Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL Affaire IT-95-14-T

2 POUR L’EX-YOUGOSLAVIE

3

4 LE PROCUREUR

5 c/

6 Tihomir BLASKIC

7 Jeudi 24 septembre 1998

8

9 L’audience est ouverte à 10 heures 10.

10 M. le Président. - Veuillez vous asseoir. Monsieur le greffier, vous

11 faites introduire l'accusé par la sécurité.

12 (L'accusé, M. Blaskic, est introduit dans la salle d'audience.)

13 M. le Président. - Je salue les interprètes.

14 Les Interprètes. – Bonjour, Monsieur le Président.

15 M. Le Président. - Nous allons reprendre. Tout le monde m’entend, je

16 suppose. Je vois que la défense a préparé ses tableaux. C'est donc le

17 nouveau témoin que nous allons appeler. Vous avez fait un résumé, c’est

18 Me Nobilo, un résumé du témoignage suivant conformément à ce que nous

19 avons demandé ?

20 M. Nobilo (interprétation) – Oui, Monsieur. le Président. Vous avez reçu,

21 je l'espère, par écrit, tout comme l'accusation, notre résumé. Je

22 l’exposerai uniquement en grandes

23 lignes.

24 M. le Président. - Peut-être… Est-ce que j’aurais des chances de l'avoir

25 en français, je me tourne aussi vers le greffe en même temps, à l’avenir.

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1 A l’avenir, est-ce que je pourrai l’avoir en français, ce sera possible?

2 M. Dubuisson - Ce sera tout à fait possible, j’attire simplement

3 l’attention sur le mot de versement de ce résumé dans le dossier. Est-ce

4 qu’il a été normalement enregistré au Greffe ?

5 M. le Président. - Oui, oui, c'est maintenant une pièce qui deviendra

6 officielle. Il faut l’enregistrer, ce sont les nouvelles dispositions et

7 c'est la décision de la Chambre.

8 Donc, vous le ferez quand vous le déposerez, aussi bien à la défense qu'à

9 la Chambre, il faut le faire enregister, Maître Nobilo, ce qui permettra

10 évidemment au Greffe de m’en assurer une traduction rapide, et ensuite je

11 pourrais comme cela mieux, dans les débats, peut-être non seulement mieux

12 vous suivre mais, éventuellement, vous dire que vous sortez de votre

13 résumé etc…

14 Maître Nobilo, vous avez la parole.

15 M. Nobilo. (interprétation) - Merci Monsieur le Président. Notre témoin

16 suivant est donc général de brigade, Slavko Marin. Il est général de

17 brigade dans l’armée de Bosnie-Herzégovine, de la Fédération de Bosnie-

18 Herzégovine. Pendant la guerre, il était à la tête des unités

19 opérationnelles, dans la zone opérationnelle de Bosnie centrale.

20 Alors, que signifie concrètement ce terme « opérationnelle » dans un

21 contexte militaire ? Il vaudra mieux poser cette question au général de

22 brigade Marin au lieu de se lancer dans des explications laïques.

23 Le général de brigade Marin nous parlera de la structure du HVO à partir

24 du début de sa structuration, à savoir les cellules de crise par les

25 comités de crise dans des villes. Il nous parlera de la constitution de la

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1 zone opérationnelle, des territoires couverts par...

2 M. le Président. - … Maître Nobilo, excusez-moi de vous le dire, il va de

3 soi qu’à partir du moment où vous nous remettez un résumé, nous vous

4 dispensons de l’exposé oral. C’était fait pour cela, évidemment.

5 A partir du moment où nous avons un résumé écrit, c’est vrai que

6 j’attacherai du prix à ce qu’il soit en français, mais c’est fait pour

7 cela. Nous n’allons pas refaire deux fois l'exercice.

8 Normalement, chaque Juge aura ce résumé, je ne sais pas si mes collègues

9 l'ont reçu… Monsieur Marc Dubuisson, c’est peut-être de ma faute de ne pas

10 vous l’avoir fait passer, vous pouvez faire une copie de ce résumé pour

11 chacun de mes collègues ?

12 Alors, vous terminez aujourd'hui le très bref exposé oral. Mais, il va de

13 soi que les réformes du texte sont faites pour gagner du temps, et donc

14 vous serez dispensé, à l’avenir, de faire un résumé oral, mais à condition

15 que nous ayons, en français et en anglais, un résumé par écrit et que

16 chaque Juge l’ai.

17 Alors, peut-être que je vais demander à Marc Dubuisson ou à l’huissier de

18 nous faire une photocopie de ce résumé.

19 Maître, vous pouvez faire introduire le témoin. Même si ce n’est pas en

20 français, je me débrouillerai.

21 (Le témoin est introduit dans la salle.)

22 M. Nobilo. - Oui, Monsieur le Président. Nous tenons dans sa totalité au

23 contenu de ce résumé.

24 La défense souhaite uniquement compléter légèrement ce résumé, à savoir..

25 M. le Président. - Je ne vous empêche pas de compléter..

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1 M. Nobilo (interprétation). - Dans la dernière phrase de notre résumé, on

2 voit que nous avons laissé une réserve, que nous allions peut-être élargir

3 le sujet, suite à nos derniers entretiens avec notre témoin.

4 Il parlera des ordres donnés en janvier 1993 parce qu'il était chargé de

5 rédiger les ordres pour le général Blaskic. Nous parlerons de cela

6 également.

7 M. le Président. - Je me tourne vers le témoin. Vous allez rester debout

8 quelques minutes. Vous allez nous donner votre nom, votre prénom, votre

9 grade, votre profession actuelle et votre adresse. Ensuite, vous prêterez

10 serment sur la déclaration que vous tendra l’huissier.

11 D’abord, je voudrais avoir le nom, le prénom, le grade, l'adresse, la

12 profession actuelle de M. Marin. Je sais son nom, mais il est tout à fait

13 normal de vous le faire préciser. Nous vous écoutons.

14 M. Marin (interprétation). - Je suis Slavko Marin. Je suis originaire de

15 Novi Travnik. Je vis actuellement avec ma famille, mes trois enfants et

16 mon épouse. Actuellement, je suis à la tête de l'état-major d'une unité de

17 l'armée de la fédération de Bosnie-Herzégovine à Mostar. Je suis officier

18 de l'armée de la fédération de la Bosnie-Herzégovine. Mon grade est celui

19 de général de brigade.

20 M. le Président. - Bien, vous restez debout encore quelques instants.

21 L’huissier vous tend la déclaration solennelle qui est votre serment.

22 Vous pouvez nous la lire ; allez-y.

23 M. Marin (interprétation). - Je déclare solennellement que je dirai la

24 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

25 M. le Président. - Merci, Général. Vous pouvez à présent vous asseoir.

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1 Vous avez accepté de témoigner -nous vous en remercions- à la demande de

2 la défense du général Blaskic, accusé devant le Tribunal pénal

3 international par le bureau du Procureur.

4 Nous avons eu un résumé sommaire de ce que la défense attend de votre

5 témoignage. A présent, vous allez répondre aux questions de Me Nobilo.

6 C'est à vous.

7 M. Nobilo (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

8 Général, bonjour. Nous devrions remonter dans le passé jusqu'en 1992, pour

9 voir les premières formes d'organisation du peuple croate en Bosnie-

10 Herzégovine, ou plus précisément, en Bosnie centrale, à l'époque où la

11 guerre était très proche de la Bosnie. Pourriez-vous nous dire à quel

12 moment le peuple de Bosnie-Herzégovine a-t-il commencé à s'organiser ?

13 Quelles ont été les premières formes de son organisation ? Pourriez-vous

14 expliquer cela à la Chambre ?

15 M. Marin (interprétation). - Avant de passer aux éléments concrets de ma

16 réponse, dans l'introduction, je voudrais faire quelques remarques

17 générales qui me permettront de présenter la situation générale en Bosnie-

18 Herzégovine, le contexte dans lequel le HVO est né, le contexte où nous

19 avons cherché les premières formes pour organiser le HVO, pour organiser

20 la défense du peuple croate en Bosnie-Herzégovine.

21 L'agression de l'armée yougoslave contre la Bosnie-Herzégovine, avant

22 tout, contre le village de Ravno a montré quelles étaient les véritables

23 intentions des dirigeants serbes à l'égard des peuples non serbes de

24 Bosnie-Herzégovine. Ceci s'est produit au mois de septembre 1991.

25 Après avoir compris ce fait, les dirigeants politiques des Croates de

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1 Bosnie-Herzégovine ont entrepris toute une série de mesures et d'activités

2 afin d'organiser le peuple pour se défendre contre l'agression qui allait

3 suivre.

4 M. le Président. - Si vous pouviez parler plus lentement pour les

5 interprètes et les transcripteurs. Merci.

6 M. Nobilo (interprétation). – Général, pourriez-vous faire une petite

7 pause après une phrase ou deux parce que les interprètes ont besoin d'au

8 moins autant de temps que vous pour prononcer une phrase.

9 M. Marin (interprétation). - Je vois. L'objectif principal était d'assurer

10 l'équipement et les armements, de trouver des formes d'organisation pour

11 faire face à l'agresseur, de concevoir la manière d'organiser les

12 instances qui allaient être responsables de l'organisation de la défense

13 du peuple, de trouver un moyen d'héberger les exilés, les réfugiés et de

14 mettre en place toutes les activités imposées par la situation telle

15 qu'elle était.

16 M. Nobilo (interprétation). – Général, pourriez-vous nous dire à quel

17 moment apparaissent les premières formes d'organisation de la défense ?

18 Quel était le nom des premières instances qui étaient constituées par les

19 Croates de Bosnie-Herzégovine ?

20 M. Marin (interprétation). - Dans le contexte tel que je l'ai esquissé, à

21 partir du mois d'août 1991, on commence à constituer des états-majors de

22 crise au niveau des municipalités et au niveau des communautés locales.

23 M. Nobilo (interprétation). - Qui nomme les états-majors de crise et qui

24 en fait partie ?

25 M. Marin (interprétation). - La constitution des états-majors de crise est

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1 la suivante : ce sont les représentants politiques des communautés locales

2 et des municipalités.

3 M. Nobilo (interprétation). - Ces états-majors de crise étaient-ce des

4 instances militaires ou politiques ? Politiques : à savoir du pouvoir

5 exécutif.

6 M. Marin (interprétation). - D'après leur structure et d'après leurs

7 membres, les états-majors de crise étaient davantage des instances

8 politiques que militaires.

9 M. Nobilo (interprétation). - Ces états-majors de crise, que font-ils

10 concrètement sur le terrain ? Sans aller dans des définitions théoriques,

11 que font-ils contre l'agression par la JNA ?

12 M. Marin (interprétation). - Leur tâche principale était la suivante :

13 assurer l'équipement et les armements, organiser la défense et établir les

14 lignes de front face à l'armée de la Republika Srpska, héberger les

15 réfugiés, protéger et mettre à l'abri la population devant les attaques

16 aériennes et prendre le contrôle des casernes de l'ex-JNA.

17 M. Nobilo (interprétation). - Merci. Dites-moi, comment est-ce qu'on a

18 organisé cette armée ou ces hommes armés ? Y a-t-il eu une mobilisation ou

19 était-ce par une autre forme d'organisation ?

20 M. Marin (interprétation). - A l'époque, les conditions étaient telles que

21 nous ne pouvions pas mener une mobilisation. Alors, ce que nous avons

22 fait, c'est dresser des listes de volontaires, village par village, liste

23 des hommes qui étaient prêts à prendre une arme et à se rendre sur les

24 lignes de front face à l'armée de la Republika Srpska.

25 M. Nobilo (interprétation). – Général, cela veut-il dire concrètement que

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1 les volontaires se rendaient dans un village ou dans une ville et

2 disaient : "Moi, je suis prêt à aller combattre!" ?

3 M. Marin (interprétation). – Oui, c'est exactement comme ça.

4 M. Nobilo (interprétation). - Comment se sont constituées les unités ?

5 Etaient-ce des unités mobiles ou les organisait-on selon un principe

6 territorial ?

7 M. Marin (interprétation). - A l'époque, à l'époque où agissaient ces

8 états-majors de crise, comme je l'ai dit, on avait des listes, mais les

9 listes c'est encore loin d'avoir des unités. On avait des listes de

10 volontaires par lieu de naissance des volontaires.

11 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce qu'on constituait effectivement les

12 unités, là, dans les villages où ces gens vivaient ?

13 M. Marin (interprétation). - A partir de ces listes de volontaires, dans

14 un village donné, les responsables, qui figuraient eux aussi sur ces

15 listes, qui étaient chargés de ces tâches, ils utilisaient pour nom de ces

16 unités : peloton, compagnie ou d'autres termes habituels dans

17 l'organisation militaire. Mais je dois insister sur un fait : ces titres

18 ne découlaient pas des normes habituelles. Ces noms, ces dénominations

19 découlaient en fait de la vision qu'en avait le responsable d'un village

20 donné. La situation était alors la suivante : vous aviez sur une liste,

21 par exemple, 40 hommes, et les villageois appelaient cette unité

22 "compagnie". Mais dans un autre

23 village, vous aviez cent noms avec la même dénomination "compagnie".

24 M. Nobilo (interprétation). – Est-ce que vous voulez dire par là que ces

25 hommes politiques au sein de l'état-major de crise et ces instances

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1 exécutives et les responsables des villages utilisaient des termes

2 militaires mais qu'au fond, chaque village représentait une unité

3 militaire, quelle que soit sa dénomination.

4 M. Marin (interprétation). – Oui.

5 M. Nobilo (interprétation). – La situation était-elle semblable chez les

6 Croates et chez les Musulmans ?

7 M. Marin (interprétation). - Elle était pareille dans l'armée de Bosnie-

8 Herzégovine, je parle de cette situation que j'ai décrite pour les

9 Croates, donc un village égal une unité dans la forme que j'ai indiquée.

10 M. Nobilo (interprétation). – Vous voulez dire un village égal une unité

11 militaire ?

12 M. Marin (interprétation). – C'est exactement cela. Pour expliquer un peu

13 mieux ce que signifie la notion de village telle que je l'emploie, et pour

14 comprendre mieux la situation générale telle qu'elle était chez nous à

15 l'époque, je pense qu'il faudrait insister sur un fait, à savoir : que

16 signifiait "village" en Bosnie pendant les préparatifs à la guerre ?

17 Le village, c'était une base logistique, c'était une base qui servait à

18 trouver des effectifs. Et si un village se trouvait à un endroit

19 important, sur un axe important à l'époque de la guerre, le plus souvent

20 ce village était en même temps une base militaire qui se défendait et où

21 les combats étaient menés. On le voit plus facilement sur le schéma que

22 j'ai préparé pour présenter visuellement l'état des choses et

23 l'organisation avec ces premières listes de volontaires, là où on vivait à

24 l'époque.

25 M. Nobilo (interprétation). – Peut-on en avoir l'image sur nos écrans ?

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1 Pouvez-vous aussi atténuer les lumières, s'il vous plaît ?

2 Général, que représente cette carte, s'il vous plaît ?

3 M. Marin (interprétation). - Cette carte est à l'échelle 1/50 000. On le

4 voit dans la légende. Que cela signifie-t-il ? Un centimètre sur cette

5 carte égal 500 mètres en réalité.

6 M. Nobilo (interprétation). - Un instant, s'il vous plaît.

7 Nous avons quelques problèmes techniques. En attendant… et voilà, la carte

8 est arrivée. Merci.

9 Général, nous allons tout de suite lire cette carte. Nous voyons trois

10 couleurs : le bleu, le vert, nous avons des cercles en bleu et en vert.

11 Que vouliez-vous indiquer par là ?

12 M. Marin (interprétation). - Ces couleurs représentent des endroits où

13 sont organisées les unités du HVO. En vert, nous voyons des endroits où

14 sont organisées les unités de l'armée de Bosnie-Herzégovine.

15 M. Nobilo (interprétation). - Dans quelles municipalités ? Quelles

16 municipalités sont représentées sur cette carte ?

17 M. Marin (interprétation). – Cette carte représente la zone opérationnelle

18 de Bosnie centrale.

19 M. Nobilo (interprétation). - Quelle zone, quelles municipalités ?

20 M. Marin (interprétation). - On voit ici les municipalités de Vitez,

21 Busovaca, Novi Travnik et Travnik.

22 M. Nobilo (interprétation). – Et Kiseljak ?

23 M. Marin (interprétation). - Non.

24 M. Nobilo (interprétation). – Donc en bleu, qu'avez-vous dit ?

25 M. Marin (interprétation). – On voit les où sont organisées les unités du

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1 HVO. Alors qu'en vert, on voit les endroits où sont créées les unités de

2 l'armée de Bosnie-Herzégovine.

3 M. Nobilo (interprétation). - Les couleurs bleues et vertes, est-ce que le

4 fait que ce soit l'endroit où sont organisées les unités de l'armée HVO

5 correspond à la majorité de la population qui vit, à savoir majorité

6 croate là où on organise les unités du HVO et l'inverse ?

7 M. Marin (interprétation). – Oui, exactement cela.

8 M. Nobilo (interprétation). - C'est donc la répartition des unités de l'un

9 comme de l'autre peuple ?

10 M. Marin (interprétation). – Oui, pour la période qui est indiquée dans le

11 titre, à savoir le 24 avril 1992 jusqu'au mois de juin 1993. Je tiens

12 également à souligner, s'agissant de cette carte, que nous voyons

13 également quelque chose d'indiqué en rouge. En rouge, ce sont les lignes

14 et les forces de l'armée de la Republika Srpska. Vu la période de laquelle

15 il s'agit, à savoir que c'est déjà le mois d'avril 92, je tiens à

16 souligner la ligne bleue qui longe la ligne rouge.

17 M. Nobilo (interprétation). - Nous y viendrons.

18 M. Marin (interprétation). – Permettez-moi. Déjà à cette époque, le HVO,

19 avec les unités dont il disposait, tenait une ligne face à l'armée de la

20 Republika Srpska.

21 M. Nobilo (interprétation). - Revenons à l'état-major de crise. Vous avez

22 dit que le trait principal était le fait que les gens étaient des

23 volontaires qui venaient d'eux-mêmes. Vous disiez aussi que la seconde

24 caractéristique était qu'un village correspondait à une unité.

25 Dites-moi maintenant, comment choisissait-on les commandants, ceux qui

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1 étaient à la tête du village, à savoir de l'unité constituée dans le

2 village ? Y avait-il une hiérarchie ? Comment était-ce constitué ?

3 M. Marin (interprétation). – Eh bien, par village, les commandants étaient

4 choisis par les villageois eux-mêmes. Au niveau de la municipalité,

5 c'était avec l'accord des dirigeants politiques des villages qui en

6 faisaient partie. C'est donc comme cela qu'ils choisissaient ceux qui

7 allaient être à la tête des états-majors de crise.

8 M. Nobilo (interprétation). - Cela veut dire que les commandants

9 militaires n'étaient pas nommés en allant d'en haut vers en bas dans la

10 hiérarchie, comme c'est habituellement le cas dans les armées ?

11 En revanche, c'était par des élections démocratiques au sein des

12 agglomérations ?

13 M. Marin (interprétation). – Oui, exactement. La ligne de commandement

14 n'était pas une ligne très solide à l'époque, comme vous venez le dire,

15 Monsieur le conseil. Tout était basé sur un principe de volontariat.

16 M. Nobilo (interprétation). - Nous avons cité une autre caractéristique

17 qui, à mon avis, sera essentielle pour comprendre comment a fonctionné

18 l'armée du HVO, au début au moins de la guerre, à savoir la logistique.

19 Ces gens-là, à partir du mois d'août 1992 jusqu'au mois d'avril 1992, à

20 savoir au moment où a commencé la guerre, donc, jusqu'au mois d'avril

21 1992, comment ont-ils été approvisionnés en armes dans ces villages ?

22 M. Marin (interprétation). - Les sources ont été multiples.

23 L'une, qui était très importante, c'est que les gens, à titre individuel,

24 avec leur propre argent, achetaient des armes et l'équipement qui

25 pouvaient servir à leur défense.

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1 Un autre moyen était en prenant le contrôle des casernes qui se trouvaient

2 dans la vallée de la Lasva, dans une zone qui était sous le commandement

3 des responsables de cette zone opérationnelle.

4 Ensuite, c'était par l'intermédiaire de certaines entreprises, puis par

5 l'intermédiaire des instances municipales. Concrètement, on peut dire que

6 c'étaient des moyens d'approvisionnement inhabituels : chacun se

7 débrouillait et trouvait le moyen le plus approprié pour trouver le moyen

8 de se défendre ; à savoir, avant tout, un fusil ou une tenue qui pouvait

9 lui donner l'aspect d'un soldat.

10 M. Nobilo (interprétation). - Par conséquent, on peut dire que nous avons

11 maintenant l'image des états-majors de crise qui étaient des instances

12 principales jusqu'au mois d'avril 1992 et ont été constituées par

13 municipalité.

14 Dites-moi, à l'époque, en Bosnie centrale, est-ce qu'on a constitué des

15 états-majors régionaux ? Y a-t-il eu une forme supérieure d'organisation

16 au-dessus de celle située au niveau de la municipalité ?

17 M. Marin (interprétation). – Oui. Vu la situation sérieuse sur la ligne de

18 front face à l'armée de la Republika Srpska, et vu la nécessité de

19 coordonner les activités, on a constitué un état-major régional. En effet,

20 un état-major régional de crise dont le rôle était celui de coordonner

21 plusieurs municipalités pour la période donnée.

22 M. Nobilo (interprétation). – Etait-il constitué d'hommes politiques et

23 non pas de soldats également ?

24 M. Marin (interprétation). - Oui.

25 M. Nobilo (interprétation). - Nous allons continuer jusqu'au mois de

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1 mai 1992. A ce moment, les états-majors de crise sont nommés, à partir de

2 ce moment-là états-majors de crise du HVO. Pourquoi cela s'est-il passé ?

3 Quelle modification s'est-elle produite ?

4 M. Marin (interprétation). – Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

5 les états-majors de crise deviennent les états-majors municipaux en

6 avril 1992. Quelles étaient leurs tâches ?

7 Les tâches des états-majors municipaux étaient identiques à celles des

8 états-majors de crise. Mais quelles étaient les différences essentielles ?

9 Au sein des états-majors municipaux, dans leur structure, il est prévu, en

10 plus d'un commandement, des adjoints et des chefs d'état-major. Par ce

11 fait, les états-majors municipaux sont une forme d'organisation plutôt

12 militaire, davantage militaire que les états-majors municipaux. Vous avez

13 ici les responsables du génie ou de la logistique.

14 M. Nobilo (interprétation). - C'est donc un pas de plus vers une forme

15 militaire d'organisation par rapport à cette forme politique exécutive que

16 vous aviez au début ?

17 M. Marin (interprétation). – Oui, tout à fait. En outre de ces états-

18 majors municipaux, dans ce système de commandement, nous avions également

19 un état-major régional dont la tâche était celle de commander et de

20 coordonner.

21 M. Nobilo (interprétation). - J'aurais besoin de l'aide de l'huissier. Je

22 demanderai qu'un document soit remis au témoin. Je demanderai au témoin de

23 nous dire de quel document il s'agit.

24 M. Riad. – J'aurais simplement une clarification : l'état-major régional a

25 remplacé les états-majors des villages ou il y avait les deux ?

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1 M. Marin (interprétation). - Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

2 dans les niveaux inférieurs des organisations, c'est-à-dire au niveau des

3 communautés locales la dénomination est restée celle de l'état-major de

4 crise ; au niveau des municipalités, se trouvaient les états-majors

5 municipaux et les états-majors régionaux étaient au-dessus des états-

6 majors municipaux : ils avaient un rôle de coordination.

7 Ils ont été créés de façon que les forces dont je viens de parler, les

8 forces qui s'étaient organisées dans les villages puissent, grâce à une

9 coordination de bonne qualité, s'engageaient sur le front contre l'armée

10 des Serbes de Bosnie.

11 Après le temps dont j'ai parlé, c'est-à-dire à partir de la fin du mois

12 d'avril 1992, les états-majors de crise voient leur nom changer et se

13 transformer en états-majors municipaux. Mais, dans les communautés

14 locales, on trouve toujours les formations qui existaient auparavant dans

15 les villages, c'est-à-dire les compagnies et les pelotons.

16 Mais au-dessus des municipalités, en revanche, se créent les états-majors

17 régionaux. Et la différence entre les états-majors de crise et les états-

18 majors municipaux résidait dans la structure de ces formations, c'est-à-

19 dire dans leur composition même : les états-majors de crise comptaient

20 dans leurs rangs des représentants politiques, alors que les états-majors

21 municipaux sont dotés d'un commandant et comptent dans leurs rangs des

22 personnes qui sont des personnes chargées de tâches militaires, tels que

23 des adjoints ou d'autres types d'assistants militaires.

24 M. Riad (interprétation). - C'est l'état-major municipal qui est

25 militaire ? Cet état-major dominait-il les autres ? C'était le

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1 commandement ?

2 M. Marin (interprétation). - Les états-majors municipaux constituaient la

3 forme supérieure d'organisation de commandement au niveau d'une

4 municipalité.

5 M. Riad (interprétation). - Merci.

6 M. Dubuisson. - C'est le document de D199, D199a pour la version française

7 et D199b pour la version anglaise.

8 M. Nobilo (interprétation). - Nous pouvons voir le texte sur le

9 rétroprojecteur également. Dites-moi, ce document date-t-il du

10 10 mai 1992 ?

11 Emane-t-il de l'état-major de Kiseljak ? Lit-on au premier paragraphe que

12 le quartier général de l'état-major de crise est rebaptisé commandement

13 municipal du HVO ?

14 M. Nobilo (interprétation). - Ce texte est-il signé du colonel Blaskic ?

15 Reconnaissez-vous la signature ?

16 M. Marin (interprétation). - Je reconnais la signature. C'est celle du

17 général Blaskic.

18 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce un document qui a été émis au moment

19 où les structures étaient en cours de réorganisation selon les détails que

20 vous venez de donner dans votre description.

21 M. Marin (interprétation). - Oui, dans ce document, on trouve les

22 modifications, les changements d’organisation que je viens d’évoquer.

23 M. Nobilo (interprétation). - Nous pouvons laisser ce document de côté ;

24 il parle de lui-même. Nous n’avons pas besoin d’en donner lecture

25 intégralement. A cette époque-là, les états-majors régionaux avaient-ils

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1 une fonction de commandement qui, automatiquement,

2 s'exerçait sur les états-majors municipaux ou bien ces états-majors

3 régionaux coordonnaient-ils le travail des municipalités d’une façon plus

4 politique ? Ce que je vous demande, en fait, c’est quelle était la nature

5 exacte des rapports qui existaient entre les états-majors régionaux et les

6 états-majors municipaux ?

7 M. Marin (interprétation). - A cette époque, l'époque dont nous parlons,

8 les états-majors régionaux s'étaient vu conférer une fonction, un rôle qui

9 était d’avantage un rôle de coordination supérieur à celui qui était

10 exercé par les états-majors municipaux.

11 M. Nobilo (interprétation). - Donc, il n'y avait pas entre les deux

12 structures de filière de commandement très nettes ?

13 M. Marin (interprétation). - Non.

14 M. Nobilo (interprétation). - Au début du mois de mai, à la fin du mois

15 d’avril 1992, quels sont les problèmes qui surgissent dans le cadre des

16 états-majors municipaux et des autres structures ?

17 Pouvez-vous nous le dire ?

18 M. Marin (interprétation). - A l'époque où les états-majors municipaux

19 étaient créés, des problèmes de natures très diverses ont surgi dont je

20 vais me contenter maintenant de signaler quelques-uns. A savoir que toute

21 l’organisation fonctionnait, comme je l'ai déjà dit, sur la base du

22 volontariat. C'était là un facteur qui rendrait assez difficile le bon

23 fonctionnement d'une filière de commandement qui, pourtant, était

24 souhaitée.

25 M. Nobilo (interprétation). - Pouvons-nous vous interrompre un instant.

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1 Vous dites que le volontariat rendait les choses plus difficiles alors que

2 nous qui regardons les films au cinéma, nous avons souvent l’impression

3 que les soldats volontaires sont les meilleurs du monde. Pouvez-vous nous

4 préciser une chose ? Pensez-vous qu’une organisation militaire basée sur

5 le volontariat est moins bonne qu'une organisation militaire basée sur

6 d'autres facteurs.

7 M. Marin (interprétation). - Oui, je crois qu’elle est moins bonne. Pour

8 utiliser des termes simples, j'expliquerai que le mot "volontariat"

9 signifie que le soldat, le combattant se propose volontairement. Mais,

10 dans le cas où il veut quitter l'organisation, il le fait également de

11 façon volontaire. Il n'existe rien qui puisse lui imposer de rester au

12 sein de la formation à laquelle il appartient car les conditions

13 d’existence, les conditions de fonctionnement sont de cette nature.

14 M. Nobilo (interprétation). - Donc, vous nous dites que le volontaire

15 arrive quand il veut et s’en va quand il veut. Mais est-il possible de le

16 faire se déplacer à 50 kilomètres de son village par exemple ?

17 Si c'est un volontaire qui s’est porté volontaire dans son village et qui

18 est prêt à travailler aux alentours de son village, est-ce qu’il est

19 possible de le faire travailler également à 50 kilomètres de son village ?

20 M. Marin (interprétation). - C'est là que résidait précisément le

21 problème. Parce que, dans les structures que nous connaissions à l'époque,

22 les volontaires qui s'étaient portés volontaires étaient prêts à défendre

23 leur village, leur maison et uniquement cela. Si l’on pense à une armée

24 classique avec un commandement normal, cette armée doit être envoyée, doit

25 pouvoir agir où son action est nécessaire. C'est la raison pour laquelle

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1 le volontariat nous a posé un problème.

2 C'est également la raison pour laquelle j'ai signalé l'importance de ce

3 front qui existait entre nous et l'armée de la Republika Srpska. C'était

4 une situation difficile. Nous avions à l'époque uniquement des

5 volontaires.

6 J'aimerais d'ailleurs vous décrire la situation de façon plus graphique

7 et, plus visuelle. Des exemples de ce genre, il y a en eu a beaucoup.

8 Voici l'exemple que je vais vous donner : il vous faut engager une

9 centaine d'hommes pour se rendre sur le front contre l'armée de la

10 Republika Srpska. Au niveau de l'état-major régional, vous transmettez cet

11 ordre au commandant des états-majors de Travnik, Novi Travnik, Kiseljak,

12 Vitez et vous êtes 100 % certains que les commandant de ces municipalités

13 vont obéir, obtempérer à cet ordre. Pourquoi ?

14 Parce que le plus probablement du monde la ligne de front de la Republika

15 Srpska se trouve à quelques dizaines de mètres de la maison du soldat ou

16 du commandant. Mais si la ligne de front se trouve à quelques kilomètres,

17 ne serait-ce qu'à quelques kilomètres de la maison de soldat, les choses

18 seront tout à fait différentes. C'est là que résidait ce problème du

19 volontariat.

20 M. Nobilo (interprétation). – Général, dites-nous à partir de cette

21 période du mois d'avril, du mois de mai 1992, et par la suite, est-ce que

22 l'armée de la Republika Srpska n'exerçait pas des pressions de plus en

23 plus intenses, notamment dans la direction de Jajce ?

24 M. Marin (interprétation). - A l'époque, les pressions exercées sur les

25 unités du HVO s'intensifiaient, notamment sur le territoire de Jajce.

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1 M. Nobilo (interprétation). – Dites-nous, est-ce qu'à cette époque, des

2 pressions émanaient également du grand nombre de réfugiés qui avaient été

3 expulsés par les soldats de la Republika Srpska de Krajina et qui

4 arrivaient sur le territoire de la Bosnie centrale ?

5 M. Marin (interprétation). – Effectivement, l'arrivée de très nombreux

6 réfugiés, l'afflux de réfugiés dans la vallée de la Lasva constituait un

7 énorme problème dû, notamment, au très grand nombre de ces réfugiés à la

8 fois Croates et Bosniens, c’est-à-dire Musulmans de Bosnie.

9 Dans la période dont je viens de parler, ce qui se passait, c'était que

10 les réfugiés croates partaient par l'Herzégovine, vers la Croatie ou vers

11 des pays étrangers alors que les réfugiés Musulmans, les réfugiés bosniens

12 restaient sur le territoire de la Bosnie centrale, restaient donc sur le

13 territoire, notamment de la vallée de la Lasva.

14 M. Nobilo (interprétation). - Lorsque vous employez le terme de

15 "réfugiés", est-ce que ce terme ne concerne que des vieillards, des femmes

16 et des enfants, ou ce terme concerne-t-il également des hommes qui portent

17 des fusils, dans un groupe comme dans l'autre bien sûr ?

18 M. Marin (interprétation). - Tous ceux qui ont suivi les grandes

19 opérations de la guerre en Bosnie-Herzégovine savent –et c'est un fait

20 très connu-, que les réfugiés se composaient de toutes les tranches d'âge,

21 de femmes, d'enfants, de jeunes, de vieux, c’est-à-dire de toutes les

22 composantes de la population à partir de laquelle s'était constitué le

23 groupe de réfugiés. Donc ces réfugiés comptaient également dans leurs

24 rangs des conscrits, des hommes aptes à porter les armes.

25 Mais je voudrais mentionner que ce grand nombre de personnes déplacées, à

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1 la fois Bosniens et Croates, provenaient de toutes sortes d'endroits,

2 notamment des municipalités de Prijedor, de Banja Luka, de Sanski Most, de

3 Bosanski Petrovast, de Gornji Vakuf, de Kotovaroc et d'autres localités

4 encore qui se trouvent au nord-ouest de la Bosnie.

5 M. Nobilo (interprétation). – Autrement dit, ce qui est arrivé dans ces

6 régions était le nettoyage ethnique et toutes ces personnes sont arrivées

7 en Bosnie centrale, comme vous venez de le dire.

8 Mais pouvez-vous nous dire si l'afflux de ces réfugiés, dont certains

9 portaient les armes, a aggravé la situation ?

10 M. Marin (interprétation). - Une arrivée aussi massive d'habitants,

11 notamment après la chute de Jajce, a détérioré la situation qui régnait

12 dans la vallée de la Lasva et en Bosnie centrale de façon plus générale.

13 A cette époque, de nouveaux problèmes ont surgit, notamment des atteintes

14 de plus en plus fréquentes à l'ordre public. Les voitures étaient volées

15 de plus en plus souvent, des barrages routiers étaient érigés et toute

16 sorte d'autres actions ont été entreprises qui, en fait, ont aggravé la

17 situation du point de vue de la sécurité dans la vallée de la Lasva.

18 M. Nobilo (interprétation). – Dites-nous, général, ces atteintes à l'ordre

19 public,

20 cette aggravation de la situation pour les habitants, les nouveaux dangers

21 encourus par la propriété civile, étaient-elles vécues de la même façon

22 par toute la population ou est-ce qu'elles n'affectaient qu'un seul groupe

23 ethnique ?

24 M. Marin (interprétation). – Elles ont affecté tout le monde.

25 M. Nobilo (interprétation). - Que se passait-il au sein des organes civils

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1 hérités de l'ex-Yougoslavie, donc hérités de ce qui était anciennement la

2 République socialiste de Bosnie-Herzégovine, je parle principalement de la

3 police civile, de la justice, du bureau du Procureur ? Comment

4 fonctionnaient ces organes dans ces circonstances aggravées au printemps

5 et durant l'été de 1992 ?

6 M. Marin (interprétation). – Je vais vous parler des évolutions que je

7 viens d'évoquer et qui effectivement ont affecté le fonctionnement des

8 autorités civiles de façon tout à fait négative. L'une des principales

9 raisons pour laquelle ces autorités civiles ont cessé de fonctionner, à

10 mon avis, vient du mauvais fonctionnement des autorités centrales de

11 Sarajevo. Mais si nous essayons d'analyser plus en détail la situation de

12 la sécurité dans la région, il est essentiel de se pencher sur l'action de

13 la police civile.

14 La police civile, qui était héritée de l'ex-Bosnie-Herzégovine –par ces

15 mots, je parle de l'ancienne République socialiste de Bosnie-Herzégovine-,

16 qui était donc en l'état où elle état à l'époque dans cette région, cette

17 police civile ne bénéficiait pas d'une crédibilité suffisante auprès des

18 habitants.

19 Et pourquoi ne bénéficiait-elle pas de crédibilité ?

20 A mon avis, deux raisons expliquent ce phénomène.

21 Il y avait déjà dans la région, des soldats, des hommes qui avaient des

22 fusils à la main, et qui tenaient la ligne de front les séparant de la

23 l’armée de la Republika Srpska. Ces hommes, de même que tous les autres,

24 c'est-à-dire ceux qui ne jouaient pas le même rôle, tous ces hommes ont

25 fini par être armés davantage que n'était armée la police. Et la mauvaise

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1 qualité de l'équipement de la police a bien sûr entraîner une difficulté

2 importante, pour cette même police, d'accomplir les actions qui sont les

3 siennes.

4 Et puis, deuxième raison, les groupes criminels ont évidemment évalué la

5 situation très rapidement et se sont rendus compte qu'elle était

6 favorable, qu'elle allait dans leur intérêt. Donc, dans ces circonstances,

7 avec la police équipée comme je viens de le dire, avec une police qui, en

8 fait, était héritée d'une institution qui n'existait plus, il est devenu

9 pratiquement impossible d'accomplir les tâches que la police était sensée

10 accomplir.

11 M. Nobilo. (interprétation) - Merci. Général, j'aimerais que nous passions

12 maintenant à l’explication de la façon dont la zone opérationnelle de

13 Bosnie centrale et des groupes opérationnels se sont créés ? Nous

14 passerons à l’examen de la carte géographique suivante et nous allons

15 examiner un certain nombre de documents. Pouvez-vous nous dire comment la

16 zone opérationnelle de Bosnie centrale s’est donc créée ?

17 M. Marin. (interprétation) - Sur la toile de fond de ces problèmes que je

18 viens de décrire et dans le but de surmonter les conséquences négatives de

19 cette situation qui étaient tout à fait évidentes, des mesures ont été

20 prises pour réorganiser les structures existantes.

21 Par exemple, les états-majors municipaux ont été démantelés en

22 novembre 1992 et des brigades ont été créées à leur place. Les états-

23 majors régionaux ont été démantelés également pour être remplacés par la

24 zone opérationnelle.

25 M. Nobilo. (interprétation) - Puisque le mot zone opérationnelle vient

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1 d’être prononcé, je demanderais à l'Huissier de bien vouloir remettre au

2 témoin ce document qui nous montrera quelle était la structure, à cette

3 période, de la zone opérationnelle de Bosnie centrale.

4 M. Dubuisson - Ce document porte le n° 200, 200a pour la version française

5 et 200b pour la version anglaise.

6 M. Nobilo. (interprétation) - Il s'agit de la pièce à conviction D 200.

7 Général, je vous demanderai de lire, d'examiner la version croate et

8 j’aimerais que nous identifions d'abord ce document, qui est daté du

9 7 octobre 1992. Est-ce qu’à la fin de ce document, on trouve la signature

10 du colonel Blaskic ou celle de quelqu'un d'autre ?

11 M. Marin. (interprétation) - Nous voyons ici le paraphe du colonel Boric

12 qui était autorisé par le colonel Blaskic à signer les documents en ses

13 lieux et places.

14 M. Nobilo. (interprétation) - Donc nous voyons qu’il y a, à cette

15 période, passage d'une forme d’organisation à une autre. Les groupes

16 opérationnels et la zone opérationnelle sont donc créés à cette époque et

17 je vous demande ce qu'était la zone opérationnelle ? Comment elle était

18 organisée et ce qu’étaient les groupes opérationnels ? Est-ce que les

19 groupes opérationnels étaient des formes d’organisation supérieures ou

20 inférieures à la zone opérationnelle en Bosnie centrale ?

21 M. Marin. (interprète) - Monsieur le Président, Messieurs les Juges, dès

22 lors que l'on emploie les termes zone opérationnelle, il convient de

23 garder présent à l'esprit que celle-ci représente le commandement qui a

24 été la forme de commandement supérieure aux commandements municipaux qui

25 existaient à l'époque dans les municipalités.

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1 Et ce, sur le territoire placé sous la responsabilité de la zone

2 opérationnelle.

3 M. Nobilo. (interprétation) - Général, je vous demanderai de nous dire si

4 la zone opérationnelle de Bosnie centrale qui était dirigée par le

5 colonel Blaskic..

6 M. le Président. - Maître Hayman, vous vouliez ?

7 M. Hayman. (interprétation) - J'aimerais demander à M. Dubuisson de bien

8 vouloir placer tous les documents sur le rétro-projecteur pour aider les

9 interprètes.

10 M. Le Président. - Monsieur Debuisson.

11 M. Dubuisson. - Cela est fait Monsieur le Juge.

12 M. le Président. - Merci

13 M. Nobilo. (interprétation) - Merci. Donc, je vais vous lire la liste des

14 municipalités auxquelles Blaskic envoie ce document : Kresevo, Kiseljak,

15 Sarajevo, Fojnica,

16 Vares, Kakanj, Busovaca, Vitez, Travnik, Novi Travnik, Zenica, Maglaj,

17 Teslic, et Tesanj.

18 Toutes ces municipalités faisaient-elles parties de la zone opérationnelle

19 de Bosnie centrale ?

20 M. Marin. (interprétation) - Oui.

21 M. Nobilo. (interprétation) - Sarajevo également ?

22 M. Marin. (interprétation) - Oui.

23 M. Marin. (interprétation) - Pouvez-vous expliquer au Tribunal maintenant

24 quel est le sens à donner au terme groupe opérationnel ?

25 M. Marin. (interprétation) - Etant donné la situation que nous vivions,

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1 notamment sur le front qui nous séparait de l'armée de la Republika Srpska

2 et dans le but d'obtenir une meilleure organisation de la défense, une

3 organisation plus efficace de la défense, des groupes opérationnels ont

4 été créés dans le cadre de la filière de commandement de la zone

5 opérationnelle.

6 M. Nobilo. (interprétation) - A quelle fin ? Pourquoi ?

7 M. Marin. (interprétation) - De façon à ce que la coordination et la

8 préparation ainsi que l’accomplissement des tâches de la défense soit de

9 meilleure qualité.

10 Et puis également en raison du territoire très important qui a été placé

11 sous la responsabilité de la zone opérationnelle de Bosnie centrale.

12 M. Nobilo (interprétation). – Général, est-ce que ce que vous êtes en

13 train de dire signifie que le territoire qui a été placé sous la

14 responsabilité du colonel Blaskic était si grand qu'il était déjà, à

15 l'époque, impossible de le diriger à partir d'un seul quartier général, à

16 partir d'un seul état-major mais qu'il fallait constituer et créer des

17 groupes opérationnels à cette fin ?

18 M. Kehoe (interprétation). – Monsieur le Président, excusez-moi. Je n'ai

19 rien contre ces longs discours de Me Nobilo, mais je crois qu'il serait

20 préférable pour tout le monde

21 dans ce prétoire que Me Nobilo pose la question au témoin.

22 M. le Président. - Vous êtes un peu excédé, emporté par votre passion de

23 la conviction, Maître Nobilo, vous avez un peu excédé ce qui doit être

24 votre exercice : vous ne pouvez pas influencer à ce point le témoin. C'est

25 votre témoin, mais… Vous lui posez des questions ; puis, vous attendez les

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1 réponses. Vous ne pouvez pas faire des commentaires qui sont plus des

2 commentaires préalables à la question. Vous le savez.

3 M. Nobilo (interprétation). – Monsieur le Président, j'essaye de

4 travailler de façon plus efficace, c'est-à-dire de poser plusieurs

5 questions en vue d'obtenir une seule réponse pour que nous travaillions

6 plus rapidement. Mais enfin, je ferai ce que vous venez de me dire.

7 Général, était-il possible de commander une zone opérationnelle aussi

8 grande de façon efficace ?

9 M. Marin (interprétation). - Précisément parce que cela n'était pas

10 possible, les groupes opérationnels ont été créés. Les commandants des

11 groupes opérationnels étaient les commandants des brigades les plus

12 puissantes dans le territoire où ils exerçaient. Je viens en fait

13 d'employer le terme de brigade. Je voudrais qu'il n'y ait pas de

14 malentendu : les brigades et les groupes opérationnels ont été créés en

15 parallèle.

16 M. Nobilo (interprétation). – Général, pouvez-vous dire aux Juges : les

17 groupes opérationnels de la zone opérationnelle de Bosnie centrale, quels

18 étaient-ils ? Et sur quels territoires ?

19 M. Marin (interprétation). – Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

20 sur le territoire de la zone opérationnelle de Bosnie centrale, on été

21 créés trois groupes opérationnels. Dans le premier groupe opérationnel, on

22 trouvait les municipalités, les états-majors municipaux de Travnik,

23 Novi Travnik, Vitez, Busovaca et Zenica.

24 Travnik, Novi Travnik, Vitez, Busovaca et Zenica.

25 M. le Président. – Excusez-moi. Sur le document, j'avais l'impression que

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1 Busovaca était dans le deuxième ; je me suis peut-être trompé dans la

2 lecture.

3 M. Nobilo (interprétation). – Monsieur le Président, en fait, c'est vous

4 qui avez bien lu. Général, vous avez le document entre les mains ?

5 M. Marin (interprétation). - Oui.

6 M. Nobilo (interprétation). - D'après ce document, ce qui s'est passé par

7 la suite, vous l'expliquerez plus tard aux Juges, mais d'après ce document

8 dont nous parlons en ce moment, quels sont les groupes opérationnels qui

9 existaient ?

10 M. Marin (interprétation). – Sur la base de ce document, c'est-à-dire à

11 l'époque où ce document a été émis, à la date du 7 octobre 1992, il est

12 visible –et c'est ce qui existait dans la réalité-, il est visible que

13 groupes opérationnels ont été créés. Nous parlons en fait d'une date

14 légèrement antérieure : ce que j'ai dit précédemment concernait une

15 période légèrement ultérieure, ce qui explique la différence.

16 Donc quatre groupes opérationnels dont la composition était la suivante :

17 les municipalités de Travnik, Novi Travnik, Vitez, Jajce et Zenica sont

18 désormais englobées dans ce que l'on appelle le premier groupe

19 opérationnel. Les municipalités de Kiseljak, Kresevo, Busovaca, Fojnica,

20 Vares, Kakanj et Sarajevo, qui relèvent de la troisième zone

21 opérationnelle font désormais partie du deuxième groupe opérationnel. Les

22 municipalités de Zepce, Zavidovici, Maglaj, Teslic et Tesanj sont

23 désormais dans la composition du troisième groupe opérationnel.

24 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que, plus tard, il y a eu des

25 modifications, des transferts de municipalités d'un groupe opérationnel à

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1 l'autre, par la suite.

2 M. Marin (interprétation). - Oui, en effet. C'est la raison qui explique

3 précisément qu'il y a quelques minutes, j'ai fait une légère erreur.

4 M. Nobilo (interprétation). - Et Busovaca, dans quel groupe opérationnel

5 est entré Busovaca ?

6 M. Marin (interprétation). - Après les transformations et après que les

7 groupes opérationnels existaient déjà, Busovaca a appartenu au premier

8 groupe opérationnel.

9 M. Nobilo (interprétation). - Merci. Nous allons maintenant parler du

10 commandement de la zone opérationnelle de Bosnie centrale. Je prierai

11 l'huissier de bien vouloir distribuer un document.

12 M. Dubuisson. - Il s'agit du document D201, D201a pour la version

13 anglaise.

14 M. Nobilo (interprétation). - Général, veuillez examiner ce document qui

15 date du 18 novembre 1992. Je vous demanderai…

16 M. le Président. - Il est presque 11 heures 20. Puisque nous abordons un

17 nouveau problème important sur le commandement, une pause permettra au

18 témoin de regarder ce document et puis de nous retrouver dans une

19 vingtaine de minutes.

20 L'audience est suspendue.

21 L'audience, suspendue à 11 heures 15, est reprise à 11 heures 45.

22 M. le Président. - L'audience est reprise. Introduisez l'accusé et excusez

23 notre retard qui est dû..

24 Il faut que vous sachiez que, quand nous reprenons avec retard -ce qui

25 arrive-, il faut vous dire que les Juges en pause sont accablés de

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1 papiers, de coups de téléphone, de règlements divers. Et ainsi il se fait

2 que nous n’arrivons pas toujours à être à l’heure. Comme je stigmatise le

3 retard des parties quand il y en a, pas souvent, je dois bien vous

4 présenter nos excuses quand le retard est important.

5 Avec la seule consolation que cela permet à nos interprètes de mieux

6 prendre des forces lorsque nous leur demandons de rester un peu plus de

7 temps ; ce qui arrive, hélas, comme hier soir. Merci.

8 Après ces entrefaites et à partir de ces considérations, Maître Nobilo,

9 vous

10 pouvez reprendre à partir du document de D220.

11 M. Nobilo (interprétation). – Merci, Monsieur le Président. Général,

12 veuillez examiner ce document ; il date du 18 novembre 1992. J'aimerais

13 tout d'abord que nous examinions la signature. Reconnaissez-vous la

14 signature du colonel Blaskic ?

15 M. Marin (interprétation). - Oui.

16 M. Nobilo (interprétation). - Que représente ce document ? Pouvez-vous

17 l'expliquer à la Chambre ?

18 M. Marin (interprétation). - Cela émane du commandement de la zone

19 opérationnelle. Il représente la structure que l'on souhaite donner au

20 commandement de la zone opérationnelle ; il s'agit de ce que le commandant

21 de la zone opérationnelle souhaitait voir se réaliser au sein du

22 commandement de la zone opérationnelle.

23 M. Nobilo (interprétation). - Le colonel Blaskic, quel était son point de

24 vue à l’époque ? De combien de personnes pensait-il avoir besoin pour

25 mettre en œuvre cette organisation ? De combien de personnes avait-il

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1 besoin au commandement ?

2 M. Marin (interprétation). - D'après ce document, d'après son idée,

3 l'estimation a été que, pour s'acquitter de sa mission, il aurait besoin

4 environ de 105 à 106 personnes.

5 M. Nobilo (interprétation). - Dites-moi. Maintenant, vous êtes expérimenté

6 avec les affaires militaires, notamment vous êtes en contact avec l'OTAN.

7 Pour l’OTAN, pour un commandement de cette taille, de combien de

8 personnes, officiers et sous-officiers, aurait-on besoin au sein de ce

9 commandement, conformément aux normes de l'OTAN ?

10 M. Marin (interprétation). - Pour autant que je le sache, pour ce niveau

11 de commandement comme l’était la zone opérationnelle à l’époque, on aurait

12 eu besoin de 200 à 220 personnes, agents.

13 M. Nobilo (interprétation). - Veuillez dire à la Chambre, Général, combien

14 de personnes constituaient le commandement de la zone opérationnelle ?

15 M. Marin (interprétation). - A l'époque où ce document a été rédigé, à la

16 rédaction duquel j'ai également participé, il y avait environ 23 à

17 25 personnes.

18 M. Nobilo (interprétation). - Sur ces 23, 25 personnes, au lieu des 100

19 selon le souhait de M. Blaskic et selon les 200 correspondant aux normes

20 de l'OTAN, combien d'officiers aviez-vous dans la conduite de l'armée ?

21 D’officiers qui avaient fait l'académie militaire ?

22 M. Marin (interprétation). - A l’époque, nous en avions trois qui avaient

23 fait l'académie militaire mais qui n’avaient pas énormément d’expérience

24 militaire.

25 M. Nobilo (interprétation). - Veuillez nous donner les noms de ces trois

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1 officiers du commandement de la zone opérationnelle de Bosnie centrale.

2 M. Marin (interprétation). - De l’académie, dans la zone opérationnelle de

3 Bosnie centrale, il y avait le général Blaskic, le chef de brigade Ivica

4 Zeko et le colonel Mijo Bozic.

5 M. Nobilo (interprétation). - Les grades sont ceux de maintenant et non

6 pas ceux de l'époque ?

7 M. Marin (interprétation). - Oui.

8 (L’interprète se reprend : " C'était le général de brigade Ivica Zeko ")

9 M. Nobilo (interprétation). - Veuillez expliquer à la Chambre : la zone

10 opérationnelle a été créée ; un commandement militaire a été créé. Est-ce

11 qu'on a réussi à surmonter les problèmes des volontaires d’une unité, d'un

12 village qui posaient problèmes précédemment ?

13 M. Marin (interprétation). - Le commandement de la zone opérationnelle,

14 tel qu’il était constitué, est né suite aux efforts constants du

15 commandant de la zone opérationnelle pour bénéficier des soldats qui

16 étaient sous son commandement et en raison des problèmes qui se posaient.

17 Je le répète : il s’agit du problème des volontaires.

18 Du fait que les structures, les filières de commandement ne fonctionnaient

19 pas, que les pressions de l'armée de la Republika Srpska étaient énormes

20 sur les lignes de défense, il y avait les problèmes des réfugiés et, d'une

21 manière générale, les atteintes portaient alors à la sécurité publique.

22 Compte tenu de ces problèmes, nous avions une organisation souhaitée, mais

23 la situation ne se modifiait pas.

24 M. Nobilo (interprétation). - Nous allons parler des filières de

25 commandement ultérieurement. Nous n'allons pas aborder ce problème

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1 maintenant.

2 Dites-moi, est-ce qu’il existait des forces prêtes sur le territoire de la

3 zone opérationnelle de Bosnie centrale ?

4 M. Marin (interprétation). - Il n'existait pas de forces "prêtes". Dans

5 ces forces, on comprend les personnes qui sont rassemblées dans les

6 casernes, qui se forment, qui sont équipées et qui disposent d'officiers

7 compétents qui s'occupent de former, d'entraîner ces hommes, et qui

8 participent à l'organisation de ces forces prêtes à combattre. Nous

9 n'avions pas de telles forces.

10 M. Nobilo (interprétation). - De quelles forces disposiez-vous ? De quoi

11 avait l'air cette armée ? Comment se déroulait son travail ?

12 M. Marin (interprétation). – Nous avons dit au départ que l'organisation

13 du HVO s'effectuait par le biais du recrutement de volontaires dans les

14 villages. Une telle organisation s'est perpétuée au cours de toute la

15 guerre.

16 Quel était le problème dans une telle organisation ? Nous l'avons déjà

17 dit. Nous continuions d'avoir des personnes qui habitaient dans leur

18 maison, qui disposaient d'armes et, lorsque le besoin ressortait, lorsque

19 le besoin de se battre contre les forces de la Republika Srpska

20 surgissait, on dressait une liste et s'il y avait trente personnes, on

21 appellerait cela "peloton", s'il y en avait cinquante ou plus, on

22 appellerait cela "compagnie" ; donc ces personnes

23 partaient accomplir leur mission, c’est-à-dire défendre les lignes de

24 défense.

25 Chez nous, le plus souvent, cela intervenait pendant sept à dix jours,

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1 sans arrêt.

2 M. Nobilo (interprétation). – Général, vous avez dit que vous rassembliez

3 des hommes, qu'ensuite vous désigniez un commandant et que ces personnes

4 partaient sur la ligne de front. Il s'agissait de personnes déjà

5 organisées d'une armée ?

6 M. Marin (interprétation). – Oui.

7 M. Nobilo (interprétation). – Mais que se passe-t-il avec ces personnes

8 lorsqu'elles ne sont pas sur le front, lorsqu'elles sont dans le village ?

9 Quel est le statut de ces personnes à ce moment-là ?

10 M. Marin (interprétation). – Après avoir accompli leur mission sur la

11 ligne de front, pendant sept à dix jours, ces personnes rentraient chez

12 elles des lignes de défense et rentraient occuper leurs tâches

13 habituelles. Certaines personnes travaillaient en entreprise, d'autres

14 travaillaient à la maison et d'autres partaient en voyage compte tenu des

15 nécessités familiales et de leurs besoins.

16 Il convient de souligner que lorsque les soldats rentraient du front, des

17 lignes de défense, et lorsqu'ils rentraient chez eux, à ce moment-là, il

18 n'était pas possible de commander.

19 M. Nobilo (interprétation). – Est-ce que selon vous, ces personnes-là

20 étaient des civils à ce moment-là ?

21 M. Marin (interprétation). – Oui, c'étaient des civils et ils avaient ce

22 statut.

23 M. Nobilo (interprétation). – Vous dites qu'ils vaquaient à leurs

24 occupations habituelles, qu'ils travaillaient en entreprise. Est-ce qu'il

25 s'agissait d'occupations civiles et d'entreprises civiles ?

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1 M. Marin (interprétation). – Oui, c'étaient des occupations civiles et

2 c'étaient des entreprises civiles. Les personnes qui allaient sur les

3 lignes de défense étaient, comme je l'ai dit, des personnes qui émanent de

4 toutes les sociétés, de toutes les entreprises qui étaient sur le

5 territoire d'une municipalité. C'était tout aussi bien l'instituteur que

6 le serrurier.

7 M. Nobilo (interprétation). – Qu'en est-il de l'uniforme ? Au moment où on

8 rentrait de la ligne de défense, que se passait-il avec l'uniforme ?

9 M. Marin (interprétation). – L'uniforme, les armes, chaque soldat les

10 emportait chez lui.

11 M. Nobilo (interprétation). - Au moment où une personne n'allait pas sur

12 les lignes de défense, quelle était l'habitude, est-ce qu'on aimait porter

13 l'uniforme ou est-ce qu'on passait plutôt aux vêtements civils ?

14 M. Marin (interprétation). - Pour mieux comprendre à la réponse à cette

15 question, nous devons revenir aux événements et à l'atmosphère qui

16 prévalait sur ce territoire. Porter un uniforme à l'époque signifiait

17 montrer sa fierté, signifiait montrer qu'on défendait une cause. Et à la

18 fin des activités sur les lignes de défense, les gens rentraient à la

19 maison et le lendemain, ils étaient assis à la terrasse des cafés dans

20 cette tenue. Ils souhaitaient que leurs voisins voient qu'ils étaient

21 soldats car c'était une source de fierté à l'époque.

22 M. Nobilo (interprétation). – Je vous remercie. Je prierai l'huissier…

23 M. Dubuisson. – Il s'agit du document 202, 202a pour la version anglaise.

24 M. le Président. - Il y a une version française, n'est-ce pas Maître

25 Nobilo ?

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1 M. Nobilo (interprétation). – Oui, oui, Monsieur le Président.

2 M. le Président. - Nous sommes tellement habitués qu'il n'y ait pas de

3 version française, qu'il ne m'annonçait pas qu'il y en avait une cette

4 fois-ci.

5 M. Dubuisson. – Je vous prie de m'excuser. Effectivement, il y a une

6 version française. Mais elle était bien camouflée.

7 M. le Président. – Merci. Bien, allons-y.

8 M. Nobilo (interprétation). - Général, veuillez examiner ces tableaux et

9 dites-nous ce que représentent ces tableaux ?

10 M. Marin (interprétation). – De cette liste, il ressort quelle était la

11 manière d'engager les soldats pour les lignes de défense. On voit

12 également que pour de telles activités, on donnait une certaine solde qui

13 était fonction du nombre de jours passés sur la ligne de défense.

14 M. Nobilo (interprétation). – Général, nous voyons sur cette première page

15 que tous reçoivent le même montant, un mois donné, alors qu'on voit, dans

16 les pages suivantes, que les montants versés varies. Quelle en est la

17 raison ?

18 M. Marin (interprétation). - On voit également de cette liste que les

19 personnes en première page sont des commandants et des membres du

20 commandement qui travaillaient au commandement.

21 Alors que sur la page n°1, en tout cas c'est ce que j'ai, sur la troisième

22 feuille, on voit que les soldats ne passent pas tous le même nombre de

23 jours. Ce qui confirme la manière dont le recrutement était effectué pour

24 les lignes de défense contre l'armée de la Republika Srpska. Cela explique

25 en partie comment le montant était versé, comment le salaire était versé à

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1 ces personnes.

2 M. Nobilo (interprétation). - Dites-moi, après nom et prénom, nous avons

3 les colonnes du postes, du coefficient, de la base de calcul, est-ce que

4 nous voyons le nombre de jours d'engagement, de recrutement pour chaque

5 personne par mois ?

6 M. Marin (interprétation). – Oui, on le voit de manière très claire.

7 M. Nobilo (interprétation). - D'où le voit on ?

8 M. Marin (interprétation). - Du sceau, on voit que cela émane de l'état-

9 major de Kresevo et il en allait de même pour les autres municipalités.

10 M. Nobilo (interprétation). - Je vous remercie. J'aimerais parler

11 maintenant des effectifs de chaque unité. J'aimerais demander à l'huissier

12 de présenter un autre de document, s'il vous plaît.

13 Pour le document précédent, est-ce que vous pouvez confirmer

14 l'authenticité de ce document compte tenu de la signature et du sceau ?

15 C'est le document D202.

16 M. Marin (interprétation). – Oui, je peux le confirmer. Il s'agit d'un

17 document émanant de l'état-major municipal de Kresevo.

18 M. Dubuisson. - Il s'agit du document D203, sans traduction.

19 M. Nobilo (interprétation). - Monsieur le Président, une erreur s'est

20 manifestement glissée dans le fait qu'il n'y a pas de traduction

21 disponible : nous avions fait en sorte qu'il soit traduit. Nous

22 demanderons donc le versement de ce document au dossier ultérieurement,

23 peut-être cet après-midi.

24 Dites-moi, Général, en conclusion, que pouvez-vous dire de l'organisation

25 en militaire en 1992, brièvement ?

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1 M. Marin (interprétation). - Pour ce qui est de mes conclusions quant à

2 l'organisation et à la structure du HVO à l'époque, j'aimerais dire les

3 choses suivantes : l'organisation a été fondée sur le principe des

4 volontaires et des problèmes se posaient dans le fonctionnement de la

5 filière de commandement. En effet, il n'y avait pas de responsabilités.

6 Par ailleurs, du personnel formé, bénéficiant d'une formation militaire,

7 faisait défaut.

8 Par ailleurs, la nomination des commandants : et bien, une influence

9 considérable était exercée par les représentants municipaux lorsqu'il

10 s'agissait des commandants au niveau municipal.

11 M. Nobilo (interprétation). - Qu'entendez vous par « responsables

12 municipaux » ?

13 M. Marin (interprétation). - J'entends par là les hommes politiques au

14 niveau municipal.

15 M. Nobilo (interprétation). - Merci.

16 M. Marin (interprétation). - Lorsqu'il s'agit des municipalités, mais

17 lorsqu'il s'agit des unités au niveau inférieur, ce qui comptait c'était

18 uniquement le village, les habitants du village.

19 Un autre problème qui se posait, en ce qui concerne l'organisation du HVO,

20 était qu'il existait des normes en termes d'organisation. Les unités

21 étaient organisées sur un principe territorial et la conséquence en est

22 que ces unités n'obéissaient pas aux principes de subordination ou de

23 hiérarchie. Il existe un rapport de familiarité et non pas un rapport de

24 hiérarchie.

25 M. Marin (interprétation). - Qu'entendez-vous par là ? Comment cela

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1 prenait-il forme concrètement ?

2 M. Marin (interprétation). - Concrètement, cela voulait dire la chose

3 suivante : un soldat qui commettrait une faute ou une infraction en raison

4 de liens de familiarité ou de connaissance, car tous venaient du même

5 village, le commandant local essaierait de passer cela sous silence et le

6 commandant ne l'apprendrait jamais.

7 M. Nobilo (interprétation). - Ce commandant local, est-ce qu'il

8 s'inquiétait plus du point de vue du commandant ou de son unité ?

9 M. Marin (interprétation). - Le commandant du village s'inquiétait plus de

10 l'opinion des membres de son unité que d'autres personnes. Par ailleurs,

11 j'ai expliqué comment on allait sur la ligne de front, comment les gens

12 rentraient. Et il est impossible de les former à ce moment-là.

13 Par ailleurs, un autre élément important, selon moi, est la constitution

14 d'une armée en conditions de guerre. Qu'est-ce que cela signifie ?

15 Vous avez vu quel était l'objectif du commandant, vous avez ce qu'il

16 souhaitait obtenir, mais la situation réelle des unités étaient

17 entièrement différente et bien plus difficile. Donc, le commandant de la

18 zone opérationnelle avait pour projet de procéder à l'organisation du

19 commandement et des formations sur ce territoire. C'était là les efforts

20 qu'il a déployés, c'était là son objectif ; le général Blaskic déployait

21 des efforts considérables. Mais la situation sur le terrain était bien

22 plus difficile avec tous les problèmes que j'ai mentionnés jusqu'ici.

23 En outre, la logistique a fait que le fonctionnement des unités du HVO se

24 faisait d'une certaine manière. Nous avons dit que la logistique et que

25 l'approvisionnement logistique se faisait sur une base individuelle :

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1 fusils individuels, uniformes individuels. Les personnes étaient seules

2 propriétaires de cela et elles décidaient de la manière dont elles

3 allaient utiliser leurs fusils ou leurs uniformes.

4 Nous avons dit également que certaines entreprises, certaines sociétés,

5 fournissaient des armes ou des uniformes ; nous avons parlé des autorités

6 municipales. Tout cela a contribué à l'organisation et au fonctionnement.

7 M. Nobilo (interprétation). - Général, est-ce qu'en Bosnie, il existe un

8 dicton qui dit : "Tu obéis à celui qui te nourrit" ?

9 M. Marin (interprétation). – Oui, c'était vrai dans ce cas.

10 M. Marin (interprétation). - Vous avez parlé de sociétés : est-ce que vous

11 vouliez parler de sociétés d'Etat ou de sociétés privées ?

12 M. Marin (interprétation). - Il y avait des sociétés privées mais il y

13 avait également des individus, qui travaillaient dans des sociétés d'Etat,

14 qui avaient des possibilités par le biais d'échange de biens. Par exemple,

15 des gens qui pouvaient acheter des armes le faisaient.

16 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que vous souhaiteriez ajouter autre

17 chose ?

18 M. Marin (interprétation). - Ce que j'aimerais dire c'est que les unités

19 étaient organisées sur les lignes de défense. Et sur les lignes de défense

20 que nous devions assurer -c'est cette ligne-là, à ce moment-là et pendant

21 toute la période dont je parle-, nous devions envoyer 50 soldats. Comment

22 le faire ?

23 Nous allions donc faire une liste de personnes et, pour cette mission,

24 pour cette tâche, nous allions désigner un commandant ; ce n'était pas un

25 commandant permanent. Des personnes allaient donc s'acquitter d'une

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1 mission et allaient fonctionner selon une organisation militaire. Mais, à

2 leur retour, elles rentraient chez elles.

3 Pour nous, au sein du commandement, c'était un problème crucial pour la

4 sécurité et la qualité de la ligne de défense. Lorsque vous n'avez pas de

5 forces prêtes à combattre, vous ne savez pas quand l'ennemi et si l'ennemi

6 aura des forces supérieures et si l'ennemi mettra en danger la ligne que

7 vous défendez. Si cela était arrivé, nous n'aurions pas eu de forces

8 prêtes à combattre pour les envoyer.

9 M. Nobilo (interprétation). – Est-ce que cela était lié également à des

10 difficultés dues au contrôle des soldats et de leur comportement

11 lorsqu'ils n'étaient pas sur le front ?

12 M. Marin (interprétation). – Oui, je l'ai déjà dit : lorsque les soldats

13 rentraient chez eux, ils étaient libres. J'ai expliqué pourquoi ils

14 venaient en ville en uniforme ; après cela, ils venaient également avec

15 leurs fusils. Et, dans certaines circonstances, ils portaient atteinte à

16 l'ordre et à la sécurité publique. Cela nous a posé bien des difficultés.

17 Moi-même, personnellement, et suite à l'ordre du général Blaskic, j'ai

18 essayé de rétablir une situation normale pour accroître la sécurité de la

19 population.

20 M. Nobilo (interprétation) - Général, nous sommes arrivés maintenant à une

21 question qui me semble importante pour la Chambre et j’aimerais que nous

22 entrions dans les détails des questions liées à la sécurité sur le

23 territoire de la zone opérationnelle de Bosnie centrale.

24 Quelles étaient les formes essentielles d'atteinte à l'ordre de la

25 sécurité publique ou de perpétration d'actions criminelles ? Quelles sont

Page 11926

1 les actions qui apparaissent à l'époque ?

2 M. Marin. (interprétation). - A l'époque dont nous parlons, il faut

3 signaler les éléments suivants : utilisation d'armes à feu en ville, donc

4 des tirs incontrôlés ; ensuite, des barrages routiers sauvages ont été

5 érigés ; vols de voitures,...

6 Par exemple, je suis né à Novi Travnik, j'y ai vécu. J'avais un certain

7 statut social avant la guerre et, pendant la guerre, j'étais commandant de

8 la section opérationnelle. Mais les situations de sécurité étaient telles

9 que la voiture que je possédais -car je travaillais à Vitez, au poste de

10 commandement-, pour des raisons de sécurité, je l’ai emmenée chez mes

11 parents à la campagne, car je ne savais pas si j’allais la retrouver.

12 Lorsqu’il y a eu cette vague de réfugiés, d'exilés, je me suis posé des

13 questions au sujet de mon appartement. Et lorsque je rentrais de mission,

14 après trois jours, je voyais que quelqu'un était entré dans mon

15 appartement, de manière illégale. J'étais commandant dans un commandement

16 de ce niveau-là, mais les criminels ne faisaient aucune différence.

17 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que des personnes ont emménagé dans

18 votre appartement ?

19 M. Marin (interprétation). - Oui, des personnes s’y sont installées et

20 j'ai dû résoudre le problème moi-même.

21 M. Nobilo (interprétation). - Parlons maintenant de ces barrages routiers

22 sauvages. Que représentaient-ils, à l’époque, en Bosnie centrale ? Qui les

23 dressaient, qu’est-ce que c’était ?

24 M. Marin (interprétation). - Lorsqu'on parle de barrages routiers

25 sauvages, on sous-entend qu'il y en avait qui étaient officiels, légaux.

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1 Alors, pour comprendre ce phénomène, j’essaierai d’expliquer : on avait

2 également des barrages routiers légaux qui existaient pour assurer le

3 contrôle et pour essayer d’améliorer la situation concernant la sécurité,

4 pour améliorer la situation. Alors que les barrages routiers sauvages,

5 c’étaient des barrages routiers qui étaient dressés par certains groupes.

6 Et ces groupes le faisaient parce qu'ils disposaient d'armement chez eux,

7 parce qu'ils étaient suffisamment bien armés pour que la police ne puisse

8 rien faire contre eux. Et puis, ces barrages routiers étaient installés

9 pour piller et pour se procurer des biens qu'ils jugeaient être en mesure

10 de se procurer en dressant ces barrages routiers.

11 M. Nobilo (interprétation). - Dites à la Chambre, s'il vous plaît, si ces

12 pillages à des barrages routiers, s'il s’agissait d’un barrage routier

13 croate, étaient destinés uniquement contre les Musulmans ou bien

14 s’agissait-il de pillages qui n'avaient aucune caractéristique nationale ?

15 M. Marin (interprétation). - C’était un pillage comme un autre. Par

16 exemple, on dressait un barrage dans un village croate, mais ces criminels

17 se mettaient d'accord avec leurs complices de dresser un barrage

18 comparable dans un village bosniaque. Puis, ils échangeaient des

19 informations entre eux par des moyens qu’ils ne connaissaient qu'eux

20 seuls ; puis, ils agissaient en fonction de ce qu'ils savaient.

21 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce qu'il y avait des groupes de

22 criminels ? Et pour quelle raison la police ne pouvait pas arrêter leurs

23 activités ?

24 M. Marin (interprétation). - Ce phénomène, avec le temps,… Je dois dire

25 que la situation concernant la sécurité s'aggravait de jour en jour. Ces

Page 11928

1 criminels se procuraient ce butin qu'ils cherchaient à se procurer. Avec

2 le temps, ces groupes de criminels sont devenus de plus en plus forts et

3 bien plus organisés. Ils étaient mieux organisés que la police. La police

4 était déjà dans l'état que je vous ai décrit, à savoir sans crédibilité,

5 dont elle avait besoin, et sans équipement, sans moyen. Donc, vu les

6 conditions dans lesquelles elle opérait, elle ne pouvait pas être

7 efficace.

8 M. Nobilo (interprétation). – Quand vous parlez de moyens, soyons un peu

9 plus concret : quelles étaient les armes dont disposaient les groupes de

10 criminels et quelles étaient les armes dont disposaient la police ?

11 M. Marin (interprétation) - Ces groupes de criminels disposaient de toutes

12 les armes d'infanterie, des armes automatiques, des fusils-mitrailleurs ;

13 ils avaient même des lance-roquettes légers, alors que la police, dans le

14 meilleur des cas, si elle avait des armes, elle avait des fusils et, le

15 plus souvent, c'étaient uniquement des pistolets, des revolvers.

16 M. Nobilo (interprétation). - Eh bien, en plus de la police civile, nous

17 avons également la police militaire qui apparaît. Quel était le problème

18 principal pour choisir des membres de la police militaire ? Donc la raison

19 qui a fait que cette police militaire n’a pas pu être plus efficace que la

20 police civile pour interrompre ces activités criminelles ?

21 M. Marin (interprétation). - En plus de la police civile, la police

22 militaire s'est créée sans qu'il y ait de règles écrites. Ce sont des

23 volontaires qui devenaient également membres de la police militaire. Il

24 n'y avait pas de critères stricts pour sélectionner les futurs membres de

25 ces unités. Alors, cela a fait que nous avons eu, dans la police

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1 militaire, des individus qui étaient portés sur la criminalité, des

2 individus qui étaient loin d'avoir les caractéristiques nécessaires à

3 effectuer ce travail et des hommes qui étaient très peu cultivés, qui

4 parfois avaient uniquement l’école élémentaire.

5 M. Marin (interprétation). - Général, dites-nous, sur l'ensemble de ce

6 territoire de la vallée de la Lasva, est-ce qu'il y avait un centre pour

7 des études de médecine légale ?

8 M. Marin (interprétation). - Non, que ce soit à l'époque où aujourd'hui,

9 on n'avait aucun centre de médecine légale.

10 M. Nobilo (interprétation). – Puis-je avoir l'assistance de l'huissier

11 pour présenter un nouveau document ?

12 M. Dubuisson. – Il s'agit du document D204, D204a pour la version

13 anglaise.

14 M. Nobilo (interprétation). – Monsieur le Président, pour éviter de lire

15 l'ensemble du document et pour que le public ici présent, qui ne voit pas

16 nos documents, puisse savoir de quoi il s'agit, j'essaierai de lire

17 quelques parties, les parties les plus importantes, pour qu'elles soient

18 consignées au procès-verbal et par la suite, je poserai des questions, si

19 vous le permettez.

20 M. le Président. – Le public n'a pas accès ? Je croyais qu'on les mettait

21 sur le rétroprojecteur. Monsieur le Greffier, quand le document est mis

22 sur le rétroprojecteur, on ne le

23 vois pas ?

24 M. Dubuisson. – Si, il est possible de le voir à l'écran, sans problème.

25 M. le Président. – C'est mieux. Quand l'audience n'est pas à huis clos, je

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1 me tourne vers la technique, je pense qu'il faut que le public ait accès à

2 la vision des documents. Cela me paraît normal. C'est très bien de voir le

3 Président, mais il faut voit le document aussi. Merci.

4 M. Nobilo (interprétation). – Merci, Monsieur le Président.

5 Ainsi donc : brigade Stjepan Tomacevic, 2ème Compagnie au jour du

6 25 janvier 1993, nous avons un rapport, "rapport sur l'activité des

7 groupes et des individus qui agissent à l'insu du commandement du HVO". Je

8 ne lirai que le premier paragraphe, par la suite je poserai ma question.

9 "Des problèmes immenses sur le territoire de la municipalité de Vitez sont

10 posés par des groupes et des individus qui, en uniforme et en portant

11 l'insigne du HVO, pillent des biens sociaux et encore plus souvent des

12 biens privés. Au moment où ils effectuent leurs méfaits, ils ont appliqués

13 toutes les méthodes de la criminalité classique.

14 Leur objectif principal est de piller, mais puisque on ne met pas fin à

15 ces activités, leurs méfaits aggravent les tensions entre les relations

16 entre les différents groupes nationaux qui sont déjà tendues.

17 Ces derniers temps, ces pilleurs agissent ensemble avec des soldats qui

18 viennent d'Herzégovine qui les ont encouragés, ce qui fait que les

19 Herzégovènes se lancent de plus en plus souvent seuls dans le pillage des

20 installations privées."

21 Je traduirais la dernière phrase.

22 "La vie même, voire les relations entre les groupes nationaux ont atteint

23 un point de rupture."

24 Puis, à la page suivante : "jusqu'à présent, de tous ces pillages et des

25 introductions dans les locaux privés, il n'y a pas eu beaucoup de

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1 victimes. Mais il faut réagir avec un maximum d'énergie contre ces

2 phénomènes. Cela atteint le point où une action plus vaste est nécessaire

3 qui sera accueillie avec enthousiasme de la part de la population de la

4 municipalité de Vitez de toutes les nationalités, afin de rendre sa

5 réputation à notre uniforme.

6 Signer et adressé à…"

7 Général, vous souvenez-vous de ce rapport qui a été élaboré par

8 M. Budimir et de la brigade de Stjepan Tomacevic ?

9 M. Marin (interprétation). – Oui, je connais M. Budimir. Je connais

10 également la personne qui a tapé ce rapport. Je me souviens également des

11 événements qui sont mentionnés dans ce document et la situation était

12 telle qu'elle est décrite dans le texte.

13 M. Nobilo (interprétation). – Merci. Si vous avez confirmé que cette

14 situation est fidèlement décrite, je n'ai plus de question au sujet de ce

15 document.

16 Avons-nous reçu une cote pour le document précédent ? Il semble que non.

17 M. Dubuisson. – Le document précédent était le D204, et D204a pour la

18 version anglaise. Et maintenant, nous avons le document D205, D205a pour

19 la version française et D205b pour la version anglaise.

20 M. Nobilo (interprétation). - Général, nous avons devant nous le document

21 205 du 22 janvier 1993 rédigé par la même personne, Ivan Budimir, que nous

22 avions également comme auteur du document précédent. Il s'agit d'un

23 rapport sur des engins explosifs qui auraient été jetés en ville dans la

24 zone de responsabilité de la 2ème Compagnie.

25 Il ressort de ce rapport qu'à la date du 22 janvier 1993 on a jeté des

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1 engins explosifs devant le siège de la Croix-Rouge et à un endroit où l'on

2 vendait des cevacici, devant un bâtiment de logements est connu sous le

3 nom de Crno Gorka et devant le commissariat de la police civile. Il en

4 ressort également que quelqu'un a tiré sur l'appartement de Zoran

5 Krizanovic.

6 Alors, ce que je vous demande, c'est de me dire si vous vous souvenez de

7 ces événement et de me dire si nous ne voyons ici qu'un exemple qui en

8 fait doit être vu dans toute une série d'événements comparables ?

9 M. Marin (interprétation). – Oui, ceci est un exemple très parlant et

10 caractéristique d'une situation qui prévalait dans la région et qu'on

11 avait recours à l'utilisation de toutes sortes d'appareils et d'engins qui

12 avaient pour but de porter atteinte à l'ordre et à la sécurité publique.

13 M. Nobilo (interprétation). - De quelle ville s'agit-il parce que ce n'est

14 pas indiqué ?

15 M. Marin (interprétation). - C'était dans la ville de Vitez.

16 M. Nobilo (interprétation). - Nous devons aussi envisager les choses sous

17 l'angle de l'appartenance nationale pour les besoins de cette affaire.

18 Ici, on parle d'un individu, Zoran Krizanovic, dont l'appartement a été

19 touché par un obus. Il est de quelle nationalité ?

20 M. Marin (interprétation). – Il est Croate.

21 M. Nobilo (interprétation). - Qui avait le contrôle sur la police civile à

22 la date du 22 janvier 1993 ?

23 M. Marin (interprétation). - Au 22 janvier 1993, la police… attendez que

24 je me souvienne, le MUP était croate.

25 M. Nobilo (interprétation). - Et le dispensaire, en janvier, il est était

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1 entre les mains de qui ? Qui le gérait ?

2 M. Marin (interprétation). – Les employés étaient des Croates et les

3 patients aussi, pour une période, étaient des Croates.

4 M. Nobilo (interprétation). – La Croix-Rouge appartenait à qui ?

5 M. Marin (interprétation). - Cette Croix-Rouge, concrètement, agissait au

6 niveau municipal.

7 M. Nobilo (interprétation). - Qui était au pouvoir dans la municipalité de

8 Vitez à l'époque ?

9 M. Marin (interprétation). – Les Croates étaient au pouvoir à l'époque.

10 M. Nobilo (interprétation). - Ce bâtiment de Crno Gorka était un grand

11 bâtiment de logement où vivaient les trois groupes nationaux ?

12 M. Marin (interprétation). - Oui, dans ce bâtiment,… Ce bâtiment était une

13 partie d'un grand ensemble qui était encore en travaux, en construction.

14 M. Nobilo (interprétation). – Merci. J'aurais besoin de l'assistance de

15 l'huissier.

16 M. Dubuisson. - Il s'agit du document D206, D206a pour la version

17 anglaise.

18 M. Nobilo (interprétation). - Général, je soulignerai certaines portions

19 de ce texte. Tout d'abord, je vous demande si c'est bien un texte signé

20 par Ivan Budimir et Nada Budza, au 13 janvier 1993, à la 2e Compagnie de

21 Vitez. Reconnaissez-vous leur signature ?

22 M. Marin (interprétation). – Oui, je les reconnais.

23 M. Nobilo (interprétation). - Je lirai les points 1, 2 et 3 de ce rapport

24 qui est intitulé "Rapport sur l'état de sécurité au sein de la

25 2e Compagnie de Vitez".

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1 "Point 1 : Depuis une semaine, tous les jours, nous recevons des visites

2 des hommes de nationalité musulmane, leur objectif étant de devenir membre

3 de nos unités. Jusqu'à présent, nous avons enregistré cinq cas. Il est

4 probable qu'il y en ait d'autres à l'avenir.

5 Point 2 : Nous connaissons de grandes difficultés avec les nouvelles

6 unités du HVO qui viennent d'arriver de Herzégovine. Tous les jours, au

7 crépuscule, ils circulent en ville, armés, et effectuent des tirs en état

8 d'ébriété, emportant atteinte à l'ordre public, à la vie des citoyens. Un

9 problème encore plus grave est celui de savoir qu'à Vitez, il y a des

10 cours dans des écoles, qu'il y a beaucoup d'enfants dans les rues. Nous

11 avons peur qu'il y ait un incident plus grave qui se produise. On a

12 enregistré une tentative de prendre la voiture à notre

13 chef des transmissions, Zoran Jukic.

14 Point 3 : Un soldat ivre, appartenant à l'armée de Bosnie-Herzégovine-

15 Vitez, est sorti dans la zone où patrouillent nos unités : dans la zone de

16 Kuber. Ce problème a été résolu : nous avons adressé un avertissement à

17 l'armée de Bosnie-Herzégovine en disant que si l'incident se reproduisait,

18 nous allions répondre par des tirs. Parce que tout cela s'est produit à

19 2 heures 30 du matin."

20 Ce rapport correspond-il à la réalité de la situation, ces jours-là, dans

21 la ville de Vitez ?

22 M. Marin (interprétation). – Oui, il correspond.

23 M. Nobilo (interprétation). – Merci. Puis-je avoir le document suivant ?

24 M. Dubuisson. – Il s'agit du document D207, D207a pour la version

25 française, D207b pour la version anglaise.

Page 11935

1 M. Nobilo (interprétation). - Merci. Général, vous l'avez reçu ?

2 M. Marin (interprétation). – Oui.

3 M. Nobilo (interprétation). - Je tiens à vous lire quelques points de ce

4 document. On s'y arrêtera pour que vous puissiez vous souvenir de ce

5 problème. Nous parlons donc, ici, du commandement de la brigade de Vitez

6 du 8 avril 1993. Le titre est : "Interdiction de se déplacer pour des

7 personnes en uniforme et de porter une arme dans les agglomérations".

8 Nous avons le préambule : "En raison des atteintes fréquemment portées à

9 l'ordre public et à la paix, des meurtres, des violences, des menaces à

10 main armée, de tirs dans les agglomérations, de même que de la

11 détérioration générale de la sécurité, conformément à l'ordre donné par le

12 commandant, colonel Timohir Blaskic, j'ordonne

13 1. d'interdire dans toutes les agglomérations et lieux de passage, aux

14 personnes en uniforme de se déplacer et de porter une arme en dehors de

15 leur service, sauf durant leur départ sur le front ou leur retour du

16 front."

17 Je saute quelques paragraphes bien que tous les points soient importants.

18 Mais pour accélérer, je passe au point 4.

19 "4. Les armes de poing (pistolet, revolver, etc.) peuvent être portées

20 uniquement par les personnes dotées d'un permis et les armes à canon long

21 uniquement par les membres de la police militaire et civile."

22 Je passe au point 6.

23 "6. Chaque personne qui ouvre le feu sans autorisation, dans les

24 agglomérations, doit immédiatement être arrêtée, désarmée avec ou sans

25 l'autorisation. Puis remettre le procès-verbal au commandant désigné.

Page 11936

1 Signé par le commandant de la brigade : Mario Cerkez."

2 Dites-moi, Général, connaissez-vous la signature de Mario Cerkez et

3 connaissez-vous cet ordre de Blaskic suivant cet ordre de Mario Cerkez ?

4 M. Marin (interprétation). – Oui, je les connais. Et ceci est bien la

5 signature de Mario Cerkez. Le général Blaskic a donné l'ordre selon lequel

6 le général Mario Cerkez a donné un ordre adressé à sa brigade.

7 M. Nobilo (interprétation). – Brièvement, pour quelle raison le

8 colonel Blaskic a-t-il donné cet ordre à l'époque ? Cet ordre qui portait

9 interdiction aux personnes en uniforme de se déplacer ? Pouvez-vous le

10 dire brièvement ?

11 M. Marin (interprétation). – Brièvement, je rappelle que les soldats, au

12 moment où ils rentraient des lignes de front, se rendaient chez eux en

13 uniforme, portaient des armes ; ils portaient atteinte à l'ordre public.

14 Nous avons eu le phénomène d'apparition des groupes criminels et bien

15 d'autres éléments qui portaient atteinte à la sécurité de la population.

16 Le contexte était tel qu'un ordre de ce type soit émis, afin que la

17 situation soit améliorée, afin que les conditions de sécurité soient

18 améliorées pour devenir acceptables pour la population locale.

19 M. Nobilo (interprétation). – Merci. Je voudrais présenter l’ordre

20 suivant, s'il vous plaît.

21 M. Dubuisson. – Il s’agit du document D208 : D208a pour la version

22 française, D208b pour la version anglaise.

23 M. Nobilo (interprétation). - Général, nous avons un ordre très bref. Je

24 lirai l'essentiel.

25 A la date du 6 février 1993, le colonel Blaskic qui est le commandant

Page 11937

1 adresse ce document à toutes les brigades du HVO et à tous les postes

2 autonomes. Alors, c'est une mise en garde pour la non exécution d'un

3 ordre, un ordre sous le numéro 01-01-217/93 du 18 janvier 1993.

4 Dans cette mise en garde, on dit : " L’ordre 01-1-217/93 du

5 18 janvier 1993. Suite à cet ordre-là et par rapport aux incidents répétés

6 de dérangement de l’ordre public et de la paix, de meurtres, de blessures,

7 de menaces avec des armes à feu et de fusillades aux endroits publics,

8 ainsi qu'à la détérioration de toute la situation de sécurité, des tâches

9 concrètes sont établies pour combattre de tels actes et traitements

10 négatifs. Puisque, jusqu'à aujourd'hui, on n'a pas pris de mesures

11 adéquates et efficaces, mais on a…-je vois très mal dans l'original-, mais

12 on a exprimé les négativités citées dans une mesure intensifiée, j’avertis

13 tous les commandants de brigades et d’unités indépendantes de la zone

14 opérationnelle de Bosnie centrale de leur devoir d'exécuter l'ordre

15 susmentionné jusqu'au 8 février 1993, rendre un rapport par écrit à ce

16 commandement sur les mesures et les actions prises poursuivant cet

17 ordre ". On voit mal la date. C’est le 8 ou 9 février. " Signature :

18 commandant-colonel Tihomir Blaskic ".

19 Général, avez-vous connaissance de cet ordre ? L’avez-vous vu ?

20 M. Marin (interprétation). - Cet avertissement, je l’ai écrit moi-même

21 puisque l’on voit mes initiales qui apparaissent dans l’angle gauche.

22 M. Nobilo (interprétation). - Oui, on va tirer cela au clair, car on le

23 reverra souvent. Quand un document n'a pas été rédigé de la main du

24 colonel en personne, comment l'indiquait-on ?

25 M. Marin (interprétation). - Pour pouvoir savoir qui a rédigé le document

Page 11938

1 et pour pouvoir vérifier s'il a été suivi d'effet, nous avons établi une

2 pratique qui a vraisemblablement existé aussi dans l’ex-armée, à savoir

3 d'indiquer dans l'angle gauche les initiales de l’auteur du texte, suivies

4 des initiales de la personne qui a tapé le texte.

5 M. Nobilo (interprétation). - A chaque fois que l'on voit SM, cela veut

6 dire que cela a été fait par vous personnellement ?

7 M. Marin (interprétation). - Oui.

8 M. Nobilo (interprétation). - Pour quelle raison Blaskic a-t-il dû répéter

9 deux fois, voire plusieurs fois, la même chose ? Pourquoi ?

10 M. Marin (interprétation). - Ce texte révèle la gravité de la situation,

11 concernant l'ordre public dans la zone opérationnelle de Bosnie centrale

12 et, en particulier, dans la région de la vallée de la Lasva. Nous avons

13 ici le numéro de l'ordre du 18 janvier 1993, auquel il est fait référence

14 dans le préambule. Nous suivions les effets, les conséquences de cet ordre

15 et nous avons constaté que cet ordre n'a pas été suivi d’effet ; au

16 contraire, que la situation s'était aggravée.

17 M. Nobilo (interprétation). - Pour quelles raisons les unités inférieures

18 ne peuvent-elles pas ou ne souhaitent-elles pas exécuter un ordre donné

19 par le commandement ? Quelle en est la raison ?

20 M. Marin (interprétation). - La raison en est précisément ce que je vous

21 ai dit quand j’ai souligné les caractéristiques de nos formations, à

22 savoir qu’il y avait des relations de familiarité. On ne respectait pas la

23 discipline. On n’avait pas suffisamment de soldats formés qui soit suivi

24 un enseignement militaire soit une pratique militaire. Nous n’avions pas

25 non plus d'instrument nous permettant de mettre fin à la criminalité parce

Page 11939

1 qu'on n’avait pas de forces, d’effectifs adéquats qui auraient pu nous

2 permettre de rétablir l'ordre public et d'exercer un contrôle effectif de

3 la situation.

4 M. Nobilo (interprétation). - Visiblement, c'est vous qui avez rédigé la

5 plupart ou un grand nombre de ces ordres. Pouvez-vous nous dire quelle a

6 été la position du colonel Blaskic ? Est-ce qu’il tolérait les violences

7 des soldats membres du HVO contre les Musulmans ? Tout en autorisant…

8 (L'interprète se reprend)

9 M. le Président. - Pouvez-vous répéter la question ?

10 M. Nobilo (interprétation). - Quelle était la position du colonel Blaskic

11 vis-à-vis des délinquants ? Est-ce qu’il autorisait les délinquants à agir

12 contre les Musulmans sur le territoire sous son contrôle ?

13 M. Marin (interprétation). - Non, le colonel Blaskic n’a jamais autorisé

14 cela. Pour lui, un délinquant était un délinquant. Il utilisait tous les

15 moyens, tous les instruments, toutes les forces qui étaient à sa

16 disposition à cette époque pour s’attaquer aux délinquants et criminels,

17 quelle que soit leur nationalité ! C’est ce qui apparaît à la lecture du

18 document que nous sommes en train d’examiner et je suis sûr que cela

19 apparaîtra également à la lecture d'autres documents.

20 M. Nobilo (interprétation). - Je demande l'aide de l’huissier.

21 M. Dubuisson. - D209 et D209a pour la version anglaise.

22 M. Nobilo (interprétation). - Général, je vais également lire quelques

23 parties de cet ordre. En fait, il s'agit ici de la pièce D209 qui est un

24 rapport élaboré dans la brigade de Vitez, le 16 mars 1993. Nous sommes

25 donc bien en mars 1993 et l'officier de service était Yvan Budimir.

Page 11940

1 Je lis : " A 18 heures 30, le 16 mars 1993, une forte explosion a été

2 entendue, provenant du centre de la ville. Le MUP, c’est-à-dire la police,

3 ainsi que le centre OIO, Centre de contrôle et d’alerte, ont été informés.

4 Il a été établi plus tard qu'un explosif ou une grenade avait été jeté

5 devant le magasin Max, devant lequel passaient de nombreux passants dont

6 certains ont été légèrement blessés. Quelques voitures garées sur le

7 parking ont également été endommagées. "

8 Je passe maintenant au deuxième paragraphe de ce rapport : " Le

9 15 mars 1993, à 19 heures 15, Ivica Drnic, commandant de compagnie, nous a

10 informés qu'un groupe de Musulmans ont été interceptés, qu'ils étaient en

11 train d'arrêter et de fouiller des personnes voyageant dans la direction

12 de Veceriska ".

13 Je passe quelques lignes, 2 lignes, et je lis la suite : " Nous avons

14 appris que Zikret Ahmic était le dirigeant du groupe en question ".

15 M. le Président. – Excusez-moi, je vois Ferhet Haskic.

16 M. Marin (interprétation). - …que Ferhet Haskic (se corrige l'interprète)

17 était le dirigeant en question et le commandant de l'armée de Bosnie-

18 Herzégovine et Zikret Ahmic a été informé au sujet de cet incident. Les

19 représentants de l'armée de Bosnie-Herzégovine sont immédiatement entrés

20 en action pour intervenir en même temps que les policiers militaires.

21 M. Nobilo (interprétation). – Oui, le chef du groupe était Ferhet Haskic.

22 Quant à Zikret Ahmic, c'est celui qui est intervenu et qui a entrepris des

23 actions destinées à combattre M. Haskic. Zikret Ahmic est donc le membre

24 de l'armée de Bosnie-Herzégovine qui a reçu la plainte et il est intervenu

25 contre Haskic.

Page 11941

1 Je continue la lecture après avoir sauté quelques lignes. Au paragraphe

2 suivant, nous lisons :

3 "Le 16 mars 1993, à 0 h 55, selon le commandant de la Compagnie Ivica

4 Drnic, un exposé a été jeté devant le quartier général de Veceriska

5 provoquant des dommages importants dans ce quartier général.

6 Nous suspectons que cette action a également été l'œuvre de Ferhet Haskic

7 qui a donc jeté cet explosif.

8 Signé : Officier de service dans la Brigade, Ivan Budimir."

9 Est-ce que la description de ces événements, dans le document 209a,

10 correspond à la réalité des événements de l'époque ?

11 M. Marin (interprétation). – Nous reçu un rapport à cet effet au

12 commandement de la zone opérationnelle. Je connais bien ces événements et

13 je reconnais le document.

14 M. Nobilo (interprétation). – Pour le besoin de ce procès, examinons les

15 choses d'un point de vue ethnique. Il est question ici de la brigade de

16 Vitez qui est une unité du HVO ?

17 M. Marin (interprétation). – Oui.

18 M. Nobilo (interprétation). – Ferhet Haskic était-il un Musulman de Donja

19 Veceriska ?

20 M. Marin (interprétation). – C'était un Musulman qui vivait à Donja

21 Veceriska je crois qu'il a été tué.

22 M. Nobilo (interprétation). – Le commandant de Donja Veceriska, dont le

23 quartier général a été visé par Haskic lorsqu'il a jeté cet explosif,

24 était-il le commandant local du HVO ?

25 M. Marin (interprétation). – Oui, le commandant des unités locales de ce

Page 11942

1 village.

2 M. Nobilo (interprétation). – hors micro

3 M. Marin (interprétation). - Je vais clarifier les choses. Il existait une

4 usine qui fabriquait de nombreux explosifs dans laquelle travaillaient les

5 habitants dans la ville de Vitez. C'est la raison pour laquelle cette

6 usine était accessible assez facilement à un grand nombre de personnes,

7 notamment au début des actions de guerre de l'armée de Republika Srpska

8 qui la visait de façon plus particulière. Donc il est fort probable que

9 des explosifs aient pu ensuite

10 circuler entre les mains de personnes qui se les étaient appropriées dans

11 l'usine, notamment des délinquants, des criminels, toutes personnes qui

12 pouvaient accéder à ces explosifs et qui avaient un intérêt à l'utiliser.

13 M. Nobilo (interprétation). – Est-ce que cela signifie que des soldats

14 possédaient des explosifs, mais également des civils ?

15 M. Marin (interprétation). – Oui.

16 M. Nobilo (interprétation). – Je demande l'aide de l'huissier pour la

17 distribution du document suivant.

18 M. le Président. – Nous distribuerons ce document pour la reprise qui aura

19 lieu à 14 heures 30.

20 L'audience est suspendue.

21 La séance est suspendue à 12 heures 55.

22 L'audience est reprise à 14 heures 35.

23 M. le Président. - L'audience est reprise. Introduisez le général Blaskic,

24 s'il vous plaît.

25 (L’accusé, M. Blaskic, est introduit dans la salle d’audience.)

Page 11943

1 M. le Président. – Bien. Maître Nobilo, nous en étions arrivés à la

2 présentation d'un nouveau document.

3 Ça va général, vous m'entendez ?

4 M. Marin (interprétation). - Je vous entends.

5 M. Nobilo (interprétation). – Oui, c'est exact, mais, si vous me le

6 permettez, j'aimerais remédier à une omission de ma part. J'aimerais que

7 nous parlions peut-être des activités du général pendant la guerre :

8 quelles étaient ses fonctions, etc. J'ai omis le faire ce matin et

9 j'aimerais peut-être le faire maintenant, en début d'après-midi.

10 Général, dites-moi, quelles étaient vos activités sur le territoire de

11 l'ex-Yougoslavie pendant avant la guerre ? De quoi vous êtes-vous occupé ?

12 M. Marin (interprétation). - J'ai un diplôme de la faculté des sciences

13 politiques en sociologie. Après mon diplôme, j'ai travaillé dans les

14 structures civiles de la défense de 13 à 14 ans environ. Pour ce qui est

15 de la formation militaire, j'ai fait l'école des officiers d'infanterie ;

16 cette école n'était pas une formation spécialisée mais on le faisait

17 pendant son service régulier, service que j'ai fait en tant que citoyen de

18 l'ex-Yougoslavie.

19 M. Nobilo (interprétation). - Après votre service militaire -je crois que

20 cette école durait six mois-, est-ce que vous avez été à la tête d'une

21 unité militaire jusqu'au début de la guerre ?

22 M. Marin (interprétation). - Le programme de cette école permettait aux

23 officiers de s'occuper d'unités jusqu'au niveau de la compagnie ; nous

24 faisions des stages à la tête

25 de troupes, 6 mois ou 7 mois selon la durée de votre service militaire :

Page 11944

1 si vous aviez une formation supérieure, vous restiez 12 mois, sinon 15 à

2 16 mois. J'ai donc fait un service de 12 mois. Ensuite, je suis rentré

3 chez moi, là où j'habitais. J'ai continué à travailler dans les structures

4 de défense civile dont j'ai déjà parlé.

5 M. Nobilo (interprétation). - Au début de la guerre, quand et où avez-vous

6 rejoint les préparatifs pour la défense contre l'attaque de la JNA ?

7 M. Marin (interprétation). – Au début de la guerre de Bosnie-Herzégovine,

8 j'étais au secrétariat de Novi Travnik et j'ai rejoint le HVO au mois

9 d'avril 1992, en qualité de collaborateur spécialisé auprès de l'état-

10 major municipal de Novi Travnik.

11 En effet, en raison des qualifications que j'avais, en raison de mes

12 activités, je pouvais apporter le plus dans l'organisation des unités dans

13 la municipalité de Novi Travnik.

14 A partir du mois d'octobre 1992, j'ai été engagé au commandement de la

15 zone opérationnelle dont le siège était à Vitez. Mes tâches étaient au

16 secteur des opérations. Après l'accord de Washington, j'ai été déplacé et

17 on m'a nommé chef de l'état-major, à Tomislavgrad. J'y suis resté deux

18 ans. Après la décision sur l'organisation de la fédération militaire, j'ai

19 été nommé chef de l'état-major à Mostar et je m'y trouve encore

20 aujourd'hui.

21 M. Nobilo (interprétation). - Veuillez expliquer encore une chose à la

22 Chambre. Quelles étaient vos activités concrètes au commandement de la

23 zone opérationnelle de Bosnie centrale ? Vous dites que vous étiez à la

24 tête des opérations : que faut-il entendre par là exactement ? Que

25 faisiez-vous ?

Page 11945

1 M. Marin (interprétation). – La tâche du chef des opérations consiste en

2 la chose suivante, avec le chef d'état-major : organisation des activités

3 du commandement, exécution des ordres du commandant et de ses décisions,

4 préparation de documents, exécutions, préparation de la formation et de

5 l'entraînement des unités, et évaluation de la situation sur les lignes de

6 défense. Voilà, en résumé.

7 M. Nobilo (interprétation). – Merci. Nous allons passé au document que

8 nous avons mentionné avant la pause déjeuner. J'aimerais que l'huissier

9 m'aide à distribuer les documents.

10 Apparemment, il y a un problème avec le transcript. Le général de brigade

11 Marin a dit qu'il était chef d'état-major d'un corps d'armée et non pas ce

12 qui figure au transcript.

13 M. Dubuisson. – Il s'agit du document D210, D210a pour la version

14 anglaise.

15 M. Marin (interprétation). – J'étais chef d'un district militaire à

16 Tomislaka, ce qui comprend plusieurs brigades et qui équivaut à un corps

17 d'armée.

18 M. Nobilo (interprétation). – Général, veuillez examiner ce document. Je

19 vais vous donner lecteur des grandes lignes de ce document pour que cela

20 figure au compte rendu. Ce document est daté du 16 mars 1993 de Donja

21 Veceriska.

22 Il y est dit que le 16 mars 1993, à 17 heures, au café de Branko et Franjo

23 Drmic, une réunion s'est tenue du HVO de Donja Veceriska où les décisions

24 suivantes ont été prises :

25 "que le 16 mars 1993, à partir de 17 heures, on ne tolérerait aucune

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1 provocation armée, aucune provocation d'autre forme, qui dérangerait la

2 population croato-musulmane de la part de l'armée du Conseil de la défense

3 croate ou des forces armées musulmanes.

4 2. Nous ferons tout ce que nous pouvons pour faire en sorte que la

5 tranquillité du peuple croate et musulman règne sur ce territoire et nous

6 demandons à l'autre partie de faire de même.

7 3. La population croate et musulmane doit retourner à ses tâches

8 domestiques et, pour ce qui est de la structure de la République de

9 Bosnie-Herzégovine, la communauté d'Herceg-Bosna, cela n'entraînera pas

10 des différents entre ces deux peuples qui ont peuplé ces territoires

11 depuis des siècles.

12 Les unités de réserve de Donja Veceriska et l'armée musulmane devront

13 contrôler les extrémistes des deux peuples.

14 5. La force de réserve du HVO de Donja Veceriska, pour sa part, fera tout

15 ce qui est en son pouvoir pour empêcher Donja Veceriska de devenir un

16 carrefour pour résoudre le conflit croato-musulman dans la République de

17 Bosnie-Herzégovine et au sein de la communauté croate d'Herceg-Bosna.

18 6. Que l'armée musulmane de Donja Veceriska remplisse toutes les tranchées

19 dans l'intérêt d'une cohabitation des deux peuples sur ce territoire.

20 7. Qu'il n'est pas autorisé d'entrer dans la cours d'autrui de manière

21 illégale et quiconque y entre illégalement sera arrêté.

22 16 mars 1993."

23 Dites-moi, tout d'abord, est-ce que vous vous souvenez de cette discussion

24 locale et est-ce qu'il était habituel qu'il y ait des conflits au niveau

25 des villages entre deux formations armées que l'on procède à des

Page 11947

1 règlements de compte au niveau du village ?

2 M. Marin (interprétation). - Ces activités portent sur un accord et j'en

3 ai connaissance, mais cela découle d'activités visant à faire en sorte que

4 les tensions s'estompent qui donc proviennent des activité d'extrémistes à

5 la fois dans l'armée des Musulmans, des Bosniens, de l'armée de Bosnie-

6 Herzégovine, et au sein du HVO.

7 Cela ressort tout particulièrement de la date. On constate que ce document

8 a été rédigé suite à l'établissement d'un barrage routier sauvage à

9 hauteur de Donja Veceriska, dont nous avons parlé avant la pause déjeuner

10 avec, notamment, le nom de Haskic.

11 De même, on voit des conclusions de ce document que des tensions

12 existaient précisément entre les armées qui étaient organisées par

13 village, HVO, armée de Bosnie-Herzégovine, ce qui reflète fidèlement la

14 carte que nous voyons.

15 M. Nobilo (interprétation). - J'aimerais vous demander encore une fois, ce

16 texte qui commence en disant : "Le 16 mars 1993, à 17 heures, une réunion

17 a eu lieu à tel café…",

18 est-ce que c'est là une façon militaire de prendre des décisions ou

19 s'agit-il d'une prise de décision de type démocratique dans les villages

20 dont vous avez parlé dans les caractéristiques de l'organisation ?

21 M. Marin (interprétation). – C'est précisément ce dont j'avais déjà parlé.

22 Il s'agissait d'une prise de décision démocratique et d'une manière de

23 travailler. Ce qui aurait dû émaner d'un système de commandement selon

24 toute organisation militaire.

25 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce qu'une petite unité, dans un petit

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1 village, peut prendre des décisions ? Est-ce qu’il est typique de prendre

2 ce type de décision ?

3 M. Marin (interprétation) - Si les choses étaient telles qu’elles

4 devraient l’être, cela aurait dû être des hommes politiques ou des

5 représentants des autorités civiles qui auraient dû prendre une telle

6 décision. Mais en raison du caractère non clair du partage des tâches,

7 dans l'intérêt général, dans l'intérêt de la sécurité de la population de

8 tels documents existaient.

9 M. Nobilo (interprétation). - Je vous remercie. J'aimerais maintenant que

10 nous examinions le document suivant.

11 M. Dubuisson - Il s'agit du document D211, D211A pour la version française

12 et D211B pour la version anglaise.

13 M. Nobilo (interprétation) - Nous avons donc ce document D 211 devant

14 nous. J'aimerais vous demander d'examiner ce document, de passer à la

15 dernière page, et de me dire si c'est bien la signature du colonel Blaskic

16 ainsi que le sceau de la zone opérationnelle ? J’aimerais que vous me

17 disiez si vous vous souvenez de ce document ?

18 M. Marin (interprétation) - C'est bien la signature du général Blaskic et

19 le sceau est celui de la zone opérationnelle de Bosnie centrale. On trouve

20 également une annotation personnelle que j'ai apposée sur ce document en

21 première page où on voit « par Novi Travnik ».

22 M. Nobilo (interprétation) - Je vous donnerai lecture de quelques lignes

23 essentielles de cet ordre du colonel Blaskic. Cet ordre date du 17 mars

24 1993, le titre du document est : "Traitement des personnes enclines à

25 adopter un comportement criminel et destructeur ordre ».

Page 11949

1 « Il est adressé à toutes les unités, etc., de la zone opérationnelle dans

2 le but d’éviter que des comportements ouvertement destructeurs ne soient

3 adoptés de façon constante par des individus portant des uniformes du HVO

4 et des insignes des formations armées du HVO, et afin d'augmenter le degré

5 de la préparation au combat. Je prends par la présente l’ordre suivant »,

6 et je vous citerai le point 3 pour gagner du temps.

7 Point 3 : « Les individus enclins à un comportement perturbateur devront

8 rendre leurs armes, leurs uniformes et leurs autres.... Une mission

9 appropriée en temps de guerre en conformité avec le décret. »

10 Page suivante, la deuxième partie du point 4 : « On peut voir que les

11 commandants, à tous les niveaux, seront responsables de couvrir en

12 particulier les conscrits enclin à adopter un comportement perturbateur et

13 criminel qui on été décrits comme tels dans les registres des pelotons »,

14 etc.

15 Je crois que le document est clair et qu'il se passe de commentaires. On

16 voit bien pourquoi il a été rédigé et quel est son message.

17 J’aimerais que vous m’expliquiez une chose. le colonel Blaskic dit qu'il

18 faut désarmer les éléments criminels du HVO et qu'il faut les affecter à

19 d'autres tâches. Est-ce que cela signifie qu'on les affecte aux unités de

20 travail qui étaient celles qui ne portaient pas les armes ?

21 M. Marin (interprétation) - Oui.

22 M. Nobilo (interprétation). - Page suivante, deuxième point du point 4, on

23 parle de commandants qui couvrent, etc.

24 Alors, comment un commandant pourrait couvrir un tel comportement ?

25 M. Marin (interprétation) - La cause en était la suivante. Je répète les

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1 unités étaient créées au sein d'un village. Au village, il y avait des

2 liens de parenté, des liens de voisinage, et c'est l'une des raisons qui

3 explique une telle couverture.

4 Mais le général Blaskic en a pris conscience et donc, de manière express,

5 il a demandé au commandant qui lui était subordonné de le faire vis-à-vis

6 des personnes qui lui auraient été subordonnées.

7 Cet ordre et ce type d'ordre ont été pris par le général Blaskic dans le

8 cadre de ses activités, y compris par oral. Il a insisté pour que soit

9 mise en œuvre, exécuter ces mesures. Il est entré en contact avec des

10 commandants pour s’en assurer et, personnellement, il m'a demandé de

11 rechercher des éléments permettant de voir dans quelle mesure, les mesures

12 avaient été appliquées et ce qu'il fallait entreprendre par la suite.

13 Mais le problème essentiel dans la mise en exécution de ces mesures était

14 que le général Blaskic n'avait pas de forces matérielles suffisantes pour

15 s'opposer à de tels événements, de tels comportements qui intervenaient à

16 des niveaux inférieurs. Nous n'avions pas de forces, de moyens , pour nous

17 attaquer aux problèmes.

18 Nous avons dû insister et nous avons dû, comme seule mesure, affecter les

19 soldats à la défense civile ou à d'autres taches. Ce qui représentait tout

20 de même une sanction à l'époque : j'ai bien dit ce que représentait le

21 fait de porter un uniforme dans sa ville, dans son village. C'est le type

22 de mesures que nous avons prises pour lutter contre ce type de

23 comportement sur ce territoire.

24 M. Nobilo (interprétation). - J'aimerais vous demander de regarder le

25 texte original en croate. On voit les initiales TBVS : est-ce que cela

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1 veut dire que Tihomir Blaskic a lui-même rédigé cet ordre ?

2 M. Marin (interprétation). – A la lecture de ces initiales et compte tenu

3 du contenu de cet ordre, je sais que c'est lui-même qui l'a rédigé.

4 M. Nobilo (interprétation). – Monsieur le Président, en anglais et en

5 français, on lit les initiales SM, ce qui semblerait indiquer que c'est le

6 témoin qui l'a rédigé. Mais, dans la version originale, ce sont bien les

7 initiales TB. Je pense que c'est une erreur de traduction.

8 Je voudrais demander à l'huissier de bien vouloir distribuer le document

9 suivant.

10 M. le Président. - Il n'est pas question de vous poser la question

11 maintenant puisque les juges posent les questions en dernier lieu.

12 Simplement, j'attire votre attention sur ce point, sur lequel vous venez

13 d'appeler notre attention : c'est cette transcription des lettres du

14 supposé auteur. Simplement. Peut-être que nous en reparlerons tout à

15 l'heure. Il faut reconnaître que c'est tout de même curieux ; mais c'est

16 vous-même qui avez posé la question.

17 Bien. Poursuivez. Nous en reparlerons, je pense.

18 M. Hayman (interprétation). – Nous devrons demander au département de

19 traduction, qui est à l'origine de ces traductions, autant que je sache.

20 Je pense qu'ils travaillaient probablement avec un modèle sur ordinateur ;

21 je pense qu'il y avait plusieurs documents qui portaient les initiales SM,

22 en bas du document : j'imagine qu'ils n'ont pas remplacé le SM des autres

23 documents par TB.

24 M. le Président. - Je vous remercie. Il faudra quand même en apporter la

25 précision par une preuve quand même. Compte tenu des développements que

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1 nous avons eus hier sur d'autres erreurs typographiques de cette sorte.

2 Ceci est un point qui n'est pas négligeable. Mais je ne voulais pas plus

3 avant vous interrompre. Maître Nobilo, vous poursuivez.

4 M. Nobilo (interprétation). - Sur l'original, on voit bien qu'il a écrit :

5 le service de traduction est d'ici, du Tribunal, mais on voit bien, dans

6 l'original, que les initiales TB figurent en bas du document.

7 M. le Président. - Vous avez-vous, vous-même, l'original ?

8 M. Nobilo (interprétation). – Mais c'est l'original ou plutôt une copie de

9 l'original.

10 M. le Président. - Au besoin, les Juges demanderont de voir l'original.

11 M. Nobilo (interprétation). – Monsieur le Président, nous n'avons pas

12 l'original : nous avons également une copie.

13 M. le Président. – Une copie ? C'est bien ce que j'avais compris.

14 D'accord.

15 M. Nobilo (interprétation). - Quand je dis "original", je veux parler de

16 la version en croate.

17 M. le Président. - D'accord.

18 M. Dubuisson. – Le document suivant porte le n° 212 et 212a pour la

19 version anglaise.

20 M. Nobilo (interprétation). - Général, vous avez parlé des difficultés

21 dans l'accomplissement des tâches de la police civile, mais vous avez

22 également parlé de la police militaire. J'aimerais attirer votre attention

23 sur ce document. J'aimerais tout d'abord que vous voyiez si c'est bien la

24 signature de Ivan Budimir, car on voit ses initiales.

25 M. Marin (interprétation). – Oui, c'est bien sa signature.

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1 M. Nobilo (interprétation). - Je vais vous donner lecture de certains

2 points clés de cette analyse.

3 La deuxième : Bojna, Stepan Tomasevic analyse l'activité de la police

4 militaire dans la zone de responsabilité du 2e Bataillon.

5 "Premièrement, à Vitez, il existe la police militaire régionale, la police

6 militaire municipale, le 4e Bataillon de police militaire et la police

7 civile.

8 Deuxièmement, nous estimons qu'il n'y a pas de sphère d'activité.

9 Troisièmement, des problèmes se posent dans la ville et dans toute la

10 municipalité de Vitez.

11 Quatrièmement, pillages incessants (voitures, maisons, entreprises), des

12 blessures dans les cafés, des opérations de sabotage en ville (cafés) des

13 assassinats, etc.

14 4a Pour l'instant, il y a eu des attaques à main armée contre six maisons,

15 deux Croates, un Serbe et trois Musulmans.

16 Cinquièmement, des barrages illégaux ont été érigés tous les jours.

17 Sixièmement, la police n'applique pas les ordres concernant les heures

18 d'ouverture des restaurants. Les patrouilles de la ville et des zones

19 avoisinantes n'existent pas ou ne sont pas suffisamment fréquentes, etc."

20 Je passe au point 11 : "Le comportement arrogant de la police militaire

21 régionale entraîne une anxiété et a des retombées sur le moral des

22 troupes. Selon les renseignements dont nous disposons, ils reçoivent un

23 salaire de 100 Marks allemands et participent à des fêtes, par exemple,

24 pour la fin de l'année."

25 Ce document ne porte pas de date et, compte tenu de son contenu, quand

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1 pensez-vous qu'il aurait pu être rédigé ?

2 M. Marin (interprétation). - Selon mes souvenirs, ce document aurait pu

3 être rédigé au mois de février ou de mars 1993.

4 M. Nobilo (interprétation). - On parle ici de la fin de l'année. C'est

5 donc le passage de 1992 à 1993. Est-ce que vous vous souvenez de quelque

6 chose de particulier à proximité de l'hôtel Vitez autour du

7 31 décembre 1992 ?

8 M. Marin (interprétation). - Oui, je me souviens d'un événement marquant,

9 notamment pour la sécurité du général Blaskic. Le général Blaskic a

10 insisté dans ses ordres écrits et oraux, sur la lutte contre les

11 criminels, sur la discipline et l'ordre au sein des unités, sur

12 l'amélioration de la sécurité globale dans les villes et dans les

13 villages.

14 Les groupes criminels se sont sentis menacés et le 31 décembre 1992, on a

15 tenté de perpétrer un attentat contre le général Blaskic. C'était le fait

16 d'un soldat qui s'est approché de son bureau où il imaginait que le

17 général Blaskic était. Heureusement, il n'y était pas. Dans le

18 couloir entre les bureaux de la section des opérations où je me trouvais

19 et le bureau où se trouvait le général Blaskic pendant son travail, il a

20 lancé une grenade à main. Il était en état d’ébriété. Après certaines

21 mesures, il a été possible de faire sortir ce soldat du bâtiment et ce

22 soldat a donc offert une résistance. Suite à un combat, ce soldat a perdu

23 la vie.

24 J'insiste donc : il s'agit là d'une situation extrêmement difficile et

25 nous avons agi avec ce dont nous disposions, les forces dont nous

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1 disposions, l'organisation dont nous disposions. Cela ne convenait pas aux

2 criminels et ils ont donc essayé d’appliquer y compris de telles méthodes.

3 M. Nobilo (interprétation). - Général, j’aimerais que nous revenions à ce

4 document. Est-ce que vous le reconnaissez comme étant authentique de

5 l'époque ? Est-ce que vous l'avez vu à l'époque ?

6 M. Marin (interprétation). - De tels rapports parvenaient au commandement

7 de la zone opérationnelle. Ils découlaient d'ordres donnés oralement et il

8 s'agissait d'identifier la manière de sortir de cette situation difficile.

9 M. Nobilo (interprétation). - Je vous remercie. Je demanderai à

10 l’huissier de distribuer le document suivant. Je ne vous ai pas posé la

11 question, mais est-ce que vous reconnaissez la signature d’Ivan Budimir en

12 dernière page ?

13 M. Marin (interprétation). - Oui, je reconnais sa signature ainsi que les

14 initiales de Nada Budza qui a tapé le document.

15 M. Dubuisson. - Il s'agit du document D213 : D213a pour la version

16 française, D213b pour la version anglaise.

17 M. Nobilo (interprétation). - Général, un événement marquant a eu lieu et

18 il illustre ce que vous venez de dire, c'est-à-dire attaques de groupes

19 armés contre le poste de police, ensuite contre la prison où l’on a libéré

20 un détenu. Je vous donnerai lecture d’une partie de ce rapport et je vous

21 demanderai ensuite de

22 Un rapport a été adressé à l'administration de la police militaire de

23 Mostar, le 1 mars 1993. On dit : " Renseignements sur les personnes qui

24 ont organisé une attaque contre le MUP, la police civile et la police

25 militaire de Vitez ".

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1 Je vous donnerai lecture uniquement de quelques paragraphes.

2 Le deuxième : " Par des moyens opératifs, j'ai établi que Gazibaric a

3 participé à un certain nombre de pillages où l’on a aliéné des véhicules

4 et d'autres biens de valeur ainsi que des sommes d'argent importantes. Le

5 motif de sa protection est de nature purement matériel ".

6 Deux paragraphes plus bas : " Le 26 février 1993, on a arrêté Ferdo

7 Gazibaric". Ma copie est écrite très petit. Je vais donc essayer, si vous

8 me le permettez, d'utiliser mes lunettes. " Le commandant de la police

9 militaire -c'est l'avant-dernier paragraphe de cette page-, Zarko Andric,

10 a organisé une réunion de la police militaire où il a informé les

11 personnes présentes de l'arrestation de Ferdo Gazibaric et de la nécessité

12 de le libérer -c'est le deuxième paragraphe de la deuxième page du texte

13 français- pour éviter sa dénonciation éventuelle des autres participants à

14 des actes criminels.

15 Je saute la deuxième page du texte croate et je passe à la troisième

16 page ; le troisième paragraphe en partant du bas.

17 Au cours de la réunion, il parlait dans un contexte négatif " du rôle de

18 Busovaca, du cadre de Busovaca -dernier paragraphe de la troisième page du

19 texte français- qui crée la politique mais n’entreprend rien de concret

20 pour la défense de Travnik ".

21 Quatrième page du texte français : " Ainsi, ils ont dit que la prison est

22 pleine de Croates de Travnik, Vitez et Novi Travnik, mais qu’il n’y a

23 personne de Busovaca, bien qu'ils sachent que beaucoup de personnes de

24 Busovaca s'occupent de mêmes actes qu’eux ".

25 Nous sautons un paragraphe. Nous passons au paragraphe suivant : " Environ

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1 50 personnes, avec de grands camions et avec un PAM, une mitrailleuse

2 antiaérienne, amenée

3 du front à Turbe ainsi qu'un nombre important de voitures personnelles

4 sont parties aux environs de 16 heures en direction de Vitez. Leur arrivée

5 à Vitez a créé une situation exceptionnellement tendue parmi les unités du

6 HVO et la population.

7 Andric et quelques autres policiers militaires ont occupé le bâtiment du

8 MUP -donc la police civile- et de la police militaire et exigé du

9 commandant Pasko Dubicic de libérer Gazibaric personnellement.

10 Et tout cela, sous la menace constante de toutes les armes à feu

11 disponibles. Puisque Gazibaric était à la prison Kaonik à Busovaca, sa

12 libération y a été effectuée.

13 Dans des salles de la police militaire, 4e Bataillon, on a établi une

14 communication avec le colonel Blaskic à Kiseljak. On lui a représenté la

15 situation actuelle, ainsi que les conséquences possibles, si l'on ne

16 satisfaisait pas à leur demande et si un conflit armé devait éclater.

17 Blaskic a suggéré de faire tout cela sans utiliser la force et sans

18 effusion de sang.

19 Après, la libération de Gazibaric, cette "unité" s'en est allée dans la

20 direction de Travnik, s'abandonnant à des fusillades incontrôlées et en

21 hurlant."

22 Dernière page, quatrième page du texte croate, 2ème paragraphe de la page 5

23 du texte français : "on connaît la liaison que ces individus entretiennent

24 avec les criminels de l'armée de Bosnie-Herzégovine. Durant le conflit à

25 Busovaca, ce groupe a collaboré activement avec Refik Lendo, Ramis Delalic

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1 et Coco. Leur collaboration se reflète dans la vente des véhicules volés,

2 des produits techniques et la protection des individus criminels" (Pero et

3 Stipo Julje pour qui on a lancé un mandat d'arrêt).

4 Et les deux derniers paragraphes : "ce qui s'est passé a des conséquences

5 négatives auprès de la population croate et montre le manque de pouvoir

6 des organes légaux et des institutions du HVO dans leur lutte contre les

7 crimes et les criminels."

8 Dans les rangs de Bosnie-Herzégovine, on n'attendait que cela, et on

9 commente cela comme un conflit ouvert entre les forces désunies du HVO.

10 Ils suivront l'évolution future avec satisfaction et s'attendent à

11 d'autres conflits de cette sorte, ce qui a une influence sur leur moral et

12 ils offrent leur aide."

13 Général, je vous demande d'abord si vous connaissez ce rapport et si vous

14 connaissez et si vous connaissez la signature des personnes qui l'ont

15 signé ?

16 M. Marin (interprétation). – Je connais aussi bien le rapport que les

17 événements et les signatures sont authentiques.

18 M. Nobilo (interprétation). – Général, dites-nous, que vous est-il resté

19 en mémoire de ces événements ? Ces événements se sont-ils entièrement

20 déroulés comme cela est écrit dans le texte ou avez-vous des souvenirs

21 supplémentaires qui vous sont restés en mémoire.

22 M. Marin (interprétation). - Ce rapport détaille de façon complète et

23 fidèle la situation qui s'est produite. Je me trouvais au commandement de

24 la zone opérationnelle lorsque ces événements sont survenus et le

25 commandement de la zone opérationnelle a donc informé les personnes

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1 intéressées. J'ai donc reçu l'information et, compte tenu de la complexité

2 de la situation, il fallait aussi demander l'avis de Blaskic qui se

3 trouvait à Kiseljak.

4 Ce rapport ne fait que confirmer et démontrer quels problèmes posait la

5 nécessité de rétablir l'ordre public, ainsi que la sécurité des citoyens.

6 Cela montre également combien il était difficile de s'opposer aux

7 délinquants et criminels, des individus qui avaient un tel pouvoir qu'ils

8 en arrivaient même à influer sur les soldats qui tenaient les lignes de

9 défense contre les Serbes de la Republika Srpska et ont obtenu la

10 libération, par la force, d'un homme qui avait commis un acte délictueux.

11 M. Nobilo (interprétation). – Général, est-ce que cela prouve que le HVO,

12 à l'époque, était une armée bien structurée ? Est-ce que vous pensez qu'un

13 événement de ce genre peut se produire dans une armée moderne et bien

14 structurée ou ben la situation était-elle différente ?

15 M. Marin (interprétation). – Une telle situation ne se produit jamais dans

16 une armée moderne et bien structurée. Mais, compte tenu des conditions

17 dans lesquelles nous vivions, des conditions marquées par la préparation

18 de la guerre, ces événements se sont produits. C'est effectivement ce qui

19 a eu lieu.

20 M. Nobilo (interprétation). – Dites-nous, dans ces conditions, alors qu'un

21 système était en train de mourir et que le système qui devait le remplacer

22 n'était pas encore créé, de quelle façon M. Blaskic pouvait-il simplement,

23 efficacement et uniquement imposer ses ordres ? Qu'avait-il à sa

24 disposition pour imposer ses ordres ? Etait-il suffisant pour lui de

25 transmettre un ordre en tant que commandant ou devait-il faire quelque

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1 chose de plus pour que cet ordre soit obéi ?

2 M. Marin (interprétation). – Dans la situation dans laquelle nous étions,

3 il n'était nullement suffisant d'émettre un ordre au sens militaire qui,

4 en général, confère à ce terme pour que l'ordre en question soit obéi.

5 Mais le général Blaskic, aussi bien aux réunions d'information du matin

6 que dans d'autres circonstances, dans le cadre de ces contacts personnels,

7 n'a jamais cessé de nous répéter que nous avions pour mission de

8 structurer et d'organiser nos formations.

9 Il cherchait par tous les moyens possibles à réaliser cette tâche. L'une

10 des façons, pour ce faire, était d'insister, de persuader, de parler des

11 effets négatifs que tel ou tel comportement pouvait avoir et de plaider et

12 c'est seulement quand tous ces efforts étaient mis en œuvre qu'il était

13 possible de s'attendre à ce qu'un ordre soit obéi.

14 M. Nobilo (interprétation). - Si le colonel Blaskic est arrivé avec une

15 base logistique provenant de l'extérieur dans la zone de Vitez et qu'il

16 avait eu 200 soldats armés derrière lui, pour imposer la loi et l'ordre,

17 les choses auraient été plus efficaces ?

18 M. Marin (interprétation). - Je pense que oui, en effet, mais il n'avait

19 ni les forces ni la logistique nécessaires pour agir de la sorte. Vous

20 avez vu qu'un homme coupable de délinquance a pu être libéré alors qu'il

21 avait été arrêté pas la police et tant la police militaire que la police

22 civile ont été en fait bloquées dans leurs efforts dans cette situation.

23 M. Nobilo (interprétation). – Je vous remercie. Puis-je avoir le document

24 suivant ?

25 M. Dubuisson. – Il s'agit du document 214, 214a pour la version anglaise.

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1 M. Nobilo (interprétation). - Je lirai simplement quelques passages du

2 document D214 qui est signé par Ivan Josipovic qui émane d'un bataillon de

3 la police militaire et qui est daté du 2 février 1993.

4 Je commencerai par vous demander si vous connaissez le tampon qui figure

5 au bas du texte et si vous connaissez peut-être Ivan Josipovic.

6 M. Marin (interprétation). – Ivan Josipovic était un membre du

7 4ème Bataillon de la police militaire qui était basé à Vitez. C'était un

8 employé. Le tampon vient de la police militaire.

9 M. Nobilo (interprétation). – Je vais vous lire cette note officielle.

10 Date : 2 février 1993. Cette note a été élaborée dans le département

11 d'enquêtes criminelles du 4ème Bataillon de la police militaire de Vitez et

12 porte sur l'explosion qui s'était produite le 1er février 1993.

13 Nous lisons "que l'explosions s'est donc produite sur la route principale

14 Vitez-Travnik, ou plutôt à l'intersection entre la route menant à Vitez et

15 le voisinage immédiat de l'entreprise Inpregnacia et de la maison de Dzeva

16 Mujanovic.

17 Pouvez-vous dire aux Juges si Mujanovic était musulman ?

18 M. Marin (interprétation). – Oui.

19 M. Nobilo (interprétation). – Est-ce que ces notes étaient rédigées de

20 façon régulière et routinière par la police après une enquête lorsque des

21 explosions s'étaient produites ?

22 M. Marin (interprétation). – Oui, parce que la police n'avait ni les

23 moyens en personnels ni les moyens financiers pour mener de meilleure

24 façon une enquête criminelle.

25 M. Nobilo (interprétation). – Savez-vous si la police militaire était

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1 sélective ? Si, par hasard, elle menait une enquête de ce type lorsque la

2 partie lésée était croate, elle ne le faisait pas lorsque la partie lésée

3 était musulmane ?

4 M. Marin (interprétation). – Non, ce n'était pas le cas. La police

5 militaire intervenait chaque fois qu'elle le pouvait, dès qu'elle avait

6 des informations au sujet d'un événement.

7 M. Nobilo (interprétation). – Merci beaucoup. Je demande l'aide de

8 l'huissier pour la distribution d'un autre document.

9 M. Dubuisson. - Document D215 et D215A pour la version anglaise.

10 M. Nobilo (interprétation). - Général, essayons d'identifier le document

11 d'abord qui date du 22 mars 1993 : 1er Bataillon de la brigade de Vitez et

12 qui est signé par Anto Bertovic.

13 Est-ce que vous connaissiez M. Bertovic ?

14 M. Marin (interprétation). - Je connais parfaitement bien M. Bertovic et

15 c'est bien sa signature.

16 M. Nobilo (interprétation). - Le document est court, donc je vais donner

17 lecture des éléments principaux. Ce qui m'intéresse, c'est de savoir si

18 vous vous rappelez cet ordre et si cet ordre a été adressé à d'autres

19 unités de la part de la zone opérationnelle de Bosnie centrale.

20 Je lis : "22 mars 1993. Etant donné que, dans quelques jours, le mercredi

21 24 mars 1993, les Musulmans vont fêter, célébrer leur fête la plus

22 importante à savoir le bajram, c'est-à-dire le ramadan, et afin d'éviter

23 toute conséquence négative éventuelle, j'ordonne à toutes les unités du

24 1er Bataillon de la brigade de Vitez d'accroître la vigilance de tous les

25 membres de l'unité au cours des jours qui viennent et, notamment, le jour

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1 du baïram, du ramadan. Et, dans le même but, d'augmenter les mesures de

2 sécurité par des contrôles constants et une multiplication des

3 patrouilles." Fin de citation.

4 Général, ma première question est la suivante : pour quelle raison Anto

5 Bertovic aurait-il demandé aux soldats de son bataillon d'augmenter leur

6 vigilance eu égard à la fête la plus importante des Musulmans, à savoir le

7 ramadan, le bajram ?

8 M. Marin (interprétation). - Cet ordre a été émis très peu de jours avant

9 la fête en question, avant le congé, avant le début du congé en question.

10 Il a été émis parce qu'il y avait des habitants musulmans et croates,

11 c'est-à-dire des membres de l'armée de Bosnie-Herzégovine et du HVO, qui

12 se trouvaient dans la région, qui portaient des armes ; il faut tenir

13 compte de l'importance très grande du ramadan pour les Musulmans.

14 La population étant mixte dans le village, étant donné la proximité de la

15 célébration du ramadan, le commandant a émis un ordre à ses subordonnés de

16 façon qu'ils se comportent comme indiqué dans cet ordre.

17 Outre ce que je viens de dire, le 22 mars 1993 est un jour dont nous

18 allons sans doute parler encore dans les heures qui viennent. Un certain

19 nombre d'événements se sont produits à ce moment-là, qui auraient pu

20 laisser à penser que des individus s'apprêtaient à provoquer un incident

21 au moment même du ramadan et que cela aurait pu avoir des conséquences

22 beaucoup plus importantes, augmenter davantage les tensions que si le même

23 incident se produisait en dehors du ramadan.

24 C'est donc en raison de tous ces motifs que cet ordre a été émis.

25 M. Nobilo (interprétation). – Général, dites-nous, d'après vos souvenirs,

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1 s'est-il agi d'une initiative personnelle d'Anto Bertovic ou était-ce une

2 initiative qui émanait du commandement de la zone opérationnelle ?

3 M. Marin (interprétation). – Pour autant que je me le rappelle, le

4 commandant, c'est-à-dire le colonel à l'époque, aujourd’hui le

5 général Blaskic, a émis cet ordre et il a insisté oralement auprès de ses

6 commandants de brigade pour qu'ils appliquent ces mesures.

7 M. Nobilo (interprétation). - Je vous remercie. Je demande l'aide de

8 l'huissier pour un nouveau document.

9 M. Dubuisson. – Il s'agit du document D216, D216A pour la version

10 anglaise.

11 M. Nobilo (interprétation). - Général, ceci est un rapport dont je

12 n'indiquerai que les grandes lignes, car le texte parle par lui-même. Je

13 vous prie de nous dire si vous vous rappelez les événements, puisque vous

14 vous rappelez les événements dont vous venez de parler, si vous vous

15 rappelez l'existence éventuellement de la même sorte de violence de

16 l'autre côté ? C'est-à-dire de la part de l'armée de Bosnie-Herzégovine

17 contre le HVO ?

18 Alors, voici ce rapport qui a été rédigé par Ivan Budimir de la brigade de

19 Vitez.

20 Je lis : "Le 27 janvier 1993, près de Fatina Vodica à Kruscica et dans le

21 centre des sapeurs-pompiers de Stari Vitez, des MTS ont été confisqués par

22 l'armée de Bosnie-Herzégovine."

23 Général, pouvez-vous expliquer aux Juges ce qu'est un MTS ?

24 M. Marin (interprétation). – Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

25 en terminologie militaire, un MTS c'est le sigle qui se rapporte a du

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1 matériel et à de l'équipement technique, c'est-à-dire des armes et

2 d'autres équipements techniques utilisés dans des opérations de combat.

3 M. Nobilo (interprétation). – Je ne vais pas lire la totalité du texte,

4 mais j'en mentionnerai simplement quelques passages, celui notamment où

5 l'on parle des armes saisies.

6 Au troisième paragraphe, il est stipulé : "A Gornji Vitez, une certaine

7 quantité d'armes ont été saisies. Des policiers, membres de la police

8 militaire régionale."

9 Au paragraphe 4, il est dit : "A Gornji Vitez également -comme au

10 paragraphe 5- à Krusica, un certain nombre d'armes ont été saisies". Fin

11 de citation.

12 On trouve la même mention au paragraphe 6. Je n'ai pas besoin d'énumérer

13 les armes qui ont été saisies. Je vous demanderai de vous rappeler cet

14 événement ou, au moins, certaines parties de ces événements et de nous

15 dire si de tels actes de violence étaient entrepris

16 par l'autre partie, dès le mois de janvier 1993 ?

17 M. Marin (interprétation). – Les événements qui se sont produits, se sont

18 produits aussi bien sur l'initiative de l'armée de Bosnie-Herzégovine que

19 sur l'initiative du HVO. Ces événements dont il est question dans le

20 rapport me sont bien connus, les lieux où ils se sont produits également.

21 Ce sont des lieux où l'armée de Bosnie-Herzégovine avait ses barrages

22 routiers : Fatina Vodica, en particulier. Et Stari Vitez. Et les armes

23 citées dans le texte, ainsi que les quantités d'armes citées sont exactes.

24 Je sais que nous avons eu à traiter de ce problème de la façon suivante,

25 le commandement de Vitez, c’est-à-dire, le colonel Mario Cerkez a contacté

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1 le commandant de la 235ème Brigade et, ensemble, ils ont résolu le

2 problème.

3 M. Nobilo (interprétation). - Je vous remercie, je demande de l’aide de

4 l’Huissier pour un autre document.

5 (325ème et pas 235ème se reprend l'interprète)

6 M. Nobilo (interprétation). - Je demanderai l'aide de l’Huissier c'est

7 pour le prochain document.

8 M. Dubuisson - Document D217, D217A pour la version anglaise.

9 M. Nobilo (interprétation). - Général, je vais vous parler d'un événement,

10 mais je vous demande d'abord si vous reconnaissez la signature de

11 M. Budimir ?

12 M.Marin (interprète) - Oui, je la reconnais.

13 M. Nobilo (interprétation). - Je ne lirai que le début du texte. Nous

14 lisons : "le 27 janvier 1993, à Kruscica, est réalisée une relève normale

15 des unités. A l'occasion du retour de Kruscica, le minibus TAM TR.283.12

16 est arrêté à 12 heures 30. Il transportait des membres de l'unité. Il a

17 été arrêté sur la route de Kruscica. Tous les occupants ont été désarmés

18 et le minibus a été confisqué."

19 Puis, nous lisons une liste d'armes, est-ce que vous vous rappelez cet

20 événement ? Est-ce que c’était bien dans le cadre d’une relève militaire

21 que cela s’est produit ?

22 M. Marin (interprétation). - Je me rappelle cet événement, le lieu où les

23 hommes ont été désarmés et tout ce qui leur a été pris au barrage routier

24 qui était tenu, en permanence, par les soldats de l’armée de Bosnie-

25 herzégovine. Cette équipe revenait des lignes de défense faisant face à

Page 11967

1 l'armée de la Republika Srpska et transportait de l’équipement et des

2 armes vers une petite base qui se trouvait à l’hôtel Lovas de Kruscica.

3 M. Nobilo (interprétation). – Merci. Nouveau document.

4 M. Dubuisson - Il s'agit du document D218, D218a pour la version anglaise.

5 M. Nobilo (interprétation). - Général, nous avons ici un document émis par

6 la presse du HVO de Novi Travnik et la Brigade de Stjepan Tomasevic,

7 c’est-à-dire l'unité chargée de la propagande. C’est un communiqué qui est

8 destiné à l'opinion publique. J'en lis un passage. Je cite :

9 "Aujourd’hui, le 10 février 1993, à Novi Travnik, dans la rue du 1er Mai,

10 dans le café Kod Djure, dont le propriétaire est Dorde Matovinovic, Zoran

11 Nukic a été blessé à mort. Il est surnomé Juka et originaire de Novi

12 Travnik et a été blessé à mort pour s'être opposé, les armes à la main, à

13 la police militaire du HVO de Novi Travnik dans le cadre d'une tentative

14 d’arrestation dirigée contre lui parce qu'il avait maltraité et harcelé

15 gravement un citoyen musulman qui l'a blessé."

16 Avez-vous entendu parler de cette annonce publique, en février 1993 ?

17 M. Marin (interprétation). – Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

18 ce communiqué a été transmis par la radio locale de Novi Travnik.

19 L’événement en question s'est déroulé dans un café, dont le propriétaire

20 était un Serbe, et compte tenu des actes qui sont décrits dans le texte,

21 compte tenu des circonstances, c'est-à-dire de l'intervention de la police

22 militaire Zoran Jukic a été blessé à mort.

23 M. Nobilo (interprétation). - Et la police militaire est intervenue parce

24 qu'il

25 maltraitait un Musulman ?

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1 M.Marin (interprétation). - Oui, cela ressort du texte, donc j’ai pensé

2 qu’il était inutile que je le souligne.

3 M. Nobilo (interprétation). - Merci, je demande l’aide de l’Huissier pour

4 le texte suivant.

5 M. Dubuisson. - Document D219, 219A pour la version anglaise.

6 M. Nobilo (interprétation). - Général, le dernier document, le document

7 D218, dit que la police militaire a tué un membre du HVO pour avoir

8 maltraité un Musulman ?

9 Messieurs les Juges, j’attire l’attention sur le document précédent, celui

10 qu’on vient de lire, c'est ce document sur lequel je m'appuie pour poser

11 une nouvelle question.

12 Donc, le document précédent, c’est un document où Zoran Jukic a été blessé

13 à mort pour avoir maltraité un Musulman . Ce document est daté du

14 10 février 1993. Or, le nouveau document que je présente, le document 219,

15 c'est un document qui est daté deux jours plus tard, le 12 février 1993.

16 Et, que lit-on dans ce document ?

17 "Rapport sur l'arrestation d'un membre du HVO. A la date du 6 février

18 1993, à 1 heures 30, à Kruscica, devant la maison noire, de la part de

19 l'armée de Bosnie-Herzégovine et du MOS, des forces armées musulmanes ont

20 été arrêtées, les soldats suivants appartenant au 2ème bataillon Vrbatt

21 Jeljo, Kan Jeljo, Bralov Zlavko", je ne vais pas les énumérer tous.

22 D'après les déclarations des témoins, l'un des kidnappeurs est de Kruscica

23 alors que les trois autres viennent de Branska et ils appartiennent au

24 MOS.

25 Etes-vous au courant de cet événement, de la manière dont il est décrit

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1 dans ce document qui a été rédigé par Ivan Budimir de sa main propre.

2 M. Marin (interprétation). – J'ai connaissance de cet événement. Je

3 connais le lieu où il s'est produit. Je connais également la plupart des

4 kidnappeurs. Cet endroit, la maison noire, est une maison qui est appelée

5 ainsi par la population locale.

6 M. Nobilo (interprétation). – Merci. Peut-on voir le document suivant,

7 s'il vous plaît ?

8 M. Dubuisson. – Le premier document est le document D220, D220a pour la

9 version anglaise. Le second document est le document D221, D221a pour la

10 version anglaise. Le troisième document est le document D222, D222a pour

11 la version anglaise.

12 M. le Président. – Maître Nobilo, c'est peut-être le moment de faire une

13 pause ? Vous avez d'autres documents à distribuer ?

14 M. Nobilo (interprétation). – Non, pas dans le cadre de cet

15 interrogatoire. Ce sont des document qui concernent les mesures de

16 discipline et je voudrais dire quelques mots au sujet des sanctions, mais

17 on peut le faire après la pause.

18 M. le Président. – Nous allons faire une pause de 20 minutes. Monsieur

19 Dubuisson, vous en avez d'autres ?

20 M. Dubuisson. – Le D223 doit être distribué.

21 M. le Président. – Distribuez ces documents et après nous ferons une

22 pause.

23 Peut-on procéder à la pause ?

24 M. Nobilo (interprétation). – Oui, bien entendu.

25 L'audience, suspendue à 15 heures 55, est reprise à 16 heures 20.

Page 11970

1 M. le Président. - Veuillez faire introduire l'accusé.

2 (L’accusé, M. Blaskic, est introduit dans la salle d’audience.)

3 M. le Président. - Maître Nobilo, à la pause, vous nous avez fait

4 distribuer je ne sais plus combien de documents, trois séries ou quatre

5 séries de documents. Je vois un quatrième, un cinquième qui sont arrivés.

6 M. Dubuisson. - Effectivement, un quatrième et un cinquième document sont

7 arrivés.

8 M. le Président. - Vous profitez de notre absence pour nous distribuer

9 encore plus de documents.

10 M. Dubuisson. - Pour vous y retrouver, le document n°224 est un document

11 sur lequel apparaît à côté du numéro du document : A2.

12 M. le Président. - A2 ? Je l’ai.

13 M. Dubuisson. - Ce document porte le n°224. Le document portant le n°D225

14 a lui comme lettres à côté du numéro du document : E8.

15 M. le Président. - Maître Nobilo, vous nous avez donc fait distribuer

16 avant la pause cinq documents différents. Nous sommes d’accord ?

17 M. Nobilo (interprétation). - Oui, tout à fait, Monsieur le Président.

18 Nous n’allons pas rentrer dans le détail de chacun de ces documents. Ces

19 documents parlent d'eux-mêmes. Mais ces documents représenteraient un

20 fondement pour tout une série de questions.

21 Général, pendant la pause, vous avez eu le temps de feuilleter ces

22 documents. Je vous demanderai en premier lieu de nous dire si ces

23 documents sont authentiques et de nous dire ce que représentent ces

24 documents ? Quel est le contenu de ces documents ?

25 M. Marin (interprétation). - Ces documents parlent de la mise en place des

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1 mesures disciplinaires dans une certain nombre d'unités qui faisaient

2 partie du commandement de la zone opérationnelle.

3 M. Nobilo (interprétation). - Quels étaient les pouvoirs du

4 Colonel Blaskic qui était à la tête de la zone opérationnelle de Bosnie

5 centrale en ce qui concerne les mesures disciplinaires ? Est-ce qu’il

6 avait des pouvoirs concernant les procédures pénales qui étaient

7 entreprises ?

8 M. Marin (interprétation). - J’essaierai d'expliquer nos activités dans ce

9 domaine. Nous avons remarqué une attitude persistante du Général Blaskic

10 qui était de faire en

11 sorte que les mesures disciplinaires soient appliquées, qu'il y ait le

12 moins d'incidents possible, que l'armée commence à fonctionner dans la

13 mesure du possible, dans le contexte donné, selon des règles militaires.

14 Pour réaliser cet objectif, le Commandant Blaskic a utilisé les pouvoirs

15 qu’il avait et il a ordonné la mise en place de mesures disciplinaires

16 militaires dans les unités et les commandements qui étaient sous ses

17 ordres.

18 D'après les règlements dont on disposait et qui régissaient les pouvoirs

19 des commandants dans les unités du HVO, le commandant de la zone

20 opérationnelle avait le pouvoir de prononcer des mesures disciplinaires

21 mais n'avait pas le droit d'amorcer un processus pénal ou d’entreprendre

22 une autre activité qui relève du code pénal.

23 Ces pouvoirs étaient donnés également aux commandants de certaines unités.

24 Pour que ce système puisse être efficace, le commandant de la zone

25 opérationnelle, le Général Blaskic a émis un ordre pour constituer un

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1 Tribunal disciplinaire militaire au niveau du commandement de la zone

2 opérationnelle de Bosnie centrale. Il a ordonné aux commandants des

3 brigades de constituer des tribunaux militaires disciplinaires à leur

4 niveau.

5 Ces tribunaux militaires disciplinaires étaient chargés d'appliquer les

6 procédures disciplinaires dans les cas où les commandants, dans des unités

7 subordonnées, effectuaient une infraction disciplinaire.

8 Au niveau du commandement de la zone opérationnelle, au sein du

9 commandement lui-même, et ceci en vertu d'un ordre du commandant, il a été

10 constitué un Tribunal disciplinaire militaire. Y ont été nommés les

11 collaborateurs les plus proches du général. Quant à moi, j'avais le rôle

12 d’adjoint du procureur militaire.

13 En m'acquittant de cette tâche, j'ai amorcé un certain nombre de

14 procédures, avant tout à l'encontre des commandants qui nous étaient

15 subordonnés, à savoir qui étaient à la tête des brigades ou au niveau des

16 commandements des zones militaires.

17 Au niveau des brigades, les commandants étaient chargés d'amorcer ces

18 processus contre les commandants qui étaient dans une position de

19 supériorité hiérarchique au sein des unités subordonnées.

20 M. Nobilo (interprétation). - Qui était responsable de poursuites pénales

21 contre les auteurs d'infraction ? Dans ce système de commandement et de

22 contrôle, quelles instances et quels organes étaient responsables

23 d'entamer des poursuites contre les auteurs des actes criminels ?

24 M. Marin (interprétation). - C'était le procureur militaire. Certains

25 éléments de ces structures existaient déjà, ont été constitués ;

Page 11973

1 cependant, je ne pourrais pas vous donner des détails là-dessus.

2 M. Nobilo (interprétation). - Le Procureur militaire. Est-ce que cela veut

3 dire qu'un Tribunal militaire existait également ?

4 M. Marin (interprétation). - Pour autant que je m'en souvienne : oui.

5 M. Nobilo (interprétation). - Le Procureur militaire, le Tribunal

6 militaire étaient-ils placés sous le commandement de la zone

7 opérationnelle ? Ou bien, dans ce système organisationnel, est-ce qu’ils

8 dépendaient du ministère de la Justice de Bosnie-Herzégovine ?

9 M. Kehoe (interprétation). - Objection de l’accusation. Est-ce qu'on

10 pourrait laisser le témoin répondre sans que Me Nobilo lui suggère une

11 réponse ?

12 M. le Président. - Voulez-vous terminer votre question, Maître Nobilo ?

13 Je m’adresse au témoin : "Y a-t-il une question à laquelle vous n'avez pas

14 eu le temps de répondre ?"

15 M. Marin (interprétation). - Il n'y en a pas.

16 M. le Président. - Terminez votre question, Maître Nobilo.

17 M. Nobilo (interprétation). - Je vous demande de savoir si le Procureur

18 militaire et le Tribunal militaire étaient placés sous le commandement de

19 la zone opérationnelle de Bosnie

20 centrale ou bien étaient-ils placés à l'intérieur de la structure du

21 ministère de la Justice ?

22 M. Marin (interprétation). – Le procureur militaire et le Tribunal

23 n'étaient pas placés sous le commandement du commandant de la zone

24 opérationnelle. En revanche, ils étaient placés au sein de la structure du

25 ministère de la Justice de la communauté croate d'Herceg-Bosnie.

Page 11974

1 M. Nobilo (interprétation). - Les documents que vous avez eu l'occasion de

2 consulter, il s'agit d'un certain nombre d'informations concernant des

3 sanctions disciplinaires allant du document D220 jusqu'au document D225.

4 Ces documents sont-ils authentiques ?

5 M. Marin (interprétation). – Ces documents sont authentiques. Ils ont été

6 rédigés sur la base de l'ordre donné par le document de la zone

7 opérationnelle. On le voit dans le document où on voit inscrit "E/8" parce

8 que le commandant de la zone opérationnelle, pour vérifier si son ordre a

9 été appliqué sur le terrain, a demandé à chacun de ses subordonnés de lui

10 rendre compte de ce qu'ils ont entrepris concernant chaque infraction.

11 On le voit dans les documents, dans les rapports qui sont ici et qui

12 découlent de cinq unités différentes qui faisaient partie de notre zone

13 opérationnelle.

14 M. Nobilo (interprétation). – Puis-je demander à l'huissier de distribuer

15 une nouvelle série de documents qui sont liés également aux sanctions

16 disciplinaires, ainsi qu'aux rapports qui ont été faits au commandement

17 concernant ces sanctions disciplinaires.

18 M. Dubuisson. – Afin de faciliter le travail des parties et de vous-mêmes,

19 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, les documents seront déjà

20 notés dans le coin supérieur droit, ce qui me permettra de terminer la

21 numération des autres documents.

22 M. le Président. - C’est parfait cela, Monsieur le greffier, vous pourriez

23 le faire pour chaque pièce.

24 M. Nobilo (interprétation). - Général, prenez votre temps, consultez

25 chacun de ces documents. Nous en avons d'autres que notre greffier est en

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1 train de préparer.

2 Général, il s'agit de rapports qui ont été faits par les différentes

3 unités au sujet des sanctions militaires. Ces rapports arrivaient au

4 commandement de la zone opérationnelle de la Bosnie centrale. S'agissant

5 de ces documents que vous avez devant vous maintenant, les avez-vous reçus

6 au sein de la zone opérationnelle de Bosnie centrale et sont-ils

7 authentiques ?

8 M. Marin (interprétation). – Oui, tous ces documents, on en a accusé

9 réception au commandement de la zone opérationnelle de Bosnie centrale et

10 la preuve en est le sceau. J'ai été informé de la part du commandant du

11 contenu de ces rapports lors de nos réunions de coordination du matin où

12 la personne chargée des questions juridiques et du personnel nous

13 informait de ces rapports sur des mesures disciplinaires sur lesquelles

14 les différentes unités informaient le commandement.

15 M. Nobilo (interprétation). - Pouvez-vous consulter une série d'autres

16 rapports. Ces documents parlent d'eux-mêmes, nous n'allons pas les lire.

17 Ce qui est important pour nous, si vous vous souvenez d'avoir accusé

18 réception de ces documents au sein de la zone opérationnelle et si ces

19 documents sont authentiques.

20 M. Marin (interprétation). - Ces documents que je viens de recevoir sont

21 également arrivés au commandement et ils sont authentiques. Ils sont

22 arrivés des différentes unités.

23 M. Nobilo (interprétation). - Monsieur le greffier, je voudrais qu'il soit

24 consigné au procès-verbal que nous souhaitons avoir la cote du premier et

25 la cote du dernier des documents que nous venons de présenter sur les

Page 11976

1 procédures disciplinaires.

2 M. Dubuisson. – Le premier set de documents s'arrêtait au D225. Donc nous

3 commençons avec le D226 jusqu'au n° D234, D234a pour la version anglaise

4 bien sûr.

5 M. Nobilo (interprétation). - Il s'agit d'un document très court que je

6 lirai. Il provient de la 111e Brigade de Zepce, brigade SP, le 11 août

7 1993, adressée à l'adjoint du commandant chargé de IPD, Activités de

8 propagande et d'information de la zone opérationnelle

9 de Bosnie centrale.

10 Il s'agit d'une demande qui dit : "Compte tenu d'une situation très

11 spécifique de la brigade 111e SP et compte tenu du fait qu'il n'existe pas

12 un Procureur militaire ni un Tribunal militaire à Zebce et compte tenu

13 d'un nombre croissant d'actes criminels, je demande que nous soient

14 adressées, de manière urgente, des instructions sur la manière de lancer

15 une procédure concernant la responsabilité criminelle, ainsi que de

16 déterminer le Tribunal compétent chargé de notre brigade."

17 M. Marin (interprétation). - Dans la région de Zebce, ils étaient isolés

18 du poste de commandement, du commandant de la zone opérationnelle de

19 Bosnie centrale. Il ressort de ce rapport ce problème-là, à savoir qu'il y

20 a des violations de la discipline, il y a un problème de criminalité qui

21 n'était pas caractéristique uniquement pour la vallée de la Lasva. Ce

22 problème était donc un problème général qui se manifestait sur l'ensemble

23 de la région. Le Procureur militaire et le Tribunal militaire ne pouvaient

24 pas atteindre Zebce puisqu'ils se trouvaient dans la vallée de la Lasva.

25 L'adjoint aux Activités de propagande et d'information de cette

Page 11977

1 brigade 111e s'est adressé à notre commandement, à son collègue qui

2 effectuait les mêmes tâches, qui effectuait le même travail pour obtenir

3 de sa part des informations, des instructions concernant la procédure qui

4 était à prendre et concernant les instances qui étaient compétentes de sa

5 brigade.

6 M. Nobilo (interprétation). – Bien. Dites-moi, le sceau que nous voyons en

7 bas, que signifie-t-il ? Est-ce un accusé de réception de votre

8 commandement ?

9 M. Marin (interprétation). – Oui, tout à fait. C'est un sceau qui accuse

10 réception devant notre commandement. Vous le voyez partout, sur tous les

11 documents qui ont été reçus par le commandement de la zone opérationnelle

12 de Bosnie centrale.

13 M. Nobilo (interprétation). – Bien. Peut-on voir le document suivant ?

14 M. Dubuisson. – Il s'agit du document D236 : D236a pour la version

15 française,

16 D236b pour la version anglaise.

17 M. Nobilo (interprétation). - Il s'agit d'un document rédigé à la main. Je

18 ne lirai que quelques portions de ce document. Je vous poserai ma question

19 par la suite.

20 Il s'agit d'un document intitulé "Appel", qui est rédigé par la main d'un

21 soldat. Ce document dit : "Je soussigné Borislav Lovrenovic, fils de Marko

22 et Kata, née Sureta, suis le père de quatre enfants mineurs et je vis à

23 Nova Bila. Je fais appel contre l'ordre donné par le colonel Tiho Blaskic

24 et contre ma peine de 30 jours de prison militaire". Puis, quelques lignes

25 plus bas, l'auteur dit qu'il a appartenu au PPAN, unité spéciale de Zuti,

Page 11978

1 et dit : "Je n'ai participé ni à l'attaque contre le poste de police de

2 Vitez ni à d'autres actions." Je ne lirai pas la suite.

3 Plus loin, si je peux quand même lire un peu : "Je souhaiterais également

4 faire remarquer que je n'ai participé ni au convoi de Tuzla ni à aucun

5 autre acte malhonnête. Je ne suis resté que peu de temps et je n'ai vu que

6 dix ou quinze jeunes hommes porter le poids du groupe. Je me suis

7 immédiatement rendu auprès du commandement pour demander la permission de

8 quitter ce groupe. Le commandant, M. Ilija Nakic, m'autorisait à quitter

9 l'unité spéciale Zuti, le 6 septembre 1993".

10 Il y a beaucoup de fautes d'orthographe, mais de quoi s'agit-il ? Il

11 s'agit d'un appel. Est-ce que cela veut dire que vous aviez la possibilité

12 d'appel prévue dans votre procédure ?

13 M. Marin (interprétation). – Oui. D'après le Règlement de discipline

14 militaire, lorsqu'une sanction militaire venait d'être prononcée par le

15 commandant d'une brigade, le soldat ou un quelconque membre de cette unité

16 avait le droit d'appel devant le commandant de la zone opérationnelle. Ce

17 que nous voyons ici ; c'est le cas ici.

18 M. Nobilo (interprétation). – Général, j'attire votre attention sur le

19 fait que nous voyons ici que ce soldat appelle à cause d'un ordre donné

20 par le colonel Blaskic. Mais devant qui fait-il appel puisque c'est le

21 colonel Blaskic qui décide ?

22 M. Marin (interprétation). - Il fait appel devant l'instance suprême, à

23 savoir le commandant de la zone opérationnelle.

24 M. Nobilo (interprétation). - Mais si c'est le commandant de la zone

25 opérationnelle qui a, en premier lieu, prononcé cette sanction, devant qui

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1 peut-on faire appel ?

2 M. Marin (interprétation). – Dans ce cas-là, celui qui jugerait de la

3 régularité de la sanction qui a été prononcée, ceci doit être décidé au

4 niveau de l'état-major principal du HVO.

5 M. Nobilo (interprétation). – Peut-on avoir le document suivant ?

6 A cette période, est-ce que vous avez été coupé de l'état-major

7 principal ?

8 M. Marin (interprétation). - Après les activités d'attaque contre la

9 police militaire, oui, nous étions déjà coupés.

10 M. Dubuisson. – Il s'agit du document D237, D237A pour la version

11 anglaise.

12 M. Nobilo (interprétation). - Général, je vous demanderai d'examiner cet

13 ordre et de me dire si cet ordre est authentique. Est-ce bien la signature

14 de M. Blaskic et le tampon de la zone opérationnelle ?

15 M. Marin (interprétation). - Oui. C'est cela.

16 M. Nobilo (interprétation). - Que représente cet ordre ? Il m'a tout l'air

17 d'être un formulaire.

18 M. Marin (interprétation). - Pour que la mise en exécution des mesures

19 disciplinaires soit aussi efficace que possible, et étant donné que les

20 membres du commandement de certaines unités n'étaient pas suffisamment

21 bien formés au commandement de la zone opérationnelle, conformément aux

22 ordres du commandant, du général Blaskic, un formulaire standardisé

23 préimprimé a été rédigé pour que les ordres portant mesures disciplinaires

24 soient complets et pour que ce document permette également de veiller à

25 l'application d'une mesure disciplinaire prononcée. Un tel formulaire, un

Page 11980

1 tel exemplaire a également été transmis auprès des

2 différentes unités.

3 M. Nobilo (interprétation). - Document suivant.

4 M. Dubuisson. - Document D238, D238A pour la version anglaise.

5 M. Nobilo (interprétation). - Général, ce document se compose en fait de

6 deux documents : tout d'abord, une plainte est rédigée par écrit ou un

7 appel rédigé par écrit et, ensuite, une décision de deuxième instance.

8 J'aimerais vous demander d'examiner ces documents. Je me concentrerai tout

9 d'abord sur la deuxième page de cet appel rédigé à la main.

10 On voit que Biljaka Mato de Kaonik –c'est là qu'était la prison-, le

11 28 novembre, rédige une plainte et dit : "Colonel, depuis que j'ai reçu

12 l'ordre de détention de 30 jours, j'estime que ma sentence est trop

13 sévère. J'estime que j'ai exécuté tous les ordres émanant du commandant

14 et, souvent, j'ai été en danger de mort de ce fait. Je ne mérite pas une

15 telle sanction. Je vous demanderai de diminuer ma peine, car j'ai

16 l'intention de me marier le 12 décembre 1993. J'espère que vous voudrez

17 bien donner droit à cette requête et je vous remercie d'avance." Personne

18 qui présente la requête : Mato Biljaka.

19 En première page, nous avons une décision du colonel Blaskic. Je vous en

20 donne lecture. Elle date du 24 décembre 1993. Elle est adressée à la

21 prison militaire de district de Busovaca où se trouve la personne qui a

22 rédigé l'appel. Il est dit : "J'ai étudié votre requête et je pense que,

23 dans le prononcé de la mesure disciplinaire, conformément à l'article 7 du

24 règlement sur la discipline militaire, le fait de commettre une offense

25 répréhensible a été poursuivi d'office et les activités contraires au

Page 11981

1 règlement militaire ont été prises en compte. La durée de la sentence

2 disciplinaire correspond aux violations disciplinaires. Conformément

3 l'article 47 du règlement sur la discipline militaire, je prends la

4 décision suivante : je rejette l'appel de Mato Biljaka."

5 J'imagine que vous ne connaissez pas l'écriture de Mato Biljaka, mais est-

6 ce que vous reconnaissez la signature de M. Blaskic ?

7 M. Marin (interprétation). – Oui, je reconnais cette signature ainsi que

8 le sceau de la zone opérationnelle. Je sais également que de telles

9 décisions ont été prises à plusieurs reprises.

10 M. Nobilo (interprétation). – Dites-moi : est-ce que c'est un exemple de

11 ce que vous avez dit tout à l'heure ? En d'autres termes, que le

12 commandant Blaskic représentait cette instance d'appel dans le cadre de

13 ces mesures disciplinaires ?

14 M. Marin (interprétation). – Oui, c'est une illustration parfaite de ce

15 que j'ai dit tout à l'heure lorsque j'ai parlé des différentes

16 responsabilités et compétence.

17 M. Nobilo (interprétation). – Pouvons-nous montrer le nouveau document au

18 témoin, s'il vous plaît ?

19 M. Dubuisson. – Il s'agit du document D239 : D239a pour la version

20 française et D239b pour la version anglaise.

21 M. Nobilo (interprétation). - Général, très brièvement, est-ce bien la

22 signature du colonel Blaskic et est-ce bien le sceau ?

23 M. Marin (interprétation). - Oui.

24 M. Nobilo (interprétation). – Est-ce qu'il s'agit encore d'un exemplaire

25 du formulaire que vous avez mis au point pour les mesures disciplinaires ?

Page 11982

1 M. Marin (interprétation). – Oui et j'aimerais ajouter une chose. Ici, on

2 voit une période de détention de 30 jours ; c'est la période maximum dans

3 ces conditions. C'est le nombre maximum de jours que le commandant de la

4 zone opérationnelle pouvait décider pour une infraction disciplinaire. Il

5 ne pouvait ordonner une période plus longue.

6 M. Nobilo (interprétation). - Je vous remercie, Général. Nous en avons

7 terminé avec toute une partie qui porte sur la sécurité et les questions

8 disciplinaires.

9 J'aimerais maintenant passer à une autre partie. Il s’agit de

10 l’organisation et de la structure des brigades. Il s’agit donc d’une

11 question que nous allons examiner au cours de la demi-heure à venir. En

12 tout cas, aujourd’hui, nous parlerons de l’organisation des brigades dans

13 les zones opérationnelles de Bosnie centrale.

14 M. Dubuisson. – Il s’agit des documents D240 : D240a pour la version

15 française et D240b pour la version anglaise.

16 M. Nobilo (interprétation). - Général, les formes d'organisation ont

17 souvent était modifiées, la structure du HVO a souvent été modifiée. Vous

18 avez parlé d'états-majors de crise, d'états-majors municipaux, etc.

19 Maintenant, nous en arrivons aux brigades. Comment expliquer cela, quelle

20 en était la raison ?

21 M. Marin (interprétation). - La situation que nous connaissions à

22 l'époque, le besoin d'organiser une défense une défense de qualité vis-à-

23 vis de l'armée de la Republika Srpska et l’effort du commandant de la zone

24 opérationnelle de créer une organisation efficace qui fonctionnerait

25 conformément aux principes militaires.

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1 Tout cela a exigé que, sans cesse, nous trouvions les meilleures formes

2 d'organisation de structure pour mettre en place une filière de

3 commandement pour assurer efficacement la défense et pour faire en sorte

4 que de la discipline militaire existe jusqu'aux plus bas échelons. C'est

5 cet objectif qui explique cet ordre également.

6 M. Nobilo (interprétation). – Il s’agit donc du 25 novembre 1992. Pouvez-

7 nous dire quelles brigades ont été créées sur le territoire de la zone

8 opérationnelle de Bosnie centrale ?

9 M. Marin (interprétation). – Le document que nous avons sous les yeux

10 montre quelles brigades ont été créées. Mais ce qu'il faut souligner,

11 c'est qu'à ce moment-là, avec un tel ordre, le commandant de la zone

12 opérationnelle ne devait pas oublier, lorsqu’il prenait un tel ordre, que

13 chaque municipalité souhaitait avoir son unité.

14 Il ne pouvait rien y changer. C'est la raison pour laquelle nous voyons

15 qu'il y a des brigades à Usora pour Usora, à Travnik pour Travnik, à Novi

16 Travnik et à Vitez avec siège

17 à Vitez. Mais lorsque nous allons parler plus avant du fonctionnement de

18 ce système, nous verrons que ces deux villes n'ont pu conserver une seule

19 brigade commune, mais qu’elle a dû se séparer en deux.

20 Pour Zenica, une brigade est créée à Zenica, pour les municipalités de

21 Maglaj et Novi Sehed, Deslic, Komosina, Zadovicic et Zepce, une brigade à

22 Zepce.

23 Pourquoi y a-t-il plusieurs municipalités ici ?

24 Parce que toutes les municipalités, à l'exception de Zepce, étaient sous

25 contrôle serbe et les structures militaires ont été conservées à Zepce,

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1 Busovaca, Kiseljak, Vojnica, Kresevo avec siège à Kiseljak. Cela n'a pas

2 tenu deux mois : nous avons donc dû constituer une brigade à Kresevo et à

3 Kiseljak.

4 Pour Kakanj et Vares, une brigade avec siège à Vares, cela également a dû

5 être modifié et, enfin, brigade Jajca, à la caserne de Travnik.

6 C'était là une idée que nous avions : nous pensions pouvoir arrêter les

7 réfugiés de Jajce sur le territoire de Travnik. C’est la raison pour

8 laquelle nous avons donné un tel ordre. Mais nous n'avons pas réussi à le

9 faire. Les réfugiés, suite à la chute de Jajce, les Croates ont quitté le

10 territoire de la vallée de la Lasva.

11 On peut également voir que des délais ont été énoncés, qu'on parle

12 d'autres activités administratives importantes pour la constitution des

13 brigades. J'ai participé à la mise en exécution de cet ordre.

14 J'ai dit, au début, que nous n'avions pas d'organisations normalisées,

15 mais qu'il existait quelques officiers qui connaissaient ces éléments et

16 le commandant de la zone opérationnelle leur a confié la tâche d'agir de

17 manière conforme à nos besoins et de mettre au point une méthode unifiée.

18 Autant que je m'en souvienne, ces brigades que nous souhaitions créer

19 devaient compter environ 2800 soldats. Lorsque je parlerai des effectifs,

20 je parlerai des effectifs de ces

21 brigades.

22 M. Nobilo (interprétation). – Dites-moi, lors de la constitution de ces

23 brigades, de leur création, de la désignation du commandement, des

24 commandants, était-il possible, compte tenu de la hiérarchie militaire,

25 que M. Blaskic décide qui allait commander telle ou telle brigade ? Ou

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1 est-ce qu’il devait, en consultation, également tenir compte du point de

2 vue de quelqu'un d'autre ?

3 M. Marin (interprétation). - Cela faisait plus d'un an qu’on était en

4 guerre mais, par ailleurs, rien n'avait changé sur ce territoire. Lors de

5 la désignation des commandants de brigade, ce sont les autorités

6 politiques locales qui décidaient pour les brigades.

7 Pour ce qui est des unités inférieures qui restaient encore organisées au

8 niveau des villages, comme cela ressort de cette carte, l'organisation

9 reste celle-ci : lors de la nomination, désignation des commandants, c'est

10 les villageois qui prenaient essentiellement la décision, lors de ces

11 réunions dans les communautés locales. Lorsqu'il s'agit de municipalité,

12 c'était fait au plan de la municipalité. On transmettait cela au

13 commandant de la zone opérationnelle.

14 Et ce n’était qu'une formalité que de confirmer ce commandant. S'il ne

15 l’avait pas fait, il aurait eu encore plus de problèmes dans le

16 fonctionnement de ce système. Personnellement, je pense que ces ordres

17 n'auraient absolument pas été écoutés de la part de ces brigades, de la

18 part de ces soldats, s'il n'avait pas procédé de la manière que je viens

19 d’indiquer.

20 M. Nobilo (interprétation). – Général, le terme de brigade dans le…

21 M. Riad (interprétation). - … Est-ce que vous pouvez nous en dire plus ?

22 Qu'en est-il du commandant désigné par le haut, si la collectivité choisit

23 quelqu'un d'autre ? Est-ce qu'à ce moment-là, on a deux commandants ? Que

24 se passe-t-il ?

25 M. Marin (interprétation). - Le commandant de la zone opérationnelle,

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1 M. Blaskic, était conscient de cette situation. Et la désignation des

2 commandants était faite

3 après consultation avec les autorités des municipalités.

4 Il n'y avait donc pas le cas de deux commandants en même temps. Et si de

5 tels cas s'étaient présentés, cela aurait été dramatique. Au moment de la

6 constitution des brigades, en effet, les pressions de la Republika Srpska

7 vis-à-vis des lignes du HVO, ces pressions étaient énormes. A l’époque,

8 notre priorité était de défendre, de maintenir ces lignes de défense que

9 nous avons dû mettre en place en 1992, en avril 1992.

10 M. Riad (interprétation). -Merci.

11 M. Nobilo (interprétation). - Vous voyez, en deuxième page, la signature

12 ainsi que le sceau : est-ce que ce document est authentique ?

13 M. Marin (interprétation). - Le document est authentique. Je dis que j'ai

14 participé et à sa rédaction, et à sa mise en application.

15 M. Nobilo (interprétation). - J'aimerais maintenant approfondir quelque

16 peu la question. Une brigade, il s'agit d'un terme, d'un concept militaire

17 et lorsqu'on parle de brigade, on pense qu'il s'agit d'une force

18 importante mobile. Que représentaient les brigades par rapport à l'état-

19 major municipal ? Par exemple, la brigade Stjepan Tomasevic à Vitez et à

20 Novi Travnik.

21 M. Marin (interprétation). - Si nous voulons parler de brigade et

22 d'organisation de brigade, enfin la différence entre l'état-major

23 municipal et les brigades, dans la réalité, dans la pratique, la

24 différence n'était qu'une différence de nom, de termes. L’état-major

25 municipal s'est appelé brigade. Mais compte tenu de tous les problèmes qui

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1 existaient, compte tenu des événements locaux, des villages, des

2 communautés locales, des municipalités, nous n'avons pu entièrement nous

3 conformer aux normes qui auraient dû être en vigueur pour ce terme de

4 brigade. Donc, dans la suite, dans tous les événements que nous allons

5 aborder par la suite et dans toutes les activités que nous allons aborder

6 par la suite, si on veut connaître de manière réelle la situation, il ne

7 faudrait pas oublier ce fait.

8 Je répète. Nous sommes donc passés d'état-major municipal à brigade. Il y

9 a eu un changement de nom. Dans sa structure, ce commandement était

10 constitué de plus de personnes mais l'organisation des unités sur le

11 terrain est restée la même. Il y avait encore les pelotons avec trente

12 personnes, les compagnies avec 50 personnes. Dans les villages, il y avait

13 le même déploiement des unités. Nous assurions les lignes de défense

14 contre les Serbes de la même manière, comme cela avait été le cas en

15 avril 1992. En effet, les circonstances n'étaient pas favorables et ne

16 permettaient pas de mettre les unités sur un territoire où nous aurions pu

17 les organiser, les former, les entraîner et les renforcer.

18 M. Nobilo (interprétation). - Ce document, qui date du 25 novembre 1992,

19 est-ce que vous pouvez voir si il est adressé au commandant de l'état-

20 major municipal ? Est-ce que ces commandants constituent les unités ?

21 M. Marin (interprétation). - On voit qu'il est adressé au commandant des

22 états-majors municipaux et j'ai déjà parlé du cas où on a essayé de faire

23 une seule brigade à partir de deux états-majors municipaux. Notre tâche

24 essentielle était d'organiser la défense contre l'armée de la Republika

25 Srpska.

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1 A Novi Travnik, nous pensions faire une seule brigade à partir de

2 Novi Travnik et de Vitez. En effet, Novi Travnik, de par son territoire,

3 comprenait des lignes de défense contre les Serbes. Nous avons donc essayé

4 d'organiser une défense de qualité et essayé de combler toutes les lacunes

5 de l'organisation de la défense et tous les inconvénients à une

6 organisation efficace.

7 M. Nobilo (interprétation). - J'aimerais demander à M. Dubuisson quelle

8 est la cote de ce document ? Je n’en ai pas pris note.

9 M. Dubuisson. - Il s'agit du document D198. Vous parlez bien de la carte ?

10 M. Nobilo (interprétation). - L'ordre du 25 novembre 1992 est le dernier

11 document dont nous avons parlé.

12 M. Dubuisson. - Il s’agit du document D240.

13 M. Nobilo (interprétation). - Merci. J'aimerais que l'on distribue le

14 document suivant s'il vous plaît.

15 M. Dubuisson. - Le document est le document D241, D241a pour la version

16 française et D241b pour la version anglaise.

17 M. Nobilo (interprétation). - Général, nous avons ici deux documents. Le

18 premier document date du 12 mars 1993. C'est un ordre du Colonel Blaskic

19 qui a trait à l'organisation et la supervision de la mise en oeuvre des

20 activités relatives à l’organisation de la brigade. Il s'agit de confier

21 cela à Mario Cerkez et un autre document nomme Mario Cerkez comme

22 commandant de la brigade.

23 Pouvez-vous nous dire comment ces événements sont intervenus ? Qui Blaskic

24 a dû consulter ? Quelles structures ont été mobilisées pour cela ?

25 M. Marin (interprétation). - Monsieur le Président, Messieurs les juges..

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1 M. Kehoe (interprétation). - Veuillez m'excuser. Est-ce qu'il s'agit de

2 deux documents ? Je n'en ai qu'un.

3 M. Nobilo (interprétation). - Deux documents. J'ai donné deux documents.

4 J'ai transmis deux documents. Peut-être qu'ils ne sont pas encore allés

5 plus loin, mais…

6 M. Dubuisson. - Voilà le deuxième document D242, a et b.

7 M. Nobilo (interprétation). - Apparemment, il y a eu un petit

8 embouteillage.

9 Général, je répète ma question. Nous avons là deux documents du 12 mars et

10 du 24 mars 1993. Est-ce que vous pouvez nous dire pourquoi une nouvelle

11 brigade a été constituée ? Pourquoi à une date si tardive ? Qui a décidé

12 MarioCerkez allait en être le commandant ?

13 M. Marin (interprétation). - Lorsque j'ai parlé des activités concernant

14 l'organisation des brigades, j'ai dit quel était notre objectif. Mais,

15 dans la pratique, nous n'avons pu traduire cela dans la réalité.

16 Douze mois après l'ordre, nous avons dû céder face à une modification.

17 Nous avons dû accepter de modifier cet ordre. Comme cela est dit au point

18 un : l'organisation, la supervision, la coordination, la gestion de toutes

19 les activités d’organisation de la brigade à Vitez, tout cela serait

20 confié à M. Mario Cerkez, pour l'instant commandant de la brigade Stjepan

21 Tomasevic des HVO à Novi Travnik.

22 Donc, une brigade est constituée à Vitez pour le territoire de

23 responsabilité de Vitez ; et même chose à Novi Travnik. J'en ai cité les

24 raisons : il n'était pas possible de fonctionner de la même manière, car

25 les autorités des municipalités souhaitaient chacune avoir sa brigade pour

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1 s'occuper de logistique et d'approvisionnement.

2 Mais pour que le commandant de la zone opérationnelle, le général Blaskic,

3 puisse émettre ce deuxième document -document qui a donc été mis

4 officiellement dans la forme que l'on voit ici, document qui était destiné

5 à nommer le général de brigade Cerkez-, il fallait que Blaskic consulte

6 les représentants du peuple croate de Vitez. Autrement, il n'aurait pas pu

7 faire ce qu'il voulait. Car il aurait dû changer son premier ordre qui

8 prévoyait que les citoyens de Novi Travnik et de Vitez créent une seule et

9 unique brigade. C'est pour cette raison qu'il a fallu agir de la sorte.

10 S'agissant du commandant de la brigade de Novi Travnik, il a fallu aussi

11 qu'il consulte un certain nombre de représentants pour faire le choix de

12 la personne qui allait remplir cette fonction à Novi Travnik.

13 M. Nobilo (interprétation). – Général, dites-moi, dans la situation qui

14 s'est créée lorsque, à l'évidence, les institutions officielles centrales

15 de l'Etat de Bosnie-Herzégovine s'étaient effondrées, dites-moi si, en

16 fait, à votre avis, les institutions municipales ont repris les fonctions

17 dévolues à l'Etat et ont donc acquis un rôle à jouer plus important que

18 celui normalement dévolu à des institutions municipales.

19 M. Marin (interprétation). - C’est ce que l'on peut dire dans une

20 situation comme celle-ci : en fait, où le Gouvernement central de Sarajevo

21 était bloqué en Bosnie-Herzégovine, sur le territoire où les autorités

22 étaient principalement municipales. C'est ce qui s'est passé.

23 M. Nobilo (interprétation). - Général, pourriez-vous authentifier ces deux

24 documents ? Est-ce qu'ils portent la signature du colonel Blaskic ?

25 M. Marin (interprétation). – Oui, c'est bien la signature du

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1 général Blaskic. L'auteur de cet ordre est Mario Rajic et le nom de la

2 personne qui a tapé ce document figure également dans le texte.

3 M. Dubuisson. – Document D243, D243a pour la version anglaise.

4 M. Nobilo (interprétation). - Je vous prierai de bien vouloir regarder ce

5 document : le 12 mars, Cerkez a donc acquis une nouvelle autorité au

6 niveau de la brigade et, le 18 mars, il a publié le document suivant.

7 Pouvez-vous me dire d'abord si c'est bien la signature de M. Cerkez qui

8 figure au bas de ce document. ?

9 M. Marin (interprétation). – Oui, c'est bien sa signature.

10 M. Nobilo (interprétation). - Je vais donc lire des parties de cet ordre

11 émanant de lui. Donc, le 18 mars 1993, il écrit aux dirigeants du HVO, au

12 commandant du 1er Bataillon, etc., etc. :

13 "Compte tenu de la multiplication des actes de destruction manifestes

14 commis par des individus portant l'uniforme du HVO et les insignes du HVO,

15 et appartenant à des unités armées du HVO qui agissent ainsi, et dans le

16 but d'empêcher de telles actions et d'améliorer l'aptitude au combat, je

17 décide ce qui suit."

18 Ensuite, nous avons la teneur de l'ordre que nous avons déjà vu.

19 Est-ce que tout cela signifie qu'en mars y compris, vous affrontiez les

20 problèmes que vous aviez déjà affrontés en janvier 93 ?

21 M. Marin (interprétation). – Oui. Nous nous trouvions face aux mêmes

22 problèmes et nous l'avons été jusqu'aux accords de Washington.

23 Mais j'aimerais que les choses soient tout à fait claires quant aux

24 raisons qui ont justifié l'élaboration de cet ordre. Voyez-vous, le

25 commandant de la nouvelle brigade, c'est-à-dire la brigade confiée à Mario

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1 Cerkez qui, jusqu'à sa nomination a été à un autre poste, cette brigade a

2 reçu le nom de Stjepan Tomasevic, lorsque Mario Cerkez en a pris la

3 responsabilité. Il était conscient qu'il existait des unités du HVO qui

4 méritaient une attention particulière et que des ordres devaient être

5 reçus du commandement de la zone opérationnelle, ainsi que du commandement

6 de la brigade Stjepan Tomasevic. Le commandant de la brigade ne pouvait

7 pas donner des ordres aux dirigeants du HVO, mais la personne qui a rédigé

8 l'ordre l'a écrit peut-être par erreur. En tout état de cause, le but

9 était que l'opinion sache ce que faisaient les responsables militaires

10 lorsque des unités ne se comportaient pas comme il convenait qu'elles se

11 comportent.

12 M. Nobilo (interprétation). - Général, lorsque vous parlez des autorités

13 du HVO, est-ce qu'il s'agit des autorités civiles ou d'autres autorités ?

14 M. Marin (interprétation). - A cette époque, la direction du HVO, le

15 gouvernement du HVO au niveau municipal était l'autorité suprême de la

16 municipalité. Je ne peux vous répondre dans le détail pour vous dire

17 exactement quelle était la composition de ce gouvernement, dans tous ses

18 éléments, puisque mon travail à moi se concentrait sur des activités

19 militaires.

20 M. Nobilo (interprétation). – Je vous remercie. Peut-on distribuer

21 maintenant ce document ?

22 M. Dubuisson. – Il s'agit du document D244, D244a pour la version

23 anglaise.

24 M. Nobilo (interprétation). - Général, le document que nous venons

25 d'examiner, le document D243 émanant de Mario Cerkes, et qui était destiné

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1 au commandant du 1er Bataillon notamment, portait la référence O1-18-1/93.

2 Maintenant, nous recevons un ordre émanant de ce commandant du

3 1er Bataillon, Anto Bertovic qui dit : "Le 19 mars", c’est-à-dire le

4 lendemain de l'ordre de Cerkes "conformément à l'ordre du commandant de

5 brigade n° 01-18-1/…" et ensuite il y a quelque chose d'illisible daté du

6 18 mars 1993 "et compte tenu de la multiplication de actes de destruction

7 manifestes et intentionnels dûs à des individus portant l'uniforme et les

8 insignes du HVO et membre de formation armée du HVO et dans le but

9 d'empêcher de tells actions et d'améliorer l'aptitude au combat, je donne

10 l'ordre qui suit".

11 Ensuite, nous lisons la teneur de l'ordre. Dites-nous, qu'apprenez-vous

12 dans ce document que vous n'appreniez pas dans le document précédent.

13 M. Marin (interprétation). - Dans ce document, il apparaît de fanon

14 manifeste qu'au niveau du commandement et des brigades, c'est le

15 commandant de brigade qui donnait les ordres à exécuter. Mais je parlerai

16 plus tard du fonctionnement des rapports existants dans le cadre de la

17 filière de commandement. En tout cas, on voit que le commandant de brigade

18 a exécuté les ordres du commandant de la zone opérationnelle et que le

19 même genre de rapport continue à se poursuivre jusqu'au niveau le plus

20 inférieur.

21 Mais cela montre également qu'il y avait un grand nombre d'actes criminels

22 commis sur ce territoire.

23 Pour comprendre toute la situation, pour comprendre tous ces événements

24 dans tous leurs détails, Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

25 permettez-moi de vous raconter une anecdote, une anecdote qui était très

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1 actuelle à l'époque dans la région de la vallée de la Lasva et de la

2 Bosnie centrale, eu égard au comportement des délinquants.

3 Un autobus part de Zenica et transporte à son bord un groupe de personnes

4 en armes, armées, qui portaient l'uniforme du HVO. Ces hommes pénètrent

5 dans l'autobus et demandent aux passagers de l'argent. Ils demandent au

6 premier passager de donner son argent et le passager voyant que le soldant

7 porte l'uniforme du HVO et qu'il est armé répond : "mais je suis Croate."

8 Et le soldat répond : "Je ne suis pas en train de recenser la population,

9 je demande de l'argent." Je vous prie de m'excuser si cette anecdote est

10 un peu en deçà de la dignité des débats, mais voilà quelle était la

11 réalité de la situation.

12 M. Nobilo (interprétation). – Général, si vous le permettez, je passerai…

13 Monsieur le Président, je m'apprête à aborder une autre série de

14 documents, nous sommes à deux minutes de la fin de l'audience.

15 M. le Président. – Je rappelle que demain nous siégerons à partir de

16 9 heures 45 jusqu'à 13 heures 30. Dans ces conditions, je lève l'audience

17 jusqu'à demain matin.

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19 L'audience est levée à 17 heures 30.

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