Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le vendredi 20 mars 2009

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 05.

  5   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour.

  6   Si j'ai bien compris, Madame Gopalan, vous avez un point à soulever.

  7   Mme GOPALAN : [interprétation] Tout à fait, un petit point de procédure.

  8   J'aimerais employer la déclaration de ce témoin de 1999 dans le cadre de

  9   son témoignage aujourd'hui. C'est un témoignage qui a été communiqué à la

 10   Défense -- en tout cas, nous les avons avertis que nous avions l'intention

 11   d'utiliser cette déclaration dans le préavis à propos des témoins. Nous

 12   attirons leur attention sur cette déclaration, c'est pour ça que je demande

 13   d'ailleurs l'autorisation de l'utiliser parce que nous n'avons pas inclus

 14   cette déclaration dans nos écritures du 14 janvier 2009. C'est un témoin

 15   qui a été interrogé viva voce dans l'affaire Milutinovic, et nous n'avons

 16   que demandé d'utiliser le compte rendu de sa déposition dans l'affaire

 17   Milutinovic. Néanmoins, je pense qu'il serait plus efficace d'utiliser une

 18   déclaration synthétique. C'est pour ça que je vous demande, Monsieur le

 19   Président, si nous pouvons l'utiliser et le verser au dossier.

 20   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je n'ai pas reçu la requête qui

 21   parlait de ce fameux compte rendu de la déposition de ce témoin dans

 22   l'affaire Milutinovic.

 23   Mme GOPALAN : [interprétation] Vous voulez dire la requête --

 24   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui. J'imagine qu'il y a une requête -

 25   -

 26   Mme GOPALAN : [interprétation] -- c'est exact --

 27   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] -- assez étoffée portant sur ce --

 28   Mme GOPALAN : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.

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  1   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Dans cette requête, si j'ai bien

  2   compris, en ce qui concerne ce témoin, vous n'avez mentionné que le compte

  3   rendu dans l'affaire Milutinovic et pas sa déclaration.

  4   Mme GOPALAN : [interprétation] Tout à fait.

  5   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Pourquoi est la question.

  6   Mme GOPALAN : [interprétation] Tout à fait. C'est parce que le témoin avait

  7   été entendu viva voce dans l'affaire Milutinovic, mais nous avons

  8   maintenant aussi étudié sa déclaration synthétique; elle est très

  9   synthétique et permettrait peut-être d'expédier les choses.

 10   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il faut voir ce qu'en pense la

 11   Défense.

 12   Monsieur Djordjevic, qu'avez-vous à dire ?

 13   M. DJORDJEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons été

 14   avertis au dernier moment, donc forcément je vais soulever une objection,

 15   mais je n'irai pas plus loin.

 16   [La Chambre de première instance se concerte]

 17   Mme GOPALAN : [interprétation] Puis-je ajouter quelque chose, Monsieur le

 18   Président ?

 19   [La Chambre de première instance se concerte]

 20   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Madame Gopalan, vous n'avez pas encore

 21   donné de réponse, mais sachez que la Chambre a remarqué une tendance non

 22   seulement dans vos arguments oraux, mais aussi dans vos arguments écrits,

 23   vous semblez demander toujours différentes choses plus ou moins motivées.

 24   Donc nous n'allons pas faire droit à votre requête puisque nous avons

 25   remarqué que vous aviez le temps de toute façon de prévenir.

 26   Cette fois-ci, nous avons été avertis ainsi que la Défense de la

 27   teneur de la déposition orale que ce témoin avait donnée dans un procès

 28   précédent. Bien sûr, le conseil de la Défense a soulevé une objection de

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  1   principe, il n'y a pas vraiment de difficulté avec ce que vous demandez.

  2   Mais la Chambre n'est pas tout à fait sûre de ce qu'elle doit faire. Et la

  3   Chambre en plus, d'un côté -- nous avons une procédure qui est conçue afin

  4   de permettre à l'autre partie et à la Chambre d'être avertie à l'avance de

  5   ce qui va se passer afin de bien se préparer -- doit être avertie de toute

  6   déclaration qui va être versée au dossier ou de tout compte rendu qui va

  7   être employé dans le cadre d'une déposition afin que l'on puisse se

  8   préparer correctement. Le fait d'agir comme vous l'aviez fait, c'est-à-dire

  9   de venir au dernier moment avec un document que vous demandez à verser au

 10   dossier sans avoir prévenu qui que ce soit, risque de gêner l'efficacité

 11   des débats.

 12   Mais comme je vous l'ai dit précédemment, nous sommes un peu divisés

 13   sur ce point. Nous pensons que cette fois-ci, nous pouvons faire droit à

 14   votre requête. Mais faites attention quand même et ne recommencez pas trop

 15   souvent.

 16   Mme GOPALAN : [interprétation] Je vous remercie.

 17   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 18   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 20   M. LE JUGE PARKER : [aucune interprétation]

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai

 22   la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 23   LE TÉMOIN : JAN KICKERT [Assermenté]

 24   [Le témoin répond par l'interprète]

 25   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie. Vous pouvez vous

 26   asseoir.

 27   Mme Gopalan va vous poser des questions.

 28   Interrogatoire principal par Mme Gopalan : 

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  1   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Kickert. Pourriez-vous, s'il vous

  2   plaît, nous donner votre nom pour le compte rendu ?

  3   R.  Je m'appelle Jan Kickert.

  4   Q.  Quelle est votre nationalité ?

  5   R.  Je suis Autrichien.

  6   Q.  Quel est votre métier ?

  7   R.  Je suis diplomate.

  8   Q.  Sachez que comme nous parlons tous deux la même langue et qu'il doit y

  9   avoir sténotypie et interprétation de nos débats, veuillez, s'il vous

 10   plaît, ménager une pause entre les questions et les réponses afin que la

 11   sténotypie et l'interprétation soient possible.

 12   Où êtes-vous en poste à l'heure actuelle ?

 13   R.  Je suis à Vienne au ministère des affaires étrangères.

 14   Q.  En juin 1999, avez-vous donné une déclaration au bureau du Procureur de

 15   ce Tribunal ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Avez-vous eu l'occasion depuis lors de relire cette déclaration ?

 18   R.  Oui, je l'ai relue avant de venir ici.

 19   Q.  Les informations qui sont contenues dans cette déclaration sont-elles,

 20   d'après vous, fiables et véridiques à votre connaissance en tout cas ?

 21   R.  Oui.

 22   Mme GOPALAN : [interprétation] Il s'agit de la pièce 5240 de la liste 65

 23   ter, et nous demandons l'admission de ce document au dossier.

 24   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Ce document sera admis.

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il recevra la cote P00478.

 26   Mme GOPALAN : [interprétation]

 27   Q.  Monsieur Kickert, avez-vous déjà témoigné en mars 2007 devant ce

 28   Tribunal dans l'affaire Milutinovic et consorts ?

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Avez-vous depuis lors revu et étudié votre déposition dans le cadre de

  3   cette affaire ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Vous nous avez dit que vous aimeriez apporter certaines corrections à

  6   votre témoignage ?

  7   R.  Oui, j'ai deux corrections très mineures à apporter à propos de noms.

  8   Je me suis rendu compte que sur une page --

  9   Q.  Je vous interromps. Nous allons procéder par ordre.

 10   Mme GOPALAN : [interprétation] Pourrions-nous, s'il vous plaît, avoir à

 11   l'écran la pièce 5214. Pouvons-nous passer à la page 5.

 12   Q.  Voyez-vous la page à l'écran ?

 13   R.  Oui, c'est en fait la page qui m'intéresse. Emyr Jones-Perry, il s'agit

 14   d'un nom composé et puis, il y aussi M. Fischer; ce nom là est aussi

 15   erroné. Il s'agit à la ligne 9 de M. Ischinger.

 16   Q.  Donc il s'agit des noms qui sont mentionnés à la ligne 9, n'est-ce pas,

 17   de cette page ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Vous voulez aussi apporter une autre correction à la page 64 de ce

 20   document ?

 21   Mme GOPALAN : [aucune interprétation]

 22   Q.  Pouvez-vous nous dire quelle est la correction qui vous intéresse ?

 23   R.  C'est un problème de nom. Il s'agit de Bardhyl Mahmuti à la ligne 19;

 24   Bardhyl et je vous l'épelle : B-a-r-d-h-y-l Mahmuti.

 25   Q.  Merci, je vous remercie. Une fois ces corrections apportées, pourriez-

 26   vous nous dire si on vous reposait les mêmes questions que les questions

 27   que l'on vous a posées dans l'affaire Milutinovic, vous répondriez de la

 28   même façon ?

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  1   R.  Oui.

  2   Mme GOPALAN : [interprétation] J'aimerais, s'il vous plaît, vous demander

  3   l'autorisation de verser le compte rendu de la déposition de ce témoin au

  4   dossier.

  5   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, ce compte rendu sera admis au

  6   dossier.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il recevra la cote P479.

  8   Mme GOPALAN : [interprétation] Au cours de la déposition de ce témoin, je

  9   vais présenter un certain nombre de documents. J'aimerais vous donner des

 10   exemplaires papier de ces documents. J'aimerais les donner surtout au

 11   témoin pour que ça soit plus simple lorsque nous nous référons à ces

 12   documents. Ce sont les documents qui sont en allemand, qui est sa langue

 13   natale, et je pense que cela l'aiderait pour répondre plus clairement

 14   lorsque je lui poserai des questions.

 15   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien. Allez-y. J'imagine que les

 16   documents seront aussi à l'écran afin que la Défense et l'accusé puissent

 17   les voir ?

 18   Mme GOPALAN : [interprétation] Tout à fait.

 19   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.

 20   Mme GOPALAN : [interprétation] Je remercie l'Huissier de son aide.

 21   Q.  J'aimerais savoir si vous voulez aussi avoir un exemplaire de votre

 22   déclaration, Monsieur Kickert ?

 23   R.  Non.

 24   Q.  Merci.

 25   Mme GOPALAN : [interprétation] J'aimerais maintenant lire le résumé de la

 26   déposition de ce témoin.

 27   Le témoin était diplomate pour le gouvernement autrichien et était deuxième

 28   secrétaire de l'ambassade autrichienne à Belgrade. En mars 1998, le témoin

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  1   faisait partie d'un corps diplomatique qui était envoyé au Kosovo par le

  2   ministère des Affaires étrangères. Le témoin a fait plusieurs autres

  3   voyages au Kosovo en 1998. Il décrit l'emploi de force excessive et

  4   indiscriminée par les forces serbes au cours de l'offensive de l'été 1998.

  5   A la fin juillet, début août 1998, une tendance a vu le jour dans le cadre

  6   des missions sur le terrain qu'a accomplies le témoin. En effet, il a passé

  7   par des villages en allant sur le terrain, des villages qui étaient

  8   intacts, et quand il est rentré exactement par la même route un peu plus

  9   tard, il s'est rendu compte que ces villages avaient été détruits ou

 10   totalement incendiés. Il a conclu que cette destruction et ces incendies

 11   avaient été le fait de la police, puisque c'étaient les seules forces qu'il

 12   voyait dans la zone. Il a aussi vu un grand nombre de personnes qui avaient

 13   été déplacées en interne sur le territoire. Il a observé aussi un grand

 14   nombre de destructions de villages d'Albanais du Kosovo, et il s'est rendu

 15   compte que la plupart de ces villages n'étaient plus habités.

 16   Voici la fin de cette synthèse.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis désolé. Une correction. Il y a eu un

 18   voyage en juin 1999 [comme interprété] qui a été fait vers le Kosovo et qui

 19   avait été organisé par le ministère des Affaires étrangères. C'était donc

 20   en juin, puisqu'en mars il y avait un autre voyage qui avait été organisé,

 21   mais je n'y ai pas participé.

 22   Mme GOPALAN : [interprétation] Je vous remercie.

 23   Q.  Monsieur Kickert, en tant que diplomate, avez-vous été déployé dans

 24   l'ex-Yougoslavie ?

 25   R.  Oui, j'étais diplomate, deuxième secrétaire, comme je l'ai dit, à

 26   Belgrade, et j'étais donc à l'ambassade autrichienne.

 27   Q.  Et c'était quand ?

 28   R.  Novembre 1997.

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  1   Q.  Qui était le chef de la mission à l'ambassade ?

  2   R.  C'était Wolfgang Petritsch.

  3   Q.  Lorsque vous étiez à l'ambassade, vous êtes rendu souvent au Kosovo ?

  4   R.  Oui, en janvier 1999 [comme interprété] j'ai commencé à faire des

  5   voyages au Kosovo.

  6   Q.  Monsieur Kickert, dans votre déclaration, à la page 2, paragraphe 4,

  7   vous faites allusion à une excursion à Pec et Decani dans l'été 1998.

  8   Mme GOPALAN : [interprétation] J'aimerais, s'il vous plaît, avoir à l'écran

  9   la pièce 2666 de la liste 65 ter.

 10   Q.  Reconnaissez-vous ce document ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Ce document, fait-il référence à cette excursion que vous auriez faite

 13   ou ce voyage que vous auriez fait à Pec et Decani en l'été 1998 ?

 14   R.  Oui, c'est le rapport sur le voyage auquel j'ai participé.

 15   Q.  Qui a préparé ce rapport ?

 16   R.  C'est moi.

 17   Q.  J'aimerais que nous passions à la page 2, s'il vous plaît, de ce

 18   document. Dans le paragraphe sur "Decani", vous dites, et je cite :

 19   "Dégâts considérables, mais en aucun cas aussi draconiens que…" et cetera,

 20   et cetera.

 21   Et ensuite vous dites la ville semblait morte. Alors, pouvez-vous nous

 22   expliquer un peu ce que vous avez voulu dire lorsque vous avez écrit cela ?

 23   R.  En allemand, j'ai dit "ausgestorben," ce qui signifie qu'il n'y avait

 24   plus de personnes. Cela avait l'air mort, parce qu'il n'y avait plus de

 25   présence humaine.

 26   Q.  Bien. Vous dites aussi que les gens que vous avez vus, les gens qui

 27   étaient dans la grande place principale, étaient là comme s'ils étaient "en

 28   vitrine", en fait. Qu'est-ce que cela signifie ?

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  1   R.  Je pense qu'ils étaient là parce qu'il y avait été invité par le

  2   ministère des Affaires étrangères. Ils étaient là pour nous expliquer leur

  3   version des faits et pour montrer aussi que la situation était contrôlée.

  4   J'avais l'impression, en tout cas, que ces gens étaient en représentation

  5   plutôt qu'autre chose. Ils étaient dans le café qui se trouve à Decani, au

  6   carrefour, en direction des monastères. J'avais vraiment l'impression qu'il

  7   y avait uniquement quelques personnes, mis à part la police, et ils étaient

  8   là en représentation. Ils avaient été mis là uniquement pour éviter que la

  9   ville soit totalement vide.

 10   Q.  Je vous remercie. Ensuite, vous parlez du village de Prilep, c'est au

 11   paragraphe suivant. Vous dites "destruction tout aussi étendue à Prilep."

 12   Pourriez-vous nous décrire le type de destruction ?

 13   R.  Comme je l'écris à Decani, j'ai bien décrit qu'on voyait des points

 14   d'impact de balles. On voyait aussi surtout des destructions qui avaient eu

 15   lieu par le biais d'incendie.

 16   Q.  Qu'en est-il des habitants à Prilep, y avez-vous vu qui que ce soit ?

 17   R.  Je ne me souviens pas avoir vu qui que ce soit. Je n'ai pas vu âme qui

 18   vive.

 19   Q.  En bas de la page de ce document, vous faites référence à un briefing

 20   qui avait été organisé par le ministère de l'Intérieur et le ministère des

 21   Affaires étrangères de l'ex-Yougoslavie. Est-ce que vous vous souvenez quel

 22   représentant du ministère de l'Intérieur a participé à cette réunion ?

 23   R.  Non, je ne m'en souviens pas.

 24   Q.  Maintenant, nous allons aborder un autre document.

 25   Mme GOPALAN : [interprétation] Avant de passer à cet autre document,

 26   j'aimerais demander le versement au dossier de cette pièce 02666.

 27   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Le document sera admis.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il recevra la cote P00480.

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  1   Mme GOPALAN : [interprétation] Pourrions-nous maintenant avoir à l'écran la

  2   pièce 2665.

  3   Q.  Monsieur Kickert, il s'agit d'un nouveau rapport qui nous vient de

  4   l'ambassade d'Autriche, en date du 1er juillet 1998. Il s'agit de la pièce

  5   2665. Est-ce que vous vous souvenez de ce document ?

  6   R.  Oui, tout à fait. C'est moi qui l'ai rédigé.

  7   Q.  Dans la case "résumé" qui se trouve au milieu de la page, au premier

  8   point il est écrit, et je donne lecture :

  9    "Confirmation officielle pour la première fois de la participation

 10   d'unités de l'armée à des opérations terrestres."

 11   Est-ce que vous saviez précédemment que l'armée participait à ce type

 12   d'opération ?

 13   R.  Non, précédemment, on avait toujours nié que l'armée était impliquée,

 14   on disait qu'il s'agissait uniquement d'une intervention de police. C'est

 15   la première fois que M. Veljko Odalovic - là, je cite Reuters - c'est la

 16   première fois que Reuters avait appris de la bouche de M. Veljko Odalovic

 17   que l'armée yougoslave avait participé à cette action sur le terrain.

 18    Mme GOPALAN : [interprétation] Je vous remercie. J'aimerais verser cette

 19   pièce au dossier.

 20   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui.

 21   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il recevra la cote P00481.

 22   Mme GOPALAN : [interprétation]

 23   Q.  Vous parlez aussi dans votre déclaration d'un voyage fait par

 24   l'ambassadeur Petritsch et vous-même. C'était à l'occasion de

 25   l'inauguration de l'arrivée de la KDOM. Cela se trouve à la page 3 de votre

 26   déclaration. Pouvez-vous nous dire exactement ce qu'était la KDOM ?

 27   R.  KDOM, c'est la Mission des observateurs diplomatiques au Kosovo. Alors

 28   l'idée, en fait, c'était que les représentants de la communauté

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  1   internationale avaient du mal à obtenir des informations fiables puisqu'on

  2   entendait des rumeurs et deux versions. Chaque partie nous racontait sa

  3   propre version, chacun racontait sa propre version, et nous voulions avoir

  4   un point de vue objectif sur ce qui se passait. C'est pour ça que nous

  5   avons mis en place ce système d'observateurs internationaux au Kosovo. Il

  6   s'agissait de la communauté européenne à l'époque, n'est-ce pas, il y avait

  7   déjà la MOCE. C'était la Mission de surveillance de la communauté

  8   européenne, et nous voulions déployer notre propre équipe mobile à partir

  9   de la fin mai; les Américains aussi voulaient être là, donc on parlait avec

 10   Belgrade pour permettre à ces observateurs officiellement d'être déployés

 11   sur le terrain.

 12   Q.  Très bien. Vous avez parlé des ambassadeurs du Groupe de contact. De

 13   quoi s'agit-il ?

 14   R.  Le Groupe de contact sont le contact -- il y avait six grandes

 15   puissantes : les Etats-Unis, la Russie, le Royaume-Uni, la France, l'Italie

 16   et l'Allemagne, donc quatre puissances européennes, les Russes et les

 17   Américains.

 18   Mme GOPALAN : [interprétation] Très bien. Je vous remercie. Pouvons-nous

 19   maintenant avoir à l'écran la pièce 2664, s'il vous plaît.

 20   Q.  Il s'agit d'un autre document provenant de l'ambassade autrichienne en

 21   date du 6 juillet 1998. Le reconnaissez-vous ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Pouvez-vous nous dire quel est le lien entre ce document et ce fameux

 24   voyage de la KDOM ?

 25   R.  A partir du 1er juillet 1998, l'Autriche présidait l'Union européenne,

 26   et c'est pour ceci que nous avons été cooptés dans le Groupe de contact,

 27   puis nous étions président de l'Europe pour six mois donc, et la mission de

 28   la présidence européenne est d'informer aussi les autres membres de l'Union

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  1   européenne de ce qui se passe. Donc, ici j'ai écrit un rapport directement

  2   en anglais pour que mes collègues à Vienne puissent transformer ceci en ce

  3   qu'on appelle un Coreu, c'est-à-dire un courrier européen qui permet

  4   d'informer tous nos partenaires européens de ce qui s'était passé.

  5   Q.  Très bien.

  6   Mme GOPALAN : [interprétation] J'aimerais, s'il vous plaît, que la pièce

  7   2664 soit versée au dossier.

  8   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Elle est admise.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Elle recevra la cote P00482.

 10   Mme GOPALAN : [interprétation]

 11   Q.  Dans votre déclaration, vous parlez de vos voyages à Malisevo, été

 12   1998. Je voulais parler du voyage que vous avez effectué avec la Troïka de

 13   l'Union européenne. Cela est décrit dans votre déclaration à la page 3.

 14   Pourriez-vous nous parler de ce voyage.

 15   R.  Les Autrichiens exerçaient la présidence de l'Union européenne. A

 16   l'époque vous aviez la Troïka, c'est-à-dire elle était composée de

 17   l'ancienne, de la future et de l'actuelle présidence. C'est la Troïka. Il

 18   s'agissait d'un voyage du secrétaire général du ministre des Affaires

 19   étrangères, Rohan et de deux directeurs politiques de l'Allemagne et du

 20   Royaume-Uni.

 21   Q.  Qu'est-ce que vous avez vu lors de ce voyage ?

 22   R.  La première partie de la visite au Kosovo était à Pristina, il

 23   s'agissait d'entretiens avec des politiques. Ensuite, il a été  décidé de

 24   se rendre également dans le pays à l'intérieur du Kosovo. Je me souviens

 25   que nous avons été arrêtés à un poste de contrôle de la police, après quoi

 26   on nous a laissés passer. Ensuite, nous sommes entrés dans le pays et

 27   revenus le jour même.

 28   Q.  Est-ce que vous avez vu quelque chose lorsque vous vous êtes rendus à

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  1   l'intérieur du pays ?

  2   R.  Ce qui m'a le plus frappé lorsque nous nous sommes rendus à l'intérieur

  3   du pays, c'est que l'on voyait les champs qui n'avaient pas encore été

  4   moissonnés, et au retour ces champs brûlaient.

  5   Q.  Savez-vous qui était responsable des incendies ?

  6   R.  Je n'ai pas vu d'incendiaire, mais je n'ai pas vu de personne autour,

  7   si ce n'est des policiers.

  8   Q.  Est-ce que vous pourriez préciser la zone à l'intérieur du pays ?

  9   R.  A ce moment-là, c'était à l'époque où nous avions établi des contacts

 10   avec l'UCK, c'était à Malisevo.

 11   Q.  Est-ce que Malisevo avait une importance particulière comme région ?

 12   R.  Il y avait une localisation stratégique à une croisée de chemins.

 13   C'était une ville qui était un point névralgique, nord, sud, est, ouest, et

 14   à ce moment-là c'était ce que l'UCK avait choisi comme capitale.

 15   Q.  Lors de l'été, puisque vous avez été plusieurs fois à Malisevo, est-ce

 16   que vous avez constaté des changements survenus dans la ville ou dans ses

 17   alentours, dans la région ?

 18   R.  Au départ lorsque je me suis rendu à Malisevo, elle était sous le

 19   contrôle de l'UCK. Lorsque l'UCK a abandonné Malisevo, elle s'est vidée, il

 20   n'y avait quasiment plus d'habitants. Elle a ensuite été reprise par les

 21   forces de sécurité serbes, par la police.

 22   Q.  Merci. En plus de vos propres constatations sur Malisevo lorsque vous

 23   vous êtes rendus sur place, avez-vous obtenu d'autres informations d'autres

 24   sources au sujet de la situation à Malisevo lors de cette période ?

 25   R.  Oui. A cette époque-là nous avions déjà créé un groupe établi

 26   d'observateurs de l'Union européenne, MOCE, et nous recevions des rapports

 27   quotidiens, car en tant que diplomate, ma mission première n'était pas les

 28   visites de terrains, c'était aux observateurs de les effectuer. Donc, nous

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  1   recevions des rapports circonstanciés de leurs observations.

  2   Q.  Avez-vous reçu des informations spécifiques sur les auteurs d'actions à

  3   Malisevo ou dans la région ?

  4   R.  Oui, nous avons reçu un rapport particulier sur Malisevo dans lequel

  5   nos observateurs ont fait état de destruction en cours à Malisevo. Il y a

  6   notamment deux phrases où il était question de policiers qui pillaient les

  7   magasins de Malisevo; et d'autre part, où ils ont observé que des policiers

  8   en uniforme incendiaient une maison.

  9   Q.  Approximativement à quelle période ?

 10   R.  Sans doute fin juillet ou début août 1998.

 11   Q.  Merci. A présent, je voudrais passer à un autre sujet.

 12   Dans votre déclaration, vous parlez de plusieurs voyages effectués à

 13   Orahovac lors de l'été 1998. Pourriez-vous nous expliquer pourquoi vous

 14   avez effectué ces voyages à Orahovac ?

 15   R.  Orahovac est une ville à la composition ethnique mixte, et certains

 16   combats y ont eu lieu au mois de juillet. Le but de ma visite était de

 17   chercher à mettre en place un mécanisme permettant aux déplacés internes

 18   albanais du Kosovo de rentrer chez eux.

 19   Q.  Merci.

 20   Mme GOPALAN : [interprétation] Je voudrais à présent demander l'affichage à

 21   l'écran du document 65 ter 2655.

 22   Q.  Monsieur Kickert, je vous invite à examiner la première page. Il s'agit

 23   d'une télécopie du 4 août. Reconnaissez-vous ce document ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Pourriez-vous nous dire pourquoi ce document a été rédigé ?

 26   R.  C'est un fax adressé à mes collègues des ambassades du Groupe de

 27   contact, Etats-Unis, France, Allemagne, Italie, Grande-Bretagne, et il

 28   s'agissait d'une série de points-clés relatifs à une démarche, si vous

Page 2581

  1   voulez, auprès des autorités de la République de Yougoslavie.

  2   Q.  A la page 2 du document sous le titre "préoccupations importantes" à la

  3   deuxième puce vous dites la chose suivante :

  4   "Rapports relatifs au pillage, à l'incendie de maisons, et à l'incendie de

  5   champs non moissonnés par des membres des forces de sécurité de la

  6   Yougoslavie."

  7   Quelle était la source de cette information, si vous vous en souvenez ?

  8   R.  Oui, les rapports de la MOCE.

  9   Q.  En dessous vous parlez du nombre de plus en plus important de déplacés

 10   internes et de la détérioration de la situation. Est-ce que vous, si vous

 11   en souvenez, pourriez nous donner une idée approximative du nombre de

 12   déplacés internes ?

 13   R.  Non. Je ne sais pas -- je pense que mon rapport était basé sur les

 14   rapports du CICR, du HCR et des grandes organisations non gouvernementales

 15   qui travaillaient dans la région et avec lesquelles j'étais en contact,

 16   Médecins sans frontières, Oxfam.

 17   Q.  Merci. Au milieu de la page sous le tire :

 18   "C'est pourquoi nous invitons le gouvernement de la Yougoslavie à…"

 19   Au deuxième point vous indiquez :

 20   "Faire en sorte que les forces de la Yougoslavie cessent d'endommager les

 21   maisons et les biens; empêcher le pillage…"

 22   Est-ce que vous pourriez expliquer le type de dégâts dont il est question ?

 23   R.  Ce point se réfère au deuxième point sous "préoccupations importantes".

 24   Il s'agit simplement de leur dire : Etant donné que nous avons des

 25   rapports, nous vous demandons de mettre fin à ces actions.

 26   Q.  Merci, Monsieur Kickert.

 27   Mme GOPALAN : [interprétation] Je voudrais demander le versement du

 28   document 2655.

Page 2582

  1   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Le document est admis.

  2   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il portera la cote P00483.

  3   Mme GOPALAN : [interprétation]

  4   Q.  Monsieur Kickert, je voudrais à présent parler des voyages avec

  5   l'ambassadeur Parak, qui figurent au paragraphe 3, page 4, de votre

  6   déclaration. Selon votre déclaration, ces voyages ont eu lieu en septembre

  7   1998.

  8   Mme GOPALAN : [interprétation] Est-ce que l'on peut afficher à l'écran le

  9   document 65 ter 564, s'il vous plaît.

 10   Q.  Est-ce que vous reconnaissez ce document ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  C'est un rapport du 11 septembre 1998. Est-ce que vous avez rédigé ce

 13   document ?

 14   R.  Oui, j'en suis l'auteur.

 15   Q.  Je voulais vous poser quelques questions sur ce document, mais d'abord,

 16   quel est son lien avec votre voyage avec l'ambassadeur Parak en septembre

 17   1998 ?

 18   R.  M. Parak était le chef de la MOCE basé à Sarajevo, c'était le siège de

 19   la MOCE pour la totalité de l'ex-Yougoslavie, il se rendait au Kosovo, et

 20   je l'ai accompagné lors d'un voyage.

 21   Q.  Si on examine ce document, au premier point il est dit que :

 22   "Les villages le long de la grand-route Pristina-Pec… à l'exception

 23   des villages serbes, ne sont plus habités."

 24   Comment saviez-vous que ces villages n'étaient pas albanais ?

 25   R.  On pouvait juger en fonction de la manière dont les maisons étaient

 26   configurées, s'il y avait une mosquée ou une église orthodoxe, en

 27   l'occurrence il s'agissait d'un village serbe.

 28   Q.  Est-ce que vous avez vu quelqu'un dans ce village ?

Page 2583

  1   R.  Oui, je me souviens que dans ce village il y avait un civil qui se

  2   promenait avec une Kalashnikov.

  3   Q.  Si l'on regarde un petit peu plus bas, le paragraphe qui commence comme

  4   suit :

  5   "Junik avait été très peu endommagé… mais il n'y a plus de traces des 1 000

  6   personnes qui sont retournées à la maison depuis le côté serbe…"

  7   R.  Non, c'est une traduction erronée. Ce que j'ai écrit en anglais c'est

  8   qu'il n'y avait aucune trace des 1 000 personnes dont les Serbes

  9   prétendaient avoir organisé le retour. Les Serbes disaient que 1 000

 10   personnes étaient rentrées chez elles, et il n'y avait pas suffisamment de

 11   personnes pour corroborer cette affirmation.

 12   Q.  Est-ce que vous pourriez un petit peu expliquer dans quel contexte

 13   cette affirmation a été faite ?

 14   R.  Si l'on s'attache à toute la situation en été, depuis la fin juillet il

 15   y avait clairement une offensive de la part des forces de sécurité serbes

 16   contre l'UCK, et en raison de ces combats énormément de personnes ont été

 17   déplacées; ce qui a préoccupé la communauté internationale, et le but était

 18   : Mettre en place les conditions nécessaires pour assurer leur retour. Donc

 19   lorsqu'il y avait des informations selon lesquelles il y avait des

 20   concentrations importantes de personnes déplacées, le HCR cherchait à

 21   entrer en contact avec elles et nous, surtout par nos observateurs, nous

 22   voulions savoir si les informations étaient fiables ou non.

 23   Mme GOPALAN : [interprétation] Est-ce que l'on peut se pencher à présent

 24   sur la page 2 de ce document.

 25   Q.  Monsieur Kickert, vous avez parlé des déplacés, au-dessus de la page 2

 26   de ce document il est question de 25 000 déplacés. Est-ce que vous savez

 27   quelle est la source de ce chiffre ?

 28   R.  Nous ne nous basions pas sur les informations serbes ou albanaises.

Page 2584

  1   Sans doute s'agit-il d'un chiffre avancé par le HCR.

  2   Q.  Au point en dessous vous parlez du transport forcé de déplacés internes

  3   à Pec. Est-ce que vous pourriez expliquer ce que vous entendez par

  4   "transport forcé."

  5   R.  Oui, le MOCE a indiqué que des personnes étaient emmenées de leurs

  6   zones de résidence vers Pec; Pec était sous le contrôle des forces de

  7   sécurité serbes, et ça ne peut être que les autorités serbes qui les y

  8   avaient emmenés à Pec.

  9   Q.  Enfin, dans la partie "résumé" de ce document, le premier point dit :

 10   "Le nombre de personnes déplacées n'a pas encore diminué" et ces personnes

 11   "sont déplacées localement par les forces de sécurité."

 12   Est-ce que vous pouvez expliquer ce que cela signifie ?

 13   R.  Ça veut dire que nous n'avons pas remarqué de diminution du nombre de

 14   déplacés, simplement leur déplacement dans l'espoir d'éviter les combats,

 15   c'est une observation que j'ai faite sur la base des rapports dont nous

 16   disposions.

 17   Q.  Merci.

 18   Mme GOPALAN : [interprétation] Est-ce que je peux demander le versement du

 19   00564 au dossier.

 20   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Le document est admis.

 21   M. LE GREFFIER : [interprétation] La cote sera P00484.

 22   Mme GOPALAN : [interprétation] Est-ce que je peux demander l'affichage à

 23   l'écran du document 65 ter 557.

 24   Q.  Monsieur Kickert, dans votre déclaration vous parlez d'une visite que

 25   vous avez effectuée dans le sud de Komorane au cours de laquelle vous avez

 26   pu observer la présence de 3 000 déplacés.

 27   R.  Au sud de Komorane.

 28   Q.  Komorane, oui.

Page 2585

  1   Le document à l'écran est le document 557, quel est son lien avec la

  2   visite que vous avez effectuée ?

  3   R.  Je me souviens qu'avec le Groupe de contact des ambassadeurs nous nous

  4   sommes rendus à Kisna Reka, à un camp de déplacés dans les collines. J'ai

  5   pu voir un camp abritant 1 000 personnes.

  6   Q.  Pour préciser les choses, qui a rédigé ce rapport, avant de poursuivre

  7   ?

  8   R.  Il y a trois auteurs, les chefs de mission, M. Petritsch; moi-même; et

  9   mon collègue M. Senfter à Belgrade. C'est un rapport qui a été écrit par

 10   nous trois. J'ai écrit la partie sur la visite du camp de déplacés.

 11   Q.  C'est à la page 2; est-ce que c'est exact, page 2, paragraphe 2 ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Vous avez visité le camp de Kisna Reka et vous avez parlé des personnes

 14   déplacées que vous avez vues, c'est le deuxième paragraphe sous le titre

 15   "camps de déplacés et rapatriement éventuel". Deux paragraphes en dessous,

 16   vous dites :

 17   "En plus de la destruction de leurs villages, la raison principale

 18   pour laquelle les personnes déplacées ne rentrent pas chez elles est

 19   l'absence de sécurité dans les villages."

 20   Pourriez-vous expliciter cette phrase.

 21   R.  C'est ce que nous ont dit les personnes déplacées, c'est qu'elles ne se

 22   sentaient pas en sécurité pour effectuer leur retour.

 23   Q.  Ont-elles expliqué pourquoi ?

 24   R.  Oui, ça continue dans le même paragraphe, elles nous ont dit que

 25   lorsque certains villageois rentraient chez eux, on leur tirait dessus,

 26   trois personnes - c'est dans le rapport - ont trouvé la mort.

 27   Q.  Ont-elles expliqué qui leur tirait dessus ?

 28   R.  Elles nous ont dit qu'il s'agissait des forces de sécurité serbes, bien

Page 2586

  1   entendu.

  2   Q.  Je voudrais examiner le point 3 du document intitulé "massacre prétendu

  3   par les forces de sécurité serbes." A la page 3 de la version anglaise,

  4   deuxième paragraphe du point 3, vous parlez d'Obrinje et d'un incident.

  5   Est-ce que vous pourriez nous expliquer cet incident à Gornje Obrinje ?

  6   R.  Oui. J'ai vu une photographie dans la presse. C'était un fossé à Gornje

  7   Obrinje, une famille de déplacés qui a été tuée.

  8   Q.  Donc cette information était basée sur un rapport ?

  9   R.  Un rapport de la MOCE, comme on le dit entre parenthèses, et sur la

 10   base de la presse.

 11   Q.  Qu'en est-il de l'incident dont il est question plus haut dans le

 12   village de Golubovac ?

 13   R.  Là, l'ambassadeur et nous, nous nous sommes rendus sur place.

 14   Q.  Qu'avez-vous pu observer là-bas ?

 15   R.  L'ambassadeur Petritsch, qui a signé, s'est rendu là en ma compagnie,

 16   et nous avons pu rencontrer un homme qui déclarait avoir survécu un

 17   massacre d'un groupe de jeunes hommes.

 18   Q.  Je voudrais à présent passer à un autre sujet, mais je voudrais passer

 19   à la première page du 557, le même document. A l'avant-dernier point vous

 20   parlez de coordinateurs de sécurité dans 70 villages. Qu'est-ce que vous

 21   entendez par "coordinateurs de sécurité" ?

 22   R.  C'était un projet de Belgrade visant à mettre en place ce qu'ils

 23   appelaient des coordinateurs de sécurité ou des policiers assistants

 24   d'origine ethnique albanaise qui étaient déployés dans les villages à

 25   l'ouest du Kosovo.

 26   Q.  Est-ce que c'est la même initiative dont vous parlez dans votre

 27   déclaration au cours de laquelle David Slinn s'est rendu à Djakovica en

 28   1998 pour vérifier les allégations des Serbes au sujet de la force

Page 2587

  1   policière albanaise ? C'est à la page 3 du dernier paragraphe.

  2   Je n'ai pas votre déclaration, mais je pense que c'est une visite que

  3   David Slinn a fait à Djakovica en août 1999 pour se renseigner au sujet des

  4   forces de police albanaises. C'est la même question, et est-ce que l'on

  5   parle des coordinateurs de sécurité dans ce document ?

  6   R.  Oui, c'est la même chose, il y avait eu deux visites, l'une que j'ai

  7   faite avec M. Slinn, et lors de la deuxième je n'ai pas pu l'accompagner

  8   parce que je m'occupais de l'accord sur l'éducation qui était un autre

  9   chantier au Kosovo. Mais il m'a fait état de ses observations lors de son

 10   deuxième voyage, début septembre.

 11   Mme GOPALAN : [interprétation] Je demande le versement du document 65 ter

 12   557.

 13   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Le document est admis.

 14   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira du document P00485.

 15   Mme GOPALAN : [interprétation] Je demande l'affichage à l'écran du 65 ter

 16   559, s'il vous plaît.

 17   Q.  Monsieur Kickert, c'est un document du 7 septembre 1998. Reconnaissez-

 18   vous ce document ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Il est intitulé ou il porte sur le plan de police locale du Kosovo des

 21   autorités de Belgrade. Est-ce que vous pouvez expliquer le contexte qui a

 22   précédé à l'élaboration de ce document ?

 23   R.  Nous nous sommes rendus dans la région pour vérifier nous-mêmes si

 24   cette affirmation selon laquelle l'on allait créer une force de police

 25   locale était fondée ou non.

 26   Q.  Quelles ont été vos observations ?

 27   R.  Il y avait certainement, indubitablement, des tentatives, mais nous

 28   n'avons pas pu nous en rendre compte par nous-mêmes lors de la première

Page 2588

  1   visite; mais la deuxième fois M. Slinn a pu voir des hommes en uniforme

  2   sans armes de poing et a reçu une liste de villages et de personnes

  3   concernées par cette force de police locale. Mais lorsqu'il s'est rendu

  4   dans les villages, après là, depuis Djakovica, il n'a pas vu ces personnes

  5   dans la région.

  6   Mme GOPALAN : [interprétation] Je demande le versement du document 00559.

  7   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Le document est admis.

  8   Mme GOPALAN : [interprétation] Je voudrais -- excusez-moi.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Sa cote sera P00486.

 10   Mme GOPALAN : [interprétation] Je voudrais demander l'affichage à l'écran

 11   du document 65 ter 00558.

 12   Q.  Monsieur Kickert, nous avons là un rapport qui porte la date du 20

 13   septembre 1998, il porte sur la police locale kosovare. Ce document a-t-il

 14   un lien avec le document précédent que nous venons d'examiner ?

 15   R.  Oui, c'est la visite de suivi avec M. Slinn. Comme je l'ai déjà dit, il

 16   est parti faire cette visite tout seul.

 17   Q.  Voyons maintenant le paragraphe intitulé "verdict" vers la fin de la

 18   page.

 19   R.  Il faudrait remplacer cela par "Appréciation."

 20   Q.  Appréciation, très bien. Prenons la phrase qui se lit comme suit :

 21   "La plupart des villages étaient inhabités. Seul un petit nombre de

 22   personnes étaient revenues à Junik."

 23   Sur quoi se fonde cet élément d'information, Monsieur Kickert ?

 24   R.  Il s'agit de M. Slinn.

 25   Q.  Vous parlez vers la fin du document également d'une opération de

 26   dissimulation ?

 27   R.  Il me semble qu'il y a là une erreur de traduction. En fait, en

 28   Allemand j'ai écrit "action d'alibi." Donc nous avions la sensation qu'il

Page 2589

  1   ne s'agissait pas vraiment d'une tentative véritable cherchant à créer des

  2   conditions de sécurité pour la population locale.

  3   Mme GOPALAN : [interprétation] Je voudrais demander le versement de la

  4   pièce.

  5   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La pièce sera versée au dossier.

  6   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P00487.

  7   Mme GOPALAN : [interprétation] Pourrions-nous afficher la pièce 00556 à

  8   présent, s'il vous plaît.

  9   Q.  Reconnaissez-vous ce document, Monsieur Kickert ?

 10   R.  Oui, je le reconnais.

 11   Q.  En êtes-vous l'auteur ?

 12   R.  Oui, j'en suis l'auteur.

 13   Q.  Je souhaiterais vous poser plusieurs questions afin de préciser

 14   certains extraits de ce document. S'agissant des coordinateurs sur le plan

 15   de la sécurité ou la police locale, nous en avons parlé, prenons le

 16   paragraphe 5 de la première page, c'est vers la fin de la page. Nous avons

 17   une première entrée qui commence par "police" où il est dit :

 18   "Il semblerait que la partie serbe serait davantage favorable au

 19   modèle de 'coordinateur de sécurité', police locale…."

 20   R.  Mon appréciation consiste à penser à ce moment-là que les Serbes sont

 21   favorables à ce modèle-là à ce moment-là, qu'ils préfèrent celui-là. Il

 22   faut replacer cela dans le contexte de la présence internationale sur le

 23   terrain.

 24   Q.  Qu'entendez-vous par le contexte de la présence internationale sur le

 25   terrain ?

 26   R.  A l'époque, des négociations intenses avaient lieu avec Belgrade, en

 27   particulier entreprises par les Etats-Unis d'Amérique, afin de voir sur le

 28   plan politique mais aussi sur le plan de la sécurité comment trouver des

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  1   modèles permettant de prendre des dispositions pour stabiliser le Kosovo et

  2   pour mettre fin aux hostilités. Donc je suppose que les Américains ont fait

  3   une proposition, ils ont dû imaginer une forte présence internationale sur

  4   le terrain qui donnerait un sentiment de sécurité. Je suppose que Belgrade

  5   a cherché à dire que ce modèle de police locale, de coordinateur de

  6   sécurité était suffisant pour rassurer la population kosovare et inspirer

  7   un sentiment de sécurité.

  8   Q.  Je vous remercie, Monsieur Kickert. Prenons le paragraphe 2, s'il vous

  9   plaît, maintenant. Page première également. Il est question de IDP, une

 10   initiative de rapatriement. C'est l'initiative dont vous avez parlé

 11   aujourd'hui ?

 12   R.  Oui, c'est le projet de Kisna Reka. En fait, il y a eu deux projets qui

 13   ont vu le jour. Il y avait un projet qui concernait le retour de la

 14   population à Orahovac et le deuxième à Kisna Reka.

 15   Q.  Très bien.

 16   Mme GOPALAN : [interprétation] Je demande le versement de la pièce.

 17   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La pièce sera versée au dossier.

 18   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P00488.

 19   Mme GOPALAN : [interprétation]

 20   Q.  Je vais aborder maintenant mon dernier sujet. Monsieur Kickert, dans

 21   votre déclaration préalable, vous évoquez des exhumations à Gornje Obrinje.

 22   Mme GOPALAN : [interprétation] Pièce 65 ter 561, s'il vous plaît.

 23   Q.  Vers la fin de la page, sous "l'expert médecin légiste." La première

 24   entrée se réfère aux experts internationaux. Pourriez-vous nous replacer

 25   cela dans le contexte, comment convient-il de lire cette entrée ?

 26   R.  Cette question dans son ensemble, la question des experts

 27   internationaux, des médecins légistes, a à voir avec le fait que des deux

 28   côtés on alléguait l'existence de la perpétration de massacres. Alors la

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  1   communauté internationale répondait en disant : Nous ne pouvons pas

  2   accepter l'une ou l'autre version de l'histoire, donc nous allons faire

  3   appel à des experts internationaux pour qu'ils examinent la situation. Donc

  4   toute cette idée a été évoquée avec les autorités de Belgrade depuis le

  5   mois de juin. Et je me réfère ici au fait que M. Shattuck, qui nous

  6   briefait occasionnellement, se montrait optimiste en disant que les

  7   autorités de Belgrade éventuellement accepteraient la présence d'experts

  8   internationaux.

  9   Mme GOPALAN : [interprétation] Je demande le versement de la pièce.

 10   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La pièce sera reçue.

 11   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P00489.

 12   Mme GOPALAN : [interprétation] La 560, s'il vous plaît, à présent. Est-ce

 13   qu'on peut afficher cette pièce, pièce au titre de 65 ter.

 14   Q.  Avant d'examiner le document, le reconnaissez-vous, Monsieur Kickert ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Est-ce que vous l'avez rédigé ?

 17   R.  J'en suis l'auteur.

 18   Q.  Au premier paragraphe de ce document, vous vous référez à M. Sainovic,

 19   vous dites qu'il est considéré comme étant un proche collaborateur du

 20   président yougoslave Milosevic et qu'on estime que la coordination des

 21   forces de sécurité relève de sa responsabilité. Qu'est-ce qui vous permet

 22   de dire cela ?

 23   R.  Il était présent au Kosovo, et la source de cet élément d'information

 24   c'était les Américains.

 25   Q.  Page 2 de ce document, s'il vous plaît. La quatrième entrée à partir du

 26   bas où il est dit :

 27   "Ouverture eu égard à l'envoi des experts médecins légistes."

 28   Est-ce que cela a à voir avec ces experts internationaux dont vous venez de

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  1   parler s'agissant des exhumations ?

  2   R.  Oui, tout à fait, exactement, c'est la même chose.

  3   Q.  C'est le 7 octobre 1998, la date de ce document. Donc à ce  moment-là

  4   les experts internationaux étaient déjà arrivés au Kosovo pour mener à bien

  5   des exhumations ?

  6   R.  Non, pas encore, pas encore à ce moment-là. Au début du mois d'octobre,

  7   il y a eu un autre rapport. Il y a eu un appel de la part de M. Bugarcic

  8   qui était le conseiller en matière des affaires étrangères du président

  9   Milosevic. Il disait là qu'il serait prêt à recevoir une équipe d'experts

 10   finlandais qui avait été proposée par les Autrichiens.

 11   Q.  Est-ce que vous pourriez nous expliquer un petit peu quels ont été les

 12   résultats de l'arrivée de cette équipe finlandaise qui est venue exhumer un

 13   certain nombre de localités ?

 14   R.  En octobre, il y a eu un moment de flottement pour ce qui est du mandat

 15   de cette équipe, de cette mission finlandaise. Puis d'abord, Belgrade

 16   voulait qu'ils passent par le biais de l'Institut de médecine légale de

 17   Belgrade; et non pas par nous. Puis il y a eu un échange de correspondance

 18   entre le ministre des Affaires étrangères de la RFY, M. Jovanovic, et le

 19   ministre des Affaires étrangères finlandais, Mme Halonen; il y a une

 20   invitation qui a été adressée à titre officiel à l'adresse des experts

 21   finlandais pour qu'ils viennent et pour qu'ils se rendent sur place et

 22   qu'on évoque avec eux un certain nombre de sites qui devaient être exhumés.

 23   Q.  Quand est-ce que vous êtes parti du Kosovo ?

 24   R.  Pendant --

 25   Q.  Pendant vos différents déplacements, vos différentes missions, vous

 26   avez dit que vous vous êtes rendu plusieurs fois au Kosovo pendant l'été et

 27   la deuxième moitié de 1998. Quand est-ce que vous y êtes allé pour la

 28   dernière fois ?

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  1   R.  Pendant la présidence autrichienne de l'Union européenne, la deuxième

  2   moitié de 1998, j'ai passé pratiquement la moitié de mon temps au Kosovo et

  3   l'autre moitié à Belgrade. Au début de 1999, je me suis trouvé également au

  4   Kosovo. Puis en février il y a eu la conférence de Rambouillet. Entre les

  5   conférences de Rambouillet et de Paris, je me suis trouvé également au

  6   Kosovo à ce moment-là. Peu de temps après, il y a eu le début des

  7   bombardements de l'OTAN. Je suis parti dans la soirée du jour où les

  8   bombardements de l'OTAN ont commencé.

  9   Q.  Quelle a été l'issue, le résultat des exhumations qui ont été proposées

 10   à Gornje Obrinje ?

 11   R.  Pour autant que je le sache, il n'y a pas eu d'exhumation à Gornje

 12   Obrinje, pas d'exhumations de ces victimes-là, pour autant que je le sache

 13   pendant que j'étais là.

 14   Mme GOPALAN : [interprétation] Je demande le versement de la pièce 561.

 15   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La pièce sera versée.

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P00490, et il s'agit

 17   bien du document 560.

 18   Mme GOPALAN : [interprétation]

 19   Q.  A ce stade, je n'ai plus de question pour vous, Monsieur Kickert.

 20   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie.

 21   Maître Djordjevic, est-ce que vous souhaitez contre-interroger ?

 22   M. DJORDJEVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Juste un

 23   instant, s'il vous plaît.

 24   Contre-interrogatoire par M. Djordjevic : 

 25   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Kickert.

 26   R.  Bonjour.

 27   Q.  J'ai plusieurs questions pour vous. Vous avez dit que vous n'avez pas

 28   besoin de voir la version sur papier, il s'agit de la pièce P478 désormais

Page 2595

  1   versée au dossier. J'aurais un certain nombre de questions à vous poser au

  2   sujet de cette déclaration. Monsieur Kickert, avant d'aborder la

  3   déclaration elle-même, j'aimerais savoir quelque chose, à partir du moment

  4   où vous avez quitté l'ex-Yougoslavie - donc c'est la matinée avant le début

  5   des bombardements en 1999, le 24 mars - depuis ce moment-là, comment s'est

  6   déroulé votre parcours diplomatique, votre carrière dans la diplomatie ?

  7   R.  Nous étions donc à Vienne. M. Petritsch était toujours envoyé spécial

  8   de l'Union européenne qui avait la charge du Kosovo. A ce moment-là, il a

  9   été nommé au poste du haut représentant en Bosnie. Après les bombardements

 10   de l'OTAN, je suis revenu moi-même au Kosovo, tout d'abord à Belgrade et

 11   ensuite au Kosovo. J'ai inauguré le bureau autrichien au Kosovo; et j'étais

 12   le conseiller politique de la mission des Nations Unies au Kosovo, de M.

 13   Kouchner. Après, je suis parti au Canada en poste et cinq ans plus tard, je

 14   suis revenu à Vienne.

 15   Q.  Il me semble que vous avez été à un moment donné conseiller de M.

 16   Solana au Kosovo. Est-ce que cela est vrai ? Il me semble avoir lu cela

 17   quelque part. J'aimerais vérifier cette information.

 18   R.  Oui. En fait je remplaçais Fernando Gentilini, qui a été victime d'un

 19   accident de voiture, je pense que c'était en septembre 2004; je l'ai

 20   remplacé pendant trois mois à ce poste en tant que représentant personnel

 21   de Javier Solana au Kosovo.

 22   Q.  Quelles ont été vos attributions à ce moment-là ? J'aimerais savoir ce

 23   qui était du ressort de M. Gentilini, que vous remplaciez à ce moment-là ?

 24   R.  Pour l'essentiel, il fallait rendre compte à Bruxelles pour qu'ils

 25   aient des informations de première main. Donc j'étais en contact avec les

 26   hommes politiques kosovars albanais de souche, mais également avec des

 27   ambassadeurs. Nous avions des réunions à titre régulier pour parler de la

 28   situation qui prévalait sur place.

Page 2596

  1   Q.  Monsieur Kickert, s'agissant de la déclaration que vous avez fournie

  2   devant ce tribunal et je viens de la mentionner - en fait, vous l'avez

  3   donnée aux employés de ce tribunal à Vienne, c'est votre première

  4   déclaration, c'est à celle-ci que je me réfère. Au paragraphe 2 vous dites

  5   que vous étiez deuxième secrétaire de l'ambassade de l'Autriche à l'époque

  6   et qu'en cette qualité, il fallait que vous vous entreteniez avec des

  7   hommes politiques albanais, avec des intellectuels albanais de souche au

  8   Kosovo, et que vous soyez en contact avec l'Université albanaise à

  9   Pristina. Vous dites également que vous avez eu des contacts fréquents avec

 10   des journalistes albanais.

 11   Alors, j'aimerais savoir quelle était la finalité de cette partie-là de

 12   votre mission, à savoir pourquoi deviez-vous entretenir des contacts avec

 13   des Albanais de souche, et vous parlez également de l'Université albanaise.

 14   Je pense que nous pourrions nous mettre d'accord pour dire qu'il s'agissait

 15   d'une institution parallèle à l'époque ? Alors comment expliquez-vous le

 16   fait qu'on vous ait confié cette mission, que votre ambassadeur vous ait

 17   confié cette mission ?

 18   R.  Pour ce qui est de l'université parallèle, l'Autriche reconnaissait

 19   cette université et reconnaissait les diplômes délivrés par celle-ci. La

 20   raison était la suivante, à partir du moment où l'autonomie a été refusée

 21   au Kosovo, nous ne voulions pas que ceux qui faisaient les études à

 22   l'université albanaise soient doublement sanctionnés, en fait. D'une part,

 23   ils n'avaient plus leur université, et d'autre part, ils ne seraient plus

 24   reconnus en Autriche. Donc, il y a un grand nombre d'Albanais de souche qui

 25   on tout d'abord commencé leurs études à Pristina, puis ensuite ont été

 26   acceptés à des universités en Autriche pour mener à bien leurs études,

 27   terminer leurs études. Donc parmi mes fonctions, je devais entretenir des

 28   contacts avec cette université parallèle avec les responsables de cette

Page 2597

  1   université pour vérifier si ces diplômes étaient corrects, et cetera.

  2   Q.  Mais votre Etat n'estimait pas qu'il s'agissait là d'ingérence dans les

  3   affaires d'un Etat souverain à l'époque, il s'agissait d'un Etat souverain,

  4   la Yougoslavie. Imaginez que cette même chose se produise dans l'autre sens

  5   ?

  6   R.  Je pense que cette question de reconnaissance de diplômes, elle ne va

  7   pas plus loin que les relations entre des universités qui reconnaissent

  8   réciproquement les diplômes.

  9   Q.  Mais vous accepterez, n'est-ce pas, que lorsqu'il s'agit d'une

 10   institution parallèle, qui existe sur le territoire d'un Etat souverain,

 11   cela ne devrait pas faire partie des intérêts ou des préoccupations d'un

 12   autre Etat, à savoir de l'Autriche ?

 13   R.  Non. Nous étions en contact avec des personnalités de l'opposition. Je

 14   ne vois pas pourquoi nous ne serions pas en contact avec d'autres

 15   institutions ?

 16   Q.  Vous avez dit qu'entre autres vous avez travaillé sur l'accord qui

 17   devait être passé sur l'éducation supérieure au Kosovo. Vous avez mentionné

 18   cela comme faisant partie de vos obligations ?

 19   R.  [aucune interprétation]

 20   Q.  [aucune interprétation]

 21   R.  Mgr Paglia et M. Edigio étaient avant tout responsables de discuter

 22   avec Belgrade là-dessus. Nous sommes venus pour financer des bâtiments

 23   universitaires. Par exemple, il y a eu un groupe qui a été mis sur pied qui

 24   devait s'occuper de mettre à la disposition des étudiants albanais de

 25   souche, trois bâtiments de l'Université de Pristina, puis il y a eu ce

 26   groupe qui était basé avec nous à la maison autrichienne de Pristina.

 27   Q.  Après cet accord, est-ce que vous savez si ces institutions ont

 28   commencé à fonctionner immédiatement, et si ce n'est pas le cas de toutes,

Page 2598

  1   est-ce que vous savez lesquelles ont commencé à fonctionner ? Est-ce que

  2   vous vous en souvenez, après que l'accord a été passé ?

  3   R.  Je me souviens qu'un des bâtiments de taille de la faculté du génie

  4   mécanique n'a jamais été utilisé. Je pense qu'ils ont également mis à la

  5   disposition de l'Institut d'albanologie [phon], qui était utilisé par des

  6   professeurs. Si je ne me trompe pas, c'était le cas aussi des beaux-arts,

  7   l'académie des beaux-arts qui a été rendue aux Albanais. Puis aussi, un

  8   autre projet c'étaient les dortoirs.

  9   Q.  Et la faculté des lettres ? Mais s'agissant de l'enseignement en langue

 10   maternelle, en langue albanaise, est-ce que vous savez que c'était une

 11   possibilité qui existait avant que le système parallèle ne soit mis en

 12   place ?

 13   R.  Pour autant que je le sache, l'Université de Pristina était une

 14   université où on employait les deux langues jusqu'à ce que l'autonomie soit

 15   annulée, et à partir de ce moment-là c'est la langue serbe qui était

 16   utilisée, à partir de 1989.

 17   Q.  Mais qu'est-ce qui vous permet de dire que c'était uniquement en serbe,

 18   qu'on n'autorisait pas l'enseignement en langue albanaise ? Est-ce que vous

 19   savez de quoi il s'agit ? Est-ce que vous avez des informations de première

 20   main vous permettant d'en parler ?

 21   R.  Si vous me demandez si j'ai entendu des cours donnés dans telle ou

 22   telle langue, non, ce n'est pas le cas. Ce sont des choses que j'ai

 23   entendues de la part d'autres personnes.

 24   Q.  Quelles sont vos sources, est-ce le recteur de l'université parallèle

 25   ou une personnalité équivalente ou quelqu'un venant d'une institution

 26   officielle ?

 27   R.  J'avais des réunions également à Pristina avec le recteur de

 28   l'université serbe, et lui était très hostile à toute forme d'éducation en

Page 2599

  1   albanais. Il estimait que du moment qu'ils étaient en Serbie, il fallait

  2   que l'enseignement se fasse en serbe.

  3   Q.  Je serai d'accord pour affirmer que la langue serbe devait être la

  4   langue officielle, mais je ne pourrais pas être d'accord avec vous pour

  5   dire que ceux qui souhaitaient suivre un enseignement dans les institutions

  6   officielles en Serbie en albanais ne pouvaient pas le faire. Donc je vais

  7   vous demander la chose suivante : est-ce que vous savez si au niveau de

  8   l'éducation élémentaire ou primaire et secondaire, est-ce que vous savez

  9   s'il y avait des classes où on enseignait en albanais ?

 10   R.  Oui, oui.

 11   Q.  Je vous remercie. Vous avez dit que l'Autriche, l'Etat que vous

 12   représentiez en tant que diplomate, se préoccupait de l'annulation de

 13   l'autonomie au Kosovo, et vous dites que c'est la raison pour laquelle vous

 14   avez établi des contacts. C'est ce que vous dites dans le paragraphe 2 de

 15   votre déclaration. J'aimerais savoir si l'Autriche, avant d'établir ces

 16   contacts avec l'université parallèle de Pristina, avec des hommes

 17   politiques qui représentaient des Albanais de souche kosovars, des

 18   intellectuels, des journalistes, et vous dites que vous en aviez la charge

 19   personnellement, est-ce qu'il y a eu des entretiens qui ont été menés avant

 20   cela, donc avec des institutions officielles serbes avec des hommes

 21   politiques serbes, avant que vous ne vous mettiez à établir ces contacts ?

 22   R.  Lorsque nous nous rendions à Pristina pour rencontrer les Albanais

 23   kosovars, nous rencontrions également le préfet de Pristina, Veljko

 24   Odalovic. C'est ce que nous faisions toujours. A chaque fois qu'un

 25   diplomate se rendait à Pristina, il y avait toujours ce même ballet de

 26   réunions.

 27   Q.  Veljko Odalovic occupait quel poste à ce moment-là ?

 28   R.  Il nous a été présenté en tant que préfet de Kosovo. Je pense qu'il

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  1   était le représentant à Pristina, et lorsqu'on se déplaçait et on se

  2   rendait à Pristina, généralement c'est lui qu'on voyait. Après il y a eu

  3   également le ministre Andjelkovic qu'on voyait à Pristina.

  4   Q.  Est-ce le ministère des Affaires étrangères de la RFY qui vous a incité

  5   à rencontrer ces personnes ou l'un quelconque des hommes politiques que

  6   vous avez eu l'occasion de rencontrer à des échelons plus importants ?

  7   R.  Non, on prenait contact directement avec leurs bureaux et on prenait

  8   rendez-vous.

  9   Q.  Au paragraphe 3 de votre déclaration, vous dites que vous vous êtes

 10   rendu pour la première fois au Kosovo en janvier 1998, et vous dites qu'en

 11   été 1998, après l'offensive d'été lancée par les Serbes contre l'UCK, vous

 12   dites que vos efforts déployés au Kosovo étaient le résultat du conflit qui

 13   existait au Kosovo entre les Serbes et les Albanais kosovars. Puisque l'on

 14   ne trouve pas au compte rendu ou dans la déclaration exactement ce que vous

 15   voulez dire lorsque vous en parlez, dites-moi, lorsque vous avez parlé du

 16   conflit qui dominait ou qui prévalait entre les Serbes et les Albanais

 17   kosovars, est-ce que vous parlez là d'un conflit entre les Serbes et les

 18   Albanais, ou est-ce que vous parlez d'un conflit entre l'UCK, qui venait

 19   d'être créée, Armée de libération kosovare, et les forces de sécurité

 20   serbe, d'autre part ? Est-ce votre position qu'il s'agissait d'une action

 21   légitime, lorsque vous parlez de cela, contre un certain nombre d'éléments

 22   qui échappaient à tout contrôle, ou vous voulez parler là d'un conflit

 23   entre les Serbes et les Albanais en tant que tel ?

 24   R.  Lorsque je suis arrivé à l'ambassade d'Autriche à Belgrade en novembre

 25   1997, il y avait déjà un nombre important de rapports relatant des

 26   incidents qui avaient lieu au Kosovo. Quand je me suis rendu à Kosovo pour

 27   la première fois, à Pristina, j'ai été présenté par un diplomate suédois

 28   qui avait l'habitude de se rendre là-bas, et qui avait l'habitude de se

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  1   rendre aussi à l'extérieur de Pristina. En fait, la situation s'est

  2   envenimée au fur et à mesure qu'il y ait eu des événements. Si vous me

  3   demandez s'il y avait un conflit entre les Serbes et les Albanais du

  4   Kosovo, je dirais non, en fait. C'était un conflit entre l'UCK, vous pouvez

  5   l'appeler les éléments armés, si vous voulez, et les forces de sécurité.

  6   Bien sûr, les civils ont été happés par cette guerre, par ce conflit. Donc,

  7   il y avait de nombreuses rumeurs qui avaient cours. On entendait dire qu'il

  8   y avait des enlèvements, et cetera. A cette époque-là, je dois dire qu'il y

  9   avait peu d'interaction entre les différents groupes d'appartenances

 10   ethniques. Shkelzen Maliqi, qui était un intellectuel, a écrit qu'il y

 11   avait "deux mondés séparés", qui coexistaient, mais qui ne vivaient pas

 12   ensemble.

 13   Q.  Merci.

 14   M. DJORDJEVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je pense qu'il est

 15   temps de faire une pause technique. Il est déjà 10 heures 30. Je vais donc

 16   mettre un terme provisoire à mon contre-interrogatoire.

 17   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien. Nous allons faire la

 18   pause d'une demi-heure. Je pense que vous êtes très habitué, Monsieur

 19   Kickert, à venir témoigner.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 21   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous savez que nous allons

 22   reprendre à 11 heures.

 23   --- L'audience est suspendue à 10 heures 32.

 24   --- L'audience est reprise à 11 heures 02.

 25   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Djordjevic, c'est à vous.

 26   M. DJORDJEVIC : [interprétation] Je vous remercie.

 27   Q.  Monsieur Kickert, avant la pause, nous avions cité les propos de M.

 28   Shkelzen Maliqi qui parlait des relations entre les Serbes et les Albanais.

Page 2602

  1   Enfin, quand je dis "Albanais," je parle des Albanais qui habitaient au

  2   Kosovo-Metohija. M. Shkelzen Maliqi était natif de cet endroit, justement.

  3   Alors, vous avez dit que la population civile a été happée par le conflit

  4   et entraînée dans ce conflit. Pourriez-vous nous expliquer un petit peu ce

  5   que vous vouliez dire par cela, vous étiez quand même très au courant de la

  6   nature du conflit qui prévalait à l'époque ?

  7   R.  Je vous ai déjà décrit et donné le nombre de personnes déplacées en un

  8   terme, qui étaient des personnes qui avaient été touchées par les combats

  9   entre l'UCK et les forces de sécurité, lorsque j'ai décrit aussi ma

 10   rencontre avec un civil qui avait une Kalachnikov, qui était sur la route

 11   de Pristina à Pec. Donc cette personne était armée d'une Kalachnikov, et ce

 12   n'était pas uniquement par hasard; c'est parce qu'il avait peur et il ne se

 13   sentait pas en sécurité.

 14   Q.  Mais ces civils que vous aviez vus armés de Kalachnikov, pourriez-vous

 15   nous dire à quel appartenance ethnique ils appartenaient ?

 16   R.  C'était une personne, et c'était une personne qui venait près --

 17   c'était près d'un village serbe. Je ne lui ai pas parlé. Mais j'imagine

 18   qu'étant donné que nous étions prêts d'un village serbe, il s'agissait d'un

 19   Serbe.

 20   Q.  Conviendriez-vous avec moi que les membres de l'UCK, en ce qui concerne

 21   les civils des villes et villages où il y avait des opérations de combat

 22   contre les forces de sécurité, avaient déplacé les civils pour les mettre

 23   en sécurité ?

 24   R.  Il y avait des allégations. On ne savait pas vraiment s'ils étaient

 25   partis de leur plein gré ou si on les avait obligés à partir. C'est une

 26   question d'ailleurs que l'on m'a posé la dernière fois que je suis venu

 27   déposer dans ce Tribunal. Je ne peux pas vraiment répondre à cela. Tout ce

 28   que je sais, c'est que j'ai assisté à des mouvements de population, il y en

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  1   avait beaucoup qui restaient dans les champs à l'extérieur. On ne sait pas

  2   très bien pourquoi, et lorsqu'on leur posait des questions et qu'on leur

  3   demandait pourquoi ils s'étaient déplacés pour se masser dans des champs à

  4   ciel ouvert, ils disaient qu'ils ne se sentaient pas en sécurité à cause

  5   des forces de sécurité serbes.

  6   Q.  Oui. Enfin, je ne vous pose pas cette question par hasard, je sais que

  7   votre ambassade vous avait demandé de parler à ces personnes. Mais je vous

  8   ai posé là une question très directe, je voulais savoir si vous étiez au

  9   courant du fait que dans le cadre des tactiques de guérilla de l'UCK, je

 10   veux savoir si vous saviez que l'une de leurs stratégies était de déplacer

 11   les civils, d'évacuer les civils pour les mettre à l'abri avant qu'ils ne

 12   lancent leurs attaques. C'est ça que je voulais savoir.

 13   R.  Non, ça, je n'avais pas cette information. Je n'en savais rien.

 14   Q.  Mais est-ce que vous savez quoi que ce soit à propos de la chose

 15   suivante, il y a des rumeurs qui disaient qu'après les opérations de

 16   combat, les membres de l'UCK se mélangeaient aux civils dans les endroits

 17   où il y avait eu des offensives. Le savez-vous ?

 18   R.  Ça, il s'agit d'une tactique de guérilla, mais tout ce que je peux vous

 19   dire, c'est lorsque je visitais les camps de déplacés, par exemple à Kisna

 20   Reka, à deux ou trois reprises, j'ai rencontré une personne en uniforme de

 21   l'UCK.

 22   Q.  Vous êtes diplomate et vous étiez à l'époque ressortissant d'un pays

 23   qui présidait l'Union Européenne, donc, vous étiez en contacts fréquents

 24   avec les pays les plus puissants du monde, vous étiez en contact avec aussi

 25   les alliances militaires les plus puissantes au monde. Vous êtes quand même

 26   un diplomate, vous connaissez bien le Kosovo, vous vous y êtes rendu à de

 27   nombreuses reprises depuis janvier 1998. J'aimerais savoir si à l'époque

 28   l'UCK était considérée comme une organisation terroriste ? Est-ce que vous

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  1   aviez des informations à cette époque ?

  2   R.  Belgrade l'appelait en effet une organisation terroriste. Il me semble

  3   qu'une fois l'envoyé américain des Etats-Unis, M. Gelbard, a utilisé ce

  4   terme d'organisation terroriste, mais normalement, les internationaux

  5   essayaient d'éviter d'avoir recours à ce terme.

  6   Q.  Je comprends bien votre réponse. Vous avez dit vous-même que vous aviez

  7   des contacts avec l'UCK, avec leurs hommes politiques et que vous leur avez

  8   demandé de s'organiser afin qu'il y ait une seule voix exprimant l'opinion

  9   albanaise en ce qui concerne les négociations. A votre avis, est-ce que vos

 10   activités étaient appropriées pour des activités diplomatiques qui avaient

 11   lieu sur le territoire d'un pays étranger ?

 12   R.  Non absolument pas, puisque nous, ce que nous voulions c'était obliger

 13   l'UCK de s'impliquer dans le processus politique. C'est pour ça que l'on

 14   avait des rencontres avec l'UCK. On voyait bien que la situation

 15   s'envenimait, on avait peur d'une déstabilisation complète du Kosovo et de

 16   cette région parce que cela aurait des répercutions sur les pays

 17   avoisinants, y compris mon pays d'ailleurs. Comme vous le savez, il y a un

 18   grand nombre de réfugiés albanais du Kosovo dans les pays européens, y

 19   compris dans mon propre pays en Autriche, et nous ne voulions absolument

 20   pas voir ce chiffre augmenter.

 21   Q.  Mais en tant que diplomate aujourd'hui, est-ce que vous savez si qui

 22   que ce soit fait des efforts ou prend des mesures pour essayer d'intégrer,

 23   d'impliquer les organisations terroristes principales dans le processus

 24   politique normal ?

 25   R.  Mais c'est un processus qui existe, bien sûr, et les diplomates le font

 26   très souvent. Au Liban avec le Hezbollah; c'est la même chose aussi avec

 27   les FARK en Colombie. Enfin, les diplomates sont très souvent en contact

 28   avec les groupes terroristes.

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  1   Q.  Les choses me paraissent un peu plus claires maintenant. Maintenant, je

  2   vais poser une question à propos de la déposition que vous avez faite dans

  3   le cadre de l'interrogatoire principal ce matin. Vous avez parlé de Pec et

  4   des personnes déplacées sur le territoire, et vous avez parlé du village

  5   d'Istinic. Vous avez donné le chiffre de 20 à 25 000 personnes déplacées

  6   sur le territoire. Donc si je vous dis que le village d'Istinic à l'époque

  7   était contrôlé par l'UCK, est-ce que vous seriez d'accord avec moi ?

  8   R.  Comment vous dire comme ça à brûle-pourpoint. Je sais très bien qu'il

  9   s'agissait d'un endroit où il y avait des combats extrêmement animés entre

 10   l'UCK et les forces de sécurité, mais je ne peux pas vous dire si ce

 11   village était contrôlé par l'UCK à ce moment-là ou pas. Ça, je ne peux pas

 12   vous le dire.

 13   Q.  D'où teniez-vous vos informations à propos d'Istinic, est-ce des choses

 14   que vous avez observées de vos propres yeux lors de vos voyages sur place,

 15   ou vous avez reçu des rapports réguliers de la mission des observateurs

 16   européens, contact du Groupe de contact ou d'autres ONG ?

 17   R.  Je ne me trouvais pas sur place moi-même. Nous recevions des rapports,

 18   lisions les rapports bien sûr, rapports de la MOCE, et en ce qui concerne

 19   ce cas bien particulier, je fais référence à l'attaché de l'ambassade

 20   néerlandaise qui m'a lui-même fait part de son évaluation de la situation.

 21   Q.  Vous avez tout à fait raison lorsque vous dites qu'il y avait des

 22   combats très violents à l'époque à cet endroit-là. Mais sachez qu'Istinic

 23   était contrôlé par l'UCK à l'époque et c'est pour cela que des Albanais de

 24   souche s'y étaient abrités. Savez-vous que les forces de sécurité serbes

 25   ont réussi à rentrer dans le village d'Istinic et ont réussi à remettre un

 26   peu d'ordre dans ce village ? Avez-vous cette information ? Je sais que

 27   peut-être pas de la part de l'ambassade néerlandaise, peut-être que vous

 28   l'avez appris d'autres sources ?

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  1   R.  Je ne me souviens pas très bien, mais je sais qu'en effet par exemple à

  2   Orahovac, il y avait des informations qui nous parvenaient selon lesquelles

  3   on essayait de faciliter le retour de ces personnes dans des endroits

  4   maintenant contrôlés par les forces de sécurité serbes.

  5   Q.  Vous avez parlé d'Orahovac. Est-ce que vous savez quelle est la raison

  6   du conflit à Orahovac les 17, 18 et 19 juillet ?

  7   R.  Non. J'ai quand même suivi ça d'assez près, puisque je me suis rendu à

  8   Malisevo peu de jours après. Je ne savais pas très bien ce qui s'est passé

  9   ce jour-là, mais j'en ai entendu parlé, j'ai entendu dire que l'UCK avait

 10   essayé de pénétrer dans Orahovac et qu'ensuite l'offensive a eu lieu et que

 11   finalement l'UCK a dû abandonner Malisevo.

 12   Q.  Vous avez entendu dire que l'UCK avait attaqué Orahovac. Mais savez-

 13   vous qu'ils ont en effet bel et bien attaqué Orahovac et qu'ils y ont tué

 14   et enlevé un certain nombre de personnes, des personnes qui ont été

 15   emmenées en détention à Malisevo ? Est-ce que vous le saviez à l'époque ?

 16   R.  Non.

 17   Q.  Mais saviez-vous qu'à ce moment-là M. Zyrapi, témoin qu'on a entendu il

 18   y a peu de temps, ainsi que M. Thaqi, étaient eux-mêmes à Orahovac ? Le

 19   saviez-vous?

 20   R.  Non.

 21   Q.  Et savez-vous que l'UCK a aussi attaqué Opterusa, emmené dix hommes et

 22   neuf femmes en détention à Malisevo, les femmes ont été emmenées dans le

 23   magasin de Sali Revkija [phon], et là, elles ont subi des sévices sexuels;

 24   le saviez-vous ?

 25   R.  Non.

 26   Q.  Vous avez une mémoire assez sélective visiblement. Savez-vous si qui

 27   que ce soit dans l'ambassade autrichienne avait pour mission d'avoir des

 28   contacts avec les Serbes ? Parce qu'il s'agit quand même d'éléments

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  1   parfaitement importants. Vous rédigiez des rapports à partir d'informations

  2   qui venaient des observateurs européens, j'en ai lu plusieurs d'ailleurs.

  3   Alors, comment se fait-il que vous, en revanche, vous n'étiez absolument

  4   pas au courant de tout cela ?

  5   R.  Souvent les observateurs n'avaient pas le droit d'aller là où il y

  6   avait des combats. Ils avaient des laissez-passer qui leur permettaient de

  7   passer certains points de contrôle, mais ils ne pouvaient pas aller

  8   partout; donc ils ne pouvaient pas souvent faire des rapports comme par

  9   exemple en ce qui concerne Opterusa. Bien sûr nous étions en contact avec

 10   les deux parties, avec les deux camps, puisque le but du travail de

 11   l'observateur, c'est d'essayer d'entendre les deux versions pour essayer de

 12   voir ce qui se passe vraiment.

 13   Pour ce qui est d'Orahovac, je sais qu'après qu'Orahovac soit à

 14   nouveau contrôlé, après qu'il y ait eu une reprise de contrôle d'Orahovac,

 15   il y avait des allégations selon lesquelles il y avait des charnières à

 16   Orahovac; c'était des allégations qui avaient été faites par les Albanais

 17   du Kosovo. Donc on a envoyé certains observateurs de la MOCE pour vérifier

 18   ce qui s'y passait. Et bien sûr, là encore, il s'agissait d'une exagération

 19   de la part des Albanais du Kosovo. Il y avait, certes, certaines fosses

 20   communes près d'une décharge, mais ce n'était absolument pas une fosse

 21   commune de l'ampleur de celle qu'ils nous avaient décrite.

 22   Q.  Je vous remercie. Savez-vous que le 17 juillet, l'UCK a attaqué

 23   Retimlje, a pris Retimlje, a fait prisonniers 15 civils serbes et les ont

 24   envoyés à la prison de Malisevo, et depuis, on n'a jamais revu ces 15

 25   personnes ? Est-ce que vous étiez au courant de cela, puisque c'est un

 26   événement qui a eu lieu à peu près en même temps que cette grande offensive

 27   qui avait été lancée par l'UCK ?

 28   R.  Non, je n'étais pas au courant.

Page 2609

  1   Q.  Savez-vous quoi que ce soit -- enfin, je pense que c'est quelque chose

  2   qui s'est passé le 21 juillet. L'UCK a attaqué le village de Zociste, l'a

  3   pillé, a ensuite incendié toutes les maisons, les ont rasées, et a chassé

  4   tous les Serbes qui y habitaient. Est-ce que vous étiez au courant de cela

  5   ? Avez-vous eu la moindre information à ce propos ?

  6   R.  Non. Non, la rumeur était que des civils serbes étaient kidnappés. Ça,

  7   on le savait. C'étaient des rumeurs qui courraient là-dessus, mais en ce

  8   qui concerne Zociste, non, je n'ai rien appris de bien précis.

  9   Q.  Nous allons maintenant revenir en arrière. Nous allons revenir à ce qui

 10   s'est passé sur la route Pristina-Pec. Savez-vous que le 18 juin la

 11   circulation sur cette route a été bloquée près de Klina, à rue Iglarevo ?

 12   Il y a un barrage routier qui a été établi au côté Pec et côté Pristina,

 13   c'est une autre municipalité, celle de Lapusnik, dans la municipalité de

 14   Glogovac, où l'on a établi un barrage routier. Est-ce que vous le saviez ?

 15   Est-ce que les observateurs vous ont fait rapport de cela, que cette route

 16   avait été bloquée et des deux côtés, à la fois du côté Pristina et du côté

 17   Pec ?

 18   R.  Je savais que la route avait été bloquée.

 19   Q.  Merci. Pouvez-vous nous dire ce que vous savez à propos du village de

 20   Kijevo et des activités de l'UCK ? Si je vous parle de ce village de

 21   "Kijevo", qu'est-ce que cela évoque pour vous ?

 22   R.  Oui, oui, la phrase de Holbrooke est bien connue : Kijevo est l'endroit

 23   le plus dangereux sur terre. C'était un village habité principalement par

 24   des Serbes et des Rom, et qui était complètement coupé de tout ce qu'il y

 25   avait au voisinage, donc qui avait été parfaitement isolé.

 26   Q.  Vous m'avez économisé de ma question. Je n'ai pas eu à la poser.

 27   J'allais parler justement de M. l'Ambassadeur Holbrooke. Mais saviez-vous

 28   que ce village était sous blocus; et si oui, est-ce que vous savez pendant

Page 2610

  1   combien de temps ce village a été coupé du monde après l'attaque de l'UCK ?

  2   R.  Je sais, en effet, qu'il a été parfaitement isolé, enfin qu'il a subi

  3   un blocus, comme vous le dites. Je ne sais pas pendant combien de temps. Ça

  4   a dû être pendant une période assez longue, parce qu'on n'en a pas mal

  5   parlé à l'époque.

  6   Q.  Merci. Cela me suffit comme réponse. Je vais vous poser d'autres

  7   questions sur les activités de l'UCK et sur les rapports que vous receviez

  8   de la part des différents observateurs de la Commission européenne ou

  9   d'autres ONG. J'aimerais savoir si vous étiez au courant de l'attaque qui

 10   avait eu lieu contre la centrale thermique d'Obilic vers la fin du

 11   printemps ou le début de l'été 1998 ? Savez-vous que l'UCK a enlevé

 12   certains salariés de cette centrale thermique ? Tout d'abord, j'aimerais

 13   savoir si vous étiez au courant que la centrale thermique a fait l'objet

 14   d'une attaque, et j'aimerais, deuxièmement, savoir si vous étiez au courant

 15   de l'enlèvement de neuf salariés de cette centrale ?

 16   R.  Je ne savais pas que la centrale thermique elle-même avait été

 17   attaquée. Il me semblait que c'était juste les environs d'Obilic. Peut-être

 18   j'ai fait référence à Belacevac. Je crois que, de toute manière, ce sont

 19   deux endroits qui sont extrêmement proches. Donc, peut-être est-ce que nous

 20   parlons de la même chose, nous nous sommes rendu compte.

 21   Q.  Oui, Belacevac, c'est bien aussi. C'est cela. Ce n'est pas loin, mais

 22   moi, je parle de la centrale thermique, centrale thermique qui a subi un

 23   assaut de l'UCK. Vous le saviez, oui ou non ? Mais si oui, j'aimerais

 24   savoir si vous êtes au courant; et sinon, dites-nous ce que vous savez au

 25   moins sur Belacevac.

 26   R.  Je ne me souviens pas bien que la centrale d'Obilic ait été attaquée,

 27   et je vous ai parlé de Belacevac parce que dans mon rapport, lorsque j'ai

 28   dit que M. Odalovic a dit à la fin juin -- c'est à ce moment-là que M.

Page 2611

  1   Odalovic, pour la première fois, à la fin juin, a dit que la VJ était

  2   impliquée dans cette opération.

  3   Q.  Bien. Savez-vous quoi que ce soit à propos de l'enlèvement de ces neuf

  4   salariés qui, je crois, étaient à bord d'un minibus ou d'un autocar de

  5   l'entreprise, ils ont été enlevés par l'UCK, et depuis on ne les a jamais

  6   revus. Enfin, on n'avait même pas retrouvé quoi que ce soit à propos de ces

  7   personnes. Vous le saviez ?

  8   R.  Il y a eu beaucoup de rapports relatant des enlèvements. Je sais qu'il

  9   y avait un journaliste russe aussi qui a été enlevé. Il a été libéré

 10   ensuite, mais c'est vrai qu'on parlait énormément d'enlèvements à l'époque.

 11   Q.  Vous savez quoi que ce soit à propos de l'enlèvement de ces neuf

 12   salariés qui travaillaient à la centrale, oui ou non ?

 13   R.  Je pense que si je pouvais compulser mes documents, je pourrais

 14   rafraîchir ma mémoire. Mais là, elle bulle d'un point dont je ne m'en

 15   souviens pas. Désolé.

 16   Q.  Non, votre réponse me satisfait.

 17   Maintenant, j'aimerais savoir si vous saviez quoi que ce soit à

 18   propos de centres de détention semi-privés, illégaux, dirigés par l'UCK où

 19   ils détenaient des personnes qui n'étaient pas Albanais de souche ? Vous

 20   étiez au courant de cela ?

 21   R.  A l'époque, il y avait des allégations à ce propos. J'ai obtenu

 22   plus d'information lorsque je suis venu ici en tant que témoin dans

 23   l'affaire Limaj et consorts.

 24   Q.  Oui, j'ai lu ce qui concernait tout cela. M. le Président le Juge

 25   Parker était, lui aussi, siégé dans cette affaire, si je me souviens bien.

 26   Pourriez-vous nous dire un peu ce que vous saviez à ce propos et d'où vous

 27   le saviez ?

 28   R.  C'était un peu dans le même esprit que ces allégations d'enlèvement, de

Page 2612

  1   meurtres de civils, les allégations qui sont trouvées aussi dans les

  2   médias. Il y avait aussi ces allégations de centres de détention qui

  3   étaient organisés par l'UCK. On n'avait aucune information fiable à ce

  4   propos, et à l'époque en juin, on n'avait pas suffisamment d'observateurs

  5   sur place. Nous avions une équipe à la fin mai. Mais une équipe, cela

  6   signifie deux personnes, et ils ne pouvaient se rendre que là où leur

  7   sécurité était assurée, et où ils ne risqueraient rien et où ils ne

  8   seraient pas arrêtés sur les routes soit par des forces serbes ou par des

  9   forces de l'UCK.

 10   Q.  Mais moi, je ne savais pas que les observateurs ne se rendaient pas sur

 11   les zones dangereuses. J'avais l'impression que c'était plutôt le

 12   contraire. J'avais plutôt l'impression que le problème c'était la

 13   possibilité de se rendre physiquement dans certains endroits. C'était ça

 14   qui était difficile. Par exemple, j'ai parlé de Malisevo à plusieurs

 15   reprises. Mais est-ce que vous êtes rendu à Lapusnik ?

 16   R.  Oui, oui. Je ne me souviens pas exactement quand. Il faudrait que je

 17   fasse un petit effort de mémoire, mais oui, je suis en effet allé à

 18   Lapusnik.

 19   Q.  Vous connaissez plutôt bien mieux Malisevo que Lapusnik, puisque vous

 20   êtes rendu beaucoup plus souvent à Malisevo qu'à Lapusnik, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Avez-vous entendu parler de centres de détention, de camps de

 23   prisonniers qui auraient été installés par l'UCK à Malisevo et à Lapusnik ?

 24   R.  Non, pas de façon concrète, j'ai entendu des rumeurs sur lesquelles il

 25   y avait des camps qui existaient. Lorsque j'étais à Malisevo, il y avait

 26   aussi une personne qui représentait le CICR, qui voulait absolument

 27   rencontrer quelqu'un de l'UCK pour s'entretenir de ces allégations.

 28   Lorsqu'on leur parlait, bien sûr, on leur demandait sans cesse de suivre

Page 2613

  1   les règles prescrites par le droit humanitaire international. On leur en

  2   parlait, bien sûr, à cause de ces allégations.

  3   Q.  Mais avec qui vous entreteniez-vous, qui étaient vos interlocuteurs

  4   politiques au sein de l'UCK ?

  5   R.  A l'époque on ne savait absolument rien sur l'organisation et la

  6   structure même de l'UCK. Donc, on essayait juste d'établir un premier

  7   contact pour essayer de voir qui ils allaient nous envoyer en tant que

  8   porte-parole, en tant que représentants des décideurs, et ce, à partir du

  9   27 [comme interprété] juillet, je crois. C'est quand M. Rohan est arrivé

 10   nous nous sommes rendus à Malisevo. Le lendemain, le 23 juillet, j'ai

 11   rencontré M. Thaqi. Je ne savais pas que c'était M. Thaqi à l'époque,

 12   puisqu'ils se sont présentés en s'appelant par des chiffres.

 13   Q.  Est-ce que M. Thaqi était le numéro un ? Qui était le numéro un ?

 14   R.  Non, il était le numéro trois. Nous n'avons pas --

 15   Q.  Oui, c'est exact. Qui était le numéro un ?

 16   R.  Je ne sais pas jusqu'à aujourd'hui. C'était peut-être M. Adem Jashari.

 17   Je ne sais pas.

 18   Q.  Très bien. Est-ce que vous connaissez d'autres numéros ? Trois, c'est

 19   Hashim Thaqi. Deux, quatre, six, est-ce que vous vous en souvenez ?

 20   D'accord, vous ne vous en souvenez pas ?

 21   R.  Le numéro sept, c'est celui que nous avons vu en premier lieu, M. Kadri

 22   Veseli, on a appris plus tard. Il y avait également le 11 ou le 12, M.

 23   Jakup Krasniqi. Mais je dois dire, nous ne comprenions pas très bien la

 24   structure organisationnelle de l'UCK.

 25   Q.  Avez-vous rencontré Zyrapi ? Non ?

 26   R.  Quel était son prénom ?

 27   Q.  Je ne me souviens pas, Zyrapi, c'est son nom de famille. Il était

 28   également dirigeant de l'UCK. Mais de toute évidence, vous ne vous en

Page 2614

  1   souvenez pas puisque vous demandez son prénom. Son prénom est Bislim

  2   Zyrapi.

  3   R.  Le nom me dit quelque chose, mais je ne me souviens pas du contexte. Je

  4   ne l'ai sans doute pas rencontré en personne. A l'époque, où était-il

  5   commandant ?

  6   Q.  Je pense que nous dépassons le cadre des questions que je vous pose.

  7   Nous allons donc en rester là. Ma question suivante est celle qui va suivre

  8   : quand avez-vous appris que M. Hashim Thaqi était numéro trois ? Quand

  9   avez-vous appris que M. Veseli était numéro sept ? A quel moment, par

 10   rapport au moment où vous ne les connaissiez que comme trois et sept ?

 11   R.  Lors de la réunion ils se sont présentés comme sept, et M. Hashim Thaqi

 12   en tant que numéro trois. Donc, nous ne connaissions que leur numéro à

 13   l'époque.

 14   Q.  Quand avez-vous appris leur nom, les noms qui se cachaient derrière ces

 15   chiffres ?

 16   R.  J'ai appris le nom de M. Thaqi peu après notre réunion, car le

 17   journaliste qui m'y a emmené était un ami de l'époque à lui, de l'époque où

 18   ils allaient ensemble à l'université. C'est ainsi que j'ai pu entrer en

 19   contact avec lui, d'ailleurs. Mais j'ai gardé cela, je ne l'ai même

 20   consigné dans mon rapport. Puis plus tard, vers la fin de l'été, ce nom

 21   était du domaine public. Il était mentionné en Kosovo, dans les médias

 22   albanophones.

 23   Q.  Dans vos contacts fréquents avec les autorités serbes, est-ce qu'elles

 24   vous ont parlé de M. Thaqi, je veux vous parler que de M. Thaqi et de

 25   personne d'autre. Dans l'affirmative, que vous ont-elles dit à son sujet ?

 26   R.  Si son nom a été mentionné, ça devait être à la fin de l'été, et il

 27   s'agissait d'un terroriste important, vraisemblablement. 

 28   Q.  Vraisemblablement ou avec une certitude absolue ?

Page 2615

  1   R.  Probablement.

  2   Q.  Maintenant c'est plus clair. M. Thaqi, enfin M. numéro trois, est-ce

  3   qu'il se présentait comme numéro trois, je suis le numéro trois, mes

  4   pouvoirs, ma fonction, mon autorité sont tels et tels ? Est-ce qu'il vous a

  5   dit ce dont il était responsable et pourquoi il était votre interlocuteur ?

  6   R.  Il s'est présenté comme numéro trois, mais il n'a pas décliné sa

  7   responsabilité. J'ai dit que nous recherchons des hauts dirigeants de l'UCK

  8   pour les associer au processus politique, et il m'a répondu qu'ils étaient

  9   disposés à l'envisager. Mais il ne m'a pas dit s'il devait s'en référer à

 10   quelqu'un ou, au contraire, prendre la décision lui-même.

 11   Q.  Vous conviendrez avec moi que la diplomatie est un domaine délicat,

 12   puisque vous êtes vous-même diplomate expérimenté. Je pourrais même dire en

 13   tant qu'officier du renseignement -- enfin, vous êtes d'accord avec moi ou

 14   pas. Mais est-ce que cela vous a traversé l'esprit que ce numéro trois

 15   pourrait être une taupe serbe ? Comment pourriez-vous être sûr qu'il était

 16   un représentant des organisations qui étaient considérées comme terroristes

 17   par l'autre partie et qu'il voulait vous parler de leurs activités futures

 18   ?

 19   R.  Vous savez nous étions à Malisevo, et il y avait uniquement l'UCK,

 20   aucune force de sécurité serbe, donc on pouvait partir du principe qu'il

 21   était membre de l'UCK. Avant que je sois introduit auprès de lui, j'ai été

 22   interrogé par une autre personne dans un café qui, de toute évidence, me

 23   sondait pour voir si j'étais véritablement un diplomate et si j'étais

 24   vraiment sérieux. Etant donné qu'il y avait beaucoup de personnes qui

 25   revenaient des pays germanophones, je pouvais m'entretenir avec cette

 26   personne en allemand. Cette personne qui me sondait, ça duré une heure,

 27   c'était une heure d'interrogatoire, a donc fait cela pendant une heure

 28   avant que je sois autorisé à rencontrer M. Thaqi.

Page 2616

  1   Q.  Cette personne qui vous a interrogé -- enfin, qui vous a emmené chez

  2   elle, le journaliste ou quelqu'un d'autre ?

  3   R.  Le journaliste. Nous nous sommes rendus à Malisevo. Là, nous nous

  4   sommes assis --

  5   Q.  Dukadjin?

  6   R.  Dukadjin Gorani.

  7   Q.  Est-ce que cette personne s'est présentée avec un chiffre ou avec son

  8   nom, et vous a-t-elle dit qui elle était lors de son entretien ?

  9   R.  Il avait un surnom, un alias, et il s'est présenté avec ce surnom.

 10   J'essaie de me rappeler son surnom. C'était Hoxha.

 11   Q.  Hoxha ?

 12   R.  Hoxha.

 13   Q.  Vous a-t-il dit qu'elle était sa fonction, qu'il était membre de l'UCK,

 14   qu'il était responsable de la sécurité à l'UCK ?

 15   R.  Je pense qu'il m'a dit qu'il était responsable de la sécurité. Il ne

 16   portait pas d'uniforme, il était en civil alors que lorsque j'ai rencontré

 17   Thaqi, celui-ci portait un uniforme ainsi que Veseli.

 18   Q.  Merci. Quels autres dirigeants de l'UCK ou de la hiérarchie politique

 19   parallèle du gouvernement kosovar avez-vous rencontré, soit seul soit en

 20   compagnie d'autres délégations, quelles sont les politiques, quels sont les

 21   officiers de l'UCK éventuellement, et éventuellement intellectuels,

 22   journalistes, en d'autres termes les notables, les personnes importantes ?

 23   Quelles étaient ces personnes que vous estimiez opportun de contacter soit

 24   d'après vos sentiments, soit ceux de vos collaborateurs ?

 25   R.  Nos premiers interlocuteurs étaient des politiques de Pristina, la LDK,

 26   Rugova, Agani, et d'autres membres de l'UCK. Ensuite il y a un groupe qui a

 27   fait scission de l'UCK, Mehmet Hajrizi, et d'autres dans ce groupe. Donc

 28   nous avions des contacts avec la LDK, avec une faction dissidente qui était

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  1   en opposition, et le troisième pilier c'était l'UCK de l'extérieur. Il

  2   était très difficile de les rencontrer, parce que nous ne savions pas quels

  3   étaient les interlocuteurs d'une part, et d'autre part, il y avait des

  4   combats et ils se déplaçaient. Ce n'est qu'après deux réunions à Malisevo

  5   et la deuxième à Klecka avec Krasniqi, Ram Buja, et Fatmir Limaj et David

  6   Slinn, mais ensuite nous avons perdu contact parce qu'ils se sont déplacés

  7   et nous ne sommes rentrés en contact à nouveau qu'à partir de la fin du

  8   mois septembre; et ça, c'était uniquement par téléphone.

  9   Q.  Nous avons compris ce que vous faisiez pour votre pays et comment. Mais

 10   sur la base de votre déposition, j'en déduis que vous faisiez cela non

 11   seulement pour l'Autriche ou pour l'Union Européenne, mais pour un motif

 12   plus large de diplomatie des Etats-Unis et de l'Union Européenne. Et je

 13   voudrais savoir qui d'autres - je ne parle pas de personne mais d'Etats -

 14   qui d'autres participaient à ces activités communes auxquelles participe

 15   également l'Autriche, soit par vous soit par l'ambassadeur Petritsch qui

 16   consistaient à suivre et à observer la situation au Kosovo ? Qui étaient

 17   les grands acteurs, quels états ?

 18   R.  L'état principal était les Etats-Unis. Dans KDOM, Mission d'observation

 19   diplomatique du Kosovo, il y avait trois composantes: les Etats-Unis,

 20   ensuite les Européens et les Russes. Il y avait également des visites

 21   communes organisées dans la campagne. Il y avait également une voiture

 22   canadienne, donc une équipe canadienne pour autant que je me souvienne, et

 23   c'est tout. Mais comme je l'ai expliqué, ce Groupe de contact était

 24   l'instance politique principale; et M. Hill, ambassadeur américain à

 25   Skopje, a été nommé envoyé spécial pour le Kosovo, et nous, les Européens,

 26   n'avions encore personne et l'on nous reprochait notre inaction ou

 27   inactivité; parfois, on nous tournait en dérision. Ce n'est qu'en septembre

 28   que l'ambassadeur Petritsch a été nommé envoyé spécial lors d'une décision

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  1   qui a été entérinée officiellement en octobre seulement par les ministres

  2   des affaires étrangères, début octobre.

  3   Q.  Vous nous expliquez quels étaient les pays qui assuraient le travail de

  4   la communauté internationale. Alors, je voulais savoir ce qu'il en est de

  5   la coordination. Vous avez dit que les protagonistes principaux étaient

  6   l'Union Européenne, les Etats-Unis et la Russie. Mais je voudrais savoir ce

  7   qu'il en était de leur interraction, non pas en terme officiel, mais au

  8   contraire dans la réalité. Quelle était la coopération entre les Russes et

  9   les Européens, les Américains, pas officiellement, parce que ça, on le

 10   sait. Je voudrais que vous répondiez à cette question pour moi, parce que

 11   vous êtes la bonne personne. Vous connaissiez la relation sur le terrain

 12   dans les faits.

 13   R.  Il y avait plusieurs initiatives et l'interaction se faisait lors de

 14   réunions officielles; les ambassadeurs du Groupe de contact se

 15   réunissaient, ensuite ils s'envoyaient des rapports. M. Hill lorsqu'il

 16   rencontrait un haut responsable serbe, il ne nous faisait pas participer,

 17   mais il nous faisait un rapport. Les Russes envoyaient également quelqu'un,

 18   Afanasievsky, si je ne m'abuse. Les Russes se rendaient ainsi à Belgrade

 19   pour voir les politiques et dire il faut faire quelque chose, parce qu'il y

 20   a là une escalade. Ils participaient à la KDOM, la Mission d'observation du

 21   Kosovo. Il y avait également une coopération à tous les niveaux, au niveau

 22   diplomatique, au niveau de l'observation.

 23   Il y avait des rapports communs dressés par les observateurs. Il y

 24   avait des visites communes sur le terrain et il y avait également des

 25   informations qui étaient remises au Conseil de sécurité. Donc en fait,

 26   chacun apportait sa contribution aux informations qui étaient acheminées

 27   vers New York, que ce soit les Américains, les Russes et les Européens.

 28   Est-ce que ça répond à votre question ?

Page 2619

  1   Q.  En partie, mais je vous remercie. Question suivante, vous avez dit que

  2   le pays le plus important dans le processus était les Etats-Unis; est-ce

  3   exact ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Merci. Est-ce que vous avez entendu parler du serment que devaient

  6   prononcer les futurs membres de l'UCK avant de rentrer dans cette

  7   organisation militaire ? Est-ce que vous connaissez le texte de ce serment

  8   ?

  9   R.  Non, je n'en ai jamais entendu parler.

 10   Q.  Très bien. En tant que diplomate, est-ce que le numéro trois, à savoir

 11   M. Thaqi, le numéro sept, M. Veseli, les autres numéros dont on ne se

 12   souvient pas, vous ont dit quel étaient leurs objectifs politiques et ont-

 13   ils expliqué la manière dont ils entendaient les mettre en œuvre ?

 14   R.  Ils disaient publiquement -- il y avait un porte-parole de M. -- ils

 15   disaient que l'indépendance était leur but.

 16   Q.  Et comment pensaient-ils arriver à l'indépendance ?

 17   R.  Par des moyens militaires.

 18   Q.  Et le parti de M. Rugova le plus important, quels étaient ses

 19   objectifs, les objectifs dont il parlait ?

 20   R.  C'était les mêmes, l'indépendance. Mais lui, il privilégiait la voie

 21   pacifique, et c'est notre analyse en tout cas. Certains cercles de la

 22   communauté albanaise se sont impatientés et estimaient que la voie suivie

 23   par Rugova ne mènerait nulle part, c'est la raison pour laquelle une

 24   faction politique a fait sécession du groupe de M. Rugova qui était plus

 25   volontariste et ensuite l'UCK prônait la voie militaire.

 26   Q.  Vous avez parlé de ce groupe qui a fait sécession du groupe de Rugova.

 27   Est-ce que la méthode pour parvenir à l'indépendance était la lutte armée ?

 28   Est-ce que vous pouvez nous en dire quelque chose ?

Page 2620

  1   R.  Non. Pour cette faction dissidente, il s'agissait également de la voie

  2   politique, pas de la voie militaire.

  3   Q.  Pourquoi à ce moment-là ont-ils fait sécession puisqu'il s'agit des

  4   mêmes buts et méthodes ?

  5   R.  Ils voulaient une approche plus active, c'est-à-dire organiser des

  6   manifestations. Et dans le paysage politique albanais, vous avez

  7   différentes composantes, et l'un de nos objectifs était que ces différentes

  8   composantes soient regroupées parce que qui devait être l'interlocuteur de

  9   Belgrade, puisqu'on parlait de ça à l'époque, pour négocier l'autonomie

 10   s'il n'y avait pas un représentant de la totalité du paysage politique

 11   kosovar albanais. Parce que la LDK, par exemple, ne voulait pas faire

 12   cavalier seul; elle déclarait ne pas avoir d'emprise sur l'UCK. Alors,

 13   comment pouvoir avoir un poids à Belgrade et promettre un cessez-le-feu par

 14   exemple, si vous n'avez aucun contrôle, aucune emprise sur ceux - il s'agit

 15   de l'UCK - qui se livraient à ces hostilités ?

 16   Q.  Votre ambassadeur, M. Petritsch, et l'ambassadeur américain à Skopje,

 17   l'ambassadeur anglais également à Belgrade, et l'ambassadeur russe à

 18   Belgrade, étaient en pourparlers avec l'élite politique yougoslave de

 19   l'époque. Je ne vais pas parler de M. Milosevic et de ses proches et je ne

 20   vais pas parler des dirigeants du Montenegro, mais je vais parler de

 21   l'élite politique, c'est un terme collectif de la République Yougoslave à

 22   l'époque. Et j'ai déjà parlé des ambassadeurs qui étaient importants dans

 23   ce processus.

 24   Ma question est la suivante, est-ce qu'il y avait une position

 25   diplomatique unifiée en ce qui concerne la question du Kosovo-Metohija et

 26   la province autonome dans le cadre de la République de Serbie et dans le

 27   cadre de la République de Yougoslavie ? Est-ce qu'il y avait une démarche

 28   commune dans les efforts diplomatiques consentis auprès de l'élite

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  1   politique serbe ? Et est-ce que celle-ci était disposée à entreprendre des

  2   négociations pacifiques avec les Albanais; et sinon, pourquoi ? Quel était

  3   l'essentiel de la position politique de l'élite politique serbe telle

  4   qu'elle était perçue par les diplomates internationaux puisque vous étiez

  5   là à ce moment-là ? Je voudrais savoir vos impressions et votre

  6   connaissance puisque vous étiez là. C'est ça que je veux dire.

  7   R.  C'est les Etats-Unis et M. Hill qui menaient clairement la danse. En

  8   plus, il y avait plusieurs initiatives, celles de M. Hill, il y avait

  9   également les Russes avec Afanasievsky, qui cherchait également à

 10   entreprendre les pourparlers avec les dirigeants. L'Union Européenne, à

 11   l'époque, ne jouait pas de rôle. Comme je le disais. M. Petritsch, au

 12   départ, n'était que l'ambassadeur de la présidence de l'Union Européenne.

 13   Si je m'en souviens bien, l'OSCE et l'Union Européenne avait chacun nommé

 14   le même envoyé pour l'ex-Yougoslavie, M. Gonzales. Il était impossible pour

 15   lui de travailler car il n'avait pas reçu de visa d'entrée en Yougoslavie.

 16   Et c'est une des raisons pour lesquelles M. Petritsch a été désigné envoyé

 17   spécial de l'Union Européenne, car on ne pouvait pas lui refuser l'entrée

 18   puisqu'il était déjà sur place.

 19   Q.  Il y a, et vous en conviendrez avec moi, des raisons politiques pour

 20   refuser le visa à M. Gonzales. Vous comprendrez avec moi qu'il y avait des

 21   raisons de refuser l'entrée dans le fief des autorités politiques à M.

 22   Gonzales qui était persona non grata à l'époque. Mais quid de l'attitude

 23   des ambassadeurs ? Les rapports envoyés dans les différents pays à l'époque

 24   indiquaient que les autorités serbes cherchaient à négocier pacifiquement

 25   pour résoudre tous les problèmes de la Metohija et du Kosovo. Ou bien, est-

 26   ce que les choses étaient tout autres ? C'est cela qui importe en ce qui

 27   concerne cette époque. Est-ce que vous savez quelle était la justification

 28   avancée par les autorités serbes au sujet de la présence des forces de

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  1   sécurité et de l'armée serbe là-bas ? Comment les ambassadeurs étrangers

  2   percevaient-ils cela, à savoir la position du gouvernement serbe ?

  3   R.  Belgrade considérait que le problème du Kosovo était une question

  4   d'ordre intérieur. Et puisque vous m'accusez également d'ingérence dans des

  5   -- donc ils étaient contre un rôle plus important, ils ne voulaient pas que

  6   l'on internationalise la question.

  7   Q.  Non ?

  8   R.  Non. Ils ne voulaient pas qu'on internationalise la question. Je me

  9   souviens que nous avions une mission de longue durée au Kosovo qui a pris

 10   fin et nous avons effectué une mission internationale pour empêcher

 11   l'escalade. Et c'est cela qui a d'ailleurs présidé du passage à la KDOM, à

 12   la Mission de vérification Kosovo. L'objectif était d'être présent et de

 13   stabiliser la situation pour éviter qu'elle ne devienne incontrôlable; et

 14   une partie de la stratégie comportait un volet politique en vertu duquel,

 15   ou dans lequel les Kosovars d'origine albanaise entreraient en pourparlers

 16   avec les autorités serbes pour évoquer le futur du Kosovo.

 17   Q.  Monsieur Kickert, je comprends votre position et je vous suis

 18   reconnaissant d'avoir fait votre travail. Je sais que vous êtes l'un des

 19   engrenages du mécanisme, et vous devez faire ce que votre dit votre

 20   commandement, respecter ses instructions, et cela n'a rien ne personnel.

 21   Mais passons à quelque chose.

 22   Vous avez une riche expérience du terrain, et je pense qu'il y a

 23   contradiction, parce que vous dites il y a des missions d'observation, je

 24   ne vais pas parler de tout cela, pour gagner du temps, OSCE, KDOM, mission

 25   de surveillance de l'Union européenne, et cetera, ou de la condition, et de

 26   nombreux ONG. Mais alors, cela ne cadre pas avec votre affirmation selon

 27   laquelle la question n'était pas internationalisée, que le gouvernement

 28   serbe ne l'avait pas autorisée. Est-ce que vous pourriez un petit peu lever

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  1   l'ambiguïté ?

  2   R.  Pour moi, ce n'est pas illogique, il y avait le travail humanitaire, il

  3   y avait un bureau d'information des Etats-Unis, et puis rien d'autre. A

  4   l'époque où je suis arrivé en 1998, j'étais l'un des peu des diplomates qui

  5   se rendaient régulièrement au Kosovo. Il n'y avait que des visites

  6   sporadiques de la part d'ambassadeurs, qui se limitaient pour la plupart à

  7   Pristina. Il y avait deux collègues, l'un de l'ambassade britannique,

  8   l'autre suédoise, qui travaillaient de manière plus poussée, mais la

  9   présence internationale était plus que limitée à Pristina. Lorsque nous

 10   nous sommes mis d'accord sur la KDOM, et le D d'ailleurs a été ajouté à la

 11   suite de l'insistance de Belgrade, D pour diplomatique, et tous les

 12   observateurs devaient être accrédités par leurs ambassades respectives, et

 13   ils n'étaient pas autorisé d'agir sous la bannière de l'Union européenne,

 14   parce que ça, ça allait trop loin, donc ces observateurs agissaient

 15   toujours en tant que représentants nationaux. Bien entendu, l'organisation

 16   et la coordination se faisaient sous la houlette de l'Union européenne,

 17   mais les autorités de Belgrade ne voulaient pas qu'il y ait une présence

 18   internationale trop poussée. C'est la raison pour laquelle ils ont refusé

 19   que l'Union européenne ait une présence sous la forme d'une maison louée à

 20   Pristina. C'est la raison pour laquelle nous avons loué une maison à

 21   Pristina que nous sous-louions aux organismes humanitaires, pour qu'il y

 22   ait une sorte de pôle humanitaire là-bas. C'était en juin 1998.

 23   Mais comme je vous l'ai dit précédemment, nous n'étions pas suffisamment

 24   informés, et nous voulions avoir nos propres sources d'information pour ne

 25   pas devoir nous fonder sur des affirmations et des démenties. Lorsque j'ai

 26   écrit mon rapport, lorsque nous sommes rendus à Decani pour vérifier des

 27   nouvelles, nous voulions savoir quel était vraiment la véracité ou

 28   l'authenticité de l'information que nous avions, parce que nous n'avions

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  1   pas de présence sur le terrain, et nous n'avions pas de sources.

  2   Q.  Je vous remercie. Mais d'après ce que j'ai compris, il y avait des

  3   nombreuses missions d'observation au Kosovo. Il y avait l'ambassadeur Hill

  4   là-bas, il y avait également l'ambassadeur néerlandais, l'ambassadeur

  5   Walker. S'ils n'avaient pas été présents là-bas, il n'y aurait pas eu de

  6   rapports que vous auriez reçus à différents moments émanant de différentes

  7   localités du Kosovo. Mais nous allons passer à une autre série de

  8   questions. Je voudrais terminer mon contre-interrogatoire pour que vous

  9   puissiez remplir les obligations qui sont les vôtres.

 10   Ma question suivante aura trait à ce que vous avez déclaré en 1999, la

 11   première fois que vous avez donné une déclaration à Vienne. C'est au

 12   paragraphe 4 de cette déclaration, vous avez dit :

 13   "En mars 1998, le ministère des Affaires étrangères de la RFY a emmené les

 14   membres du corps diplomatique au Kosovo afin de montrer ce que l'UCK y

 15   avait fait. Le gouvernement autrichien n'a pas envoyé de représentants là-

 16   bas, car nous ne souhaitions pas être utilisés comme des pions dans une

 17   campagne de propagande."

 18   Bien entendu, on sous-entend ici une campagne de propagande de la RFY ou de

 19   la République de Serbie. Alors, je voudrais que vous nous commentiez ce

 20   point de vue qui, manifestement, est votre point de vue personnel.

 21   R.  C'était une décision de l'ensemble des pays membres de l'Union

 22   européenne que de ne pas participer à cela. Nous avons changé notre point

 23   de vue, et je vais vous dire pourquoi. Alors, pourquoi je parle de

 24   propagande ? Ce que l'on voit, ce sont des représentants des ambassades,

 25   nous voyons des images qui sont tournées, ensuite des sous-titres qui ne

 26   donnent que le point de vue que d'une des parties. Donc, on pouvait y lire

 27   qu'il s'agissait de caches pour des terroristes, et cetera. Mais il y avait

 28   également des affirmations selon lesquelles un massacre s'était produit là-

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  1   bas, et nous ne voulions pas être utilisés, nous ne pouvions pas être vus

  2   là-bas en tant que tel. Les attachés militaires se sont rendus sur place,

  3   mais nous, en tant que diplomates, nous ne pouvions pas encore y aller.

  4   C'est la raison pour laquelle j'ai dit que lorsqu'on nous a fait cette

  5   seconde proposition à Decani, nous avons accepté, et qu'alors nous avons pu

  6   nous rendre compte par nous-même de la situation.

  7   Q.  Cette simple affirmation qu'il s'agissait d'une campagne de propagande

  8   des autorités serbes pose la question de votre crédibilité du point de vue

  9   de la Défense. Puisque vous avez pris catégoriquement cette position -

 10   alors, maintenant vous venez de nous donner une explication un peu plus

 11   claire - mais pour être complètement clair quant à ce dont il s'agit ici,

 12   voici ma question suivante. De quelles informations disposiez-vous, à vrai

 13   dire, de quel volume, de quelle nature était votre connaissance quant à ce

 14   qui s'était passé à Prekaz au Kosovo, cette localité où le gouvernement

 15   serbe, je veux dire le ministère des Affaires étrangères de la RFY vous

 16   avait proposé de vous rendre ? De quelles informations disposiez-vous ?

 17   R.  Je disposais d'informations émanant de mes collègues britanniques et

 18   suédois, qui s'y étaient rendus un jour après les événements. Ils s'étaient

 19   rendu compte personnellement de la situation, et m'en avaient fait état.

 20   Ultérieurement, je me rappelle aussi de photographies des victimes qui

 21   avaient été disposées à Srbica et Skenderaj, photographies prises par

 22   l'assistant de l'attaché militaire allemand. Il y avait également des

 23   informations dans les journaux albanais du Kosovo, il me semble.

 24   Q.  Alors, je vois que vous vous en souvenez. Mais comment s'appelaient ces

 25   collègues qui vous avaient informé au sujet de Prekaz, est-ce que vous vous

 26   rappelez leurs noms ?

 27   R.  Le collègue suédois s'appelait Jonas Weiss. Quant au collègue

 28   britannique, c'était Julian Braithwaite.

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  1   Q.  Est-ce que vous souvenez des fonctions qu'ils occupaient au sein des

  2   ambassades de leurs pays respectifs ?

  3   R.  Le collègue suédois était tout comme moi, me semble-t-il, le second

  4   secrétaire, il avait des tâches similaires aux miennes; alors que M.

  5   Braithwaite, me semble-t-il, était premier secrétaire, mais il n'était pas

  6   un diplomate débutant à l'époque. Ça, j'en suis tout à fait certain.

  7   Q.  Est-ce qu'il avait en charge exclusivement le Kosovo, je parle de M.

  8   Braithwaite, le savez-vous ?

  9   R.  Non, il était régulièrement en charge des relations avec les médias.

 10   Q.  Alors, quelles étaient les informations qu'ils vous ont transmises au

 11   lendemain des événements de Prekaz ? De quelle nature étaient ces

 12   informations, que vous ont-ils dit ?

 13   R.  Ils m'ont parlé de la destruction du complexe, que je n'ai eu

 14   l'occasion de voir que bien plus tard, et il semblait qu'il y ait eu aussi

 15   des armes assez lourdes qui avaient été utilisées pour aboutir à de telle

 16   destruction.

 17   Q.  Quant aux autorités serbes, qu'affirmaient-elles de leur côté en ce qui

 18   concernait Prekaz ?

 19   R.  Elles affirmaient qu'elles avaient réussi à prendre une base des

 20   terroristes. Le même jour où les événements de Prekaz se sont produits,

 21   l'ambassadeur allemand avait un entretien avec M. Odalovic, et pendant

 22   l'entretien, quelqu'un est venu informer de quelque chose M. Odalovic, qui

 23   s'est ensuite tourné vers l'ambassadeur allemand en lui disant que le

 24   problème des terroristes avait été résolu.

 25   Q.  Alors, concernant ces deux informations que vous avez reçues de vos

 26   collègues suédois et britanniques et des autorités serbes, en dehors de ces

 27   informations y avait-il d'autres éléments provenant d'autres sources qui

 28   vous seraient parvenues, peut-être à vous personnellement, de sources dont

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  1   vous disposiez personnellement, toujours concernant ces mêmes événements ?

  2   R.  Non, je n'avais pas d'information qui me serait parvenue à titre

  3   personnel, ni d'expérience personnelle concernant les événements de Prekaz

  4   à l'époque.

  5   Q.  Vos collègues se sont rendus à Prekaz un jour après les événements, ils

  6   ont affirmé avoir vu des destructions ?

  7   R.  C'était peut-être un jour après, voire le jour même. Il me semble que

  8   c'était le matin, et qu'ils avaient réussi à se rendre sur place - je ne

  9   sais plus par quel moyen - donc à Prekaz. Ils m'ont également dit que

 10   lorsqu'ils sont revenus sur la route qu'ils avaient quittée, la police

 11   serbe les a pris par surprise et qu'ils ont même été arrêtés brièvement,

 12   qu'ils ont été mis brièvement en détention. Ils m'ont dit que le jour

 13   suivant, ils sont revenus à Belgrade. C'est alors que j'ai été informé par

 14   eux.

 15   Q.  Ils ont été retenus, ils n'ont pas été mis en détention ? Il y a une

 16   différence qui est très délicate dans les termes que vous employiez. La

 17   détention est une mesure extrêmement stricte. Du moins, c'est me l'a

 18   traduit. On a peut-être ici un malentendu entre les différentes langues,

 19   mais ils ont été retenus, n'est-ce pas, aux fins d'une vérification, mais

 20   pas mis en détention ?

 21   R.  Oui, excusez-moi.

 22   Q.  Cela ne dépend ni de vous, ni de moi. Mais bon, il y a aussi la

 23   question de la traduction ici, et je suis le compte rendu d'audience

 24   simultanément.

 25   Alors, concernant ces différents éléments, nous allons pouvoir

 26   conclure, et vous conviendrez avec moi, qu'il y a eu ici conflit entre les

 27   forces de sécurité serbes et l'UCK, les forces de sécurité serbe, de

 28   quelque force qu'il se soit agi, et l'UCK qui à l'époque du point de vue du

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  1   gouvernement serbe représentait une organisation terroriste ?

  2   R.  Les événements de Prekaz et la raison pour laquelle cela est

  3   devenue une question très importante était que de nombreux membres de

  4   différentes familles avaient été tuées par les Jashari. Donc, vous aviez

  5   ces images de femmes et d'enfants, de femmes et d'enfants qui avaient été

  6   tués également, et vous n'aviez pas là ce qui pouvait être fréquemment vu

  7   par la suite, à savoir l'affrontement classique entre des membres de l'UCK

  8   en uniforme d'un côté et des forces de sécurité serbes de l'autre. Je ne me

  9   rappelle pas qu'aucune de ces victimes ait porté quelque insigne que ce

 10   soit. Je sais qu'on nous a montré ou que l'attaché militaire nous a montré

 11   des armes qui ont été trouvées là-bas. Cela est exact.

 12   Q.  Est-il exact qu'il y ait eu un conflit entre l'UCK et les forces de

 13   sécurité serbes ? 

 14   R.  Je serais très prudent en affirmant quelque chose de cette nature, car

 15   c'était là un événement très différent de ce qui s'est passé pendant l'été,

 16   où il apparaissait qu'il y avait un niveau d'organisation bien plus

 17   important du côté de l'UCK. Ici, nous avions une action qui avait pris

 18   place sur un domaine familial, et les seuls aspects dont j'ai connaissance,

 19   c'est que M. Jashari était un membre important de l'UCK, mais peut-être pas

 20   si important, important au point qu'on puisse dire qu'il se soit agi d'un

 21   affrontement entre l'UCK et les forces de la police.

 22   Q.  Avez-vous entendu dire qui M. Adem Jashari était ?

 23   R.  Il était considéré comme le père fondateur de l'UCK, un leader, donc le

 24   père fondateur de l'UCK.

 25   Q.  Est-ce que vous savez qu'il y avait eu des mandats d'arrêt et des

 26   enquêtes diligentées contre lui à cause de ses activités

 27   anticonstitutionnelles ? En avez-vous connaissance ?

 28   R.  Non.

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  1   Q.  Avez-vous connaissance que plusieurs policiers serbes ont en cette même

  2   occasion été blessés ou tués ?

  3   R.  Oui. Depuis mon arrivée à Belgrade, il y avait des rapports d'attaques

  4   subies par les forces de la police, par leurs véhicules, les escortes de la

  5   police, et j'étais conscient de cela. Il était également fait état

  6   d'individus qui avaient été tués. Un forestier avait été tué, il me semble

  7   que c'était dans le village de Drenica.

  8   Q.  Avez-vous également connaissance que les forces de sécurité serbes

  9   avaient lancé un appel à leur égard leur proposant de se rendre de façon

 10   tout à fait pacifique ? En avez-vous connaissance ?

 11   L'INTERPRÈTE : Le témoin opine du chef.

 12   M. DJORDJEVIC : [interprétation] 

 13   Q.  Savez-vous qu'Adem Jashari a refusé cette proposition ?

 14   R.  C'est ce que j'ai ouï dire, oui.

 15   Q.  Savez-vous à quoi ressemblait la maison d'Adem Jashari ? L'avez-vous

 16   vu, avez-vous vu l'endroit où il vivait ? Savez-vous à quoi ressemblaient

 17   les remparts qui protégeaient et entouraient sa maison, et qu'il y avait

 18   des meurtrières dans ses murs ? Le savez-vous ?

 19   R.  A l'époque je l'ignorais, mais ultérieurement je l'ai vue, oui. J'ai vu

 20   dans l'état où il est encore actuellement, donc détruit.

 21   Q.  Puisque vous avez dit avoir connaissance que des policiers serbes

 22   avaient été tués, je ne sais pas si l'interprète pourra traduire cela, mais

 23   ils n'ont pas été tués par des lance-pierres; ils ont été tués par des

 24   armes à feu. Est-ce que vous avez vu quels types d'armes à feu se

 25   trouvaient dans sa maison, et est-ce que vous conviendrez avec moi que ces

 26   armes à feu ne peuvent en aucun cas être considérées comme des armes

 27   individuelles, conventionnelles des forces de sécurité ? Il s'agissait

 28   d'armes lourdes, de mines, d'explosifs, de bombes, et cetera. Et suite à

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  1   cette question, ma dernière question, puisque je vois que vous confirmiez

  2   cela, mais puisque nous avons ici un compte rendu d'audience, il serait bon

  3   que vous le confirmiez à haute et intelligible voix. Ma dernière question

  4   donc :

  5   Est-il logique qu'après ce dont nous venons de convenir, vous parliez

  6   de propagande serbe ? Imaginez, je ne sais pas moi, par exemple, la même

  7   situation dans votre propre pays ? Vous avez en Carinthie, par exemple, un

  8   Slovène qui est complètement fou -- je suis très familier de la situation

  9   parce que la Slovénie c'est une partie de mon ancien pays. Imaginez le cas

 10   d'un Adem Jashari qui, là-bas, décide de donner l'indépendance à sa

 11   minorité nationale. Est-ce que ce serait de la propagande autrichienne de

 12   la part de votre Etat si cette dernière entreprenait quelque mesure que ce

 13   soit contre un homme de cette nature, ou considérez-vous qu'il s'agit là de

 14   son droit, dans un ordre démocratique, de s'armer de mitrailleuses lourdes,

 15   de mines et d'autres armements afin d'ouvrir le feu sur les forces de

 16   sécurité de la République autrichienne ? Pourquoi, donc, dites-vous que

 17   vous ne souhaitiez pas être un pion dans les mains de la propagande serbe ?

 18   C'était un événement tragique et je trouve que --

 19   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Djordjevic.

 20   M. DJORDJEVIC : [interprétation] Excusez-moi, excusez-moi, oui.

 21   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous vous livrez à un discours

 22   politique extrêmement volubile, et vous abordez des questions de fond. Si

 23   vous souhaitez que le témoin commente un aspect particulier, soulevez-le

 24   directement --

 25   M. DJORDJEVIC : [interprétation] Oui, vous avez raison, Monsieur le

 26   Président, absolument. Excusez-moi. Je voulais simplement demander au

 27   témoin pourquoi il a qualifié cela de propagande dans la situation telle

 28   que nous la connaissons ? Mais excusez-moi pour être entré dans ces

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  1   longueurs. Je n'avais aucune motivation politique, veuillez me croire.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Tout d'abord pour répondre au début de votre

  3   question. Oui, on nous a présenté les armes dont il s'agissait, et bien

  4   entendu il ne s'agissait certainement pas de fusils de chasse, loin de là.

  5   Deuxièmement, il y avait deux affirmations concernant les événements de

  6   Prekaz. L'une était qu'il s'agissait d'une action légitime des forces de la

  7   police contre les terroristes; la seconde était qu'il y avait eu un

  8   massacre dont une famille avait été victime. J'ai conscience du fait qu'en

  9   apparence M. Jashari s'est vu proposer de se rendre, et qu'il a refusé en

 10   raison de l'attaque contre Prekaz.

 11   Quant au problème de nature politique, si vous me le permettez. La

 12   situation était la suivante : la province du Kosovo disposait d'une

 13   autonomie importante qui ensuite avait été annulée. Donc il y avait ici une

 14   voie dans laquelle nous souhaitions avancer où les leaders du Kosovo

 15   auraient pu s'engager dans des pourparlers avec Belgrade, pour se mettre

 16   d'accord sur les conditions d'une vie commune dans un Etat commun. Pourquoi

 17   ne souhaitions-nous pas être envoyés là-bas ? Parce qu'il s'agissait, comme

 18   je l'ai dit, de propagande. Nous ne voulions pas être vus dans des images

 19   qui avaient été tournées et qui auraient ensuite été présentées avec une

 20   seule version des faits, avec un seul point de vue et pas l'autre. C'est

 21   cela la raison.

 22   M. DJORDJEVIC : [interprétation]

 23   Q.  Je vous remercie. Ma question suivante : Est-ce que vous êtes allé à

 24   Obrinje ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Est-ce que vous vous êtes rendu en passant par Lipovac, en empruntant

 27   la route qui passe par le village de Lipovac, ou avez-vous emprunté un

 28   autre chemin ?

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  1   R.  Lipovac ou Likovac ?

  2   Q.  Likovac, oui, oui.

  3   R.  Oui, je suis passé par Likovac, je m'y suis rendu à plusieurs reprises

  4   également, car il s'agissait aussi là de l'un des quartiers généraux de

  5   l'UCK. Je me rappelle en particulier que nous sommes allés à Likovac entre

  6   les conférences de Rambouillet et de Paris afin de voir ce que l'UCK

  7   appelait son état-major. Mais est-ce que nous sommes passés par Likovac

  8   quand nous sommes allés à Gornje Obrinje, je ne m'en souviens pas. C'est

  9   relativement proche, mais je ne pourrais pas vous dire exactement quelle

 10   route nous avons empruntée.

 11   Q.  Avez-vous connaissance du fait qu'en empruntant ce chemin, la mission

 12   de la Croix-Rouge a été victime des mines qui avaient été posées sur ce

 13   chemin, donc à Likovac, et qu'il y a eu des blessés ?

 14   R.  Oui, en effet. Il y a eu deux incidents, à vrai dire. Le premier était

 15   que des membres canadiens de la KDOM ont déclenché une mine, et qu'un

 16   véhicule blindé a été complètement détruit. Il n'y a pas eu de blessés à

 17   cette occasion. Ensuite, lors du second incident, le véhicule du CICR a

 18   touché une mine et je sais qu'il y a eu au moins un médecin - c'était

 19   quelqu'un du cru - qui a été tué dans cet incident.

 20   Q.  Savez-vous qui leur est venu en aide après cet incident et qui a

 21   procédé au transfert des survivants jusqu'aux services médicaux les plus

 22   proches, et cetera ?

 23   R.  Je suppose qu'il s'agissait des autorités serbes qui leur sont venues

 24   en aide.

 25   Q.  Encore une fois, est-ce que vous le savez ou vous le supposez ?

 26   R.  Je suppose.

 27   Q.  Très bien. Je vous remercie. Savez-vous qui avait posé cette mine sur

 28   cette route ? Sous le contrôle de qui se trouvait ce territoire ?

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  1   R.  Encore une fois, je suppose ici. Je ne sais pas qui a posé cette mine,

  2   mais c'était notre estimation que l'UCK avait posé ces mines. Alors

  3   j'ignore comment les Canadiens s'en sont sortis. Ils ont eu la chance

  4   d'avoir des téléphones portables qui fonctionnaient, qui captaient un

  5   signal à partir d'une colline proche, car leur téléphone par satellite

  6   avait été détruit du fait du déclenchement de cette mine.

  7   Q.  Ma question suivante est liée à votre déclaration. Vous avez dit qu'en

  8   juin 1998 - vous l'avez déjà dit plusieurs fois - vous vous êtes rendu à

  9   Malisevo. Une fois, vous étiez en compagnie du secrétaire général du

 10   ministère des Affaires étrangères autrichien, et ensuite vous mentionnez M.

 11   Kadri Veseli, le numéro sept. Vous parlez du soi-disant gouvernement Thaqi.

 12   Je ne veux pas entrer dans les détails des notes que vous avez émises à

 13   l'intention de votre ambassade au Luxembourg et vers Vienne. Mais qu'est-ce

 14   que vous avez réussi à obtenir, si toutefois vous avez obtenu quoi que ce

 15   soit lors de vos contacts avec le numéro trois et le numéro sept, avec les

 16   dénommés Thaqi et Rasim [phon]. Et si vous avez obtenu quoi que ce soit,

 17   que considérez-vous être le résultat de vos efforts diplomatiques et de vos

 18   contacts avec ces deux personnes ? Je ne parle que de ces deux personnes de

 19   l'UCK et non des hommes politiques albanais du Kosovo.

 20   R.  Je pense que s'il y a eu un résultat final, c'était la volonté de

 21   s'intégrer dans un processus politique, et comme on l'a vu, ils ont bien

 22   participé à la conférence de Rambouillet. Donc je pense que le fait d'avoir

 23   eu des contacts avec eux les a fait participer au processus politique, il

 24   les y a amenés. C'était du moins notre point de vue selon lequel nous

 25   sommes parvenus à quelque chose par l'intermédiaire de ces réunions.

 26   Q.  Est-ce qu'ils ont interrompu leurs activités jusqu'au début des

 27   bombardements de l'OTAN, donc jusqu'au 24 mars 1999, et est-ce qu'ils ont

 28   poursuivi leurs combats par des méthodes politiques, par des pourparlers,

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  1   des négociations ?

  2   R.  Le conflit, dans le meilleur des cas, était contenu par la Mission de

  3   vérification de l'OSCE au Kosovo dans certaines limites, mais il s'est

  4   poursuivi. Des escarmouches étaient fréquentes également après ce moment,

  5   et je parle ici de la période qui s'étend jusqu'aux accords de Rambouillet.

  6   C'est de cela que vous parlez ?

  7   Q.   Puisque vous avez dit que vous estimiez avoir réussi à amener ces

  8   personnes à participer à des pourparlers politiques et qu'ils avaient une

  9   plate-forme commune dans ce cadre -- j'en resterai là. Ma question suivante

 10   -- je n'aborderai pas maintenant les négociations. Je voudrais savoir si

 11   vous avez connaissance de tous les accords de cessez-le-feu qui ont été

 12   conclus entre les forces de sécurité serbe et l'UCK ? C'est ma première

 13   question.

 14   R.  Non, j'ai été impliqué dans aucune de ces négociations. En janvier

 15   1999, j'ai participé aux négociations concernant l'échange de soldats de la

 16   VJ, mais à aucun accord de cessez-le-feu.

 17   M. DJORDJEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, il me semble qu'il

 18   est temps de faire une pause. Il n'y aura pas d'autres questions puisque le

 19   témoin n'a pas connaissance des accords de cessez-le-feu qui sont

 20   intervenus entre les forces de sécurité serbes et l'UCK. Je préférerais

 21   donc continuer après la pause.

 22   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Maître Djordjevic. Nous faisons

 23   la pause à un moment qui est tout à fait logique. Nous reprendrons

 24   l'audience à 13 heures.

 25   --- L'audience est suspendue à 12 heures 32.

 26   --- L'audience est reprise à 13 heures 02.

 27   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Djordjevic, c'est à vous.

 28   M. DJORDJEVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président,

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  1   Messieurs les Juges.

  2   Q.  Je vais vous poser ma question suivante. A plusieurs reprises vous avez

  3   parlé de M. David Slinn, un diplomate britannique. Pourriez-vous nous dire

  4   de qui il s'agissait exactement ?

  5   R.  C'était une personne qui travaillait à l'ambassade du Royaume-Uni à

  6   Belgrade et qui remplaçait M. Braithwaite, parce que M. Braithwaite est

  7   parti, il l'a remplacé, et c'était lui s'est occupé de Kosovo à partir de

  8   ce moment-là, ça devait être au printemps, voire au début de l'été 1998.

  9   Q.  Pourriez-vous me dire, si tant est vous vous en souveniez, à quels

 10   pourparlers il a participé, avec qui s'est-il entretenu lorsque vous vous

 11   trouviez au Kosovo avec lui ?

 12   R.  Il parlait au même groupe de personnes de moi à Pristina, des hommes

 13   politiques, mais il n'avait pas l'autorisation de s'entretenir avec l'UCK,

 14   en tout cas pas avant juillet, pas avant la fin juillet, juste avant que

 15   nous allions ensemble à Klecka.

 16   Q.  Ma question suivante porte sur les événements d'Obrinje, vous avez

 17   parlé de ces événements, et j'ai sous la main un document, le document

 18   D0024615. Je pense que ça doit être la version en B/C/S, le document en

 19   anglais se trouve juste à côté. Pourrions-nous, s'il vous plaît, afficher à

 20   l'écran côte à côte ces deux documents. Il s'agit d'un document émanant du

 21   ministère de l'Intérieur de la République de Serbie. Nous attendons qu'il

 22   s'affiche. Voici, le document est à l'écran.

 23   Une question rapide à propos de ce document. Tout d'abord, le connaissez-

 24   vous, il s'agit d'un document émanant du ministère des Affaires étrangères

 25   portant sur Obrinje ?

 26   R.  Non, je n'ai jamais vu ce document, en tout cas à l'époque, je ne

 27   l'avais pas vu, mais je me souviens de l'incident, en tout cas.

 28   Q.  Très bien. Savez-vous qui est Kari Korklo, l'expert médico-légal venant

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  1   de Finlande ?

  2   R.  Semble-t-il qu'il faisait partie de l'équipe de médecins légaux venant

  3   de Finlande. Je crois qu'on s'était mis d'accord pour qu'il fasse des

  4   enquêtes dans six cas en tout, dans six affaires. Je me souviens de Helena

  5   Ranta, de M. Timo Lahelma aussi, qui était ambassadeur auprès du ministère

  6   des Affaires étrangères finlandais chargé des affaires du droit de l'homme,

  7   des droits humains, et ils faisaient partie de cette équipe qui est partie

  8   le 10 décembre à Gornje Obrinje pour procéder aux exhumations.

  9   Q.  Savez-vous que cette équipe de Finlandais qui est partie vers le site

 10   avec Mme Danica Marinkovic, la juge d'instruction de Pristina, n'ont pas pu

 11   se rendre sur le site parce que le site était déjà contrôlé par les forces

 12   de l'UCK, et la situation était dangereuse; la juge d'instruction était

 13   escortée par la police. Est-ce que vous étiez au courant de tout cela ?

 14   R.  Oui, je faisais partie de ce voyage d'ailleurs. J'étais dans le

 15   véhicule autrichien qui se trouvait en tête de convoi. Il y avait aussi la

 16   MOCE avec des camions, toute l'opération avait été organisée au préalable,

 17   et pour ce qui concerne la MOCE et l'équipe des médecins légistes

 18   finlandais, ils se faisaient escorter pour qu'ils aillent à Gornje Obrinje,

 19   qui était un territoire détenu par l'UCK. Mais c'est le matin, en fait,

 20   juste lorsqu'on est partis faire les exhumations, tout avait été préparé à

 21   l'avance, mais Mme Marinkovic ne voulait pas participer, elle ne se sentait

 22   pas en sécurité, et il y avait aussi toute une escorte de véhicules de

 23   police serbe qui nous escortaient; donc, on n'a pas pu rentrer en

 24   territoire détenu par l'UCK, parce que nous savions qu'il y aurait

 25   automatiquement des heurts, et nous, on se trouvait en plus entre les deux

 26   parties en conflit, c'est-à-dire nous, les Autrichiens, les Finlandais et

 27   la MOCE, les observateurs de l'Union européenne. C'est pour ça qu'on a

 28   décidé de ne pas rentrer.

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  1   Q.  Oui, mais ça a été remis à plus tard. C'est le juge d'instruction, Mme

  2   Marinkovic, qui a décidé de remettre ça à plus tard ?

  3   R.  Oui. Remettre ça à plus tard c'est une façon de dire les choses. C'est

  4   le juge d'instruction qui a insisté pour venir avec nous, escortés par la

  5   police, et c'est pour cela qu'il n'y a pas pu avoir d'exhumation. Par la

  6   suite, l'équipe finlandaise a décidé, alors que tout avait été préparé,

  7   tout avait été organisé pour qu'ils aillent ensuite à Pristina dans les

  8   laboratoires de la police scientifique, et cetera, ils ont décidé de se

  9   concentrer sur un autre site, sur le site d'Orahovac.

 10   Q.  Merci.

 11   M. DJORDJEVIC : [interprétation] J'aimerais, s'il vous plaît, que ce

 12   document soit versé au dossier.

 13   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il sera admis.

 14   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il recevra la cote D00061.

 15   M. DJORDJEVIC : [interprétation]

 16   Q.  Ma question suivante porte sur le document 2654 de la liste 65 ter.

 17   M. DJORDJEVIC : [interprétation] Pourrions-nous, s'il vous plaît, l'avoir à

 18   l'écran à la fois en serbe et en anglais -- en fait c'est en allemand.

 19   Q.  Nous avons les deux documents à l'écran, un document en anglais et un

 20   autre en allemand, documents qui ont été rédigés le 7 octobre 1998. S'agit-

 21   il de votre document ? Est-ce vous qui l'avez rédigé ?

 22   R.  Oui, je le reconnais. Je vois, d'ailleurs, que je me suis trompé. J'ai

 23   mis le 7 septembre dans le texte, alors que c'est le 7 octobre, ce qui

 24   s'agit d'une erreur parce que la réunion avec l'ambassadeur Holbrooke a eu

 25   lieu le 7 octobre et non pas le 7 septembre. Le 7 septembre est une

 26   coquille.

 27   Q.  Je ne vais pas vous demander de reprendre ce qui est écrit au titre de

 28   la Résolution des Nations Unies 1199, mais j'aimerais savoir pourquoi vous

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  1   avez rédigé votre texte ainsi, et j'aimerais savoir quelle était la

  2   position de l'ambassade autrichienne et la position de l'ambassadeur

  3   Holbrooke à propos de ce problème, et à propos des actions entreprises par

  4   la République de Serbie et du président Milosevic. J'aimerais savoir si on

  5   vous avait entretenu.

  6   R.  Mais c'est la première fois que M. Holbrooke a rencontré M. Petritsch

  7   en tant qu'envoyé spécial au Kosovo. Il avait dû être nommé juste quelques

  8   jours auparavant. Je me souviens avoir appelé le vice-adjoint de la mission

  9   américain à Belgrade en lui demandant au moins qu'on fasse un briefing,

 10   afin que M. Holbrooke ne puisse être briefé à propos des discussions qu'il

 11   aurait avec M. Milosevic parce qu'ils ne nous avaient pas vraiment mis au

 12   courant de ce dont ils avaient parlé avec les dirigeants principaux de

 13   Belgrade.

 14   Je me souviens que c'est ce qui est écrit ici d'ailleurs. Il m'a dit

 15   qu'il avait une impression extrêmement sinistre de tout cela. C'étaient des

 16   négociations extrêmement dures, les plus dures auxquelles il avait jamais

 17   participé d'ailleurs, qu'il avait eues avec Milosevic depuis des années.

 18   Milosevic lui a dit que toutes les demandes qui se trouvaient dans la

 19   Résolution du Conseil des Nations Unies 1199 avaient été satisfaites. M.

 20   Holbrooke a dit, ensuite, que si les négociations n'aboutissaient pas, la

 21   seule solution serait un ACTORD. Un ACTORD c'est sans doute du jargon OTAN,

 22   mais il était menacé de bombardements en tout cas. Ça c'était au début

 23   octobre, donc c'était à ce moment-là, je crois, que le rapport du

 24   secrétaire général en application de la Résolution 1199 du Conseil de

 25   sécurité était attendu.

 26   M. DJORDJEVIC : [interprétation] Très bien. J'aimerais, s'il vous plaît,

 27   que l'on verse ce document au dossier.

 28   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien.

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  1   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il recevra la cote D00062.

  2   M. DJORDJEVIC : [interprétation] Je vous remercie. Pourrions-nous avoir

  3   maintenant à l'écran la pièce 2656 de la liste 65 ter, à la fois en anglais

  4   et en B/C/S.

  5   Q.  Nous avons les deux documents. Monsieur Kickert, est-ce que vous

  6   reconnaissez ce document ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Est-ce que la date portée est exacte, le 9 octobre 1998 ?

  9   R.  C'est la même erreur que précédemment. Je l'ai écrit le 9 octobre, et

 10   cela portait sur les négociations où j'ai été présent entre les

 11   ambassadeurs Petritsch et Kotov, le 9 octobre, car il y est fait référence

 12   à la réunion du 8 octobre entre M. Ivanov et le président Milosevic.

 13   Q.  Pouvez-vous me dire, s'il vous plaît, alors nous avons votre rapport où

 14   vous dites que les Russes s'opposent toujours à l'utilisation de la force,

 15   et c'est dans ce second paragraphe où il est dit également -- on trouve

 16   votre affirmation selon laquelle les Russes estiment que la RFY a déjà pris

 17   de nombreuses initiatives afin de se conformer aux dispositions de la

 18   Résolution 1199 du Conseil de sécurité. D'un point de vue tout à fait

 19   pratique, quel était l'objectif de cet entretien que vous avez eu avec M.

 20   l'ambassadeur, M. le ministre, y compris le ministre de la Défense, donc

 21   avec M. Kotov et le ministre de la Défense russe, Sergeyev Ivanov, comme

 22   cela est indiqué ici. Vous dites que le 4 octobre, Milosevic, après des

 23   pressions aient été exercées sur lui, a accepté qu'il y ait une mission de

 24   l'OSCE au Kosovo. Donc pourriez-vous commenté brièvement cela du point de

 25   vue des négociations et des pourparlers diplomatiques auxquels vous avez

 26   participé ?

 27   R.  L'ambassadeur russe Kotov avait l'intention d'informer M. Petritsch

 28   quant à ce que les Russes avaient entrepris. Comme je l'ai expliqué

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  1   précédemment, et j'ai écrit cela dans le troisième paragraphe, il y avait

  2   une sorte de ligne qui était celle des Américains et il y avait la ligne

  3   qui était celle des Russes. Ils essayaient de convaincre M. Milosevic

  4   d'accepter l'idée d'observateurs internationaux. Il s'agissait d'élargir le

  5   cadre de la KDOM pour faire une mission de l'OSCE, et il me semble que j'en

  6   fais état dans le sixième paragraphe.

  7   Q.  Cette déclaration qui est la vôtre confirme ce que vous avez dit

  8   précédemment, à savoir que l'ambassadeur Holbrooke a fait mention d'une

  9   menace de bombardements, ou, à tout le moins, a fait usage d'une menace

 10   d'un recours à la force. Ce qui m'intéresse c'est quel était le point de

 11   vue de la partie russe en ce qui concerne le recours à la force en l'espèce

 12   ? Quelles étaient vos impressions ? Je suis sûr qu'après cette discussion

 13   vous avez eu un point de vue à ce sujet.

 14   R.  Cela ne faisait l'objet d'aucun secret. La menace de bombardements a

 15   même été mentionnée publiquement dans les médias. Ces différentes étapes

 16   qui pouvaient être franchies en vertu de l'ACTORD, tout cela entrait dans

 17   le cadre de moyens qui étaient utilisés afin de convaincre les autorités de

 18   Belgrade de s'aider et d'accepter la mission de l'OSCE et de la MVK, en

 19   plus de la surveillance aérienne de l'OTAN. Donc c'était une solution

 20   d'ensemble à propos de laquelle M. Holbrooke a négocié.

 21   M. DJORDJEVIC : [interprétation] Avant de passer à une autre série de

 22   documents, je souhaiterais que ce document que nous avons sous les yeux

 23   soit versé au dossier, s'il vous plaît.

 24   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Le document est versé.

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document reçoit la cote D00063,

 26   Messieurs les Juges.

 27   M. DJORDJEVIC : [interprétation]

 28   Q.  Monsieur Kickert, compte tenu du fait que vous êtes un diplomate, je

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  1   vais vous poser la question suivante. Il est question de menace de recours

  2   à la force de la part de la première puissance militaire du monde, à savoir

  3   l'OTAN, et ce, à l'encontre de la RFY. Alors dites-moi, concernant la

  4   menace de recours à la force de frappes aériennes, et recours à la force

  5   militaire, qui était censé appliquer ces pressions contre un état souverain

  6   ?

  7   R.  Comme vous le savez bien, il s'agit de l'OTAN. L'ACTORD correspond à un

  8   système où il existe différentes étapes aux termes desquelles ont peut

  9   mettre en œuvre ce type de menace. Bien sûr, les Etats membres de l'OTAN

 10   ont à donner leur accord. Je souhaite ajouter que l'Autriche n'est pas

 11   membre de l'OTAN, donc nous n'avons pas d'éléments nous indiquant ce qui se

 12   passait à l'époque et à quel niveau. Je ne sais même pas comment l'OTAN

 13   fonctionne précisément, de ce point de vue.

 14   Q.  Nous nous sommes pas très bien compris. Ma question était la suivante :

 15   lorsqu'il était question de recours à la force de la part de l'OTAN, est-ce

 16   que ce recours à la force devait être approuvé par une décision du Conseil

 17   de sécurité, au sens où il se serait agi d'un précédent ? J'ai compris à la

 18   lecture de votre CV que vous étiez un diplomate expérimenté, mais c'est

 19   pour ça que je vous pose la question. Est-ce que l'OTAN pouvait procéder à

 20   des frappes aériennes, des bombardements de par la simple décision de ses

 21   Etats membres, membres de la communauté internationale; ou l'OTAN ne

 22   pouvait-il le faire qu'avec une décision allant dans ce sens et émanant du

 23   Conseil de sécurité des Nations Unies ? Si toutefois vous pouvez répondre à

 24   cette question.

 25   R.  J'aurais à me reporter à la Résolution 1199 du Conseil de sécurité,

 26   mais je doute qu'il soit agi une résolution en vertu du chapitre 7. La

 27   discussion qui a été celle après les frappes aériennes de l'OTAN, qui sont

 28   intervenues le 24 mars 1999, comme vous l'avez dit, était qu'il n'y avait

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  1   pas de résolution des Nations Unies donnant mandat à l'OTAN en ce sens.

  2   Q.  Pouvons donc nous en conclure qu'il s'agissait d'une décision qui avait

  3   été prise avant tout par les Etats membres de l'OTAN, non pas tous les

  4   Etats membres, mais avant tout par les Etats-Unis ?

  5   R.  A mon sens, tous les Etats membres doivent donner leur accord pour une

  6   décision de cette nature, mais comme je l'ai déjà dit, je ne dispose pas

  7   d'éléments précis quant à la façon dont fonctionne l'OTAN. Comme vous

  8   l'avez vu, après le début des frappes aériennes, cette décision a été celle

  9   qui a été prise clairement par tous les Etats membres de l'OTAN.

 10   Q.  Ma question suivante : avez-vous connaissance que l'OTAN ait jamais

 11   recouru précédemment à la force de cette façon contre quelque état que ce

 12   soit au monde avant les frappes aériennes, les bombardements qui ont frappé

 13   la RFY ?

 14   R.  Il me semble, selon mes souvenirs, qu'il y a eu des bombardements en

 15   Bosnie. Cela a dû se passer en 1995, me semble-t-il.

 16   Q.  Et en dehors de cela ?

 17   R.  Pour autant que je m'en souvienne, non.

 18    Q.  Alors quand vous parlez de la Bosnie, vous vous conviendrez qu'il

 19   s'agissait là encore de bombardements des positions des Serbes de Bosnie ?

 20   R.  Ce que je dis maintenant correspond aux éléments que je pouvais lire

 21   dans les médias, ce que je pouvais apprendre des médias. Je n'ai pas été

 22   présent en Bosnie à l'époque.

 23   Q.  Ce n'est pas grave. Je retire cette question, alors. Le thème suivant

 24   auquel je voudrais passer, celui des accords de Rambouillet. Quel était

 25   votre rôle là-bas ?

 26   R.  A un moment, M. Petritsch a été nommé envoyé spécial des Nations Unies.

 27   J'étais son assistant car j'étais chargé du Kosovo, et ma tâche

 28   particulière était d'assurer la liaison avec les Albanais du Kosovo, en

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  1   plus de cela.

  2   Q.  Dans cette situation est-ce qu'un autre collègue peut-être, un autre

  3   diplomate travaillait avec vous pour ce qui était des Albanais du Kosovo,

  4   ou s'agissait-il exclusivement de votre rôle à vous ?

  5   R. Non, je n'en avais pas la charge exclusive. Il y avait aussi un collègue

  6   allemand, puisque depuis le début, depuis janvier 1999, l'Allemagne avait

  7   pris en charge la présidence de l'Union européenne, et ce collègue allemand

  8   était également présent et avait des contacts avec les Albanais du Kosovo.

  9   Q.  Comment s'appelait ce collègue et au nom de qui intervenait-il ? Est-ce

 10   que c'était au nom de la République fédérale d'Allemagne, au nom des

 11   Nations Unies ou d'une autre entité ? Comment s'appelait-il ?

 12   R.  Il s'appelait Axel Dittmann, D-i-t-t-m-a-n-n. C'était un diplomate

 13   allemand représentant l'Allemagne, mais également la présidence de l'Union

 14   européenne pour le premier semestre de 1999.

 15   Q.  Au meilleur de la connaissance et du souvenir que vous pouvez en avoir,

 16   la délégation albanaise qui était assez composite, qui comprenait des

 17   membres de l'UCK, des hommes politiques - et je ne nommerai ici personne -

 18   mais est-ce qu'il y avait dans cette délégation ne serait-ce qu'une seule

 19   personne qui aurait eu des exigences inférieures à l'indépendance, qu'ils

 20   ne seraient pas allés jusqu'à l'indépendance totale du Kosovo ?

 21   R.  Ils ont posé cette indépendance comme leur objectif final au début,

 22   mais l'accord de Rambouillet avait justement comme objectif une forme

 23   d'autonomie au sein de la RFY. Ce qui était proposé c'est qu'ils ne

 24   deviennent pas complètement indépendants.

 25   Q.  Est-ce que vous conviendriez avec moi qu'en substance cet accord

 26   reposait sur une décision finale concernant le statut du Kosovo, question

 27   dont la réponse a été reportée pendant des années et des années, et que

 28   vous pouviez compter sur les doigts d'une main ceux qui, dans le référendum

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  1   organisé par les habitants du Kosovo, auraient accepté cela ?

  2   R.  La décision concernant le statut final du Kosovo a évité de faire

  3   mention de la notion de référendum, mais il était dit qu'il fallait

  4   "prendre en considération la volonté du peuple." C'était l'une des

  5   questions les plus controversées dans les négociations de Rambouillet.

  6   C'était une clause particulière, "review clause" en anglais.

  7   Q.  Est-ce que la délégation serbe a accepté cette disposition et ensuite

  8   la version finale qui a été proposée, qui devait être signée à Paris ?

  9   R.  Non, ils ne l'ont pas acceptée. Ils ont refusé également à Paris. Ils

 10   ont déclaré qu'ils n'accepteraient pas cet accord et qu'ils le rejetaient

 11   dans son ensemble.

 12   Q.  Vous souvenez-vous s'il a été dit à la partie serbe qu'il y aurait une

 13   attaque de la part de l'OTAN à l'encontre de la RFY si un tel accord

 14   n'était pas signé ?

 15   R.  Je pense qu'il était clair pour tout le monde là-bas que cette menace

 16   de bombardements était tout à fait manifeste, tout à fait claire. Il était

 17   tout à fait clair que s'il n'y avait pas d'accord, on commencera à procéder

 18   au bombardement. Alors, je pense que la décision de la délégation serbe et

 19   de la délégation de la RFY a été prise en pleine connaissance de ces

 20   menaces de bombardements. Après des efforts de dernière minute à Paris, les

 21   trois négociateurs - Petritsch, Mayorski et Holbrooke lui-même - se sont

 22   rendus à Belgrade. Après qu'ils sont partis, comme nous le savons tous, les

 23   bombardements ont commencé.

 24   Q.  Avez-vous connaissance de la position qui était celle de l'équipe de

 25   négociateurs internationaux, à titre individuel ? Je pense ici aussi aux

 26   leaders, aux personnes qui ont participé en tant que négociateurs

 27   principaux. Vous pouvez, toutefois, nous le dire. Albright, Holbrooke,

 28   Mayorski, Petritsch.

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  1   R.  Il y avait trois négociateurs : Chris Hill pour les Etats-Unis,

  2   Wolfgang Petritsch pour l'Union européenne, et Mayorski pour la Fédération

  3   de Russie. Présents également étaient des représentants du Groupe de

  4   contact, et dans le Groupe de contact élargi est également le président

  5   exercé de l'OSCE. A l'époque, c'était la Norvège.

  6   Donc, il y avait des réunions régulières de ce Groupe de contact,

  7   souvent avec l'intervention des directeurs politiques, puis moins

  8   fréquemment, mais régulièrement également, il y avait également des

  9   réunions du Groupe de contact au niveau ministériel. Nous avions des

 10   visites des ministres individuels du Groupe de contact, les Français, les

 11   Britanniques, et le secrétaire d'Etat américain qui rendait également

 12   visite et en général restait quelques jours.

 13   Q.  Est-ce que vous pourriez nous dire les positions des trois grands

 14   négociateurs; Etats-Unis, Union européenne et Russie ? Est-ce que vous

 15   pourriez nous dire quelle était la position de ces trois figures après le

 16   refus des Serbes de signer lorsque les négociations ont abouti ?

 17   R.  Est-ce que voulez dire à Rambouillet ou à Paris ?

 18   Q.  A Paris, parce qu'à Paris les négociations ont échoué, et les

 19   bombardements allaient suivre. Quel était l'avis des représentants

 20   américains, russes et européens ? Est-ce qu'ils étaient unanimes quant à

 21   l'opportunité de bombarder la République de Serbie ou la RFY ?

 22   R.  Je pense que ce n'est pas un secret qu'il y avait des divergences

 23   d'opinion, et une grande déception devant l'absence de décision à Paris.

 24   Les choses étaient telles que plus personne ne pourrait faire marche

 25   arrière. Comme je l'ai dit, il y a eu des initiatives de la dernière chance

 26   à Belgrade, mais je n'étais pas là. Des propositions ont été faites à M.

 27   Milosevic, l'invitant à revoir sa position. Mais apparemment c'était un non

 28   catégorique, en tout cas c'est ce qu'on nous a dit, et ce qui s'est produit

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  1   ensuite est inscrit dans les livres d'histoire.

  2   Q.  Monsieur Kickert, pourriez-vous nous dire quelle est votre formation ?

  3   R.  Je suis géographe et historien de formation.

  4   Q.  Tout à coup je comprends les choses. Voilà, je vous remercie. C'est

  5   tout pour moi. Merci d'être venu déposer.

  6   M. DJORDJEVIC : [interprétation] J'ai terminé mon contre-interrogatoire.

  7   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Maître Djordjevic.

  8   Madame Gopalan, avez-vous des questions supplémentaires ?

  9   Mme GOPALAN : [interprétation] Oui, j'ai quelques questions.

 10   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous en prie.

 11   Nouvel interrogatoire par Mme Gopalan : 

 12   Q.  [interprétation] Monsieur Kickert, j'ai quelques questions au sujet des

 13   exhumations à Gornje Obrinje dont vous avez parlé. En répondant à une

 14   question du conseil de la Défense, vous avez indiqué que le projet initial

 15   prévoyait que l'équipe de légistes finlandaise et la MOCE se rendraient sur

 16   place, et vous dites que ce n'aurait pas été un problème. Mais pour que les

 17   choses soient claires, quel a été le problème qui est survenu qui a empêché

 18   que les exhumations puissent se faire ?

 19   R.  Notre convoi était escorté par la police serbe. C'était ça, le

 20   problème, parce que comme je l'ai déjà dit - et j'étais là lors d'une des

 21   inspections des charniers avec l'équipe finlandaise - même s'il y avait une

 22   surveillance rapprochée, nous avions un accès inconditionnel. D'ailleurs,

 23   dans l'échange de correspondance dont j'ai parlé ce matin entre les

 24   ministres des Affaires étrangères de la Yougoslavie et de la Finlande, le

 25   libre accès avait été octroyé, garanti. Donc, nous pensions que Mme

 26   Marinkovic voulait faire ces exhumations. Il n'y avait pas de problème.

 27   Mais lorsqu'elle a insisté pour que la police nous accompagne, nous avons

 28   dû interrompre l'opération; sinon, qui sait ce qui aurait pu se produire.

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  1   Q.  Merci. Donc vous n'avez pas pu avoir accès à ce site ce jour-là. Est-ce

  2   que des mesures ont été prises les journées précédentes pour rétablir

  3   l'accès ?

  4   R.  Oui. Par coïncidence, il se trouvait que le ministre de la Justice

  5   yougoslave se trouvait à Pristina, et nous avons pu le rencontrer à

  6   l'administration à Pristina, et nous lui avons fait part de nos doléances.

  7   Il n'était pas en mesure de faire droit à notre requête, à savoir que nous

  8   voulions un accès au site d'exhumation seul, et nous voulions également

  9   ramener les dépouilles tout seul à Pristina. Cela a également été évoqué en

 10   vain par l'ambassadeur Petritsch à Belgrade, et alors l'équipe finlandaise

 11   a fait ses bagages et est entrée chez elle pour Noël.

 12   Q.  Vous avez également dit qu'après le refus d'accès à Gornje Obrinje, les

 13   Finlandais ont décidé de se concentrer sur Orahovac. Est-ce qu'ils ont eu

 14   des problèmes ?

 15   R.  Non, Orahovac, c'était sous le contrôle de la police serbe. Donc, il

 16   n'y avait pas de problèmes d'accès, je veux dire.

 17   Q.  Pourriez-vous nous expliquer quel était l'incident qui faisait l'objet

 18   d'une enquête à Orahovac ?

 19   R.  Des accusations de présence de charniers dans un dépôt d'immondices. Et

 20   l'idée était également de procéder à des exhumations sur place, et

 21   d'obtenir - moi, je ne suis pas légiste - des informations sur l'identité

 22   de ces personnes et la manière dont elles avaient été tuées.

 23   Q.  Dernière question, pour revenir à Gornje Obrinje, savez-vous si des

 24   exhumations ont été pratiquées à cet endroit ?

 25   R.  Peut-être après les bombardements de l'OTAN. Je ne pense pas, je ne

 26   sais pas que ces exhumations aient eu lieu avant, parce que les événements

 27   se sont précipités, et toute la communauté internationale se concentrait

 28   sur l'incident de Racak.

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  1   Q.  Pour que les choses soient claires, avant le bombardement par l'OTAN,

  2   pour autant que vous le sachiez, aucune exhumation n'a eu lieu à Gornje

  3   Obrinje ?

  4   R.  Pour autant que je sache, non. Mais début 1999, je n'étais plus

  5   directement responsable de l'équipe finlandaise qui travaillait pour

  6   l'Union européenne, et ce sont mes collègues allemands qui ont repris le

  7   flambeau et ont traité directement avec cette équipe; et ce n'était plus

  8   moi.

  9   Q.  Merci, Monsieur Kickert. Je n'ai plus de questions pour vous.

 10   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Madame Gopalan.

 11   [La Chambre de première instance se concerte]

 12   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous entendrez avec satisfaction,

 13   Monsieur Kickert, que nous sommes arrivés au terme de votre déposition.

 14   Nous vous remercions d'être venu ici, et d'avoir apporté votre concours.

 15   Vous pouvez maintenant reprendre vos activités normales.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Messieurs les Juges. Merci à

 17   l'Accusation et la Défense de m'avoir permis de terminer aujourd'hui.

 18   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je pense qu'il nous reste deux

 19   minutes. Ce n'est pas la peine d'essayer de les remplir. Nous allons lever

 20   la séance pour aujourd'hui et nous reprendrons l'audience lundi après-midi

 21   à 14 heures 15.

 22   [Le témoin se retire]

 23   --- L'audience est levée à 13 heures 43 et reprendra le lundi 23 mars 2009,

 24   à 14 heures 15.

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