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1 Le mercredi 13 avril 2011
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 07.
5 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,
6 Messieurs les Juges. Bonjour à tout le monde dans le prétoire et autour du
7 prétoire.
8 C'est l'affaire IT-08-91-T, le Procureur contre Mico Stanisic et Stojan
9 Zupljanin.
10 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci, Madame la Greffière d'audience.
11 Bonjour à tout le monde.
12 Les parties peuvent-elles se présenter.
13 Mme KORNER : [interprétation] Bonjour. Joanna Korner, Crispian Smith et
14 Alexis Demirdjian pour l'Accusation.
15 M. ZECEVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs les
16 Juges. Me Zecevic, Mlle Tatjana Savic, Slobodan Cvijetic, et Mlle Deirdre
17 Montgomery pour la Défense de Stanisic.
18 M. KRGOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs les
19 Juges. Aleksandar Aleksic, Dragan Krgovic, et Maggie di Gaudio, pour la
20 Défense de M. Zupljanin.
21 M. LE JUGE HALL : [interprétation] On nous a dit que la Défense voudrait
22 soulever une question. Mais avant cela, je crois que nous avons deux
23 documents -- en fait la Défense de Zupljanin veut utiliser des documents
24 qui ne disposent pas de traduction. D'abord, il faut savoir où on en est
25 pour ce qui est des traductions de ces documents, et l'Accusation a posé la
26 question pour savoir s'il serait utile de présenter les traductions
27 provisoires.
28 Maître Krgovic.
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1 M. KRGOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, on nous a dit que la
2 traduction arrivera durant cette semaine, mais on ne sait pas à quelle date
3 concrète, et si cela sera la traduction complète pour ce qui est donc du
4 rapport d'expert le général Kovacevic. Mon commis à l'affaire est en
5 contact avec le service de Traduction et nous espérons que la traduction
6 donc sera prête sous peu. En tout cas, une fois reçue, l'information
7 portant sur la traduction sera communiquée à la Chambre et au bureau du
8 Procureur par le biais de notre assistant juridique.
9 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bien sûr, il y a une question
10 procédurale par rapport au stade de la procédure où nous sommes à présent,
11 et j'aimerais, en tout cas, entendre la position du bureau du Procureur.
12 Excusez-moi, vous êtes en train de répondre --
13 M. KRGOVIC : [interprétation] Puisque nous attendons à ce que la traduction
14 arrive ainsi que les notes de bas de page. Mais puisque nous ne disposons
15 pas de traduction de tous les documents nous ne pouvions pas observer cette
16 partie de l'ordonnance de la Chambre. Aujourd'hui, nous allons demander de
17 voir les représentants du service de traduction, après quoi nous serons en
18 mesure de dire à la Chambre quelle est la situation par rapport à la
19 prolongation de la période qui nous a été accordée pour soumettre ces
20 traductions.
21 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Si j'ai bien compris vous attendez à ce
22 que la demande officielle soit faite pour pouvoir vous exprimer là-dessus ?
23 M. KRGOVIC : [interprétation] Puisque nous n'avons pas reçu la réponse
24 définitive du service de traduction par rapport à la date à laquelle la
25 traduction sera finie, nous ne pouvons pas parler de notre position à ce
26 moment.
27 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci, Maître Krgovic.
28 Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je dire la chose
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1 suivante ? Nous ne voudrions pas travailler sur le rapport provisoire
2 puisque cela pourrait changer, et nous ne voulons pas que cela soit fait et
3 il n'est pas probable que Me Krgovic fasse venir l'expert avant le mois de
4 juillet au plus tôt, donc nous n'avons pas de position particulière par
5 rapport à cela.
6 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci.
7 Oui, Maître Zecevic.
8 M. ZECEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, hier, pendant
9 l'interrogatoire principal de notre premier témoin, le bureau du Procureur
10 nous a montré la liste de documents que le bureau du Procureur a
11 l'intention d'utiliser lors du contre-interrogatoire de ce témoin. Je dois
12 dire que nous étions très surpris par ce fait, et hier après-midi et hier
13 dans la soirée, nous avons pu constater qu'un certain nombre de documents
14 ne nous a jamais été communiqués. Je vais vous remettre la liste de tels
15 documents, mais avant cela j'aimerais expliquer où on en est par rapport à
16 cela.
17 D'abord, les Règles sont tout à fait claires et je n'ai pas l'intention
18 d'en parler en détail, puisque la Chambre et mes collègues les connaissent
19 très bien. Donc c'est au bureau du Procureur de communiquer les documents.
20 Il y a aussi la jurisprudence, que je peux citer, de ce Tribunal, du
21 Tribunal pour le Rwanda, qui dit clairement quelles sont les obligations du
22 bureau du Procureur dans ce sens-là. Il est dit également que le fait qu'on
23 télécharge les documents dans le système électronique ne veut pas dire que
24 le bureau du Procureur s'est acquitté de son obligation de communiquer les
25 documents.
26 Monsieur le Président, lundi, cette semaine, la Chambre a demandé à la
27 Défense de communiquer les copies dans l'entretien au pluriel que notre
28 client a accordé au bureau du Procureur, ce qui a été fait par la suite par
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1 la Défense. C'est seulement après cela qu'on a reçu l'information du bureau
2 du Procureur, selon laquelle le compte rendu intégral de l'entretien du
3 témoin de 2009 existe. C'est ce que nous avons demandé le 26 mai 2006, nous
4 avons demandé que les comptes rendus complets de l'entretien de M.
5 Bjelosevic nous soient communiqués. Nous les avons reçus à 16 h 45, le jour
6 précédent son arrivée ici.
7 Vous allez vous rappeler que pour ce qui est de cette liste de documents,
8 qu'en janvier, nous avons perdu au moins deux heures de l'audience et
9 plusieurs heures du travail de mon équipe, pour ce qui est des documents
10 provenant du livre du colonel Lisica, et c'est seulement hier que le bureau
11 du Procureur nous a communiqué cette liste où figure l'un des documents de
12 ce même livre. Ce document leur a été fourni par ce même témoin, déjà en
13 2004 lors de son entretien au bureau du Procureur. Donc je dois dire que je
14 suis très inquiet vu la situation qui prévaut à présent. Nous avons obtenu
15 le document que nous n'avons pas vu auparavant. Nous n'avons pas pu parler
16 à propos de ces documents avec notre témoin pour qu'il les commente puisque
17 nous ne savions pas ces documents existaient. Il est évident que le bureau
18 du Procureur les avait pendant tout ce temps-là puisque ce ne sont pas les
19 documents qu'ils ont obtenus hier, ou à un autre moment par le passé.
20 Le bureau du Procureur savait depuis le 24 [phon] mars cette année,
21 lorsque nous avons communiqué la liste 65 ter que notre premier témoin
22 serait M. Bjelosevic. Donc au plus tard à ce moment-là, pour ne pas
23 mentionner le fait que M. Bjelosevic lors de l'entretien en 2009 leur a dit
24 qu'il avait été prévu comme témoin par la Défense. Monsieur le Président,
25 puisque M. Bjelosevic est notre premier témoin, nous devons insister sur le
26 fait que, conformément à l'article 68 bis, une sanction soit prononcée au
27 bureau du Procureur, puisque le bureau du Procureur n'a pas respecté son
28 obligation concernant la communication des pièces.
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1 Puisque si, aujourd'hui - et dans cette situation cela passe impuni -
2 nous ne saurions pas ce qui va se passer pour ce qui est d'autres témoins
3 que nous avons l'intention de citer à la barre. Si à chaque fois les
4 documents ne seront communiqués seulement après que le témoin a prononcé la
5 déclaration solennelle, je dois dire que, par rapport à l'équité de la
6 procédure, ce n'est pas juste maintenant.
7 Je vais donc vous dire quels sont les documents pertinents plutôt les
8 intercalaires. Ce sont les intercalaires 2, 3, 5, 6, 7, 16, 17, 23, 28, 30,
9 34, 69, 72, 86, 87, 88, 90, 97 -- ce sont donc les numéros d'intercalaire
10 des documents 65 ter que l'Accusation nous a communiqués hier. Je possède
11 tous les documents concernant notre demande, et je peux les remettre à la
12 Chambre ainsi que la réponse du bureau du Procureur, et tous les autres
13 documents échangés entre nous et le bureau du Procureur.
14 Si le bureau du Procureur a l'intention de compléter ce que nous
15 avons dit par rapport à cela, par rapport à l'article 66 et par rapport à
16 l'obligation de l'Accusation dans l'affaire, le Procureur contre Lukic et
17 Lukic, c'était la décision relative à la demande Milan Lukic, pour ne pas
18 communiquer certains documents le 3 novembre 2008. Ensuite il y a la
19 décision dans l'affaire Karadzic, dans l'affaire Miroslav Bralo de 30 août
20 2006. Pour ce qui est de Karadzic, c'était la décision de 10 mars 2009. La
21 décision par rapport à l'affaire le Procureur contre Karamira, c'était la
22 décision de la Chambre d'appel du 30 juin 2006. Donc ce sont les décisions
23 auxquelles la Défense a fait référence.
24 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci.
25 Oui, Madame Korner.
26 Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, je ne sais pas
27 combien de fois j'ai soulevé cette question, et je suis vraiment désolée de
28 voir que ces questions ont été soulevées et on cite certains documents et
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1 décisions par rapport auxquels l'Accusation n'a pas été informée. En fait,
2 c'était à 7 h 30 du matin qu'on nous a informés là-dessus, donc ce matin,
3 par un message électronique. Je ne sais pas s'il y a qui que ce soit qui
4 lise ces messages électroniques à 7 h 30 du matin.
5 Donc la Défense a cité une série de décisions de la jurisprudence, et
6 je serai en mesure d'y répondre plus tard. Maintenant j'aimerais soulever
7 deux questions.
8 D'abord, l'objection pour ce qui est des comptes rendus de
9 l'entretien. Je vais dire que ce témoin ne figurait jamais sur notre liste
10 de témoins, jamais, il se trouvait sur notre liste de témoins. Il est l'un
11 des hauts fonctionnaires du MUP serbe avec lequel le bureau du Procureur a
12 eu des entretiens. Certains d'entre eux ont été mis sur la liste de témoins
13 qui devaient être cités à la barre, et certains pas. Plusieurs de ces
14 témoins nous ont dit que la Défense s'était adressée à eux, ce qui d'après
15 nous était approprié, et la plupart de ces témoins nous ont dit qu'ils ne
16 figuraient pas sur la liste des témoins de la Défense. La Chambre sera
17 peut-être surprise de l'apprendre, à savoir qu'il y a peu de témoins qui
18 viennent ici pour parler de ces événements.
19 Pour ce qui est du témoin qui témoigne cette semaine, le premier
20 entretien avec lui a été mené en 2004, et ensuite en 2009. Comme beaucoup
21 d'autres témoins que j'ai déjà cités, il a été informé, il a été approché
22 par la déclaration pour qu'il vienne témoigner en tant que témoin de la
23 Défense. Il a été demandé s'il a fait une déclaration à la Défense, et il a
24 dit que non, mais il faut que je dise que je n'ai pas vérifié cela
25 récemment.
26 Les deux instructions audio des entretiens de 2004, 2009 ont été
27 communiquées, donc nous nous sommes acquittés de notre obligation au titre
28 de l'article 68. La seule obligation qui est la nôtre concernant la
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1 communication de n'importe quelle partie de ces entretiens conformément à
2 l'article 68, cela a été fait. De plus, nous avons communiqué à la Défense
3 tout l'enregistrement audio de ces entretiens puisque nous aurions pu peut-
4 être ne pas communiquer certaines parties au titre de l'article 68. Donc
5 cela peut semer la confusion pour ce qui est de l'information fournie par
6 la Défense, que ces entretiens n'avaient pas été communiqués à la Défense.
7 Nous avons demandé que d'autres entretiens soient transcrits puisque nous
8 ne savions pas quels seraient les témoins de la Défense et nous avons donc
9 communiqué la version complète de ces transcriptions. Pour ce qui est des
10 extraits d'autres entretiens, nous les avons communiqués puisque nous avons
11 fait cela par courtoisie. Ce n'était pas notre obligation.
12 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Madame Korner, où avez-vous
13 communiqué ces enregistrements audio des entretiens dont vous avez parlé ?
14 Mme KORNER : [interprétation] Permettez-moi de poser cette question à M.
15 Smith.
16 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
17 Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons communiqué
18 l'enregistrement audio complet à la date du 8 juillet 2009.
19 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Vous avez envoyé des enregistrements
20 audio à la Défense ou vous avez téléchargé cela dans le système
21 électronique ?
22 Mme KORNER : [interprétation] Non, non, nous les avons envoyés à la
23 Défense. Nous avons envoyé des DVD ou des CD. Non, non, non, nous ne
24 faisons pas -- nous ne procédons pas de façon différente en disant Voilà,
25 nous les avons téléchargés dans le système électronique.
26 Nous les avons d'abord transcrits ces entretiens, et il est vrai
27 qu'ils nous ont demandé si tout l'entretien a été transcrit. Ce n'était pas
28 le cas, c'était seulement les parties qui leur ont été communiquées. Après
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1 que cela a été transcrit -- mais avant, il faut que je dise qu'il y a eu
2 beaucoup de requêtes en ce moment-là par rapport à l'affaire, et j'ai
3 oublié comment cela s'est passé, mais j'ai expliqué tout cela dans un
4 message électronique que j'ai envoyé à Mlle Savic et c'est pour cela que je
5 suis quelque peu surprise de voir que cette question a été soulevée
6 aujourd'hui. Lorsque nous les avons téléchargés, nous nous sommes souvenus
7 du fait que, en fait, nous avions l'enregistrement audio complet. Mais
8 comme je l'ai déjà dit, nous n'avons pas d'obligation quelconque pour les
9 aider. C'est la Défense qui a cité à la barre ce témoin et ils ont dû donc
10 faire des efforts pour que l'entretien -- le reste de l'entretien soit
11 transcrit.
12 Monsieur le Président, nous les avons donnés, nous leur avons donné
13 l'entretien transcrit et cela a été téléchargé dans le système
14 électronique. Donc je m'oppose à cette objection.
15 La deuxième partie de leur objection, à savoir par rapport aux
16 documents sur notre liste par rapport à M. Bjelosevic qui n'ont pas été
17 communiqués, mis à part le fait que certains de ces documents se trouvent
18 sur la liste de la Défense en tant que leur pièces, et puisque je n'ai pas
19 pu examiner les décisions citées par Me Zecevic, je n'ai pas pu non plus me
20 pencher sur la correspondance avec la Défense. Puisque nous nous sommes
21 acquittés de notre obligation au titre de l'article 66 A pour ce qui est de
22 l'Accusation, aucun des documents que nous allons utiliser ne relève pas de
23 l'article 68. Je ne sais pas si cela relève de l'article 66 B. Il faut que
24 je vérifie cela avec la requête de la -- pour ce qui est de la requête de
25 la Défense. Il faut que j'examine les décisions citées par Me Zecevic, donc
26 je vais vous donner la réponse demain.
27 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Donc on va attendre à ce que
28 l'Accusation nous donne la réponse définitive pour ce qui est de la
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1 question soulevée par la Défense.
2 M. ZECEVIC : [interprétation] Cela m'est clair, tout à fait clair,
3 Monsieur le Président.
4 M. LE JUGE HALL : [interprétation] S'il n'y a pas d'autres questions à
5 soulever, peut-on maintenant faire entrer le témoin dans le prétoire.
6 [Le témoin vient à la barre]
7 LE TÉMOIN : ANDRIJA BJELOSEVIC [Reprise]
8 [Le témoin répond par l'interprète]
9 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bonjour, Monsieur Bjelosevic. Vous
10 pouvez vous asseoir.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour à vous.
12 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Selon la pratique adoptée par la
13 Chambre, tous les jours pendant le témoignage d'un témoin, il faut que je
14 rappelle au témoin qu'il est toujours tenu par la déclaration solennelle
15 prononcée au début de son témoignage. Mais on vient de me rappeler que j'ai
16 omis de faire quelque chose hier, à savoir que rien de ce que je vais dire
17 aujourd'hui ne laisse pas comprendre que la Chambre a des doutes par
18 rapport à ce que vous avez dit jusqu'ici dans votre témoignage. Donc il
19 s'agit plutôt de quelque chose que j'aurais dû dire au moment où vous avez
20 prononcé la déclaration solennelle, à savoir la déclaration solennelle que
21 vous avez prononcée n'est pas seulement une forme; c'est une obligation du
22 témoin qui -- selon laquelle vous devez dire la vérité devant ce Tribunal.
23 Si vous manquez à cette obligation, le Tribunal prendra des mesures pour ce
24 qui est du faux témoignage. C'est quelque chose que j'aurais dû vous dire
25 au début de votre témoignage, et puisque j'ai déjà dit, tous les jours
26 durant votre témoignage, il faut que je rappelle que vous êtes toujours
27 tenu par la déclaration solennelle que vous avez prononcée au début de
28 votre témoignage.
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1 Oui, Maître Zecevic.
2 M. ZECEVIC : [interprétation] Merci.
3 Interrogatoire principal par M. Zecevic : [Suite]
4 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Bjelosevic.
5 R. Bonjour.
6 Q. Monsieur Bjelosevic, étant donné que nous avons procédé de façon
7 chronologique, on en est arrivés au début de l'année 1992. Veillez
8 m'indiquer si vous avez eu à connaître du fait que --
9 M. ZECEVIC : [interprétation] Excusez-moi. Je vois que le témoin ne dispose
10 pas de son classeur de documents.
11 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
12 M. ZECEVIC : [interprétation]
13 Q. Alors, maintenant que vous l'avez, je vous demande de vous pencher sur
14 l'intercalaire numéro 16. Il s'agit du 776D1. Peut-être pourriez-vous nous
15 le commenter si vous avez eu vent de l'événement ?
16 R. Oui. J'ai eu à connaître du document et de l'événement qui s'y trouve
17 décrit. Il est question de ce pont entre Bosanski et Slavonski Samac qui a
18 été plastiqué, et ici nous avons une dépêche que le ministre Delimustafic
19 envoie laquelle adresse, à savoir que la cellule de Crise de la
20 municipalité de Slavonski Brod; cependant, la question qui se pose est
21 celle de savoir si ce sont des échanges de courrier usuel; ça c'est une
22 autre question. Mais le courrier et l'événement j'en ai eu vent, oui.
23 Q. Quand vous nous dites que vous n'êtes pas sûr du fait de savoir qu'il
24 s'agit là des échanges de correspondance usuelle, ou d'une façon
25 routinière, de procéder à ces échanges, est-ce que vous pouvez expliquer ?
26 R. Je pense que, quand il s'agit de cellule de Crise de la municipalité de
27 Slavonski Brod, cela devrait aussi chez nous se situer à un niveau local.
28 Si un ministre, en sa qualité de membre du gouvernement, y prend part,
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1 alors ça devait se faire vers un niveau correspondant.
2 Mais si vous me le permettez, je voudrais ajouter quelque chose. Il y a eu
3 une demande de la part du côté croate, et ça venait surtout de Slavonski
4 Brod, demandant donc à ce que l'armée, la JNA, qui je vous le rappelle,
5 était une force armée légale en RSFY, se retire à 25 kilomètres au sud de
6 la Save, ce qui, de façon évidente, avait eu pour objectif de créer un
7 ensemble compact, ou une entité compacte, tant du côté gauche que du côté
8 droit de la Save, en rive droite et en rive gauche. C'est la raison pour
9 laquelle il y a eu ce type de pression visant à faire retirer les postes de
10 contrôle conjoints.
11 Aussi la destruction de ce pont, étant donné que jusqu'à la fin, on n'a pas
12 fini par savoir qui est-ce qui l'a détruit, ça pouvait être considéré comme
13 une pression exercée à l'égard de la partie bosniaque, afin que la partie
14 bosniaque vienne à exiger elle aussi le retrait de la JNA à quelque 25
15 kilomètres vers le sud par rapport à la rivière, c'est-à-dire à la Save.
16 Q. Dites-nous : est-ce que ces faits, et le fait d'avoir détruit ce pont
17 tout comme les ponts qu'on a vu à évoquer auparavant, puis les demandes à
18 faire en sorte que la JNA se retire à 25 kilomètres vers l'intérieur de la
19 frontière de la Bosnie-Herzégovine, tout cela avait-il eu, et si oui,
20 quelle influence sur la population résidant dans cette région ?
21 R. Bien sûr, que cela exerçait de l'influence, et je dirais que la majeure
22 partie de la population du groupe ethnique croate et musulman avait appuyée
23 cette demande, au moins pour ce qui est de Bosanski Brod et Derventa. Les
24 Serbes, eux, a presque 100 %, et une bonne partie de la population
25 musulmane, tout comme une partie importante de la population croate de
26 Derventa et du sud de Derventa, avait apporté un soutien à la présence de
27 la JNA, en sa qualité d'armée fédérale qui était là pour assurer la
28 sécurité de tous les citoyens et de toutes les populations.
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1 Q. Merci.
2 M. ZECEVIC : [interprétation] S'il n'y a pas d'objection, je demanderais à
3 ce que cette pièce soit versée au dossier.
4 Mme KORNER : [interprétation] Est-ce que je pourrais voir l'original, s'il
5 vous plaît, parce que la photocopie est si mauvaise qu'il n'est pas
6 possible de voir de quoi il s'agit ?
7 M. ZECEVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, pendant les préparatifs
8 de la Défense nous avons obtenu ce document par le département de la
9 Défense au pénal du département du tribunal de Bosnie-Herzégovine chargé
10 des crimes de guerre. C'est une copie que nous avons obtenue, elle figure
11 dans les documents de ce tribunal chargé de juger les crimes de guerre en
12 Bosnie-Herzégovine. C'est tout ce que nous avons comme documents. Merci
13 d'avoir prêté une oreille attentive à ce que je viens de dire.
14 Mme KORNER : [interprétation] Merci. Mais, moi, j'aimerais voir l'original,
15 s'il vous plaît. Comme je l'ai dit, il y a quelques instants, Messieurs les
16 Juges, il est presque impossible de voir de quoi il s'agit. Ce document
17 n'est pas signé, il n'y a pas de cachet, et c'est ce que je puis dire pour
18 le moins. Tant que je n'aurais pas une meilleure copie du document, je
19 crois que ce document devrait être marqué à des fins d'identification
20 seulement.
21 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur Zecevic, mis à part la question
22 de l'origine de ce document telle qu'évoquée par Mme Korner, et mis à part
23 la curiosité historique qui pourrait se rapporter à cet incident, pouvez-
24 vous nous indiquer en quoi l'incident est-il pertinent pour la cause que
25 vous défendez ?
26 M. ZECEVIC : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, peut-être
27 voudrais-je d'abord demander au témoin d'enlever ses écouteurs ?
28 Q. Et d'éteindre ses micros.
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1 R. [Le témoin s'exécute]
2 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui, je crois comprendre que le témoin
3 comprend l'anglais. Parce que je crois -- enfin, je crois avoir constaté
4 qu'il avait répondu avant que de -- mais bon.
5 Mme KORNER : [interprétation] Oui, je crois que ce serait peut-être une
6 chose à vérifier, mais l'exercice risque d'être futile et inutile, peut-
7 être devrions-nous lui demander de quitter le prétoire.
8 M. ZECEVIC : [interprétation] Non, à ma connaissance, mais on peut demander
9 au témoin s'il parle ou parle pas aux fins de répondre aux demandes de la
10 Chambre.
11 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur Bjelosevic, est-ce que vous
12 comprenez l'anglais ?
13 L'INTERPRÈTE : Le témoin a remis ses écouteurs.
14 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur Bjelosevic, est-ce que vous
15 comprenez l'anglais ? Si vous le comprenez l'anglais, combien le comprenez-
16 vous ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je le comprends très peu. Je sais dire
18 bonjour, comment allez-vous, et c'est tout.
19 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je dois enlever mes écouteurs ?
21 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui.
22 M. ZECEVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je crois bien que ce
23 document se trouve être pertinent parce que nous avons des documents à
24 venir que nous vous montrerons ultérieurement et qui démontreront qu'il y a
25 eu une question concrète se posant du point de vue de la destruction de ce
26 pont à Bosanski Samac, moyennant usage de dynamite. Etant donné que ça
27 s'est passé sur le territoire de la CSB qui tombait sous la responsabilité
28 de ce témoin, il y a eu une investigation de fait et lui n'a pas eu
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1 connaissance de la chose et il n'a pas eu connaissance non plus des
2 résultats des activités déployées par la commission. C'est aussi important
3 par rapport au fait que le ministre, M. Delimustafic a eu à communiquer de
4 façon directe avec la cellule de Crise à Slavonski Brod, et c'est une
5 cellule de Crise du HDZ en Croatie, donc nous estimons que ceci se trouve
6 être important pour ce qui est de tout un contexte du point de vue de la
7 situation afin de voir pour quelle raison ce témoin-ci, tout comme d'autres
8 témoins, ont fait le déplacement pour assister à une réunion qui s'est
9 tenue le 11 février à Banja Luka.
10 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bon. Ce document sera-t-il marqué à des
11 fins d'identification à ce que nous puissions trancher…
12 M. ZECEVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, les documents, qui nous
13 ont été confiés par l'Accusation, ont été versés au dossier. Un grand
14 nombre de ces documents n'ont pas été signés, ne sont pas des originaux. Je
15 ne vois pas pourquoi maintenant nous avons des critères tout à fait nouveau
16 lorsqu'il y a présentation des éléments à décharge.
17 J'ai apporté des explications pour ce qui est de l'origine du
18 document. Je vous ai dit ça venait du tribunal d'état de Bosnie-
19 Herzégovine. Je l'ai reçu par les soins du bureau chargé de la défense, des
20 défenses au pénal qui sont parties intégrantes de la structure de ce
21 tribunal d'état de Bosnie-Herzégovine. Le document que j'ai reçu est
22 exactement le document que j'ai reçu, je l'ai photocopié, j'ai fourni une
23 copie au bureau du Procureur.
24 Je ne vois pas ou je ne sais pas s'il y a un original du tout, c'est
25 une copie que j'ai reçue, et c'est tout ce que je peux dire à ce sujet.
26 Pour aider les Juges de la Chambre ou qui que ce soit d'autre que ce que je
27 peux dire, c'est le document que nous avons reçu. Entre autres, je peux
28 aussi indiquer qu'il s'agit d'un télégramme. Nous avons au moins 400 pièces
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1 qui constituent des pièces à conviction à ce jour et qui n'ont pas été
2 signées. Il y a juste une signature d'imprimée pour l'expéditeur du
3 document.
4 Mme KORNER : [interprétation] Oui, Messieurs les Juges, mais rien ne nous
5 dit que c'est un télégramme puisque toute partie supérieure du texte a été
6 coupé. Il appartient à la Défense de disposer d'original lisible,
7 d'originaux lisibles, s'ils veulent verser au dossier un document, parce
8 qu'en ce moment-ci, nous ne savons pas du tout de quoi il s'agit. Nulle
9 part il n'est montré que c'était une chose qui a été envoyée. Il semble
10 être même un extrait d'un livre, qui plus est.
11 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Madame Korner, vous devez bien savoir
12 que la meilleure des pièces à conviction possible c'est celle que vous
13 pouvez vous obtenir, vous procurer.
14 Mme KORNER : [interprétation] Oui, mais ils peuvent revenir vers le
15 tribunal d'état et leur demander d'envoyer une meilleure copie. Si j'ai
16 bien compris, c'est une chose qu'ils ont à leur disposition.
17 M. ZECEVIC : [interprétation] Mais d'après ce que je comprends, c'est la
18 meilleure copie qu'ils ont et, entre autres, il dit DD, et on voit de façon
19 claire que c'est un télégramme, ce document.
20 Mme KORNER : [interprétation] Messieurs les Juges, si je puis dire,
21 l'original, si vous vous penchez sur l'original, vous pouvez voir qu'il y a
22 ici 1 barre oblique 2. J'ai l'impression que ceci, enfin ce n'est pas peut-
23 être pas un truc, une chose qui a été sortie d'un livre, mais il ne me
24 semble pas que ce soit un télégramme, parce que pourquoi y aurait-il 1/2
25 dessus. Je vous demande de vous pencher sur la page d'après, parce que chez
26 nous c'est photocopié sur deux pages. Je vous renvois vers la page 2.
27 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zecevic, en traduction
28 anglaise, comment se trouve-t-il qu'en haut de la page 1, il y figure un
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1 intitulé : Information, république socialiste de Bosnie-Herzégovine, et on
2 ne voit pas cela sur la version B/C/S ?
3 M. ZECEVIC : [interprétation] On peut peut-être revenir à la première page,
4 ça s'y trouve, ça se trouve au coin en haut à droite. On voit "MUP SRBiH/10
5 DD," et c'est exactement la traduction de ce que vous venez de lire.
6 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bon. Donc l'original que vous avez
7 est aussi mauvais que la copie que vous avez donnée au bureau du Procureur
8 ?
9 M. ZECEVIC : [interprétation] Exactement, Monsieur le Juge.
10 Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Juge, ce n'est pas la bonne façon
11 de dire les choses. Lorsqu'ils ont donné une liste de documents qu'ils
12 montreraient au témoin et ils nous l'ont communiquée vendredi soir, ils ont
13 indiqué au prétoire électronique, or, la plupart de ces documents, nous
14 n'avons jamais eu l'occasion de les voir.
15 M. ZECEVIC : [interprétation] C'est un document qui a été communiqué au
16 bureau du Procureur, à la date du 28 mars.
17 Mme KORNER : [interprétation] Je suis désolée. On vient de me dire que ceci
18 figure sur la liste 65 ter. Je retire la dernière des observations que je
19 viens de formuler.
20 [La Chambre de première instance se concerte]
21 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Est-ce qu'on peut nous montrer la
22 page 2, je vous prie ?
23 [La Chambre de première instance se concerte]
24 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Le document est versé au dossier, il
25 obtiendra une cote.
26 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce 1D148 [comme
27 interprété], Messieurs les Juges.
28 M. ZECEVIC : [interprétation] Excusez-moi, excusez-moi, mais ça ne peut pas
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1 être le 1D148.
2 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Oui, c'est le 448, Messieurs les Juges.
3 M. ZECEVIC : [aucune interprétation]
4 Q. Je vous prie de vous pencher sur l'intercalaire 25. C'est le 789D1, et
5 je vous demanderais de commenter le document.
6 R. C'est une dépêche que j'ai envoyée moi-même vers le ministère de
7 l'Intérieur de Bosnie-Herzégovine. Par cette dépêche, j'ai demandé à ce que
8 nous soyons informés, nous en tant que service mais l'opinion publique de
9 même, pour ce qui est de savoir comment on en est venu à plastiquer le
10 pont. Qui est-ce qui l'a fait ? Notre équipe du service -- des services de
11 Sécurité à Doboj a procédé à un constat des lieux. Mais l'investigation en
12 tant que tel a été reprise par une équipe de Bosnie-Herzégovine, ce qui
13 fait que nous n'avons pas été à même d'enquêter nous-mêmes pour déterminer
14 qui a été l'auteur du plastiquage, et c'est la raison pour laquelle j'ai
15 demandé à être informé.
16 Q. Cette dépêche, vous l'avez envoyée vers le ministère de l'Intérieur de
17 la République socialiste de Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas ?
18 R. Oui.
19 M. ZECEVIC : [interprétation] S'il n'y a pas d'objection, je demanderais le
20 versement au dossier de cette pièce.
21 Mme KORNER : [aucune interprétation] Oui, je vois. Merci. Non, pas
22 d'objection.
23 M. LE JUGE HALL : [interprétation] je voulais juste dire que tout ce qui a
24 été discuté dans la matinée d'aujourd'hui et dans le courant de la journée
25 d'hier au sujet de la pertinence fera partie intégrante du document qui
26 sera versé et qui se verra attribué une cote.
27 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce 1D449, Messieurs
28 les Juges.
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1 M. ZECEVIC : [interprétation]
2 Q. Monsieur Bjelosevic, pouvez-vous vous pencher sur la pièce 780D1 qui se
3 trouve à l'intercalaire 19.
4 R. Est-ce que vous pouvez répéter parce que j'avais l'interprète qui
5 traduisait encore, ce qui fait que je n'ai pas entendu la référence.
6 Q. Intercalaire 19.
7 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zecevic, est-ce que nous
8 sommes encore en train de parler du pont ?
9 M. ZECEVIC : [interprétation] Non, non, on n'en parle plus.
10 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Dans ce cas, je voudrais poser une
11 question au témoin pour savoir si on a fini par lui envoyer le rapport
12 qu'il avait demandé et est-ce qu'il a fini par savoir qui était les auteurs
13 du plastiquage.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non.
15 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.
16 M. ZECEVIC : [interprétation] Je crois bien que le témoin, dans sa réponse
17 précédente, avait fait savoir la chose. C'est la raison pour laquelle je
18 n'ai pas posé d'autres questions.
19 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, mais d'après ce que j'ai
20 compris, sa réponse -- enfin, il a dit que c'était la raison pour laquelle
21 il avait demandé au ministère de lui envoyer un rapport.
22 M. ZECEVIC : [interprétation] Oui, c'est exact.
23 M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]
24 M. ZECEVIC : [interprétation]
25 Q. Est-ce que vous pouvez commenter ce document, Monsieur ?
26 R. Oui. Il s'agit d'une dépêche que j'ai envoyée à nouveau. Je dis bien à
27 nouveau, parce que j'avais auparavant déjà envoyé des dépêches de ce type
28 au ministre, à son suppléant, et à l'administration de la police. J'ai
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1 demandé à ce que l'on fasse cesser le fonctionnement de service parallèle
2 sur les territoires de Samac et de Brod, car comme on a pu le voir partant
3 de ce qui a été dit auparavant, nous n'avons pas été en mesure de conduire
4 notre enquête.
5 Vu qu'ils ont pratiquement complètement pris sur soi la direction de
6 ces deux postes de police, Bosanski Brod et Bosanski Samac, ils ont choisi
7 des policiers venus d'ailleurs pour les acheminer là, et à titre officiel,
8 la responsabilité de la situation dans ce secteur retombait toujours et
9 encore sur le centre des services de sécurité de Doboj. C'est la raison
10 pour laquelle j'ai demandé qu'on y mette un terme, afin que nous puissions
11 travailler et faire notre travail sur le territoire qui relève du domaine
12 de responsabilité qui était le nôtre.
13 Alors cette façon de faire de la part des inspecteurs a été calquée
14 par le chef du poste de Bosanski Samac. Il a écarté le commandant du
15 système de fonctionnement, et ce chef de poste s'est adressé à moi à
16 plusieurs reprises pour cette raison précise. Le chef du poste avait
17 procédé à la répartition des policiers par poste de surveillance, et le
18 commandant, lui, n'était censé que signer. Il n'a participé à rien et ne
19 décidait de rien du tout.
20 A ce moment-là, un certain nombre de renseignements étaient déjà
21 disponibles qui montraient clairement les raisons pour lesquelles ces deux
22 postes devaient être placés sous le contrôle de ces inspecteurs. En effet,
23 c'est le long de ces axes-là que des équipements et des armes étaient
24 transportés à destination des unités paramilitaires qui se trouvaient dans
25 la partie centrale de la Bosnie-Herzégovine.
26 Q. Cette dépêche a été envoyée au ministre, au ministre adjoint, et à une
27 personne qui figure dans ce télégramme sous le code 01. Pouvez-vous nous
28 expliquer à quoi correspond ce code 01 ?
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1 R. C'était la direction de la police, la direction chargée des policiers
2 en uniforme.
3 M. ZECEVIC : [interprétation] S'il n'y a pas d'objections, je demande le
4 versement au dossier de ce document.
5 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Le document est admis et enregistré.
6 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il devient la pièce 1D450.
7 M. ZECEVIC : [interprétation]
8 Q. Vous venez de parler d'une lettre, ou plutôt d'un document
9 d'information que vous avez reçu du chef du poste de police de Bosanski
10 Samac. Pourriez-vous, je vous prie, vous pencher sur l'intercalaire 28,
11 document 793D1, et nous donner vos commentaires ?
12 R. Oui. Ce document est une dépêche envoyée par le chef du poste de police
13 de Bosanski Samac, M. Jekic, dans laquelle ce dernier informe le MUP, et
14 plus précisément, le siège du MUP, parce que comme vous pouvez le
15 constater, on voit ici le numéro 10 qui, je crois, correspond au bureau du
16 ministre, 01 correspondant à la direction de la police, après quoi -- après
17 les barres obliques, on voit une liste de plusieurs départements. Ce
18 document est envoyé en copie à ma personne, entre autres, au centre du
19 service de Sécurité de Doboj, puisque je suis le chef de ce centre à ce
20 moment-là, ainsi qu'à ses divers départements.
21 C'est une lettre dans laquelle le chef du poste de police démissionne. Il
22 déclare qu'il ne peut plus remplir ses fonctions, qu'il ne peut plus faire
23 son travail en raison des actions du chef Dragicevic, qui a abandonné la
24 prise de décision à d'autres. Comme on peut le lire ici, il déclare que
25 Dragicevic n'a pas réuni une équipe d'experts alors qu'il aurait dû le
26 faire dans le but de discuter des problèmes et d'analyser la situation.
27 Q. Est-ce que ce document correspond à votre réponse précédente ou, en
28 tout cas, à la réponse que vous avez apportée à ma dernière question
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1 lorsque vous avez parlé de problèmes à Bosanski Samac; c'est bien cela ?
2 R. Oui, c'est exact. C'est précisément ce que confirme ce document. Comme
3 je vous l'ai déjà dit, il m'a appelé à plusieurs reprises au téléphone mais
4 j'étais impuissant là-bas parce que Dragicevic recevait ces ordres des
5 inspecteurs et que très souvent il ne répondait pas à mes appels
6 téléphoniques.
7 Q. Lorsque vous dites "ces inspecteurs ce dont il recevait ces ordres," si
8 je vous ai bien compris, vous parlez des inspecteurs qui avaient été
9 envoyés du MUP dans votre localité et sans votre consentement ?
10 R. Oui, Hodzic et celui qui lui a succédé par la suite. Il y avait
11 toujours deux inspecteurs là-bas, qui changeaient souvent.
12 Q. Je vous remercie.
13 M. ZECEVIC : [interprétation] A moins qu'il n'y ait des objections, je
14 demande le versement au dossier de ce document.
15 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Le document est admis et enregistré.
16 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il devient la pièce 1D451.
17 M. ZECEVIC : [interprétation]
18 Q. Je vous prierais, maintenant de vous pencher sur le document 782D1, qui
19 correspond à l'intercalaire 20, et de le commenter.
20 R. Oui, c'est une dépêche qui provient de moi. Je l'ai signée et je l'ai
21 envoyée au ministère de l'Intérieur, au ministre adjoint, ainsi qu'au
22 ministre responsable de la découverte et de la prévention des crimes. Il
23 devenait tout à fait évident que le système en vigueur -- ou, en tout cas,
24 le système prévu par la loi, je veux parler du système de commandement et
25 de contrôle du service. Il était totalement enrayé ou, en tout cas, était
26 devenu paralysé au moment même où ces inspecteurs sont arrivés.
27 Nous avions toujours au moins un inspecteur à Bosanski Brod et Bosanski
28 Samac, Omer Stambolic - si je me souviens bien de son nom - qui changeait
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1 les responsables à différents postes dans ces deux villes sans arrêt, donc
2 les deux villes étaient couvertes par ces inspecteurs, qui allaient à
3 l'encontre du système en vigueur. Ils avaient des contacts avec les partis
4 politiques, le SDA et le HDZ. Ils maintenaient uniquement au sein du
5 service des Contacts avec les membres d'appartenance ethnique musulman et
6 croate, qu'il s'agisse de chefs de poste, d'adjoints, ou de commandants.
7 Ils rédigeaient leurs propres rapports, ils envoyaient leurs propres
8 documents d'information, sans que nous ayons à aucun moment la possibilité
9 de discuter de ces rapports avant qu'ils ne soient envoyés. Nous en étions
10 arrivés à constater ce qui se passait, et comme je vous l'ai déjà dit, ces
11 régions de la vallée de la Sava, et de la Posavina, comme on l'appelait,
12 étaient liées à différents organes en Croatie dans la municipalité de
13 Slavonski Brod.
14 Par ailleurs, un certain nombre de choses étaient en train de se mettre en
15 place pour organiser des unités paramilitaires sous l'égide du SDA. Voilà
16 donc ce qui se passait sur le territoire des municipalités de Doboj, de
17 Tesanj, de Maglaj, et à ce moment-là, nous disposions déjà de
18 renseignements et de données tout à fait fiables au sujet de ce qui se
19 passait et des formations qui avaient déjà été créées, à cette époque-là,
20 ainsi que des armes qui leur ont été distribuées.
21 Q. Dites-moi : est-ce que vous adressiez vos rapports au ministère de
22 l'Intérieur de la République socialiste de Bosnie-Herzégovine, comme prévu,
23 dans les manuels officiels et textes réglementaires régissant votre travail
24 ?
25 R. Bien entendu. Nous faisions partie d'un flux incessant de transmission
26 de rapports à partir de notre lieu de travail, et nous envoyions également
27 des rapports contenant des renseignements relatifs à la sécurité. Le
28 dispositif était le même pour les centres de Sécurité publique et de Sûreté
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1 d'Etat.
2 Q. Connaissiez-vous les rapports envoyés par ces inspecteurs au MUP ? Vous
3 avez dit que ces problèmes n'étaient pas discutés, mais est-ce que vous
4 pouviez consulter ces rapports ?
5 R. Non, j'ai déjà dit que les inspecteurs rédigeaient leurs propres
6 rapports qu'ils envoyaient sans nous consulter, sans consulter d'ailleurs
7 personne à quelques postes de responsabilité que ce soit, et j'ai dit
8 également que je ne savais pas donc ce qu'ils envoyaient exactement et que
9 j'avais essayé d'entrer en contact avec eux, par écrit ainsi qu'au
10 téléphone, pour essayer de connaître ces documents et de discuter avec les
11 inspecteurs de ce qu'ils étaient en train de faire qui normalement aurait
12 dû se faire ensemble, mais d'entre eux, n'ait jamais venu nous voir pour se
13 consulter avec nous, ou apprécier la situation ou prendre des décisions ou
14 quoi que ce soit d'autre avec nous.
15 Q. Avec cette dépêche, est-ce que vous leur demandiez quelque chose, ou
16 est-ce que vous leur faisiez des propositions ou leur donniez des
17 indications quant à ce qu'il convenait de faire dans l'avenir immédiat ?
18 R. Vous voyez à la lecture de ce document, à la fin du document, que je
19 déclare que, si ce qui se passe à ce moment-là continue, j'en informerais
20 les autorités responsables, ainsi que l'opinion publique, le SUP fédéral,
21 et cetera.
22 Q. Est-ce que vous avez demandé l'organisation d'une réunion avec les
23 dirigeants du ministère de l'Intérieur de la République socialiste de
24 Bosnie-Herzégovine ?
25 R. A plusieurs reprises, j'ai demandé qu'une réunion soit organisée avec
26 le ministre M. Delimustafic. Je l'ai fait par téléphone, ou dans une
27 conversation directe avec la secrétaire, ou par lettres, mais aucune
28 réunion n'a jamais été organisée avec le ministre.
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1 M. ZECEVIC : [interprétation] Le document stipule, j'ai demandé une
2 réunion, c'est la raison pour laquelle j'ai posé une question directrice.
3 Pour gagner du temps.
4 Mme KORNER : [interprétation] La question n'a pas été posée convenablement,
5 vous le savez, c'est la raison pour laquelle je me suis levée.
6 M. ZECEVIC : [interprétation] Je vais faire de mon mieux. Je vous remercie.
7 Je demande le versement au dossier de ce document s'il n'y a pas
8 d'objection.
9 Mme KORNER : [interprétation] J'aimerais connaître si l'original ne
10 comporte pas une date, car la copie est de très mauvaise qualité. Si tel
11 n'est pas le cas - je suppose que c'est un document qui a été fourni par le
12 témoin - est-ce qu'il pourrait nous dire quelle en est la date ?
13 M. ZECEVIC : [interprétation]
14 Q. Monsieur Bjelosevic, pouvons-nous nous donner la date de ce document
15 ou, en tout cas, la période approximative pendant laquelle il a été rédigé
16 ?
17 R. Je ne pourrais pas dater ce document avec précision, mais je pense
18 qu'il date de fin février début mars, sans en être sûr.
19 Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, je suis désolée, mais
20 la copie est d'une si mauvaise qualité qu'elle est à peine lisible, donc
21 puisque le témoin est l'auteur de ce document. Je pense qu'il serait bon de
22 lui demander ce qui figure en haut du document, quelle est la signature
23 qu'on voit en haut du document.
24 M. ZECEVIC : [interprétation] Peut-être peut-on agrandir le texte à l'écran
25 de façon à ce que le témoin ait plus de facilité à le commenter ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] La signature que l'on voit en haut du document
27 est sans doute celle de la personne qui a traité ce document. On voit
28 également en haut la date ou, en tout cas, l'heure d'expédition de cette
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1 dépêche ainsi que le numéro de référence, qui lui a été assigné.
2 M. ZECEVIC : [interprétation]
3 Q. Monsieur Bjelosevic, je vous demande si cette dépêche provenait bien de
4 vous, et si vous savez si elle a été envoyée au MUP ?
5 R. Oui, bien sûr, elle a été envoyée au MUP, et j'ai expliqué simplement à
6 l'instant ce qu'on voyait en haut à gauche de la page.
7 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zecevic, je parle maintenant
8 de ce qui se passe avec les documents; est-ce que cela ne devient pas
9 répétitif ?
10 Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, si cela peut aider en
11 quoi que ce soit, nous admettons au nom du Procureur le fait que M.
12 Bjelosevic a passé plusieurs mois à se plaindre auprès des responsables du
13 MUP de ce qui se passait qui n'était pas correct, comme il l'a dit.
14 M. ZECEVIC : [interprétation] Oui, mais…
15 [La Chambre de première instance se concerte]
16 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je ne sais pas si j'ai bien compris ce
17 que Mme Korner vient de dire à l'instant. Ce que j'ai compris c'est que Mme
18 Korner déclare que cette admission, en fait je m'apprêtais à utiliser le
19 mot "concession" mais j'utiliserais le mot un peu moins défini,
20 "d'admission," donc je ne suis pas sûr que cette admission signifie qu'aux
21 yeux de l'Accusation la présentation d'autres documents similaires donc ce
22 processus répétitif de présentation de documents similaires soit absolument
23 indispensable.
24 Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que la
25 décision à ce sujet est entre vos mains ainsi qu'entre celles de Me
26 Zecevic. Je souligne simplement pour ma part que je ne vais certainement
27 pas contester le fait que le témoin se soit plaint à plusieurs reprises de
28 ce qui, d'après les mots utilisés par lui ne fonctionnait pas correctement
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1 à l'époque. Est-ce que ces plaintes sont justifiées ou pas, c'est une autre
2 question.
3 M. ZECEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges --
4 Q. Monsieur Bjelosevic, pouvez-vous retirer vos écouteurs, je vous
5 prie ?
6 M. ZECEVIC : [interprétation] Alors, Monsieur le Président, Messieurs les
7 Juges, ce qu'il importe de dire c'est exactement cela : D'abord est-ce que
8 c'était justifié ? C'est aux Juges de la Chambre d'en décider. Je m'efforce
9 de vous montrer ce que je vous montre à l'appui de notre position qui
10 consiste à dire que les protestations du témoin étaient plus que
11 justifiées. Car il ne cessait de présenter des demandes, et des demandes et
12 des demandes, et n'obtenait pas la réponse nécessaire du ministère, en tout
13 cas, pas la réponse qu'il aurait dû obtenir. Ça, c'est un point.
14 Un deuxième point, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, c'est
15 que ce document date d'une période ultérieure au 11 février. Par
16 conséquent, l'idée du bureau du Procureur ou la théorie de l'Accusation,
17 selon laquelle le 11 février le MUP n'avait rien à voir avec le MUP de
18 Bosnie-Herzégovine, est évidemment fausse; car le témoin, M. Bjelosevic,
19 qui se trouvait sur les lieux, a discuté de cette situation comme vous le
20 verrez dans une seconde, et il demande une nouvelle fois au ministre
21 Delimustafic d'intervenir en appelant l'attention de ce dernier sur les
22 actes erronés, sur les problèmes. Il demande à le rencontrer.
23 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Remarque entendue, Maître Zecevic.
24 Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
25 ce n'est pas une description exacte ou fidèle de ce que dit l'Accusation au
26 sujet de la réunion du 11 février, mais les Juges de la Chambre entendront
27 ce que j'ai à dire en temps utile.
28 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Donc le document est admis au dossier et
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1 enregistré.
2 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il devient la pièce 1D452.
3 M. ZECEVIC : [interprétation]
4 Q. Toutes mes excuses, j'ai oublié de brancher mon micro. Vous m'entendez
5 maintenant ?
6 R. Maintenant, je vous entends.
7 Q. Monsieur Bjelosevic, est-ce que vous avez assisté à une réunion à Banja
8 Luka, et si oui, pouvez-vous nous dire quelle était la nature de cette
9 réunion, le motif de sa convocation, et quels ont été les sujets discutés
10 durant cette réunion ?
11 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Est-ce que nous allons maintenant
12 parler de la réunion du 11 février ?
13 M. ZECEVIC : [interprétation] Tout à fait.
14 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] J'aimerais, pour ma part, poser une
15 question au témoin, avant que nous ne parlions de la réunion du 11 février.
16 Monsieur Bjelosevic, j'aimerais savoir si vous pourriez nous dire comment
17 vous interprétez le fait que le MUP de Sarajevo, sur ordre d'Alija
18 Delimustafic ait envoyé des inspecteurs qui se sont ingérés dans le travail
19 quotidien du SJB de Doboj, et aussi du CSB de Doboj. Qu'est-ce qui était en
20 train de se passer ? Est-ce que vous pourriez nous le dire ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Honnêtement, encore aujourd'hui, je ne sais
22 pas avec certitude que cette décision ait été prise par M. le ministre
23 Delimustafic ou si en fait toute cette question ne relevait pas de la
24 volonté de M. Pusina, parce que je n'ai jamais eu sous les yeux une
25 quelconque dépêche signée par M. Delimustafic, et traitant de ces
26 questions. Je n'en ai jamais reçu. Jusuf Pusina, lui, a envoyé une dépêche
27 après deux ou trois interventions de ma part dans lesquelles je demandais à
28 ce que l'on m'explique ce qui était en train de faire ces deux hommes mais,
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1 en fait, mes courriers je les adressais toujours au bureau du ministre.
2 Alors s'agissant de l'envoi de ces inspecteurs à Doboj, à Bosanski Brod et
3 à Bosanski Samac, ma façon d'interprétation les choses consiste à penser
4 que cette décision entrait dans la préparation, l'organisation et la mise
5 en place d'un certain nombre d'unités paramilitaires, qui par la suite
6 devaient être intégrées à l'armée de Bosnie-Herzégovine pour partir, alors
7 que d'autres étaient appelés à être placés sous le commandement du
8 ministère à Sarajevo. Parce que dans le cadre d'un fonctionnement normal du
9 service sur le terrain, et en particulier au niveau des barrages routiers,
10 plus précisément au niveau -- plus précisément dans le cadre de l'opération
11 poste de contrôle 91, de telles pratiques n'auraient pas dû être
12 autorisées. Il y a eu des cas où des personnes qui avaient des tendances à
13 commettre des actes de sabotage ont été arrêtées. Je pense que c'était à
14 Brcko et ailleurs aussi, où on a trouvé sur certaines personnes des
15 explosifs, et dans le secteur du CSB de Doboj, notre police de la
16 circulation a intercepté un véhicule qui arrivait d'Allemagne sous escorte
17 policière. Ce véhicule était rempli d'équipement militaire.
18 Alors, maintenant, que j'ai dit cela, j'ajouterais que lorsque la
19 police interceptait un véhicule dans ces conditions, nous-mêmes - et
20 lorsque je dis "nous-mêmes," je pense au CSB de Doboj - étions tenus de lui
21 imposer une sanction. A partir de ce moment-là, la régularité des
22 approvisionnements à bord de divers véhicules, d'armes, d'équipements
23 divers et de poste de radio a pratiquement cessé. D'ailleurs, ceci était
24 encore un sujet de protestation de ma part, protestation répétée puisque
25 aucun des équipements attendus n'arrivait.
26 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Donc vous soupçonniez que les
27 Musulmans étaient en train d'organiser en secret la création d'unités
28 paramilitaires qui, à un moment ou à un autre, reprendraient à leur compte
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1 le commandement du poste de Doboj et des postes des localités environnant
2 Doboj; est-ce que c'est bien ce que vous êtes en train de nous dire ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Simplement, il ne s'agissait pas
4 uniquement de doute ou de soupçon. Nous étions en possession de
5 renseignements tout à fait vérifiés et précis au sujet de ce qui était en
6 train de se passer, et c'était cela.
7 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Mais ceci, à mon avis, soulève deux
8 questions. Première question : Qu'avez-vous fait pour contrecarrer cette
9 évolution ? Deuxième question : Comment ou en quoi est-ce que tout ceci
10 implique les Croates ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Peut-être serait-il préférable de commencer
12 par votre deuxième question ?
13 Avant les élections déjà, le HDZ et le SDA apparaissaient ensemble aux
14 meetings préélectoraux et ils sont même allés jusqu'à nouer symboliquement
15 les drapeaux des deux partis lorsque avaient lieu ces meetings pour
16 symboliser l'unité entre ces deux partis. Et ces deux partis poursuivaient
17 un but pratiquement identique, qui était de démanteler, de faire éclater
18 l'ancienne Yougoslavie.
19 Maintenant, qu'est-ce que j'ai fait moi-même et qu'est-ce que le
20 service que je dirigeais a fait ? Nous avons régulièrement informé le
21 ministère de l'Intérieur de tous les événements qui étaient en train de se
22 dérouler et dont nous avons eu connaissance, et donc nous avons fait tout
23 ce que nous pouvions faire. Lorsque les inspecteurs fédéraux sont arrivés
24 dans notre région, nous leur avons dit ce que nous savions au sujet de ce
25 qui était en train de se passer.
26 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie. Nous reviendrons
27 peut-être sur ce point un peu plus tard. Mais je vois l'heure qu'il est,
28 donc je pense que l'heure de la pause est arrivée.
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1 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Reprise des débats dans 20 minutes.
2 [Le témoin quitte la barre]
3 --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.
4 --- L'audience est reprise à 10 heures 57.
5 M. KRGOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, par rapport à la
6 discussion qui a été menée ce matin, j'aimerais informer la Chambre de
7 première instance que nous venons de recevoir la traduction du rapport
8 d'expert du général Kovacevic et cette traduction sera téléchargée dans le
9 système électronique -- dans le prétoire électronique sous peu et sera
10 communiquée à des parties. Il y a encore à traduire à peu près une
11 vingtaine de notes de bas de page selon l'information qu'on a reçue du
12 service de traduction. La traduction de ces notes de bas de page sera prête
13 jusqu'à la fin de la semaine.
14 Cela veut dire que d'ici la fin de la semaine tous les documents qui
15 apparaissent dans les notes de bas de page seront téléchargés dans le
16 prétoire électronique et les parties au procès auront donc accès à ces
17 documents et leur traduction.
18 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci pour cette information mise à
19 jour, Maître Krgovic.
20 Est-ce qu'on peut maintenant faire entrer le témoin dans le prétoire.
21 Mme KORNER : [interprétation] En attendant que le témoin n'entre dans
22 le prétoire, j'aimerais dire la chose suivante, hier, vous avez posé la
23 question concernant le message électronique qui a été envoyé pour ce qui
24 est du calendrier dans d'autres affaires. Mais jusqu'ici, ce message n'a
25 été reçu ni par le Procureur ni par la Défense. Je vois que tout le monde
26 hoche de la tête pour dire qu'ils n'ont rien reçu jusqu'ici, et nous
27 voudrions savoir ce que la Chambre a proposé par rapport au calendrier pour
28 ce qui est de l'Accusation nous préférerions travailler deux jours en bloc
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1 et ensuite deux jours de pause et ainsi de suite. Mais, bien sûr, c'est à
2 la Chambre d'en décider.
3 [Le témoin vient à la barre]
4 M. LE JUGE HALL : [interprétation] D'abord, j'ai tout simplement voulu
5 profiter de cette occasion pour en informer les conseils le plus tôt
6 possible, et le message électronique a été envoyé à cette fin pour vous
7 dire ce que les Juges en pensent, par rapport à ce calendrier, par rapport
8 donc à notre travail, puisque nous avons ici les conseils qui sont
9 impliqués dans deux affaires. Donc nous avons voulu soulever cette
10 question.
11 Nous avons parlé de toutes les possibilités, et pour ce qui est de
12 cette question, nous avons donc fait savoir notre position. Mais seulement
13 après avoir entendu les parties, nous allons rendre notre décision
14 définitive. J'ai pensé qu'il serait mieux de commencer à penser à cela le
15 plus tôt possible puisqu'on est déjà à la mi-avril et on n'a pas beaucoup
16 de temps pour ce qui est de cette question concernant le mois de juin.
17 Mme KORNER : [interprétation] Cela serait très utile, effectivement. Mais
18 puisque j'ai beaucoup d'expériences de travail à ce Tribunal, il faut que
19 je dise qu'il ne faut pas donc rendre des conclusions hâtives.
20 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Vous pouvez continuer, Maître Zecevic.
21 M. ZECEVIC : [interprétation] Le Juge Harhoff donc a d'autres questions à
22 poser, il peut peut-être les poser maintenant.
23 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] J'ai une question à poser au témoin
24 avant de parler de la réunion du 11 février.
25 Cette question concerne le lien existant entre les faits que -- d'abord
26 vous avez entendu que les Musulmans se préparaient, de façon clandestine,
27 pour former les unités armées, vous avez entendu qu'il y a eu de transport
28 d'armes d'Allemagne et d'autres endroits qui arrivaient en Bosnie-
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1 Herzégovine.
2 Est-ce que vous avez estimé que le transport d'armes était en rapport avec
3 le fait que les Musulmans créaient leurs unités paramilitaires en Bosnie ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je rappelle qu'à l'époque, la Yougoslavie
5 existait toujours en tant qu'une entité et que le service de Sûreté de
6 l'Etat fonctionnait au niveau de la Fédération, et que nos agents
7 opérationnels du centre de service de Sécurité de Doboj disposaient de
8 renseignements pour ce qui est de la Croatie et de la Bosnie-Herzégovine;
9 ils étaient au courant de ce qui se passait à l'époque. J'ai déjà dit que
10 la police de la circulation a arrêté un véhicule, et pour ce qui est de ce
11 véhicule, je sais qu'ils ont dit à l'époque qu'il s'agissait du véhicule
12 provenant d'Allemagne et contenant de l'équipement. Je pense qu'une
13 patrouille les a escortés, me semble-t-il, de Posusje, les a accueillis à
14 Samac, et les a escortés, donc a escorté ce véhicule pendant tout ce trajet
15 jusqu'à l'entrée à Doboj, si je me souviens bien. La patrouille les a
16 arrêtés au croisement s'appellant Seslije, où se croisent les routes de
17 Bosanski Brod et Samac. Ces routes s'entrecroisent près de Doboj, et passe
18 par la suite par Doboj.
19 Puisqu'il s'agissait de l'équipement militaire, très vite, la police
20 militaire y a été impliquée pour prendre ce véhicule. Cet équipement et les
21 policiers ont été -- ont pu partir puisque, selon l'ordre qu'ils ont reçu,
22 ils devaient se rendre dans leur poste de sécurité publique de base après
23 avoir dîné dans la maison des retraités.
24 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Ces policiers, les policiers qui ont
25 assuré l'escorte du véhicule, si j'ai bien compris, étaient-ils les
26 policiers musulmans, n'est-ce pas ? Ils étaient Musulmans ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne me souviens pas de leur appartenance
28 ethnique, mais ils portaient des uniformes réguliers. Je pense qu'ils
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1 étaient de Posusje, mais je n'en suis pas certain.
2 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Donc vous ne donnez pas une réponse
3 complète. Est-ce que cela veut dire que cette escorte de la police aurait
4 pu être l'escorte serbe et que ces armes étaient destinées aux Serbes ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, puisque le chauffeur de ce véhicule, qui
6 transportait cette charge, a dit à qui la charge était destinée, et les
7 policiers auraient pu être membres de n'importe quel groupe ethnique,
8 puisque personne ne leur a dit ce qu'il y avait dans le véhicule. Je ne me
9 souviens pas de leur appartenance ethnique.
10 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] A qui les armes étaient-elles
11 destinées ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils ont dit qu'ils devaient transporter les
13 armes à Sarajevo. Le chauffeur a fait une déclaration. Puisqu'il s'agissait
14 de l'équipement militaire et que la police militaire a donc pris cet
15 équipement, ainsi que l'organe chargé de la Sécurité de la JNA, et
16 puisqu'ils se sont occupés de cette affaire puisque cela relevait de leur
17 compétence, c'est pour cela que le chauffeur leur a fait une déclaration à
18 eux, puisqu'il s'agissait de l'équipement militaire. Pour ce qui est des
19 policiers, ils se sont -- ils sont retournés dans leur poste de sécurité
20 publique de base.
21 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Cela m'est clair. Mais je ne
22 comprends toujours pas comment vous avez pu établir un lien entre ces
23 allégations, les allégations dont vous disposiez à l'époque et selon
24 lesquelles les Musulmans se seraient préparés de façon secrète pour former
25 les unités armées d'un côté, et de l'autre côté il y a eu le transport
26 d'armes qui est arrivé en Bosnie-Herzégovine. Donc il semble que vous ne
27 soyez pas tout à fait certain à qui ces armes étaient destinées.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai déjà dit qu'on a eu ajout d'informations
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1 qui ont été collectées à l'époque et transmises à Sarajevo. Parmi ces
2 informations, il y avait des informations disant quelles étaient les
3 formations qui étaient en train d'être créées, leur taille, et d'autres
4 informations concernant le transport des armes. On a eu des informations
5 qui ont été fournies ultérieurement par rapport à ces armes. Mais là, dans
6 ce cas-là, on a pu apprendre l'itinéraire du transport des armes.
7 Puisqu'il y a eu l'entretien avec le chauffeur du véhicule, et après la
8 saisie de tout cet équipement, ils nous ont informés ultérieurement que cet
9 équipement a été destiné pour -- à une unité à Sarajevo, et cette
10 information nous a été communiquée par l'armée.
11 Je dois -- je peux maintenant ajouter qu'à l'époque, on a reçu
12 l'information, et c'était à l'époque où la police fonctionnait toujours au
13 poste de contrôle à Brod, à Bosanski Brod, donc cette information disait
14 qu'un véhicule devait venir de la direction de Slavonski Brod. Mais pour ce
15 qui est de l'escorte de ce véhicule, on nous a dit que cela serait M.
16 Delimustafic. Lorsque ce véhicule à bord duquel se trouvait M. Delimustafic
17 est arrivé, les policiers n'ont osé procéder au contrôle du véhicule qui
18 était dans son escorte ni le véhicule à bord duquel il se trouvait, parce
19 qu'ils n'osaient pas du tout contrôler le ministre. Ils ont fait, par
20 rapport à cela, une note de service, et c'était tout.
21 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Aviez-vous des informations disant
22 que le côté opposé, à savoir les Serbes, étaient également -- essayaient
23 également de former leurs propres unités armées et peut-être organiser
24 l'arrivée des armes ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Les trois côtés s'armaient. Ça c'est un fait.
26 Mais le côté serbe -- du côté serbe, les Serbes répondaient en masse à la
27 mobilisation, à l'appel à la mobilisation de la JNA, et du fait, il n'y a
28 pas eu création d'unités de ce côté. Mais pour ce qui est de l'armement
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1 illégal ou obtenu -- les armes obtenues de façon illégale, ça c'est vrai,
2 et on recevait les informations dans ce sens-là.
3 Hier, j'ai parlé du fait que les gardes ont été organisés de tous les
4 côtés, et encore davantage à un stade ultérieur. Pour ce qui est des unités
5 paramilitaires, je dois répéter, encore une fois, que c'était
6 principalement les Serbes qui ont répondu à l'appel à la mobilisation et,
7 par conséquent, ils n'ont pas procédé à la création de leurs propres
8 unités, mis à part ces gardes villageois.
9 M. HANNIS : [interprétation] Je pense que nous devrions nous arrêter là. Et
10 je donne la parole à Me Zecevic. Merci, Monsieur le Témoin.
11 M. ZECEVIC : [interprétation] Merci.
12 Q. Monsieur Bjelosevic, le document 1D135, l'intercalaire 18. Mais avant
13 de voir ce document affiché, je vous ai déjà posé d'ailleurs cette question
14 que je vais maintenant reposer : Etiez-vous présent à la réunion du 11
15 février à Banja Luka ?
16 R. En 1992, oui.
17 Q. Ce document est le compte rendu de la réunion. Il se trouve derrière
18 l'intercalaire numéro 18. Regardez le document et dites-nous si vous pouvez
19 vous souvenir que les personnes énumérées dans l'introduction du document
20 étaient présentes à la réunion. Est-ce que vous-même vous étiez présent à
21 la réunion ? Pouvez-vous nous dire également de quoi on discutait à la
22 réunion et ce que vous avez dit à la réunion ?
23 R. Oui. Il s'agit des personnes qui, effectivement, étaient présentes à la
24 réunion. Moi aussi, j'ai assisté à cette réunion, et à cette réunion, on
25 discutait des problèmes liés au fonctionnement du MUP. J'aimerais que tout
26 soit tout à fait clair et puisque le système commençait à se dissoudre
27 pratiquement, la méfiance régnait dans la police, et la police fonctionnait
28 avec beaucoup de difficulté, ainsi que les policiers qui travaillaient sur
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1 le terrain et qui étaient membres de la police judiciaire, puisque les
2 citoyens n'avaient plus de confiance en la police et surtout les membres
3 d'un groupe ethnique se méfiaient des policiers qui appartenaient à l'autre
4 groupe ethnique. Si on ajoute les problèmes que j'ai déjà mentionnés, à
5 savoir le manque d'équipement au sein du service, et je vous ai déjà décrit
6 l'évolution de tout cela puisqu'on n'a pas reçu ce qui a été déjà en route,
7 donc cette livraison n'est pas arrivée, et la situation sur le terrain
8 était très difficile pour ce qui est de notre service.
9 Comme vous pouvez voir dans le document, les personnes présentes ont pris
10 la parole, moi aussi, et on peut voir que ce -- mes propos consignés dans
11 le compte rendu de la réunion. Mais presque toutes les personnes présentes
12 ont mis l'accent sur le problème consistant au mauvais fonctionnement ou le
13 non fonctionnement du MUP. Ils ont parlé du fait qu'il n'y avait pas de
14 réunion entre le ministre et les chefs des centres de service de Sécurité.
15 Ils ont parlé du problème concernant l'équipement arbitraire des postes de
16 sécurité publique sur le terrain ou de façon sélective. Après quoi, on est
17 arrivé à la conclusion selon il valait mieux organiser un autre service
18 dans le cadre de ce qui allait s'appeler le MUP serbe, puisque notre but
19 était d'assurer le fonctionnement de ce MUP, et que ce MUP assure c'est ce
20 qu'on peut voir d'ailleurs dans le contenu des discussions de certaines des
21 personnes qui ont pris la parole, donc d'assurer la sécurité, l'ordre
22 public, la paix et la sécurité des citoyens et ainsi que leurs biens.
23 Je souligne qu'il a fallu assurer la sécurité des citoyens puisqu'on
24 disait que si ce MUP devait être le MUP serbe, il ne devait pas être
25 arbitraire pour ce qui est de l'application des lois ou fonctionner de
26 façon discriminatoire.
27 Q. Monsieur Bjelosevic, aux pages 2 et 3 de la version du document
28 qui est la version en serbe, on voit vos propos consignés. Puisqu'il s'agit
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1 de la version abrégée, je ne sais pas si vous pouvez confirmer que vous
2 avez parlé de ce sujet ou bien que vous avez parlé d'autres sujets; est-ce
3 que vous pouvez nous éclairer là-dessus ?
4 R. C'est de ce que j'ai parlé essentiellement lors de cette réunion.
5 Q. Est-ce que vous vous rappelez, Monsieur Bjelosevic -- ou plutôt,
6 si des conclusions ont été faites à la fin de la réunion ?
7 R. Oui, et on les voit énumérer ici, dans le document même.
8 Q. Pouvez-vous répéter votre dernière réponse, puisque les interprètes ne
9 nous ont pas entendu.
10 R. Donc j'ai dit qu'on est arrivé à des conclusions qui ont été consignées
11 dans ce compte rendu qu'on voie afficher à l'écran.
12 Q. Est-ce que vous vous souvenez si l'une de ces conclusions portait sur
13 les points de vue qui ont été présentées le 11 février, lors de cette
14 réunion, devaient être envoyées au ministre Delimustafic pour qu'il soit au
15 courant de cela, et qu'il fallait établir un délai pour ce qui est du
16 ministère, pour que le ministère s'occupe des choses qui ont été
17 caractérisées comme des choses irrégulières ?
18 R. Oui.
19 Q. Est-ce que vous vous rappelez s'il y a eu à un moment donné une
20 discussion qui portait sur le fait qu'il fallait parler des conclusions,
21 des points de vue qui étaient présentés lors de la réunion du 11 février en
22 public, que l'opinion publique soit au courant de cela ?
23 R. Oui, il s'agissait d'une réunion dont le caractère était tout à fait
24 transparent, et l'opinion publique en a été informée.
25 Q. Après cette réunion, pouvez-vous nous dire si la situation sur le
26 territoire couvert par votre centre de service de Sécurité ainsi que les
27 rapports entre le ministère de l'Intérieur de la République socialiste de
28 Bosnie-Herzégovine a changé, pour ce qui est de leur de leur rapport avec
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1 le centre de service de Sécurité de Doboj ?
2 R. Non. La situation devenait de plus en plus compliquée. Pour ce qui est
3 de l'équipement matériel, je peux dire que rien n'a changé, exception faite
4 de dépêche envoyée avec les demandes; pour ce qui est de cet équipement,
5 mais l'équipement n'est jamais arrivé. On a continué à échanger des
6 dépêches et on a continué, et là, je peux être franc, les violations des
7 lois et si vous voulez de la constitution et d'autres actes légaux ont été
8 enfreints. Cela a continué.
9 Q. Je vais montrer maintenant le document, c'est l'intercalaire 23 du
10 document, 786D1, c'est le numéro du document. Il s'agit de la dépêche du 9
11 mars 1992. On voit la signature et ainsi on voit Andrija Bjelosevic,
12 dactylographié. Pouvez-vous nous dire si c'est votre dépêche et si vous
13 vous en souvenez ?
14 R. Oui, je m'en souviens, c'est la dépêche où il y a ma signature. A
15 l'époque, la situation est devenue dramatique. Il y a eu déjà des conflits
16 survenus à Bosanski Brod, à l'époque, c'était, me semble-t-il, du 3 au 4
17 mars. Il y a eu déjà des personnes blessées, et je voudrais soulignes qu'à
18 cette occasion-là, le poste de sécurité publique de Bosanski Brod a été
19 pris par les formations paramilitaires. Nous avons reçu plusieurs
20 informations à ce sujet, les informations sont arrivées au centre de
21 service de Sécurité de Doboj.
22 Selon ces informations, à l'hôtel Ada, à Bosanski Brod où se trouvait
23 cette unité, l'unité qui a été envoyée par le MUP, a été également
24 encerclée, désarmée au moment où les policiers se sont rendus compte du
25 fait que l'hôtel était en train d'être encerclé. Ils ont pris leurs armes,
26 leurs fusils, et ils ont voulu opposer une résistance, mais le chef du
27 poste de sécurité publique à l'époque c'était Zvonko Mertanovic [phon],
28 leur a dit de laisser les armes en disant, et je cite ses propos, Ce sont
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1 nos hommes. Lorsque les policiers ont laissé leurs armes, à l'hôtel, sont
2 entrés les hommes cagoulés, et les ont désarmés. Ils leur ont pris tout
3 leur équipement, et ils disposaient de gilets pare-balles, de dispositifs
4 de communication, des armes, tout cela leur a été pris. A la fin, leurs
5 pistolets leur ont été rendus et ils leur ont ordonné de retourner d'où ils
6 étaient venus.
7 Pour ce qui est de cette unité, elle a été commandée par Drago Gatisa
8 [phon], il était inspecteur de la police du centre de service de Sécurité
9 de Bihac. C'est donc alors qu'ils ont quitté Bosanski Brod. Dans la ville
10 même, le poste de sécurité publique a été pris, et beaucoup d'autres
11 positions-clés et bâtiments-clés qui ont été pris par les formations
12 paramilitaires de Slavonski Brod et du territoire de la municipalité de
13 Bosanski Brod.
14 De plus, je dois exprimer une de mes observations de l'époque : D'abord,
15 pour ce qui est de tous ces préparatifs puisqu'il s'agissait évidemment de
16 la reddition de l'unité en question et de la reddition de libérer du poste
17 de sécurité publique. Donc j'ajoute que c'était Avdo Hebib, qui dirigeait
18 toutes ces activités, qui était là-bas pendant une certaine période de
19 temps. Le MUP de la République socialiste de Bosnie-Herzégovine connaissait
20 des situations beaucoup moins difficiles lors desquelles il a engagé les
21 unités pour les unités spéciales, par exemple, à Focatrans lorsqu'il y
22 avait la grève. Mais là, dans cette situation, la situation en question,
23 puisque vous avez pu vous rendre compte du fait quelle était la situation,
24 cette Unité spéciale n'a pas été envoyée pour établir l'ordre qui était en
25 danger. J'ai souligné ici qu'il y avait possibilité de voir survenir des
26 conflits ethniques à grande échelle. C'est du reste pour cela que j'ai
27 proposé d'entrer en contact avec les représentants des instances militaires
28 pour procéder à la mise en place de forces conjointes, qui, à ce moment-là,
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1 pour sûr, auraient pu rétablir l'ordre.
2 Pourquoi des forces conjointes ? Si vous le permettez, je me propose
3 d'élaborer. J'ai déjà dit antérieurement que la population serbe, c'est-à-
4 dire les ressortissants du groupe ethnique serbe avaient répondu présents
5 aux appels sous les drapeaux de la JNA, et ils faisaient confiance à la
6 JNA. Les ressortissants des deux autres groupes ethniques en présence
7 prêtaient davantage une foi au MUP. C'est la raison pour laquelle j'ai
8 proposé de procéder à la mise en place de forces conjointes pour que ces
9 forces ensemble rétablissent l'ordre.
10 Sur le territoire de la municipalité de Doboj - ça n'a rien à voir avec la
11 dépêche en question, mais rien que pour illustrer la chose - sur le
12 territoire de Doboj donc, disais-je, suite à une décision prise par le
13 Conseil chargé de la Défense, il a été mis en place ce type d'effectifs
14 mixtes à des postes mixtes, et la situation, à ce moment-là, s'était avérée
15 être assez stable.
16 Q. Monsieur Bjelosevic, quelques petites explications ou quelques petits
17 éclaircissements, s'il vous plaît, référence faite à votre réponse. Je
18 demande à savoir si l'unité que le MUP de la République socialiste de
19 Bosnie-Herzégovine, au moment des événements survenus à Bosanski Brod,
20 avait-elle été déjà envoyée à Bosanski Brod.
21 R. Oui. Cette unité, que j'ai mentionnée et qui a été désarmée à l'hôtel
22 Sava, se trouvait donc là. Mais M. Hebib tout comme M. Mertanovic, qui
23 était chef de poste, de façon évidente et dans les notes de service et
24 déclarations recueillies de la bouche de policiers qui étaient là-bas, ont
25 fait savoir qu'ils ont confié le poste de sécurité publique aux
26 paramilitaires qui s'étaient trouvés là, ainsi que l'unité en question. En
27 terme pratique, ils n'ont fourni aucune espèce de résistance.
28 Q. Questions brèves seulement, deux questions brèves : Cette unité qui,
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1 j'imagine, était allée aidée le poste de sécurité publique de Bosanski
2 Brod, avait-elle été constituée par le MUP de la République socialiste de
3 Bosnie-Herzégovine ou pas ?
4 R. Oui. Avdo Hebib avait été le coordinateur chargé de la chose, chargé de
5 cette unité.
6 Q. Veuillez m'indiquer, si vous le savez : est-ce que cette unité était
7 multiethnique ? Ou -- enfin, comment se composait-elle cette unité ?
8 R. Oui, elle était à composition multiethnique, mais le pourcentage
9 m'échappe maintenant. Parce que cette unité ne se trouvait pas placée sous
10 mon commandement.
11 Q. Dernière petite question : Est-ce qu'en votre qualité de chef du CSB,
12 avez-vous été informé de l'envoi d'une telle unité par le MUP de la
13 République socialiste de Bosnie-Herzégovine vers le poste de sécurité
14 publique se trouvant sur votre territoire à vous ?
15 R. Je n'ai pas été informé par le MUP. Je l'ai appris une fois qu'ils sont
16 arrivés à Bosanski Brod, le centre de Sécurité publique de Brod m'a fait
17 savoir qu'ils étaient arrivés là-bas.
18 Q. Merci.
19 M. ZECEVIC : [interprétation] Je demanderais le versement au dossier de ce
20 document, si tant est que point d'objection de la part de l'Accusation.
21 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Versé au dossier et annoté.
22 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce 1D453, Messieurs
23 les Juges.
24 M. ZECEVIC : [interprétation]
25 Q. Monsieur Bjelosevic, pour illustrer la situation à Bosanski Brod, je me
26 propose de vous montrer le document à l'intercalaire 24. Il s'agit du
27 788D1. Il porte la date du 12 mars 1992. Il s'agit de la déclaration d'un
28 certain Duronjic Petar, un citoyen de Slavonski Brod, et la déclaration a
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1 été recueillie par le centre des services de Sécurité à Doboj. Penchez-vous
2 dessus et veuillez m'indiquer si vous savez de quoi il s'agit ?
3 R. J'ai connaissance de cette déclaration. Elle a été recueillie au centre
4 des services de Sécurité de Doboj. La déclaration a été recueillie par
5 l'inspecteur Branislav Petricevic.
6 Q. Un instant, je vous prie.
7 Dites-nous d'abord : qui était Petricevic, Branislav ? Inspecteur de
8 quoi ?
9 R. Inspecteur dans le secteur chargé de la lutte contre la criminalité.
10 Q. Un instant.
11 On voit sa signature et les signatures d'autres individus à l'autre
12 page, n'est-ce pas ?
13 R. Oui. Ça c'est un des documents et l'un des récits émanant d'un citoyen
14 daté de ces journées du 3 et 4 mars. En mars, les gens fuyaient Bosanski
15 Brod, ils se mettaient à l'abri parce qu'il y a eu une vague d'arrestations
16 de citoyens du groupe ethnique serbe et d'un certain nombre aussi
17 d'individus appartenant au groupe ethnique musulman, donc ceux qui
18 s'étaient déclarés être d'orientation pro-yougoslave. Je voudrais
19 mentionner un cas puisque je viens d'en parler. L'individu s'appelle
20 Djuheric [phon], Ismet. Il s'agit d'un homme dont la maison a été attaquée
21 ultérieurement - je ne me souviens plus de la date - et lui, avec son
22 épouse et sa fille, avaient résisté, se sont défendus. Par la suite, son
23 frère a été capturé, et toute cette famille a eu bon nombre de problèmes.
24 Je crois qu'il a réussi à s'en tirer en passant par la raffinerie,
25 puisqu'il habitait tout près.
26 En termes simples, les gens quittaient leurs maisons, leurs biens, leurs
27 postes de travail et se mettaient à l'abri. Ceux qui pouvaient se mettaient
28 à l'abri. Il est normal de les avoir vus fort inquiets, préoccupés,
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1 troublés. Ils réclamaient de l'aide; cependant, Bosanski Brod était déjà
2 bloquée par ces forces-là, et il s'agissait de formations paramilitaires,
3 du rassemblement de la Garde nationale, des HOS, d'unités locales variées,
4 et cetera.
5 Q. Quelques questions encore, Monsieur. Cet homme que vous avez mentionné,
6 Ismet Djukalic --
7 R. Djuhalic [comme interprété] -- Djukalic.
8 Q. C'est un Musulman ?
9 L'INTERPRÈTE : Correction : Djuhelic [comme interprété].
10 M. ZECEVIC : [interprétation]
11 Q. C'est un Musulman ?
12 R. Oui.
13 Q. D'après ce que vous en savez, qui s'est attaqué à sa maison, puisqu'il
14 a eu à se défendre en compagnie de sa famille ?
15 R. C'est justement ces formations paramilitaires du HOS.
16 Q. Veuillez tirer au clair ce que signifie HOS comme abréviation.
17 R. C'est une abréviation indiquant qu'il s'agit des forces armées croates.
18 Q. Merci. Vous avez dit, en mars 1992, que vous avez eu vent de cette
19 déclaration et que vous étiez au courant du cas de ce M. Duronjic
20 originaire de Bosanski Brod; oui ou non ?
21 R. Oui.
22 M. ZECEVIC : [interprétation] S'il n'y a pas d'objections, je demanderais à
23 ce que ce document soit versé au dossier.
24 [La Chambre de première instance se concerte]
25 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Nous avons certaines réserves pour ce
26 qui est de savoir de quelle utilité ceci risque de nous être à l'avenir.
27 Nous avons une déclaration au sujet de ces incidents.
28 M. ZECEVIC : [interprétation] Je comprends, Monsieur le Juge. Je comprends
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1 que ce n'est pas si important, mais le document illustre l'information et
2 confirme les propos du témoin. Mais si vous pensez que ce n'est pas
3 nécessaire --
4 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Mais nous avons sa déclaration.
5 M. ZECEVIC : [interprétation] Je comprends. Merci.
6 Mme KORNER : [interprétation] Permettez-moi de mentionner quelque chose :
7 Je ne sais pas jusqu'où ceci risque d'aller. Ce n'est pas des éléments de
8 preuve se rapportant à l'une quelconque des municipalités énoncées à l'acte
9 d'accusation. Je comprends que ceci est présenté pour les raisons avancées
10 par Me Zecevic et expliquées par lui, mais il me semble qu'il deviendrait
11 indispensable de procéder au contre-interrogatoire à des explorations de
12 sujets, parce que si l'interrogatoire au principal se poursuit ainsi, cela
13 nous fera aller dans des faits qui sont extérieurs à l'acte d'accusation.
14 Donc je ne comprends pas sur quelle base les Juges de la Chambre acceptent
15 ce type d'élément de preuve.
16 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Veuillez continuer, Maître Zecevic.
17 M. ZECEVIC : [interprétation] Merci.
18 Q. Je vous renvoie vers l'intercalaire 26. Il s'agit du 787D1. Ou plutôt,
19 nous allons sauter ce document pour gagner du temps et pour nous épargner
20 des objections nouvelles.
21 Prenez l'intercalaire 27, le 790D1 [phon], s'il vous plaît. Il s'agit d'une
22 dépêche datée du 16 mars 1992 adressée au MUP de la République socialiste
23 de Bosnie-Herzégovine. En bas, on voit tapé à la machine votre nom, et il y
24 a une signature. Alors est-ce que c'est votre dépêche à vous ? Est-ce que
25 vous en avez eu connaissance ? Est-ce que c'est vous qui en êtes l'auteur ?
26 Est-ce adressé au MUP ? A quoi cela se rapporte-t-il ?
27 R. Oui, c'est une dépêche que j'ai signée moi-même. La teneur est la
28 bonne, précisément celle-là. La situation sur le terrain se faisait ou
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1 devenait dramatique et c'est la raison pour laquelle je suis intervenu,
2 j'ai supplié pour qu'il y ait au plus vite mise en place d'effectifs
3 conjoints entre la police et l'armée afin de mettre un terme - je peux
4 servir du mot "de mettre un terme" à la guerre qui commençait et qui était
5 en train de faire rage.
6 [La Chambre de première instance se concerte]
7 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui, vous pouvez continuer, Maître
8 Zecevic.
9 M. ZECEVIC : [interprétation]
10 Q. Monsieur, veuillez nous dire ceci, le document en question, la dépêche
11 a été envoyée au MUP. Mais dites-nous : à quel MUP en Bosnie?
12 R. C'est adressé au cabinet du ministre; à l'administration de la Police;
13 à l'administration chargée de la Lutte contre la criminalité; et 05, me
14 semble-t-il, était le département de l'Analytique.
15 M. ZECEVIC : [interprétation] S'il n'y a pas d'objection, je demanderais le
16 versement au dossier de ce document.
17 Mme KORNER : [interprétation] Pas d'objection mais une question : De qui
18 voit-on l'écriture sur le document ? Qui a barré les choses ici ? Qui a
19 biffé ?
20 M. ZECEVIC : [interprétation]
21 Q. Est-ce que vous pouvez nous aider au sujet de ce qui a été rajouté à la
22 main ?
23 R. Ça, c'est mon écriture, parce que quand on m'a tapé la dépêche, et pour
24 me la faire signer, moi, j'ai rajouté ceci pour mettre l'accent sur la
25 nécessité d'accélérer au maximum les choses, pour empêcher qu'il y ait
26 aggravation suivie de la situation. C'est mon écriture, c'est moi qui l'ai
27 rajouté.
28 Mme KORNER : [interprétation] Excusez-moi, mais est-ce que ceci signifie
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1 que c'est vous qui avez biffé la ligne qui est barrée ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'ai barré cette ligne parce que j'ai
3 estimé que cette description était tout à fait dénuée de pertinence,
4 puisque la situation s'était compliquée sur le territoire entier. C'est moi
5 qui en étais l'auteur, c'est moi qui ai modifié, rajouté et signé ce
6 document.
7 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Ce sera versé au dossier avec une cote
8 qui lui sera attribuée.
9 M. ZECEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, juste une petite
10 correction. Au compte rendu, on a mal consigné le 65 ter. Il s'agit de la
11 pièce 790D1. Merci.
12 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce document devient la pièce à
13 conviction 1D454.
14 M. ZECEVIC : [interprétation]
15 Q. Monsieur Bjelosevic, nous avons un document qui est le 185D1. Il s'agit
16 du document à l'intercalaire 31. Il est question d'une dépêche datée du 31
17 mars 1992. C'est tapé à la machine, on voit votre nom de tapé, puis on voit
18 juste devant, "pour le chef du centre." Alors il y a une signature aussi,
19 c'est adressé seulement à certains postes de sécurité publique sur votre
20 territoire. Aussi vous demanderais-je de nous dire si vous avez eu vent de
21 ce document, si vous vous en souvenez et de nous apporter une explication à
22 cet effet?
23 R. Oui, je m'en souviens. C'est un document signé en mon nom par le chef du
24 département de la Police, Vojo Blagojevic. Je reconnais sa signature du
25 reste. Nous avions tiré cette conclusion à la réunion de ce matin-là, au
26 sujet de la nécessité de faire venir les commandants, et au sujet des
27 questions qui devaient être abordées à l'occasion de ladite réunion. Vous
28 avez fort bien remarqué le fait que la dépêche n'a pas été envoyée au poste
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1 de Sécurité publique de Bosanski Brod, parce que les liens avec eux avaient
2 déjà été interrompus, en m'exprimant de façon argotique, je dirais qu'ils
3 nous avaient déjà envoyé promenés.
4 Q. Merci. Est-ce que vous vous souvenez de ce qui a été évoqué à
5 l'occasion de cette réunion du 1er avril ?
6 R. Cette réunion a été présidée par le chef du département de la Police.
7 Il a été question là de la situation fort complexe et on a fait des
8 estimations, évaluations de ce que la police pourrait bien entreprendre
9 dans ce type d'environnement.
10 Q. La réunion a-t-elle eu lieu ?
11 R. Oui.
12 Q. Merci.
13 M. ZECEVIC : [interprétation] S'il n'y a pas d'objection, je demanderais à
14 ce que ce document soit aussi versé au dossier.
15 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Mais c'était une réunion du 1er avril.
16 Nous n'avons pas besoin du mémorandum interne où il est question du fait
17 que la réunion allait se tenir le 1er avril, ou avons-nous besoin de ceci,
18 Maître Zecevic ?
19 M. ZECEVIC : [interprétation] Le 1er -- peut-être le mieux serait-il de
20 demander au témoin d'enlever ses écouteurs.
21 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]
22 M. ZECEVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, le 1er avril, c'est une
23 date importante, parce que c'est la date de la création du ministère de
24 l'Intérieur serbe, et c'est la raison pour laquelle j'ai choisi cette date
25 concrète. Il s'agit du 1er avril 1992, et ils ont tenu une réunion à la date
26 du 1er avril 1992.
27 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Non, ma question ne se rapportait pas à
28 la réunion en tant que telle puisque ceci semble être pertinent. Ma
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1 question était plus étroitement ciblée sur le fait d'avoir besoin de verser
2 au dossier cette pièce, enfin ce bout de papier.
3 M. ZECEVIC : [interprétation] Moi, j'avais voulu que nous reflétions la
4 mémoire du témoin au sujet de la réunion. Il a été informé de la tenue de
5 la réunion, puisqu'il me semble que cela est important.
6 Mme KORNER : [interprétation] Nous -- enfin, nous apportons notre soutien à
7 la demande formulée cette fois-ci.
8 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Fort bien, ce sera versé au dossier et
9 il y aura une cote d'accordée.
10 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Pièce à conviction 1D455.
11 M. ZECEVIC : [interprétation] Merci.
12 Est-ce que vous m'entendez maintenant, Monsieur le Témoin ?
13 L'INTERPRÈTE : Maître Zecevic a parlé hors micro.
14 M. ZECEVIC : [interprétation]
15 Q. Vous m'entendez maintenant ?
16 R. Oui, je vous entends.
17 Q. Monsieur Bjelosevic, je me propose de vous montrer le document 796D1.
18 Il s'agit de l'intercalaire 32. Il s'agit d'une dépêche venant du MUP de la
19 République socialiste de Bosnie-Herzégovine. C'est daté du 6 avril 1992, en
20 signature, on voit ministre de l'intérieur, Alija Delimustafic. Est-ce que
21 vous vous souvenez de cette dépêche, et si oui, pouvez-vous nous expliquer
22 à quoi ceci se rapporte-il ?
23 R. Oui, je m'en souviens. Il me semble avoir dit précédemment que la
24 totalité des intervenants, donc par voie de conséquence les postes de
25 sécurité publique et les centres de Sécurité publique disposaient de plan
26 de défense pour un cas de guerre ou pour un cas de danger de guerre
27 imminent, tout comme des plannings pour situation d'urgence, circonstances
28 exceptionnelles et ainsi de suite. L'un des documents, qui était dans ce
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1 planning afférant aux situations exceptionnelles et dans les plannings
2 relatifs à la Défense, se rapportait aux mesures d'aptitude ou de
3 disponibilité. Alors ces mesures-là ont les avaient réparties en trois
4 échelons. Ceux-ci se trouvaient être prescrits par le Conseil exécutif
5 fédéral adoptés par ce dernier, et il y a eu un système de mise en place
6 pour ce qui est de la façon dont seraient transposées suivant les échelons
7 les mesures de mise en disponibilité.
8 Alors ce schéma se rapportait à toutes sortes de situations, et le deuxième
9 degré était relatif aux circonstances exceptionnelles. Le troisième degré
10 était celui qui se rapportait aux situations de guerre et au danger de
11 guerre imminent. Donc c'est l'échelon qui parlait de situation de guerre ou
12 de danger de guerre imminent.
13 La procédure était tout à fait clairement définie par les dispositions
14 fédérales et républicaines. Pour ce qui est de savoir qui donnerait les
15 ordres afférents à ces mesures, qui est-ce qui les transmettrait et de
16 quelle façon on les transmettrait, et qui est-ce qui était chargé de les
17 mettre en œuvre sur le terrain.
18 Q. Une petite clarification, je vous prie. En page 48, ligne 23, ici nous
19 avons de consigné "Conseil exécutif." Expliquez ce que vous aviez à
20 l'esprit, et qu'était ce Conseil exécutif à l'époque ?
21 R. Le Conseil exécutif fédéral c'était le gouvernement fédéral.
22 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Maître Zecevic, est-ce que nous avons,
23 ou est-ce que nous allons obtenir cet ordre dans notre librairie juridique
24 ou ailleurs ?
25 M. ZECEVIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Je ne pense pas
26 que nous l'ayons.
27 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Alors est-ce que c'est une question --
28 enfin, la question était celle de savoir si on l'avait ou si on allait
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1 l'avoir.
2 M. ZECEVIC : [interprétation] Je ne pense pas que nous l'ayons et je ne
3 pense pas que nous ayons disposé de cet ordre. Je crois avoir des documents
4 qui ont été envoyés par le MUP de la République socialiste de Bosnie-
5 Herzégovine aux différents centres de Sécurité publique, y compris ce
6 document.
7 M. LE JUGE HALL : [interprétation] La raison de la question c'était celle
8 d'indiquer que ce serait plus compréhensible si on avait l'ordre en
9 question et non pas seulement entendre les propos du témoin au sujet de ce
10 que c'était ordre avait constitué. C'était cela ma préoccupation.
11 M. ZECEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
12 ça c'est l'ordre donné par le ministre.
13 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui. Mais nous faisons référence au
14 premier paragraphe concernant l'ordre prévoyant les mesures de mise en
15 disponibilité. Vous avez posé des questions au témoin concernant les
16 différents échelons qu'il y avait de prévus, et c'est la raison pour
17 laquelle je pose la question.
18 M. ZECEVIC : [interprétation] Je vais garder ceci à l'esprit et je vais
19 demander à notre expert en matière de police de se pencher dessus.
20 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci.
21 M. ZECEVIC : [interprétation] C'est moi qui vous remercie.
22 Q. Alors est-ce que vous vouliez ajouter quelque chose, Monsieur
23 Bjelosevic, au sujet de ce document ?
24 R. Je ne pense pas avoir fini ma dernière phrase. Ces mesures au deuxième
25 échelon et au troisième échelon relevaient à part entière des compétences
26 de la présidence de la République socialiste fédérative de Yougoslavie pour
27 ce qui était du donneur d'ordre. Tous les autres suivant la filière étaient
28 là pour transmettre et exécuter. Personne d'autre en application des
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1 dispositions en vigueur n'avait le droit d'ordonner la prise de ces
2 mesures, exception faite de la présidence de la République socialiste
3 fédérative de Yougoslavie.
4 Q. Je vous remercie de vos explications.
5 M. ZECEVIC : [interprétation] S'il n'y a pas d'objection, je demande le
6 versement au dossier de ce document.
7 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Le document est admis et enregistré.
8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] En tant que pièce 1D456, Monsieur le
9 Président, Messieurs les Juges.
10 M. ZECEVIC : [interprétation]
11 Q. Monsieur Bjelosevic, je vous demanderais de vous pencher sur
12 l'intercalaire 33, document 795D1. C'est également une dépêche, elle date
13 du 6 avril 1992. On lit en tant que signataire, et ce, de façon
14 dactylographiée, les mots, ministre de l'intérieur, Alija Delimustafic.
15 Cette dépêche a été envoyée à toutes les directions des postes de sécurité
16 publique ainsi qu'à tous les chefs de ces directions. Est-ce que vous
17 connaissez ce document ? Est-ce que vous l'avez reçu ? Pourriez-vous nous
18 dire quelques mots à son sujet ?
19 R. Oui. Je connais cette dépêche. C'est un ordre qui a été envoyé à tous
20 les personnels d'active des différents organes du ministère de l'Intérieur,
21 ordre leur donnant instruction de se présenter immédiatement à leurs
22 postes, et d'ailleurs nous avons obtempéré à cet ordre. Je pense que nous
23 avons également informé les autorités du fait que nous avions complètement
24 appliqué ces consignes.
25 Q. Donc c'est une dépêche qui vient du MUP de la République socialiste de
26 Bosnie-Herzégovine. Du ministre, du ministre, n'est-ce pas ? En vertu de
27 cet ordre du 6 avril 1992, vous avez complètement appliqué ce que cet ordre
28 stipulait ?
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1 R. Oui. Nous en avons d'ailleurs informé les autorités.
2 M. ZECEVIC : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce
3 document s'il n'y a pas d'objection.
4 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Le document est admis et enregistré.
5 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il devient la pièce 1D457.
6 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zecevic, un instant, je vous
7 prie.
8 Monsieur Bjelosevic, si je vous ai bien compris, cet ordre que nous venons
9 de voir, l'ordre portant sur l'état d'alerte, n'aurait pas pu être émis par
10 le ministre Delimustafic, à votre avis; c'est bien cela ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai entendu l'interprète me dire "l'ordre
12 d'alerte," donc je ne comprends pas très bien de quoi vous parlez. Est-ce
13 que vous parlez de l'ordre donné aux différents personnels de se présenter
14 à leurs postes ? Ou est-ce que vous parlez des mesures prises pour
15 augmenter le niveau d'alerte, c'est-à-dire du document que nous avions vu
16 avant ?
17 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je parle du document relatif aux
18 mesures d'alerte.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Ah. Comme je l'ai dit, conformément aux
20 réglementations applicables en la matière, le ministre de l'intérieur ou le
21 gouvernement d'une quelconque république ou même la présidence d'une
22 quelconque république pouvait émettre tout ordre relatif à l'état d'alerte
23 à partir du 3e niveau ainsi que des ordres concernant certaines mesures
24 relevant du 2e niveau d'alerte ces deux responsabilités relevaient
25 exclusivement de la compétence du niveau fédéral de la présidence et du
26 président.
27 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] D'accord. Le document, que nous avons
28 eu sous les yeux, est un document qui rend compte aux différents postes de
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1 travail, et il concerne une mesure que le ministre avait compétence
2 d'émettre, n'est-ce pas ? Est-ce que c'est un ordre que le ministre pouvait
3 donner ? Oui. Vous avez obéi à cet ordre ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
5 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Est-ce que vous avez entièrement
6 exécuté l'ordre précédent ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
8 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Donc vous avez exécuté les deux
9 ordres ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Naturellement. Mais j'ai également
11 Souligné, auprès du ministre, que les règlements avaient été enfreints.
12 J'avais le devoir de le faire, bien que nous ayons totalement appliqué ses
13 ordres.
14 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.
15 M. ZECEVIC : [interprétation] Je vois l'heure, Monsieur le Président.
16 M. LE JUGE HALL : [interprétation] C'est l'heure de la pause. Nous
17 reprenons nos débats dans 20 minutes.
18 [Le témoin quitte la barre]
19 --- L'audience est suspendue à 12 heures 06.
20 --- L'audience est reprise à 12 heures 32.
21 Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, toutes mes excuses. Je
22 comprends que nous vous avons fait un peu attendre. Nous en sommes tout à
23 fait désolés. Nous étions en train de discuter de façon très animée des
24 événements survenus à Bosanski Brod.
25 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je vous remercie, Madame Korner.
26 M. ZECEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, une intervention au
27 sujet du compte rendu d'audience. Page 52, ligne 7, il est écrit que :
28 "…la présidence d'une république ne pouvait pas émettre un ordre au sujet
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1 de l'état d'alerte à partir du troisième degré, ou prendre des mesures au
2 deuxième niveau puisque c'était la compétence exclusive de la présidence et
3 du président au niveau fédéral."
4 Il est écrit "pouvait" alors qu'il faut lire "ne pouvait pas". Il faut
5 rajouter une négative dans cette phrase au compte rendu d'audience, page
6 52, ligne 7.
7 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je vous remercie.
8 [Le témoin vient à la barre]
9 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Vous pouvez vous asseoir, Monsieur le
10 Témoin.
11 Veuillez poursuivre, Maître Zecevic.
12 M. ZECEVIC : [interprétation] Je vous remercie.
13 Q. Monsieur Bjelosevic, eu égard au sujet que nous avions déjà abordé
14 avant la pause, je vous prierais de vous pencher sur l'intercalaire 42, qui
15 correspond au document 307D1. Toutes mes excuses, Monsieur, je vous ai
16 donné un faux numéro. En fait, le document dont nous avons besoin est le
17 document 186D1, qui correspond à l'intercalaire 34. Toutes mes excuses pour
18 cette erreur.
19 Il s'agit d'une dépêche datant du 6 avril 1992, donc du même jour que le
20 jour de réception par vous de l'ordre du ministre M. Delimustafic. Nous
21 voyons sur la présente dépêche, qui est adressée au MUP de la République
22 socialiste de Bosnie-Herzégovine ainsi qu'au MUP fédéral à titre
23 d'information, nous y voyons donc votre nom et votre signature, qui n'est
24 pas très lisible. Mais je vous prierais avant tout de nous dire si ce
25 document provient bien de votre personne et si vous pouvez bien le
26 commenter.
27 R. Oui, ce document provient de ma personne. C'est moi qui l'ai envoyé et
28 signé. Je considère qu'il est de mon devoir de vous dire que cet ordre a eu
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1 pour conséquence une infraction des règlements et que j'ai considéré de mon
2 devoir d'en informer les responsables concernés, car en ordonnant
3 l'application de ces mesures, le ministre a de facto décrété l'état de
4 guerre puisque l'une des mesures du 3e niveau stipulait de procéder à la
5 mobilisation générale et d'entamer les missions relatives à l'application
6 du plan de Défense. C'est bien, dans la pratique, la signification à donner
7 à ce texte. C'est la raison pour laquelle j'ai considéré indispensable de
8 faire ce que j'ai fait. Je connaissais les règlements. Je vous rappellerais
9 que j'avais, par le passé, travaillé au secrétariat à la Défense nationale
10 et que pendant quelques années, j'avais travaillé à la préparation de la
11 défense, donc je connaissais très bien ces questions et ces
12 réglementations. J'avais également servi en qualité de sous-secrétaire à la
13 Défense nationale, et je pense qu'il s'agissait là d'une infraction
14 flagrante aux réglementations et à la législation fédérale.
15 Ce document portait la mention "secret d'état," à l'époque. C'était
16 un document qui était adressé, entre autres, au MUP, et ce document
17 intitulé : "Ordre" avait une grande importance dans la pratique. Donc j'ai
18 simplement mis l'accent sur ce point.
19 Q. Votre dernière phrase, je crois qu'elle n'a pas été suffisamment
20 claire. Moi, je crois l'avoir comprise, mais je ne pense pas que les
21 interprètes l'ont comprise. Est-ce que vous vouliez dire que, par le passé,
22 vous aviez reçu du MUP de la République socialiste de Bosnie-Herzégovine un
23 document expliquant ce qu'il était autorisé d'ordonner en termes de mesures
24 relevant du 2e et du 2e degré d'état d'alerte ?
25 R. Oui, c'est précisément cela. Nous voyons figurer dans ce document un
26 numéro d'enregistrement pertinent.
27 Q. Donc vous êtes en train de parler de la dernière phrase du document que
28 nous voyons à l'écran en ce moment ?
Page 19542
1 R. Oui, c'est tout à fait cela. C'est à cet endroit que je fais référence
2 au document reçu précédemment. Nous lisons 08.147 et classification DT. Ces
3 cotes signifient que l'on parle de tout ce qui relève des préparatifs à la
4 défense. C'était le mode d'enregistrement des documents portant sur cette
5 question, et puis j'ai également cité la date d'expédition de ce document.
6 Q. Je vous remercie.
7 M. ZECEVIC : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce
8 document.
9 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Le document est admis et enregistré.
10 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le document est enregistré, Monsieur le
11 Président.
12 M. ZECEVIC : [interprétation] Peut-on répéter le numéro de la pièce à
13 conviction que constitue désormais ce document ?
14 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] 458, Monsieur le Président. 1D458.
15 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je vous remercie.
16 M. ZECEVIC : [interprétation]
17 Q. Le document suivant, Monsieur le Témoin, correspond à l'intercalaire
18 35. Il s'agit du document 187D1. C'est également une dépêche envoyée le
19 même jour que le document précédent, à savoir le 6 avril 1992, qui provient
20 de M. Bjelosevic, selon ce que l'on peut lire au niveau de la signature en
21 caractères dactylographiés. Donc ce document provient du chef du centre, et
22 nous voyons une signature manuscrite également. Pouvez-vous nous expliquer
23 ce qui est écrit dans cette dépêche, sur quoi elle porte, et si elle
24 provient bien de vous ? Est-ce que vous vous rappelez cette dépêche ?
25 R. Oui, je m'en souviens. Cette dépêche était en fait un ordre selon
26 lequel tous les personnels devaient rendre compte à leurs postes de
27 travail, et nous étions tenus de fournir les informations pertinentes dans
28 un délai déterminé. Nous voyons qu'il est indiqué ici que cette dépêche -
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1 et ce qu'elle ordonnait - a été exécutée. Vous le voyez écrit, dans ce
2 document, quatre membres du personnel sont en congé maladie et les autres
3 sont venus à leurs postes de travail, les consignées nécessaires ont été
4 données aux responsables, et cetera, et cetera.
5 Q. Je vous remercie.
6 M. ZECEVIC : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce
7 document.
8 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zecevic, est-ce que ce
9 document nous apporte quoi que ce soit d'autre que la connaissance du fait
10 que le témoin a exécuté cet ordre dont nous avons déjà parlé avant la pause
11 ? Il a déjà dit qu'il avait exécuté cet ordre. Ceci est une confirmation de
12 ce qui a été dit précédemment. Est-ce que nous avons vraiment besoin de ce
13 document ?
14 M. ZECEVIC : [interprétation] Eh bien, Monsieur le Juge, la théorie de
15 l'Accusation consiste à dire que dès lors que le MUP serbe a été créé, les
16 CSB et les personnels du MUP de la Republika Srpska ont désormais exécuté
17 uniquement les ordres venant de la Republika Srpska, alors que dans ce
18 document-ci, nous voyons de façon tout à fait claire, et ce, le jour même
19 de l'expédition de l'ordre provenant du ministère de la République
20 socialiste de Bosnie-Herzégovine et signé par M. Alija Delimustafic, nous
21 voyons très clairement que le CSB dont nous parlons et le chef de ce CSB
22 exécutent bien l'ordre donné par le MUP de la République socialiste de
23 Bosnie-Herzégovine et par le ministre, M. Delimustafic, et fourni des
24 informations relatives à l'exécution de cet ordre. Donc c'est la raison qui
25 me fait penser que ce document est pertinent. Il y a d'autres documents
26 également que j'ai l'intention de présenter qui confirment la position de
27 la Défense sur ce sujet. Mais le bureau du Procureur, si j'ai bien compris
28 sa position, défend une théorie différente en l'espèce.
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1 [La Chambre de première instance se concerte]
2 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Zecevic, il pourrait être
3 bon que vous demandiez à obtenir du témoin quelques renseignements
4 complémentaires au sujet de la structure qui avait cours après le 1er avril
5 car - et je parle en mon nom personnel en tout cas - ceci n'est pas tout à
6 fait clair. Je ne suis pas sûr de comprendre si ce document impliquait
7 l'exécution d'un ordre ou d'une instruction donnée par l'ancien MUP, si je
8 puis utiliser ce terme, étant donné la date limite que représente le 1er
9 avril, puisqu'au 1er avril, a été créé le MUP de la Republika Srpska, donc
10 ma question porte sur la période où il existait deux MUP, un MUP serbe et
11 un MUP de l'ancienne Bosnie-Herzégovine. Comment le témoin se situe-t-il
12 par rapport à ces deux MUP ?
13 M. ZECEVIC : [interprétation] C'était l'objet que je prévoyais d'assigner à
14 ma question suivante, Monsieur le Juge.
15 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Bien. Nous sommes sur la même
16 longueur d'ondes, par conséquent.
17 M. ZECEVIC : [interprétation] Oui. J'avais l'intention de poser cette
18 question mais, pour le moment, je demande le versement au dossier du
19 document que nous venons de discuter.
20 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Nous admettons ce document et
21 l'enregistrons en tant que pièce à conviction.
22 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] En tant que pièce 1D459.
23 M. ZECEVIC : [interprétation]
24 Q. Vous m'entendez, Monsieur Bjelosevic ?
25 R. Non. Ah, oui, maintenant tout va bien.
26 Q. Est-ce que vous m'entendez maintenant ?
27 R. Oui.
28 Q. Monsieur Bjelosevic, nous venons d'avoir sous les yeux deux ordres et
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1 deux mémos venant de vous en réponse à ces deux ordres du ministère du de
2 la République socialiste de Bosnie-Herzégovine. Je vous demande si, à
3 l'époque, vous étiez au courant du fait que le MUP de la Republika Srpska
4 dirigé par M. Mica Stanisic, à l'époque, avait été créé, le MUP de la
5 Republika Srpska de Bosnie-Herzégovine.
6 R. Oui.
7 Q. En dehors du fait que le MUP de la Republika Srpska existait, donc, à
8 ce moment-là, est-ce que vous avez respecté les ordres et les consignes
9 provenant du MUP de la République socialiste de Bosnie-Herzégovine ?
10 R. Oui.
11 Q. Je vous prierais de bien vouloir nous expliquer votre façon de
12 comprendre le fonctionnement de la situation à l'époque, époque où existait
13 d'une part le MUP de la Republika Srpska dirigé par Mico Stanisic, et
14 d'autre part, le MUP de la République socialiste de Bosnie-Herzégovine
15 dirigé par M. Alija Delimustafic.
16 R. Et bien, j'ai compris cela à la réunion de Banja Luka déjà, réunion qui
17 avait eu lieu en février. J'ai considéré que cette situation illustrait une
18 espèce de pression exercée sur le ministère de la République socialiste de
19 Bosnie-Herzégovine en vue d'obtenir une égalisation de traitement de tous
20 les centres et de tous les postes de police dans le but de les contraindre
21 à fonctionner dans le respect de la législation en vigueur. Parallèlement à
22 cela, les conditions étaient en train de se créer dans les régions où la
23 chose étaient possibles afin de mettre en place le cadre susceptible de
24 permettre un travail respectueux des lois, et les conditions nécessaires au
25 bon fonctionnement des services de police, des services de lutte contre la
26 criminalité, en vertu des lois, ainsi que de remettre dans la légalité tous
27 les responsables de la loi et de l'ordre, de la sécurité des personnes, de
28 la sécurité des biens, de la sécurité de manière générale, au sein du MUP
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1 serbe.
2 Q. Est-ce que vous saviez à l'époque que le MUP de la République
3 socialiste de Bosnie-Herzégovine conserverait certaines responsabilités,
4 certains pouvoirs, et si vous le saviez, est-ce que vous vous rappelez
5 quels étaient ces responsabilités et ces pouvoirs ?
6 R. Oui. Certaines responsabilités ou certains pouvoirs sont restés ceux du
7 MUP de la République socialiste de Bosnie-Herzégovine. Je ne saurais pas
8 les énumérer précisément ici aujourd'hui, mais c'est ainsi qu'avait été
9 mise en place toute l'infrastructure permettant un bon fonctionnement du
10 service. Mais comme vous pouvez le voir vous-même, ce système était de plus
11 en plus attaqué et en lieu et place de l'ordre et d'une hiérarchie
12 réglementaire, on voyait de plus en plus le règne de la volonté
13 individuelle, on voyait de l'anarchie, et les différents services étaient
14 de plus en plus traités différemment sur le terrain, si nous parlons du
15 mode d'organisation. J'ai constaté que de grandes quantités de matériel et
16 d'équipement technique étaient distribuées à d'autres centres alors que le
17 centre de Doboj ne recevait aucune des armes, aucun des postes radio qui
18 lui avaient été promis. Tout simplement, ces équipements ne nous sont
19 jamais parvenus.
20 Q. Monsieur Bjelosevic, est-ce que vous saviez, à l'époque, quel était le
21 principe de financement du MUP de la République socialiste de Bosnie-
22 Herzégovine et du MUP de la Republika Srpska de Bosnie-Herzégovine ?
23 R. Ce système de financement était centralisé. Ce que j'entends par le mot
24 "centralisé", c'est que les financements étaient distribués à partir du
25 siège du ministère de la République socialiste de Bosnie-Herzégovine.
26 Q. Vous voulez dire le ministère de la République socialiste de Bosnie-
27 Herzégovine qui siégeait à Sarajevo et qui était dirigé par le ministre, M.
28 Alija Delimustafic ?
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1 R. Oui, oui, oui. C'est tout à fait cela. Je crois que je l'ai dit. En
2 tout cas, c'est ce que je voulais dire.
3 Q. Est-ce qu'à ce moment-là, vous saviez quel était celui de ces deux MUP
4 qui était chargé de traiter les renseignements, et en particulier les
5 renseignements obtenus de façon électronique ?
6 R. C'était le MUP de Bosnie-Herzégovine à Sarajevo.
7 Q. Est-ce que vous saviez si les équipements techniques nécessaires pour
8 le bon fonctionnement des CSB, y compris donc les armes, relevaient de l'un
9 ou l'autre des deux MUP, et si oui, duquel ?
10 R. Ces équipements relevaient de la responsabilité du ministère de
11 Sarajevo. Je crois que je l'ai déjà dit. Je crois que j'ai déjà dit que
12 c'était ce ministère qui était responsable de la distribution de ces
13 éléments.
14 Q. Est-ce que vous savez lequel des deux MUP était responsable de la
15 formation ou de l'entraînement des membres du personnel ?
16 R. C'était le MUP de Bosnie-Herzégovine à Sarajevo, puisqu'il possédait un
17 centre spécialisé à cette fin qui se trouvait à Vraca, et je crois savoir
18 que des stages de formation y étaient organisés pour un certain nombre de
19 candidats, autrement dit des civils, qui devaient se former au métier de
20 policier grâce à un passage dans ce centre.
21 M. ZECEVIC : [interprétation] Puis-je poursuivre, Monsieur le Président ?
22 On vient de me dire que le "Livenote" ne fonctionnait plus.
23 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Voyons jusqu'où nous pouvons poursuivre.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je devrais enlever mes écouteurs ?
25 Mme KORNER : [interprétation] Ce n'est pas seulement que le "Livenote" ne
26 fonctionne plus, mais il est devenu impossible de surligner des lignes à
27 l'écran. Je vois que la Défense est d'accord avec moi. C'est le deuxième
28 jour que le problème se pose et je pense que nous devrions essayer
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1 d'obtenir que le LiveNote re-fonctionne correctement. Je veux dire on peut
2 poursuivre, bien sûr, c'est simplement un problème d'informatique.
3 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je vous en prie, veuillez poursuivre,
4 Maître Zecevic.
5 M. ZECEVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
6 Q. Monsieur Bjelosevic, penchons-nous à présent sur le document 1D257,
7 enregistré aux fins d'identification, qui correspond à l'intercalaire 36.
8 C'est une dépêche qui porte la date du 8 avril 1992. On voit qu'elle
9 concerne la dépêche du ministère de la Défense nationale de la République
10 socialiste de Bosnie-Herzégovine, en date du 5 avril 1992. Cette dépêche-ci
11 est adressée aux chefs des CSB, des SJB, et au secrétariat et elle est
12 signée par O. Jasarevic.
13 Pouvez-vous nous dire qui est ce O. Jasarevic dont on voit le nom au niveau
14 des signatures ? Pouvez-vous nous dire si vous avez été informé de
15 l'existence de cette dépêche, et si oui, sur quoi elle portait ?
16 R. Oui. Je connais cette dépêche --
17 M. ZECEVIC : [interprétation] Le document a disparu des écrans. Il s'agit
18 du document 1D257 enregistré aux fins d'identification, intercalaire 36.
19 C'était en général des problèmes caractéristiques du lundi matin, désormais
20 ils se posent y compris pendant la semaine.
21 Q. Je vous en prie, Monsieur Bjelosevic, maintenant vous pouvez répondre à
22 la question. Le système fonctionne de nouveau.
23 R. Je connais cette dépêche, qui provient du ministère de la Défense
24 chargé des préparatifs associés à la défense, et M. Jasarevic était un
25 homme qui travaillait dans ce bureau au siège du MUP à Sarajevo.
26 Cette dépêche nous donne un exemple flagrant de plus d'infraction commise
27 aux lois fondamentales et aux réglementations élémentaires qui régissaient
28 les affaires intérieures. Ce qu'on peut lire dans cette dépêche est
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1 absolument incompatible avec tous les règlements et toutes les dispositions
2 en vigueur à l'époque, puisqu'il est dit que les Unités de la Défense
3 territoriale devaient être subordonnées au poste de police. Ceci était
4 contraire à toutes les réglementations des républiques et de la Fédération.
5 Ce qui est encore plus flagrant ici, c'est que des volontaires peuvent être
6 versés dans les forces de police, aux termes des règlements de l'époque.
7 Donc pour que quelqu'un devienne membre du MUP, ce quelqu'un devait passer
8 par un certain nombre d'obstacles notamment s'il voulait être nommé
9 policier ou inspecteur. Il devrait donc subir un certain nombre de
10 vérifications de son passé, il devait avoir achever son service militaire
11 obligatoire, il devait avoir suivi un certain nombre de stages de formation
12 au métier de policier ou de réserviste. Il devait avoir régulièrement et, à
13 plusieurs reprises, suivi des stages de deux jours pour se préparer au
14 travail de policier. Apparemment au sein du MUP, on regroupait les
15 volontaires et les membres de la Défense territoriale ainsi qu'un certain
16 nombre de groupes paramilitaires même si cela n'est pas explicitement écrit
17 dans cette dépêche. Mais nous avons eu des exemples de cela par le passé,
18 fondamentalement il s'agissait ici de créer une nouvelle armée qui
19 visiblement était promise à participer à des combats.
20 Je me rappelle que peu après le début de l'apparition de ces volontaires
21 dans différents postes volontaires, ainsi que membres de la Défense
22 territoriale à Derventa et ailleurs car cela s'est sans doute passé
23 également dans d'autres postes de police mais, en tout cas, nous, les
24 rapports que nous recevions provenaient de Derventa. Donc quelques jours
25 après l'irruption de ces personnes dans le poste de police qu'ils ont
26 occupé, il s'agissait d'un poste de sécurité publique, après qu'ils ont
27 contrait les policiers d'active à quitter les lieux, or c'était un moment
28 où un certain nombre de demandes de passeports, de permis de conduire et
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1 d'immatriculation de véhicules étaient en cours, tous ces documents
2 officiels ont été perdus, peu de temps après. Certains registres
3 apparemment ont également été emportés ou coupés en deux. Autrement dit,
4 tout le système était en train de s'effondrer.
5 Q. Monsieur Bjelosevic, si je vous ai bien compris, vous avez reçu ce
6 document en avril 1992 ?
7 R. Oui.
8 Q. Ce document était envoyé par M. Jasarevic depuis le siège de Sarajevo,
9 c'est-à-dire depuis le bureau central du MUP de la République socialise de
10 Bosnie-Herzégovine ?
11 R. Oui.
12 M. ZECEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je propose que l'on
13 enlève la mention enregistré aux fins d'identification de ce document.
14 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui. Ce document sera versé au dossier
15 en tant que pièce à conviction, sans cette mention MFI.
16 M. ZECEVIC : [interprétation] Il s'agit du document 1D257.
17 Q. Monsieur Bjelosevic, regardez maintenant le document 188D1,
18 l'intercalaire 37. Il s'agit de la dépêche du 10 avril 1992. La signature
19 est dactylographiée, chef du centre, Andrija Bjelosevic. On voit une
20 signature et une mention à la deuxième page. Le document a été envoyé au
21 MUP de la République socialiste de Bosnie-Herzégovine, en mentionnant votre
22 dépêche du 8 avril 1992, donc c'était le document qu'on a déjà vu juste
23 avant l'affichage de ce nouveau document.
24 Est-ce qu'on peut afficher la deuxième page, pour que vous puissiez nous
25 dire à qui appartient la signature y figurant et pour que vous nous donniez
26 vos commentaires là-dessus ?
27 R. Il s'agit de la réponse à la dépêche que nous avons vue avant, et qui a
28 été envoyée par le MUP, et qu'on pouvait y voir. Il s'agit des informations
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1 concernant le nombre d'employés, quel était le niveau de complètement.
2 Q. Pouvez-vous commenter d'abord la signature qui figure sur cette page du
3 document ? Après quoi, on va parler du contenu du document.
4 R. Je pense qu'il s'agit de la signature du chef de la police -- ou
5 plutôt, de Babic qui s'occupait des préparatifs pour la Défense mais, en
6 tout cas, l'une des deux personnes de Doboj.
7 Q. Du département de la Police, du centre de service de Sécurité de Doboj
8 ?
9 R. Oui. Puisque Vojo Blagojevic et Krsto Babic avaient des signatures
10 similaires et c'est pour cela que je ne peux pas être certain pour ce qui
11 est de dire lequel des deux a signé ce document.
12 Q. Revenons à la première page pour que vous nous donniez vos commentaires
13 à propos de ce document.
14 R. Dans cette réponse, on voit les informations concernant les personnes
15 qui ont répondu à l'appel. Ensuite on voit quel était l'équipement
16 nécessaire pour que tout cela pouvait fonctionner. Ensuite vous voyez le
17 nombre de pistolets qui sont demandés. La munition pour les pistolets, les
18 masques de protection, les gilets pare-balles, les véhicules, les postes
19 radio, et cetera, et là, vous pouvez voir dans ce document que l'équipement
20 n'est pas arrivé au centre de service de Sécurité de Doboj ainsi qu'au
21 poste de sécurité publique de Doboj puisque cela a été délivré de façon
22 sélective. On vous ordonne que vous vous occupiez de la mobilisation, du
23 personnel, mais on ne nous envoie pas l'équipement nécessaire.
24 A la deuxième page, on voit la continuation, à savoir pour ce qui est de
25 l'équipement nécessaire pour ce qui est du personnel qui n'est pas en
26 uniforme.
27 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que cette dépêche a été envoyée au MUP de la
28 République socialiste de Bosnie-Herzégovine selon votre ordre ou selon
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1 votre autorisation ?
2 R. Oui. C'est le lendemain matin qu'on s'est mis d'accord pour que la
3 réponse soit envoyée au MUP à Sarajevo.
4 Q. Monsieur le Témoin, tout à l'heure en commentant l'ordre que vous avez
5 reçu d'Osman Jasarevic, vous nous avez dit qu'il s'agissait d'un exemple
6 flagrant de violation des dispositions légales en vigueur à l'époque, et
7 vous avez mentionné la resubordination des Unités de la Défense
8 territoriale ainsi que des volontaires. Dites-moi : quelle était votre
9 opinion pour ce qui est de cette partie de l'ordre qui, selon vous, c'est
10 ce qu'on a déjà entendu, était un exemple flagrant de la violation des lois
11 ?
12 R. Nous, à Doboj, nous ne représentions -- nous nous donc faisons pas
13 resubordonner les Unités de la TO à la police et nous ne recevions pas non
14 plus de volontaire. Nous avons continué à fonctionner avec nos effectifs
15 réguliers et nous avons également mobilisé les effectifs de réserve qui se
16 trouvaient enregistrés déjà. Le personnel de ces effectifs de réserve ont
17 bénéficié d'une formation et avaient également ces affectations en temps de
18 guerre.
19 Q. Est-ce que c'est votre démarche que vous venez de décrire était en
20 conformité avec les dispositions légales en vigueur à l'époque ?
21 R. Oui. C'était tout à fait conforme aux dispositions légales et à
22 d'autres actes régissant d'autres domaines qui étaient déjà régi de façon
23 générale par les lois.
24 Q. Est-ce que je vous ai bien compris, et si j'ai tort, dites-le-moi, s'il
25 vous plaît. Vous, pour ce qui est de l'ordre qu'on a vu tout à l'heure,
26 vous l'avez mis en œuvre en partie, n'est-ce pas ?
27 R. Oui, en partie. Mais pour ce qui est de la partie de cet ordre où il
28 était évident que certaines dispositions légales ont été violées, cette
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1 partie je ne l'ai pas exécutée.
2 M. ZECEVIC : [interprétation] S'il n'y a pas d'objection, je propose que ce
3 document soit versé au dossier.
4 Mme KORNER : [interprétation] J'ai une question à poser pour ce qui est de
5 la traduction en anglais où il est dit que "cela a été envoyé à la
6 République serbe."
7 M. ZECEVIC : [interprétation] Je vois cela, et je vous remercie de cette
8 remarque, Madame Korner. Mais il y est comme suit : "RSBIH," cela veut dire
9 la République socialiste de Bosnie-Herzégovine. Et lorsqu'on regarde le
10 document 1D257 on peut clairement voir qu'il s'agit de la réponse qui a été
11 envoyée à l'ordre, et parce que les numéros sont les mêmes.
12 Mme KORNER : [interprétation] J'ai entendu le témoignage du témoin. Je n'ai
13 pas voulu dire que je conteste cela. J'ai voulu tout simplement dire que la
14 traduction fournie est erronée et cela peut enduire en erreur.
15 M. ZECEVIC : [interprétation] Ce n'est pas la traduction que nous avons
16 obtenue. C'est la traduction fournie par le service de Traduction et nous
17 avons renvoyé la traduction pour qu'elle soit révisée puisqu'il semble
18 qu'il s'agisse d'une erreur dans la traduction.
19 [La Chambre de première instance se concerte]
20 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Donc ce document obtiendra un numéro aux
21 fins d'identification en attendant la traduction corrigée de la part du
22 service de Traduction d'interprétation.
23 M. ZECEVIC : [interprétation] Merci.
24 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Cela sera 1D459 aux fins
25 d'identification.
26 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Cela devrait être plutôt 60.
27 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Oui, 60. 460 et non 459.
28 M. ZECEVIC : [interprétation] Donc le document 188D1 est maintenant pièce à
Page 19554
1 conviction portant la cote 1D460 aux fins d'identification.
2 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Merci.
3 M. ZECEVIC : [interprétation] Merci.
4 Q. Monsieur Bjelosevic, regardez le document 307D1, l'intercalaire 42. Je
5 pense que, dans votre réponse précédente, ou dans l'une de vos réponses
6 précédentes, en tout cas, vous avez parlé de la situation prévalant à
7 Derventa. Il s'agit de la dépêche du poste de sécurité publique de Derventa
8 portant un numéro du 10 avril 1992, qui a été envoyée au MUP de la
9 République socialiste de Bosnie-Herzégovine, ainsi qu'au centre de service
10 de Sécurité de Doboj et est signée. On voit la signature dactylographiée
11 d'Ivan Duspara. Pouvez-vous nous dire davantage à propos de ce document et
12 nous fournir vos commentaires ?
13 R. Je me souviens de la dépêche qui a été envoyé par le poste de sécurité
14 publique de Derventa, envoyé par le chef de ce poste, M. Ivan Duspara, et
15 signé par lui, où il demande s'il fallait délivrer des papiers d'identité
16 officiels aux effectifs de réserve de la police puisque, dans les postes de
17 sécurité publique, pour ce qui est des effectifs de réserve de la police,
18 des papiers d'identité vierges existaient en nombre égal au nombre de
19 membres des effectifs de ce poste, mais c'était vierge. Il n'y avait pas
20 d'information concernant les données personnelles, il n'y avait pas non
21 plus de photographies des membres de ces effectifs. Il nous a posé la
22 question pour savoir ce qu'il allait faire par rapport à cela. Bon, je vous
23 ai bien compris lorsque vous avez parlé de liens de ces documents. Par
24 rapport à cela, j'ai dit que le poste de sécurité publique était occupé et
25 c'est à cette époque que beaucoup de passeports, de papiers d'identité, de
26 permis de conduire ont été pris.
27 Q. Nous allons en parler dans quelques instants. Monsieur, pouvez-vous
28 nous dire par rapport à ce qu'on voit sur ce document, donc MUP de SRBiH,
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1 01/04, Doboj, de quel MUP il s'agit ici.
2 R. Du ministère de l'Intérieur de la République socialiste de Bosnie-
3 Herzégovine. Cela nous a été envoyé également, mais nous ne pouvions pas en
4 décider puisque cela relevait de la compétence du ministère, et on pense
5 ici au MUP de la Bosnie-Herzégovine, dont le siège se trouvait à Sarajevo.
6 Q. Donc SRBiH veut dire quoi ?
7 R. La République socialiste de Bosnie-Herzégovine.
8 Q. Je vous remercie.
9 M. ZECEVIC : [interprétation] S'il n'y a pas d'objections, je proposerais
10 que ce document soit versé au dossier.
11 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Est-ce que je peux demander, Maître
12 Zecevic, pourquoi vous voulez que ce document soit versé au dossier ?
13 M. ZECEVIC : [interprétation] Bon, Monsieur le Président, il y a eu des
14 documents qui ont été présentés concernant les abus de ces papiers
15 d'identité officiels pendant la présentation des moyens à charge du bureau
16 du Procureur, et je vais en parler avec ce témoin plus tard. Mais j'ai
17 voulu être prudent, et c'est pour cela que j'ai proposé que ce document
18 soit versé au dossier, de le présenter à ce document pour expliquer comment
19 il est arrivé que les gens étaient en mesure d'utiliser ces papiers
20 d'identité des personnels du MUP sans avoir eu l'autorisation de le faire.
21 C'est pour cela que j'ai demandé que ce document soit versé au dossier. Je
22 crois que la Chambre comprendra pourquoi j'ai fait lorsque je parlerai de
23 ce sujet.
24 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Derventa ne figure pas à l'acte
25 d'accusation, Maître Zecevic.
26 M. ZECEVIC : [interprétation] Cela est vrai, Messieurs les Juges, mais les
27 cartes d'identité officielles n'étaient pas délivrées avec l'indication de
28 la municipalité. Il s'agissait de pièces d'identité officielles du MUP de
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1 la République socialiste de Bosnie-Herzégovine qui étaient utilisées sur le
2 territoire entier.
3 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Mais ça c'est une question posée par
4 le chef de Derventa au sujet de savoir s'il faudrait ou pas faire ceci ou
5 cela. Alors de quoi dépend ceci ? La réponse pourrait peut-être se
6 rapporter au territoire entier. Mais je ne sais pas si ceci vous apporte
7 une réponse pour ce qui est de la dépêche en question.
8 M. ZECEVIC : [interprétation] Oui, je comprends. Je comprends. Je m'excuse,
9 j'ai été quelque peu dans la confusion. Désolé.
10 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci. Bon, mais j'ai une question.
11 Remettez votre casque.
12 Monsieur Bjelosevic, dans cette dépêche du MUP, et dans d'autres dépêches,
13 ce MUP de la République socialiste de Bosnie-Herzégovine, ça veut dire le
14 SRBiH, ça veut dire République socialiste de Bosnie-Herzégovine, me semble-
15 t-il. Mais à l'époque, on avait déjà proclamé l'existence d'une république
16 serbe de Bosnie-Herzégovine; est-ce bien exact ? Est-ce que vous m'entendez
17 ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne reçois pas d'interprétation. Je ne sais
19 pas ce que vous êtes en train de dire. Désolé.
20 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Est-ce que maintenant ça va mieux ?
21 Est-ce que vous entendez quelque chose ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'entends pas l'interprète. Est-ce qu'on
23 entend ?
24 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Peut-être que mon micro n'a pas été
25 branché. Peut-être que c'est la raison. Est-ce que maintenant vous entendez
26 l'interprétation ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Répétez, s'il vous plaît.
28 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bon, ce n'était pas mon micro qui
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1 était en cause. Bon, ça a l'air d'aller.
2 Alors ma question --
3 LE TÉMOIN : [interprétation] J'entends maintenant.
4 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Alors, Monsieur Bjelosevic, ma
5 question était la suivante : Dans cette dépêche, l'abréviation SRBiH, de
6 votre explication, ça se rapporte à la République socialiste de Bosnie-
7 Herzégovine. Mais à l'époque, il y avait déjà une République serbe de
8 Bosnie-Herzégovine de proclamée. Elle existait, n'est-ce pas ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
10 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bon. Donc si vous adressiez une
11 dépêche au MUP de la République serbe de Bosnie-Herzégovine, donc de cette
12 république-là, comment cela se présenterait-il au niveau de la dépêche ? Au
13 lieu d'entendre la SRBiH, qu'aurait-on comme abréviation, pour que nous
14 puissions faire la distinction ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] L'abréviation était - et aussi aujourd'hui -
16 c'était République socialiste de Bosnie-Herzégovine. C'était quelque chose
17 de bien installé. Ultérieurement, lorsque nous nous adressions au MUP de la
18 République serbe --
19 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, allez-y.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] -- alors on écrivait la chose en continuité,
21 c'est-à-dire on mettait les mots, pas l'abréviation, les mots entiers.
22 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Fort bien. Merci.
23 M. ZECEVIC : [interprétation] Je peux y aller ? Merci.
24 Q. Alors, Monsieur Bjelosevic, je vous prie d'ouvrir le document à
25 l'intercalaire 44. Il s'agit du 189D1, et c'est la raison pour laquelle
26 j'ai été dans la confusion pour ce qui est du document antérieur. Mais je
27 suis un peu fatigué moi-même et je m'excuse auprès de tout un chacun. C'est
28 un document du 16 avril 1992. Il a été envoyé au MUP de la République de
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1 Bosnie-Herzégovine au service opérationnel. Je ne sais pas s'il a été
2 envoyé au CSB de Doboj. Alors est-ce que vous pouvez nous le dire -- est-ce
3 que vous en avez eu connaissance ?
4 R. Oui, c'est ce que j'ai dit tout à l'heure et c'est de cela que j'ai
5 parlé. L'agent opérationnel de permanence a reçu l'information de la part
6 du commandant adjoint du poste de police de Derventa. Comme il l'a dit dans
7 l'objet, il évoque l'occupation du poste par des personnes armées qui
8 s'étaient présentées comme étant des membres de la Défense territoriale et
9 de la défense de la ville. Tous les employés, comme vous pouvez le voir
10 ici, ont quitté les lieux. On leur a donné instruction de quitter le
11 bâtiment. Alors ces gens-là ont occupé l'immeuble, ils ont fouillé ce que
12 bon leur semblait et ont récupéré ce qui les intéressait.
13 Il me semble que c'est la signature de l'agent de permanence
14 opérationnel, Lisinovic Mirza. Si vous me le permettez, puisque je viens de
15 le mentionner cet homme, il était commandant de ce poste de police à Doboj.
16 C'était un très bon commandant de poste de police. Mais, en 1991, il a été
17 révoqué de ses fonctions, parce que cela avait été exigé par le Parti du
18 SDA. D'après eux, ce n'était pas quelqu'un de suffisamment bon pour rester.
19 Je dois dire que c'était un bon professionnel, et que c'est la raison pour
20 laquelle j'ai été la personne à avoir demandé son affectation aux
21 permanences opérationnelles. Je crois que c'est sa signature ici donc.
22 Légalement, je l'ai eu à le connaître en long et large. C'est quelque
23 chose de notoirement connu de tout un chacun.
24 M. ZECEVIC : [interprétation] S'il n'y a pas d'objection, je demanderais le
25 versement au dossier de ce document.
26 Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, je crois qu'à la
27 lumière de ce qui vient d'être fait comme commentaire au sujet de Derventa,
28 j'aimerais, avant la fin de la journée d'aujourd'hui, que nous en parlions,
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1 étant donné que d'autres documents ont été versés au dossier. Je n'ai pas
2 d'objection, mais j'ai besoin de certains éclaircissements. Je demanderais
3 à Me Zecevic de me ménager cinq minutes avant que nous ne levions
4 l'audience.
5 [La Chambre de première instance se concerte]
6 M. LE JUGE HALL : [interprétation] S'agissant de ceci, Maître Zecevic,
7 c'est la question que nous avons posée il y a quelques instants. Pourquoi
8 sommes-nous en train de nous occuper de Derventa, et d'un incident au sujet
9 duquel le témoin nous a dit, indiqué que c'était quelque chose de
10 notoirement connu de tout un chacun ? Nous avons des témoignages viva voce,
11 et en quoi cela est-il pertinent ?
12 M. ZECEVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, nous avons besoin de ces
13 documents, parce que le document que nous avons utilisé est celui du 16
14 avril, qui est un document qui envoyé par le CSB de Doboj vers le MUP de la
15 République de Bosnie-Herzégovine à Sarajevo. Ce qui démontre qu'il y a une
16 continuité de présentation de rapport de la part du CSB de Doboj vers le
17 MUP de Sarajevo, nonobstant le fait que le CSB de Doboj faisait partie
18 intégrante du MUP de la Republika Srpska.
19 [La Chambre de première instance se concerte]
20 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Mais même si tel était le cas, Maître
21 Zecevic, si j'ai bien compris le fondement qui vous pousse à demander le
22 versement de ce document, le CSB de Doboj envoie, de façon continue, des
23 renseignements à Sarajevo, et parmi ces renseignements, se trouvent des
24 éléments d'information qui n'ont aucun rapport avec l'une quelconque des
25 municipalités évoquées à l'acte d'accusation. Alors en quoi est-ce que ceci
26 peut aider la Chambre ? En quoi est-ce que ceci apporte quoi que ce soit
27 aux Juges de la Chambre eu égard aux éléments qui les concerne ? Parce
28 qu'inévitablement, il s'agira de documents supplémentaires qui s'ajoutaient
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1 aux dépêches habituelles.
2 M. ZECEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, croyez-moi, j'aimerais
3 pouvoir produire les documents datant de cette époque qui existent et qui
4 ne concernent que les municipalités figurant dans l'acte d'accusation. Bien
5 entendu, je ne penserais même pas à utiliser des documents relatifs à
6 d'autres municipalités dans ces conditions. Mais, malheureusement, c'est le
7 seul document en notre possession qui corrobore ou confirme notre théorie
8 de l'espèce, qui est contesté par la partie adverse. C'est la raison pour
9 laquelle nous proposons le versement au dossier de ce document, et c'est la
10 seule raison.
11 [La Chambre de première instance se concerte]
12 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Puisque c'est le dernier document, nous
13 l'admettons, Maître Zecevic, et je demande qu'il soit enregistré.
14 M. ZECEVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
15 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce document devient la pièce 1D161,
16 Monsieur le Président, Messieurs les Juges.
17 M. ZECEVIC : [interprétation] Je pense qu'il devrait s'agir du 461.
18 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Toutes mes excuses. Je croyais avoir
19 dit 4 et non 1, mais le bon numéro de pièce c'est le numéro 461. Je vous
20 remercie.
21 M. ZECEVIC : [interprétation]
22 Q. Monsieur Bjelosevic, nous en sommes arrivés à la mi-avril, voire même à
23 la fin du mois d'avril, n'est-ce pas ? Pourriez-vous nous expliquer quelle
24 était la situation qui régnait à ce moment-là sur le territoire de
25 responsabilité du centre de Sécurité publique de Doboj ? Est-ce que, dans
26 les postes avec lesquels vous aviez des contacts, la hiérarchie
27 fonctionnait ? Est-ce que les procédures fondamentales du MUP étaient
28 appliquées ? Pourriez-vous nous décrire tout cela ?
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1 R. A la mi-avril, la guerre durait déjà depuis pas mal de temps. Je
2 voudrais faire partir mon raisonnement de Bosanski Brod encore une fois,
3 puisque c'est de là que tout est parti. Vous vous rappellerez que le 1er
4 septembre, le premier affrontement armé ou incident armé s'était déjà
5 produit là-bas, septembre 1991. Le deuxième incident datant des 3 et 4 mars
6 1992, et puis il y a eu des combats qui se sont intensifiés, et aggravés au
7 point que ce lieu a fini par constituer un véritable front. Dans la nuit du
8 26 au 27 mars, je peux vous dire si vous ne le saviez pas déjà, qu'une très
9 grave attaque s'est produite contre les habitants du village de Sijekovac,
10 dont beaucoup sont morts dans des conditions particulièrement violentes.
11 Les membres d'un groupe ont pénétré dans le village --
12 R. Monsieur, je sais que tous ces événements sont transparents pour vous,
13 vous les connaissez parfaitement bien. Mais lorsque vous parlez de civils,
14 il importe que pour nous, vous précisiez de quelles unités paramilitaires
15 vous parlez, et de quels civils exactement.
16 R. Je serai plus précis. Les formations paramilitaires présentes à
17 Bosanski Brod étaient venues de Croatie. Il s'agissait d'Unités du HOS, qui
18 avaient été créées par le HDZ, et d'unités également qui étaient commandées
19 par un certain Cjusevic [phon], Nijaz, surnommé Medo. On y trouvait des
20 membres qui étaient d'appartenance ethnique musulmane.
21 Avec votre autorisation, Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
22 j'aimerais donner quelques détails complémentaires sur cet événement, ainsi
23 que sur les actions des membres du MUP de Bosnie-Herzégovine, en réaction à
24 ces événements. Chaque fois que se produit un événement de cette nature, je
25 juge nécessaire de souligner que les instances les plus élevées dans la
26 hiérarchie, à savoir la présidence et les ministres se trouvent contraints
27 de s'occuper de ces événements, car après tout, ces événements représentent
28 des actes d'agression de la part de la République de Croatie, qui étaient
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1 déjà connus sur le plan international. Il s'agissait donc bien d'un acte
2 d'agression de la part de la République de Croatie contre la Bosnie-
3 Herzégovine.
4 Donc suite à l'événement dont je viens de vous parler, des membres de
5 la présidence de Bosnie-Herzégovine sont venus nous rendre visite. Il
6 s'agissait de Mme Biljana Plavsic, de M. Franjo Boras et de M. Fikret
7 Abdic. Ils sont venus à Bosanski Brod, puis sont repartis, et ensuite une
8 rencontre a eu lieu avec eux dans la caserne de Derventa. J'ai assisté à
9 cette rencontre. M. Boras a gardé le silence pendant toute la réunion, il
10 n'a tout simplement rien dit. Je suppose qu'il était choqué par ce qu'il
11 venait de voir. Mais, en tant que membre de la présidence, je crois qu'il
12 aurait dû avoir la capacité de mettre des mots sur ce qui s'était passé à
13 Sijekovac et à Bosanski Brod. Quant aux deux autres membres de la
14 présidence ils ont parlé un peu plus des conditions dans lesquelles s'était
15 effectué leur trajet aller-retour de ce qu'ils avaient vu à cette occasion
16 et de l'événement en tant que tel.
17 J'ai pris la liberté à l'époque de prendre la parole pour leur dire que ce
18 qui s'était passé avait un nom et pouvait se définir en terme précis, qu'il
19 s'agissait en réalité d'un acte d'agression de la Croatie contre la Bosnie-
20 Herzégovine et que cette agression avait bénéficié de l'aide d'unités
21 paramilitaires locales.
22 Les chaînes de télévision UTel, qui étaient des chaînes yougoslaves,
23 ont diffusé quelques images de ce qui s'était passé là, ce qui représentait
24 un spectacle assez insoutenable. J'ai dit aux membres de la présidence que
25 leur travail consistait à parler de cela et que ce n'était pas à moi que
26 revenait cette tâche. Je leur ai dit, et je pense que l'Etat aurait dû
27 réagir, d'une façon beaucoup plus déterminée et plus ferme au sujet de tout
28 cela, et qu'avec la JNA tout aurait dû être fait pour stabiliser la région
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1 et empêcher que se poursuivent les fusions de sang, empêcher les
2 destructions, les expulsions et tout ce qui s'est passé par la suite. Les
3 représentant de la présidence sont restés sur place un peu de temps et puis
4 ils sont repartis.
5 Ensuite au début du mois d'avril, la guerre s'est intensifiée. Peu de temps
6 après, Derventa également a été occupée en dehors de la caserne de la JNA
7 et de quelques villages qui étaient majoritairement peuplés par les Serbes.
8 En un laps de temps assez court, ont eu lieu des arrestations
9 massives et des actes graves de persécution contre les populations. Tout
10 est parti de la ville et a atteint plus tard un certain nombre de villages,
11 comme Lijesce, Brusnica. Klakar, pour ensuite se répandre sur tout le
12 territoire de la municipalité de Derventa, en affectant également Gornji et
13 Donji Visnjik, et Lusani, et cetera.
14 A la mi-avril, une attaque à l'arme à feu a eu lieu à Kostres et Barica, et
15 dans un certain nombre d'autres villages. Kostres est mitoyen d'un autre
16 village attaqué également. Ces deux villages étaient majoritairement
17 peuplés de Serbes. Les gens ont littéralement été expulsés de leurs
18 domiciles. Onze personnes habitant ces villages n'avaient nulle part où
19 s'enfuir et sont donc restées sur place. Plus tard, on a retrouvé leurs
20 dépouilles. C'était, je crois, à l'automne 1992, ou même en 1993 déjà.
21 Suite cela --
22 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je n'aime pas beaucoup interrompre les
23 témoins sans nécessité, mais je me souviens que Mme Korner a demandé
24 quelques minutes pour présenter un sujet à la Chambre avant la fin de
25 l'audience. Il nous ne reste que deux ou trois minutes. Je ne sais pas si
26 vous avez la moindre idée, Maître Zecevic, du temps que va durer encore
27 cette relation faite par le témoin.
28 Mme KORNER : [interprétation] Quoi qu'il en soit, Monsieur le Président,
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1 j'ai une objection par rapport à tout ceci. Je conteste très sérieusement
2 la pertinence de ce que nous entendons en dehors du fait que cela pourrait
3 être une défense tu quoque.
4 M. ZECEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, ma question portait
5 très précisément sur la situation prévalant dans la zone de responsabilité
6 du CSB et sur les rapports entre le CSB et les autres SJB. Voilà quelle
7 était ma question. Le témoin - et je le comprends - tout à fait, souhaite
8 détailler ces événements, et j'éprouve quelques difficultés à l'arrêter en
9 dépit du fait que nous savons bien que le temps presse. Mais je suis à
10 votre disposition, Monsieur le Président.
11 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Si d'une part je comprends votre
12 réticence à l'interrompre, je voudrais vous rappeler, sauf le respect que
13 je vous dois, Maître Zecevic, que ce témoin a été cité par vous et qu'il
14 relève donc de votre responsabilité en tant que conseil de le guider. Les
15 témoins ont toujours le désir de proposer des renseignements détaillés,
16 mais c'est le conseil qui a la charge de mener le contre-interrogatoire.
17 M. ZECEVIC : [interprétation] Dans ce cas, nous pourrions suspendre pour la
18 journée d'aujourd'hui et Mme Korner aura le temps de présenter la question
19 qu'elle souhaitait présenter à la Chambre. Je vous remercie.
20 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur Bjelosevic, nous allons
21 suspendre l'audience pour aujourd'hui, et votre déposition se poursuivra
22 demain. Vous serez maintenant escorté hors du prétoire car nous avons
23 encore quelques minutes de débat à continuer. Je vous remercie.
24 [Le témoin quitte la barre]
25 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Pouvez-vous en finir en deux minutes,
26 Madame Korner ?
27 Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur les Juges,
28 j'éprouve de grandes inquiétudes.
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1 Et d'ailleurs, elles sont d'autant plus fondées que nous venons
2 d'entendre la réponse du témoin que nous venons d'entendre. En effet,
3 depuis deux jours, pratiquement 15 % du témoignage de ce témoin portait sur
4 des questions ou des sujets qui font l'objet de l'acte d'accusation. La
5 majeure partie de la déposition faite par ce témoin n'a pas le moindre
6 rapport avec le résumé 65 ter que nous avons reçu de la Défense au début de
7 son audition. Nous ne savions absolument pas que nous allions avoir à
8 traiter des événements survenus à Slavonski Brod, à Derventa, ou à Bosanski
9 Brod.
10 Comme je l'ai déjà indiqué à deux reprises, cela signifie qu'il va
11 nous falloir traiter de ces événements bien qu'aucune question n'ait été
12 posée par l'Accusation au principal sur ces événements, et que les Juges
13 n'aient absolument pas été informés que ces événements seraient évoqués, il
14 va donc nous falloir faire quelques recherches.
15 Mon inquiétude est très simple, à savoir que les Juges ont déjà
16 souligné que Derventa n'était pas évoqué dans l'acte d'accusation et si les
17 Juges n'empêchent pas le versement au dossier de tous ces éléments de
18 preuve, mais autorisent que tous les événements qui font partie de la
19 version du témoin s'agissant de ce qui s'est passé à Bosanski Brod et à
20 Slavonski Brod deviennent des pièces à conviction. Nous demandons à pouvoir
21 faire les mêmes recherches que la Défense pour nous occuper de ces
22 questions. Mais, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, si vous
23 souhaitez nous empêcher de contre-interroger sur ce point, M. Zecevic a dit
24 au témoin une fois que la réponse qu'il faisait n'était pas une réponse à
25 sa question, mais il a tout de même autorisé le témoin à poursuivre.
26 Manifestement, son intention c'est que ces éléments de déposition soient
27 pris en compte par la Chambre alors qu'ils n'ont aucune pertinence par
28 rapport à l'acte d'accusation.
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1 Donc, Monsieur le Président, voilà ce que j'aimerais savoir : Est-ce
2 que les Juges de la Chambre vont m'empêcher de contre-interroger sur les
3 questions qui viennent d'être évoquées ? Parce que si vous avez cette
4 intention, cela nous permettrait d'éviter de consacrer un temps important à
5 des recherches indispensables. Mais, pour le moment, nous disons qu'étant
6 donné la voie sur laquelle s'est engagée la Défense, nous devons être
7 autorisés à contre-interroger.
8 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Sans m'efforcer de répondre à votre
9 question directement, Madame Korner, je pensais que la règle de pertinence
10 était celle qui gouvernait nos travaux, même si je me rends bien compte de
11 vos difficultés en tant que représentante d'une des parties dans une
12 procédure contradictoire, étant donné que vous êtes contrainte de vous
13 occuper d'éléments de preuve qui ont été proposés par la partie adverse
14 sans savoir quelle serait la position de la Chambre sur ces sujets. Mais en
15 dehors de cela, je ne peux dire qu'une chose, c'est que les représentants
16 des deux parties devraient se rappeler que c'est la pertinence qui régit le
17 travail de la Chambre, et ce, pertinence par rapport à l'acte d'accusation.
18 Mme KORNER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
19 C'est exactement ce que je voulais dire. J'ai fait objection à deux
20 reprises, peut-être pas au moment tout à fait indiqué, mais les Juges ont
21 autorisé la déposition à se poursuivre. Je ne peux pas -- je n'ai pas pu
22 continuer à me lever pour opposer des objections. C'est la troisième fois
23 que j'oppose une objection. La dernière réponse du témoin que nous venons
24 d'entendre est tout à fait contestable car elle n'a rien à voir avec la
25 question qui était posée et n'est destinée qu'à donner une vue
26 spectaculaire de ce qui s'est passé. Je voudrais maintenant présenter une
27 objection officielle : Nous disons que tous les éléments de preuve entendus
28 ces derniers jours n'ont aucun rapport avec l'acte d'accusation, et qu'il
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1 nous faudra donc consacrer un temps important à nous occuper de questions
2 secondaires ou de municipalités qui n'ont pas été évoquées à l'acte
3 d'accusation.
4 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je dirais simplement que puisque l'heure
5 de la suspension a sonné, les éléments présentés et admis sont admis, même
6 si nous n'avions pas prévu tout à fait ce qui vient de se passer, les Juges
7 n'en tiendront pas compte. Sur ces mots, je lève l'audience.
8 --- L'audience est levée à 13 heures 48 et reprendra le jeudi 14 avril
9 2011, à 9 heures 00.
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