Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 30 janvier 2013

  2   [Plaidoiries de la Défense Stanisic]

  3   [Audience publique]

  4   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 14 heures 21.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tous.

  7   Monsieur le Greffier, veuillez citer le numéro de l'affaire.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Mesdames et Monsieur les Juges.

  9   Ceci est l'affaire numéro IT-03-69-T, le Procureur contre Jovica Stanisic

 10   et Franko Simatovic.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

 12   Maître Jordash, si vous êtes prêt, vous pouvez démarrer. Je vois que M.

 13   Groome se lève. Je ne crois pas qu'il veuille vous empêcher.

 14   Monsieur Groome.

 15   M. GROOME : [interprétation] Eh bien, concernant un document du Royaume-Uni

 16   que la Défense Stanisic a déclaré avoir l'intention de remettre à la

 17   Chambre, eh bien, je ne sais pas si cette intention vaut toujours, mais si

 18   c'est le cas, je souhaiterais pouvoir m'adresser aux Juges.

 19   M. JORDASH : [interprétation] Eh bien, nous avons l'intention de le faire,

 20   et je peux peut-être raccourcir un peu les choses en indiquant ce que nous

 21   avons l'intention de faire.

 22   Nous avons préparé un tableau de corrections au mémoire en clôture de

 23   l'Accusation, comprenant un certain nombre de choses telles que, par

 24   exemple, des citations incorrectes ou des omissions à présenter aux Juges

 25   de la Chambre, la façon dont des témoins se sont rétractés, et cetera. Je

 26   ne qualifierais pas cela d'arguments. Ce sont des corrections qui sont

 27   liées aux points relatifs à la responsabilité pénale, et j'espérais que

 28   nous serions en mesure de le faire et que l'Accusation -- j'espérais que


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  1   nous pourrions le faire plus tôt. C'est quelque chose qui est un peu

  2   controversé. Nous souhaitions connaître la position de l'Accusation à ce

  3   sujet, mais nous allons devoir demander à bénéficier d'un peu de temps aux

  4   Juges de la Chambre, peut-être à la fin de notre plaidoirie, peut-être

  5   demain, afin d'expliquer ce qu'il en est sur ce point si jamais il y a la

  6   moindre opposition de la part de l'Accusation.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Groome, Me Jordash suggère

  8   d'attendre, en fait, sur ce sujet, et que vous aurez la possibilité de

  9   présenter vos propres arguments. Qu'en est-il ?

 10   M. GROOME : [interprétation] Eh bien, c'est dans la mesure où quelque chose

 11   devait être remis à la Chambre que je souhaitais avoir la possibilité de

 12   m'adresser aux Juges. Si ce n'est pas le cas, eh bien, je suis disposé à

 13   attendre.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Dans ce cas-là, suivons la

 15   suggestion de Me Jordash avec l'accord de M. Groome.

 16   Maître, je crois que vous bénéficiez de deux heures et demie. Je vous

 17   suggère de couper ceci en deux volets d'audience de 75 minutes.

 18   M. JORDASH : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Dans ce cas-là, allez-y, s'il

 20   vous plaît.

 21   M. JORDASH : [interprétation] Merci.

 22   Aujourd'hui, pour l'essentiel, nous allons aborder certains aspects

 23   du mémoire en clôture de l'Accusation ainsi que leur approche en l'espèce.

 24   Demain, nous aborderons leur réquisitoire d'hier.

 25   M. Stanisic doit être acquitté de tous les chefs d'accusation. Il doit

 26   pouvoir quitter ce prétoire libre sans que sa réputation ne soit entachée.

 27   Nous exhortons les Juges de la Chambre de rejeter la thèse de l'Accusation

 28   et lui permettre de rentrer dans sa famille et dans sa communauté, pour


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  1   jouir de la paix qu'il a aidé à garantir pendant la guerre en ex-

  2   Yougoslavie. La thèse qui est présentée contre lui n'est même pas

  3   raisonnable, encore moins prouvée au-delà de tout doute raisonnable.

  4   Nous ne laissons pas entendre qu'il était erroné de poursuivre M. Stanisic.

  5   Nous savons que M. Stanisic était proche des événements qui relèvent de

  6   l'acte d'accusation et que ceci soulève un certain soupçon. Mais nous

  7   faisons valoir que ce procès a amplement démontré que ce soupçon ne nous

  8   dit rien de plus hormis le fait que M. Stanisic était le chef de la

  9   sécurité de Serbie en temps de guerre. Il était impossible d'être un chef

 10   des services de Sûreté de l'Etat efficace pendant une guerre civile

 11   sanglante sans être proche des événements. Un procureur averti et une

 12   poignée de témoins servant leurs intérêts peuvent faire valoir ce fait pour

 13   présenter des faisceaux de preuve, mais malgré les efforts qu'ils ont

 14   déployés, ce soupçon ne peut pas être transformé en preuve au-delà de tout

 15   doute raisonnable. Les éléments de preuve sont simplement trop équivoques,

 16   trop peu fiables, et insuffisamment étayés concernant les questions

 17   essentielles pour répondre à la charge de la preuve.

 18   En 1991, M. Stanisic était assistant des services de Sûreté en Serbie, et

 19   entre 1992 et 1998, il était à la tête de ces services. Bien sûr qu'il a

 20   participé à la guerre. Bien sûr qu'il a exercé une certaine influence. Bien

 21   sûr qu'il a assisté aux réunions avec un nombre important d'acteurs,

 22   d'acteurs critiques, notamment Milosevic, Martic, Babic, Karadzic et

 23   Mladic, et cetera. Bien sûr qu'il ne pouvait pas exprimer son désaccord

 24   avec la politique gouvernementale en public. Bien sûr que lors de réunions

 25   il a certainement dû s'aligner avec certains aspects de la politique du

 26   gouvernement serbe. Cela, nous le savions dès le début du procès. Nous

 27   savons que ces faits ont soulevé des questions légitimes.

 28   Mais ces questions n'ont pas été abordées de façon équitable par


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  1   l'Accusation lors de la conduite du procès et du réquisitoire de

  2   l'Accusation, et les réponses n'ont pas permis de prouver cette thèse au-

  3   delà de tout doute raisonnable. Plutôt que de concéder un seul pouce lors

  4   de ce procès extravagant, l'Accusation continue en affirmant que tous les

  5   aspects de sa thèse ont été prouvés au-delà de tout doute raisonnable.

  6   Comme nous le ferons valoir au cours de ces plaidoiries, en refusant de

  7   faire une seule concession ou de tenter de masquer l'effondrement de leur

  8   thèse sur des questions cruciales, l'Accusation tente d'ignorer la

  9   présomption d'innocence de M. Stanisic.

 10   Il a rencontré Milosevic et d'autres dirigeants serbes, il a fourni des

 11   informations relatives à la sécurité au gouvernement serbe, il a communiqué

 12   avec Karadzic, Martic, Babic et d'autres pour obtenir les meilleures

 13   informations possible. C'était une voie de communication entre les

 14   dirigeants sur des questions relatives à la sécurité de la Serbie. Cela

 15   cadrait parfaitement avec ses attributions. L'Accusation doit prouver que

 16   la proximité de M. Stanisic aux dirigeants et ces activités-là n'étaient

 17   pas conformes à ses obligations légales, et ils doivent prouver au-delà de

 18   tout doute raisonnable qu'ils visaient à la réalisation des crimes.

 19   Au lieu de cela, l'Accusation continue à faire valoir sans pour

 20   autant aider les Juges de la Chambre sur la question de ces différences

 21   essentielles. Tout ce que M. Stanisic a fait était dans le but de concourir

 22   à la réalisation des crimes. Tous les agents de la DB étaient criminels.

 23   Tous les efforts qu'il a déployés pour garantir la sécurité de la Serbie

 24   étaient illégitimes. Chaque mobile était mauvais. Il est responsable de

 25   tous les approvisionnements, chaque force serbe et de tous les

 26   paramilitaires. L'Accusation a depuis longtemps renoncé à présenter une

 27   thèse raisonnable, et encore moins une thèse qui permettrait d'attribuer à

 28   M. Stanisic une tâche légitime, vitale, non politique qui impliquait la


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  1   protection de millions de citoyens serbes.

  2   La Serbie avait un système de sécurité qui fonctionnait, et donc, il

  3   était important de faire intervenir la Sûreté de l'Etat. C'est un point de

  4   départ, nous faisons valoir, Mesdames, Monsieur les Juges, et nous tenons

  5   compte ici de la présomption d'innocence. Il ne suffit pas simplement de

  6   montrer qu'il était présent sur le terrain ou de présenter d'autres

  7   éléments analogues pour préciser que ses activités légitimes devaient

  8   certainement être une couverture pour autre chose.

  9   Bien évidemment, M. Stanisic aurait pu démissionner de son emploi. Il

 10   aurait même évité les défis de ce procès pénal qui ont perturbé sa vie,

 11   terni sa réputation et laminé sa santé, mais ceci eut été un chemin facile

 12   à emprunter. Et nous faisons valoir de façon aussi énergique que possible

 13   que lorsqu'il est resté à son poste, c'est ce qu'il convenait de faire dans

 14   le respect des principes. La guerre n'était pas sa priorité, mais c'était

 15   sa préoccupation, néanmoins. Et nous allons souligner au cours des deux

 16   prochaines heures et demie, qu'à un moment où il y avait un tourbillon de

 17   folie et de haine ethnique, sa voix s'élevait comme une des rares voix de

 18   la raison.

 19   Nous faisons valoir que les éléments de preuve montrent qu'il n'a

 20   jamais été nationaliste, qu'il n'a jamais détesté les non-Serbes ou cru à

 21   la supériorité des Serbes. Il n'a jamais cru que le pouvoir était une fin

 22   en soi. A un moment où les dirigeants de part et d'autre allaient vers la

 23   guerre, lui seul s'est tourné vers la communauté internationale pour les

 24   aider à mettre un terme à ce conflit terrible. Dès le départ, il ne pensait

 25   même pas qu'il était possible que la Yougoslavie puisse être tenue

 26   ensemble, encore moins de créer une Grande-Serbie. Il croit à une Grande-

 27   Serbie, mais il sait que ceci n'a rien à voir avec des terres ou un

 28   territoire, mais que cela a à voir avec des peuples, des valeurs, et le


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  1   fait d'être un membre d'une communauté internationale progressiste. Et

  2   l'Accusation n'a pas prouvé le contraire.

  3   Au paragraphe 1 258 de notre mémoire en clôture, l'entreprise

  4   criminelle commune n'est pas un concept ouvert qui autorise la condamnation

  5   en se fondant sur la culpabilité par rapprochement ou de collectiviser la

  6   culpabilité. La preuve de l'importance de la contribution de l'accusé est

  7   requise pour prouver que l'accusé partageait l'intention de réaliser les

  8   crimes et le but criminel.

  9   Ce qui signifie qu'il faut se raccrocher aux principes fondamentaux

 10   d'un procès, de filtrer avec application les éléments de preuve et

 11   d'appliquer de façon prudente la charge de la preuve. Malheureusement,

 12   l'Accusation a renoncé à ces fondamentaux. Après avoir observé et été

 13   attentive à la phase de la thèse de la Défense, l'Accusation justifie le

 14   versement au dossier d'un nombre de nouveaux éléments de preuve sans

 15   précédent qu'ils déposent sur l'autel de la contextualisation. On peut

 16   s'attendre à ce que leurs arguments finaux seraient méticuleux et qu'ils

 17   s'efforcent de garantir qu'ils ne conduisent pas en erreur les Juges de la

 18   Chambre et que les éléments de preuve saillants soient portés à l'attention

 19   de vous, Mesdames, Monsieur les Juges. Bien au contraire, le mémoire en

 20   clôture de l'Accusation fait tout pour éviter de présenter la globalité des

 21   éléments de preuve et le caractère gênant des faits et de la vérité.

 22   Dans la planche numéro 2, nous définissons nos plaidoiries qui seront

 23   divisées en trois parties. La première partie abordera les problèmes

 24   thématiques inhérents à l'approche de l'Accusation sur la question de la

 25   responsabilité individuelle de M. Stanisic. Dans cette partie, nous

 26   aborderons la manière dont l'Accusation a tenté de renverser la charge de

 27   la preuve et de réduire le critère de la preuve. Cette partie de nos

 28   arguments reposera sur un tableau d'erreurs que nous avons préparé pour les


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  1   Juges de la Chambre.

  2   Demander à une Chambre de retirer la liberté à un homme pour le restant de

  3   ses jours est un acte d'une extrême solennité, et il s'agit dans ce cas

  4   d'avoir une approche raisonnable aux faits en question, ceci ne permettant

  5   en rien de rehausser la réputation du Tribunal.

  6   Dans la deuxième partie, nous allons aborder le principe fondamental de la

  7   thèse de l'Accusation contre M. Stanisic, qu'il était le principal

  8   coordinateur et la principale voie de communication entre Milosevic,

  9   Martic, Babic, Hadzic et Karadzic. Pour remplir ses fonctions, il est censé

 10   avoir coordonné les crimes entre ces différents dirigeants régionaux. C'est

 11   ainsi qu'il aurait réussi à exercer son autorité sur différents événements

 12   militaires, déployer Arkan en SBSO, déployer les Bérets rouges et les

 13   Skorpions, les [imperceptible] et ailleurs, déployer les Bérets verts dans

 14   le cadre de l'effort de guerre, déployer les Skorpions, planifier les

 15   opérations de Vukovar, et cetera.

 16   Nous allons montrer que les éléments de preuve ne sont pas réunis et

 17   n'arrivent pas à la cheville de cette prémisse.

 18   Dans la troisième partie, nous nous concentrerons sur Stanisic en tant

 19   qu'homme et en tant que professionnel. Malgré les croyances du profane,

 20   parce que c'est effectivement ce dont il s'agit ici, qu'au moment où des

 21   crimes horribles sont commis tous ceux qui sont à des postes de dirigeants

 22   doivent être tenus responsables. Les éléments de preuve montrent qu'il

 23   était possible d'être en place, de nager contre le courant, et d'aider,

 24   souvent de façon intangible, pour soulager la douleur et la souffrance. Et

 25   bien sûr, que nous allons démontrer de façon plus facile que les

 26   négociations dans le cadre de la remise en liberté des otages de la

 27   FORPRONU en 1995, et le sauvetage des Français sont des exemples tout à

 28   fait manifestes. Moins manifestes et beaucoup plus importantes sont les


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  1   mesures que Stanisic a prises, qui ont préparé la voie pour garantir une

  2   Serbie plus calme, malgré la présence d'extrémistes aux esprits échauffés

  3   tels que Babic et Martic, qui étaient déterminés à emmener leur peuple en

  4   enfer.

  5   Il y a eu ensuite la diplomatie silencieuse, les nuits studieuses centrées

  6   sur les actions des criminels, le démantèlement stratégique des réseaux

  7   criminels, ses efforts consistant à cajoler Babic pour qu'il signe le plan

  8   Vance-Owen, sa coopération secrète avec les partenaires de la communauté

  9   internationale cruciaux à partir de 1991, alors que les Balkans brûlaient

 10   dans le cadre d'une folie ethnique, et cetera, et cetera.

 11   Il a gardé la tête froide alors que d'autres perdaient la tête. Ces actes

 12   représentent l'homme et le professionnel et sont essentiels si l'on veut

 13   évaluer le mens rea, l'élément moral. Nous faisons savoir que ces actes ont

 14   été prouvés et non pas les allégations, ce qui a été fabriqué de toutes

 15   pièces, et les rumeurs qui ont été présentées par des témoins à charge non

 16   fiables. Ceci constitue le tremplin à partir duquel vous pourrez juger de

 17   la véritable intention de l'accusé.

 18   La troisième partie évoque ceci dans le détail. Alors, si nous pourrions

 19   maintenant regarder la planche numéro 3.

 20   L'approche inappropriée de l'Accusation à la question de la responsabilité

 21   pénale individuelle. Nous faisons valoir que l'approche de l'Accusation en

 22   l'espèce est erronée, en principe. Ceci invite à penser à la culpabilité

 23   par rapprochement et aux conjectures. Le procès contre Stanisic, à tous

 24   égards, manque de preuves directes. La thèse repose sur un réseau de

 25   dépositions de témoins 92 ter et une tentative qui consiste à vouloir

 26   établir un lien entre Stanisic et Simatovic et d'autres éléments de preuve

 27   indirects, faits essentiellement de ouï-dire multiples et de conjectures.

 28   En conséquence, l'Accusation s'est laissée aller à utiliser différentes


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  1   stratégies, et nous exhortons les Juges de la Chambre de les analyser avec

  2   le plus grand soin.

  3   Nous pouvons maintenant passer à la planche numéro 4.

  4   La première stratégie de ce genre consiste à dire que l'accusé a

  5   travaillé secrètement ou dans les coulisses. Alors, si je fais valoir

  6   l'image hollywoodienne d'un service de Sûreté de l'Etat, peut-être que les

  7   pratiques illégales qui ont vu le jour après le 11 septembre, les pratiques

  8   illégales de la CIA et de M16 [comme interprété], l'Accusation tente, à

  9   l'instar de ces derniers, de conserver certains aspects de sa thèse de

 10   l'entreprise criminelle commune. La planche 4 fournit une sélection

 11   d'illustrations qui sont les tentatives de l'Accusation visant à dissimuler

 12   la pauvreté des éléments de preuve à l'appui de sa thèse, une pratique

 13   qu'ils ont développée. Et lorsqu'on conteste la pauvreté des éléments de

 14   preuve à l'appui des accusations, l'Accusation fait valoir que les actes de

 15   l'accusé ont été faits dans le secret. Ce récit inventé tente de réduire la

 16   charge de la preuve en affirmant, sans l'étayer véritablement, que les

 17   actes de Stanisic ont été entrepris secrètement.

 18   La dernière affirmation à la planche numéro 4 est un bon exemple de

 19   cette stratégie. Jusqu'à son mémoire en clôture, l'Accusation n'avait pas

 20   allégué que Stanisic contrôlait les Skorpions secrètement. Au contraire,

 21   dans leur mémoire préalable au procès en 2007, au paragraphe 81,

 22   l'Accusation allègue, et je cite :

 23   "Les Skorpions ont également reçu des livrets comportant des cartes

 24   d'identité indiquant qu'ils étaient membres de la DB."

 25   Je suppose que ces cartes d'identité devaient être montrées en

 26   public, indiquant quels étaient le statut et le privilège des hommes

 27   appartenant à cette unité de la DB.

 28   Après avoir analysé les éléments de preuve de Stoparic qui se sont


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  1   effondrés lorsque le témoin était à la barre, JF-024 et JF-029 n'ont pas pu

  2   apporter la preuve et se sont élevés tardivement pour dire que la DB ne

  3   leur avait jamais délivré de cartes d'identité; maintenant ils affirment

  4   que l'accusé contrôlait les Skorpions. Il s'agit là, bien sûr, d'un

  5   raisonnement intellectuel désespéré. Bien sûr, M. Stanisic a agi dans le

  6   secret. Il travaillait pour les Services secrets. Mais avec des mesures de

  7   protection en place au TPIY, certains éléments d'information ne sont pas

  8   rendus public, et ce, pour une très bonne raison. Cependant, lors de ce

  9   procès, nous dans ce prétoire, les sténotypistes, les interprètes,

 10   l'Accusation, le Greffe et la Défense, nous sommes dans le secret de ce

 11   qu'on appelle des informations confidentielles au TPIY. De même, quelques-

 12   unes des actions de Stanisic n'étaient pas divulguées au public et, par

 13   conséquent, étaient tenues secrètes. Comme l'allègue l'Accusation,

 14   cependant, les initiés auraient été au courant de ces actions, et ils ne

 15   savaient pas -- prouve que M. Stanisic n'a pas agi.

 16   Bien que ceci ne figure pas sur la planche numéro 4, essayons de

 17   regarder pendant quelques instants la théorie avancée par Babic. Babic est

 18   le seul témoin de l'Accusation qui ait déposé au sujet de l'existence d'une

 19   structure parallèle dans la Région autonome de Krajina. Babic a affirmé que

 20   le RDB avait initié des activités de combat de la fin du mois de juin 1991

 21   au-delà. Selon Babic, la RDB aurait exercé un contrôle global sur tous les

 22   événements de l'époque en Krajina. Selon lui :

 23   "Cette structure parallèle aurait contourné la chaîne de commandement

 24   des autorités civiles et militaires de jure, provoquant une réaction et de

 25   la peur parmi les Serbes, ce qui a causé une escalade de l'intolérance et

 26   de la violence, se soldant par la guerre."

 27   Babic a apporté un soutien direct à cette façon de faire en ne

 28   prenant pas position contre leurs méthodes, si l'on se réfère en tout cas à


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  1   son accord de plaidoyer. Le problème est que cette théorie est soutenue et

  2   est étayée par très peu d'éléments de preuve. Il y a des éléments de preuve

  3   très peu convaincants de l'existence d'un rôle de premier plan de Stanisic

  4   dans la création de Golubic.

  5   Ces éléments de preuve sont tout simplement absents. Bien entendu, il

  6   n'était pas possible pour Stanisic de contrôler l'ensemble des activités

  7   militaires en Krajina sans que quiconque l'ait observé en dehors de Babic.

  8   Il est impossible que 5 000 personnes aient été contrôlées par le

  9   commandement d'une unité de la DB sans que personne n'ait connu cela pour

 10   être la vérité. S'il y avait eu la moindre part de vérité dans ces

 11   affirmations, d'autres témoins initiés auraient été au courant de cela.

 12   C'est là une contradiction qui se trouve au cœur de la théorie de

 13   l'Accusation et qui prête à confusion, induit en erreur. Car, en même temps

 14   que l'Accusation affirme que M. Stanisic agissait en secret, elle affirme

 15   qu'il agissait avec une totale imprudence. Par exemple, l'Accusation

 16   affirme qu'il a dépêché des camions bleus du MUP à but spécial avec des

 17   plaques d'immatriculation bleues du MUP, les plaques de la police, qui

 18   étaient remplis d'armes; qu'il a rencontré personnellement un témoin pour

 19   remettre des sacs d'argent liquide afin de financer la police de Krajina;

 20   qu'il a créé le groupe paramilitaire des Bérets rouges qui s'est déployé

 21   dans les zones de guerre, en mettant en place 26 camps d'entraînement et

 22   qui constituaient en fait la colonne vertébrale de l'effort de guerre.

 23   Au paragraphe numéro 17 du mémoire en clôture de l'Accusation, il est

 24   indiqué que M. Stanisic aurait rencontré régulièrement les dirigeants

 25   serbes en Krajina, s'assurant qu'ils avaient accès aux membres de

 26   l'entreprise criminelle commune à Belgrade; qu'il est arrivé ensuite à Dalj

 27   à la mi-septembre 1991, où il criait en public au sujet de l'échec de la

 28   direction de la SBSO à libérer Vukovar; que cinq intermédiaires


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  1   supplémentaires avaient organisé la livraison de centaines et de milliers

  2   de tonnes de matériel militaire par l'intermédiaire de Prodanic; et que les

  3   associés des Serbes en Republika Srpska et en RSK se rencontraient

  4   pratiquement quotidiennement. Et, pourtant, l'Accusation a affirmé que

  5   Stanisic travaillait dans l'ombre.

  6   Il est tout simplement impossible d'être responsable de la livraison

  7   de centaines et de milliers d'armes pendant toute la période couverte par

  8   l'acte d'accusation, ainsi que l'avance un témoin sous le régime de

  9   l'article 92 quater, sans que personne ne soit au courant -- sans que cinq

 10   personnes ne le sachent, selon B179. Mladic et Milovanovic, au moins,

 11   auraient dû le savoir. Au lieu de cela, comme nous le verrons dans quelques

 12   instants, il y a une seule référence dans le carnet de Mladic à une seule

 13   livraison effectuée par Prodanic, le chef de la 8e Administration, et comme

 14   nous pouvons le voir, ces armes n'étaient même pas destinées à la VRS.

 15   Mladic, d'ailleurs, ne disposait même pas du numéro de téléphone de

 16   Stanisic avant 1995. Milovanovic a rencontré Stanisic en 1993 et pensait

 17   qu'il était un serveur. Est-il possible de dépêcher Dragan ou Crnogorac à

 18   Brcko en 1991 afin qu'ils entraînent les forces bosno-serbes au titre du

 19   projet des 28 entraîneurs d'élite sans que les autorités de la Republika

 20   Srpska soient au courant de leur venue et sans qu'elles sachent que c'était

 21   Stanisic qui les avait envoyés, sans qu'elles sachent que Stanisic voulait

 22   que cela ait lieu et qu'il coopérait avec ces membres de la VRS ? En bref,

 23   lorsque Stanisic ou la DB était impliqué, cela était connu, non du public,

 24   mais du renseignement militaire, de ceux qui recevaient l'approvisionnement

 25   et d'une multitude d'hommes de grade intermédiaire qui devaient participer

 26   à l'organisation. Si l'Accusation, après avoir passé au crible 9 millions

 27   de documents issus de ces archives, n'est pas en mesure de construire une

 28   théorie incriminant véritablement M. Stanisic, ce n'est pas parce que ce


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  1   dernier travaillait dans l'ombre. C'est parce que ceci n'est pas vrai.

  2   Je voudrais que nous passions à la planche numéro 5.

  3   La seconde stratégie employée par l'Accusation a consisté à réduire la

  4   charge de la preuve pesant sur elle, ce qui représente une invitation à

  5   faire fi de l'exigence formulée par la Chambre d'appel concernant la

  6   délimitation de l'objectif criminel commun qui doit être défini et établi

  7   au-delà de tout doute raisonnable. Ceci inclut la définition de la façon

  8   dont les participants à l'entreprise criminelle commune ont recouru aux

  9   auteurs, et cela inclut le nom de ces auteurs et la façon dont il est

 10   affirmé que leurs crimes entrent dans le cadre du but criminel commun.

 11   Ainsi que la planche 5 le montre, cela seul permet d'empêcher que la

 12   théorie de l'entreprise criminelle commune porte trop loin ou retombe dans

 13   une culpabilité par rapprochement.

 14   En l'espèce, l'Accusation a omis de fournir à l'accusé des informations

 15   cohérentes au sujet de la théorie construite contre lui. Il est censé avoir

 16   utilisé des personnes étrangères à l'entreprise criminelle commune pour

 17   œuvrer à la réalisation de l'objectif de cette dernière.

 18   Mais le cœur même de cette théorie s'est effondré. Au lieu de reconnaître

 19   cela, l'Accusation a cherché à mettre sur pied une nouvelle théorie.

 20   Je voudrais maintenant passer à la planche numéro 6. La Défense s'est

 21   systématiquement opposée à la façon dont l'Accusation a essayé de créer une

 22   nouvelle théorie en affirmant qu'elle avait manqué à son obligation de

 23   communication à la Défense. La planche numéro 6 contient des exemples des

 24   griefs de la Défense concernant la réticence de l'Accusation à identifier

 25   les personnes étrangères à l'entreprise criminelle commune que Stanisic

 26   aurait utilisées.

 27   Pourrions-nous passer à la planche numéro 7. Elle présente une vue

 28   d'ensemble du droit applicable à la responsabilité qui incombe à


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  1   l'Accusation de fournir les noms des auteurs de crime. En bref, et comme

  2   affirmé au paragraphe 32 de la décision de 2009 dans l'affaire Karadzic,

  3   qui figure dans la planche :

  4   "L'identité des auteurs matériels allégués constitue une information

  5   pertinente pour la préparation d'une défense efficace."

  6   L'Accusation du TPIY, en l'espèce, a convenu qu'elle devrait fournir ces

  7   informations à la Défense "dans la mesure où elle dispose" de telles

  8   informations.

  9   La Chambre de première instance est au courant des préoccupations de la

 10   Défense en matière de manquement aux obligations de communication. Mais

 11   jusqu'à ce stade, la Chambre de première instance a considéré comme

 12   spéculatif l'argument de la Défense consistant à dire que l'Accusation

 13   allait s'appuyer sur des individus identifiés, par exemple, dans les soi-

 14   disant dossiers individuels de la DB en tant qu'auteurs de crimes.

 15   Alors, nous passons à la planche suivante, qui ne doit pas être diffusée.

 16   Comme nous pouvons le voir sur cette planche, nous avons là la liste de 48

 17   personnes étrangères à l'entreprise criminelle commune ou auteurs

 18   matériels, y compris le cœur des 28, dont l'Accusation a donné

 19   communication.

 20   La planche suivante est également confidentielle, et à la différence de la

 21   précédente, elle contient la liste de 60 auteurs allégués ou personnes

 22   étrangères à l'entreprise criminelle commune figurant dans l'annexe A du

 23   mémoire en clôture de l'Accusation qui ont été introduits en l'espèce sans

 24   notification en bonne et due forme. Il s'agit donc d'auteurs allégués

 25   supplémentaires qui apparaissent du début à la fin du mémoire en clôture

 26   mais qui ne figurent pas à l'annexe A. La note de bas de page numéro 851

 27   est un bon exemple d'auteurs allégués qui sont eux-mêmes introduits en

 28   l'espèce de façon tardive. Et plutôt que de reconnaître le problème de


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  1   cette notification tardive ou l'absence de notification et ainsi que de la

  2   nécessité d'une notification, comme l'équipe de l'Accusation l'a fait dans

  3   l'affaire Karadzic, et au lieu d'essayer de convaincre la Chambre de

  4   première instance que la Défense n'a pas subi de préjudice, l'Accusation en

  5   l'espèce s'est contentée de requalifier le problème. L'annexe A au mémoire

  6   en clôture de l'Accusation est une invitation adressée à la Chambre de

  7   première instance, invitation à écarter les critères habituels au profit

  8   d'une nouvelle version délayée construite autour d'un nouveau seuil de

  9   relation significative. Je voudrais essayer de replacer ceci dans la

 10   logique des arguments avancés par l'Accusation hier. Mesdames et Monsieur

 11   les Juges, vous pouvez être convaincus que Kostic, Kojic et tous ceux qui

 12   avaient un lien avec la DB, à quelque moment que ce soit et à quelque

 13   moment [comme interprété] que ce soit, étaient aux ordres de M. Stanisic

 14   parce que, je cite :

 15   "Leurs actes étaient exécutés conformément à la façon dont Stanisic

 16   avait l'intention d'utiliser la DB de Serbie pour œuvrer à la réalisation

 17   de l'entreprise criminelle commune."

 18   L'Accusation a dit hier, elle n'a pas besoin de produire des éléments

 19   de preuve démontrant l'existence d'un ordre direct de Stanisic afin de

 20   s'acquitter de la charge de la preuve qui lui incombe. En d'autres termes,

 21   vous pouvez conclure que ceux qui ont eu une relation significative avec la

 22   DB agissaient pour le compte de M. Stanisic parce que la DB agissait pour

 23   œuvrer à la réalisation de l'objectif criminel commun, et nous savons que

 24   ces individus oeuvraient à la réalisation de l'objectif criminel commun

 25   parce que la DB le faisait.L'annexe A, je crois, devrait plutôt être

 26   décrite comme un index des personnes ayant un lien particulier ou une

 27   relation significative avec la DB de Serbie, ce qui est également connu

 28   comme le groupe central des 28, auquel s'ajoutent les auteurs allégués que


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  1   nous souhaitons utiliser en l'espèce sans notification en bonne et due

  2   forme.

  3   Si l'Accusation n'apprécie pas cela et ne l'accepte pas, peut-être dans sa

  4   réponse pourra-t-elle éclairer notre lanterne quant à ce que les Juges de

  5   la Chambre sont censés faire de ces individus dont l'Accusation dit qu'ils

  6   avaient une relation significative avec la DB et qui sont pertinents, selon

  7   les termes utilisés par l'Accusation hier. Ils verraient quant à ce qu'est

  8   leur compréhension du droit applicable qu'il convient d'utiliser pour

  9   déterminer si leurs crimes, à condition qu'on en établisse la réalité,

 10   entraient dans le cadre de l'objectif criminel commun.

 11   Toutes actions commise dans le cadre de crimes commis par des hommes

 12   qui n'ont pas été définis dès le début en tant qu'instruments de la

 13   réalisation de l'objectif commun et sans notification en bonne et due forme

 14   devraient être rejetées, selon nous, en l'espèce.

 15   La troisième stratégie utilisée par l'Accusation dans son mémoire en

 16   clôture a consisté à assimiler le travail de renseignement de la DB à des

 17   activités criminelles.

 18   Cela revient à dire que la présence d'agents opérationnels de la DB

 19   sur le terrain ne peut signifier rien d'autre que leur participation à des

 20   crimes aux ordres de l'accusé. Cela représente une invitation adressée aux

 21   Juges de la Chambre, invitation à exiger les éléments de preuve de l'accusé

 22   susceptibles de prouver que ces agents ne participent pas à des crimes.

 23   C'est une inversion de la charge de la preuve en d'autres termes.

 24   Les exemples les plus évidents de cette tentative de masquer cette

 25   distinction essentielle concernent les faits incriminés en SBSO, ainsi que

 26   le montrent les paragraphes 49 et 50 du mémoire en clôture de l'Accusation,

 27   cette dernière y affirme que :

 28   "Stanisic a intégré des agents opérationnels de la DB du MUP de Serbie au


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  1   sein du gouvernement de la SAO SBSO et à d'autres postes dans toute la

  2   région afin d'œuvrer à la réalisation de l'objectif commun de l'entreprise

  3   criminelle commune. Des agents opérationnels de la DB, dont notamment Kojic

  4   et Kostic, ont été extrêmement actifs et utiles en la matière."

  5   Aux paragraphes 49 et 50, l'Accusation suggère que :

  6   "Leurs activités ne se sont pas limitées à collecter des renseignements,

  7   mais plutôt, Kojic et Kostic, ainsi que d'autres membres de la DB du MUP de

  8   Serbie participaient à 'd'autres travaux.'"

  9   Alors, nous pourrions nous demander de quels autres travaux s'agissait-il ?

 10   Cela n'a pas été défini. Si le critère en question doit être satisfait,

 11   nous devons avoir la définition.

 12   Et examinons le cas de Kojic.

 13   Alors, en dépit du fait qu'il ne soit pas mentionné dans l'acte

 14   d'accusation ou dans le mémoire en clôture de l'Accusation, il a joué un

 15   rôle extrêmement important dans cette affaire. L'Accusation souhaiterait

 16   que vous acceptiez que tout son travail, tout le travail qu'il a fait au

 17   nom du gouvernement de la SBSO était fait sur les ordres de Stanisic, non

 18   pas qu'ils puissent vous le prouver, et d'ailleurs, il n'y a pas un seul

 19   ordre ou une seule consigne qui lui ait été donné par Stanisic, mais tout

 20   simplement avancé parce qu'il était engagé en tant qu'agent opérationnel

 21   chargé du renseignement par la DB.

 22   Planche numéro 10. Et là, nous verrons que les dangers de cette approche

 23   sont évidents, mais il faut les mettre en exergue. Sur la planche numéro

 24   10, nous voyons qu'il y a une citation du Témoin Bogunovic, et cela montre

 25   que même lorsque l'Accusation essaie de brouiller la différence entre le

 26   travail qui consiste à collecter des renseignements et un travail qui

 27   pourrait être considéré comme pour concourir à la réalisation de crimes,

 28   ceux qui se trouvaient sur le terrain à ce moment-là ont certainement, eux,


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  1   fait la distinction en question, comme l'a indiqué le témoin :

  2   "Eh bien, voilà comment je voyais les choses à ce moment-là. Il

  3   semble qu'il y a des gens qui ont été nommés," il faisait référence à

  4   Kojic, "étaient ceux qui leur indiquaient à tout moment ce que nous

  5   faisions au sein du gouvernement et qui leur indiquaient ce qui se passait

  6   dans la zone."

  7   Bogunovic a identifié la conclusion raisonnable, à savoir qu'en

  8   l'absence d'éléments de preuve qui suggèrent d'autre chose, on est en droit

  9   de se poser la question et d'avoir un doute.

 10   Planche numéro 11 qui, en fait, va démontrer les périls et les écueils de

 11   l'approche retenue par l'Accusation, parce qu'en fait, cet autre travail de

 12   Kojic qui a été fait sur les ordres d'autres personnes telles que Simovic

 13   du ministère de la Défense qui donne un ordre personnellement à Kojic, il

 14   semblerait en fait qu'il s'agit de devoirs militaires de combat. Mais

 15   l'Accusation doit prouver, par conséquent, qu'à chaque fois c'était M.

 16   Stanisic, et non pas Simovic ou d'autres, qui relayait ce type d'ordre.

 17   Donc, prendre des éléments de preuve qui ne font l'objet d'aucun litige,

 18   qui portent sur le rôle de Badza, qui portent sur le commandement par

 19   rapport à Kojic avant Trnovo et supposer que Kojic devait agir sur l'ordre

 20   de Stanisic simplement parce qu'il travaillait pour la DB est une approche

 21   qui laisse beaucoup à désirer.

 22   En d'autres termes, M. Martin est sous mon contrôle pendant cette

 23   audience, mais s'il ne se comporte pas de façon non professionnelle pendant

 24   la présentation des moyens à charge au TPIR, pourquoi est-ce que c'est à

 25   moi que l'on devrait faire des reproches ?

 26   Si vous prenez la planche numéro 12, vous verrez que par sa quatrième

 27   stratégie, l'Accusation essaie de voiler ou de masquer la différence entre

 28   les institutions et les personnes. Vous avez, par exemple, Bogdanovic -- ce


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  1   qui nous préoccupe particulièrement, c'est que l'Accusation essaie

  2   d'établir un lien entre Stanisic et toutes les actions de toutes les

  3   personnes, depuis Bogdanovic jusqu'à Simatovic, puis Badza, et cetera, et

  4   cetera, qu'il s'agisse de supérieurs, qu'il s'agisse de consignes qu'il

  5   donne ou qu'il s'agisse d'indiquer qu'il avait le contrôle sur ces

  6   personnes lors de la période qui nous intéresse. L'Accusation essaie

  7   d'isoler les actes des membres de l'entreprise criminelle commune de leurs

  8   instruments et essaie de faire la différence entre M. Stanisic, ceux qui

  9   travaillaient pour lui, et cela ne fait en fait que masquer la façon dont

 10   vous allez pouvoir évaluer la situation. Et c'est une interprétation

 11   particulièrement dangereuse de l'entreprise criminelle commune qui,

 12   d'ailleurs, équivaut quasiment à une culpabilité par rapprochement.

 13   Alors, les planches 13, 14 et 15 sont autant d'illustrations de mon

 14   propos, notamment la planche 15, qui ne doit d'ailleurs pas être diffusée

 15   au public.

 16   La planche numéro 15 est l'exemple convainquant, s'il en fut, de la

 17   troisième et de la quatrième stratégie prises conjointement. L'Accusation

 18   vous invite à attribuer les livraisons d'armes de Milos au nom du MUP de la

 19   Serbie à Stanisic tout simplement parce que - et c'est le seul fondement -

 20   parce que la DB a utilisé ses services depuis 1991 pour collecter des

 21   renseignements secrets, donc depuis les renseignements secrets jusqu'à

 22   l'approvisionnement en armes du MUP à Stanisic et à la DB serbe, nous voilà

 23   face à un exercice de couper-coller et un exercice d'amalgame qui n'a pas

 24   lieu d'être dans une salle d'audience et lors d'un procès.

 25   Et puis, j'aimerais maintenant vous présenter la planche numéro 16.

 26   Là, il s'agit en fait d'une stratégie de la part de l'Accusation afin

 27   d'essayer de colmater les brèches, là où il y aurait dû avoir des éléments

 28   de preuve, et c'est une façon de vous inviter, d'inviter la Chambre de


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  1   première instance à emprunter une voie erronée. Je commencerais par vous

  2   dire que nous acceptons que nous ayons commis une erreur, une seule, dans

  3   notre mémoire en clôture, au paragraphe 1 175. Car, bien entendu, nous

  4   acceptons tout à fait le fait que les Skorpions ne sont devenus ou n'ont

  5   fait partie des forces de réserve de la SAJ qu'en 1998 ou 1999. Toutefois,

  6   cette erreur est éclipsée par les nombreuses erreurs de l'Accusation. Et la

  7   planche numéro 16 vous permettra de comprendre les erreurs les plus graves

  8   qui ont été commises. Qu'est-ce que cela signifie ? Eh bien, voilà ce que

  9   nous avançons : la seule méthode afin de présenter une thèse qui se tienne

 10   contre M. Stanisic est de présenter tous les éléments de preuve, la

 11   globalité des éléments de preuve. Mais bien entendu, si nous procédons

 12   comme l'a fait l'Accusation avec une présentation sélective quasiment triée

 13   sur le volet, alors là, bien entendu, nous nous retrouvons avec des

 14   éléments de preuve qui donnent l'impression de tenir la route, mais il

 15   s'agit d'autant de -- et d'ailleurs, le mémoire en clôture de l'Accusation

 16   est truffé de ce genre d'exemples, des allégations non étayées, des

 17   citations sélectives des éléments de preuve, des déductions tout à fait

 18   déraisonnables, le fait que l'on présente des éléments de preuve pour

 19   lesquels il n'existe aucune corroboration.

 20   Vous avez, par exemple, les planches 17 à 29 qui sont autant

 21   d'exemples illustratifs de cette approche fâcheuse retenue par

 22   l'Accusation. Les planches 17, 18, 19, 20, 21, 22 et 27 sont

 23   confidentielles. Je ne vais pas vous les présenter maintenant mais je vous

 24   les laisse pour que vous vous y intéressiez par la suite. Alors, plaider sa

 25   cause de façon énergique et convaincante est une chose, mais faire fi des

 26   rétractions, cela peut quand même être assez grave. Alors, l'Accusation

 27   s'est appuyée lourdement sur les carnets de Mladic pour prouver que M.

 28   Stanisic était absolument d'accord avec les objectifs de l'entreprise


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  1   criminelle commune et qu'il participait, qu'il était engagé dans ces

  2   approvisionnements, dans cet armement, sans pour autant reconnaître dans un

  3   premier temps qu'il était un complice, qu'il avait quand même falsifié ses

  4   cahiers pour supprimer les références à Srebrenica ainsi qu'à Sarajevo, et

  5   sans reconnaître également qu'il y a des éléments de preuve qui prouvent

  6   qu'il faisait partie du plan de sécurité militaire de la VRS qui consistait

  7   à déclarer tous les associés du MUP de Serbie comme autant d'extrémistes et

  8   de paramilitaires. Donc, c'est une approche qui est quand même curieuse

  9   lorsque l'on pense aux obligations de l'Accusation.

 10   L'Accusation a avancé hier que la Défense de M. Stanisic n'avait pas

 11   su expliquer comment le fait que Stanisic avait envoyé les hommes d'Arkan

 12   et les Skorpions dans le cadre de l'opération Pauk représenterait un

 13   avantage pour Mladic et impliquerait Stanisic. Mais ils ont tout à fait

 14   raison, nous n'avons fourni aucune explication parce que nous pensions que

 15   c'était enfoncer les portes ouvertes. C'est la même réponse à la question

 16   suivante : pourquoi est-ce que l'Accusation utilise ou a recours à ces

 17   éléments de preuve pour tirer des conclusions importantes eu égard au fait

 18   que Stanisic commandait ces unités entre 1991 et 1995.

 19   Alors, j'aimerais maintenant poser deux questions à l'Accusation à

 20   propos de ces cahiers et de leur tentative d'impliquer Stanisic dans les

 21   actes des Skorpions et d'Arkan. Le général Milovanovic a affirmé que

 22   Stanisic avait beaucoup plus de connaissances que lui eu égard à ce qui se

 23   passait en Podrinje. Alors, si l'on fait abstraction du fait qu'au même

 24   moment Oric lançait des attaques et que, bien entendu, le chef de la

 25   sécurité de l'Etat devait bien entendu savoir ce qui se passait. Mais

 26   Milovanovic a accepté qu'il sache davantage que Stanisic à propos de la

 27   plupart des choses. Nous pouvons supposer que Mladic était tout aussi bien

 28   informé. Comme nous l'avons indiqué aux paragraphes 1 038 à 1 043 et 1 085


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  1   à 1 090 de notre mémoire en clôture, les Skorpions faisaient partie d'un

  2   système de roulement des unités du 11e Corps qui aidaient la VRS et Fikret

  3   Abdic pendant l'année 1994 avant l'opération Pauk et durant l'opération

  4   Pauk. Alors, pourquoi est-ce que Stanisic devait se rendre à une réunion

  5   pour relater à Mladic ce que Mladic savait déjà, à savoir que les Skorpions

  6   devaient se rendre à l'opération Pauk ? Mais en fait, ils faisaient partie

  7   du système de roulement du 11e Corps. Ou pour m'exprimer de façon

  8   différente, pourquoi est-ce que Stanisic devait se rendre à une réunion et

  9   dire à Mladic que ce qu'il savait n'était pas vrai ? Stanisic lui a dit :

 10   J'ai envoyé les Skorpions. Alors que Mladic devait savoir qu'il s'agissait

 11   du roulement du 11e Corps.

 12   Deuxièmement, pourquoi est-ce que Stanisic aurait dit à Mladic qu'il

 13   avait envoyé des hommes d'Erdut, ce qu'il faut comprendre comme les hommes

 14   d'Arkan, alors que d'après l'Accusation Simatovic avait pris des

 15   dispositions pour récupérer les hommes d'Arkan, non pas depuis Erdut mais

 16   depuis Belgrade. Stanisic, le chef de la DB qui était si remarquablement

 17   informé, devait savoir à l'époque que le camp d'Arkan qui, à Erdut, avait

 18   été fermé en octobre 1993 et n'avait rouvert qu'en mai 1995. Et vous

 19   trouverez les références à cela au paragraphe 1 040 de notre mémoire en

 20   clôture. Donc, c'est une tentative particulièrement maladroite de la part

 21   de Mladic pour essayer d'impliquer Stanisic, et même si tel n'est pas le

 22   cas, nous suggérons en fait que l'Accusation essaie de nous le faire

 23   croire, ce qui pourrait très certainement déboucher sur un déni de justice.

 24   Et je souhaiterais maintenant que la planche numéro 30 soit montrée,

 25   mais ne soit pas montrée au public.

 26   Nous soutenons qu'en l'espèce l'Accusation n'a pas su faire preuve de

 27   la solennité nécessaire alors qu'elle essaie de demander une détention à

 28   perpétuité. Alors, il s'agit du mythe, du mythe évident dont ils ont abusé,


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  1   à savoir Stanisic a approvisionné en armes et a armé les hommes d'Arkan

  2   depuis 1991. Nous avons les diapositives 31, 32 et 33 qui montrent, en

  3   fait, que l'Accusation a essayé, de façon assez maladroite à nouveau,

  4   d'amalgamer les éléments de preuve qui ont trait à Arkan pour l'année 1994

  5   et l'année 1995, et il semblerait en fait que cela porte plutôt sur les

  6   années 1991 à 1993.

  7   Donc, pour mettre un terme ou pour conclure cette première partie de

  8   ma plaidoirie, je dirais en fait que les éléments de preuve présentés ou la

  9   thèse de l'Accusation présentée contre M. Stanisic est particulièrement

 10   faible. Elle s'écroule sous le poids des allégations. Et je vais maintenant

 11   amorcer la deuxième partie de ma plaidoirie pour dire qu'ils n'ont même pas

 12   commencé à déterminer ou à établir que Stanisic était le bras droit de

 13   Milosevic, ou était un coordinateur, ou était soit un coordinateur

 14   politique ou de ces activités militaires. Ils n'ont même pas réussi à

 15   établir qu'il était quelqu'un qui fournissait des hommes à partir de

 16   Belgrade. Ils n'ont même pas réussi à établir qu'il contrôlait ne serait-ce

 17   qu'une seule force paramilitaire. Alors, lorsque nous prenons la globalité

 18   des éléments et lorsque nous utilisons et nous appliquons le droit, je

 19   dirais, en fait, que l'Accusation a réussi à nous faire comprendre ce que

 20   nous savions déjà, à savoir Stanisic était très proche des événements.

 21   L'Accusation a évité d'entendre des éléments de preuve gênants et a

 22   développé le reste pour ne pas réunir les conditions de ce critère, ce qui

 23   signifie qu'il faut considérer l'ensemble des éléments de preuve, à

 24   l'exclusion des déductions raisonnables. Cela éveille des soupçons. Rien de

 25   plus n'a été montré.

 26   Et si je puis maintenant passer à la deuxième partie de mes

 27   arguments, à savoir la planche numéro 34. Je souhaite passer un certain

 28   temps à placer dans son contexte la thèse de l'Accusation présentée dans


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  1   son mémoire concernant le rôle allégué de Stanisic, à savoir comme

  2   quelqu'un gérant la filière de communication ou un membre de l'entreprise

  3   criminelle commune.

  4   Comme vous pouvez le constater au paragraphe 187 du mémoire en

  5   clôture de l'Accusation, la thèse de l'Accusation consiste à dire que M.

  6   Stanisic a été une filière de communication, a facilité le travail des

  7   membres de l'entreprise criminelle commune, à savoir pour qu'ils puissent

  8   concourir à la réalisation des crimes. Il a coordonné les activités entre

  9   Milosevic et Babic, entre Milosevic et Hadzic, Milosevic et Martic,

 10   Milosevic et Karadzic. M. Stanisic n'était ni un commandant militaire ni un

 11   dirigeant politique. Il ne commandait pas d'armée et ne siégeait pas non

 12   plus au conseil de Défense suprême de la RFY en rendant les décisions

 13   politiques. Son rôle élargi tel qu'il est allégué, à savoir l'entraînement,

 14   le financement, la fourniture d'armes et de matériel aux forces serbes en

 15   RSK, SBSO et Bosnie, l'emploi et le contrôle d'unités spéciales, se fonde

 16   sur le fait qu'il a été le coordinateur et le facilitateur des actions des

 17   dirigeants militaires et politiques.

 18   La deuxième partie de cette plaidoirie examinera ce fondement à

 19   l'égard de chaque crime et de chaque dirigeant politique. La thèse de

 20   l'Accusation, nous faisons valoir, n'a pas été prouvée.

 21   En ce qui concerne la SAO de Krajina, Mesdames, Monsieur les Juges, vous

 22   comprendrez que le procès contre M. Stanisic se fonde sur la relation

 23   présumée qu'il avait avec Martic et Babic. Ceci a permis à M. Stanisic,

 24   comme dit cette théorie, de contrôler l'armée, les paramilitaires, Golubic,

 25   les Knindza, ainsi que les unités spéciales d'Arkan et les Skorpions. Nous

 26   allons en premier lieu parler de Martic et ensuite de Babic.

 27   La diapositive numéro 35 ne doit pas être diffusée à l'extérieur, s'il vous

 28   plaît.


Page 20279

  1   Cette planche résume les allégations principales de l'Accusation portant

  2   sur le rôle allégué qu'aurait eu Stanisic en tant que coordinateur des

  3   actions de Martic.

  4   Mesdames, Monsieur les Juges, si vous regardez ceci très brièvement,

  5   vous constaterez qu'un des traits les plus marquants de cette affaire est

  6   le fait que l'Accusation se fonde quasiment exclusivement sur JF-039, un

  7   des hommes de Martic. Techniquement parlant, il n'est pas nécessaire de

  8   corroborer ces éléments; mais, bien évidemment, Mesdames, Monsieur les

  9   Juges, si nous devons respecter la présomption d'innocence, cela est

 10   inséparable de cet incident. Car si on établit que Stanisic était le

 11   coordinateur-clé de toutes les actions de Martic, le bon sens commun et le

 12   principe juridique imposent qu'il faut plus que la parole d'un homme,

 13   surtout JF-039, qui était complice et qui avait la réputation d'être un

 14   tyran et un voleur.

 15   Vous vous souviendrez du récit de JF-039. Nous en avons longuement

 16   parlé dans notre mémoire en clôture. Il est truffé de contradictions sur

 17   des questions cruciales. On peut faire valoir que ceci a été corroboré par

 18   la déposition de feu Babic. Nous savons, comme Babic l'a dit, que la

 19   relation entre Martic et Stanisic l'a écrasé et l'a conduit à enfreindre le

 20   droit international. JF-039 a fourni le fondement pour fournir les détails

 21   sur cette relation alléguée en affirmant qu'il avait observé que M.

 22   Stanisic avait coordonné toute l'aide avec le gouvernement de Milosevic

 23   avec la force de police de Martic. Cela ne fait pas l'ombre d'un doute que

 24   les deux hommes ont présenté des faux témoignages.

 25   Alors, planche numéro 36, qui ne devrait pas être diffusée à

 26   l'extérieur, s'il vous plaît.

 27   J'espère, Monsieur le Président, Mesdames les Juges, que vous

 28   disposez également d'un livret avec ces planches. Je vous demande bien


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  1   vouloir regarder 36 et 37 ensemble. Babic et JF-039 se contredisent de

  2   façon évidente en montrant que le procès contre Stanisic, dès le départ,

  3   comme une maison construite sur du sable, manque de véritable fondement.

  4   En quelques mots, Babic et JF-039 prétendent l'un et l'autre d'avoir

  5   pris part à l'organisation de l'aide de Milosevic fournie à la police de

  6   Martic et à la création et à l'approvisionnement de Golubic. JF-039 prétend

  7   que ces dispositions ont été prises aux fins de créer et d'approvisionner

  8   la police et de créer Golubic en janvier 1991, lors d'une réunion entre

  9   Bogdanovic, Stanisic et Martic. Il faut remarquer que ceci était

 10   prétendument le deuxième stade - appelons-le comme ça - du plan Golubic, un

 11   plan visant à créer des forces paramilitaires qui étaient déjà en place,

 12   d'après le Témoin JF-039, depuis le mois de septembre 1990. Babic, d'autre

 13   part, affirme que ces dispositions ont d'abord été prises au mois de mars

 14   1991 et que Golubic n'a pas participé à ces plans. Lui-même a été surpris

 15   lorsque les hommes de la DB sont venus pour créer Golubic. Donc

 16   l'Accusation vous demande d'accepter le fait que Babic méconnaissait

 17   complètement les dispositions prises par Martic, Milosevic et Stanisic, qui

 18   avaient commencé en septembre 1990, et il est allé voir Milosevic en mars,

 19   et le 20 mars 1991, il a demandé au ministère de l'Intérieur de cette force

 20   de police qui venait d'être créée de lui fournir son aide.

 21   D'après le récit de JF-039, à l'époque où Babic recherchait ou

 22   demandait qu'on lui fournisse de l'aide pour la nouvelle police de Krajina

 23   en SAO, Stanisic avait déjà fourni ces approvisionnements depuis sept mois.

 24   Et depuis le mois de janvier 1991, Stanisic avait fourni des armes dans des

 25   camions du MUP avec des plaques d'immatriculation bleues, indiquant que

 26   celles-ci appartenaient aux forces de police serbe, conduits par des hommes

 27   portant des uniformes de la police spéciale, conduits directement à Knin.

 28   Je crois qu'il nous faudrait quelques ombres pour cacher ces camions,

 


Page 20281

  1   et pas seulement un camion. Personne, ni même les autorités en Bosnie,

  2   Babic ou JF-039, ne semble avoir remarqué cela. Il s'agit d'une affaire où

  3   le bras droit et le bras gauche font des choses différentes. JF-039 ou

  4   Babic, qui fait une économie de la vérité ? Est-il possible ou probable que

  5   Babic se soit rendu séparément, ou seul, rencontrer Milosevic en mars 1991,

  6   lui demandant l'aide de la police, ne sachant pas que Stanisic coordonnait

  7   l'approvisionnement avec Milosevic pour qu'il l'envoie à Martic et qu'il

  8   faisait cela depuis le mois de septembre 1990 ?

  9   Est-ce que nous pouvons passer à huis clos partiel pendant quelques

 10   instants, s'il vous plaît.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons passer à huis clos partiel.

 12   M. JORDASH : [aucune interprétation]

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors je ne sais pas si nous allons

 14   diviser ceci en deux parties. Nous avons commencé en retard. Donc, si vous

 15   continuez pendant sept ou huit minutes encore, à ce moment-là ce serait une

 16   répartition égale. Mais si M. Stanisic veut avoir une pause, dans ce cas

 17   nous pouvons le faire.

 18   M. JORDASH : [interprétation] Je crois que nous pouvons poursuivre.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons poursuivre pendant sept à

 20   huit minutes supplémentaires.

 21   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, Mesdames les

 22   Juges, nous sommes à huis clos partiel.

 23   [Audience à huis clos partiel]

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 18   [Audience publique]

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

 20   M. JORDASH : [interprétation] Alors, faisons fi du sens commun pendant un

 21   moment et à supposer que Babic ne savait absolument pas et qu'il ait rendu

 22   visite à Milosevic en mars 1991 sans comprendre que Stanisic, pour le

 23   compte de Milosevic, avait coordonné des approvisionnements importants

 24   d'armes et des liquides pendant sept mois.

 25   Est-ce que nous pouvons voir la planche numéro 37. Pardonnez-moi. Je crois

 26   que non, il ne faut pas la diffuser -- si, nous pouvons l'afficher en

 27   public.

 28   Comme vous le constaterez, Mesdames, Monsieur les Juges, en regardant la

 


Page 20283

  1   planche numéro 37, après la réunion qui s'est tenue en mars 1991, Babic

  2   s'est entretenu avec l'assistant de Martic au sein de la police, Zelenbaba.

  3   Et Zelenbaba s'est-il tourné vers Martic pour dire : Cher Président, je

  4   vais vous raconter une histoire à propos du frère de Martic, M. Stanisic,

  5   auquel nous faisions confiance à 100 %; ne savez-vous pas, il livre des

  6   armes depuis plusieurs mois ? Vous ne le saviez pas, n'est-ce pas ? Non.

  7   Et pourquoi Milosevic, Bogdanovic ou Stanisic n'auraient-ils pas dit à

  8   Babic lors de la réunion de mars 1991 d'arrêter de faire perdre son temps à

  9   tout le monde ? Puisque l'organisation avait fonctionné parfaitement depuis

 10   sept mois. Non seulement pour ce qui était des barricades, mais également

 11   pour le financement des sentinelles de nuit.

 12   Et au lieu de cela, Zelenbaba dit à Babic que c'est Kertez qui a enfoncé ou

 13   ouvert en grand les portes de la Défense territoriale. Rien au sujet de

 14   camions du MUP. Rien au sujet de Stanisic. Et rien non plus au sujet de ce

 15   soi-disant amour fraternel.

 16   Pourrions-nous maintenant passer à la planche numéro 38, s'il vous plaît,

 17   car il y a une troisième version. Ceci est confidentiel. Selon la théorie

 18   de l'Accusation, la pièce P975 est un extrait d'un discours fait par

 19   Milosevic lorsqu'il s'est adressé aux membres des conseils locaux le 16

 20   mars 1991. Ceci est censé être la réitération d'un ordre émis le jour

 21   précédent et ayant conduit à la création de Golubic.

 22   La planche numéro 38 contient le passage pertinent. Et pourtant, selon le

 23   Témoin JF-039, sur lequel repose la théorie à l'encontre de Stanisic au

 24   sujet de la coordination supposée avec Martic, Milosevic était occupé à

 25   créer de nouvelles forces de police en Krajina dès le mois de septembre

 26   1990. Ou, au moins à partir de janvier 1991. Selon JF-039, en janvier 1991,

 27   Stanisic avait effectivement agi sur ordre de Milosevic afin que le camp de

 28   Golubic ouvre très rapidement. Et pourtant, Milosevic lui-même semble ne


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  1   pas avoir été au courant de son propre rôle de coordination en matière

  2   d'approvisionnements et de sa propre décision de créer Golubic deux mois

  3   plus tôt. Cela n'a aucun sens et n'en aura jamais.

  4   JF-039 a construit cet édifice sur du sable, mais ce sont Babic et

  5   Milosevic qui l'ont fait s'écrouler.

  6   Alors la planche numéro 39 est confidentielle et ne doit pas être diffusée.

  7   La déposition de JF-039 est absurde, et on peut le démontrer. JF-039 s'est

  8   parjuré. La planche numéro 39 présente des preuves de la façon dont il n'a

  9   pas réussi à rester cohérent sur les questions les plus fondamentales,

 10   témoignant ainsi de son parjure. Est-ce que l'armement et la coordination

 11   par Stanisic au nom de Milosevic se sont arrêtés en juin, ou bien ont-ils

 12   continué pendant cinq années entières ?

 13   Alors, voyons cela d'un peu plus près. Je ne sais pas si c'est un bon

 14   moment, peut-être, pour faire une pause.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, nous en sommes à 75 minutes.

 16   Faisons maintenant la pause. Vous aurez un autre volet d'audience de 75

 17   minutes, et ensuite la Défense de M. Simatovic pourra prendre la parole.

 18   Nous allons donc faire une pause de 30 minutes, et nous reprendrons à 16

 19   heures 10.

 20   --- L'audience est suspendue à 15 heures 39.

 21   --- L'audience est reprise à 16 heures 12.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Jordash, veuillez poursuivre.

 23   M. JORDASH : [interprétation] Merci.

 24   Examinons plus avant ce que JF-039 dit des rapports très proches entre

 25   Stanisic et Martic et du rôle de Stanisic dans la chaîne de communication

 26   avec Milosevic. Apparemment, ces rapports étaient très affectueux,

 27   suffisamment affectueux pour que Martic se réfère souvent à Stanisic comme

 28   à "son frère" et en disant qu'il lui faisait confiance à 100 %. Et


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  1   pourtant, selon JF-039, comme cela est abordé notamment dans les

  2   paragraphes 302 à 320 du mémoire en clôture de Stanisic, en juin 1991,

  3   Martic a chassé Simatovic de Knin et a pris le contrôle intégral de sa

  4   police et de la Défense territoriale. Selon JF-039, les livraisons

  5   d'armement de Stanisic se sont arrêtées en mai ou juin 1991, selon l'une

  6   des versions de sa déposition. Ainsi que nous l'avons abordé dans le

  7   paragraphe numéro 78 de notre mémoire en clôture, au début du mois de mars

  8   1992, Martic a ordonné l'arrestation de Rajic, Simatovic, Starcevic et

  9   Orlovic parce que "ces hommes travaillaient tous directement pour Simatovic

 10   et étaient des membres de la DB de Serbie."

 11   JF-039 a affirmé en page numéro 7 282 du compte rendu d'audience que

 12   Martic avait essayé d'arrêter ces hommes parce qu'il considérait qu'Orlovic

 13   faisait passer davantage d'informations à destination de Stanisic qu'à

 14   destination de lui-même. JF-031 a corroboré dans une certaine mesure ce

 15   récit en relevant que le grief principal de Martic consistait à dire qu'il

 16   ne recevait jamais d'informations justes. Et les Juges de la Chambre

 17   retrouveront ceci au paragraphe numéro 79 de notre mémoire en clôture.

 18   Draca, en page numéro 16 778, a confirmé que Martic avait un conflit

 19   durable avec Stanisic et la DB de Serbie. Ce n'est qu'en janvier 1993 que

 20   des contacts très limités ont été rétablis entre la DB de la RSK et la DB

 21   de Serbie.

 22   Alors, pourrions-nous maintenant passer à la planche numéro 40 pour mettre

 23   le point final de cette chronologie. Comme nous l'avons indiqué au

 24   paragraphe numéro 1 118 de notre mémoire en clôture, le 4 octobre 1994,

 25   Martic a accusé Stanisic d'utiliser Kostic et Kojic dans le but de miner sa

 26   propre autorité, ce qui comprenait le rapt de son ministre de l'Intérieur,

 27   Ilija Prijic, au mois d'août 1994 et la détention de Martic lui-même au

 28   passage de la frontière.


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  1   La planche numéro 39 [comme interprété] présente un extrait d'un

  2   appel téléphonique passé par Martic à Milosevic. Comme nous pouvons le

  3   voir, Martic, en 1994, refusait de rencontrer Stanisic, en affirmant que :

  4   "Stanisic me met des bâtons dans les roues à chaque instant et il

  5   crée des problèmes. Ceci est vraiment en dessous de tout."

  6   Alors, comme nous pouvons le voir sur la base de cette chronologie, à

  7   partir de juin 1991, selon JF-039 lui-même, Martic a essayé de s'affranchir

  8   de l'influence alléguée de la DB de Serbie en Krajina. Et pourtant, malgré

  9   ces éléments de preuve clairs indiquant l'attitude invariablement

 10   paranoïaque qui était celle de Martic, considérant que Stanisic et la DB de

 11   Serbie minaient son autorité, les Juges de la Chambre seraient censés

 12   conclure que Martic considérait Stanisic comme son propre frère et qu'il

 13   lui faisait confiance à 100 %.

 14   Il ne s'agit pas de dire que M. Stanisic n'aurait jamais été en

 15   contact avec Martic. Ceci serait une affirmation ridicule et aussi

 16   irréaliste que celle consistant à dire que tout contact ou toute assistance

 17   portée à la RSK devait nécessairement s'inscrire dans la poursuite

 18   d'activités criminelles. Il aurait été irresponsable de refuser toute

 19   relation avec lui, avec Martic, compte tenu des conséquences qu'avait la

 20   direction très maladroite de Martic pour la sécurité de la Serbie.

 21   Au paragraphe numéro 669 du mémoire en clôture de l'Accusation, cette

 22   dernière affirme que Milosevic, selon ses propres termes, aurait confirmé

 23   le rôle de Stanisic en tant que liaison entre lui-même et Martic.

 24   L'Accusation affirme que :

 25   "Dans une conversation interceptée de septembre 1991 portant sur un

 26   protocole de cessez-le-feu en SAO de Krajina, Milosevic a dit à Karadzic :

 27   'Alors, j'ai dit à Jovica, puisqu'il était en contact avec Milan, de dire

 28   que Martic devrait signer ce protocole technique.'"


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  1   Malheureusement, l'Accusation refuse d'aider la Chambre à distinguer

  2   les conduites visant à poursuivre des activités criminelles des contacts

  3   avec la direction de la RSK visant à encourager la paix. Se voir charger

  4   par Milosevic de faire signer par Martic un accord de paix sous l'égide de

  5   l'Union européenne est une chose, coordonner les approvisionnements aux

  6   fins de la commission de crimes en est une toute autre.

  7   Ainsi que nous le mettrons en avant dans le reste de ces plaidoiries,

  8   le rôle de Stanisic dans de telles initiatives de paix est bien documenté.

  9   Et dans cette mesure, on peut effectivement considérer que c'est par lui

 10   que passait la communication. Les contacts qu'il a eus avec Martic afin de

 11   l'exhorter de signer un accord ou un protocole d'accord constituant une

 12   étape vers la paix n'ont été que la première de nombreuses tentatives pour

 13   promouvoir la paix, de la Conférence de Paix de Wynaendts, au plan Vance,

 14   aux accords de Dayton et au-delà. Ces éléments de preuve sont irréfutables

 15   et se démarquent très nettement de l'essentiel de la théorie de

 16   l'Accusation.

 17   Pourrions-nous maintenant passer à la planche numéro 41, s'il vous plaît.

 18   L'Accusation commet la même erreur au sujet du rôle de Stanisic dans

 19   l'assistance apportée à la mise en œuvre du plan Vance. Aux paragraphes

 20   numéro 82 à 84 du mémoire en clôture de l'Accusation, cette dernière

 21   affirme que la pièce P686, conversation interceptée entre Karadzic et

 22   Stanisic datée du 7 janvier 1992, apporterait la preuve du :

 23   "Rôle plein et entier de Stanisic dans la conception de ce qui devait

 24   devenir le gouvernement de la RSK, dans les nominations au sein du

 25   gouvernement, dans la planification des activités militaires et de la

 26   police en SBSO, et dans la consolidation des territoires serbes hors de

 27   Serbie."

 28   Cette planche contient la partie pertinente de cette conversation.


Page 20288

  1   Malgré la tentative faite par l'Accusation d'extrapoler sur la base de

  2   cette conversation, un examen séquentiel de la conversation interceptée en

  3   question montre que Karadzic et Stanisic, en réalité, s'entretenaient des

  4   difficultés de la mise en œuvre du plan Vance, et non pas, aussi loin que

  5   l'on puisse étirer le sens des propos tenus, et non pas, donc, du

  6   déplacement forcé des Croates de Croatie.

  7   Le fait même que l'Accusation se repose sur cette conversation est une

  8   illustration patente de la fragilité de sa théorie. Cette conversation

  9   ainsi que d'autres que nous verrons dans quelques instants sont une

 10   réfutation sans équivoque du rôle que Stanisic est censé avoir joué. Et

 11   ceci montre de façon très claire le manque chez lui de l'intention requise.

 12   Je voudrais que nous passions à la planche suivante. Mais avant de le

 13   faire, dans cette planche les Juges verront qu'à la date du 7 janvier 1992,

 14   Stanisic exprime sa frustration quant au manque d'activité politique en

 15   SRK. Et sur ce point, nous pouvons être d'accord avec l'Accusation, comme

 16   il le dit :

 17   "Tous ces gens ne sont que des bons à rien complètement incompétents,

 18   aussi incompétents qu'immatures … j'ai eu de grandes difficultés à leur

 19   expliquer qu'ils devaient être patients, qu'ils devaient être sérieux et se

 20   mettre au travail."

 21   Stanisic relève qu'il a rencontré 44 commandants afin d'expliquer la

 22   situation et relève également la frustration et l'insatisfaction qui

 23   existent auprès d'eux.

 24   Dans la même conversation, en fait, nous pouvons voir que Stanisic, en

 25   réalité, s'arrache les cheveux de frustration. Il se réfère à la direction

 26   de la RSK comme à des Chetniks furieux :

 27   "Il y a de nombreux radicaux là-bas qui sont en colère contre le

 28   monde entier. Ils sont assis sur ces zones frontalières depuis un an et ils


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  1   se battent. Vous comprenez."

  2   Stanisic dit qu'il va se rendre en visite dans le secteur, qu'il va essayer

  3   de mettre au point un mode d'assistance.

  4   Alors, l'idée suivant laquelle cette conversation interceptée constitue une

  5   preuve des activités de Stanisic pendant la guerre ou une preuve de son

  6   rôle pour ce qui est de mettre au point la notion de gouvernement de la RSK

  7   est une proposition tout à fait fantasque. En fait, il faisait de son mieux

  8   pour essayer de trouver un concept, une notion, qui pourrait diminuer le

  9   profond mécontentement de ces commandants de guerre, qui, plutôt que de

 10   mettre le plan de Vance ou d'essayer de se rapprocher de la paix, avaient

 11   d'autres idées. D'où la frustration de Stanisic. Est-ce que cela vous donne

 12   l'impression d'un homme qui a joué un rôle critique pour coordonner leurs

 13   activités et leurs crimes, ou est-ce que vous avez l'impression qu'il

 14   s'agit là d'un homme qui a admiré leur travail, ou qui avait tout intérêt à

 15   ces activités de guerre, ou qui a partagé une intention criminelle ?

 16   Je voudrais maintenant, en fait, que nous nous intéressions à la planche

 17   43.

 18   Car l'approche qui n'est pas raisonnable de la part de l'Accusation

 19   nous présente Stanisic dans son rôle d'intermédiaire de l'entreprise

 20   criminelle commune, et cela est encore plus apparent eu égard à Babic. J'en

 21   veux pour preuve les paragraphes 20, 669 à 671 du mémoire en clôture de

 22   l'Accusation.La planche numéro 43 résume le soutien qui est avancé pour ce

 23   rôle. En fait, il s'agit donc d'un résumé du rôle allégué de Stanisic en

 24   tant que coordinateur et de sa contribution pour ce qui est de l'entreprise

 25   criminelle commune. Il s'agit d'une illustration particulièrement frappante

 26   de la ruse dangereuse qui se trouve véritablement au cœur de la thèse de

 27   l'Accusation. Comme vous le verrez si vous examinez et étudiez les notes en

 28   bas de page 2 324 à 2 326 du mémoire en clôture de l'Accusation intitulé


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  1   "Filière de communication," il n'y a pas un seul élément de preuve qui

  2   suggère que Stanisic ait facilité les contacts de Milan Babic avec

  3   Milosevic ou partagé ces points de vue extrémistes.

  4   Bien au contraire, on ne peut pas douter que Stanisic le considérait

  5   comme quelqu'un, même s'il n'est pas glorieux de parler des morts, mais le

  6   considérait comme un bon à rien tout à fait immature, incompétent et

  7   radical parmi les dirigeants de la RSK qui, en fait, mettait des bâtons

  8   dans les roues du plan de Vance.

  9   L'Accusation a fourni un exemple de ce rôle de coordinateur joué,

 10   d'après ce qu'ils avancent, par Stanisic. La planche numéro 44 nous indique

 11   que le seul effort qui ait été identifié par l'Accusation a trait au plan

 12   de Vance.

 13    Les planches 44, 45, 46 et 47 nous donnent des extraits des pièces versées

 14   au dossier par l'Accusation suivantes : P683, P686, P687 et P690, autant de

 15   conversations entre Karadzic et Stanisic en janvier 1992. Mais l'Accusation

 16   n'a pas voulu faire la différence entre un comportement pour concourir à la

 17   réalisation d'un crime par rapport à un autre comportement. Et ils avancent

 18   que toutes ces conversations étayent leur thèse. Au contraire, nous vous

 19   exhortons, Mesdames, Monsieur les Juges, à examiner ces conversations

 20   interceptées car elles vous permettront de mieux comprendre l'état d'esprit

 21   de M. Stanisic et ses tentatives de mettre en œuvre le plan de Vance, le

 22   seul plan qui offrait une perspective de retour aux Croates.

 23   Comme le montre la planche numéro 44, le 5 janvier 1992, Stanisic

 24   explique comment il a essayé en vain de calmer le jeu de Milan Babic.

 25   Karadzic, d'ailleurs, note qu'il pouvait gâcher beaucoup de choses, et il

 26   entendait manifestement le plan de Vance.

 27   Planche numéro 45 maintenant, et là nous pouvons voir Stanisic et Karadzic

 28   qui, le 7 janvier 1992, continuent cette conversation. Karadzic, avec son


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  1   parler haut en couleur qui lui est propre, suggère que l'armée devrait

  2   attraper Babic par les couilles pour le forcer à signer le plan de Vance.

  3   Et vous remarquerez que c'est Karadzic, et non pas Stanisic, qui fait

  4   office d'intermédiaire pour la paix entre Babic et Martic. Stanisic

  5   remarque que "l'attitude extrémiste de Milan Babic vis-à-vis de tout le

  6   monde pourrait très, très mal tourner."

  7   Planche numéro 46, je vous prie.

  8   Mesdames, Monsieur les Juges, si vous prenez les planches 46, 47, 48

  9   et 49, vous constaterez qu'il s'agit d'extraits de conversations du 12 et

 10   22 janvier 1992. La planche numéro 46 nous montre que Karadzic informe

 11   Stanisic qu'il a prévu avec Babic d'aller voir Milosevic. Il est

 12   remarquable de voir que c'est lui qui informe Stanisic de ce fait. Si

 13   Stanisic était la personne qui facilitait les contacts entre Milan Babic et

 14   Slobodan Milosevic, de toute évidence c'est lui qui aurait pris ces

 15   mesures, et non pas Karadzic. Mais de toute façon, les deux hommes sont

 16   d'accord pour dire qu'une solution positive est en fait très proche d'être

 17   trouvée. Stanisic exprime sa crainte et dit : Il va y avoir une guerre

 18   totale.

 19   Planche numéro 47. Les deux hommes sont d'accord pour dire que leur

 20   conversation n'a pas grande valeur. Encore faut-il qu'ils puissent en

 21   parler à ceux qui ne sont pas d'accord avec eux. Donc ils prévoient de se

 22   réunir à nouveau et d'agir. Stanisic remarque qu'il ne veut pas que l'on

 23   comprenne qu'il fait partie de cette initiative.

 24   La planche numéro 48 vous présente des extraits de la pièce P690, qui

 25   correspond à une conversation des deux hommes le 22 janvier 1992. Karadzic

 26   et Stanisic parlent de l'avenir et se demandent comment Karadzic a négocié

 27   ou peut négocier avec Babic pour trouver une solution de compromis, à

 28   savoir permettre à la Krajina d'exprimer quelques réserves par rapport au


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  1   plan de Vance. Stanisic indique son soulagement.

  2   La planche numéro 49 est la seule planche qui vous présente la seule

  3   remarque, la seule observation de toute cette affaire qui a duré pendant

  4   plus de cinq ans et qui nous fournit un élément de preuve aussi infime

  5   soit-il qui étaye la suggestion suivant laquelle Stanisic aurait pu nourrir

  6   des sentiments négatifs vis-à-vis de la population croate. Mais il est

  7   intéressant d'examiner la conversation dans le contexte de ce sentiment de

  8   frustration que les deux hommes avaient montré vis-à-vis de Milan Babic et

  9   des dirigeants de la RSK.

 10   Karadzic indique il n'est pas souhaitable que la guerre se poursuive

 11   en RSK, en indiquant :

 12   "Personne ne la gagnera. Nous allons tous en sortir ruinés et

 13   appauvris."

 14   Il remarque que si Tudjman et les Serbes de Croatie ne montrent pas ou ne

 15   font pas preuve d'une certaine souplesse et de bonne volonté, ils vont en

 16   prendre pour 30 années de torture. Stanisic est ne marque pas son accord,

 17   qu'ils doivent tous être -- lorsqu'il est dit qu'ils doivent tous être

 18   poussés vers Belgrade. Il remarque avec une certaine frustration patente :

 19   "Nous n'avons plus rien à faire alors, il ne nous reste plus rien à

 20   faire. Nous devons les exterminer complètement, alors nous verrons bien où

 21   cela va nous mener. C'est ce qu'ils veulent, ils veulent une guerre

 22   générale, bon, autant la faire avec des honnêtes hommes alors."

 23   Cette proposition, à savoir que cette seule remarque peut constituer

 24   un élément de preuve d'une intention criminelle de M. Stanisic est une

 25   déformation de la remarque de M. Stanisic et du contexte de la

 26   conversation. Il n'y a pas une seule personne dans cette salle qui n'ait

 27   jamais prononcé avec un sentiment de frustration une remarque incendiaire

 28   ou une observation particulièrement agressive, regretter immédiatement. M.


Page 20293

  1   Stanisic était visiblement très, très, très irrité et frustré vu

  2   l'incompétence et le comportement négligeant de MM. Babic et Tudjman.

  3   L'Accusation n'est capable d'offrir que cette seule remarque pour toute la

  4   période de l'acte d'accusation, et c'est l'illustration s'il en fut du fait

  5   que M. Stanisic était un homme très flegmatique, un homme qui faisait

  6   preuve de tolérance raciale en plein milieu de ce conflit haineux.

  7   Il savait qu'il n'y avait pas de choix : il fallait signer l'accord

  8   de paix comme des honnêtes hommes plutôt que de poursuivre la guerre. Une

  9   tâche lui avait été confiée, à savoir persuader les dirigeants de la RSK de

 10   signer l'accord de paix. Ce qui le transformait en quelque sorte en un

 11   outil de communication, certes.

 12   Nous allons maintenant examiner ce qu'avance l'Accusation par rapport

 13   au rôle de M. Stanisic par rapport aux activités de M. Hadzic. L'Accusation

 14   avance que Stanisic a coordonné en SBSO les unités spéciales, notamment les

 15   Bérets rouges, les hommes d'Arkan, les Skorpions, et cetera, de par sa

 16   relation avec Hadzic.

 17   La planche numéro 50 vous présente les principales allégations

 18   avancées par l'Accusation qui sont dans l'ensemble non étayées et au mieux

 19   étayées par des éléments de preuve par ouï-dire manifestement non fiables.

 20   Je vous ai déjà indiqué ce qu'il en était des éléments 5 et 6 ou des

 21   chapitres 5 et 6. Alors, je ne vais pas revenir sur cette tentative

 22   évidente de renverser la charge de la preuve et la norme de la preuve.

 23   Mais je vous inviterais plutôt à examiner la planche numéro 51, qui

 24   nous donne un élément de preuve, le seul élément de preuve sur lequel

 25   l'Accusation s'est appuyé pour étayer l'allégation suivant laquelle Hadzic

 26   considérait Stanisic comme le lien entre Milosevic et Badza en déclarant

 27   que Hadzic lui a dit ceci, mais qu'il ne pouvait pas en dire davantage. Le

 28   témoin Bogunovic a concédé que ces éléments de preuve avaient une valeur


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  1   limitée, point de vue tout à fait raisonnable à prendre vis-à-vis de M.

  2   Hadzic puisqu'il s'agit essentiellement de preuve par ouï-dire.

  3    Qui plus est, il n'y a pas d'élément de preuve fiable indiquant que

  4   Badza n'avait pas le droit d'avoir accès à Milosevic. Comme nous l'avons

  5   indiqué dans notre mémoire en clôture, l'ascension fulgurante de Badza au

  6   poste de ministre de l'Intérieur adjoint montre qu'il était très, très

  7   proche d'un poids lourd du SPS. Sokolovic, qui à l'époque était ministre de

  8   l'Intérieur, est la preuve convaincante de ces liens avec Milosevic.

  9   Comme nous montre la planche numéro 52, l'Accusation allègue

 10   également que Hadzic mettait en œuvre les recommandations et les ordres

 11   émanant de Belgrade, après les réunions qu'il avait avec Milosevic et

 12   Stanisic. Malgré de nombreuses notes de bas de page très, très longues, la

 13   plupart des éléments de preuve sur lesquels l'Accusation s'est appuyée

 14   visent M. Milosevic, et non pas M. Stanisic. Il y a des éléments de preuve

 15   qui indiquent que M. Stanisic était effectivement présent lors de ces

 16   réunions, et elles se limitent à deux témoins. M. Babic débordant

 17   d'activités, exubérant, et M. Bogunovic. Et dans le cas de M. Babic, il ne

 18   faut pas oublier qu'il ne manque jamais l'occasion d'inventer ou

 19   d'exagérer. Comme vous le montre la planche numéro 52, ces deux

 20   affirmations sont tout à fait dénuées des détails qui permettraient de

 21   transformer une allégation en une affirmation concrète, encore moins qui

 22   permettrait de vous convaincre qu'il s'agit de la vérité au-delà de tout

 23   doute raisonnable. Il est impossible pour un Juge raisonnable du fait

 24   d'être convaincu de la présence de Stanisic à ces réunions. Même s'il était

 25   présent lors de ces réunions, l'Accusation n'a présenté aucun élément de

 26   preuve permettant de convaincre cette Chambre qu'il conseillait Hadzic ou

 27   qu'il lui donnait des instructions ou des consignes. Vous ne trouverez pas

 28   un seul conseil ou une seule recommandation relayée par Stanisic.


Page 20295

  1   Pour ce qui est des éléments de preuve relatifs à Milan Babic, je

  2   pense qu'il faudrait appliquer la charge de la preuve et la norme de la

  3   preuve et se rappeler que les éléments de preuve de Milan Babic doivent

  4   absolument être corroborés. Si tel n'est pas le cas, ils doivent être

  5   rejetés.

  6   La planche numéro 53, si elle peut être affichée, contient certains

  7   extraits de la déposition de Bogunovic à propos des réunions qu'il a eues

  8   avec Stanisic. Bogunovic était le ministre de l'Intérieur de la SBSO. Si

  9   Stanisic devait relayer les instructions de Milosevic, il est logique de

 10   supposer que cela ne se limitait pas juste à Hadzic. Et d'ailleurs,

 11   l'Accusation a voulu vous faire croire que cela était relayé à l'ensemble

 12   du gouvernement de la SBSO, depuis Kojic jusqu'à Mrgud, en passant par

 13   Badza. Et pourtant, la seule fois où Bogunovic rencontre Stanisic, comme

 14   nous l'indiquons dans notre mémoire en clôture dans le chapitre relatif à

 15   la SBSO, Stanisic ne parle pas. Il se contente d'être assis et de prendre

 16   des notes.

 17   Comme nous l'avons indiqué au paragraphe 432 de notre mémoire en

 18   clôture, c'est exactement ce que montrent les éléments de preuve. C'est ce

 19   qu'il a fait lorsqu'il a rencontré le ministre de la Défense lors de ces

 20   cinq réunions qu'il a eues avec lui entre 1991 et 1995. Ces réunions

 21   portent sur une mise à jour des événements politiques, les réfugiés, et une

 22   fois de plus la mise en œuvre du plan de Vance. Alors être silencieux et

 23   prendre des notes est quand même une attitude assez étrange de la part d'un

 24   homme qui est censé relayer des instructions de Slobodan Milosevic au

 25   gouvernement de la SBSO. Relayer des informations à Milosevic est une

 26   chose, relayer des ordres et des consignes, instructions relève d'un autre

 27   domaine.

 28   Planche numéro 53 qui résume certains des éléments de la déposition


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  1   de M. Bogunovic. Nous avons également la planche numéro 54. Car

  2   l'Accusation souhaiterait que les Juges de la Chambre acceptent que

  3   Stanisic était le lien entre Milosevic, Arkan et Badza, lien par lequel

  4   Milosevic exerçait une influence sur Hadzic sur le terrain. La planche 53

  5   vous présente les éléments de preuve sur lesquels l'Accusation s'est

  6   reposée. L'Accusation devrait vraiment réfléchir à deux fois avant

  7   d'accuser un homme d'avoir des liens avec Arkan, parce que cela doit se

  8   fonder sur un peu plus que la supposition avancée par un témoin.

  9   Et puis, en dernier lieu, l'Accusation allègue qu'à la mi-septembre

 10   1991, Stanisic est arrivé à Dalj et a exprimé sa rancœur ou son courroux du

 11   fait que Vukovar n'était pas encore tombée aux mains des Serbes. Il réclame

 12   une réunion avec Hadzic, et ce, pour essayer d'apporter sa contribution en

 13   ce qui concerne Vukovar. Lors de la réunion, Stanisic a planifié les

 14   opérations. Alors, analysons cela pendant un moment. Il ne s'agit plus de

 15   travailler en coulisses, mais il s'agit, en public, de vendre son boniment.

 16   Bogunovic, d'après le témoin à la page T4757, était censé être présent et

 17   il devait crier. JF-029, d'après JF-032, page du compte rendu d'audience

 18   4 759, était censé être présent lors de cette réunion de planification.

 19   Bogunovic a confirmé, à la page du compte rendu d'audience 6 044, qu'il

 20   avait jamais entendu parler d'un tel événement. Ni Bogunovic, ni le

 21   ministère de l'Intérieur, ni JF-029, n'ont corroboré ce récit, cette fable

 22   inventée de toutes pièces correspondant à des ouï-dire. Ce qui est encore

 23   plus important, il n'y a pas un seul élément de preuve qui permettrait ou

 24   qui laisserait entendre que Stanisic a participé à la planification des

 25   opérations de Vukovar. On aurait pu imaginer qu'au moins un initié lors de

 26   ce procès ou quelqu'un d'autre aurait entendu parler d'un tel rôle.

 27   L'Accusation souhaite vous convaincre qu'un officier du contre-

 28   renseignement professionnel et Hadzic, un magasinier, s'est assis autour de


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  1   la table et a planifié la plus grande opération militaire de l'époque.

  2   Curieusement, personne à l'exception de JF-032, que ce soient les

  3   dirigeants en SBSO ou les officiers de la JNA, ne semble avoir remarqué une

  4   contribution aussi importante à l'un des plus grands crimes de guerre lors

  5   de cette terrible guerre. Bien évidemment, il s'agit d'un mensonge.

  6   Est-ce que nous pouvons maintenant passer à la planche 55, je vous prie.

  7   Nous allons maintenant parler de la prémisse d'origine de

  8   l'Accusation à propos de la Bosnie. A l'instar des faits incriminés en

  9   Croatie, leur thèse repose sur le fait que Stanisic était une voie de

 10   communication, un facilitateur, comme ils le disent aux paragraphes 675 et

 11   676, servant de portier, de liaison entre Milosevic et Karadzic, qui

 12   reflète le rôle de Stanisic vis-à-vis de Martic, Babic et Hadzic.

 13   Cette prémisse constitue un élément essentiel de la thèse de

 14   l'Accusation. On ne peut pas raisonnablement suggérer que Stanisic avait

 15   une vraie relation avec Mladic, comme cela est manifeste dans les carnets

 16   de Mladic, étant donné que Stanisic ne lui a été présenté qu'en juillet

 17   1993. Mladic ne disposait pas du numéro de téléphone de Stanisic avant

 18   1995. Milanovic a rencontré Stanisic au début de l'année 1993 et pensait

 19   qu'il était garçon de café. Stanisic n'a pas pu coordonner tout ceci par

 20   les voies militaires. Cela a dû se faire par les voies politiques. Et cette

 21   relation politique lui aurait permis, semble-t-il, de parachuter les hommes

 22   d'Arkan et les Skorpions à volonté dans la zone de responsabilité de la

 23   VRS. Cela ne fait pas l'ombre d'un doute que Mladic affirmera que cela

 24   n'avait rien à voir avec lui.

 25   Comme nous pouvons constater au niveau de la planche 55, l'Accusation

 26   avance différentes allégations concernant les rapports entre Stanisic et

 27   Karadzic. Le trait le plus surprenant de ces affirmations sont les éléments

 28   de preuve sur lesquels on se repose pour établir le rôle de Stanisic


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  1   pendant la période couverte par l'acte d'accusation fondé sur des preuves

  2   émanant du mois de juillet 1991 au mois de janvier 1992, ainsi qu'un

  3   journal qui indique que le 6 septembre 1991, Stanisic est à une réunion

  4   avec Bogdanovic et qu'il agissait manifestement comme interlocuteur ou

  5   qu'il servait d'interlocuteur à Jovic en fournissant de manière restreinte

  6   les approvisionnements aux villages serbes vulnérables en Bosnie.

  7   Même si cette interprétation de l'Accusation des conversations

  8   téléphoniques interceptées indique que Stanisic était à l'époque

  9   coordonnateur des approvisionnements de Milosevic, approvisionnements

 10   d'armes ou qu'il s'agissait de participer à un projet politique, la

 11   déduction que l'Accusation impose aux Juges de la Chambre est tout à fait

 12   étonnante. Malgré une campagne militaire, malgré la création de structures

 13   nouvelles politiques, malgré la transformation de la JNA en VRS, il y a

 14   toute une myriade d'autres événements criminels et non criminels présentés

 15   par l'Accusation indiquant que la Chambre devrait être convaincue au-delà

 16   de tout doute raisonnable fondé sur ces seuls éléments de preuve que

 17   Stanisic a maintenu cette relation pendant toute la période couverte par

 18   l'acte d'accusation, une déduction effectivement ambitieuse, et non pas

 19   parce que cela souligne qu'il existe des éléments de preuve indirects

 20   concernant cette relation, des dépositions orales, des preuves

 21   documentaires telles que les procès verbaux des réunions de l'assemblée, le

 22   journal de Karadzic qui se trouvait sur la liste 65 ter, ceux-ci n'ont pas

 23   été versés au dossier, les carnets de Mladic, les rapports du

 24   renseignement, voire même différents éléments de ouï-dire sont une

 25   caractéristique malheureuse de cette thèse de l'Accusation, parce qu'il

 26   s'agit d'une poignée de conversations qui ont eu lieu avant la guerre. Il

 27   est important de placer tout ceci dans son contexte.

 28   Les planches 56, 57 contiennent toute une série de faits jugés et


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  1   indiquent dans quel contexte les Bosno-Serbes sont partis à la guerre et

  2   donnent un ordre chronologique. Même si Milosevic lui ait donné carte

  3   blanche pour lui permettre d'approvisionner les villages bosno-serbes en

  4   armes à la fin de l'année 1991, de faciliter les événements politiques

  5   jusqu'en janvier 1992, il est difficile de voir comment ceci aurait pu être

  6   lié à un quelconque crime. Dans les mots de l'Accusation, le troisième fait

  7   jugé, numéro 97, ce n'était qu'en janvier 1992 que le SDS a commencé à

  8   envisager la possibilité d'un conflit militaire. Il s'agissait d'une

  9   probabilité et non plus d'une simple éventualité. Les appels ont été lancés

 10   de plus en plus concernant la prise de contrôle du territoire. Ceux-ci

 11   étaient "forts et clairs et n'ont commencé qu'en janvier 1992."

 12   Aux paragraphes 88 à 117, l'Accusation évoque ces écoutes

 13   téléphoniques sous le titre "Mise en œuvre de l'entreprise criminelle

 14   commune en Bosnie". Cela comprend -- ou ils comprennent différentes

 15   accusations concernant les caractères belliqueux ou actes belliqueux de

 16   Karadzic et Stanisic indiquant que ces hommes ne s'intéressaient pas

 17   véritablement à la paix. Nous faisons valoir que ces allégations ne peuvent

 18   pas être prises au pied de la lettre et qu'elles ne sont pas exactes et

 19   qu'elles n'ont rien à voir avec ce procès. Au contraire, les allégations

 20   faites par l'Accusation et le titre provocateur "Mise en œuvre de

 21   l'entreprise criminelle commune en Bosnie", sont destinés à convaincre les

 22   Juges de la Chambre qu'il existait un but criminel commun qui avait démarré

 23   en Bosnie en même temps qu'en Croatie, et ce, pour une seule raison. La

 24   meilleure preuve contre M. Stanisic se termine avant qu'il n'y ait une

 25   quelconque action concertée aux fins de commettre des crimes. Ceux-ci

 26   avaient commencé en Bosnie au printemps de l'année 1992.

 27   L'Accusation tente d'estomper la différence qui existe entre les

 28   actions menées dans le but de favoriser la guerre et les actions visant à


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  1   favoriser des crimes afin d'impliquer le premier accusé. En outre, les

  2   éléments de preuve ne permettent pas de prouver que Stanisic ne

  3   s'intéressait pas à la paix, encore moins qu'il cherchait à commettre des

  4   crimes. Une interprétation raisonnable des écoutes téléphoniques pertinente

  5   montre précisément l'inverse. Tout d'abord, la prémisse même sur laquelle

  6   se fonde l'Accusation pour faire ces allégations est douteuse, pour le

  7   moins. Nous vous demandons, Monsieur le Juge, de croire que même si

  8   Stanisic a fait de son mieux pour neutraliser Babic, il s'est entretenu

  9   avec 44 commandants pour traiter de la question des Chetniks et du RSK et

 10   il était décidé à poursuivre la guerre en Bosnie. Pourquoi un homme aurait-

 11   il fustigé les dirigeants du RSK pour leur extrémisme ? Pourquoi aurait-il

 12   trahi ce même extrémisme ? Cela défie toute logique. Et à propos de

 13   logique, l'Accusation n'a pas seulement réinterprété les écoutes mais a

 14   fait du copier-coller à propos des personnes, des motivations pour prouver

 15   quelque chose qu'elle ne pouvait pas étayer. Mesdames, Monsieur les Juges,

 16   je vous demande de regarder les paragraphes 94 et 95 du mémoire en clôture

 17   de l'Accusation. L'Accusation fait encore un copier-coller des commentaires

 18   de Karadzic en août 1991 dans le sens où les Bosno-Serbes faisaient tout ce

 19   que pensait Brdjanin, et ensuite laisse entendre que les commentaires de

 20   Karadzic font froid dans le dos à la lumière des points de vue extrêmes qui

 21   étaient ceux de Brdjanin en 1992 lorsqu'il prône le transfert forcé; une

 22   jolie photographie au paragraphe 95 de Stanisic et Simatovic portant un

 23   uniforme militaire, incontestablement beaucoup plus tard que la date du

 24   mois d'août 1991, debout à côté de Karadzic complète merveilleusement bien

 25   cette affirmation inexacte et injuste.

 26   Au paragraphe 96, l'Accusation interprète le rôle de Stanisic comme une

 27   tentative pour empêcher la guerre et raconte une fable autour de ces

 28   événements-là pour suggérer l'inverse. L'Accusation fait valoir que la


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  1   participation de Stanisic avec Brdjanin montre que son autorité en Bosnie

  2   n'a démarré qu'au mois d'août 1991. Bien évidemment, même si cela a été

  3   vrai et même si cela n'a pas pu être vrai à tout moment lorsque les

  4   événements politiques et militaires ont évolué, les appels qui ont été

  5   lancés pour la prise du contrôle du territoire étaient devenus très clairs

  6   à ce moment-là. Il est tout à fait possible qu'il ait eu une influence au

  7   mois d'août 1991 et peu en 1992. En réalité, la charge de la preuve exige

  8   que cela soit le cas, à moins qu'on ait pu prouver le contraire. En outre,

  9   il est possible d'user de son influence pour faire le bien même si les

 10   crimes surgissent à l'horizon. Si on analyse les écoutes téléphoniques de

 11   manière détaillée, le rôle de Stanisic semble avoir été exactement cela.

 12   La planche numéro 58. Ceci montre quel rôle a joué Stanisic à l'époque, de

 13   même que les efforts qui ont été déployés en Croatie. Il a gardé la tête

 14   froide alors que les hommes autour de lui perdaient la tête. Il a regardé

 15   Brdjanin en tentant de le calmer, à l'empêcher de faire des choses stupides

 16   que les Bosno-Serbes voulaient faire en faisant échouer les négociations.

 17   Alija, ensuite, devait s'adresser aux Musulmans -- pourquoi il voulait

 18   faire la guerre contre les Serbes, comme l'a dit Karadzic. Il aurait dû

 19   l'expliquer.

 20   Nous faisons valoir qu'en 1991 Stanisic était considéré comme un homme qui

 21   aurait pu calmer les excès des uns et des autres, qu'il aurait pu empêcher

 22   la guerre et qu'il aurait pu favoriser la paix. Son rôle semble avoir été

 23   un rôle qu'il aurait joué en Bosnie, et en Croatie également.

 24   C'est un rôle qu'il a joué par la suite lors des accords de Dayton et

 25   toute une série d'autres activités qui ont favorisé la paix dans la région

 26   et qui ont permis à la paix d'être appliquée dans cette région. Alors,

 27   malgré leurs efforts pour interpréter le rôle joué par M. Stanisic ou pour

 28   dénigrer ses motifs, on retrouve toujours au cours de ces conversations


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  1   interceptées le fait que M. Stanisic a joué un rôle positif pour apporter

  2   sa contribution à la raison et à la paix. Ce qui est encore plus démontré

  3   dans une conversation entre MM. Karadzic et Milosevic le 8 octobre 1991. La

  4   planche 59 et 60 sont des extraits de cette conversation.

  5   Nous en revenons maintenant à la RSK. Milosevic remarque les dirigeant de

  6   la RSK ne vont même pas venir pour les négociations de paix, pour

  7   commencer. Il remarque qu'un seul homme, probablement Milan Babic, pense

  8   que tout le monde devrait s'agenouiller devant lui lorsqu'il arrive. Les

  9   deux hommes semblent être d'accord pour inviter Stanisic à une réunion pour

 10   essayer de trouver une solution. Une fois de plus, l'Accusation refuse de

 11   faire la part des choses entre des actes pour aboutir à la paix et des

 12   actes qui sont des contributions aux crimes. En dépit de ce que nous avons

 13   vu, et il s'agit d'une conversation à propos de la façon de promouvoir la

 14   paix. Au paragraphe 679 de leur mémoire en clôture, l'Accusation indique

 15   que cette conversation interceptée illustre parfaitement le rôle intégral

 16   joué par Stanisic dans les relations entre Karadzic et Milosevic.

 17   Comme nous l'indiquons dans notre mémoire en clôture, les services de

 18   la Sûreté d'Etat ne sont pas conçus pour la guerre, et M. Stanisic n'avait

 19   pas ces compétences. Il y avait beaucoup d'hommes qui pouvaient mener la

 20   guerre et très peu qui avaient cette finesse politique et la compétence

 21   diplomatique pour savoir raison garder et pour travailler, pour envisager

 22   une meilleure solution. Lorsque la guerre convenait à Milosevic, ou à

 23   Karadzic d'ailleurs, il faut savoir que des hommes tels que Perisic,

 24   Mladic, Arkan et Badza étaient requis. Et lorsqu'il s'agissait d'avoir une

 25   main sûre sur le gouvernail, c'était Stanisic, un homme formé dans le

 26   domaine du contre-renseignement, peut-être qu'il s'agit d'une formation

 27   parfaite pour l'art de la diplomatie, qui pouvait véritablement jouer un

 28   rôle. Et si nous pouvons véritablement prendre ces conversations


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  1   interceptées et extrapoler à partir de ces conversations pour nous lancer

  2   dans des affirmations assez pompeuses comme l'a fait l'Accusation, je pense

  3   qu'il est beaucoup plus raisonnable de donner une autre interprétation à

  4   ces conversations. Car avoir une certaine influence et une autorité n'est

  5   pas une indication d'intention criminelle.

  6   Et je pense que nous pouvons maintenant passer à la partie 3 de notre

  7   plaidoirie. Car il faut savoir que si Stanisic est considéré comme le

  8   numéro deux de Milosevic, ou s'il a joué un rôle de coordination pendant la

  9   guerre, il n'y a aucun élément de preuve qui ait jamais été présenté. Si la

 10   Défense a raison à ce sujet, et je pense également à l'effondrement de la

 11   thèse à propos des 28 tireurs d'élite, que reste-t-il ? Je pense qu'il va

 12   falloir que vous considériez que la thèse de l'Accusation est mal fondée

 13   dès le début. Elle s'est appuyée sur des enquêtes erronées et des

 14   suppositions.

 15   Comme nous l'avons indiqué, il faut faire la différence entre ce qui

 16   doit être conclu pour trouver la vérité et pour assurer que justice soit

 17   rendue, ce qui ne se trouve absolument pas dans le mémoire en clôture de

 18   l'Accusation. Car il est absolument évident qu'ils mettent l'accent sur les

 19   aspects qui incriminent le plus l'accusé en faisant fi de tout élément de

 20   fiabilité ou de crédibilité. C'est un peu comme s'ils essayaient de

 21   reconstruire une maison en utilisant du sable nouveau, tout en insistant

 22   sur le fait que le sable a une relation importante avec quelque chose de

 23   beaucoup plus substantiel.

 24   La réalité, c'est que la thèse de l'Accusation n'est pas réaliste. Ce

 25   sont eux qui fuient les éléments de preuve. Quant à nous, nous sommes

 26   confrontés aux éléments de preuve et nous avons offert des explications

 27   tout à fait raisonnables.

 28   J'aimerais maintenant vous renvoyer à l'allégation numéro 6 et à la


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  1   planche numéro 61. Dans une tentative pour essayer d'établir le lien entre

  2   Stanisic et Dragan, l'Accusation se fonde sur la pièce P671, une

  3   conversation interceptée alléguée du 29 novembre 1991 qui, au paragraphe 99

  4   de leur mémoire en clôture, d'après eux, démontre que Stanisic a essayé

  5   d'engager le capitaine Dragan et Simatovic pour aider Karadzic tout comme

  6   ils avaient déjà aidé Milan Martic.

  7   Il s'agit d'une falsification. Et cela est absolument évident.

  8   La planche numéro 61 reprend les éléments principaux de cette soi-disant

  9   conversation interceptée authentique. C'est la seule conversation

 10   interceptée que nous contestons. Sur 97 conversations interceptées

 11   présentées par un témoin, il s'agit de la seule conversation interceptée

 12   pour laquelle il n'y a pas eu de cassette correspondante permettant de

 13   vérifier son authenticité. Ce qui, bien entendu, jette un certain doute

 14   dans nos esprits à propos de son authenticité. Il est important de la

 15   replacer dans son contexte, cette conversation.

 16   Dans un premier temps, et comme nous l'indiquons au paragraphe 1 036

 17   de notre mémoire en clôture, les dirigeants serbes de Bosnie avaient adopté

 18   à partir de la mi-1994 une politique qui tendait à accuser le MUP serbe, en

 19   les présentant comme des extrémistes et des paramilitaires qui détruisaient

 20   les documents. Ce qui rend une falsification encore plus vraisemblable,

 21   d'ailleurs.

 22   Est-ce que l'Accusation a supprimé ce doute en fournissant une

 23   corroboration ? L'Accusation n'a pas présenté un seul élément de preuve qui

 24   pourrait corroborer cette soi-disant conversation interceptée et indique

 25   qu'en novembre 1991 Stanisic commandait Dragan et Simatovic dans le cadre

 26   d'opérations militaires en RSK. Mais nous indiquons qu'il n'y a pas un seul

 27   élément de preuve qui suggère que Stanisic ait commandé Dragan ou lui ait

 28   donné des ordres lors des opérations de guerre, qu'il s'agisse de Knin ou


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  1   d'autres endroits, encore moins à un moment où Golubic avait été fermé et

  2   où Dragan offrait ses services au plus offrant. Vers quelle ville

  3   exactement avançaient Dragan et Simatovic ? Pourquoi est-ce que

  4   l'Accusation n'a pas présenté un seul élément de preuve hormis ce salut

  5   enthousiaste à Kula qui suggère que Stanisic avait envoyé Dragan en Bosnie

  6   ? Un baiser n'est qu'un baiser, une accolade n'est qu'une accolade; par

  7   contre, des éléments de preuve sérieux significatifs d'une action concertée

  8   relèvent d'un autre domaine.

  9   Si nous examinons davantage le contexte, nous devenons de plus en plus

 10   sceptiques car, comme vous l'aurez constaté, d'après la pièce P651, le 8

 11   décembre 1991, Milosevic et Karadzic indiquent que Stanisic doit être

 12   l'homme qui devra se réunir avec dix hommes de l'opposition de la RSK pour

 13   essayer de contraindre Milan Babic. D'après la pièce P686, ce rôle s'est

 14   élargi puisqu'il devait en fait participer à une réunion avec 44

 15   commandants en janvier 1992.

 16   Et pourtant, d'après la logique de cette conversation interceptée de la

 17   planche numéro 61, Stanisic menait simultanément des opérations avec Dragan

 18   ainsi qu'avec les Bérets rouges en Krajina et en SBSO. Ce qui est

 19   manifestement illogique.

 20   Et nous avançons qu'une brève analyse de ce genre de situation est le

 21   genre d'analyse qui doit être fait par rapport aux éléments de preuve de

 22   l'Accusation, car la charge de la preuve et la norme de la charge sont

 23   extrêmement rigoureuses. On ne peut pas considérer ces éléments de preuve

 24   en les déplaçant du contexte car cela peut porter tort à l'accusé. Bien au

 25   contraire, nous avançons en fait que l'analyse de ces éléments de preuve

 26   révèle un manque de fiabilité manifeste, et lorsque cela est conjugué avec

 27   les éléments de preuve relatifs à la contribution de Stanisic à la paix,

 28   nous aboutissons à une conclusion raisonnable, à savoir Stanisic n'avait


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  1   pas d'intention criminelle.

  2   Pourquoi est-ce que ce fut Stanisic qui fut choisi pour négocier avec

  3   Mladic pour la libération des otages de la FORPRONU ? Comme nous

  4   l'indiquons à l'annexe 2 de notre mémoire en clôture, il s'agissait de

  5   l'une des crises les plus sensibles dans les Balkans. L'Accusation peut

  6   essayer vainement de minimiser la valeur de cet acte en suggérant que ces

  7   motifs n'étaient pas essentiellement purs, mais il n'en reste pas moins que

  8   nous nous retrouvons avec la question essentielle : pourquoi lui ? Pourquoi

  9   pas Perisic, qui avait une relation beaucoup plus intime avec Mladic ?

 10   Pourquoi pas d'autres personnes ?

 11   Personne ne peut sérieusement suggérer que Mladic, le commandant de

 12   dizaines de milliers de soldats de la VRS, craignait Stanisic ou ses JATD.

 13   Aucun élément de preuve n'existe pour prouver que Stanisic avait une

 14   relation avec Mladic et qu'ils avaient une relation cordiale. Et pourtant,

 15   hier, l'Accusation a avancé que cela prouvait l'influence importante de M.

 16   Stanisic. Mais influence sur qui ? Comme les carnets de Mladic le montrent,

 17   Stanisic n'a rencontré Mladic qu'en juillet 1993, et en 1995, ils n'ont

 18   même pas échangé leurs numéros de téléphone. Alors, pourquoi Stanisic ?

 19   Nous avançons que la réponse réside dans la personnalité et le

 20   caractère de cet homme. C'est la même réponse à la question pourquoi en

 21   1991 et en 1992 ce fut M. Stanisic qui a été, en quelque sorte, recruté

 22   pour persuader les dirigeants de la RSK à signer le plan de Vance. Cette

 23   réponse permettrait de comprendre pourquoi, à partir de l'année 1991,

 24   Stanisic, alors que la folie se répandait dans les Balkans, a continué à

 25   avoir des liens avec les services des Renseignements secrets de puissances

 26   étrangères importantes. Ou pourquoi est-ce qu'un chef de la Sûreté d'Etat

 27   fut choisi pour négocier à Dayton ? Ou pourquoi est-ce qu'après Dayton il a

 28   aidé à assurer la sécurité des opérations de maintien de paix ? Je fais

 


Page 20307

  1   référence à l'annexe 2 de notre mémoire en clôture. Et je vous dirais qu'en

  2   fait, point n'est besoin de me croire sur parole.

  3   Car je souhaiterais maintenant que nous passions à huis clos partiel.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons passer à huis clos partiel.

  5   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant en audience à huis

  6   clos partiel.

  7   [Audience à huis clos partiel]

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 27   [Audience publique]

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

 


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  1   M. JORDASH : [interprétation] Pourquoi est-ce que Stanisic n'a jamais

  2   rallié le parti de Slobodan Milosevic pendant la période couverte par

  3   l'acte d'accusation ? Pourquoi est-ce qu'il ne souhaitait pas que les

  4   membres de la DB se rallient à des partis politiques ? Pourquoi est-ce que

  5   la plupart des centres de la DB avaient une composition multiethnique ?

  6   Pourquoi est-ce qu'il n'y a pas un seul Musulman qui fut démis de ses

  7   fonctions pendant la guerre ? Pourquoi est-ce qu'il a autorisé Zlatko

  8   Radnic, un Croate, à rester chef de la 6e Administration pendant toute la

  9   durée de la guerre ? Je vous invite à examiner l'annexe 2 de notre mémoire

 10   en clôture et vous verrez que cela est indubitablement vrai. Radnic était

 11   encore employé en 1996 et a accompagné Stanisic lors de visites de très

 12   haut niveau à l'étranger. L'Accusation vous a demandé de faire fi de ces

 13   évaluations faites à l'époque, évaluations de Stanisic, qui est considéré

 14   comme un homme modéré, non politique, évaluations faites par des hommes

 15   d'intégrité, des hommes de valeur, et vous demande d'accepter plutôt les

 16   éléments de preuve avancés par des personnalités louches, peu recommandées,

 17   telles que, par exemple, les mercenaires de basse caste de Martic, le

 18   Témoin JF-039 ou le JF-047, qui n'a pas su décider s'il faisait partie

 19   d'une unité du MUP serbe ou d'une unité du MUP de la RSK, par exemple. Ou

 20   des témoins tels que Kovacevic ou JF-005, qui continuent à chercher dans

 21   les tiroirs de leur cuisine les notes qui vont corroborer leurs propos.

 22   M. Stanisic était un pragmatiste. Il n'était ni nationaliste ni extrémiste.

 23   Il avait un travail à faire. Comme nous l'indiquons dans l'annexe 1 de

 24   notre mémoire en clôture, il s'agissait de s'opposer à toutes les formes

 25   d'activités nationalistes extrêmes afin d'empêcher un conflit

 26   intranational, une guerre civile et des activités de terrorisme. Pourquoi

 27   est-ce qu'un Croate aurait conservé une si haute fonction au sein de la DB

 28   alors que cela n'était pas possible dans les autres organes de l'Etat ?


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  1   Parce que cet organe de l'Etat ne faisait pas la guerre contre les Croates

  2   et, contrairement à d'autres organes de l'Etat, avait parmi sa composition

  3   des membres de différentes appartenances ethniques, ce qui était considéré

  4   comme un atout.

  5   Comme je l'ai indiqué au début, Stanisic a cru en une Grande-Serbie,

  6   et cela était tributaire, bien entendu, de l'augmentation du territoire.

  7   Mais dès l'année 1992, et peut-être même avant, Stanisic savait qu'il

  8   n'était pas possible de préserver la Yougoslavie et qu'il était encore

  9   moins possible de concrétiser ces grandes ambitions des nationalistes et

 10   des extrémistes de Serbie.

 11   J'aimerais vous montrer les planches 63 et 64, à ne pas montrer au

 12   public. Il s'agit d'une conversation que Stanisic a avec Karadzic au début

 13   de cette guerre terrible. Il s'agit d'une conversation qui a eu lieu le 5

 14   janvier 1992. Karadzic était assez passionné à propos d'un discours qu'il

 15   avait prononcé lors d'une convention télévisée. Stanisic avait regardé le

 16   discours et a parlé à Karadzic. Et Stanisic est très réservé lorsqu'il

 17   parle de la convention et lorsqu'il fait des compliments à propos de cette

 18   convention et du discours de Karadzic. Il ne dit pas qu'il l'a aimé. Il dit

 19   qu'il a observé que d'autres l'ont aimé :

 20   "Nous vous avons regardé avec beaucoup d'attention et avons regardé les

 21   applaudissements."

 22   Alors que Karadzic indique que son discours est non élitiste, Stanisic est

 23   très circonspect et indique que lui, Karadzic, est "orthodoxe" -

 24   manifestement un euphémisme pour "extrême" - et il remarque qu'il s'agit

 25   des gauchistes orthodoxes qui ont le plus apprécié le discours.

 26   Et puis, en dernier lieu, Karadzic remarque qu'il veut "toute la

 27   Yougoslavie". Stanisic indique qu'il se "posait les mêmes questions" mais

 28   finalement indique qu'il ne sait pas si cela sera possible. Ce que


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  1   j'avance, c'est que cela prouve que Stanisic était pragmatique et qu'il

  2   savait que cela n'était pas une possibilité.

  3   A sa façon tranquille, il a essayé d'exhorter Karadzic à être

  4   réaliste. Il savait que le monde ne tournait pas comme cela. Même si des

  5   nationalistes invétérés tels que Babic, Martic, Hadzic et Karadzic

  6   n'étaient pas de cet avis, il savait que cet objectif politique était du

  7   domaine de l'impossible, même s'il devait être très prudent lorsqu'il

  8   parlait à Karadzic.

  9   Et si cela est vrai, alors quel était l'objectif politique de M.

 10   Stanisic ? Comment est-ce qu'il aurait pu se lancer dans une guerre alors

 11   qu'il ne partageait pas ces objectifs politiques ? Comment est-ce qu'il

 12   aurait pu se lancer à commettre des crimes considérés par d'aucuns comme

 13   partie intégrante de ce qu'il fallait faire pour obtenir cette Yougoslavie

 14   unifiée alors qu'il pensait que cela n'était pas possible ? Comment est-ce

 15   qu'il aurait pu partager cette intention criminelle ?

 16   Alors, les Balkans ont commencé à exploser, mais la mission de

 17   Stanisic était de prévenir cette éruption. Et son travail était un travail

 18   essentiel. D'autres étaient parfaitement capables pour le faire et avaient

 19   été formés militairement pour organiser la formation d'unités spéciales,

 20   pour financer, pour former et pour faire en sorte que toute la logistique

 21   soit donnée pour les lancer dans la bataille.

 22   Je vous remercie de votre attention.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie beaucoup.

 24   Nous allons faire la pause. Et je suppose que c'est vous, Maître Bakrac,

 25   qui allez maintenant intervenir ?

 26   M. BAKRAC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, c'est moi qui

 27   interviendrai.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons reprendre à 17 heures 55.


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  1   --- L'audience est suspendue à 17 heures 22.

  2   --- L'audience est reprise à 17 heures 56.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Jordash, avant que nous ne

  4   poursuivions, de combien de temps auriez-vous encore besoin pour nous

  5   expliquer ce que vous souhaitiez présenter comme éléments supplémentaires -

  6   - je veux dire que nous avons encore deux heures et demie pour la Défense

  7   Simatovic, tant la Défense que l'Accusation auront encore quatre heures et

  8   demie, et il nous reste encore une heure aujourd'hui. Ce qui signifie qu'il

  9   reste trois heures et demie pour demain, ce qui est juste ce qu'il faut.

 10   Alors à moins que vous n'ayez de longs arguments à présenter. Je regarde

 11   également Me Groome.

 12   M. JORDASH : [interprétation] Je ne crois pas avoir besoin de plus de dix à

 13   15 minutes.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, si les parties épuisent leur

 15   temps, nous pourrons éventuellement continuer vendredi.

 16   M. JORDASH : [interprétation] Je peux me restreindre à cinq minutes.

 17   M. GROOME : [interprétation] Je peux également diminuer le temps

 18   nécessaire.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous souhaiteriez le faire --

 20   à quel moment souhaiteriez-vous le faire ?

 21   M. JORDASH : [interprétation] Je me plierai à la décision des Juges.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Groome, êtes-vous prêt ?

 23   M. GROOME : [interprétation] Eh bien, je le ferai à tout moment que les

 24   Juges m'indiqueront.

 25   [La Chambre de première instance se concerte]

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais être très strict en ce qui

 27   concerne le temps, et nous allons vous entendre tout de suite.

 28   Vous avez cinq minutes, ce qui signifie que vous avez jusqu'à 18 heures 04.


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  1   M. JORDASH : [interprétation] Si ça peut vous aider, Monsieur le Président,

  2   Madame les Juges, l'Accusation s'oppose à cela. Donc je vais essayer de

  3   m'en passer.

  4   Donc lorsque nous avons parlé du mémoire de l'Accusation, nous avons noté

  5   un certain nombre de problèmes allant de citations qui n'étaient pas

  6   exactes, il y avait des erreurs; nous avons dû les corriger. Nous avons

  7   également noté des citations qui prétendument fournissent une

  8   corroboration, ce qui n'est pas le cas. Et le problème c'est qu'ils se

  9   fondent sur des éléments de preuve qui ne sont pas corroborés, il s'agit

 10   d'éléments recueillis dans le cadre du 92 ter [comme interprété], là, où

 11   l'Accusation n'a pas aidé les Juges de la Chambre en identifiant les

 12   éléments qu'ils pouvaient corroborer, les citations à l'appui d'éléments de

 13   preuve qui simplement n'existaient pas. Et nous avons estimé qu'il y avait

 14   un certain nombre de problèmes au niveau des documents. Donc nous avons

 15   consigné tout ceci dans un document que nous avons jugé utile pour les

 16   Juges de la Chambre, ainsi que pour les juristes de la Chambre pour

 17   accélérer le processus d'évaluation du mémoire en clôture de l'Accusation

 18   et, pour vous aider, Madame, Monsieur les Juges, à établir la vérité.

 19   Alors, ce que nous avons fait, nous avons identifié les problèmes et

 20   ensuite nous avons parcouru ces problèmes et nous avons écarté ces

 21   problèmes à ce qui correspondait à un nouveau plaidoyer et circonscrit nos

 22   commentaires ou corrections, à ce qui d'après nous, ne correspondait pas à

 23   cela. Certaines erreurs sont possibles lors de l'évaluation des éléments de

 24   preuve. Donc, notre approche était une approche assez restreinte, d'après

 25   nous, nous souhaitions qu'elle soit juste lors de la présentation de nos

 26   arguments. Mais nous avons gardé à l'esprit le fait que nous avons une

 27   obligation envers notre client pour garantir que, vous, Mesdames, Monsieur

 28   les Juges, ne soyez pas intentionnellement induits en erreur ou de tout


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  1   autre manière induits en erreur.

  2   Donc, nous avons compilé tout ceci. Ceci est destiné à être utile

  3   pour les Juges de la Chambre. Ceci n'est pas destiné à présenter de

  4   nouveaux arguments à la manière dont l'Accusation a fait hier en corrigeant

  5   des erreurs, induisant en erreur la Chambre dans notre mémoire. Nous avons

  6   le même point de vue sur la question, mais nous avons beaucoup d'autres

  7   idées sur d'autres points, mais nous avons estimé qu'il était nécessaire de

  8   compiler ce document et le proposer aux Juges de la Chambre. Nous pensons

  9   que ceci serait utile et permettrait de faire accélérer le procès et, par

 10   conséquent, créer des conditions dans lesquelles une évaluation juste des

 11   éléments de preuve et l'établissement de la vérité pourraient être

 12   conduits. C'est ce dont nous disposons maintenant. Nous ne pensons pas que

 13   ceci désavantage l'Accusation. En réalité, ceci est utile pour tout un

 14   chacun si l'on analyse les éléments de preuve d'une façon juste et exacte.

 15   Et c'est la raison pour laquelle nous avons proposé à vous, Mesdames et

 16   Monsieur les Juges, de faire cela, et dans l'alternative, les juristes de

 17   la Chambre peuvent faire la même chose et identifier ces mêmes erreurs.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Groome.

 19   M. GROOME : [interprétation] Alors, il y a deux heures les arguments ou la

 20   plaidoirie de la Défense -- je viens de recevoir ce document. C'est un

 21   document assez long. La première page, par exemple, qui semble contredire

 22   une déclaration faite par l'Accusation dans le mémoire de l'Accusation

 23   laisse entendre que M. Stanisic avait rencontré M. Babic environ trois

 24   fois. Il est dit que :

 25   "Babic devait y venir un certain temps et ensuite qu'il s'y rendrait

 26   lui-même."

 27   Il s'agit d'un argument qui est présenté.

 28   Et d'après nous, lors des réquisitoires et plaidoiries, nous avons


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  1   présenté des arguments écrits, nous les avons plaidés, et nous avons les

  2   arguments oraux qui sont censés étayer les arguments écrits, ainsi que de

  3   répondre aux écritures des parties.

  4   Une situation analogue s'est présentée lors de l'affaire Stakic

  5   devant la Chambre d'appel, et au début de l'audience en appel, la Défense

  6   Stakic disposait d'un document important, et c'est ainsi qu'ils

  7   qualifiaient leur document :

  8   "Il s'agit d'éléments de preuve qui ont été versés au dossier. Il y a

  9   certaines questions qui, d'après nous, ont fait l'objet d'erreurs de la

 10   part de la Chambre de première instance qui ont mal cité certains propos

 11   des témoins. Donc, nous aimerions que ceci ne soit pas sorti de son

 12   contexte."

 13   Ceci n'est pas très différent de ce que vient de dire Me Jordash. La

 14   Chambre d'appel a dit ce qui suit :

 15   "Je pense que l'Accusation aurait dû recevoir ces volumes à l'avance,

 16   aurait dû pouvoir les parcourir, aurait dû donner son accord et indiquer

 17   qu'il n'y a pas d'autres arguments qui figurent dans ce document. Quoi

 18   qu'il en soit, il me semble que ceci pourrait être perçu comme une

 19   tentative visant à avoir un nombre plus important de pages qui ont été

 20   présentées lors du mémoire en appel. La tâche de la Défense, comme la tâche

 21   qui revenait à l'Accusation, est de présenter ses principaux arguments dans

 22   les mémoires, que nous avons analysés et étudiés attentivement et pour

 23   lesquels les arguments oraux sont un complément. Je ne pense pas qu'il

 24   faille maintenant accepter d'autres ouvrages. Est-ce que l'on peut éviter

 25   de faire allusion à ces mémoires, et est-ce que je peux demander au

 26   greffier de bien vouloir récupérer ces volumes et les remettre à la

 27   Défense."

 28   Ceci s'est produit à la page 185, le 5 août 2005.


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  1   L'Accusation a demandé aux Juges de ne pas accepter ces arguments

  2   écrits ou, subsidiairement, de fixer un calendrier ou une limite des mots

  3   lors de ces mémoires en réplique de façon à ce que l'Accusation soit à

  4   armes égales lors de la présentation des réquisitoires et plaidoiries.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, une question. Combien de pages

  6   comporte ce document ?

  7   M. JORDASH : [interprétation] Ecoutez, 364, 92 ter [comme interprété], des

  8   dépositions qui requièrent une corroboration. Ceci, en fait, concerne

  9   l'adjoint de Stanisic. C'est un témoin dans le cadre de l'article 92 ter

 10   [comme interprété]. En fait, le témoin n'a pas été identifié. Et ensuite,

 11   je parcours ces autres pages; 207, par exemple, erreur numéro 207,

 12   paragraphe 565, affirmation faite le 12 juillet 1992, les Bérets rouges et

 13   d'autres ont tué 27 civils non-serbes dans une discothèque. La référence

 14   n'est pas exacte puisqu'on n'y trouve qu'une liste de victimes. Que les

 15   Bérets rouges aient participé à cette attaque ne fait l'objet d'aucune

 16   référence.

 17   En fait, ce sont des choses comme ça que nous avons voulu signaler.

 18   [La Chambre de première instance se concerte]

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les Juges de la Chambre ne font pas

 20   droit au versement ou la présentation d'un tel document. Cependant, bien

 21   évidemment, les parties -- alors, si vraiment il y a des références au

 22   niveau des arguments présentés dans l'Accusation sur des éléments de preuve

 23   qui n'existent pas, ceci serait utile pour les Juges de la Chambre. Mais je

 24   suppose, Monsieur Groome, que si les éléments de preuve n'existaient pas,

 25   vous diriez tout de suite aux Juges de la Chambre qu'il s'agit d'une

 26   erreur. La même chose vaut pour des erreurs manifestes, des erreurs

 27   typographiques, des guillemets au mauvais endroit, mais je ne pense pas que

 28   vous pourriez remplir 80 pages avec cela. Et dans ce cas, vous pourriez le


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  1   regarder et, avec la Défense, venir en aide aux Juges de la Chambre et

  2   corriger ces éléments. Mais en ce qui concerne ce point-là, je crois que

  3   vous pouvez parvenir à un accord pour que ceci puisse être utilisé par les

  4   Juges de la Chambre ou agir de tout autre manière. Par ailleurs, nous ne

  5   faisons pas droit à cela.

  6   Maître Jordash, je crois qu'il est sage d'évoquer cette question à un

  7   stade ultérieur, et à ce moment-là l'Accusation aura eu le temps de

  8   réaliser ce que vous souhaitez réaliser.

  9   M. JORDASH : [interprétation] Les vérifications ont été longues.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais avez-vous commencé à en discuter

 11   avec l'Accusation avant aujourd'hui à un stade antérieur ?

 12   M. JORDASH : [aucune interprétation]

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est vous qui avez pris ce risque dans

 14   ce cas. Dans la mesure où les parties peuvent se mettre d'accord sur des

 15   erreurs typographiques ou ce genre de chose, si le la citation, les

 16   guillemets ne sont pas au bon endroit, si c'était par exemple le verbe être

 17   au passé plutôt que le verbe être au présent, je crois que vous pouvez vous

 18   mettre d'accord là-dessus, et la même chose vaut pour des éléments de

 19   preuve qui n'existent pas. Nous ne rechercherions pas pendant longtemps des

 20   éléments de preuve qui n'existent pas, parce que si la source est citée et

 21   qu'on ne la trouve nulle part, nous supposons dans ce cas que cela n'existe

 22   pas, mais il semblerait que ceci remplit 80 pages, donc cela va au-delà de

 23   ces questions-là. Néanmoins, les Juges de la Chambre estiment qu'il ne faut

 24   pas accepter cela.

 25   Alors, ceci nous a pris 30 minutes déjà. Maître Bakrac, si vous

 26   commencez rapidement, nous n'allons pas perdre davantage de temps. Je ne

 27   dis pas que nous avons perdu du temps et que nous avons donc passé du temps

 28   sur des questions importantes.

 


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  1   Maître Bakrac, vous pouvez commencer.

  2   [Plaidoiries de la Défense Simatovic]

  3   M. BAKRAC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  4   Bonsoir à toutes les personnes présentes dans le prétoire.

  5   Pendant toute la présentation de ses moyens, l'Accusation, y compris

  6   pendant son réquisitoire et dans son mémoire en clôture, n'a cessé

  7   d'affirmer l'existence d'une entreprise criminelle commune dont l'objectif

  8   aurait consisté à recourir à la force pour chasser durablement la

  9   population non-serbe de vastes portions du territoire de la Croatie et de

 10   la Bosnie-Herzégovine et que, lors de cette campagne de persécutions,

 11   Franko Simatovic lui-même aurait été l'un des membres les plus importants

 12   du SDB, respectivement du RDB de la République de Serbie. L'Accusation

 13   affirme, par ailleurs, que ce plan aurait vu le jour au plus tôt en avril

 14   1991 et qu'il aurait continué d'exister au moins jusqu'au mois de décembre

 15   1995.

 16   L'Accusation décrit, par ailleurs, Simatovic comme l'adjoint de Stanisic et

 17   comme le commandant opérationnel des unités du service de la Sûreté de

 18   l'Etat, respectivement du RDB; mais ce faisant, l'Accusation passe

 19   complètement sous silence de nombreux éléments de preuve au sujet desquels

 20   nous pouvons dire qu'à tout le moins ils jettent un doute raisonnable sur

 21   cette affirmation et cette conclusion.

 22   Partant de ces hypothèses, l'Accusation devant cette Chambre de première

 23   instance affirme que Simatovic au poste évoqué aurait planifié et exécuté

 24   une entreprise criminelle commune conjointement avec les dirigeants

 25   politiques des Serbes en Croatie et en Bosnie-Herzégovine, conjointement

 26   avec les gouvernements de ces derniers, conjointement avec les

 27   représentants de leurs forces armées et de leurs forces de police, tout

 28   comme avec les dirigeants politiques, militaires et des services de police


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  1   de la République de Serbie.

  2   Cependant, dans son mémoire en clôture, le Procureur affirme que c'est dès

  3   l'été 1990 que Simatovic aurait commencé à porter assistance et à

  4   conseiller les membres de l'entreprise criminelle commune dans deux Régions

  5   autonomes serbes en Croatie. Le Procureur affirme également qu'à partir de

  6   l'été 1991, des membres de l'entreprise criminelle commune, y compris une

  7   unité rattachée à la DB de Serbie, les Bérets rouges, tout comme la SDG

  8   d'Arkan, auraient terrorisé et attaqué la population non-serbe sur tout le

  9   territoire des Régions autonomes serbes en Croatie. L'Accusation ajoute que

 10   ce modèle appliqué en Croatie a également été appliqué en Bosnie-

 11   Herzégovine et que les participants à l'entreprise criminelle commune

 12   auraient constitué des institutions et des forces parallèles dans le but de

 13   mener une campagne violente de persécutions sur le modèle de ce qui avait

 14   été initié par eux en Croatie.

 15   L'élément de preuve central sur lequel s'appuie l'Accusation pour

 16   justifier toutes ces affirmations est le discours lu par Simatovic devant

 17   le chef Stanisic, le président Milosevic et d'autres lors de la cérémonie à

 18   Kula en 1997. Bien qu'il y ait un écart considérable entre les éléments de

 19   preuve présentés d'une part et, d'autre part, la teneur du discours lu par

 20   Simatovic, le Procureur s'appuie sur ce discours comme sur un élément de

 21   preuve central de sa thèse contre Simatovic, et ce, en dépit du fait avancé

 22   par la Défense que ce discours a été lu dans des circonstances et pour des

 23   raisons particulières sur lesquelles nous reviendrons ultérieurement.

 24   Il est, en effet, manifeste qu'après la conclusion des accords de Dayton en

 25   novembre 1995, le RDB de la Serbie avait des raisons tout à fait

 26   particulières de présenter le rôle qui avait été le sien dans les conflits

 27   en ex-Yougoslavie sous un jour différent devant le président Milosevic.

 28   D'ailleurs, les éléments de preuve sont nombreux, et nous y reviendrons,


Page 20321

  1   qui démontrent justement que les affirmations tirées de ce discours sont

  2   inexactes et que le rôle du RDB de Serbie a été exagéré.

  3   A titre d'exemple, dans le discours en question sont évoqués 26

  4   lieux, les lieux supposés de camps d'entraînement. En l'espèce, pourtant,

  5   ce sont tout au plus deux ou trois lieux qui ont été présentés, lieux où

  6   sont censés avoir été mis en place des centres d'entraînement. La même

  7   remarque s'applique également à la cinquantaine de lieux qui ont été

  8   évoqués et où l'unité aurait soi-disant participé à des opérations de

  9   combat. Elle s'applique à l'affirmation selon laquelle 5 000 membres de

 10   l'unité auraient participé aux combats.

 11   Après plus de trois ans de présentation de moyens en l'espèce, après

 12   l'audition d'un grand nombre de témoins, je pense que personne dans ce

 13   prétoire ne sera en mesure d'énumérer plus de cinq ou six lieux avec

 14   lesquels l'unité JATD aurait le moindre lien, sans même parler de son

 15   éventuelle participation à des activités de combat.

 16   Ce chiffre de 5 000 membres de l'unité étant lui-même absurde et

 17   profondément en contradiction avec les éléments de preuve présentés. Nous

 18   en trouvons un exemple patent de cette exagération dans les affirmations

 19   relatives à l'escadrille aérienne au sujet de laquelle le témoin-clé de

 20   l'Accusation, Milovanovic lui-même, a déclaré qu'en termes simples, elle

 21   n'était pas exacte. Ceci concerne également les affirmations relatives à de

 22   nombreux aérodromes à partir desquels ces escadrilles auraient décollé.

 23   Le fait que dans sa lecture de ce discours, dont on ignore l'auteur

 24   qui l'a rédigé, Franko Simatovic ait utilisé les termes de "nous", "nous

 25   avons", ne signifie pas en soi qu'il ait dès le début participé,

 26   directement ou indirectement, à toutes les activités alléguées ou évoquées

 27   du service. Simatovic ne résume pas la totalité du service, pas plus que le

 28   service ne se réduit à Simatovic. Et s'il avait dû lire ce discours lors de


Page 20322

  1   cette cérémonie, n'importe quel autre employé de ce service aurait dû

  2   utiliser ces mêmes termes de "nous avons".

  3   La Défense estime que l'Accusation avait l'obligation pour chacune

  4   des affirmations extraites de ce discours d'établir, en présentant des

  5   éléments de preuve et d'établir au-delà de tout doute raisonnable, la

  6   participation concrète de Simatovic à partir du moment où l'on considère ce

  7   discours comme une preuve cardinale de la participation et de la

  8   responsabilité de Simatovic.

  9   Dans la suite de notre présentation, nous nous concentrerons sur les

 10   éléments de preuve les plus marquants permettant à la Défense d'étayer son

 11   affirmation selon laquelle l'Accusation n'a pas établi au-delà de tout

 12   doute raisonnable la responsabilité pénale de Simatovic.

 13   L'Accusation affirme que le discours de Simatovic constitue un aveu

 14   et un témoignage d'un participant direct. Se fondant sur un examen de

 15   l'ensemble des faits, la Défense affirme en revanche que ce discours ne

 16   cadre pas avec les éléments de preuve présentés et offre une image pas trop

 17   élogieuse, surdimensionnée, et exagérée du service de la Sûreté d'Etat de

 18   la Serbie et de son rôle lui rendant hommage.

 19   L'Accusation affirme que Simatovic aurait armé, contrôlé et commandé

 20   certains des auteurs directs. Elle affirme qu'une assistance matérielle,

 21   logistique et en matière de renseignement aurait été fournie aux fins de

 22   mise en œuvre de l'entreprise criminelle commune. L'Accusation affirme

 23   également que Milosevic, en 1994, aurait estimé la valeur de l'armement et

 24   du matériel fourni à un milliard de dollars. Mais si une aide d'un milliard

 25   de dollars a réellement été fournie aux Krajina serbes et à la Bosnie, on

 26   ne voit pour autant de façon claire quelles ont pu être l'influence et la

 27   contribution concrète de Franko Simatovic sur l'apport de tout ou partie de

 28   ces fonds sur la base des éléments de preuve présentés par l'Accusation. On


Page 20323

  1   ne voit pas non plus clairement quelle est cette décision prise par Franko

  2   Simatovic. Par qui il a été consulté, ou qui il a lui-même consulté. Qui

  3   l'a informé de la nature de l'aide qui allait être fournie ? Quelle

  4   fraction de ce milliard de dollars d'aide a été fournie par Franko

  5   Simatovic, et quelle est la part de l'aide pour laquelle il est possible

  6   d'établir le moindre lien avec Simatovic ? S'agit-il de mille dollars, de

  7   cent mille dollars ? Y a-t-il le moindre élément de preuve à ce sujet en

  8   l'espèce ? Y a-t-il des éléments de preuve indiquant quelle partie de

  9   l'aide viendrait du service de la Sûreté d'Etat, quelle partie viendrait de

 10   l'Etat, quelle partie viendrait de la JNA, quelle autre partie viendrait de

 11   la VJ ? Et quelle est exactement la place ou le rôle de Franko Simatovic eu

 12   égard à la décision éventuelle d'apporter cette aide au peuple serbe hors

 13   de Serbie ? Quelle est la mesure de sa participation et de sa contribution

 14   dans cette aide ?

 15   Il n'existe aucun élément de preuve à cet égard. Au contraire, nous

 16   avons des preuves solides indiquant que Simatovic n'avait pas la moindre

 17   influence sur l'éventuelle prise de décision et l'éventuel envoi d'une aide

 18   à qui que ce soit.

 19   L'Accusation essaie de faire un amalgame entre Simatovic et le

 20   service, ou entre Simatovic et l'Etat de Serbie, ce qui est tout à fait

 21   inacceptable. L'Accusation, devant cette Chambre de première instance, n'a

 22   pas présenté les éléments de preuve qui sont les seuls pertinents, à savoir

 23   des éléments de preuve qui indiqueraient sous quelle forme et à quel

 24   hauteur Simatovic aurait contribué à la réalisation de l'entreprise

 25   criminelle commune, à supposer qu'il l'ait fait. Et quelles sont

 26   l'importance et les conséquences de ces activités ? La position de la

 27   Défense est la suivante : l'Accusation avait l'obligation d'indiquer

 28   concrètement en quoi consistait la contribution conséquente de Franko


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  1   Simatovic en qualité de membre de l'entreprise criminelle commune et quelle

  2   était la mesure de cette contribution. Sauf le respect dû, la Défense

  3   affirme que l'Accusation ne s'est pas acquittée de cette obligation.

  4   Dans son mémoire en clôture, le Procureur se réfère à un réseau

  5   intégré de camps d'entraînement secrets que les accusés sont censés avoir

  6   dirigés. Mais il n'existe aucun élément de preuve permettant de démontre

  7   au-delà de tout doute raisonnable que les accusés auraient mis en place

  8   quel que réseau secret que ce soit de camps d'entraînement et qu'ils les

  9   aient dirigés. Tout d'abord, le Procureur n'a pas démontré clairement ni

 10   expliqué en quoi consisterait un réseau intégré de camps. Qu'est-ce que

 11   signifie ce réseau intégré de camps ? A quelle structure de direction et de

 12   commandement a-t-on affaire et en quoi ces camps sont-ils intégrés ?

 13   C'est ainsi que, par exemple, le camp sur la rivière Tara a été créé

 14   sur ordre de Radovan Stojcic, Badza, pour compléter la formation des

 15   membres des PJP. Ce camp sur la rivière Tara n'était en rien secret. Les

 16   membres des PJP y ont été entraînés, les membres des PJP du RDB. Il existe

 17   des éléments de preuve à ce sujet et de nombreux témoins ont déposé en la

 18   matière, comme la Défense le montre dans son mémoire en clôture.

 19   Le camp de Golubic n'a été créé ni par Stanisic ni par Simatovic, pas

 20   plus que ce camp n'était secret ou que l'on a essayé de le dissimuler.

 21   Golubic existait déjà plusieurs mois avant la venue du capitaine Dragan à

 22   Knin, et tant les médias locaux, qu'étrangers, rendaient compte de

 23   l'entraînement à Golubic.

 24   Dans la suite de notre présentation, nous reviendrons plus en détail

 25   sur ces affirmations.

 26   A supposer même que l'entreprise criminelle commune ait existé avec

 27   le but que lui assigne l'Accusation, l'Accusation en tout cas n'a pas

 28   démontré au-delà de tout doute raisonnable la participation de Simatovic


Page 20325

  1   dans cette entreprise. Certes, l'Accusation a énuméré un grand nombre de

  2   personnalités qui sont censées avoir participé à l'entreprise criminelle

  3   commune. Mais, pour commencer, l'Accusation n'a pas démontré l'existence du

  4   moindre lien ou du moindre contact entre Simatovic et un grand nombre des

  5   personnalités qui sont présentées comme des participants à l'entreprise

  6   criminelle commune.

  7   L'Accusation n'a pas davantage démontré au-delà de tout doute

  8   raisonnable que Simatovic ait volontairement partagé l'intention conjointe

  9   alléguée avec les personnalités qui étaient effectivement en contact avec

 10   lui, intention qui aurait représenté le but commun de l'entreprise

 11   criminelle commune. Selon la Défense, l'Accusation n'a pas avancé le

 12   moindre élément de preuve par lequel elle aurait démontré hors de tout

 13   doute raisonnable que Franko Simatovic a eu le moindre contact, notamment

 14   avec Slobodan Milosevic qui est considéré comme le participant principal à

 15   l'entreprise criminelle commune, et en disant cela nous pensons à la

 16   période antérieure à la cérémonie à Kula à laquelle Milosevic était présent

 17   et au cours de laquelle il y a eu aucun autre contact particulier entre lui

 18   et Simatovic.

 19   L'Accusation n'a pas davantage présenté le moindre élément de preuve

 20   au sujet de contact entre Franko Simatovic et Veljko Kadijevic, pas plus

 21   qu'avec Blagoje Adzic, avec Radmilo Bogdanovic, avec Goran Hadzic, pas plus

 22   qu'elle n'a apporté d'élément de preuve au sujet de la moindre relation

 23   particulière avec Badza, Momcilo Krajisnik, Biljana Plavsic, Mico Stanisic,

 24   ou Vojislav Seselj. Tout ce que le Procureur offre comme élément de preuve

 25   indiquant que Simatovic aurait participé à une entreprise criminelle

 26   commune se réduit à deux photographies, deux notes dans les carnets de

 27   Mladic, et deux conversations interceptées, assortis d'une théorie vague et

 28   non justifiée au sujet des rapports étroits qu'auraient entretenus Jovica


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  1   Stanisic et Franko Simatovic.

  2   La Défense de Franko Simatovic se penchera tout d'abord sur ce que

  3   l'Accusation décrit comme des "rapports étroits entre Jovica Stanisic et

  4   Franko Simatovic".

  5   L'Accusation ne fait aucune distinction entre, d'une part, ce qui

  6   relève de la relation professionnelle entre le chef du service et l'un de

  7   ses employés et, d'autre part, en quoi et de quelle façon leurs rapports

  8   acquièrent ce qui permet à l'Accusation de les qualifier de rapports

  9   étroits. Il est exact et il est normal que la coopération entre le chef du

 10   service et un de ses employés existait. Une telle coopération devait

 11   exister entre le chef du service et celui qui, au cours de sa carrière, a

 12   fini par devenir son conseiller.

 13   Cependant, les limites de la coopération telles qu'en dispose le

 14   règlement du service n'ont jamais été dépassées. L'Accusation n'a pas

 15   davantage présenté le moindre élément de preuve permettant de confirmer que

 16   la relation entre Stanisic et Simatovic aurait outrepassé les règlements,

 17   que l'un comme l'autre, se devait de respecter.

 18   Quant aux deux photographies que nous avons évoquées, les deux

 19   photographies que l'Accusation avance à l'appui de ses informations dans

 20   son mémoire en clôture, la Défense prie instamment les Juges de la Chambre

 21   de procéder à une comparaison entre ces deux photographies, qui sont les

 22   pièces P390 et P391, et la photographie P3043, dont il a été établi de

 23   façon irréfutable qu'elle a été prise à l'époque de la mission de

 24   libération des otages en Bosnie en 1994. Par une simple comparaison, il est

 25   possible de voir tout à fait clairement que ces photographies ont été

 26   prises à la même époque et, manifestement à la même occasion. En effet, la

 27   Défense a présenté aux Juges de la Chambre une photographie de Franko

 28   Simatovic datant du printemps 1993 sur laquelle on peut voir que Franko


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  1   Simatovic, à l'époque, présentait une apparence complètement différente et

  2   qu'il ne portait toujours pas de lunettes à l'époque. Il s'agit de la pièce

  3   de la Défense numéro D862 sur laquelle nous souhaitons attirer l'attention

  4   des Juges de la Chambre.

  5   Le témoin à charge Milovanovic a affirmé que, selon lui, la

  6   photographie P390 avait été prise à Belgrade, mais ceci ne peut pas être

  7   considéré comme un élément de preuve fiable. En effet, il est manifeste que

  8   Milovanovic ignore où cette photographie a été prise et qu'il se contente

  9   de conjecturer.

 10   C'est ce que nous souhaitions dire au sujet de ces photographies.

 11   Quant à Mladic et aux notes figurant dans ses carnets, nous souhaitons

 12   rappeler aux Juges de la Chambre que --

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Juste pour comprendre tout à fait bien,

 14   vous dites que :

 15   "Il est tout à fait clair que ces deux photographies ont été prises à

 16   la même époque, et même à la même occasion."

 17   Est-ce qu'en disant cela, vous aviez l'intention de dire que P390 et

 18   P391 ont été prises à la même époque et à la même occasion que P3043 ?

 19   Est-ce ce que vous avez essayé de nous dire ?

 20   M. BAKRAC : [interprétation] Oui, Mesdames et Monsieur les Juges. Excusez-

 21   moi si je n'ai pas été clair. Et lorsque je dis "à la même époque", je dis

 22   "à la même époque ou à peu près à la même époque".

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, non, ce n'était pas ma

 24   préoccupation. Vous avez parlé de ces deux photographies, mais ce que vous

 25   nous proposez c'est de comparer ces deux clichés avec un troisième, et vous

 26   semblez vouloir dire qu'ils ont été pris à peu près à la même époque.

 27   Mais je suis toujours un peu confus suite à votre dernière remarque

 28   consistant à dire que c'était à peu près à la même époque. Parce que si


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  1   vous dites que c'était à peu près à la même époque, "époque" est-ce que

  2   cela peut être en même temps à la même occasion ? Pour moi, si vous dites

  3   "à la même occasion", c'est forcément à la même époque.

  4   M. BAKRAC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, et ce que dit la

  5   Défense, c'est que les négociations portant sur la libération des otages se

  6   sont prolongées et que ces photographies ont été prises à l'époque de la

  7   libération des otages en 1994.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais pas forcément à la même

  9   occasion alors, pas à la même occasion, à l'occasion de la négociation pour

 10   la libération des otages, ou est-ce que ont été prises lors des

 11   négociations pour la libération des otages, les deux photographies en

 12   question ?

 13   Regardez. Regardez ma question -- ou mes questions, lisez-les à

 14   nouveau, et nous vous entendrons à ce sujet.

 15   M. BAKRAC : [interprétation] Monsieur le Président, ce que nous avançons,

 16   c'est que ces photographies ont été prises pendant les négociations. C'est

 17   ce que nous affirmons.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. C'est clair, donc.

 19   M. BAKRAC : [interprétation] Concernant Mladic et ses carnets, la Défense

 20   rappelle aux Juges de la Chambre que Mladic a tenu ses carnets entre 1991

 21   et 1996. Pendant toute cette période, Mladic a consigné la teneur de

 22   centaines de réunions impliquant de nombreuses personnes, y compris la

 23   teneur de nombreuses réunions avec de soi-disant participants à

 24   l'entreprise criminelle commune.

 25   Pendant une période s'étendant sur plus de cinq années pendant

 26   lesquelles Mladic a consigné la teneur de toutes ces réunions, ce n'est

 27   qu'à deux occasions, ce n'est que deux fois qu'il a noté la présence de

 28   Simatovic à l'une ou l'autre de ces réunions. Cependant, dans un cas comme


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  1   dans l'autre, Simatovic n'a absolument pas participé à la discussion. De

  2   plus, la Défense souhaite attirer l'attention des Juges de la Chambre sur

  3   le fait que la première note en question datant du 28 février 1993 concerne

  4   l'opération Udar, sur laquelle nous reviendrons plus en détail un peu plus

  5   tard.

  6   La deuxième note est la pièce P2541 et correspond au 9 septembre

  7   1995. Cette note a été consignée dans le cadre de la réunion entre le

  8   général Mladic, Momcilo Perisic et Jovica Stanisic, réunion au cours de

  9   laquelle était présent également Franko Simatovic. Et la seule personne qui

 10   ne parle pas à cette réunion est Franko Simatovic. Ce qui est

 11   particulièrement parlant lorsque l'on examine les notes en question dans

 12   leur intégralité, c'est que cette réunion est avant tout consacrée à la

 13   libération des pilotes étrangers en 1995, et c'était là le seul et unique

 14   sujet abordé lors de cette réunion.

 15   Il y a donc eu deux réunions, pas la moindre discussion, et l'une de

 16   ces réunions concernait la libération de deux pilotes étrangers qui avaient

 17   été arrêtés. Nous reviendrons plus en détail sur l'autre un peu plus tard.

 18   Reportons-nous à la conversation interceptée, la première dans laquelle il

 19   est fait référence à Franko Simatovic. Il s'agit de la pièce P693. Au

 20   paragraphe numéro 117 de son mémoire en clôture, le Procureur se contente

 21   de citer la toute fin de cette conversation.

 22   Mais pour se faire une idée juste de cette conversation, il convient de

 23   prendre en considération l'intégralité de celle-ci. En substance, cette

 24   conversation est survenue tout à fait par hasard. Il est tout à fait

 25   manifeste que la présence de Franko Simatovic dans le bureau de Kertes au

 26   moment où ce dernier est appelé au téléphone par M. Karadzic est tout à

 27   fait fortuite. Et si vous examinez en détail cette conversation

 28   interceptée, vous verrez que manifestement Karadzic ne reconnaît pas la


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  1   voix de Simatovic, que Kertes dit à Karadzic qu'un ami souhaite pouvoir

  2   l'entendre, ce qui apparaît clairement dans la transcription en B/C/S de

  3   cette conversation interceptée. La teneur de cette conversation entre

  4   Franko Simatovic et Karadzic ne laisse absolument aucune possibilité de

  5   conclure quant à ce qui constituerait le sujet de cette conversation. Il

  6   est tout à fait clair sur la base de cette conversation, que Simatovic et

  7   Karadzic se vouvoient. Simatovic vouvoie Karadzic, puis Karadzic vouvoie

  8   Simatovic. Il est tout à fait clair également que Karadzic ne reconnaît pas

  9   la voix de Simatovic. Simatovic se présente à Karadzic et lui indique avec

 10   qui il est en train de parler. Il est impossible de tirer la moindre

 11   conversation hors de tout doute raisonnable quant à la thématique de cette

 12   conversation et quant à la nature des rapports entre Simatovic et Karadzic.

 13   La seule chose qui est possible, c'est de se livrer à des conjectures, ce

 14   qui, sauf le respect dû, est exactement ce que fait l'Accusation dans son

 15   mémoire en clôture.

 16   Je passe à la seconde conversation interceptée, la pièce P671, qui ne

 17   démontre absolument rien. Cette conversation interceptée correspond à un

 18   échange entre Jovica Stanisic, qui était alors le chef du RDB de Serbie, et

 19   Karadzic. Dans cette conversation, M. Stanisic dit :

 20   "Je te transmets les salutations de Frenki et du capitaine."

 21   Tout d'abord, cette citation ne signifie absolument rien et ne prouve

 22   absolument rien. Elle ne démontre absolument aucun lien entre Franko

 23   Simatovic et Karadzic en dehors du fait qu'ils se connaissent peut-être -

 24   peut-être - et elle ne prouve certainement pas l'identité "du capitaine"

 25   dont il est question.

 26   Voilà donc ce que l'Accusation avance comme des preuves fondamentales

 27   et solides du fait que Franko Simatovic aurait eu des rapports étroits avec

 28   un grand nombre de participants à l'entreprise criminelle alléguée. Nous


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  1   estimons que ces éléments de preuve ne sauraient être considérés comme

  2   suffisants pour que les Juges de la Chambre tirent une telle conclusion.

  3   Par ailleurs, l'Accusation n'a pas établi non plus le second élément

  4   cumulatif de l'entreprise criminelle commune puisqu'elle n'a pas avancé

  5   d'éléments de preuve indiquant au-delà de tout doute raisonnable que

  6   Simatovic aurait fait partie du plan commun assorti d'une définition claire

  7   de ce qui aurait constitué son rôle précis dans ce plan. Or, l'Accusation a

  8   l'obligation d'apporter la preuve au-delà de tout doute raisonnable de cela

  9   précisément.

 10   Concernant la mens rea dans le cadre de l'entreprise criminelle

 11   commune, la Défense souligne que le dossier ne comprend aucun élément de

 12   preuve direct relatif à la mens rea de Simatovic pendant la période de

 13   temps pertinente. Le seul élément de preuve dans lequel ait été consigné

 14   quelque chose que l'on pourrait qualifier de position prise par Simatovic

 15   concernant les circonstances importantes en l'espèce, c'est le discours

 16   prononcé à Kula, discours que Simatovic s'est contenté de lire au nom du

 17   service, c'est-à-dire au nom du service de la DB de Serbie, avec toutes les

 18   insuffisances que nous avons déjà évoquées et que nous avons analysées en

 19   détail dans notre mémoire. Les éléments de preuve relatifs à l'existence de

 20   l'entreprise criminelle commune et à la participation à cette dernière de

 21   Franko Simatovic ne sont pas fiables et n'apportent pas de démonstration

 22   hors de tout doute raisonnable, ce dont on peut se convaincre au vu des

 23   exemples mêmes invoqués pas l'Accusation dans son mémoire.

 24   Nous ne doutons pas que la Chambre de première instance évaluera en

 25   détail et dans leur intégralité chacun des éléments de preuve avancés tant

 26   par la Défense que par l'Accusation. Dans notre présentation, nous

 27   souhaiterions attirer l'attention des Juges de la Chambre sur quelques

 28   exemples seulement d'interprétation erronée des éléments de preuve par


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  1   l'Accusation ou de références faites par l'Accusation à des éléments de

  2   preuve de valeur probante faible ou inexistante, ou d'éléments de preuve,

  3   en tout état de cause, qui ne peuvent pas démontrer hors de tout doute

  4   raisonnable les thèses de l'Accusation.

  5   En analysant la mise en œuvre de l'entreprise criminelle commune en

  6   SAO de Krajina, l'Accusation s'appuie sur la déposition du Témoin Babic,

  7   qui a déposé dans le procès Milosevic et dont la Défense de Franko

  8   Simatovic n'a pas eu l'occasion de procéder au contre-interrogatoire. En

  9   effet, le témoin évalue le rôle et la participation de Simatovic aux

 10   événements de l'été 1991 dans la pièce P1878 de façon tout à fait

 11   superficielle et trop générale.

 12   Sur la base des éléments de preuve auxquels se réfère l'Accusation,

 13   on ne voit pas du tout quel a pu être le rôle concret de Simatovic dans la

 14   création de postes de police en Krajina. La Défense n'a pas eu l'occasion

 15   d'interroger en détail ce témoin à ce sujet et, en raison de cela, cet

 16   élément de preuve n'a aucune valeur probante.

 17   De plus, l'Accusation affirme qu'en janvier 1991, Martic aurait

 18   convenu avec Bogdanovic et Stanisic d'une aide matérielle, technique et

 19   financière pour la Krajina, et que Simatovic verserait des soldes de la

 20   police spéciale et fournirait cette dernière en uniformes et en matériel.

 21   Maintenant cette affirmation, l'Accusation se réfère à la déposition du

 22   Témoin JF-039.

 23   Alors, Monsieur le Président, Mesdames les Juges, je voudrais que

 24   nous passions maintenant brièvement à huis clos partiel.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous passons à huis clos partiel.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 27   [Audience à huis clos partiel]

 28   (expurgé)

 


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 13  Pages 20333-20337 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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 18   [Audience publique]

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier d'audience.

 20   Nous levons l'audience, et nous reprendrons demain, jeudi, 31 janvier, à 14

 21   heures 15 dans ce même prétoire.

 22   --- L'audience est levée à 19 heures 04 et reprendra le jeudi, 31 janvier

 23   2013, à 14 heures 15.

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