Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 1er juillet 2009

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusée est introduite dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 05.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour à tous.

  6   Madame la Greffière, voulez-vous citer l'affaire, s'il vous plaît.

  7   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Il

  8   s'agit de l'affaire IT-02-54-R77.5-T, dans la procédure ouverte contre

  9   Florence Hartmann.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 11   Est-ce que nous pourrions avoir les comparutions pour aujourd'hui, en

 12   commençant par l'Accusation.

 13   M. MacFARLANE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Messieurs

 14   les Juges.

 15   Je représente l'Accusation et j'ai Lori Ann Wanlin qui est à ma droite.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur MacFarlane.

 17   Et pour le Défense.

 18   M. KHAN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs les

 19   Juges.

 20   Je m'appelle Karim Khan, et avec moi j'ai Guenal Mettraux et Samrina

 21   Mohamed. Nous représentons Mme Hartmann.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup, Maître Khan.

 23   Est-ce que vous pouvez faire entrer le témoin dans le prétoire, merci.

 24   [Le témoin vient à la barre]

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour, Madame Kandic.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Etant donné que nous avons une pause

 28   assez longue dans notre procès, j'aimerais que vous relisiez la déclaration

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  1   solennelle.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  3   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  4   LE TÉMOIN : NATASA KANDIC [Reprise]

  5   [Le témoin répond par l'interprète]

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

  7   Monsieur MacFarlane.

  8   M. MacFARLANE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  9   Contre-interrogatoire par M. MacFarlane : [Suite]

 10   Q.  [interprétation] Madame Kandic, j'aimerais parler d'un certain point,

 11   mais avant de faire cela je voudrais savoir s'il y a des documents qui ont

 12   été présentés par la Défense. Dans le mémoire, il est mentionné que vous

 13   êtes une militante des droits de l'homme et j'aimerais savoir si vous êtes

 14   d'accord avec cette définition, et si tel est le cas, qu'est-ce que cela

 15   signifie ?

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui.

 17   M. METTRAUX : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais savoir si

 18   M. MacFarlane pourrait faire référence au passage ou à la référence exacte.

 19   Je n'ai pas souvenance d'avoir utilisé le terme de militante.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous pouvez faire la

 21   citation.

 22   M. MacFARLANE : [interprétation] C'est dans le document qui a été soumis le

 23   15 janvier. Je ne suis pas en mesure de vous donner la page, mais je le

 24   ferai un peu plus tard dans la matinée si cela vous cause un problème. Mais

 25   le témoin peut peut-être prendre note de cette question et nous y

 26   reviendrons un peu plus tard.

 27   Q.  Durant votre déposition, Madame Kandic, vous avez fait référence au

 28   fait qu'il y avait un certain nombre de communiqués de presse ainsi que de

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  1   débat public en ce qui concerne les notes, le compte rendu et les

  2   décisions. J'aimerais vous poser une série de question qui, je l'espère,

  3   nous permettrons de mieux comprendre la chronologie des événements et les

  4   points qui ont été abordés. Je voudrais donc parler des rapports de presse

  5   ainsi que du débat public.

  6   Est-ce que vous pourriez être plus précise quant à ce qui a été

  7   abordé et discuté durant cette période, c'est-à-dire avant que le livre ne

  8   soit publié ?

  9   R.  Bien, j'ai avec moi un article de presse qui montre que même ceux

 10   qui faisaient partie de l'équipe juridique de la Serbie ont parlé

 11   publiquement du compte rendu des discussions du Conseil de la Défense

 12   suprême. Il s'agit du rapport de la radio B92 --

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que les témoins sont autorisés

 14   à amener des documents et à les lire devant ce Tribunal, à moins que ce

 15   soit des témoins experts ?

 16   M. MacFARLANE : [interprétation] Si ceci permet de rafraîchir la mémoire du

 17   témoin, je n'ai aucun problème avec cela, mais je ne sais pas si c'est

 18   approprié de lire de longs passages de ce document. Ce n'est pas mon témoin

 19   puisque je procède au contre-interrogatoire.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, je suis tout à fait conscient de

 21   cela. Je suis surpris que vous n'ayez pas d'objection à ce qu'elle soit

 22   venue avec des documents.

 23   M. MacFARLANE : [interprétation] Je pensais que ceci serait utilisé pour

 24   rafraîchir la mémoire du témoin, mais si cela va plus loin, bien sûr, dans

 25   ce cas-là, j'aurai des préoccupations.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous avez quelque chose à

 27   rajouter, Maître Mettraux ?

 28   M. METTRAUX : [interprétation] Pas en particulier. Mais tout d'abord, nous

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  1   voulions nous excuser auprès de notre éminent collègue. Nous avons

  2   identifié le paragraphe. Il est mentionné dans ce paragraphe que Mme Kandic

  3   est une militante très connue dans le domaine des droits de l'homme. Donc

  4   nous nous excusons auprès de notre éminent collègue.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je suis sûr que M. MacFarlane reposera

  6   cette question.

  7   Vous pouvez continuer, Monsieur MacFarlane, si vous n'avez pas d'objection.

  8   M. MacFARLANE : [interprétation]

  9   Q.  Madame Kandic, est-ce que vous pourriez nous donner plus de détails sur

 10   les articles de presse, sans nécessairement les lire. Mais j'aimerais, par

 11   le biais de vos réponses, mieux comprendre quel a été le contenu des

 12   discussions et quel a été le contenu des articles de presse qui ont été

 13   publiés durant cette période.

 14   R.  Je pense qu'il est important que je puisse lire une phrase. Je n'ai pas

 15   besoin de ce document, parce que je connais très bien les événements, mais

 16   je pense qu'il est très important d'utiliser ce document et je pense qu'ils

 17   pourront obtenir ce document, qui pourra être mis à la disposition des

 18   autres parties.

 19   Il s'agit d'un compte rendu d'une radiodiffusion de la radio B92 --

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que ceci va être versé comme

 21   pièce au dossier ?

 22   M. KHAN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je

 23   ne peux pas répondre à cette question à l'heure actuelle. Vous pouvez, bien

 24   sûr, obtenir plus d'informations, mais étant donné que le Procureur amicus

 25   curiae n'a pas d'objection à ce que le témoin puisse se rafraîchir la

 26   mémoire et étant donné que ce document pourrait être utile pour se

 27   connaître de cette affaire, pas uniquement par les questions de

 28   l'interrogatoire principal mais également du contre-interrogatoire, je

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  1   pense qu'il serait important que le témoin puisse répondre. Si ce document

  2   s'avère pertinent, par le truchement du Procureur amicus curiae ou par le

  3   truchement de la Défense ou par votre truchement, nous pourrons peut-être

  4   verser cette pièce au dossier.

  5   Donc, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, ce que je suggère, c'est

  6   de procéder de manière constructive et de permettre au témoin de répondre à

  7   ces questions. Par la suite nous pourrons peut-être préciser les choses et

  8   voir si nous pouvons verser ce document au dossier.

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, mais une voie constructive doit

 10   également respecter les procédures.

 11   M. KHAN : [interprétation] Oui, bien sûr.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous ne pouvons pas simplement

 13   présenter les documents comme cela. Il y a des procédures pour verser des

 14   documents au dossier et les témoins ne viennent en général pas devant cette

 15   Chambre d'instance pour présenter des documents. S'il faut rafraîchir la

 16   mémoire, c'est au conseil de présenter ce document. N'est-ce pas la

 17   procédure ?

 18   M. KHAN : [interprétation] Monsieur le Président, bien sûr, dans des

 19   tribunaux nationaux c'est le cas. Je ne connais pas le contenu du document,

 20   mis à part ce qui a été mentionné par le témoin. Mais bien sûr, les règles

 21   strictes en matière de preuve ne mentionnent pas cela. En vertu de

 22   l'article 89, si ce document peut aider à se connaître de cette affaire,

 23   nous pourrons peut-être demander à ce que ce document soit versé.

 24   Mais à ce stage, je ne peux pas vous aider plus avant, mis à part les

 25   observations que je me suis efforcé de faire jusqu'à présent.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 27   Vous pouvez continuer, Monsieur MacFarlane.

 28   M. MacFARLANE : [interprétation]

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  1   Q.  Vous disiez --

  2   R.  Je dois dire que je suis une militante des droits de l'homme et que je

  3   représente des victimes de crimes de guerre devant les tribunaux. J'utilise

  4   toujours des documents, parce que je pense qu'il est très important de

  5   pouvoir confirmer mes dires ou les étayer. Ce que je souhaite dire ici, je

  6   peux le faire sans l'étayer avec ces documents, mais je peux également

  7   présenter ces documents aux Juges. Avec votre autorisation, il ne s'agit en

  8   fait que d'une phrase.

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Répondez à la question du conseil. Ne

 10   dites pas comment nous devrions gérer cette procédure.

 11   M. MacFARLANE : [interprétation]

 12   Q.  Madame Kandic, vous avez fait référence à une phrase dans ce document.

 13   Est-ce que vous pourriez lire cette phrase, s'il vous plaît.

 14   R.  Je disais que ce document date du 27 février 2007. Le journaliste de

 15   cette radio B92 interrogeait le Pr Vojin Dimitrijevic et elle disait :

 16   "Vous savez que Mme Kandic a dit publiquement, concernant ce jugement, que

 17   la Serbie n'avait pas fourni d'élément de preuve."

 18   Il a répondu :

 19   "Ce que Natasa Kandic veut dire dans certains comptes rendus des

 20   discussions et des délibérations de l'instance suprême n'ont pas été

 21   présentés comme étant des préoccupations de sécurité nationale, mais ceci

 22   porte sur le fait de savoir s'il y avait une intention d'extermination

 23   d'une communauté ethnique donnée."

 24   Je fais référence à une portion expurgée de ce compte rendu de cette

 25   réunion et je voulais simplement prouver que ceci avait fait l'objet d'une

 26   discussion publique, même si la question n'avait pas été posée directement.

 27   Ici nous avons le Pr Dimitrijevic qui en a parlé ouvertement.

 28   Q.  Je voudrais revenir au point sur lequel je voulais vous poser des

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  1   questions. Ce que je voudrais savoir c'est : avant la publication du livre

  2   de Mme Hartmann, je voudrais savoir quel a été le contenu des débats et qui

  3   a participé à ces débats ?

  4   R.  Les organisations des droits de l'homme, notamment en Serbie, ont

  5   abordé cela, elles ont parlé de l'existence de certains documents, des

  6   documents militaires auxquels le public n'aurait pas eu accès. Mais c'était

  7   de notoriété publique. Il ne s'agissait pas uniquement du soutien

  8   financier, mais également d'un autre appui direct qui avait été fourni par

  9   la Serbie à la Republika Srpska. Mais en plus, nous avions des doutes

 10   importants concernant le fait que les autorités de la Serbie avaient adopté

 11   la position consistant à dire que l'Etat devait être protégé quelle que

 12   soit l'étendue du fait que Milosevic avait transformé cet Etat en un Etat

 13   criminel. Nous avons utilisé cette plateforme publique.

 14   Q.  Est-ce que vous pourriez répondre. Vous avez dit que c'était de

 15   notoriété publique et que ceci avait fait l'objet de débats publics. Vous

 16   parlez principalement d'organisations des droits de l'homme et de personnes

 17   au sein des organisations qui avaient abordé ces différents points.

 18   R.  Vous savez, l'homme de la rue n'avait pas vraiment réfléchi en détail à

 19   cette question et l'opinion publique en Serbie pensait que la sécurité

 20   nationale, quelle que soit son interprétation, devait faire l'objet de

 21   protection. Le grand public en Serbie ne pense toujours pas que ce que le

 22   régime de Milosevic a fait n'était pas correct. Je ne peux pas parler de

 23   cette opinion publique, parce que l'opinion publique continue à penser que

 24   Milosevic a été inculpé à tort. C'est encore l'opinion très répandue en

 25   Serbie en ce qui concerne les crimes et les responsabilités attribuées à

 26   ces crimes.

 27   Q.  Donc vous voulez dire que les débats et les discussions avaient

 28   principalement lieu au sein de ces organisations des droits de l'homme ?

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  1   R.  Oui, tout à fait. Nous avons utilisé toutes les possibilités qui

  2   s'offraient à nous pour aborder ces questions publiquement. Vous

  3   retrouverez pléthore d'articles de presse et d'émissions télévisées où moi-

  4   même ou d'autres militants des droits de l'homme avons abordé cela

  5   publiquement. Bien sûr, nous en avons toujours parlé en parlant des

  6   autorités. Nous savions pertinemment qui était impliqué dans l'équipe

  7   juridique de la Serbie dans l'affaire opposant la Bosnie-Herzégovine à la

  8   Serbie. Nous savions qui faisait partie de cette équipe. Nous savions qui

  9   préparait la défense pour la Serbie. Ils écrivaient des articles dans les

 10   journaux et ils faisaient peur à la population en général en disant que si

 11   le jugement était contre la Serbie, les générations futures, c'est-à-dire

 12   nos enfants, continueraient à payer des réparations pendant des

 13   générations. Et ils ont utilisé des exemples spécifiques en disant que

 14   Jelena Santic, qui était militante des droits de l'homme et qui est décédée

 15   il y a quelques années, a été utilisée comme exemple en disant que ses amis

 16   paieraient des réparations et que ces réparations seraient perçues par les

 17   amis de Radovan Karadzic. Je vous donne simplement cet exemple pour vous

 18   montrer que tout ceci a été discuté en public.

 19   Ceux qui préparaient la défense de la Serbie et qui faisaient partie

 20   des hautes sphères politiques en Serbie, ont parlé de tout ceci très

 21   publiquement et ont préparé l'opinion publique à accepter tout ce qui

 22   serait proposé par les autorités. Et compte tenu de l'atmosphère à l'époque

 23   en Serbie, où les travaux du TPIY ne sont pas bien perçus, ceci était très

 24   bien perçu. Tout le monde était convaincu que la Serbie devait être

 25   défendue contre des chefs d'accusation de génocide et que tous les moyens

 26   devaient et pouvaient être utilisés à cette fin.

 27   Q.  Merci. Ceci porte sur les personnes qui ont abordé tout cela. Je

 28   voudrais maintenant vous demander quel a été le contenu de ces discussions

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  1   et de ces débats. Si je me souviens bien, on a parlé des comptes rendus du

  2   Conseil de Défense suprême ainsi que les notes qui étaient associées; est-

  3   ce exact ?

  4   R.  Oui. J'ai parlé du compte rendu du Conseil de Défense suprême et de ces

  5   réunions donc. Nous avons constamment fait part de nos doutes et de nos

  6   soupçons, à savoir que ces portions expurgées du compte rendu des réunions

  7   du Conseil de Défense suprême mentionnaient l'implication de la Serbie et

  8   contenaient des preuves du contrôle de la Serbie et de la coopération

  9   directe de la Serbie avec la police, l'armée et les autorités de la

 10   Republika Srpska.

 11   Je souhaiterais également ajouter que lorsque le procès a commencé en

 12   Serbie, des membres des Skorpions qui étaient accusés de l'exécution de six

 13   prisonniers musulmans à Srebrenica, j'ai représenté les victimes. En tant

 14   que représentante des victimes, j'ai eu accès à tout une série de documents

 15   qui m'ont encore plus convaincue du besoin de continuer à rappeler en

 16   public que toutes les preuves et tous les documents concernant la

 17   coopération entre la Serbie et la Republika Srpska en juillet 1995 et avant

 18   juillet 1995, donc tous ces éléments devaient être rendus publics. Il

 19   s'agissait de documents qui avaient été signés à l'époque par le ministre

 20   de la police de la Republika Srpska. Il avait signé des documents d'après

 21   lesquels il était évident que les membres de la police de la Republika

 22   Srpska étaient présents sur le territoire de la Republika Srpska en juillet

 23   1995, au moment de la mise en œuvre de ce que les autorités ont appelé

 24   "l'opération Srebrenica," c'est-à-dire l'exécution de prisonniers. Ces

 25   documents existaient, les gens le savaient, mais personne n'en a parlé en

 26   public. J'en ai parlé publiquement.

 27   Cependant, la Cour, au moment du prononcé du jugement, a accepté les

 28   arguments consistant à dire que les représentants de la Republika Srpska

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  1   avaient signé ces documents montrant la présence de la police de la

  2   République de Serbie en Republika Srpska, et ceci, pour que leurs propres

  3   combattants soient rassurés qu'ils n'étaient pas les seuls à avoir tué des

  4   prisonniers, puisque ça avait été fait en association avec le peuple de la

  5   République de Serbie.

  6   Q.  Je voudrais que vous répondiez à ma question et que vous vous

  7   concentriez sur les questions que je vous pose.

  8   Ma question suivante est la suivante : vous avez fait référence à des

  9   documents qui ont été abordés et qui ont fait l'objet de débats. J'aimerais

 10   savoir si vous avez eu connaissance de ces documents ?

 11   R.  Je n'ai parlé que des documents que j'ai vus personnellement. Je n'ai

 12   pas vu les comptes rendus des réunions du Conseil de Défense suprême à

 13   proprement parler. Je ne pouvais pas les consulter s'ils étaient en la

 14   possession des plus hautes autorités de la République de Serbie ou aux

 15   autorités militaires. Personne n'y avait accès, mais ils ont été vus par

 16   les Juges du TPIY. Je ne les ai jamais vus même si j'aimerais beaucoup les

 17   avoir vus. Et comme j'ai dit, je pense qu'il est important que le public

 18   dans son ensemble puisse voir ces documents.

 19   Q.  Vous avez déjà mentionné que vous en avez parlé publiquement et vous

 20   nous dites maintenant que vous ne les avez pas vus. Donc vous vous fiez à

 21   d'autres personnes ou à ce que vous aviez compris en fonction de

 22   spéculations qui avaient eu lieu concernant la nature des documents,

 23   puisque vous n'avez pas vu les documents; est-ce exact ?

 24   R.  Evidemment, ni moi ni d'autres militants des droits de l'homme n'ont vu

 25   les documents. Mais il y a quelques instants, j'ai cité le Pr Vojin

 26   Dimitrijevic, parce que je pense que lui avait vu les documents, puisqu'il

 27   avait participé à la préparation de la défense de la Serbie.

 28   Je voudrais réitérer ce que j'ai dit. Il a dit : Natasa Kandic parle du

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  1   compte rendu du Conseil de Défense suprême et pense que ces comptes rendus

  2   d'audience cachent des preuves concernant les intentions de la Serbie de

  3   participer à la commission de crime de génocide.

  4   Q.  Madame Kandic, vous venez juste de nous dire que des membres des

  5   organisations des droits de l'homme et que les champions de la cause des

  6   droits de l'homme n'avaient pas vu lesdits documents mais qu'ils en

  7   parlaient. Donc il y avait quand même un certain nombre de personnes qui en

  8   parlaient, qui se livraient à des conjectures à propos de la teneur de ces

  9   documents; n'est-ce pas exact ?

 10   R.  Bien, je me demande si vous comprenez mes propos.

 11   Evidemment, personne n'a jamais dit que nous parlions des procès-verbaux du

 12   Conseil de Défense suprême, parce que nous aurions eu accès à ces

 13   documents. Vous êtes en train de suggérer que moi-même, ainsi que d'autres

 14   personnes, se seraient exprimées à propos de ces documents, parce que

 15   quelqu'un nous aurait donné accès à ces documents. Non, ces documents

 16   n'étaient absolument pas du domaine public et nous savions pertinemment que

 17   ces documents n'étaient pas du domaine public. Alors je sais qu'il était

 18   important que ces documents deviennent des documents publics et c'est pour

 19   cela, chaque fois que j'ai pu en parler dans les médias, j'ai toujours dit

 20   à quel point il était capital que les autorités serbes communiquent ces

 21   documents.

 22   Mais lorsque j'ai comparu ici pour la dernière fois, j'ai mentionné que

 23   lors d'une table ronde qui avait eu lieu eu égard à la Cour Internationale

 24   de Justice à la date du 29 juin 2007, le Pr Rade Stojanovic, le chef de la

 25   délégation de l'équipe de la défense de Serbie, avait également dit à

 26   l'époque qu'il faudrait lever la confidentialité de ces documents, qu'ils

 27   devraient entrer dans le domaine public et que ces documents devaient être

 28   communiqués. Il l'a lui-même indiqué.

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  1   Mais pour répondre plus précisément à votre question, il est évident que je

  2   parle toujours de ce qui était particulièrement symptomatique. Des

  3   documents ont été dissimulés. Pourquoi est-ce que la République de la

  4   Serbie a dissimulé des documents ? Pourquoi ne pas avoir accordé un accès à

  5   ces documents ? Parce que dans un premier temps, il y avait Milosevic, et

  6   d'après les nouvelles autorités qui ont accepté le point de vue défendu par

  7   Milosevic, à savoir que la Serbie n'avait jamais été en guerre. Pourquoi

  8   est-ce que les nouvelles autorités ont dissimulé des documents à propos de

  9   la coopération entre la République de Serbie et la Republika Srpska s'ils

 10   ne contenaient pas des éléments de preuve qui auraient jeté la lumière sur

 11   certains nouveaux faits à propos de cette coopération qui est prise en

 12   considération dans l'acte d'accusation - et je parle des chefs

 13   d'inculpation dressés par le TPIY contre Milosevic ou contre d'autres

 14   personnes inculpées pour le génocide qui fut commis en Bosnie-Herzégovine ?

 15   Q.  Je vous remercie, Madame Kandic. Je voudrais répondre à votre question

 16   qui, d'ailleurs, a tout à fait à voir avec la nature du débat en question.

 17   D'après ce que vous avez dit, il me semble que nous parlons de

 18   personnes qui ont présenté des observations fondées sur des conjectures et

 19   des hypothèses; est-ce bien exact ?

 20   R.  Nous avons constamment présenté une demande pour que les portions

 21   expurgées des documents militaires soient communiquées, nous avons toujours

 22   indiqué que cela était essentiel pour la Serbie, essentiel pour les

 23   relations entre la Serbie et la Bosnie-Herzégovine et capital pour pouvoir

 24   forger un avenir démocratique normal sur le territoire de l'ex-Yougoslavie.

 25   Nous étions d'avis que cela était l'une des choses les plus essentielles.

 26   Et il faut savoir que dans ce cas, la Serbie a l'obligation vis-à-vis des

 27   victimes, vis-à-vis de sa propre société également, de communiquer tous les

 28   faits portant sur la responsabilité de la Serbie pour toutes les actions

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  1   négatives commises, et je pense en l'occurrence au génocide commis à

  2   Srebrenica. Ce n'est pas nous qui l'avons avancé. En d'autres termes, ce

  3   fut ma demande, mais cette demande a également été préconisée par d'autres

  4   organisations des droits de l'homme ainsi que par de nombreux juristes. Et

  5   il faut savoir également qu'il a été demandé que les documents secrets

  6   soient communiqués, notamment les procès-verbaux du Conseil de Défense

  7   suprême, mais il était également question d'autres documents pour lesquels

  8   la République de Serbie avait demandé des mesures de protection.

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous demanderais, Monsieur

 10   MacFarlane, de bien vouloir essayer de maîtriser le débit du témoin, car

 11   nous avons entendu une très longue réponse qui n'est pas véritablement une

 12   réponse à votre question.

 13   M. MacFARLANE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 14   Q.  Alors je vais peut-être vous poser ma dernière question qui va jeter la

 15   lumière sur tout cela. Madame Kandic, dans certains des documents originaux

 16   déposés en l'espèce, vous êtes décrite comme une activiste particulièrement

 17   connue pour la cause des droits de l'homme. Voilà quelle est la question

 18   que je souhaiterais vous

 19   poser : est-ce que vous acceptez cette définition qui est faite de vous; et

 20   le cas échéant, qu'est-ce que cela signifie ?

 21   R.  Ecoutez, je m'excuse, ce n'est pas une question qu'il convient de me

 22   poser. Vous me demandez si je crois être une activiste de la cause des

 23   droits de l'homme très connue. Vous pourriez peut-être poser la question à

 24   d'autres personnes, mais pas à moi.

 25   Q.  Donc vous refusez de répondre à ma question ?

 26   R.  Bien, je ne pense pas que ce soit une question polie. C'est un peu

 27   comme si quelqu'un vous demandait : Est-ce que vous pensez que vous êtes un

 28   bon amicus curiae ? Ce n'est pas une question décente en quelque sorte. Je

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  1   pense qu'il faudrait que vous posiez cette question à d'autres militants de

  2   la cause des droits de l'homme ou vous pourriez peut-être demander aux

  3   victimes, par exemple.

  4   Q.  Non, c'est à vous que je pose ma question : Mme Hartmann, par le

  5   truchement de son conseil, a suggéré que vous étiez une militante

  6   extrêmement connue. J'aimerais savoir si vous êtes d'accord avec cette

  7   affirmation ?

  8   R.  Je ne sais pas exactement ce que signifie précisément le terme

  9   "activiste." Je me suis toujours engagée à faire en sorte que la vérité

 10   éclate, la justice, et que les faits soient présentés. Quoi que je fasse de

 11   façon très dévouée, parce que j'ai passé trois semaines, voire un mois,

 12   pour représenter ce que j'avance. Je représente des victimes à raison de

 13   trois semaines par mois environ dans différents tribunaux, et je pense que

 14   cela est très symptomatique de mon dévouement et de mon engagement, me

 15   semble-t-il.

 16   Q.  Mais puis-je me permettre de vous présenter une suggestion. J'aimerais

 17   savoir si vous êtes d'accord avec ce qui a été avancé par Mme Hartmann qui

 18   vous définit, par le truchement de son conseil, comme une activiste de

 19   grande notoriété. Est-ce que cela signifie qu'en venant ici comparaître,

 20   vous voulez absolument vous assurer de faire en sorte que votre message

 21   soit relayé quelles que soient les questions qui vous soient posées ?

 22   R.  Je m'excuse, mais je dois vous dire très franchement que je ne saisis

 23   pas le sens de votre question.

 24   Q.  Ce que j'avance, c'est qu'en venant ici, votre objectif principal est

 25   de transmettre un message par le truchement de la Chambre --

 26   M. METTRAUX : [interprétation] J'aimerais soulever une objection vis-à-vis

 27   de cette question. Je m'excuse d'interrompre mon confrère. Mais avant de

 28   poser ce genre de question au témoin, encore faut-il qu'il jette la base de

Page 436

  1   sa question. Car il a indiqué à Mme Kandic, d'ailleurs à juste titre, que

  2   c'est le conseil qui avait présenté cette description de Mme Kandic, ce

  3   n'est pas elle-même qui a dit cela d'elle-même. Donc avant de poser ce type

  4   de question, je pense qu'il faudrait qu'il jette la base de ce qu'il

  5   avance.

  6   M. MacFARLANE : [interprétation] Puis-je répondre.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui.

  8   M. MacFARLANE : [interprétation] Je pense très respectueusement que j'ai

  9   présenté les bases de ce que j'avance. Premièrement, c'est mon éminent

 10   confrère directement qui a avancé cela et cela émanait de l'accusée, donc

 11   par le truchement de son conseil comme je l'ai déjà dit. Deuxièmement, nous

 12   avons entendu un certain nombre d'interventions ce matin. Je me suis

 13   efforcé de déterminer si ces interventions, qui n'étaient pas des réponses

 14   aux questions que je posais, étaient tout simplement des messages qui

 15   étaient relayés à la Chambre par une militante des droits de l'homme. Voilà

 16   l'objectif.

 17   M. METTRAUX : [interprétation] Bien, je pense que nous souhaiterions

 18   ajouter quelque chose.

 19   Si l'Accusation présentait des questions plus précisément et de façon

 20   beaucoup moins générale et de façon plus précise, je pense que Mme Kandic

 21   serait à même de répondre à ces questions.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie. Nous ne retenons pas

 23   l'objection.

 24   M. MacFARLANE : [interprétation]

 25   Q.  Alors je reviens à ma question, Madame Kandic. Ce que j'avance ici

 26   c'est que vous êtes une militante de la cause des droits de l'homme et que

 27   votre objectif principal aujourd'hui est de transmettre un message à la

 28   Chambre, au Tribunal et au monde entier; est-ce exact ?

Page 437

  1   R.  Je vais vous expliquer comment je conçois mon rôle. Je pense que j'ai

  2   réitéré ce que j'ai déjà dit au cours des dernières années et je pense au

  3   chef d'inculpation dressé contre Florence Hartmann. Je me contente de

  4   présenter des faits, des faits dont j'ai déjà parlé au cours des dernières

  5   années, des faits qui ont déjà également été présentés par d'autres

  6   militants des droits de l'homme. Il s'agit de la réaction de l'équipe de la

  7   Défense de la Serbie et de ce qu'ils ont dit à propos des extraits expurgés

  8   des procès-verbaux du Conseil de la Défense suprême militaire. Je l'ai

  9   réitéré au cours de toutes ces années, je le répète encore aujourd'hui, je

 10   considère que ces extraits expurgés de ce compte rendu devraient être

 11   communiqués et mis à la disposition du public, et c'est tout. Au cours des

 12   années précédentes ainsi qu'aujourd'hui. Voilà tout ce que je me suis

 13   contentée de dire.

 14   Bien entendu, ma question est la suivante : pourquoi est-ce que Florence

 15   Hartmann a été accusée si moi-même, ainsi que toute une kyrielle de

 16   militants de droits de l'homme, de juristes, d'experts du droit

 17   international humanitaire, d'experts de la liberté d'expression, et autant

 18   de chantres de la justice internationale ont indiqué depuis des années,

 19   parce que cela fait des années qu'ils indiquent que ces documents doivent

 20   être du domaine public et que la Serbie, et aucun autre Etat de l'ex-

 21   Yougoslavie, ne devrait être à même d'invoquer l'article 54 du Règlement de

 22   procédure et de preuve du TPIY et de dissimuler du commun des mortels des

 23   documents importants ?

 24   Q.  Je vous remercie, Madame Kandic. Je pense que vous avez répondu à ma

 25   question, parce que quelles que soient les questions que je vous pose, vous

 26   continuez à prononcer votre discours. J'aimerais savoir --

 27   M. METTRAUX : [interprétation] Nous soulevons une objection à ce genre

 28   d'observation.

Page 438

  1   M. MacFARLANE : [interprétation] Je pense que le compte rendu sera très

  2   précis à ce sujet.

  3   M. METTRAUX : [aucune interprétation] 

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je m'excuse. Si vous avez une

  5   objection, présentez la base de votre objection.

  6   M. METTRAUX : [interprétation] Nous soulevons une objection, car nous ne

  7   souhaitons pas que M. MacFarlane fasse ce genre d'observation à propos des

  8   éléments de preuve qui sont présentés. S'il pouvait poser des questions de

  9   façon précise et s'il veut ajouter quoi que ce soit, il peut le faire à la

 10   fin de la présentation des moyens à charge. Et je pense qu'il faut

 11   également qu'il s'exprime dans son mémoire de clôture ainsi que lors de son

 12   réquisitoire ou des plaidoiries.

 13   M. MacFARLANE : [interprétation] Cela a déjà été fait. La Chambre a déjà

 14   rendu une décision à ce sujet. Je m'efforce de poser une question précise

 15   au témoin et je n'entends en réponse que de longs discours.

 16   Q.  J'aimerais passer à autre chose maintenant puisque -- en fait, vous

 17   avez parlé non pas du procès-verbal mais des documents et des documents

 18   associés. Alors j'aimerais vous poser une question bien précise. Eu égard

 19   justement à ces discussions à et à ces débats relatifs aux décisions par

 20   opposition aux documents, la question que j'aimerais vous poser est la

 21   suivante : avez-vous vu ou aviez-vous vu ces décisions dont il est question

 22   ?

 23   R.  Ecoutez, moi, personnellement, je n'ai pas vu ces décisions, mais il y

 24   a eu un débat public à propos de ces décisions. En fait, ce qui fut dit

 25   c'est que le Tribunal -- bon, ils avaient utilisé le terme de "décision,"

 26   mais je vous ai lu cette phrase prononcée par le Pr Vojin Dimitrijevic, et

 27   le Pr Dimitrijevic avait indiqué que c'était la Cour, le Tribunal qui avait

 28   décidé que ces documents ou ces extraits de ces documents restent secrets.

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  1   Donc c'était une décision de la Cour, c'était la décision de la Cour et il

  2   n'a pas été question précisément de la décision adoptée en 2003 ou lors

  3   d'une autre année. Ce n'est pas ainsi que la référence a été établie.

  4   Q.  Au vu des discussions qui avaient lieu à propos de cette décision,

  5   qu'aviez-vous compris ? D'après vous de combien de décisions s'agissait-il

  6   ? Est-ce qu'il s'agissait d'une décision, de deux, de trois, de cinq ? Est-

  7   ce que vous le savez ?

  8   R.  J'avais cru comprendre qu'il s'agissait de deux décisions.

  9   Q.  Avec combien de personnes avez-vous parlé environ de ces décisions ?

 10   R.  Je dois vous dire que nous avions parlé essentiellement des extraits

 11   expurgés et nous avons également parlé de la teneur de ces documents de nos

 12   soupçons à propos justement de la teneur de ces documents, et nous avions

 13   également dit que nous ne comprenions pas pourquoi une décision à propos de

 14   ces documents devraient indiquer que ces documents devraient rester

 15   secrets, pourquoi est-ce que cette décision avait été adoptée. Voilà quel

 16   était en quelque sorte l'essentiel de nos débats.

 17   Q.  A propos de ces décisions, vous vous êtes livrés à des conjectures.

 18   R.  Il y avait eu une référence qui avait été faite à l'existence de ces

 19   décisions, donc pour nous ou pour moi, peu importe le nombre de ces

 20   décisions, ce qui était important pour nous, c'est que ces décisions, à

 21   savoir des documents importants avaient été dissimulés au public. En fait,

 22   il s'est avéré, dans le cas de la Cour internationale de Justice, que dans

 23   ce cas non plus le public n'a pas eu accès à ces documents. Et nous avons

 24   pensé - lorsque je dis "nous" je fais référence à moi-même et à ainsi qu'à

 25   d'autres militants des droits de l'homme - nous étions d'avis que cela

 26   n'était pas une bonne chose, que ce n'était pas la façon d'établir une

 27   relation saine avec le passé, que ce n'était pas la bonne attitude à avoir

 28   vis-à-vis des victimes. Et nous avons pensé que nous devions respecter les

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  1   principes de certains experts en la matière, à savoir des principes qui

  2   visent le droit des personnes, le droit des victimes, le droit des

  3   sociétés, à savoir comme l'a indiqué Louis Joinet, notamment ce droit à

  4   pouvoir se familiariser avec les éléments de preuve qui sont dissimulés par

  5   les extraits expurgés du procès-verbal du Conseil Défense de la suprême.

  6   Q.  [aucune interprétation]

  7   M. KHAN : [interprétation] Monsieur le Président, une intervention qui

  8   pourra peut-être aider mon estimé confrère. Parce que je remarque qu'il

  9   pose sa question en anglais, puis qu'immédiatement il enlève ses écouteurs

 10   lorsque le témoin répond. Je pense que c'est la raison pour laquelle, à

 11   plusieurs reprises, il y a eu un chevauchement entre la traduction de la

 12   réponse et la question posée par mon confrère. Donc peut-être qu'il serait

 13   judicieux de marquer un temps d'arrêt. Je pense que ce serait très utile,

 14   parce que nous ratons la fin de certaines réponses.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie de votre

 16   intervention, Maître Khan.

 17   Je m'adresse à la fois au conseil et au témoin. N'oubliez pas de ménager un

 18   temps d'arrêt entre vos réponses et vos questions pour que les interprètes

 19   aient la possibilité de fermer leur phrase.

 20   M. MacFARLANE : [interprétation] Je vous remercie.

 21   Q.  Madame Kandic, je vais vous poser une question très simple et très

 22   précise, et je vous serais extrêmement reconnaissant de bien vouloir

 23   répondre à cette question. Voilà quelle est ma question : avec combien de

 24   personnes avez-vous parlé de ces décisions ?

 25   R.  D'après les réponses que j'ai fournies, il était absolument manifeste

 26   que je ne peux pas vous donner un nombre précis de personnes. Parfois - et

 27   d'ailleurs j'ai abordé ce sujet dans un texte écrit - il s'agissait d'une

 28   interview, ce qui fait que beaucoup de personnes ont lu cela et en ont

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  1   parlé avec d'autres. Donc lorsqu'il s'agit d'observations, de commentaires

  2   et de points de vue publics, il est particulièrement difficile de vous dire

  3   avec combien de personnes j'ai parlé. Je dirais peut-être une cinquante de

  4   personnes, soit des champions de la cause des droits de l'homme ou des

  5   experts, qu'il s'agisse d'experts internationaux et nationaux ou régionaux

  6   d'ailleurs. J'ai peut-être parlé avec certains d'eux de nos soupçons qui

  7   portaient sur la teneur des documents du Conseil de la Défense suprême.

  8   Nous envisagions et nous parlions également d'une méthode qui aurait pu

  9   exercer des pressions pour justement que ces documents soient communiqués.

 10   Mais je le répète, j'en ai parlé tout à fait publiquement.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur MacFarlane, nous devons

 12   terminer. Monsieur MacFarlane, essayez d'encadrer votre témoin.

 13   M. MacFARLANE : [interprétation] Je vous remercie.

 14   Q.  J'aimerais vous poser une autre question à ce sujet, Madame Kandic, et

 15   je vous exhorterais vivement à répondre à la question que je vous pose.

 16   Voilà quelle est ma question : voilà ce que j'avance, il y a un grand

 17   nombre de personnes qui ont parlé de ces décisions, mais quasiment personne

 18   n'avait vu les décisions en question, donc il s'agit tout simplement de

 19   toute une série de suppositions, hypothèses, conjectures à propos de ces

 20   décisions. Est-ce que c'est ainsi que l'on peut évaluer la situation ?

 21   R.  Moi-même, ainsi que les autres militants de la cause des droits de

 22   l'homme, avons parlé de ces décisions qui avaient été prises. Mais le fait

 23   est que ces décisions ont dissimulé aux yeux du public des documents

 24   particulièrement importants. Voilà quel était au cœur de nos discussions.

 25   D'ailleurs, il ne faut pas oublier qu'une une décision a été prise, alors

 26   voilà pour la forme, mais cela a eu une incidence pour le fond. Car le fond

 27   est que justement ces documents secrets existent. Et nous voulions que ces

 28   documents secrets soient communiqués. Voilà quel était au cœur de la

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  1   demande publique pour la communication de ces documents.

  2   M. LE JUGE GUNEY : -- vous venez de nous dire qu'il y avait des références

  3   à l'égard de l'existence de ces décisions. Auriez-vous la bonté de nous

  4   donner, si vous pouvez, plus d'explications à l'égard de la teneur de cette

  5   référence ? Merci.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Voilà comment j'ai compris la situation. Les

  7   Juges avaient rendu leurs décisions et le fait est que par cette décision,

  8   la demande présentée par la Serbie a été acceptée, ce qui fait que

  9   certaines parties du compte rendu ou du procès-verbal des réunions du

 10   Conseil de la Défense suprême militaire devraient rester confidentielles,

 11   donc secrètes. En d'autres termes, il s'agissait de documents pour lesquels

 12   nous soupçonnions qu'ils étaient pertinents à la période où le génocide de

 13   Srebrenica a été commis. Voilà de quoi nous avons parlé. Nous n'avons pas

 14   parlé de notre demande, mais tout ce que nous demandions c'était que -- ou

 15   tout ce que nous indiquions, tout ce que nous demandions c'était que ces

 16   documents qui restaient confidentiels à la suite de cette décision rendue

 17   soient communiqués. Voilà ce qui était important pour nous. Nous voulions

 18   que ces documents tombent dans le domaine public, nous voulions ainsi que

 19   le public puisse avoir accès aux extraits expurgés de ce procès-verbal.

 20   Et nous avons toujours parlé de la teneur du document, de ce qui

 21   était dissimulé par les extraits expurgés du document. Voilà de quoi il

 22   s'agissait. Voilà ce qui était important pour nous.

 23   Q.  Je vous remercie, Madame Kandic. J'aimerais maintenant aborder une

 24   autre question, à savoir la conférence qui était organisée à Belgrade. Vous

 25   avez apporté votre contribution à cette organisation de conférence et nous

 26   en avons parlé lorsque vous êtes venue ici la dernière fois, à savoir le 12

 27   juin 2007. Vous vous souvenez de cette discussion ?

 28   R.  Excusez-moi, de quelle conférence parlez-vous, de quelle table ronde

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  1   parlez-vous ? Car le 12 juin ne me dit pas grand-chose.

  2   M. METTRAUX : [interprétation] Le 29, Monsieur le Président.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie. On me dit que c'est

  4   le 29.

  5   M. MacFARLANE : [interprétation] Oui, oui, je m'excuse, il s'agit bien du

  6   29 juin.

  7   Q.  Je vais vous donner lecture de l'intitulé du document dont nous avons

  8   parlé la semaine dernière. Il s'agissait, en fait, du "Humanitarian Law

  9   Centre à Belgrade, 29 juin 2007, débat régional relatif au jugement

 10   prononcé par la Cour Internationale de Justice en matière de génocide."

 11   Est-ce que vous vous souvenez de cette discussion ?

 12   R.  Oui. Bien sûr que je m'en souviens.

 13   Q.  J'aimerais que vous nous expliquiez un peu quelle était la structure de

 14   la conférence. Notamment, j'aimerais que vous nous parliez de la discussion

 15   relative aux procès-verbaux et aux notes dont nous avons déjà parlé. Est-ce

 16   qu'il s'agissait d'une

 17   discussion ? Est-ce qu'il s'agissait d'exposé individuel ? Est-ce qu'il

 18   s'agissait d'une discussion menée par une tribune ? Est-ce qu'il s'agissait

 19   d'une discussion à laquelle a participé un groupe important de personnes ?

 20   Est-ce que vous pourriez nous indiquer ce dont il s'agissait ?

 21   R.  Il s'agissait d'une table ronde et à cette table ronde, nous avions des

 22   représentants de l'équipe de la Défense de Serbie, de l'équipe de la

 23   Défense de Bosnie-Herzégovine. Il y avait également d'autres participants,

 24   des juristes, par exemple, de tous ces Etats, de l'ex-Yougoslavie. Il y

 25   avait également des militants de la cause des droits de l'homme, de toute

 26   la région d'ailleurs. Donc il s'agissait d'une réunion régionale, d'une

 27   réunion d'experts régionaux en quelque sorte. Il y avait environ une

 28   quarantaine de participants.

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  1   Q.  Je crois comprendre qu'il y a un certain nombre de personnes qui se

  2   sont exprimées à propos de la protection de documents et qu'ils ont exprimé

  3   leur point de vue à propos de cette question, n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui, oui. Oui, oui, cela justement figurait à l'ordre du jour.

  5   Q.  Et différents points de vue ont été exprimés à plusieurs reprises. Les

  6   participants ont indiqué ou certains participants ont indiqué qu'il fallait

  7   être très circonspect, lorsque l'on discutait de questions confidentielles;

  8   n'est-ce pas exact ?

  9   R.  Non, je ne me souviens pas de ce genre d'intervention. Je pense

 10   toutefois que Sasa Obradovic s'est exprimé de la sorte. Mais ce n'était pas

 11   important, parce que tous les autres participants, notamment le chef de

 12   l'équipe de la Défense serbe, à savoir Radoslav Stojanovic, militait en

 13   faveur de la communication de ces documents, ce qui fait que nous avons

 14   essentiellement abordé la teneur de ces documents. Il a indiqué qu'il

 15   souhaiterait vivement que ces procès-verbaux soient communiqués, parce

 16   qu'ainsi le monde verrait qu'ils ne contenaient rien d'important, qu'il n'y

 17   avait pas d'éléments de preuve importants dissimulés dans ces documents. Et

 18   je m'attendais à ce que quelque chose de la sorte se passe, parce que si

 19   quelqu'un qui était le représentant, le chef de l'équipe de la Défense de

 20   la République de Serbie a préconisé en public la communication de ces

 21   procès-verbaux à une réunion telle que celle-ci, je pensais que cela allait

 22   se passer. Je me suis ralliée à son point de vue de façon assez véhémente.

 23   J'ai indiqué qu'il fallait que les documents soient communiqués. Et, bien

 24   entendu, j'ai dit qu'il fallait qu'ils soient communiqués, qu'il fallait

 25   que nous puissions avoir accès à ces documents, qu'il ne fallait pas que

 26   ces documents soient dissimulés du grand public, qu'il ne fallait pas que

 27   l'on se demande ce qui était dissimulé dans ces documents.

 28   Et ce qui m'a particulièrement impressionnée à propos du Pr

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  1   Dimitrijevic, tel que moi-même et d'autres militants des droits de l'homme,

  2   c'est qu'il s'agissait en fait du représentant de l'équipe de la Défense et

  3   qu'il a demandé publiquement la communication de ces extraits expurgés.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Maître Mettraux.

  5   M. METTRAUX : [interprétation] J'aimerais soulever une objection à propos

  6   de la façon dont les questions sont posées au témoin.

  7   Parce que l'Amicus Curiae a demandé si les participants, le participant ou

  8   les participants, il a indiqué en fait qu'il avait indiqué qu'il fallait

  9   que cela soit communiqué. Et lors des questions supplémentaires -- en fait,

 10   nous reviendrons là-dessus, parce que M. MacFarlane a émis une mise en

 11   garde à ce sujet.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Non, il a juste indiqué que cela avait

 13   à voir avec la confidentialité du document.

 14   M. METTRAUX : [interprétation] Le problème c'est que cela n'est pas ce qui

 15   a été dit. Le compte rendu, ou plutôt, le procès-verbal auquel il fait

 16   référence, et nous aborderons cela dans un petit moment. C'est à ce procès-

 17   verbal qu'il fait référence. Mais M. MacFarlane devra être très prudent

 18   lorsqu'il pose des questions, parce qu'il s'agissait de la teneur du

 19   procès-verbal du Conseil de la Défense suprême auquel il faisait référence

 20   et non pas la décision.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Mettraux, si vous préférez,

 22   vous pourriez peut-être conseiller à M. MacFarlane comment il devra poser

 23   ses questions, mais peut-être que vous pourrez le faire par la suite. Je ne

 24   souhaite absolument pas m'immiscer dans la façon qu'a M. MacFarlane de

 25   poser ses questions à moins qu'il ne fasse quelque chose qui va à

 26   l'encontre du règlement, bien entendu.

 27   M. METTRAUX : [interprétation] C'est la Chambre qui décide, bien entendu.

 28   Je ne vais surtout pas intervenir.

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  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien, vous pouvez accepter cela comme

  2   la décision prise par la Chambre, à moins que vous ne soyez pas d'accord

  3   avec cela. Alors vous pourrez peut-être faire appel par la suite, mais vous

  4   n'avez plus à faire d'observation de ce style.

  5   M. MacFARLANE : [interprétation] Merci.

  6   Q.  Madame Kandic, vous nous avez indiqué que vous n'étiez pas sûre si

  7   quelqu'un avait exprimé des préoccupations à propos de la façon dont il

  8   fallait traiter des documents confidentiels ou des décisions

  9   confidentielles. Alors j'aimerais vous rafraîchir la mémoire à ce sujet.

 10   Aux pages 93 et 94 de ce livre que vous avez cité la dernière fois, voilà

 11   ce que Sasa Obradovic a dit, et je cite :

 12   "Je ne vais pas aborder cette question, mais c'est aussi simple que si vous

 13   avez un document qui a été protégé par le Tribunal de La Haye, alors vous

 14   commettez un délit en ne prenant pas en considération, en ne respectant pas

 15   la décision du Tribunal. Certains journalistes de la Croatie ont dû

 16   répondre de ce genre de comportement."

 17   Vous vous souvenez en avoir parler et vous vous souvenez avoir vu cela dans

 18   le livre ?

 19   R.  Oui. J'aimerais vous rappeler que j'ai dit il y a un petit moment que

 20   Sasa Obradovic avait justement fait ce genre d'intervention. Mais il s'agit

 21   d'une intervention qui est véritablement secondaire par rapport au nombre

 22   infini d'autres documents et d'autres observations qui ont été faits à

 23   propos de ces extraits expurgés de ces documents.

 24   Q.  Vous voulez dire que c'est une observation peu importante, alors que

 25   c'est quelqu'un de l'ambassade de Serbie qui met quelqu'un en garde du

 26   danger qu'il y a à peut-être commettre une infraction ? Pour vous ça n'a

 27   pas d'importance ?

 28   R.  Sasa Obradovic, il était employé par l'ambassade. A côté de lui, il y

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  1   avait le Pr Stojanovic et ce professeur c'était lui qui avait dirigé

  2   l'équipe de la défense de la Serbie, et lui, il était favorable, a-t-il

  3   dit, à ce que ces documents déclarés confidentiels par les Juges du TPIY

  4   soient rendus publics. Bien sûr, c'est ce que disait le Pr Stojanovic et

  5   était bien plus important ce que disait un simple employé en la personne de

  6   Sasa Obradovic.

  7   Q.  Mais vous dites que c'était un simple employé, mais c'était aussi un

  8   juriste, un homme qui avait étudié le droit qui était employé par

  9   l'ambassade ?

 10   R.  Franchement, je ne sais pas qui était Sasa Obradovic. Vous savez, les

 11   ambassades disposent d'un personnel considérable. D'après ce que j'ai

 12   compris, il aidait l'équipe de la Défense sans pour autant avoir de rôle

 13   important. Le Pr Stojanovic, au contraire, c'était quelqu'un qui

 14   bénéficiait d'une très bonne réputation. Il enseignait à la Faculté de

 15   droit, c'était une personnalité de premier plan dans cette table ronde qui

 16   s'est faite, tenue le 29 juin 2007, et il a dit sans aucune ambiguïté,

 17   l'équipe juridique de la Serbie a pour objectif de faire en sorte que la

 18   Serbie n'ait pas à répondre du chef d'accusation de génocide, et l'équipe

 19   juridique est parvenue à ses fins.

 20   Ce que -- l'effet de tout ça c'est que nous - comme moi, comme d'autres -

 21   nous avons posé des questions plus tard. Est-ce qu'ils y sont parvenus,

 22   parce que certains documents n'ont pas pu être consultés, en l'occurrence,

 23   les comptes rendus du CDS ?

 24   Q.  Mais ma question portait uniquement sur le rôle joué par Sasa Obradovic

 25   lors de cette conférence. Vous avez dit qu'à votre avis, cette mise en

 26   garde qu'il avait formulée n'avait pas beaucoup d'importance, mais nous

 27   avons vu plus tard des comptes rendus des extraits de votre livre, vous

 28   citez Obradovic :

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  1   "Je parle ici" - dit-il - "uniquement en qualité de juriste. C'est pour ça

  2   que je suis ici et c'est pour ça que j'ai été invité par la Cour

  3   Internationale de Justice à m'exprimer en tant que représentant de la

  4   Serbie-et-Monténégro."

  5   N'est-ce pas là la vérité ? Vous vous en souvenez ?

  6   R.  Tout ce que je peux faire c'est répéter ce que j'ai déjà dit. Nous

  7   avons invité le Pr Stojanovic, je sais que nous avions aussi invité

  8   Vladimir Djeric car l'opinion le connaissait bien. Avant 2004, c'était un

  9   excellent juriste qui travaillait au ministère des Affaires étrangères, il

 10   était bien connu dans l'opinion publique, c'était quelqu'un qui s'était

 11   occupé de questions relatives à l'affaire opposant la République de Bosnie-

 12   Herzégovine à la République de Serbie, alors que pour ce qui est

 13   d'Obradovic, il n'était pas vraiment une personnalité connue de l'opinion

 14   publique. Je pense que c'était le Pr Stojanovic qui avait proposé qu'il

 15   participe à la discussion. Peut-être était-il un assistant technique de

 16   l'équipe mais c'était un fonctionnaire dont le travail consistait à

 17   représenter les avis, les exigences, les décisions de son Etat.

 18   Il n'y a rien qui porte à polémique, me semble-t-il, ici. Je ne peux que

 19   répéter ce que j'ai déjà dit lors de cette table ronde, Sasa Obradovic

 20   avait pour mission de défendre. Quand je vous dis qu'il y a beaucoup de

 21   preuves attestant du fait qu'il y a des membres de la police serbe et de

 22   l'armée serbe qui ont participé aux massacres de Srebrenica, il a dit :

 23   Oui, mais il existe aussi quelque chose qui s'appelle le test ou la norme

 24   de Nicaragua.

 25   Q.  Est-ce que je vous comprends bien ? Est-ce que les Juges vous

 26   comprennent bien ? Est-ce que vous dites que le commentaire d'Obradovic

 27   n'avait pas beaucoup d'importance à vos yeux parce que c'était un

 28   fonctionnaire, même s'il était employé de l'ambassade de Serbie et même

Page 450

  1   s'il avait représenté son pays devant la Cour Internationale de Justice ?

  2   Est-ce bien ce que vous dites aux Juges ?

  3   R.  Je vais être plus précise, si vous me le permettez. A mes yeux, c'était

  4   un fonctionnaire qui recevait des ordres, qui recevait des instructions,

  5   qui était aux ordres. Il devait lire les comptes rendus, voir ce qui

  6   pouvait nuire à la Serbie dans ces écrits, parce qu'il y avait ce procès

  7   devant la CIJ concernant la Serbie qui devait se tenir. Je pense que lui,

  8   comme d'autres juristes dans des agences et ministères publics, avait reçu

  9   pour instruction de lire ces documents, parce que ce serait mal vu des

 10   instances juridiques internationales, notamment de la CIJ si ce n'était pas

 11   le cas, que ce soit pour ce qui est de l'affaire dont a été saisie la CIJ

 12   ou que ceci concerne des actes d'accusation dressés par le TPIY. Il n'y a

 13   aucune contestation sur ce point.

 14   Sasa Obradovic n'a pas été la personnalité de tout premier plan dans cette

 15   discussion, cette table ronde. Ce qui était important c'était de savoir et

 16   de discuter de la question de savoir si la décision rendue par CIJ avait

 17   été une juste décision et des participants, dont moi, nous avons dit que

 18   non, la justice n'avait pas été faite, parce qu'il y avait des documents

 19   qu'il aurait fallu voir, documents qui, à notre avis, montraient

 20   l'intervention coupable de la Serbie dans Srebrenica. J'ai cité d'autres

 21   documents qui montrent de façon claire que la Serbie a même participé à la

 22   liquidation, à l'exécution sommaire de prisonniers à Srebrenica. Sasa

 23   Obradovic a répondu à cela qu'il fallait tenir compte de la norme établie

 24   par l'affaire contre le Nicaragua et il fallait voir sa véridicité des

 25   Juges de la CIJ.

 26   Q.  Madame Kandic --

 27   R.  Vous savez, vous me posez une question, puis vous ne voulez pas

 28   entendre ma réponse. Vous me demandez une chose et quand je vous réponds,

Page 451

  1   quand je vous dis ce qui était important à propos des arguments présentés

  2   par Sasa Obradovic, vous ne voulez pas m'écouter.

  3   Oui, ce qu'il appelle le test de l'affaire Nicaragua. Pour contrer

  4   mes arguments, mes arguments et ceux d'autres participants, il a dit qu'il

  5   y avait des preuves tangibles montrant la coopération entre la République

  6   de Serbie et la Republika Srpska.

  7   Q.  En l'espèce, il est important, très important que vous écoutiez ma

  8   question et que vous y répondiez. Je ne vous demande pas des grands

  9   discours. Je pense qu'il est inutile de poursuivre sur ce thème.

 10   Mais maintenant, j'aimerais passer à quelques déclarations récentes

 11   faites par le Procureur du TPIY et par le Président du Tribunal. Ce qui va

 12   m'intéresser c'est la question de la coopération des Etats.

 13   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

 14   M. MacFARLANE : [interprétation] Je vais présenter au témoin deux

 15   déclarations. Je voudrais qu'elles soient distribuées.

 16   L'INTERPRÈTE : Il serait utile, les interprètes seraient reconnaissants

 17   s'il pouvait disposer de ces deux déclarations eux aussi.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous avez suffisamment d'exemplaires.

 19   Vous en avez pour les interprètes ?

 20   M. MacFARLANE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 22   M. KHAN : [interprétation] Précaution, je préviens mon estimé confrère que

 23   son micro était branché.

 24   M. MacFARLANE : [interprétation]

 25   Q.  Si vous le voulez bien, nous allons d'abord examiner le document

 26   intitulé : "Déclaration." C'est ce qui est inscrit à la première page.

 27   C'est une communication de M. Serge Brammertz. Je vous le lis pour que vous

 28   le compreniez dans la langue que vous entendez. Je vais lire ce document,

Page 452

  1   puis passer à la page 2.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne veux pas vous interrompre, mais

  3   sachez que nous allons dans une minute ou deux faire une pause. Vous voulez

  4   commencer aborder ce nouveau sujet ?

  5   M. MacFARLANE : [interprétation] Non, je pense qu'il est préférable

  6   d'attendre la fin de la pause, parce que c'est un domaine tout à fait

  7   nouveau que je veux aborder.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous allons maintenant faire une pause

  9   et nous reprendrons à onze heures moins quart.

 10   --- L'audience est suspendue à 10 heures 16.

 11   --- L'audience est reprise à 10 heures 46.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur

 13   MacFarlane.

 14   M. MacFARLANE : [interprétation] Merci, Messieurs les Juges.

 15   J'ai utilisé la pause pour passer en revue mes notes, et j'ai pu vraiment

 16   circonscrire les sujets qui me semblaient le plus importants, et je pense

 17   que j'aurais besoin encore d'une demi-heure, un peu plus peut-être, pour le

 18   reste de mon contre-interrogatoire.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 20   M. MacFARLANE : [interprétation]

 21   Q.  Madame Kandic, est-ce que vous avez le document intitulé :

 22   "Communication de M. Serge Brammertz…" ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Je veux être complet pour les besoins du compte rendu, je parle du

 25   document qui se trouve à l'onglet numéro 2 : "Déclaration de M. le

 26   Procureur du TPIY, M. Serge Brammertz, au Conseil de sécurité, déclaration

 27   faite le 4 juin 2009," et c'est adressé au président, au premier ministre,

 28   et aux ambassadeurs; je vous rappelle la date, 4 juin 2009.

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  1   Il s'agit d'une déclaration faite devant le Conseil de sécurité il y a à

  2   peine trois semaines ou trois semaines et demie de cela. Veuillez prendre

  3   la page 2. Je vais vous la lire, ce qui vous permettra de comprendre cette

  4   déclaration dans votre langue. Il n'y a que les deux premiers paragraphes

  5   qui m'intéressent, enfin, vous voyez trois petites étoiles qui marquent

  6   l'interruption, et je parle des deux premiers paragraphes. Voici le premier

  7   :

  8   "La coopération des Etats avec le bureau du Procureur demeure essentielle

  9   si nous voulons que les procès de première instance et les procès d'autres

 10   appels soient menés à bien."

 11   Oui, c'est bien cela ?

 12   R.  Oui, tout à fait, je vois.

 13   Q.  Par conséquent, le Procureur insistait sur ceci et disait que la

 14   coopération des Etats c'était quelque chose d'important pour le travail

 15   fait par le bureau du Procureur. Vous voyez l'insistance qu'il exprime ici

 16   ?

 17   R.  Oui, oui.

 18   Q.  Etes-vous d'accord avec ce qu'il dit ici ?

 19   R.  Oui, oui.

 20   Q.  Deuxième paragraphe, je vous le lis :

 21   "Nous demandons toujours l'assistance de la Bosnie-Herzégovine, de la

 22   Croatie, et de la Serbie dans plusieurs domaines, comme dans celui de la

 23   fourniture de documents, la possibilité de consulter des archives, le fait

 24   de veiller à ce que des témoins puissent venir témoigner devant le

 25   Tribunal, et le fait d'aider à repérer l'endroit où se trouvent des

 26   personnes qui sont toujours enfuies et de procéder à leur arrestation."

 27   Vous le voyez ?

 28   R.  Oui, oui, j'ai vu.

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  1   Q.  Vous êtes d'accord avec ce qui est dit ici par

  2   M. Brammertz ?

  3   R.  Oui, oui.

  4   Q.  Partant de ces deux affirmations, vous comprenez, je suppose, qu'il est

  5   très important que les Etats coopèrent avec le Tribunal.

  6   R.  Oui.

  7   Q.  C'est important si on veut traduire en justice ceux qui ont commis des

  8   crimes, et il est important de veiller à ce que les victimes comme les

  9   témoins soient bien traités comme il se doit ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Voici ma question : vu l'importance qu'il faut attacher à la

 12   coopération avec les Etats --

 13   Mais avant de poser ma question, je dois vous demander ceci :

 14   connaissez-vous le concept des mesures de protection, surtout à l'égard des

 15   victimes ?

 16   R.  Oui, je le connais ce concept.

 17   Q.  Est-ce que vous connaissez le concept des mesures de protection portant

 18   sur des demandes s'appliquant à un Etat ?

 19   R.  Oui, je ne connais pas le moindre détail de la question, mais je sais

 20   qu'en vertu du Règlement de procédure et de preuve du TPIY, les Etats ont

 21   le droit de demander des mesures de protection lorsque la sécurité de

 22   l'Etat est concernée.

 23   Q.  Voici ma question : seriez-vous surprise, Madame Kandic, si, dans le

 24   cas de violations routinières de mesures de protection, mesures demandées

 25   par un Etat, un Etat dans une telle éventualité va se demander s'il peut

 26   toujours coopérer avec le Tribunal ?

 27   R.  C'est une question qui porte à conjecture. Je n'ai pas en tête

 28   d'exemple, l'exemple d'un Etat qui aurait demandé à modifier des mesures de

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  1   protection. Jamais la Serbie - notamment après ce qu'a dit le Pr Rade

  2   Stojanovic lorsqu'il a dit qu'il pensait que les comptes rendus du CDS

  3   devaient être divulgués - jamais la Serbie n'a menacé quoi que ce soit,

  4   personne parmi les autorités serbes n'a dit que les choses étant ce

  5   qu'elles étaient, la Serbie n'allait plus fournir de documents en invoquant

  6   des mesures de protection, parce que ce sont des Etats qui sont parties

  7   prenantes au conflit, et ces Etats ne peuvent pas faire de chantage sur le

  8   Tribunal.

  9   Q.  Mais je vais poser ma question autrement, j'aimerais voir comment vous

 10   allez y réagir. A mon avis, il est important de faire appliquer des mesures

 11   de protection dont bénéficie un Etat pour veiller à ce que les Etats

 12   continuent de coopérer avec le Tribunal, et ceci est vrai, par exemple,

 13   aussi pour la Serbie.

 14   R.  Mon avis, et bon nombre d'experts en matière de la liberté d'expression

 15   et en faveur de la justice après un conflit armé, mon avis, le leur, c'est

 16   que des mesures de protection ne doivent pas entraver la justice. Il est

 17   très important d'avoir des mesures de protection pour des témoins, mais le

 18   Tribunal impose des mesures de protection ici pendant que des témoins

 19   comparaissent, mais il s'est avéré que ces mesures de protection ne

 20   continuent pas de s'appliquer et de protéger les témoins lorsqu'ils sont de

 21   retour chez eux.

 22   Je le répète, les mesures de protection doivent correspondre aux

 23   besoins du Tribunal, parce que ce Tribunal doit établir des faits dans des

 24   procès pénaux, doit établir si un accusé est responsable au pénal ou pas

 25   et, quand nous parlons de la CIJ, la CIJ doit établir s'il y a

 26   responsabilité ou pas d'un Etat.

 27   Q.  J'essaie de me concentrer davantage sur mon argument. Je suppose, pour

 28   vous avoir entendue, que vous êtes en faveur de mesures de protection pour

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  1   victimes et témoins.

  2   R.  Oui, j'y suis tout à fait favorable, car il y a des témoins qui sont en

  3   danger, et s'ils ne sont pas installés dans un autre pays, leur vie peut

  4   être compromise. Parce que si de tels témoins parlent de crimes commis par

  5   des membres de la police et de l'armée de leur propre pays, leur vie est en

  6   danger dans ce pays. Je suis donc une ardente partisane de mesures de

  7   protection très importantes pour ce genre de témoins.

  8   Q.  Parlons maintenant des mesures de protection à l'encontre d'un Etat.

  9   Pensez-vous aussi que les Etats ont le droit de demander des mesures de

 10   protection et de demander au Tribunal de voir si elles doivent être

 11   appliquées ?

 12   R.  Je vais m'en tenir à l'exemple de l'ex-Yougoslavie. Il y avait une

 13   guerre qui ne s'est pas limitée au territoire d'un seul Etat. Cette guerre

 14   a été menée sur le territoire de plusieurs Etats, à l'exception de la

 15   Serbie-Monténégro. Mais si des crimes de guerre ont été commis, qui ont

 16   donné lieu à des procès pénaux et si la CIJ est supposée se prononcer sur

 17   la responsabilité éventuelle d'un Etat, si des éléments probants sont

 18   présentés, qui montrent qu'un Etat peut invoquer ses intérêts de sécurité

 19   nationale, la CIJ doit faire un exercice d'appréciation. Il y a d'un côté,

 20   le besoin de respecter des mesures de protections demandées par l'Etat,

 21   mais il y a aussi la nécessité de rendre la justice. Si un grand nombre de

 22   documents et d'éléments de preuve ne sont pas à la disposition de la CIJ,

 23   il se pourrait qu'elle ne parvienne pas à vraiment bien rendre justice de

 24   façon à veiller à ce qu'il n'y ait pas répétition d'un tel conflit.

 25   Q.  Lorsqu'un Etat a demandé et obtenu des mesures de protection, estimez-

 26   vous qu'en cas de violation de ces mesures de protection, on agisse pour

 27   que ces mesures soient appliquées ?

 28   R.  Je défends les droits de l'homme - je ne sais pas exactement quand ces

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  1   décisions ont été adoptées - mais j'ai toujours dit qu'il ne devrait pas y

  2   avoir de documents confidentiels lorsque, à la suite de crimes commis en

  3   ex-Yougoslavie, il y a des procès au pénal. J'ai toujours dit que des

  4   documents portant sur des crimes commis en ex-Yougoslavie doivent être

  5   rendus publics, que c'est important pour établir publiquement les faits.

  6   Ainsi nous pourrons voir ce que Milosevic et son régime ont vraiment fait

  7   lorsqu'ils ont placé notre pays et son peuple dans une situation qui est

  8   une situation de sanction, lorsqu'on a accusé tout ce pays de génocide,

  9   lorsque le pays tout entier a été accusé d'avoir été impliqué dans de

 10   multiple crimes qui ont entraîné la mort de milliers et de milliers de

 11   personnes. Mais indépendamment de ça, j'ai toujours dit qu'il ne devrait

 12   pas y avoir de documents confidentiels.

 13   Q.  Dites-vous dès lors que vous ne pensez pas que le Tribunal a la

 14   capacité de procéder à une bonne analyse, à bien trouver le juste milieu

 15   entre la nécessité de respecter les mesures de protection données à un Etat

 16   et la justice ?

 17   R.  Premièrement, j'aimerais vous dire que je défends les droits de

 18   l'homme, donc ma fonction essentielle est de préconiser quels sont les

 19   principes de respect de droits de l'homme fondamentaux, il s'agit également

 20   de savoir quelle est la base de ces droits, quelle est la base des droits

 21   des sociétés à connaître la vérité, le droit à avoir des faits qui sont

 22   établis sur la base de la responsabilité des personnes ou des Etats, et

 23   cela doit être établi. J'ai toujours œuvré pour les familles des victimes,

 24   pour que la société également puisse prendre connaissance des faits et pour

 25   que ces faits soient communiqués publiquement. Des faits qui permettront de

 26   déterminer pourquoi certains événements se sont déroulés et pourquoi est-ce

 27   que qu'il y a eu des crimes de guerre. C'est à partir de cela que nous

 28   pouvons avoir des garanties pour que ce type de crime ne soit jamais

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  1   répété. C'est quelque chose que j'ai appris. J'ai appris beaucoup en

  2   écoutant les experts de la justice transitionnelle. Je l'ai appris à la

  3   lecture de Louis Joinet, par exemple.

  4   Hormis cela, j'ai également évalué le fait qu'à la fois l'Accusation et les

  5   tribunaux doivent disposer de garanties suffisantes, après la procédure

  6   internationale j'entends, pour que ces crimes ne se répètent pas. Mais s'il

  7   y a encore des documents qui sont cachés, la paix ne règnera jamais. Ils

  8   diront toujours que la Serbie a dissimulé certains documents, et de ce

  9   fait, nous ne connaîtrons jamais l'exacte vérité. Par ailleurs, nous avons

 10   de nombreuses personnes qui indiquent qu'ils savent pertinemment, par la

 11   police ou par l'armée, que la Serbie a participé directement à ce génocide

 12   à Srebrenica.

 13   J'ai eu de nombreux interlocuteurs qui ne l'ont jamais dit ainsi

 14   publiquement, qui ont peur de le faire. Mais c'est de notoriété publique

 15   d'une certaine mesure, en d'autres termes quelles que soient les décisions

 16   prises à propos de documents confidentiels, quels que soient les documents

 17   qui ont été cachés, il faut absolument que la vérité éclate, qu'elle soit

 18   connue. Mais pour que cette vérité soit connue, il faut qu'elle soit

 19   reconnue en tant que telle, publiquement. Et si des documents sont cachés,

 20   la vérité ne pourra jamais être présentée publiquement, donc elle ne sera

 21   jamais reconnue.

 22   Q.  Madame Kandic, il me reste une question à vous poser à ce sujet. C'est

 23   une question qui est très ciblée. Je vais tout simplement vous demander si

 24   vous êtes d'accord ou non avec ce que j'avance. Donc vous semblez me dire

 25   que vous êtes d'accord pour que le concept des mesures de protection pour

 26   les victimes soit défendu, vous défendez ce concept, mais vous n'avez pas

 27   du tout la même approche lorsqu'il s'agit de mesures de protection pour un

 28   Etat; est-ce exact ou non ?

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  1   R.  Non, ce n'est pas exact. Cela émane de ce que j'ai dit. Je vous ai dit

  2   que je n'étais pas d'accord pour qu'il y ait des mesures de protection pour

  3   des participants à des conflits armés. En d'autres termes, lorsque vous

  4   avez des raisons de penser que des personnes peuvent être considérées comme

  5   responsables de crimes graves, notamment le génocide, je ne suis absolument

  6   pas d'accord. Pour que s'il s'agit d'Etats qui ont participé à des conflits

  7   armés, ces Etats soient exclus.

  8   Q.  Donc en matière de mesures de protection, pour ce qui est de certains

  9   Etats, vous vous ralliez à cette cause, mais vous n'êtes pas d'accord pour

 10   tous les Etats; c'est cela ?

 11   R.  Ce que je vous dis, c'est extrêmement important pour moi, c'est qu'il

 12   ne devrait pas y avoir de documents confidentiels lorsqu'il s'agit d'Etats

 13   qui ont participé à des conflits armés. Je n'ai jamais fait référence à des

 14   mesures de protection eu égard à des Etats qui n'ont absolument rien à voir

 15   avec des crimes de guerre ou des conflits armés. D'ailleurs, je ne suis pas

 16   tout à fait sûre de pouvoir vous expliquer ce raisonnement, car il me

 17   faudra un certain temps pour pouvoir lire un certain nombre de documents

 18   pour pouvoir présenter un point de vue méritoire. Ce à quoi je fais

 19   référence, eu égard à mon point de vue, c'est que lorsqu'il s'agit d'Etats

 20   qui n'ont pas été associés directement à un conflit armé, cela est une

 21   chose. Alors ils peuvent avoir des documents qui pourraient être d'une

 22   certaine aide pour jeter la lumière sur certains faits. Mais ils ont des

 23   raisons, car ils sont en quelque sorte guidés par certaines préoccupations

 24   en matière de sécurité nationale. Mais lorsque nous parlons d'Etats qui ont

 25   participé à des conflits armés, là ma position est très claire à ce sujet.

 26   Je m'insurge contre le fait que l'on peut évoquer des intérêts nationaux

 27   vitaux ainsi que la sécurité nationale pour dissimuler certains documents.

 28   En fait, à la fin des conflits armés, et c'est ce qui s'est passé en

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  1   Serbie, les nouvelles autorités ne doivent absolument pas poursuivre la

  2   politique de défense de la Serbie comme l'avait fait Milosevic et comme

  3   l'avaient fait ses institutions, les institutions qui avaient été placées

  4   sous son contrôle. Ils doivent absolument adopter une approche tout à fait

  5   différente, ce qui signifie qu'ils doivent avancer et présenter tous les

  6   faits qui permettront de faire la lumière sur ces événements quel que soit

  7   l'Etat et quel que soit le système.

  8   Q.  J'aimerais vous poser une toute dernière question, parce qu'en un mot

  9   commençant : Ce que vous nous dites, c'est que la Serbie, la Bosnie et la

 10   Croatie n'ont absolument pas le droit de demander des mesures de

 11   protection; c'est ce que vous nous dites ?

 12   R.  Je pense qu'un Etat accusé d'un crime très grave, tel que le génocide,

 13   ce qui fut le cas de la Serbie, ne devrait pas avoir le droit de cacher des

 14   documents importants et d'ailleurs ne devrait avoir le droit de ne cacher

 15   aucun document, parce que le fait d'invoquer, par exemple, des intérêts de

 16   sécurité nationale ne peut pas véritablement remplacer le besoin d'établir

 17   la vérité et les faits. Donc on ne peut pas invoquer le secret, défense à

 18   ce sujet.

 19   Les représentants de la Serbie et les autorités de la Serbie ont expliqué 

 20   publiquement pourquoi cette défense, coûte que coûte, était si importante.

 21   Ils ont voulu effrayer la population de Serbie en disant que chaque citoyen

 22   devrait payer des réparations. Mais je pense qu'une fois qu'il y a eu

 23   changement d'autorités, ce qui fut le cas d'ailleurs en Serbie, les

 24   nouvelles autorités ne doivent pas répéter cela. Les nouvelles autorités

 25   devraient être engagées pour justement que les faits soient déterminés;

 26   elles devraient pouvoir adopter un comportement idoine vis-à-vis des crimes

 27   qui ont été commis et vis-à-vis du rôle qui a été joué par les institutions

 28   lors de ces événements. Ce que j'entends, c'est qu'un Etat qui a été ainsi

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  1   inculpé ne devrait pas voir le droit de garder la confidentialité de

  2   certains documents, parce qu'il continue à garder le secret de ces

  3   documents alors que ces documents devraient être donnés aux victimes qui

  4   ont le droit de connaître la vérité et qui ont le droit de savoir quelle

  5   est la responsabilité de l'Etat qui était accusé du génocide.

  6   Q.  Madame Kandic, j'aimerais maintenant aborder un autre thème. Ce sera

  7   l'avant-dernier thème que j'aimerais aborder avec vous. Cela est tout à

  8   fait différent de ce dont nous avons parlé jusqu'à présent. Il s'agit du

  9   processus décisionnel du Centre de droit humanitaire.

 10   Vous avez mentionné un peu plus tôt qu'il y avait un conseil de direction,

 11   n'est-ce pas ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Et Mme Hartmann, entre autres, fait partie de ce conseil de direction,

 14   n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Combien de personnes font partie de ce conseil de direction du centre ?

 17   R.  Sept.

 18   Q.  Pour ce qui est du processus décisionnel au sein de ce centre, puis-je

 19   avancer qu'en ce qui concerne des problèmes importants, on recherche

 20   toujours le consensus, il y a donc un processus décisionnel collectif, par

 21   opposition à un processus décisionnel de la part d'une personne ? Puis-je

 22   avancer cela ?

 23   R.  Oui, il s'agit en effet d'un consensus.

 24   Q.  Au fil des ans, vous avez eu la possibilité de traiter avec des

 25   gouvernements dans différentes régions du monde.

 26   R.  Oui, mais je dirais que nos contacts avec les gouvernements étaient

 27   toujours associés en quelque sorte au procès de crimes de guerre et à notre

 28   besoin d'établir les faits. Nous n'avons pas de contact politique avec les

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  1   gouvernements, parce que nous ne sommes pas un parti politique. En fait,

  2   nous établissons le contact pour pouvoir établir la justice à la suite de

  3   conflits armés. C'est en ce sens que nous maintenons effectivement des

  4   contacts avec tous les gouvernements de la région.

  5   Q.  Puis-je avancer que les gouvernements, qui peuvent être conçus comme

  6   une grande organisation, ont également un processus décisionnel collectif

  7   qui assez semblable à celui de votre centre, comme toute autre organisation

  8   importante ?

  9   R.  Très franchement, je ne sais pas comment les gouvernements sont

 10   structurés et organisés. D'ailleurs je n'ai pas beaucoup de contacts avec

 11   les gouvernements de la région. Nous prenons ces contacts seulement lorsque

 12   le besoin se fait vraiment sentir dans le cadre de procès de crimes de

 13   guerre. Par exemple, en 2004, le ministère de la Justice de la République

 14   de Croatie est un des ministères avec lesquels nous avons pris contact à

 15   propos des procès de crimes de guerre à Belgrade, parce qu'il y avait ces

 16   procès qui débutaient. Il s'agissait de l'exécution de prisonniers croates.

 17   Donc je me suis adressée à ce sujet au ministère de la Justice de la

 18   République de Croatie en leur demandant de nous aider à encourager les

 19   témoins, la partie lésée, à venir témoigner. Voilà comment j'établis le

 20   contact avec les gouvernements, hormis le fait qu'en tant que simple

 21   citoyenne, je suis le rythme du processus démocratique de notre société et

 22   je vois comment cela évolue ou comment cela est entravé en quelque sorte.

 23   Sinon, je n'ai pas particulièrement de raison de chercher à avoir des

 24   contacts supplémentaires ou des explications de la part du gouvernement ou

 25   de familiariser avec la façon dont ils adoptent leurs décisions.

 26   Je suis le travail effectué par les parlements et la façon, par exemple,

 27   dont ces parlements adoptent leurs décisions. Je suis au fait de l'ordre du

 28   jour des parlements en Bosnie-Herzégovine, ainsi qu'en Serbie, mais en tant

Page 464

  1   que simple citoyenne.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous demanderais de ralentir votre

  3   rythme, car l'interprète a du mal à suivre votre cadence, Madame.

  4   M. MacFARLANE : [interprétation]

  5   Q.  Madame Kandic, je vais maintenant passer à la toute dernière série de

  6   questions et cela a à voir avec vos rapports avec Mme Hartmann, l'accusée

  7   en l'espèce.

  8   Au début de votre déposition, vous avez indiqué comment et quand vous

  9   aviez connu Mme Hartmann, et vous nous avez dit que vous la connaissiez

 10   depuis un certain nombre d'années. J'aimerais savoir quand vous lui avez

 11   parlé pour la dernière fois.

 12   R.  A la fin du mois de mai de cette année.

 13   Q.  Vous avez indiqué que vous étiez vraiment désolée de voir qu'elle avait

 14   été accusée et inculpée.

 15   R.  Non, je n'ai pas dit que j'étais désolée. J'ai estimé que cela était

 16   injuste, et cela fait des années que je proteste contre cela et contre la

 17   façon dont on a empêché que ces documents soient communiqués. Je ne suis

 18   pas la seule, d'autres l'ont dit également. Il me semblait que cette mise

 19   en accusation était profondément injuste. En fait, moi, j'étais ici pour

 20   préconiser la communication de ces documents, je ne parlais pas de mes

 21   contacts avec elle. Il y a un nombre infini de militants des droits de

 22   l'homme, de juristes. Je pense également au président du conseil de

 23   direction du centre de droits humanitaires, le Pr Pajic, qui est très

 24   connu, qui lui aussi a préconisé cela. Il y a de nombreux autres juristes,

 25   de nombreux autres juristes du droit humanitaire international, qui ont

 26   protesté de façon véhémente et qui se sont érigés pour justement que la

 27   transparence soit faite et pour que du fait de cette transparence on

 28   n'exclut pas des documents confidentiels et des éléments de preuve

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  1   importants.

  2   Q.  Je ne vous parle pas d'autres personnes, je ne vous parle pas de

  3   documents. Je vous demande votre sentiment à propos de ce procès.

  4   J'aimerais obtenir votre réaction, parce que vous étiez d'avis qu'il était

  5   injuste que Mme Hartmann soit mise en accusation.

  6   R.  Ce n'est pas une question de sentiments, voyez-vous. Il s'agit d'une

  7   attitude de principe de ma part, c'est une question de principe. Ce n'est

  8   pas tant que je sois désolée, quels que soient les chefs d'inculpation

  9   dressés contre elle, c'est pour cela que je réitère ce que je dis depuis

 10   des années. Il ne s'agit pas d'émotions, de sentiments d'amitié. Il s'agit

 11   d'une question extrêmement professionnelle, et c'est mon point de vue à ce

 12   sujet, peu importe qu'il s'agisse de Florence Hartmann ou d'une autre

 13   personne d'ailleurs.

 14   Q.  Voilà quelle sera ma toute dernière question : au vu de ce que vous

 15   avez avancé, je suppose que vous ne souhaitez pas voir l'accusée condamnée.

 16   R.  Ecoutez, je dois modifier ce que vous venez de dire. Vous m'avez dit

 17   que je ne souhaiterais pas la voir condamner. Mais je crois, véritablement

 18   et profondément, qu'il n'y a pas une seule raison véritable - et je fais

 19   référence à la vérité et à la justice - je disais donc que je ne pense pas

 20   qu'il y ait une seule raison de la condamner. A mon avis, ce procès devrait

 21   permettre de réexaminer la décision qui a fait en sorte que ces comptes

 22   rendus ne soient pas communiqués depuis si longtemps, ce qui fait qu'ainsi

 23   nous pourrions enfin éliminer tous les doutes, écarter tous les soupçons eu

 24   égard aux éléments de preuve relatifs aux crimes à Srebrenica et à propos

 25   de tout ce qui s'est passé en 1992 et en 1993. Car pour nous, pour nous,

 26   citoyens des pays ou des Etats qui formaient l'ex-Yougoslavie, il est

 27   absolument essentiel de pouvoir être confrontés à ce passé. Alors le fait

 28   est que nous n'avons pas les autorités les plus démocratiques dont nous

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  1   avons besoin d'ailleurs, et c'est pour cela, entre autres, que cette

  2   question a son importance. Nous devons véritablement cesser d'apporter

  3   notre soutien à quelque chose qui appartient au régime de Milosevic, aux

  4   anciennes autorités. Je crois qu'il est absolument important de ne plus

  5   avoir de secrets, de ne plus garder le secret pour ce qui est de cet Etat

  6   de Milosevic, il faut absolument cesser de créer des mythes et il faut

  7   forcer la main aux autorités actuelles pour qu'elles agissent conformément

  8   aux faits, quel que soit le degré de difficulté, quelle que soit la honte

  9   que cela engendrera, mais ces faits doivent être dévoilés. Car l'Etat de

 10   Milosevic a fait quelque chose et nous devons connaître la vérité à ce

 11   sujet.

 12   Q.  Madame Kandic, au vu de ce que vous dites, je suggère que ce procès est

 13   pour vous un vecteur qui vous permet de relayer votre objectif, à savoir la

 14   communication de ces documents; est-ce exact ?

 15   R.  Je saisis toutes les occasions qui me sont données pour affirmer que

 16   nous ne devons pas avoir de secrets, et pour dire également que nous devons

 17   exercer des pressions sur les autorités pour qu'ils renoncent à utiliser

 18   cet outil qui a été le leur, cet outil de manipulation et de dissimulation.

 19   Nous devons avoir des garanties pour que ces crimes n'existent plus, ne se

 20   répètent plus; et l'une des garanties justement soit de faire en sorte de

 21   ne plus déclarer ou invoquer le secret défense.

 22   Alors vous interpréterez cela de la façon que vous l'avez fait, à savoir

 23   vous m'accusez d'être une oratrice, une politicienne, vous m'accusez

 24   d'utiliser cela pour promouvoir mes objectifs personnels, mais je n'ai pas

 25   d'objectifs personnels. Tous mes objectifs se fondent sur ce que j'ai

 26   appris depuis le début de cette guerre. Moi, je n'ai pas d'objectifs

 27   privés. Je n'ai d'ailleurs aucun pouvoir. Je ne suis qu'une militante des

 28   droits de l'homme qui a appris, après moult années -- qui a appris en fait

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  1   que la communication de faits peut véritablement être d'une aide précieuse

  2   pour nous.

  3   Moi, j'habite là-bas. Vous, vous n'habitez pas là-bas. Je voudrais que

  4   notre avenir soit plus radieux. Je voudrais forcer et contraindre ces

  5   autorités à mettre à notre disposition tous ces faits du passé. Je voudrais

  6   qu'ils nous disent les faits. Je voudrais qu'ils nous indiquent où se

  7   trouvent les charniers. Je voudrais qu'ils nous montrent les comptes

  8   rendus, les procès-verbaux de l'armée. Car l'armée n'est absolument pas

  9   innocente. Les généraux sont toujours en liberté, des milliers de personnes

 10   ont été tuées. Je voudrais en fait, que l'on lève le voile de mystère qui

 11   entoure la police, qui entoure l'armée, et que l'on accorde la plus haute

 12   priorité à tout ce qui est professionnel, alors que rien ne sera

 13   professionnel si ces documents continuent à nous être cachés.

 14   M. MacFARLANE : [interprétation] Je n'ai plus de questions à poser à ce

 15   témoin.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Monsieur --

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Je --

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je m'excuse, Madame. On ne vous a pas

 19   posé de question. Le Procureur vient de nous dire qu'il n'a plus de

 20   questions à vous poser.

 21   Maître Mettraux, vous avez des questions supplémentaires ?

 22   M. METTRAUX : [interprétation] Oui, tout à fait.

 23   Avant que nous ne commencions, nous avons toute une série de documents à

 24   distribuer au témoin, au Procureur ainsi qu'à la Chambre.

 25   Nouvel interrogatoire par M. Mettraux :

 26   Q.  [interprétation] Bonjour, Madame Kandic.

 27   Est-ce que vous vous souvenez avoir répondu à un certain nombre de

 28   questions posées par le Procureur, d'abord il y a deux semaines lorsque

Page 468

  1   vous êtes venue, puis un peu plus tôt ce matin, il s'agissait en fait d'une

  2   mise en garde, d'une observation, mais je pense qu'il s'agissait plutôt

  3   d'une mise en garde que Sasa Obradovic avait fait ? Vous vous souvenez de

  4   ces questions ?

  5   R.  Oui, oui, tout à fait.

  6   Q.  J'aimerais vous demander de prendre ce qui correspond à l'onglet numéro

  7   1 de la série de documents que je viens de distribuer. Vous verrez qu'il

  8   s'agit d'extraits du compte rendu d'audience du 29 juin 2007, donc il

  9   s'agit de la conférence qui a eu lieu à Belgrade, conférence que vous avez

 10   aidé à organiser, j'aimerais vous demander de bien vouloir prendre la page

 11   40, donc 40, je répète.

 12   Est-ce que vous pouvez --

 13   R.  Non, non, non, je ne trouve pas cela. Page 40, vous avez dit ?

 14   Q.  Oui, oui, tout à fait.

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Est-ce que vous voyez qu'à la fin de la page il y a une déclaration qui

 17   est attribuée à M. Sasa Obradovic ? Est-ce que vous voyez cela ?

 18   R.  Oui, oui, oui, tout à fait.

 19   Q.  Si vous tournez la page et que vous passez à la page 41, vous verrez

 20   que la déclaration de M. Obradovic se poursuit sur cette page; vous le

 21   voyez ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Je vais vous demander du passage qui se trouve juste en dessous du

 24   milieu de la page, vous voyez qu'il y a une phrase qui commence par : "En

 25   dernier lieu, en ce qui concerne les parties censurées du document…" Je

 26   vais vous en donner lecture.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous pourriez nous indiquer

 28   clairement de quoi il s'agit, de quelle ligne il

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  1   s'agit ?

  2   M. METTRAUX : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, il s'agit de 16

  3   lignes à partir de la fin, donc cela se trouve juste en dessous de la

  4   partie qui est surlignée. Cela commence par les mots suivants : "En dernier

  5   lieu, en ce qui concerne les parties censurées des documents…"

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien.

  7   M. METTRAUX : [interprétation]

  8   Q.  Voilà ce qui est écrit, Madame Kandic :

  9   "En dernier lieu, pour ce qui est des parties censurées des documents,

 10   voilà ce que j'aimerais vous dire, j'aimerais vous dire deux choses, à

 11   savoir l'accusé Milosevic était entièrement d'accord avec l'opinion de Mme

 12   Scare Ozbolt, à savoir que tout devait être rendu public non seulement pour

 13   ce qui était des sessions publiques, mais également pour ce qui était des

 14   sessions à huis clos."

 15   Vous le voyez cela ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  En fait, à quoi fait référence M. Obradovic ? Est-ce qu'il faisait

 18   référence aux extraits expurgés des documents ou aux décisions

 19   confidentielles rendues par le Tribunal ?

 20   R.  Excusez-moi. Est-ce que vous pourriez, je vous prie, répéter votre

 21   question.

 22   Q.  Oui. Donc M. Obradovic indique que M. Milosevic convient que les

 23   documents devraient être publics. Alors est-ce qu'il s'agissait des

 24   décisions confidentielles du Tribunal ou des parties censurées des

 25   documents ?

 26   R.  Je pense qu'il faisait référence aux parties censurées des procès-

 27   verbaux.

 28   Q.  Merci. Si vous poursuivez votre lecture et que vous passez à sept

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  1   lignes après la phrase dont je viens de vous donner lecture. Il s'agit en

  2   fait de neuf lignes à partir du bas de la page. Cela commence par les mots

  3   suivants : "A la télé Hayat…" Alors voilà ce qui est écrit :

  4   "A la télé Hayat -- merci beaucoup. A la télé Hayat, la journaliste Senka

  5   Hadzovic a présenté les parties censurées de l'un des documents en question

  6   et il n'y a absolument eu aucune enquête diligentée à propos de cet acte

  7   criminel de violation du tribunal."

  8   Est-ce que vous pourriez nous dire dans un premier temps qui est Mme

  9   Hadzovic ?

 10   R.  Mme Hadzovic est une journaliste de Bosnie-Herzégovine, c'est tout.

 11   Q.  Est-ce que vous pourriez nous expliquer brièvement ce qu'a montré, sur

 12   la chaîne Hayat, Mme Hadzovic, et à quoi fait référence M. Obradovic ?

 13   R.  Elle a fait référence à la teneur de certains des procès-verbaux des

 14   réunions du Conseil de la Défense suprême, et il lui a demandé à ce moment-

 15   là si elle savait que ces procès-verbaux avaient été déclarés confidentiels

 16   conformément aux décisions qui avaient été prises. Il a également ajouté à

 17   ce sujet qu'en tant que fonctionnaire public, il était contraint par sa

 18   fonction de protéger ces décisions, quelle que fut la personne qui avait

 19   formulé le concept de sécurité nationale et quelle que fut la personne qui

 20   avait expliqué pourquoi cet intérêt avait été défini de cette façon. Il a

 21   ajouté qu'en tant que membre de la fonction publique, il protégerait et

 22   défendrait toute politique menée par l'Etat, quelle que soit sa valeur

 23   d'ailleurs, parce qu'il représentait la fonction publique de son pays, et

 24   c'est ce qu'il dit ici. Il le dit lors de la réunion et cela a été repris

 25   par le compte rendu.

 26   Q.  Nous reviendrons à cette question de la fonction publique et de ses

 27   représentants dans un instant. Mais nous sommes toujours à cette même page,

 28   prenons la page suivante, M. Obradovic fait un commentaire sur la teneur du

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  1   document, la teneur supposée de ce document. Voici ce qu'il dit :

  2   "Ce document portait sur l'intervention militaire des unités de l'armée

  3   yougoslave, d'après ce que j'ai pu voir, ça s'est passé sur le plateau de

  4   Niksic, et au cours de cette action huit membres de l'armée yougoslave ont

  5   été tués."

  6   Madame Kandic, M. Obradovic, en tant que fonctionnaire représentant la

  7   Serbie, est-ce qu'il fait référence au contenu de ce procès-verbal, au

  8   compte rendu du Conseil suprême de la Défense censuré par le Tribunal ?

  9   R.  Il parle ici pas seulement, manifestement, de la décision. Il parle du

 10   contenu même de ces documents.

 11   Q.  Merci. Prenons maintenant la page 93 du même document, si vous le

 12   voulez bien, 93. Vous vous souvenez des questions qui vous ont été posées

 13   par M. MacFarlane sur cette partie-ci ? Permettez-moi d'en poser quelques-

 14   unes à mon tour.

 15   Est-ce que vous avez trouvé la bonne page, Madame Kandic ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Revenons sur ce que M. Obradovic dit ici. Il s'agit du début de son

 18   intervention, je le cite :

 19   "Non, je n'aimerais pas donner de réponse, car je viens tout juste

 20   d'apprendre de la bouche de Mme Hadzovic qu'elle en avait 40 pages. Si je

 21   ne m'abuse, je pense avoir raison de dire que ce document devait être

 22   encore plus long que cela et qui faisait aussi référence à autre chose.

 23   Vous avez fourni une explication, et si les choses sont bien comme vous le

 24   dites, je n'ai rien à ajouter. La seule chose que vous n'avez pas faite

 25   c'est de nous dire de quelle façon vous avez obtenu ce document. Je ne vais

 26   pas aborder la question ici, mais c'est comme si vous aviez obtenu un

 27   document qui a été protégé de la vue de l'opinion publique par le Tribunal

 28   de La Haye, à ce moment-là vous commettez une infraction outrage au

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  1   Tribunal, vous le savez, n'est-ce pas ?"

  2   Vous voyez ce passage, Madame ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Un peu plus loin, environ sept lignes plus loin, il dit ceci :

  5   "S'il y a quelque chose qui était protégé dans l'intérêt de l'Etat, dans

  6   notre intérêt, mon intérêt, moi qui suis comme on l'a dit, un

  7   fonctionnaire, un représentant de la fonction publique, je dois protéger

  8   ces intérêts, quel que soit la défi qu'on en donne ou qui a donné cette

  9   définition ni ces modalités. C'est simplement mon devoir."

 10   Ceci rappelle le passage que j'ai cité précédemment. Mais soyons

 11   clairs. Est-ce que M. Obradovic lançait un avertissement à l'intention de

 12   Mme Hadzovic ? En quoi consistant cet avertissement, est-ce que c'était le

 13   fait qu'on aurait divulgué un document protégé par des mesures de

 14   protection ou est-ce que c'était l'existence de décisions prises par ce

 15   Tribunal ? Quelle était la nature de cette mise en garde ?

 16   R.  Il parle des documents protégés.

 17   Q.  Revenons à la page précédente du document; page 92. Vous le voyez, on y

 18   trouve une intervention qui apparemment est faite par Mme Senka Hadzovic,

 19   cette journaliste. Voici ce qu'elle dit, ce qui a ensuite provoqué cette

 20   mise en garde de M. Obradovic. Elle disait ceci :

 21   "Je m'appelle Senka Hadzovic. Je suis journaliste à la chaîne Hayat, dont

 22   M. Obradovic a parlé. Il a dit qu'il y avait manipulation du procès-verbal

 23   dont j'aurais parlé la première lors d'une émission. J'aimerais rappeler

 24   brièvement ce que j'ai dit alors. J'ai des extraits de ces procès-verbaux

 25   qui faisaient une quarantaine de pages. Remarquez, s'il vous plaît, que je

 26   n'avais pas toutes les pages, il y en avait plusieurs qui manquaient, et je

 27   n'avais aucune des parties qui avaient été censurées."

 28   Essayons de faire la lumière sur un point, Madame Kandic, une fois de plus.

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  1   Qu'avait montré Mme Hadzovic sur la chaîne Hayat ? Est-ce que c'était des

  2   parties non censurées d'un des documents protégés ou est-ce qu'elle avait

  3   montré une décision de ce Tribunal ?

  4   R.  Je n'ai pas vu ce qu'elle a montré à la télévision, mais ici elle parle

  5   des procès-verbaux non censurés. Elle ne parle pas de la décision.

  6   Q.  Savez-vous si Mme Hadzovic a jamais été poursuivie pour outrage au

  7   tribunal, ce dont, apparemment, d'après ses mots, elle se serait rendue

  8   coupable ?

  9   R.  Non, jamais. Je n'ai jamais entendu dire qu'elle avait été poursuivie

 10   ni mise en accusation.

 11   Q.  Savez-vous s'il y a eu des griefs de la part de la Serbie-et-Monténégro

 12   adressés à ce Tribunal ou à une autre institution judiciaire, parce que Mme

 13   Hadzovic aurait divulgué des documents confidentiels ?

 14   R.  Non, jamais un seul mot n'a été dit en public à ce propos. Même celui

 15   qui est membre de la fonction publique, comme il le dit lui-même, Sasa

 16   Obradovic, a dit qu'en sa qualité il allait demander que soient engagées

 17   des poursuites ou présenter une plainte contre Mme Hadzovic pour cette

 18   raison. Personne n'a réagi, personne n'a demandé à ce que soit entamé une

 19   procédure quelle qu'elle soit.

 20   Q.  Et la date de la conférence le montre peut-être clairement, mais

 21   j'aimerais vous demander de confirmer ou d'infirmer cette question. Nous

 22   venons de parler de ces informations placées dans le domaine public par Mme

 23   Hadzovic. Est-ce qu'elle l'a fait avant que le livre de Mme Hartmann ne

 24   soit publié ?

 25   R.  Mais vous voyez à quelle date s'est tenue cette conférence. Vous voyez

 26   aussi ce que dit la journaliste, Mme Hadzovic. Ceci montre clairement que

 27   ceci s'est passé bien avant que ne soit publié le livre de Mme Hartmann.

 28   Q.  Merci. Je vais passer à quelque chose qui est un peu différent, mais

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  1   qui demeure dans le contexte de cette conférence que vous avez organisée à

  2   Belgrade. Je reviens à ce que laissait entendre il y a une douzaine de

  3   jours M. MacFarlane. A la page 416 du compte rendu, il disait que l'avis du

  4   Pr Stojanovic, ambassadeur de Serbie, et de M. Obradovic, fonctionnaire des

  5   services, étaient en fait des avis exprimés à titre personnel et non pas en

  6   tant qu'avis officiel venant de leur fonction. Vous vous souvenez de ce que

  7   M. MacFarlane a dit ?

  8   R.  Oui, tout à fait.

  9   Q.  Et à la page 416 et page 417, vous avez dit que non, qu'à votre avis,

 10   ils avaient exprimé la position officielle de leur gouvernement.

 11   R.  Oui, nous avons invité le Pr Stojanovic, parce qu'il était le chef de

 12   l'équipe de la Défense de la Serbie devant la CIJ et c'est lui qui a choisi

 13   Sasa Obradovic au nom de l'équipe de la Défense et lui a demandé de

 14   participer. Et Sasa Obradovic a dit plus tard qu'il était aussi agent de la

 15   République de Serbie devant la CIJ. C'était donc en leur qualité officielle

 16   que ces personnes étaient présentes et ces personnes exprimaient la

 17   position officielle pendant toute la durée de la conférence. Le Pr

 18   Stojanovic a dit à un moment donné qu'il préconisait la communication de

 19   ces documents secrets. Ceci mis à part --

 20   Q.  Une chose à la fois, s'il vous plaît. Nous allons maintenant passer à

 21   la page 16 de ce document, là où nous avons la transcription de ce qui

 22   s'est dit pendant la conférence.

 23   Je pense que ce que je vais vous demander ne portera pas à contestation.

 24   Est-il vrai que lorsque les intervenants ont pris la parole pour la

 25   première fois, ils ont expliqué pourquoi ils étaient là, on a mentionné

 26   leur raison d'être à cette conférence, n'est-ce pas ?

 27   R.  C'est exact.

 28   Q.  A cette page 16, nous avons l'intervention de M. Radoslav Stojanovic.

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  1   Il est présenté comme étant l'ambassadeur de la Serbie aux Pays-Bas. Etait-

  2   ce bien la qualité qui a fait qu'il a été invité à cette conférence ?

  3   R.  Non. A l'époque, il était ambassadeur de Serbie aux Pays-Bas, c'était

  4   le poste qu'il occupait. Alors qu'à ce moment-là, le procès à la CIJ était

  5   déjà terminé, le jugement avait été rendu, et il était normal qu'on le

  6   présente en tant qu'ambassadeur. Mais pendant toute la durée de la

  7   conférence, parce qu'on discuté du jugement qui venait d'être rendu avant

  8   que ne se tienne la présente conférence, nous avons discuté des faits de la

  9   cause, et ceci, en rapport avec le travail effectué par l'équipe juridique

 10   chargée de la défense de la Serbie. Nous tous, nous nous sommes adressés à

 11   lui, en sa qualité de chef de l'équipe juridique chargée de la défense de

 12   la Serbie et c'est comme ça qu'il s'est comporté, tout comme Sasa Obradovic

 13   s'est présenté comme étant un des représentants de la République de Serbie

 14   devant la Cour Internationale de Justice. Le Pr Rade Stojanovic, et là je

 15   le cite, a dit : "Nous avons défendu la République de Serbie devant la

 16   CIJ." Il ne disait pas ça à titre d'ambassadeur. Un ambassadeur n'est pas

 17   censé défendre son Etat lorsque celui-ci se voit reprocher des chefs

 18   d'accusation au pénal. Il parlait en sa qualité de chef de l'équipe

 19   juridique chargée de la Défense. Il disait qu'ils avaient bien fait leur

 20   travail; mission accomplie, avait-il dit.

 21   Q.  Prenons la page 84. C'est dans la deuxième partie de cette page 84.

 22   Vous voyez le passage ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Prenons la deuxième phrase de ce paragraphe. Voici ce que vous dites :

 25   "Mais j'ai une observation à faire, elle concerne le comportement des

 26   membres de l'équipe de la Défense, le comportement de M. l'ambassadeur

 27   Stojanovic et de son assistant, Sasa Obradovic."

 28   Vous venez de le dire, est-ce que vous vous êtes adressée à ces deux

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  1   personnalités en tant que membres de l'équipe chargée de la défense de la

  2   Serbie ou est-ce que c'est à un autre titre que vous vous êtes adressée à

  3   eux lorsque vous leur avez parlé ?

  4   R.  Ecoutez, ce que je dis ici dans ce texte, je dis que l'ambassadeur

  5   Stojanovic et son assistant, Sasa Obradovic - mais c'est de façon

  6   informelle - Sasa Obradovic n'était pas l'assistant de l'ambassadeur

  7   Stojanovic, mais c'est la coutume. Lorsque vous avez un ambassadeur quelles

  8   que soient ces autres fonctions éventuelles ou ces autres postes, il est

  9   normal qu'on utilise son titre d'ambassadeur pour s'adresser à lui. C'est

 10   de la pure courtoisie. La coutume le veut. De jure, à l'époque, il était

 11   ambassadeur, mais de facto et dans le cadre de cette conférence, il est

 12   intervenu et nous l'avons écouté en sa capacité de chef de l'équipe

 13   juridique chargée de la Défense de la Serbie.

 14   Q.  Lorsque vous parliez à M. Stojanovic ou même à M. Obradovic, en disant

 15   que c'étaient des membres de la Défense, est-ce qu'ils se sont insurgés et

 16   se sont dit : Non, nous ne sommes pas ici à titre officiel ? Est-ce que

 17   l'un ou l'autre aurait dit quelque chose de la sorte ?

 18   R.  Non, justement parce que c'était quelque chose qui n'a jamais été

 19   contesté. C'était clair. Ces deux personnes avaient été invitées à cette

 20   conférence, ils y ont participé en qualité de membres de l'équipe juridique

 21   chargée de la Défense de la Serbie.

 22   Q.  Je pense que vous l'avez déjà expliqué, mais je vous demande quand même

 23   ceci : vous avez dit au moins une fois que M. Stojanovic avait exprimé son

 24   avis personnel. A ce moment-là lorsqu'il l'a fait, il l'a dit expressément

 25   qu'il exprimait un avis personnel, n'est-ce pas ?

 26   R.  Bien sûr, il l'a fait une fois. Mais même lorsqu'il l'a fait, voyez

 27   lorsque quelqu'un comme M. le Professeur Stojanovic dit : Je vous exprime

 28   maintenant un avis personnel. Ce n'est pas comme si un citoyen lambda

Page 478

  1   s'exprimait, parce que c'était quand même un professeur de la Faculté de

  2   droit. C'est un des représentants les plus éminents de l'Etat. Un

  3   ambassadeur n'a jamais le droit d'exprimer un avis personnel. Et M.

  4   Obradovic l'a dit parfaitement lorsqu'il a dit qu'il était fonctionnaire de

  5   l'Etat et qu'il avait pour devoir de servir les intérêts de cet Etat quelle

  6   que soit la personne qui définit cet intérêt national et comment elle le

  7   fait. Si Milosevic l'avait nommé au poste qu'il occupait, à ce moment-là,

  8   il aurait exprimé l'avis de M. Milosevic, il n'aurait défendu que l'avis de

  9   ce dernier. C'est ça qu'il essayait de dire.

 10   La question qui se pose, c'est de savoir si l'intérêt de la sécurité

 11   nationale suffit pour qu'un Etat demande toujours des mesures de protection

 12   pour ce genre de documents militaires. Il n'a même pas abordé ce sujet. Si

 13   on lui avait demandé de faire disparaître certains de ces documents en les

 14   brûlant, je suppose que M. Obradovic l'aurait fait.

 15   Q.  Prenons ces passages dont vous venez de parler. Prenons, s'il vous

 16   plaît, la page 33. Voyons ce que dit M. Radoslav Stojanovic. Je le cite :

 17   "C'est l'intervention à propos de l'opinion de" - et là c'était

 18   l'intervention du Juge Al-Khasawneh - "de ce qui avait été dit par

 19   l'associé du centre, Mme Orlovic. C'est ça qui m'a poussé à intervenir.

 20   C'était à propos de la partie concernant les parties expurgées du document

 21   fourni au Tribunal de La Haye et dont la CIJ n'a tout simplement pas tenu

 22   compte."

 23   En l'occurrence et à d'autres moments de la conférence, est-ce que M.

 24   Stojanovic n'a jamais, d'une façon ou d'une autre, essayé de dissimuler

 25   l'existence de décisions confidentielles rendues par le présent Tribunal

 26   par rapport aux documents dont il est question ?

 27   R.  Non, pas du tout, jamais de la vie. Jamais il n'a essayé de le

 28   dissimuler, jamais. Personne n'a essayé de le dissimuler.

Page 479

  1   Q.  Prenons le paragraphe suivant. Les premiers mots en sont les suivants :

  2   "personnellement…" et je le cite :

  3   "Personnellement, je peux dire que ce n'était pas nécessaire, mais ce

  4   qui compte ici - et là où Al-Khasawneh n'a pas raison - ce qui est

  5   important, c'est que ces parties ont été biffées non pas pour dissimuler

  6   des informations à la CIJ ni d'ailleurs à un autre tribunal, mais plutôt

  7   cacher cela à la partie demanderesse, à savoir la Bosnie-Herzégovine,

  8   contre laquelle nous préparons notre défense."

  9   Première question : est-ce à ce paragraphe que vous pensiez lorsque

 10   vous avez dit auparavant que M. Stojanovic avait dit précisément qu'il

 11   parlait à titre personnel ? Est-ce bien à ce paragraphe que vous pensiez ?

 12   R.  Vous venez de lire un passage de son intervention, mais je ne sais pas

 13   si là il s'exprimait à titre personnel. Il discute ici de l'opinion

 14   dissidente du Juge Al-Khasawneh et il dit que, personnellement, en tant que

 15   membre de l'équipe, il a tel ou tel avis. Mais pour moi - et ça ne veut pas

 16   dire que c'est son avis personnel en tant que particulier et que ceci n'est

 17   pas en rapport avec le fait qu'il a été chef de l'équipe juridique. Il

 18   disait simplement ce qui les avait poussés à demander des mesures de

 19   protection. Il voulait garder sous le coude certaines informations, ne pas

 20   les communiquer à la Bosnie-Herzégovine. Ce n'est pas ce qu'il a dit mot

 21   pour mot, mais j'ai compris le sens de ce qu'il disait comme étant qu'il

 22   fallait dissimuler ceci à la Bosnie-Herzégovine, mais aussi à l'opinion

 23   publique. Il disait qu'il n'essayait pas de dissimuler ça à la cour de

 24   justice, juste à la Bosnie-Herzégovine, mais je pense que l'opinion

 25   publique ne devait pas non plus être informée.

 26   Q.  Prenons la page 36 de ce même document. Vous allez voir, il y a des

 27   propos qui vous sont attribués. Vous commencez à la page 36, mais vous

 28   poursuivez à la page 37. Le passage qui m'intéresse se trouve dans cette

Page 480

  1   page. Si vous partez du bas, dix lignes plus haut, les premiers mots sont

  2   ceux-ci : "Je ne peux pas m'empêcher de me remémorer ou revoir

  3   rétrospectivement cette --"

  4   Messieurs les Juges, tout à fait, à gauche du paragraphe.

  5   Vous voyez, Madame ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Je pense que vous avez la traduction en serbe, ou je vous lis pour ce

  8   soit interprété en serbe :

  9   "Je ne peux pas m'empêcher de revoir les parties censurées des procès-

 10   verbaux du CDS et je ne peux pas m'empêcher à ce qu'a dit le Pr Rade

 11   Stojanovic, à savoir que les parties censurées du procès-verbal l'ont été

 12   de façon à ce que la partie adverse, la partie de demanderesse, ne soit pas

 13   autorisée à voir ce document."

 14   Permettez-moi de m'interrompre un instant.

 15   Est-ce que M. Stojanovic s'est opposé à un moment quelconque à ce que vous

 16   disiez, à savoir que certaines parties de ce document avaient été

 17   censurées, expurgées ? Est-ce qu'il s'est opposé à votre avis à un moment

 18   donné ?

 19   R.  Excusez-moi, quelle était votre question ?

 20   Q.  Je vais peut-être d'abord lire la phrase suivante. Ceci sera peut-être

 21   plus clair. Voici ce que vous avez dit :

 22   "Ces documents, ils avaient été modifiés, en parties censurées. Mais

 23   surtout, ils ont été dissimulés à l'opinion publique, et c'est là un fait

 24   fondamental. Ce qui comptait pour vous dans l'équipe chargée de la Défense

 25   de la Serbie, il fallait que vous demandiez la divulgation de ces documents

 26   et il faudrait que nous sachions exactement quelle est la teneur de ces

 27   documents."

 28   Quel est le message que vous essayez de faire passer à M. Stojanovic, puis

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  1   je vous demanderais quelle a été sa réaction ?

  2   R.  J'ai dit au Pr Stojanovic ceci : il avait dit qu'ils avaient uniquement

  3   demandé que la partie demanderesse, la Bosnie-Herzégovine, ne soit pas

  4   autorisée à voir ces documents militaires. Moi, j'ai dit qu'en faisant une

  5   telle demande, pratiquement ça revenait à demander que l'opinion publique

  6   ne soit pas non plus informée de l'existence ni de la teneur de ces

  7   documents. Puis j'ai ajouté qu'on aurait dû demander qu'eux, l'équipe

  8   aurait dû demander à ce que soit rendu ces documents. Il répond, il dit :

  9   Bien, ce que j'ai demandé.

 10   Q.  Je vais lire la réponse qu'il faut fournir. Je cite :

 11   "Je l'ai demandé, j'ai demandé à ceux qui ont dit le contraire."

 12   Est-ce que M. Stojanovic aurait contredit l'exactitude, la véracité de vos

 13   commentaires lorsque vous disiez notamment que ces documents avaient été

 14   censurés ?

 15   R.  Non, non.

 16   Q.  Est-ce que M. Stojanovic vous a prévenue, vous a mise en garde, vous a

 17   dit que peut-être vous vous rendiez coupable d'outrage et que vous devriez

 18   faire attention à ce que vous dites ?

 19   R.  Non.

 20   Q.  Est-ce qu'il a d'une façon ou d'une autre nié le fait que la Serbie

 21   avait demandé et obtenu des mesures de protection au TPIY pour ce qui était

 22   des comptes rendus du CDS et des documents militaires ?

 23   R.  Mais non.

 24   Q.  Cette conférence elle s'est tenue en juin 2007. Est-ce que la position

 25   des autorités serbes a changé depuis, je m'explique, est-ce qu'à un moment

 26   donné, il y a eu un revirement ? Est-ce qu'à un moment donné, les autorités

 27   serbes ont nié le fait qu'elles avaient obtenu ces mesures de protection

 28   qu'elles avaient demandées au Tribunal ?

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  1   R.  Non. Les autorités n'en ont plus discuté, ne se sont plus jamais

  2   prononcées, l'ont fait des déclarations. Après le jugement, ce n'était plus

  3   d'actualité pour les autorités serbes.

  4   Q.  Je vais d'abord vous demander ceci : est-ce qu'à un moment donné, un

  5   représentant officiel de la Serbie aurait nié le fait que la Serbie avait

  6   demandé et obtenu du Tribunal la confidentialité s'agissant des procès-

  7   verbaux du CDS et s'agissant des documents militaires ?

  8   R.  Non, il n'y a jamais eu de démenti.

  9   Q.  Certaines questions qui vous ont été posées portaient sur la

 10   coopération, la coopération des Etats avec le Tribunal. Vous vous en

 11   souvenez ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Vous vous souvenez de ces questions ?

 14   R.  Tout à fait.

 15   Q.  Vous avez eu affaire avec les autorités serbes pour ces sujets, pour

 16   d'autres peut-être, mais est-ce qu'un représentant officiel de l'Etat serbe

 17   ne s'est jamais prononcé à formuler un grief quelconque s'agissant du

 18   contenu du livre de Mme Hartmann ?

 19   R.  Non, jamais.

 20   Q.  Est-ce que vous n'avez jamais entendu qui que ce soit souhaitant

 21   réviser sa position vis-à-vis du Tribunal en raison de la publication du

 22   livre ou d'un article de Mme Hartmann ?

 23   R.  Non.

 24   Q.  Je voudrais vous demander de vous saisir de ce jeu de documents que

 25   l'Accusation vous a transmis. Est-ce que vous avez ces documents ?

 26   R.  Oui.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

 28   M. METTRAUX : [interprétation] Je pense c'est peut-être un bon moment pour

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  1   faire la pause, Monsieur le Président.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Nous allons faire la pause

  3   maintenant.

  4   --- L'audience est suspendue à 12 heures 01.

  5   --- L'audience est reprise à 12 heures 31.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Monsieur Mettraux.

  7   M. METTRAUX : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  8   Q.  Madame Kandic, vous vous souviendrez qu'avant la pause nous avons parlé

  9   dans le domaine de contre-interrogatoire la coopération de différents Etats

 10   avec le Tribunal. Vous avez indiqué à mon collègue, à la page 33 du compte

 11   rendu d'aujourd'hui, que vous aviez une idée générale de ces questions,

 12   mais pas vraiment une idée détaillée. Je voudrais vous lire les

 13   dispositions spécifiques qui portent sur ce Tribunal.

 14   Il s'agit de l'article 29 des Statuts du Tribunal. Il s'agit de la

 15   coopération et de l'aide judiciaire. Il y a le premier paragraphe qui

 16   stipule que :

 17   "Les Etats devront coopérer avec le Tribunal international dans la phase

 18   d'enquête et dans les poursuites contre des personnes qui seraient accusées

 19   d'avoir procédé à des violations graves des droits humanitaires."

 20   Il y a un paragraphe 2 qui stipule que :

 21   "Les Etats devront se conformer, sans délai déraisonnable à toute demande

 22   d'assistance ou toute requête provenant d'une Chambre d'instance."

 23   Ensuite, l'article cite des exemples.

 24   Madame Kandic, savez-vous que conformément au système statutaire de ce

 25   Tribunal, la coopération avec le Tribunal relève d'une obligation des

 26   Etats, qui doivent coopérer avec le Tribunal, et ce n'est donc pas

 27   facultatif. Etes-vous consciente de cela ?

 28   R.  Oui, je suis tout à fait consciente de cela, mais je sais également que

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  1   durant le procès Milosevic, l'Etat de Serbie n'a pas coopéré avec le

  2   Tribunal.

  3   Q.  J'aimerais que nous passions à l'onglet numéro 2 du jeu de documents de

  4   l'Accusation. Il s'agit du document qui a des onglets vert clair. Je crois

  5   que c'est celui qui est sous votre livre, le jeu de documents qui vous a

  6   été donné par l'Accusation.

  7   Le document qui m'intéresse est le document qui porte sur une déclaration

  8   de Serge Brammertz, qui porte la date du 4 juin 2009. Je voudrais vous

  9   demander de consulter la page 2 de ce document. Il s'agit d'une allocution

 10   de Serge Brammertz. Est-ce que vous voyez ce document, Madame Kandic ?

 11   Il y a un paragraphe juste en dessous de ceux qui vous ont été lus par

 12   l'Accusation, qui lit comme suit :

 13   "Depuis ma dernière réunion d'information avec le conseil, la Serbie a

 14   réalisé des avancées supplémentaires dans la coopération avec mon bureau.

 15   La grande majorité des requêtes d'entraide ont été honorées, y compris des

 16   requêtes d'accès à des documents et à des archives. Etant donné que des

 17   procès pour des hauts dirigeants sont déjà en cours et d'autres vont

 18   commencer très bientôt, nous espérons que cette tendance se poursuivra."

 19   Est-ce que ce que M. Serge Brammertz mentionne ici suggère qu'en fait la

 20   coopération de la part de la Serbie s'est améliorée plutôt que s'est

 21   détériorée durant l'année précédent les propos de Serge Brammertz ?

 22   R.  Oui. Il mentionne qu'il y a une amélioration.

 23   Q.  On vous a posé des questions sur des décisions, notamment un certain

 24   nombre de décisions qui ont été rendues par ce Tribunal en ce qui concerne

 25   des ordonnances de confidentialité, notamment en ce qui concerne la page 80

 26   [comme interprété] du compte rendu d'aujourd'hui. J'aimerais que vous

 27   consultiez l'autre jeu de documents que je vous ai transmis. Pouvez-vous

 28   passer à l'autre jeu de documents, s'il vous plaît. Je vous demande de

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  1   consulter l'onglet numéro 5 de cet onglet.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous n'avons pas d'onglet numéro 5.

  3   M. METTRAUX : [interprétation] Désolé, Monsieur le Président.

  4   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

  5   M. METTRAUX : [interprétation] Dans votre jeu de documents, il s'agira de

  6   l'onglet numéro 4.

  7   Q.  Madame Kandic, est-ce que vous avez une décision ? Il s'agit d'une

  8   décision dans le cadre du procès Milosevic qui porte la date du 23

  9   septembre 2004. Il s'agit d'une "Deuxième décision de la recevabilité de

 10   documents du CDS." Est-ce que vous avez ce document devant vous ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Puis-je vous demander de passer à la page 2 de ce document. Vous avez,

 13   au milieu de la page, une mention : "Notant les éléments suivants," "Noting

 14   the following" en anglais. Je vais vous le lire, de façon à ce que vous

 15   puissiez l'entendre en serbe également :

 16   "Notre Chambre d'instance a rendu une ordonnance dans sa décision

 17   confidentielle sur la demande de la Serbie-et-Monténégro demandant des

 18   mesures de protection conformément à la Règle 54 bis, ordonnance publiée le

 19   30 juillet 2003 ("quatrième décision" : petit A, que le gouvernement de

 20   Serbie-et-Monténégro devra fournir à l'Accusation les PV du Conseil de

 21   sécurité; et petit B, que l'Accusation conservera sur une base

 22   confidentielle les portions des PV pour lesquelles la Serbie-et-Monténégro

 23   avait demandé des mesures de protection et de les utiliser dans les

 24   poursuites devant la Chambre de première instance seulement dans des

 25   séances à huis clos, les comptes rendus seront placés sous pli scellé et ne

 26   seront pas communiqués au public."

 27   D'après cette décision publique, Madame Kandic, est-ce que cela signifie

 28   que le gouvernement avait publié le fait que le gouvernement de Serbie-et-

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  1   Monténégro avait demandé et avait obtenu des mesures de protection

  2   conformément à la Règle 54 bis concernant des parties des PV du CDS ? Est-

  3   ce exact, compte tenu de ce que vous avez lu dans ce paragraphe ?

  4   R.  Oui, tout à fait. C'est comme cela que j'interprète également ce

  5   paragraphe.

  6   Q.  Dans le petit B, il est mentionné que :

  7   "L'Accusation devra conserver sur une base confidentielle les parties

  8   des PV pour lesquelles la Serbie-et-Monténégro avaient demandé des mesures

  9   de protection."

 10   Pouvez-vous nous dire sur quel élément porte le besoin de

 11   confidentialité, sur le contenu du PV ou sur le fait que la Serbie-et-

 12   Monténégro avaient demandé des mesures de protection ?

 13   R.  La manière dont je l'interprète, c'est que le contenu devrait rester

 14   confidentiel et non le fait que des mesures de protection avaient été

 15   demandées.

 16   Q.  Lorsque vous parlez du contenu, vous pensez au contenu de la décision

 17   ou au contenu du compte rendu ou du PV du CDS ?

 18   R.  Moi, je pense qu'il s'agit du compte rendu ou du PV.

 19   Q.  Pouvons-nous passer au paragraphe 2 de ce document :

 20   "La Chambre de première instance a rendu une ordonnance dans sa neuvième

 21   décision sur des requêtes conformes à la Règle 54 bis de l'Accusation et de

 22   la Serbie-et-Monténégro, qui a été publiée le 15 octobre 2003, 'neuvième

 23   décision' - les éléments suivants : "Petit A, que la Serbie-et-Monténégro

 24   fournisse à l'Accusation les notes sténographiques du CDS; et petit B, que

 25   l'Accusation conserve, sur une base confidentielle, les parties de ces

 26   notes sténographiques pour lesquelles la Serbie-et-Monténégro avait demandé

 27   des mesures de protection, et de les utiliser dans les poursuites devant

 28   cette Chambre d'instance seulement durant des séances à huis clos. Les

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  1   comptes rendus devront être placés sous pli scellé et ne pourront pas être

  2   communiqués au public."

  3   Je voudrais que l'on se concentre encore une fois sur le petit B.

  4   L'Accusation demande que l'on conserve les éléments confidentiels, mais de

  5   quoi s'agit-il ? Il s'agit des parties des notes sténographiques du CDS, ou

  6   est-ce que c'est l'existence ou la totalité du contenu d'une décision

  7   rendue par le Tribunal ?

  8   R.  Il est très clair, dans cette décision de la Chambre, il s'agit des

  9   notes sténographiques, et c'est sur ces notes que portaient les demandes de

 10   mesures de protection de la Serbie-et-Monténégro.

 11   Q.  Si l'on passe au troisième paragraphe de cette brève décision, il est

 12   mentionné :

 13   "Ordonnance confidentielle concernant les documents du Conseil de Défense

 14   suprême, qui a été publiée le 16 juillet 2004. Cette ordonnance a demandé

 15   au greffe du TPIY de fournir à l'accusée, à ses associés juridiques, aux

 16   amicus curiae et à l'Accusation des copies des "versions protégées" des

 17   documents du CDS; et petit B, le greffe, l'accusée, les associés

 18   juridiques, les amicus curiae et l'Accusation devront conserver sur une

 19   base confidentielle les parties des documents du CDS qui avaient fait

 20   l'objet de mesures de protection et de les utiliser dans des poursuites

 21   devant la Chambre d'instance seulement dans des séances à huis clos dont

 22   les comptes rendus seront placés sous pli scellé et ne pourront pas être

 23   communiqués au public."

 24   Encore une fois, j'ai la même question, mais portant sur les amicus curiae,

 25   les accusés, les associés juridiques et le greffe. Sur quoi portait

 26   l'ordonnance de la Chambre d'instance à l'attention de ces parties ? Est-ce

 27   qu'il s'agissait de l'existence de la décision du Tribunal ou le contenu

 28   des portions expurgées des réunions du

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  1   CDS ?

  2   R.  La décision porte sur le contenu des PV expurgés du CDS, du Conseil

  3   suprême de la Défense.

  4   M. METTRAUX : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

  5   nous pourrions dire qu'il y avait une décision qui porte la date du 23

  6   septembre 2004 et qui est similaire, il s'agit de "La première décision sur

  7   la recevabilité des documents du Conseil suprême de la Défense."

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous prie de m'excuser. Mais je n'ai plus

  9   le compte rendu sur mon écran --

 10   M. METTRAUX : [interprétation]

 11   Q.  Un peu plus tôt aujourd'hui, et la première fois que vous avez comparu

 12   devant ce Tribunal, on vous a demandé d'expliquer ce qui avait été abordé

 13   en public - et je fais référence aux pages 7 et 8 et à la page 22 du compte

 14   rendu d'audience -est-ce que vous vous souvenez qu'on vous ait posé ces

 15   questions, Madame Kandic ?

 16   R.  Oui, tout à fait.

 17   Q.  Pourriez-vous nous dire si les décisions confidentielles de ce Tribunal

 18   fournissant des mesures de protection en ce qui concerne les PV et les

 19   notes du CDS et des fiches militaires relevaient du domaine public avant la

 20   publication du livre de Mme Hartmann ?

 21   R.  Lorsque les représentants de la Serbie-et-Monténégro se sont rendus à

 22   La Haye, on savait que les séances étaient à huis clos, et ils ont avancé

 23   les arguments pour étayer leur revendication lorsqu'ils ont demandé des

 24   mesures de protection pour des documents spécifiques.

 25   Q.  Je ne suis pas sûr que vous ayez répondu à la totalité de ma question,

 26   mais peut-être que ma question était trop longue. Je vais la reformuler. Le

 27   fait qu'il y avait des décisions confidentielles de ce Tribunal concernant

 28   le CDS, était-il connu du grand public ? Encore une fois, je parle de la

Page 490

  1   période antérieure à la publication du livre de Mme Hartmann; est-ce exact

  2   ou pas ?

  3   R.  Bien sûr, bien sûr, c'était du domaine public. Cette question n'était

  4   pas nouvelle, c'était très bien connu.

  5   Q.  Est-ce que le grand public savait que la partie requérante qui avait

  6   demandé d'avoir des mesures concernant les archives du CDS et des fichiers

  7   militaires était la Serbie-et-Monténégro ? Est-ce que l'on connaissait le

  8   demandeur ou la partie requérante dans le grand public ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Est-ce que c'était du domaine public que les mesures avaient été

 11   octroyées pour protéger les intérêts nationaux de la Serbie, et ceci donc

 12   avant la publication du livre de Mme Hartmann ? Est-ce que le grand public

 13   était au courant de cela ? 

 14   R.  Oui, le grand public savait que la Serbie avait pris toute une série de

 15   mesures pour se protéger devant la Cour Internationale de Justice.

 16   Q.  Est-ce que vous-même ou d'autres personnes travaillant pour les ONG ou

 17   dans le domaine des droits de l'homme, que la Serbie avait demandé ces

 18   mesures de protection au nom de la sécurité nationale ? Est-ce que c'est

 19   quelque chose qui était connu à l'époque ou pas ?

 20   R.  Je pense qu'on a commencé à en parler en 2000, mais il y avait des

 21   documents qui avaient été publiés en la matière, et on a commencé à parler

 22   et à écrire des articles sur le besoin de protéger la Serbie, parce que les

 23   citoyens serbes devraient sinon payer des réparations à la Bosnie-

 24   Herzégovine.

 25   Q.  Ces débats publics sur ces questions étaient-ils limités à des

 26   organisations de type ONG ou de droits de l'homme, ou est-ce qu'il y avait

 27   des discussions également dans d'autres domaines de la société civile,

 28   comme par exemple, les médias, le monde universitaire, par exemple ?

Page 491

  1   R.  Je me souviens d'articles qui avaient été rédigés par ceux qui avaient

  2   préparé la défense ou la réponse de la République de Serbie. Ils avaient

  3   fréquemment utilisé certains arguments montrant pourquoi il était vraiment

  4   important de défendre la Serbie et de préparer une bonne défense pour la

  5   Serbie de façon à ce que celle-ci ne soit pas punie dans une participation

  6   à un génocide. Dans ce contexte, c'étaient les raisons qui étaient avancées

  7   pour que la Serbie soit vraiment défendue en utilisant tous les moyens

  8   disponibles; un des instruments utilisés était d'intimider le public en

  9   brandissant le spectre des réparations, même si la partie requérante

 10   n'avait jamais mentionné de réparations.

 11   En ce qui me concerne, l'ONG n'avait --

 12   Q.  Madame Kandic, je vous prie de m'excuser, ma question n'était peut-être

 13   pas précise. Ma question était différente.

 14   Vous avez dit, en fait, qu'il y avait eu des discussions au sein des ONG ou

 15   de groupes de victimes ou de groupes des droits de l'homme. Ma question est

 16   de savoir s'il y avait des discussions similaires qui avaient lieu dans

 17   d'autres cercles, comme par exemple, dans le monde universitaire ou dans

 18   d'autres parties de la société civile.

 19   R.  Non, il n'y avait pas de débats dans le monde universitaire. Il n'y

 20   avait pas de tables rondes ou de conférences-débats. Mais de temps en temps

 21   on pouvait lire des articles, les opinions de juristes, des opinions

 22   isolées, mais qui, en même temps, étaient connus pour avoir été proches du

 23   régime sortant, et ils avaient conservé des liens avec les nouvelles

 24   autorités actuelles. On pouvait donc entendre des juristes ou des

 25   professeurs d'université, qui ont expliqué comment ou pourquoi la Serbie

 26   devait être protégée. Il y avait même de nouveaux adeptes de cette théorie,

 27   mais ils étaient associés à la nouvelle équipe de défense pour la Serbie.

 28   Il y avait également des professeurs renommés en droit humanitaire

Page 492

  1   international, des experts qui avaient fait part de leurs opinions et de

  2   leurs positions en expliquant pourquoi la Serbie devait faire l'objet de

  3   protection et que sa défense devait être garantie, et on faisait bien sûr

  4   référence au procès devant la CIJ.

  5   Q.  Je voudrais me concentrer maintenant sur les médias, c'est-à-dire

  6   l'IWPR, le "New York Times," la chaîne de télévision Hayat, parce que je

  7   crois que c'est comme ça qu'elle s'appelait, y a-t-il eu des références

  8   dans les médias, des discussions dans les médias de ces différents aspects,

  9   c'est-à-dire les mesures de protection qui avaient été octroyées pour les

 10   archives militaires ainsi que pour les PV du CDS ? Est-ce que c'était

 11   abordé dans la presse, à votre souvenance ?

 12   R.  Oui. Je me souviens d'un excellent journaliste, Slobodan Kostic, qui a

 13   écrit des articles à ce sujet, puis il y avait également Radio Free Europe

 14   qui faisait fréquemment référence à cela. Il y avait également

 15   l'institution pour le journalisme de guerre basée à Londres qui avait écrit

 16   également des papiers à ce sujet, et il y avait également de nombreuses

 17   autres personnes qui avaient fait part de leurs opinions, à commencer par

 18   des militants des droits de l'homme et des personnes qui ont participé ou

 19   qui étaient impliquées dans la défense de la République de Serbie et qui

 20   étaient également dans l'équipe de défense de la Bosnie-Herzégovine.

 21   Q.  Est-ce que ces discussions ont eu lieu avant ou après la publication du

 22   livre de Mme Hartmann, à votre connaissance ?

 23   R.  Je parle de ce qui s'est passé, ce qui a été écrit ou ce qui a été dit

 24   avant la publication du livre, et immédiatement après le prononcé de

 25   jugement, c'est-à-dire au moment où cette conférence s'est tenue à Belgrade

 26   le 22 juin 2007.

 27   Q.  Et mon collège vous a demandé si vous connaissiez bien le contenu de

 28   certains documents, et je voudrais vous poser une question sur un document

Page 493

  1   précisément. Il s'agit du dossier personnel de M. Ratko Mladic. Est-ce que

  2   vous avez eu connaissance de ce document et de son contenu ?

  3   R.  Non, je ne l'ai jamais vu.

  4   Q.  Lorsque vous avez exprimé des vues et des opinions concernant le

  5   contenu de ces PV du CDS et de ces fichiers militaires, est-ce que des

  6   représentants du gouvernement serbe vous ont contactée pour vous dire que

  7   les documents que vous aviez mentionné n'étaient pas ceux que vous croyiez

  8   être ?

  9   R.  Ce matin, j'ai cité le Pr Vojin Dimitrijevic, et bien que la

 10   journaliste lui a posé la question, il a dit - et je crois qu'il était

 11   assez certain en la matière - il faisait référence aux PV du CDS, et disait

 12   que le jugement de la CIJ n'avait pas vraiment permis de rendre justice.

 13   J'ai également eu la possibilité de m'entretenir avec le Pr Rade

 14   Stojanovic. Mais en fait que ce soit lui ou que ce soit les autres

 15   personnes mentionnées, ils ont toujours argué que l'Etat devait se

 16   défendre. Et le Pr Stojanovic disait également que ces documents devaient

 17   être publiés.

 18   J'ai eu la possibilité également de m'entretenir avec l'ancien ministre des

 19   Affaires étrangères de Serbie, Goran Svilanovic. Et il va sans dire que je

 20   ne leur ai pas demandé quel était le contenu des parties expurgées des PV

 21   du CDS. Mais j'ai toujours dit, j'ai toujours eu l'impression que ces

 22   parties contenaient des éléments de preuve qui auraient révélé la

 23   coopération et la participation de la Serbie dans la commission des actes

 24   de génocide à Srebrenica. Personne ne m'a jamais dit, c'est tout à fait

 25   faux ou quelque chose comme cela, personne ne s'est jamais exprimé en la

 26   matière, personne ne m'a dit que mes soupçons n'étaient pas justifiés.

 27   Q.  Merci beaucoup. Aujourd'hui à la page 42 et aux pages suivantes, on

 28   vous a posé une série de questions sur vos liens avec Mme Hartmann et son

Page 494

  1   implication dans votre centre. Savez-vous pourquoi Mme Hartmann a quitté

  2   son poste de journaliste pour devenir porte-parole du bureau du Procureur ?

  3   Connaissez-vous ses motivations derrière ce choix de carrière ?

  4   R.  Elle ne pouvait pas travailler en Serbie, elle ne peut pas travailler à

  5   Belgrade, elle a dû quitter le pays. Maintenant, quant à savoir pourquoi

  6   elle a décidé de cesser de travailler en tant que journaliste, je ne sais

  7   pas. Je la considère comme une excellente journaliste, et je pensais que

  8   c'était donc tout à fait naturel que de la nommer porte-parole du bureau du

  9   Procureur, car je ne pensais pas que d'autres journalistes auraient eu plus

 10   de connaissances qu'elle sur ce qui s'était passé dans le conflit armé en

 11   ex-Yougoslavie et, par conséquent, je pensais que ceci permettrait d'aider

 12   l'Accusation, ça ne m'a pas surprise. Mais je ne sais pas quelles sont les

 13   raisons qui ont motivé son choix lorsqu'elle a arrêté d'être journaliste et

 14   qu'elle a accepté ce poste au TPIY.

 15   Q.  Alors je vais vous poser la question suivante : savez-vous si la

 16   réussite de ce Tribunal était importante durant la période où elle a

 17   travaillé pour cette institution pendant les six ans durant lesquels elle a

 18   travaillé ? Est-ce que vous pensez que c'était vraiment important pour elle

 19   ?

 20   R.  Ecoutez, c'était une personne qui avait beaucoup voyagé, qui s'était

 21   également rendue sur tous les sites ou lieux de crime, c'est une personne

 22   qui avait été témoin oculaire de nombreuses choses. Elle avait rencontré

 23   beaucoup de victimes. Elle avait une connaissance de ce qui s'était passé,

 24   et elle rédigeait toujours, elle écrivait toujours à partir de faits, en

 25   prenant en considération des choses qu'elle avait pu elle-même voir, ou

 26   alors à la suite d'une recherche très méticuleuse faite sur le terrain.

 27   Donc j'en suis absolument convaincue de cela, et d'ailleurs je n'ai même

 28   pas eu besoin de lui poser cette question. Pour moi, elle était

Page 495

  1   indissociable quelque part de ce qui s'était passé. Et ce qui me semblait

  2   extrêmement important, c'est que c'était véritablement la personne, s'il en

  3   fut, qui pouvait aider à déterminer les faits qui s'étaient véritablement

  4   déroulés. Alors nombreuses sont les personnes qui ont choisi de faire

  5   carrière au TPIY à cause du défi que cela représentait. Elle a travaillé au

  6   Tribunal, parce qu'elle avait en quelque sorte une implication affective,

  7   elle avait une compassion pour la population de l'ex-Yougoslavie qui avait

  8   souffert. Elle connaissait beaucoup des victimes, elle les avait

  9   rencontrées. Elle était à bien des égards très semblable à moi-même et à

 10   d'autres personnes qui travaillent dans mon domaine. Donc il est

 11   extrêmement capital, primordial pour nous d'établir les faits pour qu'il

 12   n'y ait pas d'interprétation erronée, de mensonges. Je pense que ce fut une

 13   des personnes les plus dévouées qui ait jamais travaillé pour le bureau du

 14   Procureur du TPIY, et pour le TPIY d'ailleurs en général.

 15   Q.  Et puisque vous continuez à avoir des liens professionnels et des liens

 16   personnels avec Mme Hartmann depuis cette époque-là, est-ce que vous savez

 17   si elle a changé, elle a modifié son point de vue à propos de l'importance

 18   de ce Tribunal, ou est-ce qu'elle a toujours le même point de vue, le point

 19   de vue que vous venez de décrire il y un moment ?

 20   R.  Je pense qu'elle est animée d'une conviction profonde et elle croit en

 21   l'aptitude, la capacité du système international de justice, et sans les

 22   institutions internationales de justice, il n'y aurait jamais eu de progrès

 23   au niveau régional, et je pense aux progrès que nous voyons de nos jours.

 24   M. METTRAUX : [interprétation] Je n'ai plus que quelques questions à

 25   aborder dans le cadre d'un tout dernier sujet de réflexion, mais pour ce

 26   faire, je souhaiterais que nous passions à huis clos partiel, si nous le

 27   pouvons.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que la Chambre pourrait passer

Page 496

  1   à huis clos partiel.

  2   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos

  3   partiel, Monsieur le Président.

  4   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Pages 497-499 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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  6   [Audience publique]

  7   M. METTRAUX : [interprétation] Je n'ai plus de questions à poser au témoin.

  8   Je vous remercie, Madame Kandic.

  9   Me Khan va présenter quelques questions d'intendance avant que nous le

 10   levions l'audience.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Monsieur Mettraux.

 12   [La Chambre de première instance se concerte]

 13   Questions de la Cour : 

 14   M. LE JUGE GUNEY : Madame Kandic, vous avez dit : Droit à la société de

 15   connaître la vérité est un des principes sacrés. Donc droit à la société de

 16   connaître la vérité, est-il sans limite, d'abord ? Sinon, est-ce que le

 17   droit à la société de connaître la vérité est encadré avec les mesures de

 18   protection qui ne doivent pas entraver la justice ? Merci.

 19   R.  Lorsqu'il s'agit de crimes de guerre et lorsqu'il s'agit d'un Etat, un

 20   Etat qui a été présenté publiquement comme un Etat criminel - et je parle

 21   de la Serbie sous Milosevic - je pense que les citoyens et les victimes ont

 22   le droit de savoir exactement ce que cet Etat sous Milosevic a accompli et

 23   ce dans quoi il a été impliqué. Je pense, par exemple, à Srebrenica, où un

 24   génocide a été commis. Je pense que lorsque nous avons des mesures de

 25   protection visant certains documents, ces mesures de protection peuvent

 26   être considérées comme des mesures si elles ne limitent pas le droit des

 27   individus à apprendre quelles ont été les actions des personnes qui

 28   dirigeaient l'Etat à ce moment-là, alors que cet Etat est accusé des crimes

Page 501

  1   les plus odieux et les plus sérieux.

  2   Je suis le compte rendu d'audience et je vois qu'il est écrit dans la

  3   version anglaise : "…ne limite pas le droit des individus," mais je pense

  4   qu'il faudrait ajouter "droit des sociétés" également.

  5   M. LE JUGE GUNEY : [interprétation] Merci beaucoup.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

  7   Monsieur MacFarlane et Me Mettraux, avez-vous des questions à poser à la

  8   suite de la question posée par le Juge ?

  9   M. METTRAUX : [interprétation] Non, pas pour nous.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

 11   Madame Kandic, je vous remercie d'être venue témoigner. Vous êtes arrivée

 12   au terme de votre déposition.

 13   Vous pouvez maintenant quitter le prétoire et je vous souhaite un bon

 14   voyage de retour.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

 16   [Le témoin se retire]

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Maître Mettraux, Maître Khan.

 18   M. KHAN : [interprétation] Monsieur le Président, je vous remercie.

 19   Nous sommes quasiment arrivés à la fin de la présentation des moyens à

 20   décharge, à l'exception de quelques questions administratives.

 21   Vous avez été saisis d'une requête d'admission de documents directement et

 22   vous avez rendu une décision à ce sujet hier, donc je ne vais surtout pas

 23   aborder cette question.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, mais est-ce que vous êtes arrivé

 25   au terme de la présentation des moyens à décharge ?

 26   M. KHAN : [interprétation] Non, comme je vous le disais, je vais conclure,

 27   mais je voulais aborder ces quelques questions avec votre aval.

 28   Deuxièmement, nous avons déposé aujourd'hui, lors de la toute dernière

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  1   séance, une réponse à la deuxième requête de l'Accusation. Bien entendu,

  2   cela fait partie du dossier, il faudra qu'une décision soit rendue avant

  3   que je ne puisse officiellement présenter la fin des éléments à décharge.

  4   Troisièmement, le CLSS nous a indiqué qu'ils sont en train de préparer un

  5   compte rendu d'audience définitif portant sur la déposition de M. Joinet et

  6   cela nous sera donné en temps voulu. Bien entendu, nous aimerions pouvoir y

  7   faire référence. Mais lorsque vous aurez rendu une décision à ce sujet,

  8   nous aimerions que cela soit porté à votre connaissance et nous aimerions

  9   attirer votre attention sur la version définitive que prépare le CLSS.

 10   En dernier lieu - et cela est essentiel également avant que je ne déclare

 11   officiellement la fin de la présentation des moyens à décharge - je

 12   voudrais parler de la décision du 19 mai.

 13   Parce que vous saurez - et cela a été dit à plusieurs reprises - que

 14   la Défense a essayé de s'enquérir à propos des enquêtes menées à bien, ce

 15   qui a abouti à une demande d'audience de l'enquêteur qui était à l'époque

 16   amicus curiae et qui est maintenant présenté comme procureur amicus curiae,

 17   ce qui a été refusé. Vous vous souviendrez que dans votre décision du 19

 18   mai se trouve la note 25 en bas de page. Il s'agit d'une proposition qui

 19   coupe la poire en deux en quelque sorte et qui essaie de concilier à la

 20   fois ce que la Défense souhaitait et les préoccupations exprimées par le

 21   procureur amicus curiae.

 22   Dans la note numéro 25, pour ce qui est des préoccupations de la Défense,

 23   vous déclariez que la Défense pouvait présenter des questions proposées au

 24   conseil à la Chambre qui pourrait ainsi poser ces questions au Procureur.

 25   Et nous avons justement cette liste de questions, c'est le document qui

 26   vient de vous être distribué et qui a été distribué à mon estimé confrère.

 27   Je souhaiterais en fait pouvoir avoir la possibilité --

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que je peux vous poser une

Page 503

  1   question ?

  2   M. KHAN : [interprétation] Oui, bien sûr.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous avez dit que la Défense n'allait

  4   pas demander la comparution de M. MacFarlane.

  5   M. KHAN : [interprétation] Oui. Ce que je voulais vous dire, c'est qu'il y

  6   a une demande de citation de M. MacFarlane. Cela a été refusé, cela a été

  7   rejeté.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui.

  9   M. KHAN : [interprétation] Mais en refusant la requête de la Défense --

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je comprends tout à fait cela, Maître

 11   Khan. Mais à la suite de cela, la Défense avait indiqué à la Chambre

 12   qu'elle n'avait pas l'intention de convoquer d'autres témoins après Mme

 13   Kandic.

 14   M. KHAN : [interprétation] Oui, tout à fait.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Donc cela inclut également M.

 16   MacFarlane, me semble-t-il ?

 17   M. KHAN : [interprétation] Oui, cela découlait naturellement de votre

 18   décision du 19 mai que nous respectons. Donc nous n'avons pas l'intention

 19   de convoquer à la barre M. MacFarlane. Mais ce que nous souhaiterions

 20   faire, c'est que vous envisagiez la possibilité que nous posions des

 21   questions.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, mais cela vous avait été proposé

 23   comme autre option de le citer à la barre, mais vous nous avez dit en fait

 24   que vous ne souhaitiez pas convoquer d'autres témoins.

 25   M. KHAN : [interprétation] Mais nous n'avons pas la possibilité de le

 26   convoquer, puisque notre requête a été refusée. Il est conseil et nous

 27   voulions le citer. Il s'agissait d'une mesure de coercition à laquelle nous

 28   avions pensé, puisque nous avons vu notre invitation à l'interroger rejetée

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  1   --

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais ce n'est pas ce qui avait

  3   été dit à la Chambre. C'est que la Défense allait citer deux témoins --

  4   enfin, je ne veux pas entrer dans ce débat. Je soulevais simplement cette

  5   question.

  6   Mais poursuivez ces questions d'intendance.

  7   M. KHAN : [interprétation] Je pense qu'en temps utile il suffira d'examiner

  8   le procès-verbal pour comprendre.

  9   Je pense que nous avons bien présenté notre point de vue au début de

 10   la procédure. Nous ne demandions pas à citer comme témoin M. MacFarlane,

 11   non pas parce que nous avons renoncé aux droits que nous avions. Nous

 12   persistons à croire que c'est une personnalité importante, parce qu'il

 13   était le seul moyen qui nous permet de mettre à l'épreuve l'exactitude, la

 14   véracité et la profondeur de l'enquête qui a été menée. Nous avons décidé

 15   de ne pas le citer, parce que nous n'avions pas le pouvoir de le citer,

 16   sauf si nous avions une injonction pour citation. Je ne peux pas le faire

 17   venir à la barre des témoins.

 18   Et maintenant j'essaie d'utiliser ce compromis que vous-même avez proposé,

 19   à savoir de vous remettre les questions écrites. En vertu de votre décision

 20   du 19 mai, vous pourriez adresser ces questions au procureur amicus curiae.

 21   Nous allons peut-être subir un reproche. Ce n'est jamais agréable pour une

 22   Défense. Ici nous ne sommes pas en concours de popularité. Bien sûr, il

 23   faut défendre du mieux qu'on peut un client, mais on peut toujours

 24   critiquer un avocat de la Défense. Et ça n'a pas été agréable pour nous de

 25   dire que nous estimons qui porte la faute ici. Ce n'est pas la Chambre qui

 26   a émis cette ordonnance tenant lieu d'acte d'accusation, c'est parce que M.

 27   MacFarlane a été enquêteur et qu'il n'a pas bien fait son travail. Il n'a

 28   pas soumis tous les faits nécessaires à la Chambre qui avaient été désignée

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  1   à cet effet, parce que nous estimons que cette Chambre indépendantielle

  2   avait été saisie de toutes les informations pertinentes dont vous disposez,

  3   j'espère, maintenant. Cette Chambre aurait rendu une ordonnance, mais

  4   n'aurait pas donné cette ordonnance tenant lieu d'acte d'accusation. Le

  5   seul enquêteur en l'espèce, maintenant il porte la toge de l'avocat, d'où

  6   la difficulté.

  7   Sans plus, je vous demande d'accepter ceci et d'accepter que, certes, des

  8   questions écrites soient présentées, parce que vous avez rejeté notre

  9   demande. C'est tout ce que je peux dire. Nous faisons référence à la

 10   décision que vous avez rendue le 19 mai et qui faisait précisément cette

 11   proposition, et avec le plus grand respect, je vous demandais s'il vous

 12   était possible de recevoir ces questions, nous conformant ainsi à votre

 13   décision.

 14   Je vais demander à M. l'Huissier de distribuer et, bien entendu, M.

 15   MacFarlane peut recevoir un exemplaire desdites questions.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

 17   Si vous avez terminé, Maître Khan, nous allons lever l'audience. Elle

 18   reprendra vendredi, 3 juillet.

 19   M. KHAN : [interprétation] Auparavant, si vous le permettez, Monsieur le

 20   Président, sous réserve de votre décision sur l'opportunité de poser ces

 21   questions, je vous précise que j'ai ainsi terminé la présentation des

 22   éléments à décharge en faveur de Mme Hartmann.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Monsieur MacFarlane.

 24   M. MacFARLANE : [interprétation]

 25   Les questions d'administration de la preuve des questions techniques

 26   doivent être réglées; nous allons mettre la dernière main demain à nos

 27   plaidoiries et réquisitions mais nous aurons maintenant donc toutes les

 28   pièces. Serait-il possible d'évoquer certains points de procédure en

Page 506

  1   matière de numérotation de pièces, par exemple, pour voir si vous devez

  2   nous donner de nouvelles instructions ? Je pense surtout à la décision de

  3   2007, une décision précise, je me proposais d'en demander le versement et

  4   elle fait l'objet de certaines décisions. Peut-être est-il utile de passer

  5   à huis clos partiel.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui. Vous vouliez un huis clos complet

  7   ou un huis clos partiel ?

  8   M. MacFARLANE : [interprétation] Partiel.

  9   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel,

 10   Monsieur le Président.

 11   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Pages 507-511 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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  1   --- L'audience est levée à 13 heures 40 et reprendra le vendredi 3 juillet

  2   2009, à 9 heures 00.

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