Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 23 août 2010

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 14 heures 21.

  5   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous dans le

  6   prétoire et à l'extérieur.

  7   Au départ, la Chambre souhaite soulever trois points aujourd'hui.

  8   Premièrement, nous souhaitons fournir une explication de la position

  9   adoptée par la Chambre au sujet de l'addendum de l'Accusation en date du 29

 10   juin 2010, en application de la notification eu égard à l'article 94 bis au

 11   sujet du Témoin 9, Kathryn Barr, et la réponse de la Défense du 5 août.

 12   La Chambre de première instance souhaite préciser sa position au

 13   sujet de la notification de communication 94 bis. La Chambre ne rendra pas

 14   une décision formelle à ce sujet.

 15   Dans l'addendum, l'Accusation a demandé à la Chambre d'ajouter un

 16   rapport d'expert de Kathryn Barr à la diffusion de communication 94 bis;

 17   Kathryn Barr, le Témoin 9.

 18   Le 5 août 2010, la Défense a soumis sa réponse dans laquelle elle

 19   demande que l'addendum de l'Accusation soit rejeté et que si la Chambre

 20   arrivait à la conclusion que l'addendum devait être accepté, dans ce cas-

 21   là, ils souhaitaient contre-interroger le témoin expert concerné.

 22   Dans la décision 92 bis du 7 juillet, la Chambre de première instance

 23   a décidé de recevoir à titre provisoire la déposition de Kathryn Barr en

 24   application de l'article 92 bis, si la témoin en question était présente

 25   pour le contre-interrogatoire.

 26   L'article 94 bis permet à la Chambre de première instance de disposer

 27   d'un droit discrétionnaire visant à accepter au dossier un rapport d'expert

 28   ou une déclaration sans citer à la barre le témoin expert en question, si

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  1   l'autre partie l'accepte. Ici, cela n'est pas accepté, donc la question du

  2   versement en application de l'article 94 bis ne se pose pas.

  3   Par conséquent, la Chambre de première instance ne rend pas de

  4   décision au sujet du rapport d'expert additionnel par Kathryn Barr

  5   communiqué dans l'addendum de l'Accusation. Ceci ne préjuge pas de toute

  6   requête future qui serait éventuellement soumise par l'Accusation à

  7   l'avenir.

  8   A présent, nous souhaitons rendre une décision orale. La Chambre a reçu le

  9   reste de la requête de l'Accusation demandant de porter modification à la

 10   liste des témoins, le versement des éléments de preuve en application de

 11   l'article 92 ter et les mesures de protection déposées à titre confidentiel

 12   en date du 15 juillet 2010. La Chambre rendra à présent sa décision.

 13   Comme cela a été le cas pour l'autre partie de cette décision qui a

 14   été rendue la semaine dernière, cette requête a vu le jour suite au

 15   réexamen qui a été mené par l'Accusation des éléments de preuve relatifs

 16   aux conversations interceptées. L'Accusation a relevé que de son point de

 17   vue ces éléments sont suffisamment proches de la conduite de l'accusé pour

 18   exiger que le témoin soit présent dans le prétoire pour être contre-

 19   interrogé. Six conversations interceptées ont été enregistrées par lui, qui

 20   ont été versées au dossier par le biais de différents témoins dans

 21   l'affaire Popovic. Il a été interviewé par téléphone le 30 juin cette

 22   année.

 23   Le 18 août 2010, l'accusé a fourni sa réponse. Sa réponse a été

 24   déposée à titre confidentiel. Nous avons entendu les arguments des parties

 25   exposés oralement jeudi de la semaine dernière, le 19 août 2010.

 26   Donc pour faire bref, je ne reprendrai pas les arguments des parties.

 27   La première question qui se pose est de savoir s'il est dans

 28   l'intérêt de la justice d'ajouter un témoin sur la liste des témoins 65

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  1   ter.

  2   La Chambre estime que l'objectif de cette requête est de donner la

  3   possibilité à l'accusé de contester la déposition de ce témoin. Même si

  4   l'accusé a raison de relever le fait qu'il s'agira avant tout de

  5   l'authentification des conversations interceptées dans ce témoignage, c'est

  6   précisément cette authenticité que l'accusé a remis en cause fréquemment

  7   devant cette Chambre.

  8   La Chambre constate que l'Accusation propose la déposition de ce

  9   témoin en application de l'article 92 ter, un projet de déclaration d'une

 10   page seulement composée de neuf paragraphes brefs est fourni. Et tout comme

 11   pour les interceptions proposées par le biais de ce témoin, la Chambre

 12   constate que cela a été fourni sur la liste des pièces à conviction

 13   proposée par l'Accusation. Donc toutes ces pièces ont été provisoirement

 14   versées au dossier par le biais d'autres témoins. Compte tenu de la

 15   situation, par conséquent, la Chambre estime qu'il ne serait pas

 16   préjudiciable à l'accusé si ce témoin était ajouté à la liste 65 ter à ce

 17   stade du procès.

 18   Toutefois, pour ce qui est du moment de la comparution de ce témoin,

 19   la Chambre réitère encore une fois sa préoccupation face à cette pratique

 20   adoptée par l'Accusation de prévoir la comparution des témoins avant que la

 21   Chambre n'ait rendu sa décision; la Chambre préférerait que l'Accusation

 22   cite ce témoin plus tard cette semaine afin que l'accusé puisse avoir

 23   suffisamment de temps pour préparer son contre-interrogatoire. La Chambre

 24   espère que ce contretemps ne se reproduira pas.

 25   La Chambre se penchera à présent sur la partie de la requête de

 26   l'Accusation qui concerne le versement de la déclaration préalable du

 27   témoin ainsi que des conversations interceptées en application de l'article

 28   94 [comme interprété] ter.

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  1   L'accusé affirme que le projet de déclaration qui figure à l'annexe C

  2   de la requête ne satisfait pas aux critères de versement en application de

  3   l'article 92 ter, parce qu'il ne s'agit que d'un projet de déclaration qui

  4   n'a pas été signé par le témoin en question.

  5   La Chambre relève qu'à la différence de l'article 92 bis(B),

  6   l'article 92 ter n'exige pas que la déclaration soit signée. Comme l'a fait

  7   valoir l'Accusation, le témoin pourra confirmer sa déclaration sous

  8   serment. Conformément à cela, l'accusé n'a pas fourni de raison valable

  9   pour que la requête soit rejetée, à condition que le témoin vienne dépose

 10   dans la Chambre et qu'il réponde aux critères prévus à l'article 92 ter.

 11   Au sujet des conversations interceptées, quant à elles, cependant la

 12   Chambre constate qu'elles ne sont pas mentionnées dans la déclaration du

 13   témoin et, par conséquent, elles ne sauraient pas être versées au dossier

 14   par le truchement de ce témoin. L'Accusation, bien entendu, sera libre de

 15   se servir de ces conversations interceptées à un autre moment, à savoir à

 16   partir du moment où le témoin sera cité à la barre.

 17   Pour des raisons ci-dessus citées, la requête de l'Accusation demandant le

 18   versement de la déclaration de ce témoin au dossier est acceptée à

 19   condition que les conditions de l'article 92 ter soient réunies. Toutefois,

 20   la requête demandant le versement des conversations interceptées est

 21   rejetée.

 22   Enfin, la Chambre constate que le 18 août 2010, l'Accusation a déposé une

 23   requête confidentielle demandant des mesures de protection consistant en un

 24   pseudonyme et la déformation des traits du visage pour ce témoin. La

 25   requête n'a pas encore été traduite en B/C/S.

 26   Monsieur Tolimir, êtes-vous au courant de l'existence de cette requête ?

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Je

 28   vous salue --

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  1   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Etes-vous prêt à répondre à cette

  2   requête ? Est-ce que vous avez l'intention d'y répondre oralement

  3   aujourd'hui ?

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je partage l'avis de mon avocat, à savoir qu'il

  5   revient à la Chambre de première instance de prendre une décision

  6   puisqu'elle est appelée à veiller aux intérêts des deux parties. Merci.

  7   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie. Les interprètes

  8   demandent si vous ne pouvez pas vous approcher du microphone.

  9   [La Chambre de première instance se concerte]

 10   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] La Chambre fait droit à cette

 11   requête, même si vous n'aviez pas officiellement besoin d'une décision de

 12   la Chambre. Les mesures de protection s'appliqueront comme dans le procès

 13   précédent.

 14   Nous avons un autre témoin qui est là, qui pourrait déposer

 15   aujourd'hui. Nous avons reçu une demande de continuation des mesures de

 16   protection. Je pense qu'en l'occurrence il n'est pas nécessaire de rendre

 17   une décision officielle formelle, puisque ces mesures s'appliquent comme

 18   dans le procès précédent conformément à la requête que nous avons reçue ce

 19   matin.

 20   Faites entrer le témoin, s'il vous plaît.

 21   Nous lèverons les stores à partir du moment où le témoin sera entré dans le

 22   prétoire.

 23   [Le témoin est introduit à la barre]

 24   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Bonjour, Monsieur. Je vous remercie

 25   d'avoir patienté. Nous avons commencé avec un petit peu de retard, parce

 26   que nous avons dû nous occuper de quelques questions techniques.

 27   Alors, je vais vous inviter à donner lecture de la déclaration solennelle

 28   qui vous est remise.

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  2   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  3   LE TÉMOIN : HAMDIJA TORLAK [Assermenté]

  4   [Le témoin répond par l'interprète]

  5   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie. Veuillez vous

  6   asseoir.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

  8   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Ce n'est pas la première fois que

  9   vous êtes venu déposer devant ce Tribunal. Vous connaissez la procédure.

 10   Vous savez sans aucun doute que les mesures de protection qui vous ont été

 11   octroyées par une autre Chambre s'appliquent toujours. M. Thayer vous

 12   posera quelques questions.

 13   Monsieur Thayer, vous avez la parole.

 14   M. THAYER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 15   Bonjour à vous. Bonjour à la Défense. Bonjour à toutes et à tous.

 16   Interrogatoire principal par M. Thayer : 

 17   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

 18   R.  Bonjour.

 19   M. THAYER : [interprétation] Peut-on passer à huis clos partiel, s'il vous

 20   plaît, juste pour quelques éléments relatifs au CV.

 21   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Passons à huis clos partiel.

 22   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 23   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Page 4249 expurgée. Audience à huis clos partiel.

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 12   [Audience publique]

 13   M. THAYER : [interprétation]

 14   Q.  Monsieur, à un moment donné êtes-vous parti de votre village natal ?

 15   Avez-vous quitté ?

 16   R.  Oui. C'était au début du mois de juin. Le conflit a éclaté. Mon village

 17   ainsi que plusieurs villages alentour ont été pris par l'armée de la

 18   Republika Srpska. Ces villages ont été brûlés. J'ai fait comme quasiment

 19   toute la population, je suis parti de chez moi, de mon village.

 20   Q.  Et vous êtes parti pour où, Monsieur ?

 21   R.  Pendant quelque temps nous sommes restés au mont Brloska, qui est juste

 22   à côté. Par la suite nous sommes partis vers une bourgade qui s'appelle

 23   Zeleni Jadar dans la municipalité de Srebrenica, et là nous avons pu nous

 24   installer à un endroit. Il me semble que c'était une usine, une usine où on

 25   traitait du bois. C'est là que je suis resté quasiment tout le temps

 26   jusqu'au décès de ma mère, à la fin du mois de février 1993.

 27   Q.  Pourquoi êtes-vous allé jusque dans la région de Zeleni Jadar dans la

 28   municipalité de Srebrenica, Monsieur ?

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  1   R.  Etant donné que nous n'avions plus d'endroit où loger, que nous

  2   n'avions pas de nourriture, il était plus facile de trouver la nourriture à

  3   Srebrenica à l'époque et on pouvait également trouver un hébergement là-

  4   bas. C'est la raison pour laquelle nous nous y sommes rendus. La population

  5   générale a fait la même chose. Je veux parler de mon village et des

  6   villages voisins.

  7   Q.  Je souhaite revenir un petit peu en arrière, s'il vous plaît, et

  8   revenir à 1992. Vous souvenez-vous de l'attaque lancée par la VRS depuis

  9   Han Pijesak; si oui, veuillez nous la décrire et la décrire aux Juges de la

 10   Chambre. Dans quelle direction ceci s'est-il passé ? Très brièvement, que

 11   s'est-il passé pendant cette attaque ?

 12   R.  Pour autant que je m'en souvienne, même si cela fait un certain temps

 13   maintenant, l'armée de la Republika Srpska a lancé une attaque depuis Han

 14   Pijesak. Ils ont pris le contrôle des villages suivants : Rijeka,

 15   Podzeplje, Brloznik, Stoborani et Godjenje, Krivace et Glodjane et un

 16   certain Klaze et Vrtoce dans la municipalité de Rogatica. C'est là qu'ils

 17   ont placé la nouvelle ligne de front. Nous ne pouvions pas aller au-delà.

 18   Q.  Je regarde le compte rendu d'audience, Monsieur. Je vois qu'un des

 19   villages -- ou en réalité, deux villages que vous avez identifiés sont les

 20   villages de Stoponi et Glodjane. S'agit-il de noms qui sont corrects, ou

 21   est-ce que ces villages avaient un autre nom ?

 22   R.  Non, Stoborani et Godjenje, ainsi que Laze au lieu de Klaze. Il est --

 23   Q.  Peut-être à l'avenir les Juges de la Chambre auront l'occasion de

 24   regarder les cartes, peut-être en présence d'un autre témoin. Votre village

 25   natal, Monsieur, à propos duquel vous avez témoigné, a été incendié. Je

 26   souhaite attirer votre attention sur un autre village qui répond au nom de

 27   Borak. Pourriez-vous nous décrire ce qui est arrivé dans ce village ?

 28   R.  Pour autant que je m'en souvienne, ce village est resté intact jusqu'au

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  1   mois de juillet de l'année 1995. Les habitants de la région y vivaient

  2   après la prise de contrôle de Zepa en juillet 1995. Je suppose que le

  3   village a été occupé. Je ne sais pas si les maisons ont été brûlées ou non,

  4   parce que ce n'est pas quelque chose que j'ai vue. Borak, je crois.

  5   Q.  La ligne de front, ou la ligne de confrontation, comme vous l'avez dit,

  6   se trouvait à l'endroit où étaient ces villages que vous avez cités. Etait-

  7   ce la ligne de confrontation qui existait à ce moment-là en juillet 1995 ?

  8   R.  En termes généraux, oui, même si je ne me souviens pas de tous les

  9   détails ou des petites localités. De façon générale, la ligne de front est

 10   restée la même entre le début de l'année 1992 et le mois de juillet 1995.

 11   Je devrais également ajouter que c'était le côté sud de l'enclave de Zepa à

 12   ce moment-là.

 13   Q.  Vous nous avez dit il y a quelques instants que vous êtes arrivé dans

 14   la région de Srebrenica en 1993. Veuillez dire aux Juges de la Chambre,

 15   s'il vous plaît, ce qui se passait.

 16   R.  Je souhaite tout d'abord apporter une petite correction. Je crois que

 17   je suis arrivé à Zeleni Jadar, et non pas à Srebrenica dans le courant de

 18   l'automne de l'année 1992, et j'y suis resté jusqu'au printemps de l'année

 19   1993. Mon problème, pour l'essentiel, qui était partagé par d'autres

 20   personnes, consistait à trouver de la nourriture à ce moment-là. Au début

 21   de l'année 1993 et la fin de l'année 1992, je me suis rendu à Srebrenica à

 22   plusieurs occasions parce que je cherchais de la nourriture. A l'endroit où

 23   nous étions hébergés, à Zeleni Jadar, il y avait beaucoup de réfugiés qui,

 24   pour l'essentiel, venaient de la municipalité de Han Pijesak. Quoi qu'il en

 25   soit, la situation était difficile. Nous manquions des produits de première

 26   nécessité, les conditions de vie étaient mauvaises, nous n'avions pas de

 27   nourriture et la vie était vraiment difficile.

 28   Q.  Avez-vous quitté la région de Srebrenica à un moment

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  1   donné ?

  2   R.  J'ai quitté la région de Srebrenica après la mort de ma mère, au début

  3   du mois de mars ou dans la première moitié du mois de mars, je ne me

  4   souviens pas exactement. Ensuite, j'ai vécu à Zepa, dans le village de

  5   Stitkov Dol, avec un résident local qui n'avait pas quitté sa maison. J'y

  6   suis resté jusqu'au mois de juillet 1995.

  7   Q.  Lorsque vous êtes arrivé à Zepa, au début du mois de mars ou dans la

  8   première moitié du mois de mars 1993, pourriez-vous dire aux Juges de la

  9   Chambre ce qui s'y passait, quelles étaient les conditions de vie à cet

 10   endroit-là.

 11   R.  Je me suis rendu à Zepa à plusieurs reprises pendant que je séjournais

 12   à Zeleni Jadar. La situation à Zepa n'était pas vraiment meilleure que

 13   celle de Zeleni Jadar. Il y avait davantage de réfugiés là que d'habitants

 14   de la région. Et le véritable problème à Zepa était un problème de

 15   nourriture à l'époque. Il y avait aussi un manque de médicaments et

 16   d'autres produits de première nécessité. De façon générale, telle était la

 17   situation à Zepa au printemps de l'année 1993.

 18   Q.  Y avait-il des actions militaires qui étaient menées à ce moment-là ?

 19   R.  A cette époque-là et pendant l'hiver, il n'y a pas eu d'actions

 20   militaires revêtant une quelconque importance. Je crois que c'était au mois

 21   d'avril, à l'arrivée du printemps, une opération, ou plutôt, une action a

 22   été menée par l'armée de la Republika Srpska qui avait pris Zepa pour

 23   cible. Après cette opération, Zepa a été déclarée zone protégée en vertu

 24   d'une résolution des Nations Unies. C'est à ce moment-là que les actions

 25   militaires à Zepa ont cessé.

 26   Q.  Je souhaite maintenant consacrer un petit peu de temps, Monsieur le

 27   Témoin, à parler de la géographie du terrain à Zepa. Pourriez-vous dire aux

 28   Juges de la Chambre ce que les gens veulent dire lorsqu'ils parlent de

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  1   l'enclave de Zepa. S'agit-il d'une ville ? D'un village ? Ou d'un groupe de

  2   villages ?

  3   R.  L'enclave de Zepa est un petit endroit qui se trouve en Bosnie

  4   orientale. Ce lieu se trouve au bord de la Drina, en réalité, la rivière

  5   Drina. Zepa est un village un peu plus important. Ce n'est pas un petit

  6   village. Zepa comprend un certain nombre de villages qui se trouvent autour

  7   du centre de Zepa. Donc le terme "enclave de Zepa" comprend un certain

  8   nombre de villages.

  9   Avant la guerre, Zepa avait été une commune locale de la municipalité

 10   de Rogatica. Au plan du découpage administratif, ce n'était pas une

 11   municipalité en tant que telle, et au plan géographique, le centre de Zepa

 12   se trouve à 500, 600 mètres environ au-dessus du niveau de la mer. Au nord

 13   de Zepa, il y a une montagne assez importante qui s'élève jusqu'à 1 500

 14   mètres d'altitude. Et au sud de Zepa, il y a un plateau qui est à 1 000

 15   mètres environ au-dessus du niveau de la mer. Zepa se trouve dans une

 16   cuvette et en tant que telle, Zepa peut être plus facilement défendue

 17   militairement parlant par opposition à d'autres endroits qui ne disposaient

 18   pas de telles caractéristiques du terrain.

 19   Q.  Quelle est la proximité de l'enclave de Zepa par rapport à l'enclave de

 20   Srebrenica, grosso modo ?

 21   R.  L'enclave de Srebrenica se trouve au nord de l'enclave de Zepa, et la

 22   distance entre le centre de Zepa et la ville de Srebrenica, d'après mes

 23   estimations, parce qu'évidemment je ne peux pas vous le dire avec

 24   exactitude, je dirais qu'il y a environ 40 kilomètres, ou 35 kilomètres, à

 25   vol d'oiseau.

 26   Et si nous parlons de toute l'enclave, à un moment donné, les deux

 27   enclaves se jouxtaient, ou plutôt, dépendaient l'une de l'autre, et on

 28   pouvait aller de Zepa à Srebrenica à pied, mais pas en voiture. Lorsque

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  1   j'ai dit que l'on pouvait se rendre d'une enclave à l'autre, je pensais aux

  2   villages qui se trouvent aux confins de la zone de l'enclave de Zepa.

  3   Q.  Monsieur, lorsque vous êtes arrivé en 1993, quelles autorités civiles

  4   étaient en place à ce moment-là ?

  5   R.  Comme je vous l'ai déjà dit, avant la guerre, Zepa était simplement une

  6   commune locale et était rattachée à la municipalité de Rogatica et, en

  7   principe, ne disposait d'aucune institution organisée. Lorsque je suis

  8   finalement arrivé à Zepa, il y avait une présidence de Guerre. Cette

  9   présidence existait sous une certaine forme et tentait de contrôler la

 10   situation. Compte tenu des évolutions du moment, de la faim et du reste,

 11   les quatre ou cinq personnes qui faisaient partie de la présidence de

 12   Guerre à ce moment-là ne pouvaient influer en aucune manière sur

 13   l'organisation de la vie de tous les jours, ou de la vie normale, à ce

 14   moment-là.

 15   Q.  Donc que s'est-il passé, Monsieur ?

 16   R.  Bien, lorsque Zepa a été déclaré zone protégée ou enclave protégée, la

 17   situation a radicalement changé. La FORPRONU est entrée à Zepa et les

 18   troupes qui étaient rattachées au Bataillon ukrainien sont arrivées. Zepa a

 19   commencé à recevoir de l'aide humanitaire par l'intermédiaire du HCR des

 20   Nations Unies, depuis la base logistique. D'après ce que je sais, la base

 21   logistique se trouvait à Belgrade. Il y avait des observateurs militaires

 22   qui sont arrivés également, et il y avait Médecins sans frontières

 23   également qui est venu. Je ne sais pas si Médecins sans frontières est

 24   arrivé avant la Croix-Rouge. Et d'une certaine façon, la situation s'est

 25   stabilisée, en quelque sorte.

 26   Et les autorités civiles ont été réorganisées à ce moment-là, ou plutôt, le

 27   nombre du personnel a augmenté. Un comité exécutif a été créé, et cet

 28   organe était censé de s'occuper de la population civile, de l'organisation

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  1   des écoles, des systèmes de santé, et il était également censé s'occuper de

  2   la distribution de l'aide humanitaire. J'ai été pressenti et finalement

  3   choisi pour être le président du comité exécutif. A partir du mois de mai

  4   1993 et pour autant que je m'en souvienne, jusqu'en avril 1995, j'ai rempli

  5   les fonctions de président du comité exécutif.

  6   Q.  Il y quelques instants, vous nous avez dit qu'à l'époque où vous êtes

  7   arrivé, la présidence de Guerre ne fonctionnait pas, en somme. Pourriez-

  8   vous dire aux Juges de la Chambre si la présidence de Guerre a été

  9   réorganisée; et si oui, quelles ont été ses fonctions et quels étaient ses

 10   liens ou ses relations avec le comité exécutif ?

 11   R.  Bien, je vais essayer de vous l'expliquer. La présidence de Guerre -

 12   pardonnez-moi - était un organe qui avait été créé en application des lois

 13   qui étaient toujours en vigueur, et ces lois avaient été adoptées par

 14   l'ancienne République fédérative de Yougoslavie. Une présidence de Guerre

 15   comprenait le maire ou le président de la municipalité, le président du

 16   comité exécutif, et peut-être que je devrais vous expliquer ce qu'est un

 17   comité exécutif. C'est un organe exécutif qui correspond aux fonctions d'un

 18   premier ministre au niveau d'un Etat. On ne peut pas comparer évidemment,

 19   mais les membres du comité exécutif sont également membres de la protection

 20   civile ou quel que soit son titre, et c'est également le commandant

 21   militaire le plus haut gradé. Et si je me souviens bien, c'est tout. Je ne

 22   sais pas s'il y avait quelqu'un d'autre.

 23   Autrement dit, la création du comité exécutif à l'époque signifiait que

 24   toutes les fonctions nécessaires avaient été remplies et permettaient de

 25   réorganiser la vie de la population civile à Zepa. Et c'est ce qui nous

 26   manquait, parce qu'avant cela il n'y avait pas d'organisation au niveau

 27   municipal en tant que tel.

 28   Q.  Et en 1993, lorsque la présidence de Guerre a été réorganisée ou

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  1   lorsqu'elle est devenue plus fonctionnelle, y avait-il, en réalité, un

  2   président de la présidence de Guerre; et si oui, qui était-ce en 1993 ?

  3   R.  Oui, il y avait un président. C'était il y a longtemps, mais je crois

  4   qu'il y a eu trois hommes qui ont occupé ce poste. Mais à ce moment-là,

  5   celui dont je me souviens, c'était Benjamin Kulovac. C'est lui qui a

  6   proposé que je devienne président du comité exécutif.

  7   Q.  Nous allons parler davantage du Pr Kulovac plus tard, Monsieur. Mais en

  8   juillet 1995 plus précisément, qui était président de la présidence de

  9   Guerre ?

 10   R.  En juillet 1995, le président de la présidence de Guerre de Zepa -

 11   pardonnez-moi - était M. Mehmed Hajric.

 12   Q.  Et que faisait M. Hajric, quelle était sa fonction ?

 13   R.  Mehmed Hajric était un hodza. C'était un représentant de l'église. Si

 14   vous m'autorisez à utiliser ce terme. C'était le titre du poste qu'il

 15   occupait. Il avait été formé à cela et il remplissait ses fonctions à ce

 16   titre-là.

 17   Q.  Je vais vous poser des questions plus précises sur M. Hajric et le rôle

 18   qu'il jouait au sein de la communauté un peu plus tard, Monsieur. Mais

 19   brièvement pourriez-vous nous parler du hodza. Pourriez-vous nous dire qui

 20   c'est. Vous avez dit que c'était un représentant de l'église, mais quelles

 21   sont ses fonctions, ses responsabilités ?

 22   R.  Dans le cadre d'une communauté islamique, la personne principale ou la

 23   personne la plus importante au niveau de la mosquée, qui s'occupe de

 24   beaucoup de choses et qui a beaucoup de fidèles est un hodza. C'est lui qui

 25   doit dispenser les services religieux dans la mosquée et il a un domaine

 26   très important à couvrir, parce qu'il a un nombre important de personnes

 27   qui sont ses administrés. Et comme dans la toute les religions, un hodza

 28   est un homme qui est respecté et qui a la confiance de ses fidèles, en tout

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  1   cas ces personnes qui croient en Dieu et qui vont à l'église ou à la

  2   mosquée.

  3   Q.  Et en juillet 1995, quelles étaient les fonctions du président de la

  4   présidence de Guerre ?

  5   R.  Le président de la présidence de Guerre ?

  6   Q.  Oui, Monsieur.

  7   R.  Bien, par définition, le président de la présidence de Guerre a pour

  8   rôle de garder le contact avec les représentants de la FORPRONU ainsi

  9   qu'avec d'autres organisations internationales. Son rôle consiste également

 10   à s'acquitter de toutes les autres responsabilités liées à cette fonction.

 11   Peut-être que je n'ai pas été suffisamment clair.

 12   Q.  Merci, Monsieur le Témoin. Je pense que nous pouvons passer à autre

 13   chose.

 14   Les Juges de la Chambre vont peut-être entendre que le témoin parle

 15   du maire de Zepa. Et en 1995, qui aurait été une personne occupant le poste

 16   de maire de Zepa ?

 17   R.  Ça aurait été, en fait, le président de la présidence de Guerre. Le

 18   maire occupait ce poste. Il s'agissait du même poste. Le maire est

 19   également le président de la présidence de Guerre, et durant cette période,

 20   c'était M. Mehmet Hajric. C'était la personne numéro un à Zepa.

 21   Q.  Lorsque l'on parle dans votre déposition de l'adjoint au maire, qui

 22   occupait cette fonction en juillet 1995, Monsieur le Témoin ?

 23   R.  L'adjoint au maire était le président du comité exécutif, et en

 24   l'occurrence, il s'agissait de moi.

 25   Q.  Vous aviez décrit de manière générale les différentes tâches que

 26   devaient remplir la présidence de Guerre ainsi que le comité exécutif,

 27   comme par exemple, la distribution de l'aide, la constitution d'école.

 28   Pourriez-vous expliquer aux Juges de la Chambre, avec un niveau peut-être

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  1   de détails plus important, quelles étaient les différentes fonctions de la

  2   présidence de Guerre ainsi que du comité exécutif à Zepa.

  3   R.  Les principaux rôles du comité exécutif, qui était donc une instance

  4   organisationnelle des autorités civiles de Zepa, consistaient à gérer

  5   l'enseignement, à relancer les différentes structures d'enseignement dans

  6   le centre de Zepa, ainsi qu'au sein des écoles régionales qui étaient

  7   fermées depuis un an en raison de la guerre. De plus, dans la mesure du

  8   possible, ce comité devait organiser les soins de santé, mais ceci ne

  9   pouvait pas se faire sans une aide de l'extérieur, c'est-à-dire sans un

 10   apport de médicaments qui étaient fournis par la Croix-Rouge et par

 11   l'organisation de Médecins sans frontières. Enfin, mais ceci était tout

 12   aussi important, ce comité devait assurer la distribution de l'aide

 13   humanitaire qui arrivait à Zepa, qui venait donc des différentes bases

 14   logistiques du HCR des Nations Unies à Belgrade. Je l'avais déjà mentionné.

 15   Au fur et à mesure que les choses ont évolué, étant donné que 60 % de la

 16   population de Zepa de l'époque était composée de réfugiés ou de personnes

 17   déplacées, c'est-à-dire, en d'autres termes, de personnes qui venaient des

 18   municipalités de Han Pijesak, de Visegrad et de Rogatica, ainsi que venant

 19   d'autres municipalités, mais à un pourcentage plus faible, telles que

 20   Vlasenica, comme je le disais donc, il était nécessaire d'assurer

 21   l'hébergement de ces personnes. C'est la raison pour laquelle, avec l'aide

 22   du HCR des Nations Unies, nous avons lancé une opération. Le HCR des

 23   Nations Unies a fourni le matériel nécessaire et des petits logements ont

 24   été construits pour héberger ces différentes familles. Voilà donc les

 25   différentes activités réalisées par le comité exécutif.

 26   Pour ce qui est de la présidence de Guerre, il y avait également une

 27   unité pour la protection civile. Dans certains cas, l'unité de la

 28   protection civile devait venir en aide à la population. Cette unité était

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  1   tout particulièrement occupée à la construction de ces petits logements

  2   résidentiels. Dans le cadre de la présidence de Guerre, qui était une unité

  3   organisationnelle indépendante, il y avait la police civile. Le responsable

  4   de cette police civile était également un membre de la présidence de Guerre

  5   compte tenu de son poste. Le principal commandant militaire basé à Zepa

  6   était également membre de la présidence de Guerre. En termes

  7   organisationnels, il s'agissait des personnes qui composaient la présidence

  8   de Guerre. Sa composition reprenait toutes les organisations qui existaient

  9   à Zepa à l'époque. Voilà, j'en ai terminé.

 10   Q.  Essayons maintenant de voir qui occupaient les différents postes. Qui

 11   était le responsable de l'unité de la protection civile, en juillet 1995,

 12   il s'entend ?

 13   R.  Le responsable de l'unité de la protection civile, qui était donc un

 14   des membres de la présidence de Guerre, était M. Amir Imamovic.

 15   Q.  Et nous entendrons sans aucun doute parler encore de M. Imamovic dans

 16   votre déposition d'aujourd'hui. J'aimerais savoir si l'organisation de la

 17   protection civile avait un rôle à jouer au niveau de la police ou au niveau

 18   militaire ?

 19   R.  Non, ils n'étaient pas incorporés dans cette partie de l'organisation,

 20   c'est-à-dire ni dans l'organisation de la police ni dans l'organisation

 21   militaire.

 22   Q.  Mais vous avez mentionné la police civile. Qui était à la tête de cette

 23   organisation, Monsieur le Témoin ?

 24   R.  C'était M. Hurem Sahic qui était à la tête de la police civile, et

 25   ceci, pendant toute la durée de la guerre, je crois.

 26   Q.  Vous avez également parlé du principal commandant militaire, qui était

 27   également un membre de la présidence de Guerre. Qui occupait cette fonction

 28   en juillet 1995 ?

Page 4261

  1   R.  Il s'agissait d'Avdo Palic.

  2   Q.  Le nom de l'organisation était donc la présidence de Guerre et vous

  3   aviez un membre de la présidence de Guerre qui était le plus haut

  4   commandant militaire de la zone. Par conséquent, j'aimerais savoir si la

  5   présidence de Guerre ou le comité exécutif occupait des fonctions

  6   militaires, Monsieur le Témoin ?

  7   R.  La présidence de Guerre avait pour rôle de prendre des décisions pour

  8   toutes les questions qui concernaient la vie dans l'enclave. Il est fort

  9   probable qu'un problème est survenu. Lorsque l'armée est devenue active, la

 10   brigade faisait partie du système militaire et ils avaient leurs propres

 11   chaînes de commandement. Il est possible que les intérêts de la population

 12   locale ne correspondent pas complètement ou n'aillent pas dans le même sens

 13   que certaines des actions militaires qui étaient menées à l'époque.

 14   Q.  Par conséquent, est-ce que M. Palic et la chaîne de commandement

 15   militaire dont il était à la tête étaient indépendants ou est-ce qu'ils

 16   faisaient partie du comité exécutif et de la présidence de Guerre ? Vous

 17   nous avez déjà dit que M. Palic était un membre de la présidence de Guerre,

 18   mais j'aimerais savoir s'il y avait des communications régulières ou une

 19   consultation ou une participation de votre part, ou du comité exécutif,

 20   dans le processus décisionnel militaire de M. Palic, par exemple ?

 21   R.  Il y avait des contacts, et les éléments les plus importants étaient

 22   présentés à la présidence de Guerre. Cependant, certains des éléments-clés

 23   et les commandements de l'organisation militaire se faisaient par le

 24   truchement de M. Palic, c'est-à-dire que lui avait sa propre chaîne de

 25   commandement, et cela ne passait pas par la présidence de Guerre de Zepa.

 26   Q.  Et j'aimerais savoir si vous - et quand je dis "vous," je parle du

 27   comité exécutif - j'aimerais savoir donc si vous étiez informés des

 28   activités militaires au jour le jour du colonel Palic et de son processus

Page 4262

  1   décisionnel; et si oui, dans quelle mesure ?

  2   R.  Non, nous n'étions pas informés des activités militaires au quotidien.

  3   Q.  Je voudrais vous poser encore quelques questions avant de faire la

  4   première pause, et je passerai à un autre sujet. Lorsque vous êtes arrivés

  5   à Zepa en 1993, j'aimerais savoir, autant que vous pouviez vous souvenir,

  6   quelle était la population de la zone que vous avez décrite comme étant la

  7   zone de Zepa ?

  8   R.  Lorsque le premier convoi d'aide humanitaire est arrivé, nous avons dû

  9   essayer d'évaluer la population locale et, autant que je me souvienne, nous

 10   étions arrivés à un chiffre légèrement supérieur à 7 000 habitants pour la

 11   totalité du territoire de l'enclave de Zepa.

 12   Q.  Et en juillet 1995, est-ce que la population avait augmenté ou baissé ?

 13   R.  Il est possible qu'entre la période initiale et juillet 1995 il y ait

 14   eu des mouvements de population, par conséquent, ce chiffre a évolué et a

 15   peut-être augmenté à certains moments. Cependant, en juillet 1995, autant

 16   que je me souvienne, la population locale était d'environ 7 000 personnes à

 17   Zepa. Et je voudrais rappeler que la situation changeait en fonction de la

 18   nourriture qui était à la disposition des populations locales. Et il est

 19   possible que durant certaines périodes, cette période de deux ans donc, la

 20   population ait dépassé le chiffre initial de 7 000.

 21   Q.  Est-ce que vous pourriez nous expliquer pourquoi il y avait un lien de

 22   corrélation entre la nourriture disponible et la population présente à

 23   Zepa, qui pouvait augmenter ou baisser ?

 24   R.  Est-ce que vous pourriez être un peu plus précis ? Vous me parlez de la

 25   situation au niveau de la nourriture et de l'augmentation de la population

 26   à Zepa. Est-ce que c'est ce que vous me demandez ?

 27   Q.  Tout à fait, Monsieur Hamdija. Vous nous avez dit ici que "…la

 28   situation changeait en fonction des questions de nourriture. Et il y a eu

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  1   des moments durant cette période de deux ans où la population avait dépassé

  2   ce chiffre initial de 7 000 personnes."

  3   Pourquoi est-ce que la population augmentait en fonction de la nourriture

  4   disponible ?

  5   R.  Oui. Maintenant je comprends votre question. L'enclave de Srebrenica

  6   était à proximité de celle de Zepa et la population de Srebrenica était

  7   bien plus importante. Alors, que se passait-il ? Bien, je suppose que

  8   l'aide humanitaire qui arrivait à Srebrenica ne permettait pas de répondre

  9   aux besoins de base de la population sur place et c'est la raison pour

 10   laquelle des réfugiés qui étaient tout d'abord arrivés à Srebrenica se sont

 11   rendus à Zepa, où il y avait plus de nourriture. Et qu'est-ce que cela

 12   signifiait ? Bien, cela signifiait que chaque semaine ils recevaient un peu

 13   plus de farine, par exemple, que s'ils étaient restés à Srebrenica, et

 14   c'est la raison principale pour laquelle ce chiffre de 7 000 habitants

 15   fluctuait, et c'est la raison pour laquelle la population augmentait durant

 16   une période donnée.

 17   Q.  Vous nous avez dit il y a quelques instants qu'environ 60 % de la

 18   population de Zepa était composée de réfugiés ou de personnes déplacées.

 19   Pourriez-vous expliquer aux Juges de la Chambre pourquoi ces populations

 20   s'étaient rendues à Zepa ? Pourquoi ces personnes étaient des réfugiés ou

 21   des personnes déplacées ?

 22   R.  Afin de comprendre pourquoi ces personnes sont arrivées à Zepa, afin

 23   que tout le monde comprenne bien cela, j'ai décrit la position géographique

 24   de Zepa. Au début de l'année 1992, la guerre a commencé en Bosnie, et comme

 25   je l'ai déjà dit, dans certaines municipalités des résidents avaient dû

 26   partir et, par conséquent, devaient se rendre ailleurs pour se sentir plus

 27   en sécurité. En d'autres termes, par exemple, à Han Pijesak, qui est la

 28   zone dans laquelle j'habitais, il y avait un certain nombre de villages

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  1   peuplés de Musulmans. Une ligne a été établie, dès le départ. La VRS a

  2   occupé ces villages et le seul endroit où pouvaient se rendre ces gens

  3   était en direction de Zepa. D'un point de vue géographique, c'était le seul

  4   endroit où ils pouvaient trouver refuge. Et il en va de même pour les

  5   municipalités de Visegrad et de Rogatica. Des combats s'étaient tenus et

  6   les habitants de ces municipalités et de ces villages se sont retrouvés à

  7   Zepa en tant que réfugiés ou que personnes déplacées.

  8   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Thayer, avant que vous

  9   poursuiviez, nous aimerions obtenir une précision. J'aimerais savoir si la

 10   présidence de Guerre constitue la même instance que le comité exécutif ou

 11   est-ce qu'il s'agit de deux instances distinctes ?

 12   M. THAYER : [interprétation]

 13   Q.  Est-ce que vous pouvez répondre à la question posée par le Président,

 14   Monsieur le Témoin, s'il vous plaît ?

 15   R.  Bien sûr. Le comité exécutif ou un comité exécutif est une instance

 16   organisationnelle distincte qui gère différents aspects de la vie civile

 17   dans une zone. En vertu des lois en vigueur, la personne qui est à sa tête

 18   est un membre de la présidence de Guerre. En d'autres termes, on peut dire

 19   que le comité exécutif est une des unités organisationnelles ou une partie

 20   de la présidence de Guerre. Je pense que c'est la meilleure manière de

 21   définir le comité exécutif.

 22   En plus de ce comité exécutif, vous avez une police civile indépendante,

 23   vous avez une structure de protection civile indépendante et vous avez

 24   également une instance militaire avec ses unités organisationnelles à

 25   proprement parler, et les personnes qui sont à la tête de ces instances

 26   constituent une autre instance qui répond au nom de présidence de Guerre.

 27   J'espère que j'ai pu vous aider et que ceci a permis de préciser la

 28   situation.

Page 4265

  1   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Donc si je vous ai bien compris, le

  2   comité exécutif est une partie -- ou est sous la supervision de la

  3   présidence de Guerre; est-ce exact ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact.

  5   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] La Juge Nyambe a une autre question à

  6   vous poser.

  7   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Merci. A un moment donné, vous étiez

  8   président du comité exécutif de Zepa, n'est-ce pas ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.

 10   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Qui était à ce moment-là le président

 11   de la présidence ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Durant cette même période, trois personnes ont

 13   occupé le poste de président de la présidence. Et pendant toute cette

 14   période, j'étais le seul à occuper le poste de président du comité

 15   exécutif. En d'autres termes, le comité exécutif a été constitué et lorsque

 16   la présidence de Guerre a été constituée, le premier président de la

 17   présidence de Guerre était Benjamin Kulovac, que j'ai déjà mentionné. Et il

 18   a occupé ce poste pendant un an, enfin, à peu près un an, je ne me souviens

 19   plus exactement. Il a été remplacé par M. Ago Podzic, qui a lui-même été

 20   remplacé par M. Mehmed Hajric. Durant cette période de deux ans, trois

 21   personnes se sont succédé à ce poste alors que moi, j'ai occupé le poste de

 22   président du comité exécutif pendant toute cette période. J'espère que ma

 23   réponse était claire.

 24   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Oui, elle était claire, mais j'aurais

 25   besoin de précision. A la page 20, lignes 14 à 17 du compte rendu

 26   d'audience d'aujourd'hui, vous avez mentionné que les éléments-clés et le

 27   commandement de l'organisation militaire était quelque chose que recevait

 28   le commandant Palic de sa propre chaîne de commandement, et pas des

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  1   présidents de guerre. Donc ce que j'aimerais savoir c'est de qui le

  2   commandant Palic recevait ses ordres ? En d'autres termes, qui était son

  3   supérieur hiérarchique ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais vous expliquer. Au moment en question,

  5   c'est-à-dire en 1995, l'ABiH était organisée - et là je ne parle que de la

  6   zone de Zepa - donc comme je le disais, l'armée de l'ABiH était organisée

  7   de la manière suivante. A Srebrenica, vous aviez la 28e Division, qui était

  8   une unité organisationnelle du 2e Corps, si je ne m'abuse, je n'en suis pas

  9   sûr, mais je pense que le 2e Corps était basé à Tuzla. Peut-être quelqu'un

 10   pourra m'aider. A Zepa, il y avait la 1ère ou la 285e Brigade légère de

 11   Zepa, qui relevait de la 28e Division, et le commandant de cette brigade à

 12   Zepa était en fait le colonel Avdo Palic. Et vous aviez donc une chaîne de

 13   commandement qui commençait et qui finissait au niveau du corps. Il était

 14   membre de la présidence de Guerre, mais il recevait ses ordres en utilisant

 15   sa propre chaîne de commandement. J'espère que je vous ai bien expliqué la

 16   situation.

 17   Lorsque j'ai essayé d'interpréter la situation au départ, j'ai peut-

 18   être semé la confusion dans vos esprits, surtout si vous ne connaissez pas

 19   très bien cette question.

 20   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Thayer, il nous reste encore

 21   quelques instants avant la pause.

 22   M. THAYER : [interprétation] Pour poser une question de suivi à la question

 23   posée par la Juge Nyambe.

 24   Q.  J'aimerais savoir, Monsieur le Témoin, qui était le supérieur

 25   hiérarchique direct du colonel Palic ? Par conséquent, au sein de cette

 26   chaîne de commandement militaire que vous avez décrite, c'est-à-dire le 2e

 27   Corps, qui était basé à Tuzla, puis vous aviez la 28e Division qui était

 28   basée à Srebrenica, et vous aviez la Brigade de Zepa de M. Palic qui était

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  1   donc subordonnée à la 28e Division. Est-ce que vous pourriez nous dire, si

  2   vous le savez, quel était le supérieur hiérarchique direct de M. Palic ?

  3   R.  Je ne suis pas un expert militaire, mais logiquement il devait répondre

  4   au commandant de la 28e Division. Cependant, je pense qu'il avait également

  5   beaucoup de contacts directs avec l'état-major général de l'ABiH. Cela

  6   signifie, en d'autres termes, qu'il était directement subordonné à

  7   Srebrenica.

  8   Q.  Et en juillet 1995, connaissez-vous le nom de la personne qui officiait

  9   en tant que commandant de la 28e Division ?

 10   R.  Je ne sais pas exactement. Autant que je me souvienne ou que je sache,

 11   il s'agissait de Naser Oric. C'était peu de temps avant qu'il quitte la

 12   zone de Srebrenica. Je ne sais pas s'il a été remplacé par quelqu'un

 13   d'autre ou s'il a été démis de ses fonctions par le chef d'état-major. Je

 14   ne peux pas vous dire parce que je ne sais pas. Je ne sais pas s'il avait

 15   été nommé après le départ de Naser Oric ou si le chef d'état-major avait

 16   continué à s'acquitter de ses fonctions. Je ne peux pas vous le dire.

 17   Q.  Très bien. Merci.

 18   M. THAYER : [interprétation] Je vois que c'est l'heure de la pause,

 19   Monsieur le Président.

 20   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci. Nous allons faire notre

 21   première pause. Un représentant du greffe va vous accompagner durant la

 22   pause, mais veuillez rester assis pour l'instant pour des raisons de

 23   sécurité.

 24   Nous allons lever la séance jusqu'à 16 heures 15. Nous reprendrons

 25   donc à 16 heures 15.

 26   --- L'audience est suspendue à 15 heures 47.

 27   --- L'audience est reprise à 16 heures 19.

 28   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, Monsieur Thayer, je vous en

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  1   prie, continuez.

  2   M. THAYER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  3   Q.  Rebonjour [phon], Monsieur.

  4   R.  Bonjour.

  5   Q.  Vous étiez en train de parler de réfugiés et de personnes déplacées,

  6   des gens qui étaient arrivés de différentes municipalités et qui se sont

  7   retrouvés à Zepa. Pourriez-vous, s'il vous plaît, donner plus de précisions

  8   aux Juges de la Chambre pour ce qui est de cette période de 1992 à 1993, la

  9   période pendant laquelle cette population est arrivée à Zepa de différentes

 10   municipalités. Ces gens, pourquoi ont-ils quitté leur foyer, leur mosquée ?

 11   Qu'est-ce qui les a incités à partir ? Pouvez-vous en parler, aux Juges,

 12   s'il vous plaît.

 13   R.  Je vais tenter de dire au moins ce que je connais bien. Revenons donc

 14   en 1992. A ce moment-là, la Bosnie-Herzégovine était reconnue sur le plan

 15   international en tant qu'un Etat à part entière. Il me semble que c'était

 16   le 5 ou le 6 avril 1992, si mes souvenirs sont bons. A ce moment-là, ce qui

 17   s'est produit en Bosnie, c'est que la guerre a éclaté. Il faut savoir, en

 18   fait, que du côté serbe on n'a pas accepté cette solution. Et avant la

 19   reconnaissance même de la Bosnie-Herzégovine, il y a eu un certain nombre

 20   de préparatifs qui ont été menés sur le plan de l'organisation.

 21   De sorte qu'après la reconnaissance de la Bosnie-Herzégovine - et là,

 22   plus concrètement, je parle de la Bosnie orientale où je me trouvais - donc

 23   ce qui s'est produit c'est qu'il y a eu la guerre. Je sais exactement

 24   comment cela s'est passé dans la municipalité de Han Pijesak, d'où je suis

 25   originaire. En fait, toute la population issue de ces villages musulmans

 26   qui se situent aux alentours de Han Pijesak était employée dans deux

 27   usines, une scierie et une usine de traitement de bois à Han Pijesak.

 28   Je pense que c'était vers le 10 mai, il y a eu deux cars de

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  1   travailleurs musulmans qui ont été arrêtés au moment où ils partaient

  2   travailler. Ils ont été arrêtés à un poste de contrôle avant Han Pijesak,

  3   et tous les passagers ont dû rebrousser chemin et revenir à pied dans leurs

  4   villages. C'est à ce moment-là que toutes les voies de communication ont

  5   été coupées entre ces villages musulmans et le chef-lieu de la

  6   municipalité, Han Pijesak. A partir de ce moment-là, on ne pouvait plus se

  7   rendre à Han Pijesak. Il me semble qu'on a laissé passer juste quelques

  8   malades.

  9   Et le premier conflit militaire a éclaté au début du mois de juin, le

 10   4 juin, si mes souvenirs sont bons. C'est à ce moment-là qu'il y a eu une

 11   colonne de la JNA, je pense, mais peut-être qu'elle ne s'appelait plus

 12   comme ça. Elle se dirigeait vers le site de Zlovrh, qui surplombe Zepa. Le

 13   conflit qui a éclaté à ce moment-là, et c'était le conflit qui les a

 14   opposés à - comment dirais-je - à la partie musulmane. En fait, à ce

 15   moment-là, il y avait déjà, du côté musulman, une organisation militaire,

 16   donc il y a eu un conflit qui les a opposés à l'armée bosniaque.

 17   Pendant une période donnée, il y a eu comme une espèce de trêve. Puis

 18   pendant la deuxième moitié du mois d'août et au début du mois de septembre,

 19   l'armée de la Republika Srpska a lancé une action de plus grande envergure,

 20   et à ce moment-là la population, bien sûr, au début de cette offensive,

 21   logiquement a pris la fuite pour se diriger là où ils pouvaient se rendre,

 22   et donc s'était à ce moment-là contrée en altitude, plus haut que ces

 23   villages qui ont, eux, été incendiés, donc les maisons ont été incendiées.

 24   Et les lignes qui ont été établies, à partir de ce moment-là, les voies de

 25   communication, elles étaient telles que tout retour dans les villages

 26   abandonnés était devenu impossible. Donc vous avez maintenant une

 27   population qui se retrouve dépourvue de tout, sans vivres, sans

 28   médicaments, et qui vit dans les bois, littéralement. Vous avez là pas

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  1   moins de 2 000 personnes, je vous parle de ma zone. C'était été 1992.

  2   Puis comme l'automne approchait, les températures baissaient et il

  3   fallait bien que ces populations s'installent quelque part pour pouvoir

  4   passer l'hiver. Je suppose que la situation était comparable dans d'autres

  5   municipalités. Je me garde d'en parler parce que je n'y ai pas pris part,

  6   je ne sais pas exactement comment ça s'est déroulé, mais le fait est qu'un

  7   très grand nombre de personnes dans les villages musulmans de la

  8   municipalité de Rogatica ou de la municipalité de Visegrad se sont

  9   retrouvées d'une manière comparable à Zepa.

 10   Voilà, ce serait un aperçu bref des événements qui se sont déroulés

 11   tels que je les ai vécus pendant cette période-là à cet endroit.

 12   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] La Juge Nyambe souhaite vous

 13   poser une question.

 14   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Une précision, s'il vous plaît.

 15   Page 27, ligne 16 à la ligne 22, vous parlez de la situation dans un

 16   village, à Han Pijesak, et vous dites que deux autocars qui avaient à leur

 17   bord des travailleurs musulmans qui ont été arrêtés à un poste de contrôle

 18   juste avant l'entrée dans ce village. Cette situation que vous venez de

 19   nous relater, où vous dites qu'il n'y avait que des Musulmans dans ces

 20   autocars, nous permettrait de penser qu'il n'y avait que des Musulmans qui

 21   constituaient la population de ce village. Etait-ce typique en Bosnie avant

 22   la guerre, donc qu'il n'y avait que des Musulmans dans ces villages, que

 23   ces villages n'étaient pas ethniquement mixtes ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais essayer de vous expliquer cela. Han

 25   Pijesak est une ville, c'est le chef-lieu de la municipalité. Dans la

 26   municipalité de Han Pijesak, comme partout dans toutes les municipalités,

 27   il y a un territoire au sens large du terme qui compte d'autres localités.

 28   Et ces localités, dans notre cas, ce sont les villages. Plus concrètement,

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  1   dans ce secteur-là en direction de Zepa, c'est la partie est de la

  2   municipalité de Han Pijesak. Vous avez là quasiment une ligne nettement

  3   tracée, ligne ethnique entre les villages musulmans et ceux qui sont

  4   serbes. Cette frontière, pour répondre à votre question, nous permet de

  5   penser que dans ces usines travaillaient, bien sûr, les uns comme les

  6   autres.

  7   Mais les autocars qui les amenaient au travail, donc d'une part, les

  8   autocars qui amenaient les Musulmans, tout simplement vu l'emplacement

  9   géographique d'où ils venaient, n'amenaient que des Musulmans, parce qu'ils

 10   arrivaient des secteurs ou des villages qui étaient purement musulmans.

 11   Mais ce n'est pas typique pour la Bosnie en général avant 1992, puisque

 12   vous aviez largement une population mixte dans les villages, et pas

 13   seulement une population mixte dans des localités plus importantes ou dans

 14   des villes. Donc là c'était plutôt une exception. Mais il faudrait que l'on

 15   voie plus précisément sur le plan géographique comment cela se présente

 16   pour que vous voyiez mieux, en fait, comment cela se dessine.

 17   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Je vous remercie.

 18   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Thayer.

 19   M. THAYER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 20   Merci, Juge Nyambe.

 21   Q.  Monsieur, vous nous avez parlé de maisons incendiées par les forces

 22   serbes, des maisons musulmanes incendiées. Savez-vous quel a été le sort

 23   des mosquées dans ces municipalités après le départ forcé des Musulmans ?

 24   R.  Quant à ce que je sais et ce que j'ai vu, prenons concrètement le

 25   village à côté du mien, les mosquées, ça dépend un peu de la manière dont

 26   elles étaient construites, soit on les a détruites, soit physiquement, par

 27   la force brute, soit on les a incendiées. Et là, précisément, je pense que

 28   cette mosquée a été détruite par voie d'explosifs.

Page 4272

  1   Q.  Monsieur, vous vous y trouviez sur place. Est-ce que vous pourrez dire

  2   aux Juges de la Chambre quelle était la finalité de cette campagne menée

  3   par les forces serbes, dans le cadre de laquelle on a incendié des foyers

  4   musulmans et on a détruit des mosquées ?

  5   R.  Sincèrement, je vais vous dire qu'au départ, je ne comprenais pas

  6   pourquoi on faisait cela. Mais plus tard, j'en suis venu à comprendre que

  7   c'était une manière de créer les conditions qui allaient empêcher le retour

  8   des gens là-bas, donc on allait nettoyer cette zone de Musulmans.

  9   Q.  Vous nous avez déjà parlé des forces de maintien de la paix

 10   ukrainiennes qui sont arrivées à Zepa une fois que Zepa a été déclarée zone

 11   de sécurité. Est-ce que vous pourriez dire aux Juges de la Chambre où ils

 12   ont été cantonnés à Zepa, où est-ce qu'ils ont été déployés et quel était

 13   le nombre de ces militaires. Excusez-moi si j'ai posé une question

 14   complexe.

 15   R.  Je vais essayer d'avancer dans l'ordre de votre question. Donc la

 16   FORPRONU est entrée dans Zepa et Zepa a été démilitarisé. On n'en a pas

 17   encore parlé. Le QG de la FORPRONU à Zepa était basé au centre, dans le

 18   bâtiment de l'école élémentaire de Zepa.

 19   Et la FORPRONU était organisée de la manière suivante : tous les

 20   points d'entrée dans l'enclave de Zepa ont vu l'installation des postes de

 21   contrôle de la FORPRONU. Je pense qu'au départ il y en avait une dizaine de

 22   ces postes de contrôle. Avec le temps, je ne sais pas si ce nombre a évolué

 23   ou pas, mais à chacun de ces postes de contrôle, de mémoire, je vais vous

 24   dire qu'il y avait un transporteur avec un certain nombre de militaires. Et

 25   le QG, encore une fois, était basé au centre-ville, à l'école élémentaire.

 26   Et la FORPRONU contrôlait donc toutes les entrées et sorties de Zepa. Mais

 27   j'ajoute que seule la FORPRONU pouvait entrer dans Zepa et en sortir.

 28   Q.  Quel était leur nombre à peu près et qui commandait ces forces de

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  1   maintien de la paix à Zepa ?

  2   R.  Au départ, j'ai entendu parler quelque part du chiffre de 120

  3   militaires de la FORPRONU. En fait, c'étaient des membres du Bataillon

  4   ukrainien. Leur commandant, c'était M. Sejmun Dudnjik, et il me semble que

  5   son grade était celui de colonel.

  6   Q.  Et en juillet 1995, y avait-il plus ou moins que 120 militaires, pour

  7   autant que vous le sachiez ?

  8   R.  Non, je pense qu'il y en avait moins. En fait, je ne sais pas. Seule la

  9   FORPRONU sait exactement. Mais au moins à la fin, par rapport à ce qui

 10   s'est passé à la fin, il me semble qu'il y en avait considérablement moins

 11   que 120.

 12   Q.  Vous avez mentionné la démilitarisation il y a quelques instants.

 13   Parlons-en un petit peu. Est-ce que vous pouvez dire à la Chambre ce que

 14   signifie ce terme pour vous, et plus précisément dans le contexte de la

 15   création des zones de sécurité au printemps 1993 ?

 16   R.  En 1993, le Conseil de sécurité a voté dans une de ses résolutions,

 17   entre autres, la proclamation de la zone de sécurité à Zepa. D'après moi,

 18   cela impliquait également un accord local, et il me semble que c'est le

 19   général Mladic et le commandant de l'époque de l'ABiH, Sefer Halilovic, qui

 20   ont signé cet accord à l'aéroport de Sarajevo en présence des forces de la

 21   FORPRONU, bien sûr.

 22   Donc cela signifiait que du côté bosnien, on allait rendre toutes les

 23   armes, donc je parle des combattants qui avaient combattu jusqu'à ce

 24   moment-là à Zepa. Donc ils allaient remettre ces armes à la FORPRONU, qui

 25   allait assurer le contrôle de ces armes. Il me semble que du côté serbe,

 26   l'obligation était la suivante : ils devaient replier toutes leurs armes

 27   lourdes déployées autour de l'enclave de Zepa. Cela, ce processus de

 28   démilitarisation, a eu lieu après l'arrivée de la FORPRONU. Il n'y avait

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  1   pas, en fait, beaucoup d'armes sur place. Et c'est ce qui a été fait début

  2   mai ou à la mi-mai 1993. Pratiquement par la suite, l'organisation

  3   militaire de Zepa a cessé d'exister. Je veux dire, l'armée en tant

  4   qu'organisation n'existait plus à partir de ce moment-là, car ses fonctions

  5   de protection, c'est la FORPRONU qui s'en est chargée à partir de ce

  6   moment-là. C'est à peu près tout ce que j'en sais.

  7   Q.  Je vois que vous avez dit "formellement." Le colonel Palic, est-ce

  8   qu'il a continué d'occuper le poste de commandant de la Brigade de Zepa,

  9   est-ce qu'il a continué de jouer ce rôle après la signature de l'accord de

 10   démilitarisation ?

 11   R.  Je vais vous dire de mémoire ce dont je me souviens. Dans un premier

 12   temps, pendant la première année qui court de mai 1993, bien, la FORPRONU

 13   interdisait, contrôlait tout port d'armes éventuel. En fait, on n'avait pas

 14   le droit de porter une arme, qui qu'on soit, à Zepa. Et sur le plan de

 15   l'organisation, on ne parlait pas de l'armée. Mais ça, c'était formel. Mais

 16   en réalité, ce qui s'est passé, c'est que toutes les activités militaires

 17   ont été interrompues. On n'était plus déployé au front et on n'avait plus

 18   de ligne de défense, et plus personne n'y montait la garde. Donc tout ça a

 19   cessé d'exister à partir du mois de mai 1993. Mais formellement, Avdo était

 20   toujours commandement - comment dirais-je - sauf que c'est pendant la

 21   deuxième moitié de 1993 uniquement qu'on a commencé à renforcer de nouveau

 22   un petit peu les positions. Donc il y a eu une année qui s'est écoulée

 23   pendant laquelle on n'a quasiment eu aucune activité sur ce plan-là.

 24   L'armée, officiellement, n'était pas organisée, n'était pas déployée sur

 25   les lignes de front, et c'est de ça que je me souviens pour cette période-

 26   là.

 27   Q.  Monsieur, est-ce qu'il y a eu un changement à un moment donné, d'après

 28   vos souvenirs ? Vous avez mentionné du renforcement des positions au milieu

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  1   de l'année 1994. Est-ce qu'il y a eu plus que organisation formelle et

  2   activité formelle par l'armée musulmane à Zepa ?

  3   R.  Il me semble que j'ai parlé de la deuxième moitié de 1994, et non pas

  4   du milieu de cette année-là. Pendant cette année-là, il n'y a pas eu une

  5   plus grande organisation ou nouvelle organisation, mais de Sarajevo ou de

  6   l'état-major général de l'ABiH de l'époque, on a commencé à déployer

  7   certaines activités - et là, j'utilise le vocabulaire diplomatique, en

  8   fait, des activités de livraison d'arme à Zepa - donc il y a eu un certain

  9   nombre de préparatifs qui ont été menés pour agir en cas de nouveau conflit

 10   éventuel qui allait éclater à Zepa et dans ses environs.

 11   Q.  Vous n'avez pas besoin d'utiliser un langage diplomatique, Monsieur.

 12   R.  Très bien.

 13   Q.  Donc les Juges de la Chambre, vous allez pouvoir leur expliquer plus en

 14   détail la question des armes qui ont été envoyées à Zepa et certains

 15   préparatifs qui ont été menés, dans la mesure où vous étiez au courant,

 16   bien sûr, à l'époque. Que se passait-il ?

 17   R.  A l'époque, d'après ce que je sais, à plusieurs reprises, des armes et

 18   des munitions sont arrivées par hélicoptère, et il y avait dans ces envois

 19   d'autres éléments destinés à l'armée qui était à Zepa. Je sais que c'est

 20   dans la deuxième partie de l'année 1994, donc les derniers six mois et le

 21   début de l'année 1995.

 22   Q.  Et dans votre rôle officiel en tant que membre de la présidence de

 23   Guerre et président du comité exécutif, étiez-vous averti à l'avance de

 24   l'arrivée par hélicoptère d'armes, de munitions et d'équipement, ou est-ce

 25   que vous avez appris cela par un autre moyen ?

 26   R.  Oui, par un autre moyen. Officiellement, je n'étais au courant de rien

 27   avant. De telles informations n'étaient pas censées m'être transmises et je

 28   n'étais pas au courant avant l'événement.

Page 4276

  1   Q.  Et pourquoi ceci n'était-il pas censé vous être transmis ?

  2   R.  J'ai essayé d'expliquer au début de ma déposition. Cela relevait du

  3   commandement de l'armée et du système en place dans l'ABiH. Telle que cette

  4   armée était organisée à l'époque, l'information ne remontait que jusqu'au

  5   commandement de la brigade.

  6   Q.  Veuillez nous dire, s'il vous plaît, comment avez-vous appris

  7   l'existence de ces fournitures par hélicoptère ?

  8   R.  Bien, ces approvisionnements en hélicoptère se passaient la nuit

  9   surtout. Et le camp serbe a remarqué assez rapidement qu'il y avait ces

 10   hélicoptères qui volaient, et ils ont ouvert le feu sur ces hélicoptères,

 11   et les citoyens de Zepa pouvaient comprendre de quoi il s'agissait. Il y a

 12   eu plusieurs vols d'hélicoptère de ce type, et il y a eu plusieurs passages

 13   d'hélicoptères et je sais comment ces hélicoptères sont arrivés.

 14   Je dois vous dire que ces hélicoptères ne transportaient pas toujours des

 15   armes. Ces hélicoptères servaient à transporter des officiers de Kakanj à

 16   Sarajevo et Tuzla, et vice-versa. Dans ce cas, il n'y avait pas de

 17   transport d'armes à bord de ces hélicoptères. Ceci n'avait rien à voir avec

 18   les approvisionnements militaires.

 19   Q.  Est-ce qu'à aucun moment avant le mois de juillet 1995, Monsieur, avez-

 20   vous appris l'existence d'une quelconque opération militaire menée par

 21   l'"armija," des forces musulmanes qui intervenaient à partir de Zepa ?

 22   R.  Une légère correction. Nous étions l'ABiH. Nous n'étions pas les forces

 23   musulmanes. Et la réponse est oui, je peux confirmer qu'une action ou une

 24   opération était menée. Je crois que cela s'est passé en juin 1995. Je crois

 25   que l'opération s'est déroulée -- attendez, je vais essayer de me repérer

 26   et me souvenir de l'endroit où ceci s'est passé. Je crois que c'était dans

 27   la partie nord-ouest de l'enclave.

 28   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Le Juge Nyambe et moi-même, nous

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  1   avons une question supplémentaire à poser au témoin.

  2   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] J'ai besoin d'une précision, s'il

  3   vous plaît. A la page 34, ligne 21 à page 35, ligne 4, vous dites que ces

  4   approvisionnements par hélicoptère se déroulaient la nuit. A qui

  5   appartenaient ces hélicoptères et qui s'est occupé de ces hélicoptères qui

  6   arrivaient à Zepa ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agissait des hélicoptères de l'armée qui

  8   était l'armée de la BiH à ce moment-là, et ces approvisionnements en armes

  9   et autres éléments étaient menés par l'armée de la BiH ou l'ABiH afin

 10   d'approvisionner ces unités à Zepa et Srebrenica.

 11   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Merci.

 12   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je souhaite moi-même repartir en

 13   arrière et voir la page 35, ligne 8, où on peut lire : "Nous étions

 14   l'ABiH." A un moment pertinent des faits, étiez-vous vous-même un membre de

 15   l'armée ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. J'étais un membre des autorités civiles.

 17   Lorsque j'ai dit "nous," j'entendais par là toute l'enclave de Zepa, parce

 18   que l'enclave de Zepa appartenait au camp qui était sous le contrôle de la

 19   République de Bosnie-Herzégovine. C'est tout.

 20   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Monsieur

 21   Thayer.

 22   M. THAYER : [interprétation]

 23   Q.  Je vais poser une question de suivi après la question qui vous a été

 24   posée par Mme le Juge Nyambe. Donc ces vols de nuit qui ont attiré les tirs

 25   serbes, avez-vous vous-même pu observer un tel incident ?

 26   R.  Je crois que oui. Au moins une fois.

 27   Q.  Et d'après ce que vous savez, est-ce que ces hélicoptères sont tombés

 28   et ont été touchés par des balles serbes ?

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  1   R.  Oui. Au début du mois de mai 1995, un hélicoptère a été touché. Il est

  2   tombé au moment où on a ouvert le feu dessus. L'hélicoptère avait quasiment

  3   atteint son lieu d'atterrissage, et c'est là que l'hélicoptère s'est

  4   écrasé. A ce moment-là, l'hélicoptère ne transportait aucune arme, mais il

  5   y avait des officiers à l'intérieur qui revenaient de Kakanj. Et d'après ce

  6   que je sais, sur les 22 passagers, il y en a eu 11 ou 12 qui ont été tués,

  7   ainsi qu'une équipe de médecins qui allaient de Tuzla à Srebrenica. Après

  8   cet événement, les opérations de survol ont été interrompues et il n'y a

  9   plus eu de survol d'hélicoptère après cela organisé par l'ABiH.

 10   Q.  Vous avez parlé d'une opération militaire en particulier qui était

 11   menée par les forces de l'ABiH qui intervenaient à partir de Zepa. Vous

 12   avez dit que ceux-ci se trouvaient dans la partie nord-ouest de l'enclave.

 13   Vous souvenez-vous des détails de cette  opération ?

 14   R.  Je ne peux pas vous donner beaucoup de détails parce que c'était une

 15   ligne de commandement différente. Je sais que l'ordre d'attaque était venu

 16   -- ou plutôt, il eut été logique que l'ordre d'attaque vienne du

 17   commandement de la 28e Division à Srebrenica, parce qu'eux étaient censés

 18   recevoir cet ordre du 2e Corps à Tuzla. L'explication fournie était qu'il

 19   fallait apporter un soutien et une aide aux troupes qui se trouvaient dans

 20   le théâtre des opérations à Sarajevo. C'est ainsi que cette opération a été

 21   menée. Au plan militaire, elle n'avait pas d'importance particulière mais

 22   permettait de fournir un prétexte ou un alibi aux Serbes sous la forme

 23   d'attaque future contre les enclaves, et dans ce cas précis il s'agissait

 24   de l'enclave de Zepa.

 25   Q.  Nous avons compris que vous n'êtes pas un officier de l'armée, mais

 26   compte tenu de votre compréhension des événements à l'époque, quel était le

 27   but d'attaquer un endroit qui se trouvait au nord-ouest de l'enclave de

 28   Zepa pour venir en aide au théâtre des opérations à Sarajevo ? Dans quelle

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  1   mesure ces deux événements étaient-ils liés, et est-ce que vous l'aviez

  2   compris à l'époque ? Si vous ne le savez pas, nous pouvons passer à autre

  3   chose.

  4   R.  Est-ce que nous pouvons passer à autre chose. Je préfère parler d'autre

  5   chose.

  6   Q.  Bien. Je vais vous poser une ou deux questions qui sont liées à celle-

  7   ci. Je ne vais pas vous parler de l'objectif ou du but de cette opération.

  8   Est-ce qu'on vous en a parlé avant ?

  9   R.  Oui. En y repensant, je dois vous dire qu'on nous a informés de cette

 10   opération avant. Et si je me souviens bien, il y a une réunion qui s'est

 11   tenue avant cela, réunion de la présidence de Guerre. Nous avons évoqué cet

 12   ordre, et c'est le commandant Palic qui nous a dit qu'il avait reçu cet

 13   ordre et que cet ordre devait être exécuté. Si je me souviens bien, la

 14   plupart des membres de la présidence de Guerre étaient contre cette

 15   opération, ainsi que moi-même. Avdo Palic a dit qu'il avait reçu l'ordre et

 16   qu'il allait l'exécuter parce que cette opération, de toute façon, était

 17   contre-productive. Compte tenu de la situation générale, de notre situation

 18   et de la situation dans laquelle nous nous trouvions, cette opération a eu

 19   plus d'effets délétères que d'effets positifs.

 20   Q.  Et au mois de juillet 1995, pouvez-vous nous dire, d'après vos

 21   estimations, combien d'hommes en âge de porter des armes il y avait dans

 22   l'enclave de Zepa ?

 23   R.  D'après mon estimation, il y avait 1 200 hommes en âge de porter les

 24   armes. Il ne s'agissait pas que de combattants, et on ne pouvait pas dire

 25   qu'il s'agissait de combattants. Au fil des événements, nous avons pu

 26   constater qu'il n'y avait pas suffisamment d'armes pour tout le monde. Et

 27   lorsque vous parlez d'hommes en âge de porter les armes, vous voulez parler

 28   d'hommes qui sont âgés entre l'âge de 18 et 60 ans, et ils étaient au

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  1   nombre de 1 200 à peu près.

  2   Q.  Et ceci est lié à une question qui a été posée par Mme le Juge. Vous

  3   avez dit que vous n'étiez pas membre de l'armée. Avez-vous porté une arme

  4   pour la guerre ?

  5   R.  Non, je n'ai jamais porté d'arme. Au début de la guerre, c'était en

  6   1992, Avdo Palic, qui était alors notre commandant, a mis à notre

  7   disposition des moyens de communication, et j'ai appris par la suite qu'il

  8   m'avait officiellement nommé chef des transmissions, et c'était un poste au

  9   sein de la hiérarchie militaire. Mais après l'offensive de la VRS, ces

 10   moyens de communication étaient situés dans les maisons où les soldats

 11   étaient cantonnés. Donc il n'y avait aucun moyen de transmissions à Zepa en

 12   tant que tel, et ce, jusqu'à la deuxième moitié de l'année 1994.

 13   Par la suite, j'ai vu les rapports qui avaient été rédigés par le

 14   colonel Palic en 1994. Lorsque j'ai fourni ma première déposition, j'ai vu

 15   que j'avais été nommé chef des transmissions. Mais je dois vous dire encore

 16   une fois que je n'ai jamais porté d'arme et que je n'ai jamais servi dans

 17   l'armée dans l'ex-JNA en raison de problèmes de santé.

 18   Q.  Très bien. Alors, précisons une ou deux choses que je vois dans le

 19   compte rendu d'audience, Monsieur. La première, vous avez évoqué une

 20   offensive de la VRS et les moyens de transmissions que vous avez abordés.

 21   Pourriez-vous nous dire ce que vous vouliez dire ? Vous avez dit qu'il n'y

 22   avait pas de moyes de transmissions à Zepa avant la deuxième moitié de

 23   1994. Qu'est-ce que vous entendiez par cela, ces moyens de communications ?

 24   Comment l'ABiH disposait-elle de ces moyens et comment se fait-il que ces

 25   moyens de communications n'étaient plus à la disposition de l'ABiH ?

 26   R.  D'après mes souvenirs, en 1992, une opération militaire a été menée. Un

 27   des détachements de l'ABiH a lancé une attaque contre une localité qui se

 28   trouvait à proximité de Zepa, et cette localité était à ce moment-là

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  1   contrôlée par la JNA, la JNA de l'époque - et je ne sais pas si l'armée

  2   était encore la JNA - quoi qu'il en soit, ils se sont saisis de postes

  3   radio manuels qui sont en général utilisés pour la transmission entre les

  4   troupes et l'armée.

  5   Lorsque j'ai parlé des moyens de transmissions, c'est cela que

  6   j'avais à l'esprit. Je pense qu'il s'agissait de radio RUP, les R-U-P. On

  7   se servait de cassettes, et c'est l'ancienne JNA qui se servait de cela

  8   comme moyen de transmissions. Après l'offensive de la VRS, ceux-ci avaient

  9   disparu. Autrement dit, ils n'étaient plus disponibles. Je suppose qu'ils

 10   étaient restés dans le village de Krivace, où le commandant Avdo Palic les

 11   avait entreposés. Et jusqu'à la deuxième moitié de 1994, l'armée ne

 12   disposait d'aucun moyen de transmissions.

 13   Ensuite, un groupe de personnes s'est rendu à Kakanj à pied - je

 14   crois qu'ils sont allés à Kakanj - et ont rapporté de nouveaux moyens de

 15   transmissions, surtout un système de communications par paquets. C'est un

 16   système de transmissions radio protégées qui a été utilisé par la suite

 17   pour communiquer à Srebrenica et à Kakanj. Je crois que plusieurs radios

 18   portatives ont été rapportées à ce moment-là. C'est à cela que je pensais

 19   lorsque je vous ai fourni ma précédente réponse.

 20   Q.  Donc je vais me concentrer sur ce premier groupe de radios RUP que

 21   l'ABiH avait pour un temps limité. Le colonel Avdo Palic vous a demandé de

 22   faire quoi à propos de ces radios ?

 23   R.  Bien, je ne sais pas si je les ai vues, en réalité, si je les ai toutes

 24   vues. D'après les rumeurs, il fallait faire en sorte que ces radios soient

 25   utilisables. Je suis ingénieur et je m'y connais dans le domaine

 26   électronique. Je suppose que le colonel Palic pensait que cela pouvait

 27   peut-être être utile à cet endroit. D'après ce dont je ne me souviens, je

 28   ne l'ai jamais vraiment vues. Et j'en ai juste parlé une fois avec lui, si

Page 4283

  1   je me souviens bien.

  2   Q.  Dans vos réponses précédentes, vous avez dit que plus tard vous avez vu

  3   des rapports qui avaient été rédigés par le colonel Palic. Est-ce que vous

  4   pourriez nous dire ce que vous entendiez par là lorsque vous avez dit il y

  5   a quelques instants, et je vous cite :

  6   "Plus tard, j'ai vu ces rapports qui avaient été rédigés par le colonel

  7   Palic."

  8   De quoi parlez-vous ?

  9   R.  Je parle de ce qui suit : pendant la période pertinente, ou peut-être

 10   cinq ou six mois après cela, je n'ai pas pu communiquer avec le colonel

 11   Palic. J'ai passé le plus clair de mon temps à Zeleni Jadar et je cherchais

 12   surtout de la nourriture. Rien n'était organisé. Il n'y avait pas de centre

 13   ou de quelque chose de ce genre, et lorsque je vous ai dit que j'ai vu

 14   certaines choses après, par la suite, j'ai vu ce rapport-là il y a trois

 15   ans et demi. Je ne l'avais pas vu auparavant. Je n'avais pas été tenu

 16   informé de ce rapport. Ce rapport avait été rédigé en 1994, et dans ce

 17   rapport, le colonel Palic avait fourni l'historique de la Brigade de Zepa,

 18   le nom de certaines personnes qui occupaient certaines fonctions à

 19   certaines époques. Et un des postes qu'il a cités était mon poste, qui

 20   était celui du chef des transmissions. C'est cela que je voulais dire

 21   lorsque je vous ai dit que j'ai vu certaines choses après.

 22   Q.  Donc durant cette période qui nous importe ici, saviez-vous que le

 23   colonel Palic vous avait nommé chef des transmissions ?

 24   R.  En y réfléchissant à nouveau, je crois que je le savais effectivement.

 25   Je ne peux pas nier cela, mais on peut dire que pendant près de six mois,

 26   il n'y avait pratiquement pas de contacts entre lui et moi et je n'avais

 27   pas vraiment pris tout cela au sérieux. Et déjà en 1993, soit en avril,

 28   soit au début du mois de mai, j'étais devenu le président du comité

Page 4284

  1   exécutif.

  2   Q.  Et durant tout votre mandat au sein du comité exécutif, avez-vous

  3   fourni d'autres services ou avez-vous officié en tant que consultant dans

  4   le domaine des transmissions pour l'armée ?

  5   R.  Bien, vous savez, M. Palic et moi-même sommes amis. Nous sommes allés à

  6   la même école primaire. Nous avons le même âge. On se voyait presque tous

  7   les jours. On se saluait tous les jours, tout du moins. Cependant, pour ce

  8   qui est d'autres activités, et principalement d'activités militaires, je

  9   n'en avais aucune. Je n'ai participé à aucune activité liée à de nouveaux

 10   moyens de transmissions. Une nouvelle personne avait été nommée au poste de

 11   chef des transmissions et c'est lui qui avait été chargé d'aller chercher

 12   ces radios. Et lorsqu'il était cantonné à Kakanj, il a été formé pour

 13   utiliser ce matériel. Par conséquent, il n'avait pas besoin d'une aide

 14   locale.

 15   Q.  Est-ce que vous connaissez le nom de cette personne ?

 16   R.  Je pense que son nom de famille était Gusic. Par contre, je suis

 17   désolé, mais je ne me souviens pas de son prénom. Mais son nom de famille,

 18   c'est Kusic.

 19   Q.  Dans votre déposition, à la page 41, vous faites référence à votre

 20   première déposition en 1994. Est-ce que c'est en 1994 que vous avez déposé

 21   pour la première fois ici ou est-ce que c'est durant une autre année que

 22   vous avez déposé pour la première fois ?

 23   R.  Non. J'aimerais revoir cette page. Je crois que j'avais juste dit lors

 24   de ma précédente déposition. Je n'avais pas mentionné de date. Et, bien

 25   sûr, je n'ai pas déposé en 1994.

 26   Q.  Très bien. Alors, est-ce que vous pourriez dire aux Juges de la Chambre

 27   quand vous avez déposé pour la première fois devant ce Tribunal ?

 28   R.  Vous voulez dire ici ?

Page 4285

  1   Q.  Oui.

  2   R.  C'était en 2007, il y a trois ans ou trois ans et demi, à la fin du

  3   mois de mars ou au début du mois d'avril.

  4   Q.  Très bien. A compter du printemps 1993 lorsque vous êtes arrivé à Zepa,

  5   je crois me souvenir que vous nous avez dit être arrivé en mars, mais

  6   disons donc le printemps 1993 jusqu'au printemps 1995, comment décririez-

  7   vous le niveau d'activité de la VRS dans la zone de Zepa ?

  8   R.  Durant cette période, autant que je me souvienne, il y a eu des

  9   bombardements sporadiques, mais il n'y a pas eu d'attaques d'infanterie

 10   contre l'enclave de Zepa. Je pense que les bombardements en question

 11   étaient une réponse à certains événements qui se produisaient à l'extérieur

 12   de l'enclave de Zepa, mais je parle de mémoire. En d'autres termes, il n'y

 13   avait pas d'attaques, d'attaques d'infanterie. Et de temps en temps, il y

 14   avait des bombardements.

 15   Q.  Lorsque vous dites que selon vous ces bombardements étaient une réponse

 16   à des événements qui se produisaient hors de l'enclave de Zepa,

 17   qu'entendez-vous par là, Monsieur le Témoin ? Et quelles étaient les cibles

 18   de ces bombardements ?

 19   R.  J'ai dit que ceci était lié à des événements qui se produisaient hors

 20   de l'enclave de Zepa, et ce que je voulais dire, c'est qu'il s'agissait

 21   probablement de riposte.

 22   Q.  Je vous repose la question. Quelles étaient les cibles ? Quelles

 23   étaient les cibles touchées par ces bombardements de

 24   riposte ?

 25   R.  A Zepa même, il n'y avait pour ainsi dire aucune cible militaire. Il

 26   s'agissait de villages, dans cette zone, et durant cette période il n'y a

 27   pas de bombardement intensif; cependant, dans la période précédente, ils

 28   ciblaient principalement des zones d'habitation, des maisons dans Zepa

Page 4286

  1   même.

  2   Q.  Je voudrais maintenant que nous nous concentrions sur 1995, la période

  3   précédant l'attaque de la VRS en juillet. Vous souvenez-vous de

  4   bombardements qui auraient eu lieu durant cette période ?

  5   R.  Je crois me souvenir que le village de Pripecak a été bombardé. Des

  6   bombardements provenaient de l'autre rive de la Drina. Ce n'est pas la

  7   Serbie. Je crois que c'était les positions de la Brigade de Visegrad qui

  8   étaient cantonnées là-bas, brigade appartenant à l'armée de la Republika

  9   Srpska. Si je devais vous donner une période, je dirais que c'était la

 10   dernière partie du mois de juin. Il s'agissait de bombardements très

 11   importants et très intenses.

 12   Q.  Avant les attaques de la VRS en juillet 1995, j'aimerais savoir si vous

 13   vous souvenez de bombardements qui, selon vous, pour utiliser vos propos,

 14   étaient liés à des événements qui se produisaient hors de l'enclave de Zepa

 15   ?

 16   R.  Oui. Je crois qu'une fois ils ont pris pour cible le centre de Zepa et

 17   de mémoire, je pense qu'il s'agissait d'une réponse de la VRS au

 18   bombardement de l'OTAN de certaines cibles à Jahorina. Je crois que je peux

 19   établir un lien entre ces deux éléments.

 20   Q.  Est-ce que vous pourriez nous dire durant quel mois cela s'est produit,

 21   ces bombardements ?

 22   R.  Il est possible que cela se soit passé en mai 1995.

 23   M. THAYER : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les

 24   Juges, je vais passer aux événements de juillet 1995 et je voulais voir si

 25   les Juges de la Chambre avaient des questions concernant les événements que

 26   nous venons d'aborder.

 27   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Vous avez raison. La Juge Nyambe a

 28   une question.

Page 4287

  1   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Oui. Je voudrais obtenir une

  2   précision auprès du témoin.

  3   Je ne peux pas vous donner la page exacte du compte rendu d'audience,

  4   mais dans votre déposition, vous avez dit que vous aviez été nommé chef des

  5   transmissions par M. Palic; est-ce exact ? Pendant une période de six mois

  6   ou quelque chose comme ça; est-ce exact ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais répondre de la manière suivante :

  8   cette nomination est venue de Palic. J'ai essayé d'obtenir ces précisions.

  9   Cette nomination était valable pour une période de six mois, même si durant

 10   cette période je n'ai pratiquement eu aucun contact avec Palic. Peut-être

 11   que cela rend les choses plus claires. Palic m'a nommé pendant une période

 12   de six mois.

 13   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Et il s'agissait de quelle période de

 14   six mois ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Autant que je me souvienne, c'était de

 16   septembre 1992 à mars 1993, plus ou moins.

 17   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Merci.

 18   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Une question du Juge Mindua.

 19   M. LE JUGE MINDUA : Oui, Monsieur le Témoin. J'ai une question que j'avais

 20   manqué de poser au moment ou vous aviez développé le sujet. Je le fais

 21   maintenant parce qu'on a quelques minutes avant la pause. Si nous allons au

 22   transcript, page 30, lignes 10 à 12 -- page 30, lignes 10 à 12, lorsque

 23   vous avez parlé de la destruction de votre village et des villages

 24   environnants, vous avez notamment signalé le fait que les mosquées ont été

 25   brûlées ou détruites. Celles qui ont été détruites, à tout du moins, ce

 26   dont vous êtes sûr, c'est que c'était par des explosifs. Alors, j'ai deux

 27   petites questions. Première question. Avez-vous vous-même vu ces mosquées

 28   brûlées et détruites dans les villages environnants, ou vous en avez

Page 4288

  1   entendu parler ?

  2   Deuxième question. Pour les mosquées détruites par explosifs, vous

  3   aviez vous-même dit que vous n'aviez pas des connaissances militaires et

  4   qu'il y avait des opérations militaires engagées à ce moment. Alors, ces

  5   explosifs -- ou plutôt, les mosquées ont-elles été détruites au cours des

  6   opérations militaires ou a-t-on placé des explosifs délibérément pour

  7   détruire les mosquées ? Voilà.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Juste pour répondre à votre première question.

  9   Je cherche à voir cela ici à l'écran.

 10   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] C'était pour savoir si vous aviez été

 11   témoin oculaire de la destruction de ces mosquées.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je vois. C'était ça, la première

 13   question. Je n'ai pas vu ça de mes propres yeux, le geste même de

 14   destruction, mais j'ai vu les restes après la destruction, quelques jours

 15   plus tard. Je parle plus concrètement de la mosquée du village qui se

 16   trouve à côté de l'endroit où je suis né. Ça c'était votre première

 17   question. Puis la deuxième, est-ce que vous pourriez m'aider, s'il vous

 18   plaît ?

 19   M. LE JUGE MINDUA : La deuxième, c'est la destruction par des explosifs,

 20   étaient-ce des explosifs placés délibérément, ou bien c'était pendant les

 21   opérations militaires ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je l'ai dit au tout début, je vous ai

 23   parlé des cas que je connais personnellement. Pour le reste, j'en ai appris

 24   par la presse. Donc il y peut-être eu des cas où cela s'est produit dans le

 25   cadre du conflit armé mais la majorité des cas étaient les autres, où on a

 26   détruit, puis par la suite on s'est emparé de la localité. Telle serait ma

 27   réponse.

 28   M. LE JUGE MINDUA : [interprétation] D'accord. Merci beaucoup.

Page 4289

  1   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Thayer, pensez-vous que ce

  2   serait logique de faire la deuxième pause maintenant, avant d'aborder un

  3   autre thème ?

  4   M. THAYER : [interprétation] Oui. Tout à fait, Monsieur le Président.

  5   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Très bien. Nous allons donc lever la

  6   séance et nous reprendrons à 18 heures.

  7   --- L'audience est suspendue à 17 heures 33.

  8   --- L'audience est reprise à 18 heures 02.

  9   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, Monsieur Thayer, poursuivez.

 10   M. THAYER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 11   Q.  Monsieur le Témoin, nous allons poursuivre. Rebonjour.

 12   R.  Rebonjour.

 13   Q.  Vous souvenez-vous de la date de la chute de Srebrenica ?

 14   R.  Oui, le 12 juillet 1995.

 15   Q.  Après la chute de Srebrenica, est-ce qu'il y a eu des contacts entre la

 16   VRS et les autorités de Zepa ?

 17   R.  Une fois que Srebrenica est tombée, le 12 juillet 1995, ce même jour,

 18   par le truchement du commandant, du colonel Sejmon Dudnjik, de la FORPRONU,

 19   un appel a été envoyé à la présidence de Guerre leur demandant d'entrer en

 20   contact avec les Serbes.

 21   Q.  Qui a été à l'origine de cette demande d'organiser des pourparlers avec

 22   les Serbes ?

 23   R.  Peut-être que je devrais apporter des précisions. C'est la présidence

 24   de Guerre qui a reçu cette demande qui émanait de la FORPRONU. Le colonel

 25   Sejmon Dudnjik, autant que je me souvienne, a transmis cette demande au

 26   colonel Palic. Il a dit que soit lui, soit quelqu'un d'autre devrait être

 27   nommé pour rencontrer les représentants des Serbes. Peut-être que je

 28   devrais développer pour expliquer comment les choses se sont déroulées.

Page 4290

  1   Cette demande est arrivée en fin de journée le 12 juillet 1995. Après

  2   réception, tous les membres de la présidence de Guerre se sont réunis afin

  3   de discuter de cette demande. En principe, les autorités locales, sans

  4   accord des autorités politiques et militaires au niveau de la Bosnie-

  5   Herzégovine, ne peuvent pas entrer en contact au niveau local, et dans ce

  6   cas-là, nous parlons de Zepa. Compte tenu de cela, la présidence de Guerre

  7   a essayé de prendre le contact en utilisant des moyens de communications

  8   par paquets, que nous avons abordés précédemment, afin d'aborder les

  9   détails de cette demande. Ceci a été transmis aux instances dirigeantes,

 10   plus précisément le commandement militaire, et indépendamment de cela, la

 11   présidence de Guerre a essayé également d'évaluer tous les événements de la

 12   situation. Cette réunion a duré la quasi-totalité de la nuit allant du 12

 13   au 13 juillet 1995. Et nous avons décidé d'entrer en pourparlers. Lorsque

 14   nous avons essayé de déterminer qui devait se rendre à ces pourparlers, il

 15   a été décidé que ce serait moi avec un autre membre de la présidence de

 16   Guerre, M. Mujo Omanovic.

 17   Q.  Je voudrais revenir un petit peu en arrière et vous poser quelques

 18   questions afin d'obtenir des précisions sur deux points. Tout d'abord, cela

 19   vous paraît peut-être évident, mais j'aimerais que vous nous expliquiez qui

 20   a contacté le colonel Dudnjik au départ afin d'entrer en contact avec le

 21   colonel Palic ? Qui est entré en premier en contact avec le colonel Dudnjik

 22   ?

 23   R.  Bien, c'étaient les Serbes. Je ne sais pas qui précisément. Je ne sais

 24   pas s'il s'agissait du commandant de la Brigade de Rogatica, de la VRS ou

 25   s'il s'agissait de quelqu'un d'autre. Je ne dispose pas de cette

 26   information.

 27   Q.  Très bien. Vous avez également parlé des autorités locales, à savoir

 28   vous-même, et vous avez dit que vous aviez besoin du feu vert d'autorités

Page 4291

  1   ou d'instances au niveau de la Bosnie-Herzégovine. Qu'entendez par des

  2   autorités ou des instances au niveau de la Bosnie-Herzégovine ?

  3   R.  Je ne peux pas vous donner le niveau exact et quel est le niveau de

  4   gouvernement qui aurait dû nous donner la réponse. Quoi qu'il en soit, nous

  5   étions en contact avec M. Alija Izetbegovic, qui était le président de la

  6   présidence de Bosnie-Herzégovine. Nous avons ensuite attendu sa réponse,

  7   qui serait soit affirmative, soit négative. Et là, nous parlons, bien sûr,

  8   d'instances politiques.

  9   Pour ce qui est des instances militaires, le commandant de l'ABiH de

 10   l'époque, c'était Rasim Delic. Je ne dispose pas de suffisamment

 11   d'informations pour savoir comment la demande est arrivée, si elle est

 12   passée par le 2e Corps ou par l'état-major général. Ça, je ne peux pas vous

 13   le dire.

 14   Q.  Et savez-vous où se trouvaient le président Izetbegovic et le

 15   commandant Delic à ce moment-là ? Savez-vous où ils se

 16   trouvaient ?

 17   R.  De manière générale, le président Izetbegovic se trouvait à Sarajevo.

 18   Pour ce qui est de Rasim Delic, le commandant, autant que je sache, il se

 19   trouvait à Kakanj, à l'état-major général. Je ne sais pas où ils se

 20   trouvaient exactement à ce moment donné, mais c'est à ces endroits-là

 21   qu'ils se trouvaient et c'est à ces endroits-là qu'ils s'acquittaient de

 22   leurs fonctions.

 23   Q.  Très bien. Donc il a été décidé que vous-même accompagné de M. Omanovic

 24   participeant à ces discussions. Que s'est-il passé ensuite ?

 25   R.  Oui, M. Omanovic. Ensuite, nous avons informé la FORPRONU, et plus

 26   précisément le colonel Dudnjik, qui nous avait dit que l'on devrait

 27   utiliser un véhicule de la FORPRONU et que la réunion devait se tenir au

 28   poste de contrôle numéro 2 de la FORPRONU, poste de contrôle situé à

Page 4292

  1   Boksanica, qui est dans la partie sud de l'enclave de Zepa lorsque l'on

  2   vient de Rogatica. A cette époque, il s'agissait de la zone frontalière de

  3   l'enclave de Zepa.

  4   Q.  Et qu'avez-vous fait ensuite ?

  5   R.  Si mes souvenirs sont bons, même s'il s'est passé beaucoup de temps

  6   depuis, c'était dans les heures de la matinée que moi-même et Mujo Omanovic

  7   avons pris ce véhicule de la FORPRONU. Nous sommes partis au poste de

  8   contrôle numéro 2, situé à Boksanica. Et si mes souvenirs sont bons, du

  9   côté serbe, il y avait sur place le général Zdravko Tolimir, et il me

 10   semble que c'était le lieutenant-colonel Rajko Kusic qui était, du côté de

 11   la VRS, le commandant de la Brigade de Rogatica. Franchement, à ce moment-

 12   là, je ne connaissais pas le général Zdravko Tolimir. C'était dû à la

 13   pénurie de moyens de communications. Il n'y avait pas de médias, il n'y

 14   avait pas de courant, et donc on a très peu suivi les événements à Zepa.

 15   Q.  Reprenons un instant, s'il vous plaît. Vous êtes arrivés à bord d'un

 16   véhicule de la FORPRONU au poste de contrôle de Boksanica, mais j'aimerais

 17   savoir quel a été votre point de départ ?

 18   R.  On est parti du centre de Zepa, du siège de la FORPRONU. Je répète

 19   qu'ils étaient basés à l'école primaire de Zepa.

 20   Q.  Au mieux, pourriez-vous nous préciser le moment de votre départ du

 21   centre de Zepa ? A quelle heure êtes-vous partis pour vous rendre à cette

 22   réunion ?

 23   R.  Il m'est difficile de vous répondre à cette question. Disons, entre 10

 24   heures 30 et 11 heures 30. C'est à ce moment-là que nous nous sommes

 25   déplacés. Je pense que nous sommes partis du centre de Zepa un petit peu

 26   avant midi. Mais c'était il y a très longtemps. Je souligne qu'il m'est

 27   difficile d'en parler puisque je n'ai pas pris de notes du tout.

 28   Q.  Et au mieux, pourriez-vous évaluer le temps qu'il vous a fallu pour

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  1   arriver à Zepa ? Pourriez-vous nous décrire aussi la route, l'état de la

  2   route, que vous avez prise pour vous rendre là-bas ?

  3   R.  Je pense qu'il faut parler de l'arrivée à Boksanica, et non pas de

  4   l'arrivée à Zepa. Je ne sais pas si la question a été bien formulée.

  5   Q.  Oui, vous avez tout à fait raison. J'ai fait un lapsus. Donc j'aimerais

  6   savoir combien de temps il vous a fallu pour vous rendre de Zepa à

  7   Boksanica, s'il vous plaît.

  8   R.  Donc je vais vous donner une petite description. Boksanica se situe au

  9   sud de l'enclave de Zepa. En quittant le centre de Zepa, on y arrive en

 10   empruntant un chemin qui est très tortueux, étroit. Puisque c'est la

 11   première fois que j'ai pris cette route ce jour-là, je dirais que dans ces

 12   conditions, entre le centre de Zepa et le poste de contrôle numéro 2 de la

 13   FORPRONU de Boksanica, bien, que ça a pris à peu près 30 minutes pour

 14   franchir cette distance.

 15   Q.  Et avant la réunion, d'après ce que vous nous avez dit, vous ne saviez

 16   pas qui était le général Tolimir. Vous connaissiez son nom ou le nom du

 17   colonel Kusic avant la réunion ?

 18   R.  Je vous ai dit que je ne savais pas qui était le général Tolimir, que

 19   je ne connaissais pas ses fonctions. Il est possible que j'en aie entendu

 20   parler ou que je l'aie entendu diffuser par des médias, mais je ne l'avais

 21   pas retenu. Et quant au colonel ou lieutenant-colonel Rajko Kusic - je ne

 22   sais pas exactement quel était son grade à l'époque - je savais de qui il

 23   s'agissait, parce que c'était le commandant de la Brigade de Rogatica de

 24   l'armée de la Republika Srpska, et c'est elle qui tenait les lignes de

 25   front face à Zepa. Encore que, si je puis ajouter, personnellement, je

 26   n'avais pas eu l'occasion de le rencontrer avant ce moment-là, je veux dire

 27   le colonel Rajko Kusic, c'est de lui que je parle.

 28   Q.  Pourriez-vous à présent dire aux Juges de la Chambre ce qui s'est

Page 4294

  1   produit à partir du moment où vous avez rencontré le général Tolimir et le

  2   colonel Kusic ?

  3   R.  Pendant la réunion, si je me souviens bien, du côté serbe, il y avait

  4   le général Zdravko Tolimir, il y avait le colonel Rajko Kusic, la FORPRONU

  5   était représentée, me semble-t-il, par le colonel Sejmon Dudnjik, et il y

  6   avait moi-même et Mujo Omanovic. Dans un premier temps, au début de la

  7   réunion, le général Tolimir nous a dit à peu près la chose suivante :

  8   Srebrenica est tombée. Le tour de Zepa est arrivé. Alors, nous pouvons

  9   procéder de deux manières. Ce que je vous offre, c'est que vous sortiez

 10   tous de Zepa, qu'il y ait une évacuation. Vous allez monter dans des

 11   autocars et vous allez partir.

 12   Puis je lui ai posé une question. Je lui ai demandé si un homme âgé

 13   de 35 ans pouvait prendre les membres de sa famille et partir pour le

 14   territoire sous le contrôle de l'ABiH. Le général Tolimir m'a répondu :

 15   "Mais oui, bien entendu."

 16   S'il on n'avait pas accepté cela, il y avait une alternative, à

 17   savoir l'option militaire, en d'autres termes la prise de Zepa par des

 18   moyens militaires. Cette réunion n'a pas duré très longtemps, si je me

 19   souviens bien. J'ai informé le général Tolimir du fait que nous n'étions

 20   pas habilités à prendre une décision quelle qu'elle soit à ce moment-là,

 21   que nous étions venus pour recevoir les exigences formulées par la partie

 22   serbe. Nous nous sommes mis d'accord sur le fait que nous allions informer

 23   le reste de la présidence de Guerre de ce qui a été formulé par la partie

 24   serbe, et que nous allions répondre à la partie serbe en passant par la

 25   FORPRONU qui allait jouer le rôle d'intermédiaire. Il me semble que c'est

 26   le colonel Sejmon Dudnjik qui allait être chargé de relayer la réponse.

 27   De mémoire, je dirais encore une fois que cette réunion n'a pas duré

 28   longtemps. Nous avons pris le véhicule de la FORPRONU pour rentrer à Zepa.

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  1   Est-ce que je peux continuer ?

  2   Q.  Je vais vous poser quelques questions de suivi. A votre avis, Monsieur,

  3   combien a duré cette réunion ? Est-ce que vous pouvez évaluer sa durée ?

  4   R.  Cela m'est vraiment très difficile. Il me semble que cette réunion n'a

  5   pas pris plus qu'une heure, une soixantaine de minutes. Mais encore une

  6   fois, c'est de mémoire que je parle. L'événement s'est produit il y a

  7   longtemps. Je ne sais pas. Peut-être que ça a duré quelques minutes de

  8   plus, mais au mieux c'est à cela que j'évalue la durée de cette réunion.

  9   Q.  Vous nous avez dit que cette réunion n'a pas duré très longtemps. Est-

 10   ce que vous pourriez en citer les raisons aux Juges de la Chambre ?

 11   R.  De mémoire, je dirais que d'après le général Tolimir, c'était - comment

 12   dirais-je - le seul point, le seul sujet de discussion, et qu'il n'y avait

 13   plus rien à ajouter, que puisque nous avions dit que nous n'étions pas

 14   habilités à aborder les questions plus détaillées de l'évacuation, je pense

 15   que c'est comme ça que la réunion s'est terminée.

 16   Q.  Vous souvenez-vous qu'on vous ait posé des questions lorsque vous êtes

 17   venu déposer ici pendant l'autre procès, devant l'autre Chambre, d'un

 18   document - je précise aux fins du compte rendu d'audience qu'il s'agit de

 19   la page 9 852 du compte rendu d'audience de l'autre procès - d'un document

 20   sur lequel figure l'heure de 10 heures 50 du matin, donc dix minutes avant

 21   11 heures, un document qui porte la date du 13 juillet. Est-ce que vous

 22   vous souvenez avoir

 23   dit :

 24   "Je vois que c'est le 13 juillet à 10 heures 50. Je pense que nous

 25   étions déjà partis pour participer aux négociations, et si l'heure indiquée

 26   ici est exacte, pour autant que je m'en souvienne, nous étions déjà en

 27   train de négocier.

 28   Est-ce que vous vous souvenez de cette réponse que vous avez apportée

Page 4296

  1   dans l'affaire Popovic ?

  2   R.  Oui. Je m'en souviens. Je pense que ce document comporte la position

  3   des autorités, l'avis des autorités de l'armée au sujet de la légalité de

  4   notre présence à cette réunion. Je ne sais pas si je me trompe ou non.

  5   Q.  Oui, tout à fait. C'est de ce document-là que je parle. Donc lorsque

  6   vous avez vu ce document, vous avez parlé de l'heure qui est écrite là-

  7   dessus, donc le moment où le document a été reçu à Zepa.

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Que c'est 10 heures 50. Et vous avez dit :

 10   "…pour autant que je m'en souvienne, nous étions déjà en train de

 11   négocier à ce moment-là."

 12   Donc ma question était de voir si cet extrait de votre témoignage

 13   devant l'autre Chambre vous permet de situer mieux le moment. Laquelle de

 14   vos déclarations est plus précise, plus exacte ? Que vous étiez déjà en

 15   train de négocier un petit peu avant 11 heures du matin du 13, ou que vous

 16   êtes partis du centre de Zepa avant midi le 13 ?

 17   R.  Ecoutez, je ne sais pas si j'ai déjà apporté un commentaire là-dessus.

 18   Pour autant que je m'en souvienne, nous n'avons pas attendu de réponse pour

 19   savoir si nous devions partir ou pas. Je crois qu'une décision a été prise

 20   sur le lieu pour voir de quoi il s'agissait, et ce document est peut-être

 21   arrivé alors que nous étions déjà en route. Avant cela, la décision avait

 22   été prise de partir quelles que soient les positions des dirigeants

 23   politiques et militaires à Sarajevo. C'est comme cela que je peux vous

 24   expliquer ceci. Nous n'avons pas attendu l'arrivée du document. Le document

 25   est sans doute arrivé soit au moment où nous étions déjà en route, soit au

 26   moment où nous étions déjà en réunion. C'est très difficile de vous le dire

 27   15 ans après que cet événement se soit déroulé. Alors, soit nous étions

 28   déjà en route pour Boksanica, soit nous étions déjà à la réunion.

Page 4297

  1   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Thayer, nous avons une

  2   demande. Est-ce que vous pouvez peut-être afficher à l'écran cet extrait du

  3   compte rendu d'audience à l'affaire Popovic. Ce serait utile pour nous et

  4   nous permettrait de comprendre le contexte.

  5   M. THAYER : [interprétation] Certainement, Monsieur le Président. Je

  6   demande simplement à ce qu'il ne soit pas diffusé à l'extérieur, parce

  7   qu'il y a le nom qui figure en haut du document. Encore une fois, ceci date

  8   de 2007, page du compte rendu

  9   d'audience 9 852. 

 10   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Thayer, savez-vous que le

 11   compte rendu d'aujourd'hui porte le nom du témoin

 12   actuel ?

 13   M. THAYER : [interprétation] Oui, je suis tout à fait au courant, Monsieur

 14   le Président. C'est quelque chose dont je suis au courant. Je vous remercie

 15   de m'avoir signalé cela.

 16   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Une autre question. Vous pouvez poser

 17   la question au témoin. Vous avez posé la question au témoin de cette

 18   manière-là. Il a dit qu'il est arrivé à Zepa avant midi, mais en réalité il

 19   se souvient d'autre chose lorsqu'il nous a fourni deux autres de ses

 20   réponses. Il a dit que c'était dans une de ses réponses vers 10 heures et

 21   demi, et dans une autre vers 11 heures 30, et la troisième, très peu de

 22   temps avant midi. Je vous demande de bien vouloir préciser cela, parce

 23   qu'il y a différentes explications qui sont fournies pour l'heure.

 24   M. THAYER : [interprétation] Mais c'est exactement là où je veux en venir.

 25   Nous avons une limite dans le temps qui est maximale, où nous avons dit un

 26   petit peu avant midi; ce qui vient d'être indiqué par le Président de la

 27   Chambre. Et maintenant, nous avons votre déposition où vous dites que vous

 28   vous êtes souvenu de l'heure à laquelle ce document a été réceptionné à

Page 4298

  1   Zepa, à 10 heures 50 du matin --

  2   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

  3   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] On m'a dit qu'il y a des problèmes

  4   techniques, parce que ce passage du compte rendu d'audience dans l'affaire

  5   Popovic n'est pas disponible en ce moment.

  6   M. THAYER : [interprétation] Nous pouvons vous l'afficher par

  7   l'intermédiaire du système Sanction.

  8   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Donc nous avons une autre version à

  9   l'écran qui ne sera pas diffusée à l'extérieur. Pourriez-vous nous indiquer

 10   quel passage vous intéresse ?

 11   M. THAYER : [interprétation] La réponse se trouve à la ligne 8 à 14. On lui

 12   montre une pièce à conviction, comme nous pouvons le voir, qui est datée du

 13   13 juillet, et l'heure indiquée ici est celle de 10 heures 50 du matin.

 14   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie. Je souhaite saluer toutes les

 16   personnes présentes dans le prétoire, y compris le témoin. Que la volonté

 17   de Dieu soit faite et que la paix de Dieu règne dans cette maison.

 18   Le témoin n'a pas vu le document, il ne sait pas de quoi il s'agit. C'est à

 19   vous d'en décider de savoir si le document doit lui être montré ou pas.

 20   Merci.

 21   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] M. Thayer a fait référence à ce

 22   document. Il l'a affiché maintenant à l'écran dans le prétoire de façon à

 23   ce que M. Thayer puisse évoquer ça.

 24   Monsieur Thayer.

 25   M. THAYER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 26   Q.  Je crois que vous venez d'avoir cette partie du document à l'écran.

 27   Vous voyez la partie que j'ai citée dans ma question, lorsque vous dites :

 28   "…je vois qu'il s'agit du 13 juillet, 10 heures 50…"

Page 4299

  1   Ensuite, je vous laisse lire la suite.

  2   R.  J'ai besoin d'aide au niveau de la traduction.

  3   Q.  Bien.

  4   M. THAYER : [interprétation] Est-ce que les interprètes peuvent traduire ce

  5   document qui est à l'écran, si les interprètes disposent de ce document à

  6   l'écran ?

  7   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir -- pardonnez-moi,

  8   Monsieur Thayer. Il serait plus facile de le lire --

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] A quelle ligne cela se

 10   situe-t-il ?

 11   M. THAYER : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président.

 12   Q.  Des lignes 8 à 14.

 13   R.  D'accord.

 14   Q.  "Je vois ce document pour la première fois. Est-ce que vous pourriez le

 15   faire défiler vers le bas de façon à ce que je puisse voir le haut de la

 16   page. Je maintiens ce que j'ai dit, il y avait une grande confusion.

 17   Quelqu'un a dit que nous pouvions partir, quelqu'un d'autre a dit que nous

 18   ne pouvions pas partir. Je vois qu'il s'agit du 13 juillet, à 10 heures 50.

 19   Je crois qu'à ce moment-là nous étions déjà partis pour le," ensuite il y a

 20   une pause "-- pour assister aux négociations. Si l'heure indiquée ici est

 21   exacte, pour autant que je m'en souvienne, à ce moment-là nous assistions

 22   déjà aux négociations."

 23   Je crois que dans une de vos réponses précédentes, Monsieur, vous avez dit

 24   dans votre témoignage que vous vous souveniez de la teneur de ce document.

 25   Si vous avez besoin de voir ce document, je peux vous trouver un

 26   exemplaire, mais ma question, comme vous l'avez comprise, porte

 27   véritablement sur l'heure.

 28   R.  Oui. Je souhaite revoir le document, si c'est possible.

Page 4300

  1   Q.  Oui, certainement.

  2   R.  Je…

  3   [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

  4   M. THAYER : [interprétation] Avec la permission des Juges de la Chambre --

  5   Q.  Lorsque vous voulez dire que vous voulez revoir le document, vous

  6   souhaitez voir la pièce à conviction, et non pas le compte rendu

  7   d'audience; c'est cela ?

  8   R.  Oui, oui. Oui, précisément. Je souhaite voir le document; je ne

  9   souhaite pas voir le compte rendu d'audience. C'est cela dont j'ai besoin.

 10   J'aurais besoin de voir le document que j'ai vu précédemment.

 11   Q.  Fort bien.

 12   M. THAYER : [interprétation] Avec la permission des Juges de la Chambre,

 13   nous avons besoin d'improviser un petit peu. Cela ne figure pas sur la

 14   liste de nos pièces. Nous l'avons montré au témoin dans le procès

 15   précédent. Je dispose d'une copie en B/C/S. Je peux le montrer aux Juges de

 16   la Chambre et à l'accusé, ensuite nous pouvons le placer sur le

 17   rétroprojecteur pour voir de quoi nous parlons, si cela vous convient,

 18   Madame, Messieurs les Juges de la Chambre.

 19   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je pense que c'est la meilleure façon

 20   de procéder, mais nous souhaitons connaître le numéro exact de cette pièce,

 21   s'il vous plaît, de façon à l'avoir au compte rendu d'audience de façon

 22   précise. Si nous pouvons le voir sur le rétroprojecteur, c'est très bien.

 23   Et veuillez le montrer aux Juges de la Chambre, à M. Tolimir et à la

 24   Défense.

 25   M. THAYER : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience, il s'agit

 26   dans l'affaire Popovic de la pièce à conviction de la Défense 5D275, et

 27   nous allons voir le numéro ERN dans quelques instants.

 28   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Est-ce que nous avons un numéro sur

Page 4301

  1   votre liste 65 ter ?

  2   M. THAYER : [interprétation] Non, Monsieur le Président. C'était une pièce

  3   de la Défense qui a été utilisée et qui n'a pas été placée sur notre liste

  4   65 ter. Comme je vous l'ai dit, bien évidemment, ceci lui a été montré par

  5   la Défense pendant l'affaire Popovic, mais ça n'est pas quelque chose que

  6   nous avons fait figurer sur notre liste 65 ter.

  7   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, êtes-vous d'accord

  8   avec cette manière de faire les choses ?

  9   Monsieur Tolimir, je souhaite vous reposer la question : êtes-vous

 10   d'accord avec cette manière de procéder telle que proposée par M. Thayer,

 11   de nous le placer sur le rétroprojecteur de façon à ce que tout le monde

 12   puisse voir le rétroprojecteur, et vous pourrez ensuite le lire, et ceci

 13   pourra intégrer le compte rendu d'audience ?

 14   [Le conseil de la Défense se concerte] 

 15   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Maître Gajic.

 16   M. GAJIC : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, je crois avoir une

 17   solution. Je ne sais pas si les documents que va utiliser la Défense ont

 18   été téléchargés dans le prétoire électronique, mais le 1D247 - commençons

 19   par ce document-là - qui est un document de la Défense. Sur la liste 65 ter

 20   1D247.

 21   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Thayer.

 22   [Le conseil de l'Accusation se concerte] 

 23   M. THAYER : [interprétation] On me dit, Monsieur le Président, que ceci n'a

 24   pas été téléchargé encore. Je remercie Me Gajic pour cet effort.

 25   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Qu'est-ce que vous avez proposé,

 26   Maître Gajic ? Je ne sais pas si je vous ai bien compris. La question

 27   demeure si M. Tolimir est d'accord avec cette façon de procéder proposée

 28   par M. Thayer ?

Page 4302

  1   M. GAJIC : [interprétation] Oui, bien sûr. Il n'y a pas de problème.

  2   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, Monsieur Thayer, donc il n'y a

  3   pas d'objection de la part de la Défense. Nous voyons ce document sur le

  4   rétroprojecteur, et le témoin devrait peut-être lire les passages

  5   pertinents de façon à ce que ceci soit consigné au compte rendu d'audience.

  6   M. THAYER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  7   Q.  Monsieur le Témoin, heureusement il s'agit d'un document relativement

  8   bref. Est-ce que vous pourriez le lire à haute voix en commençant par l'en-

  9   tête qui est en haut à gauche, où il est mentionné "Republika Bosna i

 10   Herzegovina [phon]."

 11   R.  Très bien. Est-ce que je peux commencer ?

 12   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Faites.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Le texte du document se lit comme suit -- est-

 14   ce que je peux poursuivre ?

 15   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, allez-y.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] En-tête :

 17   "République de Bosnie-Herzégovine.

 18   "Etat-major.

 19   "Strictement confidentiel, niveau de confidentialité secret

 20   militaire, numéro 1, date 13 juillet 1995." Je dois revenir au numéro,

 21   1/825-1135.

 22   "Daté : 13 juillet 1995.

 23   "Op.vr," c'est probablement temps opérationnel, "10 heures 50.

 24   "Réponse à la demande à être envoyée.

 25   "Au commandement de 285e Brigade légère de Zepa (et à être transmis

 26   au président de la présidence de Guerre de Zepa).

 27   "En ce qui concerne le message envoyé au président du gouvernement de la

 28   République R/F BiH par le président de la présidence de Guerre de Zepa,

Page 4303

  1   nous avons reçu la réponse suivante de la présidence :

  2   "Nous informons le président de la présidence de Guerre de Zepa qu'aucune

  3   négociation ne devrait se faire avec l'agresseur.

  4   "Ce à quoi l'on peut s'attendre de l'agresseur, c'est un ultimatum sans

  5   condition pour se rendre.

  6   "Les habitants et les combattants de Zepa doivent continuer de se préparer

  7   à une résistance organisée contre l'agresseur et éviter que la panique se

  8   répande, et ils doivent prendre des actions décisives pour convaincre la

  9   population de la possibilité d'une résistance réussie contre l'agresseur.

 10   "La présidence et le gouvernement de Bosnie-Herzégovine ont investi des

 11   efforts maximums tant au niveau politique que militaire internationaux.

 12   "Salutations."

 13   Signé, le chef d'état-major, le général Enver Hadzihasanovic.

 14   Et ceci constitue la totalité du document.

 15   Q.  Merci, Monsieur le Témoin. Après avoir fait lecture de ce document --

 16   M. THAYER : [interprétation] Pouvons-nous revenir à la page du compte rendu

 17   d'audience que nous avions à l'écran.

 18   Q.  Dans votre réponse à une question qui vous a été posée lors d'un

 19   précédent procès dans lequel vous avez déposé, je crois que c'est à la

 20   ligne 11 :

 21   "Je vois ici que c'est le 13 juillet à 10 heures 50."

 22   Et comme vous venez de le lire, le temps opérationnel est 10 heures

 23   50 sur le document que vous venez de lire.

 24   "Je crois qu'à ce moment-là nous avions déjà quitté cette localité pour

 25   participer aux négociations. Si le temps mentionné sur le document est

 26   exact, autant que je me souviens, à ce moment-là nous avions déjà quitté la

 27   localité pour aller aux négociations."

 28   Je reviens à ma question. Vous avez déposé aujourd'hui et confirmé

Page 4304

  1   qu'autant que vous vous souveniez, cela s'est passé un peu avant midi. Vous

  2   vous souvenez également que selon vous, lorsqu'on vous a présenté ce

  3   document en 2007, vous aviez dit que cela s'était passé vers 10 heures 50

  4   et que vous étiez déjà partis pour les négociations --

  5   R.  [aucune interprétation]

  6   Q.  -- donc la question que je souhaiterais vous poser est la suivante :

  7   est-ce que vous pourriez aider les Juges de la Chambre et est-ce que vous

  8   vous souvenez clairement de ce qui s'est passé, à savoir à quelle heure

  9   êtes-vous arrivés à Boksanica ?

 10   R.  Selon moi, d'après l'heure à laquelle nous sommes partis, nous avons pu

 11   arriver entre 11 heures et midi, je parle de l'arrivée à Boksanica. Pour ce

 12   qui est du temps qui est mentionné sur le document, dans ma précédente

 13   déposition, j'ai dit qu'autant que je me souvenais, nous étions partis pour

 14   participer aux négociations quelle que soit l'opinion qui avait été

 15   formulée par nos autorités politiques, et nous voyons ici qu'il s'agissait

 16   d'une opinion négative émanant des autorités politiques. C'est ce dont je

 17   me souviens, mais j'espère que vous comprenez que cela s'est passé il y a

 18   15 ans, et cela signifie que cela s'est passé il y a longtemps pour essayer

 19   de replacer les différents événements dans un ordre exact.

 20   Donc pour répondre à votre question, je pourrais peut-être dire que

 21   nous sommes partis entre 10 heures 30 et 11 heures 30, et s'il fallait 30

 22   minutes de trajet, nous serions arrivés à Boksanica, par rapport à l'heure

 23   de départ, entre 11 heures et 12 heures le

 24   13 juillet 1995.

 25   Q.  Merci, Monsieur le Témoin. Et nous sommes tout à fait conscients de ce

 26   que cela représente pour vous que de vous remémorer ces événements. Et

 27   avant de faire la pause pour aujourd'hui, je vous demande de faire un

 28   effort supplémentaire et de remettre à tribut votre mémoire encore un peu.

Page 4305

  1   Vous avez confirmé que vous pensiez que cette réunion avait été brève et

  2   qu'elle a peut-être duré une heure ou un peu plus d'une heure. Est-ce que

  3   vous vous souvenez avoir dit dans le procès Popovic - il s'agit de la page

  4   9 725 - que vous pensiez que cela avait duré entre 40 minutes et 1 heure ?

  5   Est-ce que vous souvenez d'avoir dit ceci dans votre déposition; et si tel

  6   est le cas, est-ce que ceci a des conséquences sur votre déposition

  7   d'aujourd'hui ?

  8   R.  Non. De manière générale, je peux me souvenir qu'en ayant fait

  9   référence à ces notes, cela a pris environ ce temps. Ce que j'ai dit, c'est

 10   que cela avait pris environ 40 minutes, voire une heure, et c'est ce dont

 11   je me souviens concernant cette réunion, concernant sa durée et concernant

 12   nos heures d'arrivée et de départ.

 13   Q.  Maintenant, je voudrais revenir à la réunion, Monsieur le Témoin. Je

 14   voudrais vous poser une dernière question concernant cette réunion. Vous

 15   avez confirmé dans votre déposition - et je crois que vous avez utilisé

 16   certains propos suite à ce que le général Tolimir vous avait dit - vous

 17   avez dit qu'il vous avait donné la possibilité d'opter pour deux

 18   alternatives. Il vous avez dit "tous." Quand il vous a dit "tous,"

 19   qu'entendait-il par là ?

 20   R.  Bien, cela signifiait tous les habitants de Zepa, y compris tous les

 21   hommes en âge de combattre. Mais quoi qu'il en soit, en disant "tous," cela

 22   signifiait tous les habitants de Zepa.

 23   M. THAYER : [interprétation] Monsieur le Président, je vais passer à un

 24   autre sujet, donc avec votre permission, je pense que ça sera peut-être

 25   judicieux d'en terminer pour aujourd'hui. Et j'ai une proposition que je

 26   peux faire aux Juges de la Chambre en absence du témoin, si les Juges de la

 27   Chambre me le permettent, en ce qui concerne le témoin qui a fait l'objet

 28   d'une décision de cette Chambre de première instance aujourd'hui.

Page 4306

  1   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci beaucoup.

  2   Mais avant de ce faire, nous avons des questions à poser au témoin.

  3   Je voudrais vous poser une question, Monsieur le Témoin. Nous avons

  4   consulté le document qui constituait la réponse de vos autorités de l'Etat

  5   de Bosnie-Herzégovine suite à la demande de négociations. J'aimerais savoir

  6   si vous aviez reçu cette réponse avant de partir de Zepa pour vous rendre à

  7   ce point de contrôle pour les négociations ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois que je l'ai déjà dit, autant que je

  9   me souvienne, je ne pense pas que nous ayons reçu cette réponse avant notre

 10   départ pour les négociations. Cependant, de manière indépendante, au niveau

 11   local, nous avons décidé de participer à ces négociations. Même si nous

 12   avions reçu cette réponse avant notre départ, je ne pense pas que ça aurait

 13   changé quoi que ce soit; nous serions quand même partis pour les

 14   négociations.

 15   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Vous avez donc décidé de participer à

 16   cette réunion avec M. Tolimir et l'autre lieutenant-colonel sans avoir reçu

 17   de réponse de vos supérieurs ou de vos autorités de tutelle, n'est-ce pas ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Autant que je me souvienne, c'est exactement

 19   comme cela que les choses se sont passés.

 20   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci beaucoup.

 21   La Juge Nyambe a une autre question à vous poser.

 22   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Je souhaite avoir trois points de

 23   précision, s'il vous plaît. Premièrement, vous avez dit quelque chose

 24   signifiant à peu près que le général Tolimir aurait dit que vous aviez à

 25   quitter le secteur de Zepa. J'aimerais avoir une citation précise, en fait.

 26   Un instant. Voilà. Page 63, ligne 10 :

 27   "…entre les deux options, il a dit 'tous.'" Lorsqu'il a dit "tous,"

 28   qu'entendait-il par là ?

Page 4307

  1   Et vous avez répondu :

  2   "Toute la population de Zepa, y compris les hommes en âge de

  3   combattre."

  4   Mais je voudrais savoir si la population de Zepa était musulmane ou mixte ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Toute la population, à l'exception d'une dame,

  6   était musulmane.

  7   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Merci. J'ai une deuxième question.

  8   Donc une autre question. Page 38, lignes 14 à 16 du compte rendu d'audience

  9   d'aujourd'hui, vous avez répondu à une question du procureur. Vous avez dit

 10   :

 11   "J'évalue à 1 200 hommes le nombre d'hommes en âge de combattre." A Zepa à

 12   ce stade.

 13   Puis dans la suite, vous dites que :

 14   "Tous ces hommes n'étaient pas des combattants…"

 15   Est-ce que vous pourriez nous dire combien d'entre eux étaient des

 16   combattants et combien ne l'étaient pas ? Ça, c'est ma première question.

 17   Puis la deuxième : qu'est-ce qui vous permet de savoir lesquels

 18   étaient des combattants et lesquels ne l'étaient pas ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour répondre à votre première question,

 20   l'évaluation du nombre de combattants -- je pense qu'il y avait à peu près

 21   600 hommes qui ont pris part de la manière la plus directe aux activités de

 22   la brigade. S'agissant maintenant d'évaluer qui était un combattant et qui

 23   ne l'était pas, bien, c'est sur la base de leur engagement pendant la

 24   période précédente dans l'armée. Il y avait ceux qui avaient une arme, ils

 25   étaient considérés comme étant des combattants, enfin, pour utiliser ce

 26   terme de combattants. Ceux qui n'avaient pas d'armes, alors qu'ils

 27   faisaient partie de cette tranche d'âge, donc de 18 à, disons, 55 ans, ça

 28   c'est le reste de ce groupe. Donc d'après moi, c'était 50-50; 600 d'un

Page 4308

  1   côté, 600 de l'autre.

  2   J'ajoute que de mon côté, ce ne sont que des approximations. Je ne me

  3   fonde sur aucune liste plus précise, sur aucun document car je n'en ai pas,

  4   et je ne me souviens pas non plus d'avoir vu de ces documents à Zepa.

  5   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Une question de suivi. Est-ce que

  6   vous vous basez sur des documents ou sur vos observations lorsque vous

  7   avancez cette évaluation de la taille du groupe présent à l'époque à Zepa ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Quand je fais cette évaluation, je me fonde

  9   sur des connaissances, des informations, que j'avais pendant que j'étais à

 10   Zepa. En d'autres termes, je vais essayer d'être un peu plus clair.

 11   J'aurais pu entendre, par exemple, de la part du commandant, de la part

 12   d'Avdo, ou d'un de ses collaborateurs, qu'il y avait à peu près 600

 13   personnes qui avaient une arme. Et mes évaluations se fondent là-dessus. Je

 14   ne me fonde absolument pas sur un document que j'aurais vu. Je n'ai pas du

 15   tout vu la liste de personnes qui auraient fait partie de cette catégorie

 16   ou pas. Donc j'ai bien précisé que tout ce que je dis, ça se fonde sur des

 17   informations que j'ai pu obtenir là-bas, que j'ai pu obtenir soit par voie

 18   de contact avec telle ou telle personne qui connaissait la situation ou

 19   bien grâce à mes propres observations. Zepa n'est pas une localité très

 20   grande. Tout ce qui s'est passé s'est passé sur un territoire exigu. Le

 21   centre de Zepa s'étend sur une zone de 50 mètres de diamètre, donc ce n'est

 22   pas très grand.

 23   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Je vous remercie.

 24   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] M. Tolimir voulait prendre la parole.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je voulais dire

 26   la chose suivante : on interprète mal ce qu'a dit le témoin. Le témoin a

 27   dit que je lui ai dit qu'ils pouvaient tous partir tranquillement de Zepa.

 28   Et à ce moment-là, il m'a demandé : Est-ce que cela signifie qu'un soldat

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  1   peut partir avec sa famille ? Et je lui ai dit oui. Prenez la page 52,

  2   lignes 1 à 8. Je voulais simplement qu'on soit tout à fait correct dans la

  3   reproduction des propos du témoin et que l'on voie exactement ce que j'ai

  4   dit et ce que le témoin a dit à son tour. Merci.

  5   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] C'est ce que nous avons entendu,

  6   Monsieur Tolimir, mais vous n'avez pas à témoigner ici. Vous occupez un

  7   rôle différent ici, et vous allez pouvoir vous en occuper pendant le

  8   contre-interrogatoire.

  9   Monsieur Thayer, nous avons bien déplacé l'heure maintenant, alors qu'en

 10   est-il des documents que nous avons vus ? Vous les verserez au dossier ?

 11   M. THAYER : [interprétation] Je n'avais pas l'intention de montrer cela au

 12   témoin. Ce serait peut-être --

 13   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Vous pouvez peut-être réfléchir à

 14   cela --

 15   M. THAYER : [interprétation] Merci.

 16   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] -- et nous répondre demain.

 17   M. THAYER : [interprétation] Je vous en remercie, Monsieur le Président.

 18   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur le Témoin, vous continuerez

 19   avec votre témoignage demain après-midi. Permettez-moi de vous rappeler que

 20   vous n'avez pas le droit d'évoquer votre témoignage avec qui que ce soit.

 21   Vous allez être escorté par l'huissière qui vous aidera à partir. Nous

 22   allons baisser les stores, et M. Thayer pourra donc s'adresser à la

 23   Chambre.

 24   Je vous remercie, et nous allons continuer demain après-midi.

 25   M. THAYER : [interprétation] S'agissant du Témoin 205, le Témoin PW --

 26   L'INTERPRÈTE : Le reste est inaudible pour l'interprète.

 27   M. THAYER : [interprétation] -- vous avez rendu votre décision orale à son

 28   sujet aujourd'hui. Comme nous en avons informé les parties, le témoin est

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  1   ici et il est à la disposition de la Chambre. Ce sera un témoignage

  2   relativement bref.

  3   [Le témoin quitte la barre]

  4   M. THAYER : [interprétation] J'ai proposé à la Défense quelque chose qui a

  5   été accepté par la Défense, que le témoin ne reste pas ici présent pendant

  6   toute la durée de la déposition du témoin présent, qui continuera jusqu'à

  7   la dernière audience de cette semaine, voire au-delà. Je pense que le mieux

  8   serait d'interrompre la déposition du témoin à présent et que le deuxième

  9   témoin puisse reprendre la route de chez lui pour éviter qu'il y ait trop

 10   de conséquences sur son travail, s'il reste ici plus longtemps. Donc cela

 11   nous permettrait de reprendre avec le témoin présent rapidement.

 12   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, qu'en dites-vous ?

 13   Ou Monsieur Gajic ?

 14   Monsieur Gajic.

 15   M. GAJIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai eu effectivement la

 16   possibilité d'en parler avec M. Thayer avant ce volet d'audience. Nous

 17   sommes tout à fait d'accord pour entendre ce deuxième témoin demain au

 18   début d'audience, puis notre témoin actuel pourrait continuer et nous

 19   allons pouvoir continuer avec son interrogatoire principal.

 20   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.

 21   [La Chambre de première instance se concerte]

 22   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] La Chambre vous remercie d'avoir

 23   formulé cette proposition. Cela évitera au témoin de rester trop longtemps

 24   à La Haye.

 25   Mais, Monsieur Gajic, on ne pourra pas reprendre demain matin. C'est

 26   uniquement demain après-midi qu'on pourra siéger.

 27   Donc maintenant, nous avons vraiment dépassé l'heure. Nous allons tout

 28   d'abord entendre le Témoin PW-076 demain, puis nous reprendrons le témoin

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  1   que nous avons déjà entendu aujourd'hui l'après-midi dans ce prétoire.

  2   L'audience est levée.

  3   --- L'audience est levée à 19 heures 12 et reprendra le mardi 24 août

  4   2010, à 14 heures 15.

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