Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le jeudi 2 décembre 2010

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 07.

  5   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,

  6   Messieurs les Juges. Bonjour à tout le monde présent dans ce prétoire.

  7   Il s'agit de l'affaire IT-08-91-T, le Procureur contre Mico Stanisic

  8   et Stojan Zupljanin.

  9   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

 10   Bonjour à tout le monde.

 11   Je vais demander aux parties de se présenter.

 12   M. OLMSTED : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Matthew

 13   Olmsted, Tom Hannis et Indah Susanti pour le bureau du Procureur.

 14   M. CVIJETIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Au nom de la

 15   Défense de Mico Stanisic, Slobodan Cvijetic, Tatjana Savic et Claire Plumb

 16   ce matin.

 17   M. KRGOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Dragan

 18   Krgovic, Igor Pantelic et Aleksandar Aleksic au nom de M. Zupljanin.

 19   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je vous remercie.

 20   S'il n'y a pas de questions de procédure ou d'autres points à soulever, le

 21   témoin suivant bénéficie des mesures de protection que nous lui avons

 22   accordées, et donc je pense qu'il conviendrait de baisser les stores avant

 23   qu'il n'entre dans ce prétoire.

 24   [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

 25   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 26   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bonjour, Monsieur. Je vous prie de bien

 27   vouloir lire le texte de la déclaration solennelle qu'on vient de vous

 28   présenter.

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  2   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  3   LE TÉMOIN : ST-233 [Assermenté]

  4   [Le témoin répond par l'interprète]

  5   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Vous pouvez vous asseoir.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

  7   M. LE JUGE HALL : [interprétation] D'après la réponse que vous venez de me

  8   donner, je suppose que vous m'entendez dans une langue que vous comprenez.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Effectivement.

 10   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Eh bien, je vous souhaite la bienvenue

 11   devant ce Tribunal, Monsieur. Et tout d'abord, je voudrais vous rappeler

 12   que --

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 14   M. LE JUGE HALL : [interprétation] -- la déclaration solennelle que vous

 15   venez de faire vous oblige à dire la vérité dans le cadre de votre

 16   déposition devant ce Tribunal, qui, dans le cas contraire est habilité à

 17   vous poursuivre pour faux témoignage.

 18   On vous a accordé des mesures de protection, à savoir un pseudonyme et la

 19   déformation des traits de votre visage. La conséquence de cela est que ce

 20   procès, qui a un caractère public et que le public peut suivre soit dans la

 21   salle réservée au public ou bien sur internet, ceux qui souhaitent suivre

 22   ce procès pourront vous entendre sans pour autant savoir qui est la

 23   personne qui dépose.

 24   Donc, tout d'abord, je vais demander à Mme l'Huissière de vous présenter un

 25   document avec votre nom et votre prénom, votre date de naissance et votre

 26   pseudonyme, le pseudonyme que l'on vous a accordé. Je vous demande de

 27   vérifier si c'est bien vous, d'ensuite le signer et de me le remettre.

 28   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Ceci va être versé au dossier, sous pli

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  1   scellé.

  2   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P01742, sous pli

  3   scellé, Monsieur le Président.

  4   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur, vous avez déjà déposé devant

  5   cette institution, de sorte que je ne vais que vous rappeler la procédure

  6   qui va suivre. Ici, c'est le Procureur qui vous a cité, c'est le Procureur

  7   qui va commencer son interrogatoire. Ensuite, la partie adverse va vous

  8   poser des questions suite aux questions posées dans le cadre de

  9   l'interrogatoire principal du Procureur. Ensuite, le Procureur aura la

 10   possibilité de vous poser des questions supplémentaires, et les Juges, à

 11   tout moment, peuvent aussi vous poser des questions.

 12   Vous déposez ici dans le cadre d'une procédure accélérée qui existe dans

 13   cette institution --

 14   Je vais m'interrompre pour poser une question à la Défense. Est-ce que les

 15   conseils de la Défense peuvent prévoir d'ores et déjà combien de temps ils

 16   auront besoin pour leur contre-interrogatoire, parce qu'on ne m'a pas

 17   informé de cela.

 18   M. KRGOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons prévu trois

 19   heures, mais je pense que vu la décision écrite formulée par les Juges de

 20   la Chambre, nous n'aurons besoin que d'une session.

 21   M. CVIJETIC : [interprétation] Moi, en principe, je n'ai pas préparé des

 22   questions. Je pourrais toutefois poser une ou deux questions suite aux

 23   questions posées par M. Krgovic. Eventuellement, j'ai dit, puisque je ne

 24   les ai pas préparées à l'avance.

 25   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Très bien.

 26   Monsieur le Témoin, et on va vous appeler comme cela, vous savez, à cause

 27   des mesures de protection que l'on vous a accordées, vous avez entendu ces

 28   échanges de propos entre les conseils de la Défense et les Juges portant

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  1   sur la durée de votre contre-interrogatoire. Le Procureur a prévu de vous

  2   interroger pendant 45 minutes dans le cadre de son interrogatoire

  3   principal, de sorte que votre déposition va se terminer aujourd'hui.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

  5   [Problème technique]

  6   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Nous avons un petit problème technique

  7   de sorte que nous soyons obligés d'attendre cinq minutes, c'est ce qu'on

  8   vient de nous dire, pour y pallier. On va voir comment les choses évoluent

  9   dans quelques instants. Peut-être que nous n'aurons pas besoin de lever la

 10   séance.

 11   Voilà, les difficultés techniques ont été résolues et nous avons dû

 12   faire une pause. Vous avez entendu nos propos, vous avez entendu quelles

 13   sont les prévisions en ce qui concerne le déroulement de la session

 14   d'aujourd'hui. Le Procureur a l'intention de vous interroger pendant 40

 15   [comme interprété] minutes. On espère donc que vous puissiez terminer votre

 16   déposition avant la fin de nos travaux d'aujourd'hui.

 17   Donc je vais demander au Procureur de commencer avec ses questions. Et je

 18   voudrais savoir s'il y a des questions préliminaires que l'on souhaite

 19   soulever pour que l'on puisse éventuellement passer à huis clos partiel.

 20   M. OLMSTED : [interprétation] Je ne pense pas que ceci soit nécessaire. Je

 21   vais poser quelques questions que l'on pose habituellement aux témoins qui

 22   déposent en vertu de l'article 92 ter.

 23   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Très bien.

 24   Interrogatoire principal par M. Olmsted : 

 25   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

 26   R.  Bonjour.

 27   Q.  Tout d'abord, Monsieur, est-ce que vous pouvez nous dire si vous avez

 28   déposé dans l'affaire Brdjanin au mois d'avril 2002 ?

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Avant de déposer ici aujourd'hui, est-ce que vous avez eu la

  3   possibilité d'écouter un enregistrement audio de votre déposition dans

  4   cette affaire ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Et cet enregistrement, est-ce qu'il reflète correctement votre

  7   déposition dans cette affaire ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Et si l'on vous posait les mêmes questions aujourd'hui, est-ce que vous

 10   répondriez de la même façon ?

 11   R.  Effectivement.

 12   Q.  Au cours des 45 minutes dont je dispose pour vous interroger, je

 13   voudrais parler des choses dont vous avez déjà parlé dans cette déposition-

 14   là dans l'affaire Brdjanin.

 15   Dans votre déposition dans l'affaire Brdjanin, vous avez parlé des

 16   policiers qui portaient des uniformes de camouflage bleus qui circulaient

 17   en voiture à Banja Luka en 1992 dans une camionnette rouge, et qui semaient

 18   la terreur parmi la population non-serbe. Vous avez dit que Bosko Vuksan

 19   était systématiquement présent parmi ces policiers.

 20   Mis à part Vuksan, est-ce que vous vous souvenez d'une autre personne qui

 21   aurait été présente en permanence avec ces policiers ?

 22   R.  Vuksan y a été le plus souvent. Cependant, Zupljanin  y était de temps

 23   en temps. Il s'agissait d'un peloton de sept ou dix personnes, ce n'était

 24   pas toujours les mêmes hommes.

 25   Q.  Vous avez dit que cette camionnette rouge avait commencé à circuler au

 26   printemps 1992. Vous avez dit que vous aviez vu vous-même cette camionnette

 27   rouge en hiver 1992.

 28   Est-ce que vous pouvez nous dire pendant combien de temps cette camionnette

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  1   a circulé dans la ville de Banja Luka ?

  2   R.  Au début, ils avaient d'autres véhicules. Et cette camionnette rouge

  3   circulait en 1992-1993, d'après mon meilleur souvenir, à partir du moment

  4   où j'ai quitté Banja Luka.

  5   Q.  A quel moment avez-vous quitté Banja Luka ?

  6   R.  Au mois de novembre 1993.

  7   Q.  Reparlons de l'année 1992, est-ce que vous avez vu cette

  8   camionnette rouge garée devant un immeuble appartenant au gouvernement à

  9   Banja Luka ?

 10   R.  Vu que c'était une voiture de police, ils dépendaient du SUP de

 11   Banja Luka. Souvent, on pouvait le voir dans la tannerie de Deovici. Et

 12   plus tard, le plus souvent, la voiture était garée dans ce qui était avant

 13   le foyer militaire.

 14   Q.  Est-ce que vous l'avez vue à l'extérieur du bâtiment du CSB ?

 15   M. KRGOVIC : [interprétation] Objection. Il lui a déjà dit où il le

 16   voyait. Je ne vois pas comment on peut lui poser cette question-là.

 17   M. OLMSTED : [interprétation] Je ne pose pas de questions

 18   directrices. Je voulais tout simplement lui poser la question, à savoir

 19   s'il voyait parfois cette camionnette garée devant le CSB.

 20   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Allez-y, Monsieur Olmsted.

 21   M. OLMSTED : [interprétation]

 22   Q.  Est-ce que vous avez vu cette camionnette garée devant le

 23   bâtiment du CSB en 1992 ?

 24   R.  Oui, en effet.

 25   Q.  Avant votre déposition, vous avez dit que des points de contrôle

 26   ont été établis partout à travers la ville de Banja Luka. Est-ce que vous

 27   pouvez nous dire à quel moment on les a posés pour la première fois ?

 28   R.  Ces points de contrôle par lesquels je devais passer, moi, ils

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  1   ont été mis au point au mois d'avril 1992.

  2   Q.  Et qui dirigeait ces points de contrôle ?

  3   R.  C'étaient des éléments de réserves et de la police.

  4   Q.  Et pour passer par ces points de contrôle, est-ce que la

  5   population non-serbe devait disposer de certains documents ?

  6   R.  A l'époque, ils exigeaient qu'on ait des laissez-passer qui nous

  7   permettaient de circuler. Ceux qui n'avaient pas de laissez-passer ne

  8   pouvaient pas passer par les points de contrôle.

  9   Q.  Est-ce que les Serbes avaient besoin d'avoir de tel laissez-

 10   passer ?

 11   R.  Je ne suis pas sûr, mais je pense qu'ils contrôlaient tout le monde.

 12   Q.  S'il y avait un non-Serbe qui était muni de ce laissez-passer, est-ce

 13   qu'il pouvait lui arriver quand même qu'on ne le laisse pas passer ?

 14   R.  A partir du moment où il n'avait pas de laissez-passer, il ne pouvait

 15   pas passer.

 16   Q.  Non, non. Vous n'avez pas compris la question que je vous ai posée.

 17   Par exemple, est-ce que vous savez s'il est arrivé que des non-Serbes qui

 18   étaient pourtant munis de laissez-passer, s'il leur est arrivé de ne pas

 19   les laisser passer ?

 20   R.  Oui, oui. J'ai compris.

 21   Vous savez, ils étaient très arrogants. Il est arrivé qu'un des nôtres

 22   montre justement son laissez-passer. Il est arrivé qu'on lui prenne ce

 23   laissez-passer et qu'on le déchire en lui disant : Eh bien maintenant t'en

 24   as plus, de laissez-passer. Vous savez des cas comme ça il y en eu pas mal.

 25   Q.  Et quel était l'impact de ces points de contrôle sur la capacité des

 26   non-Serbes de circuler à Banja Luka ?

 27   R.  C'est difficile de vous décrire la situation telle qu'elle était à

 28   l'époque. Mais si vous êtes confiné dans un territoire restreint sans la

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  1   possibilité de circuler, de sortir, de satisfaire aux besoins élémentaires,

  2   vous vous sentez comme un habitant du ghetto, un citoyen de deuxième ordre

  3   en quelque sorte. Evidemment que cela a eu un effet considérable sur la

  4   population, parce que psychologiquement, cela avait des effets désastreux

  5   sur la population. Puisque l'on se sentait discriminés, nos droits de

  6   l'Homme étaient bafoués.

  7   Q.  Encore une question par rapport aux documents qu'il fallait obtenir

  8   pour pouvoir passer par ces points de contrôle. Est-ce qu'il était

  9   difficile d'obtenir ces documents à l'époque ?

 10   R.  Oui. Au départ, on pouvait obtenir, de temps en temps, un laissez-

 11   passer au niveau de la commune locale. Mais par la suite, c'était le

 12   département militaire qui délivrait ces laissez-passer à ceux qui

 13   bénéficiaient d'une obligation de travail. Ils pouvaient se procurer des

 14   laissez-passer au sein de leur unité, sans doute. Mais vous savez, c'était

 15   en règle générale très difficile de les obtenir.

 16   Q.  Antérieurement, vous avez parlé des agences qui ont été établies à

 17   Banja Luka en 1992. Vous avez mentionné le fait que votre fille avait fait

 18   appel à ces agences en septembre 1992.

 19   Est-ce que vous pouvez nous dire, si un non-Serbe souhaitait quitter Banja

 20   Luka, devait-il passer par l'une de ces agences ?

 21   R.  On devait tous passer par cette voie, c'était la seule voie à prendre.

 22   Donc ces agences arrivaient, nous emmenaient, et organisaient donc le

 23   transport jusqu'en Croatie.

 24   Q.  Afin d'utiliser les services d'une de ces agences, est-ce que les non-

 25   Serbes devaient payer une somme d'argent ?

 26   R.  Alors permettez-moi, s'il vous plaît, de dire que si l'on arrivait à

 27   utiliser les services de ces agences, il y avait un tas de choses à faire.

 28   Il fallait faire un versement avant d'y aller. Il fallait également

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  1   préparer toutes les attestations de paiement d'électricité, d'eau. Il

  2   fallait avoir des attestations bancaires également, pour dire qu'on était

  3   solvable, qu'on n'avait pas de dettes. Il fallait se rendre au département

  4   pour se "désenregistrer", et s'enregistrer auprès du SUP. Ensuite, avec

  5   tout l'ensemble de ces papiers, il fallait obtenir un papier, une

  6   attestation comme quoi on quitte les lieux. Et ensuite, il fallait faire la

  7   queue. Il y avait des centaines, des milliers de personnes qui attendaient.

  8   Ensuite, il fallait effectuer le paiement.

  9   C'était la voie à suivre pour partir.

 10   Q.  Vous avez mentionné le fait que les non-Serbes devaient payer des frais

 11   aux organes municipaux pour sortir, mais devaient-ils payer également les

 12   agences elles-mêmes afin de quitter Banja Luka ?

 13   R.  Afin d'obtenir ce document qu'on appelait autorisation de sortie, il

 14   fallait payer une certaine somme. Je ne me souviens plus très bien de la

 15   somme. Il fallait signer cette attestation de sortie et on acceptait que

 16   tous les biens mobiliers et immobiliers restent à la disposition de la

 17   Republika Srpska. Après le paiement, et avec toutes ces attestations dont

 18   j'ai parlé tout à l'heure, avec tout cela, on se rendait à l'agence qui

 19   s'occupait du transport.

 20   Q.  Pour ce qui est du transport, est-ce que ces autocars étaient escortés

 21   ?

 22   R.  Oui, ils l'étaient.

 23   La police était là pour assurer la sécurité. Pour ce qui est de l'agence,

 24   la propriétaire s'appelait Perka. Elle informait les personnes intéressées

 25   de l'heure de départ. Elle fixait l'heure de départ. Par jour, parfois, il

 26   y avait dix autocars qui partaient, et elle, cette personne-là, disait

 27   qu'il y avait toujours une possibilité de partir, car elle était

 28   responsable d'avoir les entretiens avec certains Croates qui devaient

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  1   donner leur approbation pour partir.

  2   Donc c'est de cette façon-là que les gens partaient pour la Croatie, en

  3   convoi et avec une sécurité et sous une escorte appropriées.

  4   Q.  Est-ce que la police effectuait des fouilles auprès des non-Serbes à

  5   bord de ces autocars ?

  6   R.  Les fouilles étaient effectuées au poste de frontière de Bosanska

  7   Gradiska. C'est là où les policiers serbes effectuaient leurs fouilles. Les

  8   gens étaient menés à l'extérieur. Il y avait des conteneurs - c'est comme

  9   ça que je les qualifierais - où l'on faisait une fouille détaillée, où les

 10   policiers serbes prenaient tous les biens de valeur. Ils les prenaient tout

 11   simplement; l'or, l'argent, et tout ce qui leur plaisait. Ils avaient même

 12   décidé de la somme d'argent qu'il convenait de prendre. Pour autant que je

 13   le sache, pour les personnes, il s'agissait d'une somme 300 marks pour

 14   maximum. Avec cette limitation, je considère qu'il s'agissait d'une

 15   occasion pour faire du vol. Ils pillaient, tout simplement, et prenaient ce

 16   qui les intéressait.

 17   En plus, il y avait des insultes, des mauvais traitements, ce qui est très

 18   difficile à supporter. C'est très difficile de comprendre jusqu'à quel

 19   point les gens sont prêts à aller.

 20   Q.  J'aimerais que l'on passe à un thème différent.

 21   Dans votre déposition précédente, vous avez parlé de deux inspecteurs de

 22   police qui vous ont emmené au SUP à l'été 1992, où ces gens-là et Drago

 23   Samardzija vous ont interrogés et vous ont battu.

 24   M. OLMSTED : [interprétation] Est-ce que l'on peut maintenant afficher la

 25   pièce P35 à l'écran, s'il vous plaît.

 26   Q.  Nous avons une photographie sous nos yeux. Est-ce que vous reconnaissez

 27   ce bâtiment ?

 28   R.  Il s'agit du SUP de Banja Luka.

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  1   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire s'il s'agit de l'endroit où vous avez

  2   été interrogé ce jour-là ?

  3   R.  Oui, il s'agit bien de ce lieu.

  4   Q.  Pouvez-vous nous dire à quel étage vous vous trouviez lorsque cela

  5   s'est produit ?

  6   R.  Je pense qu'il s'agissait du deuxième étage. Lorsqu'on monte les

  7   escaliers, on fait quelques pas, et ensuite du côté gauche, il y a le

  8   bureau de M. Samardzija.

  9   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire environ à quel moment du jour a eu

 10   lieu cet interrogatoire ?

 11   R.  Ça a commencé autour de 10 heures, je pense.

 12   Mais j'ai oublié de dire que c'était de l'autre côté du bâtiment que

 13   se trouvait le bureau où j'ai été emmené.

 14   Q.  Il s'agissait du deuxième étage, là aussi ?

 15   R.  Oui, il s'agissait du deuxième étage.

 16   Q.  Vous avez dit que l'interrogatoire avait commencé à 10 heures. Il

 17   s'agissait du matin ou du soir ?

 18   R.  Oui, le matin.

 19   Q.  Dans votre déposition antérieure, vous avez dit que vous connaissiez

 20   Samardzija d'avant le conflit. Quel poste occupait-il ?

 21   R.  Il travaillait au SUP. Et pour autant que je le sache, il était le

 22   responsable des biens matériels. C'est comme ça qu'on l'appelle.

 23   Q.  Savez-vous quel poste il occupait en 1992 lorsque le conflit a éclaté ?

 24   R.  Je ne sais pas. Il y a eu des changements sans doute, donc je ne sais

 25   pas quel poste il occupait à ce moment-là.

 26   Q.  Dans votre déposition antérieure, vous avez parlé en détail de votre

 27   interrogatoire et de la façon dont vous avez été battu, donc je

 28   n'aborderais pas en détail cette question.

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  1   Mais pouvez-vous nous dire ce qui s'est passé après que les trois

  2   policiers vous aient battu ?

  3   R.  Merci déjà de m'épargner et m'éviter que je mentionne ces détails, qui

  4   est un des jours les plus noirs dans ma vie.

  5   Lorsque ces gens m'ont sorti du bureau, ils m'ont sévèrement averti

  6   que je ne devais mentionner ce qui s'est passé à qui que ce soit. Ils m'ont

  7   menacé, ils m'ont dit que si je disais un mot, ça en était fini de moi.

  8   Q.  Après avoir dit cela, est-ce que votre expérience était unique au sein

  9   du CSB ou est-ce que vous connaissez d'autres non-Serbes qui ont vécu la

 10   même expérience ?

 11   M. KRGOVIC : [interprétation] Je ne sais pas dans quelle mesure cette

 12   question peut cadrer avec les faits jugés.

 13   M. OLMSTED : [interprétation] Les faits jugés traitent de campagnes

 14   d'intimidation. La Chambre a déjà admis la déposition du témoin à propos de

 15   son expérience. Je pense que cela serait bien qu'on sache si d'autres non-

 16   Serbes ont été dans la même situation.

 17   [La Chambre de première instance se concerte]

 18   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Nous le permettrons.

 19   M. OLMSTED : [interprétation] Très bien. Merci, Monsieur le Président.

 20   Q.  Est-ce que vous avez entendu parler d'autres non-Serbes qui ont subi

 21   des traitements similaires au sein du bâtiment du CSB en 1992 ?

 22   R.  Très certainement. Il y a un très grand nombre de personnes qui sont

 23   passées par là. S'il le faut, je mentionnerais les noms pour lesquels je

 24   sais très certainement qu'ils ont été frappés très durement précisément

 25   dans ce bâtiment. Entre nous, entre nos gens, ce n'était pas un secret.

 26   C'était une pratique courante. Donc je peux dire avec beaucoup de certitude

 27   que dans ce bâtiment, il y avait très certainement des interrogatoires où

 28   il y avait des gens qui étaient battus, et on demandait des choses qui

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  1   n'avaient, selon moi, aucun sens. Il n'y avait aucun but. Et la raison la

  2   plus courante c'était les biens matériels, comme dans mon cas, ou alors il

  3   s'agissait simplement pour d'autres personnes de faire peur.

  4   Q.  Lors de votre déposition antérieure, lorsqu'on vous a demandé de

  5   décrire la vie des non-Serbes en 1992, vous avez parlé de tirs et de

  6   meurtres.

  7   Pouvez-vous nous fournir davantage des détails ? Qui étaient les victimes

  8   et qui étaient les auteurs de ces crimes ?

  9   R.  Il est difficile de décrire la situation. On n'a pas suffisamment de

 10   mots pour décrire la situation des non-Serbes à Banja Luka. Il y a quelques

 11   instants, j'ai parlé du mouvement de la population, que nous n'avions pas.

 12   Nous étions sous contrôle permanent. Les gens qui s'apprêtaient à partir ou

 13   qui revenaient du front, ils tiraient sur les maisons, sur les bâtiments

 14   religieux. Croyez-moi, dans mon quartier, lorsque se termine la route vers

 15   Ivicnjak [phon], on pouvait rassembler les cartouches tellement il y avait

 16   de tirs venant des soldats serbes.

 17   Dans un des cas de tir sur des maisons, il y avait une personne qui est

 18   décédée et il y avait des gens qui étaient sévèrement blessés. Est-ce que

 19   je dois mentionner les noms ?

 20   Q.  Cela ne sera pas nécessaire à ce stade-ci. Et je ne pense pas que ce

 21   soit dans votre déposition antérieure.

 22   Mais est-ce que vous pouvez nous dire, est-ce que ces maisons, ces

 23   commerces, ces lieux de culte qui étaient visés, étaient-ils non-serbes ?

 24   R.  Dans le quartier où j'habitais, près de 100 % de la population était

 25   musulmane. Quelques maisons étaient mixtes, pourrais-je dire, il s'agissait

 26   de mariages mixtes.

 27   Q.  D'après ce que vous avez pu observer, est-ce que ces actes étaient des

 28   actes gratuits de violence, donc isolés, ou étaient-ils organisés ?

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  1   R.  C'était la règle presque. Pour ce qui est des mosquées, il y en avait

  2   quatre dans mon quartier, et ils ne pouvaient pas passer sans tirer.

  3   C'était la règle.

  4   On voyait les traces des tirs. On entendait les rafales. Les gens fuyaient,

  5   s'écartaient le plus loin possible de la rue principale car on ne savait

  6   pas que faire.

  7   Q.  Est-ce que votre commerce a été visé ?

  8   R.  Mon bâtiment a été endommagé, et sur le mur près du bâtiment, il y

  9   avait un obus de mortier, les gens sont venus. Je l'ai montré à la police.

 10   Q.  D'après ce que vous avez pu observer en 1992, est-ce que les policiers

 11   faisaient quoi que ce soit pour empêcher que ces crimes soient perpétrés

 12   contre les populations non-serbes à Banja Luka ?

 13   R.  Je dirais au contraire. Au cours de 1992, nous avions des réunions avec

 14   les représentants des pouvoirs civils, policiers et militaires à Banja Luka

 15   et nous nous plaignions que la situation chez nous était insupportable.

 16   Cependant, j'avais l'impression que cette réunion était tout à fait contre-

 17   productive et qu'après cela, nous avions subi une torture encore plus

 18   grande. Ils ont fixé des patrouilles pour le quartier dans lequel je

 19   vivais. On pensait qu'il allait y avoir un soulagement, un apaisement, mais

 20   la situation s'est empirée. Car les personnes qui contrôlaient notre

 21   quartier prenaient de l'argent des personnes. Ils rassemblaient des données

 22   et les envoyaient à la police afin qu'ils puissent nous emmener, nous

 23   maltraiter, nous frapper, nous faire peur. Et je peux dire avec certitude

 24   que cela se faisait sans raison aucune.

 25   Q.  Pour éclaircir ce point, qui effectuait ces patrouilles dans les

 26   quartiers musulmans ?

 27   R.  Il s'agissait de la police serbe.

 28   Q.  Vous avez évoqué une réunion en 1992. Aviez-vous assisté à une réunion

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  1   à Gornji Seher en août 1992 ?

  2   R.  Je vais faire un petit retour en arrière.

  3   Avant cette réunion au mois d'août, autour de la piscine appartenant à une

  4   personne de la commune, il y avait une réunion des autorités civiles,

  5   militaires et policières.

  6   Donc, pour revenir à votre question, oui, en août 1992, j'ai assisté à

  7   cette réunion. Il y avait Predrag Radic, le maire de la municipalité; il y

  8   avait M. Stojan Zupljanin, le chef du MUP. Pour ce qui est des militaires,

  9   je ne sais pas quel était leur grade, il y avait un lieutenant-colonel qui

 10   s'appelait Ilic.

 11   Q.  Pouvez-vous nous dire qui étaient les représentants musulmans à cette

 12   réunion ?

 13   R.  Il y avait des représentants musulmans qui avaient, pour ainsi dire, un

 14   peu plus de poids auprès de leur propre population, qui avaient une

 15   certaine autorité. Mais il y avait également, dois-je dire, je pense qu'il

 16   y en avait 80 en tout, et de chaque quartier, il y avait deux

 17   représentants. Et il y avait environ, peut-être, une trentaine de Serbes.

 18   Peut-être moins, je ne sais pas. Je ne suis pas en mesure de le dire avec

 19   de la certitude.

 20   Q.  Est-ce que vous vous rappelez de Dzevad Osmancevic ?

 21   R.  Oui, je me rappelle de sa présence.

 22   Cette réunion a été organisée à l'initiative d'Adem Gunic, qui était

 23   ingénieur et qui était maire adjoint de la municipalité. Il y avait

 24   également un dénommé Beglerovic. Et ces personnes-là, pour autant que je le

 25   sache, ont demandé à MM. Radic, Ilic et Zupljanin pour qu'ils viennent et

 26   s'adressent à nos personnes afin de trouver une solution ensemble pour

 27   qu'il soit mis fin à ces incidents.

 28   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Olmsted, je vous rappelle

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  1   qu'il vous reste encore environ huit minutes.

  2   M. OLMSTED : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.

  3   Q.  Et lors de cette réunion, quelles informations les représentants

  4   musulmans ont-ils transmises aux représentants serbes ?

  5   R.  Nous leur avons fait connaître en détail toutes les formes de

  6   provocation, les tirs sans discrimination, les irruptions chez les gens,

  7   les interdictions de mouvement. Car, en dehors de l'interdiction de se

  8   déplacer, nous avons eu un couvre-feu entre 9 heures du soir et 6 heures du

  9   matin. Personne ne pouvait sortir de chez lui pendant cette période. Donc,

 10   tout simplement, nous nous sommes adressés aux personnes présentes pour

 11   qu'une solution soit trouvée pour que les tirs diminuent, pour que le

 12   contrôle soit imposé. Et le résultat de cette réunion était justement les

 13   contrôles qu'ils ont introduits, mais malheureusement, ça aussi était

 14   plutôt néfaste pour nous.

 15   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire si une camionnette rouge a été

 16   mentionnée lors de cette réunion ?

 17   R.  Je ne me souviens pas qui avait assisté à cette réunion.

 18   Q.  Je vais reformuler ma question.

 19   Est-ce que les représentants musulmans ont mentionné aux représentants

 20   serbes des incidents liés à une camionnette rouge lors de cette réunion ?

 21   R.  Absolument. Je pense que cette camionnette rouge constituait justement

 22   le plus gros problème. C'est elle qui semait la terreur. Nous avons demandé

 23   que quelque chose soit fait afin de restreindre ces personnes et afin de

 24   les empêcher de semer la terreur à travers Banja Luka.

 25   Q.  Est-ce que les représentants serbes ont été étonnés de toutes ces

 26   informations fournies par les représentants musulmans ?

 27   R.  Je peux simplement dire qu'ils ont tous promis qu'ils allaient prendre

 28   toutes les mesures possibles afin d'améliorer la situation, et je pense

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  1   qu'ils n'étaient pas étonnés, car les personnes qui avaient organisé cette

  2   réunion les avaient informés de ce qui se passait dans la région. A mon

  3   avis, avant de venir à la réunion, ils étaient déjà au courant de ce qui se

  4   passait chez nous. Donc, à mon avis, ils n'étaient pas étonnés.

  5   Q.  Et est-ce qu'il a été suggéré que les non-Serbes créaient ces problèmes

  6   eux-mêmes ?

  7   R.  L'une des personnes présentes a effectivement déclaré cela en disant

  8   que la population musulmane, qui était majoritaire, ne prenait pas en

  9   considération la situation de manière réaliste, qu'il fallait qu'elle

 10   comprenne que c'était la guerre et qu'il fallait qu'ils répondent aux

 11   appels de mobilisation au plus grand nombre. Ils expliquaient pratiquement

 12   tout ce qui avait été soulevé en disant pratiquement que nous étions

 13   fautifs nous-mêmes d'une telle situation.

 14   Cependant, il faut souligner que les messieurs qui ont été présents

 15   avaient promis qu'ils allaient faire de leur mieux afin d'améliorer la

 16   situation.

 17   Permettez-moi d'ajouter que la réalité s'est avérée être tout à fait

 18   différente. Dès le lendemain, des rafles ont été organisées, c'est ainsi

 19   qu'on les appelait, des rafles massives, dans l'agglomération de Sitari

 20   seule. Ils ont fouillé plusieurs centaines de maisons, ils ont interpellé

 21   300 personnes, ils ont semé la terreur. S'agissant de la région dans

 22   laquelle j'étais moi-même, suite à l'arrivée de ces policiers, les choses

 23   se sont encore détériorées.

 24   Q.  Et justement c'est la raison pour laquelle je souhaitais clarifier

 25   cela. Qui a effectué ces rafles ?

 26   R.  C'était la police serbe. Ils procédaient aux perquisitions en

 27   expliquant le plus souvent qu'ils cherchaient des armes, qu'ils voulaient

 28   dénoncer les personnes qui n'avaient pas répondu à l'appel de mobilisation.

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  1   Je vais souligner également ce qui se faisant, ils pillaient et prenaient

  2   tout ce qu'il leur plaisait. S'ils n'étaient pas en mesure de prendre

  3   immédiatement ce qui leur plaisait, il donnait l'ordre pour que la chose

  4   soit mise à l'écart, car le lendemain ou plus tard le même jour, ou à un

  5   autre moment, ils allaient revenir chercher cet objet, cet article, mais le

  6   propriétaire n'était censé dire quoi que ce soit à personne.

  7   Q.  Et ma dernière question de clarification. Ces perquisitions et ces

  8   arrestations visaient qui ? Les non-Serbes ?

  9   R.  Pour la plupart, la population non-serbe, effectivement.

 10   M. OLMSTED : [interprétation] Je n'ai plus de question pour ce témoin,

 11   Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui, Maître Krgovic.

 13   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 14   M. LE JUGE HALL : [hors micro]

 15   M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, merci, Monsieur le Président.

 16   Je souhaitais simplement clarifier un point de compte rendu d'audience. La

 17   feuille de pseudonyme précédente du Témoin ST-223 est la pièce à conviction

 18   P01743 et non pas 01742 comme ceci était indiqué précédemment.

 19   Merci.

 20   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci.

 21   Oui, Maître Krgovic.

 22   Contre-interrogatoire par M. Krgovic :

 23   Q.  [interprétation] Bonjour.

 24   R.  Bonjour.

 25   Q.  Je m'appelle Dragan Krgovic, et au nom de Stojan Zupljanin, je

 26   vais vous poser quelques questions au sujet de votre déposition

 27   aujourd'hui.

 28   R.  Je vous en prie.

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  1   Q.  Tout d'abord une clarification. Lorsque vous avez parlé de la procédure

  2   appliquée lors de la traversée de la frontière, lorsque les personnes qui

  3   organisaient les passages, vous, personnellement, vous n'êtes pas parti

  4   avec ce convoi, en 1992, n'est-ce pas ?

  5   R.  Monsieur l'Avocat, vous n'avez pas suivi mes propos. J'ai clairement

  6   indiqué que je suis parti le 15 novembre 1993, donc il n'y a pas de

  7   fondement à votre question.

  8   Q.  Donc vous n'avez pas vu personnellement ce dont vous avez parlé

  9   aujourd'hui, c'est-à-dire les fouilles à la frontière et les confiscations,

 10   n'est-ce pas ?

 11   R.  Ce dont je parle est tout à fait fiable, car j'ai vu cela moi-même en

 12   1993. Or, les personnes qui ont vécu cela, ce sont des membres de ma propre

 13   famille, à savoir ma femme, ma fille, mon fils, et ma belle-fille, donc

 14   c'était sûr à 100 %.

 15   Q.  Ma question était de savoir si en 1992 vous y aviez assisté

 16   personnellement ou pas.

 17   R.  Je pense que c'est une question ridicule, je répète une deuxième fois

 18   que je suis sorti en 1993. Comment voulez-vous que je le fasse en 1992 ?

 19   Q.  C'est justement la raison pour laquelle je vous demande si vous n'aviez

 20   pas vu personnellement ce dont vous avez déposé.

 21   R.  En 1993, je l'ai vu personnellement.

 22   Q.  Mais non pas en 1992, n'est-ce pas ?

 23   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui. Monsieur Olmsted, vous vouliez

 24   intervenir ?

 25   M. OLMSTED : [interprétation] Oui, l'interprète de la cabine anglaise dit

 26   qu'elle ne pouvait pas terminer la réponse précédente du témoin concernant

 27   les membres de sa famille qui partaient avec ces convois en 1992. Je

 28   suppose qu'il est trop tard pour revenir à cette question, mais nous

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  1   n'avons pas reçu une partie de sa réponse.

  2   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui. Je souhaite rappeler au témoin et à

  3   la Défense que les propos sont interprétés.

  4   Monsieur le Témoin, veuillez attendre la fin de la question avant de

  5   répondre, et Maître, veuillez attendre la fin de la réponse avant de poser

  6   votre question suivante.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

  8   M. KRGOVIC : [interprétation]

  9   Q.  Monsieur je vais répéter encore une fois, et veuillez répondre à ma

 10   question.

 11   Vous, en 1992, vous n'étiez pas personnellement présent au passage

 12   frontalier de Gradiska; oui ou non ?

 13   R.  Non.

 14   Q.  Donc ce qui faisait l'objet de votre déposition lorsque vous répondiez

 15   aux questions posées par M. Olmsted correspond à ce que vous avez entendu

 16   dire de la part d'autres personnes, n'est-ce pas ?

 17   R.  S'agissant de 1992, oui.

 18   Q.  Vous avez également répondu aux questions de l'Accusation lorsque vous

 19   avez dit où vous aviez vu la camionnette rouge qui était garée. Vous avez

 20   mentionné l'emplacement lors de vos déclarations et des dépositions

 21   préalables. Vous n'aviez mentionné le fait que vous auriez vu ce véhicule

 22   devant le CSB, n'est-ce pas ?

 23   R.  Monsieur Krgovic, vous étiez peut-être à Banja Luka vous-même, en 1992

 24   ?

 25   Q.  C'est moi qui pose les questions, Monsieur.

 26   R.  Je veux vous dire que cette camionnette pouvait être vue garée à

 27   n'importe quel endroit de la ville; devant le SUP, devant l'ancienne maison

 28   de l'armée, devant le marché, devant Boska. Partout dans la ville, on

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  1   pouvait voir cette camionnette rouge. C'est ce que j'affirme.

  2   Q.  Dans votre déclaration précédente vous n'avez pas mentionné le fait que

  3   vous auriez vu ce véhicule devant le CSB. Vous avez mentionné la maison de

  4   l'armée, Mali Logor camp. Vous avez mentionné la caserne de la 4e Brigade

  5   d'infanterie, mais vous n'avez jamais mentionné le fait que vous l'aviez

  6   vue devant le CSB. C'était ça ma question.

  7   R.  Vous pensez qu'au bout de toutes ces années on se souvient de chaque

  8   emplacement, ou qu'on ne peut pas omettre l'un des emplacements, mais vous

  9   devriez me demander si j'en suis sûr. Je peux vous dire que j'en suis sûr à

 10   100 %. Si parfois j'omets de dire quelque chose, ou si je ne me souviens

 11   pas de la date exacte, veuillez ne pas le retenir contre moi.

 12   Q.  Donc, vous permettez la possibilité selon laquelle, au cours de vos

 13   déclarations et dépositions précédentes, vous n'ayez jamais mentionné le

 14   fait que vous aviez vu la camionnette rouge devant le CSB ?

 15   Je peux vous dire que j'ai tout parcouru et que tel est le cas.

 16   R.  Je pense que j'ai parcouru ma déposition précédente, et je pense

 17   qu'effectivement, je ne l'ai pas mentionné, mais ça ne veut pas dire que ce

 18   que je dis aujourd'hui n'est pas la vérité. Ce que je dis aujourd'hui,

 19   c'est la vérité, et c'est sûr à 100 %.

 20   Q.  Lorsque vous avez parlé des documents qui étaient nécessaires afin de

 21   quitter Banja Luka, vous avez également mentionné un certificat indiquant

 22   que tous les biens mobiliers et immobiliers sont cédés à la Republika

 23   Srpska.

 24   R.  [aucune interprétation]

 25   Q.  Vous n'avez pas signé un tel certificat ?

 26   R.  Si.

 27   Q.  Est-ce que vous l'avez sur vous ?

 28   R.  Non, et je ne pouvais pas garder cela. Tout ceci était remis. Ce

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  1   document était appelé certificat d'émigration, et sans cela, personne ne

  2   pouvait partir. Pour qu'un non-Serbe puisse partir de Banja Luka, il

  3   fallait qu'il paye toutes les factures pour l'appartement, l'électricité,

  4   les poubelles, l'eau, et d'autres factures s'il y en avait. Il devait

  5   apporter un certificat de la banque indiquant qu'il n'avait pas de dettes,

  6   donc pas de redevances vis-à-vis de l'Etat. Ensuite, le certificat de la

  7   section militaire, le certificat du SUP. Ensuite, il devait aller à la

  8   banque pour payer une somme; je ne suis pas sûr quelle était exactement la

  9   somme. Puis le document en question était en papier un peu plus épais, et

 10   il était écrit noir sur blanc que la personne renonçait à tous ses biens

 11   mobiliers et immobiliers en faveur de la Republika Srpska.

 12   C'est seulement au moment où ce document était reçu par la personne, et

 13   d'ailleurs on faisait la queue pendant des journées entières afin de

 14   l'obtenir. C'était du côté droit de la rivière Vrbas, et à gauche de Vrbas

 15   et en face de Kastel, c'est là que se trouvait cette petite baraque, et

 16   c'est là que l'on délivrait ces documents de départ.

 17   C'était la seule manière nous permettant de partir.

 18   Q.  Monsieur, vous n'avez jamais cédé vos biens à la Republika Srpska, en

 19   réalité, n'est-ce pas ?

 20   R.  Je ne sais pas à qui j'ai cédé cela. Je ne sais pas si ça s'appelait la

 21   Krajina ou la Republika Srpska, mais de toute façon c'était l'Etat, et

 22   c'est clairement indiqué.

 23   Q.  Vous avez vendu vos biens en Bosnie, n'est-ce pas ?

 24   R.  Non, jamais.

 25   Q.  Donc, vous avez encore aujourd'hui ces biens dont vous auriez fait don

 26   à la Republika Srpska; vous en êtes encore aujourd'hui propriétaire ?

 27   R.  Veuillez ne pas poser des questions provocatrices. Je n'ai pas

 28   prétendument fait don de cela, mais j'ai dû le faire réellement, et non pas

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  1   seulement moi, mais tous les citoyens qui partaient, et c'est la vérité.

  2   Tout le monde le sait, non seulement moi-même. On connaît très bien les

  3   conditions dans lesquelles j'ai dû faire cela, et dans quelles conditions

  4   quelqu'un signerait une telle déclaration. Ce sont des conditions dans

  5   lesquelles il n'y a absolument pas de choix. Il n'y a absolument pas

  6   d'autre manière de faire. Lorsque la seule priorité est de sauver sa peau,

  7   à ce moment-là, la question des biens immobiliers ne se pose pas.

  8   Q.  Ma question est de savoir si vous êtes encore aujourd'hui propriétaire

  9   de ces biens, desquels vous dites que vous en aviez fait don à la Republika

 10   Srpska ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Monsieur, lorsque vous avez parlé de cette réunion à Gornji Seher, est-

 13   ce que M. Tutus, le chef du centre de services de Sécurité publique de

 14   Banja Luka, avait assisté à cette réunion?

 15   R.  D'après mes souvenirs, MM. Predrag Radic et Zupljanin étaient là. Si

 16   mes souvenirs sont bons, il y avait un militaire. Je pense que c'était un

 17   commandant, mais je ne suis pas sûr, et son nom de famille était Ilic.

 18   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Maître Krgovic, je ne sais pas si vous

 19   avez terminé pour ce qui est des questions liées aux biens immobiliers,

 20   mais je souhaite poser une question de clarification au témoin.

 21   Monsieur le Témoin, en répondant à la question du conseil de la Défense,

 22   lorsque vous êtes demandé si vous étiez toujours propriétaire des biens que

 23   vous avez cédés à la Republika Srpska, d'après ce que vous dites, vous avez

 24   répondu oui. Est-ce que ça veut dire que vous êtes toujours en possession

 25   de ces biens immobiliers dont le conseil a parlé ? Ou bien plutôt, est-ce

 26   que vous pouvez nous expliquer votre réponse ? Je ne souhaite pas vous

 27   mettre les mots dans la bouche.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai dit qu'afin que

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  1   quelqu'un puisse sortir de Banja Luka, il fallait que la personne signe ce

  2   document, document qui s'appelait permis de départ, et il y était écrit

  3   sans ambiguïté qu'en partant, cette personne cédait tous ses biens

  4   mobiliers et immobiliers à l'Etat.

  5   Cependant, après la fin de tous ces événements, après notre expulsion, en

  6   2002, j'ai repris la possession de mes biens, et maintenant j'en profite

  7   moi-même.

  8   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci, Monsieur.

  9   Oui, Maître Krgovic, vous pouvez continuer.

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. Pardon.

 11   Excusez-moi, j'avais mal compris quelque chose. C'est bon maintenant.

 12   Poursuivez.

 13   M. KRGOVIC : [interprétation]

 14   Q.  Je vais enchaîner sur la question posée par la Chambre. Dans le

 15   cadastre, lorsque vous avez pris ce document, il n'y a pas eu de changement

 16   s'agissant du propriétaire de vos biens, il n'y a pas eu de transfert de

 17   vous à l'Etat. Est-ce exact ?

 18   R.  Tous mes biens sont à 100 % à mon nom. Je suis le propriétaire à 100 %.

 19   Je ne sais pas qui a utilisé, géré ou a pu avoir les biens pendant une

 20   certaine période, mais aujourd'hui, c'est moi qui en suit le propriétaire,

 21   tout comme c'était le cas avant.

 22   Q.  Et pour autant que vous le sachiez, il n'y a pas eu de changement dans

 23   le cadastre ?

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Quelle est la pertinence de cela ?

 25   M. KRGOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, cette question a été

 26   posée pendant l'interrogatoire principal de M. Olmsted, et le témoin a dit

 27   que ses biens ont été cédés à l'Etat, qu'il a dû faire cela pour pouvoir

 28   quitter la ville, et j'essaie d'expliquer que ceci ne s'est jamais produit

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  1   dans la réalité. C'est la raison pour laquelle je demande s'il y a eu des

  2   changements dans le cadastre, si la propriété a été transférée à l'Etat, à

  3   la Republika Srpska, et ensuite retransférée à lui. C'est la question que

  4   j'ai posée.

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je ne comprends pas tout à fait. Vous

  6   contestez la déposition selon laquelle il a obtenu cela de nouveau en 2002,

  7   autrement dit, entre 1992 et 2002, il n'en était pas propriétaire ? Ou

  8   bien, au moins c'est ce qu'il pensait. Est-ce que vous contestez cette

  9   reprise ?

 10   M. KRGOVIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Nous parlons du

 11   changement de propriétaire, car d'après la déposition du témoin, il devait

 12   signer un document cédant ses biens à la Republika Srpska. Or, la propriété

 13   et la possession, ce sont deux choses différentes. Je pense que dans sa

 14   déposition il a dit qu'il devait transférer la propriété à la Republika

 15   Srpska, si j'ai bien compris.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Peut-être je pourrais expliquer les choses ?

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Mais --

 18   M. KRGOVIC : [interprétation] Ma position est que ceci n'est pas exact. Ce

 19   n'est pas vrai.

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Lorsque les gens -- en fait, au

 21   moment où ils ont cédé leurs biens, d'après ce que vous dites, ils en

 22   avaient encore la possession ? Or, on vous dit qu'ils avaient transféré la

 23   possession seulement, et non pas la propriété à l'Etat ?

 24   M. KRGOVIC : [interprétation] Monsieur le Juge, nous pourrions clairement

 25   voir cela si nous disposions d'un tel document, d'un tel certificat. C'est

 26   la raison pour laquelle je lui ai posé cette question. Mais je n'en ai pas

 27   vu de tel certificat, au moins pour ce qui est de Banja Luka. Je n'ai pas

 28   vu ce genre de documents dont le témoin a parlé. Peut-être l'Accusation en

Page 18041

  1   dispose et peut-être l'Accusation pourrait verser ce type de document au

  2   dossier.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je peux répondre à la question ?

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] S'il vous plaît.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que l'avocat de monsieur ici présent

  6   est tout à fait au courant de cela et qu'il a dû avoir entre ses mains ce

  7   document. Et il n'est pas possible de le contester ou de jeter un

  8   quelconque doute sur le document, car il établit clairement et confirme que

  9   sur la base de ce permis de départ, dans lequel j'ai clairement indiqué que

 10   j'étais d'accord pour que mes biens soient cédés à l'Etat.  (expurgé)

 11  (expurgé)

 12  (expurgé)

 13  (expurgé)

 14  (expurgé)

 15  (expurgé)

 16  (expurgé)

 17  (expurgé)

 18  (expurgé)

 19  (expurgé)

 20  (expurgé)

 21  (expurgé)

 22  (expurgé)

 23  (expurgé) donc il ne peut pas y avoir de confusion ni

 24   de doute. Et lorsque j'ai soumis une requête pour que mes biens me soient

 25   restitués et lorsqu'un arrêt a été rendu en ma faveur, eh bien, tout ceci

 26   indique et prouve que je dis la vérité et que je disais la vérité dès le

 27   début de ma déposition. Donc vous ne pouvez pas mettre de doute là-dessous.

 28   M. KRGOVIC : [interprétation] Je pense que le moment de la pause est venu.

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  1   Je pense que le moment est opportun.

  2   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Juste un instant. Pour ce qui est des

  3   détails concernant les personnes qui ont repris la maison du témoin, cette

  4   partie doit être expurgée. Il s'agit de la partie entre les lignes 10 et 17

  5   de la page 28.

  6   Merci.

  7   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci.

  8   Nous allons prendre une pause et reprendre dans 20 minutes.

  9   [Le témoin quitte la barre]

 10   --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.

 11   --- L'audience est reprise à 10 heures 55.

 12   [La Chambre de première instance se concerte]

 13   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 14   [Le témoin vient à la barre]

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Krgovic, un instant, s'il

 16   vous plaît.

 17   Monsieur le Témoin, à partir du moment où vous avez signé la cession

 18   de vos biens, de vos maisons à l'Etat, est-ce que vous pensiez à ce moment-

 19   là qu'il s'agissait là de remettre pour de bon ces biens à l'Etat, de céder

 20   pour de bon, ou bien est-ce qu'il s'agissait d'une session temporaire le

 21   temps de votre absence ? De quoi s'agissait-il ? Est-ce que vous avez cédé

 22   pour de bon tout ce que vous possédiez ? Ou bien s'agissait-il de quelque

 23   chose d'autre ? D'une cession temporaire ? D'après ce que vous aviez

 24   compris à l'époque.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Si vous me permettez, je vais élaborer un peu

 26   en répondant à la question.

 27   Voilà, je dois dire que depuis le début, je me suis trompé en

 28   évaluant les événements de guerre. Moi, je pensais que tout cela allait se

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  1   terminer très rapidement, que moi personnellement ne suis coupable de rien

  2   devant personne. Je ne dois rien à qui que ce soit. Et qu'à cause de cela,

  3   j'allais être épargné - c'est ce que je pensais - de toute situation

  4   désagréable.

  5   Et je dois dire qu'au début j'ai regretté de devoir laisser tout ce

  6   que j'ai pu accumuler en travaillant, puisque tous mes biens, je les ai

  7   acquis en travaillant. L'exemple que je vais vous citer le corrobore, parce

  8   que j'ai fait sortir mon enfant de Banja Luka lors qu'il venait d'avoir 15

  9   ans. J'ai envoyé ma femme, ma bru, mon fils, mon petit-fils, je les ai tous

 10   fait sortir. Je les ai tous envoyés à l'extérieur de Banja Luka et je suis

 11   resté tout seul chez moi.

 12   Cependant, vu que la situation devenait de plus en plus complexe et

 13   que les problèmes s'accumulaient en s'accroissant jour à jour, avec l'aide,

 14   je dois dire, de l'UNHCR - une organisation internationale - j'ai pu

 15   quitter Banja Luka et je suis parti à Zagreb. Moi, je n'ai jamais voulu

 16   laisser mes biens. Mais vu que c'était la seule façon de sortir de Banja

 17   Luka, j'ai compris qu'il fallait que je renonce à mes biens, qu'il fallait

 18   que j'accepte cela. Quelque part dans mon for intérieur j'espérais que

 19   j'allais revenir et que j'allais pouvoir regagner ma maison, tout en étant

 20   parfaitement conscient du fait que j'ai perdu tout ce que j'avais.

 21   Je ne pensais pas que j'avais la possibilité de revenir et de

 22   reprendre mes biens.

 23   [La Chambre de première instance se concerte]

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Et comment alors vous avez pu

 25   récupérer vos biens, vous avez dit que cela s'est produit en 2002 ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] A un moment donné, à Banja Luka, un bureau a

 27   été créé. Il s'agissait du bureau chargé de la restitution des biens. Ce

 28   bureau se trouvait dans les baraques qui étaient tous près du centre

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  1   médical de la ville. Donc des gens sont arrivés de partout, de tous les

  2   pays en Europe, même des Etats-Unis, pour faire leurs demandes de

  3   restitution de biens.

  4   L'on dit qu'avant cela le représentant pour la Bosnie-Herzégovine, M.

  5   Petric, a pris la décision que tous les biens meubles et immeubles doivent

  6   être restitués aux propriétaires d'origine. Et donc c'est en bénéficiant de

  7   ce droit que j'ai demandé que mes biens me soient restitués.

  8   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

  9   M. KRGOVIC : [interprétation]

 10   Q.  Monsieur, vous n'êtes pas allé certifier cette déclaration par laquelle

 11   vous renonciez à vos biens meubles et immeubles, vous n'êtes pas allé la

 12   certifier devant un tribunal, n'est-ce pas ?

 13   R.  Que je sache, je n'ai jamais parlé d'un tribunal. Moi, j'ai parlé de

 14   certificats, et j'ai dit que mis à part ces certificats et la déclaration

 15   qui a été faite devant le département militaire, je vous dis que ce

 16   certificat de sortie, j'ai pu l'obtenir dans une baraque sur la rive droite

 17   de la rivière Vrbas.

 18   Q.  Vous avez dit que c'est les réfugiés serbes de Kljuc qui sont arrivés à

 19   Banja Luka, qui sont venus donc dans votre municipalité pour être hébergés

 20   de façon temporaire dans vos biens immeubles ?

 21   R.  Oui, je l'ai dit clairement. Ils ont reçu un permis leur permettant de

 22   s'installer de façon temporaire, d'utiliser donc ma maison. Il s'agissait

 23   d'un permis.

 24   Q.  Et à partir du moment où vous avez fait votre demande afin que votre

 25   maison vous soit restituée, ils ont accepté de déménager et ils vous ont

 26   remis votre maison ?

 27   R.  On a été invité ensemble dans ces locaux dont je viens de parler, à

 28   côté du centre médical. Et donc, ensemble, devant un fonctionnaire des

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  1   lieux, nous nous sommes mis d'accord sur les délais, délai pour eux de

  2   quitter la maison, et pour moi, de reprendre ma maison. Il s'agissait

  3   d'évacuations qui étaient tout à fait officielles, qui se faisaient avec

  4   l'aide de la police, et tout ceci a été fait pour éviter toute situation à

  5   problème. Parce que parfois vous aviez des gens qui ne souhaitaient pas

  6   partir et il fallait les évacuer par la force. Des choses semblables sont

  7   arrivées.

  8   Q.  Monsieur, vous avez parlé des attaques contre les citoyens croates et

  9   musulmans. Est-ce que vous savez si la police de Banja Luka a arrêté les

 10   gens qui maltraitaient de la sorte les Musulmans et les Croates ?

 11   R.  Je dois dire que je n'avais que peu d'information à ce sujet, mais je

 12   savais, en revanche, qu'il fallait qu'ils prennent certaines mesures, il

 13   fallait qu'ils agissent, parce que la situation qui régnait à Banja Luka

 14   était une situation sans espoir, sans loi, où l'on pillait, où l'on faisait

 15   ce que l'on voulait. Et je suis convaincu que la police était obligée

 16   d'agir et de lutter contre la criminalité. Je ne sais pas exactement ce

 17   qu'ils faisaient, mais je sais, et je suis convaincu en tant qu'homme,

 18   qu'il fallait qu'ils agissent, qu'ils fassent quelque chose.

 19   Q.  Est-ce que vous savez que parmi les personnes arrêtées pour avoir

 20   attaqué et menacé des Croates et des Musulmans de Banja Luka en 1992, que

 21   parmi les personnes arrêtées, il y en avait justement qui faisaient partie

 22   des [inaudible] dans la camionnette rouge et qui semaient la terreur parmi

 23   la population musulmane et croate ?

 24   R.  Pour ce qui est de cette camionnette, je suis sûr que ce n'est que la

 25   police qui pouvait l'utiliser.

 26   Parce que, vous savez, Bosko Vuksan travaillait dans l'usine de

 27   chaussures de Banja Luka, Bosna, et son frère était un de ses supérieurs

 28   hiérarchiques. Zuco, c'était son surnom, il est originaire de Rudarska, et

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  1   c'est un entrepreneur privé. Il s'occupait des pompes funèbres. Il

  2   construisait des tombes d'ailleurs. Je le connaissais bien. On était

  3   chasseurs tous les deux. Vous savez, les gens qui étaient dans cette

  4   camionnette rouge, on les connaissait. C'étaient des gens que l'on

  5   connaissait.

  6   Q.  Vous avez parlé des meurtres que vous avez pu voir à Banja Luka, pas

  7   tous, mais il y en a que vous avez pu voir. Est-ce que vous savez si la

  8   police militaire ou si la police tout court a arrêté une personne qui a tué

  9   deux Musulmans ? Là je parle d'Avdo Softic et cette autre personne.

 10   R.  Non, non. Ce n'est pas "Softic"; c'est "Sofic". Vous vous êtes trompé

 11   avec le nom de famille. Il n'y a pas de T. Sofic, Avdo. La deuxième

 12   personne c'était Ramiz Zdenac.

 13   Ces deux personnes ont été tuées au milieu de notre quartier, sur la

 14   vieille route, le 5 décembre 1992. Ils ont été tués par Zeljko Ceko, un

 15   jeune homme qui habitait tout près de notre quartier.

 16   Que je sache, il a été arrêté. On me l'a dit. On a même dit qu'il a été

 17   placé en détention dans le cadre d'une enquête et il était en garde-à-vue

 18   pendant l'enquête. Peut-être que je me trompe d'expression, mais je pense

 19   que c'est bien cela. Mais que je sache, il n'a pas été condamné pour ce

 20   crime, en tout cas pas à l'époque où j'étais encore dans la région. La

 21   punition consistait à l'envoyer sur la première ligne de front; c'est tout.

 22   Est-ce qu'il a été condamné par la suite, cela, je ne le sais pas.

 23   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Savez-vous quel était le métier de ce

 24   monsieur, de Zeljko Ceko ? Que faisait-il, quelle était sa profession ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense qu'il était ouvrier. Son père

 26   travaillait au marché vert. Mais je ne sais pas exactement ce qu'il faisait

 27   dans la vie.

 28   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Merci.

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  1   M. KRGOVIC : [interprétation]

  2   Q.  Vous savez qu'après le meurtre de ces deux personnes, la police a

  3   encerclé tout le quartier, l'a bloqué, à la recherche du coupable ?

  4   R.  Oui, c'est exact.

  5   Q.  Et vous savez qu'il a été arrêté peu de temps après ?

  6   R.  Ecoutez, je ne suis pas au courant de cette partie-là de l'histoire.

  7   M. KRGOVIC : [interprétation] Je vais demander que l'on montre au témoin la

  8   pièce à conviction 2D03-1340.

  9   M. OLMSTED : [interprétation] Pendant qu'on attend ce document, je voudrais

 10   rappeler la décision des Juges d'hier soir. Justement, la déposition au

 11   sujet de cet incident ne faisait pas partie des documents en vertu de

 12   l'article 92 ter. Je ne sais pas pourquoi le conseil de la Défense insiste

 13   là-dessus, mais si la Défense souhaite poursuivre, il faudrait modifier la

 14   décision des Juges.

 15   M. KRGOVIC : [interprétation] Je vais vous dire pourquoi je le fais.

 16   Le Procureur a élargi justement la déposition du témoin par rapport à la

 17   déclaration en lui demandant ce que faisaient les organes de la police,

 18   quelles étaient les mesures prises par rapport aux auteurs de crimes

 19   perpétrés contre les Musulmans et les Croates. Le témoin a dit qu'il

 20   n'était pas au courant de cela, qu'il ne connaissait pas la réponse. Et

 21   donc, moi, je souhaite lui montrer ce document en faisant suite finalement

 22   à la question posée dans le cadre de l'interrogatoire principal, et

 23   d'ailleurs, à la question posée par le Juge Harhoff.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Permettez-moi, Monsieur le Président,

 25   d'ajouter quelque chose ?

 26   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Attendez un instant -- un instant,

 27   Monsieur le Témoin, parce qu'il faut l'on décide au sujet de l'objection

 28   soulevée par le Procureur.

Page 18049

  1   [La Chambre de première instance se concerte]

  2   [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

  3   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Nous sommes tout à fait d'accord avec

  4   l'objection soulevée par M. Olmsted. Ce document ne relève pas des faits

  5   jugés au sujet desquels on a cité ce témoin. Et même si on a permis à M.

  6   Olmsted de poser une question d'ordre général, à laquelle l'on a opposé une

  7   objection que l'on a rejetée, nous ne pensons pas que le fait d'avoir poser

  8   cette question d'ordre général permet à M. Krgovic de poser des questions

  9   au sujet d'un document précis, parce que ceci présenterait une déviation

 10   claire par rapport à la décision des Juges.

 11   M. KRGOVIC : [interprétation]

 12   Q.  Monsieur, au cours de l'interrogatoire principal, vous nous avez dit

 13   qu'un mur près de votre maison a été touché par un obus qui a été lancé par

 14   un lance-roquettes portable.

 15   R.  Oui, effectivement.

 16   Q.  Et vous avez porté plainte au niveau de la police, et la police est

 17   venue pour faire un constat sur le lieu.

 18   R.  Oui, effectivement. C'était la patrouille qui patrouillait dans le

 19   quartier. Ils ont répondu que c'était tout à fait normal, que chacun

 20   possédait cette arme, et que, heureusement il n'y avait pas eu de gros

 21   dégâts. Ils nous ont dit tout simplement qu'on a eu de la chance, qu'on

 22   s'en est bien sorti.

 23   Q.  Savez-vous que la police de Banja Luka a arrêté un groupe de personnes

 24   qui s'est livré à de telles attaques avec des lance-roquettes portables et

 25   qu'il y a même eu des victimes de ces attaques ?

 26   R.  J'ai dit que nous n'avions pas de liberté de circulation. Nous, on

 27   était dans un ghetto, on n'avait pas le droit de circuler. Moi, j'ai

 28   toujours aimé lire les journaux, et là je ne pouvais pas faire, et il m'est

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  1   arrivé de demandé aux gens qui avaient un permis qui leur permettait de

  2   circuler dans la ville de m'acheter le journal du jour et de me l'apporter

  3   pour que je puisse être informé. Mais nous n'étions pas informés de la

  4   situation, pas vraiment. D'ailleurs, personne ne s'intéressait à savoir ce

  5   que faisait la police exactement. Au jour d'aujourd'hui, vous ne savez pas

  6   ce que fait la police. Comment voulez-vous que je sache si l'on arrête les

  7   gens ou non ? On sait quelle est la raison de l'existence de la police; il

  8   s'agit de maintenir l'ordre public, l'ordre et sécurité, et on n'était pas

  9   au courant des activités précises de la police. Je ne savais qui ils

 10   arrêtaient. Cela ne relevait pas de mon domaine de compétences.

 11   Q.  Monsieur, vous avez dit que vous vous êtes rendu au poste de police.

 12   N'est-il pas exact, Monsieur, que la police vous a convoqué car il existait

 13   des doutes que vous faisiez partie du groupe Walter organisé par les

 14   dirigeants du SDA à Banja Luka, et il s'agissait là d'un groupe de

 15   renseignement ?

 16   R.  Non. Moi, je ne suis jamais allé à la police, ils ne m'ont jamais

 17   arrêté et je n'ai jamais été interrogé. Ils m'ont arrêté et ils m'ont amené

 18   au poste de police uniquement pour me passer un tabac, pour m'infliger des

 19   mauvais traitements.

 20   Je n'ai entendu parler qu'après la guerre, quand les gens qui avaient été

 21   arrêtés sont arrivés. Il s'agissait de Smail Djuzel; sa femme, Sureta; Ziad

 22   [phon]; et d'autres. Mais moi, j'ai entendu parler de cela pour la première

 23   fois quand je suis sorti de Banja Luka. Donc la police ne m'a pas arrêté,

 24   ils ne m'ont jamais interrogés, et ces mots n'ont jamais été prononcés en

 25   ma présence. Par la suite, j'ai pu apprendre, mais après la guerre, que

 26   j'étais condamné pour des prétendues activités d'espionnage et pour

 27   trahison, que j'étais condamné à 12 années d'emprisonnement.

 28   Q.  Monsieur, n'est-il pas exact que vous, avec M. Krzic et ces personnes

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  1   que vous venez de mentionner tout à l'heure, que vous avez organisé l'envoi

  2   et le recueil d'informations, qu'il s'agisse des informations militaires ou

  3   portant sur la situation à Banja Luka, et que vous avez transmis ces

  4   informations à Zagreb, à l'ambassade de Bosnie-Herzégovine, ou bien à

  5   d'autres représentants internationaux ?

  6   R.  Monsieur, je pense que vous perdez votre temps. Tout à l'heure, à deux

  7   reprises, j'ai clairement dit que je ne bénéficiais pas d'une liberté de

  8   circulation, que je n'avais pas le droit de sortir et que je ne sortais

  9   pas, que je n'ai rencontré personne pendant cette période et que j'ai

 10   entendu parler de cette organisation et de ce nom Walter qu'après la

 11   guerre. Que personne ne m'a jamais posé une seule question à ce sujet, que

 12   personne ne m'a jamais accusé de cela. La question que je pose est comme

 13   suit : quelles sont les informations que j'ai pu éventuellement transmettre

 14   à Zagreb alors que j'habitais dans les quartiers de la ville qui n'avait

 15   pas d'électricité, où l'on ne bénéficiait pas de la liberté de circulation,

 16   où il y avait le couvre-feu ? Comment pouvez-vous imaginer une chose

 17   pareille ?

 18   D'où vient cette idée que j'ai pu faire de choses semblables alors

 19   que tout le monde sait qu'à partir de 9 heures du soir, je ne pouvais même

 20   pas sortir de chez moi, et pendant la journée, tout ce que je pouvais

 21   faire, c'était de sortir dans la rue devant chez moi ? Donc je vous affirme

 22   cela à 100 %; c'est une pure invention. Et d'ailleurs, quand je suis arrivé

 23   à Banja Luka jusqu'au jour d'aujourd'hui, personne ne m'a jamais posé une

 24   seule question à ce sujet. Personne n'a jamais fait jouer ma responsabilité

 25   dans cette affaire, et évidemment, je n'ai pas purgé ma peine. Donc tout

 26   cela confirme à quel point tout cela est mensonger.

 27   Q.  Bien. Monsieur, n'est-il pas exact que vous avez écrit des rapports, ou

 28   un rapport, où vous avez noirci la position des Croates et des Musulmans,

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28  

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  1   où vous avez mentionné des dizaines de milliers de femmes et d'enfants tués

  2   dans la Krajina ?

  3   R.  Excusez-moi ?

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Krgovic, quelles sont les

  5   dates de ces rapports, sur quelle période portent-t-ils ?

  6   M. KRGOVIC : [interprétation] 1992.

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Puis-je répondre ?

  9   M. KRGOVIC : [interprétation]

 10   Q.  Allez-y.

 11   R.  Monsieur Krgovic, c'est un mensonge notoire. Tout d'abord, dites-moi à

 12   qui ai-je pu envoyer des rapports ? Qui sont ces milliers de morts que vous

 13   mentionnez ? Mais ne voyez-vous pas que cela n'a aucun sens, que ça n'a pas

 14   de fondement ? Si vous affirmiez que ces rapports étaient envoyés par moi,

 15   j'aimerais bien voir au moins une petite partie de ces rapports.

 16   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur le Témoin, ce conseil est en

 17   train de poursuivre son contre-interrogatoire. Il fait son travail. Il pose

 18   ses questions. Et présenter les arguments de la Défense fait partie de son

 19   travail. Si jamais la question posée n'était pas correcte, les Juges

 20   interviendraient, donc essayez de bien écouter la question et de répondre

 21   de la façon la plus exacte possible.

 22   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Krgovic, le témoin dit :

 23   Vous parlez de milliers de personnes mortes. Est-ce que vous avez vraiment

 24   parlé de cela, parce que je ne le vois pas dans votre question.

 25   M. KRGOVIC : [interprétation] Oui, peut-être que cela n'a pas été noté au

 26   compte rendu d'audience, mais effectivement, j'ai mentionné des dizaines de

 27   milliers de morts, des femmes et des enfants tués dans la région de la

 28   Krajina et la région de Prijedor; est-ce exact ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, jamais. Jamais je n'ai parlé de cela.

  2   M. KRGOVIC : [interprétation]

  3  (expurgé)

  4  (expurgé)

  5  (expurgé)

  6  (expurgé)

  7  (expurgé)

  8  (expurgé)

  9  (expurgé)

 10  (expurgé)

 11  (expurgé)

 12  (expurgé)

 13  (expurgé)

 14  (expurgé)

 15  (expurgé)

 16  (expurgé)

 17  (expurgé). Je n'ai jamais

 18   envoyé un quelconque rapport à qui que ce soit. Je ne m'occupais pas de ces

 19   choses-là.

 20   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur Olmsted.

 21   M. OLMSTED : [interprétation] Messieurs les Juges, pour clarifier la

 22   question, il existe un document sur la liste de l'Accusation, et je pense

 23   que M. Krgovic mentionne ce document, et comme on le voit, effectivement

 24   que (expurgé) n'était pas l'auteur de ce document.

 25   M. KRGOVIC : [interprétation] Je ne parle pas de ce document précisément.

 26   Je parle de toute une série de documents, mais je vais montrer le document

 27   que j'ai mentionné au témoin.

 28   Je ne parle pas de ce document. Ma question n'est pas reliée à ce

Page 18055

  1   document.

  2   Q.  Monsieur le Témoin, n'est-il pas vrai que vous et M. Kjazim Durakovic,

  3   vous avez participé à des réunions et rassemblé des informations concernant

  4   les événements à Banja Luka et que vous avez assisté M. Krzic lorsqu'il

  5   était à Banja Luka, et que vous avez assisté à M. Osman Gujacic dans des

  6   activités de ce genre ?

  7   R.  Vous revenez sur ce que je rejette a priori. J'affirme que je n'ai eu

  8   aucun lien que ce soit avec cette organisation. J'estime que vous savez

  9   tous que cela a été inventé de toutes pièces. Et je ne sais pas d'où vient

 10   la possibilité que je collabore avec Durakovic, qui n'a jamais été un

 11   activiste, à l'exception peut-être au sein du syndicat à la mine.

 12   Mais je l'ai dit, avec ces activités qui sont inventées de toutes

 13   pièces, on a exercé des pressions sur notre propre nation pour qu'elle

 14   quitte Banja Luka, on l'a chassée. Et donc cette histoire d'espionnage et

 15   d'activités, s'agissant en tout particulier des gens de mon quartier,

 16   j'affirme qu'il n'y en est pas question.

 17   Q.  N'est-il pas vrai que dans le cadre de ce groupe, vous portiez le nom

 18   Ivo, et c'est de cette façon-là que les autres membres du groupe

 19   s'adressaient à vous ?

 20   R.  Permettez-moi, s'il vous plaît, de dire la chose suivante : vous êtes

 21   en train de me pousser vers quelque chose qui n'a aucun sens. A nouveau, je

 22   nie, je confirme et je démontre que je n'ai aucun lien quelconque avec ce

 23   groupe. Et si j'avais eu un lien quelconque, les membres de la police

 24   m'auraient arrêté, m'auraient interrogé, m'auraient fait subir des mesures

 25   précises. Donc je répète : pour ce qui est des autorités civiles,

 26   militaires et policières, il n'a jamais été question d'activités illégales,

 27   et je n'ai jamais été impliqué pour ce qui est des questions de rapports

 28   pour ce qui est d'un pseudonyme ou d'un code secret, qu'il s'agisse d'Ivo

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  1   ou d'autre chose. Eh bien, cela est tout à fait faux. Cela n'a aucun sens.

  2   M. ZECEVIC : [interprétation] Une simple petite correction s'agissant du

  3   compte rendu d'audience. Page 37, ligne 21, le témoin a dit : Je n'ai

  4   jamais parlé d'activités "illégales", et non "légales".

  5   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci.

  6   M. KRGOVIC : [interprétation]

  7   Q.  Vous savez que ce groupe de personnes, donc les membres du groupe

  8   Walter, ont été jugés à Banja Luka. Et avant l'acte d'accusation, ils ont

  9   fait des déclarations au SUP et ils ont mentionné votre nom. Est-ce que

 10   vous savez cela ?

 11   R.  Mais est-ce qu'ils ont donné des déclarations et à qui les ont-ils

 12   données, je ne sais pas. Mais je vous confirme, tout cela n'est pas vrai.

 13   M. KRGOVIC : [interprétation] J'aimerais que l'on montre au témoin la pièce

 14   2D03-1521, s'il vous plaît.

 15   M. OLMSTED : [interprétation] Messieurs les Juges, je me demande si on va

 16   au-delà de la question de la crédibilité du témoin. Pour ce qui est du

 17   réseau d'espionnage, le témoin a dit clairement qu'il n'avait rien à voir

 18   avec cela et qu'il a reconnu qu'il y avait eu des poursuites contre lui,

 19   mais que c'était sans fondement. Et il n'était même pas dans le pays à

 20   l'époque.

 21   Donc en quoi cela est-il lié à la crédibilité, et en quoi serait-il

 22   relié aux faits jugés ?

 23   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Maître Krgovic.

 24   M. KRGOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, j'ai posé des questions

 25   au témoin à propos de ces faits, et je lui ai demandé s'il y avait des

 26   raisons à son arrestation. Et je lui montre maintenant des documents pour

 27   confirmer cela, parce que c'était la position de l'Accusation qu'on faisait

 28   venir des Musulmans sans raison aucune, et je m'efforce de prouver le

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  1   contraire.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je répondre ?

  3   M. KRGOVIC : [interprétation] Alors, je veux montrer au témoin ces

  4   documents en raison de toute une série de questions que je lui ai posées.

  5   Cela est en relation avec le témoignage sous l'égide de l'article 92.

  6   M. LE JUGE HALL : [interprétation] J'aurais cru, Monsieur Krgovic, qu'en

  7   posant directement la question au témoin et après avoir reçu sa réponse,

  8   que voilà, cela suffit pour ce qui est de ce témoin. Mais donnez-moi

  9   quelques instants, s'il vous plaît.

 10   [La Chambre de première instance se concerte]

 11   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur Krgovic, veuillez

 12   continuer.

 13   M. KRGOVIC : [interprétation]

 14   Q.  Jetez un coup d'œil sur le document. Est-ce que vous avez eu l'occasion

 15   d'en vérifier la teneur ?

 16   R.  Oui, tout à fait.

 17   Q.  D'après ce document, lorsqu'il est --

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Krgovic.

 19   M. KRGOVIC : [aucune interprétation] 

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Prenez compte du fait que nous

 21   n'avons pas de traduction en anglais de ce document, s'il vous plaît.

 22   M. KRGOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je vais simplement dire

 23   que --

 24   Q.  Est-ce que vous êtes d'accord pour dire qu'il s'agit d'une notification

 25   officielle du 15 septembre 1994 faite par cette personne ? Est-ce que vous

 26   connaissez Djuzel Smail ?

 27   R.  Je vais vous dire --

 28   Q.  Non, répondez simplement à cette question. Est-ce que vous connaissez

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  1   Djuzel Smail ?

  2   R.  [aucune interprétation]

  3   Q.  [aucune interprétation]

  4   R.  Oui, je connais Djuzel Smail, et je connais --

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Nous avons l'impression que ce

  6   document que vous souhaitez montrer est un document qui datait de l'époque

  7   à laquelle le témoin vivait encore à Banja Luka, en 1992/1993. Il s'agit

  8   visiblement d'un document antérieur. De 1994 ?

  9   M. KRGOVIC : [interprétation] Oui. Mais il fait référence à des événements

 10   qui ont eu lieu en 1992 et 1993.

 11   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Donc il ne s'agit ici pas d'une note,

 12   d'un procès-verbal d'interrogatoire, ce n'est pas un procès-verbal

 13   d'interrogatoire du témoin lorsqu'il a été emmené au bâtiment de la police

 14   à Banja Luka, lorsqu'il habitait toujours à Banja Luka ?

 15   M. KRGOVIC : [interprétation] Non, Monsieur le Juge. Il s'agit d'un procès-

 16   verbal d'interrogatoire qui est établi sur la base de l'acte d'accusation

 17   qui a été établi, et de la décision dont a parlé le témoin. Je peux montrer

 18   la décision au témoin.

 19   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation]  Cela est un procès-verbal

 20   d'interrogatoire, ce n'est pas la déclaration du témoin.

 21   M. KRGOVIC : [interprétation] Non. Il ne s'agit pas d'une déclaration

 22   du témoin. Il s'agit d'un procès-verbal d'interrogatoire établi par un

 23   membre du MUP qui a enquêté sur les activités du groupe Walter, et qui a

 24   été établi en 1994.

 25   [La Chambre de première instance se concerte]

 26   M. OLMSTED : [interprétation] Messieurs les Juges, j'ai la traduction

 27   anglaise de ce document. Cela ne concerne pas les événements de 1992. En

 28   fait, il est question d'un passage où l'on parle d'après le départ du

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  1   témoin de Banja Luka.

  2   Donc il s'agit d'un procès-verbal qui a été établi par une personne

  3   qui n'est pas une partie en l'espèce, concernant donc les questions

  4   consignées dans ce document.

  5   [La Chambre de première instance se concerte]

  6   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Pour ce qui est de la teneur de ce

  7   document, la Chambre estime que c'est une question qui n'est pas

  8   pertinente, donc veuillez poursuivre, s'il vous plaît.

  9   M. KRGOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, simplement une question.

 10   L'Accusation estime-t-elle que la note officielle prise auprès d'une

 11   personne qui n'a pas déposé devant le Tribunal ne devrait faire partie du

 12   dossier ?

 13   M. OLMSTED : [interprétation] Notre position est la suivante, Messieurs les

 14   Juges. Cette déclaration a été prise en 1994 --

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Olmsted.

 16   Un instant, s'il vous plaît.

 17   La décision de la Chambre de première instance n'a rien à voir avec

 18   la position de l'Accusation concernant les notes officielles.

 19   M. KRGOVIC : [interprétation] Je comprends.

 20   Est-ce qu'on peut montrer maintenant au témoin la pièce 2D03-1453.

 21   Q.  Vous avez dit que vous aviez entendu parler du fait que vous aviez subi

 22   une peine de prison de 12 ans, en fait 13 ans pour espionnage ?

 23   R.  Oui, j'ai dit aujourd'hui qu'on m'a informé après la guerre que j'étais

 24   un présumé membre de ce groupe, et que j'avais été donc condamné à 12 ans

 25   de prison pour espionnage. C'est l'information que j'ai reçue.

 26   Q.  Est-ce que vous avez eu l'occasion de jeter un œil sur le jugement ?

 27   R.  Non.

 28   Q.  Voici le jugement.

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  6   M. KRGOVIC : [interprétation] Je demande à ce que l'on passe à huis clos

  7   partiel, et si l'on peut donc supprimer du compte rendu d'audience ce

  8   passage.

  9   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui.

 10   [Audience à huis clos partiel]

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 24   [Audience publique]

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience, je

 26   souhaite indiquer que nous avons commencé en audience publique. Merci.

 27   M. KRGOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 28   je vais juste vous donner une référence pour le compte rendu d'audience,

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  1   lorsque j'ai cité la page 18 en serbe en parlant du jugement quant à la

  2   condamnation qui a été rendue in absentia.

  3   Oui, effectivement, je voulais simplement indiquer qu'il s'agit de la

  4   page 18, et page 16 en anglais.

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] En audience publique ?

  6   M. LE JUGE HALL : [aucune interprétation]

  7   M. KRGOVIC : [interprétation] Je demanderais que le document ne soit pas

  8   diffusé au public.

  9   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Est-ce que nous devrions repasser à huis

 10   clos partiel, Maître Krgovic ?

 11   M. KRGOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, c'est simplement pour

 12   vous donner une référence. J'ai dit ce que je viens de dire, mais je veux

 13   simplement montrer cette partie du texte, car le Juge Harhoff en a parlé

 14   dans sa question et nous pouvons voir très clairement de quoi il s'agit

 15   ici, dans le dernier paragraphe en anglais.

 16   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Merci, Maître Krgovic. Je l'accepte.

 17   Je l'ai déjà accepté, cela, de vous, sur parole. Visiblement, ces personnes

 18   ont été jugées par contumace, mais - et là je parle en mon nom personnel -

 19   je ne suis toujours pas convaincu que ce témoin est la personne qui est

 20   mentionnée dans le jugement.

 21   M. KRGOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 22   peut-on passer à l'audience à huis clos partiel pour ma question suivante,

 23   pour être tout à fait sûr.

 24   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel. Merci.

 25   [Audience à huis clos partiel]

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 18   [Audience publique]

 19   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci.

 20   M. CVIJETIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Je n'ai pas de

 21   questions pour ce témoin.

 22   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci, Maître Cvijetic.

 23   Oui, Monsieur Olmsted, avez-vous des questions supplémentaires ?

 24   M. OLMSTED : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 25   Peut-on présenter, s'il vous plaît, à l'écran la pièce dont le

 26   numéro, en vertu de l'article 65 ter, est 10216.

 27   M. KRGOVIC : [aucune interprétation]

 28   Nouvel interrogatoire par M. Olmsted : 

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  1   Q.  [interprétation] Nous sommes en train d'examiner la gazette officielle

  2   de la cellule de Crise de l'ARK en date du 23 juin 1992.

  3   M. OLMSTED : [interprétation] Je souhaite vous proposer de passer à la page

  4   13 en anglais, 6 en B/C/S.

  5   Q.  Je souhaite attirer votre attention sur cette décision qui figure au

  6   numéro 45.

  7   Où il est dit :

  8   "Les organes municipaux appropriés, organes d'administration, seront

  9   informés de tous les biens abandonnés, et ensuite il sera proclamé que ce

 10   sont les biens de l'Etat, et ils seront placés à la disposition des

 11   assemblées municipales."

 12   M. KRGOVIC : [interprétation] Tout d'abord, Monsieur le Président,

 13   Messieurs les Juges, je n'ai pas montré ce document au témoin.

 14   Deuxièmement, c'est une question directrice.

 15   M. OLMSTED : [interprétation] Ce n'est pas une question directrice. En

 16   fait, j'aurais souhaité que le conseil de la Défense montre ce document au

 17   témoin.

 18   M. KRGOVIC : [interprétation] Demandez-lui d'abord s'il est au courant de

 19   ce document.

 20   M. OLMSTED : [interprétation] Ce n'est pas ma question. Je demande au

 21   témoin de comparer le document qu'il a signé à Banja Luka en renonçant à

 22   ses biens avec --

 23   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Poursuivez.

 24   M. OLMSTED : [interprétation] Merci, Monsieur.

 25   Q.  En regardant cette décision qui est devant vous au sujet des biens qui

 26   sont proclamés comme biens de l'Etat placés à la disposition des assemblées

 27   municipales, est-ce que vous pouvez nous dire comment est-ce que l'on peut

 28   comparer ce document au document que vous avez signé et par le biais duquel

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  1   vous avez renoncé à vos biens avant de partir de Banja Luka ?

  2   M. KRGOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que le témoin

  3   est un juriste pour être capable de cela ? Ici il est question des biens

  4   abandonnés. Or, aucun mot contenu dans ces dispositions ne concerne la

  5   situation du témoin.

  6   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Si j'ai bien compris la question, Maître

  7   Krgovic - et M. Olmsted nous dira certainement si nous nous trompons - eh

  8   bien étant donné que ceci fait partie d'une loi qui s'applique par

  9   conséquent à tout le monde, de quelle manière --

 10   M. CVIJETIC : [interprétation] Excusez-moi, mais nous ne recevons pas

 11   l'interprétation vers la langue serbe.

 12   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Est-ce que vous la recevez maintenant ?

 13   M. LE JUGE HARHOFF : [aucune interprétation]

 14   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Cette disposition qui fait partie des

 15   références -- vous ne l'avez toujours pas ?

 16   Donc, cette disposition qui fait partie des références, c'est quelque chose

 17   qui s'applique de manière générale, donc l'on suppose que c'est connu par

 18   tous. La première objection de Me Krgovic concernant le fait que le témoin

 19   n'est pas au courant de cela n'interdit pas l'utilisation de cela de la

 20   part de M. Olmsted.

 21   Et si j'ai bien compris la question de M. Olmsted, elle était la

 22   suivante : Compte tenu de cette disposition générale, comment peut-on

 23   comprendre ou comparer le document de renonciation du témoin ?

 24   Est-ce exact ?

 25   M. OLMSTED : [interprétation] Tout à fait. Je n'aurais pas mieux exprimé

 26   cela moi-même.

 27   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Et Monsieur le Témoin, je crois que vous

 28   avez compris la question de M. Olmsted. Est-ce que vous pouvez répondre,

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  1   s'il vous plaît.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que cette question est une

  3   bonne question. Elle vient confirmer ce que j'avais dit tout à l'heure

  4   quand j'ai dit que pour quitter Banja Luka il fallait au préalable requérir

  5   un certain nombre de documents. Quand, à la fin, on remettait tous ces

  6   documents aux autorités, on se voyait muni d'un document intitulé permis de

  7   sortir, et là, sur ce document il était écrit que toute personne décidant

  8   de quitter Banja Luka renonçait à ses biens meubles et immeubles. Cette

  9   décision de la cellule de Crise vient confirmer ce que j'ai dit. Voyez-

 10   vous, c'est eux qui prennent ces biens, et ils en disposent comme ils

 11   l'entendent.

 12   Donc, cette décision confirme ma déposition.

 13   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur le Témoin, en ce

 14   moment, il serait utile pour les Juges de vous expliquer de quelle façon

 15   nous avons compris votre déposition, puisque dans vos réponses aux

 16   questions posées par M. Krgovic, il semblait que vous sous-entendiez que ce

 17   que vous aviez signé concernant vos biens, il ne s'agissait pas du droit de

 18   propriété. Il s'agissait du droit d'usurper de vos maisons pour permettre

 19   aux autorités de Banja Luka d'utiliser vos maisons pour réinstaller

 20   d'autres réfugiés.

 21   Donc, il reste une question non répondue, à savoir : est-ce que vous

 22   vouliez vraiment dire qu'il s'agissait de reprendre votre maison de façon

 23   temporaire, ou bien est-ce que vous parlez vraiment du droit de propriété

 24   dont vous avez été aliéné ?

 25   Vous pouvez dire que vous ne le savez pas, puisque vous ne savez pas

 26   exactement quelle est la différence entre ces deux termes juridiques, ou

 27   bien vous répétez ce que vous avez répondu quand vous avez répondu aux

 28   conseils de la Défense, à savoir que vous avez permis par ce document aux

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  1   autorités d'utiliser votre propriété.

  2   [La Chambre de première instance se concerte]

  3   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur, ce que je viens de

  4   vous dire, je vous l'ai dit pour vous faire part d'un manque de clarté dans

  5   votre déposition; en tout cas dans la façon dont nous l'avons comprise. Vu

  6   que vous n'êtes pas un juriste de carrière, que vous n'avez pas de

  7   formation juridique, et il est normal que vous ne puissiez pas toujours

  8   comprendre la distinction qui existe entre les deux notions.

  9   Donc pourriez-vous maintenant expliquer aux Juges de quelle façon

 10   vous avez compris cela ? A quoi avez-vous renoncé à l'époque quand vous

 11   avez quitté vos biens et quand vous les avez cédés à l'Etat de la Republika

 12   Srpska ? Et là, je parle de l'année 1993.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] En 1993, je vous ai dit qu'on était obligé de

 14   recevoir un document définitif qui s'appelait permis de sortir. Le titre de

 15   ce document déjà indique que la personne en question quitte cette ville,

 16   quitte cette région.

 17   Le texte de ce document, à aucun moment, ne parle du caractère

 18   "temporel" de l'utilisation des biens. Ce mot n'existait pas dans ce

 19   document. Ce qui m'amène à dire que ces biens auxquels je renonce passent

 20   entre la main de l'Etat, qui a le droit d'en disposer. Est-ce que, du point

 21   de vue du cadastre, on a vraiment fait ce qu'il fallait faire pour le

 22   transfert de propriété, cela, je ne le sais pas. Mais je peux vous dire que

 23   je n'ai jamais lu, alors qu'il existe des dizaines de milliers de documents

 24   de permis de sortir où il est dit clairement dans tous ces documents que

 25   l'on cède ses biens et que c'est l'Etat qui reprend la propriété de ces

 26   biens. Moi, ce que j'ai ajouté, c'est que cette décision de la cellule de

 27   Crise le confirme, parce que c'est la cellule de Crise qui disposait de ces

 28   biens, y compris de mes biens. Autrement dit, je cède mes biens à la

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  1   municipalité, et vous savez vous-même que la municipalité c'est une unité

  2   de base territoriale, en tout cas c'est le cas dans notre société.

  3   Alors est-ce que cela a été traduit dans le texte, dans les livres, comme

  4   on le fait quand on transfère la propriété dans le cadre d'une succession,

  5   cela, je ne le sais pas. Mais peut-être que les gens ici présents

  6   pourraient vous aider pour tirer cela au clair.

  7   Je pense que j'ai été clair.

  8   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Bien, je pense que nous ne pouvons

  9   pas aller plus loin.

 10   Monsieur Olmsted, je vous redonne la parole.

 11   M. OLMSTED : [interprétation]

 12   Q.  A la page 3 du compte rendu d'aujourd'hui, on vous a posé des questions

 13   au sujet d'un incident au cours duquel un mur de votre maison a été

 14   endommagé par un obus. Et vous avez dit que le policier qui est venu faire

 15   les constats vous a dit que c'était quelque chose de normal.

 16   Est-ce que vous savez si l'enquête a jamais été faite pour jeter la

 17   lumière sur cette affaire ?

 18   R.  Que je sache, non. Ils considéraient que c'était d'ailleurs normal.

 19   Parce que vous pouviez ramasser plein de restes d'obus ou d'éclats dans mon

 20   quartier. Un tel engin a été même laissé devant de chez-moi.

 21   Il s'agissait d'une Zolja avec une grenade montée. Et sur la base

 22   d'une plainte que j'ai portée devant les forces internationales, ils sont

 23   venus et ils ont fait exploser cet engin en plein jour. C'est la vérité, et

 24   on le sait.

 25   Q.  En répondant aux questions de M. Krgovic, vous avez dit aussi que vous

 26   croyiez que la police devait faire quelque chose pour mettre fin à ces

 27   crimes qui visaient la population non-serbe. Mais sur la base de vos

 28   expériences d'entrepreneur privé, est-ce que vous savez si ces autorités de

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  1   Banja Luka ne coopéraient pas avec ces groupes de criminels, qui justement

  2   étaient à l'origine de ces méfaits ?

  3   M. KRGOVIC : [interprétation] Objection. Quel est l'objectif de tout cela ?

  4   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur Olmsted, on pouvait prévoir

  5   cette objection tout de même.

  6   M. OLMSTED : [interprétation] Pouvons-nous passer à huis clos partiel.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous y sommes.

  8   [Audience à huis clos partiel]

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  6   [Audience publique]

  7   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Nous sommes en audience publique, comme

  8   vient de l'indiquer le Greffier, et je répète, Monsieur le Témoin, que vous

  9   pouvez disposer.

 10   [Le témoin se retire]

 11   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Il est 13 heures 20. Je présume que

 12   l'Accusation a un autre témoin ?

 13   M. HANNIS : [interprétation] L'autre témoin que nous avons en ville est le

 14   ST-008. Il est toujours hospitalisé, et il y aura peut-être une procédure

 15   supplémentaire sur le point de vue médical. Donc il ne sera pas en mesure

 16   de témoigner aujourd'hui ni demain. Donc nous n'avons pas d'autres témoins

 17   pour cette semaine. Nous avons toute une série de témoins pour la semaine

 18   prochaine.

 19   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Est-ce qu'il y a des questions d'ordre

 20   procédural ou administratif qui ont besoin d'être soulevées avant de lever

 21   l'audience ?

 22   M. HANNIS : [interprétation] Pour ce qui est du témoin de lundi.

 23   Le Témoin ST-247, pour ce qui est d'une décision orale du

 24   11 novembre, vous avez versé au dossier son témoignage et vous avez fixé

 25   des délais pour ce qui est du temps. Nous avons besoin des éclaircissements

 26   concernant votre décision orale. Vous avez dit que les documents connexes

 27   au compte rendu d'audience étaient pertinents. Il existe un compte rendu

 28   d'audience qui a été surligné en bleu et qui est relatif aux faits jugés.

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  1   Et en jaune, ont été surlignées les informations qui étaient pertinentes

  2   pour ce qui est de l'historique de la procédure et des faits jugés dans

  3   leur contexte. Il n'apparaissait pas clairement d'après la décision orale

  4   si ce qui était surligné en jaune et en bleu a été autorisé, et à quels

  5   documents connexes cela réfère.

  6   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bien, nous sommes en train d'étudier la

  7   question et nous sommes conscients de l'urgence de la question.

  8   M. HANNIS : [interprétation] Merci.

  9   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Hannis, nous sommes, si je

 10   ne me trompe pas, dans l'attente d'une réponse pour ce qui est de la

 11   demande aux fins de rappeler le Témoin 191.

 12   [La Chambre de première instance se concerte]

 13   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] 191.

 14   M. HANNIS : [interprétation] Messieurs les Juges, je ne suis pas certain,

 15   j'ai perdu le fil.

 16   [La Chambre de première instance se concerte]

 17   [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] J'ai pensé que la réponse était

 19   prévue aujourd'hui.

 20   M. HANNIS : [interprétation] Je pensais que Me Korner avait déjà donné une

 21   réponse oralement.

 22   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien.

 23   M. HANNIS : [interprétation] Mon commis à l'affaire est en train de

 24   regarder le compte rendu d'audience à la page 17. Je vous prie de

 25   m'excuser. Donnez-moi un instant, s'il vous plaît.

 26   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

 27   M. HANNIS : [interprétation] Il s'agit de la page 17 946. Si, elle a donné

 28   une réponse oralement, et je n'ai rien d'autre à ajouter.

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  1   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci beaucoup.

  2   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur Zecevic.

  3   M. ZECEVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, il y a des questions

  4   administratives. Et il y a notre demande concernant l'exhumation. Je pense

  5   que je serai en mesure de traiter la question dans les 20 minutes qui nous

  6   restent --

  7   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui.

  8   M. ZECEVIC : [interprétation] -- pour qu'on puisse utiliser le temps de

  9   manière efficace.

 10   La première chose, pour ce qui est des questions administratives, le

 11   jour après la déposition du Témoin ST-041, nous avons reçu la série de

 12   pièces numéro 160 communiquée par l'Accusation. Cette communication

 13   comporte 24 documents qui, selon nous, sont extrêmement importants, et qui

 14   nous ont posé des barrières pour ce qui est de notre capacité à contre-

 15   interroger le témoin, en particulier pour concevoir les points sur lesquels

 16   portaient la déposition du Témoin ST-041.

 17   Nous avons déjà rencontré ce type de problème auparavant mais cela n'était

 18   pas problématique dans la mesure où nous avions toujours un autre témoin de

 19   la même région qui pouvait s'exprimer sur ces documents. Mais nous n'avons

 20   pas en l'espèce de témoins de Doboj.

 21   Je voulais simplement informer la Chambre de première instance. Nous

 22   essaierons de trouver une solution avec l'Accusation. Je souhaitais

 23   simplement soulever la question devant vous aujourd'hui.

 24   Le deuxième point, Messieurs les Juges, est le suivant : lorsque j'ai vu,

 25   dans la diffusion de la Conférence de la mise en état dans une autre

 26   affaire hier, qu'il y avait toute une série d'autres documents, de

 27   documents militaires, les documents dits Pecanac. Lorsque j'ai vu cette

 28   énorme quantité de documents qui ont été communiqués à d'autres équipes de

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  1   la Défense dans d'autres affaires, eh bien, pour ce qui nous concerne, nous

  2   n'avions jamais entendu parler de cela auparavant.

  3   Et lorsque j'ai commencé à me pencher sur la chose, j'ai vu qu'il y

  4   avait quatre DVD comportant un total de 6 662 documents, et la plupart de

  5   ces documents concernent -- qui ne font pas partie de la portée temporelle

  6   de l'acte d'accusation. Mais en passant au crible la liste des documents,

  7   j'ai pu repérer, disons, environ 10 % de documents qui pourraient être

  8   pertinents en l'espèce.

  9   Donc nous avons envoyé le courriel à l'Accusation immédiatement dès

 10   que nous avons pris connaissance de la communication dite Pecanac. Cela

 11   pourrait nous gêner dans notre capacité à contre-interroger l'expert

 12   militaire au mois de janvier, si nous ne recevions pas cela rapidement. De

 13   plus, nous devons savoir si l'Accusation possède d'autres documents

 14   d'importance militaire afin que nous puissions savoir que, une fois que

 15   cela est terminé, l'on pourra en bonne et due forme commencer le contre-

 16   interrogatoire de l'expert militaire.

 17   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Merci, Monsieur Zecevic.

 18   Simplement pour clarifier la communication dite Pecanac, est-ce que

 19   ce sont des documents de nature exculpatoire ? Ou s'agit-il de documents

 20   qui sont simplement pertinents ou intéressants ?

 21   M. ZECEVIC : [interprétation] Je vous prie de m'excuser, je n'étais pas

 22   très précis. Ces documents que j'ai été en mesure d'identifier simplement

 23   en regardant la liste -- puisque je ne les ai jamais vus moi-même; j'ai vu

 24   la liste. Et d'après la liste, il me semble qu'il y a beaucoup de documents

 25   qui relèvent de l'article 68, d'autres qui relèvent de l'article 66.

 26   Et nous avons demandé à l'Accusation de nous les communiquer. Bien

 27   sûr, ils ont l'obligation de le faire. Et c'est une situation qui perdure

 28   depuis un mois. Je n'en étais pas conscient. Je vous prie de m'excuser,

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  1   c'était peut-être une erreur de ma part de ne pas avoir vérifié les autres

  2   affaires, mais croyez-moi, je n'ai pas eu suffisamment de temps, même pas

  3   pour l'espèce. Je n'ai pas eu le temps de vérifier ce qui se passe dans les

  4   autres affaires.

  5   Mais une nouvelle fois, nous demandons à l'Accusation de communiquer ces

  6   documents. Nous espérons les recevoir. Et je souhaitais simplement devant

  7   la Chambre cette question qui nous préoccupe.

  8   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Hannis, vous avez des choses

  9   à dire à propos de cela ?

 10   M. HANNIS : [interprétation] Pas grand-chose. En fait, M. Zecevic nous

 11   avait dit qu'il allait présenter une demande concernant les exhumations

 12   aujourd'hui, donc je ne savais pas qu'il allait parler de cela.

 13   J'ai vu un courriel concernant cette série de documents. Il s'agit pour la

 14   plupart de documents militaires. J'étais là ce matin, j'ai téléchargé une

 15   partie de ces documents, mais je n'ai grand-chose à vous dire à propos de

 16   cela. S'il y a beaucoup de doublons, si cela concerne l'année 1992, je ne

 17   sais pas. Tout ce que je peux vous dire, c'est que dès que je quitterai le

 18   prétoire, je m'occuperai des autres questions qui ont besoin d'être

 19   traitées aujourd'hui, et je parlerai, bien sûr, de la question des

 20   documents Pecanac.

 21   Donc j'informerai en temps et heure M. Zecevic.

 22   M. ZECEVIC : [interprétation] Je comprends et j'apprécie cette --

 23   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Avant de passer à autre chose, est-ce

 24   que quelqu'un est en mesure de nous dire de quoi il est question des les

 25   documents Pecanac ? Est-ce qu'il s'agit des documents qui ont été saisis

 26   récemment par l'Accusation ? De quoi s'agit-il ?

 27   M. ZECEVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, M. Pecanac était un

 28   officier de haut rang de la VRS. Il était proche du général Mladic. Il a

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  1   saisi de ces documents -- eh bien, on appelle ça la communication Pecanac,

  2   donc je présume qu'ils ont été retrouvés en possession de cet officier.

  3   C'est pour autant que je sache à ce jour, Messieurs les Juges, et comme je

  4   l'ai dit, j'en ai appris l'existence uniquement hier soir.

  5   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Merci.

  6   M. ZECEVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, simplement pour préciser

  7   la question de ma demande concernant les exhumations, je m'exprimai en

  8   langue serbe.

  9   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je souhaite vous rappeler que

 10   le 17 septembre de cette année, à la page 14 822 et par la suite, Mme

 11   Korner, M. Pantelic et moi-même, nous avons avancé nos arguments concernant

 12   les exhumations. Je souhaite profiter de cette occasion pour incorporer

 13   tous les arguments exposés concernant cette question pour éviter des

 14   répétitions.

 15   Je vous rappellerais que nous avons notamment avancé des arguments

 16   concernant la position de l'Accusation selon laquelle il est permis dans

 17   cette phase de la procédure que l'Accusation élargisse la liste des témoins

 18   avec 1 795 nouvelles personnes dont les noms ne figurent pas dans les

 19   annexes de l'acte d'accusation. Les Défenses se sont opposées à cela, et la

 20   Chambre de première instance est en train de prendre une position là-

 21   dessus, pour autant que nous le sachions.

 22   Et dans le cadre de mon intervention, j'ai justement fourni aux interprètes

 23   un exemplaire du texte pour les aider et afin de pouvoir accélérer les

 24   choses.

 25   A cette occasion, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, la Défense

 26   Stanisic a informé la Chambre de première instance du fait qu'elle avait

 27   demandé de manière formelle auprès de l'Accusation de recevoir tous les

 28   documents pertinents concernant les 1 443 victimes énumérées dans les

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  1   annexes de l'acte d'accusation. A cette occasion, dans sa réponse aux

  2   arguments de la Défense, Mme Korner, à la page 14 834 du compte rendu

  3   d'audience, a affirmé qu'elle allait remettre à la Défense, suite à sa

  4   requête, tous les documents nécessaires concernant les victimes, car

  5   l'Accusation possédait ces documents, et si la Défense allait contester ces

  6   faits, ce qui est le droit de la Défense, que l'Accusation était prête à

  7   présenter dans ce prétoire tous les éléments de preuve requis.

  8   La Défense a demandé auprès de l'Accusation concernant chaque victime

  9   énumérée dans l'annexe de l'accusation de recevoir seulement six données de

 10   base, et s'agissant des personnes portées disparues, de remettre également

 11   des informations concernant la proclamation de la personne portée disparue

 12   en tant que décédée conformément aux lois en vigueur. Et ceci figure à la

 13   page 14 832. A ce moment-là, ces données requises ont été énumérées et

 14   consignées au compte rendu d'audience.

 15   Effectivement, le 18 octobre, l'Accusation a remis, dans le cadre du

 16   lot 151, les documents sous format électronique à la Défense avec, soi-

 17   disant, les données requises. La Défense a réussi à les analyser. Nous

 18   avons pu constater que ces données volumineuses comportent les données

 19   concernant plus de 9 000 prétendues victimes avec des noms. Ce sont les

 20   victimes de la guerre entre 1991 et 1995. Et ceci est constitué de

 21   plusieurs bases de données différentes dans lesquelles il y a des

 22   répétitions de données et où se trouvaient certaines des informations

 23   requises.

 24   Le problème réside dans le fait que les documents sur lesquels les

 25   entrées dans les bases de données se fondent ne nous ont pas été

 26   communiqués. Ainsi, nous considérons qu'il n'est pas possible de procéder à

 27   la vérification de la véracité des données qui figurent dans la base des

 28   données, ce qui constituait l'essentiel de notre requête de communication.

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  1   Afin de clarifier de manière supplémentaire cette situation, nous

  2   avons organisé une réunion dans le bureau du Procureur avec Mme Alison

  3   Kipp, qui, d'après ce que nous avons compris, est chargée de cette base de

  4   données dans le bureau du Procureur, et nous avons pu établir que

  5   l'Accusation recevait les données concernant les prétendues victimes de six

  6   sources différentes qui sont indiquées dans la base de données que

  7   l'Accusation nous avait présentée initialement le 22 juillet. Et dès le 17

  8   septembre -- je l'ai dit et je le redis maintenant, qu'à notre avis,

  9   certaines de ces sources ne sont absolument pas suffisamment objectives.

 10   Ensuite, si nous avons bien compris Mme Kipp, l'Accusation recevait les

 11   données de ces sources données, qu'elle reprenait tout simplement dans sa

 12   base de données sans procéder à la vérification et à la comparaison des

 13   données. Par conséquent, il y a plusieurs duplications des données

 14   provenant de plusieurs sources différentes. Et, si nous avons bien compris

 15   les choses, pour la plupart, les données ainsi introduites dans la base de

 16   données n'ont pas été vérifiées.

 17   Nous avons pu également entendre lors de cette réunion que les

 18   sources qui fournissent les données à l'Accusation fournissent très

 19   rarement les documents à l'Accusation indiquant sur quelle base les données

 20   ont été introduites dans la base de données. Par conséquent, l'Accusation

 21   dispose de très peu de documents de ce genre. Tout au plus 30 %, d'après

 22   notre évaluation. Il s'agit le plus souvent des rapports judiciaires des

 23   exhumations ou bien des actes de décès sans détail portant sur le temps, le

 24   lieu, le mécanisme par le biais duquel la blessure a été infligée, et ainsi

 25   de suite. Ainsi, il a été constaté que l'Accusation ne vérifie pas leur

 26   véracité et ne reçoit pas des documents corroborant les données et

 27   indiquant de quelle manière les organisations en question ont obtenu les

 28   données concernant la manière dont une personne a trouvé la mort ou a

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  1   disparu.

  2   Ensuite, il s'est avéré également qu'il existe un grand nombre de

  3   personnes concernant lesquelles les données se trouvent dans les bases de

  4   données de l'Accusation alors qu'aucune des six sources n'avait envoyé les

  5   données à ce sujet. Il s'agit des données qui y ont été introduites sur la

  6   base des déclarations de témoins, ce qui abouti à d'autres répétitions.

  7   Sur la base de tout ceci, nous avons pu avoir l'impression que

  8   l'Accusation, malgré la meilleure volonté de faire droit à notre requête,

  9   tout simplement ne possède pas toutes les données de base concernant

 10   chacune des victimes qui font l'objet de la requête de la Défense. Et si

 11   elle possède de telles données, elle ne possède pas de documents qui ont

 12   servi de base pour introduire ces données dans la base des données.

 13   Lors de la réunion, nous avons essayé de confirmer nos positions en

 14   choisissant de manière arbitraire une personne dont le nom figure dans la

 15   base des données. Nous avons demandé à Mme Kipp de nous trouver les

 16   informations pertinentes au sujet de la personne, et même au bout de 15

 17   minutes, elle n'a pas pu le faire. Ça veut dire, du point de vue de la

 18   Défense, que la Défense n'a pas de moyens lui permettant de vérifier le

 19   fondement ou la véracité des données introduites dans la base de données de

 20   l'Accusation.

 21   La Défense continue à analyser les documents en question et essaye

 22   d'établir quels sont les éléments qui manquent et quel est le nombre de

 23   personnes dont les données se répètent. Mais je dois dire que compte tenu

 24   des ressources dont nous disposons, c'est un exercice qui prendra un temps

 25   considérable.

 26   Pour conclure, je dirais que Mme Korner et moi-même, nous avons déjà

 27   remis la pratique judiciaire de ce Tribunal dans l'annexe de nos requêtes

 28   exposées le 17 septembre, et maintenant je vais tout simplement répéter les

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  1   trois positions-clés.

  2   Le fait est qu'une partie des Chambres de première instance considère

  3   que plus la distance de l'accusé est grande par rapport au lieu de crime,

  4   moins il est nécessaire d'identifier les victimes de la manière qui

  5   correspond à l'identification lorsqu'il s'agit de l'auteur direct. Mais il

  6   y a des exceptions notables dans ce cas de figure également. Car même si

  7   dans l'affaire Halilovic l'accusé était assez loin du lieu du crime, ex

  8   officio la Chambre de première instance a insisté pour que l'Accusation

  9   identifie au-delà de tout doute raisonnable toutes les victimes et tous les

 10   auteurs prétendus. L'Accusation n'a pas pu le faire, c'est ce qui est

 11   indiqué dans le jugement, et le résultat a été un acquittement.

 12   B, même les Chambres de première instance qui acceptent la position

 13   selon laquelle la distance de l'accusé du crime justifie que

 14   l'identification de la victime ne doit pas être faite de la même manière

 15   que lorsqu'il s'agit d'un auteur du crime direct, même ces Chambres-là

 16   considèrent que la victime doit être identifiée d'une manière qui permet à

 17   la Défense de contester que ces victimes étaient réellement les victimes du

 18   crime porté contre l'accusé. Par exemple, nous avons la décision sur Prlic

 19   et consorts portant sur les mémoires préalables au procès.

 20   Ensuite, la Chambre d'appel, dans sa dernière décision à ce sujet dans

 21   l'affaire Gotovina, suite à l'appel interlocutoire de janvier de l'année

 22   dernière, a accepté l'appel de la Défense et a renvoyé l'affaire à la

 23   Chambre de première instance.

 24   Pour finir, je dirais que dans un tel cas de figure dans une telle

 25   situation, la Défense n'est pas prête et n'est pas en mesure d'accepter les

 26   faits contenus dans la base de données de l'Accusation portant sur les

 27   exhumations.

 28   Merci. C'est tout ce que je souhaitais indiquer.

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  1   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci, Monsieur Zecevic. Nous allons

  2   devoir réfléchir à ce sujet. Et le Procureur, je suppose, doit aussi

  3   réfléchir à ce que vous venez de dire, et ils vont répondre le plus

  4   rapidement possible.

  5   M. HANNIS : [interprétation] Effectivement, Monsieur le Président. Nous

  6   demandons un peu de temps pour répondre. Et puis, Mme Korner doit être

  7   consultée aussi à ce sujet. Donc la conclusion de ce qu'on vient d'entendre

  8   est que la Défense n'est pas en mesure de donner son accord, et nous avons

  9   entendu les arguments juridiques à ce sujet. A présent, nous avons besoin

 10   d'une décision, à savoir si vous allez faire droit à notre requête, à

 11   savoir que les morts soient prouvées uniquement par le biais de cette base

 12   de données. Si cela suffit, cette chose va être résolue. Et si vous ne

 13   pouvez pas le faire, nous allons essayer de trouver une autre façon.

 14   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci.

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Krgovic --

 16   Vous avez dit que : "…il s'agit de trois cas de jurisprudence qui

 17   étaient pertinents." Et ensuite, vous n'en avez énuméré que deux. Est-ce

 18   que je me suis trompé ? Est-ce qu'il y en a eu vraiment trois ?

 19   M. ZECEVIC : [interprétation] Je vais essayer de vous expliquer cela.

 20   Tout d'abord, il s'agissait d'un grand nombre de décisions des

 21   Chambres de première instance par rapport à la distance de l'accusé par

 22   rapport au crime.

 23   Le deuxième élément, il s'agissait d'une décision dans l'affaire

 24   Prlic portant sur une demande préliminaire où les Juges ont dit que la

 25   victime doit être identifiée de sorte que cela permette à la Défense de

 26   contester cela.

 27   Et puis le troisième cas de la jurisprudence était la décision dans

 28   l'affaire Gotovina.

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  1   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

  2   M. ZECEVIC : [interprétation] De rien.

  3   M. KRGOVIC : [interprétation] Moi, Monsieur le Président, j'avais une

  4   question assez brève qui concerne le Témoin ST-260.

  5   Hier, nous avons reçu un courriel par lequel le Procureur nous

  6   informait qu'il était prêt à discuter avec la Défense uniquement si les

  7   Juges de la Chambre lui ordonnent de le faire.

  8   Nous savons que cela ne relève pas de votre compétence, mais vu la

  9   position exprimée pour le témoin, nous vous demandons de nous instruire.

 10   Est-ce que nous devons faire une demande demandant aux Juges de permettre

 11   au témoin de s'entretenir avec la Défense ou bien d'exiger du témoin de le

 12   faire ?

 13   Vu que le Procureur nous a suggéré, en quelque sorte, de vous poser

 14   cette question et de nous adresser à vous.

 15   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Cette proposition est vraiment bizarre,

 16   puisque nous avons déjà pris des décisions à ce sujet. Nous avons déjà

 17   décidé qu'il n'appartenait pas aux Juges de demander à des témoins de

 18   s'entretenir avec la partie adverse. Il s'agit vraiment du témoin.

 19   M. KRGOVIC : [interprétation] Il faudrait que le Procureur l'explique au

 20   témoin, parce qu'ils ont apparemment un problème de communication. Ou bien

 21   ils peuvent aussi nous permettre de nous entretenir avec ce témoin pour

 22   expliquer quel est notre point de vue.

 23   M. LE JUGE HALL : [aucune interprétation]

 24   M. HANNIS : [interprétation] Moi, j'ai déjà expliqué la position de

 25   l'Accusation et je vais le faire à nouveau. Et cela ne me dérange pas du

 26   tout que la Section d'Aide aux Victimes et aux Témoins le fasse à ma place.

 27   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Très bien. Nous avons dépassé de cinq

 28   minutes le temps qui nous a été alloué pour aujourd'hui. Nous remercions

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  1   les interprètes et le personnel qui nous aide pour cela. Et nous levons la

  2   séance pour aujourd'hui.

  3   --- L'audience est levée à 13 heures 50 et reprendra le lundi 6 décembre

  4   2010, à 14 heures 15.

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