Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Mercredi 5 mars 2003.)

2 (L'audience est ouverte à 14 heures 19.)

3 (Audience publique.)

4 M. le Président (interprétation): Veuillez vous asseoir.

5 (L'accusé, M. Brdjanin, est introduit dans le prétoire.)

6 M. le Président (interprétation): Bonjour, Madame la Greffière. Pouvez-

7 vous, s'il vous plaît, appeler l'affaire?

8 Mme Chen (interprétation): Bonjour. C'est l'affaire IT-99-36-T, le

9 Procureur contre Radoslav Brdjanin.

10 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.

11 Monsieur Brdjanin, m'entendez-vous dans une langue que vous comprenez?

12 M. Brdjanin (interprétation): Oui, je vous entends et je vous comprends.

13 M. le Président (interprétation): Je vous remercie. Bonjour à vous aussi.

14 Présentez-vous, l'accusation.

15 Mme Richterova (interprétation): Bonjour. Je suis Anna Richterova et je

16 suis assistée par Denise Gustin.

17 M. le Président (interprétation): La défense?

18 M. Ackerman (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président. Je suis John

19 Ackerman et je suis assisté par Barbara Baruch, Marela Jevtovic et M.

20 Trbojevic.

21 M. le Président (interprétation): Bonjour à vous aussi, je vous en prie.

22 Mme Richterova (interprétation): J'ai trois petits points à avancer.

23 D'abord, Mme Korner m'a informé qu'en ce moment, elle se trouvait dans le

24 prétoire pour la cause de Stakic jusqu'à 16 heures et je demande si l'on

25 peut parler d'une pièce de la remise de l'audience.

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1 M. le Président (interprétation): Je n'ai aucun problème avec cela.

2 Monsieur Ackerman, je vois, n'a non plus pas de problème avec cela. Alors

3 nous pouvons en informer Mme Korner et nous lui dirons si nous en

4 discutons à 16 heures ou avant l'audience.

5 Mme Richterova (interprétation): Le deuxième point concerne le fait que

6 nous n'ayons toujours pas reçu une réponse concernant les témoins de la

7 liste 92bis de Prnjavor. Et comme nous avons commencé à appeler ces

8 témoins de cette commune, nous aimerions pouvoir recevoir cette réponse.

9 M. Ackerman (interprétation): J'aurais cette réponse dès que possible. Je

10 fais de mon mieux. En tout cas, la réponse sera prête avant lundi. C'est

11 le mieux que je puisse faire et je dois lire encore beaucoup, beaucoup de

12 pages.

13 M. le Président (interprétation): Etes-vous contente?

14 Mme Richterova (interprétation): Oui, nous aimerions pouvoir le recevoir

15 plus tôt, mais nous comprenons le problème.

16 M. Ackerman (interprétation): Je viens de comprendre que peut-être je

17 pourrais le faire avant.

18 M. le Président (interprétation): Si vous pouviez le faire, ne serait-ce

19 qu'en partie, si vous pouviez donner une réponse partielle comme nous

20 l'avons déjà fait, cela faciliterait la situation pour l'accusation.

21 Mme Richterova (interprétation): Et le dernier point concerne les

22 photographies de M. Odobasic dont nous avons déjà discuté. Il m'a été dit

23 qu'il serait utile d'en discuter en son absence.

24 Je voudrais juste informer la Chambre que je me suis entretenu avec

25 l'enquêteur qui a reçu la déposition en mars 1999. Il n'a pas pu se

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1 souvenir exactement de la déposition, du moment où il l'a prise. Mais

2 comme il a introduit une phrase disant qu'il avait fourni ces photos en

3 faisant sa déposition, l'enquêteur croit que cela a été vraiment ainsi.

4 Moi, j'ai vérifié les formulaires qui doivent être remplis chaque fois que

5 l'on prend une nouvelle déposition. Et dans ces formulaires, j'ai trouvé

6 effectivement que, le 15 mars 1999, l'enquêteur avait reçu ces

7 photographies. On y lit que ces photographies sont le résultat du passage

8 à tabac en 1993. Et c'est la raison pour laquelle nous n'avons pas prêté

9 une attention particulière à cela, du fait que cela dépasse la période

10 concernée par l'Acte d'accusation. Mais, en plus du fait que nous n'avons

11 pas communiqué cette documentation, il n'y a rien d'autre que nous avons

12 cherché à cacher, aucune pièce à conviction. Personnellement, j'ai vu ces

13 photographies, je les ai vues dimanche dernier quand j'ai eu un entretien

14 avec le témoin. Et je les ai rendues au témoin en lui disant que je

15 n'avais pas l'intention de les utiliser comme une pièce à conviction dans

16 cette audience.

17 M. Ackerman (interprétation): S'il vous plaît.

18 M. le Président (interprétation): Maître Ackerman.

19 M. Ackerman (interprétation): Monsieur le Président, j'espère n'avoir rien

20 dit qui ferait croire à l'accusation que son comportement n'aurait pas été

21 correct concernant la communication. Mais le témoin après avoir prêté

22 serment dit n'avoir rien donné à l'enquêteur. C'est cela qui m'inquiète et

23 c'est pour cela que je demande qu'une enquête soit engagée.

24 M. le Président (interprétation): Très bien. J'ai l'intention d'en parler

25 avec le témoin une fois que le contre-interrogatoire sera terminé.

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1 Je vous en prie, Maître Ackerman, si vous êtes prêt?

2 M. Ackerman (interprétation): Mais nous n'avons toujours pas de témoin.

3 (Le témoin, M. Jasmin Odobasic, est introduit dans le prétoire.)

4 (La Greffière s'entretient avec le M. le Président.)

5 (Contre-interrogatoire du témoin, M. Jasmin Odobasic, par Me Ackerman.)

6 M. le Président (interprétation): Bonjour, Monsieur Odobasic.

7 M. Odobasic (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président.

8 M. le Président (interprétation): Bienvenue de nouveau. J'espère que nous

9 pourrons terminer aujourd'hui votre témoignage, mais avant de poursuivre,

10 je vous prie de bien vouloir répéter votre déclaration solennelle.

11 M. Odobasic (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la

12 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

13 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.

14 Maître Ackerman, à vous le tour, s'il vous plaît.

15 M. Ackerman (interprétation): Bonjour, Monsieur.

16 M. Odobasic (interprétation): Bonjour, Monsieur.

17 Question: Vous êtes-vous reposé? Etes-vous prêt pour encore une journée au

18 prétoire?

19 Réponse: Je suis prêt.

20 Question: Hier, nous nous sommes arrêtés au moment ou nous parlions de

21 votre départ de Prnjavor et je vous avais demandé si vous avez été chassé

22 de Prnjavor. A ce moment-là, vous nous avez dit que vous aviez des

23 photographies à nous montrer. Je voudrais poursuivre maintenant à cet

24 endroit-là où nous avons interrompu.

25 La personne à laquelle vous avez donné le plein pouvoir, ce monsieur nommé

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1 Branislav Maric, c'est un ami à vous, n'est-ce pas?

2 Réponse: Oui.

3 Question: Concernant ces photographies que vous avez eu la bonté de

4 montrer hier, je voudrais que vous compreniez que nous tous qui les avons

5 vues avons été choqués par ce qu'on y voyait et je crois qu'aucun être

6 humain ne devrait être autorisé de faire à un autre humain quelque chose

7 de pareil. Et je voudrais vous faire part de nos sympathies pour ce qui

8 est arrivé.

9 Réponse: C'est très noble. Je vous remercie, Maître Ackerman. En tant

10 qu'homme et humaniste, je ne voudrais que cela n'arrive à qui que ce soit

11 dans le monde.

12 Question: J'espère que quiconque en serait responsable, si déjà n'a pas

13 été puni, le sera certainement?

14 Réponse: (…) dans la ville Prnjavor, tout à fait normalement, sans aucune

15 conséquence.

16 Question: Dites-nous leurs noms. Je pense qu'on devrait connaître les

17 noms. Qui sont ces personnes? Je suppose qu'ils étaient des éléments

18 policiers de réserve?

19 Réponse: Le fait que j'ai été tabassé à deux reprises dans le poste de

20 police local me donne le droit de croire que ce n'étaient pas des

21 réservistes policiers. Peut-être qu'il y en avait quelques-uns. J'ai été

22 tabassé deux fois dans les locaux de la police régulière; il s'agit des

23 personnes suivantes: c'est Budak Vlado, un certain Jankovic Pero, ensuite

24 de Savic Darko, Jelic Milan, un certain Pancic, un certain Sestic

25 Branislav. Six policiers m'ont battu et j'ai été emmené dans le poste de

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1 police sur l'ordre d'un inspecteur de ce poste de police Monsieur Jelic

2 Milan. Il avait envoyé deux agents de police pour m'emmener dans le poste

3 de police et, la deuxième fois, à 3 heures du matin, j'ai été brutalement

4 emmené au poste de police pour être deux fois tabassé dans la journée.

5 Question: Quand vous et les autres membres de votre famille avez été

6 passés à tabac dans votre propre maison, ceci a été fait par deux agents

7 de police, après quoi vous avez appelé M. Malic à se rendre chez vous?

8 Réponse: Non, pas deux, mais six policiers. Monsieur Malic, un des rares

9 Serbes qui a osé un jour après venir me voir chez moi et, à cette

10 occasion, nous avons discuté de ce plein pouvoir que je lui ai donné.

11 Question: Vous lui avez demandé de vous assister, de vous aider à quitter

12 Prnjavor, n'est-ce pas?

13 Réponse: Non, il n'a pas participé à mon départ. Il m'avait demandé de lui

14 donner ce mandat, ce plein pouvoir pour qu'il puisse prendre soin de mes

15 biens immeubles, ceux de mon père et de mon frère; et je lui ai

16 effectivement donné trois pleins pouvoirs.

17 Question: Très bien. Je voudrais demander à l'accusation de vous montrer

18 votre déposition du 30 janvier 1999.

19 (Intervention de l'huissier.)

20 (Le témoin consulte sa déposition.)

21 Regardez, s'il vous plaît, la toute dernière page, le troisième paragraphe

22 dans bas vers le haut. Là, vous dites à l'accusation: "qu'à deux reprises,

23 vous avez tenté de quitter Prnjavor avant de réussir."

24 Est-ce que cela est vrai?

25 Réponse: Oui, cela est vrai.

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1 Question: Vous aviez les papiers tout prêts avec lesquels vous pouviez

2 vous rendre à Sarajevo. Mais chaque fois que vous avez tenté de partir,

3 les deux fois, on vous a fait descendre de l'autobus sans vous permettre

4 de partir, n'est-ce pas?

5 Réponse: C'est une erreur. Je n'avais pas de document me permettant

6 d'aller à Sarajevo. J'avais des documents me permettant d'aller en

7 Occident, en Serbie, en Hongrie et peut-être plus loin en Suède. Moi, je

8 voulais venir à Sarajevo, Maître Ackerman, après la Hongrie.

9 M. Ackerman (interprétation): Donc, quand on lit ici: "Déjà à Lubijana,

10 j'avais les papiers tout prêts qui me permettaient de partir à Sarajevo",

11 vous dites qu'il y a une erreur là?

12 M. Odobasic (interprétation): Non, ce n'est pas une erreur. Effectivement,

13 les autorités de Prnjavor m'ont donné les papiers et j'avais un visa me

14 permettant d'entrer en Suède. Nous achetions ces visas, parfois nous les

15 recevions directement de Suède. Par un concours de circonstances, un jour,

16 un Serbe de Sarajevo est venu chez moi et m'a proposé d'échanger nos trois

17 maisons contre sa maison à Sarajevo. Nous avons fait ce contrat avec lui

18 et mon projet était de faire partir une partie de ma famille en Suède et

19 que moi, je me rende à Sarajevo pour vérifier l'état dans lequel se

20 trouvait cette maison parce que nous n'avions pas où habiter. Et si cette

21 maison était bonne, j'y aurais fait venir ma famille. C'est pour cela que

22 je voulais aller à Sarajevo.

23 Pour ce qui est des papiers -il s'agit du passeport et du reste-,

24 effectivement, à Lubijana il y avait l'ambassade la plus proche dans

25 laquelle on pouvait venir de Hongrie.

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1 M. le Président (interprétation): Monsieur Odobasic, je vous prie de

2 parler plus lentement, car les interprètes doivent investir un très grand

3 effort pour suivre, pour suivre votre rythme. Je vous remercie.

4 M. Ackerman (interprétation): Est-ce que vous pouvez vous souvenir du

5 moment où il est arrivé, ces deux fois où vous avez tenté de quitter la

6 ville et où on vous a fait débarquer de l'autocar?

7 M. Odobasic (interprétation): C'était pendant la période du 3 juin au 27

8 juillet; nous étions prêts à tout moment pour partir et, la nuit, la

9 veille de notre départ, un certain Milijasevic Braco est venu me voir; il

10 était une sorte de dirigeant, de responsable; il était commandant ou

11 adjoint du poste de police de Prnjavor.

12 Question: Monsieur, je vous prie, un instant. Nous serons ici encore

13 demain si vous ne répondez pas directement à mes questions. La seule chose

14 que je souhaite que vous me disiez est quand, est-ce que vous pouvez

15 situer dans le temps les moments où vous avez tenté à deux reprises de

16 partir sans y réussir? Donc il n'y a que cette information que je veux.

17 Pouvez-vous me le dire? Je crois que vous nous avez dit que c'était entre

18 le 3 juin et le 27 juillet.

19 M. le Président (interprétation): Je pense que le témoin l'a dit et ça

20 suffit.

21 M. Ackerman (interprétation): Monsieur, est-ce que cela était à cette

22 époque ou est-ce que vous confirmez cette information?

23 M. Odobasic (interprétation): Oui, c'était bien à cette période.

24 Et si vous me permettez une phrase, ce monsieur est venu à deux reprises

25 chez-moi pour me dire: "Monsieur, vous ne pouvez pas partir demain -je

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1 crois la deuxième fois-, pas avant que vos plaies ne cicatrisent". C'est

2 ce qu'il a dit.

3 Question: Donc, en fait, vous n'avez pas été dans l'autocar et on ne vous

4 a pas fait débarquer. Mais vous figuriez sur la liste qui devait embarquer

5 et on a rayé votre nom de la liste, donc vous ne pouviez pas vous

6 embarquer. Est-ce que cela est vrai?

7 Réponse: Non, ce monsieur m'a interdit en me disant que ma famille ne

8 pouvait aucunement quitter la ville.

9 Question: Monsieur, je comprends vraiment, mais ce que je voudrais

10 clarifier est ce que vous dites dans votre déposition à la page 11. Vous

11 avez dit effectivement avoir tenté, à deux reprises, de quitter la ville

12 pour vous rendre en Hongrie. "Mais les deux fois, on m'a fait descendre de

13 l'autocar et on ne m'a pas permis de partir". Donc j'ai conclu que,

14 physiquement, vous vous trouviez dans l'autocar et qu'on vous a fait

15 descendre de l'autocar. Est-ce que j'ai tort?

16 Réponse: Pour ce qui est de l'autobus, nous étions prêts avec nos bagages

17 de partir et, les deux fois, cela nous a été interdit.

18 Question: Vous n'avez pas répondu à ma question. Ma question était si vous

19 étiez physiquement été présent dans l'autocar?

20 Réponse: Non, Monsieur, parce qu'on ne m'a pas permis d'atteindre

21 l'autocar.

22 Question: Et après avoir dit: "Et les deux fois, on m'a fait descendre de

23 l'autocar et on ne m'a pas permis de partir", vous dites ensuite: "Le

24 restant de ma famille a également quitté l'autobus volontairement".

25 Est-ce que vous comprenez que, sur cette base, j'ai pu conclure à tort que

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1 vous et votre famille avez été physiquement dans l'autocar et qu'on vous a

2 fait descendre de l'autocar, tandis que votre famille est descendue

3 volontairement?

4 Réponse: Non, vous avez raison; vous dites ce qui est écrit, mais je pense

5 que c'est une erreur de traduction, c'est mal formulé. "Une fois embarqués

6 dans le car" voulait dire le départ définitif vers la liberté.

7 Question: Très bien. Moi, je suis content de cette réponse.

8 Maintenant, je voudrais parler de vos biens à Prnjavor. Nous avons la

9 pièce à conviction de l'accusation P1; il s'agit du plein pouvoir que vous

10 avez donné à Borislav Malic. Il s'agit du document P1766. Donc c'est une

11 liste de propriétés n°373/3 concernant une parcelle de 551 mètres carrés,

12 enregistrée dans le livre sous le n°274/Prnjavor et le bureau, ainsi que

13 le bureau qui est situé dans ce bâtiment. Ce que je voudrais entendre de

14 vous, c'est de savoir s'il s'agit des mêmes biens qui ensuite ont été

15 enregistrés sous la dénomination de Avdo Tesnjak?

16 Réponse: Le nom Avdo Tesnjak est le nom de la rue. Après ce nom a été

17 changé. Il s'agissait de mes biens qui s'étaient situés dans la rue Avdo

18 Tesnjak. Et elle s'est appelée par la suite Milos Todic, ou autrement, je

19 ne me souviens plus maintenant.

20 Question: Est-ce que cela est un autre bien que celui qui est cité dans ce

21 plein pouvoir?

22 Réponse: Non, je n'ai pas d'autres biens que celui qui est cité dans ce

23 document.

24 Question: Donc il est cité dans ce plein pouvoir, dans ce mandat, votre

25 bien immobilier Kuciste portant le n°214 et vous dites que c'est le même

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1 bien qui se trouve dans la rue Avdo Tesnjak au n°1?

2 Réponse: Oui.

3 Question: Ce bien a été dans votre propriété jusqu'au mois de février

4 1994, n'est-ce pas?

5 Réponse: Oui. Ce bien a été en ma possession. C'est toujours à moi si l'on

6 regarde le livre foncier. Mais jusqu'à ce moment-là, je le possédais

7 aussi.

8 Question: Mais ce bien vous a été confisqué en février 1994 et non pas

9 avant, n'est-ce pas?

10 Réponse: Oui, il m'a été confisqué.

11 Question: Et ensuite, plus tard, ce bien vous a été restitué?

12 Réponse: Non, pas restitué. Mais une instance des droits de l'homme, en

13 tant que plus haute de ce genre, a donné un ordre que ce bien me soit

14 restitué et c'est ainsi que ceci a été fait en l'an 2000.

15 Question: En plus, un ordre a été adressé à la Republika Srpska de vous

16 payer de 20.720 marks convertibles à titre de rémunération pour le bien

17 qui est illégalement confisqué Est-ce que cela est vrai?

18 Réponse: Oui.

19 Question: Avez-vous touché cette somme?

20 Réponse: Pendant un an et demi, ils ne m'ont rien payé. Et sur un ordre de

21 la SCE, cela m'a été payé en novembre dernier.

22 Question: Une ordonnance de la cour fait état de 10% d'intérêt que vous

23 deviez recevoir pour toutes les sommes non payées de ce montant. Vous ont-

24 ils remis l'intérêt qui s'élevait à 10% du montant en question?

25 Réponse: Oui, avec un délai de quelques mois, j'ai reçu la somme

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1 principale ainsi que l'intérêt.

2 Question: Très brièvement, je souhaiterais vous poser quelques questions

3 concernant votre travail au sein de la commission pour chercher des

4 personnes portées disparues?

5 Réponse: Oui, il s'agit d'une commission d'Etat et d'une commission

6 fédérale chargées de retrouver les personnes portées disparues.

7 Question: Il y avait également une commission de la Republika Srpska

8 chargée de retrouver les personnes portées disparues. Et elle était en

9 existence aussi, n'est-ce pas?

10 Réponse: Oui, elle existait à l'époque. Elle existe encore aujourd'hui. Il

11 y avait également la commission du HVO qui existait à l'époque, mais

12 aujourd'hui, elle n'existe plus.

13 Question: Est-ce que vous avez pris part aux excavations qui ont été

14 menées par la Republika Srpska, la commission de la Republika Srpska pour

15 personnes portées disparues, ces exhumations qui impliquaient les Serbes

16 ou les Musulmans?

17 Réponse: Je ne comprends pas tout à fait clairement ce que vous voulez

18 dire. Veuillez reprendre votre question, je vous prie.

19 Question: Je tenterai d'être un peu plus clair. Je vous pose la question

20 suivante: est-ce que vous vous trouviez sur les lieux où on a mené une

21 exhumation, par exemple quand l'IFOR était présente et lorsque la

22 commission des personnes portées disparues de la Republika Srpska était

23 également présente? Vous êtes-vous trouvé sur les lieux?

24 Réponse: Pour ce qui est de toutes les exhumations qui ont lieu sur le

25 territoire d'une autre entité, lors de chaque exhumation, les deux

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1 commissions doivent être présentes, la SFOR, le IPTF. Et d'autres

2 représentants de la communauté internationale doivent être présents. Et

3 j'ai participé à un grand nombre d'exhumations jusqu'à présent.

4 Question: Bien. Dites-nous. Est-ce que vous avez toujours procédé de façon

5 adéquate, c'est-à-dire indépendamment de l'origine des personnes exhumées,

6 qu'il s'agisse de Serbes, de Croates ou de Musulmans?

7 Réponse: Que voulez vous dire par là? Je ne comprends pas ce que vous

8 voulez dire par procédure exemplaire? Ou voulez-vous que je vous explique

9 peut-être?

10 Question: Non, je vais aller droit au but. Vous souvenez-vous avoir pris

11 part à une exhumation qui a eu lieu en 1997? Je crois qu'on a exhumé à

12 plusieurs endroits...

13 M. le Président (interprétation): En 1977?

14 M. Ackerman (interprétation): Oui. Ah non, plutôt en 1997. Désolé.

15 Bien. Monsieur, qu'en est-il des exhumations qui ont eu lieu au mont de

16 Poljenik?

17 M. Odobasic (interprétation): Je ne sais pas si la date est bonne, mais

18 j'ai participé à l'exhumation de stocks avec la commission de la Republika

19 Srpska, mais j'ai également été présent à d'autres endroits. Bien sûr,

20 vous devriez savoir quelles sont les tâches et responsabilités de chaque

21 commission lors d'exhumation, pour comprendre le travail et les

22 procédures.

23 M. Ackerman (interprétation): Monsieur le Président, j'ai oublié de

24 distribuer certains exemplaires à la Chambre, ainsi qu'à mes collègues de

25 la partie adverse. Puis-je procéder à la distribution de ces documents

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1 maintenant?

2 M. le Président (interprétation): Oui, certainement, Monsieur Ackerman.

3 Vous pouvez distribuer ces documents.

4 Me Ackerman donne les documents à l'accusation et à la Greffière.

5 M. le Président (interprétation): Merci.

6 M. Ackerman (interprétation): Monsieur le Président, je ne vais pas me

7 servir de ces pièces, mais je les ai distribuées simplement pour pouvoir

8 démontrer la bonne foi, notre bonne foi pour ce qui est des questions que

9 je vais poser maintenant.

10 Donc, Monsieur, je vais vous donner lecture d'une partie du rapport qui se

11 trouve à la page 5 d'un document émanant de Slobodna Bosna, daté du 13

12 septembre 2001. Je vais vous donner lecture de certains passages et je

13 vous demanderais simplement de nous dire si c'est exact ou non. C'est tout

14 ce qui m'intéresse.

15 Le rapport se lit comme suit: "Au mont Poljenik, 12 corps d'anciens

16 soldats de la brigade de Srbac ont été découverts. Pendant l'examen

17 médico-légal, l'IFOR a informé l'équipe serbe que tous les accès à

18 l'endroit en question ont été bloqués par les femmes de Srebrenica qui

19 habitaient sur place. C'étaient vraiment des femmes de Srebrenica. Il

20 était tout à fait clair que Jasmin Odobasic, un député de Amor Masovic,

21 les a incités à le faire. L'un des témoins oculaires qui a été présent

22 lors de cet événement a fait état de ceci". Est-ce que c'est vrai?

23 M. le Président (interprétation): Où avez-vous trouvé ce passage, Monsieur

24 Ackerman?

25 M. Ackerman (interprétation): En bas de la page 5. Le texte se poursuit à

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1 la page 6. Monsieur, est-ce exact?

2 M. le Président (interprétation): Vous êtes en train de poser une

3 question, à savoir si quoi est vrai? Vous avez fait plus d'une déclaration

4 ici. Vous référez-vous plutôt à la dernière partie du texte ou à la

5 première partie du texte?

6 M. Ackerman (interprétation): Est-il exact de dire que vous avez incité et

7 encouragé les femmes de Srebrenica à bloquer tout accès aux routes qui

8 mènent vers le lieu?

9 M. Odobasic (interprétation): Il s'agit d'un mensonge pur et simple. Je ne

10 me suis pas du tout trouvé sur le terrain, je n'ai incité personne a faire

11 quoi que ce soit, je n'ai encouragé personne à procéder de la sorte.

12 Question: Bien. Je ne vais pas vous donner lecture de la partie suivante,

13 mais je souhaiterais vous demander… Je vais vous donner lecture de la

14 partie suivante: "A la recommandation de l'IFOR, la commission a retiré

15 l'équipement et les corps exhumés. Lorsqu'ils sont revenus, plusieurs

16 jours plus tard, les corps exhumés ont été retrouvés empilés les uns sur

17 les autres, et incinérés. Il y a un corps qui a été laissé sur un

18 brancard. Nous avons trouvé que cela très étrange que le corps soit placé

19 ainsi; donc nous nous sommes rendus très prudemment jusqu'à cette partie.

20 Il s'est avéré que ce brancard était miné et qu'il était également

21 connecté à une mine antichar; il y avait plusieurs explosifs autour de ce

22 brancard. Odobasic, qui observait tout le travail de l'équipe d'exhumation

23 serbe a fait un commentaire sur ce fait en disant que les femmes de

24 Srebrenica ont préparé ceci".

25 Réponse: Il s'agit vraiment de mensonges. Vous pouvez voir qu'il s'agit

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1 d'une bêtise pure et simple, d'une grossière erreur. Vous croyez que

2 j'aurais pu vraiment faire une chose pareille? Je travaille pour la

3 sécurité et je suis responsable de la commission des personnes portées

4 disparues en Republika Srpska. Si quelqu'un avait su qu'il y avait des

5 mines à cet endroit, il ne se serait pas approcher pour prendre un tel

6 risque.

7 M. Ackerman (interprétation): Seriez-vous d'accord avec moi pour dire que

8 c'était assez risqué de s'appuyer sur les choses qui sont écrites dans un

9 journal; On ne devrait certainement pas faire de ce genre de choses?

10 M. le Président (interprétation): Ne répondez pas à cette question,

11 Monsieur Odobasic.

12 Passez à une autre question, Maître Ackerman.

13 M. Ackerman (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

14 M. le Président (interprétation): Il n'y a pas de quoi.

15 M. Ackerman (interprétation): Je souhaiterais revenir maintenant à la

16 déclaration que vous avez faite le 30 janvier 1999. A la page 8 de la

17 version anglaise, il y a un paragraphe qui commence avec les mots:

18 "Pendant cette période…" Je crois que vous êtes en train de parler d'un

19 événement qui a eu lieu en été 1992. Dans ce paragraphe, on dit que

20 certains civils avaient été tués. Il y a Asim Kvasic; c'était un

21 mécanicien automobile et vous croyiez que son nom était Nesir; cette

22 personne a été tuée par balle. La personne qui l'aurait tué était Gojko

23 Kusic. Est-ce exact?

24 M. Odobasic (interprétation): Oui, effectivement, ces personnes ont été

25 tuées.

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1 Question: Qui est Gojko Kusic?

2 Réponse: C'était l'un des membres de la formation paramilitaire les "Loups

3 de Vucjak", tout près du village de Kremna, qui se trouvait non loin de

4 l'endroit où habitait du commandant/

5 Question: Bien. Vous avez dit que Mile Beus s'est fait tuer parce que les

6 Serbes voulaient qu'il leur donne de l'argent. Est-ce que vous savez qui

7 l'a tué?

8 Réponse: Non, Monsieur, je ne le sais pas.

9 Question: Comment savez-vous qu'il a été tué parce que les Serbes

10 voulaient lui extorquer de l'argent?

11 Réponse: C'est un M. Didic qui me l'a dit. Il m'a dit qu'il s'était

12 entretenu avec la famille de M. Beus et que les membres de sa famille lui

13 ont dit qu'on a demandé à M. Beus de lui remettre de l'argent.

14 Question: Est-ce que la famille a vu qui était la personne qui l'a tué?

15 Réponse: Je ne le sais pas. Vous devriez leur poser la question. Les

16 auteurs de ce crime auraient peut-être porté des masques, je ne le sais

17 pas.

18 Question: Je présume que vous êtes en train de nous dire, en fait, que les

19 personnes qui l'ont tué, c'étaient des gens qui voulaient qu'il leur

20 remette de l'argent. Ce n'étaient pas tous les Serbes de Prnjavor, n'est-

21 ce pas?

22 Réponse: Ne pensez même pas à une telle chose. Il y a des Serbes qui sont

23 absolument honnêtes et merveilleux sur le territoire de Prnjavor et

24 ailleurs. Ne pensez jamais à une telle chose, je vous prie.

25 Question: Vous n'avez donc aucune idée, vous ne savez pas qui a tué cette

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1 personne, à quelle organisation ils auraient pu appartenir, s'ils avaient

2 reçu des ordres d'exécuter ce dernier? Vous ne le savez pas?

3 Réponse: Non.

4 Question: Pour ce que vous sachiez, il serait possible que ce soit

5 simplement des bandits qui ont essayé de prendre de l'argent de quelqu'un?

6 Réponse: C'est votre présomption, Monsieur. Je n'ai pas dit cela, je ne

7 sais pas qui était derrière ceux-ci.

8 Question: Bien. Dans votre déclaration, vous dites que plusieurs personnes

9 ont été licenciées de leur poste et ont dû quitter les postes qu'ils

10 occupaient dans plusieurs entreprises de Prnjavor Est-ce que vous savez à

11 quoi je fais référence?

12 Réponse: Nous avons parlé de personnes qui s'étaient fait licencier hier:

13 je ne sais pas si vous faites allusion à cela?

14 Question: Oui, je fais allusion à cette même question. Selon vous, qui

15 ordonnait ces licenciements? Qui avait donné l'ordre pour que ces

16 personnes soient licenciées?

17 Réponse: Je peux vous donner une opinion personnelle: selon moi, c'étaient

18 les pouvoirs, c'étaient les autorités qui avaient décidé que ces personnes

19 devaient être licenciées. Il y avait un représentant du pouvoir de

20 l'époque qui se promenait, qui allait voir diverses entreprises et toutes

21 les personnes qui étaient employées, en passant par les éboueurs, les

22 personnes qui nettoient les rues, jusqu'aux personnes qui occupaient les

23 postes les plus importants, ont été licenciées.

24 Question: Bien. Lorsque vous parlez des personnes qui se trouvaient à la

25 tête du pouvoir, lorsque vous vous référez aux autorités, au pouvoir, vous

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1 pensez aux personnes qui se sont retrouvées au pouvoir après avoir gagné

2 les élections multipartites, après que le SDS eut remporté la victoire?

3 Réponse: Je crois que l'ordre provenait certainement des autorités

4 politiques et ces ordres étaient mis en place par les personnes qui

5 travaillaient dans diverses organisations et entreprises.

6 Question: Est-ce que la guerre avait déjà commencé avant que l'on ne

7 procède au licenciement de ces personnes? Je crois que la guerre avait

8 déjà commencé, n'est-ce pas? La guerre battait son plein à cette époque?

9 Réponse: Non.

10 Question: Pour ce qui est des personnes qui s'étaient faits licencier,

11 c'étaient toutes des personnes qui -je crois que nous en avons parlé hier-

12 n'appuyaient pas le concept de la Republika Srpska et on ne leur a pas

13 permis de travailler dans ces entreprises qui appartenaient à l'Etat,

14 n'est-ce pas?

15 Réponse: Non, Monsieur. Non, non, Monsieur.

16 La grande majorité de ces personnes étaient complètement apolitisées. Ce

17 n'est pas des gens qui disaient "j'aime" ou "je n'aime pas la Republika

18 Srpska". C'était des gens simples ou ordinaires qui ne voulaient pas aller

19 faire la guerre, surtout pas faire une guerre qu'ils ne considéraient pas

20 la leur. C'étaient des personnes qui dérangeaient, parce que ces personnes

21 avaient des appartements au centre-ville. C'étaient des personnes qui se

22 trouvaient à des postes qui étaient importants pour la mise en place de la

23 politique du SDS.

24 Comme je l'ai déjà dit, c'étaient des personnes qui avaient un certain

25 contrôle sur l'armement qui existait à Prnjavor, qui s'occupaient de

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1 certains entrepôts, et ainsi de suite. Il y avait plusieurs postes de ce

2 genre occupés par des personnes, pour lesquels les autorités croyaient que

3 ces postes étaient importants. Même les employés de l'usine de chaussures,

4 dans laquelle je travaillais, se sont fait licencier, même ces personnes

5 qui n'avaient absolument rien à voir avec la politique.

6 Question: Nous allons y revenir dans quelques instants. Vous nous avez dit

7 hier qu'avant les élections multipartites, avant que le système

8 multipartite ne soit mis en place, vous-même, personnellement, vous étiez

9 une personne apolitisée, vous n'aviez pas pris part à la vie politique.

10 Mais vous nous avez dit que, pour que vous puissiez obtenir le poste que

11 vous avez obtenu, il vous a fallu adhérer à la Ligue communiste, devenir

12 membre, n'est-ce pas? C'est ce que vous nous avez dit hier?

13 Réponse: Oui, je l'ai dit. Effectivement, c'est lorsque j'ai occupé le

14 poste de chef de l'inspection de la ville.

15 Question: Oui, mais vous étiez une personne apolitisée et on vous a dit

16 que vous deviez faire partie d'un certain parti, vous devriez devenir

17 membre d'un parti politique pour pouvoir continuer de travailler. On ne

18 vous a pas demandé de devenir une personne fortement politisée, mais on

19 vous a simplement demandé de devenir membre d'un parti, n'est-ce pas?

20 Réponse: Non, ce n'est pas un parti. A l'époque, il n'y avait que la Ligue

21 des communistes pour la période pour laquelle je parle, Monsieur.

22 Question: Non, mais je ne vous pose pas cette question là. Ce n'est pas ce

23 que je veux savoir. Ma question est très simple. On vous a dit qu'il

24 fallait devenir membre de la Ligue des communistes. On ne vous a pas

25 demandé de devenir un membre actif, on ne vous a pas demandé de participer

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1 activement à la vie politique de la ligue communiste, mais on vous a

2 simplement demandé de devenir membre de ce parti? C'est une question fort

3 simple et je vous demande de répondre par oui ou par non.

4 Réponse: J'ai dit que, pour ce qui est de cette période-là, effectivement,

5 c'était ainsi lorsque j'étais chef inspecteur.

6 Question: Oui, mais justement je vous ai posé une question pour cette

7 période-là. Donc merci.

8 Réponse: Oui.

9 M. Ackerman (interprétation): Je souhaiterais maintenant que l'on parle de

10 l'économie de Prnjavor. N'est-il pas exact de dire que la plupart des

11 entreprises ont arrêté la production presque complètement ou ne

12 travaillaient qu'à 10 à 20% de leur capacité d'avant la guerre?

13 M. le Président (interprétation): Pour quelle période parlez-vous?

14 M. Ackerman (interprétation): Au début de 1992, Monsieur le Président, et

15 progressivement après.

16 M. Odobasic (interprétation): Monsieur, je ne peux pas vous parler de

17 chiffres, mais chaque guerre laisse des traces sur la production. Quant à

18 savoir quelles étaient les traces que cela avait laissées à Prnjavor, je

19 ne peux pas vous dire. Pour ce qui est des plans d'avant-guerre, je ne

20 sais pas non plus. Vous savez, ce genre de renseignement ne m'est pas

21 accessible. J'avais entendu dire à un certain moment donné que la plupart

22 de ces entreprises et usines continuaient leur fonctionnement. Je l'avais

23 entendu sur les médias.

24 Question: Je souhaiterais maintenant que vous examiniez la déclaration que

25 vous avez donnée au centre de sécurité publique de Sarajevo le 30

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1 septembre 1994. Vous souvenez-vous d'avoir fait cette déclaration,

2 Monsieur?

3 Réponse: Oui.

4 (Intervention de l'huissier.)

5 Question: Il s'agit d'une déclaration que vous avez fournie à ces derniers

6 presque immédiatement après être sorti de Prnjavor. C'est l'année même à

7 laquelle vous avez quitté Prnjavor, n'est-ce pas?

8 Réponse: Oui.

9 Question: A la page 5 de ce document, pour ce qui est de la version

10 anglaise, un paragraphe qui commence avec les mots: "Caractéristiques de

11 l'économie de Prnjavor".

12 On peut lire: "Les caractéristiques de l'économie de Prnjavor peuvent être

13 remarquées par le fait que la plupart des usines avaient presque

14 complètement arrêté la production ou travaillé de 10 à 20% pour ce qui est

15 de la capacité d'avant la guerre".

16 Vous avez dit cela en 1994, n'est-ce pas?

17 Réponse: Oui, c'est cela.

18 Question: A la dernière page de ce document, votre signature y figure t-

19 elle?

20 Réponse: Oui.

21 Question: Vous avez également dit dans cette déclaration qu'à partir du 30

22 septembre 1994, lorsque vous avez fait cette déclaration tout du moins,

23 l'entreprise "Sloga" pour laquelle vous avez travaillé comprenait 1.370

24 employés et a baissé à 200 employés, est-ce exact?

25 C'est la phrase qui suit celle que je viens de vous lire il y a quelques

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1 instants.

2 Réponse: Oui, Monsieur. C'est ma déclaration.

3 Question: "L'usine de meubles standard avait à son emploi 200 employés et

4 maintenant cette entreprise a complètement fermé ses portes". A la même

5 page juste un peu plus loin.

6 Réponse: Quelle page?

7 Question: La même page tout juste sous l'information de l'usine de

8 chaussures "Sloga", juste sous le nom de Milorad Kovacevic. On dit l'usine

9 de meubles standard.

10 Réponse: Oui, oui, j'ai trouvé cette phrase.

11 Question: Restons sur la même page, prochaine phrase. "L'usine de

12 vêtements 'Pionir' qui employait auparavant 300 employés est maintenant

13 fermée".

14 Réponse: Oui.

15 Question: Vous avez bien vu.

16 Pour ce qui est de l'usine "Metalka", c'était une chaîne; elle employait

17 260 employés ouvriers avant la guerre et, maintenant, elle a réduit son

18 nombre à 130. Il était possible de garder ces 130 employés car elle

19 pouvait au moins envoyer ses produits en Russie en passant par la Serbie.

20 Et cette usine pouvait envoyer ses produits aux mêmes clients qu'avant la

21 guerre.

22 Est-ce que c'est ce que vous nous avez dit?

23 Réponse: (Pas d'interprétation.)

24 Question: Pour ce qui est de l'usine "Jelsingrad", l'usine qui fabriquait

25 des grues et qui employait 180 employés, elle est maintenant fermée?

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1 Réponse: Oui.

2 Question: Ensuite, nous pouvoir lire pour ce qui est de "Gradip", une

3 compagnie de construction qui employait 350 employés, elle ne fonctionne

4 plus maintenant. Il s'agit d'une entreprise qui produit des matériaux de

5 construction?

6 Réponse: Oui, c'est exact.

7 Question: Dites-nous, les combats qui se déroulaient pendant la guerre, à

8 quelle distance se trouvaient ces combats de la ville de Prnjavor pendant

9 que vous vous y trouviez?

10 Réponse: Vous faites allusion à quelle année?

11 Question: Vous pouvez choisir l'année que vous voulez. Je veux savoir les

12 combats pendant que vous vous trouviez à Prnjavor, est-ce qu'ils ne se

13 sont jamais rapprochés de la ville de Prnjavor? Dites-nous ce qu'il en

14 était?

15 Réponse: En 1992, les combats se déroulaient à 30 kilomètres de là;

16 c'était à Derventa. Les combats étaient les plus rapprochés à cette

17 époque-là. Et lorsque l'armée serbe a pris possession de Derventa et Brod,

18 c'étaient des endroits qui appartenaient à la Bosnie-Herzégovine. Et

19 ensuite, les fronts les plus rapprochés étaient en direction de Bihac,

20 tout près de Bihac qui se trouvait à 100 ou 200 kilomètres de là. Je n'ose

21 pas trop être plus précis. Et puis ensuite, autour de Tesanj, qui se

22 trouve à 50 kilomètres de Prnjavor.

23 Question: Très bien. Reprenons la même déclaration à la page 8. Il y a un

24 paragraphe assez long sur cette page.

25 Le général Momir Talic: son nom figure à la deuxième ligne de ce

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1 paragraphe; cela pourra peut-être vous aider à vous situer.

2 Un peu plus bas dans ce même paragraphe, vous dites: "Jusqu'à présent…" Et

3 je présume que vous parlez des événements qui se sont déroulés jusqu'au

4 mois de septembre, date à laquelle vous avez fait cette déclaration-, vous

5 dites donc: "Jusqu'à présent, plus de 300 Chetniks ont été tués dans les

6 combats qui ont eu lieu avec les soldats de l'armée de la Bosnie-

7 Herzégovine sur le territoire de la municipalité de Prnjavor. Et le nombre

8 de blessés excède ce chiffre de beaucoup".

9 Ce sont vos propres dires, n'est-ce pas, Monsieur?

10 Réponse: Oui.

11 Question: Vous parlez de combats et ces combats se déroulaient beaucoup

12 plus près de Derventa? Vous dites que ces combats avaient lieu dans la

13 municipalité de Prnjavor même?

14 Réponse: Non. Il n'y a pas eu de combat du tout sur le territoire de la

15 municipalité de Prnjavor, à ce que je sache. C'était plus en profondeur de

16 la municipalité de Derventa.

17 Question: Et lorsque vous dites qu'ils étaient tués lors de combats qui

18 ont eu lieu avec les soldats de l'armée de la BiH, dans la municipalité de

19 Prnjavor, cela n'est pas vrai? Donc vous avez signé une déclaration qui

20 n'est pas vraie?

21 Réponse: C'est une erreur de terminologie: pour ce qui est de la

22 municipalité de Prnjavor, il n'y a pas eu de combat, il n'y a jamais eu de

23 combat. Aucun combat donc sur le territoire même de Prnjavor, en dehors de

24 quelques accrochages. En fait, il n'y a pas eu de réel combat, il n'y a

25 pas eu d'attaque de la population dans les villages.

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1 Question: Vous dites que c'est une erreur terminologique, mais c'est une

2 autre façon de dire que ceci n'est pas vrai, n'est-ce pas? Ce que vous

3 dites donc, c'est que ce qu'on lit dans la déclaration signée par vous ne

4 correspond pas à la vérité: vous avez signé une déclaration qui n'est pas

5 vraie? Suis-je en droit de tirer cette conclusion?

6 Réponse: Non, Monsieur. Ici, on considère que 300 personnes sont mortes

7 sur le territoire de la municipalité de Prnjavor. C'est certainement ce

8 que j'ai dit: sur le territoire de la municipalité de Prnjavor; 300

9 Chetniks. Maintenant, la façon dont vous interprétez mes propos, c'est

10 votre affaire. comment vous proposez votera faire. Lorsqu'on parle du

11 territoire de la municipalité de Prnjavor, on peut l'interpréter sur le

12 plan territorial et aussi...

13 M. Ackerman (interprétation): A la ligne 13, on lit le mot de Prijedor au

14 lieu de Prnjavor, Monsieur le Président.

15 M. le Président (interprétation): Oui, je suppose que vous avez raison. Il

16 est important de le noter pour le compte rendu d'audience. Merci.

17 M. Ackerman (interprétation): Avez-vous trouvé la partie de votre

18 déclaration à laquelle je faisais référence, Monsieur?

19 M. Odobasic (interprétation): Oui.

20 Question: Vous voyez le passage que j'ai cité?

21 Réponse: Oui, je le vois.

22 Question: Il commence par les mots: "Jusqu'à ce moment-là…" et il se

23 termine par les mots, la phrase: "Le nombre de blessés est plusieurs fois

24 supérieur".

25 Alors, ce que j'aimerais, c'est que vous lisiez cette phrase et puis les

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1 interprètes sont appelés, invités à interpréter ce que vous lisez plutôt

2 que ce qui est écrit dans le texte, de façon à ce que nous voyions si tout

3 correspond bien. Donc je vous demanderai dans votre langue de bien vouloir

4 lire ce passage de façon à ce que nous puissions voir ce qui y est dit?

5 Réponse: "Dans les combats actuels avec les membres des soldats de l'armée

6 de Bosnie-Herzégovine, sur le territoire de la municipalité de Prnjavor,

7 plus de 300 Chetniks ont été, alors que le nombre de blessés est plusieurs

8 fois supérieur à ce chiffre". (Fin de citation.)

9 Question: Relisez plus lentement, Monsieur; relisez plus lentement parce

10 que c'est difficile pour les interprètes.

11 Réponse: "Dans les combats qui se sont déroulés jusqu'à présent avec les

12 membres de l'armée de Bosnie-Herzégovine, sur le territoire de la

13 municipalité de Prnjavor, plus de 300 Chetniks ont trouvé la mort, alors

14 que le nombre de blessés est plusieurs fois supérieur à ce chiffre". (Fin

15 de citation.)

16 Question: Donc la traduction est exacte, n'est-ce pas? Ce que vous avez

17 dit, c'est que 300 Chetniks ont été tués au cours des combats qui se sont

18 déroulés dans la municipalité de Prnjavor et que le nombre de blessés

19 dépassait plusieurs ce chiffre. C'est bien ce que vous avez dit en 1994,

20 Monsieur?

21 Réponse: Non, Monsieur. Quand je dis 300 Chetniks sur le territoire de la

22 municipalité de Prnjavor, je considère que ce sont des gens originaires de

23 la municipalité de Prnjavor. C'est très facile de comprendre ceci: du

24 moment qu'il n'y a pas eu de combat dans la municipalité de Prnjavor, il

25 s'agit de personnes qui sont mortes sur des fronts situés ailleurs, mais

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1 c'étaient des gens originaires de la municipalité de Prnjavor. Chacun sait

2 qu'il n'y a pas eu de combat sur le territoire de la municipalité de

3 Prnjavor.

4 M. Ackerman (interprétation): Monsieur, nous pourrions admettre cela si

5 vous n'aviez pas utilisé les mots: "…qui se sont déroulés sur le

6 territoire de la municipalité de Prnjavor". Ce sont les mots utilisés par

7 vous: "…sur le territoire de la municipalité de Prnjavor". Vous n'avez pas

8 dit: "300 Chetniks originaires de la municipalité de Prnjavor", mais vous

9 avez dit "…sur le territoire de la municipalité de Prnjavor".

10 Si vous avez signé une déclaration qui n'est pas véridique, vous pouvez

11 nous le dire et cela fera toute la clarté de l'affaire. Il peut s'agir

12 d'une erreur, mais manifestement il est dit dans ce texte que c'est cela

13 que vous avez dit?

14 M. Odobasic (interprétation): Monsieur, tout est très clair: il n'y a

15 jamais eu le moindre combat sur la territoire de la municipalité de

16 Prnjavor?Dans cette phrase, ce que j'avais à l'esprit de la façon la plus

17 claire qui soit, c'est que je parlais des personnes qui résidaient sur le

18 territoire de la municipalité de Prnjavor et j'ai dit que ces personnes

19 étaient mortes.

20 Voilà le sens qu'il convient de donner à la phrase que j'ai citée.

21 M. le Président (interprétation): Mais arrêtons tout cela.

22 Ce qui vous est dit, Monsieur est très simple, Monsieur Odobasic. Vous

23 expliquez à l'instant quelque chose qui ne figure pas dans votre

24 déclaration écrite. Maître Ackerman commence donc à faire observer que,

25 même si ce qui est dit ne rend pas compte de ce que vous aviez à l'esprit,

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1 vous avez tout de même signé cette déclaration. Il vous demande ensuite

2 des explications à ce sujet.

3 C'est à cela que se résume le problème. Maître Ackerman ne vous accuse pas

4 d'avoir délibérément menti ou proféré une contrevérité, à quelque moment

5 que ce soit, lorsque vous avez fait cette déclaration. Ce qu'on vous

6 demande, c'est quelle est l'explication fournie par vous au sujet de cette

7 divergence du texte signé par vous et ce que vous dites ici, aujourd'hui,

8 dans ce prétoire. Il doit y avoir une explication à cela. En général, dans

9 des cas de ce genre, les explications sont très simples.

10 M. Odobasic (interprétation): L'explication est très simple: moi-même et

11 nous tous, à ce moment-là, savions qu'il n'y avait pas de combat sur le

12 territoire de la municipalité de Prnjavor. Lorsque j'ai dit que ces

13 personnes étaient sur le territoire de la municipalité de Prnjavor, je

14 pensais à des gens qui résidaient sur ce territoire et qui sont morts. Je

15 ne pouvais pas penser à des combats qui se seraient déroulés sur le

16 territoire de la municipalité de Prnjavor, puisqu'il n'y en a pas eu. Il

17 est possible qu'on ait fait une confusion ici avec la première partie de

18 la phrase, où je disais "heurts avec les membres de l'armée de Bosnie-

19 Herzégovine". Ou alors c'est une faute de frappe, je ne sais pas. Je parle

20 sur le plan territorial de personnes qui habitaient à cet endroit et qui

21 sont allées se battre sur d'autres fronts, car il n'y a jamais eu de front

22 à Prnjavor.

23 M. le Président (interprétation): Très bien. Maître Ackerman, veuillez

24 poursuivre.

25 M. Ackerman (interprétation): Donc, Monsieur, lorsque vous dites que plus

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1 de 300 Chetniks ont été tués, ce nombre s'ajoute t-il au nombre des

2 soldats serbes qui ont été tués également?

3 M. Odobasic (interprétation): Veuillez formuler votre question d'une façon

4 plus claire?

5 M. Ackerman (interprétation): Je vous demande si vous établissez une

6 distinction entre les Chetniks et les soldats serbes de l'armée serbe

7 régulière ou si, lorsque vous parlez de Chetniks, ce nombre constitue le

8 nombre de soldats tués ou s'il s'ajoute au nombre de soldats serbes tués

9 dans votre esprit?

10 M. Odobasic (interprétation): Je ne comprends pas la question, Monsieur.

11 Lorsque vous dites soldats réguliers, de qui parlez-vous?

12 M. le Président (interprétation): La question est très simple, je me

13 redis. Il me faut à nouveau intervenir. Que voulez-vous dire lorsque vous

14 utilisez l'expression "Chetniks", Monsieur. Est-ce que vous incluez dans

15 ce terme l'ensemble des soldats serbes ou simplement une catégorie de

16 soldats serbes?

17 M. Odobasic (interprétation): Je pense à tous les soldats serbes: 300,

18 c'est le chiffre total de tous les soldats serbes qui ont trouvé la mort.

19 M. le Président (interprétation): Très bien.

20 Question suivante, Maître Ackerman.

21 M. Ackerman (interprétation): Trois pages plus loin, Monsieur: page 11 de

22 cette déclaration de la version anglaise; c'est une phrase qui commence

23 par les mots: "Après avoir effectué une percée dans ce fameux corridor et

24 avoir pris Derventa…"

25 M. Odobasic (interprétation): Oui.

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1 Question: Vous dites dans cette phrase que le nombre de Chetniks tués a

2 crû rapidement avec l'ouverture de nouveaux fronts. Là encore, je vous

3 demande si vous utilisez le terme "Chetniks" en pensant à tous les soldats

4 serbes ou simplement à ceux qui se qualifiaient eux-mêmes de "Chetniks"?

5 Réponse: C'est un terme que j'utilise de façon générale pour les soldats

6 serbes.

7 Question: Un terme péjoratif, n'est-ce pas, d'une certaine façon?

8 Réponse: Cela dépend pour qui, Maître Ackerman.

9 Question: Page 13 de cette même déclaration, vous parlez de la destruction

10 d'un mausolée musulman, un "Turbe". Et vous dites que c'est Vlado Vasic de

11 Gornja Mravica, un homme âgé de 35 à 40 ans, qui était responsable de

12 cette destruction: c'est bien cela?

13 Réponse: Je cherche à retrouver le passage?

14 Question: Je vais essayer de vous aider. Vous trouverez sans doute plus

15 facilement le nom de Gajanin, "Karadjordje", Galjipovci. C'est juste en

16 dessous.

17 (Le témoin cherche le passage en question.)

18 Réponse: J'ai trouvé le passage.

19 Question: Souhaitez-vous que je répète la question que je vous ai posée?

20 Réponse: Oui.

21 Question: Dans cette phrase vous parlez de la destruction d'un "Turbe",

22 c'est à dire d'un mausolée musulman, par un homme répondant au nom de

23 Vlado Vasic dont vous dites qu'il est de Gornja Mravica et qu'il a entre

24 35 et 40 ans. C'est bien cela?

25 Réponse: Oui.

Page 15199

1 Question: Savez-vous quelle était l'appartenance ethnique de Vlado Vasic?

2 Réponse: Je n'en sais rien.

3 Question: Comment savez-vous que c'est lui qui est responsable de la

4 destruction de ce monument?

5 Réponse: Des habitants du village voisin de ce mausolée m'ont dit cela,

6 ainsi qu'un homme qui habite dans le village qui abrite ce mausolée.

7 Question: Peu de temps après cette destruction, on a retrouvé Vlado Vasic

8 la gorge coupée, n'est-ce pas?

9 Réponse: Ce sont ces mêmes personnes qui m'ont dit cela.

10 Question: Apparemment, d'après ce que vous dites de la façon dont vous

11 avez appris cela, il s'agit de quelque chose que chacun savait dans le

12 village, à savoir que c'est Vlado Vasic qui avait commis cette

13 destruction?

14 Réponse: Je me souviens encore aujourd'hui que je suis allé participer à

15 un enterrement de ce village, très peu de temps après la destruction de ce

16 monument. Donc j'ai été informé immédiatement après.

17 Question: Avez-vous la moindre idée de l'identité de la personne qui a tué

18 Vlado Vasic, qui lui a coupé la gorge?

19 Réponse: Comment voulez-vous que je le sache? Je n'en ai pas la moindre

20 idée.

21 Question: Je pensais que peut-être vous avez entendu dire plus tard que

22 quelqu'un était considéré comme responsable de cet acte, mais si ce n'est

23 pas le cas, tant pis.

24 Réponse: Il y a sans doute eu enquête de la part de la police locale. Vous

25 pouvez vous renseigner en interrogeant la police locale.

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1 M. Ackerman (interprétation): Vous n'êtes pas en train de dire que ce sont

2 des policiers locaux qui lui ont coupé la gorge, n'est-ce pas? Ce n'est

3 pas ce que vous dites?

4 M. Odobasic (interprétation): Dieu m'en garde. J'ai dit que la police

5 locale avait peut-être enquêté.

6 M. le Président (interprétation): Maître Ackerman, question suivante, s'il

7 vous plaît?

8 M. Ackerman (interprétation): Très bien. Dans votre déposition hier, page

9 24 du compte rendu d'audience, ligne 16, Mme Richterova vous a interrogé

10 au sujet du départ de certains habitants de Prnjavor; il s'agissait de

11 non-Serbes. Une partie de votre réponse se lit comme suit -je cite-: "Dès

12 1992, dès le deuxième semestre de 1992, ce qu'il est convenu d'appeler le

13 départ organisé de Prnjavor a commencé." (Fin de citation.)

14 Et j'aimerais vous demander de nous dire, si vous vous en souvenez, à quel

15 moment ont eu lieu ce que vous qualifiez "de premiers départs organisés de

16 Prnjavor"?

17 Réponse: Je ne me souviens pas de la date exacte, mais je pourrais la

18 retrouver facilement parce qu'à la fin de 1992, deux fils d'une tante à

19 moi ont été chassés. Ils sont montés à bord d'un autobus et sont partis

20 pour la Suède; aujourd'hui, l'un d'entre eux est rentré en Bosnie.

21 Question: Vous nous avez dit hier que c'était au cours du deuxième

22 semestre de 1992 que ces départs ont eu lieu. Donc je suppose que vous

23 parliez du mois de juillet, du mois d'août ou à peu près de cette période-

24 là?

25 Réponse: Je pense que c'était beaucoup plus tard, plutôt vers la fin de

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1 l'année.

2 Question: Très bien. Conviendrez-vous avec moi que le nombre le plus

3 important de départs de Prnjavor a eu lieu en 1993?

4 Réponse: Non.

5 Question: Je reviens sur la déclaration faite par vous à Sarajevo, page

6 13, celle que nous étions d'ailleurs en train d'examiner.

7 Vous dites ce qui suit; c'est un passage qui se situe juste en dessous de

8 celui où il est question de Turbe -je cite-: "Pendant toute l'année 1993,

9 les pressions exercées sur la population non-serbe se sont accrues et

10 c'est dans cette période que le nombre le plus important de Musulmans et

11 de Croates ont été expulsés. Et je sais que, tous les samedis du mois de

12 mars, d'avril, de mai et de juin, une dizaine de d'autobus quittaient

13 Banja Luka pour se rendre en Suède, avec à bord un nombre très important

14 d'habitants de Prnjavor." (Fin de citation.)

15 Je lis cela et je crois comprendre que les départs les plus nombreux de

16 Prnjavor ont bien eu lieu en 1993. C'est bien ce que permet de penser la

17 lecture de ce passage, n'est-ce pas?

18 Réponse: Monsieur, vous n'avez pas déterminé le moment dont on parle. Les

19 derniers départs ont eu lieu en 1995. Maintenant, s'agissant des années

20 que j'ai passées à Prnjavor, c'est dans cette période, c'est par rapport à

21 cette période où j'étais présent à Prnjavor, que, dans cette année-là, le

22 nombre le plus important des départs a eu lieu. Mais c'est en 1995 que

23 l'exode le plus important de Croates et de Musulmans a eu lieu dans

24 l'absolu. Entre le 27 ou plutôt après le 27 juillet, je ne sais pas

25 exactement, mais en tout cas après mon départ. Mais là, je parle de la

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1 période où j'étais présent. Donc, pendant la période où j'étais présent à

2 Prnjavor, c'est à ce moment-là que le nombre de départs le plus important

3 s'est produit. Et pour ce qui s'est passé en 1995, j'en ai été informé

4 alors que je me trouvais déjà sur le territoire de Sarajevo.

5 Question: Vous nous avez dit que les gens ne pouvaient pas être autorisés

6 à quitter Prnjavor avant d'avoir accompli un certain nombre de choses et

7 notamment d'avoir payé leurs factures d'électricité et d'eau, et avant

8 d'avoir acquitté un certain nombre de dettes. Vous estimez que c'est une

9 pression exercée sur des gens de ne pas les autoriser à partir avant

10 d'avoir acquitté leurs dettes et payé leurs factures: vous pensez que

11 c'est répressif d'une façon ou d'une autre?

12 Réponse: Quand vous faites payer un enfant de 4 ans, 5 ans ou 6 ans, c'est

13 plus encore qu'une mesure répressive. Lorsque vous forcez ce petit garçon

14 à apporter la preuve qu'il n'est pas apte à porter les armes, on sait bien

15 à quel âge on devient apte à porter les armes dans tous les Etats du

16 monde, Monsieur.

17 Si on demande à mon père, âgé de 70 ans, de fournir un tel certificat

18 alors que ça fait longtemps qu'il n'est plus en âge de porter les armes,

19 il s'agit effectivement d'une mesure répressive.

20 M. Ackerman (interprétation): C'est une réponse intéressante. Mais je vais

21 vous répéter la question pour voir si vous pouvez y répondre. Vous nous

22 avez dit que les gens n'obtenaient pas l'autorisation de quitter Prnjavor

23 avant d'avoir effectuer un certain nombre de choses et notamment avant

24 d'avoir payé leur facture d'électricité, d'eau et avant d'avoir acquitté

25 leurs dettes. Estimez-vous que c'est une pression exercée contre des gens

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1 que de leur interdire de partir avant de payer leurs dettes? Est-ce que

2 vous estimez que c'est une mesure répressive d'une façon ou d'une autre

3 que d'exiger des gens qu'ils paient leurs dettes avant de partir? Pouvez-

4 vous répondre à cette question?

5 M. le Président (interprétation): La question se limitait simplement à

6 l'exigence faite à ces personnes de régler toutes leurs dettes en suspens,

7 c'est-à-dire leurs factures d'électricité, d'eau, etc. avant de partir.

8 C'est à cela uniquement que se limitait la question, Monsieur.

9 M. Odobasic (interprétation): C'est tout à fait logique: les Bosniens sont

10 très connus en Bosnie-Herzégovine pour le fait qu'ils s'acquittent

11 régulièrement de leurs obligations. Mais il fallait apporter la dernière

12 facture acquittée et cela aurait dû suffire pour vous libérer, ou bien il

13 aurait fallu pouvoir apporter un certificat de son lieu de travail. Mais

14 lorsqu'il est question des départs, le document le plus difficile à

15 obtenir c'était celui qu'il fallait retirer au secrétariat de la défense

16 populaire. La confirmation du fait que vous abandonniez vos propriétés

17 était également un document tout à fait important et, ensuite, il y avait

18 ce document que l'on retirait au ministère de la Défense. Bien sûr, il est

19 logique avant de partir de payer ces dettes. Aucun d'entre nous n'a essayé

20 de fuir ses obligations.

21 M. Ackerman (interprétation): A la page 28, ligne 16 du compte rendu

22 d'audience de votre déposition d'hier, Mme Richterova vous posait la

23 question suivante -je cite-: "J'aimerais vous poser une question

24 supplémentaire au sujet de ces départs. Pouvez-vous, en quelques mots,

25 nous dire si vous savez ce qui a poussé ces personnes à partir, à quitter

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1 la municipalité de Prnjavor?" Et vous répondez ce qui suit: "Ce sont les

2 pressions quotidiennes subies par les personnes et également le fait qu'il

3 était impossible de rester à cet endroit pour les personnes sur le plan

4 économique. Toutes ces personnes ont été licenciées, elles avaient perdu

5 toutes leurs ressources, elles n'avaient plus d'assurance médicale, plus

6 d'assurance santé". (Fin de citation.)

7 Alors vous, vous parlez de personnes qui avaient perdu leur emploi. Donc

8 toutes ces usines, toutes ces entreprises dont vous parlez, les

9 entreprises de Prnjavor avaient espoir de cesser complètement ou de

10 réduire de façon dramatique leurs effectifs: est-ce que c'est vrai?

11 Mme Richterova (interprétation): Je demande qu'au compte rendu d'audience,

12 on remplace "Prijedor" par "Prnjavor".

13 M. le Président (interprétation): Oui.

14 Monsieur, vous pouvez répondre à cette question.

15 M. Odobasic (interprétation): La situation économique était l'une des

16 circonstances qui poussaient ces gens à partir. Il y avait bien d'autres

17 éléments qui constituaient des pressions exercées sur ces personnes que je

18 peux d'ailleurs vous citer, si vous le souhaitez.

19 M. Ackerman (interprétation): Là encore, Monsieur, vous ne répondez pas à

20 la question que je vous ai posée. Mais votre réponse est tout à fait

21 intéressante. Je dois le dire: toutes vos réponses sont intéressantes,

22 mais il serait bien néanmoins que vous répondiez à mes questions. La

23 question que je vous posais était une question très simple. Lorsque vous

24 parlez de personnes qui ont été licenciées de leur travail et qui ont donc

25 perdu leur gagne-pain, leur assurance-santé, etc., vous parlez également

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1 des gens qui ne travaillaient plus parce que leur entreprise avait soit

2 cessé de fonctionner complètement, soit réduit considérablement leurs

3 effectifs.

4 M. le Président (interprétation): Vous venez de modifier votre question,

5 Maître Ackerman. Dans la question formulée précédemment, vous parlez bien

6 des personnes, etc. Vous ne disiez pas que vous parliez notamment de ces

7 personnes. Donc je vous demanderais de répéter votre question à

8 l'identique.

9 M. Ackerman (interprétation): Eh bien, je préfère m'en tenir à la deuxième

10 formulation, Monsieur le Président, elle est plus précise.

11 M. le Président (interprétation): Très bien, je le pense également.

12 Nous attendons votre réponse, Monsieur. La question est très simple et je

13 me permettrai de la reformuler à votre attention. Lorsque vous avez parlé

14 de toutes ces personnes qui ont quitté Prnjavor, entre autres parce

15 qu'elles avaient été licenciées de leur travail et que par conséquent

16 elles avaient perdu leur droit à leur assurance maladie, ne pensiez-vous

17 qu'aux Musulmans et autres Serbes expulsés de leur travail en raison de

18 leur appartenance ethnique? Ou bien pensiez-vous également à d'autres

19 personnes qui avaient perdu leur emploi en raison de la situation

20 économique qui prévalait à ce moment là à Prnjavor? Est-ce que vous les

21 regroupiez tous dans une même catégorie ou ne pensiez-vous qu'à une partie

22 des personnes qui avaient perdu leur emploi?

23 M. Odobasic (interprétation): Je pensais à une partie des personnes qui

24 avaient perdu leur emploi, indépendamment de ce que les usines ont fait en

25 réduisant leurs capacités de travail. Les Serbes n'ont pas perdu leur

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1 emploi, ils ont continué à travailler et conservé le statut qui était le

2 leur au sein de leurs organisations de travail. Moi, je parlais des

3 personnes qui avaient été expulsées des organisations de travail, des

4 personnes qui avaient perdu leur droit au travail.

5 M. le Président (interprétation): Ce que vous dites donc, c'est que la

6 conséquence de la crise économique de l'époque a entraîné une situation

7 particulière pour les entreprises et que, dans cette situation, les

8 personnes qui ont perdu leur emploi étaient les Musulmans et pas les

9 Serbes. En tout cas, il s'agissait des non-Serbes, alors que les Serbes

10 avaient conservé leur emploi. C'est bien ce que vous dites, Monsieur?

11 M. Odobasic (interprétation): Lorsque je parlais des personnes qui avaient

12 perdu leur emploi, je parlais des non-Serbes à savoir Musulmans et

13 Croates.

14 M. le Président (interprétation): Maître Ackerman, je suppose que cette

15 réponse vous satisfait?

16 M. Ackerman (interprétation): Je suppose que dans ces conditions vous

17 estimez qu'avant la guerre, 90% des personnes qui travaillaient dans cette

18 entreprise étaient des Musulmans et des Croates et ce sont bien, d'après

19 vous, ces personnes qui avaient perdu leur emploi, puisque les 10%

20 restants étaient, d'après vous, des Serbes, n'est-ce pas?

21 M. Odobasic (interprétation): Non, c'est une erreur. Il n'est pas exact

22 que 90% des personnes qui travaillaient dans ces entreprises étaient des

23 Musulmans. J'ai dit que 90% des personnes qui avaient perdu leur emploi

24 étaient des Musulmans et des Croates. Je ne parlais pas de la structure

25 ethnique de façon générale, car il y avait beaucoup plus de Serbes qui

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1 avaient un emploi.

2 M. Ackerman (interprétation): Eh bien, 90% des personnes qui ont perdu

3 leur travail l'ont perdu d'après vous en raison de la fermeture des usines

4 et 10 % des personnes qui avaient un travail ont continué à en avoir un

5 après ces fermetures, n'est-ce pas? C'est bien ce que vous dites?

6 M. le Président (interprétation): Ecoutez.

7 Maître Ackerman (interprétation): C'est bien ce que vous dites, Monsieur?

8 M. le Président (interprétation): Non, non, non. Nous devons faire la

9 clarté sur ce point car la plus grande confusion semble régner en ce

10 moment. Monsieur je vais vous interroger moi-même. Etes-vous en train de

11 dire qu'il y a eu des non-Serbes qui ont perdu leur emploi parce qu'ils

12 ont été licenciés pour une seule et unique raison à savoir leur

13 appartenance ethnique?

14 M. Odobasic (interprétation): J'ai dit clairement que la plupart des

15 licenciés refusaient l'appel à la mobilisation. J'ai dit clairement hier

16 qu'il y avait un nombre de Serbes qui avaient été chassés pour la même

17 raison.

18 M. le Président (interprétation): Y avait-il d'autres aussi, des

19 Musulmans, des non-Serbes et des Serbes qui étaient licenciés, non pas

20 pour leur appartenance ethnique, ni pour avoir répondu à l'appel à la

21 mobilisation, mais pour des problèmes économiques?

22 M. Odobasic (interprétation): Je n'en connais pas, je ne suis pas en

23 mesure de répondre à cette question, parce que, individuellement, je ne

24 sais pas pourquoi tout un chacun était licencié. Généralement, c'est ce

25 que j'ai dit. Il est logique qu'il y avait ceux qui, pour une raison

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1 économique, ont dû quitter leur travail et la commune.

2 M. le Président (interprétation): Ma dernière question. Dans cette

3 dernière catégorie de personnes, de ceux qui ont été licenciés en raison

4 d'une mauvaise situation économique qui prévalait en ce moment là, est-ce

5 que seulement les non-Serbes devaient partir de Prnjavor ou bien y avait-

6 il aussi des Serbes qui partaient aussi? Est-ce que Serbes et non-Serbes,

7 à cause de la mauvaise situation économique, perdaient leur travail? Est-

8 ce qu'ils étaient dans la même position ou bien les non-Serbes de Prnjavor

9 étaient dans une position pire?

10 M. Odobasic (interprétation): Les Serbes qui quittaient la ville la

11 quittait plus souvent pour des raisons idéologiques qu'économiques. Je

12 dois dire qu'avant la guerre, cette commune comptait plusieurs milliers de

13 personnes travaillant à l'étranger, en occident, et nombre de Serbes

14 trouvaient qu'il valait mieux partir dans ces pays et c'est pour cela que

15 le plus souvent ils sont partis.

16 M. le Président (interprétation): Très bien. Maintenant nous allons nous

17 arrêter ici. Maître Ackerman je propose que nous poursuivions notre

18 travail dans un quart d'heure. Madame Korner préfériez-vous parler de la

19 mention dès que nous aurons terminé avec ce témoin ou à la fin de

20 l'audience?

21 Mme Korner (interprétation): Pour moi cela n'est pas important, cela

22 dépend du temps dont Monsieur Ackerman aura besoin.

23 M. le Président (interprétation): Ce n'est pas sans importance, car si

24 l'audience durera très longtemps, le témoin devra attendre.

25 Mme Korner (interprétation): Monsieur le Président, le deuxième témoin est

Page 15209

1 déjà ici au Tribunal, je ne sais pas combien de temps faudra t-il encore à

2 Monsieur Ackerman pour ce témoin.

3 M. Ackerman (interprétation): Je pense que j'aurais besoin d'encore 35 à

4 40 minutes, vu que nous devons discuter de cette question dans le

5 prétoire.

6 M. le Président (interprétation): Je ne pense pas que nous ayons besoin de

7 beaucoup de temps à ce propos. En tout cas il n'est pas dans mes

8 intentions de vous permettre, à qui que ce soit d'entre vous, de prendre

9 trop de temps pour discuter de cette question. Dans tous les cas, je ne

10 souhaite pas que le témoin qui viendra déposer après M. Odobasic attende

11 trop longtemps ici ou qu'il vienne ici sans raison.

12 Mme Korner (interprétation): Si Me Ackerman a besoin de 35 à 45 minutes...

13 M. le Président (interprétation): Probablement alors 45 minutes.

14 Mme Korner (interprétation): Alors je ne voudrais pas que le témoin perde

15 son temps dans le prétoire.

16 M. le Président (interprétation): Si nous recommençons à 16 heures 5, à 16

17 heures 45, nous devrions avoir terminé avec M. Odobasic. Je pense que pour

18 la discussion sur la motion, nous n'avons pas besoin de plus de 20

19 minutes. Ce qui nous amène ici à 17 heures 5. Et si alors nous faisons une

20 pause d'un quart d'heure, nous pouvons commencer avec le témoin à 17

21 heures 25 et nous terminerons aujourd'hui à 18 heures 30. Ce qui veut dire

22 que le témoin déposera pendant une heure.

23 Mme Korner (interprétation): Il me semble que c'est un ordre.

24 D'accord.

25 M. Ackerman (interprétation): D'accord.

Page 15210

1 M. le Président (interprétation): Maintenant, nous faisons une pause d'un

2 quart d'heure. Levez-vous, s'il vous plaît.

3 (L'audience suspendue à 15 heures 52 est reprise à 16 heures 15.)

4 M. le Président (interprétation): Veuillez vous asseoir.

5 Mme Korner (interprétation): Monsieur le Président, je dois dire quelque

6 chose que je ne savais pas. Le service des témoins a déjà amené le témoin

7 de sorte qu'il attend déjà. Monsieur Nicholls lui a parlé et il a dit

8 qu'il serait bien qu'il puisse commencer demain matin.

9 M. le Président (interprétation): Je croyais que ce serait pour l'après-

10 midi, mais s'il préfère commencer le matin, j'espère qu'on trouvera un

11 prétoire.

12 Mme Korner (interprétation): Merci.

13 M. le Président (interprétation): Maître Ackerman, je suppose que cela ne

14 vous pose pas de problème.

15 Eh bien, Madame Korner, cela veut dire que vous pouvez transmettre à M.

16 Nicholls notre décision.

17 Et maintenant, Maître Ackerman, vous pouvez poursuivre.

18 M. Ackerman (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Monsieur, je

19 voudrais revenir à la déposition que vous avez faite à Sarajevo. Est-ce

20 que vous l'avez toujours sous les yeux ou on vous l'a prise?

21 M. Odobasic (interprétation): Elle est là.

22 Question: Très bien. Maintenant, je voudrais que nous reparlions encore un

23 petit peu à propos des licenciements. A la page 4 de la version anglaise,

24 il y a un paragraphe qui commence par les mots suivants: "Le médecin en

25 chef Velibor Milic". Quand vous aurez trouvé ce paragraphe, dites-nous que

Page 15211

1 vous l'avez trouvé.

2 Ce que vous dites dans ce paragraphe est ce qui suit: "Le médecin en chef,

3 Velibor Milic, l'un des plus éminents citoyens d'ethnicité serbe qui était

4 directeur du centre médical de Prnjavor…"

5 Et ensuite vous citez la raison pour cela. Est-ce que cela est vrai?

6 Réponse: Oui.

7 Question: Donc c'est un Serbe qui était licencié?

8 Réponse: Je n'ai pas dit licencié, c'est bien marqué ici: il a été révoqué

9 de sa fonction de directeur.

10 Question: C'est moi qui l'ai dit. Peut-être c'était une erreur de

11 traduction. Donc on parlait de la révocation. Eh bien, allons plus loin.

12 Tout à l'heure, nous avons mentionné l'usine de chaussures "Sloga". Et

13 quand vous voyez ce paragraphe un peu plus bas qui commence par: "Les

14 caractéristiques de la vie…" où l'on dit qu'avant la guerre cette usine

15 employait 1.370 travailleurs et alors que maintenant il n'en travaille que

16 200. Est-ce que cela veut dire 1.170 personnes ont perdu leur travail?

17 Réponse: Je ne sais pas si tout le monde a complètement perdu son travail,

18 s'il y en a qui sont en attente ou d'autres qui ont complètement perdu

19 leur travail. Vous devriez vérifier cela.

20 Question: La seule chose sur laquelle nous pouvons nous appuyer

21 maintenant, c'est ce qui figure ici comme votre déposition. Or on y lit

22 que cette entreprise employait autrefois 1.370 personnes alors que

23 maintenant il n'y en a que 200 qui sont employés. S'il n'en reste

24 maintenant que 200 au moment où vous avez fait votre déposition en

25 septembre 1994 et qu'il y en avait auparavant 1.377, il y en avait

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1 vraiment seulement 200 au moment de votre déposition.

2 Réponse: Oui, ils étaient 200 dans les ateliers. Mais les autres pouvaient

3 bénéficier de leur statut. Leur contrat de travail n'a pas dû forcément

4 être arrêté. Le terme "employé" peut être interprété comme le nombre de

5 travailleurs actifs à ce moment-là dans les ateliers. Nous devons être

6 sérieux pour savoir exactement combien de personnes ont vraiment été

7 licenciées et combien il y en avait d'autres qui n'étaient plus présentes

8 dans les ateliers, mais qui avaient gardé formellement leur travail. Cela

9 arrivait souvent dans ces organisations de travail que les ouvriers

10 partent chez eux et que leur engagement demeure sans aucune conséquence

11 juridique; ils sont même payés pendant cette absence.

12 Question: Bien. Je crois que l'on peut accepter votre réponse. Mais le

13 fait est que l'usine de chaussures "Sloga" dépendait de l'écoulement de

14 ces produits et que ce sont ses ventes qui lui permettaient de payer ses

15 employés, est-ce que cela est vrai?

16 Réponse: Oui, "Sloga" était une usine de chaussures, et c'est de sa

17 production et des ventes que dépendaient ses revenus personnels. Et déjà à

18 l'époque, pour moi, quand je travaillais dans cette usine, cela était

19 ainsi.

20 Question: Pendant que vous y travailliez, il y avait environ 1.370

21 employés. Dites-nous combien, quel est le pourcentage à peu près, des

22 travailleurs qui étaient Serbes?

23 Réponse: Ils étaient à coup sûr une majorité écrasante, mais je ne peux

24 pas dire avec certitude, mais si je prends la structure ethnique de

25 Prnjavor à cette époque-là, je crois qu'elle devait se refléter sur la

Page 15213

1 structure des employés dans cette usine que j'ai évoquée hier. En ce

2 moment-là, Monsieur, nous ne faisions pas de telles analyses de structure

3 ethnique. On ne s'en occupait pas.

4 Question: Très bien. Et s'il est vrai qu'il y avait des personnes qui

5 n'étaient pas complètement licenciées, qui étaient en quelque sorte un

6 excédent technologique, qui étaient en attente, qu'est-ce qu'ils faisaient

7 ces gens-là?

8 Réponse: Cela dépend de leur appartenance ethnique. La plupart des

9 travailleurs serbes étaient affectés dans des unités militaires et

10 probablement touchaient une rémunération. Je sais qu'à mon époque, quand

11 quelqu'un d'une société était appelé pour un exercice militaire, le

12 secrétariat à la Défense nous payait pour son absence. Je ne sais pas si

13 cette institution était gardée en 1992, mais je suppose que oui. Je ne

14 sais pas quels étaient les statuts des autres qui avaient le statut de

15 personnes en attente. Je ne sais pas s'ils touchaient une rémunération ou

16 non, mais ce n'est pas difficile de vérifier.

17 Question: Donc, nous avons dans "Sloga", 1.170 personnes qui ne se

18 rendaient plus au travail indépendamment de leur statut. Avec l'usine de

19 mobilier "Standard", ils avaient complètement arrêté la production de

20 sorte que 200 personnes ne se rendaient plus à leur travail Est-ce que

21 cela est vrai?

22 Réponse: La femme de mon frère n'allait plus travailler parce qu'il y

23 avait une décision sur l'arrêt du travail; et puis ensuite, ils sont quand

24 même allés travailler, puis ils ont fini par arrêter complètement cette

25 production. Je ne sais pas si les gens ont continué à se rendre dans les

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1 locaux de l'usine.

2 Question: Nous avancerons plus vite si nous parlons des mêmes choses. Moi,

3 je parle maintenant uniquement du nombre des personnes qui travaillaient

4 dans ces sociétés avant la guerre et des personnes qui étaient employées,

5 parce que donc, en septembre 1994, quand vous avez fait votre déposition,

6 vous avez dit qu'avant la guerre, 200 personnes y travaillaient et que

7 maintenant la production était complètement arrêtée. Ma question était

8 que: 200 personnes n'y travaillaient plus? Est-ce que cela est vrai?

9 Réponse: J'ai dit que la production dans l'usine "Standard" avait été

10 arrêtée. S'ils faisaient autre chose, je l'ignore.

11 Bien sûr les chiffres que j'ai avancés relèvent de mes propres évaluations

12 et les chiffres précis sont disponibles, je suppose, dans les sociétés

13 elles-mêmes.

14 Question: Dans l'usine "Pionir", qui est une usine de prêt-à-porter, il y

15 avait 300 personnes et vous avez dit que cette usine aussi avait été

16 fermée; donc cela fait encore 300 personnes sans travail, dont la plupart

17 étaient Serbes.

18 Réponse: Oui.

19 Question: Et le directeur de l'usine "Pionir", Novak Bozic, a été muté de

20 son poste tandis que lui aussi était Serbe?

21 Réponse: Oui.

22 Question: L'usine de chaînes "Metalka" employait 260 personnes, alors que,

23 maintenant, il n'en restait plus que 130. Donc les autres 130 ne venaient

24 plus au travail.

25 Réponse: Vous n'avez pas bien formulé la question. Lisez attentivement. Ah

Page 15215

1 oui, c'est un ordre. C'est 130 personnes. Vous avez raison. Je croyais

2 qu'il s'agissait d'un total de 200. Mais non.

3 Question: L'usine de "Jelsingrad" employait 180 personnes, alors cette

4 usine ne fonctionnait plus, donc 180 personnes n'avaient plus de travail

5 et le directeur de cette usine, Milorad Savkovic, lui aussi, était révoqué

6 alors qu'il était Serbe?

7 Réponse: Non, il a été promu, il a été envoyé à un poste beaucoup plus

8 attrayant.

9 Question: Si vous regardez votre déposition, on voit le texte suivant: "Le

10 directeur révoqué, Milorad Savkovic, d'une quarantaine d'années, né dans

11 le village Rizevci a été muté" Et là, vous avez raison, il a remplacé

12 Milan Plancic. La société "GIK Gradip" employait autrefois 150 personnes,

13 alors que maintenant, ils ne fonctionnaient plus, donc encore 350

14 personnes ne travaillent plus?

15 Réponse: Oui.

16 Question: Et la société de commerce Promet, le directeur Mladen Debeljak,

17 Serbe, a été révoqué?

18 Réponse: Oui.

19 Question: Si vous passez à la page 11 de la version anglaise, c'est la

20 page où il était question de 300 Chetniks, morts dans les conflits avec

21 les militaires de l'armée de Bosnie-Herzégovine. Je pense...

22 M. le Président (interprétation): Page 8 ou 11?

23 M. Ackerman (interprétation): C'est la page 11 de votre version.

24 M. Odobasic (interprétation): Oui.

25 M. Ackerman (interprétation): Tout de suite en dessous de la page des 300

Page 15216

1 Chetniks, vous dites aux enquêteurs: "Au début octobre, fin septembre et

2 début octobre 1992, on introduit l'obligation de travail à Prnjavor. On

3 crée des sections de travail pour tous les Musulmans licenciés ainsi que

4 toutes les personnes capables de travailler, Musulmans entre 15 et 60 ans.

5 Est-ce que cela est vrai?

6 Réponse: Oui.

7 Question: Très bien. Je voudrais maintenant revenir à la page 28 du compte

8 rendu de votre témoignage d'hier. Une chose particulière que vous avez

9 dites au sujet des personnes qui quittaient Prnjavor, était que ces

10 personnes pouvaient partir, en fait ne pouvaient partir qu'à travers la

11 Serbie et la Hongrie, vers les pays de l'Occident. Est-ce que vous vous en

12 souvenez?

13 Réponse: Oui.

14 Question: Ils pouvaient partir aussi en Bosnie centrale, n'est-ce pas?

15 Réponse: Les premiers échanges qui ont été faits vers la Bosnie centrale

16 ont été ceux auxquels j'ai participé le 27 juillet 1994, avant cela

17 personne n'a pu se rendre sur le territoire libre.

18 Question: Est-ce que c'était parce qu'ils ne pouvaient pas y aller ou bien

19 parce qu'ils ne voulaient pas y aller, étant donné qu'ils savaient qu'ils

20 seraient mobilisés dans l'armée de Bosnie-Herzégovine alors qu'ils ne

21 voulaient pas combattre?

22 Réponse: Monsieur, l'endroit où j'ai été échangé -c'est mon évaluation-,

23 entre 150 à 200.000 personnes sont passées vers la Bosnie centrale;

24 d'autres sont partis vers l'Occident parce qu'ils n'avaient pas d'autre

25 choix: ils ne pouvaient y aller autrement qu'à travers la Serbie et la

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1 Hongrie, vers la Suède et dans les autres pays. Dès qu'ils avaient décidé

2 de partir -ils partaient essentiellement par Travnik-, beaucoup de ces

3 gens sont venus à Zenica. Moi-même, je les avais accueillis, des dizaines

4 et des centaines.

5 Question: Ma question était la suivante: est-ce que c'était parce qu'ils

6 ne pouvaient pas y aller ou parce qu'ils ne voulaient pas y aller, sachant

7 qu'ils seraient mobilisés dans l'armée de Bosnie-Herzégovine, alors qu'ils

8 ne voulaient pas combattre? Est-ce que vous pouvez nous donner une réponse

9 simple à cette question?

10 Réponse: Ils ne voulaient… Il ne leur était pas permis de se rendre sur le

11 territoire libre parce que, probablement, ils auraient combattu aux côtés

12 de l'armée de Bosnie-Herzégovine.

13 Question: Je vous remercie.

14 Ce corridor vers la Serbie, comment ce corridor a-t-il été interrompu?

15 Réponse: Comment a-t-il été coupé? Je peux vous donner mon opinion, je ne

16 suis pas un expert militaire, je ne suis pas un stratège. Si vous voulez

17 mon opinion, je me ferai un plaisir de vous la présenter.

18 Question: Je vous en prie, oui.

19 Réponse: C'est connu ce que ce corridor menait de Belgrade vers la Région

20 autonome de Krajina et les Serbes ont tout fait pour que ce corridor

21 traverse ce territoire qui était majoritairement habité par les Serbes.

22 Lorsque vous regardez le passage par la municipalité de Prnjavor, donc

23 c'est la route Banja Luka-Prnjavor jusqu'à Doboj, j'ai déjà dit hier que

24 c'étaient tous les territoires majoritairement serbes excepté quatre

25 villages. A un moment donné, ce corridor vient entre Doboj et Modrica, où

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1 il y a trois municipalités qui sont habitées par une majorité croate;

2 ensuite, une partie de la municipalité de Derventa, de Modrica, d'Odzak et

3 de Samac.

4 Et, comme en 1992, il y a eu des conflits qui ont éclaté dans ces régions,

5 cela a été une des raisons probablement de la rupture de ce corridor. Et

6 depuis 1992 jusqu'après la guerre, je n'ai jamais plus séjourné sur ces

7 terrains des municipalités de Derventa, Modrica, Odzak, Orasje. Et

8 j'ignore quelle a été la situation, et qui et pourquoi à couper le

9 corridor. Mais je sais que la structure ethnique n'était pas

10 majoritairement serbe dans ces municipalités; c'est probablement là la

11 raison pour laquelle ce corridor a été coupé.

12 Question: Quand vous parlez de la Région autonome de Krajina, vous parlez

13 des parties de Croatie?

14 Réponse: Oui, je parle bien sûr de la Krajina de Knin et ensuite de la

15 partie de la route qui traverse la Bosnie.

16 Question: Oui. En ce qui concerne ce corridor, dans votre déposition du 30

17 janvier 1999, à la page 6, vous en parliez précisément et vous dites

18 notamment: "En mai, nous ne pouvions pas communiquer avec aucune autre

19 municipalité bosnienne. Toutes les communications ont été coupées. Je ne

20 peux pas me souvenir de la date précise, mais cette région a été

21 physiquement coupée parce que le corridor n'existait plus". Et cela est

22 vrai, n'est-ce pas?

23 Réponse: Attendez que je trouve. Dites-moi seulement à quelle page, parce

24 que la version anglaise ne correspond pas.

25 Question: Je vais voir si je peux vous aider; probablement non. Il s'agit

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1 d'un très bref paragraphe où l'on parle de Goran Nikolic, qui avait été

2 passé à tabac dans un bureau de vote. Et ensuite, vient le paragraphe. On

3 dit: "En mai, on ne pouvait communiquer avec aucune autre municipalité

4 bosnienne, parce que toutes les communications étaient coupées".

5 Réponse: Goran Nikolic, c'est à la page 5?

6 M. Ackerman (interprétation): Le paragraphe suivant. Le paragraphe suivant

7 à la page 6 de la version BCS. Le dernier paragraphe de la page 6.

8 M. Odobasic (interprétation): Non, chez moi, c'est autre chose.

9 Mme Richterova (interprétation): Je pense que le témoin regarde toujours

10 une autre déposition.

11 M. Ackerman (interprétation): Regardez, s'il vous plaît! Vous êtes en

12 train de regarder la déposition que vous avez faite à Sarajevo.

13 M. le Président (interprétation): Nous avons parlé de celle du 30 janvier.

14 M. Ackerman (interprétation): Dans la version anglaise, la sixième page.

15 M. Odobasic (interprétation): Ah oui!

16 M. Ackerman (interprétation): Donc on y lit que "cette région a été

17 physiquement coupée parce que le corridor n'existait toujours pas". Est-ce

18 que cela est vrai?

19 M. Odobasic (interprétation): Oui.

20 Question: Et puisque ce corridor n'existait plus, c'est-à-dire a été

21 coupé, non seulement qu'il n'y avait pas de communication, mais il était

22 même pas possible d'approvisionner la région?

23 Réponse: Probablement que c'est impossible, puisque les communications

24 étaient coupées.

25 Question: Très bien. Maintenant, je voudrais vous parler au sujet des

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1 "Loups de Vucjak". Dans la déposition que vous avez devant vous -et si

2 vous voulez trouver cela, je voudrais vous aider, mais peut-être cela

3 n'est même pas nécessaire.

4 Dans cette déposition, dans ce témoignage, vous parlez des Loups de Vucjak

5 commandés par Veljko Milankovic bien connu dans la région, même avant la

6 guerre, comme un criminel. C'est la vérité non? C'est à la page 3, en tout

7 cas à la page 3 de la version anglaise.

8 Réponse: Oui, j'ai trouvé. C'est ainsi comme vous me l'avez demandé.

9 Question: Dites-moi ce que vous vouliez dire en disant qu'il était connu

10 comme criminel dans cette région. Est-ce qu'il a été condamné pour un

11 délit?

12 Réponse: S'il a été condamné, je ne peux pas le dire catégoriquement. Je

13 crois que oui pour plusieurs délits. Je pense avoir clarifié cette

14 question hier. Mon service d'inspection municipale avait engagé deux

15 papiers contre ce monsieur pour la coupe illégale du bois et pour le vol

16 du bois. Je n'ai pas vérifié, mais je crois qu'une trentaine d'actes

17 différents ont été présentés au tribunal contre ce monsieur. J'ai appris

18 personnellement d'un agent de police, avant la guerre bien sûr, que lui,

19 il avait déposé une plainte pour tentative de viol par M. Milankovic. Pour

20 les voies de fait, pour les désordres qu'il provoquait dans les lieux

21 publics, ce n'est pas même pas la peine d'en parler; c'était très

22 fréquent.

23 Question: Donc sa réputation dans la ville a été celle de quelqu'un qui

24 avait le caractère de quelqu'un de violent, de quelqu'un enclin à

25 commettre des délits? C'était bien sa réputation?

Page 15221

1 Réponse: Oui. Effectivement.

2 Question: Donc cette personne avec un dossier pénal avait organisé une

3 organisation paramilitaire connue sous le nom des "Loups". Je suppose

4 qu'il avait rassemblé les personnes avec la même vision du monde que lui

5 pour le rejoindre?

6 Réponse: Monsieur, ce n'est pas lui qui a formé cette organisation. Ce

7 sont les dirigeants du parti SDS qui ont organisé cette formation. Et

8 Milankovic n'était qu'une arme entre leurs mains. Ce sont eux qui lui ont

9 donné les armes pour organiser cette formation. Vous avez vu le document

10 il y a deux jours ou bien hier.

11 Question: Et ce groupe, même avant d'être organisé, a maltraité la

12 population locale dont des Serbes aussi Est-ce que cela est vrai?

13 Réponse: Je dois réfléchir. Je sais que les Serbes ont été maltraités par

14 l'autre formation paramilitaire précédente. Oui, je me souviens qu'ils

15 avaient maltraité les Serbes qui ne voulaient pas répondre à la

16 mobilisation, mais je ne saurais vous le confirmer. Je n'ai pas de preuves

17 concrètes.

18 Question: Mais le fait est qu'à ce moment-là, quand agissait ce groupe à

19 Prnjavor, on peut dire que l'ordre public a cessé d'exister à Prnjavor?

20 Réponse: Oui effectivement. Très souvent il y a eu des incidents. Il n'y

21 avait plus la paix d'autrefois.

22 Question: La police avait essayé de faire quelque chose n'est-ce pas? Ils

23 ont arrêté plusieurs éléments de ce groupe de Milankovic. A un certain

24 moment donné, lui aussi a été arrêté?

25 Réponse: J'ai dit qu'à l'époque où cela s'est passé que la police avait

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1 essayé. Et elle a fait ce qu'elle a fait. Donc elle a arrêté ces

2 personnes.

3 Question: Et ensuite ils ont attaqué le poste de police, n'est-ce pas, en

4 réponse à cela?

5 Réponse: Ils ont d'abord attaqué le poste de police et ensuite peut-être,

6 un jour plus tard, après l'attaque en question, Milankovic s'est fait

7 arrêté ainsi que certaines personnes qui étaient avec lui. La police a

8 établi d'une certaine façon des rapports un peu plus normaux, si vous

9 voulez, après ce conflit. Mais cela n'a pas duré très longtemps.

10 Question: Avez-vous jamais entendu dire que M. Brdjanin a pris des

11 dispositions très sérieuses pour faire en sorte que M. Milankovic soit

12 arrêté et traduit en justice, afin que ses activités cessent?

13 Réponse: Je n'ai jamais connu M. Brdjanin et j'avais entendu parler de lui

14 par les médias.

15 Question: Est-ce que vous avez entendu dans les médias le discours de M.

16 Brdjanin qui a eu lieu le 15 novembre 1991, lors d'un rassemblement de la

17 Région autonome de Krajina? Lorsqu'il a commencé à tirer sur Grahovac, on

18 lui a demandé ce qu'il était en train de faire. Il avait organisé des

19 unités paramilitaires, il avait dépensé de l'argent, il avait acheté des

20 uniformes et d'autres choses, sans avoir reçu des ordres pour envoyer ces

21 personnes de l'autre côté de la Save. Vous souvenez-vous d'avoir entendu

22 ce genre de propos dans les médias?

23 Réponse: Je n'ai jamais entendu ce genre de propos dans les médias; je

24 n'ai pas pu le faire non plus, car, après que M. Brdjanin a fait ce qu'il

25 avait fait lors de la réunion de l'assemblée municipale de Bosnie-

Page 15223

1 Herzégovine, j'ai arrêté de suivre les débats des sessions et je n'ai pas

2 du tout été intéressé par ce qui se passait dans le monde politique. Je

3 n'étais qu'une personne normale.

4 Question: Ensuite, si je ne m'abuse, vous avez que ce groupe, qui

5 s'appelait les "Aigles blancs", était un autre groupe paramilitaire; ils

6 sont par la suite venus dans la ville, ils ont commencé à faire du grabuge

7 et ils ont également attaqué des personnes et certains Serbes. A un moment

8 donné -et je parle également de ce groupe de "Loups" appartenant à

9 Milankovic-, ils les ont arrêtés, ils les ont expulsés de la ville.

10 Réponse: Non, j'ai parlé du premier incident, lorsqu'ils nous ont fait

11 subir de mauvais traitements. Le second incident, c'est lorsqu'ils les ont

12 arrêtés et les ont emmenés dans la direction de Derventa, le poste de

13 police de Derventa.

14 Question: Et finalement, en janvier ou février 1993, Veljko Milankovic a

15 été blessé dans une bataille et est mort dans un hôpital de Belgrade,

16 n'est-ce pas?

17 Réponse: Oui, je crois qu'il s'agissait de l'hôpital militaire de

18 Belgrade.

19 Question: C'étaient des petits bandits, des voyous, ce groupe de "Loups de

20 Vucjak ", n'est-ce pas?

21 Réponse: Non.

22 Question: Quand je parle de voyous, je parle de bandits qui commettaient

23 des crimes, petits et grands?

24 Réponse: Oui, mais c'étaient des gens, c'était un groupe de criminels qui

25 fonctionnaient à l'intérieur d'un système, un système militaires et...

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1 Question: Mais ils n'ont pas toujours fait partie du système militaire,

2 n'est-ce pas? Ils ont fait partie du 1er Corps de Krajina à un certain

3 moment donné, n'est-ce pas? Est-ce que vous savez à quel moment ont-ils

4 commencé à faire partie de ce groupe?

5 Réponse: Eh bien, justement, c'était ainsi, Monsieur. Je crois qu'il

6 s'agissait des combats qui se sont menés autour de Derventa afin de

7 pouvoir percer le corridor et je sais qu'à ce moment-là, ils ont commis

8 certains crimes. Dans le cadre de mon travail, j'ai pris part à

9 l'exhumation de sept victimes qui étaient des victimes de ces derniers à

10 Prnjavor.

11 Question: Hier, à 17 heures 57 et 10 secondes, dans le compte rendu

12 d'audience, on vous a posé la question suivante -je cite-: "Avant de

13 parler des événements qui se sont déroulés après les élections, je

14 voudrais vous demander s'il y avait des formations paramilitaires à

15 Prnjavor avant les élections?" Vous avez répondu -je cite-: "Avant les

16 élections, il m'arrivait de voir des personnes qui portaient des armes,

17 qui, dans des circonstances normales, étaient bannies. Et très souvent, je

18 les voyais dans les villages de Kremna et dans les villages avoisinants

19 -ensuite, il y a un mot illisible-; par contre, ils prétendaient qu'il

20 s'agissait de réserviste de la JNA, mais n'était pas le cas. Ils

21 prétendaient être des réservistes de la JNA, mais ce n'était pas le

22 cas".(Fin de citation.)

23 Vous souvenez-vous avoir dit cela hier aux Juges?

24 Réponse: Oui.

25 Question: Et c'était avant les élections, n'est-ce pas? Il s'agissait

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1 d'une période pendant laquelle le gouvernement était encore sous

2 l'autorité de la Ligue des communistes, n'est-ce pas?

3 Réponse: Pour être plus précis, c'était entre 1989, ou à partir de 1989,

4 lorsque cette réunion très célèbre a eu lieu à Gazimestan et c'est là

5 qu'on a commencé à procéder à des exercices militaires: on a commencé à

6 armer les gens; il y avait un grand nombre de personnes qui n'avaient pas

7 voulu mettre ces armes à un mauvais usage, mais il y avait également des

8 personnes qui tiraient. C'était l'époque où le pouvoir communiste

9 existait, le pouvoir communiste comme on l'appelait. La police a essayé de

10 maintenir du mieux qu'elle pouvait une vie normale à l'époque. Je n'ai pas

11 remarqué qu'il y a eu des meurtres ou des attaques, mais il est certain

12 qu'on essayait d'effrayer la population en tirant des coups de feu.

13 Question: N'est-il pas exact de dire que ce gouvernement n'aurait pas

14 accepté qu'on porte des armes de façon aussi ouverte, de la façon dont

15 vous nous le décrivez?

16 Réponse: Vous oubliez, Monsieur, qu'à l'époque, au sein de ce

17 gouvernement, il y avait un grand nombre de personnes qui suivaient les

18 choix de M. Milosevic et faisaient de leur mieux pour briser la Bosnie-

19 Herzégovine.

20 Question: Non, je vous ai posé une question fort simple.

21 Réponse: Et je réponds très simplement: c'est clair ce que je dis. Il y

22 avait un schisme.

23 M. Ackerman (interprétation): Non, vous êtes en train de me donner une

24 histoire, mais je vous demande de nous répondre par un oui ou par un non.

25 N'est-il pas exact que le gouvernement de l'époque n'aurait pas permis

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1 qu'on porte les armes de façon si ouverte?

2 M. le Président (interprétation): Mais le témoin est en train de nous dire

3 qu'il ne peut pas nous donner une réponse aussi simple qu'un oui ou non;

4 il est en train de vous donner une explication, il essaye de vous

5 expliquer que le gouvernement n'était pas uniforme à l'époque, qu'il y

6 avait plusieurs courants.

7 M. Ackerman (interprétation): Ce n'est pas une réponse.

8 M. le Président (interprétation): Oui, c'est une réponse. Bien sûr que

9 c'est une réponse. Répondez à la question je vous prie.

10 M. Ackerman (interprétation): Non, il a dit non. Je crois qu'il a répondu

11 non. Pour moi cela représente un non. J'en ai terminé avec cette question.

12 M. Odobasic (interprétation): Maître Ackerman, je souhaite ajouter quelque

13 chose. Les personnes qui portaient les armes à l'époque ne pouvaient pas

14 se faire interpeller par la police, il était très difficile que la police

15 intervienne, parce que ces personnes-là, elles relevaient de la police

16 militaire.

17 Question: Vous avez dit que les "Loups" prenaient part aux combats qui ont

18 eu lieu en septembre 1992, quels étaient les combats qui étaient menés en

19 septembre de cette année-là?

20 Réponse: Monsieur, je ne peux pas vous dire où ils participaient et où ils

21 étaient précisément. Mais il y avait des combats non seulement au mois de

22 septembre, les combats ses sont déroulés jusqu'à la fin de la guerre en

23 Bosnie-Herzégovine; ils ont participé à un grand nombre de batailles. Ils

24 se sont retrouvés sur plusieurs fronts.

25 Question: Bien. Ils ont donc combattu sur plusieurs fronts, mais

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1 lorsqu'ils le faisaient, ils n'étaient pas en train d'intimider les

2 citoyens de Prnjavor?

3 Réponse: Cela dépendait du fait si l'ensemble de leurs membres se trouvait

4 sur le front ou non.

5 Question: Vous nous avez dit qu'ils pillaient souvent. Etes-vous en train

6 de nous dire qu'ils procédaient à un pillage suivant les ordres reçus par

7 le général Talic du 1er Corps de Krajina ?

8 Réponse: Non, ce n'est pas ce que j'avance.

9 Question: A la page 3 de la déclaration que vous avez fournie en septembre

10 1994, il s'agit d'une déclaration donnée aux autorités de Sarajevo, vous

11 parlez d'un Ljuban Milosevic?

12 Réponse: Oui.

13 Question: Vous dites que Ljuban Milosevic le porte-parole du SDS a

14 également travaillé pour la radio. Très souvent, il se rendait sur les

15 fronts et il envoyait des rapports en provenance du front. De quel front

16 parlez-vous précisément? Est-ce que c'était le front qui se trouvait en

17 Croatie ou s'agit-il du front du corridor?

18 Réponse: C'est même avant. Il m'a envoyé des rapports pendant que la

19 guerre en Croatie faisait rage et lorsque les formations de Prnjavor

20 prenaient part à cette guerre.

21 Question: Si l'on descend un peu plus bas, il y a un paragraphe qui

22 commence par les mots suivants: "Après la prise du pouvoir des changements

23 au niveau du personnel ont eu lieu au SUP." Lorsque vous parlez de la

24 prise du pouvoir politique, c'est le résultat d'une élection démocratique,

25 lorsque le SDS a remporté le plus grand nombre de sièges n'est-ce pas?

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1 Réponse: Non cela n'était pas un résultat d'élections démocratiques, mais

2 les personnes qui avaient été élues lors de ces élections qui étaient

3 faites de façon démocratique, c'était le résultat de personnes choisies et

4 de leur comportement.

5 Question: Ils n'ont pas pris le pouvoir politique, ils ont été élus par

6 les personnes qui ont voté, les habitants de Prnjavor, et il s'agissait

7 d'élections régulières de Prnjavor?

8 Réponse: Vous parlez de fonctions politiques et vous êtes en train de les

9 mélanger avec les fonctions au sein de la police, ce n'est pas la même

10 chose.

11 Question: Vous avez dit qu'à l'époque, le commandant du SJB était Boro

12 Tramosljanin.

13 Réponse: Je crois que vous vous n'êtes pas bien exprimé, il ne s'agit pas

14 du commandant au sein de la police. Au sein de la police, il y avait un

15 poste qui était chef de la police.

16 Question: Je vous demanderai de lire le paragraphe qui commence après,

17 vous pouvez voir: "à l'époque le commandant du SJB du poste de police

18 s'appelait Boro Tramosljanin, fils de Milan".

19 Réponse: Justement, oui voilà c'était un chef. Le chef de police comme je

20 l'ai dit.

21 Question: Et il était Serbe? N'est-ce pas?

22 Réponse: Oui, bien sûr.

23 Question: Il était Serbe?

24 Réponse: Oui, il était Serbe.

25 Question: Ils ont essayé de le remplacer n'est-ce pas? Ils ne souhaitaient

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1 pas qu'il reste à ce poste, les personnes qui ont pris le pouvoir n'est-ce

2 pas?

3 Réponse: Oui, c'est cela.

4 Question: Mais ils n'avaient pas la possibilité de le remplacer sans

5 l'approbation du ministre de l'intérieur de Sarajevo, qui s'appelait Alija

6 Delimustafic?

7 Réponse: Oui, et Alija Delimustafic est Bosnien.

8 Question: Il était bosnien à l'époque?

9 Réponse: Oui, oui, il est Bosnien.

10 Question: Cela a pris cinq mois, il a fallu cinq mois avant qu'il ne

11 puisse obtenir l'approbation d'Alija Delimustafic pour remplacer M.

12 Tramosljanin par Nenad Krajisnik: est-ce que c'est exact?

13 Réponse: Oui, c'est exact.

14 Question: Si l'on passe à la page suivante, on peut lire que vous parlez

15 de la formation du MUP serbe, comme vous l'appelez. Et vous dites que tous

16 les membres de nationalité musulmane ont pu signer une déclaration de

17 fidélité, d'allégeance, chose qu'ils ont refusé de faire et après cela ils

18 ont perdu leur emploi.

19 Est-ce que vous êtes en train de nous dire que pas un seul non-Serbe n'a

20 signé cette déclaration d'allégeance et est resté dans la police?

21 Réponse: Non. Ce n'est pas ce que je souhaite dire car je ne le sais pas.

22 Question: Mais vous savez que certaines personnes qui étaient d'origine

23 serbe n'étaient pas d'accord avec ce qui se passait. Et ils se sont

24 également fait renvoyer, n'est-ce pas?

25 Et vous avez même donné des noms. Miroslav Petrovic, Dragan Vrhovac,

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1 Radoljub Jugovic, Zika Milijasevic, n'est-ce pas?

2 Réponse: Oui. C'est comme cela, oui c'est cela.

3 Question: Donc le fait de perdre leur emploi n'était pas lié avec leur

4 appartenance ethnique, mais bien avec le fait que les employés n'avaient

5 pas donné de déclaration d'allégeance envers le nouveau gouvernement; est-

6 ce que c'est exact?

7 Réponse: Oui, c'est cela.

8 Question: Vous saviez qu'il y avait des Musulmans au sein de l'armée de la

9 VRS, n'est-ce pas?

10 Réponse: Oui, je le savais. Il y en avait.

11 Question: Dans le cadre de votre déposition d'hier, en réponse à une

12 question à la page 16, ligne 14 du compte rendu d'audience, on vous a

13 demandé si pendant la période de 1991 à 1992, les personnes d'origine

14 serbe allaient être armées et vous avez dit à la ligne 20 -je cite-: "Mon

15 meilleur ami était Serbe; il a quitté Prnjavor. On a essayé de lui

16 remettre une mitrailleuse par la force".

17 Je suis bien curieux de savoir de quelle façon est-ce qu'on force une

18 personne à prendre une mitraillette.

19 Réponse: C'est à vous d'essayer de comprendre. Comme j'ai déjà dit à

20 l'époque, on distribuait tout un container d'armes, de fusils à chasse

21 devant le club de chasse pour les personnes qui le désiraient. J'avais un

22 collègue qui était un homme très pacifique et il ne voulait pas simplement

23 pas s'engager dans l'armée. Il ne voulait faire la guerre contre personne.

24 Et il l'a confirmé. Aujourd'hui il vit à Belgrade. A l'époque pendant la

25 guerre du Kosovo, il n'a pas voulu non plus faire la guerre et il a évité

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1 de faire la guerre.

2 Question: Oui. Je ne veux pas savoir si on lui a demandé de prendre une

3 mitraillette, maisn selon vous, on a essayé de le forcer à prendre cette

4 arme, cette mitraillette. Je ne comprends pas de quelle façon est-ce qu'on

5 force une personne à prendre une arme à feu. Quel genre de personne

6 bizarre aurait forcé une personne à prendre une arme? Qu'est-ce qu'on

7 fait, on tire sur la personne qui ne souhaite pas prendre une arme?

8 Réponse: Non; Je n'ai pas dit qu'ils les ont menacés de les tuer s'ils

9 n'allaient pas prendre une mitraillette, mais ils leur ont dit qu'ils

10 avaient besoin de certains intellectuels dans leurs rangs. Et on lui avait

11 dit qu'il lui fallait prendre une mitraillette. Il était très connu dans

12 le village. C'était un enseignant. Il enseignait à plusieurs générations

13 d'enfants. Et les autorités auraient souhaité qu'il prenne les armes pour

14 qu'il donne l'exemple à ceux qui étaient incertains.

15 M. Ackerman (interprétation): Donc il était mobilisé, il a refusé de

16 rejoindre les rangs de l'armée et il s'est enfui, n'est-ce pas?

17 C'est ce qui est vraiment arrivé?

18 M. Odobasic (interprétation): Non, non. Pour ce qui est de la

19 mobilisation, il s'agit d'une procédure bien précise c'est-à-dire qu'on

20 recevait d'abord l'appel. Et cet homme était un civil à l'époque, il

21 portait des vêtements civils. Il était sur une route dans le village de

22 Sarici. Il était accompagné de sa femme et ses enfants et sur le chemin il

23 a vu trois chars à chevaux qui distribuaient des armes. Et ce n'était pas

24 une façon régulière de distribuer des armes. J'appellerais cela plutôt de

25 l'anarchie.

Page 15232

1 M. le Président (interprétation): Je vous propose de passer à autre chose,

2 Maître Ackerman.

3 M. Ackerman (interprétation): Oui, Monsieur le Président.

4 Je vais passer à autre chose justement.

5 Monsieur, à la page 17 du compte rendu d'audience d'hier, à la ligne 21,

6 on vous a demandé si vous aviez entendu, si vous saviez quelles étaient

7 les raisons pour que les Serbes s'arment.

8 Et votre réponse était bien claire. Vous avez dit que les Serbes

9 prétendaient qu'il y avait une attaque sur Prijedor car on peut lire le

10 mot de Prijedor au compte rendu d'audience. Je suis tout à fait certain

11 qu'il s'agit de Prnjavor. Je suis même en train de me tromper moi-même et,

12 des fois, je dis Prijedor au lieu de Prnjavor, mais on devrait lire

13 Prnjavor au compte rendu d'audience.

14 M. le Président (interprétation): Effectivement on devrait lire Prnjavor.

15 M. Ackerman (interprétation): Bien. Les Serbes prétendaient qu'il leur

16 fallait s'armer, car il y avait une attaque qui avait été menée sur

17 Prnjavor et Derventa. Aucune attaque n'allait être menée. Et ils disaient

18 qu'il leur fallait s'armer pour se défendre des Oustachis en se référant à

19 la population de Derventa. Il y avait donc une bataille qui se menait pour

20 le corridor. Et il y avait des combats très importants qui se déroulaient

21 à cet endroit-là à Derventa et autour de Derventa, n'est-ce pas?

22 Réponse: Oui, il y avait à Derventa, dans un village avoisinant Derventa,

23 c'est un village qui est tout près de la municipalité de Prijedor. Il y

24 avait Dragan Djuric, un député qui habitait là et il avait poussé les

25 gens, il incitait les gens à s'armer et il s'était armé bien longtemps

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1 avant cette lutte pour le corridor.

2 Question: Oui, mais il y avait beaucoup de combats assez importants qui se

3 déroulaient à Derventa et autour de Derventa, n'est-ce pas? Indépendamment

4 de là?

5 Réponse: Avant la bataille de corridor, effectivement, il y avait des

6 batailles à Derventa.

7 Question: Derventa était une communauté qui était majoritairement croate,

8 n'est-ce pas?

9 Réponse: Je crois que oui. Je ne le sais pas. Précisément par rapport aux

10 Serbes, mais je crois que oui.

11 Question: Et c'est environ à 30 kilomètres de Prnjavor, n'est-ce pas?

12 Réponse: 33 kilomètres en suivant la route.

13 Question: Et ce village a été capturé par les forces croates et le

14 corridor a été fermé, n'est-ce pas?

15 Réponse: Je ne le sais pas. Je ne sais pas si c'étaient les forces

16 croates, quelles étaient ces forces, je ne le sais pas. je ne me rendais

17 pas à cet endroit-là.

18 Question: Mais vous savez qu'on a capturé cet endroit depuis les mains des

19 Serbes, cet endroit qui était entre les mains des Serbes? On a pris ce

20 point?

21 Réponse: Je ne sais pas si c'était tenu par les Serbes, c'est un fait que

22 je ne connais pas.

23 Question: Est-ce que vous pouviez entendre les coups de feu provenant de

24 Prnjavor?

25 Réponse: Très souvent, au-dessus de la ville on pouvait entendre quelque

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1 chose que les experts militaires appelaient Luna, et c'étaient des obus

2 qui passaient au-dessus de nous et on pouvait voir les traces de ces obus

3 qui tombaient non loin de Slavonski Brod. Les personnes qui par la suite

4 ont été envoyées à Derventa pour piller des appartements nous l'ont dit.

5 C'étaient des personnes qui avaient été envoyées pour faire leurs

6 obligations de travail et ont pillé au nom des autorités. Et j'ai très

7 souvent vu ces obus au-dessus de la ville et c'était tiré depuis les

8 positions serbes.

9 Question: Si j'avais voulu savoir cela je vous aurais posé une question

10 précise, mais je voulais simplement savoir si vous avez entendu des bruits

11 de combats qui se déroulaient à Derventa depuis Prnjavor?

12 Réponse: Je n'ai fait qu'entendre ce que je viens de vous dire, c'est tout

13 ce que j'ai pu entendre. Je n'ai pas entendu autre chose.

14 Question: C'est tout ce que je vous demande. Je voulais simplement savoir

15 ce que vous avez entendu.

16 Avez-vous eu connaissance de visites faites à Prnjavor par le CICR à

17 quelque moment que ce soit entre 1992 et le moment où vous êtes parti

18 grâce au comité international de la Croix-Rouge?

19 Réponse: Une fois que j'ai été passé à tabac, ils sont arrivés et ils

20 m'ont entendu dans la ville de Prnjavor. Est-ce que le CICR était déjà

21 venu avant? Je n'en sais rien.

22 Question: Et à quel moment cela se passait-il? Vous avez été passé à tabac

23 à plusieurs reprises: quand est-ce que vous avez été interrogé par le

24 CICR?

25 Réponse: Je parlais du quatrième passage à tabac, le dernier.

Page 15235

1 Question: Avez-vous appris à ce moment-là ce que le CICR s'efforçait de

2 faire?

3 Réponse: Des membres du CICR m'ont dit qu'il s'agissait d'efforts destinés

4 à me trouver un nouveau logement à mon moi et à mon frère qui était dans

5 un état encore pire que le mien, donc hors de Prnjavor.

6 On m'a demandé si je souhaitais déménager, je pense qu'on m'a parlé de

7 Zagreb et, lorsque j'ai dit que je souhaitais que toute ma famille soit

8 relogée, on m'a répondu: "Nous ferons de notre mieux. Nous essaierons

9 d'organiser cela avec les autorités serbes. Mais, par la suite, le CICR ne

10 m'a plus jamais rendu visite.

11 M. Ackerman (interprétation): Très bien. La dernière chose que je souhaite

12 vous demander -je pense que nous pourrons aller assez vite- est la

13 suivante.

14 En page 33 de votre témoignage, hier, on vous a interrogé au sujet des

15 événements de Lisnja. Et vous avez dit: "Que vous n'étiez pas sur place

16 lors de l'attaque de Lisnja, mais que quelques jours plus tard vous avez

17 traversé le village, et que vous y avez vu 54 maisons incendiées."

18 Avez-vous réellement décompté une par une chacune de ces maisons?

19 M. Odobasic (interprétation): Ecoutez, Monsieur, il y avait un certain

20 Halilovic qui a subi ces événements de Lisnja. Sa maison était tout près

21 des maisons incendiées et j'étais un très bon ami de cet homme depuis

22 plusieurs années. Donc je suis allé le voir et nous avons commencé à

23 analyser la situation pour voir combien de maisons avaient été brûlées.

24 M. le Président (interprétation): Ecoutez, je vous interromps. Je vous

25 interromps, car la question est très simple. On vous a demandé si vous

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1 avez compté ces maisons une par une ou pas? Alors je vous répète la

2 question: avez-vous compté ces maisons une par une?

3 M. Odobasic (interprétation): Non, nous ne les avons pas dénombrées une

4 par une, nous établissions une liste.

5 M. le Président (interprétation): Très bien. Quel que soit le sens à

6 accorder à cette réponse.

7 M. Ackerman (interprétation): Vous avez établi une liste de 54 maisons?

8 M. Odobasic (interprétation): Oui.

9 Question: Quand est-ce que vous êtes allé à Lisnja pour la dernière fois

10 avant cette visite dont vous êtes en train de parler?

11 Réponse: Comme je l'ai déjà dit, j'ai été une fois à la tribune en tant

12 qu'invité du SDA, lors d'un rassemblement public.

13 Question: Et cela s'est passé quand?

14 Réponse: Avant les premières élections multipartites.

15 M. Ackerman (interprétation): Merci, Monsieur. Je n'ai plus de question.

16 M. le Président (interprétation): Merci, Maître Ackerman.

17 Madame Richterova, avez-vous des questions supplémentaires?

18 Mme Richterova (interprétation): Non, merci, Monsieur le Président, je

19 n'ai pas de question supplémentaire.

20 (Questions au témoin, M. Jasmin Odobasic, par M. le Président.)

21 M. le Président (interprétation): Je vous remercie, Madame.

22 Je n'ai pas vraiment de questions particulières à vous poser, Monsieur le

23 Témoin. Mais avant que vous ne quittiez ce prétoire j'ai tout de même un

24 éclaircissement à vous demander au sujet des photographies produites par

25 vous hier.

Page 15237

1 Hier, je vous ai posé une question très simple. Je vous ai demandé si vous

2 aviez montré l'une quelconque de ces photographies à l'un quelconque des

3 enquêteurs travaillant pour l'accusation soit avant votre arrivée ici à La

4 Haye pour déposer, soit depuis votre arrivée à La Haye?

5 Et vous m'avez répondu d'une certaine façon: que vous vous souveniez avoir

6 remis ces photographies aux représentants de Bosnie-Herzégovine

7 précédemment, mais que vous ne vous souveniez pas avoir remis ces

8 photographies à quelque moment que ce soit à l'un quelconque des

9 représentants du Bureau du Procureur.

10 Maître Ackerman, sur ces entrefaites, vous a fait valoir que ses propos

11 étaient contradictoires par rapport à ce que l'on peut lire dans l'une de

12 vos déclarations faites devant les représentants du Bureau du Procureur.

13 De surcroît, un passage de cette déclaration, émanant de vous et faite

14 devant les représentants du Bureau du Procureur, vous a été lu. Et, pour

15 ce qui me concerne, j'ai le sentiment que l'explication fournie par vous

16 n'était pas suffisante sur ce point. Je vous donne donc une nouvelle fois

17 la possibilité de revenir sur cette question que je vous ai posée hier.

18 Confirmez-vous, Monsieur, ce que vous avez dit hier en réponse à ma

19 question, à savoir que vous n'avez à aucun moment remis l'une quelconque

20 de ces photographies à l'un quelconque des membres du Bureau du Procureur

21 ou l'un quelconque des enquêteurs travaillant pour le Bureau du Procureur?

22 Ou bien préféreriez-vous peut-être revenir dans cette déclaration en la

23 modifiant?

24 M. Odobasic (interprétation): J'aimerais rendre cette déclaration plus

25 claire.

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1 M. le Président (interprétation): Très bien, je vous en prie.

2 M. Odobasic (interprétation): Lorsque je suis arrivé en 1994 à Sarajevo,

3 j'avais sur moi un grand nombre de photographies très diverses au nombre

4 desquelles se trouvait celle dont nous sommes en train de parler. J'ai

5 remis un négatif aux enquêteurs du Tribunal qui m'en ont donné une copie

6 que j'ai montrée hier ici. Ils m'ont demandé à plusieurs reprises si

7 j'autorisais la remise de ces photographies au Tribunal de La Haye ou à

8 d'autres organes d'enquête, et j'ai toujours donné mon accord.

9 Hier, j'ai bien réfléchi, mais je ne me souviens pas exactement. Il est

10 possible qu'à l'époque où j'ai fait de cette déclaration, des

11 photographies ont été remises aux enquêteurs de La Haye. Chaque fois qu'il

12 y avait interrogatoire par les enquêteurs du Tribunal de La Haye, ces

13 photographies étaient montrées si elles étaient demandées. On m'a dit que

14 16 photographies pouvaient être remises; j'ai signé une déclaration

15 donnant mon accord par rapport à cette remise des photographies, mais la

16 seule chose que je puisse dire avec certitude, c'est que, sur toutes ces

17 photographies, je n'en ai jamais donné aucune à qui que ce soit. J'ai

18 simplement montré ces photographies hier, ici même. Cette déclaration est

19 très longue et j'ai quelque difficulté à me souvenir de chacun des détails

20 qui y est contenu.

21 M. le Président (interprétation): Vous rappelez-vous avoir montré ces

22 photographies une fois arrivé à La Haye, avant d'avoir commencé à

23 témoigner dans ce prétoire? Est-ce qu'on vous a montré ces photographies?

24 M. Odobasic (interprétation): Avant mon arrivée à La Haye?

25 M. le Président (interprétation): Non, après votre arrivée à La Haye.

Page 15239

1 M. Odobasic (interprétation): C'est moi qui ai saisi cette photographie et

2 essayé de la montrer aux enquêteurs du Bureau du Procureur, celle qui a

3 été montrée ici, dans le prétoire, mais on m'a répondu que cette

4 photographie n'avait aucun rapport avec 1992 et qu'elle n'était donc pas

5 nécessaire.

6 M. le Président (interprétation): Très bien.

7 Maître Ackerman, je suis revenu sur ce sujet, donc je vous donne la

8 possibilité de poser encore une ou deux questions au témoin, qui porteront

9 donc uniquement sur ces photographies.

10 M. Ackerman (interprétation): J'ai une question à poser, Monsieur le

11 Président.

12 M. le Président (interprétation): Je vous en prie.

13 (Contre-interrogatoire supplémentaire du témoin, M. Jasmin Odobasic, par

14 Me Ackerman.)

15 M. Ackerman (interprétation): Monsieur le Témoin, vous vous souviendrez

16 qu'hier, j'ai cité un passage…

17 M. le Président (interprétation): … de la déclaration du 15 mars 1999.

18 M. Ackerman (interprétation): Un passage de votre déclaration du 15 mars

19 1999, faite devant les membres de l'accusation. Est-ce que vous l'avez

20 sous les yeux, cette déclaration du 15 mars 1999?

21 M. Odobasic (interprétation): Oui.

22 Question: J'aimerais également disposer de la version anglaise de cette

23 déclaration.

24 (Intervention de l'huissier.)

25 Ce qui m'intéresse, c'est la dernière phrase, mais j'aimerais en tout cas

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1 que vous ayez sous les yeux la version anglaise de cette déclaration et

2 que vous nous disiez si c'est bien votre signature qu'on lit juste en

3 dessous de la dernière phrase?

4 Réponse: Oui, c'est ma signature.

5 Question: Dans la version anglaise, nous lisons ce qui suit: "Je fournis

6 également des copies de 17 photographies, prises par moi et par mon frère,

7 de blessures infligées à moi, à mon frère, à mon père et à la femme de mon

8 frère, suite aux passages à tabac qui nous ont été infligés par les

9 policiers serbes, à Prnjavor."

10 Alors, voilà ce que vous avez dit aux enquêteurs de ce Tribunal: vous avez

11 dit avoir remis 17 photographies. Alors la question que je vous pose est

12 la suivante: page 63, ligne 5 de votre témoignage d'hier au compte rendu

13 d'audience, où il est question de cette déclaration, vous dites que "votre

14 déclaration portait sur des photographies qui vous ont été montrées au

15 cours de la journée d'hier dans ce prétoire", mais vous dites -je cite-:

16 "Personnellement, je ne les ai pas remises aux représentants du Bureau du

17 Procureur". (Fin de citation.)

18 Alors, comment vous pouvez-vous concilier ces deux déclarations

19 contradictoires? Dans un document signé par vous, vous dites avoir remis

20 ces photographies, alors que, dans le prétoire, vous dites aux Juges hier

21 n'avoir pas remis de photographies.

22 Réponse: J'ai éclairci ce point il y a quelques instants. En 1994, j'avais

23 remis toutes ces photographies aux autorités judiciaires de chez nous et,

24 en 1999, ces photographies ont été présentées ici. C'est la première fois

25 que je les vois mentionnées dans un autre document. Sincèrement, je ne me

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1 rappelle pas quelles sont les photographies qui sont mentionnées dans ces

2 documents dont vous parlez. Je n'ai pas examiné toutes ces photographies

3 avec les représentants des enquêteurs.

4 Question: Si je comprends bien ce que vous dites, Monsieur, vous dites que

5 ce n'est peut-être pas vous qui avez remis ces photographies aux

6 enquêteurs du Tribunal, mais qu'elles ont peut-être été remises par les

7 autorités judiciaires de chez vous aux autorités de ce Tribunal?

8 Réponse: Non.

9 M. Ackerman (interprétation): Alors, je ne comprends pas du tout votre

10 explication. Etes-vous en train de dire que c'est vous ou que ce n'est pas

11 vous qui les avez remises, ces photographies? Qu'est-ce qui est exact,

12 selon vous?

13 M. le Président (interprétation): Il vous a dit ne pas se souvenir.

14 M. Ackerman (interprétation): Ou bien est-ce que vous ne vous souvenez

15 pas?

16 M. le Président (interprétation): Restons-en là, Maître Ackerman, je vous

17 prie.

18 M. Ackerman (interprétation): Très bien.

19 M. le Président (interprétation): Monsieur Odobasic, ceci nous amène à la

20 fin de votre déposition.

21 Au nom du Tribunal, à mon nom personnel ainsi qu'au nom des deux Juges qui

22 siègent à côté de moi durant ce procès, à savoir la Juge Janu de la

23 République Tchèque et la Juge Taya du Japon, je tiens à vous remercier

24 d'être venue ici pour témoigner et nous aider dans notre recherche de la

25 vérité.

Page 15242

1 M. Ackerman (interprétation): Excusez-moi, Monsieur le Président, mais on

2 me dit que la seule façon de faire la clarté sur ce point est de traiter

3 la question maintenant. A la fin du témoignage, avant que vous n'ayez

4 interrogé le témoin au sujet de ces photographies, il venait de dire qu'il

5 s'était rendu à une réunion publique à Lisnja et au compte rendu

6 d'audience, qu'il représentait le SDP.

7 M. le Président (interprétation): C'est ce que j'ai entendu effectivement.

8 M. Ackerman (interprétation): Alors qu'on vient de me dire qu'il a déclaré

9 avoir été le représentant du SDA à ce rassemblement.

10 Monsieur le Président, si je puis me permettre je rappelle que le témoin a

11 dit qu'il était allé à cette réunion publique en tant que représentant du

12 SDP, mais que la réunion était organisée par le SDA. Mais le SDA ne figure

13 pas dans le compte rendu d'audience, page 62, ligne 16.

14 M. le Président (interprétation): Est-ce exact Monsieur Odobasic? Est-ce

15 que cette réunion publique dont vous avez parlé, à laquelle vous avez

16 assisté à Lisnja, était organisée par le SDA?

17 M. Odobasic (interprétation): Oui, bien sûr. J'ai dit hier que nous nous

18 étions invités à assister à cette réunion publique, que nous étions 5

19 invités, réunion publique organisée par le SDA, alors que nous

20 représentions le SDP.

21 M. le Président (interprétation): Très bien. Je reprends donc là où je

22 m'étais interrompu. Au nom de la Chambre de première instance, je tiens à

23 vous remercier d'être venu devant le Tribunal pour témoigner, vous serez

24 escorté hors du prétoire par madame l'huissière et on s'occupera bien de

25 vous, on fera tout ce qu'il y a à faire pour vous permettre de retourner

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1 sans encombre jusqu'à votre lieu de résidence. Une nouvelle fois je vous

2 remercie et je vous souhaite bon voyage de retour.

3 M. Odobasic (interprétation): Merci de l'expérience que je viens de vivre.

4 En tant que juriste, c'était véritablement pour moi une expérience très

5 nouvelle. Je vous remercie.

6 (Le témoin, M. Jasmin Odobasic, est reconduit hors du prétoire.)

7 (Questions relatives à la procédure.)

8 M le Président (interprétation): Eh bien, je vous vois debout, Maître

9 Ackerman.

10 M. Ackerman (interprétation): Je vous demande quelques instants Monsieur

11 le Président pour consulter mes confrères. Une pause relativement brève me

12 suffira avant d'aborder le témoin suivant.

13 M. le Président (interprétation): Lorsque vous dites une pause

14 relativement brève, vous aurez besoin de combien de temps?

15 M. Ackerman (interprétation): 15 à 20 minutes, au plus.

16 Mme Korner (interprétation): Puis-je suggérer 15 minutes, plutôt que 20?

17 M. Ackerman (interprétation): 15 suffiront.

18 M. le Président (interprétation): 15 minutes, c'est parfait. Donc, pause

19 de 15 minutes.

20 (L'audience, suspendue à 17 heures 32, est reprise à 17 heures 50.)

21 M. le Président (interprétation): Nous restons en audience publique, à

22 moins qu'une demande de huis clos partiel ne soit présentée pour une

23 partie ou pour la totalité du reste de nos débats, au sujet de cette

24 requête pour report du procès.

25 Maître Ackerman, vous avez la parole.

Page 15244

1 M. Ackerman (interprétation): Monsieur le Président, puisque c'est la

2 première fois que la question est évoquée en détail et en audience

3 publique, je tiens pour le compte rendu d'audience, notamment, à vous

4 dessiner un peu le contexte.

5 Le 24 février 2003, je crois que c'était mardi de cette semaine, je vous

6 ai fait savoir par voix de mémoire, ainsi qu'au Procureur, que j'ai un

7 problème de santé grave qui exigera mon retour au Texas, pour une

8 intervention chirurgicale qui exigera une hospitalisation de sept à huit

9 jours après l'intervention, et ensuite une période assez longue de

10 convalescence. Je ne vais pas entrer dans les détails, vous êtes informé.

11 M. le Président (interprétation): Oui.

12 M. Ackerman (interprétation): Vous verrez également dans ce mémoire un

13 plan qui, je crois, pourrait fonctionner pour la suite de ce procès. Une

14 partie de ce plan d'ailleurs a été déjà acceptée et mise en œuvre; il

15 s'agirait en effet de recruter un autre représentant au sein de l'équipe

16 de défense qui, je l'espère, pourra apporter une aide conséquente à moi et

17 à la Chambre de première instance dans la suite de cette affaire.

18 Nous avons participé à plusieurs réunions. Je crois qu'il s'agissait de

19 deux réunions avec les Juges et à une conférence en application de

20 l'Article 65ter, au cours de laquelle la question a été discutée plus

21 longuement et plus en détail. Entre-temps, j'ai également tenu un certain

22 nombre de réunions avec M. Brdjanin pour savoir quels étaient ses souhaits

23 vis-à-vis de cette situation qui n'est voulue par personne, bien entendu,

24 mais à laquelle nous sommes contraints de faire face, compte tenu des

25 circonstances.

Page 15245

1 Monsieur Brdjanin a fait connaître ses souhaits et a déposé hier une

2 requête en vue de report du procès. Ces écritures ont été déposées

3 confidentiellement, Monsieur le Président, car, en annexe, on trouve un

4 certain nombre de renseignements que je considère personnels et dont

5 j'estime qu'ils devraient rester entre nous au sein de notre communauté

6 restreinte.

7 M. le Président (interprétation): Oui, ils resteront au sein de notre

8 communauté restreinte, Monsieur Ackerman. Il ne s'agit pas de

9 renseignements à donner en pâture au public.

10 M. Ackerman (interprétation): Ayant entendu les vœux de M. Brdjanin, j'ai

11 rédigé une déclaration qui fait connaître les souhaits de mon client et

12 qui reprend, je l'espère fidèlement, la teneur des desiderata de M.

13 Brdjanin. Ce que dit M. Brdjanin, c'est la chose suivante -je cite-: "John

14 Ackerman est le conseil en chef dans l'affaire qui m'intéresse. C'est mon

15 choix, je crois comprendre qu'en application du Règlement de ce Tribunal,

16 chaque accusé a le droit de choisir son conseil et Me Ackerman a été

17 choisi par mes soins. Je fais objection à toute procédure qui se

18 poursuivrait dans la présente affaire en l'absence d'un conseil choisi par

19 moi à La Haye, à moins que je donne mon accord pour l'absence de Me

20 Ackerman. Je crois que comprendre l'état de santé de Me Ackerman est

21 sérieux et je fais objection à ce que l'affaire se poursuive au-delà de

22 l'audience du 14 mars 2003, à moins que M Ackerman soit en mesure de

23 revenir à La Haye pour aider à ma défense dans cette période."

24 Le document est signé par M.r Brdjanin et on y trouve la requête en vue de

25 report du procès annexée au document principal. Ces documents ont été

Page 15246

1 déposés par moi, hier, Monsieur le Président.

2 Monsieur Brdjanin comprend bien que le paragraphe 2 de ce document décrit

3 une objection à toute poursuite de la procédure dans la présente affaire à

4 moins que son conseil principal soit présent à La Haye, et qu'il y ait

5 possibilité pour l'accusé de contre-interroger les témoins, de présenter

6 des requêtes au cours des audiences et de traiter de toutes les questions

7 qui se posent normalement dans un prétoire.

8 Et puis, enfin, je souhaite être bref, Monsieur le Président, donc je n'ai

9 aucunement l'intention de m'appesantir sur les différents aspects du

10 problème, mais j'évoquerai finalement la demande présentée par moi, qui

11 est déposée par M. Brdjanin en accord avec moi. On trouve ce document

12 annexé à la requête que j'ai déposée hier et on y lit que Radoslav

13 Brdjanin, par la voix de son conseil John Ackerman, demande avec le

14 respect qu'il doit au Tribunal un report des audiences jusqu'au 14 mars

15 2003, date à laquelle son conseil principal pourra revenir à La Haye pour

16 l'aider à la poursuite de la présente affaire, suite aux éléments décrits

17 dans le mémoire annexé en tant que pièce à conviction A. Il s'agit du

18 mémoire que je viens d'évoquer et de faire connaître aux Juges.

19 Il s'agit donc de la description de ce projet qui vous décrit les

20 circonstances du report d'un mois de la présente affaire jusqu'au 15 avril

21 à peu près. Immédiatement après le 15 avril, nous avons prévu une

22 suspension d'audience d'une semaine et je propose que cette suspension

23 soit abrogée, ce qui finalement nous conduirait à un retard de trois

24 semaines, à une suspension de trois semaines de la présente affaire.

25 M. le Président (interprétation): Merci, Maître Ackerman. Madame Korner,

Page 15247

1 avez-vous une réponse?

2 Mme Korner (interprétation): Comme Me Ackerman vient de l'indiquer, nous

3 en avons traité de façon détaillée hier, ensemble, lors de la conférence

4 tenue en application de l'Article 65ter, qui a donné lieu à un compte

5 rendu d'audience. Du côté de l'accusation, nous tenons à dire d'abord à

6 quel point nous regrettons l'état de santé de Me Ackerman et nous lui

7 souhaitons un rétablissement prompt et entier.

8 Deuxièmement, nous dirons qu'il n'appartient pas à l'accusé de présenter

9 des objections, ses objections n'étant pas automatiquement à prendre en

10 compte. Il appartient aux Juges de la Chambre de première instance de

11 décider s'il y aurait une quelconque injustice à ce que le procès se

12 poursuive en présence d'un coconseil, et j'insiste sur le mot coconseil,

13 mais en l'absence du conseil principal. La situation à laquelle nous

14 faisons face se complique, du fait que plusieurs fois la défense a fait

15 valoir quand l'absence d'un conseil principal, le co-conseil devrait

16 pouvoir être en mesure de reprendre les débats, car il a déjà été question

17 à plusieurs reprises lors de cette affaire, d'une absence éventuelle du

18 conseil principal.

19 Des assurances ont été fournies, quant au fait qu'à partir du 18 avril,

20 une situation de ce genre pourrait exister. L'accusation ne s'oppose pas à

21 une interruption du procès, si M. Brdjanin fait valoir des raisons

22 supplémentaires indiquant pourquoi il s'oppose à ce que la présente

23 affaire se poursuive en l'absence de Me Ackerman. A notre avis, il ne

24 suffit pas que M. Brdjanin se contente de dire: je ne souhaite pas que le

25 procès se poursuive en l'absence de mon conseil principal. Il faut des

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1 motifs plus sérieux.

2 Et je m'exprime de la façon la plus neutre qui soit, Monsieur le

3 Président, en disant que, si le motif à la base de cette requête vient du

4 fait que le coconseil, bien que venant de son système judiciaire, n'a pas

5 l'expérience nécessaire pour procéder devant ce Tribunal et a notamment

6 l'incapacité de s'exprimer en anglais, ce qui le mettrait dans

7 l'impossibilité de traiter de quelque requête ou de quelque document qui

8 lui serait soumis en anglais, si tel est donc le motif, Monsieur le

9 Président, nous estimons que c'est un motif valable. Mais ce motif doit, à

10 notre avis, être indiqué très clairement par M. Brdjanin, car il s'ensuit

11 un certain nombre de conséquences. J'estime qu'il n'est que normal que les

12 Juges se voient décrits ces motifs de la façon la plus claire qu'il soit.

13 Voilà donc quel est notre premier argument. Nous disons qu'il ne suffit

14 pas pour l'accusé de dire: j'ai une objection par rapport à la présence du

15 coconseil; il faut des motifs supplémentaires. Donc Me Ackerman ou M.

16 Brdjanin devraient faire valoir ces motifs en personne.

17 M. le Président (interprétation): Je vous interromps pour l'instant.

18 Maître Ackerman, je m'adresse à vous bien sûr, car je ne parle pas

19 directement à votre client: êtes-vous en mesure de nous dire si votre

20 client serait prêt à répondre de façon favorable à ce que vient de

21 demander Mme Korner?

22 M. Ackerman (interprétation): Pour répondre clairement à votre question,

23 Monsieur le Président, je dirais que mon client est tout à fait prêt à

24 faire une déclaration dans ce prétoire, si vous estimez que c'est

25 nécessaire. Il est tout à fait prêt à le faire.

Page 15249

1 M. le Président (interprétation): Vous avez suivi, Monsieur Brdjanin, de

2 ce qui vient de se passer?

3 M. Brdjanin (interprétation): Oui, Monsieur le Président.

4 M. le Président (interprétation): Nous croyons comprendre que vous êtes

5 prêt ou que vous accepteriez de faire une déclaration, n'est-ce pas?

6 M. Brdjanin (interprétation): Je suis prêt à le faire et cela pourra être

7 assez court, je pense.

8 M. le Président (interprétation): Bien. Nous écoutons votre déclaration.

9 Je vous remercie.

10 M. Brdjanin (interprétation): Moi aussi, je vous remercie et je remercie

11 Mme Korner.

12 M. le Président (interprétation): Vous pouvez vous asseoir, si vous le

13 souhaitez.

14 M. Brdjanin (interprétation): Cela m'est égal. On ne se rend pas compte

15 d'ailleurs quand je suis debout.

16 M. le Président (interprétation): Veuillez poursuivre.

17 M. Brdjanin (interprétation): Je considère que si n'importe qui avait

18 rempli les fonctions de coconseil en ce moment -et je tiens à être clair

19 là-dessus-, même si le coconseil était le meilleur du monde, je

20 demanderais tout de même une interruption jusqu'au retour de Me Ackerman.

21 Je vous demande de me permettre de vous expliquer pourquoi en quelques

22 phrases.

23 Je suis conscient d'avoir choisi le conseil principal. Maître Ackerman et

24 moi-même travaillons ensemble depuis 44 mois. J'ai déjà eu des coconseils;

25 je ne vais pas entrer dans le détail des suspensions de ces coconseils ou

Page 15250

1 des objections que j'ai élevées à leur rencontre, mais j'ai des coconseils

2 actuellement qui, à mon avis, exercent leur fonction correctement en

3 application du droit yougoslave et en toute sécurité. Je n'ai rien contre,

4 au retour de Me Ackerman, de le voir décider si d'autres coconseils vont

5 intervenir dans l'affaire pour le contre-interrogatoire; je ne tiens pas à

6 entrer dans ces détails. Mais je me sentirais plus sûr si l'équipe

7 composée ici aujourd'hui restait en l'état.

8 Je ne formule de suspicion à l'égard de personne, mais j'estime qu'étant

9 donné que la charge de la preuve repose sur l'accusation, il est tout à

10 fait important que l'équipe de défense reste complète.

11 En raison de l'autorité dont il dispose, en raison de la façon dont il a

12 présenté un certain nombre de requêtes, en raison de communication

13 d'éléments de preuve dont il est responsable, je pense qu'il est important

14 que Me Ackerman continue à exercer ses fonctions. Il ne s'agit donc pas

15 d'exprimer des suspensions à l'égard de qui que ce soit; il s'agit -et

16 vous pouvez en juger encore mieux que moi- de la phase du procès dans

17 laquelle nous nous trouvons. Si nous étions au début du procès, peut-être

18 que la situation serait différente.

19 Bien entendu, je suis le premier à être intéressée par un procès rapide et

20 une interruption ne m'intéresse pas beaucoup, croyez-moi, mais je vous

21 demande de vous prononcer sur ce point selon les vœux exprimés par moi et

22 le vœu que j'exprime, c'est qu'une interruption du procès ait lieu pendant

23 l'absence de Me Ackerman et jusqu'à son retour.

24 Je souhaite également que l'équipe de défenseurs reste en l'état, car

25 toute nouvelle modification de la composition de cette équipe me gênerait

Page 15251

1 grandement en créant chez moi une certaine crainte. Je ne parle pas de

2 suspicion, mais je parle d'une certaine crainte que je ressens au cas où

3 une modification de la composition de mon équipe de défenseurs devrait

4 aboutir à des délais supplémentaires.

5 Tous ceux qui suivent le procès depuis le début savent combien de délais

6 j'ai déjà dû subir. Excusez-moi pour la rapidité de mon débit.

7 Donc j'ai donné mon accord à Me Ackerman par rapport à la solution

8 proposée par lui. Je ne me mêlerai pas de son travail à son retour et je

9 ne pense pas qu'un coconseil se verra interdire la possibilité de procéder

10 à des contre-interrogatoires, mais c'est à Me Ackerman qu'il appartiendra

11 de se prononcer sur ce point, car je suis vraiment un analphabète en

12 matière de droit, étant de profession ingénieur.

13 Je me rends bien compte que ce Tribunal a à faire face à des frais, que le

14 procès dure depuis longtemps; je tiens compte de tous ces éléments, mais

15 c'est en tenant compte de tous ces éléments que je vous prie, si cela est

16 possible, de faire droit à ma requête, et de permettre à Me Ackerman et à

17 moi-même, une fois que le procès aura repris, de poursuivre ce procès

18 jusqu'à son terme sans interruption.

19 Si vous souhaitez d'autres renseignements, je peux vous les fournir.

20 M. le Président (interprétation): Je vous remercie, Monsieur Brdjanin.

21 Mme Korner (interprétation): Permettez-moi de poser une question à M.

22 Brdjanin, suite à ce qu'il vient de dire.

23 Si nous devions accepter -bien sûr, il y a des témoins importants qui sont

24 encore à entendre-, mais si nous acceptions qu'en l'absence de Me Ackerman

25 ne soient cités à la barre que des témoins de fait, dont aucun

Page 15252

1 n'impliquera M. Brdjanin directement, je demande à M. Brdjanin s'il serait

2 satisfait que M. Trbojevic contre-interroge ces témoins, car nous n'avons

3 pas compris très clairement quelle était la décision de M. Brdjanin par

4 rapport à Me Ackerman sur ce point.

5 M. le Président (interprétation): Maître Ackerman?

6 M. Ackerman (interprétation): Avec le respect que je vous dois, je demande

7 à M. Brdjanin de ne pas répondre à cette question.

8 D'abord, deux ou trois choses que j'aimerais vous dire. Monsieur Brdjanin

9 a indiqué que cela faisait plus de 40 mois qu'il travaillait avec moi,

10 dans un travail très important. Au cours de ces 40 mois et plus, j'ai

11 appris beaucoup au sujet de la présente affaire et j'ai, dans mon cerveau,

12 une base de données énorme portant directement sur cette affaire. Donc, si

13 quelqu'un de nouveau intervenait dans l'équipe de défense et se posait des

14 questions quant à la façon de procéder, je pourrais répondre à ses

15 questions, car je m'appuie sur une expérience de plus de 40 mois au sein

16 de cette équipe.

17 Vous savez que, durant ce que je vais devoir vivre, il va y avoir au moins

18 une période de deux semaines au cours de laquelle je ne serai absolument

19 pas en mesure de donner le moindre conseil à un membre de l'équipe de

20 défense, de quelque point de vue que ce soit. Donc, si l'affaire se

21 poursuit, elle se poursuivra en présence de quelqu'un qui n'a absolument

22 aucune connaissance de fond sur la présente affaire.

23 Le coconseil qui entrera dans l'équipe en avril, même s'il peut lire

24 l'anglais et remplir toutes ses autres responsabilités, ne pourra pas lire

25 tous les comptes rendus d'audience et ne pourra pas être au courant de la

Page 15253

1 présente affaire autant que je suis moi-même.

2 Deuxième argument: la proposition selon laquelle nous devrions entendre

3 des témoins de faits en mon absence, après quoi je pourrais reprendre les

4 témoins qui restent à mon retour provoquera un effet tout à fait

5 désastreux pour la défense.

6 Madame Korner, en effet, a proposé que les témoins particulièrement

7 difficiles pour lesquels la préparation est très longue et très difficile

8 pourraient être entendus tous ensemble à la fin de la présentation des

9 éléments de preuve. De sorte que lorsque j'entrerai en étant encore dans

10 un état de santé un peu fragile, je devrais me concentrer sur ces témoins

11 les plus difficiles qui seront tous regroupés ensemble. Ce sera un

12 avantage important pour le Procureur, mais ce sera un inconvénient

13 important et un manque de justice pour M. Brdjanin.

14 Je demande à M. Brdjanin de ne pas répondre à la question qui lui a été

15 posée par Mme Korner et d'attendre simplement la décision des Juges au

16 sujet de la requête.

17 M. le Président (interprétation): Madame Korner.

18 Mme Korner (interprétation): Je laisse les Juges libres de se prononcer

19 sur la façon dont la question a été posée. En fait, les témoins de faits

20 ont déjà été suffisamment nombreux pour que nous n'ayons pas besoin de

21 plus de quatre semaines environ. Il n'aura pas besoin d'entendre d'autres

22 experts.

23 Mais je tiens à ce qu'une chose soit tout à fait clair, quant à ce qu'il

24 va se passer à l'avenir. S'agissant de cette interruption d'un mois, je

25 dirai les choses de la façon suivante.

Page 15254

1 Je n'aurais aucune objection si personne ne peut reprendre la charge de

2 travail de Me Ackerman à ce tel soit le cas, mais il nous faut bien

3 regarder ce qu'il va se passer à l'avenir. A l'heure actuelle l'avenir

4 semble assez noir. Ce procès dure déjà depuis un peu plus d'un an, depuis

5 15 mois, en fait, exactement. Nous avions prévu de terminer la

6 présentation des éléments de preuve de l'accusation aux environs de

7 Pâques, c'était l'estimation initiale. Nous avons eu tort, en tout cas

8 elle pourrait s'achever au mois de mai avec les délais nécessaires pour la

9 présentation et l'examen des requêtes.

10 Donc ce qui se passera, c'est tout à fait simple: aux vus du fait que Me

11 Trbojevic -et j'ai le plus grand respect pour lui- n'est pas le conseil

12 principal, n'est pas en tout cas le conseil dont Me Ackerman avait besoin

13 avant et dont il a besoin aujourd'hui et ce pour deux raisons. Et je

14 répète que je m'exprime sans vouloir manquer de respect à Me Trbojevic de

15 la moindre façon que ce soit.

16 Maître Trbojevic n'a pas l'expérience nécessaire pour travailler devant ce

17 Tribunal, il ne parle pas la langue principale de ce Tribunal et ne peut

18 pas la lire, suite à quoi toute communication entre Me Trbojevic et Me

19 Ackerman doit se faire par le biais d'un interprète. C'est un bon exemple.

20 Notre affaire est une affaire dans laquelle interviennent de très nombreux

21 et très volumineux documents et il y aura encore de nouvelles requêtes qui

22 seront présentées à l'avenir, un certain nombre d'experts seront entendus,

23 un certain nombre de mémoires devront être rédigés, après quoi si les

24 Juges estiment qu'ils ont à répondre à certaines de ces écritures, il

25 faudra que la défense présente ses arguments.

Page 15255

1 Il est tout à fait impossible que Me Ackerman remplisse l'intégralité de

2 cette tâche en l'absence d'un coconseil incapable ou en présence d'un

3 coconseil qui ne peut pas l'aider.

4 Donc les conséquences sont les suivantes: vous avez déjà vous, Mesdames et

5 Monsieur les Juges, fait droit à un certain nombre de requêtes et tout

6 cela a donné lieu à des écritures très nombreuses qu'il faudra réexaminer,

7 ce qui provoquera des retards.

8 Donc nous pouvons prévoir que même si le conseil principal est en très

9 bonne santé il aura besoin d'un délai supplémentaire. Ne parlons pas de

10 quelqu'un qui n'est pas en parfaite santé.

11 L'interruption d'audience va entraîner des délais supplémentaires.

12 Monsieur Brdjanin, de ce fait, devra rester dans le quartier pénitentiaire

13 en tant qu'accusé plus longtemps que cela n'est nécessaire -et comme les

14 Juges l'ont déjà indiqué- cela renverra à plus tard les procès d'autres

15 accusés qui attendent eux aussi depuis très longtemps, sinon plus

16 longtemps encore.

17 Alors vous-même avez dit très clairement -je m'adresse aux Juges- en

18 disant cela que quelque soit l'identité de la personne nommé au poste de

19 coconseil, cette personne doit avoir au moins la possibilité pendant une

20 période limitée de remplacer le conseil principal si celui-ci est absent.

21 Or, en l'espèce nous ne sommes pas dans cette situation.

22 Monsieur le Président, j'appelle l'intention des Juges sur ces divers

23 arguments ainsi que sur le travail important du Greffe et de toutes les

24 personnes responsables de la nomination des conseils.

25 En effet, dans un avenir tout à fait proche, notre affaire ne sera plus

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1 vraiment une affaire d'actualités. Monsieur Brdjanin nous dit qu'il

2 souhaite que son équipe de défense reste inchangé, je compatis avec lui.

3 Il a déjà vécu deux changements de coconseil, mais il me semble toutefois

4 qu'il faut que Me Trbojevic ait la possibilité de travailler en arrière

5 plan et que quelqu'un soit dans le prétoire, quelqu'un de Banja Luka peut-

6 être qui parle les langues parlées dans le prétoire et qui puisse apporter

7 une aide effective donc qu'une telle personne soit présente dans le

8 prétoire. Je dis cela car je pense qu'il est important que des

9 éclaircissements soient fournis quant à la façon dont les choses vont se

10 poursuivre. Et puis, Monsieur le Président et Mesdames les Juges, vous

11 avez entendu quels étaient mes arguments. Il est possible que M. Brdjanin

12 n'est pas à répondre à la question que j'ai posée, mais il serait bon tout

13 de même de demander à M. Brdjanin s'il accepterait qu'un coconseil le

14 représente uniquement dans le prétoire pendant l'absence de Me Ackerman.

15 (Les Juges se concertent sur le siège.)

16 M. le Président (interprétation): Vous pensez que c'est nécessaire?

17 M. Ackerman (interprétation): Je ne pense pas que ce soit nécessaire,

18 Monsieur le Président.

19 Je pense que Mme Korner vous a dit un certain nombre de choses qui

20 reposent sur des spéculations pour la plupart. Je vous ai expliqué de

21 quelle façon la présente affaire pouvait se poursuivre et j'ajouterai, y

22 compris qu'en l'absence du problème de santé que je vis actuellement, je

23 pense que notre affaire aurait pu se terminer dans les délais prévus.

24 Je ne demande qu'un délai limité en raison de cet état de santé. Je pense

25 que ce que Mme Korner a dit relève plutôt de spéculations que d'autre

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1 chose.

2 M. le Président (interprétation): Merci, Maître Ackerman.

3 Ayant entendu ce qu'a dit Mme Korner et ce que vous avez dit, vous-même,

4 Maître Ackerman, je ne pense pas qu'il soit opportun que nous répondions

5 aux arguments de Mme Korner dans l'immédiat et que nous demandions une

6 réponse à la question posée par Mme Korner à M. Brdjanin.

7 Nous croyons avoir compris l'insuffisance à la nature de l'objection qui

8 était soulevée par vous.

9 Deuxième chose, il a beaucoup été question du contexte passé de la

10 présente affaire et d'autres éléments comparables. On nous a parlé du mois

11 d'avril de l'année dernière, date à laquelle un problème de même nature

12 s'est posé pour la première fois et où il a été question de savoir ce qui

13 pouvait se passer si le conseil principal était indisposé pendant quelque

14 temps.

15 Pendant un certain temps je pense à cette époque-là quand tous les

16 instruments de ce Tribunal et plus spécialement les inspections et la

17 politique du secrétariat, ont indiqué très clairement le fait que s'il

18 arrive que le conseil principal ne soit plus capable de s'acquitter de ses

19 devoirs et même si elle en est informée immédiatement avant l'événement,

20 la défense doit être capable de reprendre ses devoirs, provisoirement bien

21 sûr parce que la défense permanente relève du conseil principal. Nous

22 l'avons clairement dit et répété à plusieurs reprises et le Greffe l'a

23 répété et confirmé à vous tout comme à nous.

24 Il a été souligné plus spécialement que lors de la désignation d'un futur

25 co-conseil dans cette affaire, il devra être donné une garantie de la part

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1 du conseil principal, garantie dans laquelle il sera dit que le co-conseil

2 sera capable d'assumer les fonctions du conseil principal dès que cela

3 s'avère nécessaire.

4 J'ai la promesse du Greffe. Il m'a été dit plus précisément, c'est le

5 Greffe qui m'en a informé, qu'avant même que Me Trbojevic n'ait été

6 désigné, qu'il avait été dit au Greffe qu'il serait capable de le faire.

7 J'ai revu les transcripts où Me Ackerman nous a dit plus ou moins que M.

8 Trnojevic était en train de se familiariser avec cette affaire et que

9 toute évidence il connaissait certains problèmes du fait qu'il ne parlait

10 pas anglais et que pour cela il avait des problèmes avec le compte rendu

11 d'audience. Mais avec le temps, tous ces problèmes seraient réglés. Et il

12 serait capable de reprendre l'affaire.

13 Mais quand il y a un mois vous deviez partir aux Etats-Unis pour des

14 affaires privées, pour des raisons privées et suite à la promesse de

15 l'accusation quant au changement de l'ordre des témoins, vous avez proposé

16 que pendant cette semaine de votre absence Me Trbojevic reprenne le

17 contre-interrogatoire.

18 Mais il semble qu'entre temps la situation a changé, personne ne nous a

19 dit pourquoi, mais de toute évidence la situation n'est plus la même. Vous

20 semblez affirmer maintenant que l'accusé a le droit d'interpréter son

21 droit à la défense de sorte qu'il n'est plus clair que cela veut dire

22 qu'il a pu non seulement choisir son conseil, mais que cela veut dire

23 aussi qu'il n'est pas d'accord avec la poursuite de l'affaire même si son

24 conseil principal n'est absent que pour un jour.

25 Nous n'allons pas nous attarder sur ce sujet, mais j'ai l'impression que

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1 même si le conseil principal, non… Si M. Brdjanin a demandé que l'audience

2 soit suspendue pendant l'absence de son conseil, je ne suis pas sûr qu'il

3 s'agit là d'une bonne interprétation du droit de l'accusé de choisir son

4 conseil. Je répète ce que nous avons déjà dit, à savoir que le co-conseil

5 doit être capable de remplacer le conseil principal dans une situation où

6 ce dernier n'est pas en mesure d'être présent au prétoire. Il appartient à

7 ce Tribunal de faire en sorte qu'aucun préjudice ne soit porté dans le cas

8 concret.

9 Maître Ackerman doit se rendre aux Etats-Unis. Il sera donc absent pendant

10 un mois. Il ne pourra pas faire son travail. Et il semble que pour cette

11 Chambre, il n'y ait pas d'autre solution que de suspendre le procès. Nous

12 ne pensons pas que ce soit la position que nous devons accepter en sachant

13 que le coconseil dans cette affaire et par le passé a déjà contre-

14 interrogé des témoins.

15 Donc nous nous arrêterons là pour le moment, nous donnerons un ordre

16 qu'une copie du compte rendu d'audience ainsi que le compte rendu selon la

17 règle 65ter pour qu'une décision puisse être prise et pour savoir si cela

18 est compatible avec la directive sur la désignation des Conseils, ce qui

19 veut dire: est-ce que l'on peut signifier au Conseil de ne pas mener le

20 contre-interrogatoire. On demande aussi à la Greffe d'informer la Chambre

21 sur toutes les actions que la Greffe considère comme devant les

22 entreprendre. Une fois que nous aurons reçu ce rapport, nous arrêterons

23 une décision. A vous, Maître Ackerman.

24 M. Ackerman (interprétation): Je voudrais juste un commentaire. Vous avez

25 dit que vous savez que Me Trbojevic a déjà contre interrogé des témoins

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1 pendant une semaine de mon absence, et qu'il semble que la situation aie

2 changée entre temps et que maintenant vous ne savez pas pourquoi elle a

3 changé. Je vous dirai pourquoi. La situation a changé parce que pendant

4 cette semaine, j'ai été en contact permanent avec mon équipe ici à La

5 Haye. J'ai pu les consulter quotidiennement ici à La Haye, or cela est

6 différent de la situation qui prévaut maintenant ou, pendant 2 semaines,

7 je ne pourrai être en contact avec personne. Je croyais que c'était clair

8 et maintenant je tiens à le souligner pour vous et pour le compte rendu.

9 M. le Président (interprétation): Oui, Maître Ackerman, mais il y a aussi

10 Mme Baruch, que vous pouvez instruire, et là nous pourrons prendre une

11 décision. Mais votre client doit comprendre qu'il ne peut pas à la fois

12 être assis sur deux chaises.

13 M. Ackerman (interprétation): Monsieur le Président, il y a une règle,

14 dans le règlement, qui permet à l'accusé d'avoir 2 conseils et vous

15 insister pour que le procès soit continué avec seulement un conseil.

16 M. le Président (interprétation): Pour le moment l'accusé à 3 conseils.

17 Maintenant, donc, nous suspendons notre travail et nous poursuivrons

18 demain et je demande à madame la Greffière d'assurer qu'une copie de ce

19 compte rendu soit acheminée à la Greffe.

20 Mme Chen (interprétation): On en tient compte.

21 M. le Président (interprétation): Je le comprends. Levez-vous. Je vous

22 remercie.

23 (L'audience est levée à 18 heures 28.)

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