Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mardi 31 mai 2005

2 [Audience publique]

3 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 08.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, veuillez poursuivre

7 votre contre-interrogatoire.

8 LE TÉMOIN: OBRAD STEVANOVIC [Reprise]

9 [Le témoin répond par l'interprète]

10 Contre-interrogatoire par M. Nice : [Suite]

11 Q. [interprétation] Monsieur Stevanovic, avant de reprendre l'ordre

12 chronologique des choses dans nos questions, j'aimerais balayer un sujet

13 particulier, le voici : dans une société comme celle où vous étiez

14 policier, il était courant d'avoir des assassinats, n'est-ce pas ?

15 R. Je m'excuse, mais je n'ai pas d'interprétation dans mes écouteurs. Oui,

16 maintenant ça y est.

17 Q. Dans une société comme celle où vous étiez policier, les assassinats

18 c'étaient monnaie courante, n'est-ce pas ?

19 R. Dans quel sens entendez-vous cela ?

20 Q. Dans ce sens-ci pour être précis : au fil des ans entre 1997 et l'an

21 2000 en particulier, l'assassinat de personnalités importantes, ce n'était

22 pas quelque chose qui était peu fréquent, n'est-ce pas ?

23 R. Bien sûr, qu'il y a eu des assassinats en Serbie, c'est exact, mais la

24 fréquence la plus grande des assassinats était celle de crimes commis par

25 les terroristes au Kosovo et Metohija.

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1 Q. Je vais m'intéresser au premier volet, celui qui concerne la Serbie. Il

2 y en a eu plusieurs, soit qu'on ne les a pas repérés, ou qu'on les a

3 attribués au MUP. Je vais en énumérer quelques uns. Il y avait votre chef

4 Badza qui a été assassiné en 1997. Je passe à 1999, il y eu l'assassinat du

5 fameux journaliste Slavko Curuvija qui a été abattu en compagnie de son

6 épouse. Puis, il y a eu Kelmendi et Agani, les avocats les plus libéraux,

7 les plus libres. En 2000, vous avez Pavle Bulatovic, un ancien ministre.

8 Puis, vous avez Arkan, et Stambolic et effectivement Djindjic. Ce ne sont

9 là que quelques uns des assassinats qui ont marqué, caractérisé votre

10 société, soit qu'ils n'ont pas été élucidés, soit dans trois cas qu'on les

11 a attribués à des membres du MUP. Etes-vous d'accord avec cette idée ?

12 R. S'agissant de tous les assassinats que vous venez de mentionner, je

13 dirais que je suis au courant de ceux-ci. Dès qu'il y a eu assassinat, il y

14 a eu des enquêtes de diligentées. A ce jour, je ne suis pas certain de

15 savoir si certains de ces assassinats ont été élucidés, mais je sais que la

16 police travaille sur tous ces dossiers, et certains sont actuellement en

17 train d'être jugés au Tribunal.

18 Q. Vous avez essayé de comparer votre police aux forces de police d'un

19 pays comme celui de la France. Seriez-vous à même de nous donner le nom

20 d'une seule société européenne ou occidentale où il y a aurait autant

21 d'assassinats de personnalités importantes qui n'auraient pas été élucidés,

22 je parle du type de ceux que je viens de vous énumérer ?

23 R. Ce que je sais, c'est qu'il y a des assassinats qui n'ont pas été

24 élucidés dans les pays occidentaux également. Ce qui importe de dire pour

25 la Serbie, c'est qu'elle a dû faire face à des problèmes très manifestes au

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1 niveau de la sécurité et à des risques, cela a influé sur un nombre accru

2 d'assassinats, entre autres ceux que vous avez cités. Mais la Serbie s'est

3 trouvée véritablement dans des circonstances très particulières. Elle n'a

4 pas généré ces circonstances. Cet environnement caractérisé par la guerre

5 aux alentours a influé sur le degré de sécurité en Serbie et la Serbie a dû

6 veiller à ce que ces opérations de combat ne soient pas transférées sur le

7 territoire de la Serbie --

8 Q. Je vous interromps. Votre réponse ne peut être que partielle, mais je

9 vous pose une question sans mettre de gants : est-ce qu'il y a un

10 quelconque de ces assassinats qui n'a pas été élucidé qui est en rapport

11 avec l'UCK ou est-ce que dans l'opinion publique et dans les débats

12 publics, on associe souvent ces cas non élucidés avec le MUP ?

13 R. Chaque attentat tant qu'il n'a pas été élucidé peut faire l'objet de

14 versions très variées. Les versions font partie du travail policier. Mais

15 la résultante des enquêtes judiciaires et policières vise à découvrir les

16 fautifs, et tant que l'enquête n'est pas terminée --

17 Q. Je vous coupe court. Est-ce qu'il y a un seul de cas d'assassinats

18 associé, dans l'opinion publique, avec l'UCK ?

19 R. Pour autant que je sache, dans l'opinion publique, ce n'est pas le cas.

20 Q. Je vous remercie. Nous allons reprendre l'ordre chronologique, et je

21 reviens à l'hypothèse selon laquelle effectivement, c'était un Etat

22 policier avec une montée en puissance de l'extrémisme au fil des ans. Si

23 j'aborde ce sujet, c'est pour cette raison-ci, je vous l'explique.

24 R. Je ne suis pas d'accord.

25 Q. Fort bien. Acceptez-vous, vu la connaissance générale que vous avez du

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1 monde et en particulier de l'Etat où vous avez fonctionné et opéré, là où

2 la police ou tout autre utilisateur agréé de la force publique agit avec un

3 punitif, il en découle deux

4 choses : la population vie dans la peur. Est-ce que c'est exact ? Est-ce

5 que c'était une des conséquences ?

6 R. En Serbie, la police n'est pas intervenue sans avoir à en assumer la

7 responsabilité. La peur a été générée essentiellement par le terrorisme.

8 L'objectif du terrorisme, c'est précisément la peur. Mais à un niveau

9 tactique, l'objectif était la violence et l'intimidation. La peur était

10 celle du terrorisme et celle de voir la guerre se transférer sur le

11 territoire de la Serbie --

12 Q. Votre réponse, je vous remercie.

13 R. -- la police a réagi à cette situation où il y a eu une peur

14 d'installée déjà en Serbie.

15 Q. Vous comprenez et vous allez de mieux en mieux comprendre lorsque je

16 vais vous montrer quelques séquences, ce qui m'intéresse ce n'est pas

17 uniquement la peur au Kosovo, ce qui m'intéresse, c'est la peur qu'il y

18 avait à Belgrade. Vous ne voulez pas laisser entendre que les Belgradois

19 vivaient dans la peur du terrorisme de l'UCK, n'est-ce pas ?

20 R. A Belgrade, également, les gens avaient peur de voir les opérations de

21 combat transportées vers la Serbie. Ils avaient peur de ce qui allait se

22 passer au Kosovo. Ils avaient peur que ce que faisaient les terroristes au

23 Kosovo ne vienne à être fait aussi à Belgrade.

24 Q. Autre conséquence, je vous ai parlé de deux conséquences qui allaient

25 faire l'objet de mes questions, les deux conséquences lorsqu'on a un Etat

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1 policier, vous le savez, c'est qu'un dirigeant politique, un chef politique

2 qui a une force de police qui peut agir en toute impunité, il lui suffit

3 d'incliner la tête, de faire un signe, ou de donner une direction générale,

4 et il saura que ses vœux vont être exaucés, même si c'est sans le respect

5 de la légalité par ces forces de police. C'est un postulat général que je

6 vous soumets. Est-ce que vous l'acceptez ?

7 R. Je m'excuse, mais une fois de plus vous avancez deux ou trois

8 allégations qu'il m'est difficile de suivre. Tout d'abord, je dois dire

9 qu'il ne peut absolument pas être question d'un Etat policier.

10 Deuxièmement, je tiens à dire que la police d'après tout ce que j'en sais,

11 et comme vous le savez, j'étais ministre adjoint, la police n'a jamais

12 observé les faits et gestes du président ou des dirigeants politiques. A la

13 tête du ministère, il y avait le ministre et avec son équipe, il était là

14 pour élaborer la politique et la stratégie du ministère. En ma qualité de

15 membre de ce ministère, j'étais censé réaliser les instructions de mon

16 ministre.

17 S'agissant du troisième volet de votre question, pour ce qui est de savoir

18 si cela avait été conforme à la légalité, je dirais que je n'ai eu que des

19 ordres tout à fait légaux adressés à mon égard, je n'ai pas eu à réaliser

20 quelque ordre que ce soit que j'aurais considéré comme étant illégal.

21 Q. Ne m'en voulez pas, mais je vous ai demandé de répondre de façon ciblée

22 et précise à mes questions --

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, cette question ne se

24 prêtait pas à une réponse courte. Il faut quand même être juste envers le

25 témoin.

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1 M. NICE : [interprétation]

2 Q. Revenons à l'intercalaire 6. Nous avons examiné cet intercalaire. Nous

3 n'avons jamais reçu une traduction de la Défense. J'ai ici un projet de

4 traduction que j'ai, malheureusement, annoté, mais peut-être pourra-t-on le

5 placer sur le rétroprojecteur. Je vais demander au témoin de prendre

6 l'intercalaire numéro 6.

7 De façon à ce que nous comprenions la structure dans laquelle vous avez

8 opéré, je parle ici des liens entre la sécurité publique et les services

9 secrets. Il se peut qu'il n'y est pas de traduction, nous en avons

10 rapidement parlé l'autre jour, l'Article 20 dit à peu près ceci -- il y a

11 d'abord l'Article 17 qui exige : d'employés, du MUP s'entend, qui ne se

12 connaissent pas et qui ont l'obligation de se présenter l'un à l'autre.

13 Article 20. L'article dit que l'employé du MUP toujours a pour

14 responsabilité d'avertir un autre employé de son secteur, je le précise,

15 qui agirait en contravention du présent du code --

16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Attendez que le témoin ait le document.

17 M. NICE : [interprétation] Il l'a sous les yeux.

18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non.

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne l'ai pas en serbe, non.

20 M. NICE : [interprétation]

21 Q. Excusez-moi. L'intercalaire 6. Je suis en train d'examiner l'Article

22 20.

23 R. Oui, j'ai l'Article 20 sous les yeux maintenant.

24 Q. Article 20, il y a à peu près ceci : "L'employé a pour responsabilité

25 d'avertir un autre employé de son secteur qui agirait en contravention à ce

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1 code de conduite, donc d'avertir cet employé, mais aussi son supérieur.

2 Lorsqu'un employé d'un autre secteur contrevient à ce code, le supérieur va

3 informer l'instance dans laquelle travaille l'employé."

4 Est-ce que ce n'est pas une façon officielle d'exiger de la part des

5 membres de chaque secteur de la DB de se comporter dans le respect de la

6 légalité.

7 R. C'est exact.

8 Q. Par conséquent, si vous faisiez partie du secteur de la sécurité

9 publique, et si à un moment donné vous aviez connaissance d'actes illégaux

10 commis par la DB, vous aviez pour rapport d'en faire état à vos supérieurs.

11 R. Absolument

12 Q. D'autant que vous étiez un haut fonctionnaire de la police. Vous ne

13 sauriez en aucune façon fermer les yeux s'il y avait des actes illégaux

14 commis par la police secrète, n'est-ce pas ?

15 R. Je ne peux absolument pas fermer l'œil devant tout comportement

16 illégal, mais j'affirme que je n'ai fermé l'œil devant quelque comportement

17 illégal que ce soit, pas seulement de la part des membres du MUP.

18 M. NICE : [interprétation] Merci. Pourriez-vous me remettre cette

19 traduction, Monsieur l'Huissier.

20 Q. En 1992, il y a plusieurs choses qui se sont passées en même temps.

21 Voici ce que le général Vasiljevic nous a dit notamment lorsqu'il est venu

22 déposer. Il a dit qu'en avril 1992, Stanisic a organisé, a monté des

23 événements de façon à ce qu'il n'y ait qu'un seul service de Sécurité ou de

24 Sûreté, à savoir, le service de la Sécurité de Serbie. Cela s'est fait en

25 partie en nommant un certain Nedeljko Boskovic au poste de chef de la

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1 sécurité militaire. Est-ce que vous vous souvenez de ces événements ?

2 R. Je ne me souviens pas d'événements en corrélation avec ce monsieur

3 Nedelkovic, si je me souviens bien, ou Boskovic. Je ne me souviens

4 absolument rien au sujet de ce monsieur en 1992. Si vous me rafraîchissez

5 la mémoire, il se peut que je m'en souvienne.

6 Q. Stanisic nous a dit qu'on l'a nommé à ce poste de façon à ce qu'on

7 mette les services de Renseignement militaires au service de l'accusé ici

8 présent. Il a établi un lien entre ceci et le fait que le bâtiment fédéral

9 du MUP a été pris par le MUP de Serbie. Nous allons prendre ceci en deux

10 phases.

11 Etes-vous au courant des modifications intervenues dans les services

12 de Sécurité militaires qui ont été provoquées par le fait que Nedeljko

13 Boskovic a été nommé à ce poste ?

14 R. Sur tout ce que vous venez de dire dans ces quelques phrases-ci, je

15 dirais que je n'ai connaissance que de ce qui a trait à la prise de

16 sécurité dans le bâtiment du MUP fédéral, dans le courant de 1992. Tout le

17 reste m'est complètement inconnu.

18 Q. Fort bien. Je rappelle aux Juges que Boskovic à succéder à Vasiljevic

19 en mai 1992. Nous allons maintenant parler de la prise de contrôle du

20 bâtiment du MUP.

21 Pourquoi y a-t-il eu prise de contrôle de ce bâtiment ?

22 R. L'objectif de la prise en charge de la sécurité au MUP fédéral avait

23 été de faire en sorte que les Unités organisationnelles et les moyens

24 matériels et techniques de la République de Serbie, du MUP de la République

25 de Serbie qui se trouvait dans ces bâtiments-là, soient sécurisés de façon

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1 appropriée; ce qui fait que -- ou plutôt chose à laquelle s'est opposé le

2 personnel du secrétariat fédéral à l'Intérieur. Je répète que dans ce

3 bâtiment-là, il se trouvait certaines Unités du ministère de l'Intérieur de

4 la République de Serbie avec des équipements très sensibles appartenant au

5 ministère de l'Intérieur de la République de Serbie.

6 Q. La justification territoriale, c'était un simulacre, n'est-ce pas,

7 cette question de sécurité ? De cette façon, l'accusé cherchait à contrôler

8 les archives et les services de Renseignement du MUP fédéral. C'est la

9 question que je vous pose.

10 R. C'est absolument faux. D'après les renseignements dont je dispose - et

11 j'ai participé directement à cette opération - je sais parfaitement bien

12 quelles sont les unités qui se trouvaient là-bas. Je ne connais pas tous

13 leurs noms, mais je sais qui se trouvait à leur tête. Je sais quels sont

14 les équipements qui se trouvaient là-bas. Je sais également qu'il y avait

15 un contrat entre le ministère fédéral, le ministère de la république sur le

16 plan de l'Intérieur qui sous-entendait la nécessité pour le MUP de la

17 république d'utiliser davantage de superficies qu'ils n'en avaient là-bas.

18 En plus de cet élément de sécurité, il s'agissait d'aménager dans les lieux

19 qui, en application du contrat, devaient être utilisés par le secrétariat

20 de la république chargée de l'Intérieur, ou plutôt du ministère de

21 l'Intérieur de la République de Serbie. Il n'est absolument pas exact

22 d'affirmer ce que vous avez affirmé tout à l'heure. A aucun moment, je n'ai

23 eu des informations qui diraient que le président de la République de

24 Serbie en aurait été au courant.

25 Q. Etiez-vous au courant de l'existence de ce qu'on a appelé le conseil

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1 chargé de la Réconciliation des points de vue pour ce qui est de la

2 politique de l'Etat ? C'est quelquefois appelé un peu différemment. Est-ce

3 que vous connaissiez l'existence et le fonctionnement de ce conseil ?

4 R. Non.

5 Q. C'est une instance, une organisation dont nous avons reçu certains

6 procès-verbaux, ces notes sténographiques. Avant de passer à l'examen de

7 celles-ci, il se peut que je n'aie pas dit à Mme Dicklich que nous allions

8 éventuellement examiner ces documents. Je le lui dis maintenant. Prenons

9 l'aspect général. Savez-vous où étaient conservées les archives d'instances

10 aussi importantes que celles du conseil chargé de l'harmonisation, du

11 conseil de Défense suprême ? Savez-vous où sont conservées ces archives ?

12 R. Je voudrais savoir de qui vient ce conseil. Je ne sais pas. Est-ce que

13 c'est si un organe fédéral, si c'est un organe du parlement ? Est-ce que

14 c'est un organe du gouvernement ? Je n'arrive pas à l'identifier pour

15 pouvoir vous répondre. A moins qu'il n'y ait une autre appellation, peut-

16 être cela pourrait m'aider.

17 Q. De façon générale, est-il juste de dire qu'il y a une obligation

18 réglementaire de conserver des archives pour tout organe important de

19 l'Etat, et qu'on les garde dans plusieurs endroits pour assurer qu'ils

20 soient conservés pour la postérité ? Est-ce que c'est là une règle générale

21 qui s'applique ?

22 R. Je ne sais pas comment la Réglementation règle ceci. Je sais qu'au

23 ministère de l'Intérieur, il y a une Réglementation concernant la

24 conservation et l'archivage de la documentation. Je ne sais pas comment

25 cela a été aménagé au sein des autres instances.

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1 Q. Vous voyez, nous n'avons reçu que le procès-verbal d'une réunion, celle

2 qui concerne la prise du bâtiment fédéral du MUP. En fait, nous n'avions

3 pas reçu les notes sténographiées en tant que telles, et je voulais savoir

4 si vous pourriez nous aider, si vous savez si un document aussi important a

5 pu être détruit ou pas. Apparemment, vous n'êtes pas en mesure de nous

6 aider.

7 Il va falloir que je vous donne lecture d'un bref passage qui vient

8 du procès-verbal que nous, nous avons reçu. Je pense que c'est

9 l'intercalaire 45. Excusez-moi. Le numéro de la cote, c'est la

10 cote 469. Afin de vous aider, je précise que c'est un organe présidé par

11 Dobrita Cosic, auquel participait cet accusé. Il y avait aussi le président

12 Bulatovic, Milan Panic entre autres. Voici ce qui est dit, je dois vous

13 lire six lignes.

14 "Le 18 octobre de cette année - nous sommes alors en 1992 - des

15 membres du ministère de l'Intérieur de la république ont occupé par la

16 force le bâtiment du ministère fédéral. Une fois qu'ils se sont trouvés à

17 l'intérieur, ils ont empêché les employés fédéraux d'entrer dans leurs

18 bureaux."

19 Puis, nous avons ceci : "La prise du bâtiment, au cours de celle-ci,

20 les officiers qui s'en sont emparés se sont emparés également du système de

21 communication, du système de codage, de l'équipement et de tous les

22 équipements techniques et matériels techniques du service de Sûreté de

23 l'Etat; est-ce exact ?

24 R. Je voudrais d'abord vous demander une fois de plus de ne pas me poser

25 plusieurs questions dans le cadre d'une seule même question, ou alors

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1 laissez-moi prendre des notes, je pourrais peut-être vous répondre plus

2 clairement. La majeure partie de cette constatation se trouve être erronée.

3 D'abord, il n'y a pas eu occupation du bâtiment; cela, c'est d'un. De deux,

4 personne parmi le personnel du ministère fédéral de l'Intérieur n'a été

5 empêché d'accéder à son poste de travail. Le fait est qu'il a été mis en

6 place un nouveau système de contrôle de la sécurité, et ils n'ont pas voulu

7 l'accepter; ce qui fait qu'on a présenté la chose comme s'il avait été

8 interdit de venir au travail. J'ai dit au début qu'on a vu prendre en

9 charge la sécurité du bâtiment du personnel, des archives, des moyens

10 techniques. Cette sécurité sous-entendait le régime d'entrée et de sortie

11 dans l'immeuble. En une journée le régime a été changé. Les gens du SUP

12 fédéral, le lendemain n'ont pas accepté ce régime. C'est la raison pour

13 laquelle ils ne sont pas venus dans leurs bureaux. Bien entendu, la plupart

14 ont pu avoir accès à leurs bureaux et continuer à travailler.

15 Je ne sais pas quels ont été les autres éléments contenus dans votre

16 question, mais ces deux éléments-là je m'en suis rappelé.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous avez parlé d'un contrat qui

18 faisait partie de cette prise de contrôle. Je n'ai pas compris ce que vous

19 vouliez dire quand vous avez parlé de contrat. Pourriez-vous me

20 l'expliquer ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je vous l'expliquerai, Monsieur le Juge.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous voulez

23 intervenir ?

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux obtenir ce document pour le

25 voir ?

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Monsieur Nice --

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je suppose que le témoin pourrait l'avoir

3 aussi.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veillons à ce qu'une copie de ce

5 document, un exemplaire soit remis à l'accusé.

6 M. NICE : [interprétation] C'est une cote -- c'est une pièce de ce dossier.

7 Je vais veiller à ce que vous en ayez un exemplaire.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous allez recevoir un exemplaire

9 sous peu.

10 Veuillez répondre à ma question, Monsieur le Témoin.

11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crois que le témoin devrait obtenir une

12 copie également.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Si le témoin veut avoir un

14 exemplaire du texte afin de répondre avec moins de difficulté, oui, il peut

15 en avoir un.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Si je continue à répondre au sujet de ce

17 document, il serait utile de l'avoir, certes. Je vais répondre à votre

18 question. Pendant un certain temps.

19 Il se peut, au fil de quelques mois, avant que l'on ne prenne en

20 charge la sécurité dans le bâtiment du secrétariat fédéral à l'Intérieur,

21 le ministre fédéral ou le secrétaire fédéral à l'Intérieur - je ne sais

22 plus comment s'appelait ou quel était l'énoncé de sa fonction - donc, c'est

23 le ministre fédéral et le ministre de la Serbie ont signé un contrat dont

24 l'objet consistait en la cession, la rétrocession d'une majeure partie des

25 locaux au ministère de l'Intérieur de la république. Une partie de ces

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1 locaux et une partie des équipements, au moment où il y a eu prise en

2 possession, prise en charge de la sécurité, se trouvait déjà faire partie

3 intégrante de ce qui constituait le ministère de l'Intérieur de la

4 république. Il s'agissait de prendre possession du reste des locaux. Etant

5 donné que le ministre fédéral a été révoqué et qu'il y en a eu un nouveau,

6 il y a eu des problèmes à ce sujet; ce qui fait que le contrat n'a pas été

7 réalisé jusqu'au bout.

8 Je ne sais pas si j'ai été suffisamment clair en vous expliquant

9 comment cela s'est passé.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quand on parle de prise en charge,

11 c'était conformément un contrat, aux clauses d'un contrat ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] On pourrait le dire. Ce contrat avait déjà

13 partiellement été réalisé au moment où il y a eu cette prise en charge de

14 cette sécurité. Le contrat avait en partie déjà été mis en œuvre.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il n'est peut-être pas correct de

16 parler en anglais de "takeover" ou de prise de contrôle parce que ceci

17 comporte une certaine connotation.

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. J'ai dit prise en charge de la sécurité

19 du bâtiment vis-à-vis des moyens et des archives. Pour ce qui est d'une

20 prise de contrôle, il y a un autre terme en serbe.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ils ont endossé, exercé certaines

22 responsabilités conformément aux clauses du contrat.

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Conformément au contrat, oui. Je voudrais

24 ajouter d'autre chose dont je viens de me souvenir. Il n'y a pas eu de

25 violence quelle qu'elle soit. M. le Procureur a parlé de violence. Mais

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1 dans aucun cas il n'y a eu de recours à la force.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Nice.

3 M. NICE : [interprétation]

4 Q. C'est vous qui aviez la responsabilité de cette opération, n'est-ce pas

5 ? A un moment donné, vous avez accepté l'idée que même si cela ne s'était

6 pas fait par la violence, il y avait eu intervention de vos effectifs pour

7 désarmer le personnel du MUP fédéral.

8 R. En partie seulement. Pour des raisons de sécurité afin qu'il n'y ait

9 justement aucune sorte de violence, les employés du MUP fédéral ont été

10 priés de restituer la munition qu'ils avaient, les munitions qu'ils avaient

11 sur eux. Les armes, ils les ont gardées. Je suis tout à fait concret. En

12 aucun cas cela n'a été fait moyennant recours à la force. Quand on dit

13 "désarmés" cela sous-entend une opération par la force.

14 Q. Je vous dis que cela a été une action illégale de prise de contrôle.

15 Maintenant, je vais vous poser quelques questions à propos de ce qu'on a

16 dit Dobrica Cosic. Avez-vous la moindre raison de douter de la façon dont

17 M. Cosic a relaté ces événements avant que nous voyions ce qu'il a écrit ?

18 R. J'apprécie et je respecte M. Cosic, mais pour pouvoir parler de ses

19 possessions, il faudrait que je connaisse ses positions, et il faudrait que

20 je sache qu'elles ont été les sources de ses informations. Il se peut qu'il

21 ait été désinformé.

22 Q. Parfait. Je n'ai pas assez d'exemplaires; c'est de ma faute. Je vais

23 demander qu'on remettre au témoin la version en cyrillique, et qu'on mette

24 le passage correspondant sur le rétroprojecteur en anglais. C'est l'ouvrage

25 le plus récent de

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1 M. Cosic. Je commence à la page 193.

2 Vous la voyez dans le livre. Voici ce que dit M. Cosic: "Nous nous sommes -

3 - nous avons siégé à la réunion au conseil pendant neuf heures. Nous avons

4 discuté de la prise de contrôle du MUP et du ministère de la Sûreté de

5 l'Etat qui se trouvaient sous les ordres de Slobodan Milosevic. En plus de

6 cette prise de contrôle, pression a été faite sur les employés du SDB de

7 Yougoslavie afin de les convaincre de venir travailler pour le ministère de

8 la Sûreté de l'Etat."

9 Puis, il est dit ceci : "M. Milosevic s'emparait de tous les

10 mécanismes du pouvoir de l'Etat."

11 Page suivante, page 177. Voici ce qu'il dit : "Je suis revenu de

12 Genève avant minuit, et pendant que j'étais absent, Milosevic s'est emparé

13 par la force du ministère de la Sûreté de l'Etat."

14 Page suivante, page 178. Voici ce qui est dit, Monsieur Stevanovic :

15 "C'est un coup, c'est un soulèvement... Matovic m'a dit comment cela s'est

16 fait, cela a été conclu. C'est un événement que je ne saurais accepter sans

17 toute la résistance nécessaire."

18 Page suivante : "Je ne suis pas allé au bureau aujourd'hui. Je

19 n'avais pas la force d'écouter ce que les gens allaient me dire. Au cours

20 des trois derniers jours, il y a eu trop d'événements qui se sont produits

21 pour que je puisse en prendre note dans mon journal. Je suis choqué de

22 l'acte de Milosevic qu'il a commis pendant mon absence lorsque j'étais à

23 Genève. Sa police a utilisé la force pour pénétrer dans le bâtiment du

24 ministère de l'Intérieur et dans les bureaux qui appartiennent au ministère

25 de la Sûreté de l'Etat. Ces hommes ont désarmé les policiers, se sont

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1 emparés des moyens techniques du commandement, des documents, des archives,

2 et ils ont éjecté les employés. Le pays s'est trouvé sans un ministère de

3 la Sûreté de l'Etat ce qui a privé l'Etat d'un des piliers prévus par la

4 constitution. Le tyran de Pozarevac a commis ce coup, ces soulèvements,

5 lorsque Panic et moi nous étions hors du pays. Qu'est-ce qu'il pense cet

6 homme ? Ce coup destructeur porté à un Etat souverain a été commis sous le

7 commandement du chef du SDB de Serbie et avec la connaissance du chef de

8 l'exécutif de l'état-major et du Kos. L'événement a eu beaucoup d'échos.

9 L'événement a diminué l'autorité qu'il y avait au sein du pays et dans le

10 monde entier, de Panic et de moi-même."

11 Voilà comment un président qui a été pris de court alors qu'il

12 n'était pas dans le pays, et vous, vous étiez l'officier qui était

13 responsable de l'opération. Dès la fin de l'automne 1992, vous avez aidé

14 l'accusé dans la tentative qu'il avait déployée pour s'emparer de tous les

15 organes du pouvoir. C'est une question que je vous pose.

16 R. Une fois de plus, il s'agit d'une question très compliquée.

17 Je vais d'abord dire que tout ce que vous venez de lire, c'est la première

18 fois que j'en entends parler, et avec tout le respect que je lui dois, je

19 me dois de dire qu'il s'agit là d'une caractérisation politique d'un

20 événement qui se fonde, à mon avis, sur des faits erronés. Vraiment, je

21 n'ai jamais pensé qu'un tel événement pourrait faire l'objet de

22 commentaires de cette nature. Ce qui se peut, c'est que la question est

23 politisée par excès, et un commentaire dans ce cas-là s'avérerait possible.

24 Il n'est pas exact de dire que l'un de ces faits quel qu'il soit ce soit

25 trouvé être exact. Je ne sais pas si je me suis bien exprimé. J'aimerais

Page 40130

1 que vos questions soient plus précises.

2 Q. Lesquels sont peut-être exacts à votre avis comme vous le dites.

3 R. Bien, il est des faits exacts qui disent que nous avons pris en charge

4 la sécurité du bâtiment, mais de là à dire que cela constituait un coup

5 d'Etat, cela est tout à fait inexact. On n'a pas empêché les employés du

6 secrétariat fédéral à l'Intérieur de travailler. Dans cette opération, nous

7 nous sommes emparés des locaux qui, en application du contrat,

8 appartenaient au ministère de l'Intérieur de la république. Nous n'avons

9 pas pris les locaux qui appartenaient au ministère fédéral et nous n'avons

10 pas pris les fonctions qui étaient celles du ministère fédéral. On a

11 commenté cela à des fins politiques. Je ne dirais pas que cela avait été

12 une intervention ordinaire de la police. Cela avait été une intervention

13 complexe. Mais suivant des fondements juridiques analogues, la police vient

14 en aide à d'autres institutions de l'Etat au quotidien pour ce qui est de

15 la réalisation de leurs décisions exécutives.

16 Il y avait là un contrat, il y avait une décision du secteur de la Sûreté

17 de l'Etat pour ce qui était de prendre en charge la sécurité. Le secteur

18 public est intervenu en application de l'Article 10 de la loi portant

19 fonction du ministère de l'Intérieur, à savoir venir en aide aux différents

20 ministères pour ce qui est de la réalisation de leurs décisions exécutives.

21 Ici, il s'agit --

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, à la page 183, il y

23 est fait référence à un coup d'Etat qui aurait été mené sous le

24 commandement du chef de la SDB de Serbie. Est-ce que le témoin sait qui

25 c'est le chef de la SDB de Serbie ?

Page 40131

1 LE TÉMOIN : [interprétation] En 1992, c'était M. Jovica Stanisic.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vois.

3 M. NICE : [interprétation]

4 Q. Puisque c'est vous qui étiez le chef de l'opération en vue de mener

5 cette prise de contrôle -- exécuter cette prise de contrôle, est-il vrai

6 qu'en fait vous exécutiez les instructions qu'il vous avait données, comme

7 le dit l'article de M. Cosic ?

8 R. Les instructions de qui, je n'ai pas été très attentif, excusez-moi ?

9 Q. Stanisic.

10 R. Bien sûr que non.

11 Q. Quelles instructions suiviez-vous ?

12 R. Je suis intervenu suivant les instructions du ministre adjoint de

13 l'époque, M. Stojicic, c'était lui mon supérieur hiérarchique, à l'époque.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne comprends pas tout à fait,

15 Monsieur Nice, faut-il comprendre ce passage comme signifiant que c'est M.

16 Stanisic qui était vraiment présent physiquement sur les lieux ?

17 M. NICE : [interprétation] Non, je ne pense pas.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vois.

19 M. NICE : [interprétation] Evidemment --

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je voudrais tirer une chose au clair,

21 Monsieur le Témoin, car il y a certaines choses que je ne comprends pas du

22 tout.

23 Vous avez parlé d'un contrat, est-ce qu'il signifiait qu'une partie du

24 bâtiment se trouvait sous le contrôle du ministère ou restait sous le

25 contrôle du ministère fédéral de l'Intérieur ?

Page 40132

1 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Suite à ce qui s'est passé dans cet

3 endroit qu'on a décrit, est-ce que le MUP fédéral a conservé le contrôle

4 d'une partie du bâtiment ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, ils ont conservé le contrôle sur la

6 partie du bâtiment qu'ils utilisaient. Le MUP fédéral a continué à se

7 servir de cette partie-là du bâtiment même après l'opération.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cela veut dire que d'après votre

9 version des faits, ce que dit Cosic, à savoir que le pays s'est trouvé

10 privé d'un service de Sûreté de l'Etat, ce qui a privé l'Etat d'une de ses

11 fonctions constitutionnelles les plus importantes, apparemment ce qui est

12 dit là est faux d'après vous.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas si cela est faux ou pas. Je

14 sais que ce n'est pas exact. Le ministère fédéral est resté et a continué

15 d'exister. Cela n'a en aucune façon --

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Dans ce bâtiment-là ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Il est resté une partie de ce bâtiment pour le

18 ministère fédéral, et le ministère fédéral est resté, donc nos actes n'ont

19 pas influé sur la disparition du ministère fédéral.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce contrat est-il possible de le

22 voir ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis certain que cela existe, à moins que

24 cela n'ait été détruit au cours du bombardement. Je vais dire que le MUP de

25 Serbie a été ciblé et détruit et les archives également, et le bâtiment du

Page 40133

1 ministère fédéral a également été détruit. Mais le contrat existe sûrement.

2 Je crois bien qu'il doit pouvoir être possible de le retrouver.

3 M. NICE : [interprétation] Monsieur l'Huissier, est-ce que je peux

4 récupérer les documents.

5 Q. Avant de poursuivre, j'aimerais revenir en arrière dans le temps sur

6 quelque chose que j'avais l'intention de vous montrer. C'est une brève

7 séquence qui s'appelle : "Vie et mort de la Yougoslavie" un programme de la

8 télévision et la date concernée ici, c'est mars 1991.

9 [Diffusion de cassette vidéo]

10 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

11 "Au milieu du discours de M. Sarkovski, dans la foule, il y a tout à

12 coup eu des gaz lacrymogènes et les gens ont commencé à courir. Etant donné

13 que la police avait constitué un cordon, il était logique qu'au bout du

14 cordon, il y ait un conflit entre les manifestants et la police.

15 [en anglais] The Serb leaders at first asked for tanks to be put on

16 the streets three hours earlier. Now their case was stronger."

17 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

18 M. NICE : [interprétation]

19 Q. Nous avons vu le comportement de la police dès 1991, est-ce que

20 c'était là quelque chose qui représentait bien la façon qu'avait votre

21 police de s'occuper des manifestants ?

22 R. Ce qui était typique ou caractéristique pour la police de Serbie,

23 c'était de prendre des mesures déterminées au cas où il y avait des

24 manifestations avec recours à la force. Il y a eu des manifestations de

25 cette nature à Belgrade, il y en a eu également à Pristina et souvent ces

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1 manifestations se sont déroulées en parallèle. Mais je ne sais pas où

2 réside la substance de votre question.

3 Toute police à l'occasion de manifestations de cette nature se

4 comporte de façon similaire. Cela dépend de l'intensité du recours à la

5 violence.

6 Q. D'après vous ce genre de réponse se trouve en Norvège, en

7 Angleterre, en Allemagne, je prends au hasard trois pays, là.

8 R. Je ne peux pas parler d'Etats particuliers, mais je crois que,

9 dans la plupart des pays, la réponse de la police lorsqu'il s'agit d'une

10 manifestation avec recours à la force se trouve similaire. Il y a bien sûr

11 des excès qui sont possibles et en Serbie, on a souvent généralisé ces

12 excès. Un passage de dix secondes de vue vidéo est repris des tas de fois,

13 ce qui contrecarre des millions de secondes où le comportement est tout à

14 fait autre, ce qui fait que l'impression est erronée. Il y a le fait que la

15 police était pendant trois mois devant les manifestants dans le calme sans

16 intervenir.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous ne pouvez pas beaucoup

18 insister sur ce genre de question parce que moi personnellement, j'ai vu

19 des réactions de ce genre dans les sociétés occidentales. Tout est

20 fonction de la situation.

21 M. NICE : [interprétation]

22 Q. Est-ce que c'est quelque chose qui a été provoqué ou pas, comme c'est

23 affirmé dans cette séquence ? Mais je voudrais avoir, si les Juges me le

24 permettent, votre commentaire sur un autre événement. En quelques mots

25 voici de ce qu'il s'agit : fin 1991, un témoin Gajic Glisic est venu nous

Page 40135

1 le dire, qu'on a essayé de créer un ministère de la Défense de la Serbie;

2 est-ce exact ?

3 R. Je ne sais pas de quoi vous êtes en train de parler. Je sais qu'il

4 existait un ministère de la Défense de la Serbie à un moment donné, mais je

5 ne sais pas vous dire à quel moment au juste. S'il y a eu tentative de

6 création d'un ministère, cela je n'en ai pas du tout connaissance.

7 Q. Vous voyez le ministère de la Défense de la Serbie n'a pas existé

8 pendant très longtemps. Nous en arrivons ainsi à la fin de 1992, c'est à ce

9 moment-là qu'il disparaît, c'est là que nous avons commencé ce matin.

10 J'aimerais vous dire ceci : avec votre aide, votre assistance l'accusé

11 contrôlait le MUP, il avait au bout des doigts, il avait la main sur tous

12 les renseignements et ceci lui a permis de s'emparer de davantage de

13 contrôle, contrôle de tous les organes du pouvoir. Acceptez-vous cette

14 hypothèse ?

15 R. S'agissant du MUP, je n'accepte pas. Je n'ai jamais eu cette

16 impression-là. Il est normal que le président de la République de Serbie

17 conformément à la loi ait certains droits. Il a le droit de demander des

18 rapports de la part du ministre de l'Intérieur et ce dernier est tenu de

19 lui communiquer un rapport en ce sens. Je crois que le ministre s'est

20 comporté conformément à cette obligation. Mais s'agissant maintenant de

21 l'attitude des instances de l'Etat, y compris le président de la Serbie

22 vis-à-vis du ministère de l'Intérieur, je ne pense pas qu'il y ait eu quoi

23 que ce soit d'inhabituel vis-à-vis de ce qui existe dans les autres pays.

24 J'ai dit déjà que ce que le MUP allait faire était une décision qui

25 était prise au sein du MUP lui-même.

Page 40136

1 Q. On accuse notamment l'accusé du fait qu'à partir de ce moment-là à peu

2 près, je ne sais pas si s'était d'abord la JNA, puis la VJ, mais en tout

3 cas, il se serait appuyé sur le MUP qui avait davantage de pouvoir. Il

4 cherchait à donner plus de pouvoir au MUP. Je vais vous lire ce que nous a

5 dit le général Vasiljevic s'agissant de ce qui s'est passé à partir de la

6 fin 1992. Dites-moi si ce que vous avez entendu est exact ou pas : "A

7 partir de 1993, le MUP de Serbie a été renforcé de façon considérable. Tout

8 d'abord, il y a eu formation d'Unités du MUP qui constituaient pratiquement

9 une armée à petite échelle dotées d'une autorité et d'un pouvoir absolu ou

10 plus exactement sur lequel l'accusé, par Stojicic, notamment, et par le

11 ministère de l'Intérieur de la Serbie, avait un pouvoir absolu."

12 Que pensez-vous de ce que dit ici un ancien général, le général

13 Vasiljevic ?

14 R. Cela ne correspond pas du tout à la vérité. Je ne sais pas comment il

15 peut affirmer qu'on a renforcé ou élargi le MUP. Pendant 20 ans, il y a eu

16 le même nombre de membres dans le MUP, les mêmes effectifs. Dès 1972, il y

17 avait des Unités spéciales. Le MUP a eu des Unités spéciales à partir de

18 1979. Par conséquent, au niveau de l'organisation rien n'a véritablement

19 changé, si ce n'est le fait qu'après 1989, le MUP a été centralisé sur le

20 plan de l'organisation structurelle, tout le reste peut être considéré

21 comme étant la même organisation, le même nombre de membres qu'avant les

22 années 1992.

23 Q. Vasiljevic nous dit, lorsqu'il est venu déposer le 6 février 2003 que :

24 "Pratiquement, c'étaient des Unités de combat qui avaient été établies avec

25 des hélicoptères, des armes qui ne sont pas généralement celles dont

Page 40137

1 dispose la police. Des Unités spéciales ont été créées et certains

2 officiers de l'armée yougoslave ont été limogés, notamment dans la police

3 militaire, il s'agit des spécialistes en opération particulière et

4 également des pilotes d'hélicoptère."

5 Il conclut en disant : "Une dizaine de milliers de personnes a constitué

6 une nouvelle force."

7 Maintenant, je vais vous segmenter ces propos. Il dit n'est-ce pas que des

8 Unités de combat on été créées, oui ou non ?

9 R. Non. Bien sûr que non. Je répète que ces unités, ces structures, ces

10 équipements, ces uniformes, ces affectations existaient depuis 1972. Les

11 hélicoptères ont existé au sein de la police de Serbie avant mon arrivée

12 dans la police. Quand je suis arrivé au ministère de l'Intérieur, la police

13 avait déjà des hélicoptères.

14 Q. Qu'en est-il du fait de retirer certains officiers de l'armée ?

15 R. Oui, dans certains cas, pour leur confier des affectations de pilotes.

16 Car il est logique que le ministère de l'Intérieur ait eu quelques

17 difficultés dans certains cas à trouver les cadres nécessaires pour former

18 des pilotes; sinon, la police a formé un certain nombre de pilotes. Elle a

19 engagé des pilotes de l'armée, certains pilotes de l'armée, dans le cadre

20 de la concurrence normale lors de la mise en candidature pour n'importe

21 quel poste, et ce, conformément aux décisions de l'état-major. Leur nombre

22 était très limité; cinq ou six pilotes tout au plus.

23 Q. Je vous rappelle que vous avez comparé vos forces de police de façon

24 très favorable à celles d'autres forces de police d'Europe du Nord.

25 J'aimerais que vous nous aidiez sur le point suivant : les organisations

Page 40138

1 des droits de l'homme ont parlé de l'ex-Yougoslavie pendant toutes les

2 années 1990, n'est-ce pas ?

3 R. Je connais certains de ces rapports.

4 Q. En particulier, Mazowiecki, qui a fait rapport aux Nations Unies. Des

5 rapports ont également été rédigés par l'organisation "Human Rights Watch".

6 Ces rapports ont été publiés. Ils ont été, pour certains, publiés à

7 Belgrade. Ces documents ont été rendus publics et adressés de façon très

8 spécifique au ministre et au président de Serbie pour que des actions

9 soient entreprises, n'est-ce pas ?

10 R. Qu'est-ce qui a été adressé au président de Serbie, je n'en sais rien.

11 Ce que je sais, c'est que la police de Serbie était en possession de

12 certains de ces documents. Quant à moi, si cela vous importe, j'ai

13 personnellement eu un entretien avec M. Izbir [phon]. Je ne sais pas

14 exactement quelles étaient ses fonctions à l'époque.

15 Par ailleurs, je dirais avec une grande certitude, que tous les

16 événements dont il était question dans les rapports publiés par ces

17 organisations, faisaient l'objet d'une attention particulière de la part de

18 la police.

19 J'ai déjà dit, répondant à une question antérieure, que la seule

20 chose qui a posé problème a été la partialité extrême, la subjectivité et

21 le caractère erroné de la façon dont certains faits étaient rapportés dans

22 certains de ces rapports, notamment de la part d'organisations humanitaires

23 qui se fondaient sur des renseignements et des données superficielles et

24 incorrectes et insuffisamment vérifiés.

25 M. NICE : [interprétation] Je vous demande une seconde. J'aimerais

Page 40139

1 que nous jetions un coup d'œil. Je crains que ces documents sont en

2 anglais. Je demande qu'on les place sur le rétroprojecteur. Je les

3 identifierai lorsqu'il existe des numéros de pièces à conviction les

4 concernant. Je dirai également lorsque ce n'est pas le cas. Regardons

5 certains de ces rapports, 1993, par exemple. Le premier est un document qui

6 déjà été versé au dossier. C'est la pièce à conviction 772.

7 Peut-on le placer sur le rétroprojecteur. Je vous remercie.

8 Voyons quelle est la teneur de ce document.

9 Monsieur l'Huissier, je vous remercie de votre aide. Je vous demande

10 de passer en page suivante où nous voyons l'intitulé et la teneur de cette

11 page. Nous n'allons pas nous en occuper tout de suite. Passons à la page

12 suivante.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Si vous vous attendez à ce que je suive

14 ce texte, je demanderais qu'on me le traduise.

15 M. NICE : [interprétation] Non, non, ce ne sera pas nécessaire.

16 Monsieur l'Huissier, je vous demande de vous rendre à la page dont les

17 derniers numéros, en haut à droite, sont 36, 3 et 6. Voilà.

18 Q. Je vais vous lire un passage qui est tiré d'un rapport, le

19 rapport que nous avons ici qui a été publié pour les Nations Unies. Ce

20 rapport indique ce qui suit, je cite : "Selon plusieurs rapports, avant et

21 après les élections du 20 décembre 1992, la police a adopté une attitude

22 plus sévère et plus agressive à l'égard de la population albanaise."

23 Ensuite, dans la première phrase du paragraphe suivant, le paragraphe

24 160, nous lisons ce qui suit, je cite : "L'action de la police est allée

25 au-delà de l'arrestation, des emprisonnements et des cas de morts résultant

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1 de tirs ou de violences policières, ont été recensés."

2 Ceci est une synthèse. Est-ce que ce rapport a fait l'objet d'une

3 enquête, Monsieur Stevanovic, ce rapport adressé aux Nations Unies ?

4 R. Je n'ai pas connaissance de ce rapport. Je ne peux vous dire s'il

5 a fait ou non l'objet d'une enquête. Si d'une façon ou d'une autre, il est

6 arrivé au ministère de l'Intérieur, il est tout à fait certain qu'il a fait

7 l'objet d'une enquête. Vous venez de lire des passages qui sont très

8 généraux. J'affirme que la police n'a jamais entrepris des violences

9 particulières à l'égard de qui ce soit en République de Serbie et,

10 notamment, pas à l'égard des Albanais au moment de quelque élection que ce

11 soit. C'est bien ce qui est affirmé dans ce texte.

12 Q. Très bien. Nous allons maintenant passer au document suivant. La

13 pièce à conviction 205.

14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic.

16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, j'estime que

17 M. Nice devrait fournir une traduction au témoin lorsqu'il a l'intention de

18 l'interroger sur tel ou tel document.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, peut-être les

20 documents pourraient-ils être placés sur le rétroprojecteur.

21 M. NICE : [interprétation] Ces documents nous ont été remis en

22 anglais, même si je soupçonne qu'à l'origine, ils ont été adressés aux

23 autorités yougoslaves. Enfin, probablement, je n'en suis pas sûr pour ce

24 document. Il est fort possible que ce document n'ait été rédigé qu'en

25 anglais, et que ce soit en anglais qu'il ait été adressé aux autorités.

Page 40141

1 Rapport suivant, le rapport de "Human Rights Watch", en anglais.

2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Puis-je obtenir un renseignement. Le

3 document suivant, c'était la pièce 772 ?

4 M. NICE : [interprétation] Oui.

5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] A-t-il été traduit à quelque

6 moment que ce soit.

7 M. NICE : [interprétation] Je n'en ai pas connaissance. C'est un

8 document des Nations Unies. Vous voulez dire est-ce qu'il a été traduit au

9 Tribunal ?

10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] A-t-il été traduit en vue de

11 communication de pièces ?

12 M. NICE : [interprétation] Non. Il est sans doute en attente quelque

13 part au Tribunal, mais je n'ai pas connaissance qu'il ait été traduit.

14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

15 M. NICE : [interprétation]

16 Q. Passons au document suivant. Monsieur Stevanovic, je vous informe

17 qu'il s'agit d'un rapport de "Human Rights Watch" publié à New York, mais

18 diffusé, comme l'auteur de ce rapport et de rapports de même nature nous

19 l'a dit, à l'intention des bureaux gouvernementaux.

20 Je demanderais à M. l'Huissier de se rendre à la page dont le numéro

21 de référence, en haut à droite, se termine par 15.

22 R. Puis-je avoir la date de rédaction de document ?

23 Q. Je peux vous la fournir. La date de ce rapport est

24 mars 1993. Non, cela doit être une erreur. La raison pour laquelle je dis

25 que cela doit être une erreur, c'est que je vois que ce dont il est

Page 40142

1 question en page -- dont le numéro de référence se termine par 15 concerne

2 le mois d'août et en note en bas de page, on parle d'octobre 1993. Donc, la

3 date de ce rapport doit être plus tardive.

4 Les allégations contenues dans ce rapport - et ce n'est qu'un échantillon -

5 Monsieur Stevanovic, dans cette page qui se termine par 15, nous lisons ce

6 qui suit : "Le 25 août 1993, la police a tiré et tué Sefer Qukovci, âgé de

7 16 ans, à Cernilje [phon], village albanais non loin d'Urosevac." Puis, on

8 apporte un certain nombre d'autres détails.

9 Pouvez-vous me dire, je vous prie, comment il se fait que, dans les 17

10 classeurs dont nous disposons ici -- est-ce que dans les 17 classeurs dont

11 nous disposons ici, je pourrais retrouver mention du fait qu'une allégation

12 de ce genre est donné lieu à enquête ?

13 R. Dans ces 17 classeurs, vous ne trouverez sans doute pas mention de

14 cela, mais vous découvrirez très certainement cela dans les 1 015 fichiers

15 du MUP. Bien entendu, le numéro n'est pas précis à la virgule près; je l'ai

16 choisi pour illustrer mon point de vue.

17 Par ailleurs, vous me critiquez pour avoir apporté tant de documents, et

18 d'un autre côté vous me demandez des documents supplémentaires. Je n'ai pas

19 pu apporter avec moi toutes les archives du MUP, et je suis très certain

20 que si vous souhaitez avoir une réponse précise à votre question, vous

21 devriez interroger le MUP au sujet de ce qui a été précisément fait dans

22 l'affaire mentionnée ici. Pour le moment, je ne me souviens pas vraiment de

23 tous ces événements de façon précise. Je ne saurais dire avec certitude --

24 Q. Examinons la page --

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il n'a pas fini sa phrase.

Page 40143

1 M. NICE : [interprétation] Très bien. Vous ne sauriez dire avec certitude.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez terminer votre phrase.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux dire avec certitude, que si le

4 document existe au MUP - et je pense qu'il existe - alors je suis très

5 certain que cette affaire a fait l'objet d'une enquête, et que les

6 conclusions de cette enquête sont disponibles. Je vous ai très

7 intentionnellement demandé la date à laquelle ce document a été rédigé,

8 parce que j'explique depuis plusieurs jours déjà ici, que toute l'année

9 1993, je l'ai passée à Bajina Basta, dans le secteur de Rudo, Priboj, et

10 cetera. Je crois me rappeler très bien de cette période. Je m'occupais, à

11 l'époque, des problèmes de frontières et des problèmes entre les

12 municipalités de Visegrad, Rudo et Bajina Basta.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Nice, est-ce que ce rapport

14 est une pièce à conviction ?

15 M. NICE : [interprétation] Il l'est.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Excusez-moi.

17 M. NICE : [interprétation] Il représente la pièce à conviction 295[comme

18 interprété].

19 Monsieur l'Huissier, je vous demanderais de vous rendre en page 18 de ce

20 document.

21 Q. Nous voyons ici comment des policiers sont évoqués. Je vous rappelle

22 l'événement. Il s'agit du meurtre d'Arif Krasniqi au poste de police de

23 Prizren.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Un instant, Monsieur Nice.

25 [La Chambre de première instance se concerte]

Page 40144

1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, nous étions en train

2 de discuter de ce problème de traduction entre Juges, notamment, ce

3 document qui a été versé au dossier dans la présentation de vos éléments de

4 preuve, et qui, par conséquent, aurait dû être communiqué à l'accusé. Or,

5 il n'est pas traduit.

6 M. NICE : [interprétation] Non, il n'y a jamais eu de demande de traduction

7 en B/C/S des pièces à conviction qui arrivent en anglais.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce document est arrivé en anglais --

9 qui arrive en anglais ou en français.

10 M. NICE : [interprétation] En français également, en effet. Ce serait

11 vraiment une tâche gigantesque que de les traduire. D'ailleurs, cela n'a

12 fait l'objet d'aucune protestation ni de l'accusé, ni des amici curiae.

13 M. KAY : [interprétation] En fait, le problème a été évoqué lorsqu'on a

14 parlé de la remise des documents du procès à l'accusé en B/C/S. Au début de

15 la procédure, en juin 2001 ou juillet 2001, l'Accusation avait initialement

16 l'intention de ne fournir les documents qu'en version originale et dans la

17 langue de cette version originale. L'Amicus a soulevé une objection en

18 octobre 2001, et une décision a été rendue par la Chambre de première

19 instance selon laquelle les documents utilisés pendant le procès devaient

20 être fournis dans la langue parlée par le témoin, à savoir, le B/C/S, pour

21 qu'il est plus de facilité à en connaître la teneur. C'était une ordonnance

22 rendue par le Tribunal.

23 Je ne me souviens pas que tous les documents tels que les rapports de

24 "Human Right Watch" que nous avons sous les yeux en ce moment, et qui

25 viennent de Fred Abrahams, qui ont été rédigés en anglais, je ne suis pas

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1 au courant qu'ils n'ont pas été traduits en B/C/S dans le cadre du procès.

2 Il était entendu que tous les documents utilisés pendant le procès devaient

3 être remis à l'accusé dans la langue parlée par lui.

4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.

6 L'ACCUSÉ : [interprétation] S'agissant de ce que vient de dire M. Nice, il

7 n'y a eu aucune objection de ma part au sujet de ces documents. Je vous

8 rappellerai à vous-même ainsi qu'à M. Kwon, qu'à l'époque le Juge qui

9 présidait la Chambre était un autre Juge. Je me suis plaint à ce sujet. Je

10 me suis plaint de l'énorme volume de documents qu'on m'avait remis, et du

11 fait que ces documents n'étaient pas traduits. Je suppose que les résultats

12 de cette objection soulevée par moi sont représentés par la décision de la

13 Chambre, indiquant qu'il convenait que l'on me remette des documents

14 traduits. Il y a certainement eu des objections à d'autres moments, mais

15 ils ont été ignorés par la Chambre de première instance, et cette décision

16 de la Chambre n'a pas été respectée.

17 M. NICE : [interprétation] Je pense que ce, à quoi fait référence Me Kay,

18 concernait les documents à l'appui de l'acte d'accusation. La pratique à

19 l'égard des éléments de preuve depuis que je suis ici a déjà été décrite.

20 C'est tout ce que je puis dire.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La Chambre de première instance va

22 s'efforcer de retrouver l'ordonnance rendue et vérifiera plus avant ce

23 problème.

24 M. NICE : [interprétation] Je vous remercie.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Nice.

Page 40146

1 M. NICE : [interprétation]

2 Q. Voyez-vous, Monsieur Stevanovic, dans ce rapport que nous avons ici, à

3 la page qui se termine par 18. Je demande à

4 M. l'Huissier de suivre en même temps que nous. Il est question du décès

5 d'un homme qui s'appelle Arif Krasniqi, à l'endroit de son interrogatoire

6 au poste de police de Prizren où il était interrogé en qualité de témoin et

7 où deux officiers de police dont l'un s'appelle Jasovic mais le prénom est

8 différent de celui qui a témoigné ici, son prénom étant Momir et l'autre

9 s'appelle Tihomir, donc c'est suite aux coups reçus de la part de ces deux

10 hommes qu'Arif Krasniqi a péri. Slavisa Dobricanin a procédé à l'autopsie

11 et deux officiers ont été mis en examen.

12 Je demanderais à M. l'Huissier de nous montrer la page dont les deux

13 derniers numéros se terminent par 20, ce procès est résumé de la façon

14 suivante, je cite : "Les autres policiers ont accueilli chaleureusement

15 Jasovic et Kosovic à leur arrivée dans le prétoire au début de leur procès

16 le 23 novembre 1993, et menaçaient les avocats de la famille Krasniqi.

17 Après un procès court, le tribunal a déclaré coupable Jasovic et Kosovic

18 qu'il a condamné à trois ans de prison chacun, mais les deux hommes ont été

19 immédiatement libérés dans l'attente de leur appel."

20 Est-ce que ceci est une description raisonnable à vos yeux ? D'abord, est-

21 ce que vous êtes au courant de ce procès ? Vous étiez un policier très

22 expérimenté à l'époque, est-ce que vous avez eu connaissance de ce procès ?

23 R. Je ne suis pas au courant de ce procès même si j'ai l'impression de me

24 rappeler l'événement, mais je le confonds peut-être avec un autre

25 événement. Je pensais que l'événement dont vous alliez parler aurait un

Page 40147

1 rapport avec Kosovska Mitrovica. Mais que souhaitez-vous me demander ?

2 Q. Ma question consistait à vous demander si cette description vous paraît

3 raisonnable, cette description de la façon dont les officiers de police ont

4 été traités alors qu'ils étaient accusés d'avoir tué quelqu'un au cours

5 d'un interrogatoire. Trois ans de prison, une libération immédiate dans

6 l'attente de l'appel, est-ce que c'est la façon dont le système

7 fonctionnait ?

8 R. Avec votre permission, je ne souhaiterais pas répondre à votre

9 utilisation du terme "société". Je ne sais pas ce que vous entendez par

10 "société". Je sais comment fonctionnait la police et pour autant que la

11 police fonctionnait, son fonctionnement était clair pour moi. La police a

12 fait la lumière sur les événements, a établi qu'il y avait des doutes

13 raisonnables quant à la possibilité que ces policiers aient fait abus de

14 leur autorité ce qui a débouché sur la mort de cet individu, et tout à fait

15 manifestement, une plainte au pénal a été déposée, et toujours tout aussi

16 manifestement, l'affaire a été remise à la justice. Le tribunal étant

17 indépendant en République de Serbie vis-à-vis du pouvoir exécutif.

18 Q. Comment pouvez-vous parler d'abus de pouvoir lorsque cette action a

19 débouché sur la mort de quelqu'un. Vous, vous vous contentez de parler

20 d'abus d'autorité.

21 R. Abuser de son pouvoir ou de son autorité peut mener très loin. On peut

22 abuser de son pouvoir en tuant quelqu'un à l'aide d'une arme à feu dans des

23 circonstances qui ne permettent pas d'agir ainsi. Donc j'utilise la formule

24 et cette expression dans le cas précis. Bien entendu, lorsque nous parlons

25 d'assassinats, il faut évaluer l'intention et voir s'il y a eu

Page 40148

1 préméditation. Ils n'avaient aucune intention à l'époque de tuer qui que ce

2 soit, j'en suis tout à fait certain. Je ne connais pas les circonstances

3 précises de cette affaire, mais d'après ce que je vois, une plainte au

4 pénal a été déposée et les tribunaux ont agi. Bien entendu, la description

5 du comportement de ces policiers n'est pas tout à fait claire, mais ceci a

6 sans doute été rédigé sur la base d'une source d'information unique. Vos

7 policiers ici ont été très cordiaux à mon égard, si je puis me servir de

8 cela à titre d'exemple. Je demanderais si cette description a été faite sur

9 la base d'une seule source. Je crois que, dans les dossiers de la police,

10 il y a d'autres faits évoqués sûrement et je pense que cette description ne

11 se fonde pas sur l'intégralité des informations disponibles ou recueillies

12 par l'Unité policière qui a travaillé à l'endroit où cet événement a eu

13 lieu. Bien entendu, je ne sais pas ce cela serait absolument vrai car je

14 n'ai pas connaissance des détails, mais je pense que cela doit être le cas.

15 Q. Je vais vous demander de répondre de façon générale. Ecoutez bien et

16 nous examinerons un autre document avant ou après la pause si la Chambre

17 veut faire la pause maintenant.

18 Durant l'année 1993, trois organisations différents ont parlé de

19 brutalité policière de la part du SIV [phon], du fait qu'elle portait

20 atteinte au physique et au mental des gens, qu'elle tirait sur des

21 cadavres, qu'elle tuait des gens dans des postes de police, qu'elle

22 déplaçait des Albanais hors de leurs domiciles, qu'elle utilisait une

23 violence excessive contre les manifestants et qu'elle arrêtait et malmenait

24 les journalistes. Ceci se retrouve dans toute sorte de rapports qui nous

25 ont été remis, si la Chambre souhaite les voir, ils sont à la disposition

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1 de la Chambre.

2 D'abord, est-ce que vous affirmez que les autorités ont examiné très

3 attentivement toutes ces graves allégations émanant d'instances

4 indépendantes ?

5 R. J'affirme qu'une attention importante a été consacrée à tous les

6 événements précis évoqués dans ces allégations. Un policier ou un groupe de

7 policiers peut éventuellement, cela arrive, exercer une force excessive qui

8 a pour conséquence la mort de quelqu'un, cela ne signifie pas que toute la

9 police de Serbie exerçait la violence ou suscitait la peur.

10 Donc, je me répète : très souvent, on peut tirer des conclusions sur

11 la base d'un ou deux événements qui ne sont pas justifiés du point de vue

12 général. Il ne faut pas généraliser. Il ne faut pas tirer, sur la base d'un

13 ou deux événements, des conclusions sur le fonctionnement de toute la

14 police en tant que système. Cela, je ne l'accepte pas. Même si la Défense a

15 admis l'existence d'un certain cas d'événement de ce genre, je dirais que

16 cela ne permet pas d'incriminer la police dans son ensemble.

17 Q. Pouvez-vous et encore une fois, c'est un témoignage que je vérifie ici,

18 pourriez-vous identifier, nous donner le nom d'une société occidentale où

19 d'après-vous des protestations aussi nombreuses de violences policières ont

20 été émises au cours des années 1990 ?

21 R. En ce moment même, bien entendu, je ne peux pas le faire car je n'ai

22 pas d'informations précises à ce sujet. Mais je vous demanderais de ne pas

23 perdre de vue la situation très particulière du point de vue de la sécurité

24 qui se posait à la Serbie à l'époque. Vous ne pouvez pas comparer la

25 situation du point de vue de la sécurité et les menaces qui existaient en

Page 40150

1 Serbie dans cette période avec la situation, par exemple, des Pays-Bas ou

2 d'autres pays d'Europe occidentale. Il s'agissait de problèmes très

3 spécifiques. La situation était très complexe, les forces policières ont dû

4 agir dans une situation tout à fait extraordinaire où les problèmes de

5 sécurité étaient immenses. Elle devait protéger les frontières, elle devait

6 empêcher la guerre de s'étendre à son territoire, il fallait combattre le

7 terrorisme et toutes sortes d'autres problèmes. Ce n'est pas la police qui

8 a provoqué la violence au Kosovo, la police a combattu la violence. Il faut

9 bien combattre la violence entre autres en utilisant de temps en temps la

10 violence.

11 Q. Une autre interprétation des réactions policières par rapport à des

12 manifestations pacifiques a été fournie ici. La police était sous votre

13 commandement et je parle des manifestations qui ont eu lieu à la fin 1996

14 et en 1997. Lorsque l'accusé a cédé peu à peu, en reconnaissant le résultat

15 des urnes dans un processus démocratique que nous examinerons plus tard.

16 Mais je vous affirme que la violence policière avait pour but le maintien

17 du pouvoir entre les mains de l'accusé et vous le savez.

18 R. Monsieur le Procureur, vous avez parlé de 1996 et 1997. J'affirme et

19 vous pouvez le vérifier dans les vidéos d'archives que pendant trois mois,

20 la police a fait preuve d'une grande tolérance, d'une grande patience.

21 Pendant trois mois, l'action policière sur le terrain s'est faite dans la

22 tolérance. Or, vous vous extrayez deux ou trois séquences où on constate

23 des violences policières. Je répèterais que ce sont des exceptions parce

24 que vous ne nous avez rien montré qui soit à l'avantage, au profit des

25 forces de police serbe. Vous n'avez rien montré de ce que ces forces ont

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1 fait pendant trois mois, pendant ces trois mois de tolérance maximale sans

2 un seul cas de violence. Ensuite, il y a eu de la violence et vous nous

3 montrez dix à 15 secondes de séquences vidéo où l'on voit ces violences

4 policières. C'est tout à fait inacceptable.

5 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons faire la pause, Monsieur

7 Nice, 20 minutes de suspension.

8 --- L'audience est suspendue à 10 heures 34.

9 --- L'audience est reprise à 11 heures 00.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Nice.

11 M. NICE : [interprétation]

12 Q. Je vais aborder un nouveau sujet pratiquement sans tarder. Auparavant,

13 une seule question. Vous allez accepter, n'est-ce pas, l'idée qu'au moins

14 pour trois des instances que j'ai évoquées avant la pause, ces instances

15 ont continué à faire rapport de brutalités policières, d'assassinats par la

16 police, d'expulsions d'Albanais du Kosovo pendant toute la période allant

17 de 1993 à 1998 ?

18 R. Je ne peux pas être d'accord avec vous parce que je ne dispose pas de

19 faits pertinents à ce sujet. J'ai une remarque à formuler. Vous m'avez posé

20 la question en disant : "Vous allez être d'accord avec moi pour dire." Si

21 je dis : "Non." Est-ce que cela veut dire que je ne suis pas d'accord ou

22 que je suis d'accord ? Si vous ne pouvez pas changer cette façon

23 d'interroger, je vais devoir m'adapter, bien entendu, mais --

24 Q. Monsieur Stevanovic, vous savez parfaitement où je veux en venir. Est-

25 ce que vous acceptez ou est-ce que vous n'acceptez pas qu'on parlait de

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1 brutalités extrêmes de la part de la police, de nature criminelle et

2 pendant toutes les années 1990 ?

3 R. Maintenant, c'est plus facile de répondre. Il y a eu, en effet, des

4 rapports de cette nature, mais ces rapports ne sauraient être qualifiés de

5 la sorte; on ne pourrait pas dire que la police a eu recours à la

6 brutalité. Il y a eu des rapports, certes, disant que la police a

7 outrepassé ses compétences ou a usé de la force contrairement aux

8 dispositions de la loi. Il y a eu des conséquences d'assumées par certains,

9 comme on l'a déjà dit.

10 M. NICE : [interprétation] Messieurs les Juges, parmi les pièces qui

11 parlent de ce sujet, je n'ai pas le temps, ni l'intention personnellement

12 de les évoquer, mais il y a les pièces 188, 190, 204, 205, 772 et 773.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce sont des rapports venant d'où ?

14 M. NICE : [interprétation] Toute une série de rapports, le rapport

15 Mazowiecki ou de "Human Right Watch"; rapports qui abordent diverses

16 facettes de la vie en ex-Yougoslavie. Dans tous ces rapports, il y a des

17 passages consacrés aux brutalités policières ou brutalités analogues.

18 Plusieurs sujets sont ainsi couverts.

19 Q. Vous le savez, Monsieur Stevanovic, il y a des rapports publiés par le

20 centre humanitaire, ou le centre du droit humanitaire. Je vais vous poser

21 quelques questions. Ce matin, vous avez dit que ces rapports étaient

22 entachés de partis pris. Est-ce que cela veut dire que vous les avez lus

23 pour affirmer une telle chose ?

24 R. S'agissant de certaines des parties de ces rapports, oui, je les ai

25 lus. Bien sûr, je les ai lus il y a longtemps.

Page 40153

1 Q. C'est tout ce que je voulais savoir. Acceptez-vous que ces rapports,

2 dans la mesure du possible, donnent le nom de victimes et donnent le détail

3 des circonstances de façon à ce que vous, les autorités, si vous en

4 décidiez ainsi, vous pouviez mener un complément d'enquête ?

5 R. Dans ces rapports ou ces parties de rapports que j'ai lues, il y a eu

6 mention de faits s'agissant de certains événements. Je répète une fois de

7 plus, que ces faits-là ont fait l'objet de l'attention et d'une

8 vérification de la part de la police. J'ai dit pourquoi je pensais que cela

9 était partial et unilatéral. Je l'ai dit, parce que dans ces rapports, il

10 est, de façon prédominante, question de violence à l'encontre d'Albanais.

11 On ne dit pratiquement rien des violences commises par les terroristes vis-

12 à-vis des personnes innocentes. On n'y trouve presque rien au sujet

13 d'assassinats de --

14 M. NICE : [interprétation] Fort bien.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Laissez le temps au témoin de

16 terminer sa réponse.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je propose de finir en disant que soit on ne

18 retrouve rien ou très peu de choses au sujet d'assassinats, de mutilations,

19 de terrorisations [phon] vis-à-vis d'une population innocente sans parler

20 des policiers et des soldats. C'est partant de là que j'affirme qu'il

21 s'agit de rapports unilatéraux et partiaux. Il se peut qu'il y ait des

22 rapports qui n'ont pas été destinés à un usage public qui l'ait englobé

23 également.

24 M. NICE : [interprétation] Je demande l'autorisation de vous interrompre.

25 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, ce témoin répond longuement à

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1 toutes les questions.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il a expliqué pourquoi il a qualifié

3 ces rapports de partiaux. Il a le droit de le faire.

4 M. NICE : [interprétation]

5 Q. La question, c'était de savoir si ces rapports donnaient le nom de

6 victimes et fournissaient des détails; ce qui aurait permis de mener des

7 enquêtes plus approfondies.

8 Troisième question qui s'impose vu la réponse que vous venez de donner. La

9 voici : savez-vous que Natasa Kandic, qui est la directrice de ce centre du

10 droit humanitaire, a effectivement publié des documents portant sur les

11 souffrances subies par les Serbes ? Répondez simplement par un oui ou non;

12 cela suffira. Etes-vous au courant du fait qu'elle l'a fait ?

13 R. Non, elle ne l'a pas fait.

14 Q. Lorsque j'obtiendrai le livre, je vais vous le montrer. Je passe à

15 autre chose, enfin, dans un certain sens. Vous nous avez dit que vous étiez

16 allé à Kula en 1996, et vous avez dit être au courant du fait qu'il y avait

17 eu une autre commémoration analogue en 1997; c'est bien cela, n'est-ce pas

18 ?

19 R. S'agissant de la première partie de votre question, ma réponse est

20 affirmative. Elle est affirmative à la deuxième partie aussi. S'agissant de

21 cette célébration ou de cette cérémonie, j'en eu vent à Belgrade.

22 Q. Vous parlez d'un entretien avec qui et organisé par qui ?

23 R. Avec vos enquêteurs, il y a trois mois.

24 Q. Fort bien. Je vais demander la diffusion d'une séquence de cette

25 commémoration de 1997.

Page 40155

1 M. NICE : [interprétation] C'est déjà versé au dossier en tant que pièce à

2 conviction. Nous avons à votre disposition une copie de courtoisie, parce

3 que sinon, il sera plus difficile de suivre si l'écran est occupé par les

4 images qui vont être diffusées. Oui.

5 Je reviens au point précédent, puisque j'ai maintenant physiquement le

6 livre entre les mains.

7 Q. Monsieur Stevanovic, Natasa Kandic a publié un livre portant sur la

8 disparition de non-Albanais au Kosovo. Je suppose que vous n'avez jamais

9 pris la peine de lire ce livre, n'est-ce pas ? C'est une version en anglais

10 ici.

11 R. Je n'en suis pas sûr. Il se peut que j'aie lu des bouts, mais je n'en

12 suis pas sûr.

13 Q. Pouvons-nous --

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce que vous vouliez faire valoir,

15 Monsieur Nice, c'est que cette dame a fait des publications sur les

16 violences commises sur les Serbes.

17 M. NICE : [interprétation] Tout à fait. Quand on parle de non-Albanais, il

18 y a des Serbes.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, effectivement. Vous nous préciser

20 que c'est le cas ?

21 M. NICE : [interprétation] Oui.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien.

23 M. NICE : [interprétation] Ce sont les Serbes et les Rom. Ce sont surtout

24 ces catégories qui sont concernées par le livre.

25 Je vais maintenant demander la diffusion de certains passages. Vous avez

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1 reçu copie. Les passages qui vont être diffusés sont en encadré.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] En ce qui concerne ce livre, quand

3 a-t-il été publié ?

4 M. NICE : [interprétation] Nous allons vous le dire dans un instant. Si on

5 n'indique pas la date de publication, je crois que le contexte nous

6 permettra de situer le moment où ce livre a été publié.

7 Le compte rendu d'audience, ou ce compte rendu de la séquence a déjà été

8 versé au dossier, pièce 390. Ici, je pense qu'on a apporté quelques

9 corrections pour qu'il y ait une continuité dans le sens. Je ne sais pas si

10 c'est l'original qui a été versé ici en tant que tel dans sa totalité au

11 390.

12 Diffusons la séquence.

13 [Diffusion de cassette vidéo]

14 M. NICE : [interprétation] Normalement vous devriez recevoir la traduction

15 par les casques. Désolé, ce n'est pas le cas. Ce serait utile d'avoir

16 l'interprétation.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] A-t-on remis un exemplaire de ce

18 compte rendu ?

19 M. NICE : [interprétation] Apparemment, cela a été fait. Ils ont reçu ce

20 texte.

21 L'INTERPRÈTE : Les interprètes précisent qu'il serait utile de savoir où se

22 trouve cet extrait.

23 M. NICE : [interprétation] Pour le moment, c'est surtout l'aspect

24 cérémonial que l'on voie.

25 [Diffusion de cassette vidéo]

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1 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

2 "Membres de cette Unité spéciale, je vous salue, les policiers ensemble.

3 Salut."

4 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

5 M. NICE : [interprétation] Oui, ceci suffira, le reste vous avez des

6 paroles et non pas l'aspect de la cérémonie.

7 Q. Vous avez reconnu, n'est-ce pas, un homme répondant au surnom de

8 Legia ? Milorad Lukovic ?

9 R. Oui.

10 Q. Je reviens à ce que j'ai dit tout au début, un homme qui est

11 aujourd'hui accusé d'avoir assassiné Djindjic.

12 R. Oui.

13 Q. Apparemment, sous le nom de code pour l'opération Arrêtons La

14 Haye.

15 R. C'est ce que font comme commentaires les médias.

16 M. NICE : [interprétation] Séquence suivante, s'il vous plaît.

17 [Diffusion de cassette vidéo]

18 L'INTERPRÈTE : [Voix sur voix]

19 "Monsieur le président, les vétérans de l'Unité d'opération spéciale

20 de la Sûreté de l'Etat de Serbie sont alignés pour être passés en revue. Le

21 colonel Zika Ivanovic se présente.

22 Milosevic : Bonjour, Ivanovic.

23 Colonel Ivanovic : Monsieur le président, permettez-moi de vous présenter

24 les vétérans, les anciens de l'unité. Monsieur le président, le colonel

25 Radojica Bozovic.

Page 40158

1 Milosevic : Salut, Bozovic.

2 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

3 M. NICE : [interprétation] Arrêt sur image, s'il vous plaît.

4 Q. Dites-nous ceci pour nous aider, Monsieur Stevanovic : apparemment ce

5 colonel a écrit des rapports qui ont été lus par l'accusé. Si vous avez

6 quelqu'un qui a un grade de colonel, quel genre de rapports écrit-il, peut-

7 on les qualifier d'opérationnels ?

8 R. Cela dépend du sujet dont il informe ou plutôt des ordres qu'il a

9 réalisés ou qu'il a obtenus. Je ne peux pas vous répondre à une question de

10 ce type, je ne dispose pas d'éléments pour pouvoir vous répondre. Qu'avez-

11 vous à l'esprit ?

12 Q. Aidez-moi. Vous avez été dans l'armée, quel est le grade militaire que

13 vous aviez en tant qu'officier de réserve au moment d'être promu général,

14 en 1995 ?

15 R. Je vous ai déjà répondu. En 1990 ou au plus tard en 1993, j'ai eu le

16 titre le plus éminent au sein de la police. Le grade que j'ai eu en ma

17 qualité de ministre adjoint n'était pas le plus élevé.

18 Q. Avant, avant cela, écoutez ma question. Quel était le grade militaire

19 le plus élevé qu'il vous a été donné d'avoir parce que vous avez terminé

20 l'académie militaire ?

21 R. J'ai terminé mes études à l'Académie militaire et j'ai acquis un grade

22 de sous-lieutenant dans l'armée. Par la suite, j'ai eu de la promotion dans

23 les effectifs de réserve. Croyez-moi, que je ne sais pas trop. J'ai été au

24 plus capitaine, peut-être commandant, mais je n'en suis pas très certain.

25 Je n'ai pas été intéressé, parce que j'étais dans le métier de policier.

Page 40159

1 Q. Je vous remercie, fort bien. Si vous avez un colonel qui fait état des

2 activités de ses effectifs. Je suppose qu'un tel colonel va présenter un

3 bilan de ce qu'il a fait, de ce qu'il a accompli, lui et ses hommes. C'est

4 vrai, n'est-ce pas ?

5 R. Tout responsable en principe présente ce type de rapports à l'intention

6 de son supérieur. Mais le grade ne nous dit pas suffisamment ou ne nous

7 apporte pas suffisamment d'éléments sur la teneur du rapport, c'est plutôt

8 sa fonction qui le fait. Alors, je voudrais savoir quelle a été sa

9 fonction, quelles étaient ses missions pour que je puisse vous dire quel

10 est le sens ou la définition plus précise de son rapport.

11 Q. Fort bien. Poursuivons la diffusion de la séquence.

12 [Diffusion de cassette vidéo]

13 L'INTERPRÈTE : [Voix sur voix]

14 "Colonel Ivanovic : Le colonel Dusan Orlovic.

15 Milosevic : Ravi de vous rencontrer, Orlovic.

16 Colonel Borovic : Le colonel Vasilje Mijovic.

17 Milosevic : Ravi de vous rencontrer.

18 Colonel Ivanovic : Colonel Goran Opacic.

19 Milosevic : Bonjour, [inaudible]

20 Colonel Ivanovic : Colonel Predrag Prica.

21 Milosevic : Ravi de vous rencontrer.

22 Colonel Ivanovic : Lieutenant-colonel Zvjezdan Jovanovic.

23 [Inaudible]"

24 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

25 M. NICE : [interprétation] Arrêtez, s'il vous plaît.

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1 Q. Je ne pense pas que nous ayons vu Zvjezdan Jovanovic, mais vous

2 connaissez bien ce nom, n'est-ce pas, Monsieur Stevanovic ?

3 R. Depuis qu'il a été arrêté pour meurtre. J'ai connaissance de ce

4 nom, depuis qu'il a été arrêté au sujet de l'assassinat du premier ministre

5 Djindjic.

6 M. NICE : [interprétation] Fort bien. Passons à l'extrait suivant.

7 [Diffusion de cassette vidéo]

8 L'INTERPRÈTE : [Voix sur voix]

9 "Monsieur le Président, nous vous remercions d'avoir accepté

10 l'invitation de participer à cette cérémonie qui commémore l'anniversaire

11 de la formation de l'Unité d'affectation spéciale de la Sûreté de l'Etat.

12 Elle a été constituée le 4 mai 1991, au moment de la désintégration de

13 l'ex-Yougoslavie. Depuis, elle a agi de façon constante pour protéger la

14 sécurité nationale dans des circonstances où l'existence du peuple serbe a

15 été mise directement en péril sur tout son territoire ethnique. Ces

16 opérations de combat étaient antiterroristes, avaient pour objet d'empêcher

17 les crimes de guerre, les représailles massives et le génocide.

18 Depuis le premier moment de son existence, et de son établissement --

19 "

20 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

21 M. NICE : [interprétation]

22 Q. Pas de raison de douter de ce que dit Frenki Simatovic à propos de ce

23 qu'il dit, à savoir, que cette unité a été formée le 4 mai 1991, n'est-ce

24 pas ?

25 R. J'ai déclaré quelque chose d'analogue, il y a deux ou trois mois dans

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1 une interview à Belgrade, parce que la question a été posée de façon

2 suggestive. Je n'ai pas voulu traiter de la question de façon approfondie.

3 J'avais la qualité de suspect cette fois-là. Je voulais qu'on parle de

4 questions qui étaient celles de mon domaine d'intervention.

5 Q. A aucun moment, on ne pourrait dire que l'armée de Frenki Simatovic,

6 elle aurait été subordonnée à l'armée, n'est-ce pas ?

7 R. Vous me demandez si l'Unité de Frenki Simatovic avait été resubordonnée

8 à l'armée, c'est bien ce que vous me demandez ? D'après ce que j'en sais,

9 jamais. Je n'ai jamais posé la question, moi.

10 Q. Fort bien. Vu tous les documents que vous aviez à votre disposition et

11 que nous avons nous aussi, son unité, soit elle était subordonnée au MUP,

12 ou directement à l'accusé. Laquelle des deux options est la bonne ?

13 R. Cette unité dont nous parlons ici, faisait partie du segment de la

14 Sûreté de l'Etat, donc, elle faisait partie du ministère de l'Intérieur.

15 Pour être plus précis, cela faisait partie du segment du secteur de la

16 Sûreté de l'Etat.

17 [Diffusion de cassette vidéo]

18 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

19 "L'unité a traversé une épopée héroïque, son chemin a été un des chemins

20 les plus difficiles parcourus dans l'histoire de notre lutte. Vu les

21 circonstances internationales que nous connaissons tous, nous avons été

22 forcés d'opérer dans le plus grand secret en dépit des conditions de

23 guerre. Nous avons combattu avec les forces croates et musulmanes, il y

24 avait la présence de beaucoup de forces internationales des Nations Unies,

25 l'IFOR, puis la SFOR et de nombreux représentants des outils, des

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1 instruments des services de Renseignements étrangers sur le terrain.

2 La contribution de l'Unité d'affection spéciale est énorme, 47

3 soldats ont été tués, 250 blessés au combat, à 50 endroits différents.

4 Nous sommes fiers de la formation professionnelle de l'unité, qui répond

5 aux normes les plus élevées dans le monde et l'unité n'a jamais connu la

6 défaite. Un de ses récent succès, c'est l'engagement visant à la libération

7 de 400 otages de la FORPRONU, en Republika Srpska. Ce qui a rencontré un

8 écho tout à fait favorable dans la communauté internationale et renforcé la

9 position de notre pays. Une des actions les plus réussies sur notre

10 territoire, c'était la capture d'un groupe terroriste du corps de la garde

11 nationale, attrapé dans la région d'Apatin, en 1993.

12 Monsieur le Président, permettez-moi de vous informer, en quelques

13 mots, de l'histoire de l'unité, de ces antécédents, de sa situation

14 actuelle et de son fonctionnement. Lorsqu'elle a été formée, elle avait en

15 son cœur des membres de notre service. La police de la République de la

16 Krajina serbe et des volontaires de Serbie. La deuxième administration des

17 services de guerre du Renseignement, qui a aussi été formée à l'époque,

18 comprenait une équipe spéciale."

19 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

20 M. NICE : [interprétation]

21 Q. Il y avait, donc, une organisation secrète. C'est bien ce que c'était,

22 n'est-ce pas ?

23 R. C'est ce que j'ai cru comprendre de ce qu'il a dit, si j'ai bien

24 compris --

25 Q. Comprenant des personnes qu'on qualifie ici de volontaires venant de

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1 Serbie.

2 R. C'est ce qu'il a dit.

3 Q. Fort bien.

4 M. NICE : [interprétation] Poursuivons la diffusion.

5 [Diffusion de cassette vidéo]

6 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

7 "Dans les zones de Benkovac, Stari Gospic, Plitvice, Glina,

8 Kostajnica et d'autres, l'unité a fourni un soutien important pour la

9 libération de toutes ces régions de la RSK. Quelque 5 000 soldats ont été

10 engagés dans ces combats et leur action a été coordonnée par le

11 commandement de l'unité et une équipe du Renseignement du deuxième bureau.

12 En mai 1991, un escadron d'hélicoptères a été formé pour transporter

13 des tonnes de matériel spécial, d'équipements, d'effectifs et d'armes, à

14 partir des aérodromes improvisés de Medeno Polje, Petrovac, Velika Popina,

15 Srb et Udbina pour mener des missions complexes."

16 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

17 M. NICE : [interprétation]

18 Q. Entre parenthèses, l'homme qui se tient debout derrière Milosevic

19 s'est, bien entendu, Stanicic, n'est-ce pas ?

20 R. Oui, c'est M. Stanicic.

21 Q. Jusqu'à présent, ce que nous avons vu, les endroits qu'on

22 mentionne comme étant des lieux où se sont rendus les membres de l'unité.

23 On parle de Benkovac, Stari Gospic, Plitvice, Glina, et cetera. Vous n'avez

24 pas parlé de ces endroits, n'est-ce pas, lorsque vous avez commencé votre

25 déposition, il y a quelques jours ?

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1 R. Ceux ne sont pas ces localités.

2 Q. Est-ce parce que vous n'étiez pas tenu au courant des lieux où

3 combattaient ces unités, ou est-ce que c'est parce que, délibérément, vous

4 avez décidé d'omettre de mentionner ces endroits ?

5 R. Je n'ai absolument pas décidé de mentionner ou de ne pas

6 mentionner. Je répondrais surtout ce que je sais et je répondrais de façon

7 claire conformément à ce que je sais. Mais, partant de ce que j'ai entendu

8 dire dans cet enregistrement, cela ne correspond pas à ce que j'en sais.

9 Deuxièmement, tout ce qui a été dit ici diffère du discours de la

10 même personne en 1996. Je suis donc, véritablement surpris d'entendre

11 Frenki Simatovic s'exprimer ainsi de façon très différente par rapport à ce

12 qu'il a fait en 1996 concernant l'historique de l'unité. Tout ce qu'il dit

13 au sujet de cette unité, et il n'a parlé à ce moment-là des membres de son

14 unité qui entretiennent, qui prennent soin des traditions de cette unité et

15 qui les a reprises de l'unité existant auparavant. C'est ce qu'il a dit.

16 Q. Excusez-moi, savez-vous s'il y a un enregistrement vidéo de

17 ladite cérémonie ?

18 R. Je ne sais pas s'il existe un enregistrement vidéo. Je ne sais

19 vraiment pas.

20 Q. Continuons la diffusion de l'extrait.

21 [Diffusion de cassette vidéo]

22 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

23 "Ces deux unités ont participé à des opérations en Slovénie

24 orientale, Baranja, extrême occidentale. Vingt-six camps d'entraînements

25 pour les Unités spéciales de la Police dans la Republika Srpska et dans la

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1 République de Serbie, de RSK ont été formés au cours de cette époque. En

2 République de RSK à Golubic, de Dinara, Obrovac, Gracac, Plitvice,

3 Samarice, Petrova Gora, Licki Osik, Benkovac, Lezimir, Ilok et Vukovar; il

4 y avait aussi en Serbie, Banja Luka, Doboj, Samac, Brcko, Bejeljina,

5 Trebinje, Visegrad, Ozren et Mrkonjic Grad.

6 Des unités, des opérations conjointes serbes en Slavonie orientale,

7 il y a avait le couloir de Brcko, de la Drina, à Sarajevo, autres

8 opérations qui étaient menées. En Bosnie occidentale, l'unité à été l'épine

9 dorsale de l'armée de Fikret Abdic avec environ 15 000 soldats qui ont

10 libéré la plus grande partie de Cazin Krajina."

11 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

12 M. NICE : [interprétation]

13 Q. Ici, on donne le nom de camps d'entraînement et de lieux d'engagement

14 de l'unité. C'est tout à fait différent de ce que vous avez mentionné. Il y

15 a quelques jours comme étant des lieux d'intervention en Bosnie et en

16 Croatie.

17 R. J'ai mentionné rien que les localités où des missions ont été

18 effectuées par les Unités spéciales de la Police et j'ai indiqué les

19 endroits concrets où j'ai été moi-même. S'agissant de la présence d'unités

20 en provenance de la République de Serbie et des localités qui sont

21 énoncées, je n'en ai aucune connaissance.

22 Q. Si c'est vrai ce que vous dites et si ce que Frenki dit est

23 exact, est-ce que cela veut que la DB du MUP était hermétiquement fermée et

24 inaccessible à la Sûreté de l'Etat ?

25 R. Dans le cadre du ministère de l'Intérieur, il y a la Sécurité

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1 publique et la Sûreté de l'Etat. Le secteur de la Sûreté de l'Etat était

2 dissocié sur le plan organisationnel du secteur de la Sécurité publique.

3 Ces deux secteurs, bien entendu, faisaient partie intégrante du ministère

4 de l'Intérieur.

5 Q. En fin de compte, étaient redevables envers l'accusé ?

6 R. Non. Ils étaient redevables à l'égard du ministère de

7 l'Intérieur.

8 Q. Celui-ci, à qui rendait-il compte ?

9 R. Il rendait des comptes devant le gouvernement. Il avait des

10 responsabilités déterminées vis-à-vis du président de la République. J'ai

11 déjà expliqué pour ce qui est de présenter au président des rapports suite

12 à une demande ou des demandes de sa part. Mais le ministre était membre du

13 gouvernement et répondait de ce qu'il faisait devant ce gouvernement.

14 Q. Vu la façon dont vous comprenez la structure du gouvernement de

15 l'accusé, pouvez-vous nous expliquer comment il se fait que les rapports du

16 colonel étaient lus par le présent accusé ?

17 R. Tout d'abord, je ne pense pas qu'il ait lu le rapport du colonel.

18 Il devait rendre le rapport du ministre, mais je n'ai pas --

19 Q. Pourquoi est-ce que c'est votre avis ? Pourquoi croyez-vous une

20 telle chose ? Vous avez entendu ce qu'il a dit. Pourquoi faudrait-il leur

21 donner une autre interprétation que ce qu'ils disent par écrit ?

22 R. Je ne l'ai pas entendu dire qu'il avait présenté un rapport au

23 président. Je n'ai peut-être pas fais attention. Je réponds ici partant de

24 connaissance générale ou d'informations générales. Je n'ai pas parlé de

25 liens qu'avait le ministre vis-à-vis du gouvernement et du président. Ce

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1 sont des choses que je connais parce que cela fait partie de mes

2 connaissances générales. Je n'ai pas été présent à l'occasion de ces

3 réunions du gouvernement ou alors réunions avec le président, mises à part

4 les quelques réunions où j'ai été, effectivement présent, mais que j'ai

5 mentionnées, que j'ai citées.

6 Q. Vous dites qu'il y a des différences entre le récit qui est fait en

7 1996 et celui qui est fait en 1997 par Simatovic. Vous avez entendu un de

8 ces récits dans l'enregistrement. Est-ce que vous nous demandez de penser

9 que Simatovic concoctait toutes ces choses pour les raconter à l'accusé ?

10 R. Je crois qu'il est dur de tirer une conclusion de cette nature. Cela me

11 semble également. Maintenant, après avoir vu cet enregistrement, je me

12 demande quelles peuvent être les raisons de voir cela. Il se peut que

13 Franki Simatovic veuille se vanter un peu devant le président de la Serbie.

14 Cela ne fait pas souvent partie intégrante de rapports populaires

15 s'agissant de cérémonies de ce type où il s'avère nécessaire de faire la

16 publicité de sa propre unité et des traditions de celle-ci. Je crois bien

17 qu'il se réfère à ces années passées pour ce qui est d'activités déployées

18 par des membres qui, auparavant, avaient fait partie d'unités différentes.

19 Tout simplement, je n'arrive pas à trouver une autre explication. Il serait

20 bon d'avoir cet enregistrement vidéo de 1996, ceci pour vérifier si mes

21 suppositions sont justes ou pas.

22 Q. Entre parenthèses, est-ce que vous avez eu l'occasion de discuter de

23 cette question avec M. Simatovic après qu'il a été interrogé par les

24 enquêteurs ?

25 R. Moi, non.

Page 40168

1 Q. Vous n'avez pas vu cet enregistrement vidéo à la télévision nationale

2 lorsque cette émission a été diffusée en 2003 ?

3 R. J'ai vu une partie de ces enregistrements en suivant le procès ici

4 présent. Pour ce qui est de tous les détails, je ne les ai pas vus. J'ai vu

5 ce passage en revue, cette présentation de rapports, et ainsi de suite,

6 mais je n'ai pas suivi tous les détails de cet enregistrement.

7 Q. Dans votre idée, dans ce que vous nous dites, il y a ceci. Simatovic va

8 inventer des détails pour ce qui est de ces camps d'entraînement, à propos

9 de ces combats menés sur le territoire de la Bosnie ou de la Croatie, alors

10 qu'apparemment, il n'aurait rien fait de tout cela. Vous voulez, si c'était

11 possible, que nous croyions une telle chose ?

12 R. Non. Je n'insiste pas sur quelque segment que ce soit auquel vous

13 devriez prêter foi ou pas. Je vous dis ce que je sais. Ici, j'ai répondu

14 sur ce que je pensais, parce que la question que vous aviez posée était

15 ainsi formulée. Ceci mérite une attention toute particulière.

16 Q. Passons à la diffusion de l'extrait suivant.

17 [Diffusion de cassette vidéo]

18 M. NICE : [interprétation] Ici, nous voyons Stanisic qui montre certaines

19 choses sur une carte à l'accusé.

20 [Diffusion de cassette vidéo]

21 L'INTERPRÈTE : L'interprète précise que la conversation est inaudible --

22 M. NICE : [interprétation] Arrêt sur image, s'il vous plaît.

23 Q. Vous souvenez-vous de ceci, à qui était dédiée cette plaque

24 commémorative ?

25 R. Absolument pas. Du reste, on ne voit rien sur l'enregistrement vidéo.

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1 Je ne me souviens d'aucune plaque analogue.

2 Q. Est-ce que vous vous souvenez que le centre portait jusqu'à il y a

3 récemment le nom de Radislav ou Radoslav Kostic ?

4 R. Je pense que cela portait le nom --

5 Q. Il est mort au combat en 1994. Vous vous en souvenez ?

6 R. Non, je ne me souviens pas du tout.

7 Q. Très bien. Continuons.

8 [Diffusion de cassette vidéo]

9 M. NICE : [interprétation] Arrêtons-nous.

10 Q. Lorsque vous y êtes allé en 1996 dans ce centre, avez-vous vu cette

11 carte ?

12 R. J'ai vu une carte. Je ne sais pas si c'est celle-là, et je ne sais pas

13 si elle se présentait ainsi.

14 Q. Elle montre des lieux où l'on dit que se seraient déroulé des combats.

15 M. NICE : [interprétation] Je vais demander qu'on place d'abord sur le

16 rétroprojecteur cette carte avec les annotations en ce qui concerne la

17 Bosnie et la Croatie.

18 Q. Est-ce qu'à votre avis, c'est la carte que vous avez vue en 1996 ?

19 C'est une carte en relief; ce n'est pas une carte plate.

20 R. Je ne pense pas avoir vu cette carte. Je suis très certain de ne pas

21 avoir vu cette carte-là.

22 Q. Merci. Fort bien.

23 R. C'est la première fois que je vois celle-ci.

24 Q. C'était tiré -- c'était un plan fixe de l'enregistrement vidéo.

25 Regardez maintenant celle-ci -- deux cartes [phon]. C'est la même avec les

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1 mêmes inscriptions qui ont été apportées, à l'exception de certains lieux,

2 de certaines villes, dont on a inscrit le nom. Vous voyez Bosanski Samac,

3 Brcko, Bijeljina, Doboj, Zvornik, en Bosnie-Herzégovine. Autant de lieux

4 mentionnés dans l'enregistrement vidéo, et pour lesquels nous avons la

5 preuve qu'il y a eu des actions qui ont été menées au cours de la guerre.

6 Vous, vous nous avez dit auparavant, ou en réponse à une question posée par

7 l'accusé, vous avez répondu ceci : "Je connais toutes les actions menées

8 par la police de Serbie en dehors du territoire de la Serbie.

9 R. C'est ce que j'affirme à présent également.

10 Q. Vous nous avez parlé de quelques événements survenus dans la partie

11 orientale de la Croatie du côté de Vukovar et de quelques activités menées

12 à la partie orientale de la Bosnie. Avez-vous des raisons de croire que

13 l'unité, cette Unité de Simatovic a fonctionné dans tous ces endroits, a

14 opéré dans tous ces endroits qui sont indiqués sur la carte, et qui portent

15 désormais un nom ici, selon cet exemplaire-ci de la carte ?

16 R. Là aussi deux questions se posent. Toutes les notions géographiques qui

17 ont été mentionnées par mes soins demeurent en vigueur. Pour ce qui est de

18 ces noms géographiques qui se trouvent ici, que je n'ai pas mentionnés, je

19 ne saurais vraiment avoir de connaissance quelle qu'elle soit à ce sujet.

20 Bien sûr, les Unités spéciales de la Police se sont trouvées sur le

21 territoire de la Bosnie occidentale et non pas seulement de la Bosnie

22 orientale comme vous l'avez dit.

23 [Diffusion de cassette vidéo]

24 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

25 "Chers, saluons la mémoire de Radovan Stojicic surnommé Badza par une

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1 minute de silence.

2 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

3 M. NICE : [interprétation] Arrêt ici, s'il vous plaît.

4 Q. C'était votre chef, cet homme, n'est-ce pas ?

5 R. Oui.

6 Q. Nous allons examiner un autre événement dans ce contexte. Tout d'abord,

7 voyons la fin de cet extrait vidéo.

8 [Diffusion de cassette vidéo]

9 M. NICE : [interprétation] Il se termine cet extrait, nous le voyons, par

10 ces images suivantes. A gauche, vous avez Legija, puis vous avez l'accusé.

11 A la droite de l'accusé, Stanisic. Ils passent en revue, ils font

12 l'inspection de l'équipement militaire. Nous allons simplement regarder le

13 premier véhicule.

14 Q. Lorsque vous êtes allé là-bas en 1996, est-ce que vous avez vu un

15 véhicule transporteur de troupes qui avait été saisi, qui avait été pris

16 aux Néerlandais à Srebrenica ?

17 R. J'ai vu plusieurs véhicules, mais je ne sais pas du tout qu'on -- si on

18 a saisi un véhicule hollandais à Srebrenica.

19 Q. Parlons rapidement de Badza Stojicic, ou plutôt de ses obsèques. Il a

20 été abattu par arme à feu. Il a eu l'avantage ou bénéficié d'une cérémonie

21 importante, n'est-ce pas ?

22 R. Oui.

23 [Diffusion de cassette vidéo]

24 M. NICE : [interprétation] Arrêtons ici.

25 Q. On le voit, pratiquement en plein centre, Arkan. A gauche, en

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1 lunettes solaires Sainovic. A la droite de Badza -- pas de Badja

2 -- je me trompe, mais d'Arkan, on voit Lilic. Puis, nous voyons en partie

3 cachée par un chapeau l'accusé.

4 [Diffusion de cassette vidéo]

5 M. NICE : [interprétation] Extrait suivant.

6 [Diffusion de cassette Vidéo]

7 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

8 "Radovan Stojicic n'avait pas de secret dans son travail. Il a

9 directement pris part aux opérations les plus complexes où il manifesté un

10 courage et un esprit de sacrifice extrême. Pour Radovan Stojicic, le

11 patriotisme n'était pas confirmé par des récits de patriotisme; c'était

12 confirmé directement sur les lieux où il a pris part à ces événements, là

13 partout où cela était nécessaire et où cela a été le plus difficile."

14 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

15 M. NICE : [interprétation] Je vous remercie.

16 Q. D'après ce que vous, vous avez relaté, il s'agit ici d'un chef de

17 police, du chef de la police nationale, quelqu'un qui se contentait d'être

18 à la tête d'un service de Police national. De quel patriotisme devait-il

19 faire preuve ?

20 R. Il est logique d'exiger de la part de chacun un certain patriotisme.

21 Chacun laisse son pays, et chacun est censé être disposé à le défendre.

22 C'est dans ce sens-là que j'ai compris le terme.

23 Q. Vous avez parlé des situations complexes qu'il a eues à gérer. Est-ce

24 que ce sont des événements de l'autre côté de la frontière en Croatie et en

25 Bosnie ?

Page 40173

1 R. A plusieurs reprises, déjà, j'ai expliqué la complexité des

2 circonstances au niveau de la sécurité en République de Serbie pendant

3 cette période. J'ai comparé avec la complexité de la situation dans

4 d'autres pays. Cela ne se compare pas.

5 Ce l'on sait, c'est que M. Stojicic a séjourné dans la Baranja et

6 dans la Slavonie orientale dans le cours de 1991, 1992 alors que je me

7 trouvais au Kosovo et Metohija. Mais il ne se trouvait pas là-bas avec ses

8 unités à lui. Comme je l'ai appris, il est allé là-bas en sa qualité

9 d'individu. Il se peut que certaines autres personnes du ministère de

10 l'Intérieur aient été là-bas avec lui. Il est certain, que d'après ce que

11 j'en sais, les Unités du ministère de l'Intérieur n'ont pas été là-bas avec

12 lui.

13 Q. La vérité, n'est-ce pas ceci, vous avez loué Badza pour son

14 patriotisme. N'était-ce pas là la même qualité qu'on demandait ou qu'on

15 recherchait dans la JSO ?

16 R. Exact.

17 Q. Donc, c'est un patriotisme serbe. Cela n'avait rien à voir avec l'ex-

18 Yougoslavie. Ce qui était en jeu, c'était les intérêts des Serbes.

19 R. Sur le plan verbal, on pourrait ranger parmi les terroristes ceux des

20 criminels qui se qualifient eux-mêmes de patriotes. Je crois qu'il s'agit

21 ici d'un terme positif, à connotation positive, mais la signification peut-

22 être différente suivant le fait de savoir qui est-ce qui l'utilise et de

23 quelle façon.

24 J'ai utilisé ces termes-là dans leurs sens positifs.

25 Q. Badza, alors qu'il occupait un poste aussi élevé avant d'être tué,

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1 comment aurait-il pu aller dans ces territoires en tant que simple

2 individu ? Comment aurait-ce été possible ?

3 R. Je pense avoir déjà dit, qu'à ce moment-là, j'étais au Kosovo. Je ne

4 vaquais qu'à ces taches-là, tâches qui m'ont été confiées par la direction

5 et la situation telle qu'elle se présentait. Je ne sais vraiment pas sur le

6 plan concret, suivant quelle nécessité il s'était trouvé là-bas. Ce que je

7 sais, c'est qu'il ne s'y est pas trouvé avec des unités. Pour autant que je

8 le sache, il a été nommé là-bas dirigeant de la Défense territoriale ou

9 d'une instance semblable.

10 Donc, il n'a pas été à la tête d'une unité. Je ne sais pas s'il

11 s'était présenté là-bas en tant que volontaire ou s'il s'agissait d'une

12 forme de coopération; cela, je l'ignore vraiment.

13 Q. Est-ce que ce sont ces événements complexes dont vous n'aviez pas

14 connaissance, sont-ce ces événements que vous avez évoqués de façon assez

15 elliptique lorsque vous avez pris la parole à ses obsèques, lorsque vous

16 avez parlé des missions complexes qui avaient été les siennes.

17 R. Cela s'est passé il y a longtemps, bien entendu. Ce que je pense

18 personnellement, c'est que s'agissant de circonstances complexes, je

19 n'entendais pas des circonstances ou des événements à l'extérieur de la

20 Serbie. C'est la Serbie qui a dû faire face à des problèmes énormes, et la

21 police de la Serbie a dû faire face à des défis de taille. Bien entendu,

22 elle n'était pas la seule.

23 Q. Je vous remercie. Examinons maintenant cette pièce-ci ou ce document.

24 R. Du reste, les discours que l'on tient aux enterrements de qui que ce

25 soit, vous savez de quoi ils ont l'air, vous savez tout ce qu'il va

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1 comporter.

2 Q. Monsieur l'Huissier, ayez l'obligeance de nous aider. Présentez

3 l'original au témoin. La version en anglais sera placée sur le

4 rétroprojecteur. C'est la 277.

5 Avez-vous vu déjà ce document ?

6 R. Le premier document, non.

7 Q. Lisons-le ensemble. Non, excusez-moi, ce n'est pas le bon document;

8 c'est la lettre -- la page de garde. Document suivant. J'espère que

9 l'accusé a le deuxième document qui est de 1997.

10 Avez-vous déjà vu ce document, Monsieur le Témoin ?

11 R. Si vous parlez de la lettre d'accompagnement, non, je ne l'ai

12 certainement pas vue.

13 Q. Non. Ce qui nous intéresse, c'est le document de base. Vous l'avez déjà

14 vu ?

15 R. Laissez-moi lire. Je pense que je ne l'ai pas vu.

16 Q. Nous allons le lire ensemble : "Pendant la période qui a précédé

17 l'adoption de la loi portant mise en œuvre de la sécurité de la République

18 fédérale de Yougoslavie, le service de la Sûreté de l'Etat va s'acquitter

19 de ses obligations conformément aux instructions données par le président

20 de la République et par la République du gouvernement ou -- le gouvernement

21 de la République Serbe." La date est celle d'avril 1997, et la signature

22 est celle de l'accusé. C'est tout à fait anticonstitutionnel, n'est-ce pas

23 ?

24 R. Ce n'est pas une question à me poser à moi. Je ne sais vraiment pas

25 vous dire si c'est constitutionnel ou pas. Il se réfère en haut à un

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1 article déterminé de la constitution. Je n'ai pas vu ce document. J'en ai

2 entendu quelque peu parler, mais je ne sais pas ce que ce document veut

3 dire au juste, et quelle est sa signification. Je ne sais pas dans quelles

4 circonstances il a été adopté.

5 Q. Puisque vous en avez entendu parler, dites-nous ce que vous avez

6 entendu dire; allez-y.

7 R. Il me semble que j'ai également entendu dire dans une émission reprise

8 de ce Tribunal, mais je n'ai pas très bien compris à vrai dire. Le document

9 en tant que tel, je le répète, je ne l'ai jamais vu. Je ne sais pas dans

10 quelles circonstances et quand il a été adopté, il a été rédigé. C'est la

11 première fois que je le vois maintenant.

12 Q. En effet, souvenez-vous, je vous ai posé une question il y quelques

13 instances s'agissant de la filière hiérarchique DB à l'accusé. Vous avez

14 dit que pas du tout, cela va entre la DB et le gouvernement. Pourquoi

15 était-il nécessaire en 1997 que l'accusé ait de façon formelle une voie

16 hiérarchique qui va de la DB vers lui, comme ce document semble le dire ?

17 R. Je ne le sais vraiment pas. Il faudrait que je l'étudie plus en détail.

18 Je n'ai pas cru comprendre que le secteur de la Sûreté de l'Etat devait

19 répondre de ce qu'il faisait au président.

20 Q. Prenez le temps qu'il vous faut.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, pour être plus précis, il dit

22 que : "Le service de la Sûreté de l'Etat doit s'acquitter de ces

23 obligations conformément aux instructions données par le président de la

24 République…"

25 LE TÉMOIN : [interprétation] On dit gouvernement de la République de

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1 Serbie. Je ne sais vraiment pas ce que cela veut dire exactement. D'après

2 ce que j'en sais à présent aussi, le secteur de la Sûreté de l'Etat était

3 subordonné au ministre de l'Intérieur. C'est un document que je vois pour

4 la première fois et je ne peux pas me prononcer sur sa signification. J'ai

5 davantage l'impression que vos questions portent sur des éléments qui ne

6 font pas partis de mes compétences, enfin, vous en avez le droit.

7 M. NICE : [interprétation]

8 Q. Toujours en 1997, d'après les témoins qui sont venus déposer ici,

9 Bakalli et Haxhiu; Gajic, Stijovic et Hadzic, ces trois individus ont donné

10 des détails d'une politique serbe qui était en place à l'égard du Kosovo.

11 Gajic, il était l'adjoint de Stanisic, c'est bien cela ?

12 R. Vous parlez de David Gajic, qui se trouvait à Pristina ?

13 Q. Oui.

14 R. Je ne sais pas ce qu'il était. Il se peut qu'il soit un adjoint. Mais

15 c'était l'un des responsables au sommet dans le secteur de la Sûreté de

16 l'Etat, et au Kosovo, si mes souvenirs sont bons, il avait été chef d'un

17 département chargé de la coordination de la Sûreté d'Etat, mais je ne sais

18 pas exactement quel était l'énoncé de sa fonction.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, puisque cette

20 décision semble faire référence à l'Article 83 de la constitution de la

21 république, il serait utile de nous procurer cette disposition.

22 M. NICE : [interprétation] C'est effectivement ce que j'avais l'intention

23 de faire. Il y autre chose que j'étais sensé vous fournir, mais j'ai oublié

24 quel document j'étais sensé vous présenter. De toute façon, cela va se

25 trouver dans le compte rendu d'audience, j'y verrai. Merci, Monsieur le

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1 Président.

2 Q. D'après les éléments de preuve dont nous disposons, fin 1997, Gajic et

3 d'autres individus ont parlé du fait que les autorités serbes auraient un

4 plan, un plan de la terre brûlée. C'est comme cela qu'il a été appelé,

5 "Sprzena semilja", apparemment; est-ce que vous étiez au courant de

6 l'existence d'un plan portant ce nom ?

7 R. Jamais tel plan n'a existé. Je n'en ai aucune connaissance. Je suis

8 certain du fait que dans la police, le ministère de l'Intérieur, un tel

9 plan n'a pas existé. Je suis certain qu'un tel plan n'a pas existé non plus

10 au niveau de l'Etat parce que cela se trouvait en contradiction totale avec

11 la politique de l'Etat et avec la politique du ministère de l'Intérieur.

12 Cela serait contraire à tous les éléments de fait dont nous avions

13 connaissance.

14 Bien entendu, il eut fallu d'abord savoir ce que l'on sous-entendait

15 sous cette notion, mais je sais qu'un tel plan sous un nom de cette nature,

16 j'affirme qu'un tel plan n'a jamais existé.

17 Q. Je fais un bon dans le temps avant de reprendre la chronologie des

18 événements. Le général Clark et le général Naumann ont rencontré l'accusé

19 en automne 1998 en vue des accords du mois d'octobre. Vous étiez présent ?

20 R. Je l'ai déjà dit, j'ai passé trois jours et deux nuits à négocier avec

21 cette équipe de l'OTAN.

22 Q. Etiez-vous là, par conséquent, un jour où ces témoins ont été vraiment

23 ébranlés et choqués devant l'explication donnée par l'accusé lorsqu'il a

24 dit cela à propos de Drenica 1945, à savoir qu'il aurait dit : tuez les

25 tous. Vous étiez là ?

Page 40179

1 R. J'étais présent à l'occasion de plusieurs réunions là-bas, mais je ne

2 me souviens absolument pas d'une telle phrase.

3 Q. Fort bien. Revenons au mois de juin. Vous le savez, n'est-ce pas, une

4 décision a été prise pour qu'il ait un lien d'autorité directe allant vers

5 les ministres adjoints pour ce qui est de l'administration du Kosovo ?

6 R. Je n'ai pas connaissance d'une décision d'une teneure de cette nature.

7 Q. Minic et d'autres, donc, Sainovic, se sont trouvés à la tête d'une

8 organisation appelée le commandement conjoint en 1998 ?

9 R. J'ai expliqué tout ce que je savais au sujet du commandement conjoint.

10 Il est vrai de dire que dans la signification telle que je vous l'ai

11 expliquée, il y avait, comme je l'ai indiqué, M. Sainovic, M. Minic, à en

12 faire partie, M. Andjelkovic également.

13 Q. Précisément, et l'idée de départ, vous le reconnaîtrez, elle venait de

14 l'accusé. La première fois qu'il en a parlé, c'est lors d'une réunion du

15 parti politique du SPS en juin 1998, n'est-ce pas ?

16 R. Je n'ai pas suivi les sessions politiques. Il se peut qu'il y ait eu

17 des idées de la sorte, mais je ne sais pas de qui elles émanent. Je sais ce

18 qui s'est produit sur le terrain et je sais comment cela fonctionnait sur

19 le terrain.

20 Q. Il s'agit de la pièce D142A pièce de la Défense.

21 Tout au début de mon interrogatoire, je vous ai demandé si pendant

22 toutes les années 90, l'accusé était à la tête d'éléments importants, que

23 ce soit pour la police ou pour l'armée, et pour le Kosovo. S'agissant de la

24 façon d'administrer le Kosovo en 1998, acceptez-vous que pour une telle

25 décision, il fallait que ce soit approuvé par l'accusé ou que ce soit une

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1 décision prise par lui ?

2 R. Je ne sais vraiment pas. Cela, vraiment je ne le sais pas. Ce que je

3 sais, c'est comment a fonctionné le ministère de l'Intérieur au Kosovo. Ce

4 que je sais également, c'est que les QG du ministère de l'Intérieur au

5 Kosovo-Metohija ont fonctionné à partir de 1990, peut-être 1989. Pour ce

6 qui est des QG du ministère fédéral, à partir de 1981. Ce que je puis vous

7 dire avec certitude, c'est que s'agissant du ministère de l'Intérieur,

8 l'organisation et la structure des Unités organisationnelles de la Police

9 se sont vues dépourvues de changements depuis l'année 1990 jusqu'à

10 pratiquement 1999. Ce qui a changé, c'est la composition du QG, le

11 personnel du QG à Pristina. Mais le système, lui, n'a pas été modifié

12 pendant toutes ces années-là.

13 M. NICE : [interprétation] Pouvons-nous maintenant examiner une courte

14 synthèse qui montre ce qui est dit du Kosovo par "Human Right Watch" en

15 1998 ?

16 Il s'agit de la pièce à conviction 191, et nous placerons la page 4

17 de la version anglaise, Monsieur l'Huissier, sur le rétroprojecteur, celle

18 qui se termine par le chiffre 4, dans le coin en haut à droite.

19 Q. Monsieur Stevanovic, je vais vous lire un passage de ce texte de "Human

20 Right Watch," organisation dont vous n'avez pas encore dit qu'elle manquait

21 d'objectivé. Ce passage se lit comme suit, je cite : "La première offensive

22 gouvernementale majeure a commencé à la mi-mai, quelques jours après que

23 Milosevic a accepté les exigences américaines selon lesquelles il devait

24 rencontrer Rugova. La police spéciale, ainsi que l'armée yougoslave ont

25 attaqué une série de villes et villages sur la frontière avec l'Albanie à

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1 l'ouest, dans l'intention précise de dépeupler la région. Jusqu'à ce

2 moment-là, l'UCK avait reçu des armes et recruté de nouvelles recrues

3 depuis la zone située de l'autre côté de la frontière."

4 Admettez-vous cette description des événements dans la première partie de

5 la période en question, disons le printemps 1998 ?

6 R. Cette synthèse est absolument inexacte. Eu égard au printemps 1998, je

7 peux, en me fondant sur mes souvenirs, affirmer que la seule action de la

8 police sur le territoire de la Metohija était en rapport avec la nécessité

9 de lever le blocus de la route Pec-Djakovica. Le seul objectif, le seul but

10 de cette opération était celui-là. Il n'est pas question de dépeupler quoi

11 que ce soit, il n'est pas question d'attaquer un quelconque village. Il

12 n'est pas question d'une quelconque opération de représailles contre les

13 Albanais. Le seul objectif était d'assurer la possibilité de circuler

14 librement pour les citoyens d'une ville à l'autre.

15 Q. Que pensez-vous de cette phrase : "Jusqu'à ce moment-là, l'UCK avait

16 reçu des armes et recruté de l'autre côté de la frontière." Est-ce que cela

17 vous paraît une description exacte de la situation ?

18 R. S'agissant des armes, ceci est une certitude. Quant aux recrues, je

19 n'en suis pas sûr aujourd'hui. C'est sans doute vrai aussi.

20 Q. Je vais vous lire le paragraphe suivant, je cite : "De nombreux

21 villages depuis Pec dans le nord jusqu'à Djakovica dans le sud ont été

22 pilonnés alors que les civils y étaient toujours présents. Les non-

23 combattants qui fuyaient les attaques ont parfois été pris pour cible par

24 des tireurs embusqués, et un nombre encore indéterminé de personnes ont été

25 placées en détention."

Page 40182

1 Exact ou pas ?

2 R. Les villages n'ont pas été pilonnés dans le sens que nous avons donné à

3 ce terme. Le recours aux armes de la police avait pour objectif la

4 nécessité d'empêcher que l'on tire sur la police et la nécessité de rouvrir

5 la route. Je pense que le nombre des personnes arrêtées a été relativement

6 limité. Je suis certain qu'il n'y a eu aucune action de snipers, de tireurs

7 embusqués contre la population.

8 Q. Dans la suite du rapport, il est affirmé qu'à trois reprises des

9 hélicoptères marquées d'une croix rouge ont tiré sur les civils. A votre

10 connaissance, y a-t-il eu de tel abus de l'utilisation de l'emblème de la

11 Croix Rouge ?

12 R. Je suis certain que non. L'emblème de la Croix Rouge ne figurait que

13 sur les hélicoptères de l'armée. Au moins deux fois j'ai eu recours à de

14 tels hélicoptères pour assurer le transport de policiers blessés en

15 direction de Belgrade.

16 Q. La dernière fois --

17 R. Je n'ai jamais vu d'armes à bord de ce genre d'hélicoptères. Comme je

18 l'ai dit, j'ai eu recours au service de ces hélicoptères au moins deux ou

19 trois fois.

20 Q. Le texte se conclut par un paragraphe qui se lit comme

21 suit : "Des mines terrestres ont été placées à des points stratégiques sur

22 la frontière ainsi que sur la frontière sud avec la Macédoine. La plupart

23 des villages de la région ont été pillés, et détruits systématiquement, et

24 le bétail des agriculteurs a été pris pour cible afin de garantir que

25 personne ne reviendrait. Quinze milles personnes ont fui vers l'Albanie et

Page 40183

1 on estime à 30 000 le nombre des personnes qui ont fui vers le nord, à

2 savoir, vers le Monténégro."

3 Est-ce que ces dernières phrases du texte, vous les admettez comme étant un

4 récit exact de la situation ?

5 R. C'est une demi-vérité dans cette dernière partie. Il y a eu

6 effectivement pas mal de bêtes qui ont péri. Il y a eu un certain nombre de

7 déplacements de personnes à l'intérieur de la région. Mais,

8 fondamentalement, le contexte que l'on trouve à l'arrière-plan de cette

9 citation est inexact. L'objectif n'était pas --

10 Q. Qui a tiré sur le bétail ?

11 R. Le bétail n'a certainement pas été tué délibérément. Dans la zone où

12 les combats avaient lieu, il y avait du bétail. Ce sont des régions où il y

13 a des prairies entre les villages et les localités habitées dans la zone

14 contrôlée par les terroristes. Bien sûr, le nombre de bêtes tuées n'a pas

15 été très important, mais j'ai déjà dit que je savais qu'un certain nombre

16 de bêtes avaient été tuées parce que je circulais dans cette zone. C'est

17 quelque chose que l'on voit couramment au cours d'une guerre. On le voyait

18 un peu partout au Kosovo à l'époque.

19 Q. Enfin, toujours le même rapport, il interprète l'attitude

20 gouvernementale, ceci figure en bas de page, comme une tentative apparente

21 d'écraser l'appui fourni par les civils aux rebelles, et dans le dernier

22 paragraphe de cette page, nous lisons que la majorité des personnes tuées

23 et blessées étaient des civils et qu'au moins

24 250 000 personnes ont été déplacées à ce moment-là, dont une majorité était

25 des femmes et des enfants accompagnés de leurs familles qui fuyaient vers

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1 les montagnes et les bois.

2 Est-ce que vous admettez qu'un grand nombre de civils ont compté au nombre

3 des victimes ?

4 R. J'ai déjà dit qu'il y a eu des déplacements de population dans la

5 région, mais le nombre cité est très certainement contraire à la réalité,

6 et il est certain également qu'il y a eu des civils parmi les victimes.

7 Cependant, le nombre cité ici, l'importance du phénomène telle qu'elle est

8 mentionnée ici, l'importance du problème, ne correspond pas à la réalité.

9 Q. Fort bien.

10 R. L'objectif, car je crois que dans ce passage on mentionne également un

11 objectif, un but, ce but ne correspond pas à la réalité. J'ai déjà dit quel

12 était l'objectif. C'est tout à fait clair. Bien entendu, ni la police, ni

13 aucun autre organe gouvernemental n'a rien fait contre les civils de façon

14 délibérée. Les civils n'étaient pas l'objectif, et rien n'a été fait en

15 particulier pour les empêcher --

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelle est votre estimation quant au

17 nombre de victimes civiles et de personnes déplacées ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Si nous parlons de cette période, le chiffre

19 cité ici est exagéré, car il est tout à fait certain que la population

20 totale de ces villages, des villages situés le long de cette route,

21 n'atteint pas le nombre cité ici. Il a pu y avoir quelques milliers de

22 personnes qui se sont déplacées, c'est un maximum, mais moins de 10 000.

23 Alors qu'ici, on parle de centaines de milliers, qui est un chiffre

24 absolument contraire à la réalité. On n'aurait pas pu atteindre ce chiffre

25 même en additionnant le total des populations de tous ces villages. Donc,

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1 10 000, c'est un maximum. On peut, peut-être, avec ce genre d'addition

2 atteindre ce chiffre, mais pour une période plus longue. Pour la période

3 dont nous parlons, le chiffre ne pouvait en aucun cas, ne serait-ce que de

4 se rapprocher du chiffre mentionné dans le texte.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vois. Merci.

6 M. NICE : [interprétation]

7 Q. D'où tirez-vous vos chiffres ? Est-ce que la partie serbe a recensé le

8 nombre de personnes déplacées ?

9 R. J'ai dit que c'était une estimation de ma part. Pendant cette période,

10 je ne sais pas s'il y a eu des recensements mis par écrit. Il était très

11 difficile de maintenir des registres, car on ne pouvait s'appuyer que sur

12 des appréciations, sur des estimations, et j'ai dit que le chiffre que j'ai

13 cité était mon estimation personnelle, alors que, si vous lisez le texte,

14 vous voyez qu'il est question de plusieurs centaines de milliers de

15 personnes qui auraient été déplacées.

16 Q. 250 000, c'est l'estimation établie par "Human Rights Watch" ?

17 R. Dans cette dizaine de villages, à peu près, c'est un chiffre qui est

18 absolument trop important et qui n'a rien à voir avec la réalité. Si vous

19 le comparez avec les chiffres disponibles en Albanie, vous verrez que ceci

20 n'est pas réaliste.

21 Q. Vous avez participé de très près aux événements du Kosovo à partir de

22 ce moment-là, n'est-ce pas, en tant que membre du commandement conjoint ?

23 R. Je n'étais membre du commandement conjoint, et dans cette période, j'ai

24 passé un grand nombre de journées au Kosovo. Personne ne m'a jamais dit que

25 je faisais partie de quelque commandement que ce soit, pas plus d'ailleurs

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1 du commandement conjoint que d'un autre commandement. J'ai participé à

2 plusieurs reprises à des rassemblements de personnes, dont nous avons déjà

3 dit verbalement, qu'on aurait pu les qualifier de commandement conjoint,

4 mais je me suis expliqué sur ce point, si je me souviens bien, au cours de

5 la première journée ou de la deuxième journée de ma déposition.

6 Q. Le commandement conjoint se réunissait tous les jours ou tous les deux

7 jours, n'est-ce pas ? C'était un organe disponible à tout moment.

8 R. Oui, selon ce que je sais, ces personnes se rencontraient très

9 fréquemment.

10 Q. Sous la direction de Minic ou de Sainovic, il rendait compte à qui

11 directement ? Est-ce que ce commandement conjoint était responsable devant

12 l'accusé ?

13 R. D'abord, je ne sais pas qui était le chef. Je ne crois pas qu'une

14 quelconque structure hiérarchique ait été établie. Je ne crois pas qu'un

15 numéro 1 et un numéro 2 aient été nommés en tant que tel. Quant à savoir

16 devant qui ce groupe était responsable, je ne sais pas. Quand j'étais sur

17 place, j'étais responsable devant le ministre.

18 Le général Lukic devait, je suppose, rendre compte au ministre

19 également. Quant à M. Sainovic, en tant que membre de la police militaire,

20 je ne sais pas à qui il rendait compte.

21 Q. Vous avez obtenu, je suppose, des rapports de divers centres du MUP,

22 n'est-ce pas ?

23 R. J'étais en situation d'utiliser les rapports des unités structurelles

24 relevant du ministère de l'Intérieur, pas toujours, mais chaque fois que

25 j'ai pu avoir accès à ces rapports. Lorsque j'étais au Kosovo, par exemple,

Page 40187

1 je n'ai pas pu utiliser les rapports des secrétariats à l'Intérieur situés

2 hors du Kosovo.

3 Q. Fort bien. Mais vous avez appris, par exemple, que certaines de ces

4 unités, certains groupes de personnes faisaient des choses répréhensibles.

5 Je vous rappellerai, par exemple, le groupe baptisé Munja. Vous vous

6 rappelez Munja ?

7 R. Je me rappelle un certain nombre de dénominations, Osa, Munja, les

8 Guêpes, et des groupes qui portaient le nom de divers insectes, de divers

9 oiseaux, et cetera. Aujourd'hui, j'aurais du mal à faire un lien entre tel

10 ou tel groupe et telle ou telle dénomination précise.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, l'heure de la pause

12 est arrivée, 20 minutes de suspension.

13 --- L'audience est suspendue à 12 heures 16.

14 --- L'audience est reprise à 12 heures 39.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Nice.

16 M. NICE : [interprétation] J'ai maintenant l'Article 83, cela vient de la

17 pièce 319, intercalaire 2.

18 Q. Monsieur Stevanovic, nous allons essayer de respecter l'ordre des

19 événements. Arrivé l'année 1998, les habitants du Kosovo étaient soumis à

20 l'influence, à l'effet ou à la force de l'UCK qui faisait une montée en

21 puissance, c'est exact ?

22 R. Les habitants du Kosovo-Metohija ont été placés sous des pressions de

23 l'UCK, oui.

24 Q. Par ailleurs, il y avait le gouvernement de la Serbie qui était résolu

25 s'agissant de l'accomplissement de ses objectifs ?

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1 R. Oui, mais de la réalisation de ses objectifs contre le terrorisme, il

2 s'entend, pas contre les citoyens de son propre pays.

3 Q. Le gouvernement serbe était, à ce moment-là, à toute fin, représenté

4 par des pouvoirs qui étaient délégués à certains, et qui passaient par le

5 commandement conjoint ?

6 R. Au Kosovo, il y avait un conseil exécutif provincial provisoire. A mon

7 avis, c'était là l'instance qui représentait l'autorité de l'Etat au

8 Kosovo-Metohija. Il se peut que je me trompe, mais c'est mon opinion.

9 M. NICE : [interprétation] Pourrait-on voir la page suivante, Monsieur

10 l'Huissier ?

11 Est-ce que nous voulons passer ceci sur le rétroprojecteur ? Non,

12 c'est uniquement à l'attention des Juges.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, donnez-nous ce document,

14 Monsieur l'Huissier.

15 M. NICE : [interprétation] Excusez-moi, je n'avais pas fait attention.

16 Q. Vous ne voulez pas dire, n'est-ce pas, que ce conseil exécutif

17 provincial provisoire avait un pouvoir réel sur le MUP, sur la VJ, ni de ce

18 genre, n'est-ce pas ?

19 R. Non. Le conseil exécutif provincial n'avait pas autorité vis-à-vis du

20 MUP ou de l'armée.

21 Q. En effet, Andjelkovic était membre du commandement conjoint, semblait

22 l'être, et le conseil exécutif provincial provisoire rendait compte au

23 commandement conjoint, par conséquent.

24 R. Il n'y avait pas de personnes répondant devant le commandement

25 conjoint. Ce commandement conjoint était constitué de personnes du même

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1 niveau en provenance de structures différentes, et son activité consistait

2 à organiser des échanges d'informations, coordinations horizontales et à la

3 participation des différentes instances telles que la police, l'armée, le

4 conseil exécutif du Kosovo-Metohija et les représentants des autres Etats à

5 Belgrade également.

6 Q. Je reviens à une question que j'avais déjà posée. Le gouvernement de

7 Serbie tenait à tout prix à réaliser ses objectifs. Les habitants du

8 Kosovo, s'ils n'étaient pas en but à des pressions, à la force ou même à la

9 brutalité de l'UCK, se trouvaient face, en fait, à un état policier résolu.

10 R. Les citoyens du Kosovo-Metohija n'ont pas eu à faire face à un état

11 policier. Je l'ai dit, et je le répète. Ce sont les terroristes qui ont dû

12 faire face à l'intervention de l'Etat vis-à-vis du terrorisme, et les

13 citoyens se sont retrouvés dans cette ambiance, cet environnement, et il

14 est certain que cela, cette situation a dû se refléter sur eux.

15 Q. Si un citoyen du Kosovo se voyait face à un policier serbe, il était

16 pratiquement certain que ce policier serbe, c'était le seul représentant du

17 pouvoir ? Cette personne est dotée d'un pouvoir absolu, il ne pouvait se

18 tourner ce citoyen vers personne d'autre.

19 R. En principe, le citoyen au Kosovo n'avait pas à faire face à la police.

20 La police, elle, se trouvait du côté des citoyens contre les terroristes,

21 les criminels et toutes autres formes de mise en péril de la sécurité et de

22 l'ordre au Kosovo-Metohija.

23 Q. Si un policier serbe interpolait quelqu'un dans la rue et lui disait de

24 le suivre au commissariat, au poste de police, ce citoyen n'avait pas le

25 choix et de l'obéir, n'est-ce pas ?

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1 R. Mais l'attitude était la même sur le territoire entier de la république

2 comme cela était le cas au Kosovo. La police, conformément à ses

3 attributions, a le droit de faire venir des citoyens au poste de police

4 lorsque les conditions requises de ce faire sont là. Mais s'agissant des

5 citoyens au Kosovo-Metohija, il n'y avait rien d'inhabituel, de mise en

6 œuvre et de différent, de ce qui était pratiqué dans les autres parties

7 dans la République de Serbie. Il se peut que je n'aie pas bien compris

8 votre question.

9 Q. Je vais vous demander ceci : le degré de violence auquel pouvait

10 s'attendre un citoyen du Kosovo dans un poste de police, est-ce qu'il

11 n'était pas de loin supérieur à ce qu'il pouvait se retrouver dans un poste

12 de police en Serbie ?

13 R. Si sous la notion de violence, on entend l'usage excessif et illégal de

14 la force, les policiers au Kosovo et dans d'autres parties de la république

15 pouvaient être placés sur pied d'égalité. A l'occasion des conflits avec

16 les terroristes au Kosovo-Metohija, il n'y a plus de cas où les citoyens

17 ont dû pâtir des séquelles de ces conflits, ce qui n'a pas été le cas pour

18 le reste des citoyens de la Serbie. Mais avoir des comportements excessifs

19 de la police vis-à-vis des citoyens est une chose possible tant au Kosovo

20 qu'à l'extérieur du Kosovo.

21 Q. Pièce 320, intercalaire 9. Je vais demander qu'on présente cette pièce

22 au témoin. Je vous laisse entendre ceci : nous sommes là au milieu de

23 l'année 1998. A ce moment-là, le Kosovo était un Etat policier effrayant

24 dangereux pour ceux qui devaient faire face aux services de la Police,

25 mais, en plus de cela, la structure était aussi dangereuse parce que la

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1 police travaillait avec des groupes illégaux, des paramilitaires d'une

2 sorte ou d'une autre.

3 J'espère que vous avez l'original, Monsieur Stevanovic. Il s'agit ici

4 d'un document --

5 R. Oui.

6 Q. -- de la République de Serbie, du MUP plus exactement, qui porte la

7 date du 24 juin et qui émane de Pec. Il dit : "Rapport sur les mesures

8 prises pour protéger les biens endommagés et en ce qui concerne la légalité

9 de l'action policière pendant l'opération Tonnerre…" Il est dit ceci : "Au

10 cours de cette période, les trois plans du 3e Corps du 24e Détachement de

11 l'Unité spéciale de la Police…" et là, je m'arrête. Cette Unité spéciale de

12 la Police, c'est le MUP public, n'est-ce pas ? C'est la sécurité publique,

13 c'est votre organisation, n'est-ce pas ?

14 R. Sécurité publique, c'est bien exact.

15 Q. "…qui était passé sous le commandement direct de la JSO, alors que

16 nous, nous effectuons cette opération, Vidomir Salipur, le chef de peloton

17 a été blessé."

18 Salipur, c'est un des paramilitaires du groupe Munja, n'est-ce pas ?

19 On le voit à bien des endroits. Ceci a bien été démontré et prouvé.

20 Votre police, ce groupe de la police à vous, que faisait-il avec un

21 homme tel que Vidomir Salipur ?

22 R. Tout d'abord - et ce, je viens de m'en rappeler - je pense que cette

23 appellation de Munja était celle d'un Département de la Police à Pec dont

24 faisait partie le dénommé M. Salipur. Mais lui était membre de la police

25 d'active. Par conséquent, je suis tout à fait certain du fait qu'il n'aille

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1 pas appartenu à un groupe paramilitaire. Mais à l'époque, l'Unité de la

2 Police et même des unités militaires se donnaient des noms déterminés. Très

3 souvent, cela découlait de l'indicatif dans les transmissions radio. Par

4 exemple, ceux qui avaient pour indicatif faucon ou aigle, ils reprenaient

5 cette appellation pour s'en servir en guise de noms de code. Je crois que

6 Munja avait été le nom du département dont faisait parti M. Salipur.

7 J'affirme qu'il ne s'agissait pas de groupes qui étaient extérieurs aux

8 effectifs de la police. Je dirais même, qu'il ne s'agit même pas

9 d'effectifs de réserve.

10 Q. Je vous demande de vous interrompre pour regarder cette photo avec sa

11 légende du livre "Sous les ordres".

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic.

13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux obtenir moi-même un

14 exemplaire du document qu'on vient de donner au témoin ?

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, nous allons y veiller. Cela

16 devrait se faire de manière routinière, c'est obligatoire.

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais je n'ai pas encore obtenu celui que vous

18 avez dit de me faire donner au tout début.

19 M. NICE : [interprétation] Voulez-vous placer cette photo sur le

20 rétroprojecteur.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice.

22 M. NICE : [interprétation] Oui. Ce document va parvenir à l'accusé.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais y compris celui que vous étiez

24 censé remettre à l'accusé auparavant.

25 M. NICE : [interprétation] Oui, nous allons le trouver.

Page 40193

1 Q. Vous voyez ici, c'est ce qu'on dit à propos de Munja. Je vous lis la

2 légende en anglais : "Des témoins ont identifié l'homme se trouvant sur la

3 droite comme étant Nebojsa Minic, surnommé 'Mrtvi', 'mort'. Il est impliqué

4 dans l'extorsion et l'assassinat de six membres d'une famille à Pec le 12

5 juin. A sa gauche, se trouve Vidomir Salipur, un policier de Pec, qui

6 serait chef du gang de Munja…"

7 Est-ce qu'on peut qualifier cet homme de chef de gang ?

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, je vous interromps.

9 Votre façon de gérer le document ne me plait pas, il faut que vous le

10 remettiez à l'accusé. Est-ce que vous avez remis celui-ci à l'accusé ?

11 M. NICE : [interprétation] Oui. Si M. l'Huissier veut bien remettre à

12 l'accusé le document qui se trouvait sur le rétroprojecteur. S'agissant de

13 celui de ce matin, nous allons obtenir un autre exemplaire dans les

14 meilleurs délais.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] N'oubliez pas, Monsieur Nice, que

16 l'accusé a peut-être besoin de ce document pour ses questions

17 supplémentaires.

18 M. NICE : [interprétation] Mais, bien entendu.

19 Q. Monsieur Stevanovic, gang de Munja, est-ce que Salipur était chef de

20 gang, chef de bande, plus exactement ?

21 R. Monsieur le Procureur, cette appellation de chef de "bande," c'est

22 offensant. Il s'agit d'une unité qui fait partie des Unités spéciales de la

23 Police. Il s'agit d'un policier d'active ou d'un responsable quelconque, je

24 n'en suis pas trop sûr. Une telle unité organisationnelle, à savoir, une

25 formation de cette nature dans la police, ne saurait être qualifiée de

Page 40194

1 bande. Une bande, c'est un groupe qui commet des délits au pénal et qui

2 vaquent à de la criminalité organisée.

3 Pour ce qui est de l'autre appellation, je n'en ai aucune

4 information. Il se peut que cela fasse partie de la police, mais, en ce

5 moment-ci, je n'ai pas de connaissance y relative.

6 Q. Je vous indique que l'ouvrage, qui a été publié où trouve cette pièce à

7 conviction que nous étions en train d'examiner, affirme que Munja était

8 dirigeant d'un groupe qui, le 12 juin 1999, aurait tué six membres d'une

9 famille dont des enfants âgés de cinq, six, sept, douze et treize ans. Est-

10 ce que ceci aurait été un crime qui aurait fait l'objet d'une enquête de

11 votre part ?

12 R. Je ne suis pas au courant de ce crime. Bien entendu, si ce crime a eu

13 lieu, c'est effectivement un crime. Cela, je ne l'ai jamais mis en doute et

14 je ne le contesterais pas non plus aujourd'hui. Mais, est-ce que ce fait a

15 été prouvé ou est-ce qu'il constitue simplement un élément d'informations

16 dans un document édité, c'est la question, et je ne saurais le dire.

17 M. NICE : [interprétation] Très bien. J'aimerais maintenant que nous

18 regardions le procès-verbal ou les notes qui ont été prises à l'issue de

19 certaines rencontres du commandement conjoint. Nous avons ici, pour le

20 rétroprojecteur et pour l'accusé, des documents relatifs à des réunions du

21 commandement conjoint au Kosovo-Metohija, document qui existe en langue

22 originale à votre intention, Monsieur Stevanovic, et en anglais pour être

23 placé sur le rétroprojecteur. Cela ira.

24 Q. Maintenant, j'aimerais vous soumettre quelques entrées dans ces

25 quelques paragraphes de ces procès-verbaux. D'abord, à la date du 29

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1 juillet, dans l'original, Monsieur Stevanovic.

2 M. NICE : [interprétation] Monsieur l'Huissier, si vous regardez en bas, à

3 droite, de ces pages, je vous demanderais de trouver celle dont le numéro

4 de référence se termine par 164. C'est la 24e page. Je vous demande plutôt

5 de placer la 24e page sur un total de 164 sur le rétroprojecteur. Non, non,

6 c'est la 25e, excusez-moi.

7 Q. Vous voyez ces paragraphes, Monsieur Stevanovic, ces différentes

8 rubriques en date du 29 juillet 1998 ?

9 R. Malheureusement, je ne parviens pas à retrouver la page en question. Si

10 quelqu'un pouvait m'aider, ce serait bien.

11 Je vois la page correspondant à la date du 30 et le 29 se situe sans

12 doute sur la page précédente.

13 Q. Vous voyez le paragraphe où il est question du général Pavkovic au

14 début de la réunion ?

15 R. Oui, je le vois ce passage.

16 Q. Dans ce procès-verbal, il aurait dit que : "La région située entre le

17 village de Crnolje et de Dulje doit encore être nettoyée." J'ai deux

18 questions à vous poser à ce sujet, je vais vous décrire le contexte. Un peu

19 plus bas dans le texte, il affirme que l'objectif de la phase 1 a été

20 réalisé et que, je cite : "Nous pouvons être satisfaits."

21 Vous rappelez-vous quelles étaient les trois phases qui existaient

22 dont celle-ci était la première ?

23 R. Ce que je sais, c'est qu'il existait trois ou quatre phases de lutte

24 contre le terroriste dans l'année 1998, un peu avant. Ces phases ont été

25 coordonnées dans un plan unifié de lutte contre le terrorisme dont j'ai

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1 parlé, il y a quelques jours. Mais à l'instant, je ne sais pas si ce

2 document parle bien de cela, peut-être qu'il parle d'autres choses.

3 Q. Ma deuxième question est la suivante: que veut dire le mot "nettoyer"

4 que l'on trouve ici ?

5 R. Je crois avoir également répondu à cette question sur le principe. Le

6 concept de nettoyage englobe exclusivement la nécessité de nettoyer le

7 territoire des terroristes. Il a également un deuxième sens, à savoir,

8 nettoyage de terrain dans le sens du ratissage de terrain, ce que le Juge a

9 souligné, il y a déjà quelques temps.

10 Q. Vous avez entendu le résumé des actions réalisées au mois de mai

11 décrites dans le rapport de "Human Rights Watch". Le mois de mai, c'est

12 quelques mois plus tard. Est-ce que vous êtes sûr que le terme "nettoyer"

13 n'a pas un sens beaucoup plus sinistre, qu'il signifie, par exemple,

14 nettoyer la population ?

15 R. En aucun cas, ce concept de "nettoyage" ne peut être mis en rapport

16 avec le nettoyage du territoire de ces habitants ou de quelconque

17 population, de quelle appartenance qu'elle soit. Il ne peut être mis en

18 rapport qu'avec la nécessité de nettoyer le territoire de ces terroristes.

19 C'est le sens de la position politique, y compris, qui peut être lié à ce

20 concept.

21 Bien entendu, tout concept peut être présenté sous un jour négatif.

22 Il suffit d'être de parti pris pour présenter quelques concepts que ce soit

23 sous un jour négatif.

24 Q. Cela suffira. Merci. Pouvez-vous maintenant passer au passage qui

25 concerne la réunion du 12 août dans le texte original. Donc, 12 août, je

Page 40197

1 vous demanderais de lire le premier paragraphe, celui où M. Sainovic

2 s'exprime au début du procès-verbal.

3 M. NICE : [interprétation] Monsieur l'Huissier, il s'agit de la page 50 sur

4 le total de 164. Oui, c'est celle-ci.

5 Q. Monsieur Stevanovic, cette réunion, vous y avez assisté car nous voyons

6 que dans la page 51 de la version anglaise, votre nom est mentionné. Ne

7 vous occupez pas de cela, pour l'instant.

8 Mais, au bas de la page que nous examinons maintenant, deuxième

9 intervention de M. Sainovic, on voit qu'il déclare ce qui suit, je cite :

10 "Dans la zone frontière, l'armée doit remplir ses obligations.

11 "Dans ce secteur, la police doit couvrir tout le territoire" -- et il

12 y a un mot illisible -- "et le consolider.

13 "La DB doit couvrir la troisième zone pour laquelle elle reprend la

14 responsabilité," -- il y a un mot illisible.

15 Est-ce que ce passage ne montre pas clairement que le commandement

16 conjoint était effectivement un commandement et qu'il était placé sous

17 autorité civile ?

18 R. Selon moi, ce n'est pas le cas. Mais on pourrait discuter de la façon

19 dont ce procès-verbal a été établi, dont les choses sont exprimées. Il est

20 fort possible que ceci ne soit que l'avis personnel de M. Sainovic, mais en

21 aucun cas un ordre ne pouvait venir d'une autre personne que le général

22 Lukic, qui lui-même recevait ces ordres du ministère s'agissant des actions

23 menées par la police. Or, c'est bien de cela qu'il est question dans ce

24 passage. Le général Lukic --

25 Q. Est-ce que nous allons trouver --

Page 40198

1 R. Ceci --

2 Q. Excusez-moi. Est-ce que nous allons trouver dans ces procès-verbaux à

3 quelque endroit que ce soit l'expression de la part de Lukic d'une

4 résistance aux consignes qui sont données par tel ou tel canal, par

5 Sainovic ou Minic ? Est-ce que cela correspond à votre souvenir ? Vous

6 étiez présent à la plupart de ces réunions. Ou est-ce que nous allons

7 trouver dans ce texte un récit correspondant au dire de Minic et Sainovic ?

8 R. Bien, je saurais répondre facilement à cette question. J'aurais besoin

9 d'analyser l'ensemble de la documentation pour ce faire. Ce qui est

10 important c'est de constater ce que M. Sainovic a déclaré qu'il était

11 nécessaire de faire, et si ces consignes données par lui ont été exécutées

12 le lendemain, et également, qui a émis les ordres qui sont décrits dans

13 cette documentation. Je ne saurais répondre à cette question. Je ne saurais

14 faire ce genre d'analyse. Ce que je sais c'est que des affectations

15 importantes avaient été données à la police, eu égard aux terrorismes, et

16 que, dans le cadre de ces affectations, les ordres devaient émaner soit du

17 QG du secrétariat, soit du ministère lui-même, par le biais de la

18 hiérarchie habituelle.Les ordres de M. Sainovic ou de M. Minic n'auraient

19 pas pu être exécutés.

20 Q. Est-ce que vous aviez le pouvoir de donner des ordres en tant que

21 ministre adjoint ?

22 R. Je n'avais aucun pouvoir d'émettre des ordres.

23 M. NICE : [interprétation] Passons à la page suivante, je vous prie,

24 Monsieur l'Huissier.

25 Q. Voilà. C'est le premier paragraphe où il est question de ce qui vous

Page 40199

1 concerne. Troisième, ou -- nous voyons que les troisièmes et quatrièmes

2 groupes auraient dû être appliqués et ne sont pas engagés. Puis, un peu

3 plus loin, Minic, aux paragraphes 8 et 9, en bas de page, déclare, je cite

4 : "Les réfugiés et les civils ont soif --" - il y a un mot illisible - "--

5 eu égard à cette catastrophe humanitaire, mais nous devons les appeler à

6 rentrer chez eux et c'est là que les frappes les plus importantes auront

7 lieu."

8 Est-ce que vous vous rappelez ce que tout cela signifiait ?

9 R. Absolument pas. Je ne me souviens pas de cette phrase, et je n'ai pas

10 la moindre idée aujourd'hui de ce qu'elle pourrait signifier.

11 Q. Que signifie les frappes les plus importantes sur leurs maisons ?

12 R. Je ne sais vraiment pas.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic.

14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il n'est pas dit ici : "Frappes les plus

15 importantes sur leurs maisons." Contrairement à ce que M. Nice déclare,

16 c'est très difficile à lire, mais on voit qu'il est fait référence aux

17 réfugiés et aux civils, effectivement. Il est dit qu'ils devraient être

18 persuadés de rentrer chez eux. Mais ceci est incompatible avec la notion de

19 frappe aérienne sur leurs maisons.

20 M. Stevanovic est plus à même de lire cette écriture.

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne trouve pas la ligne.

22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Paragraphe 8. Point 8 : "Les réfugiés et les

23 civils." C'est la page suivante. Peut-être est-il écrit : "Nous devons les

24 appeler à retourner chez eux" ?

25 M. NICE : [interprétation] Il pourra peut-être traiter de cela au cours des

Page 40200

1 questions supplémentaires. Il aura la possibilité de regarder ce texte de

2 plus près.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic. Vous pouvez

4 reprendre cela au moment des questions supplémentaires.

5 M. NICE : [interprétation]

6 Q. 26 août à présent, je vous prie, Monsieur Stevanovic. J'ai encore deux

7 passages de ce genre à vous soumettre.

8 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, ces

9 documents prendraient beaucoup de temps s'il fallait les examiner dans le

10 détail, mais ils sont disponibles et pour le moment nous nous limiterons à

11 quelques passages.

12 Page 74, Monsieur l'Huissier. C'est sans doute la deuxième page pour vous,

13 Monsieur Stevanovic. Celle où l'on voit le compte rendu de ce qu'a dit M.

14 Radovic.

15 Q. C'est Radovic qui parle. Je ne sais pas si vous avez trouvé le passage

16 dans le texte original.

17 R. Oui. C'est très difficile à retrouver.

18 Q. Les traducteurs ont décrypté ce passage relatif à

19 M. Radovic au sixième tiret, comme se lisant comme suit, je cite : "Il y a

20 16 à 17 000 personnes qui se sont réfugiées en Albanie et

21 40 000 personnes qui se sont réfugiées au Monténégro."

22 Ensuite, on dit qu'un journaliste, un certain Batun, qui Albanais déclare

23 que Klaus Kinkel, est en train de perdre et que sa théorie au sujet de

24 l'autonomie va probablement échouer. Puis, il y a une référence à une

25 solution inacceptable pour Milosevic, mais ce qui m'intéresse ce sont

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1 surtout les chiffres et les nombres de réfugiés parce que ceci est dit en

2 participant à la réunion.

3 Vous souvenez-vous d'avoir discuté des réfugiés à ce niveau ?

4 R. Il ne m'a fallu pas de temps pour trouver la citation. Je ne vous ai

5 pas très bien suivi. Vous parlez du 26, n'est-ce pas ?

6 Q. Premier chapitre sur cette page, Monsieur Stevanovic. Ce sont les

7 propos de M. Radovic, et c'est sans doute la deuxième fois que M. Radovic

8 s'exprime, en fait. On trouve la première fois où il s'est exprimé à la

9 première page si je ne m'abuse. Ensuite, il y a une série de tirets, donc,

10 16 à 17 000 personnes, qui se seraient réfugiés en Albanie, 40 000 au

11 Monténégro.

12 R. Nous sommes au mois d'août. C'est à ce moment-là que ceci est écrit.

13 J'ai vraiment des doutes quant à la date, mais je ne retrouve pas le

14 passage.

15 Q. Ces réfugiés fuyaient quels endroits ?

16 R. Bien. Le 26 août, d'après ce dont je me souviens, est une

17 -- se situe dans une période où des actes terroristes avaient lieu

18 principalement dans la Metohija. Il est très possible que ceci est un

19 rapport avec les opérations antiterroristes. Je répète que je ne parviens

20 pas à situer cela précisément dans le temps. Je parle d'une hypothèse que

21 c'est de cela qu'il est en train de parler.

22 M. NICE : [interprétation] Pouvez-vous maintenant passer à la page

23 suivante. Si je me m'abuse, celle où apparaît votre nom. Page 75, Monsieur

24 l'Huissier.

25 Q. Pouvez-vous trouver le premier chapitre dans cette page ?

Page 40202

1 R. Pour la même date ?

2 Q. Oui, même la date.

3 R. Il est possible que mes pages soient mélangées car on ne trouve

4 vraiment pas une quelconque mention de mon nom. Nous parlons bien du 26

5 août ?

6 Q. Oui. Le 26 août. Réunion tenue à 8 heures du soir.

7 R. Radovic, Gajic encore une fois Radovic puis Sainovic, ah, oui, oui,

8 oui. Je l'ai trouvé.

9 Q. Vous dites que des déplacements importants de civils sont constatés à

10 un certain endroit. Le nom complet de la localité n'est pas lisible dans le

11 texte. Ensuite, je cite : "Si nous continuons nous aurons un exode totale

12 des civils."

13 Si vous regardez trois tirets plus bas, nous trouvons les propos de

14 quelqu'un qui n'a pas été identifié, mais ce quelqu'un dit ce qui suit, je

15 cite : "Retour des civils avec reconnaissance de l'absence d'armes par la

16 Serbie et la police sera là pour assurer le maintien de l'ordre."

17 Vous avez trouvé ce passage ?

18 R. Non.

19 Q. Bon, nous n'allons pas perdre davantage de temps. C'est au bas de page

20 dans la version originale, c'est évidemment très difficile à lire. La

21 traduction est plutôt un décryptage de la part du traducteur.

22 Vous ne pouvez évoquer aucun motif pour que durant cette période en

23 1998, il y ait eu plusieurs milliers de personnes qui selon ce qui est dit

24 au cours de cette réunion, se seraient réfugiées en Albanie ou au

25 Monténégro.

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1 R. Pouvez-vous me citer encore les chiffres ?

2 Q. 16 à 17 000 vers Albanie et 40 000 vers Monténégro.

3 R. Je crois que c'était un moment important de la lutte antiterroriste au

4 Metohija, et ces chiffres sont sans doutes liés à cette opération dont je

5 vous ai déjà parlée lorsque j'expliquais le retour de plusieurs milliers de

6 personnes dans leurs villages à partir d'un lieu déterminé, mais je ne suis

7 pas sûr de pouvoir situer tout cela précisément dans le temps aujourd'hui.

8 Mais il serait tout à fait réaliste que ces déplacements de population

9 aient eu lieu, à l'époque. Je ne me souviens pas de cette réunion

10 particulière, même si tout à fait, manifestement, j'y ai assisté, donc je

11 ne peux pas vous donner de réponses plus détaillées.

12 Q. Ma question suivante --

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Expliquez en quoi une opération

14 antiterroriste peut provoquer la fuite de la population.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai essayé d'expliquer

16 cela à plusieurs reprises lorsque j'ai parlé des raisons qui ont motivé ces

17 déplacements de population. Dans les endroits où la police affrontait les

18 terroristes, les habitants partaient. J'ai expliqué pourquoi ils avaient

19 peur et ils souhaitaient se mettre à l'abri pendant que durait cette

20 opération antiterroriste. Mais, c'était également dû au fait que les

21 terroristes eux-mêmes se sont efforcés de faire partir les civiles afin de

22 créer l'apparence d'une catastrophe humanitaire et parfois d'utiliser ces

23 populations en tant que bouclier.

24 Il y avait parfois des pressions de la part des organisations

25 internationales pour que ces civiles rentrent chez eux.

Page 40204

1 Mais quelque soient les raisons, ces déplacements de population ont

2 eu lieu, pour ce qui nous concerne nous souhaitions que les personnes en

3 question rentrent chez elles le plutôt possible et nous avons pris toutes

4 les mesures pour atteindre cet objectif. Mais ces déplacements ont eu entre

5 autres en 1998.

6 M. NICE : [interprétation]

7 Q. Des déplacements de population importants qui auraient pu être légitimé

8 par une action anti-UCK de la part des forces serbes, polices et armées

9 yougoslaves, qui ont pratiqué la politique de la terre brûlée, évoqué

10 plutôt à l'intention de personnes telle que M.Bakalli.

11 R. Ceci est absolument inventé de toute pièce, cela n'a rien à voir avec

12 la vérité.

13 Q. Très bien.

14 R. Vous pouvez en être sûr.

15 Q. Deux choses encore. Le 27 août, ce sera je pense le dernier passage que

16 j'aborderai dans ces documents, première page de ce passage, donc la date

17 du 27 août vous l'avez retrouvée ? Premier chapitre des propos du général

18 Lukic en haut de la page. Vous l'avez trouvé, c'est très bien.

19 Nous voyons à la fin de ce passage, j'espère que vous l'avez retrouvé dans

20 la version originale. Ce sont des notes qui ont été prises pendant la

21 réunion, n'est-ce pas, Monsieur Stevanovic ?

22 R. Très manifestement, c'est un exemplaire original.

23 Q. Nous lisons ce qui suit. Je cite : "La route Suva Reka-Orahovac est

24 ouverte sans problèmes majeurs," ou quelque chose de ce genre. C'est ce qui

25 est écrit dans le procès-verbal de cette réunion. J'aimerais, Monsieur

Page 40205

1 Stevanovic, que vous commentiez le témoignage que nous avons entendu de la

2 bouche de Lord Ashdown qui, vous le savez sans doute, a témoigné ici au

3 sujet de ce qu'il avait vu, le 27 août, ceci figure aux pages 2354 et

4 suivant du compte rendu d'audience. Il a déclaré être arrivé dans une

5 espèce d'enclave à savoir le secteur de Suva Reka, où la vallée forme une

6 espèce d'amphithéâtre. D'ailleurs, Monsieur Stevanovic, est-ce que vous

7 avez en tête la forme géographique de cette région de Suva Reka ?

8 R. Oui.

9 Q. Est-ce que Lord Ashdown, qui décrit cette région comme un amphithéâtre,

10 l'a décrit conformément aux souvenirs que vous en avez ?

11 R. Oui, on peut décrire la région dans ces termes.

12 Q. Merci. Donc, vous visualisez ce que décrit Lord Ashdown au fil et à

13 mesure que je lise des passages de sa déposition. Il déclare avoir été

14 profondément choqué par ce qu'il a vu, comme l'a été l'ambassadeur

15 britannique, qui avait été informé par le gouvernement yougoslave que des

16 opérations étaient poursuivies contre les villages de Drenica -- que les

17 opérations, qui s'étaient poursuivies contre les villages dans la région de

18 Drenica au Kosovo, avaient cessé, ce jour-là, ou deux jours avant, parce

19 que ce qu'il a vu c'est un amphithéâtre vallonné, et tous les villages dans

20 cet amphithéâtre étaient en feu. Il rend compte également dans le récit de

21 ce qu'il a vu de pilonnages, et il dit avoir vu des explosions.

22 Pouvez-vous expliquer comment les forces responsables de cela se sont

23 conduites d'après vu pour que Lord Ashdown explique les choses de cette

24 façon et est-ce que vous estimez que ce récit des événements correspond à

25 la réalité ?

Page 40206

1 R. La description semble préciser bien qu'elle demeure assez générale dans

2 ce secteur, pour autant que je m'en souvienne, il y a effectivement eu des

3 affrontements avec des terroristes, à l'époque.

4 Je répète, encore une fois, que je suis certain qu'il n'y a pas eu de

5 pilonnage de village. Donc, l'utilisation de ce terme ne s'applique

6 certainement pas, s'agissant de ce que je sais de ces opérations.

7 Il est possible que l'opération antiterroriste en question ait

8 couvert un secteur plus important qui est couvert, ce que vous qualifiez

9 d'amphithéâtre puisque cela correspond à la description géographique des

10 lieux, et il est possible qu'il ait fallu mener une opération

11 antiterroriste, à l'époque, dans des lieux plus -- à une échelle plus

12 généralisée dans la région. Il est possible que des traces d'incendie aient

13 pu être vues dans cette région, en ce moment-là. Le feu c'est quelque chose

14 qui accompagne assez souvent les opérations antiterroristes, mais on ne

15 peut pas dire que tout l'amphithéâtre était en feu ou que des pilonnages

16 aient eu dans la région, et qu'ils aient été monnaie courante.

17 Q. Vous pouvez ne pas le savoir, mais Lord Ashdown dispose d'une certaine

18 expérience militaire. En plus de l'ambassadeur, il était en compagnie d'un

19 militaire et c'est lui qui a dit au Juge de la Chambre que, d'après leur

20 estimation, l'artillerie était en train de tirer depuis la côte appelée

21 Dolje Bllace, à quelques sept, voire dix kilomètres des dits villages. Il a

22 également expliqué qu'ils ont pu entendre et voir les frappes des

23 projectiles. Ils ont pu entendre la canonnade de l'artillerie et, d'après

24 eux, il s'agissait probablement de chars T-54 et il s'agissait certainement

25 de tirs de chars et de tirs d'artillerie de calibre 120, voire 150

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1 millimètres. Il a même ajouté qu'il y a eu des frappes aux mortiers qui

2 font un bruit tout à fait particulier. D'après eux, il s'agissait de 82

3 millimètres voir d'un calibre de 120 millimètres s'agissant de ces

4 mortiers.

5 Ce sont là, les témoignages.

6 Donc, est-ce qu'il s'agissait là de village du Kosovo ou plutôt est-ce que

7 ce qui avait été fait au village du Kosovo sous le couvert de la lutte

8 contre l'UCK.

9 R. Sans sous quelques prétextes ce soit. Je vous ai déjà expliqué à

10 plusieurs reprises ce qui a été fait. Je ne conteste pas le fait car, à

11 l'occasion de l'opération antiterroriste, il y a eu recours à l'artillerie,

12 il y a eu recours à des mortiers, parfois même à des canons sans recul,

13 parfois, peut-être, des chars. Je n'ai, personnellement, pas vu

14 d'utilisation de chars, en ce qui me concerne. Mais tout ce qui a été

15 utilisé comme armement tel que vous l'avez cité, je suis certain que cela a

16 été utilisé aux fins de réaliser un objectif légitime, non pas aux fins de

17 pilonner les villages en tant que tel, mais aux fins de neutraliser les

18 terroristes et les lignes occupées par les terroristes.

19 Les tirs d'artillerie dont nous parlons ont essentiellement été

20 utilisés à ciel ouvert pour tirer vers des positions fortifiées des

21 terroristes. De là, maintenant à savoir s'il y a eu des exceptions et si

22 l'on a ciblé des installations qui avaient constitué une place forte ou un

23 nid de terroristes, cela ce n'est pas une chose que je suis à même de vous

24 dire en ce moment-ci. Tout ce que je vous dis, je vous le dis partant de la

25 logique et de mes connaissances générales. S'agissant de cette action ou

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1 opération concrète, je n'ai pas de connaissance personnelle à son sujet.

2 Q. Ce dit en passant, quand il est question des armes de la police, vous

3 ai-je bien compris, lorsque vous avez dit que la police avait en sa

4 possession des armes antiaériennes ?

5 R. Oui, elle avait des armes antiaériennes qui étaient portées par des

6 blindés de transport de troupes, le plus souvent.

7 Q. Ces mitrailleuses ont-elles été utilisées pour tirer en direction de

8 maisons à l'occasion des opérations diligentées contre l'UCK ?

9 R. Il se peut qu'ils aient été utilisés pour neutraliser des groupes de

10 terroristes au cas où ceux-ci se trouvaient à l'intérieur de bâtiments.

11 Quand je dis "bâtiment", j'entends maisons ou autres constructions.

12 Q. Quand vous dites "neutraliser" vous voulez dire liquider, n'est-ce pas

13 ?

14 R. Je ne veux pas dire liquider, au sens de tuer, mais il s'agissait de

15 repousser une attaque illégitime. La notion de "liquidation" comporte une

16 signification au sens restreint et au sens large. Cela ne signifie pas

17 seulement tuer.

18 Liquider le terrorisme, entre autres, signifie de faire en sorte

19 qu'ils démantèlent leurs organisations et qu'ils restituent leurs armes.

20 Cela constituerait, en ce cas, une liquidation du terrorisme.

21 Q. Est-ce qu'il vous a semblé parfois que le recours excessif à la force

22 peut se traduire par l'usage d'une mitrailleuse antiaérienne pour tirer sur

23 une maison où il y aurait des hommes ?

24 R. Pour tirer sur une maison où il y aurait des citoyens, oui, ce serait

25 effectivement le cas, mais pour tirer sur une maison depuis laquelle on est

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1 en train de tirer sur la police, là, je réponds non.

2 Q. Je vais vous poser une autre question au sujet de ce document.

3 M. NICE : [interprétation] Je me réfère à la page 128 en version anglaise.

4 La date est celle du 25 septembre. Veuillez essayer de retrouver cette page

5 dans la version originale.

6 Q. Vous avez retrouvé ce 25 septembre ?

7 R. Donnez-moi encore quelques minutes. Oui. Ce n'est qu'une page si je ne

8 me trompe pas.

9 Q. Je crois que si vous tournez cette première page, vous allez tomber sur

10 une deuxième intervention de la part du général Pavkovic.

11 M. NICE : [interprétation] Je demanderais à M. Prendergast, de bien vouloir

12 tourner la page 129, la placer sur le rétroprojecteur.

13 Q. Mon Général, avez-vous trouvé cette annotation relative aux propos du

14 général Pavkovic portant sur le 25 septembre et commençant par :

15 "L'opération dans le secteur de Donje Obrinje et de Gornje Obrinje est

16 terminée. La résistance a été forte, mais ce groupe se trouve confiner dans

17 un secteur bien plus petit.

18 "Le fait que la JSO n'ait pas pris partie à cette opération se

19 traduit par les conséquences suivantes…" et ainsi de suite.

20 "Après la mort d'un policier du MUP, les opérations ont été

21 temporairement interrompues. Les actions, en provenance du côté sud ont

22 contribué à l'achèvement."

23 Puis, on dit : "Continuez le nettoyage, demain." A la fin, on dit que

24 les pertes de l'ennemi se chiffrent à 200 personnes. Dites-nous si vous

25 vous souvenez de l'incident, vous-même ou pas ?

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1 R. Je ne sais pas de quel incident il est question ici. Mais, je tiens à

2 dire qu'après le 21 septembre, il y a le 25 chez moi. Il y a juste un

3 passage, un paragraphe sur cette page. Donc, je n'ai pas l'impression que

4 nous ayons la même page entre les mains.

5 Q. Oui. Je m'excuse. Il s'agit du 26. C'est moi qui me suis trompé. Donc,

6 je vous demande de vous pencher sur ce qui est dit à la date du 26 et vous

7 allez retrouver le passage dont j'ai donné lecture à propos des dires du

8 général Pavkovic ?

9 R. Ah, je le vois, maintenant.

10 Q. Merci. A votre avis, ces 200 morts à Suva Reka, c'est ce qui est noté

11 ici, pour ce qui est de ce qui s'est produit jusqu'au 26 septembre

12 constitue une réponse proportionnée ou disproportionnée par recours à la

13 force ?

14 R. Je pourrais vous répondre si je savais quel est le secteur couvert par

15 ces opérations antiterroristes et sur leur longueur. D'après ce que vous

16 avez lu, cela ne se rapporte pas à Suva Reka. Donje Obrinje, je crois m'en

17 souvenir se trouve dans la municipalité de Glogovac. Cela est de l'autre

18 côté du lit de la rivière par rapport à l'amphithéâtre dont vous avez

19 parlé.

20 Q. Oui. Vous avez tout à fait raison. Nous sommes en train de parler d'un

21 secteur autre. Nous sommes en train de parler Gornje et Donje Obrinje.

22 Pensez-vous que pour une localité telle qu'Obrinje, une perte de 200 vies

23 humaines constitue la résultante d'un usage excessif de la force ?

24 R. Ce chiffre-là est assez problématique. Je crois bien que cela n'est pas

25 exact. Je suis étonné d'entendre le général Pavkovic cité ce chiffre. Il

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1 s'agit probablement d'une évaluation.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelle pourrait être la population

3 de cette région ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, cela dépend du secteur qu'on

5 englobe. Mais, si on en parle que de ces deux villages-là, il se peut qu'il

6 y ait sept ou huit, au plus 10 000 habitants mais je ne pense qu'un secteur

7 aussi petit ait pu être englobé par une seule et grande opération

8 antiterroriste, à moins qu'il ne s'agisse là d'un groupe important de

9 terroristes.

10 M. NICE : [interprétation]

11 Q. Voyez-vous, c'est la raison pour laquelle j'ai choisi cet exemple pour

12 vous. C'est le fait que M. Abrahams a témoigné ici. Il s'agit d'un homme

13 qui travaille pour "Human Rights Watch", il a visité Donje et Gornje

14 Obrinje en date du 29 septembre, donc à peine quelques jours après, avec un

15 autre homme répondant au nom de Bouckaert. Lorsqu'ils sont arrivés là-bas,

16 les corps ont été sortis pour être enterrés. Il y avait là-bas le cadavre

17 d'un bébé de 18 mois. Dans la forêt, ils ont vu sept cadavres y compris

18 ceux de cinq femmes et de deux enfants qui sont morts de blessures à la

19 tête. Ils se sont entretenus avec des habitants de la localité et quoique

20 qu'il ait été tout à fait clair qu'il y avait eu des combats sur ce

21 territoire. Il est, tout à fait, clair aussi, le fait que les membres de la

22 famille Delijaj qui ont été tués. Il s'agissait de civils qui ont cherché

23 refuge dans les forêts.

24 On voit ici qu'il est fait état de quelque 200 morts qui sont

25 mentionnés comme étant des membres des effectifs de l'ennemi. Les enquêtes

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1 sur les lieux laissent entendre que des innocents et des jeunes civils

2 aient également péri. Est-ce que cela ne vous paraît pas comme étant un

3 recours disproportionné à la force ?

4 R. Le meurtre de ces cinq, six civils, ou je ne sais combien en mentionne

5 le rapport constitue un crime de guerre incontestable, et cela n'a rien à

6 voir -- enfin il n'y aucune raison de mettre cela en corrélation avec la

7 mort des terroristes. Pour autant que je le sache, personne n'est venu

8 confirmer la mort de 200 personnes, de ce chiffre de 200 personnes tuées.

9 Q. Voyez-vous, ils ont également effectué une visite à Gornje Obrinje, ou

10 plutôt ils sont allés à Glogovac où ils ont appris que 13 hommes se sont

11 vus alignés et exécutés dans un jardin. De telles exécutions ne sauraient

12 être justifiées, n'est-ce pas ?

13 R. Absolument pas. Vous le dites vous-même. Ils ont ouï-dire. Ce qui

14 signifie qu'il n'y a pas eu de vérification de ces allégations.

15 Q. Peut-être cela coïncide-t-il avec ce grand nombre de victimes dont le

16 général Pavkovic a parlé au procès-verbal ?

17 R. Je crois qu'il s'agit là d'une estimation et je crois avoir pu compter

18 dans votre énumération une dizaine de personnes, ce qui n'est pas du tout

19 conforme aux chiffres avancés tout à l'heure. Vous n'avez parlé que de

20 civils, ce qui constituerait sans contestation aucune, un crime.

21 Q. Je ne vais plus parler de ces documents. Je crains fort que je doive

22 revenir demain là-dessus. Je voudrais que vous m'aidiez maintenant sur des

23 points de nature générale. S'agissant de Racak, l'accusé a posé bon nombre

24 de questions et a produit un grand tas de documents. Quelle est la position

25 que vous prenez ? Est-ce que vous êtes à même de nous aider au sujet de

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1 Racak ou pas ?

2 R. Et bien, je vous ai déjà exposé la plupart des éléments qui me sont

3 connus à ce sujet. Peut-être pourriez-vous m'aider vous-même en me posant

4 des questions complémentaires et si je sais vous répondre, je vous

5 répondrai certainement.

6 Q. Bien. Penchons-nous tout d'abord sur une carte, ou plutôt il ne s'agit

7 pas d'une carte, mais d'une vue aérienne. Etant donné l'expérience que vous

8 avez de votre travail de policier et de votre profession de militaire

9 auparavant, êtes-vous, à votre avis, à même de suivre sur une vue

10 aérienne ?

11 R. Je pense que oui.

12 Q. Je vous demande de vous pencher sur ces vues aériennes et je vous

13 demanderais si vous seriez à même de vous pencher davantage en détail sur

14 l'une des ces vues et de vous servir de votre pointeur pour nous indiquer

15 ce qui s'est produit à Racak. C'est justement ce que je voudrais vous

16 entendre nous dire.

17 Si les vues aériennes ne vous aident pas, dites-le. On essaiera de

18 procéder autrement. Si ces vues aériennes vous sont utiles, j'estime qu'une

19 image vaut plus que milles mots prononcés. Je vous demanderais de placer

20 cela sur le rétroprojecteur et de vous servir de votre pointeur pour nous

21 dire ce qui s'est passé.

22 R. Je vais vous le placer sur le rétroprojecteur et je répète que je n'ai

23 jamais été à Racak. L'endroit le plus proche est celui de Stimlje, c'est

24 jusque là que je suis allé. Je n'étais pas sur les lieux. Je ne peux pas

25 vous expliquer des éléments qui se trouvent sur le secteur précis. Ce que

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1 j'en sais, c'est à partir des lectures que j'ai faites et je crois

2 m'orienter pour ce qui est de l'emplacement de cette localité par rapport à

3 d'autres localités plus grandes.

4 Mes connaissances générales disent que ceci est la route reliant

5 Stimlje de Crnoljevo et Dulje. Si je ne me trompe pas, peut-être pourrais-

6 je m'orienter plus facilement. Ici, nous avons la route qui se dirige vers

7 le village de Racak, mais j'ignore laquelle de ces agglomérations se

8 trouveraient être Racak ou je ne sais pas si tout ceci serait Racak.

9 Q. A votre avis, que s'est-il passé à Racak ? Pouvez-vous le décrire en

10 vous servant de mots et en vous servant de la carte comme cela vous

11 semblera être utile ? Je sais que vos sources d'information sont des

12 documents dont vous avez pris lecture ou alors des informations par ouï-

13 dire. Dites-nous ce qui est arrivé ?

14 R. Bien. Il est difficile de me servir de cette vue aérienne. Je ne sais

15 pas par où les unités sont arrivées et je ne peux pas reconstruire

16 l'événement partant de cette vue aérienne.

17 Mais partant des informations qui m'ont été accessibles, il

18 s'agissait d'une opération où l'on visait l'arrestation d'un groupe

19 terroriste qui avait là son QG ou son QG auxiliaire, et ce suite à des

20 violences où il y a eu des blessés et morts d'homme.

21 Pour ce qui est des cadences, je tiens à dire que l'unité, d'après ce

22 que j'en sais, en s'approchant de la localité avait déjà été attaquée, mais

23 toutes les parties de l'unité n'ont pas été assaillies de façon analogue.

24 En s'étant rapprochées du village, il y a eu déjà des tirs de la part des

25 terroristes. On a pu prendre lecture de certains documents à ce sujet, et

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1 puis, il y a eu des conflits dans le sens restreint ou sur une ligne

2 déterminée. Ce que je ne peux pas vous dire, c'est le fait de savoir quel

3 était l'emplacement des positions occupées par la police et de celles

4 occupées par les terroristes parce que je n'ai pas cette idée directe de

5 l'apparence des lieux.

6 Dans le conflit, ce qui s'est produit est justement ce qui est

7 arrivé. Par la suite, après l'événement, je sais quel a été l'ordre des

8 choses faites et je sais quels ont été les problèmes soulevés à ce sujet.

9 Q. Arrêtons-nous ici un moment.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, il faut que nous nous

11 arrêtions à 13 heures 43 parce qu'il y a une audience cet après-midi.

12 M. NICE : [interprétation] Certainement, Monsieur le Juge.

13 Q. Partant de ce que vous venez de nous dire, avez-vous compris qu'il

14 s'agissait d'une confrontation entre un groupe de terroristes et les

15 effectifs ou les forces serbes qui arrivaient là et qu'il ne s'agissait que

16 d'un seul groupe de terroristes ?

17 R. La notion de "groupe" est assez problématique. Il s'agissait d'un

18 conflit entre la police et des terroristes. Je ne sais pas s'ils ont

19 constitué plusieurs groupes ou s'ils ont constitué un petit groupe, voire

20 un groupe important. Ce n'est pas une chose qui a été pour moi matière à

21 réflexion. Je suppose que les terroristes dans une localité de cette nature

22 s'étaient organisés en un groupe, voire à une unité appropriée.

23 Q. S'agissant des armes ou de l'endroit où ces armes ont été retrouvées,

24 dites-nous ce que vous avez su, est-ce que l'on a retrouvé les armes là où

25 se trouvaient les combattants de l'UCK tombés, ou est-ce que ces armes se

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1 trouvaient ailleurs ?

2 R. Je n'arrive pas à m'en souvenir exactement. Je sais que la police a

3 quitté les lieux, et qu'en termes pratiques, elle n'a pas pu sécuriser les

4 lieux avec les terroristes tués, les armes et le reste. Je pense que les

5 armes ont été retrouvées ultérieurement, mais je ne sais pas trop à quel

6 endroit.

7 Q. Pour finir, parce que je vois que l'heure approche pour moi d'en finir,

8 étant donné que M. le Juge vient de me convier à conduire à un terme mon

9 contre-interrogatoire d'aujourd'hui, je tiens à dire ce qui suit : vous

10 n'avez jamais vu de rapport détaillé émanant d'un officier à la tête des

11 forces serbes qui énoncerait exactement ce qu'il fait.

12 R. Je n'ai vu qu'un rapport qui est celui qui figure dans cette pièce à

13 conviction, à savoir, le rapport de groupe de travail qui s'est vu confier

14 la mission de déterminer tous les faits en corrélation avec cet événement.

15 Je n'ai pas vu, de rapport émanant du chef de cette Unité de Police, qui a

16 pris à l'opération. Je suppose que ce rapport a été intégré dans le rapport

17 fait par le groupe de travail, ou du moins, certains des éléments de ce

18 rapport ont dû être intégrés dans celui du groupe de travail.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, on --

20 M. NICE : [interprétation] Est-ce que je peux poser encore une question ?

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, une question.

22 M. NICE : [interprétation]

23 Q. Un tel document émanant du chef de cette Unité de Police serait

24 probablement le document de la plus grande des valeurs, qui serait à même

25 de nous révéler la vérité vraie des événements de Racak, n'est-ce pas ?

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1 R. Ce serait certainement un document important. Je crois que le groupe de

2 travail avait des compétences plus vastes que ce qui a été englobé par ce

3 rapport, parce qu'on a dû englober dans ce rapport bon nombre d'autres

4 informations qui ne sont pas forcément celles du chef de l'unité qui aurait

5 conduit l'opération et rédigé son rapport à lui.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien. Nous allons lever l'audience

7 d'aujourd'hui, et nous allons continuer demain matin à

8 9 heures. L'audience est levée.

9 --- L'audience est levée à 13 heures 45 et reprendra le mercredi 1 juin

10 2005, à 9 heures 00.

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