'a pas mentionné

8 tous ces cas à la police, mais je ne peux pas vous le dire de façon

9 certaine.

10 Q. Fort bien. Partant de ce que vous avez pu établir vous, d'après vos

11 renseignements, est-ce que toutes les enquêtes judiciaires ont été

12 terminées ? Est-ce qu'elles pouvaient être terminées6

13 R. Non, elles n'ont pas été terminées, il y a encore des dossiers qui ne

14 sont pas clos. Il est impossible de prendre la moindre mesure s'agissant de

15 bon nombre de ces dossiers parce que nous ne sommes plus sur le territoire

16 où les crimes ont été commis. Nous devrions interroger des personnes, mais

17 nous ne pouvons pas y avoir accès à ces personnes. Il n'y a pas du tout de

18 collaboration, de coopération avec la police qui est responsable de ce

19 genre de travail aujourd'hui. Plusieurs fois nous avons pris l'initiative

20 d'essayer de travailler avec la police, on aurait pu ainsi régler de façon

21 correcte beaucoup de dossiers qui auraient pu être élucidés. On aurait pu

22 identifier les morts. J'ai trouvé ici des documents relatifs à l'exhumation

23 et l'autopsie de corps fait par les espagnols. Nous on aurait pu les

24 identifier, mais les espagnols ne l'ont toujours pas fait.

25 Q. Vous dites que vous avez proposé de coopérer avec la police pour

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1 élucider ces affaires. Est-ce que la KFOR et la MUNIK ont voulu coopérer ?

2 M. NICE : [interprétation] M. Milosevic peut utiliser le temps comme bon

3 lui semble, mais je demande respectueusement le sens de tout ceci; où veut-

4 il en venir ?

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Apparemment, ceci concerne l'Article

6 7(3), la responsabilité.

7 Monsieur Milosevic, quelle est la pertinence de ces questions ?

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est vous qui avez posé la question a des

9 témoins précédents. Vous avez demandé à cet autre témoin s'il avait essayé

10 de coopérer. Quand je dis "vous", je ne parle pas de vous, en particulier,

11 mais l'un de vous a demandé si la police avait essayé de coopérer avec la

12 MUNIK et la KFOR, et je répète la question au colonel Paponjak parce qu'il

13 a dit qu'il avait essayé de coopérer. Je lui demande si la MUNIK et la KFOR

14 avaient manifesté la moindre volonté de coopérer. Il vous a dit que toutes

15 les enquêtes judiciaires n'ont pas été terminées.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Poursuivez, brièvement, Monsieur

17 Milosevic.

18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il a déjà répondu.

19 M. MILOSEVIC : [interprétation]

20 Q. Est-ce qu'ils ont manifesté le souhait de coopérer ?

21 R. Ils ont dit qu'ils étaient prêts à le faire. Par exemple pour ce qui

22 est de l'assassinat d'enfants, en août 2003, à Gorazdevac, mais il nous a

23 été dit qu'il était impossible d'arriver sur les lieux, et impossible de

24 contacter les personnes concernées. Nous avons dit "coopérons"; j'ai

25 proposé que deux hommes à moi se joignent à eux, mais cela n'a jamais

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1 marché, cela n'a jamais réussi.

2 L'assassinat de ces enfants n'est toujours pas élucidé, mais il n'a

3 pas été possible de collaborer, alors que nous nous avons offert

4 l'expérience de nos policiers.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous avons compris. Je pense que

6 vous avez suffisamment évoqué la question.

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien.

8 M. MILOSEVIC : [interprétation]

9 Q. Mon Colonel, essayons d'être le plus efficace possible, voyons les

10 chiffres concernés. Ces données chiffrées qu'on trouve dans le deuxième

11 volet de ce document : "Information concernant les morts," vous avez cette

12 intitulé assez longue qui se trouve à l'intercalaire 1. Nous avions

13 commencé à l'examiner hier.

14 Au point 1.1, est-ce qu'on trouve un liste de toutes les personnes

15 identifiées, qui ont trouvé la mort au cours de cette période du 10 juin

16 1999 au 1er juin 2001 ?

17 R. Je viens de recevoir cette liste.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Dans le sommaire, Monsieur Milosevic,

19 c'est tout ce que nous avons en anglais. L'intitulé de cette intercalaire

20 dit ceci : "Liste des personnes identifiées qu'on a affamées et qui sont

21 mortes de faim." Est-ce qu'il y a une erreur de traduction là ?

22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Tout à fait, c'est certain parce que c'est la

23 liste des personnes qui sont mortes, qui ont perdues la vie au cours de

24 cette période. C'est sans doute un problème technique, une erreur de

25 traduction.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

2 M. MILOSEVIC : [interprétation]

3 Q. Soyons bref, mon Colonel. A l'intercalaire 1.1, on trouve la liste de

4 toutes personnes, en tout cas, de celles qu'on a pu identifiées et

5 présentées de deux façons. On a le numéro des affaires pour les identifier

6 et on a aussi une liste de noms par ordre alphabétique.

7 R. Exact.

8 Q. Puis vous avez une liste de dossier concernant des personnes qui n'ont

9 pas été identifiées dans le même intercalaire ?

10 R. Oui.

11 Q. Pour la même période, pour la municipalité de Pec, ou plutôt le secteur

12 sous la responsabilité du SUP de Pec ?

13 R. Oui.

14 Q. Cela c'est 1.1. Au point 1.2, j'espère que nous pourrons sans

15 difficulté aucune préciser quels sont ses renseignement.

16 Tout d'abord, tirons une chose au clair; est-ce que tous ces

17 renseignements s'appuient sur des dossiers individuels précis ?

18 R. Oui. Mais permettez-moi de relever une chose. Je ne peux pas vous dire

19 de façon certaine qu'il n'y a pas de discordance, de différence. Je vais

20 vous expliquer pourquoi.

21 Parce que ces données ont été établies à partir de ce registre, reprenant

22 les incidents qu'on a, la police peut obtenir les renseignements de tous

23 citoyens qui peuvent donner son identité ou, parfois, ne peuvent pas le

24 faire, et la police va consigner ce que lui a dit ce citoyen -- cette

25 personne, et elle va chercher a établir les faits concernés.

Page 39056

1 Ici, nous avons un cas qui n'a toujours pas été élucidé, mais qui se

2 trouve dans notre dossier, mais je suis certain d'une chose. Je sais que

3 cet incident ne s'est pas vraiment produit comme il nous a été écrit. Nous

4 avons cette liste de personnes identifiées qui ont trouvé la mort au cours

5 de combats armés. Ici, nous avons une liste de 73 personnes, c'est une

6 liste que nous avons établie à partir de données recueillies au départ.

7 Mais, en fait, ce chiffre ne devrait pas être celui de 73, il devrait être

8 bien plus faible car certain de cas relèvent des autorités militaires.

9 Pourtant, ici nous avons conservé les chiffres et le nombre d'incidents qui

10 nous ont été signalés au départ parce que nous avons pensé qu'il était

11 préférable d'exagérer plutôt que de minimiser, ce genre d'erreur peut

12 toujours être corrigé si le besoins s'en fait ressentir.

13 Q. Merci, mon Colonel. Cela veut dire que la police va toujours consigner

14 qui lui sont rapportés, cela reste dans ces registres, ce qui veut dire

15 que, plus tard, si on obtient un complément d'information, ce document --

16 ce dossier est utile pour établir les faits. La police ne va pas enlever de

17 ses archives mêmes des choses qui ne sont pas complètes, des dossiers qui

18 ne sont pas complets tant que l'affaire n'est pas tout à fait terminée.

19 R. Exact.

20 Q. Prenons l'intercalaire 1.2. J'espère qu'il a été traduit parce que

21 celui que je viens de recevoir c'est le 1.3 enfin peu importe. Ce sont des

22 chiffres, donc ce ne sera pas difficile de les voir.

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut mettre sur le rétroprojecteur

24 l'intercalaire 1.2 ?

25 M. NICE : [interprétation] Je tiens à préciser qu'aucun des documents

Page 39057

1 mentionnés jusqu'à présent par le témoin n'a été traduit en anglais jusqu'à

2 présent.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je pense que nous avons reçu la

4 liste A/III.

5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le 1.5. Oui, nous avons reçu la

6 traduction de l'intercalaire 1.5, mais rien d'autre.

7 M. MILOSEVIC : [interprétation]

8 Q. Ici, je vois A3/III. De toutes les façons, je crois qu'on peut très

9 bien utiliser ces données puisqu'à l'intercalaire 1.2 que j'ai mentionné.

10 Nous avons des informations concernant le secteur tout entier relevant des

11 responsabilités du SUP de Pec, et corrigez-moi, mon Colonel, si je fais la

12 moindre erreur.

13 Dans la l'intercalaire A3/III, nous avons les mêmes données, mais

14 pour la municipalité ou le même type de données, mais pour la municipalité

15 de Klina, pourtant le dernier chiffre --

16 R. Oui. Mais le dernier chiffre est exact, n'est-ce pas ?

17 Q. Mais à une différence près, c'est que la ventilation se fait à

18 par municipalité dans un des documents, et l'autre, elle se fait en

19 fonction de la période.

20 R. Exact.

21 Q. On va peut-être mettre l'autre tableau sur le rétroprojecteur, on va

22 regarder les chiffres. Est-ce que vous avez le 1.2 sous les yeux ?

23 R. J'ai l'aperçu A2/III, c'est celui que j'ai.

24 Q. Cela c'est le 1.2. Est-ce que c'est le tableau récapitulatif des

25 incidents en matière de sécurité ayant entraîné la mort dans le cadre du

Page 39058

1 conflit armé au Kosovo et Metohija du

2 1er janvier 1998 au 1er juin 2001 dans le secteur du SUP de Pec en fonction

3 du temps de l'époque. Nous avons d'abord le nombre d'incident et le nombre

4 de cadavres, de victimes. Ceci va jusqu'au milieu de l'année 1998, donc, la

5 première colonne; puis fin 1998, cela c'est la deuxième colonne; puis nous

6 avons du

7 1er janvier au 23 mars, donc jusqu'au début de la guerre; la quatrième

8 colonne, c'est celle qui est réservée à la période de la guerre; la

9 dernière colonne, étant celle qui est postérieure à la guerre.

10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut placer ce tableau sur le

11 rétroprojecteur ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais, apparemment, il est déjà sous le

13 rétroprojecteur et je le vois affiché à l'écran devant moi.

14 M. MILOSEVIC : [interprétation]

15 Q. Quelques soit le nombre d'incidents, il y a eu plusieurs incidents

16 ayant entraîné un certain nombre de morts, n'est-ce pas ?

17 On voit ce nombre.

18 R. Oui, en tout cela fait, 606.

19 Q. C'est le total, mais qui est ventilé par période, n'est-ce pas ?

20 R. Au cours des six premiers mois de 1998 on en a eu 42. Au cours des six

21 derniers mois en 1981, avant la pression de l'OTAN, 18; pendant la pression

22 de l'OTAN, 388; et après l'agression de l'OTAN, 77; en tout, cela fait 606.

23 Q. Nous avons le chiffre de 388; est-ce que celui reprend les 73 dont vous

24 avez parlé ?

25 R. Oui.

Page 39059

1 Q. En dessous, on voit que sous ce nombre il y a des Albanais et d'autres.

2 Il y avait 318 Albanais décédés et 288 autres

3 R. Dans les "autres", il y a les non-Albanais, les Serbes, les Romains.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Qu'est-ce que vous cherchez à

5 établir en nous montrant ces statistiques ?

6 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'espère, Monsieur Robinson, que ces chiffres

7 s'expliquent, eux-mêmes, des commentaires parce qu'ils vous montrent aussi

8 bien la structure ethnique, le sexe, ainsi que l'état civil. Vous voyez,

9 civils, terroristes, inconnus, hommes, femmes dans la catégorie des

10 Albanais et dans la catégorie des autres, vous voyez membres de l'armées,

11 membres du MUP civil, hommes, femmes et enfants.

12 Ce tableau est excellent parce qu'il vous montre le nombre de personnes qui

13 ont perdu la vie dans le cadre d'attaques terroristes des albanais, ceux

14 qui ont perdu la vie à cause de bombardements de l'OTAN, ou en commettant

15 certaines infractions, certains crimes. Ce tableau est absolument important

16 parce qu'il vous permet de voir qu'aucune des allégations n'est là. Je

17 parle, bien sûr, du secteur sous la responsabilité du SUP de Pec. On verra

18 plus tard ce qu'il en est dans la totalité du Kosovo et Metohija. Mais nous

19 allons voir qu'aucune des allégations, aucun des chefs d'Accusation que le

20 Procureur présente contre les autorités de Serbie ou de la RFY ne sont --

21 aucune des allégations, n'est exacte ?

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non, cela établit simplement que des

23 personnes ont perdu la vie, mais on n'explique pas dans quelles

24 circonstances, dans quelles conditions. Il n'est pas contesté que des

25 personnes aient perdu la vie.

Page 39060

1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, mais je viens de vous dire, Monsieur

2 Robinson, que, pour l'essentiel, ce tableau vous montre dans quelles

3 circonstances ces personnes ont trouvé la mort. Vous voyez, notamment, que

4 le nombre d'Albanais et le nombre de non-Albanais, qui ont trouvé la mort,

5 est tout à fait disproportionné. Même si vous avez des doutes s'agissant

6 des dires du colonel qui vous parlait de 73 personnes qui avaient été

7 tuées. Pour ce qui est de la structure, si on compare les Albanais et les

8 autres, les non-Albanais, vous avez ici la mort de 19 femmes, n'est-ce pas,

9 dans votre secteur ? Plus du double, 44, plus exactement, parmi la

10 population non-albanaise ?

11 R. C'est exact. On le voit clairement à la première page.

12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous savez, c'est très difficile de

13 suivre sans avoir l'interprétation, la traduction.

14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais même si vous mettez de côté --

15 L'INTERPRÈTE : Le micro de M. Milosevic n'est pas branché. La question n'a

16 pas été entendue.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je peux vous expliquer ce que représente

18 la première page.

19 M. MILOSEVIC : [interprétation]

20 Q. Oui, faites cette explication afin que nous comprenions tous parce que

21 nous voyons tous ces chiffres à l'écran. Servez-vous du pointeur, de façon

22 à ce que nous sachions de quoi nous parlons.

23 R. Oui, ici vous avez : "Le nombre de cadavres de personnes tués par

24 structure nationale, sexe et statut ou état civil." Dans cette colonne,

25 vous avez le nombre d'Albanais tués. Vous avez le chiffre global de 318, à

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1 la dernière colonne. Puis, on fait une sub-division des corps tués

2 d'albanais en terroristes, civils, inconnus; terroristes, 245; inconnus,

3 aucun.

4 En plus, pour autant par le sexe, vous avez pour les Albanais : le

5 nombre d'hommes albanais, 298; 19 femmes; un enfant.

6 Puis vous avez le nombre d'autres corps inanimés, par genre. Donc,

7 cela vous a donné un chiffre total pour les albanais de 288. Par l'état

8 civil, vous avez le nombre de la VJ, 62; du MUP, 57; puis vous avez le

9 nombre des civils, 169.

10 En fonction du sexe : les hommes, 242; les femmes, 44; les enfants,

11 2.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais qu'est-ce que ces chiffres

13 établissent ? Les gens peuvent mourir pour toute une série de question.

14 Cela ne fait pas l'ombre d'un doute. Ce qui se pose comme question, c'est

15 de savoir dans quelle circonstance ces personnes ont trouvé la mort.

16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais c'est précisément ce que la page suivante

17 va vous dire. A la page suivante, Monsieur Robinson, vous avez des

18 statistiques tout à fait claires à ce propos. Prenez cette deuxième page,

19 vous allez le voir : "Nombre de personnes tuées, ventilées par

20 circonstances du décès et la structure ethnique."

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Ici, vous avez le nombre d'incidents où il y a

22 eu attaques terroristes.

23 M. MILOSEVIC : [interprétation]

24 Q. Vous savez tout ce passage, tout ce bloc qui parle des attaques

25 terroristes.

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1 R. Il y a eu 166 attaques terroristes, et 238 personnes ont trouvé la

2 mort. Puis, vous avez 53 Albanais, 185 autres. C'est ce que ce tableau vous

3 montre.

4 Q. Puis nous avons des attaques antiterroristes.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, mais qui a déterminé que

6 c'était une attaque terroriste ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous avons fait un constat sur les lieux. Des

8 Juges d'instructions sont allés sur les lieux pour faire des constats,

9 toutes les procédures ont été respectées, il y a eu dépôt de plaintes et

10 engagement de poursuites judiciaires.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Paponjak, deuxième page,

12 colonne numéro 5, qui concerne le 1er janvier 1999, jusqu'au 23 mars 1999,

13 donc, la période qui a précédé immédiatement, les bombardements.

14 Apparemment, si j'ai bien compris, il y a eu seulement deux décès suite à

15 des attaques terroristes, il y en a deux aussi dans la colonne suivante, et

16 deux, dans la colonne d'après. Cela fait, en tout, six, au cours de cette

17 période de trois mois.

18 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc, c'était étonnamment calme, cette

20 période ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Il est possible que les autorités compétentes

22 n'aient pas bien qualifié certains incidents d'attaques terroristes. Il y a

23 un problème dans notre loi, pour ce qui est de la qualification qu'on donne

24 à une attaque terroriste.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais comment pouvons-nous nous fier à

Page 39063

1 ces statistiques ? On peut s'y fier ou pas ? A vous de décider.

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Bonomy, ayez l'obligeance de garder à

3 l'esprit ceci. Il y a un quatrième bloc -- une quatrième section sur cette

4 page, où on vous donne des renseignements concernant des décès intervenus

5 dans le cadre d'infractions pénales. Donc, certaines choses qui étaient, en

6 fait, des attaques terroristes, on peut être qualifiées d'infractions

7 pénales, d'assassinats. Un seul et même acte a été qualifié d'acte, plutôt

8 que d'attaque terroriste.

9 Nous avons eu le Témoin Bojovic à la barre. On lui a demandé si

10 certains actes devaient être qualifiés de crimes de guerre ou

11 d'assassinats. Surtout s'il y avait des assassinats multiples, ce qui est

12 une accusation plus grave. Mais cette qualification juridique revient au

13 procureur. Ici, en l'espèce --

14 M. NICE : [aucune interprétation] -- et nous avons 14 personnes qui ont été

15 tuées.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais, Monsieur Milosevic, ici, on

17 prend -- on entend, dans les quatre dépositions, des éléments qui ne font

18 pas partie de l'acte d'accusation, je me demande pourquoi. Pourquoi est-ce

19 que la déposition de ce témoin ne s'intéresse pas à des éléments concernés

20 par l'acte d'accusation ? Est-ce que c'est parce que vous n'avez rien à

21 dire à ce propos, pour appuyer votre thèse ?

22 Je parle en mon nom personnel, je pense qu'il serait plus utile

23 d'avoir des éléments de preuve très clairs, concernant la période couverte

24 par l'acte d'accusation. C'est pour cela qu'il faut s'intéresser à ces

25 mois, notamment, qui ont automatiquement -- qui ont précédé les

Page 39064

1 bombardements de l'OTAN.

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Bonomy, d'après ce que je vois,

3 d'après ce que je comprends, toute la période est concernée. Ce que vous

4 dites confirme ce que j'ai déjà dit précédemment, à savoir qu'il faut que

5 je prouve que ce qui figure dans l'acte d'accusation n'est pas correct,

6 alors que c'est à M. Nice de le faire, de prouver que ce qui figure dans

7 l'acte d'accusation est vrai.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous déformez mes propos

9 délibérément. C'est vous qui avez choisi de présenter ces éléments de

10 preuve, et quand vous faites cela, ce sont des éléments de preuve qui vous

11 semblent pertinents, j'imagine. Vous ne pouvez pas simplement présenter des

12 éléments de preuve, complètement sans pertinence. Seuls les éléments de

13 preuve qui vous conviennent.

14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Bonomy, pourquoi est-ce que ce n'est

15 pas pertinent ? Expliquez-moi. Pourquoi est-ce que la totalité de ce qui

16 s'est passé en 1999 n'est pas pertinent, ou en 1998, d'ailleurs ? On parle

17 de la période de 1996. Dans l'acte d'accusation ici, nous avons les années

18 de 1998, 1999, on va jusqu'au 5 juin 2001, donc toute cette période est

19 véritablement pertinente.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais la seule période pour laquelle

21 vous pourriez être reconnu coupable est celle du 1er janvier 1999 et de la

22 période qui a suivi. En fait, la période du 1er janvier au mois de juin

23 1999.

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien, Monsieur Bonomy. Si -- c'est

25 effectivement la période du 1er janvier 1999 au 20 juin, à ce moment-là, il

Page 39065

1 faut regarder les colonnes 5 et 6, les colonnes où il y a le plus de

2 chiffres, où on voit les nombres les plus importants parce qu'on a un total

3 de plus de 400 personnes qui ont trouvé la mort; cela représente plus des

4 deux tiers du total.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Veuillez reprendre le cours de votre

6 interrogatoire principal.

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien.

8 M. MILOSEVIC : [interprétation]

9 Q. Combien de personnes ont trouvé la mort au cours d'attentats

10 terroristes ? J'espère que nous avons suffisamment d'explication sur la

11 manière dont était classifier ces attentats.

12 R. Il y a eu 166 attentats, 238 personnes tuées, 53 Albanais, 185 non-

13 Albanais.

14 Q. Dans le cadre des activités antiterroristes, c'est cela ?

15 R. Oui.

16 Q. 35 morts ?

17 R. Oui, j'essais de le placer sur le rétroprojecteur --

18 Q. -- 35 personnes ont trouvé la mort dans le cadre de ces activités

19 antiterroristes, et y compris des membres de l'UCK ?

20 R. Oui. On en vient maintenant aux chiffres concernant les bombardements

21 de l'OTAN, 24 --

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mon Colonel, pouvez-vous m'expliquer

23 : c'est que c'est qu'un action antiterroristes ? Quelles en sont les

24 caractéristiques ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Une action antiterroriste, c'est une action

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1 menée par la police qui est planifiée et organisée par la police.

2 L'objectif étant de débloquer une partie du terrain ou de repousser les

3 terroristes. Cette action se déroule conformément à un plan qui a été conçu

4 auparavant.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, un terrain qui était occupé par les

7 terroristes.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Etes-vous en mesure de nous donner

9 des exemples d'action antiterroristes et de nous donner des informations au

10 sujet de ce qui s'est passé pendant ces actions ? Je ne parle pas ici des

11 chiffres qui figurent dans le document que nous avons sous les yeux.

12 Il me semble, en effet. Monsieur Milosevic, que ce sont là des

13 éléments qui aurait une grande importance pour votre thèse. Comme je l'ai

14 déjà dit hier, si vous avez des preuves concernant des activités

15 antiterroristes menant par la police au cours desquelles des Albanais et

16 des civiles ont trouvé la mort et s'il existe dans l'acte d'accusation des

17 allégations en rapport avec ces événements à ce moment-là, les éléments

18 ainsi présentés seraient d'une grande utilité parce que je ne crois pas que

19 des statistiques qui nous montrent le nombre de personnes ayant été tuées

20 dans le cadre d'activités antiterroristes soient d'une grande utilité. Nous

21 avons besoin de connaître les circonstances dans lesquelles se sont

22 déroulées ces activités antiterroristes. Voilà qui permettrait à la Chambre

23 de statuer sur la culpabilité. Il ne suffit pas de donner de statistique,

24 c'est insuffisant, nous avons besoin de savoir dans quelles circonstances

25 les personnes concernées ont trouvé la mort.

Page 39067

1 Veuillez poursuivre.

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, Nous avons des documents sur

3 la base desquels ces chiffres ont été obtenus. Si nous disons que 35

4 personnes ont été tuées, ou 35 terroristes ont été tués pendant des

5 activités antiterroristes et que nous avons les documents permettant de le

6 prouver.

7 M. MILOSEVIC : [interprétation]

8 Q. Mon Colonel, est-ce que l'objectif des actions antiterroristes est de

9 liquider ou d'arrêter les auteurs d'actes terroristes ?

10 R. Notre objectif n'a jamais été de les liquider; cet objectif n'est pas

11 un objectif qui existe dans le cadre des activités de police.

12 Q. Quand on lance une action antiterroriste, l'idée c'est d'appréhender

13 les coupables d'actes terroristes, et il peut y avoir des morts si les

14 auteurs de ces actes ouvrent le feu sur la police et sont tuées quant la

15 police riposte, n'est-ce pas ?

16 R. Oui, tout a fait.

17 Q. Nous avons une colonne consacrée au bombardement de l'OTAN, on voit que

18 144 personnes ont trouvé la mort.

19 R. Avec 96 Albanais et 48 non-Albanais.

20 Q. Bien. Nous en arrivons maintenant aux crimes 148 personnes tuées6

21 R. Oui. Donc, 118 Albanais, et 30 autres ou divers.

22 Q. Ensuite, nous avons une catégorie autre ou diverse. Je ne sais pas

23 exactement ce que cela représente. Nous n'allons pas nous attarder là-

24 dessus.

25 R. Cela peut varier.

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1 Q. Effectivement, il s'agit peut-être des morts par suicide, des personnes

2 décédées à l'hôpital, et cetera.

3 Bien. Etant donné que vous étiez chargé de réunir tous ces documents et de

4 les classer, pouvez-vous nous dire si à partir de ces documents nous

5 pouvons voir comment ces personnes ont perdu la vie ? Est-ce que cela

6 figure dans les documents ?

7 R. Ces listes ont été préparées sur la base des documents qui étaient à

8 notre disposition. Nous avons recueilli ces documents, les avons classé et,

9 ensuite, nous avons procédé à un traitement statistique desdits documents.

10 Nous avons également des listes qui sont en rapport avec les tableaux et

11 qui ont trait aux incidents en particulier pour chaque affaire nous avons

12 les documents pertinents qui ont été fournis par le Juge d'instruction, ou

13 des documents que nous avons, nous-même, élaborés ou qui ont été recueillis

14 de manière différente.

15 Q. Au point 4, on voit ici le nombre d'enquête sur les lieux, et on voit

16 que le chiffre correspondant est celui de 126. C'est beaucoup moins que le

17 nombre d'incidents.

18 R. Oui, Il n'y a aucune proportion ici entre les deux, mais ceci

19 pourquoi ? Parce qu'il n'était pas possible de mener des enquêtes sur les

20 lieux des incidents puisqu'au départ, il y en avait 229, et en tout, il y

21 avait 288 incidents, et 126 enquêtes.

22 Q. Est-ce que le pourcentage est élevé ?

23 R. Oui, ceci grâce au effort du Juge d'instruction et des personnes

24 chargées de l'instruction.

25 Q. On voit que, dans la plupart des cas, ces enquêtes sur les lieux ont

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1 été réalisées par le Juge d'instruction ?

2 R. Oui. Dans 126 cas, il y avait seulement la police. Il y a une enquête

3 qui n'a pas pu être réalisée jusqu'au bout.

4 Q. On voit qu'il n'y a pas eu d'enquête dans 174 cas. Pouvez-vous nous

5 dire pourquoi il n'a y pas eu d'enquête ?

6 R. Parce que la situation ne permettait pas. On ne pouvait pas réaliser

7 d'enquête sur les lieux. Il était impossible de se rendre sur les lieux.

8 J'ai dit qu'il a parfois fallu mener à bien certaines enquêtes sur les

9 lieux en s'y rendant en hélicoptère, par exemple.

10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur Milosevic, je

11 voudrais avoir des informations de la part du témoin au sujet des personnes

12 qui ont été tuées dans le cadre d'activités criminelles. Si j'ai bien

13 compris, il y en a 148 qui ont été tuées en tout. Il y a 108 personnes qui

14 sont mortes pendant toute la période concernée; donc, 93 Albanais; et 18

15 non-Albanais.

16 Peut-on avoir des précisions ? Quels sont les crimes concernés, et dans

17 quelles circonstances ces personnes ont été tuées ? J'imagine que ces

18 Albanais ont été tués par les Serbes de l'endroit, y compris les formations

19 paramilitaires. Est-ce que vous pouvez nous donner des informations, à ce

20 sujet ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai bien compris. Nous avons analysé les

22 incidents qui ont entraîné des décès. Il y avait des actes qui visaient les

23 Albanais, et nous, nous avons voulu voir de quoi il retournait.

24 Vous donnez le chiffre de 93. Il y a parmi eux 73 personnes non-

25 identifiées, où il était impossible de procéder à des vérifications, mais

Page 39070

1 qui inclut ce chiffre dans le tableau. D'après certaines informations dont

2 je dispose, qui ne sont pas peut-être sûres à 100 %, il y en a peut-être

3 moins de 20. Donc, on pourrait diminuer ce chiffre de 50 immédiatement, si

4 bien que cela nous donnerait un chiffre d'environ 40.

5 Il s'agissait-là des types de crimes diverses et variés. Par exemple, le

6 cas d'un meurtre d'une femme par son mari, d'un fils par son père. Tout

7 ceci figure ici.

8 Mais je ne me souviens pas d'un incident au cours duquel un Serbe aurait

9 tué un Albanais. Je ne m'en souviens pas. Mais je pourrais sans doute vous

10 répondre si je pouvais examiner les documents.

11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, mon Colonel. Je crois que c'est

12 tout ce que je peux vous demander sur ce point.

13 Allez-y, Monsieur Milosevic.

14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur Kwon.

15 M. MILOSEVIC : [interprétation]

16 Q. Nous avons le chiffre de 144 pour les personnes qui sont mortes au

17 cours des bombardements de l'OTAN. Combien y a-t-il eu de bombardements de

18 l'OTAN dans votre zone ?

19 R. Je ne connais pas la date -- le chiffre exact, mais je crois qu'il y en

20 a eu une centaine; 97, cela aussi, cela figure dans les documents.

21 Q. On peut voir qu'en tout, 144 personnes sont mortes au cours des

22 bombardements de l'OTAN dans votre zone de responsabilité, dans la zone de

23 votre SUP.

24 R. C'est exact.

25 Nous avons un chiffre de 24 pour les bombardements, qui a trait aux

Page 39071

1 incidents les plus graves, mais, en tout, il y a eu 97 bombardements. On

2 parle toujours de votre zone, celle ou se trouvait votre SUP, n'est-ce pas

3 ?

4 R. Oui.

5 Q. Où les bombardements ont-ils eu les conséquences les plus graves ?

6 R. Dans la prison de Dubrava -- au centre correctionnel de Dubrava, et à

7 Savine Vode, il y a 100 personnes environ qui sont mortes au centre

8 pénitentiaire de Dubrava, et 24 à Savine Vode.

9 Q. Revenons à la question des crimes -- des actes criminels. Combien y a-

10 t-il eu d'enquêtes sur les lieux en rapport avec ces crimes ? Est-ce que

11 vous avez ces chiffres ?

12 R. Pour ce qui est des enquêtes sur les lieux, il faut dire qu'on a des

13 chiffres qui concernent toutes les enquêtes. Donc, on n'a pas fait de

14 classification suivant l'origine de ces incidents, bombardements de l'OTAN,

15 activités antiterroristes, et cetera. Pendant cette période, il y a 33

16 enquêtes sur les lieux qui ont été réalisés par des Juges d'instruction, 13

17 par la police, et d'autres conjointement. Cela nous donne un total de 46.

18 Q. Bien. Est-ce qu'il y a d'autres éléments qui présentent un intérêt

19 particulier sur lesquels nous pourrions nous attarder dans ces tableaux ?

20 R. Je pourrais peut-être vous demander de vous reporter au nombre de

21 personnes qui ont été inhumées, et aussi sur la résolution des affaires

22 criminelles.

23 Q. Où trouve-t-on les informations relatives à la résolution des affaires

24 criminelles ?

25 R. Dernière page.

Page 39072

1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, je vous ai

2 permis d'interroger le témoin au sujet de ces documents qui n'ont pas été

3 traduits par courtoisie, ceci afin de vous permettre de mener votre

4 interrogatoire. Je l'ai fait parce qu'on avait fait preuve de la même

5 indulgence envers l'Accusation au cours de la présentation des moyens à

6 charge, mais je dois, cependant, vous dire que j'ai beaucoup de mal à

7 suivre la teneur de ces documents. Certes, nous voyons des chiffres ici,

8 mais, quant à la signification de ces chiffres, quant à ce qu'ils

9 représentent, nous n'avons pas de traduction. J'arrive à me faire une idée

10 en vous écoutant, et en écoutant la traduction, mais, franchement, c'est

11 très difficile, et je me demande si vraiment c'est la meilleure façon de

12 procéder. Je me demande si c'est vraiment la meilleure façon de présenter

13 vos éléments de preuve. Je vais en débattre avec mes collègues, même si

14 nous avons procédé exactement de la même façon avec l'Accusation lorsque

15 les documents concernés étaient relativement brefs. Essayons peut-être

16 maintenant de passer à Dubravica en abordant les documents --

17 M. NICE : [interprétation] S'agissant de ce document et d'autres documents

18 que l'accusé souhaiterait verser au dossier pour étayer ses tableaux, je

19 réserve ma position. Quand nous nous sommes de notre côté appuyés sur ce

20 type de document, nous n'avons jamais procédé de la sorte, surtout s'il

21 fallait interroger un témoin longuement, parce qu'ici, nous avons, en fait,

22 affaire à une analyse d'expert. Donc, je réserve ma position sur ces

23 documents, même si j'attends de pouvoir poser quelques questions au témoin.

24 Mais je ne pourrais pas le contre-interroger en détail, non seulement parce

25 que les documents n'ont pas été traduits, mais pour d'autres raisons.

Page 39073

1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Oui, vous avez raison.

2 L'Accusation n'a jamais présenté ce type de document, statistique, non

3 traduit. Mais, cependant, nous avons fait preuve de la même indulgence, de

4 la même courtoisie envers l'Accusation pour d'autres types de documents

5 plus brefs, qui n'avaient pas été traduits, et ceci c'est produit souvent.

6 Oui, Monsieur Milosevic.

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur Robinson. Je souhaiterais

8 attirer votre attention sur le point suivant. Nous avons ici les documents

9 officiels venant du ministère de l'Intérieur, des documents qui ont été

10 préparés et qui ont été vérifiés par les nouvelles autorités, à partir des

11 informations et des données disponibles.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je crois que vous n'avez pas bien

13 compris ce que je voulais dire. Mais continuons, et allons de l'avant un

14 peu plus vite.

15 L'ACCUSÉ : [interprétation]

16 Q. Mon Colonel --

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, est-ce qu'on pourrait en

18 terminer de l'intercalaire 1 ? Hier, je vous ai déjà dit que c'était un

19 seul et unique document qui a été divisé en plusieurs documents, plusieurs

20 intercalaires, jusqu'à 1.6. Mais c'est, nonobstant ce fait, un seul et

21 unique document, un document qui contient des informations au sujet de tous

22 les décès qui se sont produits pendant cette période du 1er janvier 1998 au

23 20 juin --

24 -- plutôt au 1er juin 2001. C'est une liste de tous les incidents

25 concernés, des statistiques. Il s'agit d'un document officiel, il n'y a pas

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1 un seul auteur, mais plusieurs personnes ont participé à la préparation de

2 ce document qui a été un document qui a été contrôlé et vérifié.

3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Etant donné que nous avons une

4 traduction du point de l'intercalaire 1.5, est-ce qu'on pourrait pour que

5 nous comprenions mieux examiner cette partie du document ?

6 M. NICE : [interprétation] Je voudrais vous faire connaître ma position de

7 manière tout à fait claire. Si on veut utiliser le document figurant à

8 l'intercalaire 1.4 en tant que pièce pour soutenir les thèses de l'accusé,

9 et si la Chambre était tenté de permettre à l'accusé de les verser au

10 dossier, je l'inviterais à ne pas saisir cette tentation parce que nous ne

11 pourrons pas examiner tous ces documents en détails, ni moi, ni les membres

12 de mon équipe. Il n'est pas réaliste que nous demanderons au témoin de

13 revenir plus tard pour le contre-interroger. Donc, si on procède de la

14 sorte, ces documents vont tout simplement être versés au dossier, des

15 documents que personne ne pourra comprendre.

16 L'accusé est responsable de la non traduction de ces documents, il ne

17 les a pas fourni assez tôt, et il est possible que ce soit sa faute parce

18 qu'il n'a pas préparé les documents suffisamment à temps.

19 Je ne peux pas me servir, je ne peux pas travailler sur ces

20 documents, et je demanderais à la Chambre de ne pas les verser au dossier.

21 Ces documents n'auront pas aidé la Chambre et ne feront que nous encombrer.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous entends bien, je comprends

23 très bien la logique de votre position, Monsieur Nice. Le document 1.4 est

24 très long, mais il faut savoir, Monsieur Nice que par le passé nous avons

25 accepté le versement au dossier de documents aux fins d'identification

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1 avant de nous décider plus tard. Mais je comprends ce que vous dites quand

2 vous avancez qu'on interroge en ce moment le témoin sous la base de

3 documents non traduits.

4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais est-ce que vous n'avez pas dit que,

5 pour l'intercalaire 1.5, ou plutôt 1.4, vous ne vous y opposeriez pas, vous

6 ne vous opposeriez pas à son versement au dossier quand on en a parlé

7 hier ?

8 M. NICE : [interprétation] Oui, hier, je ne m'y suis pas opposé parce que

9 j'essai d'être aussi conciliant que possible envers l'accusé, de faire plus

10 de générosité possible, mais je vais cesser, parce que je ne peux pas faire

11 mon travail dans ces conditions. Je ne peux pas me montrer conciliant

12 envers la Chambre ici, vous avez raison. Parfois les documents ne sont tout

13 de suite versés au dossier, on attend de disposer de la traduction, mais je

14 dis qu'ici, il ne faut pas procéder de la sorte parce qu'il n'est pas

15 réaliste de penser que nous ne pourrons jamais utiliser ces documents de

16 manière productive. La conséquence c'est que le témoin aura déposé dans

17 qu'il soit contre-interrogé comme il se doit, et je n'y peux rien.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien, nous allons délibérer.

19 [La Chambre de première instance se concerte]

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons permettre à M.

21 Milosevic de continuer à interroger le témoin sur la base des documents et

22 nous statuerons sur la demande présentée par l'Accusation après

23 l'interrogatoire principale.

24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je me suis trompé, en donnant des

25 chiffres et des données relatives à l'intercalaire 1.5, je retire ma

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1 demande.

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Permettez-moi d'apporter une précision. Pendant

3 que vous étiez en train de délibérer, j'ai examiné l'intercalaire 1.4, M.

4 Bonomy a posé des questions relatives aux personnes tuées après le 14 juin

5 1999. De 229, du paragraphe 229 au point 285, ce qui représente en tout 57

6 incidents. C'est ce que j'ai dit quand M. Bonomy avait posé sa question,

7 mais il ne s'agit pas de 57 morts, il s'agit de 57 incidents. Il est arrivé

8 qu'au cours d'un incident il y ait deux morts, ou quatre ou aucun.

9 Le nombre de morts que l'on peut voir dans le tableau, de l'incident 229 du

10 14 juin à l'incident 285, représente un nombre de morts beaucoup plus

11 important que le nombre d'incidents même. Parce que, dans la plupart des

12 cas au cours d'un incident on a enregistré un décès, mais il est arrivé

13 qu'il y ait deux décès ou quatre ou plus de décès par incident. J'aimerais

14 que vous gardiez cela à l'esprit.

15 Dans cet intercalaire 1.4, on a inclus tous les incidents au cours

16 desquels il y a eu mort d'hommes. Ceci suite au traitement statistique de

17 tous les documents pertinents, les autorités compétentes en Serbie dispose

18 de documents relatifs à tous ces incidents.

19 Je pense que l'importance de ces documents se passe de commentaires,

20 en plus il s'agit de documents officiels.

21 Il y a quelques instants, vous nous avez dit avoir reçu la

22 traduction de l'intercalaire 1.5 qui est une liste des incidents relatifs à

23 la situation en matière de sécurité et entraîné des décès du 10 juin 1999

24 au 1er juin 2001, pendant deux ans donc dans la municipalité de Pec.

25 M. MILOSEVIC : [interprétation]

Page 39077

1 Q. Mon Colonel, j'aimerais vous demander d'examiner le document figurant à

2 l'intercalaire 1.5.

3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous n'avez

4 pas à traiter de document avec le témoin. Passez à autre chose. Puisque

5 j'ai dit que j'avais retiré ma question au sujet de cet intercalaire.

6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien, Monsieur Kwon.

7 M. MILOSEVIC : [interprétation]

8 Q. Mon Colonel, passons à l'intercalaire numéro 2. A l'intercalaire numéro

9 1, vous nous avez fourni des informations - je le répète encore une fois -

10 qui avaient trait à votre zone de responsabilité, le SUP de Pec. Des

11 informations relatives à la criminalité, aux crimes commis contre des

12 albanais. Ceci comprend la plupart des réponses aux questions posées à

13 propos des albanais en tant que victimes ?

14 R. C'est exact.

15 Q. Puisque c'est vous qui avez signé ce rapport-ci, et puisque c'est vous

16 qui êtes aujourd'hui à la barre, je vais vous demander d'examiner les

17 données que vous avez fournies, à l'intercalaire 2, dans ce rapport. A la

18 deuxième page, ainsi qu'au paragraphe 2, vous dites ceci, que : "La police

19 avait eu un comportement respectueux de la loi et avait traité tous les

20 citoyens sur un pied d'égalité."

21 Est-ce que cela a été le cas ? Est-ce que la police a fait une différence

22 si quelqu'un était Serbe, Rom, Albanais ou pas ?

23 R. Pas du tout.

24 M. NICE : [interprétation] Quelquefois il faut voir le bon côté des choses.

25 Maintenant, on en arrive à une modalité intéressante de l'interrogatoire.

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1 Un témoin consigne quelques observations qui sont des conclusions

2 générales, qu'il ait la capacité de le faire ou pas, et comme cela se

3 trouve dans un document, l'accusé lui repose la question. Il sera facile de

4 jauger la qualité d'une telle réponse.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic. C'est une

6 question qui guide vraiment trop le témoin, celle que vous avez posée.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je reviens au sommaire, parce que

8 c'est le seul document qui nous aide, qui soit en anglais. Intercalaire 2.

9 On y dit qu'il donne : "Des informations sur des actes criminels commis et

10 ayant entraîné la mort d'Albanais." La traduction n'est pas bonne, je ne

11 pense pas. Comment est-ce qu'il faudrait traduire ce document ?

12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce sont des crimes dont les victimes ont été

13 des Albanais. Monsieur Paponjak --

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc, ce sont des Albanais qui ont

15 trouvé la mort ?

16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Pas dans tous les cas, mais ce sont, de toute

17 façon, des infractions dans chacun de ces cas. Ce sont des infractions

18 commises à l'encontre d'Albanais.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

20 L'ACCUSÉ : [interprétation] A l'intercalaire 3, vous allez trouver les

21 crimes commis contre les Serbes. Au 4, les crimes dont les Rom ont été

22 victimes. Au 5, des actes terroristes contre la police. Donc vous avez, je

23 commence à la fin, la police, je remonte, on a les Rom, les Serbes et les

24 Albanais.

25 Puis, vous avez des informations à propos d'incidents relatifs à la

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1 sécurité en ce qui concerne des personnes portées disparues, des personnes

2 enlevées à partir du 1er janvier 1998, jusqu'en juin, jusqu'au 1er juin 2001.

3 Il y a eu des enlèvements par la suite aussi, mais là-dessus nous n'avons

4 pas de renseignements. Lorsqu'il s'agit de crimes commis contre les

5 Albanais, cela veut dire que les victimes sont des Albanais. Que ces

6 Albanais aient été tués ou qu'il y ait eu pillage de leurs propriétés, peu

7 importe les modalités.

8 Vous avez dit que maintenant les questions et les réponses étaient

9 sans aucun intérêt. J'aimerais attirer votre attention sur le fait que j'ai

10 cité un paragraphe de ce rapport. C'est un document officiel, où il est dit

11 que la police a pris des mesures conformes à la loi et a traité les

12 citoyens de la même façon. Je n'ai pas posé de questions directrices. J'ai

13 cité ce que le document disait, à partir de quoi j'ai posé une question au

14 témoin qui est ici, assis, pour demander si la police a traité tout le

15 monde sur un pied d'égalité. Parce que je voulais vérifier la véracité de

16 ce document.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous auriez dû demander au témoin :

18 "Comment la police avait traité les citoyens ?" Il aurait pu répondre que :

19 "Tout le monde était sur un pied d'égalité."

20 Mais j'ai oublié que l'heure était venue de faire la pause. Nous

21 allons maintenant faire une pause de 20 minutes.

22 --- L'audience est suspendue à 10 heures 37.

23 --- L'audience est reprise à 11 heures 03.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Milosevic.

25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur Robinson.

Page 39080

1 M. MILOSEVIC : [interprétation]

2 Q. Mon Colonel, à la page suivante où il est question d'analyse de

3 données, nous nous étions arrêté sur cette information portant sur les

4 délits au pénal au détriment des Albanais. On dit qu'il y a eu 1 289 délits

5 au pénal ?

6 R. Oui.

7 Q. 303 au détriment des Albanais ?

8 R. 190 délits au pénal commis par des personnes inconnues et 104 où les

9 auteurs ont été identifiés.

10 Q. Bien. On dit 302 plaintes au pénal de présentées ?

11 R. Oui, 198 contre des auteurs inconnus.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Nice.

13 M. NICE : [interprétation] Je suis perdu. Je ne savais plus ce que lisait

14 l'accusé.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Effectivement, où est-ce que vous en

16 êtes précisément dans l'examen de ce document ?

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je suis actuellement à l'intercalaire 2,

18 informations relatives aux délits au pénal perpétrés au détriment des

19 Albanais. J'ai parcouru --

20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que c'est la page 3 de

21 l'intercalaire 2. Est-ce qu'on pourrait placer cette page sur le

22 rétroprojecteur. Je pense que c'est le premier paragraphe de la page qui

23 vous intéressait.

24 M. NICE : [interprétation] Si l'accusé va demander au témoin d'examiner un

25 paragraphe donné, plutôt que ce soit l'accusé qui en fasse le résumé, il

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1 demanderait au témoin de lire le paragraphe. A ce moment-là nous pourrions

2 prendre des notes nous-même, mais il est difficile de retrouver le

3 paragraphe alors que c'est l'alphabet cyrillique qui est utilisé et d'avoir

4 le résumé de ce paragraphe par l'accusé.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic, c'est une

6 bonne idée.

7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Page suivante, oui je pense que c'est

8 celle là, c'est la bonne parce que je vois un chiffre celui de 1 289.

9 M. MILOSEVIC : [interprétation]

10 Q. La page qui se trouve sous vos yeux, mon Colonel.

11 R. Oui.

12 Q. Combien de plaintes au pénal a-t-on déposées pour ce qui est des

13 plaintes au pénal ?

14 R. Au deuxième paragraphe de ce chapitre, on dit qu'il a été présenté 302

15 plaintes au pénal, dont 198 contre auteurs inconnus, 104 contre des auteurs

16 identifiés, et 191 rapports servant de complément aux plaintes au pénal

17 suite à élucidation des délits au pénal et identification des auteurs.

18 C'est la procédure habituelle s'il y a enregistrement d'un cas et

19 dépôt d'une plainte au pénal contre inconnu, il y a élucidation de ce délit

20 et on présente au procureur un rapport en guise de complément à la plainte

21 au pénal pour élucidation de délit au pénal.

22 Q. Expliquez-moi une chose, vous dites qu'au détriment des Albanais, il y

23 a eu 303 délits au pénal. Au deuxième paragraphe vous dites 302 plaintes au

24 pénal. Est-ce que cela signifie qu'il n'y a pas eu plainte de déposer une

25 fois ?

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1 R. Oui, dans un cas il n'y a pas eu de plainte de déposée, il s'agit du

2 bombardement de l'OTAN. Nous n'avons déposé de plainte au pénal contre

3 personne.

4 Q. Bien. Combien sur le total des délits au pénal perpétrés au détriment

5 des Albanais a-t-on trouvé d'auteurs sur les lieux du crime ?

6 R. Attraper quelqu'un la main dans le sac, je dirais qu'il en a eu 86 des

7 cas pareils pour ce qui est des délits au pénal où les auteurs ont été pris

8 sur le fait.

9 Q. La structure des délits élucidés ?

10 R. 27 délits de terrorisme, 14 vols, 33 vols graves, 9 brigandages. Tous

11 les cas de vols graves où il y a pillage avec meurtre, il y en a eu trois,

12 et il y a eu des personnes qui ont suscité un danger public, deux.

13 Q. Avez-vous identifié les auteurs des délits au pénal à l'encontre

14 d'Albanais partant de la structure ethnique ?

15 R. C'est l'un des paramètres qui nous a intéressé notamment à l'occasion

16 de l'élaboration de cette étude. Dans 67 % des cas, les auteurs de délits

17 au pénal sont des Albanais, toujours au détriment d'Albanais, et dans 23 %

18 des cas les auteurs de ces délits sont des Serbes. Vous allez constater

19 qu'il y a une divergence, une différence, un reste, un résidu de 10 %, cela

20 c'est les autres groupes ethniques.

21 Q. Les Rom, les Musulmans et autres ?

22 R. Nous n'avons pris en considération que ces deux groupes ethniques parce

23 que c'est ceux qui nous intéressaient le plus.

24 Q. Bien. Mais les membres de la police lorsqu'ils déployaient des mesures

25 pour protéger les citoyens et leurs biens en temps de guerre, ont-ils

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1 procédé à des arrestation de Serbes pour délits au pénal de commis à

2 l'encore d'Albanais ?

3 R. Les policiers ont arrêté tous les Serbes qui ont été suspectés d'avoir

4 commis des délits au pénal contre des Albanais. A ce moment-là, à cette

5 période, il a été mis en arrestation 70 Serbes pour des délits au pénal

6 commis au détriment d'Albanais. Parmi ces Serbes, il y avait même un

7 directeur d'une entreprise publique qui a été pris sur le fait. Nous

8 n'avons donc fait aucune distinction pour ce qui est de l'appartenance

9 ethnique. Ceux qui ont été pris à commette des délits au pénal ou ont été

10 découverts par la suite ont fait l'objet d'arrestation. Ces personnes ont

11 été mises en arrestation et une procédure au pénal a été lancée contre eux.

12 Q. Est-ce qu'on a diligenté une procédure à l'encontre, par exemple, de

13 membres de la police ?

14 R. Oui, il y a eu des délits de cette nature-là aussi. Il y a eu des

15 plaintes au pénal contre quatre policiers des effectifs réguliers et trois

16 policiers qui faisaient partie des effectifs de réserve. Ce que je peux

17 vous dire, c'est que ces policiers ont également été arrêtés après,

18 indépendamment du fait qu'il s'agissait-là de policiers. Ils ont commis des

19 délits au pénal et ils ont été arrêtés, ils ont fait l'objet de plaintes au

20 pénal et d'une procédure.

21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Milosevic, je comprends que

22 vous suivez ce que dit ce rapport, mais il nous est difficile de faire une

23 différence entre ce que vous dites en guise de commentaire et ce qui est

24 inscrit dans le rapport. Demandez au témoin de donner lecture d'un

25 paragraphe ou d'une phrase. Puis, vous pourrez si vous voulez poser des

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1 questions.

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Kwon, je me suis efforcé de ne pas

3 faire de commentaire ou de poser des questions directrices, mais j'ai dit,

4 est-ce que ceci, est-ce qu'il y a eu telle chose ?

5 M. MILOSEVIC : [interprétation]

6 Q. Mais Colonel, puisqu'on nous le demande, je vous prie de donner lecture

7 premier, deuxième, troisième -- disons, à compter du cinquième paragraphe,

8 on dit : "Les auteurs des délits au pénal…" où on donne le pourcentage.

9 Vous pouvez nous donner lecture de ces quelques paragraphes.

10 R. "Les auteurs des délits au pénal dans 67 % des cas sont des Albanais."

11 Je donne lecture du cinquième paragraphe, je le précise : "Et dans 23 % des

12 cas, c'était des Serbes."

13 Q. C'est ce que vous avez dit tout à l'heure.

14 R. "Les membres de la police, en prenant des mesures visant à protéger les

15 citoyens et leurs biens en temps de guerre ont appréhendé 70 Serbes pour

16 des délits au pénal commis au détriment d'Albanais. Parmi ceux-là, il a été

17 également procédé à l'arrestation d'un directeur d'une société publique. Il

18 a été présenté quatre plaintes au pénal contre des policiers des effectifs

19 réguliers et trois policiers faisant partie des effectifs de réserve."

20 Q. Pourquoi avez-vous distingué ces policiers ? Pourquoi avez-vous fait la

21 différence entre les effectifs réguliers et ceux de réserve ?

22 R. Nous, ce qui nous intéressait, c'était la structure, parce que les

23 membres de la police de réserve, ce n'est pas des policiers de profession,

24 de carrière. Ce sont des réservistes, des citoyens qui ont reçu une

25 formation pour ce qui est de l'accomplissement de tâches policières. En cas

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1 de besoin, suite à une ordonnance de la part du ministre, ils peuvent être

2 engagés pour l'accomplissement de certaines tâches pendant une période

3 déterminée. Ce ne sont pas des professionnels, ce sont des citoyens qui ont

4 suivi une formation pour l'accomplissement de ces tâches.

5 Q. Vous vouliez faire une distinction à ce niveau-là. Bien. Que dit le

6 paragraphe suivant, je vous prie ?

7 R. "Les membres de la police, en raison de doutes justifiés concernant la

8 commission de délits au pénal, ont transmis aux instances militaires 75

9 personnes faisant partie des effectifs de réserve de l'armée de

10 Yougoslavie. Nous avons fait cette distinction en disant qu'il s'agissait

11 des réservistes de l'armée de Yougoslavie, puisque la situation dans

12 laquelle nous intervenions était telle."

13 Les personnes que nous trouvions en uniforme, en uniforme qui ne

14 serait pas un uniforme de la police, ce n'était pas un policier,

15 l'intéressé -- nous avons estimé que c'était un membre de l'armée, et nous

16 le transmettions aux instances militaires, et c'est les instances

17 militaires qui étaient chargées de la procédure à venir. Nous n'étions pas

18 compétents pour ce qui était de les interroger, de déterminer de qui il

19 s'agissait, et ainsi de suite. Nous les remettions aux instances

20 militaires, mais je ne sais pas si c'était des membres de l'armée ou pas.

21 Q. Bien. Le paragraphe suivant nous parle des tentatives d'activités

22 concertées conjointes entre la police normale et la police militaire. Je

23 vous demande d'abord de donner lecture.

24 R. "Les tentatives d'activités conjointes entre la police et la police

25 militaire n'ont pas donné les résultats attendus parce que les policiers de

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1 la police militaire faisaient partie des effectifs de réserve,

2 insuffisamment formés pour l'accomplissement desdites tâches. Dans leurs

3 effectifs, il y avait des individus dont le passé indiquait la présence

4 d'un comportement criminel. La situation a été nettement améliorée après

5 l'arrivée des unités régulières de la police militaire.

6 Q. Est-ce que la situation a ensuite été normalisée pour ce qui est de la

7 coopération entre la police normale, la police civile et la police

8 militaire ?

9 R. Oui. Après la proclamation de l'état de guerre dans la ville de Pec et

10 sur le territoire de la municipalité de Pec d'une manière générale, il a

11 été procédé à la mobilisation de la police militaire parmi les réservistes,

12 et leur commandant était également un réserviste. Ils ne se sont pas très

13 bien débrouillés, parce qu'il s'agissait d'intervenir -- enfin, ils

14 venaient d'être civils jusqu'à ce moment-là, et ils n'ont pas pu se

15 débrouiller pour ce qui est du comportement et de l'attitude à adopter vis-

16 à-vis de leurs voisins d'hier. Lorsque la police militaire véritable est

17 arrivée, nous avons commencé à travailler ensemble, à patrouiller ensemble,

18 et les choses se sont mises à fonctionner normalement.

19 Q. Donnez-nous lecture de ce qui suit.

20 R. "Il n'y a pas eu de cas de libération de criminels par la police. Il

21 n'y a pas eu d'attitude tolérante. Tous les auteurs ont fait l'objet de

22 mesures prévues par la loi. Les faits disent indubitablement que la police

23 a entrepris toutes les mesures légales à l'encontre de la totalité des

24 criminels, indépendamment de leur appartenance ethnique, ou de

25 l'appartenance à telle ou telle autre formation."

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1 Page suivante. "En raison de l'arrestation d'auteurs de délits au pénal

2 parmi les Serbes, la population serbe a commenté de façon négative en

3 disant que les Serbes étaient persécutés en ce temps de guerre. Le

4 ministère de l'Intérieur, le QG à Pristina, ainsi que les responsables du

5 SUP, n'ont pas donné des instructions voire orales ou par écrit pour ce qui

6 est de rendre possible quelque co-perpétration de délit au pénal que ce

7 soit. Bien au contraire, il a été donné des ordres pour que l'on combatte

8 toutes activités criminelles, et pour que l'on prenne des mesures d'urgence

9 à l'encontre d'auteurs de ces délits au pénal."

10 Q. Vous avez dit tout à l'heure qu'il y avait eu des protestations pour

11 persécution de Serbes en ces temps de guerre. Est-ce que cela se rapporte

12 au comportement de la police qui a arrêté des Serbes pour commission de

13 délits au pénal ?

14 R. Oui. Les citoyens ont estimé qu'ils faisaient l'objet d'injustice,

15 parce qu'ils ont d'abord été attaqués par les terroristes. Puis il y ait eu

16 bombardement. Don, des bombes tombaient un peu partout, et ils

17 s'attendaient à ce que la police les aide, ou l'armée les aide. Or, nous

18 avons procédé à des arrestations de voisins à eux, parce que ces voisins

19 avaient volé quelque chose, ou avaient commis quelque autre délit au pénal.

20 Certains citoyens avaient pensé que nous étions là pour les protéger à tous

21 points de vues. Nous ne pouvions pas les protéger pour ce qui est de ce

22 point de vue-là. Nous avons procédé à des arrestations de criminels.

23 Je venais d'arriver de Cacak. A Cacak, il n'y avait que des Serbes.

24 S'agissant d'une remarque de cette nature, je leur ai dit, mais à Cacak je

25 n'aurais pas de travail alors, parce que si je ne devais pas toucher les

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1 Serbes, étant donné qu'à Cacak il n'y a que des Serbes, donc on

2 n'arrêterait pas les criminels.

3 J'ai essayé de leur expliquer que nous étions en train de prendre des

4 mesures à l'encontre de criminels, d'auteurs de délits au pénal, et non pas

5 de prendre des mesures à l'encontre d'un groupe ethnique indépendamment du

6 groupe ethnique dont il s'agirait, Musulman, Albanais ou Serbe.

7 Q. Donc, si un Serbe a commis un délit au pénal, il n'y a pas eu

8 d'attitude tolérante ? On ne lui a pas fermé un œil sur son comportement ?

9 R. Non.

10 Q. Bien. Je voudrais que l'on passe à l'intercalaire 2, où il y a un

11 tableau pour ce qui est des délits au pénal. Il s'agit de données

12 statistiques qui ont été tirées des documents à notre disposition.

13 R. Je vais essayer de passer cela sur le rétroprojecteur.

14 Q. Combien de personnes ont fait l'objet de constats sur les lieux ?

15 R. Dans 105 cas, il a été procédé à des constats sur les lieux de la part

16 de la police, à savoir 56 avec la présence d'un Juge d'instruction, 46 avec

17 la participation du Juge d'instruction, trois avec la participation des

18 enquêteurs de l'armée, huit constats partiellement effectués, et 190 cas où

19 il n'y a pas eu de constat. La documentation de la police a été établie

20 pour 102 de ces cas.

21 Q. Merci, mon Colonel.

22 Est-ce qu'à l'intercalaire -- pensez-vous qu'il soit nécessaire de

23 commenter le 2.2 parce qu'à chaque fois, on mentionne le code pénal de la

24 République de Serbie ou de la Yougoslavie suivant la structure des délits

25 au pénal ?

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1 R. Ce tableau est plus ou moins clair si on compare avec les dispositions

2 et les différents délits au pénal. Il y a l'Article 125, il s'agit d'actes

3 de terrorisme, l'Article 125 du code pénal de la République fédérale de

4 Yougoslavie. Il y a 62 cas de cette nature. Maintenant, l'Article 126, je

5 ne peux pas vous dire. L'Article 47 du code pénal de la République de

6 Serbie se rapporte aux meurtres, il y en a eu 23. C'est passible de

7 dispositions de l'Article 47, il y a eu cinq tentatives de meurtres.

8 L'Article 53 parle de blessures, de coups et blessures. L'Article 103 du

9 code pénal de la République de Serbie parle de mœurs, viols et autres.

10 Donc, il y en a eu cinq au total ici, on a une série de délits par rapport

11 au bien d'autrui, les vols; Article 165 -- 166 du code pénal de la

12 République de Serbie, vols graves, une centaine de vols graves. L'Article

13 168, brigandage, vols qualifiés.

14 M. MILOSEVIC : [interprétation]

15 Q. Colonel, excusez-moi. Est-ce qu'à l'intercalaire 2.3, vous fournissez

16 une liste tout comme cela a été le cas de la liste à l'intercalaire 1 que

17 vous nous avez fourni. Liste des délits au pénal, commis au détriment

18 d'Albanais pendant la période courant du 1er janvier 1998, au 10 ou 20 juin

19 1999 sur le territoire du SUP de Pec.

20 R. Oui. Tout chapitre comporte d'abord une liste. La liste a été rédigée

21 partant de dossier individuel. Cette liste donne une brève description du

22 dossier, et partant de cette liste, il a été procédé à la rédaction de ces

23 tableaux, à la collecte de ces données statistiques. Partant des listes et

24 des tableaux, il a été rédigée une brève information qui se trouve au début

25 de tout chapitre qui fournit une image générale des conditions dans

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1 lesquelles l'on a travaillé, des circonstances dans lesquelles on a

2 travaillé, des circonstances dans lesquelles ces délits se sont produits,

3 et cela nous réfère au -- cela nous fournit la possibilité de se faire une

4 idée générale lorsqu'on rencontre les dossiers pour la première fois. Donc,

5 il y a d'abord la liste, les statistiques et les événements individuels

6 partant desquels tout ceci a été rédigé.

7 Maintenant, je précise que, dans les archives du SUP de Pec, il y a des

8 dossiers pour chacun des délits au pénal, pour chacun des événements qui

9 sont cités ici. Certains de ces dossiers se trouvent être plus volumineux,

10 d'autres ont moins de pages, mais tout dépend de ce qui se produit sur le

11 terrain.

12 M. MILOSEVIC : [interprétation] Cette liste est faite pour tous les délits

13 au pénal qui ont été commis au détriment d'Albanais qu'au détriment des

14 Serbes, de Rom, de policiers ainsi de suite.

15 Q. Maintenant, dites-moi, mon Colonel : peut-on partant de ces documents

16 que vous avez fourni ici, aux intercalaires tel indiqué, peut-on voir

17 comment sur des exemples concrets il a été procédé au traitement des

18 différents dossiers conformément à ce que vous venez de nous dire. Vous

19 venez de nous dire que les dossiers sont au SUP de Pec. Vous avez apporté

20 un nombre déterminé de dossiers pour illustrer à titre d'exemple.

21 R. Oui, c'est exact.

22 Q. Bon, alors, nous avons ici l'intégralité ou voir un grand nombre de

23 dossiers pour ce qui est d'un certain nombre de personnes qui ont été

24 victimes. Je vais à présent vous poser des questions suivant ce qui figure

25 dans les différents intercalaires--

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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vais demander une petite précision.

2 Nous avons les intercalaires 2.1 et 2.2 dans mon classeur et dans ceux

3 d'autres Juges, ils sont identiques. Est-ce que c'est pareil pour tout le

4 monde, toutes les personnes présentes dans ce prétoire ?

5 M. NICE : [interprétation] C'est le même document qu'on retrouve dans ces

6 deux intercalaires.

7 M. KAY : [interprétation] Non, pas pour nous. Dans le coin supérieur droit,

8 nous avons l'indication B2/III, cela est le 2.1 alors que dans

9 l'intercalaire 2.2 on a la mention B2/III.

10 M. NICE : [interprétation] Non.

11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, la mention est différente, mais on

12 a le même contenu.

13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais vous expliquer. Au B2/III, donc à

14 l'intercalaire 2.1, la liste des événements se rapporte aux périodes de

15 temps, aux différentes périodes, alors qu'à l'intercalaire 2.2, on reprend

16 la même chose suivant les municipalités de Pec, d'Istok et de Klina.

17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien, j'ai compris, cela suffira.

18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Parfait. Ici, si j'ai bien compris.

19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'en prends bonne note.

20 M. MILOSEVIC : [interprétation]

21 Q. Puisque vous avez parlé de différents dossiers, je parle de ceux qui

22 étaient détaillés, nous avons ici des exemples de listes concernant des

23 dossiers individuels. Nous avons un dossier en ce qui concerne l'assassinat

24 de Djordje Belic, un autre concernant l'assassinat de Desimir Vasic, un nom

25 de serbe, et nous avons un albanais, Alia Rizah.

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1 M. NICE : [interprétation] [aucune interprétation]

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, veuillez nous

3 indiquer quels sont les documents.

4 M. NICE : [interprétation] Puisque, maintenant, l'accusé donne une

5 explication pour les documents, il semble parler du 2.3. Il semble dire,

6 mais il se peut que je l'ai mal compris, que le 2.3 c'était une sélection,

7 et que ce n'était pas toutes les pièces jointes. J'ai peine à le croire

8 parce qu'apparemment, c'est un document présenté dans une partie d'un

9 rapport qui avait des numéros d'ordre dans une série de documents; d'où ma

10 confusion.

11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je suis désolé si je n'ai pas été assez clair

12 dans la question posée au témoin. Nous avons déjà parcouru l'intercalaire

13 2.2. Le témoin a déclaré que chacun des chiffres qu'on y trouve est en fait

14 complété parle dossier. On trouve ces dossiers complets au SUP de Pec. Ici,

15 nous avons repris certains dossiers, certaines affaires à l'intercalaire

16 20, nous ne sommes plus à l'intercalaire 2, nous sommes maintenant à

17 l'intercalaire 20. Il y a d'autres intercalaires après le 20. Cela se

18 trouve dans le classeur cinq, il y en a sept en tout. Je vous disais nous

19 sommes maintenant à l'examen de l'intercalaire 20.

20 M. MILOSEVIC : [interprétation]

21 Q. Mon Colonel, au 20.1 au 20.2 au 20.3 et au 20.4, est-ce qu'on trouve un

22 document détaillé concernant les assassinats ? L'assassinat, notamment, de

23 Belic, Dzordje.

24 L'INTERPRÈTE : Le témoin n'avait pas son micro branché.

25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que vous avez ce classeur ? Pourrait-on

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1 remettre ce classeur au témoin afin qu'il le garde ?

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais ceci concerne le 12 janvier

3 1998. A la fin de la présentation de vos moyens, au moment de vos

4 plaidoiries, qu'allez-vous dire à propos de ces documents ? Que sont-ils

5 censés établir, dans le cadre de votre procès ?

6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Voici ce que ceci établit --

7 L'INTERPRÈTE : Le micro de l'accusé n'est pas branché.

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Tirons une chose au clair, Monsieur Bonomy. Si

9 je devais parcourir la totalité des documents, vous présenter l'ensemble

10 des informations recueillies par les instances judiciaires à la disposition

11 de ceci, cela représenterait une montagne de documents. Ici, nous avons des

12 documents du SUP de Pec, et nous avons pris certains dossiers uniquement,

13 qui sont illustratifs, pour vous montrer les dossiers concernant des

14 Albanais et des Serbes. Nous voyons qu'en fait, le traitement qui leur a

15 été réservé est identique. La police et les instances judiciaires ont

16 toujours agi de la même façon, que ce soit les Albanais ou des Serbes qui

17 ont été tués. C'est la raison pour laquelle j'aimerais attirer votre

18 attention sur le fait qu'on aurait pu avoir des milliers, en tout cas, 1

19 200 ou 1 300 affaires, pour ce qui concerne les Albanais. On aurait pu en

20 avoir autant pour les Serbes, pour les Rom, pour les policiers, pour les

21 soldats, et cetera. Nous avons opéré une sélection pour retenir certains

22 incidents. A titre d'exemple, pour montrer le genre de cas traités. Je vous

23 ai parlé de Djordje Belic et il y avait un albanais, Rizah Alia. Il y avait

24 l'assassinat de Djuka Adem et Djuka Bakir, des albanais; il y avait Sukaj

25 Cerim, un autre albanais, ou Vasic Desimir, un serbe. Donc, nous avons fait

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1 une sélection, si vous voulez, pour reprendre aussi bien des Serbes que des

2 Albanais. Six jeunes hommes, dans le café Panda, ont également été tués. Ce

3 dossier se retrouve dans plusieurs intercalaires.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je répète mon commentaire. J'ai peine

5 à voir comment ceci va m'aider pour déterminer si des infractions pénales

6 ont été commises au moment de la période couverte par l'acte d'accusation.

7 M. NICE : [interprétation] Bien sûr, à vous de juger si l'accusé a droit de

8 poursuivre sur sa lancée, mais nous avons le 20.1, qui porte apparemment la

9 date du 12 janvier 1998. Il faudrait regrouper cela avec une sous rubrique

10 du 2.3. J'ai peut-être tout à fait mal compris le lien éventuel, mais la

11 date la plus proche du 12 janvier, c'est le numéro 10, à l'intercalaire

12 2.3. C'est le 10 ou 13 janvier. Jusqu'à présent je n'ai pas pu retrouver le

13 nom de Djordje Belic, donc je ne vois pas s'il est possible de recouper ces

14 incidents, ces événements.

15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais vous donner une explication. Nous ne

16 parlons pas des liens entre les intercalaires 2, 3 et l'intercalaire 20.

17 Nous parlons ici, du fait de vous soumettre des éléments de preuve montrant

18 que la police et les instances judiciaires ont réservé le même traitement,

19 qu'un Albanais ou qu'un Serbe ait été tué. Ils ont utilisé la même

20 procédure. On a rédigé les mêmes rapports, on a suivi la même procédure, il

21 n'y a pas eu de différence. Je vous donne plusieurs exemples.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Nice, la réponse c'est peut-

23 être qu'au point 2.3, on n'a que des victimes albanaises. Dans les autres

24 intercalaires, il y a d'autres victimes. Donc, peut-être qu'on trouvera ce

25 nom-ci dans un autre des résumés, à une autre partie de l'intercalaire.

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1 M. NICE : [interprétation] Merci, merci. C'est ce que je commençais à me

2 dire, moi-même aussi.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je voudrais vous comprendre,

4 Monsieur Milosevic. Vous dites que cet élément de preuve est important,

5 dans la mesure où il montre que la police n'a pas agi -- de façon

6 discriminatoire envers les Albanais, que les Albanais ont été traités comme

7 les Serbes l'ont été.

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Exact. S'agissant d'auteur, s'agissant de

9 victimes, le traitement a été le même. Ceci ne se rapporte pas à la

10 totalité des dépositions, mais, pour ce qui est de ces intercalaires, c'est

11 le cas parce que la déposition parle du comportement général de la police

12 et des allégations de transfert forcé, d'expulsion, et cetera. Mais, si on

13 parle d'enquête, menée suite à la commission d'infraction, du comportement

14 adopté à l'encontre d'auteurs ou de victimes de ces crimes, la victime --

15 la police a toujours agi de la même façon. Que ce soit des serbes ou des

16 albanais.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais comment allez-vous répondre à

18 la question posée par le Juge Bonomy. Pourquoi parlez-vous ici, de 1998 ?

19 Est-ce pour montrer qu'il y a eu des antécédents de non-discrimination,

20 dans le traitement réservé ?

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ces antécédents d'absence de discrimination,

22 cela existe depuis des décennies avant cela. Si vous prenez l'année 1998,

23 il n'y avait pas de guerre. La police a eu le même comportement lorsqu'elle

24 menait une enquête, suite à un crime, s'est comportée de la même façon que

25 pendant la guerre. Elle fait toujours la même chose, quand elle mène une

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1 enquête. Elle n'a pas deux façons différentes de le faire. Elle respecte la

2 loi régissant les affaires de l'intérieur. Elle fait la même chose en tant

3 de guerre qu'en tant de paix, lorsqu'il s'agit du traitement réservé aux

4 victimes ou aux auteurs des infractions.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Essayons de terminer cette partie-ci

6 de votre interrogatoire.

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, je pense que ces exemples

8 sont très convaincants et étayent ce que disait le témoin, à savoir qu'un

9 même traitement a été réservé aux Albanais et aux Serbes. C'est pourquoi je

10 vous demande le versement de ces intercalaires, à partir du 20.1 jusqu'au

11 20.4.

12 Q. Ils concernent l'assassinat de Djordje Belic, à l'intercalaire 21. Je

13 ne vais pas vous donner tous les intercalaires qui en relèvent là, on parle

14 de l'assassinat de Desimir Vasic. Au 23, de l'assassinat de Rizah Alia. A

15 l'intercalaire 28, on parle de l'assassinat de Nazif Basota. A

16 l'intercalaire 33, on parle de l'assassinat de Dalibor Lazarevic. A

17 l'intercalaire 36, 7, 8, 9, et cetera, on parle de Dejan Prelevic et Mirko

18 Radunovic. C'est de ce que vous avez parlé hier, n'est-ce pas ?

19 R. Oui.

20 Q. Ce qui s'est passé à Lloxha.

21 Q. Cet intercalaire montre les pièces étayant ce qu'a dit le témoin à

22 propos des événements de Lloxha. L'UCK a lancé une attaque contre la police

23 et contre Pec à partir de Lloxha. Puis, on trouve des documents relatifs à

24 l'enlèvement et à l'assassinat de Perovic et de Rajkovic. Cela c'est

25 l'intercalaire 36.

Page 39097

1 Vous avez les sous intercalaires, à l'intercalaire 37, vous avez

2 l'assassinat de Kuci Skender. 37.1, 37.2 --

3 M. NICE : [interprétation] Je relève ceci, je ne sais pas si l'accusé veut

4 s'en servir parce qu'apparemment, il y a quelque chose en anglais. Oui,

5 c'est le 36.17, me semble-t-il. Franchement, il m'est impossible de suivre

6 ce qui est ici affirmé.

7 La Chambre voudra peut-être garder ceci à l'esprit même si ces

8 documents avaient déjà été traduits, on conclut qu'il y avait égalité de

9 traitement entre des groupes ethnique c'est quelque chose que le témoin

10 devrait expliquer à partir des connaissances qu'il a personnellement ou à

11 titre d'expert. Mais soyons réalistes, ce n'est pas une conclusion que je

12 peux aborder sans préavis au moment du contre-interrogatoire. Pour

13 plusieurs raisons que j'ai évoquées, ces documents ne sont pas de nature à

14 assister la Chambre. Je ne sais pas si l'accusé peut obtenir du témoin

15 autre chose qu'une énumération de documents, à lui décider. Je ne suis pas

16 prêt à m'y opposer, mais je trouve que ce sont des documents qu'il est

17 impossible de gérer.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pour le moment, l'accusé était en

19 train d'énumérer les documents dont il demande le versement, nous allons

20 l'entendre et nous prendrons une décision à la fin de la déposition.

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, j'espère que vous vous

22 souvenez, vous et M. Kwon, combien de fois je me suis trouvé dans la même

23 situation. Des tonnes de documents ont été abordées très rapidement. On a

24 apporté tout un chariot rempli de classeurs, et je n'ai pas soulevé une

25 objection de ce genre. Après tout la valeur probante, le poids accordé à

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1 ces éléments de preuve par rapport à ce que dit M. Nice est inexistant,

2 c'est à vous de juger.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Poursuivons.

4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Prenons l'intercalaire 38, il concerne

5 l'assassinat de deux albanais, Adem Djuka et Bakir Djuka. Prenez

6 l'intercalaire 38, s'il vous plaît.

7 M. MILOSEVIC : [interprétation]

8 Q. Au dit intercalaire, en fait, il y en a trois, intercalaires qui

9 concernent l'assassinat de Djuka Adem et Djuka Bakir. Il y a d'abord une

10 plainte ou un rapport au pénal. Une note officielle, c'est le 38.1, et le

11 38.2 là, il s'agit de renseignements relatant tout ce qui s'est passé.

12 Est-ce que c'était là la procédure habituelle afin de déterminer qui

13 étaient les auteurs des infractions ? Est-ce que c'est comme cela

14 qu'étaient, en règle générale, traitées les victimes ?

15 R. Oui, c'est la procédure tout à fait habituelle. Parce que la plainte au

16 pénal, elle vous montre comment il se fait que nous avons eu connaissance

17 de l'événement, puis quelles furent les mesures prises ultérieurement. On

18 parle qu'au matin très tôt que Shabani Ramo est venu téléphoné au SUP de

19 Pec pour les informer que sur la droite de la route locale allant de

20 Trebevic à Pec, on avait trouvé deux cadavres.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Qui étaient les auteurs de ces faits ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous avons dont ici une plainte ou plutôt un

23 rapport établissant les faits. Nous n'avons pas trouvé les auteurs, ils

24 n'ont toujours pas été trouvés. Beaucoup d'auteurs de telles infractions au

25 pénal n'ont toujours pas été trouvés. Il est possible de les identifier,

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1 mais il n'est pas possible de les appréhender car ils ne sont pas

2 accessibles.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Dans ces exemples que vous nous

4 montrer, est-ce que vous avez des documents relatifs à des cas précis où il

5 a été établi qu'un Serbe était l'auteur du meurtre d'un Albanais.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je dois tout d'abord dire que ce n'est pas moi

7 qui ai sélectionné ces documents. Ces documents --

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Répondez à ma question.

9 M. Milosevic n'a pas tout le temps du monde. Répondez à ma question ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux pas à brûle pourpoint vous

11 répondre, vous dire si on trouve ce genre de dossiers ici parce que ce

12 n'est pas moi qui ai sélectionné ces dossiers.

13 M. MILOSEVIC : [interprétation]

14 Q. Mon Colonel, il y a quelques instants vous avez dit que vous n'avez pas

15 réussi à appréhender les auteurs. Est-ce qu'il s'agissait ici manifestement

16 d'une attaque terroriste, que ces deux Albanais étaient les victimes de

17 l'UCK ?

18 R. C'était tout à fait clair pour nous, mais il nous a été impossible de

19 mettre la main sur les auteurs car ils n'étaient pas là tout simplement.

20 Q. Savez-vous que ces deux personnes tuées avaient un frère, Xhafer, qui a

21 été abattu, massacré après la venue de la KFOR ?

22 R. Mais ces deux-ci ont aussi été tués à cause de Xhafer Djuka.

23 Cette famille, la famille Djuka, c'était une famille d'Albanais

24 qu'on appelait : "Les Albanais loyaux." Xhafer avait de hautes fonctions au

25 conseil exécutif de la municipalité, le conseil exécutif du Kosovo-

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1 Metohija. Ils étaient connus comme étant des Albanais loyaux. A ce moment-

2 là les terroristes ne pouvaient pas le toucher, c'est pourquoi ils se sont

3 rabattus sur des membres de sa famille. Plus tard, lorsqu'ils en ont eu la

4 possibilité, ils ont tué Xhafer aussi.

5 Q. Xhafer Djuka faisait parti du conseil exécutif provisoire de Kosovo-

6 Metohija ?

7 R. Oui, je pense que c'était le cas.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce qu'il vous est arrivé de

9 participer à l'enquête, une enquête qui a prouvé qu'un Serbe avait tué un

10 Albanais ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Personnellement pas. Je ne me souviens pas de

12 tels cas.

13 M. MILOSEVIC : [interprétation]

14 Q. Vous parlez du territoire de la municipalité de Pec ou plutôt du SUP de

15 Pec ?

16 R. Oui.

17 Q. Fort bien. Prenons l'intercalaire 40, là nous avons pas mal de

18 documents à cet intercalaire qui comprend plusieurs intercalaires; 40.1,

19 40.2 et 40.3. Il s'agit de cadavres non identifiés qu'on a retrouvés à

20 Volujacka Cuka, c'est la base des faits. Prenez l'intercalaire 40, s'il

21 vous plaît. Vous avez d'abord le rapport de la police scientifique après

22 constat sur les lieux concernant le village de Volujak.

23 Que savez-vous à propos de ce dossier qu'on trouve à l'intercalaire 40 ?

24 R. Il a été établi que des ossements et le reste d'un crâne avaient été

25 trouvés à un endroit, à un lieu dit Volujacka Cuka. La police scientifique

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1 s'est rendue sur les lieux et a établi qu'un crâne et quelques ossements

2 avaient été trouvés dans une espèce de fosse en dessous d'un rocher. La

3 fosse faisait une profondeur d'environ 20 mètres. Les dimensions étaient de

4 15 mètres sur 10, et on a trouvé les restes de cinq cadavres. C'était du

5 moins la présomption.

6 Avant, cette localité était contrôlée par ce qu'il est convenu

7 d'appeler l'UCK. Le terrain ayant été débloqué, c'est à ce moment-là qu'on

8 a trouvé ces restes humains qui ont été envoyés pour examen par expert. Cet

9 examen a été effectué. Le dossier n'a pas été clos, puis il y a eu état de

10 guerre, et le dossier n'est toujours pas clos. Tout récemment, des membres

11 de la police de la MINUK ont poursuivi à travailler sur les lieux, et il y

12 a à peine quelques jours, j'ai vu dans les journaux qu'on a trouvé une

13 vingtaine de cadavres à cet endroit.

14 Q. C'est une fosse commune de Serbes ?

15 R. D'après tous les faits qu'on a trouvé sur le terrain, cela semble

16 l'indiquer. Mais nous n'avons pas réussi à identifier les victimes, ni leur

17 identité.

18 Il y a plusieurs détails indiquant que c'était des Serbes. Les

19 vêtements notamment, et certaines des caractéristiques physiques. On

20 pourrait exclure que c'était des Albanais ou des Musulmans.

21 Q. Fort bien. Essayons d'être le plus bref possible. Ici, nous avons

22 un classeur, en fait, deux classeurs, les classeurs 5 et 6, contenant

23 beaucoup de documents concernant aussi bien des Serbes que des Albanais.

24 Ils sont censés servir d'exemple du traitement réservé suite à la

25 commission d'infractions pénales ayant entraîné la mort. Tout ceci se

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1 retrouve dans vos tableaux, dans vos renseignements, n'est-ce pas ?

2 R. Oui. Il peut être établi avec certitude qu'on a appliqué la même

3 procédure quel que soit le cas, que c'était absolument identique. Tout à

4 fait. Il n'est pas possible d'éviter ces procédures, ou de les détourner,

5 même si quelqu'un en avait l'intention, la velléité.

6 Q. Fort bien. Nous allons bientôt passer à autre chose. Je vais

7 essayer de parler aussitôt de Dubrava, mais auparavant, j'aimerais revenir

8 au premier classeur. Plus exactement à l'intercalaire 2.4. Il y a des

9 informations ou plutôt un rapport concernant le transfert forcé d'Albanais,

10 leur persécution pour des raisons raciales et la confiscation de leurs

11 documents d'identité.

12 Mon Colonel, dites-moi : comment ce rapport a-t-il été rédigé ? Il

13 porte le titre suivant : "Transfert forcé d'Albanais, persécution de ceux-

14 ci pour des raisons raciales," et cetera.

15 R. Je vous l'ai déjà expliqué. Ces documents ont été classés à

16 partir d'une seule et même méthode, celle du ministère de l'Intérieur de la

17 République de Serbie. Il y a un chapitre qui est indiqué par "ch" ou "dj."

18 Q. Oui, c'est "dj," c'est la lettre "dj/III."

19 R. "Transfert forcé d'Albanais, persécution de ces Albanais pour des

20 raisons raciales et confiscation de leurs documents d'identité." Le SUP de

21 Pec s'est vu confié cette mission.

22 Q. D'accord. C'est le ministère qui vous a demandé de fournir toutes

23 ces informations ?

24 R. Oui.

25 Q. Vous avez transmis les informations que vous aviez ?

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1 R. Oui, nous nous sommes acquittés de cette tâche. Nous avons compilé des

2 informations et écrit ce rapport.

3 Q. Je vais vous demander de donner lecture de ce que dit votre rapport,

4 parce que je vois que vous l'avez signé, ce rapport.

5 R. Exact.

6 Q. [aucune interprétation]

7 R. Le titre est "Rapport relatif aux transferts forcés d'Albanais, à leur

8 persécution pour des raisons raciales, et confiscation de leurs documents,

9 de leurs pièces d'identité." Cela, c'est le titre.

10 Mais les informations fournies ne sont pas correctes. Ce qui suit, c'est ce

11 qui a été établi. Des membres de la Mission de vérification --

12 Q. D'accord. Je ne sais pas si cela a été traduit ou pas, ce document.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous n'avons pas de traduction en

14 tout cas.

15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien. Souhaitez-vous que le colonel donne

16 lecture du document qui ne fait que deux pages ?

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non, pas dans son intégralité.

18 Indiquez-lui les passages pertinents, les passages dont vous estimez qu'ils

19 sont importants.

20 M. MILOSEVIC : [interprétation]

21 Q. Mon Colonel, vous nous avez déjà expliqué que l'on vous avait demandé

22 de fournir toutes les informations dont vous disposiez au sujet de

23 l'expulsion des Albanais, de la confiscation de leurs biens, de leurs

24 cartes d'identité, et cetera.

25 R. Oui.

Page 39104

1 Q. La conclusion de votre secrétariat, des hommes qui se trouvaient sur le

2 terrain, c'est que ces données ne sont pas exactes. Voilà là ce qui est

3 important ?

4 R. Oui. Ensuite, nous expliquons dans ce rapport ce que nous savions

5 effectivement de la situation. Voilà.

6 Q. Il est dit au paragraphe 3, à partir du bas de la page : "Ceci a mené

7 au rassemblement des Albanais au centre de Pec le 27 mars 1999, vers 10

8 heures, lorsqu'un certain nombre d'individus ont appelé la population à

9 quitter la zone de Pec. Au point de rassemblement, ils ont amené leurs

10 véhicules, autocars, camions, tracteurs et véhicules de fret. Il s'est

11 formé une foule importante, et la circulation a été paralysée. Après la fin

12 de ce rassemblement, les Albanais sont partis dans différentes directions,

13 aussi bien à pied que dans différents véhicules en prenant la direction de

14 Pec, Kula, le Monténégro, ou Pec-Decani-Djakovica, dans la direction de

15 l'Albanie, et Pec-Pristina pour ceux qui partaient vers la Macédoine."

16 R. Là, où je me trouvais, les tracteurs et les autocars n'avaient pas le

17 droit de circuler. Ce type de véhicules n'avait pas le droit de circuler.

18 Dans la zone où je me trouvais, il n'y avait pas de véhicule de ce type. On

19 n'a pas assisté à ce genre de chose. Il est possible que cela se soit

20 produit dans d'autres quartiers de la ville.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous avez donné

22 lecture d'un passage, et nous, nous avons compris dans la traduction qu'un

23 certain nombre de personnes, d'individus, ont appelé la population à

24 quitter Pec. Je voudrais me tourner vers M. Paponjak en lui demandant : qui

25 étaient ces personnes qui incitaient les autres à quitter Pec ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela, je ne sais pas. Je ne sais pas parler

2 albanais, et je ne sais pas quelles sont les personnes. M. LE JUGE ROBINSON

3 : [interprétation] Mais quelle était leur appartenance ethnique ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] J'imagine qu'ils étaient Albanais parce que

5 l'albanais était la seule langue parlée là-bas.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Donc, c'était des Albanais ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Les Serbes parlaient Serbes. Le Serbes c'était

8 la langue officielle. On peut dire, de manière générale, qu'il y avait un

9 certain nombre de Serbes qui connaissaient l'albanais, mais que le plus

10 souvent on parlait serbe parce que c'était le langue officiel, et certains

11 d'entre nous ne parlaient pas albanais; moi-même je ne connais que dix mot

12 d'albanais.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais ce rapport c'est vous qui

14 l'avez rédigé sur la base de ce que vous avez vu ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Ce que j'ai vu je vous l'ai dit. J'ai

16 effectivement signé ce rapport, mais c'est un rapport qui a été établi par

17 l'équipe compétente qui a préparé tous ces documents. Je vais vous

18 expliquer comment cela s'organisait.

19 Cette équipe est constituée de chef de service, un chef de service

20 c'est une sorte de directeur, de manager. Il y a des services, il y a le

21 service de la police de la circulation, de la police en uniforme, de la

22 police judiciaire. J'en oublie peut-être, il y aussi un service qui est

23 chargé de l'informatique ou de l'information de l'analyse d'informatique.

24 Le chef du secrétariat se contente de signer les rapports produits par cet

25 équipe si bien que je n'ai pas écrit ce rapport en personne, ce sont mes

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1 subordonnés qui s'en sont chargé, les chefs de service qui sont des

2 professionnels spécialistes dans certains domaines particuliers, mais il

3 faut bien que quelqu'un signe au bout du compte.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais si j'ai bien compris, c'est ces

5 chefs de service, ceux qui ont préparé ce rapport à partir de quelles

6 informations en sont-ils parvenu aux conclusions que nous voyons ici ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Un chef de service dans ces conditions

8 s'appuierait sur des entretiens avec différentes personnes, des civiles,

9 des policiers. Ils se sont inspirés également de sources concrètes sur le

10 terrain, enfin, ils ont fait appel à toutes les sources auxquelles la

11 police a recours pour obtenir des informations, ce sont des sources qui

12 sont très variées. On utilise également des mémos officiels, des rapports

13 officiels, et tout ceci est ensuite comparé avec d'autres sources.

14 M. MILOSEVIC : [interprétation]

15 Q. Mon Colonel, est-ce que cela signifie qu'au sein du secrétariat de

16 l'Intérieur, quand on en est venu le moment de préparer ce rapport, on a

17 fait intervenir toutes sortes de personnes venant de diverses sections qui

18 se trouvent au sein du secrétariat ?

19 R. Oui, on a fait appel aux meilleurs professionnels disponibles.

20 Q. C'est-à-dire, de personnes qui étaient à Pec au moment des faits ?

21 R. Oui, les personnes qui viennent de Pec, et qui travaillent au SUP de

22 Pec.

23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Paponjak, est-ce qu'il faut en

24 conclure que les documents, les éléments qui sont à la base de ce document,

25 les informations brutes, est-ce que ce sont des informations qui se

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1 trouvent à Pec ? Par exemple, ces personnes, ce sont des gens qui étaient

2 sur le terrain à l'époque ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Ces données brutes, et c'est un terme très

4 approprié que vous venez d'utiliser se trouvent donc au secrétariat. Nous

5 n'avons face à nous qu'une synthèse de toutes ces informations.

6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je poursuivre, Monsieur Kwon ?

7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, mais permettez-moi de vous dire que

8 les données brutes de ce type, les éléments bruts sont beaucoup plus

9 intéressantes et importants que ce que vous nous avez présenté. Je parle

10 des données relatives à 1998 parce que ce sont des éléments qui sont en

11 rapport direct avec les accusations qui sont portées contre vous, dans

12 l'acte d'accusation.

13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Selon moi, ce sont ici aussi les documents que

14 nous avons ici, sont aussi des documents qui viennent du terrain des

15 documents concrets parce que ce sont des documents qui émanent

16 d'institutions officielles qui préparent des rapports sur les événements

17 qui ont eu lieux, les événements concrets.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Monsieur

19 Milosevic.

20 M. MILOSEVIC : [interprétation]

21 Q. Page 2 du rapport, il est dit que : "Les Albanais sont partis dans

22 toutes les directions, dans les directions qu'ils souhaitaient que la

23 police n'a nullement restreint leur déplacement, que la police les a traité

24 de manière professionnelle et tout à fait correct."

25 R. Oui.

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1 Q. Ce qui a souhaité ce groupe chargé de préparer ce rapport, il l'a

2 consigné et vous le confirmez ?

3 R. Oui.

4 Q. Le paragraphe suivant est très court, il ne compte que deux lignes. Il

5 est dit, je cite que : "On a vu très fréquemment des albanais quitter des

6 zones rurales où la police n'était plus allée depuis longtemps." Je répète

7 : "On a remarqué de manière très caractéristique, les albanais quittaient

8 des zones rurales que la police -- où la police n'était pas allé depuis

9 très longtemps."

10 Puisque la police ne contrôlait un territoire que de 10 à 15 %?

11 R. Oui. Cette zone était pratiquement cerclée des zones contrôlées par

12 l'UCK, des localités importantes contrôlées par l'UCK qui étaient sous

13 l'emprise de l'UCK.

14 Q. Dans ces conditions, comment pouvez-vous expliquer que les albanais

15 quittaient des villages où la police n'avait plus mis des pieds depuis très

16 longtemps, où on n'avait plus vu de policiers depuis très longtemps ?

17 Pourquoi ces gens-là, ont-ils décidé de partir en Macédoine ?

18 R. Cela pourrait vous sembler illogique, mais, pour nous qui étions sur

19 place, c'était tout à fait logique. On se sentait beaucoup plus en sécurité

20 quand ils étaient là plutôt que lorsqu'ils sont partis parce que, s'ils

21 partaient, cela voulait dire que nous restions seuls, et que nous étions

22 une cible très facile à atteindre, puisque si une bombe tombait, nous

23 serions les seuls à être touchés si bien qu'en fait, nous souhaitions

24 qu'ils restent.

25 Q. Vous dites dans ce mémo que les policiers les traitaient de manière

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1 professionnelle et ne les empêchaient pas de se déplacer.

2 R. Oui. On ne pouvait pas les empêcher de partir, mais, en fait, on ne

3 voulait pas vraiment qu'ils s'en aillent parce que, s'ils s'en allaient, le

4 territoire serait non seulement ethniquement pur, mais aussi

5 professionnellement pur, c'est-à-dire qu'il n'y resterait plus que des

6 soldats et des policiers, qui feraient une cible des plus aisés, mais on ne

7 pouvait pas les empêcher de partir parce qu'on n'en avait pas le droit.

8 Cela aurait signifié que nous leur aurions fait courir un grand danger si

9 nous les avions empêché de partir.

10 Q. Ensuite, il est dit dans ce rapport que : "Là où les Albanais étaient

11 regroupés, la police a pris des mesures de sécurité afin d'empêcher des

12 crimes venant d'individus ou de groupes criminels Banjica, Prekale, et

13 cetera. A Djurakovac, Istok, Glodjane, et cetera, dans la municipalité de

14 Pec."

15 R. Oui, nous avons fait tout ce que nous pouvions pour les aider, nous

16 leur avons donné à manger, à boire. A Banjica et Djurakovac, je l'ai vu de

17 mes yeux, mais je ne suis pas allé à Glodjane.

18 Q. Il est dit dans le paragraphe 6, à partir du haut, que : "Les albanais

19 catholiques n'ont pas quitté la zone. Ils sont restés à Glodanje, dans la

20 municipalité de Pec, dans la municipalité d'Istok, à Djurakovac, à Kos,

21 Drenje, à Zlokucane, Renovac, Leskovac, Budisavci et Stup, dans la

22 municipalité de Klina. Les prêtres ont pris contact avec la police et ont

23 demandé à ce que la police intervienne, ou qu'elle vienne de manière un

24 plus fréquente dans les zones peuplées par les catholiques afin d'empêcher

25 l'arrivée des terroristes dans les villages.

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1 R. Les Albanais catholiques, qui constituaient la majorité de la

2 population, dans ces zones -- dans ces villages, ne soutenait pas ce que

3 l'on appelait l'armée de libération du Kosovo, dans les années qui ont

4 précédé. Il y avait très peu de catholiques albanais qui ont rejoint les

5 rangs de l'UCK. Dans la période précédente, par exemple en 1998, ils ont

6 subis des agressions, des pressions, pour ces raisons-là. Nous avons des

7 documents qui peuvent le prouver. Nous avons des déclarations, des rapports

8 qui peuvent le prouver. Cela concerne, non seulement les Albanais

9 catholiques, mais également les Albanais musulmans, si bien que les

10 personnes, qui ont décidé de rester dans ces villages, ont demandé à la

11 police de les protéger des terroristes parce que, puisqu'on était en état

12 de guerre, ils ne pouvaient s'attendre logiquement à des agressions encore

13 plus grave. La police leur a fourni ce type de protection, ainsi d'ailleurs

14 que l'armée, lorsque l'armée est arrivée un peu plus tard. J'ai parlé avec

15 des gens qui venaient de Cacak et ils m'ont expliqué que les Albanais

16 catholiques les avaient accueillis, de manière très cordiale, parce qu'ils

17 les considéraient comme des alliés. On trouve beaucoup de gens de ce type

18 en ex-Yougoslavie.

19 Q. Fort bien. En paragraphe numéro 4, à partir du bas, il est dit : "Dans

20 le cadre de ces activités, le police a traité tous les citoyens de manière

21 égale. La police n'a pas été à l'origine du départ des Albanais et elle ne

22 s'est livrée à aucun mauvais traitement à leur encontre. Elle n'a pas

23 procédé à la fouille de maisons ou d'appartements ou d'autres installations

24 pour forcer les Albanais à quitter leurs logements. Il est vrai que, dans

25 les périodes précédentes, dans le cadre de la lutte contre les

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1 criminalités, la police a agi conformément à la loi et a, effectivement, à

2 ce moment-là, procédé à des perquisitions dans des maisons, dans des

3 locaux, appartenant à des criminels, quelque soit leur appartenance

4 ethnique, afin de trouver des criminels et des éléments se rapportant à ces

5 crimes; cependant, la police ne s'est pas livrée à ce type d'activité

6 pendant au moins 30 jours précédant le départ des Albanais de la région, ce

7 qui permet de dire que ce n'est pas en raison des activités de la police

8 qu'ils sont partis."

9 R. Oui.

10 Q. Parce qu'il est dit ici, que pendant au moins 30 jours --

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ici, vous mélangez les choses. Vous

12 faites à la fois un commentaire et une question. Ce n'est pas acceptable.

13 Quelle est la question que vous souhaitez poser ?

14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien.

15 Q. Mon Colonel, est-ce que la police souhaitait que les Albanais quittent

16 cette région ? Oui ou non.

17 R. Non. De plus, les jours qui sont donnés ici, c'est 30 jours. Or, en

18 réalité, cela faisait peut-être deux ou trois mois que, nous, nous n'étions

19 même pas approché de leurs logements. Je vais vous expliquer pourquoi.

20 Après l'arrivée de la Mission de vérification, on nous a forcé à prévenir à

21 l'avance. La Mission de vérification, de toute action ou de toute opération

22 que nous nous apprêtions à mener, nous l'avons fait, effectivement, par le

23 truchement de nos interprètes. Nous avons été frappés par le fait qu'il

24 nous arrivait d'aller en opération, de nous rendre dans des maisons où nous

25 savions qu'il était très probable que nous trouvions l'auteur d'un crime,

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1 ou une arme. Finalement, nous nous rendions sur place et nous ne trouvions

2 absolument rien.

3 Nous nous sommes bien vite rendu compte, que d'une manière ou d'une

4 autre, les informations dont nous disposions avaient été communiqués aux

5 auteurs des crimes, qu'il y avait eu des fuites et que les auteurs de ces

6 actions avaient pu prendre la fuite. Si bien que nous faisions fou blanc

7 dans ces cas-là, puisqu'il était manifeste que les criminels concernés

8 avaient été prévenus. Je ne suis nullement en train d'avancer que les

9 vérificateurs les avaient prévenus, avaient prévenu ceux qui étaient ciblés

10 par nos opérations, mais il y avait beaucoup de monde qui était impliqué

11 dans tout cela et, notamment, les interprètes, qui, pour la plupart,

12 étaient albanais, si bien que nous avons jeté l'éponge et décidé de ne plus

13 mener ce type d'action. Nous n'intervenions que lorsque nous recevions des

14 informations sur un événement qui venait de se produire.

15 De plus, nous n'avions aucune raison de souhaiter leur départ. La police,

16 aussi bien que l'armée, voulait qu'ils restent parce que c'était dans notre

17 intérêt qu'ils restent. Il y a des éléments fondamentaux --

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le moment est venu de faire une

19 pause qui va durer 20 minutes.

20 --- L'audience est suspendue à 12 heures 18.

21 --- L'audience est reprise à 12 heures 44.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous pouvez

23 poursuivre.

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur Robinson.

25 Q. Terminons-en de l'intercalaire 2.4 que nous étions en train d'examiner.

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1 A la fin de ce rapport, il est dit, et cela a rapport avec ce que vous nous

2 disiez il y a un instant. Je cite le dernier paragraphe, avant-dernière

3 page : "Il est tout à fait certain que les citoyens serbes, pour la

4 plupart, ainsi que la police, ne voulaient pas que les Albanais quittent le

5 territoire, et qu'avec leur départ, on a vu beaucoup d'entreprises fermer

6 leurs portes. La menace de bombardement se faisait plus grande. Le

7 ravitaillement était moins bien réalisé. Le MUP a été informé de ce fait,

8 et il a été déclaré que des mesures devaient être prises pour protéger les

9 biens et les personnes."

10 On dit qu'un ordre a été donné ici. Qu'est-ce que cela veut dire ?

11 Est-ce qu'un ordre a été reçu par le MUP et par le QG ?

12 R. Oui. On nous a envoyé des dépêches qui ont ensuite été distribuées.

13 Cela ensuite était communiqué à tous ceux qui intervenaient dans différents

14 services. Les services ont transmis ces ordres, qui étaient les ordres qui

15 ont été envoyés par le ministère aux différents chefs de service, aux

16 différents employés, et cetera, selon la procédure habituelle.

17 Q. Ici, on parle du départ massif des Albanais du Kosovo et Metohija. On

18 parle du début des bombardements et du moment auquel ils ont commencé à

19 partir. Est-ce que vous savez combien de Serbes sont partis de votre zone

20 de responsabilité pour se rendre dans les pays tiers, au Serbie, et au

21 Monténégro ?

22 R. Je n'ai pas d'information s'agissant des Albanais. Je sais qu'un grand

23 nombre de Serbes sont partis; les femmes, les enfants, les personnes âgées.

24 Les Serbes, les hommes en âge de porter les armes sont restés sur place au

25 Kosovo-Metohija pour protéger leurs biens et aussi pour empêcher, si cela

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1 s'avérait nécessaire, l'intervention des terroristes, des attaques contre

2 leurs maisons, et éventuellement, s'il y avait attaque de l'OTAN, attaque

3 terrestre, pour y répondre aussi.

4 Q. Merci. Vous nous dites que vous avez préparé des documents sur ce

5 point, comme sur des documents qui avaient trait aux Albanais. Vous dites

6 avoir préparé des rapports semblables s'agissant des crimes commis contre

7 les Serbes et les Monténégrins, à l'intercalaire 3.

8 R. Oui. Mais cela s'est fait plus tard. Parce que, dans un premier temps,

9 on n'a pas pris en compte les crimes commis contre les Serbes. Mais

10 ensuite, on nous a demandé de réunir ce type d'information, c'est-à-dire de

11 répertorier les crimes commis contre les Serbes, lorsque c'étaient les

12 Serbes qui étaient lésés. Nous avons entrepris de préparer des rapports de

13 ce type dans un deuxième temps.

14 Q. Bien. Pourriez-vous nous donner l'explication suivante : on vous a

15 demandé de préparer un rapport au sujet des crimes commis contre les

16 Albanais. Mais quand ? A quel moment vous a-t-on demandé de faire cela ?

17 R. Je ne peux pas vous dire quand exactement. Mais c'était dans la

18 première phase, quand on a traité des incidents entraînant des décès et des

19 crimes commis contre les Albanais et de tout cela. Une fois que nous avons

20 terminé cette partie de notre travail, on nous a dit de nous intéresser aux

21 crimes commis contre les Serbes. On le voit puisque cette partie du rapport

22 est intitulée B astérisque. On voit que c'est un chapitre qui a été ajouté

23 ultérieurement.

24 Q. Vous avez donné la priorité aux crimes commis contre les Albanais, et

25 quand vous en avez terminé de ce travail, vous vous êtes intéressés aux

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1 crimes commis contre les Serbes.

2 R. C'est exact.

3 Q. Examinons l'intercalaire 3. Je ne vais pas m'attarder trop longtemps,

4 mais cela nous donne une idée des crimes commis contre les Serbes, les

5 plaintes déposées. Le total, c'est 403 dont 26 cas, on connaissait les

6 auteurs des crimes commis, et dans 377 cas, on n'est pas parvenu à

7 découvrir leur identité. Cela nous donne un rapport qui est moins favorable

8 entre ces deux chiffres que ce n'était le cas pour les crimes commis contre

9 les Albanais.

10 R. Oui, c'est exact, parce que nous ne pouvions pas mettre la main sur les

11 auteurs de ces crimes et nous n'avons pas été en mesure, dans la plupart

12 des cas, d'élucider ces affaires. On voit bien la nature des crimes commis.

13 320 crimes relevant de l'Article 125 du code pénal de la République

14 fédérale de Yougoslavie. Il s'agit de terrorisme. Or, c'étaient des crimes

15 que nous avions beaucoup de mal à élucider puisque les coupables étaient

16 très bien organisés en unités au Kosovo-Metohija, et nous ne pouvions pas

17 les arrêter.

18 Sur 403 crimes, il y avait 320 crimes à caractère terroriste et 83 pour les

19 autres types de crimes.

20 Q. Bien. Ceci, nous le trouvons à l'intercalaire 3. A l'intercalaire

21 numéro 4, nous avons une liste des crimes commis contre les Rom. Est-ce que

22 ce rapport a été préparé en utilisant la même méthodologie que

23 précédemment ?

24 R. Oui, mais cela, c'est venu encore plus tard, puisque ce rapport n'a été

25 préparé que beaucoup plus tard.

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1 Q. Ici aussi, nous avons une ratio très peu favorable entre les auteurs

2 connus et les auteurs inconnus. C'est-à-dire que dans un très grand nombre

3 de cas, on ne connaît pas les auteurs de ces crimes. 55 contre quatre,

4 n'est-ce pas ? Dans 48 cas, il s'agissait d'actes terroristes ?

5 R. Oui. Les Rom ne venaient même pas signaler les crimes qui étaient

6 commis contre eux, mais nous avons fini par être mis au courant. Ce sont

7 des informations qui nous ont été communiquées après les faits, au bout

8 d'un certain temps, parfois plusieurs mois, parfois même plusieurs années.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur le Témoin, ces statistiques,

10 concernent-elles tous les crimes commis dans la région, que ce soit contre

11 les Serbes, pour ce qui est de l'intercalaire numéro 2, ou contre les Rom -

12 - ou plutôt, les Serbes à l'intercalaire 3, et les Rom, à l'intercalaire

13 4 ? Est-ce que cela reprend tous les crimes commis ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tous les crimes sont pris en compte, tous

15 les crimes au sujet desquels nous avons obtenu des informations, soit parce

16 que la personne lésée a signalé la chose, ou que nous avons été prévenus de

17 manière anonyme, ou que par l'intermédiaire de nos agents, nous avons été

18 mis au courant.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc, on ne se limite pas ici des

20 crimes qui auraient été commis par des Albanais.

21 LE TÉMOIN: [interprétation] Non.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous allons trouver ici des exemples

23 de cas où des Serbes ont été identifiés comme étant les auteurs de crimes

24 soit contre des Serbes, soit contre des Rom ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout a fait.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

2 LE TÉMOIN : [interprétation] On a même des exemples de ce type ici sur la

3 liste. Il y a même des cas de viols qui ont été perpétrés par des

4 policiers, cela figure dans le tableau.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic

6 M. MILOSEVIC : [interprétation]

7 Q. S'agissant des crimes contre les Serbes et les Monténégrins, nous avez-

8 vous fourni -- parce que je ne trouve pas le document -- attendez, je

9 cherche.

10 A l'intercalaire 3 au rapport qui figure ici, qui a trait aux actes

11 criminels commis contre les Serbes et les Monténégrins, est-ce que

12 l'appartenance ethnique des auteurs des crimes en question est indiquée ?

13 R. Oui, vous le trouverez à la page 2 du rapport.

14 Q. Pouvez-vous nous donner le passage concerné et donner lecture de

15 certains exemples.

16 R. Au début de la première page, il est dit qu'on a découvert les auteurs

17 de 476 crimes. A Pec 75, à Istok 60, et à Klina 340. C'est là où se

18 trouvent les membres de l'UCK qu'on a trouvé le plus grand nombre d'auteurs

19 de crimes, 442, qui avaient commis des crimes sanctionnés par l'Article 125

20 du code pénal de la République fédérale de Yougoslavie. Le chiffre de 442 a

21 trait aux auteurs des crimes et non pas au nombre de crimes commis. Les

22 autres auteurs d'actes répréhensibles étaient des civils, 32, dont un

23 membre de la police d'active ou de la police de réserve. On voit ici la

24 répartition ethnique des personnes concernées : 454 Albanais, et d'autres

25 Serbes et Monténégrins.

Page 39118

1 M. NICE : [interprétation] Je n'arrive pas à suivre.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il s'agit de l'intercalaire 3.

3 M. NICE : [interprétation] Merci.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans la période du 20 juin 1999 au 1er juin

5 2001, on n'a enregistré que 99 actes criminels, et ce n'est pas le chiffre

6 définitif, parce que nous n'avons pas connaissance bien entendu de tous les

7 crimes commis. Il suffit de faire une simple comparaison sans procéder à

8 une analyse très détaillée et qui permet cependant d'arriver à une

9 conclusion très intéressante quant aux risques courus par les membres des

10 différentes communautés ethniques, surtout les crimes commis dans le

11 ressort. Dans la région relevant du SUP de Pec, sur les 1 289 crimes commis

12 dans la zone du SUP de Pec, il y en avait 303 qui ont été commis contre les

13 Albanais. Cela se retrouve à l'intercalaire B. 403 ont été commis à

14 l'encontre de Serbes et de Monténégrins. Quant aux autres crimes, il s'agit

15 de crimes contre les biens publics, les biens privés, ou les biens sociaux.

16 S'agissant des autres habitants, on voit que la communauté albanaise

17 représente 85 % des cas, avec 23 % seulement de crimes commis.

18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, cela suffira.

19 Mais inutile d'insister, Monsieur Robinson, sur le fait que je souhaite

20 demander le versement au dossier de ces documents, des documents qui ont

21 été préparés de manière très systématique. Chacun de ces documents comprend

22 une liste de tous les crimes commis, avec le nom des coupables. Il s'agit

23 de documents officiels qui ont été dûment signés, qui portent les cachets

24 qui s'imposent.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui. Malheureusement, la question n'a

Page 39119

1 pas trouvé de réponse qui avait trait à la composition ethnique de

2 l'ensemble des auteurs de ces crimes. Je ne crois pas que vous ayez répondu

3 à cette question. Comment se répartissaient-ils ?

4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pensais qu'on avait répondu à cette

5 question.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] On a découvert les auteurs de 476 crimes; ceci

7 figure en haut de la page, premier paragraphe. 75 à Pec, 60 à Istok, et à

8 Klina, 341. Ce sont les membres de l'UCK qui étaient les plus nombreux

9 parmi ces auteurs de crimes. Ils étaient 424. Ils avaient commis des crimes

10 sanctionnés par l'Article 125 du code pénal de la Yougoslavie. Les autres

11 étaient des civils, 32 civils, ainsi qu'un membre de la police de réserve

12 ou de la police active. S'agissant de la répartition ethnique, elle se

13 présentait de la manière suivante :

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] 454 étaient albanais, 22 serbes et

16 monténégrins.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

18 M. MILOSEVIC : [interprétation]

19 Q. Merci mon Colonel. Avez-vous des renseignements analogues pour ce qui

20 est des délits commis à l'encontre des Rom ?

21 R. Oui.

22 Q. Qui en ont été les auteurs, si l'on se penche sur la structure

23 ethnique ?

24 R. Il y a là encore moins de Serbes et de Monténégrins parmi les auteurs,

25 et il s'agit essentiellement d'Albanais cette fois-ci.

Page 39120

1 Q. Pour finir, suivant cette même méthodologie, vous avez procédé à la

2 rédaction de ce document qui figure à l'intercalaire 5, liste des actes

3 terroristes au détriment de la police. Il y a là la liste de toutes les

4 attaques dont la police a été victime.

5 R. Je dois vous expliquer. Cela ne s'est pas fait suite à une demande du

6 MUP. Cela s'est fait suite à une demande de ma part à moi, parce que

7 j'étais désireux de rassembler à un endroit les renseignements concernant

8 toutes les attaques dont a fait l'objet la police. Il se peut qu'une telle

9 information n'existe pas au niveau des autres secrétariats. Alors, si cela

10 n'a pas intéressé les chefs du SUP, cela n'existera pas.

11 Q. Bien. Mais pour ce qui est des autres intercalaires, les informations

12 doivent forcément exister dans les autres MUP ?

13 R. Oui, dans les autres MUP. Au ministère de l'Intérieur, d'une manière

14 générale, il y a une liste par chapitre et par dossier. Le dossier Kosovo

15 et Metohija existe au ministère de l'Intérieur de façon générale. Il s'agit

16 là de la somme de tous les dossiers des secrétariats de l'Intérieur

17 individuels du Kosovo et Metohija. Dans chaque secrétariat, il y a les

18 dossiers distincts, les dossiers à part pour la région concernée.

19 Q. Je vous remercie mon Colonel. S'agissant de l'intercalaire 6, vous nous

20 avez fourni un document qui se rapporte aux personnes disparues et enlevées

21 à compter du 1er janvier 1998.

22 R. Oui.

23 Q. Puis, vous avez plusieurs points, à savoir une énumération assez

24 détaillée, au 6.1, 2, 3, 4, 5. Alors, j'aimerais que très brièvement vous

25 nous donniez quelques informations au sujet des documents qui se rapportent

Page 39121

1 aux personnes disparues et aux personnes enlevées.

2 R. S'agissant de ce volet-là de notre travail, je crois bien qu'il fera

3 encore longtemps l'objet d'activité inachevée et ne saurait être conclue de

4 sitôt. La liste des Serbes et Albanais disparus est longue, et on ignore

5 complètement leur sort. Au ministère de l'Intérieur, à savoir au niveau de

6 la communauté fédérale, je me débrouille mal avec les appellations des

7 Etats puisque cela change tout le temps. Mais dans cette communauté serbo-

8 monténégrine, il y a une commission pour ces personnes disparues et il en

9 existe une au Kosovo-Metohija. Il faudrait que ces deux commissions se

10 mettent à travailler ensemble, et pendant tous ces événements de 1998,

11 1999, il a disparu bon nombre de personnes, de tous les groupes ethniques,

12 Serbes, Monténégrins, Albanais, Rom, et cetera.

13 La plupart des enlèvements, si ce n'est pas la totalité des

14 enlèvements, constituent une forme des activités terroristes de ces

15 extrémistes albanais qui avaient pour objectif d'engendrer la peur et

16 l'insécurité parmi les citoyens, dans la création d'un sentiment d'absence

17 de perspective, en limitant la liberté de déplacements, en faisant chuter

18 le moral de la population et de la police. L'objectif était de faire que la

19 population rejoigne les rangs de l'UCK et consacre des moyens financiers

20 adéquats.

21 M. NICE : [interprétation] Le témoin fournit maintenant des

22 conclusions de nature des plus générales. Nous avons déjà établi qu'il

23 s'agit là de rapports découlant du travail d'autres personnes et non pas de

24 lui-même. Plutôt que de revenir à ces points-là, à l'occasion du contre-

25 interrogatoire, peut-être serait-il préférable de lui demander s'il parle

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1 de ses connaissances personnelles ou s'il se réfère à ce que d'autres lui

2 ont dit parce qu'on ne le voit pas dans ces rapports.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, bien entendu, vous

4 pouvez soulever la question à l'occasion du contre-interrogatoire, mais je

5 me propose de poser la question moi-même au témoin. S'agissant de ce que

6 vous venez de dire, c'est quelque chose que vous nous avez avancé partant

7 des connaissances qui sont les vôtres, ou est-ce que ce sont des

8 informations de deuxième main ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Une partie relève de ce que j'ai appris moi-

10 même, des informations qui sont les miennes, et il s'agit, en partie,

11 d'analyses faites à partir de documents. L'analyse relative aux personnes

12 disparues découle de la documentation concrète qui existe. En partie, il y

13 a mes informations à moi, qui ont été intégrées là, à l'occasion du

14 fonctionnement de ce groupe de travail, parce que j'ai dirigé les activités

15 de ce groupe de travail. Il est certain que certaines de mes opinions ont

16 été intégrées et il s'agit là de mon expérience à moi, et il y a aussi les

17 opinions et les informations des autres personnes avec la documentation

18 appropriée, à savoir, les dossiers individuels. Ce ne sont pas mes

19 positions personnelles, ce ne sont pas les positions personnelles de qui

20 que ce soit d'autre, mais c'est là le fruit du travail d'une équipe. Il

21 s'agit de l'expérience des différentes personnes qui a été collectée ou

22 assemblée ici, et ils se sont fondés sur des cas particuliers, sur lesquels

23 ils ont travaillé.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous nous avez dit, Monsieur

25 Paponjak, que l'objectif des extrémistes de l'UCK consistait à générer la

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1 peur et l'insécurité. Toutefois, il me semble que, pour autant que j'ai pu

2 le comprendre, l'objectif final était l'indépendance.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, cela c'est l'objectif final. Mais

4 s'agissant de la finalité ou de l'objectif des enlèvements, parce que nous

5 étions en train de parler d'enlèvements, ils ont œuvré dans plusieurs sens,

6 dans plusieurs actes. Mais je vous dis pourquoi ils enlevaient les

7 personnes.

8 Parce que si, sur un territoire, il y a disparition d'Albanais et de

9 Serbes à la fois, puis de Rom, et si l'on ne sait pas ce qu'il est advenu

10 de tous ces gens-là, il y a un sentiment d'insécurité qui est créé. Les

11 gens n'osent plus sortir de chez eux à des heures, par exemple, lorsqu'ils

12 font savoir qu'après 17 heures, les enfants qui rentreraient de l'école

13 seront enlevés. Alors les gens s'enferment chez eux, l'objectif était celui

14 de créer ce sentiment d'insécurité.

15 Bon nombre de Serbes ont quitté le Kosovo-Metohija en 1998. Mais cela

16 a déjà été fait par bon nombre d'Albanais aussi bien, pour les mêmes

17 raisons. Je sais que mes policiers avaient demandé de leur faciliter le

18 départ de leurs familles vers des endroits, des contrées plus sûres. Ce

19 sont là des faits. Je ne sais pas ce que je pourrais vous dire d'autre à ce

20 sujet.

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Au tout début, nous avons constaté que le

24 témoin est venu témoigné partant de ses propres informations, des

25 connaissances qu'il avait, des éléments et des documents qu'il s'est

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1 procuré en exerçant ses fonctions au poste qu'il a occupé. Par conséquent,

2 si nous avons un chef de secrétariat à l'Intérieur qui couvre plusieurs

3 municipalités, à savoir, notamment, Pec, son devoir est de disposer de

4 toutes les informations relatives à ce qui se passe sur son terrain. Il

5 n'est pas seul, bien sûr. Il se trouve à la tête de la police de cette

6 région. Il dirige les activités de la police. Il recueille toutes ces

7 informations. Il se trouve sur place. Il a des informations directes et

8 comme vous avez pu le voir, il a été présent à l'occasion de ces journées

9 où des masses de citoyens se rassemblaient au centre de Pec. Il était

10 présent également, les autres jours. Donc, il s'agit d'informations qu'il a

11 recueillies lui-même et d'informations recueillies par ses équipes dans

12 toutes les filières de fonctionnement de la police, filières existant au

13 sein de ce secrétariat à l'Intérieur et qui sont subordonnées à ses

14 fonctions. En sa qualité de chef de cette équipe et en tant que

15 participant, il vient témoigner du résultat de son travail.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Continuons, Monsieur Milosevic. Je

17 crois que M. Nice avait voulu déterminer comment ces éléments

18 d'informations ont été recueillis. Je crois que la réponse nous a été

19 apportée.

20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien.

21 M. MILOSEVIC : [interprétation]

22 Q. S'agissant des personnes enlevées et disparues, j'espère que nous

23 avons suffisamment tiré cela au clair. A l'intercalaire 7, vous avez une

24 information concernant les conséquences des bombardements de l'OTAN sur le

25 territoire du SUP de Pec, ceci, notamment entre le 24 mars et le 10 juin

Page 39125

1 1999.

2 Je me réfère à l'intercalaire 7 où l'on énumère la totalité des

3 événements. Est-ce qu'on englobe la totalité des événements ?

4 R. C'est exact. Cette information a également été rédigée suivant la même

5 méthodologie. Il y a une information textuelle qui rassemble la totalité

6 des informations, il y a un tableau et il y a une liste des événements qui

7 sont survenus à l'occasion des bombardements de l'OTAN sur le territoire

8 couvert par notre secrétariat.

9 S'agissant maintenant du territoire couvert par le secrétariat à

10 l'Intérieur de Pec, l'alliance de l'OTAN a procédé à 97 attaques aériennes

11 au total; 47 sur Pec, 31 sur Klina et 19 sur Istok. Les attaques aériennes

12 ont été réalisées à des heures différentes pour attaquer par surprise; 74

13 le jour et 23 attaques la nuit. Toutes ces attaques aériennes, dans un sens

14 général du terme, ont généré des conséquences fatales, ou des conséquences

15 graves, ou blessures légères, mais aussi beaucoup de peur et beaucoup de

16 troubles parmi les citoyens, une inquiétude pour la vie de la famille, des

17 dégâts matériels énormes, un départ massif d'Albanais et un sentiment

18 d'absence de perspective pour ce qui est de continuer à vivre sur ce

19 territoire, avec limitation de la liberté de déplacements.

20 Pour ce qui est des objectifs des cibles, on peut dire que les cibles ont

21 été, 36 sur le plan militaire; 8, au niveau policier; et 69 au niveau

22 civil.

23 Q. Maintenant en partant des renseignements que vous venez de nous lire,

24 on voit que les cibles civiles étaient plus nombreuses que les cibles

25 militaires bombardées.

Page 39126

1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] D'où êtes-vous en train de lire,

2 Monsieur le Témoin ? Est-ce que c'est un document que nous avons ou un

3 autre document.

4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Intercalaire 7.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Intercalaire 7, intitulé : "Informations

6 relatives aux événements et conséquences des bombardements de l'OTAN sur le

7 territoire du secrétariat de Pec." En haut, vous voyez un J/III. On peut le

8 placer sur le rétroprojecteur.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, allez-y.

10 M. MILOSEVIC : [interprétation]

11 Q. Mon Colonel -- ou plutôt --

12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, je vous prie de ne pas

13 perdre de vue la demande que je formule de verser au dossier l'intercalaire

14 7 dans sa totalité, je n'ai pas le temps d'entrer dans tous les détails. Je

15 viens d'entendre le témoin constater le nombre d'attaques dont ils ont fait

16 l'objet et je lui ai demandé s'il y avait plus de cibles civiles que

17 militaires et on a pu constater que les cibles civiles ont été plus

18 nombreuses à être bombardées que les cibles militaires.

19 Je demande à ce que cet intercalaire-ci soit versé au dossier, tout comme

20 les intercalaires précédents parce que cela constitue des documents

21 officiels.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, je commence à

23 être préoccupé par la longueur de votre interrogatoire principal. Vous avez

24 prévu cinq heures pour ce témoin-ci. Or, nous avons dépassé largement ce

25 délai, nous en sommes à la fin de la deuxième journée de votre

Page 39127

1 interrogatoire. Vous allez, j'espère, terminer aujourd'hui votre

2 interrogatoire principal ?

3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, je suis préoccupé également par la durée

4 que cela nous prend, mais il y a beaucoup de documents malheureusement. Il

5 y a bon nombre de documents dont pourraient témoigner 20 ou 30 témoins. De

6 cette façon-ci justement, je pense être en train d'économiser notre temps,

7 notamment, lorsqu'il s'agit de documents officiels qui sont directement en

8 corrélation avec la connaissance qu'a ce témoin des faits.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Votre présentation des éléments à

10 décharge aurait été bien plus efficace si vous l'aviez fait ainsi, mais

11 quoi qu'il en soit, continuez.

12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien, Monsieur Robinson.

13 M. MILOSEVIC : [interprétation]

14 Q. Mon Colonel, à l'intercalaire 8, nous avons une information sur les

15 attaques aériennes de l'OTAN au centre pénitentiaire Dubrava à Istok. Il

16 s'agit d'une information relative aux attaques lancées le 19, 21, 24 mai

17 1999. On dit qu'il y a eu : "Des conséquences fatales avec gros dégâts

18 matériels" ? Intercalaire 8, Monsieur Robinson, je demande à ce que cela

19 soit versé au dossier, nous pouvons nous pencher brièvement sur sa teneur.

20 Je vous demanderais ce qui suit : Mon Colonel, dites-nous : où se

21 trouve cette unité pénitentiaire ?

22 R. Ce pénitencier Dubrava se trouve au village de Dubrava à l'est du

23 village d'Istok, à quelque deux ou trois kilomètres de là.

24 Q. Nous allons parcourir rapidement les éléments d'informations. Combien

25 de détenus y avait-il dans cette unité pénitentiaire ?

Page 39128

1 R. Mille quatre exactement.

2 Q. Quels types de détenus se trouvaient là-bas ?

3 R. C'étaient des personnes privées de leur liberté, en détention

4 provisoire, mises en accusation ou condamnées déjà pour les plus graves des

5 délits au pénal de l'époque, terrorisme, association aux fins d'exercer des

6 activités hostiles, possession illicite d'armes et de munitions, meurtres

7 et autres délits au pénal graves.

8 Q. Bien. Où étaient-ils installés ces détenus ?

9 R. Ils étaient installés dans des pavillons d'habitation à l'intérieur de

10 ce pénitencier. Le pénitencier, je précise, était entouré d'un mur.

11 Q. Bien, comme toute prison.

12 R. A l'intérieur il y avait des parties closes, clôturées et des parties

13 non clôturées, tous étaient dans ces parties clôturées.

14 Q. Bien. Ce pénitencier était-il sécurisé par des membres du MUP ?

15 R. Les membres du ministère de l'Intérieur n'étaient pas là pour assurer

16 la sécurité de ce pénitencier parce que la réalisation des peines

17 prononcées relève du ministère de la Justice. Mais le pénitencier était

18 placé sur surveillance assidue et vigilante du ministère de l'Intérieur

19 étant donné que se trouvaient privées de liberté à cet endroit là un très

20 grand nombre de personnes intéressantes à nos yeux pour ce qui est du point

21 de vue de la sécurité, mais ils étaient intéressants pour les terroristes

22 également et pour leurs dirigeants. Nous nous attendions à ce qu'ils

23 lancent une attaque dans ces circonstances aux fins de libérer les leurs.

24 Quand je dis que nous avons été vigilants, je précise que nous avons envoyé

25 des patrouilles fréquentes à cet endroit afin que celles-ci surveillent et

Page 39129

1 vérifient qu'il n'y ait pas de déplacements de terroristes en direction du

2 pénitencier aux fins de libérer quelqu'un. Mais nous n'y sommes pas entrés.

3 Q. Je comprends, mais ma question voulait dire que je demandais si c'était

4 vous qui assuriez la garde ou s'il y avait un service de garde qui relevait

5 du ministère de la Justice et pas du ministère de la Police ?

6 R. Exactement, cela n'avait rien à voir avec nous.

7 Q. Vous n'aviez pas accès à l'intérieur de la prison ?

8 R. Non.

9 Q. Aviez-vous des informations directes concernant ce qui s'est produit

10 dans la prison de Dubrava dans cette période allant du 19 au 24 mai. La

11 question est précise, avez-vous des informations directes, personnelles ?

12 R. Oui, j'ai des informations directes parce qu'à plusieurs reprises

13 durant ces jours-là je me trouvais sur les lieux, je me trouvais dans ce

14 pénitencier appelé Dubrava en date du 19 mai.

15 Q. Quand est-ce que l'OTAN a lancé sa première attaque sur ce

16 pénitencier ?

17 R. La première attaque a eu lieu le 19 mai.

18 Q. Vous venez de dire que vous étiez là-bas. Est-ce que vous êtes arrivé

19 juste après l'attaque, ou est-ce que vous vous y trouviez déjà ?

20 R. Je suis arrivé après l'attaque. Des que nous avons appris que cette

21 attaque avait eu lieu, nous sommes arrivés nous aussi là-bas. Je faisais

22 partie de l'équipe qui est allée là-bas. Il y avait un certain nombre

23 d'autres policiers avec moi, et nous sommes allés pour prendre des mesures

24 qui relevaient de notre devoir. C'est ce que nous avons fait.

25 Q. Cela est conforme à ce que vous nous avez dit tout à l'heure s'agissant

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1 de la façon dont procédait la police en cas d'attaques aériennes. Vous avez

2 dit que vous sortiez sur les lieux dès qu'il y avait une attaque, c'est ce

3 qui s'est produit j'imagine dans ce cas-ci ?

4 R. C'est exactement ce qui s'est produit dans ce cas-ci.

5 Q. Combien de personnes y a-t-il eu de tuées lors de cette première

6 attaque ?

7 R. Ce jour-là, nous avons déterminé la mort de trois condamnés que nous

8 avons identifiés; il s'agit de Tahiri Abdulah --

9 Q. Non, non, pas la peine de nous donner les noms. On ne va pas entrer

10 dans tous ces détails. Vous avez identifié trois morts cette fois-là, se

11 peut-il qu'il y en ait eu davantage de tués ce premier jour ?

12 R. C'est possible parce qu'il n'a pas été possible de tout déterminer le

13 premier jour.

14 Q. Combien de blessés y a-t-il eu à l'occasion de cette première attaque ?

15 R. Il y a eu cinq blessés dont deux gardiens et trois détenus.

16 Q. Les blessés ont-ils bénéficié d'une assistance médicale ?

17 R. Les blessés ont d'abord été transportés jusqu'à l'hôpital d'Istok et

18 ensuite, au centre hospitalier de Pec.

19 Q. Tout ceci se rapporte à la journée du 19.

20 R. Oui, le 19 entre 14 heures et 15 heures.

21 Q. A-t-on procédé à un constant sur les lieux ?

22 R. Un constat a été effectué ce jour même.

23 Q. Qui est-ce qui l'a fait et qui est-ce qui était présent ?

24 R. Etant donné que toutes les personnes compétentes ont immédiatement été

25 informées, ce n'est pas le Juge d'instruction de Pec qui s'est déplacé,

Page 39131

1 mais ce sont le président et le Juge d'instruction du tribunal

2 départemental de Pec qui se sont déplacés.

3 Q. Avez-vous filmé ?

4 R. Oui, nous avons filmé.

5 Q. Qui est-ce qui l'a fait ?

6 R. Nous avons filmé à l'appareil photo et à la caméra vidéo, cela a été

7 fait par la police scientifique du SUP de Pec.

8 Q. Je voudrais que nous voyions cet enregistrement de l'intercalaire 50

9 qui se rapporte à la date du 19 mai. J'espère que le Pr Rakic a mis tout au

10 point avec la cabine technique. J'espère que le témoin une fois qu'on aura

11 visionné pourra nous apporter des explications. Après ses commentaires,

12 nous verrons la partie qui a été tournée le 21 mai et, ensuite, la partie

13 qui a été tournée le 24 mai et ultérieurement.

14 M. NICE : [interprétation] A moins que l'accusé n'ait déjà fait

15 quelque chose au niveau de la longueur de ces vidéos, il me semble que les

16 enregistrements prennent deux heures.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce bien exact, Monsieur

18 Milosevic ? Est-ce que cela dure deux heures ?

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Cela dure, au total, 1 heure, 50 minutes,

20 Monsieur Robinson. Ce que je souhaitais, c'est de les faire passer en

21 version accélérée. On peut regarder en version accélérée. Il y a une

22 transcription de ce que l'on entend qui a été distribuée aux interprètes

23 dans leurs cabines, et nous pouvons ultérieurement apporter des

24 commentaires.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais à quoi se rapporte cet

Page 39132

1 enregistrement vidéo ?

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Cet enregistrement vidéo, comme vient de nous

3 l'expliquer le témoin, fait partie de la documentation officielle après

4 constat sur les lieux. Je vous prie de ne pas perdre de vue le fait que M.

5 Nice a cité à comparaître plusieurs témoins qui ont parlé de cet événement

6 de Dubrava d'une façon entièrement et tout à fait inexacte. Alors, cet

7 enregistrement vidéo remplace le témoignage de bon nombre de témoins qui

8 seraient susceptibles de nous en parler. J'espère que vous tiendrez compte

9 de ce fait. On se réfère ici à un article concret de l'acte d'accusation, à

10 savoir--

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne comprends pas. Je sais ce que

12 dit le paragraphe 66(k) de l'acte d'accusation, mais je ne vois pas

13 pourquoi je devrais souffrir le visionnement d'une vidéo qui dure plus

14 d'une heure.

15 Je vais consulter mes collègues.

16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Avant que de consulter vos collègues, je vous

17 demanderais de m'entendre. J'ai eu également ce problème de temps. Cette

18 vidéo, lorsqu'on la passe en accéléré, on peut la regarder, mais on

19 n'entend pas le son. On peut voir la totalité en une douzaine de minutes.

20 On peut voir les ruines, on peut voir les personnes ensevelies sous les

21 ruines. On voit des jambes ou des bras qui sortent de dessous les ruines.

22 On voit les effets des bombardements. On voit les personnes tuées. Tout

23 cela est visible. Etant donné que cet enregistrement est fourni comme

24 élément de preuve permet un visionnement intégral pour ceux qui

25 s'intéresseraient à l'intégralité. Donc, ce n'est pas un montage

Page 39133

1 d'extraits, mais c'est l'enregistrement entier, intégral, et sa valeur

2 constitue une documentation à ce sujet.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais que voulez-vous établir avec

4 cette vidéo qui n'aurait pas déjà été établi ?

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Cet enregistrement nous permet de déterminer,

6 outre le témoignage présenté par ce témoin, et j'espère par d'autres

7 témoins également, nous permettra de déterminer que ce qui figure au

8 paragraphe - et attendez que je le retrouve - au paragraphe (k) n'est pas

9 exact. Parce qu'ici, Monsieur Robinson, on dit bien que des centaines de

10 détenus ont été sortis pour être exécutés par les forces quelconques qui se

11 seraient trouvées là-bas. Partant de la documentation et des faits, il vous

12 sera donner de voir qu'il s'agit d'un très grand bombardement où il y a eu

13 des morts à l'occasion des bombardements, et ce qu'on dit dans l'acte

14 d'accusation se trouve à être tout à fait absurde.

15 Or, je vous demande de ne pas perdre de vue une chose. Tout à

16 l'heure, le témoin vient de nous dire qu'il y avait 1 000 détenus. Il y a

17 des preuves matérielles qui disent que 750 ont été évacués vers d'autres

18 prisons. Plusieurs dizaines ont été hospitalisés, pour ce qui est des

19 blessés. Il y en a eu une centaine de tués. Alors, pensez-vous, Monsieur

20 Robinson, que quelqu'un, s'il voulait exécuter 1 000 prisonniers,

21 emmènerait des blessés vers les hôpitaux et évacuerait 80 % vers d'autres

22 prisons ?

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie. Je vous ai

24 posé la question suivante - en fait, elle n'apparaît pas dans le compte

25 rendu d'audience. Je demandais ce que vous essayiez d'établir en nous

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1 montrant cette vidéo qui n'aurait pas déjà été établi. C'est suite à cette

2 question, que vous avez donné votre réponse.

3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourriez-vous nous aider

4 davantage. L'acte d'accusation dressé contre vous affirme qu'il y a eu des

5 meurtres le 22 et le 23. Or, cette vidéo, elle était filmée le 19. Que

6 peut-on établir avec cette vidéo, bien sûr, au regard des chefs

7 d'accusation retenus dans l'acte d'accusation ?

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] On peut déterminer que les allégations à

9 l'acte d'accusation sont fausses, sont inexactes. Parce que l'on peut

10 déterminer qu'il y a eu un bombardement le 19, et que dès le 19, il y a des

11 morts. Puis, vous avez un enregistrement vidéo qui se rapporte à la date du

12 21 mai, qui a été tourné le 21 mai, où l'on voit également les conséquences

13 de l'attaque. Puis, on a un enregistrement fait le 24 mai. On film chaque

14 fois juste après l'événement, après le bombardement. Mais les bombardements

15 sont allés du 19 jusqu'au 24 ou 25. Cela a duré pendant plusieurs journées

16 successives.

17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais ces enregistrements ne nous disent

18 pas s'il y a eu des assassinats les 22 et 23, n'est-ce pas ?

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais bien sûr que ceci parle des assassinats.

20 Vous voyez qu'ils sont la conséquence des bombardements de l'OTAN, alors

21 que dans l'acte d'accusation, on fait des affirmations tout à fait

22 absurdes.

23 [La Chambre de première instance se concerte]

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.

25 Passez-le, cet enregistrement, en version accélérée. Vous avez 12 minutes,

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1 de façon à terminer avant la fin de l'audience.

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien. Bien sûr, sous réserve de ne pas les

3 voir, ces 12 minutes, d'un seul coup. Nous allons voir le 19 mai tout

4 d'abord, puis le témoin pourra nous en parler, puisque ce jour-là, il a été

5 présent, aussitôt après l'attaque, et il est parti. Puis, nous verrons le

6 21 mai, et le troisième volet, c'est celui du 24 mai.

7 Ces images sont toujours filmées après les événements. Il y a une enquête,

8 et ces enregistrements font partie du dossier d'instruction.

9 [La Chambre de première instance se concerte]

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Fort bien.

11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. On commence la diffusion.

12 [Diffusion de cassette vidéo]

13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous voyez bien la date, c'est celle du 19 mai

14 1999, à 16 heures 03, le 19.

15 Vous voyez ici que les toits, les murs, ont été troués d'énormes orifices.

16 Il y a des débris partout. Toutes les fenêtres ont été brisées.

17 Il y a de la fumée qui se dégage du bâtiment, celui-ci et de celui d'en

18 face.

19 Tout ceci se passe le 19 mai.

20 Vous voyez ici les éclats de balles. Il y a des obus qui ont explosé

21 ici devant. C'est très clair.

22 Vous voyez ici, les barreaux des pavillons où se trouvaient des

23 détenus ont été touchés de plein fouet.

24 Vous voyez ici, les volées d'escaliers et des escaliers qui ont été

25 détruits.

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1 Ici, vous voyez les malheureux qui ont été touchés.

2 Dans l'acte d'accusation, celui qu'on voit ici, apparemment, il

3 aurait été exécuté par la police.

4 Il a la tête à moitié arrachée. Vous voyez un genou qui dépasse les

5 décombres, un bras, une main d'une de ces malheureuses victimes.

6 Vous voyez ici les dortoirs.

7 LE TÉMOIN : [interprétation] On perd beaucoup d'éléments importants

8 lorsqu'on a cette diffusion accélérée. On n'a pas la bande-son, et nous

9 parlions de la fuite des prisonniers qui fuyaient les locaux et la façon

10 dont ils prenaient la fuite.

11 M. MILOSEVIC : [interprétation]

12 Q. Vous voyez qu'ils ont essayé, pendant le bombardement, pris de panique,

13 de casser les portes pour sortir.

14 R. Oui, je connais cet enregistrement, et la bande-son explique comment

15 ils s'y sont pris pour essayer de sortir, et les membres de la police

16 scientifique vous le montrent. Ils se sont servis de barres de fer pour

17 essayer de sortir.

18 Q. Oui, vous voyez les barres de fer dont ils se sont servis comme levier

19 pour forcer les portes.

20 R. J'espère qu'au moins cette partie-là aurait été traduite.

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ici, on voit de nouveau des cadavres.

22 Regardez cette personne ici. Il a été décapité.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous ne gagnez rien à nous montrer

24 ce genre de chose, Monsieur Milosevic.

25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Voici un fragment de bombe. Vous voyez même le

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1 numéro de série.

2 M. NICE : [interprétation] Vous vous souviendrez sans doute que personne ne

3 conteste qu'il y ait eu, les 19 et 21 mai, des bombardements de l'OTAN. Je

4 peux d'ailleurs vous donner des renseignements sur le nombre de bombes qui

5 ont été larguées.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Evidemment, le nombre de tués est

8 différent.

9 M. NICE : [interprétation] Cela, c'est une question d'administration de la

10 preuve. Tout est administration de la preuve, mais les informations

11 relatives aux dates, au nombre de bombes, tout ceci vient de l'OTAN. Mais

12 il est possible d'obtenir des éléments plus clairs si vous le voulez.

13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, Messieurs, n'oubliez pas

14 qu'à l'annexe J, à la liste J, comme c'est dit au paragraphe (k), on a une

15 liste de ceux qui auraient été exécutés; il y en a 26. Nous avons établi

16 que les bombardements avaient tué plus de 90 personnes à Istok.

17 Maintenant, nous allons enchaîner.

18 M. MILOSEVIC : [interprétation]

19 Q. Colonel, pourriez-vous brièvement commenter ces images.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, plusieurs

21 choses. Tout d'abord, il y a une question de temps qui se pose, parce que

22 maintenant nous allons devoir suspendre l'audience. A la reprise de

23 l'audience, je voudrais que vous posiez des questions précises au témoin.

24 Ne lui demandez pas d'apporter un commentaire général, mais des questions

25 précises, disais-je, sur les sujets qui se posent dans ce procès.

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1 [La Chambre de première instance se concerte]

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Demain, une audience différente va

3 commencer à 9 heures; cependant, les parties doivent être prêtes --

4 L'ACCUSÉ : [interprétation] c'était hier.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] -- au cas où nous pourrions

6 reprendre l'audience de ce présent procès à 10 heures. Donc, il faut que

7 les parties soient présentes et prêtes à reprendre l'audience à 10 heures.

8 Rien n'est sûr, mais les parties devraient être prêtes à cette éventualité.

9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson. Monsieur Robinson.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.

11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que c'est sûr -- est-ce qu'on va

12 commencer avant 10 heures ? C'est certain ?

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non, ce n'est plutôt pas certain,

14 mais, de toute façon, vous ne devez pas être ici avant 10 heures.

15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, c'est tout ce que je voulais savoir. Je

16 vous remercie.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] L'audience est levée.

18 --- L'audience est levée à 13 heures 46, sine die.

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