Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Vendredi 17 janvier 2003.)

2 (Audience publique.)

3 (L'audience est ouverte à 13 heures 40.)

4 M. Le Président (interprétation): Bonjour à tous. Veuillez, s'il vous

5 plaît, nous donner le numéro de l'affaire.

6 Mme Dahuron (interprétation): Bonjour. Affaire IT-97-24-T, le Procureur

7 contre Milomir Stakic.

8 M. Le Président (interprétation): Merci. Présentation des parties?

9 Mme Sutherland (interprétation): Nicholas Koumjian, Ann Sutherland et Ruth

10 Karper pour l'accusation.

11 M. Le Président (interprétation): Et pour la défense?

12 M. Lukic (interprétation): Bonjour, Maître Branko Lukic et John Ostojic

13 pour la défense.

14 M. Le Président (interprétation): Merci.

15 Je souhaite également présenter mes remerciements à la défense pour nous

16 avoir préparé de nouveaux résumés relatifs aux déclarations attendues des

17 témoins.

18 Vous avez vu quels sont nos horaires aujourd'hui. Essayons au maximum d'en

19 terminer avec l'audition du témoin d'aujourd'hui. Mais, sans vouloir donc

20 vous imposer des limites de temps strictes, tout de suite, je souhaiterais

21 cependant que vous arriviez à vous limiter à peu près à deux heures et

22 demie voire trois heures au maximum.

23 Je demande également à l'accusation de se limiter dans ses questions pour

24 que nous puissions en terminer aujourd'hui vers 19 heures.

25 Personne n'a d'objection à présenter? Je demande donc à l'huissier de bien

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1 vouloir faire entrer le témoin dans le prétoire.

2 Par, peut-être, excès de prudence, je me tourne vers la défense pour

3 m'assurer qu'il n'y a pas de mesures de protection qui ont été demandées.

4 M.Lukic (interprétation): Non, pas de mesures de protection.

5 (Le témoin, M. Radovan Krejic, est introduit dans le prétoire.)

6 M. Le Président (interprétation): Bonjour.

7 M. Krejic (interprétation): Bonjour.

8 M. Le Président (interprétation): Merci d'être venu à La Haye. Etes-vous

9 en mesure de m'entendre dans une langue que vous comprenez?

10 M. Krejic (interprétation): Oui, je vous entends.

11 M. Le Président (interprétation): Veuillez, je vous prie, prononcer la

12 déclaration solennelle.

13 M. Krejic (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la

14 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

15 M. Le Président (interprétation): Merci. Veuillez prendre place.

16 Vous êtes donc un témoin à décharge et je donne la parole à Me Lukic.

17 (Interrogatoire principal du témoin, M. Radovan Krejic, par Me Lukic.)

18 M. Lukic (interprétation): Bonjour, Monsieur Krejic.

19 M. Krejic (interprétation): Bonjour.

20 Question: Je m'appelle Branko Lukic. Avec John Ostojic, je représente les

21 intérêts du Dr Stakic ici au Tribunal.

22 En premier lieu, je souhaiterais vous demander de bien vouloir nous donner

23 un certain nombre d'informations vous concernant. Tout d'abord, aux fins

24 du compte rendu d'audience, veuillez nous donner vos noms et prénoms.

25 Réponse: Je m'appelle Radovan Krejic, Le nom de mon père est Milos. Je

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1 suis né le 13 novembre 1946. J'habite à Prijedor, j'y habite depuis 1990.

2 Avant j'habitais à Sanski Most qui se trouve à 30 kilomètres de Prijedor.

3 Souhaitez-vous que je vous donne des informations supplémentaires?

4 Question: Veuillez également nous dire quelle est votre profession?

5 Réponse: J'ai été diplômé de la faculté de droit de Belgrade et je

6 travaille actuellement au sein de l'entreprise chargée de la production

7 énergétique dans la ville de Prijedor, et cette entreprise s'appelle

8 "Gradske Poplane".

9 Question: Est-ce que vous avez également travaillé dans le domaine de la

10 santé?

11 Réponse: Il y a quatre ans, je travaillais dans une institution qui

12 s'appelait "L'assurance sociale." Maintenant c'est un fond qui s'occupe de

13 la santé. Donc j'ai passé toute ma vie à travailler au sein de cette

14 institution qui s'intéresse aux soins médicaux.

15 Question: N'avez-vous jamais été membre d'un parti politique? Et si oui,

16 lequel?

17 Réponse: Oui, avant la guerre, j'étais membre de ce qu'on appelait à

18 l'époque "la ligue communiste de Yougoslavie". Et pendant une période de

19 temps précédent la guerre, j'étais membre des forces réformistes de

20 Yougoslavie qui était dirigée par Ante Markovic.

21 Cela, c'était juste avant le début de la guerre. Et, depuis peu, je suis

22 membre du parti des sociaux-démocrates; c'est le parti social-démocrate

23 indépendant dirigé par Milorad Dodik.

24 Question: N'avez-vous jamais été membre du parti démocratique serbe?

25 Réponse: Non, je n'ai jamais été membre de ce parti. J'ai coopéré avec eux

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1 quand ils étaient au pouvoir et je coopère encore avec les organes de ce

2 parti, dans la mesure où mes activités professionnelles nécessitent

3 parfois des contacts avec ce parti.

4 Question: N'avez-vous jamais occupé le poste de député au sein de

5 l'assemblée municipale de Prijedor?

6 Réponse: Pendant une brève période de temps, j'ai été député. Je n'ai pas

7 été élu, j'ai été désigné à ce poste. Mais ceci n'a duré que très peu de

8 temps. Je crois que c'était à la fin de 1993, vers la fin de l'année 1993.

9 Question: 1992 ou 1993?

10 Réponse: A la fin de 1992 et au début de 1993.

11 Question: Etiez-vous le président de la commission chargée des affaires

12 sociales qui a été mise en place par le SDS?

13 Réponse: Oui. Le SDS ou plutôt Simo Miskovic qui était alors président du

14 SDS m'a proposé de diriger une commission qui serait chargée de proposer

15 la meilleure organisation possible concernant les activités qui

16 m'intéressaient professionnellement. Il s'agissait donc des services

17 sociaux et, moi, personnellement, j'étais chargé des services médicaux.

18 Question: En tant que président de cette commission, avez-vous assisté à

19 des réunions du SDS?

20 Réponse: A deux reprises, j'ai été présent lors de la réunion du conseil

21 municipal ou du comité municipal du SDS.

22 Question: Nous avons évoqué les informations vous concernant

23 personnellement, et maintenant j'aimerais vous interroger au sujet de

24 l'année 1992.

25 En premier lieu, en tant que directeur de l'institution chargée de la

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1 santé dans la région de Prijedor, quelles municipalités étaient concernées

2 par vos activités?

3 Réponse: Quatre municipalités qui se trouvaient dans la région de Prijedor

4 à l'époque: Prijedor, Sanski Most, Bosanska Dubica et Bosanski Novi,

5 quelque 230.000 habitants en tout.

6 Question: En 1992, dans le cadre de vos activités professionnelles, est-ce

7 que vous vous êtes entretenu avec M. Muhamed Cehajic?

8 Réponse: Oui.

9 Question: Quelle a été la teneur de vos conversations? Pouvez-vous nous

10 dire comment ça s'est passé?

11 Réponse: Je l'ai rencontré à plusieurs reprises, M. Cehajic. Il était

12 président de l'assemblée municipale et nous nous connaissions bien parce

13 qu'il avait été mon professeur au lycée. De plus, nous étions natifs tous

14 les deux de Sanski Most. Et si vous évoquez les conversations que j'ai

15 eues à propos du financement des soins médicaux, je peux vous dire la

16 chose suivante, si vous souhaitez que je vous donne des détails.

17 Question: Allez-y.

18 M. Krejic (interprétation): Juste avant le début de la guerre, en raison

19 de la complexité de la situation à laquelle nous étions confrontés,

20 Muhamed Cehajic, en tant que président de l'assemblée, m'a appelé au

21 téléphone et il a exigé de moi que j'utilise les fonds qui étaient

22 consacrés aux soins médicaux, les cotisations médicales pour financer des

23 institutions médicales qui, en fait, n'auraient pas dû bénéficier tout à

24 fait des sommes pour ces montants.

25 Il s'agissait de sommes qui devaient être financées par la caisse

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1 d'assurance maladie. Or, lui, il voulait que l'argent reste à Prijedor et

2 qu'il ne reste pas à financer les institutions médicales se trouvant à

3 Bosanska Dubica, Sanski Most, Bosanski Novi.

4 Il y avait déjà sur place une confrontation entre le SDA et le SDS, et je

5 crois qu'eux, ils voulaient s'assurer que les sommes concernées ne soient

6 pas utilisées dans des objectifs qu'ils ne souhaitaient pas. Je lui ai

7 expliqué que tous les fonds, toutes les cotisations étaient versées au

8 fond républicain à Sarajevo et que c'était depuis Sarajevo, en fonction

9 des affectations comptables prévues, que l'argent était ensuite renvoyé à

10 Prijedor. Ensuite, c'était moi qui étais censé diriger ces fonds vers les

11 quatre municipalités concernées.

12 M. Lukic (interprétation): Nous allons nous interrompre un instant,

13 l'accusation souhaite intervenir.

14 Mme Sutherland (interprétation): Je vais demander au témoin de bien

15 vouloir ralentir son débit, car il est pratiquement impossible de le

16 suivre. Il est très difficile pour les interprètes de faire un travail

17 correct.

18 M. le Président (interprétation): Oui, certes. Notre objectif, bien

19 entendu, c'est d'en terminer aussi rapidement que possible avec la

20 déposition du témoin, mais je me rends bien compte que les interprètes

21 sont en difficulté du fait du débit du témoin.

22 Je vous remercie Monsieur le Témoin d'essayer d'être aussi rapide que

23 possible, mais il faut quand même ralentir un petit peu. Merci d'avance.

24 M. Krejic (interprétation): Je vais essayer de ralentir.

25 M. Lukic (interprétation): Essayons de ralentir un peu.

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1 M. Krejic (interprétation): Je peux continuer?

2 Question: Allez-y.

3 Réponse: J'ai dit à M. Cehajic, en tant que président de l'assemblée

4 municipale de Prijedor, quelles étaient les règles qui s'appliquaient à

5 notre travail. Je lui ai dit que nous travaillions toujours en fonction

6 des mêmes règles et que j'allais continuer à travailler en fonction des

7 règlements qui étaient toujours en vigueur. En d'autres termes, j'allais

8 continuer à distribuer les fonds que je recevais sur le compte postal de

9 la caisse d'assurance maladie, conformément aux règles qui devaient

10 s'appliquer et qui étaient prévues.

11 Et M. Cehajic a réagi assez brutalement: il m'a menacé, il a pris un ton

12 menaçant pour exiger que je lui obéisse, pour que je conserve l'argent sur

13 le compte postal jusqu'à être plus amplement informé. Je suis resté sur

14 mon point de vue, je n'ai pas accepté ses exigences. Et M. Cehajic m'a

15 menacé: il a dit qu'il allait me démettre de mes fonctions de directeur si

16 je continuais à exercer mes fonctions de la sorte.

17 J'ai été contraint d'attirer l'attention de M. Cehajic sur les pouvoirs

18 qui étaient les siens, et je lui ai dit que mon poste et les fonctions que

19 je remplissais ne relevaient pas de l'autorité des organes municipaux,

20 mais que j'avais été désigné par l'organisme me concernant, à savoir la

21 caisse d'assurance maladie de Prijedor qui édictait toutes les

22 réglementations pertinentes pour la région de Prijedor dans le domaine des

23 soins médicaux. C'est cet organisme qui m'avait nommé au poste de

24 directeur et je relevais de cet organisme.

25 Question: Monsieur Cehajic, quel poste occupait-il à l'époque?

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1 Réponse: Comme je vous l'ai déjà dit, c'était le président de l'assemblée

2 municipale de Prijedor.

3 Question: A peu près à cette époque ou peu après, est-ce que Mirza

4 Mujadzic, président du SDA a pris contact avec vous?

5 Réponse: Oui, M. Mujadzic était président du SDA. Il se trouvait que son

6 bureau se trouvait dans le même bâtiment que le mien. Lui, il était au

7 rez-de-chaussée et moi au premier étage, un étage au-dessus. Si bien qu'on

8 se voyait très souvent. Assez souvent d'ailleurs, il venait dans mon

9 bureau pour discuter de la situation à laquelle nous étions confrontés et

10 pour discuter de l'organisation des soins. Lui-même était médecin, il

11 était très intéressé par nos activités à nous.

12 Lorsque M. Cehajic et moi-même, nous nous sommes brouillés, le Dr Mujadjic

13 est venu me voir. Il avait dû être informé par M. Cehajic de ce qui était

14 advenu et il a essayé d'assurer une médiation entre nous, il a essayé de

15 nous aider à trouver un compromis. Il m'a dit que M. Cehajic n'avait pas

16 eu raison de me demander ce qu'il m'avait demandé et que ces tensions

17 n'étaient pas nécessaires.

18 Le lendemain, sans doute sur l'insistance de M. Mujadjic, M. Cehajic est

19 venu à mon bureau et nous avons de nouveau abordé toutes ces questions. Et

20 j'ai demandé à mon plus proche collaborateur, Cikota, je lui ai demandé de

21 venir avec moi. C'est un Musulman. Et vu la situation de l'époque, j'ai

22 pensé que c'était bien qu'il soit présent au cours de cette conversation

23 pour faire en sorte que ma position et mon point de vue soient compris au

24 mieux. Je voulais qu'on continue à travailler constructivement et j'ai

25 voulu qu'il m'aide à bien faire comprendre cela.

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1 Après cette conversation, M. Cehajic, on peut dire, a reconnu que mon

2 point de vue était un point de vue valable, mais il éprouvait toujours un

3 certain ressentiment envers moi, et ceci d'ailleurs à continuer ensuite.

4 Cette conversation a prouvé que j'avais tout à fait raison s'agissant de

5 l'application des réglementations qui étaient en vigueur à l'époque.

6 Question: Est-ce que M. Sead Cikota est encore en vie? Sead Cikota?

7 Réponse: Oui, il est encore en vie. Monsieur Cikota, Sead Cikota était

8 dans une espèce de prison pendant la période de crise de l'été 1992, et,

9 par la suite, il a été relâché, il a été reconnu innocent. Pendant une

10 brève période, il s'est trouvé à Trnopolje dans le centre de réception.

11 Par la suite, à sa propre demande, il est parti, est allé en(expurgé); il

12 y réside encore avec sa famille.

13 Il vient (expurgé) assez souvent. Nous sommes maintenant très bons amis.

14 Il a pris sa retraite. Nous l'avons aidé à obtenir sa pension de retraite,

15 il la reçoit régulièrement. Il m'a rendu visite l'an dernier au Jour de

16 l'An et, si vous avez besoin, vous pouvez le vérifier avec M. Cikota.

17 Question: Quand vous dites qu'il a été incarcéré pendant une brève

18 période, est-ce que vous vous référez au centre d'investigation d'Omarska?

19 Réponse: Oui.

20 Question: Le centre d'investigation d'Omarska, est-ce qu'il a été

21 transféré à Trnopolje?

22 Réponse: Oui, c'est ce que j'ai dit.

23 Question: Est-ce que vous lui avez rendu visite là-bas à Trnopolje? Et

24 qu'est-ce que vous avez vu là-bas?

25 Réponse: Je lui ai rendu visite une fois après avoir été informé qu'il

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1 était à Trnopolje. Trnopolje était très proche de Prijedor et on m'a dit

2 que je pouvais facilement m'y rendre. Et puisqu'il s'agissait de réfugiés

3 -tous étaient des réfugiés-, avec un de nos associés qui avait

4 précédemment été directeur de l'hôpital, Monsieur Juto Rodic, je suis allé

5 à Trnopolje et j'ai vu M. Cikota et j'ai passé un certain temps avec lui.

6 J'ai pensé que je pouvais lui proposer de rentrer chez lui en voiture,

7 mais il a insisté pour rester sur place parce qu'il n'avait pas encore

8 pris les arrangements nécessaires pour ses documents pour son départ. Il

9 disait que ses papiers, ses documents n'étaient pas encore prêts pour

10 pouvoir le faire, pour pouvoir partir.

11 M. Lukic (interprétation): Nous parlons maintenant de l'année 1992.

12 Avant que la guerre n'éclate, avant la prise de pouvoir de Prijedor, est-

13 ce que les Musulmans, les Croates et les Serbes ont quitté Prijedor?

14 Pouvez-vous nous dire si vous aviez connaissance de cela lorsque vous en

15 êtes devenu conscient? Est-ce que vous avez remarqué ça pour la première

16 fois? Et qui partait?

17 M. Krejic (interprétation): C'était la population qui quittait Prijedor.

18 Je ne dirai pas les Musulmans, les Croates ou les Serbes. Tout le monde

19 partait vers la fin de 1991, et ce, tout au long de 1991. Lorsque la

20 guerre a éclaté en Croatie et lorsque les tensions se sont accrues dans

21 l'ex-Yougoslavie et en Bosnie-Herzégovine, lorsque la situation est

22 devenue très difficile du point de vue politique, les gens avaient peur.

23 Ils avaient peur que les conflits n'éclatent à Prijedor, ils ont commencé

24 à partir en prenant des directions différentes pour des régions

25 différentes de la Yougoslavie. Et même pour l'étranger.

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1 Mme Sutherland (interprétation): Je suis désolée d'interrompre à nouveau,

2 Monsieur le Président. Mais, par excès de prudence, pourrait-on peut-être

3 faire en sorte que le pays qui est mentionné à la page 9, lignes 11 et 12,

4 soit expurgé du compte rendu?

5 M. le Président (interprétation): Oui, il faut que nous soyons

6 particulièrement prudents, extrêmement prudents.

7 Je voudrais donc demander à Madame la Greffière de faire en sorte que l'on

8 expurge le compte rendu, en enlevant le nom du pays de résidence de la

9 troisième personne mentionnée, s'il vous plaît.

10 Veuillez poursuivre.

11 M. Lukic (interprétation): Est-ce que vous avez fait partir des membres de

12 votre famille de Prijedor? Et quand?

13 M. Krejic (interprétation): Oui, je l'ai fait. Je crois que c'était en

14 avril. Ma fille est partie avec ma belle-fille, ma belle-soeur, la femme

15 de mon frère; elle était sur le point d'accoucher et il fallait qu'elle

16 puisse se rendre dans un endroit où elle serait en sécurité, de façon à ce

17 que la naissance se passe sans difficulté. J'ai donc saisi cette occasion,

18 pour ainsi dire, et j'ai aidé ma fille et ma belle-soeur pour aller à Novi

19 Sad, de façon à ce qu'elles puissent se trouver en sûreté, ma fille pour

20 ses études et ma belle-soeur pour cette naissance à venir. Par la suite,

21 j'ai envoyé également mon fils en Vojvodine pour ses études afin qu'il

22 puisse aller régulièrement à l'école.

23 Question: Indépendamment des personnes qui quittaient Prijedor, ceux qui

24 restaient à Prijedor, est-ce que d'autres arrivaient en même temps à

25 Prijedor venant d'ailleurs?

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1 Réponse: Ceux qui quittaient Prijedor étaient essentiellement des

2 étudiants, des enfants, des femmes, des femmes sans emploi, ceux qui

3 étaient en mesure de quitter Prijedor sans aucune conséquence pour leur

4 travail. Mais, par la suite, même certains ont quitté leur travail et sont

5 partis parce que les choses empiraient.

6 Il y avait des gens qui arrivaient à Prijedor, essentiellement des gens

7 qui venaient de Croatie parce que la guerre avait déjà commencé en Croatie

8 et que tous ceux qui le pouvaient, tous ceux qui avaient une famille à

9 Prijedor ou des relations de travail avaient quelqu'un chez qui ils

10 pouvaient aller et, à ce moment-là, ils sont venus à Prijedor.

11 Donc, à la fois Prijedor et Sanski Most ont reçu beaucoup de gens parce

12 qu'il y avait un très grand nombre de personnes de notre région qui

13 travaillaient en Croatie ou en Slovénie. Très souvent, d'abord, ce sont

14 leurs familles qui sont venues et après cela, les hommes ont suivi. Ils

15 sont venus à Prijedor, ainsi que d'autres villes de la région de Bosanska

16 Krajina.

17 Question: Quelle était, dans l'ensemble, l'origine ethnique des gens qui

18 arrivaient à Prijedor? Est-ce que ceci avait déjà commencé en 1991 et est-

19 ce que cela s'est poursuivi en 1992?

20 Réponse: Oui, c'est exact. Ceci a commencé en 1999 (sic), mais à ce

21 moment-là les choses ont commencé à augmenter à une échelle de plus en

22 plus importante. Dans les premiers temps, les gens de toute origine

23 ethnique arrivaient de partout.

24 Il était plus important de savoir d'où venaient les gens, matériellement,

25 où ils habitaient, avant que… leur origine ethnique. La plupart des

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1 personnes qui arrivaient étaient des Serbes parce qu'il y avait de

2 nombreux Serbes qui travaillaient dans d'autres Républiques. Mais,

3 ensuite, les Musulmans et les Croates ont commencé à arriver aussi, ceux

4 qui avaient de la famille à Prijedor, Sanski Most ou d'autres villes.

5 C'était très simple: les personnes essayaient de quitter les secteurs où

6 la guerre faisait rage.

7 Question: L'arrivée de ces réfugiés a-t-elle causé des problèmes du point

8 de vue du financement de l'assurance maladie dans la région de Prijedor?

9 Réponse: Lorsque vous avez un très grand afflux de population, bien

10 entendu, les dépenses s'accroissent. Ça coûte de l'argent de recevoir des

11 gens.

12 Avant cela, leur demande d'assurance maladie dans nos institutions, leur

13 nombre était croissant. Il était nécessaire de trouver des fonds

14 supplémentaires pour avoir suffisamment d'argent pour que ces gens

15 puissent recevoir des soins suffisants. Nous parlions essentiellement

16 d'enfants qui avaient droit à des soins médicaux gratuits, indépendamment

17 de savoir s'ils avaient une assurance ou non, parce que telle était la

18 réglementation en vigueur, à l'époque comme maintenant: les enfants

19 jusqu'à 15 ans et les personnes âgées de plus de 60 ans avaient le droit

20 d'avoir des soins médicaux gratuits, indépendamment de savoir s'ils

21 payaient des cotisations ou non.

22 Et de ce point de vue, nous avions, nous, l'obligation de garantir que

23 nous aurions les fonds nécessaires pour que ces personnes puissent

24 recevoir ces soins médicaux.

25 Question: Est-ce qu'à l'époque, vous vous êtes adressés au centre et au

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1 fonds de santé de la République Sarajevo pour vous aider à gérer cette

2 situation?

3 Réponse: Oui, nous l'avons fait. Nous avons regardé nos finances. Nous

4 savions exactement de combien d'argent nous avions besoin pour garantir le

5 strict minimum dont nous avions besoin pour aider les personnes qui

6 continuaient d'arriver, pour les aider du point de vue médical.

7 Je me suis d'abord adressé à mon propre directeur et aux organes du fond

8 de la République, les organes de solidarité. Il y aurait des fonds qui

9 seraient mis de côté, d'environ 10% à l'époque, pour les fonds de

10 solidarité, pour aider les secteurs qui étaient, en quelque sorte, sous-

11 développés ou pour envoyer de l'aide dans des cas d'urgence.

12 Ces fonds, ces 10%, étaient insuffisants. J'ai également parlé aux

13 assemblées municipales. Je me suis adressé aux organes compétents des

14 assemblées municipales qui avaient à connaître de questions d'assurance

15 maladie. J'ai parlé à ceux de Prijedor, Bosanski Most, Bosanski Novi,

16 Bosanska Dubica. J'ai demandé des fonds supplémentaires afin que nous

17 soyons en mesure de couvrir les dépenses supplémentaires encourues à cause

18 de la nécessité de donner à ces gens qui arrivaient les soins médicaux

19 nécessaires pour tous ceux qui arrivaient.

20 Question: Finalement, comment avez-vous résolu ce problème, ce problème

21 qui s'est créé lorsqu'un très grand nombre de réfugiés sont arrivés dans

22 les différentes municipalités de la Bosanska Krajina?

23 Réponse: Nous avons reçu des fonds supplémentaires du fonds de solidarité

24 de la République et des organes compétents auxquels j'ai fait référence.

25 Les quatre municipalités que j'ai mentionnées nous ont accordé la

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1 possibilité d'avoir des taux de contributions supplémentaires pour tous

2 ceux qui étaient employés dans notre région afin d'obtenir suffisamment

3 d'argent, de fonds, pour pouvoir aider les personnes qui étaient arrivées

4 et leur fournir une assistance médicale et des soins médicaux appropriés.

5 Nous nous étions mis d'accord sur ce principe entre les différents

6 services financiers de ces quatre municipalités. Ensuite, nos propres

7 organes ont adopté une décision dans lesquels les montants précis de cette

8 contribution supplémentaire étaient définis à partir desquels nos dépenses

9 supplémentaires seraient alors financées.

10 Question: En plus de la nécessité accrue due à l'arrivée des réfugiés en

11 grand nombre, est-ce que vous avez eu aussi des problèmes à obtenir des

12 fournitures parce que les lignes avaient été coupées à cause de la guerre

13 en Slovénie et en Croatie?

14 Réponse: Oui. En général, avant que cette situation n'existe, nous avions

15 des lignes d'approvisionnements qui venaient essentiellement à l'origine

16 de Zagreb et de Ljubija. Très souvent aussi de Belgrade et de Novi Sad,

17 aussi. Nous utilisions aussi certaines possibilités qu'offrait Sarajevo,

18 mais il y avait évidemment des problèmes de transport.

19 Des problèmes se sont posés dans nos communications avec nos anciens

20 partenaires, de sorte que comme j'étais celui, avec les autres directeurs

21 -je parle de pharmacie et d'hôpitaux-, qui était chargé de financer

22 l'ensemble, nous nous sommes mis d'accord pour constituer des moyens de

23 communication avec des sociétés qui étaient basées en Serbie parce

24 qu'elles étaient encore en mesure de nous fournir les médicaments

25 nécessaires et le matériel médical nécessaires, même de Slovénie et de la

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1 société "Priva" de Zagreb. Nous pouvions encore obtenir certaines choses

2 dont nous avions besoin mais uniquement par des sociétés basées en Serbie,

3 pour la simple raison qu'il n'y avait pas de communication à l'époque

4 entre la Croatie et la Slovénie et la Bosnie.

5 De sorte que nous utilisions des sociétés basées à Belgrade pour obtenir

6 certains médicaments qui étaient seulement produits par la société "Priva"

7 à Zagreb et qui étaient vendus dans l'ensemble de l'europe. C'est pour

8 cela que même pendant la guerre nous avons été en mesure d'obtenir des

9 produits à Prijedor pour les enfants nouveau-nés; c'étaient

10 essentiellement des médicaments contre la tuberculose.

11 Question: Est-ce que vous pourriez, s'il vous plaît, développer quelle

12 était la situation hiérarchique? Comment était organisée la hiérarchie

13 entre votre organisation de mutuelle et le fond, et leurs relations entre

14 celle-ci et l'assemblée municipale et les organes exécutifs?

15 Réponse: Nous étions organisés au niveau de la République, la Republika

16 Srpska de Bosnie-Herzégovine. Il existait un fond de la République et nous

17 nous adressions à lui pour les questions d'assurance maladie.

18 Dans le cadre de cela, ces fonds, nous avions des organisations régionales

19 et il s'agissait donc d'agence ou d'antennes d'assurance maladie dans

20 toute la région de Banja Luka, de Prijedor, de Mostar et ainsi de suite.

21 Je crois que c'étaient huit régions en tout.

22 Quelle était la hiérarchie? Eh bien, cela allait de tout en haut, c'est-à-

23 dire au niveau de la République, jusqu'aux bureaux régionaux par la région

24 jusqu'aux antennes ou aux bureaux locaux, comme on les appelait, dans les

25 municipalités. De sorte que chaque municipalité avait une agence

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1 d'assurance maladie où les dossiers, où les cartes de santé étaient

2 délivrées et les personnes pouvaient aller là pour que leurs droits

3 fondamentaux puissent être… pour qu'on puisse s'occuper d'eux.

4 Nous réunissions des fonds pour l'assurance maladie et nous étions chargés

5 de distribuer ces fonds aux bureaux régionaux. Nous n'avions de relations

6 directes avec les organes municipaux. Je dirai que nous travaillons dans

7 un domaine qui était verticalement lié à Sanski Most et tout en haut à

8 Sarajevo; c'est comme ça que nous le définissions.

9 Notre seule obligation vis-à-vis des organes municipaux était de rendre

10 compte une fois par an et de leur donner les renseignements qu'ils

11 exigeaient. C'étaient des données concernant la situation générale du

12 point de vue santé de la population parce qu'ils avaient des

13 fonctionnaires dans la municipalité qui étaient chargés de ces questions

14 d'assurance maladie.

15 Notre fond, à ce moment-là, transmettrait les renseignent demandés par le

16 truchement de leurs fonctionnaires et, ensuite, nous pouvions rédiger le

17 rapport annuel sur la situation au point de vue santé dans la population,

18 dans le secteur que nous avions analysé et dans le secteur qui était de

19 notre compétence. Et c'était d'habitude, ce genre d'informations: le taux

20 de naissances, le taux de décès, le nombre de médicaments utilisés tout au

21 cours de l'année dans la municipalité. Et les renseignements étaient

22 pertinents pour l'assurance maladie.

23 Puis ce rapport serait transmis aux organes municipaux, je parle là du

24 conseil exécutif, et, par le truchement du conseil exécutif, ce rapport

25 finirait à l'assemblée municipale. Une fois par an, ils examineraient ces

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1 rapports, ils nous donneraient, à ce moment-là, des résultats et leurs

2 propositions, et s'il y avait des réactions à notre rapport.

3 Question: Je vous remercie beaucoup.

4 Au niveau de l'ex-Yougoslavie, y avait-il une association de communautés

5 et quel était son objet?

6 Réponse: Oui, c'est une chose que j'ai oublié de dire. Nous étions

7 directement liés l'un à l'autre, mais cette association des fonds

8 républicains faisait partie de l'association des communautés mutuelles

9 dans l'ensemble de l'ex-Yougoslavie. Il y avait six fonds de ce genre au

10 sein de l'association, et la tâche de cette association des mutuelles

11 était de coordonner le travail de tous les fonds de la République, les

12 organisations mutuelles, les organisations SIS et d'adopter les normes et

13 réglementations qui seraient applicables et obligatoires pour toutes les

14 organisations SIS au niveau de la République.

15 C'étaient les règlements fondamentaux concernant essentiellement des

16 questions ayant trait aux traitements médicaux qui seraient donnés aux

17 différentes personnes, notamment qui appartenaient à une autre République,

18 les traitements médicaux qui seraient donnés à ces personnes dans le

19 territoire d'une autre République.

20 Question: La santé municipale ou son conseil exécutif, outre le fait

21 d'avoir le pouvoir de demander des renseignements à votre organisme,

22 avait-il, en quoi que ce soit, le pouvoir de diriger votre travail ou de

23 vous donner des ordres ou de donner des ordres aux unités de

24 l'organisation au sein de votre fonds?

25 Réponse: Non, en pratique, nous n'étions pas directement en contact avec

Page 10550

1 les organes municipaux. Comme je l'ai dit, les contacts que nous avions

2 été basés sur ces rapports. On leur envoyait des rapports concernant notre

3 travail.

4 Question: Après la prise de contrôle, vous vous êtes adressé à M. le Dr

5 Milomir Stakic. Pourriez-vous nous dire pourquoi vous vous êtes adressé à

6 lui et de quoi vous avez parlé?

7 Réponse: Au cours de la période durant laquelle a eu lieu la prise de

8 pouvoir à Prijedor, moi, j'étais parti de Prijedor pendant un certain

9 temps, pendant une semaine; j'ai passé une semaine en Yougoslavie. Et, une

10 fois de retour, j'ai entendu ce qui s'était passé. J'ai appelé le Dr

11 Stakic parce que je le connaissais personnellement; c'était un médecin qui

12 faisait partie de notre système de santé.

13 Je lui ai demandé, par rapport à ce que j'avais entendu qui s'était passé,

14 s'il y avait des instructions concernant notre propre travail. Il a dit

15 qu'il n'y aurait pas de modification, qu'on devrait continuer à travailler

16 comme par le passé et que notre fonds continuerait à fonctionner comme par

17 le passé. Il a dit que la seule chose que je devrais faire était de m'en

18 tenir aux règlements et de les appliquer strictement.

19 Question: Votre fond d'assurance maladie après la prise de contrôle,

20 comment a-t-il traité ses propres cotisants qui avaient une assurance

21 santé? Est-ce que vous avez traité différemment les gens, compte tenu de

22 leur nationalité ou de leur origine ethnique, ou bien est-ce que vous avez

23 pu donner les mêmes services à tout le monde? Ou est-ce que ceci dépendait

24 de quoi que ce soit d'autre?

25 Réponse: Comme il n'y avait eu aucun changement dans la réglementation

Page 10551

1 jusqu'à l'été suivant -parce que c'est à ce moment-là qu'il y a eu des

2 modifications qui ont été apportées à la réglementation-, nous avons

3 continué de travailler comme par le passé; il n'y a pas eu de modification

4 du point de vue pratique. C'est simplement que dans certains secteurs, la

5 nécessité de l'assurance maladie a augmenté dans certains cas et dans

6 d'autres a diminué; je veux parler, par exemple, du fait que, par la

7 suite, il y a des personnes au cours de la guerre qui ont été blessées.

8 Mais nous avons continué à travailler comme par le passé. Nous vérifiions

9 simplement l'identité des patients et nous les envoyions pour qu'ils

10 puissent recevoir des soins, nous nous adressions à des médecins. Donc

11 nous faisions une distinction entre les personnes. Par exemple, je signais

12 des références pour quelqu'un qui devait être envoyé pour recevoir un

13 traitement en dehors de Bosnie-Herzégovine, à Novi Sad ou à Belgrade.

14 Et, vous pouvez me croire, jamais, pas une seule fois, je n'ai vérifié qui

15 était la personne qu'il fallait envoyer. C'était un processus automatique.

16 Nous avions un comité dans lequel les médecins siégeaient, qui provenaient

17 de différentes régions, qui avaient différentes spécialités médicales; et,

18 d'habitude, ils rédigeaient une opinion selon laquelle tel ou tel patient

19 avait besoin de tel ou tel soin ou institution particulière. Et je me

20 bornais à signer ce type de document, cette décision. La plupart du temps,

21 je ne regardais même pas le nom de la personne dont il était question; je

22 voulais simplement voir si c'était des personnes qualifiées. Les médecins

23 pensaient effectivement que le malade en question devait être envoyé à une

24 institution particulière. Et c'était quelque chose d'automatique pour moi;

25 je me bornais simplement à signer des papiers.

Page 10552

1 Toutefois, je voudrais ajouter quelque chose dont je me rappelle. C'est

2 que, plus tard, lorsque l'appel à la mobilisation a commencé à arriver, le

3 nombre de personnes qui partait pour rejoindre l'armée a augmenté, le

4 secrétariat de la Défense nationale à Prijedor a demandé que je les

5 informe à ce sujet, notamment lorsque des personnes qui avaient rejoint

6 l'armée seraient envoyées pour recevoir des soins en dehors de Bosnie-

7 Herzégovine.

8 Je suppose qu'ils avaient peur que des décisions subjectives ne soient

9 prises concernant l'endroit où les soldats pourraient être envoyés pour

10 recevoir des soins. Ils ont insisté pour avoir un droit de regard sur la

11 base de nos décisions pour envoyer des personnes, par exemple, en

12 traitement à Belgrade, ce genre de chose. Et pendant une certaine période,

13 nous avons effectivement informé le secrétariat de la Défense nationale

14 pour dire qui nous envoyions et où. Nous leur donnions des listes de

15 patients qui étaient donc envoyés dans tel ou tel endroit pour recevoir

16 des soins.

17 Ceci a duré pendant environ un mois. Puis, au bout d'un mois ou deux, ceci

18 a complètement cessé parce qu'ils étaient satisfaits, les gens du

19 secrétariat avaient obtenu ce qu'ils voulaient; ils estimaient que nous

20 basions nos décisions sur des facteurs objectifs.

21 Question: Est-ce que vous fournissiez également des fonds pour que des

22 personnes, qui étaient les cas les plus graves, puissent être traitées,

23 recevoir des soins, même ceux qui ne payaient pas de cotisation?

24 Réponse: J'ai déjà dit que nous avions l'obligation légale, juridique, de

25 fournir des fonds pour le traitement des enfants et des personnes âgées.

Page 10553

1 Pendant la guerre, c'est très rarement que nous avons pu vérifier si les

2 cotisations avaient effectivement été versées. La situation était très

3 difficile. La situation financière était très compliquée et, dans ces

4 difficultés, à l'évidence, le niveau de solidarité entre les gens tend à

5 s'accroître et donc, quand on avait à traiter de cas graves et de maladies

6 graves, on accordait le traitement même pour les cas les plus graves sans

7 vérifier si les cotisations avaient effectivement été payées ou non, et on

8 envoyait ces personnes aux hôpitaux les plus importants.

9 Mais, dans de tels cas, on envoyait aussi une demande au ministère des

10 Finances pour obtenir le remboursement de ces dépenses. Selon la

11 réglementation qui était en vigueur à l'époque, l'Etat devait fournir

12 l'assistance médicale, les soins pour les personnes qui n'étaient pas

13 assurées, qui ne bénéficiaient pas de l'assistance médicale. Mais pour des

14 raisons de procédure, de façon à accélérer le traitement de ces personnes,

15 nous les envoyions aux cliniques et, lorsque ces cliniques nous envoyaient

16 leurs factures à leur tour, nous envoyions à ce moment-là nos demandes de

17 remboursement au fond de l'Etat.

18 Question: Vous avez évoqué le fait que les personnes ont été envoyées

19 aussi à l'étranger, en dehors des frontières de la Bosnie-Herzégovine et

20 vous avez dit que cela était financé et approuvé, c'est-à-dire le départ

21 de ces personnes, de la part de l'établissement médical duquel il

22 s'agissait.

23 Est-ce que ces personnes devaient disposer d'autorisations spéciales pour

24 pouvoir voyager en dehors des frontières de la Bosnie-Herzégovine pendant

25 cette époque? Et si oui, de quel organe ces autorisations pouvaient-elles

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1 être fournies?

2 Réponse: Pendant les conflits, tous les citoyens qui étaient en âge de

3 porter les armes étaient obligés, lorsqu'ils devaient voyager pour

4 n'importe quelle raison, ils étaient obligés de se procurer une

5 autorisation des organes militaires.

6 C'était le secrétariat à la défense nationale qui fournissait ces

7 autorisations quand il s'agissait du passage des frontières. C'était le

8 plus souvent vers la Yougoslavie. Lorsque nous avons voyagé sur le

9 territoire de la région, compte tenu du fait qu'il existait des points de

10 contrôle entre les villes, pour les besoins de service, pour le

11 déplacement dans le cadre de notre service, nous obtenions une sorte de

12 laisser-passer établi par la police, c'est-à-dire établi par le

13 secrétariat de l'Intérieur.

14 Moi, je disposais de ce laisser-passer de validité dite permanente parce

15 que je voyageais souvent à Sanski Most, à Bosanska Dubica, à Bosanski Novi

16 pour effectuer mes devoirs officiels. Et cela s'est passé. Je les ai eus

17 de la part du chef du poste de sécurité publique.

18 Question: Vous pensez au chef du poste de sécurité publique de Prijedor?

19 Réponse: Oui.

20 Question: Il faut clarifier encore une chose concernant ces commissions

21 médicales qui autorisaient le départ en dehors de la Bosnie-Herzégovine:

22 est-ce qu'il s'agissait d'un organe nouveau ou c'est quelque chose qui

23 existait même avant, et qui existe aujourd'hui?

24 Réponse: Il s'agit d'une commission d'experts pour éviter que les abus

25 soient faits dans le domaine de la santé parce que les frais des soins

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1 médicaux, quand il s'agit de grandes cliniques, étaient très élevés, et

2 c'est pour cela que ces commissions vérifient si tous les documents

3 médicaux sont en règle et qu'ils sont préparés par un médecin.

4 Selon cet examen, les commissions apprécient si cela est justifié, c'est-

5 à-dire les soins médicaux en dehors de la République de Bosnie-

6 Herzégovine. A l'intérieur de la République, donc, il ne fallait pas se

7 procurer cette autorisation, mais les commissions devaient estimer si cela

8 était nécessaire, c'est-à-dire les soins médicaux dans des grandes

9 cliniques. Cela fonctionnait de même la façon avant la guerre et

10 aujourd'hui.

11 Les commissions étaient en général composées de médecins de différentes

12 spécialisations de l'hôpital de Prijedor et des centres médicaux qui

13 relevaient de cette caisse d'assurance maladie de Prijedor.

14 Le docteur, mon médecin, qui était mon assistant, était le membre

15 principal, un membre permanent de cette commission et, par ailleurs, il

16 travaillait également dans la caisse d'assurance maladie.

17 Question: Pouvez-vous nous expliquer maintenant quelle était la relation

18 entre votre caisse d'assurance maladie par rapport à la caisse militaire

19 d'assurance maladie? Est-ce qu'il s'agissait de deux institutions tout à

20 fait séparées?

21 Réponse: Ce sont deux institutions complètement séparées. Nous n'avions

22 aucune relation avec les assurés de la caisse d'assurance maladie

23 militaire, parce que leurs soins médicaux sont financés par le budget

24 général de la République de la part de budgets prévus pour la défense. Et

25 c'est de cette voie que les besoins en intégralité de l'armée ont été

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1 satisfaits, y compris les soins médicaux des militaires.

2 Nous n'avions aucun contact avec les organismes, les établissements

3 médicaux militaires mêmes, ni avec les garnisons sanitaires ni avec la

4 caisse d'assurance maladie militaire. Notre seul contact aurait été dans

5 les cas où nos patients, c'est-à-dire les civils, auraient été envoyés

6 pour suivre des traitements médicaux dans les hôpitaux militaires.

7 Ce qui arrivait avant et aujourd'hui. C'est le même cas. Il y a des

8 situations lorsque les patients ont été envoyés à l'Académie médicale

9 militaire à Belgrade qui représente l'établissement médical le plus haut

10 placé en ex-Yougoslavie, mais il s'agit du contact de l'hôpital militaire.

11 Mais dans le cadre de cet hôpital militaire, il y avait un certain nombre

12 de civils en tant que patients. Et cette Académie, ce centre médical

13 militaire envoie une facture à notre caisse d'assurance maladie pour que

14 cette facture soit remboursée, et nous avions seulement cette sorte de

15 contact avec eux.

16 Moi aussi, je me suis rendu dans ce centre médical militaire à Belgrade

17 pour régler justement ces choses avec cet établissement médical militaire.

18 Question: Si quelqu'un, parmi vos assurés, avait été blessé, est-ce que

19 vous auriez payé le traitement médical d'une telle personne ou c'était la

20 caisse d'assurance maladie militaire qui payait cela?

21 Réponse: Il fallait d'abord regarder le règlement, et il fallait que les

22 garnisons militaires et la caisse d'assurance maladie militaire s'occupent

23 de tous les blessés, à partir du moment où l'appel a à la mobilisation

24 leur a été envoyé jusqu'à leur retour à la maison.

25 Mais, de temps en temps, il y avait des situations quelque peu confuses

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1 parce qu'il n'y avait pas assez de matériel sanitaire, il n'y avait pas

2 assez d'argent. Du côté de notre caisse et de la caisse militaire, il y

3 avait souvent des problèmes qui sont survenus, c'est-à-dire des situations

4 dans lesquelles on ne savait pas qui était censé être obligé de payer les

5 traitements médicaux pour les blessés.

6 Il est arrivé une fois que, pendant une longue période, au cours des

7 conflits, pendant la guerre, l'état de guerre n'avait pas été encore

8 déclaré et les autorités militaires se référaient au fait que les patients

9 étaient dans les exercices militaires et qu'ils ont été renvoyés chez eux.

10 Et ils considéraient que c'était notre caisse qui devait payer ces frais

11 médicaux, ce qui, très souvent, peut sembler bizarre… très souvent, nous

12 ne pouvions pas payer ces frais.

13 Par la suite, cela a été réglé au niveau de la République entre ces deux

14 caisses. Mais, en général, nous n'avions pas assez d'argent pour payer les

15 frais médicaux pour les assurés civils et pour les assurés qui ont été

16 blessés.

17 (Les Juges se concertent sur le siège.)

18 Question: Est-ce que pendant la période entre avril et septembre 1992,

19 vous n'avez jamais parlé avec le chef du poste de sécurité publique à

20 Prijedor, M. Simo Drljaca?

21 Réponse: Oui.

22 Question: Pouvez-vous nous dire si vous vous souvenez de cet entretien?

23 Quelque chose sur cet entretien?

24 Réponse: Le chef du poste de sécurité publique de Prijedor, Simo Drljaca,

25 je le connaissais même avant. Nous n'avions pas eu beaucoup de contacts

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1 professionnels compte tenu du fait que nous n'avions pas de relations

2 professionnelles communes. Mais moi je suis allé voir M. Drljaca au début

3 de la guerre parce que je le connaissais en personne, et j'ai essayé de

4 bénéficier de son aide parce qu'il était au centre... Lorsqu'au centre

5 d'enquêtes d'Omarska était déjà monsieur que j'ai déjà évoqué, M. Sead

6 Cikota parce qu'il était mon premier assistant.

7 Et j'ai pensé qu'il était nécessaire de l'aider parce que je connaissais

8 bien M. Drljaca. Je suis allé dans son bureau lui demander d'aider M.

9 Cikota à sortir de ce centre d'enquêtes d'Omarska. C'était un entretien

10 quelque peu long et comme je n'avais pas eu de bonnes informations, c'est-

11 à-dire sur les raisons pourquoi M. Cikota était amené dans ce centre

12 d'ancêtres d'Omarska, et comme je le connaissais depuis longtemps, je n'ai

13 pas vu de raison pour qu'il soit interrogé, M. Cikota. Ce que j'ai dit au

14 chef du poste de sécurité publique de Prijedor, et je lui ai demandé de

15 faire accélérer cette procédure, cet interrogatoire de ce monsieur parce

16 que j'ai pensé qu'il n'y avait aucun élément qui justifiait cet

17 interrogatoire.

18 Il m'a répondu que si ce que j'ai dit était vrai, il n'y aurait pas de

19 problème pour qu'il soit dans le groupe de personnes en âge de porter les

20 armes. Et qu'après l'interrogatoire, selon le règlement, si des éléments

21 prouvant, justifiant les poursuites criminelles, il serait libéré.

22 Il m'a promis qu'il accélérerait cette procédure d'interrogatoire et, par

23 la suite, je suis parti et j'ai eu sa promesse concernant M. Cikota.

24 Question: De qui avez-vous appris que M. Cikota était détenu?

25 Réponse: C'était de la part de son épouse. Elle m'a appelé, elle m'a

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1 téléphoné pour me dire que son mari a été amené à Omarska. Elle ne savait

2 pas exactement où, mais elle a dit qu'elle avait appris que c'était à

3 Omarska où il a été emmené et elle m'a demandé de l'aider.

4 Question: Pourquoi vous vous êtes adressé à M. Drljaca, pour qu'il vous

5 aide à libérer votre collègue?

6 Réponse: C'est parce qu'il était chef du poste de sécurité publique et

7 j'ai déjà dit que je le connaissais en personne. Et c'est pour cela que je

8 pensais qu'il était en mesure de m'aider et de résoudre la situation de

9 cette personne.

10 Question: Est-ce que vous savez qu'au mois d'octobre 1992, de la part du

11 parti au pouvoir à Prijedor à l'époque, c'est-à-dire le SDS, une action a

12 été menée pour que le Dr Milomir Stakic soit révoqué de sa fonction de

13 président de l'assemblée municipale?

14 Réponse: Oui.

15 Question: Pouvez-vous nous dire ce que vous savez à ce sujet, s'il vous

16 plaît?

17 M. Krejic (interprétation): Compte tenu du fait qu'à l'époque, moi, je

18 n'étais pas très actif sur la scène politique, mais je me trouvais dans la

19 ville dans laquelle beaucoup de faits ont été connus, même si vous n'étiez

20 pas dans la politique. Je savais qu'à l'intérieur du SDS il y avait

21 certains conflits, certains affrontements. Au moins, c'est ce qui

22 circulait dans la ville. Et ces affrontements ont eu lieu entre les

23 leaders du SDS et les leaders des autorités de la police des autorités

24 civiles et militaires.

25 Le bruit circulait que le Dr Stakic et Srdo Srdic, qui était pendant une

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1 période président du SDS et député, ne partageaient pas les mêmes opinions

2 et qu'il y avait des conflits qui étaient survenus entre ces deux

3 personnes.

4 Je les connaissais tous les deux parce qu'ils travaillent dans le domaine

5 de la santé. Simo Drljaca et le Dr Stakic, paraît-il, n'étaient pas dans

6 de bonnes relations et il y avait le bruit qui courait dans la ville qu'il

7 s'agissait de sérieux conflits entre eux.

8 Il y avait des conflits également entre les députés et le président du

9 SDS. Et je pense que ce sont ces raisons et à la demande d'un certain

10 nombre de personnes du conseil municipal du SDS, la demande est arrivée

11 pour que le Dr Stakic soit remplacé par une autre personne.

12 Plus tard, j'ai assisté à la réunion du conseil municipal du SDS en tant

13 que président de la commission pour la santé. Lorsque j'ai dû rapporter

14 sur le travail de cette commission et à cette réunion, il était question

15 de ces demandes répétées pour que le Dr Stakic soit remplacé, soit démis

16 de ses fonctions.

17 M. Lukic (interprétation): Monsieur le Président, est-ce que je peux vous

18 demander de passer à huis clos partiel pour quelques instants parce que

19 nous devons mentionner quelques noms.

20 M. le Président (interprétation): Je ne vois aucune objection pour passer

21 à huis clos partiel, donc nous pouvons le faire.

22 (Audience à huis clos partiel à 14 heures 50.)

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9 (Audience publique à 14 heures 53.)

10 M. le Président (interprétation): Nous sommes maintenant en audience

11 publique, vous pouvez poursuivre.

12 M. Lukic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

13 Nous avons parlé du Dr Stakic. Et est-ce que vous pouvez nous dire quand

14 vous l'avez rencontré et quelles étaient vos relations?

15 M. Krejic (interprétation): Le Dr Stakic, je le connaissais depuis le jour

16 où il commençait à travailler dans le domaine de la santé. Et moi, j'ai

17 travaillé presque tout le temps dans ce domaine de la santé. J'ai été

18 adjoint au directeur du centre médical à Sanski Most, ensuite adjoint au

19 directeur dans le centre régional à Prijedor, et ensuite, le directeur de

20 cette caisse d'assurance maladie. C'est pour cela que je connaissais pour

21 la plupart les médecins et le Dr Stakic, en tant que très jeune médecin,

22 est arrivé avant la guerre à Omarska pour y travailler.

23 A l'époque, je le connaissais très peu, mais plus tard, je l'ai connu en

24 tant que vice-président et en tant que président de l'assemblée municipale

25 et en tant que directeur du centre médical. C'est alors que l'on est

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1 devenu de très proches collaborateurs parce que mon travail exigeait de

2 coopérer très étroitement avec les directeurs de centres médicaux et

3 d'hôpitaux.

4 Question: Pouvez-vous nous dire maintenant, très brièvement, afin de

5 décrire la personnalité de Dr Stakic?

6 Réponse: Je le vois en tant qu'un jeune et ambitieux médecin. Il avait une

7 réputation d'un bon docteur. Il m'a fait une impression, pendant cette

8 période de notre coopération, d'un médecin qui n'avait pas beaucoup

9 d'expérience quand il s'agit de la politique. Il ne faut pas qu'il le

10 prenne mal, que cela le gêne, parce que quelque fois il y avait des

11 situations dans lesquelles j'ai dû le prévenir par rapport à la politique,

12 le prévenir de la responsabilité lourde qu'à mon avis, il ne pouvait pas,

13 avec sa pauvre expérience, le faire.

14 Et je lui ai conseillé de revenir dans le domaine de la santé pendant

15 cette période, surtout pendant cette période, lorsqu'il a été attaqué en

16 tant que… il a été dénigré en tant que président de l'assemblée

17 municipale. Et je lui ai conseillé de profiter de cette occasion de

18 quitter le domaine de la politique et de revenir dans la santé en

19 connaissant le fait qu'il était un trait bon étudiant, et je le

20 considérais plus utile dans le domaine de la santé que dans la politique.

21 Je pense qu'il s'agit d'un médecin de modèle classique qui est très, qui

22 est un humaniste, et je pense qu'il est dommage qu'il n'a pas travaillé

23 tout ce temps dans le domaine de la santé.

24 Question: Ensuite, une question vous concernant.

25 Vous dites que vous étiez députés non élu dans l'assemblée municipale de

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1 Prijedor. Est-ce que vous étiez démis de vos fonctions? Et si oui, quelles

2 en ont été les raisons?

3 Réponse: J'ai déjà dit que je n'étais pas membre du SDS, mais je

4 connaissais bien Simo Miskovic, président du SDS, c'est-à-dire pendant une

5 période, nous avons passé une partie de nos enfances ensemble. Nous avons

6 grandi dans le même bâtiment à Sanski Most. Son père travaillait au

7 tribunal et mon père à la police. Ils se connaissaient bien. Après, ils

8 ont déménagé et, par la suite, nous nous sommes rencontrés de nouveau à

9 Prijedor. Je le considérais comme un ami.

10 Lorsqu'il est devenu président du SDS, il a insisté à mon égard sur le

11 fait que, moi, je devrais devenir membre du SDS. Moi, je ne voulais pas

12 être membre du SDS, je ne voulais pas adhérer à ce parti parce que c'était

13 un temps de guerre et j'avais mes propres opinions là-dessus. Et j'ai

14 pensé que les partis politiques pendant la guerre n'avaient rien à faire,

15 parce que les intérêts dans la guerre sont différents et que les

16 affrontements de partis politiques se reflètent de manière négative dans

17 la situation, dans la région.

18 Dans les entretiens avec lui, j'ai dit que j'étais prêt à aider, mais

19 seulement dans le cadre de mes compétences professionnelles. Et Simo m'a

20 proposé d'abord de devenir membre de la commission aux affaires sociales

21 parce qu'il savait que j'avais une grande expérience dans ce domaine.

22 Par la suite, dans une autre conversation, il m'a dit que la composition

23 du conseil municipal du SDS et de l'assemblée municipale, c'est-à-dire les

24 députés qui se trouvaient à l'assemblée municipale, que ces personnes ne

25 disposaient pas de compétence professionnelle très élevée et il m'a

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1 demandé, et pas seulement à moi mais à d'autres intellectuels de Prijedor

2 qui n'étaient pas membres du SDS, de devenir député à l'assemblée

3 municipale, en me disant que c'était leur droit selon le Statut. C'est-à-

4 dire qu'il était possible que le nombre de députés soit élargi, c'est-à-

5 dire que les dix personnes pourront devenir membres de l'assemblée

6 municipale pour l'aider dans ses activités. Ce que nous avons accepté.

7 Par la suite, j'ai assisté à quelques réunions de l'assemblée municipale,

8 à quelques séances. Malheureusement, c'était pendant la période lorsque M.

9 Stakic a été démis de ses fonctions et il s'agissait de tensions très

10 accentuées entre ces groupes. Et tout ce qui s'est passé aux réunions du

11 conseil municipal du SDS, entre deux ou même trois groupes à l'intérieur

12 du SDS, tout cela avait une incidence sur l'assemblée municipale.

13 C'est alors que j'ai vu que je ne devais pas travailler en tant que député

14 à l'assemblée municipale. J'ai assisté à quelques séances de l'assemblée

15 municipale et, par la suite, je n'y venais plus. Après cela, les forces

16 radicales ont abordé la question de diminuer le nombre des députés dans

17 l'assemblée municipale parce que, soi-disant, le nombre élargi de membres

18 n'était pas légal et c'est comme cela que j'ai fini d'être membre de

19 l'assemblée municipale.

20 M. Lukic (interprétation): Monsieur le Président, est-ce que le temps est

21 venu de faire une pause?

22 M. le Président (interprétation): Je pense que c'est le bon moment pour

23 faire une pause jusqu'à 15 heures 30.

24 (Le témoin est reconduit hors du prétoire.)

25 (L'audience, suspendue à 15 heures 01, est reprise à 15 heures 38.)

Page 10566

1 M. le Président (interprétation): La défense peut reprendre tout de suite,

2 mais le témoin n'est pas dans le prétoire, comme on peut le constater.

3 (Rire général.)

4 Mieux vaut donc l'attendre.

5 M. Koumjian (interprétation): Pendant que nous attendons, j'ai une demande

6 à vous présenter. Notre calendrier est un petit peu complexe vu ce qui se

7 passe avec Madame Balaban et puis les développements dans l'affaire

8 Brdjanin, et étant donné que Madame Korner va contre-interroger Mme

9 Balaban et qu'elle va terminer un témoin mardi après-midi dans Brdjanin,

10 je me demande s'il serait possible de travailler le matin jusqu'à 13

11 heures 45, mais pas l'après-midi. Cela donnerait à la défense au moins un

12 jour pour rencontrer son client.

13 M. le Président (interprétation): Je m'attendais un petit peu à tout cela.

14 Nous statuerons pendant la pause.

15 Veuillez continuer.

16 (Le témoin est réintroduit dans le prétoire.)

17 M. Lukic (interprétation): Puis-je poursuive, Monsieur Krejic?

18 M. Krejic (interprétation): Allez-y.

19 Question: Savez-vous que le Dr Milomir Stakic était membre du parti

20 radical populaire de Veljko Guberina?

21 Réponse: Aujourd'hui, je le sais. Au début, quand je l'ai rencontré, je ne

22 le savais pas. Mais plus tard au cours de conversations, j'ai appris que

23 le Dr Stakic n'était pas membre du SDS. Or, c'était un petit peu étrange.

24 Il était resté président de l'assemblée municipale quand le SDS a pris le

25 pouvoir tout en n'étant pas membre de ce parti.

Page 10567

1 Question: Vous parliez du parti radical qui souhaitait qu'il quitte ses

2 fonctions de président de l'assemblée municipale. Quand vous avez dit

3 cela, vous ne parliez pas d'un parti politique?

4 Réponse: Non, j'ai utilisé ce terme pour désigner ceux qui détenaient le

5 pouvoir entre leurs mains, ceux qui avaient de l'influence au sein de la

6 municipalité.

7 Question: A un moment donné, vous avez dit que Simo avait proposé que vous

8 occupiez un poste. Or, en l'espèce, nous sommes confrontés à plusieurs

9 personnes prénommées Simo. A qui pensiez-vous exactement?

10 Réponse: Je pensais à Simo Miskovic, président du SDS.

11 Question: Vous n'avez jamais travaillé au sein de l'armée ni de la police,

12 mais étant donné que vous êtes diplômé en droit, je voudrais savoir si

13 vous savez si les organes municipaux tels que l'assemblée municipale et le

14 conseil exécutif étaient en mesure de donner des ordres à l'intention soit

15 de l'armée soit de la police.

16 Réponse: Non, ce n'était pas possible, c'était complètement impossible.

17 Question: Maintenant, je souhaiterais vous poser la question suivante. Il

18 s'agit d'un élément que j'ignorais au sujet de la Bosanska Krajina. Je

19 voudrais savoir pourquoi la Bosanska Krajina était opposée à la sécession

20 de la Bosnie-Herzégovine de la Yougoslavie. Que s'est-il passé après la

21 Deuxième Guerre mondiale en Bosanska Krajina?

22 Réponse: La Bosanska Krajina est la zone de Croatie habitée

23 essentiellement par des Serbes, c'est-à-dire Kordun, Banija et Lika, avait

24 un grand que nombre d'habitants qui, après la Deuxième Guerre mondiale

25 dans les années 1946, 1947, 1948, avaient été envoyés en Vojvodine, à

Page 10568

1 Srem, à Banat, à Backa. Il s'agit là de régions.

2 A cette occasion, des familles entières ont été divisées, puisque

3 certaines parties de ces familles ont dû aller dans les parties de

4 Vojvodine qui avaient été libérées par ce qui était alors l'armée

5 populaire, et puis certaines parties, certains membres de ces familles ont

6 dû rester où ils se trouvaient. Si bien que, surtout parmi les Serbes, il

7 y a très peu de familles qui n'ont pas de parents en Vojvodine, à Belgrade

8 ou dans d'autres grandes villes de Serbie.

9 C'est pourquoi la Bosanska Krajina a des liens très étroits avec la Serbie

10 et en particulier la Vojvodine. C'est pourquoi la population serbe de la

11 Bosanska Krajina souhaitait que la Bosnie-Herzégovine reste au sein de la

12 Yougoslavie. C'est pourquoi, encore j'aujourd'hui, il existe des liens

13 très forts entre la Serbie et la Bosnie-Herzégovine pour permettre le

14 passage, la circulation des personnes qui ont de la famille d'un côté ou

15 de l'autre. Voici une des explications que je peux vous donner.

16 Question : Avant le 1er mai, c'est-à-dire avant le 30 avril, quand vous

17 êtes allé en déplacement professionnel en Serbie, comment êtes-vous revenu

18 et pourquoi?

19 Réponse : Je suis parti à la veille du 1er, c'était un déplacement

20 professionnel, et puis il y a aussi ma fille qui habite à Novi Sad. J'en

21 ai profité pour la voir. On avait trois jours de congés à l'occasion du

22 1er mai, il y avait donc trois jours où l'on n'a pas travaillé.

23 Je suis allé d'abord à Belgrade, ensuite en Vojvodine et puis j'étais

24 censé rejoindre mon lieu de travail, mais toutes les voies de

25 communications ont été bloquées. Il n'y avait plus aucune communication

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1 entre la Bosnie et la Serbie, si bien que j'ai été contraint de rester où

2 j'étais. J'ai dû attendre la possibilité de rentrer.

3 Je n'ai pas pu rentrer en voiture, mais je suis rentré en avion de

4 Belgrade à Banja Luka. J'ai dû attendre assez longtemps parce qu'il y

5 avait beaucoup de gens qui voulaient monter dans cet avion. Il n'y avait

6 qu'un seul avion par jour qui reliait Belgrade à Banja Luka, un avion qui

7 faisait l'aller-retour.

8 Question: Mais que vous a-t-on dit? Pourquoi les voies de communication

9 étaient-elles impraticables au début mai dans toute la Bosnie-Herzégovine?

10 Pourquoi toutes les routes étaient-elles fermées?

11 Réponse: En allant en Serbie, à la veille du 1er mai, en chemin, je savais

12 déjà quelle partie du pays divisé sur le plan ethnique, quelle partie je

13 pouvais visiter ou quelles étaient les parties où je pouvais me rendre. Il

14 y avait des endroits qui étaient gardés par l'armée ou la police. Et puis,

15 à certains endroits, on voyait également des personnes armées qui

16 arboraient toutes sortes d'uniformes, des uniformes qui étaient portés par

17 les personnes qui exécutaient les patrouilles ou autre.

18 A Tuzla, j'ai été intercepté par des gens qui portaient des uniformes que

19 l'on ne porte normalement qu'en cas de catastrophe nationale. Il s'agit

20 d'uniformes de la protection civile. Et devant Tuzla, avant d'arriver à

21 Tuzla, j'ai été arrêté par des gardes qui portaient des uniformes de ce

22 type. Ils avaient également des fusils de chasse. Ils arrêtaient les

23 voitures, ils les fouillaient. Ils ont examiné nos cartes d'identité et,

24 après un bref dialogue, ils nous ont laissé poursuivre parce qu'il n'y

25 avait rien d'anormal dans notre voiture.

Page 10570

1 La situation était très tendue et il y avait quelques petites

2 échauffourées dans la région. La situation était très tendue donc et on

3 sentait bien que la guerre allait éclater.

4 Question: Quand vous êtes retourné à Prijedor entre avril et septembre

5 1992, est-ce qu'il vous est arrivé quoi que ce soit. Est-ce que vous avez

6 été impliqué dans un incident impliquant également un policier, alors que

7 vous n'aviez pas sur vous votre permis de conduire?

8 Réponse: Oui. D'ailleurs c'est une très bonne illustration de l'atmosphère

9 qui prévalait dans la ville à l'époque. J'étais au volant de ma voiture et

10 je n'avais pas mon permis de conduire sur moi; je l'ignorais d'ailleurs.

11 J'avais tous mes autres papiers mais pas mon permis de conduire.

12 Un policier m'a arrêté. C'était la nuit, vers 22 heures. Et étant donné

13 que je n'avais pas sur moi mon permis de conduire, il a voulu que je lui

14 donne les clefs de ma voiture. J'ai refusé de m'exécuter. Je lui ai dit:

15 "Je vais aller le chercher, mon permis de conduire." J'habitais à tout à

16 côté de l'endroit où m'avait intercepté. Il m'a permis d'aller chercher

17 mon permis de conduire, mais il ne m'a pas autorisé à y aller en voiture.

18 Il m'a dit que je devais aller chez moi à pied. Quand je suis revenu sur

19 place, il n'y avait plus de policiers et mon attacher-case n'était plus

20 dans ma voiture. Il avait pris mon attaché-case et il avait disparu.

21 Quelques jours plus tard, j'ai remis la main sur mon attaché-case. C'était

22 un enfant qui, en revenant de l'école, l'avait trouvé, avait trouvé ma

23 sacoche, qui se trouvait, que l'on avait jeté au bord de la route. Tous

24 mes documents étaient encore dans la sacoche, mais tout le reste, tout ce

25 qui pouvait avoir un autre intérêt, crayons, calculettes, etc., tout avait

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1 disparu.

2 Je me suis plaint auprès de Simo Drljaca, le chef du poste de sécurité

3 publique. Je me suis plaint auprès de lui à ce sujet. Je le connaissais.

4 Et j'ai voulu attirer son attention sur le comportement des membres de la

5 police. Je lui ai demandé de procéder à des vérifications, de vérifier ce

6 qui se passait. Et quand je lui ai dit qu'il y avait qu'un policier, il

7 m'a dit qu'il ne s'agissait pas là d'une patrouille de police, mais d'un

8 individu isolé. Il m'a dit que ce n'était pas l'un de ses hommes.

9 Plus tard, il m'a expliqué que des gens qui avaient été mobilisés, à qui

10 on avait remis des uniformes de police de réserve, mettaient ces uniformes

11 pour se livrer à des vols ou à d'autres exactions. Il m'a dit que ces

12 gens-là n'étaient pas membres des forces régulières de la police.

13 Question: Entre le 30 avril 1992 et la fin du mois de septembre 1992,

14 aviez-vous connaissance de l'existence de la cellule de crise de

15 l'assemblée municipale de Prijedor?

16 Réponse: Oui.

17 Question: Savez-vous quand la cellule de crise a été mise sur pied?

18 Réponse: J'ignore la date, mais je sais que c'était au mois de mai, après

19 la prise de contrôle de Prijedor. Je crois que c'était au mois de mai que

20 cette cellule de crise a été mise sur pied.

21 Question: Dans la première quinzaine, la deuxième, au milieu du mois de

22 mai?

23 Réponse: Je crois que c'était dans la deuxième quinzaine du mois de mai

24 parce que je suis rentré de Belgrade le 8. Donc, je pense que c'est après

25 cette date qu'elle a été créée. Mais franchement, je ne suis pas en mesure

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1 de vous dire la date exacte, je ne m'en souviens pas.

2 Question: Avez-vous eu des contacts avec les membres de la cellule de

3 crise une fois qu'elle a été mise sur pied?

4 Réponse: Si je me souviens bien, il y avait la cellule de crise ainsi que

5 le conseil exécutif à l'assemblée municipale. Donc chaque fois que j'avais

6 des contacts avec la municipalité, c'était avec les membres du service des

7 finances.

8 Je ne sais pas si Ranko Travar était membre de la cellule de crise. Si

9 oui, eh bien, effectivement, j'avais des contacts avec la cellule de crise

10 parce que Ranko Travar était chargé des finances de la municipalité. Il

11 était chargé de la politique financière de la municipalité de Prijedor,

12 et, étant donné que l'organisme auquel j'appartenais était également un

13 organisme qui s'intéressait au financement, en l'occurrence le financement

14 des soins médicaux dans les municipalités, j'avais contact avec ces gens-

15 là. J'avais des contacts avec le Dr Kovacevic, Ranko Travar, ainsi que le

16 Dr Stakic parce que c'étaient des médecins qui avaient des activités

17 proches des miennes.

18 Mais pour ce qui est de la cellule de crise en tant qu'organe de pouvoir,

19 je n'avais pas de contact avec cette cellule de crise, car l'institution à

20 laquelle j'appartenais relevait directement de Banja Luka et de Sarajevo.

21 Question: Est-ce que vous avez vu M. Travar dans son bureau, le bureau qui

22 était le sien en tant que membre du conseil exécutif?

23 Réponse: Oui.

24 Question: Est-ce qu'il en va de même pour Ms. Kovacevic et Stakic?

25 Réponse: Oui, j'ai vu chacun d'entre eux dans leur bureau respectif.

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1 Question: Est-ce que vous avez eu des informations au sujet de la nature

2 des missions de la cellule de crise à l'époque? Est-ce que vous aviez

3 connaissance de ses activités pendant qu'elle existait?

4 Réponse: En tant que juriste, je sais quelles étaient les fonctions de la

5 cellule de crise. La cellule de crise était chargée d'activités relatives

6 à l'organisation du travail civil, tout ce qui normalement relève de la

7 municipalité, mais la cellule de crise est censée s'occuper de cela en

8 situation de crise justement. C'est un organisme qui agit de manière

9 indépendante et qui relève de l'assemblée à qui elle fait rapport au sujet

10 de ses activités.

11 Les membres de la cellule de crise donc ont globalement pour mission de

12 garantir la bonne organisation des activités civiles relatives aux

13 activités de la commune, organisation de l'enseignement, approvisionnement

14 de la population en vivres, en eau. Enfin, voilà le genre d'activités

15 auxquelles je fais référence. La santé est également l'une de leurs

16 activités, mais il s'agit uniquement là des soins de base au niveau de la

17 municipalité. Donc, en résumé, toutes les activités qui relèvent

18 généralement de la municipalité.

19 Question: Vous dites que la cellule de crise faisait rapport à l'assemblée

20 municipale. Avec quelle fréquence et quand?

21 Réponse: Les cellules de crise sont généralement mises sur pied lorsque

22 l'assemblée municipale n'est pas en mesure de se réunir. Il s'agit là de

23 périodes de crises, catastrophes naturelles, état de guerre, etc. C'est à

24 ce moment-là qu'on met en place des cellules de crise. Il est également

25 prévu que dès que l'assemblée municipale est à même de se réunir, à ce

Page 10574

1 moment-là, la cellule de crise doit soumettre ses décisions à l'assemblée

2 municipale pour que l'assemblée municipale les approuve. En résumé, les

3 décisions de la cellule de crise doivent être approuvées par l'assemblée

4 municipale.

5 Question: Vous avez été coopté ou vous avez été nommé au poste d'adjoint

6 du président de l'assemblée municipale de Prijedor. Vous saviez donc qu'à

7 l'époque, le Dr Stakic avait démissionné en janvier 1993. Et au même

8 moment M. Simo Drljaca… ou disons à peu près à cette époque-là, Simo

9 Drljaca a cessé d'occuper le poste de chef du poste de sécurité publique

10 de Prijedor.

11 Est-ce que M. Drljaca a été démis ou est-ce qu'il a été promu? Le savez-

12 vous?

13 Réponse: Je l'ignore. Je sais qu'il est allé faire autre chose à Banja

14 Luka. Vous dire quoi, je ne le saurais.

15 Question: Merci.

16 Nous n'avons pas encore évoqué le sujet suivant. Est-ce que vous n'avez

17 jamais entendu dire que les trois parties politiques de Prijedor avaient

18 fait une demande ou présenté plutôt une exigence, lors d'une réunion à

19 l'assemblée municipale avant le referendum relatif à l'indépendance de

20 Bosnie-Herzégovine? Et ils avaient demandé que le referendum sur

21 l'indépendance ne soit pas organisé ou du moins qu'il soit reporté.

22 Réponse: Oui, j'étais au courant de cela. Mais c'était bien longtemps

23 avant la crise. Lorsque le SDA, le SDS et le HDZ coopéraient de manière

24 fructueuse, ils s'étaient répartis le pouvoir en Bosnie-Herzégovine après

25 les élections multipartites.

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1 A l'époque il était toujours possible pour les trois partis nationaux de

2 trouver un accord, et cet accord c'était que tout le monde devait

3 continuer à vivre au sein d'un seul et même état. Tout le monde devait

4 continuer à cohabiter.

5 Question: Connaissez-vous le nom de Sead Hrncic?

6 Réponse: Oui.

7 Question: Que vous dit ce nom si on le rapporte à la période de crise en

8 Bosnie-Herzégovine?

9 Réponse: Sead Hrncic était un médecin.

10 Question: Pouvez-vous nous dire quelle était sa nationalité?

11 M. Krejic (interprétation): Il était Musulman. C'est moi qui l'ai fait

12 venir à l'hôpital de Prijedor depuis Sanski Most. Il était de Sanski Most

13 ou du moins il était allé à Sanski Most pour se spécialiser en chirurgie

14 parce que c'était ce qu'il voulait faire. A un moment donné, on faisait

15 souvent le déplacement de Sanski Most à Prijedor où il travaillait, et on

16 était donc assez proches. On travaillait dans le même organisme.

17 Sead m'a demandé mon aide dans la période allant de la date de mon retour

18 de Belgrade, disons entre le 10 et le 20 mai à peu près, je ne me souviens

19 pas de la date. Donc, dès la date de mon retour de Belgrade, il m'a

20 demandé s'il pouvait me parler d'un problème qu'il avait. Je l'ai vu dans

21 mon bureau. Nous nous sommes vus après le travail. Il m'a expliqué que

22 certaines personnes, certains Musulmans, la veille, l'avaient emmené dans

23 une voiture jusqu'au plateau dominant Prijedor, jusqu'au village de

24 Hambarine. Ils l'avaient emmené à cet endroit pour lui montrer

25 l'infirmerie de Hambarine. Je savais qu'il existait une infirmerie à cet

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1 endroit.

2 Il m'a dit qu'ils lui avaient montré une nouvelle infirmerie, un nouveau

3 dispensaire où on était en train de mettre en place un équipement qui

4 permettrait de réaliser des opérations chirurgicales. Et ils lui avaient

5 demandé à se tenir prêt à réaliser des observations dans cette salle

6 d'opération, si cela devait se révéler nécessaire. En d'autres termes, si

7 le conflit éclatait entre les forces musulmanes et l'armée; chose à

8 laquelle on s'attendait à ce moment-là.

9 Il m'a dit que lorsqu'il était allé à Hambarine, il était passé devant un

10 certain nombre de gardes, de postes de gardes musulmans mis en place pour

11 sécuriser la région. Et il était venu me voir pour me demander mon avis,

12 il m'a demandé ce qu'il devait faire. Il était terrifié, il était très

13 choqué.

14 Son épouse était croate. Ils avaient deux enfants en bas âge. Il m'a

15 demandé mon avis. Il m'a dit: "Mais qu'est-ce que je dois faire?" Il était

16 terrorisé parce qu'il n'avait pas beaucoup d'options. Il avait peur de

17 rester à Prijedor parce qu'il se demandait ce qui allait lui arriver s'il

18 ne se pliait pas à la demande qui lui avait été faite. Mais de l'autre

19 côté, il n'était pas prêt à coopérer avec ces gens. Ces gens qui, en fait,

20 étaient des membres d'unités paramilitaires.

21 Je lui ai dit qu'il n'avait pas le choix, qu'il fallait qu'il s'en

22 rapporte aux autorités compétentes. Je pensais essentiellement à l'armée.

23 Parce qu'après tout, il était venu me parler de groupes armés. Et je lui

24 ai dit que la seule alternative qui s'offrait à lui, c'était de quitter la

25 région. Il n'était pas de Sanski Most mais de Kljuc, une petite ville à 30

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1 km de Sanski Most. Je lui ai dit que le mieux, c'était qu'il s'en aille,

2 qu'il aille dans sa famille ou bien ailleurs.

3 Ensuite il m'a de nouveau appelé après cette conversation. Il avait parlé

4 à son épouse et ils s'étaient mis d'accord pour partir pour la Croatie où

5 ils allaient séjourner chez des parents de sa femme. Il m'a demandé mon

6 aide pour aller à Belgrade parce que l'on ne pouvait pas aller directement

7 en Croatie à ce moment-là. Il voulait donc aller à Belgrade, il voulait

8 aller en Serbie pour ensuite gagner la Croatie par la Hongrie; et c'est ce

9 qu'il a fait. Je lui ai obtenu un billet d'avion Banja Luka-Belgrade et

10 ensuite il est parti avec son épouse et ses deux enfants.

11 Plus tard, il m'a appelé. Il est entré en contact avec moi. A ce moment-

12 là, il était dans un endroit situé près de Vienne et je crois, d'ailleurs,

13 que c'est toujours là qu'il vit.

14 M. Lukic (interprétation): Merci beaucoup, Monsieur Krejic. Nous en avons

15 terminé de l'interrogatoire principal. Vous allez être maintenant soumis

16 au contre-interrogatoire de l'accusation, et ensuite sans doute que les

17 Juges de la Chambre auront des questions à vous poser. Merci encore.

18 M. le Président (interprétation): Merci pour cette série de questions et

19 de réponses fort rapides. J'espère que nous pourrons aller, procéder avec

20 autant de célérité du côté de l'accusation.

21 Madame Sutherland, c'est à vous.

22 (Contre-interrogatoire du témoin, M. Radovan Krejic, par Mme Sutherland.)

23 Mme Sutherland (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

24 Monsieur Krejic, dans votre déposition, vous avez mentionné des réfugiés

25 venant de Croatie et arrivant en Bosnie, est-ce que ces réfugiés, on les a

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1 vus arriver dans toutes les villes de la Bosanska Krajina, y compris à

2 Banja Luka?

3 M. Krejic (interprétation): Je crois bien, oui. Moi, j'ai plus

4 d'informations au sujet des villes où j'étais. Je parle là des quatre

5 villes qui font partie de ma région: Bosanski Novi, Bosanska Dubica,

6 Sanski Most et Prijedor; mais je crois qu'il y a beaucoup de gens qui sont

7 allés à Banja Luka effectivement. Etant donné que...

8 Question: Et ces gens-là sont allés dans la ville de Banja Luka même?

9 M. Krejic (interprétation): Eh bien, les gens allaient où se trouvaient

10 les membres de leur famille, s'ils en avaient. Généralement, les gens

11 étaient hébergés chez des parents. Si leurs parents habitaient dans un

12 village, ils allaient dans un village. Si les gens habitaient en ville,

13 ils allaient en ville.

14 Mme Sutherland (interprétation): Je souhaiterais que l'on présente au

15 témoin la pièce à conviction de l'accusation SK49.

16 (Intervention de l'huissier.)

17 Je vais vous donner un moment, Monsieur le Témoin, pour regarder ce

18 document. Puis je voudrais ensuite vous demander d'en examiner un passage

19 particulier.

20 (Le témoin s'exécute.)

21 Ceci est un document intitulé "Note des comptes rendus des séances de

22 l'organe de coordination du conseil municipal SDS de Prijedor pour 1992"

23 et il est daté de février 1992.

24 Je vais vous demander de tourner les pages jusqu'à celle qui porte tout en

25 haut le chiffre P0041689. Pour les membres de la Chambre et de la défense,

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1 ce passage figure à la page 4 de la traduction anglaise.

2 M. le Président (interprétation): Je voudrais demander à l'huissier de

3 placer cette page sur le rétroprojecteur.

4 (Intervention de l'huissier.)

5 Mme Sutherland (interprétation): Monsieur le Témoin, est-ce que vous voyez

6 le nom de Simo Drljaca au milieu de la page?

7 M. Krejic (interprétation): Oui.

8 Question: Est-ce que nous pourrions peut-être lire ce passage ensemble?

9 (L'huissier demande quelle page.)

10 Si vous m'apportez ce document, je vais vous montrer exactement où.

11 (Intervention de l'huissier.)

12 Si nous regardons ce passage ensemble, j'ai ensuite une question à vous

13 poser.

14 Après les mots "Simo Drljaca", il est dit, n'est-ce pas: "… qui préparera

15 les organes administratifs de l'assemblée municipale serbe."

16 Puis cela continu en disant: "Le président de l'assemblée municipale serbe

17 de Prijedor s'est vu confier comme tâche de préparer une proposition de

18 formation d'un gouvernement et de départements de la municipalité serbe de

19 Prijedor pour 14 heures, le jeudi 16 avril 1992."

20 On lit ensuite: "Miskovic et deux personnes du conseil doivent ensuite

21 présenter les noms de personnes qui seraient à désigner pour le SDP, SDK,

22 le tribunal. Simo Drljaca et Radovan Krejic ont été nommés coordinateurs.

23 Stakic, Savanovic et Baltic ont été chargés de tous les préparatifs pour

24 l'assemblée serbe, et Simo Drljaca et Radovan Krejic ont été désignés

25 comme coordinateurs." (Fin de citation.)

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1 Ce paragraphe que je viens de vous lire, Monsieur le Témoin, est-ce que

2 ceci était en préparation de la prise de contrôle de la municipalité?

3 M. le Président (interprétation): Il y a deux demandes d'interruption,

4 tout d'abord du côté de la défense et ensuite de la part des Juges.

5 M. Lukic (interprétation): Oui, ma confrère a sauté deux lettres dans la

6 première ligne. Les lettres I.O. qui veulent dire "conseil exécutif." Donc

7 il ne s'agit pas de l'assemblée municipale. C'est le conseil exécutif de

8 l'assemblée municipale.

9 Mme Sutherland (interprétation): Je vous présente mes excuses. Merci,

10 Maître Lukic.

11 M. le Président (interprétation): Quant à la question posée par la

12 Chambre, c'est: est-ce que vous avez l'intention de continuer avec

13 l'ensemble de ce document?

14 Mme Sutherland (interprétation): Non, Monsieur le Président.

15 M. le Président (interprétation): Voudriez-vous, s'il vous plaît, à ce

16 moment-là, avoir la bonté de lire aussi les lignes suivantes?

17 Mme Sutherland (interprétation): En reprenant là où je m'étais arrêtée,

18 c'est-à-dire que Simo Drljaca et vous-même aviez été désignés comme

19 coordinateurs. Le document poursuit et se lit comme suit: "Milovan Dragic

20 fournira les locaux et Ranko Nikic s'occupera de la sécurité des membres."

21 (Fin de citation.)

22 Puis, ensuite, on lit dans ce document: "Stakic", et en dessous de son nom

23 comme renseignement: "La commission d'informations devra faire une

24 déclaration concernant les renseignements concernant les événements."

25 Alors la question que je vais vous poser c'est: ce paragraphe que je viens

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1 de vous lire, a-t-il trait aux préparatifs pour la prise de pouvoir à la

2 municipalité?

3 Réponse: Ceci pour moi est tout à fait nouveau. C'est la première fois que

4 je vois cela. Je ne savais pas que je n'avais jamais rempli des fonctions

5 de ce genre ou de coordinateur en quoi que ce soit. Je vous prie de me

6 croire. Il se peut que ce soit une proposition qui ait été faite, mais je

7 n'en ai certainement jamais été informé.

8 Question: Même si vous voyez ce document aujourd'hui pour la première

9 fois, est-ce que vous avez une opinion pour savoir si cela avait trait ou

10 non aux préparatifs de la prise de contrôle de la municipalité serbe de

11 Prijedor?

12 Réponse: Eh bien, je peux penser cela maintenant, mais vraiment je n'étais

13 informé de rien à ce sujet.

14 Question: C'est pour ça que je vous demande maintenant de réfléchir à la

15 question et d'envisager les choses, maintenant.

16 En lisant ce paragraphe: "Le président du conseil exécutif de l'assemblée

17 municipale de Prijedor s'est vu confier la tâche en vue de la formation

18 d'un gouvernement et de départements pour la municipalité serbe de

19 Prijedor". Et ensuite Simo Drljaca et vous-même "ont été nommés

20 coordinateurs. Et Stakic, Semanovic et Baltic ont été chargés de tous les

21 préparatifs relatifs à l'assemblée serbe."

22 Quel est votre avis en ce qui concerne ce paragraphe?

23 Réponse: C'est très difficile pour moi de dire quoi que soit en lisant

24 simplement cette page, sans savoir exactement de quoi il s'agissait,

25 pourquoi on envisageait cela? A aucun moment je n'ai été informé du fait

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1 que j'aurais été désigné coordinateur de quoi que ce soit. J'étais à

2 Belgrade à cette époque en mission officielle, pour des raisons

3 officielles.

4 Question: La date de cette réunion est le 13 avril 1992.

5 Réponse: Je n'ai jamais participé ou assisté à une réunion de ce genre.

6 Question: Vous dites que vous êtes allé à Belgrade la veille du 13 mai

7 1992?

8 Réponse: Oui. Oui, à la veille du 1er mai ou environ à cette date.

9 Question: Je croyais que vous aviez dit que vous étiez revenu du côté du 8

10 mai?

11 Réponse: Du côté du 8.

12 Question: Combien de temps avez-vous été absent de votre travail?

13 M. Krejic (interprétation): Entre le 1er et le 8 mai, sauf que nous avions

14 trois jours de congés à cette période, nous avions un congé officiel.

15 Mme Sutherland (interprétation): Je voudrais maintenant passer à une autre

16 question.

17 J'en ai terminé avec le document que vous avez devant vous.

18 M. le Président (interprétation): Je voudrais demander à l'huissier de

19 présenter aux membres de la Chambre les documents, tant en BCS qu'en

20 anglais. Merci.

21 Vous pouvez poursuivre.

22 (Intervention de l'huissier.)

23 Mme Sutherland (interprétation): Monsieur Krejic, vous avez mentionné le

24 nom d'un homme qui s'appelle Sead Cikota dans votre déposition

25 aujourd'hui.

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1 Est-ce que vous avez signé cette notice de licenciement datée du 1er juin

2 1992? La notification de son renvoi?

3 M. Krejic (interprétation): Tous les avis de licenciement... Cela faisait

4 partie d'un ensemble d'avis de licenciement. Alors, il se peut que ce soit

5 le cas.

6 Question: A peu près combien d'avis de licenciement avez-vous signé?

7 Réponse: J'ai signé les avis de licenciement de tous ceux qui avaient été

8 absents du travail pour une durée supérieure à ce qui était permis, ce qui

9 leur était permis.

10 Question: Est-ce que vous savez pourquoi Sead Cikota était absent de son

11 travail?

12 Réponse: Je l'ai appris plus tard, quand j'ai su qu'il avait été emmené

13 dans un centre d'enquête.

14 Question: Vous avez dit dans votre déposition qu'il avait été emmené,

15 qu'il avait été emprisonné à Omarska pendant peu de temps et qu'il avait

16 été relâché après un certain temps parce qu'on avait démontré son

17 innocence.

18 Est-ce que vous savez que Sead Cikota a été détenu au camp d'Omarska du 30

19 mai au 6 août 1992, après que les journalistes étrangers ont visité le

20 camp?

21 Réponse: J'ai appris qu'il avait été emmené quand sa femme l'a dit. J'ai

22 su qu'il était là-bas. Je ne savais pas quand il serait relâché ou quand

23 il a été relâché, mais je l'ai appris d'un ami. J'ai mentionné le fait

24 qu'il était à Trnopolje et que nous sommes allés à Trnopolje pour le

25 visiter.

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1 Question: Alors, votre visite au camp de Trnopolje se situe après le 6

2 août 1992?

3 Réponse: Lorsque j'ai appris qu'il s'y trouvait, je ne me souviens pas des

4 dates, mais c'est à ce moment-là que nous sommes allés le voir.

5 Question: Vous dites que sa femme vous a dit qu'il avait été obligé de

6 monter dans un bus, emmené à Omarska?

7 Réponse: Non, non. Elle n'a pas dit comment. Elle m'a dit seulement cela:

8 qu'il était à Omarska. Elle n'a pas dit comment il y était allé en bus ou

9 autrement. Elle m'a dit qu'il était à Omarska.

10 Question: Excusez-moi, je crois que c'est ma faute. La femme de Sead

11 Cikota vous a dit qu'il était au camp. C'est à ce moment-là que vous êtes

12 allé parler à Simo Drljaca pour essayer de le faire sortir du camp?

13 Réponse: Non, elle a dit qu'il était en prison.

14 Question: Est-ce que vous savez ce qui est arrivé à sa femme?

15 Réponse: Zlata Cikota? Maintenant je le sais, mais à l'époque je ne le

16 savais pas.

17 Question: Elle a été arrêtée le 23 juin chez elle, emmenée au poste du SUP

18 et ensuite emmenée de là au camp d'Omarska où elle a été détenue pendant

19 42 jours.

20 Réponse: Oui, j'ai appris cela de Sead, lorsqu'il est venu plus tard.

21 Question: Est-ce que vous savez pourquoi elle a été arrêtée?

22 Réponse: Non.

23 Question: Monsieur le Président, est-ce que je peux prendre un instant,

24 s'il vous plaît?

25 Est-ce que vous saviez que Zlata Cikota était la présidente du comité du

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1 référendum pour une Bosnie indépendante?

2 Réponse: Non, je ne le savais pas. Je savais qu'elle était membre du SDA,

3 son mari me l'avait dit.

4 Question: Avez-vous eu connaissance de crimes qui auraient été commis soit

5 par Sead Cikota ou par sa femme Zlata?

6 M. Krejic (interprétation): Non.

7 Mme Sutherland (interprétation): Je n'ai pas d'autres questions à poser,

8 Monsieur le Président.

9 (Questions au témoin, M. Radovan Krejic, de M. le Président.)

10 M. le Président (interprétation): Je vais moi-même continuer cette ligne

11 de questions qui ont trait à M. Cikota.

12 Est-ce que j'ai compris que vous avez dit que le fait qu'une personne ait

13 été détenue au camp d'Omarska, en l'espèce, pendant un certain temps et

14 par conséquent n'ait pas pu se rendre à son travail, était une raison pour

15 la renvoyer ou la licencier?

16 M. Krejic (interprétation): Toutes les institutions et toutes les sociétés

17 à Prijedor étaient informées du fait que tous ceux qui étaient censés

18 répondre à l'appel de mobilisation et qui ne venaient pas ou qui ne

19 venaient pas à leur travail ce jour particulier devraient être licenciés.

20 Nous avons donc suivi ces instructions. Nous avons simplement essayé de

21 savoir sur la base de nos dossiers qui manquaient, qui étaient manquants.

22 Nous n'avons pas essayé de trouver les raisons. Et tous ceux qui n'avaient

23 aucune justification pour justifier leur absence pendant cinq jours

24 étaient automatiquement licenciés.

25 Question: Mais lorsque vous avez appris de la femme de M. Cikota qu'il

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1 était détenu à Omarska, est-ce que vous avez repensé à votre décision de

2 licencier M. Cikota? Est-ce que c'est quand vous avez appris les motifs

3 pour lesquels il n'est pas venu travailler?

4 Réponse: Oui, oui.

5 Question: Est-ce que c'était une raison suffisante pour le renvoyer, le

6 licencier, permettre qu'il soit licencié?

7 Réponse: J'ai bien repensé à tout cela, mais comme il était déjà au centre

8 d'enquêtes, qu'il faisait l'objet d'une enquête et que la police m'avait

9 promis que l'enquête serait accélérée de façon à connaître la vérité le

10 plus rapidement possible, j'ai attendu de recevoir une notification de la

11 police pour savoir si une instance pénale serait commencée contre lui ou

12 s'il serait relâché.

13 Comme en définitive il a été relâché, il est venu à Prijedor, il est

14 également venu me voir, et je lui ai dit qu'il pouvait reprendre le

15 travail. Et même lorsque nous nous sommes réunis à Trnopolje, il m'avait

16 dit que son intention était de quitter le pays avec sa famille, de sorte

17 qu'il avait une possibilité de continuer à travailler puisqu'il était

18 prouvé qu'il était totalement innocent.

19 Question : Pourriez-vous nous dire quand vous avez rendu visite ou quand

20 vous avez vu M. Cikota dans le centre de Trnopolje? Est-ce qu'il s'y

21 trouvait seul ou avec sa femme?

22 Réponse: Je lui ai rendu visite, je suis allé le voir. Je crois que

23 c'était deux jours après qu'il est arrivé à Trnopolje d'Omarska. Lorsque

24 j'ai appris par mes amis qu'il était à Trnopolje, nous avons pris la

25 voiture pour aller le voir. J'ai pensé qu'on pouvait le ramener chez lui

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1 parce que Trnopolje était un centre de rassemblement d'où il était

2 possible de partir et de rentrer chez soi.

3 Je l'ai trouvé entouré par plusieurs autres personnes de Prijedor. C'était

4 une sorte de tente de fortune. Les personnes utilisaient des couvertures

5 pour en faire des tentes. C'était l'été, il faisait très chaud et il se

6 trouvait à l'extérieur de cette tente de fortune. Ils avaient allumé un

7 feu et ils mangeaient quelque chose. Ils étaient en train de faire griller

8 de la viande lorsque nous sommes arrivés, ils avaient même à boire. Ils

9 nous ont offert à boire. Sa femme n'était pas avec lui. Je crois, je ne

10 suis pas sûr, qu'à ce stade il ne savait pas où était sa femme. Et moi,

11 pour ma part, certainement, je ne le savais pas.

12 Nous avons parlé. Je lui ai proposé de le ramener en voiture à Prijedor.

13 Il m'a dit qu'il y avait un certain nombre de formalités qu'il n'avait pas

14 achevées auprès de l'administration et que l'on gardait les documents ou

15 les dossiers au camp. C'était dans l'après-midi, il était environ 4 ou 5

16 heures du soir et il fallait qu'il reste une journée de plus pour que,

17 pendant les heures normales de travail, il puisse obtenir la

18 régularisation de ses papiers.

19 Il avait déjà présenté une demande pour obtenir la permission de quitter

20 le pays. Il avait dit qu'il resterait un jour de plus pour que les

21 formalités soient accomplies et que, dès que les papiers seraient en

22 ordre, terminés, il m'appellerait. C'est ça qu'il m'a dit.

23 Question: Vous nous avez dit que vous étiez allé voir Simo Drljaca de

24 façon à intervenir dans l'intérêt de Sead Cikota. Où avez-vous rencontré

25 Simo Drljaca?

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1 Réponse: Dans son bureau.

2 Question: Et celui-ci se trouvait où à l'époque?

3 Réponse: Dans le secrétariat de l'Intérieur, au même endroit où se

4 trouvait le bureau du chef du poste de sécurité publique, du poste de

5 police, où il se trouve encore.

6 Question: Lors de cet entretien, avez-vous eu l'impression que Simo

7 Drljaca avait en fait la possibilité d'intervenir, qu'une personne soit

8 détenue ou non à Omarska?

9 Réponse: J'ai eu l'impression qu'il pouvait intervenir, bien qu'il m'ait

10 expliqué qu'une intervention de sa part ne serait pas bien vue parce qu'il

11 y avait des organes d'enquête dont les obligations étaient de vérifier les

12 faits. Et une fois que les faits auraient été connus et vérifiés, établis,

13 il serait à ce moment-là en mesure de faire ce que je lui demandais de

14 faire, c'est-à-dire d'aider à accélérer le processus pour que Sead Cikota

15 soit relâché dans le cas où il serait prouvé qu'il n'était mêlé à aucune

16 activité criminelle.

17 Question: Est-ce que vous avez aussi essayé de contacter d'autres

18 personnes à Prijedor de façon à mettre fin à cette détention ou privation

19 de liberté de M. Cikota?

20 Réponse: J'ai parlé au Dr Stakic à ce sujet aussi, comme je le

21 connaissais, et le Dr Kovacevic comme étant des médecins. J'ai parlé au Dr

22 Stakic et il m'a dit d'aller trouver la police et les militaires. Ils

23 m'ont dit d'aller là parce que c'était là que je serais peut-être en

24 mesure de faire ce que je voulais faire.

25 Question: Donc si je comprends bien, correctement, dans l'ordre, vous êtes

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1 d'abord allé voir le Dr Stakic, et il vous a dit à ce moment-là d'aller

2 voir Simo Drljaca. C'est exact?

3 Réponse: En premier, je suis allé voir le Dr Kovacevic que je connaissais

4 le mieux parce que nous avions travaillé pendant plus longtemps. Je ne

5 connaissais pas aussi bien le Dr Stakic, aussi bien que je connaissais le

6 Dr Kovacevic. Je suis allé les voir plus parce que je les connaissais en

7 tant que médecins. Je savais que leur autorité n'était pas aussi étendue

8 dans sa portée qu'elle aurait pu l'être, mais ils étaient en mesure de me

9 dire où je devrais m'adresser. C'était l'ordre dans lequel les choses se

10 sont passées.

11 Question: Je voudrais également demander où vous êtes allé voir M.

12 Kovacevic et le Dr Stakic. Dans quel bâtiment?

13 Réponse: Dans le bâtiment de la municipalité où se trouvaient leurs

14 bureaux.

15 Question: Et selon votre déposition, ceci a eu lieu après le 8 mai, c'est

16 exact?

17 Réponse: Je n'ai pas bien compris, après le 8 mai?

18 Question: Mais, lorsque vous êtes revenu à Prijedor, comme vous nous

19 l'avez dit précédemment...

20 Réponse: Oui.

21 Question: Est-ce que le Dr Kovacevic et le Dr Stakic portaient des

22 uniformes à l'époque?

23 Réponse: Je ne crois pas. Le Dr Kovacevic portait des blue-jeans. En fait,

24 je ne suis pas allé au bureau du Dr Stakic, je suis allé au bureau du Dr

25 Kovacevic. Le Dr Kovacevic portait des blue-jeans. Cela, je m'en souviens

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1 parce qu'il ne portait pas de blue-jeans très souvent. Non, je ne les ai

2 pas vus porter des uniformes à l'époque.

3 Question: Vous dites que vous n'êtes pas allé au bureau du Dr Stakic? Où

4 l'avez-vous rencontré?

5 M. Krejic (interprétation): Je crois que tout deux nous sommes allés au

6 bureau du Dr Kovacevic.

7 M. le Président (interprétation): Ceci voudrait dire, peut-être que je

8 n'ai pas bien compris, mais encore une fois ceci voudrait dire que vous

9 avez d'abord contacté le Dr Stakic et qu'ensuite, comme vous l'avez dit,

10 tout deux vous êtes allés voir le Dr Kovacevic, c'est exact?

11 M. Lukic (interprétation): Excusez-moi, Monsieur le Président. La

12 traduction n'était pas exacte. Le témoin n'a pas dit: "nous sommes allés",

13 mais "nous étions là".

14 M. Krejic (interprétation): Je vais expliquer, ce n'est pas un problème.

15 Je suis allé voir le Dr Kovacevic parce que je le connaissais beaucoup

16 mieux. C'était tôt dans la matinée. Le Dr Kovacevic et le Dr Stakic

17 étaient ensemble dans le bureau du Dr Kovacevic. Ils étaient en train de

18 prendre leur café du matin et j'ai pris une tasse de café avec eux. J'ai

19 posé les questions que je voulais poser, j'ai demandé ce que je voulais

20 savoir. Nous avons parlé de la situation, notamment en ce qui concerne le

21 système d'assurance maladie et, ensuite, je suis allé voir Simo Drljaca,

22 mais pas le même jour. Je n'ai pas pu réussir à obtenir un rendez-vous le

23 même jour. J'ai dû prendre un rendez-vous pour le jour suivant.

24 Question: De sorte que pourquoi avez-vous cru que le Dr Kovacevic pouvait

25 avoir une influence quelconque sur la détention de M. Cikota? En quelle

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1 qualité êtes-vous allé voir le Dr Kovacevic et, ensuite, à la réunion, au

2 même moment avec le Dr Stakic?

3 Réponse: Parce que, lui aussi, il connaissait Cikota et je pensais qu'il

4 pouvait aider Cikota à rentrer chez lui.

5 Question: Qui étaient les hommes les plus influents à l'époque à Prijedor,

6 dans la municipalité de Prijedor?

7 Réponse: Vous pensez à des hommes politiques qui étaient les plus

8 influents?

9 Question: Oui.

10 Réponse: Je pense que c'était Srdo Srdic qui était l'homme politique le

11 plus influent. Avant la guerre, il était député et président du SDS. Je

12 pense que, lui, il était le plus influent quand il s'agissait de la

13 politique.

14 Le Dr Kovacevic avait une certaine influence, mais il ne s'agissait pas

15 d'une influence de nature politique. Il représentait une personnalité

16 assez aimée par les gens et été apprécié en tant que médecin dans la

17 ville. Je pense que le Dr Kovacevic était une réputation en tant que

18 médecin, la plus grande réputation, et Srdo Srdic avait une renommée d'un

19 homme politique influent. Bien sûr, c'étaient, parmi les Serbes, les deux

20 personnes qui étaient les plus influentes.

21 Question: Et quelle était l'influence politique du Dr Stakic?

22 Réponse: J'ai déjà dit qu'il n'avait pas une grande influence politique

23 parce qu'il était jeune pendant cette période. Il n'était pas très connu

24 dans la ville compte tenu du fait qu'il venait de finir ses études de

25 médecine et qu'il commençait à travailler dans une infirmerie en dehors de

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1 la ville. C'est pour cela qu'un trait petit nombre de gens le

2 connaissaient.

3 Et chez nous, d'habitude, les gens qui sont, qui exercent le pouvoir

4 exécutif ont la plus grande influence par rapport aux députés parce que

5 l'assemblée municipale décide en général des questions qui ont une portée

6 générale, c'est-à-dire que les députés ne disposent pas de pouvoir

7 exécutif. C'est pour ça que ces gens-là ne sont pas les plus influents.

8 Question: Mais si vous évaluez la situation comme cela, n'étiez-vous pas

9 surpris qu'il ait d'abord été nommé vice-président. Et par la suite, il

10 est devenu président?

11 Réponse: Je n'étais pas surpris parce que c'était un peu logique que les

12 choses se soient déroulées… parce qu'il était le seul serbe à l'assemblée

13 municipale qui occupait cette fonction. Il a, en quelque sorte, hérité de

14 cette fonction de président, et c'était le Dr Kovacevic qui occupait la

15 position du pouvoir exécutif la plus influente à l'époque où Cehajic était

16 président de l'assemblée municipale. Le Dr Stakic se trouvait plus dans le

17 second plan.

18 Question: Aviez-vous de bon contact avec M. Cehajic?

19 Réponse: Je vous ai dit jusqu'au commencement des malentendus dont j'ai

20 parlé, j'ai eu de très bonnes relations avec M. Cehajic.

21 Question: Savez-vous quel était le sort de M. Cehajic?

22 Réponse: Oui, j'étais avec sa famille. Nous sommes voisins dans la même

23 ville.

24 Question: Qu'est-ce que vous avez appris au sujet des raisons de son sort

25 et comment appréciez-vous cela?

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1 Réponse: Je n'ai pas appris de détails parce que sa famille n'en parle

2 pas. Mais ils m'ont dit quand même qu'il a fini sa vie d'une façon

3 tragique au cours de cet interrogatoire au centre d'enquêtes. Il n'est

4 jamais revenu. La famille n'a jamais appris de détails au sujet de sa

5 mort, mais ils ont seulement appris que c'était au cours cet

6 interrogatoire au centre d'enquêtes qu'il a disparu.

7 Mais il s'agit des mêmes raisons qui ont provoqué cette guerre. La guerre,

8 les causes de la guerre sont les mêmes comme les causes du péril des

9 personnes.

10 Question: Est-ce que vous n'avez jamais agi dans l'intérêt des personnes

11 que vous connaissiez à l'époque, par exemple, pour M. Cehajic, dans son

12 intérêt?

13 Réponse: Non. Après l'arrestation de M. Cehajic, j'ai parlé avec son

14 épouse qui a travaillé avec moi; elle est médecin. Elle était adjointe du

15 directeur à l'hôpital et, pendant plusieurs années, nous avons travaillé

16 ensemble. Elle est venue chez moi pour me dire ce qui c'était passé.

17 Pendant notre conversation, nous avons conclu, elle m'a dit cela, qu'il

18 serait peut-être plus certain pour M. Cehajic qu'il reste, je ne peux

19 pas dire en prison, mais parce qu'il était un leader du SDA qui était

20 assez connu parmi le peuple musulman. Donc, il y avait un danger pour la

21 famille, c'est-à-dire que la famille soit exposée à ce danger. Madame

22 Cehajic a pensé qu'il serait mieux qu'ils ne fassent rien parce que, dans

23 la procédure, il serait possible que l'innocence de son mari soit prouvée

24 et qu'il n'y aurait pas donc de conséquences sérieuses et que l'enquête

25 serait équitable.

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1 Question: Vous parlez de la culpabilité ou de l'innocence. Est-ce que M.

2 Cehajic aurait commis un crime? S'il était détenu au camp d'Omarska et

3 privé de sa liberté, est-ce que c'était parce qu'il aurait commis un

4 crime?

5 Réponse: Il y avait des indices qu'au sein du peuple musulman, il y avait

6 des forces qui préparaient… j'ai cité l'exemple du Dr, du médecin Hrnsic,

7 certaines formations paramilitaires se préparaient sur le territoire de la

8 municipalité de Prijedor et même dans la région plus large, dans ma ville,

9 à Sanski Most et dans les environs, il y avait des formations

10 paramilitaires qui étaient en train d'être mises sur pied. Les Musulmans

11 étaient en train de s'armer. Et certains leaders qui travaillaient à la

12 municipalité de Prijedor auraient participé à cet armement illégal du

13 peuple musulman et à la création des formations paramilitaires qui

14 auraient pu être impliquées dans les conflits armés.

15 Par la suite, il y avait des incidents. Il y avait des échanges de tirs.

16 Et je pense que c'est à cause de cela que l'enquête a été ouverte pour

17 vérifier quel fonctionnaire, quel leader du peuple musulman aurait

18 participé à la création de ces formations paramilitaires.

19 C'est là où j'ai vu la raison pour laquelle, et même lorsqu'on a pu

20 échanger nos opinions avec les représentants du peuple musulman, qui était

21 hors de portée de ces organes d'enquête, que cela était la raison pour

22 tout cela et qu'une enquête donc montrerait qui étaient les responsables

23 de cela et que tous les innocents seraient libérés.

24 Question: Monsieur Radovan Krejic, jusqu'ici j'ai pu suivre votre

25 témoignage sincère. Mais je pense qu'en ce moment, je ne peux plus vous

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1 suivre.

2 Vous connaissiez M. Cehajic en tant que président d'alors et le Dr Stakic

3 était vice-président. Et vous saviez que le Dr Stakic a remplacé M.

4 Cehajic.

5 Est-ce que cette personne sincère, selon vous, et honnête, est-ce que vous

6 croyez que cette personne aurait pu commettre ces infractions, c'est-à-

7 dire ayant pour objectif la création des formations paramilitaires? Est-ce

8 que vous avez vraiment cru à cela?

9 Réponse: Je vous ai dit, lorsque l'avocat m'a posé cette question, je vous

10 ai dit que je travaillais dans le bureau qui se trouvait au-dessus du

11 siège du SDA. Et dans le bureau qui se trouvait au-dessous du mien, était

12 Mirza Mujadzic et, tous les jours, on a eu des activités politiques.

13 Je me trouvais dans la situation, c'est-à-dire j'ai pu voir un grand

14 nombre de militants musulmans, membres du SDA armés. Déjà à l'époque,

15 lorsque nous ne pouvions pas entrevoir ce qui allait se passer, M.

16 Mujadzic venait travailler avec les armes, en ayant les armes entre ses

17 mains. Et M. Muhamed Cehajic était quotidiennement dans ces locaux.

18 Après ce que M. Sead Hrncic, médecin, m'a dit et en qui j'ai eu confiance

19 -lui aussi, il a eu confiance de me le dire-, j'ai pu supposer qu'il n'y

20 avait plus personne qui n'était pas impliqué, c'est-à-dire que tout le

21 monde était impliqué aux actions, aux préparatifs qui précédaient la

22 guerre, parce que j'ai pu croire qu'il s'agissait de la responsabilité de

23 tout le monde et j'ai pensé que les innocents seront libérés.

24 Question: Est-ce que vous n'avez jamais parlé du sort de M. Cehajic avec

25 le Dr Stakic qui évidemment connaissait bien M. Cehajic?

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1 Réponse: Non, je n'ai pas eu d'occasion de lui en parler parce que c'était

2 le temps très difficile, parce qu'on ne pouvait pas parler du sort de ces

3 personnes et tout le monde croyait que ces personnes reviendraient

4 bientôt.

5 Tout ce que je sais sur le sort de ces personnes qui sont mortes, je l'ai

6 appris après la guerre, lorsque les Musulmans revenaient à Prijedor, à

7 Sanski Most. Et lorsque je les ai de nouveau rencontrés, ils m'ont parlé

8 franchement parce que j'ai toujours assez d'amis qui sont Musulmans.

9 Pratiquement, c'est d'eux que j'ai appris tout ce qui est aujourd'hui

10 connu, quand il s'agit des événements dans ce centre d'enquêtes.

11 Question: J'ai encore deux questions additionnelles.

12 Est-ce que vous n'avez jamais vu Mme Plavsic à Prijedor? Et est-ce que

13 vous avez assisté à la réunion qui a eu lieu au mois d'octobre 1992?

14 Réponse: Non, à Prijedor, j'ai vu seulement M. Krajisnik. Il a assisté à

15 une séance de l'assemblée municipale à laquelle j'ai assisté moi aussi. Je

16 pense qu'il a été peut-être invité ou qu'il est venu par hasard, lorsque

17 le conflit entre le Dr Stakic et les autres dont j'ai évoqué les noms, qui

18 demandaient que le Dr Stakic soit démis de ses fonctions... Donc, j'ai vu

19 seulement M. Krajisnik et je n'ai jamais vu Mme Plavsic à ces réunions de

20 l'assemblée.

21 Question: Vous nous avez parlé des événements à Prijedor. Quelle est votre

22 évaluation de la situation? Est-ce que tout cela était planifié au niveau

23 de la ville de Prijedor ou bien est-ce que les hommes politiques à

24 Prijedor dépendaient des ordres relevant des niveaux plus supérieurs,

25 indépendamment du fait qu'il s'agissait de l'un ou de l'autre niveau

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1 supérieur?

2 Réponse: Je ne peux dire que ce que je pense parce que je ne connais pas

3 tous les faits. Mes opinions ont évolué. Au début, j'ai pu croire que tout

4 ce qui s'était passé était organisé d'un centre parce que des choses

5 semblables commençaient à se produire dans plusieurs municipalités. Et

6 c'est pour cela que j'ai pensé que tout cela était préparé comme un

7 scénario de guerre.

8 Mais plus tard, j'ai pu voir que les gens, dans de semblables situations,

9 se comportent d'une façon similaire. Je pense qu'il y avait plutôt donc

10 des agissements chaotiques et non organisés. Et lorsque je fais une

11 rétrospective de ces événements, j'ai l'impression que la situation dans

12 laquelle nous nous trouvions tous a causé cette évolution des événements.

13 C'est mon impression.

14 Question: Est-ce que vous avez eu l'occasion de rendre visite au Dr Stakic

15 pendant la période entre le 8 mai jusqu'à la fin septembre 1992?

16 Réponse: Comment pensez-vous ''lui rendre visite"? Dans son bureau?

17 Question: Dans son bureau ou dans son appartement ou à Omarska, n'importe

18 où?

19 Réponse: Nous nous rencontrions dans mon bureau parce que le Dr Stakic me

20 surprenait de temps à autres en venant dans mon bureau. Et le Dr Kovacevic

21 venait assez souvent aussi dans mon bureau. Ils venaient pour parler d'un

22 problème médical, pour examiner des documents, plus en tant que médecins

23 qu'en tant comme politiques. C'était dans mon bureau que nous nous

24 rencontrions, mais il s'agissait en général des problèmes médicaux dont

25 nous pouvions discuter.

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1 Question: Est-ce que le Dr Stakic n'a jamais dit qu'il y avait des

2 difficultés à son travail, comme vous avez déjà dit avant? Vous avez dit

3 que vous auriez préféré le voir rester dans le domaine de la santé. Est-ce

4 que vous avez entendu parler des plaintes du Dr Stakic par rapport aux

5 problèmes, par rapport aux événements qui sont survenus à Prijedor?

6 Réponse: En parlant de cela avec le Dr Stakic, à l'époque, j'ai eu

7 l'impression qu'il était mécontent de la relation entre l'armée et lui-

8 même ou peut-être la municipalité de Prijedor, parce que l'armée avait

9 beaucoup d'effectifs injustifiés quand il s'agit de Prijedor, et qu'un

10 petit nombre de personnes sont restées dans les structures économiques

11 pour y travailler parce qu'il y avait beaucoup de personnes de nos

12 établissements médicaux où il y avait plus de femmes. Ces personnes ont

13 été engagées dans les garnisons sanitaires, sans parler des personnes qui

14 partaient des entreprises pour y travailler. Donc il y avait beaucoup de

15 personnes qui ont été engagées au sein de l'armée.

16 On pouvait voir qu'il était mécontent, et c'est pour cela que je lui

17 conseillais de quitter la politique et de devenir médecin de nouveau parce

18 qu'il était jeune et tout le temps était devant lui.

19 Question: Est-ce que vous avez eu l'impression que le Dr Stakic était

20 content de l'évolution des événements à Prijedor, surtout quand il s'agit

21 des événements tels que la création des camps de Keraterm et d'Omarska?

22 Réponse: Je pense que non. Je pense que lui, en tant qu'homme, il était

23 mécontent de tout cela parce que cela s'est passé dans la région dont il

24 était originaire.

25 Question: Est-ce que vous avez parlé avec lui pour savoir si lui, en tant

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1 qu'homme politique aurait une influence pour améliorer la situation et

2 pour contribuer au démantèlement de ces camps?

3 Réponse: Je ne sais pas quelle était sa possibilité et son influence quand

4 il s'agit de la fermeture de ces centres d'enquêtes, mais je crois qu'il

5 avait une bonne volonté que tout cela soit fini et qu'une situation

6 normale revienne à Prijedor, surtout parce que les conditions matérielles

7 dans la ville était très difficile pour toute la population.

8 Question: Mais quand il s'agit de la situation économique, et il y avait

9 des milliers et des milliers de meurtres de personnes habitant le

10 territoire de la municipalité de Prijedor?

11 Réponse: Si je vous ai bien compris, vous pensez à employer les personnes

12 qui se trouvaient dans les centres d'enquêtes?

13 Question: Non. Si nous comparons ces deux sortes de problèmes parce que

14 vous avez dit que, sans aucun doute, il y avait beaucoup de problèmes

15 économiques dans la municipalité de Prijedor surtout quand il s'agit des

16 personnes qui prêtaient serment, en tant que médecins, de s'occuper des

17 hommes, de la santé des hommes, sur les territoires de la municipalité de

18 Prijedor.

19 Le Dr Stakic était Président de l'assemblée municipale. Donc sur le

20 territoire sur lequel il disposait d'une certaine, il assumait une

21 certaine, et je souligne, une certaine responsabilité, il y avait ces

22 crimes qui ont été perpétrés.

23 Réponse: Je n'ai pas compris. Vous m'avez posé une question. J'ai compris

24 cela comme une sorte de commentaire que vous avez fait.

25 Question: Ma question à la suivante: vous avez parlé plus de quels sujets?

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1 Des problèmes économiques, du fait qu'il existait ces centres de détention

2 sur le territoire de la municipalité de Prijedor? Et comme cela est dit,

3 qu'il y avait quelques milliers d'assassinats de personnes innocentes.

4 Quel était le sujet préféré de vos entretiens? Est-ce que c'était au sujet

5 de la situation économique que vous avez parlé ou bien au sujet de la vie

6 de ces personnes?

7 Réponse: Avec le Dr Stakic et en particulier avec le Dr Kovacevic le plus

8 souvent, j'ai parlé normalement de la situation dans le domaine de la

9 santé parce que j'ai eu l'occasion de les rencontrer. Et chaque fois, j'ai

10 profité de ces occasions pour en parler. Comme ils étaient très occupés,

11 il n'y avait pas beaucoup d'occasion de leur en parler.

12 C'était au sujet de l'aide humanitaire qu'on a parlé. Et moi, j'ai insisté

13 sur le fait qu'ils devaient utiliser leur influence auprès de ces

14 organisations humanitaires pour que plus d'aide soit accordée dans les

15 établissements médicaux.

16 Bien sûr, j'ai essayé aussi de leur parler des moyens nécessaires à nos

17 hôpitaux. Mais on a parlé d'autres sujets bien sûr, par exemple au sujet

18 de la situation économique: ils m'expliquaient qu'ils n'avaient pas la

19 possibilité d'aider le domaine de la santé. Et là, ils ont évoqué les

20 difficultés économiques. C'est pour cela qu'on a parlé de ces problèmes

21 économiques, parce qu'on a évoqué ces problèmes par rapport aux problèmes

22 dans le domaine de la santé. Et à l'époque, nous n'avions pas beaucoup

23 d'informations sur le centre d'enquêtes. Tout ce que j'ai appris sur ce

24 centre, je l'ai appris après la guerre, et j'ai appris cela des Musulmans.

25 Question: Je sais que maintenant il faut faire une pause, mais j'ai besoin

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1 d'une autre réponse.

2 Est-ce que vous n'avez jamais rencontré le Dr Stakic en uniforme?

3 Réponse: Je ne peux pas me souvenir de cela. Maintenant, je n'exclus pas

4 cette possibilité de l'avoir rencontré en uniforme, pendant la guerre.

5 C'était peut-être pendant la guerre, mais je ne peux pas me souvenir de

6 cela.

7 Question: Est-ce qu'au cours d'une période, il y avait des cas où, tous

8 ceux qui travaillaient dans les autorités civiles portaient les uniformes?

9 Réponse: Oui, je pense que cela est devenu "secrétariat à la défense

10 nationale". Et j'ai reçu une sorte d'information, une sorte d'avis dans

11 lequel il a été ordonné que tout le monde devait porter les uniformes.

12 Moi, j'ai acheté un uniforme et je l'ai porté seulement le premier jour.

13 Par la suite, je l'ai mis dans mon armoire où il est resté pendant toute

14 la guerre. Je pense que c'était le secrétariat à la défense nationale qui

15 nous avertit de cette obligation de porter l'uniforme et que nous étions

16 tous obligés de porter l'uniforme au travail.

17 Question: Est-ce que vous pouvez nous dire à quel moment cela s'est

18 produit? Est-ce que c'était après le 8 mai ou plutôt vers le 20 mai?

19 M. Krejic (interprétation): C'était plus tard, beaucoup plus tard. Il est

20 possible que c'était au cours de l'année 1993, lorsque la guerre faisait

21 rage et lorsque l'appel à la mobilisation a été fréquent.

22 M. le Président (interprétation): Maintenant, nous allons faire une pause.

23 Mais avant cela, je vous prie d'être prêt après la pause, lorsque nous

24 aurons fini avec votre témoignage, que vous soyez prêt à parler des

25 questions qui seront posées lundi prochain. L'audience est suspendue

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1 jusqu'à 17 heures 35.

2 (Le témoin est reconduit hors du prétoire.)

3 (L'audience, suspendue à 17 heures 15, est reprise à 17 heures 43.)

4 M. le Président (interprétation): Maintenant, pour ce qui est de la

5 première question qui m'a été posée par l'accusation, mardi, il va falloir

6 agir en s'adaptant aux événements.

7 A l'heure qu'il est, personne n'est en mesure de savoir combien de temps

8 sera nécessaire pour entendre le témoin ce jour-là. Donc il faut sans

9 tenir au calendrier prévu. L'accusation dispose de trois représentants de

10 qualité, donc aucune inquiétude à se faire.

11 Mais ce jour-là, nous ignorons encore qui sera entendu mercredi, et il

12 serait prématuré de prendre une décision quelle qu'elle soit aujourd'hui.

13 Parfois il convient de s'en tenir au calendrier des audiences.

14 (Le témoin est introduit dans le prétoire.)

15 Parce qu'il faut pouvoir se fier à ce calendrier. Et puis les Juges ont

16 parfois d'autres engagements professionnels, d'autres obligations dans le

17 cadre de leur fonction. Si bien que je suis désolé, mais il ne sera pas

18 possible de remanier le calendrier des audiences pour la semaine

19 prochaine.

20 Merci, Monsieur le Témoin de nous avoir rejoints.

21 Monsieur le Juge Vassylenko a un certain nombre de questions à vous poser.

22 (Questions au témoin, M. Radovan Krejic, de M. le Juge Vassylenko.)

23 M. Vassylenko (interprétation): Monsieur Krejic, veuillez avoir

24 l'obligeance de m'expliquer pourquoi le jeune Dr Stakic, ce docteur jeune,

25 inconnu, vous l'avez dit vous-même, pourquoi le Dr Stakic a-t-il été élu

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1 au poste de vice-président et puis ensuite de président de l'assemblée

2 municipale, pour être ensuite désigné au poste de président de la cellule

3 de crise, alors que des personnages politiques de premier plan tel que

4 Simo Miskovic, Srdo Srdic et Milan Kovacevic étaient laissés de côté,

5 dirons-nous?

6 M. Krejic (interprétation): La seule chose que je peux vous dire c'est

7 l'opinion que j'ai. C'est difficile à dire, je le reconnais, mais

8 j'imagine que les hommes plus expérimentés ont décidé d'utiliser quelqu'un

9 de plus jeune pour le placer dans une situation où il ne serait pas tout à

10 fait à son aise.

11 Parfois ce sont les circonstances qui expliquent ce genre de situation où

12 quelqu'un finit par se retrouver au poste où on l'attendrait le moins. En

13 Serbie, actuellement, nous avons une présidente qui n'a commencé à faire

14 de la politique qu'un an avant son élection.

15 Question: Aujourd'hui, vous avez déclaré qu'un groupe de membres radicaux

16 du SDS, au niveau le plus élevé, a décidé, en automne 1992, de démettre M.

17 Stakic de ses fonctions. Pouvez-vous être plus précis? Pouvez-vous nous

18 dire quelles étaient les divergences entre le Dr Stakic et les membres les

19 plus radicaux à la tête du SDS? Où se trouvaient leurs divergences

20 exactement?

21 Réponse: J'avais l'impression que les radicaux, ceux que l'on peut

22 continuer à qualifier d'aile radicale du SDS, cette aile radicale donc

23 n'était pas satisfaite du fait que le Dr Stakic en tant que président de

24 l'assemblée, président de la cellule de crise, n'avait pas une attitude

25 assez énergique, assez dure. Il pensait qu'il devait exercer son pouvoir

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1 de manière plus affirmée pour s'occuper, dirons-nous, des forces qui

2 n'étaient pas contrôlées par l'administration, forces armées ou forces de

3 police.

4 Je sais qu'une fois, lorsque j'ai participé à une réunion de l'assemblée

5 municipale en tant que membre coopté de cette assemblée, une demande a été

6 faite pour que le dirigeant des forces armées soit convoqué et explique à

7 l'assemblée un certain nombre de choses, parce qu'en ville on se posait

8 des questions au sujet des forces armées.

9 Donc on a demandé aux députés d'essayer de faire front face aux autorités

10 militaires. Or, je suppose que le Dr Stakic ne l'a pas fait, il n'y est

11 pas arrivé. Peut-être n'a-t-il même pas essayé, peut-être qu'il a estimé

12 que cela sortait de ses capacités et de ce que les autorités civiles

13 pouvaient faire.

14 Vous dire pourquoi ils ont exigé qu'il fasse cela, je ne le sais pas. Mais

15 en tout cas, l'impression que j'ai eue en participant à cette réunion et

16 en écoutant cela, a été celle que je viens de vous décrire. Je crois qu'on

17 est même arrivé à la conclusion qu'il faudrait convoquer les commandants

18 devant l'assemblée pour qu'ils s'expliquent, expliquent pourquoi ils

19 mobilisaient autant de monde, parce qu'ils mobilisaient énormément de

20 monde à Prijedor et il fallait que cela s'arrête.

21 Mais je crois que, vraisemblablement, ils estimaient que le Dr Stakic

22 n'était pas assez agressif, qu'il n'utilisait pas assez le pouvoir qui

23 était le sien. Ils pensaient que s'il continuait dans ce sens, il

24 n'arriverait pas à augmenter le pouvoir des autorités civiles à Prijedor.

25 Et je pense qu'eux, ils estimaient que c'est dans ce sens qu'il aurait dû

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1 travailler.

2 Question: Donc le Dr Stakic était en mesure d'influencer l'armée et la

3 police?

4 Réponse: Je l'ignore, mais je suppose qu'il n'était pas en mesure de les

5 influencer, du simple fait qu'il n'a pas exercé d'influence sur eux. J'ai

6 simplement dit que l'aile radicale a dit qu'il faudrait qu'il exerce plus

7 d'influence sur eux, mais qu'il en était incapable ou bien que peut-être

8 ne souhaitait-il pas le faire.

9 Question: Vous avez déclaré que vous avez conseillé au Dr Stakic de

10 quitter la politique et de retrouver sa blouse de médecin. Quelle a été sa

11 réaction?

12 Réponse: Justement, c'était à peu près au moment où il a démissionné, vers

13 la fin de 1992, lorsque je suis allé à l'assemblée quelquefois et j'ai eu

14 la possibilité de m'entretenir avec lui dans mon bureau. Je ne sais pas

15 jusqu'à quel point je l'ai influencé et jusqu'à quel point j'ai joué un

16 rôle dans cette décision. Mais je sais que, peu après, il a démissionné,

17 il s'est retiré de la vie politique. C'était à peu près à cette période-

18 là.

19 Question: Dernière question: quand et comment avez-vous appris que le Dr

20 Stakic était membre du parti de Velkjo Guberina, le parti radical

21 populaire et national?

22 Réponse: Je l'ai appris au moment du débat relatif à la mise à pied du Dr

23 Stakic, de son poste de président de l'assemblée municipale. L'aile

24 radicale a présenté un des arguments suivants, a dit que le Dr Stakic

25 n'était pas membre du SDS. C'est la raison qu'ils ont invoquée pour leurs

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1 efforts consistant, ayant pour objectif de le faire partir de ce poste.

2 C'est la première fois que j'en ai entendu parler. Moi, je n'ai pas

3 participé à la fondation du parti populaire radical, mais c'est la

4 première fois que j'ai entendu dire que le Dr Stakic n'était pas membre du

5 SDS.

6 Ensuite, plus tard, il est devenu chef du centre médical, et on a eu

7 l'occasion de se parler plus longuement. Et c'est là que j'ai été mis au

8 courant de la situation.

9 Question: Est-ce que vous savez quoi que ce soit au sujet du programme

10 politique du parti radical populaire de Guberina?

11 M. Krejic (interprétation): Non, non. Malheureusement, non.

12 Mais je peux imaginer de quoi il s'agit, parce que j'ai déjà eu l'occasion

13 de voir ce genre de programme, même avant la guerre. Et ces programmes se

14 ressemblaient tous. L'un de leurs principaux objectifs, c'était d'obtenir

15 le pouvoir et les différences entre les programmes de ces différents

16 partis politiques étaient très peu notables.

17 J'ai regardé le programme du SDS, du SDA et du HDZ, et croyez-moi, même au

18 jour d'aujourd'hui, je pourrai apposer ma signature pour approbation de

19 ces programmes.

20 Mais croyez-moi, et malheureusement, personne n'a appliqué ces programmes

21 politiques parce qu'il s'agissait de simples déclarations d'intention.

22 Tout ce que voulaient ces gens, c'était de s'emparer du pouvoir, c'est

23 tout.

24 M. Vassylenko (interprétation): Je n'ai plus de question à vous poser.

25 M. le Président (interprétation): Madame La juge Argibay

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1 (Questions au témoin, M. Radovan Krejic, de Mme la Juge Argibay)

2 Mme Argibay (interprétation): Monsieur, il me semble que vous nous avez

3 dit que lorsque votre collègue ou la personne qui travaillait en votre

4 compagnie a été emmené à Omarska pour y être interrogé, et lorsque vous

5 êtes allé voir M. Drjalca afin d'essayer d'aider votre collègue, vous avez

6 dit, donc, que vous vous attendiez à voir la tenue d'un procès, ou est-ce

7 qu'il y a une procédure quelconque afin de déterminer l'innocence ou la

8 culpabilité de la personne? J'imagine que c'était là votre état d'esprit,

9 vu votre formation de juriste.

10 Je voudrais donc savoir, si à votre connaissance, il y a eu des procédures

11 instituées et concernant les gens détenus à Prijedor? Et je ne parle pas

12 uniquement de votre ami et collègue, je parle de tous les gens internés à

13 Prijedor.

14 M. Krejic (interprétation): A l'époque, je ne savais pas ce qui se passait

15 à Omarska. Pour nous qui n'étions pas dans cette situation, qui n'étions

16 pas à cet endroit, c'était très difficile à savoir. Mais plus tard, j'ai

17 appris que des enquêtes avaient été menées à Omarska, que les documents

18 avaient été conservés. Mais à ma connaissance, il n'y avait jamais eu de

19 plaintes criminelles déposées contre les personnes qui avaient fait

20 l'objet d'enquête. Enfin, c'est ce que je crois savoir.

21 Question: En tant que juriste, connaissiez-vous le nom du président du

22 tribunal de Prijedor au moment de la prise de pouvoir de la ville?

23 Réponse: Où? M. Seric.

24 Question: Est-ce que vous savez ce qui est arrivé à ce monsieur?

25 Réponse: Là encore, beaucoup plus tard, j'ai appris qu'il faisait partie

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1 des victimes. Mais je ne l'ai appris que plus tard, après la guerre,

2 lorsque ceux qui avaient été à Omarska sont revenus de l'étranger.

3 Question: Est-ce que vous connaissiez certains des juges ou des membres du

4 système judiciaire de Prijedor au moment de la prise de pouvoir à

5 Prijedor?

6 Réponse: Oui, je les connaissais.

7 Question: Est-ce que ces gens ont été démis de leurs fonctions?

8 Réponse: Franchement, je ne sais pas qui a été démis de ses fonctions et

9 je ne sais même pas s'il y en a qui ont été démis de leurs fonctions, mais

10 la plupart d'entre eux sont restés à leurs postes, ceux qui occupaient ces

11 postes avant la guerre. Ils sont restés pendant la guerre et après la

12 guerre. Et ces gens occupent toujours ces postes. Mais je ne saurais vous

13 donner des détails à leur sujet.

14 Question: Est-ce que vous savez si certains des juges ou des procureurs

15 ont été eux aussi internés à Omarska?

16 Réponse: Je ne connais que le cas de Seric, je ne connais pas le cas

17 d'autres personnes.

18 Question: Est-ce que vous pensez que les gens qui travaillaient au sein du

19 système judiciaire au moment de la prise de la ville et dont vous nous

20 dites qu'ils occupent toujours leurs postes et qu'ils ont continué à les

21 occuper pendant toute cette période, est-ce que vous savez si ces gens ont

22 entamé des procédures contre les détenus d'Omarska?

23 M. Krejic (interprétation): Je ne sais pas, non, je n'ai pas connaissance

24 de ce genre de procédure.

25 Mme Argibay (interprétation): Merci, je n'ai plus de question.

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1 M. le Président (interprétation): Merci.

2 La parole est maintenant à la défense. Avez-vous des questions

3 supplémentaires?

4 M. Lukic (interprétation): Je n'ai qu'une question qui découle d'une des

5 questions posées par le Juge Vassylenko.

6 (Interrogatoire principal supplémentaire du témoin, M. Radovan Krejic, par

7 Me Lukic.)

8 Vous nous avez dit, Monsieur le Témoin, que M. Stakic avait été démis de

9 ses fonctions par l'aile radicale du SDS parce qu'il n'avait pas imposé

10 son autorité à l'armée ni à la police. Quelle est votre opinion? Est-ce

11 que ce nouveau groupe, lui, est arrivé à s'imposer à la police, à l'armée?

12 M. Krejic (interprétation): Comme je l'ai dit précédemment, en écoutant

13 les débats aux réunions de l'assemblée et lors des réunions du conseil

14 municipal, une fois, l'impression que j'ai eue, c'est que ces gens étaient

15 déçus par le manque de détermination du Dr Stakic. Ils pensaient qu'il

16 aurait fallu mieux utiliser le poste qu'il occupait afin d'influencer un

17 certain nombre de choses et d'occasionner des changements au sein de

18 l'administration.

19 Mais il est apparu plus tard que, même après le départ du Dr Stakic, les

20 choses n'ont pas vraiment changé. Je crois que les forces armées, les

21 forces de police aussi bien que la Défense territoriale étaient autonomes,

22 étaient leur propre chef, et les autorités civiles ne pouvaient rien faire

23 pour les influencer.

24 M. Lukic (interprétation): Merci, Monsieur le Témoin, merci Monsieur le

25 Président, Madame et Monsieur les Juges.

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1 M. le Président (interprétation): Madame Sutherland?

2 Mme Sutherland (interprétation): Quelques questions seulement.

3 (Contre-interrogatoire supplémentaire du témoin, M. Radovan Krejic, par

4 Mme Sutherland.)

5 Monsieur Krejic, Mme la Juge Argibay vous a posé des questions au sujet du

6 système judiciaire à Prijedor. Pouvez-vous nous donner les noms des juges

7 musulmans et croates qui sont restés à leur poste après la prise de la

8 ville?

9 M. Krejic (interprétation): Je n'ai rien dit au sujet de l'appartenance

10 ethnique des gens. Je sais qu'un certain nombre de juges sont restés à

11 leur poste. Moi, je connaissais très peu de juges personnellement. Je

12 connaissais le président du tribunal du fait de mes fonctions de président

13 de la caisse d'assurance maladie. C'est avec lui… Moi, j'avais des

14 contacts avec les chefs des différents services, et lui était responsable

15 de l'administration judiciaire, et c'est lui qui était au fait du droit en

16 matière d'assurance médicale.

17 Donc je connaissais très peu de juges. Je les rencontrais parfois au

18 Tribunal lorsque je venais au Tribunal. Je crois que les Musulmans sont

19 partis du Tribunal, comme cela a été le cas dans toutes les autres

20 institutions, mais je n'ai pas connaissance de Musulmans qui soient restés

21 sur place. Je ne connaissais que très peu d'entre eux. Je connaissais

22 uniquement un avocat qui s'appelait Emir Islamovic. Ce sont les deux

23 avocats que je connais. Ils ont quitté Prijedor mais maintenant ils sont

24 revenus.

25 Question: Le président de l'assemblée municipale, c'était lui qui

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1 déterminait l'ordre du jour, n'est-ce pas?

2 Réponse: L'ordre du jour des réunions?

3 Question: Oui.

4 Réponse: J'ignore comment l'ordre du jour était préparé. Je n'étais pas en

5 mesure de voir comment l'ordre du jour de l'assemblée municipale était

6 préparé. Je n'ai participé ou assisté qu'à quelques réunions de

7 l'assemblée municipale et, généralement, c'était le secrétaire de

8 l'assemblée qui préparait l'ordre du jour.

9 Ensuite il envoyait cet ordre du jour au président de l'assemblée qui en

10 donnait lecture. Ceci était consigné dans le procès-verbal, et ensuite

11 l'ordre du jour était adopté par l'assemblée. Vous dire comment l'ordre du

12 jour était préparé par le secrétaire de l'assemblée, je ne le pourrais.

13 Question: A l'ordre du jour des deux réunions auxquelles vous avez

14 assisté, est-ce que jamais on avait inscrit le nettoyage ethnique des

15 villages musulmans? Est-ce qu'on a parlé de la détention des Musulmans?

16 Est-ce qu'on a parlé des crimes commis contre les civils musulmans et

17 croates?

18 M. Krejic (interprétation): Jamais.

19 Mme Sutherland (interprétation): Merci. Je n'ai plus de question.

20 (Questions supplémentaires au témoin, M. Radovan Krejic, de M. le

21 Président.)

22 M. le Président (interprétation): Une dernière question: pour vous, qui

23 occupait le poste n°1 au sein de la cellule de crise de Prijedor? Simo

24 Drljaca, M. Kovacevic, le Dr Stakic? Toute personne que vous connaissez

25 très bien.

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1 M. Krejic (interprétation): Franchement, je ne vois pas très bien de quoi

2 vous parlez. En terme juridique, le président, vu son poste, doit être

3 considéré comme occupant un poste plus important.

4 Cependant, si vous parlez de l'autorité effective dont disposaient ces

5 personnes, je pense que c'était Simo Drljaca qui était le n°1. C'est lui

6 qui avait le plus de pouvoir. Et le Dr Kovacevic, lui, était le plus

7 respecté au sein de la cellule de crise. Mais en termes juridiques,

8 c'était le Dr Stakic parce que lui, il était président. Donc voilà à peu

9 près la façon dont on pourrait les classifier.

10 M. le Président (interprétation): En termes juridiques ou du point de vue

11 du droit, aurait-il été possible pour le Dr Stakic de donner des ordres à

12 l'un ou l'autre de ces deux hommes que j'ai mentionnés?

13 M. Krejic (interprétation): Pas à Simo Drljaca. Simo Drljaca avait été

14 nommé suite à une procédure différente. Il avait été au MUP et au SUP, et

15 c'était la même situation qu'à la caisse d'assurance maladie. Vous avez

16 une chaîne hiérarchique verticale qui mène directement de la municipalité

17 à la République. Je crois que Simo Drljaca relevait de quelqu'un qui se

18 trouvait à Banja Luka. Quant au Dr Kovacevic, il avait une fonction

19 exécutive. Il présidait l'organe exécutif. Il n'y avait donc pas de lien

20 de subordination entre le Dr Stakic, en tant que président de l'assemblée.

21 Il n'aurait pas pu insister sur l'application des décisions.

22 La cellule de crise pouvait donc soit appliquer les décisions soit les

23 renvoyer à la municipalité, si elle estimait quelles n'étaient pas

24 valables. Le président de la municipalité ne peut donner d'ordre au

25 conseil exécutif qui est indépendant.

Page 10613

1 M. le Président (interprétation): D'autres questions? Personne ne veut

2 poser de question.

3 Merci beaucoup d'être venu. Merci d'avoir pris le temps de venir déposer

4 ici. Merci de nous avoir donné un grand nombre de nouvelles informations,

5 de nous avoir donné un nouvel éclairage de ce qui s'est passé à Prijedor

6 en 1992.

7 Je vous souhaite un bon retour en toute sécurité à Prijedor. Merci encore.

8 Vous pouvez disposer.

9 Monsieur l'huissier, veuillez raccompagner le témoin.

10 M. Krejic (interprétation): Je vous remercie quant à moi aussi. Et

11 j'espère que j'ai pu contribuer à la manifestation de la justice et de la

12 vérité au sujet des événements de Prijedor.

13 (Le témoin, M. Radovan Krejic, est reconduit hors du prétoire.)

14 (Questions relatives à la procédure.)

15 M. le Président (interprétation): Passons maintenant à la question des

16 témoins de lundi. La défense insiste pour entendre M. Mujadzic. C'est bien

17 cela?

18 M. Ostojic (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Nous remercions

19 la Chambre et le Bureau du Procureur de nous avoir donné la possibilité de

20 voir notre client, comme nous l'avons fait ce matin. Nous avons évoqué un

21 certain nombre de questions et nous souhaitons maintenant vous en faire

22 part. Il s'agit de la question que vous venez d'évoquer vous-même.

23 A l'époque, nous étions un petit peu déconcertés par la procédure qui

24 concédait M. Murselovic, M. Sivac et M. Mujadzic. Donc nous étions un

25 petit peu perplexes devant cette façon de procéder et nous étions un petit

Page 10614

1 peu déçus. Nous sommes toujours déçus de voir que le Bureau du Procureur a

2 la possibilité de commencer de préposer de nouvelles questions, de

3 présenter de nouveaux éléments de preuve pour essayer de prouver des

4 éléments qu'ils n'ont pas prouvés lors de la présentation des moyens à

5 charge.

6 Après avoir consulté les autres membres de l'équipe de la défense, y

7 compris le Dr Stakic, nous estimons qu'en dépit du fait que six documents

8 ont été présentés avec retard, en vertu de l'Article 68 et étant donné que

9 l'on semble s'efforcer d'arriver à terminer l'audition de certains témoins

10 le plus rapidement possible, nous n'allons pas poser au Dr Mujadzic de

11 questions supplémentaires, en dehors de celles que nous avons posées

12 pendant le contre-interrogatoire principal du témoin. Nous n'allons donc

13 pas poser de nouvelles questions supplémentaires au Dr Mujadzic. Lorsque

14 le moment sera approprié, nous souhaiterions pouvoir intervenir au sujet

15 de deux autres points, auprès des Juges.

16 M. le Président (interprétation): Donc, si j'ai bien compris, lundi matin

17 nous allons commencer tout de suite avec le témoin suivant, à savoir, si

18 je ne me trompe, le témoin 040. Un témoin qui a déjà déposé dans l'affaire

19 Omarska?

20 M. Ostojic (interprétation): C'est exact, Monsieur le Président.

21 M. le Président (interprétation): Merci.

22 Bien, veuillez maintenant aborder les autres sujets dont vous souhaitiez

23 nous faire part.

24 M. Ostojic (interprétation): Je vous remercie.

25 C'était une question soulevée par le Bureau du Procureur en ce qui

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1 concerne Mayhew qui est un témoin produit par le Bureau du Procureur et

2 qui a déposé. Il y a une correspondance avec le Bureau du Procureur qui

3 identifie certains documents qui étaient disponibles. Le témoin a pu

4 consulter pendant sa déposition et pendant le contre-interrogatoire, ainsi

5 que pendant une partie des questions supplémentaires.

6 Il a été révélé qu'il a pu même, de façon un peu cursive, voir son

7 dossier, ce qui était à l'ordinateur, et il a une connaissance de

8 renseignements sur lesquels il pouvait faire fond lorsqu'il donnait son

9 témoignage.

10 Toutefois, on m'a dit, en ce qui concernait ces questions de personnes par

11 rapport aux écrits qui leur étaient soumis, que nous n'avons jamais été

12 informés par écrit malgré les paramètres qui sont énoncés par le Bureau du

13 Procureur, et il ne savait pas que M. Mayhew allait les faire.

14 Nous ne nous attendons pas, sur la base des observations faites par le

15 Tribunal, à ré-examiner la déposition de M. Mayhew sur la base des

16 délibérations de la Chambre et des indications qui ont été offertes par

17 rapport à la déposition de M. Mayhew en discutant avec le Dr Stakic et en

18 nous fondant sur les commentaires faits par le Tribunal au cours de sa

19 déposition, ainsi que les observations faites par la Chambre au cours des

20 délibérations. Egalement, nous ne tentons pas d'obtenir la possibilité de

21 compléter notre contre-interrogatoire de M. Mayhew.

22 (Les Juges se concertent sur le siège.)

23 M. le Président (interprétation): Après délibération, accepté.

24 La question suivante, s'il vous plaît.

25 M. Ostojic (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Président.

Page 10616

1 La question suivante a trait, en fait, aux témoins qui ont été identifiés

2 pour nous, par rapport à ce qui correspond aux déclarations et

3 communications faites au titre de l'Article 68. La Chambre nous a invités,

4 d'après mes souvenirs, à demander l'aide des membres de la Chambre pour

5 savoir quels seraient les témoins que nous souhaiterions que la Chambre

6 convoque sous astreinte ou qu'elle puisse nous aider à faire venir

7 déposer.

8 Nous nous sommes consultés. Nous pensons qu'avec la permission de la

9 Chambre, nous pourrions communiquer le nom de deux de ces personnes, mais,

10 là encore, en prenant les plus grandes précautions. Peut-être que je

11 devrais donner leurs noms seulement en session à huis clos partiel si

12 c'est nécessaire. Mais je procéderai de la manière que la Chambre

13 souhaite.

14 M. le Président (interprétation): Je pense que nous avons déjà parlé des

15 noms de ces personnes en audience publique, donc je ne vois pas de raisons

16 pour lesquelles nous devrions aller à huis clos partiel à cette fin.

17 Si vous vouliez bien avoir la bonté d'indiquer ces noms et de préciser si

18 vous voulez que nous convoquions ces personnes sous astreinte, ou si vous

19 avez de bonnes raisons pour demander à la Chambre de faire venir déposer

20 ces témoins comme témoins présentés par les membres de la Chambre.

21 M. Ostojic (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Président.

22 Pour répondre à cette question, qui est en deux parties, ceci relève du

23 pouvoir discrétionnaire de la Chambre, si la Chambre souhaite convoquer

24 sous astreinte ou nous accorder cette procédure.

25 Nous avons été informés par ces témoins qu'ils ne le feront pas parce

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1 qu'ils comprennent qu'après avoir fait des déclarations et avoir été

2 interviewés par le Bureau du Procureur, ils ne coopéreront pas avec la

3 défense. Notamment, certains d'entre eux sont ou bien des suspects ou

4 pensent qu'ils seront considérés comme des suspects à l'avenir ou à cause

5 d'actes d'accusation qui ont été placés sous scellés. De sorte qu'ils ne

6 coopèrent pas avec nous, mais coopèrent et ont coopéré dans la mesure où

7 ils ont donné ces interviews au Bureau du Procureur.

8 Nous pensons que la cellule de crise, l'autorité qui existait, ou le

9 pouvoir de la cellule de crise est pertinent et franchement très important

10 pour comprendre les choses, de façon à pouvoir se prononcer sur les faits.

11 Par conséquent, respectueusement, nous voulons suggérer que les témoins,

12 si la Chambre décidait de les citer à comparaître, soient limités aux

13 témoins qui étaient membres de la cellule de crise ou qui auraient été

14 membres de la cellule de crise. Je ne suis pas sûr que la Chambre a lu de

15 façon complète leur déclaration. Ceci inclurait Ranko Travar, M. Pavicic

16 et Slavko Budimir.

17 Parmi ces trois-là, alternativement –respectueusement- la Chambre pourrait

18 là encore, selon son pouvoir discrétionnaire je le pense, en convoquer

19 deux ou trois. Cela pourrait nous aider à parvenir à un résultat juste en

20 l'espèce, et à mieux comprendre les circonstances et les événements qui se

21 sont déroulés à Prijedor et en Bosnie au cours du printemps et de l'été

22 1992.

23 M. le Président (interprétation): Pourrais-je alors demander à

24 l'accusation ses observations à ce sujet. Mais veuillez, dès maintenant,

25 tenir compte du fait qu'apparemment il semble que ce serait une perte de

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1 temps de convoquer sous astreinte ces personnes dans le cas où elles ne

2 voudraient pas comparaître comme témoins de la défense. Donc ceci

3 gagnerait du temps en fait s'ils pouvaient comparaître comme témoins cités

4 par la Chambre.

5 Une condition préalable, là encore, serait d'équilibrer les intérêts des

6 victimes par rapport aux intérêts de la défense et aux intérêts de la

7 justice pour parvenir à la vérité. Mais nous aurions besoin également, en

8 l'espèce, d'obtenir un sauf-conduit et de demander aux autorités

9 néerlandaises d'assurer un sauf-conduit également.

10 Je voudrais avoir l'opinion de l'accusation sur cette question.

11 M. Koumjian (interprétation): Eh bien, Monsieur le Président, nous pensons

12 que tout ceci est pertinent: ils détiennent des informations pertinentes.

13 Je ne vais pas faire de commentaire concernant leur crédibilité, nous

14 attendrons de les avoir entendus.

15 Mais, en ce qui concerne le point de savoir s'ils peuvent être convoqués

16 sous astreinte par la défense ou par les membres de la Chambre, je pense

17 que la Chambre peut lancer un ordre de comparution sous astreinte au nom

18 de la défense, et que ces témoins sont priés de venir et obligés de venir

19 jusqu'à nous, tout comme vous pouvez le faire au nom de l'accusation.

20 Nous n'avons pas de préférence, ce sera ce que la Chambre veut choisir et

21 la façon dont elle souhaite traiter de la question. Qu'ils apparaissent

22 comme témoins de la défense ou témoins de l'accusation, nous n'avons pas

23 d'objection à ce qu'un sauf-conduit soit donné.

24 M. le Président (interprétation): Nous prendrons une décision dès que

25 possible sur cette question.

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1 Y a-t-il d'autres questions en plus de celles-là?

2 M. Ostojic (interprétation): Pas pour le moment, Monsieur le Président, je

3 vous remercie.

4 M. le Président (interprétation): Alors c'est à moi de vous informer que,

5 comme vous le savez, la Chambre de première instance a été saisie d'une

6 requête du Bureau du Procureur présentée au terme de l'Article 66C) du

7 Règlement et, en comparant et en équilibrant les intérêts mentionnés dans

8 cet Article 66C) de notre Règlement de procédure et de preuve, la Chambre

9 de première instance est parvenue à la conclusion qu'il fallait faire

10 droit à la requête du Bureau du Procureur. Nous sommes convaincus que ceci

11 ne portera pas préjudice au Dr Stakic ou à la défense à la suite de cette

12 décision.

13 Maintenant, passons au programme des semaines à venir.

14 Nous commencerons comme nous venons le dire avec le témoin 040 et ceci ne

15 pose pas de problème. Nous avons déjà eu le résumé de la déclaration par

16 le passé et nous avons également le compte rendu; ce qui permettra, par

17 conséquent, à l'accusation de procéder immédiatement, de commencer

18 immédiatement, un contre-interrogatoire lundi, est-ce exact?

19 M. Koumjian (interprétation): Nous serons prêts, oui, Monsieur le

20 Président. Nous n'étions pas encore prêts, mais nous serons prêts.

21 M. le Président (interprétation): Je ne veux pas citer de nom, mais nous

22 savons le nom du témoin que nous allons entendre mardi. Je crois que ceci

23 remplit l'intégralité du programme de mardi.

24 On peut l'espérer d'une façon qui également correspond aux intérêts de la

25 défense et de l'accusation en même temps, mais quand est-il du reste de la

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1 semaine? Pourrai-je entendre, s'il vous plaît, quel sera l'ordre des

2 témoins que vous avez l'intention de faire entendre et comme envisager que

3 les résumés des déclarations, de leurs déclarations, soit fourni lundi

4 matin?

5 M. Ostojic (interprétation): L'ordre dans lequel nous avons l'intention de

6 faire déposer les témoins, avec l'interruption pour le témoin qui viendra

7 mardi, serait le suivant: 040, 071, 072, et à la demande de l'accusation,

8 pour que ce soit le dernier témoin de la semaine, ce serait le 058.

9 Nous avons une demande qui nous a été présentée en ce qui concerne ce

10 dernier témoin, Monsieur le Président, si vous le permettez?

11 M. le Président (interprétation): Oui, s'il vous plaît.

12 M. Ostojic (interprétation): Je vois que mon confrère vient de se lever.

13 Comme la Chambre doit le savoir, le témoin 058 a déposé dans d'autres

14 affaires devant ce Tribunal, nous n'avons pas accès aux comptes des

15 procédures en ce qui concerne Keraterm, Sikirica, et nous voudrions

16 demander à la Chambre qu'on nous fournisse ainsi qu'au Bureau du

17 Procureur, ou que le Greffe puisse nous remettre copies du compte rendu

18 sur la déposition de ce témoin.

19 Deuxièmement, pour informer la Chambre en ce qui concerne le témoin 058,

20 bien qu'à l'origine nous n'avons pas demandé de mesures de protection,

21 après avoir discuté des questions avec ce témoin, nous avons été informés

22 que depuis sa dernière déposition ou pour être plus précis, depuis la

23 dernière fois qu'il a déposé ici à La Haye devant le Tribunal, il a

24 rencontré certains problèmes concernant cette déposition, de sorte que

25 maintenant, nous allons demander des mesures de protection pour ce témoin.

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1 Nous pouvons, si la Chambre le souhaite, préparer une requête écrite et

2 nous pourrons, évidemment, la soumettre à la Chambre lundi.

3 Nous remettrons également… Nous voulons simplement prévenir avec un peu

4 d'avance le Bureau du Procureur et la Chambre à ce sujet.

5 M. le Président (interprétation): Je pense que ceci ne devrait pas

6 constituer un problème, mais est-ce que nous pourrions entendre quelle est

7 la demande du Bureau du Procureur, s'il vous plaît,?

8 M. Koumjian (interprétation): Oui. Nous n'avons pas d'objection aux

9 mesures de protection. C'est seulement en ce qui concerne l'ordre, parce

10 que, bien que nous ayons demandé pour cette semaine d'attendre pour le

11 témoin 058 à cause de nos recherches, des recherches que nous avons à

12 faire, elles sont maintenant achevées. De sorte que nous sommes maintenant

13 un peu en avance sur ce que nous avions prévu pour le 071 et 072. Et si

14 ceci ne fait pas de différence pour la défense, nous préférerions qu'il

15 précède ces deux témoins.

16 M. Ostojic (interprétation): Je n'aime pas du tout suivre une pratique,

17 mais si le Bureau du Procureur le préfère, s'ils veulent décider de notre

18 calendrier, nous travaillerons ensemble sur cette question la semaine

19 suivante. Il semble que, malheureusement, cela ne fonctionne jamais.

20 Quand un témoin que nous voulons citer se comporte d'une manière

21 particulière, on se plaint de dire qu'il est trop lent. Le jour suivant,

22 nous avons un témoin qui semble être plus rapide dans ces réponses et, à

23 ce moment-là, la plainte est que nous faisons apparaître des témoins qui

24 parlent trop vite.

25 Nous allons faire tout ce que nous pouvons, comme nous l'avons fait par le

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1 passé pour le Bureau du Procureur. Et s'il souhaite faire déposer le

2 témoin 058 mercredi, eh bien nous le ferons. Si nous en avons fini avec le

3 témoin 040 le lundi, nous entendrons immédiatement le 058, lundi après-

4 midi.

5 M. le Président (interprétation): Je vous remercie de votre coopération et

6 je pense que nous ne devrions pas essayer de trouver de raisons de

7 contrariété sur ce point. J'ai considéré que c'était simplement une

8 demande, si possible d'entendre le zéro 058 avant le 071. Et si cela vous

9 est possible, je vous en suis reconnaissant.

10 Nous allons donc procéder dans cet ordre la semaine prochaine. Peut-être

11 pour le compte rendu, avant qu'ai été discuté (sic) seulement dans le

12 cadre d'une réunion de l'Article 65ter du Règlement, qu'en est-il des

13 pièces à conviction, s'il vous plaît? Tout d'abord en BCS, puis ensuite,

14 pas à pas, dans une version traduite?

15 M. Ostojic (interprétation): Oui, pour tenir la Chambre au courant ainsi

16 que le Bureau du Procureur, lorsque nous présenterons des pièces à

17 conviction par des témoins, nous nous efforcerons de fournir les textes en

18 BCS au moins deux jours plus tôt au Bureau du Procureur, de façon à ce

19 qu'il puisse avoir leur personnel, pour que l'on puisse procéder au moins

20 à un examen rapide.

21 Mais d'après ce que j'ai compris, ils ont déjà un ensemble de nos pièces à

22 conviction en version BCS. Nous attendons encore la traduction du service

23 de traduction pour achever cette traduction des documents qui seront

24 présentés et nous n'avons pas, pour le moment, de délai qui nous permette

25 de savoir quand ces traductions seront terminées.

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1 M. le Président (interprétation): Si la défense peut également nous faire

2 un plaisir et présenter ces documents immédiatement, de façon que nous

3 n'ayons pas à attendre que ces documents soient traduits, parce que les

4 capacités de la Chambre de première instance seront limitées et nous

5 voulons vraiment lire tout ce qui est présenté par la défense. Par

6 conséquent, s'il vous plaît, présentez-les, l'un après l'autre.

7 M. Ostojic (interprétation): C'est ce que nous ferons avec plaisir,

8 Monsieur le Président.

9 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.

10 La question suivant a trait aux experts. Au cours de la réunion tenue au

11 titre de l'Article 65terI) du Règlement, ceci pour le compte rendu, nous

12 avons pris la décision qu'en ce qui concerne la valeur probante limitée,

13 toutes les parties ne sont plus intéressées à avoir, à entendre un expert

14 en dactylographie pour comparer les documents qui nous sont soumis qu'ils

15 aient été dactylographiés ou imprimés par la même machine. Donc cette

16 question est maintenant sans objet et nous n'avons plus besoin de nous

17 attendre à entendre un expert sur cette question.

18 Enfin, également pour le compte rendu, il est nécessaire de discuter de la

19 question des experts que la défense veut faire entendre et, aux fins du

20 compte rendu, je voudrais savoir quel est le délai que vous escomptez,

21 dans quel délai, pour qu'on puisse avoir ces déclarations d'experts prêtes

22 de façon à pouvoir donner à l'accusation le délai nécessaire et habituel

23 de 40 jours pour décider s'ils veulent ou non procéder au contre-

24 interrogatoire de l'expert.

25 M. Ostojic (interprétation): Excusez-moi, est-ce que la Chambre a dit 440,

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1 ou 4-0, ou 14 ou 1-4?

2 M. le Président (interprétation): Comme d'habitude.

3 M. Ostojic (interprétation): Je vous remercie. Je n'étais pas sûr parce

4 que le compte rendu montrait autre chose, et je pense que j'ai entendu

5 quelque chose de différent.

6 Mais, avant que je puisse donner une réponse précise à la Chambre sur le

7 calendrier des experts, je voudrais également respectueusement continuer à

8 m'en tenir à l'objection présentée par la défense selon laquelle on ne

9 nous a pas fourni le nombre suffisant et adéquat d'experts que nous avions

10 précédemment demandés. Je ne demande pas, à ce stade, à la Chambre de

11 revenir sur la question. Je ne voudrais simplement pas m'engager dans un

12 débat et ne pas rappeler notre objection à ce sujet.

13 Nous pensons fermement que le Bureau du Procureur a eu recours à de très

14 nombreux, en l'occurrence plusieurs experts, sur des questions soumises à

15 la Cour en ce qui concerne ce quatrième acte d'accusation modifié. Nous

16 pensons que nos demandes étaient raisonnables et cohérentes, et qu'elles

17 sont pertinentes pour toutes les questions qui se posent.

18 Nous comprenons, bien que respectueusement nous ne soyons pas d'accord,

19 nous comprenons la décision de la Chambre de limiter les possibilités pour

20 la défense de faire entendre deux experts. Néanmoins, en réponse à la

21 question précise posée par la Chambre, notre expert historien, nous

22 pensons qu'il sera prêt à présenter son rapport à la date du 15 février

23 2003.

24 Notre deuxième expert, qui est un expert militaire, sera prêt à déposer, à

25 présenter son rapport le 1er mars ou aux environs du 1er mars 2003.

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1 M. le Président (interprétation): Nous avons discuté, examiné cette

2 question ce matin, et nous sommes parvenus à la conclusion -en tenant

3 compte du nombre de jours qui nous restaient en mars- que le dernier délai

4 pour le dépôt de ces déclarations d'experts serait le 3 mars. Ayant donc

5 14 jours pour les examiner en ce qui concerne l'accusation, cela devrait

6 être un délai suffisant pour pouvoir citer les témoins à la barre. Je

7 voudrais donc prier la défense de prévoir dans leur calendrier à la fois

8 la venue de l'historien, de l'expert militaire, de façon à ce qu'ils

9 soient prêts à comparaître devant cette Chambre de première instance avant

10 le 21 mars. Je pense que c'est nécessaire.

11 En général, les experts n'ont pas le temps. Par conséquent, si vous voulez

12 bien essayer dès maintenant de fixer une date, ce serait une bonne chose

13 parce que je pense que, selon toute probabilité, l'accusation a

14 l'intention de procéder au contre-interrogatoire des experts.

15 Alors, maintenant, la question des déclarations au titre de l'Article

16 94bis, quand pourront-elles être fournies? Je vous prie de m'excuser, je

17 voulais dire 92bis du Règlement.

18 M. Ostojic (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Président. Nous

19 présenterons les résumés des déclarations des témoins... Parce que la

20 Chambre avait posé une question précédemment et je n'avais pas répondu,

21 lundi, sur le groupe suivant de témoins de la façon détaillée que nous

22 pensions nécessaire cet après-midi. Si la Chambre a des suggestions pour

23 modifier cela, nous le ferons.

24 En ce qui concerne les déclarations au titre de l'Article 92bis du

25 Règlement, nous espérons pouvoir le faire et conclure dans les trois

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1 prochaines semaines. Un de nos enquêteurs s'occupe non seulement des

2 dépôts à obtenir, des moyens de transports, mais également les différents

3 besoins des témoins qui déposeront. Ils aident à obtenir les déclarations

4 définitives, à obtenir qu'elles soient signées et mises en forme par les

5 autorités compétentes conformément aux dispositions évoquées dans

6 l'Article 92bis du Règlement.

7 Nous pensons donc essentiellement que, dans les trois prochaines semaines,

8 nous serons en mesure de fournir à la Chambre un jeu complet de

9 déclarations concernant les témoins au titre de l'Article 92bis du

10 Règlement.

11 M. le Président (interprétation): Y a-t-il des observations du côté de

12 l'accusation?

13 M. Koumjian (interprétation): Non, nous avons évidemment besoin d'un peu

14 de temps pour les examiner et voir si nous avons des objections, et nous

15 demanderons le droit de procéder au contre-interrogatoire de ces témoins

16 une fois que nous aurons vu les déclarations.

17 Je voudrais également suggérer que si ces déclarations sont en partie

18 complètes, mais pas totalement, il serait certainement utile pour nous

19 d'avoir toutes celles qu'on pourrait avoir plutôt que d'avoir à attendre

20 de les recevoir toutes d'un seul coup. Il n'y a pas nécessité, de notre

21 point de vue, d'attendre que toutes les déclarations au titre de l'Article

22 92bis soient complètes.

23 M. le Président (interprétation): Est-ce que vous pouvez accepter cette

24 proposition?

25 M. Ostojic (interprétation): Dès que nous les aurons reçues, Monsieur le

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1 Président, nous serons heureux de les fournir aux membres de la Chambre et

2 au Bureau du Procureur.

3 M. le Président (interprétation): Un instant, je vous prie.

4 Nous avons également discuté de cette question ce matin, et nous avons

5 jugé approprié que, comme nous l'avons fait pour les réquisitions du

6 Procureur, nous demandions à la défense de préparer, bien sûr dès que

7 possible, et de produire dès que possible ces déclarations et ce, pas plus

8 tard que le 3 mars. La même chose vaut pour toute autre requête ou demande

9 de modification pour faire entendre de nouveaux témoins, des témoins en

10 plus ou des experts en plus. Là encore, la Chambre de première instance

11 impose comme date d'expiration des délais le 3 mars. Jusqu'alors, nous

12 entendrons les requêtes ou demandes, qu'elles soient présentées oralement

13 ou par écrit, mais comme vous le savez, nous préférons qu'elles soient

14 orales.

15 M. Koumjian (interprétation): Là encore, pour rappeler, si nous pouvions

16 les avoir en partie parce que, si la défense attendait le 3 mars pour nous

17 donner 20 requêtes ou 20 demandes au titre du 92bis et que nous voulions

18 procéder à un contre-interrogatoire de l'ensemble de ces 20 déclarations,

19 alors, à ce moment-là, nous aurions de gros problèmes de temps.

20 M. le Président (interprétation): Bien entendu, parce qu'il est dit

21 "immédiatement ou pas plus tard que le 3 mars". De toute façon, tout est

22 clair qu'il y a un délai précis et la défense sait que, après le 3 mars,

23 la Chambre ne tiendra pas compte de nouvelles demandes qui ne seront pas

24 acceptées en ce qui concerne les demandes de faire entendre de nouveaux

25 experts ou de nouveaux témoins. Et il se peut que, pour des motifs

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1 imprévus, il y ait quelques retards en ce qui concerne les déclarations au

2 titre de l'Article 92bis, mais la date du dernier délai demeure le 3 mars.

3 On peut espérer quand même qu'on aura ces documents plus tôt.

4 Et comme la coopération entre les parties dans le passé a été bonne, je ne

5 pense pas que ceci devrait changer à l'avenir. Y a-t-il autre chose à

6 l'ordre du jour?

7 M. Ostojic (interprétation): Oui, nous avons une autre question que nous

8 avons soulevée lors de notre réunion au titre de l'Article 65ter du

9 Règlement. Je me rappelle que la Chambre nous a invités à l'évoquer avec

10 la Chambre au complet, mais ceci pourrait nécessiter que nous allions à

11 huis clos partiel à la demande du Procureur, bien que nous préférions

12 rester en audience publique parce que ceci implique l'un des témoins que

13 la Chambre veut voir déposer à l'avenir après condamnation, de sorte que

14 je ne suis pas très sûr de la manière de procéder.

15 Est-ce que vous voulez que je continue avec ma requête en audience

16 publique? Il faut que je sois prudent étant donné qu'il s'agit d'une

17 demande présentée par le Bureau du Procureur. Nous pourrions discuter de

18 cela en audience à huis clos partiel.

19 M. le Président (interprétation): Je pense que nous ne devrions ne pas

20 faire de secret sur cette question, si possible.

21 M. Koumjian (interprétation): Je comprends que nous parlons de Mme

22 Plavsic, mais je pense que ce que j'ai dit à ce sujet concernant certains

23 points qui ont été communiqués à la défense, sont toujours communiqués sur

24 une base confidentielle, et que si nous discutons de la teneur de ces

25 points, il faut considérer que c'est confidentiel.

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1 M. le Président (interprétation): Voulez-vous que nous entrions dans les

2 détails de ces documents?

3 M. Ostojic (interprétation): Juste pour rappeler ma demande précédente en

4 ce qui concerne les autres auditions qui ont été données par Mme Plavsic,

5 nous voudrions renouveler cette demande. Nous n'avons pas reçu la

6 transcription de ces auditions et nous savons qu'elles existent. A

7 l'évidence, elles ont été distribuées à différents membres des équipes du

8 Bureau du Procureur ainsi qu'à la défense de Mme Plavsic, ce qui comprend

9 approximativement six ou sept personnes.

10 Nous pensons que c'est juste de passer une quinzaine de minutes pour

11 photocopier ces pages conformément à notre demande, bien que Mme Ruth

12 Karper ait dit que nous pourrions avoir une version BCS, on l'espère,

13 lundi pour le Dr Stakic, et nous voudrions savoir si elle peut s'en tenir

14 à cette date ou s'il faudra davantage de temps. Nous savons qu'il y a une

15 forte pression qui s'exerce, qu'on travaille sous pression, mais nous

16 voudrions que les délais soient aussi courts que possible.

17 Il y a encore une autre demande que je dois faire au sujet de Mme Plavsic.

18 M. le Président (interprétation): Allons-y pas à pas, si vous le voulez.

19 Je pense qu'il ne devrait pas y avoir de problème pour vous fournir les

20 documents que vous demandez. Et je pense que le Dr Stakic, avec une

21 certaine priorité, pourra écouter ces enregistrements en BCS et si vous

22 vouliez bien, si possible, fournir au Dr Stakic lundi les enregistrements

23 en question.

24 Veuillez nous faire savoir si, oui ou non, le Dr Stakic a les moyens

25 nécessaires pour écouter ces enregistrements. Je considère que nous avons

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1 déjà discuté de cette question en audience publique et que le Dr Stakic

2 respectera la partie confidentielle dont il s'agit et n'en discutera pas

3 avec d'autres détenus dans le quartier pénitentiaire.

4 M. Koumjian (interprétation): Si la défense peut attendre quelques moments

5 après la Chambre, on pourrait le lui fournir aujourd'hui.

6 M. Ostojic (interprétation): Ce n'est pas une bobine. En fait, c'est une

7 vidéo, d'après ce que j'ai compris, qui sera fournie au Dr Stakic et il

8 n'a pas les moyens de voir une vidéo. Et s'il ne peut pas le voir, nous

9 informerons la cour et peut-être que, avec votre aide, il sera possible

10 pour lui de voir cette vidéo d'une manière ou d'une autre.

11 Je vous remercie, Monsieur le Président.

12 M. le Président (interprétation): Y a-t-il autre chose?

13 M. Ostojic (interprétation): J'avais encore deux choses à dire au sujet de

14 Mme Plavsic. Je ne sais pas si je devrais en parler. Cela ne vient pas

15 directement de son audition, mais il y a deux éléments que nous avons

16 évoqués lors de la conférence 65ter. L'un a trait aux conversations

17 interceptées avec Biljana Plavsic qu'elle avait en sa possession, et la

18 deuxième question a trait au Règlement du Tribunal, en particulier

19 l'Article 68 la concernant. Nous estimons qu'étant donné que Biljana

20 Plavsic a été identifiée comme participant à une conspiration au titre de

21 chacun des chefs d'accusation dans le quatrième Acte d'accusation modifié

22 contre le Dr Stakic, il est tout à fait raisonnable d'estimer que tous les

23 documents devraient être fournis aussi rapidement que possible, étant

24 donné qu'elle va déposer. Mais, à mon avis, ces documents auraient dû être

25 produits au début de l'affaire Stakic. Si l'allégation présentée est qu'il

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1 y a eu une entreprise criminelle commune, à ce moment-là, je pense que la

2 défense subit un préjudice si elle n'obtient pas tous ces documents. Nous

3 souhaitons donc avoir ces documents aussi rapidement que possible.

4 M. Koumjian (interprétation): Si je me souviens bien de la réunion 65ter,

5 vous aviez demandé, Monsieur le Président, une requête écrite de la part

6 de la défense. Il faut savoir que si l'on souhaite répondre à la demande

7 que vient d'exprimer Me Ostojic, il va falloir coordonner les travaux de

8 différents membres de l'équipe du Bureau du Procureur, et d'équipes

9 différentes, d'ailleurs. Ce sont des gens avec lesquels nous n'avons pas

10 de contact au quotidien. Donc cela nous serait très utile si nous avions

11 cette demande par écrit.

12 M. le Président (interprétation): Oui, c'est ce que nous avions dit. Nous

13 avons besoin d'une requête, même si elle est courte.

14 M. Ostojic (interprétation): Nous allons vous fournir cette requête aussi

15 rapidement que possible. Je ne peux pas vous promettre qu'elle sera brève

16 parce que c'est une question d'importance. Mais nous espérons que, d'ici

17 le milieu de la semaine prochaine, vous aurez cette requête.

18 M. le Président (interprétation): Donc il s'agissait de la première

19 question. Et la deuxième?

20 M. Ostojic (interprétation): Non, en fait je souhaitais évoquer deux

21 questions: les conversations interceptées et l'Article 68. Et si vous

22 examinez l'acte d'accusation, vous voyez qu'il y a d'autres co-

23 conspirateurs, d'autres co-accusés. Donc il y a des éléments relatifs à

24 l'Article 68 qui ont été fournis à d'autres équipes de la défense qui

25 travaillent ici, au Tribunal, dans d'autres procès. Et si l'on continue à

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1 insister sur le fait qu'il y a effectivement eu une entreprise criminelle

2 commune, il va bien falloir que le Bureau du Procureur nous communique ces

3 éléments, ces pièces.

4 Je souhaiterais également signaler aux fins du compte rendu d'audience la

5 chose suivante: si je reviens à ce qui a été dit par le Bureau du

6 Procureur s'agissant de la crédibilité des témoins, la Chambre ne nous a

7 pas demandé de faire des commentaires sur la crédibilité des témoins. Si

8 le Bureau du Procureur estimait que les six témoins qu'il a interrogés ne

9 sont pas crédibles, à ce moment-là, il faudrait que le Bureau du Procureur

10 explique exactement pourquoi et par écrit. Mais si avant même que ces

11 témoins soient entendus, on se permet déjà de les juger, cela n'est pas

12 acceptable parce que j'estime, moi, qu'aucun juriste digne de ce nom ni

13 aucun juge ne peut estimer que ces personnes aient été entendues de la

14 manière appropriée, en se voyant présenter tous les documents relatifs à

15 leur audition.

16 Donc je souhaiterais soulever une objection s'agissant du commentaire fait

17 par M. Koumjian. C'est aux Juges de faire ce genre de commentaire s'il y a

18 eu lieu, pas M. Koumjian.

19 Donc j'estime que les questions qui ont été posées à ces témoins ou au

20 sujet de ces témoins étaient complètement spéculatives. Et cette façon de

21 procéder est tout à fait inacceptable. Je vous remercie.

22 Je ne sais pas si vous signalez votre approbation ou si vous voulez

23 simplement que je me taise?

24 M. le Président (interprétation): Non, je pense que ça suffit. Je vous

25 rappelle que vous ne plaidez pas devant un jury, mais devant trois Juges

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1 professionnels. Nous savons pertinemment quelles sont nos obligations, et

2 nous ne saurions laisser à l'une ou l'autre partie le soin de statuer sur

3 la crédibilité des témoins. C'est la Chambre de première instance qui, à

4 ce sujet, a le dernier mot. Sans oublier bien entendu la Chambre d'appel.

5 Mais je ne pense pas qu'il soit nécessaire d'entrer dans les détails en

6 disant que telle ou telle déclaration a été recueillie de manière

7 inacceptable. A ce moment-là, et d'autre part, il est inutile de commencer

8 à se plaindre au sujet de la communication de documents 68; c'est

9 prématuré. Documents relatifs à l'Article 68, bien entendu.

10 L'accusation sait qu'il est de son devoir de fournir les documents

11 relevant de l'Article 68, et elle le fait de manière continue. Et elle va

12 continuer à le faire, j'en suis sûr.

13 Autre chose, Maître Ostojic?

14 M. Ostojic (interprétation): Non, pas pour l'instant.

15 M. le Président (interprétation): Et pour l'accusation?

16 M. Koumjian (interprétation): Non, Monsieur le Président.

17 M. le Président (interprétation): A la fin de cette semaine d'audience,

18 alors que nous devrions normalement avoir une conférence de mise en état

19 -et que nous incorporons généralement à nos audiences-, je souhaiterais me

20 tourner vers le Dr Stakic pour lui demander s'il a des problèmes de santé

21 plus graves que ceux des autres participants à ce procès.

22 Est-ce que vous avez des griefs quelconques à nous présenter, au sujet des

23 conditions de détention au quartier pénitentiaire des Nations Unies?

24 M. Stakic (interprétation): Monsieur le Président, merci.

25 Je suis satisfait de vous entendre dire que le procès me concernant doit

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1 se terminer aussi rapidement que possible. Cependant, vu la manière dont

2 le procès est maintenant organisé, vu les audiences telles qu'elles sont

3 organisées, je trouve la situation bien fatigante parce qu'il me faut

4 rester ici, au Tribunal, depuis 8 heures du matin jusqu'à 17 heures ou 18

5 heures. Je ne suis donc pas en mesure de bénéficier d'une promenade. Tout

6 ce qu'on me donne à manger, ce sont des sandwichs.

7 Mais plus grave encore, j'ai été privé de la possibilité de rencontrer mes

8 conseils, mes avocats, qui, eux aussi, ont moins de possibilité de leur

9 côté de rencontrer les témoins.

10 Je ne souhaite pas m'opposer au calendrier des audiences pour la semaine

11 prochaine. Cependant, je souhaiterais vous demander respectueusement de

12 faire en sorte que cela ne devienne pas une pratique, parce que j'ai des

13 problèmes de digestion et ça va être très difficile pour moi de me faire à

14 ce genre d'organisation; d'être enfermé ainsi toute la journée sans voir

15 la lumière du jour, et aussi de devoir me contenter d'une nourriture

16 insuffisante.

17 Je vous remercie des questions que vous m'avez posées et de la

18 préoccupation que vous avez exprimée à mon sujet. Merci de m'avoir

19 entendu.

20 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.

21 M. Stakic (interprétation): Je vous remercie.

22 M. le Président (interprétation): Nous en sommes arrivés au terme de

23 l'audience de ce jour.

24 Mais deux précautions valent mieux qu'une, donc, demain... non, pas

25 demain, plutôt lundi, disons lundi: commençons-nous à 9 heures ou 9 heures

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1 30?

2 Mme Dahuron (interprétation): Nous serons en salle II. Nous siégerons de 9

3 heures à 12 heures et de 13 heures 30 à 16 heures 30.

4 M. le Président (interprétation): Merci. Ce sera donc l'organisation de

5 notre travail, la semaine prochaine. La semaine suivante, ce sera une

6 semaine habituelle, c'est-à-dire que nous reviendrons aux horaires que

7 nous avions adoptés précédemment. Pour ce qui est des semaines qui

8 suivront, il va falloir que nous y réfléchissions.

9 Je vous remercie.

10 Je souhaite un bon week-end à tout le monde. Et surtout, je souhaite que

11 tout le monde reste en bonne santé.

12 Suspension d'audience jusqu'à lundi, 9 heures.

13 (L'audience est levée à 18 heures 53.)

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