LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE II

Devant : M. le Juge David Anthony Hunt, Juge de la mise en état

Assisté de : Mme Dorothee de Sampayo Garrido-Nijgh, Greffier

Ordonnance du : 16 décembre 1999

LE PROCUREUR

C/

MOMIR TALIC

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DÉCISION RELATIVE À LA REQUÊTE AUX FINS DE TRADUCTION DES DOCUMENTS DE PROCÉDURE EN FRANÇAIS

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Le Bureau du Procureur :

Mme Joanna Korner
M. Michael Keegan
Mme Ann Sutherland

Le Conseil de la Défense :

M. Xavier de Roux
M. Michel Pitron

 

1. Le 29 octobre 1999, en qualité de juge de mise en état, nous avons modifié les délais prévus par l’Ordonnance relative au dépôt des requêtes en l’espèce, en ordonnant que le délai pour le dépôt de la réponse du Procureur aux requêtes déposées en langue française par l’accusé, ne courra qu’après réception par le Procureur d’une version anglaise du document visé1.

2. Cette ordonnance se fondait sur les informations émanant de la Section des services linguistiques et de conférence selon lesquelles, vu le manque d’effectifs, ladite Section n’était pas en mesure de traduire en anglais les longs documents déposés en français, sans courir le risque de prendre un retard non négligeable, alors que ce problème ne se posait pas pour les documents anglais à traduire en français. Nous avons également tenu compte de notre propre connaissance de la question – tirée de notre expérience dans d’autres affaires – à savoir que, pour bon nombre de membres du Bureau du Procureur, les documents français doivent être traduits en anglais.

3. La réponse immédiate a été une Requête aux fins de traduction des documents de procédure en français2, laquelle demandait que l’accusé ne soit pas tenu de répondre à un document déposé en anglais tant qu’une traduction en français ne lui a pas été transmise et que, de la même manière, le délai concernant le dépôt des documents par l’accusé ne prenne effet qu’après réception de la version française du document du Procureur. Rien n’indiquait le caractère impératif de faire traduire les documents visés, mais nous avons considéré que cette demande tendait à garantir l’exercice d’un droit énoncé dans le Statut du Tribunal, selon lequel tous sont égaux devant le Tribunal3. Bien qu’à notre sens le principe d’égalité n’aille pas jusqu’à dire que les deux parties au procès sont en droit de recevoir quelque chose dont une seule d’entre elles a besoin, il nous a semblé qu’il convenait en l’espèce de traiter cette demande dans un esprit d’internationalité afin d’éviter toute allégation infondée suggérant une certaine partialité de la part du Tribunal.

4. La décision relative à cette requête a été ajournée car le Greffe devait s’assurer que la Section des services linguistiques et de conférence dispose effectivement des ressources suffisantes pour que tous les documents déposés dans une des deux langues de travail du Tribunal soient traduits vers l’autre langue de travail4 et que les documents déposés en français soient traduits en anglais dans les mêmes délais qu’un document anglais équivalent est traduit en français. Ces dispositions ayant été prises, tous les documents seront désormais systématiquement traduits. Certes, la Section des services linguistiques et de conférence ne sera pas en mesure de traduire des documents plus volumineux déposés dans l’une des deux langues, aussi rapidement que les documents habituellement déposés dans le cadre des requêtes. Lorsqu’une partie prévoit de déposer un document de taille (tel un mémoire ou un document similaire), il lui faudra prévenir la Section des services linguistiques et de conférence en temps opportun pour que cette dernière puisse prendre les mesures adéquates.

5. Étant donné que le délai de traduction des documents demeure incertain (si ce n’est que, quelle que soit la langue de départ, la traduction vers l’autre langue exige le même laps de temps pour des documents équivalents) et qu’il semble à présent que chaque partie continuera (comme elle en a le droit) de déposer des documents dans des langues de travail différentes, il convient de modifier l’Ordonnance relative au dépôt des requêtes en l’espèce (en date du 31 août 1999) de la manière suivante :

i) en supprimant la modification du 26 octobre 1999, et

ii) en modifiant le point 2 de l’Ordonnance du 31 octobre 1999 pour qu’il se lise comme suit :

Sauf stipulation expresse du contraire, le destinataire dispose de quatorze jours civils pour présenter sa réponse, le cas échéant, à compter de la date de réception par celui-ci d’une traduction de la requête dans la langue de travail dans laquelle il a déposé ses documents en l’espèce.

6. L’Ordonnance relative au dépôt des requêtes laisse la question du dépôt de la réplique relative à la réponse à une requête se régler au cas par cas, lorsqu’il y a lieu de délivrer pareille ordonnance portant sur les délais de dépôt. La demande d’autorisation de dépôt d’une réplique a pour objet d’éviter les pertes de temps dues au fait que des documents sont déposés sous couleur de réplique alors qu’ils ne font que réitérer (voire développer) les demandes formulées dans la requête. Le dépôt d’une réplique n’est autorisé qu’aux fins de permettre à la partie requérante de répondre aux questions posées par la partie adverse dans sa réponse à la requête et qui dépassent le cadre même de la requête. La demande d’autorisation doit préciser le(s) point(s) particulier(s) de la réponse auxquels la partie adverse souhaite répliquer.

7. Nous ORDONNONS que l’Ordonnance relative au dépôt des requêtes soit modifiée comme indiqué au paragraphe 5.

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

 

Fait le seize décembre 1999
La Haye (Pays-Bas)

(signé)
M. le Juge David Hunt
Juge de mise en état

[Sceau du Tribunal]


1. Cf Le Procureur c/ Delalic, Affaire n° IT-96-21-T, Décision relative à la requête de la défense aux fins de transmission des documents dans la langue de l'accusé, 25 septembre 1996, par. 11.
2. Requête aux fins de traduction des documents en français, 29 octobre 1999.
3. Article 21 1).
4. L’article 3 A) du Règlement de procédure et de preuve stipule que les langues de travail du Tribunal sont l’anglais et le français.