Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le jeudi 17 mars 2011

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.

  5   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Bonjour à tous et à toutes.

  6   Faites entrer le témoin, je vous prie.

  7   [Le témoin vient à la barre]

  8   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Bonjour, Madame Tabeau.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.

 10   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous souhaite de nouveau la

 11   bienvenue dans le prétoire. J'aimerais vous rappeler que la déclaration

 12   solennelle que vous avez prononcée hier est encore en vigueur.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, merci.

 14   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] M. Vanderpuye avait terminé son

 15   interrogatoire principal hier, et c'est maintenant au tour de M. Tolimir de

 16   commencer son contre-interrogatoire.

 17   Monsieur Tolimir, on vous écoute.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je souhaite bien

 19   le bonjour à toutes les personnes présentes, et je souhaite que ce procès

 20   se terminer se déroule selon la volonté de Dieu, et non pas selon la

 21   mienne. Et j'aimerais également souhaiter un bon séjour au témoin parmi

 22   nous.

 23   LE TÉMOIN : EWA TABEAU [Reprise]

 24   [Le témoin répond par l'interprète]

 25   Contre-interrogatoire par M. Tolimir : 

 26   Q.  [interprétation] Alors, aujourd'hui, je voudrais poser quelques

 27   questions qui découlent de l'interrogatoire principal d'hier. Hier,

 28   lorsqu'on a posé une question au témoin concernant les données qu'a données


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  1   M. Ivanisevic, Madame, si vous vous souvenez bien, vous nous avez dit que

  2   vous n'estimez beaucoup Ivanisevic, que vous ne pouviez pas vous fier sur

  3   ses données. Vous ne l'estimez pas bien énormément parce qu'il était un

  4   collaborateur de Radovan Karadzic. Alors, j'aimerais savoir est-ce que

  5   c'est la position adoptée par l'Accusation ou bien est-ce une position

  6   personnelle ?

  7   R.  Je voudrais préciser d'abord ce que j'ai dit hier concernant M.

  8   Ivanisevic. Ce que j'ai dit était bien différent de ce que vous me dites

  9   aujourd'hui. D'abord, j'ai dit que j'ai porté beaucoup d'attention sur la

 10   liste des 58 noms qui ont été fournis dans son livre et j'ai également fait

 11   une analyse de cette liste. J'ai également remis aux Juges de la Chambre,

 12   au Tribunal, le document avec mon analyse préliminaire et l'analyse. Et

 13   deuxièmement, j'ai fait un commentaire quant à la fiabilité de cette

 14   source. Parce que j'ai dit que j'exprimais certains doutes concernant la

 15   fiabilité, parce que M. Ivanisevic pouvait être une source biaisée; il

 16   pouvait prendre partie. Je parlais en mon propre nom, je ne parlais pas au

 17   nom du bureau du Procureur. Quelle que soit l'opinion du bureau du

 18   Procureur, c'est eux qui devraient l'exprimer séparément. J'ai donc exprimé

 19   mon opinion à moi.

 20   Q.  Merci beaucoup. C'est une opinion personnelle. A ce moment-là,

 21   j'aimerais savoir pourquoi n'avez-vous pas ce type de préjugé ou de

 22   position lorsqu'il s'agit d'une autre personne que vous avez mentionnée

 23   hier ? Alors, il s'agissait de l'équipe d'enquête de Bosnie-Herzégovine et

 24   de leur commission indépendante, et du président de cette commission. Ou

 25   bien est-ce que c'est parce que vous avez collaboré avec eux et vous leur

 26   faites plus confiance ?

 27   R.  De nouveau, j'aimerais vous demander de nous dire de quelle commission

 28   vous parlez. Je présume que vous parlez de la Commission qui est chargée de


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  1   retrouver les personnes portées disparues, la commission fédérale, mais je

  2   ne pense pas avoir mentionné cette commission hier. Veuillez, je vous prie,

  3   préciser votre question.

  4   Q.  Très bien. Merci. Vous avez mentionné hier Tokaca. Pourriez-vous nous

  5   dire quelle fonction occupe-t-il ? Et étant donné que vous l'avez mentionné

  6   et que vous l'avez évalué d'une certaine façon, j'aimerais savoir si vous

  7   pouviez nous expliquer sur quoi vous vous êtes fondée pour vous forger

  8   votre opinion concernant cette personne ?

  9   R.  J'ai mentionné M. Tokaca, mais M. Tokaca ne représente pas une

 10   commission. Il est le chef de l'ONG des droits de l'homme, et l'ONG

 11   s'appelle le centre de documentation et de recherche. J'ai mentionné M.

 12   Tokaca en rapport avec le livre qui s'appelle "Le livre des morts de

 13   Bosnie", et c'est une liste qui a été compilée par ces personnes, mais je

 14   vous ai expliqué pourquoi je ne me suis pas servi de cette source dans mon

 15   travail. L'une des raisons que j'ai données, c'est parce que cette base de

 16   données n'est pas un produit d'un groupe de statisticiens professionnels.

 17   C'est un groupe qui fait, effectivement, un travail sur l'amélioration des

 18   droits de la personne dans le pays. Et chaque fois que je peux, j'essaie

 19   d'éviter ces types de sources dans le cadre de mon travail puisqu'il

 20   pourrait y avoir des informations partiales quant aux informations qu'ils

 21   donnent.

 22   Donc, s'agissant du travail du travail de M. Tokaca et du centre de

 23   recherche et de documentation, je suis positive, je pense que c'est un

 24   processus important pour le processus de réconciliation en Bosnie-

 25   Herzégovine, mais en même temps, je ne me suis jamais servie de cette base

 26   de données en tant que source pour élaborer une liste des victimes pour les

 27   procès de ce Tribunal.

 28   C'est tout ce que je peux dire. Mais j'ai la même attitude envers M.


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  1   Ivanisevic. J'estime que cette personne est un militant dans le domaine des

  2   droits de la personne. Et il faut être prudent lorsqu'on se sert de ces

  3   types de sources. D'abord, il nous faut comprendre que ce type de source ne

  4   provient pas de statisticiens professionnels et pourrait y avoir une

  5   partialité cachée, puisque ces sources, très souvent, se fondent sur les

  6   informateurs. Et très souvent, ces sources ne sont pas vérifiées et

  7   fiables.

  8   Alors, pour ce qui me concerne, c'est ce que je pense concernant cette

  9   source, mais cela n'exprime pas une attitude personnelle envers M.

 10   Ivanisevic ou quelque autre personne.

 11   Q.  Est-ce que vous avez adopté cette attitude en tant que démographe sur

 12   la base des informations qu'a données M. Ivanisevic ou sur la base de lui

 13   comme personne ?

 14   R.  Eh bien, d'abord, je ne connais pas M. Ivanisevic, je ne connais pas sa

 15   personne. Je sais seulement certaines choses sur lui. Mais les données que

 16   j'ai reçues, je n'ai reçu qu'une liste de 58 noms et je n'ai pas été en

 17   mesure d'étudier le tout puisqu'en fait, l'information qui est contenue

 18   dans son livre est extrêmement limitée. Je n'ai pas pu faire une étude

 19   fiable sur la fiabilité de cette information.

 20   D'autre part, je suis tout à fait au courant qu'il y a des cas dans

 21   lesquels des victimes que mentionne M. Ivanisevic et les questions qui ont

 22   été présentées par des victimes à M. Ivanisevic n'ont pas été reportées

 23   correctement au public extérieur. Je sais qu'à Sarajevo, il a parlé de

 24   certaines victimes comme étant des victimes du siège, et les familles de

 25   ces victimes avaient prétendu que ces personnes avaient été mortes de mort

 26   naturelle. Donc je vous donne un exemple simplement.

 27   Donc il y a quand même une incohérence, certes. Il y a certaines

 28   incohérences que l'on peut voir, et donc mon opinion concernant la liste


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  1   des 58 noms. Eh bien, je pourrais peut-être envoyer ces 58 noms aux

  2   autorités de Bosnie-Herzégovine et je pourrais faire une demande

  3   d'assistance également. Mais ceci veut simplement dire que les décisions du

  4   tribunal dont fait référence M. Ivanisevic dans son livre, j'espère que ce

  5   sont des informations utiles, que je vais pouvoir les étudier et donner mon

  6   évaluation. Et ce n'est qu'à ce moment-là que je pourrais donner mon

  7   évaluation sur la question.

  8   Q.  Merci. Hier, vous nous avez dit que les données que vous avez

  9   retrouvées et que vous avez vérifiées dans la Republika Srpska dans le

 10   "livre des morts", et j'aimerais savoir pourquoi avez-vous vérifié les

 11   données de Musulmans décédés aux endroits qu'il mentionne précisément,

 12   comme Tuzla, par exemple, qui se trouve sur la Fédération de la Republika

 13   Srpska ? Pourquoi est-ce que vous avez cherché ces personnes dans le livre

 14   des personnes décédées de la Republika Srpska ? Pourriez-vous nous

 15   l'expliquer, je vous prie.

 16   R.  J'ai dit hier que je cherchais, que j'essayais de trouver les 58 noms

 17   dans deux bases de données, parmi d'autres. Les deux bases de données

 18   comprenaient la base de données concernant la mortalité de l'Institut

 19   statistique, mais également du livre des décès de la RS. Donc ma recherche

 20   était complète, et je ne me suis pas simplement reliée sur ces données. Je

 21   suis arrivée à la conclusion que je n'ai pas pu trouver ce que je

 22   cherchais. Notamment, je m'attendais à trouver dans ces deux bases de

 23   données, sur la base de documents, des cas soit par les certificats de

 24   décès ou d'autres documents. D'autres documents seraient, par exemple, des

 25   déclarations dans des cours, des tribunaux, parmi d'autres. Et donc,

 26   s'agissant de cette base de données, dans la mesure où elle pouvait être

 27   complète, en temps de guerre, elle n'était pas complète, donc je n'ai pas

 28   trouvé ces informations dans ces bases de données. Voilà ma réponse.


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  1   Q.  Merci. Est-ce que vous pouvez nous dire si vous avez vérifié s'il

  2   existait des certificats de décès pour ces personnes qui ont été émis au

  3   même moment que -- pour ces personnes, donc personnes qu'a évoquées M.

  4   Ivanisevic ? Merci.

  5   R.  Les certificats de décès, je ne sais pas s'ils étaient émis ou pas.

  6   J'ai cherché dans la base de données de la RS et -- je voulais vérifier

  7   s'il y avait des entrées, des registres faits par des autorités

  8   statistiques sur la base des déclarations des cours mentionnées par M.

  9   Ivanisevic. Mais je n'ai pas trouvé, donc je ne pouvais pas vérifier s'il y

 10   avait des documents confirmant les décès et si ces documents se trouvaient

 11   dans les registres statistiques.

 12   Q.  Merci. Vous avez, toutefois, dit hier dans le cadre de votre

 13   interrogatoire principal à la ligne 19, vous avez dit : "Je ne me suis pas

 14   servie du livre des décès de Bosnie pour ce qui est des mois d'avril 1992 à

 15   avril 1995."

 16   Est-ce que ceci veut dire que vous n'avez pas vérifié les données qu'a

 17   évoquées M. Ivanisevic ?

 18   R.  D'abord, je ne me souviens pas d'avoir prononcé cette phrase; vous ne

 19   m'avez pas donné de contexte. Je serais plus à l'aise si vous pouviez me

 20   montrer le compte rendu d'audience --

 21   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] J'aimerais demander à M. le Greffier

 22   d'afficher cette page à l'écran. Je vois qu'ils sont en train de travailler

 23   là-dessus.

 24   M. VANDERPUYE : [interprétation] Monsieur le Président.

 25   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Vanderpuye.

 26   M. VANDERPUYE : [interprétation] Merci. Bonjour, Monsieur le Président,

 27   Madame, Monsieur les Juges. Si je ne m'abuse, il s'agit de la page 11 421.

 28   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.


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  1   Monsieur Tolimir, avez-vous fait référence à la ligne 19 ?

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est probablement la ligne 19.

  3   M. TOLIMIR : [interprétation]

  4   Q.  Donc : "Je ne me suis pas servie des livres de décès de Bosnie entre

  5   avril 1992 et avril 1995." Voilà ce que j'ai noté textuellement, et cetera,

  6   et cetera. Et par la suite, elle mentionne Tokaca -- ou elle mentionne le

  7   centre chargé de rechercher les personnes portées disparues et elle

  8   mentionne M. Tokaca. Peut-être que nous pourrions donner la référence

  9   exacte au témoin après la pause, mais elle nous a dit qu'elle ne s'est pas

 10   servie --

 11   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Un instant, je vous prie. Le greffier

 12   est en train de faire la recherche pour afficher la page à l'écran. Nous

 13   l'aurons sous peu.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président.

 15   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je ne suis pas tout à fait certain si

 16   ceci est la bonne page.

 17   Monsieur Gajic, oui, je vous écoute.

 18   M. GAJIC : [interprétation] La page est bonne à l'écran. Vous avez la bonne

 19   page.

 20   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Très bien. Alors, nous avons la

 21   partie pertinente, Monsieur Tolimir. Veuillez poursuivre, je vous prie.

 22   M. LE GREFFIER : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience, il

 23   s'agit de la page 11 422, lignes 19 et 20. Merci.

 24   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, veuillez répéter

 25   votre question, je vous prie.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je vais répéter

 27   ma question.

 28   M. TOLIMIR : [interprétation]


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  1   Q.  Alors, j'ai voulu savoir si elle a voulu dire qu'elle n'a pas du tout

  2   vérifié la liste des 58 personnes qu'évoque Ivanisevic dans le livre des

  3   décès, en rapport à ce qu'elle a dit quand elle a dit qu'elle ne s'est pas

  4   du tout basée sur le livre des décès de Bosnie ?

  5   R.  Je pense que la source de cette confusion est peut-être le terme "

  6   registre des décès". Et il y a la base de données de mortalité de la RS et

  7   de la FIS, et je me suis servie de ces deux registres. Mais M. Tolimir a

  8   employé le terme "le registre des morts" sur la base du "Livre bosnien des

  9   morts". Mais il s'agit d'une base de données d'une ONG, mais ce n'est pas

 10   le registre équivalent à la base de données des morts de la RS et de la

 11   FIS. C'est très important, puisque le registre des décès est une source

 12   officielle. C'est des archives officielles dans lesquelles tous les décès

 13   sont enregistrés. Donc c'est ceci que l'on appelle les registres de décès.

 14   Donc, en allant -- soit les registres de décès ou de la Fédération.

 15   Mais la liste de Tokaca, c'est une liste composée par les ONG. Ce

 16   livre bosnien des morts a été compilé à la suite d'un très grand nombre

 17   d'informations et de sources diverses. Mais M. Tokaca n'a pas accès aux

 18   documents officiels confirmant le décès des personnes, tels les certificats

 19   de décès, les déclarations des cours et d'autre documentation. Il a

 20   simplement compilé cette base de données sur les sources : des listes de

 21   personnes publiées, des registres du CICR, et même sur les personnes

 22   portées disparues, et d'autres registres de personnes portées disparues.

 23   Ils sont également étudiés les pierres tombales dans les cimetières en

 24   prenant des noms des victimes. Ce n'est pas fiable, mais il faut se pencher

 25   sur cette question de façon différente.

 26   Donc, de nouveau, j'ai essayé ma recherche dans les registres des

 27   décès de la RS et des registres de décès fédéraux, mais je n'ai pas fait la

 28   recherche des noms qui se trouvaient dans le livre bosnien des morts,


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  1   puisque ce n'est pas un registre de décès.

  2   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Vanderpuye.

  3   M. VANDERPUYE : [interprétation] Une petite précision. Le témoin a fait

  4   référence à la base de données du FIS. Il faudrait lire F-i-s au compte

  5   rendu d'audience. C'est l'Institut fédéral des statistiques de Sarajevo, et

  6   la correction devrait être apportée aux pages -- à la page 5, ligne 22, et

  7   par la suite à la suite à la ligne [comme interprété] 8, ligne 1 et à la

  8   ligne 5.

  9   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie. Le compte rendu

 10   sera corrigé. Très bien. Merci.

 11   Monsieur Tolimir.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je ne veux pas

 13   perdre plus de temps là-dessus, mais j'aimerais que l'on prenne la page 11

 14   421, ligne 18, où le témoin nous dit qu'elle a reçu des informations de la

 15   RS et du FIS. Et par la suite, elle nous dit : Il faut avoir un certificat

 16   de mort du livre des morts. Nous n'avions pas pris la liste pour l'année

 17   1995. Nous avons pris la liste des personnes décédées.

 18   M. TOLIMIR : [interprétation]

 19   Q.  Alors, j'aimerais savoir si la liste des personnes disparues, est-ce

 20   que cette liste est plus importante, ou bien est-ce que c'est le registre

 21   des décès délivrés par les organes pour d'autres besoins des citoyens qui

 22   ont été réalisés sur la base des registres des décès ?

 23   R.  Concernant ce que vous dites que j'ai dit, tout n'est pas tout à fait

 24   juste. Mais pour répondre à votre question, eh bien, voici comment les

 25   choses se passent.

 26   Quand il n'y a pas de guerre, donc en temps de paix, l'information émanant

 27   du registre des décès est une information cruciale, c'est une information

 28   qui est également officielle, et est utilisée par les citoyens pour toutes


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  1   sortes de raisons, tout comme par exemple l'acquisition des droits sur les

  2   biens, et cetera, et pour d'autres raisons également. Mais pendant la

  3   guerre, le système des statistiques ne fonctionne pas très bien, alors les

  4   registres des décès ne sont pas tout à fait complets, et très souvent, ils

  5   omettent d'indiquer un très grand nombre de personnes qui meurent au cours

  6   de la guerre.

  7   Mais il y a un groupe de personnes très précis qui ne sont pas inclus dans

  8   le registre des décès, et ces personnes sont des personnes portées

  9   disparues. Les personnes portées disparues ne peuvent pas être incluses

 10   dans le registre des décès. Elles ne peuvent pas se trouver sur la liste

 11   des registres de décès pour la raison suivante, c'est qu'il n'y a pas de

 12   certificat de décès. Parce que pour un certificat de décès, il faut trouver

 13   un corps de personne disparue, et les corps se trouvent à un endroit

 14   inconnu et demeurent non disponibles. Donc il n'y a aucune façon

 15   d'enregistrer une personne portée disparue par les autorités statistiques

 16   dans le registre des décès.

 17   Alors, lorsqu'on compte les victimes d'une guerre, les activités

 18   doivent se pencher sur diverses sources. On ne peut pas seulement se fonder

 19   sur le registre des décès, puisque ce n'est pas la seule chose à faire. On

 20   peut seulement connaître les décès connus du registre des décès. Mais

 21   lorsqu'une personne est portée disparue, il faut chercher ailleurs.

 22   La source principale qui nous permet de voir qui sont les personnes qui

 23   sont portées disparues, c'est le comité international de la Croix-Rouge.

 24   Ces personnes font ce genre de travail depuis très longtemps et ils ont été

 25   impliqués dans un très grand nombre de conflits dans le monde. Donc c'est

 26   les premières personnes à aller dans les zones de conflit, à recueillir des

 27   données des membres des familles. Donc le CICR recueille des informations

 28   concernant les personnes détenues; par exemple, ils se rendent dans les


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  1   camps de détention et vérifient les conditions de détention, mais également

  2   ils se penchent sur le travail d'enregistrer les personnes qui sont portées

  3   disparues.

  4   Donc les organisations internationales comme le CICR sont une source

  5   importante pour obtenir ce type d'informations. Maintenant, on peut se

  6   poser la question si les listes des ONG sont également une source

  7   importante. Oui, effectivement, elles le sont. Lorsque le CICR travaille

  8   avec des procédures déjà établies, par exemple, puisqu'ils ont un

  9   questionnaire standard qui est utilisé pour enregistrer les personnes

 10   portées disparues, ils sont, toutefois, tout à fait sélectifs lorsqu'ils

 11   acceptent des rapports des personnes portées disparues. Par exemple, on ne

 12   peut pas simplement se présenter, faire un rapport et on établit un

 13   registre. Non. S'agissant des membres de la famille très proches, ces

 14   personnes sont acceptées par le CICR comme étant des personnes donnant

 15   l'information. Alors, ils y entrent un registre sur l'information sur les

 16   personnes portées disparues, et ceci est fiable.

 17   Mais les ONG, vous savez, ne travaillent pas de cette façon-là. Pour

 18   la plupart du temps, ils se trouvent dans les zones post-conflit, dans des

 19   conditions post-conflit plutôt, et n'ont pas cette pratique standard leur

 20   permettant de recueillir toutes ces données. Alors, très souvent, ils

 21   acceptent tous les rapports, toutes les informations provenant de toutes

 22   sortes de personnes, des registres, des rapports locaux, et tout ceci est

 23   accepté, mais ce n'est pas toujours la bonne chose à faire. Donc ils se

 24   fondent sur toutes ces informations. Alors, lorsqu'on travaille avec les

 25   listes des ONG, il nous faut être beaucoup plus critiques, sélectifs, et il

 26   faut faire attention lorsqu'on examine ce genre de données et lorsqu'on

 27   décide d'accepter ce genre de données. Donc il ne s'agit que d'une question

 28   d'approche qu'il faut employer, donc approche prudente, lorsqu'il s'agit de


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  1   recueillir les données provenant de toutes ces sources diverses et variées.

  2   Je crois que les démographes ici au Tribunal pénal international sont tout

  3   à fait au courant de ce type de problème. Nous avons été prudents et

  4   sélectifs lorsque nous choisissions nos sources. Alors, je vais terminer

  5   ici; c'est peut-être trop long comme réponse.

  6   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  8   M. TOLIMIR : [interprétation]

  9   Q.  Merci, Madame Tabeau. J'aimerais savoir pourquoi vous cherchiez ce que

 10   vous avez déjà, et non pas ce que l'on vous a dit comme étant important ?

 11   M. Ivanisevic vous signale un individu pour lequel un certificat de décès a

 12   été délivré par les autorités de Bosnie-Herzégovine, que ce soit avant ou

 13   après la guerre, or cette personne ne figure pas sur vos listes. Pourquoi

 14   vous ne recherchez pas cette personne alors ? Et pourquoi attribuez-vous

 15   une telle importance aux listes que vous avez ? Merci.

 16   R.  Avant tout, je pense que M. Ivanisevic ne nous a pas fourni des

 17   certificats de décès pour 58 individus. Il nous a montré des déclarations

 18   de témoin données devant les tribunaux. Généralement, il suffit que

 19   quelqu'un se présente devant un tribunal accompagné de deux témoins et

 20   qu'une attestation soit délivrée par le tribunal. Il ne s'agit pas là d'un

 21   certificat de décès. Le certificat de décès est délivré par la médecine

 22   légale généralement, un médecin légiste qui, après avoir examiné le corps,

 23   détermine la cause du décès, souvent trois causes principales les plus

 24   probable du décès, et il émet un certificat à cet effet.

 25   Donc je tiens à préciser que M. Ivanisevic ne nous a pas fourni de

 26   certificats de décès. Vous me demandez pourquoi je ne l'ai pas recherché

 27   moi-même. Si, je l'ai fait. Ce n'est pas un hasard que les deux registres

 28   de décès, celui de la RS et celui de l'Institut fédéral des statistiques,


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  1   se trouvent dans mon service ici. Ces deux registres n'existaient pas en

  2   Bosnie-Herzégovine au préalable. Ils ont été produits suite à la demande

  3   que nous leur avions envoyée, et nous leur avons fourni des instruments

  4   électroniques leur permettant de s'exécuter. Ils ont pu informatiser leurs

  5   données grâce à la demande qui est venue de notre part.

  6   Donc c'est notre Tribunal qui est à l'origine du regroupement de ces

  7   informations officielles. Et nous savons exactement qui sont les individus

  8   pour lesquels ces certificats de décès existent et pour lesquels ils

  9   n'existent pas. Malheureusement, les certificats de décès relatifs à

 10   Srebrenica ne sont pas pertinents puisqu'ils traitent des décès connus,

 11   c'est une catégorie tout à fait distincte de celle des personnes portées

 12   disparues. Le rapport de 2009 en l'espèce est un rapport qui porte sur les

 13   personnes portées disparues, et c'était notre groupe initial de victimes

 14   étudiées.

 15   La phase suivante a englobé d'autres sources et, avant tout,

 16   l'identification fondée sur les échantillons de l'ADN. Ce sont des

 17   échantillons qui nous ont été fournis de manière tout à fait indépendante

 18   de la part d'une organisation qui n'est pas la Croix-Rouge internationale.

 19   Donc il s'agit de la Commission internationale chargée des personnes

 20   portées disparues, l'ICMP, qui a procédé à des identifications des restes

 21   des personnes exhumées des fosses communes et d'autres fosses situées sur

 22   le territoire de Bosnie-Herzégovine.

 23   Donc, en réponse : je n'ai pas recherché les certificats de décès ou

 24   d'autres notifications officielles de décès, mais s'agissant de Srebrenica,

 25   cette source n'est pas la source valable. Il faut se fonder sur d'autres

 26   sources, sur la liste des personnes portées disparues.

 27   Q.  Je vous comprends, Madame Tabeau. Il y a beaucoup de points que nous

 28   ignorons et vous éprouvez le besoin de nous renseigner là-dessus. Mais j'ai


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  1   un certain nombre de questions à vous poser. Est-ce que vous pourriez, s'il

  2   vous plaît, me répondre à ces questions, et après je vous donnerai la

  3   possibilité de vous exprimer de manière plus détaillée sur d'autres points.

  4   Donc j'aimerais savoir comment vous avez traité les documents suggérés par

  5   M. Ivanisevic. Page 84 du compte rendu d'audience d'hier, par exemple. Je

  6   ne sais plus quelle sera la nouvelle pagination, mais ce que vous nous

  7   dites, c'est la chose suivante :

  8   "J'ai procédé à une comparaison avec la base de données de la Republika

  9   Srpska."

 10   Page 84 d'hier, ligne 11. Et vous nous dites dans la suite :

 11   "Ce type de document qui peut être accepté sur la base de la base de

 12   données de la Republika Srpska m'incite à m'interroger sur quels sont ces

 13   documents dont s'est servi Milivoje Ivanisevic. C'est un militant qui

 14   défend les droits du peuple serbe en Bosnie-Herzégovine. Il est en contact

 15   avec la Défense de Radovan Karadzic. Ce n'est pas un statisticien."

 16   Et cetera. Je ne voudrais pas m'étendre là-dessus, perdre de temps avec

 17   cela. Donc, si vous jugez la personne, de son caractère, comment est-ce que

 18   nous pouvons accepter votre conclusion ? Dites-nous pourquoi présentez-vous

 19   cet individu de cette manière-là, pourquoi cherchez-vous à rejeter en bloc

 20   les informations qu'il fournit ?

 21   R.  Je décris cet individu, je le présente pour que les Juges de la Chambre

 22   puissent savoir que c'est éventuellement une source qui n'est pas fiable,

 23   qui est partiale. Mais je l'ai déjà dit hier et je le redis aujourd'hui,

 24   j'ai étudié le cas de ces 58 noms pour pouvoir fournir ma conclusion à la

 25   Chambre, donc sur ces 58 dossiers de personnes portées disparues, pour

 26   savoir s'il faut les enlever de la liste du bureau du Procureur ou non. Et

 27   c'est quelque chose que je vais faire pour juger de la fiabilité de M.

 28   Ivanisevic et de ses sources. Je pense qu'il est important de pouvoir dire


Page 11452

  1   aux Juges de la Chambre ce qu'il en est de ces 58 noms.

  2   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Page 84, ligne 11 est devenu

  3   désormais page 11 435. Donc c'est la page du compte rendu d'audience

  4   d'hier.

  5   Monsieur Tolimir, veuillez poursuivre, s'il vous plaît.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Excusez-moi, je

  7   n'ai pas pris note de la repagination [phon].

  8   M. TOLIMIR : [interprétation]

  9   Q.  Vous venez de mentionner M. Tokaca --

 10   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, vous aviez raison.

 11   Vous avez bien dit qu'il n'y a pas de raison de présenter vos excuses. Il y

 12   a eu simplement une mise à jour de la pagination, c'est tout. Vous avez

 13   donné la référence exacte.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 15   M. TOLIMIR : [interprétation]

 16   Q.  Madame Tabeau, vous avez parlé de M. Tokaca et de son ONG humanitaire,

 17   à savoir son centre de recherche documentaire. Puisque que vous les prenez

 18   en considération, vous ont-ils fourni la liste des 500 personnes qui

 19   figurent sur la liste des personnes portées disparues et pour lesquelles il

 20   vous a bien précisé que ces personnes sont en vie ? Merci.

 21   R.  J'ai reçu une liste qui comporte, non pas 500 noms, mais 240. Je sais

 22   qu'un débat est en cours dans les médias en Bosnie-Herzégovine évoquant

 23   potentiellement 500 survivants qui auraient été pris en compte dans la base

 24   de données de Tokaca dans ce "Livre bosnien des morts". Le bureau du

 25   Procureur a exigé que lui soit fourni cette liste de 500 noms pour pouvoir

 26   faire un recoupement avec nos sources, donc la liste de personnes portées

 27   disparues relative à Srebrenica. Et en réponse à cette demande, M. Tokaca

 28   nous envoie une lettre disant que la liste des 500, il ne peut pas nous la


Page 11453

  1   fournir, 500 ou à peu près 500, puisque sa base de données est constituée

  2   de telle sorte que tout élément qui n'a jamais été effacé de sa base ne

  3   peut plus être restitué. Donc il a précisé qu'il est possible qu'au fil du

  4   temps son centre ait pu identifié ces 500 survivants de Srebrenica qui ont

  5   été sur-le-champ rayés de la liste de la base de données.

  6   Afin de nous fournir ce qu'il avait encore en main, il nous a fourni

  7   donc cette liste de 240 noms et nous a dit que ces noms ne figuraient pas

  8   en tant que victimes de la guerre dans sa base de données, mais qu'ils

  9   étaient au courant, effectivement, de l'existence de ces 240 noms à ce

 10   moment-là. Et c'est ce qui nous a été fourni. J'ajoute qu'il paraîtrait que

 11   ces 240 noms ont été pris en compte sur la base des sources du TPIY et - ce

 12   qui est encore plus intéressant - apparemment sur la base de ce que nous

 13   avons faite, nous, dans notre service démographique ici.

 14   Mais effectivement, nous avons comparé cette liste des 240 à la liste

 15   de Srebrenica et nous avons tiré certaines conclusions.

 16   Est-ce que vous voulez que je continue ?

 17   Q.  Ce serait intéressant que les Juges sachent ce que vous avez pu

 18   constater en comparant cette liste de 240 noms à ce groupe initial de 500.

 19   En fait, ces 240 ne correspondent pas à ce premier groupe initial.

 20   R.  Oui, vous avez bien compris. Nous avons fait un recoupement, et je dois

 21   dire qu'une personne sur les 240 a été retrouvée dans les registres

 22   d'identification par l'ADN de l'ICMP. M. Ridic, si je me souviens bien du

 23   nom de famille de cette personne.

 24   Nous avons examiné cela de plus près parce qu'il n'est pas possible qu'une

 25   personne soit en vie et qu'en même temps on la retrouve dans les

 26   identifications par l'ADN. Ce qui est important, c'est que nous avons

 27   trouvé une fiche relative à cette personne dans le registre gouvernemental

 28   des personnes déplacées et des réfugiées. Donc nous avions deux sources :


Page 11454

  1   d'un côté, l'identification par l'ADN de ses restes dans une fosse comme;

  2   et d'autre part, nous avions une trace selon laquelle cette personne aurait

  3   été déclarée personne déplacée.

  4   Donc l'enquête nous a permis de préciser que les données figurant

  5   dans le registre des personnes déplacées n'étaient pas exactes. La femme et

  6   les deux filles de cet individu sont restées en vie après Srebrenica, se

  7   sont retrouvées sur un territoire entre les mains du gouvernement de

  8   Bosnie. Elles ont fait une déclaration présentant tous les membres de la

  9   famille comme étant des personnes déplacées. Donc il a été enregistré lui

 10   aussi à ce moment-là, et les survivantes ont espéré que le recoupement se

 11   ferait à jour. Mais cela n'a pas eu lieu, et c'est la raison pour laquelle

 12   on a pu constater qu'il n'était pas exact de le considérer comme personne

 13   déplacée à l'intérieur du pays.

 14   Donc ce sont les conclusions de l'identification par l'ADN qui sont

 15   exactes. Cette personne n'a pas survécu aux événements de Srebrenica, et

 16   donc il est correctement enregistré par le CICR comme personne portée

 17   disparue.

 18   Dans l'ensemble, je dois dire que sur ces 240 noms, il n'y a pas de

 19   survivants qui figureraient en même temps sur la liste du bureau du

 20   Procureur.

 21   Q.  Vous venez de nous citer un cas. Mais qu'en est-il des 239 autres de

 22   cette liste ? Comment est-ce qu'on pourrait se procurer cette liste pour

 23   que ces noms ne réapparaissent pas ?

 24   R.  Les 239 autres personnes ne figurent pas sur la liste du bureau du

 25   Procureur, ne figurent pas sur la liste des personnes portées disparues et

 26   ni sur la liste des personnes identifiées. Donc c'est une chose. Et puis,

 27   bien entendu, si vous souhaitez consulter la liste, vous pouvez la

 28   consulter et mener votre enquête de votre côté.


Page 11455

  1   Q.  Je vous remercie. Entre-temps, mon conseiller juridique vient de

  2   m'informer qu'il a cette liste en sa possession. Une autre question : les

  3   500 autres qui sont annoncés par M. Tokaca dans sa déclaration, est-ce que

  4   vous avez la liste de ces 500 ?

  5   R.  Non. Il cite à peu près 500 survivants, mais il dit qu'ils ne figurent

  6   plus dans les registres des noms de victimes de la guerre de son centre.

  7   Mais il n'a pas pu nous fournir la liste de 500 noms.

  8   Q.  Merci. Est-ce que vous savez quels sont les documents sur la base

  9   desquels on a puisé des informations pour constituer sa base de données ?

 10   Il fallait bien qu'il y ait une source pour cette reconstruction. Comment

 11   est-ce que des choses peuvent être valables un jour et puis le lendemain

 12   elles ne sont plus valables ? Il faut qu'il y ait une source, une raison.

 13   R.  Ecoutez, je ne travaille pas avec M. Tokaca. Je ne vois pas pourquoi je

 14   m'intéresserais à ses sources. Nous avons vérifié ce qui en est de 240 et

 15   nous sommes arrivés à la conclusion qu'il n'y a pas de problème qui se pose

 16   au sujet des survivants sur la base de cette liste. Mais pour les 500

 17   autres, je n'ai pas de théorie à développer et je n'ai pas de sources non

 18   plus.

 19   Q.  Est-ce qu'il serait important de fournir cette liste de 500 noms au

 20   bureau du Procureur pour que ces noms ne réapparaissent pas en tant que

 21   personnes portées disparues ou en tant que personnes recherchées par les

 22   accusés dans les échantillons aléatoires, pour que ces noms ne se

 23   retrouvent pas à ce moment-là alors qu'on a refusé de les donner

 24   précédemment ? Donc je voudrais dire, est-ce que ce n'est pas délibérément

 25   qu'on a fourni cela pour que ceux qui cherchent à démontrer les

 26   discordances se focalisent là-dessus ? Merci.

 27   R.  Je pense que M. Tokaca a bien précisé les choses au sujet de ces 500

 28   personnes. La confusion est due à ce qu'en ont dit les médias, donc lorsque


Page 11456

  1   les médias ont cité ce chiffre de 500. Donc je voudrais préciser cela. Mais

  2   je pense que la question des survivants de Srebrenica, de manière générale,

  3   ne devrait pas être étudiée à la lumière d'une seule liste, une liste de

  4   500 personnes. Si l'on se penche un petit peu sur le nombre de personnes

  5   qui ont été repérées à Srebrenica à la mi-1995 et combien d'entre ces

  6   personnes ont été enregistrées par la suite comme étant des personnes

  7   déplacées, nous pouvons arriver à la conclusion qu'il s'agit d'un groupe

  8   important. Il est bien plus important qu'une liste de 500 noms. Et nous

  9   avons travaillé sur des listes de personnes déplacées à l'intérieur du

 10   pays. Donc nous avons travaillé sur des registres du gouvernement,

 11   gouvernement de Bosnie-Herzégovine, et il s'agit de registres comportant

 12   beaucoup de noms pour l'année 2000. Nous avons encore plus de 500 000

 13   personnes enregistrées, quasiment 500 000 [comme interprété] personnes

 14   enregistrées comme étant personnes déplacées, avec un petit groupe de

 15   réfugiés.

 16   Donc nous, nous avons toujours systématiquement utilisé les registres

 17   des élections de 1997, 1998, de l'an 2000. Donc, à chaque fois, vous

 18   retrouvez à peu près 2 500 000 noms sur ces listes pour le pays entier. La

 19   population de Srebrenica y est englobée. Donc nous avons fait des

 20   recoupements, et la liste des survivants n'est pas une liste de 500. C'est

 21   une question bien plus complexe que cela.

 22   Q.  Merci. Il cite que ces 500 personnes correspondent aux victimes de

 23   Srebrenica. Mais j'aimerais savoir une autre chose : ce chiffre de 500, à

 24   partir du moment où on aura démontré sur la base des recherches faites par

 25   des gens comme Ivanisevic, par exemple, le jour où on aura démontré que ces

 26   500 personnes sont décédées, par exemple, avant la guerre ou après la

 27   guerre et qu'elles se sont retrouvées, effectivement, sur ces listes de

 28   victimes, mais qu'elles ont été rayées, c'est bien la conclusion qui


Page 11457

  1   pourrait arriver, donc pourquoi est-ce qu'on nous ne donne pas cette liste

  2   de 500 et qu'on ne se contente pas simplement de nous dire que ce sont des

  3   noms qu'on a déjà enlevés ?

  4   R.  Monsieur, véritablement, je pense que vous devriez vous en ouvrir à M.

  5   Tokaca, ou M. Ivanisevic pourrait prendre contact avec lui. C'est tout ce

  6   que je pourrais vous dire. Je ne sais pas ce que Tokaca a déclaré à la

  7   presse. Ce n'est pas nécessairement non plus ce que la presse a relaté.

  8   Parfois, cela arrive qu'il y ait des malentendus et des rapports qui ne

  9   sont pas tout à fait exacts dans la presse en Bosnie-Herzégovine.

 10   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Pour que ce soit tout à fait clair,

 11   est-ce que vous pourriez, s'il vous plaît, m'aider à bien comprendre les

 12   choses. Vous avez été en contact avec M. Tokaca, vous lui avez posé la

 13   question de ses sources et vous lui avez demandé ce qu'il en est de ces

 14   articles que publiaient les médias sur les 500 personnes ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je lui ai demandé simplement cette liste

 16   de 500 personnes.

 17   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Et vous avez reçu une liste de 240 ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est une liste différente --

 19   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Pourquoi différente ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Il a dit qu'il n'a pas conservé les noms des

 21   500 personnes rayées de sa base de données comportant les noms des victimes

 22   de la guerre, qu'il n'a pas conservé des copies de ces fichiers. Ça, c'est

 23   quelque chose qu'un statisticien ne ferait jamais, mais c'est ce que font

 24   les gens qui travaillent pour les ONG. Ils détruisent des données, et

 25   voilà, les données sont perdues.

 26   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Mais M. Tokaca, est-ce qu'il vous a

 27   dit si ces 240 font partie du groupe de 500 ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Il ne nous l'a pas dit. Mais j'ai compris, en


Page 11458

  1   fait, qu'il s'agissait d'une liste distincte. J'ajoute qu'elle ne fait pas

  2   partie de sa base de données de victimes de la guerre puisqu'elle comporte

  3   les noms de survivants potentiels.

  4   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] M. Tokaca, est-ce qu'il a confirmé

  5   qu'il avait cette liste de 500 noms ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] En fait, non. Il a même précisé que ce n'était

  7   pas nécessairement 500 exactement, que c'est simplement un chiffre qui lui

  8   est venu à l'esprit à ce moment-là. Mais non.

  9   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.

 10   Monsieur Tolimir, veuillez continuer.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, je vous remercie.

 12   M. TOLIMIR : [interprétation]

 13   Q.  Hier, Madame, vous avez également parlé d'une demande que vous avez

 14   adressée aux autorités de Bosnie-Herzégovine. En page 79, vous avez donc

 15   dit que vous leur avez demandé de vous fournir une liste, ou plutôt, de

 16   comparer leur liste à la vôtre. Et M. Vanderpuye vous a demandé ce que vous

 17   aviez demandé qu'il corrige et vous avez dit : Non, rien. Il s'agit de la

 18   pièce 2770 sur la liste 65 ter. Il s'agit d'une demande d'assistance qui a

 19   été envoyée au ministère de la Défense de Bosnie-Herzégovine.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut l'afficher dans le prétoire

 21   électronique, s'il vous plaît, pour que le témoin puisse voir le document

 22   et pour que je puisse poser quelques questions à ce sujet. Il s'agit de la

 23   pièce P2083. Merci.

 24   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 26   M. TOLIMIR : [interprétation]

 27   Q.  Page 14 431 du compte rendu d'audience d'hier, ligne 8, me semble-il,

 28   et avant cela, page 14 430, vous avez évoqué la nécessité de vérifier ce


Page 11459

  1   qu'il en est de ces 142 personnes. Et puis, M. Vanderpuye vous a dit :

  2   "Vous avez envoyé aux autorités bosniaques tel ou tel document et

  3   vous avez demandé que ces autorités modifient leur base de données."

  4   Et vous avez répondu :

  5   "Nous avons demandé qu'on nous fournisse une information; je ne vois

  6   pas pourquoi on leur demanderait de modifier leurs informations."

  7   Et puis, à la page suivante, vous dites : Nous avons reçu tel ou tel

  8   élément.

  9   Mais ma question est la suivante : dites-nous, s'il vous plaît, quel

 10   est le paragraphe que nous devrions lire pour voir de quoi il s'agit, par

 11   exemple le paragraphe 3, pour que les interprètes me disent bien de quelle

 12   demande d'assistance il s'agit puisque nous n'avons pas ce document dans le

 13   dossier ?

 14   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, vous voyez le

 15   document à l'écran, il s'agit de la demande d'assistance, en anglais et en

 16   B/C/S. Hier, la traduction n'avait pas été affichée à l'écran parce qu'en

 17   fait, la traduction faisait partie d'un seul et même document, donc c'est

 18   pour cela que le document a été enregistré aux fins d'identification en

 19   attendant la traduction. Mais le problème est maintenant réglé, vous avez

 20   maintenant les deux versions sur vos écrans. Et je pense qu'hier,

 21   l'Accusation avait demandé le versement au dossier de ce document, et ce

 22   document sera maintenant pleinement versé au dossier.

 23   Monsieur Tolimir, je vous en prie, poursuivez.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Eh bien, c'est maintenant que je

 25   constate qu'il y a cette traduction.

 26   M. TOLIMIR : [interprétation]

 27   Q.  Donc, est-ce que vous pourriez nous dire si vous avez reçu les

 28   documents de Bosnie-Herzégovine, et je pense au document qui est mentionné


Page 11460

  1   à la dernière phrase du paragraphe 3 ? Donc il est question des éléments de

  2   preuve relatifs au décès de ces personnes, au lieu du décès, causes du

  3   décès. Vous les avez reçus ?

  4   R.  Oui, je pense que je les ai reçus.

  5   Q.  Donc, est-ce que vous pourriez communiquer ces documents à la Défense ?

  6   R.  Ecoutez, je pense que la Défense les a déjà, ces documents, parce qu'il

  7   est impossible qu'ils n'aient pas été communiqués.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Excusez-moi. Excusez-moi, mon assistant

  9   juridique vient juste de m'informer qu'effectivement, ces documents ont bel

 10   et bien été communiqués à la Défense. Mais il s'est contenté de nous les

 11   donner, ces documents, pour que je les examine. Il ne m'avait pas indiqué,

 12   en fait, ce dont il s'agissait.

 13   M. TOLIMIR : [interprétation]

 14   Q.  J'aimerais maintenant vous posez une autre question. Donc vous leur

 15   avez demandé de vous fournir ces documents. Alors, pourquoi est-ce que vous

 16   avez apporté ces corrections, corrections, en fait, qui étaient

 17   préjudiciables par rapport aux informations qui avaient été trouvées par

 18   l'armée, et là je vous parle de l'armée de la BiH, je ne vous parle pas de

 19   l'autre camp. Donc, pourquoi est-ce que vous avez apporté ces amendements

 20   et ces corrections ?

 21   R.  Je pense qu'il faut que je précise quelque chose. Nous avions besoin --

 22   il fallait, en fait, étudier les documents pour confirmer ou infirmer

 23   certains cas de soldats qui étaient inclus sur nos listes de personnes

 24   portées disparues. Donc il y a des décalages entre la date de la

 25   disparition ou la date du décès telles qu'indiquées par le CICR et les

 26   mêmes données se trouvant dans les dossiers de l'armée. Je dirais que dans

 27   un grand nombre de cas les documents nous ont permis de constater et de

 28   confirmer qu'il s'agissait de personnes qui avaient été portées disparues


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  1   lors de la chute de Srebrenica. Donc ce qui nous a été communiqué,

  2   c'étaient les nouvelles dates corrigées, j'insiste sur ce terme, corrigées

  3   dans les dossiers militaires. Mais je n'ai rien eu à corriger dans nos

  4   fichiers du CICR, parce que manifestement, les dossiers de l'armée

  5   correspondaient tout à fait aux données du CICR. Donc ces documents, en

  6   fait, m'ont fourni la justification nécessaire pour considérer ces

  7   différents cas comme des cas de personnes disparues, et ce, dans le siège à

  8   la chute de Srebrenica. C'est ce qui a été fait, d'ailleurs. C'est tout ce

  9   que nous avons fait.

 10   Q.  Merci. Est-ce que vous avez mené à bien des enquêtes ? Est-ce que vous

 11   avez vérifié l'exactitude de ces éléments ? Est-ce que vous avez vérifié

 12   s'il s'agissait peut-être d'éléments tout à fait fictifs nécessaires pour

 13   justifier certains besoins ?

 14   R.  Ecoutez, il aurait quand même été assez étrange que je conteste des

 15   documents officiels qui nous étaient envoyés par des autorités, par les

 16   autorités de l'Etat de Bosnie-Herzégovine. Je n'ai pas vérifié

 17   l'authenticité de ces documents. J'ai supposé qu'ils étaient authentiques,

 18   et je n'avais d'ailleurs aucune raison de supposer qu'ils étaient fictifs.

 19   Il s'agissait des documents officiels qui nous ont été fournis à la suite

 20   de notre demande d'assistance officielle. Donc il s'agit d'un document

 21   juridique contraignant qui nous a été communiqué.

 22   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Vanderpuye.

 23   M. VANDERPUYE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 24   C'est une information que je donne à l'intention de la Chambre de première

 25   instance ainsi qu'à l'intention de M. Tolimir. Je dirais que la réponse à

 26   la requête d'assistance inclut les documents auxquels fait référence le

 27   témoin. Alors, il s'agit, en fait, du document de la liste 65 ter 2771,

 28   document P2084. Et au début, à la page 3 du document, vous trouvez la liste


Page 11462

  1   des personnes et des cas de décès fournis par les autorités de Bosnie,

  2   suivie par toute la liste des certificats. Voilà, je voulais juste attirer

  3   votre attention sur ce fait.

  4   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, je vous remercie. D'ailleurs,

  5   c'est un document qui a déjà été versé au dossier hier.

  6   Monsieur Tolimir.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  8   M. TOLIMIR : [interprétation]

  9   Q.  Pourriez-vous nous dire si vous avez modifié quoi que ce soit à la

 10   liste que vous avez fournie ainsi qu'à la liste que cette organisation

 11   internationale vous a fournie à la suite de votre demande ?

 12   R.  Je ne suis pas sûre d'avoir bien compris votre question. Mais je dirais

 13   qu'en règle générale, nous ne modifions pas les informations de nos sources

 14   originales. Lorsque nous avons dressé une liste du bureau du Procureur pour

 15   les personnes portées disparues à Srebrenica, nous avons utilisé les

 16   dossiers et les rapports du CICR, tels qu'ils nous sont donnés. Donc il

 17   s'agit des informations du CICR que nous ne modifions pas, mais nous avons

 18   -- il en va de même avec les dossiers fournis par l'ICMP pour ce qui est

 19   des personnes qui ont été identifiées pour Srebrenica. Nous ne les

 20   corrigeons pas, à moins, bien entendu, dans le cas de l'ICMP, de quelques

 21   coquilles dont nous avons d'ailleurs parlé avec l'ICMP et nous avons

 22   précisé justement ce qu'il en était. Donc nous n'apportons aucune

 23   correction. S'il y a des inexactitudes ou des incohérences, nous les

 24   précisons. Nous demandons des précisions. Et au vu de la précision qui a

 25   été apportée, soit nous conservons les listes du bureau du Procureur en

 26   l'état ou alors nous supprimons ces éléments. C'est aussi simple que cela.

 27   Donc, lorsque vous avez des dossiers militaires comme source, il

 28   s'agit de listes supplémentaires, et nous utilisons d'autres listes telles


Page 11463

  1   que le recensement, la base de données de mortalité de la Republika Srpska,

  2   la base de données de mortalité du FIS. Ce sont des sources qui nous

  3   permettent de mieux comprendre la situation. Mais c'est la façon dont nous

  4   travaillons, nous ne modifions absolument pas les informations originales

  5   qui émanent des sources.

  6   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, écoutez, j'ai

  7   quelques problèmes à comprendre votre dernière question. Parce qu'il était

  8   question d'une demande d'assistance et de la réponse apportée à cette

  9   demande d'assistance. Or, lors de votre dernière question à la page 24,

 10   lignes 21 à 23, vous posez une question au témoin à propos de "la liste qui

 11   vous a été fournie par cette organisation internationale à la suite de

 12   votre demande." Alors, j'ai cité votre propos, mais qu'entendez-vous par

 13   "cette organisation internationale" ? Parce que la demande, elle a été

 14   présentée au ministère de la Défense de la Fédération de Bosnie-

 15   Herzégovine. Il ne s'agit absolument pas d'une organisation internationale.

 16   Et je pense que la réponse a été fournie par cette institution nationale.

 17   Donc, est-ce que vous vous êtes mal exprimé, s'agit-il d'un lapsus ou

 18   d'autre chose ? Je ne le sais pas. J'aimerais obtenir une précision de

 19   votre part.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je suppose que ma

 21   question était un tant soit peu illogique.

 22   M. TOLIMIR : [interprétation]

 23   Q.  Pourriez-vous nous dire comment vous avez déterminé que les documents

 24   fournis par l'armée de la BiH ne correspondaient pas aux listes fournies

 25   par le bureau du Procureur ?

 26   R.  Ecoutez, j'aimerais vous demander une petite précision, car les

 27   documents fournis par l'armée de la BiH, me dites-vous -- donc vous faites

 28   réponse à la réponse fournie à la suite de notre demande d'assistance, je


Page 11464

  1   suppose. Vous me dites qu'elle ne correspond pas aux listes fournies par le

  2   bureau du Procureur, alors je m'interroge. Vous faites référence, je

  3   suppose, aux listes militaires que nous avons utilisées pour identifier le

  4   manque de correspondance.

  5   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Puis-je vous   interrompre ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, d'accord.

  7   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Car je vois qu'au compte rendu

  8   d'audience M. Tolimir vous a dit : Les listes de l'armée de la BiH ne

  9   correspondent pas aux listes fournies, non pas "au bureau du Procureur",

 10   mais "par le bureau du Procureur".

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Ah. Je supposais qu'il s'agissait donc de

 12   listes fournies "au bureau du Procureur". Enfin, je n'avais pas tout à fait

 13   compris. C'est pour cela que j'avais demandé une précision.

 14   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, veuillez avoir

 15   l'amabilité de préciser votre question pour que nous puissions entendre la

 16   réponse du témoin.

 17   Maître Gajic.

 18   M. GAJIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais, dans un

 19   premier temps, saluer tout le monde et vous dire que je pense qu'il s'agit,

 20   en fait, d'une erreur d'interprétation, car M. Tolimir n'a pas parlé de

 21   listes fournies par le bureau du Procureur ou au bureau du Procureur. Il a

 22   tout simplement parlé des listes du bureau du Procureur. Donc vous avez

 23   d'un côté la liste de la BiH et, par ailleurs, vous avez les listes du

 24   bureau du Procureur, par exemple la liste qui remonte à 2009.

 25   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie de cette précision.

 26   Etes-vous en mesure de répondre à la question, ou souhaiteriez-vous

 27   que M. Tolimir reformule la question ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais vous dire comment je l'ai comprise,


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  1   cette question, et M. Tolimir pourra me dire si j'ai raison ou tort.

  2   Donc vous avez d'un côté la liste du bureau du Procureur de 2009 pour

  3   les personnes portées disparues qui se fonde sur les rapports du CICR, et

  4   vous avez, par ailleurs, la demande d'assistance. Et ensuite, nous avons

  5   des corrections, ou plutôt, des nouveaux éléments d'information, des

  6   nouveaux documents qui nous ont été envoyés à propos d'un certain nombre de

  7   cas. C'est bien cela ? Est-ce que c'est la réponse à laquelle vous vous

  8   attendiez, Monsieur Tolimir ? Est-ce que c'est bien cette observation que

  9   vous souhaitiez obtenir de ma part ?

 10   M. TOLIMIR : [interprétation]

 11   Q.  Merci, Madame Tabeau. Vous avez effectivement fourni la réponse idoine.

 12   Donc le CICR vous a, en d'autres termes, demandé d'harmoniser leurs listes

 13   avec les listes de l'armée de la BiH. Est-ce que c'est la raison pour

 14   laquelle vous avez demandé cette demande d'assistance ?

 15   R.  Le CICR n'a absolument rien à voir avec notre demande. C'est une

 16   décision que nous avons prise. Nous nous étions rendu compte qu'il y avait

 17   des décalages, par exemple, pour ce qui était de la date à laquelle les

 18   personnes avaient été portées disparues. Il s'agissait de 220 cas au total.

 19   Et vous aviez donc les rapports du CICR qui avaient été comparés aux

 20   rapports des dossiers militaires, que nous avons aussi à notre disposition

 21   au bureau du Procureur, donc à ce moment-là, nous avons décidé de demander

 22   des renseignements supplémentaires qui nous permettraient de mieux

 23   comprendre la date du décès, le lieu du décès, la date où la personne a été

 24   portée disparue, le lieu où la personne a été portée disparue et les autres

 25   circonstances, parce qu'il y avait donc des décalages. Il s'agissait de 142

 26   cas, et non pas de 220. De 142 cas. Par la suite, de nouveaux cas ont été

 27   ajoutés à la liste.

 28   Et nous avons décidé - et vous pouvez oublier tout à fait le CICR -


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  1   mais nous avons décidé de notre propre chef de demander des précisions. Des

  2   documents ont été envoyés. Nous avons comparé les réponses dans les

  3   documents qui nous avaient été envoyés aux documents du CICR, et nous avons

  4   conclu que pour de nombreux cas, il n'y avait pas de problème parce que les

  5   correspondances avaient été établies entre les rapports.

  6   Q.  Merci. Mais les rapports du CICR que vous venez de mentionner

  7   maintenant, est-ce que dans ces rapports figuraient des éléments tels que

  8   les circonstances du décès, la date du décès et d'autres renseignements

  9   semblables, ou est-ce qu'il s'agissait simplement d'une liste établie sur

 10   la base de rapports de la part de membres de famille pour les personnes

 11   portées disparues ?

 12   R.  Il s'agissait de rapports sur les personnes portées disparues. Pour

 13   certaines personnes, nous avions la date où la personne avait portée

 14   disparue, le lieu également où la personne avait été portée disparue,

 15   notamment les rapports des personnes qui avaient informé à ce sujet. Mais

 16   bien entendu, pour ce qui est d'une personne disparue, ce n'est pas la même

 17   chose qu'un rapport relatif au décès, par exemple. Donc les rapports

 18   relatifs aux décès ne sont pas inclus.

 19   Q.  Merci. Mais alors, est-ce que cela signifie que les données relatives

 20   aux circonstances du décès de la liste de Bosnie-Herzégovine ont été

 21   modifiées ou est-ce que ces données ont été changées dans le rapport du

 22   CICR ?

 23   R.  Alors, lorsque vous parlez de la liste de la BiH, je suppose que vous

 24   parlez de la réponse à notre demande d'assistance. Donc j'aimerais insister

 25   sur un fait : rien n'a été changé dans les rapports du CICR. D'ailleurs,

 26   cela n'a rien à voir avec la réponse à la demande d'assistance. C'est tout

 27   ce que je peux vous dire à ce sujet, parce que je ne sais pas très bien ce

 28   que vous souhaiteriez entendre à ce sujet.


Page 11467

  1   Q.  Merci. Non, je ne souhaite obtenir aucune autre information maintenant

  2   à ce sujet. Tout est très clair maintenant pour moi. Je voulais tout

  3   simplement savoir quelle liste avait été modifiée à la suite de votre

  4   intervention, et j'en conclus maintenant que les modifications ont été

  5   apportées à la liste fournie par l'armée de la BiH. C'est un renseignement

  6   qui me suffit.

  7   A la page 11 404, lignes 16 à 19, voilà ce que vous dites :

  8   "Je travaillais comme témoin à charge, donc dans ces rapports, vous

  9   trouverez la perspective du bureau du Procureur."

 10   Est-ce que je vous ai bien cité ? Il s'agit, je le rappelle, de la page du

 11   compte rendu d'audience 14 404, lignes 16 à 19, compte rendu d'audience du

 12   16 mars 2011.

 13   R.  Ecoutez, j'ai probablement dit cela à propos de mon CV et à propos des

 14   témoignages que j'ai déjà faits. Mais le fait est que j'ai été témoin à

 15   charge, témoin expert à charge. Dans une affaire, j'ai été convoquée comme

 16   témoin à décharge, dans l'affaire Lukic et Lukic. Et j'ai également été

 17   témoin expert au tribunal des Khmers rouges -- ou plutôt, je n'avais pas

 18   été convoquée ni par l'Accusation ni par la Défense, mais plutôt par les

 19   juges d'instruction dans le cas du tribunal pour les Khmers rouges.

 20   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, vérifiez le numéro

 21   de page, je vous prie, parce qu'il n'y a pas de page 11 404 au compte rendu

 22   d'audience d'hier. La dernière page est la page 11 436 -- ah non, non,

 23   excusez-moi, j'ai fait une erreur. Je me corrige. Vous avez raison.

 24   Maître Gajic.

 25   M. GAJIC : [interprétation] C'est justement ce que je voulais dire,

 26   Monsieur le Président. La page 11 404, mais il s'agit des lignes 23 à 25,

 27   en fait.

 28   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] C'est exact.


Page 11468

  1   Monsieur Tolimir, poursuivez.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Et merci,

  3   Aleksandar. Mes notes ne sont pas entièrement exactes et elles sont

  4   subjectives.

  5   M. TOLIMIR : [interprétation]

  6   Q.  Est-ce que votre rapport tient compte des thèses de l'Accusation ?

  7   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Maître Gajic.

  8   M. GAJIC : [interprétation] J'aimerais que cette question soit répétée

  9   parce que l'interprétation des propos de M. Tolimir a été abrégée.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 11   M. TOLIMIR : [interprétation]

 12   Q.  Voilà quelle était ma question : est-ce que votre rapport reprend les

 13   points de vue proposés par l'Accusation ?

 14   R.  Mon rapport reprend exclusivement mon point de vue, mon point de vue en

 15   tant que chercheur et en tant qu'auteur de ce rapport, et j'ai absolument

 16   toute latitude pour exprimer tout point de vue que je peux étayer, que je

 17   peux justifier de façon scientifique, bien entendu. Et personne ne m'a

 18   indiqué quel point de vue je devais présenter. Mon unité et moi-même

 19   n'avons jamais fait partie d'une équipe travaillant dans une affaire ou

 20   d'une équipe d'enquêteurs. Elle a toujours été absolument séparée. Nous

 21   avons toujours déployé des efforts pour présenter des rapports impartiaux

 22   et indépendants, et j'espère que nous sommes parvenus à nos fins.

 23   Q.  Je vous remercie. Ecoutez, j'ai posé cette question compte tenu de vos

 24   propos. C'est vous-même qui avez dit que dans votre rapport l'on pouvait

 25   retrouver la perspective du bureau du Procureur. Alors, ne vous fâchez pas.

 26   J'ai repris vos propos.

 27   R.  Certes, vous l'avez fait, mais vous n'avez pas cité le contexte dans

 28   lequel se plaçaient ces propos. Le contexte, c'est justement le témoignage,


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  1   le fait que je suis témoin expert, et je vous ai indiqué de façon très

  2   claire pour quelle partie j'oeuvrais lors de ces dépositions la plupart du

  3   temps. Pas tout le temps, mais la plupart du temps.

  4   M. VANDERPUYE : [interprétation] Monsieur le Président.

  5   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Excusez-moi. Monsieur Vanderpuye.

  6   M. VANDERPUYE : [interprétation] Je pense que plutôt que de tourner autour

  7   du pot et d'avoir M. Tolimir qui essaie de se souvenir des propos tenus par

  8   Mme Tabeau, je pense qu'il serait peut-être plus judicieux d'afficher sur

  9   nos écrans ce qu'elle a dit dans ce contexte. Et cela se trouve aux pages

 10   11 404 à 11 405 du compte rendu d'audience. Je pense notamment à la

 11   citation proposée par M. Tolimir, que vous trouverez aux lignes 22 à 25

 12   puis ensuite à la page suivante. Donc la première page étant la page 11

 13   404.

 14   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie. Nous allons donc

 15   voir cela sur nos écrans.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que moi aussi je pourrai voir cela sur

 17   mon écran ? Est-ce que vous pourriez m'aider pour que le document soit

 18   affiché sur mon écran ?

 19   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, M. l'Huissier va vous aider.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien. Merci.

 21   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Donc page 11 404, ligne 22.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 23   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Il me semble que M. Vanderpuye

 25   souhaiterait que nous abordions un autre sujet maintenant, ce que je vais

 26   faire.

 27   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Ecoutez, par souci d'équité envers

 28   les deux parties, je vous dirais que M. Vanderpuye s'est contenté de


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  1   demander l'affichage de cette partie du compte rendu d'audience d'hier. Et

  2   vous pouvez tout à fait poursuivre votre contre-interrogatoire comme bon

  3   vous semblera.

  4   Monsieur Tolimir, poursuivez.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Eh bien, écoutez, je ne peux pas continuer

  6   parce que je ne comprends pas le compte rendu d'audience. Donc je peux

  7   poser des questions à propos de l'interrogatoire d'hier en me basant sur

  8   mes propres notes.

  9   M. TOLIMIR : [interprétation]

 10   Q.  Donc, lorsque nous parlons de la ligne 4 de la page 11 404, voilà ce

 11   qui a été dit --

 12   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Excusez-moi. Excusez-moi, Monsieur

 13   Tolimir. Parce que maintenant je vois que ce n'est plus la bonne page qui

 14   est affichée à l'écran. Nous voulions la page 11 404. Elle a été affichée

 15   il y a une minute de cela. Là voilà, elle est à nouveau affichée. Merci.

 16   Poursuivez, je vous prie.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 18   M. TOLIMIR : [interprétation]

 19   Q.  Aujourd'hui, vous avez également déclaré que vous aviez été invitée par

 20   le Tribunal à rédiger un rapport d'expert sur les Khmers rouges, et M.

 21   Vanderpuye vous avait posé une question à ce sujet d'ailleurs.

 22   J'aimerais maintenant vous poser une question. Vous avez fait

 23   référence à un certain nombre d'affaires pour lesquelles vous avez

 24   travaillé. N'avez-vous jamais été recrutée pour travailler pour une partie

 25   qui n'était pas, en fait, les vainqueurs d'une guerre ? Est-ce que cela ne

 26   vous est jamais arrivé ?

 27   R.  Ecoutez, je voulais dire tout simplement que j'avais été convoquée, que

 28   le juge d'instruction du tribunal des Khmers rouges à Phnom Penh m'a


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  1   demandé de préparer un rapport, mais là dans ce cas d'espèce, je ne

  2   travaillais ni avec la défense ni avec l'accusation. C'est l'exemple

  3   classique, s'il en fut, du rapport absolument indépendant qui a été fait

  4   par moi de façon tout à fait indépendante. Et puis, j'ai également été

  5   témoin à décharge dans l'affaire Lukic et Lukic.

  6   Enfin, je ne sais pas si j'ai répondu à votre question, ceci étant

  7   dit.

  8   Q.  Merci. Mais est-ce que vous pourriez nous dire qui poursuivit au

  9   Cambodge : les Khmers rouges ou les vainqueurs ? Ceux qui les poursuivent

 10   maintenant.

 11   R.  Ecoutez, Monsieur, vous savez, au tribunal pour les Khmers rouges, les

 12   personnes qui sont poursuivies sont tout simplement les personnes qui sont

 13   considérées comme responsables de ces milliers de victimes qui sont tombées

 14   pendant cette période dans ce pays. Mais je suppose que vous devez quand

 15   même savoir que bien entendu ce ne sont pas les dirigeants politiques qui

 16   ont eux-mêmes les mains trempées de sang et qui ont eux-mêmes tué ces

 17   personnes. Ce n'est pas comme cela que les choses se sont passées.

 18   Q.  Oui, je le sais, cela. Mais étant donné que c'est vous qui avez fait

 19   cette recherche, je vous pose la question. Je pense à la guerre au

 20   Cambodge, est-ce qu'il y a une seule victime qui aurait été tuée par

 21   quelqu'un d'autre, et non pas par les Khmers rouges ? Et je pense aux

 22   victimes dont les noms figurent dans votre rapport.

 23   R.  Je pense qu'il serait peut-être important de ne pas oublier que dans

 24   mon rapport je ne parle pas des auteurs, je ne fais aucune référence aux

 25   circonstances, je n'indique pas qui a tué qui et pourquoi. De toute façon,

 26   cela ne fait pas partie de mon rapport, ce travail. Ce n'est pas un

 27   statisticien ou un démographe qui doit répondre à ce genre de question.

 28   Donc, dans mon rapport sur les Khmers rouges, je ne fais absolument pas


Page 11472

  1   référence aux auteurs des crimes, personnes responsables de ces milliers de

  2   victimes. Alors, pour ce qui est de savoir s'il y a des victimes qui ont

  3   été tuées par des personnes qui n'étaient pas associées aux Khmers rouges,

  4   écoutez, franchement, je n'ai absolument pas étudié cela.

  5   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, je pense qu'il est

  6   de notoriété publique qu'il y a une personne qui est traduite en justice en

  7   ce moment à Phnom Penh. Quoi qu'il en soit, nous devons faire la pause et

  8   nous reprendrons à 11 heures.

  9   --- L'audience est suspendue à 10 heures 31.

 10   --- L'audience est reprise à 11 heures 05.

 11   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur

 12   Tolimir.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, si je puis.

 14   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Je voudrais apporter une correction à la

 16   réponse d'une question que m'a posée M. Tolimir.

 17   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Certainement.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] M. Tolimir m'a demandé si je travaillais pour

 19   un parti qui est différent des vainqueurs, et j'ai répondu, mais je ne suis

 20   pas tout à fait heureuse de la réponse que j'ai donnée. Je voudrais

 21   préciser, toutefois, que je n'ai pas l'impression de travailler pour une ou

 22   l'autre des parties du conflit, ni pour les vainqueurs ni les perdants de

 23   la guerre. Je travaille pour venir en aide aux chambres pour mieux

 24   comprendre les victimes de cette guerre. Cela n'a rien à voir avec la perte

 25   de la guerre ou autre. Et mon travail n'est jamais partial. Que je

 26   travaille pour l'Accusation ou la Défense, je ferai le même genre de

 27   travail. Donc mon travail consiste à trouver des réponses, et je suis

 28   vraiment une personne très impartiale.


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  1   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.

  2   Monsieur Tolimir, veuillez poursuivre, je vous prie.

  3   M. TOLIMIR : [interprétation]

  4   Q.  Madame Tabeau, merci bien. Alors, dites-nous, s'il vous plaît, si les

  5   déclarations que vous avez faites au tribunal du Cambodge et les rapports

  6   que vous avez présentés ici en 2009 à ce Tribunal sont-ils neutres par

  7   rapport aux personnes ayant perdu la vie ?

  8   R.  De façon générale, les rapports sont objectifs et indépendants. Ce sont

  9   des rapports dans lesquels je fais une évaluation de toutes sortes de --

 10   pour ce qui est du Cambodge, j'ai fait une évaluation des victimes du

 11   Cambodge. Et pour arriver à ces chiffres, je tiens compte de plusieurs

 12   auteurs de plusieurs rapports, et je me suis également penchée sur des

 13   documents des Khmers rouges. Cela ne m'a pas présenté de problème. Et pour

 14   ce qui est de la façon dont une personne a perdu la vie, je ne vois pas

 15   comment je pourrais faire une distinction. Les personnes au Cambodge sont

 16   mortes de différentes façons. Un très grand nombre de personnes qui sont

 17   décédées étaient des victimes indirectes de la guerre. D'autres étaient des

 18   victimes directes de la guerre. Donc j'ai parlé des victimes indirectes, et

 19   il s'agissait d'un très grand groupe de personnes parmi toutes les

 20   victimes. Je pense que c'est la seule façon de procéder, en étudiant ces

 21   deux groupes et en montrant les circonstances dans lesquelles ces personnes

 22   ont trouvé la mort au Cambodge pendant la période des Khmers rouges.

 23   Donc je pourrais répondre que oui, effectivement, c'est tout à fait

 24   neutre quant à la façon dont une personne est décédée. Je ne sais

 25   réellement pas là où M. Tolimir voulait en arriver avec cette question.

 26   Q.  Merci bien. Alors, pour ne pas aller au Cambodge, rendons-nous plutôt

 27   sur le territoire de l'ex-Yougoslavie. En tant que démographe, Madame, est-

 28   ce que vous vous êtes penchée sur des questions d'ordre démographique ?


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  1   Avez-vous étudié le déplacement de la population serbe sur le territoire en

  2   Bosnie-Herzégovine, à Srebrenica ? Avez-vous donc étudié l'expulsion de la

  3   population serbe qui a été affectée par la guerre en Croatie ? Est-ce que

  4   vous avez des données ou des informations quant aux Serbes tués sur le

  5   territoire de l'ex-Yougoslavie ? Et concrètement, est-ce que vous pouvez me

  6   donner un exemple d'un Serbe dans votre rapport tué en Bosnie-Herzégovine ?

  7   R.  Eh bien, c'est plusieurs questions en une. Je vais essayer de répondre

  8   à toutes vos questions en donnant une réponse générale. Les expulsions de

  9   Serbes ou d'autres groupes ethniques n'ont pas fait l'objet de mon rapport.

 10   Je me suis, toutefois, penchée sur la migration forcée d'une population.

 11   Plus particulièrement, je me suis penchée sur la région de la Bosnie-

 12   Herzégovine. Et dans tous les rapports dans lesquels je parle de ceci, tous

 13   les groupes ethniques dans mes rapports ont le même traitement, si vous

 14   voulez. Il n'y a pas de différence concernant les Serbes, les Bosniens ou

 15   les Croates. Ils ont tous fait l'objet d'une même analyse neutre.

 16   Lorsque j'ai étudié la migration de la population serbe, migration

 17   reliée à la guerre, les Serbes qui sont partis de la Croatie, je n'ai pas

 18   fait de rapport sur cette question. De plus, les Serbes déplacés provenant

 19   d'autres Etats de l'ex-Yougoslavie, comme je l'ai dit, pour la Bosnie-

 20   Herzégovine, nous avons des rapports qui couvrent l'ensemble du pays et

 21   tous les groupes, y compris les Serbes. Je n'ai pas étudié ce sujet pour le

 22   Kosovo; quelqu'un d'autre s'est penché sur le Kosovo.

 23   Et maintenant, pour ce qui est de savoir s'il y a des rapports sur

 24   des Serbes tués en Bosnie-Herzégovine, il y a effectivement un très grand

 25   nombre de rapports -- ou plutôt, tous les rapports parlent de tous les

 26   groupes ethniques. Par exemple, à Sarajevo, il y a des rapports qui portent

 27   sur un groupe de victimes serbes. Pour Srebrenica, le fait qu'il n'y ait

 28   pas de victimes serbes, ceci n'a pas trait au fait que nous ayons été


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  1   sélectifs ou que nous nous soyons penchés seulement sur les Musulmans de

  2   Bosnie. Mais ce sont les données qui nous sont parvenues. Donc, d'après les

  3   données que nous avons trouvées, les victimes de Srebrenica sont presque

  4   exclusivement toujours bosniennes de Serbie; ils ne sont pas serbes.

  5   Ce que j'essaie de dire par là, c'est que je prends toujours une

  6   approche impartiale à l'égard de tout groupe ethnique, indépendamment de ce

  7   qui s'est réellement passé sur le territoire en cas de guerre. Je ne suis

  8   pas la personne qui détermine les résultats de mes analyses. Je ne les

  9   prévois pas à l'avance, je ne fais qu'analyser. Et les analyses, les

 10   résultats de mes analyses, de mes conclusions ne font que décrire la

 11   réalité de l'époque. Peut-être pas toujours de façon parfaite, mais dans la

 12   mesure du possible, mes conclusions décrivent toujours les réalités de

 13   certains épisodes de guerre.

 14   Q.  Merci bien. Mais je voudrais demander de bien vouloir vous concentrer

 15   sur les questions que je vous pose. Alors, est-ce que vous êtes au courant

 16   qu'à Srebrenica, plus de 3 500 Serbes ont été tués par les Musulmans dans

 17   le cadre de cette guerre ? Merci.

 18   R.  C'est ce que vous avancez. Je ne vais pas faire de commentaire sur les

 19   chiffres que vous me donnez, parce qu'il me faudrait beaucoup plus que

 20   votre déclaration. Si vous pouviez me donner des rapports dans lesquels on

 21   peut voir sur quoi s'est fondé le rapport, quelles ont été les sources et

 22   les méthodes employées, à ce moment-là, je pourrais vous donner une

 23   évaluation, je pourrais vous donner mon opinion.

 24   Q.  Merci. En tant qu'employée du bureau du Procureur, j'aimerais savoir si

 25   vous avez étudiez et enquêter sur les victimes serbes à la suite des

 26   activités de Naser Oric ?

 27   R.  Je n'ai pas pris part à cette étude. Je n'ai pas travaillé dans

 28   l'affaire Naser Oric.


Page 11476

  1   Q.  Bien. Merci. Mais votre unité démographique au Tribunal s'est-elle

  2   penchée sur cet aspect-là ?

  3   R.  Nous traitons les projets qui nous sont remis ou pour lesquels les

  4   équipes du bureau du Procureur nous posent des questions. Nous avons

  5   travaillé sur Srebrenica parce que l'unité nous a demandé d'analyser

  6   Srebrenica. Nous avons eu plusieurs rapports qui nous ont été présentés. En

  7   fait, on n'a pas les ressources nécessaires au bureau du Procureur pour

  8   nous pencher sur toutes les questions. Il s'agit des besoins de procès, et

  9   c'est à ce moment-là que nous nous penchons et élaborons le sujet, quand

 10   c'est possible.

 11   Q.  Merci. Passons maintenant à autre chose. Nous avons parlé de

 12   Srebrenica. Je vous ai dit qu'il y avait des victimes des deux côtés, mais

 13   vous avez étudié ou vous avez enquêté seulement sur ce que l'on vous a

 14   demandé de faire, alors je comprends. Maintenant, pour ce qui est du

 15   rapport que vous avez présenté, vous l'avez fait de concert avec M.

 16   Brunborg, vous avez rédigé votre rapport avec lui. Donc j'aimerais savoir,

 17   si ça a effectivement été le cas, de quelle façon est-ce que vous vous êtes

 18   répartis le travail ?

 19   R.  C'est M. Brunborg.  Brunborg, et non pas Bloomberg, comme on le voit au

 20   compte rendu d'audience. Eh bien, vous savez, nous nous sommes partagés le

 21   travail de la façon suivante : M. Brunborg est l'auteur du premier rapport

 22   de Srebrenica. Il a proposé la méthodologie et les sources employées dans

 23   le premier rapport de Srebrenica. Je fais référence au rapport de 2000

 24   présenté dans l'affaire Krstic. M. Brunborg, à l'époque, avait travaillé

 25   avec un autre enquêteur, un jeune enquêteur qui s'appelait Henrik Urdal de

 26   la Norvège --

 27   Q.  Je vous prie de d'abord répondre à la question, et par la suite vous

 28   allez pouvoir élaborer. Alors, je vous ai demandé de nous parler du rapport


Page 11477

  1   de 2009, rapport que vous avez rédigé en collaboration avec M. Brunborg,

  2   qui est venu déposer en tant que témoin de l'Accusation tout comme vous.

  3   R.  De façon générale, M. Brunborg, sa contribution a été à un niveau

  4   conceptuel. Il m'a également fait son commentaire sur son travail qui a été

  5   fait au bureau du Procureur. Moi j'ai travaillé sur le rapport de concert

  6   avec M. Arve Hetland, qui était chargé de la préparation de la base de

  7   données et le recoupage des données. Moi j'ai fait l'analyse et j'ai rédigé

  8   le rapport, et M. Brunborg a fait des commentaires sur toutes les étapes de

  9   la rédaction de ce rapport.

 10   Le nom qui manque au compte rendu d'audience est Arve Hetland. J'ai donc

 11   dit que j'ai travaillé à la rédaction de ce rapport avec M. Arve Hetland.

 12   Alors, il faudrait épeler Hetland, H-e-t-l-a-n-d.

 13   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Vous savez, ce genre de chose est

 14   corrigé plus tard, à une époque ultérieure. Vous voyez le petit signe que

 15   vous voyez ici, ceci veut dire que les sténotypistes vont vérifier le

 16   compte rendu et le corrigeront plus tard.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 18   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien. Merci.

 20   M. TOLIMIR : [interprétation]

 21   Q.  Madame Tabeau, dites-nous, je vous prie, vous et M. Brunborg, avez-vous

 22   procédé seulement à une analyse statistique ou bien est-ce que vous avez

 23   tenu compte également des changements démographiques ? Qu'avez-vous fait,

 24   en réalité ? En fait, je pense plutôt aux raisons, les causes des

 25   changements démographiques ?

 26   R.  Le problème ne porte pas sur les causes des personnes portées

 27   disparues. On ne fait que mesurer le processus lui-même et on a également

 28   mesuré les rapports relatifs à l'identification du rapport original des


Page 11478

  1   personnes portées disparues.

  2    Q.  Merci. Dites-nous, est-ce que vous avez fait ce travail seulement sur

  3   la base des informations qui vous ont été communiquées par le bureau du

  4   Procureur ou bien êtes-vous allés chercher l'information ailleurs ? Qui

  5   vous a fourni les informations, si ce n'est pas le bureau du Procureur

  6   exclusivement ?

  7   R.  Toutes les sources employées dans le rapport de 2009 ont été

  8   recueillies par mon unité. Je n'ai donc pas reçu de sources d'autres

  9   sections du bureau du Procureur. Je peux vous donner les sources de nouveau

 10   : c'est la liste du CICR et les registres de l'ICMP, des personnes

 11   identifiées pour les listes de base et pour l'intégration de la liste des

 12   personnes portées disparues pour lesquelles les personnes ont été

 13   identifiées par ADN. Et de plus, nous nous sommes servis également du

 14   recensement de la population de 1991. Nous nous sommes également penchés

 15   sur un très grand nombre de sources après la guerre sur les survivants, les

 16   électeurs, les registres de 1997, 1998 et ainsi que de l'an 2000. Le

 17   gouvernement de la BiH a également enregistré les personnes qui étaient

 18   déplacées à l'interne et ils ont également parlé de réfugiés dans le

 19   rapport. Et, en tant que source contextuelle, nous avons des registres de

 20   1997 de ce qu'on appelle les réfugiés de Srebrenica. Nous nous sommes

 21   également servis de registres militaires, nous en avons parlé un peu plus

 22   tôt aujourd'hui. Et voilà, ce sont les sources principales. Il nous est

 23   arrivé de consulter des sources plus petites, mais pour ce qui est des

 24   sources les plus importantes, il s'agissait de ces sources que j'ai déjà

 25   mentionnées.

 26   Q.  Très bien. Merci.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Veuillez, je vous prie, afficher dans le

 28   prétoire électronique la pièce 65 ter 1708. Il s'agit de la pièce D159.


Page 11479

  1   Merci. Très bien. La page qui nous intéresse est la page 4 en anglais ainsi

  2   que la page 4 en serbe, paragraphe 2.

  3   M. TOLIMIR : [interprétation]

  4   Q.  Dans lequel on peut lire, je cite -- il sera affiché sous peu. Voilà.

  5   Donc c'est le deuxième paragraphe du bas. Je vais vous donner lecture :

  6   "Quel a été le mandat du nombre de victimes minimum" -- en fait, dites-moi

  7   d'abord, est-ce qu'on vous a donné des lignes directrices pour ce qui est

  8   de votre enquête ? Est-ce que ces lignes directrices ont été définies par

  9   l'Accusation ?

 10   R.  Je n'ai reçu aucune ligne directrice pour ce qui me concerne.

 11   Q.  Très bien. Alors, voyons ce que dit M. Brunborg. Je vais vous donner

 12   lecture :

 13   "Quel était le nombre de victimes minimal de Srebrenica qui ont été tuées

 14   par la VRS après la chute de l'enclave du 11 juillet 1995 qu'on peut

 15   identifier les noms ?

 16   "Quelle est la fiabilité de la liste des victimes ?"

 17   J'aimerais vous demander : dans cet article dans lequel il a écrit ceci,

 18   s'il définit de façon correcte les tâches qui ont été confiées aux

 19   enquêteurs du bureau du Procureur ?

 20   R.  Ce passage n'a absolument rien à voir avec mes rapports, et plus

 21   particulièrement avec le rapport de 2009. C'est un article qu'avaient

 22   rédigé Helge Brunborg et M. Urdal. Il s'agit de quelque chose de

 23   complètement différent. Cela ne fait pas partie du travail qui a été fait

 24   pour cette affaire-ci. Donc c'est un article de Helge Brunborg et de Henrik

 25   Urdal.

 26   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Pourrait-on avoir la première page du

 27   document à l'écran afin de pouvoir voir de quoi il s'agit. Je remarque que

 28   je ne trouve pas ce document sur la liste des pièces qui seraient utilisées


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  1   dans le cadre du contre-interrogatoire de ce témoin. Voilà, nous pouvons

  2   voir qu'il s'agit d'un article que nous avons eu l'occasion de voir lors de

  3   l'interrogatoire de M. Brunborg. Merci.

  4   Veuillez poursuivre, je vous prie, Monsieur Tolimir.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation]  Merci.

  6   M. TOLIMIR : [interprétation]

  7   Q.  Comme nous pouvons le voir, il parle ici de quelle façon est-ce qu'on

  8   détermine certaines choses. Alors, dans votre secteur démographique, en

  9   tant que démographe, de quelle façon est-ce que vous savez de quelle façon

 10   une personne est décédée ? Est-ce qu'elle a été tuée, est-ce qu'elle a

 11   perdu la vie dans le cadre des opérations de combat, et cetera, et cetera ?

 12   R.  Comme j'ai dit un peu plus tôt, nous n'avons pas étudié les causes de

 13   décès précises ou les causes des personnes portées disparues. Nous ne les

 14   avons pas comprises. Nous n'avons pas tenu compte, en fait, des causes dans

 15   nos listes. Mais nous avons recoupé les "records" des personnes portées

 16   disparues et les registres des identifications par ADN des restes humains

 17   de personnes qui ont été exhumées des fosses communes et d'autres fosses à

 18   Srebrenica et dans la plus large zone de Srebrenica et de la Bosnie

 19   orientale.

 20   En faisant notre travail, nous avons d'abord essayé de trouver une preuve

 21   de décès de ces personnes. Quand on a un registre, quand on a une preuve

 22   par ADN, c'est quelque chose de beaucoup plus fort. Donc l'identification

 23   de décès par ADN confirme les personnes. Et l'ADN confirme beaucoup plus

 24   que le décès. L'ADN nous confirme que ces personnes n'étaient pas enfouies

 25   dans des cimetières, n'étaient pas enterrées, mais que ces personnes ont

 26   bel et bien été exhumées de tombeaux non marqués et non identifiés, de

 27   lieux d'inhumation cachés à Srebrenica.

 28   Et donc ceci nous en dit certainement beaucoup sur les circonstances,


Page 11481

  1   mais nous ne parlons pas de ceci. Ce n'est pas l'objectif de notre rapport.

  2   Nous ne parlons pas des circonstances dans lesquelles les personnes ont été

  3   enterrées. Nous ne parlons pas des circonstances entourant la mort de ces

  4   personnes qui se retrouvent dans ces lieux. Donc notre rapport est un

  5   rapport de contexte. C'est un rapport qui parle de l'étendue du nombre de

  6   victimes pour ce qui est de la chute de Srebrenica, et les rapports

  7   prouvent des preuves de décès pour un très grand nombre de victimes. Et

  8   depuis en 2009, 66 %, si je ne m'abuse, des personnes portées disparues ont

  9   été confirmées comme étant décédées grâce à l'identification par ADN, donc

 10   il n'y a plus de personnes portées disparues. Pour ces personnes-là, ce

 11   sont des personnes qui sont décédées. Nous savons qu'elles ont été enfouies

 12   dans des fosses communes et dans d'autres fosses dans la région de

 13   Srebrenica.

 14   De plus, nous avons inclus dans notre rapport des éléments

 15   statistiques qui nous permettent de voir que 80 % des personnes identifiées

 16   à date, donc 80 % environ de ces personnes, je répète, ont été trouvées

 17   dans des fosses communes étant connues sous le nom des fosses communes du

 18   TPIY. Il s'agit d'une catégorie de fosses communes bien séparée. Le TPIY a

 19   mené des enquêtes et a obtenu des éléments supplémentaires concernant ces

 20   sites particuliers.

 21   Et donc nous fournissons des éléments de preuve qui disent que 66 %

 22   des personnes portées disparues ont été confirmées comme étant décédées.

 23   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Madame Tabeau, votre réponse est

 24   vraiment longue --

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Et --

 26   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] -- à une question composée.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'excuse.

 28   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Veuillez vous concentrer sur la


Page 11482

  1   question précise qui vous a été posée.

  2   Je voudrais que l'on replace à l'écran la page 4 de ce document.

  3   Monsieur Tolimir, veuillez poursuivre, je vous prie.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Puis-je continuer ? Merci.

  5   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, oui, continuez.

  6   M. TOLIMIR : [interprétation]

  7   Q.  Est-ce qu'il y a eu des différends entre vous et M. Brunborg sur la

  8   méthode de travail ? Merci.

  9   R.  Pas autant que je me souvienne. Je ne pense pas qu'il y ait eu de

 10   différends importants entre nous.

 11   Q.  Très bien. Merci.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le P1776 à présent dans le prétoire

 13   électronique. C'est le rapport qui date de 2009. Page 38 en serbe. En

 14   anglais, ce sera la page 34. L'annexe 2 de votre rapport, si possible. Il

 15   s'intitule : "Les définitions des notions liées aux victimes de

 16   Srebrenica." Merci.

 17   M. TOLIMIR : [interprétation]

 18   Q.  Très bien. Nous voyons l'annexe 2 qui s'affiche. Et je vais vous

 19   demander la chose suivante --

 20   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Il nous faudrait la version anglaise.

 21   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera à la page 34, Monsieur le

 22   Président.

 23   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci.

 24   Votre question, Monsieur Tolimir.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 26   M. TOLIMIR : [interprétation]

 27   Q.  L'on voit ici que vous définissez les caractéristiques de la personne

 28   portée disparue par la date et le lieu donnés de la disparition, c'est-à-


Page 11483

  1   dire par rapport au moment où cette personne a été confirmée en tant que

  2   vivante. Cela vous intéresse moins de savoir à quel moment cette personne a

  3   perdu la vie. Et vous dites dans la note de bas de page : Soit la date où

  4   la personne qui fournit l'information a vu l'intéressé en vie ou bien une

  5   date qui se fonde sur les informations fournies par un témoin oculaire.

  6   J'aimerais savoir : comment vous avez cherché à déterminer si quelqu'un

  7   était un témoin oculaire ou bien s'il a reçu l'information dont il dispose

  8   de la part d'un témoin oculaire ? Merci.

  9   R.  L'information sur les personnes portées disparues, le dernier moment où

 10   ils ont été vus, la date et le lieu, eh bien, c'est quelque chose que nous

 11   avons reçu du CICR. Ce n'est pas quelque chose que nous avons cherché nous-

 12   mêmes. Ce sont les données recueillies par le CICR, par leur personnel. Et

 13   ils ont bien sélectionné très attentivement les sources d'information.

 14   C'étaient soit les membres de famille, soit d'autres individus sélectionnés

 15   avec la plus grande attention.

 16   Q.  Merci. Au vu de votre réponse, je vais vous demander la chose suivante

 17   : ces déclarations sont-elles fiables ? Vous nous dites que la vérification

 18   se faisait par plusieurs moyens. J'aimerais savoir si, finalement, ce qui

 19   en découle est fiable ?

 20   R.  Généralement, je dirais que la liste de personnes portées disparues

 21   établie par le CICR est tout à fait fiable. Nous avons généralement

 22   d'autres sources, une source indépendante, et là, en l'occurrence, ce sont

 23   les données de l'ICMP, c'est la commission qui a fourni l'identification

 24   par l'ADN des victimes. Eux aussi, ils ont recueilli les informations sur

 25   les personnes portées disparues pendant le processus de collecte des

 26   échantillons de sang pour les tests ADN. Eux ont contacté des membres de

 27   famille. Donc, grâce à ce travail, ils ont leur propre liste de personnes

 28   portées disparues de Srebrenica.


Page 11484

  1   Et ces deux bases de données présentent un niveau de correspondance

  2   très important, donc du côté de l'ICMP et du CICR.

  3   Q.  Merci. Etant donné ce que vous venez de dire, j'aimerais savoir si

  4   leurs listes sont fiables pour ce qui est de la date de la disparition des

  5   intéressés ? Et là je me réfère à l'ICMP, la commission internationale.

  6   R.  Il faut savoir que l'ICMP ne garde pas la trace de la date de

  7   disparition exacte. Pour l'ensemble des individus, la date qu'ils citent

  8   c'est celle du 11 juillet, et cela, pour signifier qu'il s'agit de victimes

  9   liées à Srebrenica. Seul le CICR fournit cette date. Quant à savoir quelle

 10   est la fiabilité de ce renseignement, eh bien, il dépend de la fiabilité de

 11   ceux qui ont fourni les informations au CICR, de ce qu'ils savaient de la

 12   disparition des gens. C'est ce dont les gens se souviennent et c'est ce

 13   qu'ils pensent de l'événement.

 14   Q.  Merci. Dites-nous seulement si ces deux organisations, donc le CICR et

 15   l'ICMP, sont toutes les deux des organisations non gouvernementales ?

 16   Merci.

 17   R.  Oui. Le CICR est une organisation internationale. Je ne sais pas, en

 18   fait, si c'est une ONG. C'est une organisation humanitaire qui existe

 19   depuis longtemps et travaille depuis longtemps à apporter l'aide aux

 20   victimes de tous les conflits armés. Et puis, l'ICMP est aussi une

 21   organisation internationale qui a fourni des identifications des victimes

 22   de la guerre en ex-Yougoslavie.

 23   Q.  Merci. Mais je sais tout cela. J'aimerais savoir si les deux sont des

 24   organisations non gouvernementales ou non. S'ils sont, en revanche, des

 25   organisations gouvernementales, dites-nous qui est le gouvernement qui les

 26   soutient.

 27   R.  Elles ne font pas partie de quelque gouvernement que ce soit. Elles

 28   reçoivent des dons de différents pays. Donc il s'agit d'organisations


Page 11485

  1   indépendantes qui ne sont pas au service de quelque gouvernement que ce

  2   soit. Dans leur travail, elles représentent les intérêts de la communauté

  3   internationale, et c'est dans ce cadre-là qu'elles s'acquittent de leur

  4   mandat.

  5   Q.  Je comprends votre question [phon]. Je n'ai plus le temps de m'attarder

  6   là-dessus.

  7   Mais dites-nous, est-ce qu'il est plus fiable de prendre les données

  8   des ONG internationales ou de se fier aux données des parties belligérantes

  9   concernées ?

 10   R.  Il m'est difficile de répondre à cette question. Je suppose que vous

 11   avez à l'esprit les listes du CICR et de l'ICMP, les listes des personnes

 12   portées disparues et des personnes identifiées, par rapport aux listes

 13   dressées par l'armée. J'aurais du mal à vous dire ce qui est plus fiable.

 14   Je fais confiance, personnellement, aux listes du CICR et de l'ICMP,

 15   puisque je sais quelles méthodes ils emploient pour les dresser, quelle est

 16   leur approche dans la collecte d'informations, comment ils traitent

 17   l'information, et je sais qu'ils respectent les normes internationales.

 18   D'autre part, vous m'interrogez sur la fiabilité des sources militaires. Je

 19   pense que ces registres doivent être fiables également puisqu'ils

 20   proviennent des autorités de l'Etat. Et qui plus est, les autorités de

 21   l'Etat ont établi ces listes pour que les familles des victimes puissent

 22   toucher des allocations, et cetera. Donc j'imagine que ces listes doivent

 23   être fiables, elles aussi. J'aurais du mal à vous dire lesquelles je

 24   considère comme étant plus fiables que d'autres. Je fais confiance aux unes

 25   comme aux autres.

 26   Q.  Je vous remercie. Mais vu le temps qui passe, si vous auriez, s'il vous

 27   plaît, l'amabilité d'abréger un petit peu vos réponses.

 28   Alors, qu'est-ce qui vous a incité à modifier les entrées dans les bases de


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  1   données gouvernementales, c'est-à-dire de l'armée, sur la base des

  2   informations fournies par les ONG ? Merci.

  3   R.  Je n'ai rien modifié. Je n'ai apporté aucune modification aux listes du

  4   rapport de 2009, parce que les éléments supplémentaires qui ont été fournis

  5   par le ministère de la Défense de Bosnie-Herzégovine sont venus étayer le

  6   fait que certains individus devaient effectivement figurer sur les listes

  7   des personnes portées disparues de Srebrenica. Donc il n'y avait pas lieu

  8   d'apporter des modifications.

  9   Il faut savoir, cependant, que la meilleure des sources peut

 10   comporter des problèmes, des lacunes. Les sources statistiques ne sont pas

 11   parfaites. En tant que statisticienne, je dois vérifier la qualité de

 12   chacune des sources sur lesquelles je m'appuie. A partir du moment où j'ai

 13   pu identifier tel ou tel manque de cohérence ou erreur, il faut que

 14   j'enlève cela de mon rapport --

 15   Q.  Non, non, mais ce n'est pas ce que je vous demande. Attendez, je vous

 16   en prie. Non, je ne vous ai pas demandé ce que vous enlevez. Je vous ai

 17   demandé pourquoi avez-vous modifié des listes du gouvernement ? Mais enfin,

 18   passons. Je vais vous demander autre chose maintenant.

 19   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, vous avez demandé :

 20   "Pourquoi avez-vous modifié les entrées dans la base de données de l'armée

 21   en apportant des informations provenant de l'ONG ?"

 22   C'est ça que vous avez demandé, et non pas pourquoi vous avez modifié

 23   la demande adressée aux autorités de Bosnie.

 24   Oui, Monsieur Vanderpuye.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais je n'ai pas demandé ça.

 26   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, Monsieur Vanderpuye.

 27   M. VANDERPUYE : [interprétation] Oui, par rapport à la dernière question

 28   posée, il s'agit d'une représentation erronée de la déposition du témoin.


Page 11487

  1   Il n'y a pas eu de modification apportée à quelque demande que ce soit à

  2   l'adresse des autorités de Bosnie, autorités militaires, ministère de la

  3   Défense ou quoi que ce soit. Rien de tel ne figure au compte rendu

  4   d'audience. Il s'agit d'une représentation erronée, et je demanderais à M.

  5   Tolimir de bien vouloir reformuler sa question.

  6   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ecoutez, je n'ai pas beaucoup de temps, je ne

  8   vais pas rectifier des points de détail. Je vais reposer la question juste

  9   pour satisfaire aux demandes du Procureur et du témoin.

 10   M. TOLIMIR : [interprétation]

 11   Q.  Avez-vous comparez les listes de l'ABiH aux listes du   CICR ?

 12   R.  Je ne me suis pas servie de liste de l'armée pour constituer la liste

 13   des personnes portées disparues ou identifiées de Srebrenica.

 14   Q.  Voyons ce qui figure aux paragraphes 3 et 5 de votre rapport.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Page 81 en serbe et page 77 en anglais. Le

 16   rapport de 2009.

 17   M. TOLIMIR : [interprétation]

 18   Q.  En attendant que cela s'affiche, je vais vous poser ma question. Vous

 19   avez dit dans vos réponses que les informations étaient recueillies auprès

 20   des proches des victimes dans le cadre du travail du CICR. Puis après,

 21   quand vous parlez des listes, vous dites que les listes du CICR sur les

 22   victimes de Srebrenica et les listes de l'ICMP comportent certaines

 23   discordances ou différences par rapport à Srebrenica et que vous ne voyez

 24   pas pourquoi.

 25   J'aimerais savoir de quelles différences parlez-vous ici ?

 26   L'INTERPRÈTE : L'interprète n'est pas sûre de la question de M. Tolimir.

 27   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, les interprètes

 28   vous demande de bien vouloir répéter la deuxième partie de votre question.


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  1   Comment se termine votre question ? "… vous ne voyez pas pourquoi il y

  2   aurait une raison d'exclure un ou l'autre," et les interprètes n'ont pas

  3   entendu la dernière partie.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  5   M. TOLIMIR : [interprétation]

  6   Q.  S'il vous plaît, au paragraphe 5, vous parlez de quelle différence

  7   d'interprétation par rapport à Srebrenica ?

  8   R.  Vous citez, en fait, le paragraphe 5 que nous avons à l'écran; c'est

  9   bien cela ? Qui commence par : "De même, 98 [comme interprété] fichiers

 10   figuraient dans…"

 11   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] C'est cela, Monsieur Tolimir ?

 12   M. TOLIMIR : [interprétation]

 13   Q.  Oui. Et puis, on voit entre guillemets dans la dernière ligne de ce

 14   paragraphe : "liées à Srebrenica". Merci.

 15   R.  Oui, merci. Ce paragraphe concerne les registres de 1998 qui ne sont

 16   pas repris dans la dernière liste du mois d'octobre 2008, la liste des

 17   personnes portées disparues de Srebrenica, liste fournie par le CICR. Il

 18   s'agit de registres de 1998 qui sont tirés de la liste qui comporte tous

 19   les noms des personnes portées disparues de toute la Bosnie-Herzégovine, et

 20   cette liste, la liste globale, a été dressée par le CICR. En nous basant

 21   sur nos critères qui sont évoqués à l'annexe 2 de notre rapport, ils nous

 22   ont permis de prélever la partie des informations dont nous avions besoin.

 23   Donc, lorsqu'on parle de personnes liées à Srebrenica, cela se

 24   comprend tout d'abord comme étant lié à Srebrenica par rapport au temps et

 25   à l'espace, et la période de temps est précisée à l'annexe 2. Puis, d'autre

 26   part, il y a une liste séparée du mois d'octobre 2008 du CICR qui comporte

 27   les noms des personnes portées disparues d'après eux. Donc il n'y a pas de

 28   contradiction entre les deux, d'après nous. Nous pensons que les fichiers


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  1   complémentaires de 1998 devraient être intégrés à la liste de personnes

  2   portées disparues de Srebrenica, liste du CICR de 2008.

  3   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Madame Tabeau, cette première ligne

  4   de ce paragraphe parle de la liste du bureau du Procureur, et dans la

  5   suite, elle ne figurait pas dans la mise à jour du CICR de 2008. C'est une

  6   coquille ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Je vais peut-être faire un croquis.

  8   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Est-ce que vous pouvez juste nous

  9   dire ce que cela signifie ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est une organisation.

 11   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Non, mais que signifie l'IRCR ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ça, c'est une coquille.

 13   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] D'accord.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi.

 15   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur

 16   Tolimir.

 17   M. TOLIMIR : [interprétation]

 18   Q. Qu'est-ce qui vous amène alors à dire dans votre rapport que vous ne

 19   savez pas sur quels critères s'est basée la Croix-Rouge internationale ?

 20   Merci.

 21   R.  Parce que je ne sais pas exactement quels ont été les critères qu'ils

 22   ont employés pour dresser leur liste. Ils ont pu se fonder sur les

 23   informations fournies par les proches qui leur ont dit c'est dans le

 24   contexte de la chute de Srebrenica que telle ou telle personne est

 25   disparue. Mais nous, nous nous sommes fondés sur deux critères formels :

 26   l'espace et le temps. C'est sur ces deux critères que nous nous sommes

 27   fondés pour dresser nos listes.

 28   Q.  Alors, est-ce que vous admettez la possibilité que le CICR, en fait,


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  1   limite l'intégration des données dans les listes, puisque vous ne pouvez

  2   pas savoir sur quelle base ils sont arrivés à telle ou telle détermination

  3   ? Donc, pour chacun des individus pour lesquels il y a eu un test à l'ADN,

  4   indépendamment de l'endroit où cette personne s'est trouvée, ils pourraient

  5   l'intégrer à la liste, par exemple.

  6   R.  Ecoutez, je ne sais pas sur quels critères se fonde la liste du CICR,

  7   la liste des personnes portées disparues, et je ne voudrais pas me lancer

  8   dans des conjectures. Mais il faut savoir qu'il existe plusieurs listes de

  9   personnes portées disparues de Srebrenica. Il existe la liste du bureau du

 10   Procureur de ce Tribunal, du CICR, de l'ICMP, de la Commission bosniaque

 11   chargée de la recherche des personnes portées disparues, l'Institut des

 12   personnes portées disparues de Bosnie-Herzégovine, et il y a des petites

 13   différences, des écarts entre le nombre de personnes qui figurent sur

 14   chacune de ces listes, chacune de ces sources. Mais il va y avoir aussi des

 15   regroupements très importants.

 16   Q.  Alors, est-ce que vous pourriez nous expliquer pourquoi, sur la liste

 17   de personnes portées disparues de Srebrenica, vous avez décidé de faire

 18   figurer ceux qui ont été vus à Baljkovica, par exemple, pour la dernière

 19   fois, c'est l'endroit où la colonne est sortie du territoire de la

 20   Republika Srpska pour se rendre sur le territoire de la Fédération, qui ne

 21   se trouve absolument pas à Srebrenica ? Merci.

 22   R.  Baljkovica, si me souvenirs sont bons, fait partie de la municipalité

 23   de Zvornik. Par conséquent, cela répond aux critères formels de définition

 24   de la zone de Srebrenica, du critère utilisé dans notre rapport. Donc c'est

 25   la raison pour laquelle cela figure ici. Et il ne nous appartenait pas

 26   d'étudier le contexte militaire ou historique des événements.

 27   Q.  Merci. Puisque votre rôle ne comportait pas cela, est-ce que vous allez

 28   présenter aux Juges de la Chambre la situation telle qu'elle s'est


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  1   présentée ou telle que cela est écrit dans votre rapport ?

  2   R.  Je vous ai dit que ce rapport présente le contexte et les régularités

  3   de victimisation liée à la chute de Srebrenica. Donc je veux dire

  4   "régularité" sur le plan territorial, lieux de disparition figurant dans ce

  5   rapport, des localités spécifiques, localités et des endroits, donc les

  6   localités dans les différentes municipalités.

  7   Et l'on peut fournir des statistiques pour chacun des endroits. Il

  8   faut comparer ce rapport à d'autres rapports qui présentent des événements

  9   militaires ou historiques. Il serait possible d'apporter des corrections,

 10   si nécessaire, mais je pense que les définitions que nous avons employées

 11   sont appropriées lorsque nous nous fondons sur des critères d'espace et de

 12   temps.

 13   Q.  Alors, j'aimerais savoir si vous vous êtes penchée sur les déclarations

 14   des témoins de l'Accusation, les informations fournies par ces témoins

 15   devant ce Tribunal sur les modalités du décès, les causes du décès ainsi

 16   que la date du décès des victimes ?

 17   R.  Non, je n'ai pas étudié les déclarations de témoin fournies ici. Je

 18   n'ai pas été appelée à faire cela, et ce n'était pas nécessaire dans le

 19   cadre de la rédaction de ce rapport.

 20   Q.  Merci. Alors, serait-il possible de leurrer les Juges de cette Chambre

 21   sur le moment et l'endroit où les événements ont eu lieu ? Donc nous avons

 22   eu ici M. Ruez, qui travaille pour ce Tribunal, et qui nous dit qu'à Bare,

 23   il a vu 600 cadavres. D166, page 595 de l'affaire Krstic. Donc vous ne vous

 24   intéressez pas du tout à savoir ce que les témoins ont dit sur ces

 25   événements ?

 26   M. VANDERPUYE : [interprétation] Monsieur le Président.

 27   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, vous n'avez pas

 28   bien repris la dernière réponse du témoin.


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  1   Monsieur Vanderpuye.

  2   M. VANDERPUYE : [interprétation] Monsieur le Président, je crois, en

  3   fait, que la déclaration de M. Ruez n'a pas non plus été bien prise en

  4   considération et, en ce sens, on est en train d'induire le témoin en

  5   erreur. Je pense que de ce fait, la réponse ne sera pas la bonne réponse.

  6   C'est la raison pour laquelle je soulève une objection.

  7   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] J'aimerais que le document soit

  8   affiché. Il s'agit, si je me trompe, du document D166.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Donc la référence correcte est comme suit :

 10   page 595 du document D166 du compte rendu d'audience dans l'affaire Krstic.

 11   En fait, c'est un médecin légiste finlandais qui avait fait ce travail, et

 12   je vous donne la référence pour éviter de demander l'affichage du document

 13   D166.

 14   M. TOLIMIR : [interprétation]

 15   Q.  Donc ma question est comme suit : est-ce qu'elle a reçu ou pris en

 16   considération des renseignements du médecin légiste qui détermine le lieu,

 17   la date du décès ainsi que les circonstances du décès ?

 18   R.  [aucune interprétation]

 19   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Nous n'avons pas la bonne page à

 20   l'écran. Vous nous avez dit page 559, alors que nous avons maintenant le

 21   page 589 qui est affichée à l'écran.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, il s'agit de la page 595. 595. C'est peut-

 23   être moi qui me suis trompé. Je m'excuse. Donc je veux dire que c'est la

 24   page 595 qu'il faut afficher à l'écran.

 25   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Mais vous pourriez peut-être nous

 26   donner les références ou à la ligne sur cette page.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] En serbe, lignes 8 à 17, et il en va de même

 28   pour la version anglaise. C'est tout un paragraphe, en fait.


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  1   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie. Poursuivez.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  3   M. TOLIMIR : [interprétation]

  4   Q.  Avez-vous pris en considération le rapport compilé par le pathologiste,

  5   ainsi que les autres experts d'ailleurs qui y ont travaillé, afin de

  6   connaître les modalités ou les circonstances du décès à Srebrenica ?

  7   R.  Je vous dirais, en fait, que nous n'avons pas utilisé ces rapports pour

  8   notre rapport. Nous n'avons utilisé aucun rapport provenant de

  9   pathologistes pour notre rapport.

 10   Q.  Est-ce que votre unité démographique analyse toutes les sources qui

 11   pourraient donner des renseignements pertinents à propos du lieu, de la

 12   date et des circonstances ou des modalités du décès, et est-ce qu'elle

 13   analyse également les dépositions et les témoignages des témoins qui ont

 14   comparu dans ces affaires ?

 15   R.  Ecoutez, ce serait une tâche absolument impossible à exécuter. Analyser

 16   toutes les sources et tous les témoignages n'est tout simplement pas

 17   possible. Nous, nous avons planifié la préparation de nos rapports en

 18   fonction de ce qui nous semblait à nous la méthode la plus fiable et la

 19   plus approprié, et nous avons essayé quand même de nous limiter dans notre

 20   travail. Nous avions certains objectifs que nous nous étions fixés, que

 21   nous voulions atteindre, et nous avons sélectionné des sources pour nous

 22   permettre d'atteindre ces objectifs.

 23   Q.  Merci. Donc, là, nous voyons deux sources : le pathologiste finlandais,

 24   et vous avez également le Témoin M. Jean Ruez. Il y a un autre rapport où

 25   il est question de 600 victimes. Il y a un autre témoin qui a fait état de

 26   500 victimes. Donc ce sont quand même des détails, des différences qu'il

 27   faut prendre en considération. Est-ce que vous pensez que dans le cadre de

 28   votre recherche, il s'agit d'une différence tout à fait négligeable ?


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  1   R.  Premièrement, je pense que donner des statistiques comme ça, 10 000, 3

  2   000, 500, 600, n'ont aucun sens pour le travail que nous avons présenté

  3   dans notre rapport. Nous, nous avions demandé les données personnelles de

  4   chaque victime, nous avons dressé des listes de victimes. Donc ce genre de

  5   déclaration générale qui donne des statistiques très générales ne peut pas

  6   être utilisée pour notre travail.

  7   Q.  Merci. Mais est-ce que cela signifie que votre rapport est un rapport

  8   général sur les événements de Srebrenica, parce que je vois qu'il inclut

  9   tous les éléments qui ont trait à Srebrenica ?

 10   R.  Non, je ne dirais pas que tout ce qui a trait à Srebrenica est inclus.

 11   Il y a des fichiers de personnes portées disparues pour lesquelles le lien

 12   avec la chute de Srebrenica a pu être établi. Oui, cela est inclus. Et

 13   puis, dans le rapport, nous donnons une définition de la façon dont il faut

 14   comprendre "personne portée disparue à Srebrenica".

 15   Q.  Merci. Alors, je vais vous donner un exemple. Dans la pièce 151, un

 16   témoin protégé, le Témoin PW-016, indique qu'à un endroit donné il a vu

 17   plusieurs centaines de morts; puis ensuite 150; et puis, près du cimetière,

 18   il a vu 30 cadavres; et en quatrième lieu, il en a vu entre 25 à 30. Donc

 19   nous voyons qu'un témoin a mentionné plus de 500 morts. J'aimerais savoir

 20   s'il s'agit d'une information qui est considéré comme pertinente et qui

 21   aurait dû être mise à votre disposition, parce qu'il est question de façon

 22   précise, du lieu, de la date et de la modalité du décès ?

 23   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Vous avez parlé de la pièce 151, mais

 24   est-ce qu'il s'agit d'une pièce P ou D ?

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il me semble qu'il s'agit d'une pièce de

 26   la Défense, pièce D151, qui ne doit pas être diffusée. Merci.

 27   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. J'avais cité le paragraphe 3 de la page


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  1   2. Lignes 14, 23 et 28. Je vous avais donné la mauvaise référence, et ce

  2   n'est pas le bon document qui est affiché.

  3   M. TOLIMIR : [interprétation]

  4   Q.  Mais au troisième paragraphe, regardez ce qui est écrit à la ligne 7 :

  5   Il y avait plus de 300 morts. Voilà. Il y avait plus de 300 morts et un

  6   nombre important de blessés. Ce qui signifie que le nombre total de

  7   victimes pourrait être supérieur à 300 morts.

  8   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Ecoutez, j'aimerais que vous

  9   m'indiquiez où vous trouvez cette référence dans ce document ? Vous nous

 10   dites --

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai dit qu'il s'agissait du troisième

 12   paragraphe -- de la ligne 7 du troisième paragraphe. Merci.

 13   M. TOLIMIR : [interprétation]

 14   Q.  Puis, nous avons le document P1174, lignes 14, 23 et 28 de la

 15   page 2 où le témoin parle des mêmes événements, mais il dit qu'à un endroit

 16   donné il y avait 25 personnes, il y en avait 30 à un autre endroit, 150 à

 17   un troisième endroit. Donc j'aimerais savoir si ce sont des données qui

 18   sont considérées comme pertinentes par votre unité démographique dont

 19   l'objectif de travail est d'obtenir le lieu, la date et les conditions du

 20   décès ?

 21   R.  Oui, mais ce sont des chiffres qui ne sont absolument pas associés à

 22   des listes de noms. Vous avez ce genre de déclaration, mais vous n'avez

 23   aucune donnée personnelle relative aux personnes pour les victimes. Donc ce

 24   sont, en ce qui me concerne, des déclarations que nous ne pouvons pas

 25   utiliser. Ce n'est pas l'approche que nous avons retenue. Nous, nous

 26   travaillons avec des faits concrets, des personnes concrètes, à savoir des

 27   noms, et nous avons également les autres renseignements relatifs à ces

 28   personnes.


Page 11496

  1   Q.  Merci. Ecoutez, il est dommage que nous n'ayons pas vu le document

  2   P1174, page 2, que je vous ai déjà donné d'ailleurs en référence. Lignes

  3   14, 23 et 28 de cette page 2. Mais bon, je voudrais vous poser la question

  4   suivante.

  5   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, eh bien, vous

  6   n'avez qu'à demander l'affichage de ce document. Vous ne l'avez pas fait,

  7   vous vous êtes contenté de le mentionner, le document. Lorsqu'il sera

  8   affiché à l'écran, vous pourrez poser une question à propos de ce document.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document P1174 ne doit pas être

 10   diffusé. Merci.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien. Nous avons le document maintenant, page

 12   2. Alors, bien entendu, ne diffusez pas le document à l'extérieur du

 13   prétoire.

 14   M. TOLIMIR : [interprétation]

 15   Q.  Ce témoin décrit l'itinéraire suivi par la colonne de Srebrenica à

 16   Baljkovica et il indique où ont été laissées les victimes. Et à la page 2,

 17   ligne 14, vous pouvez voir sur la droite de l'écran qu'il y a un chiffre,

 18   25 à 30. Et puis, à la ligne 23, regardez le dernier chiffre 30, suivi d'un

 19   tiret. Puis, ligne 28 maintenant, vous avez une date qui est donnée, 13-07-

 20   1995, c'est là où il fait référence à 150 personnes tuées et à des civils

 21   gravement blessés. Donc ce témoin donne une description exacte de ce qu'il

 22   a pu constater en route vers Konjevic Polje. Est-ce que ce sont des données

 23   qui sont considérées comme pertinentes par les enquêteurs qui doivent

 24   retrouver le lieu, la date et les circonstances du décès ?

 25   R.  Cela est probablement pertinent pour les enquêteurs, mais ce n'est pas

 26   le travail que je fais, moi. Nous avons retenu une approche différente.

 27   Nous n'avons pas choisi d'étudier les déclarations des témoins. Je suppose

 28   que l'on pourrait faire une compilation dans le cadre de nos études des


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  1   déclarations des témoins, mais ce n'est pas ce que nous avons choisi de

  2   faire. Donc nous, nous avons retenu une approche tout à fait différente.

  3   Q.  Merci. Alors, je vous accorde qu'il s'agit d'approches différentes.

  4   Toutefois, est-ce que cette approche est plus précise, puisque nous avons

  5   de plus amples renseignements à propos des lieux, des dates et des

  6   circonstances des décès ?

  7   R.  Non, parce que nous n'avons pas le nom des victimes. Donc cela est plus

  8   précis pour ce qui est du lieu et de la date de certains incidents, mais

  9   cela ne nous donne aucune information exacte à propos des détails ou des

 10   coordonnées des victimes de ces incidents.

 11   Q.  Merci. Donc cela ne vous donne pas ces données, mais le fait est qu'il

 12   y a quand même des données sur le lieu, la date et les circonstances du

 13   décès de certaines personnes, et ce sont des éléments auxquels vous faites

 14   référence dans votre rapport, donc est-ce que ces données ne sont pas plus

 15   précises ?

 16   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Ecoutez, Monsieur Tolimir, je pense

 17   que le témoin vous a fourni toutes les réponses qu'elle pouvait vous

 18   apporter. Elle vous a dit quelle était la méthode qu'elle avait retenue

 19   pour compiler ces listes et pour traiter certaines informations. Vous avez

 20   déjà obtenu votre réponse. Je comprends votre point de vue, mais je ne

 21   pense pas que vous deviez continuer à lui poser la même question.

 22   Poursuivez, Monsieur Tolimir.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 24   Est-ce que le document P07170 pourrait être affiché à l'écran. Ainsi que le

 25   document P1776, page 104 pour la version serbe et page 94 pour la version

 26   anglaise. Donc je répète, document P1776, page 97 pour la version anglaise

 27   et 104 pour la version serbe. Je souhaiterais que le document soit affiché

 28   pour que je puisse poser une question.


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  1   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Vous avez oublié de brancher votre

  2   microphone.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Est-ce que nous pouvons agrandir le

  4   document et tourner la page dans l'autre sens pour la version anglaise.

  5   M. TOLIMIR : [interprétation]

  6   Q.  Donc nous pouvons voir que sur ce tableau vous déterminez la date

  7   du décès compte tenu d'informations fournies par l'ABiH et par les listes

  8   du bureau du Procureur, et c'est exactement le cas auquel vous aviez fait

  9   référence un peu plus tôt, à savoir le cas de ces 220 personnes qui se

 10   trouvaient sur les listes du bureau du Procureur en 2005.

 11   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Il ne faut pas que ce document soit

 12   diffusé.

 13   M. TOLIMIR : [interprétation]

 14   Q.  Nous pouvons voir sur cette liste que nous avons également les données

 15   ADN, et afin d'harmoniser les données ADN et les données de l'ABiH, vous

 16   avez envoyé cette demande d'assistance au ministère de la Défense de la

 17   Bosnie-Herzégovine. Et j'aimerais maintenant vous poser une question :

 18   pourriez-vous expliquer à la Chambre de première instance ce tableau, en

 19   fait, et pourriez-vous expliquer comment se fait-il que dans les fosses

 20   communes et sur les listes du bureau du Procureur, nous trouvons des noms

 21   de personnes qui sont décédées en 1992, 1993 et 1994 ?

 22   R.  J'aimerais, dans un premier temps, expliquer cette initiale ou cette

 23   abréviation DoD. Donc cela correspond à la date de la disparition, ou à la

 24   date du décès dans certains cas. Alors, il ne s'agit pas de données

 25   relatives aux morts. La réponse de l'armée faisait également référence au

 26   fait que ces mêmes personnes étaient portées disparues. Donc nous avions

 27   des informations à propos des personnes décédées, à propos du lieu du

 28   décès. Nous devions encore gérer les éléments relatifs à la date et au lieu


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  1   de la disparition de ces personnes, premièrement.

  2   Et puis deuxièmement, il y a certaines dates de la colonne DoD où il

  3   est question de l'année 1992, 1993 et 1994, effectivement. Il s'agit des

  4   premiers rapports militaires qui ont été précisés et corrigés en 1995.

  5   Comme je vous l'ai déjà expliqué hier, il se trouve que ces registres sont

  6   en constante évolution et, en fait, ils n'ont pas été mis à jour pendant

  7   très, très, très longtemps et pas très souvent, ce qui fait que

  8   l'information qui est incluse à un moment donné peut rester sur ce tableau

  9   pendant très longtemps sans être corrigée. Alors, bien entendu, lorsqu'on a

 10   les derniers renseignements, dans certains cas, on peut fournir des

 11   informations qui sont différentes que celles du système. Voilà donc en

 12   guise d'explication pour la différence pour les dates de disparition.

 13   Et puis, je vous dirais également qu'il n'est pas surprenant que,

 14   pour certaines personnes dont les noms figurent sur cette liste, nous

 15   avions également les informations de l'ICMP à propos de l'identification

 16   ADN, parce qu'après tout il s'agit d'un sous-échantillon des personnes

 17   portées disparues à Srebrenica. Et nous avons opéré des recoupements

 18   systématiques par rapport aux identifications ADN. Donc, là, vous avez

 19   toute la liste, et pour avoir cette liste, il faut que 66 % de

 20   l'identification ait été complétée. Et cela doit également se retrouver

 21   dans ces sous-échantillons.

 22   Q.  Bien. Donc, est-ce que ce tableau nous indique peut-être qu'il y aurait

 23   eu des cas d'enregistrement erroné de personnes portées disparues, ou il y

 24   avait peut-être d'autres lacunes pour les analyses d'ADN ?

 25   R.  Non, je ne parlerais pas d'inscription erronée de personnes portées

 26   disparues. Je ne parlerais pas non plus de lacunes pour l'analyse ADN. Ce

 27   que je dis, c'est que dans une situation chaotique, dans une situation de

 28   guerre, il se peut que le système enregistre certains événements, mais que


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  1   ce système ne soit pas parfait. Et là c'est un exemple. A un moment donné,

  2   la personne a été portée disparue, en avril 1992 par exemple, et par la

  3   suite cette personne refait surface, et ensuite est portée disparue en

  4   1995, par exemple. Donc ça, c'est une théorie. Je ne peux pas vous dire que

  5   j'ai la preuve de cette théorie pour tous les cas de cette liste, mais ce

  6   sont des choses qui peuvent se passer. N'oubliez pas qu'il s'agissait d'une

  7   situation de guerre, et qui dit situation de guerre dit également qu'en

  8   matière de rapports statistiques et en matière de rapports militaires,

  9   malheureusement, la situation n'est pas parfaite.

 10   Q.  Merci. Pourriez-vous nous dire quels sont les renseignements qui

 11   peuvent être considérées comme les plus  exhaustifs : les informations qui

 12   émanent des ONG 14 ans après les faits ou les renseignements émanant des

 13   institutions militaires ou des organes de l'Etat, qui d'ailleurs avaient

 14   une obligation juridique vis-à-vis des familles des décédés ? Lesquels sont

 15   les plus précis ?

 16   R.  Ecoutez, je pense que votre question est très imprécise. Vous faites

 17   référence à des ONG qui oeuvrent 14 ans après la guerre, ou après les faits

 18   comme vous le dites. Je pense que vous faites référence ainsi aux rapports

 19   du CICR et à leurs fichiers sur les personnes portées disparues. Moi je

 20   pense que ces rapports sont fiables, sont absolument fiables. Ce n'est pas

 21   que le CICR a commencé à dresser ces listes 14 ans après la guerre. Le CICR

 22   a commencé à dresser ces listes pendant la guerre et il continue à les

 23   mettre à jour pour qu'elles soient les plus fiables possibles.

 24   Pour ce qui est de savoir si le système militaire est meilleur, je

 25   pense qu'il devrait être aussi bon au moins. Je ne suis pas en train de

 26   vous dire que les fichiers militaires sont meilleurs parce qu'il s'agit

 27   d'un système militaire. Il s'agit de savoir comment le système a été

 28   maintenu au fil des ans, s'il a été amélioré et s'il y a des mises à jour


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  1   qui ont été insérées. Donc, voilà, moi je peux vous faire part de mon avis

  2   à propos de certaines questions que l'on peut se poser pour les listes

  3   militaires.

  4   Q.  Merci. Alors, n'oublions pas qu'il s'agit de renseignements pertinents

  5   pour les organes judiciaires, parce que lorsqu'il y a eu décès et

  6   certificats des décès, il y a certaines conséquences. Alors, est-ce que

  7   vous pourriez nous dire pourquoi est-ce que l'ABiH n'a pas voulu harmoniser

  8   leurs listes avec les listes du CICR ? C'est le CICR que j'appelle l'ONG

  9   ici.

 10   R.  Vous nous dites que l'ABiH n'a pas accepté d'harmoniser ces listes,

 11   mais est-ce que quelqu'un leur a demandé de le faire ? Je ne le pense pas.

 12   Il s'agit tout simplement de deux organisations qui ont fonctionné en

 13   parallèle. Le CICR a fait son travail, et puis l'armée a fait son travail

 14   et a établi ses dossiers. Alors, pour ce qui est de savoir s'il y ait eu un

 15   échange d'informations entre eux, je n'en sais rien. Pourquoi est-ce qu'il

 16   y aurait dû avoir un échange d'informations, je n'en sais rien. D'ailleurs,

 17   ce n'est pas quelque chose qui fait partie de mon travail, de répondre à

 18   cette question.

 19   Q.  Merci. Mais la personne qui a compilé ces listes a témoigné ici, il

 20   s'agissait de M. Brunborg. Il nous a dit que dans certains cas, l'armée de

 21   la BiH n'avait pas accepté de modifier les données relatives au lieu du

 22   décès ou aux conditions ou circonstances du décès. Est-ce que vous savez

 23   quoi que ce soit à ce sujet ? Parce que c'est M. Brunborg qui nous a dit

 24   que vous, vous auriez davantage de renseignements à ce sujet.

 25   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, pouvez-vous nous

 26   donner une référence, je vous prie ?

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Pendant que nous entendons la réponse,

 28   mon assistant va essayer de localiser la référence précise, parce que moi


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  1   je me souviens très, très bien que M. Brunborg avait dit que l'armée

  2   n'avait pas voulu harmoniser certaines listes.

  3   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Vanderpuye.

  4   M. VANDERPUYE : [interprétation] Peut-être que cela va être utile pour Me

  5   Gajic et le général Tolimir. Je pense que la référence qu'il vient de faire

  6   vise la page 10 112 du compte rendu d'audience. Donc il s'agissait de la

  7   déposition du témoignage de M. Brunborg. Donc ligne 6 jusqu'à la ligne 23.

  8   Et peut-être que ce document pourrait être affiché. Ainsi, Me Gajic et le

  9   général Tolimir pourront confirmer s'il s'agit bel et bien de la bonne

 10   référence que je viens de vous donner.

 11   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie de votre aide.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Et merci,

 13   Monsieur Vanderpuye. C'est M. Vanderpuye qui avait posé les questions à M.

 14   Brunborg, donc je lui fais tout à fait confiance.

 15   M. TOLIMIR : [interprétation]

 16   Q.  Mais est-ce que vous pouvez nous dire si vous savez combien de cas

 17   étaient représentés, je pense à l'ABiH qui n'a pas voulu accepter de

 18   modifier leur liste ?

 19   R.  D'abord, j'aimerais vous dire que je suis assez sceptique lorsque vous

 20   me dites que M. Brunborg savait exactement ce que l'armée faisait de leurs

 21   dossiers, combien ils en ont accepté, combien ils en ont rejeté. Ce que

 22   nous savons, c'est ce que nous a dit l'autorité militaire, et je pense que

 23   vous avez reçu une copie de cette réponse. Il en a été question un peu plus

 24   tôt aujourd'hui, et dans la réponse, certes, il y a une remarque suivant

 25   laquelle les autorités n'ont pas été en mesure de fournir les informations

 26   pour sept personnes, me semble-t-il, sur les 142 personnes pour lesquelles

 27   des renseignements étaient demandés. Je suis en train de vérifier les

 28   réponses, en fait. Oui, c'est cela. C'est exact. Ils n'ont pas été à même


Page 11503

  1   de fournir les copies des documents pour sept personnes. C'est tout ce que

  2   nous savons. Voilà tous les renseignements et les documents dont nous

  3   disposons, ou plutôt, dont nous ne disposons pas d'ailleurs. Pour ce qui

  4   est de savoir maintenant si l'armée a corrigé ses dossiers, c'est un autre

  5   sujet. Nous ne sommes pas au courant de cela. D'ailleurs, nous ne leur

  6   avions même pas posé la question. Nous nous sommes contentés de leur

  7   demander des informations. Ils nous ont fourni les informations en

  8   question. Maintenant, pour ce qui est de savoir si l'armée a par la suite

  9   modifié quoi que ce soit dans ses registres, de toute façon cela échappe à

 10   notre domaine de connaissance, et de compétence d'ailleurs. Nous ne pouvons

 11   pas répondre.

 12   Q.  Merci. De toute façon, je n'ai pas suffisamment de temps pour parler de

 13   façon détaillée avec ceci, et étant donné que j'en ai déjà parlé avec M.

 14   Brunborg, je ne vais pas revenir à la charge.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pourrions maintenant avoir les

 16   pages 44 et 40, alors 44 pour la version serbe et 40 pour la version

 17   anglaise. Tableau numéro 3.

 18   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Il s'agit du document qui est affiché

 19   à l'écran; c'est cela ?

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, oui, c'est tout à fait cela.

 21   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Donc il s'agit à nouveau du document

 22   P1776.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 24   M. TOLIMIR : [interprétation]

 25   Q.  Vous voyez le tableau 3.1. Alors, cas suivant, les catégories, liste

 26   pour Srebrenica, liste du CICR pour Srebrenica 2008, et nous voyons le

 27   nombre de cas. Donc nous voyons que le CICR confirme le décès de 3 459

 28   personnes. Alors, voilà ce que j'aimerais savoir à ce sujet : quels ont été


Page 11504

  1   les critères utilisés par le CICR pour déterminer qu'une personne donnée

  2   était décédée ou portée disparue à Srebrenica ?

  3   R.  Bien sûr, je ne le sais pas exactement. C'est le CICR qui décidait à

  4   quel moment ils allaient fermer leurs dossiers. Et dans la mesure où il y

  5   avait une information, un échange d'informations entre le CICR et l'ICMP

  6   concernant les identifications par l'ADN des personnes portées disparues en

  7   Bosnie-Herzégovine, je peux donc dire que ce type de rapport devait faire

  8   partie de la fermeture des dossiers. Mais il faut également dire qu'il

  9   existait un groupe du CICR sur les personnes portées disparues en Bosnie-

 10   Herzégovine, et le groupe du CICR coopérait avec la Commission bosnienne

 11   des personnes portées disparues. C'est la commission qui était impliquée

 12   dans les exhumations et dans le recueil d'un très grand nombre de rapports

 13   qui ont été délivrés concernant les victimes et les exhumations, y compris

 14   les certificats de décès signés par les pathologistes des cours qui

 15   déclarent les personnes portées disparues comme mortes.

 16   Je peux imaginer de nouveau que le CICR a dû se servir de ce type

 17   d'information pour déclarer les personnes portées disparues comme étant

 18   mortes pour fermer le dossier. Il y a certainement une association entre

 19   les identifications qui sont disponibles auprès de l'ICMP et de la

 20   Commission fédérale pour les personnes portées disparues, car l'information

 21   est envoyée avec un certain délai et l'information est reçue avec un

 22   certain délai. Et donc on a besoin du temps pour mettre à jour les bases de

 23   données. Donc, s'agissant du nombre des dossiers fermés pour les personnes

 24   décédées, il y aura toujours des différences pour ce qui est des chiffres

 25   entre les deux groupes.

 26   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, il nous faut

 27   prendre notre deuxième pause d'aujourd'hui. Nous reprendrons nos travaux à

 28   13 heures.


Page 11505

  1   --- L'audience est suspendue à 12 heures 33.

  2   --- L'audience est reprise à 13 heures 05.

  3   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, veuillez

  4   poursuivre, je vous prie.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  6   Avant la pause, nous avions demandé l'affichage du document P --

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit du document P1776.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. C'est donc la page 44, tableau 3.1.

  9   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Tout le monde veut aider dans cette

 10   salle d'audience, c'est bien.

 11   L'ACCUSÉ : [hors micro] 

 12   L'INTERPRÈTE : Micro, s'il vous plaît.

 13   M. TOLIMIR : [interprétation]

 14   Q.  Avant que le tableau ne soit affiché, je vais poser une question. La

 15   Croix-Rouge internationale a confirmé la mort pour 3 459 personnes, et nous

 16   verrons ce chiffre sous peu dans le tableau lié à Srebrenica, alors que

 17   dans votre rapport, vous évoquez que le nombre de personnes dont le décès

 18   est supposément confirmé est de 5 061. Donc j'aimerais savoir comment

 19   pouvez-vous expliquer cette différence entre 5 061 personnes et 3 459

 20   personnes ? Merci.

 21   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] 5 061 personnes.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Pourrais-je voir le document dans le prétoire

 23   électronique ? Je ne vois rien dans le prétoire électronique.

 24   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] On m'apprend qu'il y a un problème

 25   technique à l'instant. Il ne nous est donc pas possible de voir le document

 26   à l'écran. Le greffe est justement en train d'y travailler.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais je peux répondre à la question, en fait.

 28   M. LE JUGE FLUEGGE : [aucune interprétation]


Page 11506

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Le chiffre qu'avance M. Tolimir, car il cite,

  2   en fait, la page 40 du rapport, il s'agit de 3 459 personnes, des dossiers

  3   fermés pour ce qui est des personnes enregistrées par le CICR en octobre

  4   2008. Et le deuxième chiffre de  5 061 personnes. Ce chiffre-là se trouve

  5   au tableau 1 du rapport à la page 6. Il s'agit là du nombre de personnes

  6   identifiées par l'ADN. C'est émis par l'ICMP et confirmé par la liste du

  7   bureau du Procureur concernant les personnes portées disparues à

  8   Srebrenica. La liste du bureau du Procureur montre un nombre de personnes

  9   supérieur à celles reportées dans la liste de l'ICMP.

 10   Je pense que j'ai déjà expliqué que la différence entre les deux, le

 11   CICR et d'autres organisations qui portaient sur l'identification. Il y a

 12   certains délais. Donc il y avait un certain délai et il fallait mettre à

 13   jour l'information au sein du CICR, et je pense que c'est ceci qui explique

 14   en partie les lacunes ou les différences.

 15   Il y a d'autres facteurs, mais il m'est bien difficile de vous dire

 16   pourquoi il n'y a pas réellement une correspondance exacte entre ces deux

 17   chiffres, ces deux totaux.

 18   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Le tableau est maintenant affiché à

 19   l'écran dans les deux langues.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 21   M. TOLIMIR : [interprétation]

 22   Q.  Compte tenu de votre réponse, pourriez-vous nous dire si l'Accusation

 23   suit de façon générale les informations obtenues ou que leur donne la

 24   Commission des personnes portées disparues et si le bureau du Procureur ne

 25   tient compte que de leurs listes et ne tient pas donc compte d'autres

 26   organismes chargés d'enquêter sur les personnes portées disparues à

 27   Srebrenica ?

 28   R.  Nous nous appuyons pour la plupart sur l'information obtenue de l'ICMP,


Page 11507

  1   ce qui ne veut pas dire que nous négligions l'information provenant

  2   d'autres sources pertinentes concernant l'identification des victimes. Mais

  3   la raison pour laquelle nous estimons que la liste de l'ICMP ou les

  4   identifications de l'ICMP sont les plus importantes, c'est principalement à

  5   cause de la méthode elle-même. C'est parce que c'est l'ADN qui sert de

  6   preuve dans ce cas-là. L'ICMP mène leurs enquêtes de façon très

  7   professionnelle, ils suivent des procédures standardisées, les normes

  8   employées, donc il s'agit également d'une organisation très fiable dans

  9   leur domaine, reconnue dans le domaine. Et je dois dire également qu'il y a

 10   une loi de Bosnie-Herzégovine sur les personnes portées disparues qui a été

 11   présentée autour des années 2005-2006. Je ne me souviens pas exactement de

 12   quelle année. Mais cette loi dit que chaque personne dans ce pays doit être

 13   identifiée à l'aide de la méthode par ADN. Donc l'existence de cette loi

 14   fait en sorte qu'une personne doit être d'abord identifiée par

 15   l'identification ADN avant de pouvoir être déclarée décédée. Donc ce sont

 16   les raisons.

 17   Q.  Très bien. Merci. Alors, est-ce que c'est la raison pour laquelle dans

 18   les listes nous retrouvons plus tard des noms de personnes qui sont

 19   décédées après la guerre, et là je parle de listes sur lesquelles on a

 20   procédé à l'analyse par ADN ?

 21   R.  Je ne sais pas à quelles listes vous faites référence. Est-ce que vous

 22   voulez dire que lorsqu'on donne une identification par ADN, est-ce que cela

 23   veut dire automatiquement que le lieu de décès, les circonstances du décès

 24   sont identifiées également ? Dans la plupart des cas oui, mais pas pour

 25   chaque personne portée disparue. S'il existe des incohérences pour des

 26   personnes qui ont d'abord été portées disparues avant la chute de

 27   Srebrenica et après la chute de Srebrenica en 1986 [comme interprété] ou

 28   plus tard, je crois que ces cas ne confirment pas -- d'après nos critères à


Page 11508

  1   nous s'agissant de la liste du bureau du Procureur sur les personnes

  2   portées disparues de Srebrenica. On ne les inclut pas dans nos listes, ces

  3   personnes-là.

  4   Q.  Merci. Nous avons vu que M. Brunborg a rédigé le premier -- enfin, nous

  5   avons lu ensemble le premier paragraphe. Je ne vais pas revenir sur le

  6   passage, mais il a expliqué dans ce paragraphe quel est le nombre minimum

  7   des victimes tuées par la VRS immédiatement après la chute de l'enclave. Il

  8   dit que c'était son travail, sa tâche. Alors, quel serait le nombre maximum

  9   de victimes qui peut être établi par cette méthode, à laquelle on peut

 10   arriver grâce à cette méthode ?

 11   R.  Eh bien, M. Brunborg, dans son article, décrit quelle est la tâche qui

 12   lui était confiée. Et quel serait le nombre maximum ? Eh bien,

 13   personnellement, je n'ai pas évalué ce chiffre. Je crois qu'il serait

 14   possible d'arriver à ce chiffre, toutefois. Il existe des méthodes

 15   statistiques qui nous permettent d'arriver à ce type de conclusion. Une

 16   deuxième évaluation était produite par l'ICMP, par Parsons, le directeur

 17   médicolégal de l'ICMP. Il a vraiment insisté pour évaluer les personnes

 18   disparues à Srebrenica en donnant un intervalle qu'on appelle de confiance,

 19   un intervalle de confiance qui était contenu dans cette évaluation, mais

 20   ceci ne voulait pas dire qu'il s'agissait du chiffre maximum. Il y a

 21   d'autres méthodes statistiques, par exemple la méthode de "capped or

 22   recapped [comme interprété]". Donc je ne peux pas vraiment vous donner de

 23   réponse. Mais si vous le souhaitez, je pourrais chercher et vous donner la

 24   réponse.

 25   Q.  Pour pouvoir visualiser ce dont vous parlez, est-ce qu'on peut afficher

 26   la page 46 en serbe et page 42 en anglais. C'est justement l'analyse par

 27   l'ADN et la commission internationale qui font l'objet de cette page. Donc,

 28   est-ce que le nombre correspond au chiffre maximal, le nombre que l'on


Page 11509

  1   retrouve sur cette page, donc des analyses qui ont été effectuées --

  2   L'INTERPRÈTE : Les interprètes ne sont pas sûrs de la question de M.

  3   Tolimir.

  4   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, pourriez-vous

  5   répéter la dernière partie de votre question ? "Est-ce que cette liste de

  6   l'ICMP est le chiffre maximal des tests à l'ADN effectués" --

  7   M. TOLIMIR : [interprétation]

  8   Q.  J'ai demandé si cette liste et le nombre d'analyses de l'ADN

  9   correspondent au chiffre maximal qui devrait être respecté aussi par le

 10   service démographique de ce Tribunal.

 11   R.  Nous n'avions jamais à l'esprit un chiffre spécifique lorsque nous

 12   avons mené cette enquête sur les personnes portées disparues et

 13   identifiées. Donc, lorsque nous avons établi ces listes, on reconstruit une

 14   réalité démographique d'un épisode de la guerre. Reconstruire signifie

 15   dresser une liste pour laquelle nous avons des raisons valables de penser

 16   que ce sont des victimes de la chute de Srebrenica. Partir du principe

 17   qu'il existe un chiffre a priori, je ne vois pas à quoi cela

 18   correspondrait. Cela n'aurait pas beaucoup de sens. Donc il n'y avait pas

 19   de chiffre cible dans notre travail.

 20   Q.  Merci. Le paragraphe 2 de ce document, s'il vous plaît, du document que

 21   nous voyons s'afficher à l'écran. Première phrase :

 22   "Il n'existe pas un aperçu concis et exhaustif du statut d'exhumation

 23   et des identifications de l'ex-Yougoslavie et, concrètement, de ce qui a

 24   été fait à Srebrenica et qui pourrait être obtenu de la part d'une seule

 25   organisation." Merci.

 26   Et puis, dans la suite, vous dites :

 27   "Hélas, cette base de données n'existe pas encore sous forme

 28   informatique."


Page 11510

  1   Et j'aimerais savoir la chose suivante : compte tenu de tout ce que

  2   vous avez déclaré, est-ce que vous aviez à l'esprit également le fait que

  3   quelqu'un avait tous ces éléments d'information en main, mais pas sous une

  4   forme qui aurait permis de les communiquer à tous les participants à ce

  5   processus ou à ce procès ici sous forme électronique ?

  6   R.  S'agissant des personnes portées disparues, les données les concernant

  7   sont en la possession fragmentaire de différentes organisations. On a

  8   essayé de faire converger les différentes listes en présence et d'établir

  9   une base de données centralisée. Récemment, l'Institut chargé des personnes

 10   portées disparues de Bosnie-Herzégovine serait arrivé à enregistrer les

 11   premiers résultats sur ce plan, me semble-t-il. Dans les médias, on parlait

 12   d'une liste regroupant toutes les données sur toutes les personnes portées

 13   disparues pendant la guerre de Bosnie-Herzégovine, et Srebrenica

 14   constituerait une partie de cette base de données. Il s'agirait d'une liste

 15   de 35 000 personnes à peu près qui correspondrait à l'ensemble de la guerre

 16   qui a eu lieu en Bosnie-Herzégovine. Donc c'est une liste qui est bien plus

 17   longue que la liste du CICR, liste relative aux personnes portées

 18   disparues, et qui comporte, celle-ci, 22 000 noms. Ce seraient des

 19   résultats tous récents. Je n'ai pas été en contact avec l'Institut chargé

 20   des personnes portées disparues, je ne leur ai pas demandé pour savoir ce

 21   qui en est dans leur base de donnée par rapport à la chute de Srebrenica.

 22   Peut-être qu'ils ont une liste relative à Srebrenica. Je ne sais pas.

 23   Mais je dois dire qu'il me semble que nous avons suffisamment

 24   d'éléments à présent sur la base des fichiers du CICR pour constituer une

 25   liste des personnes portées disparues relative à la chute de Srebrenica.

 26   Nous avons une source fiable. Les victimes ont fourni des informations

 27   relativement détaillées, et je pense qu'il s'agit d'un fondement solide

 28   nous permettant de dresser une première liste initiale de personnes portées


Page 11511

  1   disparues. Donc je ne vois pas l'utilité à obtenir de nouvelles données sur

  2   les personnes portées disparues. Donc ce qui est plus important maintenant,

  3   ce sont les informations que nous avons sur les personnes identifiées par

  4   l'ADN, donc les résultats de l'ICMP. Nous avons tout cela maintenant, tout

  5   ce qui est pertinent pour Srebrenica, et puis nous recevons tous les six

  6   mois des mises à jour. Et c'est ça qui est essentiel en l'espèce.

  7   Q.  Merci. Et voilà maintenant la question finalement qui m'intéresse

  8   surtout : qui monopolise les informations ? M. Tokaca en a parlé. Document

  9   D38, paragraphe 3. Donc, dites-nous qui est cette instance, et le CICR,

 10   est-ce que c'est lui qui va finalement harmoniser cette base de données en

 11   dernière instance ? Merci.

 12   R.  Puis-je voir la pièce D38, paragraphe 3, s'il vous plaît.

 13   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Affichons-le à l'écran.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il s'agit de la pièce à conviction D38,

 15   paragraphe 3. Merci.

 16   M. TOLIMIR : [interprétation]

 17   Q.  En attendant, dites-nous, est-ce que le comité international de la

 18   Croix-Rouge sera le lieu où seront centralisées ces deux bases de données,

 19   et est-ce que les renseignements du CICR seront contraignants pour tous ?

 20   Est-ce que tout le monde sera limité et déterminé par leur base de données

 21   ?

 22   R.  Est-ce que vous avez à l'esprit la base de données de l'Institut des

 23   personnes disparues ? C'est de cela que vous parlez lorsque vous parlez

 24   d'une base de données unifiée ?

 25   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Sur votre liste de pièces, nous

 26   voyons qu'il y a un document qui n'a pas encore reçu la traduction. Or nous

 27   voyons la traduction déjà faite ici. Alors, quel est le paragraphe que vous

 28   vouliez examiner ?


Page 11512

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'était le paragraphe 3 que j'ai mentionné, où

  2   M. Tokaca s'est exprimé et il a dit :

  3   "Le problème le plus important en Bosnie-Herzégovine est ce monopole

  4   perfide sur l'information."

  5   M. TOLIMIR : [interprétation]

  6   Q.  C'est ce qui m'a incité à poser ma question : le comité international

  7   de la Croix-Rouge jouait-il un rôle dominant dans le cadre de ces efforts

  8   de constitution d'une base unifiée de données ? Merci.

  9   R.  Je pense que nous ne parlons donc pas de la base de données de Mirsad

 10   Tokaca, que nous parlons plutôt de la base de données relative aux

 11   personnes portées disparues et qui aurait récemment été constituée par

 12   l'Institut chargé des personnes portées disparues. Donc c'est de cette

 13   manière-là que je comprends la question, et c'est à cette question-là que

 14   je vais répondre.

 15   L'Institut chargé des personnes portées disparues est une instance

 16   qui étudie les cas de tous les groupes ethniques, les groupes ethniques

 17   principaux de Bosnie-Herzégovine, et le CICR remettra progressivement tous

 18   les fichiers à cet institut. Cet institut s'impose petit à petit comme le

 19   point de convergence en la matière en Bosnie-Herzégovine. Donc ils ont pour

 20   mission de conserver toutes les données sur les personnes portées disparues

 21   et sur l'identification des personnes portées disparues.

 22   D'après ce que j'en sais grâce aux médias, il ne s'agit pas du CICR,

 23   mais de l'ICMP qui a déployé tous les efforts pour soutenir la création de

 24   cet institut, et ils ont déjà apporté leur assistance à cet institut en

 25   particulier en les aidant à créer cette grande base de données comportant

 26   35 000 personnes portées disparues de Bosnie.

 27   Donc il ne s'agit pas du CICR qui leur remettra des documents.

 28   Q.  Merci. Le temps répondra par l'affirmative soit à ma question, soit à


Page 11513

  1   votre réponse.

  2   Mais d'après ce que l'on voit ici, M. Tokaca regrette :

  3   "Le plus grand problème qui se pose en Bosnie-Herzégovine, à savoir

  4   un monopole perfide sur l'information." Et il dit que : "on a cherché à

  5   briser ce monopole en constituant un atlas sur les crimes commis en

  6   Bosnie."

  7   L'INTERPRÈTE : L'interprète n'est pas sûr d'avoir bien interprété la

  8   question.

  9   M. TOLIMIR : [interprétation]

 10   Q.  Donc j'aimerais savoir : si le directeur s'exprime ainsi, qu'est-ce

 11   cela nous dit sur les tentatives d'arriver à connaître le nombre de

 12   personnes portées disparues de Srebrenica ?

 13   R.  Ecoutez, je pense que M. Tokaca fait sa déclaration, moi je n'ai

 14   absolument rien à voir avec sa déclaration. Je ne vis pas en Bosnie, je ne

 15   connais pas les réalités de la Bosnie, je ne sais pas à quel monopole il

 16   fait référence. Quoi qu'il en soit, il n'a pas été facile d'harmoniser ces

 17   différentes bases de données. Cela a pris un certain temps après la fin de

 18   la guerre pour avoir finalement une seule et même base de données sur les

 19   personnes portées disparues en Bosnie. Donc cette base de données, elle

 20   existe. Ce qui signifie que, finalement, cela s'est concrétisé. Donc c'est

 21   une bonne chose. S'il y a un monopole, je ne suis pas au courant, mais bon,

 22   manifestement, le monopole n'existe plus puisque les choses convergent

 23   maintenant vers la bonne direction.

 24   Q.  Merci. Il est probablement beaucoup plus familier de cette situation

 25   que vous ou moi d'ailleurs.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, est-ce que nous pouvons afficher le bas

 27   de la page pour voir ce qu'il a à dire.

 28   M. TOLIMIR : [interprétation]


Page 11514

  1   Q.  Voilà ce qu'il dit : "70 personnes ont été inhumées au centre de

  2   Potocari, alors qu'en fait, ces personnes n'étaient pas mortes à

  3   Srebrenica."

  4   Vous le voyez ? C'est à la fin de la page. Est-ce que vous pourriez nous

  5   dire comment cela est possible et s'il y a eu des manipulations de la liste

  6   ou des manipulations au moment de la préparation des listes ?

  7   R.  Ecoutez, moi je ne suis pas au courant de ces 70 personnes qui sont

  8   inhumées au centre pour la mémoire de Potocari. Ce dont je voulais savoir -

  9   - bon, c'est un rapport de presse, donc j'aimerais savoir qui cite les

 10   propos de M. Tokaca parce que c'est un rapport de presse. Peut-être que

 11   Tokaca a dit cela ou a dit autre chose.

 12   De toute façon, dans le cadre de mes fonctions, moi je n'utilise pas

 13   les dossiers du mémorial de Potocari, donc en ce sens, cette information

 14   n'a aucune pertinence.

 15   Q.  Mais est-ce qu'il serait pertinent de savoir en la matière que ce

 16   renseignement a été confirmé par le chercheur Ivanisevic dans le rapport

 17   qui a été envoyé par la Défense ? Donc cela a été utilisé par la Défense,

 18   c'est une citation de ce livre.

 19   R.  Ecoutez, Monsieur, peut-être que cela est possible, mais peut-être que

 20   cela ne correspond pas à ce qui s'est passé. Moi je ne pense pas que M.

 21   Ivanisevic soit la bonne référence pour notre dialogue. Pourquoi ? Parce

 22   que son nombre des victimes de Srebrenica, ce n'est pas 7 000 à 8 000, mais

 23   700 à 800. Donc il voit la globalité du problème vu sous un angle tout à

 24   fait différent. Alors, que s'est-il passé à Potocari ? Qui est inhumé là-

 25   bas ? Ecoutez, c'est du ressort des autorités locales qui s'occupent

 26   justement du mémorial de Potocari. Et je pense que c'est à ces personnes

 27   qu'il faudrait poser ces questions. Je ne pense pas qu'il soit logique ou

 28   que cela ait un sens de poser cette question ici maintenant dans ce


Page 11515

  1   prétoire.

  2   Q.  Merci. Etant donné que vous avez abordé un autre sujet et que nous

  3   n'avons plus beaucoup de temps, parce que vous semblez parler d'autres

  4   choses maintenant ?

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais donc demander que soient affichées

  6   la page 26 dans la version serbe et la page 22 dans la version anglaise du

  7   rapport de l'année 2009.

  8   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, je dois vous dire

  9   que je n'ai pas compris votre dernière remarque, car le témoin a répondu

 10   exactement à la question que vous lui aviez posée. Mais poursuivez.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Peut-être que nous allons trouver une

 12   réponse différente dans son rapport. Est-ce que le rapport de Mme Tabeau

 13   pourrait être affiché. Page 26 pour la version serbe et 22 pour la version

 14   anglaise. Il s'agit donc de l'avant-dernier paragraphe, qui est comme suit

 15   --

 16   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Il s'agit à nouveau de la pièce

 17   P1776.

 18   M. TOLIMIR : [interprétation]

 19   Q.  Dans cette partie du rapport, le nombre d'habitants de Srebrenica est

 20   mentionné, et je cite :

 21   "Il est présumé qu'avant la chute de Srebrenica, il y avait quelque 40 000

 22   personnes à Srebrenica. Toutefois, nous ne disposons pas d'un chiffre

 23   exact. Il est difficile, du fait du manque de données relatives à la

 24   population exacte qui courait un risque, de calculer les taux de mortalité,

 25   ce qui fait que nous devons choisir une autre méthodologie, à savoir les

 26   pourcentages de décès."

 27   Voilà ce que j'aimerais savoir : quels autres critères avez-vous utilisés

 28   lorsque vous avez présenté des renseignements relatifs à l'évaluation du


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  1   nombre de personnes se trouvant à Srebrenica avant la chute de Srebrenica,

  2   puisqu'il est question de 40 000 personnes ?

  3   R.  Je pense que dans le rapport il est indiqué que pour ce qui est de la

  4   population qui vivait à Srebrenica avant la chute de Srebrenica, c'est un

  5   chiffre qui n'est pas connu. C'est ce qui est écrit dans ce paragraphe de

  6   la page 22. Les 40 000 personnes, c'est une estimation, une estimation qui

  7   se fonde quand même sur certains éléments, une estimation qui a été

  8   présentée par différentes organisations. Dans la ville de Srebrenica, et

  9   c'était une petite ville en fait, il y avait beaucoup moins de personnes.

 10   Au départ, il y avait environ 6 000 personnes. Et, certes, la population a

 11   augmenté en fonction de --

 12   Q.  Je ne souhaiterais surtout pas perdre davantage de temps à examiner

 13   cette question, puisque vous avez répondu de façon très générale, mais

 14   j'aimerais que vous nous indiquiez si vous avez utilisé des documents de la

 15   municipalité de Srebrenica, ou est-ce que vous avez utilisé d'autres

 16   sources ? Peut-être que vous pourriez répondre par oui ou par non, soit

 17   vous l'avez fait, soit vous ne l'avez pas fait.

 18   R.  Nous avons utilisé les renseignements du recensement de la population

 19   de 1991, à savoir le recensement effectué avant que le conflit n'éclate.

 20   Aucune autre source n'a été utilisée, parce qu'il n'y avait pas d'autres

 21   sources qui étaient assez fiables pour nous permettre d'évaluer la taille

 22   de la population dans la zone de Srebrenica à la mi-1995.

 23   Q.  Merci.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que le document D177 pourrait être

 25   affiché. Je m'excuse, le document D117. C'est un document de la

 26   municipalité de Srebrenica. Il s'agit, en fait, de statistiques relatives à

 27   la population résidant à Srebrenica avant les événements en question.

 28   M. TOLIMIR : [interprétation]


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  1   Q.  Le document est maintenant affiché. Pourriez-vous nous dire si vous

  2   avez déjà eu l'occasion de voir ce document ?

  3   R.  Non, je n'ai jamais vu ce document.

  4   Q.  Donc pouvez-vous voir que nous disposons des chiffres exacts de la

  5   population par municipalité; il s'agit des municipalités de l'enclave ?

  6   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, peut-être que la

  7   version anglaise suffirait sur l'écran. Ainsi, le témoin pourrait lire le

  8   document en question.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, s'il vous plaît.

 10   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Car les caractères sont très, très

 11   petits. Merci. C'est beaucoup mieux maintenant.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] En effet.

 13   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Et quelle est votre question ?

 14   M. TOLIMIR : [interprétation]

 15   Q.  Est-ce qu'il y avait des informations précises relatives à la

 16   population dans l'enclave avant la guerre ?

 17   R.  Oui, je vous l'ai dit, il s'agissait des résultats du recensement de

 18   l'année 1991 avant la guerre. C'est ce que je vous ai déjà dit.

 19   Q.  Bon, vous avez la ventilation de la population qui remonte au mois de

 20   janvier 1995, à savoir au moment des événements. Regardez la date, le 11

 21   janvier 1995. Cela se trouve dans l'en-tête.

 22   R.  Oui, je le vois Mais quelle est votre question ?

 23   Q.  Je voulais savoir si vous disposiez de renseignements précis sur la

 24   population en 1995 ?

 25   R.  Je n'avais pas l'information requise pour calculer les taux de

 26   mortalité. Toutes les analyses présentées dans notre rapport au chapitre

 27   2.5 sont présentées en fonction des appartenances ethnique. Là, vous avez

 28   des totaux pour le mois de janvier 1995, mais cela ne reprend pas les


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  1   informations relatives aux appartenances ethniques. Vous avez tout

  2   simplement la ventilation suivant le genre, le sexe de la population. Ce

  3   sont des données très générales. Pour notre analyse, ce sont des chiffres

  4   qui sont inutiles, qui ne nous servent pas.

  5   Nous avons utilisé une méthodologie qui a utilisé le recensement de 1991,

  6   mais il n'est pas inhabituel de calculer des probabilités de décès dans le

  7   domaine démographique. Donc les probabilités de décès sont en général

  8   toujours calculées par rapport à la taille de la population au début de la

  9   période concernée. En l'espèce, il s'agit de la période de guerre et les

 10   événements, plus particulièrement, de 1995, par rapport à la taille

 11   initiale de la population en 1991. Et du point de vue méthodologique, c'est

 12   une approche solide.

 13   Q.  Merci. Mais serait-il plus judicieux d'utiliser une liste de 1995 ou

 14   d'utiliser ce registre du conseil municipal qui date du mois de janvier

 15   1995 ? Du point de vue démographique, laquelle des listes est la plus

 16   appropriée ?

 17   R.  Ce n'est pas pour l'année 1995 [comme interprété]. C'est le mois de

 18   janvier 1995. C'est la date que nous voyons sur le document. Comme je vous

 19   l'ai déjà dit, il s'agit de chiffres bruts qui ne nous donnent pas la

 20   ventilation de la population en fonction de l'appartenance ethnique, du

 21   sexe et de l'âge. C'étaient des données dont nous avions besoin, et elles

 22   ne sont pas disponibles sur ce tableau.

 23   Et deuxièmement, cette liste, ou plutôt, ces statistiques ne peuvent

 24   pas, au niveau individuel, être associées aux victimes avant la chute de

 25   Srebrenica. Donc il s'agit de statistiques très générales qui sont très

 26   certainement des estimations ou des statistiques très approximatives, et

 27   nous ne pouvons pas, de ce fait, les associer avec les chiffres exacts dont

 28   nous disposons en utilisant nos listes de victimes.


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  1   Q.  Merci. La Chambre décidera s'il s'agit de chiffres exacts ou

  2   approximatifs.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrions-nous avoir le document --

  4   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, je ne pense pas que

  5   vous ayez le temps de présenter un autre document maintenant. Nous sommes

  6   arrivés au terme de l'audience de cette journée et nous devons maintenant

  7   lever l'audience. Et vous pourrez continuer la semaine prochaine ou la

  8   semaine d'après. Il m'a été dit qu'un autre témoin était prévu lundi, et

  9   Mme Tabeau est disponible à tout moment puisqu'elle travaille dans ce

 10   bâtiment.

 11   C'est bien cela, Monsieur Vanderpuye ?

 12   M. VANDERPUYE : [interprétation] Oui, vous avez tout à fait raison,

 13   Monsieur le Président. Nous avons un autre témoin, effectivement, et Mme

 14   Tabeau est à notre disposition. Mais j'aimerais juste demander à M. Tolimir

 15   quelle est la durée du contre-interrogatoire -- enfin, ce qu'il a prévu

 16   pour le reste de son contre-interrogatoire de Mme Tabeau.

 17   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Vous pouvez nous indiquer cela,

 18   Monsieur Tolimir ?

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je pense que nous

 20   serons à même de conclure en respectant le temps imparti et prévu. Je

 21   demanderais juste à Mme Tabeau d'avoir l'amabilité de répondre directement

 22   à mes questions pour que nous puissions procéder de façon plus efficace.

 23   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Dans ce cas, nous devons lever

 24   l'audience pour aujourd'hui. Nous reprendrons lundi à 14 heures 15, dans la

 25   salle d'audience II, parce que cette salle sera prévue pour une autre

 26   affaire.

 27   Je vous remercie. Et je vous rappellerais, bien entendu, qu'il ne faut que

 28   vous ne communiquiez avec aucune des parties entre-temps, Madame.


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, certainement.

  2   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Vanderpuye.

  3   M. VANDERPUYE : [interprétation] Oui, je viens juste de me souvenir que Mme

  4   Tabeau a fait référence à un projet dans le cadre duquel elle travaillait,

  5   il s'agissait des 58 noms indiqués par M. Ivanisevic. Alors, je ne pense

  6   pas que nous devons communiquer quoi que ce soit et que nous devons

  7   communiquer avec elle, mais il se peut, en fait, que du point de vue

  8   logistique, il faudrait qu'elle nous informe dès qu'elle reçoit

  9   l'information en question. Donc j'attire votre attention sur le fait que

 10   cela sera peut-être une probabilité. Si les documents arrivent, non pas

 11   directement chez Mme Tabeau, mais au bureau du Procureur, il faudra bien

 12   que nous prenions contact avec elle pour lui fournir ces dossiers, et je

 13   vous demande la possibilité de pouvoir le faire. Mais je pense qu'il était

 14   important que je vous le dise, quand même.

 15   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je ne pense pas que cela soit un

 16   problème. Bien entendu, s'il s'agit de documents même pour la Défense

 17   également, qui sont utiles aux deux parties, pour le contre-interrogatoire

 18   et les questions supplémentaires de ce témoin, que cela ne tienne.

 19   Maître Gajic.

 20   M. GAJIC : [interprétation] Monsieur le Président, le témoin travaille pour

 21   le bureau du Procureur et elle travaille dans ce bâtiment, donc il serait

 22   absolument ridicule de penser qu'elle ne puisse même pas dire bonjour à ses

 23   collègues. Nous ne nous attendons absolument pas que les mêmes mesures

 24   soient appliquées à ce témoin que pour ce qui est des témoins qui ne

 25   travaillent pas au sein du bureau du Procureur, bien sûr.

 26   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie de cette précision.

 27   Bien sûr, les contacts de politesse usuels sont tout à fait polis. Les

 28   contacts normaux sont toujours polis entre les collègues, bien sûr, mais il


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  1   n'est pas permis de parler de la teneur de cette affaire ou de son

  2   témoignage ou de ce qu'elle dira prochainement lors de sa déposition.

  3   Je vous remercie. Alors, la séance est levée. Et nous ne siègerons pas dans

  4   ce prétoire-ci, mais dans le prétoire I lundi dans l'après-midi.

  5   [Le témoin quitte la barre]

  6   --- L'audience est levée à 13 heures 48 et reprendra le lundi 21 mars 2011,

  7   à 14 heures 15.

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