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1 Le vendredi 6 février 2009
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 12.
5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour. Désolé de ce retard au
6 démarrage. Il y a eu une panne de l'équipement d'enregistrement. Nous
7 sommes prêts maintenant pour le témoin qui était en train de déposer.
8 M. STAMP : [interprétation] Oui. Monsieur le Président, si vous me le
9 permettez je voudrais soulever deux questions, et je crois que mon confrère
10 M. Djurdjic a également une question à soulever devant la Chambre.
11 Hier, vous, Messieurs les Juges, avez demandé que nous nous consultions
12 pour arriver à un accord concernant l'ordre d'audition des témoins.
13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui.
14 M. STAMP : [interprétation] C'est ce que nous avons fait, et je peux vous
15 confirmer que nous sommes tombés d'accord sur le programme de la semaine
16 prochaine, ce sera Liri Loshi ensuite Lizane Malaj. Elle était prévue de
17 toute façon pour venir à ce moment-là et nous avons vérifié, donc elle sera
18 au numéro 2, M. Sweeney étant en numéro 3. Il ne pouvait pas venir plus tôt
19 la semaine prochaine, et je crois qu'avec ce programme-là il pourra venir,
20 et je pense que ça ne sera pas trop un problème pour la Défense, ensuite ce
21 sera M. Krasniqi, puis Ramadani.
22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous remercions les conseils de cette
23 mise au point. Je crois qu'avec un programme révisé qui reçoit l'accord des
24 deux parties nous allons pouvoir ainsi à bon rythme.
25 M. STAMP : [interprétation] En effet, Monsieur le Président. La deuxième
26 question que je souhaitais soulever concerne Liri Loshi. L'Accusation
27 demande que sa déposition commence lundi, pour les raisons suivantes. Je
28 pense que nous aurons suffisamment de temps avec ce témoin aujourd'hui, et
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1 si sa déposition commence lundi, on pourrait peut-être encourir une perte
2 de temps, mais ça ne serait pas pour la totalité de la journée. Donc on
3 pourrait perdre du temps.
4 M. Loshi arrive mercredi soir. Il arrive plus tard que ce qu'on avait
5 pensé, il devait s'installer, il devait prendre un certain nombre de
6 dispositions, et il doit étudier beaucoup de documents. Cette personne est
7 extrêmement méticuleuse, et il y a beaucoup de documents de sa déposition
8 dans l'affaire Milosevic mais également dans l'affaire Moss [phon], donc
9 c'est des volumes énormes. Il a apporté également de nouveaux documents qui
10 ne lui ont pas été fournis par l'Accusation la dernière fois qu'il est venu
11 ici.
12 Je pense qu'il faudrait pouvoir lui donner l'occasion de terminer sa
13 préparation, et nous voudrions aussi avoir l'occasion de discuter avec lui
14 une fois qu'il aura examiné les documents, de voir ce qu'il aura apporté,
15 et de procéder à un bon récolement avant qu'il ne dépose. Tout cela, et
16 c'est une des raisons d'ailleurs pour lesquelles je voudrais qu'on commence
17 lundi, ça nous permettra ainsi d'avoir une présentation des éléments de
18 preuve plus efficace et moins un fouillis. Donc au final je pense que la
19 procédure s'en trouvera accélérée et que ceci va dans le sens de l'économie
20 judiciaire, donc je voudrais que sa déposition commence lundi, même si à
21 court terme ça risque de nous faire perdre un peu de temps, mais au final
22 on finira par en gagner.
23 Monsieur le Président, si vous le permettez, je vais passer maintenant à
24 certains documents qu'il a apportés, il a apporté une nouvelle vidéo
25 concernant une fosse. Ceci est en train d'être examiné, et je pense que
26 nous pourrions -- nous allons d'ailleurs demander que ceci soit versé au
27 dossier. Nous allons d'ailleurs présenter une requête pour que ceci soit
28 versé au dossier. Je crois que c'est une question qui pourra être tranchée
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1 lundi, c'est quelque chose de nouveau, et je pense que si nous commençons
2 lundi ça donnera à la Défense également le temps d'examiner cette pièce de
3 sorte qu'ils puissent se faire une idée sur la question une fois que nous
4 traiterons de la question.
5 Voilà donc les différents éléments que je voulais porter à votre
6 connaissance, et c'est avec respect que je vous demande de bien vouloir
7 accepter de commencer cette déposition lundi.
8 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Y a-t-il des objections à cette
9 proposition, Monsieur Djurdjic ?
10 M. DJURDJIC : [interprétation] Oui. Merci beaucoup, Monsieur le Président.
11 Mon éminent confrère Me Stamp vient de vous faire part de notre proposition
12 commune devant la Chambre. En ce qui concerne la toute dernière partie, ces
13 éléments de preuve ou ces pièces supplémentaires qui nous ont été
14 présentées hier après 17 heures, si je ne me trompe, nous pourrons
15 d'ailleurs revenir là-dessus plus tard. J'appuie la proposition avancée par
16 l'Accusation pour que M. Liri Loshi prenne la parole lundi car nous aussi
17 nous souhaiterions faire un certain nombre de vérifications au cours deux
18 journées qui viennent et étudier également l'origine de cette pièce et
19 obtenir des informations qui nous permettront de vous en parler avant qu'il
20 ne prenne la parole, alors que s'il prenait la parole aujourd'hui nous
21 serions empêchés de faire cet examen.
22 Cependant, je voudrais maintenant porter à votre connaissance une autre
23 question. Messieurs les Juges, la Défense souhaiterait exprimer toute sa
24 satisfaction en ce qui concerne la marge de manœuvre qui nous a été
25 octroyée au cours du contre-interrogatoire, et nous ferons tout ce qui est
26 en notre pouvoir pour contribuer au bon avancement de ce procès. Au cours
27 du contre-interrogatoire du témoin Mustafa Dragaj, j'ai pris un certain
28 temps pour vérifier son identité, son véritable patronyme. Dans le compte
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1 rendu d'audience qui a été produit, je parle du compte rendu quotidien qui
2 est en temps réel au fur et à mesure du procès, j'ai l'impression que
3 l'entretien entre M. Mustafa Dragaj et moi-même a été fidèlement reflété,
4 et lorsque Mme Kravetz a annoncé le témoin et lui a demandé de décliner son
5 identité, je pense que cette identité a aussi été fidèlement retranscrite
6 dans le compte rendu.
7 Etant donné que je n'ai pas beaucoup d'expérience devant ce Tribunal et que
8 nous avons eu quelques problèmes concernant l'erreur concernant l'année au
9 cours de laquelle M. Dragaj a fait sa déclaration et lorsque j'ai demandé à
10 ce que le compte rendu d'audience soit corrigé, vous m'avez dit qu'aucune
11 correction ne pouvait y être apportée mais que mon intervention avait été
12 enregistrée. Mais dans le CR officiel, il y a des corrections qui ne sont
13 pas nécessairement le résultat de ce qui s'est véritablement produit au
14 cours du procès hier, et je ne pense pas que ce genre de choses puisse se
15 produire. Si au cours du compte rendu d'audience la sténotypiste a tout
16 enregistré correctement, dans ce cas-là je ne pense pas que dans le CR
17 officiel que nous recevons il puisse y avoir des amendements ou des
18 corrections. Je vais donc vous rappeler.
19 A la page 602 du CR officiel, au paragraphe 16, on dit "le Témoin
20 Mustafa Dragaj." Dans le CR du jour à la page 50, ligne 18, on dit "Mustafa
21 Draga." A la page 603 on lit "Mustafa Dragaj," et à la ligne 3 de la page
22 51, on dit "Draga." Maintenant on dit "M. Dragaj," alors que dans le CR
23 quotidien à la page 58, ligne 19, on lit "M. Draga." A la page 112 [comme
24 interprété], page 17, M. Dragaj, c'est donc le CR officiel, mais dans le CR
25 quotidien page 60, ligne 20 on dit "M. Draga."
26 Alors je voudrais souligner à nouveau que j'ai posé des questions
27 précisément aux fins de m'assurer du véritable patronyme du témoin, ceci
28 afin de ne pas perdre de temps parce que M. Dragaj a fait plusieurs
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1 dépositions, plusieurs déclarations devant ce Tribunal et son patronyme est
2 consigné comme étant Draga. Ce n'est qu'hier que son véritable nom a été
3 consigné, Dragaj. C'est pourquoi j'ai consacré du temps à cela.
4 Il y a d'autres changements au compte rendu officiel par rapport au
5 projet de compte rendu qui étaient corrects, mais je voulais simplement
6 porter ceci à votre attention. Je vous remercie.
7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Mais avant de vous rasseoir,
8 Maître Djurdjic, est-ce qu'il y a un élément très important pour la Défense
9 à cet égard, c'est-à-dire quant à savoir si le nom de famille du témoin est
10 D-r-a-g-a-j ou D-r-a-g-a ? Est-ce que vous estimez qu'il y aurait deux
11 personnes témoins, deux témoins différents, deux déclarations différentes,
12 ou pas ?
13 M. DJURDJIC : [interprétation] Merci, merci, Monsieur le Président.
14 J'ai oublié de vous dire ça. Le véritable nom de famille du témoin est très
15 important pour la Défense parce que je peux vous dire ceci, que Draga et
16 Dragaj. Il y a également des membres de sa famille qui sont dans l'UCK, et
17 je veux lui demander parce que Draga et Dragaj c'est le même nom de
18 famille, mais en même temps ça nous est présenté comme étant deux familles
19 différentes. A l'annexe F, vous verrez que certaines personnes sont nommées
20 Draga et d'autres Dragaj. Je ne dis pas que c'est la même famille. Enfin
21 c'est peut-être une très grande famille avec plusieurs branches. Mais il
22 est important de savoir quel est son véritable nom de famille, et c'est
23 pourquoi la Défense souhaitait qu'il nous dise quel était son nom de
24 famille, de sorte que nous le sachions bien.
25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Est-ce que je comprends bien
26 votre préoccupation au nom de la Défense, en fin de compte vous voulez
27 montrer que le nom de famille D-r-a-g-a est la même famille que les
28 personnes qui portent le patronyme de D-r-a-g-a-j ? D'accord. Je vous
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1 remercie.
2 Je vais vous dire ce que la Chambre connaît sur la question, Monsieur
3 Djurdjic, je pense que s'il y a encore une difficulté, je pense à ce
4 moment-là qu'il faudra revenir sur la question. Tout d'abord, je pense que
5 la Chambre reçoit la requête de M. Stamp et la vôtre d'ailleurs aussi que
6 nous n'entendrons pas de nouveaux témoins une fois que nous aurons terminé
7 la déposition de celui-ci. Le prochain témoin sera entendu lundi.
8 En ce qui concerne le compte rendu d'audience, la procédure
9 habituelle est qu'au fur et à mesure que la déposition est faite de vive
10 voix et sous une pression d'ailleurs considérable, une sténotypiste ici
11 dans le prétoire et une autre personne à l'extérieur écoute la déposition
12 ainsi que l'interprétation qui en est donnée en anglais et produit un
13 compte rendu en temps réel. Puis plus tard dans la journée quand il y a un
14 petit peu plus de temps, les enregistrements sont réécoutés, et si on se
15 rend compte qu'il y a une différence entre ce qui a été noté, cette
16 correction est apportée. Ces corrections sont faites en fonction des
17 enregistrements de ce qui a été dit. Quelquefois il y a un mot qui a été
18 oublié. Quelquefois un mot n'a pas été bien consigné, et cetera.
19 La difficulté particulière au fur et à mesure du procès et même
20 lorsqu'on revérifie ces enregistrements, la difficulté particulière ce sont
21 les noms, qu'il s'agisse de toponymes, de patronymes, de surnoms, et
22 cetera. Etant donné qu'il y a des difficultés de prononciation, des
23 difficultés d'orthographe, surtout quand on passe d'une langue à une autre.
24 L'orthographe des noms de famille et des toponymes également peuvent
25 changer, et surtout dès lors qu'il s'agit de noms de personnes, non
26 seulement du fait des différentes langues, mais lorsque le nom d'une
27 personne ou d'une famille dans une langue est traduit ensuite, par exemple,
28 en anglais, quelquefois il n'y a pas une prononciation tout à fait exacte
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1 et précise, et c'est pourquoi il peut y avoir des divergences.
2 Maintenant, en ce qui concerne le Témoin M. Mustafa Dragaj, son
3 patronyme a changé dans un sens, puis dans l'autre car dans certains cas
4 son nom se terminait par la lettre "a," parfois par un "f," et parfois
5 encore par un "j." Il s'agit du prénom qui peut se terminer par un "a" ou
6 un "e". Par contre, son nom de famille se termine soit par un "a" ou un
7 "j." Il y a également des différences dues à la traduction de l'albanais en
8 anglais et que ces noms sont parfois écrits de manière différente. Mais si
9 on regarde les documents de voyage du document, les visas officiels de la
10 personne puisque son nom figure de différentes façons dans ces documents.
11 Alors une fois qu'on arrive à sa déposition et qu'on entend les dépositions
12 qu'il a faites dans d'autres procès, ce sont là bien ses dires et sa
13 déposition, et son nom a été décliné ici dans ce prétoire devant d'autres
14 procès et pourtant son nom ressort avec des orthographes différentes à
15 chaque fois.
16 Pour autant que nous sommes satisfaits qu'il s'agit bien de la seule et
17 même personne, et ça ne semble pas être là l'objet de votre préoccupation,
18 et selon ce que nous savons des éléments et nous serons peut-être informés
19 plus avant par d'autres éléments, mais il n'y a pas de distinction par
20 rapport au groupe familial entre D-r-a-g-a et D-r-a-g-a-j. Je parle là
21 évidemment au nom de ma propre expérience au cours d'autres procès,
22 d'ailleurs j'ai eu le même type de problème concernant des groupes
23 familiaux. S'il y a contestation de la question, nous entendrons à nouveau
24 des éléments à ce sujet, mais peut-être que c'est une question dont vous
25 pourriez discuter avec Me Stamp parce qu'au final peut-être qu'il n'y a pas
26 vraiment de divergence entre les parties. Nous verrons.
27 J'espère que ceci permettra de vous aider, Monsieur Djurdjic. Ce n'est pas
28 en fait -- le CR est produit au moment où tout le monde parle et pis
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1 quelqu'un qui apporterait des corrections ou une nouvelle version, non,
2 c'est pas ça qui se passe. En fait, ce sont les mêmes personnes qui sont
3 les sténotypistes et qui enregistrent ça à très grande vitesse mais qui
4 réécoutent et qui complètent ce qui avait été transcrit dans un premier
5 temps, donc en fin de journée, il y a CR qui est produit qui est donc plus
6 complet et nous l'espérons aussi plus correct que celui qui a été fait en
7 temps réel. Si vous avez un problème avec ce qui est consigné dans le CR
8 final, on peut revoir ça. Si on peut réécouter les enregistrements, on
9 pourra voir si le CR est correct ou non.
10 Mais je comprends également la difficulté à retranscrire des prénoms ou des
11 noms de famille, comme vous comprendrez aussi si vous regardez le CR des
12 derniers jours, le nombre de façons différentes dont des toponymes, des
13 noms de villages, de villes ont été orthographiés alors qu'on essaie de
14 produire en anglais les dires du témoin.
15 Est-ce que ceci vous a permis de voir un petit mieux comment la procédure
16 est organisée, Monsieur Djurdjic ?
17 M. DJURDJIC : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président. La
18 question ne porte pas tellement sur l'identité du témoin qui n'est pas en
19 cause. Nous savons très bien que M. Mustafa Draga ou Dragaj est la même
20 personne. Ce n'est pas ça mon problème. Simplement, je souhaitais attirer
21 votre attention sur un autre problème, c'est que le CR produit en temps
22 réel était correct, alors que le CR officiel que nous avons reçu ne l'était
23 pas. Il y a eu des modifications qui ont été apportées et qui étaient
24 erronées.
25 La sténotypiste qui était au prétoire a tout bien consigné, mais une fois
26 que le CR officiel a été produit, des modifications ont été apportées parce
27 que la Défense est certaine qu'au cours de la première partie jusqu'au
28 contre-interrogatoire le témoin s'appelait Draga, tant dans le CR en temps
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1 réel et le CR de fin de journée. La première fois qu'il est dit que son nom
2 était Dragaj était au début du contre-interrogatoire. Le CR officiel n'a
3 pas tenu compte de ce qui s'est véritablement produit dans le prétoire
4 parce que maintenant Dragaj figure depuis le début, et on donne
5 l'impression que la Défense perdait son temps quant au début du contre-
6 interrogatoire, la Défense a posé des questions sur son véritable nom de
7 famille.
8 La version en temps réel du CR était correcte et non pas la version
9 officielle. Voilà quelle est la nature de nos propos. J'entends bien ce
10 qu'a dit Mme Kravetz, à savoir que M. Mustafa Dragaj vient de la
11 municipalité de Skenderaj, mais dans le CR on dit que c'est Skenderaj ou
12 Srbica. Bon, je peux comprendre parce que Skenderaj c'est le nom albanais,
13 et peut-être que des noms doivent parfois être traduits en serbe. Ça je
14 veux bien l'accepter puisqu'il y a beaucoup de noms bilingues.
15 J'accepte donc que Srbica a été ajouté avec Skenderaj. Je l'ai mis dans mes
16 notes, ça je le comprends bien, mais par contre je ne comprends pas
17 pourquoi le CR officiel a été corrigé de la sorte.
18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] J'ai encore une question à ce sujet,
19 Monsieur Djurdjic. Une des raisons peut-être qu'on a essayé de standardiser
20 l'orthographe des noms au moment où ils étaient prononcés.
21 Est-ce que l'on peut passer à huis clos partiel pendant quelques instants.
22 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes en audience à huis clos
23 partiel.
24 [Audience à huis clos partiel]
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27 (expurgé)
28 (expurgé)
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1 (expurgé)
2 (expurgé)
3 (expurgé)
4 (expurgé)
5 (expurgé)
6 (expurgé)
7 [Audience publique]
8 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je pense que nous avons bien entendu
9 la question. Nous reverrons ce qui a été l'objet de vos préoccupations et
10 nous essaierons d'éclaircir la question. Nous avons consacré à ça 35
11 minutes, je pense que maintenant nous allons entendre le témoin.
12 M. DJURDJIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous en prie.
14 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour, Monsieur.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
17 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je pense que le casque n'est pas bien
18 placé sur la tête du témoin.
19 Il faudra peut-être s'y prendre autrement.
20 Nous sommes prêts à poursuivre votre audition. Merci d'être revenu dans ce
21 prétoire. Je vous rappelle que vous avez prononcé une déclaration
22 solennelle où vous avez promis de dire la vérité et vous êtes toujours sous
23 le coup de cette déclaration solennelle.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Aucun problème.
25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.
26 Maître Djurdjic, êtes-vous prêt à poursuivre ?
27 M. DJURDJIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Merci.
28 LE TÉMOIN : MUSTAFA DRAGAJ [Reprise]
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1 [Le témoin répond par l'interprète]
2 Contre-interrogatoire par M. Djurdjic : [Suite]
3 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Mustafa.
4 R. Bonjour.
5 Q. Dieu merci vous semblez être en bonne santé, je voudrais savoir si vous
6 êtes toujours actif en tant que chef de famille et si vous vaquez encore à
7 vos travaux agricoles.
8 R. Non. Je ne fais plus de travail à la ferme parce que j'ai des
9 tremblements à la main gauche.
10 Q. Merci. En 1999, est-il vrai qu'une de vos filles habitait avec vous
11 dans votre famille ?
12 R. Oui.
13 Q. Vous nous avez dit que votre autre fille était mariée. Où habitait-elle
14 ? Qui avait-elle épousé en 1992 ?
15 R. Elle avait épousé Belush [phon], mais ça fait maintenant 12 ou 13 ans
16 qu'elle habite en Allemagne. Belush.
17 Q. Ma question portait sur 1999. Quelle était la famille de son mari à
18 Belush.
19 R. Elle avait marié un homme de la famille d'Istok à Belush. Elle s'était
20 mariée bien avant la guerre. Elle avait plus de 20 ans, peut-être avait-
21 elle 25 ans quand elle s'est mariée.
22 Q. Merci. Vous avez dit qu'il y avait des maisons serbes à Leocina ? Il y
23 en avait combien, où se trouvaient-elles, pourriez-vous nous le dire ?
24 R. Il y avait 12 ou 13 foyers, pas plus.
25 Q. Est-ce que ces maisons ont été pilonnées les 25 et 26 mars 1999 pendant
26 que vous étiez dans le village ?
27 R. Je n'ai pas vu si elles ont été pilonnées ou pas parce que les maisons
28 des Serbes étaient derrière la mienne, donc quand je suis parti je n'ai pas
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1 vu ce qui est arrivé à ma maison ou à celle des Serbes.
2 Q. Merci. Quand vous êtes revenu, est-ce que vous avez vu les maisons des
3 Serbes ?
4 R. Non.
5 Q. Merci. Est-ce que par hasard vous connaîtriez Stana Zigic ?
6 R. Non.
7 Q. Avez-vous entendu dire qu'elle avait été enlevée le 19 mai 1998 ?
8 R. Je n'ai rien entendu dire. Je ne sais rien à ce propos.
9 Q. Merci. Savez-vous quand l'Armée de libération du Kosovo a été créée ou
10 est-ce que vous souvenez du moment où vous en avez entendu parler pour la
11 première fois ?
12 R. Non, je ne sais pas quand elle a été créée parce que ça ne
13 m'intéressait pas.
14 Q. D'accord, mais quand avez-vous entendu parler de cette Armée de
15 libération du Kosovo pour la première fois ?
16 R. Je ne savais même pas qu'il y avait une Armée de libération du Kosovo.
17 Ça ne m'intéressait pas ce genre de chose.
18 Q. Oui, mais est-ce que par hasard vous connaissiez des gens qui étaient
19 membres de cette Armée de libération du Kosovo ?
20 R. Non.
21 Q. Merci. Est-ce que vous connaissiez Saban Dragaj ?
22 R. Je connais cet homme. Il habite maintenant à Trevis [phon]. Ça fait 30,
23 40 ans que je le connais.
24 Q. Il est né --
25 L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas entendu le nom du village
26 mentionné par le conseil.
27 M. DJURDJIC : [interprétation]
28 Q. Est-ce qu'il est né à Kladernica ?
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1 R. A Mitrovic. Mitrovica.
2 Q. Est-ce que lui faisait partie de l'Armée de libération du Kosovo ?
3 R. Je ne sais pas.
4 Q. Dites-moi, est-ce que vous l'avez vu à Izbica en mars 1999 ?
5 R. Non, je ne l'ai pas vu. Je n'ai vu personne d'autre pendant que
6 j'errais dans les montagnes là-bas.
7 Q. Ce que je vous demande concerne le moment où vous étiez à Izbica, entre
8 le 25 et le 28. C'est de cette période-là que vous avez parlé, à moins que
9 je ne me trompe. Est-ce que vous l'auriez vu le 30 ou le 31 quand vous êtes
10 rentré ?
11 R. Non. Je ne l'ai jamais vu que ce soit à Izbice ou ailleurs.
12 Q. Merci. Est-ce que vous connaissez Loshi Liri ?
13 R. Non. Oui, parce que c'était notre docteur.
14 Q. Pourriez-vous nous dire où se trouvait le centre de santé où il
15 travaillait ?
16 R. A Runik.
17 Q. Et il travaillait avec qui ?
18 R. Je ne sais pas qui d'autre travaillait avec lui. Moi, je ne connaissais
19 que Liri.
20 Q. Est-ce qu'il vous est arrivé de voir le Dr Loshi en uniforme de l'ALK ?
21 R. Jamais je ne l'ai vu en uniforme.
22 Q. Est-ce que vous saviez qu'il appartenait à l'ALK
23 R. Je ne le savais pas. Tout ce que je sais c'est que c'était un docteur,
24 un médecin.
25 Q. Est-ce que vous connaissez Dragaj Demush ?
26 R. Oui.
27 Q. Est-ce qu'à l'époque il habitait à Leocina ?
28 R. Oui, il habite toujours à Leqina.
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1 Q. Pendant toute l'année 1998 et pendant toute l'année 1999, pendant ces
2 deux années-là, est-ce que vous avez vu le Dr Loshi à Leocina ?
3 R. Non, parce qu'en 1998, j'ai passé la plupart du temps à Mitrovica avec
4 ma femme.
5 Q. Et entre le moment où vous êtes revenu et le début des pilonnages, est-
6 ce que vous l'avez revu ?
7 R. Non.
8 Q. Vous dites que vous vous êtes trouvé à Mitrovica en 1998. Est-ce que
9 vous avez une maison là-bas ?
10 R. Non. J'étais chez mes beaux-parents.
11 Q. Où se trouvaient vos fils en 1998 ?
12 R. En 1998, deux de mes fils étaient partis en Allemagne. Et d'eux d'entre
13 eux s'y trouvaient avant. Il y en a deux qui sont restés au Monténégro
14 jusqu'au moment où l'OSCE est arrivée.
15 Q. Est-ce qu'il y a eu des combats dans votre village en 1998 ?
16 R. Non.
17 Q. Donc vous ne savez rien de ce qui s'était passé dans votre village et
18 dans les environs depuis que vous étiez parti; est-ce exact ?
19 R. Je ne comprends pas bien votre question. Vous parlez de 1998 ou de 1999
20 ?
21 Q. Je parle de 1998.
22 R. Aucune maison n'a été incendiée dans mon village en 1998.
23 Q. Merci. Mais je vous demandais autre chose. Je vous ai demandé si vous
24 saviez ce qui se passait dans votre village et dans les environs du village
25 pendant que vous, vous étiez à Kosovska Mitrovica ?
26 R. Non, je ne sais pas ce qui s'est passé au village pendant que moi
27 j'étais à Mitrovica parce que je n'étais pas là et ça ne m'intéressait pas
28 ce qui se passait.
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1 Q. Savez-vous où se trouve le village de Lausa ?
2 R. Oui.
3 Q. Il y a quelle distance entre Lausa et le village de Leocina ?
4 R. A pied, je pense que ça doit faire trois heures.
5 Q. Merci. Connaissez-vous ce nom-ci Habit Haziraj ? C'est un homme de
6 Lausa.
7 R. Non, je ne connais pas cet homme. Jamais je n'ai entendu son nom.
8 Q. Merci. Est-ce que vous avez vu le Dr Loshi à Izbica le 30 mars 1999 ?
9 R. Le 30 ? Non.
10 Q. Je pense que vous avez dit que vous étiez arrivé à Izbica le 31 mars.
11 R. Nous avons enseveli les corps, enterré les corps le 31 mars, mais moi
12 j'y suis allé le 26 mars.
13 Q. Merci. Avez-vous vu le Dr Loshi le 31 mars à Izbica alors qu'il était
14 occupé à enterrer les corps ?
15 R. Oui, il était là.
16 Q. Et qu'est-ce qu'il faisait lorsque vous l'avez vu ? Le savez-vous ?
17 R. Je n'ai pas vu ce qu'il était en train de faire. Nous, on transportait
18 les corps, les cercueils, on creusait les tombes. Donc je ne sais pas ce
19 qu'il faisait. Je me souviens uniquement du fait qu'il était en vêtements
20 civils. Jamais, en fait, je ne l'ai vu portant un uniforme. Tout ce que je
21 sais c'est qu'il était médecin et qu'il travaillait en tant que médecin.
22 Q. Merci. Parlons du 25 mars 1999, est-ce que ce jour-là il y a eu des
23 combats dans votre village ou dans les environs du village ?
24 R. Oui. A Padalishte et dans notre village, il y a eu des pilonnages qui
25 venaient de Belinca, en direction de ma maison.
26 Q. Savez-vous qui a pilonné ?
27 R. Qui ça pouvait être d'autre à votre avis que l'armée serbe et la
28 police serbe ?
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1 Q. Vous n'avez pas vu ceux qui lançaient ces obus, n'est-ce pas ?
2 R. Ils tiraient des hauteurs et à distance, et personne ne se met sur la
3 trajectoire d'un canon.
4 Q. Est-ce que les obus venaient de plusieurs endroits, de partout ?
5 R. Le 25, les obus ne sont venus que de la direction de Belinca.
6 Q. Quelle est la distance séparant Belinca de Leocina ?
7 R. Franchement, je ne sais pas. Peut-être 4 kilomètres. Moi ma maison elle
8 se trouve sur une colline, et de là il est possible de voir et même
9 aujourd'hui il y a encore des briques détruites qui sont détruites à cause
10 des obus qui sont venus de Belinca.
11 Q. Mais, Belinca ne se trouve pas dans la municipalité de Srbica, n'est-ce
12 pas ?
13 R. Non. Belinca fait partie de la municipalité d'Istoq.
14 Q. Et il y a combien de kilomètres entre Leocina et Citak, à pied ?
15 R. Il faut à peu près une heure pour y aller à pied.
16 Q. Si je dis que Citak se trouve au nord par rapport à Leocina; est-ce que
17 j'ai raison ?
18 R. Je ne sais pas, mais je pense que vous avez raison. C'est près de la
19 route asphaltée qui va à Peja.
20 Q. C'est exact, Monsieur Mustafa. Il y a une route asphaltée qui va à Pec
21 et de Pec à Srbica. Et quelle est la distance entre Leocina et Izbica, à
22 pied toujours ?
23 R. Au maximum 30 minutes, peut-être moins.
24 Q. Si je regarde la carte, Citak ça doit se trouver à mi-chemin de Leocina
25 par rapport à Izbica, non.
26 R. Citak et Izbica semblent être à la même distance, enfin pour moi.
27 Q. J'ai une carte sous les yeux. C'est le document de la liste 65 ter 615,
28 je pense qu'il s'agit de la page 30.
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1 M. DJURDJIC : [interprétation] Est-il possible d'afficher ce document à
2 l'écran. Excusez-moi. Il s'agit en fait de la page 17. Peut-on voir cette
3 carte de plus près.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Moi, je ne parviens pas à lire des cartes.
5 M. DJURDJIC : [interprétation] Oui, c'est bon. Oui, oui, maintenant vous
6 avez suffisamment agrandi l'image. C'est bon. Regardez, on voit Leocina --
7 non, non. Non, non, descendez encore un peu -- plus bas. Il faut voir
8 Srbica. Voilà. C'est bon maintenant. De Srbica, diagonalement en haut à
9 gauche vers -- Oui. Voilà. Un peu plus à droite. C'est parfait. Je vous
10 remercie.
11 Messieurs les Juges, je ne sais pas si le témoin voit la carte mais on
12 pourrait peut-être demander au témoin d'annoter la carte, de nous indiquer
13 ces lieux.
14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Mais il vous a déjà dit qu'il ne lit
15 pas de cartes.
16 Mme KRAVETZ : [interprétation] Permettez-moi d'ajouter que le témoin a dit
17 qu'il a un problème de vision; il ne voit pas bien et il ne parvient pas à
18 voir ce qui se trouve à l'écran. J'avais déjà averti la Défense de ce fait.
19 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je crois que ce sera assez inutile
20 d'essayer de demander des indications au témoin à partir de cette carte.
21 Est-ce que vous essayez de montrer quelles sont les distances, comme le
22 montre la carte entre ces villages que vous avez mentionnés ?
23 M. DJURDJIC : [interprétation] Précisément, Monsieur le Président, à
24 supposer que ce soit le témoin qui le dise, pas l'Accusation, même si le
25 témoin a bien dit qu'il ne sait pas lire de cartes. Mais je voudrais que la
26 Chambre de première instance se fasse une idée des distances séparant ces
27 villages. Il y a aussi le village de Turicevac. Si on voit la partie
28 inférieure de la carte, c'est sur la route de Srbica-Klina, ne serait-ce
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1 que pour vous donner une idée de la configuration des lieux de l'endroit où
2 se trouvent les différents lieux dont a parlé le témoin. On voit Turicevac,
3 et puis au sud d'Izbica, sud-est, vous avez Izbica, Vojnik -- juste pour
4 vous donner une idée, Messieurs les Juges. C'est uniquement pour ça que je
5 voudrais qu'on affiche cette partie de la carte.
6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous en prenons acte. Vous comprendrez
7 bien entendu que le témoin, lui, il parle des distances qu'il connaît à
8 pied, pour les avoir parcourues à pied, et il faut une carte topographique
9 pour voir s'il y a des hauteurs à franchir, des collines à grimper ou à
10 descendre pour voir quelle est vraiment la distance lorsque vous avez un
11 terrain accidenté. Ce n'est pas comme si vous aviez des villages de plaine.
12 Ceci a une incidence importante pour quelqu'un qui marche.
13 M. DJURDJIC : [interprétation] Je suis tout à fait d'accord avec vous,
14 Monsieur le Président. Mais je pense que la question des distances est très
15 importante, quelque soit la configuration du terrain. Pour ce qui est de
16 cette carte, effectivement, elle ne vous donne pas une idée du relief.
17 Q. Monsieur Mustafa, pourquoi est-ce que vous êtes parti vers le sud
18 plutôt que vers le nord pour essayer d'aller jusqu'à la route asphaltée de
19 Srbica à Pec parce que c'est une zone plus urbanisée étant donné que vous
20 essayez d'échapper aux obus qui tombaient ?
21 R. J'essayais d'échapper au danger. J'essayais de sauver ma peau, et je
22 n'ai pas pu y aller parce qu'il y avait des chars de ce côté-là.
23 Q. Mais comment savez-vous qu'il y avait des chars ?
24 R. Il y avait des chars à Gushanica. Je les ai vus.
25 Q. Quelle est la distance à pied entre Gusanica et Leocina ?
26 R. A pied, il vous faut une demi-heure à peu près pour aller à Izbice.
27 Q. Monsieur Mustafa, je vous posais la question par rapport à Leocina, et
28 pas par rapport à Izbica.
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1 R. Je ne conduis pas de voiture, donc je ne sais pas combien de temps il
2 faut pour aller de Leocina à Gushanica, mais ceux qui conduisent une
3 voiture le sauront peut-être.
4 Q. Monsieur Mustafa, je ne sais pas ce qui pose problème ici. Je vous ai
5 demandé : "Combien de temps il fallait entre Gusanica et Leocina," je ne
6 vous ai pas posé la question au sujet d'un parcours en voiture, car vous
7 avez été assez clair lorsque vous avez dit que normalement vous vous
8 déplaciez à pied entre un village et un autre. Donc ma question était,
9 combien de temps faut-il marcher pour aller de Gusanica à Leocina ?
10 R. Ça dépend du terrain. En général, il me fallait plus d'une demi-heure
11 pour aller à Izbice, par exemple.
12 Q. Je ne sais pas si vous avez bien compris ce que je vous ai demandé.
13 Combien de temps faut-il pour aller à pied entre Gusanica et Leocina ?
14 Combien de temps ?
15 R. Je ne comprends pas votre question au sujet de Gushanica.
16 Q. Monsieur Mustafa, vous avez dit que vous aviez vu des chars à Gusanica.
17 Je vous demande, combien de temps il faut à pied pour aller de Gusanica
18 jusqu'à votre village de Leocina ? Voilà ce que je vous demande.
19 R. Je ne comprends pas du tout votre question.
20 Q. Monsieur Mustafa, s'il vous faut marcher pendant une heure pour aller
21 de Leocina à Izbica. Je vous demande combien de temps il vous faut pour
22 aller à pied de Leocina à Gusanica ?
23 R. Le char se trouvait à Izbice, et il m'a fallu une demi-heure pour m'y
24 rendre, à Izbice.
25 Q. Donc c'est à partir de Leocina que vous avez vu un char qui se trouvait
26 à Izbica; c'est bien ça ?
27 R. Je ne l'ai pas vu depuis Leqina. Je l'ai vu depuis Izbice.
28 Q. Monsieur Mustafa, vous avez dit que vous aviez vu deux chars à
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1 Gusanica. Donc je vous demandais, mais je ne sais pas si vous souhaitez
2 répondre à ma question, combien de temps il fallait pour se rendre à pied
3 de Leocina à Gusanica ?
4 R. Il n'y a pas de village qui s'appelle Gushanica. Comme je l'ai déjà
5 dit, j'ai vu ces chars à Izbice, l'endroit où le massacre a eu lieu, et moi
6 j'ai survécu à ce massacre. Je ne suis jamais allé sur la route goudronnée.
7 M. DJURDJIC : [interprétation] J'aimerais prier M. le Greffier de faire
8 remonter le compte rendu d'audience jusqu'à l'endroit où le témoin a
9 déclaré avoir vu deux chars.
10 Q. Monsieur Mustafa, allez, dites-moi maintenant à quel endroit vous avez
11 vu les deux chars le 25 mars ?
12 Mme KRAVETZ : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que la même
13 question a été posée à plusieurs reprises au témoin, et il y a déjà
14 répondu.
15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Mais il y une différence entre ce qui
16 a été enregistré comme étant l'emplacement des chars et ce que le témoin
17 déclare maintenant, cette différence constitue problème et n'a pas été
18 réglé, Me Djurdjic veut sans doute explorer cette question.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais votre question ne portait pas sur le 25
20 mars. Elle portait sur le 28 mars, date à laquelle j'ai vu les chars.
21 L'avocat me pose des questions différentes.
22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je pensais que telle serait votre
23 réponse, mais maintenant les choses deviennent plus claires. Le témoin,
24 lorsqu'il a répondu à votre question il y a quelques temps, ne parlait du
25 25 mars comme étant le jour où il a vu les chars.
26 M. DJURDJIC : [interprétation] Je lui ai posé une question au sujet du
27 pilonnage, et c'est en répondant à ma question sur le pilonnage que le
28 témoin a dit avoir vu deux chars le 25. Je ne savais même pas qu'il allait
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1 évoquer ces chars, et ensuite je lui ai demandé où se trouvaient les chars
2 en question, et il a dit qu'ils étaient à Gusanica. Donc ma question
3 suivante a consisté à lui demander quelle était la distance séparant
4 Leocina et Gusanica.
5 Q. Donc nous ne parlons pas du 28 mars 1999, Monsieur Mustafa. Nous
6 parlons du 25. Pourriez-vous, je vous prie, me dire si vous avez vu des
7 chars le 25 ou pas.
8 R. Le 25 mars, je n'ai pas vu de chars. J'étais chez moi à la maison. Il y
9 avait un pilonnage en provenance de Belinca. Voilà, c'est comme ça que j'ai
10 compris votre question, je pensais que vous m'interrogiez au sujet du 28
11 mars en réalité.
12 Q. Je vous remercie. Quelqu'un vous aurait-il dit qu'il vous fallait aller
13 à Izbica ?
14 R. Personne ne nous a dit d'aller là-bas. Nous y sommes allés de notre
15 propre initiative.
16 Q. Mais comment se fait-il que vous êtes tous allés à Izbica de votre
17 propre initiative, comment se fait-il qu'un nombre aussi important de
18 personnes soit allé à Izbica alors qu'il y avait d'autres endroits où les
19 gens auraient pu chercher à trouver refuge pour se protéger des combats
20 puisque ce sont les combats qui vous ont fait partir ?
21 R. Nous pensions que ce serait le meilleur endroit pour nous abriter, et
22 c'était le plus près.
23 Q. Monsieur Mustafa, si j'ai bien compris, vos fils et vos belles-filles
24 sont partis pour Izbica le 26 mars 1999 déjà, n'est-ce pas ? Vous, vous
25 n'étiez pas parti à ce moment-là.
26 R. C'est exact.
27 Q. Pourquoi n'êtes-vous pas parti vous aussi pour Izbica ?
28 R. Pourquoi ? Parce que les pilonnages avaient commencé, et le quartier
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1 près de l'école à Leqina était déjà incendié. Donc ils ont été forcés de
2 partir.
3 Q. Ils sont partis pour Izbica de jour ?
4 R. Ils sont partis dans la matinée, et moi aussi je suis allé à Izbice
5 dans l'après-midi, tard dans l'après-midi aux environs de 5 heures de
6 l'après-midi.
7 Q. Eux sont partis pendant que le village était encore en train d'être
8 pilonné, n'est-ce pas ?
9 R. Pendant le pilonnage, mais aussi pendant qu'ils mettaient le feu à des
10 bâtiments, et en fait ils s'approchaient de plus en plus de Leqina en
11 mettant le feu.
12 Q. Vous étiez dans la cave de la maison pendant ce temps-là ?
13 R. Le 26, j'étais dans la cave de ma maison avec ma femme. Nous voulions
14 faire cuire du pain, et aux environs de 5 heures de l'après-midi, nous
15 sommes partis aussi parce que les autres se rapprochaient de plus en plus.
16 Q. Mais les autres c'est qui, et ils venaient de quelle direction, et où
17 les avez-vous vus ?
18 R. Ils se rapprochaient de plus en plus depuis Citak, et ils étaient en
19 train d'entrer dans Leqina. Depuis chez moi on pouvait voir ça très bien
20 parce que ma maison est sur une colline.
21 Q. Ils étaient à quelle distance de vous lorsque vous les avez vus ?
22 R. Pour vous dire la vérité, Monsieur, sans doute moins d'un kilomètre.
23 Q. C'était le matin quand vous les avez vus à un kilomètre de votre maison
24 ?
25 R. C'était quand ils ont commencé à mettre le feu, dans la matinée. Mais
26 je ne sais pas quelle heure il était exactement, sans doute 10 ou 11 heures
27 du matin.
28 Q. Merci. Ils ne sont pas arrivés jusqu'à votre maison jusqu'à 5 heures de
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1 l'après-midi, heure à laquelle vous êtes parti pour Izbica; c'est bien ça ?
2 R. Je ne sais pas quand ils sont arrivés jusqu'à ma maison. Ils mettaient
3 le feu en avançant, et nous, nous sommes partis et nous n'avons pas regardé
4 derrière nous pour voir ce qui se passait.
5 Q. Monsieur Mustafa, la question que je vous ai posée consistait à vous
6 demander si jusqu'à 5 heures de l'après-midi, heure à laquelle vous êtes
7 parti pour Izbica, les forces que vous avez vues avaient ou n'avaient pas
8 atteint votre maison. Elles n'étaient pas encore arrivées jusqu'à votre
9 maison, n'est-ce pas ?
10 R. Non. Elles n'étaient pas arrivées jusqu'à ma maison. Si elles l'avaient
11 fait, elles m'auraient tué parce qu'elles auraient dû passer par le hameau
12 de Dervisi avant d'arriver jusqu'à chez moi.
13 Q. Les forces en question étaient en train de mener des combats, et c'est
14 la raison pour laquelle elles ne sont pas arrivées jusqu'à votre maison,
15 Monsieur Mustafa, c'est la raison pour laquelle il leur a fallu tant de
16 temps pour couvrir cette distance d'un kilomètre qui séparait votre village
17 de l'endroit où vous les avez vues, n'est-ce pas ?
18 R. Ce n'est pas exact. Ils n'avaient personne contre qui se battre. Ce qui
19 leur a pris tout ce temps c'est qu'ils mettaient le feu aux maisons, une
20 par une, à toutes les maisons.
21 Q. Merci. Quand vous êtes parti à Izbica, pourriez-vous me dire, s'il vous
22 plaît, le chemin qui relie Leocina à Izbica est un chemin de terre ou est-
23 ce que je me trompe ?
24 R. Oui, de terre.
25 Q. Quand on va de Leocina à Izbica on vient du nord, n'est-ce pas ?
26 R. Oui. Le chemin démarre à la sortie de Leqina.
27 Q. Pourriez-vous me décrire l'endroit où vous vous trouviez au moment où
28 vous êtes arrivé à Izbica en provenance de Leocina et que vous avez trouvé
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1 de très nombreuses personnes à Izbica ?
2 R. C'était une prairie, un champ de deux hectares qui était bondé de
3 personnes. C'était le 27 mars. Tout le monde était regroupé dans cette
4 praire. Ceux qui avaient une maison à Izbice sont restés chez eux. Le 27,
5 il a plu toute la nuit et nous, nous sommes restés dehors dans la prairie.
6 Mais ceux qui avaient une maison à Izbice étaient à l'intérieur de leurs
7 maisons, et le matin ils sont sortis de leurs maisons aussi et nous ont
8 rejoints dans la prairie. Les forces serbes ont encerclé Izbice le 27, mais
9 elles ne sont pas arrivées jusqu'à l'endroit où nous nous trouvions.
10 Q. Je vous demandais simplement de confirmer que la prairie dont vous
11 parlez se trouvait bien à l'entrée d'Izbica lorsqu'on vient de Leocina.
12 Pourriez-vous, je vous prie, me dire si c'est bien le cas ou pas ?
13 R. Non. Il y a la partie haute d'Izbice, et la prairie est au bout
14 d'Izbice. Près du cimetière.
15 Q. On va essayer de pratiquer autrement si c'est possible. Le chemin qui
16 va de Leocina à Izbica passe-t-il à coté de l'endroit où vous avez enseveli
17 les corps le 31 mars ?
18 R. Le chemin qui va de Leqina à Izbice arrive d'abord dans la partie haute
19 d'Izbice, à Izbice le haut, puis traverse le centre du village avant
20 d'arriver à la prairie, et au bout de la prairie se trouve l'endroit où
21 nous avons enseveli les corps. C'est quand on va dans la direction de
22 Turicevc, cet endroit se trouve du côté droit.
23 Q. Je vous remercie, Monsieur Mustafa. Vous nous avez donc expliqué les
24 choses, c'est ce dont j'avais besoin. Je ne vais pas vous montrer des
25 photographies, mais en tout cas on ne voit pas l'endroit où vous étiez, pas
26 plus que la route qui vient de Leocina sur ces photographies. Donc je vous
27 remercie, les photos sont inutiles.
28 M. DJURDJIC : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que l'heure
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1 de la pause est arrivée.
2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien, Maître Djurdjic. Nous
3 allons faire notre première pause d'une demi-heure et reprendrons nos
4 débats à 11 heures.
5 --- L'audience est suspendue à 10 heures 28.
6 --- L'audience est reprise à 11 heures 01.
7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Djurdjic, c'est à vous.
8 M. DJURDJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
9 Q. [interprétation] Monsieur Mustafa, vous avez fait une première
10 déclaration préliminaire les 11 et 13 septembre devant des enquêteurs de ce
11 Tribunal, et vous n'y faites pas mention de l'armée ou des soldats.
12 Pourquoi est-ce que vous nous avez dit dans ces conditions hier que les
13 forces serbes englobaient l'armée et la police ?
14 R. J'ai dit ce que je savais, j'ai dit l'armée et la police, parce que si
15 ce n'était pas l'armée et la police, pourquoi les enquêteurs m'auraient
16 interrogé pour commencer ?
17 Q. Monsieur Mustafa, dans votre déclaration préliminaire du mois de
18 novembre 1999, vous ne parlez que de la police. Est-il exact que le 28 mars
19 1999, il n'y avait à Izbica que la police ?
20 R. Il y avait l'armée et la police, mais dans le groupe dont je faisais
21 partie et sur lequel ils ont commencé à tirer ne concernait que la police.
22 Q. Monsieur Mustafa, veuillez avoir l'obligeance de répondre à ma
23 question. Dans votre déclaration préliminaire de novembre 1999, vous ne
24 dites pas un mot de l'armée; ceci est-il exact ?
25 R. C'est peut-être une erreur parce que je sais que j'ai parlé de l'armée
26 et de la police.
27 Q. A votre avis, ce serait une erreur de qui ?
28 R. De la personne qui a recueilli la déclaration, peut-être, parce qu'on
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1 parlait une fois en anglais et une fois en albanais.
2 Q. Excusez-moi. Mais est-ce que vous avez fait votre déclaration
3 préliminaire en anglais ?
4 R. Il y avait un interprète.
5 Q. Est-ce qu'il y a eu des problèmes lorsque vous avez fait votre
6 déclaration ?
7 R. Je ne sais pas s'il y a eu des problèmes.
8 Q. Cette déclaration préliminaire vous a-t-elle été relue après rédaction,
9 est-ce qu'elle vous a été interprétée en albanais ?
10 R. Oui. On me l'a lue.
11 Q. Vous étiez d'accord avec ce qu'on vous a lu ?
12 R. Oui. Je l'ai agréé.
13 Q. Dans cette déclaration préliminaire on trouve tout ce que vous avez dit
14 aux personnes avec qui vous avez parlé, n'est-ce pas ?
15 R. Oui.
16 Q. Mais par la suite, même si vous avez un peu de mal à écrire, vous avez
17 signé chacune des pages de cette déclaration préliminaire, n'est-ce pas ?
18 R. Oui, j'ai signé.
19 Q. Quand vous avez participé aux séances de récolement avant de venir
20 témoigner ici -- je cherche la date exacte. Au mois d'août 2006, dans votre
21 déclaration complémentaire vous n'avez pas non plus parlé de l'armée.
22 R. Moi ce que je sais c'est que j'en ai parlé, et vous savez très bien que
23 l'armée était là-bas. Tout le monde le sait, pas seulement moi.
24 Q. Monsieur Mustafa, moi je n'étais pas sur place. Donc je ne sais pas,
25 mais vous, vous étiez sur place et vous n'avez pas parlé de la présence de
26 l'armée dans votre déclaration, déclaration que vous avez faite à un moment
27 où vous aviez encore un souvenir assez frais des événements, en novembre
28 1999, donc huit mois ou même moins après les événements qui font l'objet de
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1 votre déposition. Votre déclaration compte sept ou huit pages, mais dans
2 aucune de ces pages on ne trouve la moindre mention de l'armée yougoslave
3 ou de l'armée de Serbie.
4 R. Ce sont peut-être des erreurs, mais tout le monde sait que l'armée de
5 Yougoslavie était présente et qu'elle a commis des massacres, l'armée et la
6 police.
7 Q. Monsieur Mustafa, dois-je conclure que nombre d'années après les
8 événements, votre souvenir est meilleur, plus précis qu'il ne l'était
9 quelques mois à peine après les événements ?
10 R. La mémoire devient de moins en moins précise avec le temps.
11 Q. Merci, Monsieur Mustafa. Je voudrais revenir au bombardement, et je
12 voudrais vous montrer la pièce D001-3247.
13 M. DJURDJIC : [interprétation] Il s'agit de la transcription du 1er juillet
14 2002. C'est dans l'affaire Milosevic, à la page 737, lignes 21 à 24.
15 Q. Vous dites ici que vous n'avez pas vu les forces serbes bombarder.
16 R. Mais de quelle direction ne les aurais-je pas vues ?
17 Q. Très bien.
18 M. DJURDJIC : [interprétation] Je voudrais passer à la pièce D001-3247.
19 Pardon 3277. Dans l'affaire Milutinovic, page 2 392, lignes 24 et 25. A la
20 page 293, lignes 1, 2, 3, et 4 --
21 Q. Quand le conseil de la Défense vous a demandé : Vous ne pouviez pas
22 voir les personnes qui vous bombardaient au moment du bombardement. Vous
23 avez répondu : Non. Mais vous avez dit que vous aviez entendu le bruit dû à
24 ce pilonnage. Les obus sont tombés dans notre champ, comment vouliez-vous
25 qu'on ose regarder les gens qui nous bombardaient ?
26 R. C'est exact, oui. On voyait les obus puis les flammes dues au feu.
27 Q. Mais vous n'avez pas vu cela, et donc vous ne savez pas qui avait tiré
28 ces obus puisque vous ne l'aviez pas vu; c'est bien cela ?
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1 R. Monsieur, comment voulez-vous voir cela ? Vous devez vous enfuir et
2 essayer de ne pas vous trouver dans la ligne de tir.
3 Q. Oui, vous avez tout à fait raison. Mais ce que vous nous dites est
4 fondé sur des hypothèses parce que vous ne l'avez pas vu de vos yeux.
5 R. Mais qui d'autre si ce n'est la police et les militaires serbes
6 auraient bombardé, c'est un fait, tout le monde le sait, il n'y a pas que
7 moi qui y étais et qui l'ai vu.
8 Q. Monsieur Mustafa, si je vous dis que l'UCK avait de l'artillerie, que
9 diriez-vous à cela ?
10 R. Je ne sais pas si l'UCK a fauté à ce moment-là parce que si c'était le
11 cas, je ne vois pas comment l'armée ou la police serbe n'aurait pas fait ce
12 qu'ils ont fait, c'est-à-dire commettre des massacres. Je n'ai pas vu l'UCK
13 au cours de ces combats ni des troupes de l'UCK.
14 Q. Vous n'avez jamais vu l'UCK du tout ?
15 R. Le jour de l'enterrement, oui, j'ai vu trois ou quatre personnes
16 lorsque nous avons enseveli ces personnes à Izbice.
17 Q. Très bien, merci. Hier, vous avez dit que vous aviez décidé de vous
18 rendre à Izbica, car vous pensiez que vous seriez plus en sécurité parce
19 qu'il n'y avait pas de Serbes en cet endroit et que c'était près des
20 montagnes; c'est bien cela ?
21 R. Oui, c'est ça.
22 Q. Y avait-il des Serbes à Izbica ?
23 R. Non, il n'y avait pas de Serbes à Izbice. Il n'y avait pas de familles
24 serbes, mais il y avait la police et les militaires.
25 Q. Merci. Quelle était l'importance de la proximité des montagnes ?
26 R. Les montagnes étaient importantes parce que nous pouvions nous rendre
27 dans les montagnes, nous y abriter et nous protéger du danger. Si j'avais
28 été dans ces montagnes, je n'aurais pas vécu le massacre que j'ai vécu.
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1 Q. Ma question était de savoir qui se trouvait dans les montagnes ?
2 R. Je n'en sais rien. Tout le monde s'est enfui, chacun de son côté.
3 Q. Monsieur Mustafa, il y avait des membres de l'UCK dans les montagnes,
4 n'est-ce pas ?
5 R. Je n'ai vu personne.
6 Q. Vos fils étaient dans la montagne, ils se trouvaient là avec l'UCK,
7 n'est-ce pas ?
8 R. Non. Non. Mes fils étaient d'ailleurs chacun de leur côté. Ils
9 n'étaient pas ensemble.
10 Q. Monsieur Mustafa, vos fils ont emmené la famille pour rejoindre l'UCK
11 dans la montagne. Ils sont restés avec l'UCK dans la montagne, alors que
12 vous êtes resté en arrière pour vous occuper de votre famille, n'est-ce pas
13 ?
14 R. Ce n'est pas vrai. Comme je l'ai dit, mes fils ont essayé de trouver
15 chacun un abri. Ils ne sont pas allés là pour rejoindre l'UCK.
16 Q. Monsieur Mustafa, ils ne sont pas à Srbica, à Kosovska ou à Klina ou à
17 Pec. Ils sont allés dans les montagnes et ils étaient armés, n'est-ce pas ?
18 R. Non, ceci n'est pas vrai. Ils n'avaient pas d'armes et ils n'ont pas
19 rejoint non plus l'UCK après un certain temps. Ils se sont rendus au
20 Monténégro et puis ensuite en Albanie.
21 Q. Merci. Vous nous avez dit avoir servi au sein de l'armée. Je ne vais
22 pas citer d'année parce que je risque de me tromper. Est-ce que vous avez
23 appris la langue serbe, est-ce que vous parlez couramment la langue serbe
24 pendant que vous étiez dans l'armée ?
25 R. J'ai appris un tout petit peu mais j'ai oublié, et beaucoup d'années se
26 sont écoulées depuis lors.
27 Q. Après avoir quitté l'armée vous n'avez plus pratiqué la langue serbe,
28 n'est-ce pas ?
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1 R. Je n'ai pas quitté l'armée. J'ai terminé les deux années de service et
2 ensuite j'ai quitté l'armée à la fin de mon service.
3 Q. Oui, oui, nous savons cela, Monsieur Mustafa. Mais après avoir été
4 libéré de l'armée vous n'avez plus parlé la langue serbe et donc vous avez
5 oublié le peu que vous en connaissiez; c'est bien cela ?
6 R. Je ne parlais pas le serbe.
7 Q. Et vous ne comprenez pas le serbe aujourd'hui non plus, n'est-ce pas ?
8 R. Non.
9 Q. Pouvez-vous m'expliquer alors comment il se fait que vous avez compris
10 les forces serbes le 28 mars à Izbiza, ce qu'ils disaient lorsqu'ils
11 s'exprimaient en serbe ?
12 R. Je n'ai rien compris. Même s'ils avaient parlé en albanais je n'aurais
13 rien compris. Lorsqu'ils nous ont mis en file et nous ont ordonné de
14 marcher vers la montagne pour nous abattre, je n'aurais rien compris.
15 Q. Merci. N'est-il pas vrai qu'en fin de compte vous ne savez pas ce que
16 les membres des forces serbes disaient le 28 mars 1999 lorsque vous étiez à
17 Izbiza ?
18 R. C'est vrai. J'ai simplement compris qu'ils nous injuriaient parce que
19 d'autres amis dans le groupe nous l'ont dit, et j'ai vu aussi quand ils ont
20 arraché nos couvre-chefs et les ont jetés par terre, ils nous insultaient.
21 Ils nous appelaient Thaqi et Rugova.
22 Q. Merci. Mais vous n'avez rien compris d'autre de leurs propos, n'est-ce
23 pas ?
24 R. Mes amis m'ont dit ils nous insultent, ils nous injurient.
25 Q. Merci. Alors cet homme qu'ils appelaient un Thaqi dont ils ont parlé,
26 qui est cette personne ?
27 R. C'est Hasim Rugova qui ne vit plus aujourd'hui.
28 Q. Alors qui était Hasim Thaqi, qui était cette personne ? Qu'avait-elle
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1 fait ?
2 R. Je ne sais pas ce qu'il était. Je sais simplement qu'aujourd'hui il est
3 premier ministre.
4 Q. Alors mais en 1999, qu'est-ce qu'il avait fait ?
5 R. Je n'en sais rien. Je ne sais pas ce qu'il a fait. Je ne l'ai jamais
6 rencontré.
7 Q. A ce moment-là, pour vous, ça n'a pas beaucoup de sens le fait qu'il
8 vous appelle Thaqi, ça signifie rien ?
9 R. Non, non, je ne le connaissais pas. Je l'ai vu à la télé plus tard.
10 Q. Monsieur Mustafa, appeler quelqu'un Thaqi ne signifie pas pour autant
11 que ça soit une insulte à l'époque ?
12 R. C'est eux qui savaient ce qu'ils disaient. Moi je ne sais pas.
13 Q. Et alors en 1999, M. Rugova, est-ce que vous savez ce qu'il faisait à
14 l'époque ?
15 R. Je ne sais pas ce qu'il a fait mais j'en ai entendu parler.
16 Q. Puis-je dès lors en déduire que cette référence à M. Rugova n'était pas
17 une insulte ?
18 R. C'est eux qui savaient ce qu'ils disaient. Ils savaient si c'était
19 quelque chose d'insultant ou pas.
20 Q. Merci. Monsieur Mustafa, hier à deux occasions, vous avez dit qu'il n'y
21 avait pas d'homme à porter les armes dans cette prairie. Je voudrais vous
22 demander quels sont les critères que vous appliqueriez à une personne pour
23 la qualifier apte à porter les armes vaillantes ?
24 R. Oui, et si ces personnes étaient jeunes, elles se seraient échappées
25 dans la montagne pour ne pas être tuées, et elles n'auraient pas été tuées
26 alors qu'elles l'ont été.
27 Q. Monsieur Mustafa, je voudrais que vous répondiez à ma question, s'il
28 vous plaît. Hier, à la page 607, paragraphe 20, vous avez dit que parmi les
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1 hommes se trouvant sur cette prairie ou sur ce champ, il n'y avait pas
2 d'hommes en âge de porter les drapeaux ou aptes à porter les armes. Vous
3 savez qu'il n'en avait pas plus que deux. Les plus jeunes étaient parties
4 dans la montagne. Alors qui considérez-vous comme étant un homme en âge
5 d'être appelé sous le drapeau ou apte à porter les armes ?
6 R. Des gens jeunes en âge de porter les drapeaux ils sont jeunes, ce ne
7 sont pas les vieux qui le sont.
8 Q. Merci beaucoup. Etes-vous au courant du fait que toute personne jusqu'à
9 65 ans peut être enrôlée dans l'armée ?
10 R. Non, je ne suis pas au courant.
11 Q. Bon, vous n'êtes pas au courant, mais pouvez-vous me croire sur parole
12 ? J'ai un jour été conseil de la Défense d'un Albanais à cause de vengeance
13 de la loi du sang pour un triple meurtre, il avait 73 ans, un autre 68, et
14 ils avaient utilisé des fusils pour commettre leurs crimes.
15 R. Je vous crois sur parole, mais qu'est-ce que vous voulez me dire, que
16 ce que ces gens-là ont fait, n'importe qui pourrait le faire ? Ce n'est pas
17 bien. Même si vous avez 80 ans et même si vous avez une arme, vous pouvez
18 toujours tuer quelqu'un si vous le souhaitez.
19 Q. Je vous remercie. Ça dépend de votre santé, de votre état de santé
20 physique pour déterminer si vous êtes en âge ou apte à porter les armes;
21 c'est bien cela ?
22 R. Vous avez tout à fait raison. Quand on est allé faire notre service
23 militaire, ils ont d'abord vérifié si on était en bonne santé et si nous
24 étions aptes à être sous les drapeaux. Si ce n'était pas le cas, nous
25 n'étions pas acceptés dans l'armée.
26 Q. Monsieur Mustafa, je ne pensais pas au service militaire obligatoire et
27 habituel, mais après, indépendamment de l'âge qu'on pouvait avoir, est-ce
28 que la possibilité d'être actif au sens militaire ne dépendait pas de
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1 l'état de santé physique ou mental de la personne ?
2 R. Ça, je ne sais pas. Quand on vieillit, l'armée n'a plus besoin de vous.
3 Q. Mais si vous voulez, vous pouvez quand même rejoindre les rangs de
4 l'armée. Vous pouvez toujours aller dans l'armée et faire ce que vous êtes
5 capable de faire, non ?
6 R. Il y a un temps pour tout. Pour être soldat, il faut être jeune et pas
7 vieux.
8 Q. Merci. Je vais vous donner quelques informations qui proviennent de
9 l'annexe F de l'acte d'accusation. En tout, il y a 111 noms dans cette
10 annexe; 20 de ces personnes ont moins de 50 ans, 13 moins de 60 ans, et 25
11 personnes qui ont moins de 65 ans. Il y avait aussi 11 personnes dont l'âge
12 n'a pas été déterminé. Est-ce que ce ne sont pas là tous des jeunes gens ?
13 R. Je ne sais pas. Ces gens, ils ne pensaient pas qu'ils allaient être
14 tirés, sinon ils seraient partis dans les montagnes.
15 Q. Merci. Je vous ai donné ces chiffres, sans tenir compte -- je n'ai pas
16 donné ceux dont l'âge ne pouvaient pas être établis, parce qu'en vertu du
17 règlement, 58 hommes dans ce groupe étaient des hommes en âge de combattre
18 et aptes à porter les armes.
19 J'aimerais maintenant passer à un autre sujet. Vous avez dit que le
20 31 mars vous avez compté combien il y avait de cadavres, et qu'en tout vous
21 en avez compté 147. Est-ce que c'est vous qui avez compté personnellement
22 le nombre de corps ?
23 R. J'ai essayé de les compter, mais il se peut que je me sois trompé.
24 Q. Vous avez dû vous tromper. Je veux simplement savoir si c'était vous
25 qui avez fait le décompte des cadavres ou si c'était quelqu'un d'autre qui
26 l'avait fait ?
27 R. Il y en a beaucoup qui ont compté combien il y avait de cadavres. Moi
28 aussi, j'ai essayé de le faire dans la mesure du possible.
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1 Q. D'accord. Vous dites qu'il y a des membres de l'UCK qui ont aussi
2 participé à l'enterrement. Pourriez-vous me donner le nom de ceux qui ont
3 participé ?
4 R. Je ne me souviens plus des noms, mais je sais qu'il y en avait trois ou
5 quatre, habillés dans l'uniforme, et je me souviens uniquement du nom de
6 Sadik Xhemajli.
7 Q. Bien, mais est-ce que vous vous souvenez de Rexhep Naim ? Est-ce que ce
8 nom vous dit quelque chose ?
9 R. Je ne connais pas cet homme-là.
10 Q. Bon. Est-ce que vous vous souvenez que quelqu'un a établi une liste sur
11 une feuille de papier, une liste des noms des personnes qui avaient été
12 enterrées ?
13 R. Je pensais que c'était Sadik qui avait établi cette liste, qui comptait
14 combien il y avait de corps.
15 Q. D'accord. Mais indépendamment du chiffre du nombre de corps, êtes-vous
16 d'accord avec moi pour dire qu'on n'a pas seulement enterré les corps de
17 ceux qu'on avait trouvés dans la prairie, mais qu'on avait enterré aussi
18 les corps de ceux qu'on avait trouvés ailleurs, par exemple, dans les bois
19 ?
20 R. Il y a des gens qui ont aussi été tués dans les montagnes. Donc ils
21 avaient survécu, ils s'étaient réfugiés dans les montagnes, mais ils ont
22 été tués là-bas dans les montagnes. Hajriz Draga, lui aussi, il s'est
23 échappé dans les montagnes, mais il a été tué.
24 Q. Je ne veux pas simplement me concentrer sur Draga. On a trouvé dans les
25 bois les corps d'autres personnes, corps qui ont été enterrés, eux aussi,
26 dans ce champ-là qui a été mentionné par un de vos concitoyens.
27 R. Ceux qui ont été tués ce jour-là ont été enterrés là, ce jour-là.
28 Hajriz Draga et Sadik Hoti, ils se sont réfugiés en rampant dans les bois,
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1 et c'est là qu'ils sont tués.
2 Q. D'accord. Nous parlons du 28 mai 1999 ? Est-ce que vous avez assisté à
3 l'exhumation qui s'est effectuée à ce moment-là ou pas ?
4 R. Oui, je l'ai vue depuis la colline où j'étais. Avant que ces hommes ne
5 viennent exhumer les corps, ils ont pilonné, et puis ils ont commencé à
6 exhumer les corps, mais ils n'ont pas fait tout le travail en un jour seul.
7 Il leur a fallu quatre ou cinq jours pour le faire.
8 Q. Mais avant de pouvoir arriver à Izbice, est-ce qu'il y a eu des combats
9 ?
10 R. Jamais il n'y a eu de combat à Izbice. Pas un seul coup de feu n'a été
11 tiré à Izbice. L'UCK n'était pas du tout présente à Izbice, il n'y avait
12 pas de barrage routier. C'est pour cela qu'on est allés à Izbice, parce
13 qu'on se disait qu'on y serait en sécurité.
14 Q. Bien. Dans votre déclaration de novembre 1999, celle que vous avez
15 fournie aux enquêteurs, on ne trouve pas une seule mention de cette
16 exhumation.
17 R. On ne m'a pas posé de question à ce propos cette fois-là. Pendant le
18 deuxième procès, on m'a posé des questions à propos des corps, et pendant
19 le procès Milosevic on n'a parlé que du massacre.
20 Q. Ce qui veut dire que vous aviez en 2006 un bien meilleur souvenir qu'en
21 1999 ?
22 R. Ce que j'ai vécu, c'est ce dont je me souviens le mieux.
23 Q. Monsieur Mustafa, en réalité vous n'avez pas vu l'exhumation pendant
24 qu'elle se déroulait, n'est-ce pas ?
25 R. Je l'ai vue, l'exhumation. J'étais sur la colline, parce que sinon je
26 n'aurais pas parlé.
27 Q. En fait, vous en avez simplement entendu parler de cette exhumation,
28 n'est-ce pas ? Pourtant, aujourd'hui, vous voudriez que nous croyions qu'en
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1 fait vous avez vu cela de vos propres yeux.
2 R. Mais j'ai bien vu cela de mes propres yeux. L'armée et la police y
3 étaient. On les voyait très bien d'ailleurs de la colline. On voyait où les
4 corps étaient ce jour-là. Lorsqu'il y a eu le pilonnage, j'ai vu la police
5 serbe, l'armée serbe.
6 Q. Un instant. Merci. J'essaie de voir la référence se trouvant dans le
7 compte rendu d'audience sur ce point. J'aimerais repérer exactement
8 l'endroit précis. Ce sera rapide.
9 Mais avant de passer à cela, je vous demande ceci : êtes-vous
10 d'accord pour dire que les forces ont arrivées en plein jour ?
11 R. Oui.
12 Q. Il n'y avait rien de secret, n'est-ce pas ?
13 R. Non, il n'y avait rien de secret. Ils ont exhumé les corps. C'est pour
14 ça qu'ils étaient venus. Vous le savez parfaitement bien. Vous savez
15 comment on s'y prend pour exhumer les corps. Je suis témoin vivant de ce
16 qui s'est passé. Ils n'ont même pas trouvé la moitié des corps qu'il y
17 avait.
18 M. DJURDJIC : [interprétation] Peut-on voir la pièce D001-3277. C'est une
19 partie du compte rendu du procès Milosevic, 25 août 2006, page 2 364,
20 paragraphes 1, 2, 3, 4, 5.
21 Q. On vous a demandé si vous aviez vu l'exhumation pendant qu'elle se
22 produisait. Vous avez répondu que : Non, d'abord, parce qu'ils avaient
23 pilonné la zone, après quoi ils avaient exhumé les corps. Nous savions
24 depuis le jour où ils avaient pilonné où ça allait se passer. Ils ont
25 exhumé les corps pendant la journée, parce qu'ils se sont arrêtés à la
26 soirée, quand la nuit est tombée. J'ai vu quand ils ont emmené les corps il
27 n'y a pas un seul corps qui soit resté dans les fosses.
28 R. J'ai dit que j'étais présent quand ça s'est passé, que je les ai vus
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1 quand j'étais sur la colline. De là-haut j'ai vu les bulldozers, et puis
2 les bulldozers ont rempli les trous pour ce qui fait que rien n'est resté.
3 Q. Attendez, je vais voir si c'est le même compte rendu. Page 2 391,
4 paragraphe 7, voici ce que vous avez déclaré : Gani l'a vu. Avant, vous
5 avez dit que vous, vous n'avez pas vu de vos propres yeux.
6 R. Ce n'est pas vrai. J'ai dit que je l'ai vu de la colline. Peut-être que
7 c'était mal écrit. Mais je n'étais pas sur le lieu même, mais j'étais en
8 haut de la colline.
9 Q. C'est sans doute l'explication la plus plausible. Où vous trouviez-vous
10 le 28 mars 1999 ?
11 R. J'étais dans une prairie, dans la prairie à Izbice.
12 Q. Je vous remercie.
13 M. DJURDJIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
14 je n'ai pas d'autres questions à poser à ce témoin. Merci, Monsieur Dragaj.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Maître Djurdjic.
17 Madame Kravetz, est-ce que vous avez des questions supplémentaires ?
18 Mme KRAVETZ : [interprétation] Juste quelques-unes, Monsieur le Président.
19 Merci.
20 Nouvel interrogatoire par Mme Kravetz :
21 Q. [interprétation] Monsieur Dragaj, pendant le contre-interrogatoire,
22 plusieurs questions vous ont été posées sur le pilonnage le 25 mars de 1999
23 à Leocina. Le jour où le village a été pilonné, est-ce l'UCK était présente
24 dans ce village ?
25 R. Non.
26 Q. Est-ce qu'on a tiré depuis Leocina en direction du lieu d'où venaient
27 ces obus ?
28 R. Non. Non, non.
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1 Q. D'autres questions vous ont été posées cherchant à savoir s'il y avait
2 parmi les personnes se trouvant dans la prairie des hommes en âge de porter
3 les armes. Vous avez décrit votre groupe au moment où il y a eu ce massacre
4 que vous avez décrit, y avait-il un seul homme qui aurait été armé dans ce
5 groupe dans lequel vous vous trouviez ?
6 R. Non. Il n'y avait aucune personne armée.
7 Q. Vous avez dit que vous connaissiez bon nombre des personnes se trouvant
8 dans votre groupe. Savez-vous s'il y avait parmi ces personnes des membres
9 de l'UCK ?
10 R. Là où j'étais, il n'y en avait pas -- aucun membre parmi les hommes que
11 je connaissais. La plupart des gens étaient des personnes âgées qui avaient
12 60 ans ou voire plus, des femmes et des enfants. Il n'y avait aucun membre
13 de l'UCK.
14 Q. On vous a posé des questions sur une période que vous avez passée avec
15 votre femme à Mitrovica en 1998. Pourquoi avoir quitté Leocina pour aller
16 en 1998 à Leocina ?
17 R. Parce que j'avais peur. Je ne suis pas allé là pour m'amuser. A
18 l'époque ma maison n'avait pas encore été incendiée. Je suis parti
19 uniquement parce que j'avais peur des forces serbes.
20 Q. A l'époque, qu'est-ce qui se passait dans la zone dans laquelle se
21 trouvait le village de Leocina ?
22 R. Ça, je ne sais pas. J'ai passé plus de trois mois à Mitrovica, et
23 lorsque l'OSCE est revenue, je suis rentré chez moi dans ma maison, moi
24 aussi.
25 Q. Est-ce que vous savez quand, à quelle période de 1998 vous avez passé
26 ces quelques mois à Mitrovica ?
27 R. Je ne sais plus exactement. Mais c'était l'été.
28 Q. De quoi exactement aviez-vous peur, que craigniez-vous si vous ne
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1 partiez pas de Leocina pour aller à Mitrovica ?
2 R. On avait peur qu'ils nous tuent, on avait peur de ce qui s'est passé
3 précisément à Izbice plus tard le 28.
4 Q. Qui allait vous tuer, pensiez-vous ?
5 R. La police et l'armée serbes. Je n'avais peur de personne d'autre.
6 Q. Y avait-il des représentants de la police ou de l'armée serbe à Leocina
7 ou dans cette zone avant que vous ne décidiez d'aller passer l'été 1998 à
8 Mitrovica ?
9 R. Pas en 1998, en tout cas il n'y en avait pas à Leqina. Il y en avait
10 Runik, à Kline, à Skenderaj, dans cette zone-là, oui.
11 Q. Bien. Des questions vous ont été posées à propos de l'exhumation
12 effectuée à Izbica en 1999, lorsque les victimes du massacre ont été
13 exhumées. Est-ce que les parents des victimes ont récupéré les corps de
14 toutes les victimes de ce massacre du 28 mars ?
15 R. En tout cas, tous les corps ont été exhumés et déterrés, et avec leurs
16 bulldozers ces hommes ont comblé les trous, ont nivelé le sol.
17 Q. Mais depuis cette période-là, ces événements de 1998, 1999, est-ce que
18 les corps ont été retrouvés ?
19 R. Non. Il y en a beaucoup qu'on n'a jamais retrouvés.
20 Mme KRAVETZ : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Je
21 n'ai pas d'autres questions.
22 [La Chambre de première instance se concerte]
23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous serez content de savoir que ceci
24 met fin à votre audition, vous n'aurez plus à répondre à aucune question.
25 Merci d'être venu déposer à La Haye une nouvelle fois, et merci de l'aide
26 que vous avez apportée en témoignant. Vous pouvez maintenant rentrer chez
27 vous et reprendre votre vie de tous les jours.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Ça a été un honneur et j'ai été content de
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1 faire ce que j'ai fait. Je vous remercie.
2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] C'est moi qui vous remercie, c'est Mme
3 l'Huissière maintenant qui va vous accompagner et vous aider à sortir de ce
4 prétoire. Je vous remercie.
5 [Le témoin se retire]
6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Avez-vous des questions que vous
7 souhaitez aborder avant la levée de l'audience ? Ceci ne semble pas être le
8 cas. Comme prévu au début de l'audience d'aujourd'hui, nous allons
9 suspendre l'audience et nous la reprendrons lundi matin, 9 heures.
10 L'audience est levée.
11 --- L'audience est levée à 11 heures 56 et reprendra le lundi 9 février
12 2009, à 9 heures 00.
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