Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Mardi 10 septembre 2002.)

2 (L'audience est ouverte à 9 heures 40.)

3 (Audience publique.)

4 (Questions relatives à la procédure.)

5 M. le Président (interprétation): Bonjour à tous et à toutes. Pourrait-on

6 appeler l'affaire, je vous prie?

7 Mme Dahuron (interprétation): Bonjour. Il s'agit de l'affaire IT-97-24-T,

8 le Procureur contre Milomir Stakic.

9 M. le Président (interprétation): Merci. Je prierai les parties de se

10 présenter.

11 Mme Korner (interprétation): Bonjour. Je m'appelle Joanna Korner et, à mes

12 côtés, j'ai Ruth Karper; c'est mon assistante. Je vous remercie de m'avoir

13 accordé un temps supplémentaire ce matin.

14 M. Lukic (interprétation): Bonjour. Je m'appelle Branko Lukic. Je suis

15 accompagné de M. Danilo Cirkovic, et nous représentons les intérêts de M.

16 Stakic.

17 M. le Président (interprétation): Pour le compte rendu d'audience, je

18 souhaiterai dire immédiatement que, le Juge Fassi Fihri étant toujours

19 malade, nous allons procéder aujourd'hui en vertu de l'Article 15bis tel

20 que nous l'avions prévu. Je vais commencer par faire une référence à la

21 Conférence de mise en état d'hier, tel qu'il a été entendu par les

22 parties.

23 Nous avons préparé, hier, certains documents aux fins de versement au

24 dossier. Le Juge Vassylenko a profité de la journée d'hier pour passer en

25 revue les documents et, un peu plus tard, nous avons parlé de ces

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1 documents.

2 Nous en sommes venus à la conclusion suivante: sur la base de la journée

3 d'hier, les documents contenus sur la liste 7, donc qui figurent sur la

4 liste 7, s'agissant de tous les documents sur la liste 7, tous ces

5 documents peuvent être versés au dossier, plus particulièrement le

6 document 299 pour lequel nous n'étions pas tout à fait certains pendant la

7 Conférence de mise en état. Nous n'étions pas tout à fait certains si nous

8 allions verser ce document au dossier mais, sur l'entrefaite, le Bureau du

9 Procureur a pu nous fournir une traduction anglaise complète du document

10 en langue anglaise. Donc c'est la raison pour laquelle nous avons décidé

11 de verser ce document au dossier.

12 D'autre part, je voudrais vous rappeler que le document portant la cote

13 ERN 03048407 n'est admis que de façon provisoire au dossier portant la

14 cote S318, car la défense a demandé d'obtenir le document qui se rapproche

15 le plus de l'original, une meilleure copie de toute façon. C'est sur la

16 base de cela que nous ne l'admettons que de façon provisoire.

17 Nous confirmons donc que tous les documents contenus dans la liste 7 sont

18 versés au dossier sous les cotes qu'on a attribuées à ces documents de

19 façon provisoire, hier.

20 De plus, les documents suivants qui avaient déjà fait l'objet d'une

21 discussion préalablement sont les documents S254, S267 et S73.

22 Je voudrais rappeler aux parties qu'il y a encore certains problèmes liés

23 aux documents suivants: S242, 217, 210, S227B et S157-1. Merci. Il semble

24 que j'ai donné une mauvaise cote: il ne s'agit pas du document S318, mais

25 S308 pour corriger ce que je viens de dire donc.

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1 Nous sommes au courant des objections faites par la défense, et, sur la

2 base des discussions qui se sont déroulées hier, nous sommes arrivés à

3 cette conclusion. A ces fins, je demanderai que le compte rendu d'audience

4 d'hier fasse partie du compte rendu d'audience d'aujourd'hui suivi

5 immédiatement par la pagination du compte rendu d'audience d'aujourd'hui.

6 C'est donc de cette façon que nous allons pouvoir continuer à suivre le

7 compte rendu d'audience.

8 S'agissant du Témoin 16, auquel on a attribué le pseudonyme "AA"

9 conformément à l'Article 65ter, des documents supplémentaires qui ont été

10 fournis par le Bureau du Procureur et qui sont joints sont admis au

11 dossier conformément à l'Article 92bis, à l'exception de l'agenda;

12 l'agenda n'a pas été traduit, mais les partis se sont mis d'accord sur le

13 fait qu'il n'est pas nécessaire qu'on ait cette partie-là du témoignage du

14 témoin traduite. Donc il n'est pas important d'avoir ce document.

15 Je demanderai donc aux parties de se prononcer sur la procédure. Etes-vous

16 d'accord?

17 Mme Korner (interprétation): Oui, suivant la proposition faite par… ou

18 suivant l'accord qui a été fait avec nos compagnons de la défense, nous

19 sommes d'accord.

20 M. le Président (interprétation): Et pour ce qui est de la défense?

21 M. Lukic (interprétation): Nous sommes également tout à fait d'accord,

22 Monsieur le Président.

23 M. le Président (interprétation): Bien. Est-ce qu'il y a des changements?

24 Je me tourne vers le Bureau du Procureur?

25 Mme Korner (interprétation): Oui, en fait, je suis vraiment... Je dois

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1 dire qu'à cause des événements qui se sont déroulés dans l'affaire

2 Brdjanin-Talic, hier, j'ai oublié de demander à mon collègue ce qu'il en

3 était.

4 Je crois qu'il s'agit d'un témoin qui sera entendu en audience publique et

5 qu'il n'est pas nécessaire de lui attribuer de pseudonyme, mais nous

6 pourrions peut-être consulter mon collègue juste avant qu'on ne fasse

7 introduire le témoin, qu'on ne prononce son nom en audience publique, si

8 je ne me suis pas trompé à son sujet.

9 Je demanderai également à la défense si elle désire consulter le document

10 S308.

11 M. le Président (interprétation): Certainement. Pourrait-on le faire

12 pendant la pause?

13 Mme Korner (interprétation): Oui, tout à fait. J'aurais donc le document

14 S308 et le document S318. Il s'agit de deux documents originaux que je

15 pourrais présenter et j'aimerais dire à Me Lukic: vous allez recevoir un

16 document de ma part concernant certains détails. J'ai également dit à Me

17 Lukic que j'avais eu un problème hier: je n'avais pas eu la possibilité de

18 mettre cela par écrit, mais il n'y avait pas d'objection là-dessus.

19 D'abord, le témoin m'a dit que même s'il connaissait le Dr Stakic ou avait

20 entendu parler de lui -car il était médecin également-, il ne l'avait

21 jamais rencontré auparavant et il ne savait pas du tout qu'il avait

22 quelque chose à voir avec la politique, qu'il était mêlé à la politique.

23 Deuxièmement, il m'a relaté un incident qui s'est déroulé à Trnopolje au

24 cours duquel une femme a été abattue, et il semblait que Me Lukic était

25 déjà au courant de cela. C'est la raison pour laquelle je le dis de façon

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1 orale et je suis tout à fait navrée de ne pas avoir eu le temps de le

2 mettre par écrit.

3 M. le Président (interprétation): (Hors micro.)

4 Certainement, cela a une priorité puisqu'il s'agit de problèmes de santé

5 qu'un autre accusé a pu avoir dans une autre affaire. Il s'agit bien sûr

6 d'une question prioritaire. Je demanderai donc à l'huissier de faire

7 entrer le témoin dans le prétoire.

8 (Cabine française: L'interprète n'a pas entendu le début de la phrase du

9 Président, car le Président parlait hors micro et les propos du Président

10 ne figurent pas dans le compte rendu d'audience en langue anglaise.)

11 Simplement pour être tout à fait sûrs, commençons en audience à huis clos.

12 Nous demanderons à ce moment-là au témoin s'il désire bénéficier de

13 quelque mesure de protection que ce soit.

14 Mme Korner (interprétation): Je suis vraiment navrée, Monsieur le

15 Président, j'aurais dû demander. Je crois qu'il n'y aura pas de problème

16 et je vous remercie de cette précaution.

17 (Audience à huis clos partiel à 9 heures 50.)

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16 (Audience publique à 9 heures 52.)

17 De nouveau, je souhaiterais vous souhaiter la bienvenue, Monsieur

18 Merdzanic, et je prononce donc votre nom.

19 (Interrogatoire principal du témoin, M. Idriz Merdzanic, par Mme Korner.)

20 Mme Korner (interprétation): Docteur Merdzanic, est-ce que votre nom est

21 bien Idriz Merdzanic?

22 M. Merdzanic (interprétation): C'est exact, je m'appelle Idriz Merdzanic.

23 Question: Etes-vous né le 2 janvier 1959? Et avez-vous maintenant 43 ans?

24 Réponse: Oui, c'est exact.

25 Question: Etes-vous bosnien de nationalité ou est-ce que votre origine

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1 ethnique est bien bosnienne?

2 Réponse: Oui, je suis bosnien.

3 Question: Docteur Merdzanic, je voudrais vous demander de nous parler des

4 événements qui se sont déroulés en 1992n et ce, entre le mois d'avril et

5 le mois de septembre. Mais avant de ce faire, je voudrais vous poser

6 quelques questions quant à votre vie. Je voudrais savoir si, après avoir

7 quitté l'école, vous avez étudié à la faculté de médecine de Banja Luka?

8 Réponse: Oui.

9 Question: Est-ce que vous avez étudié entre 1978 et 1986?

10 Réponse: Oui, j'ai fait des études à Banja Luka, à la faculté de médecine

11 de Banja Luka.

12 Question: Après avoir terminé vos études, est-ce que vous avez bien fait

13 votre service militaire au sein de la JNA? Est-ce que vous avez servi dans

14 la section chargée d'hélicoptères?

15 Réponse: C'est tout à fait connu que, chez nous, tous les hommes sont

16 obligés de faire leur service militaire. C'est ainsi que, moi aussi, après

17 avoir terminé mes études universitaires, j'ai servi au sein de la JNA.

18 J'ai donc fait partie de l'unité d'hélicoptères en tant que médecin.

19 Question: Après avoir complété votre service militaire, est-ce que vous

20 avez reçu un emploi au sein de la clinique de Prijedor en tant que médecin

21 généraliste?

22 Réponse: Oui, c'est exact, dans le dispensaire de Prijedor.

23 Question: Bien, vous avez donc été interne au sein de cet hôpital après

24 avoir obtenu votre licence et vos papiers qui vous permettaient donc de

25 pratiquer votre art de médecin. Est-ce que vous avez donc commencé à

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1 travailler en tant que médecin?

2 Réponse: Oui, après un an. Non, après nos études, nous devons passer un

3 examen qui nous permet de travailler de façon indépendante. C'est ainsi

4 qu'après un an, j'ai obtenu un emploi à temps plein à l'hôpital de

5 Prijedor. Mais je n'étais pas interne, j'ai simplement travaillé pendant

6 cette première année.

7 Question: Bien, s'agissant de Kozarac, Omarska, Ljubija et les autres

8 centres, est-ce que ce centre couvrait toutes ces municipalités?

9 Réponse: Oui, ce centre couvrait toutes les municipalités de Prijedor.

10 Question: Et en 1991, est-ce que vous avez commencé à travailler au sein

11 d'une clinique qui faisait partie… à la clinique de Kozarac?

12 Réponse: J'ai d'abord commencé à travailler à Trnopolje, donc dans une

13 clinique de terrain. Ensuite, j'ai commencé à travailler dans la scierie

14 de Kozarac; c'était simplement une clinique de jour et c'était deux fois

15 par semaine.

16 Question: Est-ce que vous avez bien parlé de Trnopolje?

17 Réponse: Oui, j'ai travaillé dans une clinique de jour à Trnopolje, j'ai

18 travaillé en tant que médecin à Trnopolje. J'ai également obtenu un emploi

19 à Kozarac dans la scierie de Kozarac; j'étais le médecin attitré, chargé

20 de la santé des employés et des ouvriers.

21 Question: Très bien, merci. Maintenant, passons immédiatement au Dr

22 Milomir Stakic, aux faits qui entourent l'accusé. Est-ce que vous avez

23 personnellement fait la rencontre du Dr Stakic, avant 1992?

24 Réponse: Nous ne nous connaissons pas personnellement. Il est possible que

25 nous nous sommes peut-être rencontrés dans la rue à quelque moment donné,

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1 mais nous ne nous connaissons pas personnellement.

2 Question: Est-ce que vous avez été intéressé par la politique entre 1990

3 et 1992?

4 Réponse: Je n'ai jamais pris part à la vie politique, je n'ai pas eu le

5 temps et ce genre de chose ne m'intéresse pas du tout. Même aujourd'hui,

6 je ne suis pas du tout intéressé par la vie politique; je ne suis pas

7 impliqué dans le domaine de la vie politique non plus.

8 Question: Est-ce que vous savez, est-ce que vous avez su à un moment donné

9 que le Dr Stakic avait commencé à s'intéresser à la politique et avait

10 pris part à la vie politique?

11 Réponse: Je ne savais pas qu'il faisait partie de la vie politique, mais

12 j'avais entendu dire que le Dr Stakic avait reçu un emploi à Omarska en

13 tant que médecin.

14 Question: Je vous poserai maintenant quelques questions concernant les

15 événements qui se sont déroulés avant le mois d'avril 1992. Nous savons

16 que le village de Kozarac était un village principalement composé de

17 Musulmans. Vous-même, je crois, que vous habitiez Prijedor, n'est-ce pas?

18 Réponse: Oui, je vivais, j'habitais Prijedor.

19 Question: Et avant les élections multipartites en 1990, y avait-il des

20 problèmes ou des difficultés qui existaient entre les divers groupes

21 ethniques à Prijedor?

22 Réponse: Je n'avais pas remarqué de telles choses. Je n'ai jamais eu de

23 problèmes non plus. J'avais énormément d'amis qui étaient serbes et je

24 crois que j'avais plus d'amis serbes que d'amis appartenant à une autre

25 nationalité ou ethnicité.

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1 Question: Lorsque la guerre en Croatie a commencé vers le milieu de

2 l'année 1991, quant à vous, est-ce que cela a influé quelque peu les

3 relations ou les rapports qui existaient entre les diverses ethnies?

4 Réponse: Je crois que cela a influé. Il y a un changement qui est survenu

5 dans le sens où l'armée avait mobilisé tous les hommes en âge de porter

6 les armes pour aller faire la guerre en Croatie. C'était la JNA qui avait

7 mobilisé tous ces hommes. Les Musulmans et les Croates n'ont pas voulu se

8 présenter à cet appel ou répondre à l'appel de mobilisation, alors que

9 tous les Serbes se sont portés volontaires pour aller faire la guerre en

10 Croatie.

11 Question: Cela a-t-il fait en sorte qu'il y a eu une différence dans le

12 comportement à commencer à s'installer?

13 Réponse: Oui, même les hommes qui n'avaient pas répondu à l'appel de la

14 mobilisation, ces hommes devaient être emmenés sur le champ de bataille de

15 façon… Ils étaient contraints à y aller; donc la police militaire les

16 recherchait de sorte que les Musulmans et les Croates devaient se cacher.

17 Question: Je voudrais maintenant passer à 1992. Etes-vous, avez-vous pris

18 conscience ou avez-vous entendu parler de distributions d'armes?

19 Réponse: Comme la guerre en Croatie était en cours depuis un certain

20 temps, il était assez normal que les gens parlent de la guerre et que les

21 gens parlent des événements qui se produisaient dans toute l'ex-

22 Yougoslavie. Et c'est par le biais de ces conversations que j'ai appris

23 que la plupart des Serbes avaient reçu des armes. Certains disaient même

24 que ces armes avaient été distribuées par l'armée serbe et n'avaient été

25 données qu'à certaines familles.

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1 D'autre part, la plupart des Serbes qui se sont rendus en Croatie pour se

2 battre, une fois qu'ils rentraient chez eux, ne ramenaient pas les armes

3 aux casernes militaires, mais ramenaient les armes avec eux à la maison.

4 Question: Quand avez-vous pour la première fois pris conscience du fait

5 qu'il y avait des problèmes qui se posaient à Prijedor?

6 Réponse: De quels problèmes parlez-vous?

7 Question: Tout d'abord, des problèmes de mouvement, donc de liberté de

8 circulation.

9 Réponse: En ce qui concerne le mouvement, il y avait une unité militaire

10 qui s'était battue en Croatie. C'était une unité de combat et qui a

11 investi Prijedor en l'espace d'une nuit littéralement. Ils ont envahi tous

12 les bâtiments importants tous les bâtiments municipaux, les tribunaux, ils

13 ont installé des points de contrôle et, le lendemain matin, en me rendant

14 à mon travail, j'ai été arrêté à un point de contrôle. J'ai dû laisser ma

15 voiture; j'ai dû donc quitter ma voiture et ouvrir mon coffre et présenter

16 mes documents d'identité.

17 Question: Et est-ce que c'était en allant à votre travail?

18 Réponse: Oui, j'étais censé aller à mon travail à Trnopolje, mais je me

19 suis rendu compte que cela poserait pas mal de problème. Donc je me suis

20 rendu au centre sanitaire de Prijedor pour demander ce qui se passait,

21 pour essayer de me renseigner, pour voir s'il était possible de quitter

22 Prijedor pour aller à son travail.

23 Question: Et... excusez-moi.

24 Réponse: Non. C'est alors que j'ai remarqué qu'il y avait des militaires

25 au centre de soin. Ils ont également procédé à une vérification

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1 d'identité.

2 Question: Est-ce que vous avez pu travailler ce jour-là, à Trnopolje?

3 Réponse: Je ne pense pas que ce jour-là j'ai vraiment été à même de

4 travailler.

5 Question: Vous souvenez-vous du laps de temps qui s'est écoulé entre ce

6 moment-là et l'attaque de Kozarac?

7 Réponse: Je ne pourrais pas vous le dire avec précision.

8 Question: Donc les points de contrôle ont été installés, les bâtiments

9 publics de Prijedor avaient été occupés...

10 Réponse: Oui, effectivement à Prijedor.

11 Question: Est-ce que, dans les semaines qui ont suivi, vous avez pu

12 continuer vos activités à Trnopolje et Kozarac?

13 Réponse: Le lendemain, je me suis rendu à mon travail. On m'a arrêté et on

14 a procédé à des vérifications d'identité aux points de contrôle, mais

15 sinon il n'y a pas eu d'autres problèmes. Il y avait également un check

16 point, un point de contrôle au croisement, donc à la sortie de Kozarac, et

17 il y avait un char à cet endroit.

18 Question: Puis-je maintenant passer à l'évolution des événements? Vous

19 nous avez dit qu'il y avait un point de contrôle à la croisée des chemins

20 en dehors de Kozarac où il y avait un char. Avez-vous eu conscience

21 d'autres présences, d'autres personnels militaires ou de véhicules

22 militaires dans le voisinage de Kozarac?

23 Réponse: Personnellement, je n'en ai pas vu. Mais j'ai entendu dire

24 qu'effectivement, il y avait des véhicules et de l'artillerie qui étaient

25 arrivés à Prijedor et qui s'étaient déployés à des points stratégiquement

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1 importants.

2 Question: L'un de ces points se situait-il près de Kozarac?

3 Réponse: Je le suppose, mais je n'en suis pas sûr moi-même.

4 Question: Après l'arrivée de l'artillerie et des chars, était-il encore

5 aisé pour les gens de quitter Kozarac?

6 Réponse: Au début, oui, on pouvait encore quitter Kozarac en passant les

7 points de contrôle. Il y avait des points de contrôle non seulement à

8 Kozarac, mais également à Olovci qui se situait entre Kozarac let

9 Prijedor. Et sur L'autre route, lorsqu'on prenait la route de Trnopolje

10 pour Prijedor, il y avait également des postes de contrôle. Mais depuis

11 l'ultimatum, depuis que l'ultimatum des Serbes avait expiré, depuis ce

12 moment-là, les Musulmans n'avaient plus le droit de quitter Kozarac.

13 Question: Puis-je vous poser une question sur cet ultimatum: de quoi

14 s'agissait-il exactement?

15 Réponse: Pour autant que je sache, pour autant que je savais, la situation

16 en fait était que la constitution ethnique de Kozarac était à concurrence

17 de 98% des Musulmans, et les forces de police de Kozarac étaient

18 constituées de la même façon.

19 La police était censée accepter de porter des insignes serbes et de mettre

20 des drapeaux serbes partout dans Kozarac, mais ils ont refusé de le faire.

21 Des négociations ont eu lieu et, pour autant que je sache, c'est Stojan

22 Zupljanin qui a dirigé le côté serbe. Je ne sais plus exactement qui

23 représentait le côté musulman: je crois que Sadikovic était là, et

24 d'autres personnes de Kozarac et de Prijedor également.

25 Question: Bon, donc il y a eu des négociations. Comment ont-elles abouti à

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1 votre connaissance?

2 Réponse: Je crois que ces négociations n'ont pas connu de succès. Ce que

3 j'ai entendu, c'est que Stojan Zupljanin n'était pas venu pour négocier,

4 il a émis un ultimatum, il a fixé un délai et il a dit: si ses exigences

5 n'étaient pas respectées à l'expiration de ce délai, l'armée occuperait

6 les positions de force ou veillerait à ce que ce soit respecté de force.

7 Question: Comment avez-vous été informé de tout cela? Avez-vous été

8 informé par des personnes qui participaient aux négociations?

9 Réponse: J'en ai entendu parler par mes patients et par le personnel, les

10 personnes qui travaillaient avec moi. Il s'agissait d'un thème dont on

11 parlait beaucoup à ce moment-là.

12 Question: Avez-vous entendu à la radio ou à la télévision un ultimatum

13 quel qu'il soit fixant un délai pour la rentrée des armes, donc pour

14 rendre les armes?

15 Réponse: Non, je n'ai pas entendu cela.

16 Question: Aviez-vous, disposiez-vous d'une radio?

17 Réponse: Non, nous n'avions pas de radio à la clinique de jour, mais je ne

18 me souviens pas que quelqu'un m'ait parlé du fait qu'il avait entendu

19 quelque chose à la télévision ou à la radio, sur la radio locale.

20 Question: Les personnes qui avaient besoin de traitements dans un hôpital,

21 est-ce que ces personnes étaient autorisées à passer les points de

22 contrôle?

23 Réponse: A l'expiration de l'ultimatum, les gens n'ont plus eu le droit de

24 quitter Kozarac.

25 Question: Je voudrais maintenant, si vous le permettez, passer aux actions

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1 que vous avez entreprises avant l'attaque. Vous êtes-vous entretenu avec

2 les dirigeants musulmans de Kozarac avant que l'attaque ne se produise?

3 Réponse: Immédiatement avant l'attaque, donc à l'expiration de

4 l'ultimatum, j'ai entendu dire par des personnes avec qui je me suis

5 entretenus à Kozarac, que c'est Cirkin, qui était un officier militaire en

6 service, qui était en train d'essayer d'organiser la défense de Kozarac.

7 J'ai entendu dire que certaines personnes s'étaient armées, avaient des

8 armes. Un des travailleurs de la scierie, je ne me souviens plus de son

9 nom, m'a amené pour rencontrer Sead Cirkin; je lui avais d'ailleurs

10 demandé de me le faire rencontrer. Je souhaitais parler à Sead pour voir

11 quel pourrait être le rôle de la clinique de jour au cas où il y aurait

12 une attaque.

13 Ils étaient stationnés à la limite de Kozarac, donc pas dans la ville de

14 Kozarac même, et sa réponse n'a pas été très spécifique. Il m'a simplement

15 donné des directives générales. Il m'a dit d'attendre de voir, de

16 continuer à travailler à la clinique de jour et de continuer à faire mon

17 travail, et que lui et ces gens continueraient à faire leur travail. Notre

18 contact n'a pas été extrêmement compréhensif, chaleureux.

19 Question: Est-ce que cela signifie donc, en ce qui vous concerne, vous

20 deviez continuer à faire votre travail à la clinique de jour? Est-ce que

21 vous avez obtenu des fournitures supplémentaires?

22 Réponse: Non, nous n'avons pas reçu de fournitures supplémentaires.

23 Kozarac était isolé du monde et il n'y avait personne à qui s'adresser

24 pour obtenir ces fournitures supplémentaires. La seule chose dont nous

25 disposions, c'était d'une pharmacie à Kozarac même. Donc nous avons, nous

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1 nous sommes approvisionnés à la pharmacie et nous avons transporté tout le

2 matériel de la pharmacie à la clinique de jour.

3 Question: Prévoyez-vous qu'il y aurait une attaque de Kozarac?

4 Réponse: Au départ, nous ne pensions pas qu'il y aurait une attaque mais,

5 par la suite, on voyait à partir du premier étage de la clinique de jour,

6 on voyait dans la direction de Prijedor et de Hambarine et dans la

7 direction de Ljubija, on voyait clairement qu'il y avait des explosions la

8 nuit, on voyait qu'il y avait des maisons en feu. Et puis, on a entendu

9 des histoires racontées par des personnes que Carakovo et Hambarine

10 avaient été pilonnées par l'artillerie pendant deux ou où trois jours et

11 que tout avait brûlé. Peut-être que certains ont pu établir des contacts

12 avec d'autres par radio, mais les lignes téléphone étaient en panne,

13 étaient coupées.

14 Question: Je voudrais maintenant en arriver à l'attaque à proprement

15 parler. Vous souvenez-vous de la date à laquelle l'attaque a commencé?

16 Réponse: L'attaque a commencé le 24 mai. Je pense que c'était vers midi.

17 Question: Quand cela a commencé, est-ce que vous étiez à la clinique?

18 M. Merdzanic (interprétation): Oui, j'étais à la clinique.

19 Mme Korner (interprétation): Je voudrais que vous regardiez un certain

20 nombre de photographies de la clinique, il s'agit de nouvelles pièces qui

21 ont été soumises aux Juges et à la défense, hier. On me dit qu'elles n'ont

22 pas été remises, donc je crois que c'est les copies qui ont été faites

23 hier. Je demanderai à ce qu'elles soient remises à présent.

24 (Intervention de l'huissier.)

25 M. le Président (interprétation): Il s'agit de photographies et je

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1 demanderai que toute la série se voit attribuer une seule cote.

2 Mme Korner (interprétation): Madame Sutherland et Mme Karper demandent que

3 l'on garde comme cote le S15, pour que tout soit regroupé.

4 M. le Président (interprétation): Cela ne devrait pas poser de problème.

5 Est-ce que l'on pourrait regarder que la cote disponible soit accordée au

6 S15?

7 Mme Korner (interprétation): Monsieur le Président, il y a quatre

8 photographies qui portent respectivement les chiffres 0039-34456 et 8,

9 0039319456 et 8.

10 M. le Président (interprétation): Oui. On aura ensuite, donc, les

11 photographies qui sont les "S"… Donc la photographie qui commence par 94

12 sera S15-37; 95 sera "-38"; 96 sera "-39"; et 97 sera "-40".

13 Y a-t-il des objections?

14 M. Lukic (interprétation): Pas d'objection.

15 Mme Korner (interprétation): Merci beaucoup.

16 La date de prise de ces photographies est le 20 février 1996. Je voudrais

17 que l'on présente ces photographies au témoin. Est-ce qu'on pourrait tout

18 d'abord prendre la photographie qui est marquée 3198, c'est la dernière?

19 M. le Président (interprétation): Donc c'est "-40".

20 Mme Korner (interprétation): Vous verrez cette photographie qui apparaîtra

21 sur le rétroprojecteur. Je me demande si l'on peut tirer cela un peu plus

22 au clair sur l'écran? Est-ce qu'on pourrait agrandir ou bien mettre un

23 petit peu au point cette photographie?

24 Est-ce que vous reconnaissez cela comme étant une photographie de la

25 clinique de Kozarac?

Page 7727

1 M. Merdzanic (interprétation): Oui, il s'agit de la clinique de Kozarac,

2 c'est l'entrée à gauche. Il y avait à gauche une grille, et à droite on

3 peut voir l'entrée de la clinique de jour. C'est donc le côté sud du

4 bâtiment.

5 Question: Nous allons vous donner un pointeur. Pourriez-vous indiquer sur

6 les photographies papier que l'on met à votre disposition à droite, est-ce

7 que vous pourriez à nouveau indiquer où figure l'entrée de la clinique?

8 (Le témoin indique sur la photographie.)

9 Réponse: L'entrée elle-même de la clinique était ici. Il y a quelques

10 marches et ensuite, à droite, il y avait une grille; il y avait une petite

11 cour et un parking.

12 Question: En 1992, à l'époque, y avait-il des marques pour indiquer qu'il

13 s'agissait d'une clinique? Y avait-il des signes?

14 Réponse: Il n'y avait pas de signes extérieurs extrêmement clairs, mais,

15 sur le toit, je pense qu'il y avait peut-être une croix rouge ou blanche;

16 je n'en suis pas sûr.

17 Question: Et à Kozarac même, où était située la scierie? Donc en situant

18 cela par rapport à la route principale, à quelle distance de cette route

19 principale était située la scierie?

20 Réponse: La scierie était très proche de la route principale, au

21 carrefour. En fait, près de l'entrée de Kozarac, à partir du carrefour, la

22 scierie était le premier bâtiment à ma gauche.

23 Question: Pour être tout à fait sûr, est-ce qu'on pourrait vous présenter

24 le plan qui est la pièce S146?

25 (Intervention de l'huissier.)

Page 7728

1 Question: Nous allons vous présenter ce plan sur l'Elmo et je vous

2 demanderai d'utiliser votre pointeur pour nous indiquer à nouveau où?

3 (Le témoin indique à l'aide d'un pointeur.)

4 Réponse: Au carrefour ici, ça, c'est l'endroit où se trouvait la scierie.

5 Question: Merci. Pouvons nous regarder les autres photographies? Si nous

6 prenons maintenant le 3194 qui est le S15-37, s'agit-il d'un

7 agrandissement d'une vue en rapproché de l'entrée de la clinique?

8 Réponse: En effet, c'est l'entrée de la clinique et, à gauche de

9 l'escalier, vous pouvez voir l'entrée de la cave en contre-bas. C'est là

10 que nous avons dû nous abriter quand le bombardement a commencé.

11 Question: Nous pouvons voir qu'il y a eu des dommages qui... Alors ces

12 photographies ont été prises quatre ans plus tard. Est-ce que ces

13 bâtiments étaient dans cet état quand vous avez quitté Kozarac après le

14 bombardement?

15 Réponse: Il est probable que les choses ont un peu évolué avec le temps,

16 mais les fenêtres avaient sauté et les murs avaient été fortement

17 endommagés. Devant l'entrée, c'était là que les obus tombaient en

18 majorité, mais la plupart des obus venaient du nord, du mont Kozara, et de

19 gauche. Les obus venaient de la gauche de Prijedor.

20 Question: Si l'on regarde...

21 Réponse: L'image que l'on voyait tout à l'heure, on pouvait voir que

22 toutes les fenêtres étaient brisées.

23 Question: Nous allons voir une autre photographie qui est le 3195: c'est

24 le S15-38.

25 Réponse: Ici, on peut voir les murs qui sont criblés d'impact de balles et

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1 de shrapnells.

2 Question: Docteur, est-ce que vous pourriez nous montrer cela sur la

3 photographie elle-même?

4 (Le docteur indique.)

5 Réponse: Oui, voilà. Ici. Toutes ces marques sont des impacts de

6 shrapnells. Il n'y a une fenêtre qui soit entière. Regardez le toit. Vous

7 pouvez constater que le toit également a été endommagé par l'incendie.

8 C'est peut-être un peu difficile à voir, mais même ici dans le jardin,

9 dans la cour, on voit qu'il y a des cratères qui ont été causés par la

10 chute d'obus.

11 Question: Ce que l'on voit écrit sur les murs, donc les panneaux ronds,

12 est-ce que c'étaient des panneaux qui figuraient déjà à la clinique avant

13 l'attaque, avant le bombardement?

14 Réponse: (Hors micro).

15 Question: Veuillez répéter votre réponse.

16 Réponse: Non, ceci s'est produit pendant le bombardement et, avant le

17 bombardement, le bâtiment était en bon état.

18 Question: Oui, mais on voit une sorte de cercle où avec une sorte de croix

19 dessus. Est-ce que ces panneaux figuraient déjà sur le bâtiment avant le

20 bombardement?

21 Réponse: Non.

22 Je ne me souviens pas avoir vu ces panneaux avant le bombardement.

23 Question: Est-ce qu'il y a un sens à donner à ces panneaux et à ces

24 signaux?

25 Réponse: Non, je ne saurais pas.

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1 Question: Enfin, si nous regardons le 3196 qui porte la cote S15-39... Je

2 pense que nous verrons de façon encore plus évidente les dommages auxquels

3 vous vous êtes référés.

4 Réponse: Oui, c'est effectivement correct. Mais il faut encore signaler

5 que les dommages du côté nord étaient encore beaucoup plus importants que

6 du côté sud.

7 Question: Et nous voyons ici le côté sud du bâtiment?

8 Réponse: Oui, effectivement, ça, c'est le côté sud du bâtiment.

9 Question: Je vous remercie, Docteur.

10 Réponse: Vous nous avez dit, avant qu'on ne regarde les photographies, que

11 l'attaque, le bombardement a commencé vers midi, le 24 mai. A l'époque,

12 vous vous trouviez à la clinique. Y avait-il d'autres membres du personnel

13 médical qui s'y trouvaient à ce moment-là?

14 Réponse: Vous avez parfaitement raison, je n'étais pas seul à la clinique,

15 il y avait d'autres membres du personnel médical qui se trouvaient là avec

16 nous.

17 Question: Pourriez-vous nommer les personnes qui s'y trouvaient, s'il vous

18 plaît?

19 Réponse: Mensur Kusuran –également médecin- se trouvait là aussi. Azra

20 était là, elle était vétérinaire, ainsi que son époux...

21 Question: Pourriez-vous nous dire quel était le nom de famille d'Azra?

22 Réponse: Blazevic.

23 Question: Oui, donc c'était elle qui était vétérinaire et son mari. Y

24 avait-il d'autres personnes?

25 Réponse: Oui, elle était vétérinaire et elle travaillait aussi à Kozarac

Page 7731

1 en tant que vétérinaire. Il y avait une sage-femme que nous appelions tous

2 "Babica", c'est-à-dire "sage-femme", parce que c'était son travail mais

3 qui, en fait, travaillait comme infirmière à Kozarac. Son mari était là

4 aussi, son nom était Mujo; il faisait partie du personnel paramédical.

5 Puis, il y avait Vasif Gutic qui était étudiant en médecine. Une dame du

6 nom de Goga qui habitait le voisinage. C'était une Serbe, elle était venue

7 à la clinique pour nous aider.

8 Puis, il y avait une jeune femme du nom de Lejla. Un couple dont le nom de

9 famille était Husidic, le prénom de la dame était Albina et son nom à lui

10 était Senad. Il y avait aussi le docteur Pasic qui était venu à la

11 clinique après le commencement du bombardement. Sa maison se trouvait

12 juste à côté de la clinique.

13 Question: Comment avez-vous été conscient, vous êtes-vous rendu compte que

14 l'attaque commençait?

15 Réponse: Eh bien, c'est au moment où les obus ont commencé à tomber.

16 Question: Vous êtes-vous rendu compte du fait que le bombardement allait

17 commencer ce jour-là? Autrement dit, y avait-il eu des signes avant-

18 coureurs, pour autant que cela vous concernait, que la ville allait être

19 bombardée ce jour-là?

20 Réponse: Non, en tous les cas je n'étais pas au courant, je n'en étais pas

21 conscient. A la clinique, nous ne savions rien de cela.

22 Question: Bien. Alors, le bombardement a commencé. Avez-vous été en mesure

23 de dire, à cause du service militaire que vous aviez effectué, d'où

24 provenaient les obus? En d'autres termes, s'agissait-il de tirs

25 d'artillerie, de tirs de char?

Page 7732

1 Réponse: Nous étions plusieurs à la clinique et, bien sûr, nous avons

2 discuté de la question. Nous en avons parlé. Nous avons essayé de nous

3 rendre compte et de voir quelle serait la salle qui conviendrait le mieux

4 pour nous et les blessés, où nous pourrions soigner les blessés, les

5 installer.

6 Nous avons parlé, en fait, de la disposition des locaux de l'hôpital pour

7 savoir quel était le côté le plus en danger, le plus exposé. Nous en avons

8 conclu que le côté le plus exposé était celui qui faisait face à la

9 montagne de Kozara, et que la majorité des obus provenaient de ce côté-là;

10 c'est la raison pour laquelle nous avons décidé de descendre à la cave qui

11 était située du côté sud de la clinique.

12 Question: Combien de temps est-ce que ce bombardement a duré?

13 Réponse: Le bombardement a duré environ deux jours avec de brèves

14 interruptions, de brèves accalmies. Et le lendemain, vers midi, il y a eu

15 une accalmie du bombardement, mais, dans l'ensemble, cela a duré à peu

16 près deux jours.

17 Question: Y avait-t-il de ce que l'on pourrait considérer comme des

18 objectifs militaires près de votre clinique? En d'autres termes, par

19 exemple des postes de mitrailleuses ou des pièces d'artillerie qui

20 auraient riposté?

21 Réponse: Non, pas du tout. Il n'y avait rien de ce genre dans le voisinage

22 de Kozarac, et je ne crois pas qu'il y ait eu quoi que ce soit qui

23 présentait un intérêt d'ordre militaire. Il n'y avait que des civils à

24 Kozarac, sauf pour le groupe d'hommes de Cirkin qui se trouvait à

25 l'extérieur de Kozarac en fait. Mais je n'ai rien remarqué en ce qui

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1 concerne le côté musulman, ni de point de contrôle ni d'armes.

2 Question: Est-ce qu'on a donné à quiconque la possibilité de quitter

3 Kozarac avant que le bombardement commence? En d'autres termes, est-ce que

4 des femmes ou des enfants, des personnes âgées se sont vues offrir

5 l'occasion de partir?

6 Réponse: Non, pour autant que je sache. Au début, c'est-à-dire avant

7 l'attaque, j'avais pensé quitter Kozarac et rentrer chez moi, mais les

8 gens ont commencé à affluer, des gens qui avaient traversé le point de

9 contrôle d'Orlovci. Les Serbes qui se trouvaient aux points de contrôle

10 étaient là, c'étaient des... Il y avait là deux femmes enceintes qui

11 étaient sur le point d'accoucher, qui avaient été envoyées à Kozarac, et

12 j'ai mis au monde leurs bébés.

13 Question: Est-ce que ceci était normal? Est-ce que votre clinique

14 normalement se serait occupée d'accoucher des femmes ou de mettre au monde

15 des bébés?

16 Réponse: Non, nous ne mettions jamais de bébés au monde; il y avait une

17 maternité à Prijedor et une autre à Banja Luka.

18 Question: Pendant ce bombardement, est-ce que vous avez eu à traiter des

19 personnes qui étaient blessées à la suite de ce bombardement? Sinon du

20 bombardement ou d'autres attaques?

21 Réponse: Ceux qui avaient réussi à nous rejoindre malgré le bombardement

22 ont été aidés dans la mesure de nos moyens.

23 Question: Ceux qui vous ont rejoint, étaient-ils blessés du fait du

24 bombardement ou avaient-ils été blessés à un autre moment par d'autres

25 armes?

Page 7734

1 Réponse: Il y avait un jeune homme qui est venu à la clinique, qui a dit

2 qu'il avait été blessé par du shrapnel, qu'il avait été blessé à un gros

3 orteil. Un autre homme avait une balle qui était rentrée dans la poitrine,

4 mais cette balle avait probablement été tirée de très loin, parce qu'il

5 était en assez bonne forme.

6 Question: Assez loin, quand vous dites assez loin, qu'est-ce que qui vous

7 fait dire cela?

8 Réponse: Si on ouvre le feu avec un fusil et si une personne est touchée,

9 alors la blessure est plus profonde si la balle a été tirée de plus près.

10 Dans ce cas, la balle sortira du corps de la personne touchée. Lui a été

11 blessé du côté droit de la poitrine et je crois que la balle a dû

12 s'arrêter quelque part sur un os; ça n'a pas traversé son corps, elle n'a

13 pas traversé son corps.

14 Question: L'homme, enfin le jeune homme qui avait été blessé au gros

15 orteil, qu'est-ce que vous avez pu faire pour lui? Comment avez-vous pu le

16 soigner?

17 Réponse: Eh bien, l'orteil était pratiquement arraché. Il y avait très peu

18 de tissus restants. Et nous avons dû amputer, nettoyer la blessure, la

19 panser, la soigner.

20 Question: Et que s'est-il passé pour l'homme qui avait été touché à la

21 poitrine? Est-ce qu'il a survécu?

22 Réponse: D'après ce que j'ai entendu, il a survécu. Le jour suivant, il

23 est allé avec nous à un autre endroit; il a fini, je crois, à Omarska.

24 Quant à savoir s'il a survécu à Omarska, ça, je ne le sais pas.

25 Il y avait un autre patient qui était là, un Serbe, qui avait une blessure

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1 de shrapnell à l'abdomen, à l'estomac et il a été amené à la clinique par

2 des Musulmans qui ont essayé de lui porter secours. C'était un garde

3 forestier de Kozarac et il portait l'uniforme habituel.

4 Question: Avez-vous eu à traiter ou soigner les enfants qui ont été

5 blessés à la suite de l'attaque?

6 Réponse: Certains enfants ont été blessés au cours de l'attaque, mais nous

7 les avons tous admis le jour suivant lorsque nous avons changé

8 l'emplacement de la clinique.

9 Question: Et en ce qui concerne les femmes?

10 Réponse: Nous avons aussi reçu, admis des femmes blessées, mais également

11 à l'autre endroit le jour suivant, tant que nous étions là, à la clinique.

12 Un autre civil est arrivé, il était mort; on nous l'a apporté mort.

13 Question: Vous dites que vous vous êtes rendu à un autre endroit le jour

14 suivant. Mais comment avez-vous réussi cela?

15 Réponse: Nous avons remarqué -et les gens qui avaient réussi à parvenir

16 jusqu'à nous nous l'avaient dit-, qu'il était assez difficile de rejoindre

17 la clinique. On nous a dit que la majorité de la population civile avait

18 peur et que la plus grande partie avait quitté Kozarac et était partie

19 dans les bois par panique. C'est pour cela que nous avons essayé de

20 quitter nous-mêmes ce secteur. Nous sommes allés vers le mont Kozara.

21 Question: Et où est-ce que vous avez établi votre, disons deuxième

22 clinique, deuxième emplacement de votre clinique?

23 Réponse: Le deuxième endroit était sur les bords de la ville de Kozarac,

24 aux abords, à gauche de la route principale qui était protégée par un

25 petit bois et une colline. Nous avons pris un immeuble qui était inachevé

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1 et qui était situé près d'un petit cours d'eau. Le bâtiment lui-même

2 n'avait ni portes ni fenêtres, mais il était naturellement protégé de

3 sorte que, de la direction de Prijedor et de la montagne de Kozara, on ne

4 pouvait pas recevoir d'obus; aucun obus ne pouvait toucher ce bâtiment.

5 Question: Est-ce que vous-même vous avez essayé de parler aux autorités au

6 nom ou dans l'intérêt des blessés?

7 Réponse: A l'époque, deux enfants étaient à la clinique, qui étaient en

8 train de mourir. Il nous a été pratiquement impossible de les aider -et

9 j'étais très triste-, parce que nous avions d'autres blessés. J'étais très

10 troublé. Nous étions au rez-de-chaussée, et, au premier étage, il y avait

11 un véhicule de police et plusieurs policiers. Ils étaient en contact avec

12 les militaires par radio émetteur-récepteur, et j'ai demandé si l'on

13 pouvait relayer les messages des blessés; et c'est ce qu'ils m'ont permis

14 de faire.

15 Question: Est-ce que les policiers étaient des Musulmans?

16 Réponse: Oui, pour autant que je me rappelle.

17 Question: On vous a permis, vous avez essayé de négocier le passage pour

18 les blessés. Savez-vous à qui vous avez parlé?

19 Réponse: Je ne sais pas qui a été contacté pour cela plus

20 particulièrement, mais je sais qu'on utilisait la même fréquence pour

21 cela, la même fréquence que celle qu'on avait utilisé pour négocier la

22 reddition de Kozarac et le départ de la population de Kozarac. Je crois

23 que le contact avait été établi avec le commandement militaire qui, en

24 l'occurrence, attaquait Kozarac.

25 Mme Korner (interprétation): La personne à qui vous avez parlé, que lui

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1 avez-vous dit? Que lui avez-vous dit que vous vouliez faire ou que vous

2 souhaitiez qu'il se passe?

3 M. Merdzanic (interprétation): Je me suis présenté, je lui ai dit que

4 j'avais deux enfants qui étaient là. Il y avait une petite fille qui

5 trouvait là et dont les jambes avaient toutes deux été complètement

6 écrasées; elle était mourante. Et puis, il y avait un autre enfant.

7 (Le témoin pleure.)

8 M. le Président (interprétation): L'audience est levée jusqu'à 11 heures

9 20.

10 (L'audience, suspendue à 10 heures 50, est reprise à 11 heures 27.)

11 M. le Président (interprétation): A l'évidence, nous pouvons reprendre

12 immédiatement.

13 Mme Korner (interprétation): Docteur, je me rends compte que tout ceci est

14 extrêmement pénible de rappeler ces événements, et peut-être pourrions-

15 nous simplement traiter de ceci assez rapidement.

16 Est-ce qu'on vous a donné la permission d'emmener ces enfants blessés et

17 de les faire sortir de Kozarac?

18 M. Merdzanic (interprétation): Non, on ne me l'a pas permis. Je n'ai pas

19 pu évacuer ni les enfants ni les autres blessés en l'occurrence. La

20 réponse que nous avons reçue n'était pas très précise. La seule chose

21 qu'ils nous ont dite, c'est que: "Vous tous, 'Balija' -qui est un mot

22 d'insulte à l'égard des Musulmans-, vous pouvez tous, vous les 'Balija' et

23 les Musulmans, mourir sur place. De toute façon, nous vous tuerons".

24 Voilà ce qu'a été, en fait, la conversation.

25 Question: Alors, à la fin, le 26 mai, est-ce que les termes de la

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1 reddition ont été convenus?

2 Réponse: La police qui utilisait les mêmes émetteurs radios s'est mise

3 d'accord sur les clauses de reddition de Kozarac.

4 Question: Est-ce que vous avez eu connaissance de certaines de ces clauses

5 de reddition?

6 Réponse: Non, pas de façon détaillée. Ce que j'ai su, toutefois, c'est que

7 les blessés devaient laisser la place pour être les premiers à partir avec

8 le convoi, suivis par les policiers qui, à leur tour, étaient suivis par

9 des civils. Et ils devaient emprunter le centre de la route. C'est tout ce

10 que je sais.

11 Question: Est-ce que le bombardement s'est arrêté alors, ce matin-là?

12 Réponse: Oui, c'est à ce moment-là que le bombardement s'est arrêté.

13 Question: Et qu'est-ce que vous, vous avez décidé de faire, vous et les

14 personnes qui se trouvaient dans cette clinique de fortune?

15 Réponse: Nous avons brièvement parlé de ce qu'il fallait faire et nous

16 avons décidé de retourner à la clinique principale, parce que nous sommes

17 partis de l'idée qu'un grand nombre de civils, ou bien se trouvaient chez

18 eux ou dans les bois avoisinants, n'étaient pas au courant de la

19 reddition. Et qu'en premier, la première chose qu'ils feraient serait de

20 venir à la clinique pour demander de l'aide. C'est la raison pour laquelle

21 nous avons décidé de retourner à la clinique.

22 Question: Lorsque vous êtes revenu à la clinique principale, est-ce que

23 d'autres blessés sont venus vous trouver pour être soignés?

24 Réponse: Non, même les corps que nous avions laissés en partant n'y

25 étaient plus.

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1 Question: Vous avez dit que vous étiez inquiet à l'idée que des gens

2 n'auraient pas entendu parler de la reddition et risqueraient de venir à

3 la clinique. Est-ce que vous avez connu des gens qui n'avaient pas entendu

4 parler de cette reddition?

5 Réponse: Par la suite, effectivement, lorsque nous étions au camp de

6 Trnopolje, une femme est venue me trouver. Son nom était Sahuric, c'était

7 une femme âgée. Elle était allée à la clinique pour demander des soins.

8 Elle voulait ensuite qu'on l'aide à enterrer des cadavres. Elle a parlé à

9 Vasif Gutic ainsi qu'à moi-même.

10 Elle a dit que son mari, elle-même et un certain nombre de voisins se

11 trouvaient dans la cave, que des soldats les avaient trouvés, que les

12 soldats les avaient fait sortir dans un premier temps. Puis, qu'on les

13 avait fait entrer à nouveau dans la cave, puis qu'on avait tiré sur eux et

14 lancer une grenade, et que tout le monde avait été tué dans la cave et

15 qu'elle était la seule survivante.

16 Nous l'avons envoyé voir le major Kuruzovic et je ne sais pas ce qui s'est

17 passé par la suite. Je sais que, par la suite, cette femme est partie et

18 qu'elle est allée vivre en Allemagne.

19 Question: Revenons maintenant aux événements du 26 mai, après la

20 reddition. Vous et les collègues qui vous accompagnaient êtes revenus à la

21 clinique principale. Plus tard, au cours de cette journée, y a-t-il eu des

22 soldats serbes qui se sont présentés à cet endroit?

23 Réponse: Trois soldats serbes étaient arrivés. Ils se sont présentés sur

24 les lieux. Ils sont entrés dans la clinique. Ils nous ont fait

25 prisonniers. L'un d'eux était connu car il était de Trnopolje, nous le

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1 connaissions. Donc ils nous ont constitués prisonniers. Je ne me souviens

2 pas de son nom; si j'arrive à m'en souvenir, je vous le dirai.

3 Malheureusement, je n'arrive pas à me souvenir de son nom. Il était une

4 personne assez connue, cette dame qui était vétérinaire le connaissait

5 personnellement. Alors que pour les deux autres, ils étaient tout à fait

6 inconnus, personne ne les connaissait et ils parlaient en dialecte

7 ekavien. Je crois qu'ils n'étaient pas de Bosnie, ils ne venaient pas de

8 la région.

9 Question: Quelqu'un d'entre eux portait-il un uniforme particulier?

10 Réponse: L'un d'entre eux, celui qui était connu de nous tous, portait un

11 uniforme bleu de camouflage, alors que les deux autres portaient des

12 uniformes vert olive; et l'un d'eux portait un bandeau rouge alors que les

13 autres avaient… l'un d'eux portait un béret rouge alors que les autres

14 portaient des brassards.

15 Question: Est-ce que les soldats vous ont dit ce qui allait vous arriver à

16 la clinique?

17 Réponse: Celui qui portait un béret s'est rendu à l'étage. Il défonçait

18 les portes. Il parlait très fort et il disait qu'il fallait massacrer tout

19 le monde alors que les deux autres et celui qu'on connaissait ont appelé

20 cette dame "Goga". Elle portait un tablier, et sur son tablier on pouvait

21 lire le nom "Goga" et ils savaient peut-être qu'elle était serbe et c'est

22 peut-être la raison pour laquelle ils l'ont emmenée afin de l'interroger.

23 Après cet interrogatoire, celui qui venait de Trnopolje, il est sorti à

24 l'extérieur et, après un certain laps de temps plus ou moins court, il a

25 dit qu'un camion allait arriver sur les lieux et que nous devions mettre

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1 des médicaments à bord de ce camion.

2 Question: Et finalement, est-ce que le camion est arrivé un peu plus tard?

3 Réponse: Oui, après un certain temps, nous avons aperçu un camion vert de

4 couleur militaire -c'était un camion de la JNA-, et nous avons mis à bord

5 de ce camion tout le matériel médical que nous avions dans la clinique.

6 Question: Est-ce que le camion a quitté par la suite?

7 Réponse: Oui, et les trois nous ont emmenés vers le centre de Kozarac.

8 Question: Vous est-il arrivé de voir ce camion et les médicaments de

9 nouveau? Avez-vous revu le tout?

10 Réponse: Non.

11 Question: Pourriez-vous répéter de nouveau, les interprètes n'ont pas

12 entendu votre réponse? Pourriez-vous répéter votre réponse précédente?

13 Réponse: Non, je n'ai plus revu ni le camion ni les fournitures médicales.

14 Question: Monsieur, vous pourriez sans doute vous rapprocher un peu des

15 microphones, cela pourrait certainement aider les interprètes à vous

16 entendre.

17 Bon, maintenant on vous a emmené au centre de Kozarac. Quel était le

18 niveau de destruction que vous avez pu observer?

19 Réponse: Ce que nous avons pu observer là et sur le chemin vers le centre

20 ville était la chose suivante: nous pouvions voir que les soldats

21 pénétraient dans les maisons, et ceux qui frappaient le plus, ceux que

22 nous pouvions apercevoir, que ces soldats procédaient à un pillage.

23 Ils faisaient sortir des choses des maisons. Ils volaient également des

24 voitures, et, lorsque nous sommes arrivés à Kozarac, nous avons vu le

25 char. Il y avait un plus grand nombre de soldats. Nous nous sommes

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1 immobilisés là en plein milieu de la route. Là, il y avait un arbre à cet

2 endroit, et c'est de cet endroit que nous attendions.

3 Question: Je vais vous demander de consulter le plan que vous avez fait de

4 Kozarac, mais avant de ce faire, je voudrais vous demander si vous avez…

5 si vous êtes passé à côté de la mosquée?

6 M. Merdzanic (interprétation): Non, je ne suis pas passé à côté de la

7 mosquée. Je n'ai pas vraiment porté attention.

8 Mme Korner (interprétation): Merci. Pourriez-vous maintenant consulter le

9 plan que vous avez donné aux enquêteurs, le plan de Kozarac?

10 (Intervention de l'huissier.).

11 Monsieur le Président, pourrait-on lui attribuer la cote S… Je crois que

12 c'est une bonne cote: S321.

13 M. le Président (interprétation): Oui, donnez-nous le numéro ERN.

14 Mme Korner (interprétation): Oui, 01035313. C'est la cote ERN, et c'est

15 intitulé Kozarac.

16 M. le Président (interprétation): Très bien. Il n'y a absolument aucune

17 objection? Je vois qu'il n'y a pas d'objection, eh bien, à ce moment-là,

18 nous y attribuerons une cote. Ce plan portera la cote S321.

19 Mme Korner (interprétation): Pourrait-on dire qu'il s'agit du document

20 321-1, car je voudrais demander au témoin de nous indiquer quelque chose.

21 M. le Président (interprétation): Je crois que ce document porte déjà

22 cette cote.

23 Mme Dahuron (interprétation): Monsieur le Président, il s'agira de la

24 pièce 321-1.

25 M. le Président (interprétation): Très bien. Alors commençons par le

Page 7743

1 document qui se termine avec un "-1".

2 Mme Korner (interprétation): Merci.

3 Docteur, pourriez-vous, je vous prie, consulter ce plan, ce "sketch" que

4 vous avez fait vous-même? Vous nous avez indiqué la route principale de

5 Banja Luka qui va de Prijedor à Banja Luka, vous nous avez indiqué la

6 scierie qui est située à la droite de la route qui va vers Prijedor. Il y

7 a également la pharmacie où était située cette clinique de fortune, qui se

8 trouve de l'autre côté de la route comme vous nous l'avez indiqué.

9 Maintenant, vous avez été emmené vers Kozarac, ou plutôt les soldats vous

10 ont escorté et vous ont amené au centre de Kozarac. Pourriez-vous nous

11 dire où est-ce que vous êtes arrivé?

12 M. Merdzanic (interprétation): On nous a emmenés ici, au centre.

13 Question: Vous nous avez indiqué ce qui semble être un bâtiment religieux

14 de quelque sorte à la droite de la rue de Kozarac, la rue principale de

15 Kozarac. Pourriez-vous nous dire ce que représente ce bâtiment religieux?

16 Réponse: Vous pensez sans doute à cette église serbe?

17 Question: Oui, c'est exact.

18 Réponse: Il s'agit d'une église serbe de Kozarac, de l'église serbe de

19 Kozarac.

20 Question: Où était la mosquée, simplement pour nous orienter?

21 Réponse: Je n'en ai absolument aucune idée. Je crois que c'était plus au

22 nord. Ce n'était pas ici, tout près, de toute façon.

23 Question: Très bien, merci.

24 Vous nous avez dit qu'on vous a emmené, que vous avez été escorté sur le

25 chemin. Vous avez pu également apercevoir que des soldats pillaient des

Page 7744

1 maisons. Est-ce que vous pourriez nous dire si ces maisons étaient

2 endommagées par le pilonnage?

3 Réponse: Plusieurs maisons avaient subi des dommages, mais elles n'avaient

4 pas été complètement détruites. Il y avait, dans certaines maisons, des

5 trous qui avaient été causés par des obus, des vitres avaient été cassées

6 pour certaines d'entre elles, et il y avait certaines maisons dont le toit

7 avait été soufflé. Mais, la plupart de ces maisons étaient en bon état

8 encore.

9 Question: Simplement pour le compte rendu d'audience, je voulais dire que

10 je ne vais pas demander à l'huissier de montrer de nouveau ce document.

11 Bien. Y avait-il d'autres personnes au centre de Kozarac quand vous y êtes

12 arrivé?

13 Réponse: Vous parlez de civils?

14 Question: Oui.

15 Réponse: Je n'ai pas remarqué que, à part nous, il y avait d'autres civils

16 à cet endroit.

17 Question: Fort bien. Pendant que vous étiez là, debout à côté de cet arbre

18 au centre ville, y a-t-il eu des membres, des militaires, des soldats qui

19 se sont approchés de vous?

20 Réponse: Oui, un soldat s'est approché de Nihad Bahonjic qui était le

21 chauffeur de l'ambulance de Kozarac. Je ne connais pas ce soldat. Il lui a

22 demandé de lui remettre une carte d'identité, alors l'autre lui a remis la

23 carte d'identité. Celui-ci lui a dit de le suivre, et il l'a séparé de

24 nous.

25 Question: Est-ce que vous avez demandé à savoir pourquoi il avait été

Page 7745

1 emmené?

2 Réponse: Pourquoi est-ce qu'on l'avait emmené? Eh bien, oui. Lorsque la

3 jeep est arrivée sur les lieux pour nous transporter, alors que nous

4 montions à bord de la jeep, je n'ai pas vu Nihad Bahonjic. Alors j'ai

5 demandé à l'autre, celui qui avait un grade, je lui ai demandé qu'en

6 était-il de Nihad Bahonjic et il m'a répondu qu'ils allaient se charger de

7 son sort.

8 Question: Et combien de temps après qu'il avait été séparé de votre

9 groupe, est-ce que cette jeep est arrivée, la jeep à bord de laquelle vous

10 avez été emmené?

11 Réponse: Je ne pourrais pas vous dire avec précision.

12 Question: Est-ce que c'était peu de temps après ou bien longtemps après?

13 Réponse: Cela dépend la façon d'interpréter peu de temps ou longtemps, pas

14 plus d'une demi-heure en tout cas. Ça, c'est certain.

15 Question: Très bien. Après que vous avez demandé ce qui s'était passé avec

16 M. Bahonjic, après qu'on vous a dit qu'ils s'occuperaient de lui, est-ce

17 que vous avez entendu quelque chose?

18 Réponse: A ce moment-là, il nous a fallu monter à bord de la jeep. Nous

19 sommes tous entrés dans la jeep. Nous étions assis. Nous nous sommes

20 dirigés vers le carrefour de Kozarac. Je regardais pour voir dans quelle

21 direction nous allions, je ne savais pas si on allait nous emmener vers

22 Banja Luka ou Banja Luka. C'est à ce moment-là que j'ai entendu des coups

23 de feu. J'ai entendu par la suite qu'il avait été tué, et Azra a dit

24 qu'elle l'a vu quand ils l'ont tué.

25 Question: Quel âge avait M. Bahonjic?

Page 7746

1 Réponse: A l'époque, il pouvait avoir 35/36 ans je crois. Il avait une

2 femme et deux enfants.

3 Question: Pourriez-vous de nouveau nous répéter le prénom de M. Bahonjic?

4 Réponse: C'était Nehad Bahonjic.

5 Question: Nehad? Bien merci.

6 On vous a donc transportés à bord de ce véhicule. A quel endroit vous a-t-

7 on emmené?

8 Réponse: D'abord, nous nous sommes dirigés en direction de Prijedor.

9 Ensuite, près d'un restaurant qui se trouvait du côté gauche et tout de

10 suite après ce restaurant, il y avait un chemin en terre battue. Nous

11 avons pris un virage vers la gauche et nous nous sommes arrêtés tout près

12 de la route. C'est là qu'il y avait plusieurs soldats; il y avait

13 également plusieurs officiers avec des grades un peu plus élevés.

14 Question: Est-ce que vous êtes restés à l'intérieur de la Jeep ou bien

15 est-ce qu'on vous a fait sortir?

16 Réponse: Nous sommes restés à l'intérieur de la Jeep pendant un laps de

17 temps assez court. Ensuite, nous sommes descendus de ce véhicule. Ils ont

18 ensuite fait sortir Husidic Senad, et dans ces entrefaites, un autobus est

19 venu de Prijedor. Il y avait des femmes et des enfants à bord de cet

20 autobus, et ils nous ont dit de monter à bord du bus en question.

21 L'épouse de Husidic a demandé ce qu'il en serait de Senad. Ils ont d'abord

22 dit qu'il était un Béret vert, qu'il avait participé dans la guerre et

23 qu'il avait trafiqué avec des armes, et qu'il allait rester là. Alors son

24 épouse a supplié qu'ils le laissent partir et elle leur a dit qu'il

25 n'était pas du tout lié à ce genre d'opération. Nous avons dit qu'il avait

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1 travaillé avec nous dans l'ambulance. Celui qui portait le grade le plus

2 élevé a décidé de le faire monter à bord de l'autobus, mais lorsque nous

3 sommes arrivés à Trnopolje, immédiatement le jour suivant, ils sont venus

4 le chercher et ils l'ont emmené à Omarska.

5 Question: Est-ce que vous savez ce qui lui est arrivé par la suite?

6 Réponse: Depuis Omarska… Je ne sais pas si on l'a transporté à Manjaca. Je

7 sais qu'il a survécu. Je crois qu'il se trouve maintenant en Allemagne,

8 quelque part.

9 Question: S'agissant du bus, vous a-t-il amené à Trnopolje?

10 Réponse: Oui, nous sommes arrivés à Trnopolje à bord de ce bus.

11 Question: Vous connaissiez Trnopolje, car vous aviez travaillé à cet

12 endroit. Lorsque vous y êtes arrivé, y avait-il déjà un camp établi?

13 Réponse: A ce moment-là, lorsque nous sommes arrivés, nous n'avions pas du

14 tout idée qu'il y avait un camp. Nous ne savions pas s'il y avait un camp

15 là, à cet endroit. Il y avait un grand nombre de soldats, il y avait

16 également des civils, il y avait beaucoup de femmes et d'enfants sur les

17 lieux et ce n'est que plus tard que nous avons appris qu'il s'agissait, en

18 fait, d'un camp.

19 Question: Lorsque vous êtes arrivés, où l'autobus s'est-il arrêté pour

20 faire débarquer tous les passagers?

21 M. Merdzanic (interprétation): Je peux vous le montrer quelque part. Je ne

22 sais pas si vous avez une photographie ou peut-être un croquis? Je peux

23 vous le montrer.

24 Mme Korner (interprétation): Oui, très bien. D'abord, je vous demanderai

25 de consulter le croquis que vous avez fourni aux membres du Bureau du

Page 7748

1 Procureur, aux enquêteurs. C'est le croquis qui porte la cote 01035314.

2 M. le Président (interprétation): Quel est le chiffre avec lequel se

3 termine ce document?

4 Mme Korner (interprétation): "4", effectivement. Je suis désolée, il

5 s'agit bien du document qui se termine par 314.

6 M. le Président (interprétation): Bien, ce document portera la cote 321-2.

7 Mme Korner (interprétation): Merci.

8 M. Merdzanic (interprétation): Voici. L'autobus s'est immobilisé ici,

9 c'est le chemin qui mène de Prijedor à Trnopolje. Il y avait un petit

10 sentier et nous avons pris ce sentier en descendant de l'autobus. Ici,

11 vous aviez des soldats. Les femmes étaient plutôt dirigées vers cette

12 pièce-ci, et, comme on m'a reconnu, ils ont dit: "Voilà, tu as également

13 un médecin". Alors, ils m'ont demandé d'entrer dans l'ambulance… plutôt

14 dans la clinique, et c'est ainsi que nous avons tous pénétré dans la

15 clinique.

16 (Le témoin montré sur le croquis.)

17 M. le Président (interprétation): Vous nous avez montré la clinique.

18 Pourriez-vous nous montrer de nouveau où se trouve cette clinique? Est-ce

19 que c'est la clinique qui, en BCS, se lit "ambulanta".

20 M. Merdzanic (interprétation): Oui, c'est juste ici.

21 Mme Korner (interprétation): Bien, nous pourrions peut-être consulter des

22 photographies. Monsieur le Président, nous avons déjà montré ces

23 photographies qui portent la cote S15, nous nous sommes déjà servis de ces

24 photographies dans le cadre de ce procès. En fait, ce sont les

25 photographies qui portent la cote S15-9.

Page 7749

1 (Intervention de l'huissier.)

2 Réponse: Voici ce sentier-ci. Nous pouvons sans doute l'apercevoir ici.

3 L'autobus s'est immobilisé là. Nous nous sommes arrêtés ici. Les femmes et

4 les enfants ont été dirigés vers cette grande pièce-ci, et l'on nous a

5 demandé de passer par là pour entrer dans la clinique.

6 Question: Très bien. Maintenant, c'était à pied, lorsque vous êtes

7 arrivés. Est-ce que vous aviez une idée qu'il s'agissait d'un camp? Y

8 avait-il des fils barbelés ou y avait-il une clôture?

9 Réponse: Il n'y avait pas de fils barbelés, il y avait simplement une

10 clôture qui existait déjà auparavant. Je crois que personne d'entre nous

11 n'avait pu songer à l'existence d'un camp, donc je n'avais pas porté

12 attention.

13 Question: Lorsque vous êtes arrivé sur les lieux, lorsque vous êtes sorti

14 de l'autobus, avez-vous pu reconnaître des soldats qui se trouvaient sur

15 les lieux?

16 Réponse: S'agissant de soldats, non, je n'ai pas reconnu de soldats. Je

17 crois qu'il y avait un jeune homme qui me connaissait. Il s'est approché

18 de moi. Il me connaissait depuis l'aéroport de Prijedor, son père

19 travaillait à l'aéroport. Je ne sais plus ce qu'il faisait. Je sais qu'il

20 était intéressé par les avions dans le cadre d'exercices sportifs. Je sais

21 que je connaissais Rade Baltic qui m'a reconnu et qui a dit "voilà notre

22 médecin". Il portait un uniforme.

23 Question: Mais l'homme qui s'est approché de vous, qui vous connaissait de

24 l'aéroport de Prijedor, est-ce que c'était Rade Baltic?

25 Réponse: Non, non. Rade Baltic portait des vêtements civils et il était de

Page 7750

1 Trnopolje.

2 Question: A cette étape-là, est-ce que vous saviez s'il y avait quelqu'un

3 qui était responsable? Est-ce que vous savez qui était le responsable,

4 lorsque vous êtes arrivé?

5 Réponse: Nous n'avions aucune idée de la structure de commandement, nous

6 ne savions pas du tout qui était le commandant. C'était l'après-midi, nous

7 avions été escortés vers la clinique et c'est là que nous sommes restés.

8 Question: Et en dernier lieu, s'agissant de soldats qui s'y trouvaient,

9 pourriez-vous nous dire si vous pouviez comprendre, à la vue de leur

10 uniforme, de quelle unité ils provenaient ou à quelles unités ils

11 appartenaient?

12 Réponse: Non, car c'était probablement des gens qui étaient mobilisés déjà

13 pendant la guerre en Croatie. Et comme la guerre avait éclaté à cet

14 endroit-ci, ils ont dû garder les mêmes uniformes.

15 Question: Y avait-il des gens qui portaient des uniformes de police? Est-

16 ce que vous l'aviez remarqué?

17 Réponse: Je n'avais pas remarqué d'uniformes de police, j'ai simplement

18 remarqué des uniformes militaires.

19 Question: On vous a placé dans cette clinique, on vous a demandé d'aller à

20 la clinique. Est-ce que vous y êtes resté jusqu'au lendemain?

21 Réponse: Nous sommes restés à la clinique jusqu'au lendemain, et, lorsque

22 la nuit est venue, on a entendu des coups de feu épouvantables; nous ne

23 savions pas du tout de quoi il s'agissait, nous avions très peur et nous

24 étions tous couchés, allongés par terre. Ce n'est que le lendemain que

25 nous avons su que c'était une habitude courante et que, la nuit, ils

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1 tiraient dans les airs, comme ça.

2 Question: Maintenant, à quelle étape, ou à quel moment plutôt est-ce que

3 cette zone -connue sous le nom de Trnopolje- est devenue un camp?

4 Réponse: Eh bien, peu de temps après, quelques jours après notre arrivée,

5 nous avions commencé à comprendre que nous ne pourrions probablement plus

6 sortir. Au tout début, je croyais que j'allais pouvoir sortir puisque

7 j'étais civil. Je croyais qu'ils allaient peut-être procéder à une

8 vérification et que, quelques jours plus tard, on allait me laisser partir

9 à la maison. Mais, malheureusement, nous sommes restés là pendant encore

10 assez longtemps. Et les hommes ne pouvaient plus du tout quitter le camp

11 de Trnopolje.

12 Il arrivait des fois que ces soldats se présentent avec des listes et

13 faisaient sortir certaines personnes pour les transférer à un autre camp

14 ou ailleurs. Mais peu de temps après notre arrivée, on avait commencé à

15 organiser des convois pour les femmes, enfants et personnes âgées. Des

16 convois qui faisaient en sorte que ces derniers pouvaient être

17 relocalisés. On les faisait sortir du territoire qui était occupé par les

18 Serbes.

19 Question: Bien. Maintenant, examinons… Nous allons en parler plus tard,

20 mais examinons d'abord Trnopolje. Vous nous avez montré sur la

21 photographie de Trnopolje l'endroit. Pourriez-vous nous dire si, à un

22 certain moment donné, on avait placé des fils autour, des fils barbelés?

23 Réponse: Oui, lorsqu'on a démantelé le camp de Keraterm et Omarska, on a

24 placé par la suite des fils barbelés, mais ces fils n'étaient pas placés

25 là très longtemps. Lorsque les journalistes se sont présentés, sont

Page 7752

1 arrivés, on a enlevé ces fils barbelés peu de temps après.

2 Question: Bien, après la fermeture du camp d'Omarska et de Keraterm et

3 après le transfert des prisonniers de ces camps à cet endroit, vous dites

4 qu'on a érigé, on a placé des fils barbelés. Est-ce qu'on a enlevé ces

5 fils barbelés peu de temps après l'arrivée des journalistes?

6 Réponse: Eh bien, on avait érigé les fils barbelés avant que les

7 journalistes n'arrivent, et ensuite ces fils barbelés ont été enlevés

8 après le départ des journalistes.

9 Question: Excusez-moi. Je vous ai posé une mauvaise question. Après le

10 transfert des prisonniers d'Omarska et de Keraterm, est-ce que cela est

11 arrivé avant l'arrivée des journalistes ou après?

12 Réponse: Certains sont arrivés avant l'arrivée de Penny Marshall. Et ce

13 premier groupe incluait des femmes et des personnes, donc, jeunes et des

14 personnes malades d'Omarska. Ensuite, le groupe de Keraterm est arrivé,

15 et, ensuite, il y a eu la visite des journalistes. Et puis, à peu près

16 vers minuit, un grand groupe est arrivé d'Omarska.

17 Question: Avant cela, et nous savons que c'était au mois d'août de 1992,

18 qu'est-ce qui empêchait les gens de quitter le camp de Trnopolje? Vous

19 nous avez dit que les hommes n'avaient plus le droit de partir sauf si

20 leurs noms figuraient sur une liste.

21 Réponse: Il y avait des gardes qui étaient en poste tout autour de

22 Trnopolje. Il y avait des postes de garde et, puis, il y avait ces

23 barbelés. On pouvait facilement passer au-dessus, mais à part des gardes,

24 de toute façon, les gens avaient tellement peur, ils n'auraient pas osé

25 passer même s'il n'y avait eu qu'une ligne au sol.

Page 7753

1 Question: Bon. Sur le plan que nous venons de regarder… et je voudrais

2 qu'on le reprenne, c'est le S321/2.

3 (Intervention de l'huissier.).

4 Est-ce que vous pourriez nous indiquer les endroits où se trouvaient les

5 postes de garde?

6 Réponse: Sur ce graphique, j'ai marqué par ce petit signe, donc des postes

7 de garde. Il y en avait un ici au sud et, puis, sur la route qui menait à

8 Kozarac, il y avait un autre poste de garde. Il y en avait un en face de

9 l'entrée de la clinique et il y en avait un à l'opposé de l'école, près de

10 la station-service. Et puis, un autre poste de garde, en fait à deux

11 endroits de part et d'autre de la route, sur cette route qui menait à

12 Kozarac.

13 Pour l'autre côté, il y en avait un de ce côté-là, donc à gauche, quand on

14 venait de Prijedor. Il y avait une maison et un poste de contrôle à côté

15 de cette maison avec des sacs de sable. Il y avait une petite terrasse

16 avec un tireur isolé, un sniper, et puis il y avait un autre poste de

17 contrôle près de cette maison qu'ils utilisaient également pour se

18 reposer.

19 Mme Korner (interprétation): Aux fins du compte rendu, ce que vous avez

20 indiqué à chaque fois, c'est un cercle avec des marques foncées; c'est un

21 cercle avec deux arcs, deux parties marquées.

22 M. Merdzanic (interprétation): Oui, effectivement. C'est correct. Vous

23 avez le cercle. J'aurais pu également utiliser un autre type de marquage,

24 mais chacun de ces cercles avec deux points noirs s'est des postes de

25 garde et des points de contrôle. Il y avait d'autres points de contrôle

Page 7754

1 situés en dehors du camp plus loin, mais ceux-ci étaient les points de

2 contrôle proches du camp.

3 M. le Président (interprétation): Pour le compte rendu, pourriez-vous nous

4 nous dire où vous avez identifié la présence de snipers, de tireurs?

5 M. Merdzanic (interprétation): Pour autant que je me souvienne, il y avait

6 un tireur au premier étage de cette maison située ici.

7 Mme Korner (interprétation): Vous indiquez donc la partie gauche du plan,

8 à peu près vers le milieu, en haut, à gauche. Est-ce que vous pourriez

9 nous donner lecture de ce que vous aviez inscrit sur le plan, à cet

10 endroit?

11 Réponse: Le carré indique une maison, et le cercle qui figure en dessous…

12 Question: Non, mais qu'est-ce que vous avez inscrit à droite de ce plan?

13 Réponse: C'est le terrain de football.

14 Mme Korner (interprétation): Oui, donc c'est cela, c'était donc là une

15 indication. Vous en avez indiqué un autre?

16 M. Merdzanic (interprétation): Je ne suis pas conscient de la présence

17 d'un sniper ailleurs. Il y avait une mitrailleuse à ce point de contrôle,

18 ici et là, et un encore là, mais je ne sais pas s'il y avait encore

19 d'autres snipers.

20 M. le Président (interprétation): Pour être tout à fait concret pour le

21 compte rendu, on pourrait dire que vous avez également mentionné la

22 présence d'un sniper là où vous avez inscrit "Ograda Prodavnice". Donc

23 c'est quelque part au centre, sur la route. Non, un peu plus à gauche que

24 ce que vous montrez, donc, en fait, à cet endroit-là… là et là. C'était

25 également un endroit où il y avait un sniper?

Page 7755

1 M. Merdzanic (interprétation): Je ne suis pas sûr. Je sais que nous en

2 avions remarqué un au premier étage de la maison (Note de l'interprète: le

3 premier endroit montré par le témoin). Mais, pour le deuxième endroit,

4 plus bas sur le plan, je n'en suis pas sûr.

5 M. le Président (interprétation): Merci de cette précision.

6 Mme Korner (interprétation): Pourriez-vous identifier les endroits où il y

7 avait des mitrailleuses? Je crois que vous aviez parlé du poste de garde

8 au carrefour. Est-ce que c'est bien cela? Est-ce que vous pourriez les re-

9 indiquer? Il y avait une mitrailleuse à cet endroit?

10 (Le témoin montre un endroit.)

11 M. Merdzanic (interprétation): Au carrefour, entre les deux maisons, c'est

12 à l'arrière de la maison et près de cette maison où se trouvait le sniper,

13 premier endroit montré.

14 Question: Et les mitrailleuses, est-ce qu'elles étaient pointées sur le

15 camp ou vers l'extérieur du camp?

16 Réponse: Vers le camp.

17 Question: Je vous remercie. Je pense qu'effectivement nous avons ainsi

18 l'information du diagramme, du plan.

19 (Intervention de l'huissier.)

20 Faisiez-vous partie du premier convoi de bus, de personnes transportées

21 par bus à Trnopolje?

22 Réponse: Non, nous n'étions pas le premier groupe. Quand nous sommes

23 arrivés, nous avions déjà trouvé un grand groupe de personnes,

24 essentiellement des femmes et des enfants, et nous avons appris que ces

25 personnes y étaient déjà depuis deux jours; c'est-à-dire depuis le début

Page 7756

1 de l'attaque de Kozarac. Ces personnes ont probablement été ramassées dans

2 le voisinage de Kozarac, quand l'attaque a commencé.

3 Question: Pendant les jours qui ont suivi, d'autres convois de bus sont-

4 ils arrivés?

5 Réponse: De nouveaux bus, de nouveaux convois arrivaient à tout moment. Le

6 camp se remplissait et était amené à sa capacité.

7 Question: Les familles étaient-elles gardées ensemble, hommes, femmes et

8 enfants, ou étaient-elles séparées?

9 Réponse: On les séparait.

10 Question: Où mettait-on les gens? Où vivaient les gens?

11 Réponse: En ce qui concerne Trnopolje, la plupart des hommes étaient logés

12 dans l'école, alors que les femmes et les enfants étaient mis dans le

13 centre communautaire, même si au début les groupes étaient mixtes. Mais,

14 par la suite, on les a séparés.

15 La procédure s'était déjà faite dans les villages où l'on avait procédé au

16 nettoyage. C'est là que les femmes et les enfants étaient séparés des

17 hommes plus âgés. Donc, dans la plupart des cas, les gens arrivaient déjà

18 en groupes distincts à Trnopolje, ils n'arrivaient pas ensemble; et la

19 plupart des hommes avaient probablement déjà été amenés à Omarska et à

20 Keraterm.

21 Question: Y avait-il des hommes en âge de faire leur service militaire qui

22 arrivaient à Trnopolje?

23 Réponse: Il y en avait, mais pas en grand nombre.

24 Question: Vous nous dites que les hommes étaient placés dans l'école, dans

25 le bâtiment de l'école, et que les femmes et les enfants étaient logés au

Page 7757

1 centre communautaire. Est-ce que ces deux bâtiments…

2 Réponse: Correct. Mais, encore une fois, il était aussi possible de

3 trouver des hommes dans l'école, surtout… comme il y avait déjà trop de

4 gens qui étaient là avant l'arrivée des convois, alors, à ce moment-là, on

5 autorisait les hommes à être logés également dans l'école.

6 Question: Dans l'école où?

7 Réponse: Dans ce cas, les hommes et les femmes étaient ensemble.

8 Question: Peut-être y a-t-il eu une erreur de traduction. Vous nous dites

9 que quand il y en avait trop, on mettait les hommes également à l'école,

10 alors que vous avez voulu dire des femmes aussi dans l'école?

11 Réponse: Non, non. Les femmes… vous avez raison, c'est les femmes qu'on

12 mettait alors également dans l'école.

13 Question: Y a-t-il eu un moment où ces bâtiments étaient saturés, où il

14 n'y avait plus assez de places pour loger le nombre de personnes?

15 Réponse: Oui, bien sûr. A un moment, il n'y avait plus assez d'espace. Au

16 départ, il n'y avait pas d'installations adéquates. Il n'y avait pas de

17 lits par exemple, les gens dormaient à même le sol, ils portaient les

18 mêmes habits qu'ils portaient au moment de leur arrivée. Il n'y avait pas

19 non plus de nourriture.

20 Question: J'arriverai à la nourriture et aux conditions sanitaires par la

21 suite. Mais quand les bâtiments étaient remplis, qu'est-ce qu'on faisait

22 pour les nouveaux arrivants qui arrivaient au camp? Où les logeait-on?

23 Réponse: Une fois que les bâtiments ont atteint leur capacité, quand on ne

24 pouvait plus y mettre de personnes, alors le premier convoi de femmes,

25 enfants et personnes âgées a été organisé. Ce convoi a été organisé à

Page 7758

1 partir de la gare de chemin de fer de Trnopolje, dans des wagons de

2 marchandise, et c'est comme cela qu'on les a déplacés.

3 Question: Pouvons-nous passer à la nourriture? Les gardes serbes ont-ils

4 fourni de l'alimentation et de la nourriture pour les détenus?

5 Réponse: Non, aucune nourriture n'a été donnée.

6 Question: Comment les gens se nourrissaient-ils?

7 Réponse: Au début, il avait été convenu que la population locale, qui

8 n'avait pas encore quitté les lieux, pouvait apporter de la nourriture

9 dans le camp. Et donc, bon nombre d'habitants locaux ont apporté de la

10 nourriture dans le camp. Ce n'était pas suffisant, clairement, mais il n'y

11 avait pas d'autre solution à l'époque.

12 Après un certain temps, la Croix-Rouge serbe est arrivée et nous sommes

13 parvenus à un accord avec eux: qu'un local qui avait beaucoup de vaches

14 devait approvisionner le camp en lait pour les enfants. On a convenu que

15 de l'argent serait collecté parmi les détenus et, avec l'aide de la Croix-

16 Rouge serbe locale, on achèterait du pain et on amènerait le pain le

17 lendemain au camp pour être distribué.

18 Je dois vous dire que la situation n'était pas toujours la même au camp.

19 Après cette première période, pendant un certain temps donc, après le

20 moment où la population locale a également fait l'objet d'un nettoyage

21 -comme ils l'appelaient-, et après que les locaux ont arrêté d'apporter la

22 nourriture, nous étions convenus que les détenus, sous escorte des gardes,

23 auraient l'autorisation d'aller dans les champs pour chercher de quoi

24 manger et qu'ils pourraient ramener des pommes de terre, des légumes

25 qu'ils auraient trouvés dans le camp. On nous a également apporté des

Page 7759

1 poêles, des cuisinières pour pouvoir préparer la nourriture dans le camp.

2 Pendant un laps de temps assez bref, les Serbes ont autorisé qu'on amène

3 dans le camp un grand chaudron où on pouvait préparer la nourriture, mais

4 ce n'était pas suffisant compte tenu du grand nombre de personnes détenues

5 dans le camp. Donc, peu de temps après, on a retiré ce chaudron.

6 Question: Nous savons qu'à un moment, finalement, la Croix-Rouge est

7 arrivée dans le camp et a inscrit les gens. Mais jusqu'à ce moment, y

8 avait-il assez de nourriture pour nourrir tous ceux qui étaient détenus

9 dans ce camp?

10 Réponse: Non, pas assez. Nous, dans la clinique, on ne recevait pas de

11 nourriture du tout par exemple. Mais, parfois, des Serbes locaux venaient

12 à la clinique également pour une Consultation; c'étaient mes anciens

13 patients et ils apportaient de la nourriture pour les gens de la clinique.

14 Question: Qu'en est-il des conditions sanitaires?

15 Réponse: Quand nous sommes arrivés au camp, il y avait encore un peu

16 d'eau, mais c'était de l'eau jaunâtre, apparemment pas très propre. Donc

17 nous ne l'avons pas utilisée. Quelques jours plus tard, le camp a été

18 complètement à sec. Il n'y avait plus d'eau, les gens ne pouvaient plus se

19 laver, ne pouvaient pas se laver, ni changer leurs vêtements, mais d'une

20 certaine façon, les gens parvenaient à survivre dans ces conditions.

21 Question: Et y avait-il des toilettes disponibles?

22 Réponse: Il y avait des toilettes dans le bâtiment scolaire, mais ces

23 toilettes se sont rapidement bouchées et il n'y avait pas, par exemple,

24 nous n'avions pas de toilettes à la clinique, mais nous sommes tombés

25 d'accord pour organiser que des tranchées soient creusées près de l'école

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1 pour que les gens puissent utiliser ces trous ainsi creusés à titre de

2 toilettes.

3 Question: A quel moment avez-vous pris conscience du fait qu'il y avait

4 quelqu'un qui était responsable de ce camp?

5 Réponse: Au début, il y avait un militaire qui était là. Je ne sais plus

6 exactement quel était son grade. Je crois que c'était le deuxième jour.

7 Quand je suis arrivé donc dans ce camp, le 27, puisque nous étions arrivés

8 le 26, une femme ukrainienne est venue à la clinique, elle s'appelait

9 Marica Olenjuk. Elle travaillait avant comme femme de ménage à la

10 clinique; elle nous a apporté de la nourriture, des oeufs durs et elle

11 nous a dit qu'une de ces voisines était venue la voir. Elle avait très

12 peur. Elle disait que les soldats avaient capturé cinq femmes et les

13 avaient amenées au premier étage de sa maison et qu'elle entendait des

14 cris et des hurlements de ces femmes. Et elle pensait que les soldats

15 étaient en train de violer ces femmes dans sa maison. Je suis sorti. J'ai

16 essayé de trouver quelqu'un à qui m'adresser. J'ai demandé qui était

17 responsable et deux hommes étaient assis sur une caisse près de l'entrée

18 de la clinique dans la cour, devant la clinique, et ils m'ont dit que l'un

19 d'eux était le responsable. Alors, je l'ai informé de ce que l'on venait

20 de me raconter. Et je pensais que c'était le responsable de Trnopolje.

21 Toutefois, après,…après, cette personne est partie. Je ne l'ai jamais

22 revue. Slobodan Kuruzovic est arrivé par la suite et c'était lui qui était

23 responsable de Trnopolje.

24 Question: Je vais y revenir tout à l'heure, mais pouvons-nous terminer

25 l'épisode qui se rapporte à votre démarche où vous vous êtes plaint du

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1 fait que les femmes étaient violées. Est-ce qu'on a réagi? Est-ce que

2 quelque chose s'est passé suite à cela?

3 Réponse: Pas pour autant que je sache. Je ne sais pas ce qui s'est passé

4 par la suite. Je ne sais pas si quelque chose est arrivé. Mais je sais

5 que, moi, j'ai eu un problème.

6 Question: Que vous est-il arrivé suite au fait que vous aviez fait rapport

7 à ces allégations de viol?

8 Réponse: Les femmes ont été autorisées à venir à la clinique pour la

9 consultation, mais elles étaient toujours sous escorte d'un garde et donc

10 il y avait beaucoup d'śufs durs que les gens nous avaient apportés et, à

11 chaque fois qu'une de ces femmes venait à la consultation à la clinique,

12 je lui donnais un ou deux de ces oeufs durs pour qu'elles puissent les

13 amener à leurs enfants. L'un des soldats ensuite a fait des allégations

14 disant que je préparais le meurtre en masse des enfants serbes et que le

15 nom de code de l'opération, c'était "oeufs durs ". Il est d'ailleurs venu

16 avec un autre soldat et il m'a ordonné de venir ave lui. Apparemment, il

17 prévoyait de me liquider et, quand je suis sorti, j'ai trouvé Rada Baltic,

18 une autre personne dont j'ai oublié le nom; c'est le père de ce soldat qui

19 était venu à la clinique à Kozarac et qui m'a demandé ce qui se passait.

20 Je leur ai dit que c'était tout à fait aberrant ce qui se passait. Je lui

21 ai dit qu'on m'accusait de préparer un meurtre en masse des enfants

22 serbes. Il m'a dit que je devais retourner à la clinique et qu'il s'en

23 occuperait.

24 Par la suite, il est venu me voir et il m'a dit qu'il s'était

25 effectivement occupé de cette histoire et que je n'aurais plus de

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1 problème. Et je n'ai plus jamais revu ces deux soldats.

2 Question: Pouvons-nous maintenant regarder, nous pencher sur la question

3 des viols à Trnopolje, puisqu'il y avait un certain nombre de femmes dans

4 ce camp. Avez-vous été informé, avez-vous eu conscience, à part cet

5 incident, d'autres cas de viols apparents?

6 Réponse: En juin en particulier il y a eu des viols. La plupart des viols

7 se passaient la nuit. La plupart des personnes impliquées dans ces viols

8 n'étaient pas des gardes mais d'autres qui n'étaient pas de garde, des

9 personnes venant de l'extérieur. Ils se rendaient dans les salles où les

10 femmes dormaient la nuit et ils allumaient leur lampe de poche. Ils

11 sélectionnaient ainsi les femmes qu'ils aimaient bien. Nous avons pu

12 suivre cela par la fenêtre de la clinique. D'ailleurs, certaines femmes

13 sont, par la suite, venues à la clinique pour nous demander notre aide.

14 Je crois que les premières femmes qui sont venues à la clinique ont parlé

15 à Gutic. Et puis, il est venu me voir après que nous avons été saisis de

16 différents cas de femmes qui sont venues à la clinique. J'ai parlé au Dr

17 Dusko Ivic, un médecin serbe qui venait parfois à la clinique avec Mico

18 Kobas.

19 Question: Qu'avez-vous dit au Dr Ivic?

20 Réponse: Je lui ai dit qu'il y avait beaucoup de cas de viols, et que

21 certaines des femmes qui étaient venues à la clinique avaient accepté

22 qu'on les visite.

23 Question: Que souhaitiez-vous que fasse le Dr Ivic?

24 Réponse: Nous avons parlé de la possibilité que le Dr Ivic les amène à

25 Prijedor au service gynécologie, pour que ces allégations puissent être

Page 7763

1 étayées; et nous espérions que ceci mettrait un terme au viol.

2 Question: Et est-ce qu'il a été d'accord que ces femmes puissent aller à

3 la section gynécologie de Prijedor?

4 Réponse: Il n'a pas pu me donner une réponse immédiate, mais je pense que

5 c'est le lendemain qu'il est venu et qu'il m'a dit qu'il amènerait les

6 femmes à Prijedor. Et donc, un certain nombre de femmes -je ne sais pas

7 combien exactement, probablement plus de cinq mais moins de dix- ont été

8 amenées par lui à Prijedor pour faire l'objet d'un examen gynécologique.

9 Quand je lui ai parlé par la suite, les femmes avaient été ramenées. Je

10 n'ai pas vu le résultat de l'examen gynécologique, mais il m'a dit que

11 toutes ces femmes avaient été effectivement violées.

12 Question: En fonction de votre connaissance de la mentalité et de

13 l'éducation de ces femmes bosniaques, quelle était la difficulté

14 qu'éprouvaient ces femmes à aller déposer plainte pour viol?

15 Réponse: Personnellement, je crois que c'est un nombre extrêmement

16 restreint de femmes qui ont décidé de venir à la clinique et d'admettre

17 qu'elles avaient été effectivement violées.

18 Question: Avez-vous essayé de voir Kuruzovic pour lui parler du fait,

19 qu'apparemment, on autorisait des hommes à venir dans le camp qui,

20 ensuite, emmenaient avec eux des femmes?

21 Réponse: Je n'ai jamais parlé à Kuruzovic de cette question.

22 Habituellement, lorsque nous parlions, il y avait toujours Slavko Puhalic

23 qui était présent. Je crois que c'était l'adjoint de Kuruzovic. Il venait

24 souvent à la clinique et nous essayions de l'utiliser pour envoyer des

25 messages à Kuruzovic pour que quelque chose soit fait, mais je ne me

Page 7764

1 souviens pas d'avoir eu des entretiens avec qui que ce soit à ce sujet,

2 sauf le Dr Dusko Ivic.

3 Question: Et à la suite de vos conversations avec soit le médecin soit M.

4 Puhalic qui, pensiez-vous, était son adjoint, y a-t-il eu quoi que ce soit

5 pour empêcher ces personnes d'entrer, de venir?

6 Réponse: Après un certain temps, ces cas de viol ont diminué d'intensité.

7 Il y avait des personnels militaires qui s'occupaient d'un char et qui

8 s'appelaient eux-mêmes "El Manijakos". C'était l'inscription qu'ils

9 avaient sur leur char, apparemment. Je crois que Kuruzovic, à ce moment-

10 là, a fait passer le message et a essayé d'empêcher que ces choses se

11 produisent aussi souvent.

12 Un jour, ils sont arrivés avec deux chars et se sont disputés avec

13 Kuruzovic et Puhalic, en demandant pourquoi ils avaient permis que ces

14 femmes puissent être envoyées faire un examen médical. En tout état de

15 cause, à la suite de cela, je n'ai plus été très au courant de cas de

16 viols plus nombreux, mais je sais que les mêmes personnes qui allaient

17 dans les villages avoisinants cherchaient des femmes qu'ils pourraient

18 violer.

19 Question: Est-ce que vous avez eu connaissance d'un viol qui a eu lieu à

20 l'extérieur du camp?

21 Réponse: Oui, je me souviens qu'il y a eu une femme qui avait un enfant,

22 qui était venue au camp, et elle est venue, elle s'est rendue à la

23 clinique. Et je suis la personne à qui elle a parlé, elle pouvait à peine

24 marcher. Au point de contrôle Orlovci, elle a été arrêtée par les gardes

25 et, pendant dix jours consécutifs, elle a été violée par l'ensemble des

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1 gardes.

2 Une nuit, elle a réussi à s'échapper avec l'enfant par une fenêtre. Le

3 lendemain, après qu'elle m'avait déjà parlé, un lieutenant est venu, je

4 crois que son nom était Cumba, c'était un militaire d'actif. Je crois

5 qu'il était de la police militaire avec un autre homme -un inspecteur, je

6 crois, qui avait une touffe de cheveux blancs sur le crâne-, et ils ont

7 posé des questions en ce qui concernait cette femme pour savoir si elle

8 était venue nous trouver -la femme d'Orlovci- parce qu'ils voulaient

9 qu'elle vienne déposer et dire qu'elle avait été violée.

10 J'ai décidé de ne pas leur parler de l'entretien qu'elle avait eu avec

11 moi, et j'ai conseillé à cette femme de quitter le camp à l'occasion du

12 prochain convoi et d'aller voir un médecin dès qu'elle serait en sûreté,

13 dès qu'elle serait en dehors du territoire tenu par les Serbes.

14 Question: L'inspecteur qui était là, est-ce qu'il vous a dit quoi que ce

15 soit?

16 Réponse: Il voulait avoir un mot avec moi en particulier. Donc nous sommes

17 allés ensemble au fond de la pièce de la clinique. Il m'a averti que tous

18 ceux qui travaillaient contre les Serbes seraient tués et il m'avertissait

19 de faire attention à ce que je faisais.

20 Question: Avant que je passe au sujet suivant, pourrais-je vous poser la

21 question suivante: quel type de fournitures, de médicaments avez-vous reçu

22 dans le camp?

23 Réponse: Excusez-moi, je me rappelle un nom: Skrbic, le soldat qui est

24 venu à la clinique à Kozarac s'appelait Skrbic. Je ne parviens pas à me

25 rappeler son prénom. Le nom de son père était Skrbic aussi.

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1 Question: Je vous remercie, Docteur. Je crois que vous avez prouvé que, si

2 vous pouvez cesser de réfléchir à quelque chose, à ce moment-là, cela vous

3 revient en mémoire.

4 Bien, alors, s'il vous plaît, pour les fournitures militaires, les

5 médicaments à Trnopolje, est-ce que vous en receviez?

6 Réponse: Non, nous ne recevions pas de fournitures médicales ou de

7 médicaments. Avant l'arrivée de la Croix-Rouge internationale, il n'y

8 avait que ce que nous avions trouvé lors de notre arrivée à l'intérieur de

9 la clinique à Trnopolje. C'est ça dont nous nous sommes servis. Parfois,

10 nous avons eu l'occasion de voir les gardes lorsqu'ils faisaient leur

11 ronde dans les maisons avoisinantes, et, parfois, on trouvait des

12 médicaments qu'on pouvait ramener à la clinique dans le camp. La seule

13 chose que nous n'avons jamais obtenue du Dr Ivic était une poudre contre

14 les puces, du DDT.

15 Question: Y avait-il des violences dans le camp contre les prisonniers,

16 exercées contre les prisonniers?

17 Réponse: A un moment donné, assez tôt, l'une des pièces de la clinique qui

18 était censée être utilisée comme laboratoire mais qui ne servait pas à cet

19 usage…)

20 Réponse: A un moment donné, assez tôt, l'une des pièces de la clinique

21 -qui était censée être utilisée comme laboratoire mais qui ne servait pas

22 à cet usage- a été utilisée pour les interrogatoires et les passages à

23 tabac.

24 Question: Qui emmenait-on aux fins d'interrogatoire?

25 Réponse: Eh bien, des détenus du camp. Je ne suis pas sûr des critères sur

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1 lesquels ils étaient emmenés, peut-être qu'ils avaient des listes. Je ne

2 sais pas comment ils décidaient qui emmener et qui ne pas emmener. C'était

3 essentiellement des hommes cependant. Je ne les ai jamais vus emmener une

4 seule femme pour l'interroger.

5 Question: Comment saviez-vous que la pièce qui était censée servir de

6 laboratoire était utilisée, en fait, pour des passages à tabac?

7 Réponse: Comme je viens de l'expliquer, cette pièce se trouve derrière la

8 clinique, elle fait partie de la clinique, et donc, elle se trouve peut-

9 être à cinq ou six mètres pour ce qui est de la distance entre les deux

10 fenêtres. On pouvait donc entendre le bruit des personnes battues, des

11 personnes qui gémissaient. On pouvait entendre des Serbes les insultaient

12 verbalement parce que la distance était tellement faible.

13 Deuxièmement, certaines des personnes qui étaient passées à tabac étaient

14 ensuite emmenées à la clinique pour qu'ensuite on s'occupe de panser leurs

15 blessures.

16 Question: Pouvez-vous vous rappeler, ne vous préoccupez pas des noms, mais

17 de certaines blessures subies par des détenus?

18 Réponse: Normalement, c'étaient des traumatismes dus à des outils

19 contendants; ils donnaient des coups de pieds à ces détenus, ils les

20 frappaient avec des bâtons, des poteaux en bois. Il y avait donc des

21 blessures, des coupures, probablement faites au couteau aussi,

22 apparemment. Il y en avait un qui était blessé à une jambe, Ejub Hrnic

23 avait eu une coupure de ce genre. Je ne me souviens plus si c'était la

24 jambe gauche ou la jambe droite, mais c'était près du genou, c'était un

25 peu en dessous du genou. Un nerf avait été coupé, et donc, il ne pouvait

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1 plus bouger son pied. Il traînait la jambe derrière lui. Il avait d'autres

2 blessures aussi, mais c'était l'un d'entre eux.

3 Question: Est-ce que vous-même ou quelqu'un d'autre aviez un appareil

4 photographique à Trnopolje?

5 Réponse: Azra Blazevic avait un appareil photographique.

6 Question: Avez-vous eu la possibilité de faire des photographies de

7 certaines des blessures que vous avez vues?

8 Réponse: Nous en avons une fois parlé lorsque les passages à tabac

9 devenaient de plus en plus fréquents, nous avons parlé de la possibilité

10 de photographier les blessures de ces personnes afin qu'un jour nous

11 puissions prouver ce qui s'était passé. Nous étions dans le doute de

12 savoir s'il fallait essayer de faire cela ou non, parce que nous étions en

13 danger d'être pris en train de le faire, et nous avons convenu qu'un très

14 petit nombre d'entre nous et uniquement ceux qui travaillaient à la

15 clinique seraient au courant. Puis, nous avons décidé de ne pas prendre de

16 photographies de sorte que ceux qui avaient été battus ne pourraient pas

17 dire que quelqu'un se trouvait là en train de prendre leurs photographies.

18 Ainsi, par exemple, je suppose que presque tout le monde sait cela

19 aujourd'hui, mais il se peut que quelqu'un qui se trouvait dans la

20 clinique aurait pu dire: "Non, ils n'ont pas pris de photographies du tout

21 parce qu'ils ne savaient pas".

22 Question: Oui, pour bien comprendre… je crois que j'ai compris ce que vous

23 vouliez dire. S'ils étaient interrogés par des gardes, ils ne pouvaient

24 pas dire qu'on avait pris des photographies de leurs blessures.

25 Réponse: Précisément. Nous voulions réduire les risques au minimum, et

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1 nous voulions qu'aussi peu de personnes que possible soient au courant.

2 Question: Vous avez dit que ceci s'est fait lorsque les passages à tabac

3 sont devenus de plus en plus fréquents. Pourriez-vous nous dire, en gros,

4 au cours de quelle période cela s'est produit?

5 Réponse: C'était au mois de juin, de juillet, jusqu'à l'arrivée des

6 journalistes; ça a été la période la plus dure.

7 Question: Est-ce que ces passages à tabac se produisaient seulement au

8 cours d'interrogatoires ou est-ce qu'il y avait des coups donnés

9 indépendamment d'interrogatoires?

10 Réponse: Je ne sais pas très bien ce qu'ils faisaient là. Est-ce qu'il

11 s'agissait d'interrogatoires officiels ou non, ou est-ce qu'ils se

12 bornaient simplement à battre les gens? La plupart des personnes que j'ai

13 connues, et dont j'ai su qu'elles avaient été battues, étaient tout

14 d'abord accusées d'avoir eu une arme ou d'avoir fait partie des Bérets

15 verts ou d'avoir caché leur argent. Mais je ne suis pas sûr des raisons

16 pour lesquelles ils choisissaient telle ou telle personne plutôt qu'une

17 autre pour les battre.

18 Question: Est-ce que certains passages à tabac ont eu lieu en dehors de

19 cette pièce arrière de la clinique, autrement dit à ciel ouvert, à

20 l'extérieur?

21 Réponse: Oui, à l'extérieur aussi.

22 Question: Est-ce que c'étaient des gardes ou est-ce que c'étaient des gens

23 qui sont venus pour cela dans le camp?

24 Réponse: Une fois, ils sont entrés dans la salle où se trouvait la

25 chaudière de l'école et ils y ont battu les personnes qui s'y trouvaient.

Page 7770

1 Je ne crois pas que c'étaient les gardes en service ce jour-là, mais

2 c'étaient d'autres personnes qui étaient arrivées. Et une autre fois, nous

3 avons vu de nos fenêtres, lorsque les personnes de Keraterm ont été

4 amenées, Zigic est alors arrivé. Il a fait mettre en rangs les gens de

5 Keraterm et il a dit: "Que Dieu vous aide les héros!", et ils ont répondu:

6 "Que Dieu vous aide aussi".

7 Il a appelé un des hommes en lui disant de faire un pas en avant et de

8 sortir du rang, en lui disant "sortez des rangs". Il l'a fait

9 s'agenouiller, puis il lui a donné des coups de pied, il l'a battu jusqu'à

10 ce qu'il s'écroule.

11 Question: Est-ce que vous le connaissiez?

12 Réponse: Non, je ne le connaissais pas. Et il n'est pas venu à Trnopolje,

13 tout au moins pas pour autant que je sache. C'est la seule fois qu'il est

14 venu au camp de Keraterm avec les détenus.

15 Question: Qui vous a dit quel était son nom?

16 Réponse: Quelqu'un de la clinique le connaissait. N'étant pas né à

17 Prijedor moi-même, je ne connaissais pas les noms de ces gens-là. Mais il

18 y en avait d'autres qui étaient nés à Prijedor et qui connaissaient ces

19 gens. Il était chauffeur de taxi, on le connaissait.

20 Question: Est-ce que les gardes ont fait un essai quelconque pour empêcher

21 Zigic de faire cela ou est-ce que d'autres personnes ont essayé de les

22 empêcher?

23 M. Merdzanic (interprétation): Non, personne n'a même essayé.

24 Mme Korner (interprétation): Je pense que... Bon, peut-être que c'est le

25 moment qui convient pour examiner, je ne suis pas sûr du moment où vous

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1 voudriez suspendre, Monsieur le Président?

2 M. le Président (interprétation): Nous avons encore dix minutes.

3 Mme Korner (interprétation): Je pourrais maintenant commencer sur la

4 question des photographies.

5 Ainsi que nous le verrons, vous avez pu fournir, je crois, à Penny

6 Marshall un film que vous avez pu prendre au cours du temps que vous avez

7 passé à Keraterm?

8 M. Merdzanic (interprétation): C'est exact.

9 Question: Je crois qu'elle est arrivée au début du mois d'août,

10 probablement le 4 août, et nous avons réussi à lui remettre ce film.

11 Je voudrais que vous regardiez, s'il vous plaît, certaines des

12 photographies qui ont été reprises de ce film. Mais, avant tout, il y en a

13 une un peu à part: c'est la photographie… je crois qu'on vous a remis un

14 très grand lot de photographies, et j'espère que celle-ci y figure. C'est

15 une photographie qui a été montrée au témoin. Je crois que c'est une

16 nouvelle: elle porte le chiffre 01035318. Excusez-moi, ça ne vient pas de

17 cette pellicule-là, elle est distincte, Monsieur le Président.

18 Témoin, est-ce que vous pouvez identifier cette photographie? Je pense que

19 l'enquêteur vous l'a montrée.

20 Réponse: Ceci, à gauche, est une boutique qui se trouve à l'extérieur de

21 la clinique. Mais l'ensemble fait partie du même bâtiment. Et la partie

22 qui se trouve à droite est la clinique. Et là, se trouvaient la porte et

23 les lignes téléphoniques. Et ce que l'on peut voir à l'arrière, c'est la

24 grande entrée, le grand vestibule. Cette photographie a été prise du côté

25 nord, du côté à partir de l'école. C'est probablement après que le camp a

Page 7772

1 été fermé, parce que l'ONU n'est jamais venue au camp pendant qu'il

2 fonctionnait.

3 Question: Est-ce que vous pouvez voir, sur cette photographie, s'il s'y

4 trouve le laboratoire qui était utilisé pour les passages à tabac?

5 M. Merdzanic (interprétation): Non, pas par cet angle-là.

6 Mme Korner (interprétation): Est-ce qu'on pourrait marquer cette pièce

7 avec la cote S321-3?

8 M. le Président (interprétation): Je ne vois pas d'objection. Cette pièce

9 est versée au dossier.

10 Mme Korner (interprétation): Je vous remercie.

11 Maintenant, commençons à regarder certaines des photographies qui ont été

12 prises sur cette pellicule et qui vous ont été fournies. Regardons celle

13 qui porte le chiffre 01035329.

14 (Intervention de l'huissier.)

15 En voici une reproduction.

16 (Mme Korner montre la planche.)

17 M. Merdzanic (interprétation): La partie supérieure, vous pouvez voir

18 Mujo, un paramédical qui était avec nous, qui est debout. Là, il y a un

19 patient qui, je crois, avait passé une nuit ou deux à la clinique. Et ici,

20 on peut voir Hase Dzolagic qui est vétérinaire. Ici, c'est moi que vous

21 voyez. Ces photographies ont été prises à la clinique de Kozarac.

22 Vous voyez Mujo qui était là. C'est comme cela que nous dormions à même le

23 sol.

24 Question: Ceci a été pris à la clinique de Kozarac pendant le

25 bombardement?

Page 7773

1 M. Merdzanic (interprétation): Je vous présente mes excuses. Ceci est

2 Trnopolje et non pas Kozarac.

3 Mme Korner (interprétation): Monsieur le Président, est-ce que ceci

4 pourrait être versé au dossier en tant que pièce à conviction S321-5…

5 Pardon, 4. Excusez-moi.

6 M. le Président (interprétation): Pas d'objection, la pièce est versée au

7 dossier.

8 Mme Korner (interprétation): Pourriez-vous regarder maintenant la pièce

9 01035330?

10 (Intervention de l'huissier.)

11 M. Merdzanic (interprétation): La photographie du bas, vous voyez Azra

12 Blazevic et sur celle du haut, vous pouvez voir Sefik Karabasic et vous

13 pouvez voir comment nous devions dormir.

14 Mme Korner (interprétation): Est-ce qu'on vous a jamais fourni des lits

15 pour la clinique?

16 M. Merdzanic (interprétation): Non, aucun lit. Nous avions deux lits aux

17 fins d'examen des patients, mais ils s'y trouvaient déjà. Et "Babica", la

18 sage-femme, dormait sur l'un d'entre eux, et l'autre était utilisé par

19 Mujo qui y dormait.

20 Mme Korner (interprétation): Pourrait-on, s'il vous plaît, porter la cote

21 de 321-5 pour cette pièce?

22 M. le Président (interprétation): Pas d'objection. Par conséquent, cette

23 pièce est versée au dossier.

24 Mme Korner (interprétation): Pourrions-nous maintenant voir la 01035331.

25 Elle portera la cote S321-6.

Page 7774

1 (Intervention de l'huissier.)

2 M. Merdzanic (interprétation): En haut, sur la photographie du haut, vous

3 pouvez voir "Babica", la sage-femme. En bas, Vasif Gutic et la femme serbe

4 qui était avec nous tout le temps. Vous la voyez à l'arrière de la

5 photographie, cette femme serbe qui était avec nous tout le temps, même au

6 tout début de notre séjour à Trnopolje.

7 Mme Korner (interprétation): Et donc nous avons 6 maintenant. Et puis la

8 photographie suivante, s'il vous plaît: 01035337.

9 (Mme Korner montre la planche.)

10 (Intervention de l'huissier.)

11 M. Merdzanic (interprétation): C'est Nedzad Jakupovic que vous voyez là.

12 Nous avons pu prendre une photographie de lui, une fois. Il revenait de

13 cette pièce qui était utilisée pour les passages à tabac. Je crois qu'ils

14 l'ont emmené à la clinique uniquement à cause de la blessure qu'il avait

15 reçue à l'śil. Donc nous avons eu la possibilité de prendre une

16 photographie et nous l'avons fait. Comme vous pouvez le voir, ce n'est pas

17 une vue frontale parce que nous ne voulions pas que le patient se rende

18 compte que nous étions en train de le photographier.

19 M. le Président (interprétation): Donc cette pièce devient le S321-7.

20 Mme Korner (interprétation): Je voudrais poser quelques questions au sujet

21 de cette photographie. Nous voyons que l'śil a été blessé et nous voyons

22 le pansement qui a été mis et les blessures sur le corps. Est-ce que vous

23 vous rappelez s'il y avait d'autres blessures qu'on ne peut pas voir sur

24 cette photographie, par exemple au poignet?

25 M. Merdzanic (interprétation): Il est difficile de poser un diagnostic. Il

Page 7775

1 y avait une fracture… Oui, c'est bien cela. Il avait des traces de fils de

2 fer, de coupures dans la peau de ses bras. Il nous a dit qu'on l'avait

3 attaché avec du fil de fer pendant qu'il était passé à tabac.

4 Question: Y avait-il d'autres prisonniers en même temps que lui au cours

5 de l'interrogatoire?

6 M. Merdzanic (interprétation): Il y avait deux autres détenus avec lui, je

7 crois. L'un a été tué et est mort du fait des passages à tabac, des coups

8 reçus. Je ne sais rien en ce qui concerne l'autre.

9 Mme Korner (interprétation): Oui, je vous remercie. Et, excusez-moi, il y

10 a l'autre photographie; l'autre photographie que j'aurais dû faire

11 présenter plus tôt est la 0135336…

12 M. le Président (interprétation): Et devient la pièce S321-8.

13 M. Merdzanic (interprétation): Ceci est aussi une photographie de Nedjad

14 Jakupovic prise sous un autre angle. Peut-être qu'il est dommage que nous

15 n'ayons pas pris de vues de face. Son visage saignait et il portait des

16 ecchymoses, mais, non, on ne pouvait pas prendre une photographie de face

17 de son corps.

18 Mme Korner (interprétation): Je comprends.

19 M. le Président (interprétation): Je pense que le moment convient pour

20 suspendre l'audience.

21 L'audience est suspendue jusqu'à 14 heures 30.

22 (L'audience, suspendue à 13 heures 01, est reprise à 14 heures 45.)

23 M. le Président (interprétation): Je vous prie de prendre place et tout

24 d'abord nos excuses pour le retard, mais il y a eu un événement inattendu.

25 Nous avons dû contacter un visiteur, un diplomate de Bosnie-Herzégovine,

Page 7776

1 et comme c'était aux fins de cette affaire, nous avons donné priorité à

2 cela. Encore une fois nos excuses.

3 Mme Korner (interprétation): Pouvons-nous terminer l'examen de la série de

4 photographies, Docteur. Pourriez-vous maintenant prendre la photographie

5 qui porte la cote 01035338?

6 (Intervention de l'huissier.).

7 M. le Président (interprétation): (Hors micro.)

8 Mme Korner (interprétation): "-9". Pourriez-vous nous dire ce qui est

9 représenté, Docteur?

10 M. Merdzanic(interprétation):

11 (Le microphone du témoin n'est pas branché.)

12 Sur cette photographie, nous voyons le camp de Trnopolje. La photographie

13 a été prise en se plaçant dans la cour de la clinique, en se mettant

14 dirigé vers le sud, et le magasin qui, avant la guerre, vendait des

15 fournitures pour le bâtiment.

16 Question: Est-ce que vous pouvez nous donner un chiffre, une idée de la

17 date à laquelle cette photographie a été prise, si vous vous souvenez?

18 M. Merdzanic (interprétation): Cette photographie a été prise avant la

19 visite de la journaliste. Donc ça a dû être en juin ou en juillet.

20 Mme Korner (interprétation): Merci.

21 Pourrait-on passer à la photographie suivante, 01035339, qui représente la

22 même partie, le même secteur?

23 M. le Président (interprétation): "-10".

24 M. Merdzanic (interprétation): Ceci a été pris du même angle, c'est-à-dire

25 à partir du bâtiment où était située la clinique, en étant tournée vers le

Page 7777

1 Sud, vers le centre communautaire, également en regardant vers le magasin

2 de matériaux de construction.

3 Mme Korner (interprétation): Merci, Docteur. Il y a encore deux autres

4 photographies. Je ne pense pas que je vais les faire verser au dossier,

5 mais pourrait-on prendre le 01035341, s'il vous plaît?

6 (Intervention de l'huissier.).

7 M. le Président (interprétation): "-11".

8 Mme Korner (interprétation): Merci.

9 Je pense que ceci a été pris sous un angle un peu différent.

10 M. Merdzanic (interprétation): Oui, effectivement. Ceci a été pris, par

11 rapport aux photographies précédentes, en se situant plus à droite. A

12 gauche, sur la photographie, nous voyons une partie de la maison qui

13 abritait un magasin de matériaux de construction. Ceci se trouve donc un

14 peu plus à droite; ça a été pris plus à droite que la photographie

15 précédente.

16 Question: Est-ce que l'on voit une sorte de fil ou est-ce que c'est

17 simplement dans la qualité de l'impression ou du négatif, le fil qui

18 semble se dessiner sur la photographie?

19 Réponse: Il y a effectivement un fil qui va du magasin de matériaux de

20 construction. C'était un fil qui y était déjà avant, mais on ne le voit

21 pas sur cette photographie.

22 Question: Excusez-moi, je parlais d'une ligne qui semble traverser le

23 poteau.

24 Réponse: Non, non. Il ne s'agit pas d'un fil.

25 Mme Korner (interprétation): Pourriez-vous prendre 01035342.

Page 7778

1 M. le Président (interprétation): "-12".

2 Mme Korner (interprétation): inaudible

3 (Intervention de l'huissier.).

4 M. Merdzanic (interprétation): Ceci montre un des convois de camions qui a

5 été organisé à Trnopolje. Il s'agit de camions. Je pense que ceci a été

6 pris vers la fin du mois de juillet parce que les premiers convois ont été

7 organisés dans des bétaillères et ce n'est que plus tard que les convois

8 ont été organisés avec des camions. Ceci a été pris à partir de la cour de

9 la clinique, donc la zone devant la clinique en se tournant vers l'est et

10 vers la rue.

11 Mme Korner (interprétation): Merci. Ensuite, nous avons le 01035343.

12 M. le Président (interprétation): "-13".

13 M. Merdzanic (interprétation): Ici, il s'agit encore une fois d'un des

14 convois. C'est probablement le dernier camion du convoi. Et vous voyez les

15 détenus qui sont en train de monter dans le camion. Cela a été pris sous

16 le même angle, donc à partir de la cour devant la clinique. Je pense que

17 vous pouvez aussi voir un soldat qui monte la garde avec un fusil et un

18 deuxième qui portait un uniforme.

19 Mme Korner (interprétation): Je vous remercie.

20 M. le Président (interprétation): Je me corrige. Il ne s'agissait pas de

21 "-12", mais "-13".

22 Mme Korner (interprétation): 01035344.

23 M. Merdzanic (interprétation): Il s'agit d'un homme du village de Hrnici;

24 c'est de la zone de Trnopolje. Il était également dans la pièce où les

25 passages à tabac avaient lieu. Il avait perdu beaucoup de poids, il a été

Page 7779

1 amené à la clinique pour que nous puissions l'examiner et c'est à ce

2 moment-là que nous sommes parvenus à prendre cette photographie. Il est

3 décédé par la suite.

4 Question: Où? A Trnopolje?

5 Réponse: Oui, à Trnopolje.

6 Question: Quand il est décédé, vous a-t-on demandé d'examiner le corps?

7 Réponse: Non. Non, pas quand il est mort. On l'a emmené dans une charrette

8 tirée par des chevaux et un des détenus a dû lui creuser une tombe.

9 Question: Etait-ce un des prisonniers qui étaient arrivés d'Omarska ou de

10 Keraterm ou était-il depuis toujours à Trnopolje?

11 M. Merdzanic (interprétation): Il avait séjourné à Trnopolje pendant toute

12 cette période, mais ce n'était pas quelqu'un qui faisait partie du groupe

13 qui venait de Keraterm ou Omarska?

14 Mme Korner (interprétation): Merci. Enfin...

15 M. le Président (interprétation): N'oublions pas que ce document serait le

16 "-14".

17 Mais pour revenir à la question, si vous le permettez, avez-vous vu cette

18 personne avant cette date dans un meilleur état de santé et quel était

19 votre diagnostique? Le fait que cette personne ait perdu tant de poids,

20 était-ce attribuable au fait que cette personne était à Trnopolje?

21 M. Merdzanic (interprétation): Je suis sûr que c'était le résultat de son

22 séjour à Trnopolje. Il souffrait de dysenterie et probablement il avait

23 été torturé; il avait perdu beaucoup de poids suite à cela et c'est ce qui

24 a causé sa mort.

25 M. le Président (interprétation): Merci. Je vous prie de continuer.

Page 7780

1 Mme Korner (interprétation): Enfin, la dernière photographie 01035345,

2 est-ce la même personne?

3 M. Merdzanic (interprétation): Oui, c'est le même homme. Ici, nous voyons

4 la partie inférieure de son corps. Comme vous le voyez ici, nous avons

5 pris des photographies lorsqu'il avait le dos tourné.

6 Mme Korner (interprétation): Ce sera donc "-15".

7 M. le Président (interprétation): Non, c'est "-15". Et puis-je demander,

8 parce que je n'avais pas fait dans le passé, y a-t-il des objections à ce

9 que ces photographies soient versées au dossier? Donc, c'est la

10 photographie S321-15.

11 M. Lukic (interprétation): Pas d'objection.

12 M. le Président (interprétation): Ceci est donc versé au dossier.

13 Mme Korner (interprétation): Puis-je vous demander de prendre deux autres

14 photographies qui sont contenues dans le S15. D'abord, c'est le S15-14.

15 (Intervention de l'huissier.).

16 M. Merdzanic (interprétation): Je pense que c'est une photographie qui a

17 également été prise à Trnopolje même si ce n'est pas nous qui l'avons

18 prise. On y voit un des détenus qui étaient arrivés soit de Keraterm ou

19 d'Omarska. En tout état de cause, il n'était pas détenu à Trnopolje.

20 Question: Pouvons-nous prendre la photographie suivante: S15-15.

21 (Intervention de l'huissier.).

22 M. Merdzanic (interprétation): Il s'agit également d'une photographie

23 prise à Trnopolje, mais pas par nous. C'est après la visite des

24 journalistes. Cette photographie représente un des hommes qui étaient

25 arrivés soit d'Omarska ou de Keraterm.

Page 7781

1 Mme Korner (interprétation): Enfin, pourrais-je vous demander, même si

2 ceci n'a pas encore reçu de nombre, c'est le 00452507, dans la même série.

3 Si ces séries sont organisées, cela suit le 25-37.

4 M. le Président (interprétation): Puis-je vous demander, parce que je n'ai

5 pas cette photographie sous les yeux, c'est dans la série S15?

6 Mme Korner (interprétation): Oui.

7 M. le Président (interprétation): Pouvons-nous avoir le tiret suivant?

8 Mme Dahuron (interprétation): S15-41.

9 M. le Président (interprétation): Y a-t-il des objections? Je ne vois pas

10 d'objection, donc elle est versée, admise comme preuve.

11 Mme Korner (interprétation): Reconnaissez-vous cette scène, Docteur?

12 M. Merdzanic (interprétation): Je ne vois pas très bien où je dois me

13 situer sur cette photographie. Je ne peux pas vous dire ce que c'est

14 exactement. Il est probable que cela a été pris au camp de Trnopolje, mais

15 je ne puis pas vous le dire avec certitude; je n'ai pas de références, de

16 points auxquels me référer dans ce qui figure dans cette photographie. Je

17 suppose que cela a été pris à Trnopolje après l'arrivée des hommes

18 d'Omarska et de Keraterm, mais je n'en suis pas sûr à 100%.

19 Mme Korner (interprétation): Techniquement, Monsieur le Président, comme

20 le témoin ne l'a pas reconnu, je pense que nous ne pouvons peut-être pas

21 le reconnaître comme matériel de preuve, mais nous vous pouvons peut-être

22 l'inclure dans la série Trnopolje.

23 M. le Président (interprétation): Y a-t-il des observations par la

24 défense?

25 M. Lukic (interprétation): Nous ne pouvons ni confirmer ni nier, mais si

Page 7782

1 le témoin ne l'a pas reconnu, nous estimons qu'il ne faudrait pas que ce

2 soit admis.

3 M. le Président (interprétation): Est-ce que nous pouvons retirer cette

4 photographie, puisqu'elle n'a pas de valeur en tant que matériel de

5 preuve?

6 Mme Korner (interprétation): Enfin, sur les plans et les photographies,

7 Docteur, je crois que vous aviez également préparé un plan des différents

8 bâtiments de Trnopolje avec, comme référence, le 01035316.

9 (Intervention de l'huissier.)

10 M. Merdzanic (interprétation): Sur ce plan, nous pouvons voir la clinique

11 ainsi que le bâtiment adjacent à Trnopolje. Devant le bâtiment, à ma

12 droite, il y avait un magasin au rez-de-chaussée qui avait son entrée

13 distincte. Il y avait également un petit abri, un petit magasin qui

14 appartenait… donc un endroit d'entreposage qui appartenait au magasin. Ça,

15 c'était l'entrée de la clinique; il y avait un petit corridor.

16 Et à gauche -où je vous montre maintenant-, c'était l'endroit où se

17 trouvait le laboratoire et où ils avaient l'habitude de passer les gens à

18 tabac. C'étaient les trois salles qui étaient utilisées comme salles

19 d'examen. Alors, ici, vous voyez deux salles: deux à gauche et deux à

20 droite. Ici, vous aviez un café au rez-de-chaussée et, à l'étage

21 supérieur, il y avait les locaux du club de football. Il y avait une

22 entrée pour le café et il y avait un escalier qui menait au club de

23 football. C'était un centre communautaire qui appartenait au centre

24 communautaire. L'entrée était à gauche, là.

25 Question: La zone, ici, et la cour –ce que j'appelle la cour- devant la

Page 7783

1 clinique. Quelle est la chambre ou la pièce où se faisaient les passages à

2 tabac?

3 M. Merdzanic (interprétation): Celle-ci, celle-ci, ici. C'était à gauche

4 par rapport à l'entrée.

5 Mme Korner (interprétation): Mais lorsque j'ai traité des photographies

6 que vous aviez prises, j'ai oublié de vous demander de prendre le

7 01035334.

8 M. le Président (interprétation): Excusez-moi de vous interrompre. Peut-

9 être ai-je mal compris, mais j'avais compris que les trois salles à droite

10 où l'on lit "exam 1" pour la première pièce, donc ces pièces marquées "1,

11 2, 3" étaient utilisés pour les interrogatoires, les examens et les

12 passages à tabac.

13 Et maintenant, vous nous avez indiqué la pièce marquée d'un grand "A", un

14 "A" majuscule. Pourriez-vous confirmer?

15 M. Merdzanic (interprétation): Non, ce n'est pas le cas, donc c'est faux.

16 La salle ou la pièce marquée "A" était la pièce qui était utilisée pour

17 les passages à tabac; alors que les pièces "exam 1, 2 et 3" étaient les

18 endroits où nous procédions à l'examen des patients et où nous restions.

19 M. le Président (interprétation): Merci de ces précisions.

20 Mme Korner (interprétation): Monsieur, pourriez-vous, je vous prie,

21 regarder la prochaine photographie? Il s'agit de la photographie 334.

22 M. le Président (interprétation): Pas trop rapidement, je vous prie. Il

23 faudrait d'abord attribuer une cote à ce croquis et il portera la cote

24 322.

25 Y a-t-il des objections?

Page 7784

1 M. Lukic (interprétation): Non, pas d'objection, Monsieur le Président.

2 M. le Président (interprétation): Donc ce document est versé au dossier

3 portant la cote S322.

4 Mme Korner (interprétation): Pourriez-vous d'abord nous dire de quoi

5 s'agit-il sur cette photographie?

6 M. Merdzanic (interprétation): Oui, justement. C'est cette pièce, la pièce

7 A. Nous avons eu la possibilité de prendre une photographie de cette pièce

8 et nous avons eu la chance de prendre la photographie tout de suite après

9 qu'on a passé certaines personnes à tabac. C'est l'intérieur de la pièce

10 en question.

11 Mme Korner (interprétation): Très bien. Pourriez-vous coter cette pièce

12 "-16"?

13 M. le Président (interprétation): Oui, il s'agira de la pièce S321-16.

14 Document portant le numéro ERN qui se termine avec les chiffres 334.

15 Mme Korner (interprétation): Monsieur le Président, nous en sommes au n°9,

16 s'agissant de cette série de photographies.

17 M. le Président (interprétation): Eh bien, S321? Et nous avons poursuivi

18 jusqu'à 15? Nous avions 14 et 15.

19 Mme Korner (interprétation): Oui, vous avez tout à fait raison.

20 M. le Président (interprétation): Donc cette pièce portera la cote "-16".

21 Mme Korner (interprétation): Pourrait-on montrer au Témoin le document qui

22 se termine avec les numéros 335?

23 M. Merdzanic (interprétation): Il s'agit de la même pièce. C'est un autre

24 angle et nous pouvons voir les traces de sang sur le mur.

25 Mme Korner (interprétation): Merci.

Page 7785

1 M. le Président (interprétation): "-17".

2 Mme Korner (interprétation): Merci. Je crois que c'est tout pour ce qui

3 est de ces photographies.

4 Bien, maintenant, Docteur, dites-nous, est-ce qu'il y a eu des décès suite

5 au passage à tabac? Vous nous avez déjà parlé de l'homme en question qui

6 est décédé, qui a trouvé la mort, et vous nous avez dit que c'était plutôt

7 à cause de dysenterie. Qu'en est-il des autres personnes?

8 M. Merdzanic (interprétation): Teofik Talic est la deuxième personne qui a

9 été tuée dans cette pièce, et il est mort suite aux blessures qui lui ont

10 été infligées après ce passage à tabac.

11 Question: Y a-t-il eu d'autres décès qui sont survenus à Trnopolje? Des

12 décès qui ne sont pas survenus… dont la cause du décès n'était pas des

13 causes naturelles?

14 Réponse: Il y a eu d'autres exemples tels qu'un homme souffrant

15 d'épilepsie. Il était dans la quarantaine, il avait des problèmes

16 d'épilepsie, nous n'avions pas de médicaments. Il a eu une attaque

17 d'épilepsie. Nous n'avions que du valium et des aspirines de marque

18 Apaurin.

19 J'ai demandé à quelqu'un d'apporter des médicaments, j'ai demandé au

20 gardien soit d'apporter des médicaments de l'hôpital de Prijedor ou bien

21 de l'amener à l'hôpital. Mais il n'a pas acquiescé à ma demande. C'est

22 Ivic que j'ai demandé, et cet homme est décédé le lendemain matin.

23 Il y a eu également un autre exemple: une femme a été tuée d'une arme à

24 feu devant l'école. Il y a eu également plusieurs exemples où les

25 prisonniers se sont fait sortir et emmener à l'extérieur du camp et ont

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1 été tués à cet endroit-là, donc à l'extérieur et non pas dans le camp

2 même. Pour la plupart des personnes qui ont trouvé la mort, c'est ainsi

3 qu'ils ont été tués à l'extérieur.

4 Question: Pourriez-vous vous souvenir des noms des personnes qui ont été

5 tuées de cette façon-là, après s'être fait sortir et emmener ailleurs à

6 l'extérieur du camp?

7 Réponse: Oui, je me souviens qu'un jour, ils ont aligné les prisonniers

8 devant l'école. Ils portaient, ils avaient des listes entre les mains, ils

9 cherchaient des noms. En fait, ils cherchaient un nom "Foric" et ils ont

10 fait sortir du groupe quatre ou cinq personnes portant ce même nom de

11 famille. Ils les ont emmenés vers, tout près du bassin de pisciculture et

12 c'est là que j'ai entendu dire que, le lendemain, ils ont été tués.

13 Je sais que Murgic, le fils et le père Murgic, ont tous les deux été tués;

14 ils sont croates. Ils ont été torturés et ils les ont également emmenés

15 vers le bassin de pisciculture; un peu à gauche, il y avait le moulin et,

16 en face, c'était le bassin de pisciculture; c'est là qu'ils ont été tués.

17 La femme de Murgic était serbe, elle venait au camp, elle demandait à voir

18 son mari et son fils. Elle venait également à la clinique nous voir, mais

19 nous n'avions pas, nous n'osions pas lui dire qu'ils avaient été tués.

20 Nous avions peur qu'après, elle aille dire qu'elle l'a su par… que c'était

21 nous qui lui avions dit, et nous avions peur.

22 Il y avait également des meurtres, tel Pero Curkuz qui était le chef de la

23 Croix-Rouge serbe. Il avait fait sortir des prisonniers du camp pour aller

24 enterrer certaines personnes et c'est ainsi que nous avions appris que

25 d'autres personnes avaient également été tuées. Par exemple, lorsque l'on

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1 parle du premier hameau de Elezi en direction de Prijedor, c'est là que

2 nous avons su que vingt personnes ont trouvé la mort; il y avait des

3 hommes et des femmes, et ces derniers ont été enterrés non loin du camp.

4 Question: Je voudrais vous demander de nous parler de quelque chose que

5 vous avez évoqué il y a quelques instants, c'est-à-dire vous nous avez

6 parlé des convois. Nous avons vu des photographies. Vous nous avez dit que

7 puisque le camp grandissait, était de plus en plus rempli de convois, des

8 personnes se faisaient sortir et étaient emmenées ailleurs, pendant que

9 vous vous y trouviez.

10 A quelle fréquence est-ce que ce genre de chose se passait et que l'on

11 faisait sortir des gens de Trnopolje par le biais de convois?

12 Réponse: Eh bien, je ne peux pas vous le dire, mais je sais qu'on

13 procédait au nettoyage des villages, village par village. A chaque fois

14 que les soldats arrivaient dans un village, ils séparaient les hommes et

15 les femmes: les hommes étaient mis d'un côté, et les femmes et les enfants

16 de l'autre. Et ce sont les femmes et les enfants que l'on emmenait à

17 Trnopolje, si je ne m'abuse. Alors que les hommes, selon les listes qu'ils

18 détenaient, se étaient soit envoyés à Omarska, à Keraterm, et par la suite

19 ils les emmenaient à Trnopolje.

20 A Trnopolje, lorsqu'il y avait trop de personnes et lorsque le camp

21 devenait trop plein, ils organisaient des convois pour pouvoir transférer

22 les femmes et les enfants et pour pouvoir libérer le camp, faire assez de

23 place pour le prochain village et d'autres Musulmans. C'est ainsi que,

24 même pour ce qui est de Trnopolje, le nombre d'hommes grandissait puisque

25 les hommes… ou plutôt il y a eu certaines personnes qui ont pu faire

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1 partie du convoi. Certains hommes faisaient partie de ces convois dans

2 lesquels il y avait majoritairement des femmes, s'il s'avérait qu'ils

3 avaient des amis chez les Serbes ou parmi les Serbes qui les faisaient

4 passer dans ces convois.

5 Question: Vous dites que les hommes n'avaient pas le droit de quitter le

6 camp. Est-ce qu'on les surveillait de plus près ou étaient-ils plus

7 enfermés que les femmes et les enfants?

8 Réponse: Je ne crois pas qu'ils étaient surveillés de plus près. Tout le

9 monde se trouvait à l'intérieur de l'enceinte avec l'obsession que l'école

10 était réservée aux hommes, destinés aux hommes, alors que les autres

11 pièces étaient destinées aux femmes et aux enfants. Mais il arrivait aussi

12 que des femmes pénètrent dans l'école.

13 Question: Vous nous avez dit qu'ils procédaient au nettoyage des villages,

14 qu'ils allaient de village en village, vous nous avez décrit comment le

15 tout s'était déroulé.

16 Est-ce que c'était quelque chose que vous avez entendu dire par les

17 personnes qui venaient au camp?

18 Réponse: Oui, les personnes qui se faisaient recueillir au fur et à mesure

19 venaient nous raconter ce qu'il leur était arrivé. Donc, c'était une

20 narration qui se faisait de bouche à oreille.

21 Question: Le fait qu'on vous ait raconté la même histoire à plusieurs

22 reprises vous a-t-il permis de tirer une conclusion quant aux faits et aux

23 événements?

24 Réponse: Je suis persuadé qu'il s'agissait d'une action planifiée, qui a

25 été planifiée par les plus hauts niveaux, et je crois que c'était des

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1 ordres que les officiers inférieurs recevaient de leurs supérieurs. Je ne

2 crois pas que c'était sur l'initiative de certains officiers inférieurs,

3 je crois que c'est un ordre qui devait venir du haut.

4 Il était absolument impossible que l'on procède par ces listes de cette

5 façon très systématique. Ils détenaient des listes, et il y avait

6 certaines personnes qui se trouvaient sur ces listes et qui se faisaient

7 tuer. Je suis donc certain que c'étaient des ordres et que c'était bien

8 organisé. Je crois que le fait qu'il y ait eu des listes, manifestement,

9 démontre que c'était une action planifiée et organisée.

10 Question: Y a-t-il eu une différence, par exemple s'agissant de villages

11 qui avaient fourni une certaine résistance? Y a-t-il eu donc une

12 différence entre les villages qui n'avaient pas donné de résistance et les

13 villages qui avaient résisté?

14 Réponse: Il n'y avait absolument aucune différence. Je vous ai déjà

15 raconté que lorsqu'ils avaient demandé aux Elezi de venir, qui se trouvait

16 non loin de Trnopolje, les gens du village de Elezi, le même sort leur

17 était réservé, le même sort qu'aux gens qui se seraient trouvés dans un

18 village qui aurait résisté en utilisant des armes à feu par exemple. Le

19 même sort était réservé à tous ces villages.

20 Question: Vous nous avez dit que vous vous êtes entretenu très souvent

21 avec l'homme qui semblait être l'adjoint de Kuruzovic. Vous est-il arrivé

22 de parler à Kuruzovic directement?

23 Réponse: A quelques reprises je me suis entretenu avec Kuruzovic même. Je

24 ne me souviens pas exactement des détails. Je ne peux pas vous dire quelle

25 était la teneur de nos conversations.

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1 Question: Bien, je ne vous demande pas de nous donner des détails, mais

2 chaque fois que vous lui adressiez la parole, vous est-il arrivé de

3 l'entendre dire, de faire allusion à d'autres autorités, à une autorité

4 supérieure?

5 Réponse: Lorsqu'il s'agissait d'organiser des convois et concernant la

6 prise de décision, nous entendions cela, pour la plupart, de Slavko

7 Puhalic qui disait que les décisions étaient prises à un plus haut niveau

8 et qu'ensuite les autres obéissaient à ces décisions.

9 Et Slavko Puhalic nous avait dit qu'il fallait organiser une réunion et

10 que c'était à ce moment-là qu'ils allaient décider s'ils allaient

11 permettre que 3% de non-Musulmans demeurent sur le territoire de Prijedor.

12 Ce qui veut dire que toutes les décisions étaient prises ailleurs et non

13 pas là. Et il ne semblait pas que le Cdt Kuruzovic décidait ce qui allait

14 advenir de tous ces gens. Même lorsque ces journalistes sont venus nous

15 voir, je crois que c'était conformément à l'autorisation de Karadzic.

16 Question: J'aimerais vous poser une question concernant un convoi

17 particulier. Plus tard, vous aviez entendu dire que certaines personnes

18 qui faisant partie de ce convoi avaient été tuées. Est-ce que vous avez vu

19 lorsque ces gens sont montés à bord de ces autobus, ces personnes pour

20 lesquelles vous avez entendu dire qu'elles avaient été tuées au mont

21 Vlasic?

22 Réponse: Je crois qu'il s'agissait du dernier convoi de Trnopolje. C'est à

23 ce moment-là que la Croix-Rouge internationale s'était déjà manifestée et

24 je crois que les représentants de la Croix-Rouge internationale étaient

25 déjà venus rendre visite à Trnopolje, mais ils n'avaient pas pris les noms

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1 des prisonniers, ils ne les avaient pas tous enregistrés. De sorte que le

2 lendemain ou deux jours plus tard, ils avaient organisé des convois, et

3 les hommes avaient le droit de monter à bord de ces camions ou de ces bus.

4 On leur permettait de monter à bord de ces convois librement s'ils avaient

5 trouvé la place alors que jusqu'à ce moment-là… Auparavant, il arrivait

6 que des hommes puissent trouver une place et se faufilaient

7 clandestinement à bord de ces convois; alors que là, on leur permettait de

8 sortir librement.

9 Question: Lorsqu'on plaçait ces hommes à bord de ces convois, est-ce que

10 vous avez vu qu'ils les avaient montés pour faire partie de ces convois?

11 Réponse: Oui, les convois se constituaient soit là devant nous ou sur le

12 chemin de Prijedor/Trnopolje/Kozarac ou bien un peu plus bas en direction

13 de la route Trnopolje/Prijedor.

14 Question: Nous avons examiné les deux photographies un peu plutôt, deux

15 photographies nous permettant de voir les camions à bord desquels les

16 personnes avaient été placées. Est-ce que vous pourriez nous dire s'il

17 s'agit de la photographie qui montre le convoi appelé le convoi du mont

18 Vlasic ou s'agit-il d'un autre convoi?

19 Réponse: Il s'agit d'un autre convoi. Ce n'est pas le convoi du mont

20 Vlasic.

21 Question: Vous souvenez-vous, si oui ou non, le commandant Kuruzovic était

22 là, lorsque les hommes montaient à bord des camions?

23 Réponse: Le commandant Kuruzovic se trouvait avec les frères Balaban.

24 C'étaient des jumeaux et c'étaient ses gardes du corps, si je ne m'abuse;

25 c'étaient les gardes du corps de Kuruzovic.

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1 Pour ce qui est des jeunes gens qui s'étaient fait descendre du convoi,

2 qui avaient été tués au mont Vlasic, nous l'avons entendu dire par des

3 personnes qui avaient une radio, une petite radio, un transistor qui

4 permettait à ces gens-là d'écouter Radio Sarajevo et c'est ainsi que nous

5 avions appris cette nouvelle.

6 Ce qui est intéressant, c'est que le lendemain, immédiatement un jour

7 après, ils voulaient organiser un autre convoi et personne ne voulait

8 faire partie de ce convoi. C'est lorsqu'on avait entendu dire que les plus

9 jeunes hommes, enfin les personnes qui étaient plutôt jeunes et qui

10 faisaient partie de ce convoi s'étaient fait tuer.

11 Question: Bien, je voudrais maintenant passer à autre chose.

12 J'aimerais que l'on parle brièvement de la visite de Penny Marshall. Si je

13 ne m'abuse, vous avez quitté Trnopolje vers le 30 septembre. Vous étiez

14 l'un des derniers à quitter, n'est-ce pas?

15 Réponse: Oui, c'est exact. C'était la dernière journée de septembre. Le

16 lendemain, nous nous sommes trouvés à Karlovac.

17 Question: Lorsque vous êtes monté dans l'autobus qui allait vous amener à

18 l'extérieur de Trnopolje, avez-vous vu quelqu'un faisant partie de ce

19 convoi, donc le convoi qui était allé vers le mont Vlasic, avez-vous vu

20 une personne quelconque?

21 Réponse: Ce n'est que dans l'autobus que j'ai su que la Croix-Rouge

22 internationale -je ne sais trop de quelle façon- a pu faire sortir de

23 Banja Luka cinq personnes qui avaient survécu au massacre de Vlasic. Ils

24 les ont transférées à Trnopolje de façon clandestine et ils les ont

25 placées à bord de cet autobus.

Page 7793

1 Je me suis entretenu personnellement avec ces personnes. Ils m'ont raconté

2 leur histoire. Ils nous ont dit que des soldats entraient dans les camions

3 et les autobus et qu'ils demandaient à ce que les jeunes gens sortent à

4 l'extérieur pour que l'on puisse faire de la place pour des femmes et les

5 enfants. Et lorsque ces jeunes hommes sont sortis, le convoi a continué et

6 eux, ils ont été alignés devant une...

7 Question: Bien, nous avons entendu parler de cet événement, des personnes

8 même qui ont survécu ce massacre; donc il n'est pas nécessaire de nous

9 répéter ce que vous aviez entendu dire. Mais ce que je voulais savoir,

10 c'est si vous avez vu effectivement ces personnes lorsque vous êtes monté

11 dans l'autobus?

12 Réponse: Oui, ils se trouvaient avec moi dans le dernier bus.

13 Question: Juste avant de parler maintenant de la visite qu'a rendue Penny

14 Marshall au camp, j'aimerais vous poser la question suivante: de façon

15 très brève, le jour où la journaliste est arrivée, quelles étaient les

16 conditions au camp? Quelles conditions prévalaient au camp?

17 Réponse: Le jour précédent son arrivée… Pensez-vous au jour même avant ou

18 de façon générale?

19 Question: Je suis désolée, je crois que j'ai peut-être mal formulé ma

20 question. De façon générale, quelles étaient les conditions qui

21 prévalaient au camp? Et j'entends dans la période qui a précédé l'arrivée

22 du journaliste.

23 Réponse: Pour ce qui est du camp, je peux parler de trois temps, de trois

24 périodes. La période la plus difficile, c'est avant que le journaliste

25 arrive. Ensuite, la période lorsque le journaliste de la Croix-Rouge est

Page 7794

1 arrivé, et la période qui va de la fin de l'arrivée du journaliste, enfin

2 après l'arrivée du journaliste jusqu'à la fin.

3 La première période, celle qui était plus difficile, était atroce puisque

4 n'importe qui pouvait arriver au camp et passer à tabac qui que ce soit et

5 le tuer; il n'y avait absolument aucune sécurité. Il n'y avait pas de

6 nourriture, de sorte que cette période-là -que j'estime être la plus

7 difficile-, c'est la période effectivement la plus difficile du camp.

8 Question: Avant l'arrivée du journaliste, y a-t-il eu des préparatifs

9 faits par les autorités du camp?

10 Réponse: Azra a su, également par les gardes, que des journalistes

11 allaient peut-être venir de sorte qu'ils le savaient déjà, les autorités

12 le savaient déjà. Et les préparatifs ont été faits dans ce sens-là. On a

13 érigé une clôture de fils de métal qui allaient entre le magasin qui

14 vendait des matériaux de construction, et ce, jusqu'au bâtiment où les

15 détenus étaient placés; plus tard les détenus de Keraterm, ils les ont

16 séparés.

17 Et, plus tard, le commandant Kuruzovic nous a dit que c'étaient des gens

18 très dangereux, qu'il ne fallait avoir aucun contact avec ces derniers et

19 si jamais l'une de ces personnes voulait venir à la clinique, il leur

20 fallait être accompagné d'un garde. C'était avant qu'ils n'enlèvent le fil

21 de métal ou le fil barbelé.

22 Par la suite, lorsque les représentants ont commencé à venir ainsi que

23 d'autres journalistes, ils ont enlevé la clôture de fils barbelés pour que

24 l'on permette le déplacement libre des personnes. On pouvait monter des

25 tentes qui pouvaient abriter certaines personnes derrière la clinique, de

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1 sorte que les détenus ne soient pas trop entassés à l'intérieur du

2 bâtiment. Donc les choses se sont améliorées un peu après la visite des

3 journalistes.

4 Question: Bien. Mais maintenant, avant que les journalistes ne se

5 présentent pour la première fois, est-ce qu'il y avait des préparatifs qui

6 avaient été faits par les autorités du camp? Qu'en était-il, par exemple,

7 des femmes et des enfants?

8 Réponse: Les femmes et les enfants étaient transférés, on avait organisé

9 un convoi pour les transférer de sorte que, lorsque les journalistes sont

10 arrivés, il y avait peu de femmes et d'enfants; il y en avait encore mais

11 peu. Et les femmes qui venaient d'Omarska, qui avaient été emmenées avant

12 l'arrivée des journalistes, elles avaient également été transférées à

13 Prijedor. De sorte que lorsque les journalistes sont arrivés, il n'y avait

14 pas de femmes, les femmes qui se trouvaient au camp d'Omarska n'y étaient

15 plus; elles étaient parties avec le convoi qui à ce moment-là était parti.

16 Et, à bord de ce convoi, on avait également permis l'évacuation de

17 certaines personnes qui avaient été plus malades, enfin grièvement

18 malades.

19 Question: Nous allons maintenant passer une séquence vidéo, c'est un film

20 qui a été tourné par le ITN. Ensuite, nous allons voir ce que Penny

21 Marshall a vu lorsqu'elle est revenue, ce qu'on a montré à la télévision.

22 Je crois que vous avez également fait une entrevue à ABC Nigthline, c'est

23 un journaliste américain qui vous a interviewé; est-ce que c'est exact?

24 M. Merdzanic (interprétation): C'est exact.

25 Mme Korner (interprétation): Monsieur le Président, je demanderai à ce que

Page 7796

1 l'on montre une partie de ce film et nous avons tiré des séquences, bien

2 sûr, qui sont pertinentes. Vous allez peut-être voir plus particulièrement

3 lorsqu'on parle, lorsque l'on voit le programme américain, nous avons

4 éliminé la voix des personnes qui parlent.

5 M. le Président (interprétation): La cassette vidéo portera la cote S323.

6 Mme Korner (interprétation): Nous avons préparé également un transcript.

7 Ce n'est pas tout à fait facile de suivre le transcript; le transcript

8 existe en BCS et en anglais car il n'est pas très facile à suivre.

9 M. le Président (interprétation): Très bien. Donc nous y attribuerons la

10 cote "-1A" et "-1B".

11 Mme Korner (interprétation): Docteur, je sais que vous avez pu visionner

12 ces séquences. S'il y a certains commentaires que vous aimeriez apporter,

13 je vous demanderai de dire: "Arrêtez, stop!". Nous arrêterons la cassette

14 et vous allez pouvoir faire des commentaires, si vous le désirez.

15 M. le Président (interprétation): J'aimerais savoir s'il y a quelqu'un

16 dans la galerie du public. Je me demande si nous pouvons montrer cette

17 séquence vidéo aux visiteurs. Nous avons un visiteur dans la galerie du

18 public.

19 Mme Korner (interprétation): Je crois qu'il ne s'agit que d'une galerie

20 publique de deux chaises, il n'y a que deux sièges.

21 M. le Président (interprétation): Vous êtes d'accord? Pouvons-nous

22 procéder? Je vois que le visiteur dans la galerie du public fait un signe

23 affirmatif de la tête et le visiteur renonce à son droit de visionner la

24 séquence vidéo.

25 (Diffusion de la vidéo.)

Page 7797

1 Mme Korner (interprétation): Un moment, s'il vous plaît. Excusez-moi. Est-

2 ce qu'on pourrait revenir en arrière, je voudrais poser une question.

3 Non... Il faudrait donc la rejouer et je voudrais poser une question

4 concernant une des personnes que l'on voit sur la séquence vidéo.

5 Voilà, si vous pouvez stopper l'image pour commencer.

6 Docteur, j'aurais dû vous demander... Qu'est-ce que nous regardons là?

7 Qu'est-ce que nous voyons?

8 M. Merdzanic (interprétation): Ici, nous voyons les patients qui sont

9 debout à attendre. La personne qui porte une blouse blanche, est Mico

10 Kobas, un Serbe. Et l'homme, c'est l'homme à qui il manque un bras, il est

11 arrivé avec les journalistes. Mico Kobas était un personnel paramédical et

12 il attendait, en fait, dans la salle d'attente de la clinique de

13 Trnopolje.

14 Question: Je vous remercie beaucoup. Si maintenant vous voulez bien faire

15 défiler.

16 (Diffusion de la vidéo.)

17 Je vous remercie. Vous pouvez arrêter l'image.

18 Docteur, quel était le problème qu'il y avait à ce moment-là, s'il y en

19 avait un?

20 Réponse: Le problème qui se posait était dû au fait que Mico Kobas était

21 avec eux comme faisant partie de l'escorte, de sorte que nous n'étions pas

22 autorisés à dire quoi que ce soit. Nous ne voulions pas qu'il entendit

23 certaines choses et l'on essayait de se cacher derrière le caméraman afin

24 que le major ne me voit pas. J'ai mentionné le fait qu'elle devrait

25 essayer de le faire bouger de là afin que nous puissions poursuivre la

Page 7798

1 conversation en dehors de sa présence.

2 Question: Oui, je vous remercie. On peut continuer à présenter la

3 séquence, s'il vous plaît.

4 (Diffusion de la vidéo.)

5 Pouvez-vous arrêter l'image?

6 (Arrêt de la vidéo.)

7 Réponse: Ceci était la deuxième visite de Penny Marshall et on peut voir

8 ici clairement que les fils de fer avaient été enlevés, la palissade avait

9 été enlevée. C'est tout ce que je voulais faire comme remarque. Elle

10 vient, comme nous le voyons, de la direction de Prijedor.

11 Question: Je vous remercie. Nous pouvons continuer à faire défiler la

12 vidéo.

13 (Diffusion de la vidéo.)

14 Question: Est-ce que vous pouvez faire une pause un instant?

15 (Arrêt de la vidéo.)

16 Tout d'abord, Docteur, qui est l'homme que nous pouvons voir juste

17 derrière vous?

18 Réponse: C'est Vasif Gutic qui, à l'époque, était étudiant à la faculté de

19 médecine.

20 Question: Et lors de la deuxième visite, lorsque Penny Marshall est

21 revenue et a montré des journaux anglais, est-ce qu'il y avait quelqu'un

22 qui était présent? Quelqu'un des Serbes ou est-ce que vous étiez seul?

23 Réponse: Non, il n'y avait pas de Serbe présent.

24 Question: Bien, je vous remercie.

25 Monsieur le Président, la séquence que nous allons voir ensuite vient de

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1 ABC News des Etats-Unis. On peut poursuivre.

2 (Diffusion de la vidéo et traduction de la vidéo.)

3 "Tout autour du monde, partout… ça nous a aidés beaucoup puisque,

4 immédiatement après cela, la situation s'est améliorée. Ils ont enlevé les

5 fils de fer, ils ont commencé à apporter un peu de nourriture. J'ai pu

6 commencer à marcher librement. Les visites étaient autorisées. Les

7 Musulmans ont pu utiliser le train, ce qui n'était pas le cas avant. Nous

8 n'avions pas de médicaments, alors on n'en envoyait pas".

9 (Fin de la traduction de la vidéo.)

10 Réponse: J'ai dit, à un moment donné, que les Musulmans pouvaient prendre

11 le train. Je me référais aux visites, parce qu'il y avait encore des gens

12 à Prijedor qui n'avaient pas été détenus ou emmenés et qui avaient de la

13 famille à Trnopolje, et qui n'étaient pas autorisés à venir à Trnopolje ni

14 à monter à bord des trains pour rendre visite à leur famille avant ce

15 moment-là. Mais, par la suite, ils ont été autorisés à le faire. Et je me

16 référais aux visiteurs, pas aux détenus.

17 Question: Oui, on peut poursuivre.

18 (Diffusion de la vidéo.)

19 Veuillez faire une pause, s'il vous plaît. Et la dame qui parle, là?

20 (Arrêt de la vidéo.)

21 Réponse: La femme qui parle est Azra Blazevic, qui est vétérinaire.

22 Question: Nous pouvons poursuivre.

23 (Diffusion de la vidéo.)

24 "Cette nuit-là, lorsque vous êtes parti, il y avait environ 1.000

25 personnes d'Omarska qui avaient été emmenées à Manjaca. On ne sait pas

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1 exactement le chiffre, il se peut qu'ils aient été emmenés à Manjaca.

2 La vidéo présente une deuxième séquence.

3 Vous pouvez voir le Dr Idriz qui dirigeait la clinique de Trnopolje. Avez-

4 vous eu des cas de personnes qui ont été passées à tabac dans un autre

5 camp?

6 Le Docteur opine de la tête affirmativement: ils m'ont simplement vu

7 hausser les épaules et ne rien dire. Bien sûr, on n'avait pas le droit de

8 parler, il y avait toujours un guide. Aujourd'hui, le Dr Idriz est en

9 sécurité. Du camp de réfugiés de Karlovac, maintenant, il peut dire la

10 vérité en ce qui concerne Trnopolje. Dans le camp, certaines personnes

11 mouraient du passage à tabac, d'autres mouraient parce que nous n'avions

12 pas le droit de les emmener à l'hôpital. Un très grand nombre de personnes

13 ont été sorties du camp et tuées. En tout, le Dr Idriz dit qu'environ 200

14 hommes ont été tués à Trnopolje et que les passages à tabac –dit-il-

15 étaient constants.

16 Un corps roué de coups a été photographié par le Dr Idriz. Nous n'avons

17 pas, en fait, vu les passages à tabac, mais nous étions dans la pièce à

18 côté de l'endroit où ils se produisaient; nous pouvions les entendre et

19 entendre les cris.

20 Le Dr Idriz dit que le commandant du camp militaire Trnopolje avait essayé

21 de punir un violeur, mais lorsque le reste des soldats ont entendu parler

22 de cela, ils se sont saoulés et ils ont envoyé un ultimatum selon lequel

23 le soldat devrait être libéré ou bien ils tireraient contre leur propre

24 caserne, alors ils ont relâché ce soldat. Dès que les gens sont venus, on

25 les a simplement poussés dans le camp, on les a laissés s'organiser eux-

Page 7801

1 mêmes".

2 (Fin de la traduction de la vidéo.)

3 Question: Je vous remercie, ceci est la fin de la deuxième séquence.

4 Docteur, une simple question sur ce que nous avons entendu dire:

5 l'incident que vous décrivez sur la vidéo concernant les chars qui étaient

6 passés devant le bureau du commandant exigeant que l'on relâche un de leur

7 camarade, est-ce que c'est l'incident que vous nous aviez décrit plutôt,

8 lorsque vous avez parlé du char de régiment?

9 Réponse: Oui, ceci est l'événement en question. Il devait arriver à

10 Trnopolje de façon à pouvoir discuter de la question de savoir pourquoi

11 cette femme avait été emmenée pour subir un examen. Par la suite, on a su

12 qu'un de ces soldats, un de leurs soldats était détenu au camp de Prijedor

13 à cause de cela. Et le reste du groupe était allé à la caserne dans deux

14 chars et avait libéré leurs collègues.

15 Question: Bien, maintenant, pouvons-nous enfin parler très brièvement des

16 questions concernant… de ce qui s'est passé après la visite des

17 journalistes. La Croix-Rouge internationale est venue, je crois, vers le

18 15 août, est-ce exact?

19 Réponse: Oui, vers la mi-août environ.

20 Question: Et est-ce qu'ils ont commencé à enregistrer les gens qui se

21 trouvaient dans le camp?

22 Réponse: Pas le premier jour. Quelques jours plus tard, les gens qui se

23 trouvaient dans le camp ont été enregistrés. Chacun d'entre eux a reçu un

24 livret d'immatriculation, une sorte de pièce d'identité avec le numéro

25 d'immatriculation.

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1 Question: Et les fournitures en aliments et en médicaments se sont

2 améliorées après cette arrivée?

3 Réponse: La Croix-Rouge internationale a organisé une livraison complète

4 de nourriture sur une base quotidienne et nous avons également reçu tous

5 les médicaments dont nous avions besoin. Les fournitures m'arrivaient

6 directement. On venait d'abord me voir et je disais quel type de

7 médicament on avait besoin, lesquels me seraient, par la suite, apportés.

8 Question: Et en fin de compte, est-ce que le camp a été fermé, pour autant

9 que vous le sachiez, le 30 septembre, lorsque vous êtes parti?

10 Réponse: Le camp a été officiellement fermé, bien que quelques personnes

11 soient restées y compris des femmes et des enfants qui n'avaient pas été

12 immatriculés, des personnes qui étaient arrivées au camp plus tard avec

13 l'espoir d'être immatriculées, ce qui, par conséquent, leur aurait

14 normalement permis de partir.

15 Question: Avant d'être autorisé à monter sur le bus, avez-vous été obligé

16 de signer des documents, des papiers?

17 Réponse: Personne ne pouvait quitter le camp sans avoir d'abord signé un

18 certificat indiquant qu'ils abandonnaient tous leurs biens aux Serbes.

19 Nous avons tous reçu une copie, un exemplaire de ce document, j'en ai eu

20 un moi-même, mais malheureusement je l'ai déchiré.

21 Question: Qu'est-il arrivé aux biens que vous possédiez à Prijedor?

22 Réponse: Mes biens, les biens de la majorité des Musulmans ont été

23 détruits d'après ce qui m'a été dit sur ce qui s'est passé; c'est ce qui

24 se passait d'habitude après la purification ou le nettoyage. Les Serbes

25 emportaient avec eux tout ce qu'ils pouvaient, tout ce dont ils avaient

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1 besoin, tout ce dont ils avaient envie. Cela dépendait du village ou de la

2 ville.

3 Mais, par exemple, j'avais commencé à construire une maison dans la

4 vieille ville de Prijedor, dans le vieux quartier où vivaient la plupart

5 des Musulmans. Ce secteur était complètement rasé. On ne peut même plus y

6 trouver de fondation. Toutes les mosquées et toutes les églises croates

7 ont été détruites par les explosifs.

8 Question: Pendant la période que vous avez passée à Trnopolje, avez-vous,

9 vous-même, été passé à tabac?

10 Réponse: Non, je ne l'ai pas été. Ce qui s'est passé dans la vieille ville

11 de Prijedor n'avait rien à voir avec la guerre

12 Question: Vous dites que ce qui s'est passé dans la ville de Prijedor

13 n'avait rien à voir avec la guerre. Que voulez-vous dire par là?

14 Réponse: Je veux dire que la destruction, l'incendie, le fait de brûler

15 des maisons, les mosquées et les églises croates s'est produit après le

16 nettoyage. Les dommages qui étaient les résultats du bombardement étaient

17 quelque chose de tout à fait différent. On pourrait dire que ce n'était

18 pas intentionnel. Tandis que cela, en revanche, c'étaient des dommages

19 causés de façon intentionnelle conformément à un plan.

20 A mon avis, l'idée qui était à la base de ce type de destruction était

21 d'empêcher les gens de revenir, parce que quiconque possédait une maison

22 qui tenait encore debout aurait peut-être voulu revenir; mais si tout

23 était détruit, certainement cela empêchait les gens de revenir.

24 Question: Etes-vous retourné là-bas depuis 1992, Docteur?

25 Réponse: (Hors micro.)

Page 7804

1 (Cabine française: Nous n'avons pas entendu la réponse du témoin.)

2 Mme Korner (interprétation): Excusez-moi, Docteur, pourriez-vous, s'il

3 vous plaît, préciser votre réponse?

4 M. Merdzanic (interprétation): Non, non, je n'y suis pas retourné, plus

5 jamais depuis 1992, à Prijedor.

6 Question: Avez-vous reçu des menaces de mort sous une forme ou sous une

7 autre avant que vous ne quittiez Trnopolje?

8 Réponse: Juste avant qu'on ferme le camp, un jour avant la fermeture

9 définitive du camp, Mladen Mitrovic m'a approché et m'a dit qu'on lui

10 avait donné un ordre, l'ordre de me tuer, et qu'il ne faudrait pas que je

11 puisse quitter le camp vivant. Plus tard, au cours de la conversation, il

12 m'a dit qu'il n'allait pas le faire, qu'il ne le ferait pas. Je ne sais

13 pas s'il était sérieux ou s'il essayait seulement de me faire peur.

14 Question: Est-ce qu'il vous a dit qui avait donné l'ordre?

15 M. Merdzanic (interprétation): Non, il ne m'a pas dit de qui était

16 l'ordre.

17 Mme Korner (interprétation): Docteur, je vous suis extrêmement

18 reconnaissante. Merci beaucoup.

19 M. le Président (interprétation): Avant de passer à la question suivante

20 -qui est de savoir comment nous allons aller de l'avant-, je voudrais

21 demander au représentant du Bureau du Procureur si c'est exprès ou non ou

22 si c'est moi qui ai manqué quelque chose, si quelque chose m'a échappé

23 dans la déclaration du témoin faite en août 2000, à la page 14, paragraphe

24 2, en ce qui concerne une famille musulmane du nom de Foric.

25 Mme Korner (interprétation): Il a témoigné, Monsieur le Président. Il a

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1 dit qu'on les a emmenés.

2 M. le Président (interprétation): Nous n'avons pas inclus ce point, donc

3 je voudrais y revenir. Le croquis avec le numéro ERN 10035315.

4 Mme Korner (interprétation): Effectivement, Monsieur le Président, mais

5 ça, c'étaient des propos délibérés. Mais si vous voulez, nous pouvons

6 certainement…

7 M. le Président (interprétation): Oui, ce serait utile pour une meilleure

8 compréhension de cette question si nous pouvions y revenir et entrer un

9 peu dans les détails, de manière à mieux comprendre ce croquis portant la

10 cote S324.

11 Mme Korner (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Je voudrais être

12 bien sûre que j'ai le bon dessin… donc 315… Oui, c'est bien cela.

13 M. Merdzanic (interprétation): Voulez-vous que j'explique comment ils ont

14 emmené les Foric?

15 Question: Oui, Docteur, si vous le voulez bien.

16 M. Merdzanic (interprétation): Voici la clinique, voici le couloir qui est

17 de ce côté du bâtiment, voici le bâtiment de l'école et de l'entrée

18 principale de l'école. Les détenus quittant le bâtiment de l'école ont été

19 mis en rangs dans plusieurs rangs. On a appelé leur nom. On a dit que ceux

20 qui portaient le nom de famille de Foric devaient faire un pas en avant.

21 Cinq ou six personnes sont sorties des rangs et les autres ont pu

22 repartir. Les Foric ont ensuite été emmenés le long de cette route, vers

23 le sud, vers la gare de chemin de fer. Si ma mémoire ne me trompe pas, ils

24 ont été emmenés dans la direction de la scierie, de ce côté-là de la

25 route, et c'est là qu'ils ont été tués.

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1 Quant aux Murgic, on les a emmenés vers l'étang. On ne peut pas voir ici,

2 mais on y arrive par la route que vous voyez là. Il faut passer par la

3 gare de chemin de fer et on se trouve, à ce moment-là, à côté d'un grand

4 étang poissonneux. Lorsqu'ils ont quitté la clinique, ils se trouvaient à

5 l'extérieur de la clinique, ils ont suivi cette route en allant en

6 direction de la gare.

7 Mme Korner (interprétation): Est-ce que vous voulez poser une question

8 particulière, Monsieur le Président? Non. Alors, est-ce que ceci pourrait

9 être versé au dossier en tant qu'élément de preuve?

10 M. le Président (interprétation): C'était donc le S324. Y a-t-il des

11 objections?

12 M. Lukic (interprétation): Pas d'objection, Monsieur le Président.

13 M. le Président (interprétation): (Hors micro.) Je vous remercie beaucoup

14 de ces observations complémentaires sur la base de ce croquis, qui

15 facilitent notre compréhension de votre déposition.

16 Il n'est pas possible de commencer le contre-interrogatoire aujourd'hui.

17 C'est la raison pour laquelle nous devrons vous demander, Docteur, de

18 venir nous retrouver demain matin à 9 heures 30 pour répondre aux

19 questions de la défense. Mais je vois que nous avons une question de votre

20 part. Je vous écoute.

21 M. Merdzanic (interprétation): Je me suis rappelé le nom de Dragan Skrbic.

22 Dragan Skrbic était le soldat qui est venu à la clinique à Kozarac et son

23 père, qui était avec Rado Baltic à un moment donné. Et il y a un ajout

24 supplémentaire que je voudrais faire en ce qui concerne les postes de

25 contrôle et de garde, lorsque nous avons parlé des tireurs isolés et des

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1 nids de mitrailleuses.

2 Je voudrais ajouter que les gardes n'étaient pas toujours les mêmes. Il y

3 avait des tours de garde. D'habitude, toutes les deux semaines, il y avait

4 une rotation. Ils étaient là avec leur arme de service, leur arme

5 personnelle, et ça dépendait de leur tour et des armes qu'ils avaient. La

6 situation a changé. Je suis sûr qu'il y a dû y avoir des gardes qui

7 n'avaient pas de mitraillette par exemple ou de mitrailleuse. Ceci a dû se

8 passer à des moments où ils n'avaient que des armes légères, des armes

9 personnelles. Donc ça dépendait vraiment beaucoup du type d'unité qui

10 s'occupait de la sécurité et qui montait la garde. Ce sera tout. Je vous

11 remercie.

12 M. le Président (interprétation): Je vous remercie beaucoup de ces

13 remarques complémentaires. Comme je l'ai mentionné au début, nous sommes

14 heureux que vous ayez été prêt à entendre et répondre aux questions de la

15 défense(sic), que vous soyez prêt à répondre aux questions de la défense

16 demain dans cette même salle d'audience. Je vais demander à l'huissier

17 d'escorter le témoin hors du prétoire. Je vous remercie beaucoup.

18 (Le témoin, M. Idriz Merdzanic, est reconduit hors du prétoire.)

19 (Questions relatives à la procédure.)

20 M. le Président (interprétation): Entre-temps, il me reste à verser au

21 dossier les documents qui ne l'ont pas été, le S15-37,"-38", "-39", "-40"

22 et S321-16 et "-17". En ce qui concerne la journée de demain, quelles sont

23 les prévisions de la défense pour ce qui serait de la durée du contre-

24 interrogatoire?

25 M. Lukic (interprétation): Monsieur le Président, nous pourrons terminer

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1 notre contre-interrogatoire très probablement au cours de la première

2 partie de l'audience.

3 M. le Président (interprétation): Vous voulez dire au cours des premières

4 90 minutes?

5 M. Lukic (interprétation): Oui.

6 M. le Président (interprétation): Est-ce que je peux vous demander si Me

7 Ostojic sera présent demain?

8 M. Lukic (interprétation): Je lui ai parlé il y a deux heures et il m'a

9 informé du fait qu'il n'était pas en mesure d'obtenir un siège sur un vol,

10 sur un avion pour rentrer à La Haye.

11 M. le Président (interprétation): Ceci cause un problème. Il est envisagé

12 que, comme nous l'avions prévu la semaine dernière, nous mettions fin,

13 nous arrivions au bout de la déposition de M. Sebire. Il est exact qu'il

14 veut repartir et quitter La Haye?

15 Mme Korner (interprétation): Non, Monsieur le Président. Il y a un léger

16 malentendu de M. Koumjian. Il devait partir pour aller interviewer des

17 témoins dimanche dernier, mais à cause de ce qui s'est passé, tout ceci a

18 été changé de sorte qu'il est ici à partir de maintenant et il est tout à

19 fait prêt à venir déposer demain, à ce que j'ai compris.

20 M. le Président (interprétation): Oui, mais comme vous le savez tous, nous

21 avons seulement une journée de disponible et nous devons utiliser cette

22 journée aux fins d'entendre sa déposition. Par conséquent, nous allons

23 recevoir des documents supplémentaires et, par conséquent, je pense qu'il

24 n'y a pas d'autre manière de procéder. Nous avons déjà plusieurs fois

25 prêté quelque assistance à la défense lorsque Me Ostojic ne pouvait pas

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1 être présent, mais je crois que les questions qui demeurent pourraient

2 être posées à M. Sebire par vous ou par M. Stakic. Et, en fait, nous

3 devrions nous concentrer sur ce qui aura la valeur probante la plus haute,

4 c'est-à-dire le nouveau tableau.

5 (M. Koumjian arrive dans le prétoire.)

6 J'espère que nous en aurons fini demain avec ce nouveau tableau, qui est

7 basé sur les personnes qui sont nommées à l'annexe du quatrième Acte

8 d'accusation modifié. Pouvons-nous être d'accord qu'après avoir conclu la

9 déposition de M. Merdzanic, nous pourrons alors continuer avec la

10 déposition de M. Sebire?

11 Mme Korner (interprétation): Aucun problème de notre côté, Monsieur le

12 Président.

13 M. Lukic (interprétation): Nous ne préfèrerions pas, Monsieur le

14 Président, mais si c'est votre décision, alors nous nous y plierons.

15 M. le Président (interprétation): Je crois que c'est nécessaire pour les

16 raisons expliquées plus tôt. Et si des questions devaient demeurer, sans

17 aucun doute on trouverait une solution qui permette à la défense de poser

18 ses questions supplémentaires et, éventuellement, de les poser au témoin.

19 Donc je prie le Bureau du Procureur d'être prêt pour demain lorsque M.

20 Sebire comparaîtra. J'ai entendu dire, sur la base de rumeurs, qu'il avait

21 travaillé pendant l'ensemble du week-end pour préparer le nouveau tableau,

22 et j'espère qu'il pourra nous le fournir.

23 Mme Korner (interprétation): Je crois qu'il a travaillé toute la nuit

24 aussi ainsi que le week-end, donc je pense qu'il sera en mesure de le

25 faire. Pourrais-je simplement mentionner une chose, Monsieur le Président?

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1 Vous avez rendu une ordonnance pour ce qui est de la traduction du rapport

2 de M. Corin, il devait être prêt dans les sept jours. Est-ce que ceci

3 inclut la version française, parce que je vois que nous avons un problème

4 de ce côté-là?

5 M. le Président (interprétation): Pour commencer, il s'agit du droit de la

6 défense de M. Stakic. Par conséquent, la priorité la plus absolue doit

7 être attribuée à la version BCS, aussi rapidement que possible s'il vous

8 plaît, ensuite les traductions en français devront suivre.

9 Mme Korner (interprétation): Oui, c'était juste pour vérifier.

10 M. le Président (interprétation): Y a-t-il autre chose concernant les

11 préparatifs par rapport à demain, parce qu'il se peut que nous ayons un

12 tout petit peu plus de temps à disposition?

13 Mme Korner (interprétation): Non, Monsieur le Président. Comme vous le

14 savez, j'ai apparu et disparu en disant que j'avais une plaidoirie à faire

15 ou un débat juridique à faire. Je sais, bien sûr, que ce doit être les

16 trois Juges qui doivent m'entendre. Je me demande si nous pourrions

17 adopter une procédure, un peu comme celle d'hier, où nous utilisons le

18 temps pendant lequel je pourrais m'adresser à la Chambre sans prendre une

19 décision quelconque jusqu'à ce que le Juge Fassi Fihri soit revenu? Et

20 c'est le sens général des demandes que je voudrais présenter.

21 M. le Président (interprétation): Essayons de voir si ce sera possible,

22 nous reviendrons à cela demain, et j'espère qu'aucun autre problème en

23 l'espèce ne se posera et qu'il n'y aura pas d'autre priorité.

24 Mme Korner (interprétation): A ce que j'ai compris, il n'y aura pas de

25 décision prise avant demain, et M. Cayley sera en mesure de faire face aux

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1 questions qui se poseront demain.

2 M. le Président (interprétation): Finalement, pour aujourd'hui -parce

3 qu'on a fait des préparatifs, nous avons discuté brièvement de la

4 question-, il est envisagé que dans le pire scénario, au cas où le Juge

5 Fassi Fihri –ce qu'à Dieu ne plaise- ne soit pas disponible d'ici lundi

6 prochain, nous savons que le témoin qui a été convoqué pour lundi et mardi

7 prochain a un calendrier extrêmement serré. Par conséquent, est-ce que les

8 parties seraient d'accord pour qu'à cette fin, nous agissions en vertu des

9 dispositions de l'Article 71 du Règlement? Ce qui veut dire que nous

10 accepterions une déposition.

11 Un des Juges serait responsable d'entendre cette interview et, en même

12 temps, on veillerait au respect de tous les droits procéduraux des

13 parties. On utiliserait la même méthode pour interviewer cette personne et

14 la même durée de temps pour la possibilité d'un contre-interrogatoire pour

15 la défense.

16 Ensuite, le Juge Fassi Fihri sera à nouveau disponible et nous pourrions,

17 à ce moment-là, introduire le résultat de cette déposition et le faire

18 inclure au compte rendu de l'audience.

19 Est-ce que ceci pourrait être accepté?

20 Mme Korner (interprétation): Monsieur le Président, je préfère entendre la

21 défense d'abord.

22 M. Lukic (interprétation): Monsieur le Président, il n'y a pas d'objection

23 pour procéder de la sorte.

24 M. le Président (interprétation): Merci.

25 Mme Korner (interprétation): Monsieur le Président, si la défense n'a pas

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1 d'objection, nous non plus, nous n'avons absolument aucune objection.

2 M. le Président (interprétation): Bien. Donc nous espérons pouvoir siéger

3 avec une Chambre pleine lundi, donc avec les trois Juges. Mais essayez de

4 comprendre que je vous informerai si une audience aura lieu jeudi ou

5 vendredi. Il serait prématuré de vous donner une réponse là-dessus

6 aujourd'hui. Je n'ai pas eu de contact avec le Juge Fassi Fihri au cours

7 de la pause déjeuner, mais je vous informerai dans les plus brefs délais

8 quant à la situation qui prévaudra pour le reste de la semaine.

9 Mme Korner (interprétation): Monsieur le Président, nous allons avoir

10 d'énormes problèmes quant à certains témoins. Pour ce qui est de M. Brown,

11 par exemple, nous avons besoin d'un délai assez prolongé pour préparer ce

12 témoin, pour revoir les documents. Il sera un peu difficile d'entendre ce

13 témoin jeudi. Nous avons besoin d'un peu de temps pour nous préparer et

14 pour préparer le témoin.

15 M. le Président (interprétation): Très bien. Eh bien, nous allons voir

16 d'abord… en fait, il faudrait revoir le tout ensemble.

17 Y a-t-il des questions péremptoires pour aujourd'hui?

18 M. Lukic (interprétation): Eh bien, il serait peut-être juste envers Me

19 Ostojic de l'informer de ne pas se présenter jeudi et vendredi. A ce

20 moment-là, je vous demanderai, Monsieur le Président, s'il vous serait

21 possible de nous informer le plus tôt possible quant au reste du

22 calendrier de la semaine.

23 M. le Président (interprétation): J'essayerai de le faire dans les deux

24 heures qui suivent.

25 M. Lukic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

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1 M. le Président (interprétation): Y a-t-il autre chose?

2 Mme Korner (interprétation): Non, Monsieur le Président.

3 M. le Président (interprétation): Cela met fin à l'audience d'aujourd'hui,

4 en ce soixante-dixième jour d'audition. Et nous levons la séance jusqu'à

5 demain matin, 9 heures 30.

6 (L'audience est levée à 16 heures 12.)

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