Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mercredi 25 janvier 2006

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, veuillez

7 poursuivre.

8 LE TÉMOIN: MILAN KOTUR [Reprise]

9 [Le témoin répond par l'interprète]

10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur Robinson.

11 Nouvel interrogatoire par M. Milosevic : [Suite]

12 Q. [interprétation] Colonel, vous avez sous les yeux ce rapport qui

13 provient du secteur chargé des opérations et des affaires de l'état-major

14 nous l'avons examiné, il est dit les membres du MUP se sont engagés dans

15 une action contre les terroristes Siptar. Est-ce qu'il ressort de ce

16 rapport qui a engagé cette action ? Ou est-ce qu'il y a des dilemmes quant

17 au protagoniste ?

18 R. Non, il n'y a aucun doute. On voit que c'est une action du MUP --

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, je me souviens

20 que vous avez parcouru cela hier. Ne répétez pas ce que vous avez déjà

21 abordé.

22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, tout à fait. Je ne vais pas aller plus

23 dans les détails là-dessus.

24 M. MILOSEVIC : [interprétation]

25 Q. Mon Colonel, nous avons ici une page du rapport quotidien du commandant

26 de cette -- ce Groupe de combat 243/1 qui s'est trouvé à Dulje et à

27 Stimlje, et dans ce rapport quotidien -- rapport régulier, on lisait :

28 "Dans le déploiement des unités qu'il n'y a eu aucune modification pour

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1 cette journée-là," c'était la journée du 15. Est-ce que cela veut dire que

2 l'unité a été engagée ou pas engagée ?

3 R. Cela veut dire que la situation n'a pas été modifiée, que la situation

4 est comme précédemment, qu'il n'y a eu ni perte ni de déploiement, l'unité

5 n'a pas été engagée.

6 Q. Merci. Une question qui concernait Walker, de manière précise,

7 pourriez-vous nous dire ce qu'a dit Loncar à Walker lors de cette première

8 réunion ? Cela a été la première réunion. Où est-ce qu'elle s'est tenue ?

9 M. NICE : [interprétation] Il ne peut pas dire précisément ce que Walker a

10 dit à Loncar puisqu'il n'était pas là. On a déjà été dans ce cas de figure.

11 On a déjà examiné cette question.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mon Colonel, est-ce que vous étiez

13 là ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'entends pas l'interprétation.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous entendez à présent ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'entends rien qui me proviendrait de la

17 cabine.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Allo, donc, vous n'entendez pas.

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Si, à présent, j'entends.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, le témoin

21 n'était pas présent lors de cette réunion. Comment pourrait-il dire quels

22 ont été les propos de Loncar ?

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'ai pas demandé ce qu'a dit Loncar. J'ai

24 demandé ce qu'a dit Walker d'ailleurs. Enfin, je vais demander au témoin --

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Comment peut-il vous dire ce que

26 Walker a dit.

27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, bien entendu, qu'il ne peut

28 pas me répondre s'il n'a pas été présent à cette réunion, mais ce que

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1 j'avais compris c'est qu'il avait été à cette réunion.

2 M. MILOSEVIC : [interprétation]

3 Q. Mon Colonel, est-ce que vous étiez présent lors de cette réunion où

4 Walker a rencontré Loncar ou vice versa ?

5 R. Hier ou avant-hier dans ma déposition, j'ai dit qu'il y avait le

6 général Loncar, moi-même, le colonel Mijatovic, représentant du MUP pour le

7 Kosovo-Metohija, et une dame qui a interprété son prénom était Gordana,

8 elle était du poste du ministère des Affaires étrangères basé à Pristina.

9 Q. Vous étiez là à cette réunion.

10 R. Oui, c'est ce qui figure dans le rapport.

11 Q. Est-ce que c'est la première fois qu'ils se sont rencontrés --

12 M. NICE : [interprétation] La réunion dont il parle, je ne pense vraiment

13 qu'il lui est posée des questions au sujet de cette réunion-là.

14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il lui a posé des questions au sujet de

15 cette réunion.

16 M. NICE : [interprétation] Non, pas au sujet de celle-ci. Je lui ai posé

17 des questions au sujet de la réunion avec Milosevic, avec l'accusé.

18 J'hésite à nous faire gaspiller du temps. On laisse entendre que Walker a

19 demandé d'avoir Loncar nommé et que ce n'est pas Loncar qui a été proposé

20 par l'accusé dans un premier temps ou quelque chose de ce genre.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, je vais autoriser la

22 question même si ce n'est qu'un point secondaire.

23 Monsieur Milosevic.

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] La seule chose qui m'intéressait c'était de

25 savoir ce que Walker a dit.

26 M. MILOSEVIC : [interprétation]

27 Q. Est-ce que c'était la première réunion entre Walker et Loncar ?

28 R. Je pense que Loncar était là aussi avec Slana, le 11 novembre

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1 lorsqu'elle est arrivé à l'aéroport mais les 15, 16 novembre, au bâtiment

2 où était basée la mission de Walker, je pense que c'était la première

3 réunion officielle.

4 Q. Que Walker a-t-il -- qu'a-t-il dit à Loncar à cette occasion ?

5 R. Walker a dit à M. Loncar à cette occasion qu'il lui présentait ses

6 excuses de l'avoir tiré de sa retraite paisible, de ses jeux avec son petit

7 fils et des promenades. Parce qu'il avait demandé à M. Milosevic lors d'une

8 rencontre qu'il avait eu d'après lui -- avec lui à Belgrade, lui a demandé

9 de travailler avec Loncar parce qu'il avait un bon souvenir de leur

10 coopération en Slavonie.

11 Q. Je vous remercie. Nous n'allons pas en parler davantage. Pour ce qui

12 est de l'objectivité de Walker, je demande que l'on place la première d'un

13 document sur le rétroprojecteur, enfin la première et la dernière de

14 "Alliance for New Kosovo". C'est la page -- cette organisation il est dit

15 ici que : "Le Kosovo doit être un Etat indépendant en plein sens du

16 terme." Donc, cela provient de cette alliance. Un instant, je souhaite que

17 l'on puisse voir la page.

18 M. NICE : [interprétation] Je ne vois pas très bien quelle serait

19 l'importance de ceci. Je vois comment on le présente. On invoque

20 l'objectivité de Walker. Moi-même, je n'ai pas posé de questions là-dessus,

21 voyons où ceci va nous mener.

22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais l'annoncer tout de suite, je ne le vois

23 pas encore sur le rétroprojecteur. Très bien, on le voit. Est-ce que vous

24 pouvez montrer le haut, s'il vous plaît, pour qu'on puisse voir le titre ?

25 Très bien. La dernière page, s'il vous plaît, seulement.

26 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

27 L'INTERPRÈTE : Le président s'exprime hors micro.

28 L'ACCUSÉ : [interprétation] La dernière page seulement, s'il vous plaît,

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1 pouvez-vous la montrer ? Il est écrit ici : "L'ambassadeur William Walker,

2 l'ancien représentant spécial des Nations Unies en Slavonie orientale, et

3 chef de la Mission de Vérification." L'on voit énumérés ici les membres de

4 ce conseil d'administration de cette association. Donc, ceci a à avoir avec

5 les questions auxquelles vous avez déjà répondues, mon Colonel, et qui

6 portaient sur l'objectivité et sur l'honnêteté de William Walker.

7 M. NICE : [interprétation] Mais je n'ai aucun souvenir d'avoir posé ce

8 genre de questions. Je ne me souviens pas du tout si cela a eu lieu.

9 Toujours est-il que je ne vois pas quel lien ceci a à avoir, c'est

10 simplement une tentative de présenter sous une lumière défavorable

11 l'ambassadeur Walker, et il perd son temps.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, comment est-ce

13 que cela découle des questions précédentes ?

14 L'ACCUSÉ : [interprétation] M. Nice déploie des efforts tout le temps afin

15 de montrer qu'il y avait une attitude objective et impartiale de la part de

16 la Mission de Vérification. Or, c'est complètement contraire à la vérité.

17 L'une des preuves que nous avons ici nous montrera de quel homme il s'agit,

18 ses mains sont ensanglantées depuis Salvador et c'était l'homme chargé de

19 sales besognes d'ailleurs. C'est un criminel, Walker, un simple criminel.

20 [La Chambre de première instance se concerte]

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La Chambre ne vous autorisera pas à

22 poser cette question, Monsieur Milosevic. Posez-lui une autre question.

23 M. NICE : [interprétation] J'invite la Chambre à examiner la dernière

24 phrase. J'invite la Chambre à imposer la discipline à l'accusé. Ce n'est

25 pas l'endroit où l'accusé devrait s'engager dans ce genre d'observation,

26 dans des observations auxquelles le poussent ses émotions; à attaquer des

27 gens qui ne sont pas ici pour se défendre, ceci est totalement inadéquat.

28 Honnêtement, c'est vraiment inacceptable que la Chambre accepte -- autorise

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1 ce genre d'observations au sujet d'un homme qui a été témoin ici, et qui

2 est un homme de réputation internationale ou de stature internationale. Je

3 pense qu'il faudrait absolument arrêter ceci, c'est tout à fait

4 inadmissible.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] J'essaie de voir à quelle

6 déclaration vous vous référez.

7 M. NICE : [interprétation] Je ne vais pas la répéter, la phrase commence

8 par ceci : "L'une des preuves," ce qui est dit au sujet de cet homme est

9 tout à fait inacceptable, ne devrait être autorisé dans aucun prétoire.

10 [La Chambre de première instance se concerte]

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, faites attention

12 lorsque vous proférez des commentaires, lorsque vous posez des questions au

13 sujet de la personnalité ou du caractère des témoins. Si vous avez des

14 preuves à l'appui, est-ce que -- à moins que vous ayez des preuves à

15 l'appui de ce que vous affirmez.

16 Donc, est-ce que vous avez d'autres questions à poser dans le cadre

17 des questions supplémentaire ? Rappelez-vous le cadre -- le cadre prévu

18 pour les questions supplémentaires.

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'en tiens compte absolument, Monsieur le

20 Président. Ces questions supplémentaires sont très brèves. Il ne me reste

21 que quelques questions à poser.

22 M. MILOSEVIC : [interprétation]

23 Q. Colonel, vous avez reçu ici une déclaration préalable d'un soldat, on

24 n'a pas divulgué son nom, donc bien entendu je ne vais pas le prononcer moi

25 non plus. Mais M. Nice vous a demandé une chose au sujet d'une certaine

26 activité dont l'objectif aurait dû être d'adresser les civils albanais vers

27 Korenica parce que c'est là que des membres du MUP les entendaient avec des

28 listes dressés, des listes des noms de terroristes et puis ils

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1 s'employaient à nettoyer cette zone. Comme celui-ci l'a dit, la nettoyer

2 des Albanais.

3 Dans votre réponse vous avez dit que ce n'était absolument pas l'objectif

4 de cette opération, vous souvenez-vous de cette réponse ?

5 R. Oui.

6 Q. Quelle a été l'objectif de l'opération ?

7 R. L'objectif de l'opération a été la suivante : De la zone de Reka où

8 d'après les estimations il y avait --

9 Q. Non. Il ne s'agit pas de Reka, c'est une zone vers Korenica d'après ce

10 que je comprends.

11 R. Mais toute cette zone de Junik à Djakovica, toute cette vallée

12 s'appelle Reka.

13 Q. Très bien.

14 R. Donc, l'objectif a été seulement de détruire ces forces terroristes qui

15 s'y trouvaient. Nous avons estimé qu'il y avait là une brigade qui comptait

16 jusqu'à 200 hommes.

17 Q. Je vous remercie. A un endroit, et cela figure au paragraphe 42 de sa

18 déclaration préalable, juste un instant, je vais vérifier quelque chose.

19 Au paragraphe 42, très bien, il a déclaré, voilà c'est écrit : "Une

20 fois que les civils étaient partis, nous avons mis le feu aux maisons comme

21 l'ordre nous y en joignait." S'il vous plaît, est-ce qu'il y a eu un

22 endroit, quel qu'il soit, quelque échelon que ce soit, de quelque supérieur

23 que ce soit de l'armée, allant du commandant de la section -- chef de

24 section jusqu'au sommet, demandant d'incendier une maison, délibérément,

25 donc sur ordre ?

26 R. Monsieur Milosevic, dans l'armée, nous avions et nous avons des

27 officiers compétents, moins compétents et incompétents. Mais nous n'en

28 avions pas qui aient l'esprit dérangé. Or, seul un homme dérangé aurait pu

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1 faire cela. Pour autant que je le sache, il n'y en avait pas un tel dans

2 les rangs de l'armée yougoslave et ce genre d'ordre n'a pas été donné.

3 Q. Je vous remercie. Au paragraphe 44, il dit qu'un soldat de notre

4 bataillon a été tué. J'aimerais savoir s'il était possible que des civils

5 tuaient un soldat de son bataillon.

6 R. Non. Je sais que cette unité a eu un mort. Chez Vukovic il y a eu

7 plusieurs blessés et un mort, me semble-t-il. Nous avons eu des pertes lors

8 de cette action.

9 Q. Très bien. Au paragraphe 45, je ne vais pas citer de noms, pour qu'on

10 ne dise pas que je divulgue l'identité des témoins ou du témoin. Un

11 capitaine a ordonné à quatre otages albanais "de porter le corps d'un autre

12 soldat tué," et cetera.

13 Ce qui m'intéresse, c'est le terme "otage". Est-ce qu'il y avait des

14 Unités de l'armée de Yougoslavie, qui aurait pris des hommes en otages, à

15 quelques moments que ce soit, pendant quelque action, que ce soit, menée

16 contre l'UCK ?

17 R. Mais c'est la première fois que j'entends dire qu'il y aurait eu de

18 prises d'otages de la part de l'armée de Yougoslavie.

19 Q. Je vous remercie, mon Colonel. Il ne me reste plus que quelques

20 questions. Au début de son interrogatoire, de son contre-interrogatoire, M.

21 Nice vous a demandé ce que vous faisiez pendant ce temps-là. Pendant toute

22 la durée de ces fonctions que vous avez eues à la tête du département du

23 Corps de Pristina chargé de Coopération avec la mission, est-ce que vous,

24 vous avez gardé votre position au sein du corps ?

25 R. Oui.

26 Q. Donc, vous avez été chargé de coordination avec la mission alors que

27 vous étiez en même temps à la tête de l'artillerie dans le corps ?

28 R. Tous les hommes avaient d'une part leur mission ordinaire et en plus

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1 ils étaient officiers de liaison mais la priorité était accordée à ce rôle

2 d'officier de liaison. J'étais à l'époque à la tête de cette équipe chargée

3 des relations avec la Mission de Vérification devant le Corps de Pristina.

4 J'étais le suppléant de

5 M. Loncar à la Commission fédérale et j'étais à la tête de l'artillerie

6 dans l'infanterie. Donc, jusqu'au mois de mars, j'étais à la tête de la

7 mission. Puis après, j'ai été relevé de mes fonctions parce que c'est

8 Brankovic qui est venu.

9 Q. Très bien. M. Nice a dit que vous avez été remplacé. Ciaglinski, lui

10 aussi, l'a déclaré. Vous avez dit qu'il s'agit d'une réorganisation et que

11 vous n'avez pas été remplacé. L'avez-vous été ou non ?

12 R. Non.

13 Q. Vous avez évoqué l'organigramme de l'organisation que nous avons vue au

14 départ. Donc, le Grand état-major, puis l'équipe du Grand état-major,

15 l'équipe de la 3e Armée, celle du Corps de Pristina --

16 R. Non. Il n'y avait plus l'équipe du Corps de Pristina. Il y avait une

17 équipe unique. Donc, l'armée et le Corps de Pristina, ne constituaient

18 qu'une équipe.

19 Q. Donc, jusqu'en mars, que faisait le général Brankovic à ce sujet ?

20 R. Le 10, il est arrivé de Belgrade avec cette équipe de 26 vérificateurs

21 qui venaient d'arriver et qui parlaient anglais pour remplacer les

22 officiers de liaison dans toutes les garnisons, dans tous les bataillons

23 frontaliers et des hommes de l'armée de Yougoslavie sont arrivés, des

24 hommes qui parlaient anglais. Brankovic est arrivé avec eux.

25 Q. Par cette réorganisation, est-ce qu'on a fusionné, en fait, les deux

26 équipes, l'équipe de l'armée et celle du Corps d'armée. Donc, on en avait

27 plus qu'une à la place de deux.

28 R. C'est ce que j'ai dit. De deux, on en a fait une, de l'équipe de

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1 l'armée et de l'équipe du Corps de Pristina. On a fait une seule équipe

2 jusqu'à cette réorganisation. A la tête de l'équipe de l'armée, il y avait

3 le général Mladenovic et son suppléant était Selovic [phon]. On le voit

4 d'après toutes les signatures jusqu'à la date du 10. Mais à partir du 10,

5 vous n'avez plus que la signature du colonel Petrovic qui était à la tête

6 de cette équipe conjointe. Donc, il n'y en avait plus de -- donc, d'après

7 les signatures, c'est ce qu'on voit. L'ancienne équipe de Pristina était

8 réorganisée et on en avait plus qu'une seule et unique avec ces

9 modifications dont j'ai parlé.

10 Q. Après une semaine, à peu près, après le début de cette réorganisation,

11 la mission s'est retirée.

12 R. Mais, tôt le matin, du 12, déjà.

13 Q. Donc, ces 26 officiers qui parlaient anglais avec cette réorganisation

14 avec la fusion des équipes avec la simplification, avec l'annulation d'une

15 équipe à un échelon supérieur, est-ce que quelqu'un l'aurait fait en sept

16 jours, pour les sept jours, ou est-ce qu'on y a procédé parce qu'on

17 s'attendait à ce que la coopération soit longue ?

18 R. Mais jamais, on n'aurait fait tout cela. Mais, en tant qu'officier --

19 formé en tant qu'officier à leur rôle, même le général Drewienkiewicz leur

20 a fait une conférence dans l'esprit de la coopération passée. Donc, c'est

21 ce qu'on voit dans les rapports quotidiens. Donc, lui, en personne, a fait

22 une conférence au sein de la 15e Brigade où nous avons organisé cette

23 formation.

24 Q. Ciaglinski dans sa déclaration qui vous a été montré par

25 M. Nice dit que l'équipe est venue pour faire empirer les relations avec la

26 mission ?

27 R. Non. Cette position n'a pas de sens. Une équipe est venue chargée

28 uniquement de cela. C'est ce que je lui ai dit. Donc, il connaissait la

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1 langue. C'était leur seule tache par rapport à tous les officiers. Écoutez,

2 au commandement du corps et je pense que l'on lit même dans ce carnet. On a

3 évoqué à deux reprises, ceux-là qui avaient des problèmes avec les

4 officiers de liaison dans les unités à des échelons inférieurs. On en a

5 parlé au commandement du corps. Donc, dans les rapports aussi qui ont été

6 fournis ici, on lit qu'il fallait créer une équipe unique et qu'il fallait

7 faire venir de nouveaux officiers et c'est ce qui a été fait. On a moins

8 entre le début -- entre la prise d'initiative et la fin de l'opération.

9 Q. Est-ce qu'on peut expliquer l'affirmation de Ciaglinski que vous avez

10 été remplacé parce que vous aviez de très bonnes relations avec lui ?

11 R. Non. Cela, ce n'est pas une affirmation valable. C'est un mensonge, une

12 contre-vérité totale comme de nombreuses autres choses qu'il a dites.

13 Q. Au sujet des questions qui ont à voir avec le fait que vous avez su,

14 qu'il a déposées. En audience publique, lorsque Ciaglinski a déposé, est-ce

15 qu'on n'a pas dit tout, sauf le nom ?

16 R. On a dit tout, sauf un nom, que c'est un officier de haut rang du

17 commandement qui l'a dit et il a dessiné cela sur la carte mais on savait

18 tout de suite, immédiatement, tout à chacun a pu comprendre avec qui il

19 était en contact.

20 Q. Mais il n'avait pas beaucoup de contact. Il était en contact avec

21 vous ?

22 R. De manière quotidienne, on avait des contacts. Oui, nous deux.

23 Q. Oui. Je voudrais tirer au clair un autre point. M. Nice vous a demandé

24 ce que vous faisiez et vous venez de dire que vous étiez à la tête de

25 l'infanterie au Corps d'armée et que d'après vos fonctions d'office, vous

26 étiez un membre de l'état-major du Corps d'armée; est-ce vrai ?

27 R. Oui.

28 Q. Est-ce qu'il y a là quelque chose d'inhabituelle ? D'ailleurs, dans le

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1 cadre de votre carrière, vous avez été commandant de brigade.

2 R. Pendant six ans.

3 Q. Après été commandant de brigade, vous êtes venu à l'état-major du corps

4 et vous étiez à la tête de l'infanterie qui constitue 80 %?

5 R. 60 % du Corps d'armée.

6 Q. Bien, 60 % du corps, est-il usuel qu'un chef de corps envoie un des

7 membres de l'état-major, un de ses adjoints sur le terrain pour représenter

8 le Corps d'armée, vérifié la situation, réalisé des inspections, constaté

9 les difficultés et signalé un rapport ? Est-ce que c'est habituel ?

10 R. Non. C'est le chef du service qui doit faire cela. En l'occurrence, il

11 s'agissait d'une compagnie mécanisée. J'ai été à la tête de la 125e Brigade

12 de Kosare. J'ai été envoyé à cet endroit pour aider le commandant de la

13 brigade pour résoudre le problème. C'est de cette façon que l'on agit.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Témoin, Monsieur

15 Milosevic, les interprètes vous demandent de ralentir.

16 M. MILOSEVIC : [interprétation]

17 Q. Au sujet de Racak, M. Nice a dit que cette action avait été lancée

18 contre le village. Je vous parle à vous, en tant que militaire de carrière

19 et je vous demande la chose suivante. Quand la police entre dans un village

20 pour y chercher des terroristes, est-ce qu'on peut dire que l'action est

21 dirigée contre le village, est-ce qu'on peut présenter les choses de la

22 sorte ?

23 R. Non. On ne saurait utiliser ce type de dénomination. Cela déforme

24 complètement la situation. De la même manière que l'on ne peut pas accuser

25 une nationalité ou un pays dans son ensemble de quoi ce soit. On ne peut

26 pas non plus conduire une action contre un village.

27 Q. Vous avez parlé de l'intercalaire 14 au cours du contre-interrogatoire.

28 M. Nice vous a également montré une sorte de registre, de livre bleu, qui a

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1 trait a ce qui est décrit dans les documents qui figurent à l'intercalaire

2 14. A l'intercalaire 14, c'était le procès-verbal d'une réunion où il était

3 dit que Drewienkiewick avait lui-même vérifié les informations.

4 R. Oui.

5 Q. Il avait établi que ces informations n'étaient pas exactes, et autant

6 que je m'en souvienne, vous pouvez donner lecture du document. Il a dit

7 qu'il s'agissait d'activités normales légitimes. C'est ainsi qu'il les a

8 présentées. C'est ce qui a été consigné dans ce procès-verbal.

9 R. Oui. Permettez-moi simplement d'essayer de trouver le passage concerné.

10 Voici, ce qu'il a dit. Je vais vous en donner lecture lentement. Je cite :

11 "J'ai entendu ou plutôt le général Ciaglinski a dit que DZ était Kacanik et

12 qu'il avait établi qu'il y avait eu des confrontations, qu'il y avait des

13 tirs, que certaines maisons avaient été endommagées, mais qu'il n'y avait

14 pas eu d'acte de pillage. Certaines maisons avaient été fouillées puisque

15 l'UCK avait mené des tirs à partir de ces maisons, ce qui était considéré

16 comme une procédure normale, donc la fouille de telles maisons. Si bien que

17 la situation était complètement différente de ce que décrivait les médias

18 et l'UCK à savoir que les villages avaient été détruits, incendiés, et

19 cetera. Il a ajouté qu'un témoin sur le terrain serait près à contester les

20 allégations de l'UCK." C'est ce qu'il dit dans son rapport.

21 Q. Comment se fait-il qu'il vous est informé de cela, qu'il nierait les

22 allégations, mais que dans le livre bleu qui vous a été présenté par M.

23 Nice, il est dit ce que Drewienkiewicz avait établi n'était pas conforme à

24 la réalité.

25 R. Ce procès-verbal a été établi par M. Soskic du ministère fédéral des

26 Affaires étrangères. Il y avait également beaucoup de gens qui venaient de

27 diverses ambassades. C'était un homme très fiable qui parlait très bien

28 anglais. Slana a signé ce document, c'était quelqu'un qui travaillait dans

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1 notre antenne sur le terrain. Il n'y avait aucune raison qu'il ne signait

2 pas ce qui était écrit.

3 Quand le livre bleu a été mentionné je voudrais simplement dire que

4 j'ai douté la sincérité de celui qui avait établi ce procès-verbal, quand

5 vous me l'avez montré, quand M. Nice aussi me l'a montré, et apparemment on

6 a présenté les choses de manière différente dans un cas et dans un autre.

7 Je sais qu'il y a une équipe qui n'occupait -- qui n'autorisait pas les

8 vérificateurs à faire leur travail sur leur terrain. Il y a même des cas où

9 certains ont refusé de signer des procès-verbaux ou des comptes rendus.

10 Cela a été présenté dans une pièce à conviction ici. Il y a eu des

11 documents au sujet d'une explosion à côté d'une mine, à côté de Morina. Il

12 y a une enquête sur le terrain mais ils n'ont pas voulu ensuite signer le

13 rapport concerné.

14 A Pristina, dans le cas de la Mission de Vérification, on

15 réunissait, on ressemblait toutes les informations, on les classifiait, on

16 décidait de ce qui était important ou pas. Ils ont dit qu'ils n'avaient pas

17 confiance dans tous les vérificateurs parce qu'ils n'avaient pas

18 l'expérience requise pour ce faire. Si le général DZ n'a pas été en mesure

19 de vérifier un point donné sur le terrain lui-même, je ne vois pas qui

20 d'autre aurait pu le faire et qui aurait pu déterminer ce qu'il en était,

21 alors qu'on ne peut pas dire que ce procès-verbal a été rédigé comme le dit

22 M. Nice. Il s'agissait d'un rapport établi pour informer notre propre

23 structure, donc je ne vois pas pourquoi on aurait tenu des propos erronés.

24 Ce n'était pas notre objectif.

25 Q. J'ai une question au sujet de ce que vous a demandé M. Nice sur les

26 propos de Ciaglinski. Il dit que vous lui avez fourni des cartes présentant

27 nos positions, des cartes qui ensuite ont été utilisées par l'OTAN.

28 R. C'est un mensonge éhonté. M. Ciaglinski, il était accompagné d'un

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1 général de Brigade irlandais me semble-t-il quand il est venu me voir. Je

2 n'en suis pas sûr à 100 %. Il est venu à plusieurs reprises avec un général

3 de Brigade irlandais qui est venu assister à notre réunion, il est possible

4 que je lui aie donné ces cartes en sa présence. Ils avaient demandé ces

5 cartes afin de disposer de sources d'information diverses. Ils avaient des

6 cartes, nous en avions d'autres. Il y avait certaines discordances entre

7 ces cartes, l'échelle, comme je l'ai dit, c'était une échelle au 100

8 millième, et il n'y avait aucune indication du déploiement des troupes sur

9 ces cartes. Si la carte en question, dont il a parlé, existe, je voudrais

10 bien la voir.

11 Q. Si j'ai bien compris vous avez fourni ces cartes pour éviter tout

12 malentendu dû aux différences entre les cartes dont disposait la Mission de

13 Vérification et celles que nous avions nous.

14 R. Oui, c'est la raison essentielle.

15 Q. C'est ce que vous avez fait, vos supérieurs étaient au courant, ceci

16 s'est fait sans aucune, comment dirons-nous, complications ?

17 R. Non, aucune complication. J'étais membre de l'état-major du corps. J'ai

18 informé le corps de tout ce qui s'est passé, des rapports quotidiens

19 étaient rédigés. Donc, cela ne s'est pas fait en sous main. Bien entendu,

20 il a fallu d'abord que je reçoive ces cartes et, dès que je les ai eues

21 entre les mains, je les ai remises, je les ai transmises. Quand on demande

22 à recevoir des cartes, il faut expliquer pourquoi on a besoin de ces

23 cartes. Est-ce qu'il s'agit de cartes destinées à une utilisation dans le

24 cadre de manœuvre, de combat, et cetera. On ne peut pas demander de cartes

25 comme cela sans autre forme de procès.

26 Q. Merci. C'est tout à fait compréhensible, mon Colonel. Je n'ai plus de

27 question. J'en ai terminé.

28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Comme vous l'aurez constaté, Monsieur Robinson,

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1 mes questions supplémentaires -- et je n'ai eu besoin que de très peu de

2 temps pour le faire.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Colonel, nous en avons terminé de

4 votre déposition. Je vous remercie.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie aussi.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez partir.

7 M. NICE : [aucune interprétation]

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] On a fait une photocopie du calepin

9 du témoin. On peut lui rendre.

10 M. NICE : [interprétation] J'aimerais, dès que le témoin soit parti pouvoir

11 intervenir, faire une observation, et ensuite j'aurais autre chose à dire,

12 mais cela sera avec votre permission audience à huis clos partiel.

13 [Le témoin se retire]

14 M. NICE : [interprétation] Pendant la nuit nous avons examiné ce qui figure

15 dans ce livre, je ne vais pas demander à ce que cela soit versé au dossier.

16 Ce qui est gênant dans ce genre de pièce qui a été présentée suite à une

17 remarque accessoire de l'accusé, enfin, ce qui est gênant c'est la chose

18 suivante. Pour moi, ce n'est pas un document qui date de l'époque où ces

19 événements ont eu lieu, mais il est important que nous disposions de ce

20 type de document à l'avance.

21 Bien entendu, j'aurais pu poser des questions, j'aurais dû poser des

22 questions au sujet de cette pièce mais cela nous aurait pris beaucoup de

23 temps. C'est pourquoi je ne demanderais pas à ce que cela soit versé au

24 dossier.

25 J'aimerais pouvoir m'exprimer devant vous pendant une minute à

26 huis clos partiel, vous comprendrez pourquoi.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] A huis clos partiel.

28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Auparavant, pourriez-vous nous expliquer

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1 -- vous estimez que ce calepin, ce petit livre n'a pas été établi au moment

2 des faits ?

3 M. NICE : [interprétation] Il y a plusieurs raisons qui expliquent mon

4 refus. D'abord quand on regarde ce carnet, ce calepin, la manière dont il a

5 été rédigé, dont il est -- tout est impeccable, on regarde l'encre utilisé,

6 les dates choisies. Il y a beaucoup d'éléments qui me font douter de cette

7 pièce --

8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cela ne suffit pas nécessairement que le

9 témoin est fabriqué ce petit calepin.

10 M. NICE : [interprétation] Ses réponses aussi me troublent. Il dit qu'il ne

11 tenait pas de calepin, mais il en existe pourtant un qui n'a pas été

12 enregistré, enfin, et cetera. Il n'y a aucune continuité chronologique. On

13 a l'impression que tout est écrit au même moment, avec la même écriture. Il

14 y toute sorte d'éléments au sujet de cette pièce, qui me font douter.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, il est regrettable

16 que vous fassiez ce genre de remarques au sujet du témoin et de son carnet

17 et que vous ne les ayez pas fait devant le témoin.

18 M. NICE : [interprétation] Je n'ai pas eu le temps, justement parce que

19 l'accusé nous a présenté ceci de manière trop tardive. S'il souhaite

20 présenter des documents contemporains, il aurait du le dire à l'avance.

21 Sans parler de ce témoin en particulier, tous les documents qui

22 présentent des documents réalisés au moment des événements auraient du être

23 présentés d'une remise de ces documents dans le cadre d'une demande

24 d'assistance ou parce que c'est très gênant quand tout ceci se passe à la

25 dernière minute. Donc, soit on en parle à la dernière minute ou on oublie

26 complètement ce type de pièces parce qu'on n'a pas le temps tout

27 simplement.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cela m'étonnerait, Monsieur Nice, que

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1 vous ayez accepté ce type d'intervention de la part de l'accusé. Là vous

2 êtes en train de faire des implications au sujet du témoin, de notre

3 évaluation de ce témoin. Je veux dire très clairement que ce que vous venez

4 de dire n'interviendra pas dans mon jugement de ce témoin. Il est possible

5 que la situation change à l'avenir, mais je souhaitais le dire très

6 clairement déjà.

7 M. NICE : [interprétation] Très bien. Il n'en reste pas moins que ce type

8 de documents, quand il nous est présenté de cette manière produit toujours

9 ce type de problèmes. Les autorités savent très bien que -- les Juges

10 savent très bien que les autorités en questions s'amusent du tribunal

11 s'agissant des documents.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je n'accepte pas ce type de

13 commentaires totalement irresponsables, vous n'avez pas à le faire de même

14 que l'accusé n'a pas à les faire. Le Tribunal n'est pas le joué des

15 autorités, ce n'est pas le point de vue de la Chambre.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'entends bien votre argument. C'est

17 le seul argument valable que vous fassiez à savoir qu'il est difficile pour

18 vous de trouver des documents établis au moment des faits. Cela c'est tout

19 à fait acceptable.

20 Mais la deuxième chose que je voudrais dire, c'est que vous savez

21 qu'il va y avoir une audience s'agissant des efforts entrepris pour trouver

22 un certain nombre de pièces, de documents dont vous aurez l'occasion

23 d'intervenir comme vous venez de le faire à ce sujet. Mais à ce moment-là,

24 le temps, et le moment et l'endroit seront bien choisis. Les partis seront

25 appelés à parler de tout cela mais le moment n'est pas venu aujourd'hui

26 pour faire ce type d'allégations.

27 M. NICE : [interprétation] Je justifierais ce que je viens de dire lors de

28 cette audience. Je ne connais pas les détails de cette audience, mais je

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1 sais quel est son but général. J'en terminerai sur ce point, en répétant ce

2 que j'ai déjà dit. En insistant sur le fait que l'accusé doit savoir que la

3 Chambre sera grandement assistée si on -- la prévient à l'avance, et si on

4 lui donne à l'avance les pièces fournies par les témoins lorsqu'ils

5 arrivent dans le prétoire. Parce que s'ils ne les fournissent que

6 lorsqu'ils arrivent dans le prétoire, c'est fort gênant.

7 Peut-on maintenant passer à huis clos partiel ?

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Huis clos partiel.

9 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

10 [Audience à huis clos partiel]

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14 [Audience publique]

15 L'ACCUSÉ : [interprétation] S'agissant de l'objection soulevée par M. Nice

16 au sujet du calepin de M. Kotur, du colonel Kotur. J'imagine que vous

17 savez, tout comme moi, qu'il a exprimé un grand nombre de doute. Il a,

18 notamment, semblé suggérer que tout ce qui figurait dans ce document avait

19 pris au même moment, que c'était un document qui n'avait rien

20 d'authentique. Il a également dit que ce calepin était extrêmement en bon

21 état, dans un état impeccable. Or, j'ai des livres qui m'appartiennent et

22 qui sont extrêmement en bon état aussi. Simplement, peut-être une éducation

23 du fait que le colonel Kotur est une personne extrêmement soigneuse. On

24 peut tout à fait présenter ce document à des experts qui pourront tout à

25 fait nous dire s'il s'agit d'un document contemporain des faits ou pas.

26 Autre chose, moi-même, j'ignorais qu'il disposait de ce calepin. Je

27 souhaite simplement vous rappeler qu'en réponse à des questions qui lui ont

28 été posées, il a dit que soudain, il s'en est souvenu parce que ces

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1 éléments d'informations figuraient dans ce carnet. C'est à ce moment-là

2 qu'il est apparu ce fameux carnet et je n'en avais pas parlé à l'avance

3 parce que j'ignorais son existence. S'il m'avait pendant la séance de

4 récolement qu'il avait ce carnet, j'en aurais parlé. Je l'aurais lu. Le Pr

5 Rakic l'aurait lu, l'un de mes collaborateurs l'aurait lu si bien que ce

6 carnet, il a surgi de manière tout à fait spontanée. Le colonel Kotur

7 l'avait sur lui. Vous avez vu comment il l'a sorti de sa poche.

8 Donc, je n'accepte pas que l'on formule de types de doute ainsi au

9 sujet d'un très haut gradé de l'armée yougoslave et ceci au sujet d'un

10 carnet qu'il a présenté en toute bonne foi et qu'il a -- quand on le lui a

11 demandé et qu'il a mentionné donc, avec les meilleures intentions du monde.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Milosevic. La

13 Chambre a déjà intervenu suite aux observations faites par le Procureur. En

14 fait, il l'a rappelé à l'ordre sur ce point, cette pièce ne fait pas partie

15 du dossier. Je prends note de vos observations selon laquelle certaines

16 personnes sont plus soigneuses que d'autres lorsqu'il s'agit de leur livre.

17 Votre témoin suivant.

18 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai une question d'ordre administrative à

19 soulever avant le témoin suivant. Cela ne nous prendra que quelques

20 instants.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Allez-y.

22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, j'aimerais que vous rendiez

23 une décision au sujet de mon traitement médical à l'institut de Moscow. Je

24 voudrais vous faire remarquer que, depuis le mois d'août, j'ai des

25 problèmes. Ceci a été confirmé par le

26 Dr Dalal, de l'université de Leiden, et cela me crée beaucoup de soucis.

27 Cela me perturbe beaucoup. Les experts de l'institut de Moscow estiment que

28 ces problèmes que je rencontre sont des problèmes d'ordre vasculaire et

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1 qu'ils peuvent me soulager et j'estime que ce type de traitement médical

2 est absolument indispensable en ce qui me concerne et j'aimerais que vous

3 rendiez une décision sur ce point.

4 Voilà tout ce que j'avais à dire.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La Chambre a récemment reçu les

6 dernières informations lui permettant de délibérer de manière

7 circonstanciée sur cette question et nous rendrons notre décision dans très

8 peu de temps.

9 Témoin suivant.

10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Le Pr Branko Kostic est mon témoin suivant.

11 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vais demander au témoin de

13 prononcer la déclaration solennelle.

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai

15 la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

16 LE TÉMOIN: BRANKO KOSTIC [Assermenté]

17 [Le témoin répond par l'interprète]

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez prendre place.

19 M. Milosevic, vous pouvez commencer.

20 Interrogatoire principal par M. Milosevic :

21 Q. [interprétation] Bonjour, Professeur Kostic.

22 R. Bonjour, Monsieur Milosevic.

23 Q. Pourriez-vous nous donner le plus succinctement possible les

24 informations essentielles vous concernant, lieu de naissance, date de

25 naissance et cetera ?

26 R. Je suis né, le 28 août 1939, à Rvasi, dans la municipalité de Cetinje,

27 au Monténégro. J'ai été à l'école élémentaire à Rvasi dans mon village

28 natale. Ensuite, j'ai poursuivi ma scolarité au pensionnat ou d'un

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1 orphelinat parce que mon père a été exécuté par les fascistes italiens, en

2 1942. En conséquence, j'ai passé mon enfance dans des orphelinats -- dans

3 plusieurs orphelinats, Zagreb, Herceg-Novi, Kotur. Voici les villes où j'ai

4 été scolarisé et j'ai terminé mes études secondaires à Titograd, près de

5 Podgorica. Ensuite, j'ai suivi les cours de l'université de Belgrade en

6 économie. C'est là que j'ai été diplômé, que j'ai eu ma maîtrise et,

7 ensuite, que j'ai fait ma thèse -- où j'ai obtenu ma thèse de doctorat.

8 Après l'université, j'ai accompli mes obligations militaires à l'école des

9 officiers de réserve de Zadar dans l'école d'artillerie et, ensuite, j'ai

10 été à Niksic où j'ai fait un stage.

11 Après, j'ai commencé à vivre à Podgorica, au Monténégro. C'est là que

12 j'habite encore. Je suis marié. Ma femme aussi a une thèse, enfin, une

13 thèse en économie. Elle est membre de l'académie des Sciences et des Arts

14 du Monténégro. Nous avons deux filles. La plus âgée a un doctorat en

15 électroencéphalogramme. Elle travaille dans ce domaine dans le secteur de

16 la recherche et la benjamine, quant à elle, a un doctorat en Droit privé

17 international. Elle enseigne à l'université de Monténégro à Podgorica.

18 Q. Merci. Pourrez-vous nous parler en quelques mots de votre carrière, de

19 votre parcours professionnel, des différents postes que vous avez occupés,

20 et de votre carrière politique également ?

21 R. Pour ce qui est de mon premier poste dans ma profession, c'était un

22 poste politique. Dans l'organisation, j'étais secrétaire de la Ligue des

23 Communistes du comité universitaire de cette ligue à l'université de

24 Belgrade. Je suis resté dans ces fonctions pendant un an et demi parce que

25 j'étais encore étudiant, mais c'était quand même un travail professionnel.

26 Une fois que j'ai terminé mes études après avoir obtenu mon diplôme, je

27 suis rentré à Titograd, à Podgorica, avec un an et demi de service. Puis,

28 j'ai travaillé pendant cinq ans en tant que président professionnel de

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1 l'organisation de la Jeunesse au Monténégro parce que je ne voulais

2 m'éloigner de mes activités, de ma formation. Donc, j'ai commencé à

3 travailler dans une entreprise qui produisait de l'aluminium et j'ai été

4 directeur pendant dix ans.

5 Puis, j'ai commencé à travailler à la faculté technique de l'université du

6 Monténégro. Pendant huit ans, j'ai travaillé à l'institut de Recherche

7 technique tout en enseignant, en donnant des cours aux étudiants de toutes

8 les facultés techniques. Mais j'ai donné des cours d'économie politique.

9 Cela faisait partie du programme de cursus des universités, des facultés

10 techniques et j'ai exercé ces fonctions jusqu'à ma retraite, retraite que

11 j'ai prise l'année dernière. J'avais une chair à l'université. J'ai eu

12 quelques fonctions politiques aussi.

13 De 1986 à 1989, j'étais vice-président du conseil exécutif du

14 Monténégro dans le gouvernement de M. Vuka Vukadinovic. Puis, je suis

15 devenu président de la présidence du Monténégro. Je suis resté à ces

16 fonctions pendant deux ans. Puis, pendant l'espace de quelques mois, j'ai

17 été président de la délégation du Monténégro dans la Chambre des

18 républiques et des provinces de la RSFY. Après, j'ai été élu à la

19 présidence de la RSFY. Un mois et demi après cela, je suis devenu vice-

20 président de la présidence de la RSFY.

21 Vers le 15 juin 1992, je me suis retiré de la vie politique. Je suis

22 revenu à l'université du Monténégro et c'est là que j'ai terminé ma

23 carrière.

24 Q. Pourriez-vous en quelques mots nous dire quelles étaient les

25 attributions de la présidence du Monténégro lorsque vous avez occupé ces

26 fonctions ?

27 R. J'ai été président de la présidence du Monténégro de 1989 à 1990. En

28 vertu de la constitution du Monténégro, c'était un organe collégial. Il y

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1 avait quatre autres membres de la présidence, à part moi, et je le disais

2 aux termes de la constitution, c'était surtout des fonctions officielles de

3 cérémonie parce que le travail -- la politique intérieure, la politique

4 étrangère était du ressort du gouvernement. C'était quand même des

5 fonctions de représentation très élevées que celle de la présidence. Nous

6 avons, puisque nous étions en haut de la voie hiérarchique reçu des

7 informations non seulement sur ce qui se passait au Monténégro mais aussi

8 au sein de la RSFY.

9 Q. Vous avez parlé de 1989 et 1990. Vous avez de façon régulière reçu des

10 renseignements sur ce qui se passait en Yougoslavie, dans toute la

11 Yougoslavie.

12 R. Oui.

13 Q. C'est ainsi que je dois comprendre vos propos ?

14 R. Oui, tout à fait.

15 Q. Après 1990, vous êtes devenu président de la délégation du Monténégro

16 dans la chambre des républiques et des provinces à RSFY, n'est-ce pas ?

17 R. Oui, en ce qui concerne ces attributions-là, et ceci est vrai de tout

18 pays, c'est le parlement qui est ainsi représenté qui assure une fonction

19 législative. Mais puisque j'étais président de la délégation du Monténégro

20 dans cette assemblée, nous avons suivi de très près tout ce qui se passait,

21 et à ce moment-là, il se passait des choses assez spectaculaires. Il se

22 peut que des informations reçues n'aient pas été aussi détaillées que

23 celles que je prenais, en tant que président de la présidence. Vous saviez

24 certains bulletins d'information qui émanaient du secrétariat de

25 l'Intérieur de la République, mais aussi du secrétariat fédéral de

26 l'Intérieur.

27 Nous avions aussi des bulletins d'information contenant des renseignements

28 venant des services diplomatiques, du service du ministère des Affaires

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1 étrangères.

2 Q. Vous parlez d'informations confidentielles.

3 R. Oui.

4 Q. Aussi au quotidien, pendant que vous avez été président du Monténégro,

5 vous avez reçu des informations confidentielles venant des services

6 étrangers, des services diplomatiques, vous saviez ce qui se passait en

7 Yougoslavie ?

8 R. Bien entendu, à ce titre, j'avais des réunions, des discussions, en

9 plus des renseignements que tout citoyen reçoit par les médias. Nous avons

10 suivi les activités du gouvernement, au niveau de la République, aussi au

11 niveau de l'Etat, donc nous avons vraiment été mis au courant de tout ce

12 qui se passait.

13 Q. En ce qui concerne le Monténégro, quelles étaient vos fonctions et quel

14 était votre avis ?

15 R. Il y a eu un changement de gouvernement quand tout ceci s'est passé,

16 souvent dans nos contrés on disait que c'était la volonté du peuple qui se

17 réalisait. J'étais premier ministre, il y avait toute de sorte de

18 turbulence et des rassemblements populaires, on n'a jamais demandé,

19 personne n'a demandé au gouvernement du Monténégro de démissionner, mais

20 c'est nous au sein du gouvernement qui avons décidé de le faire. Pourquoi ?

21 Parce qu'on s'est dit que ces grands rassemblements populaires demandaient

22 la démission du gouvernement, la démission de ceux qui occupaient les

23 postes le plus élevé au niveau de la RSFY, donc de la fédération, et nous

24 nous sommes dit que nous devions démissionner aussitôt pour essayer

25 d'entraîner un apaisement de la situation, pour que la situation trouve des

26 solutions. Mais nous nous sommes dit effectivement qu'il serait plus aisé

27 de demander -- que ce serait plus aisé que de demander à d'autres de

28 démissionner puisqu'on demandait des démissions. La situation était assez

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1 dramatique à Titograd.

2 Q. Pourquoi est-ce que la population était frustrée par la politique menée

3 jusqu'à lors -- Monténégro ?

4 R. Il faudrait sans doute beaucoup de temps pour y répondre, mais je vais

5 essayer d'être bref.

6 Q. Soyez le plus concis possible.

7 R. Promis. Il y a eu à cela plusieurs raisons. A mes yeux, et mon avis

8 provient peut-être du fait que je suis économiste de profession, je suis

9 convaincu que si tout cela s'est passé à ce moment-là c'est notamment pour

10 des raisons de nature économique. Je vous parle de la perception que j'ai

11 de ce que j'ai vécu au Monténégro.

12 Toute l'économie du Monténégro était vraiment en état de crise aigue, et

13 était sur le point de s'effondrer. Il y avait, bien sûr, la présidence du

14 Monténégro dont j'ai fini par faire partie, mais je parle de la précédente

15 équipe, avec Bozin Ivanovic [phon], qui était de l'académie qui en avait

16 été le président, donc, je parle de ces présidences, des gouvernements

17 aussi, du gouvernement de l'époque mais du précédent. C'est vrai qu'on se

18 trouvait dans une situation économique déplorable. Nous étions - comment

19 dire - très frustré par le gouvernement fédéral, par M. Ante Markovic,

20 parce que nous étions sûrs qu'il s'occupait davantage de questions

21 politiques et il cherchait plus à établir son propre parti politique qu'il

22 ne s'intéressait à ses activités de premier ministre, il aurait dû

23 s'occuper de l'économie pour essayer de la redresser, notamment, au

24 Monténégro.

25 Je vais vous donner un exemple de ce qui se passait en matière d'économie.

26 Le Monténégro c'était une zone sous développée, et comme c'est vrai

27 d'autres zones sous développées au Monténégro, à partir du fonds visant à

28 accélérer le développement dans les zones sous développées, effectivement,

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1 le Monténégro a bénéficié de cette aide. Vous savez que c'était un système

2 multipartite encore, la présidence et le comité central de Ligue communiste

3 de Yougoslavie. La présidence de Yougoslavie, en tant qu'organe de l'Etat,

4 pensait qu'en fait, il n'y avait pas suffisamment d'aide qui était

5 apportée.

6 Par conséquent, afin d'accélérer le développement du Monténégro, on a

7 permis au Monténégro de faire des emprunts à l'étranger, et le Monténégro

8 l'a fait. Il a obtenu plusieurs emprunts. Notre devise n'était pas

9 convertible à l'époque, alors qu'elle est aujourd'hui. Nous avions des

10 dinars yougoslaves, et ces emprunts en devise étrangère, le Monténégro ne

11 les a obtenues pas en devise internationale mais en dinars; cependant, les

12 devises internationales, qui étaient consignées à la banque nationale,

13 étaient disponibles apportent des économies plus développées comme la

14 Slovénie et la Croatie, qu'ils les ont utilisées pour augmenter leurs

15 capacités économiques. Mais, à un moment donné, il a bien fallu rembourser

16 ces emprunts et le Monténégro, à ce moment-là, il a dû rembourser en

17 devises internationales.

18 Vu la situation économique, les entreprises monténégrines ont dû

19 puiser dans toutes leurs ressources et les épuiser parce qu'il a fallu

20 utiliser les dinars pour acheter à la banque nationale ces devises

21 internationales pour rembourser des emprunts. On a trouvé une solution au

22 gouvernement fédéral pour aider le Monténégro a paré à cette situation pour

23 faire face à ce déficit au niveau des devises internationales parce qu'il y

24 avait un problème de taux de change.

25 Qu'est-ce qui s'est passé ? Le gouvernement fédéral et le premier

26 ministre, Ante Markovic, avaient pratiquement un an d'arriéré

27 -- de retard pour ce qui est du paiement au Monténégro de cette somme

28 provenant du taux de change différent, mais le Monténégro n'avait pas

Page 47609

1 d'autre choix que de faire des emprunts à court terme sur le marché.

2 Q. En quelques mots, le comportement du gouvernement fédéral a placé le

3 gouvernement du Monténégro dans la difficulté.

4 R. J'allais et venais. Je vous parlais de ces taux d'intérêt pour les

5 prêts qu'il a fallu faire parce que le gouvernement fédéral avait pris du

6 retard dans leur remboursement au Monténégro et le Monténégro a dû utiliser

7 300 milliards de dinars.

8 Nous avions ces difficultés économiques et nous avons eu d'autres aussi,

9 qu'en somme toute, lorsque les gens disent que nous avons, en fait, eu les

10 yeux plus grands que le ventre, que nous voulions du gâteau plutôt que du

11 pain, tout ceci a entraîné ces grands rassemblements populaires. Mais il

12 n'y a pas que cela. On a commencé à voir s'afficher un certain nationalisme

13 et cela remonte à longtemps. Nous connaissons tous le printemps croate de

14 1971, et du fait de la participation à certains mouvements nationalistes,

15 certains dont certains qui plus tard sont devenus de grand commis de

16 l'Etat, notamment, Stipe Mesic, ils ont été internés, et mis en prison en

17 1981. Il y a aussi de grosses manifestations d'extrémisme et séparatisme en

18 Kosovo. Plus tard, surtout après la mort de Tito, en 1980, la situation a

19 commencé à se détériorer au Kosovo, donc, c'était en 1980, et des forces

20 sécessionnistes ont commencé à gagner du terrain.

21 Les Républiques et les dirigeants de Slovénie et de Croatie, même à

22 l'époque, étaient favorables à la direction du mouvement séparatiste au

23 Kosovo parce qu'ils se disaient que si la situation se détériorait au

24 Kosovo, s'il y avait rébellion insurgée, il ne serait que plus facile pour

25 eux de faire une sécession et de devenir indépendant.

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie d'avoir ce genre

27 d'informations, mais je pense qu'il serait préférable de poser plus de

28 questions et d'avoir des réponses brèves. Ce serait préférable à ces longs

Page 47610

1 récits.

2 M. MILOSEVIC : [interprétation]

3 Q. Professeur Kostic, pour l'essentiel, vous venez d'expliquer pourquoi il

4 y avait cette insatisfaction populaire. La raison était surtout économique

5 mais, il y avait dans une certaine mesure aussi, des raisons politiques à

6 cela.

7 L'INTERPRÈTE : Signe affirmatif du témoin.

8 Q. Est-ce ainsi qu'on peut faire la synthèse ?

9 R. Oui.

10 Q. Quelles étaient les revendications populaires ?

11 R. Mais, vous voyez au Montenegro. Beaucoup d'habitants du Montenegro,

12 après la Première guerre mondiale, même ceci après la Deuxième guerre

13 mondiale, habitaient dans la zone du Kosovo-Metohija qu'on appelait, le

14 Metohija. Il y avait beaucoup de gens originaires du Montenegro dans cette

15 région et, d'ailleurs, Montenegro, c'est tout petit, tout le monde se

16 connaît, il faut le savoir. Ceux qui étaient partis s'installer au Kosovo

17 avaient laissé au Monténégro des membres de leur famille élargie, des

18 parents. Donc, ceci a constitué une pression exercée pendant des décennies.

19 Q. Sur qui ?

20 R. Sur les monténégrins qui ont dû rentrer au Monténégro. Ceci a semé la

21 frustration, le mécontentement dans la population parce qu'aux yeux des

22 Monténégrins, les autorités fédérales n'étaient pas suffisamment actives,

23 il faut le savoir. Après la Première guerre mondiale, Pec avait le plus

24 grand nombre de Monténégrins dans sa population par rapport à sa population

25 rurale.

26 Q. Qu'est-ce qui s'est passé plus tard ?

27 R. Des dirigeants serbes ont réussi à obtenir un accord pour ce qui est de

28 la direction du Parti fédéral au niveau du comité central afin que soient

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1 adoptées les modifications de la constitution. En effet, jusqu'à lors, la

2 Serbie se trouvait en situation d'inégalité par rapport à d'autres. La

3 Serbie avait deux provinces autonomes et l'assemblée de chacune de ces deux

4 provinces pouvait adopter les actes législatifs sans l'aval de la Serbie,

5 alors que la Serbie avait besoin de l'approbation de ces deux provinces

6 pour apporter des modifications législatives. Donc, il y a eu, si vous

7 voulez, cette tension au niveau fédéral qui a duré deux ou trois ans.

8 Finalement, la Serbie a réussi à modifier sa constitution. Il est tout à

9 fait inexact. C'est faux de dire que la Serbie a mis fin à l'autonomie de

10 ces provinces de cette façon.

11 Les dirigeants au Kosovo, au Metohija d'une part et ceux de la Vojvodine

12 d'autre part, avaient des ambitions sécessionnistes -- ou plutôt, disons,

13 des ambitions autonomistes, si l'on peut dire. Seul un mouvement populaire

14 pouvait entraîner un changement au niveau de ces dirigeants.

15 Je parlais de la situation qui prévalait au Monténégro. Ce que je

16 vous en ai dit, cela veut dire que ceci a une incidence sur nous aussi. Nos

17 dirigeants au Monténégro semblaient assez indifférents au sort des

18 Monténégrins qui se trouvaient au Kosovo et qui ont dû partir. Leur

19 comportement a provoqué une révolte.

20 En août 1988, il faut savoir qu'en août, il faut très chaud au

21 Monténégro. Vous pouvez avoir des températures de 40, même de 45 degrés. Il

22 y a eu un rassemblement, il était supposé être organisé dans l'après-midi

23 quand il ne fait pas si chaud. Il devait commencer à 16 heures. Le

24 ministère de l'Intérieur a permis la tenue de ce rassemblement, mais à midi

25 seulement. Les masses ont bien compris que c'était là une provocation et

26 ceci a encore exacerbé ce sentiment de frustration.

27 Q. Mais comment est-ce que ces rassemblements se sont terminés, ces

28 rassemblements de protestation ?

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1 R. Plus ils duraient, plus il y avait de participants. Les dirigeants du

2 parti y compris se sont vus poussés à la démission ou du moins on exigeait

3 qu'ils démissionnent. Ceux qui étaient à la tête de l'Etat du Monténégro

4 ont effectivement démissionnés ou présentés leur démission en janvier je

5 crois.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous avez parlé d'un

7 rassemblement en 1998 ? C'est ce que dit le compte rendu d'audience.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai parlé de 1998, mais je me suis aussitôt

9 corrigé et j'ai dit 1988.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Autre chose. Vous parlez maintenant de

11 la démission de la direction du parti auparavant. Vous avez dit qu'à

12 l'époque, vous étiez premier ministre. Mais dans le premier résumé que vous

13 avez fait de votre curriculum vitæ, vous n'avez pas dit que vous aviez été

14 premier ministre. Est-ce que c'est une autre erreur d'interprétation ou

15 est-ce qu'à un moment donné vous avez été premier ministre ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai été président du conseil exécutif. Oui,

17 cela devrait être une erreur d'interprétation parce que je n'ai jamais dit

18 ce matin que j'étais premier ministre. J'ai dit que j'ai été vice-premier

19 ministre au gouvernement du premier ministre Vuka Vukadinovic; c'est ce que

20 j'avais dit.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous avez dit que vous

22 étiez vice-président du conseil exécutif ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

24 M. MILOSEVIC : [interprétation]

25 Q. Je vais vous donner une situation, paragraphe 78 de l'acte

26 d'accusation, Kosovo. A commencer par -- ou en commençant par : "A partir

27 de juillet 1988 et jusqu'en mars 1989, il y a toute une série de

28 manifestations et de rassemblements d'appui à Slobodan Milosevic et ceci a

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1 entraîné la démission des gouvernements de la république et de la province,

2 et à la mise en place d'un gouvernement qui soutenait Slobodan Milosevic."

3 Est-ce que ces rassemblements populaires, ces manifestations en Vojvodine

4 et au Monténégro soutenaient Slobodan Milosevic ou est-ce que ces

5 manifestations et rassemblements poursuivaient d'autres objectifs ? Ne

6 répétez pas ce que vous avez déjà dit.

7 R. Je ne pourrais pas vous parler avec autant de certitude de ce qui se

8 passait en Vojvodine, mais je vous ai dit que même la direction en

9 Vojvodine, en dépit des modifications apportées à la constitution de Serbie

10 avait des ambitions séparatistes et qu'il y avait des pressions exercées

11 sur ces personnes pour qu'elles démissionnent et soient remplacées.

12 Q. Donc, c'est tout à fait bien si vous ne répondez que du Monténégro. Je

13 vais vous citer un paragraphe de l'acte d'accusation mais s'il y a quelque

14 chose qui ne concerne pas le Monténégro, vous n'avez pas besoin de

15 répondre.

16 R. Pour ce qui est du Monténégro, ce ne serait pas honnête de ma part si

17 en faisant la direction de la situation à l'époque, je ne disais pas,

18 effectivement, votre nom était un nom au firmament du monde politique de

19 toute la Yougoslavie fédérale. C'était un climat d'indifférence à beaucoup

20 de problèmes qui régnaient et dans ce climat, vous, vous étiez assez jeune

21 à l'époque et vous êtes apparu comme quelqu'un dont on se souvenait. Je

22 m'en suis souvenu parce que, quand j'étais en deuxième année à

23 l'université, donc, je m'en souviens dans le cadre de mes activités dans le

24 parti puisque j'ai été secrétaire du parti à l'université. Après, je vous

25 ai perdu de vue, mais, apparemment, du jour au lendemain, vous êtes apparu

26 dans le monde politique de Serbie et de la Yougoslavie, et beaucoup vous

27 ont vu comme étant l'homme qui enfin, parviendrait à faire bouger les

28 choses, à mettre les choses en branle. C'était mon impression à moi, aussi.

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1 Lorsque j'ai été élu président de la présidence, j'ai accordé une

2 interview à un journal du parti, le journal Borba, et j'ai dit qu'il y

3 avait énormément de gens d'horizon politique divers qui s'étaient

4 rassemblés autour de cette foi, de ce mouvement, sans doute, avec des

5 attentes variées et diverses.

6 Q. Inutile d'aller si loin, mais je vous ai cité à un passage particulier.

7 Ces nouveaux gouvernements, est-ce qu'il soutenait

8 M. Milosevic ? Est-ce qu'ils étaient endettés, ils avaient une certaine

9 dette envers lui ? D'après ce que vous savez, est-ce que quelqu'un m'a

10 soutenu ou aurait organisé des manifestations de soutien et est-ce

11 qu'effectivement, ils m'étaient redevables et parce qu'ils m'étaient

12 redevables, ils auraient continué de me soutenir ? Est-ce que ceci cadre

13 avec ce que vous savez ?

14 R. Pour moi, cela me semble être des sornettes. Cela n'a pas de sens. Si

15 vous avez un gouvernement, des dirigeants qui vous soutiennent, il serait

16 normal que ce soit vous qui vous sentiez redevable et pas l'inverse.

17 Q. Merci. Je voulais en lisant ce paragraphe, simplement donner un exemple

18 du genre de chose qu'on trouve dans cet acte d'accusation. Quand êtes-vous

19 devenu président de la présidence de la RSFY ?

20 R. J'ai été élu par l'assemblée du Monténégro en 1991, au mois d'avril.

21 Vous savez qu'il y a un roulement à la présidence, roulement donc tous les

22 15 mai, on change; cependant, en vertu de la constitution, mon élection

23 devrait être confirmée par les deux Chambres de l'assemblée fédérale. Ce

24 qui n'avait pas été fait quand est arrivé le 15 mai. Cela s'est fait le 16.

25 C'est donc le 16 mai que je suis devenu président de la présidence de la

26 RSFY et, le 30 juin, puis, exactement, le 1er juillet, je suis devenu vice-

27 président de la présidence.

28 Q. En d'autres termes, vous avez été élu en mai ?

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1 R. En avril, par l'assemblée de Monténégro.

2 Q. Cette assemblée devait désigner des candidats à la présidence pour le

3 Monténégro ?

4 R. La présidence devait le confirmer.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous interromps. Peut-être qu'il y

6 a une autre difficulté qui a surgi au niveau du compte rendu. On dit que

7 vous êtes devenu président de la présidence, le 16 mai. Je pense que vous

8 êtes simplement devenu membre de la présidence, en mai.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. C'est une erreur.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je le répète. Cela a dû être une erreur

12 d'interprétation. Ce n'est pas ce que j'ai dit. Ce que j'ai dit c'est que

13 l'assemblée fédérale de la RSFY avait confirmé mon élection par l'assemblée

14 du Monténégro, le 16 mai. Mon élection a été confirmée en tant que membre

15 de la présidence de la RSFY et, à partir de ce moment-là, j'ai été membre

16 de la présidence de la RSFY. Cependant --

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

18 M. MILOSEVIC : [interprétation]

19 Q. Il n'y a qu'un mot qui n'est pas exact dans le compte rendu d'audience

20 qui s'affiche à l'écran. Il est écrit, "président," il faudrait lire

21 "membre." C'est la seule chose.

22 Je vous demande de répondre à cette question. Pourquoi est-ce qu'il y a eu

23 une crise au sein de la présidence de la RSFY vers le milieu de mars 1991 ?

24 R. Je le sais parce qu'à ce moment-là, j'avais déjà transmis mes

25 attributions de président du Monténégro à Bulatovic qui venait d'être élu,

26 mais j'étais à la tête de la délégation du Monténégro à l'assemblée

27 fédérale. L'opinion publique yougoslave comme internationale connaissait

28 bien les problèmes qu'il y avait et cette réunion notoire de la présidence

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1 de la RSFY, en mars, et qui a tellement duré de temps. Il y a eu des

2 problèmes.

3 Le problème fondamental c'est qu'il y a eu une paralysie des

4 activités de la présidence et ceci s'est reflété dans le fait qu'aux

5 échelons les plus élevés de l'armée yougoslave. Tout à fait correctement, à

6 mon avis, on a fait une analyse de l'évolution des événements et pour voir

7 comment la situation allait se développer et les dirigeants militaires ont

8 suggéré à la présidence de la RSFY, qui avait le rôle de commandant Suprême

9 des forces armées, ses dirigeants militaires ont suggéré qu'on mette en

10 place un état d'urgence, d'où crise, parce qu'il y avait quatre membres de

11 la présidence qui étaient opposés à cette idée et quatre qui étaient

12 favorables, d'où paralysie au niveau de la présidence.

13 Q. Quels auraient dû être les objectifs, quel aurait dû être le contenu

14 des mesures proposées afin d'empêcher un conflit armé international ?

15 R. Il y avait beaucoup de tensions au Kosovo et je dois vous dire qu'il y

16 avait un soutien manifeste des hommes politiques de Slovénie, de Croatie.

17 Donc, la situation devient de plus en plus tendue en Slovénie et en Croatie

18 même, à l'époque. Il y avait l'introduction clandestine d'armes pour armer

19 des formations paramilitaires, armes distribuées aux civils aussi, en

20 fonction de leur statut de membres du parti. Je vous l'ai dit c'était la

21 première fois après ou depuis la Deuxième guerre mondiale que se passait ce

22 genre de chose, à savoir que des civils recevaient des armes parce qu'ils

23 étaient membres du parti, d'un parti ou d'un autre. C'était vrai pour le

24 HDZ en Croatie. Mais une fois qu'on n'a plus le contrôle de la situation,

25 on a vu un phénomène d'armement de plus en plus fréquent de civils, en

26 Croatie c'était le HDZ, mais cela a été fait dans d'autres partis du pays.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le moment est venu de faire la

28 pause. Pause de 20 minutes.

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1 --- L'audience est suspendue à 10 heures 33.

2 --- L'audience est reprise à 10 heures 57.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, veuillez

4 poursuivre.

5 M. MILOSEVIC : [interprétation]

6 Q. Nous avons parlé de cette crise au sein de la présidence et nous avons

7 parlé des propositions du Grand état-major du commandement Suprême. C'est

8 ce que vous avez expliqué.

9 J'aimerais savoir quels étaient ces groupes qui s'armaient illégalement des

10 groupes desquels a parlé le commandement Suprême de l'état-major -- l'état-

11 major du commandement Suprême ?

12 R. C'étaient des formations paramilitaires en Croatie, des formations

13 paramilitaires en Slovénie. Les dirigeants slovènes se justifiaient en

14 disant qu'il ne s'agissait pas de formations paramilitaires que leur

15 Défense territoriale a été transformée en pratique en une armée, mais ils

16 ont dû, vu le fait que la Défense territoriale, d'après la constitution

17 yougoslave, faisait partie des forces armées de Yougoslavie, et tous ceux

18 dont nous parlons maintenant se situent pendant dans la première partie de

19 l'année 1991, or, il est écrit à l'acte d'accusation que la RSFY a existé

20 jusqu'en avril 1992.

21 On a armé des formations paramilitaires, on a armé des citoyens, et tout

22 simplement il fallait les désarmer.

23 Une seule donnée que je me suis servi à l'époque souvent pendant que

24 j'étais à la présidence de la RSFY, les forces de la police croates ont en

25 deux mois seulement ont accru de 17 000 policiers qu'elles avaient en temps

26 de paix à plus de 90 000 en espace de deux mois.

27 Q. Combien de temps a duré cet armement illégal des forces irrégulières en

28 Croatie ?

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1 R. Je ne pourrais vous dire exactement combien de temps cela a pris, mais

2 de toute évidence cela n'a pas pu se faire en une fois on n'a pas pu

3 importé tout cela en une fois de l'étranger secrètement. C'était surtout de

4 Hongrie que cela est venu.

5 Q. Très bien. Je vais vous poser quelques questions auxquelles je pense

6 que vous pourrez répondre par un simple oui ou non, mais bien entendu vous

7 êtes libre d'apporter des compléments si c'est indispensable, mais

8 seulement si c'est indispensable, s'il vous plaît.

9 Les autorités croates de l'époque, est-ce qu'elles ont admis le fait

10 qu'elles s'armaient illégalement ?

11 R. Non.

12 Q. Quelles étaient les preuves à l'appui de la constatation que cet

13 armement existait, qu'elles s'armaient illégalement ?

14 R. Il y avait les rapports des renseignements militaires et civils de

15 Yougoslavie, mais les autorités croates s'obstinaient à nier cela. Mais le

16 KOS de l'armée, le renseignement de l'armée, a fait un enregistrement

17 secret.

18 Q. On y viendra. Donc, il y a eu quelques preuves.

19 J'aimerais savoir si les autorités croates ont accepté de désarmer

20 ces unités irrégulières ?

21 R. Ces autorités croates ont accepté le désarmement de ces unités, si j'ai

22 été bien informé à ce sujet, uniquement à partir du moment où ce film a été

23 diffusé.

24 Q. Cette promesse et cet engagement a-t-il été tenu par les autorités

25 croates de l'époque ?

26 R. Non. A l'époque, je n'étais pas encore membre de la présidence, mais je

27 suivais avec beaucoup d'attention les événements. Il me semble que le 9

28 janvier, la présidence de la RSFY a pris une décision portant sur le

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1 désarmement de toutes les unités paramilitaires sur tout le territoire du

2 pays.

3 Q. Cette présidence quand est-ce qu'elle a pris cette décision ?

4 R. La présidence le 9 janvier. Puis, le 24 ou le 25 janvier, je ne me

5 souviens pas très bien -- les organes militaires et le tribunal de Zagreb

6 enfin le procureur militaire a engagé une enquête contre un certain nombre

7 de protagonistes de ces importations secrètes, puis, on a également demandé

8 l'arrestation, il y a eu un mandat d'arrêt contre le général Spegelj me

9 semble-t-il. Mais je crois qu'à l'époque le conseil croate de la Défense a

10 rejeté cette accusation disant qu'il était l'organisateur direct de cette

11 importation illégale d'armes, et il n'a pas été interpellé, il n'a pas été

12 arrêté, ni mis en prison.

13 Q. Vous avez évoqué ce film qui a été tourné par le service du

14 renseignement militaire, est-ce que vous savez pourquoi on a diffusé à la

15 télévision ce film sur l'armement clandestin croate ? Pourquoi est-ce qu'on

16 a diffusé ce film à la télévision ?

17 R. Je dois vous dire que c'est la question que je me suis souvent posée,

18 moi-même, à partir du moment où j'ai été devenu membre de la présidence.

19 Pour moi, naturellement, les services compétents auraient dû d'abord

20 s'occuper des protagonistes. Il ne fallait pas d'abord montrer le film à la

21 télévision avant de traduire devant les tribunaux, les auteurs. Ce film a

22 eu un grand impact sur toute l'opinion yougoslave et vous pouvez imaginer à

23 quel point, il a été effrayant et choquant aux yeux de la population serbe

24 de Croatie.

25 Q. Qui a demandé que l'on diffuse ce film ?

26 R. Je ne sais pas. Je pense que c'était le sommet de la hiérarchie

27 militaire.

28 Q. Très bien. Mais je vais demander que l'on ne voie qu'un petit extrait

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1 de ce film. Le Pr Rakic a eu la gentillesse d'aider à ce qu'on nous montre

2 ces films. Donc, j'espère que tout se passera bien.

3 [Diffusion de cassette vidéo]

4 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

5 Première bande. Au moment où le ministre s'adresse aux spectateurs de

6 la télévision croate :

7 "L'armement illégal de l'armée du HDZ se déroule à une vitesse qui

8 n'est que l'un des éléments qui révèlent qu'en Croatie, on est en train de

9 créer une armada terroriste. Même si des demandes formelles aux fins

10 d'armer l'armée du HDZ, sont présentées, également, les institutions

11 compétentes du pays. Les dirigeants de Croatie engagent des mécanismes

12 d'armement massif depuis les entrepôts étrangers. Le président de la

13 République, Tudjman, et le ministre de l'Intérieur, Bojkovic, prennent

14 contact avec des fabricants d'armes à l'étranger. Ce sont les Hongrois qui

15 leur ouvrent leur entrepôt militaire. Dès le 11 octobre 1990, un premier

16 colis d'armes transporté à bord de deux remorques de Cazmatrans de

17 Bijelova, a traversé la frontière entre la Yougoslavie et la Hongrie. Dans

18 deux entrepôts d'armement dans les environs de Budapest, on a adressé un

19 colis à Hero Astra [phon], de Zagreb. Le contenu du colis, 450 caisses avec

20 plus de

21 4 500 fusils automatiques Kalachnikov et la quantité de munitions adaptées,

22 nécessaires. Le secrétariat fédéral à la Défense, à cette occasion, s'était

23 adressé énergiquement, en avertissant les autorités militaires hongroises

24 en rappelant toutes les conséquences de ce comportement contraire à toutes

25 les conventions internationales.

26 "De Hongrie, de manière plutôt cynique, on a répondu qu'il s'agissait

27 simplement des affaires, du business et que le ministère de la Défense de

28 notre voisin n'avait rien à voir avec cela."

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1 Bande suivante :

2 "Il y a, en tout, dans la 5e Région militaire, 9 000 militaires et

3 musiciens - qu'en sais-je - 9 000, et 18 000 soldats sur tout le territoire

4 de la 5e Région en Slovénie, toute la Croatie, et une partie de la Bosnie.

5 Nous avons aujourd'hui 80 000 en armes, avec des Kalachnikovs. Mais s'il y

6 en avait que 10 000, bien --

7 "Mais pourquoi êtes-vous allé en Hongrie ? Est-ce qu'on n'en a pas chez

8 nous ?

9 "Mais alors, vous n'êtes pas au courant, mes chers, nous sommes en guerre

10 avec eux. Nous sommes en guerre avec eux.

11 "Avec qui ?

12 "Avec l'armée.

13 "Troisième voix : Le ministre Spegelj estime qu'il connaît très bien la

14 région militaire numéro 5. Son rôle est hanté de celui qui cherche à briser

15 les unités qu'il a commandées jusqu'à récemment et contenu dans la phrase.

16 'Nous sommes en guerre avec l'armée.' C'est ce qui a été déclaré par lui en

17 sa qualité de commandant des unités chauvines nouvellement créées."

18 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

19 M. MILOSEVIC : [interprétation]

20 Q. On ne le voit pas dans le compte rendu d'audience. Je pense, à cause de

21 la vitesse. Je pense que vous l'avez entendu aussi.

22 [Diffusion de cassette vidéo]

23 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

24 "Spegelj dit : Mais nous sommes en guerre,

25 L'interlocuteur lui demande : Avec qui ?

26 Spegelj répond : Avec l'armée."

27 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

28 M. MILOSEVIC : [interprétation]

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1 Q. Vous l'avez entendu ?

2 R. Oui, oui.

3 Q. Donc, à l'époque, ils ont estimé qu'ils étaient en guerre avec

4 l'armée ?

5 R. Oui, avec l'armée populaire yougoslave.

6 Q. Mais dites-moi : Lorsqu'on a diffusé ce film, est-ce que ceci a amené

7 les autorités croates à admettre quelles étaient en train de s'armer ?

8 R. Oui. On a même précisé une date butoir jusqu'à laquelle le désarmement

9 devait être fait. Les autorités croates ont demandé, en fait, je ne sais

10 pas exactement parce que je n'ai pas tout mémorisé. Enfin, ils ont demandé

11 qu'on prolonge cette date de 20 jours, mais il n'y a jamais eu de

12 désarmement, en réalité.

13 Q. A l'intercalaire 73, je vous invite à examiner une partie. Il s'agit de

14 la page 272 du livre de Mesic. L'avez-vous ?

15 R. Je l'ai, soit dans les intercalaires, soit dans les notes. Dans les

16 notes où j'ai les citations et les numéros de page.

17 Q. Très bien. Alors, est-ce que vous pouvez nous donner lecture, s'il vous

18 plaît, du livre 272, du livre de Mesic ?

19 R. Mais, avant cela, je tiens à dire que M. Mesic l'a rédigé, en 1994, ce

20 livre-ci. Donc, deux ans après ces événements -- deux ou trois ans, et

21 initialement, il a intitulé ce livre : "Comment j'ai démantelé la

22 Yougoslavie." Puis, plus tard, il a dit que, lors d'une entretien avec Hans

23 Dietrich Genscher, il lui a demandé à lui, de lui conseiller un titre. A

24 l'époque, M. Genscher avait été ministre allemand des Affaires étrangères

25 et il lui a dit que ce genre de titre n'allait pas recevoir un très bon

26 accueil en Europe. Donc, ce titre-là : "Comment ai-je brisé la

27 Yougoslavie," M. Mesic l'a transformé pour en faire : "Comment nous avons

28 brisé ou démantelé la Yougoslavie." Donc, c'était cela la première édition

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1 du livre, mais pour la deuxième édition du livre, le titre a encore été

2 changé. Donc, maintenant, c'est : "Comment la Yougoslavie a été démantelée

3 ou brisée."

4 Cela, c'est pour ce qui est du titre, mais page 272 de ce livre, donc

5 : "Comment la Yougoslavie a été démantelée," Mesic écrit littéralement :

6 "Ce peuple partiellement armé, et avec une partie de ces jeunes, est rentré

7 dans le cadre de la guerre nationale, a été progressivement organisé pour

8 devenir une armée croate moderne, a bouclé les casernes." Il emplie le

9 titre croate de -- et arrêter les mouvements des forces armées et il entend

10 par là, la JNA.

11 Un peu plus loin, page 276, lorsqu'il parle de l'embargo

12 international imposé aux importations d'armes en Yougoslavie,

13 M. Mesic dit littéralement : "Nous, ces armes, il va falloir qu'on les

14 prenne aux soldats de Kadijevic." C'est la page 276 et je dois dire que

15 ceci semble pratiquement invraisemblable. C'est le président de la

16 présidence de RSFY qui s'exprime. Il est en même temps le commandant

17 Suprême des forces armées de la RSFY. Donc, publiquement, il fait une

18 déclaration disant que les formations paramilitaires croates vont capturer

19 les armes de la JNA, la JNA, dont il est le commandant Suprême.

20 Q. Très bien. Donc, nous voyons que, Mesic et Spegelj, tous les deux

21 affirment qu'ils sont en guerre contre la JNA. Ils ne disaient pas à

22 l'époque qu'ils étaient en guerre contre la Serbie ?

23 R. Non, non. Pas encore. Pas à ce moment-là.

24 Q. Mais la Serbie a-t-elle jamais été en guerre avec eux, et eux, avec la

25 Serbie ?

26 R. Nous avons ici une rébellion armée, manifeste de la part de deux unités

27 fédérales qui cherche à se séparer de la République socialiste fédérative

28 de Yougoslavie, donc, qui engage une guerre contre la JNA qui, d'après la

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1 constitution jusqu'au 27 avril 1992, était la seule force armée légale de

2 la RSFY qui était membre des Nations Unies et reconnue internationalement.

3 Q. Très bien. Examinons maintenant deux extraits brefs également.

4 R. Si je peux dire, Monsieur Milosevic, à l'époque, on ne dit pas encore

5 qu'il y a une guerre qui oppose la Croatie à la Serbie. Personne n'a l'idée

6 de dire cela. J'étais déjà devenu membre de la présidence, j'étais déjà

7 vice-président de la présidence et je m'étais rendu auprès des réfugiés de

8 Borovo Selo. Nous avions 8 000 citoyens réfugiés, pour la grosse majorité,

9 des femmes, des enfants de Borovo Selo et des environs. J'ai aussi des

10 images vidéo, on n'aura peut-être pas le temps de montrer cela.

11 Lors de cette visite, j'ai dit que je n'étais pas là en tant que

12 représentant d'un soi-disant bloc serbe, comme M. Mesic. Les auteurs de cet

13 acte d'accusation n'arrêtent pas de nous imputer, de nous caractériser de

14 cette manière-là, ceci n'a aucun sens. S'ils avaient voulu nous appeler

15 d'une manière quelle qu'elle soit, alors, cela aurait dû être représentant

16 de l'option fédéral et non pas du bloc serbe. Donc, à l'attention -- à

17 l'occasion de cette visite, j'ai critiqué Ante Markovic et j'ai dit qu'il

18 fallait que son gouvernement s'occupe de ces réfugiés, qu'il les prenne en

19 charge et que la -- que ces réfugiés ne pouvaient pas être pris en charge

20 simplement par le gouvernement serbe, mais par les autorités fédérales.

21 J'ai dit cela à l'intention de la presse nationale et internationale.

22 Q. Maintenant, voyons la suite.

23 [Diffusion de la cassette vidéo]

24 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

25 "Première voix : Si c'est nécessaire, à un moment critique, organisez

26 deux ou trois personnes pour liquider les plus dangereux.

27 Autre voix : --

28 Première voix : "-- liquider physiquement.

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1 Autre voix --

2 Première voix : " -- liquider physiquement. On vient dans

3 l'appartement.

4 Autre voix : Oui, je sais.

5 Première voix : "On apparaît à la porte, on cogne, dum, dum et on

6 descend par l'escalier.

7 Autre voix : Et après qu'il demande, qu'il s'adresse à la police pour

8 qu'elle établisse qui.

9 Première voix : Il descend l'escalier, on va chercher l'un, l'autre.

10 Les plus dangereux peuvent être tués à la porte. Peu importe, femmes,

11 enfants, peu importe, on ne demande pas."

12 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

13 L'INTERPRÈTE : L'interprète dit que la voix reprend le texte.

14 M. MILOSEVIC : [interprétation]

15 Q. Que nous montre cet enregistrement ?

16 L'INTERPRÈTE : L'interprète signale que l'enregistrement continue.

17 [Diffusion de cassette vidéo]

18 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

19 "Première voix : L'armée n'a rien à voir, elle sera complètement

20 décimée. Pour moi, le problème est comment de vous protéger de vous deux.

21 Non pas devant l'armée, mais devant les autres.

22 Autre voix : Mais nique sa mère"

23 Première voix : Tout officier est couvert par cinq, et tous seront

24 abattus. Je dois aller vite dire à ceux qui mettre côté, aucune personnes

25 ne dois attendre la caserne en vie, personnes. Dans la rue un soldat, peu

26 importe qui quand on donne le signale, tout est abattu immédiatement sans

27 questions.

28 Troisième voix : Le ministre de la Défense de Croatie, de toute confidence,

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1 semble considérer que son système d'assassinat organisé des officiers est

2 élaboré en détail. Il donne l'ordre de tuer des soldats et de tout membre

3 de la JNA dans la rue pour que personne n'atteigne la caserne en vie.

4 Enregistrement suivant : "Pour ce qui est de postes frontières lorsqu'il

5 faudra les désarmer, on va les désarmer tous, mais les Albanais vont garder

6 cinq balles dans un fusils automatique. Les autres il faut les enfermer

7 dans la cave, donner de la nourriture et de l'eau si cela dure plusieurs

8 jours. S'il se produit quelque chose, donne l'instruction à tous ceux que

9 tu connais de tuer les extrémistes sur place, dans la rue, dans l'enceinte

10 de la caserne, où que ce soit. Pistolet et dans l'estomac. Ce ne sera pas

11 une guerre, ce sera plutôt une guerre civile dans laquelle il n'y aura pas

12 de merci à l'égard de qui que ce soit, des femmes ou des enfants. Dans

13 l'appartement tout simplement, des grenades à mains dans des appartements

14 où vivent des familles."

15 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

16 L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète : la voix reprend le même texte.

17 M. MILOSEVIC : [interprétation]

18 Q. Monsieur le Témoin, qu'est-ce que ceci nous montre ?

19 R. Cela rafraîchit ma mémoire de ces jours là.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelle est votre question ?

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai demandé ce que nous montrait cet

22 enregistrement, mais, de toute évidence, le témoin est très ému, il dit que

23 ceci ravivait les souvenirs de ces jours-là.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais c'est tellement monstrueux quand j'ai vu

25 cela il y a 14 ans, Monsieur Milosevic. Tout simplement je n'arrivais pas à

26 croire à -- dans un premier temps, j'ai cru que c'était monté de toutes

27 pièces comme cela arrive, des services de renseignements font des --

28 montent de toutes pièces des choses comme cela. Mais après il s'est avéré

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1 que non seulement que c'était un enregistrement original réalisé par la

2 direction -- le service de la douzième administration à du KOS, mais il

3 s'est avéré que c'était un enregistrement original.

4 M. MILOSEVIC : [interprétation]

5 Q. Mais tout ce qui s'est passé par la suite dites-vous, mais est-ce que

6 par la suite, les paroles de Spegelj se sont réalisées ?

7 R. Je pense que c'est de notoriété publique nous le savons tous. Il y a eu

8 des événements, et cela fait longtemps que cela s'est passé. Mais vu que

9 nous sommes ici pour nous adresser à la Chambre de première instance, je ne

10 pense pas qu'il faut donner trop d'exemples. Mais enfin on connaît une

11 image où on a tenté d'étouffer un membre de la JNA sur un transporteur

12 blindé à Split, mais on a tué trois soldats à Trogir, puis à Zadar. Puis M.

13 Tudjman a lancé un appel à Trogir et à Zadar pour que l'industrie croate se

14 mette à fabriquer des moyens de guerre, et des munitions, beaucoup de

15 choses se sont passées, sans parler des attaques ouvertes lancées contre

16 l'armée populaire yougoslave. Puis, le conflit violent qui s'est déclenché

17 avec les unités de la JNA.

18 Q. Je vous remercie.

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis je voudrais que l'on voit encore un

20 extrait du film.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Avons-nous un petit problème

22 technique, nous n'entendons pas.

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il ne faudrait pas qu'il y ait de problèmes, il

24 ne devrait pas y avoir de problèmes

25 [Diffusion de la cassette vidéo]

26 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

27 "Knin nous allons le résoudre de telle façon que nous allons

28 massacrer. Nous avons la reconnaissance internationale pour cela. Puis,

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1 nous allons les massacrer, en particulier, maintenant que cette pute l'a

2 emporté en Serbie.

3 Milosevic ?

4 Oui, et maintenant les Américains dès qu'il a emporté dès le

5 lendemain ils nous ont offert toute l'aide et jusqu'à maintenant ils

6 spéculaient, ils disaient oui, non, et ils hésitaient. Maintenant ils

7 disent 1 000 transporteurs blindés de tout genre, voitures, quand sais-je,

8 pour 100 000 soldats tout l'armement sans qu'on est à payer un sou."

9 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous avez entendu, il a dit : "Massacrer

11 Knin."

12 L'INTERPRÈTE : L'interprète dit à M. Milosevic que le

13 l'interprétation n'est pas encore terminée.

14 [voix sur voix]

15 "Nous allons nous servir de tous les moyens. Nous allons nous

16 servir des armes. Les Serbes plus jamais en Croatie ne seront pas ce nom

17 tant que nous y sommes et espérant aussi qu'ils ne seront plus ce qu'ils

18 étaient jusqu'à présent, leur domination appartient au passé. Leur Knin ne

19 sera plus jamais Knin. Nous allons entrer dans Knin. Knin doit disparaître

20 en tant que Knin. Tous les Croates doivent tenir compte de cela et nous

21 allons créer un Etat coûte que coûte s'il le faut au prix du sang."

22 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

23 L'INTERPRÈTE : L'interprète dit la voix reprend encore une fois le même

24 texte.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Milosevic, dans cet extrait

26 que nous venons de voir, est-ce qu'on entend la voix de l'un quelconque

27 ministre du gouvernement croate ou --

28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, on l'entend. On entend la voix de l'un des

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1 ministres, et par la suite, la même chose est répétée par le speaker d'une

2 manière plus articulé parce que la voix est un peu déformée.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que cela s'applique aux deux

4 ministres ? Est-ce que c'est vrai pour les deux ministres, Spegelj, et

5 puis, Boljkovac par la suite.

6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, oui.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] A chaque fois il répète les propos.

9 M. MILOSEVIC : [interprétation]

10 Q. Donc massacrer, égorger Knin, chasser, et cetera. Est-ce que Spegelj

11 seul était de cet avis ? Boljkovac à l'époque était ministre de

12 l'Intérieur, n'est-ce pas ?

13 R. Oui.

14 Q. Est-ce que Spegelj était le seul à penser cela, ou c'était une opinion

15 répandue ?

16 R. Non. C'était une opinion très répandue. Non seulement au niveau des

17 dirigeants croates mais c'était répandu parmi les Croates dans la

18 population. Car il ne faut pas perdre de vue le fait que la situation

19 politique en Croatie est aujourd'hui bien différente qu'elle ne l'a été il

20 y a 14 ou 15 ans. Elle est bien meilleure aujourd'hui. La communauté

21 démocratique croate, je dois le dire aujourd'hui, bien, n'est plus ce qu'a

22 été le HDZ à l'époque où il a remporté les premières élections

23 pluripartites. Il a remporté -- il est venu au pouvoir. Il n'y avait peu de

24 gens qui nous faisaient confiance à l'époque lorsqu'on disait que le HDZ

25 était chauvine, nazi, dans son programme vu comment elle traitait les

26 Serbes qui vivaient en Croatie depuis des centaines d'années.

27 Q. Vous voulez dire ils vivaient en Croatie sur ce territoire-là ?

28 R. Oui, oui, en Croatie. Cette déclaration au sujet de l'attitude des

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1 Américains est très convaincante du moins c'est ce que je pense. Enfin,

2 j'ai pensé la même chose à l'époque que je pense aujourd'hui, même s'il y a

3 des experts qui ne sont pas d'accord avec moi, ou des commentateurs qui ne

4 sont pas d'accord avec moi, que les Etats-Unis d'Amérique souhaitaient

5 préserver l'intégrité de la Yougoslavie. C'était cela leur priorité. Ils

6 voulaient modifier le système politique et économique surtout le

7 territoire. Ils voulaient que l'unité soit préservée. Mais l'attitude

8 allemande était tout à fait opposée. Il était dans l'intérêt de l'Allemagne

9 que la Slovénie et la Croatie fassent sécession et c'est ce qui est révélé

10 par la suite. Les Etats-Unis d'Amérique n'ont rien pu faire -- n'ont pas pu

11 faire davantage mais elles ont agi au Kosovo pour compenser. Là, je pense

12 qu'elles ont agi en essayant de faire une séparation par rapport au Proche

13 Orient où les Etats-Unis ont des intérêts tout particuliers.

14 Q. Qu'en est-il des Serbes de Krajina ? Comment se sont-ils sentis en

15 voyant ces prises de positions ?

16 R. J'ai eu l'occasion de lire beaucoup de chose sur ce point. Je suis né

17 en 1939, donc je ne me souviens pas personnellement de toutes les atrocités

18 qui ont eu lieu pendant la Deuxième guerre mondiale. Le Monténégro a subi

19 l'occupation italienne mais j'ai lu beaucoup de choses sur ce point et j'ai

20 eu l'occasion d'en apprendre beaucoup par l'intermédiaire de mes contacts.

21 Quand M. Hans Van den Broek est venu me voir, le vice-président de la

22 présidence, j'ai essayé de montrer à M. Hans Van den Broek un exemple très

23 limité expliquant pourquoi les Serbes s'étaient organisés et avaient mené

24 cette insurrection dans la Krajina serbe en Croatie. C'était la question

25 très limitée du journal quotidien Borba. C'était le journal du parti de la

26 Ligue communiste de Yougoslavie et qui a été publié dix ans avant tous ces

27 événements. Il y a un numéro spécial de Borba dans lequel figure la liste

28 intégrale de 12 000 jeunes filles et jeunes garçons âgés de six à 12 ans se

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1 trouvant dans la zone de Potkozarija. A moins que je me trompe, cela se

2 trouve à côté de la frontière de Croatie et de Bosnie.

3 Q. C'est exact.

4 R. Bien, dans cette liste de 12 000 jeunes filles et garçons de six à 12

5 ans, au cours du temps de l'Etat croate indépendant de Pavlovic, tous ces

6 jeunes garçons, ces jeunes filles ont été liquidés, tués. Ce n'est pas une

7 liste qui a été fait au hasard. On avait les noms et les prénoms des

8 enfants, les villages dont ils étaient originaires, le nom de leur mère et

9 de leur père. Quand j'ai montré cette liste à M. Hans Van den Broek il a

10 sursauté et il m'a dit : "M. Kostic, pendant combien de temps allez-vous

11 continuer à parler de votre histoire ?" Mais 45 ans, vraiment, c'est

12 beaucoup trop court pour oublier de telles atrocités. Même au cours de

13 cette campagne électorale en Croatie on a vu que M. Tudjman, chef du HDZ,

14 il a gagné les élections haut la main, ses premières élections, il a

15 déclaré que c'était là un mensonge historique et que 700 000 Serbes

16 -- plutôt dire que 700 000 Serbes, Gitans et Juifs avaient été tués au camp

17 de Jasenovac. C'était un mensonge. C'était le camp de concentration le plus

18 grand qui n'a jamais été établi pendant la Deuxième guerre mondiale et pas

19 seulement dans les Balkans.

20 Tudjman, général, un historien a essayé de minimise la portée de ce

21 crime en disant qu'il s'agissait uniquement de quelques dizaines de

22 milliers de personnes qui avaient été concernées. Puis, pendant son

23 élection, pendant sa campagne électorale couverte par les médias, Tudjman

24 s'est rendu auprès de la diaspora, dirons-nous, parce qu'on sait très bien

25 qu'il y a beaucoup de Croates qui, pendant la Deuxième guerre mondiale sont

26 partis en occident, en particulier, au Canada, en Amérique du sud, et

27 également aux Etats-Unis d'Amérique. Il s'agissait de criminels de guerre

28 mais ils n'ont jamais été sanctionnés. On leur a tout pardonné parce

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1 qu'après la Deuxième guerre mondiale, la Croatie est devenue partie

2 intégrante de la République fédérale populaire de Yougoslavie et s'est

3 trouvée du côté des vainqueurs. Donc, on sait, très bien, que les autorités

4 croates, à l'époque, ont ouvert les portes en grand à tous ces immigrés

5 croates pour qu'ils reviennent sur le territoire de la Croatie. M. Martin

6 Spegelj, lui-même, était -- comment formuler la chose ? Enfin, il était en

7 communication directe avec ces immigrés.

8 Il faut réfléchir à la chose suivante : quand, dans de nombreux villages et

9 villes de la Krajina serbe, ces policiers croates vêtus d'uniformes noires,

10 ornées du fameux symbole, le damier qui était le même symbole de celui de

11 l'Etat indépendant croate de Pavelic pendant la Deuxième guerre mondiale,

12 quand ils sont arrivés dans ces zones, ces policiers, bien entendu, ils ont

13 suscité la peur, une peur qui avait déjà existé au cours de la Deuxième

14 guerre mondiale. Cette guerre -- cette peur s'est réveillée et, à ce

15 moment-là, les gens se sont révoltés. Ils ont dit, non, nous n'allons pas

16 nous laisser massacrer comme un troupeau de moutons. Ils se sont donc

17 organisés pour que ce qui s'était passé de 1941 à 1945 ne se reproduise

18 pas. Ils sont organisés, eux-mêmes, alors que la propagande présentait tout

19 cela comme une infiltration des spécialistes envoyés par le ministère de

20 l'Intérieur de Serbie et cetera, et cetera. Je dois dire que les auteurs de

21 cet acte d'accusation font preuve d'une incompréhension totale de ce qui

22 s'est passé, des causes de la guerre en Croatie ou que --

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous interromps. Le témoin

24 s'exprime, ce n'est pas étonnant de manière extrêmement claire. Mais ici,

25 la manière dont les débats s'organisent, c'est autour de questions et de

26 réponses brèves.

27 Professeur, il ne s'agit pas ici de se lancer dans de longs récits.

28 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est difficile d'expliquer tout cela de

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1 manière succincte, Monsieur Robinson.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il faut que vous vous maîtrisiez,

3 Professeur.

4 M. MILOSEVIC : [interprétation]

5 Q. Au paragraphe 26 de l'acte d'accusation sur la Croatie, il est dit :

6 "Que Slobodan Milosevic, seul ou de concert, avec d'autres membres de

7 l'entreprise criminelle commune a participé à l'entreprise criminelle

8 commune de la manière suivante." Ensuite, je ne vais vous interroger qu'au

9 sujet du paragraphe (m). "Il a contribué ou utilisé les médias serbes pour

10 manipuler l'opinion en faisant courir des rumeurs fausses ou exagérées

11 présentées par l'agression perpétrée par des Croates contre les Serbes en

12 raison de l'appartenance ethnique de sorte à créer un climat de crainte et

13 de haine parmi les Serbes vivant en Serbie et en Croatie. La propagande

14 faite par les médias serbes était un moyen important de contribuer à la

15 perpétration de crimes en Croatie."

16 Monsieur, est-il exact que les médias ont répandu des informations fausses

17 ou exagérées faisant état d'attaques découlant de l'appartenance ethnique

18 de leurs victimes contre les Serbes ? Donc, est-ce que j'ai permis aux

19 médias de diffuser de telles informations ? Qu'en savez-vous ?

20 R. Je dois dire que le climat qui régnait, à l'époque, était extrêmement

21 fiévreux. Les tensions à caractère ethnique et religieux, s'étaient avivées

22 sur tout le territoire de la Yougoslavie et je ne peux pas dire si vous

23 avez influencé la stratégie suivie par ces médias ou dans quelles mesures

24 mais vu le comportement de certains médias du Monténégro que je connais, je

25 peux en arriver à mes propres conclusions sur ce point.

26 Si, par exemple, quand, après une réunion de travail de la présidence

27 de la RSFY, qui a élu Stjepan Mesic à la présidence de la présidence de la

28 RSFY, l'agence de presse, Tanjug, a diffusé des informations fausses en

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1 disant dans le communiqué de presse que, moi-même, j'avais voté en sa

2 faveur ? L'un des journaux de Monténégro m'a cloué au pilori en une, en

3 citant cette information, en disant que j'avais voté en faveur d'un homme

4 qui avait, d'ores et déjà, proclamé qu'il serait le dernier président de

5 cet Etat.

6 Je ne peux pas dire que, qui que ce soit au sein de la direction du

7 Monténégro ait commandé cette une, il s'agissait, peut-être simplement,

8 d'une décision prise par la rédaction du journal en question. Mais je peux

9 dire deux choses. La manière dont se comportaient les médias, en Serbie,

10 variait grandement. Il y avait certains médias qui conservaient un ton

11 modéré, qui s'efforçaient de ne pas aggraver les tensions mais il y avait

12 d'autres médias qui, délibérément, diffusaient des informations fausses, se

13 livraient à la désinformation.

14 Q. Quand on parle ici de médias publics dans l'acte d'accusation, et ces

15 médias publics est-ce qu'ils étaient modérés ou pas ?

16 R. J'allais justement y venir. Les médias publics, en Serbie, faisaient

17 preuve le plus de modération que les autres médias. Ce que j'allais dire au

18 moment où vous m'avez interrompu, c'est la chose suivante. Il me semble

19 qu'à aucun autre moment, enfin, autant que je me souvienne de l'histoire de

20 la politique de la Yougoslavie, à aucun autre moment, on ne bénéficiait,

21 disposait d'autant de médias électroniques ou autres. A aucun moment, comme

22 au moment où ces attaques ont eu lieu. Même si on compare la situation de

23 l'époque à la situation d'aujourd'hui.

24 Q. Je vous ai donné lecture du paragraphe (m), du sous-paragraphe (m) de

25 l'acte d'accusation et il est question : "D'informations fausses ou

26 exagérées faisant état d'agressions perpétrées contre des Serbes en raison

27 de leur appartenance ethnique."

28 Est-ce qu'il y a eu des agressions contre des Serbes en raison de

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1 leur appartenance ethnique ?

2 R. Oui. La plupart des attaques qui ont visé les Serbes dans cette région

3 étaient dues à leur appartenance ethnique, voyez-vous --

4 Q. Merci. Vous avez répondu à ma question. Est-il exact que les serbes, en

5 particulier, ceux qui vivaient en Croatie étaient soumis à cette atmosphère

6 de crainte.

7 R. Oui. Ceci est incontestable. Bien entendu, je ne dirais pas qu'il

8 s'agissait d'un climat de haine. D'après ce que je sais, d'après ce que

9 m'ont dit mes contacts, c'était la peur qui régnait.

10 Q. Qui était à l'origine de tout cela ?

11 R. Cette atmosphère de peur, elle était le résultat de tout ce qu'on a

12 évoqué, de ce qui se passait dans les médias, des interventions publiques

13 dans le cadre de la campagne électorale lors des élections parlementaires.

14 Ce à quoi, il faut ajouter les pratiques qui existaient à l'époque. Il faut

15 savoir que tout au long de la période d'après guerre, d'après la Deuxième

16 guerre mondiale, les Serbes et les Croates étaient des nations

17 constituantes de l'Etat. Donc, les Serbes autant que les Croates -- les

18 Serbes en Croatie constituaient une partie intégrante, une nation aux côtés

19 des Croates et lorsque le HDZ, dirigé par Tudjman a gagné les élections

20 multipartites, est arrivé au pouvoir. Ils les ont tout simplement rejeté

21 les Serbes et les Serbes ont été réduits à l'état de minorité. J'ai eu

22 l'occasion de lire de nombreux articles au sujet du droit à parler sa

23 propre langue, et cetera. On n'y mentionne aucunement les Serbes, ils sont

24 considérés comme une minorité.

25 Q. vous nous avez parlé de la période de l'après guerre. L'idée forte,

26 c'était qu'il fallait oublier tout cela et que soudain tout ce qui s'était

27 passé leur revenait à l'esprit.

28 Regardons maintenant un autre extrait de ces vidéos.

Page 47639

1 [Diffusion de la cassette vidéo]

2 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

3 "Je sais, je sais. Il y a un livre qui s'appelle 'Mission est-ouest',

4 qui a été écrit par Herman Neuebacher, qui a été envoyé par Hitler en

5 Croatie. Après la guerre, il a été condamné en Yougoslavie à 20 ans

6 d'emprisonnement. Ensuite, il est revenu, il a écrit un livre au sujet de

7 ces entretiens vers Artukovic et d'autres. Ils lui ont dit : "Nous avons un

8 problème avec les Serbes. Une un tiers d'entre eux doit périr. Un tiers

9 d'entre eux doit être converti au catholicisme, et un tiers aura le droit

10 de rester en vie. Voilà quel était leur programme.

11 "Cette irrédentisme de la part des Ustasha et de ceux qui en restait, je

12 l'ai vu partout à Munich à Paris puisque, selon eux, la vie -- la guerre

13 n'avait pas pris fin. Ils ne se considéraient pas comme vaincus."

14 [Fin de la diffusion de cassette]

15 M. MILOSEVIC : [interprétation]

16 Q. Ce que nous dit Weisenthal, est-ce que c'est également ce que l'on a pu

17 voir sur la scène politique en Croatie en 1990 et en 1991 ?

18 R. Oui. Exactement la même chose. Inutile d'insister sur le fait que M.

19 Weisenthal en savait beaucoup plus sur cela que beaucoup d'autres.

20 Q. Dans "L'odyssée des Balkans" de M. Lord Owen, qui a été versé au

21 dossier, on peut lire, en tout début du livre, les phrases suivantes :

22 "Rien n'est simple dans les Balkans, tout est imprégné d'histoire." La

23 complexité suscite la confusion même dans l'étude la plus prudente qui

24 puisse être menée.

25 Est-ce que vous seriez d'accord avec cette description ?

26 R. Oui.

27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Maintenant j'aimerais que nous passions à un

28 autre -- une autre séquence avec Lord Carrington.

Page 47640

1 [Diffusion de la cassette vidéo]

2 " -- les Serbes en Croatie et même à l'extérieur de la Croatie

3 avaient des souvenirs très vifs de ce qui s'était passé en 1941 et, en 1942

4 lorsque Hitler a déclaré que la Croatie était un Etat indépendant fantoche,

5 si vous voulez, et les horreurs qui se sont poursuivis, le meurtre des

6 Serbes, je veux dire un très grand nombre de Serbes ont été assassinés à

7 l'époque. Enfin, je veux parler de centaines de milliers de victimes. Je

8 crois que c'est très compréhensible que lorsque la Croatie a déclaré son

9 indépendance et a promulgué sa nouvelle constitution sans aucune garantie

10 pour les

11 600 000 Serbes qui vivent encore en Croatie, il est très normal que les

12 Serbes étaient très troublés par ce fait."

13 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

14 M. MILOSEVIC : [interprétation]

15 Q. Etes-vous d'accord avec cette évaluation faite par Lord Carrington ?

16 R. Vu ce que j'ai dit précédemment au cours de ma déposition, c'est très

17 clair. Effectivement, cela confirme ce que dit

18 M. Carrington.

19 Q. Qu'en était-il de la manière dont les autres nouvelles autorités

20 croates abordaient l'histoire ? En particulier, tout ce qui concerne l'Etat

21 indépendant de Croatie, et les crimes commis par les Ustasha pendant la

22 Deuxième guerre mondiale ?

23 R. J'estime quant à moi qu'il serait très dommageable de prendre la

24 totalité du peuple croate, de le juger comme cela.

25 Q. Je n'ai pas parlé du peuple croate. J'ai parlé des autorités croates.

26 R. Je n'avais pas bien saisi le libellé exact de votre question. Mais

27 était donné que c'était des problèmes que nous devions rencontrer à

28 l'époque, il y avait un certain nombre d'exagérations. Certains avaient

Page 47641

1 tendance à rendre la totalité du peuple croate coupable du mouvement

2 Ustasha. Mais s'agissant des autorités croates, je crois que jusqu'au bout,

3 non seulement ils ont réaffirmé l'idéologie Ustasha de cet Etat fantoche,

4 l'Etat indépendant croate qui existait pendant la Deuxième guerre mondiale,

5 ils ont réaffirmé tout cela, il l'ont confirmé, mais ils en étaient fiers,

6 ils ont tiré une certaine fierté, une grande fierté. Tous ceux qui

7 pensaient différemment se voyaient muselés. Ils ne pouvaient se faire

8 entendre.

9 Tout ce qui s'est passé à ce moment-là me rappelait de ce que j'avais

10 eu l'occasion d'entendre, de voir dans de nombreux films sur la manière

11 dont Hitler s'est comporté envers les Juifs après l'arrivée au pouvoir des

12 nazis en Allemagne parce qu'en Croatie, on a vu que les Serbes ont été mis

13 à pied. Il y a eu des expulsions, des destructions de biens, et cetera. Il

14 faudrait vous rappeler les événements de la ville de Trogir où des citoyens

15 croates sont descendus dans la rue pour manifester contre les Serbes ce qui

16 leur a fait courir non seulement un péril physique à eux personnellement à

17 ces Serbes, mais a entraîné également la destruction de leur biens, de

18 leurs propriétés.

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Examinons, visionnons plutôt une autre

20 séquence vidéo qui pourra s'ajouter à vos observations. Vous pourrez

21 commencer également. Il s'agit d'images qui viennent de Lesinski hall on y

22 voit Tudjman s'exprimer.

23 [Diffusion de la cassette vidéo]

24 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

25 "Ils estiment que les objectifs du HDZ constituent une revendication,

26 une demande de la restauration de l'Etat indépendant Ustasha croate. Ce

27 faisant, ils semblent oublier que l'Etat croate indépendant n'a pas

28 seulement été une créature issue de la collaboration avec les nazis, un

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1 crime fasciste, mais que c'est également la manifestation des aspirations

2 historiques de la nation croate de disposer enfin d'un Etat indépendant,

3 excepté aussi le résultat de facteurs internationaux selon lesquels sur les

4 ruines des traités de Versailles devait se créer un nouvel ordre européen.

5 Ces aspirations, les aspirations de la Croatie et en matière de frontière.

6 "A la différence de ces membres plus modérés du HDZ, Glavas n'a pas

7 fait mystère de son identification avec les Ustasha pendant la Deuxième

8 guerre mondiale et s'est félicité du retour des prisonniers de guerre

9 croates."

10 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

11 M. MILOSEVIC : [interprétation]

12 Q. Il y a un instant, vous avez parlé d'une atmosphère de peur qui

13 était dû non seulement à tout ce qui s'était passé par le passé et aussi

14 qui était dû à la réalité de l'époque du présent. Vous personnel -- dans

15 votre -- vous avez dit qu'il y avait une atmosphère -- qu'il n'y avait

16 cependant pas une atmosphère de haine ?Qu'est-ce qui vous permet d'affirmer

17 cela ?

18 R. Pendant l'année que j'ai passé à la présidence de la SFRY, j'ai eu

19 l'occasion de rencontrer de recevoir de nombreuses délégations, ou

20 plusieurs délégations de Serbes qui venaient de ces territoires croates. A

21 leur demande, je crois que j'ai reçu deux délégations, ainsi constituées,

22 ces deux délégations venaient de Slavonie occidentale.

23 Je dois dire qu'à l'époque, nous n'avions pas la possibilité de créer une

24 zone tempo avec les unités de l'armée populaire yougoslave en Slavonie

25 occidentale comme dans la Krajina de Knin parce qu'à cet endroit là nous

26 avions des forces importantes en place.

27 Mais en Slavonie occidentale, nous n'étions pas en mesure de faire de même,

28 tout simplement parce que les forces de l'armée populaire yougoslave

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1 étaient en nombre beaucoup moins important qu'auparavant et avaient vu

2 leurs effectifs diminuer parce que les Croates, les Slovènes, les

3 Macédoniens, les Albanais du Kosovo, et cetera ont cessé d'envoyer des

4 soldats pour rejoindre les rangs de l'armée. Ce qui causait des difficultés

5 si bien que les forces armées qui auraient pu être utilisées pour protéger

6 ceux qui courraient un danger, les Serbes donc en Croatie, ces forces là

7 n'étaient pas disponibles. Donc ces gens sont venus me voir pour essayer --

8 pour me demander de porter une aide. C'était possible.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous souvenez-vous de la manière

10 dont la procédure se déroule en cette enceinte ?

11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien.

12 M. MILOSEVIC : [interprétation]

13 Q. Merci, Monsieur Kostic.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Milosevic, la vidéo continue

15 à défiler.

16 Deuxièmement --

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'ai pas demandé à ce qu'on continue la

18 diffusion.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, c'est à vous de le contrôler. Il

20 y a deux événements d'autre part qui figurent dans cette dernière séquence.

21 Premièrement, nous avons un discours et, deuxièmement, nous avons le retour

22 des prisonniers de guerre. Quelle est la date de ces deux événements?

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crois que les dates figurent sur

24 l'enregistrement lui-même. Le discours de Tudjman dans la salle de Lisinski

25 a eu lieu tout au début, quand il a dit que l'Etat indépendant de Croatie

26 n'était pas le résultat de la collaboration mais que c'était le résultat

27 des aspirations historiques du peuple. Il était en train de justifier ce

28 que Weisenthal avait décrit de manière très précise.

Page 47644

1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je n'ai pas besoin d'explication

2 supplémentaire, simplement de la date.

3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je le vérifierai et je vous en ferai part. Je

4 crois que les dates figurent à l'écran, figurent sur les images.

5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est la date du 9 septembre 1990 que

6 l'on pouvait voir à l'écran.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pour le retour des prisonniers de

8 guerre ?

9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je n'en suis pas sûr. Ceci pourra faire

10 l'objet d'une vérification et on pourra nous communiquer cette information.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic. Votre

12 question suivante.

13 M. MILOSEVIC : [interprétation]

14 Q. Professeur Kostic, à l'intercalaire numéro 1 vous trouverez les notes

15 sténographiques d'une réunion que vous avez eue avec -- comment dire cela ?

16 -- avec un homme politique dénué du moindre parti pris. J'aimerais citer

17 certaines de vos prises de positions, à partir de ce compte rendu, puis,

18 comparer ce que vous avez dit à l'époque, et ce que vous pensez maintenant,

19 afin de voir s'il y a concordance et si la situation était bien telle que

20 vous la présentiez.

21 Afin que tout soit clair pur ceux qui assistent à cette audience,

22 j'ai ici le discours prononcé à la salle de Lisinski, les 27 et 28 février,

23 et s'agissant de Glavas. Cela s'est passé à l'automne 1991.

24 Quand nous avons passé en revue ces notes sténographiques, vous nous

25 m'avez dit que vous aviez fait une sélection parce qu'il s'agissait d'un

26 pays qui était très éloigné du nôtre et qui n'avait rien à voir avec tout

27 ce qui se passait. Un pays qui se trouvait même sur une continent. Un pays

28 qui entretenait des relations amicales avec le vôtre. C'était une

Page 47645

1 conversation que vous avez eue en 1992 avec le ministre des Affaires du

2 Zimbabwe.

3 Je vais vous demander de prendre la page 2. Qu'avez-vous expliqué à

4 ce ministre ? Aux paragraphes 2, 3 et 4.

5 R. Vous avez ici les notes sténographiques de cette conversation.

6 Q. Oui, apparemment c'est la version qui n'était pas officielle, c'est la

7 transcription.

8 R. Oui, c'est ce que j'ai dit oralement. Je n'avais pas de communication

9 écrite.

10 Q. Lisez, s'il vous plaît.

11 R. "La propagande croate a réussi à imposer à l'opinion publique

12 internationale l'idée selon laquelle c'est un petit pays, que la Croatie,

13 qui apparemment maintenant serait menacée par une Grande-Serbie. Dans le

14 cadre de cette propagande, ont été utilisés tous les moyens que pouvait

15 accepter la communauté internationale, à qui on a essayé de dire que

16 l'armée populaire nationale la JNA,

17 deuxième force armée après celle de l'Union soviétique, on dit dans

18 l'Europe a participé à cette agression déclenchée contre un petit pays. On

19 dit que c'est un conflit entre deux idéologies, comme si les reliquats du

20 bolchevisme en Serbie et au Monténégro essayaient de régler son compte à ce

21 jeune régime de Slovénie et de Croatie. Dans la communauté internationale,

22 il a fallu déployer beaucoup d'efforts pour faire se manifester la vérité.

23 Je suis sûr que vous savez que c'est seulement plusieurs jours plus tard

24 que M. Baker a fait une déclaration publique --"

25 Q. Un instant, Professeur. Je vois qu'à l'écran nous n'avons pas cette

26 partie-là de la transcription qui nous intéresse, et on ne montre pas à

27 l'écran ce dont vous êtes en train de parler. Vous avez commencé une

28 citation qui est le dernier paragraphe dans la traduction en anglais, qui

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1 commence par ces mots : "La propagande croate a réussi à ceci et cela" --

2 le texte se poursuivant.

3 R. "Vous savez bien que M. Baker a fini par dire en public que s'il y

4 avait une crise en Yougoslavie c'était uniquement à cause de la sécession

5 unilatérale de la Slovénie et de la Croatie et le recours à la force."

6 Q. Dans le cadre des explications que vous avez données aux représentants

7 d'un gouvernement d'un pays très éloigné, qui venait d'un autre continent,

8 quand on revoit ceci avec le recul aujourd'hui, est-ce que c'était,

9 effectivement, ce qui s'était passé ?

10 R. C'était d'une notoriété publique le Zimbabwe n'était pas le seul pays

11 africain ou d'Asie à être de cet avis parce que nous avons fait partie du

12 mouvement des pays non alignés et nous avions des liens d'amitié très

13 étroits avec ce pays. Au cours cette réunion avec le ministre des Affaires

14 étrangères du Zimbabwe, les discussions ont été franches, très sincères,

15 c'est un peu comme si j'avais prêté serment, comme je l'ai fait ici

16 aujourd'hui, il ne faut rien ajouter à cette évaluation parce que je ne

17 savais pas que ceci allait être présenté à un Tribunal pénal international

18 tel que celui-ci.

19 Q. Vous avez expliqué ce qui s'était passé c'était que pensait Baker --

20 que la crise prenait son origine dans cette décision unilatérale de faire

21 sécession de la part de la Slovénie et de la Croatie, puis, nous avons

22 entendu et vu tous ces extraits vidéo, mais, dites-moi, est-ce que vous

23 êtes convaincu que, finalement, la vérité s'est manifestée, et que c'était

24 un processus assez long ?

25 R. Non. Cela n'a duré que très peu de temps parce que les USA étaient

26 préoccupés par d'autres problèmes, d'envergure mondiale. Donc les problèmes

27 des Balkans ont là donné à l'Europe pour qu'elle s'en occupe. En très peu,

28 l'Allemagne, qui était un pays de premier plan au sein de cette Union

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1 européenne, a réussi à imposer son avis aux autres pays de l'union. Dans

2 mon livre, le livre que j'ai écrit qui a pour titre : "1919, pour qu'on

3 n'oublie pas," vous retrouvez des extraits de ce livre dans ces classeurs.

4 Je l'ai dit, à l'époque, ce n'était plus l'Europe DeGaulle ou de Churchill,

5 c'était alors l'Europe de Pétain et de Chamberlain.

6 Q. Vous poursuivez à la page 3, deuxième paragraphe, vous dites : "Qu'en

7 Croatie et en Slovénie, en fait, on a remplacé le régime totalitaire

8 communiste par un autre régime totalitaire qui se fondait sur une idéologie

9 purement nationaliste." C'est ce que vous dites.

10 R. Je le pense encore aujourd'hui -- même je pense qu'aujourd'hui, la

11 situation en Croatie est beaucoup plus favorable.

12 Q. Puis à la page 4, vous précisez à l'intention de votre homologue ou de

13 la personne qui participait à cette conversation, ce qu'il en est pour ce

14 qui est de la situation en Yougoslavie. Vous dites --

15 R. "Jamais, nous n'avons contesté que la Slovénie, la Croatie ou une autre

16 République n'aurait le droit de faire sécession avec la Yougoslavie, mais

17 nous estimons que cette sécession doit se faire conformément à la

18 constitution et à une procédure démocratique." Ce qui n'a pas, bien sûr,

19 été le cas. La Slovénie et la Croatie, qui faisaient partie, pourtant, de

20 la Yougoslavie, ont constitué leur propre formation paramilitaire en

21 contravention de la constitution. Dès le départ, avec ces formations

22 militaires, la Slovénie a pris le contrôle des postes frontaliers et toutes

23 les fonctions qui étaient celles des effectifs frontaliers yougoslaves, ont

24 été assumées par le ministère de l'Intérieur. Pour ce qui est de la

25 Croatie, là, vous aviez un programme très chauvinisme. On voulait créer, en

26 fait, cet Etat croate indépendant et alors que d'après la constitution, il

27 y avait deux peuples constitutifs, les Serbes et les Croates. Les autorités

28 ont, tout simplement, effacé, enlevé le peuple serbe de la nouvelle

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1 constitution pour former un Etat national croate.

2 Q. Puis, il dit qu'en fait : "Les Serbes avaient des droits

3 constitutionnels, n'est-ce pas, d'après la constitution précédente ?" Qu'en

4 pensez-vous ?

5 R. Oui, Ils devaient avoir les mêmes droits que les Croates --

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] En fait, nous avons ce

7 document sous les yeux. Inutile de le faire parcourir par le témoin. Vous

8 avez déjà mis en exergue les points qui vous semblaient importants.

9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien. Si vous me le permettez, je voudrais

10 quand même évoquer un autre point.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

12 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'en ai discuté avec le témoin. En effet, à

13 l'époque, ce témoin a procédé à une évaluation qu'il maintient aujourd'hui

14 parce que c'est la vérité, tout simplement, qu'il disait dans cette

15 évaluation et ceci ne saurait être modifié. Nous n'allons pas parler de

16 Tudjman.

17 M. MILOSEVIC : [interprétation]

18 Q. Maintenant, à la page 9, vous allez retrouver quelques lignes. Il

19 s'agit, en fait, du deuxième paragraphe. Vous y dites, Monsieur le Témoin,

20 que le peuple serbe -- attendez que je trouve ce passage --

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Donnez-nous les premiers mots.

22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Attendez. "Les Serbes de la région avaient

23 peur. Ils avaient peur de subir le sort qu'ils avaient subi en 1941." Page

24 5, paragraphe 4. Le peuple serbe de la région avait peur de subir le même

25 sort que celui en 1941.

26 M. MILOSEVIC : [interprétation]

27 Q. C'est ce que vous venez de nous expliquer, n'est-ce pas ?

28 R. Oui.

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1 Q. Ensuite, à la page suivante, pour ce qui est de l'initiative, du

2 conseil de Sécurité, vous dites : "Nous avons envoyé une demande au conseil

3 de Sécurité afin que soient dépêchées des forces de maintien de la paix."

4 C'est la page 10, dernier paragraphe.

5 R. Est-ce que vous avez dit, page 10 ?

6 Q. Oui.

7 R. "Lorsque nous avons demandé au conseil de Sécurité de prendre

8 l'initiative d'envoyer des forces de maintien de la paix, ce faisant, nous

9 montrons que nous étions résolus que nous voulions que l'armée se retire de

10 la région et que ce soit les forces des Nations Unies qui protègent la

11 population serbe parce que nous nous étions dits que ceci mettrait fin aux

12 conflits militaires et que nous allions une solution politique pour ce qui

13 est du statut réservé à cette population."

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.

15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien.

16 M. MILOSEVIC : [interprétation]

17 Q. Nous n'allons pas nous attarder davantage sur ce passage même si,

18 comment dire, c'est là une explication parfaitement précise, même si elle

19 est un peu longue, des événements. Explication donnée à l'époque de ces

20 événements. Mais puisqu'il faut faire la traduction de ces documents, nous

21 n'allons pas nous en occuper maintenant. Ceux qui sont intéressés par cette

22 lecture pourront y procéder.

23 En conclusion, vous avez dit que finalement la vérité s'était manifestée

24 lorsque Baker a tenu ces propos mais ceci, mis à part la totalité de ce qui

25 se trouve ici reflète bien la vie que vous avez aujourd'hui ?

26 R. Tout à fait.

27 Q. La présidence de la RSFY, comment a-t-elle réagi à tous ces événements

28 et surtout au port d'armes, à la distribution d'armes à la population ?

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1 R. La présidence, avant mon arrivée à la présidence, a tenu plusieurs

2 réunions, réunions au cours desquelles elle a fait le point de la situation

3 et a conclu que la situation était particulièrement grave. Elle a pris les

4 décisions pour ce qui est du désarmement des formations paramilitaires, ce

5 qu'il avait appliqué et lorsque vraiment la situation est arrivée à son

6 paroxysme et que la tension s'est encore accrue, c'est à ce moment-là que

7 le 12, le 13, le 14 ou 15 mars, nous avons eu cette fameuse réunion.

8 Q. N'en parlons pas pour le moment. Regardons l'intercalaire 6, tout

9 d'abord. Nous avons une ordonnance, un ordre donné par la présidence de la

10 RSFY, le 9 janvier. Vous en avez parlé. Attendez que je le trouve. Il

11 s'agit du premier document qui se trouve dans le deuxième classeur.

12 Est-ce que vous avez eu l'occasion d'examiner ce document avant d'entrer ce

13 prétoire ou est-ce que vous vous souvenez de sa teneur ?

14 R. Je ne me souviens pas de cet ordre-ci, en particulier. Je veux dire, à

15 l'époque où il a été donné mais j'ai eu l'occasion de parcourir ces

16 intercalaires, les documents dans lesquels se trouvent pratiquement toutes

17 les décisions prises en 1991 par la présidence de la RSFY.

18 Q. Ici, on parle de l'entrée clandestine d'armes venant d'autres pays,

19 pays voisins, armes, apparemment distribuées aux citoyens en fonction de

20 leur appartenance ou de leur tendance ethnique ou politique ?

21 R. Oui.

22 Q. Puis, on dit : "Qu'on crée des formations militaires inégales et qu'il

23 y a de la part de celles-ci des activités terroristes et que ceci accroît

24 la menace d'un soulèvement, d'une insurrection interethnique, d'un

25 soulèvement armé de très grande envergure dont on ne pourrait prévoir les

26 conséquences." Alors, finalement, qu'est-ce que ceci dit ?

27 R. Il est important de relever ici que c'est une décision ou une position

28 unanime de la part de la présidence. Le président, c'était Borislav Jovic.

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1 Le vice-président, c'était Stipe Mesic. Nous avions aussi M. Drnovsek à la

2 présidence. Oui, c'est bien lui,

3 M. Drnovsek ainsi que M. Tupurkovski, ce qui veut dire que c'est ici l'avis

4 unanime de tous les membres. Vous aviez aussi M. Nenad Bucin, qui

5 représentait le Monténégro à la présidence, et vous avez chacun des points.

6 Au premier point, on parle du désarmement; au deuxième, des formations

7 paramilitaires; au troisième, des armes.

8 Q. Tirons une chose au clair avant de poursuivre. L'ordre donné c'est que

9 sur le territoire de la Yougoslavie toutes les formations armées qui ne

10 feraient pas partie des forces de la SFRY soient désarmées et que ces

11 organisations ou toute organisation ayant été établie doit être démantelée

12 ?

13 R. Oui. Deuxième point, ce sont les armes, le matériel de ces unités

14 armées décrites au point un, que ces armes doivent être livrées

15 immédiatement aux unités et institutions les plus proches de la JNA,

16 qu'elles aient été rassemblées par des organes individuels au niveau de la

17 république, ou qu'elles soient en la possession de divers groupes ou

18 individus.

19 Q. Qu'auriez-vous à dire de la raison pour laquelle cet ordre de la

20 présidence -- et vous en avez mentionné tous les membres, vous aviez des

21 représentants de toutes les républiques, je le précise. Alors, pourquoi

22 est-ce que cet ordre de la présidence a été adopté sans qu'il y ait aucune

23 voix contre ? Pourquoi est-ce que cet ordre n'a pas été appliqué ?

24 R. La réponse est simple. Manifestement, les membres de la présidence de

25 la SFRY représentaient à l'époque aussi la Slovénie et la Croatie, c'était

26 de proches associés, des dirigeants des républiques qui avaient déjà pris

27 l'option de la guerre. M. Mesic, pendant tout ce temps, a été le plus

28 proche associé du président Tudjman. Drnovsek était le plus proche associé

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1 du président de Slovénie, Kucan. Nombreuses sont leurs déclarations, vous

2 pourrez les voir ou les lire, ces hommes sont intervenus en publique,

3 Tudjman a notamment dit en publique quelque chose qui était repris plus

4 tard, ou qui était confirmé beaucoup plus tard par M. Mesic. Il a dit que

5 la Croatie savait qu'elle ne gagnerait son indépendance que par la guerre,

6 c'est M. Tudjman lui même qui l'a dit.

7 Q. Pourquoi est-ce là votre avis ? Pensez-vous qu'il a raison -- qu'il

8 avait raison puisque vous avez dit, et ce que vous avez cité de ces notes,

9 c'était bien connu, c'était l'avis des dirigeants yougoslaves, de Serbie et

10 du Monténégro, à savoir que personne ne s'opposait à l'idée de sécession

11 pour autant qu'elle se fasse de façon démocratique en respectant une

12 procédure légale et démocratique.

13 R. En Croatie, ils savaient qu'ils ne pouvaient pas se débarrasser des

14 Serbes en Croatie sans la guerre.

15 Q. Donc, ils ne voulaient pas cette procédure légale parce qu'ils avaient

16 encore des Serbes qui restaient en Croatie ?

17 R. Oui.

18 Q. Vous pensez que c'est là la raison --

19 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Cela va trop loin. J'hésite, je

20 répugne à intervenir, je me suis abstenu de le faire trop -- très souvent,

21 mais, maintenant, cela va trop loin, c'est vraiment souffler les réponses

22 au témoin.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est vrai, tout à fait vrai.

24 Monsieur Milosevic, vous dirigez le témoin dans ses réponses.

25 Nous allons maintenant faire la pause.

26 M. NICE : [interprétation] Me permettriez-vous de disposer de quelques

27 minutes en l'absence du témoin parce que cela n'a rien à voir avec sa

28 déposition, ce sont des questions d'intendance et je ne vais pas rester

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1 dans ce prétoire jusqu'à la fin de l'audience.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] D'accord.

3 Monsieur le Témoin, vous pouvez quitter ce prétoire

4 [Le témoin se retire]

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais intervenir après le commentaire de

6 Mme Uertz-Retzlaff. Elle a dit que je soufflais les réponses au témoin. Je

7 suppose qu'elle ne protestera pas si c'est le président de Croatie lui même

8 qui le dit, M. Tudjman, elle ne va pas me dire que je souffle les réponses

9 à M.Tudjman.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce n'est pas de cela qu'il s'agit.

11 Vous n'êtes-vous pas sensé déposer à la place du témoin.

12 Monsieur Nice.

13 M. NICE : [interprétation] Trois choses, très brièvement. J'étais vivement

14 préoccupé devant l'évolution de la situation en matière de témoin, et

15 surtout pour ce qui est de carnet de note ce matin. J'ai fait une petite

16 recherche, notamment, au niveau du compte rendu, je suis navré de cette

17 évolution, bien sûr j'endosse toute la responsabilité, mais vous connaissez

18 tout l'historique des tentatives d'obtention de documents.

19 Hier, j'avais posé des questions à propos de ce carnet de note,

20 rappelez-vous, le fait qu'on remis ce carnet au témoin lorsqu'il est

21 arrivé, joue aussi un rôle. Ce matin j'essayais de montrer une certaine

22 neutralité à propos du document en disant qu'en ne posant pas de questions,

23 cela ne voulait pas dire que je faisais des concessions. Je n'ai pas voulu

24 donner l'impression que cela allait plus loin que cela, pourtant cela a été

25 le cas. Je voulais simplement rester neutre et, ce faisant, peut-être que

26 cela a prêté le flanc à une autre interprétation, j'en suis désolé.

27 Il n'en demeure pas moins que je maintiens ce que j'avais dit au Juge

28 Bonomy.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci de cette précision.

2 M. NICE : [interprétation] C'est moi qui vous remercie, Monsieur le Juge.

3 Hier, la Chambre m'a demandé comment on évaluait la valeur du livre bleu ou

4 plutôt comment c'était numéroté de A à F et d'un à cinq pour en savoir

5 quelle était l'importance. Je ne sais pas comment la Chambre procède à

6 cette évaluation, en tous cas la gamme de notation de l'OTAN est classique,

7 cela va de A à F et d'un à cinq.

8 Troisième chose, nous l'avons rapidement à huis clos partiel, je vais bien

9 sûr adopter ce qui a été proposé, mais je me permettre de vous demander de

10 repasser à huis clos partiel pour efflorer une fois de plus ce sujet.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Passons à huis clos partiel.

12 [Audience à huis clos partiel]

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6 [Audience publique]

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, poursuivez.

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, avant de poursuivre,

9 j'aimerais vous demander une chose en ce qui concerne l'intercalaire 1. Ces

10 notes sténographiques dont vous aviez la traduction. Est-ce qu'elles

11 peuvent être versées au dossier ?

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Un instant.

13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Nous allons donner une cote à ce

14 classeur, mais seules seront versées les parties --

15 [La Chambre de première instance se concerte]

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, il y a des

17 parties de ces notes qui concernent la Bosnie. Est-ce que vous aviez

18 l'intention de présenter des témoins en ce qui concerne la Bosnie ?

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce témoin, ici, présent, a sans nul doute des

20 connaissances. Il a participé à certains événements politiques qui

21 concernaient aussi la Bosnie-Herzégovine. Il a été à la tête de la

22 présidence fédérale ou de l'Etat jusqu'au milieu de l'année 1992, à toute

23 fin utile, jusqu'à la fin de tout le conflit en Croatie. C'est très

24 important pour la Croatie mais en partie aussi pour la Bosnie.

25 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président.

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous allez poser des

27 questions concernant ces notes à ce témoin-ci ? Je voulais m'assurer que

28 vous n'aviez pas omis cet élément. A vous, bien sûr, de décider de la façon

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1 dont vous présentez vos moyens.

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, je voulais aborder certains éléments en ce

3 qui concerne la Bosnie, mais je le ferai plus tard.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Fort bien. Une cote pour ce

5 classeur, Monsieur le Greffier.

6 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D333.

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, par le truchement de la

8 personne chargée de la liaison, je viens de recevoir des renseignements

9 concernant la déposition d'un témoin précis. Mais vu le contenu vous allez

10 le voir vous-même, je vais simplement demander de passer en l'espace de 30

11 secondes à huis clos partiel, parce que ceci concerne les coordonnées

12 personnelles de ce témoin-là.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, passons à huis clos partiel.

14 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur

15 le Président.

16 [Audience à huis clos partiel]

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13 [Audience publique]

14 M. MILOSEVIC : [interprétation]

15 Q. Professeur, nous n'allons pas revenir à cette ordonnance du 9 janvier

16 de la présidence. Voici ma question suivante. Apparemment, il est mis

17 [imperceptible] importation illégale d'armes. Est-ce que ces armes ont fini

18 par être utilisées dans le cadre de ce conflit interethnique avant la

19 séance de la présidence du 15 mars ? Paragraphe 99 du volet Croatie de

20 l'acte d'accusation, et c'est mentionné également dans le volet Bosnie de

21 façon identique. Je crois qu'il faut que je vous en donne lecture.

22 "En mars 1991, les travaux de la présidence collective fédérale était

23 paralysée à cause de quelques questions notamment à cause de la question de

24 la mise en place de l'état d'urgence en Yougoslavie. Ce n'est pas pertinent

25 ici mais ce l'est pour d'autre. Je me limite à dire ceci. Ces armes, est-ce

26 qu'elles ont été utilisées au cours du conflit armé avant ladite séance ?

27 R. Oui, on les utilisait surtout sur les territoires où il y avait une

28 majorité de Serbes qui habitaient en Croatie. Nous devons de voir quelques

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1 images à ce propos. C'était un fait notoire connu de l'opinion publique.

2 Nombreux furent les incidents qui se sont produits à l'époque dans ces

3 régions --

4 Q. Pourriez-vous en mentionner quelques-uns ?

5 R. Il y en a eu plusieurs. Cependant la plupart du temps, on a parlé de

6 Pakrat, ou Plitvice. J'ai bien lu l'acte d'accusation, et les paragraphes

7 concernés. Je pense que c'est une interprétation erronée qui est donnée

8 dans l'acte d'accusation de tout ce qui s'était passé à ces endroits. Dans

9 ce paragraphe de l'acte d'accusation, on dit, qu'il y a eu des heurts, des

10 affrontements lorsque les autorités croates ont tenté de reprendre le

11 contrôle de la région, c'est mal représenté la situation que de dire cela,

12 parce que là où il y avait une majorité serbe dans la population, où il y

13 avait des postes de police, et il est certain que c'étaient des gens du

14 territoire qui tenaient ce poste de police, il y avait des Serbes, mais il

15 y avait aussi des Croates. Alors, c'est tout à fait différent.

16 Q. Je vais vous demander si les armes avaient été utilisées avant la

17 séance de la présidence --

18 R. Oui.

19 Q. -- est-ce qu'il y a eu des incidents ?

20 R. Oui.

21 Q. Quelle fût l'attitude prise par les dirigeants de l'Etat, les

22 dirigeants militaire, face à ces incidents ? A l'intercalaire 57, on voit

23 ce qu'a dit l'amiral Brovet le 5 mars. Est-ce que vous pourriez consulter

24 ce document qui se trouve dans vos classeurs ? Intercalaire 57.

25 R. Je l'ai trouvé ce document.

26 Q. Le 5 mars 1991. Dix jours avant la tenue de la séance de la présidence.

27 Tout d'abord, est-ce que vous vous souvenez de l'amiral Brovet de ce qu'il

28 faisait à l'époque ?

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1 R. Amiral Stane Brovet était un officie très respecté de la JNA. Il était

2 Slovène d'origine, à l'époque il était secrétaire fédéral adjoint

3 responsable de la Défense nationale. Le secrétaire étant Kadijevic. Il a

4 fait une déclaration à l'époque qui porte précisément sur ce sujet.

5 Intercalaire 57.

6 Q. C'est celui-là que je vous ai demandé de consulter.

7 R. Oui. C'est ici qu'il en parle.

8 Q. Tout au début, il dit que le 2 mars, ou plutôt, il parle à une réunion

9 du comité de la Défense nationale de l'assemblée nationale de Yougoslavie.

10 R. Oui.

11 Q. En sa qualité de ministre adjoint à la défense.

12 R. Oui, parce que le ministre était absent. Il dit : "A 6 heures du matin

13 le 2 mars, quelques 200 membres du MUP croate ont encerclé et on pris

14 d'assaut l'assemblée municipale et le poste de police de Pakrac. Juste

15 avant, certains des effectifs d'active et de réserve de poste de police ont

16 quitté Pakrac avec leurs armes alors que de 15 à 20 membres de réserve qui

17 sont restés au poste de police ont été désarmés et détenus par les forces

18 qui avaient pris d'assaut Pakrac. Au fil des événements, il y a eu un

19 renforcement incessants de ces effectifs."

20 Q. Il explique des citoyens se sont rassemblés.

21 R. Oui.

22 Q. Puis qu'ils ont été dispersés par la force.

23 R. Oui. C'est à ce moment-là qu'il y a eu intervention de la JNA.

24 Q. Il dit aussi qu'au cours de ces événements on a ouvert le feu --

25 R. Oui.

26 Q. -- on a tiré.

27 R. Oui.

28 Q. Dès qu'on a informé le ministère de la Défense, celui-ci a suggéré à la

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1 présidence qu'il fallait faire venir les unités de la JNA, étaient

2 acceptées par la présidence, il y a donc engagement de certaines Unités de

3 la JNA à Pakrac. Apparemment, ceci entre dans le cadre du rôle

4 constitutionnel de la JNA qui vise à empêcher que se déclenche des conflits

5 armés, surtout interethniques, lorsqu'il y a risque de voir cette situation

6 apparaître. Il dit aussi, il insiste sur le fait que le ministère de la

7 Défense n'a pas parlé des causes ni des circonstances dans lesquelles ce

8 conflit a éclaté, parce que d'après lui, c'est un problème politique qu'il

9 faut résoudre par la voie politique et pas par la force.

10 R. Il dit que les gens ont peur, et qu'ils sont proies à l'incertitude, et

11 qu'ils veulent que cesse l'anarchie et l'absence de droit, il faut que

12 l'état de droit soit rétabli, il faut empêcher la guerre civile.

13 Q. Il dit aussi qu'au cours de l'engagement des forces de la JNA à Pakrac

14 le MUP de Croatie a tiré à partir d'un véhicule blindé sur des membres de

15 la JNA. Il dit que c'est la faute des membres du MUP qui ont ouvert le feu

16 et il estime qu'il faudrait les rendre responsable de ces faits.

17 Q. Enfin, en faisant ces déclarations devant l'assemblée, il dit en

18 m'acquittant de mes obligations je dois assurer le maintien de la paix et

19 de la sécurité de tous les citoyens de Yougoslavie. Conformément à cela les

20 unités de la JNA resteront à Pakrac tant que la situation n'aura pas été

21 normalisée conformément à la décision de la présidence de sa réunion du 2

22 au 3 mars et jusqu'à ce que la situation ne revienne à ce qu'elle a été

23 avant les incidents.

24 Q. Par la suite, il y a eu cette session, cette réunion, et cetera.

25 Maintenant je voudrais que vous me donniez quelques commentaires au sujet

26 de ce que l'on lit au paragraphe 98. Il est question de ces incidents d'une

27 autre manière -- de leur manière. Au paragraphe 98, on lit : "En mars 1991,

28 le conflit s'est intensifié lorsque les forces de police serbe ont essayé

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1 de consolider leur pouvoir dans les régions où vivait une importance

2 communauté serbe. La police serbe dirigé par Milan Martic, a pris le

3 contrôle d'un poste de police à Pakrac et des arrangements ont eu lieu

4 lorsque le gouvernement croate a tenté de rétablir son autorité dans la

5 région."

6 C'est cet événement-là.

7 "A Plitvice, un autocar transportant des policiers croates a été attaqué

8 par des Serbes et d'autres affrontements ont eu lieu. La JNA a déployé des

9 troupes dans la région et lancé un ultimatum à la police croate pour que

10 cette dernière se retire de Plitvice."

11 Ces allégations que l'on lit au paragraphe 98 sont-elles exactes ?

12 R. Je pense qu'on fournit une interprétation erronée des deux paragraphes.

13 En substance ces incidents et ces conflits qui se sont produits et que ce

14 soit à Plitvice ou à Pakrac, c'était dû à la tentative des autorités

15 croates qui était la suivante. Il y avait déjà une police croate -- une

16 police composée de Serbes, les autorités croates voulaient remplacer les

17 Serbes par les Croates dans les rangs de la police. Alors non seulement ces

18 forces de la police qui étaient déjà sur place mais aussi les citoyens dans

19 cette région où la population serbe était majoritaire n'ont pas accepté --

20 n'ont pas autorisé que ces unités avec des Croates, des policiers croates

21 prennent possession de ces postes de police où il y avait des Serbes tout

22 simplement parce que vu leurs uniformes et vu leurs insignes, leurs

23 symboles par tout cela ils rappelaient ceux qui ont été coupables de ce

24 terrible génocide commis pendant la Deuxième guerre mondiale.

25 Q. Oublions ce qu'il rappelait mais l'amiral Brovet qui est ministre

26 adjoint fédéral de la Défense et qui Slovène d'appartenance ethnique donc,

27 il ne peut nullement être un nationaliste serbe. Que dit-il ? Il dit : "Que

28 le 2 mars, 200 membres du MUP de la Croatie ont encerclé la ville et ont

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1 occupé le poste de police et l'assemblée municipale.

2 L'INTERPRÈTE : Est-ce les interprètes peuvent avoir une référence, s'il

3 vous plaît ?

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais Monsieur Milosevic, que lisez-

5 vous ?

6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je suis en train de lire le document qui figure

7 à l'intercalaire 57. C'est la déclaration de la l'amiral Brovet, le 5 mars.

8 Vous avez cela, ici, traduit. Donc, il informe le comité chargé de la

9 Défense populaire auprès du parlement, de ces événements du 2 mars.

10 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est le 57A.

11 M. MILOSEVIC : [interprétation]

12 Q. C'est la traduction anglaise, 57A; A signifie toujours traduction

13 anglaise. Donc, le 57, c'est la version serbe.

14 Au point 98, il est dit : "Que les forces de la police serbe --

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais, Monsieur Milosevic, nous ne

16 l'avons pas retrouvé.

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] 57A, c'est cela, le numéro de l'intercalaire

18 pour vous.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

20 L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

21 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

22 L'ACCUSÉ : [interprétation] "A 6 heures, le 2 mars, environ 200 membres du

23 MUP --"

24 L'avez-vous retrouvé ?

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non.

26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais où dans le document ?

27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais cela devrait être au début comme chez moi.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est le premier paragraphe.

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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais vous l'avez -- vous l'avez aussi sur le

2 rétroprojecteur, la traduction anglaise.

3 M. MILOSEVIC : [interprétation]

4 Q. Donc, il est dit ici, Brovet -- Stanley Brovet informe le parlement

5 fédéral : "Que 200 membres du MUP ont encerclé le bâtiment des autorités

6 municipales et le poste de police qui l'ont investi." Après, on voit

7 quelles ont été les réactions des citoyens et ce qui s'est passé.

8 Ensuite, ce qu'on lit dans l'acte d'accusation, c'est qu'en mars 1991

9 : "Le conflit s'est intensifié lorsque les forces de police ont essayé de

10 consolide leur pouvoir."

11 R. Mais cela n'a aucun sens. Cette affirmation est insensée. Partout, il y

12 a eu des conflits à partir du moment où les autorités croates tentaient de

13 commettre des actes de violence.

14 Q. Oui. C'est cela. Donc, votre réponse, quelle est la réponse que vous

15 nous apportez ? Les allégations de l'Accusation sont-elles véridiques,

16 sont-elles fondées ?

17 R. Non.

18 Q. A l'entrée, brièvement, je souhaite que l'on voit un enregistrement de

19 cette session qui s'est tenue le 5 mars. Nous avons déjà vu des extraits

20 préalablement.

21 [Diffusion de cassette vidéo]

22 L'INTERPRÈTE :

23 [voix sur voix]

24 "Est-ce que vous pensez vraiment que vous pouvez importer

25 illicitement des armes contrairement à la constitution et entraîner le pays

26 dans une guerre civile ?" Ce sont des faits que vous avez publiés --

27 "Mesic : La Serbie est plus --

28 Jovic : Vous avez dit que vous n'allez plus appliquer les lois

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1 fédérales sur votre territoire. Pour est-ce que tu dis que tu es en train

2 de démanteler le pays ? Ce que tu me dis, c'est là non pas de valeur. Ici,

3 il s'agit de l'usurpation des droits et on ne l'autorisera pas --

4 Mesic : Tout le monde fait cela.

5 Jovic : Vous êtes en train de vous engager à une guerre civile. Il

6 s'agit là de faits qui sont incontestables. Vous êtes en train d'entraîner

7 le peuple qui vit sur votre territoire dans une guerre civile. Par là, vous

8 êtes en train de susciter, de provoquer une guerre civile en Yougoslavie.

9 Ce sont les faits que personne ne peut contester."

10 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

11 M. MILOSEVIC : [interprétation]

12 Q. Donc, on a entendu l'interprétation partielle. Vous avez la version

13 serbe. Qui sont ces deux interlocuteurs ?

14 R. C'est le Docteur Borisav Jovic, celui qui parlait.

15 Q. Mais, il y en avait deux qui parlaient.

16 R. Donc lui, lorsqu'on regarde l'écran se trouve à droite pour nous qui

17 regardons. Il était le président de la présidence fédérale à l'époque,

18 yougoslave. A côté de lui, le président de la présidence de la République

19 fédérale, M. Stjepan Mesic.

20 Q. Au sujet de cet événement, je vous ai déjà cité le paragraphe 99, mais

21 est-ce qu'il est nécessaire que vous nous précisiez quelle était la

22 divergence entre ceux qui ont apporté leur soutien à la position prise par

23 l'armée et ceux qui étaient contre cette position ?

24 R. Écoutez, je ne sais pas s'il y a lieu que je le souligne encore une

25 fois ou davantage. Le fait est le suivant. Ceux qui prônaient l'acceptation

26 de la proposition du Grand état-major ou du sommet de la hiérarchie

27 militaire donc, de l'état-major du commandement Suprême. Ils ont estimé que

28 si on mettait, on place une situation d'urgence, d'exception, que ceci

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1 pouvait empêcher que le conflit interethnique ne prenne de l'ampleur et

2 qu'on ne risque une guerre civile que ce soit en Croatie ou au-delà de la

3 Croatie. Ceux qui s'opposaient à cette proposition, c'étaient des

4 représentants de la Slovénie, de la Croatie, de la Bosnie et de la

5 Macédoine. Ils pensaient que si on mettait en place une situation d'urgence

6 ou si on assistait un peu plus sur l'importance de l'armée que ceci pouvait

7 susciter une guerre civile dans certaines parties du pays. Donc, du moins,

8 c'était cela leur explication de leur position. Donc, pourquoi ils

9 s'opposaient à la mise en place d'une situation d'urgence.

10 Q. Très brièvement, je pense que ce sera parlant. Est-ce qu'on pourrait

11 voir quelque chose ? C'était une proposition qui devait être acceptée et

12 publié par la présidence. C'est à l'intercalaire 58. Pourriez-vous, vous y

13 reporter, s'il vous plaît ?

14 R. Je l'ai trouvé.

15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, vous l'avez. C'est une seule

16 feuille et elle a été traduite en anglais.

17 M. MILOSEVIC : [interprétation]

18 Q. Est-ce que c'est bien là la proposition qui venait de l'état-major du

19 commandement Suprême qui était adressée à la présidence et qui n'a pas pu

20 être acceptée parce que quatre membres de la présidence s'y sont opposés,

21 ceux de la Slovénie, Croatie, Bosnie-Herzégovine et Macédoine.

22 R. Oui. En réalité, c'est une proposition comparable en mesures proposées

23 par les militaires précédemment mais elles ont été acceptées mais elles

24 n'avaient été traduites dans les faits. Ce sont les mesures proposées le 9

25 janvier.

26 Q. A présent, la présidence tente d'adopter les mesures suivantes. Que

27 lit-on ici ?

28 R. [aucune interprétation]

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1 Q. En fait, elle aurait pu le faire si un membre de présidence, de plus,

2 l'avait accepté. Premièrement, c'est le troisième paragraphe --

3 R. "Premièrement, prendre des mesures dans les rangs des forces armées de

4 la RSFY au niveau qui conformément à l'appréciation de l'état-major du

5 commandement Suprême, garantir d'empêcher un conflit armé interethnique et

6 la guerre civile, à réunir les conditions pour une solution pacifique et

7 démocratique de la crise yougoslave en se fondant sur la constitution et

8 les lois du pays.

9 "Deuxièmement, prendre des mesures urgentes et décisives afin de ramener le

10 système de la défense du pays dans le cadre établi par la constitution de

11 la RSFY. A cette fin, il y a l'ordre de la présidence de la RSFY du 9

12 janvier 1991, afin de désarmer et démanteler les unités armées illégales,

13 les positions et les décisions de la présidence sur le contrôle de la

14 Défense territoriale, ces mesures et ces éléments seront mis en œuvre de

15 manière cohérente.

16 En adoptant cette décision, la présidence de la RSFY a fait valoir la

17 nécessité d'intensifier un dialogue constructif et démocratique afin de

18 surmonter la crise économique, politique et constitutionnelle et sur

19 l'organisation future de la Yougoslavie.

20 La présidence de la RSFY souligne encore une fois --"

21 Q. [aucune interprétation]

22 A. Dans sa détermination à résoudre.

23 Q. Qu'a-t-il dit afin : "En employant des mesures, des moyens

24 constitutionnels en s'opposant à toute forme d'anarchie et à l'adoption

25 unilatérale des décisions."

26 R. Oui.

27 Q. Pourquoi est-ce que cela n'a pas été adopté lors de la séance de la

28 présidence ? Donc cela n'a pas été adopté.

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1 Maintenant, revenons au paragraphe 56 que j'ai cité. J'ai cité les trois

2 premières lignes, je cite : "Le travail de la présidence est tombé dans une

3 impasse sur plusieurs questions et notamment celle de l'imposition de

4 l'état d'urgence."

5 Nous avons vu ce qui a été proposé. Ensuite, il est dit que : "Des membres

6 des présidences de la Serbie, du Monténégro, Vojvodine, et cetera, et du

7 Kosovo ont démissionné. Dans son discours du 16 mars 1991, diffusé à la

8 télévision, Slobodan Milosevic, président de la République de Serbie, a

9 déclaré que la Yougoslavie c'était terminé, que la Serbie n'était plus

10 tenue de respecter les décisions de la République fédérale -- de la

11 présidence fédérale."

12 Voyons si cela correspond à la réalité.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, en fait, il

14 s'agissait là du paragraphe 99 de l'acte d'accusation relatif à la Croatie

15 --

16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Paragraphe 99 certes, mais il est exactement

17 mot pour mot semblable au paragraphe 56 de l'acte d'accusation relatif à la

18 Bosnie. On fait référence à un discours que j'ai prononcé. Je suis désolé,

19 mais je dispose de ce discours tel qu'il a été publié dans Politika en

20 mars, le 17 mars, mais malheureusement je n'ai pas noté exactement

21 l'intercalaire correspondant. Je crois qu'il s'agit de l'intercalaire 51.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, il s'agit de l'intercalaire 51.

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, 51. J'espère que ceci a été traduit, même

24 si moi-même je n'ai pas eu la traduction. Un instant, je vous prie. Je n'ai

25 pas vérifié la traduction en anglais. Mais observons une petite pause sur

26 ce point.

27 M. MILOSEVIC : [interprétation]

28 Q. Nous avons ici la une de Politika, et au paragraphe 99 ou 56 qui sont

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1 les mêmes, donc dans ces deux actes d'accusation ont

2 dit : "Dans un discours, en mars, Slobodan Milosevic a déclaré que la

3 Yougoslavie appartenait au passé."

4 Alors, j'aimerais que vous donniez lecture de mon discours depuis le début

5 parce qu'ici on affirme que j'ai déclaré dans mon discours que la

6 Yougoslavie appartenait au passé. Qu'est-ce que j'ai effectivement dit ?

7 R. "La nuit dernière, la Yougoslavie est entrée dans la phase finale de

8 son agonie. La présidence de la RSFY ne fonctionne plus depuis longtemps

9 maintenant, et toutes illusions qui auraient pu subsister au sujet de ces

10 efforts, qui en fait sont totalement inexistants, toutes ces illusions ont

11 été complètement dissipées."

12 Q. Alors qu'est-ce qui a expiré ? Qu'est-ce qui est mort ? Est-ce que

13 c'est la Yougoslavie ou quoi ?

14 R. Ce sont les illusions selon lesquelles la présidence fonctionnerait,

15 ces illusions, elles, ont disparu, se sont dissipées, sont mortes dirons-

16 nous. Donc il y a une mauvaise interprétation de ce texte dans l'acte

17 d'accusation.

18 Q. Mais bien. Puisqu'on dit que j'ai déclaré que la Yougoslavie

19 appartenait au passé, qu'elle était morte, veuillez poursuivre la lecture.

20 L'INTERPRÈTE : Les interprètes ne disposent pas du texte.

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce qui figure dans l'acte d'accusation, la

22 seule qui soit et que vous avez lu. La seule chose qui soit un petit peu

23 vraie, c'est ce qui figure à la fin. Parce qu'en fait, loin de dire que la

24 Yougoslavie appartenait au passé, on voit que vous, vous êtes resté

25 farouchement en faveur de cette idée yougoslave.

26 M. MILOSEVIC : [interprétation]

27 Q. Bien. Soyez voir s'il y a la moindre trace de vérité dans cette

28 allégation.

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1 Les paragraphes 99 et 56. Est-ce que c'est exact ce qui est écrit là ?

2 R. Seulement un petit peu.

3 Q. Non, je parle de ce qui est dit au sujet de la mort de la Yougoslavie.

4 R. Non. Vous avez dit dans votre discours que c'est l'illusion de

5 l'existence de la présidence qui avait disparu.

6 Q. Oui. Illusion selon laquelle on essayait de faire quelque chose. Mais

7 il y a une autre allégation qui est faite dans l'acte d'accusation, à

8 savoir que les représentants de la présidence -- à la présidence de la

9 République de Serbie et de la République de Monténégro, de la province

10 autonome de Vojvodine, la province autonome du Kosovo-Metohija ont tous

11 démissionnés de leurs postes. Est-ce que c'est exact ?

12 R. Je ne peux me prononcer avec certitude sur la -- tous autant qu'ils

13 sont, mais je sais que Borisav Jovic a démissionné de son poste de

14 président de la présidence de la RSFY, et pour le Monténégro, il en a été

15 de même avec Nenad Bucin. Dans le communiqué de presse de l'agence Tanjug,

16 il a été dit que Jugoslav Kostic avait également annoncé sa démission.

17 Q. Riza Sapundzija, qu'en est-il de lui ?

18 R. Je pense que lui aussi, il a été remplacé à ce moment-là.

19 Q. Est-ce que vous avez expliqué pourquoi ces hommes qui avaient

20 démissionné avaient pris cette décision ?

21 R. Je n'ai pas eu l'occasion de m'entretenir avec eux à ce sujet, mais ce

22 qu'ils ont dit publiquement, c'est qu'ils ne souhaitaient pas participer au

23 démantèlement de la Yougoslavie ou en être responsable parce qu'ils

24 estimaient que de telles décisions, des décisions relatives à l'état-major

25 du commandant Suprême, toutes ces décisions étaient propres à plonger la

26 Yougoslavie immédiatement dans la guerre civile.

27 Q. Mais, qu'en est-il de votre opinion, de votre évaluation de la

28 situation, puisque ensuite vous êtes devenu vice-président de la

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1 présidence ? Est-ce que la capacité de la présidence à adopter cette

2 proposition au sujet de l'état-major du commandant Suprême traduisait

3 l'incapacité de la présidence à remplir son rôle, à remplir ses

4 obligations ?

5 R. Oui. Je crois que c'était un échec de la présidence, l'incapacité

6 qu'elle avait de remplir ses obligations qui étaient la préservation de

7 l'intégralité territoriale de la Yougoslavie. Je pense qu'il s'agissait là

8 en l'occurrence d'une violation extrêmement grave de cette obligation à

9 plusieurs reprises. J'ai dit publiquement - je l'ai d'ailleurs écrit dans

10 mon livre - j'ai dit que, selon moi, l'adoption de cette proposition de

11 l'état-major du commandement Suprême lors de la séance du 12, 13 et 14 mars

12 constituait -- avait constitué la dernière chance peut-être d'empêcher une

13 guerre civile généralisée en Yougoslavie.

14 Q. A l'intercalaire numéro 58, on parle "de mesures pour augmenter le

15 niveau de préparation des forces armées afin d'éviter la guerre civile et

16 le conflit interethnique." Or cette proposition elle n'a pas été acceptée ?

17 R. Exactement.

18 Q. Quelle a été la réaction de l'état-major du commandement Suprême ?

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avant de vous laisser poursuivre, une

20 question. Je souhaite pouvoir comprendre exactement comment tout cela

21 fonctionne. Il s'agissait là du commandement Suprême constitué de huit

22 représentants. Est-ce que les décisions étaient prises à la majorité

23 simple ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Expliquez-moi je vous prie, comment

26 dans une structure démocratique de ce type, expliquez-moi dans -- en quoi

27 on va aider la discussion, faire avancer le débat en claquant la porte si

28 la proposition que l'on présente ne bénéficie pas du soutien de la

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1 majorité ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois qu'il y a dans votre question un

3 grand nombre de questions qui sont soulevées. Premièrement, la présidence

4 comptait neuf membres. Pour qu'une décision soit adoptée, il fallait qu'il

5 y ait au moins cinq membres de la présidence qui se prononcent en faveur de

6 ladite décision.

7 Réponse s'agissant de la question essentielle, le règlement du travail de

8 la présidence stipulait qu'il fallait une majorité des deux tiers, c'est-à-

9 dire qu'il fallait le vote favorable de six membres de la présidence pour

10 faire passer une décision. Lors de cette réunion, quatre membres se sont

11 prononcés pour et quatre contre. La réunion a été interrompue, si je me

12 souviens bien, et elle a repris un ou deux jours plus tard.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous n'avez pas répondu à ma question.

14 Enfin, est-ce que vous êtes dans la capacité de me répondre ? Je

15 préfèrerais que vous me disiez cela au lieu de me répéter ce que vous avez

16 déjà dit.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous prie de m'excuser, Monsieur Bonomy.

18 Mais dans ces conditions, je crois de ne pas avoir compris votre question.

19 Pourriez-vous la répéter je vous prie ?

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ma question était la suivante : Quand

21 on se trouve dans un système comme celui-là qui fonctionne de manière

22 démocratique, où chacun peut exprimer son vote, et où ces personnes

23 constituent le commandement Suprême, je ne vois pas comment on peut faire

24 avancer le débat au sujet de l'avenir de la Yougoslavie en claquant la

25 porte, en démissionnant si l'on n'obtient pas ce que l'on souhaite si la

26 proposition que l'on présente n'est pas acceptée à la majorité ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que vous avez mal compris la

28 situation. Personne n'est parti, tous les membres de la présidence sont

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1 restés à leur place pendant toute la durée de la réunion, réunion qui a

2 durée trois jours.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais vous venez de nous dire qu'à

4 votre connaissance, il y a deux membres de la présidence qui ont ensuite

5 démissionnés. En fait, ce que vous a dit

6 M. Milosevic, c'est qu'il y en avait quatre qui avaient présentés leur

7 démission. Donc, quoi qu'il en soit, ceux qui n'étaient pas satisfaits de

8 la décision ainsi prise ont dit : "Bien, ça va, je ne joue plus, je vais

9 jouer -- je m'en vais." Alors, je voudrais savoir en quoi cela fait avancer

10 de manière raisonnable le débat politique.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Si vous êtes-vous en train de me demander ce

12 que je pense moi-même de ces démissions, des démissions présentées à

13 l'époque, je dois vous dire la chose suivante : Dans une situation de ce

14 type, quand on est donc dans une situation extrêmement critique telle que

15 si on avait pas pris les décisions concernées, si on ne prend pas les

16 décisions concernées, cela entraîne la guerre civile. Je pense que, si

17 j'avais été à leur place, pour les mêmes motifs qu'ils ont invoqués, à

18 savoir qu'ils ne voulaient plus parler -- participer à la désintégration du

19 pays, je dois dire que j'aurais agi de même. La différence est que -- la

20 différence est le Dr Jovic, plusieurs jours plus tard suite à des

21 instructions de l'assemblée de Serbie est retourné travaillé au sein de la

22 présidence. Alors que Nenad Bucin a maintenu sa décision et il n'est pas

23 revenu. Donc je fais ici la différence entre le vote au cours de cette

24 séance de travail, la capacité de rendre une décision et le fait de

25 démissionner après une réunion. Parce que ces démissions elles ont eu lieu

26 après la réunion, à la fin de la réunion dans sa totalité, le troisième

27 jour, après le troisième jour.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais quand on laisse derrière soi

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1 le processus démocratique pour une raison très impérieuse parce qu'on

2 estime que la décision qui a été prise est la mauvaise, qu'elle va

3 entraîner le démantèlement de l'Etat. Quand on abandonne le processus

4 démocratique dans un tel contexte, quand on démissionne, il faut avoir à

5 l'esprit une -- une alternative afin de défendre les intérêts de l'Etat.

6 J'essaie de voir comment ils pensaient attendre cet objectif justement, en

7 démissionnant ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous prie de m'excuser mais je ne saurais

9 répondre à votre question, j'ignorer ce qu'il pensaient. Tout ce que je

10 disais, je n'ai pas eu l'occasion de contacter ces personnes, mais tout ce

11 que je disais, c'est que c'était là une situation fort critique dans

12 laquelle se trouvait le pays, qui entraînait directement la guerre -- vers

13 la guerre civile. Cette réunion a eu lieu trois jours -- trois jours -- a

14 durée trois jours. Il y avait huit membres au sein de la présidence, s'il y

15 en avait eu neuf, à ce moment-là ils auraient obtenu la majorité. Mais en

16 fait ce qui s'est passé, c'est qu'il y a eu -- on était dans l'impasse, on

17 était dans l'impasse, et si j'avais eu les responsabilités de ces gens, ces

18 mêmes responsabilités en tant que membre de la présidence du commandement

19 Suprême, j'aurais peut-être réagi de la même manière, présenter ma

20 démission pour œuvrer en faveur de la raison.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je ne veux pas prolonger indûment

22 notre conversation. Mais est-ce qu'on peut vraiment qualifier cette

23 situation d'impasse ? Parce qu'on avait besoin d'une voix, d'une voix

24 favorable pour changer la donne. Mais s'il y avait parité entre les deux

25 partis, c'était le statu quo et cela allait l'emporter. Donc, je pense là

26 si vous décidez de quitter, de partir, cela crée un vide, ce qui risque

27 d'avoir accéléré, d'avoir précipité le démantèlement de l'Etat. Mais, à M.

28 Milosevic de décider la façon dont il va poursuivre.

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur Bonomy, permettez-moi de dire ceci.

2 Moi aussi, je pense à une quatrième catégorie, mais je pense que sa

3 situation dans le jeu de l'échec de l'impasse, les pattes sont les mêmes

4 parce que si vous avez deux camps qui ont une bonne chance de gagner, à ce

5 moment-là, en fonction de solutions constitutionnelles et de décisions

6 constitutionnelles, cela ne veut pas nécessairement signifier le vide. Il y

7 a d'autres possibilités.

8 M. MILOSEVIC : [interprétation]

9 Q. Essayons de tirer au clair ce que disait le Juge Bonomy. Je pense qu'il

10 a bien présenté la question à mon avis personnel. Tirons quand même quelque

11 chose au clair. La constitution ne donne t-elle pas l'obligation suprême à

12 la présidence d'essayer d'empêcher que n'éclate la guerre ?

13 R. Si un accord avait été signé en vertu de la constitution à cet effet

14 par l'assemblée fédérale.

15 Q. Laissons ceci de côté pour le moment. Je pense que nous pourrons nous

16 entendre sur une explication. Si nous laissons de côté les personnes, vous

17 avez Borisav Jovic et Nenad Bucin, de la Serbie et du Monténégro, qui

18 démissionne.

19 Faisons une différence maintenant pour le Monténégro entre vous notamment

20 et l'autre personne.

21 R. Oui.

22 Q. Est-ce que c'est instauré un vide par la suite ? Vous avez expliqué

23 qu'ils avaient décidé de démissions après la réunion. Est-ce qu'il faut

24 penser que c'était un acte responsable de leur part ? Bucin a démissionné.

25 Qu'est-ce qui s'est passé après ? Il a eu aussitôt une réaction du

26 Monténégro qui vous a désigné, n'est-ce pas ?

27 R. Non.

28 Q. Quand est-ce que vous avez été nommé ?

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1 R. Je n'ai pas tout de suite été désigné par le Monténégro, mais en vertu

2 de la constitution, il est prévu que si le Monténégro n'est pas représenté

3 à la présidence de la RSFY, ce qui s'est passé au moment de la démission de

4 M. Bucin, elle prévoie que le président de la présidence remplisse les

5 fonctions de ce membre de la présidence, donc jusqu'au moment de mon

6 élection, de ma confirmation par l'assemblée c'est Momir Bulatovic, qui a

7 rempli ce rôle, à l'époque, il était le président de la présidence du

8 Monténégro, c'était là la solution qu'apportait la constitution.

9 Q. Donc, il n'y a pas de vide ?

10 R. Exact. C'est bien ce que j'ai dit il n'y a pas eu de vide qui s'est

11 instauré.

12 Q. Bucin a démissionné, le Monténégro vous a choisi. Avant que vous ne

13 preniez vos fonctions, c'est le président qui a rempli votre fonction

14 conformément à la constitution. C'est bien à cela que cela revient ?

15 R. Oui.

16 Q. Jovic a retiré sa démission et a continué à œuvrer dans la présidence ?

17 R. Oui.

18 Q. Je vous remercie. Nous pourrons poursuivre. Je m'excuse, mais je devais

19 retrouver un document, et je ne parviens pas à mettre la main dessus.

20 Voyons la réaction de l'état-major du commandement Suprême après que sa

21 proposition a été rejetée, intercalaire 59, déclaration officielle du

22 commandement Suprême de la RSFR, la date est celle du 19 mars 1991.

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous avez ce document, je pense que oui,

24 Monsieur Robinson, vous l'avez en anglais, n'est-ce pas ?

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

26 M. MILOSEVIC : [interprétation]

27 Q. Voici le sujet. "Aux séances des 12, 14, et 15 mars, la présidence n'a

28 pas accepté la proposition de l'état-major du commandement Suprême afin que

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1 soit prise les mesures nécessaires pour empêcher l'éruption du conflit armé

2 interethnique et la guerre civil et pour veiller à ce que soit mise en

3 place les conditions permettant une solution pacifique et démocratique à la

4 crise yougoslave en s'appuyant sur la constitution et les lois de la RSFY.

5 "L'état-major du commandement Suprême, c'est l'instance suprême pour ce qui

6 est du contrôle et du commandement des forces armées en tant que tel elle a

7 fait le point sur la situation et les conséquences qu'on peut escompter

8 sont les suivantes.

9 "La JNA va surveiller avec attention les frontières de la RSFY, elle ne

10 permettrait pas qu'il y est un conflit armée interethnique, qu'on est

11 recours à la force."

12 R. Ni non plus qu'il y est des manifestations violentes d'où qu'elles

13 viennent destiner à renverser le régime.

14 Q. Puis, ce texte dit : "Vu que les circonstances qui ne se prêtent pas à

15 l'application de la décision de janvier, on ne serait tenir responsable la

16 JNA de l'armement de la population et de l'organisation militaire de qui

17 que ce soit ou que ce soit sur le territoire yougoslave."

18 Puis, on rappelle : "Les conditions et les conditions préalables à une

19 solution pacifique et démocratique de la crise yougoslave…"

20 Alors qui est-ce qui s'oppose à ce que ces mesures soient prises ?

21 R. Je pense que ce sont surtout les représentants des républiques

22 sécessionnistes qui se sont opposés à cette idée, par la suite il y a une

23 sécession violente de la Yougoslavie -- de ces républiques par rapport à la

24 Yougoslavie, nous l'avons vu plus tard. Vu ces informations que j'avais à

25 l'époque et qui ont été rendues publiques j'ai pensé que les représentants

26 de la présidence de Bosnie-Herzégovine et ceux de Macédoine les ont

27 rejoints, en pensant qu'effectivement, en craignant que la Croatie et la

28 Slovénie ne pensent qu'ils étaient entachés de partie pris.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pensez-vous qu'il convienne qu'une

2 armée fasse ce genre de déclaration dans laquelle elle exprime sa

3 frustration, son désaccord face à une proposition d'un gouvernement -- de

4 son gouvernement ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Tout ce que je peux vous dire, Monsieur

6 Bonomy, c'est ce que j'aurais fait dans une telle situation, mais cela ne

7 veut pas dire que cela aurait été une bonne chose, que cela aurait été la

8 mesure qu'il fallait prendre.

9 Dans mes déclarations publiques et, plus tard, en tant que vice-président

10 de la présidence de la RSFY, en tant que membre de la présidence, des

11 reprises, j'ai répété ce que j'avais dit, à savoir que je pensais - et je

12 pense toujours - qu'on était à la 25e heure qu'il était quand même grand

13 temps qu'on agisse pour empêcher qu'il y est chaos et guerre civile sur ce

14 territoire. Parce que, si j'avais été dans cette situation, j'aurais

15 décrété l'état d'urgence, mais peut-être que ce n'était pas la bonne chose

16 à faire.

17 En ce qui concerne M. Kadijevic, je vous l'ai dit lorsqu'on a souvent

18 critiqué, lorsqu'on s'est souvent plaint de ce qu'il faisait en tant que

19 ministre de la Défense, j'ai dit à l'époque, à mon avis, M. Kadijevic était

20 davantage un homme politique et un soldat. Jamais je n'ai autorisé qu'on

21 doute de lui ou qu'on le soupçonne, parce qu'à mon avis, il a toujours été

22 et il est toujours Yougoslave.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous semblez dire qu'il est tout à

24 fait acceptable qu'une armée fasse ce genre de déclaration, manifestant son

25 désaccord avec une décision qui est prise par le commandement Suprême de

26 cette armée. Si vous aviez fait partie de ceux qui s'opposaient à l'état

27 d'urgence, est-ce qu'à vos yeux ce n'était pas là, je parle ici de cette

28 déclaration, un acte montrant une absence de loyauté ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Pas du tout. Ce genre de déclarations au

2 contraire montrent la loyauté de l'armée envers l'état-major du

3 commandement Suprême, nous parlons ici de dirigeants civils de l'armée.

4 Mais si j'avais été à la place du général Kadijevic plutôt que de faire

5 cette déclaration, j'aurais pris des mesures, mais je ne sais pas si cela

6 aurait été les bonnes.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous pensez dès lors que le cinquième

8 paragraphe, le fait d'abandonner ces responsabilités c'est là une position

9 acceptable ?

10 M. MILOSEVIC : [interprétation]

11 Q. Monsieur Kostic, avant de répondre, lisez le cinquième paragraphe.

12 R. "On dit puisque les conditions nécessaires n'ont pas été réunies,

13 conditions nécessaires à l'application de l'ordre du 9 janvier 1991, donné

14 par la présidence de la RSFY, la JNA ne serait endossée aucune

15 responsabilité si se poursuit l'armement illégal des citoyens ou s'il

16 s'organise de façon militaire ou que ce soit sur le territoire -- du

17 territoire de la Yougoslavie."

18 De la façon dont je comprends ces termes, l'état-major du

19 commandement Suprême respectant, tout à fait, la situation d'impasse dans

20 laquelle se trouvait la présidence où il y avait quatre voix pour et quatre

21 voix contre, la JNA où l'état-major du commandement Suprême dit que cette

22 situation déjà difficile va se poursuivre, va perdurer et s'aggraver à

23 l'avenir. Alors, c'est pour cela que je ne vois pas, moi, ce que j'aurais

24 fait si j'avais été un des huit membres de la présidence. J'essayais de

25 vous expliquer même si ceci me fait courir un certain risque. Je vous dis

26 que si j'avais été à la place du ministre de la Défense face à cette

27 impasse et conscient des difficultés que présentait la situation, j'aurais,

28 peut-être, pris des mesures, ce jour-là, compte tenu du fait que dans un

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1 pays démocratique comme la Grèce, l'armée a pris des mesures dans des

2 situations critiques et, pendant sept ans, pratiquement, il y a eu une

3 junte militaire. Mais il n'y a pas eu de guerre civile en Grèce et la

4 démocratie est revenue dans la paix plus tard. Je ne sais pas si ma

5 décision aurait été la bonne, mais c'est ce que moi, sans doute, j'aurais

6 fait.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons lever l'audience

8 parce qu'il y a une autre audience qui commence sous peu.

9 L'INTERPRÈTE : Microphone, s'il vous plaît.

10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je comprends. Mais est-ce que vous me

11 permettez de poser une dernière question pour tirer au clair ce que vient

12 de dire le Juge Bonomy --

13 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

14 M. MILOSEVIC : [interprétation]

15 Q. Paragraphe 5 : "Puisque la présidence de la RSFY n'accepte les

16 mesures proposées pour l'application complète de son ordre du 9 janvier --"

17 il serait peut-être utile de lire l'ordre. La présidence ordonnait le

18 désarmement et le démantèlement d'unités armées illégales. Étant donné que

19 cette décision n'a pas été acceptée, l'armée dit, qu'elle ne pourrait pas

20 être tenue responsable de la poursuite de cette situation parce que si

21 l'armée n'avait pas tenu compte de l'ordre, elle se serait trouvé dans

22 l'inégalité. Je ne sais pas si c'est exact ou pas mais c'est bien ce qui

23 est dit parce que l'ordre a été rejeté. Est-ce là bien un fait ?

24 R. Tout à fait. C'est précisément de cela qu'il s'agissait, d'un

25 fait, et je vous ai dit que face à une telle situation, si j'avais à la

26 place du ministre, peut-être que j'aurais fait quelque chose d'autre même

27 si cela aurait pu donner l'apparence de quelque chose d'inégale parce que

28 la décision était grave. Face à une impasse, lorsque les autorités civiles

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1 ne peuvent pas trouver une bonne solution, peut-être que j'aurais pris des

2 mesures différentes.

3 Q. Fort bien.

4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur Robinson. Je comprends qu'il

5 nous faut lever l'audience.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Effectivement, elle reprendra

7 mercredi 1er février, à 9 heures.

8 --- L'audience est levée à 13 heures 47 et reprendra le mercredi 1er

9 février 2006, à 9 heures.

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