Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mercredi 15 février 2006

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 05.

6 LE TÉMOIN: BRANKO KOSTIC [Reprise]

7 [Le témoin répond par l'interprète]

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur

9 Milosevic. Je vous invite à être aussi succinct que possible, rappelez-vous

10 qu'il n'est pas nécessaire que vous posiez des questions au sujet de tous

11 les éléments qui ont été évoqués lors du contre-interrogatoire. Essayez de

12 vous concentrer sur les éléments et les sujets dont vous pensez que votre

13 témoin peut parler plus avant.

14 Nouvel interrogatoire par M. Milosevic : [Suite]

15 Q. [interprétation] Professeur Kostic, si l'on parle des affirmations

16 lancées par Mme Uertz-Retzlaff au sujet de ma lettre ouverte à Milan Babic,

17 qu'elle parle de cela ma déclaration - peu importe, elle peut appeler cela

18 comme elle le souhaite - mais cette lettre est-ce que vous l'avez sous les

19 yeux ? Intercalaire 79, de la pièce 352, la une du journal Politika.

20 R. Oui, cela y est, je l'ai.

21 Q. Auriez-vous l'amabilité de lire le début ? Ensuite, on pourra passer à

22 la suite ?

23 R. "Lettre ouverte de Slobodan Milosevic à Milan Babic. Le peuple ne doit

24 pas avoir à souffrir du fait de l'égoïsme des hommes politiques. Le refus

25 des solutions pacifiques au conflit signifie que l'on va vers la guerre

26 alors qu'il n'y a pas de raison qu'il y est la guerre. Le fait que la

27 Serbie aide la Krajina ne signifie pas que celle-ci est le droit de décider

28 de la vie et de la mort de ces citoyens."

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1 Q. Vous, qu'est-ce que vous lisez ?

2 R. Les intertitres.

3 Q. Bien. Ne perdons pas plus de temps. Examinons plutôt le texte véritable

4 de la lettre.

5 R. Je cite : "J'estime qu'il est de mon obligation et de ma responsabilité

6 de manifester mon désaccord avec la position que vous allez -- avez prise

7 et selon laquelle vous ne souhaitez que les forces de maintien de la paix

8 des Nations Unies protège le territoire de la Krajina dans le cadre du plan

9 Cyrus Vance. Le fait de rejeter la protection --"

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pourquoi est-on en train de lire

11 cette lettre, dans quel objectif ? Est-ce que vous allez lire une bonne

12 partie de cette lettre, la totalité ? Pourquoi est-ce que vous ne posez pas

13 des questions au témoin ?

14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien, j'aimerais bien lui poser des questions,

15 qui ont trait à l'affirmation lancée selon laquelle je conteste les

16 dirigeants de la Krajina et cela a trait à tout ce que raconte l'autre

17 côté, et tout ce qu'a dit Mme Uertz-Retzlaff en évoquant le livre de

18 Borisav Jovic parce que, quand on lit cette lettre, tout cela c'est

19 complètement faux.

20 M. MILOSEVIC : [interprétation]

21 Q. Veuillez lire l'avant dernier paragraphe de la lettre, je vous prie.

22 R. "Etant donné qu'il est manifeste que depuis longtemps maintenant vous

23 créez une image auprès des citoyens selon laquelle vous êtes en accord avec

24 les dirigeants de la Serbie, je voudrais que le peuple de la Krajina sache

25 que ce n'est pas vrai."

26 Q. Professeur Kostic, ce qui se passait là-bas c'était décidé à Belgrade;

27 c'est cela ?

28 R. Oui. C'est ce que j'ai dit dans mon contre-interrogatoire. Quand on a

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1 parlé de mon discours et de ce que j'ai dit aux gens de Glina, je suis venu

2 leur dire que justement toutes ces rumeurs dont vous parlez étaient

3 complètement fausses.

4 Q. Oui, selon laquelle tout ce qui se passait là-bas c'était le fait de la

5 Serbie ?

6 R. Oui, oui. Au cours de mon interrogatoire principal, j'ai dit que

7 c'était faux de penser de la sorte, même si vous-même vous aviez une très

8 grande influence politique en Serbie et au Monténégro, j'ai dit qu'il était

9 tout à fait faux et erroné de partir du principe comme le pensait l'opinion

10 publique internationale et nationale, donc, il était faux de penser que

11 vous contrôliez de manière absolue les dirigeants de la Krajina.

12 Q. Qu'est-ce qu'on peut lire ensuite ? "Bien que vous m'ayez

13 personnellement informé --

14 L'INTERPRÈTE : Problème technique --

15 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

16 M. MILOSEVIC : [interprétation]

17 Q. [aucune interprétation]

18 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

19 M. MILOSEVIC : [interprétation]

20 Q. Examinez le dernier paragraphe. "Bien que vous m'ayez informé

21 personnellement que vous accepteriez tout à fait les décisions de la

22 présidence yougoslave sur l'arrivée des forces des Nations Unies, vous avez

23 fait la sourde oreille aux prises de positions explicites de la présidence

24 yougoslave, et ceci plus d'une fois, présidence yougoslave et dirigeance

25 [phon] serbe, en vous donnant le droit de prendre des décisions que,

26 malheureusement, la totalité du peuple serbe devra payée de son sang."

27 R. [aucune interprétation]

28 Q. S'agissant de ce qu'a dit Mme Uertz-Retzlaff au sujet de ces relations

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1 de ce qui figure dans ma déclaration, comme elle l'appelle, et dans ce

2 qu'on trouve dans le livre de Jovic, selon lequel il ne faudra accorder

3 aucun appui aucun soutien à la Krajina, qu'est-ce qu'on peut lire à la

4 fin ?

5 R. Je cite : "La Serbie ne s'arrêtera pas d'aider le peuple de la Krajina

6 même lorsque la paix aura été rétabli, mais les citoyens de la Krajina

7 doivent savoir qu'à cause de ce que vous avez fait, vous avez perdu toute

8 leur confiance -- toute notre confiance, et que pour toute leur relation

9 future avec les autorités de la République serbe, il leur faudra déléguer

10 des personnes qui placeront l'intérêt du peuple au-dessus de leur propre

11 prestige politique personnelle."

12 Q. Donc, qui n'a pas -- a perdu ma confiance ici ? Est-ce que ce sont les

13 dirigeants de la Krajina ou Milan Babic ?

14 R. Milan Babic, lui seul.

15 Q. Ici pourquoi est-ce que je demande son remplacement, est-ce que c'est

16 pour une autre raison que celle que j'évoque, à savoir que c'est un menteur

17 et un homme sans honneur ?

18 R. Oui, c'est exact. Il vous avait même accusé publiquement de vouloir

19 l'arrêter. Il avait peur d'aller à Belgrade à cause de cela, alors qu'en

20 fait il le disait mais il passait beaucoup de temps à Belgrade.

21 Q. Oui, ce n'est pas le seul à avoir déclaré cela. Misic disait également

22 avoir peur, et ainsi que Markovic. Il disait qu'il avait peur mais personne

23 ne leur a jamais rien fait.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic --

25 L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] -- veuillez poser des questions.

27 M. MILOSEVIC : [interprétation]

28 Q. Babic a été remplacé ensuite, qui a remplacé Babic ? Est-ce qu'il a été

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1 remplacé par l'assemblée de la Krajina ?

2 R. C'était l'assemblée de la Republika Srpska de la Krajina. Les

3 propositions venaient de l'assemblée qui a adopté le plan Vance et on m'a

4 proposé que M. Babic soit remplacé. Mais, nous qui étions en faveur du plan

5 Vance, nous avons dit qu'il ne fallait pas que cette séance de travail ait

6 lieu parce que M. Babic n'était pas là de toute façon. Donc ils ont fait

7 cela plus tard dans une autre séance où ils étaient tout seul.

8 Q. Mme Uertz-Retzlaff a parlé du livre de Borisav Jovic, et elle a dit --

9 elle a lu un passage selon lequel c'était moi qui m'étais occupé des

10 négociations au sujet du plan Vance. Est-ce que vous savez si la délégation

11 en question a parlé avec les dirigeants du Monténégro ?

12 R. Oui, à Podgorica --

13 Q. Ils ont parlé du Monténégro ?

14 R. Oui. Ils m'ont parlé. Ils ont parlé avec les dirigeants de la Krajina.

15 Q. Ils vous ont parlé aussi ?

16 R. Oui.

17 Q. Est-ce qu'ils ont parlé à Tudjman également ? Est-ce qu'il a parlé

18 clairement qu'ils voulaient parler à tous les acteurs en Yougoslavie et pas

19 seulement à moi ?

20 R. Ils voulaient parler à tous ceux qui auraient pu avoir une influence

21 positive et permettre l'application du plan Vance.

22 Q. Est-ce que quiconque parmi toutes les personnes compétentes a été mis

23 de côté ?

24 R. Non, non. Ils nous ont parlé le plus à nous qui étions à la présidence

25 parce qu'ils voulaient que nous au commandement Suprême, nous agissions en

26 conformité avec le plan, pour que l'armée population yougoslave se retire

27 du territoire une fois que les Casques bleus arrivent.

28 Q. Donc, ce sont à vous qu'ils ont parlé le plus et aussi aux dirigeants

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1 de Serbie, Croatie, Monténégro, Krajina ?

2 R. C'est exact. Même M. Marek Goulding est allé en Krajina à deux reprises

3 pour essayer de dissiper les doutes, pour essayer de leur faire changer

4 d'avis.

5 Q. Mme Uertz-Retzlaff vous a posé des questions au sujet du fait que

6 c'était l'assemblée serbe qui remplacerait les dirigeants de la Krajina --

7 ou plutôt de la Vojvodine; est-ce que l'assemblée serbe a pris des

8 décisions dans ce sens au sujet de la présidence de la Vojvodine ?

9 R. Non, je ne sais pas.

10 Q. Vous souvenez-vous dans quelles circonstances la Serbie s'est attribuée

11 les -- ou s'est arrogée les attributions et les compétences de l'assemblée

12 du Kosovo, par exemple ?

13 R. Je ne sais pas. Je ne pense pas pouvoir répondre à cette question.

14 Q. Bien. Bon je ne vais pas suggérer de réponse.

15 Mme Uertz-Retzlaff a présenté un extrait du livre de Bulatovic, page 93,

16 cela a trait à la période pendant laquelle on a parlé de la constitution de

17 la Yougoslavie, la nouvelle constitution ?

18 R. Je m'en souviens.

19 Q. Elle a cité un passage -- ou plutôt la fin d'un passage. Deuxième

20 passage à la page 93 où qu'il y est dit : "Que comme d'habitude Milosevic

21 avait -- prenait toutes les décisions; Slobodan Milosevic généralement

22 était celui qui avait le dernier mot par rapport à la partie adverse.

23 Quelle est l'autre partie en présence ? Qui étaient ceux qui ont également

24 parlé de la constitution yougoslave ?

25 R. je ne sais pas.

26 Q. Est-ce que c'est la Serbie-et-Monténégro ?

27 R. Je ne peux pas interpréter ce qui figure dans le livre de cet homme

28 mais je peux confirmer que nous sommes plusieurs parmi les hauts

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1 responsables de la Serbie-et-Monténégro y compris Jovic en tant que membre

2 de la présidence de Serbie, moi-même, membre de la présidence de

3 Monténégro. Donc, nous sommes plusieurs à avoir participé à ces discussions

4 qui ont eu lieu à Belgrade, une fois, à Gorica également. Je souhaite qu'on

5 arrive à un accord.

6 Q. Donc, les deux parties en présence sont la Serbie-et-Monténégro, est-ce

7 que c'est là qu'on parle ici ?

8 R. Oui.

9 Q. Il est dit ici que Slobodan Milosevic a pris la parole et a présidé la

10 réunion. Est-ce que c'était la Serbie qui était présente là, également ?

11 R. Oui. C'était forcément la Serbie.

12 Q. Qui d'autres étaient mieux placés encore pour représenter la Serbie ?

13 R. D'après la constitution, c'était vous, puis lui, pour le Monténégro.

14 Q. Est-ce exact ?

15 R. Oui, il était président du Monténégro.

16 Q. Ici, l'expliqué ou on parle des discussions qui ont eu lieu dans une

17 villa, dans votre villa, peut-être, à Dedinje, je ne sais pas qui

18 exactement ? On en a parlé, il y a quelques jours. Puis, il est dit : "Que

19 nous sommes allés parler dans le jardin," parce qu'il y avait un serveur,

20 là. Vous souvenez-vous de cela de ce que Mme Uertz-Retzlaff a relaté ici

21 même ?

22 R. Oui, je m'en souviens. Je m'en souviens également l'avoir lu dans le

23 livre de Jovic. Je n'ai pas eu le temps à ce moment-là de dire que jamais

24 vous, ni M. Jovic n'êtes venus chez moi, dans ma maison. A une exception,

25 lorsque vous êtes arrivé avec un homme chargé de la gestion des bâtiments.

26 Avant que je ne parte de Belgrade, vous m'avez demandé si je pouvais

27 partir, si je pouvais aller m'installer dans une villa à Dedinje parce

28 qu'il fallait faire certains travaux dans la villa. Bien entendu, j'ai

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1 accepté parce que tout comme Mesic, Tupurkovski, et cetera… J'avais un

2 appartement dans la villa mais ces hommes-là, ils étaient partis donc, la

3 villa était désertée.

4 Q. Donc, nous ne sommes jamais allés vous voir chez vous ?

5 R. Non.

6 Q. Qu'en est-il de ce qui est dit au sujet du fait que nous sommes allés

7 dans le jardin parce qu'il y avait un serveur ou un domestique qui servait

8 le café dans la villa ?

9 R. Cela à l'air très convaincant, mais il dit aussi qu'on a eu du cake

10 [phon]. On a pris le café ensemble à Batanica, même si je ne l'ai jamais vu

11 ce jour-là. Cela aussi, cela avait l'air convaincant a priori. Donc, il

12 allait sans doute très souvent dans cette villa. Donc, il n'était pas

13 difficile pour lui d'en décrire l'atmosphère. Je ne sais pas à qui il

14 essaie de nuire ici, à vous ou à moi.

15 Q. Monsieur Kostic, vous avez déclaré très nettement que vous, à la fin de

16 votre mandat, en juin, vous vous êtes retiré de la vie politique lorsque le

17 président de la RSFY a été élu; est-ce bien exact ?

18 R. Oui.

19 Q. Six mois plus tard, en décembre 1992, vous avez accepté d'être candidat

20 à la présidence du Monténégro. Pourquoi est-ce qu'en décembre 1992, vous

21 avez accepté cela ?

22 R. J'étais toujours à Belgrade. Après mon retrait de la vie politique, les

23 relations entre la Serbie-et-Monténégro se sont faits de plus en plus

24 tendues. Je ne craignais pas que la Serbie attaque le Monténégro mais ce

25 dont j'avais peur, c'est qu'on ne voit surgir des conflits internes au

26 Monténégro. Comme j'avais décidé de prendre ma retraite politique, parce

27 que pendant deux ans j'avais été président du Monténégro. Auparavant,

28 j'avais été vice-président du Monténégro également, vice-président de la

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1 Yougoslavie donc, j'ai estimé qu'il était de mon devoir, moralement, de

2 mettre en garde tous les citoyens du Monténégro, de leur dire que l'on

3 risquait de voir les dirigeants de l'époque qui sont toujours au pouvoir

4 aujourd'hui, de voir ces dirigeants donc, les mener vers le séparatisme.

5 Mais ils le faisaient subrepticement, sans avoir l'air parce qu'ils

6 savaient pertinemment que s'ils le faisaient ouvertement, jamais la

7 population ne les soutiendrait. La seule manière de se faire entendre dans

8 les médias, c'était d'être candidat à la présidence. Ma candidature a été

9 présentée par deux communes, mon village natal et avant même que les

10 résultats ne soient annoncés, j'ai déclaré que je ne m'attendais pas à

11 gagner mais que j'avais fait mon devoir, mon devoir de citoyen. J'avais mis

12 en garde la population sur ce qui se préparait.

13 Q. Merci. Vous avez suffisamment à ma question. Encore une précision au

14 sujet de cette déclaration. Est-ce que c'est moi qui ai présenté votre

15 candidature ? Vous dites que deux localités de votre région natale l'ont

16 fait. Est-ce que j'ai joué un rôle quel qu'il soit dans votre désignation

17 en tant que candidat à la présidence ?

18 R. Non, en aucun cas. Nous n'avons même pas parlé au téléphone. M. Jovic

19 m'a appelé au téléphone une fois, il m'a dit : "Retire-toi Branko, tu n'as

20 absolument aucune chance de gagner." Je lui ai répondu exactement ce que je

21 viens de déclarer devant ce prétoire, à savoir que ce n'était pas le poste

22 de président qui m'intéressait, mais que je voulais avoir la possibilité de

23 m'adresser aux citoyens du Monténégro de leur dire où leurs dirigeants les

24 entraînaient. Il est bien connu que pratiquement tout ce que nous avons

25 convenu au sujet de la constitution, au sujet des plus hautes fonctions,

26 tout cela, ils ne l'ont pas mis en œuvre dans un esprit d'unité. On parlait

27 d'institutions conjointes, commandement Conjoint, au niveau des ambassades

28 également, à M. Bulatovic, lui-même, était d'accord pour qu'il y ait un

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1 roulement tous les six mois. C'était donc un système hybride qui n'avait

2 absolument aucune chance de survie.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Répondez à la question.

4 M. MILOSEVIC : [interprétation]

5 Q. Madame Uertz-Retzlaff a évoqué pendant assez longtemps la conversation

6 que vous avez eue avec le ministre de l'Intérieur, intercalaire 1. Elle en

7 a cité quelques extraits. Veuillez avoir l'amabilité d'examiner ce

8 document.

9 R. Je l'ai trouvé.

10 Q. Page 14, vous déclaré au bas de la page 14, dernier paragraphe :

11 "Cependant le problème le plus important maintenant," qu'est-ce qu'on lit

12 ensuite ?

13 R. Attendez, je n'ai pas encore trouvé la page 14. Cela y est. Je l'ai

14 trouvé.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il faut aussi le temps aux Juges de

16 trouver la page en question. Il faudrait nous indiquer à quelle page cela

17 correspond dans la version anglaise.

18 En anglais, à quelle page pouvons-nous trouver ce passage ?

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Malheureusement, je ne l'ai pas là, sous les

20 yeux. Attendez. Si, je l'ai trouvé.

21 M. MILOSEVIC : [interprétation]

22 Q. Page 8, deuxième paragraphe complet. Qu'est-ce que cela dit ?

23 R. "Mais nous avons maintenant un problème plus grave, la Bosnie-

24 Herzégovine. D'après la constitution de la Yougoslavie et celle de Bosnie-

25 Herzégovine, nous avons trois peuples constitutifs en Bosnie-Herzégovine.

26 Les Musulmans sont les plus nombreux. Ils représentent 44 à 46 % de la

27 population. Quant à eux, les Serbes représentent 32 %, et ils ont environ

28 64 % du territoire. Les Croates constituent 18 % de la population.

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1 "D'après la constitution de Bosnie-Herzégovine en vigueur aujourd'hui

2 tous les trois peuples ont les mêmes droits quelles que soient leurs forces

3 numériques."

4 Q. Très bien. Puis, on vous pose des questions. On vous demande qui sont

5 les Musulmans et vous dites que 95 ou 98 % des cas ce sont des Serbes

6 islamisés, des Serbes qui ont fait de l'Islam leur religion. Ils l'ont

7 accepté.

8 R. Oui.

9 Q. Puis, Mme Uertz-Retzlaff vous a cité un autre passage. Celui qui se

10 trouve trois paragraphes plus loin : "Dans 105 de 110 municipalités, ils

11 vivent ensemble." C'est une population mixte, n'est-ce pas ?

12 R. Oui.

13 Q. Est-ce que ceci a été un des arguments massues à l'appui de ce que vous

14 disiez, à savoir qu'il faudrait que les trois peuples se mettent d'accord

15 entre eux ?

16 R. C'est précisément cela. Lorsque vous avez ce genre de population mixte

17 mélangé, je veux dire aux fonctions de l'appartenance ethnique il est

18 impossible d'avoir des lignes de démarcation. C'est la raison pour laquelle

19 nous n'avons eu de cesse de dire et d'insister pour dire que la Bosnie doit

20 rester unique, entière, et unifiée, et faire partie de la Yougoslavie.

21 Q. Page suivante. Là, aussi, il y a une citation de

22 Mme Retzlaff en partie : "Malheureusement, la Communauté européenne et M.

23 Badinter, en tant que président de la Commission d'arbitrage, ont proposé

24 un référendum pour les citoyens de Bosnie-Herzégovine. Ce qui signifie

25 application du principe de l'après dominance qui détruit le principe de

26 l'égalité des trois peuples constitutifs que confère la constitution de

27 Bosnie-Herzégovine."

28 R. Donc, ce serait débouché directement sur un conflit.

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1 Q. Ceci pourrait s'il y avait reconnaissance de la Bosnie en tant

2 que pays indépendant entraînait la guerre, et c'est bien ce qui s'est

3 passé, n'est-ce pas ?

4 R. Oui.

5 Q. Est-ce que vous vous souvenez de ce qu'ont dit Vance et Carrington à

6 propos de ces reconnaissances prématurées et de leurs effets de leurs

7 intérêts ?

8 R. Aussi bien M. Carrington que M. Vance mais aussi Lord Owen ont rappelé

9 que le fait de reconnaître prématurément l'indépendance de la Slavonie, de

10 la Croatie, mais surtout aussi de la Bosnie-Herzégovine avait entraîné

11 l'escalade vers la guerre, avait attisé les flammes et que c'était un

12 désastre pour tous ceux qui vivaient en ex-Yougoslavie, pour tous les

13 peuples qui vivaient.

14 Q. Veuillez trouver la page 18.

15 R. Je l'ai trouvée.

16 Q. Le paragraphe du bas, au troisième paragraphe à partir du bas, vous

17 dites : "Pour nous, toute solution est acceptable pour autant qu'elle est

18 le fruit d'un accord entre chacun des peuples de Bosnie-Herzégovine. Si

19 deux de ces peuples constitutifs essaient d'imposer leur volonté au

20 troisième inévitablement ceci va déboucher un conflit."

21 R. C'est parfaitement conforme aux dispositions de la constitution de

22 Bosnie-Herzégovine, dispositions que j'ai présentées aux Juges après la fin

23 du contre-interrogatoire.

24 Q. Comme l'a dit Mme Uertz-Retzlaff, elle a dit que vous aviez des idées

25 qui allaient entraîner la division de la Bosnie, je ne vais pas revenir sur

26 la réponse que vous avez fournie, mais prenez le deuxième paragraphe de

27 votre discours.

28 R. "Mais s'il y a, effectivement, cantonisation [phon], les Serbes et les

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1 Musulmans pourraient sans doute se mettre d'accord sur la division pour ce

2 qui est de Sarajevo dans le point de départ de la cantonisation, c'est

3 celui d'avoir une majorité ethnique dans un lieu donné. La cantonisation

4 voudrait entraîner une division de la Bosnie-Herzégovine qui permettrait

5 aux Croates et aux Serbes de communiquer, d'avoir des liens avec leurs pays

6 d'origine, la Croatie et la Serbie, donc la Yougoslavie."

7 Q. Est-ce que Cutileiro, dans son plan, ne proposait la cantonisation ?

8 R. Mais si, c'est bien ce que j'ai dit. Ce plan se fondait précisément sur

9 ces principes, c'était pareil pour les accords de Dayton qui ont permis

10 d'arriver à la fin de la guerre en Bosnie, et il était prévu des liens

11 spécifiques avec la République de Serbie et avec la Yougoslavie.

12 Q. Poursuivez.

13 R. "Nous pensons qu'il existe un intégrisme musulman dans une des factions

14 du parti musulman. L'indépendance pour la Bosnie-Herzégovine est une

15 tentative visant à former le premier Etat islamique en Europe. Si les

16 dirigeants musulmans voulaient vraiment protéger les intérêts de leur

17 peuple, ils devraient protéger les intérêts de la Yougoslavie parce

18 qu'après les Serbes, ce sont les Musulmans qui sont le plus dispersés en

19 Yougoslavie. Tout comme naturellement les Serbes veulent vivre dans un seul

20 et même Etat, c'est vrai des Musulmans."

21 Q. Inutile de poursuivre la lecture. Inutile d'expliquer où vivaient les

22 Musulmans. Vous poursuivez en disant que les dirigeants actuels ne tiennent

23 pas compte des intérêts du peuple musulman. Est-ce que ceci correspond bien

24 à ce que disait leur chef Adil Zulfikarpasic dans cet entretien, mais aussi

25 dans les entretiens qu'il a fait pour l'opinion publique ?

26 R. Ce que je dis ici au ministre des Affaires étrangères d'un pays amical

27 dans ce pays lointain d'Afrique qu'est le Zimbabwe -- et ceci se passait en

28 1992 -- et ce que M. Zulfikarpasic a dit dans ce qu'il a écrit et dans les

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1 entretiens assez longs et approfondis qu'il a donné en 1996 et en 1997, ce

2 que je dis ici coïncide parfaitement avec l'analyse de M. Zulfikarpasic, ce

3 n'est pas tant qu'il coïncide mais cela relève du bon sens. C'est pour cela

4 que j'ai dit que

5 M. Zulfikarpasic était un des plus grands intellectuels de Bosnie-

6 Herzégovine.

7 Q. Qu'est-ce que vous dites au troisième paragraphe à partir de la fin :

8 "Lorsque la crise yougoslave a commencé, nous avions des gens de Croatie

9 dans les six des fonctions les plus importantes."

10 R. Oui. "Au niveau de la Fédération, Mesic était président de la

11 présidence, M. Markovic était président du Conseil fédéral exécutif, M.

12 Loncar était le ministre des Affaires étrangères," et cetera.

13 Au cours de l'interrogatoire principal, j'ai parlé aussi de

14 M. Zekan, ministre des Finances, maintenant le nom de l'autre m'échappe. Il

15 était ministre des Sciences et des Techniques.

16 Q. Marendic.

17 R. Oui, Bozidar Marendic.

18 Q. Beaucoup de questions vous ont été posées à propos de l'élection de

19 Mesic. Est-ce que le droit de la Croatie de désigner

20 M. Mesic comme membre de la présidence n'a jamais été contesté ?

21 R. Non. Jamais par qui que ce soit, pas plus qu'on a douté ou nié à la

22 Croatie le droit de présenter un candidat à la présidence ou au poste de

23 président cette année-là.

24 Q. Dans le Règlement intérieur de la présidence, est-ce qu'on dit que le

25 président doit être élu ou est-ce qu'il assume automatiquement en fonction

26 du principe du roulement ?

27 R. Non, non, il a toujours dû être élu. Je vous l'ai expliqué auparavant,

28 tout membre de la présidence avait dû subir toute une série de

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1 vérifications dans le système socialiste, mais M. Mesic n'avait pas dû le

2 faire parce que, dans l'intervalle, on avait démantelé la Ligue des

3 socialistes -- ou plutôt, la Ligue socialiste des travailleurs.

4 Q. Mme Uertz-Retzlaff vous a diffusé plusieurs extraits vidéo concernant

5 la visite que vous avez effectuée à Borovo Selo. Je ne vais pas vous le

6 remontrer. Inutile de perdre du temps mais est-ce qu'on a dit plus d'une

7 fois et j'ai ici le compte rendu d'audience en anglais qui reprend vos

8 propos. Mais vous dites dans ce cas-ci, comme dans tous les autres : "Le

9 Conseil fédéral exécutif doit être tout à fait responsable de ce genre de

10 questions quelque soit les appartenances ethniques de la population qui

11 sont en proie à des mésaventures ou des malheurs."

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelle est votre question ?

13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais simplement finir la citation que je

14 fais sur la dernière phrase.

15 M. MILOSEVIC : [interprétation]

16 Q. "Notre armée doit représenter le pouvoir, l'armée nationale, au sens

17 propre et profonde, sa signification, à savoir, une armée qui va protéger

18 tout citoyen qui se trouve en danger quelque soit sa nationalité, son

19 appartenance ethnique ou son affiliation politique, son engagement

20 politique."

21 C'est bien ce que vous avez dit, n'est-ce pas ? Vous parliez, là, des

22 Serbes. Vous parliez du fait que l'armée, les chefs, les dirigeants, je

23 dirais, tout le monde. Qu'est-ce qui est attaqué ?

24 R. Mais c'était la population serbe qui a été attaquée. Elle était la plus

25 nombreuse parmi les 8 000 réfugiés.

26 Q. Donc, pour ceux qui avaient été attaqués et à qui vous rendiez visite

27 après tout cela. Vous leur dites, "Voilà, nous allons protéger tout le

28 monde quelque soit l'appartenance ethnique." Est-ce que c'est bien là le

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1 sens de votre message ?

2 R. Oui. C'est l'essence même de mon message. Cela a été montré plusieurs

3 fois et je suis content que cela a été fait parce qu'aujourd'hui encore, je

4 ne changerais pas un iota.

5 Q. Mais, est-ce exprimé aussi la vie des dirigeants d'alors s'agissant de

6 l'égalité, de l'absence de discrimination entre les peuples ethniques, les

7 peuples constitutifs ?

8 R. C'était notre avis à tous. Nous tous qui voulions préserver la

9 Yougoslavie et maintenir l'égalité entre les peuples constitutifs et des

10 républiques constitutives du pays.

11 Q. Souvenez-vous ou est-ce que vous vous souvenez qu'au moment de ces deux

12 visites, est-ce que vous vous souvenez du nombre de réfugiés qui étaient

13 déjà arrivés en Serbie depuis ces régions ?

14 R. Je vous l'ai dit, environ 8 000. Bien sûr, il y a eu certains Croates

15 parmi eux qui étaient partis de la Croatie en Serbie. Mais étant que

16 c'étaient surtout des Serbes qui habitaient dans ces régions, la plupart

17 des réfugiés étaient Serbes et la majorité, c'étaient des femmes et des

18 enfants parce que les hommes ils étaient restés chez eux pour essayer de

19 défendre leurs foyers.

20 Q. Mme Uertz-Retzlaff a tenté de dire que vous avez été attaqué par vos

21 propres collègues, par d'autres professeurs d'université ?

22 R. Oui, je m'en souviens aussi de ces attaques.

23 Q. Mais toutes ces attaques dirigées contre vous, à l'époque. Je parle ici

24 d'attaques verbales. Est-ce que vous les avez toutes publié dans votre

25 livre ?

26 R. Oui. Oui, je les ai cité, verbatim. Il y a eu trois écrits successifs

27 qui chacun ont rappelé que ce n'était pas moi personnellement qui étais

28 critiqué mais que c'étaient mes activités, mon engagement politique qui

Page 48504

1 l'était. Mais au fond, tous ceux qui ont écrit ces lignes ne représentaient

2 même pas 10 % du personnel de l'université, des professeurs. Bien sûr, tous

3 ceux qui ont signé ces déclarations étaient dans l'opposition, sont restés

4 dans des partis d'opposition. Ce sont des gens qui ont, de toujours, été

5 mes adversaires. Aujourd'hui encore, nous ne sommes pas du même avis, en

6 politique.

7 Q. Je cherche quelque chose. Certaines des questions posées par la

8 partie adverse concernaient des meetings, des rassemblements populaires.

9 Vous avez dit qu'ils étaient organisés dans les coulisses.

10 R. Oui.

11 Q. Mme Uertz-Retzlaff que c'est vous qui aviez, alors, parlé d'événements

12 qui avaient été montés de toute pièce à cause des vagues de réfugiés ou

13 parce que ces vagues de réfugiés, ces violences ont commencé plus tard,

14 lorsque vous, vous preniez la parole en octobre 1990.

15 R. Mais sans doute que la confusion régnait dans son esprit. Vers le

16 milieu de l'année 1991, on avait déjà commencé à voir des attaques directes

17 contre la JNA. Alors que la sécurité et l'anxiété des gens, des Serbes qui

18 vivaient en Krajina serbe avaient commencé bien plus tôt. Il y avait déjà

19 fuites massives de personnes.

20 Q. Quand est-ce que vous avez été à Borovo Selo ?

21 R. En 1991. Je pense que c'était au mois de juin, ou était-ce, non. Je

22 crois que c'était au mois de juin.

23 Q. Qu'en est-il de ces rassemblements populaires ? Vous dites que vous

24 êtes allé à ces rassemblements pour essayer d'apaiser la situation, de

25 calmer le jeu. Qui est-ce qui a organisé ces grands meetings au

26 Monténégro ?

27 R. Mais celui-là en particulier, celui qui a été mentionné par cette dame

28 avait été organisé par un parti qui avait à sa tête un ancien collègue de

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1 l'université à moi, le Pr Novak Kilibarda. Maintenant, il a beaucoup changé

2 en mieux, ce parti politique, tant mieux. J'ai aussi essayé de calmer la

3 situation lors d'autres meetings. Je ne sais pas qui les a tous organisé.

4 Mais je sais qu'il y avait des divisions ethniques. D'une part, vous aviez

5 des Serbes et des Monténégrins. De l'autre, vous aviez des Musulmans et des

6 Albanais, et il n'y avait qu'un faible, une tenue cordon policier qui les

7 séparaient. Lorsque je suis arrivé, on m'a informé du fait que les Albanais

8 avaient interrompu une danse serbe et qu'ensuite d'autres avaient

9 interrompu une danse turque, enfin, tout cela s'était très embrouillé.

10 Q. Mais quel rôle avez-vous joué ?

11 R. Écoutez, il y avait un tel paroxysme au niveau des tensions que M.

12 Blagoje Lukic, je crois que c'était un haut cadre d'un parti. Il avait

13 essayé de calmer la situation pendant toute la journée, en vain. Lorsque je

14 suis arrivé, j'ai constaté qu'il y avait déjà une division au niveau des

15 dirigeants à partir d'un clivage ethnique dans le bâtiment. Ils se

16 prenaient par les revers du veston. Je ne savais pas quoi faire, je me suis

17 dit que c'était inutile d'essayer de se fier sur les dirigeants locaux pour

18 trouver une solution. Je suis descendu pour essayer de m'adresser aux gens,

19 je leur ai demandé de choisir cinq personnes dans la foule. Je me suis

20 adressé à un autre groupe de citoyens à qui j'ai aussi demandé de choisir

21 cinq personnes parmi eux en qu'ils avaient confiance, et j'ai dit qu'il n'y

22 aurait pas de sang qui serait versé.

23 Une fois que nous sommes retrouvés seuls, j'ai pris les noms, j'avais

24 aussi un membre du gouvernement avec moi.

25 Q. Soyons brefs, Monsieur Kostic. Est-ce que vous avez essayé d'attiser

26 ces flammes ? Est-ce que vous avez contribué à la montée des tensions, ou

27 est-ce que vous avez fait le contraire ?

28 R. Pas du tout. J'ai dit à ces dix hommes qui avaient été choisis et plus

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1 tard à tous ceux qui s'étaient amassés autour du bâtiment, je leur dis que

2 personne, qu'il soit de Podgorica ou de Belgrade, ne pourrait leur apporter

3 la paix, l'harmonie, s'ils ne retrouvaient pas cette paix, l'harmonie en

4 eux s'ils veulent continuer à cohabiter. C'était là la vocation, la

5 finalité de tous mes efforts et les gens se sont dispersées dans le calme.

6 Q. Il restait quelques questions en ce qui concerne l'initiative d'Ohrid,

7 intercalaire 20 dans les classeurs, je pense. Il s'agissait d'une réunion

8 de la présidence yougoslave avec les présidents des républiques.

9 Quelle était la notion -- qu'est-ce que cet intercalaire 20 nous montre ?

10 Prenez le deuxième paragraphe, on dit : "Nous devons nous opposer à tout

11 recourt à la force."

12 R. "Nous devons nous opposer au recourt à la force, ce qui a coûté des

13 vies humaines et continue de le faire. Il nous éloigne de plus en plus des

14 intérêts vitaux qui sont les nôtres.

15 "Ces intérêts, c'est le développement démocratique, le respect des

16 droits individuels et collectifs des libertés civiques, et la poursuite

17 continuelle de ces objectifs, l'amélioration de la qualité de la vie.

18 "Ces intérêts, ces légalités parfaites, le respect mutuel, les droits

19 de nos peuples constitutifs à l'autodétermination dans la souveraineté,la

20 dépendance, le droit de décider de leur propre sort, du sort de la

21 Yougoslavie, la liberté de communication et d'association…"

22 Q. Est-ce que c'était là les messages véhiculés par l'initiative

23 d'Ohrid ?

24 R. Oui. Ils sont à la base des quatre principes fondamentaux

25 acceptés par la présidence au complet, avec à sa tête Stjepan Mesic,

26 principes qui ont été proclamés lors de la séance inaugurale de la

27 conférence de la paix à La Haye.

28 Q. Alors, comment se fait-il que Mesic soit parti en claquant la porte de

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1 cette réunion de la présidence qu'il présidait ?

2 R. Je ne pense pas qu'il ait fait. Seul Tudjman l'a fait.

3 Q. Pourquoi l'a-t-il fait ?

4 R. Parce que cela s'est passé dans la soirée, vers 20 heures. Tudjman

5 apparemment aurait reçu des informations disant que la guerre sévissait en

6 Croatie, qu'il y avait eu quelques escarmouches, que la JNA avait attaqué

7 l'une ou l'autre région. Mais il était plus manifeste que tout ceci avait

8 été organisé, orchestré. Toutes ces attaques avaient été organisées pour

9 lui donner un prétexte afin qu'il quitte la réunion, qu'il abandonne la

10 réunion d'Ohrid et n'accepte pas la déclaration d'Ohrid.

11 Q. Y a-t-il quoi que ce soit dans cette déclaration qu'il aurait été

12 justifié de rejeter ?

13 R. Il y a sans doute beaucoup de choses qu'il voulait rejeter. Mais pas

14 tout en gardant la face. Il y avait pour M. Mesic une chose inacceptable,

15 c'était que cette déclaration insistait, sur la nécessité de désarmer

16 l'information paramilitaire -- insister sur la nécessité du désengagement

17 de l'armée yougoslave alors que Mesic et Tudjman ont toujours insisté pour

18 dire que la JNA devait réintégrer ces casernes, ce qui aurait pratiquement,

19 forcément entraîné des attaques de la part des paramilitaires, alors qu'il

20 en avait déjà eu beaucoup de ces attaques des paramilitaires contre des

21 régions serbes ou des citoyens serbes.

22 Q. Prenons maintenant le protocole d'accord de la Mission d'observation de

23 1991. Je pense que ce document n'existe qu'en anglais. C'est aussi un des

24 documents de l'Union Européenne.

25 Il semblerait que ce soit là une confirmation de l'affirmation de

26 laquelle la suspension de l'indépendance devait être une période de trois

27 mois, ce que vous n'avez pas expliqué. Point B (1) : "La suspension de la

28 mise en application de la déclaration de l'indépendance se fera pendant une

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1 période de trois mois comme il est convenu entre les partis à l'accord…"

2 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Il s'agit de la pièce 946.

3 M. MILOSEVIC : [interprétation]

4 Q. "…à Brioni --."

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande aux interprètes d'interpréter ce que

6 j'ai dit parce que ce qui a été interprété c'est la précision apportée par

7 le Procureur.

8 M. MILOSEVIC : [interprétation]

9 Q. "-- surtout pour ce qui est du régime frontalier et de la sécurité de

10 frontières."

11 Il faut surveiller qu'il y a bien suspension de trois mois surtout en ce

12 qui concerne les dispositions prises à la frontière et la sécurité de ces

13 frontières.

14 Je vous demande maintenant ceci : cette déclaration de Brioni, peut-elle

15 être prise comme prétexte ou comme justification à l'affirmation selon

16 laquelle on n'aurait contesté cette suspension de la déclaration de

17 l'indépendance ?

18 R. Non. Elle n'avait qu'une vocation. C'était de rétablir les conditions

19 qui prévalaient avant en Yougoslavie pendant trois mois.

20 Q. La déclaration détenu parle trois mois. Mais est-ce que cela concerne

21 autre chose ou un autre Etat que la Slovénie ?

22 R. Non, non. Uniquement la Slovénie.

23 Q. Est-ce que ceci concerne uniquement la partie slovène du tracé des

24 frontières yougoslaves ?

25 R. Oui. C'est uniquement la disposition frontalière dans l'attente qu'on

26 trouve dans l'intervalle au cours de ces trois mois, une solution

27 différente qui serait plus conforme au dispositions préconisées par la

28 Communauté européenne qui serait que ces fonctions seraient prises par la

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1 police frontalière.

2 Q. Avez-vous vu ici un acte publié par le journal officiel de Yougoslavie

3 où figure la décision signée par vous portant sur la déclaration du danger

4 de guerre imminente ?

5 R. Oui.

6 Q. Vous souvenez-vous que cette décision a été prise le

7 1er octobre 1991 ?

8 R. Cette appréciation, cette évaluation a été adoptée lors de cette

9 réunion du 1er octobre, mais je ne me souvenais pas avoir signé cet acte, et

10 je ne me souvenais pas non plus qu'il ait été publié par le journal

11 officiel. Mais il est certain que cette évaluation a été adoptée, et c'est

12 tout à fait clair et n'appelle aucune explication supplémentaire.

13 Q. Au sujet du communiqué publié où il est dit que le pays se trouve dans

14 une situation de danger de guerre imminente -- intercalaire 33, pièce à

15 conviction -- ou plutôt, qui figure dans le classeur devant pièces à

16 conviction. Compte tenu de la pratique qui a été celle de la présidence,

17 vous souvenez-vous s'il est jamais arrivé que la présidence publique le

18 moindre communiqué sans qu'il ait été précédemment vérifié et approuvé

19 pendant la réunion par tous les membres de la présidence ?

20 R. Cela je peux l'affirmer en toute certitude, et je pense que la Chambre

21 pourra s'en convaincre. Pendant le contre-interrogatoire, nous avons vu ici

22 les notes sténographiques de la réunion de la présidence du 1er octobre. Ce

23 sténogramme nous permet de savoir qu'il y a eu un débat lors de cette

24 réunion du 1er octobre portant pratiquement sur chaque phrase de ce texte

25 que l'on a décidé de ce qu'il fallait rayer dans le texte. Le journal

26 officiel n'a publié aucune évaluation comparable, mais tout ce qui devait

27 être divulgué à l'opinion était préalablement examiné attentivement par

28 tous les membres de la présidence et adopté par eux. L'on voit dans ces

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1 notes sténographiques aussi que nous avons adopté six ou sept procès-

2 verbaux des réunions précédentes de la présidence, ce qui vient confirmer

3 ce que j'avais déjà dit à savoir qu'on autorisait les sténogrammes que

4 s'ils allaient être divulgués, et que les procès-verbaux étaient adoptés

5 aux réunions de la présidence.

6 Q. Voyons maintenant ce procès-verbal que l'autre partie vous a demandé

7 d'examiner, c'est le projet du procès-verbal de la

8 144e réunion qui s'est tenue le 3 octobre. Le premier point à l'ordre du

9 jour est comme suit : accord permettant de garantir la continuité des

10 travaux de la présidence suite aux conclusions de la -- ou à l'évaluation

11 de la réunion de la présidence telle qu'adoptée lors de sa 143e réunion

12 constatant que le pays se trouve dans une situation de danger de guerre

13 imminente.

14 Est-ce que vous avez ce texte ?

15 R. Mais de quel intercalaire s'agit-il ?

16 Q. Ce n'est pas un intercalaire, c'est quelque chose qui provient du

17 contre-interrogatoire de l'autre partie. Cela vous a été fourni par l'autre

18 partie et je souhaite vous poser des questions sur un passage.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Uertz-Retzlaff.

20 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Il s'agit de la pièce 328,

21 intercalaire 13. Il s'agit du procès-verbal de la réunion du 3 octobre.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que l'on est en train de

23 remettre cela au témoin ? Mais, Monsieur Milosevic, vous devriez avoir un

24 exemplaire pour le témoin.

25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais je n'ai pas les moyens de faire les copies

26 de ce que Mme Uertz-Retzlaff présente ici. Je ne vois pas où je le ferais.

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Pendant le contre-interrogatoire, j'ai eu ce

28 document, mais on me l'a repris par la suite. Je ne l'ai plus.

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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. Je vais demander que l'on place sur

2 le rétroprojecteur l'exemplaire que j'ai et je suivrai moi-même grâce au

3 rétroprojecteur.

4 M. MILOSEVIC : [interprétation]

5 Q. Pour poser les quelques questions que j'ai à poser à

6 M. Kostic.

7 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] J'ai un exemplaire, Monsieur le

8 Président.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, nous sommes en

10 train de perdre du temps. Vous ne faites pas preuve de zèle dans la gestion

11 de cet interrogatoire.

12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais, Monsieur Robinson, une seule question :

13 où pensez-vous que je pourrais produire ces photocopies des documents que

14 la Dame ou l'autre partie présentent ?

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous devez pouvoir bénéficier des

16 services de la personne de liaison qui vous aidera.

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien.

18 M. MILOSEVIC : [interprétation]

19 Q. L'avez-vous trouvé ?

20 R. [aucune interprétation]

21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une question pour l'Accusation, s'il

22 vous plaît. Pouvez-vous montrer ce document en passant par le logiciel

23 Sanction.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je l'ai trouvé, je l'ai.

25 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Madame Dicklich est en train

26 d'essayer --

27 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

28 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Mais nous communiquons toujours les

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1 documents au témoin --

2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Au témoin.

3 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui, mais aussi à

4 M. Milosevic.

5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, mais le document a été montré et

6 repris; est-ce exact ?

7 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] C'est exact. Mais

8 M. Milosevic l'a et il l'a maintenant grâce -- enfin grâce aux jeux de

9 documents que j'ai dans mon classeur -- il sort de mon classeur.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Avançons.

11 M. MILOSEVIC : [interprétation]

12 Q. Monsieur Kostic, point 1, deuxième page, donc est-ce qu'il est dit ici

13 : "Que lors de la réunion de la présidence du 3 octobre qui a rassemblé les

14 six membres de la présidence ?"

15 R. Oui.

16 Q. "Est-ce qu'il a été constaté à l'unanimité que nous nous trouvons face

17 à un danger de guerre imminente." Donc, de quel danger de guerre est-il

18 question ici ? Qu'est-ce qui est écrit ici ? Danger de quoi ?

19 R. D'une guerre civile généralisée sur le territoire parce que vous savez

20 à l'époque sur une partie du territoire yougoslave la guerre était déjà en

21 cours.

22 Q. Le paragraphe suivant, qu'est-ce qu'on lit ici ? Que les conditions

23 sont réunies ?

24 R. Que les conditions sont réunies pour que la présidence de la RSFY

25 fonctionnent et agissent conformément à ce qui est prévu par la

26 constitution de la RSFY dans une situation de danger de guerre imminente

27 puisque nous n'avons pas pu nous réunir avant.

28 Q. Qu'est-ce qui est dit par la suite ?

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1 R. La présidence écarte une possibilité de blocus --

2 Q. A la fin du deuxième paragraphe, dernière phrase, la présidence de la

3 RSFY, qu'est-il écrit ici ?

4 R. [aucune interprétation]

5 Q. Deuxième paragraphe, deuxième page.

6 R. La deuxième page.

7 Q. Oui, deuxième page, point 1. C'est la page que nous sommes en train de

8 citer.

9 R. "La présidence de la RSFY écarte une possibilité de blocus imposée à

10 ses travaux et elle assume certaines ingérences -- certaines attributions

11 de l'assemblée de la RSFY qui ne veut pas se réunir."

12 Q. Est-ce que vous avez fait usage de ces attributions ?

13 R. Non, alors qu'on était habilité à adopter des décrets lois, également,

14 puisque l'assemblée elle se trouvait bloquer, du moment que les députés

15 Slovènes et Croates s'étaient retirés; cependant, nous ne nous sommes

16 servis d'aucune attribution de l'assemblée alors que nous étions habiletés

17 à le faire.

18 Q. Ensuite, quelque chose que l'autre partie vous a demandé pendant le

19 contre-interrogatoire, le deuxième paragraphe, cette même page. Il est dit

20 que : "Tous les membres de la présidence de la RSFY doivent être informés

21 dans l'immédiat --" - donnez-nous lecture de la suite - "-- que la

22 présidence de la RSFY pendant -- "

23 R. "Qu'il existe une situation de danger de guerre imminente se réunira de

24 manière continue à Belgrade à ce sujet. Il est indispensable que les

25 membres de la présidence se trouvent si possible à Belgrade, soit à une

26 distance leur permettant de se rendre au maximum dans un délai de deux

27 heures au lieu où se tiendra la réunion."

28 Q. Alors dites-nous : puisque l'autre partie a insisté sur un point. Elle

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1 a insisté sur le fait que vous empêchiez les autres à se rendre aux

2 réunions, mais ceux qui étaient le plus loin, par exemple, les membres de

3 la présidence de Slovénie, Macédoine, Croatie, Bosnie--Herzégovine, comment

4 se rendaient-ils régulièrement aux réunions de la présidence ? Par quels

5 moyens de locomotion ?

6 R. Bien --

7 Q. Mais répondez-moi, s'il vous plaît, par quels moyens ?

8 R. Par des avions qu'avait à sa disposition la présidence. C'étaient de

9 petits avions.

10 Q. Est-ce qu'ils se rendaient à toutes les réunions de la présidence à

11 bord de ces petits avions ?

12 R. Je ne pourrais pas dire que c'était vraiment dans le cas de toutes les

13 réunions. Peut-être que -- mais c'étaient de petits avions qui pouvaient

14 prendre 12 passagers ou quelques-uns de plus.

15 Q. Combien de temps met un petit avion pour atteindre Belgrade, de la

16 république la plus éloignée ?

17 R. Je pense au maximum, une heure.

18 Q. C'est tout à fait cela, une heure. Vous avez dit qu'ils devaient se

19 trouver à une distance maximum de deux heures pour pouvoir assister à la

20 réunion de la présidence ?

21 R. Oui, Monsieur Milosevic. Même s'il n'y avait pas eu de danger de guerre

22 imminente, tous les membres de la présidence étaient tenus de se tenir dans

23 leur cabinet à Belgrade et ils avaient leurs logements de fonction à

24 Belgrade.

25 Q. Mais est-ce que cette décision les empêche même de séjourner dans les

26 villes de leurs républiques respectives pour pouvoir se rendre par la suite

27 aux réunions.

28 R. Mais M. Tudjman est venu vous voir quelques jours auparavant et il

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1 s'est entretenu avec vous et avec M. Kadijevic à Belgrade.

2 Q. Très bien.

3 R. M. Mesic dit dans son livre que l'avion JAT a été mis à sa disposition

4 pour le transporter, et pourtant, il n'est pas venu. D'ailleurs, c'est ce

5 que M. Mesic dit lui-même dans son livre. Donc, il est plus qu'évident

6 qu'ils avaient l'intention de bloquer les travaux de la présidence qui

7 était la seule instance qui restait.

8 Q. Par la suite, vous avez le projet du procès-verbal qui vous a été remis

9 par l'autre partie de la 145e Réunion de la présidence.

10 R. Pouvez-vous m'aider ? Je n'ai pas cela.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je m'attends à ce que vous terminiez

12 ces questions, Monsieur Milosevic, avant la suspension de l'audience.

13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est l'intercalaire 11, la pièce 328.

14 M. MILOSEVIC : [interprétation]

15 Q. L'avez-vous Monsieur Kostic ? L'avez-vous sous les yeux ?

16 R. Non.

17 Q. En fait, je peux donner lecture. La question qui se pose est de savoir

18 si vous avez signé des décrets. Il est écrit : "Le président de la

19 présidence de la RSFY a informé la présidence des décrets signés qui

20 relèvent du domaine du commandement et du contrôle des forces."

21 Alors, pour qu'il n'y est plus de doutes là-dessus, qu'est-ce qui peut

22 faire l'objet d'un décret ? Ou plutôt, je reformule ma question : Un décret

23 peut-il porter un ordre à l'attention de l'armée pour qu'elle lance une

24 action ?

25 R. Non. Aucun ordre de ce genre. Un décret peut révoquer ou nommer des

26 ambassadeurs. Il peut promouvoir les officiers les plus hauts gradés. Il

27 peut promouvoir au grade de sous-lieutenant les élèves officiers qui

28 sortent des académies militaires.

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1 Q. Il peut s'agir aussi de décerner des médailles ?

2 R. Oui.

3 Q. Est-ce qu'on peut émettre des ordres par voix de décret ?

4 R. Non.

5 Q. Très bien. Dans ce cas, je ne vais pas m'y attarder.

6 Mme Uertz-Retzlaff a cité les notes sténographiques de la 143e

7 Réunion de la présidence, en date du 1er octobre et elle a cité les propos

8 de l'adjoint du ministre fédéral des Affaires étrangères, page 44. Nous

9 avons une traduction anglaise. Elle a remis le document original également.

10 Elle a donc cité le ministre adjoint des Affaires étrangères disant que

11 l'Union européenne s'était réunie. Les 12 ministres des Affaires étrangères

12 de l'Union avaient tenu une réunion. Elle dit : "Ils se sont mis sur le

13 point suivant : de préparer une déclaration afin d'inviter toutes les

14 parties intéressées de Yougoslavie de continuer de participer à la

15 Conférence sur la Yougoslavie à La Haye à l'expiration du moratoire, de le

16 faire de bonne foi pour permettre à la conférence d'être fructueuse."

17 Donc, l'autre partie a affirmé que vous vous attendiez à ce que le

18 moratoire sur l'indépendance expire, mais ce que Maksic dit, est-ce que

19 ceci a à voir quoique ce soit avec l'expiration du moratoire sur

20 l'indépendance. Il est dit ici : "Ils se sont mis d'accord pour ce qui est

21 du moment après l'expiration du moratoire."

22 R. Ce moratoire concernait de toute évidence la fin de tout conflit et le

23 maintien d'une trêve pour qu'on puisse recherche une solution politique

24 dans une situation de paix. Ce moratoire ne concernait pas les déclarations

25 de l'indépendance.

26 Q. Très bien. L'autre partie vous a cité les différentes options de Jovic

27 concernant l'avenir de la Yougoslavie qui prétendument découle d'une

28 réunion qu'il aurait eue avec eu et avec moi. D'après vous, est-ce que ce

Page 48518

1 sont ces réflexions, les réflexions de l'un quelconque d'entre nous ou nos

2 réflexions communes, ce qui figure dans son journal ?

3 R. Pendant le contre-interrogatoire, j'ai exprimé mes réserves au sujet de

4 nombre de choses qui figure dans le livre de Jovic. Il est parfaitement

5 évident sur exemple qu'il ne s'agit pas d'un journal qu'il aurait tenu

6 régulièrement. C'est à posteriori qu'il lui a donné la forme de journal de

7 bord.

8 J'ai dit aussi pendant le contre-interrogatoire que cela pouvait être

9 ses réflexions personnelles mais que nous tous, recherchions des solutions

10 dans le cadre du maintien de cette Yougoslavie tronquée. D'ailleurs,

11 c'était l'engagement pris par la conférence, le 3 janvier. Vraiment, on ne

12 s'attendait pas à ce qu'il y ait un conflit qui éclaterait en Bosnie avec

13 les Musulmans. Jusqu'au dernier moment on ne pensait pas que cela allait se

14 produire.

15 Q. On vous a soumis une déclaration adoptée par l'Union européenne ou

16 plutôt la Communauté européenne de l'époque concernant la situation qui

17 prévalait en Yougoslavie. On a affirmé que ceci confirmait que le plan

18 Carrington avait été adopté par avance, accepté par avance. A l'appui, on a

19 cité un extrait du livre de Momir Bulatovic.

20 A ce sujet, puisqu'il s'agit là d'un point très important, je

21 souhaite vous poser plusieurs questions. Page 2 donc, de cette déclaration

22 portant sur la situation en Yougoslavie, le 28 octobre 1991, déclaration

23 rédigée à Bruxelles. Non, excusez-moi. C'était un autre document de l'Union

24 européenne. Attendez un instant, je vais le retrouver.

25 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Il se peut que ce soit la pièce à

26 conviction 812. Il s'agit d'un résumé de l'évolution de la Conférence sur

27 la Yougoslavie. Je m'en suis servi souvent. Donc, je suppose que c'est à

28 cela que se réfère M. Milosevic.

Page 48519

1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voulais retrouvez ce document de l'Union

2 Européenne où on parle de ce qui a été communiqué par van den Broek à

3 l'issue d'une réunion qui s'était tenue. Je l'avais ici, mais c'est

4 identique ou c'est semblable à ce qui figure dans le libre de M. Bulatovic.

5 Je vais donc utiliser le livre de M. Bulatovic.

6 M. MILOSEVIC : [interprétation]

7 Q. S'il vous plaît, examinons la page 65 du livre de Momir Bulatovic, on

8 vous l'a soumis. Il est dit ici : "Le fondement de cette solution, était-il

9 écrit dans le document sera constitué par l'indépendance accordée aux

10 républiques qui le souhaitent à la fin des négociations qui vont se

11 dérouler de bonne foi."

12 Donc, ce n'était pas un document, c'était une déclaration faite par

13 Lord Carrington, mais je ne veux pas le contester. Donc, "A la fin des

14 négociations qui se dérouleront de bonne foi."

15 Donc dites-moi, à un moment quelconque la présidence yougoslave, la

16 présidence serbe au Monténégro aurait-il contesté le droit à l'indépendance

17 d'un peuple quel qu'il soit, de qui que ce soit en Yougoslavie qui le

18 souhaiterait ?

19 R. Non. A aucun moment. Nous n'avons jamais remis cela en question.

20 Q. Mais notre position consistait-elle à dire que ceci devait

21 survenir à la fin d'un processus de négociation qui devait protéger le

22 droit de tout un chacun ?

23 R. La position adoptée a été que, dans le processus de la recherche d'une

24 solution politique, toutes les options devaient être placées sur un pied

25 d'égalité, que c'est par une voie politique qu'il fallait aboutir à une

26 solution. Alors notre partie, qui prenait l'option yougoslave, elle

27 insistait sur le point suivant : tout comme on garantissait le même droit

28 aux peuples et aux républiques d'effectuer une sécession, il fallait

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1 accorder le même droit à ceux qui voulaient rester au sein de la

2 Yougoslavie. Quant à ceux qui voulaient opérer une sécession, nous ne leur

3 avons jamais contesté ce droit. Or toutes les républiques sécessionnistes

4 nous ont contesté le droit à rester au sein de la Yougoslavie, enfin ou

5 plutôt que ceci figure dans la première partie.

6 Q. Donc, si van den Broek a dit qu'il fallait chercher une solution compte

7 tenu du fait que les républiques qui le souhaitent allaient accéder à

8 l'indépendance.

9 R. Oui.

10 Q. S'il vous plaît, j'attire votre attention sur le fait qu'il est écrit

11 ici "à la fin des négociations."

12 R. Oui.

13 Q. Est-ce que c'est la même chose que nous disions ?

14 R. Oui.

15 Q. Donc, est-ce qu'il y a eu qui que ce soit qui l'aurait contesté ?

16 R. Personne.

17 Q. Maintenant, est-ce qu'il y a eu des négociations ? Ou est-ce que les

18 négociations ont été interrompues ?

19 R. Après le 5 novembre, en pratique on a interrompu les négociations. Les

20 républiques sécessionnistes ont rejeté ce que Lord Carrington était près à

21 faire figurer dans le premier chapitre du document de La Haye, à savoir que

22 les républiques qui allaient rester avaient le droit de vivre ensemble au

23 sein de la Yougoslavie et de bénéficier des mêmes droit et d'un même

24 traitement.

25 Q. Mais, s'il vous plaît, Monsieur Kostic, quand est-ce qu'il y a eu cette

26 réunion à La Haye où j'ai refusé le document de Carrington ?

27 R. Le 18 octobre.

28 Q. Quand ?

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1 R. Le 18 octobre 1991.

2 Q. Donc, c'est deux semaines exactement après ceci ?

3 R. Oui.

4 Q. Par conséquent, s'il est dit ici que tout cela doit se produire à la

5 fin des négociations qui se dérouleront de bonne foi, est-ce que 14 jours

6 plus tard on a pu constater que la Yougoslavie n'existait plus ?

7 R. Non.

8 Q. Mais est-ce que cela a pu être la fin des négociations de bonne foi ?

9 R. Non.

10 Q. Puis, on cite Smilja Avramov qui dit - et la raison de le dire dans son

11 livre en citant, mais je n'ai reçu qu'une page de son texte et c'est

12 interrompu à la fin de la page - elle dit -- que je dis c'est exact. Les

13 négociations proposées sur la recherche d'une crise yougoslave ne peuvent

14 être acceptées parce que ceci mène à la fin de la Yougoslavie qui existe

15 depuis des décennies en tant qu'Etat légal. Un forum international ne

16 serait abolir un Etat.

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai fourni ceci, Monsieur Robinson. Vous le

18 savez vous êtes un juriste compétent au droit international et je pense que

19 vous ne pouvez contester ce document, avoir aucune objection à son sujet.

20 M. MILOSEVIC : [interprétation]

21 Q. Donc, Monsieur Kostic, le premier point du document de Carrington était

22 ce qu'on mettait fin à la Yougoslavie ?

23 R. Oui.

24 Q. Donc ce qui est dit à savoir que l'on accède à l'indépendance à l'issue

25 des négociations qui se seront déroulées de bonne foi. Est-ce que c'était

26 une manière --

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais, Monsieur Milosevic, je vais

28 vous arrêter. Vous êtes en train de poser des questions directrices.

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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien, très bien.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Donc, les réponses n'ont aucune

3 valeur.

4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais je suppose que ce qu'on cite, les

5 documents a quand même une valeur, Monsieur Robinson.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais ces documents sont versés au

7 dossier. Comme je vous l'ai fait observer je m'attends à ce que vous ayez

8 terminé avec vos questions supplémentaires avant la première pause.

9 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aurais du mal à faire cela, Monsieur

10 Robinson, même si j'essaie de ne pas poser certaines questions. J'essaie

11 vraiment d'aller au vif du sujet et d'utiliser le moins de temps possible.

12 Mais très certainement, je n'arriverais pas à terminer avant la suspension

13 puisque d'après ce que je vois, c'est maintenant.

14 M. MILOSEVIC : [interprétation]

15 Q. Donc, pour en terminer avec cette question, qu'est-ce qu'il est écrit

16 ici ? "L'indépendance aux républiques qui le souhaitent à l'issue des

17 négociations qui se sont déroulées de bonne foi." Ces négociations, ont-

18 elles eu lieu après cette date du 4 octobre ? C'est le 4 octobre non, la

19 date du document. Après ces dates, est-ce qu'il y a eu des négociations ?

20 R. Le 18, il y a eu des négociations, et puis le 5.

21 Q. Attendez, attendez, s'il vous plaît. Cela a été rédigé le

22 4 octobre. Après le 4 octobre, est-ce qu'il y a eu des négociations

23 jusqu'au 18 octobre où on a soumis ce projet de mettre fin à la

24 Yougoslavie. Est-ce qu'il y a eu des négociations entre le 4 et 18

25 octobre ?

26 R. Cela je ne pourrais pas vous le dire, je n'y ai pas pris part. Mais je

27 pense qu'il y a eu des entretiens. Je ne sais pas exactement quand, mais je

28 n'y étais pas.

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1 Q. Très bien. Si vous ne pouvez rien dire à ce sujet. Mais en 14 jours,

2 est-ce que les négociations auraient pu toucher à leur fin ? Est-ce qu'on

3 aurait pu proposer la fin de la Yougoslavie sur la base de ce qu'on lit

4 ici, des négociations de bonne foi ?

5 R. Mais j'ai déjà dit dans les deux volets de mon interrogatoire que pour

6 ce qui est de ces principes, la recherche de la solution politique, un pied

7 d'égalité pour toutes les options, un processus de bonne foi, et que les

8 participants à la Conférence de La Haye y ont dérogé ainsi que les

9 représentants des républiques sécessionnistes.

10 Q. Très bien. Alors, passons maintenant à la question

11 Suivante. On vous a présenté l'intercalaire 2 ici. Vous avez eu ces

12 entretiens prolongées -- plutôt quel a été votre objectif lors de cette

13 réunion avec les représentants de la République serbe de Krajina, très

14 brièvement ?

15 R. L'objectif principal a été qu'il fallait convaincre les dirigeants de

16 la République serbe de Krajina d'agir de manière concertée avec nous pour

17 adopter le plan Vance.

18 Q. Très bien. Voyons qu'est-il écrit page 34. Lisez cela seulement pour

19 qu'on voit. Il s'agit d'un échange rapide.

20 R. "Branko Kostic -- "

21 Q. Avant cela, l'on voit à la fin de votre propos ou plutôt Paspalj

22 termine.

23 R. "A présent, cette partie du peuple qui a osé se défendre lui-même -- "

24 Q. Lentement, on traduit lentement.

25 R. "Cette partie du peuple qui a osé de se défendre tout d'abord soi-même

26 et, ensuite, pour sauver l'honneur du reste de la Yougoslavie, de l'armée,

27 ce peuple, nous nous plaçons sous l'égide des Nations Unies et d'une

28 certaine façon nous l'abandonnons à son destin, que décideront les

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1 puissances internationales."

2 Q. Donc : "Que décideront les puissances internationales ?" C'est ce que

3 dit le président de l'assemblée, Paspalj.

4 R. Oui.

5 Je réagis : "Pourquoi le conflit a-t-il éclaté là-bas ? Pourquoi y a-

6 t-il eu un conflit armé en Krajina ?"

7 Mile Paspalj : "Mais tout le monde le comprend."

8 Branko Kostic : "Je demande pourquoi ? Est-ce que c'est parce que les

9 autorités croates ont tenté sur ce territoire de vous imposer leur

10 pouvoir ? Est-ce qu'il en est ainsi ?"

11 Mile Paspalj : "C'est exact."

12 Branko Kostic : "Vous vous êtes levés et vous vous êtes organisés

13 pour vous défendre contre cela."

14 Mile Paspalj : "Nous nous sommes défendus."

15 Branko Kostic : "Vous vous êtes défendus avec succès."

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le moment est venu de faire une

17 suspension. Nous allons faire une pause de 20 minutes.

18 --- L'audience est suspendue à 10 heures 32.

19 --- L'audience est reprise à 10 heures 59.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur

21 Milosevic.

22 M. MILOSEVIC : [interprétation]

23 Q. Professeur Kostic, nous en étions à la page 34 du sténogramme et vous

24 dites, je cite : "Pourquoi le conflit a-t-il débuté en Krajina ? Est-ce

25 parce que les autorités croates ont imposé leur autorité, leur pouvoir sur

26 ce territoire ? Vous vous êtes organisé. Vous vous êtes défendu, vous-

27 même." On vous répond : "Nous nous sommes défendus, nous-mêmes." Ce

28 dialogue spontané que l'on voie transcrit ici, est-ce qu'il nous montre

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1 bien ce qui s'est passé là-bas ou est-ce que cela indique autre chose ?

2 R. Il s'agit ici de notes tecnographiques prises au moment du débat. Cela

3 n'a été préparé pour personne sauf pour le Tribunal et cela n'a fait que --

4 ne fait que confirmer ce que j'ai dit lors de ma déposition. C'est

5 exactement et précisément ce qui s'est passé.

6 Q. Bien. La partie adverse vous a montré un certain nombre de cartes de

7 Yougoslavie, en fait, il s'agissait de cartes de la FORPRONU avec des

8 indications démographiques. Lors de la convention sur la nouvelle

9 Yougoslavie, est-ce qu'il y avait des cartes ? Est-ce qu'on a discuté de

10 cartes ?

11 R. Non, comme je l'ai déjà dit.

12 Q. Est-ce qu'on a parlé de frontières lors de cette convention ?

13 R. Non. Tout ce que l'on a dit c'est qu'il fallait que l'on se réunisse

14 pour défendre la Yougoslavie en tant qu'Etat uni, commun, en dépit de nos

15 divergences, une Yougoslavie basée sur des principes acceptables par tous;

16 l'égalité des peuples et des républiques en permettant l'accession libre

17 ultérieurement.

18 Les Serbes de Bosnie-Herzégovine estimaient qu'il était essentiel de

19 préserver la Yougoslavie puisqu'ils ont vu qu'ils ne pouvaient pas y avoir

20 de Bosnie indépendante où tout le monde aurait les mêmes droits.

21 Q. Dans le cadre du contre-interrogatoire, on a attiré votre attention de

22 l'autre côté de ce prétoire sur la page 179, note de bas de page 85.

23 Veuillez, je vous prie, vous reporter à ce document. L'avez-vous trouvé ?

24 R. Oui.

25 Q. Elle a attiré votre attention sur la note de bas de page 85 et il est

26 dit, je cite : "La décision de la présidence de la RSFY relative au retrait

27 des Unités de la JNA du territoire de la Bosnie-Herzégovine avait été

28 complètement mise en œuvre à ce moment-là."

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1 R. Oui. Il s'agit d'une interview que vous avez accordée à la ZDF, une

2 chaîne de télévision allemande en juin, alors que le 18 et le 19 mai, nous

3 avions déjà retiré toutes les Unités de la JNA de Bosnie-Herzégovine.

4 Q. Page suivante, note de bas de page 86 qui ne vous a pas été présentée

5 par l'autre côté, qu'est-ce qu'on lit ?

6 R. "Les dirigeants du peuple serbe de Bosnie-Herzégovine et, en

7 particulier, le Dr Radovan Karadzic ont insisté à plusieurs reprises sur le

8 fait que les Serbes de Bosnie-Herzégovine étaient en difficulté dans leurs

9 relations avec les Musulmans et les Croates parce que la JNA recrutait une

10 bonne partie de leurs hommes, alors que des deux autres côtés, on faisait

11 preuve de beaucoup d'agressivité."

12 Q. Qu'est-ce que cela nous montre ?

13 R. Cela nous montre ce que je n'ai cessé de signaler, à savoir que la JNA

14 a fait preuve de beaucoup de retenue sur tous les territoires où elle se

15 trouvait. Cela confirme d'autre part ce que j'ai déjà déclaré, à savoir que

16 les Musulmans et les Croates ont cessé d'envoyer leurs conscrits pour

17 rejoindre les rangs de la JNA et qu'ils ont mis en place leurs propres

18 formations paramilitaires. Parallèlement, ceci revient à réfuter les propos

19 de M. Jovic selon lesquels moi-même jamais je n'aurais donné mon accord au

20 retrait de la JNA de Bosnie.

21 Q. Attendez, justement j'allais y arriver. C'est ce qu'on va lire ensuite.

22 Mais ce que vous venez de dire au sujet du fait que les conscrits musulmans

23 n'étaient plus envoyés dans la JNA, est-ce que ceci a été confirmé dans la

24 réunion de Skopje, réunion avec Izetbegovic ? Est-ce qu'on le voit dans les

25 notes sténographiques ?

26 R. Oui. Il a déclaré que les dirigeants musulmans de Bosnie étaient

27 responsables du fait que la JNA était devenue une armée où n'était

28 représentée qu'une seule nation.

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1 Q. Dans la note de bas de page suivante, qu'écrivez-vous ?

2 R. Juste avant la décision de retirer la JNA de Bosnie-Herzégovine, j'ai

3 déclaré en public, je cite : "Jamais je ne donnerai mon accord au retrait

4 de la JNA de Bosnie-Herzégovine sans accord préalable des trois dirigeants

5 de cette république. La présidence de la Bosnie-Herzégovine constituée par

6 les plus hauts représentants des Musulmans et des Croates de Bosnie-

7 Herzégovine a demandé officiellement le retrait de la JNA de Bosnie-

8 Herzégovine. J'ai l'impression que les dirigeants du peuple serbe de

9 Bosnie-Herzégovine étaient très impatients de voir cela se produire. Nous

10 avons parlé avec Radovan Karadzic, Momcilo Krajisnik et Nikola Koljevic, et

11 au cours de cette discussion, nous avons obtenu leur accord relatif au

12 retrait de la JNA de Bosnie-Herzégovine. Ultérieurement, mes opposants

13 politiques m'ont souvent accusé et reproché d'avoir tenu ces propos. Mais

14 invariablement, ils ne citaient que la première partie de ce que j'avais

15 dit."

16 Q. La deuxième partie de ce que vous aviez dit, c'est que jamais vous

17 n'auriez donné votre accord sans l'accord des dirigeants des trois parties

18 en présence.

19 R. Oui.

20 Q. Vous avez donné votre accord parce que les Musulmans et Croates ont

21 donné leur accord et que Karadzic, Koljevic, au cours de leur conversation

22 avec vous, ont également donné leur accord, n'est-ce pas ?

23 R. Oui.

24 Q. Avez-vous agi en conformité avec le poste que vous occupiez et les

25 positions que vous aviez formulées ?

26 R. Oui.

27 Q. De l'autre côté du prétoire, on vous a présenté une carte -- attendez,

28 je ne vois pas bien ce qui est écrit ici -- où sont indiqués les lieux où

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1 se sont déroulées des activités criminelles qui figurent dans l'acte

2 d'accusation.

3 Est-ce que vous avez le document ?

4 R. Non.

5 Q. Veuillez prendre celui qui vous est donné et le placer sous le

6 rétroprojecteur si cela est possible. Maintenant, j'aimerais que vous

7 regardiez un petit peu cette carte. Sur le territoire de la Serbie, est-ce

8 qu'on voit l'indication d'un meurtre, d'un seul meurtre, sur cette carte

9 qui, d'après eux, représente ou indique tous les meurtres qui ont été

10 commis. Est-ce qu'il y a un seul meurtre qui y est indiqué ?

11 R. Non. Aucun crime sur le territoire de la Serbie, cela recouvre les

12 meurtres. Tous les crimes sont concentrés sur la zone frontalière entre la

13 Croatie et la Serbie et aussi sur la zone frontalière qui sépare la Serbie

14 de la Bosnie.

15 Q. En Serbie, est-ce qu'on voit meurtre, ne serait-ce qu'un seul meurtre ?

16 R. Non.

17 Q. Quel était le pourcentage de la population non-serbe en Serbie à

18 l'époque ?

19 R. Plus de 34 % de la population, plus d'un tiers.

20 Q. Cela représente plus de 3,5 millions de personnes.

21 R. Exact.

22 Q. Aucune de ces personnes n'a été touchée par ces événements ?

23 R. Non.

24 Q. Maintenant, examinez les points bleus qui indiquent des lieux de

25 détention. Comme vous pouvez le constater dans quatre localités en Serbie

26 se trouvaient, d'après cette carte, des lieux de détention.

27 R. Sremska Mitrovica, Lovac, Sid --

28 Q. Lovac est en Croatie.

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1 R. Effectivement.

2 Q. Sur ces quatre lieux, est-ce qu'il y a une seule localité qui relève de

3 l'autorité serbe ? Begici - paragraphe 64(e) - caserne de la JNA. Est-ce ce

4 qui est écrit ? Puis, complexe agricole de Stajicevo, JNA. Ensuite, Sid,

5 prison militaire de la JNA. Sremska Mitrovica, prison militaire de la JNA ?

6 C'est tout ?

7 R. Oui.

8 Q. Est-ce qu'il y a là une seule prison relevant de l'autorité serbe ?

9 R. Non.

10 Q. Maintenant regardons ce qui se passe au Monténégro. Morinje, un dépôt

11 d'armes militaire de la JNA. Est-ce qu'on trouve des lieux de détention

12 placés sous l'autorité monténégrine ?

13 R. Non. Toutes ces installations militaires c'étaient des installations de

14 la JNA.

15 Q. A votre connaissance, qu'est-il advenu des personnes détenues dans ces

16 lieux et qui étaient ces gens ?

17 R. Il s'agissait de prisonniers, de membres d'organisations paramilitaires

18 croates qui avaient été capturés par la JNA et placés en détention dans ces

19 lieux. Ensuite, beaucoup d'entre eux ont été échangés. J'ai parlé du Dr

20 Vesna Bosanac. Elle était directrice de l'hôpital de Vukovar. Elle a été

21 mise en accusation par les tribunaux serbes pour crimes de guerre. Même

22 elle, plus tard, elle a été échangée au cours de l'échange organisé par M.

23 Banic. Un échange total et bilatéral.

24 Q. Est-ce que, dans ces prisons, des personnes ont été assassinées ?

25 R. Non, pas à ma connaissance.

26 Q. Nous avons là un document très volumineux qui vient du groupe "Helsinki

27 Watch". Est-ce qu'il se distingue en quoi ce soit de cette carte ? Est-ce

28 qu'on y voit, est-ce qu'on y découvre l'existence de quoi ce soit en

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1 Serbie ?

2 R. Je n'ai pas compris votre question.

3 Q. Vous avez reçu une lettre de "Helsinki Watch", envoyée à Blagoje Adzic

4 et à moi-même, qui évoque des violations des droits de l'homme. Il y est

5 indiqué Strugar, Dvor, Benkovac, Osijek, Lovinac, près de Gracac, Petrinje,

6 Balinci, Podravska Slatina, Gospic, Grubisno Polje, Bogdanovci, et cetera.

7 Est-ce que parmi toutes ces localités, il y en a une seule qui se trouve en

8 Serbie ?

9 R. Non. Toutes ces localités se trouvent en Croatie.

10 Q. Bien. Maintenant, pour parler de Dubrovnik. Que nous ont dit à nous

11 tous les plus hauts dirigeants militaires au sujet de Dubrovnik ?

12 R. Les principaux responsables militaires ont répondu à toutes nos mises

13 en garde, à toutes nos demandes. D'abord, en nous informant du fait que

14 leurs hommes sur le terrain avaient reçu l'ordre le plus strict de ne pas

15 s'approcher de la vieille ville, de ne pas s'approcher à portée de forces

16 qui pourraient se trouver à l'intérieur de la vieille ville. Ils avaient

17 reçu également l'ordre le plus strict de ne pas bombarder Dubrovnik, de ne

18 pas la pilonner, de protéger et de préserver la vieille ville. Je dois dire

19 que nous avons été tenus informés de tout cela. Il est également vrai que

20 la propagande faisait rage des deux côtés, surtout du côté croate. Les

21 Croates qui disaient que Dubrovnik allait être rasée. J'ai déjà parlé de

22 Cavcat, une localité qui se trouve à proximité de Dubrovnik dans laquelle

23 les troupes de la JNA sont entrées sans tirer un seul coup de feu.

24 Q. Mais ce qui m'importe ici, c'est la chose suivante : que répondait la

25 JNA lorsque nous lui demandions ce qui se passait à Dubrovnik, pourquoi

26 Dubrovnik était pilonnée ?

27 R. On nous répondait que c'était de la propagande croate, que la vieille

28 ville n'était absolument pas pilonnée et que, selon leurs informations,

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1 nombre de bâtiments stratégiques dans la vieille ville avaient été minés,

2 plastiqués et que les Croates montaient de toutes pièces des attaques pour

3 accuser la JNA.

4 Q. Est-ce que nous avons reçu des éléments montrant que la JNA a pilonné

5 Dubrovnik ?

6 R. Non.

7 Q. Nous avons demandé des informations. Que nous a-t-on répondu s'agissant

8 de ce pilonnage ?

9 R. On nous a répondu que Dubrovnik n'avait pas été pilonnée, n'était pas

10 pilonnée. Même pour ce qui est de la journée du 6 décembre, sur laquelle je

11 me suis le mieux renseigné avant de venir ici, la base navale de la JNA

12 nous a fait savoir qu'il n'y avait pas de pilonnage.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Cette information provenait d'où,

14 l'information selon laquelle la JNA ne procédait pas au pilonnage de

15 Dubrovnik ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous recevions nos informations des plus hauts

17 responsables, des plus hauts gradés de l'état-major du commandement Suprême

18 avec qui nous étions en contact. Je n'avais pas de contacts avec les chefs

19 militaires sur le terrain. J'avais des contacts avec Brovet, Kadijevic et

20 un autre général, le général Adzic. Donc, ces trois généraux. S'agissant

21 des informations officielles, elles venaient du secteur naval de Boka,

22 secteur militaire naval. Il s'agissait de communiqués officiels qui

23 réfutaient les allégations publiées dans la presse croate selon laquelle,

24 le 6 décembre, Dubrovnik avait été soumise à un pilonnage particulièrement

25 violent.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avant de poursuivre, vous êtes en

27 train de nous donner des réponses très générales. J'ai l'impression qu'en

28 fait, vous étiez censé, dans ce genre de circonstances, rencontrer en

Page 48533

1 personne les dirigeants militaires en question pour qu'ils vous informent

2 de ce qui se passait à Dubrovnik. Est-ce que vous pouvez nous dire qui

3 concrètement vous a fourni ces informations ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur Bonomy, je me suis rendu là où se

5 trouvaient ces unités pendant deux ou trois heures. Bien entendu, je n'ai

6 pas pu me rendre à Dubrovnik même, parce qu'il y avait des combats à ce

7 moment-là. Je me suis rendu dans les environs de Dubrovnik et les chefs

8 militaires avec qui je me suis entretenu à ce moment-là, ils nous ont dit

9 que certains bâtiments et certains remparts de la vieille ville étaient

10 utilisés pour y installer des positions de tir. Pendant mon contre-

11 interrogatoire, j'ai également dit que j'avais vu des images tournées là-

12 bas, des documentaires qui m'ont permis de constater qu'il y avait eu

13 effectivement pilonnage de Dubrovnik et que certains bâtiments avaient été

14 détruits, mais que ces destructions n'avaient pas le caractère massif dont

15 nous parlait la propagande à l'époque. Encore aujourd'hui, je dirais qu'il

16 n'y a pas eu de destruction aussi importante à Dubrovnik.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci. Mais précédemment, et c'est la

18 raison pour laquelle que je vous ai posé cette question, vous nous avez dit

19 : "Je n'avais pas de contacts directs avec les commandants, avec les chefs

20 sur le terrain." Enfin, c'est ce que j'ai compris en écoutant la traduction

21 de ce que vous avez dit. Vous avez dit qu'Adzic, Kadijevic et Brovet, les

22 plus hauts gradés, vous aviez des contacts avec eux. Or, maintenant, vous

23 êtes en train de nous dire que cette information vous l'avez reçu

24 directement des commandants militaires qui se trouvaient sur le terrain à

25 Dubrovnik.

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur Bonomy, l'opération de Dubrovnik a

27 duré plusieurs mois et les informations que nous recevions au sujet de

28 l'opération de Dubrovnik et d'autres choses, nous venaient régulièrement de

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1 l'état-major du commandement Suprême. Ce dont je vous ai parlé, c'était une

2 visite, une visite qui n'a duré que deux ou trois heures, une seule visite,

3 mais les informations, l'essentiel des informations, nous les recevions de

4 l'état-major.

5 M. LE JUGE BONOMY : Merci.

6 M. MILOSEVIC : [interprétation]

7 Q. On vous a montré un certain nombre de documents au sujet des décisions

8 de la JNA. A l'annexe 123, il y a une lettre adressée par Kadijevic à M.

9 van den Broek le 4 novembre 1991 dans laquelle il dit : "S'agissant des

10 opérations militaires dans la région de Dubrovnik, je souhaite insister sur

11 le point suivant. Les Unités de la JNA ont reçu, à plusieurs reprises, des

12 ordres stricts leur indiquant qu'il leur était interdit de tirer sur la

13 vieille ville de Dubrovnik quelles que soient les circonstances, même si la

14 vieille ville était utilisée pour y installer des positions de tir."

15 Voilà une lettre de Kadijevic à van den Broek le 4 novembre 1991. Est-ce

16 que c'est ce que Kadijevic vous répétait lui aussi ?

17 R. Oui.

18 Q. Il y a eu un désaccord au sujet d'un document dans lequel il y avait

19 une mise en garde de l'état-major du commandement Suprême à la République

20 de Croatie, à son président et à son QG, le QG de l'état-major principal de

21 l'armée croate. Vous avez trouvé le document, n'est-ce pas ? Vous vous en

22 souvenez ?

23 R. Oui.

24 Q. Veuillez donner lecture du dernier paragraphe, parce qu'il y a deux

25 éléments ici, deux points. Dans l'autre, il y avait quatre. Alors quel est

26 le document authentique celui où il y a seulement deux points ou l'autre ?

27 R. J'ai donné une copie aux messieurs, dames de l'Accusation, donc je ne

28 suis pas sûr d'en avoir encore une.

Page 48535

1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois qu'il s'agit de la pièce 948,

2 mais avant --

3 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai trouvé, j'ai trouvé.

4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] -- je n'ai pas très bien compris,

5 Monsieur Milosevic, à quel document vous avez fait référence quand vous

6 parlez de la décision de la JNA, annexe 123 ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est une question à laquelle je dois

8 répondre ?

9 M. MILOSEVIC : [interprétation]

10 Q. Non.

11 L'ACCUSÉ : [interprétation] 123 c'est une annexe qui fait partie de

12 la même liasse de documents que la pièce 948. Le numéro 87, le numéro 123

13 c'est une lettre de Kadijevic à van den Broek du

14 4 novembre 1991. J'en ai cité un passage, un passage dans lequel il informe

15 van den Broek du fait que des ordres très stricts avaient, à plusieurs

16 reprises, été délivrés; des ordres selon lesquels il était interdit de

17 tirer sur Dubrovnik quelles que soient les circonstances, cela correspond

18 aux informations que nous avons reçues.

19 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je ne pense pas que ce soit le cas,

20 mais le classeur numéro 2 des documents fournis par

21 M. Milosevic, c'est un classeur qui a été préparé à partir d'une collection

22 de documents de la JNA. Je ne suis pas sûre que le document 123 s'y trouve.

23 Je ne crois pas.

24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] On pourra s'en assurer plus tard.

25 Continuons.

26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien. Je peux vous donner ce document. Il est

27 exactement identique.

28 M. MILOSEVIC : [interprétation]

Page 48536

1 Q. Est-ce que vous avez, Monsieur le Témoin, trouvé le document que vous

2 aviez vous-même fourni ?

3 R. Oui.

4 Q. Il y a deux points, n'est-ce pas, dans ce document ?

5 R. Oui.

6 Q. Ensuite, qu'est-ce qu'on lit ? Je vais le lire, je cite : "Si vous

7 souhaitez éviter un bain de sang et la destruction, il faut que les

8 autorités locales --"

9 R. "…que les autorités prennent immédiatement attache avec le commandement

10 de la JNA afin de permettre de garantir aux unités qui se retirent de

11 passer en toute sécurité avec tous leurs biens mobiliers ainsi que leurs

12 familles, les familles des membres de la JNA qui se trouvent dans les

13 garnisons menacées. On peut faire intervenir également des observateurs

14 internationaux."

15 Q. Mise en garde du commandement Suprême de son état-major, n'est-ce pas;

16 est-ce que c'était une menace cette mise en garde ?

17 R. Il faut considérer que c'est là une mise en garde, parce que si les

18 autorités croates coupaient l'approvisionnement en eau, en électricité, les

19 lignes téléphoniques, et empêchaient tout approvisionnement en vivres à

20 quelque 125 000 soldats, ou plutôt, excusez-moi, non, 25 000 soldats de la

21 JNA en les empêchant d'enterrer leurs morts, en les empêchant d'évacuer

22 leurs blessés, dans ces conditions, je pense que même au jour

23 d'aujourd'hui, dans les mêmes circonstances, après dix cessez-le-feu non

24 respectés, je pense que moi aussi j'aurais rédigé un tel document, donné

25 une telle mise en garde.

26 Q. Est-ce que cette menace a été traduite dans les faits dans toutes les

27 garnisons qui étaient attaquées ?

28 R. Non.

Page 48537

1 Q. En fait, cela a été interprété comme une menace. Pourquoi ?

2 R. Il s'agissait d'une mise en garde destinée à persuader les unités

3 paramilitaires croates et les autorités croates d'accepter enfin ce qu'ils

4 avaient fait mine d'accepter dans tous les accords de cessez-le-feu

5 précédents, à savoir permettre le retrait, le départ des soldats de la JNA

6 ainsi que de leurs familles.

7 Q. Encore une question seulement. Votre livre "Contre l'oubli," on vous

8 l'a présenté, et à la page 108, il y a tout un paragraphe qui a trait à la

9 mise à la retraite d'un certain nombre de généraux. Est-ce que vous avez

10 trouvé le passage concerné ?

11 R. Oui.

12 Q. Pourquoi a-t-on décidé de réduire le nombre de généraux ? Pour quel

13 motif ?

14 R. J'ai déjà dit que même à l'époque, alors que c'était encore la paix,

15 pour tout le territoire de l'ex-Yougoslavie, nous avions déjà trop de

16 généraux, le nombre de généraux était inhabituellement élevé par rapport

17 aux effectifs de l'armée. Parallèlement, la guerre s'est déclarée, la

18 Croatie et la Slovénie ont cessé d'envoyer leurs jeunes appelés pour servir

19 dans la JNA, imitées bientôt par les Albanais du Kosovo, imitées bientôt

20 par Alija Izetbegovic et les Musulmans de Bosnie. Le territoire de la

21 Yougoslavie, il existait certes, c'était encore un Etat tout à fait

22 légitime, mais ce territoire il s'est vu amputé de moitié. Il était donc

23 tout à fait normal de réduire le nombre des généraux de l'armée, un nombre

24 qui était déjà excessif en temps de paix. Nous, nous étions le commandement

25 Suprême, nous étions compétents en la matière, mais nous avons, malgré

26 tout, essayé d'avoir l'accord de la JNA, de son état-major général, nous

27 leur avons demandé de fournir une liste des généraux qui servaient dans les

28 différentes armes de la JNA.

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1 Q. Alors, est-ce que j'ai joué un rôle quelconque dans cet exercice,

2 l'exercice que vous venez de mentionner ?

3 R. Non, vraiment pas.

4 Q. Est-ce que je suis intervenu de quelque manière que ce soit, est-ce que

5 j'ai demandé à ce que tel ou tel général soit mis à la retraite ?

6 R. Non, je l'ai déjà dit, vous n'êtes pas intervenu pour quiconque. La

7 seule conversation que nous ayons eue à ce sujet c'est un échange assez vif

8 où vous avez fait une remarque assez agressive au sujet de M. Marko

9 Negovanovic, qui était votre ministre de la Défense serbe, et vous étiez

10 mécontent parce que vous n'aviez même pas été informé qu'on allait le

11 mettre à la retraite.

12 Q. Qu'est-ce que j'ai dit à ce moment-là ? Est-ce que j'ai protesté parce

13 qu'on allait le mettre à la retraite ?

14 R. Non, non. Vous avez protesté parce que vous avez dit qu'on aurait quand

15 même pu vous prévenir, vu que c'était quand même le ministre de la Défense

16 de Serbie. A ce moment-là, je vous ai expliqué qu'il n'était pas mis à la

17 retraite en tant que ministre de la Défense, il était mis à la retraite en

18 tant que chef de la 12e administration -- ou du 12e Secteur du contre-

19 espionnage de l'armée, et c'était lui qui était responsable de ce qui

20 s'était passé en Slovénie avec Aleksandar Vasiljevic. A l'époque de

21 l'opération Slovanie, il était à la tête de ce 12e Service du contre-

22 espionnage de l'armée.

23 Q. Merci. Je n'ai plus de question à poser.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je peux dire quelque chose après 10

25 jours d'interrogatoire sans qu'on ne me pose de question ?

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous n'aimons ce genre d'attitude où

27 des gens proposent quelque chose.

28 Questions de la Cour :

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'aimerais tirer une chose au clair en

2 vous posant une question. On vous a renvoyé à votre livre et au discours

3 que vous avez prononcé à propos du retrait de la JNA de Bosnie où vous avez

4 déclaré que : "La présidence de Bosnie se composait des plus hauts

5 responsables croates et musulmans, et qu'elle avait exigé officiellement le

6 retrait de la JNA. J'ai l'impression que les dirigeants serbes trépignaient

7 d'impatience, attendaient avec impatience cette décision."

8 Qu'est-ce que vous vouliez dire en prononçant ces termes, ces paroles ?

9 R. Je pense que ceci est expliqué dans le livre, mais je ne vous ai peut-

10 être pas rappelé quelque chose dont on avait discuté même ici dans le cadre

11 de ma déposition.

12 Les dirigeants serbes en Bosnie se sont sans arrêt plaints du fait que

13 leurs recrues, leurs appelés étaient appelés dans l'armée, mais que ceci

14 affaiblissait leur position en tant que représentants du peuple serbe sur

15 ce territoire vu les circonstances qui prévalaient, à savoir que les

16 Croates et les Musulmans avaient déjà établis leurs unités paramilitaires à

17 eux. Avec le retrait de la JNA, tous les membres serbes de la JNA qui

18 étaient originaires de Bosnie devaient être libres de rejoindre l'armée

19 serbe en Bosnie-Herzégovine renforçant ainsi la position serbe.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Kostic, ceci met fin à

22 votre déposition, merci d'être venu en tant que témoin. Vous pouvez

23 maintenant disposer.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

25 [Le témoin se retire]

26 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je voudrais intervenir à propos d'une

27 pièce. Je me suis servie d'une carte préparée par le bureau du Procureur en

28 interrogeant le témoin, c'était plutôt comme appui visuel, M. Milosevic

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1 s'en est servi lui aussi. Faudrait-il la verser au dossier ? Cela montre

2 simplement les lieux incriminés.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Maître Kay.

4 M. KAY : [interprétation] Ceci est typique de la thèse défendue par

5 l'Accusation, ceci devrait être repris par l'Accusation dans son

6 réquisitoire. Cela ne devrait pas être quelque chose présenté par le

7 truchement d'un témoin.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Effectivement.

9 Témoin suivant.

10 Monsieur Nice.

11 M. NICE : [interprétation] Avant l'arrivée du prochain témoin, quelques

12 questions d'intendance en quelques minutes à peine. Une première chose,

13 observation générale, nous n'avons toujours qu'un témoin à la fois dans sa

14 liste de témoins, on ne sait jamais ce que nous réserve l'avenir.

15 Deuxième chose, pourrait-on passer l'espace de quelques instants à huis

16 clos partiel ?

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

18 [Audience à huis clos partiel]

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17 [Audience publique]

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic. Une question

19 avait été soulevée en audience publique je pense par M. Nice, elle

20 concernait le témoin Bulatovic. Vous étiez censé nous informer -- ou est-ce

21 que c'était à huis clos partiel ? Excusez-moi. Revenons à huis clos

22 partiel.

23 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

24 [Audience à huis clos partiel]

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17 [Audience publique]

18 [La Chambre de première instance se concerte]

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous étiez censé

20 fournir un complément d'information en ce qui concerne votre liste de

21 témoins, et vous devriez nous dire quels seront vos témoins pour les quatre

22 ou six semaines à venir, documents à remettre à la Chambre et aux parties

23 concernées dans ce procès.

24 Le prochain témoin s'il vous plaît.

25 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vais demander au témoin de

27 prononcer la déclaration solennelle.

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai

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1 la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

2 LE TÉMOIN: MARKO ATLAGIC [Assermenté]

3 [Le témoin répond par l'interprète]

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur, veuillez vous

5 asseoir.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez entamer votre

8 interrogatoire principal, Monsieur Milosevic.

9 Interrogatoire principal par M. Milosevic :

10 Q. [interprétation] Monsieur Atlagic, veuillez vous présenter.

11 R. Je m'appelle Marko Atlagic. Je suis né le 30 avril 1949 dans le village

12 d'Ostrovice, municipalité de Benkovac. J'ai terminé l'école primaire à

13 Ostrovice, ensuite j'ai fait l'école secondaire et j'ai fait l'école

14 normale de formation d'enseignent à Benkovac ou, plus exactement, l'école

15 secondaire. Après l'école secondaire, j'ai étudié l'histoire et la

16 pédagogie à la faculté de philosophie de Zadar. J'ai fait un post gradua à

17 la même université, post gradua en science historique. J'ai une maîtrise.

18 J'ai aussi un doctorat et je suis aujourd'hui, enseignant, professeur à

19 Kosovska Mitrovica à la faculté. J'ai d'abord été --

20 M. NICE : [interprétation] Manifestement, le témoin lit quelque chose.

21 Apparemment, il a préparé des notes. Dommage que ceci n'est pas été

22 communiqué en application du 89 (F). Nous aurions aimé nous préparer en

23 ayant ce document, manifestement imprimé. Est-ce que la Chambre, je suis

24 sûr que la Chambre aimerait savoir si le témoin fait référence à des notes

25 et si c'est le cas, s'il est possible de les remettre à l'Accusation.

26 L'INTERPRÈTE : [aucune interprétation]

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous avez un document que

28 vous utilisez ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne lis pas pour le moment mais j'ai

2 préparé, disons, des hypothèses ou des idées générales. Si vous voulez,

3 vous pouvez vous en servir, le voir, ce document.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous l'avez préparé quand, ce

5 document ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Au cours des deux ou trois dernières journées.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.

8 Poursuivez, Monsieur Milosevic.

9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous avons maintenant les informations de

10 contexte. Vous en voulez davantage. Je vais peut-être poser d'autres

11 questions de contexte qui me semblent nécessaire.

12 M. MILOSEVIC : [interprétation]

13 Q. Monsieur Atlagic, quels sont les postes que vous avez occupés ?

14 Quelles fonctions avez-vous exercé en Croatie, de 1990 à 1992 ?

15 R. J'étais député à l'assemblée de la République de Croatie qui s'appelle

16 Sabor.

17 Q. Au cours de quelles élections avez-vous été élu député ?

18 R. Lors des élections de 1990. Lors des premières élections pluripartites.

19 Q. Vous étiez candidat de quel parti à ces élections au parlement croate ?

20 R. C'est l'Alliance des socialistes de Croatie, SSH, et j'ai été élu en

21 tant que membre de ce parti au parlement croate.

22 Q. Ce parti, sur le plan ethnique, est-ce que c'était un parti où il y

23 avait plusieurs appartenances ethniques ou une seule ? Comment s'est

24 composé ce parti ?

25 R. Voici comment s'est composé sur le plan ethnique ce parti ? Nous avions

26 des députés tant Serbe que Croate.

27 Q. Est-ce que c'était un Serbe ou un Croate à la tête du parti ?

28 R. Il s'appelait Zeljko Mazar, un Croate.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il manque quelque chose pour ce qui

2 est des données de contexte. Est-ce que vous avez dit que vous étiez

3 professeur à Pristina ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Professeur de quoi ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] En science historique dans le Département de

7 philosophie.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation]

9 M. MILOSEVIC : [interprétation]

10 Q. Je vous remercie. C'était une période très importante, celle de 1990 à

11 1992. Puisque vous étiez parlementaire, parlementaire au Sabor, le

12 parlement croate, quel a été votre programme électoral ?

13 R. J'avais comme circonscription celle de Benkovac, la municipalité de

14 Benkovac.

15 Q. A ce moment-là important, est-ce que vous avez eu beaucoup de contacts

16 avec les membres de votre circonscription, ceux qui allaient participer aux

17 élections. Est-ce que vous aviez des informations qui vous parvenaient à

18 propos de ce qui se passait dans votre circonscription ?

19 R. Oui. Dans la mesure de ce qu'un député peut recevoir en information.

20 Q. Est-ce qu'on vous a informé de tout ce qui se passait à l'assemblée

21 croate dont vous étiez député, à propos des sujets évoqués, de la situation

22 politique ?

23 R. Oui. Je pense que j'ai été actif, participant actif à ces discussions

24 au parlement.

25 Q. Donc, vous avez été actif dans la vie parlementaire croate, au

26 parlement ?

27 R. Oui. Je pense que je me suis acquitté de ces fonctions avec honneur.

28 Q. Vu vos fonctions et vu le fait que vous avez tout au cours de cette

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1 période, c'était très actif en République de Croatie. Dites-moi ceci, s'il

2 vous plaît. Question qu'on trouve au point 6 de l'acte d'accusation. On

3 parle d'une entreprise criminelle commune. On m'accuse d'avoir organisé

4 cette entreprise criminelle commune qui avait pour objectif de contraindre

5 la majorité de la population croate et du reste de la population non-serbe

6 à évacuer environ un tiers du territoire dont il était prévu qu'il ferait

7 partie d'un nouvel Etat dominé par les Serbes.

8 Puisque vous étiez un acteur de la vie politique à cette époque,

9 qu'en pensez-vous ?

10 R. Il n'y avait pas d'entreprise criminelle commune à laquelle vous, en

11 tant que -- Milosevic, vous auriez participé. Vous n'auriez pas pu

12 contraindre la population non-serbe à partir, à évacuer une partie du

13 territoire. Vous n'auriez pas pu planifier les choses pour que ce

14 territoire devienne une partie d'un nouvel Etat dominé par les Serbes.

15 Q. Alors, où est la vérité ?

16 R. S'il y avait eu une entreprise criminelle commune, c'est plutôt Franjo

17 Tudjman qui était à la tête de cette entreprise criminelle commune. Lui

18 était président de la Croatie.

19 Q. Mais ces dirigeants croates, qu'est-ce qu'ils avaient comme objectif

20 dans cette entreprise criminelle commune ?

21 R. Ils voulaient démanteler la RSFY pour créer un Etat indépendant où il

22 n'y aurait pas de Serbes. La continuité juridique, ils auraient le fil des

23 choses, là où s'étaient arrêtés l'Etat fasciste de la Deuxième guerre

24 mondiale avec la Bosnie-Herzégovine, avec Backa et Subotica, et une partie

25 de la baie de Kotor.

26 Q. Fort bien. Vous dites qu'il était à la tête. Vous étiez député à

27 l'assemblée croate. Dites-nous, qui était à la tête de ce mouvement qui

28 voulait une Croatie sans Serbe ? Quels étaient les autres participants à

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1 cette entreprise ? Vous pouvez en parler parce que vous avez vu la

2 réalisation de tout ceci.

3 R. Il y avait plusieurs dirigeants en République de Croatie. Il y avait,

4 notamment, Zarko Domljan, président de l'assemblée croate, président du

5 Conseil exécutif de la République de Croatie; Josip Manolic, vice-président

6 de l'assemblée; Sulimanac, Stjepan; deuxième vice-président, Vladimir Seks;

7 le ministre de l'Intérieur de la République de Croatie, Josip Bojkovac; et

8 Martin Spegelj, ministre de la Défense; ainsi que membre de la présidence

9 de la RSFY qui est devenu plus tard président de la présidence fédérale et

10 qui est aujourd'hui président de la Croatie, Stipe Mesic.

11 Q. Sur quoi vous basez-vous pour affirmer que ces gens étaient impliqués à

12 l'époque, lorsque vous, vous étiez député pour créer une Croatie sans

13 Serbe ?

14 R. Mais c'est au vu de l'ambiance de manière générale et aussi au vu de

15 l'évolution des choses sur place.

16 Q. Très bien. Mais y a-t-il un document prouvant que cet objectif que vous

17 citez, enfin, vous vous basez sur votre expérience personnelle mais est-ce

18 qu'il y a un document où on pourrait trouver cet objectif formulé ?

19 R. Ce document existe. C'est le programme de l'Union démocratique croate.

20 En particulier, dans les messages envoyés suite au premier rassemblement du

21 HDZ et dans les proclamations lancées par le HDZ.

22 Q. Vous parlez du premier rassemblement de la première convention du HDZ

23 des décisions de cette convention. Est-ce que ces décisions figurent à

24 l'intercalaire 1 ?

25 R. Oui, je pense que c'est là qu'elle se trouve.

26 Q. Je vous invite à examiner l'intercalaire 1 et de quel document s'agit-

27 il ?

28 R. Le voici à l'intercalaire 1, nous avons les décisions de la première

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1 convention générale du HDZ, les basses programmatiques et les objectifs du

2 HDZ.

3 Page 39, en bas à gauche, au point 9, il est dit que le HDZ prône la

4 défense du droit actuel et inaliénable de l'ensemble du peuple croate à

5 l'intérieur de ces frontières, et cetera, à l'autodétermination, donc, il

6 est question de la Croatie dans ces frontières historiques et naturelles.

7 Or, ce sont les frontières que j'ai citées à savoir la République de

8 Croatie d'aujourd'hui, plus la Bosnie-Herzégovine, plus Boka Kotorska, avec

9 le Srem et la Backa, et là jusqu'à Subotica.

10 Q. Etait-ce quelque chose de neuf sur la scène politique croate ? Etait-ce

11 une nouveauté qui serait apparue en 1990 dans les propos du numéro 1,

12 Franjo Tudjman, ou était-ce une position qui aurait déjà été défendue de

13 par le passé ?

14 R. Non, ce n'était pas une nouveauté, Dans la période précédente, le Dr

15 Tudjman avait déjà défendu cette position.

16 Q. Est-ce que vous pouvez étayer cette affirmation ?

17 R. Oui. En 1964, le Dr Franjo Tudjman a déjà écrit et il a dit qu'il

18 prônait la Croatie dans ces frontières historiques et naturelles. Par là,

19 il entendait la Croatie d'aujourd'hui, en plus de la Bosnie-Herzégovine, la

20 Boka Kotorska, et Srem et la Backa avec Subotica. C'est la raison pour

21 laquelle des Commissions de la Ligue des Communistes de Yougoslavie

22 l'avaient entendu.

23 Q. Très bien. Mais ce que vous nous dites à présent, est-ce que quelque

24 chose que nous pouvons trouver à l'intercalaire 3 celle-là qu'il est

25 question d'un livre rédigé par deux auteurs "Les Croates et la Bosnie," est

26 le titre de ce livre. Je pense que vous l'avez.

27 R. Oui, j'ai l'intercalaire 3.

28 M. NICE : [interprétation] Il n'y a pas de traduction de ce document.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Peut-on placer le document sur le

2 rétroprojecteur ?

3 M. MILOSEVIC : [interprétation]

4 Q. S'il vous plaît, seule la page 96 nous intéresse. Nous avons une

5 citation très brève ici.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est la page 96 dans le texte que

7 nous avons, non pas 69.

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, 96.

9 M. MILOSEVIC : [interprétation]

10 Q. Quelle est la citation des propos de Tudjman ?

11 R. Voici, c'est en page 96. Je vais tenter de reprendre les propos de M.

12 Tudjman. "Des frontières historiques de la Croatie (du royaume triple de la

13 Croatie), on a enlevé le Srem et la Boka Kotorska et d'après le droit

14 naturel on ne lui a pas rattaché les régions tout à fait croates de Bosnie-

15 Herzégovine, qui ont même fait partie de la Banovina de Croatie en 39, ni

16 la partie croate de Backa avec Subotica." C'est ce qu'a écrit et a rédigé

17 Tudjman.

18 Q. Très bien, mais à l'attention des personnes qui ne connaissent très

19 bien la situation géographique, est-ce que vous pouvez expliquer où se

20 situent ces endroits et ces localités ?

21 R. Bien, la Bosnie-Herzégovine est une république, la république voisine.

22 La Boka Kotorska cependant se trouve en République de Monténégro, tandis

23 que Backa et Subotica se trouvent en République de Yougoslavie ou plus

24 précisément en République de Serbie.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le Srem, où se situe le Srem ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Le Srem se situe en Serbie en partie, et en

27 partie en Croatie.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.

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1 M. MILOSEVIC : [interprétation]

2 Q. Au point 7 de l'acte d'accusation, il est dit que cette entreprise

3 criminelle commune a vu le jour avant le 1er août 1991, peu importe jusqu'où

4 cela s'est poursuivi. Maintenant, pour cette question, je voudrais que vous

5 nous disiez quelle était la situation en Croatie avant ce mois d'août

6 1991 ? Plus précisément, qu'en a-t-il été de ces élections pluripartites où

7 vous avez été élu et après la victoire du HDZ et après l'arrivée au pouvoir

8 du HDZ avec M. Tudjman à sa tête ?

9 R. A l'issue des élections pluripartites, l'Union démocratique croate a

10 célébré sa victoire. Mais pratiquement dans chaque village avec force

11 d'animaux à la broche, qu'était-ce, on tournait un boeuf à la brosse et,

12 par la suite, dans les heures de la soirée, on venait provoquer la

13 population serbe dans les villages serbes, on chantait des chansons

14 provocatrices, on invoquait Ante Pavelic et Ante Starcevic. Or, les

15 pouvoirs ne réagissaient pas du tout. Il y a eu plein de slogans contre les

16 Serbes, chez les marchands de journaux, aux gares, et cetera.

17 Q. A quel moment cette campagne a-t-elle été lancée et quand est-ce que

18 cette ambiance s'est-elle instaurée, ces slogans quand est-ce qu'ils ont

19 été lancés ?

20 R. Dès 1989, mais surtout pendant la première moitié de 1990, et avec

21 l'arrivée au pouvoir du HDZ c'est devenu pratique courante.

22 Q. Quels ont été les slogans qui ont dominé sur la scène publique ?

23 R. Il y en a eu un grand nombre. Le slogan le plus fréquent était : "Nous

24 allons égorger les Serbes -- pendre les Serbes aux bouleaux," "on chassera

25 les Serbes, on vous mettra dehors," et cetera.

26 Q. Dites-nous les autorités ont-elles réagi suite à ces slogans ?

27 R. Les autorités pour autant que je le sache n'ont absolument pas réagi

28 pendant toute cette période de 1990 à 1992. Elles ont considéré que c'était

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1 tout à fait normal.

2 Q. Pour vous, Serbes, pour vous aussi en tant que député au parlement

3 croate, cette attitude des autorités croates, par exemple, en 1990, en

4 1991, comment l'avez-vous interprété ?

5 R. Pour tous les Serbes de Croatie et pour nous qui étions dans les

6 instances de pouvoir, c'était un appel à rétablir la Croatie dans ce qu'on

7 appelle les frontières historiques, et c'était aussi un appel contre les

8 Serbes. On invoquait Pavelic qui était le plus grand haïsseur des Serbes de

9 l'histoire. C'est l'homme qui a dit que les Serbes n'existaient pas, et non

10 seulement les Serbes de Croatie mais il a dit aussi pour les Serbes de

11 Serbie. Il disait que c'étaient des Tsiganes des bâtards, des vauriens

12 balkaniques. Il estimait que les Serbes en tant qu'entité politique

13 n'existaient pas. On connaît bien sa phrase disant que les Croates étaient

14 le seul peuple politiquement articulé de Croatie et que les Serbes n'en

15 faisaient qu'une partie, qu'en fait, les Serbes n'étaient que des Croates.

16 Pour résumé, c'était très mal pour les Serbes et les Serbes se sont trouvés

17 très préoccupés.

18 Q. Fort bien. Je vous invite maintenant à examiner l'intercalaire 2, l'on

19 y voit la citation d'un intellectuel croate très connu, Joza Horvat. Que

20 lit-on dans cette citation ? Elle est-elle aussi très brève. On peut la

21 placer sur le rétroprojecteur.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] De quelle page s'agit-il, Monsieur

23 Milosevic ?

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est la page 97, on la voit à présent sur le

25 rétroprojecteur.

26 M. MILOSEVIC : [interprétation]

27 Q. Que lit-on ici, Monsieur Atlagic ? Voici l'introduction. Voici ce qu'a

28 dit de ces activités l'intellectuel croate connu Joza Horvat. Pouvez-vous

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1 lire ses propos ?

2 R. "Il ne s'agit pas de peu d'inquiétude et de questions qu'ont apporté

3 les Unités très agressives des membres du HDZ. Après la victoire aux

4 élections, ils ont mis en péril tous les acquis de notre lutte populaire de

5 libération. S'il n'y avait pas eu de mouvement de libération, s'il n'y

6 avait pas eu de Tito et des résistants, la République de Croatie

7 d'aujourd'hui, pas plus que le HDZ n'existerait nullement. Je demande à M.

8 Tudjman de nous expliquer ceci, non pas en tant que général mais en tant

9 qu'historien."

10 Q. Donc, c'est un intellectuel croate. Vous avez évoqué les noms de

11 Pavelic et de Starcevic, est-ce que les Serbes pouvaient avoir des doutes

12 quant à ce qui allait advenir de ce que l'en réservait l'avenir compte tenu

13 de cette situation ? Est-ce qu'ils pouvaient se poser la question ?

14 M. NICE : [interprétation] Je n'ai pas objecté jusqu'à présent, mais nous

15 ne savons pas très bien de qui il s'agit, qui est l'auteur de ce livre, et

16 nous ne savons pas du tout si nous pouvons accepter des citations de ce

17 livre.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, c'est directeur,

19 la manière dont vous interrogez. Il va falloir reformuler.

20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien.

21 M. MILOSEVIC : [interprétation]

22 Q. Vous avez dit qu'on entendait des slogans, qu'on a évoqué Pavelic et

23 Starcevic. Est-ce que vous l'avez dit ?

24 R. Oui.

25 Q. Maintenant, puisque nous parlons d'idées maintenant et de slogans, la

26 question que je vous pose est la suivante : ces idées ont-elles été mises

27 en œuvre traduites dans les faits pratiquement en 1990, 1991, ce sont les

28 années dont nous parlons ?

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1 R. Mais bien sûr que si. Dans les années 1990, ils ont été traduits dans

2 les faits, voici comment : le président de la république, M. Tudjman,

3 pratiquement à chaque fois qu'il faisait un discours en public disait

4 qu'Ante Starcevic était le père de la patrie, et il n'exprimait aucune

5 réserve au sujet des idées de celui-ci, eu égard aux Serbes. Par

6 conséquent, les Serbes ne pouvaient pas être sereins en entendant ce genre

7 de déclaration.

8 Q. Très bien. Mais dans cette citation vous avez lu aussi quelques

9 éléments qui concernent l'antifascisme, je ne voudrais pas vous poser de

10 questions directrices là-dessus. Donc, dites-nous ces nouvelles autorités

11 du HDZ, qu'est-ce qui les caractérisaient à l'égard de l'antifascisme ?

12 R. Bien, le nouveau pouvoir HDZ ce qui la caractérisait au sujet de

13 l'antifascisme c'est qu'il a nié les combattants, les membres du mouvement

14 antifascisme.

15 Q. Nommez quelques exemples s'il vous plaît ?

16 R. Je peux, oui. La place de l'antifascisme de Zagreb a été rebaptisée

17 Place Mile Budak.

18 Q. Qui est Mile Budak ?

19 R. Mile Budak a été l'un des dirigeants de l'Etat indépendant croate. Il

20 était l'auteur de la fameuse solution de la question serbe de 1941 à 1945.

21 Il a dit qu'un tiers des Serbes devait être chassé, un tiers tué, et un

22 tiers converti au catholicisme.

23 Q. Très bien. A quel moment a-t-on rebaptisé la place de l'antifascisme

24 pour la nommer Place de Mile Budak ?

25 R. Que cela s'est passé avant 1993 à peu près.

26 Q. Est-ce que vous pouvez nous citer d'autres exemples. Vous nous parlez

27 du Mouvement Oustachi. Est-ce qu'il y a eu un parti qui a été créé

28 ouvertement en s'inspirant d'Oustachisme [phon] ?

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1 R. Oui. Nous avons plusieurs exemples de ce genre. Je pense que c'était

2 vers le mois de mars 1991 qu'un parti oustachi a été créé à l'hôtel Marijan

3 de Split. Les nouvelles autorités ont rejeté -- ont renié tous les acquis

4 des résistants antifascistes de la Seconde guerre. Tout simplement parce

5 que ces gens-là n'acceptaient pas qu'on rejette la mémoire du Mouvement

6 antifasciste.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le moment est venu de faire une

8 pause de 20 minutes.

9 --- L'audience est suspendue à 12 heures 17.

10 --- L'audience est reprise à 12 heures 46.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous en prie, veuillez

12 poursuivre, Monsieur Milosevic.

13 M. MILOSEVIC : [interprétation]

14 Q. Monsieur Atlagic, vous avez parlé de cette ambiance qui régnait à

15 l'époque. Les Serbes, comment percevaient-ils cette situation, et vous-même

16 également ?

17 R. C'était une grande peur qui régnait. Les Serbes ainsi que moi en tant

18 que député parce qu'on voyait ce qui était en train de nous arrivait. On

19 rappelait les fantômes du passé Ante Starcevic qui a dit au sujet des

20 Serbes qu'il n'existait pas, que ce peuple est mature pour être passé à la

21 hache. Donc, il y avait une grande inquiétude dans la population serbe.

22 Q. Officiellement les dirigeants croates, quelle a été leur attitude ?

23 R. C'était le Dr Franjo Tudjman qui était à la tête de la Croatie. C'était

24 lui l'auteur de la politique menée par la direction croate. Lui, il

25 estimait qu'il fallait briser, démanteler la République Socialiste

26 Fédérative de Yougoslavie, et qu'il fallait créer un Etat, une république

27 indépendante de Croatie, mais qu'il s'inscrirait dans la suite de l'Etat

28 indépendant croate fasciste qui existé pendant la seconde guerre mondiale.

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1 En fait il s'agit d'un projet né entre les deux guerres mondiales. En 1941,

2 c'est sous contrôle étranger que l'Etat indépendant croate fasciste a été

3 créé. Maintenant, on voyait Tudjman évoquer ceci parce qu'il appelait

4 Starcevic, le père de la patrie, et il a aussi prononcé le nom de Pavelic

5 lors de ces prises de parole publiques.

6 Q. Nous avons ici dans les documents un discours que vous avez mentionné.

7 Mais est-ce qu'il y avait quelque chose de comparable au début des années

8 90 -- 1989, 1990, 1992 -- donc, nous avons vu cela à l'intercalaire 3 ?

9 R. Mais cela a commencé avant cela. En 1989, le président Tudjman, lors

10 d'une conférence du corps diplomatique en Allemagne a déjà évoqué la

11 solution de la question du peuple serbe de Krajina. Il a dit que, très

12 rapidement, il a allait résoudre la question de la Krajina en disant que le

13 sol de Krajina allait être rouge de sang. Nous avons aussi d'autres

14 déclarations qu'il a faites. En 1992, à place Jelacic, il a dit : "Qui a

15 lancé la guerre ? Pourquoi a-t-on fait la guerre ? Pourquoi ceux qui

16 auraient pu l'éviter ne l'ont pas fait ?" Tout cela il l'a dit.

17 Q. A l'intercalaire 4, un instant. Nous avons ici un article qui est

18 intitulé "Les nationalistes mijotent dans leur propre jus."

19 Q. Page 3 de cette série de documents, nous avons la déclaration de

20 Tudjman de 1989; est-ce bien ce que vous venez de mentionner à l'instant ?

21 R. Oui. C'est cela. Je vais essayer de citer ceci, l'annonce de Tudjman de

22 1989 : "'L'expérience n'est pas aussi fraîche que celle de Warren. Pour

23 l'essentiel, ceci vient de mes années de service en Bulgarie,' a souligné

24 Fischer. 'Cependant, les deux situations que j'ai vécues personnellement

25 ont été un avertissement drastique montrant que la situation dans l'ex-

26 Yougoslavie est bien plus compliquée que ce que je pensais. Je me rappelle

27 la Conférence du corps diplomatique en Allemagne, en 1989, à laquelle a

28 assisté le futur président croate, Franjo Tudjman. A cette occasion, il a

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1 souligné que lorsqu'il sera devenu le président de la Croatie et non s'il

2 allait devenir cela, que le sol de la Krajina allait être rouge de sang

3 serbe. A ce moment-là, j'ai compris qu'il y avait là une haine politique

4 qui devait nécessairement s'exprimer un jour.

5 "'Un deuxième cas concerne la réunion du haut représentant du comité

6 américain chargé de la Sécurité des Affaires étrangères et de la délégation

7 de la Communauté européenne, en octobre 1991, à la Maison blanche. Je me

8 souviens qu'à ce moment-là, je me suis adressé à un homme politique

9 américain, lui demandant quelle était l'attitude des Etats-Unis pour ce qui

10 est de la crise yougoslave ? Il m'a dit, je cite : 'Laisse les idiots

11 mijoter leur jus.' Je ne savais s'il fallait que j'estime qu'il s'agissait-

12 là d'une plaisanterie ou qu'il s'agissait d'une attitude qui révélait le

13 caractère insuffisamment élaboré de la politique étrangère américaine'."

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais vous étiez en train de citer les

15 propos de qui ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] De David Zimmerman -- de David Fischer.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Qui parle ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Lors de la promotion du livre de Zimmerman.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais qui est David Fischer ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est un homme politique, un diplomate

21 allemand qui a été membre de la Mission diplomatique allemande, en

22 Bulgarie, me semble-t-il ?

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'était un fonctionnaire de l'Etat

24 allemand, un diplomate ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

27 M. MILOSEVIC : [interprétation]

28 Q. Il cite ici donc, la déclaration faite en 1989 disant que le sol de

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1 Krajina sera rouge de sang serbe et à l'instant vous avez mentionné le

2 discours du 24 mai 1992 prononcé par Tudjman, place du banc Jelacic. Est-ce

3 que c'est le discours que l'on trouve à l'intercalaire 5 ?

4 R. Oui. C'est la première page de l'intercalaire 5. Je cite : "La guerre

5 n'aurait pas eu lieu si la Croatie ne l'avait pas souhaité. Mais nous avons

6 estimé que seule la guerre pouvait nous permettre d'accéder à

7 l'indépendance de la Croatie. C'est la raison pour laquelle nous avons

8 participé aux négociations politiques, mais en coulisse nous avons créé nos

9 unités armées. Si nous ne l'avions pas fait ainsi, nous n'aurions pas

10 atteint l'objectif. Par conséquent, la guerre, on aurait pu l'éviter

11 uniquement, si nous avions renoncé à nos objectifs, à savoir, à

12 l'indépendance de notre Etat."

13 Q. C'est le discours prononcé par Tudjman, place du banc Jelacic, en

14 1980 et en 1992."

15 R. Oui.

16 Q. Donc, il dit que la guerre aurait pu être évitée si la Croatie ne

17 l'avait pas souhaité. Il le dit publiquement.

18 R. Oui.

19 Q. Est-ce qu'il y a eu d'autres messages qui ont inquiété les Serbes, qui

20 ont créé des peurs parmi les Serbes ou qui les ont incité à s'organiser ?

21 R. Oui. Il y a eu d'autres craintes. Il n'y avait pas que des déclarations

22 mais ces déclarations prononcées par les plus hauts responsables ont eu un

23 grand impact sur la population, non seulement Serbe mais aussi antifasciste

24 croate. Donc, il y en a toute une série de ces déclarations qui ont été

25 prononcées par les dirigeants de la République de Croatie.

26 Q. Qu'a écrit Girard Baudson dans son livre, "L'Europe des fous ou comment

27 renverser la Yougoslavie -- le renversement de la Yougoslavie." Nous

28 n'allons citer qu'une petite partie.

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1 R. De quel intercalaire s'agit-il, s'il vous plaît ?

2 R. C'est l'intercalaire 6. Avez-vous trouvé la page 60 ?

3 R. Oui. Je l'ai trouvé.

4 Q. Que lit-on au dernier paragraphe ?

5 R. Je cite : "Avant cette élection à la présidence de la République en

6 1990, il a publiquement dit qu'il s'est félicité que sa femme ne soit ni

7 Serbe, ni Juive. Cet homme n'a rien de démocratique. En 1989, il a publié

8 un livre à Zagreb intitulé : "Les déserts de la réalité historique." Ce qui

9 peut être traduit comme "La fuite," ou "La voie sans issue de la vérité

10 historique."

11 Q. Vous, vous étiez un député au parlement à l'époque. Comment avez-vous

12 interprété ces déclarations qui a été, d'ailleurs, reprises par les

13 journaux lorsqu'il a dit : "Je me félicite que ma femme ne soit ni Serbe,

14 ni Juive ?"

15 R. Écoutez, on a été choqué par cette déclaration, par le numéro un, le Dr

16 Tudjman. D'ailleurs, il l'a souligné à plusieurs reprises, en 1990, à la

17 journaliste Tanja Torbarina. Il a réellement dit : "Je suis heureux que ma

18 femme ne soit ni Serbe, ni Juive." Pour nous, ce n'était qu'un délire

19 généralisé. Nous pensions que c'était l'année 1941 qui était en train de se

20 reproduire. Hélas, c'est ce qui est advenu.

21 Q. L'intercalaire 7, s'il vous plaît, pouvez-vous l'examiner ?

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Qui est l'auteur de ce document, à

23 l'intercalaire 6 ?

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est Gerard Baudson, un français. C'est lui,

25 l'auteur. Il a rédigé un livre intitulé "L'Europe des fous ou le

26 renversement de la Yougoslavie."

27 M. MILOSEVIC : [interprétation]

28 Q. Page 10 --

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, que cherchez-

2 vous à prouver en présentant ces éléments ?

3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je tente de montrer comment s'est développé ce

4 climat ? Le témoin nous parle d'une peur qui n'était pas sans fondement.

5 C'est une peur qui découlait des comportements politiques, de mouvements de

6 masse. Enfin, de tout ce qui était en train de se passer en Croatie avant

7 même les élections de 1991. Une attitude très déplorable envers la

8 population serbe, le renouveau du mouvement Oustacha, datant de la Deuxième

9 guerre mondiale, les déclarations publiques des plus grands hommes

10 politiques croates ainsi qu'en réaction, l'organisation des Serbes, leurs

11 réactions. J'essaie d'établir ici un lien de causalité. L'acte d'accusation

12 nous parle d'une entreprise criminelle en Serbie alors que les Serbes

13 réagissaient à une situation qui se développait en Croatie et tout ce

14 qu'ils ont fait, c'était en réaction et uniquement en réaction. Cela, ce

15 sont les faits que tout le monde pouvait constater facilement à l'époque.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

17 L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

18 M. MILOSEVIC : [interprétation]

19 Q. Donc, il va dans le sens de votre thèse selon laquelle les Serbes se

20 sont toujours contentés de réagir à ce qui se passait.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Monsieur

22 Milosevic.

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur Robinson.

24 M. MILOSEVIC : [interprétation]

25 Q. Dernier paragraphe de la page 10 à l'intercalaire 7. Que peut-on y

26 lire ?

27 R. Le dernier paragraphe, je cite : "Quand il y a déjà longtemps en 1997

28 Franjo Tudjman a présenté un rapport au parlement de Croatie quand il a

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1 fait prononcer son discours, discours sur l'état de la nation, il a déclaré

2 que l'un des plus grandes, des plus grandes réussites de sa politique était

3 la disparition des Serbes de Croatie et le fait qu'ils avaient été réduit à

4 une minorité très petite, qu'il ne serait plus en mesure de jouer un rôle

5 important dans sur la scène politique croate."

6 Q. Vu tout ce qui était en train de se passer sous vos yeux, est-ce que

7 vous pouvez nous dire s'il y a d'autres personnages publiques en Croatie

8 qui ont émis de telles menaces à l'encontre des Serbes à partir du début

9 des années 1990, traduisant ainsi les intentions véritables des dirigeants

10 croates ?

11 R. Oui. Il y a des gens en Croatie qui ont également réagi contre. Un

12 peintre très renommé a déclaré que, dans les années 1990, Tudjman avait

13 réussi -- avait essayé de le persuader qu'il résoudrait le problème serbe

14 en Croatie en faisant en sorte que la moitié des Serbes fassent leur

15 bagages et s'en aillent. C'était Edo Murtic, un peintre extrêmement connu.

16 Cette théorie, c'est la théorie de Mile Budak, que j'ai déjà mentionné.

17 Q. Est-ce que vous pouvez trouver le passage concerné, page 95 ?

18 M. NICE : [interprétation] D'après ce qu'on m'a dit, nous allons entendre

19 ce témoin pendant six heures, donc il faudrait savoir où est-ce que nous

20 allons. Je vois que le témoin consulte ses notes, il ne cesse de les

21 consulter même en répondant. Tout semble bien organisé avec des titres, des

22 paragraphes, des alinéas, c'est peut-être même -- on pourrait même parler

23 d'une déclaration de témoin qu'il a sous les yeux. Je ne sais pas vraiment

24 s'il est nécessaire, s'il est utile qu'un témoin suive ainsi ses notes, si

25 ses notes ne sont pas distribuées à tout le monde. S'il suit ses notes, à

26 ce moment-là, on peut nous-mêmes les lire et voir s'il y a certains

27 domaines qu'il convient d'aborder dans le prétoire. Maintenant s'agissant

28 du document dont on vient de parler, l'intercalaire 7, je ne sais pas si le

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1 témoin a dit ou dit être présent au moment des faits, et si c'est le cas,

2 il pourrait nous le dire.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui. On remarque que nous n'avons eu

4 aucun élément direct de la part du témoin. On pourrait penser qu'un député

5 qui a rencontré M. Tudjman pourrait nous donner des informations directes

6 dans la mesure où elles sont pertinentes, ce qui n'est pas sûr.

7 M. NICE : [interprétation] Oui. Tout à fait dans votre sens, la plupart des

8 documents n'ont pas été traduits, on nous les a remis mercredi après-midi

9 pour certains d'entre eux. Il me semble que la déposition du témoin est,

10 quant à elle, tout à fait préparée. Donc je souhaiterais demander avec tout

11 le respect que je dois à la Chambre que l'on s'interroge sur la

12 recevabilité de ces livres. Nous avons entendu avec le dernier témoin des

13 passages très intéressants du contre-interrogatoire où on s'est rendu

14 compte que les passages en question ont été versés au dossier uniquement

15 aux fins d'identification parce que le témoin dit ne pas avoir de

16 connaissance directe de ce qui figure dans ces livres.

17 Donc, je me demande ce qu'il en est des livres que nous en train

18 d'examiner maintenant, peut-être le mieux serait-il que le témoin nous

19 remette ses notes et nous pouvons faire une copie et les lire pendant le

20 week-end.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Atlagic, ces notes que vous

22 avez sous les yeux, de quels types de notes s'agit-il et dans quelle mesure

23 vous en servez-vous ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Je ne me sers pas de mes notes, je ne

25 m'appuis pas sur mes notes. Ce sont juste des notes télégraphiques, je peux

26 m'en passer d'ailleurs si c'est nécessaire. Cela ne me gêne pas.

27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, le témoin a déjà répondu a

28 répondu à votre question, il a dit qu'il avait déjà pris des notes, des

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1 télégraphiques au cours des trois jours passés. Je pense qu'il est en droit

2 de le faire si vous estimez qu'il ne doit pas regarder ses notes ---

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il aurait fallu nous l'expliquer

4 auparavant. Bon, mais Monsieur Milosevic, si l'on regarde la teneur de la

5 déposition du témoin, je voudrais savoir si vous allez l'inciter à nous

6 parler d'éléments qui sont en relation directe avec ce qui figure à l'acte

7 d'accusation. Est-ce qu'il a des éléments à nous communiquer qui sont en

8 rapport direct avec l'acte d'accusation ou est-ce qu'il peut nous parler

9 d'événements auxquels il a été personnellement lié, dans lesquels il a été

10 personnellement impliqué ?

11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, Monsieur Robinson. M. Nice a mentionné

12 l'intercalaire 7. Je vais l'utiliser à titre d'exemple puisque lui-même a

13 mentionné cet intercalaire 7, le passage cité c'est un extrait du discours

14 de Tudjman sur l'état de la nation au parlement. Il dit que les Serbes ont

15 été réduits à une minorité insignifiant qu'ils ne joueront plus jamais

16 aucun rôle sur la scène politique. C'est un document public fait devant le

17 parlement. Est-ce que quiconque peu le contester ? Peut contester la

18 validité de ce document ? Il s'agit du discours prononcé par un chef d'Etat

19 devant le parlement dudit Etat. Le témoin ici présent était un homme

20 politique à l'époque, en Croatie pendant cette période critique au début

21 des années 1990 il était actif dans la vie politique sur cette scène

22 politique que nous évoquons. Quand il nous fait ces citations, il reprend

23 ce qui figure ici dans le document. Jamais il n'a donné lecture de thèse,

24 de citations pour lesquelles on ne trouve pas de documents correspondants,

25 qui ne soient pas confirmées par les documents.

26 [La Chambre de première instance se concerte]

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le témoin peut consulter ses

28 notes, les notes qu'il a préparé. Mais si vous n'avez pas besoin de les

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1 consulter, ce sera encore mieux parce que nous préférons que les témoins

2 s'expriment librement, spontanément.

3 Quant à vous, Monsieur Milosevic, il faut que vous fassiez en sorte

4 que le témoin nous parle d'événements auxquels il -- dans lesquels il a été

5 directement impliqué.

6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais bien sûr. Oui, oui. C'est la direction que

7 je vais prendre aussi, mais il faut savoir que cet homme il a eu une

8 activité politique dans la vie politique. Tous les faits de la vie

9 politique sont des faits publiques. On n'est pas en train de parler de

10 conversations secrètes avec Tudjman, on est en train de parler de

11 déclarations publiques qui ont influencé le climat politique de l'époque.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais pour l'instant nous n'avons

13 entendu -- pas entendu quoi que ce soit qui est trait à ce que le témoin

14 lui-même fait, ou vécu, rien.

15 L'ACCUSÉ : [interprétation] On va y arriver. Mais est-ce que je peux

16 continuer, Monsieur Robinson, s'il vous plaît ?

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

18 M. MILOSEVIC : [interprétation]

19 Q. Vous venez de nous parler d'Edo Murtic ce peintre. Est-ce qu'on peut le

20 voir à la page 95 de l'intercalaire 8, avant dernier paragraphe. Veuillez

21 donner lecture du dit paragraphe.

22 R. "Dans une interview accordée à Novi List, un journal de Rijeka,

23 interview datant de janvier 2000, le peintre, Edo Murtic, a insisté sur le

24 fait que Tudjman l'avait assuré à la veille des élections de 1990, que son

25 objectif c'était d'atteindre ou d'arriver à ce que les Oustacha et Pavelic

26 n'étaient pas parvenu en 1941. Il a dit que 250 000 Serbes allaient faire

27 leur bagage et partir, et que les 250 000 restant allaient soit restés,

28 soit disparaître."

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1 Q. Passons maintenant à l'intercalaire numéro 9.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, est-ce que c'est

3 encore la même chose. Est-ce que c'est pour nous montrer et illustrer

4 l'état d'esprit de M. Tudjman ? Est-ce qu'on n'a pas assez vu ?

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, ici on va parler des Bosniaques.

6 L'intercalaire 9 a trait aux Bosniaques, pas aux Serbes. Je pense qu'il est

7 utile que le témoin nous en parle. C'est tout au début.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien.

9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très, très vite.

10 M. MILOSEVIC : [interprétation]

11 Q. Il pensait -- que pensait-il ?

12 R. Au cours du 4e Congrès de l'Union démocratique croate, Tudjman a

13 déclaré, je cite : "Le nom de Bosniaques, cette désignation d'une

14 nationalité va permettre aux Musulmans de faire plus facilement un choix,

15 un choix mental en Croatie, parce que s'il y a des Bosniaques en Bosnie qui

16 sont Musulmans, il est clair qu'en Croatie il ne peut pas y avoir de

17 Bosniaques de foi croate, il ne peut y avoir que des Musulmans de religion

18 musulmane et pas de religion croate."

19 Q. A partir de votre expérience des événements de l'époque, pouvez-vous

20 nous dire quel a été l'essentiel des activités du HDZ lorsqu'il est arrivé

21 au pouvoir ?

22 R. Lorsque l'Union démocratique croate est arrivée au pouvoir, elle s'est

23 concentrée sur un programme de croatisation en se fondant sur la politique,

24 l'idéologie de fascistes Oustachi.

25 Q. Mais là c'est une réponse très générale que vous nous faites. Est-ce

26 que vous pouvez donnez des exemples de cette croatisation ?

27 R. On a rebaptisé les noms antifascistes. On a introduit une iconographie

28 fasciste. Tous les noms, tous les symboles qui étaient en rapport avec la

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1 lutte antifasciste de 1941 à 1945, tout cela a été éliminé.

2 Puis, on a voté toute une série de lois à partir des années 1990. Par

3 exemple, à partir de 1990 avec l'arrivée du HDZ, tout est devenu Croate. On

4 a insisté pour ajouter l'adjectif croate à tout : "économie croate",

5 "forêts croates", et cetera, dans toutes les lois.

6 Il a, par exemple, été interdit d'aller déposer des fleurs, des couronnes

7 sur le monument érigé en mémoire de l'ex-camp de concentration de

8 Jasenovac. Le gouvernement, la puissance publique a entamé une politique de

9 nettoyage des Serbes.

10 Q. A quel moment ?

11 R. Dès que Tudjman est arrivé au pouvoir. En juin, ou peut-être même en

12 mai 1990, on a vu débuter cette purge des Serbes, non seulement dans la

13 police, mais dans les rangs de la Défense territoriale, dans les

14 ministères, et cetera, et cetera. Donc on a assisté à une croatisation

15 générale, même dans les établissements scolaires où les Serbes n'avaient

16 plus le droit d'enseigner la langue serbo-croate parce que, dans

17 l'intervalle, on avait décidé d'introduire la langue croate.

18 Q. Est-ce qu'il y a eu des choses physiques qui se sont passées, je parle

19 du comportement qu'on avait à l'égard des maisons, des enfants serbes, des

20 terres serbes ?

21 R. Tout à fait, c'est certain. On a même changé le nom d'enfants serbes,

22 et même de personnes âgées qui étaient Serbes. Aussi par rapport à la

23 maison qui est un lieu sacré. Vers le milieu des années '90, on a vu

24 attaquer des lieux qui étaient sacrés pour les Serbes.

25 Q. Quand est-ce qu'on a commencé à bombarder ou pilonner des maisons ?

26 R. [aucune interprétation]

27 Q. Vous parlez de 1990 ou des années 90 ? Parce que les années '90, c'est

28 toute une décennie ?

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1 R. Je ne parle que de 1990.

2 Q. Pour que tout soit clair, parce que le compte rendu d'audience parle

3 des années 90 ?

4 R. Non, non. Je parle de 1990. Au moment où est arrivé au pouvoir le HDZ

5 et même avant les choses qui étaient sacrées pour les Serbes ont été

6 attaquées. A Ilok, 60 tombes de Serbes ont été profanées. On a enlevé les

7 croix, et même des tombes récemment creusées ont été détruites. On a même

8 aussi provoqué l'Eglise orthodoxe serbe à Split. Il y a eu des graffitis

9 qui disaient : "Les fils de putes serbes." Ce genre de choses.

10 En Dalmatie, le 3 juillet, un Serbe a été attaqué par un Croate. Miroslav

11 Mlinar a été poignardé à mort à Benkovac.

12 Q. C'était en 1990. Quand exactement ?

13 R. Le 18 mai 1990.

14 Q. Mais Benkovac, c'est votre circonscription, n'est-ce pas ?

15 R. Oui. C'est là que je suis né et c'était ma circonscription.

16 Q. Est-ce que vous avez une connaissance personnelle des événements ? Est-

17 ce que vous avez vu ce dénommé Mlinar ?

18 R. Oui, c'était un de mes étudiants à l'école secondaire. Quand cela s'est

19 passé, je suis allé le voir à l'hôpital. J'étais parlementaire à l'époque

20 et j'ai vu qu'il avait été poignardé. Il a été victime de trois coups de

21 couteau.

22 Q. Qu'est-ce que les autorités ont fait ?

23 R. Au fond, rien. On a soi-disant engagé des poursuites, mais cela n'a

24 rien donné.

25 Q. Vous dites qu'on a pilonné des maisons serbes --

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Alors qu'est-ce que vous avez, vous,

27 fait lorsque vous avez vu que c'était l'apathie qui régnait, que rien ne se

28 faisait ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais député et je faisais partie de

2 l'Alliance des socialistes, mais il y a d'autres parlementaires croates qui

3 n'ont pas voulu collaborer avec moi, parce que j'étais d'origine serbe.

4 Même au parlement croate, un de mes collègues m'a attaqué, a eu à mon égard

5 toutes sortes d'insinuations. C'était l'attitude qu'il avait à mon égard.

6 Dès l'arrivée au pouvoir du HDZ, c'était clair, on ne voulait plus négocier

7 avec les Serbes.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais ce n'est pas cela que je vous

9 demandais. Vous parlez d'un jeune serbe qui avait été poignardé dans votre

10 circonscription où je suppose que vous aviez derrière vous la majorité des

11 électeurs. Alors qu'avez-vous fait ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Il a été poignardé, mais il n'en est pas mort

13 de ses blessures. Il a survécu. J'ai fait de mon mieux. A l'assemblée

14 croate, j'ai essayé de soulever cette question, de poser la question au

15 président de l'assemblée et aussi j'ai posé la question au chef du Conseil

16 exécutif. C'était mon devoir en tant que parlementaire.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais est-ce que vous n'aviez pas dit

18 que cette personne avait été poignardée à mort. Vous avez donné le nom de

19 Miroslav Mlinar. Vous avez dit qu'il avait été poignardé à mort.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'a pas été poignardé à mort.

21 L'INTERPRÈTE : Les interprètes s'excusent d'avoir fait une erreur.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vois. Il a fallu plusieurs

23 questions pour que vous nous disiez effectivement ce que vous avez fait. Je

24 vous remercie.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux continuer ?

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, posez une question, Monsieur

27 Milosevic.

28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.

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1 M. MILOSEVIC : [interprétation]

2 Q. Monsieur Atlagic, vous avez dit qu'au début les Serbes avaient même

3 commencé à changer de noms ?

4 R. Oui. Certains ont changé leurs noms sous l'effet de la peur ils ont

5 changé de prénoms et de noms de famille. Il y a eu aussi des voies de faits

6 perpétrés sur les Serbes et sur des lieux qui étaient sacrés pour eux.

7 Q. Donnez-nous des exemples de violence à l'encontre des Serbes en plus de

8 ce que vous avez déjà dit ?

9 R. Voici de nombreuses exemples à Sibenik ou à Petrovic ou Bore Petrovic

10 l'enfant a été enlevé -- son enfant a été enlevé et s'est retrouvé à une

11 dizaine de kilomètres de Sibenik et on s'est servi d'une barre en métal

12 pour le frapper, pour lui donner des coups. On voit encore les traces de

13 ces exactions sur son corps.

14 Le 21 novembre 1990, un policier Goran Alavanja a été tué.

15 Q. C'était dans votre municipalité ?

16 R. Oui.

17 Q. Cela se passait en 1990 ?

18 R. Oui.

19 Q. Dans quelle circonstance ce policier a-t-il été tué ?

20 R. Je ne sais pas si c'était un jour avant ou jour après, mais j'étais

21 allé à une réunion de l'assemblée. Donc, j'étais à Zagreb, et j'avais des

22 soupçons, de Benkovac à Zagreb, j'ai vu beaucoup de policiers que je ne

23 connaissais pas aussi bien sur le territoire de ma municipalité que dans

24 les municipalités voisines, effectivement nous avons appris que cela

25 s'était passé.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais cela ne me dit rien. C'était un

27 Serbe. De toute façon, quelle pertinence peut-on ou quelle importance peut-

28 on accorder à un seul événement ou incident isolé ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'est pas un événement isolé. C'était une

2 tentative d'assassina en 1990. Voilà, nous avons un policier tué. Imaginez

3 l'inquiétude qui règne parmi les Serbes et aussi parmi les Croates.

4 M. NICE : [interprétation] Il est vraiment navrant de voir que ce document

5 n'est pas été communiqué auparavant, parce qu'il ne portait nécessairement

6 à controverse, et on aurait pu se mettre d'accord cela aurait permis à

7 l'accusé de faire une économie de temps.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Milosevic.

9 M. MILOSEVIC : [interprétation]

10 Q. N'allons pas plus loin, est-ce qu'on peut dire qu'il s'agit de là de

11 cas isolés, ou est-ce qu'il y a eu toute une série d'événements signifiant

12 qu'il y avait des violences à l'encontre des Serbes ?

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est une question directrice qui

14 contient déjà la réponse. Passez à autre chose.

15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien.

16 M. MILOSEVIC : [interprétation]

17 Q. Vous venez de parler de ces actes de violence, est-ce qu'ils

18 caractérisent uniquement l'année 1990 ?

19 R. Non, c'est aussi caractéristique de l'année 1991. Plus tard, il y a eu

20 une série d'attaques analogues.

21 Q. Parlons de l'année 1991, est-ce qu'à ce moment-là se passaient

22 certaines choses en Slavonie occidentale ?

23 R. C'était vrai dans toute la Croatie mais surtout en Slavonie

24 occidentale. Là, des maisons serbes étaient déjà attaquées aussi des lieux

25 et bâtiments qui étaient sacrés pour eux. Fin 1990 et en 1991, beaucoup de

26 lieux de culte ont été endommagés ou détruits. Endommagés et détruits.

27 Jusqu'en mars 1992, plus de 4 000 maisons ont été incendiées en Slavonie

28 occidentale.

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1 Q. Donc 4 000 maisons incendiées ?

2 R. Oui, ceci jusqu'en mars 1992.

3 Q. Que s'est-il passé par exemple à Zadar, en 1991 ?

4 R. Il y a eu ce qu'on a appelé l'affaire de Zadar, la Nuit de Cristal, à

5 Zadar, en 1991, 350 maisons et cafés ont été plastiqués qui appartenaient à

6 des Serbes.

7 Q. Est-ce que les Serbes avaient provoqué des tensions à ce moment-là à

8 Zadar ?

9 R. Non.

10 Q. Cela s'est passé quand ?

11 R. En mars ou en mai, me semble-t-il.

12 Q. De toute façon dans la première partie de l'année 1991 ?

13 R. Oui.

14 M. NICE : [interprétation] Est-ce qu'il ne faudrait pas savoir si c'est là

15 une expérience personnelle du témoin parce qu'il se serait trouvé à Zadar,

16 ou ceci, se sont des racontars ou des articles de presse qu'ils l'ont

17 informé ?

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] D'où tenez-vous ces informations ?

19 Quelles sont vos sources ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, j'étais un député au parlement national,

21 puis, ces autres municipalités sont à peine à 15 kilomètres de la mienne,

22 on communiquait encore entre les municipalités. J'étais à Zadar pour voir

23 ce qui se passait, mais c'était quelque chose d'une notoriété publique, ce

24 qu'on a qualifié de Nuit de Cristal.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Milosevic.

26 M. MILOSEVIC : [interprétation]

27 Q. Au pied du mont Papuk et Psunj, il y avait deux villages serbe, que

28 s'est-il passé ?

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1 R. Autour de Psunj et Papuk, il y avait environ ou plus de 100 ces

2 villages serbes. Ils ont été détruits par le feu.

3 Q. En 1991, fin 1991 ?

4 R. Oui.

5 Q. Est-ce que vous avez entendu prononcer cette expression disant : "Les

6 Serbes descendaient la rivière vers la Serbie" ?

7 R. Oui, on le disait surtout en Slovanie occidentale, en Baranja et Srem,

8 vous avez des cadavres de Serbes qui avaient été massacrés et qui avaient

9 été jetés dans la rivière et qui descendaient la rivière vers la Serbie.

10 Mais je veux dire que ce n'est pas quelque chose de neuf, parce que cela

11 s'était passé entre 1941 et 1945. On entendait les mêmes mots d'ordre. On

12 disait, "Roi Pierre, va à Belgrade."

13 M. NICE : [interprétation] Excusez-moi. Est-ce qu'il est possible de mettre

14 un peu d'ordre dans les dires du témoin ? L'accusé lui a posé une question

15 qu'on pourrait peut-être qualifier de directrice, on lui a demandé s'il

16 avait entendu prononcer cette expression. Je ne sais pas si la réponse

17 était préparée ou pas, mais il ne nous dit pas où il l'a entendu, qui a

18 prononcé ces paroles, à quoi cela revient ? Je me demande en quoi ceci nous

19 aide ?

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pourrez poser ces questions

21 dans votre contre-interrogatoire, Monsieur Nice.

22 Mais, Monsieur Milosevic, il faut vraiment que vous posiez à ce témoin des

23 questions auxquels il peut répondre d'une façon plus directe, plus

24 personnelle, parce qu'il les connaît.

25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense qu'il est en train de parler en

26 donnant des réponses directes, il vient de dire que Zadar est une

27 municipalité voisine de sa circonscription électorale et il dit qu'il s'est

28 rendu personnellement à Zadar et qu'il a parlé avec les citoyens -- ces

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1 concitoyens qui sont sa base électorale, et il ne dit pas qu'il a appris

2 cela dans les médias, il dit qu'il était député populaire qu'il devait

3 s'intéresser à l'actualité.

4 Est-ce que je peux poursuivre, Monsieur Robinson ?

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, mais nous aimerions entendre

6 des éléments qui sont plus directement liés au point repris à l'acte

7 d'accusation. Nous avons entendu suffisamment d'éléments contextuels.

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Toutes ces atrocités ont un lien direct

9 puisqu'elles provoquent une réaction des vagues de réfugiés, l'auto-

10 organisation, la défense, tout le reste. Bien sûr, qu'il y a un lien

11 direct.

12 M. MILOSEVIC : [interprétation]

13 Q. Monsieur Atlagic, nous n'allons pas parler des années 41 à 45. Que

14 s'est-il passé dans les années 1990, dites-nous ? Donc la Slavonie, vous

15 avez évoqué cette expression que vous avez entendu dire à savoir "Les

16 Serbes descendent la rivière vers Belgrade," et cetera.

17 R. Ecoutez, dans les années 90, en Slavonie, on attaque -- s'attaque à des

18 objets de culte serbe. La librairie de Branka Egic a été incendiée par

19 exemple. Donc, cela a commencé, en 1990, et cela a continué jusqu'en 1995.

20 Q. Mais que savez-vous des villages serbes incendiés, de leurs maisons

21 incendiées, des victimes serbes, des gens tués à l'époque ?

22 R. Jusqu'en 1992, je sais qu'il y a eu nombre d'effigies orthodoxes sur

23 tout le territoire de la République de Croatie qui ont été, soit endommagé,

24 soit entièrement détruit. Je peux même vous parler des "parish", celles de

25 Dalmatie ou de Zagreb ou de Karlovac, de Slavonie, et cetera. Elles sont

26 six, au total. Partout, la situation était la même. Donc, jusqu'en 1992,

27 plus de 180 objets de culte serbe aux lieux de culte serbe ont été, soit

28 endommagé, soit détruit.

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1 Q. Vous évoquez là, les églises et les monastères serbes ?

2 R. Oui. Pour l'essentiel, ce sont des églises et des monastères que je

3 parle.

4 Q. Jusqu'en 1992, il y en eu combien qui ont été détruits ?

5 R. Plus de 160 églises et monastères.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Atlagic, est-ce que c'est le

7 type de comportement qui a incité les Serbes à commettre des crimes ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Écoutez, dans les années 1990, on ne peut pas

9 parler de crimes serbes. Je ne sais pas dans quelle circonscription serbe,

10 en 1990.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non. C'est la destruction des églises

12 jusqu'en mars 1992. M. Milosevic n'arrête pas de nous dire en substance,

13 que les Serbes ont réagi. Les Serbes ont-ils commis des crimes suite à ce

14 type de comportement ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais ce ne sont pas les Serbes qui ont commis

16 des crimes. Des crimes ont été commis contre eux en Slavonie occidentale

17 jusqu'en 1991 et jusqu'en mars 1992. Plus de 200 Serbes ont perdu la vie.

18 Ils ont été anéantis et il y a eu à peu près autant de membres des unités

19 territoriales qui ont été blessés, aussi.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] En fin de compte, vous nous direz que

21 pour autant que vous le sachiez, aucun Serbe n'a commis aucun crime ou est-

22 ce que vous allez essayer de nous expliquer pourquoi les Serbes ont-ils,

23 eux aussi, commis des crimes ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y a eu des crimes commis de toute part.

25 Cela, c'est indubitable.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cela, cela nous aide beaucoup. Donc, à

27 un moment donné, on parlera des crimes qui sont allégués à l'acte

28 d'accusation, je l'espère.

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

2 M. MILOSEVIC : [interprétation]

3 Q. Vous parlez maintenant des années 1990 et 1991, pour autant que vous le

4 sachiez, les Serbes auraient-ils provoqué une situation qui aurait incité

5 les autorités à se venger ? Vous parlez de villages incendiés, de maisons

6 détruites, d'églises, de monastères détruits, les Serbes auraient-ils été à

7 l'origine de quoi que ce soit qui auraient suscité ce genre de vengeance ?

8 R. Au cours des années 1990, Monsieur Milosevic, les Serbes n'ont

9 absolument pas réagi suite à ces incidents.

10 Q. 1990, c'est cela l'année qui nous intéresse. C'est celle que vous avez

11 évoquée ?

12 R. Mais en 1990, les Serbes n'ont rien provoqué. C'était ce genre

13 d'attitude qu'on a réservé à l'égard de tout ce qui était Serbe. Mais je ne

14 connais aucun cas où les Serbes auraient été à l'origine de quelque chose

15 et je l'affirme en toute conscience.

16 Q. Un exemple, d'après certains chiffres que j'aie ou des données que

17 j'aie, vous me direz si c'est exact ou non ? Dès le mois de mars, ou plus

18 précisément, le 16 mars 1990, à l'Église orthodoxe de Zagreb, rue

19 Bogoviceva, on a inscrit un graffiti, une lettre U. Donc, c'est la mi-mars

20 1990, avant les élections --

21 M. NICE : [interprétation] Il n'appartient pas à l'accusé à témoigner en

22 l'espèce. Donc, s'il veut fournir des informations en posant sa question,

23 il faut préalablement il jette les bases.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, ceci fait un

25 moment que vous interrogez le témoin. Vous devriez être en mesure de

26 pouvoir gérer un interrogatoire. Vous devriez pouvoir le faire bien mieux

27 que vous n'êtes en train de le faire. Je vous demande de reformuler cette

28 question.

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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai posé ma question. Je vais la reformuler.

2 M. MILOSEVIC : [interprétation]

3 Q. Nous parlons du mois de mars 190. Les élections en Croatie, elles se

4 sont déroulées à quel moment ?

5 R. Elles se sont terminées au 30 mai car c'est là que la première session

6 pluripartite a eu lieu.

7 Q. Vous avez été élu, à ce moment-là. C'est quelque chose que vous

8 connaissez bien. Que s'est-il produit, en mars 1990 ?

9 R. L'Église orthodoxe principale de Zagreb, sur une plaque de la façade,

10 l'on a inscrit la lettre U. On sait ce que c'est. C'était les fascistes de

11 1941 à 1945, en Croatie. Cela, cela inquiétait les fidèles de l'Église

12 orthodoxe serbe de Zagreb. Non seulement, les croyants mais aussi les

13 prêtres.

14 Q. Mais est-ce que les Serbes l'ont provoqué ?

15 R. Mais jusqu'en 1990, il n'y a aucune provocation. Ce prêtre orthodoxe de

16 Zagreb, le jour en question, il s'est fait crevé ces pneus de sa voiture --

17 il s'est fait crever les pneus de sa voiture.

18 Q. A-t-on jamais découvert les auteurs de cet acte ?

19 R. Mais eux-mêmes, ils ont laissé une pièce d'identité à côté de la

20 voiture et il était écrit sur la pièce d'identité ou sur cette carte,

21 Torsida noire, organisation Oustachi clandestine. C'est ainsi qu'ils se

22 sont identifiés, eux-mêmes.

23 Q. Alors, quelle était la situation avant les élections pluripartites ?

24 R. Il y avait beaucoup de rassemblements dans le cadre de la campagne

25 électorale. Les dirigeants du HDZ rappelaient les fantômes du passé. Ils

26 menaçaient disant qu'ils allaient les chasser. Que tous les Serbes qui

27 allaient rester, allaient pouvoir se placer sous un seul parapluie.

28 Q. Mais d'où vous tenez cela ?

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1 R. Mais le 2 mars 1990, à Gospic, il y a eu un rassemblement électoral du

2 HDZ et c'est le président croate Stipe Mesic qui a pris la parole à ce

3 moment-là. Il pleuvait. Il y avait 15 000 personnes qui se sont rassemblées

4 et il a été dit qu'à partir du moment où l'Etat croate allait se

5 constituer, tous les Serbes allaient pouvoir se rassembler sous un

6 parapluie.

7 Q. Donc, c'était mars 1990, et c'est Stipe Mesic qui l'a dit ?

8 R. Oui.

9 Q. Pour quelle raison a-t-il cela ? Y avait-il quelque chose de fait du

10 côté serbe qui l'aurait incité à le dire ?

11 R. Voyez-vous pourquoi ? S'agissant de Stipe Mesic, il faut savoir une

12 chose. Le 5 décembre 1991, lorsque nous, les députés, nous avons été

13 remerciés de l'avoir élu à la présidence de la RSFY, il nous a dit, entre

14 autres, la chose suivante. Je vais vous dire ce qu'il nous a dit. "Je vous

15 remercie," de m'avoir élu pour que je défende les intérêts de la République

16 de Croatie au sein de la présidence de la RSFY. J'ai mené à bien ma

17 mission, la Yougoslavie n'existe plus. Mais il n'y a rien d'étonnant là-

18 dedans. Pourquoi ? Parce que dans les années 1970, Stipe Mesic a été

19 condamné à une peine de prison pour avoir voulu briser la Yougoslavie.

20 Donc, ce n'était pas quelque chose d'étonnant, venant de Stipe Mesic.

21 Mais, il y a d'autres choses à son égard qu'il faut dire. Il a dit

22 que les Serbes n'ont pas apporté la terre serbe en Croatie, en venant

23 s'installer dans cet Etat. Vous pouvez imaginer comment les Serbes ont pu

24 percevoir cela.

25 Q. Est-ce qu'il y a eu la moindre tension provoquée par les Serbes

26 jusqu'au mois de mars 1990 ou Mesic dit devant 15 000 personnes que tous

27 les Serbes allaient pouvoir se rassembler sous un seul parapluie, à partir

28 du moment où l'Etat aura été créé, l'était qu'il prônait ?

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1 R. Non. Il n'y a eu aucun incident qui aurait pu provoquer cet état de

2 chose.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic.

4 Nous allons lever l'audience et nous reprendrons le mercredi 22

5 février 2006 et nous attendons à entendre un témoignage plus directement

6 lié à l'acte d'accusation, un témoignage de la part de ce témoin.

7 L'audience est levée.

8 --- L'audience est levée à 13 heures 43 et reprendra le 22 février 2006, à

9 9 heures 00.

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