Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le lundi 28 juillet 2003

2 [Audience publique]

3 --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.

4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour, Madame la Greffière, veuillez

6 citer l'affaire.

7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Bonjour,

8 Monsieur le Président. Bonjour, Mesdames les Juges. Il s'agit de l'affaire

9 It-99-36-T, le Procureur contre Radoslav Brdjanin.

10 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie, Madame la Greffière.

11 Monsieur l'Accusé, pouvez-vous suivre la procédure dans une langue que vous

12 comprenez ?

13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Mesdames les

14 Juges. Oui, je vous comprends dans une langue qui m'est familière.

15 M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]

16 Mme KORNER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, je m'appelle

17 Mme Korner, je suis d'aidée ce matin de Timothy Resch qui va interroger le

18 témoin, le témoin de demain. Il s'agit également d'un témoin qui a comparu

19 dans une procédure dans laquelle M. Resch est engagé. Et il est ici

20 aujourd'hui pour voir comment se déroule les opérations, ainsi que Denise

21 Gustin.

22 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci, et bonjour.

23 Est-ce que la Défense peut se présenter.

24 M. CUNNINGHAM : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, je

25 m'appelle David Cunningham, je suis accompagné D'Aleksandar Vujic.

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1 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci. Y a-t-il des préliminaires,

2 Madame Korner ?

3 Mme KORNER : [interprétation] Je veux simplement dire une chose. Vous

4 m'avez demandé vendredi dernier de présenter un calendrier s'agissant des

5 documents qui émanaient de l'AID, à propos desquels le témoin peut

6 confirmer l'authentification. Ce tableau vous sera communiqué après la

7 première suspension d'audience.

8 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] J'ai également -- je me suis également

9 aperçu Madame Korner, après vous avoir invité à faire cela que j'avais

10 commis une erreur, en fait, ma mémoire semblait m'avoir fait défaut, mais

11 en fait, je me suis aperçu que je suis déjà en possession d'une telle

12 liste.

13 Mme KORNER : [interprétation] En effet.

14 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Mais cette liste n'était pas complète.

15 En d'autres termes, elle prévi -- elle communique les -- des informations

16 au sujet de la provenance de nombreux documents qui ont été utilisés par le

17 truchement de ce témoin mais non pas pour l'ensemble des documents.

18 Mme KORNER : [interprétation] Je remercie, je crois qu'il s'agit des

19 documents qui ont été, originalement -- à l'origine, communiqués par M.

20 Inayat.

21 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui.

22 Mme KORNER : [interprétation] Mais nous avons changé cela parce que nous

23 avons pu obtenir d'autres documents qui présentaient une source.

24 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vois.

25 Mme KORNER : [interprétation] Nous pourrions vous remettre une liste

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1 actualisée.

2 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Ce serait fort utile.

3 Mme KORNER : [interprétation] Ce que nous allons faire, c'est que nous

4 allons procéder à deux choses. Tout d'abord, nous avons identifié les

5 documents que le témoin a déjà authentifiés. De même, nous avons identifié

6 les documents que M. Hidic a lui-même photocopiés. Par conséquent il s'agit

7 de documents identiques mais qui proviennent de sources distinctes.

8 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Est-ce que M. Hidic a témoigné en

9 séance publique ?

10 Mme KORNER : [interprétation] Oui.

11 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Fort bien.

12 Mme KORNER : [interprétation] Par conséquent, cette liste présentera deux

13 colonnes. Je voudrais également, à présent, vous demander la chose

14 suivante. En vue des limites de temps, je n'ai pas présenté l'ensemble de

15 ces documents à des fins de l'authentification. Il y a encore nombre de

16 documents qui proviennent de l'AID mais je ne le -- les lui ai pas

17 présentés. Si je devais faire cela et si vous estimez que cela est

18 important, cela va prendre un peu plus de temps. Par conséquent, Monsieur

19 le Président, j'espère que vous-mêmes pourrez examiner ces éléments de

20 preuve comme présentant un caractère authentique sinon nous devrons --

21 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Vous ne pouvez pas vous attendre à ce

22 que moi-même ou à mes collègues formulent des observations à ce sujet. Nous

23 n'allons pas vous dire ce que nous allons -- sommes prêts à faire.

24 Mme KORNER : [interprétation] Fort bien.

25 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je crois qu'il s'agirait de dépasser

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1 les limites qui sont raisonnables.

2 Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, avec tout le respect,

3 je ne pense pas comme vous. Je pense qu'à un certain moment, il faut tenir

4 compte de ces objections mais il s'agit de documents qui proviennent de

5 l'AID, et soit la Défense pourra les utiliser et je pense que ceci devra

6 être le cas parce du fait, il s'agit tout simplement d'une perte du temps.

7 A défaut, je pense que vous-même et les Juges vous êtes habiletés à dire si

8 un délai supplémentaire pourrait être envisagé.

9 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Il y a une autre solution, Madame

10 Korner. Je ne sais si vous avez encore de nombreuses questions qui vous

11 restent. Mais, je crois que nous avons compris la teneur de la déposition.

12 Peut-être que vous pourriez mettre un terme ici à sa déposition, présenter

13 sa déclaration ou son entretien. Nous pourrions peut-être lever l'audience

14 pour une demi heure et à ce moment-là, vous allez lui remettre tous les

15 documents que vous souhaitez voir authentifier et nous reprendrons

16 l'audience à ce moment-là et ce qui nous confirmera que ces documents sont

17 bien authentiques ou qu'ils ne le sont pas. Je ne sais pas.

18 Mme KORNER : [interprétation] L'autre chose que je pourrais faire, c'est de

19 peut-être remettre toute sa déclaration, mais je pense qu'il serait peut-

20 être encore bon, qu'il revienne sur certaines entrées de son journal.

21 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, je vous comprends.

22 Mme KORNER : [interprétation] En effet.

23 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Ensuite, au cours du week-end qui s'est

24 écoulé, j'ai lu la déclaration du témoin suivant : Le témoin BT93.

25 Mme KORNER : [interprétation] Oui.

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1 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] En fait, il était prévu pour deux

2 jours.

3 Mme KORNER : [interprétation] C'est exact.

4 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je pense pour ma part qu'il ne sera pas

5 nécessaire de le prolonger au-delà d'un jour.

6 Mme KORNER : [interprétation] Je ne pense pas que ceci durera deux jours.

7 C'est la raison pour laquelle j'ai indiqué à mon collaborateur, s'il le

8 veut, il pourrait déborder demain.

9 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] En fait, cela signifie et j'espère que

10 vous pouvez corroborer cela avec moi et que Me Cunningham pourra le faire

11 également, que nous pourrions terminer la déposition de ce témoin peut-être

12 mercredi ou --

13 Mme KORNER : [interprétation] Le témoin qui doit suivre pourra de toute

14 façon être libéré mercredi. J'espère que nous pourrons peut-être nous

15 occuper de choses et d'autres mercredi prochain.

16 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Fort bien. Je suis prêt à faire preuve

17 de souplesse. Je ferai comme vous le voulez et je verrai à répondre à vos

18 désirs.

19 Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, voyons comment les

20 choses évolues et si nécessaire, nous demanderons au témoin de rester

21 jusqu'à ce qu'il ait terminé sa déposition.

22 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Madame Korner, je voudrais simplement

23 que les choses soient très claires. Je ne tiens pas à priver Me Cunningham

24 de son droit de procéder au contre-interrogatoire.

25 Mme KORNER : [interprétation] Je comprends cela.

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1 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je crois que les choses sont claires.

2 Mme KORNER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

3 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Fort bien. Faisons rentrer le témoin

4 dans le prétoire. Nous sommes toujours en audience publique, n'est-ce pas ?

5 Mme KORNER : [interprétation] Oui.

6 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Cunningham, allez-vous

7 interroger le témoin qui va entrer dans le prétoire ?

8 M. CUNNINGHAM : [interprétation] Oui, en effet.

9 M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]

10 M. CUNNINGHAM : [interprétation] Je vais le faire et je ne pense pas pour

11 ma part que ce contre-interrogatoire va durer plus de deux jours.

12 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je partage votre point de vue. A moins

13 qu'il ait des choses à dire qui ne figurent pas dans sa déclaration, mais

14 je ne pense pas que tel soit le cas.

15 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

16 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci, Monsieur l'Huissier.

17 Bonjour, Monsieur le Juge.

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,

19 Mesdames les Juges.

20 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] J'espère que vous vous êtes bien reposé

21 au cours de ce week-end, que vous avez pu recharger quelque peu vos

22 batteries et que vous êtes prêt à terminer votre déposition aujourd'hui.

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

24 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Fort bien. Veuillez relire la

25 déclaration solennelle.

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1 TÉMOIN : JOVICA RADOJKO [Reprise]

2 [Le témoin répond par l'interprète]

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

4 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci. Veuillez prendre place.

6 Madame Korner, vous avez la parole.

7 Interrogatoire principal par Mme Korner : [Suite]

8 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Juge. Est-ce que vous pouvez vous

9 remettre votre journal, s'il vous plaît.

10 Mme KORNER : [interprétation] Il faudrait s'arrêter à la date du 2 juillet.

11 J'ai déjà traité les documents qui concernent cette date du 2 juillet. Nous

12 avons déjà examiné un certain nombre de procès-verbaux qui concernaient

13 cette réunion. J'ai fait ça vendredi dernier. En fait, il s'agit de la

14 pièce P1841. J'aimerais vous poser un certain nombre de questions

15 concernant cette entrée dans votre journal. Il s'agit de la page 122 de la

16 version anglaise.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Avez-vous dit la date du 2 juillet ou du 2

18 juin ? Je ne vous ai pas bien entendu.

19 Mme KORNER : [interprétation]

20 Q. Il s'agit de la date du 2 juillet. Est-ce qu'il s'agit-là de vos notes

21 concernant les événements qui étaient prévus lors de la réunion de la

22 cellule de Crise ?

23 R. Oui. Il s'agit-là de mes notes, si ce n'est que je me pose une question

24 au sujet de l'ordre de présentation. Peut-être que la date aurait dû être

25 le 1e juillet. Il s'agissait de la 24e [sic] session. Je ne sais pas si

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1 c'est ce que vous aviez à l'esprit.

2 Q. Je voudrais vous poser un certain nombre de questions au sujet de ces

3 notes. Donc, on voit une première instruction qui consiste à dire qu'il

4 faut appeler Pero Dosen afin de "s'occuper de différentes relations, de

5 planifier, de définir", et cetera. Alors la question que je vous pose est

6 la suivante : Pouvez-vous dire au Juge de la Chambre, qui est-ce Pero

7 Dosen ?

8 R. Pero Dosen était le responsable de la radio Petrovac, c'est de lui

9 qu'il s'agit.

10 Q. Mais de quoi s'agit-il lorsqu'il vous faites allusion aux relations

11 planifiées, à la définition, et cetera ? Si vous ne vous en souvenez pas,

12 veuillez simplement nous le dire.

13 R. Je ne me souviens plus tout à fait. Mais il s'agissait peut-être du

14 plan visant à financer la radio et de recruter des nouveaux effectifs ou de

15 voir les liens, les relations du travail, afin de voir qui devait être

16 recruté ou non, mais je n'en suis pas certain.

17 Q. Ensuite, il y a un prochain volet qui est intitulé "convoi

18 organisation" et puis on voit qu'il est question d'un dénommé Djuro Bulic,

19 du MUP de la Krajina.

20 R. Il s'agit d'un convoi qui était organisé afin d'acheminer des

21 marchandises vers la Serbie et d'acheminer d'autres marchandises à partir

22 de cet endroit. C'était à ce moment-là que le corridor de la Serbie

23 traversant la Posavina a été ouvert.

24 Q. Pouvez-vous nous dire ce que vous avez reçu de la Serbie ?

25 R. En Serbie, nous achetions essentiellement de la nourriture. C'est-à-

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1 dire de l'huile, la farine, toutes les quantités en quantité qui était

2 nécessaire. Il s'agissait d'épices, de carburant qui venait de là-bas, mais

3 il ne s'agissait pas de sources de première main.

4 Q. Avez-vous eu connaissance d'une personne qui provenait de la Serbie,

5 qui recevait des fournitures et du matériel, qui avait trait à la police ou

6 à l'armée ?

7 R. En fait dans la mesure où ces personnes étaient sensées assurer la

8 garde, c'est-à-dire, que la police devait garder ses biens pour éviter

9 qu'ils ne soient pillés ou volés. Et l'armée était présente afin d'assurer

10 une escorte à travers les différentes régions dans lesquelles se

11 déroulaient les combats.

12 Q. Savez-vous, d'après des connaissances qui vous sont propres, si

13 l'armée et -- ou la police recevait du matériel et de l'équipement de la

14 Serbie ?

15 R. Je pense que tel était le cas. Pendant la plupart de la période de la

16 guerre, nous avions des vieux uniformes et je sais qu'on essayait de

17 rémunérer certaines entreprises de fabrication de tissu afin de trouver de

18 nouveaux uniformes parce que les uniformes anciens étaient usés. Je crois

19 qu'en Bosanski Petrovac, il y avait encore ce reste de l'armée, même en

20 1995 lorsque nous sommes partis. Il s'agissait de stock très important de

21 la guerre et qui pouvait encore être utilisé pendant de nombreuses années.

22 Q. Pouvons-nous nous arrêter et nous centrer sur l'année 1992 ? Si vous ne

23 connaissez pas la réponse, dites-le directement. Mais savez-vous si, oui ou

24 non, la Serbie fournissait du matériel à la police ou à l'armée ?

25 R. Je n'ai aucune connaissance directe à ce propos. Toutefois l'impression

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1 que j'ai était que c'était possible parce que les personnes se rendaient

2 là-bas ou en provenaient, mais les commandements militaires certainement

3 pourraient vous en dire davantage.

4 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Madame Korner, un moment, si vous me

5 permettez, je vais vous interrompre. J'aimerais savoir s'il y a un lien

6 quelconque entre le premier tiret et le deuxième. Il y a donc convoi

7 organisation, Djuro Bulic, le MUP de la Krajina, et ensuite on voit un

8 numéro de téléphone. Puis ensuite, on voit un autre tiret, centre

9 d'intelligence, suivi d'un numéro de téléphone du MUP de la RAK. Ensuite,

10 le gouvernement de la RAK, un numéro de téléphone, suivi entre parenthèses

11 du nom de Erceg. Est-ce qu'il y a un lien quelconque au niveau de

12 l'organisation de ce convoi et le centre d'intelligence -- le centre de

13 renseignement du MUP de la RAK et de Nikola Erceg, c'est-à-dire, du

14 président du conseil exécutif ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Il y a un lien parce qu'il s'agit ici

16 d'une seule note. Il fallait organiser le convoi, ainsi que les

17 marchandises, qui étaient prêtes à être vendues, devaient être chargées.

18 Puis il fallait s'occuper des véhicules et des plaques d'immatriculation,

19 veiller à ce que le véhicule soit remis à la police, et ensuite apparaît le

20 numéro de téléphone qu'il fallait composer. Et il fallait également

21 informer le gouvernement de la RAK que le convoi allait prendre la route

22 afin que ce gouvernement puisse fournir l'appui nécessaire lorsqu'il

23 traversera la région. Donc, tout est étroitement lié.

24 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Fort bien. Je m'excuse de vous avoir

25 interrompu, Madame Korner.

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1 Mme KORNER : [interprétation] Je comprends tout à fait.

2 Q. Monsieur le Témoin, je crois que nous avons déjà parlé de cela, mais

3 j'aimerais à présent passer à la date du 3 juillet. Il s'agit d'une demande

4 adressée à Milorad Sajic en vue de la fourniture de cigarettes. Et ensuite,

5 vous avez écrit entre parenthèses, membres de la cellule de Crise de la

6 RAK. Est-ce que vous vous souvenez pourquoi M. Sajic -- en fait il

7 s'agissait du lieutenant-colonel Sajic -- avait un lien quelconque avec des

8 cigarettes ?

9 R. A l'époque, les cigarettes étaient devenues très rares. Il était très

10 difficile de se procurer cette denrée. Les stocks dans l'entreprise de

11 Banja Luka étaient très faibles et insuffisantes. Les réserves préalables à

12 la guerre avaient déjà été épuisées et il y avait une pression croissante

13 qui provenait de l'armée afin que celle-ci reçoive des cigarettes, et c'est

14 la raison pour laquelle nous avons communiqué avec la cellule de Crise pour

15 lui demander de nous aider.

16 Q. Et savez-vous pourquoi vous avez plus particulièrement pris contact

17 avec le lieutenant-colonel Sajic ? Si vous ne le savez pas, veuillez

18 simplement nous le faire savoir.

19 R. Je sais pourquoi. Feu le président Novakovic nous communiquait les

20 nombres -- les chiffres et nous disait qui il fallait communiquer et ce

21 qu'il fallait demander.

22 Q. Fort bien. Nous allons à présent passer à la date du 20 juillet.

23 Mme KORNER : [interprétation] Il s'agit de la page 138, Monsieur le

24 Président, dans la version en anglais.

25 Q. Est-ce que ce jour-là, Monsieur le Témoin -- est-ce que vous vous êtes

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1 rendus à Banja Luka ?

2 R. D'après ces notes, il s'agissait soit du 20 juillet voir de quelques

3 jours plus tard. Et ces notes énumèrent simplement plusieurs choses que je

4 dois faire.

5 Q. Et parmi les premiers points que nous voyons, vous aviez rencontrer M.

6 Rosic au sujet de Svabo, n'est-ce pas ? Est-ce qu'il s'agissait du dénommé

7 Rosic, celui qui était le juge ?

8 R. M. Rosic était un juge. A cette époque, il occupait un poste important

9 au niveau de l'appareil judiciaire, et le président m'avait demandé de

10 m'adresser à lui, en fait, pour discuter de Svabo. Svabo est, en fait,

11 Nikolas Kovacevic. Il s'agissait d'un surnom. Il m'a dit de m'adresser à

12 lui, et ce président, en fait, m'a dit littéralement de lui demander si

13 Svabo était une personne qui pourrait convenir pour occuper la fonction de

14 juge parce qu'à l'époque on mettait en place un tribunal.

15 Q. Et ce Rosic était responsable de la nomination de juges pour le

16 tribunal de Petrovac, n'est-ce pas ?

17 R. Non. Il s'agissait de l'assemblée qui nommait les Juges, mais nous ne

18 connaissions pas suffisamment les Juges et les personnes qui travaillent au

19 niveau de l'appareil judiciaire se connaissaient. Donc, la seule chose que

20 nous avions besoin, c'était des informations afin de savoir si cette

21 personne était à même de s'acquitter de cette fonction.

22 Q. Et si nous descendons dans cette liste, on voit qu'il est question de

23 "passer au bureau de la cellule de Crise vers 11 heures." Et ensuite si

24 vous tournez la page, on voit que vous avez consigné une note en disant

25 qu'il s'agissait de "la réunion de la présidence de Guerre de la RAK, de la

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1 région de autonome de la Krajina", et on vous a montré cela à la page 83 de

2 votre entretien.

3 Mme KORNER : [aucune interprétation]

4 Q. Est-ce qu'il s'agit de la seule fois où vous avez assisté à une réunion

5 de la présidence de la guerre de la région autonome de la Krajina ?

6 R. Pour autant que je m'en souvienne, je n'ai assisté à telle réunion qu'à

7 une seule reprise, et je vous ai déjà expliqué que mon impression était que

8 cette réunion n'avait pas été bien préparée. Ce jour-là, j'étais présent et

9 il est possible que j'étais présent à deux reprises, peut-être soit parce

10 qu'il y avait une raison spécifique et, pour la deuxième fois, peut-être

11 que j'étais à proximité de cela, mais il semblerait que j'ai été présent

12 lors de cette réunion ce jour-là.

13 Q. Peut-être que je pourrais simplement vous rappelez ce que vous avez dit

14 lors de cela -- à ce sujet. En fait, au point 1, vous avez dit : analysez

15 la mise en œuvre des dispositions qui avaient déjà été adoptées ainsi que

16 des décisions. Et vous avez -- on vous a demandé s'il s'agissait de la

17 cellule de Crise régionale de la présidence de Guerre, et qu'il s'agissait

18 d'analyser la mise en œuvre des décisions prises par les municipalités. Et

19 votre réponse avait été la suivante :

20 "Vraisemblablement -- plus que vraisemblablement parce que je ne vois de

21 quelles autres décisions il aurait pu s'agir."

22 Est-ce que vous pensez qu'il s'agit de toujours de cela ?

23 R. Oui, c'exact.

24 Q. Et alors, ensuite il y a un rapport sur les surplus et les demandes de

25 produits stratégiques de la région autonome. Je pense que c'est

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1 relativement clair. Et un rapport de l'agence sur le fait de déplacer des

2 biens matériels et des personnes. Je ne sais pas si vous vous rappelez.

3 Est-ce que vous vous rappelez ce que c'était cette agence ? Ou comment on

4 l'appelait ?

5 R. Je ne me rappelle pas très bien. Il y avait de nombreux organes qui

6 avaient été créés. Et on leur confiait seulement une ou deux tâches et

7 officiellement ils n'ont jamais été dissous, mais il y avait de nombreux

8 organes qui avaient été constitués ad hoc. Mais en gardant à l'esprit ce

9 qui dit dans ce rapport sur le fait de déplacer des biens matériels et les

10 personnes, il est -- un millier de personnes je ne vois pas plus loin. Il

11 est possible que ceci se réfère soit au déplacement de population de

12 personnes qui étaient arrivées dans notre région parce qu'on appelait ceci

13 -- cet établissement humain une colonie, et donc il y avait de nombreuses

14 immeubles qui auraient été parfaitement convenable pour héberger la

15 population. Plusieurs centaines de personnes vivaient à cet endroit.

16 Q. Bien. Comme je l'ai dit, je ne veux pas passer trop longtemps sur ceci

17 parce que nous avons -- nous avons peu de temps. Et je voudrais voir les

18 conclusions. Un des rapporteurs, il dit, de Petrovac Krupa, et est-ce de

19 Bihac ? Pourriez-vous nous dire ce que veut dire ce texte ?

20 R. Il est dit que l'un des rapports de la séance devrait être adressé aux

21 organes compétents de ces municipalités pour qu'ils puissent en délibérer.

22 Parce que plus loin dans ce rapport, on indique aussi que lorsqu'il est

23 question des limites des frontières, ceci veut dire que pour ces

24 municipalités, on leur demande de quel côté la frontière devrait se trouver

25 l'armée pour tenir des positions.

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1 Q. Et ensuite, il y a la composition des membres du conseil régional du

2 SDS, des députés, et des membres de la présidence de la RAK. Quelle était

3 la composition ? Est-ce que c'était cette composition qui se trouvait là,

4 la séance à laquelle vous participez ou est-ce que ça se réfère à quelque

5 chose d'autres ?

6 R. Non. Ce n'était pas la composition de ceux qui participaient à cette

7 séance ici. Il est question de ceux qui seront membres ou ceux qui

8 enverront se rapport. Ce qui veut dire, c'est que ceci certainement eu lieu

9 avant l'assemblée de la BH, de sorte que ceci pourrait être débattu dans

10 une assemblée commune, conjointe. Ça c'est une part. La deuxième chose

11 c'est que dans cet organe. Cet organe devrait comprendre des membres du

12 SDS, des conseils régionaux, des députés, et des membres de la présidence

13 de Guerre de la RAK. Donc cette composition aurait dû permettre de donner

14 effet à la proposition.

15 Q. Alors, maintenant, par rapport à ce qui se trouvait à séance, qui

16 présidait cette séance ?

17 R. La séance à laquelle j'ai assisté, je me rappelle bien c'était M.

18 Brdjanin qui la présidait. Je ne sais pas si c'était cette séance-là ou une

19 autre, mais pour autant que je me souvienne, ç'avait eu lieu plus tôt dans

20 l'année. Mais avant que les affrontements ne commencent de Krajina, la

21 guerre n'éclate d'une façon générale. Je me rappelle qu'à une occasion --

22 ou bien c'était à l'assemblée de Banja Luka, ou bien c'était dans le

23 bâtiment de Banja Luka, je n'en suis pas certain -- mais lors d'une séance

24 à laquelle j'ai assisté, M. Brdjanin présidait la séance.

25 Q. Bien. Est-ce que vous pouvez vous rappeler, s'il y avait d'autres

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1 personnes que vous avez reconnu, tout d'abord, de la cellule de Crise

2 régionale ?

3 R. Bien, je ne suis pas absolument sûr. Il se peut que M. Kupresanin ait

4 assisté. Je ne connaissais pas ces gens. Je suis arrivé dans cette région

5 tout juste avant que la guerre n'éclate, et j'avais entendu parlé de la

6 plupart de ces personnes. Personnellement, je connaissais depuis Banja Luka

7 le Dr Lukic, en ce qui concerne les politiques, et j'en connaissais un

8 autre, et un directeur d'une fabrique de caoutchouc. Ils étaient président

9 du SDS. Ils ont tous été remplacés. Alors je ne sais pas exactement quand.

10 Q. Bien. Vous avez dit où ça été traduit le Dr Lukic. Vous avez dit

11 Vukic ?

12 R. Vukic. Je voulais dire Vukic.

13 Q. Bien. C'est tout ce que je veux vous poser question à ce sujet pour le

14 moment.

15 Je voudrais passer dans un instant à la façon dont les Musulmans ont quitté

16 Bosanski Petrovac. Mais avant cela, je souhaiterais que vous jetiez un coup

17 d'œil à un document, qui a été produit par quelqu'un d'autre, c'est la

18 pièce à conviction 1878, et que vous avez eu l'occasion de voir la semaine

19 dernière.

20 Mme KORNER : [interprétation] Et il est -- y est fait référence dans la

21 déclaration de ce témoin, à la page 6 du document.

22 Q. Ce n'est pas un document que vous avez rédigé, ni que vous aviez eu par

23 la suite, que vous avez eu la possibilité de le lire intégralement lorsque

24 l'enquêteur vous l'a montré.

25 R. J'ai eu la possibilité de le lire, et je l'ai lu avec soin.

Page 20194

1 Q. A votre avis, est-ce que c'est à précis des évènements tels qu'ils ont

2 une incidence pour les Musulmans à Bosanski Petrovac ?

3 R. C'est un compte rendu exact des évènements. Il se peut que certains

4 détails ne soient pas tout à fait exacts, mais pas de propos délibérés,

5 mais tout simplement parce que les faits n'étaient pas parfaitement connus.

6 Mais oui, c'est un rapport qui est exact.

7 Q. Et je crois que vous-mêmes vous aviez connaissance, par exemple, de

8 l'incident qui s'est produit le 18 juin, lorsque deux personnes ont été

9 tuées par une bombe qui est tombée dans leur chambre à coucher, je crois,

10 qu'en fait, vous avez décrit cela pour nous.

11 R. Oui, et la maison de ces personnes se trouvaient dans mon voisinage

12 dans le quartier où j'habitais. Dans la matinée lorsque je suis parti au

13 travail, j'ai vu qu'il avait des policiers, et j'ai vu qu'ils procédaient à

14 des constations sur les lieux. Et lorsque je suis arrivé à mon travail,

15 j'ai demandé ce qui s'était passé et on m'a dit qu'une grenade avait été

16 jetée par la fenêtre à l'intérieur de cette chambre à coucher où ces

17 personnes dormaient. Il s'agissait de personnes âgées ou d'un certain âge,

18 disons qu'ils avaient de 50 à 60 ans, et ces personnes sont mortes.

19 Q. Alors, s'agissant de l'incident qui s'est produit le 14 juillet, nous

20 voyons qu'il y a une référence qui est faite à deux mosquées qu'on a fait

21 sauter. Est-ce que toutes les mosquées, qui se trouvaient à Bosanski

22 Petrovac, ont été soit détruites soit endommagées, c'est-à-dire, dans la

23 municipalité proprement dite ?

24 R. Dans la région à Petrovac, pour autant que je sache, il y avait trois

25 mosquées. Ces trois mosquées se trouvaient toutes dans la zone ou plutôt

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1 dans la banlieue de la ville, et toutes trois ont été détruites. Elles

2 n'ont pas seulement été endommagées, elles ont été intégralement détruites.

3 Q. Bon. J'aimerais maintenant qu'on aille, s'il vous plaît, à la page

4 suivante où il est question de réunions entre les Musulmans, M. Novakovic

5 et la FORPRONU. Et je voudrais maintenant qu'on en parle parce que vous les

6 avez consignées dans votre journal. Pourriez-vous, s'il vous plaît, pour

7 commencer, regarder le passage -- mais attendez, excusez-moi, avant qu'on y

8 vienne, pourriez-vous regarder votre journal en date du 10 août.

9 Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, c'est la page 150.

10 Q. Vous parlez du fait que la famille Balic a été liquidée par des

11 extrémistes musulmans. Il s'agit d'un communiqué de presse apparemment. Et

12 la propagande est en cours pour expulser tous les Musulmans, ce qui est

13 inacceptable. Pour commencer, où était la famille Balic ?

14 R. D'après les instructions données par le président, j'étais la personne

15 qui était chargée des contacts avec les médias, d'une façon générale. Et

16 j'étais également responsable de ces fonctions en ce qui concerne les

17 mouvements et les départs. En ce qui concerne la famille Balic, ceci a

18 trait à l'incident Biscani. On s'y réfère toujours comme étant un incident.

19 L'assassinat de cette famille a en fait vraiment secoué, profondément

20 choqué les dirigeants. Il s'agit d'une famille qui n'a jamais exprimé la

21 moindre -- le moindre manque de loyauté à l'égard des autorités. Il

22 s'agissait de personnes, d'habitants, qui n'avaient jamais exprimé

23 d'animosité ni suscité soupçon. Balic était un homme aisé, et le chef de la

24 police, en secret de façon à ce que personne le sache, bien que ceci ait pu

25 être trouvé dans les documents, lui avait donné un Kalashnikov pour

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1 défendre ses biens parce qu'il y avait un danger qu'il puisse être attaqué

2 à cause de -- du fait qu'il était riche. Mais en dépit de cela, quelqu'un

3 est entré dans sa maison, apparemment avec des intentions paisibles, et a

4 tué toute sa famille ainsi que lui-même. Et on n'a jamais pu établir qui

5 avait fait cela. Cet incident a été mentionné de temps à autre parce que

6 ceci a eu une grosse influence sur les décisions qui étaient prises par les

7 dirigeants.

8 Q. Bon alors. Excusez-moi, mais est-ce que je comprends bien ? On vous a

9 dit de préparer un communiqué de presse pour dire que la famille Balic

10 avait été liquidée par les extrémistes musulmans, même si ça n'était pas le

11 cas, ou disons si les policiers ne savaient pas que c'était le cas -- que

12 tel était le cas ?

13 R. Pour commencer, dans les renseignements qu'on a recueilli au départ, la

14 police soupçonnait que certains Musulmans pourraient avoir commis ce

15 forfait parce que M. Balic avait dit en public qu'il n'avait rien contre

16 les Serbes, contre l'armée serbe, et cetera. Et il avait même acheté un

17 très grand taureau et l'avait donné comme cadeau à l'un des représentants

18 du commandement pour qu'on puisse le donner à l'armée comme nourriture. Ça

19 c'était la première fois. Mais on n'a pas su qui c'était, on n'a pas trouvé

20 qui c'était. On n'a pas su à l'époque qui les avait tués. Il n'y avait que

21 les soupçons.

22 Q. Bien. Et alors, la propagande à ce moment-là a commencé pour ce qui

23 était d'expulser tous les Musulmans, ce qui est inacceptable. De qui

24 émanait cette propagande ?

25 R. Je ne peux pas me rappeler à qui ceci se référait, mais la propagande

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1 en ce sens émanait de certains de leurs représentants peut-être parce que

2 les gens avaient peur, à quoi on pouvait s'attendre dans de telles

3 circonstances. Mais il se peut également que ce soit venu de d'autres

4 origines.

5 Q. Excusez-moi. Est-ce que vous dites que c'était les Musulmans eux-mêmes

6 qui lançaient une propagande qui visait à expulser tous ceux qui étaient de

7 leur propre nationalité ?

8 R. Ici, l'expression propagande, à mon avis, est un mot trop fort. Pour

9 autant que je me souvienne, il ne s'agissait pas de propagande. Il

10 s'agissait du fait que les gens se parlaient les uns aux autres et

11 parvenaient à la conclusion que, dans ces circonstances, ils devraient s'en

12 aller.

13 Q. Excusez-moi, mais est-ce que le mot que vous avez utilisé dans votre

14 journal est le mot "expulser" ?

15 R. Non. Les mots en premier, c'est s'en aller, partir.

16 Q. Bien alors, pourriez-vous, s'il vous plaît, donner lecture afin que

17 nous puissions avoir une traduction des mots précis que vous avez écrit en

18 dessous du mot en question, la phrase qui se trouve sous les mots "famille

19 Balic".

20 R. "Une propagande est en cours pour que tous les Musulmans s'en aillent,

21 ce qui est inacceptable."

22 Q. Bien. Et alors, qui disait que tous les Musulmans devraient s'en aller,

23 ce que vous jugiez, d'après ce que vous avez inscrit, comme étant

24 inacceptable ?

25 R. Là il y a un problème de barrière linguistique. Cette note est une

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1 observation assez crue qui est faite là. Là ce sont des instructions qui

2 m'avaient été données par le président afin que je puisse les mettre en

3 œuvre et les passer ensuite à la presse. Mais ce que cela veut dire -- ce

4 que je devais dire à la presse, c'était qu'il existait une propagande qui

5 était en cours à l'évidence, sans préciser de qui elle émanait, selon

6 laquelle tous les Musulmans devraient partir, et on devait dire que cette

7 propagande était inacceptable.

8 Q. Oui, mais ça ce n'est pas une question difficile, Monsieur le Juge.

9 Est-ce que c'était des Musulmans qui lançaient cette "propagande" ou --

10 cette propagande selon laquelle ils devraient s'en aller ou est-ce que

11 c'était les Serbes qui lançaient cette propagande selon laquelle tous les

12 Musulmans devraient s'en aller ou être expulser ?

13 R. C'est précisément le problème. L'idée était de dire à la presse que les

14 Musulmans eux-mêmes étaient les auteurs de cette propagande avec pour

15 objectif de s'en aller ou plutôt que certains de leurs représentants le

16 faisaient.

17 Q. Et est-ce que c'était vrai que les Musulmans eux-mêmes étaient en train

18 de lancer cette propagande selon laquelle ils devraient s'en aller ?

19 R. Mon impression c'est qu'il n'avait pas lancé cette propagande, mais à

20 cause des circonstances, il demandait à être abrité, à être protégé.

21 Q. Bon. Alors avançons maintenant dans votre journal, s'il vous plaît, et

22 parlons de deux réunions avec les personnalités internationales, le 13 août

23 s'il vous plaît, à la page 153 de votre journal

24 Mme KORNER : [interprétation] C'est la page 153.

25 Q. Est-ce que vous avez participé à une séance avec la FORPRONU, avec ce

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1 qu'il semblait être un capitaine français, Philipe Lavergne et M. Odobasic,

2 M. Druzic. Pouvez-vous vous rappeler, s'il vous plaît, quel était le

3 premier nom de M. Druzic -- quel était le prénom de M. Druzic ?

4 R. En ce qui concerne Odobasic, je sais que son prénom était Husein, mais

5 en ce qui concerne Druzic, je ne peux me rappeler son prénom pour le

6 moment. Mais je crois qu'il n'avait qu'une jambe.

7 Q. Le chef du SJB, c'était ce M. Druzic [sic] ?

8 R. C'est exact.

9 Q. Et M. Odobasic expliquait les problèmes que nous n'avons pas besoin

10 maintenant de revoir et qui ont concerné ceux qui restaient à Petrovac et

11 ce qui était pour nous une catastrophe, cela qui est écrit. Et maintenant

12 si vous voulez bien, nous passons maintenant à la date du 17 août dans

13 votre journal, à la page 156. IL y est question d'une réunion du 17 août

14 avec le HCR aura lieu avec des observateurs militaires. Est-ce qu'il était

15 clair que le HCR disait qu'il ne participerait pas à la réinstallation de

16 population ?

17 R. C'est exact. C'est une transcription exacte de ce qu'ils disaient être

18 leur opinion.

19 Q. Bien. Est-ce que nous pourrions maintenant passer, s'il vous plaît au

20 21 août. Et je vais maintenant passer à d'autres documents qui ont trait

21 aux déplacements, au départ de la population. Le 20 août, vous avez pris

22 des notes et je me demande s'il y a là une référence à la lettre que nous

23 avons vue -- excusez-moi, il s'agit du 21 août, une réponse au SIP, la

24 lettre que nous avons regardée -- non, excusez-moi.

25 Mme KORNER : [interprétation] Excusez-nous, Monsieur le Président.

Page 20200

1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je me rappelle cette lettre. C'est moi qui

2 l'ai écrite personnellement. Et j'avais reçu des instructions de l'écrire

3 du président du conseil exécutif. Il s'agit d'une lettre qui traite --

4 enfin il s'agit d'une réponse qui a trait en ce qui concerne la décision de

5 préparer les Musulmans pour --

6 L'INTERPRÈTE : Inaudible.

7 Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, c'est la pièce P252

8 [sic].

9 Q. Pourrions-nous, s'il vous plaît, jeter un coup d'œil à ce qui s'est

10 passé en septembre. Voyons tout d'abord si vous pourriez examiner la pièce

11 à conviction 1848. Apparemment, il s'agit de nouvelles qui ont été

12 diffusées par M. Dosen, dont vous avez parlé précédemment. C'est daté du 13

13 septembre. Il est question du départ en masse des Musulmans du secteur de

14 Bosanski Petrovac et -- enfin se poursuit encore une colonne de sept

15 autocars avec une escorte spéciale a quitté le village de Biscani, dans la

16 direction de Travnik. D'après les renseignements obtenus du bureau de

17 Petrovac pour l'échange de population et de biens au cours des trois

18 derniers jours, plus de 900 hommes, femmes et enfants d'origine ethnique

19 musulmane, ont quitté la région de Petrovac en direction de Bihac et de

20 Travnik. D'après les Serbes et la municipalité -- la présidence de Guerre

21 de la municipalité, le départ des Musulmans de Petrovac ne peut en aucun

22 cas être comparé à un nettoyage ethnique, pas un seul Musulmans de ce

23 secteur n'est parti sous la contrainte et tous sont partis de leur propre

24 gré.

25 Alors, maintenant vous avez traité de cela dans la déclaration que vous

Page 20201

1 avez faite la semaine dernière.

2 Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, tout ceci, est dit à

3 la page 5.

4 Q. Alors je vous pose une question, Monsieur le Témoin. A votre avis

5 l'expression, "pas un seul Musulman de cette région, de ce secteur n'est

6 parti sous la contrainte, mais de son plein gré." Est-ce que ceci est un

7 compte rendu exact de la situation ?

8 R. Bien sûr que ce n'est pas vrai.

9 Q. Alors maintenant, voyons voir ce qui s'est passé le 13 septembre,

10 puisque vous avez été intimement lié à ces événements. Peut-on regarder,

11 s'il vous plaît, la pièce P1849. Vous avez eu la possibilité de lire

12 intégralement ce document lorsque vous avez fait votre déclaration. Est-ce

13 que vous regardez à la deuxième page, on y trouve une description de ce qui

14 s'est passé, lorsque vous êtes arrivé. C'est un rapport, je crois que c'est

15 quelqu'un non pas Sacesa, mais Gacesa qui a écrit ce rapport. Est-ce que ce

16 rapport est exact ? Est-ce qu'il raconte précisément ce qui s'est passé sur

17 ce convoi ?

18 R. Oui, c'est exact.

19 Q. Les personnes qui ont essayé de partir ce jour-là, ont-elles réussi à

20 partir ?

21 R. Elles n'ont pas réussi à partir, parce qu'il y avait des opérations de

22 combats qui se déroulaient le long d'itinéraires qui étaient censés suivre.

23 Q. Et qu'est-ce qui vous a amené à commencer cette discussion avec la

24 police ?

25 R. C'était parce que, il était impossible à notre convoi de passer par là.

Page 20202

1 Nous avons été informé de cela environ 5 à 6 heures avant que je ne puisse

2 parvenir à --

3 L'INTERPRÈTE : Inaudible.

4 R. Le président Novakovic, ce jour-là se trouvait à Lika quelque part. Il

5 escortait notre délégation, quelque chose de ce genre et j'ai réussi à me

6 mettre en rapport avec lui au téléphone. Il a dit que bon gré, mal gré, il

7 fallait que j'y aille, que je les dégage et certainement avec l'assistance

8 du président de la municipalité qui est là-bas, Knezevo, je les protège et

9 qu'une fois les opérations du combat auraient cessé sur le front, à ce

10 moment-là, ils pourraient passer.

11 Lorsque je suis arrivé là, j'ai trouvé la police et ces autocars avec des

12 réfugiés à Karanovac. C'est un endroit qui est près de Banja Luka. A côté

13 des autocars, il y avait des hommes, portant l'uniforme, d'autres

14 partiellement en uniforme, d'autres sans uniforme. Ils étaient armés. La

15 plupart avaient des armes relativement désuètes de l'armée mais il y avait

16 un certain nombre d'armes automatiques. J'ai vu que les autocars étaient

17 encerclés. La police se trouvait là et ils se parlaient. Ils parlaient à

18 certaines personnes qui n'étaient pas armées. Immédiatement, je me suis

19 dirigé vers les autocars pour voir si quelqu'un avait été tué ou blessé et

20 lorsque je passais entre les autocars, j'étais injurié par ces personnes

21 qui se trouvaient à côté des autocars et en fait, ils me maudissaient,

22 juraient contre moi. C'était tout à fait inutile que je dise quels étaient

23 leurs jurons, littéralement, c'est ce qu'il pouvait y avoir de pire. Bien

24 entendu alors que j'étais là pour les défendre, pour protéger les

25 Musulmans. J'ai été traité de traître et de tout ce qu'on veut et donc

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1 j'étais très amer. Je leur ai dit qu'ils devraient avoir honte d'eux-mêmes

2 et que s'ils voulaient combattre, ils feraient mieux d'aller au front

3 plutôt que de terroriser les personnes désarmées, les civils désarmés.

4 Et une fois que j'ai fini d'inspecter les autocars, je connaissais quelques

5 hommes parmi les Musulmans et je sais que je leur ai parlé brièvement. Et

6 j'ai vu, par exemple, notre chef de la comptabilité, Senada, et elle m'a

7 regardé. Ces yeux étaient pleins de larmes. Elle avait deux petits enfants

8 avec elle et elle a dit : Jovo, est-ce que vous allez nous tuer tous ? Est-

9 ce que vous allez nous tuer tous sur place ici ?

10 Q. Donc, c'est ceci qui a conduit à la discussion qui est décrite là ?

11 R. Oui.

12 Q. Donc, ceci était le 13 septembre. Maintenant, pourriez-vous, s'il vous

13 plaît regarder un nouveau document. Il s'agit du numéro 7.283.

14 Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, c'est un nouveau

15 document que le témoin a apporté avec lui. Il est daté du 23 septembre.

16 Q. S'agit-il de quelque chose que vous avez écrit, noté au verso d'une

17 facture de restaurant et daté le 23 septembre ? Il s'agit de la réunion de

18 la présidence de Guerre.

19 R. Non. La facture n'a rien à voir avec cela. C'est tout à fait par hasard

20 que la facture s'est trouvée à cet endroit. Mais ceci a été fait sur un

21 bloc-note qui, tout à fait par hasard, s'est trouvé dans ces locaux

22 officiels le soir où j'ai été convoqué à la réunion. Il s'agissait d'une

23 réunion de la présidence de Guerre qui a été organisée ad hoc. Il

24 s'agissait d'une réunion urgente concernant les déplacements de la

25 population et c'est là parce que les violences se sont accrues.

Page 20204

1 Q. Est-ce que nous pourrions résumer cette escalade de violences car on en

2 avait déjà entendu parler. Il y a des Serbes qui se sont fait tués, sur la

3 ligne de front, par des Musulmans et ensuite, les Serbes de Petrovac,

4 souvent ce sont des Musulmans, n'est-ce pas ? Des musulmans de Petrovac ?

5 R. Oui.

6 Q. Donc, vous avez cette réunion urgente qui a lieu le 23 septembre

7 jusqu'avant minuit, à 23 heures 45. M. Novakovic était présent. M. Gacesa,

8 je pense, en tant que président de la réunion ?

9 R. Oui, en effet.

10 Q. Ensuite Bogdan --

11 R. Si vous le voulez bien, je peux vous énumérer les personnes présentes.

12 Q. Oui, allez-y.

13 R. Donc, Rajko Novakovic, en tant que président; le chef de la police,

14 Dragan Gacesa; Bogdan Latinovic, le président du conseil du comité

15 exécutif; Jevto Kecman, le commandant de la police; Nenad Dragisic, le chef

16 de la sécurité militaire de Petrovac et Drago Sepa, le père de Jovica Sepa

17 qui était dans la municipalité et selon lui, c'est le commandant de la

18 Défense territoriale -- des unités de la Défense territoriale. Il s'agit-là

19 des unités régionales.

20 Q. Et, donc la réunion portait sur la situation du produit de la sécurité

21 et M. Novakovic, apparemment, a condamné les meurtres de civils innocents

22 et il a dit qu'il allait démissionner à moins que des organes compétents

23 n'empêchent ces pogroms -- n'entravent ces pogroms car il croyait qu'il ne

24 s'agissait pas là, d'un déplacement accidentel.

25 Est-ce que vous savez ce qu'il voulait dire par là, quand il a dit, "qu'il

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1 ne croyait pas qu'il s'agissait là d'un accident" ?

2 R. J'ai déjà dit dans mon interview, nous avons essayé avec la police et

3 les autres organes compétents, à la demande de M. Novakovic, d'arrêter un

4 certain nombre de personnes. Un certain nombre de personnes s'est fait,

5 effectivement, fait arrêter mais dès les débuts, les acolytes de ces

6 détenus les ont libérés par la force, de leur détention de la police. Et

7 Novakovic disait qu'il allait peut-être démissionner. Il avait dit cela, en

8 privé, dans un cercle assez étroit. Tout de même, il pensait que la

9 situation n'allait qu'empirer. Et je pense qu'il avait tout à fait raison.

10 Il s'agissait d'une personnalité qui jouissait de beaucoup d'influence et

11 il pouvait, quant à lui, garder les choses sous le contrôle. Et là, il le

12 dit en public car il savait qu'il s'agissait-là de groupes organisés. Il

13 les connaissait avant la guerre. Il connaissait exactement ce qu'elles

14 étaient leurs capacités. Et donc, il a évolué à juste titre qu'ils

15 n'agissaient pas tout seul, de leur propre gré.

16 Q. Ils étaient organisés par qui ?

17 R. A l'époque, je pensais personnellement, et je le pense d'ailleurs

18 aujourd'hui encore, que lui il avait une petite idée des gens qui étaient

19 derrière eux mais il nous l'a jamais dit. Il est mort sur notre ligne de

20 front dans des circonstances peu éclaircies, peu claires, pendant la

21 guerre. Mais il n'en a jamais parlé tout simplement.

22 Q. Si nous regardons la page 6 de la traduction, à un moment donné, le

23 chef a dit : Tous les services savent qui sont les auteurs. Et ensuite le

24 président dit : Organisez une réunion pour demain matin et si l'ordre n'est

25 pas mis en œuvre, tous les dirigeants civils vont démissionner.

Page 20206

1 Mme KORNER : [interprétation] Ensuite, il y a toute une série de

2 discussions.

3 Q. Donc, les résultats de ceci est qu'on a organisé des bus pour qu'ils

4 transportent pour de bon -- de façon efficace et en réalité -- tous les

5 Musulmans en dehors de Petrovac.

6 R. C'est le chef de la police qui a dit que la police avait quelques

7 indices quant aux auteurs de ces violences. A nouveau, le chef de la

8 Sécurité militaire ne l'a pas contesté et a dit que ses services avaient

9 s'occuper de cela, à savoir que tous les militaires, tous les hommes en

10 uniformes armés soient retirés de la ville pour éviter que ces convois ne

11 soient menacés. Et moi, je devais informer toutes les entreprises et

12 surtout les entreprises de transport et toutes celles qui pouvaient nous

13 fournir d'autres moyens de transports, et bien, qu'ils doivent partir dans

14 la matinée avec leurs gardes et se rendre au point de rencontre, et qu'il

15 fallait qu'ils se dirigent vers Travnik. Donc, nous avons eu de la

16 négociation avec les sociétés, les entreprises des transports. Il y en a

17 qui ont respecté cet accord, d'autres ne l'ont pas fait. Toujours est-il

18 que le convoi est parti le 24 au matin.

19 Q. Nous allons pouvoir en parler assez rapidement. Il s'agit de la page

20 84. Donc, quelqu'un a proposé qu'on leur prenne leurs objets de valeur,

21 l'argent, les bijoux. Et vous, vous avez -- vous êtes opposé à cela en

22 disant que c'était illégal.

23 R. Oui, c'est le commandement militaire qui avait proposé cela. Je pense

24 que c'était M. Vrzina qui faisait part des points de vue soutenus par

25 l'armée, venant du front. Et il n'a pas participé à cette réunion-là, et

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1 évidemment les autres n'étaient pas d'accord avec lui, mais ils n'osaient

2 rien dire car cela aurait été mal vu que de refuser cette proposition et,

3 car il s'agissait que cela ne servirait à rien. Mais comme il n'était pas

4 présent lors de cette réunion-là, et bien, on n'en a pas discuté. De toute

5 façon, techniquement ce n'était pas faisable et en plus -- de plus, tout le

6 monde comprenait qu'il s'agissait de quelque chose complètement -- de

7 complètement illégale. Car lui, il disait qu'avec ces armes ils allaient --

8 car lui il disait que les Musulmans allaient vendre leurs objets de valeur

9 et utiliser leur argent pour acheter des armes et pour combattre des

10 Serbes.

11 Q. Je pense que vous avez donc accompagné ces convois ?

12 R. Oui, c'est exact.

13 Q. Je pense qu'il est exact de dire aussi qu'une attaque a été menée

14 contre le convoi.

15 R. Oui, c'est exact. Il y a eu une attaque de menée contre le convoi.

16 Q. Un certain nombre de personnes se sont fait tuées, d'autres ont été

17 blessées.

18 R. D'après ce que j'ai appris, en les escortant, quatre personnes se sont

19 fait tuées et huit personnes ont été blessées.

20 Q. Très bien. Enfin, Monsieur le Témoin -- Monsieur le Juge, est-ce que je

21 peux vous demander d'examiner encore quelques pièces à conviction qui se

22 trouvent dans le dossier. Tout d'abord, la pièce P1850.

23 Mme KORNER : [aucune interprétation]

24 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Avant de le faire, Madame Korner,

25 pourriez-vous nous dire si vous souhaitez verser au dossier ?

Page 20208

1 Mme KORNER : [interprétation] Oui, oui, oui. S'il vous plaît, je

2 souhaiterais verser au dossier ce document, et il faudrait lui attribuer la

3 cote P2453.

4 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.

5 Mme KORNER : [interprétation] Il s'agit du procès-verbal du 23 septembre.

6 Et pour confirmer, le numéro de communication de ce document était le

7 numéro 7.283.

8 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui.

9 Mme KORNER : [interprétation]

10 Q. Donc, il s'agissait d'un communiqué de presse qui était signé n'est-ce

11 pas à nouveau par M. Novakovic ?

12 R. Oui.

13 Q. Donc, il s'agit d'une annonce faite publiquement, enfin d'un communiqué

14 de presse, concernant les meurtres que l'on a tenté d'arrêter.

15 R. Oui, cela avait quelque chose à avoir avec les meurtres qui se sont

16 produits après les meurtres de ces soldats. Enfin, après que les soldats

17 sur le front se sont fait tués. Et donc, on a commencé à tuer de façon

18 anarchique les Musulmans, et c'est pour cela qu'il a essayé de jouir de son

19 influence pour arrêter cela. Donc, il parle de chevalerie -- de la

20 tradition chevaleresque. Et il demande aux gens aussi de ne pas gaspiller

21 la munition, et tout ceci pour la propagande, pour que les Serbes puissent

22 l'accepter, pour qu'ils comprennent que même pour les Serbes ça n'était pas

23 utile. Car il s'agissait de tirs en l'air, mais il y a eu aussi des

24 meurtres, enfin il y a eu des tirs qui ont abouti.

25 Q. Très bien. Pourrions-nous à présent avoir les documents 1852, 1853,

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1 1854 et 1855, 1856 et 1857 ? Je pense que le mieux ce serait de communiquer

2 tous les documents au témoin, enfin les huit documents. Donc, aussi 1858 et

3 1859.

4 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur le Témoin, en examinant ces

5 documents, si vous avez le moindre doute quant au -- à l'authenticité d'un

6 quelconque de ces documents, je vous prie de bien vouloir nous le dire.

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Si j'ai le moindre doute quant à

8 l'authenticité de ces documents, je vous le dirai.

9 Mme KORNER : [interprétation]

10 Q. Vous allez pouvoir me confirmer la chose suivante. Après la réunion de

11 l'assemblée qui a donc vérifié toutes ces décisions, est-ce que ces

12 décisions étaient à nouveau publiées au mois d'octobre, enfin le 28

13 octobre ? Et car il s'agit là de décisions qui avaient déjà été prises.

14 Mme KORNER : [interprétation] Vous vous souvenez, Monsieur le Juge, quand

15 le témoin était là, et bien, il n'était pas clair pourquoi toutes ces

16 décisions avaient été prises.

17 R. Je vous avais déjà pris -- parlé du manque de logique du point de vue

18 de l'organisation. Souvent, par exemple, on faisait un amalgame entre le

19 nom, à savoir la cellule de Crise et la présidence de Guerre ou bien la

20 présidence de l'assemblée, et cetera. Moi, j'ai travaillé pour tous ces

21 organes, et je ne comprenais pas comment ils pouvaient sans cesse changer

22 de noms. Ce document, quand je le regarde, il s'agit d'une décision qui a

23 été prise par la cellule de Crise. Il s'agit d'une décision qui porte sur

24 la nomination de la cellule de Crise, et la plupart des gens qui sont --

25 qui figurent dans ce document sont ici ex officio à cause de leurs

Page 20210

1 fonctions, du travail qu'ils faisaient.

2 Q. Si vous regardez les dates de ces documents, il y a toujours la même

3 date, le 28 octobre, à l'époque, il y avait presque plus de Musulmans à

4 Petrovac. Si vous regardez la pièce P1857, la date qui figure en haut du

5 document est le 18 juin. Il s'agit de la réunion de la cellule de Crise qui

6 a eu lieu le 17 juin. Et ensuite, on a ajouté une date, à savoir, la date

7 du 28 octobre. Est-ce qu'il s'agissait tout simplement d'une formalité, ou

8 est-ce qu'il s'agissait de publier un nouveau les décisions qui avaient été

9 prises après les avoir vérifiées par l'assemblée ?

10 R. Et bien, les deux décisions que nous sommes en train de regarder, le 20

11 octobre 1992 [sic]. Maintenant, je sais pourquoi elles existent. Toutes les

12 décisions, qu'il s'agisse des décisions de la cellule de Crise ou de la

13 présidence de Guerre, devaient être soumises à l'assemblée de la

14 municipalité pour vérification, pour aval. Et donc, il s'agit là des

15 documents du travail pour -- destiner aux députés et quelle que soit la

16 date de leur adoption, ces décisions devaient être préparées pour être

17 présentées aux députés. Et c'est pour cela qu'elles ont toutes la même date

18 et on voit que toutes ces décisions sont présentées ensemble.

19 Q. Merci, Monsieur le Témoin, je n'ai plus de questions à vous poser.

20 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Madame Korner, est-ce que vous avez

21 besoin que le témoin authentifie d'autres documents ?

22 Mme KORNER : [interprétation] Ce que je vais faire, c'est qu'à la fin de

23 son contre-interrogatoire, je vais lui demander de parcourir tous les

24 documents qu'on ne lui a pas montré et lui demanderait de les authentifier.

25 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Est-ce que vous avez une

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1 objection par rapport à ces procédures, Maître Cunningham ?

2 M. CUNNINGHAM : [interprétation] Non.

3 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Souhaitez-vous commencer

4 votre contre-interrogatoire tout de suite ou bien souhaitez-vous que l'on

5 fasse une pause à présent ?

6 M. CUNNINGHAM : [interprétation] Je préfère une pause.

7 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Nous faisons une pause de 25

8 minutes.

9 --- L'audience est suspendue à 10 heures 22.

10 --- L'audience est reprise à 10 heures 58.

11 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous présente mes excuses au sujet

12 du retard. Maître Cunningham, vous allez bientôt prendre la parole, mais

13 avant j'aimerais informer le témoin que vous allez être interrogé par

14 Maître Cunningham, qui représente les intérêts de l'accusé.

15 M. CUNNINGHAM : [interprétation] Puis-je poursuivre ?

16 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui.

17 M. CUNNINGHAM : [interprétation] Merci.

18 Contre-interrogatoire par M. Cunningham :

19 Q. [interprétation] Je sais, Monsieur le Témoin, que vous êtes juriste, et

20 je sais que dans le milieu où moi je travaille, les juristes tendent à

21 prendre la parole longtemps et à réponde de façon développée. Je sais que

22 vous souhaitez, que vous souhaitez retrouver votre famille le plus

23 rapidement possible, et mon objectif est de vous permettre d'atteindre

24 cette solution.

25 Par conséquent, avant de commencer, j'aimerais vous rappeler un certain

Page 20212

1 nombre de choses. Tout d'abord, lorsque vous avez commencé à faire votre

2 déposition jeudi dernier, le président de cette Chambre vous avez -- vous a

3 demandé de répondre aux questions que je vous pose, ou que d'autres avocats

4 vous posent, de façon si précise que possible, par conséquent, je vous

5 rappelle cette injonction. En deuxième lieu, si vous ne comprenez pas ma

6 question, veuillez me le faire savoir. En troisième lieu, je vais vous

7 faire la demande suivante : je sais que vous avez passé en revue la

8 déclaration qui a été enregistrée que vous avez remise au bureau du

9 Procureur en juin 2003, mais je voudrais vous demander -- que l'on vous

10 remette un exemplaire de votre déclaration, de cette déclaration

11 enregistrée, ainsi que la déclaration que vous avez faite la semaine

12 dernière, afin que vous puissiez consulter ce document selon que de besoin.

13 Par conséquent, pourrions-nous remettre un exemplaire de ceci au témoin ?

14 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui. Madame la Greffière d'audience, il

15 s'agit de ces deux déclarations, ou plutôt de la déclaration plus de compte

16 rendu de l'entretien. Est-ce qu'on pourrait les remettre le plus rapidement

17 possible au témoin, je vous prie. J'imagine que vous avez remis ces

18 documents en B/C/S, n'est-ce pas ?

19 M. CUNNINGHAM : [interprétation] Et si un moment quelconque vous devez vous

20 pencher sur votre note, sur votre journal, ou sur votre déclaration que

21 vous avez remise au bureau du Procureur, veuillez le faire et prendre tout

22 le temps nécessaire.

23 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Excusez-moi de vous interrompre, Maître

24 Cunningham, je pense qu'il serait bon de lui remettre également

25 l'exemplaire de son journal.

Page 20213

1 M. CUNNINGHAM : [interprétation] Je pense qu'il dispose de ce document.

2 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Ah! Je me suis trompé. Excusez-moi.

3 M. CUNNINGHAM : [interprétation]

4 Q. Et enfin, lorsque je fais allusion à une pièce à conviction, je verrais

5 à veiller à ce que ce document vous soit remis afin que vous puissiez

6 savoir de quoi il s'agit.

7 Je vais à présent commencer, et j'au cru comprendre que le bureau du

8 Procureur ne vous considère plus comme étant un suspect, toutefois dans le

9 cadre de la déclaration qui a été enregistrée en juin 2003. On vous a lancé

10 un avertissement, à savoir que vous étiez considéré comme suspect, mais

11 qu'avez-vous pensé lorsque vous avez entendu de tels propos ?

12 R. Je dois vous dire que j'étais quelque peu étonné. J'étais préoccupé

13 également, et je me demandais quelles étaient les raisons sous-jacentes

14 d'une telle position. Je me suis livré à plusieurs activités. J'ai occupé

15 plusieurs fonctions, en tant que secrétaire du conseil exécutif. Par la

16 suite, j'ai été nommé juge et, dans l'accomplissement de ces tâches, j'ai

17 été amené à faire certaines choses que certaines personnes n'ont peut-être

18 pas approuvées. Par ailleurs, j'étais en conflit avec certains

19 représentants du commandement et de la police, comme vous avez pu le voir à

20 la lumière des documents, et j'ai cru qu'il s'agissait peut-être d'un

21 rapport qui avait été élaboré par une personne qui contiendrait des

22 informations, mais je suis revenu en arrière pour essayer de me rappeler ce

23 qui c'était passé, et au fait pour tout vous dire, j'étais simplement

24 préoccupé.

25 Q. Préoccupé parce que vous pensiez, pour votre part, que vous n'aviez

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1 rien commis qui soit reproché.

2 R. J'étais préoccupé quant à la façon dont je pouvais prouver que je

3 n'avais rien commis de répréhensible. A l'époque, j'ignorais l'existence de

4 certains documents, documents qui ont été présentés ici, et je ne

5 connaissais très bien les personnes qui se trouvaient dans cette région, et

6 je me demandais simplement qui je pouvais proposer comme témoin qui

7 pourrait témoigner que je n'avais rien fait de mal, ou que je n'avais rien

8 commis qui allait à l'encontre des textes de la loi. En fait, il n'y a pas

9 eu de débat. Lors de plusieurs reprises, j'ai agi en tant que négociateur

10 pour assurer une protection pour les Musulmans et je voulais proposer qu'un

11 de ces Musulmans soit mon témoin, mais, en fait, je ne connaissais pas leur

12 nom. Par conséquent, je n'étais pas apeuré parce que j'aurais pu faire,

13 mais j'étais préoccupé par le fait que je ne pouvais pas prouver que je

14 n'avais rien commis de répréhensible.

15 Q. Ensuite vous vous êtes déplacé à La Haye. Je ne sais pas si vous étiez

16 déjà dans cette salle lorsque l'on a décidé plus un suspect. Est-ce que le

17 bureau du Procureur vous a expliqué pourquoi votre situation avait changé,

18 que dans un premier temps vous aviez été considéré comme suspect et par la

19 suite vous ne l'étiez plus. Est-ce que ce bureau vous a expliqué les

20 raisons de ce changement ?

21 R. Le bureau du Procureur m'a dit avoir examiné mon dossier de plus près,

22 qu'il devait examiner les documents et qu'il pensait d'après les dernières

23 informations, dont il disposait, qu'il n'y avait plus lieu de me considérer

24 comme suspect et que, par conséquent, il m'interrogerait qu'en qualité de

25 témoin. C'est ce que m'a dit un dénommé M. Grady. C'est lui qui m'a informé

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1 de cela. Je dois par ailleurs souligner que je dispose ici d'une version en

2 anglais du compte rendu d'audience. Par conséquent, s'il est nécessaire de

3 suivre ce document, il serait peut-être bon de disposer de ce document en

4 B/C/S.

5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie de nous avoir signaler

6 cela. Je pensais bien que tel était le cas. C'est la raison pour laquelle

7 j'ai précisé qu'il fallait vous remettre ce document en B/C/S.

8 M. CUNNINGHAM : [interprétation] Nous avons un exemplaire à votre

9 disposition.

10 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Mais non, nous aussi nous avons ce

11 document.

12 Mme KORNER : [interprétation] Nous avons également ce document en B/C/S.

13 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Le compte rendu de votre déclaration,

14 pourriez-vous peut-être nous dire quels sont les documents que vous avez ?

15 Vous avez un exemplaire de votre journal, et j'imagine qu'il s'agit de la

16 version d'origine, n'est-ce pas ? En B/C/S.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.

18 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Fort bien. Vous avez également un

19 exemplaire de la longue déclaration que vous avez faite. Est-ce qu'il

20 s'agit d'un document en anglais ou en B/C/S ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je dispose de ce document-là en anglais.

22 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Il serait peut-être de remettre ce

23 document en B/C/S.

24 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le greffe n'a reçu qu'un document en

25 anglais. Nous n'avons jamais reçu l'exemplaire en B/C/S.

Page 20216

1 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Afin de ne pas perdre davantage de

2 temps, je vais remettre mon propre exemplaire en B/C/S au témoin. Je ne

3 comprends pas pourquoi le greffe n'ait pas reçu cet exemplaire alors que

4 moi-même, ne lisant pas la langue du B/C/S' dispose de cet exemplaire.

5 Mme KORNER : [interprétation] Je pense qu'il est hautement improbable que

6 cet exemplaire n'est pas été communiqué au greffe.

7 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] En tout état de cause, je constate que

8 s'agissant de la déclaration du 22 et du 23 juillet -- en fait, j'ai reçu

9 deux exemplaires de cette -- de ce document, mais je dispose de ces deux

10 exemplaires en langue anglaise.

11 M. CUNNINGHAM : [interprétation] Mais je dispose de ce documents en B/C/S.

12 Si cela peut vous être d'une utilité quelconque.

13 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Si vous pourriez par le truchement du

14 greffier -- non par le truchement du huissier remettre un exemplaire de ce

15 document au témoin, cela nous permettrait de diligenter la procédure. Nous

16 verrons à vous restituer cet exemplaire à la fin de l'audience de ce matin.

17 Je pense que nous sommes enfin prêts. Nous allons poursuivre.

18 M. CUNNINGHAM : [interprétation]

19 Q. Lorsque nous avons eu la dernière interruption au sujet de ces pièces à

20 conviction, vous nous avez dit comment M. Grady vous a informé que vous

21 n'étiez plus un suspect.

22 Mme KORNER : [interprétation] Excusez-moi, je suis tenue d'interrompre. En

23 fait, c'est moi-même qui l'ai informé de cette information, et M. Grady

24 m'accompagnait. Je pense qu'il serait bon que Me Cunningham note ce fait.

25 M. CUNNINGHAM : [interprétation] Je vous présente mes excuses, Madame

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1 Korner.

2 Q. Monsieur le Témoin, j'aimerais vous poser la question suivante :

3 lorsque le bureau du Procureur vous a informé de cette nouvelle, comment

4 vous êtes-vous senti à ce moment-là, que vous n'étiez plus considéré comme

5 un suspect ? Quelle était votre réaction ?

6 R. Pour être tout à fait franc, je n'ai rien senti de particulier parce

7 que je pensais qu'il n'y avait pas de motifs suffisants pour me poursuivre,

8 et qu'on ne pouvait jamais parler de tels motifs. Et lorsque j'ai commencé

9 à donner ma déclaration, lorsque Mme Korner m'a communiqué cette nouvelle,

10 ceci a été fait en passant. M. Grady était également présent, mais, pour

11 moi, rien n'a changé. Ce n'est que par la suite que j'ai commencé à me dire

12 qu'en fait, qu'ils me considéraient vraiment comme un suspect.

13 Q. Et lorsqu'ils vous ont dit que vous n'étiez plus considéré comme un

14 suspect, est-ce que vous êtes senti quelque peu soulagé, d'une certaine

15 manière ?

16 R. Non, pas à ce moment-là, ni plus tard d'ailleurs. Je sais simplement ce

17 qui s'était passé et je sais quels ont été mes faits et gestes à l'époque,

18 non pas uniquement moi-même. Seule une partie de mes activités est reflétée

19 dans cette déclaration parce qu'il est impossible de tout consigner, mais

20 je savais qu'il n'y avait pas de motifs suffisants pour me poursuivre.

21 C'est la raison pour laquelle j'ai simplement accepté cette nouvelle qui

22 m'a été communiquée en passant.

23 Q. Dans votre déclaration enregistrée, et peut-être que la version en

24 langue anglaise et la version en B/C/S ne font pas apparaître les mêmes

25 références. A la page 4, vous avez fait la déclaration suivante. Il s'agit

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1 des lignes 9 et 10 de la page 4 :

2 "Je me souviens de beaucoup, mais je dois vous dire que la mémoire peut

3 être trompeuse, et je tiens à vous informer pourquoi je pense cela."

4 Je pense qu'ici, dans ce passage, vous avez raconté -- vous parlez plutôt

5 des circonstances dans lesquelles vous avez dû fuir Petrovac. Mais pour

6 moi, j'étais quelque peu préoccupé par cette déclaration puisque vous y

7 précisez que, de temps à autre, votre mémoire peut vous faire défaut. Par

8 conséquent, comment pouvez-vous me tranquilliser et tranquilliser les

9 préoccupations qui sont celles de mon client, à savoir que votre mémoire ne

10 vous fait pas défaut ?

11 R. Je dois dire que, de par la force des choses, la mémoire ne peut jamais

12 être complète. J'ai formulé -- ou j'ai fait plusieurs déclarations et j'ai

13 dit que je m'engageais à dire la vérité, et je sais que tel est mon devoir.

14 Bien évidemment, la mémoire peut faire défaut de temps à autre, mais cette

15 déclaration -- ce passage dans ma déclaration a été dressé à vue que l'on

16 remette mes notes, mon journal, et cetera. Et je dois vous dire que

17 j'aurais eu du mal à me souvenir de l'ensemble de ces événements si on ne

18 m'avait pas remis mes notes, mon journal, qui m'ont permis de me souvenir

19 des noms des personnes et des faits et des gestes des uns et des autres.

20 Vous avez pu le voir vous-mêmes. Ainsi l'incident de Biscani, ce n'est que

21 dans le cadre de ce prétoire que je me suis souvenu de quoi il s'agissait.

22 Alors que je pensais que les événements s'étaient déroulés ailleurs. Ce

23 n'est que par la suite que je me suis souvenu du meurtre de cette famille,

24 de cet homme d'affaire.

25 Q. Je comprends cela et je comprends que le fait de pouvoir compulser vos

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1 notes et d'autres documents a permis de rafraîchir quelque peu votre

2 mémoire et que les faits se sont quelque peu éclaircis. Mais si vous n'êtes

3 pas en mesure de répondre de façon catégorique à une réponse, veuillez nous

4 le faire savoir.

5 R. Bien évidemment.

6 Q. J'aimerais à présent vous poser des questions qui concernent le

7 transcrit anglais, et j'aimerais à présent vous reporter à la page 91 de la

8 déclaration enregistrée, de la ligne 14. Il s'agit d'un passage qui figure

9 presqu'à la fin de votre entretien. Et, en fait, Mme Korner vous pose une

10 question dans le sens suivant : à savoir si vous étiez prêt à venir déposer

11 de façon volontaire, et vous avez répondu en expliquant quelles étaient les

12 raisons. Et, en fait, le début de votre réponse commence à la ligne 13 :

13 "En raison de la situation générale et compte tenu des événements qui se

14 produisaient, je pensais que les autorités municipales sur place ont fait

15 tout ce qui était possible. L'objectif fondamental-- l'intention était que

16 les personnes devaient être protégées du danger. Malheureusement, si vous

17 regardez cette situation de l'extérieur, nous voyons exactement la même

18 chose, à savoir que les municipalités qui ont organisé les actes de

19 persécution à l'encontre de leur population et ont organisé leur départ."

20 Est-ce que vous vous souvenez avoir dit cela ?

21 R. Je me souviens avoir dit cela.

22 Q. J'aimerais vous demander si vous êtes d'accord que les choses ne

23 semblent pas toujours -- que les choses ne semblent pas toujours être ce

24 qu'elles sont ? A savoir que, dans votre municipalité, des personnes comme

25 vous-même, qui occupiez une position au niveau du gouvernement, vous vous

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1 êtes livrées à des activités de nettoyage et des actes de persécution qu'en

2 fait tel n'était pas le cas ? Est-ce que vous êtes en mesure de corroborer

3 cela ?

4 R. Dire que la situation dans la municipalité n'était pas comparable à

5 celle d'autres municipalités --

6 Q. En fait, à la page 91 de votre entretien, vous avez précisé que :

7 "Si l'on regardait la situation depuis l'extérieur, nous voyons la

8 situation exactement de la même manière que les municipalités qui ont

9 organisé la persécution de leur propre population et qui ont organisé leur

10 départ."

11 Si on examine ce passage, à mes yeux, ce que vous êtes en train de dire,

12 c'est que certaines personnes pourraient conclure cela, à savoir que la

13 municipalité de Petrovac se livrait à des activités de persécutions et

14 organisait le départ de ces personnes, mais qu'en fait, tel n'était pas le

15 cas à Petrovac. Est-ce que vous êtes d'accord avec moi ?

16 R. En effet, je suis d'accord. La situation n'était pas du tout telle que

17 vous l'avez décrite.

18 Q. Je vais vous poser un certain nombre de questions au sujet de vos

19 antécédents, lorsque vous avez pris la fonction de juge. En fait si vous

20 êtes né dans la municipalité de Bosanski Petrovac, vous avez été élu en

21 fait dans d'autres municipalités, n'est-ce pas exact ?

22 R. En partie, dans la municipalité de Petrovac.

23 Q. Mais dans votre déclaration et dans votre déposition, vous avez dit en

24 fait, qu'en 1980, 1981 [sic], lorsque vous êtes arrivé dans la

25 municipalité, vous ne connaissiez pas vraiment beaucoup de personnes qui

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1 vivaient dans cette municipalité, n'est-ce pas exact ?

2 R. C'est exact.

3 Q. Il s'agissait pour vous d'une nouvelle municipalité dans laquelle, vous

4 n'aviez que quelques contacts au niveau de la municipalité elle-même,

5 n'est-ce pas ?

6 R. C'est exact.

7 Q. Si nous revenons à présent sur votre formation, vous êtes juriste, vous

8 avez dit avoir assisté à un institut de hautes études administratives. Vous

9 avez suivi donc des études dans ce domaine à Zagreb, n'est-ce pas ?

10 R. C'est exact.

11 Q. Et après avoir reçu votre diplôme de juriste, vous êtes resté à Zagreb,

12 où vous avez travaillé au sein d'une école croate, n'est-ce pas exact ?

13 R. C'est exact.

14 Q. En 1990, est-ce que vous avez appris de première source l'existence du

15 conflit interethnique, étant donné que vous avez dû quitter cette école,

16 puisque vous étiez la cible directe d'hostilités qui était dirigées à votre

17 encontre en tant que Serbe, n'est-ce pas exact ?

18 R. C'est exact.

19 Q. Et grâce à l'aide de certains de vos amis, vous avez reçu une

20 proposition de travail au sein de la municipalité de Bosanski Petrovac,

21 n'est-ce pas exact ?

22 R. C'est exact.

23 Q. Et cette offre émanait du président, M. Novakovic, n'est-ce pas exact ?

24 R. C'est exact.

25 Q. Et à la lumière de votre déclaration et après avoir entendu votre

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1 déposition, vous admiriez, vous respectiez M. Novakovic, n'est-ce pas

2 exact ?

3 R. Je le respectais, mais je ne l'admirais pas pour autant.

4 Q. Lorsque vous êtes arrivé dans la municipalité de Petrovac, dans la

5 version anglaise de votre déclaration enregistrée, vers le bas de la page

6 7, vous parliez de prendre cette nouvelle fonction au sein de cette

7 municipalité et vous avez déclaré à la ligne 29 :

8 "Que votre intention n'était pas du tout de vous rendre là-bas."

9 Pouvez-vous nous dire ce que vous comprenez par cela ?

10 R. J'ai dit cela à cette époque. J'étais un membre actif de la communauté

11 orthodoxe à Zagreb, au sein de la communauté orthodoxe. Et beaucoup de

12 personnes se réunissaient là-bas. Et lorsque j'avais fait l'objet

13 d'insultes, du fait de mon appartenance serbe, je me suis confié à certains

14 de ces membres de cette communauté religieuse. Et certains d'entre eux, qui

15 avaient des bons rapports avec l'archevêque, nous avons commencé à parler

16 de cette question. C'est en fait le responsable de Zagreb lui-même, de

17 cette communauté qui m'a dit qu'il pourrait essayer de m'organiser, de me

18 trouver un travail à Belgrade. J'avais pensé pouvoir rester à Zagreb plus

19 longtemps, mais je ne voulais pas accepter l'option de Belgrade, parce

20 qu'en fait, il s'agissait pour moi d'un nouvel environnement.

21 Et lorsque je me suis rendu chez mes parents, il s'agissait de la période

22 des vacances, j'ai rencontré certains amis. Nous avons abordé cet aspect,

23 nous en avons parlé. Nous avons évoqué la possibilité pour moi de quitter

24 Zagreb ou non. Et un de ces amis, peut-être qu'il s'agissait de plusieurs

25 personnes, s'est adressé à ce président qui était chef d'une entreprise à

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1 l'époque. Et lorsque je suis rentré à Zagreb, nous sommes convenus de nous

2 rencontrer pour prendre une boisson ensemble. Je me suis arrêté dans un

3 café et M. Novakovic, qui à l'époque n'était pas président, m'a été

4 présenté, et c'est lui en fait qui m'a proposé de me rendre à Petrovac.

5 Mais à l'époque, je n'ai pas accepté. Il disait qu'après les élections, son

6 parti serait vraisemblablement majoritaire et qu'il pouvait m'assurer un

7 emploi à cette époque.

8 Toutefois, je n'ai pas accepté, parce que je ne savais pas ce que je

9 voulais faire, et cetera. Je n'avais pas vraiment envie de me rendre dans

10 un environnement où je ne connaissais personne. Il s'agissait d'un

11 environnement plus petit, et je ne pourrais pas retrouver les choses

12 auxquelles j'avais l'habitude d'être exposé.C'est par la suite que M.

13 Novakovic a repris contact avec moi. Il m'a appelé lorsque j'étais à

14 Zagreb, et lorsque je n'étais pas là non plus. Et à plusieurs reprises, un

15 ami que j'avais à Zagreb, Ivica Bezer, m'a dit qu'en fait, Novakovic était

16 assez insistant, et par la suite, il s'est révélé que M. Novakovic allait

17 être président en raison des élections qui avaient déjà eu lieu.

18 Et ensuite, suite à son insistance, j'ai retourné l'appel qu'il m'avait

19 fait. A cette époque-là, une fois de plus, je n'ai pas accepté et ce n'est

20 que lors de la troisième, ou la quatrième occasion que je me suis rendu à

21 sa décision. Et c'est par conséquent, qu'en décembre 1990, je me suis rendu

22 là-bas, il m'a présenté à un grand nombre de membres de l'assemblée, et il

23 m'a annoncé qu'il y avait plusieurs postes de juristes. Et il m'a dit que

24 je pouvais choisir ce qui me conviendrait, que je suis le -- que le

25 secrétaire de l'assemblée municipale n'avait pas encore été élu, plutôt du

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1 conseil exécutif. En fait, il y avait plusieurs postes qui étaient vacants,

2 les chefs de différents services.

3 Q. Je crois que vous avez répondu à ma question. Il me semble que votre

4 président, M. Novakovic vous a convaincu, en définitive, que vous deviez

5 faire partie de la municipalité et en fait, c'est ce que vous avez fait,

6 n'est-ce pas ?

7 R. Oui. C'est exact.

8 Q. Vous avez été nommé secrétaire du conseil exécutif, n'est-ce pas

9 exact ?

10 R. C'est exact.

11 Q. Toutefois, de temps à autre, vous étiez amené à jouer le rôle de

12 secrétaire de l'assemblée municipale, n'est-ce pas exact ?

13 R. C'est exact.

14 Q. Et vous aviez l'expérience et la formation requise dans le domaine de

15 questions administratives pour ce faire, n'est-ce pas exact ?

16 R. C'est exact.

17 Q. Et vous vous trouviez très proche de ce bâtiment municipal. Vous y

18 viviez à proximité. Par conséquent, vous pouviez vous y rendre rapidement

19 s'ils avaient besoin de vous, n'est-ce pas exact ?

20 R. C'est exact.

21 Q. J'ai également l'impression que vous êtes une personne qui est prête à

22 venir en aide, si on lui fait la demande. Est-ce que je vous décris de

23 façon plus au moins exacte ?

24 R. Si la tâche n'est pas trop difficile, voir impossible, oui, je suis

25 toujours prêt à venir en aide.

Page 20225

1 Q. Et autre raison pour laquelle vous avez participé à ce projet est le

2 fait que M. Sikman n'était pas une personne qui s'acquittait de l'ensemble

3 des tâches qui étaient les siennes. Et en fait, vous avez pris certaines de

4 ses fonctions, n'est-ce pas ?

5 R. Exact. Oui, c'est exact ou plutôt au-delà de ses fonctions, il y en

6 avait d'autres. Donc, on ne peut pas dire qu'il ne travaillait pas du tout.

7 Tout simplement, qu'il n'était pas suffisamment concentré à cette fonction-

8 là, à pouvoir tout faire car il avait une entreprise. Il a continué à

9 exercer ses fonctions d'antan, ceci dans l'intégralité de ses fonctions.

10 Q. Donc, vous aviez ces deux fonctions-là, à savoir, des [imperceptible]

11 de la secrétaire de l'assemblée municipale, ensuite, le secrétaire du

12 comité exécutif et plus tard, à Bosanski Petrovac, vous étiez aussi membre

13 de la cellule de Crise. Donc, vous avez travaillé pour la cellule de Crise,

14 n'est-ce pas ?

15 R. Oui. De temps en temps, du point de vue formel -- formellement, on me

16 nommait au sein de la cellule de Crise.

17 Q. Nous allons en parler. Mais pour l'instant, je voudrais parler de cette

18 fonction que vous aviez au début, à Petrovac. En lisant les transcrits et

19 en attendant votre déposition, j'ai cru comprendre qu'à un moment donné,

20 vous avez été mobilisé, envoyé sur la ligne de front. Est-ce que vous vous

21 souvenez des dates exactes de cette mobilisation et est-ce que vous savez,

22 est-ce que vous pouvez me dire combien de temps, vous avez passé dans

23 l'armée ?

24 R. Je peux vous répondre de mémoire mais je ne jugerai pas de l'exactitude

25 de ces données. Donc, pour la première fois, j'ai été mobilisé au début.

Page 20226

1 Donc, au cours de la première moitié ou premier tiers du mois de mars ou

2 bien du mois d'avril 1992. Je pense qu'il s'agissait plutôt du mois de

3 mars. Et en tant que juriste, je devais rejoindre le régiment de génie.

4 Q. Est-ce que vous avez reçu d'autres convocations au cours de l'année

5 1991 jusqu'en 1992 ? Est-ce qu'il y en a eu d'autres ?

6 R. C'est facile, je suis resté un mois sur le front. En 1992, j'ai été

7 mobilisé à trois reprises. Une fois, j'ai été à Kupres et à deux reprises,

8 j'ai été sur le front de Bihac.

9 Q. Et si je vous ai bien compris, vous ne vous souvenez pas des dates

10 exactes. Mais au cours de ces quatre mobilisations que vous avez suivies en

11 1992, pourriez-vous nous dire combien de temps à peu près vous avez passé

12 dans l'armée ?

13 R. Tout en tout, j'ai passé entre deux mois et demie et trois mois.

14 Q. Et de ces deux mois et demie, trois mois, vous avez passé combien de

15 temps à l'extérieur de Bosanski Petrovac ?

16 R. Et bien, toute cette période-là.

17 Q. Donc, on peut dire que pendant la mobilisation que vous avez suivie,

18 dont vous avez fait l'objet, et bien, vous ne pouviez pas remplir vos

19 obligations par rapport à la municipalité car vous en aviez d'autres auprès

20 de l'armée ?

21 R. Oui, c'est exact pour la plupart du cas. Pendant que j'ai été dans le

22 régiment d'ingénierie, enfin de génie, au cours du premier mois, à chaque

23 fois que j'avais une permission, et bien avec l'accord de nos supérieurs

24 hiérarchiques, Latinovic, je pouvais revenir immédiatement vers la

25 municipalité pour terminer quelques missions importantes. En ce qui

Page 20227

1 concerne les autres mobilisations, puisque j'ai été sur la ligne de front

2 qui se trouvait assez loin, là, ce n'était plus possible.

3 Q. Pendant que vous étiez à Bosanski Petrovac, étiez-vous membre de

4 l'association Sokol ?

5 R. Oui, formellement, oui. J'ai été même le président de cette association

6 pour Petrovac. Et vous savez, cette association n'a jamais vraiment

7 commencé à fonctionner de façon active. C'est vrai que là j'avais tout fait

8 pour que cela marche mais cela n'a pas marché tout simplement.

9 Q. Pourriez-vous très rapidement, mais vraiment très rapidement, nous

10 expliquer de quoi s'agit-il ? Qu'est-ce que c'est que cette association

11 Sokol ?

12 R. Il s'agit d'une association culturelle et sportive avec une tradition

13 de peuple slave dans l'austro-hongrie. Il s'agissait de renouveler cette

14 tradition qui avait existé auparavant. Et c'est pour cela que l'on a créé

15 des branches régionales de cette association alors que le siège de cette

16 association se trouvait soit à Sarajevo, soit à Banja Luka. Je ne suis pas

17 sûr où se trouvait le siège exactement. Toujours est-il que moi, à chaque

18 fois que j'avais à traiter au sujet de Sokol, moi, je me mettais en contact

19 avec Banja Luka.

20 Q. Je vais vous parler du premier jour de votre travail au sein de la

21 municipalité de Bosanski Petrovac. Et je voudrais vous poser quelques

22 questions au sujet de ce que vous avez pu voir et je vous préviens à

23 l'avance : Je vais vous poser un certain nombre de questions mais pas

24 forcément dans l'ordre chronologique. Et je ne le fais pas parce que je

25 veux vous induire en erreur ou semer le trouble dans votre esprit, non.

Page 20228

1 C'est parce que c'est plus facile pour moi. C'est pour cela que je ne vous

2 pose pas nos questions dans l'ordre chronologique. C'est comme cela que je

3 me suis organisé.

4 Donc, tout d'abord, je voudrais vous parler de la situation économique qui

5 prévalait à Bosanski Petrovac au moment où vous êtes arrivé. Il serait

6 exact, n'est-ce pas, de dire que cette situation économique était très

7 mauvaise. Vous avez dit cela, d'ailleurs, dans votre interview. Vous m'avez

8 dit à la page 11 de cet interview qui a été enregistré, et vous avez dit

9 que la situation économique s'était complètement effondrée dans la

10 municipalité. Est-ce exact ?

11 R. Oui.

12 Q. Et vous nous avez dit au cours de votre déposition, qu'il y avait moins

13 d'offres d'emploi en 1991 qu'en 1931 ?

14 R. Oui. Si l'on examine les données statistiques, ceci est exact.

15 Q. Et vous conviendrez que l'infrastructure économique de cette

16 municipalité était en très mauvais état ?

17 R. Oui, en effet.

18 Q. Et avec les conflits en Slovénie et en Croatie, ceci aussi, a influé de

19 façon négative sur la situation économique de votre municipalité, n'est-ce

20 pas ?

21 R. Oui, surtout quand il s'agit du conflit en Slovénie car l'usine qui

22 marchait le mieux, exportait ces produits, justement, en passant par la

23 Slovénie. Et aussi tous les exports destinés aux Etats-Unis et qui -- des

24 produits dans votre municipalité, passés par le port de Sibenik. Donc, là

25 aussi, ceci a eu un mauvais effet.

Page 20229

1 Q. Donc là, vous nous parlez de ce qui s'est passé avec cette entreprise,

2 cette usine qui marchait très bien et qui ne pouvait tout simplement plus

3 exporter, et ceci a influé sur l'emploi de nombreuses personnes à

4 l'intérieur de la municipalité ?

5 R. Je pouvais vous dire que je ne suis pas sûr s'ils avaient vraiment

6 perdu leur travail, mais il est vrai que la situation économique était

7 devenue plus que précaire.

8 Q. Est-ce que vous conviendrez avec ce que je vais dire à présent ? Au

9 cours de cette période, 1991-1992, un grand nombre de personnes de la

10 communauté ont perdu leur travail à cause de la guerre ?

11 R. Oui. Et d'ailleurs, je vous ai énuméré les raisons de cela au cours de

12 ma déposition. Et de plus, ceci est exact puisque vous êtes en train de

13 faire un lien entre 1991 et 1992.

14 Q. Et bien, nous allons nous concentrer sur la période qui a précédé le

15 mois de décembre 31, le 31 décembre 1991. Donc, quelle était la situation

16 économique à Bosanski Petrovac avant cette date-là ? Vous conviendrez qu'il

17 s'agissait là d'une région arriérée et pauvre, n'est-ce pas ?

18 R. Oui, absolument.

19 Q. Il y avait de l'inflation pendant cette période-là ?

20 R. Oui, c'est exact. L'inflation était devenue galopante, début 1992.

21 Alors que jusqu'à cette date-là, elle était acceptable pour la situation,

22 enfin pour les gens de la région.

23 Q. La municipalité de Bosanski Petrovac était, pendant de nombreuses

24 années, assimilée à Bihac et ensuite, il y a eu des initiatives pour

25 rejoindre la communauté des municipalités de Bosanska Krajina. Vous savez

Page 20230

1 de quoi je parle, n'est-ce pas ?

2 R. Oui. Oui. C'est exact.

3 Q. Et au cours de votre interview au bureau du Procureur, quand on vous a

4 posé la question, il y a un mois, on vous a demandé si cette situation

5 était basée sur la situation politique ou économique. Je pense que vous

6 avez dit, à peu près au niveau de la page 11 : il m'est difficile de vous

7 répondre et, puisque j'ai été relativement neuf dans cette municipalité, je

8 ne connaissais pas beaucoup de monde.

9 R. Je me souviens d'avoir dit cela, mais je ne sais pas pourquoi je l'ai

10 dit.

11 Q. Et vous leur avez dit, et je voudrais vous demander de corroborer ceci

12 à présent, que les raisons économiques pour cette nouvelle alliance étaient

13 évidentes ? Pouvez-vous confirmer cela ?

14 R. Oui, et j'avais donné une réponse.

15 Mme KORNER : [interprétation] Si vous allez lire la réponse, je vous prie

16 de bien vouloir la lire dans son intégralité.

17 M. CUNNINGHAM : [interprétation] Pour les comptes rendus d'audience, il a

18 dit :

19 "Il est difficile de dire. Je ne vivais pas là-bas et je ne savais pas,

20 même si je crois que l'économie, enfin les raisons économiques existaient,

21 mais il y avait aussi, sans doute, raisons politiques avec des idées comme

22 quoi nous serons mieux de l'autre côté, ce qui est complètement ridicule,

23 et je pense que même les dirigeants savaient que, sans travailler

24 difficilement, enfin sans beaucoup d'efforts, ceci n'était pas possible."

25 Q. Voici ma prochaine question : en dépit du fait qu'on avait coupé les

Page 20231

1 liens avec la communauté de Bihac et du fait que Bosanski Petrovac faisait

2 partie de la Krajina de Bosnie, votre président a continué à coopérer, de

3 façon très étroite, avec Bihac, n'est-ce pas ?

4 R. Oui.

5 Q. La décision de rejoindre la Bosna Krajina a été mise en œuvre

6 uniquement du point, enfin, uniquement formellement et ceci jusqu'au début

7 de la guerre ?

8 R. Oui. C'est exact. C'est exactement cela. Et je l'ai décrit dans ma

9 réponse. Si vous le voulez bien, je peux vous en donner lecture.

10 Q. Je ne pense pas que ceci soit nécessaire, même pas besoin de la

11 répéter. Donc, au cours de la période qui va jusqu'à la guerre, vous et

12 votre président, vous coopérez de façon très étroite avec la municipalité

13 de Bihac, en essayant de développer la structure économique,

14 l'infrastructure, et cetera ?

15 R. Oui, c'est exact.

16 Q. Donc, même si votre président, votre municipalité, s'ils ont changé

17 d'allié, et bien, dans les faits, on passe plus de temps et plus d'énergie

18 à traiter avec Bihac qu'avec la Krajina de Bosnie ?

19 R. Oui, c'est exact.

20 Q. Donc sur papier, on avait l'impression que Bosanski Petrovac pendant

21 cette période-là, pendant la guerre, était alliée de façon plus étroite

22 avec la Krajina de Bosnie. En réalité, on entretenait des liens

23 traditionnels avec la municipalité de Bihac, n'est-ce pas ?

24 R. Et bien, en réalité, oui. J'ose même donner les raisons pour cela, pour

25 continuer la coopération, non seulement avec Bihac, mais aussi avec une

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1 entreprise de Cazin. Et nous avions une très bonne coopération, aussi, avec

2 les représentants de la municipalité de Kladusa.

3 Q. Et quand vous parlez de cette entreprise à Cazin, est-ce que vous vous

4 référez à une entreprise musulmane qui est située dans une région musulmane

5 et le jour où votre municipalité traitait avec eux, n'est-ce pas, faisait

6 des affaires avec eux, à l'époque ?

7 R. Il s'agissait d'une entreprise d'état, mais à Cazin, Cazin était

8 habitée à plus de 90 % par des Musulmans. Enfin, c'est ce que je pensais.

9 Des gens qui travaillaient dans cette entreprise étaient des Musulmans,

10 mais je ne suis pas vraiment au courant de cela.

11 Q. Et, il en est de même avec la municipalité de Kladusa ? Il s'agissait

12 là, aussi, d'une municipalité musulmane ?

13 R. Oui. Il est vrai que Kladusa était une entreprise [sic] musulmane;

14 cependant, le président Novakovic avait de très bons rapports politiques et

15 économiques avec leurs dirigeants.

16 Q. Très bien. Cela me fait une belle transition pour passer au prochain

17 sujet, le président Novakovic. Vous l'avez décrit comme la personne qui

18 travaillait sur le principe d'en connaître. Pourriez-vous, s'il vous plaît,

19 nous dire de quoi il s'agit ?

20 R. Et bien, il disait que chacun devait savoir juste ce dont il avait

21 besoin pour effectuer son travail. Donc, il ne fallait pas que les chefs de

22 service se mêlent du travail des autres chefs de service et qu'il ne faille

23 pas leur communiquer, et qu'il ne faille qu'ils demandent des informations

24 qui vont au-delà de leur travail. Et moi, j'ai interprété cela comme une

25 instruction de ne pas demander ce que l'on ne me dit pas -- de ne pas

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1 demander à savoir ce qu'on ne me l'a pas dit.

2 Q. Vous avez dit que votre président avait beaucoup d'influence. Vous

3 conviendrez avec moi, n'est-ce pas, là-dessus ?

4 R. Oui.

5 Q. Et pour nous donner un exemple de cela, vous nous avez dit qu'il

6 pouvait très bien décrocher le téléphone pour appeler le Dr Karadzic ou

7 Plavsic et parler avec eux au téléphone, comme s'il les connaissait depuis

8 longtemps ?

9 R. Oui, c'est exact. Il n'agissait pas comme cela uniquement avec -- je

10 sais qu'il se comportait de la même façon avec les haut représentants de la

11 population musulmane. Je sais qu'il avait appelé certains ministres. C'est

12 comme cela qu'il se comportait avec les gens. Il était très direct, très

13 naturel.

14 Q. Et il a été bien respecté par les gens. Ceci est démontré par sa

15 capacité de faire -- passer des coups de fil, d'appeler des gens qui

16 étaient placés très -- en très haut niveau hiérarchique et il était aussi

17 respecté par les gens de la municipalité.

18 R. Et bien, vous savez que, dans une communauté locale, on a plus tendance

19 à nier l'autorité de quelqu'un, mais je considère qu'il jouissait de

20 beaucoup d'influence au sein de la municipalité. Bien sûr, il y avait des

21 gens qui étaient pour lui comme il y en avait qui étaient contre lui.

22 Q. Une de vos fonctions -- je pense que c'était une de vos fonctions,

23 consistait à fournir des conseils à votre président, ceci au sein de la

24 municipalité.

25 R. Oui, à chaque fois qu'il me demandait conseil, je lui en donnais.

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1 C'était notre règle de conduite. Mais il s'agissait là des opinions

2 informelles car lui il avait la fonction de l'assemblée, alors que moi, mes

3 opinions d'expert, je les fournissait de façon formelle au président du

4 conseil exécutif. Et de temps en temps, il me demandait mon point de vue,

5 pas seulement -- il ne demandait pas seulement à moi, il demandait aussi

6 aux autres collègues juristes. Et parfois, il demandait même de lui

7 consulter avec mes collègues avec lesquels j'avais des très rapports, pour

8 être sûr que la décision qu'il allait prendre allait être la bonne.

9 Q. Et donc, il vous a posé des questions au sujet des questions

10 juridiques, mais aussi il avait pour l'habitude de se faire conseiller par

11 d'autres personnes, experts en d'autres matière, l'économie, et cetera ?

12 R. Oui, surtout quand il s'agit de questions économiques. Il essayait

13 toujours de trouver des moyens pour aboutir à des échanges

14 -- aboutir au développement.

15 Q. Est-ce que vous pensez que votre président s'efforçait de prendre la

16 meilleure décision possible pour convenir à votre municipalité ?

17 R. Il est difficile d'évaluer cela, mais je pense qu'il s'est efforcé à

18 prendre les meilleures décisions.

19 Q. Diriez-vous qu'il s'agit là d'un penseur indépendant ou bien de

20 quelqu'un qui suivait automatiquement dans la ligne droite du parti ?

21 R. Non, il avait un caractère extrêmement indépendant.

22 Q. Je vais aborder quelques événements auxquels vous avez participé. Je ne

23 vais pas les aborder en ordre chronologique. A la page 13 du transcrit en

24 langue anglaise, vous racontez cet incident où, avant la guerre, vous aviez

25 deux entreprises qui se trouvaient dans la région purement musulmane et qui

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1 travaillaient dans votre -- qui fonctionnaient dans votre municipalité.

2 Vous nous avez raconté de quelle façon les travailleurs musulmans se sont

3 fait attaqués par votre président qui a eu des prises de positions très

4 fortes. Est-ce que vous savez de quel incident je parle ?

5 R. Ces entreprises étaient en train de construire une route chez nous. Le

6 président Novakovic a réussi, par les biais du fonds pour les routes, à

7 commencer la construction des routes qui auraient dû être construites une

8 vingtaine ou trentaine d'années auparavant. Donc, il était convenu que les

9 entreprises de la région, qui n'étaient pas trop prises, et bien, allaient

10 être chargées de ce travail. Donc, là il s'agit de l'entreprise Putevi de

11 Krajina et Rad à Cazin. Evidemment, les travailleurs de ces entreprises

12 étaient musulmans.

13 Q. Il y a eu un incident au cours duquel ces travailleurs musulmans ont

14 fait l'objet d'une attaque. Votre président a réagi de façon très forte

15 pour critiquer ces attaques, les attaques perpétrées contre ces

16 travailleurs.

17 R. Oui, et moi je suis allé faire de l'enquête sur place.

18 Q. Et votre président dit au chef de police qu'il allait le remplacer si

19 ces attaques ne sont pas arrêtées.

20 R. Oui, et c'est vrai qu'on a arrêté ces attaques.

21 Q. Et donc là, ça vous donne l'exemple de votre président faisant de bons

22 choix, agissant comme il faut.

23 R. Oui, je le crois.

24 Q. Et je voudrais vous citer un autre exemple. A la page 13 et 14 de votre

25 déclaration en langue anglaise, il s'agit là d'un événement religieux qui a

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1 quelque chose à voir avec Bihac Petrovac et une promotion -- la promotion

2 d'un évêque à Belgrade. Et pendant que vous étiez à Belgrade, vous avez

3 appris que des hommes armés sont venus dans la ville et ont fait peur à la

4 population musulmane. Je ne vous demande pas de décrire cet incident, mais

5 est-ce que vous vous en souvenez ?

6 R. Oui, je m'en souviens.

7 Q. Et je crois qu'avant cet incident, les représentants de la population

8 musulmane sont venus le voir pour s'assurer que de tels incidents

9 n'allaient pas se reproduire, n'est-ce pas ?

10 R. Oui.

11 Q. Et votre président les a rassuré en leur disant qu'il allait faire tout

12 ce qu'il pouvait pour empêcher cela, n'est-ce pas ?

13 R. Oui, c'est exact.

14 Q. Et donc il essaie de faire ce qu'il faut, à savoir, aider les citoyens

15 de sa municipalité, n'est-ce pas ?

16 R. Oui.

17 Q. Je vais avancer un peu car je voudrais aborder avec vous un problème

18 récurrent dans votre municipalité, et votre président a tenté de faire

19 quelque chose pour arrêter cela. Donc, il s'agit de la période de la guerre

20 dans votre municipalité. Des individus armés se sont mis à piller, à voler

21 les choses, n'est-ce pas ?

22 R. Oui.

23 Q. Pendant la période où vous vous trouveriez dans cette municipalité, à

24 l'évidence votre président a demandé au commandant des unités locales de

25 l'armée, d'essayer je crois de les prendre ou de contrôler les soldats,

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1 n'est-ce pas ?

2 R. Oui. Il le faisait continuellement.

3 Q. Il a essayé d'obtenir que les militaires et la police locale coopèrent

4 pour empêcher les problèmes de pillage et de destruction des biens

5 appartenant à des personnes privées, n'est-ce pas ?

6 R. Oui.

7 Q. Et je pense que vous serez d'accord avec moi pour dire que votre

8 président essayait de faire ce qui convenait de faire, n'est-ce pas -- ce

9 qui avait lieu de faire ?

10 R. Oui, je pense bien.

11 Q. Mais du fait des circonstances qui échappait indépendant de sa volonté,

12 c'est-à-dire, à cause du pouvoir des militaires, il n'a pas pu faire en

13 sorte que les pillages et les actes de violence contre les personnes et les

14 biens soient arrêtés, n'est-ce pas ? Qu'ils cessent, n'est-ce pas ?

15 R. Oui. C'est bien cela.

16 Q. Est-ce que vous vous rappelez, je crois que c'était à la pièce à

17 conviction du Procureur --

18 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Excuse-moi de vous arrêter un instant,

19 Maître Cunningham, mais en ce qui concerne cette question de pillages et de

20 ce que vous voulez décrire -- ce que vous avez décrit vous et le témoin,

21 puisque vous vous référez à une période où le pays était en guerre, peut-

22 être que le témoin pourrait être plus précis et nous indiquer de quelle

23 année il parle et de quelle région -- de quelle partie de l'année ou de

24 quelles années il veut parler lorsqu'il y a eu ces pillages et ces autres

25 incidents.

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] La période en question c'était le printemps de

2 l'année 1992.

3 M. CUNNINGHAM : [interprétation]

4 Q. Votre président était également prêt et ouvert à la possibilité que

5 pendant le printemps et l'été 1992, les Musulmans qui se trouvaient au sein

6 du gouvernement et qui remplissaient leurs tâches, leurs fonctions ne

7 devraient pas être mis à pied et rejetés simplement à cause de leurs

8 origines ethniques, n'est-ce pas ?

9 R. Oui. C'est exact. J'ai expliqué cela.

10 Q. Et il s'efforçait de trouver, votre président, il s'efforçait de

11 trouver une façon qui lui permette de contrôler les directives selon

12 lesquelles les Musulmans faisant partie du gouvernement ou dans des

13 sociétés devraient être renvoyés. C'est bien cela.

14 R. Oui. Il expliquait quelles seraient les conséquences si on continuait à

15 faire cela ?

16 Q. Et plutôt que de les renvoyer, ce qu'il fait fondamentalement, c'était

17 de prendre un arrêté ou une ordonnance leur disant de rentrer dans leurs

18 foyers sans salaire, et de prendre un congé sans solde, c'est bien cela ?

19 R. Oui.

20 Q. Nous avons parlé de certains exemples concernant votre président, chef

21 de la municipalité, qui s'efforçait de faire ce qu'il y avait lieu de faire

22 pendant une période difficile. Est-ce que vous seriez d'accord avec

23 l'observation suivante que je formule, à savoir que pendant cette période

24 il était difficile, pour le gouvernement enfin pour la municipalité, de

25 faire toujours ce qu'il convenait de faire parce qu'il y avait tout

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1 simplement trop d'obstacles à cela ?

2 R. Oui.

3 Q. Et je voudrais savoir si vous êtes d'accord avec ma façon de voir

4 l'obstacle primordial, principal pour pouvoir faire ce qui avait lieu de

5 faire dans cette municipalité, c'était les militaires, n'est-ce pas ?

6 R. Et bien, en fait, pas le commandement, mais simplement les unités qui

7 n'étaient pas contrôlées qui échappaient au contrôle. C'était des soldats,

8 des soldats qui avaient quitté leurs unités pour la plupart.

9 Q. Nous allons en parler dans une minute, mais l'un des problèmes que le

10 président a eu à résoudre, auquel il se trouvait confronté, c'était que des

11 délégations, des communes, des délégations officieuses venant de différents

12 secteurs de la municipalité, sont venues le trouver, en fait en exigeant

13 d'être armées par la municipalité, n'est-ce pas ?

14 R. C'est exact.

15 Q. Et outre le fait de traiter des exigences ou des demandes officieuses

16 présentées par ces habitants, il avait également à faire face à des

17 individus, faisant partie d'unités que j'appellerais des renégats qui

18 viendraient en ville présenter des exigences à la municipalité, n'est-ce

19 pas ?

20 R. Oui. Oui, il a aussi eu des problèmes avec eux.

21 Q. Donc ce n'était pas inhabituel que de telles délégations d'unités

22 viennent pour essayer d'exercer des pressions sur lui sur la municipalité

23 pour qu'il prenne certaines mesures, n'est-ce pas ?

24 R. C'est exact. Souvent ils venaient dans les bureaux emportant des armes.

25 Q. Et vous-mêmes, vous avez eu un exemple, dont vous avez parlé dans votre

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1 déclaration, pendant que vous vous trouviez aux lignes de front, concernant

2 un bataillon tout entier qui était venu devant le bâtiment de la

3 municipalité, vociférant et demandant à voir les autorités municipales pour

4 quelles soient -- pour que je les remplace. Je reprends vos propres termes,

5 parce que je -- d'après ce que je comprends, il n'était pas suffisamment

6 Serbes ou pro-Serbes. Vous dites que vous avez vu cela, entendu cela de vos

7 propres yeux et de vos propres oreilles, n'est-ce pas ?

8 R. Je n'étais pas présent. J'étais à Kupres. Quand je suis revenu, on a

9 parlé -- le président Novakovic m'en a parlé, M. Latinovic m'en a parlé, et

10 ainsi que mon collègue, le secrétaire de la municipalité, pardon de

11 l'assemblée municipale. Tout le monde donc m'a raconté la même histoire et

12 donc je l'ai crue. Et j'ai également appris par d'autres personnes que des

13 douilles correspondaient à des munitions pardon -- que des caisses de

14 balles et de munitions avaient été réunies et avaient été mises devant le

15 bâtiment. Donc, il y avait une démonstration, une manifestation très forte.

16 Q. Il y a un autre problème récurant avec les militaires. C'était qu'on

17 essayait par rapport aux militaires, aux soldats qui venaient en ville, qui

18 causaient des violences à des personnes, et des biens c'était d'essayer de

19 faire quelque choses à ce sujet pour l'empêcher, n'est-ce pas ?

20 R. Oui.

21 Q. Et votre président a fait ce qu'il pouvait pour communiquer avec les

22 militaires, pour essayer de mettre un terme à cela, n'est-ce pas ?

23 R. Oui.

24 Q. Et pourquoi est-ce qu'il n'a pas réussi à les faire cesser ? Pourquoi

25 est-ce que votre président n'a pas réussi premièrement à empêcher ces

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1 renégats, ces soldats rebelles de venir en ville ? Pourquoi est-ce qu'il

2 n'a pas pu les en empêcher ?

3 R. Pour deux raisons. Le commandant militaire n'avait pas de structures

4 internes très solides ou de chef de commandement. Je ne devrais pas vous

5 donner ces raisons maintenant mais en tout état de cause, il n'était pas en

6 mesure de maintenir la discipline avec leurs soldats. La deuxième raison,

7 c'était que précédemment, ils se trouvaient sous une direction militaire.

8 Et s'ils devaient être arrêtés par la police civile, et il y a eu plusieurs

9 cas de ce genre et s'ils étaient détenus, il fallait les relâcher

10 immédiatement parce que c'était la police militaire qui était censé prendre

11 la suite. Parfois, la police militaire les emmenait et de sorte qu'ils

12 devaient à ce moment-là passer par une procédure, discipline militaire,

13 mais ceci n'empêchait un tel comportement.

14 Q. Et ce que je n'arrive pas à comprendre, si c'est votre président, qui

15 était à la tête de gouvernement municipal, pourquoi est-ce qu'il ne pouvait

16 pas tout simplement faire appliquer cela ? Pourquoi, par exemple, est-ce

17 qu'il ne pouvait pas garder les personnes en prison ?

18 R. J'ai expliqué cela. Il n'était pas de sa compétence d'ordonner -- de

19 donner des ordres à la police. S'il disait, par exemple, au chef de la

20 police qu'il le remplacerait, ce n'était qu'un exemple, mais, en fait, il

21 fallait qu'il demande à son supérieur de faire remplacer ce chef. Il

22 n'avait pas un pouvoir direct ou une compétence directe, en ce qui concerne

23 la police, les organes de police ou les organes militaire.

24 Q. Un des autres problèmes dont vous parlez dans votre déclaration, c'est

25 le fait que votre municipalité avait un problème avec les paramilitaires

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1 qui avaient réussi à s'infiltrer dans la communauté et que personne ne

2 contrôlait. Est-ce que vous vous rappelez avoir parlé de cela ?

3 R. Oui, je m'en souviens.

4 Q. Comment se fait-il que le président, en tant que le chef des autorités

5 municipales, pour certaines municipalités, ou tout autre membre des

6 autorités civiles, n'ait pas pu contrôler ces paramilitaires ?

7 R. Pour l'essentiel, de telles unités ou petits groupes de soldats, ce

8 n'étaient pas vraiment des unités au sens militaire du terme. Il s'agissait

9 essentiellement de soldats qui étaient repartis pour ailleurs, qui avaient

10 une autre destination. Nous étions à un carrefour très important. Et ces

11 soldats traversaient notre région pour se rendre à différents fronts, et de

12 petits groupes de ce genre, en fait, étaient en train d'échapper à leur

13 commandement. Ils passaient la nuit en ville, ils se livraient au pillage,

14 ils cambriolaient des maisons, ils dépensaient beaucoup d'argent dans les

15 bars et dans les restaurants. Et ensuite, ils ne voulaient pas payer leur

16 note. Et en sortant, au moment où ils étaient sur le point de partir,

17 certaines mesures seraient prises, mais elles ne servaient pas à grande

18 chose. Nous avions à en subir les conséquences.

19 Q. Ce n'était pas d'une grande utilité, d'après ce que je comprends, parce

20 qu'il lui aurait -- souhaite une intervention des militaires, soit une

21 intervention de paramilitaires qui forcerait à ce moment-là, obligerait à

22 ce moment-là à relâcher ces personnes ?

23 R. Tout ce que je sais, c'est qu'il y a eu un exemple dans lequel de tels

24 renégats avaient libéré des camarades qui ont été mis en prison, et dans la

25 plupart des cas, ils s'échapperaient.

Page 20243

1 Q. Et dans ce cas, ce cas que vous avez connu où des camarades sont venus

2 pour libérer des personnes qui seront en prison, c'était à Topalovic.

3 J'espère que je prononce ça correctement. C'est bien incident de

4 Topalovic ?

5 R. Topalovic, oui, c'est exact. C'est l'incident dont lequel un groupe

6 avait été arrêté effectivement.

7 Q. Mais je voudrais essayer de résumer les choses. Il s'agit de l'incident

8 dans lequel -- après lequel, Topalovic et ses collègues -- ses camarades,

9 qui, je crois, avaient le nom de Rambo, ont été arrêtés et le chef de la

10 police est venu. Il a dit qu'il était obligé de les relâcher à cause de

11 leurs collègues, le fait que ces collègues, en fait, lui avaient le canot

12 d'un pistolet dans la bouche et ils l'avaient littéralement forcé sous la

13 menace d'un pistolet à les relâcher.

14 R. C'est tout à fait exact, sauf qu'il y en avait deux autres -- il y

15 avait deux autres personnes, et quatre personnes avaient été arrêtées.

16 Q. Bien et je suppose -- ce que j'essaie de lui montrer, c'est ceci : nous

17 savons que les militaires constituer un obstacle pour la bonne

18 administration de la municipalité de Bosanski Petrovac, et nous avons ce

19 problème des paramilitaires qui constituaient un obstacle également à la

20 bonne administration de Bosanski Petrovac; c'est bien exact, n'est-ce pas ?

21 R. Oui. Oui, c'était des obstacles entre autres -- autres obstacles.

22 Q. Et vous en évoquez d'autres. Pourriez-vous brièvement nous dire ce qui

23 vous vient à l'esprit lorsque vous nous parlez de cela ?

24 R. Ce qui me vient à l'esprit, c'est le fait que la population était

25 extrêmement politisée. Les personnes, qui appartenaient aux communautés

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1 ethniques, étaient comme empoisonnées par cela. Ils avaient le -- un très

2 grand nombre de personnes, qui normalement auraient dû s'acquitter de leur

3 travail, et qui, en fait, s'occupaient de politique, donc c'était une

4 situation généralement mal saine.

5 Q. Bon, nous y reviendrons un peu plus tard. Je voudrais maintenant

6 revenir à sur cette question avec vous encore dans la même veine concernant

7 les militaires. Bon, je vais faire un peu un saut en avant, mais je ne veux

8 pas créer la confusion à votre esprit. Je voudrais vous parler de la

9 période où la cellule de Crise municipale de Petrovac se réunissait. Est-ce

10 que des militaires participaient toujours au cellule de Crise lorsque vous

11 étiez présent ?

12 R. Pas toujours.

13 Q. Et si vous deviez attribuer un pourcentage à leur participation, quel

14 serait ce pourcentage. Est-ce qu'ils participaient 75 % du temps ou quelle

15 serait votre estimation pour caractériser leur participation ?

16 R. Un certain période, ils ne participaient pas du tout, par exemple, en

17 1994, où ils ne venaient que très rarement, lorsque c'était absolument

18 nécessaire. Mais pendant cette période de crise, qui correspond à ma

19 déposition, comme vous pouvez le voir d'après les comptes rendus, on voit

20 la fréquence de leur participation. Chaque fois qu'il y avait quoi que ce

21 soit qui concernait l'armée, les relations avec l'armée, le fait de faire

22 sortir les soldats de la ville, le contrôle ou la discipline concernant ces

23 soldats, à ce moment-là, ils participaient toujours.

24 Q. Bien, et alors ils évitaient les réunions parfois parce que votre

25 président et d'autres personnes les critiquaient parce qu'ils ne faisaient

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1 rien pour empêcher les pillages et le désordre au sein de la communauté en

2 1992, c'est bien cela ?

3 R. Et bien, je ne sais pas. Je ne sais pas s'ils les évitaient, mais ceux

4 qui ne venaient pas à ces réunions ou à ces séances, c'étaient ceux qui

5 étaient invités. Par exemple, ils envoyaient des représentants d'un grade

6 moins élevé. En tout état de cause, ils réagissent de façon négative par

7 rapport aux critiques qui étaient formulées en ce qui concerne la

8 discipline de leurs soldats et tout ce qui avait trait avec les demandes

9 pour empêcher le pillage et les attaques.

10 Q. Je voudrais continuer en parlant de quelque chose qui concerne la

11 participation des militaires. Pourriez-vous regarder votre journal à la

12 date du 28 mai 1992 ?

13 R. Je l'ai trouvé.

14 Q. Est-il exact qu'à la date en question, les militaires vous ont dit

15 qu'ils ne voulaient pas assister à cette séance ?

16 R. Oui. C'est exact. J'ai noté le fait qu'ils avaient dit qu'ils n'étaient

17 pas en mesure d'assister. J'étais censé réunir -- j'étais sensé organiser

18 cette réunion.

19 Q. Et vous nous avez dit vendredi dernier -- on trouve ceci à la page 18

20 du compte rendu -- que la raison pour laquelle ils ne voulaient pas

21 participer était qu'ils étaient fatigués d'entendre la cellule de Crise

22 dire que les militaires étaient responsables de ces désordres. C'est

23 exact ?

24 R. C'est exact.

25 Q. Et pendant cette période, en 1991 à 1992, n'est-il pas vrai que votre

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1 municipalité à été abordée par deux officiers en retraite de l'armée qui

2 étaient de Belgrade et qui ont offert leurs services pour constituer un

3 système judiciaire ou un tribunal qui s'occuperait de sanctionner les

4 soldats qui s'étaient rendus responsables de crimes ou délits ?

5 R. C'était -- il y en avait certainement deux ou trois. Je pense qu'ils

6 avaient le grade de colonel. Ils avaient appartenu au service juridique.

7 C'est exact. Ils voulaient constituer dans la région, au niveau de la

8 région y compris du côté de Petrovac, et ils voulaient qu'il y ait un

9 tribunal militaire de constituer. Et ils proposaient cela, et de façon à ne

10 pas perdre de temps, je pourrais vous dire que cette proposition a été

11 rejetée et qu'il n'a plus jamais été question.

12 Q. Et brièvement, pourquoi est-ce que vous l'avez rejetée ?

13 R. Parce qu'il s'agissait d'officiers à la retraite et qui apparemment

14 venaient, disaient-ils, pour nous aider, mais aucun d'entre nous qui étions

15 juristes ne voulions faire partie d'une telle juridiction, d'un tel

16 tribunal. Personnellement, j'étais sensé être juge dans cette juridiction

17 et j'ai dit que je trouverais une méthode qui me permettrait de s'échapper,

18 mais de ne pas le faire plutôt de faire cela. Mais j'ai également informé

19 M. Novakovic de façon détaillée du genre de juridiction que ce serait et à

20 quoi elle servirait. Après cela, la direction municipale a -- s'est

21 déclarée de façon décisive contre la constitution d'une telle juridiction.

22 Q. Donc, pour une raison ou pour une autre, et je sais que vous êtes là en

23 train de lire à partir de la déposition que vous avez faite, de façon

24 détaillée dans la déclaration, cette décision a été

25 -- la décision a été prise de dire merci beaucoup, mais non merci, nous ne

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1 voulons pas ce type de tribunal selon vos conditions, dans notre

2 municipalité.

3 R. C'est exact. En l'occurrence, il devait s'agir de tribunaux militaires

4 ou de cours martiales. Et les choses n'étaient même pas définies en ce qui

5 concernait le niveau auquel ce tribunal fonctionnerait, à savoir si les

6 appels seraient possibles, s'il y aurait une Chambre d'appel, et ainsi de

7 suite.

8 Q. Donc, ça aurait été juste de dire qu'il y a eu une possibilité de créer

9 un système judiciaire chargé de la discipline en cas de comportement

10 criminel commis par des soldats, mais que votre municipalité a décidé de ne

11 pas l'accepter.

12 R. D'après la loi en vigueur, il y avait eu des tribunaux qui existaient

13 préalablement, mais ceci ne correspondait pas au domaine de la loi. Et

14 notre municipalité avait des renseignements divergents à ce sujet. C'était

15 l'une des tentatives, parmi toute une série, d'établir un pouvoir militaire

16 -- pouvoir militaire à Petrovac. Si ça avait fonctionné à Petrovac, à ce

17 moment-là, il aurait été très facile de suivre cet exemple également dans

18 tout le secteur avoisinant. Et à ce moment-là, ça aurait pu être le --

19 différentes institutions avaient été constituées en ville, et je ne pense

20 pas que les officiers étaient tout à fait conscients de l'importance de

21 leur demande. Même avant de nous être trouvés en contact avec ces colonels,

22 nous étions déjà contraires -- nous étions déjà contre ces demandes parce

23 qu'en fait, ces demandes visaient à établir une autorité, une

24 administration militaire. C'est pour ça qu'il y avait des tentatives

25 constantes pour essayer de déclarer l'état de guerre, et ainsi de suite.

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1 Ces officiers sont venus à un moment différent. Ils étaient formés de

2 manière différente et ils pensaient que, lorsque la guerre éclatera, ils

3 pourraient reprendre tout le commandement -- l'autorité. En fait, ils ne

4 parvenaient pas à comprendre que l'autorité civile puisse exister ou doive

5 exister, mais ils pensaient seulement qu'elle ne devrait exister qu'en

6 fonction de leurs ordres. C'est comme ça qu'ils voyaient les choses.

7 Q. Bien. Et un autre exemple que nous avons vu, dans lequel les militaires

8 agissaient de façon illicite, c'était lorsque vous avez procédé à une

9 mobilisation -- une réquisition des denrées et biens matériels, vous avez

10 parlé de la manière dont les militaires avaient réquisitionné de façon

11 arbitraire du matériel et des denrées en particulier, des ressources

12 matériels en ce qui concerne les véhicules. Est-ce que vous vous rappelez

13 avoir parlé de cela ?

14 R. Je me rappelle en avoir parlé. C'est exact.

15 Q. Et pour l'essentiel, est-ce que les militaires, pour employer ce mot-là

16 à défaut d'un autre, volaient des véhicules et disaient qu'ils les

17 réquisitionnaient et les utilisaient à ce moment-là à leur propre profit ?

18 C'est bien cela ?

19 R. Ils ne les volaient pas. Ce serait peut-être -- c'est un terme exagéré.

20 Mais ils les réquisitionnaient et ils donnaient un certificat -- un reçu,

21 mais ils ne respectaient pas les procédures légales conformes au droit, à

22 savoir qu'il y aurait dû y avoir une liste de véhicules établie en temps de

23 paix, et à ce moment-là, ils auraient pu réquisitionner ou mobiliser en

24 fonction de la liste préétablie. On ne pouvait pas avoir un véhicule qui

25 appartenait comme ça à quelqu'un et soudainement que -- le réquisitionner.

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1 Q. Et vous, en tant que juriste, vous saviez que ceci est illicite, n'est-

2 ce pas ?

3 R. Bien sûr. Et pas seulement moi, mais les autorités compétentes aussi se

4 sont plaintes parce qu'elles étaient chargées de mobilisation.

5 Q. Bien. Et comment se fait-il que les autorités compétentes, quelles

6 qu'elles aient pu être, n'aient rien pu faire pour empêcher les militaires

7 de faire cela ? Est-ce que c'est simplement que les militaires étaient trop

8 puissants ?

9 R. Un très grand nombre de questions semble toucher au même objet. Je

10 dirais que cet organe en fait ne parvenait à rien faire. Chaque fois que

11 j'étais moi-même mobilisé, j'étais mobilisé contrairement à la loi. Je ne

12 faisais pas partie de ces personnes qui pouvaient être mobilisées, mais

13 c'était simplement une pression qui s'exerçait pour essayer de me

14 mobiliser. Et pas seulement moi, mais il y a eu des situations dans

15 lesquelles tous les membres de la direction municipale ont été placés au

16 front. C'est vous montrer à quel point ils étaient puissants. Et à ce

17 moment-là, nous avons pris part au combat.

18 M. CUNNINGHAM : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que c'est

19 le bon moment pour permettre -- pour suspendre l'audience. Je vois qu'il

20 est 12 heures 29.

21 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie, Maître Cunningham.

22 Nous allons avoir une suspension d'audience de 25 minutes.

23 L'INTERPRÈTE : L'interprète demande que l'on remplace le terme "renégat"

24 par rupture de bancs.

25 --- L'audience est suspendue à 12 heures 29.

Page 20250

1 --- L'audience est reprise à 13 heures 00.

2 M. CUNNINGHAM : [interprétation] Non ? Est-ce que je peux reprendre ?

3 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Attendez un instant.

4 M. CUNNINGHAM : [interprétation] C'est une mauvaise habitude que j'ai prise

5 car, chez nous, l'accusé est toujours dans le prétoire au moment où les

6 Juges arrivent.

7 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Ici, le système est quelque peu

8 différent.

9 M. CUNNINGHAM : [interprétation] C'est ce que je viens d'apprendre. Est-ce

10 que je peux continuer ?

11 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, merci.

12 M. CUNNINGHAM : [interprétation] Et bien avec l'aide de Mme l'Huissière, je

13 voudrais montrer au témoin, deux pièces. La pièce P1826 et ensuite la pièce

14 P229.

15 Q. Ce que je vais faire, c'est tout d'abord de vous montrer la pièce 1826

16 et ensuite la pièce P229, car je considère que le contenu de ces

17 documents, qui font partie des pièces à conviction, diffère de la réalité

18 des choses. Si vous examinez la pièce 1826, et bien, vous allez voir qu'il

19 s'agit-là d'une lettre que votre président a envoyée à l'assemblée et au

20 président de la République de Serbie, n'est-ce pas ?

21 R. Oui, c'est exact.

22 Q. L'exemplaire que vous avez ne contient pas de date, cependant, on voit

23 la signature du président.

24 R. Oui, c'est exact.

25 Q. Et c'est bien cela, le document qui demande, à l'assemblée et au

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1 président de la République de Serbie, de prendre les mesures appropriées

2 pour protéger le peuple serbe et ensuite on y énumère, dans le deuxième

3 paragraphe, enfin à l'avant-dernier paragraphe, neuf municipalités

4 différentes qui, d'après lui, sont prêtes à participer de façon active à la

5 défense, et cetera, d'après ce que dit l'auteur du texte. Vous le voyez,

6 n'est-ce pas ?

7 R. Oui.

8 Q. Et vous avez dit, je pense que le fait qu'on ait énuméré ces neufs

9 municipalités, vient relever d'une décision arbitraire. Car je pense que

10 vous nous avez dit, jeudi dernier, qu'il n'était pas possible que votre

11 président ait pu s'entretenir avec les neuf autres présidents dans si peu

12 de temps. Vous vous souvenez avoir dit cela ?

13 R. Oui, je m'en souviens. Je l'ai dit comme cela.

14 Q. Et je pense que vous avez cité au moins deux municipalités, à savoir,

15 Bihac et Sipovo, pour corroborer votre déclaration ?

16 R. Oui. J'ai cité l'exemple de Bihac, de Sipovo et me semble-t-il

17 Mrkonjic. Je dis tout au moins que je n'étais pas sûr au sujet de Mrkonjic.

18 Q. Je pense que vous m'avez peut-être dit dans une vos déclarations, je ne

19 critique pas votre président de l'avoir fait, mais est-il exact, qu'il a,

20 de façon arbitraire, décidé d'inclure ces deux municipalités Sipovo et

21 Bihac, qu'il n'a probablement pas consultées ?

22 R. Moi, je pensais que de façon arbitraire et de son propre gré, il a

23 indiqué qu'il représentait ces municipalités. Je dis cela sur la base des

24 circonstances qui prévalaient à l'époque. J'ai dit qu'il y avait juste une

25 partie de Bihac qui avait la population serbe et peut-être qu'il avait en

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1 tête ces parties-là, car tout Bihac, c'était tout simplement pas possible

2 car la majorité était habitée --la majorité de la population était

3 musulmane et le président était musulman.

4 Q. Mais si on regarde ces documents où on énumère ces neuf municipalités,

5 on a l'impression que votre président écrit aux noms de ces municipalités ?

6 R. Mais oui. C'est bien le contenu de son message. C'est le message qu'il

7 envoie aux autorités serbes. Il le dit, officiellement, représenter ces

8 neuf municipalités.

9 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Me Cunningham, Monsieur le Témoin, je

10 pense qu'il est plus exact -- juste de dire, de noter qu'avant le nom de

11 Novakovic, on voit aussi un terme "coordinateur", et ceci se réfère à la

12 façon qui était celle de M. Novakovic, sans doute. Vous pouvez dire, par

13 exemple, que vous vous nommez vous-même en tant que représentant mais pas

14 en tant que coordinateur. Et car, dans le sens même de coordinateur,

15 implique une certaine interactivité et la décision de l'assemblée

16 municipale est mentionnée ici. Est-ce que M. Novakovic était un

17 coordinateur ? Est-ce qu'il y avait une organisation de ces différentes

18 assemblées municipales et le SDS ? Est-ce que vous savez s'il existait une

19 décision nommant M. Novakovic au poste de coordinateur ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Et bien justement, pour autant que je le

21 sache, à aucun moment, M. Novakovic n'a été nommé au poste de représentant

22 en quoi que ce soit de ces municipalités, d'un. Et de deux, ces

23 municipalités n'ont jamais participé à une assemblée des municipalités,

24 sauf peut-être dans le cadre de la RAK Krajina, mais là il s'agit d'une

25 région beaucoup plus vaste et d'une sécession beaucoup plus large. Donc

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1 moi, je pense que ce qui figure dans le paragraphe 2 de la lettre, et bien

2 c'est le but de cette lettre, à savoir, se procurer des armes. C'était son

3 objectif.

4 M. CUNNINGHAM : [interprétation]

5 Q. Donc, vous dites que sur la base de circonstances qui prévalaient à

6 l'époque, vous ne pensiez pas qu'il avait consulté deux ou même trois

7 municipalités. Mais est-ce qu'en même temps, en examinant ces documents,

8 est-ce que vous nous dites qu'il parle, qu'il s'exprime au nom de toutes

9 les municipalités, des neufs municipalités ?

10 R. Je n'ai pas dit qu'il n'a pas communiqué avec eux. Il pouvait rentrer

11 en contact avec eux mais je ne pense pas que du point de vue officiel, on

12 l'a nommé au poste de représentant. Peut-être qu'ils l'ont fait -- l'ont-

13 ils fait de façon inofficielle [sic], par téléphone. Mais je ne suis pas au

14 courant de l'existence d'une telle unité organisationnelle, tout au moins,

15 formellement. Peut-être qu'il a agi de son propre gré, tout simplement, sur

16 sa propre initiative, c'est-à-dire sans avoir obtenu au préalable des

17 décisions nécessaires pour élaborer un tel document.

18 Q. Là, je suis un peu confus car vous avez dit :

19 "Je ne pense pas qu'il n'a pas communiqué avec eux, qu'il n'a pas eu de

20 communications avec eux et il pouvait rentrer en contact avec eux."

21 Alors que la semaine dernière dans votre déclaration vous avez dit :

22 "Je ne pense pas qu'il était en mesure de rentrer en contact avec le

23 président dans si peu de temps."

24 Et vous avez donné, cité l'exemple de Bihac, de Sipovo. Alors qu'est-ce que

25 vous voulez dire exactement ? Est-ce qu'il pouvait communiquer, rentrer en

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1 contact avec eux ou non ?

2 R. Quand j'ai dit qu'il pourrait rentrer en contact avec eux, je vous fais

3 une observation générale mais je ne pense pas qu'il ait pu s'entretenir

4 avec eux au sujet de cette lettre-là, à vue les données. Tout simplement,

5 il n'y avait pas assez de temps pour le consulter à ce sujet, car je

6 connaissais très bien sa raison, les raisons immédiates qui le poussaient à

7 écrire cette lettre.

8 Q. Très bien. Et je vous remercie de m'avoir aidé. A présent, je vais vous

9 demander d'examiner la pièce P229. Et je vais vous rappeler pendant que

10 l'huissier vous apporte la pièce, qu'il s'agit- là d'une pièce qui porte

11 les conclusions lors de la réunion de la sous région des municipalités --

12 comportant différentes municipalités en liste. On donne la liste des

13 municipalités et Bosanski Petrovac en fait partie. Est-ce que vous vous

14 souvenez de ce document ?

15 R. Oui.

16 Q. Et juste pour résumer, je pense que la semaine dernière, vous avez dit

17 que vous pensiez avoir été envoyé à cette réunion par courtoisie car votre

18 président avait été invité. Et vous vous souvenez ne pas avoir pris

19 beaucoup de notes. Vous vous souvenez de ne pas avoir lu ces conclusions,

20 ne pas avoir entendu ces conclusions et vous avez dit que vous pensiez que

21 ces conclusions ont été adoptées de façon arbitraire après coup. Et vous

22 avez dit vendredi dernier :

23 "Je pense que ceci a été fait dans une des municipalités. A la fin de la

24 réunion et peut-être se sont-ils mis d'accord de façon informelle que

25 quelqu'un devrait rédiger ce document et l'envoyer aux autorités

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1 pertinentes. Quelle que soit la personne qui a écrit ce document, elle l'a

2 écrit de façon arbitraire."

3 Donc, si on regarde ce document, et bien on voit qu'il y a pas mal de

4 conclusions, beaucoup de conclusions différentes qui figurent dans ce

5 document.

6 R. Oui. Il y a sept paragraphes dans ce document.

7 Q. Très bien. Et si nous regardons la conclusion numéro 6, et bien, il

8 s'agit-là du paragraphe qui concerne le déplacement des Musulmans et des

9 Croates en dehors de la municipalité ou des municipalités. Vous n'avez pas

10 besoin de la lire. C'était juste pour savoir si on est sûr de parler de la

11 même chose.

12 R. Paragraphe numéro 2, on parle de la percée du corridor.

13 Q. Non, non, non. Je parle du 6e paragraphe, avant dernier paragraphe.

14 R. Oui. Je vous écoute.

15 Q. Et donc là, ici on parle du déplacement enfin du -- de la nécessité de

16 faire partir les Croates et les Musulmans ?

17 R. Oui, c'est exact.

18 Q. Et donc ici, il est dit que les sept municipalités de la sous région

19 sont d'accord pour dire que les Musulmans et les Croates devraient partir

20 jusqu'à ce qu'un certain quota reste ou soit atteint ?

21 R. Si vous êtes en train de citer, si vous voulez citer de façon exacte la

22 teneur de ce document, pour autant que je puisse me souvenir ça n'a jamais

23 été discuté de cette façon. C'est un des éléments sur lesquels j'ai basé ma

24 conclusion lorsque j'ai dit qu'il s'agit-là de conclusions arbitraires

25 parce que cette conclusion ne pouvait pas être mise en œuvre.

Page 20256

1 Q. Tel que ce document se présente, il semble qu'il s'agisse d'une

2 conclusion en vertu de laquelle les représentants de votre municipalité se

3 sont associés à cela, est-ce exact ?

4 R. Cette conclusion n'a jamais été mise aux voix. J'étais à cette séance

5 et je sais qu'il n'y a jamais eu de vote sur cette question. C'était une

6 séance officieuse et pour autant que je puisse me rappeler, il a été

7 convenu que personne n'écrirait de conclusions à ce sujet. Et j'ai dit que

8 ceci avait été -- eu lieu dans la municipalité de Sanski Most. On pouvait

9 en déduire -- on pouvait déduire cela d'après le tampon, le sceau, donc

10 sous le point de vue -- sur le point administratif je crois --

11 Q. Je crois que nous sommes d'accord sur le même point. Si nous regardons

12 ce document, ce qu'il y a dans ce document, de votre main, c'est tout à

13 fait différent, c'est radicalement différent de la réalité ou de ce qui

14 s'est effectivement passé lors de cette réunion, n'est-ce pas ? Est-ce bien

15 cela ?

16 R. Ce que le document dit, je ne peux pas me rappeler l'ensemble de la

17 séance et quel tournant elle a pris. Mais ce que ce document dit est

18 fondamentalement différent de ce qui se déroulait dans notre secteur, là où

19 nous étions.

20 Q. Et si nous lisons ce document, si on devait lire ce document sans

21 savoir véritablement ce qui s'est passé à cette séance ou dans votre

22 municipalité, quelqu'un pourrait tirer une conclusion erronée selon

23 laquelle quelqu'un parmi les représentants de Bosanski Petrovac était en

24 faveur du déplacement de l'expulsion des Musulmans et des Croates de cette

25 municipalité. En regardant simplement le texte, sans avoir la possibilité

Page 20257

1 de savoir ce qui s'est véritablement passé à la séance et quelle a été la

2 réalité dans votre municipalité.

3 R. Oui, vous avez raison.

4 Q. Parce que nous savons d'après votre déposition et, par exemple en ce

5 qui concerne M. Latinovic, qui avait rendu compte de cette séance à la

6 cellule de Crise, que telle était la position que vos représentants, votre

7 municipalité avait prise, n'est-ce pas ?

8 Est-ce que ceci est bien exact ?

9 R. Oui, oui, ça l'est.

10 Q. Je n'avais pas simplement entendu votre réponse, excusez-moi. Bon, j'en

11 ai fini avec cette pièce à conviction, si vous voulez, s'il vous plaît la

12 rendre à l'huissier.

13 M. CUNNINGHAM : [interprétation] Merci, Monsieur l'Huissier.

14 Q. Je vais maintenant vous poser, Monsieur le Témoin, quelques questions,

15 d'ordre général, et Monsieur l'Huissier, la pièce à conviction suivante

16 sera P1825. Et pendant que l'huissier vous procure cette pièce à

17 conviction, je voudrais que vous ayez cette pièce devant vous. Je vais vous

18 poser quelques questions en ce qui concerne le droit administratif et votre

19 formation pour ce qui est des questions administratives parce que j'ai

20 écouté votre déposition et j'ai regardé la manière dont vous examinez un

21 document. Et je peux dire que vous utilisez donc vos connaissances et votre

22 formation à ce sujet. Le document que vous avez devant vous est la pièce

23 1825, et vous nous avez parlé de ce document, pièce 1825, et dans le

24 contexte de -- enfin lorsque vous avez parlé de la teneur de documents de

25 ce genre. Je relève dans mes notes que vous avez dit dans votre déposition,

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1 si un document de ce genre et je m'en sers uniquement comme exemple, porte

2 comme notation "vous avez pour instructions de" avec une conclusion, ceci

3 veut dire -- ce type de terminologie veut dire qu'il s'agit d'un ordre, est

4 obligatoire. C'est exact ?

5 R. Oui. Fondamentalement, bien que ce terme a -- parfois était utilisé

6 uniquement pour renforcer -- réaffirmer la position de cet organe.

7 Q. Et je pense que vous nous avez dit que, si un document de ce genre

8 contentait des termes tels que, "demande", "requière" ou "recommande", ou

9 des termes de ce genre, ce n'est pas considéré comme un ordre d'ordonnance,

10 n'est-ce pas ?

11 R. C'est exact.

12 Q. Et à ce moment-là, vous aviez dit quelque chose dans le contexte de

13 cette déposition et je présente mes excuses à l'Accusation du fait que je

14 n'ai pas la référence précise dans le compte rendu, mais d'après mes notes,

15 on voit que l'expression, "ont reçu pour instruction de" ou "reçoivent pour

16 instruction", est utilisée de façon générale, je vais essayer de vous le

17 retrouver. Cette expression, "ont reçu pour instruction" ou "reçoivent pour

18 instruction de", doive être utilisée lorsqu'un organe, qui émet cet

19 ordonnance, n'a pas de raisons ou de motifs juridiques d'émettre un tel

20 ordre, est en fait en train d'essayer de s'approprier davantage de pouvoir

21 ou de compétence, qu'il en aurait normalement de par la loi.

22 Mme KORNER : [interprétation] Excusez-moi, mais est-ce que vous pourriez me

23 donner une idée quelconque de l'endroit où ceci figure au compte rendu ?

24 M. CUNNINGHAM : [interprétation] Si vous voulez me donner une seconde, je

25 vais regarder dans le brouillon de mes notes. Madame Korner, je n'arrive

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1 pas à le trouver pour le moment, mais je vais peut-être, si vous le

2 permettez, de progresser parce qu'il semble que je vais déborder au-delà du

3 lundi -- excusez-moi, jusqu'à demain mardi, et donc, je voudrais passer à

4 une question différente. On y reviendra parce que je pense qu'il est juste

5 à l'égard du témoin de citer ses paroles exactes.

6 Q. Je vais maintenant vous parler des cellules de Crise, parce que vous

7 étiez sur le point --

8 Mme KORNER : [interprétation] Excusez-moi, Maître Cunningham, en fait, j'ai

9 trouvé le passage. Il se trouve en fait à la page 49 de ma version du

10 compte rendu.

11 M. CUNNINGHAM : [interprétation] Je prends le compte à la date du jeudi,

12 c'est bien cela ?

13 Mme KORNER : [interprétation] Jeudi, oui.

14 M. CUNNINGHAM : [interprétation] Bien.

15 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] C'était dans la première partie de la

16 déposition du témoin.

17 M. CUNNINGHAM : [interprétation] Bien. Excusez-moi pour le temps qu'il m'a

18 fallut pour le retrouver. Je présente mes excuses à l'Accusation et à la

19 Chambre.

20 Q. Bon, alors voilà ce que vous avez dit, je lis ce que vous

21 -- ce qui est écrit au compte rendu de jeudi dernier. On commencera à la

22 ligne 12. On vous a posé la question :

23 " Est-ce qu'il y avait une différence entre une demande telle que formulée

24 et une instruction ?"

25 Et votre réponse que je cite maintenant :

Page 20260

1 "Oui, il y avait une différence, et on utilisait le terme 'reçoivent pour

2 instruction ou pour ordre,' cela veut dire qu'il s'agit d'un ordre. Mais,

3 si on utilise d'autres termes tels que "sont appelés à", alors il s'agit de

4 plus qu'une recommandation et d'une demande qui n'a pas essentiellement à

5 être appliquée. Mais, si on lisait 'reçoivent pour instruction de', alors,

6 ceci veut dire qu'il s'agit d'un ordre, même si l'expression 'reçoivent

7 pour instruction de' est utilisée d'une façon générale lorsque l'organe

8 qu'il a émit n'a pas de base juridique pour y mettre un ordre de ce genre.

9 Il est en fait en train d'essayer de s'approprier davantage de pouvoir

10 qu'il en a normalement d'après la loi."

11 Et c'est dans cette dernière partie que -- c'est cette dernière partie que

12 je veux passer, utilisation d'expression "reçoivent pour instruction de"

13 utilisée lorsque l'organe qui émet ces instructions n'a pas de bases

14 juridiques pour émettre un tel ordre et, en fait, essayer de s'approprier

15 davantage de pouvoir qu'il ne leur reconnaît la loi. Qu'est-ce que vous

16 voulez dire par cela ?

17 R. En résumé, c'était une pratique qui existait dans notre temps, disant,

18 par exemple, que ce que je voulais dire, si je prends un exemple avec la

19 police, le poste de Sécurité publique reçoit pour instruction différents

20 endroits, tel et tels endroits, et à ce moment-là, le poste de police qu'il

21 soit encore sous l'administration de Bihac ou non, je n'en suis pas très

22 sûr. Je crois que c'était le cas, mais c'était également par rapport à la

23 création autonome de la Krajina, c'était probablement au moment de la phase

24 de transition, le contrôle effectif au niveau le plus élevé. Il est

25 probable que personne ne l'avait ni Bihac, ni --

Page 20261

1 L'INTERPRÈTE : Illisible.

2 R. -- pour cette raison, donc les organes municipaux utilisent cette

3 terminologie de "pour instructions" et, en fait, ils sont en train de leur

4 dire de faire cela. Et je dois dire que de leur dire de façon explicite, je

5 crois que c'était, soit en 1988 ou 1989, la municipalité était en fait

6 compétente pour diriger la police locale, et il y avait ce type d'inertie,

7 ce sentiment de la police que lorsqu'un tel terme était utilisé, on

8 s'attendait à ce que la police accepterait et appliquerait ce qui était

9 demandé, exécuterait ce qui était demandé.

10 Q. Alors, je voudrais maintenant changer de sujet un peu, parce que je

11 voudrais parler avec vous des cellules de Crise et je voudrais faire appel

12 à votre expérience. Tout d'abord, au sein de la cellule de Crise

13 municipale, en tant que participant ou consultant. Et deuxièmement, tant

14 qu'observateur de la cellule de Crise de la RAK. Pour commencer, en ce qui

15 concerne la cellule de Crise municipale, lorsque des conclusions, et des

16 décisions étaient atteintes, est-ce que c'était à la suite d'un vote ?

17 R. Fondamentalement, je ne me rappelle pratiquement pas le très petit

18 nombre de cas dans lesquels, il y avait eu officiellement un vote. S'il

19 arrivait qu'une personne ou plusieurs personnes se déclarent explicitement

20 contre une proposition, elle était considérée, qu'elle était adoptée. A ce

21 moment-là, la personne qui présidait disait : est-ce que nous pouvons

22 poursuivre ? Et je disais oui. Et quelqu'un disait, à ce moment-là, qu'ils

23 étaient contre, quelqu'un d'autre. Il disait qu'ils étaient pour et c'est

24 ainsi que ça figure au compte rendu, mais, brièvement, on me suggérait

25 comment la conclusion devait être rédigée, de sorte que c'est très

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1 rarement, qu'il ait eu un vote officiel avec les votes à main levée.

2 Q. Bien, et alors que vous preniez des notes pour le compte rendu. Je

3 comprends que c'est à cause de votre formation et votre expérience en droit

4 administrative, vous faisiez très attention de vous assurer que le compte

5 rendu reflétait bien ce qui s'était passé pendant la séance de la cellule

6 de Crise, n'est-ce pas ?

7 R. Oui. Chaque fois que je faisais le compte rendu à la séance suivante,

8 on examinait ce compte rendu pour vérifier ce qui était noté et c'est pour

9 ça que j'essayais toujours d'enregistrer ce qui s'était passé de façon

10 aussi exacte que possible, de façon à ce qu'il n'y est pas d'objection.

11 Q. Bien, alors, maintenant basé sur vos souvenirs de nombreuses années

12 plus tard, est-ce que vous vous rappelez si quelqu'un à la cellule de Crise

13 de Bosanski Petrovac, ce n'est jamais opposé de façon officielle à une

14 décision ou à une conclusion prise par la cellule de Crise ?

15 R. Bien, il y a eu des cas, plusieurs cas dans lesquels certains membres

16 n'étaient pas d'accord avec la proposition qui était faite et souvent de

17 telles propositions n'étaient pas adoptées, et on adoptait quelque chose

18 d'autre et ainsi de suite. Mais, il est normal que de telles choses se

19 soient produites, et c'était bien le cas.

20 Q. Vous avez parlé de façon assez importante au sujet des pressions qui

21 étaient exercées sur votre cellule de Crise par les militaires et d'autres

22 sources. Est-ce que vous savez si les pressions, qui étaient exercées,

23 empêchaient les membres de la cellule de Crise de présenter leur opinion,

24 telle quelle était la leur, étant donné que du point de vue politique, cela

25 n'aurait pas été adéquat pour révéler quelles étaient leurs réelles

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1 opinions et de consigner cela dans le procès-verbal.

2 R. Lorsque nous parlons de la pression exercée sur la cellule de Crise, il

3 faut comprendre que cette pression était exercée sur les personnes qui

4 exécutaient leurs taches. Il s'agissait de membres désignés d'office pour

5 la cellule de Crise parmi les membres qui provenaient de l'extérieur.

6 S'agissant à présent de votre question, d'une manière générale, une telle

7 pression avait une influence sur le processus de prise de décision, d'une

8 manière générale. Ces cas de pression avaient des répercussions sur le

9 processus de prise de décisions. En fait, il était devenu impossible pour

10 les membres de la cellule de Crise de s'opposer en public à certaines

11 décisions et, en fait, il s'agissait là de faits qui étaient tout à fait

12 précis. Il ne s'agissait pas simplement du fait qu'ils s'exposaient à des

13 risques du point de vue politique, mais pour des raisons de sécurité. Il ne

14 s'agissait pas d'adopter une telle position. Cela n'était pas recommandé.

15 Q. Vous avez parlé d'une manière très vague des questions de sécurité et

16 vous avez précisé que, pour assurer votre propre sécurité, ces personnes ne

17 pouvaient pas adopter une telle position en public, étant donné qu'elles

18 s'exposaient à un risque, n'est-ce pas ?

19 R. C'est exact.

20 Q. J'aimerais à présent parler de votre expérience personnelle avec la RAK

21 et, plus particulièrement, sa cellule de Crise. Je crois que vous étiez

22 présent lors d'une ou de deux séances de la cellule de Crise. Est-ce que

23 vous en aviez un souvenir ?

24 R. C'est exact.

25 Q. Et alors que vous faisiez attention à vos fonctions, à savoir que vous

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1 veilliez à ce que les compte rendus soient consignés de façon adéquate

2 conformément à la procédure, avez-vous eu l'impression, d'après ce que vous

3 avez pu voir, lorsque vous avez assisté aux deux séances de la RAK, que les

4 personnes faisaient preuve de tant d'attention que vous-même lorsqu'elles

5 consignaient ces procès-verbaux ?

6 R. Je ne peux pas me prononcer au sujet des procès-verbaux qui étaient

7 dressés à l'époque. Je ne connaissais pas le mécanisme qui était en place,

8 mais dans ma déclaration j'ai dis que, d'une manière générale, j'avais

9 l'impression que, du point de vue administratif, les choses ne

10 fonctionnaient pas correctement. C'était là mon impression personnelle. Je

11 ne peux pas me prononcer au sujet de faits particuliers, mais il me semble,

12 pour ma part, qu'il ne s'agissait pas d'items qui étaient consignés de

13 façon adéquate. Ainsi, je ne pense pas que l'appareil juridique était

14 intervenu, du moins c'était là mon impression.

15 Q. Et lorsque vous avez assisté à ces séances de la cellule de Crise de la

16 RAK, avez-vous eu l'impression que ces séances étaient quelque peu

17 chaotiques ou est-ce que l'on suivait une procédure ? Pouvez-vous nous en

18 faire une description très brève, je vous prie ?

19 R. D'après ce que j'ai pu voir sur place, les choses se déroulaient

20 conformément à la procédure qui était en place. Toutefois, je dois dire que

21 je n'étais pas un observateur très attentif. Je ne m'occupais que de

22 domaines très importants que je transmettais au président. Et j'essayais

23 également de participer aux séances lorsque d'autres sujets étaient

24 abordés. Par conséquent, je dois vous dire que je n'étais pas un

25 observateur attentif, mais je me souviens que, d'une manière générale, les

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1 choses se déroulaient conformément au mode opératoire. Et je ne sais pas si

2 les séances étaient enregistrées sur bande ou non. Et je ne sais pas si mon

3 impression était correcte. En fait, je n'ai assisté à de telles séances

4 qu'à deux reprises.

5 Q. Je comprends tout à fait ce que vous avez voulu dire lorsque vous avez

6 dit que vous n'étiez pas un observateur très attentif. Plus -- de plus,

7 depuis lors, plusieurs années se sont écoulées, mais est-ce que vous vous

8 souvenez avoir participé à une séance de la cellule de Crise de la RAK

9 lorsqu'on a procédé à un vote ?

10 R. Je pense que lors d'une séance il y avait eu recours à un vote, mais il

11 me semble que -- je n'arrive pas à vous dire quelle était les dates, mais

12 je sais que cela a eu lieu.

13 Q. Je ne suis pas intéressé par les détails à savoir quelle était la

14 question et qui avait été en faveur ou non, mais est-ce que vous vous

15 souvenez quelle était la conclusion générale qui a été adoptée sur la base

16 du vote majoritaire ? Pouvez-vous nous dire quelque chose à ce sujet ?

17 Avez-vous le moindre souvenir de cela ?

18 R. Pour autant que je me souvienne, lors d'une des séances, je ne me

19 souviens plus de laquelle, et je ne sais même pas si j'étais présent, mais

20 pour autant que je m'en souvienne, en effet il y a eu un vote officiel. Si

21 vous parlez de la procédure officielle, je ne sais pas si tout le monde a

22 participé à ce vote parce que je pense qu'il y avait deux ou trois

23 personnes qui étaient, comme moi, qui étaient présentes, mais qui n'avaient

24 pas le droit de voter, qui occupaient un rôle d'observateur en quelque

25 sorte, de sténotypiste. Mais je pense que certaines personnes ont pris part

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1 à ce processus de vote, mais je ne sais pas si c'était la majorité des

2 membres ou non. Je ne faisais pas attention.

3 Et si vous me le permettez, j'aimerais ajouter quelque chose. Lors de cette

4 séance, j'avais reçu le journal officiel du peuple serbe en Bosnie-

5 Herzégovine. Et j'ai constaté que ce texte avait été très mal libellé.

6 C'est l'impression qui dominait, du moins pour ma part, à l'époque. Et pour

7 être tout à fait honnête, je lisais le journal au cours de cette séance, et

8 je me suis dit que, si l'on pouvait publier un tel journal officiel, nul

9 besoin de prendre la parole, c'est la raison pour laquelle je n'ai pas fait

10 attention au sujet des détails. Ce n'est que vers la fin que j'ai demandé à

11 prendre la parole. Je me suis présenté et j'ai dit que le journal officiel

12 ne peut pas être rédigé de cette sorte.

13 Q. Et si nous allons un peu en avant, que s'est-il passé à ce moment-là ?

14 Est-ce que les personnes de la cellule de Crise vous ont regardé en l'air

15 de dire : mais de qui s'agit-il ? De quoi parle-t-il ? En fait, ces

16 personnes ne vous ont pas répondu, n'est-ce pas ?

17 R. Je me suis présenté. Par conséquent, elles savaient qui j'étais. Elles

18 savaient que je n'étais pas un membre, suite à la manière dont je m'étais

19 présenté. Toutefois, mon impression, pour ma part, était que leur réaction

20 était la suivante, à savoir, mais qu'est-ce qui lui arrive à ce type ? Je

21 savais quelle allait être leur réaction, mais je ne voulais pas me taire

22 parce que je pense, pour ma part, que le journal officiel doit être rédigé

23 de façon adéquate.

24 Q. Une fois de plus, reconnaissant le fait que vous ne vous rappelez pas

25 de tous les événements, puisque vous étiez en train de lire le journal à

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1 l'époque, je voudrais vous poser une dernière question au sujet de la

2 procédure de vote. Vous souvenez-vous si les représentants, les présidents

3 des municipalités qui étaient présents, est-ce que vous vous souvenez si,

4 oui ou non, ils ont pris part au vote ?

5 R. Je ne me souviens pas de cela. Je ne connaissais que quelques personnes

6 parmi les membres. Je me suis présenté dans cette salle alors que la

7 réunion avait déjà débuté. Je me suis assis tout au fond, seul, dans une

8 salle qui était assez grande -- plus ou moins aussi grande celle de ce

9 prétoire. La forme était un peu différente peut-être de cette pièce. Mais

10 je crois que le mode opératoire précisait si les présidents des assemblées

11 municipales avaient ou devraient avoir le droit de prendre part au vote. Et

12 je pense qu'il jouissait d'un tel droit, mais je ne suis pas certain, mais

13 d'après le règlement, il devait avoir le droit au vote.

14 Q. Je vais commencer à vous parler d'un certain nombre de pièces à

15 conviction et la première pièce concerne la pièce numéro 22.

16 M. CUNNINGHAM : [interprétation] Par conséquent, avec l'aide de l'Huissier,

17 pourrions nous mettre ce document à la disposition du témoin.

18 Q. En fait, il s'agit d'un télex qui présente 14 points. Ce télex a été

19 adressé à quelqu'un. Nous avons déjà examiné sa teneur la semaine dernière.

20 Je voudrais simplement vous inviter à jeter un coup d'œil afin de vous

21 rafraîchir la mémoire et puis je vais vous poser un certain nombre de

22 questions au sujet de ce document. Veuillez simplement me faire signe

23 lorsque vous savez de quoi il s'agit afin que je puisse vous poser des

24 questions.

25 R. Vous pouvez commencer.

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1 Q. Si nous nous penchons sur ce document, on voit qu'il émane de M.

2 Brdjanin, n'est-ce pas exact ?

3 R. M. Brdjanin a signé. On voit son nom y apparaître, mais je ne sais pas

4 qui a élaboré ce document.

5 Q. Et vous ne savez pas, non plus, qui a autorisé ce document, n'est-ce

6 pas ?

7 R. En fait, il est impossible de savoir, mais on voit, en fait, que ce

8 document émane de la région autonome de la Krajina.

9 Q. Et au fait, on voit une liste de 14 directives ou d'instructions qui

10 sont adressées à la municipalité, n'est-ce pas exact ?

11 R. C'est exact.

12 Q. Et on vous a demandé, lors de votre déclaration qui a été enregistrée,

13 de déterminer quelle de ces 14 directives a été traduite dans les faits.

14 Est-ce que vous vous souvenez de cela ?

15 R. Je m'en souviens. D'après mes souvenirs, j'ai même répondu quelles

16 étaient les directives qui ont été traduites dans les faits et lesquelles

17 ne l'ont pas été.

18 Q. Et en fait, vous avez dit que pour la plupart d'entre elles, aucune

19 n'avait été appliquée, si ce n'est le numéro 1, qui a été appliqué pendant

20 une semaine, et le numéro 7, qu'il s'agissait là, en fait, du mutage que la

21 municipalité effectuait déjà avant l'émission de ce document, n'est-ce pas

22 exact ?

23 R. Je ne peux pas avoir dit que le numéro 1 avait été appliqué puisqu'il y

24 avait un conflit déjà, à ce moment-là, avec le commandement militaire. Il y

25 avait en fait -- il existait en fait un devoir au niveau des organes

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1 municipaux du gouvernement. Peut-être que c'est cela qui explique le

2 malentendu. Mais s'agissant du numéro 7, c'est exact. Ceci avait été fait

3 bien auparavant et tout au long de la guerre.

4 M. CUNNINGHAM : [interprétation] Je vais commencer à aborder un point plus

5 précis de ce document.

6 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci, Maître Cunningham. Nous

7 reprendrons notre séance demain matin, à 9 heures, dans ce même prétoire.

8 Mme KORNER : [interprétation] Si vous me le permettez, Monsieur le

9 Président, j'aimerais prendre un moment. Je voudrais simplement savoir si

10 le Juge de la Chambre de première instance allait statuer au sujet de la

11 requête présentée par Me Ackerman.

12 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Non. En fait, nous étions convenu que

13 Me Ackerman allait passer le week-end à réfléchir aux choses que j'avais

14 dites et que nous allions nous donner une semaine pour réfléchir à cette

15 question. Et je l'avais invité, à ce moment-là, à présenter une réponse au

16 début de la semaine. Il avait proposé mardi, étant donné qu'il n'était pas

17 là lundi.

18 Mme KORNER : [interprétation] Je pensais que vous lui aviez donné deux

19 semaines.

20 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Non. Non. Non. En fait, je lui ai dit

21 que je vous donnais une semaine si vous nous donniez une semaine. Par

22 conséquent, normalement, il devrait nous donner une réponse demain.

23 M. CUNNINGHAM : [interprétation] [aucune interprétation]

24 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Est-ce que nous pouvons faire sortir le

25 témoin.

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1 M. CUNNINGHAM : [interprétation] Simplement pour que les Juges de la

2 Chambre de première instance et le conseil de l'Accusation en soit informé,

3 je crois que j'aurai encore besoin d'une heure et quinze minutes, ceci afin

4 que les dispositions logistiques puissent être prises.

5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Peut-être que Mme Korner pourrait

6 établir une liaison avec M. Resch à ce sujet.

7 Mme KORNER : [interprétation] J'aurais des questions supplémentaires. Je ne

8 sais pas si vous vous en aurez.

9 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je pense que tel sera le cas.

10 Mme KORNER : [interprétation] Fort bien. Par conséquent, nous pensons que

11 le prochain témoin se présentera après la première suspension de

12 l'audience.

13 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Fort bien.

14 [Le témoin se retire]

15 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] A demain.

16 --- L'audience est levée à 13 heures 46 et reprendra le mardi 29 juillet

17 2003, à 9 heures.

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