Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 18 janvier 2010

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 05.

  5   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour

  6   à tous.

  7   Il s'agit de l'affaire IT-08-91-T, le Procureur contre Mico Stanisic et

  8   Stojan Zupljanin.

  9   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci, Madame le Greffière.

 10   Bonjour à toutes les personnes présentes. C'est la première audience après

 11   les vacances judiciaires. Je vous souhaite à tous une bonne année.

 12   J'ai appris ce matin quelque chose où on m'indique que la productivité est

 13   plus importante dans les pays où il fait plus chaud, donc étant donné que

 14   vous avez eu trois semaines de vacances, cela veut dire que vous êtes prêts

 15   à être plus productifs dans les mois à venir.

 16   Donc avant les vacances judiciaires, le témoin Donia était en train de

 17   déposer, c'était le contre-interrogatoire. Et à moins qu'il n'y ait

 18   d'autres questions administratives, nous allons reprendre le contre-

 19   interrogatoire.

 20   Mme KORNER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.

 21   Pour l'acte Accusation, Joanna Korner, Belinda Pidwell et Crispian Smith.

 22   Je vous souhaite une bonne année à tous. J'ai une question pour cette

 23   nouvelle année. Est-ce que nous allons avoir très bientôt quelques

 24   décisions rendues ?

 25   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Vous dites, très bientôt.

 26   Mme KORNER : [interprétation] Je veux dire demain.

 27   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Les décisions sont sur le point d'être

 28   rendues. Vous les aurez bientôt.

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  1   Mme KORNER : [interprétation] Je souhaite également dire que l'une de ces

  2   décisions a trait au témoin qui est censé venir déposer demain. Ou pourrait

  3   avoir une incidence sur ce témoin.

  4   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui, nous en sommes conscients.

  5   M. ZECEVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonne année à

  6   vous tous. Slobodan Zecevic, Slobodan Cvijetic, Eugene O'Sullivan et

  7   Tatjana Savic défendent les intérêts de l'accusé aujourd'hui. Mais Me

  8   Cvijetic qui mène le contre-interrogatoire du témoin Donia a une question

  9   préliminaire qu'il souhaiterait aborder, ce matin. Merci.

 10   M. CVIJETIC : [aucune interprétation] 

 11   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Excusez-moi, Maître Cvijetic. J'aimerais

 12   que l'autre équipe de la Défense, la Défense Zupljanin se présente d'abord.

 13   M. PANTELIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.

 14   Igor Pantelic et Dragan Krgovic pour la Défense de Zupljanin, et en même

 15   temps, je souhaite dire que nous regrettons la mort des responsables de

 16   l'ONU à Haïti, ainsi qu'un grand nombre de personnes ont trouvé la mort,

 17   malheureusement. Nous avons appris que les officiers serbes membres de

 18   l'équipe de l'ONU à Haïti se portent bien et ils font tout pour aider les

 19   locaux. Merci.

 20   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci. Nous en prenons note, Maître

 21   Cvijetic.

 22   M. CVIJETIC : [interprétation] Oui. J'attendais la fin de l'interprétation.

 23   Je vous souhaite une bonne année.

 24   Comme Me Zecevic vient de le dire, c'est moi qui ai mené le contre-

 25   interrogatoire de Donia, et à la fin, nous étions en train d'aborder un

 26   sujet que je souhaiterais continuer à aborder aujourd'hui. Me Pantelic et

 27   moi, nous avons en quelque sorte fait un tri des sujets que nous

 28   souhaitions aborder, et nous avons fait une évaluation du temps dont nous

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  1   avons besoin aujourd'hui afin de mener à terme son interrogatoire. Et nous

  2   avons conclu qu'effectivement, et lui et moi, nous allons pouvoir en

  3   terminer avec son contre-interrogatoire aujourd'hui. Mais nous ne savons

  4   pas combien de temps je vais avoir besoin et combien de temps Me Pantelic

  5   va avoir besoin. Mais j'espère que vous allez permettre à Me Pantelic et

  6   moi d'interroger M. Donia pendant les trois sessions.

  7   Nous avons un enregistrement vidéo que nous souhaiterions voir pendant la

  8   deuxième séance, parce que nous ne pouvons pas encore le visionner pendant

  9   la première, nous ne sommes pas prêts. Ensuite, après cet enregistrement

 10   vidéo, j'espère que je vais pouvoir en terminer avec l'interrogatoire de M.

 11   Donia. Ensuite, Me Pantelic prendra la parole. C'est tout ce que je

 12   souhaitais vous dire. Merci.

 13   [La Chambre de première instance se concerte]

 14   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Si j'ai bien compris, Maître Cvijetic,

 15   cet enregistrement vidéo sur lequel on est toujours en train de travailler

 16   - et j'imagine qu'il y a un certain nombre de problèmes techniques à ce

 17   sujet - mais de toute façon, le témoin Donia doit terminer sa déposition

 18   aujourd'hui, y compris les questions supplémentaires de la part de

 19   l'Accusation.

 20   Donc nous allons commencer tout de suite avec le contre-interrogatoire afin

 21   de profiter au maximum du temps dont nous disposons. Et de toute façon, ce

 22   que vous souhaitez qu'il soit fait avec cet enregistrement vidéo sera fait.

 23   Je prie M. l'Huissier de faire entrer le témoin.

 24   [Le témoin vient à la barre]

 25   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bonjour, Monsieur Donia, je vous

 26   rappelle que vous êtes toujours tenu d'observer la déclaration solennelle.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Merci. Oui.

 28   M. CVIJETIC : [interprétation] J'ai la version en anglais des deux

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  1   déclarations de M. Donia, donc je pense qu'il serait utile que ces versions

  2   lui soient remises.

  3   LE TÉMOIN : ROBERT DONIA [Reprise]

  4   [Le témoin répond par l'interprète]

  5   Contre-interrogatoire par M. Cvijetic : [Suite]

  6   Q.  [interprétation] Monsieur Donia, Bonjour.

  7   R.  Bonjour.

  8   Q.  Bonne année. Nous pouvons commencer maintenant.

  9   Monsieur Donia, brièvement, je vous rappelle que la dernière fois nous

 10   avons abordé un sujet que nous n'avons pas pu traiter jusqu'au bout. En

 11   fait, j'ai essayé d'introduire un document de la Défense, il s'agit d'une

 12   lettre écrite par les parents de plusieurs enfants musulmans de Neum et

 13   dans cette lettre ces personnes demandent les instructions de la part du QG

 14   du Parti SDA de Sarajevo au sujet des manuels venant de Croatie.

 15   Cette lettre porte la date du 16 septembre 1991, et vous avez dit que cette

 16   lettre n'était pas pertinente pour cette affaire, parce que d'après vous,

 17   la Communauté croate d'Herceg-Bosna a été établie plus tard en novembre

 18   1992, cela figure dans le compte rendu d'audience - et cela figure

 19   également dans votre rapport à la page 34 en anglais et page 32 en B/C/S -

 20   donc vous dites que la création de cette entité a eu lieu le 18 novembre

 21   1992.

 22   J'aimerais que nous abordions ce sujet plus en détail, parce que la Chambre

 23   souhaitait que nous traitions de ce document plus en détail afin de

 24   préciser ces dates et la date de création de la Communauté croate d'Herceg-

 25   Bosna.

 26   M. CVIJETIC : [interprétation] Le Juge Hall a dit qu'il fallait que nous

 27   entrions dans le vif du sujet tout de suite, et c'est pourquoi j'aimerais

 28   que l'on affiche maintenant le document qui porte la référence 1D00-3788.

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  1   Monsieur Donia, j'ai également fait un classeur avec tous les documents

  2   pour que vous n'ayez pas à souffrir en lisant sur l'écran.

  3   Q.  Monsieur Donia, le document qui figure à l'écran est au numéro 8 chez

  4   vous. Vous voyez, il s'agit d'une lettre en annexe de la part de Mate Boban

  5   et dans cette lettre il s'adresse directement personnellement au président

  6   à Zagreb et l'informe au sujet de la création de la de la Communauté croate

  7   d'Herceg-Bosna. Cela figure au numéro 8. L'avez-vous trouvé ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  A la page suivante --

 10   M. CVIJETIC : [interprétation] J'aimerais qu'on affiche maintenant la page

 11   suivante.

 12   Q.  Nous avons la décision portant sur la création de la Communauté croate

 13   d'Herceg-Bosna. L'avez-vous trouvé, Monsieur ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Je vous prie, d'examiner ces décisions.

 16   R.  Je connais ces décisions.

 17   Q.  Ma question est toute simple. Lorsque vous avez dit que la Communauté

 18   croate d'Herceg-Bosna a été créée le 18 novembre, je suppose que vous

 19   pensiez à cette décision, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Vous la connaissez, ce n'est pas la peine de s'attarder là-dessus, et

 22   je vais demander maintenant le versement au dossier de ce document étant

 23   donné que c'est un document que vous reconnaissez et que vous pensiez

 24   d'aller bien à ce document.

 25   M. CVIJETIC : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce

 26   document en tant que pièce de la Défense.

 27   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Ça sera versé au dossier.

 28   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ça sera la pièce 1D141, Monsieur le

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  1   Président.

  2   M. CVIJETIC : [interprétation] Merci. J'aimerais que l'on affiche

  3   maintenant le document 1D00-3672.

  4   Q.  Chez vous, Monsieur Donia, cela figure au numéro 9.

  5   R.  Oui, je connais ce document.

  6   M. CVIJETIC : [interprétation] Précisons pour le besoin de la Chambre de

  7   quoi il s'agit; c'est une décision statutaire qui accompagne la décision

  8   portant sur la création de la Communauté croate d'Herceg-Bosna.

  9   Q.  J'aimerais que vous me disiez la chose suivante : est-ce que cette

 10   décision vous montre à quel point l'entité d'Herceg-Bosna avait les

 11   attributs d'un Etat compte tenu de ce qui figure dans ce statut ?

 12   R.  Je dirais que cela lui attribue un certain degré d'attributs d'Etat.

 13   C'est une décision portant sur la formation d'une communauté de

 14   municipalités de Bosnie et Krajina. Donc ce ne sont pas vraiment les

 15   attributs d'un Etat, mais dans une certaine mesure, oui.

 16   Q.  Merci. C'est précisément ce que je souhaitais obtenir. Donc il y avait

 17   certains attributs d'Etat, mais pas pleinement, donc ce n'est pas ce que je

 18   voulais insinuer.

 19   M. CVIJETIC : [interprétation] Je demande également le versement au dossier

 20   de ce document, étant donné que le témoin le connaît.

 21   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Vous avez peut-être remarqué une

 22   certaine hésitation lorsque vous avez demandé le versement au dossier du

 23   document précédent, et je souhaite maintenant poser une question. Est-ce

 24   que ces documents font partie d'un jeu de documents dont nous avons parlé

 25   au mois de novembre, lorsqu'on a dit qu'il s'agissait de documents

 26   statutaires ou quasi-statutaire, qu'il ne fallait pas formellement

 27   introduire au dossier et qui allait, en fait, faire partie d'une liste de

 28   documents que les parties allaient régler entre elles. Cela fait partie

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  1   d'un jeu de documents de référence juridique ou bien cela ne fait pas

  2   partie de ce jeu de documents.

  3   M. CVIJETIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Je pense que Mme

  4   le Procureur est d'accord avec moi. Ce jeu de documents fait partie de

  5   règlements et lois au niveau de la Bosnie-Herzégovine qui ont été publiés

  6   dans la gazette officielle de Bosnie-Herzégovine; alors que là, il s'agit

  7   de règlements relatifs à une plus petite zone, à savoir la Communauté

  8   croate d'Herceg-Bosna.

  9   Mme KORNER : [interprétation] La seule question que j'ai, c'est quelle est

 10   la pertinence de ce document. Je n'ai pas compris dans quelle mesure ce

 11   document est pertinent pour la Communauté croate d'Herceg-Bosna.

 12   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui, mais la dernière question posée au

 13   témoin, je voulais savoir quel est le contexte de cette question. On

 14   souhaite obtenir ses commentaires au sujet de ce document et c'est pourquoi

 15   ce document est pertinent et il est versé au dossier. Merci.

 16   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce 1D142, Monsieur le

 17   Président.

 18   M. CVIJETIC : [interprétation]

 19   Q.  Monsieur Donia, revenons maintenant à la thèse de la Défense relative à

 20   la lettre que je ne vais pas vous montrer de nouveau. Mais je souhaite

 21   maintenant aborder un autre document, c'est 1D00-3693.

 22   Cela figure au numéro 11, dans votre classeur, Monsieur.

 23   R.  Oui, je le vois.

 24   Q.  Comme vous pouvez le constater -- enfin, je ne sais pas si vous savez,

 25   Smiljko Sagolj, donc le signataire et le rédacteur du programme

 26   d'information de la télévision de Sarajevo - donc la teneur de cette lettre

 27   n'est pas tellement importante pour moi, mais je souhaite attirer votre

 28   attention sur la manière dont il adresse M. Boban. Et il dit, au début : A

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  1   M. Boban, président de la Communauté croate d'Herceg-Bosna. Et ce qui est

  2   le plus intéressant, c'est que la date est le 10 novembre 1990.

  3   Monsieur Donia, après les élections pluripartites sur le terrain, la

  4   Communauté croate d'Herceg-Bosna a été bel et bien établie, n'est-ce pas ?

  5   R.  Comme je l'ai dit, la communauté a été établie formellement le 18

  6   novembre 1991. 

  7   Q.  Oui, mais maintenant, je vous montre le document qui indique que cette

  8   entité fonctionnait bel et bien et avait même un président depuis 1990.

  9   Est-ce que vous acceptez que cette communauté existait bel et bien avant

 10   qu'elle ne soit déclarée formellement ?

 11   R.  Non. L'exemplaire anglais que j'ai sous les yeux comporte un point

 12   d'interrogation associé à la mention de l'année 1990. Je pense que cela

 13   permet de penser que les choses ont pu se passer en 1991. Ce serait une

 14   date acceptable pour ce document.

 15   Q.  Mais est-ce que vous pourriez jeter un coup d'œil à la version B/C/S,

 16   la version imprimée ? Vous l'avez cette version en B/C/S ? C'est une

 17   télécopie où on voit la date.

 18   R.  Je la vois à l'écran, oui.

 19   Q.  Et ce qu'on lit, c'est 1990, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Très bien. Mais en dépit de cela, manifestement, vous n'êtes pas

 22   d'accord avec la thèse que je défends, à savoir que la Communauté croate

 23   d'Herceg-Bosna existe depuis 1990 ?

 24   R.  C'est exact, je ne suis pas d'accord avec vous sur ce point, en effet.

 25   Q.  Bien. Dans ces conditions, j'aimerais que nous parlions maintenant de

 26   ce rapport que vous aviez établi pour votre déposition dans l'affaire

 27   Karadzic. Il me semble que dans ce rapport, vous indiquez que le Conseil

 28   croate de Défense, en sa qualité de formation armée de la Communauté croate

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  1   d'Herceg-Bosna, a été créé, si je ne me trompe, en avril 1992. Vous

  2   rappelez-vous avoir indiqué cela dans votre document ? Je crois que vous

  3   l'avez sous les yeux.

  4   R.  Oui.

  5   Mme KORNER : [interprétation] Est-ce que nous pourrions voir le numéro de

  6   la page.

  7   M. CVIJETIC : [interprétation] Oui, c'est possible, c'est possible. Mais je

  8   vous demande un instant pour le retrouver.

  9   Q.  Monsieur Donia, vous vous rappelez, n'est-ce pas, avoir indiqué cela ?

 10   Est-ce exact que cette création a eu lieu en avril ?

 11   R.  Oui.

 12   M. CVIJETIC : [interprétation] Je crois avoir retrouvé la note en bas de

 13   page qui me permettra de répondre à Mme Korner. Toutes mes excuses, j'ai

 14   besoin de quelques instants. Voilà, le Conseil croate de Défense a été créé

 15   le 8 avril 1992 par la présidence de la Communauté croate d'Herceg-Bosna et

 16   ceci est écrit en note en bas de page 118, dans le rapport en question.

 17   Quant au numéro de la page - et je ne peux vous indiquer la page que dans

 18   la version en B/C/S, c'est la page 41 - mais vous pouvez retrouver cette

 19   référence grâce au numéro de la note en bas de page, numéro 118.

 20   Q.  Monsieur Donia, avez-vous trouvé ce passage -- d'ailleurs, vous le

 21   savez, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui, je l'ai trouvé et je vous réponds par l'affirmative.

 23   Mme KORNER : [interprétation] Un instant, je vous prie. De quoi parlez-vous

 24   lorsque vous parlez du rapport présenté dans l'affaire Karadzic ? Les deux

 25   rapports qui sont les seuls à avoir été versés au dossier dans cette

 26   affaire sont les rapports portant sur l'origine de la Republika Srpska et

 27   de la Krajina bosniaque. Alors qu'appelez-vous le rapport Karadzic ?

 28   M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, Mme Korner a oublié -

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  1   - Madame, vous avez oublié qu'une partie de ce rapport a été versé au

  2   dossier de notre affaire également, et la référence que j'ai extraite, ma

  3   citation, est tirée de cette partie du rapport versée au dossier dans notre

  4   affaire qui est donc pertinente.

  5   Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, Me Cvijetic a tout à

  6   fait raison. Je qualifie cette partie du rapport de rapport Sarajevo,

  7   habituellement. C'est la raison pour laquelle j'ai fait la confusion.

  8   M. CVIJETIC : [interprétation]

  9   Q.  J'aimerais, maintenant, qu'on vous soumette, Monsieur Donia, le

 10   document 1D00-3853.

 11   Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, je suis désolée

 12   d'interrompre Me Cvijetic, mais ce qui vient de se passer me rappelle un

 13   point. Vous n'avez admis au dossier que les chapitres 4 à 6. Or la citation

 14   de Me Cvijetic est issue d'un passage qui ne fait pas partie de ces

 15   chapitres. Cela ne me pose aucun problème, mais puisque je souhaitais le

 16   versement au dossier de l'intégralité du rapport de toute façon, mais cela

 17   risque de créer une petite difficulté.

 18   M. CVIJETIC : [interprétation] Non, non, chapitres 4, 5 et 6 -- pardon,

 19   toutes mes excuses, Monsieur le Président.

 20   [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

 21   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Madame Korner, la citation faite

 22   par Me Cvijetic se trouve bien dans la partie du rapport que nous avons

 23   admise en tant qu'élément de preuve.

 24   Mme KORNER : [interprétation] Cela montre simplement qu'il est toujours bon

 25   de vérifier deux fois. Toutes mes excuses, Monsieur le Président, vous avez

 26   raison.

 27   Je suis désolée, Maître Cvijetic.

 28   M. CVIJETIC : [interprétation] Pas de problème.

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  1   Q.  Monsieur Donia, vous avez dans votre classeur le passage dont je parle

  2   à l'intercalaire 10, donc vous pourriez y jeter un coup d'œil, je vous

  3   prie.

  4   Dans ce document, vous trouverez une lettre de la Communauté croate

  5   d'Herceg-Bosna qui est imprimée sur un papier à l'en-tête du Conseil croate

  6   de Défense. Le texte en tant que tel n'est pas particulièrement pertinent,

  7   mais ce qui est pertinent, c'est la date, 1er juin 1990. Alors, Monsieur

  8   Donia, de quelque façon que vous abordiez la question, la Communauté croate

  9   d'Herceg-Bosna ainsi que la section armée de son armée ont été créées en

 10   1990 et ceci est bien confirmé par ce document, n'est-ce pas ?

 11   R.  Je suis désolé, je ne vois pas de date dans la version anglaise.

 12   Q.  Mais vous avez la version B/C/S sur l'écran où vous trouverez la date,

 13   1er juin 1990.

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Donc je vous ai posé la question : Est-ce qu'à la lecture de ces deux

 16   documents, nous constatons qu'il existe dans les faits une entité en bonne

 17   et due forme sur le terrain dès l'année 1990, une entité croate ou plus

 18   précisément, une formation armée croate ?

 19   R.  Non, je pense que les dates que vous prenez en compte viennent de l'en-

 20   tête de la télécopie et il s'agit dans les deux cas d'une date qui n'a

 21   aucun rapport avec les documents. Les documents n'auraient aucun sens si

 22   dans les deux cas la date était largement antérieure aux élections du 18

 23   novembre 1990. Ce qui est plus vraisemblable, c'est que ces dates sont

 24   simplement l'en-tête d'une télécopie et que quelqu'un n'a pas bien réglé la

 25   machine, le fax.

 26   Q.  Je vous dirais dans ces conditions, en deux mots, qu'il semble

 27   incroyable que ce fax qui est chargé d'émettre des documents pour la

 28   Communauté d'Herceg-Bosna et pour le Conseil croate de Défense ne

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  1   fonctionne pas correctement et que l'envoi de ces documents ait été réalisé

  2   postérieurement aux faits. Mais enfin, je laisserai toute latitude à la

  3   Chambre de première instance pour apprécier l'authenticité de ce document.

  4   Et je passerai, maintenant, au document suivant.

  5   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Excusez-moi, Maître Cvijetic. J'essaie

  6   de m'exprimer avec beaucoup de précision puisque vous n'êtes pas en

  7   capacité de témoigner. Mais dois-je comprendre que votre position consiste

  8   à dire que dans la version B/C/S originale du texte, la date n'apparaît

  9   nulle part ? Et pourtant, votre question concernait uniquement la date

 10   qu'on voit en en-tête du fax. Donc il n'y a pas de date dans ce document,

 11   n'est-ce pas, dans la version B/C/S ? C'est bien votre position ? Est-ce

 12   que la date figure dans le corps du texte ou pas ?

 13   M. CVIJETIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président, c'est simplement

 14   à partir de la date d'envoi de la télécopie que je conclus que cela se

 15   passait en 1990. C'est ma seule possibilité d'aboutir à cette conclusion.

 16   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je vous remercie.

 17   M. CVIJETIC : [interprétation]

 18   Q.  Monsieur Donia, nous allons à présent parler de l'année 1992.

 19   M. CVIJETIC : [interprétation] Et je demanderais que nous voyions affiché

 20   sur les écrans le document 1D00-3511.

 21   Q.  C'est le document qui apparaît à l'intercalaire 13 dans votre classeur.

 22   R.  Oui, je l'ai trouvé.

 23   Q.  Vous l'avez trouvé ? Très bien.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Cvijetic, est-ce que vous

 25   demandez le versement au dossier du document précédent ?

 26   M. CVIJETIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge. J'ai oublié de

 27   l'indiquer. J'ai utilisé deux documents, la lettre de Smiljko Sagolj, ainsi

 28   que le document 1D00-8353, sont les deux documents dont je demande le

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  1   versement au dossier.

  2   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Ils sont admis et seront enregistrés.

  3   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] En tant que numéro, les deux documents

  4   deviennent des pièces à conviction, 1D143 et 1D144, Monsieur le Président,

  5   Messieurs les Juges.

  6   M. CVIJETIC : [interprétation]

  7   Q.  Monsieur Donia, nous sommes ici en présence du journal officiel de la

  8   Communauté croate d'Herceg-Bosna, n'est-ce pas ? C'est bien ce que vous

  9   lisez en en-tête du document ? Intercalaire 13, vous l'avez trouvé, ce

 10   document ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Dans ce document, sont publiées les réglementations applicables en

 13   Communauté croate d'Herceg-Bosna et dans l'une de ces pages, vous trouverez

 14   le décret relatif à la création d'une division de la Cour suprême de la

 15   Communauté croate d'Herceg-Bosna. Vous le voyez, ce décret ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  A l'article 5, on indique les conditions de nomination et de

 18   révocation, ces deux actes ne pouvant s'accomplir que sur proposition de la

 19   présidence ou recommandation de la présidence de la Communauté croate

 20   d'Herceg-Bosna. Puis il y a également un autre décret qui concerne le

 21   bureau du procureur; c'est bien cela, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  En page suivante, vous trouvez deux autres décrets. Je vous demanderais

 24   de passer à la page suivante. Je pense que dans votre version du texte,

 25   ceci se trouve également en page suivante. En effet, ma question portera

 26   sur les quatre décrets.

 27   Affichage de la page suivante, je vous prie. Décret relatif à l'application

 28   de la Loi relative au maintien de l'ordre public en Communauté croate

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  1   d'Herceg-Bosna et décret relatif à l'application de la Loi portant sur la

  2   sécurité routière; deux décrets donc en page suivante. Vous les avez

  3   trouvés, Monsieur Donia ? A la page suivante de votre texte.

  4   R.  Oui.

  5   Q.  La raison pour laquelle je vous ai demandé de vous pencher sur ce

  6   document réside que dans le fait que nous voyons ici, un décret qui indique

  7   que les règlements de la Bosnie-Herzégovine seront également applicables

  8   sur le territoire de l'Herceg-Bosna, uniquement s'ils ne sont pas en

  9   contradiction avec ces décrets ainsi que les décrets d'application de ceci.

 10   Est-ce que ceci ne vous remet pas en mémoire un certain nombre d'attributs

 11   d'Etat qui concernent la Communauté croate d'Herceg-Bosna, puisque celle-ci

 12   choisit les articles et les textes originaires des règlements de Bosnie-

 13   Herzégovine qui seront applicables sur son territoire. Est-ce que c'est

 14   cela que vous aviez à l'esprit lorsque vous avez répondu par l'affirmative

 15   au moment où je vous ai interrogé sur les attributs d'Etat ?

 16   R.  Non. Les attributs d'Etat auxquels je pensais lorsque j'ai répondu à

 17   votre question antérieure étaient ceux que l'on trouve dans les décrets du

 18   18 novembre 1991, et en particulier dans les trois derniers paragraphes ou

 19   trois derniers chapitres de ce décret. Ici nous avons des éléments qui

 20   ajoutent des attributs d'Etat supplémentaires qui mènent plus loin la

 21   conception de l'Herceg-Bosna.

 22   Q.  Monsieur Donia, vous avez anticipé ma question suivante. Vous remarquez

 23   en particulier que dans le dernier décret dont nous parlons à présent, les

 24   amendes doivent être acquittées en devise croate, n'est-ce pas, en dinar

 25   croate. C'est ce que nous lisons dans ce texte, n'est-ce pas ?

 26   Vous avez trouvé ce passage, article 2 du décret relatif à la sécurité

 27   routière. Vous l'avez trouvé ?

 28   R.  Oui.

Page 5018

  1   Q.  Donc une devise est mise en circulation et cette devise est le dinar

  2   croate. Est-ce que vous êtes d'accord sur ce point avec

  3   moi ?

  4   R.  Je ne suis pas sûr de savoir s'il y avait ou pas une devise officielle

  5   en Bosnie-Herzégovine. Je n'en suis pas sûr.

  6   Q.  Mais vous devez savoir que ce dont il est question dans ce texte est un

  7   instrument de paiement qui est spécifique à la Communauté croate d'Herceg-

  8   Bosna uniquement valable sur son territoire ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Je vous remercie de votre réponse. Nous allons avancer.

 11   M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 12   toutes mes excuses, j'ai encore oublié de le faire. Je demande le versement

 13   au dossier de ce document 1D00-3511. Etant donné les réponses fournies par

 14   M. Donia, je pense que ce document confirme la thèse de la Défense.

 15   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Admis et enregistré.

 16   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce 145 [comme

 17   interprété], Monsieur le Président, Messieurs les Juges.

 18   M. CVIJETIC : [interprétation]

 19   Q.  Monsieur Donia, il nous faut aller plus loin. L'accord de paix de

 20   Dayton est bien connu et on sait bien qu'aux termes de cet accord la

 21   Communauté croate d'Herceg-Bosna n'est pas admise, n'est pas reconnue en

 22   tant qu'entité distincte, n'est-ce pas ?

 23   R.  En effet.

 24    Q.  Les formations militaires, formations armées sont également abolies

 25   aux termes de cet accord de Dayton et une armée conjointe de l'ABiH est

 26   créée, n'est-ce pas ?

 27   R.  Les formations militaires ne sont pas abolies, mais il existait une

 28   armée conjointe en Bosnie-Herzégovine, créée par cet accord de Dayton.

Page 5019

  1   Q.  C'est bien ce que j'avais à l'esprit. Peut-être ne me suis-je pas bien

  2   exprimé ou bien mes propos ne vous ont-ils pas été bien interprétés.

  3   M. CVIJETIC : [interprétation] Mais penchons-nous sur le document suivant,

  4   1D00-4526, je vous prie.

  5   Q.  C'est l'intercalaire 14 de votre classeur dans le document numéro 14.

  6   Bien. Le document s'affiche à l'écran.

  7   M. CVIJETIC : [interprétation] Mais j'aimerais que l'on voie le haut de la

  8   page. Un peu plus encore. Très bien. Pour que nous voyions de quel document

  9   il s'agit exactement.

 10   Q.  Monsieur Donia, si je ne m'abuse, nous sommes ici en décembre 1996, et

 11   la République croate d'Herceg-Bosna à cette date possède son journal

 12   officiel, et son nom est toujours Herceg-Bosna, n'est-ce pas ? Nous voyons

 13   ici un décret - je l'ai choisi à titre d'exemple - c'est un décret qui a

 14   force de loi et qui amende la loi que la République croate d'Herceg-Bosna

 15   est tenue d'appliquer. Il est stipulé dans ce texte quelles sont les

 16   conditions de formation du corps des officiers du Conseil croate de

 17   Défense. Est-ce que vous avez trouvé ce passage en page une ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Alors, pouvez-vous expliquer ce fait, Monsieur Donia, le fait qu'en

 20   décembre 1996, c'est-à-dire un an après la signature des accords de Dayton,

 21   la République croate d'Herceg-Bosna existe toujours, qu'elle soit toujours

 22   en possession d'un journal officiel et qu'elle publie ses règlements et

 23   décrets, et évoque, y compris ses propres forces armées ?

 24   R.  La République croate d'Herceg-Bosna a été maintenue illégalement en

 25   violation des accords de Dayton pendant pas mal de temps après la signature

 26   des accords de Dayton. Maintenant, le fait de savoir si le HVO faisait ou

 27   non partie des forces armées légitimement est un peu moins clair. Il y

 28   avait, si je ne m'abuse, une disposition dans l'accord de Dayton, ou en

Page 5020

  1   tout cas, dans son annexe relative à l'armée qui reconnaissait le HVO. Mais

  2   la République croate d'Herceg-Bosna, c'était tout à fait clair, ne faisait

  3   pas partie, n'était pas évoquée par les accords de Dayton. Et si je me

  4   souviens, bien elle a finalement été démantelée en 1998. Mais jusqu'à ce

  5   moment-là elle a existé, elle a fonctionné en infraction aux dispositions

  6   de l'accord de Dayton.

  7   Q.  Je me dois de sourire, je ne sais pas ce qui viendra plus tard. Je

  8   pense que vous êtes d'accord avec moi, donc je vais continuer dans l'ordre

  9   d'idées que j'ai abordé d'ores et déjà pour que les choses se passent sans

 10   heurt. Donc la Communauté croate d'Herceg-Bosna a continué à exister. Et ma

 11   question suivante qui en terminera avec ce sujet de l'Herceg-Bosna est la

 12   suivante, car vous avez été professeur à l'Université de Sarajevo pendant

 13   un certain temps, mais vous n'êtes pas allé souvent en Bosnie-Herzégovine,

 14   n'est-ce pas ?

 15   R.  J'appellerais simplement votre attention sur un propos tenu par vous

 16   selon lequel la Communauté croate d'Herceg-Bosna a continué à exister. Ce

 17   n'est pas le cas. En 1993, la Communauté croate d'Herceg-Bosna s'est

 18   transformée en République croate d'Herceg-Bosna et c'est cette entité qui a

 19   existé jusqu'en 1998.

 20   Et effectivement, j'ai été professeur associé à l'Université de

 21   Sarajevo bénévolement et sans travail, mais je porte ce titre depuis

 22   plusieurs années.

 23   Q.  Je vais maintenant vous donner mon impression et essayer de voir si

 24   vous êtes d'accord avec moi ou si vous partagez cette impression. J'ai

 25   voyagé pas mal dans ce qu'il était convenu d'appeler à un certain moment la

 26   Communauté croate d'Herceg-Bosna ou la République d'Herceg-Bosna, donc

 27   chaque fois que je vais là-bas j'ai le même sentiment, à savoir quand je

 28   regarde la télévision ou que j'écoute la radio et que je regarde les

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  1   affichages que l'on peut voir un peu partout, est-ce que vous avez voyagé

  2   en Communauté croate d'Herceg-Bosna ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Est-ce que vous avez le même sentiment que moi, à savoir que celle-ci

  5   existe, en réalité ?

  6   R.  Non.

  7   Q.  Manifestement, nous ne partageons pas la même impression. Mon

  8   impression est différente de la vôtre. Mais bien sûr nous n'avons pas

  9   nécessité d'être d'accord sur ce point. Très bien. Monsieur Donia, passons

 10   à un autre sujet.

 11   M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, encore une fois

 12   toutes mes excuses, j'ai oublié de demander le versement au dossier du

 13   journal officiel de la République croate d'Herceg-Bosna qui a fait l'objet

 14   de commentaire de M. Donia, par conséquent j'en demande le versement au

 15   dossier. Il s'agit du document 1D00-4526.

 16   Mme KORNER : [interprétation] Objection, Monsieur le Président, cette fois-

 17   ci. Car ce document n'a absolument rien à faire avec le procès, il est

 18   entièrement en dehors de la période pertinente. Il n'a aucune pertinence

 19   par rapport à quelque question sur laquelle les Juges de la Chambre auront

 20   à se prononcer, notamment sur cette question de savoir si l'entité en

 21   question a continué à exister en violation des accords de Dayton.

 22   M. LE JUGE HALL : [interprétation] De plus, il n'existe pas dans le

 23   prétoire électronique de la traduction anglaise de ce document.

 24   Donc Maître Cvijetic, le document n'est pas admis.

 25   M. CVIJETIC : [interprétation] D'accord, je respecterai votre décision.

 26   Mais le greffe m'a indiqué que nous avions une traduction anglaise. Si

 27   c'est la raison du refus d'admission, bon, enfin, je voulais dire à titre

 28   d'explication que ce document --

Page 5022

  1   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Il n'est pas admis.

  2   M. CVIJETIC : [interprétation] Bien, ce n'était pas le motif du refus

  3   d'admission, très bien.

  4   J'admets la décision de la Chambre. Nous pouvons avancer.

  5   Q.  Monsieur Donia, nous sommes maintenant en page 31 de votre rapport

  6   intitulé, Les origines de la Republika Srpska. Dans la version anglaise, il

  7   s'agit des pages 33 et 34. Je vous indique cela pour vous aider à retrouver

  8   le passage. Vous l'avez ? Bien.

  9   Alors dans cette page de votre rapport, vous traitez de la réunion de

 10   l'assemblée de Bosnie-Herzégovine tenue, comme nous le savons, le 15

 11   octobre 1991, n'est-ce pas ?

 12   R.  Les 14 et 15 octobre 1991, en effet.

 13   Q.  Oui. Durant cette séance de l'assemblée, une décision est prise qui

 14   porte sur la souveraineté de la Bosnie-Herzégovine, l'indépendance de la

 15   Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas ?

 16   R.  Pas tout à fait. Je crois que l'assemblée a adopté une résolution

 17   portant sur l'indépendance, elle n'a pas en tout état de cause rendu une

 18   décision sur ce sujet. Elle a simplement appelé l'attention de chacun sur

 19   l'idée d'indépendance qui avait déjà été développée dans l'un des

 20   amendements à la constitution votée en juillet 1990.

 21   Q.  Très bien, merci de ces précisions. Mais quoi qu'il en soit, il n'est

 22   pas contesté, n'est-ce pas, que cette résolution a été adoptée en l'absence

 23   des représentants serbes de l'assemblée de Bosnie-Herzégovine et que donc

 24   non votée pour cette résolution que les députés croates et musulmans,

 25   autrement dit de façon plus précise, les députés représentant le SDA et le

 26   HDZ, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Durant cette séance de l'assemblée, les députés serbes se sont efforcés

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  1   d'empêcher l'adoption de cette résolution en affirmant qu'il s'agissait

  2   d'une entreprise anticonstitutionnelle, qui donc était en violation de la

  3   constitution, car elle concernait les intérêts vitaux de l'une des nations

  4   du pays. M. Karadzic a pris la parole à plusieurs reprises pour s'efforcer

  5   d'appeler l'attention de l'assemblée sur ce point.

  6   M. CVIJETIC : [interprétation] J'aimerais que nous nous penchions

  7   maintenant sur la pièce P13. Pièce à conviction P13.

  8   Q.  Qui se trouve à l'intercalaire 15 de votre classeur, Monsieur Donia.

  9   L'avez-vous trouvé ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  C'était juste l'une des allocutions. Vous avez dit dans votre rapport,

 12   donc à la page 31 en B/C/S et 33 et 34 en anglais, donc vous avez dit que

 13   c'était une prise de parole assez dramatique, et M. Izetbegovic, d'après

 14   vous, a compris qu'il s'agissait des menaces. Et plus tard il y a une

 15   phrase où il est dit que ce discours a été qualifié en tant que menace.

 16   Monsieur Donia, je serai bref, que ce document a déjà été versé au dossier,

 17   mais n'auriez-vous pas dû lire le discours dans sa totalité de M. Karadzic,

 18   ensuite tirer la conclusion qu'au fond il prie qu'on ne prenne pas une

 19   telle décision, et il signale quelles pourraient être les conséquences si

 20   une telle décision est prise.  Donc plusieurs phrases avant cette phrase et

 21   critiques que vous avez citées - c'est à la page 3 en B/C/S - M. Karadzic,

 22   qu'en moyen ultime, "Messieurs, tant que la question d'indépendance de la

 23   Bosnie-Herzégovine n'est pas supprimée de l'ordre du jour, je prendrai la

 24   parole constamment." Donc il est dit qu'il va soulever cette question à La

 25   Haye, qu'il va employer tous les moyens constitutionnels pour l'empêcher.

 26   Il prie les députés de ne pas prendre une telle décision, et d'une manière

 27   dramatique, je suis d'accord avec vous, il signale quelles pourraient être

 28   les conséquences en attirant leur attention sur ce qui s'était passé en

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  1   Croatie.

  2   Monsieur Donia, conviendrez-vous que ce document doit être néanmoins

  3   interprété dans le contexte de tout son discours et non pas de manière

  4   isolée, où vous avez tiré juste quelques paroles pour les interpréter ?

  5   R.  Oui, je suis d'accord, et je pense qu'il faut également situer dans son

  6   contexte toutes les autres références qu'il a faites quelques jours avant

  7   la prise de parole devant l'assemblée afin de mieux comprendre ce que cette

  8   déclaration voulait bel et bien dire.

  9   Q.  D'accord. Vous conviendrez que dans ce contexte, on peut comprendre son

 10   comportement après cette réunion de l'assemblée.

 11   Monsieur Donia, après cette réunion, la guerre n'a pas commencé, M.

 12   Karadzic a commencé les négociations menées par la communauté

 13   internationale et M. Cutileiro, et il a signé et il a accepté un plan où

 14   l'on ne parle pas de la Grande-Serbie ni de la Yougoslavie Croupion, mais

 15   on parle effectivement d'une Bosnie souveraine, indépendante. Est-ce que

 16   c'est dans ce contexte-là que nous devrions situer son discours ?

 17   R.  Non, je pense que cela ne pourra pas être pris comme contexte. Le

 18   contexte immédiat est que le jour même, le 15 octobre, ce soir-là est le

 19   début d'un processus qui a duré longtemps, et

 20   M. Karadzic, en fait, a envisagé de créer un Etat distinct, un Etat serbe

 21   distinct au sein de la Bosnie.

 22   Q.  Monsieur Donia, Republika Srpska n'a pas été planifiée en tant

 23   qu'entité serbe distincte au sein de la Bosnie-Herzégovine. Cela n'est pas

 24   précisé de la sorte dans la constitution de la Republika Srpska. Et

 25   j'aimerais que l'on vous montre maintenant la pièce P181.

 26   Excusez-moi, chez vous, cela figure à l'intercalaire 17. C'est la

 27   constitution.

 28   M. CVIJETIC : [interprétation] Et j'aimerais que l'on affiche l'article

Page 5025

  1   143, c'est tout à la fin de la constitution.

  2   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Cvijetic, il y a quelque chose

  3   qui m'échappe. On dirait que vous parlez de l'Etat serbe distinct à

  4   l'extérieur de la Bosnie-Herzégovine, alors que le témoin parlait d'un Etat

  5   distinct serbe à l'intérieur de la Bosnie-Herzégovine.

  6   M. CVIJETIC : [interprétation] Peut-être que j'ai mal compris

  7   l'interprétation. Il se peut que j'aie commis une erreur, mais il me

  8   semblait que j'avais bien compris. Donc nous allons tirer cela au clair en

  9   traitant de cet article. Moi, j'ai compris le contraire, Monsieur le Juge.

 10   Peut-être que le témoin pourrait -- voilà, M. le Témoin pourrait nous le

 11   dire.

 12   Q.  Lorsque vous avez interprété le comportement de M. Karadzic, à quel

 13   type de séparation pensiez-vous lorsqu'on parle de la Republika Srpska ?

 14   R.  Je pensais qu'on voulait créer un Etat serbe distinct à l'intérieur de

 15   la Bosnie-Herzégovine.

 16   M. CVIJETIC : [interprétation] Dans ce cas-là, le Juge Delvoie a bien

 17   compris.

 18   Q.  Est-ce que vous voyez où se trouvent les articles à la fin de la

 19   constitution, à savoir l'article 143 ?

 20   R.  L'article 143, oui, je le vois, mais je ne sais pas ce que ça veut

 21   dire.

 22   Q.  Comme vous pouvez le constater, la constitution permet la possibilité

 23   que la constitution s'accorde à l'acte constitutif portant sur les

 24   relations avec la Bosnie-Herzégovine, parce que les négociations étaient

 25   toujours en cours et donc l'ordre constitutionnel de la Bosnie-Herzégovine

 26   était toujours incertain, et c'était une question ouverte, ce qui est

 27   reflété dans cet article, n'est-ce pas, et cela soutient justement ce que

 28   le Juge Delvoie a

Page 5026

  1   dit ?

  2   R.  D'après ce que je sais, il n'y avait pas d'article au sein de la

  3   constitution portant sur les relations avec la Bosnie-Herzégovine. S'il y

  4   avait de telles discussions, peut-être qu'il y en avait par la suite entre

  5   les différentes parties et la communauté internationale, mais à l'époque,

  6   non, il n'y en avait pas.

  7   Q.  D'accord. Nous allons toucher un mot au sujet de ces négociations, mais

  8   avant la pause, je souhaite vous poser une question au sujet de

  9   l'assemblée. En fait, j'ai deux questions à ce sujet. Monsieur Donia,

 10   conviendrez-vous qu'avec cette résolution de l'assemblée, une crise

 11   constitutionnelle et politique très sérieuse a vu le jour en Bosnie-

 12   Herzégovine ?

 13   R.  Oui. Je suis d'accord pour dire que c'était un moment crucial à partir

 14   duquel les partis ont pris les chemins différents. Je pense que la crise

 15   constitutionnelle a vu le jour avant cet événement, mais c'est sûr que cet

 16   événement a intensifié, a aggravé la crise et a eu une incidence importante

 17   sur le comportement des partis politiques par la suite.

 18   Q.  D'accord. Et une deuxième question relative à cette décision, votre

 19   opinion, je ne vous demande pas de vous comporter en tant qu'expert pour le

 20   droit constitutionnel, mais je pense que je peux néanmoins vous poser cette

 21   question : est-ce que cette décision a respecté l'esprit de la constitution

 22   de Bosnie-Herzégovine ?

 23   R.  Je ne peux vraiment pas répondre à cette question. Il est évident que

 24   les différents partis avaient une compréhension différente de la

 25   constitution, et parfois, cette compréhension, cette interprétation n'était

 26   pas tellement basée sur la constitution, mais cela relevait du domaine des

 27   souhaits. Mais vous dire si cela respectait l'esprit de la constitution,

 28   ça, je ne pourrais pas vous le dire. Je ne suis pas expert en la matière et

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  1   je ne peux pas vraiment répondre à cette question.

  2   Q.  J'ai remarqué que s'agissant des questions relatives à la constitution,

  3   en bas de page de votre rapport, vous vous référez à certains articles et

  4   livres. Entre autres, vous vous êtes référé à l'ouvrage de M. Robert

  5   Hayden, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui, c'est une des choses que j'ai examinées.

  7   M. CVIJETIC : [interprétation] Peut-être que le moment est opportun pour

  8   examiner maintenant la pièce de la Défense 1D01-1156.

  9   Q.  Excusez-moi, chez vous, cela figure à l'intercalaire 16. Il s'agit d'un

 10   extrait de l'ouvrage de M. Hayden, intitulé, "Propositions pour partager la

 11   maison." Je vous prie de consulter maintenant la page 94 de ce document.

 12   Chez vous, je pense que cela figure à la deuxième page.

 13   Je vous prie d'en prendre connaissance très rapidement pour vous

 14   familiariser de ce que dit M. Hayden.

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Il semble que d'après lui cette décision n'observait pas l'esprit de la

 17   constitution de la Bosnie-Herzégovine. En convenez-vous ?

 18   R.  Non, parce qu'à mon avis, si je ne m'abuse, il ne se rend pas compte du

 19   fait qu'il y avait un effort pour créer un conseil chargé de l'égalité

 20   entre les nationalités. Donc cela devait être une sorte de commission qui

 21   devait être composée des membres des deux chambres, et l'assemblée n'a pas

 22   nommé les membres qui devaient siéger au sein de cet organe et n'a pas

 23   adopté le document sur lequel cet organe devait être basé. Le fait que cet

 24   organe n'a pas été créé est important pour comprendre ce qui s'était passé

 25   le 15 octobre et pour comprendre pourquoi M. Karadzic et le SDS s'étaient

 26   opposés fermement au vote et aux propositions soumises et pourquoi le HDZ

 27   et le SDA pensaient qu'ils pouvaient passer outre et voter néanmoins pour.

 28   Q.  Je pense que nous convenons, Monsieur Donia, avec M. Hayden lorsqu'on

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  1   dit que les mécanismes constitutionnels n'étaient pas assurés pour

  2   respecter, pour observer l'ordre constitutionnel, parce qu'il n'y avait pas

  3   le conseil des nations au sein de l'assemblée, et ce conseil n'a pas été

  4   établi et n'a jamais siégé. Donc au fond, cela correspond à ce que vous

  5   venez de dire, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui, c'était avant les élections, les trois partis représentant les

  7   trois ethnies ont dit qu'il devait y avoir soit une troisième chambre ou un

  8   organe tel que le conseil chargé des nationalités pour s'assurer de la

  9   protection des droits des trois ethnies.

 10   Q.  Oui, mais cet organe n'a jamais vu le jour, n'est-ce pas ?

 11   R.  Les dispositions pour sa création ont fait partie de la constitution,

 12   mais ces dispositions n'ont jamais été mises en vigueur par une loi votée à

 13   l'assemblée.

 14   Q.  Merci. C'est justement ce que je voulais dire.

 15   M. CVIJETIC : [interprétation] Je souhaite maintenant aborder un sujet qui

 16   n'a rien à voir avec ce qui a été dit auparavant. Donc peut-être qu'il

 17   vaudrait mieux faire une pause ou vous souhaitez continuer.

 18   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Nous avons encore huit minutes avant la

 19   pause. Donc je vous prie de poursuivre.

 20   M. CVIJETIC : [interprétation] Merci.

 21   Q.  Monsieur Donia, avant de passer au plan de Cutileiro qui sera mon

 22   dernier sujet, je souhaite aborder néanmoins un autre sujet sur lequel vous

 23   vous attardez dans votre rapport, à la page 30, 31, 2 et 3, de la version

 24   en anglais et c'est à la page 28 -- plutôt c'est aux pages 28 à 31, en

 25   B/C/S.

 26   Mme KORNER : [interprétation] C'est quel rapport ?

 27   M. CVIJETIC : [interprétation] C'est le premier rapport, la création de la

 28   Republika Srpska. Donc c'est le premier rapport qui nous concerne le plus.

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  1   Il est en anglais, ce sont les pages 30 à 33.

  2   Q.  Monsieur Donia, vous savez quel est le sujet qui nous intéresse, c'est

  3   la transformation de l'armée yougoslave, n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  D'après vous, l'armée populaire yougoslave a commencé sa transformation

  6   en tant qu'armée serbe depuis les événements en Croatie, n'est-ce pas ?

  7   R.  Est-ce que vous pouvez me citer une date ?

  8   Q.  Je ne parle pas de la date. Je me réfère à la guerre en Croatie. Je

  9   pense que c'est ce que j'ai pu lire dans ce que vous avez écrit par la

 10   suite.

 11   R.  A l'époque où la guerre en Croatie s'était intensifiée, et c'était au

 12   mois de septembre 1991, d'après moi, on peut constater les premiers indices

 13   de la transformation de la JNA en Bosnie également. C'était un processus

 14   qui a pris du temps avant de battre son plein en 1992.

 15   Q.  Merci. Je vais attirer votre attention sur plusieurs documents couvrant

 16   la période précédente pour voir si une telle tendance existait déjà en

 17   1991.

 18   M. CVIJETIC : [interprétation] C'est pourquoi j'aimerais qu'on affiche

 19   maintenant le document 1D00-3848. Chez vous, cela figure à l'intercalaire

 20   25, Monsieur.

 21   Q.  Le voyez-vous ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Il n'y a aucun doute au sujet de la date de ce document, c'était bel et

 24   bien en 1991 et la municipalité Citluk relevait de la Communauté croate

 25   d'Herceg-Bosna. Conformément à cette décision, on impose un moratoire sur

 26   l'envoi des recrues à la JNA, c'était vers le milieu de 1991. Vous

 27   conviendrez, Monsieur Donia, que la transformation de la JNA a, entre

 28   autres, commencé par le moyen de telles mesures, n'est-ce pas ?

Page 5030

  1   R.  Oui, la transformation de la JNA a eu plusieurs éléments, et cela en

  2   est un.

  3   Q.  Merci.

  4   M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le

  5   versement au dossier de ce document, étant donné que le témoin expert est

  6   d'accord avec ce qui figure dans ce document et avec la thèse de la

  7   Défense, et c'est important.

  8   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Le document est versé au dossier.

  9   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] En tant que pièce 1D146, Monsieur le

 10   Président.

 11   M. CVIJETIC : [interprétation] J'aimerais qu'on affiche maintenant le

 12   document 1D00-054. Monsieur, chez vous, cela figure à l'intercalaire 27.

 13   Q.  Le voyez-vous ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Vous conviendrez que ce document émane du même contexte. Ici, le HDZ de

 16   Bosnie-Herzégovine demande qu'on n'envoie pas les enfants pour devenir

 17   membres de la JNA; c'était en 1991, n'est-ce pas ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  D'accord.

 20   M. CVIJETIC : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce

 21   document.

 22   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui.

 23   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce 1D147.

 24   M. CVIJETIC : [interprétation] Voyons le document suivant, c'est un

 25   document qui porte sur l'attitude du parti SDA, par rapport à la JNA. C'est

 26   un document qui porte la référence 1D00-3840. Chez vous, cela figure au

 27   numéro 26.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

Page 5031

  1   M. CVIJETIC : [interprétation]

  2   Q.  Le SDA suggère qu'il faut empêcher que les documents ayant trait aux

  3   recrues soient pris par la JNA afin de cacher tous les documents relatifs

  4   aux éventuelles recrues de la JNA ?

  5   R.  Non, je ne vois pas où on emploie le terme "cacher," à moins qu'il n'y

  6   ait un problème de traduction. Tout simplement, on demande que la police

  7   garde ces archives militaires. Donc que la police soit également impliquée

  8   dans la garde de ces archives.

  9   Q.  Mais conformément à ce document, l'on demande que la JNA soit empêchée

 10   de prendre possession de ces documents, n'est-ce pas ?

 11   R.  Il est dit que cette recommandation ou cet ordre et la réponse à ce qui

 12   avait été fait.

 13   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Etant donné qu'il y a un problème à ce

 14   sujet, il y a une controverse, peut-être qu'il vaut mieux faire une pause

 15   maintenant et revenir dans 20 minutes.

 16   M. CVIJETIC : [interprétation] D'accord.

 17   [Le témoin quitte la barre]

 18   --- L'audience est suspendue à 10 heures 26.

 19   --- L'audience est reprise à 10 heures 52.

 20   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Pendant que l'on attend que le témoin ne

 21   revienne déposer, je voudrais simplement aviser les parties que nous allons

 22   prendre 15 minutes avant la fin de la séance d'aujourd'hui pour parler de

 23   quelques questions juridiques. La Chambre rendra également une décision.

 24   Et, si je m'abuse, le témoin Donia a demandé que l'on puisse terminer son

 25   contre-interrogatoire aujourd'hui.

 26   [Le témoin vient à la barre]

 27   M. CVIJETIC : [interprétation] Puis-je continuer, Monsieur le Président ?

 28   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui, je vous en prie.

Page 5032

  1   M. CVIJETIC : [interprétation]

  2    Q.  Monsieur Donia, pour ne pas trop perdre de temps, j'aimerais attirer

  3   votre attention immédiatement sur le point 2 dans lequel on voit que le

  4   pouvoir républicain met ou donne le pouvoir à la loi fédérale sur le

  5   service militaire. Et c'est le Parti de l'Action démocratique, c'est un

  6   autre fait qui figure sur ce document et non pas les autorités politiques

  7   de Bosnie-Herzégovine. Est-ce que vous pourriez nous parler de ces

  8   différences, parce que nous voyons ici que c'est un parti qui demande que

  9   l'armée nationale, que la JNA, enfin, qui empêche la JNA de fonctionner

 10   correctement. Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que c'est

 11   effectivement le cas dans ce document ?

 12   R.  Oui, tout à fait.

 13   Q.  Merci.

 14   M. CVIJETIC : [interprétation] Je demanderais alors que l'on montre au

 15   témoin un autre document faisant partie de ce groupe de documents. C'est le

 16   document 1D00 -- ou plutôt, excusez-moi, Monsieur le Président. J'ai oublié

 17   de demander une question au témoin. En fait, j'ai demandé de vous demander

 18   à vous de faire en sorte que ce document soit versé au dossier en tant que

 19   document de la Défense,  

 20   parce que le témoin est d'accord avec mon affirmation.

 21   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Très bien. Le document sera versé au

 22   dossier.

 23   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce document portera la cote D148,

 24   Monsieur le Président, Messieurs les Juges.

 25   M. CVIJETIC : [interprétation] Très bien. Le document suivant porte la cote

 26   1D00-3783. Docteur Donia, dans votre classeur, il s'agit du document 24.

 27   Q.  C'est à la droite du document. Voilà, c'est à droite. Voilà, c'est

 28   juste là. Donc c'est la décision quant au retrait du représentant de la

Page 5033

  1   République socialiste de Bosnie-Herzégovine, de toutes les organisations ou

  2   les organismes fédéraux. Docteur Donia, vous n'avez sans doute pas trouvé,

  3   il s'agit du document qui porte le numéro 24. Peut-être qu'en version

  4   anglaise, il ne s'agit pas de la même page ou du même numéro du document;

  5   est-ce que vous avez trouvé la partie intitulée, Retrait ?

  6   R.  Oui, tout à fait.

  7   Q.  Bien. Ce n'est pas un paragraphe qui est très long, mais je voudrais

  8   quand même faire quelques commentaires très courts. On voit la date qui y

  9   figure, c'est le 25 janvier 1992. C'est le vice-président qui a signé, le

 10   vice-président de l'assemblée de la République socialiste de Bosnie-

 11   Herzégovine. Il signe, donc ce document. J'aimerais savoir, quant à cette

 12   attitude envers la JNA, seriez-vous d'accord avec moi pour dire que ceci

 13   est tout à fait contraire à un Etat fédéral ?

 14   R.  Non.

 15   Q.  Alors, dites-moi, de quoi il s'agit ici ?

 16   R.  [aucune interprétation]

 17   Q.  Très rapidement, si vous le pouvez, brièvement.

 18   R.  Vous m'avez posé une question, et je vais répondre du meilleur de mes

 19   capacités. S'agissant du retrait des représentants, ceci a placé la Bosnie

 20   dans la même position que les deux autres Républiques occidentales, celles

 21   qui avaient préalablement subi le même sort. Il ne s'agissait pas

 22   nécessairement d'un retrait permanent, dans la mesure où ceci se passait

 23   avant le référendum qui était sujet, bien sûr, à ce que cette décision soit

 24   renversée; si les résultats du référendum étaient allés dans une autre

 25   direction, on aurait pu renverser cette décision. Je ne dirais pas qu'il

 26   s'agit ici de la fin d'une fédération, non, pas du tout.

 27   Q.  Mais vous serez sans doute d'accord avec moi pour dire que c'est une

 28   tentative de démantèlement de la fédération, une tentative dans une série

Page 5034

  1   de tentatives qui avaient été faites pour aller dans ce sens ?

  2   R.  Oui, tout à fait.

  3   Q.  Monsieur Donia, dans le cadre de votre travail, et ce, dans les pages

  4   dans lesquelles vous décrivez la JNA, vous avez cité un certain nombre

  5   d'incidents pour lesquels vous blâmez la JNA, les membres de la JNA. Je

  6   crois que vous parlez des tirs qui avaient eu lieu dans la ville par des

  7   soldats ivres et j'aimerais --

  8   M. CVIJETIC : [interprétation] En fait, j'ai oublié de vous demander que ce

  9   document soit également versé au dossier. Je ne crois pas que c'est trop

 10   tard, n'est-ce pas, Monsieur le Président ?

 11   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Très bien. Le document sera versé au

 12   dossier.

 13   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce document portera la cote 1D149,

 14   Monsieur le Président.

 15   M. CVIJETIC : [interprétation] Très bien. Je demanderais alors qu'on place

 16   ou qu'on affiche la pièce 1D010 ou 102, je ne sais plus comment les

 17   appeler, 1D102, donc 1D102, voilà. Chez vous, Monsieur Donia, c'est le

 18   document qui figure au numéro 19, c'est le document 19 de votre classeur.

 19   Voilà, c'est le document. 

 20   Q.  Est-ce que vous l'avez trouvé, Monsieur Donia ?

 21   R.  Oui, tout à fait.

 22   Q.  Très bien. Je vois, Monsieur Donia, que vous avez déjà ouvert la page,

 23   vous êtes déjà à la deuxième page. Nous voyons ici un acte du ministre

 24   Jelko Doko qui fait suivre la décision de la présidence de Bosnie-

 25   Herzégovine quant au retrait des unités de la JNA du territoire de Bosnie-

 26   Herzégovine. Je demanderais qu'on passe immédiatement à la page 2 dans

 27   laquelle cette décision se trouve. C'est la page qui suit. Voilà, vous

 28   l'avez trouvé. Très bien.

Page 5035

  1   Monsieur Donia, je vois ou je présume que vous connaissez déjà, vous avez

  2   déjà connaissance de cette décision, vous savez que la présidence avait

  3   pris pour décision une décision de retirer la JNA du territoire et avait

  4   également énuméré les conditions dans lesquelles ceci devait être fait ?

  5   R.  Oui, tout à fait.

  6   Q.  C'est un document qui est bien connu de tous. Je ne crois pas qu'il est

  7   nécessaire de faire d'autres commentaires, puisque mes commentaires -- mais

  8   j'aimerais quand même faire quelques commentaires quant aux décisions qui

  9   ont suivi tout ceci. Vous connaissez déjà cette décision et le document

 10   figure déjà au dossier, de toute façon. Il n'est pas nécessaire de demander

 11   son versement au dossier, car il fait partie du dossier.

 12   M. CVIJETIC : [interprétation] J'aimerais qu'on affiche la pièce 1D00-2795.

 13   Q.  Dans votre classeur, Docteur Donia, il s'agit du document 20.

 14   R.  Oui.

 15   Q.  C'est signé par Alija Delimustafic, il est le ministre de l'Intérieur.

 16   Il fait référence à la décision de la présidence sur le retrait des unités

 17   de la JNA; vous voyez ceci dans l'introduction. Au point 4, entre autres,

 18   on peut lire qu'il fallait procéder à la coordination avec la Défense

 19   territoriale et qu'il s'agit de lancer les activités de combat sur le

 20   territoire de la République de Bosnie-Herzégovine et d'accélérer les

 21   activités et que tout ceci devait être, donc, coordonné avec la Défense

 22   territoriale.

 23   Est-ce que selon vous, ceci représente une déclaration de guerre ?

 24   R.  Non, pas du tout.

 25   Q.  Très bien, merci.

 26   M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je demanderais qu'on

 27   affiche le document suivant. Je vais demander également que ce document

 28   soit versé au dossier, puisqu'il s'agit d'un ordre donné par le commandant

Page 5036

  1   de la Défense territoriale, comportant une décision semblable à celle-ci ou

  2   similaire à celle-ci. Et il s'agit du document 1D00-2798.

  3   Q.  Docteur Donia, il s'agit du document 21 dans votre classeur.

  4   R.  Oui, je l'ai trouvé.

  5   Q.  Attendons que le document soit affiché. Nous voyons le même en-tête,

  6   déclaration de la présidence, on fait appel à la décision rendue par la

  7   présidence et le document est signé par le colonel Hasan Efendic, au nom du

  8   QG de la Défense territoriale. Au point 4, on demande que les activités de

  9   combat commencent sur l'ensemble du territoire. Ce qui est intéressant,

 10   c'est que cet ordre a été fait à la suite d'une décision de la présidence

 11   quant au retrait des unités de la JNA. C'est la raison pour laquelle je

 12   vous demande si ceci est en rapport avec la décision du -- déclaration, en

 13   fait, de guerre contre la JNA. Je présume que votre réponse serait la même.

 14   R.  Vous avez posé la question de façon quelque peu différente cette fois-

 15   ci. Vous dites que cette fois-ci ressemble à une déclaration de guerre. Et

 16   je devrais dire que oui, il y a quelques éléments qui ressemblent aux

 17   éléments d'une déclaration de guerre, mais comme vous le savez, une

 18   déclaration formelle de guerre n'a pas eu lieu. Donc, non, ce n'est pas une

 19   vraie déclaration de guerre en tant que tel, mais elle comporte néanmoins

 20   quelques éléments d'une déclaration de guerre effectivement. Maintenant,

 21   dans le contexte dans lequel la JNA a lancé une attaque contre ces forces

 22   sur le territoire, l'ensemble du territoire de Bosnie-Herzégovine, ici.

 23   Q.  Très bien. Donc je suis partiellement d'accord avec vous, puisque vous

 24   vous êtes plutôt rapproché de ma question, pas dans son ensemble, mais je

 25   ne pourrais pas être tout à fait d'accord avec vous, bien sûr. Monsieur le

 26   Président, je demanderais que ces deux documents soient versés au dossier.

 27   Il s'agit de deux documents qui ont une importance historique. Bien sûr,

 28   ils sont pertinents pour qu'on puisse comprendre cette question, cette

Page 5037

  1   problématique relative à la JNA. Je ne sais pas si vous souhaiteriez que je

  2   reprenne, que je répète la question. Il s'agit -- enfin, les numéros

  3   plutôt, les cotes de ces deux documents, il s'agissait de la pièce 1D02795

  4   et 1D02798.

  5   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bien. Les documents seront versés au

  6   dossier et identifiés par une cote.

  7   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bien. Il s'agira de la pièce 1D150 et

  8   1D151, Monsieur le Président, Messieurs les Juges.

  9   M. CVIJETIC : [interprétation] Je demanderais maintenant qu'on affiche dans

 10   le prétoire électronique la pièce suivante qui porte la cote 1D00-3938.

 11   Q.  Docteur Donia, dans votre classeur, il s'agit du document 22.

 12   M. CVIJETIC : [interprétation] Passons maintenant à la page suivante. Je

 13   vais en donner lecture. Il s'agit d'une transcription de la présidence,

 14   d'une session de la présidence tenue par la présidence de Bosnie-

 15   Herzégovine. J'aimerais qu'on passe immédiatement à la page suivante.

 16   Voici.

 17   Mme KORNER : [interprétation] Pour être tout à fait précis, Monsieur le

 18   Président, il s'agit d'une publication qui a été publiée dans un journal,

 19   d'un texte qui se dit être une transcription d'une session.

 20   M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit d'une

 21   transcription de cette session qui a eu lieu et qui a été publiée dans les

 22   journaux. Il y avait un feuilleton qui sortait de façon continue dans le

 23   journal ou dans les journaux et je n'ai fait qu'extraire cette page-là pour

 24   poser mes questions à notre témoin expert, mais Mme Korner a tout à fait

 25   raison de quoi il s'agit, effectivement. 

 26   Donc, Monsieur Donia, à la page 2.

 27   Q.  Pourriez-vous, je vous prie, lire le commentaire de M. Delimustafic en

 28   votre for intérieur. En fait, ce paragraphe commence par la suite :

Page 5038

  1   "Il y a également quelques manquements, quelques lacunes dans son

  2   ministère également…" Ici, on peut lire qu'en son nom, c'est M. Avdo Hebib

  3   qui a signé ce document, son assistant, et il dit : On a donné l'ordre que

  4   la guerre commence, que le feu soit ouvert. Et M. -- l'autre lui demande :

  5   Qui a fait ceci ? Et lui, il répond : Avdo Hebib. Delimustafic dit : Oui.

  6   Il a fait une déclaration de guerre à l'armée.

  7   Par la suite, le membre croate de la présidence demande que ceci ne soit

  8   plus enregistré au compte rendu, mais cela fait néanmoins partie de la

  9   transcription. Ça a été consigné. Donc j'aimerais vous demander : est-ce

 10   que vous maintenez votre thèse selon laquelle ceci n'était pas une réelle

 11   déclaration de guerre ? Je ne pense pas à celle que vous avez en tête, mais

 12   de fait, ne devrait-on pas dire qu'effectivement c'était un appel à la

 13   guerre ? Et même Delimustafic fait référence à ceci.

 14   Q.  Oui, effectivement. C'est Delimustafic qui n'était pas très heureux

 15   avec ce qui a été fait. Donc je ne sais pas si c'est une description qui a

 16   vraiment un poids particulier. C'est simplement sa propre opinion. Il n'y a

 17   pas de date à laquelle cette déclaration alléguée aurait été faite.

 18   Q.  Oui, d'accord. Je ne fais que citer les propos de Delimustafic. C'est

 19   lui-même qui dit qu'il s'agissait d'une déclaration de guerre à la JNA,

 20   n'est-ce pas ? Mais passons, si vous n'avez pas de commentaire, si c'est

 21   tout ce que vous voulez dire, je demanderais aux Juges de la Chambre,

 22   puisque de nouveau il s'agit d'un document qui a une importance historique,

 23   que ce document soit également versé au dossier.

 24   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Le document est versé au dossier et il

 25   portera une cote qui est la suivante.

 26   M. CVIJETIC : [aucune interprétation]

 27   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce 163 [comme

 28   interprété], Monsieur le Président, Messieurs les Juges.

Page 5039

  1   M. CVIJETIC : [interprétation] Très bien.

  2   Q.  Monsieur Donia, j'ai un dernier document à vous montrer concernant

  3   cette transformation de la JNA. Il s'agit d'un document qui est déjà versé

  4   au dossier, qui porte déjà la cote 1D19. Excusez-moi, c'est le document 23

  5   dans votre classeur, Monsieur Donia.

  6   Comme vous pouvez le voir, la Chambre de première instance a déjà pris

  7   connaissance de ce document, puisqu'il figure déjà au dossier. Vous n'avez

  8   peut-être pas eu l'occasion d'en prendre connaissance mais il s'agit d'une

  9   chronologie d'événements importants qui fait état d'incidents et d'attaques

 10   faites contre les membres de la JNA. Comme nous pouvons le voir ici, la

 11   date qui est mentionnée est le 30 mai 1992. Il s'agit d'incidents très

 12   importants dans lesquels un très grand nombre de la JNA ont péri. Il s'agit

 13   d'attaques contre Sarajevo, contre Tuzla, et il y avait des centaines de

 14   morts, bien sûr.

 15   Monsieur Donia, je voudrais savoir si ceci est le résultat de la

 16   déclaration de guerre qu'on a vue dans la déclaration dont on a fait un

 17   commentaire ici, il y a quelques instants, ou est-ce que ce sont des

 18   événements qui ont suivi la décision en question ?

 19   R.  Je n'ai pas eu l'occasion de passer en revue tous ces points et

 20   segments. Il est certain qu'un très grand nombre de ces incidents ont eu

 21   lieu avant la décision en question. Je ne sais pas non plus quelle est la

 22   source même de ce document. En fait, mon commentaire est qu'un très grand

 23   nombre d'incidents ici se sont déroulés avant la décision et qu'un très

 24   grand nombre d'incidents, également se sont déroulés après.

 25   Mme KORNER : [interprétation] Pourrait-on savoir quelle en est la source,

 26   s'il vous plaît ?

 27   M. CVIJETIC : [interprétation] Je crois que lorsque ce document a été versé

 28   au dossier, cela avait été dit, je crois qu'une des personnes qui, à ce

Page 5040

  1   moment-là, était ici, un expert militaire, nous avait dit de qui et de quoi

  2   il s'agissait ou de nous informer de la source. Excusez-moi. On m'apprend

  3   que le document a simplement été versé au dossier -- n'a pas été versé au

  4   dossier, mais qu'il porte une cote provisoire. Donc je retire ma demande de

  5   versement au dossier.

  6   Mme KORNER : [interprétation] Oui, excusez-moi, mais le Dr Donia voulait

  7   savoir quelle est la source du document; donc je ne fais que réitérer sa

  8   demande. Indépendamment du fait que ce document soit versé au dossier ou

  9   pas, j'aimerais savoir quelle est la source de ce document, si vous le

 10   savez.

 11   M. CVIJETIC : [interprétation] Je crois qu'un expert militaire qui est venu

 12   ici nous a confirmé qu'il s'agissait d'un document du service

 13   d'informations militaires et c'est la raison pour laquelle ce document n'a

 14   pas été versé au dossier en tant que pièce, car nous n'avions pas pu

 15   obtenir une confirmation de ceci. Très bien.

 16   Mme KORNER : [interprétation] Mais oui, effectivement, c'est ce que je sais

 17   déjà. Mais j'aimerais savoir d'où ce document a été -- enfin, d'où il

 18   provient, qui, et comment vous l'avez obtenu ?

 19   M. CVIJETIC : [interprétation] Je crois que c'est un document que nous

 20   avons reçu de la part du secrétariat de la commission d'Etat qui étudie les

 21   crimes de guerre commis sur le territoire de Bosnie-Herzégovine. Et je

 22   crois qu'un membre de cette commission - en fait, c'est un témoin de la

 23   Défense - et nous allons essayer de savoir par le biais de ce dernier

 24   comment et d'où ce document provient. Nous l'avions montré au Pr Basara la

 25   dernière fois.

 26   Q.  [aucune interprétation]

 27   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Pour pouvoir simplement savoir et

 28   faire la planification de notre journée d'aujourd'hui, de combien de temps

Page 5041

  1   aviez-vous encore besoin pour votre contre-interrogatoire; combien de temps

  2   aura besoin votre co-conseil; et combien de temps est-ce qu'il faudra pour

  3   les questions supplémentaires ?

  4   M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai besoin d'encore

  5   20 minutes. Je vais essayer de terminer en 20 minutes. Je n'aurai pas

  6   besoin de plus d'une demi-heure. En fait, j'aurais eu besoin de deux

  7   sessions, mais je vais essayer d'abréger. Voilà.

  8   M. PANTELIC : [interprétation] En fait, je dois le faire, ce n'est pas

  9   quelque chose que je fais joyeusement mais --

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je n'ai pas très bien entendu.

 11   M. PANTELIC : [interprétation] Non, j'ai dit que je vais devoir me

 12   conformer. Je vais devoir me plier aux exigences du temps qui nous est

 13   accordé. Je vais essayer de terminer certainement aujourd'hui.

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Et pour ce qui est des questions

 15   supplémentaires ?

 16   Mme KORNER : [interprétation] Je n'ai fait que soulever ceci puisque j'ai

 17   des difficultés avec le temps. On a accordé une heure 30 à M. Cvijetic, et

 18   une heure à M. Pantelic. M. Cvijetic a dépassé le nombre de minutes qui lui

 19   ont été accordées, mais bon, c'est une autre chose.

 20   Monsieur le Président, pour ce qui est des questions supplémentaires, je

 21   n'ai qu'une question à poser. Je ne sais pas si j'aurai d'autre question

 22   après avoir entendu les autres questions posées par mes éminents confrères,

 23   mais pour l'instant je n'ai qu'une question.

 24   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

 25   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Voilà, après avoir effectué un calcul un

 26   peu rapide, nous calculons que vous devriez devoir terminer dans les 20

 27   prochaines minutes.

 28   M. CVIJETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je vais

Page 5042

  1   m'efforcer de me plier à votre demande.

  2   Q.  Monsieur, il y a effectivement une demande de la communauté

  3   internationale pour essayer de résoudre les problèmes ou les crises en

  4   Bosnie-Herzégovine, nous connaissons le plan de Cutileiro, et cetera. Dans

  5   votre rapport, vous avez également mentionné les principes établis au mois

  6   de février. Mais je dois néanmoins vous montrer le document 1D134, donc

  7   1D134, puisque ces négociations s'étaient poursuivies et on a terminé les

  8   négociations le 18 mars 1993, tout du moins c'est ce qui est écrit sur ce

  9   document. J'aimerais vous demander de jeter un coup d'œil sur les

 10   principes.

 11   R.  Où sont-ils ?

 12   Q.  Vous les voyez.

 13   R.  Où sont-ils ? De quoi parlez-vous exactement ? De quel document ?

 14   Q.  Excusez-moi, c'est le document 34 dans votre classeur. Avez-vous trouvé

 15   le passage ?

 16   R.  Oui, tout à fait.

 17   Q.  Est-ce que vous connaissez ces principes ? Est-ce que vous avez eu

 18   l'occasion de voir ce document préalablement ?

 19   R.  Oui, tout à fait, je connais le document. Je l'ai déjà vu auparavant

 20   mais pas récemment, je dois le dire.

 21   Q.  Très bien. Nul besoin de faire un commentaire très long, nous allons le

 22   remettre aux experts du droit international. Mais est-ce que vous serez

 23   d'accord pour dire que c'est le document qui a été signé par les parties,

 24   ou ratifié par les parties ? Et que ce document prévoyait une Bosnie-

 25   Herzégovine souveraine indépendante composée de trois entités; est-ce que

 26   c'est exact ?

 27   R.  Ce document n'a pas du tout été signé. Radovan Karadzic avait fait une

 28   déclaration auprès de l'assemblée serbe de Bosnie. Peu de temps après, il

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  1   avait dit : Nous ne signerons jamais un document pour lequel nous ne sommes

  2   pas d'accord. Et "Oslobodenje" disait à l'époque : "D'accord avec les

  3   propositions ou non mais signées." Je crois, que ceci est dit à la dernière

  4   page, c'est que ceci a ouvert la porte vers d'autres négociations et c'est

  5   ainsi que la Communauté européenne ou le pourparler de la Communauté

  6   européenne a résumé l'accord dans une déclaration de presse faite le 18, ou

  7   très tôt le 19, à la fin de ces négociations.

  8   Q.  Oui, très bien. Mais, Monsieur Donia, vous affirmez que cet accord,

  9   l'accord de Lisbonne a été signé mais que M. Izetbegovic avait retiré sa

 10   signature du document ?

 11   R.  Pourriez-vous me montrer ce que vous citez, je vous prie ?

 12   Q.  Oui, tout à fait. Oui, je vais vous demander un instant simplement pour

 13   retrouver le document. Oui, le voici. Dans la version B/C/S -- enfin bon,

 14   plutôt dans la version anglaise il s'agit des pages 29 et 30 de votre

 15   rapport, n'est-ce pas ?

 16   R.  Quel rapport ?

 17   Q.  Le rapport sur les origines de la Republika Srpska. Et vous déclarez

 18   dans ce passage que le président de la présidence, Alija Izetbegovic était

 19   un partenaire involontaire à la conclusion de cet accord et s'est retiré

 20   peu de temps après, et cetera. Excusez-moi, est-ce que j'ai lu trop vite ?

 21   Mme KORNER : [interprétation] Je pense qu'il vous faudrait citer la phrase

 22   entière, car la seule chose qui a été présentée au témoin c'est qu'il avait

 23   retiré son paraphe du document. C'est ce que Me Cvijetic a dit à M. Donia,

 24   qu'il avait retiré son paraphe du document. Et ce n'est pas ce qu'affirme

 25   M. Donia.

 26   M. CVIJETIC : [interprétation]

 27   Q.  Avez-vous lu ce paragraphe ? Quelle est votre réponse, a-t-il retiré

 28   son paraphe ou pas ?

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  1   R.  Non. Je ne crois pas, enfin, comme je l'ai dit, je pense que les

  2   éléments de preuve émanant de diverses sources permettent de conclure sans

  3   la moindre possibilité de controverse que le document n'a jamais été signé.

  4   Manifestement, il n'a pas été paraphé. Je ne sais pas, en tout cas, s'il

  5   avait été paraphé. Mais parapher un document ne revient pas au même que de

  6   le signer. Et ce qui est certain, c'est que parapher un document qui

  7   stipule qu'il constitue la base de négociations futures ne vaut même pas la

  8   peine finalement. Il était clair que ce n'était là que le début des

  9   discussions à venir, qui devaient aboutir à la conclusion d'un accord,

 10   comme je le déclare ici, en particulier au sujet de l'établissement d'une

 11   carte. Et, comme vous le savez, ces accords n'ont pas été conclus à l'issue

 12   des pourparlers ultérieurs.

 13   Alors je dirais que lorsque Izetbegovic est rentré à la fin du mois de

 14   février, il a refusé de participer à la conclusion de cet accord, et ce,

 15   sur décision du conseil exécutif du SDA, donc de son parti politique, et

 16   par la suite Izetbegovic a ajouté des conditions supplémentaires ou insisté

 17   sur le respect de dispositions précises indiquant que les pourparlers ne

 18   pouvaient pas se poursuivre dans le même esprit qu'auparavant.

 19   Q.  Très bien, Monsieur Donia.

 20   M. CVIJETIC : [interprétation] J'aimerais que nous diffusions une séquence

 21   vidéo qui dure deux minutes et qui porte sur ce sujet. Je demanderais à Mme

 22   Tania, notre assistante, de lancer la vidéo.

 23   [Diffusion de la cassette vidéo]

 24   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 25   "Jose Cutileiro est nommé --

 26   M. CVIJETIC : [interprétation] Revenons au début de la séquence, voilà la

 27   diffusion peut commencer.

 28   [Diffusion de la cassette vidéo]

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  1   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

  2   "Lord Carrington a essayé d'éviter la catastrophe en nommant le président

  3   portugais, Jose Cutileiro, qui devait être chargé de trouver un terrain

  4   commun entre les Serbes, les Musulmans et les Croates avant la

  5   reconnaissance de l'indépendance de la Bosnie. Après être allé à Sarajevo

  6   et à Lisbonne et avoir discuté avec les trois parties en Bosnie au sujet de

  7   la possibilité de la création d'un Etat intégré, l'idée du fédéralisme a

  8   été évoquée. Les Serbes, Musulmans et Croates de Bosnie ont tous signé

  9   l'accord relatif à l'indépendance le 18 mars 1992. Le gouvernement central

 10   de Bosnie-Herzégovine avait prévu cela à la création de trois cantons sur

 11   le modèle de la Suisse. C'était la dernière proposition applicable en

 12   Bosnie-Herzégovine avant que n'éclate la guerre. 'Si le plan de Lisbonne

 13   avait été adopté, la guerre en Bosnie n'aurait sans doute pas éclaté,'

 14   affirme le journaliste de la BBC. Mais deux jours plus tard, suite à une

 15   réunion avec l'ambassadeur américain Warren Zimmermann, M. Izetbegovic a

 16   changé d'avis. Izetbegovic a retourné sa veste et s'est retiré. Zimmermann

 17   reconnaît devant le journaliste du New York Times ce que Izetbegovic avait

 18   signé avec réticence l'accord pour obtenir la reconnaissance

 19   internationale. Plus d'un an après le début de la guerre en Bosnie-

 20   Herzégovine, il a également reconnu que le plan de Lisbonne n'était pas

 21   mauvais du tout et qu'il ne comprend pas pourquoi Izetbegovic n'a pas

 22   signé. Zimmermann a dit à Izetbegovic qu'il pouvait peut-être attendre pour

 23   voir ce qui se passerait, ce qui signifiait que c'était une condition à

 24   l'adoption d'une aide. Donc 'n'acceptez pas le plan Cutileiro, n'acceptez

 25   pas l'accord de Lisbonne, mais tenez-vous un peu à l'écart et attendez de

 26   voir ce qu'il en sera de cet Etat intégré en Bosnie-Herzégovine.' Selon nos

 27   conceptions diplomatiques, il était tout à fait clair que les propositions

 28   Cutileiro pouvaient être un tournant important. La communauté européenne a

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  1   voté sur l'assistance des Etats-Unis --

  2   [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

  3   M. CVIJETIC : [interprétation]

  4   Q.  Monsieur Donia, je pense que cette séquence dément entièrement ce que

  5   vous avez dit, et Lord Carrington, y compris, ainsi que les autres auteurs

  6   de ce texte affirment qu'il a été signé, ils l'affirment tous, et que

  7   retirer sa signature était synonyme de déclaration de guerre. Est-ce que

  8   vous admettez cela ?

  9   R.  Non.

 10   Q.  Même après avoir vu ces images de vos yeux et avoir entendu ce que nous

 11   avons tous entendu dans ce prétoire pendant la diffusion de la séquence ?

 12   Mme KORNER : [interprétation] S'agissant de cette vidéo - d'abord, je pense

 13   qu'il serait préférable d'identifier l'origine de cette vidéo, ceci est

 14   dans l'intérêt de tous - et deuxièmement, il serait intéressant de

 15   déterminer qui est en train de parler, cet homme qui porte une moustache et

 16   qu'on voit à la fin de la séquence. Et troisièmement, il conviendrait de

 17   savoir si l'intégralité de la vidéo est disponible.

 18   M. CVIJETIC : [interprétation] Oui, j'ai le devoir de fournir ces

 19   informations sur lesquelles Mme Korner vient d'appeler mon attention. Il

 20   s'agit d'un film documentaire qui a été produit aux Etats-Unis et que l'on

 21   trouve sur internet. C'est donc un document public que chacun peut

 22   visionner. Son titre est, La guerre qu'il était possible d'éviter, et dans

 23   ce documentaire tous les représentants politiques et militaires agissant à

 24   l'époque apportent leur commentaire sur les affrontements en Bosnie-

 25   Herzégovine. J'ai diffusé une partie de ce documentaire dont la durée

 26   totale est de 180 minutes, si je ne m'abuse. C'est un document

 27   particulièrement long, que nous utiliserons sans doute ultérieurement dans

 28   d'autres portions. Il s'agit donc d'un documentaire qui est disponible sur

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  1   internet, et je communiquerai l'intégralité du film à l'Accusation. Nous

  2   disposons de l'intégralité de cette vidéo, donc nous la communiquerons dans

  3   son intégralité. Voilà.

  4   Mme KORNER : [interprétation] Mais est-on en mesure d'identifier l'homme

  5   qui porte la moustache et qui s'exprime dans ce documentaire ?

  6   M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, les personnes que

  7   nous ne parvenons pas à identifier, nous nous efforçons de les identifier

  8   également. On voit Lord Carrington, David Owen, Philip Morillon dans cette

  9   vidéo, mais il y a un certain nombre de personnes que nous ne sommes pas

 10   encore parvenus nous-mêmes à identifier. Nous y travaillons encore, et

 11   lorsque certains de nos témoins experts viendront déposer ici, nous

 12   pourrons peut-être répondre à ces questions. Pour le moment, je ne suis pas

 13   capable d'y répondre, Madame Korner, mais nous y répondrons dès que nous

 14   serons arrivés à la fin de l'identification de toutes les personnes qu'on

 15   voit dans ce documentaire.

 16   Monsieur le Président, je ne sais pas si les conditions sont réunies pour

 17   permettre l'adoption de cette vidéo, mais je demanderais au moins qu'elle

 18   soit enregistrée aux fins d'identification.

 19   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je ne suis même pas sûr que ceci soit

 20   possible, car il me semble que la vidéo nous écarte de notre chemin. Pour

 21   autant que je l'ai bien comprise, cette séquence se présente sous la forme

 22   d'une vidéo accessible au public. Vous l'avez fait diffuser, vous avez

 23   demandé son avis au témoin sur cette vidéo et il a répondu négativement à

 24   votre question. Donc je ne crois pas que nous puissions l'utiliser au-delà

 25   de cela, que nous souhaitions ou pas revenir sur cette vidéo plus tard pour

 26   des fins diverses puisqu'elle est accessible au public, nous verrons. Mais

 27   pour le moment, je ne vois pas ce qu'il est possible ou souhaitable de

 28   faire avec cette vidéo. Elle ne peut être certainement pas versée au

Page 5049

  1   dossier. Je ne crois même pas qu'elle soit enregistrable aux fins

  2   d'identification.

  3   Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, la difficulté c'est

  4   que la Défense s'efforce de s'appuyer sur cette vidéo en tant qu'élément de

  5   preuve démontrant quelque chose qui est peut-être important éventuellement.

  6   En d'autres termes, le fait que le plan Cutileiro a effectivement été signé

  7   et qu'Alija Izetbegovic a retiré sa signature. Alors il n'est pas contesté,

  8   bien entendu, qu'Alija Izetbegovic ait retiré sa signature, mais la Défense

  9   s'appuie sur une version qui est un montage, un montage effectué en vue de

 10   réalisation d'un film. Et je crains qu'un élément de preuve en bonne et due

 11   forme doit être proposé si cet argument est un argument que va défendre

 12   l'accusé. La Défense ne s'appuie pas sur ce documentaire pour démontrer

 13   qu'il y ait une quelconque vérité dans ce qui est dit dans cette vidéo.

 14   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Maître Cvijetic, pour ma part, j'ai

 15   quelques doutes et quelques difficultés à comprendre votre thèse, car je ne

 16   vois pas quelle peut être l'importance de savoir si oui ou non le plan

 17   Cutileiro a été signé ou simplement paraphé par M. Izetbegovic. Vous avez

 18   fait référence il y a quelques instants aux pages 29 et 30 du rapport du

 19   témoin relatif aux origines de la Republika Srpska, et la seule chose que

 20   je sois capable de trouver dans ce rapport se trouve en page 30 de la

 21   version anglaise où nous lisons que :

 22   "Le président de la présidence de Bosnie-Herzégovine et du SDA, M. Alija

 23   Izetbegovic, était un partenaire réticent à la conclusion de cet accord et

 24   qu'il s'est retiré des discussions relatives à ce rapport peu de temps

 25   après son retour à Sarajevo en provenance de Lisbonne à la fin du mois de

 26   février. Mais le point important ici ne semble pas porter sur les

 27   principes, mais bien sur une carte."

 28   Donc, Maître Cvijetic, tout ce que je trouve dans ces pages auxquelles vous

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  1   avez fait référence dans le rapport du témoin, c'est l'idée que M.

  2   Izetbegovic s'est retiré de l'accord. Et je suppose que ceci n'est pas

  3   contesté. Donc où réside l'importance, s'il y en a une, de savoir si oui ou

  4   non M. Izetbegovic a signé ou simplement paraphé ce document ?

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Par ailleurs, Maître Cvijetic, si

  6   vous me permettez, je ne pense pas avoir entendu l'un des représentants

  7   officiels que l'on voit dans ce documentaire ou dans cette séquence vidéo,

  8   et en tout cas je n'ai pas vu Lord Carrington dire ou évoquer le fait que

  9   l'accord ait été signé. La signature de l'accord n'a été mentionnée que par

 10   les réalisateurs du documentaire, mais pas par l'un des participants

 11   officiels aux pourparlers, si je ne m'abuse.

 12   M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 13   si je me souviens bien de la teneur de ce documentaire, il est écrit dans

 14   le sous-titre que l'accord a été signé à Lisbonne. Et on voit également M.

 15   Zimmermann qui est cité comme ayant dit que M. Izetbegovic était un

 16   partenaire réticent aux négociations, et cetera. Mais le point fondamental,

 17   finalement, réside dans cette phrase qui indique que si le plan de Lisbonne

 18   avait été signé, la guerre n'aurait pas éclaté. Voilà sur le fond ce qui

 19   importe.

 20   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je crois que nous devrions nous en tenir

 21   là pour le moment et passer à autre chose.

 22   M. CVIJETIC : [interprétation] Très bien.

 23   Q.  Monsieur Donia, je n'ai plus de temps d'aborder le dernier sujet qui

 24   m'intéressait, à savoir la partie de votre rapport où vous évoquez d'autres

 25   conflits internationaux, et en particulier les guerres mondiales. Vous

 26   intitulez ce chapitre, qui commence en page 36 de la page anglaise,

 27   création de l'histoire, et je pense qu'il se trouve dans ce chapitre pas

 28   mal d'inexactitudes ou d'erreurs. Par respect pour la Chambre de première

Page 5051

  1   instance, je me dois de donner mon appréciation de votre travail et

  2   proposer à la Chambre une façon de réagir à votre rapport. Je dois dire à

  3   cet égard --

  4   Mme KORNER : [interprétation] Toutes mes excuses, Monsieur le Président,

  5   objection. Il n'est pas du devoir de Me Cvijetic de donner son avis

  6   personnel. Il est inadapté de sa part de déclarer qu'à son avis, ce

  7   chapitre comporte de nombreuses inexactitudes et de nombreuses erreurs. Il

  8   peut contester ce qu'il souhaite contester dans le rapport, mais il n'est

  9   pas habilité à exprimer son avis personnel.

 10   M. CVIJETIC : [interprétation] Je suis d'accord avec Mme Korner, je n'ai

 11   pas le temps d'ailleurs de traiter de ces parties du rapport du témoin où

 12   il aborde les problèmes historiques. Je retire donc mes qualificatifs.

 13   Q.  Monsieur Donia, la Cour internationale de Justice de La Haye a rendu un

 14   verdict dans l'affaire Bosnie-Herzégovine contre la Serbie en acquittant la

 15   Serbie de toute participation à un génocide en Bosnie-Herzégovine, n'est-ce

 16   pas ?

 17   M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, permettez-moi de

 18   finir, je n'en ai que pour trois phrases seulement.

 19   Q.  Vous savez que ce verdict a été rendu, n'est-ce pas ?

 20   R.  Je connais très bien ce verdict. Je dirais simplement que la CIJ a

 21   admis, vis-à-vis de la Bosnie-Herzégovine, que la Serbie avait apporté son

 22   concours et aidé à la commission d'un génocide ou en tout cas n'avait pas

 23   empêché ce génocide. Excusez-moi, je n'ai plus le souvenir exact des mots

 24   juridiques qui ont été utilisés, mais en tout cas la seule chose qu'elle

 25   n'a pas admise, c'était que la Serbie avait commis un génocide.

 26   Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, voilà le problème.

 27   C'est la raison pour laquelle je me suis levée tout à l'heure, ensuite j'ai

 28   pensé que je pouvais attendre la réponse à la question. Mais M. Donia n'est

Page 5052

  1   pas expert de cette question. Le verdict peut être lu par tous, et il est

  2   impossible de le résumer dans les mots utilisés par Me Cvijetic pour le

  3   faire. J'ajouterais ce commentaire car j'étais présente durant les débats.

  4   M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, il est impossible de

  5   comprendre ma thèse à moins qu'on ne m'entende. Je n'en ai que pour trois

  6   phrases.

  7   Q.  Monsieur Donia, êtes-vous d'accord avec la déclaration selon laquelle

  8   ce verdict est mauvais et qu'il constitue une violation du principe selon

  9   lequel le droit pénal international doit punir le crime de génocide ?

 10   M. LE JUGE HALL : [interprétation] J'aimerais digérer la question avant que

 11   le témoin ne s'efforce d'y répondre. Il me semble que votre question --

 12   mais vous ne pouvez pas poser cette question à ce témoin dans la présente

 13   affaire. Lorsque vous employez le mot décision, je suppose que vous parlez

 14   du verdict rendu par la CIJ, Maître Cvijetic ? La CIJ qui, bien sûr, est un

 15   tribunal traitant de litiges intervenus entre des Etats. Donc il est tout à

 16   fait non pertinent pour ce témoin de se voir poser cette question durant

 17   les présents débats. Je pense que votre question n'est pas admissible.

 18   M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je teste la

 19   crédibilité du témoin, et je vous demande de poser la question qui consiste

 20   à lui demander s'il estime que ce verdict est un mauvais verdict, celui qui

 21   a été rendu par la CIJ.

 22   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Sauf votre respect, la Chambre a rendu

 23   sa décision, donc vous ne pouvez pas insister. Passez à autre chose.

 24   M. CVIJETIC : [interprétation] Bien.

 25   Q.  Monsieur Donia, avez-vous signé une lettre ouverte adressée au

 26   président de la Cour internationale de Justice de La Haye et ce Tribunal,

 27   dans laquelle vous qualifiez ce verdict de mauvaise décision et de

 28   violation des principes du droit international, en déclarant également que

Page 5053

  1   la politique s'est ingérée dans le travail de la CIJ comme elle le fait

  2   dans le travail du TPY ? Oui ou non, Monsieur Donia ?

  3   R.  Je ne m'en souviens pas. Je ne me souviens pas de l'avoir fait si je

  4   l'ai fait.

  5   Mme KORNER : [interprétation] J'aimerais que nous ayons un exemplaire de

  6   cette lettre ouverte.

  7   M. CVIJETIC : [interprétation] Oui. C'est la pièce de la Défense 1D01 - je

  8   demande l'affichage de ce document sur les écrans - donc 1D1162. Dans votre

  9   classeur, Monsieur Donia, ceci se trouve à l'intercalaire 36.

 10   Q.  Voilà, le document s'affiche. Il s'agit d'une lettre ouverte dans

 11   laquelle on trouve la citation que je viens de vous soumettre. Dans le

 12   premier paragraphe, on trouve le début de la citation faite par moi, et le

 13   reste est un peu plus loin dans le texte. Il y en a encore bien d'autres de

 14   même nature. Parmi les signatures, au numéro 4 des signataires, on trouve

 15   le nom du Pr Robert Donia, expert scientifique, puis une liste des

 16   positions défendues par vous.

 17   M. CVIJETIC : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche maintenant la

 18   page 2 de la version en B/C/S, où l'on voit le nom des signataires. Page 2

 19   de la version en B/C/S. Au regard du numéro 4, on trouve bien votre nom,

 20   n'est-ce pas, Pr Robert Donia.

 21   Q.  Professeur Donia, vous rappelez-vous maintenant si vous avez signé

 22   cette lettre ouverte ?

 23   R.  Je me rappelle que ce document a été diffusé, mais je ne me rappelle

 24   vraiment pas si je l'ai signé ou pas. Ce que j'ai vu était un courriel. Je

 25   n'ai aucun souvenir d'avoir en bonne et due forme signé ce document. Je ne

 26   m'en souviens simplement pas. Mais je vous fais confiance. Apposer mon nom

 27   au bas de ce document revient, d'une certaine façon, à en admettre la

 28   teneur.

Page 5054

  1   Q.  Très bien. Est-ce que vous vous rappelez éventuellement si vous l'avez

  2   signé ou paraphé ?

  3   R.  Comme je l'ai déjà dit, je n'ai rien signé. Si j'ai donné mon

  4   approbation, cela n'a pu se faire que par courriel.

  5   Q.  Bien. Dans ces conditions, je vous pose la question suivante : est-ce

  6   que quelqu'un qui admet un document comme celui-ci peut être auditionné par

  7   un Tribunal international comme celui devant lequel vous vous trouvez

  8   aujourd'hui ?

  9   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Maître Cvijetic, je pense que nous avons

 10   compris la réponse apportée par le témoin à votre question. Quoi qu'il en

 11   soit, vos 20 minutes sont expirées.

 12   M. CVIJETIC : [interprétation] Bien, permettez-moi un commentaire, Monsieur

 13   le Président. Je demande simplement le versement au dossier de ce document,

 14   je parle du document 1D01-1162.

 15   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Ce document est admis et enregistré.

 16   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] En tant que pièce à conviction 1D153,

 17   Monsieur le Président, Messieurs les Juges.

 18   M. CVIJETIC : [interprétation] J'explique pour quelles raisons je propose

 19   le versement au dossier de ce document. En effet, ce document démontre dans

 20   une grande mesure le manque d'objectivité de ce témoin. En tout cas, il

 21   permet de se poser la question de l'objectivité qui serait celle de ce

 22   témoin. Donc c'est la raison pour laquelle nous en demandons le versement

 23   au dossier.

 24   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je vous remercie.

 25   Maître Pantelic.

 26   Mme KORNER : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. Excusez-

 27   moi, Maître Pantelic. Un point encore sur ce document. Le document qui nous

 28   a été communiqué à l'avance l'a été en langue anglaise et ne comporte

Page 5055

  1   aucune signature, en tout cas aucun nom propre en dehors du Pr Marko Hoare

  2   et Adina Becirevic, et j'aimerais donc entrer en possession de la version

  3   originale, en tout cas le texte où l'on voit toutes les signatures.

  4   M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, dans la version

  5   originale en B/C/S dont nous disposons, il y a 54 signataires, et

  6   l'interprète qui a interprété le B/C/S n'a prononcé que trois noms. Donc

  7   nous ne sommes pas responsables de l'absence d'interprétation jusqu'au bout

  8   de la liste des signataires qui comporte effectivement 54 noms dans la

  9   version originale, au nombre desquels on trouve le nom du Pr Donia.

 10   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Donc c'est simplement une volonté de

 11   votre part de mettre de l'ordre dans les pièces à conviction.

 12   Mme KORNER : [interprétation] Oui. Je demande simplement la version

 13   complète en anglais.

 14   M. CVIJETIC : [interprétation] Pas de problème. Nous demanderons au service

 15   de traduction de bien vouloir traduire la liste complète des signataires,

 16   et nous communiquerons la nouvelle traduction à l'Accusation.

 17   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur Pantelic.

 18   Contre-interrogatoire par M. Pantelic : 

 19   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Donia. Ça fait longtemps que nous ne

 20   nous sommes pas vus.

 21   R.  Ça me fait plaisir de vous voir.

 22   Q.  Moi aussi.

 23   En 2001, nous avons eu des discussions dans l'affaire Simic, si je ne

 24   m'abuse. C'était au mois de septembre 2001.

 25   R.  Oui, il me semble.

 26   Q.  Et ne me comprenez pas mal, mais je suis très fier de constater que

 27   juste six conclusions que vous avez tirées ont été citées dans le jugement

 28   Simic. C'était grâce à mon travail si j'ai eu un certain succès.

Page 5056

  1   Mais de toute façon, passons à ce qui nous préoccupe ici. Tout d'abord,

  2   entre 2001 et le jour d'aujourd'hui, je pense que vous vous êtes très

  3   souvent rendu en Bosnie-Herzégovine ou bien au moins une ou deux fois par

  4   an, n'est-ce pas ?

  5   R.  Entre une à quatre fois par an environ.

  6   Q.  Est-ce que vous avez eu l'occasion de vous rendre sur le territoire de

  7   la Republika Srpska ou bien de rendre visite aux institutions de la

  8   Republika Srpska ?

  9   R.  Je pense que chaque fois que j'y suis allé, je me suis effectivement

 10   rendu en Republika Srpska.

 11   Q.  Pourriez-vous nous dire quand vous vous êtes rendu pour la dernière

 12   fois en Republika Srpska pour des raisons d'ordre privé, mais je pense que

 13   vous êtes allé également consulter les archives ou vous vous êtes rendu aux

 14   institutions de la Republika Srpska. En deux mots, dites-nous quel était

 15   l'objectif de votre séjour en Republika Srpska.

 16   R.  Je ne suis pas allé consulter les archives de la Republika Srpska. Je

 17   suis allé voir plusieurs villes et villages à l'est, dans la vallée du

 18   Danube et à Bijeljina, et également dans la partie occidentale. D'habitude,

 19   je restais un jour et j'avais des discussions avec les locaux.

 20   Q.  Est-ce que ces entretiens avaient pour objectif une sorte d'enquête que

 21   vous meniez ou vous vouliez écrire quelque chose ?

 22   R.  Non, je n'avais pas un livre à l'esprit que je voulais écrire. Je

 23   voulais tout simplement voir quels étaient les changements qui avaient eu

 24   lieu en Bosnie-Herzégovine dans son intégralité, et bien, la Republika

 25   Srpska en fait partie importante. Si je voulais obtenir quoi que ce soit,

 26   c'était plutôt de comprendre quelles étaient les relations entre les

 27   différentes municipalités.

 28   Q.  Vous êtes cofondateur de la fondation qui s'appelle Fondation de Donji

Page 5057

  1   Vakuf. Est-ce qu'elle est toujours active ?

  2   R.  Non.

  3   Q.  Comment se fait-il ?

  4   R.  Nous avons cessé les activités de cette association et nous avons donné

  5   les ressources dont nous disposions à l'Université du Michigan.

  6   Q.  Je pense que cela s'est passé il y a deux ans, n'est-ce

  7   pas ?

  8   R.  Je pense que c'était en 2005.

  9   Q.  Pendant son existence, est-ce que votre fondation a alloué des fonds

 10   aux institutions de Bosnie-Herzégovine ?

 11   R.  Je pense qu'il n'y avait pas de fonds alloués directement aux

 12   institutions bosniaques. La plupart de ces dons ont été faits à l'adresse

 13   de l'Université de Michigan, l'Université St- Lawrence, au Canada, puis

 14   pour les besoins d'un projet qui s'appelait l'initiative du développement

 15   des affaires. Le siège de cette organisation est à San Francisco, et je

 16   pense que nous avons donné des fonds aux organisations qui fonctionnent aux

 17   Etats-Unis et qui ne payent pas d'impôts. Ce sont des fondations.

 18   Q.  D'accord. S'agissant de ces institutions en Bosnie-Herzégovine,

 19   pourriez-vous être plus précis ? Quelles étaient ces institutions ?

 20   R.  Je ne me souviens pas avoir fait des dons aux institutions de Bosnie-

 21   Herzégovine. Comme je vous l'ai dit, ces dons ont été adressés aux organes

 22   que je viens de vous énumérer.

 23   Q.  D'après vous, vous êtes ami des Musulmans de Bosnie-Herzégovine ? Votre

 24   travail est étroitement lié aux questions qui les préoccupent en Bosnie,

 25   n'est-ce pas ?

 26   R.  Ce sont deux questions. La deuxième réponse est certainement, oui. Je

 27   consacre une grande attention et une grande partie de mon temps à la

 28   Bosnie, et je considère que je suis ami des Bosniaques, des quatre nations

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  1   là-bas, et d'autres également vivant en Bosnie-Herzégovine.

  2   Q.  D'accord. Vous avez été engagé par le gouvernement de Bosnie-

  3   Herzégovine en tant qu'expert devant la Cour internationale de Justice,

  4   s'agissant de l'affaire entre la Bosnie et la Serbie. Avez-vous agi au nom

  5   de l'équipe juridique bosniaque ?

  6   R.  On m'a demandé d'écrire un rapport, ce que j'ai fait, mais je n'ai pas

  7   déposé en espèce.

  8   Q.  Qui est-ce qui vous a demandé de le faire ?

  9   R.  J'oublie le nom de l'avocat néerlandais qui était représentant de la

 10   Bosnie. C'est lui qui m'avait contacté, je pense qu'il s'appelait Van den

 11   Biesen.

 12   Q.  Et vous avez collaboré étroitement avec votre consoeur, Mme Korner,

 13   n'est-ce pas ? Je pense qu'elle était également impliquée dans cette

 14   affaire au nom de la Bosnie ?

 15   R.  Oui. Nous avons eu une ou deux conversations à ce sujet, mais je ne

 16   dirais pas que nous avons collaboré étroitement.

 17   Q.  Mais elle a représenté la thèse de la Bosnie ?

 18   R.  Oui. Mais en tant que membre de l'équipe à l'époque.

 19   Q.  Avez-vous été payé pour ce travail que vous avez

 20   mentionné ?

 21   R.  D'après mes souvenirs, oui. J'ai reçu une compensation pour ce rapport.

 22   Q.  Et l'affaire menée devant la Cour internationale de Justice a été menée

 23   sur la demande de la présidence Croupion de Bosnie-Herzégovine. Cela veut

 24   dire que même aujourd'hui, il n'y a pas de représentants serbes au sein de

 25   cet organe, et les représentants serbes au sein des institutions de Bosnie-

 26   Herzégovine n'avaient jamais approuvé cette procédure ? Le savez-vous ?

 27   R.  La présidence de Bosnie-Herzégovine, à l'époque où l'affaire avait été

 28   entamée, avait deux représentants serbes. Donc je ne suis pas d'accord avec

Page 5059

  1   vous.

  2   Q.  Et c'était quand ?

  3   R.  D'après mes souvenirs, tout a commencé au début de l'année 1993.

  4   Q.  Et qui étaient ces membres serbes de la présidence ?

  5   R.  Mirko Pejanovic. Et la deuxième personne est une femme dont le nom

  6   m'échappe. Miljana, je ne sais pas comment c'était.

  7   Q.  Et s'agissant de ce monsieur, Pejanovic, il a été élu membre de la

  8   présidence en bonne et due forme ? Comment cela s'était passé ? Parce que

  9   le représentant officiel de la nation serbe au sein de la présidence

 10   bosniaque était Mme Plavsic et M. Koljevic. Alors comment se fait-il que

 11   tout d'un coup M. Pejanovic était devenu membre de cette présidence ?

 12   R.  Mme Plavsic et M. Koljevic ont démissionné le 7 avril 1992, et on s'est

 13   posé la question au sein de la présidence, comment les remplacer. C'est

 14   pourquoi ils ont examiné la liste électorale pour la présidence s'agissant

 15   du vote de 1990, et ils ont trouvé le nom des candidats qui venaient par la

 16   suite, candidats représentant la nationalité serbe. C'était Mirko Pejanovic

 17   et Nenad Kecmanovic.

 18   Q.  Dites-moi, Professeur Donia, vous n'êtes pas un expert au sujet des

 19   affaires qui ont trait à la constitution, n'est-ce pas ?

 20   R.  C'est exact.

 21   Q.  Et vous n'êtes pas expert dans le domaine du droit international public

 22   ?

 23   R.  C'est exact.

 24   Q.  Vous êtes historien, au fond, n'est-ce pas ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Et dans le cadre de votre travail, vous avez fini par connaître

 27   certains aspects du droit constitutionnel et du droit public international,

 28   plus que d'autres experts qui sont vos confrères, étant donné que vous avez

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  1   déposé à plusieurs reprises devant ce Tribunal et devant la Cour

  2   internationale de Justice également, et cetera ? Donc je pense que vous

  3   connaissez plutôt bien la constitution bosniaque et tous les accords

  4   internationaux qui entraient à la Bosnie, n'est-ce pas ?

  5   R.  Je ne dirais pas que je connais très bien, mais je dispose de certaines

  6   connaissances en la matière. Mais je répète, je n'ai pas déposé devant la

  7   Cour internationale de Justice.

  8   Q.  D'accord. A la lumière de ces faits, en 1992, après le vote des

  9   délégués serbes en octobre 1991, comment décririez-vous la

 10   Bosnie ? Est-ce que c'était un Etat qui jouissait de toutes les

 11   prérogatives d'un Etat, tel que le gouvernement central, contrôle sur la

 12   totalité du territoire et ainsi de suite ?

 13   Est-ce que la Bosnie était un Etat en termes du droit public international

 14   ou pas ?

 15   R.  La constitution de Bosnie-Herzégovine était de vigueur à partir de 1974

 16   avec tous les amendements. Et en 1990, c'était toujours la constitution de

 17   vigueur en Bosnie-Herzégovine. Je pense que les premiers amendements ont eu

 18   lieu en 1994, et cette constitution était toujours le fondement juridique.

 19   Bien sûr, le gouvernement central, la présidence de Bosnie-Herzégovine

 20   n'avait pas le contrôle sur la totalité du territoire de Bosnie-Herzégovine

 21   pendant la guerre.

 22   Q.  [aucune interprétation]

 23   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Maître Pantelic, il est midi cinq. Vos

 24   questions préliminatoires [phon] vont nécessairement poursuivre après la

 25   pause de 20 minutes.

 26   [Le témoin quitte la barre]

 27   M. PANTELIC : [interprétation] Merci.

 28   --- L'audience est suspendue à 12 heures 06.

Page 5061

  1   --- L'audience est reprise à 12 heures 35.

  2   M. LE JUGE HALL : [interprétation] En attendant que le témoin ne rentre

  3   dans le prétoire, Maître Pantelic, je vous signale qu'il faut que vous

  4   teniez compte de l'heure qui figure sur "Livenote." Vous devez terminer

  5   avant 1 heure 20 pour qu'il y ait suffisamment de temps pour les questions

  6   supplémentaires. Ensuite, la Chambre souhaite rendre deux décisions et nous

  7   allons lever l'audience à

  8   1 heure 45, comme il était prévu.

  9   [Le témoin vient à la barre]

 10   M. PANTELIC : [interprétation]

 11   Q.  Monsieur Donia, avant la pause, nous avons parlé de la question du

 12   contrôle sur le territoire et si c'était effectivement un Etat. Monsieur

 13   Donia, dès les premiers combats sérieux qui ont eu lieu en Bosnie, disons

 14   au mois d'avril 1992 jusqu'à la fin de l'année 1995, vous conviendrez que

 15   la Bosnie-Herzégovine n'était pas un Etat aux termes du droit public

 16   international s'agissant du contrôle que l'Etat avait sur le territoire,

 17   que ce n'était pas un Etat qui avait un gouvernement central, et cetera ?

 18   En convenez-vous ?

 19   R.  Je n'ai pas suffisamment de connaissances s'agissant du droit public

 20   international pour pouvoir répondre à cette question.

 21   Q.  Mais vous conviendrez que pendant cette période allant d'avril 1992 à

 22   la fin de l'année 1995, il y avait au moins deux, voire trois gouvernements

 23   qui fonctionnaient en Bosnie-Herzégovine, à savoir le gouvernement qui

 24   était sous le contrôle des Musulmans à Sarajevo, puis il y avait un

 25   gouvernement de la Republika Srpska et il y avait un gouvernement en

 26   Herceg-Bosna, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Et ces trois - je ne dirais pas entités - mais ces trois acteurs, en

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  1   quelque sorte, disposaient de leurs propres forces de police; en convenez-

  2   vous ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Et à un moment donné, conformément aux efforts fournis par la

  5   communauté internationale, à savoir le ministère des Affaires étrangères

  6   des Etats-Unis, je pense que c'était en 1994 que l'on a créé la fédération

  7   croato-musulmane ?

  8   R.  La Fédération de Bosnie-Herzégovine a été créée, si je ne m'abuse, au

  9   mois de mars 1994.

 10   Q.  Je pense que c'était une création des représentants musulmans et

 11   croates de Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Et de manière générale, vous conviendriez que pendant la guerre en

 14   Bosnie, les Musulmans de Bosnie, ou les Bosniens - je pense qu'ils

 15   s'appellent ainsi depuis 1993 - puis les Croates de Bosnie se battaient

 16   ensemble contre les Serbes de Bosnie, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Etant donné que vous êtes expert s'agissant de l'histoire de Bosnie et

 19   de tous ces événements survenus dans les Balkans, vous conviendrez que

 20   pendant la Deuxième Guerre mondiale, l'Etat marionnette, le NDH, c'était

 21   l'Etat des Croates soutenu par le régime d'Hitler, cet Etat était très

 22   proche des formations militaires musulmanes de Bosnie ? Donc ils avaient

 23   une coopération étroite pendant cette guerre, n'est-ce pas ?

 24   R.  C'est une question complexe, et la réponse générale serait non. Les

 25   Musulmans de Bosnie, pendant la Deuxième Guerre mondiale, étaient présents

 26   des deux côtés, pour ainsi dire. Probablement, la plupart faisait partie

 27   des forces du gouvernement des Oustacha ou bien, au début de la guerre,

 28   soutenaient ou faisaient partie des formations militaires des Oustachi, et

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  1   par la suite ont rejoint les partisans. A la fin de la guerre, je dirais

  2   qu'il y avait très peu de Musulmans qui soutenaient le gouvernement des

  3   Oustachi ou qui faisaient partie de ces forces.

  4   Q.  Mais vous savez qu'il existait des unités dites SS ou Handzar Division,

  5   qui étaient à l'époque composées de Musulmans de Bosnie ?

  6   R.  Oui, je pense que j'en ai parlé dans mon document qui traite de l'ARK.

  7   Je pense que cette division a été créée en 1943 sous les auspices des

  8   Allemands.

  9   Q.  [aucune interprétation]

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Donia, dans votre réponse

 11   précédente, lorsque vous parlez des Musulmans de Bosnie qui ont rejoint les

 12   partisans, vous avez parlé de l'année 1993.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, je voulais dire 1943.

 14   M. PANTELIC : [interprétation] Dans une certaine mesure, vous savez,

 15   Monsieur Donia, certaines choses se répètent.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] J'avais peur que vous alliez dire justement

 17   cela.

 18   M. PANTELIC : [interprétation]

 19   Q.  Conviendriez-vous que le régime des Oustachi appelait les Musulmans de

 20   Bosnie, pendant la Deuxième Guerre mondiale, les fleurs croates ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Cela veut dire que dès la Deuxième Guerre mondiale, cette sorte

 23   d'alliance que nous avons pu observer pendant la toute dernière guerre

 24   entre 1992 et 1995, donc on peut dire qu'il y avait une sorte d'alliance

 25   entre les deux ? Ou bien du moins une sympathie ou une coopération ?

 26   R.  Non, je ne suis pas d'accord. La participation des Musulmans au sein du

 27   NDH n'a jamais été très importante pour qu'on puisse dire qu'il s'agissait

 28   d'une alliance. Et d'autre part, je pense que les relations entre le HDZ et

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  1   le SDA se sont sérieusement dégradées pendant la guerre en Bosnie, dès le

  2   mois d'octobre 1992.

  3   Q.  De toute façon, Monsieur Donia, il est très difficile de parler de ces

  4   choses de manière générale, mais nous avons un grand nombre d'exemples

  5   couvrant la période de 1992 et 1995 -- et même dès l'année 1991, dès les

  6   élections pluripartites en Bosnie où, à plusieurs niveaux, qu'il s'agisse

  7   du domaine de la politique ou du domaine militaire ou de la coopération

  8   entre les forces de police, on peut constater que les Musulmans de Bosnie

  9   et les Musulmans de Croatie agissaient de concert contre les Serbes de

 10   Bosnie. En convenez-vous ?

 11   R.  Il y avait un grand nombre de tels exemples, oui.

 12   Q.  Je ne sais pas si vous le savez ou pas, mais Me Cvijetic a eu

 13   l'obligeance d'attirer -- en fait, de vous communiquer un document. Il

 14   s'agit d'un document émanant de la division Handzar datant de 1992 à

 15   Lukavica à Sarajevo. Je crois que nous allons traiter de ce document -- je

 16   vais aborder cette question un peu plus tard, mais j'aimerais savoir si,

 17   Monsieur Donia, vous savez si les représentants du SDA avaient envoyé des

 18   jeunes personnes musulmanes de Bosnie ou des officiers de police afin que

 19   ces derniers obtiennent une formation en Croatie pendant l'année 1992 et

 20   pendant 1991 ? Est-ce que vous savez ceci ?

 21   R.  Oui. En fait, ce genre de choses a eu lieu effectivement.

 22   Q.  Très bien. Monsieur Donia, j'aimerais savoir si -- en fait, je vous

 23   considère comme étant un expert sur l'Islam et la question musulmane, et

 24   j'aimerais savoir si vous pouvez nous parler de la déclaration islamique.

 25   Nous avons vu brièvement cette question abordée lors de l'interrogatoire

 26   principal, mais j'aimerais savoir, s'agissant de la déclaration islamique

 27   du feu président Alija Izetbegovic, j'aimerais qu'on en parle un peu.

 28   Pour ceci, je demande que l'on affiche la pièce du bureau du Procureur 65

Page 5065

  1   ter 03388. En attendant que ce document soit affiché à l'écran, j'imagine

  2   que vous savez que le bureau du Procureur a, en fait, mené une enquête et a

  3   voulu émettre un acte d'accusation contre Alija Izetbegovic, mais il est

  4   mort entre-temps. Est-ce que vous êtes au courant de ceci ?

  5   R.  Non, je ne savais pas spécifiquement tous les détails de tout ceci.

  6   Mais j'imaginais, je savais qu'à un certain moment donné, on allait

  7   certainement émettre un acte d'accusation contre ce dernier.

  8   Q.  Simplement pour vous informer, ce fait a été publié le 22 octobre 2003

  9   dans la presse.

 10   Maintenant, nous avons la déclaration islamique ici. Et j'aimerais vous

 11   demander de prendre connaissance de la première page de ce document.

 12   Mme KORNER : [interprétation] Je suis vraiment désolée, Maître Pantelic.

 13   Nous avons demandé le versement au dossier de cette pièce. Effectivement,

 14   cette pièce est versée au dossier. Si vous vous souvenez, Monsieur le

 15   Président, vous ne vouliez que les parties pertinentes. Il s'agit de trois

 16   pages, et ces trois pages figurent dans le prétoire électronique, mais les

 17   trois pages ne comprennent pas la page numéro 1.

 18   M. PANTELIC : [interprétation] Parce que j'avais l'impression qu'elle était

 19   versée au dossier en tant que pièce 65 ter.

 20   Mme KORNER : [interprétation] Non. Malheureusement, le document n'a pas été

 21   versé au dossier dans son ensemble. Il n'y a que trois pages qui ont été

 22   versées au dossier.

 23   M. PANTELIC : [interprétation] Très bien. Donc je demanderais aux Juges de

 24   la Chambre de nous aider. Le document figure dans le prétoire électronique,

 25   il s'agit de la pièce 1D00-3855. Nous pouvons certainement nous servir de

 26   ce document versé au dossier de cette façon-ci, et poursuivre la pratique

 27   de nos éminents confrères de l'Accusation. Effectivement, nous aussi, nous

 28   allons demander le versement au dossier que de parties pertinentes, et non

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  1   pas de l'ensemble d'un document.

  2   M. LE JUGE HALL : [interprétation] C'est justement la façon, probablement,

  3   la plus efficace.

  4   M. PANTELIC : [interprétation] Oui, effectivement, parce qu'il ne s'agit

  5   pas d'archives ici, mais d'un Tribunal pénal.

  6   Q.  Bien, pour revenir à vous, Monsieur Donia, en fait, je n'ai que

  7   quelques questions s'agissant de la déclaration islamique. Il y a quelques

  8   citations que j'aimerais vous lire, en commençant par la page 24 de la

  9   version anglaise, passage dans lequel M. Izetbegovic dit, et je cite :

 10   "Le peuple musulman n'acceptera jamais ce qui est opposé à l'Islam de façon

 11   claire, puisque l'Islam n'est pas simplement une collection d'idées ou de

 12   lois, mais l'Islam a transcédé [phon] à l'amour et en sentiments. Et celui

 13   qui s'insurge contre l'Islam ne peut que s'attirer la haine et la

 14   résistance."

 15   Donc je vous ai donné cette lecture de cette partie de la déclaration

 16   islamique, et j'aimerais savoir si vous ne pensez pas que ce passage

 17   appelle à l'action et au conflit, et non pas à l'amour et à la coopération.

 18   Est-ce que vous êtes d'accord avec moi ?

 19   R.  Non, je ne suis pas d'accord avec vous.

 20   Q.  Très bien. Merci. C'est tout ce que je voulais savoir. Maintenant, nous

 21   avons à l'écran la déclaration islamique. Ce que vous voyez dans la partie

 22   supérieure de la version en anglais, on peut lire :

 23   "Notre objectif est l'islamisation de Musulmans." Effectivement, personne

 24   ne peut dire que ce n'est pas ce qui est écrit. Et : "L'objectif est de

 25   croire et de combattre." Ceci pourrait mettre quelques craintes chez

 26   certains. Qu'est-ce que vous pensez de ceci, croyez et combattez ?

 27   R.  Je crois que c'est une rhétorique qui est très habituelle s'agissant de

 28   toute religion conçue. Enfin, ce sont des paroles qui ont été dites pour

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  1   susciter une essence de sentiment religieux chez les personnes.

  2   Q.  Oui. Puisque nous parlons de ceci, est-ce que vous pourriez nous donner

  3   un exemple dans le monde contemporain, ou y a-t-il d'autres religions,

  4   comme le bouddhisme, la chrétienté, y a-t-il d'autres religions comme, par

  5   exemple, je ne sais pas, l'Eglise de scientologie, qui auraient mené des

  6   actions contre les valeurs d'un monde civilisé ? Y a-t-il d'autres

  7   religions qui se battent contre les valeurs établies du monde contemporain

  8   ? Pourriez-vous nous donner un exemple d'autres religions, si vous le

  9   pouvez, qui appellent aux actions dans la rue, aux bombardements de

 10   bâtiments, et ainsi de suite ?

 11   R.  Permettez-moi de vous rappeler que ce texte a été rédigé dans les

 12   années 60. Pour ce qui est de ce qui se passe du terrorisme islamique

 13   aujourd'hui, en fait, ce n'est pas comparable. Je crois que vous ne pouvez

 14   pas comparer les deux. Je crois que chaque religion, à l'exception peut-

 15   être du bouddhisme, a, à quelque moment que ce soit dans l'histoire, eu à

 16   combattre pour sa religion. Il est certain que l'histoire de la chrétienté

 17   est également truffée de ce type de choses --

 18   Q.  Oui, Docteur Donia, laissons ceci de côté. J'aimerais simplement que

 19   l'on parle de la période contemporaine. M. Izetbegovic a rédigé ce livre -

 20   c'était, je crois, en 1970 - j'aimerais que l'on prenne cette période-là.

 21   Il s'agit d'une période 39, presque 40 ans, et j'aimerais vous demander si

 22   vous êtes d'accord avec moi qu'à l'époque - et je crois que vous l'avez

 23   déjà mentionné - que c'était une tentative d'essayer de trouver une

 24   solution à cette question islamique après la guerre israélo-arabe, n'est-ce

 25   pas ?         

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Ensuite, Monsieur Donia, j'aimerais savoir si vous êtes d'accord avec

 28   l'affirmation suivante, à savoir que c'est ceci qui a pavé la route du

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  1   conflit en Bosnie-Herzégovine sur la base des faits suivants : l'idée

  2   initiale des Musulmans de Bosnie, par un processus de majorisation [phon],

  3   qui voulaient effectuer le contrôle de l'ensemble de Bosnie-Herzégovine.

  4   Etes-vous d'accord avec moi pour dire cela, oui ou non ?

  5   R.  Non.

  6   Q.  Très bien. Alors, Monsieur Donia -

  7   M. PANTELIC : [interprétation] En fait, j'aimerais savoir s'il est possible

  8   de verser au dossier cette page en tant que pièce de la Défense, et par la

  9   suite, je passerais à d'autres parties de la déclaration islamique.

 10   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Puisqu'il n'a pas d'objection quant à sa

 11   pertinence, j'imagine que le document pourra être versé au dossier et qu'on

 12   pourra lui attribuer une cote.

 13   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bien, cette pièce portera la cote 2D31,

 14   Monsieur le Président, Messieurs les Juges.

 15   M. PANTELIC : [interprétation] Très bien. Prenons maintenant la page 24 en

 16   anglais de cette même déclaration islamique et la page 17 en B/C/S.

 17   Q.  Nous avons la page 24 à l'écran, le paragraphe commence

 18   par : "le peuple musulman n'acceptera…" ainsi de suite.

 19   M. PANTELIC : [interprétation] Je demanderais que l'on affiche la page 17

 20   en B/C/S, s'il vous plaît, c'est un chapitre. Mais nous avons besoin de la

 21   page 17 en B/C/S, et j'aimerais que l'on puisse voir également la page 24

 22   en anglais. Très bien. Page 17, s'il vous plaît. Ce qui m'intéresse, c'est

 23   le deuxième paragraphe en B/C/S.

 24   Q.  Nous avons parlé de ce paragraphe préalablement lorsqu'il était

 25   question de l'appel à la résistance. C'est un message de M. Izetbegovic

 26   dans lequel il a dit : "Ceux qui s'opposent à l'Islam ne vont que recevoir

 27   la haine et la résistance." J'aimerais vous demander si vous êtes d'accord

 28   avec moi pour dire que ceci fait appel à un conflit, que ces propos sont

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  1   des propos qui appellent à l'intolérance en Bosnie ?

  2   R.  Où parle-t-on de la Bosnie ici ?

  3   Q.  C'est la phrase qui se trouve à la base de toutes les actions en

  4   Bosnie-Herzégovine. Je ne sais pas si vous êtes d'accord avec moi ou pas.

  5   R.  Avec tout le respect, je ne suis pas d'accord du tout avec vous.

  6   Q.  Fort bien.

  7   M. PANTELIC : [interprétation] Alors j'aimerais demander que l'on affiche

  8   la page 24 en anglais et la page 17 en B/C/S.

  9   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Versées au dossier.

 10   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce 2D32, Monsieur

 11   le Président, Messieurs les Juges.

 12   M. PANTELIC : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche la page 26 en

 13   anglais et la page 19 en B/C/S. Page 26. Non, en fait, c'est la page 35.

 14   Mais j'ai besoin de la page 19 en B/C/S.

 15   Q.  Pendant que l'on attend que cette page soit affichée à l'écran,

 16   j'aimerais attirer votre attention sur le passage suivant : M. Izetbegovic

 17   dit, je cite :

 18   "Une société islamique sans une autorité islamique est incomplète et n'a

 19   pas d'autorité. Les gouvernements islamiques, sans une société islamique,

 20   sont soit l'utopie ou la violence."

 21   Ensuite, il poursuit pour dire :

 22   "En parlant de façon générale, le Musulman n'existe pas en tant qu'individu

 23   indépendant. S'il souhaite vivre et survivre en tant que Musulman, il doit

 24   s'entourer, il doit créer une communauté, un système et en faire partie. Il

 25   ne doit pas changer le monde de lui-même. L'histoire n'a jamais fait preuve

 26   d'un mouvement islamique, qui n'est pas en même temps un mouvement

 27   politique."

 28   Monsieur Donia, c'est ce que voulait faire M. Izetbegovic pour créer un

Page 5070

  1   environnement propice à occuper toutes les parties non musulmanes de Bosnie

  2   afin d'avoir un gouvernement centralisé pour en arriver à ces objectifs ?

  3   J'aimerais savoir si vous êtes d'accord, oui ou non, avec moi ?

  4   R.  Non, je ne suis vraiment pas d'accord pour dire qu'un document rédigé

  5   en 1970 puisse représenter une plate-forme pour un parti qui a été créé en

  6   1990.

  7   Q.  Oui. Mais il est de connaissance notoire que le processus de

  8   majorisation et la violation des droits d'une nation constitutionnelle en

  9   Bosnie ont provoqué les conséquences terribles qui sont arrivées en Bosnie

 10   ?

 11   R.  Bien, non, c'est très peu probable. Si vous prenez la déclaration

 12   islamique et si vous parlez de la majorisation, et cetera, je ne suis

 13   vraiment pas d'accord avec vous. On ne peut pas faire de parallèle, on ne

 14   peut pas faire de conclusions telles que vous les faites. 

 15   Q.  Mais effectivement, en octobre en 1991, en Bosnie, il y a une

 16   majorisation ?

 17   R.  C'est vous qui le dites. Les dirigeants du SDS ont également

 18   caractérisé ce qui s'est passé comme tel, mais d'autres personnes à

 19   l'époque ne sont pas arrivées à la même conclusion.

 20   Q.  Donc vous nous dites que même les personnes érudites, comme Bob Hayden

 21   ou d'autres auteurs qui avaient dit que c'est ceci qui a commencé le tout,

 22   ce vote oral [comme interprété] ? Est-ce que vous voulez dire que ce sont

 23   des personnes qui sont arrivées aux mauvaises conclusions ?

 24   R.  Bob Hayden a très souvent tort, mais je n'ai pas de conclusion. Je ne

 25   peux pas vraiment vous donner d'exemple concret. Si vous avez une

 26   déclaration, je serais heureux de vous donner des commentaires sur cette

 27   dernière.

 28   M. PANTELIC : [interprétation] D'abord, Monsieur le Président, pourrait-on

Page 5071

  1   avoir cette partie de la déclaration islamique.

  2   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Versée au dossier.

  3   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Cette pièce est versée au dossier.

  4   2D33, Monsieur le Président.

  5   M. PANTELIC : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche à l'écran la

  6   page 30 de la déclaration islamique. En B/C/S, nous avons ce même texte à

  7   la page 22. Je répète, il s'agit de la page 30 et de la page 22.

  8   Q.  Monsieur Donia, vous pouvez peut-être m'aider en me disant si la partie

  9   qui m'intéresse ici -- enfin, si vous pouviez nous donner des commentaires,

 10   "il ne peut pas y avoir de paix ni de coexistence entre les institutions

 11   non islamiques et la religion islamique." Est-ce que le texte se trouve sur

 12   cette page ? Attendez voir. Oui.

 13   M. PANTELIC : [interprétation] Je n'arrive pas à retrouver le passage, je

 14   vais demander à mes assistants de m'aider.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Maître Pantelic, j'aimerais retirer le

 16   commentaire que j'ai fait sur Bob Hayden. Je me vois vraiment désolé de

 17   l'avoir fait. Nous avons travaillé ensemble et nous aimons bien nous mettre

 18   d'accord sur les choses sur lesquelles nous sommes en désaccord. Nous

 19   déjeunons souvent ensemble, nous prenons un verre ensemble. Donc je ne

 20   voudrais surtout pas que le commentaire reste tel que je l'ai dit tout à

 21   l'heure.

 22   M. PANTELIC : [interprétation] Merci, Monsieur Donia, nous allons lui faire

 23   votre message.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Moi aussi, d'ailleurs, si je le rencontre

 25   avant vous.

 26   M. PANTELIC : [interprétation] Très bien.

 27   Je n'arrive pas à lire très bien. Est-ce que nous pourrions agrandir par un

 28   zoom, s'agissant de la page 22, en B/C/S. Je n'arrive vraiment pas à

Page 5072

  1   trouver le texte pertinent en anglais.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est peut-être la page précédente.

  3   M. PANTELIC : [interprétation] J'ai un problème, parce que j'ai la page 22

  4   en B/C/S et d'abord, ce qui m'intéresse, c'est la conclusion de la

  5   possibilité d'une coexistence entre la religion islamique, mais je n'arrive

  6   pas à trouver le texte en anglais.

  7   Q.  De toute façon, je vais vous en donner lecture en serbe, et plus tard

  8   nous allons trouver le passage exact en anglais. En serbe, voici ce que le

  9   texte dit, je cite :

 10   "Ce commentaire est une conclusion nous permettant de voir qu'il est

 11   absolument impossible de coexister entre la religion islamique et les

 12   systèmes ou les institutions politiques et religieuses non islamiques."

 13   Donc, Docteur Donia, si je vous disais que le dirigeant du SDA, M.

 14   Izetbegovic, dans cet ouvrage qui est un ouvrage de jeunesse, a conçu cette

 15   politique qui a servi à son parti en Bosnie pour entamer le processus de

 16   l'islamisation en Bosnie-Herzégovine, est-ce que vous seriez d'accord avec

 17   moi pour dire ceci ?

 18   R.  Si je vous ai bien compris, votre affirmation est que ceci a aidé à

 19   créer une politique, cette politique, non, je ne suis pas du tout d'accord

 20   avec vous. Je crois que vous avez rencontré la déclaration d'Izetbegovic

 21   dans la déclaration islamique et que les sociétés islamiques et non

 22   islamiques ne sont pas compatibles, je suis d'accord pour dire que ceci est

 23   écrit ici de façon très claire. Mais c'était à une époque où il ne

 24   s'adressait pas à une entité particulière en ex-Yougoslavie ou en Bosnie-

 25   Herzégovine, il voulait simplement un ravivement [phon] du monde islamique,

 26   mais tout ceci est très éloigné d'un monde où les partis multipartites

 27   auraient pu avoir lieu.

 28   A l'époque, j'étais en Yougoslavie, vous aussi d'ailleurs, et je ne

Page 5073

  1   crois pas qu'il pensait, lorsqu'il écrivait ces lignes, à une époque

  2   ultérieure.

  3   Q.  Mais c'est un fait, n'est-ce pas, Monsieur Donia, un très grand nombre

  4   de membres des Moudjahidines et plus loin, les membres d'al-Qaeda se

  5   trouvaient en Bosnie, et ce, à la suite d'un appel officiel d'une

  6   invitation qui avait été faite par les représentants musulmans de Bosnie

  7   les invitant à venir et combattre ?

  8   R.  Je ne sais pas si vous avez eu un appel officiel lancé par al-Qaeda en

  9   demandant à ces personnes de venir combattre. Il y a effectivement eu des

 10   représentants du SDA qui avaient demandé des renforts des Moudjahidines en

 11   Bosnie-Herzégovine.

 12   Q.  Et ces Moudjahidines avaient commis des crimes horribles contre les

 13   Serbes, par exemple, les crimes commis sur le mont Ozren dont vous avez

 14   sans doute connaissance, on a procédé à la décapitation de quelques soldats

 15   serbes, est-ce que vous savez cela ? Est-ce que vous savez que ceci est

 16   arrivé ?

 17   R.  Je suis d'accord pour dire que des crimes terribles ont été commis par

 18   les Moudjahidines, et ce, contre les Serbes et les Croates effectivement.

 19   Q.  En fait, vous nous dites que ces phrases dans la déclaration islamique

 20   qui parle d'une coexistence pacifique entre les peuples et les nations et

 21   les religions -- Monsieur Donia, est-ce que vous êtes d'accord pour dire

 22   que ces phrases ont été à la base de ces événements tragiques qui se sont

 23   déroulés en Bosnie-Herzégovine ?

 24   R.  Non, je ne suis pas du tout d'accord avec vous pour dire que c'est ceci

 25   qui a causé la violence ou qui se trouve à la base de cette violence.

 26   Q.  Mais c'était néanmoins important. Ce sont des phrases qui ont été dites

 27   et qui ont servi de précurseur à ces événements tragiques qui se sont

 28   déroulés en Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas ?

Page 5074

  1   R.  Je ne sais pas ce que vous voulez dire par là dans le sens où ceci fait

  2   partie de l'histoire de la toile de fond générale de l'histoire, et donc,

  3   effectivement, je rejette la notion d'une causalité linéaire, plus

  4   particulièrement lorsque vous parlez des événements qui se sont déroulés en

  5   1991.

  6   Q.  Ce livre parle de lui-même, Monsieur Donia.

  7   M. PANTELIC : [interprétation] Je demande le versement au dossier de la

  8   page comportant la citation que j'ai faite, Monsieur le Président.

  9   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Admise et enregistrée.

 10   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] En tant que pièce à conviction 2D34,

 11   Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Est-ce que c'est toujours la page 30,

 13   Monsieur Pantelic ?

 14   M. PANTELIC : [interprétation] C'est la page 22 en B/C/S et, effectivement,

 15   la page 30 en anglais, oui.

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

 17   M. PANTELIC : [interprétation] Merci beaucoup.

 18   Je demande que soient affichées les pages 49 et 50 de la version anglaise,

 19   qui correspondent à la page 37 de la version B/C/S.

 20   Q.  En attendant l'affichage, je vais donner lecture de ce passage, après

 21   quoi nous pourrons aborder les questions.

 22   Professeur Donia, M. Izetbegovic dit ce qui suit dans son ouvrage, je cite

 23   :

 24   "L'ordre islamique ne peut être établi que dans des pays où les Musulmans

 25   représentent la majorité de la population. Si tel n'est pas le cas, l'ordre

 26   islamique est réduit à un simple pouvoir (en l'absence d'autres éléments au

 27   sein de la société islamique)." Et : "et peut tourner à la violence."

 28   Comment comprenez-vous cette situation particulière de son livre ?

Page 5075

  1   R.  Je comprends cela comme faisant partie de l'effort très général qu'il

  2   consent pour participer à la relance de l'islamisme, et en particulier pour

  3   réagir au fait que la société islamique doit se battre, elle doit plutôt

  4   fleurir dans le cadre d'un tel renouveau islamique. Ceci n'est pas

  5   spécifique à la Bosnie, ses commentaires ne concernent pas uniquement la

  6   Yougoslavie fédérale. Il s'agit d'une déclaration générale de principe

  7   faite par lui dans le contexte de la discussion qui accourt dans une

  8   dizaine de différents pays islamiques à l'époque.

  9   Q.  Et dans la deuxième partie, page 50 de la version anglaise,

 10   correspondant à la page 37 de la version B/C/S, nous trouvons une référence

 11   aux minorités. Il déclare, je cite :

 12   "Les minorités musulmanes connues au sein d'un Etat islamique, à condition

 13   qu'elles soient loyales," et j'insiste là-dessus, "à condition qu'elles

 14   soient loyales, jouissent de la liberté religieuse et de toutes les formes

 15   de protection."

 16   Donc, dites-moi, Professeur Donia, comment interprétez-vous ce passage très

 17   précis, et en particulier les mots "à condition qu'ils soient loyaux" ? Que

 18   se passe-t-il s'ils ne sont pas fidèles à la majorité ? Que se passerait-il

 19   pour cette minorité dans ce cas-là ? Pouvez-vous me l'expliquer ? Comment

 20   interprétez-vous ce passage ?

 21   R.  Encore une fois, je replace ceci dans le contexte de l'époque, et je

 22   pense que c'est une espèce de principe admis quant au fait que tous les

 23   groupes présents au sein d'un Etat doivent y être fidèles, fidèles à l'Etat

 24   ou fidèles au gouvernement.

 25   Q.  C'est excellent. Donc vous conviendriez avec moi qu'au sein de la

 26   Republika Srpska, un individu, quelle que soit son appartenance ethnique,

 27   qui serait opposé au système, opposé à l'ordre constitutionnel, pourrait

 28   être puni et traduit devant les tribunaux, ou en tout cas une certaine

Page 5076

  1   procédure pourrait être engagée à son encontre. Est-ce que vous êtes

  2   d'accord avec moi sur ce point ou pas, selon le même principe qui vient

  3   d'être discuté ?

  4   R.  De quelle période parlez-vous ?

  5   Q.  Entre 1992 et 1995.

  6   R.  Bien, quel que soit le droit pénal en vigueur à l'époque, dans le cadre

  7   du système judiciaire de Bosnie-Herzégovine et de la constitution de

  8   Bosnie-Herzégovine, il importe que ce droit s'applique. Je ne suis pas

  9   assez expert pour vous dire de quoi il s'agit exactement.

 10   Q.  Mais sur le principe, si vous dites que les minorités au sein d'un Etat

 11   islamique, à condition qu'elles soient loyales, jouissent de certains

 12   droits, vous ne pouvez pas expliquer qu'en l'absence d'une telle loyauté,

 13   il n'y aurait pas certaines conséquences judiciaires. Par exemple, je vous

 14   propose l'exemple d'un membre d'un groupe ethnique minoritaire en Republika

 15   Srpska qu'il sera pas fidèle au système, est-ce qu'il aurait à faire face à

 16   des poursuites judiciaires, oui ou non; ai-je raison de le dire ou pas ?

 17   R.  C'est l'erreur fondamentale que vous commettez, la Bosnie-Herzégovine

 18   n'était pas un Etat islamique. C'était un Etat civil reconnu par la

 19   communauté internationale et par des dizaines de pays et qui avait son

 20   propre système constitutionnel. Et les Musulmans représentaient au sein de

 21   cet Etat un groupe. Là encore, le résonnement linéaire ne peut s'appliquer.

 22   L'Etat qui existait entre 1992 et 1995 ne pourrait même pas être décrit

 23   comme comparable peu ou prou avec la république islamique ou un Etat

 24   islamique.

 25   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Excusez-moi, au compte rendu d'audience,

 26   page 71, ligne 1, dans la citation de Me Pantelic, nous devons lire

 27   l'original, je cite : "Les non-Musulmans," alors qu'au transcript, il est

 28   question de Musulmans connus. Manifestement, les deux mots ont un sens

Page 5077

  1   différent.

  2   M. PANTELIC : [interprétation] Oui, je vous remercie, Monsieur le

  3   Président. Je demande l'affichage des pages 49 et 50 en B/C/S,

  4   correspondant à la page 37 en anglais -- ou plutôt, excusez-moi, pages 49

  5   et 50 en anglais, correspondant à la page 37 en B/C/S, le versement au

  6   dossier de ces pages.

  7   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Admises et enregistrées.

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] En tant que pièce à conviction 2D35,

  9   Monsieur le Président.

 10   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Maître Pantelic, il est

 11   13 heures 23.

 12   M. PANTELIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, excusez-moi,

 13   j'en termine, mais j'aurais besoin de temps supplémentaire. Je m'intéresse

 14   maintenant aux pages 69 et 70 de la version anglaise, qui correspondent aux

 15   pages 53 et 54 de la version B/C/S. Dans ce passage, M. Izetbegovic évoque

 16   le rapport existant entre les Juifs, les Sudistes [phon] et les régimes

 17   arabes sur la question palestinienne, et cetera. Et dans cette citation

 18   précise, il dit, je cite :

 19   "Il n'existe qu'une solution pour le mouvement islamique et pour tous les

 20   Musulmans du monde, poursuivre la lutte, de l'élargir et de la prolonger

 21   jour après jour, année après année, quel que soit le sacrifice que cette

 22   tâche puisse impliquer."

 23   Alors, je vous dis, Monsieur Donia, que ceci est un message très clair de

 24   la part de M. Izetbegovic, et c'est d'ailleurs le fondement de sa

 25   politique, même si j'admets éventuellement que ce ne soit pas un fondement

 26   déclaré de sa politique, mais en tout cas les actions du gouvernement

 27   musulman de Bosnie en Bosnie ont abouti à de telles conséquences.

 28   Conviendriez-vous avec moi ou pas que ceci constitue le fondement du

Page 5078

  1   processus de pouvoir majoritaire détenu par les Musulmans de Bosnie en

  2   Bosnie ?

  3   R.  Non, je ne suis pas d'accord que ceci soit le fondement de ce que vous

  4   venez de décrire, comme vous l'avez fait, qui a eu lieu en octobre 1991.

  5   M. PANTELIC : [interprétation] Je vous remercie, Professeur Donia. Nouveau

  6   numéro de pièce à conviction, Monsieur le Président, je vous prie, pour ces

  7   pages.

  8   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Admises et enregistrées. Je pense que

  9   c'était déjà le cas auparavant.

 10   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] En tant que pièce à conviction 2D36,

 11   Monsieur le Président.

 12   M. PANTELIC : [interprétation] Je vous remercie.

 13   Q.  Professeur Donia, dites-moi et dites, je vous prie, aux Juges de la

 14   Chambre quelle est la rémunération que vous percevez pour votre rôle

 15   d'expert au bénéfice du bureau du Procureur ? Est-ce que vous travaillez

 16   bénévolement ou êtes-vous rémunéré ? Je ne vous demande pas un chiffre

 17   précis, mais simplement nous dire si vous êtes payé pour votre travail.

 18   R.  La rémunération n'est pas suffisante, est-ce que c'est une bonne

 19   réponse ? Je perçois 200 dollars par jour, qui est la somme versée au

 20   témoin, plus le per diem.

 21   Q.  Non, non. Je ne vous demandais pas un chiffre particulier. Mais je

 22   crois comprendre que vous avez été payé par le gouvernement de Bosnie-

 23   Herzégovine pour votre travail à la CIJ par le passé, n'est-ce pas ?

 24   R.  J'ai été payé par le procureur général du gouvernement de Bosnie-

 25   Herzégovine pour la production de mon rapport.

 26   Q.  Oui. En fait, vous vous êtes rendu à Sarajevo pendant le gouvernement

 27   de Tito, n'est-ce pas, sous le régime socialiste, à plusieurs reprises ?

 28   R.  Oui. Je n'y suis pas allé à plusieurs reprises. J'y suis allé en 1965,

Page 5079

  1   en 1974, en 1975, pendant un an, puis encore une fois en 1978 et en 1985.

  2   Q.  Si vous comparez la période de l'époque à l'époque actuelle du point de

  3   vue du nombre de mosquées présentes à Sarajevo, que diriez-vous ?

  4   R.  Il y a beaucoup plus de mosquées à Sarajevo aujourd'hui qu'il n'y en

  5   avait en 1975.

  6   Q.  Vous vous rappelez cela parce que Sarajevo, je dois le dire, est encore

  7   l'une de mes villes favorites dans l'ex-Yougoslavie, donc je vous demande

  8   si vous vous rappelez la bonne chair, l'amabilité de la population et le

  9   climat très agréable qui y

 10   régnait ? Vous vous rappelez quelle était la couleur des plaques portant le

 11   nom des rues à l'époque de Tito ? Je peux vous dire qu'elles étaient

 12   bleues.

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Vous êtes d'accord avec moi ?

 15   R.  Oui. Avec des inscriptions en grandes lettres blanches, en général.

 16   Q.  Des lettres blanches. Et de nos jours, quelle est la couleur des

 17   plaques portant les noms des rues ?

 18   R.  Verte.

 19   Q.  Verte. Et le vert, c'est la couleur préférée des Musulmans, je crois ?

 20   R.  En effet.

 21   Q.  Et les noms des rues ont changé, par exemple, nous avons pas mal de

 22   noms à Sarajevo comme, peut-être pas Moudjahid, mais en tout cas le nom de

 23   combattants musulmans pour la cause islamique, des héros islamiques, et

 24   beaucoup moins de noms de personnalités serbes et croates, n'est-ce pas ?

 25   R.  Il y en a quelques-uns.

 26      Q.  Quelques-uns.

 27   R.  Et je crois que l'on peut dire fondamentalement que les dirigeants

 28   politiques, cela a été le fait, y compris des partis communistes au

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  1   pouvoir, ont donné les noms des personnalités qu'ils préféraient à des

  2   rues. Ceci a été le cas de tous les groupes au pouvoir pendant toute

  3   l'histoire de la Bosnie-Herzégovine.

  4   Q.  Professeur Donia, je voudrais --

  5   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Maître Pantelic.

  6   M. PANTELIC : [interprétation] J'en termine. J'en termine. C'est mon grand

  7   final.

  8   Q.  Professeur Donia, je vous déclare que vous êtes un combattant de la

  9   cause islamique et musulmane, que vous êtes très proche du régime musulman

 10   en Bosnie-Herzégovine et que vous êtes partial au sujet des événements

 11   survenus en Bosnie-Herzégovine. Est-ce que vous êtes d'accord avec moi sur

 12   ce point; oui ou non ?

 13   R.  La réponse est facile, Maître, c'est un non.

 14   M. PANTELIC : [interprétation] Je vous remercie, Professeur Donia. Passez

 15   une bonne journée.

 16   Mme KORNER : [interprétation] J'espère que votre réponse ne concernait pas

 17   les quatre questions posées, car il y en avait quatre dans cette très

 18   longue question.

 19   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui, Maître Cvijetic.

 20   M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, une proposition

 21   concrète. Je pense que vous avez remarqué que la Défense comme l'Accusation

 22   d'ailleurs, s'agissant de la déclaration islamique, n'en ont extrait que

 23   quelques fragments. Je n'ai pas eu le temps de m'occuper de ce document. Je

 24   ne vais donc même pas essayer de le faire dans ces conditions, mais pendant

 25   les séances de récolement, j'ai appelé l'attention du Pr Donia sur le

 26   risque qu'il y avait à extraire certaines citations d'un texte plus

 27   complet. La déclaration islamique est un pamphlet politique, ce n'est pas

 28   un pamphlet religieux. C'est un texte très court. Nous avons versé au

Page 5081

  1   dossier des rapports qui étaient beaucoup plus longs. Donc peut-être

  2   serait-il équitable et convenable, parce que nous avons le prétoire

  3   électronique en B/C/S et en anglais, de verser l'intégralité de la

  4   déclaration islamique au dossier pour que le loisir soit donné aux Juges de

  5   la Chambre de se prononcer sur l'intégralité du texte, sur l'importance de

  6   ce document par rapport aux événements de Bosnie-Herzégovine.

  7   [La Chambre de première instance se concerte] 

  8   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Vous avez dit que c'était un document

  9   court. Qu'entendez-vous par court ?

 10   M. CVIJETIC : [interprétation] C'est exact.

 11   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Est-ce un livre ?

 12   M. CVIJETIC : [interprétation] C'est un petit livre de 40 pages alors que

 13   nous avons eu des rapports qui comptaient plus de 100 pages. Et c'est un

 14   texte réellement important.

 15   M. LE JUGE HALL : [interprétation] S'il s'agit de ce nombre de pages, alors

 16   je suis d'accord avec vous. Le greffe va donc se voir chargé de la tâche

 17   peu enviable d'adapter le système de numérotation pour permettre

 18   l'intégration de ce document au prétoire électronique.

 19   Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, si vous pensez au

 20   texte original, nous l'avons déjà versé au dossier en partie, donc nous

 21   demanderions que la pièce versée par l'Accusation soit remplacée par ce

 22   nouveau document avec un numéro en P.

 23   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je vous remercie.

 24   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

 25   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je vous remercie, Maître Cvijetic, de

 26   votre proposition.

 27   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, dans ce cas,

 28   l'ouvrage entier devient la pièce à conviction P6, et les pièces 2D31 à

Page 5082

  1   2D36 sont retirées des pièces à conviction.

  2   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je vous remercie.

  3   Madame Korner --

  4   Mme KORNER : [interprétation] J'ai une question à poser.

  5   Nouvel interrogatoire par Mme Korner : 

  6   Q.  [interprétation] Professeur Donia, de ce que vous avez dit ce matin au

  7   sujet des allocutions prononcées par M. Karadzic devant l'assemblée en

  8   octobre 1991 découle ma question, on vous a demandé au compte rendu

  9   temporaire page 21, lignes 23 à 25 -- ou plutôt, lignes 20 à 22, on vous a

 10   demandé si vous étiez d'accord sur le fait que les quelques mots qui vous

 11   ont été cités devaient être replacés dans leur contexte, contexte qui se

 12   compose d'autres propos exprimés dans les quelques jours précédant cette

 13   réunion de l'assemblée par M. Karadzic.

 14   Pouvez-vous simplement dire aux Juges de la Chambre quels sont ces

 15   autres propos que vous aviez à l'esprit ?

 16   R.  Oui. Il y a eu pas mal d'écoutes téléphoniques entre M. Karadzic et

 17   d'autres dirigeants du SDS qui ont été interceptées. Je crois une

 18   conversation avec son frère Luka, en particulier, qui se trouvait à

 19   l'époque au Monténégro, dans laquelle il utilise des mots très comparables

 20   à ceux qu'il utilise dans les dernières phrases de cette allocution quant à

 21   la disparition des Musulmans et dans laquelle il apporte des détails

 22   complémentaires. Il cite en particulier le nombre de Musulmans qui risquent

 23   de disparaître avant de donner des détails quant à ce qui allait se passer

 24   dans le cadre de cette disparition. Il fait très souvent dans ces

 25   conversations référence à la disparition des Musulmans en tant que peuple.

 26   Q.  Oui. Je vous remercie, Professeur Donia. C'est la seule question que

 27   j'avais à poser dans le cadre des questions supplémentaires.

 28   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Maître Cvijetic.

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  1   M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai une proposition

  2   à faire. Dans le prétoire électronique, en tant que pièce P6, nous n'avons

  3   que les trois pages utilisées par l'Accusation à l'époque où elle s'est

  4   servie de la déclaration islamique. Mais comme l'intégralité du document a

  5   été traduite en anglais, je pense que c'est cette traduction complète qui

  6   pourrait se voir affecter un numéro de pièce à conviction, et je

  7   demanderais que le numéro de la pièce soit donc revu.

  8   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

  9   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui, Maître Cvijetic, l'ouvrage figurait

 10   sur la liste 65 ter, puis il est devenu une pièce à conviction, donc

 11   l'ouvrage entier est déjà versé au dossier. C'était cela votre objectif ?

 12   M. CVIJETIC : [interprétation] Si le livre a été versé intégralement, il ne

 13   se pose plus aucun problème. Mais je dois dire qu'on m'informe que ce n'est

 14   pas le cas. Je donne le numéro du document, 1D00385.

 15   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

 16   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Ce n'est peut-être pas encore le cas,

 17   mais c'est en cours. Le versement de tout le texte de tout le livre est en

 18   cours.

 19   Professeur Donia, vous nous remercions d'être venu témoigner au Tribunal.

 20   Nous vous souhaitons un bon voyage de retour. Ce matin, lorsque je vous ai

 21   salué, j'ai omis de vous faire mes meilleurs vœux pour la nouvelle année,

 22   et donc je le fais maintenant. Merci d'être venu. Vous pouvez vous retirer.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

 24   [Le témoin se retire]

 25   Mme KORNER : [interprétation] Je sais, Monsieur le Président,

 26   Messieurs les Juges, que vous vous apprêtez à rendre plusieurs décisions,

 27   mais est-ce que je pourrais, au début de l'audience de demain, donc demain

 28   après-midi, prendre la parole pour traiter des pièces à conviction liées au

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  1   témoignage de M. Donia dont le sort n'est pas encore réglé dans les mêmes

  2   conditions que nous l'avons fait pour les autres documents. 

  3   M. LE JUGE HALL : [interprétation] L'une des décisions à venir porte sur ce

  4   point, Madame Korner. Je demande que nous passions à huis clos partiel.

  5   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel,

  6   Monsieur le Président.

  7   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Pages 5085-5086 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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  8  (expurgé)

  9   --- L'audience est levée à 13 heures 46 et reprendra le mardi 19 janvier

 10   2010, à 14 heures 15.

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