Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 15 mars 2010

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 36.

  5   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour. Veuillez citer l'affaire

  6   inscrite au rôle, Madame la Greffière.

  7   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges.

  8   Affaire IT-98-32/1-R77.1, le Procureur contre Zuhdija Tabakovic.

  9   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.

 10   Monsieur Rogers.

 11   M. ROGERS : [interprétation] Paul Rogers au nom de l'Accusation, avec M.

 12   Kyle Wood et notre commis à l'affaire, Jasmina Bosnjakovic.

 13   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Monsieur Rogers.

 14   Maître Powles.

 15   M. POWLES : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Je représente

 16   les intérêts de M. Tabakovic, et je m'appelle Steven Powles.

 17   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] J'ai cru comprendre que vous vouliez

 18   apporter certaines questions.

 19   M. POWLES : [interprétation] Oui. Il est peut-être utile de passer à huis

 20   clos. J'ai votre décision relative à la question soulevée vendredi, mais ce

 21   ne serait pas long du tout. Mais je pense qu'il est préférable de passer

 22   pour se faire à huis clos.

 23   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous allons passer pour quelques

 24   instants à huis clos partiel et vous pourrez régler cette question avant

 25   que nous ne revenions en audience publique.

 26   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos

 27   partiel, Monsieur le Président.

 28   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Pages 14-19 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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 21   [Audience publique]

 22   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La Chambre siège aujourd'hui,

 23   car elle est saisie d'un acte d'accusation concernant M. Tabakovic qui

 24   reprend six chefs d'outrage découlant du procès de Milan Lukic et Sredoje

 25   Lukic, qui ont été jugés et condamnés pour crimes de guerre, l'année

 26   dernière, par le présent Tribunal. L'acte d'accusation dressé contre M.

 27   Tabakovic a été déposé en octobre 2009. Au cours d'une phase antérieure de

 28   la procédure, l'accusé s'est déclaré non coupable au regard des six chefs

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  1   de l'acte d'accusation.

  2   Vendredi dernier, une requête a été déposée devant la Chambre pour

  3   examen d'un accord de plaidoyer déposé conjointement par la Défense de M.

  4   Tabakovic et par l'Accusation. La Chambre va maintenant se concentrer sur

  5   ladite requête.

  6   A cette fin, la Chambre souhaite indiquer qu'une requête demandant

  7   protection de l'identité de deux personnes a été déposée, ces deux

  8   personnes n'étant pas, ni l'une, ni l'autre, le présent accusé. Ces

  9   personnes sont nommées dans l'acte d'accusation. En raison du fait qu'il y

 10   aura peut-être d'autres procédures menées par ce Tribunal, la Chambre

 11   estime qu'il convient d'accorder des mesures de protection aux deux

 12   personnes sous forme d'octroi d'un pseudonyme, aux fins de la présente

 13   audience; ces personnes seront, aux fins de la présente procédure, comme il

 14   est proposé dans la requête, X et Y.

 15   Monsieur Rogers, voulez-vous intervenir ?

 16   M. ROGERS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 17   Vous avez reçu la proposition d'accord sur le plaidoyer qui, manifestement,

 18   reste d'un caractère confidentiel, et les deux parties demandent à lever le

 19   caractère confidentiel de ce document sous réserve d'expurgation que vous

 20   venez d'indiquer, Monsieur le Président. Nous allons déposer aujourd'hui

 21   une version expurgée, publique de l'accord sur le plaidoyer qui pourra être

 22   versée au dossier de la procédure à l'attention de l'opinion publique. Cet

 23   accord sur le plaidoyer vous présente un résumé de l'accord proposé. M.

 24   Tabakovic est d'accord pour se déclarer coupable de trois chefs

 25   d'accusation, tel qu'il a été déposé le 30 octobre 2009, et est d'accord

 26   pour dire que ceci englobe sa responsabilité pénale pour outrage à la suite

 27   des actes et omissions allégués dans l'acte d'accusation.

 28   M. Tabakovic se propose de plaider coupable des chefs 1, 3 et 4 de

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  1   l'acte d'accusation des chefs d'outrage. En raison de cet accord, nous

  2   allons demander à retirer les autres chefs d'accusation, si vous en êtes

  3   d'accord, à savoir le chef 2, tentative de commettre un outrage, et les

  4   chefs 5 et 6, incitation à commettre un outrage. Nous avons toujours dit

  5   que c'était des allégations subsidiaires aux chefs 1, 3, et 4 de l'acte

  6   d'accusation. Nous attirons votre attention sur le fait qu'en raison de ce

  7   cas manifesté comme intention, Monsieur Tabakovic, l'Accusation est prête à

  8   recommander une peine de prison dans une fourchette de peine de quatre à

  9   six mois, et pas d'astreinte, pas de peine financière.

 10   Nous avons tenu compte, à cet égard, de l'évaluation des circonstances

 11   atténuantes, notamment la coopération dont il a fait preuve pour ce qui est

 12   de la date de l'accord sur le plaidoyer et de ce plaidoyer lui-même. Nous

 13   estimons qu'il devrait bénéficier d'une peine inférieure à -- l'accusé a le

 14   droit de faire valoir qu'il ne peut pas être condamné à quatre ou six mois,

 15   et que la Chambre n'est pas obligée d'accepter une recommandation quelle

 16   qu'elle soit. Elle peut imposer une peine inférieure ou supérieure à ce qui

 17   est recommandé. Nous savons que ce que nous recommandons peut parfaitement

 18   faire l'objet d'une commutation de peine ou d'une grâce, si l'accusé le

 19   demande en application des articles 123 à 125.

 20   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Avant de poursuivre, je vais vous dire

 21   comment moi, je lis l'acte d'accusation.

 22   M. POWLES : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 23    M. LE JUGE PARKER : [interprétation] En vertu du chef 1, il y a une

 24   charge subsidiaire, un chef subsidiaire au chef d'outrage, mais le chef 2

 25   est séparé. Ce n'est pas la même chose qu'un chef d'outrage. Pourriez-vous

 26   y revenir ?

 27   Est-ce que vous voulez dire que le chef 2 constitue une tentative de

 28   commettre un outrage ?

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  1   M. ROGERS : [interprétation] Pour nous, le chef 2 a toujours été une

  2   tentative. C'est pour ça que vous avez une ligne entre les deux chefs,

  3   chefs 1 et 2. On dit, à titre subsidiaire, une tentative de commettre le

  4   chef 2 de l'acte d'accusation.

  5   Je ne sais pas si c'est un problème, mais le problème découle du

  6   libellé du règlement, qui dit que s'il y a incitation ou tentative à

  7   commettre tous les actes au 77(B) peut être considéré -- toute incitation à

  8   ou tentative de commettre l'un des actes sanctionnés au paragraphe A est

  9   assimilé à un outrage et passible de la même peine. Alors est-ce que c'est

 10   vraiment une incitation ? C'est de toute façon considéré comme un outrage,

 11   que ce soit une tentative ou une incitation.

 12   Vous le savez, sans doute. Il n'y a pas eu de mise en accusation ici

 13   pour tentative de commettre un outrage, ce qui veut dire que nous sommes en

 14   terra in cornita [phon] et que nous n'avons pas encore de jurisprudence en

 15   la matière.

 16   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous pourrez peut-être qualifier ceci

 17   d'outrage dans l'interprétation que donne le règlement de l'outrage.

 18   M. ROGERS : [interprétation] Tout à fait.

 19   S'agissant de la nature des chefs retenus contre l'accusé, M.

 20   Tabakovic comprend que l'Accusation devra apporter la preuve au-delà de

 21   tout doute raisonnable de tous les éléments constitutifs de l'outrage, à

 22   savoir qu'il a sciemment entravé l'administration de la justice et que

 23   l'Accusation est d'accord pour dire que les éléments repris dans l'exposé

 24   des faits que je vais vous présenter en temps utile n'a pas été contesté et

 25   a été établi au-delà de tout doute raisonnable. Il n'accepte sa

 26   responsabilité pleine et entière de tous les éléments repris dans l'exposé

 27   des faits et dans l'acte d'accusation face auquel il s'est prononcé.

 28    Les parties sont d'accord que les éléments repris soutiennent une

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  1   condamnation pour culpabilité, tout comme sa responsabilité pénale

  2   internationale pour outrage, et les chefs 1, 3 et 4.

  3   Puis il y a partie formelle qui énonce la fourchette possible. Ça

  4   pourrait être sept ans d'emprisonnement et une peine qui ne dépasserait 100

  5   000 euros ou les deux, au regard de chacun des deux chefs d'accusation. M.

  6   Tabakovic, au paragraphe 9, comprend qu'il n'est pas tenu par -- que la

  7   Chambre, pardon, n'est tenue par aucun accord susceptible d'être intervenu

  8   entre l'Accusation et la Défense. Mais c'est important, il estime

  9   qu'indépendamment de la peine imposée, il ne veut pas chercher à modifier

 10   l'accord de culpabilité, ou faire appel d'une condamnation pour autant que

 11   les Juges se prononcent et décident d'une condamnation.

 12   Il reconnaît que la Chambre, au moment d'envisager la peine imposée,

 13   tiendra compte de la gravité de l'infraction et des circonstances

 14   personnelles de la personne condamnée. La Chambre tiendra compte aussi de

 15   toute circonstance atténuante ou aggravante, notamment le degré de

 16   coopération avec l'Accusation. La Chambre tiendra compte aussi de la nature

 17   des peines, tel qu'elles se pratiquaient dans les tribunaux de l'ex-

 18   Yougoslavie.

 19   L'accusé comprend aussi que les parties fourniront à la Chambre toute

 20   information que la Chambre estime nécessaire lorsqu'il s'agira d'imposer la

 21   peine. En plaidant coupable, il comprend qu'il va renoncer à certains

 22   droits, le droit que l'Accusation apporte la preuve pendant le procès, et

 23   il renonce au droit de plaider non coupable et de présenter une défense

 24   pendant son procès, pendant une procédure, et cetera, notamment le droit

 25   d'être jugé.

 26   Vous avez tous ces éléments repris dans le texte.

 27   Ça ne veut pas dire qu'il renonce au droit d'être représenté par un

 28   conseil dans la présente procédure ou dans toute procédure à venir. C'est

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  1   de plein gré qu'il procède à cet accord. Il dit qu'aucune menace n'a été

  2   faite à son égard et que les seules promesses qui lui ont été faites sont

  3   énoncées dans l'accord, à savoir que l'accusation va faire les

  4   recommandations qu'elle vient de faire. Aucune autre promesse n'a été

  5   faite, aucun autre accord n'est intervenu entre le bureau du Procureur et

  6   M. Tabakovic ou son conseil.

  7   Vous allez voir la déclaration que fait M. Tabakovic dans laquelle il

  8   dit qu'il a lu l'accord de plaidoyer dans une langue qu'il comprend et

  9   qu'il a examiné chaque détail de cet accord avec son conseil, Me Powles. Me

 10   Powles l'a informé de ses droits et des stratégies de défense possible et

 11   des conséquences qu'aurait un accord sur le plaidoyer, et qu'il est tout à

 12   fait satisfait de ce qu'a fait son avocat jusqu'à présent.

 13   Aucune promesse ne lui a été faite. Il est d'accord pour dire que

 14   personne ne l'a menacé, ni ne l'a forcé à procéder à cet accord sur le

 15   plaidoyer, qu'il l'a fait de plein gré et qu'il est tout à fait dans la

 16   maîtrise de ses facultés et qu'il comprend les conditions reprises dans cet

 17   accord. Je pense que vous pourrez voir cet accord sur le plaidoyer, et ceci

 18   est le reflet fidèle, à la page suivante, de ce qui est dit précédemment,

 19   mais dans l'optique du conseil.

 20   Je ne vais pas maintenant voir l'exposé des faits. Je pense que vous

 21   voudrez peut-être examiner ces éléments avec M. Tabakovic pour être bien

 22   sûr qu'il comprend ce qu'il fait, et puis nous pourrons passer aux

 23   conclusions au vu des éléments dont vous disposez.

 24   Est-ce que je peux vous aider maintenant ?

 25   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Non, je vous remercie, Monsieur

 26   Rogers.

 27   Monsieur Powles, voulez-vous ajouter quoi que ce soit ?

 28   M. POWLES : [interprétation] Absolument pas. Je vous remercie.

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  1   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien.

  2   Monsieur Tabakovic, pouvez-vous suivre la procédure dans une langue que

  3   vous comprenez jusqu'à présent ?

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Tout à fait, Monsieur le Président.

  5   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien. Je vous remercie.

  6   Ce matin, nous sommes là principalement pour étudier l'accord de plaidoyer

  7   au titre duquel vous avez accepté donc d'être coupable pour trois chefs

  8   d'outrage que l'on trouve dans l'acte d'accusation.

  9   Vous avez compris cela jusqu'à présent, n'est-ce pas ? Vous proposez

 10   que nous étudions votre plaidoyer de culpabilité en ce qui concerne trois

 11   des chefs qui sont à l'acte d'accusation, et que donc nous ne traitions pas

 12   des trois autres chefs qui seront donc retirés. Vous avez compris cela

 13   jusqu'à présent ?

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, j'ai compris.

 15   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien.

 16   La Chambre a été saisie donc de cet accord de plaidoyer, de cette

 17   proposition d'accord du moins, qui est datée de vendredi dernier, le 11

 18   mars, que vous avez signée; et vous avez aussi signé d'ailleurs une

 19   déclaration qui constitue le paragraphe 17 de cet accord.

 20   Vous vous souvenez de cela, n'est-ce pas; vous vous souvenez avoir

 21   signé cette déclaration ?

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, je le sais, Monsieur le Président.

 23   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Donc vous avez signé la

 24   déclaration, vous avez signé l'accord, n'est-ce pas ?

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.

 26   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] En pièce jointe, nous avons aussi un

 27   document qui relate les faits sur lesquels se base l'accord de plaidoyer. A

 28   la fin de ce document, il semble que nous trouvions votre signature à

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  1   nouveau. Donc pouvez-vous nous confirmer que vous avez bien signé ce

  2   document qui reprend l'exposé des faits qui compose cet accord de plaidoyer

  3   ?

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, tout à fait.

  5   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Votre conseil, Me Powles, s'est

  6   entretenu avec vous des conséquences de cet accord, n'est-ce pas, pour vous

  7   en informer ?

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, oui.

  9   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je pense qu'il a dû vous expliquer que

 10   vous pouvez maintenir soit votre plaidoyer de non culpabilité en ce qui

 11   concerne tous les chefs qui sont à l'acte d'accusation et donc dans ce cas-

 12   là, ça serait à l'Accusation de démontrer chacun de ces chefs qui vous sont

 13   reprochés.

 14   Je pense que Me Powles vous a expliqué cela aussi, n'est-ce pas, vous

 15   avez cette possibilité de continuer ?

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, oui. Nous en avons parlé.

 17   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] J'aimerais savoir si Me Powles vous a

 18   présenté les différentes possibilités qui vous seraient ouvertes en ce qui

 19   concerne votre défense si vous décidez de plaider non coupable à tous les

 20   chefs d'accusation qui sont dans l'Accusation ?

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, oui, tout à fait, nous en avons parlé.

 22   Nous avons étudié plusieurs options en ce qui concerne la défense possible.

 23   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Donc vous êtes certain, à l'heure

 24   actuelle, que vous devez suivre cet accord de plaidoyer et donc plaider,

 25   d'une certaine façon, qu'en ce qui concerne trois des six chefs ?

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ecoutez, c'est la solution que nous avons

 27   trouvée ensemble. Les chefs 2, 4, et 5 en fait finalement sont très proches

 28   des chefs 1, 3, et 5, enfin, des autres en tout cas.

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  1   Les chefs 1, 3, et 5 et 2, 4, et 6 sont assez proches les uns des

  2   autres finalement.

  3   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vois que votre client connaît bien

  4   son acte d'accusation.

  5   M. POWLES : [interprétation] Oui. Je me suis levé uniquement pour un seul

  6   point. Je comprends bien pourquoi vous passez tous ces points avec M.

  7   Tabakovic, mais ce qui m'inquiète ici c'est la relation privilégiée entre

  8   conseil et client. On s'approche un peu de la limite là, et je pense que M.

  9   Tabakovic n'est quand même pas spécialiste, et je ne suis pas certain qu'il

 10   connaisse très très bien tout ce qui est impliqué dans ce point.

 11   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Ecoutez, je voulais juste vérifier

 12   avec le témoin si vous avez bel et bien envisagé avec votre client toutes

 13   les possibilités qui étaient ouvertes à lui.

 14   M. POWLES : [interprétation] J'ai bien compris.

 15   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je ne cherche rien d'autre.

 16   M. POWLES : [interprétation] Oui, mais je ne suis pas certain que M.

 17   Tabakovic ait vraiment compris où vous vouliez en venir.

 18   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, mais je pense qu'il a répondu

 19   extrêmement bien, de façon extrêmement informée.

 20   M. POWLES : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 21   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie, Maître Powles.

 22   M. POWLES : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 23   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous comprenez, n'est-ce pas, que si

 24   vous plaidez coupable sur trois chefs d'accusation, en conséquence, la

 25   Chambre va devoir envisager la peine qu'il convient de vous imposer, et va

 26   vous imposer une peine portant sur ces trois chefs pour lesquels vous

 27   plaidez coupable. Il n'y aura pas de procès, nous n'allons pas étudier les

 28   faits en ce qui concerne ces trois chefs.

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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai bien compris.

  2   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Tabakovic.

  3   La Chambre de première instance doit maintenant étudier l'application de

  4   l'article 62 bis, puisqu'au titre de l'article 62 bis, le plaidoyer doit

  5   être fait délibérément, toute connaissance de fait n'est pas équivoque. Il

  6   faut qu'il existe des faits suffisants pour établir le crime, et cetera. De

  7   ce fait, je tiens à dire que la Chambre a été grandement aidée par l'accord

  8   écrit que nous avons reçu, qui est extrêmement précis, et qui est

  9   suffisamment précis, et qui donne une base permettant à la Chambre de

 10   conclure que ces points ont été satisfaits, les points de l'article 62 bis.

 11   L'accusé a confirmé aujourd'hui qu'il maintient cet accord. En

 12   signant cet accord, il maintient aussi la déclaration et la teneur de cet

 13   accord, il a confirmé que son conseil lui a précisé ce qu'il en était, et

 14   qu'il a aussi été mis au courant des conséquences. Donc, son accord de

 15   plaidoyer est fait en toute connaissance de cause. Sa conduite n'est pas

 16   équivoque, et du fait de ce qu'il a dit oralement et de la part de ce qui

 17   est contenu dans l'accord de plaidoyer, il semble évident qu'il fait ce

 18   plaidoyer de culpabilité délibérément.

 19   En ce qui concerne, maintenant, l'exposé des faits sur lesquels se

 20   base cet accord, je tiens à dire qu'il est extrêmement détaillé et qu'il

 21   est joint à l'accord de plaidoyer, et M. Tabakovic confirme qu'il a aussi

 22   signé ce document. La Chambre de première instance a, bien sûr, pris

 23   connaissance de cet exposé des faits, et s'est penchée sur la question de

 24   savoir si ce document est suffisant pour étayer ce qui est trouvé dans

 25   l'accord de plaidoyer. Alors, la Chambre est parfaitement convaincue que

 26   cet exposé des faits est tout à fait satisfaisant, en ce qui concerne

 27   l'accord de plaidoyer portant sur les trois chefs.

 28   La Chambre de première instance a aussi reçu une déclaration de la

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  1   part de M. Powles, qui représente l'accusé en l'espèce, en ce qui concerne

  2   leur relation. Il a bien expliqué à l'accusé quelles étaient les options

  3   qui lui étaient ouvertes, les conséquences de cet accord de plaidoyer, les

  4   droits auxquels il renonçait en faisant cet accord de plaidoyer.

  5   En ce qui concerne ces points-là, la Chambre de première instance est

  6   convaincue que ce plaidoyer de culpabilité peut être correctement accepté

  7   en ce qui concerne les trois chefs concernés et énoncés dans cet accord de

  8   plaidoyer.

  9   Maître Powles, est-ce que vous êtes d'accord pour que la Chambre

 10   traite uniquement de la requête, ou préféreriez-vous que l'on lise à

 11   nouveau les trois chefs à l'accusé ?

 12   M. POWLES : [interprétation] Non, je pense que la chose la plus

 13   simple serait de travailler sur la base de la requête. C'est plus pratique.

 14   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Powles.

 15   Dans ce cas, la Chambre de première instance, tel que cela est précisé dans

 16   la requête, fera droit à la demande de M. Tabakovic, qui a décidé de

 17   modifier son plaidoyer pour faire un plaidoyer de culpabilité en ce qui

 18   concerne les chefs 1, 3 et 4 de l'acte d'accusation. Bien sûr, la Chambre

 19   de première instance, de ce cas, va déclarer l'accusé coupable de ces trois

 20   chefs.

 21   La Chambre de première instance considère aussi que ces trois

 22   condamnations qui sont maintenant au compte rendu reflètent le fait que le

 23   témoin a, de plein gré, fait une déclaration erronée qu'il a fait lui-même,

 24   et qu'il a fait aussi faire à deux autres personnes, pour que ces faux

 25   témoignages soient utilisés par la Défense dans l'affaire Lukic et Lukic.

 26   Mais la Chambre de première instance est convaincue aussi qu'elle peut

 27   rejeter les trois autres chefs que l'on trouve dans l'acte d'accusation,

 28   c'est-à-dire les chefs 2, 5 et 6.

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  1   Passons maintenant à la peine.

  2   Monsieur Rogers, qu'avez-vous à dire ?

  3   M. ROGERS : [interprétation] Je voudrais peut-être étudier avec vous

  4   l'exposé des faits qui est attaché à cet accord de plaidoyer. Vous le

  5   trouverez en pièce jointe. Il s'agit de la pièce jointe numéro 2. Il y aura

  6   une version expurgée publique qui sera déposée aujourd'hui, mais nous

  7   tenons quand même à vous lire certains passages pour l'instant, car ils

  8   portent sur les faits et ils vous permettront ainsi de déterminer la peine.

  9   Je donne lecture :

 10   Messieurs les Juges, Zuhdija Tabakovic a été contacté par Irana Rasic

 11   [phon], l'ex-commis aux affaires de l'équipe de Défense de Milan Lukic,

 12   vers le mois d'octobre 2008. Ils se sont mis d'accord pour se réunir au

 13   café Robot, dans un centre commercial de Sarajevo, et au cours de cette

 14   réunion, Rasic a dit à Tabakovic qu'il pouvait gagner un peu d'argent.

 15   Elle lui a ensuite fourni une déclaration vierge. Vous avez dans ce

 16   dossier bleu, Messieurs les Juges, un certain nombre de dossiers, et vous

 17   verrez cette déclaration vierge à l'onglet numéro 3. Vous verrez qu'il

 18   n'est pas aussi vierge que ça, finalement, puisqu'il y a un certain nombre

 19   de faits qui sont déclarés. Tout ce qui manque, ce sont les noms puis les

 20   dates qui doivent être précisés dans la partie officielle, la page de

 21   garde.

 22   Ensuite, M. Tabakovic a lu la déclaration et a demandé ce qu'il

 23   fallait faire. On lui a dit que la personne qui travaillait pour l'équipe

 24   de la Défense de Milan Lukic à La Haye lui a demandé de trouver d'autres

 25   personnes qui, pour d'autres compensations financières, confirmeraient la

 26   déclaration qu'on lui avait montrée ou des déclarations similaires. Ces

 27   déclarations devaient être utilisées par la Défense de Milan Lukic.

 28   Quand il a demandé quel serait le bénéfice qu'il pouvait en tirer, on lui a

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  1   dit que ce serait 2 500 euros. L'argent comprendrait les frais de voyage à

  2   La Haye, l'achat de vêtements, de chaussures, d'hébergement, en fait toutes

  3   les dépenses pour sa préparation à témoigner. On lui donnerait, d'abord, 1

  4   000 euros après avoir signé la déclaration et que cette déclaration soit

  5   vérifiée par un représentant de la municipalité. Ensuite on lui donnerait 1

  6   500 euros après la déposition ainsi que de nouveaux vêtements et il

  7   recevrait tout cela avant de partir à La Haye pour témoigner dans l'affaire

  8   Milan Lukic, ou juste à son arrivée.

  9   L'accusé déclare que Mme Rasic lui a dit que c'était Milan Lukic qui

 10   payait lui-même.

 11   A un moment avant que Tabakovic ne signe sa déclaration, Rasic lui a

 12   décrit quel était le but de la déclaration. Il devait dire qu'il se

 13   trouvait de l'autre côté de la rivière lorsque des personnes ont été

 14   abattues, que certaines de ces personnes avaient survécues et devait

 15   décrire les tueurs et leurs véhicules. Donc, nous ne suggérons pas que

 16   Tabakovic savait exactement dans quel but sa déclaration serait utilisée,

 17   non plus quel impact sa déclaration pouvait avoir sur l'affaire Lukic et

 18   Lukic, mais cela dit, cela avait à avoir avec l'argument d'alibi que Milan

 19   Lukic voulait soulever en ce qui concerne un des chefs qui lui était

 20   reproché.

 21   Tabakovic a déclaré avoir désespérément besoin d'argent, a accepté de

 22   faire cette déclaration et de la signer devant un représentant de la

 23   municipalité. Il savait que la déclaration n'était pas véridique et qu'elle

 24   serait utilisée par la Défense Milan Lukic à La Haye.

 25   Le 20 octobre 2008, au bâtiment de la municipalité de Novi Grad à

 26   Sarajevo, Tabakovic a rencontré à nouveau Mme Rasic, et là il a lu, signé

 27   et vérifié la déclaration en cinq exemplaires qui comprenaient un passage

 28   portant sur les mesures de protection qui lui seraient peut-être accordées

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  1   au Tribunal. Il a conservé un exemplaire de cette déclaration. Il s'agit de

  2   la pièce numéro 5, qu'il a donné de façon volontaire à l'enquêteur de

  3   l'Accusation, Don King, à l'antenne de Sarajevo. Cette déclaration est

  4   signée par cette personne.

  5   Maintenant, si vous pouviez passer à l'intercalaire 3 du dossier qui vous a

  6   été donné, vous voyez le formulaire de déclaration c'est identique à celui

  7   qui était vierge précédemment, sauf que les détails maintenant ont été

  8   renseignés. Plusieurs champs ont été renseignés à la page de garde. A la

  9   page 4, vous avez la déclaration et la signature est celle du 20 octobre

 10   2008, la version que vous avez dans votre dossier, la version en B/C/S.

 11   Ensuite, à la page 2, vous voyez la certification du témoin. Il est

 12   écrit :

 13   "J'ai lu cette déclaration de 4 pages. Elle contient tout ce que j'ai dit,

 14   tout ce dont je me souviens, et j'ai fait cette déclaration de mon propre

 15   chef, de mon propre gré. Elle peut être utilisée dans les procédures

 16   judiciaires lancées devant le TPIY, et je me rendrais au Tribunal si on me

 17   demande de venir y témoigner."

 18   Ensuite il y a une demande visant à ce que le témoin reçoive des mesures de

 19   protection.

 20   Là, le nom n'est pas correct. C'est un petit problème de traduction

 21   et rien d'autre.

 22   Le 11 septembre 2009, la Défense de Milan Lukic a communiqué à

 23   l'Accusation une autre copie qui est absolument identique de cette

 24   déclaration qui porte la signature de M. Tabakovic. Vous la trouverez à la

 25   pièce 4.

 26   Les deux documents portent le cachet de la municipalité de Novi Grad

 27   à Sarajevo. Il y a d'autres données aussi qui confirment qu'il a bel et

 28   bien signé ce document devant un représentant de la mairie, et l'agent de

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  1   la municipalité de Sarajevo l'a bel et bien confirmé.

  2   En ce qui concerne cette certification, je tiens à dire que la loi en

  3   Bosnie-Herzégovine portant sur la certification de signature des

  4   exemplaires et des documents manuscrits demande que le cachet de

  5   certification soit placé sur le document en présence de la personne. Il

  6   faut donc que la personne soit là pour signer. Donc il y a à la fois

  7   certification sur le document et enregistrement sur une main courante à la

  8   mairie. L'agent chargé de la certification doit établir l'identité de la

  9   personne en vérifiant soit son passeport soit sa carte d'identité avant de

 10   pouvoir estampiller quoi que ce soit. Et le cachet porte plusieurs

 11   informations, la date, les personnes qui ont signé, et cetera.

 12   Les cachets sur l'exemplaire de la déclaration donnée par Tabakovic à

 13   Don King le 3 décembre 2008, et sur l'exemplaire que la Défense a donné le

 14   11 septembre 2009, comprennent le nom de M. Tabakovic, la date à laquelle

 15   la certification s'est faite le 20 octobre 2008, le cachet de la

 16   municipalité de Novi Grad à Sarajevo, ainsi que le numéro de la

 17   certification qui correspond au numéro inscrit sur la main courante. Il y

 18   a, de plus, une signature qui est identique à la signature que l'on trouve

 19   sur les deux déclarations, et M. Tabakovic a confirmé qu'il s'agit bien de

 20   sa signature. Et l'agent de la municipalité de Novi Grad à Sarajevo a aussi

 21   confirmé tout cela.

 22   Après avoir signé la déclaration, M. Tabakovic et le commis aux

 23   affaires sont allés à l'entrée de la mairie où Rasic a donné à Tabakovic un

 24   morceau de papier blanc plié qui comprenait 1 000 euros en billets de 50

 25   euros pris dans un agenda vert. La déclaration que Tabakovic a signée ne

 26   comportait pas ses propres mots, mis à part sa signature. Il n'a absolument

 27   pas été impliqué dans les événements auxquels il est fait référence à la

 28   déclaration. A l'époque, l'époque à laquelle se réfère cette déclaration du

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  1   7 juin 1992, il était à Sarajevo.

  2   Il a dit qu'avant de signer cette déclaration, il avait attendu

  3   environ 40 minutes dans le bâtiment de la municipalité en parlant avec ce

  4   commis aux affaires, Mme Rasic. Elle lui a dit quand il faudrait aller

  5   témoigner à La Haye, on lui donnerait de la nourriture, on l'hébergerait,

  6   et qu'il serait sans doute contacté avant son témoignage dans le prétoire,

  7   afin de procéder au récolement. Cela dit, elle lui a dit que le conseil

  8   principal à l'affaire, un Américain, ne devait pas savoir que la

  9   déclaration était fausse et qu'elle avait été obtenue par le biais

 10   d'argent. Alors qu'il était à la mairie, Tabakovic a reçu de la part du

 11   commis aux affaires une esquisse dessinée. Elle lui a dit que ce dessin

 12   devant de Milan Lukic et que c'était un document qui permettrait à

 13   Tabakovic de mieux comprendre les événements écrits dans la déclaration. Il

 14   s'agit des pièces 4 et 5 du dossier bleu.

 15   Elle lui a dit que c'était une carte qui allait expliquer comment les

 16   gens avaient été tués ou exécutés à Visegrad le 7 juin 1992, et que c'était

 17   une carte qui lui permettrait de dire où il se trouvait et ce qu'il était

 18   censé dire.

 19   Mais comme vous regardez ce document, cette carte, on comprend bien

 20   ce qu'on attendait de lui. Tout ceci fait référence à des soldats musulmans

 21   qui se trouvaient de l'autre côté de la rivière. Ce sont des documents qui

 22   ont été traduits et qui étaient en B/C/S. Ça nous permet de comprendre

 23   exactement à quoi ressemble cette carte dessinée par M. Lukic.

 24   On lui a donné aussi une photographie d'une victime en l'espèce,

 25   Jasmina Vila, et on lui a demandé si pour 10 000 euros il serait capable de

 26   trouver l'adresse de cette femme, parce que Milan Lukic pensait qu'elle

 27   était encore en vie.

 28   A peu près au même moment où M. Tabakovic a rencontré pour la première fois

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  1   Mme Rasic, et a signé cette déclaration erronée, elle lui a aussi demandé

  2   s'il connaissait d'autres personnes qui étaient prêtes à faire la même

  3   chose contre de l'argent. Elle lui a donné une déclaration pro forma vierge

  4   que vous trouverez à l'intercalaire numéro 3, il s'agit de la pièce numéro

  5   3 tout à fait identique à celle qu'on a vue précédemment, et a dit à M.

  6   Tabakovic qu'elle voulait trouver un témoin qui signerait une déclaration

  7   similaire à cela portant sur le SDS à Visegrad en 1992. Elle lui a dit

  8   qu'elle cherchait des témoins qui auraient été d'anciens soldats, mais nés

  9   à Visegrad.

 10   Peu de temps après Tabakovic a signé cette déclaration à la

 11   municipalité, il a contacté deux hommes, Sacacelic [phon] et Amilovic

 12   [phon]. Il leur a demandé de venir prendre du café parce qu'il avait du

 13   boulot pour eux. Il a demandé à X s'il voulait gagner 1 000 euros et lui a

 14   dit d'aller à Novi Grad Sarajevo municipalité avec sa carte d'identité. Les

 15   trois personnes se sont réunies à un restaurant près de Novi Grad Sarajevo,

 16   près du bâtiment de la municipalité, et Tabakovic a montré à Y et X les

 17   déclarations que la commis à l'affaire voulait qu'ils signent. Il leur a

 18   dit qu'ils recevraient tous 1 000 euros pour avoir signé cette déclaration.

 19   Tabakovic a dit à X que lui et Y déposeraient concernant une exécution. X

 20   et Y ont été d'accord pour signer ces déclarations. Tabakovic a téléphoné à

 21   la commis à l'affaire et a dit, J'ai terminé ce boulot pour vous; j'ai

 22   trouvé les gens. Il s'est arrangé pour que X et Y la rencontrent à la

 23   municipalité de Novi Grad Sarajevo.

 24  (expurgé)

 25  (expurgé). Le

 26   même jour, Y a signé la déclaration concernant le SDS à Visegrad. Ce matin-

 27   là, Tabakovic a accompagné chacun de ces hommes à son tour depuis le

 28   restaurant jusqu'au bâtiment de la municipalité de Novi Grad Sarajevo et

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  1   retour et les a présentés l'un et l'autre à la commis à l'affaire qui se

  2   trouvait à l'intérieur du bâtiment.

  3   Tabakovic a dit que Y était saoul perdu. Chacun que ces hommes a

  4   signé sa déclaration - comme on le voit aux intercalaires 6 et 7 - devant

  5   un fonctionnaire de la municipalité qui vérifiait et en a pris copies. A la

  6   sortie, un homme s'est approché de X et de Y. Tabakovic était présent au

  7   moment où X et Y ont été payés de la même manière que lui-même avait été

  8   payé avec l'agenda vert, avec une enveloppe contenant 20 billets de 50

  9   euros par un homme que la commis à l'affaire avait désigné à X et Y. La

 10   commise à l'affaire a dit à Tabakovic que l'homme qui avait fait le

 11   paiement était "notre homme."

 12   Après que X et Y aient terminé leurs déclarations de certification,

 13   elle a dit à Tabakovic qu'elle lui parlerait au téléphone plus tard. Puis

 14   elle est partie avec cet homme dans un taxi. Tabakovic est retourné au

 15   restaurant avec Y, et Y avec ses 1 000 euros, ses 1 000 euros ont été

 16   partagés également entre Tabakovic, X et Y, 100 euros demeurant pour payer

 17   la note pour les boissons consommées par ces trois hommes.

 18   X a été d'accord et a reconnu qu'il avait signé une déclaration

 19   fausse; il a dit qu'il avait juste pris l'argent. Y avait appris de

 20   Tabakovic et X que s'il signait quelque chose, il recevrait 1 000 ou 2 000

 21   euros. Tabakovic a contacté les deux hommes et leur a demandé s'ils

 22   voulaient gagner de l'argent en signant de fausses déclarations. A la fois

 23   X et Y on fait leurs déclarations sachant que leurs déclarations étaient

 24   fausses. Tabakovic a dit que tous deux savaient qu'ils signaient et

 25   fournissaient une fausse déclaration dans l'affaire Milan Lukic. Tabakovic

 26   savait que leurs déclarations avaient été signées, vérifiées et remises à

 27   la commise à l'affaire. A l'origine, il était réticent à dire aux

 28   enquêteurs les noms de ces hommes. Mais le 28 janvier 2009, il a défini

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  1   leurs identités comme étant X et Y.

  2   Par la suite, à la signature des premières déclarations en octobre

  3   2008, Tabakovic a été contacté à nouveau par la commis à l'affaire, car il

  4   y avait une erreur dans les déclarations qu'il avait signées et qui avaient

  5   été signées par X et Y. Cette erreur avait trait à une date des

  6   déclarations, et la commise à l'affaire avait besoin de nouvelles

  7   déclarations qu'il fallait signer. Tabakovic a contacté Y et X à nouveau.

  8   Il a dit que le lendemain ils ont signé les déclarations modifiées. Il a

  9   donné ces déclarations à la commis à l'affaire. Ces déclarations sont

 10   datées du 5 décembre 2008, et on les trouve aux intercalaires 8 et 9 -- les

 11   pièces 8 et 9 et 10.

 12   Monsieur le Président, la seule importance de ce changement de date

 13   est importante pour ce qui est de l'alibi.

 14   Après cette réunion, il a rencontré la commis à l'affaire lorsqu'elle

 15   a demandé les tailles des vêtements. Tabakovic a demandé quand il serait

 16   payé. Après sa réunion avec la commis à l'affaire, elle a pris ces

 17   déclarations et est partie pour Belgrade. Le 5 décembre, des déclarations

 18   ont été fournies à l'Accusation par la Défense pendant le procès le 20

 19   janvier 2009. Là encore, on ne suggère pas que Tabakovic ait su quel était

 20   l'objet précis pour lequel ces déclarations seraient utilisées ni quelle

 21   était l'incidence que ces déclarations étaient censées avoir sur le procès

 22   Lukic, mais elles étaient en fait pertinentes par rapport aux alibis de

 23   Milan Lukic. Je ne suggère pas que M. Tabakovic ait connaissance de cette

 24   importance du changement de date, c'est simplement le fait et c'est ce qui

 25   s'est passé, et c'est ce qui est important.

 26   Le 29 décembre 2008, Tabakovic s'est présenté à la grille du bâtiment

 27   de l'ONU à Sarajevo. Quand il a d'abord parlé aux enquêteurs, il a demandé

 28   une sorte d'indemnisation pour avoir fourni des renseignements concernant

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  1   le paiement des témoins en particulier, il a demandé 2 500 euros. On lui a

  2   dit qu'aucun paiement de ce genre ne serait fait pour des renseignements et

  3   il est parti sans donner une identification quelconque. Néanmoins, il est

  4   revenu au bâtiment de Sarajevo le lendemain en laissant ses renseignements

  5   d'identification et sa fausse déclaration. M. Tabakovic a donné à

  6   l'enquêteur de l'Accusation, Don King, un résumé de ce qu'il pouvait dire.

  7   Il a expliqué qu'il l'avait fait pour l'argent, qu'il avait une femmes et

  8   deux enfants et qu'il n'y avait pas beaucoup réfléchi, et qu'il ne le

  9   faisait pas pour des raisons patriotiques. Une réunion a été organisée le

 10   31 décembre 2008 pour que Tabakovic vienne à Sarajevo aux bureaux de l'ONU

 11   pour donner son récit, son compte rendu. Dans une interview enregistrée en

 12   vidéo, Tabakovic a expliqué ce qui s'était passé de façon détaillée et a

 13   fourni volontairement des documents pour corroborer cette déclaration. Il a

 14   également dit qu'il s'attendait à un paiement supplémentaire de 1 500 euros

 15   du côté du 5 ou 6 janvier 2009 par la commise à l'affaire. Tabakovic a

 16   expliqué qu'il avait contacté le bureau du Procureur parce que c'était "la

 17   chose à faire" en fait. Il a dit que le but de sa visite au bureau du

 18   Procureur était qu'il ne considérait pas que ce, à quoi il était mêlé, fût

 19   bon. Il a dit qu'il se sentait soulagé et beaucoup mieux à la suite d'avoir

 20   porté ces questions à l'intention du bureau du Procureur.

 21   Au cours de ses interviews suivantes avec les enquêteurs du bureau du

 22   Procureur, il a évoqué les préoccupations qu'il avait concernant sa

 23   sécurité et sa situation financière. Le 10 janvier 2009, Tabakovic a

 24   rencontré les membres de la Défense de Milan Lukic et d'autres à magasin

 25   Mercator. Avant ce contact avec la Défense, Tabakovic avait contacté Don

 26   King, l'enquêteur du bureau du Procureur, pour demander son avis et des

 27   conseils, mais il n'a reçu aucun conseil sur le point de savoir s'il devait

 28   ou non y participer, être présent. Au cours de cette réunion, Tabakovic a

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  1   appris que la commis à l'affaire avait été enlevée de l'équipe de Défense

  2   parce qu'elle avait raté quelque chose qui avait à voir avec le deuxième

  3   paiement qui devait être payé au témoin, et que ce paiement aurait lieu

  4   maintenant quand ces personnes viendraient déposer, et que l'homme nommé

  5   Dragan devait être le contact de Tabakovic à partir de ce moment-là.

  6   Le lendemain, à la demande de Dragan, Tabakovic a rencontré un

  7   juriste à Mercator. Ce juriste a demandé si Tabakovic avait eu des

  8   problèmes avec la justice et la loi. Il a dit qu'il pouvait lui fournir un

  9   passage jusqu'à La Haye librement. Ce juriste et Tabakovic à ce moment-là

 10   ont examiné l'ensemble de sa déclaration fausse, ligne par ligne, ont

 11   discuté de ce que Tabakovic pourrait dire sur ce dont il se souvenait et ce

 12   sur quoi il devait déposer, et comment il savait que Milan Lukic avait dit

 13   clairement ces choses au juriste, à savoir qu'il ne connaissait pas Milan

 14   Lukic.

 15   Après cette réunion, Tabakovic a dit qu'il allait prendre des mesures

 16   pour obtenir un passeport. A la demande de ce juriste, Tabakovic a

 17   également recueilli des renseignements personnels sur X et Y, y compris ce

 18   qu'ils avaient fait pendant la guerre et sur la question de savoir s'ils

 19   avaient des casiers judiciaires ou quoi que ce soit qui "pourrait les

 20   compromettre" devant un tribunal, et il a donné ces renseignements à

 21   Dragan.

 22   Le 15 février ou environ vers cette date, 15 février 2009, Dragan a

 23   téléphoné à Tabakovic et lui a dit de faire le nécessaire pour obtenir un

 24   passeport pour se rendre à La Haye pour faire une déposition.

 25   M. ROGERS : [interprétation] Là, il y a un bref paragraphe dont je

 26   souhaiterais traiter en audience à huis clos, s'il vous plaît.

 27   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Huis clos, s'il vous plaît.

 28   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos, Monsieur le

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  1   Président.

  2   [Audience à huis clos partiel]

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 26   [Audience publique]

 27   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.

 28   M. ROGERS : [interprétation] Dans l'ensemble, Tabakovic a participé à huit

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  1   interviews qui ont été enregistrées en vidéo entre le 31 décembre 2008 et

  2   le 24 décembre 2009 avec le bureau du Procureur. La dernière était avec

  3   avertissement en tant que suspect. Les autres interviews, il était venu

  4   comme témoin. Certains contacts étaient à son initiative, d'autres par le

  5   bureau du Procureur. A chaque fois qu'il est venu, il a comparu en disant

  6   qu'il le faisait volontairement. Il a fourni les noms et les détails

  7   d'autres personnes qui étaient impliquées, il a pris part aux procédures

  8   d'identification de façon à aider à les identifier. On lui a demandé

  9   pourquoi il était venu au Tribunal et il a dit qu'il avait fait une grave

 10   erreur et qu'il voulait la corriger, et il s'est rendu compte qu'il avait

 11   fait cette erreur, je le cite :

 12   "Quelque part du côté du mois de décembre 2008."

 13   Monsieur le Président, voici les faits. A moins que je puisse vous aider

 14   davantage avec autre chose, c'est tout ce que je propose de dire à ce

 15   stade.

 16   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Rogers. Je

 17   remarque l'heure et je pense qu'il serait juste à votre égard, Monsieur

 18   Powles, si nous pouvions avoir la suspension de séance nécessaire de façon

 19   à vous permettre ensuite de prendre la parole et de continuer après la

 20   suspension.

 21   M. POWLES : [interprétation] Je vous remercie beaucoup. Il y a deux

 22   documents que je voudrais présenter. Maintenant serait peut-être le moment

 23   qui convient pour le faire de façon à ce que vous puissiez également les

 24   examiner et réfléchir à leur sujet.

 25   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous serions très reconnaissants.

 26   M. POWLES : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.

 27   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Monsieur Powles.

 28   Nous allons suspendre l'audience et nous reprendrons à 11 heures et

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  1   quart.

  2   M. POWLES : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  3   --- L'audience est suspendue à 10 heures 48.

  4   --- L'audience est reprise à 11 heures 17.

  5   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Monsieur Powles.

  6   M. POWLES : [interprétation] Je crois, Monsieur le Président, que M. Rogers

  7   voudrait tout d'abord prendre la parole, si vous le permettez.

  8   Monsieur le Président, il y a deux points : pour commencer, le document que

  9   je vous avais fourni. Au paragraphe 29, je pense qu'il serait juste de dire

 10   que -- excusez-moi. Est-ce que nous pourrions aller, s'il vous plaît, en

 11   audience à huis clos.

 12   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes en audience à huis clos.

 13   [Audience à huis clos partiel]

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 22   [Audience publique]

 23   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous venez juste de dire, Monsieur

 24   Rogers, qu'il était parvenu à votre attention que l'accusé avait eu des

 25   condamnations antérieures en 2003 devant le tribunal municipal de Sarajevo,

 26   où il a été reconnu coupable de fraude en ce qui concerne une affaire dans

 27   laquelle il avait soutenu qu'il pouvait obtenir un visa pour l'Allemagne

 28   et, avec cette prétention, avait obtenu une somme d'environ 1 570 marks

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  1   allemands.

  2   M. ROGERS : [interprétation] C'étaient des marks convertibles, Monsieur le

  3   Président. C'est exact.

  4   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Là encore, il a donc été condamné --

  5   quelle était cette condamnation déjà ?

  6   M. ROGERS : [interprétation] Cinq mois de prison et l'ordre de rembourser

  7   la somme de 1 570 marks convertibles à la victime en l'espèce. La peine

  8   maximale était de trois ans d'emprisonnement. Et avant cette infraction, il

  9   n'avait pas de casier judiciaire. Ce jugement a été confirmé en appel le 9

 10   septembre 2004.

 11   Et excusez-moi d'avoir oublié de dire cela à la fin de mes

 12   observations tout à l'heure.

 13   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Monsieur Powles.

 14   M. POWLES : [interprétation] Si vous permettez, Monsieur le Président, au

 15   nom de M. Tabakovic. Bien entendu, il a accepté que l'outrage au Tribunal

 16   comme pour toute autre juridiction et le fait d'avoir entravé le cours de

 17   la justice était évidemment une question grave. Cette affaire, toutefois,

 18   selon nous, entre à un moment où il faut examiner l'échelle de gravité. En

 19   contactant l'Accusation à la fin de décembre 2008, M. Tabakovic a remédié à

 20   l'infraction et s'est assuré qu'en fait aucun dommage véritable ne pourrait

 21   s'ensuivre par rapport au processus de l'affaire.

 22   La mesure prise par M. Tabakovic en se mettant en rapport avec

 23   l'Accusation à la fin de décembre 2008 a fait en sorte qu'aucun faux

 24   témoignage ou fausse déposition n'a, en fait, été présenté à la Chambre de

 25   première instance et à son examen pour déterminer la culpabilité ou

 26   l'innocence des Lukic accusés. La teneur des déclarations fausses de

 27   Tabakovic, de X et de Y n'ont pas été présentées à la Chambre de première

 28   instance comme éléments de preuve et finalement, il n'en a pas été tenu

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  1   compte par la Chambre de première instance. Donc nous voudrions faire

  2   valoir que ceci est entièrement dû aux mesures très décisives prises par M.

  3   Tabakovic lorsqu'il s'est mis en rapport avec l'Accusation.

  4   Pour finir, Milan Lukic a été reconnu coupable et condamné à emprisonnement

  5   à vie. Ses déclarations n'ont, en fait, eu aucun effet. La mesure dans

  6   laquelle M. Tabakovic est intervenu et a fait de l'obstruction à

  7   l'administration de la justice est limitée à deux points : pour commencer,

  8   l'inclusion de son nom et de X et Y par rapport à liste de témoins de

  9   l'article 65 ter dans l'affaire Milan Lukic, avec un résumé de ces

 10   questions. Ceci a été présenté au Tribunal en 19 novembre 2008. La deuxième

 11   question était le fait d'avoir fourni de fausses déclarations de X et de Y

 12   à l'Accusation pour la Défense de Lukic le 20 janvier 2009.

 13   Si je peux développer un petit peu en appelant votre attention sur le

 14   calendrier des contacts de M. Tabakovic et les comparer à sa coopération

 15   avec le bureau du Procureur, ce qu'on a tenté de faire dans ce document

 16   c'est de clairement exposer quand et comment M. Tabakovic est intervenu. Il

 17   faut comparer cela avec les mesures qu'il prenait pour coopérer avec

 18   l'Accusation à ce moment-là. Ce qui est écrit en italique ce sont les

 19   contacts. Nous avons ajouté également en gras son contact pour ce qui est

 20   de traiter avec le bureau du Procureur. Ce qui est ombré explique très

 21   clairement ces points, à savoir qu'il y a eu interaction entre la Défense

 22   Lukic et le bureau du Procureur et le Tribunal et la mesure dans laquelle

 23   ces documents donnent les informations qui ont pu être prises en

 24   considération dans la procédure.

 25   En commençant en octobre 2008, M. Tabakovic a été prié de fournir une

 26   fausse déclaration contre de l'argent, quelque chose qu'il a accepté de

 27   faire le 20 octobre 2008. C'était vraiment la phase un de son comportement.

 28   La deuxième chose qu'il a faite à la demande de Rasic était de

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  1   trouver deux autres personnes qui seraient intéressées à signer des

  2   déclarations pour de l'argent. X et Y qui ont été trouvés et qui tous deux

  3   ont signé des déclarations et ont reçu 1 000 euros chacun, bien que X les

  4   avait partagés à la fois avec M. Tabakovic et Y. Ceci est vraiment la phase

  5   deux.

  6   La troisième phase c'est la modification des déclarations ou les

  7   déclarations modifiées qui ont étés signées le 5 décembre 2008. Il s'agit

  8   donc des pièces 8, 9 et 10, déclarations qui, pour finir, ont été fournies

  9   au bureau du Procureur le 20 janvier 2009.

 10   Donc ce sont là les trois étapes de ce qu'a fait M. Tabakovic ou ce

 11   qui est de son comportement. Le 19 novembre, M. Tabakovic, X et Y ont été

 12   compris dans la liste des témoins 65 ter dans l'affaire Milan Lukic, et un

 13   résumé des questions abordées dans leurs déclarations devait être fourni.

 14   Il y avait donc ces trois stades. Et M. Tabakovic a mis un coup d'arrêt

 15   décisif en s'adressant au bureau du Procureur à la fin de décembre 2008.

 16   Le 29 décembre, il est allé au Tribunal, au bureau du Procureur, il

 17   n'a pas laissé son nom. Il est revenu le lendemain, à ce moment-là, a dit

 18   qu'il était et a fourni un exemplaire de sa fausse déclaration au bureau du

 19   Procureur. Nous faisons valoir que c'est quelque chose qu'on ne pouvait pas

 20   prévoir, à savoir après que M. Tabakovic soit venu au Tribunal pour faire

 21   une fausse déclaration. Ça n'aurait jamais pu marcher. Il a mis un coup

 22   d'arrêt à cela.

 23   Le moment même où il a passé cette porte pour faire cette fausse

 24   déclaration, l'Accusation a été en mesure de dire qu'elle n'était pas

 25   véridique. On nous a donné copie de cette fausse déclaration, et vous avez

 26   dit que c'était une fausse déclaration, que ceci mettait un coup d'arrêt à

 27   tout.

 28   Le 3 décembre [comme interprété], M. Tabakovic a donné une interview

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  1   entièrement enregistrée sur un total de huit interviews enregistrées au

  2   bureau du Procureur. Il a expliqué ce qui s'était passé de façon détaillée

  3   et a dit qu'il était soulagé et se sentait beaucoup mieux après avoir dit

  4   au bureau du Procureur tout ce qui s'était passé.

  5   Passons maintenant à 2009. Le 9 janvier 2009, M. Tabakovic a encore

  6   rencontré un enquêteur du bureau du Procureur et il lui a dit qu'il était

  7   "libre de parler avec qui que ce soit que vous souhaitiez, et vous devez

  8   décider vous-même comment vous voulez procéder en la matière."

  9   M. Tabakovic a expliqué qu'il était préoccupé par les renseignements

 10   qu'il avait fournis et il craignait qu'ils ne tombent dans de mauvaises

 11   mains, et ceci pourrait être pour lui très grave.

 12   Le lendemain, le vendredi 9 janvier, et le jour suivant, le 10

 13   janvier, le samedi, à 10 heures 45 dans la matinée, M. Tabakovic lui-même

 14   s'est mis en rapport avec le bureau du Procureur et a expliqué qu'il avait

 15   été contacté par l'équipe de Milan Lukic, l'équipe de Défense, pour

 16   assister à une réunion. Il a demandé qu'on lui donne des instructions sur

 17   la façon dont il devrait réagir à cette demande, et on le dit encore que sa

 18   réaction dépendait uniquement de lui, c'était son choix.

 19   Il a rencontré les membres de l'équipe de Défense Milan Lukic à

 20   l'hôtel Mercator et a dit que Rasic avait été enlevé de l'équipe et Dragan

 21   devait être le contact. Il a demandé à rencontrer quelqu'un le lendemain,

 22   11 janvier, tel été le cas. A ce moment-là, une déclaration complète a été

 23   discutée. Ça c'était le dimanche.

 24   Le jour suivant, le lundi, M. Tabakovic a dûment rendu compte au

 25   bureau du Procureur et leur a dit tout ce qui s'était passé pendant le

 26   week-end. Il a fourni les détails à l'hôtel Mercator sur l'ensemble de son

 27   contact avec l'équipe de la Défense de Milan Lukic au cours du week-end.

 28   Il a mentionné également le fait qu'il avait pensé prendre un avocat,

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  1   et on lui a dit qu'il fallait examiner l'aspect qu'il pourrait y avoir des

  2   coûts dans cela, et M. Tabakovic a dit : Je ne sais plus ce que je vais

  3   faire. Je ne sais plus comment me comporter.

  4   Le mardi, le 13, partant des informations fournies par Tabakovic au

  5   bureau du Procureur, un enquêteur est allé à l'hôtel Mercator et a obtenu

  6   une cassette représentant les images du circuit de télévision fermé, le

  7   contrôle. Le 15 janvier, Dragan a téléphoné à Tabakovic, à qui on a dit de

  8   prendre les dispositions nécessaires pour avoir un passeport. Aussitôt

  9   après cet appel téléphonique, M. Tabakovic est allé à l'antenne du bureau

 10   du Procureur et a dit qu'il avait été contacté par Dragan à propos d'un

 11   passeport.

 12   On a reparlé de la question d'obtenir un avocat et on lui a dit que

 13   c'était à lui de décider et il a dit qu'à son avis, ce n'était pas

 14   nécessaire.

 15   Nous arrivons dans cette zone grise, ces interactions avec la Défense

 16   Lukic et la question d'une intervention du bureau du Procureur. Le 20

 17   janvier 2009, les déclarations du 5 décembre ont été fournies au bureau du

 18   Procureur par la Défense Lukic. Ça s'est passé le 20 janvier. Trois jours

 19   plus tard - trois jours plus tard, je le précise - M. Tabakovic, X et Y ont

 20   été retirés de la liste des témoins visés par l'article 65 ter. Donc il

 21   fallut trois jours, période entre le moment où ces déclarations sont

 22   fournies à l'Accusation et puis sont retirées.

 23   N'oublions pas que le 28 janvier, M. Tabakovic a de nouveau été

 24   entendu par le bureau du Procureur, et à ce moment-là, il a identifié X et

 25   Y. Tout comme il s'était identifié, fin décembre 2008, là, non plus, il

 26   était devenu impossible qu'il donne une vie quelconque au cours de cette

 27   déclaration. Le 28 janvier 2009, après qu'il eût identifié X et Y au bureau

 28   du Procureur, il était certain que ces deux personnes ne pourraient jamais

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  1   venir témoigner à l'audience.

  2   Quoi qu'il en soit, ces personnes, les trois personnes avaient déjà

  3   été retirées de la liste des témoins à décharge de Lukic.

  4   N'oublions pas non plus qu'un enquêteur du bureau du Procureur a dit

  5   le 28 janvier à Tabakovic qu'ils étaient reconnaissants au bureau du

  6   Procureur de l'aide que Tabakovic avait donnée, et il espérait que cette

  7   coopération qui avait commencé se poursuivrait.

  8   Passons au 15 janvier 2009. M. Tabakovic est entendu par M. Rogers, M. Wood

  9   et un enquêteur, M. Schweiger. On lui dit alors que si les chefs

 10   d'accusation sont retenus tel qu'est le cas, il était probable qu'il

 11   comparaîtra en tant que témoin. On lui a montré les images de l'hôtel

 12   Mercator, qui avaient été obtenues et qui reprenaient ces images en circuit

 13   fermé, qui avait été obtenues le 13 janvier. On lui a montré et il a aidé

 14   l'Accusation en montrant les personnes sur ces images.

 15   Il a dit clairement à ce moment-là que si la Défense lui demandait de

 16   venir témoigner au TPY, il refuserait de comparaître en tant que témoin. Le

 17   2 mars, il a aidé, il a participé à une procédure d'identification

 18   concernant Rasic. Il a été de nouveau entendu par le bureau du Procureur le

 19   11 mars.

 20   Le 3 avril il est venu au TPY. Vous verrez ces détails dans un

 21   encadré qui concerne le 3 avril ou c'est compris dans l'accord de

 22   plaidoyer.

 23   Le 21 août, quelques mois plus tard, il a demandé au bureau du

 24   Procureur ce qu'il en était de son statut, et on lui dit qu'effectivement

 25   si on avait besoin de lui reparler il serait averti. Ça, ça s'est passé au

 26   mois d'août 2009.

 27   Enfin, le 24 septembre il a été entendu en tant que suspect par l'équipe

 28   qui l'avait déjà interviewé, entendu auparavant et il a participé à une

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  1   nouvelle procédure d'identification pour identifier cette fois Dragan.

  2   Je pense que nous avons ainsi replacé le contexte idoine, et ceci

  3   montre que les infractions qu'on peut lui reprocher sont d'une portée très

  4   limitée, et qu'elles n'ont eu aucun effet sur le procès Lukic.

  5   Ceci étant dit, M. Tabakovic reconnaît qu'il a mal fait. Mais comme

  6   il a décidé d'en parler au bureau du Procureur en 2008, ceci montre qu'il

  7   savait qu'il avait fait une erreur, mais il l'a dit au bureau du Procureur,

  8   il voulait une solution. Il voulait aussi empêcher toute entrave au cours

  9   de la justice.

 10   Messieurs les Juges, lorsqu'il a décidé de signer cette fausse

 11   déclaration, il était poussé par le désespoir. Il avait besoin d'argent, il

 12   n'était pas poussé par une volonté politique ou d'origine ethnique

 13   d'empêcher ce procès. Il a dit lui-même :

 14   "Je n'ai pas vraiment réfléchi à la question. Je ne l'ai pas fait

 15   pour des raisons patriotiques."

 16   De plus, et le bureau du Procureur le reconnaît, Tabakovic ne savait

 17   pas précisément pourquoi ou à quoi devait servir cette déclaration, ni

 18   l'effet recherché dans le procès Lukic.

 19   Sans qu'on l'y pousse, M. Tabakovic m'a demandé de vous dire qu'il a

 20   le plus grand respect pour ce que fait le TPY, le plus grand respect pour

 21   le rôle du TPY qui traduit en justice ceux qui sont responsables des crimes

 22   commis en ex-Yougoslavie. Il vous fait part de ses remords les plus

 23   sincères, et il voudrait exprimer ceci aux victimes des crimes retenus dans

 24   l'affaire Lukic et à la Chambre. Il ne veut pas aggraver cette injustice,

 25   et c'est pour cela qu'il s'est adressé de lui-même au bureau du Procureur

 26   en 2008. Pour lui, c'était la seule chose qu'il pouvait faire. Ce sont les

 27   mots même qu'il a employés.

 28   Je pense qu'ici, il convient de retenir le plus grand nombre de

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  1   circonstances atténuantes, vu son accord de plaidoyer. Il a reconnu qu'il

  2   avait mal fait. Il l'a toujours dit. C'est pour cela qu'il s'est adressé au

  3   bureau du Procureur. Sans lui, aucune procédure n'aurait pu être intentée

  4   contre lui ni contre autrui. C'est parce qu'il a agi qu'il se retrouve ici

  5   aujourd'hui dans ce prétoire.

  6   Regardez les paragraphes 12 à 16 de notre note, ceci concerne la

  7   situation personnelle de M. Tabakovic. Je ne pense pas qu'il soit

  8   nécessaire d'aborder ceci par le menu en audience publique. Vous avez ces

  9   détails, et j'espère que vous en tiendrez compte au moment de vous

 10   prononcer sur la peine.

 11   Je me contenterais de vous rappeler que c'est un homme qui n'a pas

 12   beaucoup de moyens. Vous savez, un mark convertible c'est un demi euro,

 13   c'est 50 centimes. Un euro fait deux marks convertibles. Vous allez voir

 14   qu'il a vraiment très peu de moyens, il n'a vraiment pas grand-chose dont

 15   il peut vivre. Puis il a eu des problèmes de santé en 2008, ce qui fait

 16   qu'il a dû passer trois mois à l'hôpital, le rendant incapable de

 17   travailler. C'était juste avant que ne commencent toutes ces histoires, et

 18   qu'effectivement il a accepté de l'argent pour signer une fausse

 19   déclaration.

 20   Je le rappelle, c'est un homme qui a très peu de moyens financiers,

 21   pas beaucoup de revenu, et sa détention a, bien sûr, un effet sur sa

 22   famille. Il n'y a que les revenus de sa femme qui permettent à la famille

 23   de subvenir à leurs besoins en Bosnie. Vous verrez le paragraphe 16 qui en

 24   parle.

 25   Troisième volet : les circonstances de son arrestation et le temps

 26   passé en détention provisoire. En novembre 2009, M. Tabakovic se trouvait

 27   en Croatie. Il venait tout juste de trouver un emploi. Et pendant qu'il se

 28   trouve en Croatie, il a appris par des amis qu'il était recherché par le

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  1   TPY. Aussitôt, il a essayé de contacter l'antenne de Sarajevo, et puis il a

  2   pris la décision de rentrer à Sarajevo pour y voir les enquêteurs et pour

  3   répondre des allégations portées contre lui. Il a été arrêté le 23 novembre

  4   2009. Avant d'être interpellé, d'être arrêté, il a téléphoné à la police et

  5   a convenu d'un lieu où il pouvait être arrêté. Il n'a pas résisté à cette

  6   opération, aucune contrainte n'a été utilisée, aucune contrainte ne fut

  7   nécessaire.

  8   Il a été placé en détention provisoire jusqu'au moment où il a été

  9   mis en liberté sous caution, le 26 novembre 2009. Donc il avait été arrêté

 10   le 23 novembre, et il a passé quelques jours au tribunal de la Bosnie-

 11   Herzégovine jusqu'au 26. Les conditions de la caution étaient très

 12   strictes. Il ne pouvait pas quitter son lieu de domicile. Il ne pouvait pas

 13   quitter le périmètre de la ville dans laquelle il vivait. Il devait fournir

 14   plusieurs pièces d'identité et se présenter tous les jours au poste de

 15   police de sa localité et ceci, pendant une période de 21 jours jusqu'au

 16   moment de son transfèrement à La Haye, le 18 décembre 2009. Il est depuis

 17   en détention provisoire.

 18   Permettez-moi de dire un point s'agissant de temps de détention

 19   provisoire. Il a passé ici 90 jours de détention.

 20   Mais puis-je aborder un point à huis clos partiel, précisément sur ce

 21   point ?

 22   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous avez dit 87 ou 90 ?

 23   M. POWLES : [interprétation] 87 jours à La Haye plus 3 jour en Bosnie, ça

 24   fait en tout 90 jours de détention provisoire.

 25   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Huis clos partiel.

 26   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel,

 27   Monsieur le Président.

 28   [Audience à huis clos partiel]

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 17   [Audience publique]

 18   M. POWLES : [interprétation] Permettez-moi de revenir à la peine

 19   recommandée par l'Accusation. Je remercie sincèrement le bureau du

 20   Procureur de la synthèse faite des peines imposées en matière d'outrage

 21   ici, au TPY. C'est un document utile que cette synthèse.

 22   Je voudrais relever deux erreurs eu égard à certaines des peines

 23   imposées. Pour Haraqija, 17 décembre 2008, déclaration de culpabilité et

 24   emprisonnement de cinq mois. N'oublions pas qu'il a été acquitté au stade

 25   de l'appel, ce qui veut dire que la peine a été rejetée en appel.

 26   Dans le procès Bulatovic où il y avait refus de comparution en tant

 27   que témoin et quatre mois d'emprisonnement ont été imposés; mais n'oublions

 28   pas qu'il y a eu suspension de la peine, sursis de deux ans, en raison des

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  1   problèmes de santé concernant M. Bulatovic.

  2   Voilà pour ce qui est de la peine. Manifestement, la fourchette est

  3   large d'après ce que prévoit le règlement en matière d'outrage au TPY. Il y

  4   a eu deux affaires pour subornation de témoin ou intimidation de témoin, on

  5   a imposé l'emprisonnement, la fourchette va de trois à cinq mois. Beqaj,

  6   Morina et Haraqija, la dernière décision ayant été annulée en appel.

  7   Autant de peines de trois à cinq mois et qui suivent des procès très

  8   polémiques où il y a eu de nombreuses protestations des accusés. Dans

  9   toutes ces procédures, les accusés cherchaient à avoir, par leur

 10   comportement, un effet direct et des conséquences concrètes sur

 11   l'administration de la Justice. Dans aucun de ces procès, les accusés

 12   n'avaient d'eux-mêmes averti le bureau du Procureur, ni le TPY.

 13   Pour ce qui est des autres procès de subornation de témoin, il y a

 14   bien sûr l'affaire Milan Vujin. N'oublions pas que Milan Vujin était

 15   l'avocat de Dusko Tadic, et la Chambre d'appel l'a condamné à 15 000

 16   florins et ceci, dans des circonstances où il avait obtenu des faux

 17   témoignages qu'il voulait soumettre à la Chambre et qu'il a soumis à la

 18   Chambre de première instance et qui allaient contre les intérêts même de

 19   son propre client. C'est là une violation flagrante du devoir de

 20   confidentialité et de corruption de la justice, et ceci ne méritait même

 21   pas une peine. Mais je trouve qu'il faut, bien sûr, être indulgent envers

 22   les avocats, mais je trouve qu'ici vraiment quand on voit M. Tabakovic et

 23   ce qu'à fait Milan Vujin, aucune comparaison n'est possible.

 24   Par conséquent, nous estimons que quatre ou six mois, ce serait là

 25   une peine bien trop lourde, car la portée de ce qu'il a pu avoir fait est

 26   très limitée. Il a essayé de coopérer avec l'Accusation, et dans cette

 27   procédure, c'est lui-même en personne qui a cherché à veiller qu'aucun

 28   élément négatif ne ressortirait du procès Lukic.

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  1   Voyez le paragraphe 26 de nos notes. Ceci s'est fait à huis clos dans

  2   un autre procès. Je ne veux donc pas aborder ceci dans le détail, mais je

  3   vous rappelle la dernière ligne du paragraphe cité au paragraphe 26 qui

  4   vient d'une comparution à huis clos.

  5   Le comportement de M. Tabakovic a commis un outrage assez clair et il

  6   l'a prouvé en plaidant coupable, mais vous avez la déclaration de

  7   l'Accusation. Il y a longtemps, et dans cette procédure qui montre

  8   clairement que vraiment, ce comportement quand on voit l'échelle de gravité

  9   en matière d'outrage, il est à l'échelon le plus bas.

 10   Vu cette situation, nous pensons que ce que recommande l'Accusation,

 11   à savoir quatre ou six mois, est vraiment exagéré.

 12   Que recommande la Défense en matière de peine ?

 13   Le fait qu'il a entravé le cours de la justice se limite aux éléments

 14   repris au paragraphe 6 des notes en matière de diminution de peine et par

 15   rapport au comportement dont vous avez le schéma. Ces activités ont une

 16   portée très limitée et en plus, il faut se souvenir de son comportement eu

 17   égard à la participation d'autres personnes peut-être plus haut placées que

 18   lui dans ce procès. C'est la commise à l'affaire de la Défense Lukic qui a

 19   cherché à le faire intervenir et puis après, elle a été relayée par

 20   quelqu'un d'autre. Vous verrez, le 11 janvier, il a discuté avec un membre

 21   de cette équipe, lequel était au courant de la situation de M. Tabakovic en

 22   ce qui concerne ce qu'il savait de Milan Lukic.

 23   Qu'est-ce qui compte ici à notre avis, c'est que les personnes qui

 24   devraient être jugées pour outrage ne son pas ici présentes. Le rôle de M.

 25   Tabakovic ne doit-il pas être comparé à celui de M. X et M. Y, or aucun de

 26   ces deux n'a été poursuivi pour outrage. Ces deux personnes, X et Y,

 27   savaient qu'elles avaient fait de fausses déclarations et qu'elles allaient

 28   être utilisées dans le procès Milan Lukic. Si vous regardez les

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  1   déclarations signées par ces deux personnes, vous les trouverez à l'onglet

  2   6. S'agissant de la déclaration de Y, voyez la signature, 23 octobre 2008;

  3   et vous avez au dessus de cette signature, une déclaration - moi je ne vais

  4   pas vous lire la version en B/C/S - mais vous voyez en fin d'onglet 6 sa

  5   déclaration au dessus de la signature, qui dit :

  6   "J'ai lu cette déclaration de quatre pages qui contient tout ce que

  7   j'ai dit. J'ai fait cette déclaration de mon plein gré, je sais qu'elle

  8   peut être utilisée dans un procès du TPY, et il se peut que je sois appelé

  9   à la barre dans un procès."

 10   Vous trouverez une déclaration analogue dans la déclaration de Y à

 11   l'intercalaire 7. Donc ça ne fait pas l'ombre d'un doute, ces deux

 12   personnes savaient que leurs déclarations pouvaient être utilisées dans un

 13   procès dont allait connaître le TPY. De plus, X tout comme Tabakovic a dit

 14   à Y qu'il aurait de l'argent s'il signait. Ni X, ni Y n'a été poursuivi

 15   pour outrage, et c'est un contraste remarquable par rapport au traitement

 16   qu'on a réservé à M. Tabakovic.

 17   Non seulement ils n'ont pas été poursuivis, mais la participation de

 18   ces deux personnes est restée confidentielle, n'est pas dans le domaine

 19   public, alors qu'il y a eu mise en accusation publique de M. Tabakovic et

 20   on a grandement et longuement parlé du fait qu'il se préparait à signer une

 21   fausse déclaration. Vous avez le paragraphe 31, les deux dernières phrases,

 22   vous pourrez les lire. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire d'aborder le

 23   contenu du paragraphe 32 parce que ceci a été dit à huis clos partiel, à

 24   l'époque.

 25   Le fait que M. Tabakovic a passé ce temps en détention provisoire l'a

 26   beaucoup préoccupé, et c'est vrai depuis trois mois. Mais il se peut qu'à

 27   son retour au pays, il soit face à des difficultés encore plus grandes.

 28   Pour le moment, c'est sa famille qui ressent le contre coup de sa

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  1   situation.

  2   Parlons de la coopération qu'il a manifestée à l'égard du bureau du

  3   Procureur. Puis-je mettre en exergue les points suivants.

  4   C'est lui qui a mis tout ceci en branle en avertissant le bureau du

  5   Procureur.

  6   Deuxièmement, c'est lui, en personne, qui a fourni cette déclaration

  7   et la carte qu'avait tracée Milan Lukic à l'Accusation dès qu'il a eu un

  8   premier contact avec l'Accusation.

  9   Troisièmement, au départ, on lui avait dit qu'il serait "témoin" dans

 10   ce procès, et il a pleinement coopéré dans ce cadre avec l'Accusation.

 11   Quatrièmement, après un premier contact avec l'Accusation, il n'a pas tardé

 12   à informer l'Accusation chaque fois qu'il a eu un contact avec la Défense

 13   Lukic.

 14   Cinquièmement, pendant neuf mois, il a, avec beaucoup de diligence,

 15   assisté à huit entretiens avec l'Accusation. A un moment donné, on lui a

 16   dit que ce n'était pas nécessaire d'avoir un avocat, alors que celui-ci

 17   aurait pu le conseiller sur la meilleure façon d'agir. Nonobstant cela, il

 18   a quand même assisté à neuf entretiens, et à l'entretien lorsqu'il était

 19   suspect, il n'a même pas demandé la présence d'un avocat, en décembre 2009.

 20   Sixièmement, il a donné des détails sur tous les autres participants

 21   à l'Accusation.

 22   Septièmement, il a participé à des (expurgé)

 23  (expurgé)

 24  (expurgé)

 25  (expurgé)

 26  (expurgé)

 27   Vous retrouvez tout ceci au point 9. Inutile d'y revenir maintenant,

 28   mais je suis sûr que vous avez tout à fait compris ces points.

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  1   Vu toutes ces circonstances, vu le degré très élevé de coopération

  2   qu'il a manifesté avec la Procureure, étant donné que c'est lui qui a porté

  3   l'attention de l'Accusation sur sa situation, et sachant qu'il n'y aurait

  4   pas eu de procès, si ce n'était pas lui qui avait parlé de cela au bureau

  5   du Procureur, nous sommes ici dans des circonstances tout à fait inusitées,

  6   et nous pensons qu'une réprimande ou une peine, une astreinte légère aurait

  7   été la peine plus correcte.

  8   Il vient de passer trois mois en prison. En son nom, nous exhortons

  9   la Chambre à prononcer une peine qui permettra sa libération immédiate.

 10   Je vous remercie. Je suis prêt à répondre à vos questions, si vous en avez.

 11   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci beaucoup.

 12   Monsieur Rogers.

 13   M. ROGERS : [interprétation] Oui, à la suite de ce qui vient d'être dit,

 14   j'aimerais revenir sur quelques faits.

 15   Paragraphe 6 (ii), quand il parle d'avoir fourni des déclarations

 16   fausses de X et d'Y le 20 janvier, en fait les trois déclarations ont été

 17   fournies le 20 janvier par les trois personnes concernées. Donc, il a

 18   fourni non seulement les déclarations de X et Y, mais la sienne aussi, le

 19   20 janvier.

 20   Permettez-moi d'aborder deux points à huis clos partiel, Monsieur le

 21   Président.

 22   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui.

 23   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 24   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Page 66 expurgée. Audience à huis clos partiel.

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  2   [Audience publique]

  3   M. ROGERS : [interprétation] Je peux vous confirmer que M. Tabakovic a bel

  4   et bien contacté le bureau du Procureur avant de se rendre. Je pense que

  5   ceci doit être porté à votre connaissance. Une fois qu'il savait qu'il y

  6   avait une procédure en cours, il a pris des informations pour savoir ce

  7   qu'il convenait de faire.

  8   Ensuite, lorsque mon éminent confrère parle d'une opinion exprimée,

  9   sachez que quelle que soit l'opinion qu'a eu cet accusé avant la procédure

 10   lancée contre lui, je pense que vous ne devriez pas le prendre trop en

 11   compte, une fois établi le fait qu'un crime a bel et bien été commis. Nous

 12   avons des opinions, certes, et des différences d'opinions, mais une fois

 13   que l'on a conclu qu'un crime a bel et bien été commis, qu'une infraction a

 14   bel et bien été commise, il convient de fixer la peine.

 15   Ensuite, en ce qui concerne le fait que d'autres auraient pu,

 16   auraient dû, ou auraient éventuellement été poursuivis à un moment ou à un

 17   autre, pour ce qu'ils ont fait, ceci n'est pas pertinent en ce qui concerne

 18   la fixation de la peine, en tout cas, à notre avis. Quant à savoir pourquoi

 19   d'autres personnes ne sont pas poursuivies, ceci ne nous intéresse pas. Ce

 20   qui nous intéresse ici, c'est la conduite de cet accusé en l'espèce et la

 21   peine qu'il convient de donner à l'infraction qu'il a reconnue.

 22   Ensuite, en ce qui concerne les deux derniers points abordés par mon

 23   éminent confrère en ce qui concerne les peines précédentes, une peine a bel

 24   et bien été prononcée par la Chambre de première instance. Le fait qu'elle

 25   a été annulée en appel ne doit pas être pris en compte.

 26   En ce qui concerne l'affaire Vujin, il y a deux points à prendre en

 27   compte. Tout d'abord, vous devriez lire les documents concernant cette

 28   affaire, et ensuite, il s'agit d'une affaire qui a été traitée dans le

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  1   cadre de l'ancien régime, où la peine maximum était de six mois de prison.

  2   Sachez que dans cette affaire, la Chambre s'est demandée longuement s'il

  3   fallait l'envoyer en prison, maintenant qu'il s'agissait d'un avocat qui

  4   était actif et qui risquait de perdre sa charge, s'il était mis en prison,

  5   et la Chambre a décidé, de ce fait, de lui imposer une peine financière

  6   plutôt qu'une peine de prison. Mais nous pensons, à notre avis, que ceci

  7   n'est pas extrêmement pertinent en l'espèce. C'est à vous de voir, bien

  8   sûr.

  9   Il y a un autre point, maintenant, que je souhaite aborder, mais il

 10   convient de passer à huis clos partiel pour cela.

 11   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Huis clos partiel, s'il vous plaît.

 12   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 13   [Audience à huis clos partiel]

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 13   [Audience publique]

 14   M. POWLES : [interprétation] En ce qui concerne le paragraphe 6(ii) des

 15   écritures de la Défense, concernant les fausses déclarations faites par X

 16   et Y à la Défense Lukic le 20 janvier 2009. Bien entendu, la déclaration de

 17   M. Tabakovic a aussi été donnée à ce moment-là, c'est évident. Nous le

 18   reconnaissons, et d'ailleurs, cela se voit dans le déroulement des faits.

 19   Mais ce n'est pas mentionné, parce qu'il s'était déjà présenté au bureau du

 20   Procureur à ce moment-là. Donc il est évident qu'il avait donné sa

 21   déclaration, et c'est pour cela que ça n'a pas été inclus dans le 6 (ii),

 22   parce qu'il a donné les deux autres déclarations et, bien entendu, la

 23   sienne. Mais ça, ça allait sans le dire.

 24   Ensuite, en ce qui concerne les autres qui pourraient ou qui ne

 25   pourraient pas -- qui ne sont pas poursuivis, pour nous, c'est parfaitement

 26   pertinent, parce que cela montre bien qu'il a quand même -- il semble qu'il

 27   y est deux points de mesure quand même entre le traitement accordé à M.

 28   Tabakovic et le traitement accordé aux deux autres qui, finalement, ont

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  1   commis la même infraction ou une infraction extrêmement similaire. Ils

  2   n'ont même pas été identifiés. Ils n'ont certainement pas été poursuivis et

  3   même pas identifiés.

  4   Donc nous considérons que la Chambre de première instance devrait

  5   vraiment prendre en compte le fait que ces deux personnes n'ont pas été

  6   poursuivies lorsque la Chambre décidera de la sentence à infliger à M.

  7   Tabakovic.

  8   J'en ai terminé avec mes arguments.

  9   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie.

 10   [La Chambre de première instance se concerte]

 11   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La Chambre de première instance a été

 12   grandement aidée de la part des deux parties en l'espèce, ce qui est

 13   reflété non seulement par le soin avec lequel la requête et le projet

 14   d'accord de plaidoyer ont été rédigés, mais cela se reflète aussi par les

 15   arguments extrêmement précis qui ont été présentés par les deux parties,

 16   surtout par l'argumentation fournie par M. Powles. Nous reconnaissons cela,

 17   et de ce fait, nous pouvons dès maintenant décider de la peine qui doit

 18   être imposée.

 19   De notre avis, la Chambre de première instance considère que les

 20   motifs étayant cette décision doivent se faire par écrit, ceci se fera

 21   d'ailleurs dans les jours à venir. Mais nous considérons que la Chambre de

 22   première instance doit faire connaître sa décision en matière de peine dès

 23   aujourd'hui afin que les conséquences et les arrangements puissent être

 24   faits le plus vite possible pour que M. Tabakovic puisse savoir tout de

 25   suite quel sort lui sera réservé.

 26   Monsieur Tabakovic, veuillez vous lever.

 27   La Chambre de première instance a étudié avec beaucoup de soin les

 28   différents arguments qui ont été présentés en votre nom et a étudié aussi

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  1   le rôle que vous avez joué dans l'affaire et les conséquences qui en sont

  2   découlées. Nous vous imposerons une peine et nous publierons par écrit très

  3   rapidement les raisons étayant cette peine. Mais au vu de votre situation,

  4   nous allons procéder de façon un peu inhabituelle et vous annoncer tout de

  5   suite la peine qui vous ai réservée.

  6   La Chambre de première instance, au vu des trois chefs qui vous sont

  7   reprochés et au vu des trois condamnations qui ont été imposées

  8   aujourd'hui, vous serez condamné donc à une peine de prison de trois mois.

  9   Au titre du Règlement, le temps que vous avez passé en détention provisoire

 10   sera déduit de cette peine, et de ce fait, à la fin de la semaine, vous

 11   pourrez être libéré.

 12   La Chambre de première instance espère que les arrangements

 13   nécessaires seront faits avec une grande diligence afin que vous puissiez

 14   recouvrer la liberté le plus rapidement possible.

 15   Vous pouvez vous asseoir.

 16   La Chambre de première instance tient à remercier les deux conseils

 17   pour l'aide précieuse qui a été apportée.

 18   Nous allons lever la séance.

 19   --- L'audience est levée à 12 heures 12.

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