Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 45618

1 Le mardi 25 octobre 2005

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 05.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, veuillez poursuivre.

7 LE TÉMOIN: MILOS DJOSAN [Reprise]

8 [Le témoin répond par l'interprète]

9 M. NICE : [interprétation] Vous vous souviendrez la semaine dernière --

10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson. Je vous ai promis de me

11 procurer, de la part de M. Tomanovic, le journal de guerre, si vous vous en

12 souvenez, on en avait parlé. J'ai ici tout ce que M. Tomanovic avait en sa

13 possession. J'ai un exemplaire pour moi et je peux confier deux exemplaires

14 à M. Nice.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur l'Huissier, pourriez-vous

16 prendre ces documents.

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je tiens à préciser que ce n'est pas le journal

18 entier, M. Tomanovic a envoyé une demande officielle pour qu'il lui soit

19 communiquer le journal complet. Dans ce journal incomplet, il y a les dates

20 critiques qui intéressaient M. Nice, à savoir celle du 27 avril notamment,

21 il y est fait état de cette opération antiterroriste. Ce qui l'intéressait

22 existe déjà dans ce que j'ai en ma possession.

23 Pour ce qui est du document complet, une requête a déjà été présentée.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Cette copie va être remise au bureau

25 du Procureur.

Page 45619

1 M. NICE : [interprétation] La semaine dernière, après l'audience, nous

2 avons été informé de la façon dont le document se présentait.

3 Effectivement, la structure n'était pas claire tel que ce document se

4 présentait à vos yeux, je n'ai pas de raison de douter de l'exactitude de

5 ce qu'a dit un des collaborateurs de l'accusé à Mme Dicklich, à savoir que

6 les documents qui étaient disponibles ou le journal dans sa version

7 originale, c'était peut-être un extrait de ce journal plus exactement, que

8 ceci avait été en partie transcrit pour que ce soit plus lisible pour

9 l'accusé, ce qui explique qu'il y a des passages dans la pièce qui sont en

10 cyrillique et dactylographiés, et nous n'avons pas de raison de douter, car

11 lui aussi peut avoir des difficultés à lire l'écriture de quelqu'un

12 d'autre. Il n'y a rien de négatif dans tout cela.

13 Puis, il y a eu une partie qui a été traduite à partir du cyrillique,

14 dactylographié ou pas, peu importe, traduction en anglais, c'est ce que

15 nous avions nous.

16 Je reviens à ce que disait l'accusé à propos des 27 et 28, je viens

17 d'examiner ces dates-là moi-même, à l'instant. Je devrais ajouter que,

18 d'après ce qu'a appris Mme Dicklich par ses conversations avec les

19 collaborateurs de l'accusé, le CLSS a refusé de traduire certaines

20 catégories de documents, et il se peut que ce document relève de cette

21 catégorie. Par exemple, des éléments manuscrits de ce genre. Pas de raison

22 de douter des dires de l'accusé. Rien de ce que j'ai soulevé comme

23 possibilité la semaine dernière ne serait être retenu contre lui, je tenais

24 à le préciser.

25 Ceci étant dit, je peux vous dire ce qu'il m'est possible de voir

Page 45620

1 maintenant. Bien sûr, si ceci ne nous était parvenu plus tôt hier, je ne me

2 plains pas, c'était un jour férié des Nations Unies, nous n'avons pas

3 travaillé, mais en puissance ces documents sont très importants ou très

4 précieux et ceux qui avaient été fournis, c'étaient certains éléments qui

5 avaient été sélectionnés et qui nous avaient été présentés à l'intercalaire

6 6, on commençait simplement par la rubrique du 24 mars. Apparemment, c'est

7 la même chose si je compare le texte de l'intercalaire avec celui que j'ai

8 reçu à l'instant même. Il n'y a pas d'ajouts.

9 Il y avait un incident pour lequel je devais demander à comparer et,

10 pour ne pas perdre de temps ici, je vais peut-être demander à ce que ceci

11 soit reporté, une suspension. Une suspension elle même prendrait du temps;

12 je pense qu'il est plus utile de le faire maintenant.

13 Les premières pages que vous avez en original nous ont été fournies. Je ne

14 pense pas qu'on y ait ajouté quoi que ce soit. Puis, il y a des pages

15 manuscrites originales, mais qui se présentent sous forme différente pour

16 ce qui est du 1er, du 2 et du 3 avril. Vous vous souviendrez sans doute,

17 Messieurs les Juges, qu'il y avait quelques pages dactylographiées en

18 anglais en ce qui concerne les dates à partir du 4 avril. Apparemment les

19 1ère, 2e et 3e semblent être des pages nouvelles, je vais demander qu'on les

20 examine dans un instant.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, nous estimons qu'il

22 vous faut utiliser la pause pour procéder à cet exercice.

23 M. NICE : [interprétation] Merci beaucoup, mais j'ai pratiquement terminé.

24 Bien sûr, il faut qu'on fasse une pause.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non, utilisez la pause.

Page 45621

1 M. NICE : [interprétation] Mais j'en aurais sans doute terminer de mon

2 contre-interrogatoire à ce moment-là, c'est pour cela, je ne voulais pas

3 ici faire d'hiatus entre cette déposition-ci et une autre.

4 Puis, nous avons quelques pages manuscrites. Apparemment, il y a une série

5 de pages qui concernent les journées qui vont du 25 au 28 avril, là aussi

6 la présentation est un petit peu différente et tous les jours ne se suivent

7 pas. Je vais simplement demander que les membres de mon équipe examinent ce

8 document. J'y reviendrai soit avant la pause ou en tant que de besoin peu

9 de temps après la pause, mais apparemment il y a quelques éléments

10 supplémentaires qui viennent du document que nous a fourni l'accusé dans

11 les modalités qu'il nous a décrites.

12 Je vous remercie.

13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je n'ai pas tout à fait suivi l'endroit

14 où vous avez dit que le CLSS, notre service de traduction n'avait pas voulu

15 traduire les documents manuscrits. Pourquoi ?

16 M. NICE : [interprétation] Il ne me revient pas de répondre à votre

17 question, de vous expliquer quelles sont les pratiques de ce service, ni de

18 façon implicite de le critiquer. Je suppose que vous savez que si on donne

19 un gros document manuscrit à ce service de traduction, cela prend beaucoup

20 de personnes. Le service ne veut pas faire une traduction intégrale d'un

21 document manuscrit important en pages. Je ne sais pas, parce que vous savez

22 ceci nécessite des ressources énormes. Il faut déchiffrer et traduire; cela

23 prend beaucoup plus de temps que lorsque vous avez des documents. En

24 fonction des priorités, le service opte pour les documents dactylographiés.

25 Mais je crois cette politique, nous la connaissons depuis un certain temps.

Page 45622

1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Si l'écriture de ces documents n'est

3 pas meilleure que la mienne, je comprends ces difficultés

4 M. NICE : [interprétation] Très bien.

5 Contre-interrogatoire par M. Nice : [Suite]

6 Q. [interprétation] Je reviens à ce que nous disions à propos de ce

7 journal de guerre. S'agissant de cette commission de la VJ chargée de la

8 Collaboration, est-ce que c'est la commission qui décide des documents qui

9 vont vous être fournis à vous ou directement aux collaborateurs de

10 l'accusé ?

11 R. Je ne me suis pas aventuré à étudier la méthodologie du fonctionnement

12 de la commission. Comme je l'ai déjà dit il y a quelques jours, la

13 commission m'a convié moi et m'a montré un texte figurant dans le livre et

14 elle m'a demandé, s'agissant de certains événements, de faire une

15 déposition. Pour moi, cela a été suffisant.

16 Pour ce qui est de la méthode de travail de cette commission, je

17 n'avais nul besoin de chercher à la connaître.

18 Q. Essayons de faire un petit récapitulatif. Vous avez, dans vos

19 déclarations faites à la commission de la VJ, des événements, mais des

20 événements qui étaient englobés par des documents rédigés à l'époque qui se

21 trouvent maintenant dans les archives, n'est-ce pas ?

22 R. Je le suppose.

23 Q. Est-ce que vous avez cherché à voir ces documents, si vous en avez fait

24 la demande, est-ce que vous avez été autorisé à les voir avant de fournir

25 une déclaration à la commission de la VJ ?

Page 45623

1 R. Non.

2 Q. Vous en êtes sûr ?

3 R. Bien sûr.

4 Q. Acceptez-vous l'idée selon laquelle, les documents rédigés à l'époque

5 sont les plus utiles pour des gens tels que les Juges qui se saisissent

6 d'événements survenus il y a plusieurs années ?

7 R. Ma conviction est la suivante, à savoir que les documents les plus

8 précieux sont ceux qui ont été créés à l'époque des événements mêmes, les

9 événements de l'époque, à savoir, de la période de temps en question.

10 Q. Est-ce qu'on vous a, plus exactement, la commission de la VJ vous a

11 expliqué pourquoi elle servait de filtre entre des documents originaux que

12 demandait souvent le bureau du Procureur et le présent Tribunal, est-ce

13 qu'on vous a donné une raison expliquant pourquoi la VJ, la commission de

14 la VJ a servi de filtre, a agi en tant que filtre ?

15 R. D'abord, je ne pense pas que cela ait été filtré. Je ne vois aucune

16 raison pour moi, me concernant, de me poser la question. Ils ne m'ont pas

17 donné de prétextes pour générer ce type de conclusion. On m'a dit : "Mon

18 général, vous voyez ce qui est écrit ici et j'aimerais que vous fassiez une

19 déposition au sujet des événements en question."

20 Q. Si vous le voulez bien, nous allons examiner l'intercalaire 7 parmi vos

21 documents, pour prendre un exemple.

22 Je vais vous expliquer les deux finalités qui sont les miennes, avant

23 d'examiner le document. Vous nous avez dit, ce matin, que la commission

24 vous a appelé, vous a convoqué et vous a montré le texte écrit dans ce

25 livre "Dit comme vu." Rappelez-nous : est-ce que vous même vous avez lu ce

Page 45624

1 livre ou pas ?

2 R. J'ai lu les parties qui se rapportaient aux événements qui ont fait

3 l'objet de questions à mon égard, le reste du livre je ne l'ai pas lu.

4 Q. Est-ce que vous avez douté de l'auteur de ce livre, pensez-vous que

5 c'était l'OSCE ou est-ce que vous pensiez que c'était Natasa Kandic elle-

6 même qui l'avait écrit ?

7 R. De nos jours encore, j'ai des raisons de douter de ce livre, parce que

8 je n'en connais pas les auteurs. Qui est la personne qui a vu et qui a

9 raconté, parce que c'est une chose de publier un livre, c'est une autre

10 chose que de l'écrire et c'est une troisième chose que de voir, d'observer

11 et de le noter.

12 Parce que le titre "Tel vu, tel dit" met les choses en doute. Il

13 demande à ce que nous nous penchions sur le fait de savoir qui est-ce qui a

14 vu, qui est-ce qui a relaté les choses. Le fait de savoir qu'est-ce qui l'a

15 publié revêt moins d'importance. J'aimerais que l'on me communique à moi,

16 ne serait-ce que l'un des noms des auteurs qui aurait vu ces choses-là et

17 qui les auraient relatées.

18 Q. Ne vous en faites, Monsieur Djosan. La personne qui a procédé à la

19 compilation de ce livre est venue ici même nous dire comment cela a été

20 fait, en expliquant parfaitement la méthode.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais je ne pense pas que c'est ce à

22 quoi veut en venir le témoin. Il dit que ce qui compte ici, les vrais

23 auteurs, ce sont les personnes qui ont fourni les informations, pas les

24 personnes qui les ont rassemblées.

25 M. NICE : [interprétation] Je comprends.

Page 45625

1 Q. Mais prenons la deuxième page de votre déclaration, avant- dernier

2 paragraphe; voici ce que vous dites en anglais : "J'ai lu les informations

3 selon lesquelles les forces de la RFY auraient participé à la destruction

4 de ces parties de la ville, dans un livre publié par le centre du droit

5 humanitaire du Kosovo : "As Seen, As Told." De quelle page parlez-vous ? De

6 quel paragraphe du livre s'agit-il ?

7 R. Je n'ai pas sous les yeux ce livre-là et je ne me souviens pas avec

8 précision de tous les passages de ce livre. Mais j'aimerais savoir qui est-

9 ce qui a vu. Vous ne me l'avez pas dit. Qui est-ce qui a vu cela et qui

10 est-ce qui l'a écrit ?

11 Q. Attendez, attendez, ne répétez pas. Vous êtes ici pour déposer à propos

12 d'événements. Vous dites, dans une déclaration, que vous avez lu quelque

13 chose et maintenant, vous le contestez. Vous êtes un homme intelligent, un

14 homme instruit. Si vous voulez contester quelque chose, il faut que vous

15 nous donniez tous les tenants et tous les aboutissants de ce que vous

16 contestez parce que je posais une question de suivi par rapport à ce que

17 demandait le Juge Bonomy. Si vous nous donnez une page, un numéro de

18 paragraphe, je peux vous montrer comment ce livre-ci est assorti de notes

19 de bas de page qui dit qu'il ne faut pas nécessairement donner le nom des

20 témoins, mais qu'il y a des témoins. Est-ce que vous savez qu'il y a

21 partout, dans ce livre, des notes de bas de page qui montrent l'existence,

22 le nombre de témoins ainsi que le pseudonyme qui leur a été donné à

23 chacun ? Vous le saviez ?

24 R. J'ai écrit ici quelque chose au sujet d'un événement concret et je n'ai

25 pas répondu à des notes de bas de page de ce livre.

Page 45626

1 Q. Écoutez la question, s'il vous plaît. Vous vous êtes plaint du fait

2 qu'on n'indiquait pas les auteurs de ce livre. Or, ici, vous avez un

3 passage, une déclaration que vous voulez présenter aux Juges comme étant

4 une pièce sur laquelle s'appuyer parce qu'elle est fiable. Là, vous parlez

5 de quelque chose. Dites-moi de quel paragraphe il s'agit et à ce moment-là,

6 je vais vous demander de voir ce qu'il en est, de comparer vos vues à

7 celles des auteurs et de voir qui ils sont ? Dites-moi où est ce passage

8 parce que si vous n'êtes pas en mesure de le faire, nous ne pouvons pas

9 répondre à cette affirmation qui est la vôtre. Est-ce que vous me

10 comprenez ?

11 R. Je vous dis, une fois de plus, que j'ai rédigé une déposition

12 concernant les événements du 24 mars 1999. Je l'ai fait en fonction de mes

13 souvenirs et des connaissances que j'en avais ainsi que des connaissances

14 qu'en avaient mes officiers subordonnés.

15 Si j'avais su que vous alliez me demander de répondre au sujet de

16 chaque petit trait et de chaque note de bas de page, j'aurais répondu de la

17 sorte, mais on m'a demandé de fournir une description à moi des événements

18 et les connaissances qui étaient les miennes.

19 Q. Arrêtez-vous parce qu'on a déjà parlé de cela et vous ne répondez pas à

20 ma question. Vous faites référence à des notes de bas de page. Alors,

21 reprenez cette partie-ci de ma question : vu ce que vous dites dans votre

22 déclaration à propos de ce livre, "As Seen, As Told" et vu ce que vous avez

23 dit à ces Juges à propos des auteurs de ce récit repris dans ce livre, est-

24 ce que vous saviez ou non, à l'époque, que dans ce livre, il y avait des

25 notes de bas de page qui donnaient les sources utilisées ? Parce que vu la

Page 45627

1 façon dont vous nous lisiez votre déclaration, ceci ne semble pas être le

2 cas.

3 R. J'essaie de vous expliquer une fois de plus. Je n'ai pas commenté moi-

4 même en réplique par rapport à ceux qui ont rédigé les notes de bas de

5 page. Je me suis adressé à la commission pour faire une déposition et je

6 l'ai signé et je maintiens ce que j'ai signé. Je crois que cela est tout à

7 fait suffisant pour ce qui nous regarde ici.

8 Q. Bien --

9 R. J'aimerais bien apprendre qui est l'auteur de cette note de bas de

10 page.

11 Q. Rappelez-vous, je vous ai demandé les numéros de page, les numéros de

12 paragraphe que vous auriez lus dans ce livre, mais vous n'avez pas répondu.

13 Je vous laisse entendre que la commission de la VJ a sans doute fait un

14 résumé des plus généraux qui, d'après vous, se trouvait dans votre livre.

15 Puis, vous avez notamment Vukovic et il dit que ce n'était pas possible de

16 lire plus loin parce qu'il était dégoûté par Natasa Kandic. Est-ce que

17 c'est dire ce qui s'est passé ? Est-ce qu'il vous a dit : "Voilà ce que dit

18 ce livre, c'est le livre de Natasa Kandic ?"

19 R. Tout d'abord, vous avez tort. Vous avez tort de dire que la commission

20 nous a raconté ce que disait ce livre. J'avais ce livre chez moi pendant

21 deux jours. J'ai feuilleté ce livre et j'ai consulté la partie qui

22 m'intéressait. Je n'avais pas du tout l'intention de polémiquer avec

23 quelqu'un qui serait indiqué par un nom, prénom, pseudonyme dans une note

24 de bas de page. J'ai décrit ce que j'ai vu et j'ai dit quelles étaient mes

25 informations.

Page 45628

1 Maintenant, de là à savoir ce que M. Vukovic a rédigé et je dirais

2 que c'est son droit d'aimer ou de ne pas aimer quelqu'un.

3 Q. Fort bien. Je reviens à la première page de la même déclaration. Nous

4 allons voir ce que vous avez dit jusqu'à présent, pour ce qui est des

5 détails. Vers le milieu de la première page, dans votre version, c'est un

6 peu plus avant dans la version en anglais, il y a un paragraphe qui dit

7 ceci : "Au cours de la nuit où a commencé l'agression de l'OTAN --" vous

8 avez maintenant ce document sur le rétroprojecteur.

9 "Au cours de la nuit où a commencé l'agression de l'OTAN, je me

10 trouvais sur la colline de Cabrat, près de Djakovica. Le centre

11 opérationnel de la brigade se trouvait au pied de la colline. Le régiment

12 ou le bataillon de logistique se trouvait à Djakovica. Il y avait

13 déploiement d'unités organisationnelles. Le commandement du bataillon se

14 trouvait aux abords de la ville, près de Cabrat. Nous avons eu un logement

15 de la maison Marsenic où nous avions abrité notre personnel et les armes

16 que nous avions utilisées, que nous avions mises en place auparavant sur la

17 colline. Mais nous avons déplacé nos radars P-15 que nous utilisions pour

18 suivre, pour surveiller l'espace aérien de cet endroit pour aller ailleurs.

19 Nous nous attendions à ce que nous soyons pris pour cible par l'avion de

20 l'OTAN au cours des premiers moments de l'agression de l'OTAN."

21 "Puis, la première cible qui a été frappée par les missiles de

22 croisière, c'était la caserne Devet Jugovica."

23 Le texte continue. Tout ceci, vous vous en souveniez ou est-ce que

24 vous avez quelque part des notes, que ce soit des notes de bas de page,

25 pour vous rafraîchir la mémoire ?

Page 45629

1 R. Je les ai rédigées de mémoire.

2 Q. Vous étiez, à ce moment-là, général ou général à la retraite et vous

3 pensiez vraiment qu'en novembre 2002, c'était quelque chose de satisfaisant

4 que d'utiliser uniquement sa mémoire, ses propres souvenirs pour relater

5 des événements survenus trois années auparavant ?

6 R. Ce type d'événement est gravé dans la mémoire pendant très longtemps.

7 Le début de l'agression, le début de la guerre, c'est quelque chose dont on

8 se souvient très longtemps.

9 Q. Bien entendu, vous ne donnez pas d'heures, de jours. Vous ne donnez pas

10 de noms, si ce n'est celui d'une famille. Prenons, si vous le voulez bien,

11 dès lors, l'intercalaire 10.

12 Nous avons une autre déclaration que vous avez faite, cette fois-là, le 27

13 décembre 2002. Cette déclaration concerne des activités du 1er avril 1999.

14 Prenez le paragraphe qui suit, celui où on explique le déplacement des

15 forces, mais autant regardez celui-ci.

16 Est-ce que vous vous êtes souvenu que le 1er Bataillon de roquettes,

17 d'artillerie se trouvait dans le secteur de Kijevo, le deuxième dans celui

18 de Gnjilane, le troisième dans celui de Djakovica ? Vous vous souveniez de

19 tout cela, précisément ? Vous avez tout retenu ?

20 R. Ils se trouvaient là-bas à partir du 9. Cette partie-là de ma

21 déclaration était une sorte d'avant-propos. Il se trouvait là-bas à partir

22 du 9 avril et c'est à l'époque qu'il se trouvait encore dans le secteur de

23 Djakovica.

24 Vous avez vu qu'il y a un avant-propos ici qui donne une sorte

25 d'introduction concernant ce que je faisais, à quelle date et quel était le

Page 45630

1 déploiement des unités. Le 1er avril, mes unités n'étaient ni à Gnjilane, ni

2 à Beca, ni à Kijevo, ni à Gracanica.

3 Q. Prenons le paragraphe suivant. Vous dites : "En sus des unités

4 susmentionnées, il y avait une batterie de roquettes avec un système de

5 missiles KUB-M qui venaient des effectifs du

6 311e Régiment de roquettes autopropulsées qui se trouvaient dans la région

7 générale de Bec. Vers 22 heures 30, le 31 mars 1999, deux avions de l'OTAN

8 se sont approchées venant de la direction de Prizren."

9 Tout ceci vous le dites trois ans, trois ans et demi plus tard. D'où

10 est-ce que vous avez tenu ces notions précises comme l'heure, par exemple ?

11 R. L'heure est exacte parce qu'à ce moment-là, je me trouvais sur place et

12 je me souviens de tout ce qui s'est passé. J'ai pris part à tout ceci.

13 C'est moi qui ai sauvé ces soldats. Comment voulez-vous que je ne me

14 souvienne pas d'événements aussi importants ?

15 Q. Je vois. Vous n'avez même pas cherché à vérifier. Vous saviez que vous

16 alliez déposer ici. Est-ce que vous pensiez que c'était dix heures ou dix

17 heures et demie ? Est-ce que vous avez voulu vérifier ? Non, non, vous êtes

18 satisfait de vos souvenirs, même s'il y a des documents qui pourraient

19 prouver, documents que nous avons ou plus exactement que le bureau du

20 Procureur avait et qu'il cherchait à obtenir, alors que ces documents se

21 trouvaient à attendre dans les archives. C'est cela ?

22 R. Je n'en ai eu nullement besoin.

23 Q. Je vois. Vous n'avez pas non plus le souhait de le faire, vous qui

24 étiez un militaire. Vous n'avez pas eu envie de vérifier les archives ?

25 R. Pour un événement de cette nature, où il a été tué des soldats à moi,

Page 45631

1 je n'avais pas besoin d'aller consulter les archives pour savoir quand,

2 comment et de quelle façon ont été tués ces gens qui ont été placés sous

3 mes ordres. Il y a d'autres hommes avec qui je me suis entretenu. Il y a un

4 dénommé Vukasinovic dont la déposition figure également ici.

5 Q. Qu'est-ce que vous dites ? Qui vous aurait parlé dans la commission,

6 qui aurait partagé avec vous leurs souvenirs, plutôt que de consulter les

7 archives ? Est-ce que personne n'a dit à la commission, lors de ces

8 réunions : "Ecoutez, est-ce qu'il est possible de revoir ces documents que

9 nous avons rédigés ?" Personne ne l'a fait, n'a cherché à revoir ces

10 documents qui se trouvaient dans les archives ?

11 R. Les autres, je ne sais pas. Posez-moi des questions me concernant. Je

12 n'ai pas eu --

13 Q. Est-ce qu'il y a eu une réunion de gens avec la commission qui vous a

14 dit ce que vous alliez faire en vue de la préparation de documents sur

15 lesquels devraient s'appuyer ces juges parce qu'ils seraient fiables ou

16 est-ce que cela a été des tête-à-tête ou est-ce qu'il y a eu une réunion

17 générale où on vous a parlé à tous ? Dites-nous comment cela s'est passé.

18 R. On m'a fait venir et on m'a dit : "Général, voyez un peu ce qui est dit

19 dans ce livre. Veuillez nous faire une déposition au sujet de ces

20 événements." Ils n'ont pas influé sur moi. Ils ne m'ont pas dit ce qu'il

21 fallait que j'écrive. Ils m'ont dit juste : "Apportez votre déposition et

22 sachez que vous répondrez de votre déposition sur le plan moral, matériel

23 et pénal." Que voulez-vous que la commission me dise d'autre ? Vous ne

24 vouliez tout de même pas qu'eux me disent ce qu'il fallait que j'écrive.

25 Tout ce qui est dit ici, je le maintiens. Du reste, je n'aurais pas rédigé

Page 45632

1 ce type de déposition. Ce n'était pas le cas.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous avez rédigé cette

3 déclaration, à ce moment-là, sur les lieux ou est-ce que vous avez pris un

4 certain temps pour y réfléchir avant de le faire ?LE TÉMOIN :

5 [interprétation] Je l'ai rédigé dans mon bureau. Je n'étais pas encore mis

6 à la retraite. J'ai été mis à disposition. J'avais encore trois mois pour

7 moi avec le droit de venir au travail et de disposer d'un bureau. C'est là

8 que j'ai tapé cette déposition sur mon ordinateur. Avant cela, j'ai

9 convoqué un officier à moi, le colonel Vukasinovic de laquelle unité

10 venaient ces soldats, mais j'étais moi-même sur place lorsque ceci est

11 arrivé. C'est moi qui ai sorti les soldats de cette zone de feu. Il

12 s'agissait du lieutenant-colonel Milic Drago.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Djosan, vous dites que la

14 commission vous avait demandé d'écrire quelque chose à propos de cet

15 événement. Pourriez-vous me dire de quelle façon on a décrit cet

16 événement ? Dans quels termes on l'a décrit lorsque vous avez reçu cette

17 demande de la part de la commission ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne comprends pas ce que vous voulez dire,

19 dans quelle "langue" ou dans quels "termes." Vous parlez de style ou vous

20 parlez de langue en tant que telle ?

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non. Ce que j'aimerais savoir, c'est

22 ce qu'ils vous ont demandé précisément, sur quoi précisément devait porter

23 ce rapport ? Parce que vous dites "cet événement." Comment ont-ils formulé

24 leur demande ? En quels termes ? Demande qui a débouché sur la rédaction

25 par vous de ce document.

Page 45633

1 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils m'ont donné lecture d'une partie de ce

2 livre qui se rapportait au prétendu événement de Qerim. Je savais où se

3 trouve Qerim. Cela se trouve juste à côté de l'endroit dont je suis en

4 train de parler et où ont perdu la vie mes soldats. Cela s'appelle Ljug

5 Bunar, cet endroit. J'ai décrit l'événement tel que j'en ai eu connaissance

6 et j'ai parlé de ce que je savais, à savoir que je me souvenais

7 parfaitement bien de l'événement puisque des soldats à moi ont été tués. Je

8 me trouvais à proximité immédiate de cet endroit et j'ai dit que je n'avais

9 aucune information sur --

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je comprends. Vous avez répondu à ma

11 question. Maintenant, j'aimerais vous demander si ceci, c'était avant ou

12 après, avant d'avoir lu ces parties du livre que vous dites avoir lues ou

13 après.

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne vous ai pas bien compris, excusez-moi.

15 Est-ce que vous voulez demander si cette déposition, je l'ai rédigée avant

16 ou après ?

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, non. Je vous ai d'abord demandé

18 en quels termes la commission vous avait fait cette demande. En réponse,

19 vous avez dit qu'ils vous avaient lu une partie de livre, les membres de la

20 commission. J'aimerais savoir si cela s'est passé avant que vous, vous

21 n'ayez vous-même lu le livre comme vous avez dit que vous l'aviez fait,

22 d'ailleurs ou si c'était après ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils m'ont d'abord fait venir. Je ne savais

24 même pas que ce livre avait été publié. On m'a fait venir dans cette

25 commission et on m'a dit : "Général, il a été publié un livre et il est

Page 45634

1 mentionné des événements de Djakovica, un tel et un tel et un tel

2 événement. Veuillez nous indiquer quelles sont les informations dont vous

3 disposez au sujet de ces événements." Alors, j'ai rédigé l'un après l'autre

4 --

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ma question était tout à fait simple.

6 Vous dites que vous avez eu, à un moment donné, le livre chez vous pendant

7 deux jours. Je vous demande si c'étaient deux jours avant ou après qu'on

8 vous demande de rédiger ce rapport ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Après. Après qu'on m'ait demandé de présenter

10 ces dépositions.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

12 M. NICE : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît, Messieurs les

13 Juges.

14 Q. Veuillez prendre et consulter l'intercalaire 29.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Si vous ne revenez pas sur ce point,

16 je voudrais terminer moi-même.

17 Ma dernière question sera celle-ci, Général : est-ce que vous avez

18 rédigé le rapport avant ou après que vous ayez lu ce livre ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Après avoir lu ce livre -- ou plutôt, la

20 partie dont j'ai parlé.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

22 M. NICE : [interprétation]

23 Q. Pourrions-nous consulter l'intercalaire 29. Vous dites que vous n'aviez

24 pas de document de référence. On vous a demandé de rédiger un rapport, on

25 vous a montré le livre, puis vous avez écrit votre rapport. Vous l'avez,

Page 45635

1 cet intercalaire, l'intercalaire 29 ?

2 Monsieur Nort, Monsieur l'Huissier, veuillez placer le document en anglais

3 sur le rétroprojecteur. Merci.

4 Vous avez un avant-propos, un préambule, puis, vous dites

5 ceci : "Dans le cadre de l'action menée par la VJ et le MUP afin de

6 neutraliser les activités du STS dans le secteur de Trava, l'unité a

7 participé à une opération de fermeture du secteur sur les lignes : à

8 gauche, cote 442; à droite, cote 478 Batraki, afin d'empêcher le repli des

9 STS sur l'axe des villages de Racaj et de Skivjan."

10 Tout ceci, vous l'aviez encore en mémoire ? C'est un souvenir que

11 vous aviez ?

12 R. Cela se fonde sur les souvenirs du commandant du bataillon qui a

13 commandé cette unité à moi, le lieutenant-colonel Odak.

14 Q. Par qui est-ce ? Est-ce que c'est pour cela que sa déclaration est

15 tellement semblable à la vôtre parce que nous avons la sienne à

16 l'intercalaire 30.

17 R. Je pense que s'agissant d'un événement, si on dit la vérité, toute

18 personne devrait dire quelque chose de semblable.

19 Q. Non. Vous n'avez pas obtenu de documents originaux et vous n'avez pas

20 dit que quelqu'un d'autre aurait demandé à obtenir des documents originaux,

21 mais est-ce que M. Odak, lui, avait des documents originaux lui permettant

22 de se souvenir de ces cotes ?

23 R. Le lieutenant-colonel Odak a pris la carte de Meja, étant donné qu'il

24 s'agissait de quelqu'un de l'infanterie, il connaissait la disposition des

25 endroits et il a consulté la carte pour dire où il a été. J'ai dit, moi-

Page 45636

1 même, que j'ai visité ces endroits, que j'ai trouvé ces gens aux différents

2 endroits.

3 Q. En votre présence ?

4 R. Lorsqu'ils se trouvaient sur ces positions, je les ai inspectées dans

5 le courant de la journée. Tout comme les autres unités, je les ai

6 inspectées, j'ai passé une heure sur les lieux.

7 Q. Les détails ne nous intéressent pas tout de suite. Ce qui nous

8 intéresse, c'est la méthode utilisée pour rédiger. Vous avez rédigé cette

9 déclaration lorsque vous étiez assis à une table avec Odak ou est-ce que

10 lui a préparé la déclaration, il a vu une carte et est-ce qu'il en a

11 discuté avec vous ? Vous savez que sans document rédigé à l'époque, il est

12 difficile de savoir comment vous vous souvenez des cotes. Nous aimerions

13 simplement savoir quelle est la méthode que vous avez utilisée ?

14 R. Ma déposition, je l'ai rédigée partant de la déposition qu'il avait

15 faite lui même, tout comme la commission m'avait confié pour mission de

16 rédiger une déposition, je lui ai également donné l'ordre, en sa qualité

17 d'officier qui était immédiatement l'officier chargé de cet endroit-là, de

18 faire une déposition également.

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crains qu'il y ait une espèce de confusion

22 parce que cela a été dit dans une seule et même phrase, le témoin l'a dit,

23 mais peut-être que l'interprétation n'a-t-elle pas été suffisamment

24 précise. Le témoin a dit qu'il a inspecté cette unité sur le terrain. Il

25 n'est pas allé voir Odak pendant que celui-ci rédigeait sa déposition. Il a

Page 45637

1 inspecté l'unité alors qu'elle se trouvait sur le terrain. Il parle de la

2 période de temps où, pendant l'opération, l'unité se trouvait sur le

3 terrain. C'est là le sens de ce que le témoin a dit en langue serbe.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que c'est le cas ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Fort bien.

7 M. NICE : [interprétation]

8 Q. En quoi ceci nous aide t-il pour ce qui est de l'emplacement de ces

9 cotes ? Vous dites que pour écrire votre déclaration, vous vous êtes basé

10 sur celle d'Odak.

11 R. Oui, c'est exact. Odak a fait une déposition à mon intention. J'avais

12 inspecté cet endroit, j'ai vu ces lieux et j'ai confirmé le fait que les

13 choses se sont produites exactement de la façon qui est décrite par le

14 lieutenant-colonel Odak. J'affirme qu'il en a été ainsi puisque j'ai été

15 moi aussi sur les lieux.

16 Q. Montrez-moi où, dans votre déclaration, vous dites ceci, par exemple :

17 "Je confirme l'exactitude des dires de M. Odak" ou est-ce qu'il serait plus

18 exact de dire qu'on a l'impression, en lisant votre déclaration, que ce

19 sont vos souvenirs que vous consignez ou parce que vous auriez examiné les

20 documents de l'époque ? Dites-nous exactement où, dans votre déclaration,

21 vous dites que : "Vous rapportez les dires d'Odak." On ne trouve pas ce

22 genre d'endroit, n'est-ce pas?

23 Vous étiez un officier supérieur. Est-ce qu'il vous est arrivé

24 d'imposer des sanctions disciplinaires à l'un quelconque de vos hommes ?

25 R. Vous m'avez posé deux questions à la fois. La première question que

Page 45638

1 vous avez posée était celle de savoir si, dans ma déclaration à l'intention

2 de la commission, j'étais censé décrire. Si je devais le faire, c'est une

3 autre chose. Je me suis rendu compte par moi-même du fait qu'Odak avait

4 rédigé une déposition exacte. Partant de la sienne, j'ai rédigé la mienne.

5 Si vous estimez que j'aurais dû ajouter une clause confirmant la déposition

6 qui était la sienne, là, nous parlons d'une chose tout à fait autre.

7 La deuxième partie de votre question connaît la réponse suivante :

8 bien sûr que j'ai pris des mesures disciplinaires à l'encontre de ceux qui

9 n'auraient pas exécuté les ordres.

10 Q. Nous allons revenir à cette deuxième question dans un instant. Merci

11 d'avoir répondu comme vous l'avez fait à la première partie parce que cela

12 me pousse à poser cette question-ci : à votre connaissance, le fait de

13 reprendre pour faire vôtre la déclaration de quelqu'un d'autre, est-ce que

14 c'était une pratique courante au sein de la commission ?

15 R. Monsieur Nice, vous ne m'écoutez pas du tout. Je vous ai dit que

16 j'étais sur les lieux et que j'ai vu. Si je ne me fais pas confiance à moi-

17 même, à qui dois-je faire confiance. Je prête, à part entière, foi à ce

18 qu'a dit M. Odak.

19 Q. N'essayez pas de faire de digression. Revenez, s'il vous plaît, à ce

20 que vous avez dit vous-même. Vous avez dit : "J'étais convaincu qu'Odak

21 avait fait une déclaration fidèle aux faits et c'est là-dessus que je me

22 suis basé pour rédiger la mienne." C'est ce que vous avez dit vous-même, ce

23 sont vos propos. Dites aux Juges qui est censé déclarer recevable des

24 déclarations faites par la commission. Vous vous basez sur la déclaration

25 d'un autre et vous dites qu'à ce moment-là, vous rédigez votre propre

Page 45639

1 rédaction. Est-ce que c'était une habitude de travail au sein de la

2 commission, oui ou non ?

3 R. Je ne peux pas vous répondre par un oui ou par un non sans plus. Je

4 vais vous dire ce qui suit : la pratique était la suivante : Odak a rédigé

5 une déposition à mon intention et je me suis rendu compte de la véracité de

6 ses dires et je n'ai eu aucune raison d'en douter. Pour ce qui est de

7 l'autre déposition rédigée par Vukasinovic, j'ai vérifié également, je sais

8 comment les choses se sont passées. Je n'acceptais aucune déposition sans

9 vérifier.

10 Q. Comment avez-vous vérifié ? Qu'est-ce que vous avez utilisé pour

11 vérifier la déclaration de quelqu'un, puisque vous avez dit que vous n'avez

12 pas eu d'archives à votre disposition, de dossiers, de quoi vous êtes-vous

13 servi pour faire ces vérifications ?

14 R. Me comprenez-vous quand je vous dis que j'étais là-bas en même temps

15 qu'Odak. J'ai rendu visite à cette unité. J'en ai les tenants et les

16 aboutissants --

17 Q. Monsieur Djosan, veuillez écouter la question, parce que nous, nous

18 écoutons ce que vous dites dans vos réponses. Les réponses que vous avez

19 fournies qui nous ont été traduites reviennent à dire ceci : vous avez

20 parlé de cette déclaration faite par Odak. Vous dites que vous n'aviez pas

21 de raison d'en douter. Puis, vous dites que c'est peut-être un lapsus -

22 vous dites : "C'est vrai pour les autres déclarations comme celle du

23 colonel Vukasinovic. Je le sais parce que j'ai vérifié au sujet d'un

24 événement."

25 R. A propos d'un autre événement.

Page 45640

1 Q. Oui. Mais comment est-ce que vous avez vérifié ? Soit vous vous

2 avez un souvenir de quelque chose et à ce moment-là, vous n'avez pas besoin

3 de lire la déclaration de quelqu'un d'autre ou vous lisez une déclaration

4 ou vous voyez des documents originaux et vous dites : "Oui, il a raison

5 parce qu'il affirme que c'était à 10 heures 30 et les archives le

6 montrent." Qu'est-ce que vous vouliez dire lorsque vous avez dit que vous

7 aviez vérifié ?

8 R. Chacun de mes officiers, en rédigeant une déposition, a dû consulter

9 ses subordonnées à lui. Lui aussi le faisait. Tous ceux qui avaient

10 souvenance d'un événement ont été consultés.

11 Q. Je vois.

12 R. Je n'ai aucune raison pour ma part de douter de la déclaration de ce

13 lieutenant-colonel.

14 Q. C'est une espèce de pyramide d'historiens ? Nous avons des

15 subordonnées, des subalternes qui font des rapports et cela va d'un échelon

16 à l'autre et vous, vous acceptez simplement. Vous signez sans vérifier qui

17 est celui qui a fourni ce qui était ses souvenirs. Est-ce que c'est à peu

18 près comme cela que cela s'est passé ?

19 R. Ce n'est pas exact.

20 Q. Revenons une fois de plus à cet intercalaire 29, à votre déclaration

21 où, trois paragraphes avant la fin, on parle de cette opération de

22 fermeture du secteur qui s'était poursuivie.

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il n'y a pas la réponse du témoin dans le

Page 45641

1 compte rendu d'audience. Il a dit : "Ce n'est pas exact." Ici, le compte

2 rendu dit : "Pas d'interprétation." C'est vide.

3 M. NICE : [interprétation] Effectivement, il l'a bien dit, mais cela n'a

4 pas été répercuté au compte rendu d'audience.

5 L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont rien entendu.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Cela l'est maintenant.

7 M. NICE : [interprétation]

8 Q. Prenons ce troisième paragraphe avant la fin, lorsqu'on passe cette

9 action de bouclage du secteur qui est interrompue à

10 16 heures. Maintenant, prenons la déclaration d'Odak qui se trouve à

11 l'intercalaire 30, on donne des références aux cotes 442, 478; c'est pour

12 le 27, rien pour le 28. Qui a fourni une déclaration que nous devrions

13 consulter pour retrouver cette référence que vous, vous faites à 18

14 heures ?

15 R. A vrai dire, je ne sais pas trop quelle déclaration il faudrait

16 vérifier. Peut-être, celle de l'une des personnes faisant partie de

17 l'unité.

18 Q. Comment avez-vous pu écrire ceci, signer, avez-vous pu chercher à

19 présenter ceci comme étant un élément de preuve ? Là où vous dites : "Cette

20 opération de bouclage du secteur, on l'avait interrompue à 18 heures ?"

21 D'où tenez-vous cette information ? Quelles sont vos sources ?

22 R. Il y a eu un rapport de la part de l'homme de permanence qui m'a fait

23 savoir que le bouclage avait pris fin.

24 Q. Où est-ce qu'on trouve ce rapport ?

25 R. Il faudrait que je consulte je ne sais combien de documents pour le

Page 45642

1 retrouver.

2 Q. Mais vous ne comprenez toujours pas, Monsieur Djosan. S'il vous fallait

3 demander ces documents aujourd'hui, qu'est-ce que vous avez fait au moment

4 où vous avez préparé cette déclaration le

5 27 décembre 2002 ? Si vous n'aviez pas ces documents, il vous fallait les

6 demander. Mais qu'est-ce que vous avez fait précisément à cette date-là ?

7 R. Je vous dis une fois de plus. J'ai convoqué le lieutenant-colonel Odak

8 et il a déclaré à mon intention qu'il se trouvait à l'époque à cet endroit.

9 Je sais que je lui avais rendu visite. Je sais quel avait été le

10 déploiement de mon unité. J'ai vu l'endroit où il se trouvait et cela m'a

11 suffi qu'il en soit effectivement ainsi.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous n'avez pas répondu à la question

13 qui vous a été posée. Vous ne vous faites pas vous-même justice et cela ne

14 vous sert pas de répondre de la sorte. Vous dites que s'agissant des

15 sources d'informations concernant les événements survenus à 16 heures,

16 cette source était un rapport de l'officier de permanence. Ce rapport n'a

17 pas été rédigé par le colonel Odak.

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Le lieutenant-colonel Odak n'a pas noté

19 cela ici. Du moins, je ne l'ai pas relevé.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est effectivement là-dessus que

21 porte la question. On vous demande comment vous avez pu faire ce genre de

22 déclaration sans avoir consulté des dossiers, des archives ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] A l'époque, je ne disposais d'aucune

24 documentation. J'ai convoqué le lieutenant-colonel Odak et lui, a rédigé

25 une déposition à cet effet. Cela m'a suffi.

Page 45643

1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce qui pose problème et ce qu'indique

2 le Procureur, c'est qu'il n'y a aucune référence à cette heure de la

3 déclaration d'Odak.

4 M. NICE : [interprétation] La dernière réponse fournie par le témoin le

5 montre très clairement. C'est Odak qui a rédigé cette déclaration-ci pour

6 lui.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous pourrez poser des questions là-

8 dessus, vous-même. Mais je reviens à ce qui avait été dit auparavant par

9 vous-même, c'est-à-dire que le colonel Odak, lui, ne fait aucunement

10 référence à cet incident ou à cette heure.

11 M. NICE : [interprétation]

12 Q. Veuillez répondre à la question posée par Monsieur le Juge.

13 R. Le fait que le colonel Odak n'ait pas rédigé ce point-là constitue

14 peut-être une omission de rédaction. Je ne sais pas vous dire pourquoi,

15 dans sa déposition à lui, cela n'a pas été indiqué. Du reste, il est là.

16 Posez-lui la question. Demain ou aujourd'hui, lorsque son tour viendra. Je

17 ne peux pas vous dire maintenant pourquoi le lieutenant-colonel Odak --

18 voilà ce que je dis, le lieutenant-colonel Odak, vers 16 heures --

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, merci. Vous avez ainsi répondu à

20 ma question.

21 M. NICE [interprétation] :

22 Q. Justement grâce à vos réponses --

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais je veux dire quelque chose --

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous avez répondu à ma question,

25 Monsieur. Merci. Si M. Milosevic ou M. Nice veulent continuer à poser des

Page 45644

1 questions là-dessus, à eux de le faire.

2 M. NICE : [interprétation]

3 Q. Monsieur Djosan, vous répondiez aux préoccupations manifestées par M.

4 le Juge et vous dites ceci : "J'ai appelé le colonel Odak et il a écrit

5 cette déclaration pour moi." Est-ce que vous voulez dire vraiment cela, que

6 cette déclaration qui se trouve à notre intercalaire 29 a vraiment été

7 rédigée par Odak ? C'est ce que vous avez dit.

8 R. Non, ce n'est pas exact. Conformément aux ordres reçus par la

9 commission, j'ai donné des ordres à son intention à lui.

10 Regardez, dans la déclaration d'Odak, deuxième paragraphe, il dit :

11 "Vers 16 heures, on m'a confié la mission de prendre des mesures de

12 sécurité au combat pour faire revenir l'unité vers les rangs du bataillon."

13 L'INTERPRÈTE : Veuillez mettre cela sur le rétroprojecteur.

14 LE TÉMOIN : [interprétation] La déclaration du lieutenant-colonel Odak dit

15 : "Vers 16 heures, on m'a donné pour mission de prendre des mesures

16 d'appliquer les mesures de sécurité --"

17 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Les interprètes demandent à ce que ce

18 soit placé sur le rétroprojecteur, si vous allez donner lecture de ce

19 texte.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien sûr qu'on va le faire. En titre, nous

21 lisons : "Commission pour la Coopération avec le MKTJ." Dans le texte, nous

22 lisons, "Le 28 avril 1999, l'unité --

23 M. NICE : [interprétation] Où est-ce que cela se trouve ? Quel est

24 l'intercalaire ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] 30.1.

Page 45645

1 M. NICE : [interprétation]

2 Q. Malheureusement, je n'ai pas l'impression que ce numéro corresponde à

3 notre numérotation.

4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cela semblait être la dernière page de

5 l'intercalaire 30.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux commencer ? Destiné à la commission

7 chargée de la Coopération avec le TPIY, le texte : à la demande de la

8 commission chargée de la Coopération avec le TPIY, je déclare ce qui suit :

9 "Aux environs de 16 heures, j'ai reçu pour mission de ramener l'unité au

10 sein du bataillon tout en appliquant des mesures de sécurité au combat.

11 Pendant toute cette action, il n'y a pas eu d'action de la part de mon

12 unité ou quelque contact avec la population civile."

13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il n'y a pas de traduction de ce

14 document.

15 M. NICE : [interprétation] J'ai une traduction. J'ai une traduction de

16 trois pages. La première fois que j'en ai parlé tout à l'heure, j'avais

17 omis de remarquer la présence de la troisième page.

18 Est-ce que vous avez trouvé ce texte ? La troisième page en anglais,

19 Monsieur Nort -- Monsieur l'Huissier, commence par une date, celle du 10

20 janvier 2002. Le titre est le même que pour les autres pages et dans le

21 texte, les mots commencent par le "28 avril 1999."

22 Vous trouvez ce passage, Monsieur l'Huissier, pour le placer sur le

23 rétroprojecteur ? Sinon, je peux vous donner ma copie.

24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pourriez remettre sur le

25 rétroprojecteur le document que nous avons vu il y a un instant ? J'ai

Page 45646

1 l'impression que dans l'intercalaire 30 et l'intercalaire 30.1, on trouve

2 des expressions identiques.

3 Monsieur l'Huissier, ce document, c'est celui que nous venons de voir ?

4 M. NICE : [interprétation] C'est l'intercalaire que nous venons de voir à

5 l'instant, effectivement.

6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'accord. Merci. C'est 30.1.

7 M. NICE : [interprétation] Est-ce qu'on peut placer la version anglaise à

8 présent sur le rétroprojecteur ?

9 M. KAY : [interprétation] Je pense que le document sans traduction se

10 trouve à l'intercalaire 30 et non à

11 l'intercalaire 30.1, Monsieur le Juge.

12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, justement, c'est ce qu'il me

13 semblait.

14 M. KAY : [interprétation] C'est une phrase un petit peu différente.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] A l'intercalaire 30.1, je lis la

16 phrase suivante : "Aux environs de 16 heures, les unités du MUP ont achevé

17 le ratissage du terrain et j'ai été chargé de ramener l'unité dans le

18 secteur du bataillon." Ce n'est pas la même phrase ?

19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nort, Monsieur l'Huissier, est-

20 ce que vous pourriez placer la page en B/C/S, la dernière page de

21 l'intercalaire 30, sur le rétroprojecteur ? Je crois que c'est

22 l'intercalaire qu'on a vu tout à l'heure.

23 M. NICE : [interprétation] Cette page vient de l'intercalaire 30.1 en

24 anglais; il faut l'associer à ce texte en B/C/S. Le texte commence par le

25 "28 avril 1999 ..." --

Page 45647

1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Voilà celui que j'ai pour ma part.

2 M. NICE : [interprétation] C'est encore une fois différent.

3 M. KAY : [interprétation] M. le Juge Kwon a actuellement entre les mains le

4 document auquel je crois que le témoin est en train de faire référence.

5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mon Général, pourriez-vous nous dire si

6 ceci est bien le document dont vous venez de donner lecture où on trouve la

7 phrase qui commence par : "Aux environs de

8 16 heures ..."

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourriez-vous relire cette phrase, je

11 vous prie ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] "Aux environs de 16 heures, j'ai reçu pour

13 mission dans le cadre de mesures de sécurité requises de ramener l'unité au

14 sein du bataillon."

15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Ce document n'a pas de

16 traduction.

17 Oui, Monsieur Milosevic.

18 L'INTERPRÈTE : Microphone, s'il vous plaît. Microphone.

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Maintenant, le micro est branché. Je tiens à

20 signaler que dans cet intercalaire 30, on trouve deux déclarations, deux

21 dépositions du lieutenant-colonel --

22 L'INTERPRÈTE : Nous n'avons pas entendu le nom du colonel.

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] -- toutes deux fournies le 26. L'une concerne

24 les opérations menées par l'unité du 20 au 28 avril. Elle est assez longue.

25 La deuxième déposition qui constitue une troisième page, mais c'est une

Page 45648

1 déposition distincte, concerne ce que l'unité a fait le 28 avril 1999 et

2 c'est le texte qui vient d'être cité. Si ces deux dépositions étaient deux

3 intercalaires distincts, il n'y aurait pas de confusion. Mais la troisième

4 page, je le répète, est une déposition différente, une deuxième déposition

5 et c'est cette deuxième déposition qui vient d'être citée par le général.

6 M. NICE : [interprétation]

7 Q. Voilà, nous pouvons récapituler. Il existe une déposition qui n'est pas

8 encore traduite, une déposition d'Odak qui mentionne ce qui s'est passé aux

9 environs de 16 heures et je vous demande si vous affirmez avoir simplement

10 reproduit ce qu'Odak a dit dans sa déposition dans la vôtre. Est-ce que

11 c'est ce que vous êtes en train de dire ?

12 R. Il dit qu'à partir du lieu de l'action, il a ramené l'unité aux

13 environs de l'heure indiquée. Je ne vois pas ce que cela a de différent de

14 ce que j'affirme moi-même dans ma propre déposition.

15 L'INTERPRÈTE : Est-ce que le témoin pourrait allumer son deuxième

16 microphone ? Merci.

17 M. NICE : [interprétation]

18 Q. Avant de revenir à un sujet qui m'est venu à l'esprit grâce à l'une de

19 vos réponses, j'aimerais vous demander votre commentaire sur le point

20 suivant : vous avez quitté Djakovica en juin 1999 ?

21 R. Le 11 juin 1999.

22 Q. Vous avez sans doute reçu des renseignements au sujet de ce qui s'est

23 passé à Djakovica par la suite. J'aimerais, si vous le pouvez, que vous

24 commentiez les trois phrases suivantes : "L'UCK s'est emparé des rues

25 quelques heures après que les forces de sécurité de police serbe se soient

Page 45649

1 retirées de la municipalité de Djakovica. Elles ont guidé le retour des

2 réfugiés dans leurs maisons et leurs villages et se sont vite chargées

3 d'assurer la police dans les zones sous leur contrôle. Cette présence de

4 plus en plus importante de l'UCK a donné lieu à certain nombre

5 d'allégations de la part de victimes et de témoins oculaires dans la

6 municipalité où il est question du fait que l'UCK aurait participé à des

7 meurtres, à des enlèvements, à des emprisonnements, des expulsions, des

8 incendies de maisons, des mesures de harcèlement et d'intimidation. De

9 nombreuses allégations font état du fait que l'UCK aurait participé à des

10 agressions, à des attaques contre les minorités albanaises du Kosovo

11 lorsque ces Albanais du Kosovo n'étaient pas fidèles à la cause UCK."

12 Je sais que vous aviez quitté la région, mais je suppose que vous receviez

13 des informations sur ce qui s'y passait. Je vous demande si ce que je viens

14 de lire correspond effectivement à ce qui s'est passé avec l'UCK suite au

15 retrait des troupes serbes. Est-ce que ceci vous paraît conforme à la

16 réalité ? Il est dit, n'est-ce pas, qu'après qu'il ait pris le contrôle de

17 la région, il y a eu augmentation du nombre de présomption de meurtres,

18 d'enlèvements, d'emprisonnements, d'expulsions, de mesures de harcèlement

19 et d'intimidation de la part de l'UCK. Est-ce que ceci vous semble exact ?

20 R. Ce n'est pas le cas.

21 Q. L'UCK n'a pas fait ces choses-là.

22 R. J'ai dit que ce n'était pas exact. Mon unité est la première qui s'est

23 retirée car c'était une unité antiaérienne. Mais une partie de mon unité

24 est tout de même restée à Djakovica. C'était un bataillon des arrières qui

25 se trouvait au poste de commandement déplacé du corps d'armée. L'UCK ne

Page 45650

1 s'est pas chargée d'organiser la circulation, mais des membres de l'UCK

2 sont arrivés en qualité de renfort et ont commencé à assurer la circulation

3 dans les rues.

4 Q. La deuxième partie de la phrase où il est question d'un certain nombre

5 de choses assez horribles, meurtres, enlèvements, arrestations, incendies,

6 harcèlement, intimidation, est-ce que ceci, à votre avis, semble

7 correspondre à ce que vous savez de ce qui s'est passé après l'arrivée de

8 la KFOR ?

9 R. Après l'arrivée de la KFOR, c'est certain. Mais à ce moment-là, ils

10 l'ont fait dans la mesure où ils étaient capables de le faire.

11 Q. Etes-vous au courant du fait que des allégations de ce genre qui font

12 état de souffrances vécues par la population après l'arrivée de l'UCK, est-

13 ce que vous êtes au courant du fait qu'on retrouve ces mêmes propos dans

14 l'ouvrage intitulé : "Dit comme cela a été vu," qu'une organisation

15 internationale a publié ?

16 R. Dans une mesure un peu inférieure.

17 Q. Est-ce que quelqu'un vous a montré cet ouvrage où on trouve un

18 récapitulatif des événements survenus au Kosovo, à l'époque ? Est-ce que

19 quelqu'un vous a montré ce livre intitulé : "Relaté comme cela a été vu,

20 volume numéro 2 ?"

21 R. Ceci ne peut pas être un ouvrage où on trouve un point de vue équilibré

22 sur la situation au Kosovo-Metohija. J'étais, en effet, le chef de la

23 commission chargée d'appliquer l'accord technique militaire et je sais bien

24 ce qui s'est passé à cet endroit --

25 Q. Je vous en prie. Nous manquons de temps. Est-ce que vous pourriez

Page 45651

1 répondre à la question. Est-ce que quelqu'un vous a montré ce livre ?

2 R. Je n'ai pas eu ce livre sous les yeux, je ne l'ai pas vu.

3 Q. Revenons maintenant à l'ouvrage dont vous dites que vous l'avez vu, que

4 vous l'avez eu sous les yeux et que vous l'avez lu.

5 R. Le passage qui traite de Djakovica.

6 Q. En effet. Pas l'intégralité de ce passage. Ce serait trop long. Mais en

7 anglais -- je demande qu'on se réfère à la page 170. Nous ne disposons pas

8 de la version serbe ici, faute de références de page; ce que je peux faire

9 éventuellement, c'est de vous expliquer quel est le format de ce passage

10 traitant de Djakovica. Vous voyez qu'ici, il est question de la famille

11 Jakupi. Vous vous rappelez de la famille Jakupi ?

12 R. La seule chose que je vois dans ce texte anglais que je ne comprends

13 pas, ce sont des chiffres et des noms propres.

14 Q. Oui, absolument. Mais j'essaie de vous mettre au courant de la

15 structure de l'ouvrage en anglais, puisque vous dites avoir vu le même

16 livre qui, je pense, est structuré de la même façon, mais en langue serbe.

17 Il y a un chapitre historique dans lequel on trouve un passage relatif à la

18 famille Jakupi et un peu plus loin, un passage relatif à Djakovica.

19 M. NICE : [interprétation] Est-ce qu'on peut voir les deux pages en même

20 temps sur le rétroprojecteur ? Très bien. Faites un peu le point, je vous

21 prie.

22 Q. Un peu plus loin, un passage relatif à la ville de Djakovica où vous

23 voyez un titre : "Events before

24 20th of March 1999," événements antérieurs au 20 mars 1999.

25 Ensuite, on tourne la page et on voit qu'il est question des

Page 45652

1 événements survenus après le 20 mars 1999. C'est à peu près au bas de la

2 page. Si on passe à la colonne qui, actuellement, est à droite de l'écran,

3 page suivante, on y trouve le passage suivant dont je vais vous donner

4 lecture, je cite : "Le début des frappes aériennes de l'OTAN contre la RFY,

5 le 24 mars, a entraîné une intensification immédiate de la violence et des

6 destructions dans le centre de Djakovica durant laquelle de nombreuses

7 maisons ont été incendiées, des commerces pillés et des habitants kosovars

8 assassinés."

9 Je vous demande de revenir deux ans et demi ou trois ans et demi en

10 arrière, je pense que vous avez une assez bonne mémoire pour cela, faites

11 de votre mieux pour vous rappeler la situation : est-ce que vous vous

12 rappelez avoir vu cette phrase dans la version que vous avez eue sous les

13 yeux, une phrase dans laquelle il aurait été question d'une augmentation

14 immédiate de la violence et d'une multiplication des destructions ?

15 R. Je vais vous dire d'abord ce que je vois ici, ce que j'ai en anglais

16 sous les yeux n'est pas clair pour moi, mais si je fais confiance à votre

17 traduction, je dirais qu'il est possible que ceci ait été écrit, mais les

18 choses ne se sont pas passées ainsi. Elles ne se sont pas passées ainsi.

19 Q. On y viendra dans quelques secondes. Mais vous êtes quelqu'un d'éduqué,

20 n'est-ce pas ? Alors, je vous demanderais de regarder le texte d'un peu

21 plus près. M. l'Huissier va mettre le doigt sur la ligne où on voit les

22 mots en anglais "Citoyens albanais du Kosovo assassinés."

23 Vous voyez où l'Huissier a placé son doigt ? Il y a un signe de note

24 en bas de page. Je demanderais à M. l'Huissier d'avoir la gentillesse de

25 laisser temporairement son doigt sur cette page et de se rendre pour

Page 45653

1 quelques secondes à la page 187, colonne de droite. De droite. Non, ceci

2 n'est certainement pas la page 187. 187.

3 Voilà. Vous voyez, sur la colonne de droite, on trouve cette fameuse note

4 en bas de page 23 où on voit une série de un, deux, trois, quatre, cinq,

5 six, sept, huit, neuf, dix, 11, 12, 13, 14, 15 pseudonymes différents qui

6 évoquent 15 témoins différents.

7 Je vous demande si, à quelque moment que ce soit, vous avez découvert que

8 les allégations relatives à Djakovica auraient pu venir des propos de, par

9 exemple, ces 15 témoins mentionnés ici. Est-ce que vous avez découvert cela

10 à un moment, éventuellement ?

11 R. Monsieur Nice, comment est-ce que je pourrais lire

12 15 témoignages de témoins qui se présentent sous pseudonymes alors que je

13 sais exactement ce qu'a dit l'homme dont nous parlons ? Je le connais

14 personnellement et je peux vérifier l'authenticité de ce qu'il me dit.

15 Pourquoi est-ce que j'aurais eu besoin de ces

16 15 témoignages ?

17 Q. Ecoutez, peut-être que mes propos ont été mal interprétés. C'est ma

18 faute.

19 R. Oui, absolument.

20 Q. Des dépositions ont été présentées à des Juges. Ce qui m'intéresse,

21 c'est de découvrir par quel système les dépositions sont arrivées jusqu'à

22 vous, avant que vous ne prépariez la déposition que vous dites avoir

23 préparé vous-même.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous interromps, Monsieur Nice.

25 M. NICE : [interprétation] Je m'excuse.

Page 45654

1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le témoin a dit, il y a quelques

2 instants, au moment où on lui a montré le passage de l'ouvrage, que les

3 choses ne s'étaient pas passées ainsi, comme elles sont relatées dans ce

4 passage.

5 M. NICE : [interprétation] Oui.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] J'aimerais entendre la version du

7 témoin relative à la façon dont les choses se sont passées.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsque mon unité a quitté Djakovica, ceci

9 s'est passé le 11 juin 1999, aux premières heures de la matinée --

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous voulez la

11 parole ?

12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il est question de la citation d'un ouvrage,

13 mais le témoin ne peut pas se référer à cette citation puisqu'elle ne lui

14 est pas présentée. M. Nice vient de mettre l'accent sur ce passage

15 accompagné d'une note en bas de page qui concerne la date du 24 mars,

16 premier jour de l'agression, où il est dit que les incendies de maison et

17 les destructions à Djakovica ont commencé ce jour-là, le premier jour de

18 l'agression, le 24 mars. Le témoin a dit qu'il suppose que ce passage lui a

19 bien été interprété, mais que les choses ne se sont pas passées ainsi. Mais

20 maintenant, le témoin parle de ce qui s'est passé après son départ, après

21 la guerre.

22 Il faut qu'un lien soit établi entre les différentes questions posées au

23 témoin. Tout à l'heure, on l'a interrogé au sujet d'une citation qui se

24 situe le 24 mars et selon laquelle les incendies de maisons et les

25 destructions ont commencé ce jour-là, le 24 mars, à Djakovica. C'est cela

Page 45655

1 qu'on lui a montré, un passage accompagné d'une note en bas de page.

2 Maintenant, il est question du départ de Djakovica.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je faisais référence aux assassinats

4 de citoyens albanais. Le témoin, à ce moment-là, interrogé à ce sujet, a

5 interrompu en disant que les choses ne se sont pas passées ainsi. Je pense

6 qu'on devrait avoir la possibilité de voir comment les choses se sont

7 effectivement passées.

8 M. NICE : [interprétation] Oui. Est-ce que vous voulez que je pose les

9 questions ou vous souhaitez le faire vous-même, Monsieur le Président ?

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez le faire.

11 M. NICE : [interprétation]

12 Q. J'aimerais que nous tirions ce point au clair. Dans cet ouvrage, il est

13 dit que sous l'influence des événements survenus le 24 mars, la violence et

14 les destructions se sont intensifiées et qu'au cours de ces événements, un

15 grand nombre de maisons d'Albanais du Kosovo ont été incendiées et un

16 certain nombre de citoyens Albanais du Kosovo tués. A ce sujet, je vous

17 interroge au sujet du système qui existait et vous avez répondu de votre

18 propre chef que les choses ne s'étaient passées ainsi. Le Président revient

19 sur ce point et aimerait, je pense, en particulier, que vous expliquiez

20 comment, le 24 mars ou juste après le 24 mars, les choses dont il est

21 question dans cet ouvrage se sont passées, s'agissant de ce qui est évoqué

22 dans ce livre, à savoir, assassinats, incendies de maisons et expulsions.

23 R. J'ai parlé du 24 mars et j'ai dit que les premières bombes ont commencé

24 à tomber et que la première nuit de cette période, des bombes sont tombées

25 sur Djakovica, sur un certain nombre de maisons et y compris, sur notre

Page 45656

1 caserne, que j'étais à Cabrat et que très peu de temps après, j'ai vu ce

2 qui s'était passé au niveau de l'église catholique et que quelques jours

3 plus tard, j'ai été témoin oculaire au quotidien des actions de l'aviation

4 contre Djakovica et les environs. Au cours de ces actions, on a vu toutes

5 sortes de choses et notamment, l'arrivée de terroristes Siptars qui sont

6 arrivés en même temps que les premières bombes de l'OTAN. Au moment même où

7 l'agression de l'OTAN a commencé, à cet instant même, tous ces terroristes

8 Siptars pour lesquels j'ai dit qu'ils étaient cachés dans pas mal de

9 maisons et que jusque-là, ils ne pouvaient pas sortir ou n'avaient pas le

10 courage de sortir, tout d'un coup, ils se sont mis en action et au même

11 moment où l'agression a commencé, ils ont commencé à sortir un peu partout

12 en ville, dans les rues. Je le dis dans le livre que j'ai écrit, mais ce

13 n'est pas le plus important. En tout cas, ce qui importe, c'est que c'est

14 bien ainsi que les choses se sont passées.

15 M. NICE : [interprétation] Monsieur, je demande à l'Huissier de revenir à

16 la page 173, en anglais, sur le rétroprojecteur. Chaque mot de ce récit

17 serait faux. Pas d'incendies, pas d'assassinats, pas de pillage, rien de

18 tout cela ?

19 R. Ce n'est pas exact. Il y a eu des incendies. J'ai dit que depuis

20 Cabrat, j'ai vu la rue de l'église catholique en feu. Quand une rue brûle,

21 c'est qu'il y a des incendies. Je ne dis pas non plus qu'il n'y a pas eu de

22 pillage. Après l'arrivée des bombes, les vitrines ont commencé à éclater.

23 Il est tout à fait logique que dans ces conditions, c'est très souvent le

24 cas, des pillages surviennent. Je n'ai jamais dit qu'il n'y avait eu ni

25 pillage, ni incendies; il y en a eu, en effet.

Page 45657

1 Q. A la fin du paragraphe, la phrase suivante. Je vais la lire lentement,

2 je cite : "Durant la nuit, des officiers de police et des paramilitaires

3 ont mis le feu à l'ancienne place du marché. On raconte que certains des

4 paramilitaires portaient des uniformes de la police avec les emblèmes de la

5 police et un certain nombre de familles de la région ont également reconnu

6 des Serbes et des 'Tziganes' de la région ainsi que des membres d'une autre

7 minorité." Je ne sais pas très bien comment lire ce mot en disant qu'ils

8 ont participé à des tirs contre les résidents Albanais du Kosovo à

9 l'intérieur de leurs maisons."

10 Puis, je viens à cette dernière phrase, je cite : "Des chars, des

11 camions et de l'artillerie lourde ont été vus en ville."

12 Ce qui est allégué ici est tout à fait clair, à savoir qu'un certain

13 nombre de méfaits sont constatés de la part de la police et des

14 paramilitaires. Il est même question de chars qu'on voit dans la ville à ce

15 moment-là. Est-ce que ceci n'est pas un récit conforme à la réalité ?

16 R. Ceci n'est pas un récit conforme à la réalité. Or, il est très précis

17 et je dis pour ma part, comme je l'ai déjà dit, qu'il n'y a pas eu de

18 formations paramilitaires. C'est le premier point.

19 Puis, de quels chars est-il question ici ? Comment est-ce qu'il

20 pourrait y avoir des chars dans la ville alors que les bombes pleuvaient.

21 Pas un seul véhicule ne peut survivre cinq minutes dans la rue alors que

22 des avions sont en train de bombarder, des avions ennemis. Il aurait fallu

23 être un commandant militaire complètement fou pour laisser des chars dans

24 les rues de la ville dans de telles conditions. Nos chars étaient tous

25 cachés dans des tranchées camouflées et pas du tout opérationnels à ce

Page 45658

1 moment-là. Car lancer un char dans une opération, dans de telles

2 conditions, aurait scellé la mort, la destruction de ce char immédiatement.

3 Vous avez raison, ce texte est très précis, mais il ne correspond pas à la

4 réalité. Je n'emploierai pas de mots plus péjoratifs pour décrire la chose.

5 Q. La semaine dernière, le capitaine Peraj a été entendu. Ce que je vais

6 vous citer est, d'après moi, un récit tout à fait honnête et fidèle à la

7 réalité de la situation.

8 Il a regardé un certain nombre d'éléments documentaires qui traitent

9 de la présence de l'armée à Djakovica et du rôle qu'elle a pu jouer, qui

10 était un rôle bien différent de celui de la police et des paramilitaires.

11 Je vais maintenant vous dire, comme je l'ai dit à l'époque, que ceci était

12 effectivement un récit fidèle à la réalité et tout à fait honnête.

13 Nous avons une version serbe de ce texte. Je cherche la référence.

14 Monsieur l'Huissier, est-ce que vous pourriez -- je vous prie, voilà la

15 page en question. Voyez où j'ai mis mon pouce. Pourriez-vous mettre sur le

16 rétroprojecteur ces deux paragraphes ? A droite immédiatement de cette

17 page. Un peu plus haut, s'il vous plaît.

18 On trouve le passage suivant, la phrase suivante où il est question

19 des gens qui ont fui "par crainte des représailles de la part des forces

20 serbes. Ils sont allés dans d'autres villages ou dans les collines

21 environnantes pour rejoindre des membres de leurs familles qui y résidaient

22 lorsque la chose était possible et comparé au sort vécu par d'autres villes

23 comme Pec qui était pratiquement désertée, la ville était encore peuplée

24 d'un certain nombre de ses habitants car la moitié de la population

25 seulement était partie, s'était enfuie."

Page 45659

1 Est-ce que ceci est exact ?

2 R. Je vais essayer de répondre d'abord à la première partie de votre

3 question. Il n'y avait pas de formations paramilitaires dans la ville de

4 Djakovica ou au Kosovo-Metohija.

5 Q. Je vous interromps car cela prendra peut-être un peu de temps, mais je

6 vais vous demander de revenir un peu en arrière dans votre esprit. La

7 semaine dernière, un certain nombre d'allégations assez générales ont été

8 entendues et les Juges de cette Chambre ont demandé à plusieurs reprises :

9 "Mais quand vous dites ceci, est-ce que vous voulez dire cela exactement ?"

10 Je vous pose à peu près une question qui se situe dans le même ordre

11 d'idée. Est-ce que vous dites effectivement que pendant toute cette

12 période, il n'y a pas eu de paramilitaires nulle part au Kosovo; c'est bien

13 cela que vous dites ?

14 R. J'affirme qu'au Kosovo-Metohija, il n'y a pas de formations

15 paramilitaires. Je me fonde, pour le dire, sur les références trouvées

16 auprès des commandants des corps d'armée. Pour Djakovica, je suis encore

17 plus au courant puisque je me trouvais à Djakovica. Mais nous avions

18 également des informations venant du commandement du corps d'armée. Nous

19 recevions des renseignements du commandement du corps d'armée et jamais, à

20 aucun moment, je n'ai reçu la moindre information selon laquelle il y

21 aurait eu des formations paramilitaires là-bas.

22 Q. Revenons maintenant à cette fuite de la population avec la moitié de la

23 population qui reste sur place, qui ne s'en va pas. Est-ce que c'est

24 exact ?

25 R. La proportion exacte, il me serait difficile de l'affirmer. Mais

Page 45660

1 comment expliquerez-vous qu'ils aient commencé à s'enfuir le jour même où

2 les avions sont arrivés ? Comme s'il y avait eu une entente. Pourquoi est-

3 ce qu'ils ne se seraient pas enfuis dix jours plus tôt ou un mois plus

4 tôt ?

5 Q. Ce n'est pas la question que je vous ai posée. Voyons la fin du

6 paragraphe et abordons-la du point de vue de sa fidélité à la réalité.

7 Après un certain nombre de détails, on arrive à la phrase qui se lit comme

8 suit, je cite : "L'armée les a vus se déplacer à partir de la caserne

9 jusqu'aux environs de l'église catholique San Antonio."

10 Est-ce que c'est exact ?

11 R. L'église San Antonio ou Saint-Antoine se trouvait pratiquement au

12 niveau de la caserne. C'était à un jet de pierre de la caserne. Un soldat

13 aurait pu passer --

14 Q. Pouvez-vous répondre à la question ?

15 R. Je ne sais pas ce qui est écrit ici, ce n'est --

16 Q. Passons, si vous le voulez bien, à la page 174. On trouve, là encore,

17 un exemple de ce qui est dit au sujet des événements dus aux paramilitaires

18 et non aux militaires. Le bas de la page 174, par exemple, côté droit de la

19 page. Un peu plus haut, Monsieur l'Huissier, sur le rétroprojecteur, s'il

20 vous plaît. Très bien. Merci.

21 La phrase qui se trouve dans le dernier paragraphe de cette page,

22 nous y lisons : "Ce jour-là et les jours suivants --" le

23 28 mars et les jours suivants, je cite : -- "la police a continué d'aller

24 de maison en maison, d'avancer rue par rue dans Djakovica --"

25 Puis, en haut de la page suivante, Monsieur l'Huissier, s'il vous plaît, je

Page 45661

1 poursuis la lecture : -- "pour dire aux gens de s'en aller souvent à l'aide

2 de haut-parleurs ordonnant à la population de partir pour l'Albanie.

3 Certains réfugiés ont rendu compte de rumeurs selon lesquelles les forces

4 serbes emmenaient les femmes dans le stade de foot de Djakovica pour abuser

5 d'elles, ce qui n'a aucunement été vérifié par la suite. Cependant,

6 plusieurs interviews rendent compte du fait que des jeunes femmes ont été

7 enlevées par la police et les paramilitaires serbes."

8 Vous voyez ce passage qui traite de Djakovica et qui met l'accent sur la

9 police et les paramilitaires. J'aimerais savoir si vous affirmez que ceci

10 ne correspond pas à la réalité, si vous le niez ?

11 R. Les choses sont très simples. J'étais à Djakovica. Je commandais la

12 garnison et je n'ai jamais vu la moindre unité paramilitaire. Je ne suis

13 pas au courant. Je n'ai pas non plus entendu le moindre rapport qui aurait

14 évoqué la présence d'éléments paramilitaires dont il est question ici. Mes

15 officiers, ceux qui étaient sous mes ordres, se trouvaient un peu partout

16 en ville et ils me l'auraient certainement dit si cela avait été le cas.

17 Peraj aurait dû m'en faire état et il ne l'a pas fait, pas plus que

18 les autres.

19 M. NICE : [interprétation] Je ne sais pas si la Chambre a l'intention de

20 faire la pause.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, en effet.

22 M. NICE : [interprétation] Nous avons un passage pertinent en serbe qui

23 traite de ce qui s'est passé à ce moment-là, à Djakovica et je pense qu'il

24 pourra être utile.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Nous suspendons pendant 20

Page 45662

1 minutes.

2 --- L'audience est suspendue à 10 heures 35.

3 --- L'audience est reprise à 10 heures 58.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Nice.

5 M. NICE : [interprétation]

6 Q. Monsieur Djosan, je ne sais pas si vous avez utilisé la pause pour

7 examiner la version en serbe du document du livre "As Seen, As Told," "Dit

8 comme vu," je ne vous fais pas de reproche, mais est-ce que vous avez pu

9 cerner un passage de ce livre que vous auriez lu et auquel vous auriez

10 répondu dans votre déclaration qu'on trouve à notre intercalaire 7, où vous

11 dites : "J'ai lu des informations selon lesquelles 'les forces de la RFY

12 auraient participé à la destruction de ces quartiers de la ville'" à

13 Djakovica. Est-ce que vous avez pu retrouver ce passage dans le texte qui

14 vous a été fourni ?

15 R. J'ai mis à profit cette petite pause pour vérifier. J'ai constaté qu'il

16 y avait le même style, le même auteur, la même façon d'écrire, tout est

17 exactement pareil et je pourrais trouver je ne sais combien d'exemples

18 disant qu'il s'agit d'une contre-vérité évidente. J'ai sous les yeux

19 justement un passage de la sorte.

20 Q. Autant nous dire de quel passage il s'agit. Mais tout d'abord, quelle

21 est la rubrique parce que le numéro de page ne nous aidera pas et si vous

22 nous indiquez quel chapitre ou quelle rubrique c'est, M. l'Huissier va le

23 placer sous le rétroprojecteur.

24 R. Il est dit : "Meja, y compris le premier bombardement du convoi de

25 personnes déplacées."

Page 45663

1 Q. Page 178, peut-être la 179. Est-ce que c'est le deuxième, le troisième

2 ou le quatrième paragraphe de ce chapitre ou de cette section ?

3 R. Le passage de droite, deuxième paragraphe.

4 Q. Ce n'est pas agencé de la même façon. Dites-nous quel paragraphe c'est.

5 R. Comment vous appelez ces parties-là ?

6 Q. Oui.

7 M. NICE : [interprétation] C'est la page 179, Monsieur l'Huissier, vers le

8 haut de la page, à gauche.

9 Q. Veuillez lire le passage qui, d'après vous, n'est pas exact.

10 R. Il est question de Meja et on parle du premier bombardement du convoi

11 de personnes déplacées par l'OTAN. "Dans la déclaration d'un garçon de 13

12 ans qui, ce matin-là, a été déplacé du village de Pacaj (non loin de

13 Dobros, Djakovica), il est donné description de ce qui suit : une fois

14 arrivé à Meja, il a entendu une explosion dans laquelle un tracteur aurait

15 été touché. La police a donné l'ordre à un groupe d'entrer dans un grand

16 bâtiment de transport accompagné d'un garage. Le garçon a dit qu'au bout de

17 15 minutes, pendant quelque 20 minutes, ils ont été bombardés par des

18 avions bariolés de couleurs de camouflage, après quoi, sa mère et quelques

19 autres 40 personnes auraient fui le village en direction des montagnes où

20 ils ont rencontré des forces de l'UCK qui leur ont conseillé de se diriger

21 vers Ramoc. L'UCK est alors entrée en combat contre la police et au bout

22 d'une heure à peu près, les policiers ont convié les villageois 'à venir

23 voir leurs parents tués.' Il a également dit que pendant les bombardements

24 de la maison, il a été tué quelque sept personnes, parmi lesquelles il y

25 avait les deux sœurs de ce garçon et deux autres membres de sa famille,

Page 45664

1 alors que lui-même et sa maman ont été blessés. Il a également dit que bon

2 nombre d'autres personnes ont été tuées et il dit 'suite aux bombardements

3 du tracteur.' (Voir le chapitre 13, boucliers humains et autres mises en

4 danger de personnes qui n'étaient pas des combattants pendant les

5 opérations militaires.)"

6 Q. Qu'est-ce qu'il y a de faux dans cela et pourquoi est-ce que ce serait

7 faux ?

8 R. Tout est faux. Jamie Shea s'est tué à expliquer et à essayer de

9 justifier le fait que les pilotes aient touché ce convoi et comment cela

10 s'est passé. L'un des deux ment. Je dirais même, qui plus est, que j'étais

11 sur les lieux. Je suis arrivé après les frappes. Il y a eu deux avions F-16

12 à --

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] La question qui vous est posée est de

14 savoir ce qu'il y a d'erroné dans le récit que vous avez lu ou le passage

15 que vous avez lu ? Qu'est-ce qu'il y a d'erroné, de faux ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Tout le récit est erroné, notamment, le fait

17 qu'ils auraient été escortés par la police et que de là, ils se seraient

18 dirigés vers les forêts pour combattre l'UCK. Est-ce que cela vous semble

19 être logique ? Si ce livre-là se fonde sur des déclarations d'un garçon de

20 13 ans, je dirais que rien --

21 M. NICE : [interprétation]

22 Q. Essayons de ventiler votre réponse. Est-ce que vous étiez là, à

23 l'endroit où ce gamin de 13 ans dit s'être trouvé ? Est-ce que vous étiez

24 présent en chair et en os ?

25 R. Oui. Je suis arrivé après les frappes.

Page 45665

1 Q. De Dobros à cet endroit-là où le tracteur a été touché ?

2 R. Un tracteur, pas un camion, un tracteur. Oui, j'ai été là-bas.

3 Q. Très bien. Combien de temps après que le tracteur a été touché vous

4 êtes-vous trouvé sur les lieux ?

5 R. A peu près une demi-heure ou une heure plus tard.

6 Q. Une demi-heure, dites-vous, à peu près. Il vous est impossible de nous

7 dire ce qu'a fait la police, n'est-ce pas ? Vous voyez, ce livre ne se

8 plaint pas, ici, de l'armée. On se plaint de la police. C'est votre premier

9 exemple et sans doute le meilleur pour penser que ce livre n'est pas digne

10 de foi. Mais vous n'étiez même pas sur les lieux, n'est-ce pas ?

11 R. Si j'avais été là-bas, j'aurais été tué, moi aussi, si je m'étais

12 trouvé sur place à ce moment-là. Je suis arrivé une demi-heure après les

13 frappes de l'aviation de l'OTAN.

14 Q. Je n'ai pas le temps d'aller plus loin. Mais est-ce qu'il y a d'autres

15 exemples dans ce passage que vous avez lu --

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] J'aimerais demander ceci au témoin :

17 est-ce que vous avez reçu des rapports qui auraient contredit la version

18 des événements mentionnés dans ce passage que nous venons de voir ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Pas de rapport particulier reçu par moi qui

20 viendrait contester la chose. Ce qui est contesté ou ce qui le conteste,

21 c'est mon passage là-bas, ma déposition et ce que j'ai appris une fois

22 arrivé sur les lieux parce que s'il y avait eu la police là-bas, il y

23 aurait eu au moins un policier de tué. Ils n'ont tout de même pas cette

24 chance-là de ne pas être tués, s'ils se trouvaient à leurs côtés, à ce

25 moment-là.

Page 45666

1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous venez de faire référence aux

2 connaissances que vous avez acquises sur le terrain. C'est à cela que je

3 pensais, est-ce qu'on vous a dit quelque chose, lorsque vous êtes arrivé

4 sur les lieux, quoi que ce soit qui contredise ce qu'il dit dans ce passage

5 ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je me suis entretenu avec quelqu'un qui

7 se trouvait à la tête de la colonne. J'ai essayé de l'expliquer l'autre

8 jour, mais j'ai été interrompu. Une fois arrivé sur les lieux, je me suis

9 personnellement entretenu avec l'homme qui se trouvait à la tête de la

10 colonne. C'était un homme assez âgé qui m'a dit qu'ils marchaient. Il n'a

11 pas parlé de police du tout. Il a parlé de deux avions et il a montré de la

12 main la direction dans laquelle ces avions étaient parties et cet axe-là

13 coïncide avec l'axe observé par mes soldats qui étaient là pour observer

14 l'espace aérien. Cet homme n'a dit aucun mot au sujet de quatre avions, ni

15 au sujet des couleurs de camouflage de cet avion, ni au sujet de la police.

16 Il me l'a dit dans une langue serbe très bien maîtrisée.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Si je comprends bien le Procureur, ce

18 qu'il vous demande c'est ceci : où, dans cette ouvrage, auriez-vous trouvé

19 des allégations à propos de l'armée ? Vous venez de mentionner un passage

20 qui ne se plaint aucunement de l'armée. Je ne sais pas si j'ai mal compris,

21 mais j'ai l'impression que vous n'avez pas réussi à cerner un passage où il

22 y aurait des plaintes à propos de l'armée. Est-ce exact ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'est pas exact. Ce que je veux dire, c'est

24 que je ne suis pas venu ici pour défendre l'armée. Je suis venu ici pour

25 dire la vérité sur les connaissances qui sont les miennes. Je n'ai jamais

Page 45667

1 dissimulé de crimes si tant est que j'ai été mis au courant de crimes

2 perpétrés. Vous avez pu vous en rendre compte à partir des plaintes

3 déposées à l'encontre de mes propres soldats qui ont été envoyés au

4 tribunal pour tentative de viol.

5 Je n'ai pas, ici, l'intention, pas plus que je ne suis venu ici pour

6 défendre l'armée, mais pour dire la vérité au sujet d'événements dont j'ai

7 été informé à Djakovica et --

8 M. NICE : [interprétation]

9 Q. Excusez-moi de vous interrompre. C'est une réponse que vous fournissez

10 à une question de M. le Juge, mais vous n'y répondez pas.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est en rapport avec la déclaration

12 que vous avez fournie à propos des événements survenus le 24 mars; c'est à

13 l'intercalaire 7.

14 M. NICE : [interprétation] Celle du 28 novembre 2002.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Là, vous dites : "J'ai lu des

16 renseignements selon lesquels les forces de la RFY auraient participé à la

17 destruction de ces quartiers-là de la ville dans un livre publié par le

18 centre de droit humanitaire."

19 Nous, nous essayons de cerner les passages dans le livre que vous avez lus

20 où il serait dit qu'il y aurait eu une participation de l'armée à la

21 destruction de certaines parties de Djakovica. Vous dites avoir parcouru ce

22 livre et avoir trouvé ces passages, mais nous n'en avons pas encore

23 entendu, ni vu pour le moment. Est-ce que vous avez réussi à trouver un

24 passage qui le dit, qui dit ce genre de choses ? La question est simple.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, la question est très simple, mais il est

Page 45668

1 difficile maintenant de retrouver ce passage. Parce que dans un livre de

2 cette taille, il faut beaucoup de temps pour retrouver un passage de la

3 sorte. Dans ce livre, il est question à chaque paragraphe de certaines

4 destructions, de certaines formations paramilitaires ou de crimes; cela est

5 pratiquement impossible à trouver.

6 M. NICE : [interprétation]

7 Q. Monsieur Djosan, je dois aborder ces questions de la façon la plus

8 synthétique possible, mais en bref, la vérité, la voici, n'est-ce pas : la

9 commission de la VJ n'était aucunement en place pour collaborer, elle

10 servait de filtre pour écarter les éléments qui seraient négatifs pour la

11 VJ, la police, mais surtout pour la VJ et pour permettre à des gens comme

12 vous de fournir des déclarations qui allaient blanchir les activités de la

13 VJ au cours de ce conflit. On vous l'a demandé parce que vous étiez un

14 homme faible, comme le disait le capitaine Peraj.

15 R. D'abord, je ne sais pas de quel type d'homme faible vous êtes en train

16 de parler. Mais ce que vous êtes en train de dire au sujet de la commission

17 n'est pas vrai. Nik Peraj, un jour, fait des louanges à mon égard; puis, il

18 dit que je suis un homme faible. Du reste, pourquoi ferait-il allusion à

19 moi, parce que ce que j'ai cru comprendre, c'est que Nik Peraj, lui, a fait

20 deux dépositions.

21 Q. Revenons à une question que je vous ai posée auparavant; puis, je dois

22 avancer, passer à autre chose. Lorsque vous avez imposé des sanctions

23 disciplinaires à certains de vos soldats, est-ce qu'il y a eu des exemples

24 de cours martiales ?

25 R. Oui.

Page 45669

1 Q. Est-ce que les gens responsables des cours martiales dans votre système

2 permettent à des soldats, à des subordonnés de faire des déclarations en

3 leurs noms propres ?

4 R. Je ne sais pas. Je ne me suis jamais mêlé des décisions du tribunal. Je

5 ne sais pas non plus comment ce tribunal-ci fonctionne.

6 Q. Est-ce qu'il vous est arrivé d'être membre d'un de ces tribunaux,

7 lorsqu'il y a cour martiale, en tant que juge ?

8 R. J'étais présent.

9 Q. Fort bien. Est-ce qu'on a donné l'occasion à la personne qui était

10 accusée de déposer, de se défendre ?

11 R. C'est moi qui étais la personne censée donner des déclarations, enfin,

12 si vous permettez, j'étais allé témoigner. C'est moi qui ai fait une

13 déposition. Je ne sais pas ce que vous entendriez d'autre par témoignage.

14 J'estime que je témoigne ici également.

15 Q. Je vais essayer d'obtenir une réponse de votre part, Monsieur Djosan,

16 mais je pense qu'il est manifeste et plus que cela encore, que si vous

17 étiez en train de juger quelqu'un dans le cadre d'un cour martiale, est-ce

18 que vous vous attendriez à ce que des témoins donnent leur récit des

19 événements, leur version ou est-ce que vous vous attendez à ce qu'ils

20 rapportent les propos d'une tierce personne qui pourrait, elle aussi,

21 déposer ? Quel serait l'élément auquel vous vous attendez ?

22 R. Je n'ai jamais siégé moi-même dans un tribunal militaire. J'ai été

23 sollicité pour faire des déclarations, mais je n'ai jamais fait partie

24 Q. Très bien.

25 R. -- d'un jury militaire. Je n'ai jamais siégé dans un tribunal

Page 45670

1 militaire.

2 Q. La commission de la VJ dans tout ce qu'elle a fait, a essayé de

3 pervertir le cours de l'histoire.

4 M. NICE : [interprétation] Est-ce que nous pouvons passer à huis clos

5 partiel, Monsieur le Président.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

7 [Audience à huis clos partiel]

8 (expurgée)

9 (expurgée)

10 (expurgée)

11 (expurgée)

12 (expurgée)

13 (expurgée)

14 (expurgée)

15 (expurgée)

16 (expurgée)

17 (expurgée)

18 (expurgée)

19 (expurgée)

20 (expurgée)

21 (expurgée)

22 (expurgée)

23 (expurgée)

24 (expurgée)

25 (expurgée)

Page 45671

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11 Page 45671 expurgée. Audience à huis clos partiel.

12

13

14

15

16

17

18

19

20

21

22

23

24

25

Page 45672

1 (expurgée)

2 (expurgée)

3 (expurgée)

4 (expurgée)

5 (expurgée)

6 (expurgée)

7 (expurgée)

8 (expurgée)

9 (expurgée)

10 (expurgée)

11 (expurgée)

12 (expurgée)

13 (expurgée)

14 [Audience publique]

15 M. NICE : [interprétation] Je reviendrai peut-être, si j'en ai le temps,

16 mais j'en doute.

17 Q. Revenons à la question de Meja. En synthèse, on peut dire que les

18 allégations reviennent à dire qu'il y a eu une opération de nettoyage

19 ethnique pour se venger de l'assassinat d'un policier. A ce propos, vous

20 avez dit, pas du tout, cela a été uniquement une lutte antiterroriste.

21 R. C'est exact.

22 Q. À ce stade, l'UCK, c'était une entreprise, une entité assez

23 impressionnante, n'est-ce pas ?

24 R. Pendant tout ce temps-là, cela a été une organisation paramilitaire et

25 terroriste.

Page 45673

1 Q. Oui.

2 R. Ce n'était pas un mouvement.

3 Q. Elle était assez formidable, dans le sens d'impressionnant; c'était un

4 groupe de personnes assez effrayantes, n'est-ce pas ?

5 R. Il s'agissait d'une organisation paramilitaire, terroriste avec un

6 grand nombre de membres dans ses rangs.

7 Q. Je ne vais pas vous le montrer, mais on pourrait retrouver Ojdanic, qui

8 dit à une réunion du conseil suprême de la Défense, intercalaire 667,

9 intercalaire 73, réunion du 25 décembre 1998. Ojdanic dit en ce qui

10 concerne les régions frontalières, 90 % des habitants avaient une attitude

11 assez négative à l'égard des services de Sécurité. Ce qui veut dire

12 qu'implicitement, beaucoup de gens soutenaient l'UCK à l'époque. Êtes-vous

13 d'accord avec moi là-dessus ?

14 R. Tout d'abord, laissez-moi vous dire que je ne sais pas ce qu'Ojdanic a

15 dit. Ojdanic est à cinq échelons au-dessus de moi. Je ne sais pas ce qu'il

16 a dit.

17 Q. S'il l'avait dit, seriez-vous d'accord avec lui et pour dire que sans

18 doute 90 % de gens soutenaient l'UCK et étaient hostiles aux forces

19 serbes ?

20 R. La population civile n'a pas soutenu dans un tel nombre ce groupement

21 terroriste de l'UCK.

22 Q. Je vois. Il n'en demeure pas moins que si on veut caractériser l'UCK,

23 c'étaient des gens dangereux et qui inspiraient la peur ?

24 R. Je dirais plutôt que c'était une organisation terroriste sur le

25 territoire d'un état souverain, une organisation paramilitaire et

Page 45674

1 terroriste.

2 Q. Voyons de quelle façon M. Peraj a décrit l'opération sur ce croquis. Je

3 n'avais pas averti Mme Dicklich que j'allais utiliser cette pièce qui est

4 la pièce 143.

5 C'est M. Peraj qui a tracé ce croquis. Il nous montre l'armée en

6 formation de soutien afin de permettre au MUP de pousser des Albanais du

7 Kosovo innocents vers Meja, là où ils ont été tués par eux. C'est de cette

8 façon-là qu'il présente le dispositif général de forces serbes.

9 J'aimerais que vous me disiez ceci : l'armée ou la police, combien de

10 pertes ont-elles subi, au cours de ces deux journées de combat menées

11 contre des forces assez effrayantes, assez considérables ? Il y a eu

12 combien de pertes dans leurs rangs ?

13 R. Mon unité à moi n'a subi aucune perte.

14 Q. Très bien. Une autre unité --

15 R. Elle n'a pas eu de blessés non plus.

16 Q. Une autre unité. Puisque vous savez tout ce qui s'est passé, il y a eu

17 combien de pertes, s'il vous plaît ? Combien de pertes ?

18 R. Je ne le sais pas.

19 Q. Puis-je --

20 R. Pourquoi le saurais-je du reste ?

21 Q. Mais, Monsieur Djosan, vous avez dit au Juge que vous étiez au courant

22 de toutes sortes de choses qui n'étaient pas en rapport direct avec votre

23 zone de responsabilité. Est-ce que vous nous dites maintenant qu'alors

24 qu'il s'agit d'un événement vraiment notoire, un événement significatif à

25 Meja, pour autant qu'il y ait eu un conflit, que vous ne savez pas si

Page 45675

1 d'autres soldats ou des policiers auraient été blessés ou pas ? Je voudrais

2 simplement que vous me disiez combien de pertes il y a eu.

3 R. C'est précisément ce que je dis. Je ne le sais pas parce que mon unité

4 y a pris part, mais n'a pas eu de pertes. Les autres qui ont pris part

5 n'ont pas été des subordonnés à moi, ni mes supérieurs non plus. Ils

6 n'étaient pas tenus de m'informer et ils n'avaient nul besoin de m'informer

7 de cela.

8 Q. Mais dites-nous, si les forces de la VJ et du MUP n'avaient pas subi de

9 pertes, est-ce que c'était un coup de chance ? Vous rappelez-vous avoir

10 utilisé ces termes, un coup de chance ? Lorsque vous avez dit que des gens

11 qui auraient été sur le lieu d'un bombardement auraient eu la chance d'y

12 échapper, est-ce que c'est simplement un coup de chance qu'il n'y a pas eu

13 pour autant que c'était vrai, qu'il n'y ait pas eu de victimes du côté

14 serbe, au cours de ces combats qui ont duré deux jours ?

15 R. Monsieur Nice, je n'ai pas dit qu'il n'y a pas eu de pertes dans les

16 autres unités de l'armée de Yougoslavie ou du ministère de l'Intérieur.

17 J'ai parlé de mon unité à moi. Par conséquent, il n'est pas question de

18 chance ou de coup de chance. J'ai parlé de coup de chance dans le contexte

19 qui était celui d'affirmer que toutes les bombes ne tuaient pas et que dans

20 la guerre, chaque balle ne tue pas. Parce que si toutes les bombes et

21 toutes les balles tuaient, il n'y aurait pas eu un seul survivant à

22 Dunkerque.

23 Q. Monsieur Djosan, mais vous savez, bien sûr, ce qui s'est passé à

24 Racak ?

25 L'INTERPRÈTE : Est-ce que le témoin pourrait répéter ?

Page 45676

1 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je l'ai appris. Il a été question, ces

2 jours-ci, de Racak.

3 M. NICE : [interprétation]

4 Q. Il n'y a pas eu de victimes du côté des Serbes à Racak. Quelqu'un a été

5 blessé parce que simplement, il y avait eu ricochet d'une balle. Est-ce que

6 ceci traduit la même réalité, c'est-à-dire, des opérations de représailles

7 avec une utilisation tout à fait excessive de la force pour tuer des gens

8 qu'on veut tuer ? Qu'en pensez-vous ?

9 R. Tout d'abord, je ne sais pas ce que vous voulez dire par

10 "représailles." Racak se trouvait à l'extérieur de ma zone de

11 responsabilité. Tous ces événements se trouvaient à l'extérieur de ma zone.

12 Je ne sais rien.

13 Q. D'accord. Puisqu'il en est ainsi, voyons ce qu'il en est de vos unités

14 puisque nous avons reçu maintenant des extraits de votre journal de guerre.

15 Nous avons reçu ce qui était à la disposition de l'accusé. Ne les examinez

16 pas encore, Monsieur Djosan. Essayez d'écouter ma question, d'abord, pour

17 gagner du temps. Vos effectifs, ceux de la VJ, est-ce qu'ils ont déployé un

18 peloton d'intervention au cours de cette opération-ci ?

19 R. Oui.

20 Q. Ce peloton, une section d'intervention, qu'est-ce que c'était

21 exactement ? Quelle était sa nature ?

22 R. J'ai déjà expliqué qu'à l'époque, dans la ville de Djakovica, il y

23 avait des parties de mon unité qui n'étaient pas destinées au combat. Il y

24 avait le commandement, le segment de commandement et un bataillon

25 d'artillerie avec la logistique. A l'époque, il y avait déjà eu des

Page 45677

1 attaques contre nos unités. Il s'agissait d'un peloton composé de soldats

2 qui étaient tenus, en cas d'attaque contre l'unité, d'être prêts à

3 intervenir ou plutôt, à se défendre. Tout comme chacune des unités a une

4 partie de l'unité chargée de protéger celle-ci, il y avait un peloton

5 chargé de protéger, de défendre le poste de commandement de la brigade.

6 Q. Fort bien. Ce peloton d'intervention, si c'était la fonction qu'il

7 avait, qu'est-ce qu'il avait à voir avec les activités survenues les 27 et

8 28 avril, à Meja ?

9 R. On nous a confié, le commandement supérieur, à savoir, le poste de

10 commandement avancé nous a confié une mission, à savoir que cette unité à

11 nous, comme on l'a désignée, procède à un bouclage sur les cotes indiquées

12 dans l'objectif d'empêcher le passage des terroristes allant du secteur de

13 Meja. C'était déjà la vallée de Carragojs, il ne fallait pas qu'ils

14 arrivent jusqu'à la ville parce que dans la ville, il y avait notre

15 bataillon des arrières, la logistique et l'unité de commandement qui

16 auraient pu être exposés aux activités des terroristes. Chaque unité

17 normale a des effectifs chargés de sa propre protection, à savoir, de la

18 protection des éléments ou des segments les plus importants de ces

19 effectifs.

20 Q. C'étaient uniquement des forces défensives. On appelle cela un peloton

21 d'intervention, mais c'est plutôt à des fins défensives, uniquement à la

22 défensive.

23 Q. Très bien. Est-ce que vous avez une copie du plan Reka ?

24 R. Non.

25 Q. Où se trouve-t-il ?

Page 45678

1 R. Je ne sais pas pourquoi je l'aurais.

2 Q. Vous savez très bien ce que c'est, ce plan, n'est-ce pas ?

3 R. Oui.

4 R. Je vous demande simplement une confirmation : si une partie, en

5 l'occurrence, le bureau du Procureur, n'a pas été autorisée à consulter ce

6 genre de documents, si c'est la commission de la VJ ou la VJ même qui ne

7 lui a pas donné accès, il n'est pas possible que le nom même, ce plan Reka,

8 Rijeka, comment voulez-vous que le bureau du Procureur connaisse

9 l'existence de ce plan ?

10 R. Est-ce que vous m'avez posé une question ?

11 Q. Mais oui, c'est une question que je vous pose parce que ce n'est pas un

12 plan d'une notoriété publique.

13 R. De quel plan de notoriété publique parlez-vous ? Posez-moi une question

14 concrète à ce sujet. Vous venez de dénoncer une constatation.

15 Q. Dites-nous ce qu'était ce plan Reka.

16 R. Il s'agissait d'une mission consistant à empêcher le regroupement des

17 forces terroristes Siptar qui s'étaient amoncelées dans la vallée Carragojs

18 dans l'objectif de grossir et de venir en renfort aux effectifs qui

19 s'attaquaient depuis Kosare avec une grande puissance.

20 Q. Apparemment, c'est ce plan qui a amené ou qui a entraîné les choses qui

21 se sont produites les 27 et 28 avril et qui a causé beaucoup de morts dans

22 la région de Meja, n'est-ce pas ?

23 R. Je ne sais pas ce qui s'est produit dans le secteur de Meja. Je sais

24 quel a été le rôle de mon unité dans cette opération.

25 Q. Revenez à la question que je vous ai posée, s'il vous plaît. Vous savez

Page 45679

1 ce qu'est ce plan Reka puisque vous avez répondu par l'affirmative à ma

2 question. C'est le plan qui a dicté vos actions à vous et les actions de

3 tous les autres dans cette région de Meja les 27 et 28 avril. Est-ce que je

4 suis en droit de le dire ?

5 R. Vous dites, fonctionner, je ne sais pas ce que vous voulez dire par là.

6 Dans le cadre de ce plan, j'avais une mission et c'est tout ce que je sais

7 vous dire à ce sujet. Je sais que ce plan s'appelait Reka.

8 Q. Effectivement, il existe toujours. A moins qu'il n'ait été détruit, il

9 doit y avoir quelque part une copie de ce plan, n'est-ce pas ?

10 R. Je ne l'ai pas. Vous, je ne sais pas.

11 Q. Vous êtes général et vous avez un doctorat, vous êtes titulaire d'une

12 thèse de troisième cycle. Vous pensez pouvoir nous dire ce qui s'est passé

13 à propos de ce plan ? Vous croyez que c'est utile de nous dire ce que vous

14 savez à propos de ce plan ?

15 R. Il serait fort utile de dire et d'apprendre tout ce qui s'est produit

16 dans le courant de cette guerre.

17 Q. Monsieur Djosan, je vais vous le dire sans aucune ambiguïté. Je laisse

18 entendre que vous faites l'impossible parce que vous n'avez pas le choix

19 que pour essayer de blanchir la VJ et votre dernière réponse le montre de

20 façon très claire. Vous avez vendu la mèche. Je vous ai posé une question

21 des plus simples. Essayez d'y répondre. Je vais vous lire la totalité.

22 R. Oui, allez-y.

23 Q. Pensez-vous qu'il serait utile -- pour savoir ce qui s'est passé dans

24 une guerre, pensez-vous qu'il serait utile de savoir quel était le plan qui

25 avait été mis sur pied ? Oui ou non ?

Page 45680

1 R. Oui.

2 Q. Je vous remercie.

3 R. Ce serait utile pour ce qui est de tous les plans.

4 Q. La question n'était pas difficile, n'est-ce pas ?

5 R. Bien sûr qu'elle n'était pas difficile. J'ai suffisamment

6 d'intelligence pour comprendre les questions qu'on me pose.

7 Q. Est-ce que vous comprenez que jusqu'au moment où nous avons vu ces

8 documents qui nous ont été fournis ce matin, documents dont disposait

9 l'accusé, mais qui n'ont pas été transcrits ni traduits pour nous, que

10 jusqu'à ce moment, nous n'avions aucune connaissance de ce plan Reka comme

11 étant un plan qui explique ce qui s'est passé à Meja ces deux jours-là, en

12 avril 1999 ? Est-ce que vous acceptez cette idée ?

13 R. Non, je ne l'accepte pas.

14 Q. Donnez-nous une bonne raison. Essayez d'en trouver une. Cette

15 commission dit vouloir collaborer, coopérer avec le bureau du Procureur du

16 TPIY; pourquoi est-ce qu'une telle commission n'offre pas par votre

17 truchement ou par le truchement d'un autre témoin, n'offre-t-elle pas le

18 plan même qui a provoqué ces morts à Meja ? Donnez-nous une bonne raison

19 pour ne pas produire ce plan.

20 R. Ce terme utilisé pour ce qui est "des tués à Meja," je crois que c'est

21 quand même à mauvais escient que vous l'utilisez. Pourquoi voulez-vous que

22 cette unité -- et cette commission a été supprimée le premier jour de la

23 nomination du ministre approprié ? Il se peut que cette commission ait eu

24 l'intention de vous le communiquer.

25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.

Page 45681

1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Le témoin a fait un lapsus. Il a parlé du

3 ministre des Affaires étrangères. Or, dans le compte rendu d'audience, il

4 est question du ministre de l'Intérieur. Or, lui, il parlait de façon

5 évidente du ministre de la Défense.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je parle de M. Borislav Tadic qui se trouvait

7 être ministre de la Défense à l'époque. S'il n'avait pas aboli cette

8 commission, il est certain qu'aujourd'hui, il nous serait plus facile de

9 parler de ce sujet.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

11 M. NICE : [interprétation]

12 Q. Je reviens à ce que vous disiez auparavant. La commission avait

13 travaillé deux ans. Elle avait amplement le temps de fournir ce document

14 parce qu'elle a pris du temps à vérifier vos déclarations, celle de

15 Vukovic, celle d'Odak, entre autres. Alors, il n'y a rien qui empêche de

16 fournir ce plan.

17 R. Je ne sais pas. Je sais que j'ai fait une déclaration auprès de cette

18 commission. Je ne sais pas comment elle a fonctionné. Je sais que j'ai fait

19 une déposition et vous avez un document à cet effet.

20 Q. Lorsque Tadic a mis fin aux travaux de cette commission, est-ce que

21 cela s'est fait dans un climat où on a fait des allégations disant que la

22 commission avait agi de manière déshonorable ou malhonnête même ? Est-ce

23 que c'était cela qu'on laissait entendre quelque part à Belgrade ?

24 R. Ecoutez, mon éducation ne me permet pas de m'aventurer à juger les

25 idées du ministre. Il était ministre de l'armée. Je ne sais pas ce qu'avait

Page 45682

1 été son intention et il ne m'appartient pas de commenter. Il ne m'a pas

2 demandé mon avis, pour ce qui est de mettre fin à son existence ou pas.

3 M. NICE : [interprétation] Je vous demande de pouvoir examiner les

4 documents supplémentaires qui, bien sûr, ne sont pas encore traduits. Ce

5 que je peux faire, c'est de demander à M. l'Huissier qui a un exemplaire

6 supplémentaire de le placer sur le rétroprojecteur. Le témoin a son propre

7 exemplaire. Ce document vient de l'accusé. Commençons par la fin, Monsieur

8 l'Huissier.

9 Dans cette liasse de documents que nous avons, c'est à peu près à six

10 pages à partir de la fin. Le document a cet aspect-ci. Je vous montre la

11 première page.

12 Q. Est-ce que ce document ne montre pas que le journal de guerre dont nous

13 n'avons que très peu de pages et nous en avions encore moins qui étaient

14 traduites en anglais; il y a 198 pages, dans ce journal de guerre.

15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je me suis renseigné auparavant sur ce cachet

18 comportant ce chiffre de 198. C'est quelque chose qu'on insère lorsqu'on

19 donne un cahier vide d'un journal à une unité.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] En effet.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, ne faites pas ce

22 genre de commentaire. Une question a été posée au témoin, qu'il y réponde.

23 Ce n'est pas à vous qu'il incombe de répondre.

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous ai déjà fourni ces explications la fois

25 passée, mais cela, c'est quelque chose que je ne savais pas. Je voulais

Page 45683

1 ajouter cet élément-là à mon explication, à l'explication que j'ai déjà

2 fournie.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Permettez-moi de compléter l'explication.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, allez-y.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans chaque commandement, il y a un registre

6 de cahiers qui ont été visés à chaque page. Quand on donne un registre

7 vierge, il y a, en haut de chaque page, un petit cachet et à la fin, il y a

8 une clause disant que tel registre comporte tel nombre de pages. Cela est

9 affirmé et visé par celui qui a signé et c'est le responsable du

10 département opérationnel qui a signé ici, le capitaine Dobrivoj Vasic. On

11 dit que cela a été fiché au registre de contrôle des registres militaires

12 du poste militaire un tel. C'est le poste militaire 1946.

13 Parce que la brigade que je commandais avait un poste militaire avec

14 un numéro, c'était le numéro 1936.

15 Une fois que le registre est restitué, une fois qu'on a rempli toutes

16 les pages, il faut que ce registre comporte le même nombre de pages. Elles

17 ne sont pas forcément toutes remplies. Si l'agression avait duré plus

18 longtemps, il se peut que toutes les pages aient été effectivement

19 remplies, mais c'est la procédure à suivre; c'est ce qu'on fait avec les

20 cahiers de notes, avec le journal tenu à jour pour ce qui est des tirs

21 effectués et des différents journaux. Tout cahier vierge, une fois qu'il

22 devient un document officiel, doit comporter des cachets. Une fois qu'il

23 est établi un journal de guerre, il faut qu'il soit recensé au niveau de ce

24 fichier. Cela se trouve recensé au numéro 552 et c'est avec intitulé

25 "Journal de guerre." Là-bas, il est indiqué combien de pages le journal en

Page 45684

1 question comporte effectivement. Voilà de quoi il s'agit.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Nice.

3 M. NICE : [interprétation]

4 Q. Il y a combien de pages ?

5 R. Il y a autant de pages que de journées de guerre.

6 Q. Il y a combien de pages ? C'est tout ce que je veux savoir. La question

7 n'est pas compliquée.

8 R. Je ne sais pas vous dire par cœur. Je n'ai pas sur moi le journal de

9 guerre complet.

10 Q. Maintenant --

11 R. Mais parfois, on utilisait une page pour décrire les événements d'une

12 journée et des fois, deux pages.

13 Q. Cela me suffit. Merci.

14 R. Mais en tout état de cause, les pages doivent toutes être à leur place.

15 M. NICE : [interprétation] Monsieur l'Huissier, nous allons commencer par

16 le début, c'est la seule façon qui nous permettra de comprendre quelque

17 chose. Nous allons les prendre une à une, ces pages. Prenons la première,

18 tout d'abord. Pas la page de garde.

19 Q. Ici, nous avons la date du 24 mars. Cela ne m'intéresse pas pour le

20 moment. Page suivante, je pense que c'est aussi à propos de cette journée,

21 à la fin, on parle du 25 mars. La page d'après couvre plusieurs jours.

22 Puis, nous avons le 28 mars, au début de la page suivante. Si nous

23 regardons les rubriques pour ce qui est de 21 heures 15, nous voyons :

24 renforcement par la VJ du MUP. Veuillez nous lire ce passage-là.

25 R. "Un peloton BOV pour renforcer le groupe du MUP dans le secteur de

Page 45685

1 Junik." Cela a été donné comme ordre par le commandant.

2 Q. Est-ce que ceci montre le genre d'opération habituelle, opération

3 conjointe avec le MUP et la VJ ?

4 R. Les membres du MUP et de l'armée de Yougoslavie, çà et là, dans des

5 situations très bien déterminées, lorsqu'il y avait danger de voir les

6 membres du MUP tomber en difficulté, les uns venaient à l'aide des autres.

7 Q. Quel était le rapport de subordination ?

8 R. Personne n'était le subordonné de l'autre.

9 Q. Je vois. Puis, prenez 21.16, veuillez lire ce passage.

10 R. Trois BOV encore pour apporter des renforts au MUP dans le secteur de

11 Junik. Puis, on dit que cela a été donné comme ordre par le chef du Corps

12 de Pristina. J'ai donné l'ordre au commandant de la batterie et j'ai reçu

13 cet ordre de la part du chef de Corps de Pristina.

14 Q. Qui était le chef d'état-major du Corps de Pristina ? Qui était-ce ?

15 R. C'était l'officier qui se trouvait au poste de commandement avancé du

16 Corps de Pristina, sis à Djakovica et au nom du commandant, il avait le

17 droit de nous donner des ordres, à nous autres, qui étions des officiers de

18 commandement.

19 Q. Qui était, à l'époque, ce commandant ?

20 R. Le général Lazarevic.

21 Q. Lazarevic a la capacité de donner des ordres à la VJ pour que la VJ

22 opère avec le MUP et cela s'est passé de façon assez régulière, n'est-ce

23 pas ?

24 R. Oui. Cela est arrivé à chaque fois qu'il y a eu danger de voir les

25 terroristes tuer ou détruire des ressortissants, des membres du MUP.

Page 45686

1 Q. Page suivante, Monsieur l'Huissier.

2 Là, on voit le début des renseignements concernant le 31 mars. A

3 droite, on voit le huitième jour de la guerre.

4 Page suivante, Monsieur l'Huissier. Cela concerne certains points que

5 j'ai déjà avancés.

6 Ici, on fait en partie référence à des pertes, c'est une des choses

7 qui m'ont intéressé. Veuillez lire ces références qui sont faites. Je pense

8 qu'un certain Djordje Cimbaljevic a été tué.

9 R. Oui, je l'ai retrouvé, Cimbaljevic.

10 Q. C'est la troisième ligne à partir du haut.

11 R. C'est exact.

12 Q. Relater les circonstances de sa mort et des blessures infligées à

13 Tadic, Aleksandar Tadic.

14 R. Oui. "Un radar a été touché et détruit et il a été tué, entre

15 parenthèses, ont brûlé les soldats Cimbaljevic, fils de Milic Djordje, né

16 le 17 août 1979 à Barani [phon], Monténégrin, faisant partie de l'armée de

17 Yougoslavie à commencer par le

18 23 septembre 1998. Ensuite, Ivanovic Zoran, fils de Tomislav, né le 22

19 juillet 1978, à Trstenik, Serbe, membre de l'armée de Yougoslavie depuis le

20 24 juin 1998.

21 Q. Je vais vous interrompre un instant. Ces deux hommes, je ne sais pas si

22 c'est Aleksandar Tadic qui a été blessé, il a été tué ou blessé au cours

23 d'un bombardement, pas par l'UCK, n'est-ce pas ?

24 R. C'est exact.

25 Q. Merci.

Page 45687

1 R. C'est ce qui est dit.

2 Q. Continuons. Page suivante, nous arrivons au 1er avril; là, la

3 présentation n'est pas la même. On va peut-être réfléchir parce que nous

4 n'avons pas l'original. Pourriez-vous nous expliquer pourquoi la

5 présentation est différente ?

6 R. Tout simplement parce que la tenue à jour d'un journal de guerre ne se

7 trouve pas être réglementée à part. Un journal de guerre doit décrire des

8 événements importants pour chaque journée au niveau de la journée d'une

9 unité. Mis à part ce fait, les journaux de guerre n'ont pas toujours été

10 tenus à jour par les mêmes personnes. L'officier qui se trouvait au QG

11 tenait à jour ce journal de guerre et certains d'entre eux partaient en

12 congé. Ce n'est pas toujours la même personne qui remplissait le journal de

13 guerre.

14 Q. Savez-vous qui a inscrit ces notes concernant le

15 1er avril 1999 ?

16 R. Je ne sais pas. Je ne m'en souviens pas.

17 Q. Mais vous n'avez pas de raison de mettre en doute --

18 R. Moi aussi, je n'arrive pas à m'en souvenir.

19 Q. Pas de raison de douter de la fiabilité, de l'exactitude de ce qui est

20 consigné ici ?

21 R. Aucune raison.

22 Q. Bien. Prenons la deuxième page qui semble concerner le

23 1er avril. Veuillez lire à cinq lignes après le début, 11 heures 50.

24 R. On dit : "Les gardes à Cabrat ont remarqué un groupe d'une trentaine

25 d'Albanais en train de quitter la ville. Il a été dit au lieutenant Krunic

Page 45688

1 de les garder là jusqu'à l'arrivée MUP. Un grand groupe d'Albanais a quitté

2 la ville. Entre 18 heures et 21 heures, il a été procédé suite à l'ordre du

3 commandant de la brigade, un déplacement du poste de commandement depuis le

4 site maison Maslenica vers la maison de la Culture à Djakovica. Les

5 conditions de travail et de vie pour ce qui est de ce poste de commandement

6 se trouvent être meilleures. Ce jour-là, il n'y a pas eu de frappes de

7 l'OTAN contre nos unités, les unités de la brigade et il n'y a pas eu

8 d'activités de nos effectifs non plus contre les avions de l'OTAN."

9 Q. Je vous demande de vous interrompre un instant. Ici, on parle de tous

10 les Albanais du Kosovo, la plupart des autres en tout cas comme étant des

11 terroristes. Mais ici, pour une fois, on dit qu'on retient des hommes

12 Albanais. Pourquoi est-ce qu'on les retient quelque part en plein milieu

13 d'une guerre. On ne dit pas que ce serait des terroristes ou des membres de

14 l'UCK. On dit simplement des Albanais.

15 R. C'est exact. Tous les Albanais n'étaient pas des terroristes et tous

16 les Albanais ne faisaient pas partie de l'UCK, et bon nombre d'entres eux

17 n'apportaient pas leur soutien à l'UCK. Parce que si ceux-ci avaient été

18 des terroristes, ils auraient ouvert le feu en direction de mes soldats et

19 le lieutenant Krunic n'aurait pas eu l'occasion de les retenir, cette

20 trentaine. Or je précise qu'un peloton ne compte que 20 soldats.

21 Q. Pourquoi est-ce qu'on ne leur permet pas de partir en liberté pour

22 décider eux-mêmes de leur propre sort ?

23 R. Ils sont passés par les lignes de déploiement de notre unité. Notre

24 unité se trouvait déployée à Cabrat.

25 Q. En passant, avant de passer à autre chose, avant que je ne l'oublie,

Page 45689

1 auparavant vous avez relevé une coïncidence entre les gens qui partaient du

2 Kosovo et Metohija au début des bombardements, il y a une explication toute

3 simple. Vous la connaissez aussi bien que moi. Personne n'a véritablement

4 cru que le présent accusé allait éviter des négociations jusqu'au tout

5 dernier moment. Personne n'a pensé qu'il allait permettre les bombardements

6 et pourtant, il l'a fait, c'est ce qui a retardé le départ de ces gens

7 jusqu'à ce moment-là. Est-ce que ce n'est pas la vérité ou une partie de

8 celle-ci ?

9 R. Ce sont des insinuations de votre part. Tout d'abord,

10 M. Milosevic n'a pas eu à autoriser le début des bombardements. C'est

11 quelqu'un d'autre qui a autorisé cela, mais cela, on finira bien par le

12 savoir un jour ou l'autre.

13 Deuxièmement, je tiens à dire que ce jour-là, il y a eu des gens qui ont

14 commencé à fuir Belgrade et les autres villes. Du reste, certaines de ces

15 personnes ont été accueillies par vous, dans vos villes respectives.

16 Q. Prenons la page suivante. Nous parlons maintenant du

17 2 avril, la page d'après le 3 avril. C'est pareil pour la suivante, puis,

18 on change de nouveau de présentation. Là, il s'agit du 7 avril. Page

19 suivante, le 8. La page suivante concerne le 25 avril.

20 Nous continuons pour arriver, je pense -- oui, c'est bien cela, au 27.

21 Puis, on ne sait pas où se trouve le 26. Nous n'avons pas reçu les pages

22 concernant la date du 26 avril.

23 Vous savez pourquoi ? Pourquoi est-ce qu'on ne le retrouve pas dans

24 cette liasse de documents ? Il n'y a rien qui s'est passé le 26 qui vous

25 embêterait particulièrement, dont vous auriez honte, en particulier ?

Page 45690

1 R. Je n'ai honte de rien du tout. Le fait que cette page manque, je dirais

2 que ce n'est pas la seule page manquante. Si vous vous procurez le journal

3 complet, vous verrez que toutes les pages sont à leur place et que cela

4 correspond tout à fait à l'attestation qui a été fournie tout à l'heure,

5 mais je n'ai aucune raison d'avoir honte de quoi ce soit.

6 Q. Petit rappel, le 27. C'est le journal de guerre de votre groupe et ce

7 qui vous intéresse en particulier, c'est la défense antiaérienne, n'est-ce

8 pas ?

9 R. Oui.

10 Q. Est-ce que vous pourriez lire la première rubrique du

11 27 avril pour nous dire quelles sont les indications en matière de temps.

12 On voit Putarak [phon] à gauche, qu'est-ce que ceci nous dit ?

13 R. Oui. Cela dit que c'était le 27 avril et que cette année-là, c'était un

14 mardi et je cite : "Avec plus d'intensité que la veille, l'aviation ennemie

15 frappe l'espace aérien depuis le matin."

16 Q. Poursuivez.

17 R. J'ai un peu de mal à lire cette écriture. Je continue.

18 "Les actions sont menées sur les bâtiments habituels comme le montre

19 l'objectif Devet Jugovica et le MUP ainsi que les numéros. Le nettoyage des

20 forces Siptar de Reka auxquelles participe la batterie mixte de la 1ère

21 Division PVO à l'aide d'un bataillon des arrières commandé par --"

22 L'INTERPRÈTE : Est-ce que le témoin pourrait lire un peu plus lentement ?

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Djosan, vous êtes prié de

24 lire plus lentement pour les interprètes.

25 M. NICE : [interprétation] Cela aiderait la Chambre de savoir que vous êtes

Page 45691

1 arrivé à la ligne qui suit la ligne 0600 ou peut-être la ligne qui est

2 juste au-dessus de celle-ci.

3 Q. J'aimerais que vous repreniez votre lecture à partir de "L'opération de

4 nettoyage de Reka."

5 R. "L'opération de nettoyage des Siptar qui s'appelaient Reka a commencé…"

6 là je parle de mon unité "…avec un bataillon mixte du 1er SARD. C'est la 1ère

7 Division, un peloton comptant des effectifs égaux à ceux d'une compagnie et

8 une compagnie d'une division. L'action a été menée selon le plan et selon

9 la dynamique prévue et, en raison de l'absence du commandant qui se trouve

10 au sein du 2e PVO division des roquettes, le commandement a été transféré.

11 Les opérations ont commencé conformément à ce qui était prévu dans le

12 plan."

13 Q. On se concentre là-dessus, mais j'aimerais que les Juges soient

14 rassurés en ce qui concerne les données relatives au temps. Vous voyez à

15 gauche, dans la colonne à gauche 0600, 0830, 1100. Est-ce que tout cela, ce

16 sont des mentions relatives à la défense aérienne ?

17 R. Oui.

18 Q. Il y a mention d'un soldat blessé à 12 heures, si je ne m'abuse. Est-ce

19 que son nom est Ilic ?

20 R. Toplica Ilic.

21 Q. Oui, Toplica Ilic. Il est blessé suite à quoi ? Par quoi ? Le

22 bombardement, n'est-ce pas ?

23 R. Non. Il a été blessé dans le village de Kijevo suite aux actions des

24 terroristes Siptar. Ce n'est pas ici que cela se passe.

25 Q. Pourriez-vous lire cette rubrique intégralement ?

Page 45692

1 R. Oui. Je cite : "Le colonel Trajkovic de Pristina fait savoir que dans

2 la brigade KM, le soldat Toplica Ilic, membre du

3 1er PVO SARD, est mort des suites de ses blessures de la veille. Transféré

4 pour recueil des données nécessaires au KBC de Pristina."

5 Q. Cet homme a été blessé; il est ensuite mort de ses blessures, mais il

6 n'a pas été blessé pendant la campagne ou le conflit de Meja, quel que soit

7 le nom qu'on veuille lui donner, mais il a été blessé au cours d'un

8 événement antérieur. Quand et où ?

9 R. Il a été blessé à 100 kilomètres de là dans le secteur de la division.

10 Q. D'accord. On n'a pas à s'y intéresser, pas de rapport avec Meja.

11 R. A l'endroit du 1er Bataillon d'artillerie.

12 Q. Maintenant, revenons à la rubrique qui nous intéresse vraiment, ce

13 jour-là.

14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un point d'intendance.

15 M. NICE : [interprétation] Oui.

16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nice, vous avez dit que la page

17 correspondant au 26 avril ne figure pas dans ce journal de guerre.

18 M. NICE : [interprétation] Mais on le trouve dans l'original.

19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je l'ai trouvé dans la traduction

20 anglaise, mais je n'ai pas trouvé la page correspondante en B/C/S original.

21 M. NICE : [interprétation] Oui, vous avez absolument raison, Monsieur le

22 Juge, c'est d'ailleurs cette constatation qui m'a alerté et m'a montré

23 qu'il fallait que nous regardions de plus près les dates des journées du 27

24 et du 28. Je ne vois pas d'explications pour cela, Monsieur le Juge. Peut-

25 être des vérifications complémentaires pourront-elles nous permettre de

Page 45693

1 découvrir cette page correspondant au 26, quel que soit son numéro,

2 d'ailleurs ?

3 Q. Regardons cette rubrique correspondant à 0600, c'est-à-dire, 6 heures

4 du matin; visiblement, il est question de forces terroristes Siptar et

5 d'une batterie mixte, peloton autopropulsé -- c'est une formation qui

6 dépendait de vous ?

7 R. Oui.

8 Q. Un peloton d'infanterie du bataillon chargé de la logistique. Est-ce

9 qu'il dépendait de vous aussi ?

10 R. Oui.

11 Q. Deux bataillons d'infanterie ne dépendant pas de vous, n'est-ce pas ?

12 R. Ce ne sont pas des bataillons, mais deux pelotons ou détachements.

13 Q. Une chose à la fois, s'il vous plaît.

14 R. -- de deux bataillons.

15 Q. Vous avez lu le mot bataillon, c'était peut-être un lapsus, mais voyons

16 le texte. Qu'est-ce qui est écrit là ? Quel est le mot qui figure ?

17 Bataillons ou pelotons ?

18 R. Peloton de deux bataillons différents. La division du commandement

19 mais, en tout cas, c'est un peloton, un détachement, ce n'est pas un

20 bataillon. Un bataillon est une unité tout à fait différente.

21 Q. Très bien. D'accord, puisque la vérification a été faite, alors,

22 qu'est-ce que votre unité de défense aérienne a fait puisqu'elle a apporté

23 des effectifs pour participer à cette opération ? Quelle était sa

24 destination ?

25 R. Mon unité dans cette opération, d'ailleurs, ce n'est pas une opération,

Page 45694

1 c'est une action antiterroriste, se trouvait sur la ligne de bouclage dont

2 j'ai parlé quand nous avons discuté de la carte. Ici, dans ce texte, on a

3 un texte qui reprend la description de la situation illustrée par la carte

4 et je suis tout à fait d'accord --

5 Q. Non, non. Ce n'est pas cela que cela décrit. On voit ici "mention du

6 plan envisagé." Le plan, c'est un plan Reka dont nous n'avions aucune

7 connaissance jusqu'à ce qu'il en soit question ici, ce matin. Pour répondre

8 à votre dernière phrase où vous disiez que ceci reprend au mot la situation

9 illustrée par la carte, je vous dis non, ce n'est pas le cas.

10 Maintenant, penchons-nous sur le jour suivant --

11 R. Ce que je voulais dire parce que -- reprenons cette phrase, le

12 déroulement a eu lieu selon le plan, cela signifie que l'unité qui était

13 chargée de telle ou telle affectation, à savoir la mienne, a rempli sa

14 tâche -- sa mission conformément à ce qui était prévu, ce qui signifie

15 qu'elle a tenu la ligne de bouclage comme elle devait le faire. Parce qu'on

16 inscrit dans un journal de guerre, c'est la description des actions menées

17 par sa propre unité.

18 Q. Bien sûr, nous voyons ici un certain nombre d'unités sous vos ordres,

19 nous voyons leur segmentation, ce qui tout de même fait un nombre

20 considérable au total, on a à la base, au niveau inférieur, le peloton,

21 puis, on monte dans l'hiérarchie en passant à la compagnie, à la brigade,

22 tout cela. Cela donne pas mal d'archives, pas de documentation finalement,

23 n'est-ce pas, à l'époque ?

24 R. Les archives, on les garde à un endroit bien déterminé. Les archives de

25 la brigade, c'était la formation que je commandais, étaient conservées dans

Page 45695

1 un lieu déterminé. Les archives d'une autre unité dans un lieu différent.

2 Le Corps d'armée, lui, il a ces archives dans un troisième lieu encore. Si

3 nous parlons sur un mode hypothétique et qu'on envisage que par hypothèse,

4 toutes ces archives se trouvent dans le même bâtiment, cela ferait pas mal

5 de documents, cela ferait une grosse masse de documents, mais cela n'existe

6 pas en un seul lieu.

7 Q. Je vois que vous n'affirmez pas que ces archives ont pu être détruites

8 par les avions de l'OTAN, ou est-ce que vous l'affirmez ?

9 R. Qui a parlé de bombardement à l'instant ? Je n'ai pas dit que mes

10 archives avaient été détruites par les avions de qui que ce soit et encore

11 moins les archives de quelqu'un d'autre. Ne me mettez pas des mots dans la

12 bouche que je n'ai pas prononcés, s'il vous plaît.

13 Q. Combien a-t-on fait de prisonniers, le 27, dans ce que vous dites être

14 une opération antiterroriste ? Est-ce qu'il y a eu des prisonniers ? Ou

15 est-ce que comme à Racak, il n'y a pas eu de prisonniers ?

16 R. Mon unité n'a fait aucun prisonnier.

17 Q. Est-ce que quelqu'un d'autre a fait des prisonniers ? Est-ce qu'une

18 autre formation de l'armée yougoslave ou du MUP, de la police ou est-ce que

19 des paramilitaires auraient fait des prisonniers ?

20 R. Ecoutez, est-ce qu'il faut vraiment que je vous explique cinq fois

21 qu'il n'y avait pas de forces paramilitaires ? Ecoutez, respectez-moi au

22 moins un peu quand je vous parle. C'est le premier point.

23 Deuxièmement, je ne sais pas quelles autres unités ont fait quoi. Ce

24 n'était pas ma responsabilité.

25 Q. Mais voyez-vous --

Page 45696

1 R. L'unité que je commandais n'a pas eu de contact --

2 Q. Vous avez très librement fourni des renseignements de seconde main

3 quant à la présence ou l'absence de paramilitaires au Kosovo et vous nous

4 avez dit qu'il n'y avait pas de paramilitaires. Vous aviez de nombreuses

5 sources d'information pour le vérifier. Quand je vous ai posé une question

6 au sujet de cela, mais plus près de la situation qui vous concerne, nous

7 sommes dans une situation différente. On peut obtenir des registres ou des

8 documents de quelqu'un d'autre, voyez-vous, pour vérifier. Je vous demande

9 simplement s'il y a des documents qui traitent de ce sujet, mais je ne sais

10 pas ce qu'il en est pour le moment avant que vous m'ayez répondu. Répondez.

11 Y a-t-il eu des prisonniers qui aient été faits à Meja les 27 et 28 ? Oui

12 ou non ou je ne sais pas éventuellement ?

13 R. Je ne sais pas.

14 Q. Reparlons du 28, voyons le journal.

15 Je demande à mon confrère si je ne me trompe dans l'identification du

16 passage, mais on voit le 28, puis, une, deux, trois rubriques, 0700, 0800,

17 1500 heures, toutes ces rubriques concernent la défense aérienne, n'est-ce

18 pas ?

19 R. Jusqu'à 18 heures, oui, c'est le rapport fait par l'officier de service

20 ce jour-là…

21 Q. Voyons ce qui figure face à l'indication horaire 0700, pourriez-vous

22 lire ce passage ?

23 R. Je cite : "Accord rapide entre les organes de commandement de la

24 brigade pour les autorisations du jour où il est souligné que des unités

25 sont engagées dans la zone Reka, que le chef du génie et le NABHO, en cas

Page 45697

1 de destruction du pont, devront identifier des trajets de rechange,

2 quelques mots des ordres à donner uniquement aux soldats subordonnés."

3 Q. Je me permets de vous interrompre, mais si vous voulez, vous pourrez

4 continuer la lecture.

5 R. Je peux m'arrêter ici aussi. C'est vous qui décidez.

6 Q. Il est dit, n'est-ce pas, dans ce passage, qu'il y a une courte réunion

7 entre tous les commandants de la brigade pour organiser la journée ? Dites-

8 moi, je vous prie, où on trouve trace de cette réunion ? Pourquoi n'en

9 trouve pas t-on trace dans ce texte ?

10 R. Vous en avez une trace ici. C'est de cela qu'il est question ici. Cela

11 fait office de rapport.

12 Q. Mais on ne trouve pas mention de l'endroit où telle ou telle personne a

13 été déployée, de ce qui a pu se passer concrètement. On dit simplement que

14 l'unité d'intervention est toujours engagée dans le secteur de Reka.

15 Qu'est-ce que cela signifie ?

16 R. Cela signifie que ce que je vous dis depuis quelques jours, à savoir

17 qu'elle se trouvait à l'endroit où elle allait rester jusqu'à 16 heures, ce

18 jour-là. C'est ce que confirment ma déposition et la déposition du

19 lieutenant-colonel Odak.

20 Q. Mais les unités dont nous avons parlé plus tôt, laquelle d'entre elles

21 est le peloton d'intervention parce que vous avez parlé de votre peloton ou

22 détachement, mais laquelle des unités dont nous avons parlé jusqu'à présent

23 constitue le peloton d'intervention ?

24 R. Le peloton d'intervention, c'est un terme général qui désigne une unité

25 créée en cas d'attaque ou de mise en danger d'un certain nombre de points

Page 45698

1 précis. Chacun au sein d'une division, au cas où il y a attaque simultanée

2 depuis la terre, parce que les unités sont des cibles constantes pour une

3 attaque aérienne, puisque la mission de ces unités consistait à attaquer

4 les terroristes, s'il y avait en même temps attaque à partir de la terre et

5 attaque aérienne, il fallait qu'intervienne cette unité d'intervention. Or,

6 c'est bien ainsi que les choses se sont passées suite à la coordination, à

7 l'accord entre l'UCK et l'OTAN.

8 Q. Voyons maintenant les autres rubriques correspondant à la désignation

9 horaire de 0800 heures, puis 15 heures.

10 R. Pour 8 heures, je cite : "Les organes du commandement effectuent leur

11 mission conformément au plan."

12 Q. Alors ?

13 R. Puis, 15 heures : "Le commandant et le chef, le chef du groupe

14 opérationnel ont séjourné au sein du 3e PVO et contrôlé les batteries de

15 roquettes où ont été constatés sur place un certain nombre d'insuffisances

16 et des remarques concrètes ont été faites. Le chef d'état-major au sein du

17 commandement dans le secteur de Reka, l'aviation ennemie intensifie ses

18 inspections et intervient de temps en temps contre des objectifs choisis

19 dans la caserne du Devet Jugovica."

20 Q. Arrêtez-vous un instant.

21 R. "A 10 heures 15, ils ont attaqué --"

22 Q. Arrêtez-vous un instant.

23 R. "-- les casernes Devet Jugovica."

24 Q. S'agissant de ce qu'on peut constater à la lecture de ce texte de ce

25 qui a pu se passer à Meja, qui est ce chef d'état-major ?

Page 45699

1 R. Il s'agit du colonel Novica Stankovic.

2 Q. Colonel Stojanovic ?

3 R. Non, Novica Stankovic. Colonel Novica Stankovic.

4 Q. On a sa déposition dans la documentation dont on dispose ici. Est-ce

5 que c'est vous qui avez produit cette déposition de Stankovic ?

6 R. Je ne lui ai pas demandé la moindre déposition. Je ne sais pas comment

7 je pourrais l'avoir.

8 Q. Mais elle se trouve dans notre documentation.

9 R. Pas dans la mienne.

10 Q. Est-il en vie ? Se porte t-il bien, ce Stankovic ?

11 R. Oui.

12 Q. Où habite t-il ?

13 R. A Leskovac.

14 Q. Est-ce qu'il y a une raison précise pour laquelle il ne serait pas prêt

15 à déposer au sujet de l'unité qu'il commandait ?

16 R. Je ne vois pas, je ne vois aucune raison de ce genre chez lui. Je ne

17 cois pas qu'il ait quoi que ce soit à cacher.

18 Q. Toute personne ayant une importance potentielle a été convoquée par la

19 commission, mais celle-ci était tout de même un peu dépendante de la

20 coopération ou la non coopération de ces personnes. Est-ce que vous savez

21 si cet homme a été convoqué par la commission ?

22 R. Non, il n'a pas été convoqué.

23 Q. Tous ceux qui connaissaient ou avaient lu l'ouvrage intitulé "Raconté,

24 relaté comme les choses ont été vues" ou l'ouvrage "Aux ordres" ou un

25 certain nombre d'autres récits relatifs à Meja et qui savent que l'armée

Page 45700

1 était censée garder le territoire pendant que certains procédaient aux

2 assassinats, l'homme responsable du peloton d'intervention aurait dû, dans

3 ce cas-là, être au courant de ce genre de choses, n'est-ce pas, que ces

4 choses soient vraies ou pas ? Il en savait plus que d'autres parce qu'il

5 était plus près de l'action.

6 R. Non.

7 Q. Non, ce n'est pas vrai ?

8 R. Non, ce n'est pas vrai.

9 Q. Pourquoi pas ? Qu'est-ce qui n'est pas vrai ? Dites-le- nous, je vous

10 prie. Où est-ce que je me suis trompé ?

11 R. Ce qui n'est pas vrai, c'est que l'armée n'a pas assuré la sécurité à

12 qui que ce soit en train d'assassiner qui que ce soit. L'armée et la police

13 de Kosovo-Metohija n'ont tué personne. Ils combattaient les terroristes

14 comme on les combat partout dans le monde.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, nous allons faire 20

16 minutes de pause.

17 --- L'audience est suspendue à 12 heures 20.

18 --- L'audience est reprise à 12 heures 43.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, à vous.

20 M. NICE : [interprétation]

21 Q. S'agissant des volontaires, revenons sur ce que vous avez dit. Vous

22 avez dit que les volontaires n'étaient jamais autorisés à constituer la

23 partie majoritaire ou l'entièreté d'une unité. La pièce à conviction qui a

24 été examinée en rapport avec Vukovic,

25 intercalaire 4A, si je me souviens bien de la numérotation, j'aimerais que

Page 45701

1 nous reprenions ce texte. Sur le rétroprojecteur, Monsieur l'Huissier, il y

2 a une partie surlignée en haut de la page. Vous voyez, je cite : "Le

3 peloton des volontaires fantômes et l'escadron Zverka de la compagnie de

4 Reconnaissance." Qu'est-ce que c'est que ce peloton des volontaires de

5 fantômes ? C'était bien un peloton de volontaires, semble-t-il ?

6 R. C'est la première fois que j'entends parler de cela. Vukovic n'est pas

7 mon supérieur. Je n'ai pas la moindre idée de ce que je lis ici. Je ne suis

8 absolument pas au courant. Il faut que vous posiez la question à Vukovic.

9 Q. Mais, Monsieur, il apparaît que votre connaissance générale de ce qui

10 se passait au Kosovo est assez peu solide. Apparemment, il se pouvait que

11 des choses se passent sous votre nez sans que vous soyez au courant; c'est

12 bien cela ? Je lis une partie de ce que vous avez dit, entre autres, sur ce

13 sujet, je cite : "Il est impossible de trouver dix volontaires dans un

14 peloton de 30 hommes." Apparemment, il est question d'un peloton entier.

15 R. En effet, c'est exact qu'il ne peut pas y avoir plus de dix hommes,

16 grand maximum.

17 Q. Mais est-ce qu'on pourrait maintenant regarder le document suivant ? Je

18 crois qu'il s'agit de la pièce 13A, n'est-ce pas ?

19 R. Je voudrais répondre. Je parlais de mon unité à moi. Le colonel Vukovic

20 ne faisait pas partie de mon unité; je ne peux pas parler en son nom.

21 Q. Serait-il prudent pour nous de réexaminer votre déposition, pour le

22 revoir sous ce jour-là, à savoir que tout ce que vous avez dit ne

23 concernait uniquement et exclusivement que votre unité ? Est-ce que ce

24 serait une attitude prudente de notre part, à votre avis ?

25 R. Absolument. Je ne parle, ici, dans mon témoignage, que de mon unité, de

Page 45702

1 ce qu'elle a fait et des missions qui lui ont été confiées.

2 Q. Mais alors, c'était quoi ? Des propos regrettables, malhonnêtes ou

3 mensongers, lorsque vous avez répondu de façon plus générale ?

4 R. Malhonnête, cela n'a sûrement pas été le cas. Je suis venu ici pour

5 dire la vérité et je refuse de faire des conjectures. Vous exigez de moi

6 que je devine, que je suppute, que j'émette des conjectures et je m'y

7 refuse.

8 Q. Monsieur Djosan, nous ne serions pas en train de parler de tout cela,

9 si vous n'aviez pas choisi, si vous n'aviez pas été volontaire pour

10 présenter des déclarations très générales au sujet des militaires et de la

11 pratique qui a été appliquée dans l'ensemble du Kosovo. Ceci découle des

12 réponses faites par vous et par personne d'autre.

13 Examinons la pièce 13A de Farkas, je vous prie, sur la question des

14 volontaires et des paramilitaires en même temps car nous parlerons

15 rapidement des paramilitaires.

16 C'est un document qui va être produit par Farkas, je crois, 13A.

17 J'aimerais qu'on le passe sur le rétroprojecteur.

18 Le paragraphe du bas. Il s'agit du 20 avril 1999, je cite : "Dans la

19 première période, aucune organisation des volontaires n'a été mise sur pied

20 au PC de Bubanj Potok. Ils ont simplement été regroupés et emmenés au 3e PC

21 de l'armée et souvent, sans leur accord et sans aucune coordination avec

22 eux. Ils appartenaient principalement à des groupes paramilitaires créés

23 antérieurement et un certain nombre d'entre eux étaient inaptes au service

24 militaire

25 (il s'agissait d'hommes qui boitillaient, d'alcooliques, de gens qui

Page 45703

1 avaient une mauvaise vue, et cetera.) Finalement, ils ont été envoyés dans

2 la 1ère branche de l'armée. Un certain nombre de volontaires s'est retrouvé

3 sur des positions déterminées."

4 Mais ce que je veux vous demander, c'est : est-ce qu'il est exact que

5 d'après ce qu'on lit ici, les volontaires ont été regroupés pour se

6 retrouver au sein de la 3e Armée et qu'ils venaient, pour la plupart,

7 d'anciens groupes paramilitaires et pour certains, de groupes de

8 délinquants ?

9 R. Je ne sais pas ce que Farkas voulait dire exactement en parlant

10 ainsi, mais vous avez sa déposition. C'est à lui qu'il faut que vous posiez

11 la question.

12 Q. Est-il exact, parce que je sais que maintenant, vous tenez beaucoup à

13 dire que ce que vous dites dans votre déposition ne concerne que votre

14 unité et les environs immédiats, mais vous vous êtes exprimé un peu

15 différemment précédemment. Est-il exact que ces gens qui combattaient sur

16 ce territoire et avaient commencé en tant que délinquants pour, ensuite,

17 devenir paramilitaires et ont été versés dans l'armée par le processus du

18 volontariat ? Ceci est-il exact ?

19 R. Je ne suis pas au courant de cela. Ce que je sais au sujet des

20 volontaires que j'avais sous mes ordres, c'était que c'étaient des hommes

21 tout à fait corrects, tout à fait respectables et qu'ils faisaient partie

22 d'unités en bonne et due forme. Maintenant, s'agissant de ce qui s'est

23 passé ailleurs, dans d'autres groupes, je ne saurais en parler car ce

24 serait supputer de la situation ailleurs.

25 Q. Alors, on parle des volontaires et on parle de vos réponses assez

Page 45704

1 générales. Est-ce que vous connaissez les Skorpions, ces gens qui, dit-on,

2 ont été filmés alors qu'ils commettaient des assassinats ? On en parle

3 beaucoup à Belgrade. Est-ce que vous les connaissez ?

4 R. J'en ai entendu parler par la télévision, mais je n'ai aucun

5 renseignement concret à ce sujet. Tout ce que j'ai entendu à la télévision,

6 je peux vous en parler, c'est tout ce que je sais.

7 Q. Savez-vous que les Skorpions ont été utilisés au Kosovo, compte tenu

8 des besoins et que leur première action a consisté à aller tuer des civils

9 à Podujevo; après quoi, on les a retirés, puis, on les a réengagés là-bas.

10 Selon le général Vasiljevic qui a déposé ici, on les a déployés une

11 nouvelle fois dans une autre région et ils ont tué 20 civils à Gnjilane.

12 Est-ce que vous étiez au courant de cela ? L'assassinat de 20 civils par un

13 groupe paramilitaire, d'après le général Vasiljevic, c'est un groupe assez

14 nombreux tout de même ?

15 R. Je ne suis pas au courant de cela. Il faut lui poser la question. S'il

16 l'a dit, je suppose qu'il a des idées précises au sujet de ce qu'il dit. Je

17 ne suis pas au courant.

18 Q. Au sujet de ce que dit le général Vasiljevic sur des faits, des faits

19 qui appartiennent à l'histoire, c'est bien cela ?

20 R. J'ai tendance pour ma part à mettre en doute tout ce que mes yeux n'ont

21 pas vu eux-mêmes, tout ce que je n'ai pas entendu moi-même ou lu moi-même.

22 Q. Mais vous avez entendu la question. Sentez-vous libre de dire ce que

23 vous voulez au sujet de qui que ce soit devant ce Tribunal ? Vous nous avez

24 dit que vous aviez des raisons de douter de ce que le général Vasiljevic a

25 dit devant ce Tribunal dans sa déposition; c'est bien cela ?

Page 45705

1 R. Je ne sais pas ce qu'il a pu dire et tout ce qu'il a pu dire. La seule

2 chose que j'ai entendue, j'ai dit à son sujet que j'avais des raisons de

3 douter de ce que je n'avais pas entendu ou vu moi-même.

4 Q. Mais s'agissant d'incendier des bâtiments, j'aimerais que vous vous

5 penchiez, si vous voulez bien, sur la pièce à conviction Delic, pièce

6 produite par le témoin Delic. Est-ce que vous avez des raisons de douter ?

7 Il s'agit de l'intercalaire 72 de la pièce D299. Avez-vous des raisons de

8 mettre en doute ce qu'a dit le général Delic ?

9 R. Comme je l'ai déjà dit et je le répète, j'ai tendance à mettre en doute

10 tout ce que je n'ai pas vu, entendu ou fait moi-même.

11 Q. Dans ce procès-verbal d'une réunion de l'état-major du MUP, le 11 mai

12 1999, à Pristina, c'est cela qui fait l'objet de ce texte, page 12 de la

13 version anglaise, la 124e Brigade et son commandant, un certain Colic.

14 Voilà ce qu'on lit dans ce passage du texte. Est-ce que vous le

15 connaissez ? Vous connaissez Colic ?

16 R. Non. Je ne le connais pas.

17 Q. Vous avez trouvé ce paragraphe 12. Une fois que vous aurez trouvé le

18 paragraphe 12, je vous demanderais de vous rendre au dernier paragraphe de

19 ce procès-verbal d'une réunion du MUP, le

20 11 mai 1999 et qui, c'est écrit dans le texte, s'est tenue à Djakovica. Je

21 cite : "Les citoyens et les réfugiés de la ville de Djakovica ont été

22 traités correctement pendant les opérations. Cependant, après toutes les

23 actions, des réservistes de l'armée yougoslave ont mis le feu à des maisons

24 et ont pénétré dans ces maisons. Nous avons informé les commandants de la

25 VJ, armée yougoslave, pour que de telles actions soient empêchées."

Page 45706

1 Vous nous avez dit vous être retrouvé sur place et vous voyez que des

2 réservistes de la VJ disent ce qui s'est passé et que c'est enregistré dans

3 un procès-verbal de réunion du MUP ?

4 R. Je n'ai pas assisté à cette réunion du MUP et je ne suis pas au courant

5 de cela. Le général Delic avait une zone de responsabilité beaucoup plus

6 vaste que la mienne. Je me concentrais principalement antiaérienne.

7 Q. Vous réduisez la portée de votre déposition en disant que ce vous dites

8 ne concerne que ce vous connaissiez. Mais répondez : était-il possible

9 qu'une maison soit incendiée à Djakovica par des réservistes de l'armée

10 sans que vous soyez au courant ? Ou était-ce quelque chose dont le MUP

11 aurait été informé et il essaierait de faire porter le chapeau à l'armée ?

12 Dites-le nous.

13 R. De nombreuses maisons de Djakovica ont brûlé. C'est après le 24 mars,

14 après les opérations aériennes de l'aviation que la majorité des maisons a

15 brûlé. Je n'ai jamais entendu dire et je n'ai jamais été informé du fait

16 que des réservistes de l'armée yougoslave auraient mis le feu à des maisons

17 ou seraient entrés par effraction dans des maisons. Je ne peux que le

18 répéter. Je n'ai jamais appris qu'un de mes subordonnées aurait commis un

19 acte de ce genre.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'aimerais reprendre la première

21 partie de la question et vous demander d'écouter attentivement et de

22 répondre à cette première partie de la question. Est-il possible que des

23 maisons aient été incendiées à Djakovica par des réservistes de l'armée

24 sans que vous ayez été au courant ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela aurait été difficile.

Page 45707

1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

2 M. NICE : [interprétation]

3 Q. Mais qu'en est-il des maisons qui ont été incendiées avant l'arrivée

4 des avions de l'OTAN ? Comme vous le dites, qui les a incendiées ? Qui a

5 mis le feu à ces maisons ? Ce n'était pas des Albanais du Kosovo qui

6 mettaient le feu à leurs propres maisons, n'est-ce pas ? Alors, qui a mis

7 le feu ?

8 R. J'ai dit que je ne savais pas, que je n'avais pas d'informations sur ce

9 point.

10 Q. Vous avez dit et je reprends votre réponse, Monsieur Djosan. Nous

11 n'essayons de vous tendre un piège. Nous suivons la logique de vos

12 réponses. Vous avez dit qu'un grand nombre de maisons de Djakovica ont été

13 incendiées et que la majorité d'entre elles l'ont été après le 24 mars.

14 Manifestement, vous aviez en tête des maisons qui auraient été incendiées

15 avant. Ou était-ce simplement une façon de vous exprimer un peu trop sur

16 ces maisons qui ont brûlé ? Est-ce qu'elles ont brûlé par auto combustion

17 ou est-ce que quelqu'un y a mis le feu avec une cigarette qui serait tombée

18 dans une chambre à coucher ? Dites-nous, expliquez-nous comment cela a pu

19 se passer.

20 R. Écoutez, je ne vois pas -- répétez, mais je ne vois pas ce que vous

21 dites que j'aurais dit.

22 Q. Vous avez dit que certaines maisons --

23 R. Veuillez répéter ce que j'ai dit dans son intégralité.

24 Q. Je vais répéter un passage, pas l'intégralité. Vous avez dit, je cite :

25 "De nombreuses maisons de Djakovica ont été incendiées, la majorité d'entre

Page 45708

1 elles l'ont été après le 24 mars, après les frappes des avions de l'OTAN."

2 Si vous dites que quelque chose s'est passé après un certain moment, on est

3 tout à fait en droit d'en déduire que la même chose s'est passée aussi

4 avant, n'est-ce pas ?

5 R. Non. J'ai dit que la majorité des maisons, parce que cela veut dire que

6 toutes les maisons de Djakovica n'ont pas brûlé. Si j'avais dit que toutes

7 les maisons de Djakovica ont brûlé et que la majorité d'entre elles ont

8 brûlé après le 24 mars, votre déduction serait juste. J'ai dit que de

9 nombreuses maisons ont brûlé après le 24 mars. Mais il y en a beaucoup

10 aussi qui sont restées debout. C'est ma façon d'interpréter ce que j'ai

11 dit.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je ne suis pas tout à fait sûr que ce

13 soit la bonne façon d'interpréter la chose, mais c'est peut-être également

14 un problème d'interprétation parce qu'il n'a jamais été dit que toutes les

15 maisons de Djakovica ont été incendiées. Mais ce que vous avez dit, c'est

16 que parmi les maisons incendiées, la majorité a été brûlée après le 24 et

17 la question suivante qui vous a été posée consistait à vous demander quelle

18 était la cause de l'incendie des maisons qui ont brûlé avant le 24.

19 Pourriez-vous, je vous prie, répondre à cette question ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux. Je ne suis pas au courant du fait que

21 des maisons auraient été incendiées avant le 24 mars. Je ne suis pas au

22 courant. Je n'ai reçu aucun rapport l'indiquant. Je n'ai vu aucune maison

23 en feu avant le 24 mars.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] En d'autres termes, votre réponse

25 précédente était erronée. Ou est-ce que c'était un lapsus de votre part ou

Page 45709

1 une erreur ou quoi ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit que de nombreuses maisons ont brûlé

3 après le 24 mars et par ces mots, je ne sous-entendais pas que certaines

4 maisons avaient brûlé avant le 24 mars. Ce que je sous-entendais, c'était

5 que certaines maisons étaient restées intactes, debout, n'avaient pas été

6 la proie des flammes.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

8 M. NICE : [interprétation]

9 Q. Je n'ai pas le temps de parcourir les cartes que vous avez présentées,

10 s'agissant des bombardements. Deux points seulement : est-ce que vous avez

11 tenu compte du rapport d'expert de Patrick Ball à propos de la corrélation

12 établie entre les bombardements et les mouvements des réfugiés, les

13 déplacements des réfugiés ?

14 R. Non.

15 Q. Il dit qu'il n'y a pas de corrélation entre la cadence des

16 bombardements et les déplacements de réfugiés. Vous ne les avez pas vus,

17 ces rapports; vous ne pouvez pas répondre. Mais vous n'avez pas de

18 statistiques pour ce qui est des dates auxquelles il y aurait eu ces

19 bombardements ? On ne voit, sur vos cartes, aucune date en ce qui concerne

20 les dates de ces bombardements.

21 R. La plupart de ces sites se trouvent à être authentiques. On ne peut pas

22 porter sur cette carte le moindre détail. J'affirme que sur certaines

23 cartes, à savoir concrètement sur la carte relative au 2e Bataillon

24 d'infanterie, chaque endroit indiqué correspond à des endroits de frappes

25 de l'aviation de l'OTAN. Si on avait voulu montrer tous les endroits

Page 45710

1 frappés par l'OTAN, il nous faudrait une carte qui aurait la superficie

2 d'un kilomètre carré.

3 Q. Cela peut-être des petites bombes, des plus grosses, d'autres qui ont

4 eu pour effet de semer la peur, il peut y avoir toutes sortes de choses,

5 toutes sortes d'aspects, cela peut être des bombes qui ont tendance à créer

6 des diversions --

7 R. Bien sûr.

8 Q. Si je vous dis que la plupart des gens étaient déjà partis avant le

9 début du plus gros des bombardements, est-ce que vous accepteriez ceci ?

10 Une grande partie des déplacements de la population s'est effectuée avant

11 la phase la plus aiguë des bombardements ? Est-ce que vous acceptez cette

12 idée ?

13 R. Je ne sais pas ce que vous entendez par la phase la plus aiguë des

14 bombardements. La première bombe qui est tombée a initié le flux des

15 réfugiés. Les individus s'en sont en allés tout de suite. Certains

16 s'attendaient à ce que cela ne dure pas longtemps et sont restés. Au fur et

17 à mesure que l'agression ou plutôt au fur et à mesure que les intervalles

18 de bombardements se sont accrus ou se sont intensifiés, le nombre des

19 réfugiés lui aussi a crû. Par conséquent, dans le courant de toute cette

20 agression de l'OTAN, il y a eu des flux de réfugiés. Certains sont restés

21 plus longtemps à certains endroits, d'autres sont restés moins longtemps à

22 ces mêmes endroits. Je n'ai pas dit que tous les réfugiés se sont déplacés

23 en même temps.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Djosan, êtes-vous en train

25 de dire qu'il n'y a pas eu de fuite de réfugiés avant les bombardements ?

Page 45711

1 LE TÉMOIN : [interprétation] Avant le bombardement, avant le 24 mars, il

2 n'y a pas eu de départ dans le sens où cela est démontré comme étant des

3 départs vers l'Albanie. Il y a eu des départs de gens qui quittaient les

4 endroits où il y a eu des conflits entre les membres de l'armée ou du MUP

5 avec les terroristes. Cela, oui, mais des déplacements massifs de réfugiés,

6 ceux-là n'ont commencé qu'une fois que les bombes de l'OTAN ont commencé à

7 pleuvoir.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.

9 M. NICE : [interprétation]

10 Q. Crime et châtiment. Vous avez parlé des indications de viol. Je ne vais

11 pas en parler. Je n'en ai pas le temps.

12 Est-ce qu'il y a des preuves qui montrent que des soldats qui avaient été

13 accusés, par exemple, d'incendie volontaire, d'avoir tué des gens, de les

14 avoir chassés, est-ce qu'il y a quoi que ce soit dans des archives, des

15 traces de tout cela ?

16 R. D'après ce que j'en sais, il existe des informations détaillées au

17 sujet de mes soldats. Etant donné que je n'avais pas de compétence, puisque

18 cela relevait du domaine des instances judiciaires, je ne saurais vous en

19 dire davantage parce que la justice est intervenue. Il y a eu des dépôts de

20 plaintes au pénal. Il y a eu des dépôts de plaintes provenant de mon unité

21 à moi et je suppose que les autres commandants s'ils ont eu des cas

22 analogues ont rapporté cela. Je ne peux parler pour ma part que de mon

23 unité à moi.

24 Q. Vous le savez, n'est-ce pas, il n'y a pratiquement pas de traces au

25 Kosovo de ce que des gens auraient été poursuivis ou punis pour des crimes

Page 45712

1 qui équivalent à des crimes de nettoyage ethnique ? Il n'y a aucune trace

2 de ce genre, n'est-ce pas ? Pas d'enquêtes qui auraient été menées ?

3 R. Tout d'abord, il n'y a pas eu de nettoyage ethnique. Deuxièmement, je

4 ne dispose que des informations qui se rapportent à mes soldats à moi que

5 j'ai confiées au tribunal militaire. Je ne sais pas ce qui s'est passé au

6 niveau des unités. Comment voulez-vous que je le sache ?

7 Q. Manifestement, c'est la Chambre qui devra statuer s'il y a eu nettoyage

8 ethnique ou pas, mais une chose est claire c'est que s'il y a eu nettoyage

9 ethnique, on a rien fait pour punir ou poursuivre les personnes qui en

10 étaient responsables.

11 R. Il y a nettoyage ethnique. Ce nettoyage s'est produit maintenant. C'est

12 maintenant qu'a lieu le nettoyage ethnique au Kosovo-Metohija. C'est

13 maintenant que le Kosovo-Metohija se trouve être ethniquement nettoyé.

14 Savez-vous qui il y a maintenant au Kosovo-Metohija ?

15 Q. Oui, oui, je comprends bien votre question, même si je ne vais pas y

16 répondre. Ceci m'apporte à mon avant-dernier sujet de façon tout à fait

17 adéquate, je reparle de la commission de la VJ. Est-ce que vous êtes un de

18 ces Serbes qui dit que les Albanais du Kosovo raconteront n'importe quoi si

19 on les contacte, si nous les contactons, ils vont nous raconter des

20 bobards. Est-ce que c'est ce genre d'attitude que vous avez à l'égard des

21 Albanais du Kosovo ?

22 R. Je le pense au sujet de certains témoins qui se sont trouvés exposer à

23 des menaces. Je ne généralise jamais, je n'ai jamais dit que c'était tout

24 le monde. Je n'ai pas pu parler des autres unités, des autres soldats des

25 autres unités, je ne peux pas parler non plus des autres Albanais. Il

Page 45713

1 serait logique de s'attendre à ce que la plupart des témoins disent bon

2 nombre de choses parce qu'exposés à des pressions, mais je n'ai pas dit que

3 tout le monde le ferait. Comment voulez-vous que je sache que tout un

4 chacun le ferait ?

5 Q. Vous voyez, si on analyse bien si ce qui s'est passé au Kosovo, ceci

6 apparaît : en termes politiques et militaires, c'est l'UCK qui a gagné et

7 les Serbes ont été battus et chassés. Nous n'avons pas d'avis dans un sens

8 ou dans un autre, c'est un simple fait, n'est-ce pas ? Nous ne disons pas

9 si c'est bien ou mal, c'est bien cela ?

10 R. D'où tirez-vous cette idée aux termes de laquelle l'UCK a été capable

11 de battre une armée régulière au sein d'un pays ? Comment appelez-vous

12 cela ? Comment qualifier vous cela dans votre pays à vous ?

13 Q. Si vous n'acceptez pas mon hypothèse, je passe à autre chose. Mais

14 l'UCK - est-ce que vous accepteriez ceci - l'UCK se trouve maintenant dans

15 un environnement où elle n'a rien à craindre ou peu de choses à craindre

16 des Serbes parce qu'il n'y a pas beaucoup de Serbes au Kosovo et parce que

17 les Albanais du Kosovo dirigent et administrent leur propre pays, enfin, je

18 ne vais pas ici m'exprimer là-dessus non plus, en tout cas, ils

19 administrent le Kosovo.

20 R. Les Albanais du Kosovo ne gèrent pas le Kosovo tout seul, tout comme

21 les Serbes ne gèrent pas le Kosovo-Metohija tout seuls. On sait qui est-ce

22 qui gère, comment il le fait et comment on en est arrivé là.

23 Q. Les Serbes du Kosovo, vous en êtes un, à Belgrade se trouvent en but à

24 des pressions extrêmes, lorsqu'ils sont pour ainsi dire organisés par des

25 gens comme la commission de la VJ, les pressions exercées sur vous sont

Page 45714

1 extrêmes, énormes sur vous tous.

2 R. Je ne comprends pas du tout ce que signifie ce terme de "pressions."

3 Quelles pressions avez-vous à l'esprit ?

4 Q. Ce n'est pas vous qui avez perdu, vous qui n'êtes pas parvenu à

5 conserver le Kosovo en dépit d'actes de criminalité graves, vous risquez

6 tous d'être exposés pour les crimes que vous avez commis, c'est pour cela

7 qu'il vous faut rester ensemble. Est-ce que c'est bien ce qu'on voit dans

8 cette déposition qui est la vôtre, dans ces documents que vous produisez

9 bien des années après les événements ? Vous vous tenez tous vous et vos

10 collègues. Vous vous protégez.

11 R. D'où tirez-vous cette idée qui consiste à dire que nous n'avons pas pu

12 préserver le Kosovo ? Cela, c'est une offense pour l'intelligence de ce

13 Tribunal et je ne vais pas entendre parler de cette propagande. Je ne sais

14 pas à qui sont les positions que vous avancez ici, mais vous étiez très

15 proche ou très près d'une aide et d'une assistance apportée à l'UCK.

16 Q. Vous vous souvenez que vous avez dit que vous ne vous êtes pas opposé

17 au général Vasiljevic. Vous avez dit que vous ne pouvez pas, bien sûr, vous

18 exprimer en connaissance de cause, vous n'aviez pas d'avis négatif. Mais

19 savez-vous pourquoi cette commission qui a organisé votre déposition ici

20 essaie de l'empêcher, lui, de venir déposer, essaie de limiter, d'entraver

21 l'accès ou a essayé d'entraver son accès au bureau du Procureur avant qu'il

22 n'ait le courage de prendre lui-même l'initiative ? Pourquoi est-ce que la

23 commission de la VJ interviendrait de cette façon-là auprès d'un homme

24 comme lui ?

25 R. S'agissant du général Vasiljevic, je ne veux pas me casser la tête

Page 45715

1 avec. Pourquoi voulez-vous que je réfléchisse à son cas. Cela le regarde,

2 c'est son opinion à lui pour ce qui des choses qu'il va proférer. Cela en

3 dira long au sujet de lui-même.

4 Q. Très bien.

5 R. C'est quelqu'un que je ne connais même pas.

6 Q. Très bien. Dernière question, sujet différent. Vous êtes resté à

7 Djakovica. En tout cas, vous y étiez vers le milieu de l'année 1998. Je

8 vais vous demander d'examiner un document déjà versé au dossier. Il s'agit

9 de l'intercalaire 35 de la pièce 677 [comme interprété]. Je vous explique

10 quel est ce document pendant qu'on le distribue. Ici, ce sont les notes

11 intégrales recueillies au cours d'une réunion du conseil suprême de

12 Défense. C'est produit par les autorités de Serbie et du Monténégro. Son

13 authenticité n'a jamais été contestée jusqu'à présent et on y précise ce

14 qu'ont dit certains hauts placés intégralement et littéralement. La

15 réunion, celle-ci s'est tenue le 13 avril 1995. Elle concerne Djakovica, ce

16 qui explique que je vous pose la question.

17 J'espère que vous avez cette page sous les yeux ? Monsieur

18 l'Huissier, placez la page 24 en anglais sur le rétroprojecteur. Oui,

19 Monsieur l'Huissier, trouvez le bon passage. Replacez ceci dans le

20 contexte. Oui.

21 L'accusé, Slobodan Milosevic, a dit ceci dans un entretien avec Perisic et

22 Lilic : "...'d'abord, 15 jours de terroriste ... les premiers jours ...'

23 puis, vous avez 130 000. Non, vous n'avez pas que 130 000, vous avez en

24 plus 100 000 policiers qui vont intervenir dans des situations où il y a

25 des terroristes ou d'autres situations, surtout les unités spéciales de la

Page 45716

1 police qui vont coopérer avec l'armée."

2 C'est en 1995.

3 R. J'aimerais qu'on ne parle pas si haut.

4 Q. Excusez-moi. Il dit qu'il avait 130 000 hommes et : "...tu vas avoir

5 100 000 policiers de plus qui vont intervenir dans des situations des

6 terroristes ou d'autres, des unités spéciales de la police qui vont

7 collaborer avec l'armée."

8 1995. Vous étiez en 1998, mais vous deviez connaître un petit peu

9 l'histoire. Est-il exact de dire qu'il y avait à disposition

10 100 000 policiers ?

11 R. Mais il n'en est pas question.

12 Q. Voici ce que dit Perisic : "Bien. Je pensais que ce n'était pas moi qui

13 étais chargé de proposer tout ceci." L'accusé

14 dit : "Oui, je comprends, mais tout ceci doit être en corrélation. Par

15 exemple, la plus belle ville du Kosovo, celle où les séparatistes Siptar

16 ont le plus investi, c'est le groupe de Djakovica. Djakovica, il n'y a pas

17 de ville plus jolie, plus riche, mieux organisée que celle-là au Kosovo.

18 Elle se trouve dans un endroit qui n'a pas son pareil. Il y a une ancienne

19 caserne un peu en surplomb, elle est maintenant abandonnée."

20 Est-ce qu'il est ironique ou sincère, Perisic ? Est-ce que c'était un bel

21 endroit, Djakovica ?

22 R. Djakovica, c'était une très jolie ville. On vivait bien à Djakovica et

23 la colline dont il est question est une jolie colline sur les hauteurs de

24 Djakovica, en effet.

25 Q. L'accusé dit ceci : "Une ancienne caserne et une unité motorisée de

Page 45717

1 blindés devaient y être installées afin qu'ils sachent que ce trésor, ce

2 joyau va être attaqué demain, si quelque chose ne commence pas à passer. Il

3 faut qu'ils sachent que l'armée existe et qu'elle est là."

4 Perisic dit ceci : "Mais nous y avons une caserne."

5 L'accusé dit : "Tu n'y a rien."

6 Perisic : "J'y ai un régiment."

7 L'accusé : "Non, non, tu n'as qu'une caserne vide."

8 Passons à la page suivante. Perisic : "Mais qu'est-ce que je serais comme

9 chef d'état-major, si je ne le savais pas ? Il y a un bataillon à

10 Djakovica, à la sortie vers Dzapa Prusica, sur la gauche. J'y étais trois

11 jours."

12 L'accusé : "Mais cette caserne qui se trouve sur les hauteurs de Djakovica,

13 pourquoi est-ce qu'elle est abandonnée ?"

14 Perisic : "Elle est abandonnée depuis longtemps."

15 L'accusé : "Je ne veux pas dire que vous l'avez abandonné. J'ai dit qu'elle

16 est en état de désaffectation depuis longtemps."

17 Perisic : "Quelqu'un l'a désertée, je ne sais pas pourquoi. Toutes les

18 villes du Kosovo ont une caserne et l'armée, mais je n'ai pas assez de

19 soldats."

20 Avant de lire le passage suivant, est-il vrai de dire qu'il y avait une

21 caserne désaffectée et qu'elle a été remplie, réutilisée entre 1995 et

22 1998 ?

23 R. Je vais vous dire : Feu mon père Miko, en 1932, a fait son service

24 militaire à Djakovica dans la caserne qui s'appelait la caserne du 156e

25 Régiment blindé.

Page 45718

1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Contentez-vous de répondre à la

2 question, Monsieur Djosan et laissez de côté le caractère anecdotique.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, en effet, il y a eu une caserne

4 d'abandonnée.

5 M. NICE : [interprétation]

6 Q. Mais est-ce qu'elle a été réoccupée entre 1995 et 1998 ?

7 R. Oui. Il est arrivé une brigade chargée de la Défense antiarienne, la

8 brigade dont j'ai été le commandant moi-même.

9 Q. Précisément. Lorsqu'on voit l'accusé qui dit, eux, les occupants de ce

10 bel endroit doivent savoir que l'armée existe et qu'elle est là sur les

11 lieux, c'est notamment vous qui avez rempli, réalisé cette partie-là de ses

12 objectifs ?

13 R. Mais chez vous, dans les belles villes ou dans les beaux endroits, il

14 n'y a pas de soldats. Qu'est-ce que cela signifie que d'avoir une belle

15 localité où les soldats n'auraient pas le droit d'accès. L'unité de défense

16 antiaérienne dont j'ai été le commandant avait pour mission, étant donné

17 qu'à partir de 1996 il y a eu des avions sans pilote d'envoyés depuis

18 l'Albanie et vous savez quand est-ce que la chose a été installée, cela n'a

19 pas été destiné à l'espionnage de l'Italie ou de la Grèce, très

20 certainement, à partir de 1996, il y a eu des avions sans pilote qui

21 faisaient leur apparition. Il est tout à fait normal qu'une unité de la

22 défense antiaérienne se voie placer là pour empêcher ces incursions dans

23 l'espace aérien.

24 Q. Mais est-ce que vous saviez que Perisic n'était pas favorable à cette

25 idée et que c'est l'accusé, en tout cas, c'était son intention en 1995, qui

Page 45719

1 voulait qu'il y ait une présence militaire visible qui surplombe la ville

2 de Djakovica ?

3 R. Cette unité de défense antiaérienne est une unité que tout un chacun a

4 vue.

5 Mais comment voulez-vous que je sache ce que Perisic avait à l'esprit

6 à l'époque ?

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Répétez votre réponse, s'il vous

8 plaît.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit que cette unité de défense

10 antiaérienne n'est pas une unité qu'on pouvait ne pas voir. C'est une

11 brigade.

12 Deuxièmement, comment voulez-vous que je sache quelles ont été les

13 réflexions du général Perisic ? Quand bien même je l'aurais su, il ne

14 m'appartient pas de les commenter puisqu'à l'époque, j'étais commandant

15 d'un régiment seulement.

16 M. NICE : [interprétation]

17 Q. Lisons le tout dernier passage, où l'accusé dit

18 ceci : "Le Kosovo c'est notre territoire le plus sûr." Je m'interromps.

19 Vous vous souvenez, ce sont les notes sténographiques de ce qu'il dit.

20 "Nous avons envoyé 9 000 étudiants à l'université de Pristina; les filles

21 serbes qui sont des filles uniques peuvent sortir à Pristina dans la rue au

22 milieu de la nuit, toutes seules. Mais elles se sont dit que ce n'est pas

23 une bonne chose à faire. Elles ont vu ce qui s'était passé en Bosnie. Mais

24 c'est bon que nous ayons cet endroit, que vous les ayez là et que cela

25 marche. On sait très bien que c'est "la peur qui assure la meilleure

Page 45720

1 sécurité de la maison."

2 R. Je n'ai pas retrouvé ce passage. Je pense ne pas avoir disposé des

3 pages dont vous êtes en train de donner lecture.

4 Q. Dernière partie du passage. Il décrit la vie quotidienne réelle au

5 Kosovo, en 1995. Sécurité, paix, sécurité dans la rue, il n'en demeure pas

6 moins qu'il est nécessaire de semer la peur du militaire dans cette ville

7 car comme l'adage le dit, c'est la peur qui est la meilleure gardienne de

8 la maison. J'espère que les interprètes en cabine anglaise pourront me

9 donner la bonne traduction. Je pense que c'est : "Strah Kucu, cuva ?"

10 R. L'armée de Yougoslavie n'a jamais eu ni l'intention, ni l'objectif, ni

11 la mission qui serait celle de faire peur à la population. Pourquoi ferait-

12 elle peur à ses propres citoyens ?

13 Q. Vous avez été placé là pour intimider, pour se venger de la mort d'un

14 policier qui lui-même était sans doute un criminel de guerre. Vous le savez

15 fort bien. Vous n'avez pas seulement gardé la maison, mais vous avez gardé

16 le MUP lorsque ce MUP a commencé à abattre, à égorger des gens à Meja. Vous

17 le savez, n'est-ce pas ? C'est la vérité.

18 R. Ce sont des insinuations que vous faites et peut-être des souhaits que

19 vous exprimez. Je suppose que ce sont même vous souhaits. Mais ce n'est

20 certainement pas la vérité.

21 Q. Je vous remercie.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Nice.

23 Monsieur Milosevic, avez-vous des questions supplémentaires ? Si vous

24 en avez, qu'elles soient courtes et précises.

25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais poser des questions au sujet des

Page 45721

1 questions soulevées par M. Nice à l'occasion du contre-interrogatoire.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Rapprochez, je vous prie, le micro.

3 Poursuivez. Tous les points soulevés par M. Nice ne nécessitent pas

4 forcément une question supplémentaire de votre part.

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'ai pas l'intention et je l'ai bien dit,

6 Monsieur Robinson, je serai bref, je me résumerai. Mais il est des points

7 tout de même que M. Nice a soulevé à l'occasion de son contre-

8 interrogatoire que je ne saurais contourner. Mais je n'ai certainement pas

9 l'intention de revenir à toutes les questions qui ont été posées par M.

10 Nice à l'occasion du contre-interrogatoire. Cependant, il a soulevé des

11 questions tout à fait nouvelles et il a inversé la présentation de

12 certaines choses.

13 Nouvel interrogatoire par M. Milosevic :

14 Q. [interprétation] Mon Général, M. Nice, au tout début, vous a posé des

15 questions qui sont rapportées à vos activités suivant les différentes

16 années de votre service. Vous en souvenez-vous ?

17 R. Oui.

18 Q. Entre autres, vous avez expliqué que vous avez fait partie de l'Armée

19 serbe de la Krajina entre le 1er janvier et le

20 30 juin 1995 ?

21 R. C'est exact.

22 Q. C'est exact ?

23 R. Oui. C'est exact.

24 Q. Dites-nous, Mon Général, qui est-ce qui vous a envoyé dans l'Armée

25 serbe de la Krajina ?

Page 45722

1 R. S'agissant de l'armée serbe de la Krajina, j'y suis allé suite à une

2 demande de ma part, à une demande que j'ai faite moi-même et en passant par

3 le 40e Centre chargé du Personnel.

4 Q. En passant, vous avez mentionné, mais ensuite, M. Nice a omis de vous

5 poser des questions à ce sujet, vous avez mentionné le fait que vous n'avez

6 pas touché d'allocations pour le fait d'être séparé des vôtres. Vous avez,

7 je pense, dit que pendant que vous étiez à Pristina, vous touchiez des

8 allocations pour une vie séparée de votre famille et que lorsque vous étiez

9 dans la Krajina, vous n'aviez plus touché ces allocations-là. Dites-moi

10 maintenant qui est-ce qui a droit à des allocations pour une vie séparée de

11 sa famille et pourquoi cette allocation est-elle versée ?

12 R. Ces allocations relèvent des droits des membres de l'armée de

13 Yougoslavie qui interviennent dans des garnisons où ils n'ont pas installé

14 leurs familles. Ma famille se trouvait à Belgrade, alors que j'étais à

15 Pristina. Partant des dépenses que j'ai eues, étant donné que j'étais

16 éloigné de ma famille, je percevais cette espèce d'indemnité ou de prime

17 d'éloignement. Cela n'est perçu que lorsqu'un officier fait son service à

18 l'extérieur de l'endroit où il a son appartement, sa maison familiale.

19 Q. Est-ce que cela était en vigueur pour tous les membres de l'armée de la

20 Yougoslavie ?

21 R. Oui, pour tous les membres.

22 Q. Lorsque vous étiez dans les rangs de l'armée serbe de la Krajina en

23 tant que volontaire, est-ce que votre famille est allée avec vous à Knin ?

24 R. Non. Elle était à Belgrade.

25 Q. Pourquoi n'avez-vous pas touché cette prime d'éloignement à ce moment-

Page 45723

1 là ?

2 R. Je n'y avais pas droit.

3 Q. Pourquoi n'y avez-vous pas eu droit ?

4 R. Parce que l'état ne voulait pas payer de prime d'éloignement à

5 l'intention de ceux qui sont allés dans la Krajina serbe de leur plein gré.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Faites des pauses entre les

7 questions et les réponses, s'il vous plaît.

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien.

9 M. MILOSEVIC : [interprétation]

10 Q. Avez-vous dit, tout à l'heure, que tous les membres de l'armée avaient

11 perçu ou avaient droit à une prime d'éloignement si, suite à l'ordre qui

12 leur a été donné, ils devaient partir travailler dans une autre garnison ?

13 R. Oui. S'ils partaient vers une autre garnison suite aux ordres reçus.

14 Q. Pourquoi n'avez-vous pas perçu cette prime ?

15 R. Parce que je n'ai pas été là-bas suite à un ordre. J'y suis allé suite

16 à une requête de ma part. Une requête présentée de mon plein gré.

17 Q. Est-ce que pendant cette période-là, vous étiez considéré comme étant

18 membre de l'armée de la Yougoslavie ou de l'Armée serbe de la Krajina ?

19 R. J'étais membre de l'Armée serbe de la Krajina, à ce moment-là.

20 Q. Merci. M. Nice vous a également posé des questions au sujet de

21 l'exhumation de cadavres à Batajnica en établissant une corrélation à

22 plusieurs reprises entre ce fait-là et le fait que vous ayez indiqué que

23 vous avez servi une partie de votre service à Batajnica. Vous en souvenez-

24 vous ?

25 R. Je m'en souviens.

Page 45724

1 Q. Est-ce que l'endroit où vous avez fait votre service à Batajnica a quoi

2 que ce soit à voir avec l'endroit où on a exhumé des cadavres ?

3 R. Non, rien à voir. J'ai été de service à l'aéroport de Batajnica. A la

4 fin, au bout de la piste, nous avions une déposition de cette batterie de

5 missiles avec des SAM 3 et c'est là que se trouvaient nos positions. Par

6 conséquent, je faisais mon service à l'aéroport de Batajnica.

7 Q. Pour ce qui est de cet événement lié à l'exhumation, vous aviez que

8 cela est plutôt incroyable de voir survenir chose pareille pendant la

9 guerre parce qu'il était difficile de transporter quoi que ce soit puisque

10 vous-même, avec une voiture personnelle, vous avez voyagé trois jours par

11 aller rendre visite à votre famille. Vous avez estimé qu'il était

12 incroyable que cela se produise en temps de guerre. Ce sont vos termes.

13 Mais est-ce que vous estimez que cela serait possible en temps de paix ?

14 R. Cela pourrait se faire.

15 Q. M. Nice vous a dit qu'on savait fort bien que les Albanais n'étaient

16 pas les bienvenus en Serbie. Savez-vous nous dire combien d'Albanais il

17 réside à Belgrade ou dans d'autres régions de la Serbie, mis à part le

18 Kosovo ?

19 R. A Belgrade, autant que je le sache, il doit y avoir quelque 100 000

20 Albanais, peut-être un peu moins. Je ne peux pas vous donner de chiffre

21 exact, mais je veux dire par là qu'un très grand nombre d'Albanais résident

22 à Belgrade.

23 Q. Bien. Avez-vous ouï dire que sur ces quelque

24 70 000 Albanais --

25 M. NICE : [interprétation] Cela se peut que j'aie dit quelque chose de ce

Page 45725

1 goût-là, mais je ne me souviens pas avoir dit cela en ces termes-là. C'est

2 peut-être retiré de son contexte. Je me trompe peut-être, mais je ne pense

3 pas avoir tenu ce genre de propos.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne m'en souviens pas non plus.

5 Est-ce que vous pouvez replacer ceci dans son contexte ?

6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Le compte rendu d'audience est là pour nous

7 rafraîchir la mémoire. Maintenant, je ne sais pas si

8 M. Nice l'a dit lorsqu'il a posé la question de la manipulation des

9 Albanais parce que les Albanais, a-t-il dit, ne seraient pas les bienvenus

10 en Serbie. Je voulais savoir à partir de quoi peut-on affirmer que les

11 Albanais ne sont pas les bienvenus en Serbie et je veux savoir combien il y

12 en avait à Belgrade et à l'extérieur du territoire du Kosovo en général.

13 M. MILOSEVIC : [interprétation]

14 Q. Mon Général, Monsieur Djosan, avez-vous ouï dire qu'il se serait

15 produit quelque chose à l'encontre d'un Albanais quelconque à Belgrade

16 pendant la guerre du Kosovo ?

17 R. Non.

18 Q. Avez-vous appris qu'on aurait cassé la vitrine d'un magasin

19 d'Albanais ? J'imagine que vous en avez vu bon nombre de ces magasins en

20 déambulant dans les rues.

21 R. Je n'ai jamais appris la chose et ils ont beaucoup de magasins et aux

22 endroits les meilleurs.

23 Q. Est-ce qu'on voit les noms des propriétaires et est-ce que les noms des

24 propriétaires laissent bien entendre qu'il s'agit d'Albanais ?

25 R. Oui, en effet.

Page 45726

1 Q. M. Nice vous a demandé au sujet du témoignage de Nik Peraj qui était un

2 officier dont vous avez été le supérieur hiérarchique et il vous a posé

3 des questions au sujet de son caractère, de son honnêteté.

4 Vous souvenez-vous d'avoir répondu, de ma part, au sujet des

5 questions que je vous ai posées, des questions relatives à Nik Peraj et à

6 son caractère ?

7 R. Non. Vous avez posé des questions sur des faits et non pas sur son

8 caractère.

9 Q. Si, à trois endroits, il a parlé de la présence d'une brigade de la

10 Republika Srpska à Djakovica, est-ce que c'est un trait de caractère ou

11 est-ce que c'est un fait ?

12 R. C'est un trait de caractère.

13 Q. Est-ce qu'il y a eu une brigade de la Republika Srpska à Djakovica ou

14 pas ? Est-ce que c'est un fait que vous pourriez contester ?

15 R. C'est un fait.

16 Q. Ou est-ce que c'est quelque chose de tout à fait équilibré comme le dit

17 M. Nice ?

18 R. Je parle de fait parce que j'ai coopéré avec la SFOR dans la Republika

19 Srpska et je sais qu'il n'était pas possible à l'un quelconque des soldats

20 de la Republika Srpska de venir jusque-là et encore moins une brigade de

21 blindés. C'est une méconnaissance des plus élémentaires ou alors une

22 contrevérité flagrante.

23 Q. Il s'agit de façon claire d'une contestation des faits et non pas d'une

24 contestation de traits de caractère. Si lui vous dit que vous avez arrêté

25 Micunovic, est-ce que c'est un fait ou un trait de caractère, si vous

Page 45727

1 répondez : "Je ne l'ai pas arrêté et je n'ai pas eu affaire à lui ?"

2 R. Oui. On pourrait dire que c'est un trait de caractère. Je pourrais même

3 dire qu'il ment carrément.

4 M. NICE : [interprétation] S'il a dit -- je ne vois pas où vont ces

5 questions, tout d'abord, parce que la personnalité est toujours mise en

6 cause au cours du contre-interrogatoire. Puis, c'est une question de fait,

7 l'accusé n'a pas posé une question à propos de l'honnêteté de M. Peraj et

8 la réponse a été : oui, je savais qu'à ce moment-là, il était honnête. Mais

9 je ne vois pas trop bien où vont ces questions.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Moi-même, je ne vois pas trop où

11 vont vos questions, à quoi elles mènent. Il revient aux Juges de déterminer

12 la question de crédibilité.

13 L'ACCUSÉ : [interprétation] N. Nice s'est efforcé de réhabiliter le

14 témoignage de son témoin à lui, M. Nik Peraj et s'agissant de toute une

15 série de points qui se rapportent à des témoignages de faits, le général

16 Djosan, lui, a dit que c'étaient des contrevérités complètes. Par exemple,

17 une brigade de la Republika Srpska présente à Djakovica, l'arrestation du

18 commandant Micunovic; ensuite, les formations paramilitaires. Toute une

19 série de faits matériels qui ont fait l'objet du témoignage de Nik Peraj et

20 qui ont été contestés --

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

22 L'ACCUSÉ : [interprétation] -- par le général Djosan et qui ont été

23 contestés ou réfutés de façon catégorique.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Nous avons reçu ces

25 éléments de preuve, il nous revient de les analyser. Vous pourrez aborder

Page 45728

1 ces questions en temps voulu, mais maintenant, ce n'est pas le bon moment.

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien. Ce que je souhaitais, c'était d'indiquer

3 le fait que le général Djosan parlant de faits qu'il a contestés de la

4 bouche de Nik Peraj et M. Nice a voulu lui demander si c'était un homme

5 honnête, si c'étaient des choses équilibrées, ce que l'autre témoin avait

6 dit. Or, il a dit des mensonges notoires.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic. Pas de

8 commentaires, s'il vous plaît. Continuez, avancez.

9 M. MILOSEVIC : [interprétation]

10 Q. Par conséquent, si Nik Peraj a pu dire que votre officier, le

11 commandant Winter, aurait rédigé un rapport à l'intention de la

12 3e Armée, parlant de la façon dont des terroristes auraient été tués à

13 Meja, s'il a pu rédiger un rapport de cette nature, a-t-il dit la vérité ou

14 a-t-il menti ?

15 R. Il a menti.

16 Q. Je ne vais plus m'attarder sur Nik Peraj parce que ce témoin-là ne le

17 mérite pas. Je vais m'attarder sur un autre point, toutefois.

18 M. Nice vous a, à plusieurs reprises et concernant des aspects différents,

19 posé la question de savoir pourquoi vous estimiez que les témoins albanais

20 étaient des témoins sous pression ou soumis à des pressions. Vous souvenez-

21 vous du fait qu'il vous ait posé cette question ?

22 R. Oui, je m'en souviens.

23 Q. Je vais vous donner lecture à présent d'un extrait, un seul extrait

24 assez bref, qui se rapporte à une réponse de la part de

25 M. Nice concernant une requête relative à Ramush Haradinaj. C'est la même

Page 45729

1 partie qui affirme que les Albanais ne sont pas exposés là-bas à des

2 pressions. Au --

3 M. MILOSEVIC : [interprétation]

4 Q. -- point 7 -- au paragraphe 7 --

5 M. NICE : [interprétation] Je ne sais pas si c'est pertinent, mais

6 apparemment, c'est un autre cas de ouï-dire, de quelque chose que quelqu'un

7 d'autre aurait dit dans un autre cas, dans un autre procès.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pour veiller à respecter à la bonne

9 tenue des audiences, nous allons veiller à terminer l'audience

10 d'aujourd'hui à une heure 43 car il y en a une autre cet après-midi, dans

11 ce même prétoire.

12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. Je vais juste lire cette brève

13 citation.

14 M. MILOSEVIC : [interprétation]

15 Q. Il s'agit ici d'une écriture officielle de la partie représentée par M.

16 Nice, à l'intention des Juges de la Chambre, composée par Agius,

17 Brydensholt et Eser et au paragraphe 7, il est dit ce qui suit : "Le Kosovo

18 est encore une région très peu sûre, instable."

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Arrêtez, Monsieur Milosevic. Dites-

20 nous à quoi vous faites référence. Je ne le sais pas. Ce sont des arguments

21 présentés par qui ?

22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je me réfère à des écritures adressées par

23 Stefan Waespi, avocat.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vois, un membre du bureau du

25 Procureur.

Page 45730

1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. C'est quelqu'un du bureau du Procureur. Ce

2 sont leurs écritures à eux et dans ces écritures qui portent la date du --

3 je vais vous le dire, du 13 octobre 2005 et comme vous le savez, nous

4 sommes à quelques jours plus tard, il est dit : "Le Kosovo est toujours une

5 région peu sûre. Les victimes et les témoins sont régulièrement contactés

6 par l'Accusation pour exprimer leur inquiétude à l'idée que cet accusé --"

7 je pense qu'il s'agit de Haradinaj -- "a peut-être été remis en liberté

8 provisoire et à l'idée que d'autres accusés pourraient, eux aussi, être

9 placés en liberté provisoire. La décision qui est de relâcher les

10 conditions strictes imposées à cette mise en liberté provisoire n'avait

11 fait qu'accroître les angoisses et l'anxiété des témoins et 'des

12 victimes.'"

13 M. MILOSEVIC : [interprétation]

14 Q. Voit-on à partir de ceci, Mon Général, que la partie représentée par M.

15 Nice sait pertinemment bien pourquoi les témoins albanais se trouvent être

16 dans le trouble --

17 M. MILOSEVIC : [interprétation]

18 Q. -- et bouleversés ?

19 R. C'est tout à fait clair.

20 M. NICE : [interprétation] Mis à part le fait que ce genre de documents est

21 tout à fait irrecevable et dénué de pertinence, je voudrais qu'on comprenne

22 qu'il s'agit d'Albanais qui viennent déposer dans le cadre de procès

23 intentés à des Albanais du Kosovo. Ce n'est pas vraiment très utile.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, ce n'est pas une question très

25 porteuse. Il ne vous est pas possible de poser ce genre de questions à ce

Page 45731

1 témoin-ci.

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien.

3 M. MILOSEVIC : [interprétation]

4 Q. Vous ai-je mal compris ou avez-vous expliqué que les Albanais, dans ces

5 circonstances-ci, doivent forcément témoigner conformément aux attentes qui

6 sont celles de l'UCK par peur pour leurs propres vies ou pour une autre

7 raison ?

8 R. Par peur pour leurs propres vies ou pour la vie de leurs proches.

9 Q. Merci, Monsieur. Vous avez également indiqué, en répondant à une

10 question posée par M. Nice, où il a été touché un sujet tout à fait nouveau

11 auquel je n'ai pas touché à l'occasion de l'interrogatoire principal, à

12 savoir que vous vous êtes trouvé à la tête de la commission chargée de

13 l'application de cet accord technique militaire.

14 R. Oui, c'est exact.

15 Q. Vous avez dit ce qui expliquait le manque d'objectivité vis-à-vis des

16 Serbes ?

17 R. Oui.

18 Q. Vous avez, en effet, commencé à parler de l'ouverture d'une fosse

19 commune où on a trouvé le cadavre d'un Serbe et suite à une demande du

20 représentant de la partie représentée ici par M. Nice, la fosse commune a

21 été immédiatement refermée.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Comme je l'ai indiqué --

23 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] J'ai déjà indiqué qu'il nous faut

25 suspendre l'audience à 1 heure 43. Or, il est 1 heure 43. L'audience

Page 45732

1 reprendra demain, à 9 heures.

2 --- L'audience est levée à 13 heures 43 et reprendra le mercredi 26 octobre

3 2005, à 9 heures 00.

4

5

6

7

8

9

10

11

12

13

14

15

16

17

18

19

20

21

22

23

24

25