Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 1185

1 (Jeudi 31 janvier 2002.)

2 (L'audience est ouverte à 9 heures 11.)

3 (Audience publique.)

4 (Les accusés sont introduits dans le prétoire.)

5 (Questions relatives à la procédure.)

6 M. le Président (interprétation): Bonjour, Monsieur Brdanin. Pouvez-vous

7 m'entendre dans une langue que vous comprenez?

8 M. Brdanin (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président. Je vous

9 entends et je vous comprends.

10 M. le Président (interprétation): Pourriez-vous répéter, s'il vous plaît,

11 parce que nous n'avons pas entendu?

12 M. Brdanin (interprétation): Bonjour. Je vous entends et je vous comprends.

13 M. le Président (interprétation): Général Talic, est-ce que vous pouvez

14 m'entendre dans une langue que vous comprenez?

15 M. Talic (interprétation): Je vous entends et je vous comprends.

16 M. le Président (interprétation): Madame la Greffière d'audience, pouvez-

17 vous citer l'affaire, s'il vous plaît?

18 Mme Chen (interprétation): Monsieur le Président, il s'agit de l'affaire

19 IT-99-36-T, le Procureur contre Radoslav Brdanin et Momir Talic.

20 M. le Président (interprétation): Pourrions-nous avoir les présentations:

21 pour l'accusation?

22 M. Cayley (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Je me présente:

23 Maître Cayley; je représente l'accusation avec Mme Korner, ma collègue, et

24 Mme Denise Gustin, assistante.

25 M. le Président (interprétation): Pour la défense?

Page 1186

1 M. Ackerman (interprétation): Je me présente: Maître John Ackerman; je

2 défends M. Brdanin avec Mme Tania Radisavljevic, Milka Maglov et Milos

3 Perec.

4 Je vous prie de nous excuser pour ce retard.

5 M. le Président (interprétation): Merci. Cela peut arriver à tout le

6 monde.

7 Pour le général Talic?

8 Mme Fauveau: Je suis Natasha Ivanovic-Fauveau, avocat au barreau de Paris.

9 Je remplace Me Pitron et Me de Roux. Je suis assistée de M. Fabien Masson.

10 M. le Président (interprétation): Puisque nous en sommes à ce stade

11 particulier de la procédure, pourriez-vous m'expliquer pourquoi Me Pitron

12 et Me de Roux ne nous ont pas honorés de leur présence ces trois derniers

13 jours? J'ai cru comprendre qu'ils étaient les conseils de la défense du

14 général Talic.

15 Mme Fauveau: Oui, ils sont bien les conseils du général Talic. Je crois

16 qu'ils étaient empêchés, qu'ils avaient de bonnes raisons pour ne pas être

17 présents cette semaine, mais je ne peux pas vous en dire plus.

18 M. le Président (interprétation): Je ne remets pas en question les raisons

19 qui les éloignent peut-être de cette salle d'audience, mais je crois que,

20 de par mon devoir, je suis contraint de faire allusion à cette question en

21 audience publique. Le général Talic a un certain nombre de droits et, en

22 tant que Président assisté des deux Juges qui composent la Chambre, je me

23 dois de faire en sorte que la procédure et les droits fondamentaux de

24 votre client soient respectés et de faire en sorte qu'il soit satisfait de

25 cette situation.

Page 1187

1 Madame Fauveau, vous comprendrez bien, j'en suis sûr, que je ne permettrai

2 pas une dégradation de la situation comme cela s'est produit dans d'autres

3 affaires.

4 Mme Fauveau: Je comprends la situation tout à fait et je comprends votre

5 position. Mais peut-être que le général Talic pourrait nous dire le plus?

6 M. le Président (interprétation): Général Talic, est-ce que vous

7 m'entendez?

8 M. Talic (interprétation): Je vous entends.

9 M. le Président (interprétation): Est-ce que vous comprenez la teneur de

10 ce que je viens d'évoquer avec Me Fauveau?

11 M. Talic (interprétation): Oui, j'ai compris. Je ne connais pas la raison

12 de leur absence mais, pour l'instant, je n'ai rien contre le fait d'être

13 représenté par Mme Natasha Fauveau.

14 M. le Président (interprétation): Mais j'imagine, Madame Fauveau, que vous

15 ne devez pas considérer cela comme un propos qui vous vise

16 personnellement, mais ma position est la suivante: votre client a

17 parfaitement le droit d'être représenté, comme cela a été prévu, par les

18 conseils de la défense qui ont été désignés pour le représenter. Bien

19 entendu, vous également, vous le représentez de façon particulièrement

20 professionnelle, mais je ne pense pas que cette situation doive se

21 poursuivre indéfiniment sans que la Chambre intervienne.

22 Peut-être pourriez-vous transmettre ce message à Me Pitron et à Me de

23 Roux? Plus particulièrement maintenant, que j'ai entendu le général Talic

24 nous confirmer que lui non plus n'a pas été informé des raisons qui

25 expliquent leur absence de ce prétoire. Est-ce que l'accusation souhaite

Page 1188

1 intervenir sur cette question particulière?

2 Mme Korner (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

3 Nous aussi, nous avons constaté cette absence et nous avons d'ailleurs

4 fait la remarque, mais notre point de vue est le suivant. Maître Fauveau

5 s'acquitte extrêmement bien de sa tâche pour l'instant mais il reste

6 néanmoins que ce sont Me Pitron et Me de Roux qui sont les conseils aux

7 fins du compte rendu. Je crois qu'on ne devrait pas permettre une

8 situation où le fait que le général Talic n'ait pas été représenté par les

9 conseils de son choix puisse être un motif de recours. Voilà, c'est tout

10 ce que je souhaitais dire.

11 Nous comprenons que le général Talic -ce n'est pas surprenant- est

12 satisfait de la représentation par Me Fauveau mais nous croyons comprendre

13 que le conseil, tel que prévu, peut-être absent uniquement si le client y

14 consent en pleine connaissance de cause des raisons qui expliquent cette

15 absence.

16 M. le Président (interprétation): Général Talic, je vous repose une fois

17 de plus la même question. Vous venez d'entendre ce que Mme Korner, du côté

18 de l'accusation, a dit qui décrit parfaitement la situation sur le plan

19 juridique. Ce que j'aurais aimé entendre de votre part, c'est la chose

20 suivante: que vous me répondiez par oui ou par non et que vous me disiez

21 si vous êtes disposé à poursuivre l'audience aujourd'hui, compte tenu du

22 fait que ces deux conseils sont absents depuis deux jours consécutifs,

23 c'est le troisième jour où ils ne se sont pas présentés ni l'un ni

24 l'autre; souhaitez-vous poursuivre ou préférez-vous invoquer vos droits et

25 faire en sorte qu'ils soient présents? Surtout étant donné que vous n'avez

Page 1189

1 pas été informé des raisons qui expliquent leur absence.

2 M. Talic (interprétation): Oui, je suis disposé à poursuivre aujourd'hui

3 et demain.

4 M. le Président (interprétation): Merci.

5 Mme Fauveau: Monsieur le Président, Mesdames les Juges, si je pouvais

6 suggérer que cette question soit peut-être éclairée lundi prochain parce

7 que Me de Roux sera présent; je pense qu'il est beaucoup plus compétent

8 pour discuter de cela que moi.

9 M. le Président (interprétation): Mais même… C'est une question de

10 courtoisie également. Je travaille comme juge depuis 25 ans et, lorsqu'un

11 conseil ne peut se présenter, généralement, les juges en sont informés.

12 Ici, pour autant que j'aie pu le comprendre au cours de cette dernière

13 semaine et demie, si, du côté de l'accusation, Mme Korner estime que sa

14 présence n'est pas nécessaire à un moment donné parce que M. Cayley

15 s'occupera d'un témoin particulier, alors, même si c'est peut-être

16 superflu, une explication est la bienvenue et les Juges en sont informés.

17 A titre provisoire, je me suis dit que je ne dirai rien le premier jour

18 parce que je ne souhaitais pas absolument évoquer cette question. Le

19 deuxième jour, j'ai commencé à me préoccuper. Maintenant, nous en sommes

20 au troisième jour, et je ne pense pas que cette situation doive se

21 poursuivre.

22 Par ailleurs, je serai parfaitement clair, je ne permettrai pas que la

23 situation nous amène à un point où cela puisse servir de prétexte au

24 général Talic ou à M. Brdanin. Pour l'instant, je n'ai absolument aucun

25 reproche à l'équipe qui défend M. Brdanin mais je ne souhaite pas que cela

Page 1190

1 devienne un prétexte pour qu'une audience n'ait pas lieu, parce que, vous

2 le savez aussi bien que moi, le Règlement prévoit un certain nombre de

3 choses que nous appliquerons. Cela ne fait aucun doute.

4 Mme Fauveau: Je comprends tout à fait votre position et j'apprécie votre

5 démarche mais, puisque mon client veut bien continuer encore ces deux

6 jours avec moi, j'ai seulement suggéré que ces questions soient éclairées

7 avec le conseil principal.

8 M. le Président (interprétation): Très bien.

9 Général Talic, j'aurais une dernière question à vous poser. J'imagine

10 qu'étant donné que la situation vous satisfait, en tout cas jusqu'à

11 demain, j'imagine que vous ne souhaiterez pas évoquer, faire valoir des

12 griefs par rapport à la situation de ces derniers jours. Vous êtes

13 satisfait de ce qui s'est passé hier et les jours précédents, en d'autres

14 termes, que les audiences se sont poursuivies même si les deux conseils

15 qui avaient été désignés pour vous défendre n'étaient pas présents.

16 M. Talic (interprétation): Je ne souhaite faire aucune objection en

17 rapport avec les audiences jusqu'ici.

18 M. le Président (interprétation): Merci, Général Talic. Vous pouvez vous

19 asseoir.

20 (Le général Talic s'assoit.)

21 Je comprends bien à quel point la situation dans laquelle vous vous

22 trouvez est délicate, Maître Fauveau.

23 Je vous suis reconnaissant de votre coopération avec la Chambre ces

24 derniers jours, coopération grâce à laquelle nous avons pu en terminer

25 avec le travail que nous souhaitions accomplir pratiquement un jour plus

Page 1191

1 tôt. Et je vous en remercie.

2 Je vous suggère à présent de faire entrer le Dr Donia pour que Me Ackerman

3 puisse procéder à son contre-interrogatoire; Maître Ackerman qui,

4 apparemment, attire les accidents!

5 M. Ackerman (interprétation): Au cours de ces derniers jours, vous n'avez

6 certainement pas remarqué non plus que je suis plus âgé que vous, Monsieur

7 le Président.

8 M. le Président (interprétation): Parfois, moi aussi, je sens le poids de

9 mon âge.

10 (Le témoin, M. Robert J. Donia, est introduit dans le prétoire.)

11 Docteur Donia, Me Ackerman va procéder au contre-interrogatoire

12 aujourd'hui; il représente M. Brdanin.

13 Est-ce que le témoin a prononcé la déclaration solennelle?

14 M. Donia (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la

15 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

16 M. le Président (interprétation): Oui, Maître Ackerman.

17 (Contre-interrogatoire du témoin, Robert J. Donia, par Me Ackerman.)

18 M. Ackerman (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Bonjour,

19 Docteur Donia.

20 M. Donia (interprétation): Bonjour.

21 Question: Comment vous sentez-vous aujourd'hui?

22 Réponse: Très bien, merci.

23 Question: Vous êtes prêt à entrer?

24 Réponse: Prêt à partir pour la Bosnie.

25 Question: Ah, pour la Bosnie?

Page 1192

1 Réponse: Oui.

2 Question: Le premier jour de votre déposition, vous avez interrompu

3 l'interrogatoire pour dire à la Chambre que vous aviez quelque chose à

4 divulguer. Est-ce que vous vous en souvenez?

5 Réponse: Oui.

6 Question: Je dois procéder de la même façon: par le biais d'une

7 divulgation.

8 J'ai un frère qui enseigne à l'Ohio State University Lima; cela m'a donné

9 l'occasion de me renseigner sur vous. Je dois dire que les renseignements

10 que j'ai reçus en retour ont été très satisfaisants; vous les avez marqués

11 par votre présence. Et je crois qu'il était de mon devoir de dire ce que

12 j'avais appris par ce biais.

13 Réponse: Merci.

14 Question: Ce que j'aimerais tout d'abord vous dire, quant aux questions

15 que je vais vous poser, c'est que j'essayerai de toutes mes forces

16 d'organiser mon travail d'aujourd'hui pour que nous puissions terminer

17 assez rapidement car, si j'ai bien compris, vous souhaitez quitter La Haye

18 samedi. C'est la raison pour laquelle mes propos ne seront pas

19 parfaitement cohérents, mais j'espère que je ne vais pas exagérer dans ce

20 sens.

21 Je commencerai par une discussion assez générale de l'histoire et du

22 travail des historiens.

23 Est-ce que vous seriez d'accord avec moi pour dire que l'histoire consiste

24 à étudier les activités d'un groupe de personnes donné, à un moment et à

25 un endroit donnés?

Page 1193

1 Réponse: Oui.

2 Question: En tout cas, j'imagine que cela correspond d'assez près à la

3 définition que donneraient les historiens?

4 Réponse: Oui.

5 Question: Parmi les activités des historiens, on trouve des activités de

6 recherche qui, ensuite, aboutissent au fait d'écrire le résultat de ces

7 recherches dans des magazines, des publications, des documents, etc.?

8 Réponse: Oui, je suis d'accord.

9 Question: Une méthode s'est mise en place au fil des ans pour orienter le

10 travail des historiens dans leurs recherches, c'est exact?

11 Réponse: Oui.

12 Question: Alors, ce que vous faites essentiellement lorsque vous essayez

13 de faire des recherches sur un groupe de population donné, à un endroit

14 donné, à un moment donné, c'est que vous recherchez des sources

15 d'information fiables sur les activités de ces personnes au moment qui

16 vous intéresse et à l'endroit qui vous intéresse?

17 Réponse: Oui, j'ajouterai que l'on essaie de rechercher des sources quant

18 aux rapports de ce groupe avec l'environnement, avec d'autres groupes et

19 d'autres situations analogues.

20 Question: Parmi les sources que vous consultez dans ce processus, la

21 méthode dont nous parlons les a divisées en deux catégories: on trouve les

22 sources primaires et les sources secondaires. C'est exact?

23 Réponse: Oui, il n'est pas toujours facile d'établir une distinction entre

24 les deux.

25 Question: Pouvez-vous expliquer aux Juges ce que c'est une source primaire

Page 1194

1 et une source secondaire?

2 Réponse: Une source primaire: c'est tout document, tout élément de preuve

3 qui provient d'un auteur identifiable et qui, généralement, n'est pas

4 largement diffusé à moins que ce ne soit par une publication, dans une

5 collection ou sur un autre support de diffusion. Je crois que le facteur

6 essentiel serait le fait que l'auteur, que le créateur est connu et

7 identifiable.

8 Question: Je vais vous donner un exemple: si vous effectuez des recherches

9 sur Abraham Lincoln, une lettre qui aurait été écrite par Abraham Lincoln

10 serait une source primaire?

11 Réponse: Oui.

12 Question: Une entrée dans un ouvrage qui ferait état de cette lettre qui

13 avait été écrite par Abraham Lincoln serait une source secondaire?

14 Réponse: Une référence qui ne citerait intégralement le document, oui: ce

15 serait une telle source.

16 Question: Dans les recherches historiques, où l'on se fonde sur les

17 sources primaires, on est plus susceptible d'être reconnus dans les

18 milieux universitaires?

19 Réponse: Je n'en suis pas si sûr, je ne suis pas sûr que ce soit le cas à

20 présent. On s'est toujours intéressé aux sources primaires, on y a attaché

21 une importance dans le milieu historique.

22 Question: Les sources secondaires ne devraient pas être utilisées si des

23 sources primaires existent et sont disponibles?

24 Réponse: Non, je ne serais pas d'accord. Je crois que les sources

25 secondaires sont un philtre et un écho important des sources primaires;

Page 1195

1 elles-mêmes revêtent une importance particulière à cet égard.

2 Question: En l'espèce, l'accusation vous a demandé de rédiger un rapport,

3 n'est-ce pas?

4 Réponse: Oui.

5 Question: De rédiger un rapport sur les activités d'un groupe de

6 personnes, à un moment donné, à un endroit donné?

7 Réponse: La demande était plus large que cela: on m'a demandé de rédiger

8 un rapport sur le contexte historique général dans lequel les événements

9 présumés ont eu lieu, y compris les activités de groupes pertinents, en

10 rapport avec les processus de l'époque.

11 Question: Nous avons entendu dire à Mme Korner que vous avez suivi sur des

12 moniteurs la déposition de M. Inayat sur les perquisitions et les saisies

13 à Prijedor, n'est-ce pas? Et à Banja Luka?

14 Réponse: Oui.

15 Question: Vous avez eu connaissance de ces perquisitions et de ces

16 saisies?

17 Réponse: Oui.

18 Question: Monsieur Inayat nous a dit qu'il s'est rendu au bâtiment de la

19 mairie, à Prijedor et Banja Luka, par exemple, et qu'il a obtenu des

20 documents officiels de ces endroits-là. Il s'agirait là du type de

21 documents qui pourraient intéresser un historien qui souhaiterait étudier

22 cette période?

23 Réponse: Il s'agirait là d'un petit groupe de documents qui intéresserait

24 un historien.

25 Question: Merci. J'aurais aimé savoir si, dans le processus de rédaction

Page 1196

1 de votre rapport pour cette affaire, l'accusation vous a donné accès à

2 tous ces documents qui ont été saisis à Prijedor et à Banja Luka?

3 Réponse: Non.

4 Question: Comme vous l'avez dit à la Chambre, le premier jour de votre

5 déposition, vous vous êtes fondé essentiellement sur un ensemble de

6 documents. Il s'agit, j'imagine, des documents qui se trouvent dans les

7 deux classeurs auxquels nous avons fait référence ces deux derniers jours,

8 n'est-ce pas?

9 Réponse: Cela englobe également d'autres documents, des documents qui ne

10 figurent pas ici. Ils font également partie de la collection de documents

11 que j'ai consultés. Il s'agit notamment des comptes rendus de l'assemblée

12 de la République serbe, ainsi que de l'Assemblée de la RAK.

13 Question: Mais, en tout état de cause, il s'agissait d'une collection de

14 documents qui a été choisie par l'accusation et non par vous-même?

15 Réponse: Oui.

16 Question: Je crois vous avoir entendu dire à la Chambre la chose suivante:

17 "Monsieur le Président, j'aurais aimé divulguer que le Bureau du Procureur

18 m'a invité à examiner un nombre limité de documents sur lequel se fondent

19 ses conclusions. Ces documents se composent des procès-verbaux et des

20 conclusions de la ZOBK; et de la Krajina, ainsi que les comptes-rendus et

21 les transcriptions de l'assemblée serbe de Bosnie, et des documents

22 connexes.

23 Réponse: Oui, c'est exact.

24 Question: Vous dites, par la suite: "Par la suite, je me suis intéressé à

25 un grand nombre de périodiques, d'articles de presse et d'autres

Page 1197

1 documents". J'aimerais uniquement dire cela aux fins du compte-rendu. Est-

2 ce que c'est exact?

3 Réponse: Oui, c'est exact.

4 Question: Ce que vous essayez véritablement de dire aux Juges à ce moment-

5 là, c'est que votre point de vue n'avait de valeur qu'en rapport avec la

6 sélection de documents qui vous a été fournis?

7 Réponse: Non, ce n'était pas cela.

8 Question: C'est moi qui me reprends, j'ai mal formulé ma question. Cela

9 était lié non seulement à l'intégrité mais au caractère complet des

10 documents qui vous ont été fournis?

11 Réponse: Ce n'était pas là mon message à l'attention des Juges. Le gros

12 des documents que j'ai utilisés pour rédiger ce rapport provenait en

13 réalité de recherches plus générales portant sur la presse de l'époque et

14 sur certains documents qui ont été publiés par la suite: des mémoires, des

15 descriptions secondaires. La base de documents limitée qu'on m'a demandée

16 d'examiner, eh bien, je l'ai examinée dans le contexte de tous ces autres

17 renseignements que j'ai rassemblés au cours de ces dernières années.

18 Question: Alors, j'en déduis que vous avez consacré beaucoup de temps à

19 vous rendre dans la RAK, à Banja Luka, Prijedor et ailleurs, pour

20 effectuer ces recherches historiques?

21 Réponse: Non, je n'ai jamais travaillé sur les archives régionales de

22 Bosnie-Herzégovine.

23 Question: Dans le cadre du travail que vous avez effectué pour

24 l'accusation pour cette affaire… enfin, je crois que vous avez déjà

25 répondu à cette question mais j'aurai aimé que cela ressorte clairement.

Page 1198

1 Est-ce que vous avez reçu de la correspondance ou adressé de la

2 correspondance au Bureau du Procureur sur ce travail, sur cette question?

3 Réponse: Non.

4 Question: Est-ce que vous avez jamais demandé, oralement, au Bureau du

5 Procureur de vous fournir des documents supplémentaires?

6 Réponse: Oui. J'ai demandé des copies du Journal Officiel de la Bosnie-

7 Herzégovine et de la République serbe de Bosnie-Herzégovine, de temps en

8 temps.

9 Question: Pour ce projet particulier?

10 Réponse: Oui.

11 Question: Avez-vous reçu ces copies?

12 Réponse: Oui. Lorsqu'elles étaient disponibles. Je crois que certaines

13 n'étaient pas disponibles.

14 Question: Avez-vous demandé d'autres documents?

15 Réponse: Non.

16 Question: Avez-vous jamais eu sous les yeux des comptes-rendus de réunion

17 de la cellule de crise de la RAK, à quelque moment que ce soit?

18 Réponse: Il est possible que dans ce classeur il y en ait un ou deux, mais

19 je n'ai pas de souvenirs précis à cet égard. S'il en existe, j'ai vu ce

20 qui existait mais je n'en ai vu aucun autre que ceux qui existaient.

21 Question: S'agissant de l'assemblée ZOBK, Communauté des municipalités de

22 Bosnie-Herzégovine, je crois savoir qu'on vous a remis le procès-verbal

23 des 2e, 6e, 7e, 9e, 11e, 14e, 15e et 18e Sessions de cette assemblée,

24 n’est-ce pas?

25 Réponse: Je crois que c'est bien cela.

Page 1199

1 Question: Si vous voulez, vous pouvez vérifier. On m'a donné ces éléments

2 hier soir; vous pouvez vérifier.

3 Réponse: Je crois que c'est tout à fait exact. En effet, cela correspond à

4 ce que j'ai constaté.

5 Question: Je vous demande donc si vous avez eu sous les yeux le procès-

6 verbal des 1ère, 3e, 4e, 5e, 8e, 10e, 12e, 13e, 16e et 17e Sessions de

7 cette organisation?

8 Réponse: Non.

9 Question: Avez-vous demandé de disposer de ce procès-verbal?

10 Réponse: A un certain moment, j'ai demandé le procès-verbal des réunions

11 de cette assemblée pour savoir si elles étaient en la possession du Bureau

12 du Procureur.

13 Question: Et je suppose qu'on vous a fourni une réponse à l'époque?

14 Réponse: Oui, on m'a dit que le Bureau du Procureur n'en disposait pas.

15 Question: Je suppose que ces documents auraient pu utiles pour essayer de

16 se faire une image complète de la situation; à l'époque, il eût été utile

17 de consulter ces documents?

18 Réponse: Oui.

19 Question: Je veux dire que c'est ce que vous aviez demandé au Bureau du

20 Procureur, n'est-ce pas?

21 Réponse: En effet.

22 Question: Et vous conviendrez avec moi que si vous aviez eu la possibilité

23 de voir l'ensemble des procès-verbaux de réunions, cela aurait pu modifier

24 les conclusions auxquelles vous êtes parvenu devant cette Chambre de

25 première instance, hier?

Page 1200

1 Réponse: C'est possible, en effet.

2 Question: Pendant le reste de ce contre-interrogatoire, Professeur Donia,

3 je vais vous renvoyer à la lecture de quelques pages d'un ouvrage

4 intitulé: "La guerre en Bosnie-Herzégovine - Conflit ethnique et

5 intervention internationale", dont les auteurs sont Steven Burg et Paul

6 Shoup. Je sais que vous connaissez cet ouvrage.

7 Réponse: Oui, je le connais.

8 Question: Et je sais que vous le considérez comme une source faisant

9 autorité, s'agissant des événements en Bosnie-Herzégovine?

10 Réponse: Je ne l'appellerai pas une source faisant autorité; je dirai

11 qu'il s'agit d'un ouvrage important qui utilise de façon approfondie la

12 documentation disponible.

13 Question: Seriez-vous d'accord avec la proposition consistant à dire qu'il

14 s'agit d'un ouvrage rédigé par deux professeurs d'université américains

15 qui ont fait un travail tout à fait impressionnant, notamment sur la

16 question de la Bosnie-Herzégovine?

17 Réponse: Oui.

18 Question: Très bien. J'aimerais que nous passions rapidement en revue

19 quelques éléments historiques que vous avez déjà abordés. Je le ferai plus

20 brièvement que vous d'ailleurs.

21 Vous avez parlé de la constitution, de la création au cours de l'histoire

22 de ces régions appelées "Krajina", qui existaient aussi bien en Bosnie-

23 Herzégovine qu'en Croatie, ces zones frontières, n'est-ce pas?

24 Réponse: Oui.

25 Question: Et je crois me rappeler que ce que vous avez expliqué aux Juges

Page 1201

1 de cette Chambre, c'est que ces zones frontalières avaient été pendant

2 longtemps des lieux de démarcation entre ce qu'on pourrait appeler, pour

3 aller vite, l'Ouest christianisé et l'Est ottoman, en tout cas, à l'époque

4 où l'empire ottoman était responsable de cette région?

5 Réponse: Je pense que c'est une simplification exagérée.

6 Question: Oui, je le pensais moi-même également.

7 Réponse: Le fait, je dirais, qu'une zone frontalière ait existé entre

8 l'empire ottoman et l'empire autrichien, pendant la période allant disons

9 du XVIIe siècle à la fin du XIXe siècle, serait peut-être une façon plus

10 précise d'exprimer les choses.

11 Question: Et ces deux régions ont déployé des efforts pour se défendre en

12 y installant des combattants stationnaires, si je puis utiliser cette

13 expression?

14 Réponse: Oui, mais je proposerais de modifier la dénomination de cette

15 expression en l'appelant "zone frontière".

16 Question: Oui?

17 Réponse: Parce qu'en fait, il s'agissait d'un territoire assez vaste et

18 pas d'une ligne, pas d'une ligne de fil de fer barbelé, séparant deux

19 régions limitrophes.

20 Question: Ce que j'essayais de dire, c'est que les gens qui ont été

21 envoyés là-bas pour défendre la région, défendaient une zone frontalière.

22 Réponse: Oui.

23 Question: S'agissait-il de combattants?

24 Réponse: Ils étaient recrutés aux fins de pouvoir combattre, en effet.

25 Question: Etaient-ils formés en tant que guerriers à cette fin?

Page 1202

1 Réponse: La plupart d'entre eux n'étaient pas entraînés, mais ils étaient

2 recrutés et déménageaient avec toute la famille dans ces régions. Ou même

3 parfois avec davantage que leurs proches: avec des familles étendues.

4 Question: En certains lieux, ce groupe dans la population était composé de

5 Serbes orthodoxes et d'autres Musulmans?

6 Réponse: Oui.

7 Question: Et les descendants de ces personnes vivaient encore, en général,

8 dans ces régions en 1991?

9 Réponse: Oui, en général, c'est exact.

10 Question: Pouvons-nous maintenant parler en quelques mots des événements

11 de Krajina au cours de la Deuxième Guerre mondiale?

12 Il est vrai, n'est-ce pas, qu'une centaine de milliers de Serbes ont été

13 assassinés dans cette région, principalement par les forces croates, qui

14 avaient été stationnées à cet endroit par l'Allemagne nazie?

15 Réponse: Le chiffre n'est pas avéré. J'admets le chiffre d'une centaine de

16 milliers de personnes comme un chiffre approximatif, reposant sur des

17 études faites depuis la Deuxième Guerre mondiale, mais la réalité peut

18 être supérieure à ce chiffre si l'on étudie de plus près les éléments de

19 la démographie. En tout cas, c'est un chiffre approximatif.

20 Réponse: 17% de la population serbe de Bosnie-Herzégovine est tombée au

21 cours de la Deuxième Guerre mondiale. Admettez-vous ce pourcentage?

22 Réponse: Je ne connais pas ce pourcentage.

23 Question: Ce massacre qui a fait des victimes parmi des femmes, des hommes

24 et des enfants a donc fait des victimes parmi la population, n'est-ce pas?

25 Réponse: Les premières attaques oustachis contre ces communautés ont bel

Page 1203

1 et bien fait ce que vous venez de dire. Mais par la suite, des conflits

2 importants ont opposé les Allemands en armes à des Serbes de Krajina. Et,

3 effectivement, parmi ces Serbes de Krajina, il y avait des combattants,

4 c'est-à-dire des hommes en âge de porter des armes.

5 Question: Vous nous avez dit hier que ces atrocités, ces massacres ont été

6 très intenses dans la région de Prijedor, notamment, ce qui explique la

7 présence d'un monument de taille importante à Kozara?

8 Réponse: La première partie de votre question, j'y répondrai en disant

9 oui. Quant au monument de très grande taille, c'est un monument qui a été

10 érigé en l'honneur des héros partisans qui ont résisté, notamment aux

11 attaques allemandes, et qui ont pris le contrôle d'une partie importante

12 du territoire en excluant ce territoire du contrôle allemand. Cela s'est

13 passé particulièrement en 1942 et 1943.

14 Question: Et à quelque distance à peine, de l'autre côté de la frontière,

15 en Croatie, se trouvait le camp de concentration de Jasenovac, n'est-ce

16 pas?

17 Réponse: Oui.

18 Question: Il serait pratiquement impossible à qui que ce soit de grandir

19 dans la Krajina bosniaque sans apprendre de ce qui s'était passé dans ce

20 camp à l'époque, n'est-ce pas?

21 Réponse: En effet.

22 Question: C'était, n'est-ce pas, un camp d'extermination du même genre que

23 les camps d'Auschwitz, Birkenau, etc.?

24 Réponse: Oui, en effet.

25 Question: Vous rappelez-vous que, lorsque Franjo Tudjman est arrivé au

Page 1204

1 pouvoir en Croatie, il s'est exprimé publiquement pour affirmer qu'à son

2 avis, le nombre de gens exterminés à Jasenovac avait été exagéré et

3 ajoutant que -toujours selon lui- le nombre de Serbes tués au cours de la

4 Deuxième guerre mondiale avait été exagéré?

5 Réponse: La position qu'il avait sur ce point existait déjà longtemps

6 avant la prise de pouvoir par lui. Mais effectivement, c'est la position

7 qui était la sienne et qu'il avait déjà commencé à exprimer dans les

8 années 70.

9 Question: Mais qui avait été largement diffusée au moment où il a pris le

10 pouvoir?

11 Réponse: Oui, je crois qu'elle avait été largement diffusée avant ce

12 moment-là.

13 Question: Toujours durant la Deuxième Guerre mondiale, une unité spéciale

14 de SS avait été créée qui était composée de Musulmans de Bosnie, n'est-ce

15 pas?

16 Réponse: En effet.

17 Question: Eh bien, nous arrivons à l'année 1990 et, à ce moment-là, nous

18 ne sommes pas très éloignés, sur le plan historique, des événements que je

19 viens d'évoquer, n'est-ce pas?

20 Réponse: 45 ans de distance.

21 Question: Enfin, c'est encore assez proche pour que, dans la Krajina

22 bosniaque, il y ait encore en vie un certain nombre de personnes qui

23 avaient personnellement vécu certaines des choses que je viens de décrire?

24 Réponse: Oui.

25 Question: Ou qui avaient perdu un nombre important de leurs proches au

Page 1205

1 sein de leur famille?

2 Réponse: Oui.

3 Question: Ou qui avaient un souvenir particulièrement vivace de ce qui

4 s'était passé au cours de la Deuxième Guerre mondiale?

5 Réponse: Oui.

6 Question: Et je crois que vous savez également que ces événements étaient

7 si marquants que les personnes, qui les ont vécus, ont tenu à les partager

8 avec leurs enfants et même avec leurs petits-enfants, n'est-ce pas?

9 Réponse: Oui.

10 Question: Et pas mal de ces événements ont été transcrits dans les livres

11 de classe, utilisés plus tard dans les écoles, n'est-ce pas?

12 Réponse: Mais sous un angle un peu différent, sur le plan social. Car ce

13 qui était dit, c'était que les atrocités avaient été commises par des

14 envahisseurs étrangers et que la résistance avait été le fait des

15 partisans.

16 Question: A présent, nous allons arriver aux événements qui constituent le

17 cœur de ce dont nous parlons ici, à savoir la désintégration de la

18 Yougoslavie, la création de partis motivés par le nationalisme, qui se

19 sont efforcés de faire resurgir ces souvenirs. Et je vais préciser ce que

20 j'entends par là: je pense qu'il est exact qu'au cours de la Deuxième

21 Guerre mondiale, les Oustachis utilisaient pour symbole un échiquier blanc

22 et rouge; et que, lors de la création des partis nationalistes en Croatie,

23 cet échiquier a refait son apparition, n'est-ce pas?

24 Réponse: Oui, en effet.

25 Question: Et ce genre de choses pouvait être observé par des victimes, par

Page 1206

1 d'anciennes victimes des Oustachis, qui devaient y voir quelque chose

2 d'effrayant ou, en tout cas, de provocateur?

3 Réponse: Beaucoup ont vu cela comme une provocation, en effet.

4 Question: Ceci a dû avoir un certain effet sur les mentalités de certains

5 des Serbes qui vivaient dans la région de la Krajina, tout près, à côté de

6 la Croatie, n'est-ce pas?

7 Réponse: Ce que je pourrais dire à ce sujet ne serait qu'hypothèse; or je

8 ne suis pas censé spéculer ici. Mais le retour de tous les emblèmes et de

9 tous les symboles dus aux partis nationalistes dans cette période-là a eu

10 pour effet de raviver la mémoire des gens.

11 Question: Dans une telle situation, il n'est pas difficile de comprendre

12 pour quelles raisons les gens ont souhaité acquérir des armes pour se

13 protéger? Sinon, pour d'autres raisons?

14 Réponse: Je ne partage pas votre conclusion, non.

15 Question: Vous et moi vivons tous les deux aux Etats-Unis et, en fait,

16 vous et moi, avons vécu par le passé quelque temps exactement au même

17 endroit. C'est-à-dire dans la ville de Houston au Texas. Je pense que vous

18 conviendrez avec moi qu'il n'est pas rare lorsqu'une série de crimes est

19 commise aux Etats-Unis, il n'est pas rare de voir que les gens se ruent

20 tout d'un coup, sans aucune justification particulière, sur les armureries

21 pour acheter des armes. Cela se produit, n'est-ce pas?

22 Réponse: Cela se produit beaucoup au Texas, oui.

23 Question: Eh bien, cela se produit aussi ailleurs. Vous savez, vous vous

24 souvenez des révoltes qui ont eu lieu, les révoltes de la misère qui ont

25 entraîné une véritable explosion des ventes d'armes, n'est-ce pas?

Page 1207

1 Réponse: Oui.

2 Question: Très bien. Vous avez parlé des partisans, lorsque vous avez

3 évoqué le monument érigé sur le mont Kozara. Les partisans ont obtenu la

4 victoire à l'issue de la Deuxième Guerre mondiale, et le dirigeant, le

5 chef des Partisans, Tito, a donc créé un gouvernement qui était en fait un

6 gouvernement communiste. Et c'est ce gouvernement qui a dirigé la

7 Yougoslavie avec toutes les composantes qui étaient les siennes jusqu'au

8 démantèlement de 1991?

9 Réponse: Oui.

10 Question: Et ce gouvernement a, un peu à la surprise générale, supprimé

11 les divisions ethniques, ce immédiatement après les événements atroces qui

12 avaient marqué la Deuxième Guerre mondiale et que nous venons d'évoquer?

13 Réponse: Je ne qualifierai pas de cette façon les réalisations de ce

14 gouvernement. Je pense qu'il mettait tellement l'accent sur la nécessité

15 pour la classe ouvrière de s'unir, tout en en promouvant une certaine

16 identité culturelle de la part de certaines nationalités, certains groupes

17 ethniques, que ces tensions ethniques ont diminué pendant toute la durée

18 du gouvernement socialiste.

19 Question: Mais, en fait, ce n'est pas quelque chose qui s'est passé tout

20 seul. C'est quelque chose qui a été fait de façon tout à fait volontaire

21 et énergique par le Gouvernement de Tito qui voulait supprimer toute

22 manifestation publique d'intolérance ethnique ou nationale?

23 Réponse: Les manifestations publiques d'intolérance ethnique étaient

24 traitées en tant qu'actes criminels, en effet.

25 Question: Avec beaucoup de fermeté.

Page 1208

1 Réponse: Oui, en effet, notamment au début du Gouvernement de Tito.

2 Question: Bien. On peut même dire que certaines des nationalités, certains

3 des groupes ethniques qui s'exprimaient le plus ont été réduits au

4 silence, n'est-ce pas?

5 Réponse: Réduits au silence, mis en prison. Effectivement.

6 Question: Et le pouvoir devait être partagé par les différents groupes

7 ethniques, n'est-ce pas?

8 Réponse: Je ne sais pas si je peux être d'accord avec vous pour dire qu'il

9 y a eu partage du pouvoir. Le pouvoir était exercé par le parti

10 communiste, et ce aux fins de remplacer toute source de pouvoir détenue

11 éventuellement par un groupe ethnique.

12 Question: Mais vous connaissez le système qui était baptisé "Kljuc", "la

13 clef"?

14 Réponse: Oui.

15 Question: Quel était ce système? Pouvez-vous le décrire?

16 Réponse: Ce système appelé "Kljuc" était un système régissant la

17 répartition des postes au niveau gouvernemental dans les organismes socio-

18 économiques, dans lequel les différents groupes ethniques devaient être

19 proportionnellement représentés.

20 Question: Cela avait cours également au sein du gouvernement?

21 Réponse: Je ne me souviens pas en quelle année ce système a été mis en

22 place mais, depuis le début, je dirai qu'une certaine participation de

23 tous les groupes nationaux était encouragée pour ensuite devenir

24 obligatoire à partir d'un certain moment.

25 Question: Et ce système était en vigueur partout, dans tous les domaines.

Page 1209

1 Il était en vigueur dans les institutions gouvernementales, dans les

2 entreprises régies par l'Etat socialiste. Donc toutes ces entreprises

3 étaient publiques, et ce système était en vigueur au sein de la JNA,

4 n'est-ce pas?

5 Réponse: En principe, c'était un système qui s'appliquait partout, mais

6 dans la réalité il existait de nombreuses institutions qui ne respectaient

7 pas ces directives. C'était notamment le cas de la JNA.

8 Question: Mais je crois qu'il est permis de dire que le corps des

9 officiers de la JNA était composé de très nombreux Serbes mais également

10 d'un nombre important de Musulmans et de Croates en 1989/1990, n'est-ce

11 pas?

12 Réponse: Oui, en effet.

13 Question: "Fraternité et unité" était un slogan qui décrivait ce que Tito

14 avait créé et s'efforçait de maintenir vivace en Yougoslavie après la

15 Deuxième Guerre mondiale, n'est-ce pas?

16 Réponse: Le slogan "Fraternité et unité" datait du début de la Deuxième

17 Guerre mondiale. C'était le slogan des Partisans, en fait, depuis le

18 premier jour par la résistance opposée par ceux-ci.

19 Question: En fait, la Yougoslavie a prospéré pendant de nombreuses années

20 dans ce système. L'économie yougoslave est devenue de plus en plus solide.

21 Elle s'est rapprochée de l'Europe, peut-on dire. Les Yougoslaves avaient

22 toute liberté de voyager dans le monde entier avec un passeport. Le

23 tourisme était très développé dans différentes régions de la Yougoslavie,

24 qui était un pays prospère sur le plan économique jusqu'au moment où la

25 désintégration du pays a commencé à poindre, n'est-ce pas?

Page 1210

1 Réponse: Non, c'était une grande période de grands succès économiques dans

2 les années 50, mais dans la décennie des années 60 les problèmes

3 économiques ont commencé.

4 Ce qui explique, dans une certaine mesure, l'ouverture des frontières et

5 l'encouragement donné aux Yougoslaves à aller travailler à l'étranger pour

6 pouvoir faire revenir dans le pays des devises fortes. La situation

7 économique avait été ménagée, sauvée, mais il ne fait aucun doute qu'à la

8 fin des années 70 la crise économique faisait rage.

9 Question: Très bien. J'en arrive maintenant à une question qui m'intéresse

10 particulièrement. Avez-vous réfléchi un tant soit peu à l'incidence au

11 moment où la désintégration de la Yougoslavie venait à peine de commencer?

12 Avez-vous réfléchi à l'incidence qui a pu avoir sur la Bosnie-Herzégovine

13 et sur l'ex-Yougoslavie, la guerre menée par l'Union Soviétique en

14 Afghanistan?

15 Réponse: Oui. J'y ai certainement réfléchi en pensant à tous les fléaux

16 qui ont marqué l'Union Soviétique à l'époque. Et à ce qui suscitait la

17 réticence de l'Union Soviétique à s'engager directement dans la situation

18 en Yougoslavie. Je dirai que c'est d'ailleurs l'élément qui a sans doute

19 eu l'incidence la plus importante sur le conflit.

20 Question: J'aimerais maintenant vous poser une question sur les faits de

21 quelque chose d'autre. Ces derniers temps, on entend beaucoup parler,

22 beaucoup utiliser le mot "Talibans" et un certain nombre d'autres mots

23 comme "Moudhjadine". Or, les combattants musulmans antisoviétiques sont

24 considérés dans le monde islamique comme ayant infligé une défaite à l'une

25 des deux plus grandes puissances militaires du monde, n'est-ce pas?

Page 1211

1 L'Union Soviétique, en d'autres termes.

2 Réponse: Je ne crois qu'il y est une continuité entre les Talibans et les

3 forces qui ont imposé une défaite à l'Union Soviétique mais, quoi qu'il en

4 soit, le soutien apporté aux intégristes a très certainement été augmenté

5 par la défaite des soviétiques en Afghanistan et la victoire de

6 l'Afghanistan.

7 Question: Vous savez également, n'est-ce pas, que certains des Moudhjadine

8 qui avaient été entraînés et qui avaient combattu en Afghanistan se sont

9 retrouvés en Bosnie-Herzégovine en 1991 et 1992?

10 Réponse: Je crois que c'était en 1992. Pour 1991, je ne sais pas, mais en

11 1992 c'est certain, en effet.

12 Question: Et s'il y avait une perception qu'il s'agit d'un groupe de

13 combattants qui étaient particulièrement féroces, particulièrement

14 entraînés, c'est quelque chose qui aurait pu créer un climat de crainte,

15 de peur concernant leur arrivée pour combattre un groupe de personnes qui

16 n'étaient pas du tout équipées de façon militaire comme les Soviétiques?

17 Réponse: C'est une hypothèse avec toute une série de présuppositions, et

18 je ne peux pas vraiment parvenir à une telle conclusion.

19 Question: Il y aurait quand même une possibilité que cela ait pu avoir un

20 effet. Est-ce que vous êtes d'accord avec cela?

21 Réponse: Oui.

22 Question: Bien. Je voudrais maintenant me rapprocher de notre époque.

23 La désintégration de la Yougoslavie est quelque chose sur lequel on a

24 beaucoup écrit. Beaucoup, beaucoup d'auteurs ont écrit sur la question et

25 il n'y a pas un accord général sur les causes pour lesquelles la

Page 1212

1 Yougoslavie s'est désintégrée. Je crois que notre objectif ici n'est pas

2 seulement tellement de comprendre pourquoi ça s'est produit, mais les

3 causes, les conséquences de cette désintégration. Est-ce que vous serez

4 d'accord avec cela?

5 Réponse: Oui.

6 Question: Ceci s'est produit pendant une période où il y avait

7 essentiellement une dislocation de l'Union Soviétique des systèmes, des

8 régimes communistes dans l'ensemble de l'Europe de l'Est, le parti

9 communiste perdait sa primauté partout et la guerre froide commençait…

10 était presque finie?

11 Réponse: Oui.

12 Question: Et le parti communiste en Yougoslavie lui-même s'est défait

13 comme les autres en Europe orientale, en Europe de l'Est?

14 Réponse: C'est un peu différent, le parti communiste en Yougoslavie, la

15 ligue communiste en Yougoslavie s'est divisée dans ces éléments composants

16 de républicains, mais le processus avait déjà commencé plus tôt, mais ce

17 fut en janvier 1990. Et il y a donc eu des partis communistes réformés

18 dans les différentes républiques.

19 Question: Et cette ligue communiste était le parti et la force qui avaient

20 imposé cette notion essentielle jusqu'à cette époque?

21 Réponse: Oui.

22 Question: Vous avez abordé très brièvement des événements qui, je pense,

23 ont commencé peut-être dans les années 60, vers les années 60, où la

24 population musulmane de Yougoslavie voulait atteindre, voulait devenir une

25 nation en Yougoslavie?

Page 1213

1 Réponse: Les Musulmans de Bosnie ont essayé d'être reconnus en tant que

2 nation?

3 Question: Pourriez-vous expliquer à la Chambre ce que cela veut dire

4 d'être reconnu en tant que nation?

5 Réponse: Eh bien, peut-être que la meilleure façon d'expliquer serait de

6 dire que dans la façon de penser, les partisans yougoslaves il y avait

7 différents niveaux de reconnaissance de groupe. Et le niveau le plus

8 élevé, c'était qu'un groupe fût reconnu comme une nation, de sorte que les

9 nations qui étaient reconnues aux premières réunions de parti en 1942

10 étaient les Serbes, les Croates, les Monténégrins, les Macédoniens, les

11 Slovènes; et ils étaient définis comme étant des nations qui constituaient

12 la fédération de Yougoslavie.

13 Les Musulmans de Bosnie aspiraient à avoir cette reconnaissance. Ce qui

14 voulait dire qu'il leur serait accordé des droits; par exemple, d'être

15 comptés dans les recensements et d'avoir certains autres droits en tant

16 que groupe par rapport à ceux qui seraient d'une minorité ou d'autres

17 populations vivant dans le pays.

18 Question: Vous avez parlé de "kljuc", "la clé". Cela aurait affecté la

19 façon dont ils étaient traités, n'est-ce pas, selon ce régime?

20 Réponse: Oui.

21 Question: Ce processus qui était de s'efforcer d'être reconnus comme

22 nation de la part des Musulmans de Bosnie-Herzégovine ne s'est pas produit

23 sans que s'exprime un certain nationalisme qui, je crois, a commencé à se

24 faire jour dans le début des années 1980. Est-ce exact?

25 Réponse: Pourriez-vous reposer la question?

Page 1214

1 Question: Oui, je ne l'ai peut-être pas très bien posée.

2 Cette lutte pour être reconnus comme une nation, de la part des Musulmans

3 de Bosnie, contenait en elle-même un élément de ce qu'on appelait à

4 l'époque une sorte de nationalisme extrême, de fondamentalisme musulman,

5 n'est-ce pas?

6 Réponse: Elle contenait le mouvement qui remontait aux mois qui ont juste

7 suivi la Deuxième Guerre mondiale, qui s'appelait "les Jeunes Musulmans".

8 Ce groupe est devenu une des tendances au sein de la communauté politique

9 musulmane de Bosnie, qui était considéré comme le gouvernement de la

10 Yougoslavie, et d'autres comme étant un groupe islamique fondamentaliste

11 ou conservateur, oui!

12 Question: Et ce groupe a été réprimé, a fait l'objet de répressions par le

13 gouvernement, y compris avec l'arrestation et les procès d'Alija

14 Izetbegovic et sa condamnation?

15 Réponse: Oui, ils l'ont fait après la Deuxième Guerre mondiale et cela a

16 repris en 1983, à nouveau.

17 Question: Vous parlez, dans votre déposition, de l'apparition des partis

18 politiques nationalistes: le SDA, le SDS, le HDZ. Ce n'est pas la première

19 fois dans l'histoire de la Yougoslavie qu'il y avait des partis politiques

20 nationalistes?

21 Réponse: Non.

22 Question: Et il y a, entre la Première et la Deuxième Guerre mondiale, un

23 parti politique qui s'appelait le "JMO", un parti politique musulman de

24 Bosnie?

25 Réponse: Oui.

Page 1215

1 M. Ackerman (interprétation): Lorsque la Ligue des communistes a commencé

2 à se démanteler, est-ce qu'il est devenu clair que d'autres partis

3 politiques le remplaceraient et qu'il y aurait d'autres partis politiques

4 rivaux en Bosnie?

5 Monsieur le Président, nous entrons dans un domaine tout à fait nouveau

6 maintenant: peut-être serait-ce le moment qui convient pour suspendre?

7 M. le Président (interprétation): Oui, nous allons donc suspendre la

8 séance maintenant et nous reprendrons à 10 heures 50.

9 (L'audience, suspendue à 10 heures 23, est reprise à 10 heures 51.)

10 (Le témoin, M. Robert J. Donia, est introduit dans le prétoire.)

11 M. le Président (interprétation): Maître Ackerman, poursuivez.

12 M. Ackerman (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

13 Lorsque nous avons interrompu, Monsieur Donia, nous avions commencé à

14 parler de régime multipartite. Je voudrais maintenant me concentrer sur la

15 Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas?

16 M. Donia (interprétation): Oui.

17 Question: A ce qu'il semble, il y a eu pas mal de préoccupations en ce qui

18 concerne ce qui pourrait se produire si ces partis avaient une base

19 nationale. Comme vous le savez, le parlement bosnien avait adopté une loi

20 électorale en 1990 qui interdisait la formation de partis nationalistes,

21 n'est-ce pas?

22 Réponse: Il autorisait la formation de partis, mais excluait des partis

23 basés sur la nationalité ou la religion.

24 Question: Il devait être entendu que cela pourrait créer des problèmes

25 assez importants et profonds?

Page 1216

1 Réponse: Oui.

2 Question: Le même mois, un parti nationaliste, le SDA, a été formé sous la

3 direction de Alija Izetbegovic, n'est-ce pas?

4 Réponse: Je crois que c'est en février pour les deux dates, à la fois pour

5 l'amendement et la Constitution, et non pas la formation du parti mais la

6 formation d'un comité d'organisation du SDA.

7 Question: Cette loi qui interdisait la création de partis basés sur des

8 nationalités avait été déclarée inconstitutionnelle par la Cour

9 Constitutionnelle de Bosnie, n'est-ce pas le cas?

10 Réponse: Oui.

11 Question: A l'époque le président de cette Cour était un président Kasim

12 Trkna, n'est-ce pas?

13 Réponse: Oui.

14 Question: Et peu après, le Dr Trkna est devenu un membre influant de la

15 direction du parti SDA, n'est-ce pas?

16 Réponse: Je ne sais pas.

17 Question: S'il est rapporté que Steven Burg et Paul Shoup dans leur

18 ouvrage en rendent compte?

19 Réponse: Je ne connais pas la source.

20 Question: Bien, nous pourrons y revenir plus tard. Après cette décision

21 déclarant que la loi qui interdisait les partis fondés sur la nationalité

22 n'était pas constitutionnelle, alors le parti SDS s'est formé en juillet

23 1990 et le SDS en août 1990, est-ce exact?

24 Réponse: Les trois partis avaient un rapport analogue par rapport à cette

25 loi et par rapport à la décision de la Cour Constitutionnelle. Chacun a

Page 1217

1 formé des comités d'organisation avant la décision de la Cour

2 Constitutionnelle, ils se sont engagés dans des types d'activité de parti

3 mais aucun officiellement n'avait tenu d'assemblée constituante avant que

4 ne soit prise la décision de la Cour Constitutionnelle en juin.

5 Question: Dans la chronologie dans laquelle ces partis…, ce fut d'abord le

6 SDA, puis le SDS, puis le HDZ?

7 Réponse: Je crois que cela dépend de savoir quand le parti a été formé,

8 qu'est-ce qu'on entend par cette expression. Je crois que l'ordre

9 chronologique que vous citez est exact pour ce qui est les assemblées

10 constituantes ou qui ont fondé ces trois partis.

11 Question: Je crois que vous avez devant vous des extraits, si on vous les

12 a remis?

13 Réponse: Non.

14 M. Ackerman (interprétation): Le Greffe a un exemplaire pour vous.

15 M. le Président (interprétation): Est-ce que vous allez demander le

16 versement au dossier de cette pièce?

17 M. Ackerman (interprétation): Je laisse ça à votre décision, Monsieur le

18 Président.

19 M. le Président (interprétation): Parce que vous nous demandez de nous

20 référer à un document qui par la suite pourrait être revu, je préférerais

21 qu'on en demande le versement au dossier.

22 M. Ackerman (interprétation): Dans ce cas-là, je propose, Monsieur le

23 Président, que ce soit la pièce n°1 du dossier de la défense. Je pense que

24 ce serait donc DB1 si c'est bien la façon dont on veut le marquer.

25 M. le Président (interprétation): Je préférerais que ce soit la Greffière

Page 1218

1 d'audience qui nous dise exactement comment elle souhaite que cette

2 numérotation soit faite, parce que c'est plus important pour eux, et que

3 nous verrons ensuite.

4 Mme Chen (interprétation): DB1.

5 M. le Président (interprétation): Bien. Est-ce que l'accusation en a pris

6 note?

7 M. Cayley (interprétation): Oui.

8 M. le Président (interprétation): Avez-vous reçu une photocopie des pages

9 pertinentes de ce livre?

10 M. Donia (interprétation): Oui, mais il n'y a pas les notes de bas de page

11 auxquelles il sera fait référence.

12 M. Ackerman (interprétation): Je pourrais en fait remettre un exemplaire

13 même de ce livre à M. Donia parce que, je pense qu'il voudra peut-être se

14 référer aux notes de bas de page.

15 Je vous prie de m'excuser de ne pas vous l'avoir donné, Monsieur Donia.

16 M. le Président (interprétation): J'ai remarqué plus tôt qu'il y a un

17 exemplaire du livre qui a été apporté.

18 Mme Korner (interprétation): Oui, nous avons reçu la photocopie ce matin

19 et nous nous sommes procuré le livre ensuite.

20 M. le Président (interprétation): Bien. Vous avez ce qu'il vous faut. Le

21 tribunal… Nous n'avons pas d'exemplaire du livre.

22 Mme Chen (interprétation): J'ai une photocopie.

23 M. Ackerman (interprétation): Nous avons un autre exemplaire, si vous le

24 souhaitez, si c'est utile. Excusez-moi, nous n'avons pas d'autre

25 exemplaire.

Page 1219

1 M. Cayley (interprétation): Je peux suivre dans le livre, si vous voulez:

2 j'ai une photocopie et le livre, si vous souhaitez quelque chose.

3 M. le Président (interprétation): (Hors micro.)

4 Vous pouvez commencer, Maître Ackerman.

5 M. Ackerman (interprétation): Page 46, la deuxième page de la photocopie.

6 Il y a essentiellement deux éléments à la page 46, qui se poursuivent sur

7 la page 47. La première date que vous allez remarquer dans le deuxième

8 paragraphe: "c'est la Cour constitutionnelle qui, à l'époque, était

9 présidée par M. Kazim Trnka, qui deviendrait par la suite un membre actif

10 de la direction des SDA". C'est la déclaration dont nous avons parlé, il y

11 a un moment.

12 Si vous regardez le dernier paragraphe de la page 46, ensuite la page 47,

13 on voit que les auteurs disent que le SDA a été créé en mars 1990. Est-ce

14 que vous êtes d'accord avec les auteurs en ce qui concerne ces dates?

15 Soyez tout à fait libre de consulter les notes de bas de pages en ce qui

16 concerne les sources utilisées par ces auteurs.

17 M. Donia (interprétation): Respectueusement, je ne suis pas d'accord avec

18 la déclaration qui est faite, à savoir que le SDA aurait été fondé en mars

19 1990. Je crois aussi que, dans ma propre déclaration, j'ai cité de

20 meilleures sources pour les amendements constitutionnels; si vous voulez,

21 je peux les rechercher.

22 Je note que la note de bas de page 80, qui concerne la fondation du SDA,

23 et une note de bas de page qui concerne une dissertation de Xavier

24 Bougarel, dans une collection d'essais. Et cela ne peut en aucun cas être

25 considéré comme une source primaire.

Page 1220

1 Je suis conscient du fait que le Dr Trnka est devenu, à un moment donné,

2 membre du SDA. Je ne le rencontre pas comme membre de la direction du SDA,

3 à un moment quelconque avant, dans l'histoire du parti. Le nom est Trnka,

4 Kazim Trnka.

5 Je ne vais pas nécessairement contester ce qui est dit ici, mais je

6 voudrais poser la question de savoir ce que l'on entend par "par la suite"

7 ou "plus tard". Parce que ça peut être pas mal plus tard qu'il est devenu

8 un membre actif de la direction du parti.

9 Permettez-moi de voir si je retrouve mes références en ce qui concerne les

10 amendements constitutionnels.

11 Question: Pendant que vous faites cela, vous devez comprendre que je ne

12 suis pas vraiment intéressé par la précision concernant ces dates, en ce

13 qui concerne la chronologie et leur séquence, la façon dont elles se

14 suivent. Me comprenez-vous?

15 Réponse: Oui, moi, je suis très intéressé par la précision parce qu'on ne

16 peut pas avoir de séquence sans précision.

17 M. Ackerman (interprétation): C'est vrai.

18 M. Donia (interprétation): Si vous regardez ma note de bas de page 90…

19 M. le Président (interprétation): Nous parlons de la page 32 du rapport de

20 M. Donia, n'est-ce pas?

21 M. Donia (interprétation): Oui, c'est exact, Monsieur le Président.

22 Et je crois qu'à la page 31, j'avais donné la date du 21 février 1990,

23 lorsque l'assemblée a adopté une loi -c'est la dernière phrase de cette

24 page- qui permettait aux partis politiques d'être organisés, mais qui

25 interdisait que les partis soient fondés sur la nationalité ou la

Page 1221

1 religion. Avec une citation du Journal Officiel.

2 M. le Président (interprétation): Excusez-moi, je vais peut-être essayer

3 de vous aider tous les deux.

4 D'après votre rapport, Monsieur Donia, à la page 34, pardon la page 35, on

5 lit que: "Le HDZ a tenu sa première assemblée de fondation dans la salle

6 de Skenderia le complexe sportif le 18 août 1990." Donc il semble que ce

7 soit l'une des affirmations que vous faisiez.

8 La deuxième affirmation est un peu plus bas dans le paragraphe suivant,

9 tout à fait à la fin: "Le SDA a eu sa première assemblée le 26 mai à

10 Sarajevo avec les délégués de 73, etc.".

11 M. Donia (interprétation): Oui.

12 M. le Président (interprétation): Donc ceci c'est pour la seconde partie.

13 Et assurément le SDA semble avoir été fondé, constitué avant le HDZ

14 assurément selon vous, n'est-ce pas?

15 M. Donia (interprétation): Pour être précis en ce qui concerne la

16 formulation, Monsieur le Président, c'était l'assemblée constituante de

17 ces partis qui s'est tenue à ces dates-là. Et si on utilise ce critère,

18 dans ce cas-là, oui! Le SDA a été fondé d'abord, le SDS en second et le

19 HDZ en troisième.

20 M. le Président (interprétation): Le SDS à la page 36, premier paragraphe,

21 vers la quatrième ligne: "près de 3.000 Serbes ont assisté à l'assemblée

22 de fondation du 12 juillet 1990". Je crois qu'il s'agit bien du SDS?

23 M. Donia (interprétation): Oui, Monsieur le Président.

24 M. le Président (interprétation): Est-ce que ceci coïncide avec ce qui

25 vous a été dit par Me Ackerman?

Page 1222

1 Je ne veux pas procéder moi-même au contre-interrogatoire. Excusez-moi,

2 Maître Ackerman, mais je voulais simplement éclairer les choses.

3 M. Ackerman (interprétation): Je crois que la question que je voulais vous

4 poser, Monsieur Donia, c'était que le SDA a été fondé en mars 1990, le SDS

5 en juillet et le HDZ. Et vous dites que le SDA n'a pas été fondé avant le

6 mois de mai dans votre rapport, mais il est d'accord avec les dates de

7 juillet et d'août?

8 M. Donia (interprétation): La fondation des partis avait donné lieu à des

9 élections municipales, et la plupart des élections partielles et dans ces

10 élections les sièges à l'assemblée de Bosnie-Herzégovine ont été gagnés

11 par des représentants des trois partis nationalistes, est-ce exact?

12 M. Ackerman (interprétation): Il y a une chose qui m'intrigue, Monsieur

13 Donia et comprenez que je ne comprends pas cela. Donc je vous demande

14 vraiment une explication. Si vous regardez la page 51 de ce que nous avons

15 appelé la pièce n°DB1, du côté de la page 56, il est dit que…, page 51

16 pardon.

17 Il est dit que: "Fikret Abdic avait obtenu le plus grand nombre de votes

18 et néanmoins le poste est allé au second qui avait le plus grand nombre de

19 votes, Alija Izetbegovic". Est-ce que c'est vrai, et je ne sais pas

20 pourquoi ce le serait? Est-ce que c'est bien cela qui s'est passé?

21 M. Donia (interprétation): Je suis d'accord, du point de vue des

22 principes, que c'est cela qui aurait dû se passer. Et il se peut que

23 l'histoire se soit déroulée autrement, mais la manière dont l'accord entre

24 les partis a fonctionné, a été que le parti qui avait remporté le plus

25 grand nombre de votes dans l'élection, avait le droit de désigner le

Page 1223

1 président de la présidence. Le parti qui avait ensuite le plus grand

2 nombre de votes juste après, avait le droit de désigner le président de

3 l'assemblée. Et le parti qui a été en troisième position, avait le droit

4 de désigner le président du cabinet, en quelque sorte le Premier ministre.

5 Ceci a donc fonctionné ainsi parce que les membres de la présidence

6 choisissent le président. Et les membres de l'assemblée choisissent le

7 président de l'assemblée, de sorte que l'accord entre les trois partis

8 nationaliste a donc conduit à ce résultat.

9 Question: Lorsque vous dites: "l'Histoire aurait pu se dérouler autrement

10 si les résultats avaient été différents", je suppose que vous parlez des

11 différences de situation sur ce qui aurait dû se passer en Bosnie-

12 Herzégovine entre Izetbegovic et Fikret Avdic?

13 Réponse: Il y avait beaucoup de divergences entre l'un et l'autre. Je ne

14 peux que faire des hypothèses quant à savoir si les choses seraient allées

15 mieux ou non, mais, en dernière analyse, c'étaient des personnes très

16 différentes.

17 Question: Est-il vrai que Avdic était en faveur d'essayer de garder la

18 Yougoslavie comme une unité, une entité telle qu'elle existait, autant que

19 faire se pouvait?

20 Réponse: Je ne sais pas.

21 Question: Il venait de cette région aux alentours de Bihac, un bastion

22 musulman important dans ce petit coin, en haut, tout en haut; et il s'est

23 battu contre l'armée de Bosnie avec son groupe de combattants musulmans,

24 n'est-ce pas?

25 Réponse: Oui.

Page 1224

1 Question: Est-ce que vous pourriez maintenant examiner, s'il vous plaît,

2 la page 63 de la pièce DB1? Si vous prenez le premier paragraphe complet,

3 en partant du bas de la page, une phrase commence par "La paralysie", est-

4 ce que vous arrivez à retrouver cette phrase?

5 Réponse: Je n'arrive pas à la retrouver.

6 Question: Le paragraphe qui commence par "Outside Sarajevo"?

7 Réponse: Oui.

8 Question: Si vous trouvez le paragraphe immédiatement au-dessus, vous

9 trouverez une phrase qui commence par "Dans la paralysie."

10 Réponse: Oui.

11 Question: "Dans la paralysie qui s'en étant suivi et grâce à l'usure des

12 cadres non musulmans dans les ministères, le gouvernement à Sarajevo en

13 est venu à être largement dominée par le SDA. Etant donné que la Bosnie-

14 Herzégovine était un Etat fortement centralisé, le danger de voir le SDA

15 et la communauté ethnique musulmane exclure les autres communautés

16 ethniques du pouvoir était réelle, au moins au niveau du gouvernement

17 central." (Fin de citation.)

18 Ma question est la suivante: êtes-vous d'accord avec cette affirmation qui

19 est faite par Berg et Schuppe?

20 Réponse: Non. Et d'ailleurs, si vous me permettez de reprendre votre

21 prononciation, c'est Schaup et non pas Schuppe.

22 Question: Probablement qu'il n'écoute pas l'audience aujourd'hui, alors il

23 ne sait pas que j'ai déformé son nom. Donc je vous demanderai de ne pas le

24 lui dire.

25 Réponse: Mais ça lui arrive souvent!

Page 1225

1 Question: Si vous prenez le bas de cette page, vous verrez qu'une phrase

2 commence par "A Gorazde" Est-ce que vous arrivez à la retrouver?

3 Réponse: Oui.

4 Question: Je cite: "A Gorazde, le SDA musulman a entrepris un processus

5 de…" Et là, malheureusement, cela s'arrête, car je n'ai pas photocopié la

6 page 64. Mais, dans la suite de la phrase, on parle d'un processus visant

7 à écarter les Serbes des positions de responsabilité. La phrase qui

8 commence en bas de la page 63 se poursuit en haut de la page 64. Peut-être

9 que vous pouvez la retrouver dans le livre que vous avez sous les yeux?

10 Réponse: Oui, je vois.

11 Question: Est-ce que vous êtes d'accord avec cela? Est-ce que vous avez

12 conscience du fait que c'est arrivé?

13 Réponse: Non, je ne suis pas d'accord.

14 Question: Est-ce que vous êtres en train de dire aux Juges que ce ne n'est

15 pas ce qui s'est passé?

16 Réponse: Je ne sais pas si cela s'est passé au non.

17 Question: Est-ce que vous savez si, dans la municipalité de Konjic, en

18 avril 1992, les dirigeants musulmans ont créé une présidence de guerre et

19 ont écarté tous les Serbes du pouvoir dans la municipalité de Konjic? Est-

20 ce que vous êtes au courant de cela?

21 Réponse: Je ne sais pas.

22 Question: Il est vrai, n'est-ce pas, qu'au départ, au moment où ces

23 problèmes ont commencé à se poser avec la Croatie et la Slovénie, qui

24 souhaitaient faire sécession et devenir indépendantes, au départ donc, le

25 SDS était favorable à la Bosnie-Herzégovine qui devait rester au sein

Page 1226

1 d'une Yougoslavie fédérale?

2 Réponse: Oui, effectivement.

3 Question: Et le SDS a adopté une telle position, même si la Croatie et la

4 Slovénie devaient faire sécession?

5 Réponse: Le SDS, oui.

6 Question: Et êtes-vous d'accord avec moi pour dire que le droit

7 international préfère qu'un pays demeure tel qu'il est, plutôt qu'il soit

8 dissous et qu'il se désintègre?

9 Réponse: Je ne peux me prononcer sur le droit international. J'ai peur de

10 ne pas être qualifié pour répondre à cette question.

11 Question: Le SDA, sous la direction d'Izetbegovic, a indiqué que ce

12 n'était pas dans leur intérêt de rester au sein d'une Yougoslavie fédérale

13 si la Croatie devait faire sécession et devenir indépendante. Est-ce

14 exact?

15 Réponse: Je crois que, pour y répondre, je devrais savoir quand une telle

16 déclaration a été prononcée, dans quel contexte. Car, comme je l'ai

17 indiqué en réponse à l'interrogatoire principal et dans mon rapport, le

18 SDA s'efforçait par tous les moyens de concilier ces deux positions du HDZ

19 et du SDS et il se trouvait en quelque sorte entre les deux, à plusieurs

20 reprises.

21 Question: Je crois que c'était immédiatement avant juin 1991, où la

22 Croatie et la Slovénie ont fait sécession. Je crois que c'est à ce moment-

23 là qu'Izetbegovic a dit que, si la Croatie ne faisait plus partie de la

24 Yougoslavie, il ne pouvait plus demeurer au sein d'une Yougoslavie

25 fédérale.

Page 1227

1 Etes-vous d'accord ou n'êtes-vous pas d'accord? Veuillez me le dire.

2 Réponse: Cela ne m'étonne pas qu'une telle déclaration ait pu être faite à

3 l'époque.

4 Question: A quel moment la communauté européenne s'est-elle impliquée

5 activement dans les événements qui se déroulaient en Yougoslavie?

6 Réponse: A la fin du mois de juin 1991.

7 Question: Et parmi les actions qui ont été entreprises par la commission

8 européenne, on trouve la création d'une commission qui s'est appelée "la

9 Commission Badinter", n'est-ce pas?

10 Réponse: Oui.

11 Question: Et je crois que la mission de cette commission –"mission,

12 commission", ce sont deux mots qui vont bien ensemble- c'était d'étudier

13 la situation et de faire des recommandations relatives à l'indépendance

14 des différents Etats qui essayaient de faire sécession de la Yougoslavie à

15 l'époque?

16 Réponse: C'était de se pencher sur des demandes de reconnaissance

17 d'indépendance pour les républiques de la Yougoslavie qui le souhaitaient

18 et d'évaluer ces demandes en fonction d'un certain nombre de critères.

19 Question: Et au moment où cette commission a été créée, la question de ce

20 qui se passait, de ce qui allait se passer en ex-Yougoslavie était assez

21 incertaine et on ne savait pas comment il fallait traiter la situation.

22 Jusqu'au 29 novembre 1991, date à laquelle cette commission a estimé que

23 la Yougoslavie était un pays qui connaissait un processus de dissolution?

24 Réponse: Je crois qu'une dynamique certaine existait avant la création de

25 la Commission Badinter en faveur d'une indépendance pour la Slovénie et

Page 1228

1 pour la Croatie.

2 Question: En fin de compte, la Communauté européenne a essayé, par le

3 biais de cette commission, d'arriver à un processus de reconnaissance

4 ordonnée, une fois que la dissolution est apparue clairement, donc une

5 reconnaissance des entités qui souhaitaient obtenir cette reconnaissance?

6 Réponse: Oui.

7 Question: Et ce faisant, en essayant d'y parvenir de façon ordonnée et

8 coordonnée, l'Allemagne a pris les devants et a reconnu, de façon

9 unilatérale, la Croatie et la Slovénie le 23 septembre?

10 Réponse: Oui.

11 Question: Une reconnaissance à laquelle se sont opposés, de façon

12 véhémente, les Etats-Unis, la Grande Bretagne et même les Nations Unies,

13 n'est-ce pas?

14 Réponse: Oui, effectivement, ces Etats et ces organes s'y sont opposés.

15 Question: En janvier 1992, la Commission Badinter s'est penchée sur la

16 Bosnie-Herzégovine et elle a estimé que les efforts visant à faire

17 reconnaître la Bosnie-Herzégovine comme étant indépendante dans les

18 frontières existantes, étaient contredits par les déclarations des Serbes

19 de Bosnie qui souhaitaient à faire partie de la Yougoslavie fédérale,

20 n'est-ce pas?

21 Réponse: Je vous prie de m'excuser, mais pourriez-vous peut-être répéter

22 votre question?

23 Question: La Commission Badinter pour ce qui est de la Bosnie-Herzégovine

24 a été confrontée au fait que, contrairement à la Croatie et à la Slovénie,

25 une partie importante de la population de la Bosnie-Herzégovine semblait

Page 1229

1 être opposée à l'indépendance, et je veux dire par là les Serbes de Bosnie

2 qui souhaitaient rester au sein de la Yougoslavie?

3 Réponse: La conclusion de la Commission Badinter a fait remarquer qu'une

4 réunion de l'assemblée des Serbes de Bosnie s'est tenue le 21 décembre je

5 crois, et elle a fait remarquer que cette assemblée avait pris des mesures

6 en vue de constituer un Etat bosniaque séparé. Et pour se prononcer sur le

7 sentiment de la population, la population a demandé qu'un référendum soit

8 organisé.

9 Question: Mais cela se fondait, n'est-ce pas, sur le fait que la

10 Commission Badinter estimait qu'une composante importante de la population

11 de Bosnie-Herzégovine était opposée à l'indépendance, c'est-à-dire les

12 Serbes?

13 Peut-être pourrais-je vous demander de prendre la page 96 du document que

14 vous avez sous les yeux.

15 (Le témoin s'y reporte.)

16 Si vous prenez la moitié de cette page, à peu près la moitié du premier

17 paragraphe complet, vous trouverez une phrase où il est dit que: "Dans le

18 cas de la Bosnie-Herzégovine la commission Badinter a fait remarquer…",

19 etc.

20 Réponse: Oui.

21 Question: Je cite: "Dans le cas de la Bosnie-Herzégovine, la Commission

22 Badinter a fait remarquer que les efforts du gouvernement en vue de

23 déclarer un Etat indépendant au sein des frontières existantes de la

24 République, étaient contredits par les déclarations de Serbes de Bosnie

25 qui étaient favorables au fait de rester membres d'un Etat yougoslave. Par

Page 1230

1 conséquent, elle a estimé que la volonté des peuples de Bosnie-Herzégovine

2 de constituer la République socialiste de Bosnie-Herzégovine en tant

3 qu'Etat souverain et indépendant, ne pouvait être considérée comme étant

4 parfaitement établie. Elle a suggéré d'organiser un référendum auquel

5 participeraient tous les citoyens de la République socialiste de Bosnie-

6 Herzégovine comme moyen possible de déterminer la volonté populaire." (Fin

7 de citation.)

8 Réponse: Oui, je crois que c'est ce que j'ai dit. Ils n'ont pas estimé que

9 les Serbes de Bosnie souhaitaient rester membres de la Yougoslavie. Ils

10 ont pris note des déclarations de l'assemblée des Serbes de Bosnie en vue

11 de constituer un Etat séparé, c'est la raison pour laquelle ils ont

12 souhaité que la volonté populaire s'exprime au cours d'un référendum.

13 Question: Très bien. La Commission Badinter devait certainement connaître,

14 en partie au moins à l'époque, quelle était la composition ethnique de la

15 Bosnie-Herzégovine. C'était certainement le cas, n'est-ce pas?

16 Réponse: Oui.

17 Question: Et la Commission Badinter aurait certainement su que trois

18 partis nationalistes étaient impliqués, le SDA, le SDS et le HDZ?

19 Réponse: Oui.

20 Question: Et en estimant que les efforts visant à déclarer l'indépendance,

21 étaient contredits par les déclarations des Serbes qui souhaitaient rester

22 une partie de la Yougoslavie, en disant cela, ce qu'ils ont affirmé en

23 réalité, c'était qu'à moins que les trois groupes ethniques ne soient

24 d'accord, l'indépendance n'avait pas vraiment de sens à ce stade-là?

25 Réponse: Pour être précis sur la décision qui a été rendue par la

Page 1231

1 Commission Badinter, elle ne s'est absolument pas prononcée sur la volonté

2 des Serbes de Bosnie; elle n'a même pas pris en compte le point de vue du

3 SDS. Elle a uniquement cité les conclusions de l'Assemblée des Serbes de

4 Bosnie qui laissait ouverte la question de savoir si ces idées

5 représentaient les idées d'une majorité de personnes en Bosnie. Et c'est

6 sur cette base que la commission a demandé l'organisation d'un référendum.

7 Je constate ici que vous faites allusion à une source secondaire. Or, moi,

8 je crois avoir fait référence à la source primaire, qui a été publiée dans

9 une enquête yougoslave.

10 Question: Je ne pense pas que nous soyons en désaccord. Ce que j'essaie de

11 vous dire, c'est la chose suivante: la Commission Badinter avait

12 certainement compris que, à part les Serbes de Bosnie, les autres parties

13 constitutives de la Bosnie-Herzégovine étaient favorables à la déclaration

14 de l'indépendance, mais elles ne comprenaient pas parfaitement quel était

15 le point de vue des Serbes de Bosnie et estimaient donc qu'il fallait

16 organiser un référendum.

17 Réponse: Je ne sais pas quelle est la logique qui a poussé la Commission

18 Badinter à parvenir à sa conclusion, mais sa conclusion ne reflétait

19 d'aucune manière une vision a priori de la volonté populaire des

20 Musulmans, des Serbes ou des Croates.

21 Question: Il n'aurait pas été irréaliste d'envisager que les Serbes de

22 Bosnie-Herzégovine, qui ont dû interpréter la décision de cette

23 commission, pensaient qu'il fallait qu'il y ait un consensus des trois

24 nations qui composaient la Bosnie-Herzégovine avant que la commission ne

25 recommande l'indépendance. Est-ce exact?

Page 1232

1 Réponse: Non, je ne suis pas d'accord.

2 Question: Alors, quelle différence cela aurait-il fait pour la Commission

3 Badinter de connaître le point de vue des Serbes? Apparemment, c'est ce

4 qui a motivé le fait qu'ils n'ont pas envisagé cette possibilité.

5 Réponse: La façon dont j'interprète leur décision, c'est qu'ils ont

6 demandé qu'un référendum soit organisé pour déterminer la volonté

7 populaire.

8 Question: Mais ils n'ont pas fait cela pour la Slovénie et la Croatie,

9 n'est-ce pas?

10 Réponse: Non, ils n'ont pas exigé qu'un référendum soit organisé pour la

11 Slovénie et la Croatie.

12 Question: C'est parce qu'apparemment, aucun groupe de la population ne

13 contestait la proposition d'indépendance, aucun groupe important ne

14 contestait cette idée en Croatie ou en Slovénie.

15 Réponse: Il existait certainement un tel groupe de population en Croatie.

16 Question: D'une taille importante?

17 Réponse: Oui, environ 600.000 Serbes vivant en Croatie, qui étaient

18 opposés à l'indépendance pour la Croatie.

19 Question: Et savez-vous pourquoi un référendum n'a pas été organisé là-

20 bas?

21 Réponse: Des référendums avaient déjà été organisés, si je ne m'abuse, à

22 la fois en Croatie et en Slovénie, référendums qui avaient été organisés

23 par les autorités locales.

24 Question: Dans la décision de la Commission Badinter, est-ce qu'on trouve

25 des éléments permettant de penser qu'ils recherchaient une majorité simple

Page 1233

1 ou un consensus entre les différents groupes nationaux?

2 Réponse: A ma connaissance, ils n'ont pas défini ce qui ferait que ce

3 référendum aboutirait dans tel ou tel sens.

4 Question: La commission, de par sa mission, devait formuler une

5 recommandation relative à une façon ordonnée de procéder. On n'imagine pas

6 que la Commission Badinter, dans ses recommandations, adopterait des

7 solutions qui susciteraient le désordre. Or, je crois qu'après la tenue de

8 ce référendum, on peut dire clairement qu'une partie importante de la

9 population de Bosnie-Herzégovine -en d'autres termes, les Serbes- était

10 vivement opposée à l'indépendance?

11 Réponse: Oui.

12 Question: Merci. Il est possible, n'est-ce pas, que les Serbes de Bosnie-

13 Herzégovine, les dirigeants du SDS en Bosnie-Herzégovine aient pensé que,

14 s'ils se contentaient de maintenir leur opposition à l'indépendance,

15 alors, la Commission Badinter ne recommanderait peut-être jamais à la

16 Communauté européenne de reconnaître la Bosnie-Herzégovine en tant qu'Etat

17 indépendant?

18 Réponse: Je suis désolé, mais j'ai perdu le fil de cette question.

19 Pourriez-vous peut-être la répéter?

20 Question: Oui. Je vais essayer d'être plus clair. J'imagine que vous

21 reconnaîtrez que les dirigeants du SDS auraient pu en conclure que, s'ils

22 continuaient à s'opposer, si les Serbes de Bosnie continuaient à s'opposer

23 à l'indépendance de la Bosnie-Herzégovine, alors cela pourrait empêcher la

24 Commission Badinter de recommander la reconnaissance de la Bosnie-

25 Herzégovine en tant qu'Etat indépendant?

Page 1234

1 Réponse: Oui, c'est envisageable, c'est possible qu'ils soient parvenus à

2 cette conclusion.

3 Question: Avez-vous entendu parler d'une réunion qui a eu lieu au début du

4 mois de novembre 1991, je crois que c'est à ce moment-là qu'elle a eu

5 lieu, entre Izetbegovic et Genscher Hans Dietrich d'Allemagne?

6 Réponse: Je n'ai pas de souvenir particulier d'avoir lu une référence à

7 cette réunion.

8 Question: Pourriez-vous prendre la page 97, s'il vous plaît, et je crois

9 que la question que je dois vous poser maintenant, si cela vous rafraîchit

10 éventuellement la mémoire. C'est le premier paragraphe complet qui

11 commence par "Telle était la situation", peut-être que vous pouvez lire la

12 suite également pour savoir à quoi il est fait allusion.

13 (Le témoin s'exécute.)

14 Réponse: Voilà, j'ai lu le texte.

15 Question: Je crois que nous devons maintenant revenir à la façon dont la

16 République socialiste fédérative de Yougoslavie fonctionnait et à la

17 question de la présidence collective. Vous savez de quoi je parle, n'est-

18 ce pas?

19 Réponse: Non, je ne comprends pas parfaitement ce que vous voulez dire.

20 Question: Je vais essayer de préciser. Après la mort de Tito, et pour

21 anticiper la situation qui se présenterait après sa mort, on a pris des

22 dispositions sur la façon dont le gouvernement yougoslave allait

23 fonctionner après sa mort, n'est-ce pas?

24 Réponse: La façon dont allait s'organiser la Yougoslavie après sa mort,

25 était reprise dans la Constitution de 1994.

Page 1235

1 Question: La Constitution de 1994 a prévu une présidence collective; je

2 crois que c'est ainsi qu'on l'a appelée.

3 Réponse: Oui.

4 Question: En d'autres termes, des représentants de chacune des Républiques

5 y étaient représentés ainsi que des représentants du Kosovo et de...

6 Réponse: La Vojvodine.

7 Question: Oui, merci. La Vojvodine.

8 Pour qu'il y ait un équilibre au sein de la présidence collective, pour

9 empêcher une nation particulière de l'emporter sur les autres, c'était

10 l'intention de la Constitution de 1994, n'est-ce pas?

11 Réponse: Oui.

12 Question: Au moment où Izetbegovic a vu qu'un danger existait de voir la

13 Slovénie et la Croatie être reconnues sans que la question de la Bosnie-

14 Herzégovine ne soit réglée au sein de cette présidence collective de la

15 SFRY, il n'aurait plus…, il a vu qu'il ne disposerait plus de devoir qui

16 l'aiderait à protéger ses intérêts, c'est-à-dire la Croatie et la

17 Slovénie. C'est la raison pour laquelle il a estimé qu'il se trouverait

18 dans une situation très délicate?

19 Réponse: C'était une des raisons qui aurait expliqué une telle

20 préoccupation de sa part. Et, à l'époque, il n'était même pas clair qu'une

21 reconnaissance impliquerait un retrait de la présidence collective. Cela

22 aurait été une raison, parmi d'autres, qu'il aurait eu présente à

23 l'esprit.

24 Question: Mais cette préoccupation était suffisamment sérieuse et, d'après

25 Burg et Shoup, cela a expliqué le fait que Izetbegovic a reçu un briefing

Page 1236

1 par l'ambassadeur d'Allemagne de Belgrade pour que Genscher comprenne bien

2 ce qui allait se passer si la Slovénie et la Croatie étaient reconnues, à

3 savoir que ça allait engendrer des difficultés importantes?

4 Réponse: Burg et Shoup affirment, à la note de bas de page 153, que: "Cet

5 incident demeure énigmatique, qu'Izetbegovic aurait certainement mis en

6 garde contre le fait de limiter la reconnaissance à la Croatie et à la

7 Slovénie. Surtout si l'Allemagne reconnaissait ces Etats sans l'accord des

8 autres membres de la Communauté européenne." (Fin de citation.)

9 Je cite: "Nous disposons du témoignage d'un participant à la réunion du 22

10 novembre Michaël Libal du Ministère des affaires étrangères allemand, à

11 savoir qu'Izetbegovic n'a pas mis en garde Genscher contre le danger de la

12 reconnaissance pour la Bosnie." (Fin de citation.)

13 Est-ce que vous avez connaissance de ce qui est dit par Burg et Shoup, et

14 qu'en pensez-vous?

15 Réponse: Il s'agit là d'un compte rendu secondaire sur la base de mémoire

16 et, apparemment, sur la base de communication privée de la part d'un

17 collaborateur du Ministère des affaires étrangères allemand. Je crois

18 qu'il est tout à fait crédible de penser qu'une telle réunion a eu lieu

19 entre Izetbegovic et Genscher mais je crois que cela doit être envisagé

20 comme étant des conclusions fondées sur des spéculations.

21 Question: Parfait! Mais je pense qu'un des problèmes que nous avons dans

22 notre travail ici, c'est que nous parlons de certaines périodes qui ne

23 sont pas encore entièrement comprises, élucidées, pour lesquelles de

24 nombreuses questions subsistent encore, n'est-ce pas?

25 Réponse: Je suis absolument d'accord.

Page 1237

1 Question: Oui.

2 Réponse: Et, en fait, j'ai été un jour appelé au téléphone par le Pr

3 Shoup, il y a deux ans à peu près, qui me disait qu'il prévoyait de sortir

4 une édition révisée de cet ouvrage, et qui me demandait qui pourrait

5 procéder à des recherches à Sarajevo pour l'aider à trouver des

6 renseignements complémentaires.

7 Question: Très bien. Dans ce genre de situation où beaucoup de choses sont

8 encore mystérieuses et inconnues, nous ne pouvons que faire du mieux

9 possible, n'est-ce pas?

10 Réponse: Je crois. En effet, c'est ce que nous devons faire.

11 Question: Revenons à la date du 25 juillet 1992, Parlement de Bosnie-

12 Herzégovine.

13 Un débat est en cours au parlement, ce jour-là, qui porte sur le projet

14 d'adopter une décision déclaration d'indépendance sur la base d'un

15 référendum. C'est bien cela?

16 Réponse: Oui.

17 Question: Et à ce projet, s'opposaient fermement un grand nombre des

18 députés serbes de ce parlement, n'est-ce pas?

19 Réponse: Oui.

20 Question: A cette époque, le Président de l'Assemblée, comme vous nous

21 l'avez rappelé précédemment, était un homme qui avait pour nom Momcilo

22 Krajisnik. C'était un Serbe, n'est-ce pas?

23 Réponse: Oui.

24 Question: Krajisnik, après plusieurs heures de discussion, a levé la

25 séance de l'Assemblée, n'est-ce pas?

Page 1238

1 Réponse: Il a essayé de lever la séance, selon la source que -je pense-

2 vous êtes en train de lire.

3 Question: L'Assemblée s'est alors réunie une nouvelle fois après le départ

4 des députés serbes, n'est-ce pas? C'est-à-dire lorsque c'était un membre

5 du SDA qui agissait en tant que Président en exercice de l'Assemblée?

6 Réponse: Oui.

7 Question: Et le résultat a été les mesures prises autour du référendum?

8 Réponse: Oui. Et pour être précis, le paragraphe suivant ici -dans

9 l'ouvrage de Burg et de Shoup, à la page 105- indique qu'il y a eu 17

10 heures de discussion pour tenter de parvenir à un compromis avant ce

11 moment-là.

12 Question: Oui, nous allons y arriver. C'est ce dont nous parlerons à

13 l'étape suivante. Mais moi, cela ne me dérange pas que vous anticipiez sur

14 mes questions, car c'est en fait ce que je souhaitais vous demander de

15 toute façon.

16 Ma question suivante est donc celle-ci: cette réunion a été l'une des plus

17 longues réunions qui soit: 17 heures d'affilée de discussion, n'est-ce

18 pas?

19 Réponse: Oui.

20 Question: Et pendant toute la journée, toutes sortes d'efforts ont été

21 déployées dans des rencontres bilatérales, en tout cas hors séance, de

22 différents dirigeants et ce genre de choses pour essayer d'arriver à une

23 solution qui pourrait aboutir à la division en cantons, ou en tout cas à

24 une régionalisation de la Bosnie-Herzégovine avant la tenue du référendum?

25 Réponse: Cette discussion s'est surtout centrée sur la solution consistant

Page 1239

1 à créer des cantons.

2 Question: Oui. Et aux alentours de minuit -je parle toujours de cette

3 réunion qui a duré 17 heures d'affilée-, donc aux alentours de minuit, il

4 a semblé qu'un accord pourrait être conclu entre le SDA et le SDS,

5 s'agissant de régionaliser ou en tout cas de créer des cantons en Bosnie-

6 Herzégovine, et que ce ceci pourrait être fait par voie de référendum,

7 avec participation de tous, n'est-ce pas?

8 Réponse: Oui.

9 Question: Je pense que vous trouverez cela, je n'ai pas la référence

10 exacte mais je crois que c'est en page 106 de l'ouvrage. Mais je ne sais

11 pas si je l'ai en photocopie sous les yeux.

12 En tout cas, les choses se sont ensuite à nouveau dégradé, car Alija

13 Izetbegovic a commencé à trouver que les conditions qui étaient assorties

14 à la tenue du référendum étaient inacceptables pour lui?

15 Réponse: Oui.

16 Question: Les députés serbes du Parlement ont proposé que ce projet de

17 référendum soit envoyé au Conseil pour l'égalité des groupes nationaux,

18 Conseil dont la création n'avait d'ailleurs pas encore été approuvée à ce

19 moment-là. Mais en tout cas, l'idée qu'avaient les Serbes, c'était qu'ils

20 pourraient envoyer ce projet à un organe qui aurait le pouvoir d'annuler

21 la décision prise par le gouvernement si cette décision ne correspondait

22 pas aux besoins et aux souhaits de protection d'un groupe national

23 minoritaire. Donc quelque chose de très semblable, dans l'idée, à la

24 répartition sur la base de la "kljuc", de la clé dont nous avons parlé

25 tout à l'heure, qui était en vigueur en Yougoslavie précédemment.

Page 1240

1 Vous êtes d'accord que ce Conseil pour l'égalité entre les groupes

2 nationaux avait pour objectif d'assurer la même chose que le système de la

3 clé?

4 Réponse: Cela n'a rien à voir avec le concept qui régissait le système de

5 répartition, appelé "clé". Mais c'était un Conseil qui avait pour but, en

6 tout cas, il était censé être composé de représentants de tous les groupes

7 nationaux et il était censé revoir, relire les lois sur les groupes

8 nationaux, donc affectant les intérêts nationaux.

9 Question: C'était en réalité la suite du concept d'unité et de fraternité,

10 n'est-ce pas, que nous avons mentionné tout à l'heure, un système destiné

11 à assurer et à renforcer ce concept d'unité et de fraternité?

12 Réponse: Oui.

13 Question: Très bien. Et ceci n'a pas fonctionné non plus, n'est-ce pas;

14 nous en avons déjà parlé. Krajisnik a donc suspendu la séance et tous les

15 Serbes ont quitté l'assemblée?

16 Réponse: Oui.

17 Question: Très bien. Vous nous avez parlé hier -nous passons maintenant au

18 mois de février 1992-, vous nous avez dit que la Communauté européenne

19 essayait toujours de résoudre le puzzle de la Bosnie-Herzégovine et qu'un

20 médiateur, José Cutilheiro, a pris les choses en main pour s'efforcer de

21 trouver cette solution, en jouant le rôle de médiateur.

22 Réponse: Oui. En fait, ses efforts avaient été déployés à partir de la fin

23 de 1991.

24 Question: Oui, le 22 février 1993, si je ne m'abuse -je crois que c'était

25 à cette date qu'une proposition a été faite à Lisbonne par Cutilheiro, qui

Page 1241

1 portait sur la mise en place d'un système prévoyant encore une fois une

2 répartition en cantons de la Bosnie-Herzégovine.

3 Et cette solution a été acceptée à Lisbonne, n'est-ce pas?

4 Réponse: Oui, nous avons fait référence à cet accord hier.

5 Question: Oui, en effet. Je vous demanderai donc de vous rendre en pages

6 111 et 113 du document que je vous ai fait distribuer. Vous trouvez là

7 deux cartes géographiques qui ont été élaborées pendant ce processus

8 auquel a participé Cutilheiro et qui portait sur la mise en place d'un

9 système de cantons, solution acceptée par les trois partis en février. Les

10 deux cartes que je suis en train de vous montrer sont précisément les

11 cartes que Cutilheiro a proposées à la discussion de Lisbonne. La première

12 de ces cartes est la carte proposée par Cutilheiro et la deuxième est

13 apparemment celle qui était proposée par le SDA.

14 Vous voyez ces deux cartes? Vous les avez sous les yeux?

15 Réponse: Oui.

16 Question: Avez-vous la moindre contestation quant au fait que ces deux

17 cartes émanent bien du processus auquel a participé Cutilheiro à l'époque?

18 Réponse: Oui. La deuxième de ces cartes est montrée dans le livre comme

19 étant une carte reprise au journal "Politika" qui est un quotidien de

20 Belgrade. Donc je ne saurais jurer de son authenticité a priori.

21 Question: Donc vous ne pouvez pas dire qu'il s'agit ici d'une reproduction

22 exacte d'une carte présentée par le SDA au cours de cette conférence?

23 Réponse: Je ne pourrais pas dire cela, non.

24 Question: J'ai encore une question à vous poser néanmoins. Vous

25 remarquerez, n'est-ce pas, qu'il n'y a pratiquement aucune différence

Page 1242

1 entre cette carte dont vous parlez et la carte de Cutilheiro?

2 Réponse: Il y a un certain nombre de différences significatives, mais si

3 l'on regarde les choses de loin, elles ont l'air tout à fait semblables.

4 Question: Regardons la région qui nous intéresse ici: le nord-ouest de la

5 Bosnie. Sur les deux cartes, on voit mentionnés Bihac et Prijedor comme se

6 trouvant dans un district musulman. Et puis ensuite, on a une zone de plus

7 grande taille, dont le centre est Banja Luka sur les deux cartes, et, sur

8 les deux cartes, cette zone est censée correspondre à un district serbe,

9 n'est-ce pas?

10 Réponse: C'est exact.

11 Question: D'accord. Une fois que l'accord a été conclu -d'ailleurs,

12 utiliser le mot "accord" est peut-être un peu exagéré, car il n'y a pas eu

13 de rédaction officielle d'un accord en bonne et due forme-, en tout cas,

14 un accord de principe s'est établi entre les trois parties à Lisbonne, par

15 rapport à cette idée de Cutilheiro au sujet des cantons. Et presque

16 immédiatement après son retour à Sarajevo, Izetbegovic, n'est-ce pas, a

17 annoncé qu'il avait changé d'avis et qu'il dénonçait, en tout cas, qu'il

18 rejetait cet accord?

19 Réponse: Les choses ne se sont pas passées tout à fait comme cela. Il a

20 envoyé une lettre à M. Cutilheiro, comme je l'ai rappelé hier, dans

21 laquelle il rappelait les réunions de l'Assemblée de Banja Luka et disait

22 que, si la République Serbe de Bosnie continuait à discuter de la

23 proclamation d'une nouvelle Constitution, ceci rendrait les discussions

24 autour du projet Cutilheiro nulles et non avenues.

25 Question: Ce qui en fait consistait à jouer un jeu, car le plan avait été

Page 1243

1 adopté; donc aucune autre question n'aurait dû se poser, n'est-ce pas?

2 Réponse: Oui, c'était une façon de jouer un petit jeu. C'était un faux-

3 semblant.

4 Question: J'aimerais maintenant que nous passions à une autre question.

5 Vous avez sous les yeux les documents dont il a été question hier. A

6 l'onglet 12 du classeur, vous trouverez la pièce à conviction de

7 l'accusation n°15. Vous me direz quand vous l'avez trouvé?

8 Réponse: J'y suis.

9 Question: Si vous prenez la dernière page de la traduction anglaise de ce

10 document, il y a là un paragraphe qui a été soumis à l'attention des Juges

11 de la Chambre hier, durant votre déposition, lorsque vous avez parlé de ce

12 document. Et si ce document est authentique, nous voyons que, dans ce

13 paragraphe, il est question du fait que les Serbes étaient en train de

14 s'armer, n'est-ce pas?

15 Réponse: Oui.

16 Question: Les trois partis serbe, musulman et croate étaient tous en train

17 de s'armer, n'est-ce pas, fin 1991, début 1992?

18 Réponse: Oui.

19 Question: Si vous revenez maintenant à la page 74 du livre de Burg et

20 Shoup, le dernier paragraphe complet, avant la note en bas de page 54,

21 nous y lisons ce qui suit -je cite-: "Pendant toute cette période, des

22 armes pénétraient en masse en Bosnie. La JNA a commencé à transférer les

23 armes aux Serbes de Bosnie. Le groupe paramilitaire croate "Forces de

24 défense croate" était en train d'armer activement ses membres en

25 Herzégovine. Le groupe des "Bérets verts musulmans de Bosnie" s'était

Page 1244

1 organisé à l'automne 1991. Selon Izetbegovic, ce groupe comptait entre

2 35.000 et 40.000 membres lorsque le conflit a éclaté.

3 La ligue patriotique s'est constituée à la même époque et, en février

4 1992, a mis en place un plan de défense de la Bosnie. Selon Sefer

5 Halilovic, cette ligue patriotique comptait 120.000 membres au printemps

6 de 1992." (Fin de citation.)

7 Alors, la première chose que je vais faire, c'est de vous demander de dire

8 aux Juges de la Chambre qui est Sefer Halilovic.

9 Réponse: Sefer Halilovic était, je crois, le premier commandant de l'armée

10 de Bosnie-Herzégovine.

11 Question: C'est également l'un des accusés qui sera jugé par ce Tribunal?

12 Réponse: Oui, en effet.

13 Question: Avez-vous quelque chose à ajouter à ce que disent Burg et Shoup

14 quant au fait que les trois partis étaient en train de s'armer

15 militairement?

16 Réponse: Eh bien, comme je l'ai indiqué dans mon document écrit, je crois

17 savoir qu'il existe des éléments de preuve tout à fait fiables indiquant

18 que la ligue patriotique s'était organisée dans une période en antérieure

19 c'est-à-dire à partir de mai 1991. Mais je noterai simplement que

20 Halilovic était un grand partisan de la ligue patriotique. Les nombres

21 cités ici peuvent être peut-être exagérés, ils me paraissent élevés mais,

22 en dehors de cela, j'admets cette déclaration que je vois ici.

23 Question: Très bien. Maintenant j'aimerais, comme je le dis assez souvent,

24 passer à quelque chose d'entièrement différent.

25 Les documents dont nous avons parlé, l'une des choses que l'on constate à

Page 1245

1 l'étude à l'examen de ces documents, c'est que des tensions importantes

2 étaient en train de se créer entre Radovan Karadzic et ce que je

3 dénommerais "le groupe de Pale". Vojo Kupresanin, Radoslav Vukic, Radoslav

4 Brdanin faisaient partie de ce que j'appellerai "le groupe de Banja Luka".

5 Donc entre ces deux groupes le combat était intense, n'est-ce pas, sur la

6 question de savoir quelle était l'instance que le gouvernement accepterait

7 comme siège du gouvernement et quelle serait donc la nature exacte de cet

8 organe?

9 Réponse: Oui, un désaccord assez important est apparu entre ces groupes au

10 sujet de l'organisation des Serbes de Bosnie et également au sujet du

11 siège de son gouvernement.

12 Question: L'une des justifications apportées pour proposer de créer la

13 ZOBK -Communauté des municipalités de Bosnie-Herzégovine- et la RAK

14 -Région autonome de Krajina- a consisté à résider dans l'affirmation de

15 certaines personnes qui étaient, en Krajina, que les ressources

16 économiques étaient concentrées à Sarajevo et que ceci entraînait une

17 perte de vitesse de l'économie?

18 Réponse: Oui.

19 Question: Je pense que vous avez indiqué, au cours de votre déposition,

20 que cette proposition n'avait pas acquis un soutien très important. Il est

21 donc difficile de dire si c'était une réalité ou la perception de

22 certains, n'est-ce pas?

23 Réponse: En effet.

24 Question: Mais le fait que, très souvent, nos perceptions diffèrent un peu

25 de la réalité n'a pas une importance capitale en soi. Cependant, c'est

Page 1246

1 cette réalité ou cette perception de la part de certains en Krajina qui a

2 entraîné certains habitants de la Krajina à souhaiter agir pour modifier

3 la situation économique, l'améliorer en créant une organisation régionale?

4 Réponse: Je pense que cela fait une grande différence de savoir si

5 quelqu'un agit sur la base d'une perception, donc sur une base empirique,

6 ou pas. Donc je ne suis pas tout à fait d'accord avec ce que vous venez de

7 dire.

8 Question: Vous avez parlé dans votre déposition de M. Jaksic. Pouvez-vous

9 dire aux Juges de cette Chambre de qui il s'agit?

10 Réponse: Monsieur Jaksic était le directeur de l'Institut économique à

11 Banja Luka et, sur le plan des partis politiques, il était membre du SDP.

12 Question: Savez-vous que le Dr Jaksic a été l'un des hommes à l'origine du

13 concept sur lequel s'est appuyée la Bosnie-Herzégovine pour concept qui

14 préconisait la création de régions économiques dans l'ensemble de la

15 Bosnie-Herzégovine?

16 Réponse: Oui.

17 Question: Avez-vous lu le livre qu'il a écrit sur ce sujet?

18 Réponse: Non.

19 Question: Je ne l'ai pas lu, non, puisqu'il est écrit en serbo-croate.

20 Mais vous n'êtes pas, n'est-ce pas, en train d'affirmer que ce concept de

21 régionalisation, s'étendant à l'ensemble du pays, est quelque chose qui a

22 été inventé ou en tout cas qui a émané du comité central du SDS?

23 Réponse: Non, je n'affirme pas cela.

24 Question: En fait, lorsque la constitution de la Republika Srpska ou de la

25 République serbe de Bosnie-Herzégovine a été rédigée, elle ne

Page 1247

1 reconnaissait même pas l'existence de la RAK ou d'autres associations de

2 ce type, n'est-ce pas?

3 Réponse: La Constitution de la Bosnie? Excusez-moi, de quelle Constitution

4 est-ce que vous étiez en train de parler?

5 Question: Je parle de la Constitution des Serbes de Bosnie-Herzégovine. Le

6 premier projet de constitution émanant des Serbes de Bosnie-Herzégovine a

7 suscité une lutte très intense au sujet de l'idée de régionalisation.

8 Réponse: Je ne sais pas ce qui était écrit dans les premières versions,

9 dans les premiers projets de ce texte.

10 Question: Eh bien, nous pourrons nous pencher sur ces documents un peu

11 plus tard. Ils sont probablement… Enfin, nous regarderons les procès-

12 verbaux des réunions plus tard, si vous le voulez. Mais, en tout cas, il y

13 a eu accord sur un projet de constitution finalement qui prévoyait la

14 création de région. Vous voyez de quoi je parle?

15 Réponse: Oui.

16 Question: Très bien. Et, dans mon souvenir, le projet de constitution

17 soumis le 28 février admettait effectivement l'existence de régions, mais

18 n'utilisait pas les mêmes termes que les termes utilisés par le groupe de

19 Banja Luka, s'agissant de l'autonomie et de la souveraineté. En tout cas,

20 c'est ce dont je me souviens quant aux divergences qui se sont exprimées

21 au moment du débat sur le projet de Constitution et des différentes

22 positions prises au sein de l'Assemblée de la RAK.

23 Question: Je vous demanderai de reprendre votre rapport, le haut de la

24 page 66 de votre rapport.

25 Le fait que les membres du groupe de Pale n'ont pas réussi à faire ce que

Page 1248

1 les membres du groupe de Banja Luka voulaient faire, a débouché sur la

2 menace de créer une République totalement indépendante en Krajina. C'est

3 bien ça? Je crois que c'est ce que vous dites en haut de la page 66.

4 Réponse: Cette réunion s'est tenue avant la proclamation de la création de

5 la Republika Srpska, le 9 janvier. Donc, d'une certaine façon, c'est avant

6 la tenue de cette réunion que cette exigence a été exprimée s'agissant du

7 statut à octroyer à leur entité.

8 Question: Ce groupe s'est également opposé à ce que la capitale se trouve

9 à Sarajevo, n'est-ce pas?

10 Réponse: Oui mais, si je puis me permettre, appeler cela "le groupe de

11 Pale" est un peu prématuré; en effet, c'est plus tard que la direction

12 centrale du SDS a établi son siège à Pale. A ce moment-là, le siège était

13 toujours à Sarajevo.

14 Question: D'accord. Donc "le groupe de Sarajevo", si vous voulez, qui

15 deviendra plus tard "le groupe de Pale".

16 Réponse: Oui.

17 Question: Brdanin était opposé, et il l'a fait savoir, à ce que la

18 capitale soit à Sarajevo. Il a dit qu'il n'y aurait pas moyen d'éviter "un

19 retour de la vieille situation bien connue". Et lorsqu'il parlait de

20 "vieille situation bien connue", il s'agissait donc de la mauvaise

21 situation économique de la Krajina et du fait que personne ne s'occupait

22 de rétablir la situation économique en Krajina, n'est-ce pas?

23 Réponse: Oui.

24 Question: Toute cette agitation était, en fait, une mise en question

25 frontale du pouvoir de Karadzic par les gens qui habitaient dans la RAK,

Page 1249

1 n'est-ce pas, ou qui dirigeaient la RAK?

2 Réponse: Oui.

3 Question: Et cela s'est passé en même temps que Karadzic négociait avec

4 Cutilheiro une solution impliquant la création de cantons en Bosnie-

5 Herzégovine, n'est-ce pas?

6 Réponse: Oui.

7 Question: Il y a quelques instants, nous avons dit que toute cette

8 agitation, émanant de la RAK, allait être à la base du fait qu'Izetbegovic

9 allait trouver des excuses pour abandonner l'accord conclu à Lisbonne en

10 février?

11 Réponse: Dans ces lettres, il ne parle que du fait qu'une Constitution est

12 sur le point d'être adoptée par l'Assemblée des Serbes de Bosnie, comme

13 les débats à l'Assemblée de Banja Luka le montrent.

14 Question: Oui. Et ceci a poussé Cutilheiro à passer le coup de téléphone,

15 dont vous avez parlé hier, qui en fait lui a permis de dire à Karadzic

16 qu'il allait maintenir les Serbes sur la même idée.

17 Réponse: Oui.

18 Question: Et Karadzic, à ce moment-là, a essayé de rétablir son contrôle,

19 son pouvoir sur les Serbes de Krajina et le fossé s'est creusé de plus en

20 plus entre Karadzic et les Serbes de la Krajina, n'est-ce pas, plutôt que

21 de se combler?

22 Réponse: Je ne crois pas. Je pense que depuis ce moment-là, le 24 ou le 25

23 février, le fossé s'est comblé, peut-être pas complètement, mais une

24 solution pour l'essentiel a été trouvée, trois ou quatre jours plus tard.

25 Question: Eh bien, dans ces conditions, veuillez reprendre votre rapport à

Page 1250

1 la page 67, après que Karadzic a parlé au téléphone avec Cutilheiro. "Il

2 sort pour parler au téléphone à Cutilheiro, il revient dans la salle pour

3 la poursuite de la réunion et celle-ci devient très difficile. Les gens se

4 lancent des invectives à la figure, Karadzic accuse Brdanin de n'être plus

5 dans la ligne, il lui dit qu'il n'a pas le droit de saboter tous les

6 efforts qui ont été faits précédemment".

7 Ce sont des mots qui ne sont pas destinés à combler un fossé, me semble-t-

8 il, mais plutôt à l'élargir.

9 Il a utilisé des mots très vifs au cours de cette réunion de l'Assemblée

10 et le même genre de mots a été utilisé à la réunion du club des députés,

11 le 28?

12 Réponse: Oui. Cependant, le fossé, pour l'essentiel, était comblé au

13 moment de l'adoption du texte, le 28, avec le soutien de l'Assemblée de la

14 RAK exprimé le 29. Conformément aux recommandations de M. Krajsnik, qui

15 souhaitait que la direction du SDS de Sarajevo se réunisse et rencontre

16 donc les dirigeants de l'assemblée de la RAK, eh bien, cette réunion a eu

17 lieu le 29 février.

18 Question: Je voudrais me référer maintenant à la pièce 33 du dossier de

19 l'accusation. Ce document est le compte-rendu de l'assemblée du 25 février

20 1992, n'est-ce pas? C'est après l'onglet 29A dans mon classeur.

21 Réponse: Oui, je l'ai.

22 Question: Ce sont les notes de l'Assemblée. Pourriez-vous regarder à la

23 page 44, onglet 29? C'est Karadzic qui parle et il dit -je cite-: "Nous ne

24 pouvons pas permettre que cinq personnes ayant des ambitions personnelles

25 détruisent nos chances. Nous sommes très prêts de réaliser nos objectifs

Page 1251

1 stratégiques. Je ne fais pas d'objection si quelqu'un a un meilleur plan.

2 Brdjo, par exemple, qui est responsable devant cette Assemblée, qui doit

3 donc l'être puisqu'il est membre de ladite assemblée, s'il a un meilleur

4 plan, qu'il le présente ici et maintenant". (Fin de citation.)

5 Je saute un passage. Je cite: "Nous ne voyons pas qu'il ait un meilleur

6 plan". (Fin de citation.)

7 Vous passez ensuite au document suivant, pièce 34 du dossier de

8 l'accusation. Ce document est une réunion des adjoints du 28 février 1992,

9 n'est-ce pas?

10 Réponse: Oui.

11 Question: A la page 36, c'est Karadzic qui parle à nouveau. Vers le bas de

12 la page, le paragraphe qui commence par: "Nous pouvons et nous devons

13 renoncer à quelconque refus de travailler de la façon dont nous avons

14 convenu, Brdjo et tout le reste, tous les autres. Lorsque Brdjo apparaît

15 quelque part, c'est comme une bombe: il fait tout exploser; je ne le

16 permettrai pas en tant que psychiatre et comme dirigeant de parti. Il est

17 fou, il n'est pas normal", poursuit le Dr Karadzic. "Il ne sait pas ce

18 qu'il peut faire et ce qu'il ne peut pas faire". (Fin de citation.)

19 Est-ce exact?

20 Réponse: Oui.

21 Question: Passons maintenant à la pièce 35 du dossier de l'accusation.

22 C'est le 29 février 1992, dans la grande salle du centre culturel de Banja

23 Luka. C'est une réunion de la 4e Session de l'Assemblée de la Région

24 autonome de la Krajina. Et Radovan Karadzic et Momcilo Krajisnik et Nikola

25 Koljevic et Velibor Ostojic du groupe de Sarajevo et Pale sont présents,

Page 1252

1 n'est-ce pas?

2 Réponse: Oui.

3 Question: Et Karadzic dit -si vous voulez bien regarder la page 2 du

4 document-, se référant aux efforts déployés pour que la Région de la

5 Krajina soit déclarée une République -je cite-: "Si la République de

6 Krajina était déclarée, tous les Serbes à l'extérieur de ce territoire

7 souffriraient des conséquences de cette décision." (Fin de citation.)

8 C'est Cizmovic qui le dit. Karadzic a alors souligné que "ce serait un

9 crime comme la Krajina si elle était déclarée comme une République. Ceux

10 qui préconisent des idéaux aussi infantiles exposent la population serbe à

11 de grandes difficultés." (Fin de citation.)

12 C'est exact?

13 Réponse: Oui.

14 Question: Puis il caractérise les idées proposées par Brdanin comme étant

15 infantiles?

16 Réponse: Oui.

17 Question: A plus d'une reprise, par conséquent, il est juste de dire,

18 n'est-ce pas, que Karadzic, en public, critiquait, prononçait des

19 critiques publiques et utilisait mêmes des termes qui pourraient être

20 qualifiés "d'humiliants" à l'égard de Radoslav Brdanin?

21 M. Donia (interprétation): Oui. A l'époque qui se situe entre l'épisode où

22 il a été interrompu au sein du Conseil et cette séance, il y a eu un

23 certain nombre d'exemples où des termes de ce genre ont été employés dans

24 les organes délibérants où Karadzic parlait de M. Brdanin dans ces termes.

25 M. Ackerman (interprétation): Monsieur le Président, je pense que nous

Page 1253

1 pourrions peut-être conclure sur cette partie. Peut-être qu'il ne me

2 faudra pas plus de quelques minutes. Ce serait un bon moment pour

3 suspendre.

4 M. le Président (interprétation): Nous reprendrons à 12 heures 50.

5 (L'audience, suspendue à 12 heures 28, est reprise à 12 heures 52.)

6 (Questions relatives à la procédure.)

7 Mme Korner (interprétation): En attendant l'arrivée de M. Donia, il y a un

8 certain nombre de questions administratives que je voudrais poser,

9 Monsieur le Président.

10 M. le Président (interprétation): Combien de temps pensez-vous qu'il vous

11 faudra pour terminer votre contre-interrogatoire, Maître?

12 M. Ackerman (interprétation): J'essaie d'évaluer, je crois qu'il faudra à

13 peu près une heure et demie.

14 M. le Président (interprétation): Donc en terminant demain, en dépassant

15 sur demain?

16 M. Ackerman (interprétation): Oui, je pense que oui.

17 M. le Président (interprétation): (Hors micro.)

18 Mme Korner (interprétation): Pas plus de cinq minutes.

19 M. le Président (interprétation): Avez-vous des objections à ce que nous

20 commencions par ces deux questions administratives maintenant?

21 M. Ackerman (interprétation): Non, pas du tout.

22 M. le Président (interprétation): Alors, Madame Korner, vous pouvez peut-

23 être faire cela dès maintenant.

24 Mme Korner (interprétation): Cela a à voir avec la décision que vous avez

25 donnée avant-hier sur les questions soulevées par l'Article 92 du

Page 1254

1 Règlement. Avec tout le respect que je dois, ça nous est vraiment très,

2 très utile car nous voyons exactement votre raisonnement; et tout ce que

3 je voudrais dire sur cette décision, c'est en ce qui concerne le témoin

4 7.167.

5 M. le Président (interprétation): (Hors micro.)

6 Je ne suis pas encore arrivé à ce stade. Attendez. Je n'arrive pas à me

7 souvenir des numéros des témoins et de leur nom.

8 Mme Korner (interprétation): Vous avez dit, Monsieur le Président, qu'à

9 cause de certains des renseignements qu'il a donnés, il devrait être

10 présent. Ce que j'ai à dire est ceci: nous avons un nombre important de

11 témoins qui vont venir déposer en personne et ce témoin-ci aurait pu, si

12 vous l'aviez autorisé, apporter des éléments corroborants des éléments

13 présentés par deux autres témoins. Et, dans ces conditions, nous ne

14 proposons pas de le citer à la barre. C'est très clair.

15 Je dois ajouter qu'il ne faut pas considérer que c'est une politique que

16 nous allons adopter dans chaque cas et, qu'en pensant que chaque fois que

17 la défense fait objection sur la base de l'Article 92, nous les omettrons.

18 Mais nous pensons ici que ça n'est pas nécessaire. 7.167, c'est la

19 première question. Il y en en fait trois points.

20 M. le Président (interprétation): Oui.

21 Mme Korner (interprétation): Nous sommes en train de donner une pré-

22 numérotation de la liasse de pièces qui sont présentées pour être déposées

23 au dossier pour la municipalité de Banja Luka. Nous fournirons à la

24 défense l'indexe montrant cette pré-numérotation et, en plus, M. Inayat

25 est en train d'indiquer sur le papier ce qui est nécessaire pour

Page 1255

1 identifier chaque document. Nous fournira ceci à la défense demain matin.

2 Nous voudrions demander si, en dépit de ces renseignements, il va encore y

3 avoir des demandes insistantes pour que les dépositions aient lieu avant

4 que vous n'acceptiez le dépôt de ces documents, et que nous soyons

5 notifiés avant de commencer à faire déposer le premier témoin, et nous

6 demanderons à M. Inayat de venir déposer à la barre.

7 En tout état de cause, nous avons l'intention de présenter, pendant

8 environ 25 minutes, une courte vidéo qui -nous le pensons- pourrait être

9 utile à la Chambre parce qu'elle montre plusieurs domaines qui ont trait à

10 la présente affaire. Et je crois que ce serait utile de voir les

11 différentes zones.

12 Enfin, je voudrais demander, puisque nous sommes dans le processus de

13 planification avancée de cette affaire, il serait utile que la Chambre et

14 la défense puissent nous donner tous renseignements utiles sur le moment

15 où l'affaire Stakic va probablement commencer.

16 M. le Président (interprétation): Je ne suis pas en mesure de vous le dire

17 pour le moment. On peut espérer que je serais en mesure de le faire, mais

18 je ne peux pas prévoir de date pour vous le dire pour le moment. Nous vous

19 informerons. La Chambre vous informera. Pour le moment, nous ne sommes en

20 en mesure de le faire.

21 Mme Korner (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

22 M. le Président (interprétation): En ce qui concerne ce que Mme Korner

23 vient de suggérer, pas en ce qui concerne Stakic, pas en ce qui concerne

24 la vidéo, mais la planification, est-ce que ceci est acceptable?

25 Est-ce que ce qui est proposé est acceptable, Maître Ackerman, pour la

Page 1256

1 défense?

2 M. Ackerman (interprétation): Oui, Monsieur le Président.

3 M. le Président (interprétation): Maître Fauveau?

4 Mme Fauveau: Oui, Monsieur le Président.

5 M. le Président (interprétation): Bien. Pour ce qui est des requêtes à

6 venir, fondées sur l'Article 92bis du Règlement. Je dirai très brièvement,

7 je vais faire une recommandation pour qu'on y réfléchisse, qu'il y ait

8 matière à réflexion et, lorsque vous y aurez réfléchi, comme l'aurait dit

9 Milton, et lorsque vous l'aurez digéré, nous pourrons nous réunir et en

10 discuter.

11 Ma suggestion est la suivante que, pourvu qu'à aucun moment votre droit de

12 procéder à un contre-interrogatoire en tout état de cause les témoins, il

13 faut bien entendu qu'il soit garanti et maintenu, vous y avez droit.

14 Peut-être pourriez-vous, sauf incident, adopter la procédure consistant à

15 accepter des requêtes de l'accusation pour présentation de preuve au titre

16 de l'Article 92bis? Parce que, pourvu qu'il n'y ait rien d'illégal ou

17 d'illisible qui ne saurait être autorisé en vertu de l'Article 92 bis dans

18 le cadre de ces interventions, je suppose que vos droits ne sont pas

19 atteints en quoi que ce soit s'il y a un contre-interrogatoire qui a lieu.

20 L'idée, si vous voulez bien y réfléchir, est d'éviter des travaux inutiles

21 pour la Chambre de façon à ce que nous puissions progresser. En d'autres

22 termes, on parviendrait au même résultat, parce qu'il y a toujours

23 évidemment le droit de procéder au contre-interrogatoire, mais on pourrait

24 à ce moment-là économiser le temps de l'interrogatoire principal et

25 demander au témoin, si nécessaire, de voir si vous voulez contre-

Page 1257

1 interroger. Nous pouvons en discuter. Je ne sais pas; nous pouvons

2 discuter plus tard des avantages et des inconvénients.

3 M. Ackerman (interprétation): Je crois que je comprends ce que vous voulez

4 dire, à savoir que, si l'application du 92bis ne convient pas, alors il

5 faut soulever la question.

6 M. le Président (interprétation): Comme vous l'avez fait à juste titre

7 dans certains cas.

8 M. Ackerman (interprétation): Sinon, si c'est une question dans laquelle

9 les questions de Statut se posent, tout ce que j'aurais à faire, c'est

10 qu'il y a une personne pour qui je souhaite faire un contre-

11 interrogatoire. Je suppose que c'est ça que vous voulez dire?

12 M. le Président (interprétation): Vous avez raison. Fondamentalement, ce

13 qui se passe, c'est que, dans la majorité des cas, lorsque vous regardez

14 les dépositions des témoins qui sont proposés par écrit, sans que le

15 témoin comparaisse, il y a des cas limites. Dans certains cas, c'est très

16 évident et, dans d'autres cas, c'est limite. Et il y a des cas où le

17 problème ne se pose pas, tout simplement, mais qui sont évoqués quand même

18 pour des raisons que, parfois, nous ne comprenons pas.

19 Ce que je voudrais suggérer maintenant, c'est qu'à moins que l'objection

20 qui découle de l'Article du Règlement lui-même n'est véritablement

21 manifeste, compte tenu du document tel qu'il se présente, vous laissiez

22 passer; nous admettons la déclaration, vous dites clairement que vous

23 voulez que le témoin soit ici pour procéder au contre-interrogatoire. Nous

24 aurons, à ce moment-là, gagné, économisé beaucoup de temps au niveau de

25 l'interrogatoire principal et nous pourrons nous concentrer sur le contre-

Page 1258

1 interrogatoire.

2 C'est une suggestion, c'est quelque chose dont nous avons discuté avec mes

3 collègues; Mme Taya, Mme Janu et moi, nous avons pensé que nous allions

4 vous faire cette proposition.

5 M. Ackerman (interprétation): C'est une excellente idée.

6 M. le Président (interprétation): Que vous puissiez réfléchir et voir si

7 c'est utile dans la pratique ou non. Bien entendu, cela ne veut pas dire

8 que vous ne pouvez pas soulever des objections lorsque vous devez les

9 soulever en pratique.

10 M. Ackerman (interprétation): Je suis tout à fait d'accord. Je crois que

11 c'est une façon brillante, remarquable de faire les choses. Tout à fait

12 d'accord.

13 M. le Président (interprétation): Maître Fauveau, je n'attends pas de

14 réponse définitive de vous, bien entendu. Il faut que vous soumettiez la

15 question à vos confrères, mais j'espère que, même de votre côté, vous

16 comprenez que ce qui est suggéré n'est pas pour éviter le travail, mais

17 pour réduire un gaspillage de temps inutile.

18 Mme Fauveau: Je suis d'accord avec vous. Je suis sûre que mes deux

19 collègues français seront aussi d'accord.

20 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.

21 Est-ce que ceci convient aussi à l'accusation?

22 Mme Korner (interprétation): Pourrais-je avoir une légère restriction?

23 Certains témoins que nous avons choisis pour qu'ils puissent déposer,

24 doivent être entendus au titre de l'Article 92, qui demande seulement leur

25 présence pour un contre-interrogatoire, si vous leur donnez… Il y a de

Page 1259

1 bonnes raisons, par exemple à cause de l'âge ou de l'état de santé. Je

2 voudrais donc que ce soit pris, si possible, au cas par cas.

3 M. le Président (interprétation): Sans aucun doute. Bien sûr. Je n'ai même

4 pas besoin de le dire. Vous avez tout à fait raison et j'en prends acte.

5 Mme Korner (interprétation): L'autre chose que j'aurais dû mentionner en

6 ce qui concerne les éléments de preuve du compte rendu du colonel Kranjc,

7 décédé; il me semble qu'un moment raisonnable pour traiter de la question

8 serait après que le dernier témoin de la municipalité de Banja Luka ait

9 été entendu, qui traitera des aspects militaires. Par conséquent, la

10 Chambre pourra apprécier le poids à accorder ou non à ce compte rendu,

11 après cette déposition.

12 M. le Président (interprétation): Et peut-être, dans l'intervalle, si ma

13 mémoire ne me fait pas défaut, Me Ackerman n'a pas soulevé d'objection, à

14 l'heure actuelle, à ce que soit admise cette déposition puisque nous

15 n'avons pas de déposition dans le cas du général Talic.

16 Mme Korner (interprétation): Non, cela n'affecte son client.

17 M. le Président (interprétation): Je pense donc qu'il est sage d'attendre

18 que nous ayons eu la réponse des conseils du général Talic pour savoir

19 quelle est leur position et d'y réfléchir.

20 Bien entendu, c'est un point sur lequel il faudra qu'il y ait des

21 propositions, des requêtes qui ont été décidées par la Chambre dans le

22 passé et sur lesquelles il y a eu certaines controverses. Je ne veux pas

23 ouvrir ce chapitre maintenant. En tout état de cause, je ne veux pas

24 l'ouvrir maintenant.

25 Je suis d'accord avec vous. Peut-être qu'on pourra envisager cette

Page 1260

1 question vers la fin du chapitre concernant Banja Luka. Etes-vous

2 d'accord?

3 Mme Fauveau: Effectivement, je suis d'accord avec Mme Korner et je pense

4 que la fin de cette partie serait appropriée pour décider de l'admission

5 du transcript du colonel Kranjc.

6 M. le Président (interprétation): Donc je pense qu'on peut rappeler le

7 témoin, M. Donia.

8 Nous nous arrêterons comme d'habitude à 13 heures 45.

9 Maître Ackerman, donc vous avez 35 minutes qui vous restent. Et si vous

10 pensez qu'il vaut mieux vous arrêtez plus tôt, parce qu'on termine un

11 chapitre ou quelque chose, il vous est loisible de le faire.

12 (Le témoin, M. Robert J. Donia, est introduit dans le prétoire.)

13 M. le Président (interprétation): Maître Ackerman.

14 M. Ackerman (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Monsieur

15 Donia, vous êtes prêt à continuer?

16 M. Donia (interprétation): Oui.

17 Question: Je crois que nous allons maintenant passer à un sujet

18 complètement différent. Plutôt que de passer au document, je crois que

19 vous vous souvenez de quel document il s'agissait, c'était la pièce P37 de

20 l'accusation; et c'est ce document qui a donné des instructions, c'est

21 Vojo Kupresanin qui donnait des instructions aux municipalités en leur

22 disant qu'elles n'avaient pas d'obligation en rapport avec l'organisation

23 du référendum du 29 février, qu'elles n'étaient pas obligées d'apporter

24 leur assistance. Est-ce que vous vous souvenez de ce document?

25 Réponse: Oui.

Page 1261

1 Question: La seule chose que j'aurais aimé vous demander, c'est que vous

2 n'avez pas de renseignements ou de documents qui indiquent, n'est-ce pas,

3 qu'on a pris des mesures pour empêcher activement le référendum d'avoir

4 lieu de cette façon-là?

5 Réponse: Non.

6 Question: Merci. Autour de la fin de votre déposition hier, vous nous avez

7 parlé de l'armement important de la JNA et ensuite de l'armée de la

8 Republika Srpska, et je me suis dit que l'impression qu'on pouvait en

9 retirer -et vous l'avez peut-être pratiquement dit- c'est que les

10 capacités militaires musulmanes ou croates étaient très limitées dans la

11 zone dont nous parlons. Et, au même moment, vous avez dit que des

12 différents, des conflits, des combats militaires ont opposé des forces

13 autour du couloir qui allait faire le lien entre la Krajina et la Serbie.

14 J'aimerais me concentrer sur ce couloir un instant.

15 Est-ce que vous êtes d'accord avec moi pour dire que ce couloir, ce

16 corridor a été en réalité pris et isolé suite à une offensive croato-

17 musulmane au début de la guerre, offensive qui a pris la ville de Doboj

18 qui l'a assiégée?

19 Réponse: Je ne sais pas.

20 Question: Pourriez-vous prendre la page 133 de l'ouvrage de Burg et Shoup,

21 et j'aimerais que vous preniez le paragraphe qui commence par "Juin 1992."

22 (Le témoin s'y reporte.)

23 Est-ce que vous voyez de quel passage je parle?

24 Il s'agit de la page 133. C'est la dernière page de la photocopie, la

25 pièce DB1. Est-ce que vous avez trouvé le paragraphe en question?

Page 1262

1 Réponse: Oui.

2 Question: Est-ce qu'on peut y lire la chose suivante -je cite-: "En juin

3 1992, les Serbes ont lancé leur première contre-attaque de la guerre,

4 certainement avec l'appui des forces de Serbie, et ont repris des zones

5 qui avaient été prises par les forces combinées croato-musulmane en Bosnie

6 centrale au mois de mai." (Fin de citation.)

7 Est-ce que c'est bien ce qui est dit?

8 Réponse: Oui.

9 Question: Est-ce que vous avez des raisons de contester cela?

10 Réponse: Je ne sais pas si je peux accepter cette affirmation telle

11 qu'elle est formulée ou si je dois être en désaccord.

12 Question: Ensuite, la phrase continue et il est dit: "Qu'à Bihac les

13 Serbes n'ont pas réussi à établir un corridor au nord entre Banja Luka à

14 l'Ouest et Semberija et la Serbie à l'Est. Ils n'ont pas pu prendre la

15 ville de Gradacac qui se trouvait au Sud du corridor ou la ville d'Orasje

16 au Nord."

17 C'est ce que Burg et Shoup affirment, n'est-ce pas?

18 Réponse: Oui.

19 Question: Et je pense que vous me direz, une fois de plus, que vous ne

20 savez pas?

21 Réponse: Je ne vois pas une seule note. Enfin, je vois ici une note de bas

22 de page qui parle d'un article de "Borba", le journal de Belgrade. Peut-

23 être que c'est le cas, mais je ne sais pas. Et sur cette base, je ne peux

24 pas en conclure que c'était effectivement le cas.

25 Question: Je vous demanderai de prendre la pièce P33 de l'accusation page

Page 1263

1 60.

2 (Le témoin se reporte à cette page.)

3 Réponse: Je l'ai sous les yeux, c'est bien la page 60?

4 Question: Oui. L'orateur est Vojo Kupresanin.

5 Et si vous prenez le bas de la page 60, vous verrez que M. Kupresanin dit:

6 "Je crois que nous savons ce qui se passera si la République de Krajina

7 est proclamée. Nous n'avons pas Doboj, nous n'avons pas de point de

8 passage vers Semberija, nous ne pourrons nous battre même pas cinq jours,

9 car nous nous retrouverons sans carburant." (Fin de citation.)

10 Ce qui semble confirmer, au moins en partie, ce que Burg et Shoup

11 affirment au sujet de ce corridor et de Doboj, qui est entre les mains de

12 forces non serbes, n'est-ce pas?

13 Réponse: Oui, cela semble être le cas.

14 Question: A la lecture de cela, on ne dirait pas que les forces croato-

15 musulmanes, qui ont pu empêcher les Serbes de s'emparer de Gradacac et

16 d'Orasje, et qui peuvent garder et défendre ce corridor, il ne semble pas

17 que ces forces soient des forces dépourvues de tout moyen militaire et

18 soient moins armées que les forces serbes, n'est-ce pas?

19 Réponse: Votre question peut se décomposer en deux parties, je crois.

20 Tout d'abord, ce qui porte sur les forces croates. Pour ce qui est des

21 forces croates, je crois qu'effectivement, vous avez raison de dire cela.

22 Pour ce qui est des forces musulmanes, elles étaient moins bien équipées

23 que les Croates à cette époque-là et elles se caractérisaient par ces

24 unités de la TO locale.

25 Question: Peut-on dire, sans crainte de se tromper, que les forces

Page 1264

1 musulmanes étaient rapidement approvisionnées avec des armements

2 importants?

3 Réponse: Cela dépend énormément de la région dont on parle et de

4 l'emplacement exact des différentes unités. Je n'ai pas de renseignement

5 sur la façon dont le processus s'est déroulé à ce moment-là.

6 Question: J'aurais aimé vous poser la question suivante: est-ce que vous

7 savez que, dans la municipalité de Konjic, se trouvait une fabrique

8 d'armement importante de l'armée yougoslave?

9 Réponse: Oui.

10 Question: Savez-vous que, également dans la municipalité de Konjic, se

11 trouvait une cache d'armement importante à un endroit s'appelant

12 "Celebici"?

13 Réponse: Non.

14 Question: Et savez-vous qu'au mois d'avril 1992, les forces musulmanes se

15 sont emparées à la fois de cette fabrique d'armement et de la cache

16 d'armes de Celebici, si elle existait?

17 Réponse: J'en ai entendu parler. Je ne sais pas si c'est au mois d'avril,

18 mais je crois que c'est effectivement autour de cette période que cela a

19 eu lieu.

20 Question: Mardi, vous avez parlé du fait que les différentes municipalités

21 ont pris la décision de rejoindre la ZOBK et vous avez dit, dans votre

22 déposition, que Banja Luka n'a voté dans ce sens qu'à la fin du mois

23 d'avril 1991, assez longtemps après que les autres ont décidé de rejoindre

24 la ZOBK, n'est-ce pas?

25 Réponse: Oui, je crois que c'était le 29 avril, à un jour près.

Page 1265

1 Question: Et en rapport avec cela, vous nous avez dit qu'un membre du SDS

2 s'y est opposé, a émis des objections lorsque Banja Luka a décidé de

3 devenir membre de la ZOBK. Est-ce que vous vous en souvenez?

4 Réponse: Oui.

5 Question: Est-ce que vous savez qui c'était?

6 Réponse: Je crois l'avoir dit dans le document, mais je ne peux m'en

7 souvenir de mémoire.

8 Question: Vous avez parlé des différentes municipalités de la région qui

9 ont été invitées à adhérer. Est-ce que des municipalités de la RAK n'ont

10 pas été invitées à adhérer?

11 Réponse: La façon dont j'ai interprété l'invitation m'incitait à penser

12 qu'il s'agissait d'une invitation ouverte à l'intention de toutes les

13 municipalités de la zone de la RAK, y compris les zones de Cazin, Bihac et

14 Velika Kladusa.

15 Question: Si je vous pose la question, c'est pour une raison: en page 48

16 de votre rapport, vous nous donnez, dans le tableau 2, une liste des

17 différentes municipalités et des différentes nationalités qui ont été

18 invités à devenir membres de la ZOBK, après l'Assemblée de fondation. Est-

19 ce exact?

20 Réponse: Oui.

21 Question: Je me posais la question suivante: est-ce que certaines

22 municipalités n'ont pas été invitées à devenir membres, des municipalités

23 qui auraient été situées dans cette région de la RAK dont nous parlons?

24 Réponse: Je crois que l'invitation à devenir membres était une invitation

25 ouverte, mais quant aux destinataires exacts, je ne dispose pas de ces

Page 1266

1 renseignements.

2 Question: Peut-être que c'est uniquement moi qui ai retiré cette

3 impression, mais j'ai cru comprendre, en vous entendant déposer, que

4 quelque chose d'assez curieux était perceptible à la lecture du tableau 2,

5 où l'on voit qu'on trouve une municipalité où il n'y avait pratiquement

6 pas de Serbes. Si toute municipalité de la RAK avait été invitée à devenir

7 membre, alors cela n'aurait peut-être pas énormément d'importance?

8 Réponse: Je crois avoir expliciter la façon dont je voyais cette

9 invitation.

10 Si j'ai bien compris, à ce stade-là, il s'agissait d'une invitation à

11 devenir membre, sur une base volontaire, qui avait été adressée à des

12 municipalités qui n'avait pas de majorité serbe, de même qu'à celles qui

13 se composaient d'une importante population serbe ou d'une majorité absolue

14 de Serbes.

15 Question: Je vais essayer peut-être de passer à une autre question et

16 peut-être que nous pourrons le faire rapidement, sans reprendre tous les

17 documents.

18 J'aimerais revenir à la pièce P25 de l'accusation, le document "Variantes

19 A et B". Dans ce document, si vous prenez le document -là, j'examine la

20 traduction anglaise-, si vous prenez la première page, dans le coin en

21 haut à gauche, vous voyez que la source en est le parti démocratique serbe

22 de Bosnie-Herzégovine, le conseil principal, c'est exact?

23 Réponse: Oui.

24 Question: Si vous prenez la toute dernière page du document à présent,

25 vous verrez qu'il y est dit que "la source et la cellule de crise du SDS"?

Page 1267

1 Réponse: Oui.

2 Question: Est-ce que vous avez des éléments en votre possession vous

3 permettant de penser que le 19 décembre 1991 quelque chose appelée

4 "cellule de crise" du SDS pouvait exister à par ce document?

5 Réponse: Je ne sais pas si cela pourrait être une source faisant autorité

6 que je pourrais accepter, mais un rapport d'une cellule de crise du SDS

7 qui aurait été créée dès le mois d'octobre 1991 existe, on a pu le lire

8 dans des communiqués de presse.

9 Question: Donc vous en avez entendu parler?

10 Réponse: Oui.

11 Question: Avant le mois de décembre 1991?

12 Réponse: Oui.

13 Question: Ce document particulier variante A et B, vous avez estimé hier

14 qu'il s'agissait d'un document complexe, c'est exact?

15 Réponse: Oui.

16 Question: Et il est en réalité plutôt une recommandation à l'intention des

17 différentes municipalités, plutôt qu'un ordre leur disant: "Vous devez

18 faire telle ou telle chose", même si dans d'autres documents, par la

19 suite, on parle de certaines choses que vous allez certainement évoquer.

20 Mais c'est en tout cas la façon dont c'est formulé, donc c'est une

21 recommandation?

22 Réponse: Non.

23 Question: Vous n'êtes pas d'accord?

24 Réponse: Non, je crois qu'il ressort très clairement qu'au point 1, par

25 exemple en page 2, au petit 2, on voit que les mesures, tâches et autres

Page 1268

1 activités figurant dans ces instructions seront mises en oeuvre pour

2 améliorer la préparation et la mobilité.

3 Question: Alors, je crois que vous serez d'accord avec moi pour dire que,

4 de deux choses l'une, pour certains c'était considéré comme étant

5 uniquement une série de recommandations ou d'idées pouvant être ignorées.

6 On trouve, en effet, la date du mois de décembre; et au mois de mars,

7 certaines municipalités ne s'étaient pas du tout conformées à cela?

8 Réponse: Oui, je crois que la deuxième explication est la bonne. En effet,

9 de nombreuses résistances ont été exprimées à partir du 11 décembre et un

10 certain nombre de municipalités, de la part de certaines municipalités,

11 après ces instructions.

12 Question: Par conséquent, le SDS n'était pas unanime à ce sujet, des

13 divergences existaient?

14 Réponse: Oui, des divergences et même des résistances dans différentes

15 municipalités.

16 Question: Ce qui n'est pas ressorti parfaitement clairement. Or, je crois

17 que c'est le cas. C'est que dans de nombreuses municipalités où les Serbes

18 étaient minoritaires, où par conséquent c'est la variante B qui se serait

19 appliquée, les municipalités serbes qui ont été constituées l'ont été,

20 mais de façon secrète. Il ne s'agissait pas de quelque chose de public,

21 mais d'organisation secrète, est-ce exact?

22 Réponse: Certaines l'étaient, mais bon nombre d'entre elles ont été

23 annoncées publiquement au moment où elles ont été créées. Dans un cas, je

24 crois que c'était dans les faubourgs de Sarajevo, la décision a été prise

25 le 3 janvier, et elle a été annoncée publiquement le 10 janvier. Je crois

Page 1269

1 que les deux cas de figures ont existé.

2 Question: Donc certaines d'entre elles étaient secrètes?

3 Réponse: Oui.

4 Question: Est-ce que vous pourriez examiner l'intercalaire 40, la pièce

5 P44, s'il vous plaît?

6 Réponse: Oui, je l'ai trouvé.

7 Question: Il s'agit là d'une communication de Vojo Kupresanin, n'est-ce

8 pas? De la RAK, Région autonome de Krajina, à l'intention de la présidence

9 de la République serbe de Bosnie-Herzégovine.

10 Réponse: Oui.

11 Question: Et la date est le 17 juillet 1992?

12 Réponse: Oui.

13 Question: Etes-vous au courant d'une quelconque communication, soit

14 émanant de la RAK, soit de la cellule de crise, qui aurait été adressée à

15 la présidence de la République serbe ou d'une quelconque communication de

16 la République à la RAK ou à sa cellule de crise, au cours de la période du

17 1er avril 1992 à cette date-là, 17 juillet?

18 Réponse: Pour vous répondre, je devrais examiner ces documents, mais je ne

19 peux vous le dire comme cela de mémoire. Je n'ai pas connaissance d'une

20 quelconque communication de ce type.

21 Question: Est-ce que vous avez eu connaissance d'une réponse à ce document

22 de la part de la présidence?

23 Réponse: Non.

24 Question: Est-ce qu'un quelconque élément en votre possession vous

25 permettrait d'affirmer avec certitude que cette communication a été

Page 1270

1 envoyée?

2 Réponse: Je vois qu'elle est signée et qu'elle porte un tampon, mais cela

3 ne garantit pas qu'elle ait été envoyée.

4 Question: Nous avons parlé ces derniers jours de différentes assemblées:

5 nous avons parlé des assemblées du SDS, des assemblées de la République de

6 Bosnie-Herzégovine, des assemblées de la ZOBK, de la RAK. Toutes ces

7 assemblées, de par leur nature, réunissent des délégués et elles prennent

8 la forme d'un organe législatif délibérant.

9 Est-ce qu'on pourrait les décrire de cette façon?

10 Réponse: Oui.

11 Question: Et les organes législatifs, dans les institutions démocratiques,

12 rassemblent des représentants élus du peuple, leurs tâches étant d'adopter

13 des lois et des résolutions et autres, pour gouverner l'entité dont ils

14 sont l'assemblée, n'est-ce pas?

15 Réponse: Oui, c'est la façon dont cela se passe dans les institutions

16 démocratiques.

17 Question: Et peut-on dire, de façon générale, qu'il y a deux organes? Car

18 il y a l'exécutif qui se charge de mettre en oeuvre les lois adoptées par

19 ces assemblées ou par ces parlements. Ensuite, il y a généralement un

20 troisième pouvoir qui est le judiciaire, n'est-ce pas?

21 Réponse: Oui. Parfois, ce n'est pas aussi net dans certaines sociétés.

22 Mais, de façon générale, oui, je serais d'accord.

23 Question: Vous nous avez dit hier que l'idée même de cellule de crise

24 était de créer un organe qui allait rassembler et prendre la place d'une

25 assemblée pour des situations de crise où l'Assemblée ne pouvait plus se

Page 1271

1 charger de la conduite de ces affaires?

2 Réponse: Oui. Je crois que j'ai décrit cet organe comme un organe qui

3 agirait pour le compte de l'Assemblée, au nom de l'Assemblée, à certaines

4 conditions précises. Et dans certaines situations précises: guerre ou

5 menace de guerre.

6 Question: Je crois que ce que vous avez dit, mais qui n'est pas

7 entièrement exact, c'est qu'il s'agissait d'un organe pour assumer des

8 pouvoirs, un pouvoir exécutif au nom de l'Assemblée. Or, l'Assemblée, elle

9 n'a pas de pouvoir exécutif, n'est-ce pas?

10 Réponse: Eh bien, si, c'est possible. Si j'ai bien compris, l'idée c'est

11 que les deux organisations qui existaient étaient l'Assemblée à proprement

12 parler et le comité exécutif. Le comité exécutif n'était pas véritablement

13 un pouvoir exécutif indépendant; il s'agissait en quelque sorte d'un

14 organe exécutif qui recevait son autorité de l'Assemblée.

15 Question: Mais prenons plus précisément l'assemblée de la RAK. Il existait

16 un comité exécutif de la RAK, n'est-ce pas?

17 Réponse: Oui.

18 Question: Et ce comité exécutif avait à sa tête une personne qui

19 s'appelait Nikola Herceg, c'est cela?

20 Réponse: C'était l'une des deux personnes qui ont été à sa tête au cours

21 de la période sur laquelle je me suis penché.

22 Question: Et savez-vous que ce comité exécutif a continué à fonctionner,

23 de façon quotidienne, pendant la période allant d'avril à décembre?

24 Réponse: D'avril à décembre 1991?

25 Question: 1992.

Page 1272

1 Réponse: 1992? Non! Je ne sais pas.

2 Question: Pourriez-vous prendre à présent, s'il vous plaît, la pièce P52

3 de l'accusation?

4 (Le témoin prend le document en main.)

5 Réponse: Oui, je l'ai trouvé.

6 Question: Hier, vous avez dit à la Chambre que vous souhaitiez attirer son

7 attention sur un texte figurant en page 2 où Karadzic parle

8 essentiellement de la façon dont il a eu l'idée géniale de demander à ce

9 que ce soit Mladic?

10 Réponse: Oui.

11 Question: Est-ce que vous avez connaissance d'un moment où Karadzic a

12 essayé de licencier Mladic, de le limoger et d'en faire le commandant de…?

13 Réponse: Non, pas précisément. Je sais que leurs rapports n'étaient pas

14 excellents, à différents moments.

15 Question: Et savez-vous qu'à un moment donné, les effectifs ont menacé de

16 se révolter si Mladic n'était pas écarté?

17 Réponse: Non.

18 M. Ackerman (interprétation): Monsieur le Président, j'étais sur le point

19 de passer à autre chose et peut-être que ce serait le bon moment pour

20 suspendre l'audience.

21 M. le Président (interprétation): Voilà qui nous a même au terme de

22 l'audience d'aujourd'hui.

23 Docteur Donia, j'ai bien peur que vous deviez revenir encore demain. Et

24 j'espère que Me Ackerman terminera son contre-interrogatoire en une heure.

25 Est-ce que c'est bien cela? Suite à quoi, bien sûr, vous serez soumis à un

Page 1273

1 autre contre-interrogatoire de la part de l'équipe de défense du général

2 Talic, ce qui ne devrait pas prendre très longtemps, d'après ce que nous a

3 dit Me Fauveau, hier.

4 Oui, Madame Korner?

5 Mme Korner (interprétation): Monsieur le Président, pour ce qui est du

6 contre-interrogatoire pour le général Talic, j'aurais aimé dire la chose

7 suivante: c'est la défense du général Talic qui s'est en quelque sorte

8 -enfin, je vais essayer de m'exprimer poliment- agitée au sujet de ce qui

9 a été décrit comme la façon de voir l'histoire par l'accusation.

10 Je ne doute pas que Me Fauveau en est bien consciente.

11 Mais si un quelconque différend devait surgir à l'avenir sur la déposition

12 de M. Donia et que cela devait justifier de re-citer un expert, je crois

13 qu'il faudrait le dire dès maintenant au Dr Donia pour qu'il en soit

14 informé.

15 M. le Président (interprétation): Non, non, non. Le Dr Donia ne reviendra

16 certainement pas et le contre-interrogatoire du Dr Donia s'achèvera

17 demain.

18 Je me souviens exactement de ce qui a été dit par Me de Roux. Et vous avez

19 entièrement le droit de citer je ne sais combien de Dr Donia.

20 Mais pour ce qui est du contre-interrogatoire de ce Dr Donia-ci, vous

21 devez achever le contre-interrogatoire demain et ce sera la fin de ce Dr

22 Donia.

23 Mme Korner (interprétation): Pour ce qui est des questions

24 supplémentaires, Me Cayley souhaitera poser quelques questions demain.

25 Mais ce que j'essayais de dire, en vérité, c'est que le Dr Donia doit se

Page 1274

1 voir signifier ce qui est éventuellement contesté pour qu'il puisse y

2 réagir.

3 M. le Président (interprétation): Non, mais demain, le chapitre sera clos.

4 Demain, nous entendrons le contre-interrogatoire de Me Fauveau, car c'est

5 elle qui est présente, et cela va clore le chapitre également pour la

6 défense du général Talic.

7 Mme Korner (interprétation): Peut-être que je ne me suis pas très bien

8 exprimée.

9 M. le Président (interprétation): Le contre-interrogatoire de demain ne va

10 pas éventuellement préparer un contre-interrogatoire ultérieur ou une

11 demande à faire revenir le Dr Donia. Demain, nous en aurons terminé avec

12 le Dr Donia, sinon on ne peut accepter un tel déroulement du procès.

13 Mme Korner (interprétation): Non, ce que j'essayais de dire, c'est la

14 règle que j'ai évoquée tout à l'heure, concernant la présentation des

15 éléments de preuve de la défense.

16 S'ils affirment que le Dr Donia s'est entièrement trompé sur tel ou au tel

17 aspect, il faut le dire, sinon, s'ils citent un expert, si cela n'a pas

18 été dit auparavant au Dr Donia et qu'il n'a pas expliqué pourquoi il était

19 d'accord ou pas d'accord, nous risquons peut-être de demander à ce qu'il

20 revienne.

21 M. Ackerman (interprétation): Je dirai qu'une telle demande va peut-être

22 vraiment trop loin. Je n'ai pas encore sélectionné un quelconque expert en

23 histoire. Je n'ai pas préparé mon intervention sur des questions

24 historiques et je ne sais absolument pas de quoi je parlerai

25 éventuellement avec un expert historique qui viendrait éventuellement.

Page 1275

1 Alors, l'idée selon laquelle je dois, dès aujourd'hui, informer le Dr

2 Donia de ces points-là me semble vraiment aller trop loin.

3 M. le Président (interprétation): Vous allez véritablement plus loin que

4 ce qui a été dit par Mme Korner.

5 Ce qu'essayait de dire Mme Korner, c'est que, si vous contestez un point

6 de la déposition du Dr Donia en réponse à l'interrogatoire principal, vous

7 devez le faire maintenant, dans le cadre de votre contre-interrogatoire.

8 La façon dont la Chambre voit les choses, c'est que vous saviez avant qu'à

9 un moment donné, au cours de ce procès, vous auriez à être confronté aux

10 aspects historiques. Et je ne peux permettre qu'on arrive à une situation

11 où quelqu'un affirmera: "Ah, mais je n'ai pas préparé cette partie-là

12 avant le début du procès!" Non, vous deviez vous attendre à cela, vous

13 deviez vous y préparer. Si vous ne l'avez pas fait, vous devrez en faire

14 les frais, je suis désolé.

15 M. Ackerman (interprétation): Je suis vraiment d'accord.

16 M. le Président (interprétation): J'ai vraiment du mal à concilier ce que

17 vous venez de dire, surtout si vous me dites que vous êtes d'accord, avec

18 d'autre part le fait que vous ne savez même pas qui sera votre expert

19 historique!

20 La Chambre s'attend à ce que vous sachiez déjà qui sera votre expert

21 historique et s'attend à ce que vous l'ayez consulté avant même de

22 commencer le contre-interrogatoire du Dr Donia. C'est la façon dont doit

23 se dérouler le procès, car sinon nous nous trouverions en train d'essayer

24 de nager dans un océan qui est plus vaste que tous les océans du monde et

25 nous ne saurions pas où nous commencerions et où nous nous arrêterions.

Page 1276

1 Bien. Nous suspendons l'audience et nous reprendrons demain à 9 heures en

2 Salle I.

3 (L'audience est levée à 13 heures 46.)

4

5

6

7

8

9

10

11

12

13

14

15

16

17

18

19

20

21

22

23

24

25