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1 Le jeudi 2 avril 2009
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 05.
5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour.
6 Madame D'Ascoli -- non, non, je m'excuse. Ce n'est pas Mme D'Ascoli, c'est
7 Madame Gopalan.
8 Mme GOPALAN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Le témoin
9 suivant est le Dr Shukri Gerxhaliu.
10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie.
11 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Monsieur le Président.
12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] C'est un plaisir de vous voir, Maître
13 Djordjevic.
14 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Le plaisir est partagé, Messieurs les
15 Juges.
16 Nous avions dit que si nous avions des questions administratives à
17 soulever, nous le ferions devant cette Chambre de première instance. Alors,
18 il s'agit toujours du même et sempiternel problème qui, à mon avis, ne peut
19 pas être réglé, mais avec le passage du temps, il devient de plus en plus
20 difficile de le régler. Il s'agit d'un problème technique à propos de
21 l'ordinateur de l'accusé qui doit utiliser un disque dur extérieur, et ce,
22 dans le quartier pénitentiaire des Nations Unies. Nous avons d'abord été
23 rassurés, on nous a dit que cela sera réglé, mais le problème n'a pas été
24 réglé. Alors, le fait est que mon collègue, mon confrère Me Djurdjic et
25 moi-même, avons des problèmes pour préparer notre défense du fait de la
26 quantité monumentale de documents que nous devons fournir à notre client
27 sur des CD, sur des DVD et il n'arrive véritablement pas à se retrouver
28 dans ce labyrinthe de documents en utilisant différents moteurs de
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1 recherche. Donc il a demandé un certain nombre de solutions techniques. La
2 seule façon, ce serait de lui permettre d'utiliser un disque dur extérieur;
3 plusieurs accusés du quartier pénitencier d'ailleurs l'utilisent depuis
4 très longtemps. Donc je ne comprends pas pourquoi son cas serait différent.
5 Et Messieurs les Juges, je vous demanderais de prendre cela très au
6 sérieux, parce que nous n'avons pas beaucoup de temps.
7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous êtes en train de me dire qu'il y
8 a des accusés qui utilisent un disque dur extérieur ?
9 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, pour autant que je
10 m'en souvienne, et c'est ce que mon client a indiqué, il m'a indiqué que le
11 premier disque dur extérieur a été reçu par le général Perisic. Enfin, ceci
12 étant, c'est mon client qui me l'a dit. Donc ce n'est pas une connaissance
13 directe. Et plusieurs autres personnes ont apparemment utilisé ou utilisent
14 apparemment des disques durs extérieurs. Donc moi, je ne vois pas d'où
15 vient le problème. J'en ai parlé aux experts informatiques, et ils m'ont
16 dit que c'était l'enfance de l'art, très facile à régler.
17 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Ecoutez, je serais extrêmement surpris
18 d'entendre que des disques durs extérieurs sont disponibles dans le
19 quartier pénitentiaire, parce que par le passé cela avait posé d'énormes
20 problèmes de sécurité, et je pense que c'est le problème fondamental en
21 fait pour votre client. Lorsque cela a été soulevé il y a plusieurs
22 semaines de cela, nous avions reçu un rapport détaillé à ce sujet. Et à ce
23 moment-là, il y avait eu un échange de points de vue pour justement aider
24 votre client, mais je dois vous dire que la solution n'a jamais été de lui
25 faire utiliser un disque dur extérieur. D'après ce que je sais, il s'agit
26 d'un problème de sécurité.
27 Donc, le problème sera soulevé à nouveau. Je verrai s'il s'agit d'un
28 problème différent. Je vais aussi m'enquérir pour voir si d'autres accusés
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1 ont le droit d'utiliser ce genre de dispositif informatique. Mais si tel
2 est le cas, cela ne signifie pas d'ailleurs automatiquement que votre
3 client aura le droit de le faire, parce qu'il se peut quand même que cela
4 suscite d'autres difficultés, ou des difficultés permanentes. Mais nous
5 allons nous pencher sur cette question pour, dans un premier temps, nous
6 assurer qu'il y ait une logique sécuritaire, et je pense à tous les
7 dispositifs qui seront mis à la disposition de votre client lorsque je dis
8 cela.
9 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Merci.
10 M. STAMP : [interprétation] Puisque nous parlons de problèmes
11 administratifs, j'aimerais juste indiquer qu'un témoin prévu pour la
12 semaine prochaine, le Témoin K89, nous a informé par le truchement de
13 l'Unité des Témoins et des Victimes -- je ne vais pas entrer dans les
14 détails, dans les détails de sa vie, mais il a des problèmes avec un membre
15 de sa famille. Donc il ne peut pas venir comme prévu. Alors bien entendu,
16 nous avons ôté ce nom de la liste de la semaine prochaine. Je vais, bien
17 entendu, en informer par écrit la Chambre et les parties, mais je voulais
18 vous l'indiquer le plus rapidement possible, cela.
19 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Monsieur Stamp. Donc, nous
20 supposons qu'un témoin prévu après ce témoin viendra à sa place, n'est-ce
21 pas ?
22 M. STAMP : [interprétation] Oui, oui. Nous faisons des efforts en ce sens.
23 L'INTERPRÈTE : Les interprètes souhaiteraient que le microphone de Me
24 Djordjevic soit débranché.
25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie.
26 Maître Djordjevic, il vient d'être dit que votre micro était toujours
27 branchée.
28 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
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1 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour, Monsieur.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
3 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Est-ce que vous pourriez, je vous
4 prie, nous donner lecture de la déclaration solennelle qui vous est remise
5 maintenant.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.
7 Je déclare solennellement que je dirai la vérité, toute la vérité et
8 rien que la vérité.
9 LE TÉMOIN : SHUKRI GERXHALIU [Assermenté]
10 [Le témoin répond par l'interprète]
11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie beaucoup.
12 Veuillez prendre place.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Mme Gopalan a quelques questions à
15 vous poser.
16 Madame Gopalan, je vous en prie.
17 Interrogatoire principal par Mme Gopalan :
18 Q. [interprétation] Bonjour, Docteur Gerxhaliu.
19 R. Bonjour.
20 Q. Pourriez-vous, je vous prie, nous décliner votre identité.
21 R. Je m'appelle Shukri Gerxhaliu.
22 Q. Quel est votre âge, Docteur Gerxhaliu ?
23 R. J'ai 55 ans. Je vais bientôt avoir 56 ans. Je suis né en 1953.
24 Q. Merci. Et où êtes-vous né, Docteur Gerxhaliu ?
25 R. Je suis né à Studime e Poshteme, dans les environs de Vushtrri.
26 Q. Merci. Et où résidez-vous à l'heure actuelle, Docteur Gerxhaliu ?
27 R. Je vis toujours dans mon village.
28 Q. Docteur Gerxhaliu, en février 2000, avez-vous fourni une déclaration au
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1 bureau du Procureur, au TPIY ?
2 R. Oui.
3 Q. Avez-vous eu la possibilité d'examiner cette déclaration récemment ?
4 R. Oui.
5 Q. Je pense que vous avez apporté un certain nombre de corrections à cette
6 déclaration lorsque vous l'avez examinée récemment. Donc, je vais vous
7 donner lecture d'un certain nombre de corrections effectuées, et je vous
8 demanderais de bien vouloir confirmer qu'elles sont exactes. Je vais vous
9 remettre un exemplaire de votre déclaration que j'ai ici.
10 Mme GOPALAN : [interprétation] Je souhaiterais demander l'aide de M.
11 l'Huissier, je vous prie.
12 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
13 Mme GOPALAN : [interprétation] Et la cote 65 ter de cette déclaration est
14 la cote 2275, mais j'ai l'intention d'aller assez vite en besogne dans
15 l'examen de cette déclaration, pour vous demander tout simplement de
16 confirmer les corrections effectuées.
17 Q. Au paragraphe 24 de votre déclaration, vous dites :
18 "A partir de l'endroit où nous étions cachés, j'ai vu une dizaine de
19 véhicules qui arrivaient de la route de Studime e Poshteme…"
20 Alors, la correction que vous souhaitez apporter est comme suit :
21 "De l'endroit où nous étions dissimulés, j'ai vu une dizaine de véhicules
22 qui venaient de la route, qui venaient de Studime e Poshteme, qui se
23 dirigeaient vers Studime e Eperme."
24 La septième phrase du paragraphe 24 est comme suit :
25 "Nous n'avions pas de combustible, et tout est dégagé ici."
26 La phrase devait être comme suit :
27 "Nous n'avons pas de carburant, et tout a été dégagé. Nous avons nettoyé le
28 terrain."
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1 Est-ce que cette correction est exacte, Monsieur Gerxhaliu ?
2 R. Oui, oui, ces corrections sont tout à fait exactes. C'est ainsi que la
3 situation s'est déroulée, parce que le convoi arrivait de la direction --
4 Q. Je vais vous interrompre, Monsieur. Nous allons aborder votre
5 déposition dans un petit moment. J'aimerais plutôt, dans un premier temps,
6 passer au paragraphe suivant où vous avez effectué une autre correction. Il
7 s'agit du paragraphe 25, et la première phrase est comme suit :
8 "Lorsque les soldats sont partis, Halil et moi-même avons marché jusqu'à
9 Studime e Eperme."
10 Alors que la correction que vous avez apportée est comme suit :
11 "Lorsque les policiers et les soldats serbes sont partis, Halil et moi-même
12 avons marché jusqu'à Studime e Eperme."
13 Est-ce exact ?
14 R. Oui, c'est exact, parce qu'une fois qu'ils sont partis, nous avons vu
15 qu'il n'y avait personne dans les environs. Donc, nous sommes allés nous
16 cacher.
17 Q. Je vous remercie, Docteur Gerxhaliu. Maintenant que ces corrections ont
18 été apportées à votre déclaration, considérez-vous que votre déclaration
19 est véridique et exacte, et correspond à ce que vous savez ?
20 R. Oui.
21 Mme GOPALAN : [interprétation] Je souhaiterais demander le versement au
22 dossier de cette pièce.
23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui. Merci, ce document sera versé au
24 dossier.
25 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P00512, Monsieur le
26 Président.
27 Mme GOPALAN : [interprétation]
28 Q. Docteur Gerxhaliu, avez-vous témoigné dans l'affaire Milutinovic et
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1 consorts en août 2006 ?
2 R. Oui.
3 Q. Avez-vous récemment eu la possibilité d'examiner le compte rendu de
4 votre témoignage dans cette affaire ?
5 R. Oui, oui, tout à fait.
6 Q. Merci. Et Docteur Gerxhaliu, vous avez apporté des changements à cette
7 déposition dont je vais vous donner lecture maintenant. A la page 2 507,
8 ligne 14 de votre déclaration dans l'affaire Milutinovic et consorts, vous
9 avez dit que la date n'avait pas été bien consignée, et que la date exacte
10 devrait être le 2 mai au lieu du 2 avril. Est-ce exact ?
11 R. Oui, c'est exact.
12 Q. A la page 2 520 ligne 3, toujours dans l'affaire Milutinovic et il
13 s'agit toujours de votre déposition, vous aviez dit que le nombre de jeunes
14 filles albanaises qui avaient été tuées n'avait pas été bien consigné et
15 que le chiffre devrait être de huit jeunes filles albanaises, est-ce exact
16 ?
17 R. Oui, c'est exact, ce n'est pas neuf, mais huit. Huit étant le chiffre
18 exact.
19 Q. Je vous remercie. A la page 2 521 ligne 9 du compte rendu d'audience
20 dans Milutinovic, vous dites que les trois personnes mentionnées sont, mon
21 oncle et ses fils, et que cela n'avait pas été bien consigné, mais qu'il
22 s'agissait de mon oncle, Xhemajl, son cousin Selatin et son fils Shaban.
23 C'est bien cela, Monsieur ?
24 R. Oui, c'est exact. Mon oncle s'appelait Xhemajl, son fils était Selatin,
25 et son fils Shaban.
26 Q. Je vous remercie Docteur Gerxhaliu. Maintenant que vous avez apporté
27 ces corrections à votre déposition, si les mêmes questions venaient à vous
28 être posées aujourd'hui, est-ce que vous fourniriez les mêmes réponses ?
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1 R. Oui, tout à fait.
2 Q. Merci, Docteur Gerxhaliu.
3 Mme GOPALAN : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaiterais
4 demander le versement au dossier du compte rendu d'audience de la
5 déposition du témoin dans l'affaire Milutinovic qui correspond à la cote
6 5130 de la liste 65 ter.
7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Cette pièce sera versée au dossier.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P00513.
9 Mme GOPALAN : [interprétation] J'aimerais maintenant vous donner lecture du
10 résumé de la déposition du témoin.
11 Le témoin est un médecin albanais du Kosovo. Il décrit les événements
12 qui ont débouché aux meurtres et assassinats dans le convoi, et ce, le long
13 de la route des Gorges de Studime le 2 mai 1999. Le 28 ou le 29 mai 1999,
14 les forces serbes ont lancé une offensive à partir de la zone de Rashice,
15 et ce, à l'extérieur du village de Studime e Eperme dans la municipalité de
16 Vucitrn. Les villageois se sont enfuis vers les collines pour y échapper.
17 Les forces serbes ont brûlé des maisons à Studime e Poshteme pour empêcher
18 les villageois de revenir. Le 2 mai 1999, aux environs du 2 mai 1999, les
19 forces serbes ont brisé les lignes de l'UCK dans les zones nord de
20 Meljenica et de Llap et ont progressé vers le sud en direction du village
21 de Studime e Eperme.
22 Le témoin estime qu'environ 40 000 réfugiés ont formé un convoi et se sont
23 dirigés vers la route des Gorges de Studime, et ce, en direction de la
24 ville de Vucitrn. Les forces serbes avançaient à partir du nord et ont
25 pilonné le convoi. Les forces serbes ont également tiré à partir de
26 positions à Saracak et Rashice qui se trouvaient au sud du convoi. Certains
27 des réfugiés du convoi ont été tués par les forces, d'autres ont été roués
28 de coups, et des effets objets précieux leur ont été confisqués. Le témoin
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1 s'est dissimulé, a survécu au massacre et affirme que des unités de la
2 police ont participé à cette opération.
3 J'en suis maintenant arrivée au terme de ce résumé.
4 Q. Docteur Gerxhaliu, j'aimerais maintenant vous poser quelques questions
5 à propos de votre déclaration. Au paragraphe 5 de votre déclaration --
6 Mme GOPALAN : [interprétation] Il va falloir que je m'interrompe, car je
7 n'entends pas l'interprétation -- je n'entends pas l'interprétation en
8 B/C/S. Je vais reprendre.
9 Q. Docteur Gerxhaliu, au paragraphe 5 de votre déclaration, vous parlez
10 des patients que vous traitiez. Est-ce que vous pourriez nous dire qui
11 étaient vos patients aux environs du mois d'octobre 1998 ?
12 R. En octobre 1998, au dispensaire de Vushtrri, je soignais tous les
13 patients qui se présentaient au dispensaire. Lorsque je revenais le soir ou
14 lorsque j'avais un moment après le travail, j'allais dans la zone qui était
15 contrôlée par l'UCK et j'y soignais tous les patients, indépendamment du
16 fait qu'il s'agissait de membres de l'UCK ou des civils. Je soignais toute
17 personne qui avait besoin de mes soins.
18 Q. Je vous remercie, Docteur Gerxhaliu. Au paragraphe 6 de votre
19 déclaration, vous dites qu'environ 80 % de la municipalité de Vucitrn était
20 placé sous le contrôle de l'UCK.
21 Mme GOPALAN : [interprétation] J'aimerais demander l'aide de M. l'Huissier
22 et j'aimerais que la pièce 0038 soit placée sur le rétroprojecteur. Je
23 pense qu'il sera ainsi plus facile au témoin de faire des annotations sur
24 cette carte si vous la placez sur le rétroprojecteur.
25 Q. Vous dites dans votre déclaration au paragraphe 6 que les Serbes
26 étaient cantonnés sur une position stratégique dans la zone de Rashice.
27 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
28 Mme GOPALAN : [interprétation]
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1 Q. Un petit moment, Docteur Gerxhaliu. Je m'excuse, il y a un léger
2 décalage en fait.
3 Mme GOPALAN : [interprétation] Est-ce que nous pourrions agrandir la zone
4 de Vucitrn, je crois qu'il va falloir tourner la carte dans le bon sens.
5 Merci beaucoup.
6 Q. Docteur Gerxhaliu, j'ai quelques questions à vous poser à propos de la
7 carte. Pourriez-vous, je vous prie, nous indiquer sur cette carte où se
8 trouvaient les zones placées sous le contrôle de l'UCK, zones auxquelles
9 vous faites références dans votre déclaration. Si vous faites une ligne,
10 cela me suffira amplement.
11 R. Ce que je souhaiterais dire c'est que Rashice est un quartier de
12 Studime e Poshteme, et cela se trouve sur un terrain qui surplombe les
13 autres terrains. Voilà Studime e Poshteme et voilà le quartier de Rashice.
14 Q. Est-ce que vous pourriez dessiner une ligne qui nous montre dans ce
15 secteur où se trouvait le contrôle effectué par l'UCK dans ce secteur
16 autour de Rashice.
17 R. Voilà Studime e Eperme, voilà Studime e Poshteme. C'est à peu près
18 là que se trouvait la ligne de démarcation jusqu'à Saracak e Eperm, puis
19 Samadrexha. En fait il faudrait faire une ligne là.
20 Q. D'accord.
21 R. Parce que Samadrexha était le poste de contrôle des forces Serbes --
22 Q. Je vous interromps, Monsieur. Pour bien préciser tout cela, la ligne à
23 laquelle vous faite référence est la ligne qui est en haut de la page. Est-
24 ce que vous pourriez biffer la ligne qui n'est pas la bonne. Oui, effacez-
25 la. Vous pouvez l'effacez me semble-t-il. Merci. Maintenant, on a juste une
26 seule ligne qui passe par la place qui va vers Samadrexha. Arrêtez de
27 dessiner, je vous prie, j'aimerais savoir où se trouvait la zone qui était
28 contrôlée, est-ce qu'elle se trouvait au-dessus de la ligne, ou en dessous
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1 de la ligne ?
2 R. Au-dessus, au-dessus. Cela correspond au secteur contrôlé par l'UCK,
3 alors que la zone qui se trouve au-dessous de la ligne était placée sous le
4 contrôle des forces serbes.
5 Q. Merci. Est-ce que vous pourriez mettre un A pour indiquer cette ligne ?
6 Est-ce que vous pourriez juste mettre la lettre A au-dessus de la ligne que
7 vous venez de dessiner ?
8 R. Ici ?
9 Q. Oui.
10 R. [Le témoin s'exécute]
11 Q. Merci. Maintenant, dites-moi s'il y avait une zone contrôlée par l'UCK
12 qui se trouvait en dessous des rails ferroviaires qu'on voit ici sur la
13 carte ?
14 Mme GOPALAN : [interprétation] Est-ce qu'on peut faire défiler la carte
15 vers le haut un peu. Merci.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui. Ce sont les rails de chemin de fer.
17 Mme GOPALAN : [interprétation]
18 Q. D'accord --
19 R. Ici cette zone --
20 Q. Merci.
21 R. C'est où se trouvaient les rails du chemin de fer.
22 Q. Pouvez-vous maintenant dessiner une ligne pour nous montrer quelle
23 était la zone contrôlée par l'UCK, et qui se trouvaient en dessous de cette
24 ligne qui représente les rails du chemin de fer, comme vous l'avez dit.
25 R. C'était ici où ils se trouvaient. Je pense que c'est à peu près la
26 zone.
27 Q. Merci. Pourriez-vous apposer la lettre B à côté de la ligne que vous
28 venez de dessiner ?
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1 R. [Le témoin s'exécute]
2 Q. Pour qu'on soit plus précis, Docteur Gerxhaliu, est-ce que la zone
3 contrôlée par l'UCK se trouve en dessous de la ligne à côté de laquelle
4 vous avez apposée la lettre B ou plutôt au-dessus de cette ligne ?
5 R. Cette zone se trouvait ici à partir de tous ces villages. Cette zone
6 était contrôlée par l'UCK, et la zone où se trouvait les rails du chemin de
7 fer, ainsi que d'autres territoires se trouvant à la proximité des rails du
8 chemin de fer, étaient contrôlés par les forces serbes.
9 Q. Docteur Gerxhaliu, encore une fois il faut préciser ce point. Est-ce
10 que vous dites que la zone qui se trouve en dessous de la ligne indiquée
11 par la lettre B était contrôlée par l'UCK ? Et quand je dis "en dessous,"
12 je pense plutôt sur le côté droit.
13 R. A partir de cette ligne, toute la zone qui se trouve au-dessous de
14 cette ligne était contrôlée par l'UCK.
15 Q. Et pour ce qui est de la zone entre deux lignes que vous avez dessinée,
16 la zone se trouvant entre les lettres A et B, ou plutôt les lignes que vous
17 avez indiquées en apposant les lettres A et B, qui contrôlaient cette zone
18 ?
19 R. Cette zone était contrôlée par les forces serbes ou par les forces de
20 l'ex-Yougoslavie.
21 Q. Merci, Docteur Gerxhaliu.
22 Mme GOPALAN : [interprétation] Nous pouvons maintenant laisser de côté
23 cette carte. La carte peut rester sur le rétroprojecteur, parce que le
24 témoin apposera d'autres annotations sur la même carte un peu plus tard.
25 Q. Docteur Gerxhaliu, est-ce que nous pouvons maintenant revenir à votre
26 déclaration. Selon ce que vous avez dit, vers le 28 ou le 29 mars, les
27 Serbes ont lancé une offensive de la direction de Rashice, et je crois que
28 vous l'avez déjà indiqué. Vous avez déjà indiqué Rashice sur la carte en
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1 apposant la lettre R. Vous avez dit que beaucoup d'habitants locaux étaient
2 partis dans les collines pour éviter les tirs et les pilonnages, et que les
3 Serbes ont brûlé les maisons à Studime e Poshteme pour prévenir le retour
4 de la population.
5 Docteur Gerxhaliu, comment savez-vous que les Serbes ont incendié les
6 maisons se trouvant à Studime e Poshteme ?
7 R. Ce jour-là, j'étais toujours en ville dans le centre de santé, et nous
8 avons reçu les informations disant qu'une offensive avait été lancée. Nous
9 sommes partis du dispensaire un peu plus tôt que d'habitude, et lorsque je
10 me dirigeais vers ma maison, les membres de ma famille avaient déjà quitté
11 la maison parce que le village de Begaj ainsi qu'un quartier qui se
12 trouvait vers Rashice, était ciblés par l'offensive serbe. Les forces
13 serbes combinées entraient dans ce village et ordonnaient aux villageois de
14 partir, ils ont pillé le village, pris tous les objets de valeur et mis le
15 feu dans la plupart des maisons. C'est ce que j'ai vu.
16 Q. Merci. Dans quel village avez-vous habité ?
17 R. J'habitais à Studime e Poshteme, où je vis toujours. Nous appelons
18 cette partie de Studime e Poshteme Gerxhaliu. C'est la partie où je vis.
19 Q. Merci. Maintenant, j'aimerais qu'on parle des événements qui sont
20 produits le 2 mai 1999, et c'est au paragraphe 11 de votre déclaration.
21 Dans ce paragraphe vous dites qu'on vous a ordonné de quitter la région
22 parce que les Serbes ont percé la ligne de front à Llap et à Meljenica et
23 que vous avez décidé de quitter Vucitrn. Vous avez établi un itinéraire à
24 suivre par votre famille. C'est aussi au paragraphe 11, et après une
25 colonne a été formée. Docteur Gerxhaliu, j'aimerais qu'on revienne à la
26 carte sur laquelle vous avez apposé des annotations tout à l'heure pour
27 nous montrer la direction, ce que la colonne a emprunté le 2 mai.
28 R. Le 2 mai, nous étions à Sllakovc. L'un des hôpitaux de campagne de
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1 l'UCK se trouvait à cet endroit. Il était plus grand par rapport à d'autres
2 hôpitaux de campagne. Dans la région de Shale --
3 Q. Docteur Gerxhaliu, je m'excuse mais il faut que je vous interrompe ici.
4 S'il vous plaît, indiquez la direction dans laquelle s'est déplacée la
5 colonne en partant de Sllakovc que vous avez déjà indiquée sur la carte en
6 dessinant un cercle.
7 R. De Sllakovc, la colonne s'est rendue dans la direction de Ceceli. De
8 Ceceli nous nous sommes rendus à Gornje Studime, ou Studime e Eperme, et de
9 ce village nous nous sommes rendus à Donje Studime, ou Studime e Poshteme.
10 C'est par là que la colonne s'est arrêtée.
11 Q. Merci beaucoup. Pourriez-vous dessiner un cercle autour de cette
12 portion de la route que vous avez empruntée, et le long de laquelle vous
13 vous êtes déplacés. Apposez un cercle autour de cette zone, et mettez la
14 lettre C à côté de ce cercle. Juste la zone où se trouvait la route que
15 vous avez empruntée.
16 R. [Le témoin s'exécute]
17 Q. Merci beaucoup. Et au paragraphe 12 de votre déclaration, vous dites
18 que vous êtes parti vers 13 heures le 2 mai et les Serbes avançaient du
19 nord dans votre direction, il y avait des pilonnages et c'est comme cela
20 que votre groupe devait passer vers le sud. Pouvez-vous nous dire pourquoi
21 vous vous êtes arrêtés à Studime e Eperme vers 15 heures de l'après-midi,
22 ce qui est indiqué dans votre déclaration ?
23 R. Nous nous sommes arrêtés là-bas parce que les forces serbes se
24 trouvaient derrière nous, mais également sur la colline de Rashice et de
25 ces deux endroits, il y avait des pilonnages en direction de la colonne. Il
26 y avait des tirs, des coups de feu, il y avait des pilonnages et, par
27 conséquent, la colonne ne pouvait pas avancer. A proximité, il y avait une
28 colline et nous pouvions donc observer le terrain très bien depuis cette
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1 colline.
2 Q. Docteur Gerxhaliu, vous avez dit qu'il y avait des pilonnages de la
3 colline de Rashice. Pouvez-vous apposer la lettre D à côté de la colline à
4 laquelle vous avez fait référence, ou peut-être que cela était déjà indiqué
5 sur la carte ?
6 R. [aucune interprétation]
7 Q. Non, juste la lettre D pour nous indiquer la zone d'où provenaient les
8 pilonnages.
9 R. [Le témoin s'exécute]
10 Q. Merci. Et dites-nous où la colonne s'est arrêtée ?
11 R. La colonne s'est arrêtée ici près de cette colline, et ils ne pouvaient
12 pas nous voir derrière cette colline.
13 Q. Merci. Pouvez-vous apposer la lettre E à côté de la colonne où la
14 colonne s'est arrêtée.
15 R. [Le témoin s'exécute]
16 Q. Merci. Vous avez dit qu'il y avait des pilonnages provenant du nord.
17 Pouvez-vous indiquer la direction depuis laquelle vous avez vu ou vous avez
18 entendu des obus tomber. Est-ce que cela est visible sur la carte ?
19 Mme GOPALAN : [interprétation] Pourrions-nous faire défiler la carte un peu
20 vers le bas pour pouvoir voir cela.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Les forces serbes ont pris les positions à
22 Llap, dans la municipalité de Podujeve, ainsi qu'à Meljenica; et ils ont
23 donc établi leurs positions dans une localité qui se trouvait derrière
24 nous. Ils ont tiré dans la direction de Sllakovc. J'étais à bord du
25 tracteur qui était parmi les derniers tracteurs dans la colonne, il y avait
26 des éclats d'obus qui nous survolaient, qui volaient au-dessus de nos
27 têtes.
28 Mme GOPALAN : [interprétation]
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1 Q. Merci. Docteur Gerxhaliu, vous venez d'apposer une flèche. Qu'est-ce
2 que cela représente ?
3 R. Ça indique la direction d'où ils venaient, de Llap, municipalité de
4 Podujeve; donc ils venaient de ces deux directions et ils tiraient dans la
5 direction de Sllakovc.
6 Q. Merci. Pouvez-vous donc apposer la lettre E --
7 R. Je pense que j'ai déjà apposé la lettre E ici.
8 Q. Vous avez raison. Pouvez-vous apposer la lettre F pour indiquer cette
9 direction, et je m'en excuse.
10 R. [Le témoin s'exécute]
11 Q. Maintenant j'aimerais qu'on revienne à votre déclaration. Vous avez
12 décrit à partir du paragraphe 15 et plus loin, vous avez décrit les
13 événements qui se sont produits pendant que vous étiez dans la colonne. Et
14 au paragraphe 15, vous dites que vers 17 heures un grand nombre des unités
15 militaires et paramilitaires serbes se sont approchées de la colonne du
16 nord. Pouvez-vous nous dire ce que les membres de ce groupe ont fait aux
17 gens qui se trouvaient dans la colonne ?
18 R. Je me trouvais à peu près dans le milieu de la colonne. J'étais ici à
19 l'endroit indiqué par la lettre E; donc c'est quelque part au milieu de la
20 colonne. Ils sont arrivés derrière nous. Il s'agissait des forces
21 combinées, les forces de la police, de l'armée, des forces paramilitaires.
22 Ils étaient bien coordonnés entre eux, toutes leurs unités étaient là-bas.
23 Ils se sont approchés du tracteur à trois ou quatre reprises. Au début, ils
24 ont demandé des marks allemands, ensuite lorsque les gens n'avaient plus
25 d'argent, ils ont commencé à les battre de façon brutale, et finalement ils
26 les ont tués. Et d'autres groupes ont répété le même scénario.
27 Q. Docteur Gerxhaliu, dites-nous ce qui s'est passé pour ce qui est de
28 votre beau-frère Halil Basholli ?
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1 R. Halil Basholli était le frère de mon épouse. Il conduisait le tracteur.
2 Ils nous ont donc fait descendre du tracteur, ils l'ont battu jusqu'à ce
3 qu'il n'ait plus eu d'argent. Il a été donc battu de façon brutale, et
4 c'est à ce moment-là que nous avons compris qu'un autre groupe allait
5 arriver et allait faire la même chose parce que la police était un peu plus
6 loin, ainsi que l'armée, et c'est pour cela que nous avons décidé de
7 descendre du tracteur et de nous cacher. Nous avons trouvé un abri dans un
8 ruisseau.
9 Q. Merci, Docteur Gerxhaliu. Lorsque vous dites "nous", qui avez-vous
10 pensé exactement ? Avec qui vous avez trouvé refuge dans ce ruisseau ?
11 R. Moi-même, Halil, et encore deux ou trois autres personnes. Je ne sais
12 pas qui ils étaient; mais Halil et moi-même, nous avons trouvé refuge dans
13 le ruisseau.
14 Q. Merci. Au paragraphe 21 de votre déclaration, vous avez parlé du fait
15 que vous avez quitté la remorque et vous vous êtes dirigés dans la
16 direction du ruisseau, et lorsque vous avez sauté de la remorque vous avez
17 atterri sur un cadavre. Vous avez regardé et vous avez vu qu'il s'agissait
18 de votre cousin Haki Gerxhaliu. Docteur Gerxhaliu, pouvez-vous nous dire
19 comment Haki Gerxhaliu a été tué ?
20 R. Oui, à l'époque il était mort. Donc il était mort au moment où j'ai
21 sauté de la remorque du tracteur, j'ai sauté sur son corps parce que son
22 tracteur était derrière le mien. Il y avait d'autres cadavres, d'autres
23 corps là-bas, mais j'ai reconnu son corps et après cela, j'ai continué à
24 marcher à gauche en direction du ruisseau.
25 Q. Merci, Docteur Gerxhaliu. Et avant de faire cela, avant de vous diriger
26 vers le ruisseau, avez-vous vu que quelqu'un d'autre aurait été tué, une
27 autre personne qui se trouvait dans la colonne ?
28 R. J'ai pu entendre des tirs de tous les côtés. Mon tracteur était à
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1 moitié couvert, et nous pouvions voir seulement la partie se trouvant
2 derrière le tracteur vers le nord. Deux ou trois tracteurs qui se
3 trouvaient un peu plus loin, quelqu'un s'est approché d'un couple âgé.
4 L'homme a dit à l'autre homme en serbo-croate: "S'il-vous-plaît, ne tuez
5 pas mon fils. Il s'est marié aujourd'hui." Et ils ont répondu : "Nous
6 allons célébrer cela ensemble." Devant cet homme, ils ont tué son fils. Je
7 me souviens toujours des mots qu'il a prononcés en B/C/S : S'il vous plaît,
8 ne tuez pas mon fils. Il s'est marié aujourd'hui. Après quoi ils ont dit :
9 Nous allons célébrer cela ensemble, après quoi ils l'ont tué. Nexhip ainsi
10 que son fils ont été exécutés ensemble avec deux ou trois autres personnes.
11 Q. Merci, Docteur Gerxhaliu. Maintenant j'aimerais qu'on regarde le
12 paragraphe 24 de votre déclaration où il est question des événements qui se
13 sont produits plus tard dans la journée au moment où les survivants de la
14 colonne ont continué à se déplacer. Vous avez dit que vous avez vu un
15 certain nombre de véhicules se déplaçant sur la route de Studime e
16 Poshteme. Pouvez-vous nous décrire ces véhicules, s'il vous plaît.
17 R. Il y avait des véhicules divers. Halil et moi-même, nous étions cachés
18 dans les arbustes, nous avons plutôt essayé de nous cacher pour qu'ils ne
19 nous voient pas; nous les avons entendu parler entre eux. La nuit était
20 étoilée. Je les ai reconnus. Le premier véhicule était un véhicule de
21 marque Stojadin, véhicule de la police, les autres véhicules étaient les
22 véhicules blindés de transport de troupe. Ils ont dit quelque chose comme
23 quoi il fallait nettoyer le terrain. J'ai entendu un officier faire un
24 rapport en disant : Nous avons nettoyé le terrain, mais nous n'avons plus
25 de carburant et nous devons rebrousser chemin. C'est ce qu'ils ont dit. Ils
26 sont donc retournés dans la même direction d'où ils étaient venus au début.
27 Q. Merci, Docteur Gerxhaliu. Après que ces personnes soient parties, au
28 paragraphe 25 vous avez dit qu'avec Halil vous vous êtes rendus à pied à
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1 Gornji Studime ou Studime e Eperme. Qu'est-ce que vous avez vu une fois
2 arrivés à ce village ?
3 R. Studime e Eperme ou Gornje Studime était en feu. Il y avait de la
4 fumée. Nous respirions à peine, parce que le village tout entier était en
5 flammes. On pouvait entendre le bétail qui était en feu, on pouvait
6 entendre des chevaux et d'autres animaux en train de mugir. C'était une
7 scène horrible de voir le village entier en flammes. Nous nous sommes
8 déplacés difficilement parce qu'il y avait de la fumée partout, et nous
9 sommes partis dans une autre région un peu plus loin.
10 Q. Merci. Mis à part les animaux qui étaient en flammes ainsi que le
11 village, au paragraphe 25 de votre déclaration, vous avez parlé du nombre
12 de victimes, et il s'agissait principalement des hommes mais il y avait
13 cinq ou six femmes aussi. Pouvez-vous nous décrire l'état dans lequel se
14 trouvaient les victimes au moment où vous êtes arrivés à ce village ?
15 R. Cela est arrivé après que nous nous soyons reposés parce que nous
16 étions exténués la nuit précédente. Le lendemain, à savoir le 3 mai, nous y
17 sommes retournés pour voir ce qui s'est passé et pour voir s'il y avait des
18 gens qui ont survécu à cela.
19 Le long de la route, j'ai vu beaucoup de cadavres, des hommes, des femmes,
20 des enfants, et d'autres. L'UCK a donc établi ses positions, et dans la
21 matinée l'UCK est venue pour ramasser les corps pour préparer l'enterrement
22 de ces corps. Lorsque je me suis rapproché de l'endroit de l'enterrement,
23 puisqu'ils avaient besoin d'assistance de qui que ce soit qui était en
24 mesure de les aider, il y avait quelqu'un de la police militaire de l'UCK
25 dont les uniformes étaient différents par rapport aux autres ainsi que
26 leurs tâches. Cette personne m'a donné une liste de victimes, liste
27 approximative, en me demandant si je connaissais les victimes. Sur la
28 liste, j'ai vu figurer mon propre nom. J'ai dit que c'était moi-même, et
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1 après quoi il a dit : Oui, vous êtes médecin. Donc il a rayé mon nom sur la
2 liste et il était content de me voir toujours en vie. Après quoi, ils m'ont
3 dit de revenir à Sllakovc à l'hôpital qui n'était pas complètement
4 incendié. Et c'est comme cela que j'ai continué à travailler à l'hôpital,
5 et c'est ce que j'ai fait à l'époque.
6 Q. Merci, Docteur Gerxhaliu. Maintenant parlons du paragraphe 35 de votre
7 déclaration où vous parlez de votre départ au Monténégro en début juin.
8 Vous avez décrit être passé par un certain nombre de points de contrôle et
9 vous avez fait référence au point de contrôle se trouvant à Zvecane, et
10 vous avez décrit ce point de contrôle comme le point de contrôle qui posait
11 le plus de problèmes. Pouvez-vous nous dire ce qui s'est passé pour ce qui
12 est des papiers d'identité des personnes qui passaient ce point de contrôle
13 ensemble avec vous ? Il s'agit donc du point de contrôle à Zvecane.
14 R. Pour ce qui est de ce point de contrôle, il nous a été très difficile
15 de le passer, même si sur le bus il y avait des plaques d'immatriculation
16 serbes. Par rapport à cela, ils n'avaient pas de doute, mais une fois
17 arrivés à cet endroit ils sont montés à bord du bus pour procéder au
18 contrôle des documents. Ils m'ont dit que je devais subir un test pour voir
19 si je portais des armes --
20 Q. Docteur Gerxhaliu, pour revenir à ma question : pouvez-vous me dire ce
21 qui s'est passé pour ce qui est des papiers d'identité de ces personnes qui
22 passaient par ces points de contrôle ?
23 R. Oui, les cartes d'identité délivrées en albanais par le ministère de
24 l'Intérieur du Kosova ont été déchirées et jetées par eux.
25 Q. Merci, Docteur Gerxhaliu. Pour le moment, je n'ai plus de question pour
26 vous.
27 Mme GOPALAN : [interprétation] Mais j'aimerais que la carte soit versée au
28 dossier, la carte qui se trouve placée sur le rétroprojecteur.
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1 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La carte sera versée au dossier.
2 M. LE GREFFIER : [interprétation] La carte 65 ter qui porte le numéro 00038
3 deviendra la pièce portant la cote P00514.
4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.
5 La Chambre de première instance a versé au dossier la déclaration ainsi que
6 le compte rendu de la déposition antérieure du médecin.
7 Maintenant, Maître Djordjevic, voulez-vous contre-interroger le témoin ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je dire quelque
9 chose ?
10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Docteur, vous avez la parole.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai voulu dire la chose suivante. Lorsque je
12 suis venu pour témoigner dans l'affaire Milosevic et dans l'affaire
13 Milutinovic, pour ce qui est du contexte de cette déclaration, je peux dire
14 qu'il s'agissait de l'événement du 31 mai où la famille de mon cousin
15 Selatin ainsi que mon oncle paternel Xhemajl ont été tués. J'aimerais que
16 cette partie de ma déposition devienne partie intégrante de ma déclaration
17 parce qu'aujourd'hui personne m'a posé de question par rapport à cet
18 événement. C'est pour cela que j'aimerais que cela fasse partie intégrante
19 de ma déposition parce qu'il s'agit d'un événement qui, pour nous, est un
20 événement tragique.
21 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Peut-être que vous avez été un peu
22 confus par la procédure à suivre ici, parce que la déposition ainsi que la
23 déclaration que vous avez faite dans des affaires précédentes sont devant
24 nous. Cela a été proposé au versement au dossier aujourd'hui, vous avez
25 parlé de cet incident qui par conséquent inclut tous les détails pour ce
26 qui est de la mort de beaucoup de membres de votre famille. Nous avons tout
27 cela, nous avons lu cela, tous ces détails. Lors de ce procès nous devons
28 entendre 120 témoins, et c'est pour cela que leurs déclarations écrites
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1 sont versées au dossier, après quoi nous ajoutons des observations
2 particulières. Par conséquent, nous connaissons toute cette histoire, parce
3 que nous l'avons lu.
4 Mme Gopalan a demandé le versement au dossier de cette déclaration, cela
5 veut dire qu'on a fait droit à votre requête en quelque sorte.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Djordjevic, avez-vous des
8 questions à poser au témoin ?
9 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'ai besoin
10 de quelques instants pour me préparer à mon contre-interrogatoire.
11 Contre-interrogatoire par M. Djordjevic :
12 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur.
13 R. Bonjour.
14 Q. Je vais maintenant vous poser une série de questions en tant que
15 conseil de la Défense de l'accusé, Djordjevic, dans cette affaire en espèce
16 pour en arriver à la vérité et pour que vous puissiez nous dire tout. Ce
17 qui figure dans votre déclaration du 17 février 2000 - vous nous avez dit
18 aujourd'hui que vous l'avez passé en revue - et à la page 2, paragraphe 2,
19 vous dites que le 26 mars 1999, un paramilitaire serbe armé est venu à
20 l'hôpital de Vucitrn où vous travailliez et, par la suite, le directeur,
21 une personne d'origine ethnique serbe, vous a congédié, vous, ainsi que
22 d'autres collègues albanais. Pourriez-vous nous dire d'abord si vous-même
23 vous avez vu ce paramilitaire serbe lorsqu'il est entré dans le bâtiment de
24 l'hôpital, est-ce que vous l'avez vu de vos propres yeux ? C'est ma
25 question.
26 R. Je voudrais faire quelques commentaires justement à ce sujet. Oui, je
27 l'ai vu de mes propres yeux, et je voudrais également ajouter que dans la
28 cave de l'hôpital il y avait des armes. Cela servait de dépôt d'armes. Sur
Page 3120
1 le toit du bâtiment il y avait une garde de 24 heures pour surveiller le
2 terrain.
3 Ce jour-là, le 26 mars, il est venu armé et il était là debout dans le
4 corridor. Le directeur, Ranko Milenkovic, nous a dit de rentrer à la
5 maison, alors je lui ai demandé : Pourquoi doit-on
6 rentrer ? Il m'a dit qu'il y a un ordre qui est parvenu de la hiérarchie,
7 et il a employé un mot serbe.
8 Q. Outre cet ordre de M. Milenkovic, votre directeur, est-ce qu'on vous a
9 donné d'autres explications, est-ce qu'il y avait d'autres documents écrits
10 indiquant que votre emploi prenait fin ? Je vous demande si à quelque
11 moment que ce soit vous avez reçu une décision selon laquelle votre emploi
12 prenait fin dans cette institution ?
13 R. Non, nous n'avons pas reçu de documents, aucune lettre, seulement cet
14 ordre donné de façon orale, à savoir que la hiérarchie avait donné cet
15 ordre.
16 Q. Quelle heure était-il quand ce paramilitaire est entré à l'hôpital ?
17 R. Il était environ 10 heures, je crois. Je me souviens très bien de cet
18 instant. Il y avait une vieille dame qui attendait à la porte pour que
19 j'aille l'examiner en fait.
20 Q. Nous en parlerons un peu plus tard, Docteur, justement. Vous dites vers
21 10 heures.
22 Pourriez-vous me dire si vous étiez suffisamment près de lui pour
23 l'entendre parler au directeur, et s'est-il entretenu seulement avec le
24 directeur ou bien vous a-t-il parlé à vous également, s'est-il entretenu
25 avec d'autres collègues à vous qui étaient également des Albanais du cru ?
26 R. Ce paramilitaire était là de façon menaçante. Il n'a rien dit, il était
27 simplement là, debout dans le couloir, je ne sais pas qui était ce
28 paramilitaire. Il y avait plusieurs autres paramilitaires, des policiers,
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1 des membres de l'armée de là jusqu'à la commune. Il y avait ce gardien qui
2 était placé sur le toit du bâtiment il y avait également ces armes dans le
3 dépôt. Ce Serbe était là, il s'appuyait contre le mur, il était armé. Le
4 directeur, M. Milenkovic, nous a dit de partir et, bien sûr, il n'y avait
5 rien d'autre que nous pouvions faire. J'étais le dernier à quitter
6 l'hôpital.
7 Q. Docteur, veuillez m'expliquer comment est-ce que vous aviez conclu que
8 cet ordre était venu de la hiérarchie par le biais de cette personne armée
9 ? Est-ce que vous avez réfléchi peut-être à une autre façon dont cet ordre
10 ait pu parvenir ? C'est pour ça que je vous demande s'il s'est entretenu
11 avec vous personnellement et vos collègues ?
12 R. Je ne peux pas me livrer à des conjectures. Je ne peux que vous citer
13 ce que le directeur m'a dit, M. Milenkovic. Il m'a dit : Vous devriez
14 partir. Nous avons reçu des ordres venant d'en haut, il a dit "odozgo" en
15 serbe. Après avoir examiné cette vieille dame, j'ai pris mon stéthoscope,
16 et je suis parti accompagné de cette vieille dame.
17 Q. Je voulais vous poser la question suivante : pourquoi avez-vous établi
18 ce lien entre l'ordre oral venant du directeur, relatif à vos services qui
19 prenaient fin et l'arrivée de ce paramilitaire ? Pourquoi vous établissez
20 un lien si vous n'avez pas vu le paramilitaire parler au directeur ?
21 R. Je ne pense pas qu'il est à même lieu d'en parler, je sais seulement
22 que le paramilitaire était là, qu'il était armé, que le directeur m'a dit
23 de partir. Je devais obéir, je ne sais pas ce qu'il savait. Si je n'avais
24 pas obéi, j'aurais peut-être souffert des conséquences de cette
25 désobéissance.
26 Q. Merci beaucoup. Vous dites que même avant que cette personne n'arrive
27 et pendant que la personne était dans le couloir, qu'il y avait des
28 policiers, des paramilitaires qui étaient présents dans l'hôpital. Dites-
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1 nous comment est-ce que vous êtes arrivé à la conclusion que cette personne
2 armée était un paramilitaire ?
3 Mme GOPALAN : [interprétation] Monsieur le Président,
4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Madame Gopalan.
5 Un instant, s'il vous plaît, Docteur.
6 Mme GOPALAN : [interprétation] J'aimerais avoir la référence pour laquelle
7 le conseil de Défense a posé cette dernière question, lorsqu'il dit :
8 "Avant que ce paramilitaire n'arrive à l'hôpital, il y avait des policiers,
9 des paramilitaires, des membres de la police."
10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] D'où est-ce que vous avez tiré cela,
11 Maître Djordjevic ?
12 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, un peu plus tôt
13 j'ai posé cette question, et le témoin nous a dit qu'il y avait plusieurs
14 soldats à l'hôpital, ensuite ma question ne faisait que donner suite à
15 l'une des réponses du témoin. Vous pouvez voir au transcript que le témoin
16 nous avait dit qu'il y avait dans la cave de l'hôpital un dépôt de
17 munitions, qu'il y avait des soldats, des paramilitaires autour de
18 l'hôpital, qu'il y avait également une garde sur le toit. Ma question n'a
19 fait que donner suite à sa réponse.
20 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Djordjevic, je suis vraiment
21 désolé, mais je ne me souviens pas du tout d'avoir entendu tout cela. J'ai
22 peut-être manqué, il est certain qu'il y avait une personne qui montait la
23 garde sur le toit et qu'il y avait des armes dans la cave, mais je ne crois
24 pas que l'on ait dit tout ceci. Vous voulez peut-être demander au témoin de
25 vous préciser si effectivement c'était le cas.
26 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Fort bien. Pour ne pas perdre de temps, je
27 vais poser la question de façon plus directe :
28 Q. Dites-nous si avant l'événement en question ce jour-là, s'il y avait
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1 une présence de soldats dans l'hôpital, est-ce qu'il y avait également
2 quelqu'un qui se trouvait sur le toit de l'hôpital, y avait-il des armes et
3 des munitions dans la cave qui servait de dépôt d'armes d'une certaine
4 façon ?
5 R. Tout près de l'hôpital, il y avait une académie policière du ministère
6 de l'Intérieur de Serbie à l'époque. Ils étaient toujours près. Ces forces-
7 là étaient toujours dans les environs. Comme j'ai dit un peu plus tôt, il y
8 avait un garde qui était sur le toit de l'hôpital, il était là pendant un
9 mois environ. Il y avait également des armes dans la cave, mais nous ne
10 nous rapprochions pas de ces endroits. Les Serbes nous avaient dit : Vous
11 n'avez pas le droit de monter sur le toit, et vous n'avez pas le droit non
12 plus de descendre dans la cave. Nous savions qu'il y avait un garde qui
13 montait la garde 24 heures sur 24, et qui était placé sur le toit.
14 Q. Qu'est-ce que vous avez vu, Docteur, qu'il s'agissait de la police, des
15 formations paramilitaires, qui était-ce d'après vous ?
16 R. Vous parlez du couloir où se trouvait le paramilitaire, l'homme en
17 question ?
18 Q. Non, Docteur. Vous nous parliez de ces endroits pour lesquels les
19 Serbes vous ont dit que vous n'aviez pas le droit d'y aller, je parle du
20 toit et de la cave. Est-ce que vous n'aviez vu que ces personnes
21 appartenant à cette académie militaire ou avez-vous vu également des
22 membres d'autres unités autour de l'hôpital, des membres de la police
23 militaire ou autre ? Voilà, c'est ce que je voulais préciser.
24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Madame Gopalan.
25 Mme GOPALAN : [interprétation] Je suis vraiment désolée d'interrompre de
26 nouveau, Monsieur le Président, mais le conseil de la Défense a posé
27 plusieurs questions dans le cadre de la dernière série de questions, j'ai
28 compté au moins trois questions. Je veux demander s'il était possible de
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1 préciser au témoin à quelle question il devrait répondre.
2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Djordjevic, vous devriez peut-
3 être poser une question à la fois. Nous avancerions plus rapidement. De
4 cette façon, le témoin pourrait répondre plus facilement à une question,
5 plutôt que de procéder autrement.
6 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur le
7 Président, la raison pour laquelle je pose cette question, c'était pour
8 pouvoir accélérer le pas. L'Accusation préférerait peut-être que je ne pose
9 aucune question, mais ce n'est pas possible. C'est la raison pour laquelle
10 j'ai demandé au témoin s'il avait vu d'autres personnes outre que les
11 membres de la police. C'est pour ceci que j'ai demandé la question. Ce
12 n'est pas une perte de temps, mais je m'attends à recevoir une réponse. Y
13 avait-il des membres de la police militaire, des paramilitaires ou autres
14 dans l'hôpital et autour de l'hôpital, outre les policiers ? J'ai essayé
15 d'être le plus concis et le plus précis possible.
16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Mais votre question couvre plusieurs
17 sujets. La Chambre de première instance en l'occurrence vous demande de
18 poser une question à la fois afin que nous puissions accélérer le pas. Je
19 vous demanderais de bien vouloir procéder de cette façon-là. Merci.
20 M. DJORDJEVIC : [interprétation]
21 Q. Qui avez-vous vu autour de l'hôpital avant que cette personne n'arrive
22 ce jour-là, et après ce jour-là, il y avait des membres de quelle unité
23 dans l'hôpital et autour de l'hôpital ?
24 R. Il y avait un mouvement de façon quotidienne. Comme j'ai déjà dit,
25 l'hôpital est situé entre le bâtiment de l'académie de police et le poste
26 de police. C'est là que l'hôpital se trouve jusqu'à ce jour. Il s'agissait
27 d'unités combinées, militaires et paramilitaires. La police montait la
28 garde sur le toit alors qu'en bas, nous ne pouvions pas descendre dans la
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1 cave car nous ne savions pas qui montait la garde devant la cave.
2 Q. Merci de cette réponse. La question que j'ai posée un peu plus tôt et à
3 laquelle vous n'avez pas encore répondu est la
4 suivante : qu'est-ce qui vous a permis de conclure que la personne que vous
5 avez vue dans le couloir de l'hôpital et la personne qui était armée en
6 l'occurrence était un membre d'une unité de paramilitaires ?
7 R. Sa façon d'être, son apparence physique. Ses cheveux étaient plus longs
8 que les membres de la police régulière. Il n'était pas rasé de près, il
9 ressemblait à un paramilitaire.
10 Q. Dites-nous, s'il vous plaît, si à quelque moment que ce soit après ce
11 jour-là vous avez reçu un document concernant votre congédiement. Avez-vous
12 jamais reçu une décision par écrit selon laquelle on mettait fin à votre
13 emploi à l'hôpital ?
14 R. Comme je l'ai déjà dit, on ne m'a informé que de façon orale que
15 j'étais congédié. Je n'ai jamais reçu de document écrit.
16 Q. Combien de médecins serbes y avait-il à l'hôpital, outre vous-même, et
17 vous étiez d'origine ethnique albanaise ?
18 R. Il y avait deux dentistes serbes, il y avait deux médecins serbes, il y
19 avait des infirmières, donc je dirais qu'en tout, cinq à six, moins de dix.
20 Je ne me souviens pas du nombre exact puisque dix ans se sont écoulés
21 depuis.
22 Q. Merci. Docteur, dites-moi, s'il vous plaît, combien y avait-il
23 d'Albanais qui étaient employés au centre médical de Vucitrn outre vous-
24 même, combien y avait-il de médecins, d'infirmières et d'autre personnel
25 médical ?
26 R. Il me faudrait élaborer. Au début des années '80 lorsque j'ai eu cet
27 emploi, la structure était la suivante : 80 % du personnel médical était
28 albanais, et il y avait 20 % de Serbes. Par la suite, dans les années '90,
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1 la structure a changé, il y avait 60 % d'Albanais et 40 % de Serbes. Les
2 Albanais étaient congédiés pour différentes raisons. Donc la structure
3 changeait, le ratio changeait également. Lorsque j'ai été congédié, la
4 proportion était de 60 à 40. Donc il y avait une pression constante pour
5 que ce pourcentage change.
6 Le nombre d'employés serbes augmentait de façon constante. Les Serbes
7 venaient en tant que réfugiés de la Bosnie, de Croatie, et lorsqu'ils
8 avaient terminé leurs études secondaires, ils venaient travailler là; alors
9 que les Albanais, on leur disait que leurs diplômes n'étaient pas valides,
10 ils ne pouvaient pas trouver un emploi.
11 Q. Merci, Docteur. J'aimerais savoir combien y avait-il de médecins ? Je
12 ne vous demande pas de nous dire combien y avait-il de personnels, quel
13 était le pourcentage ou quelle était la proportion du personnel non
14 diplômé. Je voudrais savoir pour ce qui est des médecins, combien y avait-
15 il de médecins d'origine albanaise ?
16 R. Environ 30 au total. Je parle ici de médecins et de dentistes.
17 Q. Docteur, dites-moi : est-ce que vous avez gardé de bons rapports avec
18 certains de vos collègues serbes, j'entends par là des médecins qui
19 travaillaient au centre médical de Vucitrn ?
20 R. Oui. Personnellement, j'ai eu de très bons rapports et une excellente
21 coopération avec tous les médecins, particulièrement avec Natalia Tasi,
22 elle était Croate. Elle-même avait des problèmes de diabète, elle ne
23 pouvait pas très bien voir, et je l'aidais toujours lorsqu'elle prenait la
24 tension artérielle de ses patients puisqu'elle n'arrivait pas à la lire.
25 Donc de façon générale, mes rapports étaient excellents avec tous les
26 médecins, mais plus particulièrement avec Natalia. Comme je vous ai dit,
27 elle ne pouvait pas très bien voir et je l'aidais chaque fois qu'elle
28 prenait la tension artérielle des patients.
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1 Q. La raison pour laquelle je vous pose cette question c'est parce que
2 j'aimerais vous demander quand était-ce pour la dernière fois, avant que
3 l'on vous dise de ne plus revenir au travail, quand avez-vous reçu votre
4 salaire pour la dernière fois; et est-ce que vous savez quelle était la
5 situation avec les autres médecins qui n'étaient pas albanais et à qui on
6 n'a pas dit de quitter le centre médical de Vucitrn ? Donc est-ce que vous
7 pourriez nous dire à quel moment avez-vous reçu votre dernière paye, et
8 qu'en était-il pour eux également ?
9 R. Le dernier salaire que j'ai perçu, avant la guerre je ne me souviens
10 pas quand était-ce, mais après la guerre, une fois que la guerre était
11 terminée, quelqu'un nous a apporté notre salaire en dinars serbes. Je ne
12 l'ai pas mentionné dans ma déclaration, mais il est exact de dire que nous
13 avons tous reçu nos salaires en dinars après la guerre.
14 Q. Merci, Docteur, de cette réponse bien franche. J'aimerais savoir si
15 votre directeur, vous aviez de bons rapports avec lui avant qu'il ne vous
16 dise que vous étiez congédié ?
17 R. Bien sûr. Il était dentiste. Il était nommé par la municipalité au
18 poste de directeur. J'avais de très bons rapports avec lui. Il travaillait
19 en tant que dentiste. Il s'occupait de ses affaires, moi je m'occupais des
20 miennes. Mais de façon générale, nous avions de très bons rapports.
21 Q. Voilà, justement je vous pose cette question. Est-ce qu'il vous est
22 jamais arrivé -- ou plutôt, à ce moment-là lorsqu'il vous a dit de ne plus
23 revenir, vous a-t-il jamais expliqué les raisons pour lesquelles -- il vous
24 a donné d'autres explications outre la réponse que vous nous avez déjà
25 donnée, à savoir que c'était un ordre qu'il avait reçu de ses supérieurs ?
26 R. Non, aucune autre raison ne m'a été donnée. C'était la dernière chose
27 qu'il ne m'ait jamais dite. Je suis descendu, j'ai prescrit un médicament à
28 cette vieille dame serbe qui était une patiente à moi, et j'ai quitté le
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1 bâtiment en sa compagnie; et je ne l'ai plus jamais revu depuis, lui.
2 Q. Merci beaucoup, Docteur.
3 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, si je ne m'abuse,
4 c'est l'heure de la pause. Je pourrais ainsi faire une pause dans mon
5 contre-interrogatoire et nous reprendrons après.
6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien, alors le moment est
7 propice, Monsieur Djordjevic. Effectivement, prenons notre pause maintenant
8 et nous pourrons revenir à 11 heures. Ceci permettra au technicien de
9 changer les rubans.
10 --- L'audience est suspendue à 10 heures 29.
11 --- L'audience est reprise à 11 heures 03.
12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Djordjevic, je vous en prie.
13 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
14 Q. Docteur Gerxhaliu, quand est-ce que vous êtes revenu du Monténégro à
15 Vucitrn, chez vous, dans votre ville ?
16 R. Aux alentours du 17, 18, 19 juin, je ne me souviens pas de la date
17 précise.
18 Q. Avez-vous séjourné dans votre ville natale de Vucitrn depuis ?
19 R. Oui, oui, à Studime.
20 Q. Docteur Gerxhaliu, pourriez-vous me dire combien de vos collègues non-
21 Albanais sont restés au dispensaire médical dans la ville de Vucitrn après
22 le mois de juin ?
23 R. Lorsque je suis rentré en juin -- je suppose que vous me posez la
24 question à propos de médecins, c'est cela ?
25 Q. Oui, il s'agit de médecins.
26 R. Je vous disais que lorsque je suis revenu après la guerre, je n'en ai
27 vu aucun. J'ai entendu dire qu'ils avaient pris leurs effets personnels et
28 qu'ils étaient partis.
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1 Q. Qu'en est-il du reste du personnel médical, je parle toujours des non-
2 Albanais ?
3 R. Il y a des Roms, il y a des Musulmans, mais il n'y a pas de Serbes --
4 je parle du dispensaire où je travaille, du dispensaire médical. Il y a des
5 Turcs également, mais il n'y a pas de Serbes, et il y a des Monténégrins.
6 Q. Docteur Gerxhaliu, alors essayons, je vous prie, de déterminer quelles
7 sont les divergences importantes entre votre déposition, vos déclarations
8 précédentes; ce que vous avez dit aujourd'hui diffère légèrement du reste
9 en fait. Voilà ce que j'aimerais indiquer à votre attention.
10 Vous avez dit aujourd'hui que le 26 mai vous avez été en quelque sorte
11 démis de vos fonctions oralement et que vous n'êtes jamais revenu au centre
12 médical. Je pense que cela figure aux lignes 14 à 21 du compte rendu de la
13 page 22, plutôt du compte rendu d'audience d'aujourd'hui.
14 R. Ce n'était pas le 26 mai, c'était le 26 mars pour commencer. Je ne sais
15 pas si l'erreur vient de vous ou des interprètes, mais le fait est que cela
16 s'est passé le 26 mars, deux jours après le début de la campagne aérienne
17 de l'OTAN.
18 Q. Si j'ai dit le "26 mai," c'est moi qui ai fait l'erreur. Merci pour la
19 correction apportée. Toutefois, il n'empêche que lors de votre
20 interrogatoire principal mené à bien par mon estimée consoeur Mme Gopalan,
21 vous avez répondu à l'une de ses questions - et cela figure à la page 12 du
22 compte rendu d'audience d'aujourd'hui, ligne 19 à ligne 25 - vous avez dit
23 que le 28 mars vous étiez encore dans la ville, que vous étiez au travail
24 dans votre clinique, que vous êtes rentré chez vous et que vous n'y avez
25 trouvé aucun membre de votre famille parce qu'ils avaient quitté le
26 domicile avant cela, et qu'ensuite vous vous êtes dirigé vers le nord.
27 Alors est-ce que vous pourriez préciser et nous dire ce qui est vrai, à
28 savoir le 26 mars vous avez été démis de vos fonctions et vous n'êtes
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1 jamais revenu au centre médical, ou est-ce qu'il est vrai que le 28 mars
2 vous étiez encore dans votre clinique, dans votre dispensaire, et que vous
3 êtes revenu, que vous n'avez trouvé personne chez vous, et que vous avez
4 quitté la ville ? Laquelle de ces deux versions est vraie ?
5 R. J'ai déclaré dans les déclarations et lors de la déposition - je ne
6 sais pas en fait ce que vous, vous avez entendu par le biais de
7 l'interprétation - mais ce que j'ai dit c'est qu'il m'était impossible de
8 revenir au centre médical après le 26 mars parce que les routes avaient été
9 bouclées. Pendant ces deux jours, je me suis déplacé le long de la rivière,
10 dans la montagne, je suis allé à l'hôpital de l'UCK à Sllakovc. Il nous a
11 été impossible de rentrer chez nous jusqu'au mois d'avril.
12 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Est-ce que nous pourrions afficher à
13 l'écran, je vous prie, le compte rendu d'audience d'aujourd'hui, page 12,
14 lignes 19 à 25, je vous prie, et page 13, lignes 1 à 9.
15 Q. Alors est-ce que vous comprenez l'anglais, Monsieur ? Est-ce que vous
16 le lisez ?
17 R. Oui.
18 Q. Je vous prie de bien vouloir regarder l'écran et de bien constater
19 quelle fut la réponse que vous avez apportée à la question posée par ma
20 consoeur. Regardez le compte rendu d'audience. Vous avez dit que le 28 vous
21 êtes rentré chez vous depuis la clinique, et c'est la raison pour laquelle
22 je vous demande si vous avez fait une erreur, étant donné que vous venez
23 maintenant de répéter qu'à partir du 26 vous n'avez plus eu rien à voir
24 avec ce centre médical. Précisez-nous la situation.
25 R. Il s'agit d'une erreur. Après le 26, deux jours après le début des
26 bombardements de l'OTAN, nous sommes partis et nous ne sommes plus revenus
27 au centre médical. J'ai déjà dit que cela s'est passé deux jours après le
28 début des bombardements de l'OTAN. Je me suis déplacé dans la zone que j'ai
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1 décrite, mais il m'était impossible de revenir au centre médical. Comment
2 est-ce que vous auriez pu revenir au centre médical en sachant pertinemment
3 que votre vie était menacée ?
4 Q. Merci, Docteur Gerxhaliu. J'aimerais maintenant vous poser une autre
5 question : nous en sommes maintenant à ce que vous aviez dit à propos de
6 cette femme âgée qui était votre patiente, vous l'avez examinée, et à la
7 suite de cet examen vous avez quitté la clinique en question ou le centre
8 médical et vous n'êtes plus jamais revenu. Vous nous avez dit que c'était
9 l'une de vos patientes. Voilà la question que j'aimerais vous poser : cette
10 femme, vous la connaissiez depuis longtemps, cette femme serbe ?
11 R. Oui, elle venait au centre médical très souvent. Elle souffrait d'un
12 problème rénal, d'un problème cardiaque également d'ailleurs, elle venait
13 fréquemment demander un avis médical. Ce jour-là, elle est venue pour
14 obtenir une ordonnance, elle voulait juste renouveler son ordonnance pour
15 obtenir de nouveaux médicaments de la pharmacie.
16 Q. Mais est-ce que vous savez où elle vivait ?
17 R. Quelque part à Vushtrri. Elle vivait dans les environs, je ne sais pas
18 exactement où. Je ne connais pas son adresse, mais ce que je sais c'est
19 qu'elle vivait dans la ville.
20 Q. Elle vous l'a dit, puisque vous le relatez dans votre déclaration, elle
21 vous a dit que vous faisiez partie d'une liste de
22 7 000 personnes de Vucitrn qu'ils avaient l'intention de tuer. Cet élément
23 d'information à propos des 7 000 personnes qui devaient être tuées à
24 Vucitrn, est-ce que cela est véridique ? Est-ce que vous avez bien compris,
25 parce qu'il s'agissait quand même d'une liste de 7 000 personnes à Vucitrn
26 ?
27 R. Je lui ai donné son ordonnance, elle m'a remercié et m'a demandé : Est-
28 ce que vous avez peur ? Je lui ai dit : Non, je n'ai pas peur. J'ai
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1 toujours bien traité les gens. Je pense qu'il y aura quelqu'un parmi les
2 Serbes qui me défendra, et elle a répondu en me disant : Ce n'est pas vrai.
3 Faites attention. J'ai entendu dire qu'il y avait une réunion qui avait été
4 convoquée et que vous faisiez partie de ces 7 000 intellectuels qui vont
5 être tués, et elle m'a dit que tout le secteur allait être nettoyé et
6 habité par des réfugiés de Bosnie, de Croatie et d'autres endroits.
7 Je l'ai remerciée et là je dois dire que j'ai quand même commencé à faire
8 un peu plus attention, et en fait je considère qu'elle m'a sauvé la vie
9 d'ailleurs. Je la remercie très souvent dans mes pensées parce que je n'ai
10 jamais eu la possibilité de la revoir.
11 Q. Au paragraphe 4 de votre déclaration, vous dites qu'elle vous a dit que
12 vous traitiez pendant la journée des patients, mais que pendant la nuit
13 vous traitiez l'UCK. Cela ne me semble pas être une mise en garde
14 particulièrement amicale. Est-ce que vous pourriez nous dire d'où elle a
15 obtenu cette information ?
16 R. Ecoutez, c'est ce qu'elle m'a dit. Elle avait entendu dire qu'une
17 réunion avait été convoquée et que lors de cette réunion quelqu'un avait
18 mentionné mon nom, elle m'a dit que le nom du Dr Gerxhaliu avait été
19 mentionné, qu'il avait été dit le Dr Gerxhaliu pendant la journée est comme
20 un ange, mais le soir il va voir les terroristes pour panser leurs plaies,
21 et c'est pour cela qu'il sera puni pour cette activité.
22 Q. Au paragraphe suivant ainsi que pendant votre déposition d'ailleurs,
23 vous avez dit que la nuit vous alliez soigner les membres de l'UCK qui
24 étaient blessés et les personnes qui se trouvaient dans le territoire
25 contrôlé par l'UCK. Je peux en conclure qu'"ils," comme vous dites, et
26 qu'"ils," comme elle disait, qu'il s'agit des forces serbes, alors est-ce
27 que je peux en conclure qu'ils disposaient d'informations suivant
28 lesquelles vous traitiez des soldats de l'UCK. Puis-je tirer cette
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1 conclusion ?
2 R. Bien sûr qu'ils ont dit cela. C'est ce qu'elle a confirmé en fait.
3 C'est pour ça qu'elle m'a mis en garde. C'est pour cela que par la suite
4 d'ailleurs, j'ai commencé à être de plus en plus prudent.
5 Q. C'est la raison pour laquelle vous êtes parti de Vucitrn, parce que
6 vous vous êtes rendu compte que votre vie était directement menacée par les
7 Serbes, étant donné qu'ils avaient obtenu des informations suivant
8 lesquelles vous soignez ceux qui pour eux étaient des terroristes de l'UCK.
9 Est-ce que c'est ainsi que l'on peut analyser la situation une fois que
10 vous avez reçu ces éléments d'information de la part de cette femme ?
11 R. Oui, oui, c'est ainsi d'ailleurs que les choses se sont passées.
12 Q. Merci, Docteur. J'aimerais maintenant vous poser une autre question,
13 car vous avez dit que pendant la nuit vous vous rendiez dans des zones
14 contrôlées par l'UCK pour fournir une assistance médicale aux combattants
15 de l'UCK, ainsi qu'aux autres personnes, parce que la population en
16 question ne pouvait pas venir à Vucitrn, parce qu'elle y aurait été tuée.
17 Alors, Docteur Gerxhaliu, dites-nous je vous prie ce qui suit. Jusqu'au 26
18 mai, est-ce que vous avez vu des cas de personnes qui venaient au centre
19 médical de Vucitrn ? Je pense à des personnes qui venaient de territoires
20 contrôlés par l'UCK, et ce, afin d'obtenir une aide ou une assistance
21 médicale. Est-ce que vous auriez vu donc ces personnes qui auraient été
22 liquidées ou tuées avant le 26 mai dans le centre médical aux alentours du
23 26 mai ?
24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Ecoutez, je pense que vous voulez
25 parler du 26 mars. Vous avez à nouveau parlé du mois de mai.
26 M. DJORDJEVIC : [interprétation] C'est une erreur de ma part. Merci,
27 Monsieur le Président.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Avant le 26 mars et après d'ailleurs, les
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1 postes de contrôle serbes se trouvaient dans le village Dakovce qui se
2 trouvait sur la route entre Prishtina et Vushtrri, et puis il y avait un
3 poste de contrôle également à Samadrexha dans le quartier de Llazoviq. Il y
4 avait d'autres postes de contrôle d'ailleurs, ce qui fait que les
5 personnes, les civils qui vivaient dans la zone contrôlée par l'UCK et qui
6 passaient par ces postes de contrôle faisaient l'objet de sévices. Certains
7 ont d'ailleurs peut-être été tués. Moi, je n'ai pas pu tout voir de mes
8 yeux, mais comme je l'ai indiqué dans ma déclaration dans l'affaire
9 Milosevic, dans l'affaire Milutinovic ainsi qu'aujourd'hui, vous verrez par
10 exemple même de nous jours qu'il y a encore des personnes qui souffrent de
11 séquelles de leurs tortures et de leurs sévices subis à ces postes de
12 contrôle. Donc, les gens avaient peur. Ils avaient peur de passer par ces
13 postes de contrôle, et c'est la raison pour laquelle moi, je devais aller
14 vers eux, je devais aller les trouver pour les soigner.
15 M. DJORDJEVIC : [interprétation]
16 Q. Docteur Gerxhaliu, donc puis-je en conclure -- puis-je conclure d'après
17 vos derniers propos que vous n'avez pas de conséquences directes du fait
18 que des personnes auraient été tuées au poste de contrôle alors que ces
19 personnes essayaient d'obtenir une aide médicale ? Je parle de personnes
20 véritablement malades qui avaient besoin de voir un médecin à Vucitrn.
21 Vous, vous n'avez pas de connaissance directe de ce genre de fait, n'est-ce
22 pas ?
23 R. Non. Personnellement, je ne dispose pas de ce genre d'information. Il y
24 a des gens qui s'occupent des droits de l'homme, des libertés qui justement
25 disposent de ce genre de dossier. Moi, mon devoir et ma mission principale
26 consistaient à soigner les gens qui avaient besoin de mon aide.
27 Q. Merci. Merci, Docteur Gerxhaliu. Alors, le document médical - enfin je
28 ne sais pas, ce qu'on appelle les chartes médicales ou les dossiers
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1 médicaux plutôt, pour trouver le mot exact - est-ce que ces dossiers
2 médicaux ont été conservés à Vucitrn ?
3 R. Vous voulez parler de la période qui a précédé la guerre ?
4 Q. Non, non, je parle de dossiers médicaux couvrant -- oui, pour la
5 période allant jusqu'au 24 mars 1999. Est-ce que ces dossiers ont été
6 conservés ?
7 R. Lorsque nous sommes revenus après la guerre, nous n'avons rien trouvé.
8 Tout avait été jeté. Tout avait disparu. Le centre médical qui existait
9 avant la guerre avait été repris par la communauté internationale. Il a été
10 reconstruit et il a été converti en un hôpital. Donc, nous n'avons rien
11 trouvé de ces dossiers médicaux qui remontaient à la période précédant la
12 guerre.
13 Nous avons trouvé des documents personnels de collègues serbes, des permis
14 de travail, par exemple, ce genre de choses, et nous leur avons envoyé
15 leurs documents. Mais pour ce qui était des dossiers médicaux, nous n'avons
16 rien trouvé.
17 Comme vous le savez, moi, je ne suis pas revenu directement après. Je
18 ne suis pas revenu directement du Monténégro au Kosova, mais lorsque j'ai
19 fini par revenir, j'ai vu qu'il y avait de nombreux documents qui avaient
20 été jetés et déchirés. Donc, pour ce qui est était des dossiers médicaux de
21 nos patients, il faut savoir que rien n'avait été préservé, rien ne restait
22 à cet endroit.
23 Q. Est-ce que vous connaissez l'identité de cette femme âgée qui était
24 votre patiente et qui venait souvent vous voir en consultation ?
25 R. Je ne me souviens pas de son nom; je sais à quoi elle ressemble. Elle
26 n'était pas très grande. Elle portait un foulard sur la tête. Je ne me
27 souviens pas de son nom. J'avais plus de 80 patients, mais je me souviens
28 très bien de son visage. Je me souviens également de son état de santé, des
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1 thérapies dont elle avait besoin, et cetera, et cetera. J'ai également dit
2 dans ma déclaration qu'il est extrêmement fâcheux que je ne me souvienne
3 pas de son nom. Je suis allé au village de Grablje [phon] - c'est un
4 village serbe - pour la chercher, parce que je voulais la remercier
5 personnellement, mais je ne l'y ai pas trouvée.
6 Q. Merci. Vous avez justement abordé ce qui allait faire l'objet de ma
7 question suivante. Vous venez de dire que vous ne l'aviez pas revue après
8 la guerre. Donc, elle n'était pas originaire de Vucitrn. Elle venait du
9 village de Grablje donc. Merci d'avoir précisé cela.
10 R. Non, non, non. Elle était de Vushtrri. C'était une femme de la ville de
11 Vushtrri. Elle avait toujours habité à la ville. Grablje est un village qui
12 fait partie de la municipalité de Vushtrri près de Babici [phon], mais
13 elle, elle était de la ville. Elle vivait dans un appartement ou dans une
14 maison -- enfin, je n'en sais rien. Je ne sais pas exactement d'ailleurs.
15 Comme je vous l'ai dit, je n'avais pas son adresse. Je n'étais pas si
16 intéressé par son adresse, tant qu'elle était ma patiente. Mais ce que je
17 sais, c'est qu'elle vivait dans la ville.
18 Q. Je vous ai posé la question parce que vous avez mentionné le fait que
19 vous étiez allé à Grablje parce que vous souhaitiez la remercier. C'est
20 pour cela que je vous ai posé cette question. Donc, elle vivait en ville.
21 C'est ce que vous venez de nous préciser. Merci. Je voudrais vous demander
22 de faire preuve de patience maintenant.
23 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Est-ce que vous pourriez afficher à
24 l'écran la pièce D002-5233. C'est la version serbe ou en B/C/S, et est-ce
25 qu'on peut afficher en même temps D002-5235 en anglais.
26 Q. Docteur, voyez-vous ces documents ? Et après le paragraphe numéro 8, à
27 la ligne 2, où il est dit :
28 "Dans la zone de responsabilité du Kosovska Mitrovica," à tel jour,
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1 et cetera, pouvez-vous lire tout le paragraphe et pouvez-vous donner des
2 commentaires là-dessus.
3 R. [aucune interprétation]
4 Q. Je ne reçois pas d'interprétation.
5 Je ne sais pas si vous avez répondu que vous êtes en mesure de voir ou pas
6 cela.
7 R. Vous pensez à la version en serbo-croate, 006 -- ?
8 Q. "Dans la zone de responsabilité de Kosovska Mitrovica le 24 septembre
9 1998, dans l'après-midi, un groupe de trois Spitar du village de Samodreza
10 en tant que représentants du village se sont rendus à bord d'un tracteur
11 chez les terroristes qui se trouvaient à la proximité du village de
12 Cecelija pour les persuader de cesser les attaques et de rendre les armes."
13 Est-ce qu'il faut que je réitère une partie de la citation ?
14 R. Je pense, oui.
15 Q. "Les terroristes les ont malmenés physiquement, les ont battus, ont
16 cassé leur tracteur et leur ont dit de se rendre au village en disant que
17 si la prochaine fois ils essayaient de se rendre dans cette région, ils
18 allaient les tuer."
19 Connaissez-vous cela, cet incident ?
20 R. Non, je ne dispose pas d'informations au sujet de cet incident. J'ai
21 déjà dit dans l'affaire Milutinovic et consorts, et je vais répéter encore
22 une fois dans cette affaire qu'il faut me donner des noms des personnes
23 impliquées dans cet incident; comme je l'ai déjà dit, parce que c'est
24 quelque chose qui n'est pas englobé dans ma déclaration. Tout simplement,
25 je n'ai pas eu le temps pour m'occuper de tout cela. Vous pouvez
26 probablement demander au Conseil des droits de l'homme pour en savoir plus,
27 parce qu'ils suivaient la situation et tout un peu plus. Moi, je m'occupais
28 de mes affaires et je travaillais en tant que médecin. Et si quelqu'un est
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1 venu pour demander mon assistance, je faisais ce que je pouvais faire. Donc
2 je ne peux pas vous dire quoi que ce soit à ce sujet parce que je ne suis
3 pas conscient de cela. Donc je n'ai pas entendu parler de cet incident. Je
4 n'ai pas vu cet incident se dérouler.
5 Q. Merci, Docteur.
6 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Maintenant, est-ce qu'on peut afficher une
7 autre pièce, 65 ter la pièce P244. Mon collègue, Me Djurdjic m'a dit qu'il
8 y avait des problèmes hier pour ce qui est de l'affichage de cette carte.
9 Il s'agit en fait de la pièce 65 ter 5244. Il s'agit d'une carte qui porte
10 le numéro 0586767, mais son numéro 65 ter est 5244.
11 Q. Et j'aimerais vous poser des questions à propos de cette carte. Après
12 quoi, je vais vous poser des questions pour ce qui est d'une autre carte de
13 l'Accusation qui a été déjà versée au dossier.
14 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Et est-ce qu'on peut afficher maintenant
15 cette première carte. Merci.
16 Q. Sur la carte qui vous a été présentée par l'Accusation, vous avez posé
17 des annotations concernant le territoire qui était contrôlé par l'UCK.
18 Cette carte qui est affichée sur l'écran est une carte où on peut voir les
19 rails du chemin de fer passant par Vucitrn.
20 Vous avez dit que 90% [comme interprété] du territoire était contrôlé par
21 l'UCK. Je peux en conclure que mis à part les voies de communication
22 principales tenues par les forces serbes, que le reste du territoire était
23 tenu par l'UCK. Docteur, dites-moi si cette voie de communication, à savoir
24 les rails du chemin de fer sur une portion des rails était contrôlée par
25 l'UCK au nord-ouest ou au sud-est, parce que les rails passent en diagonale
26 par Vucitrn, c'est ce qu'on peut voir sur la carte.
27 R. J'ai déjà posé des annotations, j'ai déjà dessiné une ligne similaire
28 et j'ai expliqué que les rails du chemin de fer, la ville, entre Prishtina
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1 et Mitrovica, ces portions du chemin de fer étaient sous le contrôle des
2 forces serbes, et je n'ai pas entendu dire que l'UCK aurait contrôlé cela.
3 Mais les villages que vous venez d'énumérer, Cicavica et les autres
4 villages, pour autant que je sache, 20 % de ce territoire était contrôlé
5 par l'UCK, pour ce qui est de ces quartiers. Mais pour ce qui est de la
6 ville et des banlieues de la ville, tout cela était contrôlé par les forces
7 yougoslaves.
8 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Est-ce qu'on peut aider le témoin. Est-ce
9 que M. l'Huissier peut aider le témoin en lui donnant un stylet
10 électronique pour qu'il dessine le territoire contrôlé par les Serbes. Est-
11 ce qu'on peut lui donner un stylet électronique pour qu'il puisse dessiner
12 ce cercle.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai déjà dessiné cette ligne. Mais les
14 toponymes indiqués sur la carte sont indiqués en lettres minuscules trop
15 petites. Je ne peux pas donc me situer sur la carte, je ne peux pas vous
16 indiquer les endroits où se trouvaient les forces serbes. Je ne peux pas
17 voir Samadrexha et les autres. Donc cette ligne ici, ça représente le
18 territoire sous le contrôle de l'UCK et cette autre ligne, c'est le
19 territoire contrôlé par les forces serbes.
20 M. DJORDJEVIC : [interprétation]
21 Q. Est-ce que vous pouvez indiquer le territoire qui était autour de
22 Vucitrn vers le nord.
23 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Est-ce qu'on peut agrandir d'abord la
24 partie inférieur de la carte où on peut voir Vucitrn.
25 Q. Est-ce que vous pouvez dessiner une ligne allant vers le nord vers les
26 villages de Velika Kicic. Est-ce que vous voyez mieux maintenant ?
27 R. Oui, je vois mieux maintenant. Gojbulja, Mirac [phon]. Je ne vois pas
28 Donja Sudimlja, peut-être que c'est ici. J'espère que j'ai raison.
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1 Q. Oui. Donja Sudimlja est à droite par rapport à Vucitrn. Pouvez-vous
2 dessiner un cercle autour de la zone contrôlée par les forces serbes.
3 R. Je pense que Gornje Sudimlja est là.
4 M. DJORDJEVIC : [aucune interprétation]
5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous ne pouvons pas agrandir la carte
6 maintenant, sinon nous allons perdre toutes les annotations apposées
7 jusqu'ici. Si nous agrandissons cette partie de la carte, nous devons
8 apposer des annotations à nouveau.
9 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Puisque c'est important pour la Défense,
10 j'aimerais qu'on place cette carte sur le rétroprojecteur parce que ça sera
11 plus approprié que d'afficher la même carte dans le système électronique.
12 Est-ce qu'on peut placer la carte sur le rétroprojecteur dans le sens
13 inverse…
14 Est-ce qu'on peut placer la carte de façon à ce que Vucitrn soit au
15 milieu de la surface du rétroprojecteur --
16 Mme GOPALAN : [interprétation] Monsieur le Président, ce qu'on peut voir
17 sur l'écran et sur la carte, je vois qu'il y a des annotations sur la
18 carte.
19 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vois qu'il y a des annotations en
20 noir.
21 Mme GOPALAN : [interprétation] Si je me souviens bien, la version qu'on a
22 montrée hier ne contenait pas d'annotation du tout.
23 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Le Procureur a raison. Les annotations en
24 jaune sont les annotations utilisées par la Défense lorsque la carte a été
25 présentée pour retrouver plus facilement les endroits mentionnés dans la
26 déclaration du témoin. Les annotations en noir, je ne peux pas vous dire de
27 quoi il s'agit parce que ce n'est pas moi qui ai posé ces annotations, mais
28 pour ce qui est des annotations en jaune, c'est moi qui ai apposé ces
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1 annotations en feutre jaune parce que ce sont les endroits mentionnés par
2 le témoin.
3 Ce n'est pas possible d'utiliser cette carte pour apposer d'autres
4 annotations, nous n'avons pas l'autre carte qui est une carte vierge.
5 J'aimerais que le témoin indique autour de Vucitrn seulement le territoire
6 qui était contrôlé par les forces serbes, c'est tout ce que je veux que le
7 témoin fasse, est-ce que cela est possible, bien sûr. Je ne pense pas que
8 cela soit une question fondamentale.
9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La Chambre ne tiendra pas en compte
10 les annotations en noir et en jaune qui existent déjà sur la carte. Le
11 témoin utilisera le stylet rouge et comme cela nous pourrions suivre les
12 annotations du témoin. Est-ce que cela peut vous aider, Maître Djordjevic ?
13 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Ma seule question pour le témoin pour ce
14 qui est de cette carte est que le témoin nous indique le territoire
15 contrôlé par les forces serbes sur cette carte.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Sur la première carte les toponymes étaient
17 beaucoup plus clairs. Sur cette carte ce n'est pas aussi clair.
18 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
19 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Est-ce qu'on peut donner la carte au
20 témoin pour qu'il appose ses annotations, après quoi on peut replacer la
21 carte sur le rétroprojecteur.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Pour moi, il était plus facile d'apposer des
23 annotations sur la première carte --
24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Djordjevic, nous allons essayer
25 d'agrandir cela dans le système électronique pour avoir une image plus
26 nette de la carte.
27 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je suis d'accord
28 avec vous pour dire que l'autre carte, mais sans annotation apposée par le
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1 témoin, sera affichée, et il peut apposer des annotations maintenant sur
2 cette autre carte. On peut afficher la première carte, je ne dispose pas du
3 numéro exact de cette carte, mais Mlle O'Leary va m'aider, c'est P514,
4 c'est la cote de la carte, mais il faut l'afficher sans annotations
5 apposées par le témoin parce que cette carte a été déjà versée au dossier
6 en tant que pièce à conviction --
7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Voyez-vous maintenant clairement ce
8 qui est affiché sur l'écran, Maître Djordjevic. Je pense que c'est la carte
9 sur laquelle M. le Médecin pourrait se situer, vous pouvez lui demander
10 qu'il appose des annotations sur cette carte.
11 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Je suis d'accord avec vous, et c'est pour
12 cela que j'ai proposé que cette carte soit affichée. Mais s'il est plus
13 facile pour le témoin d'utiliser l'autre carte, je suis d'accord. Mais je
14 ne veux qu'il indique le territoire de 20 % qui était contrôlé par les
15 forces serbes, c'est tout ce que je veux qu'il fasse.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Il m'est plus facile de faire cela sur la
17 première carte. Je vais essayer de le faire maintenant sur cette carte.
18 Comme vous le savez, je suis médecin, et je ne me débrouille pas bien avec
19 les cartes.
20 Les forces serbes étaient à Studime, Donje Studime, Saracak, Samadrexha, à
21 Dumnice, à Donje Dumnice, à Gojbulja, à Smrekonica, il s'agit de cette
22 ligne-là pour indiquer ce territoire. C'est la zone qui est en dessous.
23 Cette partie était contrôlée par les forces serbes yougoslaves. Ce
24 territoire allant jusqu'à Llap était contrôlé par les forces de l'UCK. Ici
25 se trouvent les rails du chemin de fer qui, comme je l'ai déjà dit, était
26 contrôlé par les forces serbes, Pantine, Sitarice, Nevolane, c'est en
27 dessous, Preluze, je ne vois pas Preluze, c'est à peu près ce territoire.
28 C'était approximativement la ligne qui était sous le contrôle de l'UCK,
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1 alors que la partie entre les deux lignes en rouge était contrôlée - au
2 moins c'est ce que je pensais, ce qui représentait à peu près 20 %, c'est
3 mon estimation - ce territoire était contrôlé par ces forces. Mais vous
4 pouvez vérifier vous-même cela.
5 M. DJORDJEVIC : [interprétation]
6 Q. Merci.
7 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Cette carte peut être retirée maintenant,
8 mais j'aimerais que cette carte soit versée au dossier avec les annotations
9 apposées par le témoin.
10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La carte sera versée au dossier.
11 M. LE GREFFIER : [interprétation] La carte recevra la cote 514 [comme
12 interprété].
13 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ce que j'ai déjà dit au Procureur avant.
14 M. LE GREFFIER : [interprétation] La carte portera la cote D00069, Monsieur
15 le Président.
16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maintenant cette carte fait partie du
17 dossier de l'affaire, Maître Djordjevic.
18 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Merci.
19 Q. Est-ce que Veskovica était contrôlée par les membres de l'UCK ?
20 R. Quel endroit ?
21 Q. Vesekovce.
22 R. Vesekovc, oui jusqu'au 2 mai. Oui, je parle de Veskovc, cela se trouve
23 au-dessus de Sllakovc. Sllakovc, Vesekovc, tout cela c'était dans cette
24 zone-là.
25 Q. A la fin de mars et en début d'avril, Svracak était contrôlé par l'UCK
26 aussi ?
27 R. Les deux Saracak n'était pas contrôlés par l'UCK. Dans ces deux
28 Saracak, les Serbes vivaient et ces deux endroits étaient contrôlés par les
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1 forces serbes. Saracak e Eperme, Gornje Saracak et Donje Studime.
2 Q. A la fin du mois d'avril, dites-moi si les Serbes tenaient toujours
3 Svracak ?
4 R. Oui, oui, je pense que oui, qu'ils contrôlaient Studime et Saracak. Il
5 y avait un point de contrôle serbe là-bas qui lançait des obus de temps en
6 temps vers Donje Studime. Il y avait toujours des forces serbes à ces deux
7 positions.
8 Q. Merci. Au paragraphe 6, c'est le même paragraphe, dans le paragraphe 6
9 de votre déclaration, il est dit que beaucoup de personnes étaient parties
10 dans les montagnes pour éviter les tirs et les obus. Pouvez-vous
11 m'expliquer pourquoi ces personnes ne se seraient pas rendues à Vucitrn
12 pour éviter des coups de feu et des obus, parce que si j'ai bien compris, à
13 Vucitrn, il n'y avait pas tout ça, il n'y avait pas de coups de feu, il n'y
14 avait pas de pilonnage.
15 R. La population a été expulsée de toute la ville et a été rassemblée à la
16 Dardania, à proximité d'un cimetière. Il n'y avait pas suffisamment de
17 place pour toute la population. Le ruisseau de Studime coulait dans un
18 canal d'une profondeur de deux ou trois mètres et c'était la meilleure
19 position pour ceux qui voulaient y aller. Ils se sont rendus là-bas, tous
20 ceux qui voulaient y aller, pour se sauver. Comme j'ai déjà dit, ils ont
21 été expulsés de leurs domiciles, et comme j'ai déjà dit, ils sont allés au
22 cimetière où un massacre a eu lieu le 22 mai.
23 Q. Vous vous êtes rendu dans les montagnes pour travailler dans des
24 hôpitaux de campagne de l'UCK qui se trouvaient dans ces montagnes ?
25 R. Oui, oui j'ai travaillé à l'hôpital de l'UCK.
26 Q. Où se trouvaient les hôpitaux de l'UCK à l'époque ?
27 R. Lorsque cette zone était sous le contrôle de l'UCK, l'hôpital se
28 trouvait à Bajgora et Kovacic, mais l'hôpital principal était à Sllakovc,
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1 où j'ai passé la plupart de mon temps. Il s'agissait d'un bâtiment à deux
2 étages et il y avait plus de pièces nécessaires pour accueillir tous les
3 blessés. C'est là-bas que je travaillais la plupart du temps. Cet hôpital a
4 été transformé en hôpital musée aujourd'hui.
5 Q. Dites-moi Docteur, quel était votre rôle à l'organisation de la
6 protection médicale des membres de l'UCK se trouvant sur le terrain ? Y
7 avait-il une sorte de hiérarchie ? Etiez-vous le seul médecin ou vous
8 faisiez partie d'un groupe de médecins ?
9 R. Je travaillais seul parfois, quelquefois des collègues venaient de Llap
10 pour m'aider. Parfois je me rendais là-bas pour les aider. Il n'y avait pas
11 de hiérarchie. Nous travaillions en tant que bénévoles en fournissant de
12 l'aide à ceux qui en avaient besoin. Les chirurgiens étaient arrivés après
13 le 16 mai, ils s'occupaient de leur partie du travail, mais pendant la
14 période où il n'y avait pas de chirurgien, je travaillais en temps que
15 gynécologue, pédiatre ou chirurgien. J'ai tout simplement essayé de
16 m'occuper de tous les patients qui venaient là-bas. Je faisais de mon
17 mieux, mais je n'ai fait aucune différence entre les personnes blessées,
18 personnes contagieuses, personnes âgées, enfants. C'était tout simplement
19 des gens malades, et j'essayais de les aider tous, de faire de mon mieux
20 selon le serment d'Hippocrate, comme vous le savez.
21 Q. Je respecte cela, mais pour ce qui est de la protection médicale
22 dans des conditions de guerre, pour ce qui est du matériel nécessaire pour
23 fournir de l'aide médicale, vous serez d'accord avec moi pour dire que ce
24 n'est pas un travail simple et facile. Qui s'occupait de tout cela ? Qui
25 prenait des décisions concernant l'organisation de l'aide médicale, de la
26 protection médicale ?
27 R. Non, comme je l'ai déjà dit, il s'agissait du travail de bénévoles. Les
28 gens fournissaient des choses nécessaires, parfois les membres de la
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1 famille des gens malades amenaient ce qu'ils avaient. C'était le travail
2 des bénévoles et rien n'a été fait de façon organisée, les gens essayaient
3 tout simplement d'aider en fournissant de l'assistance aux personnes
4 malades, aux personnes blessées, les gens donnaient du matériel médical,
5 des médicaments. Nous utilisions l'équipement de la zone opérationnelle de
6 Llap qui se trouvait à la frontière avec la Serbie.
7 Parfois les gens de Llap nous fournissaient cet équipement, parce
8 qu'ils en avaient plus que nous et les gens de Llap nous fournissaient
9 cela. Je ne sais pas comment ils les ont trouvés, je ne sais pas s'ils les
10 ont achetés, mais nous manquions de cela.
11 Q. Vous avez appelé ces hôpitaux des hôpitaux de campagne de l'UCK.
12 Etiez-vous membre de l'UCK ?
13 R. Oui, puisque je travaillais à cet endroit-là, j'étais membre de
14 l'UCK, je l'ai déjà dit même par le passé.
15 Q. S'agissant de ces hôpitaux de campagne, est-ce que ceci veut dire que
16 les hôpitaux étaient placés sous le contrôle de l'UCK ?
17 R. L'UCK avait pour but de nous protéger, de nous informer dans le cas où
18 la ligne de front était percée. Ils nous donnaient des ordres pour que l'on
19 se déplace à un endroit plus sûr s'il y avait des problèmes, mais sinon ils
20 ne jouaient aucun autre rôle dans notre travail. Comme j'ai dit, nous
21 faisions un travail bénévole, donc dans les circonstances tout ceci était
22 créé par le régime précédent, et tout le monde essayait de faire ce qu'ils
23 pouvaient.
24 Q. J'aimerais vous poser la question suivante. Nous avons entendu des
25 témoins nous donner leurs dépositions, mais puisque vous étiez membre de
26 l'UCK, j'aimerais savoir si l'UCK était une organisation bien développée
27 depuis les débuts de son existence ?
28 R. Voyez-vous, pour ce qui est de l'organisation et de la structure, ceci
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1 ne fait pas partie de mon travail. Comme j'ai dit, je faisais partie de la
2 logistique, et je ne me suis penché que sur mon travail. L'UCK avait son
3 commandement. Il y avait des zones, ces zones opérationnelles, dans le
4 contexte la zone opérationnelle de Shale, et c'est là que je travaillais,
5 puis pour ce qui est du nord, Studime, Saracak. Il y avait une autre
6 brigade qui s'appelait la Brigade 142, et elle opérait dans le sud de
7 Vushtrri et Cicavica, mais nous communiquions plus avec Llap.
8 Mais entre les Brigades 141 et 142 il y avait Vushtrri, et c'est là
9 qu'étaient placées les forces serbes, et ceci nous empêchait de communiquer
10 avec eux directement. Mais à l'hôpital, nous n'avions pas réellement de
11 temps pour nous occuper de ce type de questions puisque nous voulions
12 trouver des approvisionnements pour prodiguer des soins aux malades et aux
13 blessés.
14 Q. Docteur, je vous ai posé cette question en tenant compte bien sûr de
15 votre profession, mais également à cause de la déclaration que vous avez
16 donnée, et je vais citer le paragraphe 11 dans lequel vous avez dit, je
17 cite :
18 "Le 2 mai 1999, l'ordre a été donné pour que l'UCK soit transféré puisque
19 les Serbes avaient percé la ligne de front à Llap et Meljenica."
20 Donc un ordre est parvenu pour que l'UCK soit transféré. Pourriez-vous nous
21 dire, si vous le savez, qui avait la responsabilité dans cette zone et qui
22 aurait pu donner un tel ordre ?
23 R. Ce n'était pas un ordre qui avait été donné par les commandants eux-
24 mêmes. C'était plutôt une information, un message, qui nous avait été donné
25 par les soldats à l'hôpital, ils nous avaient dit que les positions de
26 combat à Meljenica, Majdan, Llap, dans ces zones opérationnelles-là, et au
27 nord et dans la partie nord-ouest et sud-est, qu'ils étaient en train
28 d'avancer et que nous devions procéder à une évacuation.
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1 Ce n'était pas un ordre, c'était une information, un message qui nous
2 avait été donné afin que nous puissions partir avant qu'ils n'arrivent.
3 Donc ils ont pris le temps pour transférer les malades, pour préparer le
4 tout. Donc j'étais parmi les derniers à quitter l'endroit, et juste avant
5 que nous ne partions, nous avions eu une discussion entre nous.
6 L'UCK était une organisation plutôt démocratique. Ils n'imposaient pas quoi
7 que ce soit. Ma famille voulait venir avec moi, donc j'avais la liberté
8 d'être avec ma famille.
9 Q. J'ai très bien compris ce que vous m'avez dit, et si j'ai bien compris
10 on ne vous a pas donné d'ordre, vous avez procédé de la sorte parce que
11 vous aviez reçu une information. Mais vous nous dites - et je vous en ai
12 donné lecture, mais vous pouvez en prendre connaissance vous-même - le 2
13 mai 1999, un ordre est arrivé pour que l'UCK soit transféré, non pas
14 l'hôpital, mais l'UCK, que l'UCK soit transféré parce que les Serbes
15 avaient percé la ligne de front à Llap et Meljenica. C'est ce qui est
16 rédigé dans la version en anglais. Alors qu'en serbe -- vous avez signé la
17 version serbe également. Vous avez prononcé ces paroles effectivement en
18 2000, c'était il y a plusieurs années, mais je vous demande maintenant de
19 nous dire si vous vous souvenez de qui cet ordre est-il venu pour que l'UCK
20 soit transféré ? Car c'était bien vos propos. Est-ce que vous savez qui
21 avait la responsabilité de cette zone de responsabilité ? Qui était le
22 commandant de cette zone de responsabilité pendant que vous travailliez
23 dans ces hôpitaux de campagne ? Est-ce que c'était un ordre qui est parvenu
24 du plus haut échelon, ou bien comment est-ce que cela s'est-il passé, donc
25 l'ordre pour que l'UCK soit transféré ?
26 R. Pour ce qui est des ordres venant des structures militaires, le
27 personnel militaire connaît mieux la façon de procéder. Nous faisions
28 partie de la logistique. Nous travaillions sur une base volontaire. Nous
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1 avions reçu ce message, et nous nous sommes conformés à cette information.
2 Pour ce qui est des structures de l'UCK, ils avaient leurs propres ordres,
3 j'ignore quels étaient ces ordres. Ils sont partis en direction de Dumnice,
4 c'est-à-dire que le convoi est parti du côté droit vers Ceceli. Je sais que
5 l'UCK les a pris et a blessé les membres de l'UCK, alors que les civils
6 avaient emmené avec eux leurs membres de la famille malades.
7 Pour ce qui est du commandement de l'UCK, pour ce qui est du QG, je ne me
8 suis jamais rendu là-bas. Je n'ai pas eu le temps d'y aller. Je passais
9 tout le temps à l'hôpital et je m'occupais de mes patients. Je ne peux donc
10 pas vous parler de quelque chose que j'ignore. Je peux seulement vous dire
11 que la distance entre l'hôpital de campagne et le commandement de l'UCK
12 était assez importante, les deux endroits étaient assez éloignés. Ils
13 avaient leur propre personnel militaire, et moi je m'occupais des patients.
14 Q. Docteur, est-ce que je vous ai bien compris, n'avez-vous jamais
15 prononcé les paroles qui figurent au paragraphe 11, à savoir qu'un ordre
16 était arrivé pour que l'UCK soit transféré ? C'est ce qui était rédigé ici
17 au paragraphe 11. Est-il exact de dire que vous ne pouvez pas nous dire
18 maintenant si un ordre était arrivé pour que l'UCK soit transféré, vous
19 n'avez aucune idée de cela ?
20 R. Ecoutez, ce n'est pas un ordre en tant que tel, ce n'était pas un
21 ultimatum. Nous avions reçu ceci comme un message, une information. La
22 structure militaire fonctionnait d'après les ordres depuis leur
23 commandement. Nous faisions partis de la logistique. Nous travaillions sur
24 une base volontaire et nous avions reçu ceci comme une information, comme
25 un message qui nous était parvenu.
26 Ils auraient bien pu donner un ordre à leurs commandants de zone ou
27 bien aux commandants des unités ou de leurs brigades. Je ne le sais pas.
28 Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, le commandement de la zone était
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1 situé à une distance assez importante de l'hôpital; et je ne suis pas une
2 personne qui aimait les armes, je n'ai jamais aimé les armes. Je n'ai donc
3 pas porté attention sur tout ce qui est relatif aux questions militaires;
4 je ne faisais attention qu'à mon travail. C'est tout ce que je veux vous
5 dire. Personne ne m'a donné d'ordre. Mon travail était fait sur une base
6 volontaire et c'est tout. S'il y avait eu des ordres, quelqu'un m'aurait
7 dit quelque chose lorsque je suis parti, et lorsque eux ils sont partis
8 avec les blessés je suis allé joindre ma famille et mes enfants, et non pas
9 l'UCK et leurs soldats blessés.
10 Q. Docteur, veuillez répondre à ma question, s'il vous plaît. Ai-je raison
11 de dire que cette partie-ci de votre déclaration qui figure au paragraphe
12 11 n'est pas exacte, que vous ne savez absolument pas si l'UCK avait reçu
13 quelque ordre que ce soit, car ici il est indiqué :
14 "L'ordre est arrivé pour que l'UCK soit transféré," et non pas vous ou non
15 pas l'hôpital, mais bien l'UCK. C'est ce que vous aviez dit, c'est ce que
16 vous avez déclaré. Ai-je raison de dire que vous n'en avez pas connaissance
17 et que ce qui est écrit ici n'est pas exact ?
18 R. J'ai dit cela effectivement, mais je parlais d'un ordre pour ce qui est
19 des militaires de l'armée; mais pour ce qui est de nous, nous les membres
20 s'occupant de la logistique, ce n'était pas un ordre qui était pour nous.
21 Nous étions là en tant que volontaires.
22 Q. Très bien, merci. C'est tout ce que je voulais savoir.
23 Ensuite dans le même paragraphe, vous dites :
24 "Les civils ont donc dû également partir…"
25 Dites-moi, s'il vous plaît, Docteur, pourquoi les civils devaient-ils
26 partir s'ils ne participaient pas aux opérations de combat avec les forces
27 serbes ? Pourquoi les civils devaient-ils partir ?
28 R. Simplement parce que tout ce qui était albanais était ciblé, et d'après
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1 ce qui s'était passé plus tôt, les massacres qui se sont passés plus tôt,
2 nous avions peur et nous espérions d'une certaine façon que nous pourrions
3 arriver en Macédoine, en Albanie, au Monténégro et passer par Vushtrri. Des
4 civils sont partis parce qu'ils avaient peur, parce que les forces serbes,
5 lorsqu'ils ont incendié les maisons et lorsqu'ils se livraient aux
6 opérations de combat, ils ne se battaient pas là sur le terrain où eux-
7 mêmes pouvaient être tués, mais ils se sont plutôt défoulés sur la
8 population civile.
9 Q. Dites-moi, s'il vous plaît, si les combats qui avaient lieu entre l'UCK
10 et les forces serbes se déroulaient de façon quotidienne dans cette région
11 ?
12 R. Il y avait des tirs qui se faisaient entendre très souvent. Je ne sais
13 pas si c'étaient simplement des tirs unilatéraux ou bien s'il y avait un
14 échange de tirs, je ne le sais pas. Un expert pourrait sûrement vous
15 l'expliquer. Je ne le sais pas. Mais l'hôpital était assez éloigné des
16 lignes de front, qu'il s'agisse de la partie nord-est ou nord-ouest, et
17 comme je vous ai dit, pour ce qui est de mon travail en tant que médecin je
18 n'étais préoccupé que par mon travail.
19 Dans la nuit en question, les forces serbes ne sont pas allées vers
20 Dumnice, c'est-à-dire là où sont allés l'UCK et les soldats, mais ils ont
21 plutôt suivi le convoi. Donc eux nous ont suivis derrière, alors que devant
22 nous il y avait des forces qui avaient pris des positions à Studime et
23 Saracak. C'est là que ces massacres ont eu lieu, c'est à cet endroit-là que
24 ces 118 ou 119 personnes avaient été tuées. Nous étions coincés.
25 Q. J'aimerais savoir : sur le territoire contrôlé par l'UCK - et vous avez
26 évoqué plusieurs villages - quels villages étaient habités auparavant par
27 les Serbes ? Je parle de la période qui a précédé le mois de mars 1999.
28 R. Il y avait peut-être des Serbes à Samadrexha puisque la population
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1 était mixte dans ce village-là. Je crois qu'il y avait des Serbes à
2 Samadrexha jusqu'à une époque plus tardive. C'est ce que j'ai entendu dire.
3 Mais je ne les ai pas vus moi-même, et ils n'avaient pas de problèmes avec
4 l'UCK jusqu'à plus tard. Les forces serbes avaient un point de contrôle
5 dans le quartier de Llazoviq, et un peu plus loin il y avait certaines
6 maisons où des Serbes plus âgés habitaient. C'est ce que j'avais entendu
7 dire.
8 Avant la guerre, je m'étais rendu à cet endroit assez souvent, à Saracak
9 "area," mais pour ce qui est de la période dont vous parlez, s'agissant de
10 Saracak, il n'y avait pas de membres de l'UCK. Les forces serbes tenaient
11 leur point de contrôle à cet endroit-là puisque ce village de Saracak e
12 Eperm était composé de Serbes.
13 Q. Vous avez parlé de Svracak, de Samodreza, y avait-il d'autres villages
14 qui étaient placés sous le contrôle de l'UCK ?
15 R. Saracak était tenu par les forces serbes. Les autres villages étaient
16 principalement albanais. Il ne s'agissait pas de villages mixtes.
17 Q. Permettez-moi de vous demander la chose suivante, s'agissant de Gornji
18 Svracak et Samodreza, y a-t-il des maisons serbes à cet endroit-là où des
19 personnes habitent, donc je ne parle pas de maisons vides, mais de maisons
20 habitées.
21 R. Oui, plusieurs d'entre eux étaient mes patients. J'avais de bons
22 rapports avec eux. Je leur rendais visite assez souvent avant la guerre.
23 Q. Savez-vous combien y avait-il de maisons serbes à Gornji Svracak ?
24 R. Il y avait environ quatre à cinq maisons, habitées principalement par
25 des personnes plus âgées. Les jeunes habitaient Prishtina et visitaient les
26 personnes âgées et les membres de leurs familles pendant les week-ends.
27 J'avais des contacts avec ces personnes âgées, leurs fils, leurs nièces et
28 neveux. Je ne les voyais pas. Mais comme j'ai dit, je rendais visite aux
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1 personnes âgées assez souvent, puisqu'ils n'étaient pas en très bonne
2 santé. Les jeunes travaillaient à Prishtina ou Vushtrri et se rendaient
3 dans les villages pendant les week-ends. Donc les habitants de ces maisons
4 étaient plutôt des personnes âgées.
5 Q. Docteur, combien y avait-il de maisons serbes à Samodreza ?
6 R. Dans ce quartier-là, près du quartier de Malokve [comme interprété],
7 il y avait deux ou trois maisons serbes, de nouveau habitées par des
8 personnes âgées; alors que le voisinage de Llazoviq était plutôt composé de
9 dix à 12 maisons. Le quartier de Llazoviq était plus près de la ville, il y
10 avait également un point de contrôle qui était érigé dans le coin, sur une
11 colline tout près de ce quartier.
12 Q. Merci. Je vais maintenant revenir au paragraphe 11. Dans ce paragraphe,
13 vous avez déclaré que les civils étaient également forcés à se déplacer
14 après que Llap et Meljenica, dans la municipalité de Kosovska Mitrovica, et
15 vu le départ des positions de l'UCK. Est-ce que vous seriez d'accord avec
16 moi pour dire, eu égard à la situation et à la façon de mener des
17 opérations de combat de type guérilla, que l'UCK menait des opérations de
18 combat contre les forces serbes; est-ce que les civils et les forces de
19 l'UCK se sont déplacés ensemble, se sont retirés ensemble, et s'agissait-il
20 des membres de l'UCK qui ne portaient pas d'armes ?
21 R. [aucune interprétation]
22 Q. [aucune interprétation]
23 R. [aucune interprétation]
24 Q. Vous ne l'avez jamais vu ou est-ce que vous ne le connaissiez pas
25 Bislim Zyrapi ?
26 R. Je crois que j'ai vu son nom dans les journaux, j'ai peut-être entendu
27 parler de lui à la télévision, mais je n'ai jamais rencontré cette
28 personne, la personne portant ce nom.
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1 Q. Alors c'est plus clair, merci. Pourriez-vous me dire, s'il vous plaît,
2 lorsque vous avez vu son nom dans les journaux, est-ce que vous saviez
3 qu'il était le chef de l'état-major de l'UCK, saviez-vous cela à ce moment-
4 là ?
5 R. Il n'était pas -- Je connaissais les personnes de la zone
6 opérationnelle de Shala. Je les connaissais avant la guerre et après la
7 guerre. Je ne connaissais personne de l'état-major principal. Cela ne
8 m'intéressait absolument pas, ce n'était pas du tout quelque chose qui me
9 préoccupait. Je ne faisais pas partie de l'armée. Mon travail consistait à
10 sauver des vies. C'est un nom que je n'avais pas entendu mentionner dans la
11 zone opérationnelle de Shala.
12 Q. En tant que membre de l'UCK, est-ce que vous aviez connaissance d'un
13 ordre selon lequel, en cas d'attaque menée par les forces serbes, toutes
14 les forces de la ligne de front étaient censées se retirer ensemble avec la
15 population civile; aviez-vous connaissance de cela ?
16 R. C'est la première fois que j'entends parler d'un tel ordre.
17 Q. Dans votre déclaration page 3, paragraphe 8 et paragraphe 3, page 4 en
18 albanais, vous avez dit que :
19 "De 30 à 40 000 personnes fuyaient cette zone à cause des opérations de
20 combat entre l'UCK et l'armée serbe."
21 N'est-il pas exact que la population civile partait de cette région à cause
22 des opérations de combat qui se faisaient sur une base quotidienne entre
23 l'UCK et les forces serbes ?
24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Madame Gopolan.
25 Mme GOPALAN : [interprétation] Je suis en train de lire le paragraphe 8 en
26 anglais et, malheureusement, je n'arrive pas à trouver la référence du
27 paragraphe en question. Je me demandais si mon éminent confrère pouvait me
28 donner la référence exacte.
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1 M. DJORDJEVIC : [interprétation] J'ai dit la même chose pour l'anglais,
2 alors paragraphe 3, page 4. Je ne sais pas ce qui est consigné au compte
3 rendu d'audience, mais c'est une erreur -- mais en albanais, c'est la même
4 chose. Un instant, s'il vous plaît.
5 Mme GOPALAN : [interprétation] Je crois que nous avons retrouvé la page en
6 question. Il s'agit du paragraphe 10 de la déclaration en anglais; ai-je
7 raison, Maître ?
8 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Oui, c'est tout à fait juste.
9 Q. Docteur, souhaiteriez-vous que je répète ma question ?
10 R. Nous n'en avons pas parlé de façon détaillée. Un ordre, oui, pour ce
11 qui était de la partie militaire. Mais pour nous, il s'agissait tout
12 simplement d'un message, d'une information que nous recevions des soldats
13 suivant laquelle les positions étaient tombées entre les mains des forces
14 serbes. Mais nous, les civils, nous devions partir. Je pense qu'il y avait
15 entre 30 à 40 000 personnes après la guerre, d'après les documents qui ont
16 été trouvés dans la municipalité de Vushtrri, c'est le chiffre qui a été
17 retenu, entre
18 30 000 et 40 000 réfugiés. Je pense que c'est un chiffre qui est plus ou
19 moins exact, parce qu'il s'agissait d'un convoi énorme, il y avait beaucoup
20 de personnes. Il n'y avait pas d'ordre. Personne ne pouvait me donner
21 l'ordre de faire quoi que ce soit. Nous avons fait ce que nous avons fait,
22 parce que nous avions peur, parce que nous étions en proie à la panique,
23 parce que nous craignons que ce qui était arrivé à d'autres allait nous
24 arriver. Il n'y avait pas d'autre raison en fait.
25 Q. Dans ce paragraphe, il me semble qu'il s'agit du dixième paragraphe de
26 la version B/C/S et anglaise, vous dites et vous avez maintenant répété
27 qu'il y avait entre 30 et 40 000 civils. J'aimerais en fait savoir si vous
28 avez jamais fait une déclaration alors que vous vous trouviez à Ulcinj au
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1 Monténégro; est-ce que vous n'avez jamais fait une déclaration à la fin, en
2 fin du mois de juin 1999 ?
3 R. Où ? A Ulcinj au Monténégro ou au Kosova ?
4 Q. Oui, oui, à Ulcinj au Monténégro. Le 18 juin 1999, est-ce que vous avez
5 fait une déclaration, et le cas échéant, à qui ?
6 R. Oui. Il s'agissait d'une représentante du CICR, ou plutôt du groupe du
7 ICG, "International Crisis Group," d'ailleurs, je ne me souviens pas du nom
8 de l'organisation. C'est une femme qui m'a interrogé, puis il y a eu une
9 autre déclaration faite après la guerre à Studime.
10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Pensez-vous, Maître, qu'il s'agit d'un
11 moment opportun pour faire la pause ?
12 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Oui, oui, je m'excuse. J'avais un peu
13 oublié l'heure.
14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous allons donc faire la deuxième
15 pause, et nous reprendrons à 13 heures.
16 Mais, Maître Djordjevic, est-ce que vous pourriez nous dire où nous en
17 sommes ?
18 M. DJORDJEVIC : [interprétation] J'ai l'intention de terminer mon contre-
19 interrogatoire aujourd'hui et je laisserai, bien entendu, un laps de temps
20 pour l'Accusation.
21 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie beaucoup. Nous
22 reprendrons à 13 heures.
23 --- L'audience est suspendue à 12 heures 34.
24 --- L'audience est reprise à 13 heures 02.
25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Maître Djordjevic.
26 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
27 Je souhaiterais que soit affiché le document D002-5212. Il s'agit de la
28 version anglaise, et pour la version B/C/S il s'agit de la pièce D002-5200.
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1 C'est la page numéro 2 qui m'intéresse.
2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Page 2.
3 M. DJORDJEVIC : [interprétation] S'il s'agit de la page 2, …
4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Non, non, pas encore, me semble-t-il.
5 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Oui, c'est exact.
6 C'est la page suivante en B/C/S qui devrait être affichée. Non, non, ce
7 n'est toujours pas la bonne page. Page suivante, je vous prie. Visiblement,
8 il y a un problème avec ce document. Il s'agit de la déclaration du témoin,
9 déclaration du 18 juin 1999. Il s'agit du Témoin Sukri Gerxhaliu; vous avez
10 également Fahrie Gerxhaliu, son épouse. Ce sont des déclarations qui ont
11 été faites à Ulcinj. Vous pouvez le voir sur ces documents. C'est ce que
12 j'ai devant moi, mais ce n'est pas ce qui apparaît à l'écran. Cela commence
13 par : "Déclaration de témoin, incident numéro 1, 1er avril." Voilà, voilà.
14 C'est cela. Enfin, c'est le bon document, mais ce n'est pas la bonne page.
15 Ecoutez, je pense qu'il y a visiblement un malentendu à propos de ce
16 document.
17 En attendant que le document idoine soit affiché à l'écran,
18 j'aimerais poser une question au témoin pour ne pas trop perdre de temps.
19 D'ailleurs, je n'ai pas beaucoup de temps à ma disposition.
20 Q. Il s'agit d'une déclaration que vous avez faite à l'ICG, le
21 International Crisis Group, et vous l'avez faite, cette déclaration, à
22 Ulcinj à une certaine Mme Muriel le 6 juin 1999. Vous vous en souvenez ?
23 R. Oui, oui, je m'en souviens. C'était une femme, une ressortissante
24 française, me semble-t-il. Mais je ne me souviens pas de son nom.
25 Q. Après avoir fait ladite déclaration, est-ce que vous avez examiné ce
26 que vous aviez relaté ce jour-là ?
27 R. Non, je n'ai pas lu cette déclaration. J'ai fait ma déclaration, puis
28 ensuite je suis rentré chez moi. Mais après, elle est revenue me trouver et
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1 a vérifié cette déclaration avec moi.
2 Q. Merci. Donc dans cette déclaration que nous n'avons toujours pas
3 affichée sur nos écrans malheureusement, mais le fait est que j'ai un
4 document papier avec moi en B/C/S, document de cette déclaration, donc il
5 va falloir que j'attende avant que je ne vous pose des questions à propos
6 de la partie polémique. Parce que j'aimerais que l'on précise certaines
7 choses à ce sujet, et j'espère que cela va être bientôt affiché sur nos
8 écrans. Vous faites référence à l'incident numéro 1, il s'agit du 2 avril,
9 et vous dites à la fin du premier paragraphe :
10 "Le 2 mai alors que nous faisions la navette ou les allées et venues entre
11 ou vers Sudimlja, nous avons été entourés dans un champ pour des membres
12 des forces serbes, il s'agissait de la police et des paramilitaire, qui
13 venaient de Saljska Bajgora."
14 C'est un incident dont vous avez parlé il y a peu de temps de cela. Lors de
15 votre déposition, vous nous aviez indiqué qu'il y avait entre 30 000 et 40
16 000 réfugiés. Vous avez dit qu'il y avait des gens qui étaient montés sur
17 des tracteurs et qui descendaient de la montagne, il s'agit de civils, et
18 ils le faisaient pour ne pas perdre leur vie.
19 "Il y avait quelque 20 000 civils sur des tracteurs," et vous avez dit :
20 "Nous descendions de la montagne avec tous les membres de nos familles pour
21 ne pas mourir de faim."
22 Est-ce que vous pourriez nous expliquer cette divergence, ce décalage entre
23 le nombre de réfugiés dans un premier temps, puis il y a également une
24 divergence pour ce qui est de la raison que vous évoquez pour expliquer le
25 déplacement de cette colonne. Parce que vous dites dans cette déclaration
26 que vous aviez peur de mourir de faim, alors qu'il y a un petit moment de
27 cela, vous avez fourni une autre version à la Chambre. Est-ce que vous
28 pourriez nous expliquer cette divergence, et entre-temps je vais essayer de
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1 retrouver le document en question.
2 R. Pour ce qui est du nombre évoqué, j'ai toujours indiqué qu'il y avait
3 entre 30 000 et 40 000 personnes. Alors, il est évident que je ne les ai
4 pas comptées, mais c'est l'impression que j'en ai dégagé en voyant toutes
5 ces personnes, c'est ce que j'ai dit à cette femme. Il se peut qu'elle ait
6 commis une erreur. Peut-être qu'au lieu d'écrire 40 000, elle a écrit 20
7 000. Mais moi, je suis catégorique, j'insiste sur ce chiffre de personnes,
8 donc compris entre 30 000 et 40 000 personnes. Et après la guerre, Simic
9 était le commandant adjoint à Vushtrri, il a donné exactement le même
10 chiffre, entre 30 000 et 40 000 réfugiés qui s'étaient rassemblés dans
11 cette vallée. Donc je ne pense pas que le chiffre pose problème. Je pense
12 tout simplement qu'il s'agit d'une erreur.
13 Lorsque j'ai examiné à nouveau la déclaration, j'ai apporté de nombreuses
14 corrections. J'aurais dû apporter cette correction qui m'a échappé. Je ne
15 l'ai pas vue. C'était l'ICG, c'est probablement quelque chose qui a été
16 fait par l'ICG. C'est la raison pour laquelle je suis ici pour dire ce que
17 je pense et, je répète, je réitère que l'impression que j'en avais dégagé
18 est qu'il s'agissait d'un nombre compris entre 30 et 40 000 personnes. Il
19 s'agit peut-être d'une erreur de nature technique.
20 Q. Merci. C'est beaucoup plus clair maintenant. Un petit moment, je vous
21 prie.
22 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Alors, d'après mon commis aux audiences,
23 je pense que la meilleure méthode consisterait à montrer au témoin le
24 document papier dont je dispose. Alors je vais maintenant demander à --
25 maintenant je ne le retrouve pas d'ailleurs ce document papier.
26 [Le conseil de la Défense se concerte]
27 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Nous allons quand même attendre que cela
28 soit donc retrouvé. J'ai voulu proposer ce document au versement au
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1 dossier, donc on va attendre un peu. Sinon, je m'en excuse. Mais ces
2 parties on l'a évoquées également, et ces parties figurent dans la
3 déclaration de ce témoin.
4 Q. La deuxième partie de ma question était comme suit : dans ce compte
5 rendu il a été dit que vous êtes descendus des montagnes pour ne pas mourir
6 de faim et de froid. Quelle était la vraie raison ? Pour être précis,
7 quelle était la raison pour laquelle vous avez cela dans ce compte rendu,
8 dans le compte rendu du ICG ?
9 R. Il y avait plusieurs raisons pour cela, d'abord, la population avait
10 peur du massacre qui a eu lieu, effectivement. Il n'y avait pas de verglas
11 ni de neige, mais il n'y avait pas de médicament, il n'y avait pas de
12 vivres, mais la raison principale pour le faire était la peur, la
13 population était intimidée et craignait des massacres et des tortures, ce
14 qui est en fait réellement passé à Drenice, Izbice, Racak. Malheureusement,
15 cela est arrivé à Studime aussi.
16 Q. Docteur, lorsque vous parlez de la remorque dans laquelle vous étiez
17 dans la colonne et dans laquelle vous étiez caché, pouvez-vous nous décrire
18 exactement l'aspect de cette remorque, ou plutôt, pour être plus précis,
19 pouvez-vous nous décrire l'endroit où vous étiez dans la remorque de ce
20 tracteur. Vous avez décrit un peu où se trouvait exactement cette remorque,
21 et comment elle a été cachée ? Est-ce que vous pouvez me décrire un peu
22 plus précisément comment vous vous êtes caché dans cette remorque, qu'est-
23 ce qu'il y avait en dessous et au-dessus ?
24 R. Le tracteur avait une remorque, comme c'est le cas des tracteurs à
25 remorque. Au sol, il y avait un peu de foin. Ma famille s'y trouvait ainsi
26 que la famille de mon épouse. La moitié de cette remorque était couverte
27 avec une bâche en polyester qui pouvait être plus large, pour couvrir toute
28 la remorque, mais c'était seulement la moitié de la remorque qui était
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1 couverte de cette bâche, et j'y étais assis, donc sous cette bâche. Ma
2 fille et les autres étaient autour de moi. Si quelqu'un s'approchait de la
3 remorque, il ne pouvait pas me voir parce que j'étais caché parmi les
4 enfants et les membres de ma famille.
5 Q. Est-ce qu'il y avait d'autres personnes qui se trouvaient cachées sous
6 cette bâche en polyester ?
7 R. Seulement moi, parce que cette bâche en synthétique ne couvrait qu'une
8 partie de la remorque, des deux côtés, et au coin. J'étais au coin, donc au
9 coin de la remorque, et ma fille, à côté de moi, les autres étaient dans
10 l'autre partie qui n'était pas couverte. Ma fille aînée était assise là-bas
11 aussi. Elle était devant moi, j'étais derrière elle, et comme je l'ai déjà
12 dit, cette partie était couverte par cette bâche en synthétique.
13 Q. Dites-moi qui conduisait ce tracteur ?
14 R. Mon frère – le frère de mon épouse, Halil Bashota.
15 Q. En Serbie, c'est "surak" en serbe. C'est le frère de votre épouse.
16 Parce que je vois qu'ici il est indiqué "zet" [phon] ou le beau-frère.
17 C'était plutôt le frère de votre épouse. Mis à part vos deux filles, si
18 j'ai bien compris --
19 R. Notamment oui, il s'agit de mon beau-frère, en fait du frère de mon
20 épouse, Halil.
21 Q. Mis à part vos deux filles, qui d'autre était dans la remorque assis et
22 visible de l'extérieur ?
23 R. Mes deux fils, la mère de mon épouse ou ma belle-mère, les enfants de
24 Halil, la belle-sœur de Halil et ses filles. Le tracteur était rempli des
25 membres de ma famille ainsi que des membres de ma belle-famille.
26 Q. Est-ce que vous étiez en mesure de voir quoi que ce soit en étant en
27 dessous de cette bâche synthétique ?
28 R. A première vue, personne ne pouvait me voir, mais lorsqu'ils se sont
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1 approchés plus près de la remorque en utilisant des lampes, ils pouvaient
2 me voir, c'est pour cela que j'ai sauté du tracteur et je suis parti.
3 Q. Vous n'avez pas bien compris. Est-ce que vous vous étiez en mesure de
4 voir quoi que ce soit en étant caché sous cette bâche synthétique ? Est-ce
5 que vous étiez en mesure de voir quoi que ce soit à l'extérieur de la
6 remorque ?
7 R. J'ai pu voir un peu en levant ma tête au-dessus de cette bâche pour
8 voir ce qui se passait autour.
9 Q. Merci. Les choses qui se sont passées autour de la remorque, les
10 soldats serbes qui demandaient de l'argent, les conversations entre eux
11 disant quel nombre de personnes ont été tuées et quelles autres allaient
12 être tuées, votre beau-frère qui a été battu, dites-nous si vous avez
13 entendu ces passages à tabac pendant que vous étiez caché sous la bâche
14 synthétique dans la remorque ?
15 R. Oui, j'ai été en mesure de voir et d'entendre ce qui se passait autour.
16 Le lendemain j'ai vu que Halil était couvert de bleus parce qu'ils l'ont
17 battu en utilisant des matraques. Après j'ai vu ce qui se passait.
18 Q. Après avoir sauté de la remorque, vous avez dit que vous aviez atterri
19 sur le cadavre de votre cousin ou de votre voisin. Dites-moi si vous savez
20 comment il a été tué ou c'était plutôt après que vous avez appris comment
21 il a été tué ? Est-ce qu'à ce moment-là, vous étiez au courant des
22 circonstances de sa mort ?
23 R. Non. Son tracteur se trouvait à côté du mien, le tracteur de Haki, et
24 je pouvais voir cela parce que le tracteur était derrière nous. Quand
25 quelqu'un a dit quelque chose en serbo-croate il est descendu du tracteur,
26 et en présence de son père, de son épouse, de ses enfants, tout cela s'est
27 passé devant ces personnes. Il y avait une petite distance qui séparait mon
28 tracteur du sien, il a été exécuté sur place.
Page 3164
1 Q. Merci de cette réponse.
2 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, sur l'écran on peut
3 finalement voir des extraits de la déclaration faite à l'enquêteur de
4 l'ICG. J'aimerais que seulement cette page soit versée au dossier, la page
5 en anglais et la page en B/C/S, par rapport à cela j'ai posé des questions
6 au témoin tout à l'heure.
7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je crois que la déclaration toute
8 entière devrait être versée au dossier si vous voulez que cela devienne une
9 pièce à conviction jusqu'à cela soit parcouru vraiment en détail, on ne
10 peut pas être sûr si une autre partie de cela n'influence tout, ou se
11 réfère à cela. Voulez-vous que le document tout entier soit versé au
12 dossier ?
13 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Oui.
14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Cela sera versé au dossier.
15 M. LE GREFFIER : [interprétation] La cote de ce document sera D00070.
16 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Merci.
17 Q. Docteur, dites-moi ce que vous faites aujourd'hui, quel est votre poste
18 au centre médical à Vucitrn, à partir du moment où vous êtes retourné au
19 centre médical ?
20 R. Après être retourné à Vushtrri, j'ai continué à travailler en tant que
21 médecin spécialiste de la médecine du travail, parce que j'ai bénéficié
22 d'une formation à Belgrade avant la guerre. Je m'occupe principalement des
23 maladies professionnelles ainsi que d'autres maladies. Après la guerre j'ai
24 suivi une formation pour ce qui est de la médecine de famille qui a été
25 fournie par des professeurs britanniques.
26 Q. Docteur, le dernier sujet de mon contre-interrogatoire à aborder, vous
27 m'avez dit aujourd'hui que vous avez coopéré avec la zone opérationnelle de
28 Llap, est-ce vrai ?
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1 R. Je n'avais pas de contact direct avec cette zone, mais il y avait une
2 personne que nous envoyions pour ce qui est du matériel médical. Il nous
3 donnait le matériel médical parce qu'ils étaient mieux fournis que nous.
4 Ils nous envoyaient cela par les civils.
5 Q. Savez-vous si dans l'UCK il existait également la défense territoriale
6 dans le cadre de l'UCK ainsi que la protection civile ?
7 R. Tout simplement, je travaillais à l'hôpital où je m'occupais de
8 patients. Je l'ai dit maintenant et je le dis de nouveau, lorsque l'on
9 parle de ce qui était arrivé à l'organisation je n'avais même pas le temps
10 de réfléchir à tout cela. La plupart du temps je travaillais tout seul,
11 sans le concours de mes collègues. Je devais me consacrer aux questions de
12 santé, d'épidémiologie, et cetera, je devais prodiguer des soins aux
13 personnes qui en avaient besoin.
14 Q. En d'autres mots, vous ne savez pas s'il y avait une défense civile
15 dans le cadre de l'UCK, ai-je raison de dire cela ?
16 R. Vous avez raison, je n'avais absolument pas d'intérêt, cette structure-
17 là ne m'intéressait pas.
18 Q. Merci. J'ai maintenant une dernière question pour vous. Au paragraphe
19 25 de votre déclaration, vous avez déclaré que certains soldats de l'UCK
20 avaient aidé à enterrer les morts. Pourriez-vous nous expliquer, s'il vous
21 plaît, pourquoi l'UCK faisait cela ? Pourquoi n'était-ce pas les civils qui
22 se sont occupés de ce type de chose, puisque c'était les civils qui avaient
23 leur vie dans des circonstances particulières ?
24 R. Faites-vous référence au 3 mai ou au 31 mai ?
25 Q. Je fais référence au 3 mai.
26 R. Le 3 mai, il y avait peu de civils qui étaient restés sur place. C'est
27 la raison pour laquelle il était nécessaire que les soldats de l'UCK leur
28 viennent en aide pour dégager les corps qui se trouvaient le long de la
Page 3166
1 route. Ils m'ont dit de revenir à l'hôpital parce que près de l'hôpital
2 dans un champ, il y avait environ 90 vaches qui avaient été tuées, et il a
3 fallu que j'organise un petit groupe de soldats et de civils pour dégager
4 ces carcasses afin d'éviter que les maladies ne se propagent. Comme je vous
5 l'ai dit, il y avait quelques civils qui étaient là-bas et l'UCK a aidé à
6 enterrer les morts.
7 Q. Y avait-il que des civils ou il y avait également des membres de l'UCK,
8 est-ce que vous savez si c'était le cas ?
9 R. Ils étaient tous des civils. J'ai des photos ici avec moi si vous
10 voulez, je peux vous les montrer, vous pouvez également voir vous-même
11 qu'il n'y avait absolument pas de soldats parmi ces civils qui avaient été
12 tués. Toutes ces personnes étaient des civils.
13 Q. Docteur, je vous remercie d'avoir répondu à toutes ces questions,
14 d'avoir précisé certains points qu'il fallait préciser. Je vous remercie
15 d'être venu déposer, j'en conclu mon contre-interrogatoire et je voudrais
16 vous remercier de nouveau.
17 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Monsieur Djordjevic.
18 Madame Gopalan, est-ce que vous avez des questions supplémentaires à poser
19 au témoin ?
20 Mme GOPALAN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
21 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.
22 Nouvel interrogatoire par Mme Gopalan :
23 Q. [interprétation] Docteur, j'ai des questions supplémentaires à vous
24 poser qui découlent du contre-interrogatoire du conseil de la Défense. On
25 vous a demandé pourquoi vous avez quitté Vucitrn, c'est le conseil de la
26 Défense qui vous a posé cette question à la page 35 ligne 24. D'abord pour
27 préciser, dites-nous où se trouve votre maison, dans quel village ?
28 R. Ma maison se trouve dans Studime e Poshteme, mais c'est dans le village
Page 3167
1 de Studime ou bien comme on le voit sur la carte, c'est D. Studime. C'est
2 là que se trouve ma maison. Un peu plus haut se trouve le quartier de
3 Rashice où les forces serbes étaient positionnées alors que ma maison se
4 trouvait en contrebas, dans la partie basse du village.
5 Q. Et le 2 mai, pourquoi avez-vous rejoint le convoi ?
6 R. Nous nous sommes joints au convoi, car nous espérions survivre. Les
7 forces militaires et paramilitaires avaient percé les deux lignes de front
8 derrière nous et ma femme a toujours voulu que l'on se déplace tous
9 ensemble. Si un obus devait nous tomber dessus, il nous tomberait dessus en
10 tant que famille.
11 Q. Dans quelle direction est-ce que le convoi s'est déplacé ?
12 R. Le convoi s'est déplacé de Sllakovc en direction de Ceceli, et ensuite
13 de Ceceli on a tourné à droite en direction de Studime e Eperme, et de
14 Studime e Eperme vers Studime e Poshteme, où la colonne s'est arrêtée près
15 d'une colline. Derrière la colline il y avait les forces serbes qui
16 tiraient de temps en temps.
17 Q. Merci, Docteur Gerxhaliu. On vous a également posé des questions
18 relatives à l'emplacement de diverses forces armées. Vous avez dit que dans
19 la nuit en question, l'UCK s'est dirigé en direction de Dumnice. Pourriez-
20 vous nous dire Dumnice se trouve où par rapport à l'endroit où vous étiez ?
21 Est-ce au nord, est-ce au sud, à l'est ou à l'ouest ?
22 R. Dumnice se trouvait à l'est de l'endroit par rapport où j'étais. Le
23 convoi s'est déplacé vers Ceceli et ensuite on a tourné à droite en
24 direction de Studime, ensuite l'UCK est allé à gauche vers Dumnice.
25 Q. Merci. Vous avez également parlé des forces armées qui suivaient le
26 convoi. De quelles forces s'agit-il ?
27 R. Il s'agissait des forces serbes qui avaient percé la ligne de front à
28 Shala, près de Meljenica et dans la région de Llap. Ils avaient rejoint,
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1 ils étaient arrivés jusqu'aux forces yougoslaves de Sllakovc, ils
2 pilonnaient, ils tiraient, nous essayions de les éviter et nous avons fait
3 cela jusqu'à Studime où ils nous ont rattrapés.
4 Q. Quelles étaient les forces armées qui étaient situées à Studime et
5 Svracak ?
6 R. De nouveau, c'étaient les forces serbes, mais ils avaient été
7 positionnés à Saracak et à Studime, auparavant ils étaient sur la colline
8 de Rashice. Nous avions derrière nous les forces qui avaient réussi à
9 percer la ligne de front à ces deux endroits que j'ai mentionnés, et devant
10 nous, nous avions les forces qui avaient été positionnées là un peu plus
11 tôt.
12 Q. Merci, Docteur Gerxhaliu. J'aimerais maintenant passer à un autre
13 sujet. J'aimerais que vous nous disiez ce que vous avez vu de la remorque
14 ou du tracteur dans lequel vous étiez caché. Vous avez mentionné avoir vu
15 des formations paramilitaires, certains soldats extirpant de l'argent,
16 tuant et passant à tabac certaines personnes. Est-ce que ces soldats
17 semblaient chercher quelque chose à l'intérieur des tracteurs également ?
18 R. Ils se rapprochaient du tracteur, et ils demandaient de l'argent. Par
19 la suite lorsqu'on leur donnait de l'argent, ils passaient à un autre
20 tracteur. Nous pensions que si on donnait de l'argent nous ne serions plus
21 à risque; mais en réalité ce n'était pas exact puisque tout de suite après
22 un autre groupe arrivait, ils fouillaient les hommes, ils les passaient à
23 tabac, les exécutaient en la présence des membres de leurs familles pour
24 semer la panique et la peur parmi les civils. C'est pour cela que plus de
25 118 ou 119 personnes avaient été tuées cette nuit-là.
26 Q. Merci, Docteur Gerxhaliu. J'aimerais maintenant que vous me parliez
27 d'un homme qui avait été tué cette nuit-là. Vous parlez de lui dans votre
28 témoignage à la ligne 18, et 9, vous dites que vous avez entendu des
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1 paramilitaires se faisant demander de ne pas tuer le fils de cette
2 personne, et cette personne a été néanmoins exécutée. Ce que j'aimerais
3 préciser ce sont les noms des personnes que vous avez vues tuer la personne
4 en question, si vous vous en souvenez, bien sûr.
5 R. Il y avait Haki qui avait été tué, il était juste à côté de la remorque
6 de mon tracteur. Dix mètres plus loin il y avait également la remorque du
7 tracteur de Nexhip Bunjaku de Studime e Eperme, et lui il a été tué. Son
8 père Sherif avait marié son fils avec une femme d'un autre village et avait
9 rejoint le convoi ce jour-là. C'est à ce moment-là que j'ai entendu le
10 Serbe lui dire en serbe -- il leur a d'abord dit en serbe : S'il vous
11 plaît, ne tuez pas mon fils. Il vient de se marier aujourd'hui.
12 Q. Merci, Docteur Gerxhaliu --
13 R. Ensuite le Serbe a répondu : Nous allons fêter son mariage, et ils
14 l'ont exécuté.
15 Q. Merci, Docteur Gerxhaliu. Je n'ai plus d'autres questions.
16 R. Il n'y a pas de quoi.
17 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.
18 [La Chambre de première instance se concerte]
19 Questions de la Cour :
20 M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Docteur, j'aimerais vous poser une
21 question concernant ce couple de personnes âgées. Qui est allé vers eux ?
22 Est-ce que c'étaient les paramilitaires ?
23 R. Au moment de l'exécution, il était très difficile de dire de qu'il
24 s'agissait exactement; il y avait des membres de la police, il y avait des
25 paramilitaires et d'autres unités qui étaient bien coordonnées parmi eux.
26 Mais pour ce qui est de la police et des membres de l'armée, c'est eux qui
27 avaient commis le plus d'atrocités. Les militaires les avaient rejoints
28 également, donc c'étaient la police et les paramilitaires qui s'étaient
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1 livrés au plus d'atrocités.
2 M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Merci.
3 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Docteur, vous serez heureux
4 d'apprendre que ceci met fin à votre témoignage. Nous avons vos dépositions
5 et vos déclarations qui avaient été faites dans le cadre d'un autre procès,
6 et je vous remercie d'avoir répondu aux questions qui vous ont été posées
7 ici. Tout ceci sera pris en compte à une étape ultérieure du procès. Nous
8 vous remercions de vous être déplacé jusqu'ici et de l'aide que vous nous
9 avez apportée. Vous pouvez maintenant regagner votre maison, vous pouvez
10 retourner à vos activités. L'huissier vous aidera à quitter la salle, et je
11 vous remercie de nouveau.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président,
13 Messieurs les Juges. Je crois que j'ai été clair et j'ai témoigné de façon
14 sincère. Le désir de mes gens, des gens qui habitent encore là-bas,
15 indépendamment de leur origine ethnique, est que vous rendiez une décision
16 juste. Je vous remercie de nouveau en mon propre nom et au nom de ma
17 famille.
18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Docteur.
19 Nous allons reprendre nos travaux dans la matinée à 9 heures du matin
20 demain matin.
21 [Le témoin se retire]
22 --- L'audience est levée à 13 heures 46 et reprendra le vendredi 3
23 avril 2009, à 9 heures 00.
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