Page 1555
1 Le lundi 19 octobre 2009
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 40.
5 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,
6 Messieurs les Juges. Bonjour à tous. C'est l'affaire IT-08-91-T, le
7 Procureur contre Mico Stanisic et Stojan Zupljanin.
8 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bonjour. Comme tout le monde le sait,
9 nous commençons cette semaine avec ce fait qu'il faut nous rappeler que
10 dans ce monde moderne, nous sommes évidemment très fortement tributaires
11 des hasards de la technologie. Et vous aurez observé que les ministres de
12 cet art viennent avec leurs incantations et leurs rituels, et à ce que je
13 comprends, les problèmes ont dû être corrigés, tout au moins, c'est ce que
14 Mme l'Huissière m'a dit. L'un des effets malheureux de tout ceci, c'est que
15 nous avons perdu environ 35 à 40 minutes que nous ne pourrons pas
16 immédiatement rattraper, parce que tenant compte du fait que les accusés se
17 sont trouvés en salle d'audience pour commencer l'audience à temps,
18 l'emploi du temps que nous avons conçu et qui prévoyait les suspensions de
19 séance habituelles de façon à suivre le rythme et le système qui est mis en
20 place pour leur confort et leur convenance, il faut croire que ceci ne sera
21 pas trop troublé.
22 Jeudi dernier, avant de lever la séance, la Chambre a su directement par
23 l'accusé qu'ils éprouvaient certaines difficultés du point de vue des
24 arrangements faits pour eux, plus particulièrement compte tenu des
25 audiences prolongées qui ont été prévues pour cette semaine. Parmi les
26 griefs qu'ils auraient évoqués et levés, il y avait certaines questions qui
27 avaient trait à la sécurité, et je répète ce que nous aurions dit jeudi, à
28 savoir que la Chambre ne se prononcera pas de façon directe pour répondre à
Page 1556
1 ces griefs, parce que pour des raisons évidentes, la Chambre évidemment
2 suit ce qui est prévu par les équipes de sécurité et compte tenu des
3 systèmes qu'ils ont mis en place. Si des problèmes se posent au-delà des
4 incidents ordinaires qui peuvent se produire lorsqu'on est en détention,
5 alors, les accusés, par le truchement de leur conseil, pourront, j'en suis
6 sûr, formuler les requêtes qu'il convient. Et à moins et jusqu'à ce que
7 cela n'ait lieu, nous n'en dirons pas davantage.
8 Une chose qui nous préoccupe c'est la conséquence de ces audiences
9 prolongées cette semaine par rapport à la routine qui est normalement mise
10 en place pour les accusés, et notamment leurs sorties, leurs possibilités
11 de sortie pour prendre l'air dans la fin de l'après-midi qui ne pourront
12 pas être satisfaites à cause de l'impossibilité de faire les arrangements
13 nécessaires au point de vue transport entre le siège du Tribunal et le
14 quartier pénitentiaire. Et les trois jours, ou quatre jours, peut-être
15 même, que nous allons avoir en audience cette semaine, la seule assurance
16 que nous puissions donner c'est que des dispositions sont prises au sein du
17 quartier pénitentiaire pour que les accusés puissent faire de l'exercice,
18 même si ce n'est pas à l'air libre. Ceci, en quelque sorte, pour compenser
19 les inconvénients, qui, nous le reconnaissons, sont la conséquence de notre
20 décision d'avoir des audiences prolongées.
21 Donc nous sommes certains que l'accusé, en particulier M. Zupljanin, qui a
22 explicité ses préoccupations à la fois pour lui-même et pour le co-accusé,
23 nous sommes sûrs qu'il comprend ce que nous avons dit. Nous reconnaissons
24 que nos explications ne sont pas satisfaisantes, mais c'est tout ce que
25 nous pouvons dire à ce stade.
26 Je voudrais demander qui représente les parties pour l'Accusation.
27 M. OLMSTED : [interprétation] Monsieur le Juge, Matthew Olmsted, Joanna
28 Korner et Crispian Smith, notre commis à l'affaire pour l'Accusation.
Page 1557
1 M. ZECEVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Slobodan
2 Zecevic et Slobodan Cvijetic pour la Défense de Stanisic. Je vous remercie.
3 M. PANTELIC : Monsieur Zupljanin, Me Pantelic et M. Eric Tully. Merci bien.
4 De temps en temps, nous pouvons changer de langue pour l'équité des deux
5 langues, des deux langues officielles. Merci beaucoup.
6 M. LE JUGE HARHOFF : Nous sommes enchantés, Maître. Merci. Très bien.
7 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci.
8 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Du côté des Juges nous sommes
9 satisfaits. Je vous remercie.
10 M. PANTELIC : [interprétation] Merci.
11 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Est-ce que le témoin pourrait maintenant
12 être accompagné dans la salle d'audience, s'il vous plaît.
13 [Le témoin vient à la barre]
14 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je rappelle au témoin qu'il est toujours
15 tenu par sa déclaration solennelle.
16 Monsieur Olmsted, mon souvenir c'est que vous aviez terminé votre
17 interrogatoire principal.
18 M. OLMSTED : [interprétation] Non, Monsieur le Président, j'ai encore
19 environ une heure. C'est un peu plus long que ce que nous avions prévu à
20 l'origine, la raison étant que nous avons passé beaucoup de temps jeudi à
21 parler de questions de procédures en ce qui concerne l'Accusation, la façon
22 dont l'Accusation fonctionne, et comment les affaires se dirigent dans
23 différentes procédures. Ceci est important pour notre procès et nous
24 pensons qu'en recourant à ce témoin, nous pouvons espérer à l'avenir
25 limiter beaucoup la quantité des dépositions d'autres témoins comme celui-
26 ci. Et je pense que j'en aurai terminé dans l'heure.
27 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je vous remercie.
28 Veuillez poursuivre.
Page 1558
1 M. OLMSTED : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Avant que nous
2 ne commencions, je voudrais apporter une correction au compte rendu à la
3 page 1 527, lignes 4 et 11, page 1 531, lignes 5 et 9. Ceci est sans aucun
4 doute dû à ma mauvaise prononciation.
5 LE TÉMOIN : MILENKO DELIC [Reprise]
6 [Le témoin répond par l'interprète]
7 Interrogatoire principal par M. Olmsted : [Suite]
8 Q. Monsieur Delic, pourriez-vous, s'il vous plaît, dire le nom du
9 substitut et nous l'épeler.
10 R. Sabic.
11 Q. Juste pour que nous soyons bien au clair, pouvez-vous nous l'épeler.
12 R. S-a-b-i-c.
13 Q. Merci. Maintenant, avant de continuer votre déposition aujourd'hui,
14 est-ce qu'on vous a demandé pour commencer, lorsque nous avons suspendu la
15 séance jeudi dernier, je vous posais des questions concernant 1992 et le
16 registre appelé KT dans votre bureau du procureur. Il s'agissait de la
17 pièce P121. Je voudrais revenir un instant sur ce registre. Nous n'avons
18 pas besoin de le voir à l'écran. Avant de faire votre déposition
19 d'aujourd'hui, on vous a demandé de repérer quelles étaient les affaires de
20 caractère pénal qui étaient inscrites dans le registre KT et dans
21 lesquelles les auteurs des infractions étaient des Serbes et les victimes
22 étaient des non-Serbes.
23 R. Oui, effectivement.
24 Q. Et combien de ces affaires avez-vous pu retrouver dans le registre KT ?
25 R. Je pense qu'il y en avait sept.
26 Q. Et est-ce que vous vous rappelez, enfin, peut-être que vous ne pouvez
27 pas vous rappeler exactement les numéros ou le nombre des entrées des
28 mentions dans ces registres ?
Page 1559
1 R. C'est difficile.
2 Q. Y a-t-il quelque chose dont on pourrait parler et qui pourrait vous
3 aider à vous rappeler les chiffres, les numéros d'enregistrement de ces
4 affaires ?
5 R. Si on me montrait un exemplaire du registre, alors peut-être que je
6 pourrais.
7 Q. Bien. Comme autre possibilité, est-ce que vous vous rappelez avoir fait
8 une déclaration écrite la semaine dernière dans laquelle vous aviez inscrit
9 les numéros concernant ces sept affaires, lorsqu'elles ont été consignées
10 par écrit ?
11 R. Oui.
12 M. OLMSTED : [interprétation] Monsieur le Président, pour rafraîchir la
13 mémoire de ce témoin, est-ce qu'on pourrait lui montrer la déclaration
14 écrite qu'il a faite la semaine dernière. Nous avons fourni ceci à la
15 Défense ainsi qu'aux membres de la Chambre, je pense que c'était mercredi
16 dernier.
17 M. LE JUGE HALL : [hors micro]
18 M. OLMSTED : [interprétation]
19 Q. Monsieur Delic, on vient de vous remettre une déclaration écrite.
20 Pourriez-vous, s'il vous plaît, y jeter un coup d'œil et nous dire si c'est
21 bien la déclaration écrite que vous avez faite la semaine dernière ?
22 R. Oui.
23 Q. Et est-ce que cette déclaration vous rafraîchit la mémoire concernant
24 les numéros des affaires, en l'occurrence, les numéros sous lesquels les
25 affaires ont été inscrites dans le registre KT en 1992, dans lesquelles
26 l'auteur de l'infraction était un Serbe et la victime était non-Serbe ?
27 R. Oui, oui.
28 Q. Donc, pour le compte rendu, pourriez-vous, s'il vous plaît, fournir ces
Page 1560
1 numéros d'inscription au registre ainsi que les infractions qui étaient
2 reprochées aux auteurs ?
3 R. Le premier numéro, c'est le KT 110. Il s'agissait du crime de meurtre
4 tel que prévu à l'article 36.2 du code pénal de l'ex-Bosnie-Herzégovine, et
5 il y avait, en l'occurrence, plusieurs personnes qui avaient été tuées. Le
6 deuxième numéro c'est le KT 115. Le crime ou le délit c'était d'avoir mis
7 en danger la circulation sur les routes, et là, il s'agit de l'article
8 181.3. La troisième mention c'est le 120, et il s'agit là du crime de viol
9 prévu et puni à l'article 88.1. Le quatrième chiffre est le 127, il s'agit
10 à la fois de fraude, de contrefaçon, [inaudible] en écriture concernant les
11 documents. Article 158.2. L'infraction suivante est inscrite sous KT 129.
12 Il est dit ici qu'il s'agit de pillage, mais en fait, il s'agissait de vol
13 à main armée, et ceci se rapporte à l'article 150.
14 Puis, KT 132, vol qualifié, article 147. Puis KT 133, extorsion et prise
15 d'un véhicule à moteur, articles 153 et 160.
16 M. OLMSTED : [interprétation] Et, Monsieur le Président, pour le compte
17 rendu en anglais, la traduction de P121 contient chacune de ces sept
18 mentions.
19 Q. Monsieur Delic, si je vous ai bien compris correctement, depuis le mois
20 d'avril jusqu'au mois de décembre 1992, la police a rendu compte à votre
21 bureau uniquement de sept infractions dans lesquelles on savait que
22 l'auteur était un Serbe qui avait commis une infraction contre un Musulman
23 ou un Croate; c'est bien ça ?
24 R. Oui.
25 Q. Qu'est-ce que ceci veut dire par rapport à toutes les autres
26 infractions nombreuses sur lesquelles vous avez déposé jeudi dernier et qui
27 avaient lieu contre la population non-serbe, tous les meurtres, toutes les
28 blessures corporelles, les vols, les viols, destructions de biens, qu'en
Page 1561
1 est-il de ces autres affaires ?
2 R. Dans les cas où il y avait des auteurs non identifiés pour ce qui est
3 des infractions consignées dans le registre, on les enregistrait comme tel.
4 Quand il s'agissait d'auteurs qui avaient des casiers judiciaires et que
5 l'infraction était présentée par la police, ils étaient enregistrés dans le
6 registre KT qui a trait aux affaires dans lesquelles les auteurs ont été
7 identifiés.
8 Q. Donc si j'ai bien compris, ceci veut dire que soit les infractions,
9 toutes ces autres infractions qui ne sont pas inscrites dans le registres
10 KT ou bien n'avaient pas été rapportées à la police ou bien étaient
11 indiquées à la police, mais c'étaient des affaires non résolues avec des
12 auteurs inconnus ?
13 R. Oui.
14 Q. Lesquelles dans ces sept affaires que vous avez énumérées pour nous
15 comptent un auteur qui était membre des forces de police ?
16 R. Je ne me rappelle pas avoir eu un cas quelconque, dans ces affaires-ci,
17 où l'auteur aurait été un membre des forces de police.
18 Q. Donc serait-il exact de dire qu'aucun rapport de caractère pénal contre
19 des auteurs de la police d'infractions contre des non-Serbes n'a été
20 présenté à votre bureau en 1992 ?
21 M. PANTELIC : [interprétation] Objection. La question est directrice.
22 M. OLMSTED : [interprétation] Je modifie la question, Monsieur le
23 Président.
24 Q. Pourriez-vous nous dire de mémoire si des plaintes au pénal contre des
25 auteurs appartenant à la police ont été présentées à votre bureau dans des
26 cas où il s'agissait d'infractions contre des non-Serbes en 1992 ?
27 R. Je ne me rappelle pas avoir vu présentés de tels rapports.
28 Q. Maintenant, j'aimerais vous poser quelques questions concernant deux
Page 1562
1 des infractions enregistrées dans le registre KT. Il s'agit d'un meurtre et
2 des affaires de viol qui semblent donc être deux cas de grande violence. Le
3 premier, c'est le KT 110; est-ce que vous vous rappelez cette affaire ?
4 R. Oui.
5 Q. Pourriez-vous nous dire quels étaient les faits, quelles étaient les
6 circonstances du crime, l'origine ethnique des victimes, l'origine ethnique
7 des auteurs ?
8 R. Les auteurs étaient des Serbes. L'une de ces personnes était Goran
9 Mrdja. Et de toute façon, il y avait quatre personnes qui étaient les
10 auteurs. Quant aux victimes, c'étaient deux Musulmans. L'incident a eu lieu
11 dans le village de Skucani Vakuf. Je me rappelle l'événement et j'ai
12 assisté à l'enquête sur les lieux du crime après que ces meurtres aient eu
13 lieu. Plus tard, un procès a eu lieu pour juger les auteurs des crimes.
14 Q. Maintenant, d'après les crimes qui étaient reprochés à ces auteurs,
15 quelle était la sentence minimum obligatoire à laquelle ils étaient exposés
16 ?
17 R. Dans ce cas-ci, où il avait un meurtre qualifié de plusieurs
18 personnes, la loi envisage une peine minimale de dix ans de prison.
19 Q. Et vous avez mentionné le fait qu'il y avait eu procès. Quelle peine a
20 été infligée par le tribunal du premier degré à Sanski Most contre ces
21 auteurs ?
22 R. Les auteurs ont été condamnés à des peines de prison d'un an.
23 Q. Et pourquoi est-ce qu'ils ont tous reçu des peines d'un an seulement,
24 alors que tous auraient dû avoir, en principe, dix ans ?
25 R. Je pense que le juge, qui était une dame, a eu peur au cours du procès.
26 Devant le bâtiment du tribunal, il y a eu un groupe très important d'hommes
27 armés qui se sont réunis et qui ont utilisé leurs armes, qui ont tiré et
28 qui étaient ivres. Un policier qui escortait l'accusé depuis son lieu de
Page 1563
1 détention jusqu'au tribunal m'a dit que certaines personnes du groupe
2 voulaient savoir qui j'étais, voulaient se renseigner à mon sujet parce que
3 j'étais censé représenter l'accusation contre ces Serbes. Ils ont proféré
4 des menaces et la situation était très tendue.
5 Q. Vous avez dit que c'était un groupe de personnes armées. Pouvez-vous
6 nous dire quelle était l'origine ethnique des membres de ce groupe armé et
7 également ce qu'ils portaient comme vêtements ?
8 R. C'étaient des Serbes, puisque c'étaient en fait des gens qui se
9 plaignaient du fait que des Serbes étaient en train d'être jugés pour avoir
10 tué des Musulmans. Ils portaient des uniformes et portaient des armes à
11 canon long.
12 Q. Est-ce que vous savez d'où ces hommes armés qui étaient en uniforme
13 venaient ?
14 R. Je ne sais pas.
15 Q. Est-ce qu'ils ont tiré, ce jour-là ?
16 R. On a pu entendre plusieurs coups de feu.
17 Q. Quelles mesures est-ce que la police a prises pour empêcher ces hommes
18 armés de déranger, de troubler le procès ?
19 R. Je ne suis pas au courant de mesures que la police aurait pu prendre.
20 Q. Et est-ce que vous êtes au courant, vous savez si la police a jamais
21 procédé à des enquêtes de caractère pénal concernant cet incident ?
22 R. Non. Je ne sais rien de cela non plus.
23 Q. Je voudrais maintenant que nous passions à cette affaire de viol qui
24 est rapportée au numéro 120 dans le registre KT.
25 M. OLMSTED : [interprétation] Monsieur le Président, le document suivant
26 est un document un peu sensible dans sa nature, parce qu'il contient non
27 seulement les victimes de viol avec leurs noms, mais également les lieux où
28 ça a eu lieu et les circonstances du viol. Et on nous a demandé de ne pas
Page 1564
1 publier ça ou de ne pas le diffuser au public.
2 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui.
3 M. OLMSTED : [interprétation] Pourrait-on voir, s'il vous plaît, la pièce
4 1122 de la liste 65 ter. Voyons maintenant la deuxième page, à la fois pour
5 l'anglais et le B/C/S.
6 Q. Monsieur Delic, si vous regardez tout en haut de la page 2, quelle
7 peine a été prononcée contre l'auteur de ce crime pour le viol d'une
8 Musulmane ?
9 R. Ils étaient censés purger une peine d'un an en prison qui ne serait
10 exécutée que si l'accusé commettait une nouvelle infraction dans les deux
11 ans qui suivent le prononcé de la peine. C'était donc une peine avec
12 sursis.
13 Q. Est-ce que c'est une peine appropriée pour un viol de cette nature ?
14 R. Non. Je ne dirais pas qu'il s'agit d'une peine appropriée.
15 M. OLMSTED : [interprétation] Si on peut maintenant voir la page 5,
16 paragraphe 4 de ce document, qui est aussi la page 5, paragraphe 4 pour la
17 version en B/C/S.
18 Q. On voit là que le tribunal justifie le prononcé d'une peine avec sursis
19 pour l'auteur en retenant un certain nombre de circonstances atténuantes,
20 et je cite :
21 "Que la victime avait changé d'adresse, comme la majorité des personnes du
22 cru appartenant à la même origine ethnique, ce qui faisait qu'il était
23 raisonnable de s'attendre à ce que le simple fait de mettre en garde,
24 combiné avec la menace de peine, aurait un effet suffisant sur l'accusé
25 pour l'empêcher de commettre le même crime ou des crimes analogues à
26 l'avenir."
27 Monsieur Delic, est-ce que ceci est approprié lorsqu'il s'agit de
28 déterminer la peine à imposer à un accusé ?
Page 1565
1 R. Une telle explication est peut-être le résultat des circonstances dans
2 lesquelles le procès a eu lieu, à savoir l'état de guerre. Et je suppose
3 que c'est la raison pour laquelle une peine aussi légère a été prononcée.
4 Peut-être que la personne qui saurait le mieux vous expliquer ça serait le
5 président de la juridiction qui a rendu cette décision.
6 Q. Est-ce que ceci est encore un cas dans lequel le tribunal avait des
7 pressions ou des intimidations qui s'exerçaient sur lui, de façon à ce
8 qu'il n'impose qu'une peine légère, s'agissant d'un crime contre une
9 personne non-serbe ?
10 R. Très probablement, très probablement, c'était la raison pour laquelle
11 une peine aussi légère a été prononcée par rapport à la peine qui aurait pu
12 être prononcée dans d'autres conditions que celles qui régnaient à ce
13 moment-là.
14 M. OLMSTED : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que l'on
15 pourrait verser au dossier, admettre cette pièce sous pli scellé ?
16 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Elle est admise ainsi et marquée ainsi.
17 Mme LA GREFFIERE : [interprétation] Comme la pièce P122 sous pli scellé.
18 M. OLMSTED : [interprétation]
19 Q. Monsieur Delic, quelles mesures est-ce que la police a prises pour vous
20 protéger, vous et les membres du tribunal, contre les pressions et
21 intimidations quand vous avez voulu faire le procès des Serbes responsables
22 de crimes commis contre les non-Serbes ?
23 R. Je n'ai pas connaissance des mesures de protection qui avaient été
24 prises à l'époque.
25 Q. Et à quel point est-ce que la police s'est intéressée à assurer qu'il y
26 aurait des enquêtes complètes sur ce type de cas lorsque l'auteur était un
27 Serbe et la victime n'était pas serbe ?
28 R. Je ne suis pas très sûr de ce que je peux vous dire, mais je suppose
Page 1566
1 qu'ils ont fait tout ce qu'ils pouvaient compte tendu des circonstances. Il
2 est difficile de donner une réponse précise à votre question.
3 Q. S'il s'était agi d'un auteur serbe pour l'infraction et d'une victime
4 serbe, est-ce que la police aurait été davantage disposée à faire une
5 enquête complète sur ce qui s'était passé au cours de cette période en 1992
6 ?
7 R. Il y a eu aussi des cas de ce genre dans lesquels l'auteur du crime et
8 la victime étaient de la même origine ethnique. La police a entrepris les
9 mêmes mesures par rapport à leur mandat. Il y a eu des rapports -- j'ai
10 reçu des rapports concernant de tels cas aussi.
11 Q. Bien. Nous avons parlé -- enfin, il y a eu un nombre important
12 d'infractions contre des non-Serbes qui n'ont jamais fait l'objet de
13 poursuites en 1992. Comment est-ce que la population non-serbe, la
14 population civile de Sanski Most, a-t-elle réagi au fait que l'ordre
15 judiciaire pénal n'a pas réussi à les protéger ?
16 R. La population non-serbe était très effrayée à l'époque. Pour la
17 plupart, ils essayaient de partir, de quitter le territoire de la
18 municipalité par tous moyens possibles. Ils étaient extrêmement effrayés.
19 Q. Et quelle était l'attitude de la population civile non-serbe à l'égard
20 de la police et du travail accompli par la police ?
21 R. Je n'ai eu que peu de contact avec des non-Serbes. Les voisins avec qui
22 j'ai eu des contacts étaient tout simplement effrayés. Ils avaient peur.
23 L'ensemble de la situation au début de la guerre et tout cela nous a tous
24 pris par surprise. Le fait même que des crimes ont été commis a affecté la
25 population en ce sens qu'ils avaient peur.
26 Q. Est-ce que la population non-serbe avait confiance dans la police ?
27 R. Difficile de répondre à votre question. Il faudrait demander à
28 quelqu'un d'origine non-serbe qui aurait vécu dans le territoire de Sanski
Page 1567
1 Most.
2 Q. Bien. Regardons maintenant la pièce 1788 de la liste 65 ter. Ceci est
3 un rapport envoyé par le SJB de Sanski Most au CSB de Banja Luka, et en
4 première page nous voyons une liste d'un certain nombre de crimes commis
5 avec violence contre des non-Serbes entre la fin du mois d'octobre et le
6 début du mois de novembre. Ma première question est la suivante : avez-vous
7 vu ce document en 1992 ?
8 R. Non.
9 Q. J'aimerais que nous nous penchions sur la page 2, paragraphe 1 de la
10 version anglaise du texte, qui correspond dans sa version B/C/S à la page
11 2, deuxième paragraphe entier. Dans ce paragraphe, le chef de la police de
12 Sanski Most déclare, je cite :
13 "En ce moment, nous savons qui sont certains des auteurs. Toutefois,
14 nous pensons que dans une situation comme celle-ci, il ne serait ni
15 possible ni conseillé d'entreprendre des mesures destinées à appréhender ou
16 à poursuivre en justice les criminels pour des raisons liées à la sécurité
17 des employés du SJB et des instances juridiques."
18 Alors, Monsieur Delic, est-ce que vous savez qu'à l'époque vous receviez
19 notification de ce nombre important de crimes commis contre des non-Serbes,
20 la police retirait les noms des auteurs de ces documents, des auteurs
21 présumés de ces crimes ?
22 M. PANTELIC : [interprétation] Objection. Il serait équitable pour le
23 témoin de dire -- enfin, mon collègue de l'Accusation a dit un nombre
24 important de cas de crimes non résolus. Mon collègue de l'Accusation aurait
25 peut-être pu être plus précis en disant simplement ce qui suit au témoin,
26 c'est-à-dire en lui posant la question suivante : est-ce que vous avez reçu
27 un certain nombre de plaintes au pénal concernant des auteurs non
28 identifiés ? Parce qu'ici dans le libellé de la question, on ne voit pas
Page 1568
1 très bien comment le témoin pourrait faire autrement que spéculer. Ce n'est
2 pas ce qu'a expliqué le témoin lorsqu'il a parlé de ce qui s'est passé. Il
3 n'a pas parlé d'un grand nombre de cas non résolus; et la charge incombe à
4 l'Accusation d'être précise dans ses questions. Le témoin s'est expliqué
5 dans le détail. Donc peut-être la question pourrait être reformulée. Je
6 vous remercie.
7 M. OLMSTED : [interprétation] Très bien. Je pense que nous allons obtenir
8 une nouvelle objection au sujet de la façon de parler, mais je vais
9 reformuler ma question et la simplifier.
10 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur Olmsted, ce qui me frappe,
11 c'est qu'un certain nombre de questions que vous avez posées demandent au
12 témoin des conclusions n'ont pas fait encore l'objet d'objections. C'est la
13 première que nous attendons. Donc reformulez votre question.
14 M. OLMSTED : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
15 Q. Monsieur Delic, saviez-vous que pendant cette période - et je rappelle
16 que le document date, si je ne trompe, de novembre 1992 - la police
17 retirait les noms des auteurs de ces crimes des documents les concernant ?
18 R. Non, je ne suis pas au courant de cela. J'ai vu en page 1 de ce
19 document qu'il est fait état d'une affaire liée au meurtre de neuf
20 personnes d'appartenance ethnique croate. Je connais cette affaire. J'ai
21 fait partie de ceux qui ont enquêté sur les lieux, et je sais que les
22 auteurs de ce grime ont fait l'objet d'une plainte officielle.
23 Q. Monsieur Delic, est-ce que vous avez eu à quelque moment que ce soit un
24 entretien avec des policiers au cours duquel vous auriez déclaré que vous
25 étiez un peu réticent par rapport à la nécessité de poursuivre dans l'une
26 ou l'autre de ces affaires en raison de préoccupations que vous aviez par
27 rapport à votre sécurité personnelle ?
28 R. Non.
Page 1569
1 Q. Si la police vous avait soumis une de ces affaires à la fin de
2 l'enquête et vous avait donné les noms des auteurs, est-ce que vous auriez
3 refusé de les poursuivre en justice ?
4 R. Non.
5 Q. Pourquoi pas ?
6 R. Parce que c'est mon devoir de poursuivre en justice les auteurs d'actes
7 criminels qui font l'objet de plaintes au pénal par la police, plaintes
8 accompagnées de preuves suffisantes qui permettent de suspecter que telle
9 ou telle personne est bien l'auteur présumé de l'acte criminel en question.
10 M. OLMSTED : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
11 je demande l'enregistrement de ce document aux fins d'identification.
12 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Madame la Greffière.
13 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce P123,
14 enregistrée aux fins d'identification, Monsieur le Président, Messieurs les
15 Juges.
16 M. OLMSTED : [interprétation]
17 Q. J'aimerais maintenant que nous parlions de l'arrestation et de la mise
18 en détention de certains Serbes à Sanski Most pendant l'année 1992 --
19 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur.
20 Est-ce que nous pourrions demander à M. le Juge Delic s'il sait qui pouvait
21 proférer des menaces ou intimider des policiers au cas où les policiers
22 entreprendraient une enquête ou des poursuites. Qui suscitait cette peur
23 exactement ? Serait-il possible au témoin d'identifier ces personnes,
24 individuellement ou collectivement ? Je parle de ceux qui menaçaient les
25 policiers, si ces policiers faisaient effectivement leur travail. Est-ce
26 qu'il se serait agi de soldats ou est-ce qu'il se serait agi d'autres
27 policiers ou d'émeutiers au sein de la communauté serbe ? Enfin, d'où
28 venait la menace, d'après le témoin ?
Page 1570
1 M. OLMSTED : [interprétation]
2 Q. Monsieur Delic, est-ce que vous avez compris la question qui vient de
3 vous être posée par le Juge de la Chambre ?
4 R. Oui.
5 Q. Pourriez-vous répondre ?
6 R. Je ne suis pas au courant. Je ne sais absolument rien en rapport avec
7 cela.
8 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Merci.
9 M. OLMSTED : [interprétation] Bien.J'aimerais que nous nous penchions sur
10 la pièce P117, à présent.
11 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
12 M. OLMSTED : [interprétation] On m'indique à l'instant que ce document
13 n'est pas encore téléchargé dans le système électronique, donc je demande
14 l'affichage du document 65 ter numéro 641. C'est bien le document dont j'ai
15 besoin.
16 Q. Monsieur Delic, penchons-nous sur le premier paragraphe où nous voyons
17 qu'il est question d'un certain nombre d'arrestations de citoyens non-
18 serbes entre mai et juillet 1992, et de leur mise en détention dans un
19 certain nombre de bâtiments, et notamment au siège de la SJB, ainsi que
20 dans une salle de sport et dans le camp de Manjaca. Regardons maintenant le
21 document 65 ter numéro 10 128.
22 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur Olmsted, il est 10 heures 25.
23 Je le vois à l'horloge qui se trouve en face de moi, sur le mur. Donc,
24 comme je l'ai dit tout à l'heure, nous avons entamé la matinée un peu tard,
25 mais nous allons tout de même faire la pause à l'heure.
26 M. OLMSTED : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
27 [Le témoin quitte la barre]
28 --- L'audience est suspendue à 10 heures 24.
Page 1571
1 --- L'audience est reprise à 10 heures 48.
2 [Le témoin vient à la barre]
3 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur Olmsted, veuillez poursuivre.
4 M. OLMSTED : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je demande
5 l'affichage du document 65 ter 10128.
6 Q. Ce document date d'un mois après le document que nous avons examiné
7 précédemment, et il est question de personnes détenues dans le bâtiment du
8 SJB à Sanski Most, ainsi que dans le camp de Manjaca et dans une usine dont
9 le nom est l'entreprise Krings. Monsieur Delic, est-ce que vous connaissiez
10 ces divers centres de détention en 1992 ?
11 R. Non.
12 Q. Quels étaient le ou les centres de détention que vous connaissiez à
13 Sanski Most en 1992, entre avril et décembre de cette année-là, si vous en
14 connaissiez ?
15 R. J'avais uniquement entendu parler du fait que des habitants du village
16 de Mahala étaient installés dans une salle de sport. J'ai entendu parler de
17 cela de la bouche d'une personne qui habitait à Mahala et qui était
18 dactylographe pour le tribunal, et j'ai entendu dire qu'elle avait été
19 enfermée pendant une période assez courte dans ce lieu.
20 Q. Est-ce que cette salle de sport était un gymnase ?
21 R. Oui, oui, un gymnase.
22 Q. Pourriez-vous nous dire quelle était l'appartenance ethnique des
23 personnes qui étaient détenues dans ce gymnase ?
24 R. C'étaient avant tout des personnes d'appartenance ethnique musulmane,
25 en majorité.
26 Q. Vous êtes-vous rendu personnellement dans ce gymnase ?
27 R. Non.
28 Q. Combien de plaintes au pénal ont été déposées par la police auprès de
Page 1572
1 vos bureaux qui avaient un rapport avec ce lieu de détention ou tout autre
2 lieu de détention à Sanski Most pendant cette période ? Je parle de lieux
3 de détention où étaient enfermés des non-Serbes.
4 R. Il n'y a pas eu de telle plainte.
5 Q. Je vous prierais de vous pencher sur le dernier paragraphe du document
6 que vous avez à l'écran devant vous. Dernière phrase, qui se lit comme
7 suit, je cite :
8 "Veuillez nous dire quel est le bureau du procureur qui est habilité
9 à traiter de cette question de façon à ce que nous lui transmettions les
10 plaintes au pénal pertinentes."
11 Monsieur Delic, pourquoi est-ce qu'il y avait une incertitude quant au
12 bureau du procureur qui était habilité à recevoir de telles plaintes au
13 pénal relatives à des personnes détenues dans ces divers lieux de détention
14 ?
15 R. Il est possible que l'auteur de cette phrase dans le texte se soit
16 adressé au procureur militaire, donc il est possible que ce qu'avait à
17 l'esprit l'auteur de ce document était l'existence des tribunaux
18 militaires.
19 Q. J'aimerais que nous nous repenchions sur la pièce P117. C'est la fin du
20 dernier paragraphe de ce document qui m'intéresse. Il se lit comme suit, je
21 cite :
22 "Les personnes qui ont fui les lieux où se déroulaient des combats,
23 qui sont environ au nombre de 500, sont des personnes aptes qui sont
24 traitées comme des prisonniers civils et qui ont été installées dans le
25 gymnase."
26 Monsieur Delic, étant donné qu'il est question ici dans ce passage de
27 civils détenus dans le gymnase, cela vous apprend-il quelque chose quant au
28 bureau du procureur qui aurait du recevoir la plainte relative à ces
Page 1573
1 prisonniers ?
2 R. Dans le lotissement de Mahala à Sanski Most s'étaient déroulés des
3 conflits armés, et la population civile avait été déplacée de ce
4 lotissement et installée dans le gymnase où elle a passé quelques jours,
5 après quoi je sais que cette population a été emmenée dans un autre lieu
6 non loin de Bihac.
7 Q. Mais si nous partons du principe que ces personnes étaient censées
8 avoir commis un crime, ou en tout cas étaient détenues en tant que
9 prisonniers alors qu'il s'agissait de civils, quel est le bureau du
10 procureur auprès duquel la police aurait du déposer cette plainte les
11 concernant ? Etait-ce le bureau du procureur civil ou le bureau du
12 procureur militaire ?
13 R. Si ce dépôt de plainte concernait le procureur militaire, c'est lui qui
14 aurait dû être responsable. Par exemple, si les actes incriminés avaient un
15 rapport avec une rébellion armée, ils étaient du ressort du tribunal
16 militaire. Dans ce gymnase, il y avait un certain nombre de femmes et
17 d'enfants ainsi que de personnes âgées qui n'avaient commis aucun crime. Je
18 suppose que ces personnes ont été installées dans ce gymnase temporairement
19 parce qu'un conflit armé était en cours dans le lotissement où elles
20 résidaient.
21 Q. Si la police avait déposé une plainte auprès de votre bureau et que par
22 la suite vous aviez déterminé que ce dossier était, en réalité, du ressort
23 du tribunal militaire, qu'auriez-vous fait ?
24 R. Dans ce cas, j'aurais transmis la plainte en question au procureur
25 militaire compétant.
26 Q. En vertu du code de procédure pénale en vigueur à cette époque-là,
27 combien de temps la police pouvait-elle garder en détention une personne en
28 l'absence de toute ordonnance du tribunal destinée à prolonger la détention
Page 1574
1 de cette personne ?
2 R. Je crois que cette période était au maximum de trois jours.
3 Q. Pourrions-nous nous pencher sur la pièce P120 à présent. Page 58 de la
4 version anglaise, correspondant à la page 152 de la version B/C/S. Excusez-
5 moi, j'ai fait une erreur. Il s'agit de la page 59 de la version anglaise,
6 qui correspond à la page 162 de la version B/C/S. Peut-on faire défiler le
7 texte à l'écran. C'est l'article 196 qui m'intéresse, paragraphe 3 de cet
8 article.
9 Monsieur Delic, veuillez, je vous prie, prendre connaissance de cette
10 partie de l'article. Pourriez-vous nous dire si la disposition qu'on voit
11 ici est bien celle qui limite le droit de garde à vue d'une personne par la
12 police à trois jours en l'absence d'une ordonnance du tribunal ?
13 R. Oui. A l'article 3, nous voyons quelle est la durée de détention
14 déterminée par le ministère de l'Intérieur qui est au maximum de trois
15 jours. Effectivement, c'est bien la partie du code de procédure pénale qui
16 concerne la durée maximum de la garde à vue.
17 Q. Eu égard aux détenus dont il était question dans les deux documents que
18 nous venons d'examiner, vous rappelez-vous que la police aurait déposé une
19 requête auprès du tribunal ou auprès de votre bureau pour demander une
20 prorogation de ce délai de trois jours ?
21 R. Je ne crois pas qu'il y ait eu de telles requêtes.
22 Q. Quelles étaient les diverses catégories auxquelles appartenaient les
23 détenus non-serbes une fois qu'ils avaient été appréhendés par la police ?
24 R. Je ne sais pas comment répondre à cette question. Je ne connais pas la
25 réponse.
26 Q. Penchons-nous sur la pièce P60.10. Ce document est une conclusion qui
27 émane de l'état-major de Crise de Sanski Most en date du 4 juin 1992.
28 Penchons-nous sur la première conclusion et voyons-en particulier quelles
Page 1575
1 étaient les trois catégories de prisonniers évoquées dans cette conclusion.
2 Première catégorie, les responsables politiques; deuxième catégorie, les
3 extrémistes nationalistes; troisième catégorie, les personnes dont la
4 présence n'était pas souhaitée sur le territoire de la municipalité de
5 Sanski Most.
6 Monsieur Delic, est-ce que vous saviez que la police et l'armée
7 répartissaient les prisonniers non-serbes en trois catégories ?
8 R. Je ne le savais pas. Ce document ne m'a sans doute pas été transmis.
9 Q. Pourriez-vous nous dire en vertu de quelles lois, de façon générale,
10 lois de la Republika Srpska, la police était habilitée à appréhender et à
11 placer en détention des personnes qui étaient des représentants politiques
12 ou des personnes dont la présence n'était pas souhaitée dans la
13 municipalité ?
14 M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, objection, si vous me
15 le permettez. Il ne ressort pas de la lecture de ce document que c'est la
16 police qui était à l'origine de la création de cette catégorie. Je pense
17 que l'Accusation est en train de tirer des conclusions qu'il est impossible
18 de tirer et que le Procureur est en train de soumettre au témoin une
19 conclusion injustifiée. Ce document émane de la cellule de Crise.
20 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je vous remercie.
21 Monsieur Olmsted, il me semble qu'il y a une certaine valeur à cette
22 objection. Encore une fois, vous demandez au témoin de tirer une conclusion
23 à la lecture d'un document; or, le document n'étaye pas nécessairement la
24 conclusion que vous évoquez. Mais ce qui est encore plus important, c'est
25 que le témoin n'est pas l'auteur de ce document. Donc encore une fois,
26 veuillez reformuler votre question.
27 M. OLMSTED : [interprétation] Absolument, Monsieur le Président. Je dirais
28 simplement que d'après la lecture de cette conclusion, nous voyons que
Page 1576
1 Mirko Vrucinic, qui était responsable de la police, est également
2 responsable de la division des détenus en plusieurs catégories. Donc, c'est
3 ce que laissait entendre l'Accusation, mais je vais reformuler.
4 Q. Monsieur Delic, connaissez-vous une quelconque loi de la Republika
5 Srpska autorisant quelque personne que ce soit, y compris un policier, un
6 soldat ou quelque autre personne, à appréhender et à placer en détention
7 des personnes en vertu de diverses catégories, à savoir en vertu du fait
8 que ces personnes seraient des responsables politiques, des extrémistes
9 nationalistes ou des personnes dont la présence n'est pas souhaitée dans le
10 secteur de la municipalité de Sanski Most ?
11 R. Je ne suis pas au courant de l'existence d'une quelconque loi ou
12 réglementation impliquant cela.
13 M. OLMSTED : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
14 j'aurais dû demander l'enregistrement aux fins d'identification du document
15 65 ter numéro 10128. Excusez-moi.
16 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je ne me rappelle pas à quel moment nous
17 avons vu ce document, mais je suppose que vous auriez dû le faire
18 effectivement, Monsieur Olmsted.
19 M. OLMSTED : [interprétation] Oui. C'est le document qui précédait celui
20 que nous sommes en train de discuter, donc le document qui a été affiché
21 avant le texte de loi que nous avons actuellement à l'écran.
22 [La Chambre de première instance se concerte]
23 M. OLMSTED : [interprétation] Page 16, ligne 19 du compte rendu.
24 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce P124 enregistrée
25 aux fins d'identification, Monsieur le Président, Messieurs les Juges.
26 M. OLMSTED : [interprétation] Et ceci met un point final à l'interrogatoire
27 de l'Accusation.
28 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je vous remercie.
Page 1577
1 Contre-interrogatoire ?
2 M. CVIJETIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs
3 les Juges.
4 Contre-interrogatoire par M. Cvijetic :
5 Q. [interprétation] Monsieur Delic, bonjour.
6 R. Bonjour.
7 Q. Je m'appelle Slobodan Cvijetic. Je suis avocat et membre de l'équipe
8 qui assure la Défense de M. Mico Stanisic, l'un des co-accusés en l'espèce.
9 Monsieur Delic, au début de l'interrogatoire principal mené par le
10 représentant du bureau du Procureur, vous avez déclaré que vous vous
11 appuyiez dans votre travail essentiellement sur trois types de textes de
12 lois : le code pénal de la République fédérale yougoslave; la loi de
13 procédures pénales, qui était également en vigueur au niveau de la
14 fédération. Donc ces deux textes de lois s'appliquaient à l'ensemble du
15 territoire yougoslave. Et vous vous appuyiez également sur le code pénal de
16 la République socialiste de Bosnie-Herzégovine; c'est bien cela ?
17 R. C'est cela.
18 Q. Je vous prierais simplement d'attendre un instant la fin de ma question
19 avant de répondre dans l'intérêt d'un bon travail de la part des
20 interprètes, car nous parlons la même langue et il ne faudrait pas que nous
21 nous chevauchions.
22 J'aimerais revenir un pas en arrière pour voir dans quelles conditions ces
23 lois étaient mises en œuvre à l'époque. Conviendrez-vous avez moi qu'au
24 moment du démantèlement de l'ancienne Fédération socialiste de Yougoslavie,
25 de nouveaux Etats ont vu le jour sur le territoire en question ? Et vous
26 conviendrez avec moi, je suppose, qu'il n'était pas suffisant de rédiger
27 une déclaration relative à l'indépendance ou à la souveraineté de ces
28 nouveaux Etats pour qu'ils deviennent automatiquement de nouveaux Etats ?
Page 1578
1 L'une des premières tâches à accomplir à cette fin consistait à compléter
2 le corps des textes législatifs en y ajoutant un certain nombre de nouveaux
3 textes de lois et de nouvelles réglementations, n'est-ce pas ?
4 R. Oui.
5 Q. Conviendrez-vous avec moi que ce travail était impossible à réaliser en
6 24 heures ? Car dans ce cas, il y aurait eu un risque de se trouver
7 confronté à des lacunes juridiques. Ai-je raison de dire cela ?
8 R. Oui.
9 Q. Par exemple, dans le domaine qui était votre domaine de responsabilité,
10 une telle éventualité eut été particulièrement dangereuse, car en vertu de
11 notre principe continental de la légalité, personne ne peut être poursuivi
12 au pénal pour un acte commis par lui si cet acte ne fait pas au préalable
13 l'objet d'une disposition précise dans un texte de loi indiquant que cet
14 acte est un acte condamnable, un acte criminel. Etes-vous d'accord sur ce
15 point avec moi ?
16 R. Oui.
17 Q. Donc, dans le cas où vous-même, en votre qualité de procureur au moment
18 en question, au cas où vous ne disposez ni d'un code pénal, ni d'un code de
19 procédure pénale sur lequel vous appuyer, pas plus vous-même que la police,
20 pas plus que le juge d'instruction ou le tribunal, n'a la moindre
21 possibilité de poursuivre en justice l'auteur d'un acte criminel présumé.
22 Est-ce bien le cas ?
23 R. En effet.
24 Q. C'est en raison de cela que toutes les anciennes républiques, y compris
25 la Republika Srpska, ont trouvé une façon de combler cette lacune juridique
26 en adoptant des dispositions extraordinaires dans l'urgence, ce qui leur a
27 permis de déterminer qu'avant que de nouveaux textes législatifs soient
28 adoptés, c'était les anciennes lois de l'ex-République socialiste
Page 1579
1 yougoslave et de la République socialiste de Bosnie-Herzégovine qui
2 continuaient à s'appliquer. Etes-vous au courant de cette approche ?
3 R. Oui.
4 M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les
5 Juges, je demanderais de soumettre au témoin la pièce 1D00-4266. Je vais
6 citer le numéro ERN pour faciliter les choses, peut-être. Dans la version
7 B/C/S du texte, il faut remonter le texte à l'écran. Voilà, c'est bien.
8 Q. Monsieur Delic, dans la partie droite de l'écran -- je crois qu'il faut
9 surmonter le texte à l'écran dans sa version anglaise. Il s'agit de
10 l'arrêté qui concerne la mise en œuvre de la constitution. Connaissez-vous
11 ce texte officiel, Monsieur Delic, l'arrêté relatif à la proclamation de la
12 Loi constitutionnelle relative à l'application de la constitution de
13 Bosnie-Herzégovine ? Connaissez-vous cet arrêté, Monsieur Delic ?
14 R. Oui.
15 M. CVIJETIC : [interprétation] Très bien. Je demanderais maintenant que
16 l'on passe à la page suivante. C'est l'article 12 de ce texte de loi qui
17 m'intéresse. La page suivante, s'il vous plaît. Voilà. Voilà, c'est là.
18 Veillez faire la même chose avec l'anglais, s'il vous plaît.
19 Q. S'il vous plaît, Monsieur Delic, je vous demande de bien vouloir lire
20 cet article.
21 R. L'article 12 --
22 Q. Vous pouvez le lire à voix basse. Est-ce que vous connaissez cette
23 disposition particulière ?
24 R. Oui.
25 Q. Avez-vous eu l'occasion de lire cet article à l'époque ?
26 R. Oui. Il s'agissait du fondement juridique de l'établissement des
27 anciens textes législatifs de la RSFY et de la République socialiste de
28 Bosnie-Herzégovine qui ont été mis en place par la Republika Srpska.
Page 1580
1 M. CVIJETIC : [interprétation] Pour ce qui est d'un document, je souhaite
2 demander le versement au dossier en tant que pièce de la Défense, étant
3 donné que mon confrère de l'Accusation a pu l'identifier.
4 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Est-ce qu'on avait décidé que toutes les
5 lois, quelque soit l'approche en fait, que toutes ces lois soient mises
6 dans le même panier, plutôt que de les présenter individuellement ? D'une
7 manière ou d'une autre, est-ce que ceci tomberait dans cette catégorie-là ?
8 [Le conseil de la Défense se concerte]
9 M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, effectivement. Donc
10 avant le moment qui a précédé cet accord, je fais référence à certains
11 textes de lois. Je crois que ceci s'est fait sur la proposition de
12 l'Accusation. Vous avez déjà admis au dossier certains textes législatifs,
13 mais comme vous le dites, je parle ici d'un texte législatif assez court.
14 Il est aisé d'en faire un commentaire. Je suis d'accord avec ce que vous
15 proposez. Je demande au témoin de faire un commentaire sur ce texte
16 législatif, et je demande que ceci soit admis en tant que pièce à
17 conviction.
18 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je comprends bien ce que vous êtes en
19 train de faire. Il s'agit simplement de vous dire qu'il n'est pas utile que
20 ce soit marqué comme pièce à conviction, quelque soit le système utilisé
21 pour ajouter ce document à l'ensemble des documents qui se trouvent dans la
22 corbeille du document déjà admis.
23 M. CVIJETIC : [interprétation] Très bien. J'accepte votre proposition,
24 Monsieur le Président. Et je demande que cet accord entre le bureau du
25 Procureur et nous puisse être appliqué le plus rapidement possible. On nous
26 dit dans cesse que ce sera le cas, mais ceci n'a pas encore vu le jour.
27 Quoi qu'il en soit, je suis d'accord avec la proposition que vous venez de
28 faire, et je crois que le témoin a pu suffisamment commenter ce texte de
Page 1581
1 loi.
2 Q. Maintenant, l'article 12, qui a constitué le fondement juridique de
3 certains textes législatifs de droit pénal adoptés par la Republika Srpska,
4 vous conviendrez avec moi, n'est-ce pas, qu'en ce qui est de l'ensemble des
5 textes de lois appliqués par la Republika Srpska à l'époque, il y avait
6 peut-être des douzaines, voire des centaines de textes de l'ex-RSFY, de la
7 République socialiste de Bosnie-Herzégovine, qui ont été intégrés ?
8 R. Oui. Je ne peux pas vous le garantir, mais je crois qu'il y a encore
9 certains textes législatifs qui datent de cette période-là, qui sont encore
10 en usage.
11 Q. Vous êtes notaire et vous êtes un juriste. Vous avez l'obligation de
12 faire adopter ces lois, de le faire appliquer. Ce texte de loi a été retiré
13 il y a un an seulement.
14 R. Je suis d'accord avec cela. En fait, cette nouvelle loi a été adoptée
15 et est entrée en vigueur le 5 janvier de cette année.
16 Q. Donc, nous avons traité de cette question de l'introduction de ces
17 textes de loi qui ont été incorporés à l'ensemble des autres textes. Je
18 souhaite maintenant parler de la façon dont vous avez été élu procureur.
19 Avant cela, étant donné que nous avons déjà abordé la question des
20 dispositions en matière de droit pénal, je souhaite revoir avec vous
21 certaines des questions qui vous ont été posées par le bureau du Procureur,
22 à savoir le code de procédure pénale de la RSFY, qui se divise en deux
23 parties, est-ce exact ?
24 R. Oui.
25 Q. Donc, il y avait une partie plus générale qui comprenait des principes
26 juridiques et une partie distincte dans laquelle on pouvait trouver
27 différents types de crimes qui étaient énumérés qui étaient définis au
28 niveau fédéral, ai-je raison ?
Page 1582
1 R. [aucune interprétation]
2 Q. Dans cette partie distincte, on pouvait y trouver les crimes comme ceux
3 qui étaient des crimes commis contre le système étatique de la république
4 socialiste, des crimes contre l'humanité ainsi que des questions de droit
5 international. Ce n'est que la RSFY qui avait apposé sa signature au bas de
6 toutes les conventions internationales, car il fallait ou il y avait
7 l'obligation d'inclure ces textes de lois, les textes des conventions dans
8 le droit national, à savoir dans le sens général du terme, les crimes
9 commis pendant la guerre et les crimes de guerre, ai-je raison ?
10 R. Oui.
11 Q. Parmi ces délits, il y avait des crimes commis contre les forces
12 armées, et je peux insister plus particulièrement sur les crimes
13 d'espionnage, de sabotage et de rébellion armée, ai-je raison ?
14 R. Oui.
15 Q. Ce qui est particulièrement intéressant dans ce chapitre-ci, c'est de
16 voir que des civils pouvaient être tenus pour responsables pénalement s'ils
17 avaient commis de tels crimes; est-ce exact ?
18 R. Oui.
19 Q. En temps de paix, vous conviendrez avec moi qu'il y avait des tribunaux
20 militaires qui géraient de telles affaires, n'est-ce pas ?
21 R. Oui.
22 Q. Est-ce que vous êtes au courant de cela ?
23 R. Oui.
24 Q. Donc pour ce qui est du code de procédure pénale, je n'ai plus de
25 questions à vous poser, et je souhaite passer maintenant aux questions de
26 procédure pénale. Monsieur Delic, je veux parler d'un procès au pénal au
27 tribunal, en vertu d'une décision rendue par un juge d'instruction sur
28 l'ouverture d'une enquête ou sur le fait de préparer un acte d'accusation
Page 1583
1 ou une proposition d'acte d'accusation établie par le procureur général,
2 ai-je raison ?
3 R. Oui.
4 Q. Par conséquent, une enquête est menée et conclue par le juge
5 d'instruction, est-ce exact ?
6 R. Oui.
7 Q. Je ne vais pas entrer dans le détail des différentes dispositions du
8 code de procédure pénale étant donné que nous sommes tous les deux des
9 professionnels, vous n'allez pas contester cette partie-là, je suis sûr.
10 J'étais procureur moi-même il y a une trentaine d'années, je me souviens
11 encore de ces dispositions.
12 La police ne lance pas une procédure pénale et ne peut pas ouvrir une
13 enquête, c'est exact ?
14 R. Oui.
15 Q. Vous conviendrez avec moi que la police est simplement celle qui lance
16 la procédure pénale, comme vous l'avez dit vous-même, ceci se passait dans
17 90 % des cas. Quoi qu'il en soit, une procédure pénale peut également être
18 menée par une autre entité, et d'après vous, ceci arrivait dans 10 % des
19 cas ?
20 R. Oui.
21 Q. A l'article 162 de cette loi, on peut lire qu'un juge d'instruction ne
22 peut confier certaines enquêtes qu'à un organe du membre du ministère de
23 l'Intérieur - nous allons utiliser ce terme-là - et ensuite, la police doit
24 se conformer à l'ordre donné par le juge d'instruction, ai-je raison ?
25 R. Oui.
26 Q. Disons qu'un juge d'instruction ordonne que l'on fouille ou qu'il y ait
27 perquisition d'un appartement, et qu'il ne puisse pas s'y rendre lui-même,
28 dans ce cas il peut ordonner à la police de s'occuper de cette perquisition
Page 1584
1 et de lui faire un rapport, ai-je raison ?
2 R. Oui.
3 Q. De surcroît, des poursuites pénales sont terminées lorsque l'enquête
4 est terminée, si en tant que procureur vous décidez de ne plus poursuivre
5 la procédure pénale ?
6 R. Oui.
7 Q. Ou lorsqu'un jugement est rendu dans lequel la chambre de première
8 instance ou le juge décidera de l'issue de la procédure pénale, ai-je
9 raison ?
10 R. Oui.
11 Q. Vous pouvez abandonner des charges pénales et vous n'avez pas besoin
12 dans ce cas d'avancer des poursuites pénales, ai-je raison ?
13 R. Oui.
14 Q. Dans ce cas-là, vous êtes d'accord avec moi pour dire que la police ne
15 doit pas décider s'il faut lancer ou non une procédure pénale. Tout ceci
16 relève des instances judiciaires, ai-je raison ?
17 R. Oui.
18 Q. Maintenant, j'en viens à la question de votre nomination, que j'ai déjà
19 évoquée. Vous nous avez parlé d'une procédure démocratique par laquelle
20 vous avez été élu. Il semble qu'on vous a fait une offre que vous ne
21 pouviez pas refuser ?
22 R. Oui.
23 Q. Mais vous nous devez toujours une réponse par rapport à la question
24 posée sur que serait une procédure normale dans le cas de l'élection d'un
25 juge ou d'un procureur. Qui devait élire ce type de personnes ?
26 R. Auparavant, c'était l'assemblée, ou plutôt, les assemblées.
27 M. CVIJETIC : [interprétation] Est-ce que je peux demander à ce que l'on
28 affiche la pièce 65 ter 713, document qui figure sur la liste 65 ter.
Page 1585
1 Q. Monsieur Delic, avant de voir le document, je souhaite vous demander
2 ceci : connaissiez-vous votre collègue, un procureur de Kotor Varos ?
3 R. Oui. Il s'appelait Aleksa Tepic.
4 Q. Aleksa Tepic, très bien. Veuillez maintenant regarder, s'il vous plaît,
5 ce document, la partie gauche de votre écran, qui devrait afficher la
6 version en B/C/S de ce document. Veuillez regarder le deuxième paragraphe,
7 s'il vous plaît. Regardez le premier paragraphe. Veuillez déplacer le
8 document en B/C/S légèrement vers la droite.
9 Maintenant vous voyez ici au paragraphe 2, le premier alinéa. Est-ce
10 que vous y êtes ?
11 R. Oui.
12 Q. Je vais vous le lire si vous n'êtes pas en mesure de le lire vous-même
13 - je pense que vous le pouvez - mais je vais vous lire ce paragraphe :
14 "Momcilo et Cedo doivent régler la question avec Goran, la question du
15 procureur général…"
16 Veuillez regarder ce document et me dire qui a produit ce document.
17 Il s'agit d'un extrait des procès-verbaux de la session de la cellule de
18 Crise à Kotor Varos. Ici, la cellule de Crise décide de régler la question
19 du procureur général de Kotor Varos. Il semblerait que ce choix, ou plutôt,
20 cette élection, est encore plus extraordinaire que votre propre élection ?
21 R. Oui.
22 M. OLMSTED : [interprétation] Le Procureur s'oppose à ce type de question.
23 La Défense demande au témoin de faire un commentaire sur ce qui s'est passé
24 dans une autre municipalité qui est distincte de la sienne. Je pense qu'il
25 n'y a pas suffisamment de fondement pour lui permettre de faire cela.
26 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur Olmsted, d'après la façon dont
27 je comprends les choses, l'Accusation -- ou lorsque le Procureur a appelé
28 ce témoin, c'était pour lui demander des questions sur le système et les
Page 1586
1 méthodes impliquées à l'époque; et je crois qu'avec ceci en toile de fond,
2 je ne vois pas très bien en quoi la Défense s'écarte de ce qu'elle devrait
3 faire. Il s'agit d'une question qui porte sur la municipalité. La question,
4 telle que je la comprends, porte sur les structures et le système.
5 M. OLMSTED : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. En fait, lorsque
6 nous avons posé des questions à ce témoin, cela portait sur le changement
7 de personnel dans la municipalité et les faits dont il était au courant
8 dans cette municipalité-là. Il n'a pas témoigné, de façon générale, sur la
9 façon dont on recrutait ou dont on se licenciait ou se défaisait de
10 procureurs ou de juges à ce moment-là. Et maintenant la Défense lui pose
11 une question sur une municipalité complètement différente. Il n'y a pas de
12 fondement à cela. On ne sait pas s'il avait des contacts avec les gens qui
13 se trouvaient là-bas. Donc il lui demande, en somme, de donner son avis sur
14 des procédures appliquées dans d'autres municipalités.
15 [La Chambre de première instance se concerte]
16 M. PANTELIC : [interprétation] Si, Monsieur le Président --
17 M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président --
18 M. PANTELIC : [interprétation] Le témoin vient d'évoquer son collègue à
19 Kotor Varos, M. Aleksa Tepic, son collègue de Kotor Varos. Il vient
20 d'indiquer qu'il connaissait son collègue qui se trouvait à Kotor Varos.
21 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur Pantelic. Je ne
22 suis pas sûr que cela suffise.
23 Monsieur Cvijetic, en partant du principe que vous disposiez du fondement
24 nécessaire, où voulez-vous en venir ? Qu'est-ce que vous cherchez à obtenir
25 du témoin avec ce type de questions ? Je comprends bien ce que dit le
26 Procureur sur la question du fondement, fondement que vous devez poser
27 avant de pouvoir poser votre question, c'est-à-dire que vous posez des
28 questions qui sont en dehors du champ de la connaissance et de l'expérience
Page 1587
1 personnelle de ce témoin, même s'il parle de systèmes en général.
2 M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, vous avez tout à fait
3 bien deviné quelles étaient mes intentions lorsque vous avez répondu au
4 Procureur. Je n'ai pas l'intention de demander le versement au dossier de
5 ce document. Je veux simplement parler du contexte ici dont parle le témoin
6 et dont le témoin a déjà parlé avec le Procureur. Je veux parler de façons
7 bizarres d'élire le procureur général. Dans ce cas-ci, le procureur général
8 est élu par la cellule de Crise. Je ne vais pas demander le versement au
9 dossier de ce document. Il connaissait ce procureur, il peut également nous
10 parler de son élection. Son élection était assez bizarre, ainsi que
11 l'élection de son confrère, collègue à Kotor Varos, qui était également
12 procureur. Je souhaite simplement placer tout ceci dans son contexte. Quand
13 il s'agit de différentes municipalités, je reviens sur le terrain de la
14 municipalité où le témoin a été procureur. J'ai déjà posé le fondement, je
15 lui ai demandé comment il avait été élu. Et le Procureur lui a posé la même
16 question, et voici le fondement que je pose pour poser la question que je
17 suis sur le point de poser au témoin.
18 M. PANTELIC : [interprétation] Pardonnez-moi si je vous interromps,
19 mais pour les besoins du compte rendu d'audience, M. Tully vient de me dire
20 que ce document a une cote et a été versé au dossier. La cote est le P85.
21 Donc…
22 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Veuillez poursuivre, Maître Zecevic.
23 M. CVIJETIC : [interprétation]
24 Q. Monsieur Delic, veuillez revenir à la municipalité de Sanski Most.
25 M. CVIJETIC : [interprétation] Est-ce que l'on peut montrer au témoin la
26 pièce 1D00-4513, s'il vous plaît. C'est bien ce document.
27 Q. Monsieur Delic, veuillez regarder ce document. Encore une fois, à la
28 partie gauche de l'écran. Je vous demande de bien vouloir faire attention
Page 1588
1 au point 2, s'il vous plaît. Il s'agit là d'un autre document qui émane de
2 la cellule de Crise, et dans ce cas-ci, c'est la cellule de Crise de la
3 municipalité de Sanski Most, où vous travailliez, où vous habitiez. La
4 cellule de Crise donne des ordres à différentes entités. On peut voir
5 quelles sont les entités ici. Ce qui nous intéresse c'est le point 2, où on
6 dit :
7 "Le président du tribunal de première instance de Sanski Most a reçu
8 l'ordre de nommer un juge chargé des questions médicolégales pour procéder
9 à l'enterrement des morts."
10 Je veux toujours parler du contexte. Ici, la cellule de Crise donne l'ordre
11 au président de la chambre de première instance et lui indique comment il
12 doit travailler et ce qu'il doit faire. Monsieur Delic, est-ce que vous
13 savez quelque chose sur la façon dont la cellule de Crise de la
14 municipalité de Sanski Most fonctionnait ? Est-ce qu'ils se mêlaient de
15 votre travail avec les instances judiciaires ?
16 R. Je ne peux parler que de ce que je connais moi-même. Ils ne se mêlaient
17 pas de mon travail, et je n'ai jamais vu ce document auparavant.
18 Q. Merci beaucoup. De toute façon, on vous a déjà montré ce document. Je
19 ne vais pas insister sur ce document, et je ne vais pas en demander le
20 versement parce que vous ne le connaissez pas.
21 M. CVIJETIC : [interprétation] Est-ce que nous pouvons passer à un autre
22 document qui se trouve sur la liste 65 ter. Le numéro en est le 606. Ce qui
23 nous intéresse c'est le point 2, encore une fois.
24 Q. Monsieur Delic, veuillez lire ce point 2 à voix basse, s'il vous plaît.
25 R. Oui, je peux tout à fait.
26 Q. Donc, allez-y. Conviendrez vous avec moi pour dire que l'on peut lire
27 ici que la cellule de Crise nomme et certifie le fait que Mirko Vrucinic va
28 commencer à travailler comme chef du poste de police de la sécurité
Page 1589
1 publique de Sanski Most, et qu'il en exercice à Sanski Most le 1er août 1992
2 ? Donc je crois que ce texte parle de lui-même. Compte tenu du fait que
3 vous étiez procureur à l'époque, est-ce que vous connaissez le
4 fonctionnement et la ligne hiérarchique du MUP ? C'est ma première
5 question. Je ne vous demande pas tous les détails, je vous parle du
6 principe.
7 R. Oui.
8 Q. Et ce type de procédure qui consiste à élire M. Mirko Vrucinic, est-ce
9 que ceci était conforme à la façon dont les plus hauts représentants au
10 sein du ministère de l'Intérieur devaient être nommés, d'après ce que vous
11 savez ?
12 R. Non. Il s'agissait là de quelque chose qui n'était pas habituel. Ce
13 n'était pas la façon habituelle de nommer les représentants officiels du
14 MUP.
15 Q. Comment ceci aurait-il dû être fait ?
16 R. Quoi qu'il en soit, il aurait dû y avoir une procédure et cette
17 procédure aurait dû être appliquée lors de l'élection d'un chef d'un poste
18 de sécurité publique, comme dans ce cas.
19 Q. Merci. Monsieur Delic, laissons ces documents de côté pour l'instant.
20 J'en ai d'autres, mais faisons une pause par rapport à ces documents, et je
21 souhaite vous parler des conditions de votre travail à Sanski Most. Vous en
22 avez déjà parlé lorsque vous avez répondu aux questions du Procureur. Je
23 souhaite maintenant vous poser des questions très concrètes à cet égard.
24 Est-ce que vous aviez un problème de communication lorsque vous avez
25 commencé à travailler et à exercer vos fonctions, un problème de coupure
26 d'électricité, ce genre de choses ? Et est-ce qu'on avait restreint votre
27 liberté de circulation ? Je vous ai déjà posé un certain nombre de
28 questions là-dessus, mais je crois que toutes les questions sont liées
Page 1590
1 entre elles. Je vous demande de bien vouloir répondre.
2 R. A la fin du mois de mai et au début du mois de juin 1992, l'ensemble de
3 la République de Bosnie-Herzégovine a été le théâtre des conflits. A Sanski
4 Most, il y avait également un conflit armé et il n'y avait tout simplement
5 pas d'électricité pendant deux mois. Au cours de l'été, par exemple, les
6 lignes téléphoniques étaient à terre, ne fonctionnaient pas dans la plupart
7 des cas. Il était très difficile de communiquer avec Banja Luka ou toute
8 autre ville qui se trouvait dans ce secteur. Il était difficile de se
9 déplacer. On avait restreint la circulation des personnes, on ne pouvait
10 pas quitter la ville, il y avait souvent des contrôles aux postes de
11 contrôle. Et à ces postes de contrôle, il y avait des membres de l'armée
12 qui étaient armés. On ne pouvait pas se déplacer sans laissez-passer. Et
13 pour ce qui est de l'approvisionnement en produits de première nécessité,
14 il n'y avait pas de nourriture. Les magasins étaient vides et on avait
15 pillé les magasins. Donc toute la situation était chaotique.
16 Q. Merci. Je pense que vous nous avez dépeint un tableau très exact de la
17 situation. Vous conviendrez avec moi pour dire qu'à l'époque, il y avait
18 cette opération qui consistait à faire une percée dans le corridor ?
19 R. Oui.
20 Q. Est-ce qu'on pouvait emprunter cette route-là, le long du corridor ?
21 Est-ce que c'était sûr après cela ?
22 R. Non. Ça n'était pas sûr sur l'ensemble du territoire de la Bosnie-
23 Herzégovine et ma municipalité ne constituait pas une exception à la règle.
24 Q. Mais penchons-nous sur la question du couloir. Est-ce que ce corridor
25 faisait l'objet d'attaques, de pilonnage, même après son ouverture
26 officielle ?
27 R. Oui. Il y a eu toutes sortes d'incidents qui se sont déroulés à cet
28 endroit-là et ce, assez souvent.
Page 1591
1 Q. Parlons maintenant du travail du procureur général de la République.
2 Quand avez-vous appris qui avait été nommé à ce poste ?
3 R. Je ne m'en souviens vraiment pas, mais ce n'est que plus tard, un peu
4 plus tard, peut-être, voire même en 1995, peut-être.
5 Q. Donc vous conviendrez que cela a pu être même après la fin de la
6 guerre, vous ne saviez pas qui était le procureur général de la République
7 ?
8 R. [aucune interprétation]
9 Q. Cela est assez inhabituel, je le reconnais. Pourriez-vous expliquer
10 comme ceci est arrivé ?
11 R. Le bureau du procureur, le parquet se trouvait à Pale, et Pale à
12 l'époque était loin. Pale est toujours loin, c'était surtout loin pendant
13 la guerre compte tenu des circonstances qui prévalaient à l'époque.
14 Q. Disons que Pale se trouve à l'est de la Republika Srpska, de l'autre
15 côté du corridor; ai-je raison de présenter les choses ainsi ?
16 R. Oui.
17 Q. Et qu'en est-il du procureur de la République, du procureur général, où
18 se trouvait son bureau ?
19 R. Son bureau se trouvait à Banja Luka.
20 Q. Quand vous êtes-vous, pour la première fois, réunis avec le procureur
21 qui était votre supérieur ?
22 R. Plus de deux mois se sont écoulés ou ont dû s'écouler lorsque j'ai été
23 désigné ou nommé procureur membre du ministère public à Sanski Most, et
24 c'est à ce moment-là que j'ai rencontré le procureur qui était mon
25 supérieur.
26 Q. Bien. A Pale se trouvait le quartier général de la plupart des services
27 publics et autorités publiques les plus importantes; c'est bien cela ?
28 R. Oui.
Page 1592
1 Q. Etes-vous jamais allé à Pale pendant la guerre ?
2 R. Non.
3 Q. Monsieur Delic, quand avez-vous appris qui était le ministre de
4 l'Intérieur et quel était son nom, au cours de cette période ?
5 R. Peut-être après la guerre, lorsque les journaux ont commencé à parler
6 de cette affaire.
7 Q. De cette affaire-ci ou de l'affaire de Jovica Stanisic et c'est quand
8 vous avez établi le lien ?
9 R. Pendant un temps, il y a eu de nombreux articles ou rapports concernant
10 Jovica Stanisic. Et je suppose que Mico et Jovica ont un lien sur la base
11 de leur nom de famille.
12 Q. Non, en fait, ça n'est pas le cas, mais ils ont bien, effectivement, le
13 même nom de famille. Donc nous sommes d'accord que ce n'est que lorsque ces
14 procédures ont commencé devant le tribunal que vous appris qui était le
15 ministre de l'Intérieur en 1992; ai-je raison ?
16 R. Oui.
17 Q. Monsieur Delic, quand vous avez répondu aux questions du Procureur,
18 vous avez dit qu'on pouvait parfaitement voir dans le registre comment il
19 se faisait qu'il y ait eu une montée dans les infractions dans la
20 municipalité de Sanski Most. Il y a eu un accroissement du nombre des
21 infractions au pénal. Vous avez dit qu'à partir du registre pour 1991 et en
22 allant jusqu'en mai 1992, on pouvait voir clairement que la plupart des
23 infractions commises étaient en fait des infractions mineures. Vous avez
24 même inclus le vol de bois de chauffage dans la forêt, et cetera. Est-ce
25 que j'ai raison ?
26 R. Oui.
27 Q. Et ensuite, vous avez dit que dès mai 1992, on pouvait constater qu'il
28 y avait une différence considérable; est-ce que c'est bien cela ?
Page 1593
1 R. Oui.
2 Q. Subitement, vous avez eu à faire face aux types d'infractions pénales
3 les plus graves dans votre territoire. Il y avait des meurtres, des vols à
4 main armée, et cetera; est-ce que j'ai raison ?
5 R. Oui.
6 Q. Vous serez d'accord avec moi si je dis que c'était nouveau et ceci
7 était particulièrement lourd pour ce qui était de faire respecter la loi,
8 c'est-à-dire la police chargée du maintien de la paix et vous-même en tant
9 que ministère public, n'est-ce pas ?
10 R. Oui.
11 Q. Je vais essayer de développer l'exemple de Sanski Most avec vous.
12 Toutes les forces de police du monde ont un registre concernant les
13 opérations. Vous êtes au courant de cela ?
14 R. Oui
15 Q. Et dans ce registre, ils consignent de façon interne, pour leurs
16 propres besoins, les noms de personnes qui sont soupçonnées d'activités à
17 caractère pénal ou criminel; c'est exact ?
18 R. Oui.
19 Q. Toutefois, ceci n'est fondé que sur des hypothèses, de sorte qu'on ne
20 dispose pas d'éléments suffisants pour avoir des soupçons qui soient
21 fondés; c'est bien cela ?
22 R. Oui.
23 Q. Donc la police garde trace de ces éléments jusqu'à ce qu'on parvienne à
24 des éléments de preuve pour les fonder; c'est bien cela ?
25 R. Oui.
26 Q. Pour Sanski Most, je pense que vous ne pouvez pas nous donner les
27 chiffres exacts, mais vous pouvez nous donner une description de ce
28 qu'était la situation de ce point de vue et combien de personnes ont été
Page 1594
1 inscrites dans ce registre comme étant des auteurs potentiels de crimes ou
2 délits ?
3 R. Je n'ai pas de statistiques à ma disposition, mais comme Sanski Most
4 était un endroit assez petit et assez calme où avant la guerre, les crimes
5 étaient rares et où les crimes et délits commis n'étaient pas si dangereux
6 pour la population, la société, je suppose que dans le registre, dit
7 registre des opérations de la police, il y a les noms de personnes qui se
8 sont engagées dans des activités qui n'étaient pas particulièrement
9 dangereuses pour la société, pour le public.
10 Q. Bien. Mais alors, vous avez été conscient de l'accroissement énorme de
11 la criminalité. Est-ce que ce que je peux dire conviendrait pour décrire
12 les motifs de ceci et en employant le mot "guerre" est-ce que ce mot de
13 "guerre" peut donner la meilleure explication de ce qui a commencé à se
14 produire là ?
15 R. Lorsque la guerre a éclaté, c'est à ce moment-là que les crimes et
16 délits les plus graves ont commencé à être commis.
17 Q. Donc, lorsque la guerre a commencé, les activités de temps de guerre
18 dans le territoire de Sanski Most, il y a eu l'arrivée de formations
19 militaires. Mais vous serez d'accord avec moi qu'en parallèle à cela et
20 indépendamment sont également arrivés des formations paramilitaires, des
21 criminels qui avaient endossé des uniformes et qui portaient des armes, en
22 d'autres termes, des personnes que l'on ne trouvait pas dans le registre
23 des opérations de la police parce qu'elles venaient d'ailleurs et qu'elles
24 étaient constamment en mouvement, se déplaçaient constamment ? Est-ce que
25 j'ai raison ?
26 R. C'est probable, mais mes propres mouvements étaient restreints, donc je
27 n'ai pas moi-même de renseignements concernant les allers et venues de ces
28 individus.
Page 1595
1 Q. Bien.
2 M. OLMSTED : [interprétation] Juste une objection que j'élève pour ce qui
3 est du fondement. Là, je pense que le témoin a établi qu'il était d'accord
4 qu'il y avait une sorte de registre des opérations de la police, mais
5 maintenant, la série de questions concerne ce qu'il y avait dans ce
6 registre. Et je ne pense pas qu'on ait établi si le témoin a jamais vu ce
7 registre ou pu examiner ce qui s'y trouvait écrit.
8 M. LE JUGE HALL : [interprétation] En tout état de cause, le témoin a dit
9 qu'il ne pouvait pas répondre à la question.
10 M. CVIJETIC : [interprétation]
11 Q. Avant que je ne passe à la question suivante, je voudrais essayer de
12 définir les moments que vous avez décrits en citant une phrase célèbre de
13 notre unique prix Nobel de littérature de la région, et je vais vous
14 demander, vous connaissez cette phrase.
15 "Il viendra un moment où les fous parlent, où les personnes intelligentes
16 se taisent et les calembredaines sont de plus en plus nombreuses."
17 Est-ce que cette phrase pourrait décrire cette époque ?
18 R. Je connais cette phrase. Elle a été écrite par Ivo Andric, prix Nobel
19 de littérature, et ceci décrit bien le temps de guerre.
20 Q. Monsieur Delic, nous allons maintenant parler de votre registre KTN sur
21 lequel le bureau du Procureur vous a déjà posé des questions. Est-ce que
22 vous savez ce que veut dire un point noir dans le domaine pénal ou criminel
23 ?
24 R. Pour autant que je m'en souvienne, il doit s'agir du nombre d'auteurs
25 de crimes qu'on n'a pas retrouvés ou qu'on n'a pas identifiés.
26 Q. C'est exact. Nous avons là, en fait, le pourcentage de crimes ou délits
27 commis par rapport aux crimes et affaires résolus.
28 Vous serez d'accord avec moi que ce point noir, c'est le nombre de crimes
Page 1596
1 sur lesquels il n'y a pas eu de solution, dans des périodes normales,
2 régulières, où les organes judiciaires et la police fonctionnaient. Ce
3 chiffre devrait être beaucoup plus petit, n'est-ce pas ?
4 R. Oui, c'est comme ça que les choses devraient être.
5 Q. Mais la période que vous avez également vécue, vous serez d'accord avec
6 moi, ceci devait contribuer également au fait que le point noir devenait
7 plus grand ?
8 R. Oui, c'est exact.
9 Q. Mais en présentant des rapports à caractère pénal contre X, contre un
10 auteur inconnu ou plutôt, si une telle présentation est basée sur la loi,
11 n'est-ce pas ?
12 R. Oui.
13 Q. La loi relative à la procédure pénale, en son article 151, dit bien que
14 la police, indépendamment d'identifier les auteurs, doit d'urgence
15 s'assurer qu'elle a les preuves relatives aux crimes ou délits qui ont été
16 commis, n'est-ce pas ?
17 R. Oui.
18 M. PANTELIC : [interprétation] Excusez-moi. A la page 42, ligne 5, entre 5
19 et 8, notre collègue de la cabine de l'interprète n'a pas exactement
20 traduit ce qui a été dit par le témoin. Le témoin a dit que la police
21 devait assurer la sécurité des lieux du crime ou du délit. Donc, précisons
22 cela bien clairement, s'il vous plaît.
23 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Maître Pantelic, encore une fois,
24 merci de votre intervention, mais veuillez, s'il vous plaît, ne pas essayer
25 de mettre dans la bouche des témoins ce que vous croyez qu'ils ont dit. Il
26 vaudrait mieux l'entendre directement des témoins.
27 M. PANTELIC : [hors micro]
28 L'INTERPRÈTE : Microphone, s'il vous plaît.
Page 1597
1 M. PANTELIC : [hors micro]
2 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] En tout état de cause, Maître
3 Pantelic, que vous l'ayez entendu ou non, ça n'a pas d'importance. Le point
4 important, c'est que nous entendions cela directement du témoin --
5 M. PANTELIC : [hors micro]
6 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] -- et non d'un conseil ou d'un
7 avocat. Merci.
8 M. CVIJETIC : [interprétation]
9 Q. Monsieur Delic, clarifions un peu ce point. N'est-ce pas la tâche de la
10 police, entre autres, de protéger et de conserver des éléments de preuve
11 qui seraient trouvés après qu'un crime ou délit a été commis ? Est-ce que
12 nous n'avons pas parlé de cela ?
13 R. Les éléments de preuve qui ont été découverts sur les lieux d'un crime
14 ou d'un délit doivent être trouvés et conservés. Voilà ce que cela veut
15 dire.
16 Q. Oui, et c'est bien comme ça que j'ai compris les choses, et vous aussi
17 sur ce que dit la loi.
18 A ce sujet, permettez-moi de dire qu'il y a un proverbe ou une
19 expression dans la police qu'à de tels moments, il est plus important de
20 s'assurer des éléments de preuve que de courir après l'auteur, parce qu'à
21 quoi sert-t-il de le prendre si vous ne pouvez pas l'accuser par la suite
22 parce qu'il n'y a pas de base sur laquelle le tribunal pourrait le
23 condamner. N'ai-je pas raison ?
24 R. Oui.
25 Q. Bien. Nous en avons terminé avec ceci.
26 [Le conseil de la Défense se concerte]
27 M. CVIJETIC : [interprétation]
28 Q. On vient de me suggérer qu'il faudrait clarifier le point que ceci est
Page 1598
1 l'objectif même, le but même de présenter un rapport de caractère pénal
2 contre X, contre un auteur inconnu, à savoir de protéger, d'obtenir toutes
3 les pièces nécessaires aux preuves d'une façon qui soit juridique, de façon
4 à être en mesure de les utiliser une fois qu'on aura découvert quel est
5 l'auteur, n'est-ce pas ?
6 R. Oui.
7 Q. Disons donc des traces qui présentent un caractère biologique, ou
8 certains éléments de preuve de ce genre peuvent disparaître, et à moins
9 qu'ils ne soient recueillis et réunis et protégés, on ne pourra jamais les
10 récupérer. C'est bien ça ?
11 R. Oui.
12 Q. Bien. Alors, n'allons pas plus loin dans ce domaine. Je pense que nous
13 avons suffisamment éclairé les choses. Je voudrais maintenant examiner des
14 circonstances nouvelles qui ont modifié la situation dans votre
15 municipalité. Donc, en parallèle au fonctionnement des autorités
16 judiciaires et civiles et autres organes civils d'un tribunal militaire ou
17 une cour martiale, les procureurs militaires de la police militaire vont
18 apparaître; c'est bien cela ?
19 R. Oui.
20 M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaiterais
21 qu'une pièce de la liste 65 ter soit présentée au témoin; elle a pour cote
22 2001.
23 Q. Monsieur Delic, du côté droit du document, comme vous voyez, il y a une
24 décision qui est prise en ce qui concerne le siège et le ressort de
25 tribunaux militaires, et pour les bureaux des procureurs militaires; donc
26 leur création et leur siège. Et du côté droit, vous pouvez voir, n'est-ce
27 pas, si je ne me trompe - jetons un coup d'œil. Donc vous avez ces
28 tribunaux militaires et ces bureaux du procureur militaire qui sont créés
Page 1599
1 et installés. Et en vertu de cette décision, ils sont en fait reliés aux
2 commandements des corps d'armées. C'est bien ça ?
3 R. Oui, c'est ce qui découle de cette décision.
4 L'INTERPRÈTE : L'interprète demande que le conseil veuille bien répéter. Le
5 conseil va trop vite pour les interprètes.
6 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Maître Cvijetic, les interprètes vous
7 prient de ralentir.
8 M. CVIJETIC : [interprétation] Page suivante, s'il vous plaît.
9 Q. Veuillez, s'il vous plaît, regarder ce qui est en haut de la page. On
10 voit là à quel moment la décision entre en vigueur. Vous le voyez ? Vous
11 voyez la date du côté gauche en haut de la page ? Vous voyez cette date ?
12 R. Le 31 mai 1992.
13 Q. Mais l'entrée en vigueur, c'est huit jours après sa publication. Donc,
14 il a été publié le 31 mai; c'est bien cela ?
15 R. Oui.
16 Q. Simultanément, en parallèle avec les juridictions régulières, les
17 tribunaux militaires sont en train d'être créés et installés. Je ne sais
18 pas si vous connaissez bien la question, mais j'ai là une décision relative
19 à l'élection, la compétence et la création des juridictions dans la Région
20 autonome de Krajina qui fait suite à la création des tribunaux militaires.
21 Vous connaissez cela ?
22 R. Non.
23 Q. Alors, je ne vais pas vous poser des questions à ce sujet, mais
24 j'espère dans ce cas-là que vous me croirez sur parole pour ce qui est de
25 dire que les premiers tribunaux militaires ont été formés d'abord, puis les
26 tribunaux civils. Puisque nous avons pu regarder ce document, je voudrais
27 maintenant demander, s'il vous plaît --
28 M. LE JUGE HALL : [hors micro]
Page 1600
1 L'INTERPRÈTE : Microphone, s'il vous plait.
2 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Excusez-moi, mais avant que vous ne
3 passiez à votre question suivante, je signale qu'il est l'heure de
4 suspendre la séance.
5 M. CVIJETIC : [interprétation] Bien. Bien.
6 --- L'audience est suspendue à 12 heures 07.
7 --- L'audience est reprise à 12 heures 33.
8 M. LE JUGE HALL : [interprétation] En attendant que le témoin ne revienne
9 en salle d'audience, il y a une question dont il faut que nous traitions
10 maintenant, question récurrente concernant la législation. Pour autant que
11 nous concerne la question, la législation doit être prouvée, et je
12 m'adresse aux deux conseils qui doivent se mettre d'accord avec le greffe
13 pour voir comment on pourra régler la question.
14 M. KRGOVIC : [interprétation] Je voudrais juste dire pour le compte rendu
15 que le problème c'est les sténographes, je crois. Nous n'avons pas de
16 sténographe pour le moment. Les interprètes sont là.
17 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]
18 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Maître Pantelic, avant que vous ne
19 répondiez à ce que j'ai dit, peut-être vaudrait-il mieux pour le compte
20 rendu que je répète ce que j'ai dit tout à l'heure, et je crois que les
21 conseils ont entendu, en fait, ce que je vais maintenant résumer. C'est
22 d'ailleurs que, en ce qui concerne la Chambre, les textes de lois,
23 législations, lois, décrets, étant des documents publics, n'ont pas besoin
24 d'être prouvés de façon formelle. Et la Chambre se satisferait du fait que
25 les conseils de part et d'autre, en consultation avec le greffe, décident
26 de la manière qui convient le mieux pour qu'ils puissent faire référence à
27 ces textes de lois.
28 M. PANTELIC : Pour le procès-verbal, mon cher confrère et ami, Me Krgovic,
Page 1601
1 est aujourd'hui avec nous. Merci bien.
2 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci.
3 M. LE JUGE HARHOFF : Alors, bienvenue, Monsieur Krgovic.
4 M. KRGOVIC : Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs les Juges.
5 M. ZECEVIC : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait m'entendre sur la
6 question des accords à faire entre les parties, juste une suggestion
7 rapide. Je pense que mes amis de l'Accusation seront d'accord, parce que
8 nous sommes en train de préparer un document en vue d'un accord concernant
9 tous les textes de lois. Je suggère que nous parvenions à un accord sur ce
10 document, et si c'est le cas, nous le présenterons au greffier, et on verra
11 quelles sont les cotes qui y sont données, que ce soit des cotes P ou des
12 cotes D. On aura à ce moment-là des pièces, et ce sera, je crois, la façon
13 la plus commode de procéder. Je ne sais pas si l'Accusation elle-même a --
14 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Non, la Chambre est tout à fait heureuse
15 de laisser la méthode au conseil.
16 M. ZECEVIC : [interprétation] Merci beaucoup.
17 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci beaucoup.
18 Oui, Maître Cvijetic, veuillez poursuivre votre contre-interrogatoire.
19 Poursuivez votre contre-interrogatoire.
20 M. CVIJETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
21 Pourrait-on, s'il vous plaît, maintenant voir le document que je
22 viens de mentionner juste avant la suspension de séance. Il s'agit de 1D00-
23 4992. Le numéro ERN, il s'agit d'une page qui contient "Les dispositions
24 générales, chapitre 1" et le numéro est le 0358-3684. Je crois que c'était
25 la façon la plus rapide de retrouver la page dont j'ai besoin. En anglais,
26 on devrait lire le titre "Dispositions générales, chapitre 1."
27 [Le conseil de la Défense se concerte]
28 M. CVIJETIC : [interprétation] Je ne vois pas d'autre méthode de vous
Page 1602
1 aider pour ce qui est au moins de la page en anglais, si ce n'est de vous
2 dire ce que nous reconnaissons dans son titre : "Chapitre 1 : Dispositions
3 générales."
4 Oui, c'est bien cela.
5 Q. Veuillez regarder, s'il vous plaît, le point 3, Monsieur Delic. Lisez-
6 le, s'il vous plaît, des yeux.
7 M. CVIJETIC : [interprétation] Pour le texte en B/C/S, pourrait-on passer à
8 la page suivante, s'il vous plaît, parce qu'il y a un saut de page.
9 Q. Avez-vous lu cette portion du point 3 jusqu'à maintenant ?
10 R. On voit la fin de ce point-là qu'on poursuit.
11 Q. L'avez-vous lu ? Excusez-moi. Je n'ai pas précisé de quel document il
12 s'agissait. Il s'agit du règlement de service de la police militaire des
13 forces armées. Lorsque les règlements militaires dont nous avons parlé et
14 que nous avons commentés sont entrés en vigueur, ces dispositions ont
15 également été appliquées. Etant donné que nous sommes tous deux des
16 professionnels, des gens du métier, je peux vous dire que ce que vous voyez
17 là c'est des dispositions qui ont trait à la compétence et au ressort de la
18 police militaire, ceci donc étant lié à un ressort territorial dans lequel
19 l'unité est responsable, ou plutôt, la police militaire qui se trouve dans
20 ce secteur de responsabilité. Vous voyez cela ?
21 R. Oui.
22 Q. Passons maintenant au point 9, qui devrait être sur la page suivante
23 pour les deux versions.
24 M. CVIJETIC : [interprétation] Excusez-moi, il semble que le microphone du
25 témoin, M. Delic, soit éteint. Je ne sais pas si sa réponse a été
26 enregistrée.
27 M. OLMSTED : [interprétation] Monsieur le Président, l'Accusation souhaite
28 présenter une objection en ce qui concerne cette série de questions. Il
Page 1603
1 s'agit d'un procureur civil dans une municipalité. Aucune base n'a été
2 établie qui permettrait de savoir en ce qui concerne des règlements qui ont
3 trait à un tribunal militaire ou un bureau du procureur militaire ou de la
4 police militaire. Effectivement, on n'a même pas établi qu'il aurait vu ces
5 textes réglementaires sur lesquels on lui pose des questions maintenant. Et
6 ce n'est probablement pas le témoin qu'il faut pour poser ce type de
7 questions.
8 M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être que je
9 pourrais vous dire quelque chose d'utile avant que vous ne preniez votre
10 décision. Peut-être pourrais-je poser une question au témoin qui éclaircira
11 les choses.
12 Q. Dans le cours de vos fonctions, est-ce que vous avez coopéré avec la
13 police militaire ?
14 R. Oui, mais rarement.
15 Q. Mais vous l'avez fait, néanmoins ?
16 R. Oui.
17 M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais demander
18 au témoin de commenter ce point -- enfin, sur ces dispositions puisqu'en
19 fait, c'est un praticien du droit. C'est un professionnel. Ces dispositions
20 que j'étais sur le point de lui citer, c'est quelque chose qu'il doit
21 connaître. En tout état de cause, il serait la personne la mieux qualifiée
22 pour nous dire s'il connaît ces dispositions ou pas.
23 M. OLMSTED : [interprétation] Monsieur le Président, encore une fois
24 l'Accusation élève la même objection. Avec tout le respect que je dois,
25 ceci n'est pas le témoin qui convient le mieux pour faire des commentaires
26 sur des règlements qui ont trait aux tribunaux militaires, à la police
27 militaire et aux procureurs militaires.
28 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Mais, Monsieur Olmsted, la dernière
Page 1604
1 réponse faite par Me Cvijetic a montré que le témoin s'est trouvé dans des
2 cas, à l'occasion, où il y avait un chevauchement. J'aurais pensé que
3 c'était suffisant comme base pour pouvoir formuler la question qu'il essaye
4 de poser, dans des limites évidentes, bien sûr.
5 M. OLMSTED : [interprétation] Je suppose que nous devons attendre pour
6 entendre les questions, mais notre préoccupation c'est que tout ce que le
7 témoin a dit, c'est qu'il y avait eu parfois, rarement, coopération avec la
8 police militaire. Je ne suis pas sûr que ceci soit suffisant maintenant
9 pour commencer toute une série de questions en ce qui concerne un règlement
10 de service de la police militaire sur lequel nous n'avons, là encore,
11 aucune preuve que le témoin l'ait jamais lu.
12 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Il y a toujours, Monsieur Olmsted --
13 enfin, n'anticipons pas, entendons les questions une par une. Quant aux
14 objections, s'il y a des objections, nous trancherons.
15 M. CVIJETIC : [interprétation] Toutes mes excuses.
16 Q. Monsieur Delic, lisons rapidement, si vous le voulez bien, le point 9.
17 Je vous demande d'en prendre connaissance rapidement.
18 R. J'en ai pris connaissance.
19 Q. Vous en avez pris connaissance. Donc, mon but est de faire un parallèle
20 avec les procureurs chargés des poursuites au niveau civil, ainsi que les
21 juges travaillant dans les tribunaux civils. Le fond de ma question, par
22 conséquent, est de déterminer les attributions des uns et des autres, mais
23 ce qui m'intéresse également, c'est la coopération entre ces diverses
24 structures. Vous avez coopéré avec certains membres de la police militaire,
25 et ici dans le règlement, nous voyons que les policiers militaires peuvent
26 également agir en vêtements civils. Est-ce que ceci vous rappelle quelque
27 chose eu égard au travail de la police civile ?
28 R. Au point 9 de ce texte, nous lisons que la police militaire peut
Page 1605
1 accomplir un certain nombre de missions en vêtements civils. Enfin, il est
2 question de tenue civile, très précisément.
3 Q. Bien, évidemment. Mais examinons la responsabilité et le domaine
4 d'intervention des uns et des autres, et penchons-nous sur le point 3 de ce
5 texte. Je cite le numéro ERN de la page, 0358-3688.
6 M. ZECEVIC : [interprétation] Il s'agit de la page 11 de la version serbe -
7 - ou plutôt, de la version anglaise du texte dans le prétoire électronique,
8 correspondant à la page 10 en version anglaise, car la page 11 était bien
9 la page 11 dans la version serbe du texte.
10 M. CVIJETIC : [interprétation]
11 Q. Bien. Alors, nous nous penchons sur le paragraphe 17 de la page 11 du
12 texte en B/C/S, auquel je vous demande de consacrer votre attention.
13 Paragraphe 17. Il n'est pas encore affiché sur les écrans. C'est la page
14 suivante en version anglaise. Il s'agit de la page 12 de la version
15 anglaise. Voilà. Maintenant, nous sommes au clair. Page 12 de la version
16 anglaise. Voilà. Le paragraphe 17 vient d'apparaître à l'écran. Dans ce
17 paragraphe, vous constaterez, au milieu du paragraphe, que nous trouvons la
18 phrase suivante, je cite :
19 "La découverte des crimes et de leurs auteurs est la tâche ex officio des
20 personnes compétentes au sein des tribunaux militaires…"
21 Est-ce que j'ai bien lu le texte ?
22 R. Oui.
23 Q. En d'autres termes, les pouvoirs de poursuite sont les mêmes que les
24 pouvoirs dont sont investis les responsables de la police civile, n'est-ce
25 pas ?
26 R. Oui.
27 M. CVIJETIC : [interprétation] J'aimerais maintenant que nous nous
28 penchions sur le paragraphe 21, le point 21. Nous le voyons déjà à l'écran
Page 1606
1 dans sa version anglaise. Il nous faudra quelques instants pour l'obtenir
2 en version B/C/S. Voilà, c'est fait.
3 Q. Alors, paragraphe 21. Veuillez en prendre connaissance. Est-ce que vous
4 pourriez lire, d'ailleurs, ce paragraphe en même temps que moi. Il se lit
5 comme suit, je cite :
6 "Les droits et devoirs des personnes travaillant dans les instances
7 dépendant des affaires intérieures au sein des forces armées sont les mêmes
8 que les droits et pouvoirs des responsables de la police militaire
9 habilités au sein de leur propre juridiction."
10 Cet article du règlement, par conséquent, établit un parallèle entre les
11 droits et devoirs incombant aux responsables habilités des instances
12 civiles dépendant du ministère de l'Intérieur et ceux de la police
13 militaire. Vous êtes d'accord là-dessus avec moi ? Dans la pratique, les
14 droits et devoirs de ces deux instances sont bien les mêmes, n'est-ce pas ?
15 R. Oui.
16 Q. Très bien. J'aimerais maintenant que nous nous penchions sur la page
17 suivante du texte. Mon confrère, Me Zecevic, va m'apporter son concours. Il
18 s'agit de la page 19 en B/C/S. Je vais vous en donner le numéro ERN. Peut-
19 être cela facilitera-t-il les choses. En tout cas, c'est la page 12 de la
20 version B/C/S du texte téléchargé dans le prétoire électronique. Voilà. Il
21 est à l'écran, maintenant. Très bien. J'aurais encore besoin de l'aide de
22 mon confrère, Me Zecevic, pour déterminer à quoi cette page correspond en
23 version anglaise. Nous sommes bien sur la bonne page en version B/C/S, et
24 c'est le paragraphe n de la version anglaise qui m'intéresse. En version
25 anglaise, il s'agit du bas de la page 13, qui se poursuit au début de la
26 page 14.
27 Monsieur Delic, avez-vous vu quels étaient, selon ce passage du texte, les
28 devoirs incombant à la police militaire ?
Page 1607
1 R. Oui, au n.
2 Q. Oui, au n, n pour New York, si je puis m'exprimer ainsi. M. CVIJETIC :
3 [interprétation] Dans la version anglaise, il faut maintenant que nous
4 passions à la page suivante pour que tout le monde puisse lire
5 l'intégralité de ce paragraphe, de cette disposition. Voilà. C'est bien.
6 Q. Pour ma part, Monsieur Delic, j'ai le sentiment et je vous demande si
7 vous partagez ce sentiment, puisque tout à l'heure nous avons parlé de la
8 façon dont étaient retrouvés les auteurs d'actes criminels et dont ils
9 étaient empêchés, et cetera, et cetera. Alors ici, nous avons un passage du
10 code de procédure pénale qui -- vous êtes bien d'accord avec moi là-dessus
11 ? A l'écran, c'est ce que nous voyons.
12 R. Oui, c'est la même chose. Enfin, les droits et devoirs évoqués ici sont
13 les mêmes, pour les mêmes instances.
14 Q. Très bien. J'aurais besoin de la page suivante pour ma question
15 suivante. Page 13 en version B/C/S; page 15 en version anglaise. C'est le
16 paragraphe (h) qui m'intéresse. Donc, paragraphe 25(h) en version anglaise.
17 25(h). Voilà, il est à l'écran.
18 Vous avez lu ce paragraphe, Monsieur Delic ?
19 R. Oui.
20 Q. Donc :
21 "Participer à la garde des détenus dans les camps destinés aux
22 prisonniers de guerre."
23 Et je crois que je n'aurai plus besoin longtemps de ce document. J'ai
24 encore un paragraphe à vous soumettre. Page 20 en B/C/S; page 23 en version
25 anglaise. C'est le paragraphe 7 qui m'intéresse, le chapitre 7 de cette
26 page, dont le titre est "Service chargé de la prévention du crime." Les
27 caractères sont tout petits. Je ne sais pas s'ils sont lisibles pour vous.
28 R. Oui, tout à fait.
Page 1608
1 M. CVIJETIC : [interprétation] Bien. Merci.
2 Q. Voici donc ma question, qui est assez générale. Nous constatons ici
3 qu'il existe un service spécialement chargé de la prévention du crime au
4 sein de la police militaire. Je ne vais pas vous poser de question précise
5 sur la teneur de ce texte, mais voici ma question générale. Comme on peut
6 le constater à la lecture de ce texte, l'organisation de la police
7 militaire, de façon générale, correspond en tout point à l'organisation de
8 la police civile. Etes-vous d'accord avec moi sur ce point ?
9 R. Oui.
10 Q. Bon. Monsieur Delic, avec l'entrée en vigueur de la loi sur les
11 tribunaux militaires et les procureurs militaires, et avec la création des
12 différentes instances qui sont à la disposition de ces tribunaux militaires
13 et de ces procureurs militaires pour mener à bien les poursuites
14 judiciaires, nous voyons apparaître un système double d'instances
15 judiciaires et d'organismes chargés de l'application des lois en matière de
16 lutte contre la criminalité, n'est-ce pas, d'une part une structure
17 militaire, d'autre part une structure civile qui sont parallèles. C'est
18 bien ça ?
19 R. Oui.
20 Q. Et nous en arrivons à présent au point central de mon contre-
21 interrogatoire, car il se pose à ce moment-là un problème de séparation,
22 n'est-ce pas, entre ces deux filières, entre ces deux pouvoirs. Suis-je en
23 droit de dire ce que je viens de dire ?
24 R. Oui.
25 Q. En tant que procureur doté d'une certaine expérience, dites-nous, je
26 vous prie, quels sont les critères qui étaient applicables pour distinguer
27 la nature d'un crime s'agissant de déterminer qui serait responsable de le
28 poursuivre. Quel était donc le critère, l'élément de détermination le plus
Page 1609
1 important ?
2 R. Le premier élément le plus important consistait à déterminer si l'acte
3 délictueux ou criminel était de nature purement militaire, et s'il avait
4 été commis par un membre des forces armées. Prenons par exemple une
5 infraction au devoir qui est celui d'une sentinelle. Ce travail ne peut
6 être accompli que par un soldat et par personne d'autre. Lorsqu'on en
7 arrivait à devoir déterminer si une personne était un civil ou un militaire
8 alors que cette personne travaillait pour les forces armées, le problème
9 était compliqué d'autant.
10 Q. Je me permets de vous interrompre pour vous interroger sur un point
11 très précis, très concret. Est-ce que le premier critère le plus important
12 de tous consistait à déterminer le statut de l'auteur de l'acte, à savoir
13 s'il s'agissait d'un civil ou d'un soldat ?
14 R. Oui. C'était le premier point sur le plan pratique le plus important.
15 Q. Je vous ai posé une question très concrète. Est-ce que c'était le
16 premier critère, le critère principal ?
17 R. Oui.
18 Q. En d'autres termes, le premier et principal critère, s'agissant de la
19 mise en œuvre dans les actes, consistait à établir de façon très précise si
20 l'auteur de l'acte était un militaire, un soldat ou un civil, n'est-ce pas
21 ?
22 R. Oui.
23 Q. Pourriez-vous me dire quelle est votre définition d'un soldat ?
24 R. Un soldat, c'est une question qui sert dans les rangs de l'armée.
25 Autrement dit, un militaire est quelqu'un qui est membre de l'armée et qui
26 éventuellement a un grade. Mais je ne vois pas quel est le problème.
27 Q. Je vous demandais simplement une définition. Nous en arriverons à
28 parler des cas limites dans un instant. N'avançons pas trop vite. C'est moi
Page 1610
1 qui vous poserais mes questions. Donc, le membre d'une unité militaire ou
2 d'une unité tout court, c'est bien la définition de militaire d'après vous
3 ?
4 R. Oui.
5 Q. Maintenant, je vous pose une question très concrète. Excusez-moi, je
6 continue. J'attends l'interprétation. Très bien.
7 Alors, quelqu'un qui est sorti des forces de réserve pour être activé suite
8 à une mobilisation, qui reçoit donc un uniforme et une arme, est-ce que
9 c'est un militaire, oui ou non ?
10 R. Oui.
11 Q. Monsieur Delic, est-ce que d'après ce que nous avons vu à l'instant
12 dans les textes, un autre critère valable consistait à déterminer dans
13 quelle zone de responsabilité était déployé un militaire ?
14 R. Oui.
15 Q. Voyons ce que cela signifie concrètement. Donc, si un crime est commis
16 dans une zone de responsabilité ou de déploiement d'une unité militaire,
17 les seules instances habilitées à intervenir sont des instances judiciaires
18 militaires. Est-ce que j'ai raison de dire cela ?
19 R. Oui.
20 Q. Bon. A présent, j'en arrive à un troisième critère qui, à mon avis, est
21 celui de la nature de l'acte criminel. Il existe des actes criminels dont
22 sont exclusivement chargés les organes judiciaires militaires. Il s'agit,
23 par exemple, des crimes de guerre, puisque d'après la description même et
24 la nature même de ces actes, seuls des militaires sont à même de les
25 commettre, n'est-ce pas ? D'après les règlements, je dis bien.
26 R. Oui.
27 Q. Bon. Donc nous venons de déterminer trois critères fondamentaux. Mais
28 il peut se produire également des situations où les domaines de
Page 1611
1 responsabilité, les attributions se chevauchent. Vous en avez parlé il y a
2 un instant vous-même, et je vais vous soumettre un exemple. Un acte
3 criminel est commis, son auteur n'est pas identifié et la police militaire
4 ainsi que la police civile interviennent. Est-ce que la première et
5 principale mission de ces deux instances consiste à déterminer exactement
6 la compétence qui s'applique selon les règlements dont nous venons de
7 parler ? Ai-je raison sur ce point ?
8 R. Oui.
9 Q. J'en arrive maintenant à une question pratique. Vous habitiez à Sanski
10 Most et savez certainement que sur le territoire de la municipalité de
11 Sanski Most est arrivée une formation militaire de grande importance dès le
12 mois d'avril. Pouvez-vous me dire de quelle formation militaire il s'agit ?
13 R. Je pense qu'il s'agit de la 6e Brigade de Krajina.
14 Q. Je suppose que vous savez que c'est le colonel Branko Basara qui
15 exerçait le commandement de cette brigade ?
16 R. J'ai entendu parler de lui, mais je ne le connaissais pas
17 personnellement.
18 Q. Ménagez une brève pause avant de commencer votre réponse à la fin de
19 mes questions, je vous prie.
20 Donc vous avez entendu parler du commandant de cette unité et vous avez
21 entendu parler de cette unité. Savez-vous que cette brigade avait en son
22 sein une unité de police militaire ?
23 R. Oui.
24 Q. Est-ce que vous avez coopéré avec cette police militaire de la brigade
25 ?
26 R. Rarement.
27 Q. Pourriez-vous prononcer le nom des personnes que vous avez eu
28 l'occasion de rencontrer dans le cours de votre travail ?
Page 1612
1 R. Il y avait un policier militaire qui, je crois, s'appelait Predrag
2 Lazic.
3 Q. Bien.
4 M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je demanderais qu'à
5 présent soit soumis au témoin un document --
6 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Maître Cvijetic, avant que nous
7 laissions ce document de côté, je vous demanderais de bien vouloir faire
8 préciser au témoin un certain nombre de points de détail, car il ne m'est
9 pas apparu avec certitude que le témoin nous ait expliqué qu'en temps de
10 paix - en tout cas, car c'est bien l'activité et les devoirs de la police
11 militaire en temps de paix qui sont régis par le règlement - donc, en temps
12 de paix, pour le moins, le témoin nous a dit qu'il existait un
13 fonctionnement parallèle de la police civile et de la police militaire, que
14 ces deux forces de police avaient les mêmes devoirs et que trois critères,
15 finalement, s'appliquaient pour faire la distinction entre l'une et
16 l'autre, critères que vous avez évoqués, à savoir l'identité de l'auteur,
17 la nature du crime commis et le lieu où ce crime a été commis. Mais ce
18 fonctionnement parallèle s'appliquait-il également en temps de guerre ?
19 C'est le premier point que j'aimerais que vous fassiez préciser au témoin.
20 Et le deuxième point, c'est que vous avez demandé au témoin si le
21 terme de "soldat" pouvait s'appliquer également à une personne mobilisée,
22 alors qu'auparavant, elle était dans la réserve, qui se voit remettre un
23 uniforme et une arme. Et ma question, par conséquent, est la suivante :
24 qu'en est-il d'un volontaire qui s'est également vu remettre un uniforme et
25 une arme, pour autant que ce soit un groupe de volontaires qui aient
26 éventuellement commis les crimes en question ? De quel ressort relève un
27 crime commis par un groupe de volontaires, de la police civile ou de la
28 police militaire ? Est-ce que vous pourriez demander cette précision à M.
Page 1613
1 le Juge Delic ?
2 M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Juge, je vais donc commencer par
3 la première question que vous venez de poser. J'ai demandé au témoin de
4 faire la distinction entre police militaire et police civile s'agissant de
5 l'époque dont nous sommes en train de discuter. Et je lui ai demandé ce
6 qu'il en était dans la pratique.
7 Q. Monsieur Delic, est-ce que vous avez appliqué ces trois critères de
8 distinction à l'époque dont nous discutons ici, c'est-à-dire à l'époque où
9 existait une menace imminente de guerre à Sanski Most ?
10 R. Oui.
11 Q. Très bien.
12 M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Juge, est-ce que je devrais
13 continuer à interroger le témoin ?
14 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Non, mais je n'ai pas vu la dernière
15 réponse du témoin au compte rendu. La dernière réponse du témoin était-elle
16 affirmative, suite à la question posée par le conseil ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
18 M. CVIJETIC : [interprétation] Peut-être les interprètes n'ont-ils pas eu
19 le temps d'interpréter dans le délai voulu. En tout cas, les volontaires
20 viennent à l'instant d'être évoqués.
21 Je vais interroger le témoin, mais je ne sais pas s'il a compétence
22 pour répondre à cette question quant à savoir de quelle façon les
23 règlements et réglementations militaires s'appliquaient à des volontaires.
24 Mais enfin, je ne souhaiterais pas le guider dans sa réponse.
25 Q. Savez-vous, Monsieur Delic, qu'il existe, selon les règlements et
26 réglementations militaires, une catégorie qui est celle des volontaires ?
27 R. Je ne connais pas à fond les règlements et réglementations militaires.
28 Q. C'est ce que je pensais. Il va falloir maintenant que nous entrions
Page 1614
1 dans le détail de la place des volontaires au sein des unités militaires,
2 que nous abordions la question des formations paramilitaires, et cetera, et
3 cetera, ce qui risque d'être délicat.
4 M. CVIJETIC : [interprétation] Si vous me le permettez, Monsieur le
5 Président, je vais donc poser ma question suivante.
6 Je demande l'affiche de la pièce 2D07-0033.
7 Q. Monsieur Delic, vous voyez de quoi il est question dans ce document.
8 Nous sommes face à une plainte au pénal soumise par le commandement de la
9 6e Brigade de Krajina, et dans l'intitulé, nous lisons : "Compagnie de la
10 Police militaire, poste militaire, date," et cetera, et suivent les noms
11 des destinataires. Je cite : "Le procureur militaire de Banja Luka." Nous
12 voyons ensuite l'objet de cette plainte au pénal et le texte législatif sur
13 lequel s'appuie cette plainte. Et vous constaterez avec moi, n'est-ce pas,
14 qu'il s'agit bien de la loi de procédure pénale qui est également appliquée
15 par les instances civiles. Suivent ensuite un certain nombre de noms et de
16 renseignements personnels concernant les auteurs présumés contre lesquels
17 cette plainte est émise.
18 Je demande à présent l'affichage de la page 2 de ce texte, car j'aimerais
19 vous demander si vous avez eu connaissance de cette affaire. Donc dans la
20 page 2, nous voyons le descriptif de l'acte criminel présumé commis. Voilà.
21 C'était la page qui m'intéressait.
22 M. CVIJETIC : [interprétation] Que l'on fasse défiler un peu la version
23 B/C/S du texte à l'écran et que l'on agrandisse le passage où l'acte
24 criminel est décrit. Voilà, très bien. Merci.
25 Q. Monsieur Delic, à la lecture des noms des personnes contre lesquelles
26 cette plainte est déposée, à la lecture de la description du crime que ces
27 personnes sont présumées avoir commis, est-ce que vous êtes en mesure de
28 déterminer de quelle affaire il s'agit. Faisons défiler un peu le texte
Page 1615
1 anglais. C'est le paragraphe situé au-dessus du paragraphe que l'on voit
2 maintenant à l'écran qui m'intéresse, dans la version anglaise. Encore un
3 peu vers le haut. Manifestement, c'est un paragraphe qui se répartit sur
4 deux pages. C'est ça le problème. Page 2, dernier paragraphe, c'est là que
5 commence la description de l'acte criminel, et cette description se termine
6 à la page suivante du texte.
7 Monsieur Delic, reconnaissez-vous cette affaire ?
8 R. Oui, je connais cette affaire.
9 Q. En avez-vous le souvenir ?
10 R. Oui.
11 Q. Je vous prierais de prêter attention à présent à la fin du document, la
12 fin, donc, de ce passage consacré à la description de l'acte criminel. En
13 page suivante du texte, page 3, j'en demande l'affichage, juste avant le
14 mot "annexe". Voilà. Le texte est actuellement affiché à l'écran.
15 Prêtez attention, je vous prie, aux éléments de preuve qui ont été
16 présentés par cette compagnie de police militaire. Au paragraphe 3, nous
17 voyons que ce sont les employés du poste de sécurité publique de Sanski
18 Most qui ont procédé aux constatations d'usage sur les lieux, c'est bien
19 cela ?
20 R. Oui.
21 Q. En page suivante, donc --
22 M. CVIJETIC : [interprétation] Je demande l'affichage de la page suivante
23 en B/C/S et en anglais. De la page 4 en version anglaise. Voilà.
24 Q. Cette plainte au pénal est déposée par le colonel Branko Basara. Je
25 vous demanderais maintenant quelques commentaires. Vous avez dit que vous
26 aviez le souvenir de cette affaire, n'est-ce pas ?
27 R. Oui.
28 Q. Nous voyons que les instances chargées des poursuites, instances qui
Page 1616
1 ont envoyées des hommes sur les lieux pour constatation, sont les instances
2 de la police civile, mais la suite de la procédure a été menée par la
3 police militaire, n'est-ce pas ?
4 R. Oui.
5 Q. A la lecture de la description de l'acte commis et des renseignements
6 généraux qui sont fournis dans ce texte, quelles sont les conclusions que
7 vous tirez, et pourquoi ?
8 R. La conclusion que j'en tire, c'est qu'il s'agissait probablement de
9 soldats.
10 Q. Très bien. Je ne peux m'empêcher de vous poser cette question, puisque
11 vous êtes un procureur d'expérience et qu'il s'agit ici d'une plainte au
12 pénal, et j'ai également été procureur moi-même il y a quelques années.
13 Dans ce texte, y a-t-il quelque chose qui manque, du point de vue de ce qui
14 importe pour assurer la qualité d'un document tel que celui-ci sur le plan
15 juridique ?
16 R. Il ressort manifestement de la lecture de cette plainte qu'elle
17 présente tous les aspects nécessaires officiellement pour constituer une
18 plainte au pénal en bonne et due forme. Par exemple, ce document ressemble
19 au document de même nature que je pouvais recevoir du poste de police de
20 Sanski Most.
21 Q. Donc, vous conviendrez que ma conclusion quant au fait que les
22 enquêteurs judiciaires de la police militaire avaient qualité pour traiter
23 de cette affaire est étayée par ce qu'on peut lire dans cette plainte au
24 pénal ?
25 R. Oui.
26 Q. Je vais maintenant vous interroger au sujet d'un certain nombre
27 d'affaires limites. Dans des cas limites, il est difficile de déterminer si
28 l'auteur de l'acte est un civil ou un militaire, et pouvait-il arriver dans
Page 1617
1 des cas de ce genre que la police civile, comme la police militaire,
2 déclare qu'elle n'avait pas compétence pour traiter de l'affaire, ce qui,
3 d'une certaine façon, permettait à l'auteur présumé de s'en sortir ? Est-ce
4 que vous réfléchissiez parfois à cette possibilité ?
5 R. Oui, nous réfléchissions toujours à cette possibilité dans le cadre de
6 nos attributions.
7 M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
8 nous en arrivons maintenant à la partie du contre-interrogatoire annoncée
9 l'autre jour par mon confrère Me Pantelic, lorsqu'il a parlé des documents
10 65 ter. Nous avons reçu toute une série de plaintes au pénal qui font plus
11 de 200 pages, et qui n'ont pas été traduites en anglais. Me Pantelic a
12 proposé une façon de régler le problème qui se pose en l'espèce, et il vous
13 fera part de sa proposition de solution. Pour ma part, j'ai étudié un
14 procès très important qui a eu lieu à Banja Luka, procès devant un tribunal
15 militaire, et j'en ai extrait un certain nombre de parties de textes
16 pertinentes, car le nom du témoin que vous avez face à vous y est
17 mentionné. Et j'ai demandé la traduction de ces parties de textes
18 pertinentes.
19 A présent, je demande l'affichage de la pièce 1D00-4907.
20 M. PANTELIC : [interprétation] Pardonnez-moi, je crois qu'il faut verser au
21 dossier ce document. Le précédent, s'il vous plaît, pour Me Cvijetic, en
22 fait, cette charge criminelle qui a été déposée par le colonel Basara. Je
23 crois que vous pouvez en demander le versement au dossier.
24 M. CVIJETIC : [interprétation] Messieurs les Juges, le témoin connaît
25 l'affaire puisqu'il l'a reconnue. Et je suis convaincu que ceci a déjà été
26 enregistré au moment de l'audition de M. Basara. Si tel n'est pas le cas,
27 je vais vous demander le versement au dossier de ce document, s'il vous
28 plaît. Dois-je répéter le numéro du document ? C'est le 2D07-0033.
Page 1618
1 Je souhaite en demander le versement, s'il vous plaît.
2 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]
3 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Vous pouvez donner une cote, s'il vous
4 plaît.
5 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit du numéro 1D40.
6 M. PANTELIC : [interprétation] Si mon confrère Me Cvijetic me l'autorise,
7 je souhaite connaître la voie à suivre des Juges de la Chambre. Un peu plus
8 tôt, j'ai abordé cette question avec mes confrères du bureau du Procureur,
9 et ils ne s'opposent pas à ma demande. En réalité, Messieurs les Juges,
10 comme l'a indiqué mon confrère Me Cvijetic, nous avons reçu, le 12 octobre,
11 une liasse de documents qui porte sur des charges pénales, des éléments
12 d'archives sur ce qui a été recueilli sur site, des registres sur site qui
13 ont traits aux crimes, les poursuites devant le tribunal militaire de Banja
14 Luka, et cetera, et cetera, contre des auteurs connus et inconnus, dans la
15 plupart des cas contre la population non-serbe de Sanski Most. Que premier
16 point, ces documents sont en B/C/S. Nous ne disposons pas de traduction
17 anglaise pour ces derniers, parce que ceci nous a été communiqué
18 conformément à l'article 66(B), me semble-t-il, et ce que je propose, c'est
19 ceci : nous pourrions verser au dossier cette corbeille de documents, pour
20 - comment dites-vous - MFI, aux fins d'identification. Ensuite, nous allons
21 demander à nos amis des services de traduction, CLSS, du Tribunal de
22 traduire ces documents. Une fois que nous aurons la traduction anglaise de
23 ces derniers, nous pourrions verser au dossier tous ces documents. Ces
24 documents sont très importants, parce qu'ils comportent énormément de
25 registres ou de procès-verbaux signés par M. Delic. Tout simplement, nous
26 aimerions recueillir de lui certains commentaires à propos de ces
27 documents, puisqu'il s'agit de réunions auxquelles il a assisté, et cetera.
28 Donc, je souhaite vous demander votre avis sur la question, et quelles sont
Page 1619
1 vos consignes en la matière. Merci.
2 [La Chambre de première instance se concerte]
3 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Maître Pantelic, nous apprécions la
4 proposition que vous avez faite pour gagner du temps en admettant votre
5 corbeille de documents - pour reprendre votre phrase - en une seule fois.
6 Malheureusement, nous ne savons pas quels sont les éléments de cette
7 corbeille qui seront utiles aux Juges de la Chambre pour finir. Donc, à la
8 fin de cet exercice, nous allons vous demander d'appliquer la méthode
9 suivante : les éléments que vous allez recueillir qui sont pertinents pour
10 les éléments que vous souhaitez présenter, vous pourriez poser des
11 questions sur ces éléments-là au témoin, quand bien même le document sur
12 lequel vous vous reposez est encore en B/C/S et n'a pas encore été traduit.
13 Lorsque vous procédez de la sorte et lorsque vous posez des questions sur
14 les parties pertinentes du document, à ce moment-là cette partie-là du
15 document pourrait être traduite. A ce moment-là, cela prendrait plus de
16 temps certainement pour vous et pour nous, mais à la fin de cette exercice-
17 là, les Juges de la Chambre estiment qu'il s'agit là de la voie à suivre,
18 parce que ceci est vite, de nous retrouver à la fin de ce processus avec un
19 nombre très important de documents qu'il va falloir trier.
20 Est-ce que vous comprenez ce que je viens de vous dire ?
21 M. PANTELIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Comme vous avez
22 indiqué à juste titre, très bien, mon idée consistait simplement --
23 M. LE JUGE HALL : [interprétation] A gagner du temps --
24 M. PANTELIC : [interprétation] -- à gagner du temps. Cela me convient tout
25 à fait, on peut voir ces passages-là du document avec le témoin, et voir
26 quelles sont les parties du document dont nous allons demander le versement
27 du dossier. Je vous remercie beaucoup.
28 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci.
Page 1620
1 M. PANTELIC : [interprétation] Je vous en prie, Monsieur le Président.
2 M. CVIJETIC : [interprétation] Messieurs les Juges, j'ai fait quelque chose
3 de semblable pour essayer de résoudre ce problème. J'ai pris ce dossier
4 militaire qui est très important, et j'en ai extrait les passages
5 pertinents. Ensuite, j'ai demandé au service de traduction de les traduire.
6 Pardonnez-moi, je ne sais pas quel est le statut du document précédent,
7 celui du colonel Basara. Je crois que nous en avons terminé avec ce
8 document ? Très bien.
9 Donc, je vais demander l'affichage du 1D00-4907, la page 20 en B/C/S,
10 s'il vous plaît, et la page 5 en anglais. Messieurs les Juges, j'ai une
11 suggestion pratique à vous faire. Ces documents, je les ai imprimés et j'ai
12 une copie papier. Peut-être qu'il serait préférable que le témoin le lise,
13 et ainsi nous pourrions nous suivre à l'écran pour nous assurer que nous
14 sommes sur la même page. Bien évidemment, s'il n'y a pas d'objection de
15 votre part.
16 Q. Monsieur Delic, il s'agit là d'un autre rapport au pénal qui émane du
17 commandement de la 6e Brigade de Krajina, la compagnie MP. Comme vous
18 pouvez le voir, ce rapport est un rapport au pénal contre Nenad Malic. Nous
19 avons une description du crime. Connaissez-vous cette affaire ? Savez-vous
20 de quoi il s'agit ?
21 R. Oui.
22 Q. Fort bien. Donc, nous pouvons en parler davantage.
23 M. CVIJETIC : [interprétation] Est-ce que nous pouvons avoir la page
24 suivante en B/C/S, la page 21, et la page 6 en anglais, s'il vous plaît.
25 Q. Vous conviendrez avec moi, n'est-ce pas, qu'en termes juridiques et
26 officiels, ce rapport au pénal est identique au précédent, c'est-à-dire que
27 toutes les conditions juridiques sont réunies pour qu'il s'agisse là d'un
28 rapport au pénal en bonne et due forme, n'est-ce pas ?
Page 1621
1 R. Oui.
2 Q. Nous constatons que le crime s'est déroulé le 21 décembre 1992; est-ce
3 exact ? Ce qui est intéressant dans cette affaire-ci dont vous vous
4 souvenez, comme vous venez de nous le dire, est que l'auteur a commis le
5 crime alors qu'il n'était pas en service, alors qu'il ne participait pas à
6 des actions de combat. Et il se trouvait dans une localité appelée Stari
7 Majdan. Et il a fait sortir deux Musulmans d'un bar et il les a tués; est-
8 ce exact ?
9 R. Oui.
10 Q. La société MP a déposé une plainte au pénal contre lui; c'est exact ?
11 R. Oui.
12 Q. Parce qu'il a été établi qu'en toute probabilité c'était un membre de
13 l'armée, un soldat ?
14 R. Oui.
15 M. CVIJETIC : [interprétation] Est-ce que nous pouvons afficher le document
16 à la page 23 en B/C/S et à la page 7 en anglais, s'il vous plaît.
17 Q. Veuillez regarder la version en B/C/S. Les pages suivent un ordre
18 chronologique. Ici, nous avons la décision du tribunal de Banja Luka qui
19 précise qu'après avoir été en garde à vue pendant trois jours, on a ordonné
20 la détention. C'est le juge d'instruction du tribunal compétent qui en a
21 décidé ainsi, du tribunal militaire ?
22 R. Oui.
23 Q. Et c'est donc le tribunal militaire qui a poursuivi l'auteur, n'est-ce
24 pas ?
25 R. Oui.
26 M. CVIJETIC : [interprétation] Est-ce que nous pouvons afficher le document
27 suivant qui est à la page 33 en B/C/S et à la page 8 en anglais, s'il vous
28 plaît.
Page 1622
1 Q. Comme vous pouvez le constater, le bureau du procureur militaire
2 rattaché au commandement du 1er Corps de la Krajina a remis ce rapport aux
3 fins de mener une enquête qu'il a adressé au juge d'instruction du tribunal
4 militaire de Banja Luka; c'est exact ?
5 R. Oui.
6 Q. Nous pourrions passer au document suivant et suivre l'ordre
7 chronologique, qui se trouve donc à la page 40 en B/C/S et 3 en anglais.
8 Comme nous pouvons le constater, le juge d'instruction a accepté la
9 proposition faite par le bureau du procureur militaire et a ouvert une
10 enquête contre la personne en question.
11 R. Oui.
12 Q. Si je ne me trompe pas, la même loi s'applique lorsqu'il s'agit d'un
13 tribunal civil. Il s'agit du même code de procédure pénale; c'est exact ?
14 R. Oui.
15 Q. Pourquoi me suis-je intéressé à ce passage-ci en particulier ? C'est
16 parce qu'outre les autorités militaires, cette affaire a également été
17 traitée par les autorités civiles.
18 M. CVIJETIC : [interprétation] Est-ce que nous pouvons passer à la page 44
19 en B/C/S et page 1 en anglais, s'il vous plaît.
20 Q. Voyez-vous ce document ? Il s'agit du rapport portant sur le lieu du
21 crime et l'enquête qui a été menée.
22 R. Oui.
23 Q. Je constate que le juge d'instruction de Sanski Most, à 21 heures,
24 s'est rendu sur les lieux du crime. Les inspecteurs civils étaient présents
25 sur les lieux et en haut à droite nous pouvons lire leurs noms. Il y avait
26 un officier de police qui était en service ainsi qu'un médecin qui
27 accompagnait le juge d'instruction. Vous, en revanche, vous n'avez pas
28 assisté à cette visite sur le lieu du crime et l'enquête qui était ouverte.
Page 1623
1 R. Oui.
2 Q. Le juge d'instruction a rédigé ce rapport le 18 janvier 1993, comme
3 nous pouvons le constater.
4 R. Oui.
5 Q. Bien évidemment, l'enquête sur site a été faite sans que le rapport ne
6 soit dactylographié tout de suite. Est-ce que ceci aurait pu se produire de
7 cette façon ?
8 R. Oui.
9 Q. Et comme c'était effectivement le cas, je vais vous le montrer en vous
10 présentant un autre document à la page 3 en anglais et à la page 47 en
11 B/C/S.
12 M. CVIJETIC : [interprétation] Il ne s'agit pas du document en question.
13 Pardonnez-moi, c'est la page 13 en anglais, page 43 en B/C/S, page 43.
14 C'est mon erreur. Voilà. Ceci devrait être le bon document.
15 Q. Vous avez une copie papier de ce document. Vous pouvez le lire
16 directement. Le juge d'instruction vous a envoyé le rapport officiel,
17 n'est-ce pas ?
18 R. Oui.
19 Q. Et vous êtes donc informé en bonne et due forme du crime ?
20 R. Oui.
21 Q. Ceci a été envoyé le 18 janvier 1993. Maintenant, sur le document
22 suivant, nous pouvons constater quelle a été votre réaction. Page 39 en
23 B/C/S, page 12 en anglais. Est-ce que vous reconnaissez votre signature ?
24 R. Oui, tout à fait.
25 Q. Vous avez tout de suite contacté le commandant de la 6e Brigade de
26 Krajina, donc la compagnie MP, pour demander des renseignements
27 complémentaires, à savoir s'il y avait des poursuites contre l'auteur; est-
28 ce exact ?
Page 1624
1 R. Oui.
2 Q. Le document suivant que nous sommes sur le point de voir est un
3 document qui émane de vous. Pardonnez-moi. C'est la réponse de la brigade.
4 Page 38 en B/C/S et 11 en anglais.
5 Monsieur Delic, la police militaire vous a répondu en disant qu'ils avaient
6 déposé une plainte au pénal. Ils avaient précisé la nature du crime ainsi
7 que d'autres éléments s'y rapportant. Est-ce bien ce que nous avons dit
8 précédemment ? Vous vouliez être tout à fait sûr qu'il y ait une suite à
9 cette affaire ?
10 R. Oui.
11 Q. Simplement pour être sûr, vous avez contacté la police civile
12 également, n'est-ce pas ? Page 37 en B/C/S et page 10 en anglais ? Nous
13 attendons la traduction. Vous avez une copie papier de ce document.
14 [Le conseil de la Défense se concerte]
15 M. CVIJETIC : [interprétation]
16 Q. C'est la SJB, le poste de sécurité publique qui répond à votre demande,
17 à savoir ils indiquent qu'ils ont envoyé certains documents au procureur
18 militaire.
19 R. C'est exact.
20 Q. En ce qui vous concerne, ceci met un terme à cette affaire parce que
21 ceci a été remis entre les mains des autorités judiciaires militaires ?
22 R. Oui.
23 Q. Dans ce cas, l'auteur du crime a commis le crime dans une localité,
24 dans un bar. Est-ce la raison pour laquelle vous souhaitiez savoir si
25 c'était un cas limite ?
26 R. Oui.
27 Q. Donc, vous conviendrez avec moi, n'est-ce pas, que dans d'autres cas,
28 lorsque la question de la compétence ne se posait pas, vous ne meniez pas
Page 1625
1 d'enquête particulière, parce que les militaires pouvaient donner suite à
2 ce genre d'infraction et n'avaient pas l'obligation de vous faire un
3 rapport; c'est exact ?
4 R. Oui.
5 Q. Je vais maintenant vous montrer deux documents. Tout d'abord, nous
6 avons un document de la Défense, le 1D00-72 [comme interprété].
7 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur Cvijetic, lorsque vous aurez
8 terminé vos questions sur ces deux documents, nous allons faire une pause
9 qui sera plus longue.
10 M. CVIJETIC : [interprétation] Fort bien. Je souhaite simplement voir ces
11 deux documents que j'ai cités, avec votre permission.
12 Q. Monsieur Delic, voyez-vous ce document ?
13 R. Oui.
14 Q. Il s'agit d'un rapport sur les travaux menés par la police judiciaire
15 entre le 5 septembre 1992 et le 23 septembre 1992. Il s'agit là d'un
16 rapport qui émane de la compagnie MP. Comme vous nous l'avez dit, cette
17 compagnie MP coopérait avec vous. C'est la raison pour laquelle je vous
18 pose la question, sinon je ne vous aurais pas posé la question. Est-ce
19 exact ?
20 M. CVIJETIC : [interprétation] Est-ce que nous pouvons passer à la page
21 suivante maintenant pour voir qui a signé le document. Et j'aurais des
22 questions à vous poser. Troisième page, s'il vous plaît. Je crois que nous
23 devrions avoir ceci en anglais également. C'est également la troisième page
24 en anglais. Nous n'avons besoin de voir que le cadre réservé à la
25 signature. Bien.
26 Q. On peut lire ici que l'inspecteur de la police judiciaire a rédigé ce
27 rapport. Est-ce bien la personne que vous connaissiez, d'après ce que vous
28 nous avez dit ?
Page 1626
1 R. Oui.
2 Q. Il a signé ici en tant qu'inspecteur de la police judiciaire, est-ce
3 exact ?
4 R. Oui.
5 Q. J'ai une question d'ordre général à poser à propos de ce document, et
6 ensuite nous allons aborder le reste du document.
7 M. CVIJETIC : [interprétation] Est-ce que nous pouvons passer à la page 1
8 avant, et cela, s'il vous plaît, dans les deux versions. Voici ce document.
9 Q. Il s'agit d'un certain nombre d'affaires qui ont été traitées par la
10 Compagnie de la Police militaire. Veuillez regarder le document vous-même.
11 L'affaire de Vakuf, les auteurs ont été poursuivis. Et Ibrahim Cehajic,
12 c'est une affaire aussi ?
13 R. Oui.
14 Q. Est-ce que vous voyez que ce sont les instances judiciaires militaires
15 qui ont traité avec cette affaire ? Est-ce que vous voyez cela ?
16 R. Oui.
17 Q. Et est-ce que vous voyez que les cas de personnes musulmanes tuées ont
18 également été présentés au tribunal militaire, effectivement ?
19 R. Oui.
20 Q. Egalement le cas de Serbes qui ont été tués, où le tribunal militaire
21 en a également été saisi ? Est-ce que vous êtes d'accord avec moi là-dessus
22 ?
23 R. Non. Cela, je ne le vois pas.
24 Q. Radoslav Bilbija, c'est le fils de Borislav, qui a été mis en détention
25 préventive, me semble-t-il, et qui est serbe, n'est-ce pas ?
26 R. Oui, vous avez raison.
27 Q. Et à la page suivante -- page suivante, s'il vous plaît.
28 M. CVIJETIC : [interprétation] Messieurs les Juges, on vient de me
Page 1627
1 dire qu'il est l'heure de faire la pause de déjeuner. Avec votre
2 permission, je souhaite remettre ces documents au témoin. Ainsi, nous
3 prendrons moins de temps pour les parcourir après la pause, si vous me le
4 permettez, Monsieur le Juge.
5 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Est-ce que vous avez quelque à
6 dire, Monsieur Olmsted ?
7 M. OLMSTED : [interprétation] J'ai une question administrative à
8 régler. En fait, ceci porte sur le témoin suivant. D'après ce que nous
9 avons compris de la Défense, ils vont auditionner ce témoin pour le reste
10 de la journée. Donc nous demandons à ce que le témoin suivant ne soit pas
11 obligé en fait d'être dans l'antichambre du Tribunal aujourd'hui, de façon
12 à ce qu'il puisse vaquer à ses occupations.
13 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui.
14 Bien sûr, vous pouvez remettre ce document au témoin pendant la
15 pause. Nous allons reprendre dans une heure.
16 [Le témoin quitte la barre]
17 --- L'audience est levée pour le déjeuner à 13 heures 48.
18 --- L'audience est reprise à 14 heures 54.
19 Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais vous
20 expliquer pourquoi je me suis déplacée à l'avant de la partie de la salle
21 réservée au Procureur, M. Olmsted n'étant pas encore ici. Nous ne nous
22 étions pas rendu compte que le témoin allait être entendu aussi longtemps,
23 et il a donc pris un avion pour Sarajevo cet après-midi. Sa place était
24 déjà réservée, et malheureusement, il n'a rien pu changer. Donc en tant que
25 conseil principal, je vais cet après-midi prendre la place de M. Olmsted.
26 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bien sûr, Madame Korner.
27 Mme KORNER : [interprétation] Je vous remercie.
28 [Le témoin vient à la barre]
Page 1628
1 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Maître Cvijetic, vous pouvez reprendre
2 votre contre-interrogatoire.
3 M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je demanderais
4 l'affichage, une nouvelle fois, du dernier document que nous examinions
5 avant la pause, et je vais répéter la cote. Il s'agit de la pièce 1D00-742.
6 Très bien.
7 Q. Monsieur Delic, je ne vais plus vous poser de questions au sujet des
8 détails de ce rapport du service de police judiciaire de la 4e Compagnie de
9 la Police militaire de Sanski Most, car je sais que pendant la pause, vous
10 l'avez examiné de très près. Etes-vous d'accord avec moi sur le fait de
11 dire que dans la brève période qui concerne ce rapport, puisqu'il ne s'agit
12 que de 18 jours de travail, du 5 septembre au 23 septembre, n'est-ce pas,
13 donc il ressort de la lecture de ce rapport concernant cette brève période
14 à quel point le travail du service judiciaire de la police militaire de la
15 6e Brigade de la Krajina était intensif.
16 R. Oui.
17 Q. Serez-vous d'accord pour dire également que cette conclusion concerne
18 aussi bien la variété de crimes traités que la gamme variée d'auteurs ?
19 N'est-ce pas ?
20 R. Oui.
21 Q. Je ne peux pas, en ce moment même, comparer ce qui est écrit ici avec
22 votre registre, mais ne semble-t-il pas, à la lecture de ce document, sur
23 le principe, et êtes-vous d'accord avec moi sur ce point, que la plupart
24 des plaintes au pénal et des crimes commis ainsi que des auteurs de ces
25 crimes ont été examinés par les instances militaires ? N'est-ce pas que le
26 travail a été accompli par les instances militaires ?
27 R. Il est très difficile de comparer en l'absence de données précises,
28 mais il apparaît à la lecture de ce document que les militaires ont traité
Page 1629
1 d'un grand nombre d'affaires.
2 Q. Mais je vous posais une question de principe. Je souhaitais vous
3 entendre confirmer qu'une partie de votre compétence a été transférée sur
4 les organes de la justice militaire. Vous êtes d'accord avec moi sur ce
5 point ?
6 R. Oui.
7 Q. Reconnaissez-vous dans ce document la description de certains incidents
8 effectivement survenus ?
9 R. Oui.
10 M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, toutes mes excuses,
11 mais j'ai oublié de demander le versement au dossier de la plainte au pénal
12 que j'avais tirée d'une liste plus importante tout à l'heure, dernier
13 document que nous avons discuté avec le témoin, qui était au courant de
14 l'affaire évoquée dans la partie du document que j'avais mis en exergue. Je
15 veux parler de ce document qui était affiché à l'écran avant la suspension
16 d'audience pour le déjeuner, à savoir la pièce 1D00-4907. J'en demande donc
17 le versement au dossier.
18 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Ce document est admis au dossier et
19 enregistré.
20 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] En tant que pièce 1D41, Monsieur le
21 Président, Messieurs les Juges.
22 M. CVIJETIC : [interprétation] Puisque le témoin a reconnu l'événement et
23 s'est remémoré le contexte dans lequel cet incident est survenu et le fait
24 que cette affaire a été traitée par la police militaire - puisqu'il a
25 coopéré avec cette police militaire à l'époque - je demande le versement au
26 dossier du document qui est en ce moment sur les écrans. Document 1D00-
27 0742.
28 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Ce document est également admis au
Page 1630
1 dossier.
2 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce 1D42, Monsieur
3 le Président, Messieurs les Juges.
4 M. CVIJETIC : [interprétation]
5 Q. Monsieur Delic, vous n'avez pas pu apporter une réponse précise quant
6 au fait de savoir quel était le pourcentage de votre compétence qui avait
7 été transféré de la police civile, donc de votre responsabilité à la police
8 militaire. J'aimerais maintenant vous soumettre un autre document et je
9 demande l'affichage du document 65 ter numéro 1355. En attendant que ce
10 document ne s'affiche sur les écrans, je vous demande de confirmer,
11 Monsieur Delic, que pendant la suspension d'audience, vous avez examiné ce
12 document dans le détail, n'est-ce pas ?
13 R. [aucune réponse verbale]
14 Q. Votre réponse n'est pas consignée au compte rendu d'audience. Il ne
15 suffit pas de hocher du chef.
16 R. Oui.
17 Q. Nous avons donc face à nous maintenant un rapport adressé au
18 commandement du Corps de la Krajina, et qui émane du procureur militaire.
19 Il concerne l'ensemble des actes criminels commis pendant toute l'année
20 1992. J'aimerais que l'on affiche immédiatement la première page de ce
21 document, donc première page après la page de garde, et que l'on fasse
22 défiler le texte pour qu'on voie le haut de cette page. En anglais
23 également. Très bien.
24 Monsieur Delic, dès le premier paragraphe de ce texte, nous constatons que
25 le procureur militaire du 1er Corps de la Krajina a reçu 639 plaintes contre
26 978 personnes et ensuite, vient la décomposition, nous voyons qu'il est
27 question de 742 soldats de première classe, de 28 officiers, de 24 sous-
28 officiers, et ce qui peut être intéressant en particulier, ce document
Page 1631
1 concerne également 124 civils ou soldats ennemis. Comme vous le constatez -
2 vous avez examiné ce texte - je demande que l'on affiche la page suivante
3 de la version anglaise de ce document, donc page suivante de la version
4 anglaise.
5 Nous voyons donc quelle est la décomposition des auteurs et quels sont ces
6 auteurs. Et en page suivante, on voit la décomposition des actes commis
7 selon leur nature.
8 Mme KORNER : [interprétation] Excusez-moi. Une question qui peut être
9 intéressante. Est-ce que les soulignements ou les marques que l'on voit sur
10 ce document figuraient dans l'original qui a été obtenu par l'équipe de
11 Défense ?
12 M. CVIJETIC : [interprétation] Effectivement, j'ai plusieurs exemplaires de
13 ce document et ce qu'on voit dans cette page, les parties soulignées
14 figurent bien dans le document original. Nous avons reçu ce document en
15 l'état.
16 Q. Monsieur Delic, j'espère que vous avez trouvé la partie du texte qui
17 m'intéresse, en haut à gauche, premier paragraphe où on lit que cinq
18 plaintes pour crimes contre l'humanité et crimes de guerre ont été
19 transmises au procureur. Vous voyez cela ?
20 R. Oui.
21 Q. Ensuite, on voit qu'il est question de crimes contre la sécurité des
22 biens et des propriétaires. Quelques détails à ce sujet, ce sont des crimes
23 tels que le fait de tirer en l'air, de jeter des grenades dans la cour
24 d'une maison ou contre un monument du culte, contre une église, et cetera,
25 et cetera. Est-ce bien le genre de crimes qui est décrit dans cette partie
26 du texte ?
27 R. Oui.
28 Q. Je souhaitais m'assurer que vous et moi savions exactement de quoi nous
Page 1632
1 étions en train de parler. Je ne vais pas entrer davantage dans le détail
2 des statistiques que l'on trouve dans ce rapport. Vous l'avez étudié avec
3 attention, donc pouvez-vous tirer une conclusion quant au sujet qui a fait
4 l'objet de ma question précédente, à savoir qu'une partie importante de la
5 compétence des instances policières civiles a été transférée sur les
6 instances chargées des poursuites judiciaires au sein de l'armée ?
7 R. Oui. Il est question dans ce document de nombreux individus et de
8 nombreux actes criminels.
9 Q. Donc vous conviendrez avec moi que s'agissant de votre registre et des
10 crimes que vous aviez à investiguer, il y en a ici beaucoup plus ?
11 R. Oui. Beaucoup plus que le nombre que j'avais à traiter moi-même.
12 Q. Monsieur Delic, je vais maintenant revenir à des questions que le
13 Procureur vous a posées, et ensuite, je vous parlerai plus concrètement de
14 ces plaintes au pénal. Partons du principe qu'un citoyen porte une arme
15 pour laquelle il n'a pas de permis de port d'arme, un pistolet, par
16 exemple, vous allez le poursuivre pour infraction à la réglementation
17 relative au port d'arme, n'est-ce pas, pour possession illégale d'arme ?
18 R. Oui.
19 Q. Mais si un nombre plus important d'individus portent des fusils dans un
20 quartier ou dans un secteur déterminé parce que des armes ont été fournies
21 à ces individus de façon organisée, vous conviendrez avec moi que l'on ne
22 peut pas parler de délit relevant de votre compétence, car dans un cas tel
23 que celui-ci, on est face à des préparatifs éventuels de rébellion armé ou
24 face à une rébellion armée en bonne et due forme, n'est-ce pas ?
25 R. Oui. Ceci peut être qualifié de rébellion armée ou de crime à venir.
26 Q. Et si l'on pense à poursuivre les auteurs de tels actes, ce sont les
27 instances chargées des poursuites au sein de l'armée qui auraient à traiter
28 de cette affaire, n'est-ce pas ?
Page 1633
1 R. Oui.
2 Q. Même si les personnes concernées étaient des civils ?
3 R. Oui. Ma réponse est oui, s'agissant de ce crime déterminé.
4 Q. Très bien. Une question vous a été posée par le représentant du bureau
5 du Procureur, qui vous a demandé pourquoi certains auteurs dont les noms
6 figurent dans cet acte d'accusation n'ont pas été jugés. Je crois savoir
7 qu'on vous a montré une liste de victimes dont les noms figuraient très
8 concrètement dans un acte d'accusation où nos clients étaient en cause ?
9 R. Oui. J'ai eu à examiner ces actes d'accusation.
10 Q. Voici ma question : existe-t-il une possibilité pour que les actes
11 évoqués dans cet acte d'accusation aient été commis par des personnes qui
12 entrent dans les trois catégories que nous avons évoquées tout à l'heure, à
13 savoir qu'il s'agit de soldats, que les actes commis ont été commis dans
14 des zones sous la responsabilité de la police militaire, et troisièmement,
15 que les actes criminels en question sont des actes criminels relevant de la
16 justice militaire, à savoir crimes contre l'humanité, crimes de guerre, et
17 cetera. Est-ce que cette éventualité existe ?
18 R. Oui.
19 Q. Et ceci permettrait de comprendre pourquoi ce ne sont pas les instances
20 dont vous étiez responsable qui ont procédé aux poursuites judiciaires en
21 question ?
22 R. Oui. C'est une possibilité.
23 Q. Je vous remercie. Maintenant, je vais très concrètement vous soumettre
24 un certain nombre de plaintes au pénal qui vous ont été transmises en votre
25 qualité de procureur. Je serai bref.
26 M. CVIJETIC : [interprétation] Toutes mes excuses, Monsieur le Président.
27 Le document dont je viens de traiter, le document 65 ter numéro 1355, j'en
28 demande le versement au dossier en tant que pièce de la Défense.
Page 1634
1 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui. Ce document est admis et
2 enregistré.
3 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] En tant que pièce 1D43, Monsieur le
4 Président, Messieurs les Juges.
5 M. CVIJETIC : [interprétation] A présent, je demanderais que l'on soumette
6 au témoin le document 65 ter numéro 1119. Le voici. Bien.
7 Q. Monsieur Delic, ce document concerne une affaire criminelle. C'est donc
8 la page de garde du dossier concernant cette affaire qui émane du poste de
9 sécurité publique de Sanski Most. Et l'affaire vous a été transmise. Voyons
10 de plus près ce document. Pouvez-vous me dire de quelle affaire il était
11 question à la lecture du texte que vous avez sous les yeux ? Vous voyez le
12 nom des victimes ?
13 R. Ce nom ne me rappelle rien.
14 Q. Examinez la page suivante, dont je demande l'affichage. Je demande que
15 l'on fasse défiler le texte en version anglaise pour voir le haut de la
16 page. Nous avons vu le bas de la page.
17 Vous voyez la signature ? C'est bien votre signature ? Vous la reconnaissez
18 ?
19 R. Oui.
20 Q. Donc vous avez reçu cette plainte, et vous dites qu'il s'agit d'une
21 plainte contre X et vous demandez au poste de sécurité publique d'œuvrer à
22 l'identification de l'auteur de cet acte, n'est-ce pas ?
23 R. Oui.
24 Q. Et si je ne me trompe, il s'agit de la procédure habituelle dans des
25 cas de ce genre, n'est-ce pas ?
26 R. Oui.
27 Q. Je demanderais maintenant l'affichage de la page suivante, en anglais
28 également.
Page 1635
1 Comme vous pouvez le voir, le poste de sécurité publique a traité
2 cette plainte contre X, et on trouve dans ce texte la description de l'acte
3 criminel en question, n'est-ce pas ?
4 R. Oui.
5 Q. Nous avons déjà discuté des plaintes contre X. Mais la raison pour
6 laquelle j'ai choisi plus particulièrement ce document, on la trouve à la
7 page suivante de ce document intitulé "Note de service." Et je demande
8 l'affichage de cette page. Le texte qui s'affiche à l'instant est assez peu
9 lisible. Etes-vous en mesure de lire le deuxième paragraphe pour le moins ?
10 R. Oui.
11 Q. Veuillez prendre connaissance des quatre ou cinq premières lignes de ce
12 deuxième paragraphe, après quoi je vous poserai ma question. Avez-vous lu
13 ce passage ?
14 R. Oui.
15 Q. Donc, l'inspecteur de la police civile - nous verrons son nom au niveau
16 de la signature au bas de la page plus tard pour savoir si vous le
17 connaissez - il identifie qu'un acte criminel a été commis contre un
18 Musulman, et déclare que ce sont des membres de la 4e Compagnie d'appui
19 commandée par Mirko Stupar. C'est bien ce qui est écrit ici, n'est-ce pas,
20 et le nom d'un certain Dzevar est mentionné. Je suis sûr que vous le
21 connaissez.
22 R. Oui.
23 Q. Mais ce qui est important, c'est de constater qu'on lit ici que cette
24 compagnie a été transférée, elle a été mutée à Bosanski Brod. Donc l'auteur
25 du texte est dans l'incapacité de s'entretenir avec les membres de cette
26 unité, mais il a décidé de continuer le travail en effectuant un certain
27 nombre de tâches qu'il est en mesure d'effectuer, et vous constatez à la
28 lecture du texte qu'il interroge les voisins, n'est-ce pas ? Vous voyez ça
Page 1636
1 au bas de la page ?
2 R. Oui.
3 Q. Et au milieu du paragraphe que je vous ai soumis et qui est sur l'écran
4 face à vous, vous lisez, n'est-ce pas, que cet inspecteur établit un lien
5 entre l'acte en question et une tentative de destruction de la mosquée de
6 Majdan de la part de l'unité susmentionnée. Alors, voici la question que je
7 souhaitais vous poser en rapport avec ce passage du texte.
8 M. CVIJETIC : [interprétation] Je demande d'ailleurs immédiatement
9 l'affichage de la fin de ce document, deux ou trois pages plus loin, pour
10 qu'on voie la signature aussi bien en B/C/S qu'en anglais.
11 Q. Et, Monsieur Delic, je vous indique que la signature est celle d'un
12 certain Zdravko Savanovic. Connaissez-vous cet homme peut-être ?
13 R. Oui.
14 Q. La question que je vous pose est la suivante : qu'est-ce qui relevait
15 des pouvoirs de cet inspecteur dans une situation telle que celle-là ? Tout
16 semble l'avoir dépassé, avoir échappé à son contrôle et même son mandat;
17 est-ce que j'ai raison ?
18 R. Oui.
19 Q. Et je pense que ceci s'applique également à vous, n'est-ce pas ?
20 R. Oui.
21 Q. Donc la seule possibilité qui restait, c'était que les organes
22 militaires chargés devraient prendre la suite, prendre leurs
23 responsabilités; c'est bien ça ?
24 R. Oui.
25 Q. Je ne vois aucune preuve ou élément de preuve écrit de cela. Donc, nous
26 pouvons seulement supposer que c'est comme ça que l'on procède. Vous êtes
27 d'accord ?
28 R. Oui, je suppose que c'est ce qui s'est passé.
Page 1637
1 M. CVIJETIC : [interprétation] Bien. Monsieur le Président, je demande de
2 présenter ce document comme pièce de la Défense.
3 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui. Il est admis et reçoit une cote.
4 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce 1D44.
5 M. CVIJETIC : [interprétation] Bien.
6 Q. Monsieur Delic, je voudrais maintenant demander que l'on présente le
7 document suivant, 1D00-4646. Voyez-vous cela, Monsieur Delic ?
8 R. Oui, c'est bien cela.
9 Q. Ici également, vous pouvez voir la manche. Est-ce que vous pourriez
10 reconnaître, d'après les noms des personnes dont il est question, de quoi
11 il s'agit ?
12 R. Oui.
13 Q. Si je ne trompe pas, les victimes ici sont des Musulmans ou des
14 Croates. Tâchez de m'aider, s'il vous plaît. Je lis Emil Cengic --
15 R. Ici nous parlons de victimes d'origine croate.
16 Q. Oui, mais les auteurs, c'étaient des Serbes, n'est-ce pas ?
17 R. Oui.
18 Q. Bon. Alors, voyons la page suivante. Examinons un peu le rapport. On
19 peut voir que les auteurs étaient des Serbes. Vous verrez avec moi, quand
20 je dis qu'ils ont d'abord fait l'objet d'une instruction de la part du SJB
21 de Sanski Most, et je suppose que vous aussi, vous avez pris part à la
22 procédure. Incidemment, est-ce que vous pouvez vous rappeler ?
23 R. Le rapport pénal a été reçu au bureau du procureur de Sanski Most, et
24 je suppose qu'on a exercé des poursuites. Je ne me rappelle pas des
25 détails, mais je suppose que c'est ça qui s'est passé.
26 Q. Mais vous reconnaissez l'affaire ?
27 R. Oui.
28 M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je présente le
Page 1638
1 présent rapport pénal ainsi que ses annexes en tant que pièce.
2 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui.
3 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera donc la pièce 1D45, Monsieur le
4 Président.
5 M. CVIJETIC : [interprétation] Bien.
6 Pourrions-nous maintenant voir le rapport pénal suivant, 1D00-3142.
7 [Le conseil de la Défense se concerte]
8 M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, permettez-nous juste
9 de vérifier et de voir pourquoi ceci n'a pas été saisi, bien que d'après
10 les renseignements dont je dispose, il aurait dû l'être. Mais dans
11 l'intervalle, voyons le document suivant, le 2D03-0074. Voilà. C'est bien
12 ce document-ci.
13 Monsieur le Président, il s'agit là du moment où -- non, en fait, nous en
14 sommes maintenant arrivés aux documents qui ne sont pas traduits et que
15 vous avez également mentionnés.
16 Q. Monsieur Delic, ceci est un rapport pénal contre X, contre un auteur
17 inconnu. La victime était Tado Ilicic de Kruhar, et j'ai trouvé dans le
18 dossier qu'il était --
19 L'INTERPRÈTE : Inaudible
20 M. CVIJETIC : [interprétation]
21 Q. Il semble que cette personne ait été un Serbe.
22 R. Je pense que cette personne était d'origine ethnique croate.
23 M. CVIJETIC : [interprétation] Je voudrais maintenant voir le reste du
24 rapport pénal pour établir s'il satisfait à toutes les conditions voulues.
25 Q. On lit :
26 "Rapport pénal contre auteur inconnu, contre X."
27 Il y a là une description des crimes commis et il est fait mention
28 également des éléments de preuve matériels, n'est-ce pas ?
Page 1639
1 R. Oui.
2 M. CVIJETIC : [interprétation] Passons maintenant à la page suivante, s'il
3 vous plaît.
4 Q. Comme vous le voyez, ce sont là des notes officielles, et ce type de
5 note officielle, d'habitude, est en général annexé à un rapport pénal qui a
6 trait à l'audition de témoins, et cetera, n'est-ce pas ?
7 R. Oui.
8 M. CVIJETIC : [interprétation] Page suivante, s'il vous plaît.
9 Q. Il s'agit-là d'un document qui est bien signé par vous, n'est-ce pas ?
10 R. Oui.
11 Q. Vous rappelez-vous ce document ? Vous avez reçu le rapport d'enquête
12 sur les lieux et il vous a été transmis par la police, n'est-ce pas ?
13 R. Oui.
14 Q. Et j'en conclus de ceci, que vous avez donné des ordres à la police,
15 n'est-ce pas ?
16 R. Oui.
17 Q. Voyons la page suivante qui contient le rapport d'enquête sur les
18 lieux. Est-ce que ceci est bien un rapport d'enquête sur les lieux ? Il
19 n'est pas très lisible.
20 R. Oui, c'est bien cela.
21 Q. Monsieur Delic, seriez-vous d'accord avec moi quand je dis que ce
22 rapport pénal répond à toutes les conditions juridiques voulues, compte
23 tenu de la qualité des procédures qui l'ont précédées; c'est bien cela ?
24 R. Oui.
25 M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je suis informé du
26 fait que -- non, excusez-moi. Je voudrais tout d'abord demander le
27 versement de ce document. Non, il faut d'abord lui attribuer une cote
28 provisoire MFI parce qu'il n'est pas traduit. Est-ce que vous pouvez
Page 1640
1 accepter cela ?
2 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Maître Cvijetic, j'avais l'impression
3 que ce lot de documents qui n'existent qu'en B/C/S pour le moment, c'était
4 ça que vous alliez faire - je crois que vous avez été d'accord pour le
5 faire lorsqu'on en a parlé ce matin - c'était de confronter les témoins
6 avec les parties pertinentes de ces documents et de les faire lire en B/C/S
7 au témoin. Et en en donnant lecture, nous obtiendrions l'interprétation
8 donnée par les interprètes, de sorte qu'il ne serait pas nécessaire de les
9 faire admettre comme éléments de preuve, et il ne serait pas nécessaire de
10 les faire traduire. Donc nous pourrions faire d'une pierre deux coups,
11 réaliser différents objectifs en procédant de la sorte, plutôt que de les
12 faire d'abord verser au dossier comme éléments de preuve et ensuite,
13 intégralement traduire.
14 Donc pourriez-vous nous dire si vous souhaitez procéder en suivant
15 cette méthode. Je voudrais également vous demander, Maître Cvijetic,
16 maintenant que nous parlons de cela, je voudrais vous demander de nous
17 indiquer où nous allons avec tout cela. Il n'est tout simplement pas
18 certain de ce que la Chambre est censée tirer de tout ceci, de tous ces
19 éléments concernant l'autorité des diverses forces de police pour enquêter
20 sur des crimes et délits. Je pense que j'ai saisi un tableau assez complet
21 de la façon dont il y avait un partage entre la police militaire et la
22 police civile, et vous avez déployé de grands efforts pour montrer ceci à
23 la Chambre. Mais s'il y a autre chose que vous souhaitez établir, dans ce
24 cas-là, dites-le-nous, parce que je pense que sans cela il n'est pas
25 nécessaire de nous présenter davantage d'éléments de preuve portant sur le
26 même point.
27 M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je ne traite pas de
28 la définition du mandat en quoi que ce soit. J'ai fini en présentant des
Page 1641
1 éléments de preuve à ce sujet. Là, je traite des crimes ou délits, enfin,
2 des infractions prises une à une. Il reste plus d'un cas, et je vais
3 expliquer bientôt quel est l'objectif. En fait --
4 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Oui, Maître Cvijetic, je voudrais
5 également vous rappeler qu'apparemment vous avez déjà utilisé deux heures
6 et 16 minutes de votre temps. Donc je pense qu'il vous est demandé de
7 commencer à terminer votre contre-interrogatoire.
8 [Le conseil de la Défense se concerte]
9 M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
10 je traite maintenant de points qui ont été évoqués par le bureau du
11 Procureur. La Procureur a posé au témoin des questions concernant la
12 qualité du travail accompli par les services du MUP dans des organes, tout
13 particulièrement lorsqu'il s'agit d'auteurs d'infractions inconnus. J'en
14 aurai fini très rapidement sur ce point. Il me reste juste un cas à
15 analyser, mais je peux m'en passer parce que ces dossiers ne sont pas
16 traduits; donc il n'y a pas grand-chose que l'on puisse faire à ce sujet
17 maintenant. Si je vais document par document et si je commence à en donner
18 lecture, ça ne sera pas satisfaisant. Donc, permettez-moi simplement de
19 traiter d'un dernier cas, et j'en viendrai à ce moment-là à l'essentiel de
20 mon contre-interrogatoire et de son but.
21 [Le conseil de la Défense se concerte]
22 M. CVIJETIC : [interprétation]
23 Q. Maintenant, nous nous sommes mis d'accord en ce qui concerne le
24 précédent document, n'est-ce pas, en ce qui concerne sa qualité, elle
25 répond bien à tous les critères posés ?
26 R. [aucune interprétation]
27 M. CVIJETIC : [interprétation] Votre Honneur, Monsieur le Président,
28 Messieurs les Juges, je voudrais à ce moment-là que ce document reçoive une
Page 1642
1 cote pour identification jusqu'à ce qu'il ait pu être traduit.
2 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Le conseil ne semble pas se rendre
3 compte de ce que la Chambre s'est efforcée de faire ce matin, à savoir que
4 la question de la traduction de ces documents n'est pas quelque chose
5 d'automatique, qu'elle ne va pas avoir lieu. Nous comprenons de ce qui a
6 été dit ce matin que le conseil souhaite présenter des parties du contexte
7 de ces documents au témoin. Je suppose que ceci peut se faire à propos des
8 autres témoins. Et ça ne va pas plus loin. Donc la question de
9 l'attribution d'une cote aux fins d'identification ne se pose pas parce
10 qu'on ne s'attend pas à ce que ce document, dans sa totalité, puisse jamais
11 devenir une pièce à conviction.
12 M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, ces documents sont
13 très importants pour nous et ils finiront par être traduits en fin de
14 compte. Je ne vois aucune raison pour laquelle il ne devrait pas être
15 possible de les présenter comme éléments de preuve parce que nos clients
16 sont poursuivis pour ne pas avoir agi au moment où des crimes étaient en
17 train d'être commis contre des non-Serbes.
18 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Cvijetic, la Chambre accepte
19 le fait que dans un certain nombre de cas où l'auteur était connu, ces
20 crimes ont fait l'objet d'enquêtes et de poursuites. Ceci n'est pas
21 contesté par l'Accusation. Vous nous avez présenté plein d'éléments pour
22 démontrer votre thèse. Vous avez également montré que dans les cas où
23 l'auteur n'était pas connu, des enquêtes étaient entreprises dans certains
24 cas. Pour finir, vous nous avez montré que la police civile et la police
25 militaire avaient des compétences qui se chevauchaient dans certains cas,
26 mais que d'une façon très générale, une séparation ou division était suivie
27 entre ces deux unités, c'est-à-dire la police civile et la police
28 militaire.
Page 1643
1 Toutefois, si j'ai bien compris ce que dit l'Accusation, elle dit que si
2 des crimes commis par des Serbes contre des Musulmans ou des Croates ont
3 effectivement fait l'objet d'examen et, dans certains cas, de poursuites,
4 alors l'Accusation soutient que ceci a été fait beaucoup trop rarement.
5 Ceci ne traduit pas le nombre des crimes. Donc de leur point de vue, un
6 très grand nombre de crimes aurait dû avoir été commis -- non, excusez-moi,
7 aurait dû avoir fait l'objet d'une enquête et de poursuites.
8 La question, telle que je la comprends, n'est pas de savoir si les
9 crimes ou délits commis par des Serbes ont fait l'objet d'enquêtes et d'une
10 procédure; ceci demeure sans aucun doute. La question est de savoir si ceci
11 a été fait dans tous les cas où une telle enquête et une telle poursuite,
12 du point de vue du Procureur, aurait dû faire l'objet d'enquêtes et de
13 poursuites.
14 Alors, il faut que maintenant vous en terminez très rapidement,
15 Maître Cvijetic, parce que nous sommes déjà en train de dépasser le temps
16 que vous aviez vous-même annoncé, et nous devons encore progresser et
17 passer au contre-interrogatoire de Me Pantelic. Je vous remercie.
18 Mme KORNER : [interprétation] Il est très difficile de vous voir,
19 Monsieur le Président, de l'endroit où je me trouve, mais j'ai l'impression
20 que je devais dire que ce n'était pas juste cela. Comme vous le verrez,
21 même si une enquête ou une poursuite a été commencée, très souvent ce n'est
22 pas allé plus loin. Donc, c'était légèrement plus que le fait qu'ils n'ont
23 pas poursuivi ou qu'ils n'ont pas investigué du tout.
24 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie pour avoir
25 interprété mon interprétation.
26 Mais, Maître Cvijetic, les choses, telles que je les vois, c'est ce
27 que vous devez démontrer, exposer.
28 M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, vous avez
Page 1644
1 anticipé sur mes arguments et ce vers quoi je tends, mais j'ai essayé
2 d'utiliser des exemples plus pratiques pour démentir les mots utilisés par
3 le Procureur. Les cas suivants que j'ai distingués, parmi d'autres,
4 comptent des auteurs inconnus, parce que l'auteur n'a pas été identifié.
5 Des auteurs non-serbes ont commis un crime contre un autre auteur non-serbe
6 ou croate. Si vous ne pensez pas que ceci rentre dans le domaine de ce dont
7 nous devrions traiter, je vais à ce moment-là mettre fin à ce contre-
8 interrogatoire de ce témoin, et je repasserai à mon confrère, Me Pantelic,
9 qui va traiter du reste des rapports au pénal. Etant donné que je n'ai plus
10 beaucoup de temps, permettez-moi de poser une question de principe à mon
11 éminent ami Delic sur ce que vous avez mentionné.
12 Q. Monsieur Delic, vous avez dit qu'en 90 % des cas, les rapports au
13 pénal avaient été présentés au poste de sécurité publique, est-ce que c'est
14 exact ?
15 R. Oui.
16 Q. En d'autres termes, dans 10 % des cas, et la Loi sur la procédure
17 pénale le stipule, les procédures pénales peuvent effectivement et ont
18 effectivement été lancées. Des rapports criminels ont été présentés par
19 tous les autres citoyens, les personnes victimes, les organisations. Vous
20 pouvez personnellement apprendre ce que vous voulez concernant un crime.
21 Vous pouvez recevoir un appel ou un message anonyme selon lequel un crime a
22 été commis. Ma question est la suivante : parmi les 10 %, est-ce que vous
23 avez eu un seul cas dans lequel vous avez appris les choses d'une façon
24 différente; et si ça a été le cas, dans l'affirmative, est-ce que ça a
25 également été le cas lorsque la police n'a pas poursuivi ?
26 R. Non.
27 Q. Ma question suivante est celle-ci : dans le travail de la police, avez-
28 vous observé une approche sélective pour traiter des cas ? En d'autres
Page 1645
1 termes, est-ce que la police a procédé dans un cas d'une certaine manière
2 si la victime n'était pas serbe d'origine, et d'une façon différente
3 lorsque la victime était d'origine serbe ?
4 R. Non, je ne peux pas dire que j'ai eu connaissance de telles pratiques.
5 Q. Ma question était de savoir si vous aviez observé des différences dans
6 leur travail ?
7 R. Non, non.
8 Q. Très bien. Je vous remercie, Monsieur Delic. Il y a comme un proverbe
9 qui est que tout le monde a tout compris ou est malin après que l'événement
10 ait eu lieu, ou le lundi matin lorsqu'on revient à l'audience. Après tant
11 d'années de guerre, devant ce Tribunal, devant les juridictions de la BiH,
12 on essaye de faire la lumière sur un grand nombre de cas, d'infractions qui
13 ont eu lieu au cours de la guerre, et de très nombreux cas n'ont pas encore
14 été ni détectés ni même découverts; est-ce que c'est vrai ?
15 R. Oui.
16 Q. L'approche qui dit qu'il y a toujours possibilité d'amélioration est
17 effectivement correcte, il y a effectivement toujours des possibilités
18 d'améliorer les choses. Toutefois, je vous pose la question maintenant en
19 tant que procureur d'après-guerre. Essayez de m'aider. Quand avez-vous
20 cessé d'exercer en tant que membre du ministère public, en tant que
21 procureur ?
22 R. En janvier 2008.
23 Q. Est-ce que vous avez des renseignements qui ont trait à ces années
24 2005, 2006, 2007 ou 2008 concernant le pourcentage de crimes qui ont été
25 découverts ou élucidés en ce qui concerne les crimes et délits qui ont été
26 commis ?
27 R. Pour autant que je puisse m'en souvenir, le pourcentage était d'environ
28 50 % pour les auteurs qui ont été retrouvés et c'était un bon pourcentage à
Page 1646
1 l'époque.
2 Q. Donc, vous seriez satisfait avec le pourcentage de 50 % même en 2008,
3 n'est-ce pas ?
4 R. Oui, effectivement.
5 Q. Est-ce que vous avez comparé ça avec les moyennes européennes ?
6 R. Je n'ai pas ces statistiques.
7 Q. Donnez-moi un chiffre au pifomètre. Peut-être vous pourriez, enfin.
8 Est-ce que ce serait très différent du pourcentage que nous avons ici ?
9 R. Je pense que la situation est plus ou moins la même.
10 Q. Et ma toute dernière question pour vous, Monsieur le Témoin, est la
11 suivante : partant des conditions stériles qui existaient, il est facile de
12 réexaminer les conditions dans lesquelles vous travailliez à l'époque. Est-
13 ce que ce serait exagérément ambitieux d'attendre de Mirko Vrucinic et de
14 la police en 1992, vous en tant que procureur du ministère public, d'avoir
15 réalisé des résultats plus élevés dans les conditions qui régnaient à
16 l'époque ? Est-ce que ceci aurait été exagérément ambitieux ?
17 R. Oui, je pense que oui.
18 Q. Je vous remercie beaucoup, Monsieur Delic.
19 M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, ceci met fin à mon
20 contre-interrogatoire, et je souhaite remercier M. Delic de sa coopération.
21 Contre-interrogatoire par M. Pantelic :
22 Q. [interprétation] Bonjour à vous. Monsieur le Procureur Monsieur Delic,
23 je m'appelle Igor Pantelic. Je représente les intérêts de Stojan Zupljanin
24 dans ce prétoire. Pour reprendre le thème qui a été abordé par les Juges de
25 la Chambre, à la lumière des questions posées par mon confrère de
26 l'Accusation et le conseil de la Défense, si je souhaite vous parler de ce
27 qui relève de la compétence de la police c'est de retrouver les auteurs des
28 crimes, entre autres, et ceci s'inscrit dans les dispositions du code de
Page 1647
1 procédure pénale, la police est censée être au service du procureur et doit
2 répondre aux ordres du procureur lorsqu'il s'agit de rassembler des
3 éléments d'information et d'aller inspecter les lieux du crime, est-ce que
4 vous êtes d'accord avec moi sur ce point ?
5 R. Oui.
6 M. PANTELIC : [interprétation] Ma consoeur, Mme Korner -- Q. Pardonnez-
7 moi. Je dois résoudre une question ici.
8 M. PANTELIC : [interprétation] Mon éminente consoeur, Mme Korner, est en
9 train de mélanger des pommes et des poires pour ce qui est de la
10 présentation des faits. La position de la Défense est la suivante : le
11 devoir de la police est d'agir conformément et sur les ordres donnés ou
12 instructions données par les instances judiciaires; le procureur, le juge
13 d'instruction est, dans certains cas, le juge qui mène le procès, qui
14 dirige le procès. Ce n'est pas le cas ici qu'il y ait ou non un certain
15 nombre de procédures pénales qui sont arrivées à terme, à savoir qu'il y a
16 eu une issue au procès et qu'il y ait eu un jugement qui a été rendu à
17 terme, non. L'élément-clé et la thèse de l'Accusation se résument à ceci :
18 si mon client, prétendument, M. Zupljanin, n'a pas agi conformément aux
19 textes de lois et procédures applicables par la profession, nous allons
20 vous montrer, en montrant des éléments de preuve à ce témoin, que la police
21 a agi - je veux parler de Sanski Most maintenant - que la police a agi en
22 pleine conformité avec la juridiction et la législation en vigueur à
23 l'époque, conformément aux normes de la profession et conformément aux
24 instructions et demandes des organes ou instances judiciaires, comme le
25 juge d'instruction --
26 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Ecoutez, Maître Pantelic, vous êtes
27 vraiment à la limite, Maître Pantelic, entre témoigner vous-même et obtenir
28 des éléments d'information de la part du témoin. Faites attention --
Page 1648
1 Mme KORNER : [interprétation] Ça n'est pas un cas limite. Il est bien au-
2 delà de la limite, surtout en présence du témoin. De surcroît, Me Pantelic
3 n'a pas été invité par vous, Monsieur le Juge, à procéder de la sorte. Je
4 l'ai dit à maintes et maintes reprises. Ce n'est pas à la Défense de faire
5 des discours sur quelle est la teneur de leur thèse, ni ce que les éléments
6 de preuve montrent. Leur rôle consiste à contre-interroger le témoin qui a
7 été appelé pour le contre-interrogatoire du Procureur.
8 M. PANTELIC : [interprétation] Après le discours de l'Accusation, j'ai
9 fourni des éléments d'information aux Juges de la Chambre, donc c'est un
10 argument de suivi par rapport à ce que ma consoeur, Mme Korner, vient de
11 dire.
12 Donc, Monsieur le Juge, je repars en arrière et je souhaite parler des
13 documents que j'ai ici et qui ont été abordés ce matin. Il s'agit de
14 documents vitaux pour la Défense pour montrer que la police a fait peser
15 des charges pénales sur des auteurs connus et inconnus, que la police a agi
16 conformément avec les normes de la profession et sur instructions du
17 procureur général et du juge d'instruction. M. Delic vient de le confirmer.
18 Quel est le rôle de la police ? La police n'a pas pour rôle de mettre en
19 accusation, la police n'a pas pour rôle de juger et de rendre des
20 jugements, non. Ceci n'est pas le cas.
21 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Veuillez m'aider en ceci, Maître
22 Pantelic.
23 M. PANTELIC : [interprétation] Oui, oui.
24 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Par rapport à ce que le Juge Harhoff et
25 par rapport à ce que Mme Korner vient de dire, est-ce que vous présentez
26 des arguments sur les raisons pour lesquelles ces documents que nous avons
27 évoqués à deux reprises devraient être présentés comme éléments de preuve
28 et admis au dossier; si tel est le cas, ce serait utile à nos yeux que vous
Page 1649
1 vous circonscriviez à cela simplement, comme ceci a été signalé, parce que
2 sinon, vous semblez octroyer.
3 M. PANTELIC : [interprétation] J'ai parfaitement compris, mais ce qui
4 m'amène à un autre point, cette liasse de documents a été déposée - à vos
5 souhaits - a été communiquée à la Défense le 12 octobre. Il y a environ 200
6 pages. Donc, avec votre permission et conformément à vos instructions, si
7 vous m'amenez à me retrouver dans cette situation-là, je dois prolonger mon
8 contre-interrogatoire, parce que ceci est extrêmement important pour notre
9 défense. Dans tous ces documents, nous avons des pièces à conviction, nous
10 avons des preuves que mon client -- en réalité, pour être plus précis, que
11 des membres de la police de Sanski Most ont agi pleinement en conformité
12 avec la loi. Donc, je devrais être autorisé à apporter des commentaires --
13 ce témoin doit pouvoir commenter certains passages de ce document, avec
14 votre permission.
15 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Mais si nous tenons compte de votre
16 approche, les Juges de la Chambre ont indiqué ce matin que vous devriez
17 suivre nos consignes, vous devez présenter ces éléments de preuve aux Juges
18 de la Chambre. Je n'ai pas entendu de questions que vous auriez posées au
19 témoin qui traitent d'un quelconque passage des documents dont vous
20 disposez, vous avez parlé de façon générale, au sens large. Vous avez parlé
21 de l'incidence de cette pléthore de documents. Mais est-ce que vous avez
22 posé une question précise au témoin, parce qu'il me semble que c'est la
23 seule façon dont nous allons pouvoir traiter le problème. S'il y a un
24 passage du document, retrouvez-le et posez la question au témoin. Les
25 interprètes vont le traduire en anglais et ensuite nous passerons au
26 passage suivant. Est-ce que ceci vous pose un problème, le fait de procéder
27 de la sorte ?
28 M. PANTELIC : [interprétation] Pas du tout, Monsieur le Président. Je vais
Page 1650
1 suivre toutes vos instructions et je vais suivre ceci au pied de la lettre,
2 mais l'idée que j'avais, c'était simplement de présenter des arguments en
3 guise de suivi par rapport aux questions posées par mon confrère, M.
4 Cvijetic, parce que M. le Juge Harhoff a réagi et a indiqué que ceci, peut-
5 être, n'avait pas de lien particulier avec cette affaire-ci.
6 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bon. Pour gagner du temps, posez votre
7 première question, et ensuite nous pouvons poursuivre.
8 M. PANTELIC : [interprétation]
9 Q. Monsieur Delic, nous avons ici un document qui a été saisi dans le
10 système électronique du prétoire, c'est la pièce 2D03-0063.
11 Monsieur Delic, regardons ceci et assurons-nous d'une chose. La première
12 page porte le numéro 0048-2336. Je ne dispose pas de traduction du
13 document, donc tout ceci doit être consigné au compte rendu d'audience.
14 Conviendrez-vous avec moi qu'il s'agit là d'un rapport final qui porte la
15 date du 22 février 1993, et l'affaire pénale dont il est question ici met
16 en cause un auteur inconnu pour un crime conformément à l'article 172,
17 paragraphe 1, du code de procédure pénale de la République de Bosnie-
18 Herzégovine, et Tehvid Smajlovic est la partie lésée, défenderesse. En
19 réalité, Tehvid Smajlovic est la victime.
20 M. PANTELIC : [interprétation] Pouvons-nous voir la page suivante de ce
21 document, s'il vous plaît, les deux derniers chiffres sont le 37.
22 Pardonnez-moi.
23 Q. Est-ce que ceci est exact ?
24 R. Oui.
25 Q. Ici nous avons ce rapport pénal qui a été remis par la police de Sanski
26 Most; est-ce exact ?
27 R. Oui.
28 M. PANTELIC : [interprétation] Passez à la page suivante, s'il vous plaît,
Page 1651
1 28. Mon confrère, Me Zecevic, vient de me donner une consigne dans ce sens.
2 Regardons la page 37, s'il vous plaît. C'est mon erreur.
3 Q. Regardez la description du crime :
4 "Le 15 décembre 2002, un auteur inconnu a tiré avec son Zolja, a tiré sur
5 une maison qui était occupée par plusieurs personnes à l'époque, et Tehvid
6 Smajlovic a été tué à ce moment-là."
7 R. Oui.
8 Q. Un Zolja, c'est un lance-roquettes à main, n'est-ce pas ?
9 R. Oui.
10 Q. M. Smajlovic est d'appartenance ethnique musulmane, n'est-ce pas ?
11 R. Oui.
12 Q. Et le chef de la police à Sanski Most, Mirko Vrucinic, c'est lui qui a
13 signé ce rapport, n'est-ce pas ?
14 R. Oui.
15 Q. Il s'agit là d'un document qui a été signé par vous, n'est-ce pas ?
16 R. Oui.
17 Q. Vous informez le poste de police de Sanski Most que vous avez reçu le
18 rapport d'enquête sur les lieux qui est daté du 16 décembre 1992 à propos
19 de cet événement, n'est-ce pas ?
20 R. Oui.
21 Q. Et dans la dernière partie de ce document, ici nous avons le télégramme
22 qui a été envoyé par la police à Sanski Most, signé Mirko Vrucinic, et
23 parle de l'événement en question; est-ce exact ?
24 R. Oui.
25 Q. Il s'agit là d'une lettre qui a été rédigée par le juge d'instruction
26 Milena Zoric, je crois; est-ce exact ?
27 R. Oui.
28 Q. Et ceci fait parti du même dossier, n'est-ce pas, d'autres personnes
Page 1652
1 sont citées ici; Smajlovic, Mujaga, Dzevad --
2 R. Je vais vous aider.
3 Mme KORNER : [interprétation] Ecoutez, je demande simplement si ces écrans
4 en fait sont diffusés sur les écrans qui sont publics, parce que les noms
5 des victimes sont cités ici dans ce document, ainsi que d'éventuels
6 auteurs. Cela fait un certain temps que cela dure, et je n'ai pas vraiment
7 intégré cela. Je crois qu'il est trop tard pour expurger tout cela, mais
8 peut-être que Me Pantelic peut faire un petit peu attention lorsqu'il cite
9 des noms. Bien évidemment, nous ne pouvons pas comprendre.
10 M. PANTELIC : [interprétation] Non, je ne peux pas faire…
11 Q. Dans ce document-ci, vous ne pouvez pas le voir, mais on peut lire que
12 Tehvid Smajlovic a été tué et Mujaga ainsi que Dzevad ont été grièvement
13 blessés; est-ce exact?
14 R. Oui.
15 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Peut-être que je peux vous suggérer
16 une idée. Peut-être que l'Accusation pourrait envisager une autre approche
17 à cette question, plutôt que de perdre le temps, votre temps, le temps de
18 l'Accusation, le temps des Juges de la Chambre et des interprètes, si vous
19 remettez l'ensemble des documents au témoin, vous demandez au témoin de
20 lire tous ces documents, ainsi il peut nous dire combien d'incidents et
21 combien de cas de ce type il existe, et ensuite demandez-lui de le
22 confirmer une fois pour toute, que les procédures ont été menées
23 conformément aux règlements. Parce que c'est cela où vous voulez en venir,
24 plutôt que d'avoir à passer tout en revue.
25 M. PANTELIC : [interprétation] Je suis tout à fait d'accord avec vous.
26 Alors je vous soumets la proposition suivante : étant donné que je vais
27 maintenant aborder d'autres questions, mais je m'adresse à l'Accusation,
28 étant donné que c'est l'Accusation qui nous a fourni l'ensemble des
Page 1653
1 documents, dans l'intervalle, ils peuvent faire une copie, parce que tous
2 sont en B/C/S. Ils peuvent faire des copies et les remettre au témoin. Et
3 d'ici demain, il peut tout lire, et à ce moment-là, nous ne serons pas
4 obligés d'aborder les documents dans le détail, mais dire que dans les
5 grandes lignes et de façon générale, comme l'a dit le Juge Harhoff, je
6 crois que c'est une façon pratique de procéder.
7 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Mais j'ai besoin de l'acceptation de
8 Mme Korner sur ce point, parce que sinon, nous ne pouvons pas le faire.
9 Mme KORNER : [interprétation] Oui, nous n'avons pas d'objection. La seule
10 question qui se pose c'est qu'il faudra un tout petit peu de temps pour
11 imprimer ces documents pour les remettre au témoin. Est-ce que le témoin
12 doit les regarder pendant la nuit de façon à pouvoir être en état de nous
13 en parler demain matin ?
14 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Oui, je pense que ce serait la
15 solution la plus pratique, plutôt que de lui demander de le faire
16 maintenant, étant donné que le témoin revient de toute façon demain. Autant
17 lui demander - si vous êtes d'accord, Monsieur Delic, est-ce que vous
18 seriez d'accord de regarder tous ces documents cette nuit ?
19 Mme KORNER : [interprétation] Alors, comment allons-nous lui communiquer ?
20 Nous ne pouvons évidemment pas lui parler. Comment pouvons-nous procéder ?
21 Nous pouvons peut-être remettre ces documents au témoin --
22 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Ecoutez, vous pouvez le faire par
23 l'intermédiaire du Greffe, bien sûr.
24 Mme KORNER : [interprétation] Très bien. Nous le ferons ainsi.
25 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Alors, pour préciser tout cela, nous
26 vous remercions de votre coopération. Nous aimerions vous remercier,
27 Monsieur le Juge Delic, j'espère que vous n'aviez pas d'autres projets pour
28 ce soir. La question que nous souhaitons vous poser c'est celle-ci : si les
Page 1654
1 poursuites pénales qui ont été lancées dans ces affaires-là, si ces
2 procédures pénales étaient conformes aux règles et aux règlements en
3 vigueur à ce moment-là. Est-ce que c'est une question sur laquelle les
4 parties peuvent se mettre d'accord ?
5 M. PANTELIC : [interprétation] Oui.
6 Mme KORNER : [interprétation] Oui.
7 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Très bien.
8 M. PANTELIC : [interprétation] C'est de surcroît, comme M. Delic l'a fait
9 ce matin et cet après-midi, en réalité, quelques questions pourront peut-
10 être être posées eu égard à l'appartenance ethnique des auteurs, et cetera,
11 bien sûr.
12 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je souhaite, à ce moment-là, poser
13 une question sur les éléments statistiques de ces documents. Est-ce que
14 vous pouvez nous dire de combien d'affaires il s'agit, qui sont mentionnées
15 dans ces documents, sur quoi portent ces affaires, qui étaient les auteurs,
16 s'ils sont connus, et combien d'auteurs il y avait, dans combien de cas les
17 auteurs étaient-ils connus, dans combien de cas les victimes étaient-elles
18 connues, et dans combien de cas y a-t-il eu des poursuites judiciaires qui
19 ont été lancées, intentées, sur la base de ces rapports ou de ces plaintes
20 au pénal.
21 M. PANTELIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, bien sûr.
22 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Merci.
23 M. PANTELIC : [interprétation] Nous allons faire de notre mieux.
24 Q. Monsieur Delic, vous comprenez certainement très bien ces questions de
25 procédure, parce que vous êtes vous-même procureur. Donc c'est très rare
26 d'avoir ici un procureur à la barre des témoins.
27 Poursuivons. Monsieur le Procureur Delic, vous êtes diplômé de la faculté
28 de droit, vous avez obtenu votre diplôme de la faculté de droit en 1983;
Page 1655
1 est-ce exact ?
2 R. Oui.
3 Q. Après avoir reçu votre diplôme, vous avez travaillé dans une banque à
4 Prijedor; est-ce exact ?
5 R. Oui.
6 Q. Après quoi vous êtes devenu juge auprès du tribunal municipal de Sanski
7 Most.
8 R. Oui.
9 Q. En quelle année ?
10 R. En 1988. Au mois de novembre, je suis venu à ce tribunal.
11 Q. Très bien, très bien. Vous avez été nommé procureur général de la
12 municipalité en 1992; est-ce exact ?
13 R. Oui.
14 Q. De quel mois s'agissait-il ?
15 R. C'était sans doute à la fin du mois de mai.
16 Q. Est-ce que vous seriez d'accord avec moi si je vous dis lorsqu'il y
17 avait la République fédérative socialiste de Bosnie-Herzégovine, pour que
18 quelqu'un soit juge ou procureur général, dans 99,9 % des cas, cette
19 personne devait certainement être un membre de la Ligue des Communistes de
20 Yougoslavie?
21 R. Oui.
22 Q. Le rôle d'un juge ou d'un procureur général, dans tout système,
23 consiste à protéger l'ordre constitutionnel et juridique. Prenons l'exemple
24 des Etats-Unis, où le procureur agit au nom de l'Etat ou de la population.
25 Et lorsqu'il y a une monarchie, ce dernier agit au nom de la reine ou du
26 roi, et dans notre pays, le procureur agit toujours au nom de l'Etat ?
27 R. Oui.
28 Q. On ne met pas en doute le fait que la Republika Srpska a été créée le
Page 1656
1 30 janvier 1992.
2 L'INTERPRÈTE : Pardonnez-moi, je n'ai pas entendu la date.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Le 9 janvier 1992. Et la réponse était
4 affirmative.
5 M. PANTELIC : [interprétation]
6 Q. Et la constitution de la Republika Srpska a-t-elle été adoptée ?
7 R. Oui.
8 Q. Et la Loi sur le gouvernement de la Republika Srpska a été adoptée
9 aussi ?
10 R. Oui.
11 Q. Et comme mon confrère, Me Cvijetic, a abordé avec vous la question
12 d'une série de textes de lois et de règlements, donc le droit pénal qui
13 était adopté était le droit de l'ancien système qui a été intégré au
14 système juridique de la Republika Srpska; est-ce exact ?
15 R. Oui.
16 Q. Et c'était tout à fait légitime que des poursuites pénales puissent
17 être engagées contre des personnes ou des groupes de criminels qui se
18 livraient à une rébellion armée contre les autorités de la Republika
19 Srpska. Je veux parler de personnes qui prenaient les armes de façon
20 illégale ou de rébellion armée ou de personnes qui se regroupaient pour
21 former ou constituer un groupe de rébellion armée.
22 R. [aucune interprétation]
23 Q. C'est peut-être moi qui ai omis d'aborder cette question-là, mais je ne
24 sais pas si vous nous avez dit comment vous avez été nommé en mai 1992, qui
25 a été à l'origine de cela ?
26 R. J'ai expliqué qu'une réunion s'est tenue à Vlado dans le bâtiment du
27 tribunal, et Vlako Vrkes a dit que la décision avait été adoptée qui
28 précisait, entre autres, que j'avais été nommé procureur général de Sanski
Page 1657
1 Most.
2 Q. En mai 1992, étiez-vous un membre du SDS ?
3 R. Non.
4 Q. Avant mai 1992, étiez-vous un membre du SDS ?
5 R. Non.
6 Q. Depuis le mois de mai 1992, avez-vous jamais été un membre du SDS ?
7 R. Non.
8 Q. Etiez-vous un membre de la Ligue des Communistes avant ce moment-là ?
9 R. Avant la guerre, oui.
10 Q. Etiez-vous un membre d'un quelconque autre parti ?
11 R. Non.
12 Q. Je veux parler de l'année 1992.
13 R. Non, du tout.
14 Q. Donc vous avez été nommé par les dirigeants serbes de la municipalité
15 et vous étiez quelqu'un qui n'appartenait à aucun parti; c'est exact ?
16 R. Oui.
17 Q. Donc vous avez été nommé en tant que professionnel, pour être très
18 précis ?
19 R. Oui.
20 Q. Mais à l'époque vous n'aviez quasiment aucune expérience en matière
21 pénale, n'est-ce pas ?
22 R. Oui.
23 Q. Et à la lumière de l'évolution rapide des événements au mois de mai
24 1992, en fait, vous étiez confronté à de très grandes difficultés pour
25 mener à bien vos travaux sur le plan professionnel, à la fois compte tenu
26 de votre expérience professionnelle et compte tenu des événements qui
27 prévalaient à l'époque, n'est-ce pas ?
28 R. Oui.
Page 1658
1 Q. Le colonel Basara, le commandant de la 6e Brigade de la Krajina à
2 Sanski Most qui est venu témoigner ici, vous nous avez dit que vous le
3 connaissiez de nom, mais vous nous avez dit que vous ne l'avez jamais
4 rencontré en personne. La question que j'ai à vous poser est celle-ci : il
5 a confirmé, il y a d'autres éléments qui l'attestent, que la 6e Brigade de
6 la Krajina était composée de plus de 6 000 soldats; est-ce exact ?
7 R. C'est possible. Les chiffres que vous avez cités sont peut-être exacts.
8 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Maître Pantelic, vous semblez aborder un
9 autre sujet. Maintenant, il est 16 heures 15.
10 M. PANTELIC : [interprétation] Pour les besoins du compte rendu, Monsieur
11 le Président, je me suis entretenu avec mon confrère, Me Zecevic, il ne
12 s'agit pas d'une réclamation que je fais, il s'agit plutôt d'un avis, d'un
13 conseil, d'un souhait, je ne sais pas comment le dire. Nous avons eu
14 beaucoup de problèmes avec l'interprétation anglaise aujourd'hui. Je ne
15 connais pas le nom de ce monsieur qui est dans la cabine des interprètes.
16 Il s'agit de procédures pénales ici, et chaque mot et la formulation des
17 mots est très importante. Je souhaite simplement attirer l'attention des
18 Juges de la Chambre sur ce point. Nous ne sommes pas satisfaits de la
19 traduction anglaise du serbe vers l'anglais, du monsieur qui officiait dans
20 la cabine des interprètes aujourd'hui.
21 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur Delic, je voudrais vous
22 rappeler, comme je l'ai d'ailleurs fait déjà jeudi, que d'un jour à
23 l'autre, vous êtes encore un témoin tenu par une déclaration sous serment,
24 déclaration officielle, vous ne pouvez pas communiquer avec les conseils,
25 ni d'un côté, ni de l'autre, ni parler de votre déposition à qui que ce
26 soit en dehors de cette salle d'audience. Vous aurez probablement saisi,
27 d'après ce qui a été dit entre les Juges et les conseils, qu'il y a
28 certains documents qui vont vous être fournis par le Greffe pour que vous
Page 1659
1 puissiez les examiner ce soir. Donc nous allons maintenant suspendre
2 l'audience jusqu'à demain matin, dans cette salle d'audience, à 9 heures.
3 L'audience est suspendue.
4 [Le témoin quitte la barre]
5 --- L'audience est levée à 16 heures 17 et reprendra le mardi 20
6 octobre 2009, à 9 heures 00.
7
8
9
10
11
12
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28