Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Lundi 11 novembre 2002.)

2 (L'audience est ouverte à 9 heures 05.)

3 (Audience publique.)

4 (Questions relatives à la procédure.)

5 M. le Président (interprétation): Veuillez annoncer l'affaire.

6 Mme Dahuron (interprétation): Affaire IT-99-36-T, le Procureur contre

7 Radoslav Brdjanin.

8 M. le Président (interprétation): Merci.

9 Monsieur Brdjanin, bonjour. Pouvez-vous m'entendre dans une langue que

10 vous comprenez?

11 M. Brdjanin (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président et Mesdames

12 les Juges. Oui, je peux vous entendre et je vous comprends.

13 M. le Président (interprétation): Présentation de l'accusation?

14 Mme Korner (interprétation): Joanna Korner, Ann Sutherland et Denise

15 Gustin.

16 M. Ackerman (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président. Je suis John

17 Ackerman, assisté par Mirela Jevtovic.

18 M. le Président (interprétation): Bonjour. Nous allons donc entendre un

19 nouveau témoin. Avant de le faire entrer dans le prétoire, y a-t-il des

20 questions préliminaires?

21 Mme Korner (interprétation): Pourrais-je revenir, Monsieur le Président, à

22 une question que vous aviez soulevée vendredi? Ceci concerne le fait

23 d'avoir pris acte judiciairement des faits, en ce qui concerne les

24 meurtres de Jaskici et j'avais eu l'occasion de lire la réponse de Me

25 Ackerman.

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1 Comme je lui ai dit ce matin, il est toujours agréable de pouvoir vous

2 citer à l'appui d'une proposition. Mais, même si on fait cette

3 proposition, même si c'est une proposition que l'on a faite soi-même,

4 toutefois, comme je l'ai dit la dernière fois, j'ai l'impression que ceci

5 figure aux procès-verbaux. Nous allons à l'encontre des dispositions de

6 l'Article 94 du Règlement et nul ne semble avoir encore eu recours à cet

7 Article 94 du Règlement.

8 Toutefois, nous avons déjà communiqué, au cours des communications que

9 nous avons faites, trois témoins qui ont eu à connaître de ces meurtres.

10 Maître Ackerman est déjà en possession de ces documents.

11 Je ne donnerai pas lecture des noms à haute voix et nous communiquerons

12 les trois autres à la fin de la journée, de sorte que Me Ackerman puisse

13 voir sur quelle base la Chambre d'appel a basé sa décision. J'ai dit par

14 erreur qu'il s'agissait de témoins protégés. Il ne s'agissait pas de

15 témoins protégés. Donc, à une exception près, il s'agit d'un document qui

16 a été déposé confidentiellement, qui contenait les noms de personnes qui

17 ont été tuées ou battues.

18 Bien sûr, l'Article du Règlement a changé de sorte que nous n'avons pas à

19 l'appliquer de cette manière-là. Et donc on fournira la liste des noms

20 pour les six témoins.

21 M. le Président (interprétation): Bien.

22 Oui, Maître Ackerman?

23 M. Ackerman (interprétation): Mon hypothèse est que Mme Korner parle

24 essentiellement des comptes rendus et non pas des déclarations de témoins.

25 Mme Korner (interprétation): Oui, c'est cela.

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1 M. Ackerman (interprétation): Bien. Alors j'ai une question très brève à

2 évoquer. Tout d'abord, je vais répondre brièvement à ce que Mme Korner a

3 dit. Je pense que, lorsque je dépose une pièce écrite devant la Chambre,

4 j'ai l'obligation de vous fournir les sources les plus autorisées.

5 M. le Président (interprétation): Je comprends.

6 M. Ackerman (interprétation): Monsieur le Président, vous comprenez?

7 Alors, vendredi, un document… Le vendredi 8 novembre, nous avons reçu 826

8 pages de plus de documents concernant les témoins de Prijedor, et ceci, à

9 deux minutes par page, représente 27 heures et demie de temps de lecture.

10 Depuis le 24 octobre, nous avons reçu 1.955 pages nouvelles concernant les

11 témoins. Ceci ne comprend pas des documents, simplement des documents

12 relatifs au témoin, ceci représente donc 122 pages par jour de lecture.

13 (L'interprète demande si Me Ackerman pourrait ralentir.)

14 Oui, je vous remercie. Je disais donc qu'on aboutit à un calcul de 122

15 pages par jour rien que pour la lecture pendant quatre heures chaque jour,

16 de sorte que les chiffres que j'ai donnés la semaine dernière n'étaient

17 pas complets. Ils ont été singulièrement accrus depuis vendredi dernier.

18 Je voulais simplement qu'il soit pris acte de ce que je viens de dire.

19 M. le Président (interprétation): Je vous remercie, Maître Ackerman.

20 Le témoin n'a pas demandé de mesures de protection?

21 Mme Korner (interprétation): Non, Monsieur le Président, il ne l'a pas

22 demandé.

23 M. le Président (interprétation): Alors, faites entrer dans le prétoire M.

24 Merdzanic.

25 Est-ce que vous pensez que vous aurez fini avec ce témoin aujourd'hui,

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1 Madame Korner?

2 Mme Korner (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Je pense même que

3 j'aurai fini avant la suspension, parce qu'il a déposé très récemment dans

4 l'affaire Stakic, et je vous donnerai les références des numéros de pages

5 du compte rendu qui traitent de différentes questions.

6 M. le Président (interprétation): Bien. Maître Ackerman?

7 M. Ackerman (interprétation): Je pense que nous pourrions finir

8 aujourd'hui.

9 M. le Président (interprétation): Bien. Alors, après ce témoin, avez-vous

10 un autre témoin à faire entendre?

11 Mme Korner (interprétation): Non, Monsieur le Président. Vous vous

12 rappelez que j'avais dû en remplacer un à la dernière minute.

13 M. le Président (interprétation): Je dois prendre l'avion pour rentrer

14 chez moi demain. Et si vous avez un autre témoin, j'essayais de voir si on

15 pouvait utiliser l'après-midi pour avoir une séance et si on pouvait

16 passer d'une séance de l'après-midi à une séance de la matinée afin que

17 vous puissiez disposer du temps complet.

18 Mme Korner (interprétation): Non, Monsieur le Président. Je pense que Me

19 Ackerman aura besoin d'une journée de plus pour examiner les questions.

20 (Le témoin, M. Idriz Merdzanic, est introduit dans le prétoire.)

21 M. le Président (interprétation): Bonjour, Docteur.

22 M. Merdzanic (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président.

23 M. le Président (interprétation): Vous avez déjà déposé dans l'affaire

24 Stakic, je serai donc très bref lorsque je vous dirai… Avant de commencer

25 à déposer, le Règlement exige que vous fassiez une déclaration solennelle.

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1 Le texte vous a été remis par l'huissier et c'est donc votre engagement

2 vis-à-vis de la Chambre: au cours de votre déposition, vous direz la

3 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

4 Veuillez, sil vous plaît, faire votre déclaration.

5 M. Merdzanic (interprétation): Je vous remercie. Je déclare solennellement

6 que je dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

7 M. le Président (interprétation): Je vous remercie. Je pense que nous

8 pouvons sauter les préliminaires, vous connaissez déjà ce type de

9 prétoire.

10 Je suis le Juge Président Agius. A ma droite, j'ai la Juge Janu, et à ma

11 gauche la Juge Taya; la Juge Janu de la République tchèque et la Juge Taya

12 du Japon.

13 A votre droite, vous avez l'équipe de l'accusation avec Mme Korner comme

14 premier substitut; je ne sais pas qui procédera à l'interrogatoire

15 principal ce matin.

16 A votre gauche, vous avez l'équipe de défense pour Radoslav Brdjanin, qui

17 est l'accusé dans ce procès, et le conseil principal Me John Ackerman qui

18 pourra vous poser des questions lors du contre-interrogatoire.

19 Ce qui va donc se passer, c'est que nous allons considérer comme déjà lu…

20 Est-ce que vous recevez bien l'interprétation?

21 M. Merdzanic (interprétation): Oui.

22 M. le Président (interprétation): Vous allez donc considérer comme ayant

23 déjà été lu votre déposition antérieure, mais il y aura des questions

24 supplémentaires qui vous seront posées par l'accusation au cours du

25 contre-interrogatoire, ainsi que des questions qui seront posées par la

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1 défense.

2 Ceci étant dit, je donne la parole à Mme Korner, l'accusation.

3 (Interrogatoire principal du témoin, M. Idriz Merdzanic, par Mme Korner.)

4 Mme Korner (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Président.

5 Monsieur Merdzanic, bonjour.

6 M. Merdzanic (interprétation): Bonjour.

7 Question: Monsieur Merdzanic, je voudrais, s'il vous plaît, à nouveau,

8 vous demander de décliner votre identité: votre nom est bien Idriz

9 Merdzanic?

10 Réponse: Oui, je suis Idriz Merdzanic.

11 Question: Est-ce que vous êtes un médecin, votre profession est médecin?

12 Réponse: Oui. J'ai obtenu mon doctorat à la faculté de Banja Luka, et j'ai

13 fait mon internat après avoir été en formation. Je suis devenu médecin

14 généraliste au centre de Prijedor.

15 Question: Et je crois que vous êtes né le 2 janvier 1959, donc vous auriez

16 43 ans?

17 (L'interprète demande que le témoin se rapproche du microphone.)

18 (Le témoin s'exécute.)

19 Je crois que vous êtes bosnien de nationalité, n'est-ce pas?

20 Réponse: C'est exact.

21 Question: Au moment où a eu lieu l'accusation… où a eu lieu l'attaque en

22 mai 1992, attaque contre Kozarac, est-ce que vous exerciez comme médecin à

23 Trnopolje et à Kozarac proprement dit?

24 Réponse: C'est exact. A l'époque, je travaillais à Trnopolje et à Kozarac

25 ou, pour être plus précis, à Kozarac j'avais des tours de garde, et je

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1 travaillais également à l'infirmerie de la scierie.

2 Question: Et à l'époque, vous habitiez à Prijedor?

3 Réponse: Oui, j'habitais Prijedor.

4 Question: Et pour replacer les choses dans leur contexte, je crois que

5 vous êtes déjà venu au Tribunal les 10 et 11 septembre; donc il y a

6 presque exactement deux mois, lorsque vous êtes venu déposer dans

7 l'affaire du Procureur contre Milomir Stakic?

8 Réponse: C'est exact.

9 Question: Pourrions-nous tout d'abord parler, traiter de cet accusé

10 Radoslav Brdjanin. Je crois qu'il est vrai que vous ne l'avez jamais

11 rencontré, n'est-ce pas?

12 Réponse: Non, je ne connais pas M. Brdjanin et je ne le connaissais pas.

13 Question: Vous ne l'avez jamais vu dans le camp de Trnopolje?

14 Réponse: Je ne l'ai pas vu dans le camp de Trnopolje.

15 Question: Avez-vous jamais, par le passé, avant les événements de mai

16 1992, vu l'accusé à la télévision?

17 Réponse: Je ne suis pas très sûr, je ne suis pas vraiment en mesure de

18 dire oui ou non. Peut-être que je l'ai aperçu à la télévision à un moment

19 donné, mais je n'ai pas fait très attention. J'avais entendu dire qu'il y

20 avait un Brdjanin qui avait des fonctions politiques au SDS, mais je n'ai

21 pas prêté attention à cela.

22 Question: Et je crois que, comme vous l'avez dit à la Chambre

23 précédemment, vous n'avez pratiquement pas d'intérêt dans les questions

24 politiques, voire pas du tout?

25 Réponse: C'est cela.

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1 Mme Korner (interprétation): Je vais vous demander ce matin de regarder un

2 certain nombre de photographies et de séquences vidéo que vous avez déjà

3 vues afin que les Juges de la Chambre puissent entendre vos explications,

4 mais je voudrais les replacer dans leur contexte.

5 Et pour commencer, pourrions-nous montrer les environs de Kozarac par

6 rapport aux autres localités?

7 Pourriez-vous regarder une carte? Et ensuite nous regarderons votre propre

8 croquis.

9 Monsieur le Président, je ne suis pas sûre que la Chambre ait reçu…

10 (Le Président montre son exemplaire.)

11 M. le Président (interprétation): Si, nous avons notre exemplaire, mais on

12 y voit une cote de pièce à conviction.

13 Mme Korner (interprétation): Je vous en donnerai un qui n'est pas annoté.

14 M. le Président (interprétation): J'en ai un et on m'a dit de ne pas les

15 sortir des pochettes de plastique et de les conserver. Apparemment, ils

16 font partie des dossiers de l'autre affaire; il faudra qu'ils soient

17 rendus.

18 Mme Korner (interprétation): Pas que je sache, Monsieur le Président, mais

19 nous avons évidemment fait des copies avec les cotes de l'affaire Stakic.

20 M. le Président (interprétation): Oui, parce qu'il y a une date de

21 versement au dossier. On a par exemple: pièce à conviction 146.

22 Mme Korner (interprétation): Nous avons obtenu du représentant du Greffe

23 son concours, qui peut nous aider aujourd'hui pour les documents dont nous

24 aurions besoin; la personne du Greffe qui s'occupe de l'affaire Stakic.

25 Pourrait-on, s'il vous plaît, inscrire sur ce document la cote P1146?

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1 Le témoin l'a sous les yeux. Bien.

2 M. Ackerman (interprétation): Y a-t-il un exemplaire que nous pourrions

3 avoir?

4 Mme Korner (interprétation): Certainement pas! (Rire) Oui, voici.

5 Pouvez-vous voir, Docteur, marquée sur cette carte la position de Kozarac?

6 Je crois que cela se trouve à un carrefour de la route de Prijedor et de

7 Banja Luka.

8 (Le témoin désigne un point.)

9 M. Merdzanic (interprétation): Voici Kozarac. Kozarac est exactement à

10 l'endroit où je place le pointeur. Il y a effectivement un carrefour ou un

11 croisement des deux routes dont une conduit à Trnopolje, qui n'est pas

12 très bien figurée, mais c'était une route qui n'était pas en dur. On voit

13 Trnopolje. Puis il y a une autre route qui traverse Kozarac et conduit à

14 Kozara où se trouvaient un hôtel, une station de relais télévision et un

15 émetteur.

16 Question: Nous pouvons voir que Trnopolje était très proche de la ligne de

17 chemin de fer de Prijedor, qui relie Prijedor, Trnopolje à Omarska.

18 Réponse: La voie de chemin de fer faisait le tour, enfin esquivait

19 Trnopolje. Il y avait une petite gare qui s'y trouvait.

20 Question: Après Omarska, où conduit la ligne de chemin de fer? Quelle est

21 la gare suivante? Le savez-vous?

22 Réponse: Avant Banja Luka, il y a d'autres gares, mais je ne sais pas tous

23 leurs noms. Il y a plusieurs gares avant Banja Luka dont je ne me rappelle

24 pas le nom.

25 Question: Est-ce que la voie de chemin de fer, cette voie de chemin de fer

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1 en particulier s'achève à Banja Luka?

2 Réponse: A Banja Luka et à partir de Banja Luka, bien sûr, on peut

3 continuer à aller à Doboj et dans la direction de Sarajevo.

4 Question: Je vous remercie. Bien. On peut maintenant enlever cette carte.

5 Pourriez-vous maintenant regarder le croquis que vous avez dessiné vous-

6 même pour représenter le secteur de Kozarac? Parce que sur ce croquis

7 figurent un certain nombre d'éléments.

8 (Intervention de l'huissier.)

9 Il va donc y avoir un certain nombre de croquis, et je voudrais demander

10 si on pouvait, si on pourrait leur donner une cote; en particulier, comme

11 on va les avoir ensemble, une cote unique qui serait donc P1147.1, qui,

12 pour l'identifier porte le numéro ERN 01035313.

13 Alors, ce que vous avez marqué sur ce croquis c'est, je crois, la route

14 principale, la grand-route entre Prijedor et Banja Luka qui, dites-vous,

15 était asphaltée. Et qu'avez-vous marqué sous le nom Prijedor? Qu'est-ce

16 que cela représente?

17 Réponse: On dit qu'il y a un café, une auberge. Quand on nous emmenait de

18 Kozarac à Trnopolje -ici, une jeep militaire-, nous sommes descendus de la

19 jeep à cet endroit et nous avons pris les bus.

20 Question: Puis vous avez marqué là quelque chose lorsque nous allons vers

21 Kozarac, je crois que la route se poursuit vers la route principale; il y

22 a certaines collines, n'est-ce pas?

23 Réponse: Vous voulez dire celle-ci qui se dirige vers le nord et qui

24 traverse Kozarac? Oui, vous avez raison. Cette route est en pente, en

25 montée vers Kozara. Il y avait donc un hôtel qui se trouvait là vers le

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1 mont Kozara, et il y avait un grand émetteur de télévision dans cette

2 direction.

3 Question: Et lorsqu'on suit la route de Prijedor et qu'on la suit à la

4 gauche, on voit donc la scierie?

5 Réponse: Oui, c'est bien cela. C'est ici, au carrefour, que se trouve la

6 scierie du côté gauche.

7 Question: Et est-ce qu'un peu plus haut, vers le centre, il y a une

8 clinique vétérinaire?

9 Réponse: La clinique vétérinaire était adjacente à la scierie où l'on dit

10 "poste vétérinaire"; c'est là que se trouvait ce poste vétérinaire. Et

11 puis, la première route qui se trouve à la gauche conduit justement à

12 cette infirmerie.

13 Question: Et dans la clinique vétérinaire, est-ce qu'il s'y trouvait un

14 vétérinaire, un médecin du nom de Azra Blazevic qui exerçait?

15 Réponse: Pour autant que je sache, Azra Blazevic y travaillait.

16 Question: Vous avez dit à la Chambre la dernière fois, comme on va le voir

17 bientôt sur les photographies, que cette dame médecin était avec vous à

18 Trnopolje?

19 Réponse: C'est exact. Pas seulement à Trnopolje, il était à Kozarac tout

20 le temps avec nous.

21 Question: Bien. Alors, si nous poursuivons en suivant cette route, nous

22 voyons le centre de Kozarac, et c'est là l'endroit où l'on vous a emmenés

23 quand les soldats sont arrivés?

24 Réponse: Je l'ai marqué comme étant un centre mais, fondamentalement, le

25 centre de Kozarac est entre ce croisement et un peu plus haut. Tout ceci

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1 était considéré comme un centre parce que c'est une petite localité. Mais

2 ce point est l'endroit où les soldats nous ont amenés depuis l'infirmerie

3 jusqu'à cet endroit et nous avons fait ce trajet à pied, avant qu'on nous

4 fasse monter sur une jeep militaire.

5 Question: En poursuivant sur cette route, on pouvait voir une pharmacie et

6 c'est là où vous pouviez obtenir des médicaments, dès que celle de Kozarac

7 a été fermée?

8 Réponse: Tous les médicaments ont été transférés de cette pharmacie à

9 l'infirmerie.

10 Question: En allant encore plus loin, on voit la clinique provisoire;

11 c'est là que vous vous êtes installés une fois que le pilonnage a

12 commencé?

13 Réponse: Oui, nous avons déménagé le lendemain du pilonnage, le pilonnage

14 a commencé vers le 24, le 24 vers midi -à quelle heure exactement je ne

15 saurais vous le dire. Le 25, nous sommes partis vers une maison qui était

16 en construction, dont la construction n'était pas encore terminée, et la

17 police de Kozarac s'y trouvait déjà.

18 Question: Revenons un peu plus vers le bas, sur cette route. A droite de

19 la route, on peut y voir une clinique, n'est-ce pas?

20 Réponse: Là où l'on voit le centre, où le centre est indiqué, à droite on

21 peut voir une route, et à la fin de cette route se trouve l'infirmerie.

22 Question: Nous allons voir les photographies qui nous montrent à quoi cela

23 ressemblait après le pilonnage. Mais, maintenant, vous avez marqué

24 l'église orthodoxe serbe, c'est bien cela?

25 Réponse: L'église orthodoxe serbe se trouvait au sud de l'infirmerie. Il y

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1 a une route vers le bas et, au tournant même de cette rue, se trouvait

2 l'église orthodoxe serbe.

3 Mme Korner (interprétation): Maintenant, je vous prie de regarder quelques

4 photographies. Vous en avez vu quelques-unes auparavant mais d'autres sont

5 nouvelles, vous ne les avez pas vues avant. Il y a toute une série de

6 photographies, il s'agit du P1128. On vient de me dire que nous avons une

7 série de photographies. Donc on les mettra sur le rétroprojecteur,

8 puisqu'il me semble que nous n'avons pas suffisamment de copies pour tout

9 le monde. Ce sont celles que l'on a déjà utilisées dans l'affaire Stakic.

10 M. le Président (interprétation): Ce sont les photographies que l'on a

11 déjà montrées aux témoins précédents ou celui qui a précédé le témoin qui

12 a déjà déposé avant?

13 Mme Korner (interprétation): Toute la série des photographies a déjà été

14 versée au dossier. C'est Mme Sutherland qui se charge des photographies et

15 donc, je vais juste la consulter un petit instant. Je vous prie de

16 m'excuser.

17 (Madame Korner se consulte avec Mme Sutherland.)

18 Madame Sutherland vient de me dire qu'il y a 15 jours ces photographies

19 ont déjà été versées; peut-être qu'on pourrait utiliser la même cote?

20 M. le Président (interprétation): Mais nous avons reçu toutes les

21 photographies, mais elles n'ont pas été toutes admises. Les photographies

22 qui ont été versées ont chacune d'elles reçu une cote, alors que la série

23 dans l'ensemble a reçu une cote également. Donc, déjà, toute la série des

24 photographies s'est vue attribuer une cote, n'est-ce pas?

25 Mme Korner (interprétation): Je vous prie de montrer au témoin cette

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1 photographie.

2 M. le Président (interprétation): Nous avons déjà vu cette photographie,

3 elle fait partie du dossier de la série des photographies.

4 Mme Korner (interprétation): Le numéro ERN de cette photographie est

5 00393467.

6 Peut-on mettre cette photographie sur le rétroprojecteur, je vous prie,

7 Madame l'huissier?

8 (Intervention de l'huissier.)

9 Je vous remercie.

10 Donc la cote suivante attribuée est 112828.

11 Pouvez-vous identifier les photographies? Il s'agit d'une carte postale.

12 Que peut-on voir à gauche?

13 M. Merdzanic (interprétation): A gauche, on peut voir une mosquée.

14 Question: Savez-vous combien de mosquées il y avait à Kozarac?

15 Réponse: Il y en avait beaucoup, mais je ne circulais pas tellement à

16 Kozarac, je faisais toujours le chemin qui menait à l'infirmerie. J'ai

17 circulé dans Kozarac à plusieurs reprises, mais je sais qu'il y en avait

18 plusieurs.

19 Question: Nous allons vous montrer une autre photographie, peut-être que

20 ceci pourra vous être utile. Que peut-on voir en haut, à droite?

21 Réponse: Je pense qu'il s'agit de Kozarac.

22 Question: C'est bien ce qu'on peut voir depuis Prijedor en direction des

23 montagnes?

24 Réponse: Non. Je pense que c'est du côté opposé qu'il s'agit, de l'autre

25 côté. Mais la partie supérieure, la partie haute de Kozarac, je ne la

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1 connais pas très bien; je ne faisais que travailler à Kozarac. Donc je

2 connais bien ce chemin qui menait à l'infirmerie. Il me semble, cependant,

3 qu'il s'agit de Kozarac mais de la partie haute de la ville, vue de la

4 montagne de Kozara en direction du carrefour de la route qui mène vers

5 Banja Luka.

6 Question: Pouvez-vous reconnaître ce qui figure sur la photographie qui se

7 trouve en bas, à droite?

8 Si vous n'êtes pas en mesure de l'identifier, vous pouvez nous le dire?

9 Réponse: Je n'en suis pas sûr. C'est probablement Kozarac, mais je ne peux

10 pas l'affirmer avec certitude. Cependant, il me semble que ceci est la

11 mosquée de Kozarac qui se trouve dans la partie haute.

12 Question: Fort bien.

13 Je souhaiterais maintenant un peu établir, définir le contexte. Je vais

14 vous montrer une autre série de photographies à cet effet.

15 Vous nous avez dit que le pilonnage de Kozarac a commencé le 24 mai. Est-

16 ce exact?

17 Réponse: Oui, c'est exact.

18 Question: Le témoignage à ce sujet commence à la page 7732 du compte

19 rendu. Avant cela, la ville a-t-elle été complètement bloquée?

20 Réponse: La ville a d'abord été bloquée lorsque les négociations ont été

21 entamées, les négociations entre les habitants de Kozarac, les

22 représentants de Kozarac et les autorités serbes. On a placé des points de

23 contrôle et on y contrôlait les pièces d'identité, mais on pouvait quand

24 même passer. Mais à partir du moment où l'ultimatum a été fait pour que

25 Kozarac se rende -et la fin de l'ultimatum était fixée au 22-, on a

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1 déplacé le point qui se trouvait en bas; il y avait le poste de contrôle

2 uniquement à Orlovci et on ne pouvait plus circuler.

3 Question: Et les personnes qui bénéficiaient d'un traitement à l'hôpital,

4 l'hôpital de Prijedor, pouvaient-elles passer les points de contrôle?

5 Réponse: A ma connaissance, même les malades ne pouvaient pas sortir avant

6 le pilonnage. Dans la matinée, deux femmes ont accouché -j'ai aidé deux

7 femmes à accoucher à l'infirmerie de Kozarac-, et elles ont dit qu'elles

8 n'ont pas pu sortir de la ville pour rejoindre Prijedor.

9 Question: Donc, c'est dans votre infirmerie que vous avez aidé ces deux

10 femmes à accoucher, les deux bébés?

11 Réponse: Oui, j'y étais assisté de la sage-femme.

12 Question: Le pilonnage a-t-il été dirigé depuis le nord, la colline qui se

13 situe au nord de Kozarac?

14 Réponse: On a pu remarquer qu'effectivement les obus venaient du nord et

15 de l'ouest de Prijedor.

16 Question: Je résume la déclaration que vous nous avez donnée: il y a eu

17 des blessés et des morts suite au pilonnage, n'est-ce pas?

18 Réponse: C'est exact. Il y a eu des blessés, il y a eu des morts

19 également.

20 Question: Et vous avez tenté d'entamer des négociations avec l'armée afin

21 d'évacuer les enfants et les blessés -Monsieur le Président, Mesdames les

22 Juges, cette partie du témoignage se situe à la page 7737 du compte

23 rendu-, mais vous n'avez pas réussi, n'est-ce pas?

24 Réponse: Le 25, le lendemain donc, lorsque nous avons installé

25 l'infirmerie dans cette maison, il y avait deux enfants dans notre groupe,

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1 dont une petite fille, de 10 ou 12 ans dont les jambes étaient

2 pratiquement brisées suite à une explosion d'obus. Ensuite, il y a un

3 petit garçon qui a souffert d'une blessure au fémur; sa jambe était cassée

4 et il saignait. Il y avait également deux femmes blessées, l'une est

5 décédée rapidement. Un homme a été également blessé. Ensuite, il y avait

6 un homme en uniforme qui avait une blessure à l'estomac.

7 Ce sont les enfants surtout qui m'ont poussé à tenter de négocier leur

8 passage vers Prijedor. A l'étage, il y avait des policiers, ils

9 disposaient d'un véhicule de police. Je leur ai demandé s'il était

10 possible de discuter avec les Serbes. Ils ont dit qu'ils disposaient d'une

11 radio et qu'on pouvait essayer. Donc j'ai essayé de discuter avec eux. Je

12 me suis présenté à eux, je leur ai expliqué que l'on avait des blessés,

13 mais personne ne voulait parler avec moi. Ils plaisantaient, ils se

14 moquaient de moi, ils nous ont dit: "Crevez 'balija'!". Et même lorsque je

15 lui ai dit que l'on avait un des leurs parmi les blessés, ils n'ont rien

16 dit et, par la suite, on ne les a plus entendus à cette radio.

17 Question: A présent, je vous prie de regarder une série de photographies

18 qui ont été prises, il s'agit de votre clinique. Il s'agit du numéro ERN

19 00-39141516 ou plutôt 194, 195, 196 et 198.

20 Peut-on présenter au témoin ces photographies, je vous prie?

21 (Intervention de l'huissier.)

22 M. le Président (interprétation): Entre-temps, peut-on montrer, peut-on

23 attribuer une cote au témoignage de ce témoin dans l'affaire Stakic, je

24 vous prie?

25 Mme Korner (interprétation): Oui, ce sera P1148. La première photographie

Page 11756

1 sur le rétroprojecteur, il s'agit du 194; que peut-on y voir?

2 M. Merdzanic (interprétation): C'est l'entrée de l'infirmerie de Kozarac.

3 A gauche, c'est la partie principale du bâtiment. Là, on voit l'entrée et

4 les dentistes se situaient là, à droite. En bas, on peut voir l'entrée de

5 la cave.

6 Question: Et c'est dans la cave que vous vous êtes réfugiés lors du

7 pilonnage?

8 Réponse: Oui. Lors du pilonnage, c'est là que nous nous sommes réfugiés.

9 Il était trop dangereux de rester à l'étage à cause des éclats d'obus, et

10 nous étions bien obligés de nous réfugier en bas.

11 Question: Il y a un cercle avec une croix sur cette photographie, il y en

12 a deux en fait. Est-ce que ces marquages figuraient lorsque vous êtes

13 partis de l'infirmerie?

14 Réponse: Je ne me souviens pas. Même à l'époque où nous avons quitté

15 l'infirmerie, je ne me souviens pas avoir vu ces marquages.

16 Question: Ces photographies ont été prises en 1996. Lorsque vous avez

17 quitté cette clinique, cette infirmerie, le bâtiment avait-il été

18 endommagé déjà?

19 Réponse: La plupart oui -peut-être qu'entre-temps il y a eu d'autres

20 dommages-, mais les vitres ont été brisées, les traces d'obus et les murs

21 fissurés. Ce sont effectivement les dommages que l'on a pu voir à l'époque

22 aussi.

23 Question: Peut-on voir la photographie 3195, je vous prie?

24 (Intervention de l'huissier.)

25 Il s'agit du même côté du bâtiment de la clinique, mais vu sous un autre

Page 11757

1 angle. On voit les vitres brisées, les fenêtres brisées à gauche. De quoi

2 s'agit-il?

3 Réponse: En haut, il y avait un laboratoire. En bas, on peut voir les

4 fenêtres de la cave, alors que là-haut il y avait des salles de

5 consultation et une pièce réservée au médecin de garde, pour qu'il puisse

6 y dormir. On peut voir également les fenêtres des pièces qui servaient aux

7 consultations. Et en bas, dans la cave, il y avait une chaudière pour le

8 chauffage central.

9 Question: Ensuite, je vous prie de regarder la photographie 3196. Jetez-y

10 un regard bref puisqu'il s'agit juste d'un gros plan.

11 Réponse: Oui, il s'agit de la partie gauche, on la voit pratiquement en

12 entier. On voit les traces des obus, on voit les fenêtres cassées. A

13 l'époque où nous avons quitté la clinique, c'était à peu près l'état du

14 bâtiment.

15 Question: Et enfin, je vous prie de regarder 3198.

16 Réponse: C'est l'entrée de la cour de la clinique. On voit la route, le

17 chemin qui mène vers le centre, alors qu'ici, à droite, on voit la rue qui

18 mène à l'église orthodoxe serbe. Ici, il me semble qu'il y avait aussi une

19 petite rue avec plusieurs maisons. On pouvait passer par là aussi.

20 On ne peut pas le voir sur cette photographie, mais comme les obus

21 tombaient là où normalement était situé un parking, on pouvait voir les

22 traces des obus. Je ne peux pas le voir sur cette photographie, mais, à

23 l'époque, les traces des obus étaient visibles.

24 Question: Avant d'en terminer avec ces photographies, toutes ces

25 photographies ont été prises de face, n'est-ce pas, puisque c'est la

Page 11758

1 direction d'où provenaient les obus?

2 Réponse: Je suppose qu'il y avait plus de dommages du côté nord. De

3 l'autre côté, il n'y avait pas de route, il n'y avait pas de chemin, donc

4 on n'est pas sorti pour voir ce qui s'y passait. La plupart des obus

5 provenaient de cette partie et les dommages étaient plus importants dans

6 cette partie-là, la partie haute, je dirais.

7 Question: J'en ai terminé. Ces photographies pourraient porter la cote

8 1128-26-27-28-29.

9 Après la cessation du pilonnage, est-il exact que les soldats sont arrivés

10 en ville?

11 Réponse: Pas à la fin du pilonnage, mais lorsque les policiers, à la fin,

12 par l'intermédiaire, au moyen de cette radio, se sont mis d'accord avec

13 les Serbes en vue de la prise de Kozarac. Donc ils ont quitté Kozarac, et

14 les civils ont appris la nouvelle. Ce n'est qu'après que l'armée, avec les

15 chars, est entrée dans la ville même de Kozarac.

16 Question: Et vous, vous avez quitté la clinique provisoire pour vous

17 réinstaller dans la clinique, dans le bâtiment principal?

18 Réponse: Oui, c'est exact. Lorsqu'ils se sont mis d'accord sur la

19 reddition pour que la ville soit prise, nous avons décidé de regagner la

20 clinique puisque nous étions conscients que les civils, qui se cachaient

21 soit dans les caves soit dans les bois, n'étaient pas du tout au courant

22 des événements, que Kozarac avait été prise. Nous nous attendions donc à

23 ce qu'ils viennent à la clinique pour demander de l'aide.

24 Question: Donc, en fait, une fois que vous avez regagné la clinique, les

25 soldats sont arrivés, n'est-ce pas?

Page 11759

1 Réponse: Pas immédiatement. Peu de temps après, les militaires serbes sont

2 arrivés, trois d'entre eux.

3 Question: Monsieur le Président, Mesdames les Juges, cela se situe à la

4 page 7740 du compte rendu.

5 Ensuite, un camion de la JNA… toutes vos provisions ont été chargées dans

6 ce camion et vous étiez emmenés par les soldats dans le centre-ville?

7 Réponse: Oui, exactement. Ils ont d'abord discuté avec Goga, une Serbe,

8 qui faisait partie de notre personnel de santé. Ensuite, il y avait

9 également Dragan Skrbic, c'était un militaire serbe. Je ne sais pas avec

10 qui il a discuté, mais lorsqu'il est rentré, il a dit qu'un camion

11 viendrait et que tous les médicaments qui se trouvaient à la clinique

12 devraient être chargés. Lorsqu'on s'est exécuté, ils nous ont emmenés au

13 centre; la partie que moi j'ai marquée comme étant le centre de Kozarac.

14 Question: Et je pense que vous et vos collègues ont été mis dans un 4x4 et

15 que vous avez été amenés à Trnopolje?

16 Réponse: Pendant un certain temps, nous avons attendu à cet endroit, et

17 après un certain temps maintenant, je dois dire que ce n'est pas tout le

18 monde qui est parti pour Trnopolje.

19 Un soldat a abordé Nihad Bahonjic, qui était chauffeur de l'ambulance, qui

20 était chauffeur professionnel même avant la guerre, et lui a demandé de

21 lui montrer sa carte d'identité. Après avoir lu son nom, ce soldat lui a

22 dit de le suivre, c'est-à-dire il l'a écarté vers le nord de Kozarac. Et

23 après le 4x4 est arrivé. J'ai demandé ce qui allait se passer avec

24 Bahonjic, et l'un des soldats qui avait un grade –mais je ne sais pas

25 lequel- a répondu que c'étaient eux qui allaient s'occuper de Nihad.

Page 11760

1 Après quoi, nous étions mis dans le 4x4, et on a entendu deux coups, deux

2 tirs, mais je n'ai pas regardé dans cette direction, mais Azra a dit qu'il

3 avait été tué.

4 Question: D'accord. Avant de passer à Trnopolje, je vous prie de montrer

5 au témoin quelques vidéos qui ont été filmées ultérieurement mais qui ont

6 été déjà montrées dans l'affaire Stakic.

7 D'abord, il faut montrer au témoin… Il s'agit d'un extrait, en fait d'une

8 vidéo portant le numéro V0002085. Cela a été filmé dans un programme de

9 télévision intitulé : "Ville appelée Kozarac".

10 Je vous prie de mettre cela en route maintenant parce qu'il y a des

11 éléments qui montrent ce qui s'était passé à côté de la route principale.

12 (Diffusion de la vidéo.)

13 Il s'agit des maisons brûlées musulmanes. Cette croix, c'est donc

14 l'indication mise par les Serbes pour indiquer les bâtiments qu'ils

15 devaient détruire. C'est ce nettoyage ethnique avec la vengeance.

16 M. Ackerman (interprétation): Objection! Parce qu'il y a le texte qui est

17 vu, parce qu'il s'agit du témoin que je ne peux pas interroger.

18 Mme Korner (interprétation): Tout le monde accepte qu'il s'agit d'un

19 commentaire de télévision qui n'a aucune valeur probante.

20 M. le Président (interprétation): Est-ce que vous acceptez cela, Maître

21 Ackerman?

22 M. Ackerman (interprétation): Merci.

23 Mme Korner (interprétation): Est-ce que vous reconnaissez cette route,

24 Monsieur le Médecin?

25 M. Merdzanic (interprétation): Il s'agit, je pense, de la route qui se

Page 11761

1 trouve entre Prijedor et Banja Luka, et, je pense, la direction de Kozarac

2 vers Banja Luka. Mais, à la fin, on a vu Prijedor, la ville de Prijedor et

3 cette route-là va de Prijedor vers Banja Luka.

4 Mme Korner (interprétation): Monsieur le Président, maintenant il faut

5 donner à cette pièce à conviction le n°P1149. Ensuite, il faut montrer au

6 témoin encore un extrait du programme de télévision "Nightline". Il s'agit

7 du numéro V0002843. Je répète que le commentaire de ce correspondant de

8 télévision n'a pas de valeur probante.

9 M. le Président (interprétation): Oui, vous pouvez montrer cela.

10 (Diffusion de la vidéo.)

11 Mme Korner (interprétation): Arrêtez-vous ici.

12 M. Merdzanic (interprétation): Je pense qu'il s'agit du bâtiment à Kozarac

13 du côté droit, à l'entrée de Kozarac.

14 Question: Monsieur le Président, je devais dire que cela a été filmé en

15 novembre 1992, c'est-à-dire un peu plus tôt. Parce que c'est en novembre

16 que cette émission a été montrée.

17 Vous pouvez continuer.

18 (Suite de la diffusion de la vidéo.)

19 Question: Merci.

20 Monsieur le Président, il ne m'est pas clair pourquoi tout est en noir et

21 blanc parce que c'était en couleur. Peut-être que quelque chose n'a pas

22 fonctionné lors de la copie. Merci, Monsieur le Médecin.

23 Entre-temps, je prie de donner à cette pièce à conviction la cote 1511.

24 Maintenant j'ai compris ce qui manque: c'est parce qu'on va remplir cela

25 avec les numéros de pièces à conviction parce qu'on a déjà donné des cotes

Page 11762

1 semblables.

2 Monsieur le Médecin, est-ce que, de là, vous et vos collègues, vous étiez

3 amenés à Trnopolje?

4 Réponse: C'est exact. De là, à la fin, on est arrivé à Trnopolje.

5 Question: Monsieur le Président, cette partie concernant Trnopolje

6 commence à la page 7748 du compte rendu. Il me semble que, quand vous êtes

7 arrivés, il n'y avait pas de signes qui montraient qu'il s'agissait d'un

8 camp de concentration?

9 Réponse: Il y avait beaucoup de soldats. Nous ne pensions pas de cette

10 façon, c'est-à-dire qu'il existait des camps. Nous nous rendions compte de

11 cela seulement plus tard, parce que nous nous sommes rendu compte qu'il

12 s'agissait d'une sorte de camp de détention. Mais, au début, nous pensions

13 que nous étions escortés à cause de la guerre, à cause des opérations

14 militaires et que nous serions libérés bientôt.

15 Question: Je pense que vous étiez là-bas jusqu'à, presque jusqu'à la fin

16 de l'existence de Trnopolje en tant que camp jusqu'au mois de septembre

17 1992. Vous étiez parmi les derniers qui ont quitté le camp?

18 Réponse: A la fin du mois de septembre, ce camp a été démantelé et, le 1er

19 octobre, nous nous trouvions à Karlovac.

20 Question: Vous avez décrit ici, au Tribunal, dans l'affaire Stakic, divers

21 événements qui se sont produits à Trnopolje: la violence, les viols qui se

22 sont produits là-bas. Est-ce que le camp de détention même était sous le

23 contrôle de l'armée, par apparence au moins?

24 Réponse: Le camp était contrôlé pas seulement en apparence par l'armée

25 parce qu'il y avait des gardes à tous les coins du camp, et il n'était pas

Page 11763

1 possible de circuler librement dans le camp.

2 Question: Je pense que vous avez expliqué également qu'il y avait eu des

3 tireurs embusqués ou des nids de tireurs embusqués. Nous allons voir

4 quelques schémas que vous avez dessinés là-dessus, mais il faut que vous

5 répétiez: est-ce que c'était exact?

6 Réponse: Oui, c'est exact, parce que j'ai dit que les gardes qui

7 contrôlaient le camp se sont roulés (sic) le plus souvent toutes les deux

8 semaines et c'était à l'occasion que toutes les gardes ont été relevées et

9 cela dépendait de ces gardes, quelles armes ils porteraient pour contrôler

10 le camp de détention.

11 Question: Oui, et ces mitrailleuses, est-ce que ces mitrailleuses ont été

12 tournées vers l'intérieur, vers le camp même? Il s'agit de 7755.

13 Réponse: Il y avait des mitrailleuses qui ont été tournées vers le camp et

14 qui ont été cachées par les sacs de sable, par exemple.

15 Question: Avant de regarder ces schémas, encore une question: est-ce que

16 vous vous trouviez dans une clinique provisoire en fait ou dans une

17 infirmerie provisoire?

18 Réponse: Il y avait une infirmerie à Trnopolje dans la communauté locale;

19 j'ai travaillé avant la guerre; c'était mon poste de travail dans cette

20 infirmerie à Trnopolje.

21 Question: Et est-ce que vous avez habité, enfin, vécu dans cette

22 infirmerie?

23 Réponse: Avant l'existence du camp, non.

24 Question: Bien sûr, il s'agit de la période pendant le fonctionnement du

25 camp.

Page 11764

1 Réponse: J'ai été détenu comme les autres. Nous avions peut-être plus de

2 chance pour être écartés, pour être dans l'infirmerie où nous sommes

3 restés et avons profité peut-être de meilleures conditions de vie que les

4 autres.

5 Question: Et est-ce que les gens, qui étaient avec vous dans cette

6 infirmerie, donc c'est Azra Blazevic qui était vétérinaire, est-ce qu'elle

7 était avec vous?

8 Réponse: Tout le monde était avec nous tout le temps, qui ont été amenés,

9 mais Husidic Senad a été écarté à ce point de contrôle de transfèrement de

10 4x4 dans le bus. Il voulait l'écarter mais il le laissait aller quand même

11 avec sa famille. Après quelques jours, ils sont arrivés à Trnopolje. Un

12 soldat est arrivé dans l'infirmerie pour l'amener à Omarska. Après quoi, à

13 la fin de juin ou début juillet, ils sont arrivés pour amener Jusuf Pasic

14 médecin, et Mensur, médecin également, parce qu'ils les cherchaient par

15 leur nom pour les amener à Omarska. Pasic Jusuf a été tué à Omarska et

16 Kusuran Mensur a été emmené à Manjaca d'où il a été libéré, et il est

17 toujours en vie aujourd'hui.

18 Question: Avec Azra Blazevic, est-ce qu'il y avait un étudiant en

19 médecine, Vasif Gutic?

20 Réponse: Il était avec nous depuis le début à Kozarac, il a commencé à

21 étudier la médecine et il s'est trouvé tout le temps avec nous dans le

22 camp.

23 Mme Korner (interprétation): Maintenant, je vous prie de montrer au témoin

24 une série de dessins que vous avez faits. Le premier porte la cote

25 01035314.

Page 11765

1 (Intervention de l'huissier.)

2 Je pense, Maître Ackerman, que vous avez ces dessins, que l'on vous a

3 communiqués plus tôt, ces dessins.

4 M. Ackerman (interprétation): (Pas d'interprétation.)

5 Mme Korner (interprétation): D'accord. S'il vous plaît, montrez d'abord au

6 témoin, montrez-nous certains endroits dans le camp. D'abord, montrez-nous

7 où s'est arrêté le bus qui vous a amenés dans le camp?

8 M. Merdzanic (interprétation): Le bus qui nous a amenés dans le camp, par

9 un chemin de village, d'un village, est venu jusqu'à Trnopolje où il a

10 rejoint cette route de Prijedor à Trnopolje. Et, à peu près, les bus se

11 sont arrêtés par là. Il s'agissait ici d'un sentier battu pour les

12 piétons, et, par ce sentier, on nous a escortés jusqu'à l'infirmerie.

13 Question: Maintenant, il faut voir d'autres éléments que l'on voit sur ce

14 dessin. Est-ce que vous pouvez nous montrer sur ce dessin où se trouvait

15 l'infirmerie?

16 Réponse: L'infirmerie se trouvait ici. L'entrée se trouvait ici. Cela,

17 c'est la cour. Ici se trouvaient un café, un stade de football. Derrière,

18 il y avait une grande salle, et devant se trouvait un magasin. Et

19 l'infirmerie se trouvait entre ces éléments.

20 Question: Je pense que vous avez également indiqué la place de l'école?

21 Réponse: L'école se trouvait tout de suite derrière l'infirmerie. Il

22 s'agit d'une grande école primaire pour les enfants de première jusqu'en

23 huitième classe.

24 Question: Et qui étaient détenus dans cette école?

25 Réponse: Dans cette école, il y avait pour la plupart des hommes. Mais

Page 11766

1 dépendant de la situation, il y avait quelquefois ensemble des hommes et

2 des femmes.

3 Le camp de Trnopolje avait pratiquement deux systèmes de détention, si je

4 peux dire comme cela: un système, c'était enfin le camp pour les hommes

5 entre 17, 18 ans et 65 ans, capables de porter les armes et à qui on leur

6 a interdit de quitter le camp; et d'un autre côté, il y avait les femmes,

7 les enfants et les personnes âgées rassemblés dans des villages.

8 Après avoir procédé au nettoyage ethnique, après avoir eu un nombre

9 suffisant de telles personnes, un convoi a été organisé, et ces personnes

10 ont donc été chassées du territoire, de cette Région autonome serbe de

11 Krajina.

12 Question: Pouvez-vous nous montrer sur cette carte où se trouvaient les

13 tireurs embusqués?

14 Réponse: Ce que nous avons vu, c'était derrière le stade de football où se

15 trouvait une maison; et dans la mansarde de cette maison, il y avait une

16 fenêtre où se trouvait un tireur embusqué. Et l'autre garde… l'autre point

17 de garde se trouvait en bas. Ce que nous avons vu, bien sûr ce n'était pas

18 tout ce qu'il existait par rapport aux gardes et à leurs armes, les

19 mitrailleuses qui se trouvaient le plus souvent ici -ce que je montre

20 maintenant avec le pointeur.

21 Question: S'il vous plaît, placez un peu mieux la carte vers le bas.

22 Réponse: Ici, sur le point de contrôle, sur cet autre point de contrôle,

23 et quelquefois ici, en bas. Mais je dis: cela dépendait des gardes qui

24 étaient de service à ce moment-là.

25 Question: Je pense que, pour le compte rendu, il est important de dire que

Page 11767

1 vous avez montré le cercle en haut de la carte où il y a le numéro,

2 ensuite le deuxième tout de suite au-dessus du stade de football, et le

3 troisième cercle se trouvant à côté du carrefour, tout près du carrefour,

4 du croisement de ces deux rues.

5 Bien. Maintenant, si l'on regarde la carte comme cela, de droite, de son

6 côté droit, est-ce qu'on peut voir le poste de commandement?

7 Réponse: Le poste de commandement dans différentes périodes a été situé

8 différemment. Au début, c'est-à-dire lorsque la Croix-Rouge serbe est

9 arrivée, le point de commandement se trouvait là. Pendant un certain

10 temps, c'était le Dr Ivic, le commandant Kuruzovic qui se trouvaient dans

11 ces locaux.

12 Après, le poste de commandement a été transféré, et le commandant

13 Kuruzovic se trouvait dans une maison quelque peu à l'extérieur du camp où

14 se trouvait le point de commandement dernier, jusqu'à la fin, c'est-à-dire

15 où le commandant Kuruzovic se trouvait.

16 Mme Korner (interprétation): Bien sûr, je répète de nouveau pour le compte

17 rendu: vous avez montré que, plus tard, cela a été transféré dans le

18 bâtiment qui se trouve en haut à droite de ce petit plan.

19 Maintenant, je vous prie de regarder une photographie qui a déjà été

20 montrée en tant que pièce à conviction. Il s'agit d'un document qui porte

21 la cote P1128.1. S'il vous plaît, mettez cela sur le rétroprojecteur.

22 M. le Président (interprétation): Entre-temps, Madame Korner…

23 Mme Korner (interprétation): Je vous prie de donner à ce document la cote

24 P1147.2.

25 M. le Président (interprétation): Merci.

Page 11768

1 Mme Korner (interprétation): Maintenant, Monsieur, pouvez-vous nous dire

2 ce que l'on voit sur cette photographie?

3 M. Merdzanic (interprétation): C'est le camp de détention, c'est donc la

4 photographie prise. A droite, c'est le côté nord vers Kozarac; à gauche,

5 c'est la direction vers le chemin de fer. Cette route-là, cette direction

6 mène vers Prijedor, et cette autre direction inverse mène vers Omarska.

7 Ici, c'est le stade de football. Là, on voit qu'il y avait une petite

8 terrasse, et c'est ici que se trouvait ce tireur embusqué. Les autres

9 gardes se trouvaient en bas, à côté de la maison où se trouve cet arbre.

10 Les autres gardes se trouvaient par ce côté-là, donc à droite. Il y avait

11 le point de contrôle suivant. L'autre se trouvait à côté de cette maison

12 et un suivant se trouvait à côté du carrefour.

13 Ici, c'est l'école. Ici, se trouve le magasin devant l'infirmerie. Ça,

14 c'est l'entrée de l'infirmerie. L'infirmerie c'est cela, ce que je montre

15 à gauche.

16 Il y a une pièce dans laquelle ils interrogeaient et passaient au passage

17 des détenus (sic), c'est l'entrée de la communauté locale, le bureau de la

18 communauté locale. Ici, c'est le café, à l'étage où mène un escalier dans

19 le bureau du club de football et, à côté, c'est l'entrée dans cette grande

20 salle qui, avant la guerre, a été déjà désaffectée.

21 Ici, c'est la cour de l'infirmerie, et c'est par là qu'on entrait dans la

22 cour et dans l'infirmerie.

23 Question: Bien. Maintenant, nous allons passer au dessin où l'on voit

24 l'infirmerie; il s'agit du document portant le numéro ERN 01035316.

25 (Intervention de l'huissier.)

Page 11769

1 Mais ce sera maintenant le document P1147.3. Donc c'est la cote de ce

2 document. Je vous prie de passer en vitesse par ce document avant la

3 pause.

4 Pourriez-vous nous expliquer quelle est la partie majeure de l'infirmerie?

5 Réponse: L'infirmerie est cet espace-là. C'est la cour devant

6 l'infirmerie, c'est l'entrée de l'infirmerie. A gauche, se trouvait cette

7 pièce utilisée pour interroger les détenus, et les passages à tabac. Il y

8 avait les toilettes à droite. A droite, c'est le couloir; on voit les

9 fenêtres donnant sur l'école. Ici, il y avait des locaux pour examiner les

10 patients, il y avait trois locaux et un petit cagibi sans fenêtre. Devant,

11 c'est un magasin. Ici, ce sont les locaux de la communauté locale, ici

12 c'est le café et, à l'étage, se trouvait le bureau de la direction de ce

13 club de football. Et derrière se trouvait cette grande salle.

14 Question: Bien. Maintenant, il faut voir encore une photographie qui n'a

15 pas été présentée jusqu'ici mais cela fait partie de ce document. Vous

16 pouvez la mettre sur le rétroprojecteur. C'est le numéro ERN 0214-7094,

17 l'annonce a été déjà présentée et c'était 1128.12, la cote de ce document.

18 (Intervention de l'huissier.)

19 Réponse: Sur cette photographie, on voit également l'infirmerie. La cour

20 de l'infirmerie se trouve ici, c'est l'entrée de l'infirmerie. Ce sont ces

21 trois fenêtres de ces trois pièces utilisées pour examiner les patients.

22 C'est le magasin qui se trouve devant. Si l'on entre par cette porte, à

23 gauche se trouve la pièce utilisée pour interroger des détenus.

24 Question: Merci. Nous avons encore cinq minutes.

25 Je vous prie maintenant de montrer votre troisième dessin portant le

Page 11770

1 numéro ERN 010317, et ce dessin devient la pièce à conviction portant la

2 cote P1147.34. Il s'agit essentiellement du premier dessin, mais vous avez

3 rajouté quelque chose sur ce dessin.

4 Vous pouvez nous expliquer ce que signifient ces croix?

5 Réponse: Ces croix désignent qu'il s'agit du temps après la visite des

6 journalistes, c'est-à-dire qu'il y avait des tentes qui avaient été

7 établies parce qu'il n'y avait pas assez de place à l'école, dans la

8 grande salle de l'école. C'est pour cela que les détenus ont improvisé une

9 sorte de tente. Il ne s'agissait pas de vraies tentes, c'étaient des

10 couvertures, des choses en plastique pour construire des tentes comme

11 cela, improvisées, pour pouvoir y coucher et dormir.

12 Question: Comme tout le monde le sait, il y avait une dispute concernant

13 l'existence du barbelé autour de ce camp, et je pense que vous avez

14 témoigné là-dessus dans une affaire antérieure. Mais dites-nous s'il y

15 avait des barbelés ou non?

16 Réponse: Le barbelé qui, d'un côté, était un vrai barbelé mais, d'un autre

17 côté, il n'y avait pas d'épines (sic); ce n'était pas un barbelé. Ce

18 barbelé existait seulement pendant une période de l'existence du camp,

19 c'était pendant une période courte de l'existence du camp et c'était

20 préparé pour les détenus qui ont été amenés de Keraterm et d'Omarska. Et

21 après la visite des journalistes, ce barbelé a été démonté.

22 Question: Donc ce barbelé, ce fil de fer a été construit lorsque les

23 détenus sont arrivés d'Omarska et de Keraterm, avant la visite des

24 journalistes. Après quoi, ce fil de fer a été enlevé, après la visite des

25 journalistes, et après que cette émission de télévision a été faite?

Page 11771

1 Réponse: Oui, c'est exact.

2 Question: Est-ce que nous pouvons voir ici, sur cette carte, où se

3 trouvait ce fil de… la clôture de cela?

4 Réponse: Non. Mais je peux vous dessiner maintenant comment c'était. Cela

5 partait de cette grande salle vers la grille du magasin de matériel de

6 bâtiments, et ensuite cela finissait ici au coin de cette grande salle.

7 Mme Korner (interprétation): Il est peut-être temps pour faire la pause.

8 Après quoi, on peut identifier de quel dessin il s'agissait.

9 M. le Président (interprétation): C'est ce dessin-là qui a été fait dans

10 l'affaire Stakic.

11 Je pense qu'il est mieux de faire maintenant la pause pour que vous soyez

12 sûr qu'il s'agissait de ce dessin, car il est possible que je me sois

13 trompé.

14 Nous allons faire la pause de 20 minutes.

15 Maître Ackerman?

16 M. Ackerman (interprétation): Je pense que nous allons finir aujourd'hui

17 avec ce témoin parce que Mme Korner devrait finir jusqu'ici, ce qui ne

18 s'était pas produit. Si vous avez l'intention de nous préparer pour le

19 travail de demain, il vaut mieux faire cela. Je vais peut-être finir, mais

20 je n'en suis pas sûr.

21 (L'audience, suspendue à 10 heures 31, est reprise à 10 heures 57.)

22 M. le Président (interprétation): Avant que nous ne reprenions, je me suis

23 renseigné en ce qui concerne les possibilités demain. Il n'y a pas de

24 possibilité de siéger demain matin car tous les prétoires sont occupés. Il

25 va donc falloir que nous siégions l'après-midi.

Page 11772

1 Mme Korner (interprétation): Il se peut que j'aie le même problème que

2 vous, Monsieur le Président, Mesdames les Juges, parce que j'ai un rendez-

3 vous médical à Londres demain après-midi à 17 heures. Nous allons voir

4 comment nous progressons, Monsieur le Président.

5 Mme Korner (interprétation): Docteur, nous avons maintenant retrouvé un

6 exemplaire du croquis que vous aviez établi pour l'affaire Stakic.

7 Monsieur le Président, nous n'avons pas suffisamment d'exemplaires en

8 couleurs pour pouvoir en verser un à titre de pièce à conviction dans le

9 dossier, mais est-ce que l'on pourrait peut-être lui attribuer une cote?

10 Et demain, nous pourrons verser une copie. C'est le même plan que celui

11 qui est marqué 5315.

12 (Intervention de l'huissier.)

13 Mais avec nos propres marques, et je crois que vous aviez annoté en rouge

14 où se trouvait cette clôture.

15 M. Merdzanic (interprétation): Oui, c'est exact. La ligne rouge est

16 marquée là et indique la clôture à l'extérieur de laquelle on mettait les

17 détenus et où on les faisait venir. Elle avait été spécialement construite

18 de ce côté, de ce côté-ci, ainsi qu'ici. Le côté sud existait déjà, le

19 côté sud de la clôture, mais il y en avait une également à l'endroit que

20 je marque ici.

21 Mme Korner (interprétation): Bien. Je vous remercie, Docteur. Ceci nous

22 aide. Vous pouvez maintenant retirer le document.

23 M. le Président (interprétation): Donc ceci serait le document 1147.5. Je

24 ne pense pas qu'il y ait lieu de le distribuer parce que nous l'avons

25 déjà.

Page 11773

1 Mme Korner (interprétation): Non, cela ne devait pas être distribué. Est-

2 ce que l'huissier pourrait nous le rendre?

3 (Intervention de l'huissier.)

4 Parce que nous devrons faire d'autres copies afin d'en verser une au

5 dossier.

6 M. le Président (interprétation): Je vois ce que vous voulez dire.

7 Mme Korner (interprétation): Je vous remercie.

8 Alors, vous avez dit que le commandant Kuruzovic était-il -sauf tout à

9 fait au début de votre séjour dans le camp-, était-il le commandant du

10 camp pendant toute la durée, sauf au début?

11 M. Merdzanic (interprétation): Pendant les premiers jours, lorsque nous

12 sommes arrivés au camp, il n'était pas le commandant du camp. Mais

13 quelques jours plus tard le commandant Kuruzovic est arrivé et, pendant

14 toute la durée du fonctionnement du camp, il était le responsable du camp

15 de Trnopolje.

16 Question: Bien. Je voudrais maintenant que l'on examine brièvement une

17 question. C'est donc un extrait, une séquence vidéo concernant l'arrivée

18 des journalistes. Et les éléments de preuve concernant ce point commencent

19 à la page 7794 du compte rendu. Et je voudrais vous demander de bien

20 vouloir regarder la séquence vidéo.

21 Mais est-ce que l'on pourrait s'arrêter un instant avant de la jouer?

22 C'est donc une séquence extraite du film complet, ainsi qu'un autre

23 extrait du programme "Nigthline" de ABC, qui contient une interview du

24 témoin après qu'il ait été libéré.

25 Donc si vous voulez bien maintenant faire défiler la vidéo?

Page 11774

1 (Diffusion de la vidéo.)

2 Vous pouvez arrêter un instant le défilement. Pourriez-vous revenir un peu

3 en arrière? Revenez un peu en arrière. Nous pouvons commencer et nous nous

4 arrêtons dès que l'on verra l'homme qui n'a qu'un bras. Voilà.

5 Docteur, pouvez-vous nous dire qui était cet homme à qui il manque un

6 bras?

7 Réponse: C'est Mica Kabarsko; il était à Trnopolje avec Dusko Ivic, c'est

8 un infirmier. Il venait régulièrement au camp de Trnopolje.

9 Mme Korner (interprétation): Monsieur le Président, avant d'aller plus

10 loin, une partie des dialogues s'entend mal, même s'il est en anglais.

11 Nous avons donné une transcription, je me demande si on vous l'a remise,

12 Monsieur le Président, Mesdames les Juges, la transcription de la bande

13 sonore. Et il y a un exemplaire pour Me Ackerman aussi.

14 (Intervention de l'huissier.)

15 Je crois que, sur cette vidéo, en fait, nous avons enlevé une partie des

16 commentaires, en particulier lorsque l'on voit... Veuillez poursuivre.

17 (Diffusion et interprétation de la vidéo.)

18 "-J: Est-ce que vous avez vu de nombreux cas de personnes qui ont été

19 battues dans un autre camp?

20 (Le témoin opine du chef.)

21 Nombreux. Est-ce que vous avez beaucoup de médicaments ou est-ce que vous

22 avez besoin de médicaments? Est-ce que vous avez besoin de davantage de

23 médicaments?

24 -T: Oui.

25 -Q: Est-ce que vous avez à travailler très dur, des travaux très durs?

Page 11775

1 -T: (Incompréhensible.)

2 -J: Est-ce que vous parlez russe ou anglais? Est-ce que vous pourriez

3 parler dans votre propre langue?

4 -T: Je sais un peu de russe.

5 (Echange en russe.)

6 (Black out dans le véhicule.)"

7 (Arrêt de la diffusion vidéo.)

8 Mme Korner (interprétation): Pourriez-vous arrêter l'image un instant?

9 Ceci est le retour après la première visite, quelques jours plus tard.

10 Comme je dis, ce sont des extraits de cette vidéo.

11 On peut poursuivre.

12 (Reprise de la diffusion et interprétation de la vidéo.)

13 "-J: Il y avait du fil de fer barbelé? Je vous montre la photographie,

14 j'ai (mot incompréhensible).

15 -T: Ici, est-ce qu'on va y repasser? Arrêtez, laissez-moi revenir. Ils ont

16 enlevé les fils de fer barbelés, ici. Heureusement.

17 (Nouveau passage à l'hôpital.)

18 -J: Vous êtes un homme très, très brave.

19 -T: (Inaudible.)"

20 (Arrêt de la diffusion vidéo.)

21 Mme Korner (interprétation): Pourriez-vous arrêter l'image, s'il vous

22 plaît?

23 Docteur, quel est l'homme que l'on peut voir juste derrière vous?

24 M. Merdzanic (interprétation): C'est Gutic, un étudiant en médecine, Vasif

25 Gutic.

Page 11776

1 Mme Korner (interprétation): Bien. Pouvez-vous poursuivre?

2 (Poursuite de la diffusion et interprétation de la vidéo.)

3 "-T: Cela nous a beaucoup aidés. Immédiatement après cela, la situation

4 s'est améliorée. Ils ont enlevé les clôtures métalliques, ils ont commencé

5 à apporter des aliments, les gens ont commencé à aller et venir librement.

6 Les visites étaient autorisées. Les Musulmans peuvent utiliser le train,

7 ce qui n'était pas le cas précédemment. Nous n'avons pas de médicaments,

8 on ne nous envoie toujours pas de médicaments.

9 -Infirmier: Cette nuit... "

10 (Arrêt de la diffusion.)

11 Voulez-vous arrêter sur l'image, s'il vous plaît?

12 Qui est ce médecin?

13 Réponse: C'est Azra Blazevic, elle est vétérinaire.

14 Question: Je vous remercie. Pouvez-vous poursuivre?

15 (Reprise de la diffusion et interprétation de la vidéo.)

16 "Cette nuit, à environ 2 heures, près de 1.000 personnes ont été amenées

17 d'Omarska à ici. Un groupe de quelque 900 à 1.000 personnes d'Omarska qui,

18 probablement, avaient été prises à Manjaca."

19 (Fin de l'extrait vidéo.)

20 L'extrait suivant est de "Nightline ABC".

21 (Diffusion et interprétation de la vidéo.)

22 "-Journaliste: On peut voir cette menace sur le visage du Dr Idriz, qui

23 était le chef de la clinique de Trnopolje. Est-ce que vous avez eu de

24 nombreux cas de personnes qui ont été battues dans l'autre camp?

25 (Le témoin opine du chef.)

Page 11777

1 Nombreux...

2 -Témoin: J'ai simplement fait un mouvement des épaules et de la tête, mais

3 je n'ai rien dit. Bien sûr, on n'avait pas le droit de parler, il y avait

4 toujours quelqu'un qui vous surveillait.

5 -J: Aujourd'hui, le Dr Idriz est en sécurité. Du camp de réfugiés de

6 Karlovac, aujourd'hui, un grand nombre peut dire la vérité concernant

7 Trnopolje.

8 -T: Dans le camp, de nombreuses personnes sont mortes de passages à tabac,

9 pour avoir été battues. D'autres sont mortes parce que l'on ne leur a pas

10 permis d'aller dans des hôpitaux. Il y a un grand nombre de personnes qui

11 ont été sorties des camps et qui ont été tuées.

12 -J: Le Dr Idriz dit qu'environ 200 hommes ont été tués à Trnopolje et il

13 dit que les passages à tabac étaient constants. Le corps couvert

14 d'ecchymoses de Nedzad a été photographié cet été-là par le Dr Idriz.

15 -T: Nous n'avons pas, en fait, vu les passages à tabac, mais nous étions

16 dans la salle qui était à côté de celle où ces passages à tabac avaient

17 lieu; nous pouvions entendre les coups et les cris.

18 -J: Le Dr Idriz dit que le commandant du camp militaire de Trnopolje a

19 essayé une fois de punir un violeur.

20 -T: Lorsque les autres soldats ont appris cela, ils se sont saoulés et ils

21 ont amené deux tanks devant la caserne principale."

22 (Note de l'interprète: Fin de la lecture: "Et ont lancé comme ultimatum

23 que si le soldat n'était pas libéré, ils tireraient sur leur propre

24 caserne. Alors ce soldat a été relâché. Dès que ces gens sont arrivés, on

25 les a poussés à l'intérieur du camp et on les a laissés s'organiser.)

Page 11778

1 (Arrêt de la diffusion vidéo.)

2 Je vous remercie. Ceci est donc la fin de la vidéo.

3 Est-ce que l'on pourrait en faire comme pièce à conviction le P1512 et la

4 transcription en anglais le P1512.2?

5 Maintenant, Docteur, comme chacun le sait, vous avez fourni à Penny

6 Marshall le film qui contient les photographies que vous aviez prises

7 pendant les périodes où vous étiez incarcéré à Trnopolje. Je voudrais vous

8 demander, s'il vous plaît, de regarder maintenant ces photographies et de

9 les identifier, de les expliquer.

10 Je pense que le Président et Mmes les Juges auront des exemplaires de ces

11 photographies.

12 M. le Président (interprétation): Nous en avons plusieurs.

13 Mme Korner (interprétation): Elles commencent par les chiffres 01035330.

14 Mme Korner (interprétation): Je pense que, Monsieur le Président, Mesdames

15 les Juges, vous avez déjà ces photographies, n'est-ce pas?

16 M. le Président (interprétation): Oui.

17 Mme Korner (interprétation): C'est ce que je pensais. Peut-être pourrais-

18 je maintenant vous les faire tenir une par une, l'une après l'autre.

19 Si l'on pouvait donner à l'ensemble du recueil un numéro de pièce à

20 conviction, je les marquerai ensuite point 1, point 2; ce serait donc la

21 pièce à conviction 1513, la première commençant par point 1. Je vais donc

22 vous les présenter au fur et à mesure.

23 Pourrait-on, s'il vous plaît, les placer sur le rétroprojecteur pour qu'on

24 voit de quoi nous parlons?

25 (Intervention de l'huissier.)

Page 11779

1 Vous nous avez dit que non seulement vous travailliez à la clinique mais

2 vous y dormiez. Est-ce qu'il y avait des lits?

3 M. Merdzanic (interprétation): Il y avait deux lits qui se trouvaient déjà

4 dans la clinique, parce que c'était déjà une clinique avant de devenir un

5 camp; il y avait donc ces deux lits qui servaient à examiner des patients.

6 Ce sont donc deux lits médicaux que l'on a trouvés dans cette infirmerie.

7 Question: Bien, je vous remercie. Qui est-ce que l'on voit qui dort sur

8 cette photographie, tout en haut?

9 Réponse: Sefik Karabasic en haut de la photographie, et Azra Blazevic, en

10 bas de la photographie.

11 Question: Donc ceci sera la pièce à conviction, là encore 1513.1.

12 Est-ce que l'on pourrait voir l'image suivante, la photographie suivante?

13 Je vous remercie.

14 (Intervention de l'huissier.)

15 Qui voyons-nous sur cette photographie?

16 Réponse: La sage-femme. Et sur la photographie du haut, elle dormait sur

17 l'un des lits dans l'infirmerie. En bas, il y a Vasif Gutic. Et derrière

18 lui, vous pouvez voir Goga -je ne sais pas son nom de famille-, c'était

19 une Serbe qui était avec nous pendant toute la durée de notre séjour à

20 Kozarac. Pendant un certain temps, elle était également à Trnopolje

21 jusqu'à ce qu'on lui interdise de rester avec nous.

22 Mme Korner (interprétation): Au bas de la photographie…

23 M. le Président (interprétation): Il vient juste de l'expliquer.

24 Mme Korner (interprétation): Excusez-moi, Monsieur le Président, oui, je

25 n'avais pas entendu.

Page 11780

1 Bien. Je vérifie mes notes. Pourriez-vous me donner une minute Monsieur le

2 Président, s'il vous plaît, pour que je puisse vérifier mes notes?

3 On revient en arrière. Mais pourriez-vous, Monsieur le Témoin, regarder

4 cette photographie qui est marquée 5329? Excusez-moi, j'avais oublié, je

5 savais bien qu'il manquait quelque chose.

6 (Intervention de l'huissier.)

7 Pourriez-vous nous dire ce que nous voyons là?

8 M. Merdzanic (interprétation): Mujo, un infirmier, se trouve sur la

9 photographie d'en haut, et à côté, un jeune homme qui était un patient; je

10 crois qu'il a passé une nuit à l'infirmerie avec nous. Et là, on peut voir

11 sur la photographie du bas et derrière moi, il y a Hase Dzonlagic qui est

12 vétérinaire.

13 Question: Et je pense que l'appareil photo appartenait au Dr Blazevic,

14 n'est-ce pas?

15 Réponse: C'est exact, oui.

16 Question: Bien, je vous remercie.

17 Pourrait-on maintenant en faire la pièce 0135334? Pourriez-vous, s'il vous

18 plaît, regarder le 0135334, le numéro ERN? Que voyons-nous là?

19 Réponse: La photographie montre la pièce dans laquelle on procédait aux

20 interrogatoires et aux passages à tabac des détenus. Et l'on peut voir des

21 taches de sang sur les murs et par terre, sur le sol.

22 Question: Je vous remercie. Ensuite, dans la même pièce 33, nous aurons la

23 cote point 4; la suivante, le 5335 aura la cote point 5. C'est le même

24 secteur mais on peut voir davantage de marques sur les murs.

25 Réponse: C'est exact, c'est la même pièce, et la photographie a été prise

Page 11781

1 à la même époque.

2 Question: Je vous remercie. Ceci sera donc le document point 5.

3 Pourriez-vous, s'il vous plaît, maintenant, nous passer les photographies

4 5336 et 5337?

5 (Intervention de l'huissier.)

6 Je pense que ce sont celles que nous avons vues sur le film. Ceci montre

7 les blessures subies par le témoin.

8 Réponse: C'est Nedzad Jakupovic. On nous l'a amené de cette pièce parce

9 qu'il avait une blessure à l'śil, au coin de l'śil, et nous avons donc dû

10 panser cette blessure, soigner cette blessure. Cette fois, le garde

11 n'était pas à côté de nous pendant tout le temps, il est sorti et nous

12 avons donc décidé de prendre une photographie.

13 Question: Je crois que, comme vous l'avez dit à la Chambre pendant

14 l'affaire Stakic, toutes les photographies ont été prises de dos, de façon

15 à ce que les personnes photographiées ne soient pas au courant.

16 Est-ce exact?

17 Réponse: Non, ce n'est pas exact. C'était de façon à ne pas identifier qui

18 nous photographions. Ce que l'on essayait de faire, c'était de réduire le

19 risque qu'il soit révélé que nous utilisions un appareil photo pour faire

20 des photographies dans le camp.

21 C'est la raison pour laquelle nous avions décidé -puisque Nedzad était

22 dans un tel état que ses yeux étaient gonflés et qu'il ne pouvait pas

23 voir, il était pratiquement assommé- nous l'avons donc photographié dans

24 l'espoir qu'il ne remarquerait pas qu'on le photographiait parce que nous

25 avions peur que, si les Serbes continuaient à l'interroger et à le battre,

Page 11782

1 il finisse par leur dire peut-être que nous avions pris une photographie

2 de lui, et à ce moment-là, nous serions en danger.

3 En tout état de cause, le risque existait et nous essayions de réduire au

4 minimum le risque en question.

5 Question: Si nous regardons l'image suivante, brièvement, cette

6 photographie, nous pouvons voir une vue de profil et on peut voir la

7 blessure à l'śil, dont vous avez parlé.

8 Réponse: C'est exact, c'est le même patient. C'est donc Nedzad Jakupovic,

9 et cette photographie a été prise pratiquement au même moment que l'autre.

10 Question: Je vous remercie. Ceci portera la cote point 6 et point 7.

11 Pourrions-nous voir très rapidement une série de photographies qui ont été

12 prises à l'intérieur du camp: 38394041 pour le numéro ERN?

13 (Intervention de l'huissier.)

14 Très rapidement, le bâtiment que l'on peut voir à l'arrière plan, qu'est-

15 ce que c'est?

16 Réponse: C'est l'entrepôt où l'on vendait du matériel de construction, et

17 du côté sud -il se trouve du côté sud-, pas loin de la voie ferrée.

18 Question: Et la photographie suivante, s'il vous plaît?

19 Réponse: Ceci est orienté dans la même direction, c'est le même bâtiment,

20 donc le dépôt qui vendait du matériel de construction. C'était un ancien

21 magasin. Ceci est donc l'endroit qui se trouve entre l'entrée principale

22 et l'infirmerie, et on voit une pièce où, ensuite, du fil de fer barbelé

23 avait été placé par la suite.

24 Question: Et la suivante, c'est le même endroit?

25 Réponse: C'est le même endroit, également vu sous le même angle. Je ne

Page 11783

1 sais pas qui a pris ces photographies; ce n'est pas moi qui les ai prises.

2 Question: Et finalement la cote 41, le numéro 41?

3 M. Merdzanic (interprétation): Ceci est pris plus ou moins sous le même

4 angle, mais un peu plus à droite, près du terrain de football, mais on ne

5 peut pas voir ce terrain. Et à gauche, on voit une petite cabane qui se

6 trouve près de la construction qui servait d'entrepôt. Un peu plus loin à

7 gauche se trouve donc ce dépôt de matériel de construction. Ce qui veut

8 dire que c'est pris de la droite. Cela veut dire que, devant cette maison,

9 se trouve la route qui relie Prijedor, Trnopolje et Omarska.

10 Mme Korner (interprétation): Je vous remercie beaucoup, Docteur. Donc,

11 Monsieur le Président, Mesdames les Juges, les documents suivants seraient

12 les points 8, 9, 10 et 11.

13 (Intervention de l'huissier.)

14 Pourrions-nous maintenant voir les photographies 42 et 43?

15 M. le Président (interprétation): Il ne semble pas avoir un exemplaire de

16 rechange, un exemplaire supplémentaire. Qu'est-ce qui serait donc P153.10?

17 Nous ne l'avons pas en fait dans les trois que nous avons devant nous.

18 Est-ce que vous l'avez?

19 Mme Korner (interprétation): Excusez-moi.

20 M. le Président (interprétation): L'avant-dernier: point 10. Nous ne

21 l'avons pas.

22 Mme Korner (interprétation): Je ne sais pas comment cela s'est passé, mais

23 nous vous en procurerons d'autres copies. Nous avons de toute façon un

24 exemplaire et nous allons pouvoir régler la question.

25 La photographie 42, que nous regardons maintenant, qui est prise derrière

Page 11784

1 l'arbre?

2 M. Merdzanic (interprétation): Celle-ci a été prise de la direction de

3 l'entrée de l'infirmerie, dans la direction de la route qui conduit de

4 Trnopolje à Kozarac. On voit des camions qui se trouvent sur la route. Je

5 pense qu'il s'agit d'un convoi qui était là peu de temps avant que les

6 journalistes ne viennent. Ce convoi avait été organisé, et un certain

7 nombre d'hommes ont été autorisés à entrer et à rejoindre le convoi.

8 Le premier convoi qui est parti est parti par train de la gare de chemin

9 de fer. Après cela, je ne sais pas. Je ne sais pas pourquoi il n'était pas

10 possible d'aller à Doboj. Ils utilisaient des camions remorque couverts de

11 bâche, et ils ont emprunté la route qui passait par le mont Vlasic.

12 Question: Je crois que vous avez mentionné ces convois avant la venue des

13 journalistes, je crois que c'est cela, comme vous l'avez dit à la Chambre,

14 à la page 7793: "Peu de temps avant l'arrivée des journalistes, la plupart

15 des femmes et des enfants ont été sortis de Trnopolje.".

16 Réponse: Oui, c'est exact au début, mais à la fin, je crois que quelques

17 hommes ont été pris aussi.

18 Question: Je vous prie de regarder maintenant la deuxième photographie.

19 Réponse: C'est le même convoi. C'est probablement la dernière remorque. On

20 voit les détenus qui y sont embarqués, on voit deux soldats. Ils étaient

21 les uns sur les autres dans la remorque. Ensuite, ils étaient enfermés. Il

22 faisait très chaud, on était en été, et c'est de cette manière qu'ils les

23 transportaient, sans eau.

24 Question: Ce seront les photographies point 12 et point 13, et enfin deux

25 photographies qui portent les numéros 344 et 345.

Page 11785

1 (Intervention de l'huissier.)

2 Réponse: C'est un homme qui a été détenu à Trnopolje, qui souffrait de

3 dysenterie; il a perdu beaucoup de poids. Il me semble que son nom de

4 famille est Hrnic, mais je n'en suis pas sûr. Dans la pièce que j'ai

5 mentionnée tout à l'heure, ils l'ont passé à tabac. Il est décédé par la

6 suite. La raison qui a entraîné la mort est probablement le résultat de

7 tout cela, du passage à tabac, de la dysenterie. Il est décédé par la

8 suite. Je ne pense pas que la raison principale en ait été le passage à

9 tabac.

10 Question: Il a passé tout le temps à Trnopolje ou faisait-il partie du

11 groupe qui a été amené d'Omarska?

12 Réponse: Non, il était à Trnopolje. Les photographies ont été prises, nous

13 les avons prises avant l'arrivée des journalistes et nous les avons

14 remises. C'est donc avant Keraterm et Omarska que cela s'est produit.

15 Question: Fort bien. Maintenant, je vous prie de jeter un bref coup d'śil

16 sur la deuxième photographie.

17 Réponse: Il s'agit du même homme, mais on n'y voit que la partie

18 inférieure. On ne peut pas voir sur cette photographie, mais il souffrait

19 de diarrhée, tout était mouillé, ses sous-vêtements étaient mouillés; on

20 n'avait pas les médicaments pour le soulager.

21 Question: Fort bien. Ce seraient les dernières photographies qui

22 porteraient donc la cote point 14 et point 15.

23 Pour résumer le reste du témoignage que vous nous avez donné, Docteur, il

24 me semble que vous nous avez décrit avant tout les meurtres qui se sont

25 déroulés à l'extérieur -7786, pour vous, Monsieur le Président, Mesdames

Page 11786

1 les Juges-, donc les personnes qui étaient emmenées à l'extérieur du camp

2 et tuées.

3 Réponse: La majorité des meurtres ont été faits de la manière suivante:

4 les détenus ont été emmenés à l'extérieur et certain d'entre eux ont été

5 tués à l'extérieur. Un jour, les soldats sont arrivés, ils avaient une

6 liste. Devant l'école, ils ont aligné tous les hommes, tous les détenus

7 hommes, et ils ont demandé que Foric, donc l'homme qui portait le nom de

8 Foric -il y avait cinq ou six hommes qui sont sortis- ils les ont emmenés

9 vers la gare, vers l'ancien moulin ou la mare. Je ne sais pas ce qui s'est

10 produit par la suite.

11 Mme Korner (interprétation): On les a retrouvés dans une tombe. Ce sont

12 les éléments de preuve sur la base des exhumations.

13 M. Ackerman (interprétation): C'est maintenant l'accusation qui est en

14 train de soumettre une pièce à conviction?

15 Mme Korner (interprétation): Je le ferai par la suite, Maître Ackerman.

16 M. Ackerman (interprétation): J'imagine qu'il y aura quelqu'un que je

17 pourrai contre-interroger à ce sujet?

18 Mme Korner (interprétation): Oui, bien sûr.

19 M. le Président (interprétation): Madame Korner, allez-y.

20 Mme Korner (interprétation): A présent, nous allons aborder les passages à

21 tabac qui se sont produits dans les pièces que vous avez évoquées; c'est à

22 la page 7768. Vous avez dit également que les passages à tabac ont eu lieu

23 à l'extérieur?

24 M. Merdzanic (interprétation): C'est exact. Lorsque les détenus sont

25 arrivés de Keraterm, Zigic est arrivé ultérieurement. Avec un soldat, il

Page 11787

1 est entré dans l'espace où se trouvaient les détenus de Keraterm. Il les a

2 alignés, il leur a adressé un salut, une salutation en serbe, les détenus

3 ont répondu.

4 Ensuite, il a dit: "Kum -parrain en français-, sors de là!" L'un des

5 détenus est venu vers lui, il s'est agenouillé, puisque l'autre lui avait

6 donné l'ordre de le faire. Il l'a frappé, il lui a donné des coups de

7 pied, des coups de main. Lorsque l'autre est tombé par terre, il l'a

8 piétiné, il est resté par terre et les détenus l'ont emmené vers le Dom.

9 Je ne l'ai plus jamais revu. J'ai entendu dire qu'il a survécu, qu'il est

10 resté en vie.

11 Question: Fort bien. Vous avez aussi dit à la Chambre dans l'affaire

12 Stakic la similarité des propos des détenus quant à la manière dont ils

13 ont été amenés au camp, ce qui s'est produit dans leur village.

14 A la page 7788, Monsieur le Président, Mesdames les Juges.

15 Je ne vais pas répéter ce que vous avez dit puisqu'on peut le lire dans le

16 compte rendu, mais il s'agit d'une méthode, d'un modèle que vous nous avez

17 décrit.

18 D'après ce que vous avez vu, y avait-il une raison particulière pour

19 laquelle un camp a été mis en place à Trnopolje? Quels étaient les

20 avantages que cela présentait?

21 Réponse: Je n'ai pas réfléchi là-dessus. Ce n'est qu'après avoir témoigné

22 dernièrement puisqu'on m'a déjà posé la question, la défense m'a posé une

23 question dans ce sens, ils ont dit que cela a été fait rapidement, que

24 c'était en quelque sorte improvisé.

25 Après avoir réfléchi, j'ai tiré la conclusion que ce n'était pas possible,

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1 ce n'était pas par hasard. Cela a certainement été planifié longtemps à

2 l'avance. Peut-être que ceux qui ont exécuté, qui étaient des exécutants,

3 ils l'ont appris à la dernière minute. Mais, dans toute cette région, le

4 camp se situe tout près de la gare, tout près du chemin de fer. Il y a un

5 stade, il y a l'école; donc l'endroit s'y prête parfaitement.

6 On peut y mettre sur place un camp, on peut rassembler la population, on

7 peut les transporter par trains ou par camions. C'est certainement

8 quelqu'un qui était au courant de tout cela, qui connaissait la situation,

9 qui a fait ce plan. Pourquoi pas à Kozarac, par exemple, mais justement à

10 Trnopolje.

11 Question: Dans votre témoignage précédent, vous nous avez décrit les

12 convois, les différents convois. Avant d'embarquer dans les convois, est-

13 ce que les personnes devaient signer certains documents, des documents

14 précis?

15 Réponse: Pour ce qui est des convois réguliers, qui étaient destinés aux

16 personnes âgées, aux femmes et aux enfants, quelques hommes pouvaient de

17 temps en temps faire partie de ces groupes, s'ils avaient des

18 connaissances parmi les Serbes. Je ne sais pas s'il y avait des documents.

19 Le dernier des convois a été organisé par le CICR et le NHCR. Et, nous

20 autres détenus enregistrés, on est sortis grâce à ces convois, on était

21 censé… et on a dû signer un document par lequel on cédait tous nos biens à

22 la Republika Srpska et que la CICR garantissait que nous ne reviendrions

23 jamais en Bosnie, mais que nous nous installerions dans des pays tiers.

24 Le CICR nous a dit de signer ce papier, que ce papier n'avait aucune

25 valeur. On a organisé des groupes devant l'école et on entrait dans les

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1 convois un par un et chacun devait signer ce papier. Chacun a obtenu un

2 exemplaire de ce document. Moi, malheureusement, j'ai jeté le mien.

3 Certains des détenus, probablement, certainement d'ailleurs, ont encore en

4 leur possession cette liste, ce document.

5 Question: Etes-vous jamais retourné à Prijedor depuis votre expulsion?

6 Réponse: A Prijedor, non, jamais.

7 Question: Vous nous avez dit que vous avez fait partie d'un des derniers

8 convois en septembre 1992. Vous êtes allé à Karlovac. Vous faites partie

9 de ceux qui ont survécu au massacre de Vlasic.

10 Réponse: Lorsque nous sommes partis dans le camion, j'ai appris qu'il y

11 avait six personnes avec nous, que le CICR avait réussi à sauver de Banja

12 Luka, de l'hôpital de Banja Luka, et ils les ont fait sortir avec nous.

13 Mme Korner (interprétation): Et enfin, le Président, le Juge Schomburg,

14 dernièrement, a demandé qui est responsable, selon vous, de tout ce qui

15 s'est passé, et vous avez fourni une longue réponse que je ne vais pas

16 répéter mais elle figure à la page 7863.

17 Je vous remercie beaucoup, Docteur.

18 M. le Président (interprétation): Maître Ackerman?

19 Monsieur le Témoin, vous allez maintenant être contre-interrogé par le

20 conseil de la défense.

21 (Contre-interrogatoire du témoin, M. Idriz Merdzanic, par Me Ackerman.)

22 M. Ackerman (interprétation): Bonjour, Docteur?

23 M. Merdzanic (interprétation): Bonjour.

24 Question: Vous avez remarqué probablement que nous croyons pouvoir

25 terminer avec votre témoignage ce matin. Vous pouvez nous aider si vous

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1 répondez aussi brièvement que possible à mes questions. Si j'ai besoin que

2 vous élaboriez votre réponse, je vous le demanderai. Est-ce clair?

3 Réponse: Oui, ça va.

4 Question: Dans votre témoignage dans l'affaire Stakic, vous avez fait une

5 déclaration au Bureau du Procureur et je vais y faire référence. Je vous

6 prie de comprendre si, à un moment ou à un autre, vous n'êtes pas trop sûr

7 quant à ce que vous avez dit dans cette déclaration, vous pouvez obtenir

8 une copie de cette déclaration, le Procureur vous en fournira une copie.

9 D'accord?

10 Réponse: D'accord.

11 Question: A la page n°1 de cette déclaration, que vous avez faite au

12 Bureau du Procureur, vous avez évoqué la situation qui a précédé à la

13 guerre en 1992. Vous avez dit: "Avant la guerre, il n'y avait pas de

14 problèmes entre les communautés ethniques. Nous nous entendions bien.".

15 (Fin de citation.)

16 Vous souvenez-vous avoir dit cela?

17 Réponse: Je ne sais pas si je l'ai formulé de cette manière, mais c'était

18 effectivement la situation, je le confirme. Avant la guerre qui a éclaté,

19 avant la guerre en ex-Yougoslavie, à Prijedor en ex-Yougoslavie, je n'ai

20 jamais remarqué quelque problème que ce soit. Il n'y a pas eu de problème.

21 Question: Vous savez ce qui s'est passé à Prijedor et à Kozarac pendant la

22 Seconde Guerre mondiale, n'est-ce pas?

23 Réponse: En partie, oui.

24 Question: Savez-vous ou saviez-vous une personne qui porte le nom de

25 Hamdjia Kahrimanovic?

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1 Réponse: Le patronyme Kahrimanovic m'est connu, mais je ne sais pas si

2 j'ai connu personnellement quelqu'un qui s'appelle Hamdjia.

3 Question: C'était un instituteur de Kozarac. Est-ce que cela peut vous

4 rafraîchir la mémoire?

5 Réponse: Non.

6 Question: Je vous prie de confirmer ce que je vais vous lire: "Un des

7 massacres les plus horribles, des batailles les plus féroces durant la

8 Seconde Guerre mondiale se sont produites dans la région de la montagne de

9 Kozara. Les habitants de la région ont une réputation de braves

10 combattants.".

11 Réponse: C'est ce que l'on peut lire dans les livres.

12 Question: On dit dans la région de Kozara –et je vais vous le citer-: "Les

13 citoyens de Kozara, les habitants de Kozara aiment leur fusil comme ils

14 aimeraient une jeune fille. Ils aiment la chanson et un verre d'alcool,

15 mais, avant tout, ils aiment la liberté".

16 Connaissez-vous ce proverbe?

17 Réponse: Oui mais les gens de Kozara ne sont pas seulement des Serbes, il

18 y a d'autres communautés ethniques.

19 Question: Je parle des habitants de Kozara en général.

20 Réponse: Il me semble que tout le monde aime la liberté, les gens de

21 partout, en Hollande comme ailleurs par exemple.

22 Question: Mais pour ce qui est des habitants de Kozara et de leur amour

23 pour les armes?

24 Réponse: Il y avait beaucoup de chasseurs qui disposaient de fusils de

25 chasse, mais cela dépendait de chacun. Moi, je n'ai jamais eu d'affinités

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1 de ce genre, je n'ai jamais possédé d'armes. Je connais beaucoup de gens

2 de la région de Kozara qui ne possèdent pas d'armes.

3 Question: Savez-vous, êtes-vous d'accord avec moi pour dire que, pendant

4 la Seconde Guerre mondiale, les différents groupes de la région étaient

5 divisés?

6 Réponse: Pendant la Seconde Guerre mondiale, je n'y ai pas participé, mais

7 je suis né à Kresevo, près de Sarajevo, et je ne me suis installé dans

8 cette région qu'après avoir fait mon service militaire. J'y ai obtenu un

9 poste après avoir fait mes études universitaires. Je suis donc incapable

10 de vous répondre par l'affirmative ou la négative.

11 Question: A l'école primaire, on apprend l'Histoire et on apprend ce qui

12 s'est produit à Kozarac, notamment le massacre des Serbes?

13 Réponse: Oui, bien sûr, il y a l'Histoire. Et il y avait des anciens, des

14 personnes plus âgées qui nous racontaient ce qui s'était produit et qui

15 différait de ce qui était compté dans les livres d'Histoire.

16 Question: Après la Seconde Guerre mondiale, la situation a-t-elle changé

17 de telle manière que les différents groupes ethniques s'entendaient bien,

18 comme vous l'avez dit vous-même? Combien de temps cela a pris?

19 Réponse: Immédiatement après la guerre, probablement il y a eu des

20 problèmes. Les Musulmans, pendant une longue période de temps, n'avaient

21 pas le droit de s'exprimer en tant que Musulmans, de se déclarer comme

22 Musulmans; ils n'avaient que le choix d'être soit Serbes, soit Croates.

23 Je suis né en 1959, et pendant mon enfance, pendant toute ma vie, je n'ai

24 pas eu de problème avec les membres d'autres communautés ethniques.

25 Question: Est-ce ce bien la Constitution de 1974 qui a garanti aux

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1 Musulmans de se déclarer en tant que Musulmans?

2 Réponse: Je ne saurais vous le dire avec exactitude si c'est bien cette

3 Constitution-là, mais je sais que c'est une des Constitutions qui a

4 garanti aux Musulmans le droit de se déclarer comme tels.

5 Question: Dans l'affaire Stakic –7779-, vous avez dit, vous avez évoqué la

6 période de 1991, la période du début de la guerre en Croatie où un appel à

7 la mobilisation a été lancé. Vous avez donc dit à la page 7719 que: "Ceci

8 a eu un effet sur l'attitude des Serbes par rapport aux Musulmans et aux

9 Croates à Prijedor". Vous avez dit que: "Les Musulmans et les Croates

10 n'ont pas répondu à l'appel à la mobilisation et qu'ils ont été harcelés

11 par la police militaire, et de force amenés au front.".

12 Vous souvenez-vous avoir déclaré cela?

13 Réponse: Oui.

14 Question: Vous avez dit également à la Chambre que de nombreux Musulmans

15 et Croates se cachaient pour ne pas avoir à rejoindre le front; exact?

16 Réponse: Oui.

17 Question: Et ils ne se rendaient pas à leur travail puisqu'ils se

18 cachaient, c'est exact?

19 Réponse: C'est exact.

20 Question: Et s'ils ne se présentaient pas à leur travail, alors il est

21 fort possible qu'ils aient été renvoyés, licenciés?

22 Réponse: Je ne pense pas que ce soit la vraie raison, mais les

23 licenciements sont devenus une pratique vers la fin du mois de février,

24 lorsque le SDS et les Serbes ont pris Prijedor de force. Il y a eu des

25 élections et le SDA a gagné.

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1 A Prijedor, les Musulmans occupaient des postes de responsabilité avec les

2 Serbes et les Croates, et il n'y avait pas encore de persécutions

3 importantes, du moins pas de manière ouverte.

4 Ensuite, lorsque le SDS a pris le pouvoir, les Croates et les Musulmans

5 ont été licenciés; et ceux qui n'ont pas fait une déclaration d'allégeance

6 et n'ont pas répondu à l'appel à la mobilisation, ce sont donc eux qui ont

7 été licenciés. Je parle de la fin de l'année 1991 et du début de l'année

8 1992.

9 Question: Mais n'était-ce pas conforme à la loi que, si vous ne vous

10 présentiez pas à votre travail, vous étiez normalement licencié, n'est-ce

11 pas?

12 Réponse: Dans la plupart des entreprises cela pouvait être le cas, mais, à

13 Prijedor, le SDA a gagné: le partage du pouvoir n'a pas encore été

14 effectué et les gens, dans tous les cas avant que les militaires prennent

15 le pouvoir, n'étaient pas licenciés. Ce n'était pas une pratique.

16 Peut-être qu'après des personnes ont été arrêtées. Le couvre-feu a été

17 établi à 21 heures; ceux qui étaient capturés étaient amenés à Banja Luka

18 ou bien ils étaient forcés à creuser des tranchées, d'autres étaient

19 échangés. Il y en avait qui étaient mobilisés de force, qui devaient

20 rendre leurs armes, alors que d'autres étaient tués, étaient ramenés dans

21 des cercueils.

22 Question: Donc, dès que le SDA a pris le pouvoir à Prijedor, les non-

23 Serbes pouvaient ne pas se présenter à leur travail et rien ne leur

24 arrivait: il n'y avait ni sanctions ni conséquences, ils recevaient leur

25 salaire mais ne travaillaient pas?

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1 Réponse: Ce n'est pas exact. Lorsque les Serbes avaient pris le pouvoir,

2 les gens qui occupaient des fonctions importantes, les juges, les

3 dirigeants de la police ont été licenciés. Tous les non-Serbes.

4 Question: La traduction n'a pas été bonne. Ce que je vous ai posé comme

5 question ne concernait pas le SDS, mais le SDA. Donc vous estimez que,

6 pendant cette période, les non-Serbes, les employés non-serbes étaient

7 autorisés à ne pas se présenter à leur travail et ne pas subir des

8 sanctions pour cela pour autant?

9 Réponse: Je ne sais pas quelle est votre connaissance quant à la situation

10 à Prijedor. Le SDA n'a jamais réussi à prendre le pouvoir après les

11 élections, même s'ils ont gagné les élections, puisque le SDS l'a fait

12 très rapidement. Il se peut que des personnes, un jour, ne se présentent

13 pas au travail. Ce n'est pas la police militaire qui les guettait pour

14 voir s'ils allaient et venaient, mais cela ne se produisait pas plusieurs

15 jours de suite.

16 Question: Dans l'affaire Stakic, vous avez dit que c'est l'armée qui a

17 pris le pouvoir à Prijedor?

18 Réponse: Physiquement, l'armée a pris le pouvoir de Prijedor, du jour au

19 lendemain. Une unité militaire, qui était arrivée du front, a placé des

20 points de contrôle; elle contrôlait les gens qui passaient, elle postait

21 des francs-tireurs sur les bâtiments. Ils se sont installés dans toutes

22 les institutions importantes: l'hôpital, la mairie, la police, etc. Tout

23 ce qui est le pouvoir politique, le SDS l'avait entre ses mains.

24 Question: Compte tenu de ce que l'on a dit au début, le caractère

25 équitable notamment, lorsque je vous l'ai demandé… dans l'affaire Stakic,

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1 vous aviez répondu à une question que c'est l'armée qui a pris le pouvoir

2 à Prijedor. N'aurait-il pas été plus simple juste de dire oui?

3 Réponse: Non. Votre question était autre. L'armée a pris le pouvoir

4 physiquement, mais le SDS a pris le pouvoir politique après les élections,

5 au moment où la Bosnie a été déclarée, a été proclamée comme Etat

6 indépendant.

7 Question: Je pense que vous avez dit que l'armée rassemblait les personnes

8 et les emmenait à Keraterm, Omarska et Trnopolje, n'est-ce pas?

9 Réponse: Lorsque nous sommes arrivés à Trnopolje, il y avait beaucoup de

10 militaires, de gardiens qui surveillaient le site. Partout où l'on

11 circulait, on pouvait voir des personnes en uniforme.

12 Question: Connaissez-vous une personne qui s'appelle Sead Cirkin?

13 Réponse: Oui, j'en ai entendu parler, c'était un officier d'active.

14 Lorsque les Serbes ont pris le pouvoir militaire à Prijedor, il a tenté

15 d'organiser la défense de Kozarac. Il a réussi à rassembler quelques

16 personnes et ils ont tenté de défendre Kozarac.

17 Question: Et lui, il se trouvait en tête de l'unité armée de la Défense

18 territoriale à Kozarac, n'est-ce pas?

19 Réponse: Je ne savais pas s'il s'agissait de la Défense territoriale ou

20 d'une autre unité, mais j'ai entendu dire que, lui, il a essayé

21 d'organiser la défense de Kozarac.

22 Question: Est-ce que vous savez, est-ce que vous étiez au courant d'une

23 réunion qui se serait tenue avant les événements de Kozarac? Donc est-ce

24 que vous êtes au courant d'une réunion où la question de la population de

25 Kozarac a été accentuée, c'est-à-dire si la population était prête à

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1 rendre leurs armes et, de telle façon d'éviter, le conflit? Est-ce que

2 vous êtes au courant de cette réunion?

3 Réponse: J'ai entendu parler d'une réunion lors de laquelle il y avait un

4 ultimatum qui a été lancé pour rendre les armes. Mais je ne sais pas ce

5 qui s'était vraiment, exactement passé lors de cette réunion. Mais j'ai

6 entendu parler qu'il y avait des négociations qui se sont tenues.

7 Question: Est-ce que vous savez que la population de Kozarac, les

8 habitants de Kozarac, qui ont été présents à cette réunion et qui étaient

9 fiers de leur réputation de combattants forts et vaillants, qui aimaient

10 leurs armes, qu'ils ont décidé de ne pas rendre leurs armes et de défendre

11 par contre leur village?

12 Réponse: C'est exact. Et autant que je le sache, ils ont décidé de

13 défendre leur famille et leur village.

14 Question: Est-ce que vous savez que les combats à Kozarac se sont produits

15 lorsque les Musulmans, à un point de contrôle, ont tiré sur le convoi des

16 soldats serbes?

17 Réponse: Je n'en sais rien. Je sais que les Serbes avant cela avaient déjà

18 attaqué vers Ljubija et Hambarine et vers encore un village. Après quoi,

19 ils se sont déplacés d'un village à l'autre. Kozarac n'était pas le

20 premier village attaqué par l'armée serbe.

21 Question: Est-ce que vous savez que ce qui s'est passé à Hambarine s'était

22 produit après que les Musulmans aient tiré sur certains soldats serbes et

23 tué certains parmi eux?

24 Réponse: Avant cela, les soldats serbes ont arrêté un tracteur avec du

25 foin et ont demandé les cartes d'identité. Quand ils ont vu qu'il

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1 s'agissait de Musulmans, ils les ont tués d'emblée, sur place. Maintenant,

2 donc, on peut se citer mutuellement des exemples, il y en a l'infini mais

3 cela ne mène à rien.

4 Question: Je suis prêt à me mettre d'accord avec vous, Monsieur. Dans le

5 compte rendu à la page 7722, vous avez parlé, dans l'affaire Stakic, d'une

6 réunion à Kozarac concernant la demande en ce qui concerne les drapeaux

7 serbes, et les emblèmes serbes sont indiqués. Est-ce qu'il s'agit de la

8 même réunion dont on vient de parler ou il s'agissait d'une autre réunion?

9 Réponse: Je ne sais pas combien de réunions il y avait, s'il y avait une

10 seule réunion ou plusieurs. J'ai entendu parler seulement que la police et

11 ceux qui organisaient cela devaient se rendre, devaient déclarer leur

12 loyauté aux Serbes et indiquer les emblèmes serbes; c'est ce dont j'ai

13 entendu parler. Mais je ne sais pas si vous savez que la police qui s'est

14 rendue, que lors de cet événement, tous ces policiers ont été écartés,

15 donc mis de côté et tués sur place.

16 M. Ackerman (interprétation): On vous a posé la question concernant les

17 points de contrôle sur le territoire de Kozarac, dans l'affaire Stakic. Et

18 à la page 7732, vous avez dit aux Juges, concernant les Musulmans, vous

19 n'avez rien, vous n'avez pas remarqué de points de contrôle ni d'armes.

20 Lorsque vous alliez au travail de Prijedor à Kozarac, est-ce que vous avez

21 vu un point de contrôle musulman au croisement de deux routes, des routes

22 Prijedor-Banja Luka vers Kozarac? Est-ce que vous avez dû passer ce point

23 de contrôle?

24 M. Merdzanic (interprétation): Lors du procès précédent, j'ai rajouté que,

25 sur cette route principale Prijedor-Kozarac-Banja Luka, je n'ai jamais vu

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1 du côté bosnien de points de contrôle, mais je me suis souvenu du moment

2 lorsqu'un char a été placé à l'entrée de Kozarac. Alors, à l'entrée de la

3 scierie, les habitants de Kozarac ont mis des obstacles. Il y avait une

4 garde placée là-bas pour éviter que l'armée et ce char n'entrent à

5 Kozarac, mais les autres pouvaient passer ce point de contrôle librement.

6 Est-ce que, en dehors de cette route à Kozarusa ou ailleurs, il y avait

7 des points de contrôle musulmans? Je n'en sais rien, mais je ne peux que

8 supposer parce que j'ai entendu parler que, lorsque l'armée serbe a occupé

9 Prijedor et lorsqu'il était évident que les Serbes allaient prendre par

10 force les villages musulmans, que les non-Serbes -les Musulmans et les

11 Croates- se sont organisés pour organiser la garde, pour éviter donc que

12 les Serbes n'entrent dans les villages et ne commettent des massacres.

13 Mais ce n'était que la réaction à la prise de Prijedor par l'armée serbe.

14 M. le Président (interprétation): L'interprète n'a pas entendu, Monsieur,

15 votre dernière phrase que vous avez prononcée. Je vais lire ce que nous

16 avons comme votre dernière phrase: "Je ne sais pas, mais j'ai entendu

17 parler lorsque l'armée serbe a pris Prijedor, et lorsqu'ils ont clairement

18 montré qu'ils prendront par force des villages musulmans, les Croates et

19 les Musulmans se sont organisés pour éviter les Serbes, pour se défendre

20 et pour éviter aux Serbes d'entrer dans les villages et commettre les

21 massacres d'une manière soudaine.". C'est à ce moment-là que l'interprète

22 n'a pas pu entendre ce que vous avez dit.

23 M. Merdzanic (interprétation): Ce n'était qu'une réaction à des démarches

24 des Serbes qui, par force, avec l'armée, ont pris Prijedor. Après quoi les

25 Musulmans, intimidés par les représailles vers leur famille, ont organisé

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1 les gardes dont la mission était d'éviter que les Serbes n'entrent

2 soudainement dans ces villages.

3 M. le Président (interprétation): Merci.

4 Oui, Maître Ackerman, vous pouvez poursuivre.

5 M. Ackerman (interprétation): Vous avez dit, Monsieur, dans l'affaire

6 Stakic et ici, devant cette Chambre également, vous avez dit quelque chose

7 concernant les combats, les tirs survenus à Kozarac et vous avez dit que

8 cela avait duré pendant plusieurs jours. Après deux jours de tirs que vous

9 avez écoutés en vous trouvant dans la cave du centre médical, il y avait

10 des… un accord a donc été conclu pour qu'ils se rendent?

11 M. Merdzanic (interprétation): Oui, c'est en partie exact. Nous n'avions

12 pas tout le temps dans la cave du centre médical de Kozarac mais aussi à

13 l'extérieur de Kozarac dans l'infirmerie, transférés (sic), et à ce

14 moment-là la police a réussi le 26 à conclure l'arrêt des bombardements,

15 des pilonnages, et tout ce qui était lié à la reddition.

16 Question: La reddition signifie, Monsieur, qu'il y avait des combats, une

17 partie a perdu dans ce combat, et les armes, et les soldats se rendent,

18 n'est-ce pas (sic)?

19 Réponse: Je n'étais pas présent au moment des négociations sur les

20 conditions de reddition, mais, en tout cas, ce qui a été conclu, c'est que

21 c'était la police et les blessés d'abord, qu'il fallait qu'ils sortent de

22 Prijedor, et après eux, la population civile.

23 Pour Cirkin, je n'ai jamais entendu parler après cela, mais je dois dire

24 que lorsque cette attaque s'était produite, Cirkin et les siens ne se

25 trouvaient pas à Kozarac; il est probable qu'ils étaient partis en dehors

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1 de Kozarac. Mais à Kozarac même, sauf une partie de la police, il n'y

2 avait pas beaucoup d'hommes armés.

3 Question: Je suppose que ce n'est pas pendant deux jours que l'armée, donc

4 disposant d'artillerie et des chars, occupe un petit village, s'il y avait

5 seulement les civils qui défendaient le village, et des civils non armés,

6 n'est-ce pas?

7 Réponse: Je vous ai dit que Cirkin disposait de groupes d'hommes armés qui

8 essayaient avec d'autres civils de se défendre. Ces hommes armés avaient

9 des uniformes, peut-être provenant de la Défense territoriale ou

10 d'ailleurs, je n'en sais rien.

11 En tout cas, avec Cirkin, il y avait une sorte de formation armée. Quelle

12 était sa taille? Je n'en sais rien. Mais à une occasion, je me suis rendu

13 là-bas et j'ai vu avec lui un petit nombre d'hommes. Il est probable que

14 les autres se trouvaient quelque part, qu'ils tenaient leur position sur

15 le front. Et les bombardements duraient du 24 à midi et se finissaient le

16 26 au cours de la matinée.

17 Question: Après cette reddition dont vous avez parlé, l'armée a évacué

18 tous les habitants de Kozarac, n'est-ce pas?

19 Réponse: Non. Il a été conclu que les blessés, la police et les civils

20 sortent de Kozarac, et l'armée attendait dehors pour que tout le monde se

21 rende. Après quoi, l'armée est entrée à Kozarac. Mais il y avait beaucoup

22 d'habitants qui ne savaient pas qu'il fallait se rendre.

23 Question: Oui. Les premières personnes qui ont été alignées et auxquelles

24 il a été permis de quitter Kozarac, c'étaient les blessés, n'est-ce pas?

25 Réponse: Oui, je pense qu'il s'agissait des blessés, de blessés de la

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1 police, mais surtout des blessés qui sont sortis de Kozarac. Ils ont été

2 emmenés dans des véhicules conduits par le mari d'Azra.

3 Mais entre-temps, il faut que je dise que les autres étaient morts. Le

4 petit garçon était toujours en vie jusqu'à Prijedor. Il y avait un autre

5 Musulman qui avait une blessure par balle dans la poitrine, il a été

6 emmené à Omarska tout de suite, et pas à l'hôpital. Le chauffeur qui les a

7 emmenés –ces blessés- a été conduit à Omarska. Et ce garçon est mort à la

8 fin. Quand il s'agit de la police, j'ai entendu parler que les membres de

9 la police ont été tués également sur place.

10 Question: Maintenant, je veux passer au sujet de Trnopolje et vous poser

11 quelques questions concernant l'alimentation dans ce camp.

12 Les Juges ont l'occasion de lire votre déposition dans l'affaire Stakic,

13 comme cela nous pouvons mettre assez d'éléments. L'alimentation a été

14 fournie à Trnopolje par les gens qui vivaient sur ces territoires, les

15 Serbes y compris, n'est-ce pas?

16 Réponse: Au début. Au début, c'étaient aussi les Serbes qui nous amenaient

17 de la nourriture.

18 Question: Vous dites, à la page 8 de votre déclaration -je cite-: "Nous ne

19 pouvions pas sortir du territoire clôturé par les barbelés excepté si on

20 était accompagné d'un garde.". (Fin de citation.)

21 D'abord, je veux vous poser cette question: autour de tout le camp, il n'y

22 avait pas de barbelés, n'est-ce pas?

23 Réponse: Non.

24 Question: N'est-il pas vrai que les gens qui étaient à Trnopolje, tous les

25 jours, ils partaient pour travailler à des endroits où ils travaillaient,

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1 et après quoi, le soir, ils revenaient à Trnopolje parce qu'ils

2 considéraient Trnopolje comme un lieu sûr pour eux?

3 Réponse: Ce n'est pas du tout exact. J'entends cela pour la première fois,

4 ce n'est absolument pas exact.

5 Question: Est-ce qu'il y avait des listes de gens qui pouvaient sortir

6 tous les jours pour aller au travail au cours de la journée, après quoi

7 ils revenaient? Est-ce que ces listes existaient à Trnopolje?

8 Réponse: Non, je n'en sais rien. Et je suis sûr que ces listes

9 n'existaient pas.

10 Question: N'est-il pas vrai que les gens, qui ont été à Trnopolje,

11 prenaient de l'argent pour acheter du pain et d'autres nourritures qui,

12 après, étaient fournies au camp?

13 Réponse: Pendant une période, les détenus donnaient de l'argent; on

14 collectait de l'argent. Après quoi, on donnait cet argent à la Croix-Rouge

15 serbe, qui nous a fourni, le lendemain, du pain pour les détenus.

16 Question: Et certaines des personnes qui donnaient cet argent avaient de

17 l'argent parce qu'ils gagnaient cet argent en allant travailler à

18 l'extérieur du camp?

19 Réponse: Non, ce n'est pas du tout exact.

20 Question: N'est-il pas vrai que la Croix-Rouge serbe a organisé

21 l'approvisionnement en lait pour le camp de Trnopolje, quotidiennement

22 pour les enfants?

23 Réponse: Non, ce n'est pas exact que c'étaient tous les jours. C'était

24 seulement au début que nous avons réussi une autre initiative: à avoir un

25 accord pour avoir un peu de lait pour les petits enfants.

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1 Question: N'est-il pas vrai que l'on permettait aux gens d'aller dans leur

2 maison pour récupérer le lait, le sucre, la farine, etc., pour qu'ils

3 puissent amener cela dans le camp? Par exemple, les haricots, les fèves,

4 etc.

5 Réponse: Pendant une période, quand il n'y avait pas d'autre choix, ils

6 ont permis aux gens, accompagnés de soldats, d'aller dans leur maison et

7 dans leur jardin. Mais enfin, il ne s'agissait pas de leur propre maison,

8 de leur propre jardin. Les gens allaient donc dans n'importe quelle

9 maison, n'importe quel jardin autour du camp pour ramener de la

10 nourriture.

11 Il s'agissait en général des tomates, des pommes de terre. C'était pendant

12 l'été, et ils leur ont permis donc de cette façon. Et cela, c'était

13 pendant la période, après la visite de Penny Marshall jusqu'à la venue de

14 la Croix Rouge internationale, c'était pendant cette période que les gens

15 pouvaient se nourrir de telle façon. Mais il ne s'agissait pas de leur

16 propre maison où ils allaient et ils pouvaient y aller seulement

17 accompagnés d'un garde.

18 Question: La raison pour laquelle ils devaient être accompagnés d'un

19 garde, c'était pour les protéger des bandits, des criminels qui étaient

20 donc aux alentours?

21 Réponse: La raison principale pour cela, c'était pour que les détenus ne

22 se sauvent pas. Mais je pense que cela n'avait aucun sens parce que, tout

23 autour, se trouvaient les points de contrôle serbes, à la proximité du

24 camp de Trnopolje. Mais la raison pour laquelle il y avait un garde qui

25 les accompagnait, c'était d'éviter la fuite des détenus.

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1 Question: Il a donc été permis aux gens d'aller dans leur maison pour

2 ramener du bois pour des poêles aussi, et pour préparer de la nourriture

3 avec cela. Est-ce exact?

4 Réponse: Je répète: il ne s'agit pas de gens qui allaient dans leur propre

5 maison, mais il s'agissait de détenus qui se trouvaient à ce moment-là ici

6 et il leur a été permis de ramener des poêles, du bois pour cuire la

7 nourriture, et c'était entre la maison de la culture et l'école qu'ils ont

8 installé tout cela pour pouvoir se préparer de la nourriture.

9 Question: A la page 9 de votre déclaration -je cite-: "Je n'ai jamais vu

10 aucun politicien arriver à Trnopolje et je ne connaissais personne de la

11 cellule de crise de Banja Luka.". (Fin de citation.)

12 Est-ce exact?

13 Réponse: Je ne connaissais personne, en personne, personnellement, et j'ai

14 dit que, dans mon infirmerie, personne n'est venu dire "je suis untel

15 politicien". Je ne sais pas qui venait. Il y avait des délégations, mais

16 je ne savais pas qui était dans ces délégations.

17 Question: Compte tenu du fait que vous avez abordé cette question, vous

18 avez dit qu'il y avait une délégation qui est venue avec un Américain et

19 avec un officier de la JNA avec un haut gradé. Est-ce que vous vous

20 souvenez avoir dit cela?

21 Réponse: Il y avait un étranger, je ne sais pas s'il s'agissait d'un

22 Américain, mais je suppose que oui, et il y avait des hauts gradés. L'un

23 d'eux avait un grade très haut, je me ne me souviens plus lequel, mais il

24 y en avait plusieurs. Donc les personnes en uniforme serbe.

25 Qui c'était exactement? Je ne sais pas parce que nous n'avons pas parlé

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1 avec. Quand ils sortaient d'une pièce et entraient dans une autre, il y

2 avait un interprète, et j'ai réussi à donner signe à cet interprète de

3 vouloir parler en tête-à-tête, ce qu'elle a dit à ce monsieur, et lui a

4 donc transmis cela. Ce monsieur a prié les autres de sortir. Après quoi,

5 nous avons parlé avec ce politicien qui était en civil; il s'agissait de

6 cet étranger. Il y avait d'autres délégations qui arrivaient mais qui ne

7 sont pas entrées dans notre infirmerie. Mais je ne sais pas qui étaient

8 dans ces délégations.

9 Question: Vous avez dit que l'une de ces personnes était un officier de la

10 JNA, un haut gradé. Permettez-moi de vous demander la chose suivante: est-

11 ce que vous savez s'il s'agissait d'un officier de la JNA ou de la VRS, de

12 l'armée de la Republika Srpska?

13 Réponse: Expliquez-moi ce que signifie VRS?

14 Question: Cela signifie "armée de la Republika Srpska"?

15 Réponse: Je ne sais pas où est la différence.

16 Question: Quand vous dites qu'il s'agissait d'un officier de la JNA, vous

17 parlez en fait d'une personne en uniforme avec un haut grade, pour lequel

18 vous pensiez qu'il s'agissait d'un membre de la JNA. Est-ce exact?

19 Réponse: Oui, en tout cas, il appartenait au côté serbe. Mais si, à

20 l'époque, il existait des unités spéciales, je n'en ai aucune idée.

21 Question: A la page 7748 du compte rendu de l'affaire Stakic, vous avez

22 dit à la Chambre que lorsque, pour la première fois, vous êtes arrivé à

23 Trnopolje il n'y avait aucune trace visible sur laquelle vous avez pu

24 conclure qu'un camp était en train de se former, n'est-ce pas?

25 Réponse: J'ai dit que je n'ai pas du tout pensé au fait qu'il s'agissait

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1 d'un camp. J'ai vu beaucoup de soldats, femmes et enfants, et je n'ai pas

2 du tout eu cette idée qu'un camp aurait pu se former à l'époque.

3 Question: Là-bas, il n'y avait aucun barbelé ou aucune grille qui aurait

4 été placée auparavant?

5 Réponse: Il y avait un fil de fer qui menait de l'école, ou un fil de fer

6 -un grand- autour de ce magasin de matériel de construction qui existait

7 depuis l'époque avant la guerre.

8 Question: Et certaines parties de cette grille étaient si basses que vous

9 avez pu sauter cela?

10 Réponse: Cette petite grille, nous pouvions la sauter; qui se trouvait

11 devant l'infirmerie. Même la grille qui se trouvait autour de l'école

12 était assez basse pour pouvoir la sauter.

13 M. Ackerman (interprétation): Je vous prie de montrer au témoin la pièce à

14 conviction P1128.1. Il est possible qu'il s'agisse de la pièce à

15 conviction P1128.12. Il s'agit de la pièce à conviction qui porte les

16 indications rouges, mais il est possible que ce soit seulement le

17 Procureur qui dispose de ce document, de cette copie du document.

18 Mme Korner (interprétation): Je pense qu'il s'agit de la pièce à

19 conviction 1128.5.

20 M. le Président (interprétation): Il s'agit de 1128. Ce sont les

21 photographies, n'est-ce pas?

22 Mme Korner (interprétation): Oui, mais je pense que Me Ackerman pense à ce

23 petit plan, ce petit croquis portant des indications rouges. Il s'agit de

24 P1147.5.

25 M. Ackerman (interprétation): Oui, c'est cela. Merci.

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1 Monsieur, cette ligne rouge que vous avez dessinée ici montre où se

2 trouvait la grille qui a été placée après que les gens de Keraterm et

3 d'Omarska soient arrivés?

4 M. Merdzanic (interprétation): Cette grille a été préparée pour eux avant

5 leur arrivée. Et après qu'ils soient arrivés, donc cette grille existait.

6 Question: Au sud de cette grille, y compris l'entrepôt de matériel de

7 construction, cette partie se trouvait déjà là-bas, n'est-ce pas?

8 Réponse: Oui, au sud. Il s'agissait d'une grille assez haute qui entourait

9 cet entrepôt.

10 Question: Et il s'agissait du barbelé, n'est-ce pas?

11 Réponse: Oui, il s'agissait du barbelé.

12 Question: Et cette grille qui a été mise avant l'arrivée des gens

13 d'Omarska et de Keraterm, cette grille n'était pas du fil de fer barbelé

14 mais était faite de chaînes, n'est-ce pas?

15 Réponse: Non, je pense que de ce côté il y avait un filet et ce n'était

16 pas la grille très haute, au maximum un mètre et demi. De ce côté, vers la

17 route et vers la maison de culture, la hauteur était à peu près jusqu'au

18 niveau de la tête; il y avait un rang de barbelés au sommet. C'est ce côté

19 vers la route, vers la maison de la culture.

20 Mais ici, de ce côté-la, il ne s'agissait pas de barbelé et cette grille

21 était quelque peu plus basse.

22 Question: Je ne sais pas si vous étiez au courant ou pas, mais le fait est

23 que quand Penny Marshall est arrivée pour la première fois et lorsqu'elle

24 a filmé les gens de Trnopolje, elle est entrée dans la partie entourée par

25 le barbelé qui se trouvait autour de l'entrepôt de matériel de

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1 construction. Et elle a filmé de l'intérieur de cet espace, de cet enclos

2 pour montrer qu'il s'agissait du barbelé. Est-ce exact?

3 Réponse: Elle a filmé les gens et l'on peut voir les gens de ce côté,

4 c'est-à-dire de cet enclos, donc entouré de barbelés de l'entrepôt de

5 matériel de construction. Elle a filmé aussi les gens qui se trouvaient de

6 l'autre côté du fil de fer, entouré d'un autre barbelé.

7 M. Ackerman (interprétation): Cette grille, que vous avez donc indiquée

8 par une ligne rouge, se trouvait pendant deux semaines au plus tard. Après

9 quoi, elle a été enlevée, est-ce exact?

10 M. Merdzanic (interprétation): Oui, lorsque les premiers gens de Keraterm

11 et d'Omarska son arrivés ici. Après quoi, Penny Marshall est arrivée peu

12 de temps après. Après, il y avait un assez grand groupe d'Omarska qui a

13 été mis dans cet enclos de l'entrepôt de matériel de construction. Après

14 quoi, cette première grille a été démontée. Et cette autre grille, il y

15 avait la porte qui a été donc ouverte et cela aussi a été enlevé. Cela n'a

16 donc pas duré trop longtemps.

17 M. le Président (interprétation): Quand vous voudrez, Maître Ackerman.

18 M. Ackerman (interprétation): Je voudrais seulement poser une ou deux

19 questions encore. Après cela, nous pourrons suspendre, si vous le voulez

20 bien.

21 Donc pendant les dix jours où cette clôture s'est trouvée là, aucun des

22 autres détenus, aucune autre personne qui se trouvait là à Trnopolje ne

23 s'est trouvée à l'intérieur de cet enclos; c'étaient simplement les

24 personnes de Keraterm et d'Omarska, n'est-ce pas?

25 Réponse: A l'époque, c'était seulement les détenus qui avaient été mis à

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1 l'intérieur de cet enclos de Keraterm, et une partie de ceux qui se

2 trouvaient à Omarska dans cette autre partie clôturée. Par la suite,

3 lorsqu'on a enlevé les clôtures après la venue des journalistes, les

4 détenus ont pu, à ce moment-là, se mélanger entre eux.

5 M. Ackerman (interprétation): Je me demande si nous pourrions avoir une

6 suspension de 15 minutes seulement pour en finir.

7 M. le Président (interprétation): Nous allons avoir une brève suspension

8 de 15 minutes. Nous ferons tout notre possible pour en terminer avec le

9 contre-interrogatoire de ce témoin.

10 (L'audience, suspendue à 12 heures 34, est reprise à 12 heures 50.)

11 M. le Président (interprétation): Oui, Maître Ackerman?

12 M. Ackerman (interprétation): Dans votre témoignage dans l'affaire Stakic,

13 à la page 7787, vous avez dit que les hommes n'avaient pas le droit de

14 quitter le camp -hormis bien sûr le grillage qui a été monté pendant les

15 deux jours- mais la nuit, ils pouvaient le faire, n'est-ce pas, ils

16 pouvaient sauter ce grillage dans diverses parties du camp, n'est-ce pas?

17 M. Merdzanic (interprétation): C'était possible, comme dans toute autre

18 prison. Mais si vous avez en vue les gardes et les emplacements où étaient

19 postés les gardes, c'était peu probable. Et de toute manière, en sortant,

20 il y avait des gardes partout; donc ce n'était pas possible.

21 Question: Quelles étaient les motivations des personnes qui voulaient

22 partir? Où pouvaient-elles aller?

23 Réponse: Les Serbes contrôlaient tout, ils avaient le contrôle sur tout.

24 Ils auraient pu éventuellement rejoindre la montagne Kozara, la forêt, ou

25 bien essayer de rejoindre le territoire libre ou la Croatie.

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1 Donc, si quelqu'un était sûr que les Serbes le recherchaient, qu'ils

2 allaient le tuer, alors peut-être qu'il s'aventurerait. Mais des gens

3 comme moi ne voulaient pas être impliqués dans la guerre, cela ne nous

4 intéressait pas et on ne s'attendait à pas à ce que quelqu'un ait

5 l'intention de nous tuer, juste à cause du fait que nous étions Musulmans.

6 Question: Connaissez-vous quelqu'un qui a réussi à s'évader et à rejoindre

7 le territoire sûr à travers les montagnes?

8 Réponse: Non, je ne connais pas de noms de personnes ayant été détenues à

9 Trnopolje. Je sais que certains groupes de Kozarac ont tenté de rejoindre

10 la Croatie en passant par les montagnes, mais pour ce qui est de

11 Trnopolje, je ne dispose pas d'informations dans ce sens.

12 Question: Connaissez-vous quelqu'un au nom de Sejmenovic Mevludin?

13 Réponse: Sejmenovic Mevludin est un nom que je connais. Il me semble qu'il

14 était impliqué dans la politique, il était membre du SDA.

15 Question: Savez-vous qu'il est entré par lui-même à Trnopolje pendant la

16 nuit? Il y a passé un certain temps. Il en est sorti, et puis il est

17 revenu ensuite. Le savez-vous?

18 Réponse: Autant que je le sache, il a été emmené à Omarska. Je ne sais pas

19 de quelle manière il est rentré à Trnopolje. Peut-être qu'il a eu une

20 possibilité pendant que l'on récoltait la nourriture. Si le gardien n'y

21 prêtait pas attention, il était possible que quelqu'un se faufile à

22 l'intérieur du camp. Cela aurait été possible peut-être.

23 Question: Aurait-il pu se passer que les gens ne veuillent pas sortir de

24 Trnopolje puisqu'ils s'y sentaient en sécurité, vu la situation dans la

25 région?

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1 Réponse: Ce n'est pas exact. Lorsque le CICR est arrivé, donc vers la fin

2 de l'existence du camp, lorsque les détenus ont été enregistrés, à partir

3 de ce moment-là, effectivement, il était plus sûr d'être à Trnopolje

4 puisque le CICR exerçait le contrôle. A l'extérieur, les Serbes

5 maltraitaient les gens, les passaient à tabac, les emmenaient. Ce n'est

6 donc qu'à partir du moment où le CICR est arrivé et a enregistré les

7 détenus que, dans un certain sens, il était mieux de rester dans le camp.

8 Question: Vous avez dit au départ que, à Trnopolje, il n'y avait pas de

9 lits, il n'y avait pas de couvertures et que tout le monde se couchait par

10 terre pour y dormir, n'est-ce pas?

11 Réponse: Lorsque les gens sont arrivés à Trnopolje, à l'école même, dans

12 les locaux de l'école, il n'y avait pas de lits, il n'y avait que des

13 bancs d'école; à l'infirmerie, il n'y avait que deux lits. Les gens se

14 débrouillaient. Certains réussissaient à obtenir une couverture, même

15 nous-mêmes, on a réussi à acquérir deux ou trois couvertures. C'est la

16 population locale qui nous les a données. Mais c'était de la

17 débrouillardise. Les gardiens, certains d'entre eux, essayaient de nous

18 aider.

19 Tous les Serbes ne sont pas pareils. Je n'ai jamais dit qu'il n'y avait

20 pas de Serbes qui s'y opposaient, qui s'opposaient au fait de nous aider.

21 Il y en avait qui nous aidaient autant qu'ils le pouvaient.

22 Question: A votre sens, y avait-il beaucoup de lits et de couvertures à

23 Trnopolje qui auraient pu être fournis par la population?

24 M. Merdzanic (interprétation): Non. Hormis les lits qui se trouvaient dans

25 les maisons privées, il n'y avait rien d'autre. Peut-être que je ne peux

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1 pas vous dire si l'on aurait pu s'en procurer, si l'on pouvait s'en

2 procurer ailleurs.

3 M. Ackerman (interprétation): Est-il juste que certaines personnes sont

4 arrivées à Trnopolje de leur propre gré?

5 M. le Président (interprétation): Vous lui avez déjà posé la question,

6 Maître Ackerman.

7 M. Ackerman (interprétation): Mais ceci est différent.

8 Ils ont fait cela puisqu'ils pouvaient y trouver une possibilité de

9 quitter la région grâce au convoi qui était organisé?

10 M. Merdzanic (interprétation): Je ne suis pas au courant de cela. A ma

11 connaissance, après le nettoyage d'un village, les gens étaient transférés

12 au camp. On organisait un convoi. Il y avait des exceptions, des individus

13 qui, par l'intermédiaire de leurs amis serbes, venaient juste avant le

14 départ du convoi pour l'intégrer et pour pouvoir sortir de cette zone.

15 (Le Banc de l'accusation se consulte.)

16 Question: Vous avez fait une déclaration selon laquelle on peut y lire

17 qu'il s'agit d'un entretien avec le Dr Idriz Merdzanic et l'entretien a eu

18 lieu à Karlovac. Vous en souvenez-vous?

19 Réponse: C'est possible. Je ne me souviens pas. Il me semble qu'une

20 personne de l'ambassade des Etats-Unis recueillait les déclarations des

21 détenus.

22 Question: Une déclaration qui a été jointe à la déclaration que vous avez

23 faite aux représentants du Bureau du Procureur, donc ERN 00288977, page

24 34, en bas. Vous avez dit, s'agissant de Trnopolje -je cite-: "Les gens

25 venaient de partout. Ils dormaient dans leur voiture. Ils étaient de 9.000

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1 à 10.000 dans leur véhicule ou dans leur machine agricole.". (Fin de

2 citation.)

3 C'est correct?

4 Réponse: Peut-être, mais les gens étaient expulsés de chez eux et ils

5 étaient transférés à Trnopolje. Donc, bien sûr, une fois que vous êtes là-

6 bas, si quelqu'un vous chasse de chez vous, vous êtes ramené sous garde.

7 Question: Vous avez évoqué l'infirmerie à Trnopolje et vous avez dit qu'il

8 y avait une pénurie de médicaments. Donc vous pouviez aller dans des

9 maisons voisines pour y chercher des médicaments et les ramener à

10 Trnopolje?

11 Réponse: Il y avait des gardiens qui habitaient à Trnopolje, qui étaient

12 originaires de Trnopolje. Donc, avec certains d'entre eux, je pouvais

13 arriver à un accord pour qu'ils m'accompagnent, moi et Azra en général. Il

14 me semble qu'il y avait un soldat dont le nom était Nisevic qui était

15 toujours prêt à nous aider, c'était un soldat donc. Il nous autorisait à

16 sortir pour aller chercher des médicaments dans d'autres maisons. Mais

17 cela dépendait des gardiens, on ne pouvait le faire que si l'on

18 connaissait l'un des gardiens.

19 Question: Est-il donc exact de dire que Trnopolje était un camp de

20 transit?

21 Réponse: Une grande partie. Et peut-être que l'objectif principal de

22 Trnopolje était d'aider à évacuer la population musulmane de la région.

23 Mais c'était comme s'il y avait deux camps en un. On amenait les gens, on

24 les transportait, on les rassemblait, on les transportait à l'extérieur,

25 et on les expulsait de cette zone serbe.

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1 Pour ce qui est des femmes, des enfants et des personnes âgées, en

2 particulier des personnes qui étaient en âge de combattre, ils n'avaient

3 pas la permission de quitter le camp.

4 Donc, par rapport à Omarska et Keraterm, Trnopolje présentait les

5 conditions les plus favorables. Bien sûr, excepté les personnes qui

6 étaient particulièrement recherchées. L'objectif principal était

7 l'expulsion de force de la population musulmane de la région.

8 Les forces militaires serbes avaient rasé un village, avaient nettoyé

9 complètement un village. La Croix-Rouge serbe organisait le transfert de

10 la population. Ils organisaient donc les convois pour que la population

11 quitte cette zone. Et après une organisation que l'on appelait "les sśurs

12 serbes", "Kolo srpski Sestara", prenait la relève. C'était une sorte

13 d'organisation humanitaire qui prenait en charge alors les maisons

14 musulmanes et croates.

15 M. Ackerman (interprétation): Je vous prie, Monsieur, de bien répondre à

16 la question sinon on ne pourra pas terminer aujourd'hui.

17 M. le Président (interprétation): Maître Ackerman a raison, vous nous

18 parlez de choses qui ne constituent pas une réponse directe à la question.

19 M. Merdzanic (interprétation): Excusez-moi, mais Trnopolje peut être

20 défini comme un camp qui a servi pour le transfert de la population

21 musulmane.

22 M. Ackerman (interprétation): A Trnopolje, avant l'arrivée de la Croix-

23 Rouge et avant que les personnes soient enregistrées, il y avait beaucoup

24 de soldats armés à cette période précise dans la zone?

25 M. Merdzanic (interprétation): Avant l'arrivée du CICR?

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1 Question: Oui.

2 Réponse: Il y avait des gardes, il y en avait beaucoup. Il y avait

3 beaucoup de soldats lorsque nous sommes arrivés. Et quelques jours plus

4 tard, le commandant Kuruzovic est arrivé et la garde était assurée 24

5 heures sur 24?

6 M. Ackerman (interprétation): Il y avait des mitrailleuses? C'est ce que

7 vous nous avez dit, n'est-ce pas?

8 M. Merdzanic (interprétation): Cela dépendait des équipes de garde.

9 Chacune apportait ses armes.

10 M. le Président (interprétation): On ne vous a pas posé une question qui

11 exigeait une telle réponse. On vous a demandé s'il y avait des

12 mitrailleuses, des nids de mitrailleuses, alors répondez par oui ou par

13 non.

14 Allez-y, Maître Ackerman.

15 M. Ackerman (interprétation): Vous avez dit, dans l'affaire Stakic, que

16 certaines personnes, y compris les Foric par exemple, avaient été tuées?

17 M. Merdzanic (interprétation): Je n'étais pas présent, mais il me semble

18 qu'ils ont été tués par balle.

19 Question: Il y avait certainement beaucoup de soldats et beaucoup d'armes

20 qui tiraient et qui tuaient tout le monde à Trnopolje, n'est-ce pas? Ils

21 auraient pu le faire?

22 Réponse: Oui, c'est exact. Ils auraient pu le faire.

23 Question: Ils auraient pu tuer tout le monde à Keraterm au lieu de les

24 amener à Trnopolje, n'est-ce pas?

25 Réponse: Oui.

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1 Question: Il en va de même pour les personnes d'Omarska?

2 Réponse: C'est exact.

3 Question: Parmi les documents qui nous ont été fournis et qui figurent

4 parmi les documents joints à votre déclaration, il y en a un… Il s'agit en

5 fait d'un compte rendu qui a été fait en Angleterre, il s'agit d'un compte

6 rendu de votre témoignage, n'est-ce pas?

7 Réponse: Oui.

8 Question: De quoi s'agit-il?

9 Réponse: On parlait surtout du fil, l'autre partie affirmait qu'il n'y

10 avait jamais eu de fil de fer -ce que vous affirmez vous-même-, qu'il n'y

11 avait pas de camp, qu'il ne s'agissait pas de camp, que les gens pouvaient

12 sortir et entrer comme ils le désiraient.

13 M. Ackerman (interprétation): Et Penny Marshall est entrée par cette

14 clôture en fil de fer, elle a pris des photographies afin que l'on puisse

15 voir que le camp avait effectivement été entouré de barbelé?

16 Mme Korner (interprétation): Je soulève une objection à la question et...

17 M. Ackerman (interprétation): Je la retire. De toutes les manières, je ne

18 veux pas que le témoin y réponde.

19 A la page 7789 du compte rendu dans l'affaire Stakic, vous avez dit: "Même

20 après l'arrivée des journalistes… Même l'arrivée des journalistes a été

21 approuvée par Karadzic.". Pouvez-vous me dire si Karadzic a été confronté

22 lors de la conférence de Londres aux médias, aux rapports des médias

23 concernant justement Omarska -il a nié l'existence des camps-, et par la

24 suite, suite à des pressions, il a donné l'ordre aux autorités de la zone

25 de Prijedor de permettre l'accès aux journalistes?

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1 Réponse: Je ne sais pas si cela s'est produit. J'ai juste entendu dire que

2 Karadzic était la personne qui avait autorisé que l'on visite les camps.

3 Question: Si c'est Karadzic qui l'a fait, les autorités d'Omarska n'ont

4 pourtant pas permis aux journalistes de visiter de nombreuses parties de

5 ce camp?

6 Réponse: C'est ce que j'ai appris par la suite.

7 Question: Le convoi qui a quitté Trnopolje, et où les gens étaient obligés

8 de signer les documents selon lesquels ils cédaient leur propriété à la

9 Republika Srpska, était le convoi organisé par le CICR et le HCR, n'est-ce

10 pas?

11 Réponse: Oui.

12 Question: Et les responsables du CICR et le HCR vous ont dit de signer ce

13 document -et je cite vos paroles-: "Puisqu'il n'y a pas de loi qui

14 autoriserait l'existence de ces documents, ces documents ne pourraient

15 donc jamais être utilisés.". C'est bien ce que vous avez dit dans

16 l'affaire Stakic?

17 Réponse: C'est exact.

18 Question: Brièvement, je souhaiterais vous poser une ou deux questions

19 concernant les viols qui auraient eu lieu à Trnopolje. Vous nous avez dit

20 que, dans une certaine mesure, ces viols étaient commis par des soldats

21 membres d'une unité de blindés qui s'appelait "El maniacos"?

22 Réponse: Oui.

23 Question: Savez-vous quelque chose à leur sujet: d'où ils venaient, qui

24 ils étaient?

25 Réponse: Je ne sais rien au sujet de cette unité.

Page 11819

1 Question: Le commandant de Trnopolje à un moment donné, le commandant

2 Kuruzovic, a accusé, après avoir entendu les accusations à l'encontre d'un

3 des soldats qui aurait violé des femmes, il aurait donc été arrêté et

4 incarcéré?

5 Réponse: Je ne sais pas si c'est le commandant Kuruzovic qui l'a fait,

6 mais je sais que l'un des soldats a été effectivement -c'est ce que j'ai

7 entendu dire- enfermé dans la caserne.

8 Question: Donc il s'agit bien là d'une personne qui estimait qu'il était

9 justifié de punir quelqu'un pour ce qu'il avait fait?

10 Réponse: Oui, c'est ce qui semble être le cas.

11 Question: Les autorités de Trnopolje avaient, en fait, donné

12 l'autorisation à ces personnes, à ces femmes pour qu'elles soient emmenées

13 à Prijedor et pour qu'elles soient examinées pour prouver si elles avaient

14 effectivement été violées?

15 Réponse: Oui, j'en ai discuté avec Dusko Ivic, c'est lui qui a emmené

16 quelques-unes de ces femmes à Prijedor. Je ne sais pas avec qui il en a

17 parlé au juste.

18 Question: Et le Dr Ivic est Serbe, n'est-ce pas?

19 Réponse: Oui.

20 Question: Et les autres soldats membres de cette unité "El Maniakos",

21 lorsqu'ils ont entendu que l'un de leurs membres avait été arrêté et

22 incarcéré à Prijedor, ils s'y sont rendus avec leurs chars et ils ont

23 exigé qu'il soit relâché?

24 Réponse: Je ne sais pas comment cela s'est produit, mais je sais qu'ils

25 sont allés là-bas et qu'ils ont obtenu la libération de ce soldat.

Page 11820

1 Question: Mais, dans votre déclaration, il figure que les canons des chars

2 étaient dirigés vers la caserne?

3 Réponse: Je n'y étais pas personnellement, donc je ne peux pas le dire.

4 Question: Pendant votre déposition dans l'affaire Stakic -en fait, il

5 s'agit d'un extrait vidéo qui a été présenté- pendant la présentation de

6 cet extrait vidéo, le narrateur dit -nous l'avons peut-être vu

7 aujourd'hui- que le Dr Idriz dit que le commandant du camp militaire de

8 Trnopolje a essayé de faire punir un violeur.

9 Et puis, ensuite, apparemment, c'est vous qui dites: "Lorsque les autres

10 soldats ont appris cela -à la page 7798-, lorsque les autres soldats ont

11 appris cela, ils se sont saoulés, ils ont pris deux chars et les ont

12 amenés devant la caserne et ont lancé un ultimatum pour que ce soldat soit

13 relâché, sinon ils tireraient sur leur propre caserne. De sorte que ce

14 soldat a été relâché.". (Fin de citation.)

15 Et puis, il y a une vidéo où vous dites cela. Est-ce que vous me dites que

16 c'est cela que vous avez bien compris ou est-ce que vous avez inventé

17 cela?

18 Réponse: Aucun soldat n'a été arrêté à Trnopolje. En tout cas, aucun

19 violeur. J'ai entendu dire que l'un de ces soldats avait été arrêté et mis

20 en garde à vue dans la caserne, et que ces conducteurs de chars l'avaient

21 libéré. Et par la suite, ils sont aussi venus à Trnopolje avec deux chars.

22 Question: S'ils sont allés à la caserne et ont pointé leurs canons vers

23 les casernes pour demander et exiger qu'on le relâche, ce n'est

24 certainement pas dans le cadre d'une discipline militaire normale, n'est-

25 ce pas, selon vous?

Page 11821

1 Réponse: (inaudible.)

2 M. Ackerman (interprétation): Je sais que le témoin a répondu, mais je ne

3 sais pas ce qu'il a répondu.

4 M. le Président (interprétation): Oui, quelle est sa réponse?

5 M. Merdzanic (interprétation): J'ai dit: c'est exact. Exact.

6 M. Ackerman (interprétation): Bien, nous avons compris.

7 Dans votre première déclaration faite au Procureur, à la page 17, vous

8 avez déclaré ceci, je ne sais pas si vous vous rappelez l'avoir dit:

9 "Avant que les journalistes ne viennent, les Serbes avaient démantelé le

10 camp de Keraterm de façon à prétendre que personne n'y avait jamais été.

11 La même chose s'est passée pour Omarska.". (Fin de citation.)

12 Est-ce que vous vous rappelez avoir dit cela?

13 Réponse: C'est possible que j'aie dit cela parce qu'ils ont démantelé

14 Keraterm. Et, si vous continuez ce qui est écrit dans ma déclaration, je

15 crois que je l'ai dit, Omarska avait été en partie démantelée, qu'un

16 certain nombre de détenus y sont restés, pour lesquels on a préparé des

17 lits, apporté de la nourriture, et après cela, on les a montrés à des

18 journalistes.

19 Question: Vous savez que, lorsque les journalistes sont venus pour la

20 première fois à Omarska, toutefois, il y avait un grand nombre de

21 personnes qui étaient encore détenues, que certaines personnes sont venues

22 par la suite de Trnopolje, enfin, certaines personnes…

23 Est-ce que vous saviez cela?

24 Réponse: Je ne sais pas où ils étaient. En tout état de cause, ils

25 n'étaient pas encore arrivés à Trnopolje, les journalistes ne les ont pas

Page 11822

1 vus à Omarska et ils n'ont pas eu accès à toutes les pièces. Je ne sais

2 pas où se trouvaient ces personnes à ce moment-là.

3 Question: Voulez-vous regarder, s'il vous plaît, la pièce à conviction

4 portant la cote P1134, s'il vous plaît?

5 (Intervention de l'huissier.)

6 Question: Ce que vous avez devant vous, Monsieur le Président, Mesdames

7 les Juges, vous avez déjà vu cela. Ce que vous avez devant vous, c'est un

8 document qui porte pour titre "Rapport de la commission sur l'inspection

9 des centres de rassemblement et autres installations pour des captifs dans

10 la Région autonome de la Krajina", et datée du 17 août 1992.

11 Ce que je voudrais faire, c'est appeler votre attention sur la deuxième

12 partie de ce document. Une partie qui a pour titre "Omarska près de

13 Prijedor". Paragraphe... Vous trouverez le paragraphe qui commence par les

14 mots: "Les prisonniers sont gardés".

15 Il est dit: "Les prisonniers sont gardés dans une sorte de hangar

16 contenant des lits de camp militaires et des installations sanitaires.

17 L'alimentation est fournie par une cantine. Les aliments sont préparés

18 dans le bâtiment central et il y a donc un self service; il y a une

19 infirmerie qui se trouve dans l'un des bureaux et qui a un médecin et un

20 infirmier pour administrer les premiers soins selon les besoins. Lorsqu'il

21 s'agit de cas plus sérieux, les prisonniers sont transférés aux centres

22 médicaux de Banja Luka et de Prijedor.". (Fin de citation.)

23 Alors, vous avez dit auparavant que vous saviez qu'après que la plupart

24 des personnes ont été enlevées d'Omarska, un certain nombre de personnes

25 qui étaient restées là ont reçu de la nourriture, des lits de camp et des

Page 11823

1 draps, de sorte que, lorsque les journalistes y sont venus pour la

2 deuxième fois, ils ont vu une situation qui leur paraissait assez normale.

3 Est-ce exact?

4 Réponse: C'est vrai, j'ai parlé à de nombreux détenus d'Omarska qui s'y

5 trouvaient, et ce que je sais, c'est que ces lits ont été montés avant

6 l'arrivée des journalistes, de façon à montrer aux journalistes des

7 conditions d'existence qui, en fait, n'existaient pas réellement. Il y a

8 de nombreux témoins d'Omarska. Je n'étais pas à Omarska moi-même, donc je

9 ne peux pas attester moi-même.

10 Question: La déclaration que je viens de lire de votre rapport n'est-elle

11 pas compatible avec ce que vous avez… N'est-elle pas logique par rapport à

12 ce que vous avez entendu?

13 Réponse: Non, ce n'est pas le cas.

14 Question: Je reviens à la section qui porte le chiffre 1, Trnopolje près

15 de Prijedor. Vous comprenez que nous parlons d'août 1992. (Inaudible.)

16 Ceci étant entendu, au deuxième paragraphe, le nombre de résidents dans ce

17 centre change tous les jours parce que leur mouvement n'est nullement gêné

18 et ils peuvent partir pour une destination de leur choix, après avoir

19 obtenu les documents nécessaires.". (Fin de citation.)

20 Est-ce exact?

21 Réponse: Une partie de cela est vrai. Après la visite des journalistes,

22 lorsque les fils de fer ont été ôtés, des visites ont été autorisées au

23 camp; ce qui veut dire que les femmes dont le mari ou les enfants se

24 trouvaient dans le camp ont reçu l'autorisation d'y venir pour leur

25 apporter de la nourriture. Elles laisseraient leur carte d'identité entre

Page 11824

1 les mains des gardes et, après un certain temps, elles pourraient

2 repartir, reprendre leur carte d'identité et quitter le camp.

3 Question: Bien. Je n'ai plus que quelques questions à poser. Je voudrais,

4 s'il vous plaît, que l'on présente à nouveau la photographie P1128-26. Je

5 crois que c'est celle-là que je voudrais que l'on présente et que vous

6 regardiez.

7 (Intervention de l'huissier.)

8 Oui, c'est bien celle-là.

9 Voici une photographie, Monsieur le Témoin, qui est donc un conduit à

10 l'intérieur de l'infirmerie, que vous avez décrite, c'est l'entrée, ainsi

11 que du cabinet dentaire, n'est-ce pas?

12 Réponse: Oui, c'est à la clinique de Kozarac.

13 Question: Et ceci a été pris 4 ans après les combats qui s'y sont

14 déroulés, n'est-ce pas?

15 Réponse: (La réponse n'a pas été entendue. Pas d'interprétation.) Oui,

16 c'est exact.

17 Question: Et est-ce que ce bâtiment a été endommagé par la suite, au cours

18 des 4 années qui ont suivi, n'est-ce pas?

19 Réponse: Je crois que des dommages ont aussi été causés par les

20 intempéries, avec le temps qui s'est écoulé.

21 Question: Il semble qu'il y ait eu une inondation à cet endroit-là. Si

22 vous regardez ces poteaux qui se trouvent devant, la marque noire que l'on

23 voit jusqu'en haut des marches semble indiquer qu'il y ait eu une

24 inondation, et que ceci se soit trouvé sous l'eau à un moment donné;

25 n'est-ce pas? Est-ce que vous avez entendu parler d'une inondation à cet

Page 11825

1 endroit-là?

2 Réponse: Non, pas autant que je sache, non. Kozarac est sur une élévation,

3 plus particulièrement l'infirmerie, il n'est donc pas possible que ce

4 secteur ait été inondé. Pour qu'une inondation puisse monter à cette

5 hauteur, il faudrait qu'il y ait eu beaucoup, beaucoup de pluie, il

6 faudrait que tout soit détrempé et que le niveau d'eau soit monté

7 suffisamment haut pour entrer dans l'infirmerie. Je n'arrive pas à le

8 croire.

9 Question: Bien. Cette infirmerie servait à l'ensemble du secteur de

10 Kozarac, cette clinique en l'occurrence?

11 Réponse: C'est exact.

12 Question: Et tous ceux qui vivaient là, n'est-ce pas? Ce n'était pas

13 seulement une clinique pour Musulmans?

14 Réponse: C'est exact. Et aussi les personnes qui travaillaient là

15 n'étaient pas seulement des Musulmans, il y avait d'autres personnes.

16 Question: Ce symbole que vous voyez à deux endroits sur ce bâtiment, avec

17 un cercle et un "x" à l'intérieur, cela n'avait rien à voir avec le fait

18 qu'il s'agissait d'un bâtiment pour Musulmans?

19 Réponse: Non. Je ne crois pas que cela ait eu quoi que ce soit à voir avec

20 cela parce que cela n'aurait pas de sens; ce n'était pas un bâtiment pour

21 Musulmans.

22 Question: Mais ce symbole, comme vous le savez, est un symbole

23 international qui concerne les bâtiments qui doivent être réparés ou qui

24 risquent de s'effondrer; c'est donc une indication pour dire de faire

25 attention de ne pas rentrer dans des bâtiments qui sont dans un tel état

Page 11826

1 de délabrement. Est-ce que vous savez cela?

2 Réponse: Non, je ne suis pas au courant. Je ne connais pas ce genre de

3 symbole.

4 Question: Au cours de votre interrogatoire direct concernant certaines

5 personnes qui rejoignaient les convois et qui étaient à Trnopolje, vous

6 avez utilisé les membres de phrases de personnes qui étaient bannies de ce

7 territoire, n'est-ce pas?

8 Réponse: C'est exact.

9 Question: Est-il vrai que ces personnes demandaient à grands cris de

10 monter sur ces autobus? Ils exigeaient de monter sur ces autobus et de

11 partir de là?

12 Réponse: C'est exact. Les gens voulaient en fin de compte partir de ce

13 territoire le plus vite possible, afin de ne pas être exposés à des

14 dangers.

15 Question: Oui. Est-ce que vous savez -c'était très peu de temps après

16 votre arrivée à Trnopolje- que la Croix-Rouge serbe est venue, n'est-ce

17 pas?

18 Réponse: C'est vrai.

19 Question: Est-ce que vous savez si la Croix-Rouge serbe est jamais venue à

20 Keraterm ou à Omarska?

21 Réponse: C'est quelque chose que je ne sais pas.

22 Question: Trnopolje, dans la mesure où il y avait une administration, elle

23 était essentiellement confiée à l'armée, n'est-ce pas? Le commandant était

24 militaire, les gardes étaient des militaires, et ainsi de suite, n'est-ce

25 pas?

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1 Réponse: Oui, c'est exact. Baltic Rade était souvent là, ainsi que Ostoja

2 Skrbic; c'étaient des civils. Qu'ils aient eu un rôle là-dedans? Ça, je

3 n'en sais rien.

4 Question: Les photographies qui ont été prises avec l'appareil que Azra

5 avait fait entrer dans le camp de Trnopolje, les deux photographies que

6 vous nous avez présentées plus tôt de Nedzad Jakupovic, vous avez dit que,

7 lorsque vous avez pris ces photographies, vous avez essayé de le faire de

8 telle sorte que la personne dont la photographie était prise ne saurait

9 pas qu'elle était photographiée. Est-ce cela que vous avez dit?

10 Réponse: Dans tous les cas, nous espérions que la personne ne remarquerait

11 pas qu'on la photographiait.

12 Question: Il me semble que ces photographies ont été prises avec un flash,

13 est-ce que je me trompe?

14 Réponse: Non, vous avez peut-être raison, peut-être qu'on les a prises

15 avec un flash. Mais Azra saurait si l'appareil avait un flash ou non, mais

16 je pense que vous avez raison.

17 Question: Avez-vous jamais vu la vidéo dans laquelle le commandant Nedzad

18 Jakupovic décrit comment il a été blessé à l'śil?

19 Réponse: Je ne me souviens pas, c'est possible que je l'ai vu mais je ne

20 m'en souviens pas.

21 Question: Vous a-t-il dit comment il a été blessé à l'śil?

22 Réponse: Non, pas particulièrement en ce qui concerne son oeil, il a été

23 passé à tabac plusieurs fois. Nous avons seulement pris une photographie

24 la première fois. Par la suite, nous avons eu davantage de contacts avec

25 lui, il nous a dit qu'il avait été battu.

Page 11828

1 Question: Est-ce qu'il vous a dit qu'il a été blessé à l'śil alors qu'il

2 essayait de sauter par une fenêtre et qu'il s'était cogné contre le mur en

3 essayant de le faire?

4 Réponse: Non, il ne m'a pas dit cela.

5 Question: Vous avez parlé des documents que vous deviez signer, que vous

6 étiez requis de signer avant de pouvoir vous joindre au dernier convoi et

7 emmené de Trnopolje. Vous dites que vous l'avez déchiré et que vous l'avez

8 jeté. Est-ce que cela veut dire que vous avez refusé de le signer?

9 Réponse: Non. C'est seulement lorsque j'ai quitté le camp et que l'on est

10 arrivé à Karlovac –je ne sais pas si c'était de colère- mais j'ai pris ce

11 document et je l'ai déchiré. Maintenant, je souhaiterais l'avoir gardé,

12 parce que j'ai dû le signer et je ne l'ai déchiré qu'après avoir quitté le

13 territoire serbe.

14 Question: Donc, en fait, vous l'avez signé. Il devrait donc y avoir un

15 exemplaire quelque part, l'exemplaire que vous avez signé?

16 Réponse: Cela devrait être le cas.

17 Question: Madame Korner vous a demandé si vous étiez retourné à Prijedor

18 depuis que l'on vous a -selon ses propres termes- expulsé de là. Dites-

19 nous ce qui vous a empêché de prendre le dernier convoi, ce qui a essayé

20 de vous empêcher de prendre le dernier convoi?

21 Réponse: Que voulez-vous dire? Je n'ai rien fait pour ne pas prendre ce

22 convoi. Bien sûr que je voulais être compris parmi ceux qui prendraient ce

23 convoi comme les autres détenus. Parce que je voulais quitter ce

24 territoire où, tous les jours, on était en danger; on risquait tous les

25 jours de se faire tuer.

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1 Question: La dernière chose que Mme Korner vous a demandé, c'était une

2 question qui vous avez été posée par, je crois, le Juge Schomburg dans

3 l'affaire Stakic -je crois que c'était le Juge Schomburg- qui était de

4 savoir qui était responsable de ce qui s'était passé. Et vous avez donné

5 une réponse assez longue à cette question, qui était essentiellement ce

6 que vous deviniez comme pouvant être le responsable. Mais, en réalité,

7 vous n'en savez rien, n'est-ce pas?

8 M. Merdzanic (interprétation): C'est exact.

9 M. Ackerman (interprétation): C'est tout ce que j'avais à demander. Je

10 vous remercie, Monsieur le Président.

11 M. le Président (interprétation): Madame Korner, avez-vous des questions

12 supplémentaires?

13 (Interrogatoire principal supplémentaire du témoin, M. Idriz Merdzanic,

14 par Mme Korner.)

15 Mme Korner (interprétation): Est-ce que vous auriez quitté votre domicile

16 à Prijedor et votre clinique si l'attaque sur Kozarac n'avait pas eu lieu?

17 M. Merdzanic (interprétation): Bien sûr que non je n'aurais pas voulu

18 quitter cette région si la guerre et tous ces événements n'avaient pas eu

19 lieu.

20 Question: Lorsque vous êtes monté sur ce bus, lorsque vous avez été emmené

21 à Karlovac, vous nous avez dit que vous vouliez sortir de ce secteur. Est-

22 ce que vous faisiez cela volontairement, de votre propre volonté, en toute

23 liberté?

24 Réponse: Je n'ai pas bien compris la question. Que voulez-vous dire par

25 "est-ce que je voulais prendre volontairement ce bus ou est-ce que je

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1 voulais aller plus loin une fois que j'aurais atteint Karlovac?" Je ne

2 suis pas sûr de votre question.

3 Question: Lorsque vous êtes monté sur ce bus, l'un des derniers bus qui a

4 quitté Trnopolje, est-ce que c'était parce que vous vouliez quitter la

5 région de Prijedor pour de bon, définitivement?

6 Réponse: Je ne pensais pas que je quittais la région pour toujours mais, à

7 ce moment-là, j'étais heureux de pouvoir partir de là. Je pensais

8 toutefois que j'y reviendrais un jour.

9 Question: Mais vous étiez heureux de quitter cet endroit pourquoi?

10 Réponse: A cause des incertitudes dans le camp, la crainte que n'importe

11 quel jour une personne pourrait venir vous tuer ou vous battre; c'était

12 insupportable non seulement pour moi, mais pour la majorité des détenus

13 dans le camp ou même ceux qui étaient dans des maisons. Ils étaient tous

14 soulagés de pouvoir quitter cette zone de façon qu'ils ne soient plus… de

15 façon à n'être plus en danger.

16 Mme Korner (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Témoin, je vous

17 remercie, Docteur.

18 M. le Président (interprétation): Docteur Merdzanic, votre déposition

19 prend fin. Vous devriez pouvoir rentrer chez vous assez rapidement. Comme

20 vous avez vu, votre déposition a duré juste la durée de cette audience, ce

21 qui est très bien.

22 Toutefois, avant que vous ne quittiez cette salle d'audience, j'ai le

23 devoir et la responsabilité de vous remercier d'avoir accepté de venir

24 témoigner devant cette Chambre. Et je peux vous assurer que l'on prendra

25 soin de vous entre maintenant et votre retour dans votre pays.

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1 L'huissier va maintenant vous escorter hors de la salle d'audience et je

2 vous remercie à nouveau.

3 M. Merdzanic (interprétation): Je vous remercie aussi, Monsieur le

4 Président et Mesdames les Juges.

5 (Le témoin, M. Idriz Merdzanic, est reconduit hors du prétoire.)

6 (Questions relatives à la procédure.)

7 M. le Président (interprétation): Nous reprendrons le 20.

8 M. Ackerman (interprétation): Je crois que c'est dans l'après-midi du 20,

9 Monsieur le Président.

10 M. le Président (interprétation): Oui, je crois que c'est le cas.

11 M. Ackerman (interprétation): Il y a une question que je voudrais porter à

12 votre attention, sur laquelle vous pourriez peut-être dire un mot pour

13 faciliter les choses.

14 Nous avons un problème. J'ai fourni à M. Brdjanin les enregistrements de

15 l'affaire Stakic, et quand on l'a transféré depuis le centre

16 pénitentiaire, on les lui a pris, ces enregistrements. On a dit qu'on les

17 lui rendrait ce soir-là, on ne l'a pas fait.

18 Il m'a appelé samedi matin pour me dire qu'il n'avait toujours pas les

19 enregistrements. J'ai enquêté à ce sujet au centre pénitentiaire et,

20 finalement, nous avons réussi à les trouver. Ils avaient été remis à

21 quelqu'un d'autre, ce qui a causé certaines craintes.

22 Qu'en aurait-il été s'il s'était agi d'un témoin protégé? En tout état de

23 cause, il faudrait qu'un mécanisme soit mis en place de façon à ce que je

24 puisse lui remettre ces enregistrements et qu'il puisse les emmener dans

25 sa cellule, sans qu'ils soient remis à des personnes qui n'ont pas le

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1 besoin d'en connaître, et, en particulier, si nous traitons de témoins

2 protégés.

3 Heureusement, j'ai pu, avec différents coups de téléphone le samedi, les

4 faire retrouver et les obtenir pour midi ce samedi. Et nous avons pu avoir

5 un entretien vers la fin de la journée de dimanche, sur ce qu'il avait pu

6 entendre.

7 M. le Président (interprétation): Je vous remercie, Maître Ackerman,

8 d'avoir évoqué cette question. La Chambre ordonne que cette partie du

9 compte rendu soit copiée et communiquée à M. Tim McFadden pour son

10 information et pour les mesures qu'il jugera appropriées de prendre

11 maintenant et à l'avenir, de façon à éviter que se répète des faits et des

12 incidents de ce genre.

13 Madame Korner?

14 Mme Korner (interprétation): Monsieur le Président, la seule question que

15 j'ai à poser. Vous alliez poser des questions et savoir si nous allions

16 trouver une salle d'audience où nous pourrions siéger le vendredi 22,

17 parce que, pour le moment, les salles vont devoir être libérées pour

18 entretien.

19 M. le Président (interprétation): Oui.

20 Mme Korner (interprétation): Si votre personnel pourrait nous faire

21 savoir, afin que nous sachions comment nous organiser et pour quels

22 témoins?

23 M. le Président (interprétation): Madame la Greffière, si vous voulez

24 bien, pourriez-vous vous renseigner à ce sujet et nous renseigner?

25 M. Ackerman (interprétation): Il faudrait vraiment que je sache qui sera

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1 le témoin dès demain.

2 Mme Korner (interprétation): Certainement, nous pouvons prévenir Me

3 Ackerman qui viendra le 20. La question est de savoir qui d'autre va venir

4 parce que, d'après mes souvenirs, toutes les personnes qui sont sur la

5 liste vont effectivement -comme le témoin d'aujourd'hui- venir. Mais je

6 suis d'accord avec Me Ackerman, que nous pourrions essayer de savoir tout

7 cela, de savoir demain où la Chambre pourra siéger.

8 M. le Président (interprétation): L'audience est levée.

9 (L'audience est levée à 13 heures 46.)

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