Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL AFFAIRE N° IT-95-14-T

2 POUR L'EX-YOUGOSLAVIE

3 Mercredi 4 novembre 1998

4 (L'audience est ouverte à 10 heures.)

5 Les interprètes. - Bonjour, Monsieur le Président.

6 M. le Président. - Je salue les interprètes.

7 Faites entrer l'accusé.

8 (L’accusé est introduit dans le prétoire.)

9 Nous reprenons nos travaux. Faisons entrer le témoin, M. Pervan.

10 Son nom est bien Père Pervan, mais nous l'appelons Père Ivan. Son nom est

11 bien Pervan ?

12 M. Nobilo (interprétation). - Oui, Monsieur le Président, Pervan

13 est le nom de famille.

14 M. le Président. - C'est le nom de famille. Il peut entrer.

15 M. Nobilo (interprétation). - C'est Ivan le prénom et le nom

16 c'est Pervan.

17 M. le Président. - Père Ivan, vous êtes reposé ? Vous vous

18 sentez bien ? Nous allons reprendre nos travaux. Vous m'entendez ?

19 M. Pervan (interprétation). - Bonjour Monsieur le Président,

20 bonjour Messieurs les Juges. Je vous entends bien.

21 M. le Président. - Très bien. Maître Cayley ?

22 M. Cayley (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

23 Bonjour Monsieur le Président, bonjour Messieurs les Juges, bonjour

24 conseils de la défense, bonjour M. Pervan.

25 Monsieur Pervan, hier vous avez dit que Père Bozo était un homme

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1 intègre et que très souvent il avait formulé des critiques à l'égard des

2 autorités de Kiseljak, étant donné les difficultés que rencontraient

3 fréquemment les Musulmans. Vous en souvenez-vous ?

4 M. Pervan (interprétation). - Père Bozo avait parlé souvent,

5 lors de nos rencontres, des lacunes qui existaient ou plutôt des

6 difficultés auxquelles devaient faire face les Musulmans. Les incidents

7 également qui se sont produits, moi personnellement j'en ai parlé

8 publiquement alors que Père Bozo n'avait pas sa paroisse à Kiseljak. Il

9 était de Lepenica, comme je l'ai précisé, et c'est la raison pour laquelle

10 il fallait parler de ces problèmes-là auxquels les Musulmans devaient

11 faire face à cette époque-là.

12 M. Cayley (interprétation). - A qui s'est-il adressé ? A quelle

13 personne des autorités du HVO de Kiseljak et à qui a-t-il parlé de ces

14 difficultés ?

15 M. Pervan (interprétation). - Je ne sais pas, il n'a pas parlé,

16 c'est-à-dire qu'il n’a pas écrit, étant donné qu'il a rencontré de temps à

17 autre un certain nombre de personnalités, des autorités publiques etc.,

18 mais comme Kiseljak n'est pas une grande ville, il pouvait voir ces

19 personnalités par exemple au moment où il est allé chercher l'autorisation

20 pour son bureau. Je vous répète, il ne s'est pas adressé par écrit ou

21 publiquement. S'il les avait appelés au téléphone, ça je ne sais pas.

22 M. Cayley (interprétation). - Par conséquent, je suis en droit

23 de dire qu'il a parlé avec M. Josip Bozo, M. Ivica Rajic, M. Mijo Bozic

24 sur les difficultés que rencontraient les Musulmans à Kiseljak, n'est-ce

25 pas ?

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1 M. Pervan (interprétation). - Je ne peux pas vous le confirmer,

2 parce que je n'ai pas des données précises.

3 M. Cayley (interprétation). - Par conséquent, vous ne savez pas

4 à qui il a parlé, à quel membre des autorités du HVO de Kiseljak, sur ces

5 difficultés que rencontraient donc les Musulmans ?

6 M. Pervan (interprétation). - Je ne sais pas à qui il avait

7 parlé et je sais qu'il avait besoin d'en parler parce qu'il avait ressenti

8 le besoin d'en parler. Il nous a parlé à nous, aux prêtres, lors de nos

9 réunions, mais je ne peux pas dire en dehors de nous à qui il avait parlé,

10 mais je sais qu'il avait besoin d'en parler.

11 M. Cayley (interprétation). - Parlons maintenant du sens du mot

12 "difficulté", si vous le voulez bien. Suis-je en droit de dire que ce mot

13 de difficulté correspondait aux pillages des biens musulmans, au fait que

14 leurs maisons ont été incendiées et au fait que certains Musulmans ont été

15 expulsés de force de Kiseljak, n'est-ce pas ?

16 M. Pervan (interprétation). - Vous avez parfaitement raison, il

17 s'agit de cette difficulté dont il a parlé et cela frappe tout le monde.

18 M. Cayley (interprétation). - Vous avez dit hier, et vous l'avez

19 répété aujourd'hui, que vous avez formulé un certain nombre de critiques

20 au cours de vos services religieux, critiques relatives aux souffrances

21 infligées à la population musulmane de Kiseljak. Connaissiez-vous le nom

22 des personnes qui ont participé à ce type de difficulté, à savoir qui ont

23 imposé ce type de souffrance aux Musulmans ?

24 M. Pervan (interprétation). - Oui, à plusieurs reprises j'ai

25 parlé des maux qui se sont produits et qui ont frappé des personnes

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1 diverses dans notre territoire. Je ne savais pas qui avait détruit

2 Merhamet par exemple, quel était le groupe de personnes qui avait commis

3 un tel acte. Je n'ai pas, par conséquent, prononcé le nom lors de la

4 messe, mais j'en ai parlé publiquement sans prononcer les noms.

5 M. Cayley (interprétation). - Hier, vous nous avez dit que vous

6 saviez que des combats avaient eu lieu à Rotilj en avril 1993, n'est-ce

7 pas ?

8 M. Pervan (interprétation). - Oui, quand je suis rentré de

9 Split, j'ai appris qu'il y avait des combats qui ont eu lieu là-haut,

10 qu'il y avait des morts et qu'il y avait des bâtiments qui ont été

11 incendiés. C’est ce que j'ai appris par les gens quand je suis retourné à

12 Kiseljak.

13 M. Cayley (interprétation). - Monsieur Pervan, savez-vous que le

14 HVO a lancé des opérations de combat le 18 avril 1993 dans la municipalité

15 de Kiseljak ?

16 M. Pervan (interprétation). - Les combats avaient lieu d'un côté

17 entre les communautés ethniques, entre les Croates et les Musulmans, ou

18 bien les Musulmans et les Croates, comme vous le voulez. Pendant cette

19 période-là déjà en 1992, le HVO a été formé ainsi que l'armée de Bosnie-

20 Herzégovine et je pense que c'était la guerre entre les deux armées, les

21 combats entre les deux armées.

22 M. Cayley (interprétation). - Avez-vous vu l'un ou l'autre des

23 ordres de combats qui ont été présentés dans cette affaire avant votre

24 témoignage ?

25 M. Pervan (interprétation). - Je n'ai jamais vu des ordres de

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1 combat, ni à cette époque là, ni maintenant.

2 M. Cayley (interprétation). - Peut-on soumettre au témoin la

3 pièce 456/22, s'il vous plaît ? Il s'agit d'une pièce de l'accusation.

4 P 456/22.

5 Monsieur le Greffier, peut-on avoir la pièce de la défense 306,

6 la pièce de l'accusation 406/50 et la pièce de l'accusation 298 à portée

7 de main, s'il vous plaît ?

8 Père, je sais que vous n'êtes pas militaire mais j'aimerais

9 cependant attirer votre attention sur un certain nombre de points contenus

10 dans cet ordre. Vous verrez que la date de cet ordre est le 17 avril 1993.

11 Est-ce que vous voyez cela ?

12 M. Pervan (interprétation). - Excusez-moi, je lisais le document

13 et je n'ai pas écouté la question. Je vais donc vous demander de me la

14 reposer.

15 M. Cayley (interprétation). - Monsieur Pervan, veuillez lire le

16 document rapidement et je vous poserai ensuite ma question.

17 M. Pervan (interprétation). - J'ai lu le document.

18 M. Cayley (interprétation). - Vous serez d'accord avec moi pour

19 dire que c'est un ordre du 17 avril 1993, n'est-ce pas ?

20 M. Pervan (interprétation). - Oui.

21 M. Cayley (interprétation). - Est-ce qu’il s'agit d'un ordre

22 visant à mettre en place des opérations de combat ?

23 M. Pervan (interprétation). - Oui.

24 M. Cayley (interprétation). - Au deuxième paragraphe de ce

25 document, on voit que l'affectation de la brigade Ban Jelacic est précisée

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1 et je vais résumer : sa tâche est de capturer les villages de Gomjeliza*

2 et Svinjarevo* en utilisant systématiquement différents types de mortiers.

3 C'est bien ce qui est dit dans cet ordre, n'est-ce pas ?

4 M. Pervan (interprétation). - C'est ce qui est écrit.

5 M. Cayley (interprétation). - Et l'opération doit commencer le

6 18 avril 1993 à 5 heures 30. Ceci figure au paragraphe 10.

7 M. Pervan (interprétation). - Oui.

8 M. Cayley (interprétation). - Et l'ordre est en fait signé par

9 Tihomir Blaskic.

10 M. Pervan (interprétation). - Oui.

11 M. Cayley (interprétation). - Le témoin peut-il voir la

12 pièce D306, s'il vous plaît ? L'avez-vous lu ?

13 M. Pervan (interprétation). - Je l'ai lu. Je ne l'ai pas lu en

14 entier mais je vois, par exemple, l'intitulé.

15 M. Cayley (interprétation). - Eh bien, je pourrai vous apporter

16 mon concours. La date est en fait celle du 18 avril 1993 et il est

17 16 heures 45. Vous serez d'accord avec moi pour dire qu'il s'agit d'un

18 rapport, n'est-ce pas, qui répond à l'ordre que je viens de vous résumer,

19 l'ordre du 17 avril. C'est une réponse qui provient de la brigade

20 Ban Jelacic et qui est adressée à la zone opérationnelle de Bosnie

21 centrale, n'est-ce pas ?

22 M. Pervan (interprétation). - C'est ce qui est écrit.

23 M. Cayley (interprétation). - Pour résumer ce rapport, il est

24 indiqué que le conflit s'est étendu à Brestovska*, Hertcezi*, Rotilj,

25 Visnjice, etc, n'est-ce pas ?

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1 M. Pervan (interprétation). - Oui.

2 M. Cayley (interprétation). - Et ce rapport indique également

3 que le HVO n'a pas encore réussi à prendre le contrôle du village de

4 Gomjonica ?

5 M. Pervan (interprétation). - Si vous attendez ma réponse, je

6 vais vous répondre de la manière suivante. Comme je savais que j'allais

7 être cité devant la Chambre, j'ai pu m'entretenir il y a un mois et demi à

8 peu près avec quelqu'un de Rotilj, c'est-à-dire il s'agit de quelqu'un de

9 Borina qui a été à Rotilj au moment des combats. Il m'avait dit

10 qu'effectivement ils avaient des ordres, mais qu'ils avaient négocié

11 pendant une journée pour la restitution des armes.

12 Comme vous parlez de Gomionica, lors de la déclaration que j'ai

13 faite hier, j'ai dit que je retournais de Split en passant par Fojnica,

14 Kiseljak et que je ne pouvais pas passer le carrefour que j'avais désigné,

15 étant donné qu'en provenance de Gomionica il y avait des échanges de tirs.

16 C'est la réponse à ce que vous m'avez demandé.

17 M. Cayley (interprétation). – L'homme avec qui vous avez parlé à

18 Rotilj était membre du HVO local, n'est-ce pas ?

19 M. Pervan (interprétation). – Excusez-moi, Monsieur le

20 Président, Messieurs les Juges, j'ai dit que c'était quelqu'un qui était

21 de Borina, qui était à Rotilj au moment où les combats ont eu lieu. Sinon,

22 il est de Borina.

23 M. Cayley (interprétation). – Oui, je comprends et cette

24 personne, cet homme de Borina qui a reçu cet ordre visant à lancer

25 l'opération à 5 heures 30, c'était à l'époque un membre du HVO, n'est-ce

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1 pas ?

2 M. Pervan (interprétation). - Cet homme qui m'en a parlé il y a

3 un mois et demi était membre du HVO, mais il m'avait dit -et je cite- "les

4 combats devaient commencer à 5 heures et demi du matin, nous nous sommes

5 arrêtés et nous avons continué nos négociations". (fin de citation)

6 M. Cayley (interprétation). – Peut-on donner la pièce 456/50 au

7 témoin s'il vous plaît ?

8 (L'huissier la remet au témoin)

9 M. Pervan (interprétation). – J'ai lu, merci.

10 M. Cayley (interprétation). – Pour résumer ce document, c'est un

11 ordre du 19 avril 1993 adressé à la brigade Ban Jelacic provenant de

12 Tihomir Blaskic et invitant les forces de Kiseljak à prendre le contrôle

13 de Gomionica, n'est-ce pas ?

14 M. Pervan (interprétation). - C'est ce qui est écrit.

15 M. Cayley (interprétation). – Peut-on soumettre au témoin

16 maintenant, ou plutôt la pièce 298 peut-elle être placée sur le

17 rétroprojecteur ? C'est une pièce en anglais, Père Pervan, donc, je vous

18 la lirai à haute voix et les conseils pourront suivre sur l'écran.

19 Vous serez d'accord avec moi pour dire que tous ces ordres et

20 ces rapports lus dans leur globalité montrent qu'une opération de combat a

21 bien débuté le 18 avril à 5 heures 30 du matin et qu'elle s'est poursuivie

22 jusqu'au 19 avril, n'est-ce pas ?

23 M. Pervan (interprétation). - Je suis d'accord avec ce que vous

24 venez de dire, mais je me permettrai de rajouter que, de l'autre côté, il

25 y avait les formations également militaires, sur ce que j'avais appris.

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1 M. Cayley (interprétation). – Le document suivant est un

2 document ou un rapport de l'ECMM plus précisément. Vous vous souvenez de

3 la présence de l'ECMM à Kiseljak, n'est-ce pas ?

4 M. Pervan (interprétation). - Je ne me souviens pas d'un nom

5 tout à fait précis, parce qu'il y avait énormément de missions, il y avait

6 la FORPRONU, il y avait d'autres personnes également qui sont passées par

7 Kiseljak, par chez moi également. C'était une grande quantité de personnes

8 que j'ai pu rencontrer.

9 Mais j'ai rencontré un certain nombre de personnes qu'on pouvait

10 reconnaître parce que, ou bien ils portaient les uniformes de la FORPRONU,

11 ou bien c'étaient des observateurs, mais il y avait des groupements

12 différents.

13 M. Cayley (interprétation). – Mais vous avez le souvenir de

14 l'organisation de l'ECMM et de sa présence à Kiseljak en 1993, n'est-ce

15 pas ?

16 M. Pervan (interprétation). – Oui, à Kiseljak, il y avait des

17 représentants de l'ECMM.

18 M. Cayley (interprétation). – C'est donc un rapport rédigé par

19 un témoin qui est venu déposer dans cette affaire en date du 25 avril 1993

20 et qui est intitulé "Rapport spécial sur des allégations de nettoyage

21 ethnique".

22 "De 15 heures, le 18 avril jusqu'à 12 heures le 19 avril,

23 environ vingt soldats masqués, prétendument membres du HVO, certains

24 venant sans doute des environs, une sorte de commandement de la mort sont

25 rentrés dans le village susmentionné et ont détruit toutes les maisons

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1 musulmanes appartenant à la partie ouest du village, 19 maisons, quelques

2 garages, des étables et d'autres bâtiments. Le village n'a pas été défendu

3 par une quelconque force de l'armée de Bosnie-Herzégovine, puisque tous

4 leurs soldats étaient déployés dans la région de Visoko.

5 Aucune des maisons croates n'a été endommagée, toutes les

6 maisons ont été incendiées, pillées et certaines ont été vandalisées. Au

7 moment où cela s'est produit, la plupart des habitants ont été évacués

8 pour être envoyés dans la partie sud-est de la ville, sauf sept personnes

9 qui ont été sauvagement exécutées. Le lendemain matin, de nombreux jeunes

10 hommes et des hommes âgés ont été arrêtés et emprisonnés dans la prison du

11 HVO de Kiseljak".

12 Père, je sais que vous ne vous trouviez pas sur les lieux à ce

13 moment-là, mais est-ce bien ce dont vous avez entendu parler des

14 événements qui se sont produits à Rotilj le 18 avril 1993 ?

15 M. Pervan (interprétation). - Je n'ai pas entendu en détail

16 toutes les questions qui m'ont été posées.

17 M. Cayley (interprétation). - Avez-vous entendu dire que des

18 maisons musulmanes avaient été pillées et incendiées à Rotilj les 18 et

19 19 avril 1993 ?

20 M. Pervan (interprétation). - On peut voir même aujourd'hui

21 qu'il y avait un certain nombre de maisons qui ont été incendiées, qui ont

22 été détruites. Je ne peux que supposer qu'il y avait des pillages

23 également et des actes criminels qui ont été commis.

24 M. Cayley (interprétation). - Des maisons croates ont-elles été

25 pillées et incendiées ce jour-là à Rotilj ?

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1 M. Pervan (interprétation). - Je ne le sais pas.

2 M. Cayley (interprétation). - Et avez-vous entendu parler du

3 meurtre de sept civils qui se serait produit le 18 avril dans ce village ?

4 M. Pervan (interprétation). - Oui, ça je l’ai appris et

5 notamment on a parlé d'une femme qui a été tuée.

6 M. Cayley (interprétation). - Zibija Srksa, n'est-ce pas ? Ce

7 nom vous rappelle-t-il quelque chose, Srska ? Peut-être que je prononce

8 mal.

9 M. Pervan (interprétation). - Cela pourrait être le nom.

10 M. Cayley (interprétation). - Je vais vous lire la liste de noms

11 des personnes qui ont assassinées ce jour-là. Peut-être pouvez-vous me

12 dire si vous les reconnaissez :

13 "Zibija Srska, femme de 31 ans violée et tuée par arme à feu.

14 Nous avons vu les preuves de ce meurtre dans la maison et nous avons

15 aperçu également des tâches de sang".

16 Est-ce que cela vous rappelle quelque chose ?

17 M. Pervan (interprétation). - Eh bien, Monsieur le Président,

18 Messieurs les Juges, quand on a parlé de personnes qui ont été tuées, j'ai

19 parlé également avec un médecin de Rotilj. C'est une femme, elle m'avait

20 confirmé, elle m'avait dit qu'effectivement on l'avait appelé pour lui

21 dire que cette femme avait été tuée. Elle est donc rentrée et elle m'a dit

22 -je cite- : "Je suis rentrée, je l'ai vue dans une position mi-couchée mi-

23 assise, avec la tête en arrière, tuée, j'ai vu qu'elle portait encore les

24 vêtements".

25 Je lui ai posé à plusieurs reprises la question "Est-ce qu'elle

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1 a été violée ?" et le Docteur m'avait répondu : "Je n'ai pas de

2 confirmation, c'était trop rapide, elle portait des vêtements". Par

3 conséquent, j'ai posé à plusieurs reprises la même question au Docteur

4 Golubovic.

5 M. Cayley (interprétation). - Vous souvenez-vous de

6 Miralem Topalovic et de Esad Topalovic qui ont été tués tous les deux ?

7 Ils étaient père et fils.

8 M. Pervan (interprétation). - Je me dois de vous dire qu'en ce

9 qui me concerne, au moment où le combat a eu lieu, j'étais Père à Kiseljal

10 pendant un an et demi et je ne connaissais pas tous les paroissiens, je ne

11 connaissais que les catholiques et je ne connaissais pas les Musulmans

12 parce qu'ils ne venaient pas souvent à l'église. Je connaissais un certain

13 nombre de personnes qui occupaient des postes importants au niveau de

14 Kiseljak.

15 Je connaissais également des Hodja et des religieux musulmans.

16 Je connaissais un certain nombre de noms et de prénoms, comme Skesicevo*,

17 Topalovic, Pusculovic... Ce sont les noms que je connaissais, mais je ne

18 connaissais pas en personne ces gens-là.

19 M. Cayley (interprétation). - Par conséquent, vous ne

20 connaissiez pas Bajro Pusculovic et Zila Pusculovic ?

21 M. Pervan (interprétation). - Je ne connaissais pas ces

22 personnes-là. Je connais entre dix et quinze personnes musulmanes, je

23 connais les noms et les prénoms, mais les autres je ne connais pas, je ne

24 connais même pas tous mes paroissiens. J'ai actuellement plus de

25 7000 paroissiens et ça c'est une tâche assez difficile de connaître tous

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1 les noms et tous les prénoms. Je ne connais pas comment ils sont,

2 physiquement je ne les aurais pas reconnus.

3 M. Cayley (interprétation). - Après les événements, avez-vous

4 entendu parler d'un couple de personnes âgées qui avaient été brûlés vifs

5 chez eux ?

6 M. Pervan (interprétation). - Je pense qu'on m'en a parlé.

7 M. Cayley (interprétation). - Eh bien en fait, il s'agissait de

8 M. et de Mme Pusculovic. Je suppose que vous ne savez rien du meurtre de

9 Dzevad Hodzic et de Zijad Kosovac ?

10 M. Pervan (interprétation). - Je dois dire que j'ai appris qu'il

11 y avait des tués, des personnes qui sont mortes, mais je n'ai jamais vu

12 une liste de personnes qui ont été tuées. Par conséquent, je ne peux pas

13 m'en souvenir et je ne sais pas qui avait été tué. C'est la première fois,

14 sur l'écran, que je vois la description des personnes qui ont été tuées à

15 Rotilj, si c'est comme cela.

16 M. Cayley (interprétation). - Monsieur Pervan, je vais passer à

17 autre chose. L'huissier pourrait-il nous présenter la dernière page, et je

18 lirai le paragraphe final de ce document qui dit la chose suivante. Il

19 s'agissait des conclusions de l'ECMM suite à ces événements, le 25 avril

20 1993.

21 "Il y a environ 600 habitants qui vivaient dans la partie sud-

22 ouest du village. Ils doivent rester à l'intérieur de leur village parce

23 qu'ils sont encerclés par le HVO. Ils n'ont pas d'électricité ni de

24 téléphone, ni d'eau, et les aliments sont en quantité limitée. Ils ont un

25 besoin urgent d'un médecin ou d'une infirmière car certains enfants ont de

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1 la fièvre et n'ont pas de médicaments. Dans ce groupe, il y a environ 100

2 à 150 réfugiés de Visoko."

3 Lorsque vous êtes revenu en mai, est-ce bien la situation que

4 vous avez trouvée à Rotilj ?

5 M. Pervan (interprétation). – Moi, je ne suis pas allé le

6 premier jour à Rotilj. Je ne sais même pas quelle était la situation ces

7 premiers jours. J'ai dit, et avec toute responsabilité, qu'il y avait un

8 médecin-femme dans le village qui était sous le serment d'Hippocrate et,

9 par conséquent, elle n'a pas pu me dire les choses qui ne sont pas vraies.

10 Je sais qu'il y avait les échanges de tirs et je sais qu'il y

11 avait beaucoup de morts et je sais qu'il y avait des tués d'un côté et de

12 l'autre. Je sais qu'il y avait également des maisons qui ont été

13 incendiées, des étables qui ont été incendiées, qu'il n'y avait plus

14 d'électricité, plus de télécommunications à Rotilj et à Kiseljak et nous

15 avons constaté que la télécommunication et l'électricité étaient en panne,

16 parce que c'est par les poteaux que passaient les fils et pas sous le sol.

17 M. Cayley (interprétation). – Par conséquent, vous dites que,

18 étant donné que vous n'étiez pas à Kiseljak le 25 avril 1993, vous n'avez

19 aucune idée des conditions dans lesquelles vivaient les Musulmans dans les

20 villages musulmans à l'époque, n'est-ce pas ?

21 M. Pervan (interprétation). – Je ne savais pas qu'une telle

22 situation s'était produite, parce que j'étais à Split et je n'étais pas en

23 communication téléphonique avec Kiseljak.

24 M. Cayley (interprétation). – Père, avez-vous eu connaissance de

25 la moindre enquête menée par la police civile ou la police militaire,

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1 enquête relative aux événements qui se sont produits à Rotilj ?

2 M. Pervan (interprétation). - Je ne connais pas, je ne sais pas.

3 M. Cayley (interprétation). – Y a-t-il eu une personne qui a été

4 sanctionnée pour ce qui s'est passé à Rotilj les 18 et 19 avril 1993. Le

5 savez vous ?

6 M. Pervan (interprétation). - Je ne sais pas.

7 M. Cayley (interprétation). – Merci.

8 M. Pervan (interprétation). - Merci.

9 M. Cayley (interprétation). – J'en ai terminé avec cette pièce,

10 merci.

11 Père, j'aimerais maintenant parler avec vous des conditions de

12 vie dans le village de Rotilj et dans la communauté musulmane. Pendant

13 toute l'année 1993, je ne veux pas que vous décriviez la situation mois

14 après mois, parce que nous serions là pendant plusieurs semaines, mais

15 nous allons prendre trois points chronologiques et vous pourrez ainsi

16 expliquer quelle était la situation qui régnait à l'époque. Avez-vous

17 consulté la photographie aérienne qui a été placée sur le chevalet ?

18 M. Pervan (interprétation). - Oui je l'ai vue, vous l'avez

19 placée hier.

20 M. Cayley (interprétation). – Reconnaissez-vous la zone

21 représentée sur cette photographie ? Je sais que ce n'est pas toujours

22 très simple, mais reconnaissez-vous cet endroit ?

23 M. Pervan (interprétation). - Il faudrait que je voie de plus

24 près.

25 M. le Président. – Rapprochez-vous, Père Pervan, levez-vous et

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1 approchez-vous. Peut-être que Monsieur l'huissier va organiser le micro

2 pour que vous puissiez répondre aisément.

3 M. Dubuisson. – Si je peux me permettre, il s'agit de la

4 pièce 76.

5 M. Pervan (interprétation). – Oui, j'ai reconnu.

6 M. Cayley (interprétation). – Pourriez-vous rester debout et

7 l'huissier pourrait-il tendre au Père Pervan le pointeur ?

8 M. le Président. – Maître Nobilo, approchez-vous.

9 M. Cayley (interprétation). – Monsieur Pervan, pouvez-vous

10 indiquer le village de Borina, s'il vous plaît, sur la carte ?

11 M. Pervan (interprétation). – Voilà, c'est ici Borina.

12 (Le témoin montre avec le pointeur.)

13 Il y a d'abord Donja Brina et ensuite Gornja Borina.

14 M. Cayley (interprétation). – Par conséquent, vous indiquez

15 actuellement les maisons qui, sur la photographie, sont juste au-dessus du

16 village de Rotilj et, en fait, la route qui traverse Borina est parallèle

17 à la route qui passe par Rotilj. C'est exact ?

18 M. Pervan (interprétation). - Oui.

19 M. Cayley (interprétation). – Le village de Borina est en fait

20 un village croate, n'est-ce pas ?

21 M. Pervan (interprétation). – Oui, le village de Borina est un

22 village croate.

23 M. Cayley (interprétation). – A quelle distance se trouve Borina

24 de Rotilj ? Quelle est la distance la moins importante entre les deux,

25 disons ?

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1 M. Pervan (interprétation). - Le point le plus proche est ici,

2 encore là c'est la maison croate. Voilà. Je pense que ce sont ici des

3 maisons croates et là, ce sont les maisons musulmanes.

4 (Le témoin les indique)

5 M. Cayley (interprétation). – Par conséquent, quelle serait

6 votre estimation de la distance entre Borina et Rotilj, si l'on prend les

7 deux-points les plus proches de ces deux villages ?

8 M. Pervan (interprétation). – 100 mètres à peu près. C'est là.

9 Et ici, c'est 300 mètres au maximum. (Le témoin indique.)

10 M. Cayley (interprétation). - Par conséquent, de ce côté-là le

11 village de Borina est parallèle à la totalité du village de Rotilj, n'est-

12 ce pas ?

13 M. Pervan (interprétation). - Est-ce que vous voulez répéter

14 votre question ?

15 M. Cayley (interprétation). - Suis-je en droit de dire que le

16 village de Borina est parallèle et au-dessus de Rotilj dans toute sa

17 longueur ?

18 M. Pervan (interprétation). - Oui, ce sont les deux villages

19 parallèles. Oui, effectivement, ce sont les deux villages parallèles.

20 M. Cayley (interprétation). - Et au cours du conflit, le HVO

21 avait le contrôle du village de Borina, n'est-ce pas ?

22 M. Pervan (interprétation). - Oui, c'est cela.

23 M. Cayley (interprétation). - A quelle distance se trouvait la

24 caserne de Kiseljak de Rotilj ?

25 M. Pervan (interprétation). - Cinq à sept minutes à pied.

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1 M. Cayley (interprétation). - Très bien. Le village de Rotilj

2 s'étend le long d'une route. Quelle est la distance entre la route

3 principale et la fin du village, environ ?

4 M. Pervan (interprétation). - Vous devez penser à ce point

5 jusqu'à Kiseljak ?

6 M. Cayley (interprétation). - Oui.

7 M. Pervan (interprétation). - Je pense deux kilomètres et demi.

8 Je n'ai jamais véritablement regardé l'heure en conduisant la voiture,

9 mais en voiture c'est quatre minutes à peu près.

10 M. Cayley (interprétation). - Très bien, une estimation me

11 suffira. Merci beaucoup.

12 Le village de Rotilj se situe dans une vallée, n'est-ce pas ?

13 M. Pervan (interprétation). - Oui.

14 M. Cayley (interprétation). - Entouré de collines des deux

15 côtés, n'est-ce pas ?

16 M. Pervan (interprétation). - Tout à fait. Borina oui, mais du

17 côté de Pazine* il y a une pente.

18 M. Cayley (interprétation). - Je suppose que nous ne pourrons

19 pas voir ceci sur cette photographie, mais où se trouvaient les lignes de

20 confrontation entre l'armée de Bosnie-Herzégovine et le HVO ?

21 M. Pervan (interprétation). - Je n'étais pas à Rotilj, je l'ai

22 dit, par conséquent je ne peux pas vous donner la réponse à cette

23 question.

24 M. Cayley (interprétation). - Vous ne savez pas où se trouvait

25 la ligne de front entre le HVO et l'armée de Bosnie-Herzégovine ?

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1 M. Pervan (interprétation). - Non, cela je ne sais pas.

2 (Me Nobilo n'est pas audible.)

3 M. Cayley (interprétation). - Je vais reposer la question. Après

4 le 18 avril 1993, saviez-vous où se trouvait la ligne de front entre le

5 HVO et l'armée de Bosnie-Herzégovine ?

6 M. Pervan (interprétation). - Je ne comprends pas votre

7 question. Vous me demandez pour Rotilj ou bien après le 18 à Rotilj ? Je

8 ne sais pas véritablement. Est-ce que vous pouvez me préciser votre

9 question ?

10 M. Cayley (interprétation). - Je vais vous donner une date

11 précise. En novembre 1993, savez-vous où se trouvait la ligne de front, la

12 ligne de front entre le HVO et l'armée de Bosnie-Herzégovine ? A quel

13 endroit précisément ?

14 M. Pervan (interprétation). - En novembre 1993, je sais où se

15 trouvait la ligne de front entre l'armée de Bosnie-Herzégovine et le HVO,

16 mais cette ligne était loin par rapport à Rotilj, c'était à plusieurs

17 kilomètres par rapport à Rotilj. Vous parlez de novembre 1993, mais en

18 avril il y avait des lignes de front du côté de Visoko, du côté de

19 Sarajevo, du côté de Caicevo* et derrière Lug et Cupascov*.

20 M. Cayley (interprétation). - Par conséquent, la ligne de front

21 ne figure pas sur cette photographie ?

22 M. Pervan (interprétation). - Après le conflit du mois d'avril,

23 il n'y avait plus de ligne de front, il n'y avait plus d'armée qui

24 surveillait Rotilj, qui attaquerait Rotilj ; c'est la raison pour laquelle

25 il n'y avait pas de ligne de front.

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1 M. Cayley (interprétation). - Par conséquent, ils s'étaient

2 déplacés vers l'est, vers Visoko ? Je parle de la ligne de front.

3 M. Pervan (interprétation). - La ligne de front était dans les

4 frontières de la municipalité de Kiseljak, exception faite de la partie

5 qui a été occupée par l'armée de Bosnie-Herzégovine, Kazanovici,

6 Bilalovac, Bakovici, du côté de Fojnica et derrière Lug, à Bakovici

7 également et vers Visoko, à Cikulja, à Zavrsje également, ensuite du côté

8 de Visoko quelque peu plus haut par rapport à Celukovac, à Kobiljaca

9 également, c'était l'armée de la République serbe, à Lepenica également, à

10 Jagovica.

11 M. Cayley (interprétation). - Par conséquent, en novembre 1993,

12 toutes les zones décrites sur cette photographie ont été contrôlées par le

13 HVO, n'est-ce pas ?

14 M. Pervan (interprétation). - Oui, sous le contrôle du HVO.

15 M. Cayley (interprétation). - Merci beaucoup. Vous pouvez vous

16 rasseoir.

17 M. Pervan (interprétation). - Merci.

18 M. Cayley (interprétation). - Je m'excuse auprès de

19 Maître Nobilo, je devrais peut-être vous demander de vous relever d'un

20 instant à l'autre. Vous souvenez-vous de l'endroit où se trouvaient les

21 Musulmans dans le village de Rotilj ? Dans quelle partie du village se

22 trouvaient-ils ?

23 M. Pervan (interprétation). - Les Musulmans se trouvaient dans

24 la partie du village que je vais indiquer avec le pointeur. C'est là,

25 c'était la maison musulmane. Ensuite, ces maisons-là également étaient des

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1 maisons musulmanes. Là, c'était une maison croate, ensuite s'ensuivent les

2 maisons musulmanes... Là aussi c'étaient des maisons musulmanes, ici

3 également... Là, une maison croate, une deuxième et puis d'autres maisons

4 croates également qui s'ensuivaient. Là également les maisons croates...

5 La photographie n'est pas tout à fait précise mais de toute façon on peut

6 reconnaître les maisons.

7 M. Cayley (interprétation). - En novembre 1993 où vivaient la

8 majorité des Musulmans de Rotilj ?

9 M. Pervan (interprétation). - En novembre 1993, la majorité des

10 Musulmans vivaient ici même et puis d'autres endroits que j'ai montrés.

11 M. Cayley (interprétation). - Par conséquent, dans un coin

12 éloigné du village en direction du sud-est ?

13 M. Pervan (interprétation). - L'ouest, l'ouest du village.

14 M. Cayley (interprétation). - Oui, pardonnez-moi, la

15 photographie est inversée.

16 Où se trouvaient les maisons qui ont été endommagées et brûlées

17 à Rotilj, d'après votre souvenir ?

18 M. Pervan (interprétation). - Laissez-moi voir un petit peu...

19 M. Cayley (interprétation). - Vous indiquez donc sur la pièce 76

20 la première étiquette qui indique Rotilj et qui se trouve proche de la

21 partie principale de Kiseljak.

22 Combien de maisons ont été endommagées dans cette zone, vous en

23 souvenez-vous ?

24 M. Pervan (interprétation). - Lors de ma déposition hier, j'ai

25 dit qu'il y avait une quinzaine de maisons mais je n'ai pas véritablement

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1 compté jusqu'à nos jours ces maisons.

2 M. Cayley (interprétation). - Très bien, vous pouvez vous

3 asseoir. Merci de votre aide.

4 M. Pervan (interprétation). - Merci.

5 M. Cayley (interprétation). - Les Juges ont entendu la

6 déposition d'un membre de la force de protection des Nation Unies, de la

7 FORPRONU, le capitaine Lantier* qui a visité le village de Rotilj en

8 mai 1993. Il y a découvert une communauté qui vivait à l'extrémité du

9 village, comme vous l'avez indiqué, composée principalement de femmes,

10 d'enfants et de personnes âgées. Est-ce que vous avez vu en mai 1993 à

11 Rotilj ?

12 M. Pervan (interprétation). - Oui, au mois de mai 1993 je suis

13 allé chez Salko Hodzic. C'était la nuit, il m'avait accueilli avec deux

14 autres personnes. Ensuite, quand je suis retourné à Rotilj, je suis allé

15 chez Salko et Suad Betic et j'ai vu beaucoup plus de femmes et d'enfants

16 que d'hommes. C'était à cette époque là... J'ai vu quelques hommes.

17 M. Cayley (interprétation). - Connaissez-vous M. Mario Bradara ?

18 M. Pervan (interprétation). - Oui, je connaissais Mario Bradara.

19 M. Cayley (interprétation). - Qui était ce ?

20 M. Pervan (interprétation). - C'était un soldat.

21 M. Cayley (interprétation). - Du HVO ?

22 M. Pervan (interprétation). - Oui. Le soldat du HVO.

23 M. Cayley (interprétation). - En mai 1993 était-il commandant

24 adjoint du HVO à Kiseljak ?

25 M. Pervan (interprétation). - Je sais qu'il était soldat au sein

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1 du commandement. Quelle était sa fonction, ça je ne sais pas, je ne lui ai

2 pas posé la question.

3 M. Cayley (interprétation). - L'officier de la FORPRONU dont je

4 viens de parler à l'instant, le capitaine Lantier, s'est entretenu avec

5 M. Bradara en mai 1993 et M. Bradara lui a dit que les Musulmans de Rotilj

6 étaient en fait emprisonnés, qu'ils ne pouvaient pas quitter le village à

7 leur guise, que les hommes en bon état physique utilisés pour creuser des

8 tranchées et qu'il avait également dit que le CICR s'était vu refuser

9 l'accès à Rotilj.

10 Seriez-vous d'accord avec moi pour dire que c'était bien la

11 situation qui régnait à Rotilj en mai 1993 ?

12 M. Pervan (interprétation). - Je ne connais pas qu'il avait eu

13 une telle conversation. Je ne sais pas si, au moment où j'étais absent, la

14 FORPRONU ou la Croix-Rouge s'était rendue à Rotilj ; vous venez de dire

15 que oui. Vous dites donc qu'ils sont allés à Rotilj. Personnellement, je

16 maintiens ce que j'avais déjà dit. Je comprends parfaitement ce qui

17 s'était passé avec ces gens-là. Je sais qu'ils vivaient dans une situation

18 extrêmement difficile, mais vous venez de dire qu'ils n'avaient pas le

19 droit de partir ; je ne sais pas s'ils leur avaient interdit de partir du

20 village, ça je ne le sais pas.

21 M. Cayley (interprétation). - Mais ces personnes ne pouvaient

22 pas quitter le village quand elles le souhaitaient en mai 1993, n'est-ce

23 pas ?

24 M. Pervan (interprétation). - Dans ma déclaration, j'ai parlé de

25 ce barrage qui se trouvait devant le village de Rotilj, j'ai dit qu'il y

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1 avait deux vieillards, deux personnes âgées qui étaient à côté. Je sais

2 que dans cette psychose, dans les problèmes qu'ils ont vécus, personne de

3 Rotilj n'avait besoin et ne souhaitait sortir et aller en ville. Tout

4 était fermé. Je ne pense pas qu'ils souhaitaient partir vers l'ouest. Il y

5 avait peut-être quelques sorties. Personnellement, je n'approuve pas

6 l'idée qu'il s'agissait d'un camp.

7 Le camp n'est pas pour les gens, en ce qui me concerne, mais de

8 toute façon, je sais qu'ils étaient en difficulté, je sais qu'ils avaient

9 des problèmes, il y avait ce barrage, mais le barrage avait pour but de

10 les protéger.

11 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, si vous permettez,

12 je voudrais compléter ce que je viens de dire. Il y avait des personnes

13 qui se trouvaient derrière le barrage. Moi-même, je suis passé à plusieurs

14 reprises et jamais on ne m'a posé de problèmes.

15 M. Cayley (interprétation). - Peut-on soumettre au témoin la

16 pièce suivante, s'il vous plaît ?

17 Pendant que cette pièce est distribuée, Père, je voudrais

18 préciser qu'il s'agit d'un rapport de l'ECMM en date du 22 mai 1993. Il

19 s'agit donc d'un autre rapport d'une autre organisation internationale qui

20 travaillait également dans la région. Je ne vais pas commencer ma lecture

21 avant que le conseil de la défense ait ce document sous les yeux.

22 Les personnes qui occupaient ce barrage avaient-elle un

23 quelconque moyen de communiquer avec le quartier général du HVO à

24 Kiseljak ?

25 M. Pervan (interprétation). - ...Téléphone...

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1 M. Cayley (interprétation). - Vous avez dit qu'ils avaient un

2 téléphone, c'est cela ?

3 M. Pervan (interprétation). - Oui, ils avaient le téléphone. Ils

4 avaient le téléphone ou la station radio talkie-walkie.

5 M. Cayley (interprétation). - Ce rapport a été rédigé après

6 votre visite à Rotilj.

7 M. Dubuisson. - Il s'agit du document 532.

8 M. Cayley (interprétation). - "L'équipe a visité la communauté

9 musulmane de Rotilj où environ 600 Musulmans sont rassemblés dans quelques

10 maisons. Les personnes n'ont pas une liberté de mouvement, bien que ce

11 fait soit nié par le HVO. Il y a un poste de contrôle occupé par des

12 civils croates qui arrêtent les gens venant de Rotilj. Des passages

13 annoncés au préalable par un maximum de deux personnes âgées ou de deux

14 femmes âgées sont possibles. Les gens peuvent également passer lorsqu'on

15 leur demande d'apporter certains médicaments spécifiques ou lorsqu'ils

16 sont là pour réparer des fenêtres par exemple.

17 HCR et une autre organisation sont informés de la situation et

18 apporteront très rapidement leur assistance. Six hommes sont encore portés

19 disparus et doivent être dans la prison de Kiseljak. Le CICR obtiendra des

20 informations sur ce point."

21 Père Pervan, savez-vous que des femmes âgées devaient demander

22 l'autorisation afin de pouvoir quitter Rotilj ?

23 M. Pervan (interprétation). - Je ne suis pas au courant.

24 M. Cayley (interprétation). - A l'époque, saviez-vous que six

25 hommes musulmans du village étaient portés disparus et qu'on pensait

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1 qu'ils se trouvaient à la caserne du HVO à Kiseljak ?

2 M. Pervan (interprétation). - A cette époque-là, je n'étais pas

3 au courant et aujourd'hui non plus.

4 M. Cayley (interprétation). - Faisons un saut en avant, si vous

5 le voulez bien, et passons à la période de septembre 1993. Avez-vous

6 visité le village de Rotilj en septembre ?

7 M. Pervan (interprétation). - Moi, je n'ai pas pris de note, je

8 sais que je suis allé à Rotilj de temps à autre. Il est fort possible que

9 j'ai été également en septembre à Rotilj.

10 M. Cayley (interprétation). - C'est une description du village

11 qui nous est donnée par un officier de l'armée canadienne qui est venu

12 déposer devant ces juges. C'est ici un résumé de la teneur de son rapport.

13 Il a découvert environ 600 Musulmans vivant dans 15 à 20 maisons.

14 Il s'agissait principalement de femmes, d'enfants et de

15 personnes âgées. Elles venaient notamment de Visnjice, Dolce, Han Ploca,

16 Duhre et Grahovice entre autres.

17 Ceci correspond-il à la scène à laquelle vous avez assisté en

18 septembre 1993 et à votre opinion sur la situation ?

19 M. Pervan (interprétation). - Moi, je ne le sais pas, mais si on

20 a parlé de 600 personnes, vous dites qu'il y avait quinze ou vingt

21 maisons... Je ne peux pas m'imaginer qu'il y avait plus de trente

22 personnes, tout au moins je ne suis pas au courant. Cela voudrait dire que

23 chaque maison contenait trente personnes.

24 M. Cayley (interprétation). – A l'époque, la communauté

25 internationale a exprimé ses préoccupations (l'officier canadien en a

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1 d'ailleurs parlé devant ses juges) préoccupations étant donné que l'hiver

2 approchait et l'on pensait que les Musulmans de Rotilj allaient subir de

3 grandes souffrances et qu'ils risquaient de mourir, étant donné les

4 conditions qui régnaient dans le village et les rigueurs de l'hiver. Avez-

5 vous entendu parler de cela ?

6 M. Pervan (interprétation). - Je ne connaissais pas leurs

7 préoccupations, leurs angoisses. Ce que je savais, c'est que chaque maison

8 était à côté de la forêt et pouvait s'approvisionner en bois et, à cette

9 époque-là, ils recevaient les vivres comme les autres, en dehors de ce

10 qu'ils avaient reçu des organisations humanitaires que nous n'avons pas

11 contrôlé, parce que de toute façon, ce n'était pas sous notre autorité

12 comme c'est le HCR, "médecins sans frontières" et "pharmaciens sans

13 frontières. Et la peur à cette époque-là qu'ils traverseraient de très

14 grandes épreuves, je ne pourrai pas le confirmer ou pas, parce que

15 d'autres réfugiés n'étaient pas dans une situation meilleure sur le plan

16 psychologique. Ils étaient même dans une situation meilleure ?… par

17 rapport aux Musulmans.

18 Mais, en ce qui concerne le bois, en ce qui concerne les

19 vêtements, en ce qui concerne les vivres, ils en avaient suffisamment

20 comme d'ailleurs tous ceux qui vivaient dans la paroisse de Kiseljak.

21 C'est d'ailleurs pour cela que je ne peux pas approuver ce que vous venez

22 de dire.

23 M. Cayley (interprétation). – Mais vous n'avez pas passé les

24 mois de l'hiver avec les Musulmans de Rotilj, n'est-ce pas ? Vous habitiez

25 chez vous à ce moment-là ?

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1 M. Pervan (interprétation). – Oui, je vivais dans ma demeure. Je

2 répète : ils ont vécu un moment psychologique très dur, mais en ce qui

3 concerne les besoins personnels, en ce qui concerne les vêtements, les

4 vivres, se chauffer, ils avaient tout ce dont ils avaient besoin et puis,

5 ils pouvaient en demander davantage.

6 M. Cayley (interprétation). – Vous serez d'accord avec moi pour

7 dire que la communauté internationale, médecins sans frontières, la

8 FORPRONU et le HCR sont plus à même de juger des conditions sanitaires qui

9 régnaient à Rotilj en 1993 ?

10 M. Pervan (interprétation). - Je ne suis pas médecin, par

11 conséquent je ne peux pas juger de l'état de santé de quelqu'un, mais je

12 suis un homme qui donnerait du pain à n'importe qui qui me dirait qu'il a

13 faim.

14 M. Cayley (interprétation). – Je voudrais maintenant faire

15 passer la pièce suivante, il s'agit d'un document public.

16 Le document suivant, Monsieur Pervan, est donc une annonce

17 publique qui est parue par l'intermédiaire de l'agence de presse française

18 et qui provient du haut-commissariat aux réfugiés. Je vais vous lire ce

19 document.

20 M. Dubuisson. – Document 543.

21 M. Cayley (interprétation). – "Sarajevo, 25 septembre 1993, les

22 Croates de Bosnie ont arrêté les membres de la population musulmane de

23 plusieurs villages en Bosnie centrale, ont utilisé les hommes pour du

24 travail forcé et ont enfermé les femmes et les enfants dans un quasi camp

25 de concentration. C'est ce qu'a dit un responsable des Nations Unies ici,

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1 samedi. Ray Wilkinson, porte-parole du haut commissariat aux réfugiés, a

2 déclaré que ces représentants qui travaillaient sur le terrain ont signalé

3 que les forces croates du HVO avaient arrêté un nombre significatif de

4 Musulmans des villages aux environs de Kiseljak où se trouve la base de la

5 force de protection des Nations Unies. Les hommes, plusieurs centaines qui

6 ont été utilisés pour creuser des tranchées sur les lignes de front près

7 de Fojnica, l'ont été, alors que les femmes et les enfants ont été

8 déportés, expulsés de leur foyer et emmenés à l'extérieur des villages de

9 Rotilj".

10 C'est ce qu'a dit le porte-parole, M. Wilkinson.

11 Le comité international de la Croix-Rouge et ses représentants

12 ont tenté en vain d'avoir accès à ce camp. Des nouvelles relatives à la

13 déportation nous sont parvenues le lendemain du jour où les Croates de

14 Bosnie ont libéré environ 500 prisonniers musulmans d'un camp qui se

15 trouvait à Dretelj, au sud du pays, et au moment où ils les ont emmenés

16 sur l'île de Korcula au bord de la côte croate.

17 M. Pervan (interprétation). - Je le vois.

18 M. Cayley (interprétation). – Vous êtes d'accord que ce n'est

19 pas le type d'organisation qui exagérerait une description ou une autre ?

20 M. Pervan (interprétation). – C'est probablement comme cela.

21 M. Cayley (interprétation). – Par conséquent, vous ne pourriez

22 qu'être d'accord avec la description qui est donnée de la situation qui

23 régnait à Rotilj en septembre 1993.

24 M. Pervan (interprétation). - Ils voyaient les choses de leur

25 façon et d'ailleurs, c'est ce qu'ils ont marqué dans ce texte.

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1 M. Cayley (interprétation). – Aviez-vous connaissance

2 d'arrestations de Musulmans dans les villages musulmans aux environs de

3 Kiseljak et que ces Musulmans avaient été emmenés à Rotilj ?

4 M. Pervan (interprétation). - Les Musulmans sont arrivés à

5 Rotilj, mais je sais également que la FORPRONU les avait conduits

6 également à Rotilj. Je sais par ailleurs que la FORPRONU avait organisé un

7 certain nombre d'échanges. Il y avait les Croates de Kacuni, de Silos, de

8 la prison de Brestovsko également qui ont été emmenés et puis un certain

9 nombre de Musulmans de Kiseljak et de Radanovici notamment ont été

10 conduits par la FORPRONU à Rotilj, mais également sur le territoire

11 musulman. Je sais qu'à cette époque-là la FORPRONU et les observateurs

12 n'ont pas parlé de la même manière de ce problème-là.

13 M. Cayley (interprétation). - Savez-vous que les hommes, en

14 bonne condition physique, étaient utilisés par le HVO et qu'ils étaient

15 emmenés pour creuser des tranchées ?

16 M. Pervan (interprétation). - Cela, je le sais. Je sais

17 également que les tranchées ont été creusées, ensemble, avec eux, par les

18 Croates qui n'étaient pas en âge de porter l'uniforme. Ils ont creusé les

19 tranchées ensemble. Je sais que les Musulmans de Rotilj sont venus vers la

20 partie centrale du village, qu'ils sont montés dans les camions, qu'on les

21 a conduits. Je sais également qu'on avait distribué des cigarettes à ces

22 gens-là, qu'ils pouvaient boire et manger, et que par la suite on les a

23 ramenés par camions à Rotilj. C'est ensemble, avec eux, comme je l'ai dit,

24 que les Croates d'un certain âge, qui avaient entre 57 et 70 ans,

25 creusaient les tranchées.

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1 M. Cayley (interprétation). - Mais ces hommes musulmans qui

2 creusaient des tranchées pour le HVO, ils ne le faisaient pas

3 volontairement, n'est-ce pas ?

4 M. Pervan (interprétation). - Certainement pas. Moi non plus, je

5 ne l'aurais pas fait si je n'étais pas obligé.

6 M. Cayley (interprétation). - Les camions qui venaient les

7 chercher du village, et dont vous avez parlé, c'étaient des camions du

8 HVO, n'est-ce pas ?

9 M. Pervan (interprétation). - A cette époque-là, à Kiseljak on

10 n'avait pas de camions peints d'une peinture militaire, mais c'étaient des

11 camions qui ont servi aux besoins de l'armée. Ce n'étaient pas des camions

12 qui étaient assurés. Souvent, on prenait ce genre de camions sans

13 immatriculation pour s'approvisionner en vivres. A cette époque-là, il n'y

14 avait pas de camions militaires à Kiseljak, tout au moins je ne les ai

15 pratiquement jamais vus. C'étaient les camions civils qui ont été mis à la

16 disposition du HVO.

17 M. Cayley (interprétation). - Merci. Monsieur le Président,

18 peut-être serait-il

19 opportun de faire la pause maintenant. Cela me conviendrait en tout cas.

20 M. le Président. - Eh bien, nous allons faire la pause.

21 (L'audience, suspendue à 11 heures 15, est reprise à

22 11 heures 30.)

23 M. le Président. - L'audience est reprise, introduisez l'accusé.

24 Monsieur le Procureur, vous avez à nouveau la parole pour la

25 continuation de votre interrogatoire.

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1 M. Cayley (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

2 Nous allons poursuivre, Monsieur Pervan. Vous avez déclaré, en

3 réponse aux questions de l'interrogatoire principal, que vous avez

4 rencontré Ivica Rajic et que vous le faisiez pratiquement tous les deux

5 jours.

6 M. Nobilo (interprétation). - Monsieur le Président, je propose

7 que nous passions à huis clos partiel.

8 M. le Président. - Vous êtes d'accord ?

9 M. Cayley (interprétation). - Bien sûr, pour assurer la sécurité

10 du témoin.

11 M. le Président. - Merci, Maître Cayley. Nous passons à huis

12 clos partiel.

13 Audience à huis clos partiel

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22 M. le Président. - Nous passons en audience publique

23 Audience publique

24 M. Cayley (interprétation). - Mon collègue me rappelle une

25 question que je devais vous poser.

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1 Monsieur, vous rappelez-vous quels sont les commandants ou

2 commandants adjoints avec lesquels vous avez évoqué le problème des

3 tranchées creusées sous la contrainte par des Musulmans. Nous avons peut-

4 être besoin de repasser à huis clos partiel si la défense le souhaite ?

5 M. Nobilo (interprétation). - Oui.

6 M. le Président. - Vous préférez ?

7 M. Nobilo (interprétation). - Oui.

8 M. le Président. - Nous repassons à huis clos partiel

9 Audience à huis clos partiel

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23 Audience publique

24 M. Cayley (interprétation). – Merci Monsieur le Président.

25 Monsieur, en réponse aux questions de l'interrogatoire principal, vous

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1 avez déclaré n'avoir aucun souvenir du fait que la population musulmane a

2 été embarquée à bord de camions, population musulmane qui venait des

3 différents villages entourant Kiseljak et que vous n'aviez aucune idée que

4 cette population musulmane a été emmenée sous la contrainte à Rotilj ?

5 M. Pervan (interprétation). – A mes yeux, le problème venait du

6 grand nombre de personnes qui étaient arrivées sur les lieux en provenance

7 de villages à l'extérieur. Et je n'apprenais ce qui passait qu'après que

8 cela ait eu lieu. Donc, c'est seulement après que j'étais en mesure de

9 réagir, de prendre des mesures et de faire connaître ma position, qui

10 était la position d'un être humain et d'un catholique.

11 J'ai donc appris après les faits que la population de Rotilj ne

12 cessait de croître. En tout cas, c'est ce que l'on pouvait constater à la

13 lecture des listes. J'ai donc appris après les faits que des habitants

14 d'autres endroits, notamment de Bilalovac, arrivaient à Rotilj et que

15 certains des Musulmans notamment étaient emmenés avec l'aide de la

16 FORPRONU et, à l'époque, ce genre de choses portait le nom d'"échange". Le

17 plus souvent, j'apprenais ce genre de choses lorsqu'un homme arrivait

18 auprès de moi et me disait : "Nous sommes arrivés hier, nous avons besoin

19 d'aide".

20 Je demandais : "D'où êtes-vous venu ?" et il me répondait :

21 "Nous avons fait l'objet d'un échange."

22 M. Cayley (interprétation). – Eh bien, les honorables juges de

23 ce tribunal ont entendu des habitants musulmans de Han Ploca, de Potkraj,

24 de Duri*, selon lesquels des camions du HVO arrivaient dans ces villages

25 pour emmener les femmes et les enfants dans le village de Rotilj, alors

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1 que les hommes en bonne condition physique étaient emmenés à la caserne de

2 Kiseljak. Avez-vous entendu cela en 1993 ou après 1993 ?

3 M. Pervan (interprétation). - Je ne peux pas dire que ces

4 personnes ont menti devant cet honorable tribunal. Il est certain que les

5 choses se sont passées ainsi, car à Rotilj, et on peut le vérifier sur les

6 listes de Caritas, des habitants de Topola et d'autres villages ont trouvé

7 une résidence.

8 Quant à la façon dont chacune de ces personnes est arrivée à

9 Rotilj, je n'en suis pas informé, mais la situation est bien telle que

10 vous venez de la décrire. Ces personnes sont arrivées à Rotilj, en

11 provenance d'autres endroits, je ne sais pas à quel moment, ni de quelle

12 façon ces personnes sont arrivées, je ne l'ai pas vu, mais je ne peux pas

13 dire que les personnes qui ont parlé ici ont menti. Par conséquent, c'est

14 bien ainsi que les choses se sont passées.

15 M. Cayley (interprétation). – Merci, Père, pour votre franchise.

16 Nous allons passer à un autre domaine de l'interrogatoire et je

17 demanderai, si vous le permettez, Monsieur le Président, que nous

18 repassions à huis clos partiel.

19 M. le Président. - Huis clos partiel, s'il vous plaît.

20 Audience à huis clos partiel

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5 Audience publique

6 La pièce porte quel numéro, Monsieur Dubuisson ?

7 M. Dubuisson. - 535.

8 M. le Président. - C'est une nouvelle pièce ?

9 M. Dubuisson. - Oui.

10 M. Cayley (interprétation). - Au cours de votre témoignage,

11 hier, Monsieur Pervan, vous avez dit, n'est-ce pas, que le Général Rajic

12 était venue à Kiseljak pour maintenir la Bosnie-Herzégovine dans son état

13 d'origine. Je crois que c'est ce que vous avez dit hier.

14 M. Pervan (interprétation). - Oui, c'est ce j'ai dit.

15 M. Cayley (interprétation). - Par conséquent, vous pensez que le

16 Colonel Blaskic croyait fermement en la République de Bosnie-Herzégovine ?

17 M. Pervan (interprétation). - Moi, je suis d'avis que M. Blaskic

18 s'était rendu à Kiseljac pour des raisons patriotiques. La Bosnie-

19 Herzégovine a été attaquée, on a fait agression sur la Bosnie-Herzégovine,

20 l'armée de Bosnie-Herzégovine et le HVO n'ont pas encore été mis en place

21 et ils étaient impuissants.

22 M. Cayley (interprétation). - Il s'agit à nouveau d'un document

23 public, à nouveau diffusé par l'AFP et je le lirai à l'attention des

24 Juges. Ce document est en date du 11 mai 1992. Peut-on le placer sur le

25 rétroprojecteur, s'il vous plaît, pour faciliter la tâche des

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1 interprètes ?

2 "Accroché sur un mur, à quelque 30 kilomètres seulement de la

3 capitale de Bosnie, Sarajevo, le mot "douane" indique la frontière d'une

4 autre région contrôlée par un autre groupe ethnique.

5 "Vous entrez maintenant en Herceg Bosna", nous dit un garde

6 Croate à l'extérieur de son poste de contrôle. Il se situe à la limite

7 d'un village musulman et pas très loin de la route qui sépare ce premier

8 territoire du district contrôlé par les Serbes.

9 Malgré la proximité de leurs rivaux appartenant à d'autres

10 groupes ethniques, et malgré les combats violents qui font rage à

11 Sarajevo, les Croates de l'Herceg Bosna disent qu'ils ont beaucoup

12 d'espoir de rester extérieurs au conflit. "Nous occupons ici un oasis de

13 paix et nous voulons rester extérieurs à tous ces conflits. Nous voulons

14 juste défendre Kiseljak", dit Andrija, un travailleur local qui est chargé

15 d'une unité du Conseil croate de défense, le HVO, l'armée croate en

16 formation.

17 Tiho Blaskic qui dirige les forces du HVO de Kiseljak nous a

18 expliqué que la région était paisible, parce que les Serbes, qui ne

19 constituent que 3 % de la population de la ville, n'ont aucun intérêt et

20 aucun dessein particulier pour ce territoire.

21 Pour ce qui est du gouvernement de Bosnie-Herzégovine à

22 Sarajevo, il déclare qu'il n'a aucune légitimité sur ce territoire.

23 Andrija exprime sa fierté devant le fait que Kiseljak, la semaine

24 dernière, est devenue la première ville de Bosnie dont l'ancienne armée

25 fédérale a accepté de ne pas la toucher."

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1 Je vous invite maintenant à passer à la deuxième page.

2 "Les villes et les rues de Kiseljak étaient pleines d'hommes

3 désoeuvrés, nombre d'entre eux portant des chemises militaires. La plupart

4 d'entre eux sont des ouvriers qui viennent de la proche capitale et qui ne

5 peuvent pas se rendre à leur travail à cause du siège de la ville maintenu

6 par les Serbes.

7 "Notre seul lien avec le monde extérieur est Split", dit Andrija

8 qui fait référence au grand port croate qui se trouve sur l'Adriatique au

9 sud-ouest. "A partir de ce point, des camions amènent de l'aide

10 humanitaire, envoyés à Kiseljak par l'organisation catholique Caritas",

11 ajoute-t-il.

12 Marijeta, seize ans, a pris des vacances forcées étant donné que

13 le lycée local a été fermé puisque les professeurs venant de Sarajevo ne

14 peuvent plus y parvenir. Elle a déclaré qu'elle n'appréciait pas beaucoup

15 le temps qu'elle passait ici étant donné qu'il y avait sans arrêt des

16 sirènes qui prévenaient des raids aériens, même si les bombes n'avaient

17 pas encore touché sa ville.

18 Pendant ce temps, à la caserne de la ville, des soldats croates

19 continuent à repeindre des jeeps et des camions qui ont été laissés là par

20 l'armée, et ils les repeignent aux couleurs de la Croatie. "Kiseljak fera

21 par conséquent partie d'un canton croate dit Tihomir Blaskic, ou de la

22 région administrative locale, et se tournera plutôt vers l'ouest que vers

23 l'est".

24 Père Pervan, avez-vous jamais entendu le Colonel Blaskic

25 exprimer son opinion sur ce point ?

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1 M. Pervan (interprétation). - C'est lui qui a rédigé le document

2 et la manière dont il a décrit décrivait à peu près la situation telle

3 qu'elle était.

4 Mais je vais rajouter quelque chose. Au cours de 1993, le

5 journaliste a véritablement remarqué que les camions apportaient les

6 marchandises pour Caritas. Ce que je dois dire, c'est que nous avons eu le

7 sceau du HVO pour traverser un certain nombre de points de contrôle, mais

8 il fallait également disposer du sceau de l'armée de Bosnie-Herzégovine.

9 Sur les papiers qui ont accompagné nos camions, si on n'avait pas des

10 cachets du HVO, on ne pouvait pas traverser Citru*. Si on n'avait pas de

11 sceau de l'armée de Bosnie-Herzégovine, on ne pouvait pas traverser Igman.

12 J'ai reconnu tout à fait par hasard les noms de ceux qui ont

13 donné les déclarations, ces déclarations contenues dans le document, et je

14 sais que M. Blaskic est allé pour défendre Jajce. Jajce était une ville

15 qui avait une population mixte, ce sont les Serbes qui l'ont agressée, et

16 Travnik également était une ville mixte.

17 M. Cayley (interprétation). - Ma question est donc la suivante.

18 Avez-vous entendu le colonel Blaskic exprimer de telles opinions

19 publiquement à Kiseljak ?

20 M. Pervan (interprétation). - Non.

21 M. Cayley (interprétation). - Savez-vous que ce même jour le

22 colonel a décidé de ne plus reconnaître les forces musulmanes de la

23 Défense territoriale à Kiseljak ?

24 M. Pervan (interprétation). - Je ne suis pas au courant.

25 M. Cayley (interprétation). - Je n'aurai que quelques questions

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1 encore, avant de conclure. Vous avez déclaré au cours de l'interrogation

2 principal que vous deviez acheter des explosifs ou plutôt que le HVO

3 devait acheter des explosifs soit en Bosnie-Herzégovine soit aux Serbes ?

4 M. Pervan (interprétation). - J'ai dit que le HVO achetait des

5 explosifs aux Serbes, ou il les avait reçus ou achetés en Herzégovine, et

6 notamment quand il s'agit de la dynamite.

7 M. Cayley (interprétation). - Par conséquent, les Serbes

8 permettaient au HVO de transporter de l'équipement militaire et leur

9 permettaient de traverser le territoire qui était placé sous leur

10 contrôle ?

11 M. Pervan (interprétation). - C'était comme ça, mais on payait

12 un grand prix pour passer ce territoire. On plaisantait souvent et on

13 disait que je consommais de l'argent pour la nourriture et que c'était

14 bien, mais que les trois camions coûtaient une citerne de pétrole, alors

15 qu'un camion de la dynamite également coûtait à peu près ça ; c'était trop

16 cher, le prix était trop cher.

17 M. Cayley (interprétation). - Et en 1993, saviez-vous que

18 l'armée des Serbes de Bosnie fournissait des chars au HVO afin de soutenir

19 leurs opérations militaires menées comme l'armée de Bosnie-Herzégovine

20 dans la municipalité de Kiseljak ?

21 M. Pervan (interprétation). - Oui, ça, je suis au courant. Je

22 sais également qu'ils achetaient aux Serbes les munitions. On avait parlé

23 qu'on se mettait d'accord pour les 80 000 cartouches, les Serbes disaient

24 "une cartouche 3 Mark" et ensuite ils négociaient, et puis le prix montait

25 même jusqu'à 5 Mark. Je sais qu'une fois, on avait récolté presque un

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1 million de Mark pour sous-louer un char. Je me souviens qu'il y avait donc

2 cette récolte de Mark pour acheter le char et pour acheter également les

3 munitions.

4 M. Cayley (interprétation). - Savez-vous où cette opération

5 militaire a eu lieu ?

6 M. Pervan (interprétation). - Je pense que c'était une opération

7 du côté de Fojnica, mais je ne suis pas sûr.

8 M. Cayley (interprétation). - Avez-vous vu de vos yeux le char à

9 Kiseljak ?

10 M. Pervan (interprétation). - Je l'ai vu deux fois, à deux

11 reprises.

12 M. Cayley (interprétation). - Combien y avait-il de chars ?

13 M. Pervan (interprétation). - Deux, je pense deux. Je ne les

14 aurais pas vus, mais comme ma demeure paroissiale se trouve tout à fait en

15 haut, j'ai entendu le bruit. Et la FORPRONU pouvait voir également ceux-

16 ci, car ils devaient passer à côté de la FORPRONU.

17 M. Cayley (interprétation). - Peut-on tamiser la lumière, je

18 voudrais diffuser un extrait très court d'une cassette vidéo ; je vous

19 invite à regarder l'écran qui se trouve juste devant vous, Monsieur

20 Pervan, ici-même.

21 Diffusion de la cassette vidéo.

22 Peut-on faire un arrêt sur image, s'il vous plaît ? Est-ce vous

23 Monsieur Pervan ?

24 M. Pervan (interprétation). – Oui, c'est bien moi.

25 M. Cayley (interprétation). – Vous êtes donc la deuxième

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1 personne à partir de la droite de l'image. Diffusons cet extrait jusqu'à

2 la fin, s'il vous plaît.

3 (Diffusion)

4 Merci. S'agissait-il là de la présentation de nouvelles couleurs

5 pour le régiment et notamment pour la brigade Ban Jelacic par le

6 commandant Tihomir Blaskic ?

7 M. Pervan (interprétation). - Je pense que c'était le jour où la

8 brigade Ban Jelacic a été mise en place.

9 M. Cayley (interprétation). – Quelle était votre fonction lors

10 de cette cérémonie ?

11 M. Pervan (interprétation). - C'était la cérémonie de la

12 formation de la brigade et toutes les personnes de renommée de la ville

13 ont été invitées ou bien les personnes qui avaient un certain nombre de

14 fonctions. Moi, j'étais un des invités.

15 M. Cayley (interprétation). – En tant que prêtre franciscain de

16 Kiseljak, c'est cela ?

17 M. Pervan (interprétation). – En tant que prêtre de Kiseljak.

18 M. Cayley (interprétation). – D'accord, en tant que prêtre de la

19 paroisse, excusez-moi.

20 M. Pervan (interprétation). - J'ai été invité non pas en ma

21 qualité de prêtre, mais du fait que je me trouvais à la tête de la

22 paroisse.

23 M. Cayley (interprétation). – Vous avez dit hier dans votre

24 témoignage que vous connaissiez un homme du nom de Mario Bradara.

25 M. Pervan (interprétation). – Oui, je le connais même

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1 aujourd'hui.

2 M. Cayley (interprétation). – Mario Bradara est-il un cousin du

3 général Blaskic ?

4 M. Pervan (interprétation). – A ma connaissance, il n'est pas

5 cousin, il ne porte pas le même nom, cela n'est pas, par conséquent, du

6 côté de son père, alors que la mère de Mario est de Derventa, je n'en ai

7 jamais entendu parler.

8 M. Cayley (interprétation). – Peut-on montrer au témoin la pièce

9 D424 ?

10 Il s'agit de la déclaration dont vous êtes l'un des signataires.

11 C'est une déclaration pleine de sentiments tout à fait nobles et qui parle

12 de tolérance et d'amour chrétien entre les gens. Vous avez signé ce

13 document, n'est-ce pas, Monsieur Pervan ?.

14 M. Pervan (interprétation). – Oui.

15 M. Cayley (interprétation). – Vous souvenez-vous de la date de

16 ce document ?

17 M. Pervan (interprétation). - Je ne me souviens pas du jour et

18 de la date, mais je pense que cette déclaration a eu lieu entre les deux

19 conflits.

20 M. Cayley (interprétation). – Par conséquent, entre janvier et

21 avril 1993 ?

22 M. Pervan (interprétation). - Je pense que c'était dans cette

23 période-là, mais je ne m'en souviens pas très précisément.

24 M. Cayley (interprétation). – Pourriez-vous lire à haute voix le

25 quatrième paragraphe ? Je crois qu'il commence par le mot "torture", non,

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1 excusez-moi, excusez ma prononciation. Pouvez-vous nous lire ce

2 paragraphe, s'il vous plaît ?

3 M. Pervan (interprétation). – "C'est pourquoi nous demandons à

4 ceux qui se trouvent au pouvoir, que ce soit des autorités civiles ou

5 militaires que tous ceux qui au nom du peuple commettent les crimes, font

6 des pillages, tuent, incendient, propagent la peur, au nom des droits de

7 l'homme respectent le droit de vie de tout un chacun".

8 M. Cayley (interprétation). – Dans cet appel, vous et vos

9 collègues, vous vous adressez directement à des personnes haut placées

10 dans les autorités militaires et civiles, afin de leur demander de mettre

11 un terme aux pillages, aux meurtres et à la haine.

12 M. Pervan (interprétation). - Oui.

13 M. Cayley (interprétation). – Vous vous adressez à la fois à des

14 personnages haut placés, militaires et civils ? Il s'agit donc de

15 personnages également placés dans la hiérarchie du HVO ?

16 M. Pervan (interprétation). – Oui.

17 M. Cayley (interprétation). – Et vous partagiez l'opinion à

18 l'époque avec les autres membres du clergé qui ont rédigé cette

19 déclaration que ces autorités pouvaient mettre un terme aux événements qui

20 étaient en train de se produire ?

21 M. Pervan (interprétation). – C'est ce que nous avons pensé et

22 c'est ce que nous avons souhaité surtout.

23 M. Cayley (interprétation). – Merci, je n'ai plus de questions,

24 Monsieur le Président. Je voudrais simplement demander le versement des

25 pièces 540, 541, 542, 543, 544, 545 et 546 qui est la vidéo.

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1 M. le Président. - Pas d'observations ? Ces pièces seront

2 versées.

3 La fin d'après-midi risque de subir quelques changements en

4 raison d'une visite qui est faite au Tribunal et aux Juges. Nous vous

5 proposons, mes collègues et moi, pour essayer de perdre le moins de temps

6 possible, de commencer à 14 heures 15, si tout le monde est d'accord et

7 les interprètes également.

8 Les interprètes. - Les interprètes sont d'accord,

9 Monsieur le Président.

10 M. le Président. - Je vois que le conseil de la défense opine,

11 Maître Cayley aussi.

12 Bon d'accord, nous nous retrouvons après une courte pause à

13 14 heures 15.

14 (L'audience, suspendue à 13 heures, est reprise à 14 heures 15)

15 M. le Président. - L'audience est reprise. Introduisez l'accusé.

16 (L'accusé est introduit dans la salle d'audience.)

17 M. le Président. - Maître Cayley, avant de donner la parole à

18 Me Nobilo pour son droit de réplique, je me permets de vous rappeler qu'il

19 y avait une série de pièces que vous souhaitiez examiner ; je crois que ce

20 sont les pièces sur les bénéficiaires de l'aide humanitaire. Nous allons

21 attendre l'entrée du témoin pour que vous puissiez prendre parti à ce

22 moment-là.

23 Monsieur le Greffier, peut-on introduire le Père Pervan ?

24 (Le témoin est introduit dans la salle d'audience.)

25 M. Cayley (interprétation). - Oui, je m'en souviens, Monsieur

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1 le Président, je devais vous le rappeler d'ailleurs, je crois ! Vous avez

2 une meilleure mémoire que la mienne vraisemblablement...

3 M. le Président. - (Hors micro)

4 M. Cayley (interprétation). - Effectivement, j'ai examiné les

5 documents et je n'ai aucune objection à leur versement.

6 M. le Président. - Maître Nobilo ?...

7 M. Nobilo (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

8 Père Ivan, voudriez-vous dire aux Juges si Caritas, votre

9 paroisse, avait donné l'aide tout aussi bien aux Croates qu'aux Musulmans,

10 donc la même quantité de vivres par habitant ?

11 M. Pervan (interprétation). - Monsieur le Président, en ce qui

12 concerne la paroisse de Kiseljak, nous avons donné la nourriture aussi

13 bien aux Musulmans qu'aux Croates.

14 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que vous voulez dire aux

15 Juges... Nous avons entendu par notre confrère, le Procureur, que HCR

16 avait donné l'aide également aux Musulmans dans votre paroisse. Est-ce

17 que, à votre connaissance, il avait donné directement également l'aide aux

18 réfugiés croates sur le territoire de votre paroisse par habitant, une

19 fois de plus ?

20 M. Pervan (interprétation). - Monsieur le Président, au moment

21 où j'ai parlé des donateurs, pour la paroisse Caritas, j'avais dit qu'il y

22 avait des donations qui sont provenues des organisations humanitaires

23 civiles non seulement de chez nous mais également de pays différents et

24 c'est HCR qui avait également donné de l'aide humanitaire à notre

25 organisation.

Page 14142

1 En ce qui concerne le HCR, je sais qu'il avait donné de la

2 nourriture non seulement à notre paroisse, et à Caritas, mais aux

3 Musulmans avant que cela passe par notre évidence. Les Médecins sans

4 frontière, les Pharmaciens sans frontière faisaient pareil et comme je

5 l'ai dit également, moi-même j'ai reçu l'aide de la part de la FORPRONU

6 pour les Musulmans.

7 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que le HCR avait donné

8 directement aux réfugiés croates la nourriture ?

9 M. Pervan (interprétation). - Cela, je ne connais pas, je ne

10 connais pas un seul cas.

11 M. Nobilo (interprétation). - Si l'on résume que les Musulmans

12 dans votre paroisse avaient reçu l'aide de la part de Caritas, du HCR, des

13 Médecins sans frontière, etc, alors que les réfugiés croates recevaient

14 l'aide uniquement de Caritas, à ce moment-là, qu'est-ce que vous pouvez en

15 conclure ? Qui a obtenu davantage d'aide ? C'étaient les Musulmans ou

16 c'étaient les réfugiés croates ?

17 M. Pervan (interprétation). - Logiquement, par habitant, ce sont

18 davantage les Musulmans qui en ont profité.

19 M. Nobilo (interprétation). - Maintenant, nous allons passer à

20 un certain nombre de questions qui concernent Rotilj.

21 En ce qui concerne la pièce à conviction 298 de l'accusation, on

22 a parlé d'Andrija et l'on a dit qu'il y avait 600 personnes qui se

23 trouvaient à Rotilj ; on pense aux Musulmans bien évidemment.

24 Pourriez-vous nous dire, Père Ivan, selon les listes dont vous

25 disposez -car c'est vous qui avez distribué les vivres-, combien il y

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1 avait de familles musulmanes dans votre paroisse et à Kiseljak ?

2 M. Pervan (interprétation). - Selon le directeur du centre de

3 collecte qui s'occupait de la distribution des vivres, il y avait

4 480 personnes de Rotilj qui se trouvaient sur la liste. A plusieurs

5 reprises, nous avons parlé du fait qu'il ne s'agissait pas d'une donnée

6 correcte et qu'il pourrait probablement s'agir d'une dizaine de personnes

7 de moins, mais nous n'avons jamais voulu vérifier les listes car, de

8 l'autre côté, parmi les réfugiés croates, il nous arrivait également

9 d'obtenir des listes qui n'étaient pas tout à fait correctes.

10 C'était quelque chose qui était général à cette époque-là, aussi

11 bien du côté des Musulmans que du côté des Croates, et c'est la raison

12 pour laquelle nous sommes d'avis que le nombre de personnes qui

13 nécessitaient l'aide a été augmenté quelque peu, même pour ceux qui

14 n'existaient pas.

15 En d'autres termes, on mettait sur la liste le chef de famille,

16 par exemple Marko Markovic, et le nombre de membres de famille, sept,

17 alors que souvent c'était cinq et pas sept. C'était souvent le cas, aussi

18 bien du côté des Musulmans que du côté des Croates.

19 M. Nobilo (interprétation). - Merci. Mais quelles étaient les

20 raisons pour lesquelles les réfugiés croates ou les Musulmans mettaient un

21 nombre plus grand comme membres de leur famille ?

22 M. Pervan (interprétation). - Mais la raison était très simple :

23 nous avons vu que nous n'avions pas pu distribuer de la nourriture

24 régulièrement, nous ne savions pas quelles étaient les quantités dont nous

25 allions disposer quand nous allions retourner de notre voyage ; les uns et

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1 les autres s'approvisionnaient pour être sûrs qu'ils auraient de la

2 nourriture jusqu'au jour où ils pourront réclamer davantage, pour la

3 deuxième fois.

4 M. Nobilo (interprétation). - Dans cette même pièce à

5 conviction, 298, on dit que les 600 personnes habitaient dans les quinze

6 ou vingt maisons. Si nous supposons que les trente personnes étaient par

7 maison, ou même plus que trente par maison, vous avez visité un certain

8 nombre de maisons musulmanes, quelle est votre expérience vu le nombre de

9 membres de famille qui habitaient par maison ?

10 M. Pervan (interprétation). - Tout à fait au début, j'ai dit que

11 je communiquais notamment avec Saleocodic*. Et tout au début du conflit,

12 au début de la guerre, il m'avait dit qu'il y avait 17 personnes qui

13 habitaient dans sa maison. J'essayais de le consoler en disant que moi

14 aussi, j'abritais les 15 personnes.

15 Mais ultérieurement, quand j'ai vu Mirsad Muicic*, Mirsad et

16 puis les deux filles également, quand je suis allé chez eux et les ai

17 emmenés de Rotilj pour leur trouver un appartement qui était plus correct

18 chez Zlavko Lucic, j'ai trouvé cinq personnes chez Lucic et il y avait au-

19 dessus également Mirsad avec sa famille. Moi-même, je l'ai emmené

20 également. Donc, il y avait cinq et sept respectivement membres des deux

21 familles.

22 M. Nobilo (interprétation). - Selon vous, est-il vrai que toutes

23 ces personnes-là pouvaient habiter dans les quinze ou vingt maisons ?

24 M. Pervan (interprétation). - Non, je pense que c'est un chiffre

25 qui a été doublé, ou triplé même.

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1 M. Nobilo (interprétation). - Entre quarante et soixante maisons

2 dans ce cas-là ?

3 M. Pervan (interprétation). - Oui, au minimum.

4 M. Nobilo (interprétation). - D'après vous, vous connaissez la

5 population, vous connaissez également la mentalité, est-ce que pour les

6 Musulmans c'était plus sûr d'habiter à Rotilj ou bien de se déplacer dans

7 la municipalité de Kiseljak, ou bien dans la ville de Kiseljak où il y

8 avait 19 000 réfugiés croates qui étaient frustrés, qui étaient angoissés,

9 dont les membres de famille ont été tués ? Qu'est-ce que vous en pensez ?

10 M. Pervan (interprétation). - Moi, je maintiens mon point de vue

11 que ces gens-là se trouvaient dans une situation extrêmement éprouvante,

12 qu'ils n'étaient pas dans une bonne position.

13 Si jamais ce conflit devait se répéter et si moi, je devais

14 décider de vivre dans les conditions dans lesquelles ils avaient vécu à

15 l'époque, ou bien d'être parmi les réfugiés frustrés, j'aurais

16 probablement choisi le calme et la paix dans laquelle ils ont vécu.

17 M. Nobilo (interprétation). - Vous voulez dire qu'à Rotilj, les

18 Musulmans étaient beaucoup plus en sécurité ?

19 M. Pervan (interprétation). - Oui, je pense qu'ils étaient

20 beaucoup plus en sécurité que dans d'autres parties de la municipalité de

21 Kiseljak, et notamment jusqu'en automne 1993. Il est arrivé, bien

22 évidemment, qu'il y avait des problèmes à Rotilj également, mais à cette

23 époque-là ceci pouvait leur arriver également en ville ou dans d'autres

24 parties de la municipalité. Par conséquent, pour eux, c'était beaucoup

25 plus sûr d'habiter Rotilj que d'habiter ailleurs.

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1 M. Nobilo (interprétation). - Ce n'était pas absolument sûr ?

2 M. Pervan (interprétation). - Bien évidemment, ce n'était pas

3 absolument sûr.

4 M. Nobilo (interprétation). - Vous avez dit que vous vous êtes

5 rendu chez Ivica Rajic, au poste de commandement, et que vous avez passé

6 un certain nombre de coups de téléphone. Vous avez parlé de Split

7 également et de l'entrepôt où il y avait des munitions. Est-ce que l'on

8 pouvait facilement communiquer par téléphone entre Herzégovine et la

9 Croatie ?

10 M. Pervan (interprétation). - On pouvait, en ce qui concerne

11 Kiseljak, téléphoner tout le temps. Je ne peux pas vous dire quelle était

12 la base et sur quel fondement, mais de toute façon c'était beaucoup plus

13 difficile de communiquer. Mais à partir du mois d'août, la communication

14 avec Split et avec le monde était maintenue. Et à la fin de 1993, moi,

15 j'ai même disposé d'une ligne de téléphone chez moi.

16 M. Nobilo (interprétation). - Mais est-ce que vous avez pu

17 parler avec quelqu'un qui était à Vitez en passant par cette ligne ?

18 M. Pervan (interprétation). - Je n'ai jamais eu à discuter avec

19 quelqu'un à Vitez, mais je suis passé par la station de radio.

20 M. Nobilo (interprétation). - Mais par téléphone ?

21 M. Pervan (interprétation). - Peut-être, on aurait pu, mais en

22 ce qui me concerne, je n'ai même pas posé la question et j'ai utilisé la

23 station radio.

24 M. Nobilo (interprétation). - Merci.

25 Nous avons parlé de creusements de tranchées à Kiseljak, vous

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1 avez dit que vous n'avez pas parlé avec Blaskic de ceci. Pouvez-vous nous

2 apporter quelques précisions ? Pourquoi n'avez-vous pas parlé avec Blaskic

3 de cela ? Quelles étaient vos raisons ? Pourquoi vous n'avez pas parlé de

4 creusements de tranchées dans la municipalité de Kiseljak ?

5 M. Pervan (interprétation). - A cette époque-là, après la mort

6 de Mato Lucic, Maturica, je ne me suis pas entretenu avec M. Blaskic. Tout

7 d'abord je n'avais pas le téléphone, je ne connaissais pas son numéro de

8 téléphone non plus. Et puis déjà, à cette époque-là, on considérait que de

9 toute façon on ne demandait absolument rien de Blaskic et que lui-même ne

10 pouvait pratiquement rien faire.

11 M. Nobilo (interprétation). - Dans la pièce à conviction 544 de

12 l'accusation, on parle de l'ordre donné à Bozic pour faire sortir de

13 l'appartement Miro Bozic, l'ancien officier de la JNA, de l'appartement

14 dans lequel il était. Il s'agit donc du document qui date du 1er mai 1993.

15 Est-ce que vous pouvez dire aux Juges ce que vous savez sur

16 Mustafa Polutak ? Quelle était sa fonction à Kiseljak et qu'avait-il fait

17 auparavant ?

18 M. Pervan (interprétation). - Moi, je ne connais pas

19 personnellement Mustafa Polutak, mais j'ai entendu parler de son nom à

20 maintes reprises. Mustafa Polutak était le commandant de la caserne dans

21 l'ex-JNA et nous savons qu'à cette époque-là, les autorités politiques,

22 militaires et civiles avaient négocié avec lui, au printemps 1992, pour

23 restituer les armes et pour mettre à la disposition la caserne. On avait

24 dit à cette époque-là qu'il était prêt à le faire et qu'il n'allait pas

25 écouter les officiers de la JNA. C'est vrai. Il avait donc rendu la

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1 caserne.

2 M. Nobilo (interprétation). - Quand ?

3 M. Pervan (interprétation). - C'était au printemps 1992 et à

4 cette époque-là on avait dit qu'il y avait un certain nombre d'armes

5 également, quand ils ont transporté les armes de Kaonik, de Kiseljak et de

6 Dragan*, et qu'il y avait un certain nombre d'armements qui est resté.

7 Je sais que, plus tard, il y avait un certain nombre de

8 reproches entre le HVO et l'armée de Bosnie-Herzégovine, qu'ils n'avaient

9 pas soi-disant réparti de manière équitable les armes. L'armée de Bosnie-

10 Herzégovine reprochait au HVO d'avoir pris davantage d'armes. Il n'y avait

11 pas de conflit, il y avait ce conflit verbal.

12 Mais Mustafa Polutak avait rendu la caserne au HVO, il s'est

13 retiré dans son appartement et, ces jours-ci, ce que j'ai appris par la

14 suite, c'est par sa propre volonté, et cela a été même arrangé, il est

15 parti à Visoko où il a obtenu un poste de commandement de l'armée de

16 Bosnie-Herzégovine, alors que la caserne de Bosnie-Herzégovine, qui se

17 trouve à Visoko et qui est à côté du lycée, c'est un bâtiment qui

18 appartenait à l'ordre franciscain à l'époque, et c'est lui-même, de sa

19 propre volonté, qui est parti là-bas.

20 En ce qui concerne Mijo Bozic, en revanche, à cette époque-là,

21 on avait beaucoup pris les appartements, dont les propriétaires étaient

22 partis. Personnellement, je pense que Mijo Bozic avait pris cet

23 appartement car il s'agissait d'un appartement qui était un appartement

24 militaire, de la propriété de l'armée, et que personne ne pouvait en

25 disposer. L'appartement était dans la propriété de l'armée.

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1 On considérait que les appartements de l'ex-JNA appartenaient

2 actuellement à l'armée qui était nouvellement formée et selon la

3 législation de l'époque ceux qui quittaient le lieu de résidence n'avaient

4 plus le droit à l'appartement dans lequel ils se trouvaient.

5 M. Nobilo (interprétation). - D'après vous, au moment où il y

6 avait cet ordre, donc c'est le 544, vous voulez dire que Mustafa Polutak

7 avait été absent de son appartement plus d'un an ? Est-ce que c'est

8 exact ?

9 M. Pervan (interprétation). - Moi, je ne peux pas vous dire

10 exactement, parce que je ne me souviens pas exactement de la date où la

11 caserne a été rendue, mais comme c'était au printemps cela pouvait être un

12 an, un peu plus d'un an ou un peu moins d'un an.

13 M. Nobilo (interprétation). - Merci. Je pense que nous pourrions

14 peut-être éclaircir un autre point très brièvement. Nous allons peut-être

15 répéter cela. Qui avait destitué Mijo Bozic de son poste du commandement

16 de la brigade Ban Josip Jelacic ?

17 M. Pervan (interprétation). - Mijo Bozic, le commandant de la

18 brigade Ban Josip Jelacic, a été destitué par les amis d'Ivica Rajic, ceux

19 qui lui ont été subordonnés.

20 M. Nobilo (interprétation). - Le Procureur vous a parlé du

21 29 mai 1993 et quand Blaskic, avec la FORPRONU, s'était rendu à Kiseljak.

22 Est-ce que vous pouvez me dire, s'il vous plaît, où pouvait se trouver

23 Blaskic à ce moment-là, alors que vous n'étiez pas au courant de sa visite

24 de Kiseljak ?

25 M. Pervan (interprétation). - Monsieur le Procureur m'avait

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1 surpris avec cette donnée, quand il avait dit que M. Blaskic s'était rendu

2 à Kiseljak après le 13 mai ; probablement que la donnée dont il dispose

3 est une bonne donnée. Mais en ce qui me concerne, je n'ai pas vu

4 M. Blaskic à cette époque-là, et je n'ai pas appris par qui que ce soit

5 qu'il s'était rendu à cette époque-là à Kiseljak.

6 J'ai réfléchi un petit peu pendant la pause et puis il y a une

7 idée qui m'est venu à l'esprit. Je me souviens qu'une fois, j'étais parti,

8 accompagné par la FORPRONU, dans un transporteur, et que tout le long de

9 cette route je ne savais même pas où je me trouvais, je ne pouvais même

10 pas le voir ; et je suppose que M. Blaskic était venu probablement, à

11 partir du moment où le Procureur l'affirme. Il aurait pu se trouver dans

12 la base de la FORPRONU ou bien à un endroit où, nous autres, à Kiseljak,

13 on n'aurait pas pu le voir.

14 M. Nobilo (interprétation). - On vous a également cité une

15 déclaration de Blaskic concernant le gouvernement à Sarajevo. Pouvez-vous

16 me dire comment vous avez vécu ce fait de parler de Herceg-Bosna, c'est la

17 négation de l'Etat de Bosnie-Herzégovine, ou d'une nécessité de guerre, et

18 donc d'une partie qui était quand même au sein de la Bosnie-Herzégovine ?

19 M. Pervan (interprétation). - A cette époque-là, en 1992, il y

20 avait la guerre, c'est Sarajevo notamment qui souffrait le plus. Avant,

21 Procevina était occupée également, pour ce qui concerne les Croates et les

22 Musulmans. Ils se trouvaient dans une situation extrêmement dure à Banja

23 Luka et à Krajina, et notamment ceux qui étaient de Kotor Varos, qui sont

24 arrivés ensemble, aussi bien les Croates que les Musulmans.

25 Et si, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, vous me le

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1 permettez, je vais dire une phrase qui peut-être ne devrait pas être

2 prononcée ici. Il y avait un Musulman, un Musulman de Kotor Varos, de

3 Banja Luka. Au moment où l'armée de Bosnie-Herzégovine s'est emparée de

4 Bajkovic*, il était resté dans la demeure paroissiale et à cette époque-

5 là, il y avait déjà des combats qui ont été préparés pour Jaic* et tout le

6 monde le savait, on avait attaqué Mostar et c'est pourquoi il a été

7 indispensable que le peuple croate se rassemble un peu davantage. Et c'est

8 à ce moment-là que l'on avait fondé Herceg-Bosna qui a été toujours une

9 communauté au sein de Bosnie-Herzégovine.

10 On peut en voir également sur les mémorandums, dans les

11 intitulés, sur les sceaux, il y a toujours la Bosnie, Bosnie-Herzégovine,

12 ensuite la communauté Herceg-Bosna Kiseljak. Donc, il y a d'abord la

13 Bosnie-Herzégovine, Herceg-Bosna, et ensuite Kiseljak. Je pense que c'est

14 comme cela que c'est dans les intitulés.

15 M. Nobilo (interprétation). - Bien évidemment, vous n'avez pas

16 des précisions et des détails au sujet de la manière dont Herceg-Bosna

17 était organisée au sein de cette communauté.

18 M. Pervan (interprétation). - Je connais beaucoup de personnes

19 qui sont d'Herceg Bosna, mais je n'ai jamais fait de politique et, selon

20 le code de conduite de mon ordre, je n'aurais même pas pu le faire.

21 M. Nobilo (interprétation). - Je vous en remercie.

22 Vous avez dit que pour louer le char, il a fallu donc rassembler

23 un million de Deutsche Mark. Qui avait pu récolter une somme aussi

24 importante ? Qui avait donné de l'argent ?

25 M. Pervan (interprétation). - A l'époque, on parle d'une période

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1 tout à fait précise dans le cadre de la municipalité de Kiseljak et de

2 Krecevo -ce sont les deux municipalités qui se rattachent l'une à l'autre,

3 depuis le centre de Kiseljak jusqu'à Krescevo, il y a 12 kilomètres- il y

4 avait beaucoup de personnes qui étaient riches et qui, même avant la

5 guerre, se sont enrichies. Je pourrais dire que ce sont les personnes qui

6 étaient devenues des grands riches et à cette époque-là, à Kiseljak, il y

7 avait une trentaine de personnes qui étaient véritablement riches.

8 Ensemble, avec les autorités politiques -je sais par exemple

9 qu'il y avait Joso Boro parmi eux, il y en en avait d'autres également-,

10 ils ont collecté l'argent et en quatre heures, ils ont pu faire la

11 collecte et ils sont arrivés à un million de Deutsche Mark justement pour

12 acheter des armes.

13 Je vous ai dit pour les cartouches comment ils ont fait : une

14 cartouche valait 1 Deutsche Mark, ensuite 3 Deutsche Mark, ensuite

15 5 Deutsche Mark. Donc, une fois, quand ils avaient besoin de l'argent, ils

16 collectaient cet argent-là. Ils faisaient la même chose également quand il

17 s'agissait des blessés ; à Kiseljak, par exemple, notre municipalité a

18 payé également l'hospitalisation des blessés et c'était une somme assez

19 importante, c'était 1 300 000 Deutsche Mark.

20 M. le Président. - (Hors micro) J'ai compris en lisant.

21 On peut passer en huis clos partiel s'il vous plaît.

22 (Audience à huis clos partiel)

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10 (Audience publique)

11 M. le Président. - Bien nous repassons en session publique. Vous

12 avez terminé l'ensemble de votre droit de réplique, Maître Nobilo, ou

13 uniquement la partie sur la session privée ?

14 M. Nobilo (interprétation). - De fait, j'ai pratiquement

15 terminé, mais je demanderai seulement le versement au dossier d'une pièce

16 à conviction que l'accusation a déjà reçue hier, et je demande que l'on

17 montre cela au témoin pour que le témoin dise s'il s'agit bien là du

18 rapport que la défense a reçu de ce témoin. Il s'agit du rapport

19 concernant les activités de l'organisation Caritas entre 1992 et 1995.

20 M. le Président. - Vous voulez présenter cette pièce, Maître

21 Nobilo ?

22 M. Nobilo (interprétation). - Oui, mais ceci a déjà été remis au

23 Greffier d'audience. Donc je demande simplement que l'on distribue ceci et

24 qu'on attribue une cote.

25 M. Dubuisson - Le document porte le numéro D427.

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1 M. Nobilo (interprétation). - Père Ivan, vous avez examiné ce

2 document. Est-ce qu'il s'agit-il là du rapport concernant Caritas que vous

3 avez remis à la défense ?

4 M. Pervan (interprétation). - Oui.

5 M. Nobilo (interprétation). - Merci. Monsieur le Président, nous

6 avons maintenant terminé notre droit de réplique et nous demandons le

7 versement au dossier de tous les documents présentés jusqu'à maintenant, y

8 compris ce dernier document.

9 M. le Président. - Il n'y a pas d'objection. Père Pervan, je

10 vais maintenant donner la parole à chacun des Juges qui m'entourent et

11 d'abord bien sûr au Juge Riad.

12 Il vous appartiendra, vous la défense, vous l'accusation, si les

13 Juges abordaient un sujet pour lequel vous sollicitiez une mesure de huis

14 clos partiel, de le demander. Cela ne sera pas les Juges qui l'ordonneront

15 d'eux-mêmes, il vous appartient de le demander. Voilà.

16 Monsieur le Juge Riad, c'est à vous.

17 M. Riad (interprétation). - Merci, Monsieur le Président. Père

18 Ivan, bonjour.

19 M. Pervan (interprétation). - Bonjour, Monsieur le Juge.

20 M. Riad. - Je souhaite être éclairé sur certains points et je

21 commence par une question qui m'intéresse beaucoup concernant les

22 critiques de M. Rajic, les reproches qu'il faisait au général Blaskic, au

23 colonel Blaskic à ce moment-là. Qu'est-ce qu'il lui reprochait au juste ?

24 M. le Président. - Vous préférez que cela soit en session à huis

25 clos partiel, Maître Nobilo ?

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1 M. Nobilo (interprétation). - Oui, Monsieur le Président, merci

2 M. le Président. - Excusez-moi, Monsieur le Juge.

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9 Audience publique

10 M. Shahabuddeen (interprétation). - Père Pervan, je crois que

11 vous conviendrez avec moi qu'il est un peu curieux pour une armée qui se

12 bat contre une autre armée d'aider l'armée à laquelle elle s'oppose d'une

13 façon ou d'une autre. Peut-être, la situation était-elle la suivante : les

14 Serbes aidaient le HVO et aidaient également les Musulmans, en sachant que

15 cette aide devait être utilisée par ces deux camps, dans leur lutte entre

16 ces deux derniers camps, si vous m'avez bien compris. Est-ce que c'était

17 bien la situation ?

18 M. Pervan (interprétation). - Monsieur le Juge, votre estimation

19 est bonne. La situation était effectivement telle que vous l'avez décrite,

20 les Serbes voulaient contrôler la situation en aidant tantôt les uns,

21 tantôt les autres et permettez-moi de vous raconter quelle a été la

22 situation dans la poche de Bihace où les Serbes s'attaquaient aux soldats

23 musulmans avec l'aide d'un autre groupe de soldats musulmans aussi. Ils

24 voulaient en tout cas toujours contrôler la situation.

25 M. Shahabuddeen (interprétation). – Mais, Père Pervan, à ce

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1 stade, je crois qu'il va falloir que je vous dise l'étendue de ma

2 connaissance, mais également l'étendue de mon ignorance. Parlons quelque

3 peu de l'aide apportée notamment de la nourriture. Serais-je en droit de

4 supposer qu'une certaine quantité de nourriture a été transmise à Caritas,

5 et à Merhamet et que cette aide provenait d'autres organisations

6 humanitaires telles que le HCR entre autres.

7 M. Pervan (interprétation). - Monsieur le Juge, si j'ai bien

8 compris, vous m'avez posé une question, mais je n'ai pas entièrement

9 compris la question. Donc, je m'excuse, mais veuillez la répéter.

10 M. Shahabuddeen (interprétation). - Oui. Eh bien, je vais la

11 diviser. Caritas distribuait de l'aide sous forme de nourriture. La

12 situation était-elle la suivante : une certaine quantité de cette

13 nourriture était-elle reçue par Caritas d'autres organisations

14 humanitaires ?

15 M. Pervan (interprétation). – Caritas recevait de la nourriture

16 des autres organisations humanitaires et, ensuite, distribuait cette

17 nourriture aux autres qui en avaient besoin. Est-ce que c'était cela votre

18 question ?

19 M. Shahabuddeen (interprétation). – Oui, oui, c'est la question

20 et c'est la réponse à laquelle je m'attendais à vrai dire.

21 Mais, était-il prévu que Caritas distribue la nourriture qu'elle

22 recevait de façon non discriminatoire ?

23 M. Pervan (interprétation). - Oui.

24 M. Shahabuddeen (interprétation). - Cela était-il également vrai

25 pour Merhamet ?

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1 M. Pervan (interprétation). - Oui.

2 M. Shahabuddeen (interprétation). - Votre ou plutôt le conseil

3 de la défense a versé au dossier certains documents montrant que Caritas

4 avait distribué de la nourriture à la fois aux Musulmans et aux Croates.

5 Etait-il également prévu que vous envoyiez ce document régulièrement aux

6 donateurs qui transmettaient la nourriture à votre organisation ?

7 M. Pervan (interprétation). - Nous remercions les donateurs dès

8 que nous recevions leurs dons, et, de temps en temps, nous leur envoyions

9 un rapport, c'est-à-dire nous envoyions un rapport au bureau central de

10 Caritas à Sarajevo et, bien évidemment, c'est selon la conscience et la

11 sincérité de l'âme de la personne qui devait distribuer cette nourriture,

12 de la distribuer à ceux qui en avaient besoin, mais moi, je ne m'attendais

13 jamais à ce qu'un jour on demande de telles listes, de tels documents.

14 Nous, nous dressions ces listes pour nous-mêmes.

15 M. Shahabuddeen (interprétation). – Merhamet utilisait-elle un

16 système identique ?

17 M. Pervan (interprétation). - Aussi, pendant qu'il fonctionnait,

18 je sais que, par exemple, Mensur Elezovic dressait de telles listes lui

19 aussi. Et puis j'ai déjà dit qu'ils ont eu un certain nombre de problèmes

20 et Menso, Mensur porte avec lui encore aujourd'hui des listes pour prouver

21 qu'il travaillait de manière équitable.

22 M. Shahabuddeen (interprétation). - A l'époque, aviez-vous

23 l'impression que Merhamet ne travaillait pas de façon non discriminatoire

24 ou, au contraire, pensiez-vous qu'elle fonctionnait de façon

25 déséquilibrée ?

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1 M. Pervan (interprétation). - Personnellement, je ne m'immisçais

2 pas dans leur travail, sauf que je leur donnais certaines vivres tout comme

3 j'en recevais de leur part. Donc, je ne connais pas le détail concernant

4 les problèmes dans leur fonctionnement. J'ai entendu dire quelques

5 détails, mais je n'ai pas de connaissance personnelle à ce sujet.

6 M. Shahabuddeen (interprétation). - Je vous comprends très bien,

7 Père Pervan. Passons maintenant, s'il vous plaît, aux tranchées. Bien

8 entendu, je n'étais pas sur place, et je ne sais pas quelle était la

9 situation sur place. Vous, en revanche, vous aviez une approche plus

10 personnelle que moi. Pouvez-vous nous dire si certaines tranchées étaient

11 creusées à proximité de certaines lignes de front ?

12 M. Pervan (interprétation). - Oui, lorsqu'on creusait les

13 tranchées, on le faisait près de la ligne du front, maintenant, je viens

14 de me souvenir d'un exemple, je veux mentionner cela, il s'agit d'un

15 incident qui est arrivé à une personne qui est arrivée à Kiseljak, elle

16 n'était pas capable de faire son service militaire et il a dit qu'il avait

17 creusé des tranchées auparavant pour les Musulmans et maintenant pour les

18 Croates et lui-même il était croate.

19 M. Shahabuddeen (interprétation). - Père Pervan, avez-vous

20 entendu des histoires faisant état du fait que des Musulmans étaient

21 utilisés pour creuser des tranchées et que ces Musulmans étaient exposés à

22 des tirs ennemis ?

23 M. Pervan (interprétation). - Ils creusaient les tranchées près

24 de la ligne du front, mais je n'ai jamais entendu ni appris que qui que ce

25 soit parmi eux ait été non seulement tué, mais même blessé.

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1 M. Shahabuddeen (interprétation). - Je dois dire que j'ai peut-

2 être manqué d'attention au cours de votre témoignage, et il y a un point

3 qui reste obscur. Je crois que vous avez parlé de Rotilj en 1993 et que

4 vous avez dit à un moment donné que des maisons avaient été incendiées,

5 mais que vous n'avez jamais entendu dire qu'une maison croate avait été

6 incendiée.

7 Et d'ailleurs j'ai été frappé par ce que vous avez dit à ce

8 moment-là : vous avez dit qu'il y avait des personnes qui avaient été tués

9 des deux côtés. Ai-je bien entendu ?

10 M. Pervan (interprétation). - Oui, vous avez bien entendu,

11 Monsieur le Juge, oui.

12 M. Shahabuddeen (interprétation). - Par conséquent, pourriez-

13 vous me dire ce que vous aviez à l'esprit lorsque vous nous avez dit qu'il

14 y avait des morts des deux côtés à Rotilj ?

15 M. Pervan (interprétation). - Ce que j'ai voulu dire, Monsieur

16 le Juge, c'est que vraiment c'était la guerre là-bas.

17 M. Shahabuddeen (interprétation). - Oui, je vois, je vois. J'en

18 arrive à Mustafa Polutak. Il était responsable de la caserne je crois, au

19 départ ?

20 M. Pervan (interprétation). - Il était le commandant de la

21 caserne, Monsieur le Juge, durant la période durant laquelle l'armée de la

22 JNA se trouvait au sein de la caserne, étant donné que la guerre en

23 Bosnie-Herzégovine a commencé après la guerre en Croatie et donc toute

24 l'armée a quitté la Croatie et la Slovénie pour venir en Bosnie-

25 Herzégovine, et par la suite ils se sont rangés du côté des Serbes.

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1 M. Shahabuddeen (interprétation). - Au moment où il a abandonné

2 la caserne au profit du HVO, servait-il dans les rangs de l'armée de

3 Bosnie-Herzégovine ou bien était-il loyal vis-à-vis du gouvernement de

4 Sarajevo ?

5 M. Pervan (interprétation). - Mustafa Polutak a fait le

6 transfert de la caserne de Kiseljak de manière paisible et calme. Il est

7 sorti paisiblement de la caserne, il a remis la caserne au HVO, sachant

8 que le HVO allait répartir les armes et les Musulmans entre le HVO et

9 l'armée de Bosnie-Herzégovine, et, lui, il est allé librement à Visoko,

10 sans aucun reproche, et il a rejoint les rangs de l'armée musulmane.

11 M. Shahabuddeen (interprétation). - Je vois. Vous avez dit que

12 certaines lois stipulaient que si l'occupant d'un appartement était absent

13 pendant plus de six mois, les autorités pourraient reprendre possession

14 dudit appartement.

15 M. Pervan (interprétation). - Oui, c'est ce que j'ai dit et

16 c'est le cas encore aujourd'hui en Bosnie-Herzégovine. Je souhaite vous

17 informer, Monsieur le Juge, que nous avons reçu des informations certaines

18 selon lesquelles M. Mustafa Polutak n'allait pas venir à Kiseljak et il

19 existait le danger de voir cet appartement pillé, détruit, etc..

20 M. Shahabuddeen (interprétation). - Je vois. En vertu de ces

21 lois, quelles autorités pouvaient reprendre possession de ces appartements

22 vides ?

23 M. Pervan (interprétation). - Les autorités municipales, les

24 autorités d'une municipalité donc.

25 M. Shahabuddeen (interprétation). - Et ces lois parlaient-elles

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1 explicitement du HVO comme étant l'une de ces autorités possibles ?

2 M. Pervan (interprétation). - Les autorités dans la municipalité

3 de Kiseljak, donc à cette époque-là, durant ces événements-là, c'est le

4 HVO qui a repris le contrôle. Le HVO avait

5 au moins trois composantes : la composante politique, le représentant

6 civil et l'armée. Donc, il s'agissait d'un conseil qui à l'époque se

7 trouvait à la tête de certaines villes et le nom en était le HVO.

8 M. Shahabuddeen (interprétation). - D'accord. Maintenant, j'en

9 arrive au stade où peut-être je demanderai que nous passions en audience à

10 huis clos partiel.

11 M. le Président. - Nous sommes à huis clos partiel.

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7

8 (L'audience, suspendue à 15 heures 50, est reprise à

9 16 heures 20.

10 M. le Président. - Introduisez l'accusé, nous reprenons en

11 session publique. Nous lèverons l'audience à 16 heures 45, ce sera donc

12 pour une très courte reprise

13

14 Père Pervan, je voulais vous poser quelques questions.

15 Vous avez dit qu'en 1993 vous avez vu la baisse de vos

16 paroissiens et l'arrivée de milliers de réfugiés. Est-ce que vous en avez

17 parlé avec les autres pères de la paroisse, avec les autres paroisses,

18 pour essayer d'arrêter une position face à ce qui allait être un

19 catastrophe humanitaire?

20 M. Pervan (interprétation). - Monsieur le Président,

21 depuis 1991, depuis que la guerre s'est déclenchée en Croatie, et

22 notamment au moment où Sarajevo a été assiégée et bloquée, quand beaucoup

23 de gens avaient sentis que la guerre se déclenchait également dans notre

24 région, nous nous sommes réunis souvent et nous avons parlé des problèmes

25 auxquels nous aurions à faire face.

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1 Excusez-moi, mais j'ai du bruit dans mon casque et je n'arrive

2 pas à parler. Jusqu'à maintenant c'était bien, je ne sais pas ce qui

3 m'arrive maintenant. Eh bien, je pense que je vais pouvoir quand même

4 tenir jusqu'à la fin de cette séance.

5 (Le greffier donne un autre casque au témoin)

6 M. le Président. - Est-ce que ça va mieux ? Vous avez quand même

7 compris ma question ?

8 M. Pervan (interprétation). - Oui, merci.

9 Oui j'ai compris votre question, Monsieur le Président, j'ai

10 déjà commencé à vous donner la réponse.

11 Je répète : au cours de 1991, vu la guerre en Croatie, et puis,

12 en 1992, la guerre que nous avons pressentie en Bosnie-Herzégovine étant

13 donné que la Posavina était déjà en guerre et Sarajevo bloqué, avant

14 Pâques, normalement, on avait des réunions, nous avons parlé de ces

15 choses-là, et nous avons dit que nous étions fort préoccupés de ce qui

16 allait se passer.

17 M. le Président. - Vous aviez arrêté une position quand même ?

18 C'est là que vous avez décidé, pour l'aide humanitaire comment vous alliez

19 prendre une part importante ?

20 M. Pervan (interprétation). - A cette époque-là, ou plus

21 particulièrement en 1992, nous n'avons pas encore arrêté une décision très

22 concrète parce que l'on avait espéré que la guerre n'allait pas se

23 produire véritablement, à savoir que les hommes politiques des communautés

24 ethniques allaient se mettre d'accord, et ensuite il y avait un certain

25 nombre d'estimations également au sujet de la guerre qui nous parvenaient

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1 de Sarajevo. M. le Président de la Présidence, Alija Izetbegovic, au

2 printemps 1992, affirmait que la guerre n'aurait pas lieu en Bosnie-

3 Herzégovine et que nous n'allions pas être agressés.

4 M. le Président. - Lorsque vous avez vu arriver (je crois que

5 c'est votre chiffre) jusqu'à 14 000 réfugiés, est-ce que vous en avez

6 parlé dans votre communauté et est-ce que vous en avez parlé avec les

7 autres communautés ?

8 M. Pervan (interprétation). - Eh bien, à cette époque-là, nous

9 avons parlé avec d'autres paroisses quand il y a eu les conflits qui ont

10 commencé. Nous en avons parlé avec des Musulmans également, avec les

11 représentants de toutes les communautés ethniques, avec des Serbes

12 également, avec leur société humanitaire "Preporod", "Le renouveau", et

13 c'est à cette époque-là que nous avions quatre paroisses et que nous avons

14 parlé entre nous, nous avons échangé des points de vue, nous avons aidé

15 les uns les autres.

16 M. le Président. - Bien, mais est-ce que vous avez décidé, par

17 exemple, avec l'imam, avec le représentant du culte orthodoxe, de

18 conserver une certaine neutralité ?

19 M. Pervan (interprétation). - Pour ce qui est de la municipalité

20 de Kiseljak, il n'y avait pas de prêtre orthodoxe et il y avait des

21 Musulmans. Moi, j'étais en très bonnes relations avec les imams et

22 notamment avec M. Setko et avec M. Halusevic Aldo.

23 Je suis allé le voir dès que la guerre s'est terminée, même

24 aujourd'hui d'ailleurs je le vois. A cette époque-là, effectivement, nous

25 avons beaucoup parlé . on voulait garder la neutralité et en même temps

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1 également que chacun de nous parle qu'il était indispensable de ne pas

2 véritablement être en guerre.

3 J'ai parlé de Setko alors qu'il fallait dire Seto.

4 M. le Président. - Dans cette optique d'une certaine neutralité,

5 on nous a passé une vidéo ce matin où vous figurez en bonne place avec un

6 autre père au cours d'une parade qui devait avoir une certaine connotation

7 nationaliste je suppose.

8 Ma question est celle-ci : est-ce que vous pensez que votre

9 place était là ? Et, dans un pays où il y a un fort sentiment religieux

10 est-ce que vous pensez pas que c'est de nature, dans la population, à

11 accréditer que l'Eglise est du côté des armes ? Qu'est-ce que vous en

12 pensez ?

13 M. Pervan (interprétation). - Monsieur le Président, lors de

14 cette cérémonie, de cette parade, comme je l'ai dit, j'ai été invité, je

15 n'ai pas porté l'uniforme, ça ne m’est jamais venu à l'esprit. Je n'ai

16 jamais tiré sur qui que ce soit, moi j'étais invité d'honneur. Au cours

17 de 1992, de 93 et de 94 même, j'ai eu un certain nombre de contacts avec

18 la FORPRONU, et c'était avec d'autres pères. Tous ces gens qui étaient

19 représentés sur la cassette vidéo. C'étaient les Croates effectivement.

20 Mais ceci ne veut pas dire qu'ils étaient tous des Catholiques, la

21 majorité c'étaient des Catholiques. Et moi-même, je pense que c'est bien

22 que j'ai été là-bas pour pouvoir influencer de manières positive ces gens-

23 là et parler des principes chrétiens.

24 M. le Président. - Je vais retourner ma question. Si vous ne

25 vous y étiez pas rendu à cette invitation, est-ce que cela aurait été

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1 interprété et dans quel sens ?

2 M. Pervan (interprétation). - Si je ne mettais pas rendu à la

3 cérémonie, on n'aurait pas été satisfait. J'aurais pas été puni., ça c'est

4 sûr, si je n'avais pas répondu à l'invitation. Mais j'aurais pas eu le

5 droit de parler du mal et du bien, comme je les fais pratiquement tout le

6 temps lors de mes messes comme je l'ai précisé.

7 M. le Président. - C’est intéressant ce que vous dites ; vous

8 nous dites, au fond, que le fait de participer, aux côtés d'un camp, vous

9 donne le droit de mieux parler de la paix et de la neutralité. Cela peut

10 se discuter, reconnaissez-le, à tout le moins. Il me semble

11 personnellement qu'on parlerait beaucoup mieux de la paix entre les

12 communautés si on ne participait pas symboliquement à une parade.

13 M. Pervan (interprétation). - Monsieur le Président, c'était un

14 état de fait déjà. Kiselkak, à cette époque-là, avait l'armée, il aurait

15 eu l'armée même s'il n'y avait pas un seul prêtre, l'armée était sur

16 place. Et moi, je n'étais pas en possibilité de dire : "Rentrez chez vous

17 et laissez, ne menez pas la guerre".

18 M. le Président. - Ce n'était pas ça, Père. Ne me faites pas

19 dire ce que je n'ai pas dit. Je ne disais pas que vous alliez, tout seul,

20 avec votre robe de bure, du beau symbole de Saint-François d'Assise, dire

21 devant : "Partez !", non pas du tout. Je me posais la question de savoir

22 si c'était vraiment la place de l'Eglise, dans une parade militaire, en

23 pleine guerre, au moment où des choses, des atrocités sont susceptibles

24 d'être commises, voire même ont été commises. Bien, mais laissons ce

25 sujet-là.

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1 Vous avez dit, je vais pas trop prolonger, à un moment donné, je

2 sais pas si je me trompe, vous avez dit avec force : "Rotilj n'était pas

3 un camp". Qu'est-ce qui vous permet de caractériser ce qui est un camp ?

4 Ce qui ne l'est pas ? Rotilj n'était pas un camp. Vous avez donc la notion

5 de ce qui est un camp !

6 M. le Président. - Monsieur le Président, excusez-moi, mais j'ai

7 peut-être pas était tout à fait clair ou j'ai dit des choses qu'il ne

8 fallait pas dire. Mais, personnellement, si j'ai dit que Rotilj n'était

9 pas un camp, c'est parce que j'en ai eu quelques raisons.

10 Si on parle d'un camp, à ce moment-là c'est un lieu qui est

11 encerclé. Jusqu'au mois d'août, quand on allait chercher la nourriture,

12 dans ce cas-là on pourrait dire que Kiseljak était également un camp. Moi,

13 je suis allé à Rotilj. Je sais qu'il y avait des Croates qui sont aller

14 pour aider la population à Rotilj. Je sais qu'il y avait ce barrage et que

15 ce barrage existait à un seul endroit. Les gens disposaient de nourriture.

16 Et il y en avait qui se sont occupés de ces gens-là, moi-même je me suis

17 occupé de ces gens-là. Personne ne m'a menacé pour cela. Ensuite, ils

18 pouvaient communiquer librement entre eux ; je parle des villageois.

19 Personne des autorités officielles, que ce soit des autorités politiques,

20 civiles ou militaires, n'avait donné des instructions ou des ordres pour

21 maltraiter la population.

22 Voilà, ce sont les raisons pour lesquelles je considère que

23 Rotilj n'était pas un camp, car il y avait un seul barrage et toutes les

24 autres routes menaient en dehors de Rotilj.

25 M. le Président. - En même temps, c'est là où il y a quelque

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1 chose qui me paraissait ambigü, mais vous allez m'éclairer. Ce n'est pas

2 un camp, mais il y a un barrage, et vous avez dit que ce barrage est

3 destiné à les protéger, à protéger ces réfugiés qui étaient à Rotilj.

4 Alors je vais poser la question, les protéger de quoi ? Ils

5 étaient en danger et le danger venait de qui ? Il y avait donc bien un

6 danger quand même ?

7 M. Pervan (interprétation). - Oui, Monsieur le Président, vous

8 avez parfaitement raison. A cette époque-là, on avait un grand nombre de

9 réfugiés, qui ont laissé leurs maisons qui ont été détruites ou

10 incendiées, ou des personnes de leur famille qui ont été tuées. Il y avait

11 une révolte. C'est la raison pour laquelle on a dressé ce barrage, pour

12 qu'il n'y ait pas de vengeances, de représailles, de pillages, pour qu'il

13 n'y ait pas de meurtres. C'est la raison pour laquelle le barrage a été

14 placé, pour des Croates et pas des Musulmans.

15 M. le Président. - C'est illogique me semble-t-il puisque le

16 barrage... je me souviens de la carte... il est à un certain endroit, mais

17 il ne bloque pas tout. Vous êtes en train de me dire que Rotilj n'est pas

18 un camp parce que s'est ouvert, mais le barrage est à un certain endroit,

19 il ne commande pas toute la ville de Rotilj. Et semble-t-il ce barrage est

20 fait pour protéger les personnes qui sont à Rotilj. Est-ce qu'il n'y a pas

21 quand même quelque chose qui n'est pas tout à fait logique dans ce que

22 vous dites ? Vous voyez mon observation ? Ou bien il y a un barrage pour

23 protéger et à ce moment-là et il faut que ce barrage protège totalement

24 et à ce moment-là, on est dans un camp. Ou bien vous dites que ce n'est

25 pas camp, c'est quand même un endroit ouvert, mais alors, on ne sait pas

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1 pourquoi il y a un barrage. Je dois dire que je n'ai pas très bien

2 compris.

3 M. Pervan (interprétation). - Je vais essayer,

4 Monsieur le Président, de m'expliquer, je vais donner un exemple. Il y

5 avait des réfugiés, qui venaient avec des sacs dans les mains, ils

6 n'avaient pas de couvertures, pas de lits, pas de tables. Donc, bien

7 évidemment personne n'allait se rendre à pied à Rotilj pour prendre la

8 table ou pour prendre le lit etc, mais passera par cette route-là pour

9 piller.

10 Effectivement, les gens de Rotilj n'ont pas pillé, c'est ce que

11 les Musulmans disent également. On a supposé que ceux qui allaient essayer

12 de piller allaient prendre cette route qui était la plus courte pour

13 regagner donc Rotilj.

14 M. le Président. – Un pillard prend la route la plus officielle,

15 où il y a un barrage ? Je ne sais pas si c'est peut-être comme cela, mais

16 écoutez, je n'ai pas à donner d'appréciation.

17 Une des dernières questions que je voulais vous poser : vous

18 dites que vous allez souvent à Kiseljak à la caserne et vous rencontrez

19 tous ces chefs du HVO, vous êtes ami avec ceux, vous prenez un café, parce

20 que ce sont des amis d'enfance peut-être. Est-ce que justement là vous

21 n'auriez pas préféré peut-être rester un peu plus à distance ?

22 M. Pervan (interprétation). – Moi, je suis allé à la caserne

23 pour affaires. Et j'ai pris un café. J'avais toujours une raison ou bien

24 de parler au téléphone ou éventuellement d'apprendre un certain nombre de

25 choses. Je n'avais pas des contacts avec ces gens-là depuis mon enfance,

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1 mais je pensais que c'était bien de savoir les choses et d'avoir toutes

2 les informations. C'est comme cela que j'ai pu apprendre un certain nombre

3 de choses et ensuite pouvoir très publiquement parler devant les personnes

4 qui avaient commis quelque chose et auxquelles il fallait dire qu'ils ont

5 fait des choses qui n'étaient pas bien.

6 M. le Président. – Je vais poser ma dernière question, parce que

7 je crois que, voyez-vous, il me semble que vous êtes, par ce que vous

8 accomplissez sur terre, vous êtes dans une fonction qui est quand même

9 transcendante aux choses misérables de l'humanité. Donc, le fait que vous

10 ayez été cité par la défense ne peut que nous faire poser des questions

11 qui ont trait quand même à votre qualité. Vous nous avez manifestement

12 tracé un portrait flatteur même de l'accusé. Moi, la question que j'avais

13 envie de vous poser : vous êtes un homme d'Eglise, est-ce qu'en fin de

14 compte, les événements étant maintenant écoulés, est-ce que vous vous

15 reprochez certaines choses ? Ou est-ce qu'au fond vous agiriez de la même

16 façon ?

17 M. Pervan (interprétation). - Monsieur le Président, dès le

18 début, d'abord, j'ai prêté serment et j'ai dit que je dirai la vérité,

19 toute la vérité. Ce n'est pas uniquement la loi, mais également l'esprit

20 dans lequel je vis en tant que prêtre, j'ai dit la vérité. Je suis prêt à

21 répéter la vérité, s'il s'agit des mêmes choses et s'il s'agit du même

22 procès et du même cas.

23 M. le Président. - Bien écoutez, é s'il n'y a pas d'autre

24 question à vous poser, je crois que nous allons vous renvoyer à l'exercice

25 de votre ministère, en vous remerciant d'être venu à la demande de la

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1 défense jusqu'au tribunal pénal international.

2 Je crois que nous allons clore ce soir ,mais M. le Juge Riad

3 souhaite poser un dernière question. Monsieur le Juge, allez-y.

4 M. Riad (interprétation). – Père Ivan, cette question n'a plus

5 trait exactement au procès, mais je sais que des hommes comme vous peut-

6 être sont à la base de la paix, vous croyez que les deux communautés

7 croates et musulmanes veulent vivre ensemble, veulent coexister et que

8 cette lutte intestine a été provoquée ou ils ne sont pas faits pour vivre

9 ensemble ?

10 M. Pervan (interprétation). - Monsieur le Juge, vous avez bien

11 observé les choses. Je pense que les conflits en Bosnie-Herzégovine entre

12 les Croates et les Musulmans a été voulu et ce conflit a été tel qu'il a

13 été. Je répète en permanence que la guerre doit rester derrière nous.

14 C'est la raison pour laquelle je prie que chacun doit rester vivre sur son

15 propre sol, les Croates doivent vivre sur leur propre sol et les Musulmans

16 sur leur propre et j'espère que les générations qui viendront après nous

17 vivront dans la paix et en paix.

18 M. Riad (interprétation). –J'ajoute : est-ce que cette guerre,

19 heureusement elle est terminée, a été forcée par les armes, par les armées

20 forcées au peuple ou bien est-ce que cela émanait vraiment d'un esprit

21 populaire ?

22 M. Pervan (interprétation). - Personnellement, je suis d'avis

23 que la guerre en Bosnie, notamment en Bosnie centrale, était le résultat

24 d'une agression serbe de la grande hégémonie serbe. Il faut dire que sur

25 un espace qui est limité, il y avait beaucoup de personnes qui se sont

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1 retrouvées regroupées et qui sont arrivées de Bosnie orientale,

2 occidentale de tous les territoires différents et chacun cherchait

3 l'espace pour la vie et c’est la raison pour la principale pour laquelle

4 il y avait cette guerre et, personnellement, j'espère que nous n'aurons

5 plus de guerre.

6 En ce qui me concerne, j'espère que moi, je ne vais pas vivre

7 une guerre prochaine. De toute façon, je n'y crois pas.

8 M. le Président. - Merci.

9 M. Pervan (interprétation). - Excusez-moi, j'aimerais dire juste

10 quelques mots.

11 Je voudrais remercier les juges et dire au Président que je ne

12 voulais pas dire peut-être que les questions qui m'ont été posées

13 n'étaient pas correctes. Au contraire toutes les questions qui m'ont été

14 posées étaient tout à fait correctes. Je ne sais pas si j'ai fait une

15 erreur ou si je n'ai pas bien compris.

16 M. le Président. - L'audience est levée. Je crois qu'il vaut

17 mieux que nous reportions à demain nos débats, qui reprendront demain à

18 15 heures.

19 (L'audience est levée à 16 heures 45.)

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