Page 5223
1 Le vendredi 29 mai 2009
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 03.
5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Huis clos partiel.
6 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos.
7 [Audience à huis clos]
8 (expurgé)
9 (expurgé)
10 (expurgé)
11 (expurgé)
12 (expurgé)
13 (expurgé)
14 (expurgé)
15 (expurgé)
16 (expurgé)
17 (expurgé)
18 (expurgé)
19 (expurgé)
20 (expurgé)
21 (expurgé)
22 (expurgé)
23 (expurgé)
24 (expurgé)
25 (expurgé)
26 (expurgé)
27 (expurgé)
28 (expurgé)
Page 5224
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13 Pages 5224-5240 expurgées. Audience à huis clos.
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 5241
1 (expurgé)
2 (expurgé)
3 (expurgé)
4 (expurgé)
5 (expurgé)
6 (expurgé)
7 (expurgé)
8 (expurgé)
9 (expurgé)
10 (expurgé)
11 (expurgé)
12 (expurgé)
13 (expurgé)
14 (expurgé)
15 (expurgé)
16 [Audience publique]
17 M. STAMP : [interprétation] Notre témoin suivant est Richard Ciaglinski et
18 c'est Mme Gopalan qui l'interrogera.
19 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.
20 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
21 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour, Monsieur.
22 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous demanderais de lire à haute
24 voix le texte que l'huissier vous présente.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
26 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
27 LE TÉMOIN : RICHARD CIAGLINSKI [Assermenté]
28 [Le témoin répond par l'interprète]
Page 5242
1 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci beaucoup. Vous pouvez vous
2 asseoir, maintenant.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Mme Gopalan va vous poser quelques
5 questions.
6 Interrogatoire principal par Mme Gopalan :
7 Q. [interprétation] Pourriez-vous nous dire votre nom et prénom pour les
8 besoins du compte rendu.
9 R. Je suis Richard Andrew Zbigniew Ciaglinski.
10 Q. Pourriez-vous épeler votre nom de famille ?
11 R. Oui, je vais le faire. C-i-a-g-l-i-n-s-k-i.
12 L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent les pauses entre la question et la
13 réponse.
14 Mme GOPALAN : [interprétation]
15 Q. Puisque nous parlons la même langue, il nous faudra faire des pauses
16 entre les questions et les réponses. Merci.
17 Monsieur, avez-vous fait une déclaration au Tribunal international en mars
18 2000 ?
19 R. Oui, je l'ai faite.
20 Q. Et en novembre 2000, avez-vous fourni une déclaration supplémentaire
21 très brève au Tribunal ?
22 R. Oui.
23 Q. Avez-vous eu l'occasion de les revoir ?
24 R. Oui.
25 Q. Après l'avoir fait, êtes-vous convaincu qu'elles sont véridiques et
26 exactes, de mieux que vous vous souvenez ?
27 R. Oui.
28 Q. Bien.
Page 5243
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
15 versions anglaise et française
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 5244
1 Mme GOPALAN : [interprétation] Monsieur le Président, ces deux déclarations
2 font partie d'un même document 2488 de la liste 65 ter. Je demande leur
3 versement.
4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Les documents seront reçus.
5 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera P00833.
6 Mme GOPALAN : [interprétation]
7 Q. Monsieur le Témoin, avez-vous témoigné dans l'affaire Procureur contre
8 Slobodan Milosevic en avril 2002 ?
9 R. Oui.
10 Q. Avez-vous eu l'occasion de relire le compte rendu de votre déposition
11 dans cette affaire ?
12 R. Oui.
13 Q. Après l'avoir fait, pourriez-vous confirmer aujourd'hui que si on vous
14 posait les mêmes questions maintenant, que vous répondriez en substance de
15 la même manière ?
16 R. Oui.
17 Q. Bien.
18 Mme GOPALAN : [interprétation] Il s'agit du document 0289 de la liste 65
19 ter. Je demanderais le versement du compte rendu.
20 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Le compte rendu sera versé.
21 Mme GOPALAN : [interprétation] Finalement, Monsieur --
22 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P00833. Et le document
23 précédent, 2488 de la liste 65 ter, sera P00832.
24 Mme GOPALAN : [interprétation]
25 Q. Enfin, avez-vous déposé dans l'affaire Procureur contre Milutinovic et
26 consorts devant ce Tribunal en novembre 2006 ?
27 R. Oui.
28 Q. Avez-vous eu la possibilité récemment de relire le compte rendu de
Page 5245
1 cette déposition ?
2 R. Oui.
3 Q. Si vous deviez répondre aujourd'hui aux mêmes questions, est-ce que vos
4 réponses seraient les mêmes ?
5 R. Oui, je le crois.
6 Q. Bien.
7 Mme GOPALAN : [interprétation] Il s'agit du document 05154 de la liste 56
8 ter. Je demande son versement.
9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Le document sera versé.
10 Mme GOPALAN : [interprétation] Merci.
11 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera P00834.
12 Mme GOPALAN : [interprétation] Merci. J'aimerais maintenant vous donner
13 lecture du résumé de la déclaration du témoin.
14 Le témoin est colonel de l'armée britannique en retraite. Le témoin
15 décrit le début de sa mission au sein de l'OSCE début décembre 1998 dans le
16 cadre de la Mission de vérification du Kosovo. Le témoin était basé à
17 Pristina et ses attributions comprenaient l'organisation et la
18 planification des visites pour la vérification de l'armement.
19 Il a pu conduire des visites aux établissements de la VJ et leurs
20 positions, mais avait un accès très limité aux lieux où le MUP était
21 présent. Le rôle de cette vérification des armes a été finalement abandonné
22 puisqu'à plusieurs reprises on avait refusé aux vérificateurs l'accès aux
23 positions, casernes et autres bâtiments.
24 Le témoin également a agi en tant que l'officier de liaison pour l'OSCE MVK
25 et la RFY. Le témoin et d'autres fonctionnaires de l'OSCE MVK
26 le représentant des autorités de la RFY qui ont été représentées par une
27 commission de coopération. Du côté de la RFY, il y avait à la tête de la
28 délégation le général Dusan Loncar qui se rendait régulièrement à Belgrade.
Page 5246
1 Loncar avait demandé à l'OSCE de vérifier dès qu'il y avait un incident qui
2 comprenait un membre des forces serbes.
3 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Maître Djurdjic.
4 M. DJURDJIC : [interprétation] Ecoutez, je ne sais pas de quoi il s'agit.
5 S'agit-il d'une déclaration que les interprètes ont déjà ? De toute
6 manière, je vois que ce qui entre dans le compte rendu, ça vient même avant
7 que Mme le Procureur prononce. Il y a des mots qui sont notés avant qu'elle
8 ne les prononce.
9 Je n'ai rien contre -- écoutez si -- je ne comprends pas. Vous savez,
10 le nom de M. Loncar a été consigné au compte rendu bien avant que Mme
11 Gopalan le prononce. C'est pour ça que j'interviens.
12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci d'avoir exprimé vos
13 préoccupations, Maître Djurdjic.
14 Vous savez que vous étiez en train de lire très rapidement.
15 Mme GOPALAN : [interprétation] Je vais ralentir.
16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je n'aime pas le demander au conseil,
17 aux avocats, mais ça serait bien, néanmoins.
18 Mme GOPALAN : [interprétation] Bien.
19 Le commandant de la police au Kosovo était le lieutenant général Sretan
20 Lukic, qui a toutefois refusé de traiter avec l'OSCE et qui a laissé cette
21 tâche au colonel Miroslav Mijatovic, qui était le représentant du MUP à la
22 commission de coopération. D'après le témoin, c'était le numéro deux du MUP
23 au Kosovo, et il avait probablement un contrôle opérationnel du MUP.
24 Fin février ou fin mars 1999, les forces spéciales du MUP sont arrivées de
25 l'extérieur du Kosovo. Le témoin a poursuivi sa mission jusqu'au retrait de
26 l'OSCE en mars 1999.
27 Le 13 juin 1999, le témoin est revenu au Kosovo en tant qu'officier de
28 l'OTAN. Il a participé à l'éjection du MUP de ses fonctions; et ce faisant,
Page 5247
1 il a vu des officiers du MUP brûler des documents avec des noms albanais
2 dans une cour située non loin du ministère de l'Intérieur.
3 Voilà la fin de ce résumé.
4 J'ai l'impression que mon casque fonctionne relativement mal. Si vous me le
5 permettez, j'aimerais que l'on m'attende quelques instants.
6 Q. Comme vous le savez, les Juges disposent d'ores et déjà de votre
7 déposition et du compte rendu d'audience, et donc je vais simplement
8 chercher à souligner quelques parties de votre témoignage. Vos
9 qualifications académiques et militaires ont déjà été précisées, mais
10 j'aimerais que vous reveniez peut-être et que vous nous disiez si vous êtes
11 membre des forces armées depuis 1974 ?
12 R. Oui.
13 Q. Est-ce que vous êtes toujours en service dans l'armée anglaise ?
14 R. Non, j'ai pris ma retraite il y a quatre ans et demie. Je travaille
15 pour le gouvernement britannique et pour le ministère des Affaires
16 étrangères, et je m'occupe de questions de résolution de conflits auprès de
17 ce ministère.
18 Q. Merci. J'aimerais maintenant que l'on en vienne à la période que vous
19 avez passée au Kosovo. Est-ce que vous pourriez nous dire quand vous êtes
20 allé au Kosovo ?
21 R. C'était -- bon, on est arrivé à Skopje fin novembre, début décembre,
22 puis ensuite, quelques jours plus tard, on est passé au Kosovo à Brezovica
23 où il y avait un centre de formation et où il y avait un cours
24 d'introduction. Puis quelques jours plus tard, nous sommes allés à
25 Pristina.
26 Q. C'était en quelle année ?
27 R. 1998.
28 Q. Quand en 1998, quand êtes-vous arrivé à Pristina ?
Page 5248
1 R. Je pense que c'est le 10 décembre, de mémoire.
2 Q. Merci. Pourquoi êtes-vous allé à Pristina à l'époque ?
3 R. Parce que je faisais partie de l'équipe de l'état-major du général
4 Drewienkiewicz, DZ, qui était l'un des subalternes de l'ambassadeur Walker,
5 et DZ était chargé des opérations.
6 Q. Pourquoi étiez-vous sur place dans cet état-major ?
7 R. D'abord, je travaillais avec Donna Phelan qui travaillait dans ce
8 département de l'Etat, elle s'occupait des questions de vérification des
9 armements. Elle a ensuite été responsable de la fusion, les centres de
10 recueil d'informations et de renseignements, et ensuite j'ai repris son
11 poste.
12 Q. Merci. Dans votre déclaration vous avez dit que vous étiez allé au
13 Kosovo pour faire partie du personnel britannique de la MVK
14 R. Oui. Il y avait un groupe britannique qui a été envoyé; 114 ou 115
15 personnes se sont rendues sur place. Mais quand l'on parle d'un groupe, je
16 pense que c'est une erreur, parce que c'était une équipe internationale.
17 Donc moi je faisais partie de cette équipe internationale. C'était un
18 groupe britannique qui a été envoyé au Kosovo qui a ensuite été départi.
19 Q. MVK ça veut dire quoi ?
20 R. Mission de vérification au Kosovo.
21 Q. Merci. Si j'ai bien compris, ce groupe qui a été dirigé par le général
22 DZ faisait partie de cette MVK ?
23 R. Oui.
24 Q. Merci. Quelle était la mission de cette MVK
25 R. Il y a eu plusieurs mandats et missions. Il s'agissait au départ de
26 mener des vérifications. C'était le mandat qu'on nous avait donné, mandat
27 signé par le président Slobodan Milosevic, et il fallait vérifier que les
28 deux parties se désengageaient du conflit. Il fallait aussi vérifier que
Page 5249
1 les troupes restaient bien dans les casernes et que les armes étaient
2 enlevées de ces casernes. Il y avait d'autres rôles concernant les
3 élections, le système juridique, s'occuper de la police, du logement, et
4 cetera. Donc c'était un mandat assez large. Mais au départ, il s'agissait
5 plutôt de vérifier, de faire un état des lieux.
6 Q. Nous allons revenir là-dessus dans un instant, mais j'aimerais revenir
7 un petit peu en arrière, quand vous dites qu'il fallait mener des
8 vérifications et que les sites devaient être désengagés, et que c'était
9 l'une des tâches principales de la MVK. Savez-vous pourquoi c'était l'une
10 de ses missions principales ? Savez-vous ce qui a fait que ces
11 vérifications étaient devenues nécessaires ?
12 R. Il faut remonter un petit peu dans le temps, naturellement, parce qu'en
13 amont du déploiement de la mission, on sait tous qu'il y avait des combats
14 importants entre l'UCK et l'armée serbe. L'OTAN n'était pas satisfaite de
15 la situation. Un certain nombre de menaces ont été proférées par l'OTAN, il
16 y avait un ordre d'activation qui avait été signé par l'OTAN qui entraînait
17 des bombardements et qui menaçait de bombarder la Serbie.
18 Donc je pense qu'autour de mai ou juin 1998, le président Milosevic et le
19 président Yeltsin se sont rencontrés et ils se sont mis d'accord pour dire
20 qu'il fallait qu'il y ait une mission qui aille sur place pour voir ce qui
21 se passait, pour vérifier, prouver que tout se faisait comme il se devait.
22 Puis l'Union européenne -- la Mission d'observation diplomatique de l'Union
23 européenne a précédé la MVK. C'est précisément ces gens-là qui nous ont dit
24 ce qu'ils avaient vu.
25 En juillet -- le 6 juillet, KDOM a commencé à travailler. Ensuite, les
26 combats se sont intensifiés pendant toute la période, et là encore l'OTAN
27 s'est impliquée et a fait des menaces diverses. Et --
28 Q. J'aimerais vous interrompre. Lorsque vous parlez de KDOM, est-ce que
Page 5250
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
15 versions anglaise et française
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 5251
1 vous parlez de la Mission d'observation diplomatique au Kosovo; c'est bien
2 cela ?
3 R. Absolument.
4 Q. Vous avez parlé des ordres d'activation de l'OTAN qui ont été signés.
5 Est-ce que vous vous rappelez quand cet ordre a été signé ?
6 R. Je savais que vous alliez me poser cette question. Je dois dire que là
7 j'ai un trou, je ne sais plus. Je sais que ça a été resigné en octobre et
8 ça a été réactivé, une deuxième activation.
9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Djurdjic va nous aider.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien.
11 M. DJURDJIC : [interprétation] Deux questions : tout d'abord, j'ai
12 l'impression que l'on parle de la période où le témoin n'était pas au
13 Kosovo. Ensuite, je dirais que le témoin dispose d'un aide-mémoire, il a
14 des notes, alors je ne sais pas si c'est normal. Mais en tout cas, je sais
15 que ce que je vois c'est qu'il est en train de témoigner pour une période
16 pendant laquelle il n'était pas au Kosovo, puis je me pose des questions
17 sur les notes qu'il utilise comme aide-mémoire.
18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Tout d'abord, il vient de mentionner
19 le rôle qu'il avait sur place et avec qui il travaillait, donc je pense que
20 ça ne pose aucun problème, Maître Djurdjic. Concernant cet aide-mémoire, je
21 vais vous demander, Monsieur le Témoin, de ne pas utiliser de notes --
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait. C'est juste qu'il y avait
23 tellement de dates, que j'ai suivi les choses chez moi au fur et à mesure,
24 donc il y avait un certain nombre d'instructions qui ont été données par le
25 Conseil de sécurité, et cetera, mais je voulais juste avoir certains
26 éléments sur moi.
27 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Si vous voulez vérifier vos notes, à
28 ce moment-là il faut que vous le disiez que vous faites allusion à vos
Page 5252
1 notes, et ensuite nous vous dirons si cela est autorisé ou pas.
2 Vous pouvez poursuivre, Madame Gopalan.
3 Mme GOPALAN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
4 Q. Lorsque nous avons été interrompus, on parlait du deuxième ordre
5 d'activation de l'OTAN. Je pense que ça suffit pour expliquer le processus
6 qui a entraîné la formation de la MVK et votre arrivée au Kosovo. Mais est-
7 ce que vous pourriez revenir sur votre rôle plus précisément au sein de
8 cette MVK ?
9 R. Oui, naturellement. En arrivant, j'ai été formé pendant quelques jours
10 à Brezovica et j'aurais pu rester à Brezovica comme formateur étant donné
11 que je disposais d'une expérience en la matière puisqu'on formait les
12 observateurs. J'avais été attaché de défense sur place, donc il y avait un
13 certain nombre de compétences dont je disposais, la formation des troupes,
14 la disposition des troupes, j'aurais pu procéder à une évaluation de tout
15 cela.
16 Mais ce qui s'est passé c'est que pendant mon séjour à Brezovica, j'ai été
17 écarté par le général DZ; et quelques jours après mon arrivée au quartier
18 général à Pristina, on m'a demandé de réfléchir à ce système de
19 vérification pour voir ce qu'il y avait dans cet accord. En d'autres
20 termes, d'essayer de parcourir le Kosovo pour voir où étaient les soldats,
21 quelles étaient leurs armes, ce qu'ils faisaient, est-ce qu'ils étaient
22 retournés dans les casernes, de me rendre sur les trois positions qui
23 avaient été autorisées dans le cadre de l'accord, et cetera.
24 Q. En dehors de votre rôle de vérification des armes, est-ce que vous avez
25 eu un autre rôle à l'époque ?
26 R. Oui, absolument. Au départ, je devais être l'officier de liaison pour
27 les deux parties, la MVK au quartier général et j'étais l'officier de
28 liaison pour l'UCK et la commission qui était basée à Pristina. C'était une
Page 5253
1 commission de deuxième niveau puisqu'il y avait une autre commission de
2 niveau hiérarchiquement supérieur à Belgrade.
3 Donc moi j'étais présent à ces réunions, mais il est devenu assez
4 rapidement difficile pour moi de travailler de part et d'autre, parce que
5 d'un côté comme de l'autre, on a commencé à se poser des questions sur les
6 motivations qui auraient pu être les miennes, et j'ai eu le sentiment que
7 ce n'était pas une bonne idée. Et donc j'ai parlé à DZ et nous avons nommé
8 quelqu'un d'autre pour être officier de liaison avec l'UCK, et moi je m'en
9 suis tenu à la commission.
10 Q. Merci. Une précision. Lorsque vous parlez du général DZ, je pense que
11 c'est une abréviation ?
12 R. Oui, absolument. On l'appelait DZ parce que son nom était assez
13 imprononçable et parfois on me disait CZ à cause de mon nom.
14 Q. Et quel était son nom ?
15 R. Son nom était Karol Drewienkiewicz.
16 Q. Très bien. Vous parlez également d'une commission qui a été mise en
17 place à Pristina ou qui était basée, à tout le moins, à Pristina. Est-ce
18 que c'était une commission de coopération dont vous avez parlé dans votre
19 déposition ?
20 R. Oui. C'était la commission de coopération de la RFY, mais il fallait
21 aussi qu'il y ait une commission de niveau plus important à Belgrade.
22 Q. Quel était son objectif ?
23 R. Il s'agissait de traiter des problèmes auxquels on était confronté au
24 quotidien, transfert d'informations de part et d'autre.
25 Q. Pour ce qui est des membres de cette commission, est-ce que vous
26 pourriez nous dire qui était membre de cette commission de votre côté et de
27 l'autre côté ?
28 R. De notre côté, je n'étais pas le membre senior. Au départ, c'était le
Page 5254
1 général DZ ou l'ambassadeur Walker ou alors l'un des adjoints représentait
2 la MVK.
3 Moi j'étais sur place avec lui et il y avait évidemment aussi un ou
4 deux interprètes avec nous et puis on faisait venir d'autres personnes
5 selon les besoins, côté MVK.
6 De l'autre côté, côté serbe, la commission Pristina était dirigée par
7 le général Loncar, un général à la retraite, et M. Walker l'avait demandé
8 personnellement. Il y avait le colonel Mijatovic du MUP, il venait de moins
9 en moins souvent au fil du temps, et puis le colonel Kotur, qui était un
10 officier de la VJ. En dehors de ça, on avait des gens qui venaient de
11 Belgrade. Il y avait M. Babic qui venait de temps en temps et il y en a
12 d'autres qui venaient et qui partaient.
13 Q. Merci. Concernant maintenant votre mission de vérification,
14 vérification menée par la MVK, d'une manière générale, est-ce que ce
15 processus était fructueux ?
16 R. Je dirais que les vérifications que nous avions prévues n'ont pas été
17 fructueuses.
18 Q. Pourquoi ?
19 R. Parce qu'on ne nous a pas donné l'accès qu'on croyait avoir.
20 Q. Et quel était l'accès que vous pensiez avoir ?
21 R. Dans l'accord, il était stipulé que l'on avait une liberté de mouvement
22 et d'accès sur tout le territoire du Kosovo-Metohija.
23 Q. Merci. J'aimerais que l'on revienne maintenant sur un certain nombre
24 des accords dont vous avez parlé dans votre témoignage.
25 Mme GOPALAN : [interprétation] Monsieur le Président, si vous me le
26 permettez, j'aimerais donner au témoin une version papier de ces accords
27 pour faciliter les références qui seront faites à ce document.
28 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous en prie.
Page 5255
1 Mme GOPALAN : [interprétation] J'aimerais faire référence au 65 ter 00658.
2 Q. Est-ce que vous pourriez aller au deuxième onglet, Monsieur le Témoin,
3 c'est l'étiquette numéro 2.
4 R. Oui.
5 Q. J'attends simplement que le document apparaisse à l'écran.
6 R. D'accord.
7 Q. Monsieur le Témoin, reconnaissez-vous ce document ?
8 R. Oui.
9 Q. De quoi s'agit-il ?
10 R. C'est l'accord d'origine entre l'OSCE et la RFY.
11 Q. Si on en vient à la dernière page du document, vous verrez qu'il a été
12 signé par un certain Bronislaw Geremek.
13 R. Oui. Bronislaw Geremek.
14 Q. Qui était-il à l'époque ?
15 R. C'était le ministre des Affaires étrangères polonais de l'époque, il
16 était président de l'OSCE.
17 Q. Merci. Cet accord entre l'OSCE et la RFY que nous avons sous les yeux,
18 quel rôle est-ce qu'il a joué concernant les travaux à mener par la MVK ?
19 R. C'était notre Bible.
20 Q. Qu'entendez-vous par là ?
21 R. Ça veut dire qu'on nommait les missions en fonction conformément à ce
22 document.
23 Q. J'aimerais qu'on regarde une section spécifique de ce document. C'est
24 en bas de la page 3, section 3, qui commence avec "specific terms of
25 reference."
26 Mme GOPALAN : [interprétation] Sur le prétoire électronique, ça commence à
27 la page 2 et ensuite, ça continue à la page 3. Les "specific terms of
28 reference," paragraphe 1 et ça continue ensuite sur la page suivante.
Page 5256
1 Q. La dernière phrase, qui dit : "Le personnel de la mission disposait
2 d'une liberté totale de mouvement et d'accès partout au Kosovo et à tout
3 moment."
4 Colonel, pourriez-vous revenir sur cette section de l'accord. Est-ce que
5 cela était respecté ?
6 R. Comme je le disais, c'était notre raison d'être au début de la mission.
7 Cela nous a permis de donner l'autorité, de mener notre mission de façon
8 efficace. Et dans notre interprétation, la liberté d'accès et de mouvement
9 était totale dans les garnisons, dans les casernes, les installations, les
10 casernes de police, et cetera, partout au Kosovo. C'était ça l'idée.
11 Malheureusement, bien souvent on nous refusait cette liberté d'accès
12 à cause de différentes activités de la VJ et du MUP.
13 Q. Qu'entendez-vous par différentes activités du MUP et de la VJ ?
14 R. Par exemple, s'ils déclaraient que telle ou telle zone était zone
15 opérationnelle, ou que c'était une zone de formation, eh bien, ils
16 bloquaient toute la zone, toute la région sur des kilomètres pour nous
17 empêcher d'avoir accès à cette zone et de voir ce qui s'y passait. Et ils
18 ne nous permettaient pas d'entrer dans les casernes, même si nous les en
19 avions avertis auparavant.
20 Q. Et pour ce qui est de cette campagne qui était bloquée et de votre
21 accès qui vous était interdit, est-ce que vous avez des exemples ?
22 R. Ça arrivait souvent. Au quotidien, les centres régionaux m'appelaient.
23 Il y avait cinq centres régionaux qui commandaient différentes zones de
24 responsabilité. Et ils m'appelaient tout en sachant que j'avais un accès au
25 colonel Mijatovic ou Loncar, et ils m'appelaient tous les jours et me
26 disait, On ne peut pas entrer dans telle ou telle zone. Il y avait des
27 barrages d'artillerie, il y avait des tirs, et cetera. Donc il y avait
28 tellement d'incidents comme celui-ci.
Page 5257
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
15 versions anglaise et française
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 5258
1 Lorsqu'il y avait des formations au niveau de Podujevo, on n'a pas pu
2 entrer sur la base aérienne, pas du tout. On était à l'extérieur, on
3 pouvait simplement voir ce qui se passait de l'extérieur lorsqu'ils ont
4 pilonné des villages en mars, non loin de Vucitrn, là c'était la même
5 chose, on nous a empêchés d'y aller. Parallèlement, il y avait d'autres
6 exercices de grande ampleur qui étaient menés sur cette zone et le général
7 DZ et moi-même avons été tenus en otage à bout portant avec un pistolet sur
8 la tempe et on nous a dit qu'on ne pouvait pas entrer.
9 Q. Lorsque vous parlez de la formation à Podujevo, à quelle période
10 pensez-vous ?
11 R. Ça c'est fin décembre.
12 Q. Et cet incident où on vous a placé un pistolet sur la tempe, est-ce que
13 c'était dans la zone de Vucitrn aussi ?
14 R. Oui.
15 Mme GOPALAN : [interprétation] J'aimerais verser cette pièce au dossier
16 comme élément de preuve.
17 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien.
18 M. LE GREFFIER : [interprétation] Cote P00835.
19 Mme GOPALAN : [interprétation] J'aimerais maintenant qu'on en vienne à un
20 autre document, peut-être devrions-nous faire une pause ou est-ce que vous
21 pensez qu'il vaut mieux passer au document suivant ?
22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] De combien de temps voulez-vous
23 disposer pour ce document ?
24 Mme GOPALAN : [interprétation] Plus de trois minutes.
25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Une ou deux minutes ou plus ?
26 Mme GOPALAN : [interprétation] Il me faudra au moins cinq minutes.
27 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous allons observer la pause
28 maintenant, nous reprendrons à 11 heures.
Page 5259
1 [Le témoin quitte la barre]
2 --- L'audience est suspendue à 10 heures 28.
3 --- L'audience est reprise à 11 heures 00.
4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Djurdjic.
5 M. DJURDJIC : [interprétation] En attendant que le témoin n'arrive, je vais
6 vous dire quelque chose rapidement, et vous me direz si ce que je demande
7 est possible ou pas.
8 Un grand nombre d'éléments de preuve ont été versés au dossier lors du
9 contre-interrogatoire de la Défense Milutinovic pendant la déposition de ce
10 témoin, de 15 à 20 documents. Afin d'abréger les choses, je souhaite
11 établir une liste des éléments de preuve qui ont été utilisés dans
12 l'affaire Milosevic et que ceci soit versé au dossier dans notre affaire,
13 si vous êtes d'accord.
14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Madame Gopalan.
15 Mme GOPALAN : [interprétation] Cette question a été soulevée dans l'affaire
16 Milutinovic et il existe une référence dans le compte rendu d'audience
17 Milutinovic lorsque l'Accusation a fourni les pièces à conviction
18 correspondantes pour les documents Milosevic dans l'affaire Milutinovic.
19 Cette information est déjà contenue dans le compte rendu d'audience de
20 l'affaire Milutinovic.
21 Je peux fournir les documents 65 ter ou les numéros de pièces à
22 conviction dans l'affaire Djordjevic qui correspondent, mais d'après les
23 numéros P de l'affaire Milutinovic qui existent au compte rendu d'audience,
24 le processus de la reconversion parle d'elle-même. Là je parle de la page 6
25 857.
26 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il sera utile pour nous et pour Me
27 Djurdjic si nous pouvions avoir un tableau avec les références mutuelles
28 entre les numéros, et si tel est le cas, peut-être que nous pourrions
Page 5260
1 éviter le besoin pendant la déposition du témoin actuellement présent de
2 verser au dossier les documents qui sont sur cette liste. Nous pouvons
3 traiter de cela lorsque le témoin rentrera chez lui.
4 Nous allons accepter votre suggestion, Maître Djurdjic, mais essayons
5 de combiner cela de telle sorte que les cotes de l'affaire Milosevic et
6 Milutinovic soient visibles.
7 M. DJURDJIC : [interprétation] Monsieur le Président, je suis tout à
8 fait d'accord pour que toutes les pièces à conviction versées dans
9 l'affaire Milutinovic soient versées dans notre affaire de la même manière,
10 car si nous avons admis le compte rendu d'audience il est normal que tous
11 les éléments de preuve soient admis aussi. Les mêmes critères devraient
12 s'appliquer à la fois à l'Accusation et à la Défense. Merci.
13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous laisserons le soin au
14 conseil de préparer cela. Merci.
15 Excusez-nous de ce retard, mais c'est dans votre intérêt et non pas
16 seulement le nôtre.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
18 Mme GOPALAN : [interprétation] Merci.
19 Q. Au moment de la pause, nous allions nous pencher sur un autre document,
20 le numéro 65 ter 00395. Il s'agit là de l'intercalaire suivant.
21 En attendant que ceci apparaisse à l'écran, je souhaite simplement vous
22 rappeler la réponse que vous avez fournie au sujet des questions d'accès
23 dont nous avons déjà parlé. Il s'agit du pilonnage qui a eu lieu à Vucitrn
24 fin mars.
25 Est-ce que vous pourriez me dire qui était responsable du pilonnage ?
26 R. Oui. Visiblement, si c'était l'artillerie c'était la VJ, mais il y
27 avait aussi un grand nombre de membres du MUP qui avaient des véhicules
28 armés et qui les utilisaient.
Page 5261
1 Q. Lorsque vous dites Vucitrn, vous parlez de la municipalité ou de la
2 ville ?
3 R. Je parle de la municipalité.
4 Q. Merci. Pendant combien de temps est-ce que ce pilonnage a eu lieu ?
5 R. Cette action a duré pratiquement toute la journée.
6 Q. Et la journée était fin mars ?
7 R. Oui.
8 Q. Est-ce qu'il y a eu d'autres actions dans cette région à l'époque ?
9 R. Oui, il y avait beaucoup d'activités, donc c'était quelque chose qui se
10 déroulait à petite échelle très souvent, mais ici il s'agissait de quelque
11 chose qui se déroulait à grande échelle et les villages étaient entièrement
12 brûlés.
13 Q. Pour ce qui est des incendies et du pilonnage, est-ce que les mêmes
14 forces étaient responsables des deux activités ?
15 R. Qu'est-ce que vous voulez dire par là ?
16 Q. Parce qu'au départ vous avez dit que le pilonnage c'était la VJ et le
17 soutien --
18 R. D'habitude c'était dans l'autre sens. C'était toujours les membres du
19 MUP qui effectuaient ces activités. La VJ fournissait d'habitude le soutien
20 sous forme d'artillerie lourde alors que les forces terrestres étaient
21 exclusivement presque celles du MUP. Quant aux incendies et les attaques
22 contre les villages, les incendies étaient provoqués de l'air mais les
23 attaques contre les villages étaient le fait du MUP.
24 Q. Merci. Nous allons revenir au document qui est à l'écran. Il s'agit de
25 l'intercalaire 3, vous le reconnaissez ?
26 R. Oui.
27 Q. C'est quoi ?
28 R. Pardon, ceci concerne le document de Shaun Byrnes ou du Clark Naumann,
Page 5262
1 oui je le reconnais.
2 Q. Et c'est un accord, c'est quoi ?
3 R. C'est un accord que Shaun Byrnes qui était le chef de la Mission
4 d'observateur diplomatique au Kosovo des Etats-Unis a fait avec le général
5 Djordjevic concernant les points de contrôle. L'essentiel du document porte
6 sur le nombre de points de contrôle et d'observation qui devaient exister à
7 travers la région du Kosovo.
8 Q. Alors paragraphe 1 --
9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Attendez, Madame Gopalan.
10 Oui, Maître Djurdjic.
11 M. DJURDJIC : [interprétation] Je pense que nous avons tous le même
12 document à l'écran. Il ne s'agit pas ici du bon document. Je pense qu'on
13 présente le mauvais document au témoin. Ce que j'ai c'est l'accord Clark
14 Naumann.
15 Mme GOPALAN : [interprétation] Oui, c'est exact, il s'agit d'une omission
16 de ma part. Si on peut présenter maintenant le document correct. Il s'agit
17 de 00394, excusez-moi. Maintenant nous avons le bon document à l'écran.
18 Q. Nous allons revenir au paragraphe 1, la première phrase fait
19 référence aux points de contrôle qui doivent démantelés, alors que la
20 deuxième phrase concerne les points d'exploration. Est-ce que vous pouvez
21 nous expliquer la différence entre ces deux termes ?
22 R. Oui, les points de contrôle étaient en place et à l'origine c'était des
23 barrières, des obstacles physiques sur les routes qui entravaient le
24 mouvement des personnes et des véhicules. D'après l'accord il fallait les
25 démanteler et les éliminer, et les remplacer par des postes d'observation
26 qui constitueraient des groupes de policiers du MUP à l'extérieur des
27 routes qui leurs permettraient de surveiller le mouvement des personnes et
28 des véhicules et ainsi de suite.
Page 5263
1 Q. Pourquoi est-ce que l'on demandait une telle restriction concernant le
2 nombre de points de contrôle, ou ici, de points d'observation ?
3 R. La raison était que nous considérions que les points de contrôle
4 devaient être écartés car ça provoquait beaucoup de difficultés pour tout
5 le monde qui se déplaçait à travers le Kosovo, et nous avons cru que si on
6 établissait les points d'observation, il était possible qu'ils procèdent à
7 leurs observations sans nécessairement arrêter les gens et sans entraver la
8 circulation.
9 Q. Merci. Nous allons maintenant passer aux numéros qui sont au paragraphe
10 1, il y a la référence à 27 points d'observation sur les lignes de
11 communication, ensuite une référence à un tiers de ces points
12 d'observation. Est-ce que vous pouvez expliquer un peu quelque chose
13 concernant ces nombres et ce tiers. Qu'est-ce que ça veut
14 dire ?
15 R. Ce qu'on voulait atteindre, c'est que 27 zones soient désignées comme
16 zones ayant des postes d'observation. Vous pouvez voir aussi aux
17 paragraphes 1 à 5 les routes montrant quel serait un nombre raisonnable, et
18 le général Djordjevic l'a accepté. Il n'y avait pas de raison d'avoir des
19 zones autour de toutes ces routes, et nous avons cru qu'il était plus
20 raisonnable d'avoir seulement neuf des 27 postes où les hommes se
21 tiendraient.
22 Q. Pour ce qui est de la mise en œuvre de cette partie de l'accord, est-ce
23 que vous pouvez faire un commentaire là-dessus ?
24 R. Oui. Nous avons appris que cet accord n'était pas du tout respecté, et
25 donc moi, en tant qu'homme chargé de la vérification, j'ai arrangé une
26 vérification ad hoc non annoncée un jour -- et j'ai envoyé 40 équipes sur
27 le terrain à chacun de ces emplacements que nous avions identifiés qui
28 était utilisé comme postes d'observation par le MUP, et nous avons constaté
Page 5264
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
15 versions anglaise et française
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 5265
1 qu'il y en avait au moins 27 qui étaient occupés ce jour-là, et non pas
2 neuf.
3 Q. Merci, je crois que vous avez fait référence à cette vérification
4 surprise au paragraphe 1, page 3 de votre déclaration. C'était en février
5 1999 ?
6 R. Oui.
7 Q. Est-ce que vous avez mené d'autres vérifications
8 surprises ?
9 R. C'était la vérification surprise principale que j'ai dirigée depuis le
10 quartier général de Pristina, mais localement parlant, dans des centres
11 régionaux, bien sûr que nous suivions le nombre de points d'observation où
12 les hommes se trouvaient. C'était la raison pour laquelle cette
13 vérification surprise a eu lieu et le rapport était envoyé à la mission de
14 coopération, afin d'indiquer qu'on les avait attrapés. Ils disaient
15 toujours qu'ils respectaient l'accord et qu'il n'y en avait pas plus de
16 neuf et non pas 27 où les hommes étaient déployés ce jour-là.
17 Q. Que s'est-il passé après que ce rapport a été envoyé à la commission de
18 la coopération ?
19 R. Rien.
20 Q. Merci.
21 Mme GOPALAN : [interprétation] Je souhaite verser cela au dossier.
22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Ce sera admis.
23 M. LE GREFFIER : [interprétation] La pièce dont le numéro 65 ter est 00394
24 aura la cote P00836.
25 Mme GOPALAN : [interprétation] Merci. Je souhaite que l'on affiche la pièce
26 dont le numéro 65 ter est 00395.
27 Q. Monsieur, l'accord qui figure à l'écran maintenant, ce sera
28 l'intercalaire suivant de votre classeur, l'intercalaire 4. Est-ce que vous
Page 5266
1 le reconnaissez ?
2 R. Oui. Ce sont tous des accords que je portais sur moi pendant toute la
3 période que j'ai passé au Kosovo.
4 Q. Cet accord correspond à quoi ?
5 R. Ceci fait référence à l'accord Clark Naumann signé par M. Sainovic et
6 le général Djordjevic en résultat d'une des visites de l'OTAN à Belgrade.
7 Q. Merci.
8 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Maître Djurdjic.
9 M. DJURDJIC : [interprétation] Je dois simplement vérifier si la traduction
10 est bonne. Il a été dit que ce sont les accords qui ont été faits pendant
11 qu'il était au Kosovo comme si le témoin avait participé ou établi cet
12 accord. C'était l'interprétation que j'ai reçue en B/C/S. Je ne sais pas
13 comment ceci a été consigné au compte rendu d'audience.
14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je pense que nous avons compris que
15 les accords étaient portés par le témoin pendant la période qu'il a passée
16 au Kosovo. Il n'avait pas suggéré qu'il avait participé aux longues
17 négociations ou qu'il en était l'un des signataires, si j'ai bien compris.
18 M. DJURDJIC : [interprétation] Je m'excuse, vous savez comment ceci a été
19 consigné au compte rendu d'audience et moi j'ai réagi par rapport à ce que
20 j'ai entendu. C'est la raison de ma question. Si ce qui est au compte rendu
21 d'audience est exact et non pas ce que j'ai entendu, c'est bon. C'est la
22 deuxième fois que je l'ai entendu. J'ai marqué un signe pour moi pour poser
23 la question au témoin. C'est pour cela que j'ai réagi. Merci.
24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci beaucoup.
25 Oui, Madame Gopalan.
26 Mme GOPALAN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
27 Q. Je revenais à l'accord concernant lequel vous avez dit que c'était
28 l'accord Clark Naumann. J'ai quelques questions à vous poser concernant ce
Page 5267
1 rapport.
2 Mme GOPALAN : [interprétation] Peut-on passer à la page 2 du document.
3 Q. L'on fait référence à la résolution du Conseil de sécurité de l'ONU,
4 numéro 1199. Plus tôt au cours de votre déposition, vous avez parlé de la
5 résolution du Conseil de sécurité de l'ONU. Vous parliez de cette
6 résolution-là ?
7 R. Oui.
8 Q. Et si l'on passe maintenant à la page suivante, paragraphe 3. J'attends
9 simplement que le document soit affiché à l'écran. Le paragraphe 3 fait
10 référence à la police, la police spéciale en temps de paix. Et il fait
11 référence aussi aux équipements et armes lourdes qui restent au Kosovo et
12 qui vont être renvoyés aux postes de police et aux bases.
13 Ce paragraphe fait référence aux buts dont tenaient compte les autorités de
14 la RFY au moment où elles ont annoncé ces mesures. Est-ce que vous pouvez
15 faire un commentaire sur la mise en œuvre de ce paragraphe par rapport au
16 renvoi des armes lourdes et des équipements ?
17 R. Oui, oui. Pour la plupart, les équipements ont été placés aux bons
18 endroits, comme ceci avait été déjà vérifié par le KDOM. Mais bien sûr, ce
19 qui s'est passé lorsque KDOM a remis ses opérations à l'OSCE, la MVK
20 tant que partie à l'accord, avait prévu d'absorber le KDOM et nous n'avions
21 plus accès aux équipements ni aux armes lourdes. Nous ne pouvions pas
22 vérifier, simplement, on nous disait ce qui se passait. Mais bien sûr, nous
23 ne pouvions pas vérifier cela car nous ne pouvions pas entrer dans des
24 casernes ou structures en question.
25 Q. Et lorsqu'on parle des armes lourdes et des équipements contrôlés par
26 le MUP, est-ce que vous pouvez clarifier à quel type d'armes on fait
27 référence ici ?
28 R. Je crois qu'il s'agissait des pièces de plus de 12,7-millimètres. Tous
Page 5268
1 les véhicules armés de calibre de plus de 12,7-millimètres.
2 Q. Et c'était dans la portée régulière des armes contrôlées par le MUP ?
3 R. Le MUP avait certainement des armes plus lourdes que cela, et par la
4 suite, en mars, ils les utilisaient.
5 Q. Je souhaite vous renvoyer maintenant au paragraphe 5 où vous faites
6 référence à un certain nombre d'emplacements. Vous avez fait référence aux
7 garnisons de la VJ, n'est-ce pas ?
8 R. Oui, mais on ne les appelait pas garnisons. Il s'agissait de groupes de
9 compagnie et nous n'avions jamais vraiment trouvé un accord exact
10 concernant la taille, mais l'ambassadeur Walker avait écrit une lettre à
11 Milosevic pour dire que nous croyions que la taille raisonnable pour un
12 groupe de compagnie était d'environ dix chars et 120 membres de personnel.
13 Q. Merci. Et pour ce qui est de la VJ, le paragraphe au-dessus fait
14 référence aux unités de la VJ additionnelles et aux équipements apportés
15 après février 1998 au Kosovo qui devaient être retirés. Quelle est votre
16 expérience par rapport à cette partie-là de l'accord ?
17 R. Certainement, ceci a été retiré et les autorités ont respecté cette
18 partie, mais bien sûr, en mars, nous avons trouvé un grand flux
19 d'équipements plus modernes et plus puissants que l'on ramenait de nouveau.
20 Q. Et donc ces équipements appartenaient seulement à la VJ ?
21 R. Non. Certainement, la VJ a fait venir les chars T-84, mais le MUP avait
22 apporté aussi les véhicules de transport de troupes blindés aussi.
23 Mme GOPALAN : [interprétation] Merci. Peut-on verser ça au dossier.
24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui.
25 M. LE GREFFIER : [interprétation] Cote P00837.
26 Mme GOPALAN : [interprétation] Merci.
27 Q. En réponse à certaines questions portant sur cet accord, vous avez
28 mentionné le fait que le KDOM allait être absorbé au sein de la MVK
Page 5269
1 c'était quand ?
2 R. L'absorption a eu lieu progressivement. Certaines parties de KDOM ont
3 été absorbées pendant plus longtemps que d'autres. Par exemple, l'élément
4 britannique de KDOM a été absorbé début décembre alors que la partie
5 américaine ça a été fait pendant plusieurs mois avant l'absorption totale.
6 Q. Et pour ce qui est des véhicules additionnels qui ont été emmenés au
7 Kosovo, quelle était la source de votre information ?
8 R. Moi et mes photographies et aussi les observateurs du centre régional
9 près de Mitrovica.
10 Q. Est-ce que vous pouvez clarifier ce que vous avez vu dans la région ?
11 R. Par exemple, il y avait un train qui transportait les équipements. J'ai
12 vu des chars T-84 que l'on a emmenés et ce type d'équipement qui était
13 utilisé au Kosovo, c'était T-55, par exemple. Donc nous sommes allés du
14 type de char de 1950 au modèle de 1980, qui était tout à fait différent.
15 Q. Et quand avez-vous vu cela ?
16 R. Ça aussi en mars.
17 Q. En mars. Merci. Par rapport au MUP, est-ce que vous avez des exemples
18 spécifiques de ce qui a été emmené ?
19 R. Je n'ai pas vu personnellement les équipements que l'on faisait venir à
20 bord des trains que le MUP avait, mais le MUP a fait venir beaucoup
21 d'équipement par la route. Et simplement, il s'agissait d'une nouvelle
22 génération de véhicules blindés.
23 Q. Il s'agissait de la période de mars aussi ?
24 R. Oui. Tout ceci s'est déroulé pendant le mois de mars.
25 Q. Merci. Je souhaite maintenant passer à un autre document, 00396, c'est
26 l'intercalaire suivant.
27 Monsieur, est-ce que vous reconnaissez le document qui est à l'écran ?
28 R. Oui.
Page 5270
1 Q. Et c'est quoi ?
2 R. C'est une lettre que M. Walker a envoyée à M. Milosevic en répondant à
3 tous les accords que nous avons essayé de développer. On a essayé de
4 développer une ligne de base de nos opérations, des informations que nous
5 devions avoir concernant ce qui était au Kosovo, quels étaient les
6 équipements qui étaient en réalité au Kosovo, et le nombre de troupes, et
7 cetera.
8 Q. Et lorsque vous dites "la ligne de base," c'est quoi ?
9 R. Pour procéder à nos vérifications, nous devions savoir lorsque l'on
10 faisait venir de nouvelles armes. Donc nous devions savoir quel était le
11 nombre initial et une fois cela établi, nous devions savoir combien il y en
12 avait sur place, où ils étaient; aussi, nous essayions d'interpréter les
13 autres accords passés préalablement concernant ce que nous considérions
14 comme des armes lourdes; donc on vérifiait les points de contrôle, les
15 postes d'observation, la taille, la composition, et cetera. Donc c'était la
16 ligne de base sur la base de laquelle nous avons poursuivi la suite de
17 notre travail au Kosovo pendant le reste de notre mandat.
18 Q. Et quel a été le résultat de cette lettre ?
19 R. Rien. Il n'y a jamais eu de réponse.
20 Q. Et si tel avait été le cas, qui aurait mené vos tâches -- dans la
21 situation telle qu'elle prévalait, qui procédait aux vérifications ?
22 R. Nous informions la commission de coopération que nous allions procéder
23 à la vérification conformément à cette lettre puisque c'était notre seul
24 fondement.
25 Q. Je comprends. Dans cette lettre, on fait référence à deux réunions qui
26 ont eu lieu -- mardi matin, c'est en bas de la page 2, dernière page. Une
27 référence y est faite aux réunions du mardi matin. De telles réunions, est-
28 ce qu'elles se déroulaient entre les officiers de liaison de la RFY et les
Page 5271
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
15 versions anglaise et française
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 5272
1 membres de la MVK ?
2 R. Je pense que peut-être il y avait des réunions par-ci, par-là qui se
3 tenaient au quartier général de la MVK, mais je pense qu'il y avait surtout
4 les réunions quotidiennes à la commission de coopération.
5 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire quelque chose au sujet de ces réunions
6 quotidiennes ?
7 R. oui, il y avait des réunions de coordination planifiées au quotidien,
8 tous les jours à 10 heures avec le général DZ qui les présidait d'habitude.
9 Je pouvais parler de tous nos problèmes, des questions des problèmes au
10 sujet desquels nous avons reçu l'information de la part des centres
11 régionaux, des demandes, des documents ou rapports que l'on souhaitait
12 soumettre à la commission de coopération. Ensuite la commission de
13 coopération nous informait de ce qui se passait, exprimait leurs
14 préoccupations ou leurs requêtes.
15 S'il y avait un convoi qui devait venir, parfois ils souhaitaient nous le
16 dire pour que l'on sache et pour qu'on puisse prendre des mesures
17 appropriées.
18 Q. Quelle était la productivité de ces réunions ?
19 R. Les réunions étaient très longues. Souvent pendant cinq heures.
20 Certainement au début, peut-être pendant le premier mois, beaucoup de
21 réunions concernaient l'histoire du Kosovo. Les camps serbes étaient
22 contents si l'on comprenait tous l'histoire du Kosovo, ensuite les réunions
23 sont devenues plus utiles, plus productives.
24 Je veux dire par là qu'il y avait vraiment un échange des plaintes. Le
25 colonel Mijatovic, s'il était sur place, d'habitude il criait et se
26 plaignait, il nous disait qu'on était responsables du fait que ses
27 policiers se faisaient tuer par l'UCK, qui selon lui était une organisation
28 terroriste. Mais nous ne contestions pas cela, nous ne voulions pas avoir
Page 5273
1 de disputes.
2 Donc parfois ce n'était pas très utile, ça durait quatre ou cinq heures,
3 puis on recevait trop tard les informations nécessaires.
4 Q. Pourquoi vous pensez que c'était le cas ?
5 R. Je ne suis pas sûr. Je ne sais pas si c'était fait de manière délibérée
6 ou bien si c'est la procédure qui fonctionnait ainsi, mais c'est comme ça
7 que les choses se déroulaient.
8 Q. Merci. Pour ce qui est de la fréquence de ces réunions avec le temps,
9 vous avez mentionné qu'au début c'était au quotidien. Est-ce que ça s'est
10 poursuivi tout au long de votre mandat ?
11 R. Non. Par exemple, s'il y avait une activité importante qui se déroulait
12 au Kosovo, au début de la mission, bien sûr, nous avions des réunions
13 faisant suite le même jour. S'il fallait aller sur le terrain avec le
14 colonel Kotur, parfois on le faisait aussi. Mais au fur et à mesure que la
15 mission avançait, vers le mois de mars, les choses se déroulaient bien, on
16 a eu plusieurs réunions par jour pour résoudre les problèmes.
17 Autour de Noël, nous avons eu un incident autour de Podujevo, encore une
18 fois, il y a eu plusieurs réunions à la commission de coopération.
19 Q. Merci. Pendant ces réunions, est-ce que vous avez soulevé les questions
20 concernant la violation des accords différents, ça a fait l'objet de
21 discussions ?
22 R. Sans cesse.
23 Q. Quelles étaient les conséquences de ces plaintes ?
24 R. Parfois la situation s'améliorait, par exemple, s'agissant de l'accès
25 limité aux zones où la VJ et le MUP étaient déployés. C'était un véritable
26 problème, si les gens ne pouvaient pas y aller, ils ne pouvaient pas
27 vérifier.
28 Plus tard, nous avons reçu une lettre de la part du général Lazerovic où il
Page 5274
1 était clairement indiqué que l'accès allait être autorisé à la MVK, mais en
2 pratique, d'une certaine manière, je ne sais pas ce qui est arrivé, mais
3 cette lettre n'a pas été transmise à toutes les unités. Quand nos gens se
4 rendaient sur le terrain, on les renvoyait. Alors ils me contactaient par
5 téléphone satellite, ensuite je m'adressais à un membre de la commission;
6 si c'était le problème causé par le MUP, je parlais au colonel Mijatovic.
7 Ensuite, je passais le téléphone au garde ou au commandant de la compagnie
8 ou de l'unité qui se trouvait sur place pour qu'on lui dise qu'il fallait
9 laisser mes gens passer. Ensuite, dès que je partais, dix minutes plus
10 tard, la situation redevenait normale et habituelle et on refusait de
11 nouveau l'accès à nos gens. C'était à peu près toujours de la même manière
12 que nos activités de vérification étaient obstruées.
13 Q. Bien. S'agissant de ces visites de contrôle au MUP, est-ce que vous en
14 avez parlé lors de ces réunions ?
15 R. Oui, à plusieurs reprises. Vous savez, nous avons souvent indiqué que
16 la situation exigeait qu'on augmente le nombre de points d'observation.
17 Q. Merci.
18 Mme GOPALAN : [interprétation] Nous demandons le versement de ce document.
19 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il sera versé.
20 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera P00838.
21 Mme GOPALAN : [interprétation]
22 Q. J'aimerais maintenant vous poser quelques questions portant sur le rôle
23 du MUP au Kosovo. Vous en avez parlé à la page 9, paragraphe 3 de votre
24 déclaration, vous avez dit :
25 "A mon avis, la primauté au Kosovo avait le MUP puisque c'est le MUP qui
26 était responsable des problèmes de sécurité interne. Ils conduisaient
27 toutes les opérations jusqu'à à peu près une semaine avant notre retrait."
28 Pourriez-vous nous expliquer de quelle manière vous êtes parvenu à cette
Page 5275
1 conclusion portant sur le rôle du MUP ?
2 R. C'est simple. Le MUP était présent partout, dès qu'il y avait un
3 incident, c'était le MUP qui commandait, qui contrôlait la situation. S'il
4 y avait la VJ et si elle était présente, elle y était en tant que soutien.
5 Je pense que c'est une pratique tout à fait normale, habituelle s'agissant
6 d'une situation portant sur la sécurité interne. La police a la primauté et
7 l'armée est là pour aider. Mais la situation a en fait dépassé le domaine
8 d'activités habituel de la police dans des conditions normales. Vous aviez
9 là le MUP qui combattait et qui était en première ligne alors que la VJ
10 était en seconde ligne avec les chars et l'artillerie et d'autres armes
11 lourdes.
12 Q. Vous disiez que le MUP était présent partout, vous pensez aux unités
13 régulières ou à d'autres types d'unités du MUP ?
14 R. Il y avait plusieurs types d'unités du MUP, il y avait plusieurs types
15 de policiers, ça dépendait des régions, dans les villes ou dans les
16 villages, c'était différent. Il y avait peut-être ceux qui s'occupaient de
17 la circulation. Vous avez aussi les membres du MUP qui portaient des
18 uniformes semblables à des uniformes de combat, en camouflage, mais en
19 bleu. Donc ils étaient partout.
20 Leurs équipements étaient assez vieux et leurs uniformes étaient plutôt
21 démodés, mais à partir du Nouvel An nous avons remarqué qu'il y avait de
22 plus en plus de membres du MUP nouveaux qui arrivaient avec des jolis
23 uniformes, nouveaux uniformes, nouvel équipement, très motivés, bien plus
24 disciplinés, presque comme des forces spéciales d'élite. Je pense que
25 c'était le plus haut échelon du MUP qui est arrivé à ce moment-là au
26 Kosovo.
27 Q. Vous dites que c'était autour du Nouvel An ?
28 R. Oui.
Page 5276
1 Q. Vous avez tout à l'heure dit que le MUP était partout, est-ce que vous
2 avez eu l'occasion de voir de vos propres yeux les activités conduites par
3 le MUP ?
4 R. Ecoutez, je réfléchis un peu. Normalement, j'arrivais au moment où
5 l'action arrivait à la fin ou était déjà finie. Je n'ai pu voir que les
6 conséquences des activités du MUP. Par exemple, s'agissant de Podujevo,
7 avant Noël, c'était un incident lors duquel le MUP avait essayé de sauver
8 un agriculteur qui se retrouvait au milieu des combats.
9 Q. Bien. Vous avez fait référence à cet incident de Podujevo à plusieurs
10 reprises. Vous venez de parler maintenant de cet agriculteur, y avait-il eu
11 d'autres incidents relatifs à l'accès de vérificateurs sur les lieux
12 concernant la zone de Podujevo ?
13 R. J'essaie de me souvenir. Vous savez, il y avait des positions de chars
14 et l'accès a été contrôlé dans cette zone de Podujevo à partir de l'endroit
15 qui s'appelait Gornja Lapastica. L'accès était très limité et contrôlé par
16 le MUP. Il y avait également un char.
17 Q. C'était quand ?
18 R. Cette position du MUP a toujours existé pendant toute la période.
19 Q. C'est-à-dire durant toute la période que vous avez passé au Kosovo ?
20 R. Oui.
21 Q. Merci.
22 Mme GOPALAN : [interprétation] Nous nous excusons aux interprètes. Nous
23 essayerons de parler plus doucement.
24 Q. S'agissant de ces opérations, vous avez également parlé des opérations
25 conjointes menées par la VJ et le MUP ensemble. Vous avez déclaré que
26 l'armée fournissait le soutien d'artillerie et que c'était la police qui
27 avançait vers les positions de l'UCK et les villages. C'est la page 9,
28 paragraphe 3, de la déclaration du
Page 5277
1 Témoin.
2 Dites-nous comment vous êtes parvenu à cette conclusion portant sur la
3 coordination des activités de la VJ et du MUP ?
4 R. Dès le départ, sur la base déjà de nos discussions avec la commission
5 de coopération, on nous a dit que la VJ ne jouait aucun rôle dans ces
6 activités. Ceux qui jouaient le rôle principal étaient les membres du MUP
7 concernant la sécurité au Kosovo. L'armée n'était utilisée que dans les
8 situations où on avait besoin d'un soutien d'artillerie lourde. C'est
9 quelque chose que j'ai pu entendre au Kosovo très, très souvent au sujet du
10 fonctionnement de ce système. La police était celle qui jouait le rôle
11 principal.
12 Q. [aucune interprétation]
13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Djurdjic, allez-y.
14 M. DJURDJIC : [interprétation] Je demanderais à ma consoeur de m'indiquer
15 la référence pour le B/C/S, parce qu'elle fait référence aux pages et
16 paragraphes en anglais. Le témoin fait des commentaires rapidement sur ces
17 passages alors que je n'ai même pas réussi à retrouver les passages en
18 question.
19 Je n'arrive absolument pas à suivre quand ma consoeur dit page telle
20 et telle, paragraphe tel et tel. Dans mon exemplaire, ça ne correspond pas
21 du tout, et d'ailleurs les paragraphes ne sont pas du tout numérotés. Ce
22 problème est de nature technique.
23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Etes-vous en mesure d'améliorer votre
24 approche quant aux références des documents ?
25 Mme GOPALAN : [interprétation] Mes paragraphes ne sont pas numérotés, en
26 fait si je dis tout simplement paragraphe 3, c'est le troisième paragraphe.
27 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Sur une page donnée.
28 Mme GOPALAN : [interprétation] Oui. Je donne le numéro de la page et je dis
Page 5278
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
15 versions anglaise et française
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 5279
1 que c'est tel et tel paragraphe dans l'ordre sur la page en question.
2 M. LE JUGE PARKER : [aucune interprétation]
3 M. DJURDJIC : [interprétation] Le problème c'est que la mise en page des
4 textes en B/C/S et en anglais n'est pas identique. Si elle dit le troisième
5 paragraphe de la cinquième page, ce n'est pas nécessairement la même chose
6 pour le texte en B/C/S.
7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Avez-vous une déclaration de référence
8 en B/C/S ?
9 Mme GOPALAN : [interprétation] Non, malheureusement pas.
10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Mais je suis sûr que ça vous serait
11 bien utile de l'avoir à l'avenir.
12 Mme GOPALAN : [aucune interprétation]
13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous remarquerez bien que Me Djurdjic,
14 quand il fait référence à un document, il vous donne la page en anglais et
15 en B/C/S. Il faudra faire la même chose à l'avenir.
16 Mme GOPALAN : [interprétation] Oui, je tâcherai de le faire, merci
17 beaucoup, Monsieur le Président.
18 Q. Avant d'être interrompu, nous avons parlé du paragraphe 3 à la page 9
19 qui parle des opérations conjointes menées par le MUP et la VJ. Vous avez
20 dit que c'était la police qui avait le rôle principal dans ces opérations.
21 Ce que je voulais vous demander était de savoir si vous avez eu l'occasion
22 de voir de vos propres yeux une de ces opérations ?
23 R. Oui, comme je l'ai déjà dit. Dans la zone de la municipalité de
24 Vucitrn, au sud de cette municipalité, une opération d'envergure du MUP
25 contre les villages qui se trouvaient à l'ouest de leur position, l'armée
26 fournissait le soutien. Ils étaient en arrière, ils attendaient qu'on leur
27 demande d'avancer le cas échéant.
28 Q. Bien. Cet incident à Vucitrn s'est passé en mars ?
Page 5280
1 R. Oui.
2 Q. Bien. Vous avez parlé tout à l'heure de plus en plus de membres de
3 forces spéciales du MUP qui arrivaient au Kosovo. A quel moment avez-vous
4 remarqué l'augmentation de membres de forces spéciales ?
5 R. Il y a eu un nouvel incident, à chaque fois où il y avait un nouvel
6 incident on les rencontrait. Je ne peux pas vous dire de quelle unité ils
7 faisaient partie parce qu'en général ils ne portaient pas d'emblème.
8 Q. Bien. Vous dites que leur nombre a augmenté, pourriez-vous nous donner
9 une estimation ?
10 R. Non, mais de toute manière c'est évident, ils étaient beaucoup plus
11 nombreux.
12 Q. De quelle manière ils se distinguaient des membres du MUP local ?
13 R. Je vous ai déjà dit que leurs vêtements et leurs équipements étaient
14 différents. Leur structure de commandement paraissait beaucoup mieux
15 organisée. Ils se comportaient presque comme des unités militaires, ils
16 étaient très déterminés, très durs, très professionnels. Quand je dis
17 professionnels, je veux dire qu'ils savaient ce qu'ils étaient en train de
18 faire.
19 Q. S'agissant de la structure de commandement, vous dites qu'ils étaient
20 bien différents, qu'ils étaient beaucoup plus professionnels, avez-vous un
21 exemple concret pour ceci ?
22 R. Ecoutez, d'une manière générale, on voyait bien qu'ils étaient très
23 motivés, de la manière dont ils se tenaient, leur attitude, leur posture
24 générale, leur conduite, leur organisation, tout ce qu'ils faisaient, les
25 opérations ressemblaient davantage aux opérations militaires que
26 précédemment nous avions pu observer lors des opérations du MUP, on voyait
27 avant très souvent les membres du MUP qui se promenaient en direction des
28 positions de l'UCK. Ces personnes-là n'avaient pas l'air de se promener,
Page 5281
1 ils savaient exactement ce qu'ils étaient en train de faire.
2 Q. Bien. Vous avez dit que vous arriviez en général juste vers la fin
3 d'une action ou après une action. Vous pouviez voir les conséquences d'une
4 action menée par le MUP. Quelles étaient les conséquences de ces opérations
5 que vous avez pu observer ?
6 R. Ce que nous avons observé, et nous nous sommes plaints de ceci, est le
7 fait qu'il y a toujours eu une utilisation disproportionnée de la force.
8 Ils n'avaient pas besoin de raser tout un village parce qu'il y avait là
9 peut-être quelques membres de l'UCK. Ils n'avaient pas besoin de tirer 300
10 obus sur un village en quelques minutes. Nous avons souvent discuté de ceci
11 lors des réunions avec la commission de coopération et nous avons essayé de
12 les convaincre qu'il fallait introduire le principe de proportionnalité
13 dans leurs actions.
14 Q. Cet incident, il porte sur quelle période ?
15 R. C'était en décembre, je pense, tout juste avant celle de Racak.
16 Q. Quelle est votre source d'information s'agissant de cet usage excessif
17 de la force ?
18 R. Nous nous sommes rendus sur les lieux, nous avons vu les photographies.
19 Le général DZ était présent en personne, l'ambassadeur Walker aussi, le
20 général Loncar. Tout le monde a pu voir cela. Nous pensons également que ce
21 que nous avons trouvé sur place était d'une certaine manière scénarisé et
22 qu'on y a rajouté des choses.
23 Q. Y a-t-il eu des plaintes portant sur l'usage excessif de force lors de
24 ces réunions avec la commission de la coopération ?
25 R. Oui.
26 Q. De quelle manière réagissaient-ils ?
27 R. D'habitude, ils disaient qu'il s'agissait des actions légitimes
28 dirigées contre les terroristes qu'il fallait chasser et que dans une
Page 5282
1 situation similaire, nous aurions fait de même. Moi, je ne le croyais pas.
2 Je pense que Racak est le bon exemple de ce que nous avons réussi enfin à
3 faire, parce que nous avons réussi à les convaincre qu'il fallait réduire
4 l'envergure de leurs opérations.
5 A un moment donné, suite à l'enterrement, ils ont réussi à mener une action
6 d'envergure limitée, à sortir plusieurs terroristes sans causer d'autres
7 incidents lors de l'enterrement. C'était faisable.
8 Q. Vous parlez de l'incident de Racak. Que s'est-il passé là-bas ?
9 R. Je ne suis pas allé personnellement là-bas. J'étais au Kosovo, j'ai
10 ensuite suivi ce qui se passait concernant l'enterrement, les corps qui
11 étaient là-bas et il y a eu des négociations avec l'objectif d'obtenir une
12 autorisation de se rendre dans le village de Racak, où 45 personnes
13 albanaises ont été tuées.
14 Q. Mais la MVK était à Racak ? Vous, personnellement, n'y êtes pas allé.
15 R. Moi, non. Je ne suis pas allé.
16 Q. Bien.
17 Mme GOPALAN : [interprétation] Je vais maintenant passer au document 00677,
18 sur la liste 65 ter.
19 Q. C'est le dernier dans votre registre.
20 L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent les pauses entre les questions et
21 les réponses.
22 Mme GOPALAN : [interprétation] En anglais, c'est le paragraphe 1(a) qui
23 nous intéresse. Il est indiqué :
24 "Les zones principales d'activité sont à Bukos, et cetera…"
25 La troisième phrase dit :
26 "…cela a changé la qualité de ces anciennes zones d'exercice, nous
27 avons observé une présence de véhicules du MUP et de la VJ et d'armement
28 plus important qu'auparavant."
Page 5283
1 Q. Tout d'abord, dites-nous si vous reconnaissez ce document ?
2 R. Oui.
3 Q. Qu'est-ce ?
4 R. C'est le rapport quotidien fourni par le QG.
5 Q. Quel QG ?
6 R. De Pristina.
7 Q. Avez-vous participé à l'élaboration des rapports
8 quotidiens ?
9 R. J'y contribuais, mais je ne les rédigeais pas moi-même.
10 Q. S'agissant de cette phrase que "la présence de véhicules du MUP et de
11 la VJ plus importante que d'habitude a été observée," dites-nous si cela
12 correspond à ce que vous avez vu sur le terrain à cette époque-là ?
13 R. Oui.
14 Q. Que voulez-vous dire par ceci ? Expliquez-nous.
15 R. Tout simplement, il y avait plus de véhicules et de personnel de la VJ
16 et du MUP sur ce territoire, cela signifiait que soit ils préparaient des
17 activités, soit il s'agissait de l'instruction, de l'entraînement. Mais de
18 toute manière, nous étions certains qu'il y avait beaucoup de personnel et
19 de mouvement dans cette zone.
20 Q. Bien. Il s'agit ici d'un rapport qui a été mis à jour le 27 février
21 1999 ?
22 R. Oui.
23 Q. Bien. Est-ce qu'elles signifient quelque chose de spécial concernant la
24 période de temps pendant laquelle vous avez conduit des activités
25 d'observation ? Vous voyez ces dates qu'il y a en haut de la page.
26 R. Ecoutez, il y a certainement eu davantage d'activités qui se
27 déroulaient sur le territoire du Kosovo à cette époque-là.
28 Q. A cette époque-là ?
Page 5284
1 R. Oui.
2 Q. Bien. J'aimerais maintenant qu'on aborde le chapitre intitulé "La
3 situation de sécurité dans le district de Prizren".
4 Mme GOPALAN : [interprétation] En B/C/S cela est à la même page, il faut
5 juste baisser un peu le document quelques lignes plus bas.
6 Q. C'est la troisième ligne à partir d'en bas. On voit :
7 "EU AG a observé plusieurs civils armés." Qu'est-ce que ça veut dire
8 les civils armés ? Pourriez-vous nous expliquer ce que cela voulait dire ?
9 R. Oui, quand nous disions des civils armés, alors on pensait à des Serbes
10 armés. Si on voyait des civils albanais armés, alors on disait l'UCK parce
11 que d'habitude, les seules personnes albanaises armées du côté albanais
12 étaient membres de l'UCK; si dans un rapport vous voyez la référence à des
13 civils armés, alors il s'agit des civils serbes.
14 Nous en avons parlé lors des réunions avec la commission, et elle nous a
15 dit que c'était normal parce qu'il s'agissait de réservistes qui
16 s'entraînaient et que ça faisait partie de leurs devoirs.
17 Q. Est-ce que vous avez des informations sur la source des armes pour les
18 civils ?
19 R. On nous a dit que c'était les autorités serbes qui les armaient.
20 Q. Comment avez-vous appris ceci ?
21 R. Nous en avons parlé lors des réunions avec la commission avec les
22 colonels Loncar et Kotur, et ils nous ont dit que c'était normal.
23 Q. Bien. Est-ce que vous les avez vus de vos propres yeux, ces civils
24 armés ?
25 R. Oui.
26 Q. A quel moment vous avez commencé à les voir ?
27 R. A peu près à partir de cette période-là.
28 Q. Où ?
Page 5285
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
15 versions anglaise et française
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 5286
1 R. Je ne les ai pas vus à Pristina, mais ailleurs, dans d'autres zones et
2 dans des villages.
3 Q. Avez-vous un exemple concret, si vous vous souvenez ?
4 R. Ecoutez, partout où on allait. Je n'ai aucun exemple concret. Je peux
5 vous donner des noms de villages mais ça ne vous dira rien. Tout simplement
6 sur le terrain.
7 Q. Bien. J'ai des problèmes avec l'interprétation et mes écouteurs. Toutes
8 mes excuses.
9 R. Merci.
10 Mme GOPALAN : [interprétation] J'aimerais demander le versement de ce
11 document.
12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il sera versé.
13 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera P00839.
14 Mme GOPALAN : [interprétation]
15 Q. Nous allons aborder quelques autres sujets, maintenant.
16 Dans votre déclaration, vous avez parlé de Nikola Sainovic et de ses
17 activités au Kosovo. Vous nous avez donné quelques exemples relatifs à son
18 autorité. A votre avis, quel était le rôle de Sainovic au Kosovo ?
19 R. A mon avis, il était le lien entre tout ceux qui avaient à faire au
20 Kosovo. Parce qu'il se trouvait très souvent au Kosovo. Je n'avais aucune
21 connaissance personnelle, je ne le connaissais pas personnellement, mais on
22 parlait souvent de Sainovic lors des réunions de la commission, et souvent
23 s'il s'agissait d'une information importante, d'une décision importante,
24 ils disaient qu'il fallait qu'ils en parlent à M. Sainovic.
25 Q. Bien. Est-ce que vous l'avez rencontré souvent ou seulement lors de
26 cette réunion ?
27 R. M. Sainovic rencontrait d'habitude l'ambassadeur Keller qui était un
28 des agents de nos chefs de mission, l'ambassadeur français, c'était ça son
Page 5287
1 pendant. S'il y avait des problèmes à la frontière, et cetera, dans ce cas-
2 là, Keller prenait contact avec Sainovic et on trouvait une solution à ces
3 problèmes en quelques minutes. J'ai assisté à une réunion qui était
4 présidée par M. Sainovic.
5 Q. A Pristina ?
6 R. Oui, à Pristina.
7 Q. Pouvez-vous nous donner des exemples illustrant le fait qu'il ait
8 exercé une autorité au Kosovo ?
9 R. Oui, par exemple, en décembre, il était très probable qu'un combat
10 entre les Serbes et l'UCK à l'ouest de Podujevo éclate. A ce moment-là,
11 j'ai proposé qu'on essaie de sauver les fermiers serbes qui s'étaient
12 retrouvés entre les mains de l'UCK. Je leur ai proposé de me laisser
13 intervenir moi-même, de retenir les forces de la VJ et du MUP, de ne pas
14 lancer d'attaque avant que je n'essaie de régler la situation. Alors Loncar
15 a dit qu'il allait prendre contact avec Sainovic et il est allé lui
16 téléphoner, et il a dit que c'était fait.
17 Q. Merci. Avait-il une autorité sur le MUP ou la VJ ?
18 R. Je pense qu'il prenait des décisions, qu'il faisait des propositions,
19 des conseils s'agissant de Podujevo. Par exemple, lors des réunions où
20 l'OSCE était représenté par l'ambassadeur Keller et qui étaient présidées
21 par M. Sainovic du côté serbe, nous avons pu voir plusieurs exemples de
22 décisions qu'il a prises immédiatement sur place en réagissant à nos
23 demandes.
24 Par exemple, on m'a autorisé à me rendre à Nis pour rencontrer les
25 prisonniers. D'une certaine manière, on nous a dit également ce qui allait
26 se passer avec les hélicoptères, le carburant et toutes les questions qui
27 étaient soulevées lors des réunions.
28 Q. Merci. Concernant le lieutenant général Sretan Lukic, quel était son
Page 5288
1 rôle ?
2 R. Pour autant que je sache, c'était lui le chef du MUP au Kosovo.
3 Q. Comment l'avez-vous su ?
4 R. On nous l'a dit, et dès lors que l'on rendait compte à quelqu'un il
5 s'agissait de Lukic. On nous a dit que dans la mission de coopération, que
6 Lukic était le chef.
7 Q. Est-ce que Lukic a participé aux réunions avec la mission de
8 coopération ?
9 R. Si tel était le cas, je ne m'en souviens pas, pas que je sache. C'était
10 principalement Mijatovic.
11 Q. Merci. J'aimerais maintenant passer à un autre moment, le moment où
12 vous avez quitté le Kosovo en mars. Est-ce que vous pourriez nous dire
13 quand selon vos souvenirs vous avez quitté le Kosovo ?
14 R. Le 20 mars.
15 Q. Le 20 mars. Donc autour de cette période, une fois parti du Kosovo, où
16 êtes-vous allé ?
17 R. Toute la MVK est partie en Macédoine. Nous sommes passés dans une
18 région non loin du lac Ohrid.
19 Q. Etes-vous allé en Macédoine à un endroit qui s'appelait Blace ?
20 R. Blace, oui, à de nombreuses reprises. Oui, j'y suis allé plusieurs
21 fois.
22 Q. A cette période, est-ce que vous êtes allé sur place ?
23 R. Oui.
24 Q. Merci.
25 Mme GOPALAN : [interprétation] J'aimerais que l'on fasse apparaître 65 ter
26 655.
27 Q. Vous allez voir une photo apparaître à l'écran.
28 Reconnaissez-vous cette photo ?
Page 5289
1 R. Oui, c'est moi qui l'ai prise.
2 Q. Où est-ce ?
3 R. C'est au sud de la frontière, le général Jankovic Blace et c'est la
4 ligne de chemin de fer entre le Kosovo et la Macédoine.
5 Q. Quand a été prise cette photo ?
6 R. Quelques jours après notre arrivée en Macédoine.
7 Q. Que voit-on sur cette photo ?
8 R. Sur cette photo on voit le début de l'arrivée des réfugiés en Macédoine
9 après qu'ils aient été chassés de force du Kosovo. Malheureusement, les
10 Macédoniens ne les ont pas laissés partir, donc ils ont continué à
11 s'amasser là dans la région. Il y en avait au total environ 25 000, je
12 pense, sur la taille de quatre terrains de foot.
13 Q. Quand vous dites qu'ils ont été chassés, selon vous qui les a chassés ?
14 R. Ça c'est l'une des photos que j'ai prises, mais je suis aussi allé sur
15 place parler aux gens sur place, et tout le monde m'a raconté la même
16 chose, à savoir qu'il y avait eu des rafles dans les maisons, qu'on leur
17 avait dit de faire leurs valises et qu'on les a emmenés à la gare
18 ferroviaire de Pristina où ils ont été mis sur des trains.
19 On leur a enlevé leurs papiers d'identité, ils ont été mis dans les
20 trains et on leur a demandé de marcher. Moi, c'est là que j'ai commencé à
21 les voir, j'ai commencé à voir ces gens qui marchaient en portant leurs
22 valises, ce qui rappelle tout à fait ce que vous avez vu pendant
23 l'Holocauste.
24 Q. Concernant le fait qu'on les a privés de leurs papiers d'identité,
25 avez-vous appris pourquoi est-ce que ces papiers leur avaient été enlevés ?
26 R. Tout le monde m'a dit exactement la même chose, à savoir que tout lien
27 avec le Kosovo devait disparaître pour qu'ils ne puissent pas rentrer.
28 Q. Merci, Monsieur.
Page 5290
1 Mme GOPALAN : [interprétation] J'aimerais que l'on verse cette pièce au
2 dossier.
3 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Tout à fait.
4 M. LE GREFFIER : [interprétation] Cote P00840.
5 Mme GOPALAN : [interprétation]
6 Q. Toujours sur cette question des papiers d'identité, j'aimerais que l'on
7 revienne au moment où vous êtes entré au Kosovo comme officier de l'OTAN en
8 juin 1999. Dans votre déposition dans la version anglaise, c'est la page
9 10, paragraphe 4, pour la version anglaise.
10 Vous faites une allusion aux officiers du MUP qui ont brûlé des dizaines de
11 milliers de documents dans une cour non loin d'un bâtiment du MUP. Vous
12 dites qu'il y a des officiers du MUP qui lançaient des documents par les
13 fenêtres. Est-ce que vous pourriez revenir là-dessus, nous expliquer ce que
14 vous avez vu ?
15 R. Lorsqu'on est arrivé au Kosovo, les QG avaient été installés sur la
16 route de Pristina qui mène à l'aéroport, et on voulait mettre en place une
17 commission de coopération en quelque sorte qui serait commandée par le
18 général Bailey dans l'un des bâtiments de la ville. Le bâtiment qui avait
19 été retenu n'était pas celui de la caserne de police du MUP, c'était juste
20 derrière, les QG du MUP étaient juste derrière.
21 On a emménagé dans ce bâtiment et la police vidait le bâtiment, elle
22 jetait des boîtes, des dossiers par les fenêtres, dans la cour, dans ce
23 petit creux qu'il y avait entre les deux bâtiments. Alors on a été intrigué
24 par cela parce que tout le bâtiment, du fait que ça brûlait, il y avait de
25 la fumée partout dans ce bâtiment, donc il était difficile de respirer.
26 Donc on est allé voir sur place ce qui se passait, et j'ai pris des
27 documents et je me suis rendu compte que c'étaient des papiers d'identité
28 de différents types.
Page 5291
1 Q. A qui appartenaient ces papiers d'identité ?
2 R. A des Albanais.
3 Q. Merci.
4 Mme GOPALAN : [interprétation] Pour information, la référence en B/C/S
5 c'est la dernière page avant la déclaration du témoin.
6 Monsieur le Président, j'aimerais vous mentionner une chose. Dans l'affaire
7 Milutinovic, le témoin avait annoté un document. Alors est-ce que je
8 pourrais verser un document avec les annotations qui ont été portées au
9 document, ou si vous préférez que l'on reprenne ce document vierge pour
10 ensuite que nous puissions l'annoter. Si je vous demande cela c'est pour
11 gagner du temps.
12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Ces annotations ont été faites pendant
13 la déposition lors d'un procès précédent ?
14 Mme GOPALAN : [interprétation] Oui, absolument. Ce sont des annotations qui
15 ont été faites dans la Chambre.
16 [La Chambre de première instance se concerte]
17 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Djurdjic.
18 M. DJURDJIC : [interprétation] Pour aider, je suis tout à fait d'accord
19 avec ce que dit Mme Gopalan, étant donné que le témoin a dit cela lors
20 d'une audience, ça a été versé comme pièce au dossier, comme élément de
21 preuve. Je pense que ça correspond avec la proposition que j'ai faite. Je
22 pense que toutes ces pièces devraient être admises dans notre affaire. Je
23 pense que si ça a été admis au compte rendu dans une autre affaire, ce
24 serait logique de le reprendre dans celle-ci et de leur redonner d'autres
25 cotes. Je pense que la Défense souhaiterait aussi que ça se passe de cette
26 manière.
27 [La Chambre de première instance se concerte]
28 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien. Les versions annotées
Page 5292
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
15 versions anglaise et française
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 5293
1 seront donc versées.
2 Mme GOPALAN : [interprétation] Très bien. J'aimerais que l'on fasse
3 apparaître à l'écran le 65 ter 05157.
4 Q. Je vais demander au témoin de nous expliquer ses annotations. Monsieur
5 le Témoin, cette photo que vous avez sous les yeux, est-ce que vous la
6 reconnaissez ?
7 R. Oui.
8 Q. Qu'est-ce que ça décrit ?
9 R. C'est une belle photo d'une voiture au Kosovo, mais à l'arrière on voit
10 qu'il y a des marques de fumée. Il y a des marques en haut à droite de la
11 photo qui montrent bien la fenêtre depuis laquelle on jette des documents.
12 On voit de la fumée qui s'élève à l'arrière-plan, il y a toujours ce feu
13 incandescent. La raison pour laquelle il y a ce véhicule c'est que je ne
14 voulais pas que le MUP me voie en train de prendre cette photo tout à fait
15 importante.
16 Q. Qu'en est-il des marques rouges que vous avez faites autour de la photo
17 ?
18 R. Ça montre bien l'ampleur du feu.
19 Q. Où sont ces documents que vous avez vus brûler ?
20 R. Juste derrière le véhicule, entre ces deux bâtiments, dans ce petit
21 creux.
22 Q. Quelle était la taille de cette pile de documents ?
23 R. Même taille que la voiture.
24 Q. Merci, Monsieur.
25 Mme GOPALAN : [interprétation] J'aimerais que l'on verse cette pièce au
26 dossier.
27 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien.
28 M. LE GREFFIER : [interprétation] Cote P00841.
Page 5294
1 Mme GOPALAN : [interprétation]
2 Q. Donc lorsque vous étiez à Pristina à l'époque, en juin 1999, qu'est-ce
3 que vous avez vu d'autre par rapport à ce que faisait la VJ ou les forces
4 du MUP ?
5 R. Ce n'était pas une surprise immense, mais je suis arrivé le jour où
6 l'OTAN est arrivé, et j'ai été là pendant les trois semaines. Il a fallu
7 plusieurs jours pour que la VJ et le MUP se retirent.
8 Le moral du personnel et des troupes serbes était au plus haut et ils
9 prenaient tout ce qu'ils trouvaient, tous les véhicules, et cetera. Tous
10 les véhicules étaient chargés de tous types de choses, de frigos, de télés,
11 de documents, et cetera, donc il y avait des convois sans fin un peu
12 partout de ce genre-là. Donc c'était un pillage qui avait pris une ampleur
13 tout à fait sans précédent.
14 Q. Où allaient-ils ?
15 R. Ils rentraient en Serbie.
16 Q. Pendant combien de temps avez-vous vu cela ?
17 R. Ça a duré pendant au moins cinq ou six jours.
18 Mme GOPALAN : [interprétation] Merci. Voilà, je n'ai plus d'autres
19 questions à vous poser pour l'heure, Monsieur.
20 Avant que l'on ne s'arrête, il y a une pièce qui a été annotée dans
21 l'affaire Milutinovic et j'aimerais la verser au dossier parce que je
22 voulais demander au témoin de l'annoter de nouveau.
23 C'est la pièce 05156, et dans l'affaire Milutinovic la cote c'était
24 T-8626.
25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Est-ce que vous voulez dire quelque
26 chose sur ces annotations ? Est-ce que le témoin souhaite dire quelque
27 chose ?
28 Mme GOPALAN : [interprétation] Je voudrais simplement verser cette pièce.
Page 5295
1 Je peux vous expliquer ces annotations, je peux la faire apparaître à
2 l'écran, cette pièce, et le témoin peut nous expliquer.
3 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Cette pièce est maintenant à l'écran.
4 Mme GOPALAN : [interprétation] Oui.
5 Q. Avant que je ne verse cette pièce, peut-être pourrait-on expliquer ces
6 annotations.
7 R. Oui. Tout à l'heure vous me posiez des questions sur Podujevo et vous
8 me demandiez ce qui allait se passer sur place du fait que les fermiers
9 serbes avaient été kidnappés par l'UCK.
10 La réunion que j'ai eue le matin avec le général Loncar et avec le
11 reste de la commission, à la fin de cette réunion on m'a dit que le
12 bataillon de cavalerie et de chars qui était marqué avec un X et avec le
13 cercle, X à l'intérieur, et qui est sur la base militaire, et qu'on avait
14 demandé aux différentes unités d'avoir recours à la force par tous les
15 moyens pour recapturer le fermier. C'est là que je me suis porté volontaire
16 pour faire sortir ce fermier si l'autorisation m'en était donnée.
17 En haut, les autres cercles que vous voyez, c'est la ville à l'ouest
18 de Podujevo, il y a trois cercles. Le petit cercle en bas à droite, c'est
19 la position de ce qu'on appelait la "colline des chars", c'est là qu'il y
20 avait des chars de la VJ. C'était sur une colline donc ça surplombait la
21 route, qui est la route principale d'approvisionnement en quelque sorte,
22 pour les autorités serbes, qui allait directement vers la Serbie. C'est là
23 que toutes les entrées et toutes les sorties du Kosovo se faisaient.
24 Le cercle un peu plus important est la zone d'activité où l'UCK
25 travaillait. En haut à gauche, ce cercle est un village au nom de Gornja
26 Lapastica où le fermier a finalement été trouvé où il était détenu.
27 Q. Très bien. Merci.
28 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien. Cette pièce peut être
Page 5296
1 versée.
2 M. LE GREFFIER : [interprétation] La cote est P00842.
3 Mme GOPALAN : [interprétation] Je n'ai plus d'autres questions.
4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] On pourrait continuer pendant une
5 douzaine de minutes avant la prochaine pause ou alors on peut faire notre
6 pause un peu tôt et reprendre un peu plus tôt, comme vous le préférez,
7 Maître Djurdjic ?
8 M. DJURDJIC : [interprétation] Je peux commencer tout de suite, mais si
9 vous souhaitez qu'on fasse d'abord la pause, je ne commencerais qu'après,
10 peut-être allons-nous faire la pause maintenant et puis ensuite on
11 reprendra.
12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Effectivement, je pense que d'un point
13 de vue pratique, il est plus facile de faire la pause maintenant. On
14 reprendra à 13 heures moins dix.
15 [Le témoin quitte la barre]
16 --- L'audience est suspendue à 12 heures 18.
17 --- L'audience est reprise à 12 heures 53.
18 [Le témoin vient à la barre]
19 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Djurdjic.
20 M. DJURDJIC : [aucune interprétation] Merci, Monsieur le Président.
21 Contre-interrogatoire par M. Djurdjic :
22 Q. [interprétation] Monsieur Ciaglinski. Est-ce que j'ai bien prononcé
23 votre nom ?
24 R. Oui, Ciaglinski.
25 Q. Je voulais vous poser un certain nombre de questions. Je fais partie de
26 l'équipe de la Défense. Je suis avec Mlle Marie O'Leary, qui fait partie
27 aussi des conseils de la Défense. J'aimerais vous poser un certain nombre
28 de questions.
Page 5297
1 Etant donné que nous ne parlons pas la même langue, j'aimerais que vous
2 attendiez la fin de l'interprétation avant de commencer à répondre à mes
3 questions et cela vaut évidemment pour moi aussi.
4 D'emblée, j'aimerais vérifier un certain nombre de points qui relèvent
5 peut-être de questions de traduction.
6 Mais tout d'abord, est-ce que je peux affirmer que vous n'avez pas été
7 témoin ou présent lors de la signature de l'accord entre Jovanovic et Clark
8 ?
9 R. Oui, c'est exact, je n'étais pas présent lors de la signature
10 personnellement.
11 Q. Merci. Deuxièmement, je pense qu'il y a peut-être eu une
12 incompréhension sur les dates de l'incident à Rugovo. Je pense que c'était
13 le 29 janvier 1999 plutôt que décembre 1998, est-ce exact ?
14 R. Je réfléchis, mais je pense que c'était assez proche de mon incident le
15 15 décembre. Mais je dois dire que là je ne dispose pas de mes documents
16 donc je ne peux pas vous répondre comme ça. Mais je crois que l'on sait
17 tous de quel incident nous parlons en tout cas.
18 Q. Merci. Je vais vous montrer des documents et on en reparlera. Autre
19 chose, vous avez dit que n'étiez pas à Rogovo. Toutefois, l'interprétation
20 que j'ai reçue disait qu'il y avait 300 obus qui ont été tirés sur les
21 minivans; est-ce que vous voulez dire 300 balles ? Qu'avez-vous dit plus
22 précisément, est-ce que vous pourriez revenir là-dessus ?
23 R. Oui, c'étaient des balles.
24 Q. Merci. Monsieur Ciaglinski, à la lecture de votre déclaration que vous
25 avez fournie dans le cadre de cette procédure, j'aimerais revenir sur
26 quelques points. Votre formation de base, c'était dans quel domaine ?
27 R. En mathématiques.
28 Q. Merci. Quand avez-vous terminé cette formation ?
Page 5298
1 R. Dans les années '70, si j'ai bonne mémoire.
2 Q. Merci. Une fois que vous avez terminé votre diplôme de mathématiques,
3 est-ce que vous avez été embauché quelque part ?
4 R. Oui, absolument, parce que j'ai fait un diplôme de mathématiques et
5 d'enseignement, donc j'ai travaillé pendant un an dans une école où j'ai
6 enseigné les mathématiques avant de rejoindre les rangs de l'armée.
7 Q. Merci. Dans votre déposition, je lis aussi qu'en 1974 vous vous êtes
8 inscrit à l'académie de Sandhurst, j'espère ne pas trop écorcher le nom de
9 cette académie, et vous y êtes resté jusqu'en 1975.
10 R. Oui, c'est exact.
11 Q. Ce n'était pas une académie purement militaire au Royaume-Uni d'après
12 ce que je crois savoir. Est-ce que vous pourriez nous expliquer comment
13 est-ce qu'on peut être diplômé d'une académie en un an seulement ?
14 R. C'est assez simple. Ce qui se passe dans l'armée britannique, c'est que
15 l'armée britannique accepte des diplômés, des gens qui ont déjà une
16 licence, qui ont déjà passé trois ou quatre ans à l'université à se creuser
17 les méninges et ces gens-là peuvent passer une année à Sandhurst pour
18 recevoir une formation purement militaire.
19 Suite à Sandhurst, avant de rejoindre une unité, vous suivez une
20 formation dans le train, l'ingénierie, l'infanterie, et que sais-je, ça
21 c'est pendant les quelques années après que vous ayez reçu votre diplôme.
22 Mais visiblement ça fonctionne. En tout cas, c'est comme ça que fonctionne
23 l'armée anglaise.
24 Q. Je n'ai aucun doute sur le fait que l'armée anglaise fonctionne, mais
25 dans quoi vous êtes-vous spécialisé ? Quelle était votre spécialité pendant
26 cette année de formation ?
27 R. Vous voulez parler de mon année à Sandhurst ? On fait tous la même
28 chose. Tous les élèves de Sandhurst sont des élèves militaires. Au moment
Page 5299
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
15 versions anglaise et française
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 5300
1 où on quitte Sandhurst, on est tout à fait habilité à gérer une compagnie,
2 donc on peut commander une compagnie d'environ 120, 130 personnes. Mais au
3 moment où vous quittez Sandhurst, on ne vous donne pas une compagnie
4 entière, mais on vous donne simplement une section.
5 Q. Merci. Je vois dans votre déclaration qu'en mai 1975, vous avez terminé
6 vos études et je suppose que c'est à ce moment-là que vous avez eu cette
7 section. Quel était votre grade au bout de la première année à l'académie ?
8 R. Deuxième lieutenant.
9 Q. Merci. Est-ce que vous pourriez me dire de quelle manière vous avez
10 continué à avancer dans le service militaire ?
11 R. Compte tenu de ma formation précédente, j'ai continué à être actif dans
12 le domaine de la formation. J'étais moniteur au sein de l'armée, donc
13 j'avais plusieurs postes liés à la formation au sein de l'armée, mais
14 j'étais toujours attaché au type différent d'unité. Pendant les trois
15 premières années, je commandais une section dans une unité d'infanterie.
16 Par la suite, j'ai été aux unités de génie militaire à Hong Kong, puis j'ai
17 été avec les Gurkhas responsables de toutes sortes de choses, surtout le
18 travail sur la frontière, le renvoi des immigrants clandestins de bateaux
19 chinois et vietnamiens, le fait de les capturer lorsqu'ils venaient.
20 J'ai fait plusieurs collèges dans le cadre du collège de l'état-
21 major, donc il y avait des formations de l'état-major au cours de ma
22 carrière. J'ai eu une maîtrise pendant que j'étais dans l'armée, ça a duré
23 un an dans le cadre de la formation. Par la suite, j'ai été envoyé en
24 Pologne en tant qu'attaché militaire dans le cadre du personnel de
25 l'ambassade.
26 J'ai eu un mandat en Bulgarie en tant qu'attaché de la défense aussi.
27 Donc ma carrière variait et je peux dire que j'ai travaillé dans le cadre
28 de la formation pour ce qui est des chars, de l'aviation et d'autres
Page 5301
1 équipements, donc j'ai de bonnes connaissances concernant tous les aspects
2 militaires et leur fonctionnement.
3 Q. Merci. Vous m'avez dit beaucoup de chose, mais vous n'avez pas répondu
4 à ma question. Vous travailliez avec les soldats, mais qu'est-ce que vous
5 leur enseigniez ? Quel est le type de formation que vous transmettiez aux
6 soldats ?
7 R. Bien, pendant que j'étais avec les unités d'infanterie, je formais ma
8 propre section dans le domaine des combats de guerre. C'était pendant trois
9 ans.
10 Après, au fur et à mesure que je progressais, j'étais responsable de
11 la formation, de la conception de la formation, de toutes sortes de chose
12 liées aux militaires, que ce soit la formation des pilotes d'hélicoptère ou
13 des commandants de char ou des systèmes de simulation et d'entraînement
14 afin de permettre aux gens de s'entraîner.
15 A un moment donné, j'ai été le responsable de l'équipe des
16 conseillers qui étaient responsables de toutes les formations au sein de
17 l'armée. En Allemagne, j'étais responsable de la formation qui portait sur
18 la formation de guerres et toutes les capacités requises pour la
19 planification et l'organisation de l'entraînement et de la formation des
20 troupes.
21 Q. Merci. Dans votre déclaration, vous avez dit que votre carrière était
22 centrée sur le soutien aux systèmes d'entraînement et activités de
23 renseignements. Ces activités de renseignements, est-ce qu'elles étaient
24 liées à l'entraînement ou à votre travail dans le cadre de l'armée
25 britannique ? Je veux parler de la période avant que vous ne deveniez
26 attaché.
27 R. Dans une partie de mon travail, par exemple, à Hong Kong, j'ai été
28 l'officier de renseignements de l'unité. A Berlin, pendant un certain
Page 5302
1 temps, j'étais actif dans le cadre du travail de renseignements. Berlin
2 était occupé, donc nous avions les Russes et les autres là-bas et mon
3 travail impliquait le travail de renseignements à Berlin aussi. Par la
4 suite, comme vous le dites, je suis devenu un attaché de la défense, ce qui
5 correspond à l'art du recueil des informations.
6 Q. Merci. En 1998, je vois que vous avez été affecté à l'état-major
7 britannique pour le soutien à Rhinedahalen, si j'ai bien prononcé. Est-ce
8 que vous pouvez m'expliquer, donc c'est un endroit en Allemagne, mais est-
9 ce que vous pouvez m'expliquer de quel type de travail et d'unité il
10 s'agissait ?
11 R. Rhinedahalen est la base de deux groupements. D'un côté, le commandant
12 de soutien du Royaume-Uni, son commandement, j'en faisais partie, et son
13 travail était de fournir le soutien à la 1ère Division blindée. On était
14 responsable de la conception de la sécurité et de l'entraînement des forces
15 de cette division.
16 Et l'autre unité à Rhinedahalen était le quartier général du Corps de
17 réaction rapide des forces alliées et le chef était le général Mike
18 Jackson.
19 Q. Excusez-moi, mais ces forces à la tête desquelles se trouvait le
20 général Mike Jackson, les forces de réaction rapide, est-ce qu'elles
21 étaient des unités britanniques ou de l'OTAN ?
22 R. L'unité du général Jackson était une unité de l'OTAN.
23 Q. Donc en 1998, vous étiez dans une unité de l'OTAN ?
24 R. Non, je faisais partie du groupe du commandement de soutien du Royaume-
25 Uni, donc nous étions dans la même base, mais nos fonctions étaient
26 différentes.
27 Q. Excusez-moi, je ne vous ai pas bien compris tout à l'heure.
28 Vous dites que vous avez vu un concours, si j'ai bien compris, pour le
Page 5303
1 poste du vérificateur au sein du groupe britannique. S'agit-il d'un
2 concours public ou est-ce que vous vous êtes présenté suite à la
3 recommandation de quelqu'un ? Comment est-ce que vous avez répondu à cette
4 candidature pour le poste au sein de la MVK
5 R. Voici comment les choses fonctionnaient. Lorsque le gouvernement
6 britannique a décidé d'envoyer un contingent à l'OSCE, en fait c'était le
7 ministère des Affaires extérieures qui a demandé du personnel, et le
8 ministère de la Défense devait fournir un certain nombre de militaires de
9 service, car les employés du ministère des Affaires extérieures recrutaient
10 aussi un certain nombre d'officiers retraités.
11 Donc le ministère de la Défense décidait du nombre de personnes qui
12 devaient y aller, quel était leur nombre et leur envoyait des signes, des
13 messages aux commandements différents en disant, On a besoin d'un certain
14 nombre de personnes et de tel grade de votre unité pour aller au Kosovo. Et
15 j'étais de permanence cette nuit-là lorsque le signal est arrivé par le
16 biais d'un document écrit disant qu'il fallait envoyer un lieutenant-
17 colonel au Kosovo.
18 Plutôt que de donner ça à quelqu'un d'autre, j'ai parlé avec mon chef
19 et il a dit, Oui, je pense que tu es la bonne personne, tu peux te porter
20 volontaire si tu le souhaites. Personnellement, je ne devais pas être
21 sélectionné moi-même, mais il y avait un certain nombre de personnes,
22 probablement à Rhinedahalen, qui auraient pu aimer aller à cette mission.
23 Peut-être comme il était tard dans la nuit, on m'a donné la chance de se
24 faire.
25 Ca s'est passé à ce moment-là, donc nos noms ont été soumis au
26 ministère de la Défense et au ministère des Affaires extérieures et ils ont
27 envoyé les noms à Vienne. L'OSCE a essayé de trouver quelles personnes
28 étaient les plus compétentes pour les envoyer au Kosovo.
Page 5304
1 Q. Merci. Peut-être je vous ai mal compris. Vous étiez lieutenant-
2 colonel à l'époque ?
3 R. Oui. Pardon, j'attends les interprètes. Effectivement, j'étais
4 lieutenant-colonel.
5 Q. Merci. Et en 1998, en Allemagne, à Rhinedahalen, est-ce que vous avez
6 travaillé dans le cadre de cette unité du renseignement ?
7 R. Non.
8 Q. Merci. S'agissant du groupe que vous avez évoqué, 115 Britanniques ont
9 été sélectionnés pour la mission de la vérification de l'OSCE. Est-ce que
10 vous pourriez me dire, parmi ces 115 personnes, combien y avait-il de
11 militaires professionnels ou retraités ?
12 R. Je pense que la majorité était des officiers d'active et probablement
13 juste une poignée d'officiers retraités.
14 Q. Merci. Compte tenu du fait que vous étiez haut placé dans la hiérarchie
15 de la mission à Pristina, est-ce que vous pourriez me dire si vous savez
16 combien de personnes y avait-il des Etats-Unis dans la mission de
17 vérification, approximativement ?
18 R. C'est difficile de dire, parce qu'ils restaient entre eux-mêmes même
19 quand ils faisaient partie de la KDOM. Je ne sais pas. Je pense qu'ils
20 étaient moins nombreux que nous, donc pas plus qu'une centaine.
21 Q. Merci. Quand je dis "mission", je ne fais pas référence à ces membres
22 des armées britanniques ou autres qui étaient rattachés à la KDOM. Je fais
23 plutôt référence à ceux qui sont venus directement au Kosovo dans le cadre
24 de la MVK. Savez-vous combien de Français étaient membres de la MVK ?
25 R. Je pense qu'il y a un problème, là. Vous savez, les Français, les
26 Américains, les Britanniques ont tous envoyé des personnes qui avaient été
27 sélectionnées afin de faire partie de cette mission de vérification. Une
28 partie de ce contingent qui avait été sélectionné pour composer la mission
Page 5305
1 de vérification a été envoyé au Kosovo comme membre de la KDOM, parce qu'il
2 voulait être présent sur le terrain immédiatement. La Grande-Bretagne a
3 immédiatement envoyé une dizaine de personnes, puis plus tard 80 personnes
4 sont arrivées à Brezovica. Ensuite, quelques semaines plus tard, tous ces
5 115 sont devenus membres de la MVK. Ceux qui se trouvaient auparavant dans
6 les rangs de la KDOM ont été transférés à la MVK
7 dire combien ils étaient, les Français; peut-être entre 50 et 100.
8 Vous savez, il doit y avoir quelque part une information écrite
9 portant sur le nombre exact, sur les effectifs exacts de cette mission au
10 Kosovo.
11 Q. Oui, vous avez raison. Nous avons des informations portant sur les
12 effectifs, mais il n'y a aucune référence à leur nationalité. C'est pour ça
13 que je vous pose ces questions-là.
14 Savez-vous, par contre, combien d'Italiens y avait-il au sein de la
15 MVK ?
16 R. Ecoutez, je ne peux que répondre la même chose à chaque fois. Je ne
17 connais pas les effectifs exacts de chaque nation. Il faudrait que je
18 trouve ces informations dans des documents que je n'ai pas ici, mais je
19 sais qu'ils existent. Alors il y avait des Italiens, des Russes, des
20 Polonais, et je pense que quasiment toutes ces nations étaient
21 représentées, tous les pays membres de l'OSCE.
22 Q. Oui, c'est exact, mais c'est pour une autre raison que j'aimerais
23 savoir quel est le nombre de personnes envoyées par chacun de ces Etats.
24 Encore une dernière question à ce sujet-là : la République fédérale
25 d'Allemagne, combien de vérificateurs a-t-elle fournis ?
26 R. Je crois à peu près le même nombre que ceux que je viens de mentionner.
27 Q. Merci. N'avez-vous pas l'impression que le plus grand nombre de
28 vérificateurs étaient venus des pays membres de l'OTAN ?
Page 5306
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
15 versions anglaise et française
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 5307
1 R. C'est possible et il doit y avoir une raison si c'est ainsi. Mais je
2 dois vous dire qu'il y avait là-bas un certain nombre de Russes, alors que
3 la Russie n'est pas membre de l'OTAN.
4 Mais vous savez, la raison pour cela est toute simple. L'OTAN dispose
5 des procédures de déploiement rapides qui sont déjà mises en place et qui
6 permettent aux Etats membres de l'OTAN d'envoyer très, très rapidement 100
7 ou 200 personnes en mission; des Américains, des Italiens, des Allemands,
8 des soldats professionnels, des soldats de carrière.
9 Il y avait d'autres nations membres de l'OSCE qui n'avaient pas cette
10 possibilité, et au lieu de fournir les militaires, ils fournissaient des
11 civils pour d'autres types de missions. Je trouve qu'il est beaucoup plus
12 difficile de choisir des civils à envoyer dans une zone de combat que des
13 militaires, parce qu'ils n'ont pas très envie d'y aller tout d'abord, et
14 deuxièmement, ils ne disposent pas de savoirs leur permettant de survivre
15 dans des zones de combat. Vous savez, nous n'avions aucune idée sur les
16 logements, sur les événements sur le terrain, sur les conditions de
17 sécurité. Vous ne pouvez pas envoyer quelqu'un, un jeune homme ou une jeune
18 femme sortant de l'université, sans aucune idée sur la manière de se
19 comporter sur le terrain lui permettant de survivre et d'éviter les
20 incidents. C'est pour cette raison-là que je pense que c'était surtout les
21 pays membres de l'OTAN qui envoyaient autant de vérificateurs.
22 Q. Je suis d'accord avec vous, mais en fin de compte c'est une question de
23 sélection, et tout dépend de la personne qui effectue la sélection. Qui
24 est-ce qui décide à la fin ? Enfin, combien de personnes de quels pays
25 deviendraient membres de cette mission ?
26 R. Je ne sais pas. Je n'y étais pas. Vous devez le demander au général DZ
27 quand il viendra. Je pense que tout le processus de planification et de la
28 création de cette mission a été effectué à Vienne. Vous savez, j'imagine
Page 5308
1 qu'on a demandé à tous les pays de dire combien de personnes ils pourraient
2 fournir, que chacun a dit, Voilà, je peux fournir autant, et cetera, et
3 cetera. On aurait dit, Non, ça ne suffit pas. Il nous en faut plus. Voilà,
4 c'est la manière habituelle dont les choses se passent, et je pense que
5 cela a dû se passer ainsi également en ce qui concerne le Kosovo.
6 Q. Bien. Du point de vue légal, si j'ai bien compris, vous avez signé un
7 contrat avec l'OSCE pour travailler dans la mission ?
8 R. Ecoutez, j'essaie de m'en souvenir. Oui, certainement que nous avons dû
9 signer des documents conformément aux règlements portant sur la santé et
10 sur la sécurité des membres de l'OSCE. Mais je ne me souviens pas s'il y a
11 eu un contrat proprement parlant. Il y a peut-être eu un contrat dans le
12 tas de documents et des papiers que j'ai dû signer en me préparant pour
13 cette mission. Mais si vous souhaitez, je peux essayer de retrouver un
14 contrat, si je l'ai jamais eu. Mais je ne me souviens pas de cela.
15 Q. Bien.
16 Mais votre expérience de combat avant d'être parti au Kosovo, quelle
17 était votre expérience ?
18 R. Avant le Kosovo, l'armée britannique avait très peu d'expérience
19 directe au combat, à l'exception de l'Irlande du nord et des Malouines.
20 J'étais membre de l'état-major de l'armée en Irlande, donc mon expérience
21 au combat n'était pas très importante.
22 Q. Merci. Dites-moi, s'il vous plaît, êtes-vous par ceci, en commençant à
23 travailler pour l'OSCE, est-ce que vous êtes devenu fonctionnaire
24 international ou êtes-vous resté membre de l'armée britannique ?
25 R. Nous avons été détachés auprès de l'OSCE, incorporés dans la chaîne du
26 commandement de l'OSCE, ce qui signifie que je recevais des ordres de
27 l'OSCE, et j'étais responsable devant l'OSCE, mais mon salaire était payé
28 par le ministère de la Défense et j'étais toujours membre de l'armée
Page 5309
1 britannique.
2 Q. Merci. Dites-moi quelle était la relation entre l'OSCE et l'OTAN durant
3 votre mission de vérificateur ?
4 R. Je dois dire que je n'ai aucune connexion personnelle avec l'OTAN. Mais
5 parce que je me suis trouvé sur place alors que le général DZ était au
6 téléphone avec Wesley Clark, et qu'il arrivait que quelque chose de grave
7 se passait au Kosovo et que l'OTAN l'apprend et qu'ils téléphonent au
8 général DZ pour obtenir davantage d'informations, j'avais des informations
9 par ce biais-là. Mais il n'y avait aucune relation de subordination entre
10 l'OTAN et l'OSCE.
11 La seule chose qui existait c'était quelque chose qu'on appelait la
12 force d'extraction de la MVK. C'était une unité militaire commandée par un
13 général, le général David Montgomery, dont la mission était si jamais le
14 pire arrivait au Kosovo, d'aider à évacuer en toute sécurité les membres de
15 la MVK. C'est donc eux, ils faisaient partie de l'OTAN, et nous étions en
16 contact avec eux.
17 Nous avions également une unité des forces de l'air de l'OTAN, mais
18 cela faisait partie de l'accord. C'était en fait une unité qui était
19 chargée de la surveillance aérienne.
20 Q. Bien. Merci. En fait, ce qui m'intéresse c'est plutôt de quelle manière
21 se déroulait l'échange des informations de l'OSCE et de l'OTAN, ou plus
22 précisément de la MVK et de l'OTAN. Bien sûr, ce que vous venez de dire,
23 c'est très intéressant. Comme vous le dites, il n'y a pas eu besoin
24 d'intervenir, et heureusement que c'était ainsi, même si je ne sais pas
25 s'ils auraient eu beaucoup de succès, le cas échéant.
26 R. Ecoutez, je dois redire ce que j'ai déjà dit, c'est que si
27 communication a eu lieu, elle a eu lieu au plus haut échelon, entre les
28 plus hauts officiers de l'OTAN et l'OSCE. Du côté de l'OSCE, c'est le
Page 5310
1 général DZ, et du côté de l'OTAN, c'était Wesley Clark et quelques autres,
2 mais je ne peux pas vous dire de quoi ils parlaient.
3 Q. Bien sûr que vous ne pouvez pas me dire, me transmettre la teneur de
4 leur communication. Ce qui m'intéresse, c'est la communication officielle
5 entre ces deux parties, et non pas leur communication personnelle ou
6 privée. A plusieurs reprises, je me suis rendu compte du fait que vous
7 deviez être très souvent en état de préparation maximum. Vous deviez
8 attendre des instructions. Je me demandais si tout cela était le résultat
9 des communications entre l'OTAN et l'OSCE ?
10 R. Je ne suis pas sûr tout à fait de ce que vous voulez dire. Est-ce que
11 vous voulez dire que j'étais en stand-by, qu'est-ce que cela signifie et
12 quel est le rapport entre ceci et l'échange officiel des informations à un
13 niveau plus élevé entre l'OSCE à Vienne. J'imagine que c'est le siège de
14 l'OSCE à Vienne qui distribuait aux Etats membres les rapports, les
15 informations. Il me paraît évident que l'OTAN les recevait également.
16 Alors s'agissant des Britanniques, je pense que c'est le colonel DZ
17 qui rédigeait un rapport à chaque nuit qu'il envoyait à Vienne. Parfois, il
18 rédigeait un rapport à l'attention du ministère de la Défense qui portait
19 principalement sur ce qui nous concernait, nous les militaires britanniques
20 sous son commandement.
21 Q. Merci. Et cela signifie que des membres de la mission communiquaient
22 également avec leur pays, les autorités de leur pays qui les ont envoyés.
23 R. Oui, c'était la procédure normale pour une mission de ce type, pour
24 toutes les missions.
25 Q. Ecoutez-moi, je n'ai aucune expérience en la matière, mais je pensais
26 que les employés internationaux travaillaient pour l'organisation qui les
27 employait, mais peut-être que je me trompe.
28 Une question : lorsque vous avez rejoint cette mission de vérification de
Page 5311
1 l'OSCE, est-ce que vous avez été nommé à un poste en particulier, ou est-ce
2 que quelqu'un d'autre a décidé de ce que vous deviez faire ?
3 R. Au départ, il voulait me charger de la formation de tous les
4 vérificateurs qui venaient à Brezovica, mais il y a un certain nombre
5 d'Italiens qui occupaient déjà ces postes-là, donc ils voulaient garder
6 leur emploi, donc DZ m'a fait passé au QG parce qu'il me connaissait.
7 Q. Merci. J'étais un peu surpris en lisant toutes ces dépositions, non
8 seulement la vôtre, mais d'autres aussi. J'ai été surpris par les
9 fonctions. Avant Brezovica, est-ce que vous aviez été formé ? En dehors de
10 Brezovica, est-ce que vous aviez été préparé à cette mission de
11 vérification ?
12 R. Oui. Tout d'abord, comme je l'ai dit, l'armée britannique dispose d'un
13 personnel qui est formé à un niveau relativement élevé, donc la plupart des
14 fonctions d'une mission internationale pouvaient être effectuées sans
15 formation complémentaire. Mais étant donné que c'était une mission dans une
16 zone nouvelle, on a reçu une formation qui a duré plusieurs jours, on nous
17 a donné toutes les informations, la toile de fond sur la guerre, sur
18 l'histoire du Kosovo, Kosovo Polje, et cetera. On nous a parlé de la
19 langue, la façon dont les choses fonctionnaient dans cette région. Ensuite,
20 on a eu une formation médicale. On a été formé pour faire attention aux
21 mines, sensibiliser aux mines, former aux questions de communication,
22 d'évacuation. Ça, c'est des choses qu'on nous a apprises avant d'aller à
23 Brezovica. Ensuite, à Brezovica, on a reçu une formation complémentaire.
24 Q. Merci. La seule chose qui m'intéresse c'est les informations que vous
25 avez reçues concernant cette guerre. Quel type d'informations vous a-t-on
26 données sur la guerre au cours de cette formation ?
27 R. Comme je vous l'ai dit, on nous a donné l'historique, ce qui s'était
28 passé, les blessés, les personnels impliqués, les équipements, les raisons,
Page 5312
1 les niveaux de destruction, voilà, ce genre d'information.
2 Q. J'aimerais que vous m'expliquiez dans le détail ce que vous entendez
3 par là. De quel type d'information disposiez-vous quand vous êtes arrivé au
4 Kosovo ? Quel type d'information avez-vous reçu, entendu en Grande-Bretagne
5 sur ce qui se passait concernant les destructions, ce qui se passait sur le
6 terrain, et cetera ?
7 R. Pour autant que je me souvienne, je crois qu'on nous a montré beaucoup
8 de photos et de vidéos, les images qu'ont pris les journalistes du Kosovo à
9 l'époque. Il y a aussi des gens qui venaient, qui rentraient du Kosovo,
10 donc on avait des Albanais du Kosovo qui sont venus nous voir aussi.
11 Q. Est-ce que vous pourriez m'en dire un peu plus sur les informations que
12 vous avez pu tirer des médias et des journaux. Vous avez parlé d'images
13 vidéo, de films, quel était le format de ces informations ?
14 R. Naturellement, c'est ça.
15 Q. Quel type de communication aviez-vous avec les médias, les agences de
16 presse étrangères venant d'Allemagne, des Etats-Unis, de Grande-Bretagne ou
17 d'ailleurs ?
18 R. Pouvez-vous préciser. Est-ce que vous voulez dire pendant la formation
19 ou une fois qu'on est arrivé sur place au Kosovo ?
20 Q. Lorsque vous êtes arrivé sur place au Kosovo ?
21 R. Ecoutez, je pense que la communication marchait bien avec la presse. On
22 a organisé quelques interviews avec la presse américaine et britannique. On
23 avait aussi notre bureau de presse à Pristina, avec un équilibre qu'on
24 essayait de préserver entre les Serbes et les Albanais.
25 Q. Non. Je ne voulais pas dire des conférences de presse. Ce que je
26 voulais dire, c'était sur le partage d'informations. Est-ce qu'il était
27 normal que les représentants des médias soient utilisés comme sources
28 d'informations ?
Page 5313
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
15 versions anglaise et française
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 5314
1 R. On avait notre propre section chargée de la presse et de l'information,
2 notre propre porte-parole pour faire des déclarations. Mais si la presse
3 venait sur le terrain, elle parlait aux vérificateurs régulièrement,
4 c'était facile, on n'empêchait pas nos membres de parler à la presse parce
5 qu'on n'avait rien à cacher.
6 Q. Comment savez-vous que les journalistes disent la vérité ?
7 R. Je n'ai pas dit que les journalistes disaient la vérité, j'ai dit que
8 les membres de l'équipe, en général, disaient la vérité.
9 Q. Pardonnez-moi. J'ai mal compris ce que vous avez voulu dire. Mais Batam
10 Hadjiu [phon] par exemple, c'était un journaliste, n'est-ce pas ?
11 R. Je ne le connais pas.
12 Q. Merci. J'aimerais maintenant revenir à ce qu'on disait sur
13 l'information qu'on avait sur les Albanais du Kosovo. Est-ce que vous avez
14 reçu des informations de Yougoslavie parce qu'à l'époque, c'était toujours
15 la Yougoslavie quand tout cela se passait au
16 Kosovo ?
17 R. Evidemment. On obtenait des informations du ministère des Affaires
18 étrangères et on essayait d'obtenir une version équilibrée des choses
19 venant des deux parties, mais on avait non seulement des Albanais qui
20 venaient nous voir, mais aussi des Serbes.
21 Q. Monsieur Ciaglinski, je faisais allusion à votre réponse concernant la
22 formation. Vous avez dit que vous aviez parlé aux Albanais du Kosovo, vous
23 n'avez pas parlé de membres d'une autre communauté ethnique de Yougoslavie,
24 mais vous venez d'en parler maintenant.
25 Alors quel était votre titre officiel lorsque vous êtes passé de
26 Brezovica à Pristina ?
27 R. Très vite, je suis devenu le responsable de la vérification des armes.
28 Q. Merci. C'était dans le cadre de l'équipe d'opération, c'est ça, de la
Page 5315
1 MVK; c'est ça ? Mais outre lorsque vous dites vérification d'armes,
2 j'imagine que ça faisait partie de l'état-major du général DZ. Est-ce qu'il
3 y avait d'autres adjoints pour d'autres zones en dehors de vous ?
4 R. Oui, évidemment. Il y avait le département opérations qui était le plus
5 important de tous les départements à l'époque et il y avait un certain
6 nombre d'adjoints. Il y avait, par exemple, celui qui était chargé de la
7 cellule fusion, cellule information, c'était un élément-clé. On avait un
8 responsable des opérations, DZ était responsable des opérations.
9 J'étais en charge de la vérification au Kosovo et j'écrivais des
10 instructions là-dessus, donc si on nous envoyait une vérification
11 centralisée planifiée pour le Kosovo, je m'occupais de la planification; je
12 faisais partie de l'équipe des planificateurs. C'était quelque chose de
13 très coordonné, de très intégré au niveau du QG pour qu'on sache bien ce
14 que chacun faisait.
15 Q. Au niveau auquel vous étiez et au poste que vous occupiez, est-ce qu'il
16 y avait quelqu'un d'autre du MUP ou de l'UCK qui n'était pas officier de
17 liaison ?
18 R. Que voulez-vous dire par "responsable de l'UCK". Je ne comprends pas.
19 Q. Vous nous dites que vous aviez comme responsabilité la vérification des
20 armes, de l'équipement, du matériel, et je dirais que c'est le domaine
21 militaire dans lequel vous travailliez, vous étiez l'adjoint de DZ pour
22 l'armée de Yougoslavie. Parallèlement, est-ce qu'il y avait quelqu'un
23 d'autre qui couvrait le MUP, d'après ce que vous nous avez dit dans vos
24 dépositions, est-ce qu'il y avait quelqu'un qui couvrait l'UCK ?
25 R. Oui, évidemment qu'il y avait quelqu'un. Ce qui se passait c'est qu'on
26 avait une section en charge des relations avec le MUP. On n'avait pas une
27 section pour l'UCK, mais on avait une liaison avec l'UCK, avec quelqu'un
28 qui leur parlait; il fallait bien que quelqu'un leur parle. Je faisais de
Page 5316
1 la vérification, je faisais aussi de la liaison parallèlement avec la
2 commission serbe, donc j'étais le lien, à mon niveau. A des niveaux plus
3 élevés, ils ne participaient pas forcément aux discussions à moins qu'il ne
4 se passe quelque chose de très grave ou que vraiment les choses avaient mal
5 tourné.
6 J'essaie de réfléchir, mais il y avait probablement aussi des
7 policiers dans cette mission. Je pense que si l'on conjugue l'aspect
8 police, l'aspect militaire, les éléments de DZ, il y avait des gens qui se
9 parlaient.
10 Je sais qu'il y avait un policier suédois et aussi un colonel
11 américain à la retraite qui s'appelait Guy Sands qui s'occupait de la
12 liaison avec le MUP la plupart du temps.
13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Djurdjic, je suppose que vous
14 avez encore des questions.
15 M. DJURDJIC : [interprétation] Oui.
16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Ecoutez, je me devais d'essayer.
17 Nous allons reprendre notre travail mardi prochain, et je crois que
18 l'audience commencera à deux heures et quart. Je suis désolé pour ça.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Le seul problème, c'est que si ça se prolonge
20 beaucoup la semaine prochaine je pourrais avoir des problèmes parce que
21 j'ai des engagements.
22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] On finira mardi de toute manière
23 même si je dois recourir à des moyens illicites.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.
25 --- L'audience est levée à 13 heures 47 et reprendra le mardi 2 juin 2009,
26 à 14 heures 15.
27
28