Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le jeudi 8 décembre 2005

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 03.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, vous pouvez

7 poursuivre votre contre-interrogatoire.

8 LE TÉMOIN: KRSMAN JELIC [Reprise]

9 [Le témoin répond par l'interprète]

10 Contre-interrogatoire par M. Nice : [Suite]

11 Q. [interprétation] Hier, nous parlions de Kotlina. Il y avait une

12 question qui était restée en suspens, question posée par

13 M. le Juge Bonomy hier, et je souhaite en terminer à propos de Kotlina et

14 en terminer avec cette question.

15 Monsieur Jelic, je vous ai posé un certain nombre de questions hier. Vous

16 vous souviendrez que les allégations comprennent le fait que 17 personnes

17 ont été tuées dans des endroits décrits comme étant des puits en

18 l'utilisation d'engins explosifs. Regardons les pièces 54, 55 et 57A pour

19 nous rappeler les moyens de preuve dont il s'agit.

20 M. NICE : [interprétation] La Chambre de première instance se souviendra

21 peut-être de l'objet de ces pièces à conviction. Veuillez nous mettre cela

22 sur le rétroprojecteur.

23 Q. Il ne s'agit pas de puits, mais de trous importants dans lesquels --

24 dans le bois dans lesquels les corps ont été déposés. Vous souvenez de ce

25 type d'endroit, Monsieur Jelic, ces trous dans le sol ?

26 R. Je ne me souviens absolument pas de trous dans le sol, ni de grottes de

27 ce type car je ne me trouvais pas à cet endroit-là avec mes hommes.

28 Q. Des observations ont été faites sur le fait que les hommes qu'on y a

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1 retrouvés étaient des membres de l'UCK. On n'a jamais contesté le fait

2 qu'il y avait des hommes de l'UCK ici impliqués ou que ces hommes-là ont

3 été tués, ou qu'il s'agissait, en tout cas, de personnes qui défendaient

4 les intérêts de l'UCK. Pièce 59A.

5 M. NICE : [interprétation] Je souhaite rappeler à la Chambre de première

6 instance à quoi ressemblaient les personnes qui ont été tuées, très

7 brièvement de façon à ce que nous puissions en venir au fait. : La planche

8 suivante, s'il vous plaît. Merci. Ensuite, la planche suivante encore, s'il

9 vous plaît. Merci beaucoup. Veuillez me rendre ces planches maintenant,

10 s'il vous plaît.

11 Nous allons maintenant placer sur le rétroprojecteur la pièce 163. Merci

12 beaucoup. Veuillez me les redonner. 163, intercalaire numéro 4,

13 intercalaire numéro 3 et 4. Ceci se rapporte à la question posée par M. le

14 Juge Bonomy.

15 163, intercalaire numéro 4 est un rapport de lieux de crimes du

16 Kosovo, recherche faite par les Autrichiens. Messieurs les Juges, nous

17 allons en parler en détail. Veuillez, s'il vous plaît, placer ceci sur le

18 rétroprojecteur.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Nice, il ne s'agit pas de

20 réentendre la thèse de l'Accusation. Ce qui m'inquiétait c'est que le

21 témoin avait établi une distinction entre Kacanik et Kotlina, et cela

22 n'était pas très clair lorsqu'il a répondu. Je souhaitais simplement

23 expliquer cela. Il ne s'agit pas de ressasser toute la thèse de

24 l'Accusation parce que nous n'avons pas le temps de faire cela.

25 M. NICE : [interprétation] Non, non, Monsieur le Juge, ce qui me

26 préoccupait, comme je vous l'ai dit, c'est qu'il y avait Kotlina et

27 Kacanik, et la réponse avait été fournie par le témoin. Ce qui s'est passé,

28 je le passe sur le rétroprojecteur. La préoccupation de la part du témoin,

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1 et je pensais que c'était cela qui vous inquiétait, mais ce sont les

2 Autrichiens qui ont examiné les lieux du crime, et ceci parle -- cette

3 pièce parle de cela, et ensuite ce sont qui ont découvert les corps, et

4 ensuite ce sont -- c'est l'équipe suisse qui a fait l'autopsie et qui a

5 procédé à un examen détaillé. Ce sont eux qui ont examiné les cadavres à

6 Kacanik qui se trouvaient à cinq kilomètres. C'est la raison pour laquelle

7 les morts trouvés à Kotlina ont été découverts.

8 Si vous voulez bien me rendre ce document, s'il vous plaît.

9 Pour, finalement -- pour en terminer avec ces questions, à savoir si

10 ces personnes-là étaient des membres de l'UCK ou non, le témoin a nié toute

11 activité de l'UCK. Je souhaite vous montrer un court extrait de l'ouvrage :

12 "As Seen, As Told," "Ce que nous avons vu, ce que nous avons raconté." Cela

13 figure du reste dans les deux ouvrages. Page 219, il y a eu -- de plus, il

14 y a eu les témoignages de d'autres témoins -- ajoute l'interprète.

15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] M. Nice nous dit que le témoin a nié toute

18 activité de la part de l'UCK. Cela n'est pas vrai du tout; au contraire il

19 a parlé de l'activité de membres de l'UCK dans la région.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Milosevic.

21 M. NICE : [interprétation] Dans la mesure où on -- ceux qui sont morts

22 n'ont pas pu nier ce type d'activité, on en parle ici dans ces passages,

23 c'est un extrait de l'ouvrage "As Seen, As Told," "Ce que nous avons vu, ce

24 que nous avons raconté." Je vais vous lire cet extrait en anglais. On

25 parle, en haut de la page 22, du fait que des personnes, semble-t-il,

26 étaient tuées. Ensuite, nous avons un récit détaillé, et les réserves qui

27 sont émises par les membres de l'OSCE suite à une enquête sur site, comment

28 ils ont pu confirmer des éléments qui leur avaient été rapportés par des

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1 corps qui ont été retrouvés dans ces trous dans le sol, et parle : "De ces

2 22 personnes," - en bas de la page - "11, semble-t-il, n'étaient pas armés

3 et c'étaient des soldats de l'UCK portant des habits civils, ils ont été

4 emmenés dans la région près de l'endroit où se trouvaient les trous, 'les

5 puits'," - et en bas de la page - "où ils ont été passés à tabac, des coups

6 de feu ont été entendus par la suite, ce qui était sans doute une

7 exécution, et ce que nous avons entendu ensuite après, c'était des bruits

8 d'explosion…"

9 Q. Très rapidement, une partie du témoignage qui porte sur la question que

10 vous avez posée, à savoir, Kotlina et Kacanik, et la question que je vous

11 pose, pour finir, et après y avoir réfléchi pendant la nuit : est-ce que

12 vous pouvez nous fournir une quelconque explication pour le fait que ces

13 hommes, qui ont été trouvés dans des puits ou se trouvaient cantonner vos

14 hommes dans cette région, pourquoi ont-ils été trouvés mort, suite à des

15 explosions qui ressemblaient à des explosions de grenade ?

16 R. La région que vous avez citée, la région de Kotlina, se trouve à 15

17 kilomètres de Kacanik, et non pas à trois à cinq kilomètres. Kotlina se

18 trouve dans la zone frontalière à l'intérieur, à cinq kilomètres. Dans le

19 cours de mon témoignage jusqu'à présent, j'ai dit qu'à partir de Kotlina,

20 il y avait des attaques incessantes sur nos unités qui se trouvaient à

21 l'intérieur de la frontière. Il y avait avec les terroristes des échanges

22 de feu dans toute la région pendant un certain temps, dans toute la région

23 depuis le village de Pustenik. Il y avait une forte concentration des

24 forces terroristes à cet endroit-là. On nous avait donné un ordre. Je crois

25 du reste que je vous en ai parlé ici, depuis 1998 on avait interdit à

26 l'armée d'entrer dans des zones habitées, surtout en possession d'armes

27 lourdes, et c'est quelque chose que nous observions aux pieds de la lettre.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mon Général, avez-vous une réponse à

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1 nous fournir à la question, oui ou non, à savoir si vous avez une

2 explication à nous donner pourquoi ces hommes trouvés dans des puits, dans

3 les endroits où vos troupes opéraient, pourquoi ces hommes ont été

4 retrouvés mort suite à un bruit d'explosion, ou à des explosions qui

5 étaient équivalentes à des explosions de grenade ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas d'explication à vous fournir car

7 je ne suis jamais entré dans le village, je n'ai jamais entendu parler de

8 ce fossé, et je n'en ai jamais entendu parler. Ce n'est que par la suite

9 ici devant un Tribunal que j'ai entendu parler de ces victimes qui, semble-

10 t-il, sont des civils.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Nice.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mon Général, qu'a-t-il pu advenir de

13 ces personnes ? Il semble que ces personnes aient été attaquées d'une

14 manière ou d'une autre ? Qu'est-ce qui aurait pu leur arriver d'autre ?

15 Bon, peut-être que c'était justifié, mais tout semble indiquer qu'ils sont

16 morts suite à une attaque. Vous ne savez rien à ce propos ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'avais aucun élément d'information à leur

18 sujet car, à ce moment-là, l'armée n'était pas entrée dans le village de

19 Kotlina.

20 M. NICE : [interprétation]

21 Q. Je suppose, Monsieur Jelic, que vous laissez entendre que dans une

22 région dans laquelle vous étiez déployé, vous assuriez la couverture de la

23 route qui allait de Djeneral Jankovic et vous dites que le long de cette

24 voie de communication les militants de l'UCK étaient présents, vous êtes en

25 train de dire que l'armée les chassaient simplement et les faisaient partir

26 le long de la route, parce que vous ne vouliez pas rentrer dans les

27 villages, car vous craigniez d'être attaqué par les gens de l'UCK. C'est

28 effectivement cela ce que vous dites dans votre déposition ?

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1 R. Je ne sais pas très bien ce que vous entendez par là, si vous dites :

2 "Qu'il fallait remonter la route dans un sens et dans un autre." Je ne sais

3 pas s'il s'agit d'une ballade le long de la route mais les unités se

4 déplaçaient le long de la route.

5 Q. Ce que vous dites, en fait, que votre armée n'est jamais entrée dans

6 les villages, on savait qu'il y avait des militants de l'UCK dans les

7 villages. Si vous n'êtes pas entré dans les villages, comment les

8 terroristes ont-ils pu vous attaquer ? Nous n'avons pas vos journaux de

9 bord. Nous n'avons pas les archives de vos unités, ni les comptes rendus.

10 Comment les membres l'UCK aurait-il pu vous attaquer si vous n'êtes pas

11 entré dans leurs villages ?

12 R. Je crois que cinq à six reprises j'ai déjà dit devant cette Chambre

13 quelle était la tactique adoptée par l'UCK. Il s'agissait de civils armés.

14 Ils n'attaquaient pas à partir de villages, mais ils attaquaient le long

15 des routes, la route l'axe nord-sud, autrement, Djeneral Jankovic et

16 Globocica. Autrement dit, ils n'étaient jamais dans les villages et ne

17 recherchaient jamais la protection d'un village. Bien le contraire, étant

18 donné que c'est une région très boisée, on ne peut pas le voir sur cette

19 carte car c'est une photocopie, l'altitude est de 1 000 mètres environ.

20 C'est très boisé dans cette partie-là et c'est très peu accessible. Ces

21 personnes marchaient, tiraient quelques coups de feu et, ensuite, lorsqu'on

22 ripostait à ces coups de feu, ils fuyaient à travers les bois, sans doute

23 pour aller chez eux ou pour retourner à leur base, nous ne savons pas de

24 quels villages ils venaient. On ne pouvait jamais obtenir de renseignement

25 sur ces questions-là, mais nous savions que c'étaient des personnes qui

26 venaient des villages voisins.

27 Comme vous pouvez le constater à l'est et à l'ouest nous n'avions pas

28 ce genre de difficultés, car tout était été concentré dans la région où

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1 étaient positionnées nos troupes de combat. Ce qui indique qu'ils

2 attaquaient nos unités de façon sans cesse.

3 Q. Autrement dit, vous dites que vous n'êtes jamais entré dans un village

4 pour essayer d'en faire sortir l'UCK, pour ne pas parler en spécialiste que

5 les choses soient claires ?

6 R. L'armée n'est jamais entrée dans un village pour neutraliser les

7 membres de l'UCK pour ce qui est de la zone qui entourait le village, cela

8 c'est très différent.

9 Q. Passons au point suivant à propos duquel je souhaite vous poser des

10 questions. Ivaja. J'ai très peu de temps. Paragraphe 63(k) de l'acte

11 d'accusation, où il est dit, je cite, paragraphe 63(k) : "Kacanik : Entre

12 mars et mai 1998, les forces de la FRY et de la Serbie ont attaqué des

13 villages de la municipalité de Kacanik et la ville de Kacanik elle-même.

14 Cette attaque s'est soldée par la destruction de maisons et de sites

15 religieux dont les mosquées de Kotlina et Ivaja."

16 Pouvons-nous regarder ici quelques extraits de cet ouvrage qui se

17 trouve à la pièce 321 ? Monsieur Jelic, il s'agit de compte rendu, c'est un

18 format que connaît bien la Chambre. C'est un document qui vient de la

19 Mission de l'OSCE. On parle ici du 9 mars. Avant qu'il y soit question d'un

20 état d'urgence ou d'un état de guerre, les représentants -- les

21 observateurs ont constaté qu'il y avait une opération de la VJ du MUP pour

22 écarter l'UCK de Djeneral Jankovic et de cette région. Tout d'abord, l'OSCE

23 s'est-elle trompée lorsqu'elle a dit que c'est un exercice -- ou dans une

24 manœuvre organisée conjointement par la VJ ou le MUP. Il s'agissait de

25 débarrasser, dans la région, des membres de l'UCK, cette région qui va à

26 Djeneral Jankovic.

27 R. La région de Djeneral Jankovic, c'est une région très étendue et

28 très peuplée. Il n'y avait pas de plan à cet effet, de débarrasser de

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1 l'UCK. Il s'agissait simplement de nous défaire des attaques terroristes.

2 Q. Vous étiez là avec le MUP et vous n'étiez pas là pour nettoyer

3 l'endroit, la région ?

4 R. Ecoutez, si vous me posez la question à moi personnellement. Non. Mes

5 unités se trouvaient dans la région et ils s'y sont trouvés pendant plus

6 d'un an et après la sécession de la république de Macédoine car c'est là

7 qu'il y a une frontière.

8 Q. Je vous pose une question non pas à vous-même, mais une question qui a

9 trait à vos unités. Donc, je vais reformuler ma question. Vos unités se

10 sont-elles trouvées à cet endroit-là pour faire quelque chose ou agir

11 contre l'UCK, mais non pas pour nettoyer la région; oui ou non ?

12 R. Les unités étaient présentes pendant tout ce temps. Vous pouvez du

13 reste le confirmer sur ce tableau. C'était sur cette carte. C'était une

14 décision du gouvernement fédéral. Il n'y avait de police, de membres de la

15 police le long de la frontière, à l'exception de Djeneral Jankovic.

16 Q. Donc, poursuivons. Comment l'OSCE ou le MVK ont-ils dans leur rapport

17 indiqué ceci ? "Leurs patrouilles ont été -- on a empêché à leurs

18 patrouilles de pénétrer dans les villages en question. Les forces du MUP et

19 de la VJ ont ensuite suivi un plan et ont encerclé les villages de la

20 région en forçant les habitants à fuir car ils faisaient usage de tirs

21 directs et indirects. Au milieu de l'après-midi, les maisons à Gajre,

22 Ivaja, Straza, Alil Mahala brûlaient. Les Unités du MUP avaient semblé

23 déterminer à détruire ces villages."

24 Y a-t-il une raison de mettre en doute les dires de l'OSCE qui ont

25 été consignés ici, y compris ce qui a été constaté à propos d'Ivaja ?

26 R. Vous avez parlé de plusieurs villages ici. Il s'agit quasiment de

27 l'ensemble de la municipalité. L'armée ne pouvait pas quitter ces zones de

28 responsabilité. L'armée ne partait pas. Je ne sais pas de quelle patrouille

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1 vous voulez parler. Vous dites quand les patrouilles ont arrêté et bloqué.

2 Je parle des patrouilles du MUP parce qu'il s'agit des patrouilles

3 officielles. C'est cela que vous entendiez ? Je ne comprends pas comment

4 votre question, ni la formulation de votre question. Quelle patrouille ?

5 Est-ce que vous parlez des patrouilles de l'UCK ?

6 Q. Je vais vous laisser une dernière chance --

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic.

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne comprends pas ce que M. Nice cite ici

9 dans ce document, document de l'OSCE. C'est un rapport de l'OSCE. Je ne

10 suis pas en possession d'un tel document.

11 M. NICE : [interprétation] Pièce 321. Peut-être que l'accusé ne se souvient

12 pas. Je vais le lui rappeler. Il s'agit d'un document qui a été utilisé à

13 de multiples reprises. C'est une compilation de rapports quotidiens, des

14 observateurs de l'OSCE qui se trouvaient sur le terrain.

15 Q. Monsieur Jelic, vous n'avez pas compris ce que j'ai dit. Je vais

16 répéter ma question pour qu'elle soit plus simple.

17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Sur le rétroprojecteur.

18 L'ACCUSÉ : Monsieur Robinson.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, le document se

20 trouve sur le rétroprojecteur.

21 M. NICE : [interprétation]

22 Q. Le rapport de l'OSCE --

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce n'est pas un document de l'OSCE. C'est un

25 extrait de l'ouvrage : "As Seen, As Told," "Ce que nous avons vu, ce que

26 nous avons raconté." Il y a toutes sortes choses qui figurent dans cet

27 ouvrage.

28 M. NICE : [interprétation] Puis-je continuer mon contre-interrogatoire,

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1 s'il vous plaît ?

2 L'INTERPRÈTE : Microphone pour M. Nice, s'il vous plaît.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quoiqu'il en soit, c'est le document

4 qui se trouve sur le rétroprojecteur.

5 Veuillez poursuivre, s'il vous plaît.

6 M. NICE : [interprétation]

7 Q. Je disais -- donc, je vais vous soumettre mon idée de façon plus

8 simple. Les observateurs de l'OSCE sur le terrain ont rapporté que les

9 forces du MUP et de la VJ ont encerclé les villages, ont forcé les

10 habitants à fuir sous les coups de feu direct et indirect, et ont mis le

11 feu à des maisons et même des maisons à Ivaja; est-ce que ceci peut-il

12 correspondre à la vérité ?

13 R. Non. Ceci n'est absolument pas vrai. L'armée n'est jamais entrée dans

14 les villages, n'a jamais mis le feu à des bâtiments et n'a jamais chassé la

15 population. Ce sont nos propres gens. Pourquoi est-ce que nous voudrions

16 les chasser ?

17 Q. Est-ce que vous dites qu'il a été question d'une opération conjointe

18 organisée par vous et le MUP sur la voie de communication Straza, Ivaja,

19 Gajre, Kotlina ? Y a-t-il eu question de ce type d'opérations à aucun

20 moment ? Oui ou non ?

21 R. Non. Il n'y a pas eu d'opérations conjointes. Nous nous sommes

22 simplement battus contre -- nous avons simplement combattu les terroristes

23 vraiment où ceux-ci surgissaient.

24 Q. Je vais maintenant vous citer ce qui a été consigné à propos du jour

25 suivant. Ensuite, nous en aurons terminé avec Ivaja. Le lendemain, c'est

26 toujours la même équipe de l'OSCE, la mission a rapporté ce qui suit, donc,

27 à propos d'Ivaja. Leur patrouille de reconnaissance numéro 5, je crois --

28 non, oubliez.

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1 "Le MVK a escorté et d'un convoi de la HCR des Nations Unies, ils ont

2 été arrêtés par la VJ et le MUP. Mais, pour finir, ils ont été autorisés à

3 poursuivre et trois corps en habit civil ont été retrouvés à Ivaja, village

4 complètement désert comme l'est Gajre.

5 Ensuite, les observateurs ont apporté leurs commentaires. Ils ont dit

6 que la VJ avait une petite garnison de soldats et du matériel militaire.

7 Quatre BOV et quatre véhicules de transport de cargos à Djeneral Jankovic."

8 Que pouvez-vous nous dire à propos de ces trois corps retrouvés en

9 habit civil, ces trois corps à Ivaja ?

10 R. Je ne peux vous fournir aucune explication pour ces trois cadavres

11 retrouvés à Ivaja car ils sont en habit civil et aucun terroriste ne

12 portait un uniforme pendant toute la durée de la guerre et en 1998, ils

13 portaient des habits civils et ils portaient des armes à la main, des

14 fusils à la main. Ces trois personnes, ce sont, sans doute, battus contre

15 les soldats et ont été tués, et à savoir si ceci porte sur Djeneral

16 Jankovic, non.

17 Q. C'est lié --

18 R. Vous avez dit --

19 Q. Ceci a trait avec Ivaja. L'accusé vous a posé des questions sur Ivaja.

20 Donc, vous saviez que la question à propos d'Ivaja allait être posé et nous

21 n'avons vu aucun document nous permettant de dire ce qu'ont fait vos

22 hommes, ce jour-là, encore moins, pour le 9 et le 10. Pouvez-vous nous dire

23 quelque chose ou nous fournir une quelconque explication sur ce -- les

24 raisons pour lesquelles ces trois hommes ont été tués à Ivaja, le 9 ou le

25 10 ?

26 R. Je ne sais pas comment ils ont été tués, mais c'est vous qui avez dit

27 que l'armée se trouvait cantonnée dans la garnison de Djeneral Jankovic.

28 Donc, je ne l'ai dit par hasard.

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1 L'INTERPRÈTE : L'interprète demande à ce que le deuxième microphone du

2 témoin soit branché car lorsqu'il est tourné vers

3 M. Nice, nous avons du mal à l'entendre.

4 M. NICE : [interprétation] Si vous voulez bien allumer l'autre microphone,

5 s'il vous plaît, Madame l'Huissière.

6 Q. Veuillez regarder ce document, s'il vous plaît, qui vous est en B/C/S.

7 Nous allons mettre la version anglaise sur le rétroprojecteur.

8 Bien. C'est un document qui est daté du 9 mars. Voici ce qu'on y lit.

9 On y lit que : "En commençant à 5 heures 30, le 8 mars, les membres du SUP

10 d'Urosevac et du SUP -- l'Unité spéciale de la Police de Gnjilane,

11 accompagnés de membres de la VJ, ont lancé une opération pour nettoyer les

12 villages de Straza, Ivaja, Gajre et Kotlina. Dans la municipalité de

13 Kacanik, des groupes terroristes qui ont mené des opérations terroristes

14 dans la région en attaquant des membres de la police et cetera."

15 Qu'avez-vous à dire à propos de ce document ? Vous niez qu'il y a eu

16 une quelconque opération conjointe. Donc, qu'avez-vous à dire à propos de

17 ce document-ci ?

18 R. Je dois d'abord lire le document avant de dire quoique ce soit. Mais, à

19 aucun moment, je n'ai nié qu'il y ait eu un combat conjoint contre le

20 terrorisme. Vous avez dit tout à l'heure que l'armée entrait avec la police

21 dans des villages pour chasser la population. Ce n'est pas la même chose.

22 Dans les secteurs qui sont mentionnés ici, on parle de l'emplacement des

23 unités. Si vous vous penchez convenablement sur la carte, vous allez voir

24 le déploiement au combat des unités. J'ai dit au sujet de toutes les unités

25 qu'il y avait des bataillons ou des batteries chargées de la lutte contre

26 le terrorisme, une des unités d'intervention en quelque sorte. Au cas où il

27 y aurait des attaques contre l'armée de Yougoslavie, nous prenions des

28 mesures.

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1 Q. Juste un instant, je vous prie. Laissez-moi vous rappeler la question

2 que j'ai posée il y a quelques instants et la réponse que vous avez fournie

3 il y a quelques instants également.

4 Je vous ai demandé s'il y a eu des opérations conjointes entre vous et le

5 MUP dans les villages de Straza, Ivaja, Gajre, et je vous ai demandé s'il y

6 avait une possibilité quelconque d'une opération conjointe. Vous avez

7 répondu que : "Il n'y avait pas d'opération conjointe, qu'il n'y a eu que

8 des combats contre le terrorisme, là où ils faisaient leur apparition." Par

9 conséquent, Monsieur Jelic, il semblerait que vos réponses maintenant et

10 celles de tout à l'heure ne coïncident pas. Pourquoi avez-vous dit une

11 chose et pourquoi avez-vous changé d'avis ? Pourquoi ? Est-ce que c'est

12 parce que nous vous avons pris au piège en vous montrant ce document ?

13 R. Non, au contraire. Mais vous n'avez pas présenté ce que vous avez ici -

14 - la question que vous avec posée. Ce que vous avez omis délibérément,

15 expulsion et nettoyage du terrain, pour prouver que nous avons fait ce que

16 vous voulez démontrer que nous avons fait. Relisez une fois de plus votre

17 question en entier et vous verrez que le compte rendu d'audience coïncide.

18 Q. Monsieur Jelic, écoutez les questions et répondez ici. Regardez ce

19 paragraphe et vous verrez qu'il est clairement dit que l'armée et le MUP

20 ont réalisé une opération conjointe de nettoyage de villages. Il y a 10 à

21 15 minutes, vous avez dit que vous n'êtes jamais entré dans les villages.

22 Alors qu'en est-il ?

23 R. Jamais l'armée n'est entrée dans les villages. Je le répète une fois de

24 plus : jamais l'armée n'est entrée dans les villages.

25 Q. Dites-nous ce que l'armée avait fait dans cette opération conjointe

26 dont vous ne vous souveniez pas il y a cinq minutes. Quelle était votre

27 mission ?

28 R. Ecoutez, il y a cinq minutes ou il y a cinq jours, et c'est quelques

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1 années en arrière et j'ai bonne souvenance de ce que nous avons fait.

2 L'armée lorsqu'il y avait des groupes terroristes, où des terroristes

3 faisaient leur apparition, l'armée avait pour mission de bloquer, et au cas

4 où ils se trouveraient dans des agglomérations, la chose était laissée et

5 confiée aux instances du MUP. Ailleurs, il s'agissait pour l'armée de se

6 battre jusqu'à extermination.

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il y a une incompréhension des plus ordinaires

10 ici. Monsieur Jelic est un militaire professionnel --

11 M. NICE : [interprétation] Normalement quand l'accusé commence à faire ce

12 genre de chose, il cherche à aider le témoin à répondre, donc je voudrais

13 que l'accusé n'ait pas l'autorisation de le faire.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, si vous voulez

15 faire un commentaire, je ne vais pas vous le permettre. Si vous avez une

16 objection, vous pouvez y aller.

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je veux faire un commentaire. Je dis que M.

18 Jelic est un militaire professionnel.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non, non, vous ne pouvez pas le

20 faire. Vous pouvez soulever la question dans vos questions complémentaires,

21 mais il vous appartient de nous aider à comprendre. Vous pouvez poser des

22 questions lorsque votre tour viendra.

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais j'essaie de vous aider à comprendre de

24 quoi il s'agit.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, mais vous n'êtes pas en train

26 de témoigner. Vous n'êtes pas sur le banc du témoin. Vous ne comprenez pas

27 la façon de procéder.

28 M. NICE : [interprétation] Avec l'autorisation des Juges, je voudrais

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1 continuer.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Nice.

3 M. NICE : [interprétation]

4 Q. Monsieur Jelic, ce que je voulais dire c'est que les rapports de l'OSCE

5 disent que le MUP et l'armée ont attaqué ensemble les villages, est-ce que

6 ce qui est dit ici est exact ?

7 R. Non, l'armée n'a pas attaqué les villages. Là où il y a eu des membres

8 de l'UCK, l'armée s'est chargée de boucler ces secteurs. Vous avez parlé du

9 village d'Ivaja. Vous ne m'avez pas laissé lire jusqu'à la fin. Regardez le

10 paragraphe 3. On dit que : "Les forces de la police spéciale sont entrées,

11 ont brisé le groupe terroriste et sont entrées dans leur QG dans le

12 village." Cela ne fait que confirmé ce que je vous ai dit tout à l'heure en

13 répondant à votre question précédente. C'est en principe ce qui a été fait

14 dans la totalité des villages.

15 Q. Oui. Lisons ce qui se trouve au bas du paragraphe.

16 R. Allons-y.

17 Q. On dit : "Au village d'Ivaja, les forces spéciales de la police ont

18 brisé un grand groupe de terroristes et ont détruit le QG de ce qu'il est

19 convenu d'appeler l'UCK de la 162e Brigade. Dans cette opération, il a été

20 saisi une grande quantité d'explosifs, de mines, d'armes d'infanterie, de

21 lance-roquettes portatifs, et ainsi de suite.

22 "Ensuite, on a saisi une grande quantité de matériel médical et une

23 documentation parlant de l'organisation de groupes terroristes et de leurs

24 opérations. Cette opération visant à nettoyer le territoire de groupes

25 terroristes s'est terminée à 17 heures 30."

26 Bien sûr, je ne peux pas vous affirmer de quelle façon les combats se sont

27 déroulés dans le village, et comment les personnes dans les villages ont

28 été tuées, mais il est clairement dit ici qu'il s'agissait d'une opération

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1 conjointe menée à bon terme. L'armée a participé à cette opération

2 conjointe. L'armée a certainement noté quelque chose au sujet de ce qui

3 s'est passé. Pourquoi, il y a quelques instants, lorsque je vous ai demandé

4 si vous aviez des explications concernant la façon dont ces trois hommes

5 ont été tués à Ivaja, pourquoi ne nous avez pas dit que c'était là la

6 conséquence d'une opération menée conjointement ?

7 R. Vous avez indiqué que trois hommes ont été tués là-bas. Mais moi, je

8 ne sais pas quand et comment ces gens-là ont été tués. Vous pouvez indiquer

9 quelque moment que ce soit sans présenter de documents, moi, je ne peux pas

10 m'en souvenir. Il serait absurde de demander à quelqu'un de demander à se

11 rappeler de la totalité des détails.

12 Q. Justement, justement, sans document, vous ne pouvez pas vous en

13 rappeler. Ne pensez-vous pas qu'il soit offensant pour l'intelligence de

14 quiconque de venir devant ce Tribunal sans faire l'effort de se pencher sur

15 l'un quelconque des documents créés à l'époque ? Ne pensez-vous pas que ce

16 soit offensant pour quelque personne intelligente que ce soit ?

17 R. Je ne vois pas en quoi cela serait offensant. De quels documents

18 parlez-vous ? Si je n'ai pas ces documents, je ne peux pas les commenter et

19 je ne peux pas vous donner une évaluation quelconque.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Jelic, il y a quelques

21 minutes, vous nous avez dit que vous aviez souvenance de toutes ces choses

22 et "que vous vous souveniez de vos réponses d'il y a cinq minutes et de ce

23 qui s'est passé il y a cinq ans." C'est vous qui vous êtes servi de cette

24 expression. On vous a demandé, il y a quelque temps, de nous expliquer ou

25 on vous a demandé de nous dire si vous pouviez expliquer comment il se

26 faisait qu'on ait retrouvé, à Ivaja, trois cadavres. Vous n'avez rien dit.

27 Vous auriez peut-être pu dire que : "C'était une opération de la police

28 dont vous aviez le souvenir pour ce qui est des dates allant du 8 au 10

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1 mars."

2 Pourquoi ne le faites-vous pas ? Pourquoi n'essayez-vous pas d'aider les

3 Juges de la Chambre à déterminer la vérité sur ces questions ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, je ne peux pas répondre et

5 aider cette Chambre pour apporter des réponses forfaitaires. Je me souviens

6 des réponses et je me souviens des questions qui m'ont été posées. Je me

7 souviens également de la teneur globalement parlant des documents.

8 Maintenant, pour ce qui est de savoir où est-ce que quelqu'un a été tué et

9 dans quelles circonstances, il serait absurde de demander à quelqu'un de

10 s'en souvenir sur un territoire très grand, alors qu'il n'a pas de

11 documents à ce sujet.

12 On essaie de faire passer le sujet sur ce terrain concret et avant cela il

13 a été question de nettoyage du terrain autour de Djeneral Jankovic et d'une

14 opération conjointe entre la police et l'armée.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Jelic, Monsieur Jelic la

16 question était celle de nous dire : "Ce que faisait l'armée dans

17 l'opération conjointe ?" dont vous ne vous souveniez pas il y a cinq

18 minutes. Je vous ai demandé quelle a été votre rôle et vous avez dit : "Je

19 me souviens très bien de ce qui se passait, il y a cinq minutes, il y a

20 cinq jours et cinq ans."

21 Est-ce que vous voulez retirer cette réponse ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne retire pas ma réponse. L'armée devait

23 sécuriser ses flancs, ses ailes et elle devait se sécuriser à l'égard des

24 terroristes et combattre ces terroristes. C'était sa mission fondamentale.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

26 M. NICE : [interprétation]

27 Q. Avant que de passer au dernier des sujets. J'aimerais que vous me

28 confirmiez ce qui suit : d'après ce que vous en savez, êtes-vous la seule

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1 personne de votre brigade qui est venue témoignée ici pour la défense de

2 l'accusé ?

3 R. Pour autant que je le sache, oui.

4 Q. Venir ici sans documents de l'époque fournir des réponses de nature

5 générale, si nous n'arrivons pas à nous procurer des documents de l'époque,

6 nous ne serons jamais à même de déterminer ce que vos unités ont fait là-

7 bas aux dates du 9 et 10 mars 1999, n'est-ce pas ?

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je crois que ce témoin-ci ne saurait

9 vous répondre. Allez de l'avant, Monsieur Nice.

10 M. NICE : [interprétation] Comme Monsieur le Juge le voudra. Les Juges de

11 la Chambre vont vouloir savoir que le document que nous avons consulté tout

12 à l'heure était la pièce de la Défense numéro 312, intercalaire 24.

13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le document de Janicevic.

14 M. NICE : [interprétation] Oui, le document de M. Janicevic.

15 Q. Nous allons passer à un troisième domaine, très brièvement. Il s'agit

16 de Stagovo. Voyons ce que dit l'acte d'accusation au sujet de Stagovo, il

17 s'agit du 63(k)(ii) et 66(l)(iii). Passons d'abord au 66(l)(iii).

18 Nous parlons de la date du 21 mai 1999 ou vers cette date : "Le village de

19 Stagovo a été encerclé par les forces de la FRY et de la Serbie. La

20 population a essayé de fuir en direction des montagnes situées à l'est du

21 village. Au cours de cette action, au moins 12 personnes ont été tuées. La

22 plus grande partie du village a été pillée et incendiée."

23 Que savez-vous nous dire à ce sujet ? Je vais vous aider avec les dates, il

24 s'agit de la date du 21 mai 1999.

25 R. J'ai déjà dit que le village de Stagovo était très caractéristique,

26 parce que depuis, non pas du village, mais de ce secteur, il y a eu des

27 attaques constantes contre les détachements blindés, ce sont les petits

28 rectangles qui sont dessinés sur la carte en direction de Kamena Glava.

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1 Les attaques se faisaient généralement la nuit et, à plusieurs reprises,

2 les terroristes sont entrés dans des champs de mines. L'armée n'a fait que

3 riposter puisqu'elle ne pouvait pas quitter ses pièces d'artillerie et

4 aller les poursuivre dans les villages. L'armée n'est pas entrée dans le

5 village de Stagovo, elle n'a fait que combattre au nord du village de

6 Stagovo pour se battre contre les terroristes. Pour ce qui est des

7 opérations conjointes et d'entrer dans le village de Stagovo, je dirais

8 qu'il n'y en a pas eu.

9 Si cette défense est considérée comme étant une opération, moi, je veux

10 bien.

11 Q. Bien, les éléments de preuve présentés devant la Chambre s'agissant de

12 Stagovo englobent ce qui suit : ce jour-là, les soldats de l'armée de

13 Yougoslavie ont été vus dans ce secteur, ils ont été vus par le témoin

14 Dashi. Les gens se sont retirés. On a pu entendre des tirs de mortier et

15 des tirs d'arme d'infanterie, une fois que les forces serbes se sont

16 retirées, on a retrouvé dans le village des cadavres.

17 Pouvez-vous, je vous prie, nous expliquer comment se fait-il que ces gens-

18 là aient été tués dans le village en question ?

19 R. Tout d'abord, je dirais que cette unité n'a pas disposé de mortier et

20 d'artillerie antichar. Comment ces gens-là ont été tués, cela je ne le sais

21 vraiment pas. Je ne puis que supposer qu'ils ont dû s'aventurer à entrer en

22 conflit. L'armée a toujours été, et comme il dit qu'il a vu les soldats,

23 oui, il les a vus, il les a vus entre Stari Kacanik et Stagovo, c'est là

24 que les soldats ont été déployés.

25 Q. Ces gens qui se sont battus ont bien pu perdre leurs vies de la sorte,

26 et vous nous avez dit que lorsqu'il y avait décès, il fallait bien que la

27 chose soit consignée. Donc quelque part dans les documents de l'armée, il

28 doit bien y avoir consignation de la façon dont ces personnes ont perdu la

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1 vie. Il se peut que cela ait été dit en termes généraux ou en termes

2 concrets, mais il doit y avoir des notes à ce sujet ?

3 R. Lors de l'assainissement des champs de bataille, là, où l'on a retrouvé

4 des cadavres de quelque façon que ce soit, il se peut qu'il y ait eu des

5 activités criminelles ou quoi que ce soit d'autre, donc chaque fois qu'on

6 retrouve un cadavre, il faut procéder conformément à la loi et conformément

7 aux ordres donnés par le commandement du Corps d'armée, et en application

8 du droit international. On doit récupérer les corps, les inhumer de façon

9 digne et remettre une documentation aux autorités locales. Dans ce cas

10 concret, il s'agirait des autorités de Kacanik.

11 Q. Nous pouvons être sûrs que la documentation remise aux autorités de

12 Kacanik au sujet des personnes tuées à Stagovo sauraient très probablement

13 nous fournir des informations au sujet du fait que les personnes qui ont

14 été ramassées là-bas étaient armées et ont participé au combat, n'est-ce

15 pas ?

16 R. Je ne peux pas vous dire ce qui est dit dans cette documentation. Cela

17 dépend de l'identité de ceux qu'ils ont retrouvés. Si ce sont des

18 autorités, ce sont le Juge d'instruction et autres instances qui devaient

19 intervenir. Ces endroits devaient être marqués. Ces personnes devaient être

20 inhumées de façon digne de ce nom, et la procédure devait s'accompagner

21 d'une documentation appropriée.

22 M. NICE : [interprétation] Avec l'autorisation des Juges de la Chambre.

23 Q. Nous allons placer ce document-ci sur le rétroprojecteur. Il s'agit

24 d'une partie de la pièce à conviction 163, intercalaire 11. Le document est

25 en langue anglaise, mais je vais vous donner lecture de ce qui importe. Ce

26 document provient d'un rapport médico-légal suisse, ils ont effectué leur

27 enquête le 24 et 25 septembre 1999, date à laquelle ils se sont penchés sur

28 une fosse commune à Stagovo. Vous pouvez voir vous-même que, parmi les

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1 personnes tuées, il y a une femme de 74 ans, un garçon de sept ans, une

2 femme née en 1954, elle devait avoir donc à l'époque 45 ans, puis, une

3 femme née en 1916, ensuite une autre femme née en 1943.

4 Q. Auriez-vous l'amabilité de nous aider. Partant de vos souvenirs,

5 Monsieur Jelic, dites-nous comment, dans une opération avec la

6 participation de l'armée, il y a eu mort de ces personnes-là ? Parce que

7 tous ceux qui sont intéressés par ce qui s'est passé là-bas voudraient le

8 savoir. Dites-le nous.

9 R. Vous dites que l'armée a participé à cette opération. Je répète et j'ai

10 répété à plusieurs reprises que l'armée n'a pas participé à cette

11 opération. L'armée n'est pas entrée dans le village de Stagovo et n'a pas

12 réalisé d'opération.

13 S'agissant du décès de ces personnes-là, je n'ai aucune raison de ne pas

14 croire que ces personnes ont péri effectivement, mais je ne sais pas où et

15 je ne sais pas qui est-ce qui a fourni ces renseignements.

16 Je peux en douter. Je n'ai pas à en douter non plus. Parce que ces

17 renseignements sont, enfin, ce sont peut-être des gens qui sont morts de

18 mort naturelle. Je ne sais pas du tout. N'oubliez pas quand on est né en

19 1976, il se peut très bien que ce soit une personne morte de mort

20 naturelle.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, merci, mon Général. Allons de

22 l'avant.

23 M. NICE : [interprétation] Soit dit en passant il s'agit de mort par balle

24 et mort à l'arme blanche.

25 Q. Autre chose au sujet, de Stagovo d'autres éléments que nous avons

26 présentés aux Juges de la Chambre et parmi ces choses-là, il y a un recueil

27 de pièces à conviction parlant de la même chose.

28 M. NICE : [interprétation] Je voudrais que, sur le rétroprojecteur, on

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1 place la page 221 et, notamment, le coin gauche, en bas, où il est question

2 du 30 avril.

3 Q. On dit : "Que le 30 avril, Stagovo, à l'est de la route numéro 2, en

4 dessous de Stari Kacanik, non loin des chemins de fer, ont été pilonnés, et

5 la police n'est pas entrée dans le village, mais a encerclé le village."

6 On dit qu'il y a eu des combats.

7 Ensuite, on dit : "Qu'au mois de mai, l'UCK avait une espèce de place

8 forte, non loin du village et le 21 mai, Stagovo a été attaqué, une fois de

9 plus. L'armée et la police ont pilonné le village. Les villageois ont

10 commencé à fuir vers les montagnes."

11 Donc, il est explicitement dit qu'il s'agissait de l'armée de Yougoslavie.

12 Avez-vous souvenance de ce que l'armée faisait là-bas, le 21 mai ?

13 R. C'est vous qui confirmez ce que j'ai dit, tout à l'heure, à savoir

14 qu'elle s'est battue contre les terroristes. Les terroristes qui se

15 trouvaient au village de Stagovo. Quand vous dites "ce village," vous dites

16 -- vous pensez au centre du village, mais on ne peut pas cibler l'armée à

17 partir du centre du village. A chaque fois qu'il y avait des terroristes,

18 l'armée s'est battue de façon violente contre ces terroristes. Mais, ici,

19 je ne comprends pas parce que vous me faites une traduction, mais on dirait

20 que le MUP a fouillé le village de Stagovo à la recherche de cette bande de

21 terroristes que vous venez de mentionner.

22 Q. Vous pouvez --

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Nice, ce qui me préoccupe

24 c'est qu'en aussi peu de temps que vous avez, vous êtes en train de contre-

25 interroger sur des documents qui ne font pas partie des pièces à

26 conviction.

27 M. NICE : [interprétation] Oui. C'est le cas.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous avez dit que ce n'était pas versé

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1 au dossier.

2 M. NICE : [interprétation] Je n'ai pas dit que cela ne faisait pas partie

3 de nos éléments de preuve. Etant donné que cela est fait, effectivement --

4 partie de nos éléments de preuve.

5 Q. Mais la raison pour laquelle je mentionne ceci est la suivante. Il est

6 dit ici de façon concrète -- et laissez-moi un instant pour que je retrouve

7 le passage.

8 Alors, ici, on dit que des exécutions ont été l'œuvre de

9 paramilitaires. Il est question d'interviews et on dit que des témoins ont

10 déclaré que des personnes parmi lesquelles des femmes ainsi qu'une grand-

11 mère paralysée ont été exécutées par des paramilitaires et que leurs

12 maisons ont été ensuite incendiées.

13 Alors, avez-vous souvenance de ce que les militaires ont fait avec la

14 participation de la police et est-ce qu'il y a parmi ces souvenirs un

15 souvenir relatif à la participation de paramilitaires également ? Oui ou

16 non ?

17 R. Cela, c'est un mensonge des plus absolus, des plus patents.

18 Q. Je vois. Donc, ceux qui ont décrit la mort de femmes et d'enfants sont

19 -- ou plutôt, dites-moi : y a-t-il possibilité de voir les soldats reconnus

20 à tort et on aurait estimé que c'étaient des paramilitaires ?

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pouvez-vous replacer cette pièce sur

22 le rétroprojecteur, je vous prie, pour mes besoins ?

23 Monsieur Nice, où se trouve ce passage que vous venez de lire, à

24 savoir le passage disant que le village a été pilonné de loin ?

25 M. NICE : [interprétation] "En date du 21 mai, Stagovo a été attaqué une

26 fois de plus. L'armée de Yougoslavie et la police ont pilonné le village de

27 loin. Les villageois ont commencé à fuir vers les montagnes."

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien. Je voudrais justement poser

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1 une question au général à ce sujet. Il nous a constamment dit que l'armée

2 n'est jamais entrée dans les villages.

3 Est-ce que ceci se trouve être cohérent avec ce que vous avez déjà dit, à

4 savoir que les pilonnages se faisaient de loin ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Justement, Monsieur le Président. L'armée n'a

6 jamais attaqué des villages. Nous n'avons pas la compétence. Nous ne sommes

7 pas habilités à attaquer ou à inspecter des villages. S'il y a une

8 fortification de construite dans un village, c'est l'armée, à l'armée que

9 revient la tâche de briser à l'artillerie la fortification en question mais

10 pour ce qui est de combattre les terroristes, procéder à des inspections de

11 villages et à des arrestations, c'est la police qui en est chargée. C'est

12 le MUP. Donc, on dit ici qu'il y avait là un groupe de terroristes. C'est

13 la raison pour laquelle j'ai dit, je me suis servi des termes que j'ai

14 utilisés.

15 Il y avait un groupe de terroristes dans Stagovo et on s'attendait à

16 ce que l'armée fasse son travail. Autrement, elle ne l'aurait pas -- elle

17 n'aurait pas accompli sa mission.

18 La dernière des questions est celle de savoir comment un simple citoyen

19 pourrait parler, savoir parler de paramilitaires dans un village du fin

20 fond de la campagne. Avec tout le respect que je dois à l'éducation de ces

21 gens et à la localité où ils vivaient, quand ils voyaient un homme, ils

22 voyaient soit un policier ou un soldat, mais ils ne savaient pas faire la

23 distinction entre eux et les paramilitaires. On a inventé cela de toute

24 pièce pour jeter une souillure sur ma brigade. J'aimerais qu'on me donne le

25 nom, ne serait-ce que d'un de ces soldats à avoir été un "paramilitaire"

26 dans mes rangs et je veux bien, alors, dans ce cas-là, assurer une pleine

27 et entière responsabilité de tout ce qui s'est passé.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Donc, d'une manière générale, la

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1 stratégie demandait à l'armée d'opérer de loin et le MUP entrait dans les

2 villages pour s'occuper --

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. C'est le principe général.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice.

5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, non.

6 M. NICE : [interprétation]

7 Q. Ma dernière question sur ce --

8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mon Général, est-ce que vous excluez

9 toute possibilité qu'il y ait eue une personne ou des personnes à avoir été

10 armée sans pour autant faire partie des rangs de l'armée ou de la police,

11 que ce soit légal ou illégal ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'exclus pas cette possibilité. Il se peut

13 qu'il y ait eu des bandes d'individus, de criminels, comme cela est le cas

14 en temps de paix, dans des conditions de vie, tout à fait, normales. Il y a

15 toujours des criminels. Il est très probable que les criminels aient

16 pilulés en des temps où il y avait des circonstances de guerre.

17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, les hommes ordinaires auraient pu

18 les qualifier de paramilitaires ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'excuse, mais, dans notre langue, c'est un

20 terme qui n'a été utilisé qu'au fil des quelques dernières années. C'est un

21 terme qui a été importé. On a parlé de hors la loi. On a parlé de policiers

22 ou de militaires mais "paramilitaire," c'est un terme qui nous est venu

23 d'ailleurs, qui nous a été imposé par autrui.

24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je parle des unités organisées.

26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Revenons à Stagovo, est-il exact de dire

27 que l'armée a pilonné le village ?

28 LE TÉMOIN : [interprétation] L'armée n'a pas pilonné le village. Le groupe

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1 terroriste qui se trouvait au nord de Stagovo a été repoussé là-bas par la

2 police parce que ce groupe avait attaqué la police de Kacanik. Ils ont été

3 repoussés là et ils ont essayé de passer par les positions tenues par un

4 Détachement antichar, antiblindé et par Kamena Glava et c'était là

5 qu'étaient déployées nos forces à nous.

6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Etes-vous en train de dire que l'armée

7 n'a jamais pilonné ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Elle n'a pas pilonné le village. Elle n'a

9 jamais pilonné le village car le village avait été pilonné, j'aurais reçu

10 un rapport de quelque nature qu'il soit.

11 Or, ce qui a été écrit - et je l'ai dit à plusieurs reprises - c'est

12 que des combats ont eu lieu au-dessus de Stagovo et que certains hommes ont

13 même sauté sur de mines, probablement en tentant de fuir les forces du MUP

14 ou de se rapprocher de leurs positions.

15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Excusez-moi. Ma question n'était pas

16 bien posée. L'armée a pilonné l'endroit d'où des tirs étaient partis; c'est

17 bien cela, n'est-ce pas ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.

19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

20 M. NICE : [interprétation]

21 Q. Ma dernière question qui d'une certaine façon, fait suite à celle de M.

22 le Juge Kwon est la suivante : Vous m'avez dit qu'il était hors de question

23 que l'on puisse confondre vos soldats avec des hommes que l'on a l'habitude

24 de qualifier de militaire. Il est exact, n'est-ce pas, et même certain que,

25 dans l'ordre du 26 mars, vous donniez des ordres non seulement à l'armée,

26 mais également à des hommes non Siptar armés, c'est-à-dire, à des Serbes

27 qui avaient reçu des armes.

28 Est-ce que ces personnes, à votre avis, auraient pu être prises pour

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1 quelqu'un d'autre et notamment pour ce que l'on a l'habitude d'appeler des

2 "paramilitaires" ?

3 R. Les différentes expressions ou les différents termes qui pouvaient être

4 utilisés par les uns ou par les autres, je n'en sais rien, et il est sans

5 doute impossible à qui que ce soit aujourd'hui de préciser avec une total

6 certitude ce que telle ou telle personne aurait pu utiliser pour terme pour

7 qualifier ce genre de gens à l'époque.

8 Quant à ce que dit le document auquel vous faites référence, en dehors de

9 l'armée de Yougoslavie, il y avait le ministère de la Défense qui avait

10 distribué des armes à des personnes pour leur permettre de défendre des

11 installations d'une importance vitale, comme les bureaux de poste, les

12 banques, les centres téléphoniques, les transformateurs d'électricité, et

13 autres installations tout à fait capitales qui se trouvaient dans la zone

14 de responsabilité.

15 Toutes ces personnes étaient organisées; elles étaient placées sous un

16 commandement qui était soit le ministère, soit l'armée, soit le MUP et

17 elles ne pouvaient pas être qualifiées de paramilitaires car ce qu'elles

18 faisaient n'était pas totalement séparé de l'action de l'armée. Leurs

19 activités entraient dans le cadre des activités menées par les soldats

20 également. Elles avaient un travail particulier à effectuer.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mon Général, vous dites que la

22 stratégie générale de l'armée consistait à opérer de loin, alors que la

23 police entrait dans les villages pour s'occuper des rebelles ou quelque

24 soit le nom qu'on leur donne. Pour quel -- est-ce que -- est-ce que tout

25 cela était dû à des raisons tactiques ou imposé par la constitution et par

26 la législation ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, voyez-vous lorsque des groupes

28 terroristes font leur apparition à un endroit déterminé, les choses sont

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1 tout à fait claires et tout à fait simples. Ces groupes sont encerclés et

2 détruits; cependant, si ces groupes fuient vers des zones habitées, les

3 militaires se voient contraints d'encercler le village, à partir d'un point

4 déterminé et ensuite le MUP pénètre dans le village, fouille les bâtiments

5 et mène des combats dans des secteurs habités. L'armée pour sa part ne

6 pénètre pas dans les villages et elle ne tire pas parce que, si elle le

7 faisait, cela reviendrait à tirer au hasard. Il n'y a pas de front dans une

8 telle situation. Il n'y a pas d'armée en face d'une autre armée. En

9 général, ces groupes comptaient une quinzaine et jusqu'à une cinquantaine

10 d'hommes tout au plus.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Encore une question. De quand date

12 le terme "paramilitaires" dans votre pays ? Vous dites qu'il est d'usage

13 récent.

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Je dois dire que ce terme de "paramilitaires"

15 a commencé à être utilisé disons dans les années 1990. Malheureusement

16 c'est un terme qui a commencé à être utilisé au moment où a commencé la

17 désintégration de la Yougoslavie, au moment où certains partis politiques,

18 non seulement en Serbie, mais dans toute la Yougoslavie ont commencé à se

19 servir de ce terme et tout cela avec des intérêts bien particuliers à

20 défendre.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous avez terminé, Monsieur

22 Nice.

23 M. NICE : [interprétation] J'ai encore trois sujets, Monsieur le

24 Président. J'aurais voulu poser deux autres questions de nature générale au

25 témoin avec l'autorisation de la Chambre.

26 Q. Mon Général, y a-t-il des textes dont vous ayez souvenir qui -- où il

27 soit question à quelque endroit que ce soit de la prise de prisonniers de

28 guerre, de la capture de prisonniers de guerre ?

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1 R. Si cette question s'adresse à moi, je dirais que, s'agissant des

2 prisonniers de guerre --

3 Q. Oui.

4 R. -- les documents à ce sujet, s'ils existent, sont conservés par le MUP

5 et par les organes de sécurité. Quant à moi, je n'avais pas de prisonniers

6 de guerre et nous ne tenions pas de registres. Il y avait des gens que nous

7 ne gardions pas auprès de nous en état de détention pendant un jour ou

8 deux, comme le montre les documents du commandement du corps d'armée, mais

9 nous n'avions pas de prisonniers de guerre.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Votre dernière question, Monsieur

11 Nice.

12 M. NICE : [interprétation]

13 Q. Est-ce qu'il vous est arrivé de vous rendre à la centrale électrique

14 d'Obilic à Prizren ?

15 R. Je n'ai pas compris la question. Une centrale à Prizren.

16 Q. Je parlais d'une centrale électrique.

17 R. Il n'y en a pas à Prizren.

18 Q. Très bien. C'est tout ce que je voulais savoir.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic --

20 M. NICE : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, mais

21 j'aurais encore un point à border à huis clos partiel, si vous m'y

22 autorisez.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Passons à huis clos partiel.

24 [Audience à huis clos partiel]

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11 Pages 47177-47179 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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3 (expurgée)

4 [Audience publique]

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, il n'y a pas de

6 centrale électrique à Pristina, pas plus qu'à Prizren. Il n'y en a pas non

7 plus à Pristina.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Nice, y a-t-il une raison

9 précise pour laquelle la mention de la correction qui vient d'être apportée

10 et qui figure au compte rendu d'audience doit l'être dans le cadre d'un

11 huis clos partiel ?

12 M. NICE : [interprétation] Oui.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.

14 M. KAY : [interprétation] Pourquoi ? Vraiment, l'Accusation va un peu trop

15 loin à mon avis dans le cas présent. A mon avis, absolument rien de ce qu'a

16 dit l'Accusation ne risque en quoi que ce soit de nuire aux intérêts de la

17 justice en l'espèce. Aucun nom propre n'a été prononcé.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Intérêts de la justice et sécurité.

19 M. KAY : [interprétation] Où est-ce que cela peut créer un danger ? Aucune

20 identification n'a été formulée, la réponse a été très courte, un oui, sans

21 aucune explication. Il est fort possible que ce soit une réaction

22 personnelle de M. Nice sur le coup du moment. A notre avis, aucun détail

23 n'a été fourni et l'Accusation devrait démontrer le fait que la question

24 est délicate pour demander un huis clos en tout état de cause --

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Monsieur Nice, veuillez

26 justifier de votre demande. Je pense que Me Kay a raison.

27 M. NICE : [interprétation] Bien, le fait de laisser entendre que je

28 pourrais avoir une réaction subite et personnelle va trop loin à mon avis.

Page 47181

1 Nous pouvons revenir sur le compte rendu d'audience, à mon avis, cela

2 suffira pour démontrer la justesse de ce que j'ai fait. Page 31, lignes 12

3 à 14, première partie --

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Sommes-nous à huis clos partiel ou

5 pas ?

6 M. LE GREFFIER : [interprétation] En audience publique.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous vouliez que nous soyons à huis

8 clos partiel, n'est-ce pas ?

9 M. NICE : [interprétation] Oui.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Passons à huis clos partiel.

11 [Audience à huis clos partiel]

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8 [Audience publique]

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic. Nous n'avons pas

10 besoin d'entendre un commentaire superflu. Le moment est venu pour vous de

11 poser vos questions supplémentaires, et je tiens à vous rappeler quel est

12 l'objet des questions supplémentaires. Il ne faut pas que vous soyez trop

13 long. Concentrez-vous sur les questions les plus importantes, à savoir

14 celles pour lesquelles vous pensez que le témoin a besoin d'être

15 réhabilité. Veuillez commencer.

16 Nouvel interrogatoire par M. Milosevic :

17 Q. [interprétation] Mon Général, est-ce qu'un tank a fonctionné, a opéré à

18 Racak ?

19 R. Pas un seul.

20 Q. Y avait-il qui que ce soit qui possédait un char là-bas en dehors de

21 vous ?

22 R. Personne d'autre que mon unité ne possédait un char.

23 Q. Etes-vous en mesure de dire à une certitude à 100 % qu'aucun char n'a

24 opéré ?

25 R. Je dis avec une certitude de 100 % que pendant la journée du 15 pas un

26 char n'a tiré. Je ne parle pas des journées du 17, du 18 ou du 19, mais le

27 15 aucun char n'a tiré.

28 Q. Très bien. Est-ce qu'un char aurait pu tirer sans que vous le sachiez ?

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1 R. Absolument pas, c'était impossible.

2 Q. Pourquoi impossible ?

3 R. A cause de la hiérarchie, des ordres, du bruit qu'aurait fait un tir de

4 canon d'un char --

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Un instant, un instant. J'entends

6 que les interprètes souffrent et je vous demande de ménager une pause entre

7 les questions et les réponses.

8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'un char n'a pas tiré dans la

9 direction de Belince le 15 ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'a pratiquement jamais été tiré dans la

11 direction de Belince. Ce sont des PAM et des Praga qui tiraient sur

12 Belince. Les tirs visaient un endroit qui était au sud de Belince, c'est

13 dans ces conditions que l'armée a ouvert le feu à certains moments.

14 M. MILOSEVIC : [interprétation]

15 Q. Même lorsqu'il y a eu des tirs, ils ne provenaient pas d'un char.

16 R. Non, il ne provenait pas d'un char.

17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourriez-vous me rappeler ce qu'est un

18 PAM, je vous prie.

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous prie de m'excuser. Il s'agit d'une

20 mitrailleuse antiaérienne. C'est un sigle.

21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

22 L'ACCUSÉ : [interprétation] De calibre 12,7 millimètres.

23 M. MILOSEVIC : [interprétation]

24 Q. Mon Général, vous êtes un soldat de métier. Quel est le sens militaire

25 à donner au mot "opération ?"

26 R. Une opération implique une action qui se mène au plus haut niveau.

27 C'est-à-dire au niveau du Corps d'armée ou au niveau supérieur de la

28 hiérarchie dans les unités.

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1 Q. Très bien. Dans l'endroit dont nous parlons est-ce qu'il serait permis

2 de parler de quelque chose qui serait mené là-bas et qui serait une

3 opération ?

4 R. Aucunement, ni au niveau de l'importance hiérarchique --

5 Q. Très bien. Mais alors pourquoi est-ce que vous utilisez le mot

6 "opération" ?

7 R. Une opération cela implique --

8 Q. Non. Je vous demande pour quelle raison vous utilisez le mot

9 "opération" lorsque vous répondez aux questions de M. Nice ?

10 R. Une opération cela implique une action qui se mène pour régler un

11 problème déterminé et ce au niveau le plus élevé de la hiérarchie.

12 Q. Très bien. Cette action que vous décrivez, disons dans une situation où

13 un groupe terroriste aurait tiré sur votre unité, vous auriez riposté en

14 tirant sur ce groupe ?

15 R. Oui, ce n'est pas une opération. C'est un combat.

16 Q. Très bien. Alors est-ce que vous avez mené des combats conjoints avec

17 le MUP pour combattre certains groupes terroristes sur ce terrain ? Si oui,

18 quand ?

19 R. Dans notre lutte contre les groupes terroristes, nous n'avons jamais

20 appliqué de plan, parce que nous ne savions pas et n'étions pas en mesure

21 de déterminer à quel moment les attaques terroristes auraient lieu.

22 Simplement lorsqu'une attaque terroriste se produisait, l'armée isolait la

23 région et fouillait le secteur.

24 Q. Très bien. Donc la date des attaques était, en fait, imposée par les

25 terroristes qui en décidaient ?

26 R. C'est tout à fait cela. N'oubliez pas M. Milosevic que la carte que

27 nous avons ici et les ordres que nous avons eus sous les yeux règlent tout,

28 régissent tout. Malheureusement, nous n'avons pas examiné totalement la

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1 carte et ces documents. Mais la carte en question et l'ordre dans son

2 intégralité régissent toutes les actions que fait l'armée dans ces

3 conditions.

4 Q. Très bien. Ouvrez donc cet ordre et voyons-en les détails. Parce que

5 mon Général, il est très important que vous expliquiez tout cela en détail,

6 dans la mesure où c'est sans doute le seul cas au monde où lorsqu'un Etat

7 combat des terroristes sur son propre territoire, on appelle cela à

8 l'extérieur un acte criminel.

9 L'INTERPRÈTE : [aucune interprétation]

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, les interprètes

11 demandent une référence précise. Quel est le document que vous demandez au

12 témoin de citer.

13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, je vois, c'est l'intercalaire --

14 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai trouvé c'est l'intercalaire 19.

15 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est un ordre qui a été rédigé par le témoin,

16 c'est-à-dire, le général Jelic.

17 M. MILOSEVIC : [interprétation]

18 Q. Mon Général, nous n'allons nous référer à cet ordre que par rapport aux

19 explications que vous avez déjà fournies pendant le contre-interrogatoire,

20 c'est-à-dire pour les passages qui concernent la lutte contre les

21 terroristes. Qu'avez-vous écrit à ce niveau ?

22 R. Voici, paragraphe 8.3 page 8 : "Pendant les actions de lutte contre le

23 sabotage et le terrorisme, il importe de se concentrer sur la nécessité de

24 détecter, de surveiller, d'écraser et de détruire les groupes de sabotage

25 et les groupes terroristes ainsi que les forces insurgées dans la zone de

26 responsabilité de la brigade." Donc, les combats sont menés contre les

27 forces des terroristes et des éléments responsables du sabotage ainsi que

28 des forces insurgées qui attaquent les installations militaires et les

Page 47186

1 bâtiments de la brigade, autrement dit, des bâtiments militaires. La police

2 militaire doit avant tout se concentrer sur cette mission.

3 Q. Qu'est-il dit quant à l'engagement de la police militaire ?

4 R. Le 2e Peloton de la Police militaire participe à cette action, c'est ce

5 qui est écrit ici.

6 Q. Donc, vous parlez d'un Peloton de la Police militaire ?

7 R. Oui.

8 Q. Il est important de déterminer quelle est l'importance numérique de

9 l'unité qui a participé à tout cela ?

10 R. Oui.

11 Q. Vous engagez, dans cette action, un Peloton de la Police militaire pour

12 réagir à ce qui s'est passé.

13 R. C'est exact. Au vu de l'aspect particulier de l'action concernée, ces

14 hommes ont été choisis parce qu'ils étaient entraînés et équipés à lutter

15 contre de petits groupes terroristes.

16 Q. Combien de soldats composent un peloton ?

17 R. 45 à 50.

18 Q. Très bien. Qu'est-il dit dans le texte ? Le 1er Peloton de la police

19 militaire doit agir à titre de soutien.

20 R. Oui, ceci conformément à l'ordre donné par moi. C'est la détermination,

21 la description exacte des tâches à mener. Chacun sait ce qu'il doit faire

22 dans quel lieu déterminé. Mais ce qui est important c'est le sous

23 paragraphe A auquel j'ai fait référence.

24 Puis, il y a la surveillance de la circulation, et cetera.

25 Q. Pas besoin d'expliquer ces éléments secondaires. Donc, ce qui est

26 dit ici dans l'ordre signé par vous, c'est que votre réaction, votre

27 intention était de la nature qui vient d'être décrite et c'est ce qui a

28 justifié votre comportement ?

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1 R. Oui, absolument. C'est unités étaient entraînées et prêtes à agir à ce

2 moment-là contre les terroristes qui n'avaient pas lancé d'attaque directe,

3 mais qui avaient attaqué par voie de sabotage et qui essayaient de s'enfuir

4 le plus rapidement que possible.

5 Q. Très bien. Il est dit ici que vous n'avez pas su comment répondre à la

6 question de dire ce que faisaient vos unités le 9 et le 10 mars.

7 R. Bien entendu, je sais ce que faisaient mes unités, Monsieur Milosevic.

8 Nous avons combattu dans ce secteur tout le temps. Je vous donnerai un

9 exemple. Le 9 mars, une attaque a eu lieu contre le groupe de combat numéro

10 3, c'est-à-dire, dans le secteur de Globocica. A ce moment-là, deux de nos

11 soldats ont été blessés. Ils ont perdu une jambe. Je sais quelles sont les

12 pertes au sein de mes unités. Ce que je ne sais pas c'est quelles ont été

13 les pertes subies par les terroristes, parce qu'ils en ont certainement eu

14 des blessés et des morts.

15 Q. Nous en avons terminé de cette question. M. Robinson vous a demandé si

16 votre stratégie consistait à combattre de loin et si celle de la police

17 consistait à investir certains secteurs. Quelle était exactement cette

18 stratégie, mon Général, parce que je n'ai pas très bien compris ?

19 R. Stratégie est peut-être un grand mot.

20 Q. Vous ne devez pas nous dévoiler toute votre stratégie, mais dans quel

21 sens est-ce que vous utilisez ce mot ? En tout cas j'aimerais mieux

22 comprendre ce que vous avez expliqué ?

23 R. S'il y a un groupe terroriste dans un secteur et que ce secteur est à

24 découvert par rapport à l'armée, celle-ci réagit immédiatement en engageant

25 des forces qui combattent les terroristes. Au cas où les terroristes

26 s'enfuient dans des zones habitées et même si la zone vers laquelle

27 s'enfuient les terroristes n'est pas habitée, l'armée isole le secteur,

28 c'est-à-dire qu'elle vient du nord, du sud, de l'est et de l'ouest et

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1 qu'elle encercle le secteur et elle rend immédiatement compte aux instances

2 du MUP qui en est donc informé. Le MUP arrive, pratique des fouilles, donc

3 vérifie ce qui se passe dans les maisons, les bâtiments, les installations

4 qui se trouvent dans le secteur, y compris d'ailleurs dans des entreprises

5 d'Etat, mais aussi dans des habitations privées.

6 Q. Ce qui veut dire que de façon réglementaire l'armée n'est pas sensée

7 entrer dans les villages.

8 R. De façon réglementaire et conformément aux ordres donnés par le général

9 en chef de l'armée depuis 1998, il nous était interdit de pénétrer des les

10 villages.

11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Milosevic, pourriez-vous

12 répéter votre question, les interprètes n'ont pas pu suivre car vous parlez

13 trop rapidement. Je vous en prie, ne parlez pas tous les deux ensembles,

14 mais un à la fois.

15 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'y penserais, Monsieur Kwon.

16 M. MILOSEVIC : [interprétation]

17 Q. Donc, dans la stratégie dont il a été question, y a-t-il eu un ordre

18 qui est venu des niveaux hiérarchiques les plus élevés de l'armée, et qui

19 interdisait de pénétrer dans les villages ?

20 R. Il venait du Grand état-major, du chef du Grand état-major, et est

21 descendu tous les niveaux hiérarchiques jusqu'au niveau du bataillon, des

22 commandants de bataillon. Il interdisait à l'armée de pénétrer dans des

23 secteurs habités au cours des combats. Aucun combat ne devait être engagé

24 dans des zones habitées, et les zones habitées ne pouvaient être

25 encerclées, assiégées, que sur ordre particulier, avec interdiction

26 d'utiliser des pièces d'artillerie lourdes, de façon à éviter que des

27 bâtiments et des installations, privées ou publiques, soient détruites, et

28 que des civils puissent être tués ou blessés.

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1 Q. Très bien. Répondant à une question de M. Robinson, vous avez dit que

2 vous avez pilonné de loin. Comment pouvez-vous expliquer cela ? Qu'est-ce

3 que vous pilonniez de loin ? Est-ce que vous pilonniez de loin une plaine

4 ou autre chose ? Je ne vous pose pas de question autre. Je vous demande de

5 répondre à la question qui vous a déjà été posée par M. Robinson. Vous avez

6 dit que vous pilonniez de loin, mais qu'est-ce que vous pilonniez de loin ?

7 R. Stagovo, où un groupe terroriste se trouvait, comme le Procureur l'a

8 dit, un peu au-dessus de Stagovo. Automatiquement, l'armée a réagi en

9 tirant sur ce groupe terroriste. Elle a utilisé des pièces d'artillerie

10 pour tirer sur ce groupe terroriste, ainsi que des mortiers.

11 Q. Un instant, mais qu'est-ce que vous pilonniez à Stagovo de loin ?

12 R. Pas Stagovo, mais un groupe--

13 Q. Attendez un instant, mon Général. Vous vous souvenez bien ce que vous

14 faisiez, et de la façon dont vous avez répondu. Si le Juge Robinson vous a

15 interrogé au sujet d'un pilonnage de Stagovo de loin, cela veut dire que

16 vous pilonniez un village de loin.

17 R. Excusez-moi, je suis désolé.

18 Q. Je vous disais --

19 R. C'était un Groupe de combat.

20 Q. Un instant. Ce qui m'intéresse, ce n'est pas le groupe de combat. Ce

21 qui m'intéresse, c'est si vous tiriez sur un village de loin, ou sur un

22 groupe de combat.

23 R. Pas sur un village, mais sur secteur où se trouvait un groupe de

24 combat. Ce n'était pas un village.

25 Q. Sur quoi exactement tiriez-vous ?

26 R. Sur les terroristes qui avaient été chassés de Kacanik.

27 Q. Sur quoi tiriez-vous ? Ne nous donnez pas les détails de l'histoire,

28 mais sur quoi tiriez-vous ?

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1 R. Sur des terroristes, des objectifs militaires, l'UCK, des gens en

2 armes.

3 Q. Où se trouvaient-ils ?

4 R. Au nord de Stagovo.

5 Q. A quelle distance au nord ?

6 R. A 400, 500 mètres de nos positions de combat.

7 Q. Très bien. Où vous trouviez-vous lorsque vous tiriez ?

8 R. A -- juste en dessous de Kacanik. Je vais vous le montrer sur la carte.

9 Q. Montrez-le sur la carte.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Que le témoin le montre sur la

11 carte.

12 L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'entendent pas l'intervenant.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous ne vous avons pas entendu, mon

14 Général. Veuillez répéter.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Encore une fois, je répète que nous étions

16 ici, que là se trouvaient nos positions, que là se trouve le village de

17 Stagovo, juste ici, et que le groupe de terroristes était ici, un peu plus

18 vers l'est de ce Détachement de blindés.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous dites que cela se trouve à 400

20 mètres au nord de Stagovo ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, à 400 mètres à l'est de nos positions de

22 combat. 400 ou 500 mètres. Si vous voyez ce que je vous montre ici, c'est

23 dans la zone boisée, aux bords de la forêt ici, sur une colline qui fait

24 400 à 500 mètres d'altitude, environ.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, nous allons

26 faire une pause de 20 minutes, et nous reprendrons ensuite.

27 --- L'audience est suspendue à 10 heures 34.

28 --- L'audience est reprise à 10 heures 59.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic.

2 M. MILOSEVIC : [interprétation]

3 Q. Mon Général, on utilise ici, souvent le terme de pilonnage. Je suppose

4 que ceci se rapporte à des tirs avec des pièces d'artillerie, des pièces

5 lourdes. C'est bien ainsi qu'on l'entend ?

6 R. Oui, littéralement traduit, c'est ainsi que cela se présente.

7 Q. Bien. Alors, est-ce que vos unités qui ont disposé de pièces lourdes,

8 n'est-ce pas ?

9 R. Oui.

10 Q. Est-ce qu'elles ont du tout, à quelque moment, que ce soit, pilonné un

11 village ?

12 R. Aucun village n'a été pilonné par quelques unités que ce soit. Elles

13 n'avaient pas le droit de le faire puisque les ordres, on les donnait par

14 le commandement supérieur. Je vous l'ai dit, d'ailleurs, et mes ordres à

15 moi ont été donnés dans ce sens. Ces ordres ont été strictement respectés.

16 Q. Mais, lorsqu'on procède à des tirs à l'artillerie, est-ce que ces

17 pièces d'artillerie doivent avoir des cibles bien définies ou est-ce que

18 c'est une cible de principe ?

19 R. D'abord, la cible doit être visible avec tous les éléments de mesurés,

20 la distance, la grandeur de la cible, la résistance de la cible et c'est

21 ensuite qu'on décide avec quelle arme on va la cibler.

22 Q. Mais qu'est-ce qui pouvait être "cible" dans vos tirs à l'artillerie,

23 dans quelques situations que ce soit ?

24 R. Pour ce qui est des pièces d'artillerie et des chars, les cibles ne

25 peuvent être constituées que par des sites bien déterminés, des

26 constructions dures, des constructions en béton ou, éventuellement,

27 d'autres constructions qui peuvent être -- seraient utilisés à des fins qui

28 ne sont pas les fins d'origine et cela peut dans ce cas-là constituer des

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1 cibles militaires et, éventuellement, même des maisons.

2 Q. Mais quand est-ce que les maisons ou d'autres installations, d'autres

3 constructions peuvent être une cible ?

4 R. D'abord, il s'agit de procéder à des reconnaissances pour savoir ce qui

5 se trouve dans la cible, dans la construction. Est-ce que ce sont des

6 terroristes ? Est-ce qu'ils disposent d'armes ? Est-ce qu'ils ouvrent le

7 feu en direction des membres de l'armée ?

8 Q. Bien. Mais est-ce que cela signifie que les cibles de tir ne peuvent

9 être que des constructions à partir desquelles on vous tire, ou est-ce que

10 cela peut être n'importe quoi ?

11 R. C'est la construction qui sert de point de tir ou des installations, un

12 groupe d'installations. Cela ne peut être considéré qu'en tant que cible

13 unique.

14 Q. Bien. Mais est-ce que vous avez eu des cas où on ouvrirait le feu en

15 direction de cible flou, en direction d'un village entier ?

16 R. Non. On n'a jamais tiré dans le flou. On a toujours tiré à découvert

17 avec des calibres inférieurs, avec des mortiers, dans les forêts, les

18 fossés, les vallons, là où, par exemple, les terroristes ont cherché à fuir

19 ou à se cacher.

20 Q. Bien. Revenons brièvement à Kotlina. M. Nice a pris le livre : "As

21 Seen, As Told," pour parler d'exécution ou de meurtre de personnes dans ce

22 site de Kotlina, comme il l'a dit.

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, j'aimerais que l'on place sur le

24 rétroprojecteur ces photographies-ci. Je précise qu'il s'agit de photos

25 prises à l'occasion du constat, à l'occasion du même jour du 24 mars, comme

26 on le voit dans le rapport qui suive les photos, qui accompagne les photos,

27 en leur qualité de partie textuelle.

28 Q. On voit ici quelques maisons, n'est-ce pas ?

Page 47193

1 R. Oui, je vois.

2 Q. La dernière se trouve tout à fait à droite, à l'angle droit.

3 R. Je vois, j'en vois trois.

4 Q. En bas, on en voit au moins deux.

5 R. Oui, c'est cela.

6 Q. Est-ce que l'une quelconque de ces maisons se trouveraient être

7 détruites ?

8 R. Sur ces maisons, il n'y en n'a pas une seule de détruite, je dirais

9 même qu'elles sont en très bon état. D'après le petit jardin qui se trouve

10 devant, la porte d'entrée on voit la coupole de l'antenne satellite. On ne

11 voit aucune ruine. On ne voit aucun monticule de débris.

12 Q. Allez plus loin, je vous prie.

13 R. Alors, sur la photo du haut on voit que la maison est entière ou plutôt

14 on en voit deux, et la troisième se trouve tout à fait à droite. Elles sont

15 en bon état.

16 Q. Très bien.

17 M. KWON : [interprétation] Quel est le numéro de la pièce que vous êtes en

18 train de montrer ? Ou est-ce que cela fait partie du cas Stevanovic.

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, cela fait partie des pièces à conviction

20 dans le témoignage Stevanovic. Je n'ai pas sous les yeux le numéro de

21 l'intercalaire exact, mais maintenant on va me le fournir. Il s'agit de

22 l'intercalaire numéro 212.

23 M. MILOSEVIC : [interprétation]

24 Q. Alors, Monsieur le Témoin, allons de l'avant. Voyons un peu ces

25 photographies brièvement.

26 R. On voit en bas une troisième maison, l'entrée, et cetera.

27 Q. Bon, bon, point n'est besoin d'expliquer davantage. Je n'ai pas de

28 questions à ce sujet. On dit ici que c'était là le QG de l'UCK. Est-ce que

Page 47194

1 c'est bien ce que dit le texte ?

2 R. Oui. On dit que : "C'était probablement là qu'était installé le QG de

3 ce qu'il est convenu d'appeler l'UCK dans le village de Kotlina."

4 Q. Bien. Passons à autre chose. Que voit-on ici ?

5 R. Ici on voit une pièce, photo numéro 1 et c'est une photo prise à partir

6 de la porte d'entrée.

7 Q. Passez à la photo suivante, je vous prie.

8 R. On voit les équipements. On voit le poêle à chauffer.

9 Q. Passez à la page suivante, je vous prie.

10 R. Ici on voit une partie de l'armement et de l'équipement, du matériel.

11 Q. Bien. Page suivante, je vous prie.

12 R. On voit ici des armes et du matériel.

13 Q. Ensuite, on voit photo du matériel et des armes.

14 R. Matériel et armes.

15 Q. Encore des armes et du matériel retrouvé. Tout cela c'est à Kotlina, et

16 documentation photographique.

17 M. NICE : [interprétation] Je ne sais pas où ceci nous mène et à partir de

18 quoi cela vient d'être montré. Donc, j'ai déjà à plusieurs reprises dit que

19 j'acceptais qu'il y ait eu des activités déployées par l'UCK et c'est bien

20 ce qui ai dit dans le livre : "As Seen, As Told."

21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais ce n'est pas le témoin qui a

22 conduit cette enquête.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Passez à autre chose.

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, je voudrais poser des

25 questions au sujet de ce que M. Nice a constamment appelé ou qualifié de

26 puits ou de trous. Or, ce n'est pas des trous ou des puits, c'est des

27 abris. On lui a demandé ce qu'il savait au sujet de puits, alors il ne peut

28 rien savoir au sujet de puits puisqu'il ne s'agissait pas de puits, il

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1 s'agissait de bunkers.

2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais nous avons déjà cela dans les

3 pièces à conviction.

4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Parfait. Alors, nous n'allons pas aller plus

5 loin.

6 On voit sur les photos les terroristes tués avec des armes à côté de ces

7 abris. Vous avez déjà eu l'occasion de voir ceci.

8 M. MILOSEVIC : [interprétation]

9 Q. Alors, on vous a posé la question, mon Général, à savoir comment se

10 faisait-il que des personnes arrivaient à périr avec l'utilisation de

11 grenades. Alors, est-ce qu'on utilise des armes à feu, des armes

12 d'infanterie, des grenades à main ou pas quand on se bat contre des

13 terroristes ?

14 R. Oui. Des grenades à main, c'est un moyen de combat rapproché et cela

15 est utilisé au combat. Cela peut être une arme offensive ou défensive,

16 mais, en principe, on s'en sert pour se défendre et on peut jeter cela à 30

17 ou 50 mètres de distance.

18 Q. Bien. Nous n'allons pas nous attarder davantage.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Excusez-moi. Est-ce que l'on laisse

20 entendre par là que les trois ou je ne sais combien de victimes auraient

21 été tuées dans des activités de combat rapproché, où il y a eu usage -- où

22 il y a eu utilisation des grenades ? Est-ce que c'est ce que l'on affirme

23 ici ?

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ici on présente une documentation photo de ce

25 qui a été retrouvé, le constat a été fait le jour même de la conduite de

26 cette action antiterroriste. C'est une documentation photographique faite

27 par la police scientifique lors du constat. Je n'ai pas le rapport entier à

28 portée de main, mais il s'agit là d'un groupe de terroristes tués au

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1 village de Kotlina qui ont disposé de ces deux bunkers en guise d'abris et

2 qui ressemblaient à des puits.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais il n'y a aucune finalité à poser

4 ces questions, à moins que le témoin ne puisse nous dire qui est-ce qui a

5 participé à ce combat rapproché. Dites-nous ce que le témoin sait à ce

6 sujet. Dites-nous ce qu'il sait au sujet d'utilisation de grenades à main à

7 l'occasion de combat rapproché dans Kotlina. Savez-vous nous dire quoi que

8 ce soit à ce sujet, Monsieur le Témoin ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Des grenades à main ont probablement été

10 utilisées pour une défense dans l'immédiat, donc de manière rapprochée. On

11 la jette à la main la grenade, mais on ne peut pas la jeter à plus de 30 ou

12 50 mètres.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais qui est-ce qui s'est servi de ces

14 grenades pour se servir ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Pour se défendre, c'était utilisé

16 essentiellement par les terroristes.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] D'après votre théorie, ils se seraient

18 tués, eux-mêmes.

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela c'est à titre défensif. A titre offensif,

20 cela avait utilisé par le MUP et par l'armée. On peut s'en servir pour

21 attaquer, donc, c'est une utilisation offensive et pour se défendre et dans

22 ce cas-là l'utilisation est défensive.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc, l'armée n'était pas là-bas et

24 n'était pas impliquée. Dites-nous alors qui est-ce qui s'est servi des

25 grenades ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans des agglomérations, il ne pouvait y avoir

27 qu'utilisation de la part du MUP et des terroristes.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

Page 47197

1 M. MILOSEVIC : [interprétation]

2 Q. Très bien. Passons au sujet suivant. On a placé devant vous, M. Nice

3 vous a fourni au tout début un télégramme émanant de vous datant de 1994.

4 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai obtenu pour ma part un exemplaire. Je ne

5 sais pas si on peut en donner un exemplaire au témoin le télégramme qui a

6 été montré par M. Nice.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Qu'on le fasse.

8 M. MILOSEVIC : [interprétation]

9 Q. Vous avez cela sous les yeux ?

10 R. Oui.

11 Q. Vous n'allez pas vous pencher sur les deux pages parce que je ne vais

12 pas vous poser des questions de détail. Je voulais juste qu'on nous dise ce

13 dont il s'agit. Veuillez nous donner lecture de la première phrase.

14 R. Certes. Il est question du commandement de Pristina.

15 On dit : "Partant de votre télégramme numéro --"

16 Q. Peut importe le numéro. Dites la date.

17 R. "Du 26 juillet 1994, nous vous communiquerons les renseignements qu'ils

18 demandaient."

19 Q. Vous leur communiquez des renseignements qu'ils vous ont demandés ?

20 R. C'est cela.

21 Q. Il y a un télégramme à eux, auquel vous vous référez, et où il est

22 question de vous demander des renseignements ?

23 R. C'est exact.

24 M. NICE : [interprétation] Cela me semble être une question directrice.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous posez des

26 questions directrices.

27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Comment, directrice ? Je lui ai posé la

28 question. Il vous donne lecture de ce qu'il dit. On dit : "En réponse à

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1 votre télégramme confidentiel numéro un tel, daté du

2 26 juillet 1994, nous vous communiquons les renseignements demandés." Cela

3 sous-entend que le numéro de télégramme un tel, lui a demandé de

4 communiquer des renseignements.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je communique les renseignements

6 demandés.

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'ai pas posé de questions directrices.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est une question directrice. Vous

9 auriez dû lui demander ce que cela sous-entendait. Vous avez le droit de le

10 faire. Vous n'avez pas à lui dire que cela sous-entend telle chose parce

11 que c'est une question directrice dans ce cas-là. Cela fait déjà trois ans

12 que vous défendez -- quatre ans que vous vous défendez vous-même. Vous

13 devez comprendre ce que c'est qu'une question directrice. Vous devez

14 comprendre également qu'elle est -- enfin le sujet dont on parle. Ceci --

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, c'est limite

16 avec outrage au Tribunal.

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je me demande ce que -- pourquoi

18 M. Nice a soulevé la question. Vous auriez dû le lui dire, à lui.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Passez à une autre question.

20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien.

21 M. MILOSEVIC : [interprétation]

22 Q. M. Nice vous a posé des questions au sujet de la carte de déploiement

23 de la 243e Brigade ?

24 R. Oui.

25 Q. Vous avez expliqué qu'il s'agissait là d'une carte qui faisait partie

26 de l'ordre destiné à votre brigade, à savoir que cela émanait en tant

27 qu'élément de l'ordre en provenance du Corps de Pristina ?

28 R. Oui, c'est ce qui est dit en en-tête.

Page 47199

1 Q. Ensuite, il vous a demandé si vous avez apposé l'emplacement de toutes

2 vos unités. Vous avez dit que oui.

3 R. C'est cela.

4 Q. Pourquoi n'a-t-on pas apposé l'emplacement des autres unités ?

5 Expliquez votre réponse, je vous prie. Parce que vous avez dit en réponse,

6 que dans votre extrait à vous, votre déploiement est donné dans le détail,

7 alors que le déploiement des autres unités n'est donné qu'en principe.

8 Qu'est-ce que cela signifie ? La

9 549e Brigade n'est pas fournie dans le détail. Dans quel sens est-elle

10 fournie dans le principe ? Est-ce qu'on donne son numéro, ou est-ce qu'on

11 donne encore autre chose ?

12 R. Je vais vous le dire. Parce que là, c'est une question de terminologie

13 assez spécifique, et peut-être nous ne nous comprenons pas comme il faut.

14 Quand il y a cette carte, il y a un ordre écrit, un document, et c'est

15 transposé sur la carte. La décision est transposée sur la carte, La carte

16 relative au corps d'armée n'est pas communiquée à toutes les unités parce

17 que ce serait une carte énorme. On donne des extraits à l'intention des

18 unités qui sont chargées de différents territoires. On leur dit quelle est

19 leur mission. On délimite les choses, à gauche et à droite. Si, à par

20 exemple, l'unité se trouve en profondeur, on lui dit qui se trouve devant

21 et qui se trouve derrière. On indique qui sont les voisins et quelles sont

22 leurs missions principales. C'est la raison pour laquelle, la 549e qui est

23 indiquée ici, voilà, là, elle n'a été qu'indiquée, et une partie des unités

24 qui en font partie afin qu'on sache quelle est là et qu'on sache quelle est

25 sa mission.

26 Q. C'est votre mission à vous qui est dessinée dans le détail sur la carte,

27 n'est-ce pas ?

28 R. Oui, dans le détail.

Page 47200

1 Q. On vous indique qui sont vos voisins.

2 R. Oui. On dit, à gauche et à droite, il y a la 175e ici et l'autre là-

3 bas.

4 Q. Bien. On vous a également demandé ce que signifiaient certains symboles

5 sur la carte. Sur la carte qu'on a montrée à ce moment-là - je ne l'ai pas

6 ici. M. Nice a sorti une carte et on a montré des bleus - alors, quand vous

7 avez dit les bleus, qu'avez-vous voulu dire au juste ?

8 R. Voyez-vous, sur cette carte-ci, tout ce qui est rouge, se sont nos

9 forces à nous.

10 Q. Bien.

11 R. Donc, ce sont les effectifs de l'armée de Yougoslavie.

12 Q. Bien.

13 R. En bleu, d'après nos Règles de combat, c'est l'ennemi. En plus de ma

14 brigade en rouge, il y a les voisins qui sont indiqués, et on appose

15 l'emplacement des bleus. Donc, on a indiqué quelles sont les unités qui

16 sont groupées aux frontières face à la République fédérale de Yougoslavie.

17 Il y a cinq brigades de forces terroristes Siptar et un groupe tactique qui

18 avait une brigade de blindés, deux brigades mécanisées.

19 Q. De qui ?

20 R. De forces multinationales installées en Macédoine.

21 Q. Vous parlez de l'OTAN ?

22 R. Oui, des brigades de l'OTAN. Il y en avait une qui se trouvait à

23 Tetovo, plus au sud; une brigade qui se trouvait à proximité de Skopje; et

24 une autre à Tito Veles. Une brigade se trouvait à Petrovac, à l'aéroport;

25 une brigade de parachutistes. Une cinquantaine d'hélicoptères étaient déjà

26 à l'aéroport, là-bas. On a montré comment ils ont été acheminés là. Le

27 groupe tactique avait pour intention d'entrer sur le territoire du Kosovo-

28 Metohija. L'axe de déplacement principal est indiqué ici sur la carte.

Page 47201

1 C'est l'axe Debelbel, pour ce qui est du gros des forces, et Kacanik. Donc,

2 sur cet axe Kosovo.

3 Q. Expliquez-nous, Mon Général, en bleu, sur notre territoire, ce n'est

4 pas l'emplacement des forces, mais on a dessiné l'axe de pénétration, l'axe

5 d'avancement.

6 R. Oui. On explique l'objectif de leur intervention.

7 Q. Donc, c'est l'objectif ?

8 R. Oui. Leur objectif est fourni en phase 1 et en phase 2.

9 Q. J'espère qu'on a expliqué à présent la teneur de cette carte.

10 M. Nice vous a présenté ici un document à vous du commandement de la 243e

11 Brigade, dit-on. La date est celle du 8, mais laissez-moi voir de plus

12 près. Il s'agit du 8 août 1998. 8 août 1998, disais-je. Avez-vous ce

13 document ?

14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pièce à conviction 933.

15 M. MILOSEVIC : [interprétation]

16 Q. Je ne vais pas citer ce que M. Nice a cité, mais je me propose de citer

17 la fin du premier paragraphe. Penchez-vous sur ce qui est dit à la fin du

18 premier paragraphe. On parle du "matériel de combat de l'armée de

19 Yougoslavie." Vous venez de nous donner vous-même.

20 R. Juste un moment.

21 Q. Je précise que c'est un rapport à vous, signé par Krsman Jelic. Page 1,

22 avant-dernier paragraphe, juste avant le paragraphe numéro 2.

23 R. Oui. "Matériel de combat de l'armée de Yougoslavie se trouve être

24 déployé conformément aux Règlements --"

25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il s'agit de la page 2 en version

26 anglaise.

27 LE TÉMOIN : [interprétation] -- n'est intervenu que dans les cas

28 indispensables."

Page 47202

1 M. MILOSEVIC : [interprétation]

2 Q. Attendez que l'on retrouve sur le rétroprojecteur la version anglaise.

3 Plus bas. Voilà. Levez la page, je vous prie, Madame l'Huissière. Voilà. On

4 dit que les forces ont été utilisées, une "full accordance," conformément.

5 R. Je redonne lecture. "L'armée de la Yougoslavie et son matériel ont été

6 utilisés en pleine conformité avec les Règlements régissant le combat. On a

7 utilisé la puissance de feu que seulement en cas de nécessité absolue pour

8 ce qui est des abris, des routes, des bunkers et des sites fortifiés où se

9 trouvaient les terroristes Siptar."

10 Q. Uniquement en direction des éléments de fortification mis en place par

11 les forces terroristes Siptar.

12 R. C'est exact.

13 Q. S'agissant de ce type d'activité, mon Général, avait-il été nécessaire

14 de proclamer un état d'urgence ?

15 R. Non. L'état d'urgence n'est proclamé que --

16 Q. Non, je ne vous pose pas cette question. Je ne vous demande pas -- pour

17 ce qui est de cette action.

18 R. Non. C'est une décision qui est prise par l'état-major et le

19 commandement du Corps de Pristina.

20 Q. Très bien.

21 R. Donc, si une unité est attaquée, il n'y a pas à prendre une décision.

22 Nous informons le commandement supérieur de ce que nous allons faire.

23 Q. Que dit le paragraphe 3, le paragraphe suivant à la page d'après.

24 R. Cela commence par : "Les membres de --

25 Q. Oui. "Les membres du MUP --"

26 R. "Les membres du MUP et de l'armée de Yougoslavie se sont comportés de

27 façon appropriée à l'égard de la population civile ainsi qu'à l'égard de

28 leurs biens, sans abus, sans vol et sans criminalité ou quelconque. Dans

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1 certaines situations, les femmes et les enfants ont reçu une aide en vivres

2 et en vêtements."

3 Q. Bien. Vers la fin, on dit qu'un char a été touché le

4 25 juillet, qu'un soldat a été blessé, et que le 26, un autre char a été

5 touché, qu'il a été tué deux soldats et un officier.

6 R. Oui, un commandant.

7 Q. Veuillez nous expliquer que si ce char qui a été touché, où il y a eu

8 blessure d'un soldat, et un autre char le lendemain qui a été touché avec

9 deux morts et un blessé, est-ce que c'est la conséquence d'un comportement

10 de la population civile à votre égard, ou est-ce que c'est la conséquence

11 d'une attaque terroriste ?

12 R. Toutes ces conséquences sont des conséquences qui ont affecté l'armée.

13 Cela s'est fait avec de l'armement lourd. L'organisation terroriste était

14 très bien organisée, très bien équipée et bien armée. Il n'y a qu'une

15 organisation bien équipée qui a pu être à même de détruire un moyen de

16 combat aussi gros qu'un char. Donc, c'est des Armbrust, des lance-roquettes

17 spéciaux. Ils peuvent être habillés de vêtements civils, être dans une

18 tranchée et tirer un missile antichar en direction de nos forces.

19 Q. Penchons-nous brièvement sur cet intercalaire numéro 17.

20 M. Nice a constamment mis l'accent sur le fait que vos rapports portaient

21 l'inscription "strictement confidentiel." Vous m'avez entendu, mon

22 Général ?

23 R. Oui, je vous ai entendu.

24 Q. Dites-nous, est-ce que dans ce classeur, il y a l'un quelconque de vos

25 rapports qui ne porterait pas l'inscription de "strictement confidentiel" ?

26 R. Pour autant que je le sache, dans tout mon classeur, la totalité des

27 documents porte cette annotation "strictement confidentiel." Il n'y en a eu

28 qu'un seul de confidentiel. Les autres sont strictement confidentiels.

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1 Q. Est-ce que c'est le régime habituel de communication de rapports

2 militaires --

3 M. NICE : [interprétation] Je ne pense pas avoir dit quoi que ce soit de

4 particulier au sujet du "strictement confidentiel." Ce qui me préoccupait,

5 c'était de savoir d'où ces documents venaient.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Pour répondre à votre question, je dirais que

7 le "strictement confidentiel" correspond au degré de confidentialité des

8 renseignements fournis dans le document. "Le strictement confidentiel,"

9 sous-entend un degré de confidentialité des plus élevés afin que les

10 renseignements ne se voient communiquer là où il ne faudrait pas.

11 Q. Est-ce que tous les documents militaires sont classifiés de la sorte ?

12 R. Il y a une confidentialité "interne," une confidentialité "stricte," et

13 le plus haut des degrés de confidentialité, c'est l'annotation "secret

14 d'Etat." C'est les degrés de confidentialité qui sont en vigueur pour ce

15 qui est des correspondances de service.

16 Q. Bien. Les rapports qui sont communiqués ici sont classifiés, sont

17 classés dans la catégorie du "strictement confidentiel."

18 R. C'est ainsi qu'ils ont été classés ou catégorisés par le commandement

19 supérieur.

20 Q. M. Nice a dit qu'il n'y avait rien du tout au sujet de Racak. Ici, il

21 est dit qu'à la date du 15, les forces du MUP ont bloqué et ont procédé à

22 des fouilles. Est-ce que c'est tout ce que vous avez sur Racak ?

23 R. C'est tout ce que j'ai eu à communiquer à mon commandement supérieur.

24 Q. Bien.

25 R. J'ai envoyé cela au commandement du corps, et le commandement de corps,

26 lui, a probablement communiqué cela au commandement de l'armée.

27 Q. Est-ce que dans ce rapport il est donné de voir ce que vous avez dit

28 dans votre témoignage en page 2, où il est dit : "A partir du secteur du

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1 village de Belince." Je crois que vous avez expliqué très bien ce que

2 c'était qu'un secteur et ce que c'était qu'un village.

3 R. Oui.

4 Q. Vous précisez dans le secteur de Belince au sud à

5 700 mètres. Est-ce qu'au sud, à 700 mètres, cela signifie à

6 700 mètres du village de Belince ?

7 R. Oui. A 700 mètres de Belince, il a été utilisé des armes d'infanterie,

8 ainsi que des armes antichars et des mortiers en direction des forces de

9 déploiement de notre groupe de commandement. Nous avons riposté à la Praga

10 et au 12-millimètres. Suite à ces échanges de tir au sud du secteur de

11 Belince, dans le secteur de Vis, les tirs ont cessé.

12 Q. Est-ce que c'est ce que vous nous avez dit dans votre témoignage, et ce

13 qui figure dans votre rapport relatif à cette journée-là ?

14 R. C'est justement de cela qu'il s'agit.

15 Q. Bien. M. Nice a dit ici, a montré ici plutôt une information ou plutôt

16 un rapport, un rapport opérationnel journalier tel que la première

17 direction de l'état-major en fournissait au quotidien. J'aimerais que vous

18 nous disiez d'abord si vous voyez combien de pages comporte ledit rapport ?

19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il s'agit de la pièce à conviction 934.

20 M. MILOSEVIC : [interprétation]

21 Q. Est-ce que vous voyez combien de pages il y a dans tout ce rapport pour

22 ce qui est du rapport opérationnel ?

23 R. Oui, il a trois pages.

24 Q. Il y a trois pages.

25 R. En effet.

26 Q. Trois pages pour couvrir la totalité de l'armée de Yougoslavie.

27 R. Oui, cela couvre l'armée totalement, en entier.

28 Q. Est-ce que cela sous-entend également la marine de guerre ?

Page 47206

1 R. Oui.

2 Q. Est-ce qu'on parle de la situation aux frontières ?

3 R. Oui.

4 Q. Est-ce qu'il y a activité et changement survenus dans les armées de

5 terre et autres ?

6 R. Oui. C'est au point 5.

7 Q. Les forces étrangères ?

8 R. Oui.

9 Q. Situation sur le territoire ?

10 R. Oui.

11 Q. Sécurité des arrières ?

12 R. Logistique.

13 Q. Donc, il y a là deux paragraphes seulement pour ce qui est de la 3e

14 Armée ?

15 R. Oui.

16 Q. Au premier paragraphe, il est question de tirs ouverts à Dara Glava. M.

17 Nice, lui, vous a donné citation du paragraphe numéro 2. Veuillez nous

18 donner lecture du paragraphe numéro 2 --

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Paragraphe 2, date du --

20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Page 4, en anglais.

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Le 24 janvier, et cetera. Est-ce que c'est le

22 passage que vous avez en tête ?

23 M. MILOSEVIC : [interprétation]

24 Q. Non, non, non. La 3e Armée mentionnée au deuxième paragraphe. Est-ce

25 que vous voyez le passage où nous lisons la

26 3e Armée. Puis, suit le deuxième paragraphe, au bas de la page 2, sur un

27 total de trois pages, avant l'intitulé situation du point de vue de la

28 logistique.

Page 47207

1 R. Un instant. Excusez-moi.

2 Q. En page 2, au bas de la page, vous voyez le titre situation du point de

3 vue de la logistique, et juste au-dessus, vous avez un passage où il est

4 question de la 3e Armée.

5 R. Je l'ai trouvé.

6 Q. Est-ce que vous pouvez en donner lecture du milieu de ce paragraphe.

7 R. "Pendant les exercices tactiques --"

8 Q. Non, non, non. Je vous ai dit le milieu du paragraphe. Tout le reste ne

9 m'intéresse pas. Cela n'a pas été cité. Le milieu du paragraphe, "Certaines

10 forces…" Est-ce que vous pouvez lire à partir de ce mot ?

11 R. "Certaines forces du BG-243-1 ont été déployées en vue de cerner le

12 village de Racak --"

13 Q. Dans la municipalité de Stimlje ?

14 R. "-- dans la municipalité de Stimlje…"

15 Q. Arrêtons la lecture ici. Est-ce que ce sont les forces au sujet

16 desquelles nous avons apporté des explications détaillées et qui se

17 trouvaient là depuis le mois d'avril de l'année précédente ?

18 R. Il s'agissait des forces qui ont subi la vérification des vérificateurs

19 lorsqu'ils sont venus.

20 Q. Nous avons vu des pièces à conviction qui les concernent. Elles sont

21 arrivées et elles ont procédé à des vérifications. Est-ce que ces forces

22 sont allées où que ce soit dans le but de cerner quelque chose ?

23 R. Non, elles ne sont allées nulle part. Elles ont simplement pris

24 position dans leur secteur.

25 Q. Elles ne sont pas allées encercler quoi que ce soit, mais l'action

26 antiterroriste a eu lieu dans leur voisinage et c'est la raison pour

27 laquelle elles ont coupé une route particulière. Est-ce exact ou pas

28 exact ?

Page 47208

1 R. C'est exact. Du côté nord, pratiquement au voisinage direct de là où

2 elles se trouvaient, il y a eu coupure de la route. Sinon, elles n'avaient

3 pas été déployées là pour couper la route. Le Procureur a posé la même

4 question en s'appuyant sur une carte et il m'a demandé si cela pouvait être

5 considéré comme une opération de bouclage.

6 Q. Très bien. Vous venez de dire que ces éléments existaient depuis avril

7 1998 ?

8 R. C'est exact.

9 Q. Elles ne se sont déplacées nulle part, elles ne sont allées nulle

10 part ?

11 R. Elles ne sont allées nulle part, sauf là où elles ont pris position

12 dans leur secteur, à l'endroit où elles se trouvaient.

13 Q. Très bien. Dites-moi maintenant : qu'est-il écrit plus bas, à la ligne

14 suivante ? Bien entendu, cela concerne Racak et nous lisons -- que lisons-

15 nous ?

16 R. "… des membres du MUP ont mené une action contre les terroristes Siptar

17 qui avaient tué un de leurs hommes."

18 Q. Très bien. Qui a mené cette action à Racak ?

19 R. Il est écrit, ici, que les membres du MUP l'ont menée, cette action.

20 Q. Très bien. Ce sont les membres du MUP qui ont mené cette action. C'est

21 ce qui est écrit dans ce rapport opérationnel également.

22 R. Vous voyez cela figurer dans les documents du corps d'armée également,

23 si vous les avez sous les yeux.

24 Q. C'est indubitable. Mais je souhaitais simplement que nous revenions sur

25 ce passage car il est écrit, ici, en toutes lettres que ce sont les membres

26 du MUP qui ont mené cette action.

27 M. Nice vous a soumis la pièce D395. C'est ce que j'ai écrit dans mes

28 notes. Il s'agit d'un journal manuscrit de votre commandant du groupe de

Page 47209

1 combat Cafa Dulje.

2 R. Oui.

3 Q. Est-ce que vous avez ce texte sous les yeux ?

4 R. Non.

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait soumettre ce texte au

6 témoin, D395 ?

7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] 935.

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai écrit 395, mais c'était sans doute une

9 erreur de l'interprète.

10 M. MILOSEVIC : [interprétation]

11 Q. Est-ce que vous avez cette page sous les yeux, page 2 ? Que lit-on dans

12 cette page ? Nous lisons que Dragan Todorovic -- qui était bien lieutenant-

13 colonel, n'est-ce pas ?

14 R. Oui, c'est un lieutenant-colonel.

15 Q. Est-ce que c'était le commandant d'un groupe de combat dépendant de

16 vous, établi selon l'accord conclu avec l'OSCE, dans ce secteur ?

17 R. C'était peut-être lui ou peut-être le lieutenant-colonel Djordjevic qui

18 était commandant du groupe à l'époque.

19 Q. Très bien. En tout cas, il est écrit et c'est un document de l'époque

20 qui date de cette journée du 15.

21 R. Je pense que c'est l'original, effectivement.

22 Q. M. Nice a reçu ce document, comme vous pouvez le voir.

23 M. Nice vous a dit que Racak n'était mentionné nulle part, dans ce

24 document. Or, que lit-on dans ce document ? Que Cafa Dulje, le

25 15 janvier 1989 et ensuite ?

26 R. La position de combat de l'unité a été modifiée, si je vois bien ce qui

27 est écrit.

28 Q. Ce qui est écrit ici, c'est que la disposition de combat de l'unité est

Page 47210

1 demeurée inchangée. Est-ce que ces unités auraient pu être engagées où que

2 ce soit sans modifier la disposition de combat ?

3 R. Ceci était impossible parce qu'un ordre avait été donné et pour qu'il y

4 ait modification, il aurait fallu un nouvel ordre écrit.

5 Q. C'est pourquoi je dis que c'est écrit ici. Il est dit, dans ce

6 document, que la disposition de combat de l'unité est demeurée la même, ce

7 qui veut dire que l'unité n'est allée nulle part ailleurs que là où elle

8 devait aller pour remplir ses missions régulières ?

9 R. La disposition de combat, c'est quelque chose de très important et elle

10 est demeurée inchangé.

11 Q. Très bien. Pour la journée du 16, même chose. Qu'est-il écrit, à la

12 page suivante, la journée du 16, sous l'intitulé : "Disposition de combat -

13 -"

14 R. Inchangé, paragraphe 2.

15 Q. Mon Général, je vous demande si, au cas où ces hommes auraient

16 participé à quelque chose de particulier, cela aurait été mis noir sur

17 blanc dans ce document ?

18 R. Il aurait fallu que ce soit écrit dans ce document. Je lis la page

19 suivante, sur l'ordre que j'ai émis suite à la réception par moi d'un ordre

20 du commandant du corps d'armée, l'unité a été engagée et un homme a écrit

21 ce qui figure ici. Il aurait fallu que tout soit écrit dans le document,

22 s'il y avait eu le moindre changement dans la disposition de combat.

23 Q. Très bien. Vous avez expliqué ce qu'il en était en vous fondant sur la

24 carte de déploiement et vous avez mentionné le village de Kostanje, et

25 cetera.

26 Que dites-vous au sujet de 130/2 dans ce texte ?

27 R. Un Praga.

28 Q. Très bien, 130/2?

Page 47211

1 R. Oui.

2 Q. Un véhicule.

3 R. Oui.

4 Q. Quand ce point a été attaqué, quand le feu a été ouvert sur ce point,

5 que c'est-il passé ? Est-ce que les positions de combat ont été reprises ou

6 est-ce que ces hommes sont restés sous la tente ?

7 R. Les unités antiaériennes sont les unités qui ont pris position à cet

8 endroit.

9 Q. Très bien. Ce sont des positions de combat qui figurent ici et qui

10 existaient depuis plusieurs mois ?

11 R. Depuis le mois d'avril et qui se situaient au sommet de la colline de

12 Canovica. La forêt de pins, celle qui descend jusqu'à Kostanje et jusqu'à

13 la route que je montre ici.

14 Q. Ce sont les limites des positions de combat de tous ces jours-là ?

15 R. C'est la position de combat qui avait été ordonnée.

16 Q. Est-ce que vous êtes en train de dire qu'il y avait des fortifications,

17 des abris creusés, et cetera ?

18 R. Oui.

19 Q. Combien de temps a-t-il fallu pour préparer le terrain de cette façon ?

20 R. Du mois d'avril, c'est-à-dire, à partir du moment où l'unité tout

21 entière s'est trouvée là et par la suite.

22 Q. A partir d'avril 1998 ?

23 R. Oui, c'est exact.

24 Q. Dans ce document manuscrit, le commandant du groupe de combat dit que

25 les positions sont inchangées à partir de ce moment-là et jusqu'à la

26 journée du 15 ou du 16.

27 R. C'est exact.

28 Q. Les dispositions de combat de l'unité n'ont pas changé. Merci, mon

Page 47212

1 Général.

2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne vois pas très bien à quel moment

3 la position de Kostanje a été attaquée. Est-ce que les hommes qui se

4 trouvaient sur la position de Kostanje ont été attaqués à quelque moment

5 que ce soit ? Si oui, cela s'est passé le

6 15 janvier, d'après vous ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Les positions sur la colline de Kostanje n'ont

8 jamais été attaquées. Les positions ne se trouvaient pas dans un village,

9 mais sur une colline. C'étaient des positions où étaient stationnées des

10 armes antiaériennes. Il convient d'examiner cette position de façon

11 distincte parce que dans le rapport, il est écrit que l'unité a pris

12 position sur la colline de Canovica.

13 Sept cents mètres d'altitude environ, surplombant Stimlje, à un kilomètre,

14 un kilomètre et demi de Stimlje. Puis, il y a une position à Kostanje qui

15 est un autre point non loin de la route.

16 M. MILOSEVIC : [interprétation]

17 Q. Très bien. L'unité a été attaquée à ce moment-là ?

18 R. L'unité a été attaquée et --

19 Q. Elle a pris ses positions de combat ?

20 R. Oui.

21 Q. Les hommes de cette unité ont fait cela parce qu'ils étaient attaqués ?

22 R. Oui, pour défendre les hommes et le matériel.

23 Q. Il y a eu dispersion par rapport aux positions existant précédemment ?

24 R. Oui, par rapport aux positions établies précédemment pour remplir une

25 mission particulière.

26 Q. Très bien.

27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que je pourrais vous demander un

28 éclaircissement linguistique parce que d'autres témoins ainsi que l'accusé

Page 47213

1 ont parlé de "Kostanje," mais, mon Général, vous parlez, vous, de

2 "Kostanjevo"; est-ce que c'est la même chose ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est la même chose, mais c'est une colline.

4 Sur la carte, il est difficile de distinguer les deux parce que l'échelle

5 de la carte est trop grande.

6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Lorsque vous parlez de "Kostanjevo,"

7 vous parlez de "la colline de Kostanje" ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Kostanje est à la cote 691. Je le vois

9 maintenant sur la carte, même si ce n'est pas très lisible, C'est au sud-

10 est de Stimlje, parallèlement à la route qui mène à Urosevac.

11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

12 M. MILOSEVIC : [interprétation]

13 Q. Venons-en maintenant à cette conversation du

14 4 février 1999 dont vous a parlé M. Nice hier. Le général de brigade

15 Maisonneuve et ses collaborateurs vous ont interrogé et je vois que le

16 colonel Kotur, chef de liaison du corps d'armée, était également présent.

17 C'était l'officier de liaison, et cetera, et cetera. J'aimerais vérifier

18 simplement ce que vous avez dit et quelle a été la teneur exacte de cette

19 conversation, de façon à vérifier auprès de vous si cela concorde avec ce

20 que vous avez dit, vous-même.

21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Numéro 78 dans le classeur de Racak.

22 M. NICE : [interprétation] Nous essayons de trouver un exemplaire de ce

23 texte pour le placer sur le rétroprojecteur.

24 L'INTERPRÈTE : Microphone, s'il vous plaît. Microphone pour

25 M. Milosevic, s'il vous plaît.

26 M. MILOSEVIC : [interprétation]

27 Q. Vous n'avez pas besoin de ce texte qui n'existe qu'en anglais. Le seul

28 qu'ils peuvent placer sur le rétroprojecteur, c'est un texte anglais.

Page 47214

1 Mais je vous interroge au sujet de ce texte pour vérifier auprès de vous

2 s'il est conforme à la réalité.

3 En effet, mon Général, un certain nombre de fois et notamment au cours de

4 la déposition du général Maisonneuve, il a été dit que vous aviez refusé de

5 le rencontrer, ensuite, que Kotur vous en avait persuadé, mais nous

6 n'allons pas nous appesantir là-dessus. En page 2 - je rappelle qu'il

7 s'agit des notes prises par lui et pas par vous - je lis ce qui suit,

8 c'est-à-dire, un passage où il cite votre nom, je cite : "S'agissant du

9 retard de la réunion, notre mission quotidienne consistait à entraîner les

10 soldats."

11 R. Je n'entends pas.

12 Q. " Vous êtes plusieurs fois sans vous être annoncé..."

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Un instant, Monsieur Milosevic.

14 Mon Général, est-ce que vous entendez l'interprétation maintenant ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, cela va mieux.

16 M. MILOSEVIC : [interprétation]

17 Q. Je vous en prie, la question que je vous pose, c'est de savoir si c'est

18 bien à peu près ce que vous avez dit à Maisonneuve au sujet du report de la

19 réunion. Il est question de cette réunion entre vous. Vous avez pour

20 mission principale d'entraîner l'armée, et cetera, et cetera. Vous avez dit

21 qu'il était venu à plusieurs reprises sans s'être annoncé; puis, vous dites

22 un peu plus loin : "Pour organiser une rencontre entre nous, il faut que

23 nous passions par l'officier de liaison. On vous pose plusieurs questions.

24 La plupart obtiennent une réponse de la part de K --" Je suppose qu'il

25 s'agit de Kotur, et je cite la suite : "Je ne tiens pas à ajouter quoi que

26 ce soit à ce qu'il a déjà dit dans ses réponses, mais je peux le faire, si

27 on me le demande." Puis, un peu plus loin, je

28 cite : "Je fais ce qui m'est demandé réglementairement dans le cadre de mon

Page 47215

1 service pour sauver la vie des soldats. Je suis désolé, mais c'est ce qui

2 se passe ici. Je regrette que vous ne teniez compte que des résultats et

3 pas des causes. L'Unité de Stimlje subissait un entraînement et a essuyé

4 des tirs. Durant l'été, nous avons perdu trois hommes qui marchaient en

5 rang. Nous avons essuyé des tirs à une distance de 500 à 600 mètres et

6 j'affirme qu'aucun soldat n'a été touché de plus près que d'une distance de

7 500 mètres."

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais quelle est la question,

9 Monsieur Milosevic ?

10 M. MILOSEVIC : [interprétation]

11 Q. La question c'est : est-ce que le témoin a bien dit cela et de quoi

12 était-il question exactement. "Il est incroyable que vous ayez dit de

13 telles choses." Voilà ce qui est écrit dans le document. Un peu plus haut,

14 dans le texte, nous lisons --

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous demandez au témoin de confirmer

16 s'il a effectivement dit ce qui figure dans ce texte ?

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, je lui demande de dire si c'est bien ce

18 qu'il a dit.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelle est votre réponse, mon

20 Général ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela porte sur plusieurs questions. Mais au

22 sujet de la réunion dont il vient d'être question, je dirais qu'elle

23 n'avait pas été annoncée pour le 16 et qu'à mon avis, il était question

24 d'une réunion uniquement avec l'officier de liaison. C'était la voie de

25 communication normale entre nous et l'OSCE; nous passions, en général, par

26 l'officier de liaison.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Contentez-vous de répondre à la

28 question. Est-ce que vous avez effectivement dit ce qui figure dans ce

Page 47216

1 texte ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Plusieurs phrases ont été citées. Il y a un

3 certain nombre d'entre elles que je n'ai pas dites exactement comme cela.

4 Mais il me faudrait un peu plus de temps pour analyser l'ensemble de ces

5 phrases plus en détail.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Parmi les phrases qui viennent

7 d'être citées par M. Milosevic, pouvez-vous nous dire celles qui ne

8 correspondent pas à ce que vous avez dit effectivement à l'époque ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas dit que j'avais refusé de le

10 rencontrer et que c'est le colonel Kotur qui m'en avait persuadé. Au

11 contraire.

12 Une réunion avait été convoquée à l'avance et je l'ai fait reporter parce

13 que j'étais particulièrement occupé sur le terrain et que la situation

14 était particulièrement difficile.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] M. Milosevic vous a demandé de ne pas

16 vous attarder sur ce point. Obtempérez, je vous prie.

17 M. MILOSEVIC : [interprétation]

18 Q. S'il vous plaît, sur quoi porte cette réflexion de votre part quant au

19 fait que vous trouvez ce qu'il dit incroyable ?

20 R. Ce qui est incroyable --

21 Q. A quoi appliquez-vous ce qualificatif d'incroyable ? Est-ce que vous

22 vous rappelez, dans ce qu'il a dit, ce que vous avez considéré comme

23 incroyable ?

24 R. Je ne m'en souviens pas exactement, mais ce qui était incroyable,

25 c'était de dire - c'est ce qu'il a fait - que l'armée était allée là-bas.

26 Q. Je vais vous citer d'autres choses qu'il a affirmées. En page 1, il

27 dit, je cite : "Le 15 janvier, mes forces ont vu des chars de l'armée

28 yougoslave tirer sur des maisons abritant des civils qui n'ont pas

Page 47217

1 riposté."

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous demandez au témoin

3 si c'est l'une des choses qu'il a trouvé incroyable ?

4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. Je le lui demande parce que c'est ce que

5 dit Maisonneuve un peu plus haut, dans le texte. Je voulais demander au

6 témoin, avant tout, ce que Maisonneuve lui a dit que lui-même a considéré

7 comme incroyable. Le général a très bien répondu. Il a dit que ce qu'il

8 avait trouvé incroyable, c'était ce que Maisonneuve avait dit quant au fait

9 que l'armée s'était trouvée à cet endroit.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Passons à autre chose. Nous avons

11 couvert ce sujet déjà.

12 M. MILOSEVIC : [interprétation]

13 Q. Puis, vous dites un peu plus bas, dans le texte, je cite : "L'armée

14 yougoslave n'a pas mené cette opération, mais ce qu'elle a pu faire, c'est

15 se défendre à partir des positions qu'elle tenait."

16 R. C'est cela.

17 Q. Maisonneuve vous dit, à ce moment-là, je cite : "Vous avez encerclé des

18 villages pendant que le MUP opérait à l'intérieur de ces villages." Vous

19 dites, je cite : "Peut-être l'interprétation n'est-elle pas bonne. L'armée

20 a défendu ses propres positions. Si vous étiez allé à Racak, vous auriez vu

21 de vos yeux que le terrain semé d'arbres et où il n'y a pas mal de collines

22 et de montagnes ne se prête pas à l'utilisation de chars."

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelle est votre question, Monsieur

24 Milosevic ?

25 M. MILOSEVIC : [interprétation]

26 Q. Ceci correspond-t-il à la réalité ? Est-ce que c'est bien ce qui a été

27 dit lors de cette rencontre ? Est-ce que vous lui avez dit ce que vous avez

28 rapporté ici, dans votre déposition, ces jours-ci ?

Page 47218

1 R. Oui. D'abord, je n'ai pas compris l'interprétation. Pas votre

2 interprétation, mais l'interprétation qui a été faite au moment de la

3 réunion. Ce qu'il disait me semblait tout à fait incroyable. Il disait que

4 nous nous étions trouvés sur les collines, mais, si vous examinez la

5 topographie des lieux, il est impossible à un véhicule de combat d'arriver

6 jusque-là, c'est impossible durant l'été et encore plus durant l'hiver.

7 Q. Puis, un peu plus loin, vous dites que vous circonscrivez les lieux à

8 la zone située entre Racak et Belinac. Lui vous dit que vous n'avez pas

9 appuyé l'opération du MUP et vous répondez : "Non, en effet."

10 R. C'est exact.

11 Q. Où vous trouviez-vous le 16 janvier, c'est-à-dire le lendemain de

12 l'opération ? Vous dites que vous étiez ici et vous ajoutez, je cite :

13 "Nous avions une réunion au QG de Pristina."

14 R. Oui, c'était une réunion qui avait été prévue à l'avance avec le

15 commandement du Corps d'armée.

16 Q. C'est ce que vous avez dit également dans votre déposition ici ?

17 R. Oui. J'étais absent ce jour-là parce que je participais à une réunion

18 au commandement du Corps de Pristina.

19 Q. Très bien, merci. A l'intercalaire 19, on trouve un ordre émis par vous

20 qui, comme le dit M. Nice a déjà été examiné, donc nous n'allons pas nous

21 attarder, mais je reviens simplement sur un aspect de ce texte pour vous

22 demander quelle est votre interprétation puisque des interprétations

23 diverses ont été présentées. Ma question est la suivante : est-ce que cet

24 ordre concerne le 26 mars ou est-ce que c'est un ordre permanent dont

25 l'exécution est demandée à partir du 26 mars ?

26 R. Le commandant peut émettre un nouvel ordre qui rend nul et non avenu un

27 ordre précédent. L'ordre que nous avons sous les yeux entrait en vigueur le

28 26 mars et devenait un ordre permanent.

Page 47219

1 Q. C'est ce qui m'intéressait. Donc c'était un ordre permanent jusqu'à

2 émission d'un nouvel ordre ?

3 R. Oui, jusqu'à émission d'un nouvel ordre.

4 Q. Très bien. Donc aussi longtemps que cet ordre était valable, votre

5 brigade devait le mettre en œuvre ?

6 R. 90 % de ce que contient cet ordre est resté valable jusqu'à la fin de

7 la guerre. Dans une partie du texte, il est question de certains éléments

8 de l'unité qui ont été utilisés en titre de renfort après la mobilisation.

9 Q. Quelques questions encore. Est-ce que vous avez reçu un ordre de qui

10 que ce soit en dehors de votre commandant supérieur direct, à savoir le

11 commandant du Corps de Pristina ?

12 R. Je pense que cela est établi dans tous les Règlements ?

13 Q. Le Règlement ne m'intéresse pas. Je vous demande si vous avez reçu

14 d'autres ordres que ceux de votre commandement direct, de votre supérieur

15 direct ?

16 R. Non, personne d'autre ne pouvait me donner d'ordres.

17 Q. Très bien. Dites-moi maintenant ce que signifie en termes militaires le

18 terme "destruction des groupes terroristes," et l'expression "nettoyage des

19 terroristes sur le terrain" et d'autres expressions du même genre ?

20 J'aimerais savoir si cela signifie destruction physique, donc, le fait de

21 tuer ces terroristes ou si cela signifie briser leur force militaire et

22 éliminer le danger que ces terroristes constituent sur le plan militaire ?

23 Dans la terminologie militaire, quel est le sens exact que l'on doit donner

24 aux termes "rasbianije" [phon] des groupes terroristes et "ciscenije" du

25 terrain pour en éliminer les groupes terroristes ?

26 R. Dans notre Règlement qui concerne les niveaux inférieurs de

27 commandement, donc les niveaux des commandements, des compagnies,

28 bataillons et unités tels que les bataillons d'artillerie qui combattent

Page 47220

1 les groupes terroristes dans certains secteurs et dans certaines régions,

2 vous avez mentionné le nom "rasbianije" "destruction" et vous avez parlé

3 d'arrestation, d'emprisonnement. Donc le mot "rasbianije" signifie que si

4 l'on ne parvient pas à encercler le groupe en question, on le détruit, on

5 l'élimine. Si les membres de ce groupe se rendent et déposent leurs armes,

6 alors ils sont traduits devant les tribunaux dans le cadre d'un procès en

7 bonne et due forme.

8 Q. Qu'en est-il du nettoyage "ciscenije du terrain, pouvez-vous répondre à

9 cela ?

10 R. Oui, on nettoie le terrain en éliminant les groupes terroristes qui y

11 demeurent. On trouve mention de cela dans les Règlements des bataillons

12 d'artillerie notamment.

13 Q. Très bien. Merci, mon Général.

14 M. MILOSEVIC : [interprétation] J'en ai terminé des questions

15 supplémentaires, Monsieur le Juge Robinson.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le Juge Kwon a une question.

17 Questions de la Cour :

18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous nous avez dit que Pero Petrovic

19 vous avait fourni à un exemplaire du procès-verbal établi par lui suite à

20 la rencontre avec M. Maisoneuve le 16 janvier, et vous avez évoqué la

21 possibilité pour nous de nous procurer ce document. Ceci est-il exact ?

22 Est-ce que vous pensez que nous avons une possibilité de nous procurer ce

23 document ?

24 R. Je regrette beaucoup de ne pas pouvoir être plus complet dans ma

25 réponse, mais à la suite de toute réunion - je crois l'avoir déjà dit si je

26 me souviens bien - un procès-verbal est rédigé ainsi qu'un rapport. Le

27 lieutenant-colonel Petrovic, officier de liaison, m'a soumis ce document,

28 il m'a demandé mon avis, il en a écrit la version définitive et l'a soumise

Page 47221

1 au commandement supérieur. Ce procès-verbal - c'est une obligation - doit

2 être écrit le jour-même de la réunion de façon à pouvoir être transmis au

3 niveau supérieur de la hiérarchie en temps utile.

4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si un tel document existe aujourd'hui,

5 où croyez-vous que nous puissions nous le procurer ?

6 R. Sur ordre, il est stipulé que tous les documents, documents de travail,

7 notes relatives aux opérations, listes diverses et variées, donc tous les

8 documents doivent être transmis au Corps de Pristina à la caserne de

9 Pristina. C'est là que tous les documents en question ont certainement été

10 transmis. Pour le reste, je ne sais pas quel a été leur sort ultérieur. Je

11 ne peux pas vous aider sur ce point.

12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous donne mon point de vue

13 personnel, mais ce qui m'intéresserait beaucoup c'est de voir ce document.

14 J'incite vivement les deux parties, le Procureur et ses collaborateurs de

15 même que l'accusé et ses collaborateurs à découvrir où se trouve ce

16 document. Je vous remercie.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mon Général, ceci met fin à votre

18 déposition, merci d'être venu devant le Tribunal pour témoigner. Vous

19 pouvez maintenant vous retirer.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

21 [Le témoin se retire]

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons faire la pause

23 maintenant pendant 20 minutes. Nous reprendrons après et nous entendrons

24 les arguments sur la question qui a été évoquée plus tôt ce matin. Nous

25 allons commencer par l'accusé.

26 M. NICE : [interprétation] Eu égard à la question posée par

27 M. le Juge Kwon, nous allons nous reposer sur les observations du Juge Kwon

28 et faire cette demande auprès des autorités plutôt que de préparer une

Page 47222

1 ordonnance formelle.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, oui vous pouvez effectivement

3 procéder comme cela, nous allons lever l'audience.

4 --- L'audience est suspendue à 11 heures 59.

5 --- L'audience est reprise à 12 heures 23.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, comme on l'a

7 déjà dit tout à l'heure, nous allons entendre les arguments présentés sur

8 la question relative à la prorogation des délais attribués à vous pour la

9 présentation de vos éléments à décharge.

10 Avez-vous des arguments à présenter et je signale qu'il y a 15 minutes pour

11 chacune des parties ?

12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je suppose que mon micro est branché. Merci,

13 Monsieur Robinson.

14 Je ne vais pas mettre à profit la totalité des 15 minutes que vous

15 avez eu l'amabilité de m'accorder. Je prendrai moins de temps pour dire

16 quelques mots. Je tiens à vous rappeler que l'article 14 du Pacte

17 international sur les droits civiques et les droits politiques au

18 paragraphe parle d'un minimum de droit, et aussi au sous-paragraphe (b) il

19 est dit qu'il s'agit d'avoir un temps adéquat pour des dispositions qui

20 sont susceptibles de faciliter la préparation de la Défense, entre autres.

21 On dit, au point(e) : "Examiner et interroger les témoins et procéder à

22 l'interrogatoire des témoins en son nom dans les mêmes conditions que cela

23 a été fait pour les témoins à charge."

24 La même chose est dite par la Convention européenne relative à la

25 protection des droits de l'homme. Je tiens aussi à vous rappeler le fait

26 que M. Kay vous a présenté, la fois passée, la quantité énorme de documents

27 et il a parlé de quelque 1 million 200 000 pages. Je tiens à vous rappeler

28 que je ne me suis jamais vu attribuer le temps nécessaire pour ne serait-ce

Page 47223

1 que lire cela.

2 Je suis très sérieusement lésé du point de vue de mes droits et si

3 vous-même et M. Kwon - M. Bonomy, je ne le cite pas parce qu'il n'était pas

4 là - mais vous vous souviendrez que M. May, à ma demande en ce sens, avait

5 toujours dit que cela serait étudié et, comme vous le savez, cela n'a

6 jamais été étudié. Entre-temps, vous n'ignorez pas que j'ai réduit ma liste

7 de témoins à un strict minimum, ce qui fait que cette liste se situe à

8 quelque 190 témoins en tout et pour tout. Ce qui est véritablement le

9 minimum de ce qu'il me faut citer à comparaître. J'estime que j'aurais

10 besoin pour cela de quelque 380 heures en comptant en moyenne, deux heures

11 d'interrogatoire principal par témoin, en moyenne. Certains en

12 nécessiteront davantage, certains auraient besoin de moins, mais je dirais

13 là que ce serait là une moyenne.

14 Pour être tout à fait précis dans mes propos, j'ai besoin encore de

15 quelque 380 heures pour l'interrogatoire de mes témoins à moi. Ce serait

16 tout. Je n'ai rien d'autre à ajouter.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, pourquoi dites-

18 vous que votre droit à interroger les témoins sous les mêmes conditions que

19 cela a été fait s'agissant des témoins à charge se trouverait être lésé, si

20 tant est qu'il vous a été donné le même temps pour ce qui est des vraies

21 heures de travail comme cela s'est fait pour l'Accusation.

22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Tout d'abord, Monsieur Robinson, j'ai donné

23 citation des deux paragraphes cités au Pacte international relatif aux

24 droits civils et aux droits politiques. Il est prévu là un temps de

25 préparation qui ne m'a jamais été alloué.

26 Il en va de même pour ce qui est du temps nécessaire pour la

27 préparation des témoins. Je sais très bien que bon nombre de témoins qui

28 sont venus témoigner en faveur de la partie adverse ont passés des semaines

Page 47224

1 et des semaines ici au titre de préparatifs. Mon temps pour les préparatifs

2 est strictement limité et se réduit à une heure et demie par jour dans le

3 courant des journées ouvrables et quelques heures pendant les journées que

4 vous ne considérez comme étant ouvrables, mais elles ne sont pas ouvrables

5 pour vous.

6 Il n'est pas question pour nous ici de parler d'une équité ou d'une

7 égalité en droit. Pour ce qui est du même nombre d'heures, j'estime que

8 cela n'est pas exact non plus, parce que quand j'ai additionné mes heures

9 et les heures de M. Nice, à savoir, toutes les heures, il manque sur les

10 300 journées de la durée de la présentation des affaires à charge quelque

11 70 jours. Cela n'a certainement pas été dépensé par les témoins qui sont

12 entrés dans le prétoire pour prêter serment, et cetera. Si vous vérifiez

13 les heures et si vous divisez le nombre d'heures par jour, vous allez

14 obtenir un peu plus de 200 jours. Je parle moi du droit que j'ai à --

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous affirmez

16 que vous avez obtenu 70 jours de moins. Vous avez déjà avancé cette

17 affirmation. Je vous ai demandé, quant à moi, de mettre cela sur papier.

18 Auriez-vous quoi que ce soit à l'appui de l'affirmation que vous venez de

19 faire ? Parce que ce que vous venez de dire ne coïncide pas avec nos

20 fichiers.

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, vous avez des fichiers pour

22 ce qui est de la première mi-temps, à savoir lors des témoignages à charge,

23 utilisée par M. Nice et utilisée par moi-même. Quand on fait la somme, cela

24 ne fait pas 300 jours, mais cela fait 200 et quelques jours. Par

25 conséquent, c'est un document que vous avez et c'est à la disposition du

26 Greffe. Je n'ai pas besoin de vous le montrer. Vous l'avez déjà. Vous ne

27 pouvez pas dire que vous n'êtes pas au courant.

28 Deuxièmement, le fait que M. Nice ait cité un grand nombre de témoins en

Page 47225

1 application du 92 bis, à ce sujet, je vous prie de ne pas perdre de vue le

2 fait que je n'ai pas pu me servir d'une telle possibilité parce que je n'ai

3 pas eu le temps de me préparer. Cela aurait été impossible.

4 Vous me dites que vous avez à disposition ceci ou cela, mais je n'ai

5 pas le temps de mettre à profit ce qui est à ma disposition, et bien, cela

6 ne sert à rien. Cela constitue une déformation des choses. Il faut que

7 j'aie droit à un temps adéquat. Or, cela est jugé en fonction des besoins

8 adéquats, des besoins qui sont véritablement établis pour ce qui est de la

9 présentation de ma défense.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, ce n'est pas une

11 chose vraie. Vous avez obtenu --

12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne comprends pas.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] -- des ressources considérables qui

14 vous ont été mises à disposition. Vous bénéficiez d'une aide qui vous est

15 mise à disposition. Vous auriez pu vous appuyer sur cette assistance pour

16 vous préparer en application de l'article 92 bis.

17 Mais cela a été l'argumentation que vous avez présentée ?

18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, comme vous avez, à plusieurs

19 reprises, dit que j'étais privilégié parce que j'avais une chambre, un

20 téléphone et ainsi de suite, je tiens à dire que je n'ai rien reçu de tout

21 cela jusqu'à il y a un an à peine, lorsque je devais commencer la

22 présentation de mes éléments de preuve. Pendant toute la période

23 précédente, je n'ai rien eu. Je n'ai même pas pu rencontrer mes

24 collaborateurs plus d'une ou deux fois dans la semaine parce que les temps

25 de visite étaient limités; or, c'est le temps qui a duré.

26 Si vous parlez de privilège, je tiens à dire que je suis le seul pour

27 qui le temps court, alors qu'il n'a pas de conseil de la Défense. J'estime

28 que chaque personne qui se défend elle-même -- j'ai appris que M. Seselj a

Page 47226

1 l'intention de se défendre lui-même, j'estime qu'il aura, lui aussi, la

2 même possibilité de faire comme moi.

3 Il ne s'agit pas d'un privilège. Au contraire. C'est une privation de

4 possibilité à l'égard d'une personne qui veut préparer sa défense dans des

5 circonstances normales. Tout ceci se trouve être tronqué par le fait de

6 m'avoir attribué une pièce et un téléphone. Mais il ne peut pas être

7 question de privilège.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Votre position est celle de refuser,

9 de façon têtue, de modifier votre façon de présenter les éléments à

10 décharge. Vous allez continuer à rejeter l'utilisation des possibilités qui

11 vous ont été mises à disposition et qui vous permettraient de présenter

12 plus rapidement les éléments de preuve en faisant en sorte que vos associés

13 et le conseil commis d'office soient utilisés de façon plus productive,

14 afin qu'ils recueillent les déclarations que vous allez présenter. Devons-

15 nous comprendre que vous allez continuer et que vous persisterez à garder

16 cette attitude non réaliste. Je pense que le fait de vous défendre vous-

17 même est, selon vous, une façon de faire qui vous permettra de faire tout,

18 tout seul.

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'ai pas dit que je faisais tout, tout seul.

20 Ce sont mes collaborateurs qui se procurent les documents. Vous n'ignorez

21 pas le fait que je ne puis pas me procurer, moi-même, les documents. Ils

22 examinent ces documents. Ils ont des problèmes énormes à se procurer ces

23 documents. Il y a une tâche formidable à réaliser, à effectuer.

24 Je ne pense pas que quiconque pourrait interroger ici les gens plus

25 vite que moi. Je mets à profit le temps qui m'est imparti de façon très

26 productive. Je procède à des interrogatoires de témoins. Chacun doit

27 pouvoir interroger le témoin. Les collaborateurs ne peuvent pas le faire en

28 parallèle parce que les témoins sont appelés à témoigner ici.

Page 47227

1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous avons déjà eu bon nombre

2 d'exemples où les témoignages auraient pu être présentés de façon plus

3 efficace par écrit et non pas sous forme d'interrogation orale. Les

4 modalités de présentation de vos éléments à décharge portent atteinte à

5 votre défense parce que vous n'avez pas la possibilité de vous concentrer

6 sur les questions importantes. J'estime que vous devriez être conscient de

7 ce fait. Vous savez certainement que vous avez, à votre disposition, des

8 conseils de la Défense expérimentés qui peuvent préparer le matériel qu'il

9 faut pour vous. Partant de votre réponse, j'estime que vous continuerez à

10 rejeter leur aide pour faire vous-même tout le travail.

11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Bonomy, j'espère que vous, tout comme

12 moi, comprenez parfaitement bien ce que sous-entend le droit à se défendre

13 soi-même. C'est un droit effectif, ce n'est pas un droit déclaratif. Si je

14 me défends moi-même, je dois effectivement avoir la possibilité à profit ce

15 droit. Or vous, vous êtes en train de proposer, de recommander ma défense

16 par autrui pour gagner du temps.

17 [La Chambre de première instance se concerte]

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Kay, voulez-vous dire quelque

19 chose vous-même ?

20 M. KAY : [interprétation] Je ne vais pas répéter ces arguments. Je veux

21 simplement ajouter quelques autres points qui me sont venus à l'esprit. Il

22 aurait pu le dire en son propre nom.

23 Toutes les équipes de la Défense estiment que cela est très

24 difficile, compte tenu des ressources qui sont mises à leur disposition de

25 faire appliquer le 89(F) et l'article 92 bis, autrement dit, une procédure

26 qui permet de présenter les moyens de preuve. Les équipes de la Défense ne

27 disposent pas d'un grand nombre d'enquêteurs professionnels, de gens qui

28 sont capables de recueillir des déclarations de façon professionnelle.

Page 47228

1 Certaines déclarations qui représentent une trentaine ou une quarantaine de

2 pages pourraient signifier que cela représente trois ou quatre jours pour

3 un avocat et toutes les équipes de la Défense ont estimé que cela était

4 très difficile d'utiliser le temps des conseils de la Défense de cette

5 manière. Le personnel qui est là pour venir en aide à ces équipes, ces

6 personnes ne sont pas en mesure de préparer de tels documents pour le

7 procès.

8 L'Accusation dispose de ressources différentes et sont davantage en

9 mesure de faire appel à des membres du personnel qui peuvent les aider et

10 ils peuvent utiliser les ressources qui sont mises à leur disposition pour

11 préparer de telles déclarations.

12 Cela étant dit, le Règlement de procédure du Tribunal tient compte du

13 cadre fixé par ce Tribunal. Il faut en tenir compte. Il faut savoir que

14 cela existe. Le point que je souhaite faire valoir est celui-ci : cela est

15 plus difficile pour la Défense de dire qu'on peut utiliser les mêmes

16 Règles, alors qu'en réalité, c'est une procédure qui est plus adaptée aux

17 besoins de l'Accusation qu'aux besoins de n'importe quelle équipe de la

18 Défense. Bien que cela existe, néanmoins, cela est plus adapté à

19 l'Accusation. Nous avons demandé une modification du Règlement et cette

20 demande est venue de l'Accusation. La Défense n'a jamais soutenu ce type

21 d'approche par rapport à nos Règles et la jurisprudence de ce Tribunal car

22 ils étaient tout à fait conscients de leurs propres limites.

23 Je pense qu'à ce stade de la procédure, nous parlons non pas de

24 prorogation des délais pour la présentation des moyens à décharge pour un

25 acte d'accusation qui aurait été disjoint, mais simplement du Kosovo. On

26 parle, ici, des trois actes d'accusation et on parle de la situation dans

27 laquelle se trouve l'accusé par rapport à ces trois actes d'accusations.

28 Notre inquiétude à propos de ces trois actes d'accusation, comme je l'ai

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1 déjà dit, lorsque nous avons parlé de la disjonction ou de la séparation

2 des actes d'accusation, il est important que l'accusé ait suffisamment de

3 temps pour préparer sa défense, puisqu'il a assuré qu'il a une défense à

4 préparer par rapport aux actes d'accusation portant sur la Croatie et la

5 Bosnie.

6 Il souhaite avoir suffisamment de temps pour cela. Dans la présentation des

7 moyens à décharge jusqu'à ce jour - dans 85 % des cas - nous nous sommes

8 concentrés sur l'acte d'accusation portant sur le Kosovo. Ce qui

9 m'inquiète, je souhaite qu'il ait suffisamment de temps pour se préparer

10 non seulement pour le Kosovo, mais également pour la Croatie et la Bosnie.

11 Pour ce qui est du temps dont l'accusé a besoin, je n'ai pas eu le

12 temps de traduire ceci dans des chiffres ou un cadre temporel --

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je crois que c'est assez facile car

14 cela n'est pas très très loin du temps qui lui a été imparti à l'origine

15 qui représente quelque 18 mois pour les

16 360 heures qui avaient été données. Si on ajoute à 368 heures [comme

17 interprété] supplémentaires, cela représente un an et demi et un peu plus.

18 Mais nous savons déjà que ces estimations pour ces interrogatoires

19 principaux dépassent de loin le temps imparti et dépassent de loin les

20 estimations qu'il nous a fournies. D'après ce qu'il dit, je crois que les

21 éléments de présentation à décharge de la part de l'accusé prendraient

22 encore trois heures.

23 M. KAY : [interprétation] Je n'ai pas tenu compte des contre-

24 interrogatoires de l'Accusation.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ecoutez, c'est important d'en tenir

26 compte parce que le contre-interrogatoire, effectivement, est quelque chose

27 qui en fait partie.

28 M. KAY : [interprétation] Je crois que l'histoire comprendra que

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1 l'Accusation contestera chaque élément présenté par la Défense. On ne peut

2 pas, ici, réduire les questions car sur aucun point, on ne peut trouver un

3 point d'accord.

4 Pour ce qui est de l'équité du temps qui a été donné à l'accusé,

5 d'après nous, nous pensons qu'il devrait pouvoir présenter sa thèse de

6 façon efficiente. Nous estimons qu'il n'y a pas égalité d'arme entre les

7 parties car j'estime qu'il s'agit d'un argument qui serait inconvenant car

8 nous parlons, ici, d'affectation des ressources. Quels que soient les

9 propos avancés par l'Accusation, il est clair que l'Accusation dispose d'un

10 bon nombre d'experts au plan technique et l'Accusation est en mesure de

11 produire un nombre très important de documents et de déposer des écritures

12 qui vont bien au-delà de ce que peut faire la Défense.

13 Il y a ici une inégalité et c'est la raison pour laquelle il faut

14 peut-être accorder le temps nécessaire à l'accusé pour préparer sa défense,

15 eu égard à ces actes d'accusation, quelque chose dont il faut tenir compte

16 lorsqu'on se défend contre l'affaire qui a été montée contre lui. Je parle

17 de façon générale.

18 Je ne sais pas si je peux vous aider davantage.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice

20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, est-ce que je peux ajouter

21 encore une phrase ?

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Concernant les lenteurs, écoutez, je vous en

24 prie, je tiens à vous rappeler que l'article 14 du pacte international,

25 précisément paragraphe numéro 1 que je n'ai pas cité prévoie la publicité.

26 "Chacun devrait avoir le droit à des audiences publiques et équitables." La

27 publicité des travaux, je la réalise en interrogeant en public les témoins

28 ici et cela se trouve être tout à fait conforme aux Règles ici énoncées.

Page 47231

1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non, ce n'est pas le cas, Monsieur

2 Milosevic. Cela dépend de la manière dont vous interprétez cela. Vous savez

3 fort bien que le droit à un débat public n'est pas un droit absolu et qu'on

4 peut y déroger afin de protéger les intérêts de certaines victimes et des

5 témoins et il s'agit effectivement de faire appliquer ici le Statut du

6 Tribunal.

7 Monsieur Nice.

8 M. NICE : [interprétation] Pour ce qui est des calculs, je crois que je

9 suis assez d'accord dans les grandes lignes avec les chiffres avancés par

10 M. le Juge Bonomy. Le calcul de l'accusé qui estime que deux heures par

11 témoin correspond à peu près à la réalité. Je crois qu'en réalité, il

12 s'agit d'un tiers. Si on parle de six heures par témoin, deux heures par

13 témoin, je crois que cela représentait 30 semaines. Mais si on multiplie ce

14 chiffre pour l'interrogatoire principal, d'après la réalité, nous arrivons

15 à

16 90 semaines pour l'interrogatoire principal, 60 % du contre-interrogatoire

17 pendant trois ans.

18 La position de l'Accusation est celle-ci : il ne devrait pas y avoir

19 de prorogation car l'accusé n'a présenté aucun argument à cet effet. La

20 Chambre de première instance a calculé très soigneusement le temps utilisé

21 et a alloué le même temps à l'accusé qu'à l'Accusation et du début à la

22 fin, la Chambre a été extrêmement courtoise dans son attitude vis-à-vis de

23 l'accusé, courtoise dans le sens où la Chambre a respecté l'accusé comme

24 étant un homme intelligent. Je crois qu'il s'agit, effectivement, de

25 quelque chose de tout à fait convenable : voici ce que vous allez faire et

26 voici les conséquences que vous aurez à subir si vous continuez ainsi.

27 Il n'y a aucune raison de s'écarter de cette position-là, à moins que

28 la Chambre de première instance estime que l'accusé a été, au plan

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1 intellectuel, incapable de recueillir les avis et les conseils qui lui ont

2 été donnés et les conseils que vous lui avez prodigués sur la conduite à

3 suivre ici et comment il doit se défendre lui-même. Il s'est entêté, il a

4 refusé d'écouter ses conseils assez souvent et en réalité, il tourne la

5 tête, lorsque des questions de procédure sont soulevées, comme si cela ne

6 l'intéressait pas. Mais, en l'état, la Chambre lui a toujours prodigué les

7 meilleurs conseils qui soient et lui a toujours indiqué ce qu'il lui serait

8 bon de faire.

9 S'il n'avait pas agi ainsi et s'il n'avait pas simplement gaspillé

10 son temps, au lieu de recueillir l'avis d'avocats professionnels, il n'est

11 absolument pas en mesure de dire de quel temps nécessaire il aurait encore

12 besoin. S'il avait agi de façon raisonnable et s'il avait tenu compte de

13 cette question d'économie de temps, s'il avait tenté de réaliser le plus

14 possible dans le temps qui lui était imparti, il aurait pu dire : "J'ai

15 fait de mon mieux. J'ai besoin d'un temps supplémentaire." A ce moment-là,

16 peut-être, que la Chambre de première instance pourrait prendre ceci en

17 compte. Nous ne savons absolument pas où nous en serions s'il s'était

18 comporté de cette façon-là, de cette façon raisonnable et logique.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est le problème que j'ai

20 effectivement, Monsieur Nice. Pourriez-vous me redonner vos chiffres ? Vous

21 parlez sur la base de 190 témoins ?

22 M. NICE : [interprétation] Je crois qu'il a dit deux heures pour chaque

23 témoin, pour l'interrogatoire principal.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce qu'il s'agit de

25 190 témoins ?

26 M. NICE : [interprétation] Oui, c'est exact.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Six heures, si ce sont vos

28 estimations, pour 190 témoins, cela correspond grosso modo à --

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1 M. NICE : [interprétation] Mille heures environ.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui.

3 M. NICE : [interprétation] Mille heures divisées par quatre, cela fait 250

4 jours.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je crois que c'est plutôt 300 jours.

6 M. NICE : [interprétation] C'est un temps considérable.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Trois jours par semaine, sur une

8 période de 40 semaines, si cela est réalisable, cela représente un temps

9 beaucoup plus long. Je n'avais pas fait ce calcul-là. Ceci, en réalité,

10 représente un temps beaucoup plus long, beaucoup plus que trois ans.

11 M. NICE : [interprétation] Ceci est un calcul arithmétique que je fais

12 assez rapidement.

13 Messieurs les Juges, vous n'avez pas omis de remarquer que comme vous

14 l'avez entendu, il n'y a absolument aucune réduction du temps où --

15 l'accusé n'a absolument diminué en rien le temps de son interrogatoire

16 principal, ni le temps qu'il a pris pour poser des questions

17 supplémentaires, par exemple. Je crois que c'est important, ici, si on

18 parle de prorogation des délais.

19 La Chambre se souviendra certainement, pour quelle que soit la

20 raison, une décision avait été prise avec le Témoin Farkas. Je me souviens

21 que les questions supplémentaires avaient été bien menées rondement. Je

22 crois que cela avait duré 20 minutes et l'accusé sait très bien quelles

23 sont les questions sur lesquelles il souhaite poser des questions.

24 Nous sommes tout à fait convaincus que la Chambre doit avoir le

25 courage de s'en tenir à la décision qu'elle a prise, qui était dans

26 l'intérêt de l'accusé, quelque chose qui a toujours été appliqué et qui

27 tient compte de ses capacités et de son intelligence et qui indique

28 clairement que c'est l'accusé qui a décidé de se mettre dans cette

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1 situation-là ou en tout cas, il a voulu peut-être coincer la Chambre, ce

2 qui n'est pas approprié.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, nous avons donné à

4 l'accusé le même nombre d'heures de travail que l'Accusation pour la

5 présentation de ses moyens. Que diriez --

6 que répondriez-vous à l'argument suivant l'égalité des armes dans la

7 circonstance n'équivaut pas à parler d'équité ?

8 L'INTERPRÈTE : L'interprète demande que M. Nice se tourne vers l'autre

9 microphone pour qu'on puisse l'entendre, s'il vous plaît.

10 M. NICE : [interprétation] C'est l'argument que j'ai avancé un plus tôt :

11 nous ne le saurons jamais. Il se peut que l'accusé fait de son mieux pour

12 utiliser au mieux les procédures qui sont mises à sa disposition pour

13 présenter ses moyens de la meilleure façon possible, à ce moment-là, nous

14 allons terminer plus tôt et cela prendra moins de temps que l'Accusation et

15 peut-être qu'on constatera à ce moment-là que trop de temps aura été

16 consacré à certains témoins, ou alors il essaie d'épuiser son temps et de

17 dire : "Est-ce que je peux avoir davantage de temps." A ce moment-là, on

18 peut le lui accorder. Dans les services ou ressources qui sont prodigués à

19 l'un ou à l'autre, il n'y a pas de différence pour dire qu'il y a tout

20 simplement une question d'inégalité.

21 Les arguments de Me Kay, je vais en aborder un ou deux. Les argument en

22 vertu de quoi la Défense estime que c'est difficile de faire appliquer le

23 89(F) ou le 92 bis, car le conseil ne peut pas préparer suffisamment les

24 déclarations de témoins, c'est quelque chose, à mon sens, qui ne peut avoir

25 aucune incidence sur ce procès. La pratique qui consiste à utiliser des

26 déclarations écrites pour les interrogatoires principaux est une méthode

27 communément appliquée par bon nombre de tribunaux et de parlements. C'est

28 quelque chose en tout cas qui est très souvent utilisé par les tribunaux

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1 civils en Grande- Bretagne. L'expérience est à cet égard est quelque chose

2 dont chacun peut profiter.

3 Si l'accusé avait décidé de suivre les conseils prodigués par la Chambre et

4 peut-être utiliser cette pratique adoptée par l'Accusation, et utiliser le

5 89(F) et s'il estimait que cela était difficile car il n'avait pas

6 suffisamment de ressources, à ce moment-là, il aurait pu attirer

7 l'attention de la Chambre sur ce point et, à ce moment-là, on aurait pu

8 faire quelque chose, car cette Chambre a toujours répondu favorablement aux

9 demandes de l'accusé. Il est important de garder à l'esprit cette question-

10 là. Ce nouvel argument présenté sur le manque de ressources constitue

11 simplement un nouvel argument proposé par l'accusé, c'est une nouvelle arme

12 qu'il utilise.

13 J'ai attiré votre attention là-dessus il y a quelques semaines. J'ai

14 indiqué qu'il s'agissait d'un nouvel argument, mais jusqu'à ce moment-là,

15 ce n'était pas une question de pratique. L'accusé a simplement indiqué

16 qu'il était décidé à ne pas tenir compte des conseils qu'on lui prodiguait

17 car il voulait contourner la Chambre. Il a dit qu'il mettrait tout par

18 écrit et brusquement, je crois que c'était il y a un mois ou cinq semaines,

19 c'est la première fois que nous avons entendu parler de ces difficultés.

20 Il n'y a pas de difficultés. Nous l'avons vu en présence des témoins qu'il

21 a cités avec différentes feuilles de papier et lorsqu'ils ont regardé des

22 notes, ils savaient exactement quelle question allait être posée, il savait

23 exactement quel document allait être présenté. Bien sûr qu'il en est tout à

24 fait capable, étant donné qu'il doit faire appel à ses collaborateurs et

25 lorsqu'il dit qu'il fait tout ceci tout seul, c'est quelque chose qui est

26 un peu fantaisiste. Bien sûr qu'il en est tout à fait capable. Ni Mme Del

27 Ponte, ni moi-même, ne voyons chaque témoin nous-même. Elle n'en voit pas.

28 J'en vois quelques-uns, mais je ne vois pas tous les témoins avant qu'ils

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1 ne soient cités à la barre. Je surveille la préparation des témoins, mais

2 je ne fais pas tout moi-même. Ce serait impossible.

3 La proposition que vient d'avancer l'accusé quand bien même elle

4 serait prise au sérieux par un Tribunal comme celui-ci, bien sûr cela

5 rendrait son travail complètement infaisable. S'il l'avait souhaité et

6 contrairement à son désir de citer tous les témoins oralement, il aurait pu

7 mettre en place un système qui lui aurait permis de citer les déclarations

8 de témoins en vertu du 89(F) et du 92 bis, il y a plus d'un an déjà, et il

9 aurait dû procéder ainsi.

10 Je ne sais pas si je réponds suffisamment à la question que vous avez

11 posée, Messieurs les Juges, à propos de l'inégalité. Pour ce qui est de

12 l'inégalité des ressources, bien évidemment, le bureau du Procureur ici,

13 comme dans toute instance, a à disposition davantage de ressources,

14 ressources qui sont plus importantes que les ressources qui sont

15 disponibles à un avocat de la Défense. Ce qui ne fait peut-être pas

16 beaucoup de différence à ce stade de la procédure. La charge de la preuve

17 ne repose pas sur lui. Il répond aux allégations en citant les témoins à la

18 barre et il cite les pièces à conviction dont il souhaite que les témoins

19 parlent.

20 Nous avons vu un exemple très frappant d'inégalité dans le dernier cas.

21 L'inégalité en fait porte sur l'autre partie. L'accusé et ses

22 collaborateurs en ce qui concerne Jelic avaient un accès immédiat à toute

23 une série de documents dont les ordres qui se trouvent dans le classeur. Ce

24 sont des ordres que nous avons essayé de nous procurer depuis trois ans.

25 Nous avons vu d'autres exemples où, brusquement du jour au lendemain, ces

26 journaux de guerre ont été produits, alors que cela fait des années que

27 nous essayons de mettre la main dessus. Donc on ne peut pas toujours parler

28 d'inégalité. Bon.

Page 47237

1 L'inégalité n'est pas un état de fait. C'est peut-être quelque chose auquel

2 -- ce n'est pas quelque chose qui requiert -- l'inégalité n'est pas lié à

3 une prorogation de temps et quand bien même on estimerait que ce temps

4 supplémentaire serait nécessaire, on ne sait toujours pas combien de temps

5 il faudrait lui donner car il a perdu beaucoup de temps de cette Chambre.

6 La seule manière qui nous permettrait d'envisager sérieusement d'accorder

7 plus de temps à l'accusé, c'est dans le cas où la Chambre, avec le recul,

8 devrait se dire : "C'est un homme intelligent, il a écouté les conseils que

9 nous lui avons prodigués et il a répondu comme il fallait par rapport aux

10 questions auxquelles il devait faire face et il en est tout à fait capable,

11 il ne l'a pas fait, il n'a pas pu le faire." En l'absence de quelque

12 conclusion à cet égard, il a refusé de répondre aux ordonnances de la

13 Chambre. Il a refusé d'écouter les conseils des Juges de la Chambre et les

14 conseils prodigués par ses avocats. C'est ce que j'ai dit dans mes

15 arguments récents, il a essayé de coincer toutes les personnes, toutes les

16 parties présentes, ce qui va retarder le procès d'une façon qui est

17 inacceptable, dans ce cas, je crois qu'il faudrait le traiter comme un

18 homme qui a pris une décision raisonnée, qui est tout à fait un homme

19 intelligent qui a décidé de ne plus citer de témoins à la barre pour

20 présenter ses moyens de preuve parce qu'il n'a plus de temps. A ce moment-

21 là, c'est quelqu'un qui a fait une décision motivée, donc, il ne pourra

22 plus appeler à la barre le témoin pour la Croatie, ni pour la Bosnie.

23 Si on regarde un petit peu en arrière, l'histoire nous donne quelques

24 exemples de retard. Lorsque cette Chambre a décidé de commettre d'office

25 des conseils, la Chambre a fait très attention. La Chambre a commis ces

26 conseils pour des raisons de santé, encore une fois faisant montre de

27 courtoisie à l'égard de l'accusé en ne rendant qu'une conclusion allant

28 contre lui. Pour ce qui est de l'ordonnance portant sur les modalités qui,

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1 évidemment, avait une incidence sur le tems imparti à l'accusé, cette

2 décision a été entièrement respectée et cette ordonnance portant sur les

3 modalités nous conduit à la situation actuelle. Donc la Chambre de première

4 instance sait que le respect de cette ordonnance, c'est quelque chose qui

5 devrait être apprécié ailleurs et plus tard, mais ceci sera abordé peut-

6 être ailleurs, à un autre endroit, à un autre moment.

7 Un seul autre sujet dont j'aimerais traiter, c'est le sujet suivant, à

8 savoir l'important volume de documents. C'est un argument qui revient

9 régulièrement et qui, à mon avis, est une façon erronée de présenter la

10 réalité, mais je dois argumenter.

11 Le volume important de papier qui a été remis à une personne qui se

12 trouve dans la situation de l'accusé, il n'est pas étonnant, car il ne peut

13 être inférieur à ce qu'il est. Il est prévisible que ce volume sera énorme.

14 Compte tenu de notre devoir de l'aider en lui transmettant des documents à

15 décharge, c'est un problème inévitable dans un procès de l'importance de

16 celui-ci, comme il l'est dans d'autres procès. C'est un problème qui peut

17 ne pas être gênant, si la Chambre tient compte de la publicité des débats.

18 C'est un problème qui peut être réglé au cas par cas en transmettant le

19 plus grand nombre possible de documents par voie électronique, de façon à

20 ce que le bénéficiaire puisse consulter ces documents dans les conditions

21 qu'il déterminera lui-même, mais en tout cas, il n'y a aucun moyen matériel

22 de réduire le volume, le nombre de pages en tant que tel. La seule

23 possibilité de réduction vient du tri que fera le bénéficiaire en décidant

24 de ce qui l'intéresse plus ou moins. J'ai demandé à des Juges d'autres

25 Chambres, ainsi qu'aux Juges de cette Chambre de présenter leurs remarques,

26 si remarques il y avait, au sujet de la facilité, de l'aisance avec

27 laquelle ces documents peuvent être récupérés par voie électronique. Parmi

28 les documents qui sont transmis à l'accusé, il y a bon nombre que Mme

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1 Dicklich décide de lui communiquer de son propre chef, de sa propre

2 initiative, sans qu'ils étaient demandés, simplement parce qu'ils ont un

3 lien plus ou moins étroit avec des témoins dont l'audition est prévue.

4 [La Chambre de première instance se concerte]

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, veuillez poursuivre,

6 Monsieur Nice.

7 M. NICE : [interprétation] L'une des choses qui a été faite pour aider

8 l'accusé, c'est que Mme Dicklich lui a toujours transmis les documents

9 relatifs aux témoins avant l'audition de ceux-ci, afin de l'aider à avancer

10 plus vite. Il le sait très bien.

11 Nous savons que l'article 68 relatif à la communication des documents a été

12 utilisé de façon très performante pour lui permettre d'organiser ses

13 interrogatoires principaux, ainsi que nos contre-interrogatoires.

14 [La Chambre de première instance se concerte]

15 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, on me rappelle que dans

16 le paragraphe 13 de nos récentes écritures déposées au mois de février de

17 cette année, on voit le Juge Robinson qui met en garde l'accusé, quant au

18 fait qu'il ne devrait pas perdre de temps, ou en tout cas qu'il devrait

19 utiliser au mieux le temps qui lui est donné, suite aux documents qui lui

20 sont communiqués, pour les étudier dans les délais --

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais ces documents ont été

22 "utilisés," j'en suis sûr.

23 M. NICE : [interprétation] En tout cas, l'accusé relate les faits d'une

24 façon totalement contraire à la réalité, car si l'on devait le suivre, ce

25 procès pourrait ne jamais se finir. C'est sans doute ce qu'il veut, mais

26 c'est ce à quoi il convient de s'opposer.

27 La Chambre a toujours agi, je le répète, dans la plus grande équité et la

28 plus grande courtoisie à l'égard de l'accusé, et la Chambre devrait

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1 convenir qu'un moment doit venir où ce procès doit s'achever. Je vous

2 remercie.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

4 [La Chambre de première instance se concerte]

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, est-ce que vous

6 avez quelque chose à dire au sujet des derniers rapports médicaux ? Je suis

7 sûr que vous en avez eu connaissance.

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne les ai pas vus dans la dernière période.

9 Peut-être ont-ils été communiqués à M. Rakic. Ces derniers jours, je n'ai

10 pas eu sous les yeux le moindre rapport médical.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Comment cela se fait-il ?

12 Monsieur le Juriste de la Chambre, je vous prie de vous approcher.

13 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Kay, est-ce que vous avez

15 reçu ces documents ?

16 M. KAY : [interprétation] Nous avons reçu un exemplaire de l'expert qui

17 s'occupe des oreilles en tout cas, c'est ce terme que j'utilise pour parler

18 de lui dans mes notes.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est le dernier rapport, n'est-ce

20 pas ?

21 M. KAY : [interprétation] Oui. Je pense que c'était le 6 --

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il y a aussi un rapport du Dr van

23 Dijkman.

24 M. KAY : [interprétation] A quelle date, Monsieur le Juge ?

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est sans doute le deuxième rapport.

26 M. KAY : [interprétation] Je vais essayer de vérifier.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le 2 décembre.

28 M. KAY : [hors micro]

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne puis comprendre, Monsieur

2 Milosevic, quelles sont les circonstances qui vous ont empêché de recevoir

3 ces rapports.

4 M. KAY : [interprétation] Le rapport du spécialiste des oreilles 6 décembre

5 2005, nous l'avons reçu le 7, et au mois de décembre, je n'en ai pas reçu

6 d'autres.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous avez reçu un rapport

8 du neuroradiologue ?

9 M. KAY : [interprétation] Nous avons reçu un rapport du Dr Dijkman datant

10 du 1er décembre, premier rapport en effet. Mais pas d'autres cette semaine.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous venez de parler d'un rapport

12 datant du 6 qui vient du Dr Delarts [phon], n'est-ce pas ?

13 M. KAY : [interprétation] Le 29 novembre, en effet. Puis, il y en a un

14 autre --

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le Dr Delarts a confirmé les dires du

16 Dr Andric au sujet des problèmes d'audition et de la nature exacte de ce

17 trouble. Les autres rapports traitaient davantage des répercussions

18 éventuelles des problèmes cardiovasculaires. Je pense que le rapport du

19 neuroradiologue traitait de six points et proposait une méthode susceptible

20 de régler le problème. Le Dr Delarts, pour sa part, je crois me rappeler

21 qu'il s'occupait des problèmes d'audition de M. Milosevic dans le prétoire.

22 M. KAY : [interprétation] Oui, c'était le rapport technique, où on trouvait

23 --

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je pense que nous avons bien tout

25 passé en revue.

26 M. KAY : [interprétation] Nous avons bien reçu tous ces rapports.

27 [La Chambre de première instance se concerte]

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Kay, pourriez-vous être

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1 plus clair ? Est-ce que vous avez reçu le rapport du neuroradiologue, le Dr

2 Aart ?

3 M. KAY : [interprétation] Aart ?

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, le dernier rapport.

5 M. KAY : [interprétation] Oui, oui, oui. Le 6 décembre, celui du 6

6 décembre. Mais apparemment, il n'est pas dans mon classeur ici. Il est sans

7 doute dans la pièce à côté. Mais en tout cas, oui, nous l'avons reçu le 6.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne comprends pas pourquoi

9 l'accusé ne l'a pas reçu.

10 M. KAY : [interprétation] Nous, nous l'avons reçu. Le Dr Rakic -- ou

11 plutôt, je ne devrais pas lui donner le titre de docteur. Le

12 Pr Rakic est ici, et il ne fait aucun doute qu'il a dû le recevoir, puisque

13 son nom figure sur la liste des destinataires de ce genre de courrier.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

15 M. KAY : [interprétation] Nous veillerons à ce qu'un exemplaire soit

16 distribué.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, ce que vous avez

18 dit au sujet des 380 heures pourrait être valable -- ou plutôt, ce que vous

19 avez dit, au sujet des 380 heures supplémentaires dont vous avez besoin,

20 serait synonyme d'une prolongation de ce procès de trois ans à peu près.

21 Pouvez-vous me dire pourquoi il ne serait pas raisonnable de ma part de

22 partir du principe que vous n'avez pas parlé sérieusement et de façon

23 responsable, et pouvez-vous me dire pourquoi je ne devrais pas me trouver

24 dans la situation d'estimer que ceci est un signe du plus grand sinistre

25 par rapport à la tâche qui incombe à cette Chambre, à savoir, garantir un

26 procès équitable et rapide, donc, la conclusion rapide de ce procès ?

27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, d'abord, je ne puis

28 comprendre comment vous faites équivaloir 380 heures et trois ans. Cela

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1 reviendrait à penser que pour vous, une année compte 100 heures. C'est sans

2 doute lié à un problème d'intelligence de votre part.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic,

4 M. Nice a fait ce calcul. Ce qu'il vous appartient de faire, c'est de nous

5 dire pourquoi vous avez besoin d'un nombre aussi important d'heures.

6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, dans les efforts que je

7 déploie pour réduire autant que faire se peut la durée, le temps dont j'ai

8 besoin et pour réduire autant que faire se peut le nombre de témoins que je

9 souhaite entendre et, après toutes ces réductions, je suis arrivé à 380

10 heures. Comme vous le savez, ce n'est pas beaucoup. Chacun ici doit bien

11 savoir à quoi équivalent

12 380 heures. J'insiste sur le fait que ces 380 heures ont été calculées sur

13 la base de deux heures par témoin en moyenne. J'aimerais que vous soyez

14 assuré que pas un seul instant je n'ai pensé à prolonger la durée du

15 procès. Bien au contraire. Je m'efforce d'utiliser le temps de la façon la

16 plus rationnelle qu'il soit.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ne perdez pas de vue que le temps

18 que vous avez déjà utilisé équivaut à peu près à deux fois le temps qui

19 vous était imparti au départ. Voilà ce qui s'est passé effectivement. Là,

20 nous ne parlons pas de conjecture ou de supputation.

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Cela, c'est un autre problème car les

22 appréciations à l'avance du temps qui sera nécessaire pour entendre tel ou

23 tel témoin, je ne saurais dire qu'elles ont toujours été exactes. Bien au

24 contraire. Parfois, un témoin nécessite une durée d'audition plus longue

25 parce qu'il y a pas mal de questions à aborder, puis diverses circonstances

26 surgissent, qui expliquent les interruptions et les prolongations de son

27 audition. S'agissant de ce que je fais, je calcule le temps de la façon la

28 plus efficace qu'il soit. Parce que tout de même, je vous en prie, chaque

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1 journée de travail compte à peu près 4 heures et 15 minutes. Disons, quatre

2 heures pour arrondir et 380 heures, je ne vois pas comment M. Nice fait

3 équivaloir ce chiffre de 380 à trois années. Car c'est bien moins que 100

4 jours de travail. 400 heures, cela fait 100 jours de travail. Or, je ne

5 parle que de 380 heures, ce qui fait moins. Ce qui fait, disons, à peu près

6 90 jours de travail environ. Cela n'atteint même pas, et de loin, une

7 année.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous ne comptez pas les contre-

9 interrogatoires. Vous n'avez pas inclus les contre-interrogatoires,

10 Monsieur Milosevic.

11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ecoutez, si j'en arrive à

12 90 journées, si j'inclus les contre-interrogatoires, cela fait un total de

13 150 jours. De toute façon, c'est encore loin d'une année et encore beaucoup

14 plus loin de trois années de travail. Je ne sais pas quelle est la méthode

15 de calcul qu'a utilisé M. Nice et de quelle école il est sorti, mais en

16 tout cas, par aucune méthode, on ne peut arriver à quatre années.

17 [La Chambre de première instance se concerte]

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ceci met un terme à l'audience

19 d'aujourd'hui -- au présent débat.

20 Je demande que l'on fasse entrer dans le prétoire M. Sel.

21 M. NICE : [interprétation] Je demande un huis clos partiel avant

22 l'entrée du témoin pour évoquer un point de procédure.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je demande le huis clos

24 partiel.

25 [Audience à huis clos partiel]

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22 [Audience publique]

23 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, je crains de ne pouvoir

24 conclure le contre-interrogatoire aujourd'hui.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelle est votre estimation du temps

26 qu'il vous faudra ?

27 M. NICE : [interprétation] Sous réserve que nos propositions soient

28 acceptées, je pense à une séance entière --

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Une séance uniquement.

2 M. NICE : [interprétation] Je l'espère. Nous verrons de quelle façon les

3 choses se dérouleront sur la base des questions que je poserai.

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez vous asseoir, Monsieur

6 Sel.

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous êtes toujours sous

9 l'effet de la déclaration solennelle prononcée par vous au début de votre

10 déposition.

11 LE TÉMOIN: JANOS SEL [Reprise]

12 [Le témoin répond par l'interprète]

13 Contre-interrogatoire par M. Nice : [Suite]

14 Q. [interprétation] Monsieur Sel, cette partie de l'interrogatoire

15 reposera sur un certain nombre de déclarations qui sont parvenues à

16 l'Accusation de la part de deux hommes auxquels ont parlé les enquêteurs du

17 bureau du Procureur, et qui ont cité le nom de Colovic, comme confirmant

18 l'existence de ces journaux. La Chambre a demandé que le journal en

19 question lui soit remis. Il s'agit de journaux, manuscrits. Ce que nous

20 avons en notre possession, ce sont des photocopies. Les originaux ont été

21 conservés à Belgrade.

22 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, nous

23 avons fait traduire un nombre déterminé de pages assez peu nombreuses. Je

24 vais faire distribuer l'intégralité de ces journaux, si vous me le

25 permettez. Au début de cette liasse de documents, chacun trouvera les pages

26 traduites qui sont en nombre assez limité, avec l'original d'abord, la

27 traduction ensuite. Ceci pour respecter la pratique mise en vigueur par la

28 Chambre, notamment s'agissant du nombre limité de pages qui peuvent

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1 constituer une pièce à conviction.

2 Nous disposons d'un texte intégral pour le témoin, car nous tenons

3 absolument à ce qu'il puisse voir l'intégralité du texte.

4 Les pages de ces journaux sont numérotées pour permettre une

5 plus grande lisibilité. La Chambre constatera, que sur chaque page figure

6 très souvent un numéro ou quelquefois deux numéros. Moi, par exemple, j'ai

7 sous les yeux les pages 67, 68 et 68, 69. La numérotation est un -- du

8 début à la fin de ce document et ce qui constituait deux pages sur les

9 photocopies originales est repris ici en pleine page, d'où les deux

10 chiffres qui figurent sur chaque page.

11 Pour aller plus vite, nous nous fonderons sur la version anglaise de

12 ces pages et si cela s'avère nécessaire, nous prendrons les originaux en

13 Serbe.

14 Q. Monsieur Sel, est-ce que vous pourriez jeter un coup d'œil à la version

15 qui vient de vous être remise, qui ne sera pas versée au dossier en tant

16 que pièce à conviction dans son intégralité, mais qui vous est donnée pour

17 votre convenance personnelle. Ces documents viennent de Belgrade, du

18 ministère des Affaires étrangères et de l'armée. Jetez-y un coup d'œil et

19 vous verrez qu'il s'agit d'une copie de vos deux journaux.

20 R. Monsieur Nice, je tiens à vous corriger. Ces documents ne sont pas des

21 journaux. Ce sont des carnets de notes. Je commandais une compagnie. Je ne

22 tenais pas un journal personnel.

23 Q. Très bien. Un carnet de notes. Le vôtre, n'est-ce pas ?

24 R. Oui, oui, c'est mon carnet de notes qui date de 1998-1999.

25 Q. Je vais maintenant passer en revue un certain nombre de pages assez

26 rapidement, sujet par sujet. Le premier sujet, vous pourrez en traiter sans

27 doute assez vite. Il a déjà été abordé la dernière fois, à la dernière

28 audience où vous étiez présent. Vous avez dit ne rien savoir d'Ersad ou de

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1 Semso Colovic, n'est-ce pas ? Est-ce que vous pourriez vous rendre en page

2 33, le coin en bas, à droit de la page 33. A droite de cette page, sous la

3 rubrique concernant le 25juin 1998, vous trouvez la rubrique --

4 R. Un instant, s'il vous plaît. Je n'ai pas cette page dans ma

5 documentation.

6 Q. Nous allons vous fournir la page qu'il faut après le 33.

7 M. MILOSEVIC : [interprétation] L'interprète a dit 43 et je vois, au compte

8 rendu d'audience, que M. Nice a dit 33. Il doit y avoir eu une erreur de

9 traduction parce que ce n'est pas 43 comme l'interprète l'a dit, mais 33.

10 C'est la raison pour laquelle le témoin ne peut pas le trouver.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est, en réalité, la

12 page 33, Monsieur Sel et la date est celle du 25 juin 1998.

13 M. NICE : [interprétation]

14 Q. C'est rédigé à la main, votre main. Il s'agit de rechercher Colovic ?

15 R. Oui, Monsieur Nice, c'est rédigé à ma main. Colovic Ersad, c'est

16 quelqu'un - je vais vous l'expliquer - c'est quelqu'un qui a été envoyé

17 pour une visite médicale. Nous sommes sortis à Sulane [phon] vers le 15 ou

18 le 16 juin, me semble-t-il et il a été relâché pour partir voir un médecin

19 à l'hôpital militaire de Nis. Il ne s'est pas présenté à l'hôpital

20 militaire de Nis et il n'a plus été revu à l'unité.

21 Q. Vous n'aviez plus souvenir de Colovic la dernière fois. Qu'est-ce qui a

22 rafraîchi votre mémoire ?

23 R. Monsieur Nice, il s'agit de 1998. C'est la raison pour laquelle j'avais

24 dit que je souhaitais avoir mon carnet de notes pour ne pas en venir à

25 penser que je ne dis pas la vérité. Colovic Ersad, c'était un jeune soldat

26 qui a fait partie des rangs de mon unité, génération 1998 et il a été

27 transféré -- permettez-moi de vous le dire. Il a été transféré vers le 15

28 juin vers mon unité, vers les rangs de mon unité. Pour des raisons de

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1 maladie, il a été relâché du campement où nous étions pour être examiné

2 médicalement et il n'a plus fait son apparition dans les rangs de l'unité.

3 Q. Le détail --

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais ceci ne répond pas à la question

5 qui a été posée.

6 M. NICE : [interprétation]

7 Q. Voyez-vous, la dernière fois que vous êtes venu ici, vous ne saviez

8 rien nous dire du tout au sujet de Colovic. Nous ne pouvons pas lire tout

9 ce qui figure sur cette page du carnet, mais dites-nous s'il est dit qu'il

10 est parti à l'hôpital et qu'il n'est pas revenu parce que nous, nous avons

11 réussi à lire juste "Recherche de Colovic Ersad." Il n'est pas question

12 d'hôpital.

13 R. Monsieur Nice, nous n'avions pas, au campement, de médecins et c'est

14 avec un accompagnateur qu'il a été envoyé vers Djakovica, vers un

15 dispensaire pour se faire examiner médicalement et --

16 Q. Mais écoutez ma question.

17 R. -- d'habitude, les soldats étaient envoyés vers la caserne, pour ce

18 faire.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Sel, on vous a demandé

20 pourquoi vous n'avez pas pu vous souvenir de cette personne la dernière

21 fois que vous êtes venu ici et maintenant, vous avez réussi à vous rappeler

22 tous ces détails alors que dans votre journal ou dans votre carnet, il n'y

23 a que son nom ? Comprenez-vous la question qui vous est posée ? Si oui,

24 répondez.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je comprends très bien, mais j'ai l'impression

26 que vous ne me comprenez pas. Partant du carnet de notes que j'ai ici, sous

27 les yeux, je me suis rappelé ce soldat. Je vous ai dit que sans mes notes,

28 en témoignant la fois passée, j'ai dit que je ne pouvais pas confirmer que

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1 telle ou telle chose était vraie ou pas. C'est la raison pour laquelle j'ai

2 donné l'ordre, le 25 juin 1998, de lancer des recherches, j'ai lancé un

3 avis de recherche après l'intéressé Colovic.

4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous êtes en train de nous dire que

5 maintenant que vous avez revu ce nom, vous vous êtes souvenu de tout cela ?

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais il n'y a pas que le nom. Il y a

7 aussi "avis de recherche."

8 M. NICE : [interprétation] Mais je ne veux pas gaspiller notre temps là-

9 dessus, mais en page 37, du côté gauche, pour ce qui est des entrées qu'on

10 y a apposées.

11 Q. En page 37, du côté gauche, on voit, à un autre endroit, mentionné --

12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quelle page ?

13 M. NICE : [interprétation] Page 36, je m'excuse, si je ne l'ai pas dit.

14 Q. Ceci n'a pas été traduit et je viens de m'en rendre compte. Mais on a

15 identifié l'endroit à mon intention. Vous voyez à gauche, sur la page 36,

16 une autre entrée, une fois de plus, il est fait mention d'un avis de

17 recherche après Colovic. C'est cela, au milieu de la page ?

18 R. Non, Monsieur Nice. On a reçu un rapport, entre-temps, qu'il se

19 trouvait à l'hôpital parce qu'il y a le mot "bolmica [phon]" qui signifie

20 "hôpital."

21 Q. J'aimerais que vous nous donniez lecture de ce qui est écrit et nous

22 dire si c'est votre écriture ?

23 R. Je ne vois pas très bien. "Colovic" et son prénom échappe ici et il y a

24 -- non pas "hôpital," mais "Poternica [phon]" qui signifie avis de

25 recherche parce qu'en ma qualité de responsable de l'unité, je devais

26 lancer un avis de recherche puisqu'il ne s'est plus présenté dans son

27 unité.

28 Q. Maintenant, la page suivante qui nous intéresse, c'est la page 56. Une

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1 fois de plus, nous retrouvons le nom de l'intéressé. Il est présenté, ici,

2 toute une liste de gens et lui y figure au

3 numéro 2 : Colovic Ersad ?

4 R. Ici, Monsieur Nice, il y a le mot "Begstro [phon]" qui veut dire

5 "Fuite." Le dénommé Colovic est en fuite. Sur le plan légal, il a fait

6 l'objet d'un avis de recherche par le biais des instances chargées de la

7 Sécurité ou plutôt, par le service chargé des recherches parce que le jour

8 où il devait aller à l'hôpital, il a déjà brillé par son absence. Nous

9 parlons toujours de 1998, Monsieur Nice.

10 Q. Page 68, maintenant. Vous voyez, Monsieur Sel, vous avez peut-être déjà

11 répondu à la question, mais -- un moment, je vous prie -- ou plutôt,

12 laissez tomber la page 68.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] N'oubliez pas que nous ne pourrons

14 pas aller au-delà de 1 heure 43.

15 M. NICE : [interprétation]

16 Q. Nous allons continuer pour arriver à la page -- laissez-moi voir -- non

17 pas 35. La page 170. Si ce n'est pas le cas, je vais quand même poser ma

18 question. Laissez tomber 170 aussi.

19 Nous avons retrouvé trois endroits dans votre carnet de notes où il est

20 fait mention du nom d'Ersad Colovic. La dernière fois, lorsque j'ai dit que

21 des dires émanaient du dénommé Ersad Colovic, vous avez nié qu'il faisait

22 partie de votre unité. Est-ce que vous avez nié parce que vous saviez que

23 cet homme était peut-être à même de dire la vérité à votre sujet ?

24 R. Monsieur Nice, il s'agit d'une période de temps assez longue et d'un

25 écart de temps assez long. Si vous avez été suffisamment attentif, vous

26 m'auriez entendu dire que sans mes carnets de notes, je ne pouvais pas vous

27 confirmer si cet homme avait fait partie de mon unité ou pas. A partir du

28 28 juin, cet homme a pris la fuite. Comment a-t-il pu faire des

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1 déclarations à mon sujet pour 1999, alors qu'il n'a pas du tout fait partie

2 de l'unité ?

3 Q. Juste encore une petite question pour enchaîner sur ce que M. Bonomy a

4 dit. Est-ce que votre cerveau fonctionne de manière à voir un mot, tel que

5 le nom de "Colovic" et indépendamment de ce que vous avez déjà entendu

6 auparavant, ce n'est qu'une fois que vous voyez ce mot écrit sur une

7 feuille de papier que cela rafraîchit votre mémoire, cela le fait revenir à

8 votre mémoire ? Est-ce que c'est ce qui se passe dans votre cerveau ?

9 R. Monsieur Nice, nous n'allons pas parler maintenant des modalités de

10 fonctionnement du cerveau d'un tel ou d'un tel autre. J'ai dit que j'avais

11 besoin de mon carnet de notes pour constater si cet homme avait fait partie

12 des rangs de mon unité ou pas. Comme vous pouvez le constater, il est

13 arrivé dans mon unité vers le 15 juin et le 20 juin, il s'est éloigné. Il

14 n'est plus revenu et je parle de 1998. Il se trouve être fugitif depuis. Il

15 n'a pas pu faire de déclaration à mon sujet puisque nous avions un

16 entraînement en campement. Mon unité n'a pris part à aucune activité de

17 combat, à cette époque-là.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, je tiens à constater

19 seulement qu'il ne s'agit pas d'un seul mot qui est le nom de "Colovic." Il

20 y a trois ou quatre mots qui disent "Avis de recherche après Colovic" et

21 c'est peut-être ce qui a rappelé --

22 M. NICE : [interprétation] Mais il n'a pas été fait référence à l'hôpital

23 ou à quoi que ce soit d'autre. Mais je vais m'interrompre.

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, il y a un phénomène qu'on

25 appelle la mémorisation visuelle et une fois que quelqu'un voit son carnet

26 de notes, il me semble assez normal d'avoir des choses qui reviennent à la

27 mémoire.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Mais c'est un commentaire que

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1 vous pouvez faire en une autre occasion.

2 M. NICE : [aucune interprétation]

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons à présent interrompre

4 nos travaux, Monsieur Sel. Vous devrez revenir ici lundi, à 9 heures du

5 matin.

6 L'audience est levée.

7 --- L'audience est levée à 13 heures 45 et reprendra le lundi 12 décembre

8 2005, à 9 heures 00.

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