Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Mardi 4 février 2003)

2 (Audience publique.)

3 (L'audience est ouverte à 9 heures 05.)

4 M. le Président (interprétation): Bonjour à tout le monde.

5 Madame la Greffière, pourriez-vous annoncer l'Affaire?

6 Mme Dahuron (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président, Monsieur et

7 Madame les Juges. Il s'agit de l'Affaire IT-97-24-T, le Procureur contre

8 Milomir Stakic.

9 M. le Président (interprétation): Les parties peuvent-elles se présenter?

10 M. Koumjian (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président. Nicholas

11 Koumjian et Ruth Karper pour le Procureur.

12 M. le Président (interprétation): Merci. La défense?

13 M. Lukic (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président, Monsieur et

14 Madame les Juges. Branko Lukic, John Ostojic et Danilo Cirkovic pour la

15 défense.

16 (Questions relatives à la procédure.)

17 M. le Président (interprétation): Je vais commencer par cela: j'ai

18 l'impression qu'il y a un certain nombre de problèmes qui doivent encore

19 être résolus et ceci le plus rapidement possible. Il s'agit de petits

20 problèmes pour ainsi dire, mais quand on les additionne, ceci peut devenir

21 une montagne.

22 Avant de continuer dans l'Affaire, je pense qu'il est très important que

23 l'on se réunisse pour voir de quelle façon nous allons procéder vu les

24 problèmes des parties en l'espèce.

25 Pour cela, je vais demander aux parties de réfléchir s'il leur serait

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1 possible de participer à une réunion en vertu de l'Article 65ter i) cet

2 après-midi à partir de 5 heures de l'après-midi. Donc, s'il vous plaît,

3 faites-le moi savoir avant la première pause. Je voudrais savoir si ceci

4 peut convenir par rapport à ce que vous vouliez faire aujourd'hui.

5 Ensuite, en audience publique, comme je l'ai dit hier, nous devons encore

6 discuter de la requête de la défense portant témoignage par biais de

7 vidéoconférences et ceci pour cinq témoins.

8 Le Procureur peut-il me faire part de ses commentaires à ce sujet?

9 M. Koumjian (interprétation): Monsieur le Président, nous ne sommes pas

10 opposés à cette requête à cause des raisons qui ont été fournies par la

11 défense, mais nous considérons, tout comme le Président et les Juges de la

12 Chambre, que ceci porte préjudice à la présentation de nos moyens de

13 preuve, puisque nous allons devoir mener notre contre-interrogatoire par

14 le biais de vidéoconférences. Evidemment, nous aurions préféré une

15 déposition et nous avons d'ailleurs évoqué cette possibilité.

16 M. le Président (interprétation): Très bien. La défense?

17 M. Ostojic (interprétation): La seule demande que nous avons apprise de la

18 Chambre, c'est concernant les économies qui auraient été gagnées par le

19 biais des dépositions. Nous pensions que la vidéoconférence… Ceci est un

20 bon compromis, puisque nous avons ceci aussi avec le témoin du Procureur,

21 et je ne vois pas pourquoi, quand il s'agit des témoins de la défense, les

22 critères ne seraient pas les mêmes.

23 Nous considérons que le contre-interrogatoire peut se mener de façon tout

24 à fait acceptable par la vidéoconférence, tout comme par les témoignages

25 de vive voix ou bien les dépositions. Nous insistons sur la question

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1 d'économie et l'égalité des armes.

2 Nous avons accepté, en agissant de façon assez raisonnable, toutes les

3 requêtes semblables provenant du Bureau du Procureur. Mais dès que nous,

4 nous faisons de telles demandes, le Procureur ne les accepte pas ou bien

5 soulève des objections.

6 Nous espérons donc que les Juges vont prendre en compte tout ceci quand

7 ils vont examiner cette question, pour voir s'ils vont décider des

8 vidéoconférences ou bien des dépositions. Et j'espère que les Juges de la

9 Chambre vont prendre en compte les mêmes critères que ceux qu'ils avaient

10 pris en compte quand ils avaient décidé de la demande du Procureur. Cette

11 procédure figure d'ailleurs dans le Règlement de procédure et de preuve.

12 M. Koumjian (interprétation): Je voudrais répondre de façon très brève.

13 La défense n'avait pas demandé, n'avait pas proposé la solution de

14 dépositions quand le Procureur avait demandé la proposition par

15 vidéoconférence. Nous ne disons pas que nous refusons tout simplement le

16 témoignage par vidéoconférence. Nous avons juste dit quelle était notre

17 préférence, et notre préférence vers la déposition. Nous considérons, du

18 point de vue logistique, que c'est beaucoup plus logique et facile.

19 M. Ostojic (interprétation): Pour que ceci soit bien clair au compte rendu

20 d'audience, le témoin "O", qui a témoigné par le biais de

21 vidéoconférences, aurait pu donner une déclaration en vertu de l'Article

22 92bis. Mais au lieu de cela, après l'interrogatoire direct par Mme

23 Sutherland, on a tout simplement décidé d'extraire les paragraphes qui se

24 réfèrent à notre client, le Docteur Stakic. C'est dans cette mesure-là que

25 nous pouvions poser des questions et, ensuite, nos questions devaient

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1 s'arrêter.

2 A l'époque, donc, on a déterminé qu'il n'était pas besoin de contre-

3 interroger le témoin. A l'époque, nous n'avons pas insisté que l'on fasse

4 venir ce témoin.

5 Nous n'avons pas demandé que l'on fasse une déposition, et tout ceci -je

6 vous le dis pour que ce soit bien clair au compte rendu d'audience-, je

7 pense que dans le Règlement de procédure et de preuve, la procédure est

8 très claire concernant le contre-interrogatoire: soit des témoins de vive

9 voix, soit par la vidéoconférence.

10 De l'autre côté, cela ne nous dérange pas du tout de passer cinq ou dix

11 jours ou toute une semaine en recueillant cinq dépositions si ainsi en

12 décident les Juges de la Chambre.

13 M. le Président (interprétation): Nous allons en décider le plus

14 rapidement possible. Je voudrais savoir si les parties sont en mesure de

15 se rencontrer avec les Juges de la Chambre à partir de 5 heures, cet

16 après-midi. Et ceci constituera une conférence en vertu de l'Article

17 65ter, car, apparemment, il y a un certain nombre de problèmes qu'il

18 convient de résoudre le plus rapidement possible.

19 Mais nous allons le faire, il convient de faire ceci plutôt dans le cadre

20 d'une conférence en vertu de l'Article 65ter, qu'en audience publique.

21 M. Ostojic (interprétation): Un instant, Monsieur le Président, je

22 voudrais soulever un point.

23 Nous avons demandé à être entendus car, à nouveau, notre témoin nous

24 informe qu'il ne se sent pas bien, qu'il se trouve sous un stress

25 extraordinaire et, tout ceci, à cause des horaires, des nouveaux horaires

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1 de travail en l'espèce. Avec tout le respect que nous vous devons, nous

2 sommes en train de préparer une requête écrite pour vous montrer de quelle

3 façon les heures de travail ont changé en l'espèce pendant toute la durée

4 du procès. Et ceci nous a été imposé aussi. Dans notre requête écrite,

5 nous allons...

6 M. le Président (interprétation): Je pense que vous n'avez pas besoin

7 d'aborder ce point en détail. Je pense que nous allons pouvoir le faire

8 lors de cette conférence en vertu de l'Article 65ter.

9 M. Ostojic (interprétation): Mais je peux vous dire, d'ores et déjà, que

10 nous ne sommes pas disponibles à 5 heures. Nous devons rencontrer des

11 témoins. Ce sont des témoins que nous devons préparer, puisque nous

12 n'avons eu aucune autre possibilité de les préparer. Nous n'avons pas de

13 pause; nous n'avons pas de temps pour nous consulter avec notre client;

14 nous n'avons pas de temps pour voir les témoins, et c'est pour ceci que

15 nous ne pouvons pas participer à une conférence à 5 heures cet après-midi.

16 (Le témoin, M. Ostoja Marjanovic, est introduit dans le prétoire.)

17 M. le Président (interprétation): Pourriez-vous nous dire qu'en est-il de

18 vendredi, de vendredi à 5 heures, car vous avez dit que nous n'allons pas

19 siéger toute la journée pour ainsi dire.

20 Je m'exprime comme cela, mais, en réalité, il ne s'agit pas vraiment

21 d'audiences qui durent toute la journée car les horaires que nous

22 appliquons à présent sont les horaires qui ont été appliqués pendant les

23 huit années de l'existence du Tribunal. Il n'y a rien de particulier avec

24 ces horaires.

25 Si vous prenez en considération le fait que, vendredi, nous ne travaillons

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1 pas toute la journée, est-ce que vous n'allez pas pouvoir vous entretenir

2 avec votre client, avec les témoins éventuellement, vendredi après-midi,

3 puisque vendredi après-midi, vous allez être libres?

4 M. Ostojic (interprétation): Monsieur le Président, avec tout le respect

5 que je vous dois, je pense qu'il s'agit d'une question cruciale, très

6 importante et urgente et je ne peux pas attendre jusqu'à vendredi. Et je

7 pense que nous ne commençons pas à 9 heures, mais à 10 heures 30 vendredi;

8 donc cela ne nous fournit pas l'opportunité…

9 M. le Président (interprétation): Non, cela n'est pas exact. Vendredi,

10 nous commençons à siéger de 14 heures 15.

11 M. Ostojic (interprétation): Mon client insiste pour que je formule cette

12 demande auprès des Juges et j'hésite à le faire, puisque le témoin est

13 présent. Il m'a demandé de vous faire une demande concrète concernant son

14 état de santé et ses soucis, les soucis qui sont les siens. Je ne pense

15 pas que ceci peut attendre. Je pense qu'il faudrait que les Juges nous

16 entendent, à ce sujet, immédiatement et sans délai.

17 M. le Président (interprétation): Voulez-vous dire que c'est trop tard que

18 de vous entendre jeudi?

19 M. Ostojic (interprétation): Je voudrais que l'on m'entende immédiatement.

20 J'ai demandé aux représentants de la Chambre de vous faire part de ces

21 trois points. C'est la procédure; et cette procédure existe depuis sept ou

22 huit ans de l'existence du Tribunal.

23 M. le Président (interprétation): Puisque nous devons prendre une décision

24 claire, et ceci dans le cadre de cette conférence en vertu de l'Article

25 65ter i), je souhaite plutôt le faire dans ce cadre-là qu'en audience

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1 publique. Donc je vais vous demander de me fournir une date à laquelle

2 nous allons pouvoir tenir cette conférence en vertu de l'Article 65ter i).

3 Et moi, je suis disponible quand vous le voulez.

4 M. Ostojic (interprétation): Moi, je suis prêt à en parler immédiatement.

5 M. le Président (interprétation): Comme vous le savez, nous devons

6 entendre le témoin; c'est une priorité, puisque ce témoin nous a fait

7 cadeau de son temps libre pour venir témoigner ici. Il se trouve à La Haye

8 et ceci représente une priorité. Je ne veux pas perdre de temps sur cette

9 question. Je sais que cette question vous tient à coeur et c'est

10 important, avant tout, pour le Dr Stakic, mais nous ne pouvons pas

11 utiliser le temps qui nous est alloué pour entendre le témoin, pour vous

12 entendre à ce propos.

13 M. Ostojic (interprétation): Juste pour le compte rendu d'audience, avec

14 tout le respect que je dois au témoin, ce témoin- en vertu de l'Article de

15 procédure et de preuve ou bien du Statut du Tribunal ou un règlement

16 quelconque du Tribunal- n'a pas la priorité par rapport aux soucis qui

17 peuvent être ceux de mon client.

18 M. le Président (interprétation): Eh bien, si vous m'avez écouté de façon

19 attentive -et vous allez relire le compte rendu d'audience-, eh bien, vous

20 en serez arrivé à la conclusion que tous ces commentaires n'étaient pas

21 forcément nécessaires, Maître Ostojic.

22 Maintenant, je demande à Maître Lukic de continuer.

23 (Interrogatoire principal du témoin, M. Ostoja Marjanovic, par Me Lukic.)

24 M. Lukic (interprétation): Bonjour, Monsieur le Témoin.

25 M. Marjanovic (interprétation): Bonjour.

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1 Question: Vous êtes-vous bien reposé?

2 Réponse: Oui.

3 Question: Pouvons-nous continuer la lecture.

4 Réponse: Oui.

5 Question: Je vais demander à l'huissier de vous fournir quatre documents.

6 Je vais vous fournir leur numéro en vertu de l'Article 65ter: il s'agit

7 des documents allant de 662 jusqu'à 665.

8 (Intervention de l'huissier.)

9 Pourriez-vous, s'il vous plaît, placer sur le rétroprojecteur le document

10 662 et fournir au témoin sa version en langue BCS?

11 (Intervention de l'huissier.)

12 (Le témoin lit le document.)

13 Monsieur Marjanovic, nous n'avons pas eu suffisamment de temps pour

14 parcourir ce document. Je sais même qu'à l'époque vous n'étiez pas le

15 directeur de la mine de fer de Ljubija. Mais je crois que vous allez voir

16 le document et comprendre son contenu.

17 Pourriez-vous, tout d'abord, nous donner lecture du titre du document,

18 nous dire qui en est le signataire et nous dire si ce système d'adduction

19 d'eau potable existe bel et bien dans les locaux d'Omarska?

20 Réponse: Si vous voulez, je peux vous faire un commentaire par rapport à

21 ce document. Puisque j'étais chef de projet de la construction de la mine

22 d'Omarska entre 1974 et 1979, donc on a construit évidemment toutes les

23 installations de la mine, mais la question qui se posait de façon très

24 sérieuse était celle de l'approvisionnement en eau potable, surtout de la

25 cantine, mais aussi pour toute l'usine, pour toute la mine. Il s'agit donc

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1 d'un gisement de minerai de fer, et pour cette raison, dans tous les

2 puits, on trouvait une haute concentration de fer. Donc il s'agit d'un

3 métal le fer et le manganèse, la formule "Fe˛O3" et "MnO". Il s'agit de

4 substances fortement nuisibles, toxiques pour la santé humaine. Et donc,

5 les analyses que nous avons faites de l'eau ont démontré que la quantité

6 de l'eau était suffisante pour approvisionner la mine et tous les hommes y

7 travaillant, et qu'il fallait mettre en place un système d'épuration.

8 Il y avait plus de 350 employés qui travaillaient à cet endroit, et, pour

9 fournir de l'eau à tous ces gens, il fallait mettre en place un système

10 d'épuration de l'eau pour enlever le fer et le manganèse. Donc tout ceci a

11 été construit. L'installation a été construite. Il y avait aussi des

12 critères qu'il fallait appliquer, des critères de contrôle de qualité de

13 l'eau. C'est pour cela qu'on a élaboré ce document qui porte le nom

14 "Instructions concernant l'installation et le maniement des installations

15 de l'eau potable dans la mine d'Omarska", élaboré en date du mois de mars

16 1987.

17 Question: Pourriez-vous nous répéter la date, encore une fois?

18 Réponse: Il s'agit du mois de mars 1987.

19 Cette instruction comporte plusieurs paragraphes, plusieurs entités

20 techniques. Il s'agit de l'instruction concernant la pompe à eau, ensuite

21 de l'instruction concernant l'énergie électrique nécessaire à ces pompes

22 et, ensuite, de l'instruction concernant ces substances chimiques qu'il

23 convient d'enlever: le fer et le manganèse.

24 Ensuite, il fallait contrôler toute l'installation pour assurer la qualité

25 de l'eau nécessaire pour qu'elle soit potable.

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1 Pour tout ceci, on a dû faire appel à différents types d'ingénieurs et de

2 professionnels. Mais, parfois, il est arrivé qu'à cause d'une erreur

3 humaine ou d'une négligence, on retrouve une haute concentration de ces

4 substances nocives dans l'eau. Dans ce cas-là, il a fallu qu'il y ait une

5 intervention technique.

6 Il fallait, tout d'abord, faire l'état de la situation et, ensuite, le

7 directeur général d'Omarska ainsi que le directeur technique devaient

8 prendre les mesures nécessaires pour corriger les défaillances.

9 Quand la mine d'Omarska a commencé à fonctionner, l'institution du

10 ministère en charge de l'énergie et des mines de Bosnie-Herzégovine a

11 envoyé un certain nombre de commissions qui comprenaient un nombre

12 important d'experts en purification de l'eau, des experts qui devaient

13 aussi valider les installations industrielles, et il a fallu une

14 approbation de ces commissions pour qu'une installation puisse commencer à

15 fonctionner.

16 A la fin du document, il est écrit: " Omarska, le mois de mars 1987.

17 Instructions validées de la part du service de médecine du travail et de

18 la protection des employés, ingénieur Franjo Galunic". Il s'agissait de

19 Ceraj Zdenko, ingénieur des mines.

20 M. Marjanovic (interprétation): Quelle était l'appartenance ethnique de

21 ces deux personnes?

22 M. Lukic (interprétation): Ils sont Croates tous les deux.

23 M. le Président (interprétation): Très bien. Donc la prochaine cote dont

24 nous disposons est D66, est-ce exact? Ceci sera donc la cote provisoire du

25 document: D66-A et B respectivement.

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1 M. Lukic (interprétation): Peut-on présenter au témoin le document

2 suivant, celui qui a le numéro 263 en vertu de l'Article 65ter?

3 (Intervention de l'huissier.)

4 Monsieur le Témoin, pourriez-vous nous dire quelque chose au sujet de ce

5 document, comme vous l'avez fait pour le document précédent?

6 M. Marjanovic (interprétation): Oui, je peux vous expliquer en disant

7 toutefois que j'ai fait une erreur, tout à l'heure, quand je vous ai donné

8 le nom de cette institution au niveau de la Bosnie-Herzégovine, car

9 j'avais dit qu'il s'agissait du ministère pour l'énergie et les mines,

10 alors que c'est le nom de l'institution à présent. A l'époque, il

11 s'agissait du comité de la République pour l'énergie et les mines. Donc,

12 c'est une erreur.

13 Je vous ai bien dit que l'on avait mis en place une commission, et que

14 cette commission était créée par le comité de l'énergie et des mines de la

15 République socialiste de Bosnie-Herzégovine. Il y a un certain nombre de

16 dates et de numéros qui figurent sur le document.

17 Il s'agit d'une décision qui permet l'exploitation de l'eau potable et du

18 puits dans la mine. Le signataire du document est l'assistant du président

19 du comité de la République pour l'énergie et l'industrie. Il s'agissait

20 donc du Pr, du Dr Safet Cicic, un collègue à moi, que je connais, et si

21 son appartenance ethnique vous intéresse, je peux vous dire qu'il est

22 Musulman.

23 M. le Président (interprétation): Très bien. Ce document aura la cote

24 provisoire D67A et B, respectivement.

25 M. Lukic (interprétation): Le document suivant, selon l'Article 65ter,

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1 porte la cote 264, selon l'Article 65ter.

2 Monsieur Marjanovic, pouvez-vous lire ce document parce qu'il n'est pas

3 très long?

4 M. Marjanovic (interprétation): "DPRGR, Ljubija, Prijedor."

5 "DP" signifie la société en propriété de l'Etat.

6 "Le service de la protection au travail Prijedor le 22 novembre 1990.

7 Numéro du document: 156/90.

8 Procès-verbal.

9 Le 7 novembre 1990, les échantillons de l'eau ont été pris pour l'analyse

10 bactériologique. Il a été constaté que l'eau ne contient pas de bactéries

11 et est conforme aux normes du règlement sur l'hygiène de l'eau potable.

12 Le 7 novembre 1990, j'ai examiné les sources du système et de la station

13 de purification des eaux de la mine d'Omarska et j'ai pu constater ce qui

14 suit: il n'y a pas de système pour pré-chloration ni pour la chloration

15 finale. Il n'y a pas de désinfection ni de déférisation (sic) de l'eau

16 potable. Comme la chloration ne marche pas, on ne peut pas procéder à la

17 désinfection des eaux.

18 Quant aux installations pour procéder à la purification des eaux, ce sont

19 seulement les filtres avec du sable qui sont en fonction. Les

20 installations destinées à la désinfection des eaux devraient être réparées

21 car nous ne pouvons jamais être certains quand une contamination

22 secondaire des eaux arriverait.

23 Et, par la suite, tous les problèmes relatifs à la santé -bonne chance, à

24 la fin, c'est indiqué 'à la fin', selon une habitude des mineurs.

25 Le service de la protection au travail."

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1 Signé par Cerimagic Faruk, ingénieur des mines.".

2 Question: Quelle était l'appartenance ethnique de Faruk Cerimagic?

3 Réponse: Faruk Cerimagic, mon ami, est Musulman.

4 M. Lukic (interprétation): Savez-vous si les demandes de M. Faruk

5 Cerimagic ont été appliquées?

6 M. Marjanovic (interprétation): Je peux supposer qu'il était obligé de

7 procéder selon ce règlement parce qu'il est sûr que les sanctions étaient

8 assez sévères… Je ne peux pas vous garantir s'il y avait une intervention

9 après cette demande de M. Cerimagic, mais compte tenu des sanctions très

10 sévères, je peux supposer que cela s'est passé ainsi.

11 M. le Président (interprétation): Ce document aura la cote provisoire D68A

12 et B, respectivement.

13 M. Lukic (interprétation): Nous avons encore un document qui porte le

14 numéro 265. Il n'y a pas de traduction de ce document, mais ce document

15 nous a été communiqué du Bureau du Procureur.

16 Ce document, Monsieur Marjanovic, sera plus difficile à lire parce qu'on

17 ne peut pas voir la fin du document. Mais, s'il vous plaît, essayez de

18 nous dire le contenu de ce document.

19 M. Marjanovic (interprétation): Je m'excuse.

20 "Mines de fer de Ljubija, Prijedor. Service de la protection du travail.

21 Numéro du document 86/90, Prijedor, le 15 juin 1990.

22 L'unité économique, mine d'Omarska.

23 Omarska, à l'attention de Micic Branko, ingénieur des mines.

24 En annexe de cette lettre, nous vous envoyons les eaux traitées par

25 rapport aux bactéries de votre système de purification des eaux. Les

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1 analyses sont négatives et les résultats -je suppose qu'ici, il faut dire

2 les analyses- sont négatifs et les résultats des analyses sont

3 probablement conformes aux normes du règlement de la purification des eaux

4 potables. Le Journal officiel de la SFRJ 33/87.

5 Je suppose que c'est cela le contenu de cette phrase: les analyses ont été

6 faites aux sources de l'eau, aux installations sanitaires et au

7 restaurant, c'est-à-dire dans la cantine une fois par mois.

8 Bonne chance.

9 Technologue: Cerimagic Faruk, ingénieur des mines.

10 Responsable du service pour la protection des ouvriers: Zahirovic Smail,

11 ingénieur des mines."

12 Les deux sont Musulmans et ce document a été remis aux archives et aux

13 services concernés.

14 M. le Président (interprétation): Ce document portera la cote provisoire

15 D69B. Il faut dire que la traduction se trouve aux pages 12 et 13 du

16 compte rendu d'aujourd'hui.

17 M. Lukic (interprétation): De ce document, est-ce que vous pouvez voir

18 que, le 15 juin 1990, même si une partie du document manque ici, est-ce

19 qu'on peut en conclure que l'eau était tout à fait potable, c'est-à-dire

20 qu'il n'y avait pas de bactéries?

21 M. Marjanovic (interprétation): Oui, je peux en conclure cela, mais il

22 faut supposer qu'ils ont procédé de façon, c'est-à-dire en conformité avec

23 les résultats précédents de ce service qui s'occupait de la purification

24 des eaux.

25 M. Lukic (interprétation): Maintenant, nous allons parler d'un autre

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1 sujet.

2 Est-ce que vous savez, compte tenu du fait que vous avez participé au

3 travail des organes municipaux du pouvoir exécutif, est-ce que vous savez

4 quelles sont les fonctions du président de l'assemblée municipale, c'est-

5 à-dire quelles sont ses tâches dans le cadre de ses fonctions?

6 M. Marjanovic (interprétation): Les tâches attribuées au président...

7 M. Koumjian (interprétation): Je soulève l'objection, parce qu'il n'est

8 pas clair à quelle période Me Lukic s'est référée.

9 M. Lukic (interprétation): Quelles étaient les tâches du président de

10 l'assemblée municipale?

11 M. le Président (interprétation): Pouvez-vous attendre, s'il vous plaît,

12 que la Chambre décide de cette objection. Je suis surpris de ce qui se

13 passe ces derniers jours, quand il s'agit de la défense.

14 (Les Juges se concertent sur le siège.)

15 Après avoir consulté mes collègues, l'objection est admise.

16 M. Lukic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

17 Je vais reformuler ma question.

18 Monsieur Marjanovic, est-ce que vous savez quelles étaient les fonctions

19 du président de l'assemblée municipale de Prijedor pendant la période

20 entre 1991 et 1992?

21 M. Marjanovic (interprétation): je n'étais pas président de l'assemblée

22 municipale, mais, selon le statut de l'assemblée municipale, c'est-à-dire

23 il y a des dispositions qui régissent cela de façon précise. Comme je

24 connaissais bien le statut, je peux vous dire quelque chose de plus là-

25 dessus.

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1 Avant, je voudrais dire que les fonctions des années 1980 et 1990, et même

2 aujourd'hui, les fonctions attribuées au président sont presque les mêmes

3 et, quand on parle de cette période, je pense que le même statut était en

4 vigueur jusqu'à la fin de la guerre, c'est peut-être seulement aujourd'hui

5 que le statut a été modifié.

6 Le président de l'assemblée municipale, c'est-à-dire de la municipalité,

7 le président est élu à la réunion de l'assemblée municipale et il faut que

8 cela soit un notable de la ville avec des caractéristiques humaines

9 positives; il faut que ce soit un humaniste, qu'il soit un citoyen

10 renommé.

11 Il préside l'assemblée municipale pendant les réunions. La convocation des

12 réunions de l'assemblée municipale relève de sa compétence et les

13 questions qui sont présentées à l'assemblée municipale sont définies par

14 le comité exécutif.

15 Le comité exécutif, qui représente le pouvoir exécutif dans la

16 municipalité, demande aux députés de l'assemblée municipale que

17 l'assemblée municipale décide de nombreuses questions. Moi, je peux

18 énumérer quelques questions: les taxes, les impôts, les contributions,

19 etc.

20 Lorsque, au cours des réunions de l'assemblée municipale, c'est-à-dire

21 avant la réunion, il faut décider de l'ordre du jour, les députés votent

22 et adoptent -soit adoptent, soit rejettent- certains points de l'ordre du

23 jour.

24 Après, si l'ordre du jour est adopté, les députés discutent de tous les

25 points de l'ordre du jour.

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1 Les documents qui sont définis, après en avoir discuté, sont les décisions

2 de l'assemblée municipale et ces décisions sont transmises au comité

3 exécutif pour qu'il les réalise. La tâche du président de la municipalité

4 est de coordonner le travail du service de l'assemblée municipale qui, si

5 je me souviens bien, est sous la direction du secrétaire de la

6 municipalité. Je pense que j'ai pu vous expliquer quelles étaient les

7 compétences du président de la municipalité, enfin de l'assemblée

8 municipale.

9 Question: Lorsque la cellule de crise a commencé, a été mise sur pied,

10 est-ce que vous avez eu l'impression qu'en même temps le comité exécutif

11 fonctionnait? Pouvez-vous nous expliquer où se trouvaient les secrétaires

12 des secrétariats? Est-ce qu'ils étaient dans leur bureau ou ailleurs?

13 Réponse: Si le comité exécutif fonctionnait?… Je ne peux pas vous donner

14 la réponse, parce que je ne sais pas si les réunions du comité exécutif

15 ont été tenues, mais tout les secrétaires, c'est-à-dire la plupart des

16 secrétaires ou au moins ceux auxquels je me suis rendu, étaient dans leur

17 bureau et faisaient donc leurs activités.

18 Moi, par exemple, je me rendais souvent chez Ranko Travar, secrétaire pour

19 les affaires économiques; c'était mon ministre auquel je répondais et,

20 pendant cette période, j'ai eu beaucoup de contacts avec lui.

21 Question: Revenons maintenant à votre unité de travail de votre entreprise

22 à Omarska et cela, pendant la période où le centre d'enquête existait à

23 Omarska.

24 Qui, pendant cette période, était chargé de fournir du matériel, par

25 exemple de l'essence, à cette partie de votre entreprise? Est-ce que

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1 c'était par le biais de vos bureaux? Pourriez-vous nous expliquer ceux qui

2 se trouvaient là-bas, qui utilisait la station-service, etc.?

3 Réponse: Je ne peux pas vous dire comment cela s'est déroulé, parce que

4 c'était complètement séparé, détaché, mais je pense qu'une certaine

5 quantité est restée dans les entrepôts, une certaine quantité d'essence

6 est restée aux stations-service, mais les stations-service appartiennent à

7 Energopetrol.

8 C'est une société appartenant à l'Etat qui fait la distribution des

9 produits pétroliers. Je ferai peut-être une erreur, si je dis qu'il

10 s'agissait d'une grande quantité, à peu près une trentaine de tonnes

11 d'essence.

12 Avant, les stations-service appartenaient à l'unité économique de la mine

13 d'Omarska. Il y avait le personnel qui s'occupait de ces stations-service,

14 qui distribuait l'essence et qui était soumis à des instructions précises

15 pour enregistrer le nombre de véhicules, l'identité des chauffeurs et avec

16 une liste de chauffeurs établie et une liste de l'essence qui leur a été

17 distribuée.

18 Pendant que le centre d'enquête existait, je n'ai pas d'informations sur

19 cela, je ne suis pas sûr si les gens qui travaillaient là-bas, s'ils

20 avaient travaillé là-bas. Je ne sais pas s'ils avaient informé Vlacina

21 Dusko là-dessus, qui était, à l'époque, le directeur de la mine d'Omarska.

22 Question: Savez-vous pourquoi les camions qui faisaient partie de votre

23 entreprise à Omarska ont été utilisés?

24 Réponse: Je dois maintenant essayer d'être plus clair. Pour moi, la mine

25 d'Omarska a beaucoup de moyens de transport; par exemple des camions d'une

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1 tonne, d'une tonne et demie jusqu'à 70 tonnes. Mais quand je parle

2 d'Omarska, il y avait plusieurs sortes de véhicules. Je vais essayer de

3 les énumérer pour que l'on sache quelle était leur utilisation.

4 -Le "DUMPER", 75 tonnes, sert à transporter des minerais de la mine.

5 -Le véhicule, pour transporter les explosifs de 4 tonnes et demie, servait

6 à transporter de l'explosif de Ljubija vers la mine, quand il y avait des

7 opérations de cette sorte.

8 -Les véhicules pour la maintenance de production d'une entreprise, qui

9 s'appelaient "TAM" -et dans la mine c'était "TAMICI", c'était

10 l'appellation populaire de ce véhicule-, c'était entre 1.500 et 2.000

11 kilos de poids. Il disposait d'une cabine spéciale, "Trambus Kabina"; je

12 ne sais pas ce que cela veut dire. C'est une cabine additionnelle dans

13 laquelle il était possible de mettre même 4 ou 5 ou 6 hommes. Dans la

14 carrosserie, on pouvait transporter des pièces de rechange, des câbles et

15 d'autres matériels. Ces machines ont été utilisées pour transporter le

16 matériel nécessaire et les personnes qui devaient s'occuper de cela.

17 Est-ce que je pourrais rajouter encore: comme il y avait trois unités de

18 production, c'étaient les exploitations orientales centrales. Et, à

19 Omarska, il y avait le même principe appliqué dans toutes les unités de

20 production, c'est-à-dire qu'il y avait presque les mêmes machines dans ces

21 trois exploitations, mais le nombre de ces machines était différent

22 seulement.

23 Question: Est-ce que vous avez dit, pour le compte rendu seulement,

24 "l'exploitation orientale", enfin, au sud ou centrale?

25 Réponse: C'était Ljubija, l'exploitation centrale, parce que c'est de

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1 Ljubija que les autres exploitations ont été développées. Donc il

2 s'agissait d'exploitations orientales, centrales et à Omarska.

3 Question: En été 1992, savez-vous quelle était l'utilisation des camions

4 de la mine? C'est-à-dire, est-ce qu'il y avait des rapports là-dessus?

5 Pourquoi ces camions ont été utilisés pendant cette période?

6 Réponse: Je n'ai pas reçu de rapports là-dessus. Je ne sais pas pourquoi

7 ces camions ont été utilisés. Je ne peux que supposer. Quand je dis que

8 l'exploitation souterraine d'Omarska devait fonctionner en continuité, et

9 compte tenu du fait qu'il n'y avait pas d'électricité pendant cette

10 période -il n'y avait pas assez d'électricité-, je suppose que les

11 ouvriers qui s'occupaient de la maintenance des pompes à eau devaient

12 utiliser une quantité d'essence pour que l'électricité soit produite dans

13 des quantités suffisantes. Je suppose qu'ils ont utilisé certains camions

14 pour aller à cette exploitation et pour faire ce travail.

15 Question: Est-ce que vous, c'est-à-dire votre entreprise, à Tomasica et à

16 Omarska par exemple, est-ce que votre entreprise a été pillée au cours de

17 l'été... au cours du printemps, de l'été et de l'automne 1992?

18 Réponse: Oui, je vais essayer de dire ce qu'il s'était passé exactement.

19 Je vous prie de me comprendre, c'est-à-dire que je ne peux pas vous donner

20 la date exacte de cela.

21 Je sais que la 6e Brigade de Sana, au cours des opérations militaires, est

22 arrivée à l'exploitation centrale où les membres de cette brigade ont

23 provoqué un chaos.

24 Par exemple, ils ont pris toutes les provisions de colle minière que l'on

25 ne peut pas utiliser, nulle par ailleurs, même dans le ménage.

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1 Ils ont pris une certaine quantité d'outils qui ne peuvent pas servir

2 ailleurs. Ils ont tiré sur les réservoirs du générateur. Je suppose qu'ils

3 ont pris de l'huile de ce générateur. Ils ont pris tout ce qu'ils

4 pouvaient prendre, c'est-à-dire ils ont pris tout cela.

5 Les membres de cette même brigade, à la fin de la guerre, sont arrivés à

6 l'exploitation et ils ont provoqué beaucoup de dommages. Ils ont détruit

7 le laboratoire qui s'occupait de la qualité de la mine que notre

8 entreprise avait produit à Omarska.

9 Il y a eu plusieurs pillages, plusieurs vols, des biens privés. C'est-à-

10 dire, il arrivait que les personnes armées obligent des gardes à être

11 couchés au sol. Ils prenaient les clefs d'entrepôts et ils prenaient des

12 biens, du matériel. Ils ont pris 12 outils. Chaque ensemble de ces outils

13 a une valeur de 4.000 dollars. Des poteaux électriques, ils ont enlevé une

14 partie de construction, et deux poteaux ont été abattus.

15 Ce matériel, ils l'ont utilisé pour produire une partie de tracteur.

16 Plus tard, en 1996, j'ai fait une proclamation destinée aux habitants

17 d'Omarska, c'est-à-dire qu'il fallait qu'ils rendent ces outils, parce que

18 ces outils ne peuvent pas leur servir.

19 Ces événements liés aux membres de la 6e Brigade de Sana, je ne pouvais

20 pas me plaindre parce qu'il n'y avait personne à qui se plaindre.

21 Quand il s'agissait de vols privés, j'ai informé le centre de sécurité

22 publique de Prijedor de ces vols, mais ils n'ont rien fait pour les

23 empêcher de faire ces vols.

24 Je pense, pour que vous ayez une image plus nette de cela, qu'ils ont

25 accusé, qu'ils m'ont accusé et mes collègues, d'avoir vendu une partie des

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1 machines en Serbie. Simo Drljaca a envoyé deux inspecteurs qui se sont

2 rendus à Ruma, à Kolubara, à Niksic dans l'usine d'acier pour interroger

3 les gens, pour savoir ce que nous avons vendu. Il s'agissait de la vieille

4 quincaillerie.

5 Les inspecteurs sont arrivés, ils ont pleuré et ils m'ont dit: "Il faut

6 que tu avoues quoi que ce soit parce que sinon nous serons démis de nos

7 fonctions." Ils n'ont rien trouvé. Je pense que ça illustre bien la façon

8 de travailler de ces personnes.

9 Question: Vous dites que cela illustre bien la façon de travailler de qui?

10 Réponse: La façon de travailler de Simo Drljaca qui dirigeait le MUP.

11 Question: La police donc s'est rendue maîtresse du complexe d'Omarska.

12 Savez-vous qui faisait fonctionner la station-service?

13 Réponse: Je n'en sais rien et, pour vous dire la vérité, même avant je ne

14 le savais pas. C'étaient les gens qui travaillaient à cet endroit. C'est

15 le contremaître qui décidait, le directeur d'Omarska et le contremaître

16 désignaient les personnes concernées.

17 Question: J'aimerais également vous poser des questions au sujet de la

18 cuisine. Qui préparait la nourriture? Et qui se trouvait à côté de

19 "Separicija"?… Savez-vous qui faisait fonctionner la cuisine à l'époque?

20 Réponse: Je l'ignore. Avant, il y avait un service de restauration qui

21 fournissait la nourriture à toute l'entreprise et ils avaient des

22 cuisiniers qui préparaient à manger. Cependant, pour ce qui est de cette

23 période, je n'en sais rien. Je ne sais pas comment cela fonctionnait.

24 Question: Vous nous avez parlé des gardes qui se trouvaient à l'entrée des

25 bâtiments. Qui organisait le travail des gardes et qui était avec vous

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1 devant le bâtiment?

2 Réponse: Après les événements de la fin mai et l'attaque sur Prijedor le

3 30 mai, c'était le chaos. On ne savait pas d'où pouvait venir le danger;

4 les gens s'organisaient spontanément, montaient la garde aux entrées des

5 bâtiments. Il y en a même qui ont barré leurs portes au moyen de barres de

6 fer.

7 Moi-même, j'ai monté la garde. Et, à plusieurs reprises, Ivo Komljenovic

8 montait la garde avec moi. Nous avons déjà parlé de cet homme, c'est un

9 Croate. Il y avait également Minka Cehajic, un médecin qui habitait dans

10 la même cage d'escalier que moi et qui était avec nous. Nous montions

11 ainsi la garde pour être en mesure de donner l'alarme si quelque chose se

12 passait. Tout au long de la nuit, on discutait, on buvait du café. Et,

13 fort heureusement, il ne s'est jamais rien passé au niveau de cette

14 entrée-là de notre bâtiment.

15 Question: Nous avons déjà parlé de M. Ivo Komljenovic, vous venez de

16 redire son nom. Veuillez, s'il vous plaît, nous expliquer comment il a

17 quitté Prijedor? Qui l'a aidé pour ce faire et pourquoi est-il parti?

18 Réponse: Ivo Komljenovic était un de mes voisins. C'était un ingénieur

19 dans le domaine des mines. Il était directeur technique de Nemetal. Je

20 crois que nous avons vu le document qu'il a signé hier, un document

21 relatif à la présence des employés. Il a deux enfants, deux jeunes enfants

22 et une femme. C'était quelqu'un chez qui je me rendais à l'occasion.

23 En 1992, en juin, juillet et dans les mois qui ont suivi, la production a

24 cessé. La situation était peu encourageante. Il était illusoire d'attendre

25 ou de penser que les salaires allaient être payés, parce que, comme je

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1 vous l'ai déjà expliqué, nous n'étions pas en mesure d'obtenir le paiement

2 de tout ce que nous avions exporté par le biais de Zenica. Il avait deux

3 frères en Allemagne et sa femme, elle-même, avait des parents dans ce

4 pays.

5 Il a pris contact avec eux et eux, à leur tour, lui ont envoyé des papiers

6 qui sont arrivés par l'intermédiaire de l'organisation caritative Caritas.

7 Quand il a reçu ces papiers, il m'a demandé si je pensais qu'il devait

8 partir. Je n'ai rien pu lui dire. Je lui ai dit: "Si je te dis de partir,

9 et si c'est effectivement une bonne décision, on va m'en rendre

10 responsable. Mais, si je te dis de rester et que ça se passe bien, à ce

11 moment-là, moi, aussi, on me rendra responsable de tout cela."

12 Donc je lui ai dit que c'était sa décision. Et finalement, il a pris sa

13 propre décision tout seul et il m'a demandé de l'aider. Dans sa voiture,

14 ainsi que dans une autre voiture, je l'ai emmené avec sa famille jusqu'à

15 Dvor Na Uni. Il est allé jusqu'en Croatie en passant par Vojnic.

16 Question: Est-ce que M. Komljenovic a jamais pris contact avec vous

17 depuis?

18 Réponse: Oui. Oui, depuis Wiesbaden. Pendant la guerre, il a pris contact

19 avec moi.

20 Aujourd'hui il habite à Zagreb, il est rentré de son séjour en Allemagne

21 et il est revenu à Prijedor quelquefois, depuis Zagreb. J'ignorais que sa

22 femme avait tenu des propos peu aimables à mon égard. Mais enfin, bon, ça

23 c'est de l'histoire ancienne, ce n'est pas la peine d'y penser.

24 Question: Pour aller de Prijedor en Croatie, est-ce que ces gens ont dû se

25 munir de laissez-passer?

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1 Réponse: Effectivement, il leur fallait des laissez-passer. A l'époque, il

2 y avait des points de contrôle établis, là où ces points de contrôle

3 étaient nécessaires -et là où ils n'étaient pas franchement nécessaires

4 également.

5 Aujourd'hui, je sais que certains de ces points de contrôle étaient en

6 fait des lieux où l'on extorquait de l'argent aux passants. Moi, j'ai

7 fourni des laissez-passer à Ivo et Dragica Komljenovic. Et c'est ainsi que

8 nous sommes parvenus à passer tous les points de contrôle, puisque j'avais

9 reçu tous ces documents pour eux.

10 Question: Dans les documents saisis, que nous avons reçus de l'accusation,

11 dans la section PS245, numéro ERN0050095 et P0050096, on peut constater

12 dans ces documents que, effectivement, M. Marjanovic a demandé et obtenu

13 des laissez-passer pour ces deux personnes. Ces documents en attestent.

14 Je souhaiterais maintenant que l'huissier présente au témoin un document

15 dont il faut d'abord que je trouve la cote. Donc je vais passer à autre

16 chose et, ensuite, on reviendra à cette question dès que j'aurais trouvé

17 le document en question.

18 J'ai une question maintenant qui n'a rien à voir avec ce sujet, mais je

19 souhaiterais vous demander si vous avez entendu parler de l'existence de

20 une ou deux sections d'intervention sur le territoire de la ville de

21 Prijedor ou en Bosnie-Herzégovine à l'époque... des groupes

22 d'intervention.

23 Réponse: J'ai effectivement entendu parler de ce terme de "groupes

24 d'intervention", que l'on met en place dans les unités impliquées dans des

25 opérations de guerre. On trouve ces sections ou ces groupes d'intervention

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1 dans les brigades. Cela existe aussi, je crois, au sein des bataillons, je

2 crois. Donc un groupe d'intervention, c'est un groupe qui est le premier à

3 intervenir au combat et qui doit enfoncer les structures de défense de

4 l'ennemi afin de permettre au gros des troupes d'avancer ensuite.

5 Question: Savez-vous s'il y avait une section d'intervention au sein de la

6 municipalité de Prijedor, placée sous le commandement de la cellule de

7 crise ou, plus tard, de l'assemblée municipale?

8 Réponse: Je ne sais pas. Je crois qu'il n'existait pas de telle section.

9 Et j'en aurais entendu parler parce que j'habitais là, mais je n'ai jamais

10 entendu parler d'une telle structure.

11 Question: Comme cela n'a pas été consigné au compte rendu d'audience, je

12 vais répéter ma question: avez-vous dit que, si une telle section avait

13 existé, vous en auriez indéniablement entendu parler?

14 Réponse: Vu tout ce que je vous ai dit précédemment, j'ai fait toutes les

15 observations que j'avais à faire au sujet de ce qu'il se passait à

16 Prijedor et dont j'avais entendu parler.

17 Etant donné que j'étais directeur général de la mine, je peux vous dire

18 avec la plus grande des certitudes que je n'ai jamais entendu parler de

19 rien de tel.

20 M. Koumjian (interprétation): Je ne prête aucune attention mal

21 intentionnée au conseil de la défense, mais si le conseil de la défense

22 s'entretient avec son client à haute voix dans la langue du témoin, le

23 témoin peut être en mesure d'entendre cela.

24 M. le Président (interprétation): Oui, je n'ai pas voulu vous interrompre

25 mais, dans le prétoire, il faut parler dans une langue que, nous, nous

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1 comprenons.

2 Bien entendu, vous avez le droit de vous entretenir avec votre client si

3 c'est nécessaire, et personne n'a le droit de prêter l'oreille à ce que

4 vous lui dites. Mais s'exprimer ainsi dans une langue comprise par le

5 témoin, mais qui ne soit pas une langue officielle du Tribunal, c'est là

6 une méthode sur laquelle il convient de s'interroger, sur laquelle pèse un

7 certain nombre de doutes.

8 M. Lukic (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Je comprends bien

9 la mise en garde que nous adresse notre éminent confrère de l'accusation,

10 mais on pourra tout à fait procéder à des vérifications en ré-écoutant les

11 enregistrements, les enregistrements de ce que le témoin a dit et de ce

12 qui a été dit par des échanges qui ont ensuite eu lieu. Ce type de

13 vérification pourra être tout à fait faisable.

14 M. Ostojic (interprétation): Pour que les choses soient absolument

15 claires, les interprètes n'ont pas traduit précisément les déclarations du

16 témoin. Donc, pour que les choses soient les plus claires possible, nous

17 souhaiterions que les interprètes, dans leur cabine, se penchent plus

18 particulièrement sur ce qui a été dit page 24, ligne 8 du compte rendu

19 d'audience.

20 Nous leur demandons de bien vouloir ré-écouter l'enregistrement audio afin

21 de pouvoir corriger leurs erreurs!

22 M. le Président (interprétation): Veuillez vous calmer et adopter le ton

23 adapté à ce prétoire!

24 Nous ne sommes pas ici en train de plaisanter, Maître Ostojic!

25 Je vous ai déjà demandé de vous comporter comme il convient à un conseil

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1 de la défense dans ce prétoire. Et si la traduction vous pose des

2 problèmes, au cours des 112 derniers jours d'audience, nous avons toujours

3 trouvé moyen de résoudre ce type de problème. Au cas où vous estimiez

4 qu'il y a eu une erreur commise dans les cabines d'interprétation,

5 veuillez, s'il vous plaît, vous conformer aux instructions qui vous sont

6 données.

7 M. Ostojic (interprétation): Me permettez-vous d'intervenir brièvement,

8 Monsieur le Président?

9 M. le Président (interprétation): Non! Le moment n'est pas bien choisi.

10 La défense a demandé une audience d'urgence au sujet des questions de

11 procédure. Sur la base de l'Article 65ter i), j'annonce l'organisation

12 d'une réunion des parties dans cinq minutes, dans mon bureau.

13 L'audience est suspendue jusqu'à plus amples informations.

14 Je vais demander aux parties et à tous les participants d'être prêts à

15 rejoindre le prétoire à 11 heures précises. Et s'il devait y avoir quelque

16 retard que ce soit, je vous en informerai.

17 (L'audience est levée à 10 heures 24.)

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