Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le jeudi 20 août 2009

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 29.

  5   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour. Je souhaite vous présenter

  6   mes excuses parce que ce matin, nous commençons en retard.

  7   [Le témoin vient à la barre]

  8   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour. Nous vous présentons nos

  9   excuses d'avoir commencé nos travaux en retard. Je vous rappelle que la

 10   déclaration solennelle que vous avez faite est toujours en vigueur.

 11   A vous, Monsieur Hannis.

 12   M. HANNIS : [interprétation] Merci, Messieurs les Juges.

 13   LE TÉMOIN : MILAN DJAKOVIC [Reprise]

 14   [Le témoin répond par l'interprète]

 15   Nouvel interrogatoire par M. Hannis : [Suite]

 16   Q.  [interprétation] Bonjour, Général.

 17   R.  Bonjour.

 18   Q.  Ce matin, j'aimerais vous poser quelques autres questions sur la prise

 19   de notes et sur les réunions ou les séances du commandement conjoint

 20   auxquelles vous avez assisté au cours de 1998. Mardi dernier, à la page du

 21   compte rendu d'audience 8 012, et hier à la page 2 [comme interprété] du

 22   compte rendu d'audience, vous avez déclaré que pendant que vous consigniez

 23   des notes, vous releviez "uniquement les détails et les faits qui, d'après

 24   mon sentiment, étaient utiles à mon commandement pour évaluer les effectifs

 25   terroristes siptar."

 26   Mais vous avez également consigné d'autres notes concernant les propos émis

 27   par les participants à ces réunions. Nous avons plusieurs civils qui

 28   s'expriment sur des sujets qui ne concernent pas uniquement les effectifs

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  1   des forces terroristes. Vous en souvenez-vous ou souhaitez-vous que nous

  2   examinions quelques exemples ?

  3   R.  Je m'en souviens. Plusieurs sujets supplémentaires ont effectivement

  4   été abordés, ceci concernant notamment la protection de la population, la

  5   fourniture des vivres, l'aide à apporter aux citoyens d'ethnicités

  6   albanaise et serbe concernant les vivres et tous les problèmes qui

  7   survenaient du jour au jour; et c'est quelque chose sur quoi s'exprimait

  8   notamment M. Andjelkovic.

  9   Quant aux autres participants, ils prenaient la parole en fonction de leur

 10   propre jugement au moment où ils sentaient qu'ils pouvaient ajouter ou

 11   apporter une contribution à la discussion. Donc effectivement, il n'était

 12   pas question uniquement des forces siptar terroristes et des problèmes de

 13   sécurité, mais plusieurs autres sujets étaient également abordés.

 14   Q.  Lors d'un échange que vous avez eu avec Me Djurdjic concernant ce sujet

 15   de façon générale, c'était mardi, page du compte rendu d'audience 8 012 et

 16   suivantes, lorsque Me Djurdjic vous a demandé si on pouvait affirmer

 17   qu'aucune note n'ait émané d'une décision qui aurait été prise par le

 18   commandement conjoint, vous avez répondu qu'il était possible effectivement

 19   de l'affirmer, aucune décision, aucun ordre émis par le commandement joint

 20   n'est relevé dans vos notes.

 21   J'aimerais vous poser quelques questions concernant la réunion organisée le

 22   27 juillet. Le procès-verbal de cette réunion fait partie de la pièce à

 23   conviction 886, page 15 en version albanaise aussi bien qu'en version

 24   B/C/S. Me Djurdjic vous a parlé de cette réunion, c'est la réunion à

 25   laquelle a assisté le général Samardzic et il a été question d'un plan à

 26   élaborer. A la page 15, la dernière personne à prendre la parole au cours

 27   de cette réunion, d'après vos notes, est M. Minic, et il déclare, je cite :

 28   "Poursuivre le plan à 7 heures du matin conformément à l'accord conclu."

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  1   Vous souvenez-vous de ces propos émis par M. Minic ?

  2   R.  Je me souviens de ces propos de M. Minic, le commandant de l'armée

  3   était parmi les participants, il a annoncé qu'il fallait procéder à la

  4   réalisation du plan et à la fin des débats. M. Minic n'a fait que réitérer

  5   la décision déjà émise par le commandant de l'armée puisque la décision

  6   d'engager des forces avait été prise par le commandant de l'armée, non pas

  7   par un civil. Donc M. Minic n'a fait que répéter ce qui avait déjà été dit,

  8   donc je ne sais pas s'il souhaitait aborder le sujet du point de vue du MUP

  9   ou d'une autre institution, mais toujours est-il que c'était le commandant

 10   de l'armée qui avait adopté la décision de commencer à exécuter le plan à 7

 11   heures du matin.

 12   Q.  Très bien. Permettez-moi à présent de vous poser quelques autres

 13   questions.

 14   M. HANNIS : [interprétation] Penchons-nous sur la page 84 en version

 15   anglaise, qui correspond à la page 86 en version B/C/S.

 16   Q.  Ce document se réfère à la réunion tenue le 10 septembre 1998.

 17   M. HANNIS : [interprétation] Il va falloir retourner à l'envers la version

 18   B/C/S.

 19   Q.  En bas de cette page, on voit que M. Minic prend la parole, et dans la

 20   traduction anglaise il déclare, entre autres :

 21   "Se rendre dans les villages de Dubovik et Radovic pour évaluer la

 22   situation actuelle. Se rendre dans le village Prapacan avec la VJ, et

 23   ordonner à la police de reprendre le village." Maintenant je saute un

 24   point, puis je poursuis : "Se rendre dans tous les villages et exercer la

 25   pression pour que les habitants rendent les armes. Assurer la sécurité des

 26   routes et du territoire. L'armée adoptera un plan concernant le déploiement

 27   sur le territoire lundi. Le MUP devrait agir de même."

 28   Vous souvenez-vous de ces propos émis par M. Minic ?

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  1   R.  C'était le sens général des propos qu'il avait proférés. Je ne suis pas

  2   en mesure de me souvenir de chaque mot en particulier, mais c'était de

  3   façon générale ce qu'il avait voulu dire. Pour ce qui est du rassemblement

  4   des armes, il s'agissait d'une action qui était déjà en cours à l'époque et

  5   avait été déclenchée à l'initiative du commandement, mais aussi à

  6   l'initiative des citoyens d'ethnicité albanaise qui, à cette époque-là, dès

  7   le mois de septembre, souhaitaient rendre des armes. Mais ce qui est arrivé

  8   également c'est que les citoyens rendent une petite quantité d'armes en

  9   gardant pour eux toutes les armes plus sophistiquées, plus modernes. Après

 10   avoir eu un certain nombre d'échanges, nous avons compris qu'ils ne

 11   rendaient une quantité d'armes que pour induire en erreur l'armée et le MUP

 12   et leur faire croire qu'ils avaient effectivement rendu toutes les armes.

 13   Mais il arrivait aussi que les citoyens d'ethnicité albanaise rendent

 14   toutes leurs armes, y compris les mitrailleuses et les mortiers, et chaque

 15   fois que nous recevions de leur part les mortiers et les mitrailleuses,

 16   nous nous rendions compte qu'ils étaient en note.

 17   Q.  Permettez-moi de vous interrompre, Général. Je vous demande tout

 18   simplement si vous vous souvenez de ces propos proférés par M. Minic qui,

 19   de prime abord, semblent plutôt relever d'une décision, d'un ordre, d'une

 20   instruction. Donc vous souvenez-vous de ces propos proférés par lui ?

 21   R.  Oui, c'est ce que j'ai consigné dans mes notes, et c'était bien le sens

 22   de son discours.

 23   Q.  Lorsque vous avez fourni une réponse à Me Djurdjic mardi concernant ce

 24   sujet -- en fait, laissez-moi vous poser la question suivante : pensez-vous

 25   que les termes "décision" et "ordre" dans le sens technique et militaire

 26   ont une signification officielle, donc est-ce que lorsque vous dites

 27   "décision" ou "ordre" vous pensez à un document officiel rédigé dans un

 28   certain format conformément à un certain règlement ? Et c'est la raison

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  1   pour laquelle vous affirmez que personne au sein du commandement conjoint

  2   n'a jamais émis d'ordre ou de décision ? Comprenez-vous ma question ?

  3   R.  Oui, j'ai compris. Et oui, effectivement, c'est la manière dont

  4   j'interprète ce terme. Donc, il n'y a pas eu de décision, mais je ne nie

  5   pas le fait que plusieurs individus ont déclenché des initiatives, mais

  6   cela ne change pas le fait que le commandant de l'armée et le chef de

  7   l'état-major du MUP avaient un devoir d'exécuter tout ceci. En fait, ces

  8   initiatives, c'est quelque chose qu'ils devaient prendre en compte au

  9   moment où ils émettaient des décisions à part entière.

 10   Q.  Les opinions exprimées par M. Minic - et dans ce texte nous pouvons

 11   retrouver plusieurs déclarations semblables faites par M. Sainovic, M.

 12   Makovic - si j'ai bien compris votre propos, ces opinions exprimées n'ont

 13   pas un caractère obligatoire, mais elles comportent un certain poids ? Le

 14   fait que M. Minic ou Sainovic disent : Allons là-bas, faisons ceci, est-ce

 15   que cela avait un certain poids aux yeux des autres participants à la

 16   réunion ?

 17   R.  Si, par l'exemple, l'un des participants civils à la réunion insistait

 18   sur une question donnée, le général Pavkovic avait le devoir de présenter

 19   ce problème au général de l'armée. Ensuite, le général de l'armée prenait

 20   la décision qui intégrait ou non l'opinion exprimée par l'un des civils. Il

 21   arrivait que le commandant adopte entièrement l'opinion exprimée par les

 22   civils. Il arrivait que ces opinions soient rejetées entièrement par lui,

 23   ou qu'il les accepte partiellement. Ceci était particulièrement le cas

 24   lorsque les opinions exprimées par les civils se rapportaient à l'armée et

 25   à son déploiement.

 26   Q.  Très bien. Qu'en est-il de l'utilisation des forces du MUP ? Est-ce que

 27   les choses se passaient de la même manière ou le MUP ajoutait-il davantage

 28   de poids aux propos éventuellement exprimés par M. Sainovic et M. Minic

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  1   concernant, par exemple, les instructions, est-ce que le MUP ressentait ces

  2   propos comme une instruction, un ordre ou une décision ? Le savez-vous ?

  3   R.  C'est quelque chose que je ne saurais affirmer, mais puisque l'armée

  4   fournissait l'appui au MUP, il était nécessaire pour nous d'informer le MUP

  5   de nos déploiements. C'était alors au commandant du MUP de prendre une

  6   décision quant à l'engagement des forces là où l'armée fournissait son

  7   appui. Mais en tout cas, ce qui était interdit complètement, c'est que

  8   l'armée soit déployée sans que les unités du MUP prennent part à l'action

  9   également.

 10   Q.  J'aimerais vous présenter deux autres ou trois autres documents.

 11   D'abord, page -- ou plutôt, deux ou trois autres paragraphes.

 12   M. HANNIS : [interprétation] Page 120, version anglaise. Page 123 en

 13   version B/C/S.

 14   Q.  Il s'agit de la réunion du 5 octobre 1998. Mais laissez-moi vous poser

 15   d'abord la question suivante : à quel moment avez-vous arrêté de consigner

 16   les notes pour -- à quel moment votre subordonné Tesevic a-t-il pris la

 17   relève ?

 18   R.  Je crois que c'était vers le 20. J'ai consigné des notes pendant cinq

 19   ou six réunions, et je pense que c'est vers le 20 qu'il a pris ma relève,

 20   le 20 octobre.

 21   Q.  Donc, lors de la réunion du 5 octobre, c'est vous qui preniez des

 22   notes, et ce qui est indiqué ici, c'est que M. Sainovic a déclaré :

 23   "Nous devrions commencer nos opérations en organisant d'abord des actions

 24   de moindre envergure."

 25   Puis il dit :

 26   "Il faut éliminer immédiatement tous les dirigeants dès que nous disposons

 27   des informations suffisamment amples. Il faut tout faire pour éliminer des

 28   individus importants."

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  1   Savez-vous de quoi il parlait dans ce passage-là ?

  2   R.  Je me souviens de ces propos. Certains individus qui faisaient partie

  3   du commandement de l'UCK ont été isolés par la sécurité publique et la

  4   Sûreté d'Etat comme les principaux perpétreurs de crimes et comme les

  5   dirigeants de l'insurrection terroriste au Kosovo. Il s'agissait

  6   particulièrement de Ramush Haradinaj. Lors de cette réunion, ils n'ont pas

  7   été cités nommément, mais de façon générale ces propos se référaient aux

  8   dirigeants terroristes. Lors des réunions précédentes, les représentants de

  9   la Sûreté de l'Etat avaient signalé qu'ils étaient sur le point

 10   d'identifier un certain nombre de dirigeants terroristes, et s'ils

 11   n'arrivaient pas à les capturer, le mieux serait de les éliminer au cours

 12   des combats. Donc, une fois que le général Pavkovic a présenté les

 13   informations concernant les armes rendues dans les villages, M. Sainovic a

 14   repris ce problème qui avait déjà été invoqué par les organes de la Sûreté

 15   de l'Etat. Son objectif, ce faisant, était probablement d'insister sur ce

 16   problème crucial, à savoir celui d'isoler les terroristes du reste de la

 17   population, parce que si ceci avait été fait avec succès, il aurait été

 18   plus facile de communiquer avec la population civile, et il aurait été plus

 19   facile pour elle de reprendre le cours de la vie normale et de rentrer chez

 20   eux. Donc, c'est le souvenir que j'ai gardé de ces propos lors de ces

 21   réunions pendant lesquelles j'ai pris des notes.

 22   M. HANNIS : [interprétation] Passons maintenant à la page suivante, page

 23   121 en version anglaise, qui correspond à la page 123 [comme interprété] en

 24   version B/C/S.

 25   Q.  Lors de cette même réunion, M. Sainovic s'exprime de nouveau vers le

 26   bas de la page; il y a trois tirets. Tiret 3 :

 27   "Les agents de la Sûreté de l'Etat doivent éliminer un certain nombre

 28   d'individus."

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  1   L'acronyme utilisé ici est celui de DB, et cela se réfère à la Sûreté de

  2   l'Etat, n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Dans votre réponse précédente, vous avez suggéré qu'il fallait éliminer

  5   ces individus au cours des combats, mais ici le mot "combat" n'est pas

  6   utilisé. On dit "il faut les éliminer," sans préciser comment.

  7   Je vois que M. Djurdjic s'est levé.

  8   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Djurdjic, à vous.

  9   M. DJURDJIC : [interprétation] Dans la première partie de sa question, M.

 10   Hannis s'est permis de déduire des conclusions qui ne sont pas valables, à

 11   mon sens, mais il s'est repris dans la deuxième partie de sa question, donc

 12   je n'ai plus d'objections à soulever.

 13   M. HANNIS : [interprétation]

 14   Q.  Général, souhaitez-vous que je répète ma question ?

 15   R.  Non, ce n'est pas la peine; je l'ai bien comprise. Oui, j'ai mentionné

 16   les actions de combat, mais ce qui est consigné dans les notes n'exclut pas

 17   le recours aux unités de combat. Par exemple, le commandement de Sultan a

 18   fait objet d'une attaque à Ovcarevo. Donc, des unités militaires se sont

 19   emparées d'Ovcarevo, alors que les organes de la Sûreté de l'Etat n'ont pas

 20   participé à cette action. Par ailleurs, c'est la tâche qui incombe aux

 21   organes de la Sûreté de l'Etat, et aux organes de la sécurité militaire de

 22   suivre les activités de terroristes. Ici, lors de l'arrestation, les

 23   terroristes offrent de la résistance. Ils ont le droit de réagir. C'est

 24   dans ce sens-là que M. Sainovic présente des observations qui se situent

 25   dans la même ligne que les commentaires précédents de MM. Radovic et

 26   Markovic. Tout simplement, ceux qui l'ont constaté qu'il arrivait qu'au

 27   cours de combats, des terroristes soient éliminés.

 28   Je me souviens, M. Radovic me l'a dit, au cours des combats, un

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  1   Siptar a été éliminé parce que les Albanais avaient appris que c'était un

  2   agent de la Sûreté de l'Etat. M. Radovic s'est rendu compte qu'il avait

  3   également dévoilé un certain nombre d'informations aux terroristes albanais

  4   également, et ces informations concernaient des charniers à Klecka, au nord

  5   de Dulje. C'est là qu'on a retrouvé les restes humains; et d'après les

  6   connaissances que j'ai eues à l'époque, il s'agissait des restes humains de

  7   victimes serbes.

  8   Q.  Permettez-moi de vous interrompre.

  9   M. HANNIS : [interprétation] Messieurs les Juges, j'aimerais procéder de

 10   manière suivante, si le conseil de la Défense ne soulève pas d'objection et

 11   si cela vous convient, plutôt que d'étudier chaque passage pertinent,

 12   j'aimerais tout simplement énumérer un certain nombre de pages où les

 13   différents participants à la réunion fournissent ce qui me semble relever

 14   d'une décision, d'un ordre ou d'une instruction. Si cela vous convient,

 15   j'aimerais procéder ainsi. Donc, j'aimerais simplement répertorier les

 16   pages où cela me semble être le cas.

 17   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Djurdjic, à vous.

 18   M. DJURDJIC : [interprétation] Je n'ai aucune objection. Je fais confiance

 19   à M. Hannis et aux citations qu'il a répertoriées. La seule condition,

 20   c'est qu'il n'en abuse pas.

 21   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] M. Djurdjic est indifférent, n'a pas

 22   d'opinion arrêtée à ce sujet.

 23   Vous pouvez poursuivre.

 24   M. HANNIS : [interprétation] De semblables passages peuvent être trouvés à

 25   la page 130 dans la version anglaise, réunion du 13 octobre, propos de M.

 26   Sainovic. Page 128, version anglaise, réunion du 11 octobre, propos de M.

 27   Sainovic à deux reprises. A la page 125, version anglaise, réunion du 8

 28   octobre, propos de M. Sainovic. Réunion du 7 octobre, page 124 en version

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  1   anglaise, c'est M. Sainovic qui s'exprime de nouveau. Page 112, version

  2   anglaise, réunion du 26 septembre, M. Sainovic prend la parole. Page 113,

  3   réunion du 29 septembre, M. Minic est la personne qui s'exprime. Réunion du

  4   22 septembre 1998, page 108, M. Sainovic prend la parole. Et, finalement,

  5   nous avons, je crois, une réunion au mois d'août que j'aimerais vous

  6   signaler. Réunion du 1er août, page 27, version anglaise, c'est M. Matkovic

  7   qui prend la parole.

  8   Q.  Général, j'aimerais que nous approfondissions un petit peu le type de

  9   relation qui existait entre le commandement conjoint et la VJ. J'aimerais

 10   que nous nous penchions sur la pièce P1229 dont vous avez déjà fait état

 11   dans votre déposition.

 12   M. HANNIS : [interprétation] J'ai un exemplaire imprimé de ce document, et

 13   je demande l'assistance de Mme l'Huissière pour vous le remettre. Il s'agit

 14   d'un document de deux pages.

 15   Q.  Le document date du 29 septembre 1998. Il a été rédigé et envoyé par le

 16   général Pavkovic à la 3e Armée, au commandant en mains propres. Le document

 17   porte le titre "La mise en œuvre de la cinquième étape du plan." Vous avez

 18   déjà examiné ce document, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Passons au paragraphe 4 dans ce document …

 21   M. HANNIS : [interprétation] …qui se trouve à la page 2 en version

 22   anglaise.

 23   Q.  Avez-vous trouvé ce passage ? Dans ma traduction anglaise, le texte est

 24   indiqué comme suit :

 25   "Lors d'une réunion du commandement conjoint pour le Kosovo-Metohija du 10

 26   septembre 1998." Il y a un sigle qui est utilisé ici, ZK. J'imagine que ZK

 27   se réfère à "Zajednicka Komanda," à savoir le commandement conjoint ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  "…lors de cette réunion, pendant qu'il a été question de la mise en

  2   œuvre de la cinquième étape du plan, les autres organes du commandement

  3   conjoint ont remarqué que la VJ n'avait pas exécuté deux obligations qui

  4   lui avaient été imparties par le plan, à savoir elle n'a pas établi des

  5   unités d'intervention rapide par hélicoptère, comme l'avait ordonné le

  6   président du RSFY lors de la réunion du 31 août 1998; et deuxièmement, deux

  7   groupes de combat n'ont pas été envoyés au Kosovo-Metohija."

  8   Avez-vous vu ce document en 1998 ? Saviez-vous que le général Pavkovic

  9   l'avait écrit au général Samardzic ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Vous souvenez-vous qu'il était question de ce sujet lors de la réunion

 12   du commandement conjoint le 10 septembre ?

 13   R.  Oui, je m'en souviens.

 14   Q.  J'aimerais vous poser la question suivante. Dans ce paragraphe, le

 15   général Pavkovic indique, et je cite :

 16   "Les autres organes de commandement au sein du commandement conjoint ont

 17   signalé que la VJ n'a pas exécuté ses tâches."

 18   Je comprends que le MUP pouvait être l'autre organe du commandement, mais

 19   ce que nous avons ici, c'est un terme utilisé au pluriel. Alors, ce qui

 20   m'intéresse, c'est de savoir qui sont ces autres organes du commandement ?

 21   Hormis la VJ et le MUP, qui participait aux réunions du commandement

 22   conjoint ?

 23   R.  Au cours de ma déposition cette année et l'année dernière aussi, j'ai

 24   toujours présenté l'hypothèse suivante : à mon sens, il n'y avait que deux

 25   organes de commandement; l'état-major du MUP et le commandement de la VJ.

 26   C'étaient les seuls organes qui avaient l'autorité de commander et de

 27   coordonner le travail conformément aux décisions du commandant de l'armée.

 28   Je n'ai jamais nié le fait que les représentants du gouvernement fédéral et

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  1   de la République de Serbie ont assisté à ces réunions. Vous avez déjà

  2   relevé les quatre civils qui assistaient le plus souvent aux réunions du

  3   commandement conjoint.

  4   Alors, quels sont les organes auxquels se référait le général

  5   Pavkovic dans ce passage particulier, je ne saurais vous le préciser. Mais

  6   ce que je sais, c'est que le seul organe de commandement, hormis la VJ,

  7   était l'état-major du MUP. Il se peut, quand même, qu'il ait pensé

  8   également aux représentants civils du gouvernement fédéral et du

  9   gouvernement de la République de Serbie, parce que dans ces documents, le

 10   général Pavkovic se réfère parfois à ces termes du commandement conjoint.

 11   Mais la seule chose que je peux affirmer de nouveau, c'est que le

 12   commandement conjoint n'adoptait pas de décisions. Ces décisions étaient

 13   prises à Belgrade, et ce qu'ils faisaient, c'est qu'ils informaient le

 14   président Milosevic de la situation actuelle pour que celui-ci adopte des

 15   décisions définitives concernant le déploiement des forces pour faire

 16   suivre ses décisions au chef de l'état-major général de la VJ et au chef de

 17   l'état-major du MUP.

 18   Je suis sûr que ces organes avaient une attitude correcte vis-à-vis des

 19   organes du commandement du MUP et de la VJ. Ils n'insistaient jamais pour

 20   qu'un certain nombre de choses soient exécutées. Mais les opinions que ces

 21   civils fournissaient avaient un certain poids aux yeux du commandant, et

 22   grâce à ces opinions ont présenté un certain nombre de problèmes au

 23   commandant.

 24   Q.  Très bien. Cette influence qui est exercée relevait en partie de la

 25   relation qu'il entretenait avec le président Milosevic; c'est bien ça que

 26   vous avez voulu dire ? C'est leur lien avec le président Milosevic qui

 27   accordait un poids à leurs propos ?

 28   R.  Je n'ai jamais vraiment approfondi ce sujet. Je ne sais pourquoi leurs

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  1   propos exerçaient un impact. Mon sentiment c'est que ces gens-là avaient

  2   adopté une attitude correcte, qu'ils entretenaient des relations avec le

  3   président, qu'il s'agisse de contacts personnels ou autres. Je sais qu'ils

  4   se rendaient à Belgrade, et quel était le sujet du débat qu'ils avaient eu

  5   avec le président, je ne saurais l'affirmer.

  6   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous n'avons pas entendu votre

  7   réponse. Est-ce que vous pourriez répéter ce que vous venez de dire,

  8   Général.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais essayer de répéter. Je sais que les

 10   messieurs qui participaient au gouvernement de la Serbie et aux autorités

 11   de la RFY étaient sporadiquement en contact avec le président Milosevic, et

 12   qu'ils avaient des contacts avec lui à Belgrade. Quant à la teneur de leurs

 13   conversations, cela je l'ignore.

 14   M. HANNIS : [interprétation]

 15   Q.  Merci. Une chose encore concernant ce document, vers le bas de la page,

 16   tout de suite en dessous de la mention "nous proposons." Le général

 17   Pavkovic dit :

 18   "De plus, nous donnons l'occasion aux membres du commandement conjoint pour

 19   le Kosovo-Metohija l'occasion d'adresser un rapport au président de la RFY

 20   faisant état que la VJ n'a pas accompli ses missions conformément au plan."

 21   Savez-vous pourquoi le général Pavkovic a ajouté cette mention dans ce

 22   document adressé au général Samardzic ?

 23   R.  Le général Pavkovic fait savoir au commandant de l'armée que lui aussi

 24   était présent lors de la réunion auprès du président lorsqu'il a été

 25   débattu de ce problème. Il lui rappelle le fait qu'il y a eu ce problème

 26   relatif à la formation d'unités héliportées et au fait d'amener deux

 27   groupes de combat au Kosovo avait été approuvé par le président Milosevic,

 28   et que cela n'a pas été fait. En fait il informe par écrit le commandant de

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  1   l'armée de ce problème, et il demande aux membres du commandement conjoint

  2   d'en avertir.

  3   Alors, qu'est-ce que cela représentait ? Nous savons qu'à Belgrade auprès

  4   du président Milosevic tous étaient présents. C'était un commandement qui

  5   mettait en commun toutes les ressources, c'est une forme d'état-major - je

  6   ne sais pas comment ils désignaient cette structure dans les procès-verbaux

  7   qu'ils tenaient - mais tous les membres qui se trouvaient au Kosovo se

  8   trouvaient faire partie également de ce commandement chargé de formuler des

  9   suggestions à l'attention du président. Ce n'est qu'un titre temporaire

 10   dans le temps qu'ils sont dépêchés au Kosovo en tant que personnalités qui

 11   se trouveront sur plan et qui à partir du terrain feront état d'un certain

 12   nombre d'informations au président, informations sur la base desquelles ce

 13   dernier prendra des décisions de nature politique, car ici nous --

 14   S'il avait été ordonné de neutraliser toutes les forces siptar se trouvant

 15   au Kosovo, je pense que l'armée en aurait terminé avec ces tâches en 8 à 10

 16   [comme interprété] jours.

 17   Q.  Merci, Général. Je voudrais que vous vous reportiez à un autre document

 18   à présent.

 19   M. HANNIS : [interprétation] C'est la pièce D212. C'est juste une page me

 20   semble-t-il, vous pouvez la consulter sur votre écran.

 21   Q.  Cela porte la date du 5 octobre 1998. Je vois ce qui semble être vos

 22   initiales dans le coin inférieur gauche. Est-ce que c'est un document que

 23   vous avez rédigé vous-même ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Nous avons ici Pavkovic qui s'adresse au général Samardzic, au point 2,

 26   il dit :

 27   "Le plan visant à écraser les forces qui opèrent un sabotage sur le

 28   territoire du Kosovo-Metohija approuvé par le président de la RFY

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  1   mentionnait et stipulait que lorsque ces forces opérant des actions de

  2   sabotage sur le territoire du Kosovo auront été écrasées par le MUP et la

  3   VJ, des forces d'intervention rapides devront être formées et se trouver

  4   prêtes au combat, incluant l'intervention d'hélicoptères MI-8 afin

  5   d'intervenir dans les zones menacées conformément aux ordres du président.

  6   "A mon retour de la session d'information avec le commandement conjoint

  7   pour le Kosovo en date des 19 et 20 septembre 1998, je vous ai

  8   personnellement informé par téléphone de cette décision portant formation

  9   de forces d'intervention rapide."

 10   Quand il parle ici de cette décision visant à former ces forces, il parle

 11   d'une décision du commandement conjoint, n'est-ce pas ?

 12   R.  Il parle de M. Milosevic et de la décision de ce dernier à l'échelon de

 13   l'Etat. Ce n'était pas une décision du commandement conjoint. C'est un

 14   processus qui a été initié par certains des membres de ce commandement

 15   conjoint, peut-être le général Pavkovic en faisait-il partie, je ne sais

 16   pas quelles étaient exactement ces personnes. C'était cela l'origine de

 17   cette décision visant à former des forces d'intervention rapide, c'était

 18   une proposition qui a été soumise au président en se fondant sur cette

 19   réunion, et le rapport a été émis par le général Pavkovic au nom de l'armée

 20   et par quelqu'un d'autre au nom du MUP, mais c'est alors que le président a

 21   décidé que des forces d'intervention rapide devaient être créées, et cela

 22   supposait que si jamais un problème apparaissait soudainement à un endroit

 23   précis il fallait éviter des mouvements supplémentaires de forces du MUP et

 24   plutôt recourir à un transport par hélicoptère, transport rapide pour

 25   transporter les forces d'intervention rapide sur les lieux aussi rapidement

 26   que possible afin de ne pas avoir à engager des effectifs plus importants.

 27   Q.  Très bien. La phrase suivante dit :

 28   "Au titre des conclusions du commandement conjoint pour le Kosovo lors de

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  1   sa réunion, je vous envoie la décision portant formation des forces

  2   d'intervention rapides…"

  3   De quelle décision parlait-il ici, et de quelles conclusions prises par le

  4   commandement conjoint, si vous le savez ?

  5   R.  J'ignore de quoi il parle ici précisément, car pour l'essentiel il me

  6   dictait le contenu et corrections à apporter. Je consignais cela, mais lui

  7   procédait à des corrections, bien que l'essentiel de ces documents aient

  8   été rédigés par moi.

  9   Q.  Très bien. Reportons-nous dans ce cas-là à cette réunion du 20

 10   septembre du commandement conjoint.

 11   M. HANNIS : [interprétation] C'est la pièce P886. Page 105 en version

 12   anglaise et page 109 en version B/C/S.

 13   Q.  Vous voyez que cela correspond à la réunion qui s'est tenue le 20

 14   septembre, mais je voudrais que nous passions au dernier point de cette

 15   réunion qui se trouve en fait en page 117 [comme interprété] de la version

 16   B/C/S, ce qui correspond à la page 106 de la version anglaise. La personne

 17   qui parle est M. Sainovic, dans la version anglaise on voit qu'il dit, je

 18   cite :

 19   "Préparer et entraîner les unités d'intervention rapide. Former des groupes

 20   et ensuite ? Demander à l'armée de l'air d'envoyer des hélicoptères et

 21   ensuite -- "

 22   Jeudi est rayé, il est dit vendredi.

 23   "Les commandements des unités héliportées doivent se réunir à 10

 24   heures ainsi que les officiers de l'armée en charge des opérations."

 25   Cela semble être la seule référence écrite à ces hélicoptères et aux

 26   unités d'intervention lors de cette réunion, et c'est M. Sainovic qui fait

 27   ces commentaires en guise de conclusion de cette réunion ?

 28   Est-ce que ce à quoi se réfère le général Pavkovic dans cette

Page 8134

  1   information adressée au général Samardzic correspond à ce que nous venons

  2   de voir à l'instant ?

  3   R.  Oui, je comprends de quoi vous voulez parler. Mais en me fondant sur ce

  4   que moi je peux estimer, je n'exclus pas la possibilité que M. Sainovic se

  5   soit adressé au président Milosevic. Je dis que je n'exclus pas cette

  6   possibilité car il fait ici état d'un certain nombre de détails pour

  7   lesquels il est possible qu'il les ait reçus directement du président en

  8   s'entretenant avec lui au sujet de ces unités d'information. Je ne pense

  9   pas que M. Sainovic ait pris des décisions seul.

 10   Il avait l'habitude soit de se rendre à Belgrade pour avoir des

 11   contacts directs avec le président, et je n'exclus pas, encore une fois, la

 12   possibilité que le président lui ait donné des tâches et des obligations

 13   plus concrètes à cet égard afin que cela soit présenté au général Samardzic

 14   et pour qu'il prenne une décision conformément à ses compétences pour

 15   l'information et l'engagement de ces forces. Probablement Sainovic n'a-t-il

 16   pas le droit, ni la compétence, ni jamais essayé de donner quelque ordre

 17   que ce soit aux généraux Samardzic ou Pavkovic. Mais il est probable que ce

 18   soit par l'intermédiaire du président Milosevic qu'il faisait état de ses

 19   positions et de ses opinions concernant la formation de ces unités au

 20   Kosovo.

 21   Q.  Merci. Je pense que j'en ai fini avec les notes prises lors des

 22   réunions du commandement conjoint. J'aimerais vous poser quelques questions

 23   au sujet d'un document qui vous a été présenté hier. C'est la pièce D324.

 24  Si vous pouvez vous reporter juste à l'écran. Cela porte la date du 1er août

 25   1998, cela émane du général Pavkovic, et le document est adressé à la 3e

 26   Armée. C'est une demande d'approbation pour le lancement de la première

 27   étape du plan.

 28   Ma question concerne le document en lui-même. Nous semblons avoir ici la

Page 8135

  1   signature du général Pavkovic ainsi qu'un cachet, mais il n'y a rien

  2   d'autre. Si nous pensons à ce que nous voyons souvent dans les documents de

  3   la VJ, à savoir des initiales qui sont celles de l'auteur, il n'y a pas

  4   d'information concernant la remise des documents. Aucun cachet ou tampon

  5   des archives que nous voyons par ailleurs souvent dans les documents qui

  6   émanent des archives de la VJ. Rien de tout ne figure dans ce document.

  7   Est-ce inhabituel, à votre avis ? Pouvez-vous nous formuler un commentaire

  8   à ce sujet ?

  9   R.  Il n'y a rien ici d'inhabituel car concernant ces activités autour

 10   d'Ovcarevo, j'ai déjà dit ce que je pouvais en dire. Cela suivait les

 11   activités et les événements autour d'Ovcarevo et Likovac. Ici c'est une

 12   requête qui a été adressée au poste de commandement avancé de la 3e Armée;

 13   concrètement c'est le général Pavkovic qui s'adresse au poste de

 14   commandement avancé à Pristina, poste de commandement de la 3e Armée. Est-

 15   ce que cela a été remis en mains propres, mais ensuite il n'y a pas eu de

 16   cachet apposé, je ne sais pas. Mais c'est certainement la signature de M.

 17   Pavkovic, et le numéro 880 confirme également que le document a bien été

 18   rédigé et adressé au poste de commandement avancé de la 3e Armée.

 19   Maintenant, est-ce que cela a bien été remis et consigné comme tel par la

 20   3e Armée, je ne sais pas. Si vous vous rappelez, ce document du 18 avril

 21   concernait le général Djordjevic, qui lui a été présenté. Ce n'est que le

 22   jour suivant que le général Pavkovic a remis ce document au service

 23   concerné pour qu'il soit enregistré, alors il a pu se produire également

 24   que par erreur ce document soit resté auprès de lui et qu'il n'ait pas été

 25   transmis, par erreur encore une fois.

 26   Q.  Merci. Il semble qu'hier on vous a posé les questions suivantes, M.

 27   Djurdjic vous a interrogé en fait concernant la question de savoir qui

 28   était à la tête des unités du MUP au Kosovo en 1998 et en 1999, et vous

Page 8136

  1   avez répondu concernant 1998 le général Lukic et l'état-major du MUP.

  2   Savez-vous pourquoi les généraux Djordjevic et Stevanovic étaient présents

  3   lors des réunions du commandement conjoint en 1998 ?

  4   R.  Il m'est difficile de répondre à cette question de façon directe. Mais

  5   je peux dire quelles sont mes impressions, en revanche, concernant leur

  6   participation sur le terrain au Kosovo.

  7   Q.  Si vous ne pouvez pas, ce n'est pas grave. Je vais vous poser ma

  8   question suivante : savez-vous qui, au sein du MUP, avait la responsabilité

  9   d'envoyer des unités de la PJP en provenance d'autres parties du territoire

 10   vers le Kosovo, et ce, en 1998 et 1999 ? Savez-vous qui aurait pu être

 11   cette personne ?

 12   R.  En me fondant sur ce que j'ai pu entendre du général Pavkovic, c'était

 13   exclusivement du ministre de l'Intérieur qui avait cette compétence, Vlajko

 14   Stojiljkovic.

 15   Q.  C'était en 1998 ou en 1999 ou les deux années ?

 16   R.  Je suppose que oui, car en 1998, le ministre de l'Intérieur était

 17   présent en tant qu'officiel du plus haut rang du MUP. Sans sa présence, on

 18   n'aurait pas pu envoyer des effectifs du MUP au Kosovo. En aucun cas cela

 19   n'aurait été possible sans qu'il le décide.

 20   Q.  Vous avez répondu lorsqu'on vous a demandé si vous avez vu le général

 21   Djordjevic au Kosovo après le mois d'octobre 1998. Vous avez répondu que

 22   vous pensiez ne l'avoir vu qu'une seule fois lors d'une réunion autour du

 23   18 ou du 19 avril. Qu'en est-il du général Lukic ? L'aviez-vous vu au

 24   Kosovo en 1999, et si oui, à combien de reprises ?

 25   R.  Je n'allais pas aux réunions. Il est exact que le 18 avril, j'ai vu MM.

 26   Djordjevic, Lukic et Obrad Stevanovic. Pour ce qui concerne Lukic, je

 27   savais qu'il était présent sur place; je le savais sur la base de

 28   conversations avec d'autres personnes, car moi je ne me rendais plus à

Page 8137

  1   aucune réunion de coordination en 1999. Pour ce qui concerne Obrad, je

  2   l'ignore. Pour M. Djordjevic, c'est la même chose. Je ne sais pas et je ne

  3   l'ai pas vu, ni lui, ni Obrad Stevanovic, ni je n'ai entendu dire qu'ils

  4   soient venus sur place.

  5   En dehors, bien sûr du fait que dans le cadre des préparatifs qu'on m'a

  6   demandé d'accomplir, on m'a demandé donc pour le 1er juin, en dehors du

  7  récolement, j'ai été interrogé aussi le 1er juin, mais c'est une information

  8   qui n'est pas de première main.

  9   Q.  Très bien. Alors, passons, s'il vous plaît au document D340 qui vous a

 10   été présenté par M. Djurdjic hier. J'ai un exemplaire papier pour vous, car

 11   il y a là plusieurs pages.

 12   Si Mme l'Huissière pouvait nous assister, s'il vous plaît. C'est donc la

 13   pièce D340.

 14   Q.  C'est la date du 2 octobre 1998, analyse des tâches exécutées sur le

 15   territoire du Kosovo-Metohija par la 3e Armée. Donc, vous rappelez-vous

 16   avoir déjà examiné ce document précédemment ?

 17   R.  Oui. J'en ai pris connaissance. Je l'ai lu.

 18   M. HANNIS : [interprétation] Très bien. Pouvons-nous passer à la page 4 de

 19   la version anglaise. C'est la page 3 en version B/C/S. Pour vous, Général,

 20   c'est le point numéro 3.

 21   Q.  Il aborde les expériences et les enseignements que l'on peut tirer.

 22   Donc, les expériences qualifiées de positives. Voyez-vous le premier tiret

 23   ? Ma traduction anglaise dit, je cite :

 24   "La distribution d'armes aux citoyens loyaux à la RFY," et ensuite entre

 25   parenthèses il est indiqué "appartenant aux groupes ethniques serbes et

 26   monténégrins, fin des parenthèses, a rendu possible une action de

 27   résistance de grande ampleur contre les terroristes et a permis son

 28   organisation."

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  1   Donc, est-ce exact que seuls les citoyens serbes et monténégrins se

  2   trouvant au Kosovo, se sont vus fournir des armes en 1998 ?

  3   R.  En 1998 et 1999, tous les citoyens, à part ceux appartenant au groupe

  4   ethnique albanais, ont reçu des armes dans le cadre de la mobilisation

  5   générale, armes qui leur étaient destinées selon la structure existante.

  6   J'en ai fait état il y a deux jours. Egalement, dans le cadre du ministère

  7   de la Défense, les unités de la Défense civile et de la protection civile

  8   voyaient les citoyens appartenant à d'autres groupes ethniques se voir

  9   remettre des armes aux fins de leur propre protection et la protection de

 10   leurs biens dans leurs propres villages et leurs localités. Ils recevaient

 11   donc également des armes.

 12   A plusieurs reprises, on a essayé de former un certain nombre d'unités qui

 13   auraient été mixtes, des unités mixtes serbes et albanaises à Kosovo Polje.

 14   L'une de ces tentatives a été le fait de M. Pesic qui était le commandant

 15   du district militaire. Cependant, cette tentative n'a rencontré aucun écho

 16   chez les Albanais, et il n'a réussi à former aucune unité qui aurait eu une

 17   composition mixte. Par conséquent, le peuple albanais rejetait ouvertement

 18   ces armes qui étaient distribuées et refusait également de résister aux

 19   actions des terroristes au Kosovo.

 20   Si vous demandez ce que j'en pense, je crois que beaucoup d'entre eux

 21   soutenaient l'action des séparatistes, mais ils étaient nombreux également

 22   à redouter, à craindre des représailles ou des actions de revanche, y

 23   compris d'être des victimes de torture de la part d'autres membres du

 24   groupe ethnique albanais si jamais ils rejoignaient la police ou l'armée

 25   dans le cadre de ce type d'effort.

 26   Q.  Je voudrais passer à un autre document qui est proche.

 27   M. HANNIS : [interprétation] C'est la pièce P889.

 28   Q.  Cela concerne la question des non-Siptar qui étaient armés au Kosovo.

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  1   M. HANNIS : [interprétation] Page 4 de la version anglaise.

  2   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Djurdjic.

  3   M. DJURDJIC : [interprétation] Il me semble que je n'ai absolument pas posé

  4   de question concernant ce sujet au général. Je ne vois pas pourquoi cette

  5   question devrait être abordée dans les questions supplémentaires. M. Hannis

  6   aurait pu aborder cette question dans son interrogatoire principal s'il

  7   l'avait souhaité.

  8   M. HANNIS : [interprétation] Bien. Il s'agit d'un document qui aborde des

  9   aspects positifs et négatifs de ce que la 3e Armée du Corps de Pristina a

 10   fait en 1998.

 11   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Donc, cela découle de l'utilisation

 12   qu'il est fait du document lors du contre-interrogatoire, n'est-ce pas ?

 13   M. HANNIS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 14   [La Chambre de première instance se concerte]

 15   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Continuez, Monsieur Hannis.

 16   M. HANNIS : [interprétation] Merci.

 17   Q.  Alors, Général, c'est le général Lazarevic ici qui, en date du 16

 18   février, est l'auteur de ce document, vous l'avez déjà vu précédemment. Et

 19   le point 2 de la version anglaise en page 4, je crois que c'est la page 3

 20   en version B/C/S, si vous pouviez donc vous y reporter, il y est fait

 21   référence au Corps de Pristina, et il est question de faire intervenir la

 22   population non-siptar. C'est ainsi que c'est indiqué. Voyez-vous, cette

 23   mention ?

 24   R.  Non, je ne l'ai pas trouvé. Voilà. C'est bon.

 25   Q.  Savez-vous de qui il s'agit ici ? Donc, il ne s'agit pas de membres de

 26   la MUP ou de la VJ, n'est-ce pas ?

 27   R.  Cela concerne cette partie que j'ai déjà expliquée, à savoir les

 28   Serbes, les Monténégrins, les Musulmans, les Rom et les autres membres

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  1   d'autres groupes ethniques qui n'étaient pas protégés, qui se trouvaient

  2   dans des villages serbes et dans des villages mixtes au sein desquels ils

  3   étaient la cible d'attaques fréquentes qui étaient le fait des terroristes

  4   siptar, alors que les forces du MUP et de l'armée n'étaient pas en position

  5   de détacher des effectifs pour assurer la protection de ces villages, si

  6   bien que dans le cadre des tâches générales incombant au ministère de la

  7   Défense, cette partie des effectifs a été armée pour protéger cette

  8   population et ses biens. Il s'agit de vieillards, d'enfants, de personnes

  9   âgées de 65 à 80 ans qui ne pouvaient pas être mobilisées et qui ne

 10   pouvaient participer à aucune espèce d'opération de combat que ce soit.

 11   Q.  En rapport avec cela, si vous descendez encore un peu plus bas dans

 12   cette page, lorsque vous parlez du recours à ces forces pour protéger les

 13   villages, est-ce que vous voyez cette référence qui est faite pour ce qui

 14   est de protéger des villages non-siptar ? Ou des localités peuplées d'une

 15   population non-siptar ?

 16   R.  Si vous pensez à cette partie du texte qui dit :

 17   "…y compris pour la défense de localités peuplées de ressortissants non-

 18   siptar," n'est-ce pas ? C'est bien cela ?

 19   Q.  Oui.

 20   R.  C'est précisément ce que je suis en train de vous expliquer, à savoir

 21   que l'armée et le MUP non plus n'étaient pas en position de détacher des

 22   effectifs significatifs pour assurer la protection de la population, ils ne

 23   pouvaient pas s'écarter de l'accomplissement de ces tâches principales.

 24   Pour que l'armée assure la défense de la population, elle aurait dû

 25   détacher des effectifs de l'importance d'une compagnie au moins. Or, nous

 26   ne pouvions pas le faire et le MUP non plus, car notre tâche principale

 27   était la lutte contre les terroristes et la protection des axes de

 28   communication. La tâche de la Défense des populations n'était que

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  1   partiellement à leur charge.

  2   Pour que ces populations puissent être protégées dans le cadre des

  3   armes qui étaient distribuées par le ministère de la Défense, on leur a

  4   distribué des armes, mais nombreux d'entre eux, comme les Siptar,

  5   disposaient depuis des années déjà de leurs armes personnelles pour assurer

  6   leur propre protection.

  7   Q.  Très bien. Alors, qu'en est-il de la protection des villages siptar

  8   peuplés de Siptar loyaux ?

  9   R.  Les villages où vivaient des Siptar loyaux, les membres du MUP et de la

 10   VJ pouvaient entrer sans problème dans ces villages, et dans certains de

 11   ces villages, il avait même un déploiement de ces unités qui était

 12   identique à celui auquel il était procédé dans les villages serbes. Nous

 13   n'avons eu absolument aucun cas, pas même dans la 15e Brigade, et ce,

 14   jusqu'en 1999 qu'il y ait eu des attaques contre des unités, à l'exception

 15   de certains cas et de certains groupes tout à fait individuels. Mais que la

 16   population ait procédé à des attaques généralisées contre ces unités, il

 17   n'y a pas eu de tels cas. Vous avez même des ordres du commandant du Corps

 18   de Pristina et du commandant de la 15e Brigade blindée auquel moi je me

 19   suis adressé par écrit. Il s'agit donc des rapports qui ont été signés par

 20   le général Pavkovic qui montrent la façon dont ces commandants se

 21   comportaient avec la population. Et c'est une tradition au Kosovo qu'il y

 22   ait eu des entretiens entre eux et la population et les chefs de village.

 23   Mais lorsqu'il y a eu des cas comme à Lipljan, il y avait un rejet et la

 24   population attaquait ces unités. Moi, c'est ce que j'ai vu à Lipljan. Il y

 25   a eu 800 ou 900 Albanais qui essayaient de quitter ce village. Dans les

 26   premiers villages, il y avait une forme d'accord ou de compréhension

 27   mutuelle, mais lorsque ces chefs de village ou ces anciens ont été

 28   remplacés par des hommes plus jeunes, tous ces accords n'étaient plus

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  1   valides.

  2   Q.  Très bien.

  3   R.  [aucune interprétation]

  4   Q.  Alors, revenons maintenant au document D340. C'est en page 3 de la

  5   version B/C/S, en page 3 également de la page anglaise. Ce rapport comprend

  6   une information concernant le nombre de terroristes qui ont été tués ou

  7   liquidés, comme cela figure dans ma traduction ici. Il fait état d'un

  8   nombre total de 1 299 personnes. Je suppose que cela correspond à la

  9   période s'étendant jusqu'au 1er ou 2 octobre. Jusqu'au 1er ou 2 octobre,

 10   n'est-ce pas ?

 11   Alors, vous avez vu ce document, ce procès-verbal de la réunion qui a été

 12   tenue le 29 octobre 1998 à Belgrade, où le général Pavkovic a fait état des

 13   tâches accomplies par le commandement conjoint, rapport de travail donc. Et

 14   dans ce rapport, il fait état qu'entre le 25 juillet et le 29 octobre, 33

 15   500 [comme interprété] d'entre eux ont été tués, 560 ont été liquidés - on

 16   se réfère ici aux terroristes - et que 666 autres ont été liquidés dans les

 17   zones frontalières; ce qui nous amène à un total de 4 700. Alors, est-il

 18   possible que 3 400 terroristes aient été tués entre le 1er et le 29 octobre

 19   pendant les opérations conjointes de la VJ et du MUP ?

 20   R.  Ce que je peux dire avec certitude, c'est que ce ne sont pas des

 21   données exactes concernant les morts de l'autre côté. Et la raison en est

 22   qu'en 1998, il y avait très, très peu d'Albanais qui étaient morts aux

 23   combats. Donc nous avons conclu qu'il était fort probable qu'ils avaient

 24   recueilli ces corps et ils les avaient ramenés dans leur territoire. Donc

 25   les commandants qui faisaient leurs rapports, et également nos rapports

 26   pour le général Pavkovic, pour le commandement de l'armée et l'état-major,

 27   pour ce faire, nous utilisions les données sur les données de leurs pertes

 28   éventuelles. Donc, cela est possible à l'armée, puisque nous avons certains

Page 8143

  1   indicateurs obtenus lors des opérations de combat.

  2   Donc nous ne savions pas, à vrai dire, combien de morts nous avions. Je

  3   n'ai même pas vu cinq Albanais morts. Donc en fait, nous faisions des

  4   évaluations, et les données les plus exactes étaient celles qui provenaient

  5   des zones de frontière, car ils laissaient derrière eux les corps, lesquels

  6   étaient emmenés à Djakovica, et ensuite remis aux municipalités.

  7   Q.  [aucune interprétation]

  8   M. HANNIS : [interprétation] Alors, en raison du retard du --

  9   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Maître Djurdjic.

 10   M. DJURDJIC : [interprétation] A la page 24, ligne 5, il est fait mention

 11   de 33500. Est-ce que l'on peut revoir ce chiffre ?

 12   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] 3 350

 13   M. HANNIS : [interprétation] J'ai peut-être mal donné le chiffre. 

 14   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il y avait un zéro de trop.

 15   M. HANNIS : [interprétation] Monsieur, je voulais dire 3 500. Il s'agit

 16   bien de 3 500 qui figure dans ce document; 3 500 plus 560 plus 666.

 17   Alors, j'aimerais -- Monsieur le Président, en raison du commencement

 18   tardif d'audience, je ne sais pas combien de temps nous disposons.

 19   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous pouvez terminer. Combien de temps

 20   cela va vous prendre ?

 21   M. HANNIS : [interprétation] Il me reste 15 à 20 minutes, je pense. Ça sera

 22   terminé d'ici là.

 23   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] C'est bien acceptable.

 24   M. HANNIS : [interprétation] Je vous remercie.

 25   Q.  Alors, pour revenir à ce document, vous avez répondu à une question de

 26   Me Djurdjic, à savoir s'il y avait des indications dans celui-ci. Il s'agit

 27   donc du D340, d'indications relatives aux problèmes concernant le Corps de

 28   Pristina qui ne respecterait pas les ordres de l'armée. Alors, à partir

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  1   d'octobre 1998, étiez-vous au courant des plaintes qui avaient été

  2   formulées aux rangs supérieurs concernant le Corps de Pristina ? Je pense

  3   bien sûr à l'état-major avant tout, de manière précise. Etiez-vous au

  4   courant de cela ?

  5   R.  J'en ai eu connaissance grâce au général Pavkovic. Autrement dit, en

  6   raison de certaines lettres qui étaient échangées, donc des informations

  7   qui étaient échangées entre le général Pavkovic et Samardzic, j'ai constaté

  8   que le général Samardzic, bien qu'il ait participé aux réunions entre le

  9   président Milosevic et le chef de l'état-major, une fois rentré à Pristina,

 10   il a tenté de revenir sur certaines initiatives prises, mais ce n'était pas

 11   acceptable. Cela ne pouvait pas être implémenté de cette façon-là.

 12   Donc, il a essayé de régler cela grâce à ses contacts avec le général

 13   Samardzic. Mais d'après ce que j'ai pu entendre à une reprise, le général

 14   Perisic et Dimitrijevic, en septembre et début octobre, ont commencé à

 15   mettre l'accent sur ces questions du commandement conjoint; alors que

 16   pendant cette période juillet à octobre [comme interprété] 1998, ils

 17   étaient conscients qu'il y avait des civils au Kosovo, M. Matkovic, M.

 18   Andjelkovic et d'autres. A une reprise, j'ai entendu que le général Perisic

 19   a proposé que M. Andjelkovic soit présent.

 20   Je n'ai pas assisté à la réunion, mais je n'exclus pas cette

 21   possibilité. Je ne peux que jeter des présomptions s'agissant de cette

 22   proposition, mais je peux dire que le général Dimitrijevic et le général

 23   Perisic étaient au courant de cela, et cette question est devenue un

 24   problème par la suite.

 25   Q.  Etiez-vous conscient de ce problème dès juillet 1998 s'agissant

 26   du général Perisic ?

 27   R.  Le problème concernant le général Perisic, je ne sais même pas s'il y

 28   en avait un dès juillet, mais j'étais au courant de certaines pressions

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  1   exercées sur le général Samardzic, car je ne vois pas pourquoi le général

  2   Samardzic essayerait de revenir sur une décision faite par le président. En

  3   fait, il essayait de faire quelque chose sur lequel on ne s'était pas mis

  4   d'accord lors de la réunion avec le président Milosevic. J'en conclus qu'il

  5   y a eu des pressions qui ont été exercées sur le général Samardzic.

  6   Q.  En octobre et décembre 1998, aviez-vous participé ou étiez-vous dans

  7   l'organisation s'agissant du MVK de l'OSCE, la mission de vérification ?

  8   R.  Oui, j'ai participé.

  9   Q.  Etiez-vous au courant d'un incident qui s'est déroulé en décembre 1998,

 10   autour de Podujevo, il a été question de violation des accords de la part

 11   de l'OSCE dans la mission de vérification au Kosovo ? Est-ce que vous savez

 12   de quoi je parle ?

 13   R.  Je ne suis pas certain.

 14   Q.  La VJ disait qu'il s'agissait simplement d'exercices et qu'ils ont été

 15   attaqués et qu'ils ont retourné le feu par la suite.

 16   R.  Je pense qu'il s'agissait de la région du lac de Batalovo, s'il s'agit

 17   bien de cet incident dont vous parlez. Car nous avions des terrains

 18   d'exercice là dans la région du lac de Batalovo, et c'est là que les unités

 19   de la 15e Brigade blindée se trouvaient. Donc on avait des exercices tous

 20   les trois mois car il fallait entraîner les troupes de manière organisée;

 21   nous ne le faisions pas au sein des casernes. On avait des terrains

 22   d'entraînement près des casernes. Chacun de ces terrains avait un terrain

 23   de tir.

 24   Q.  Mais vous n'étiez pas au courant des discussions au niveau de l'état-

 25   major au cours desquelles le général Dimitrijevic avait laissé entendre

 26   qu'il ne s'agissait pas d'un exercice mais d'une provocation de la part de

 27   la VJ, provocation adressée au KLA, et qu'il y avait eu des discussions

 28   concernant le commandement joint et le rôle de M. Sainovic concernant les

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  1   unités de la VJ ? Etiez-vous au courant de cela ?

  2   R.  Oui, j'en ai entendu parler, mais j'aimerais éclaircir certains points,

  3   cela me semble important. Dès l'arrivée de la mission de l'OSCE et jusqu'à

  4   la fin de l'année, il s'agit de l'année 1998, il y a eu 500 cas d'attaques

  5   sur les représentants du ministère de l'Intérieur et sur les civils. A

  6  partir du 1er mai et jusqu'au début de l'agression, il y a eu 652 incidents.

  7   Alors, dire que l'armée faisait de la provocation, ce n'est pas vrai, car

  8   l'armée n'avait pas l'intention de provoquer les forces terroristes

  9   albanaises à moins qu'il s'agisse d'une opération d'attaque.

 10   Q.  Il n'y a pas beaucoup de temps. Je vous prie de m'excuser, mais étiez-

 11   vous au courant de discussions au niveau de l'état-major concernant le rôle

 12   de M. Sainovic en tant que civil, c'est un civil qui a pu avoir une

 13   influence au sein des unités de la VJ.

 14   J'aimerais passer maintenant à une question concernant l'ordre de

 15   subordination.

 16   M. HANNIS : [interprétation] Si on peut regarder le P887, s'il vous plaît.

 17   Q.  Est-ce que vous le voyez à l'écran ? Il y a un numéro de commandement

 18   de la 3e Armée qui s'affiche en haut, il s'agit du 872-94/2, daté du 19

 19   avril. Il semble en regardant le texte qu'il s'agit d'un ordre du général

 20   Ojdanic du commandement Suprême. Est-ce que l'ordre a été au poste avancé

 21   du commandement et au Corps de

 22   Pristina ? Il ne semble pas y avoir d'information autre que celle

 23   concernant le général Ojdanic.

 24   R.  Je pense qu'il s'agit effectivement d'un ordre du général Ojdanic

 25   adressé au commandement de la 3e Armée et élabore son propre ordre et il

 26   l'adresse au général Lazarevic, le contenu en l'essence devrait être le

 27   même. Il s'agit de réémettre un ordre semblable au commandement de la 3e

 28   Armée, par la suite on peut bien sûr préciser l'ordre pour les unités sur

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  1   le terrain.

  2   Q.  Il s'agit du 872-94/2, et il s'agit du deuxième document qui est relié

  3   à ce thème précis. Il est daté du 19 avril. Si nous passons maintenant au

  4   document D204, s'il vous plaît, daté du 20 [comme interprété] avril. Il

  5   semble que vous en soyez l'auteur d'après les initiales. On voit la

  6   signature et le cachet du général Pavkovic. Il porte le numéro 872-94/1.

  7   D'après le numéro, il a été réalisé avant à une date antérieure, mais si on

  8   regarde la date cela semble avoir été réalisé après.

  9   R.  Je dois revenir sur le document. Le document 874-94/1. J'aimerais voir

 10   la version originale, s'il vous plaît.

 11   Q.  Je vais vous le remettre en version papier.

 12   R.  J'ai répondu à cette question hier. Le général Pavkovic a pris ce

 13   télégramme. Il l'a gardé. C'est la raison pour laquelle il semble que ce

 14   premier ordre a été signé et ensuite archivé. Donc, la personne qui était

 15   de permanence a d'abord archivé ce document et ensuite probablement que le

 16   général Pavkovic lui a demandé d'archiver cet autre document sur lequel il

 17   travaillait. Donc, il a été sans doute incapable de faire la correction, et

 18   par la suite il aurait fallu biffer ces cotes. On peut voir clairement

 19   qu'il s'agit d'un ordre, ensuite il y a une réponse du commandant de

 20   l'armée et ensuite, un rapport relatif à l'ordre reçu de l'état-major. Il y

 21   a une erreur dans la façon dont ce document a été archivé, en effet.

 22   Q.  En regardant ces deux documents, êtes-vous en mesure de me dire à quel

 23   moment vous et la 3e Armée avez reçu l'ordre du général Obrenovic [comme

 24   interprété] ? L'heure, la date ?

 25   R.  Vous pensez à l'ordonnance relative à la subordination ?

 26   Q.  Oui.

 27   R.  J'ai déjà dit que cet ordre est arrivé avant 17 heures 30 le 18 avril.

 28   Il est clair qu'il est arrivé avant cette heure limite. On peut voir sur le

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  1   cachet qu'il est fait mention de 16 heures. Je viens de le remarquer

  2   maintenant. Donc, le général Pavkovic, une heure après, a contacté les

  3   organes du MUP et leur a dit qu'un ordre avait été reçu portant

  4   resubordination.

  5   Hier, j'ai expliqué pourquoi il l'a fait le 19 avril, car en effet il

  6   a sans doute gardé ce document pour lui-même et ensuite ce document a été

  7   archivé. On peut le voir d'après ce cachet portant réception. Il ne peut y

  8   avoir erreur ici que cela ait été reçu à 16 heures 40.

  9   Q. Vous parlez de la réunion entre vous-même et Pavkovic et Lazarevic

 10   concernant Djordjevic, il s'agissait d'une réunion qui avait lieu le même

 11   jour ou le jour après ?

 12   R.  D'après mes souvenirs, il s'agit du même jour. Je n'ai pas reçu ce

 13   document mais cela est sûrement le même jour, car je ne pense pas que le

 14   général Pavkovic - que je connais bien - ait pu attendre pour fournir cette

 15   information.

 16   Mais je peux voir d'après ce cachet que l'heure est bien 16 heures

 17   40, cela confirme ce que je dis. La réunion a eu lieu à 17 heures 30

 18   environ, c'est-à-dire, grosso modo, une heure après la réception du

 19   document. Car le cachet et le système de cote utilisé sont très précis.

 20   S'il s'agissait de 16 heures 42, il en aurait été fait mention dans ce

 21   cachet de manière très précise.

 22   Q.  Merci.

 23   M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai plus de

 24   questions pour le témoin.

 25   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Monsieur Hannis.

 26   Questions de la Cour : 

 27   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] J'aimerais vous poser des questions

 28   concernant certaines irrégularités que vous avez mentionnées hier. Il

Page 8150

  1   s'agit de la page 44 du compte rendu d'audience d'hier. Il est question du

  2   commandement de la 3e Armée, et vous avez parlé de certaines irrégularités,

  3   les informations que vous aviez reçues de ces unités, deviez-vous les

  4   transmettre à vos supérieurs. C'est la question que je vous ai posée et

  5   vous avez répondu : Oui, cela a été fait relativement aux unités des corps,

  6   les unités indépendantes.

  7   Vous vous souvenez que ces rapports étaient reçus par vous-même et par vos

  8   collègues, des rapports concernant les irrégularités sur le terrain ?

  9   R.  Lors de mon témoignage à cette occasion et l'an dernier, j'ai mentionné

 10   ce rapport que vous avez reçu du commandement de la 125e et de la 549e

 11   Brigade concernant les problèmes quant à la mise en place de ces décisions,

 12   car les organes de la police civile des unités de la police civile

 13   n'avaient pas reçu un ordre de l'état-major du MUP qui avait été coordonné

 14   au niveau du commandement conjoint. Dans la mesure où ces unités de la

 15   police n'avaient pas reçu l'approbation du général Lukic à l'effet qu'ils

 16   pouvaient poursuivre ces opérations, ces opérations n'avaient pas lieu. A

 17   mon sens, il s'agit de la plus grande erreur qui ait été faite car la

 18   coopération n'avait pas été mise en place en réalité et mise en pratique.

 19   Cependant, je peux dire une chose, c'est-à-dire que ce n'est pas tellement

 20   les unités de police qui refusaient de participer. Ils attendaient tout

 21   simplement l'ordre, et une fois que l'ordre était arrivé, il n'y avait pas

 22   de problème.

 23   Quant aux irrégularités sur le terrain, je ne peux que déduire qu'il

 24   y ait eu irrégularités d'après certaines informations que je recevais de

 25   temps en temps, mais il ne s'agissait pas d'un problème majeur, et je

 26   présume que les commandants de brigades et les commandants de rangs

 27   inférieurs connaissaient mieux les problèmes sur le terrain. Je ne pouvais

 28   qu'analyser la situation au sein des unités en me basant sur ces rapports.

Page 8151

  1   En me basant sur ces rapports, j'ai proposé au général Pavkovic les mesures

  2   à prendre et à envoyer aux commandements inférieurs.

  3   Vous trouvez, par exemple, un rapport concernant deux civils albanais qui

  4   ont été tués près de Kosovo Polje par trois membres de la 37e Brigade

  5   motorisée. On a ordonné au colonel Stojanovic d'arrêter ces trois hommes,

  6   et il y a eu une enquête.

  7   Cela est vrai également concernant le massacre de Lipljani, je ne

  8   peux qu'exprimer sur l'incident concernant l'armée et non ce qui était

  9   relatif au MUP.

 10   Donc, nous recevions des rapports de la 125e Brigade, de la 549e et de la

 11   15e. Pour dire tout simplement, nous n'avions pas de rapports de combats du

 12   MUP concernant leur participation car les rapports en question étaient

 13   envoyés à l'état-major du MUP. C'est l'état-major du MUP qui décidait de la

 14   façon d'utiliser les unités du MUP, alors que le rôle de l'armée était

 15   également du ressort exclusif des unités du MUP.   

 16   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Receviez-vous ce type de rapports des

 17   unités qui vous étaient subordonnées à vous ?

 18   R.  Nous recevions des rapports réguliers de combat. Mais lorsque j'ai

 19   appris récemment quel type d'événements s'étaient produits à l'époque, rien

 20   ne figurait dans les rapports que nous recevions de telle envergure; vous

 21   avez pu voir l'un des documents qui a été présenté où l'on a pu voir que le

 22   général Pavkovic, 10 à 15 jours après les opérations de combat, émet un

 23   ordre en vue d'obtenir un rapport détaillé sur les activités de l'armée du

 24   MUP sur le terrain. L'accent était mis notamment sur la mise en œuvre des

 25   activités de combat et sur d'éventuelles irrégularités et toute autre

 26   déviation par rapport aux ordres émis.

 27   Ce type de rapports était désigné par le terme de rapports sommaires, et

 28   c'est là qu'étaient répertoriées toutes les connaissances des commandants

Page 8152

  1   des brigades, mais ils n'ont jamais indiqué quoi que ce soit de ce type. Il

  2   est intéressant de relever un incident qui s'est produit dans le village de

  3   Zegra au cours de 1999. Le colonel Stojanovic a informé le général Pavkovic

  4   de la liquidation d'une famille albanaise à Zegra. Cette élimination avait

  5   été effectuée par les membres de la 175e Brigade qui se trouvait dans la

  6   région de Gniljane. Dès le moment où il l'a appris, le général Pavkovic m'a

  7   ordonné de l'accompagner à Gnijlane en me disant : Il va falloir licencier

  8   le général de brigade.

  9   C'est quelqu'un que je connaissais depuis plusieurs années déjà.

 10   Certainement, c'était un officier supérieur tout à fait correct qui

 11   n'aurait pas permis qu'un tel type d'événement se produise, mais le

 12   problème c'est qu'il n'exerçait pas un contrôle total sur son unité qui

 13   venait justement d'être mobilisée et qui comprenait environ 400 membres de

 14   réserve. Donc, je comprenais parfaitement qu'il n'ait pas réussi à établir

 15   un contrôle à tous les niveaux qui fonctionnerait parfaitement. Dès qu'il

 16   s'est rendu à Gnijlane, le général a licencié ce général de brigade ainsi

 17   que plusieurs autres officiers supérieurs, et il a entamé une procédure au

 18   pénal pour des crimes qui avaient été commis. Je crois que ces membres

 19   militaires de réserve avaient été condamnés à plusieurs années de prison à

 20   cause de cet événement qui s'était produit dans le village de Zegra.

 21   C'étaient les connaissances dont je disposais personnellement. C'étaient

 22   les connaissances dont nous disposions au sein du commandement.

 23   Pour tout ce qui est du reste, je sais que le commandement du Corps de

 24   Pristina avait entrepris des mesures pertinentes, que nous avions réagi à

 25   tous les incidents. Mais il se peut aussi que des mesures prévues n'avaient

 26   pas été mises en œuvre, soit que les commandants n'aient pas eu

 27   connaissance des délits commis, soit qu'ils n'aient pas appliqué les

 28   mesures nécessaires.

Page 8153

  1   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci infiniment, Général.

  2   R.  Je vous en prie.

  3   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Général, votre interrogatoire touche à

  4   sa fin. J'ai le plaisir de vous apprendre que vous êtes désormais libre de

  5   reprendre votre cours de vie normal. Il ne sera plus nécessaire pour vous

  6   de rester ici et subir un interrogatoire. Nous vous remercions

  7   chaleureusement de l'assistance que vous nous avez apportée, et l'huissière

  8   vous aidera à quitter la salle d'audience.

  9   Nous reprenons nos travaux à midi moins 20.

 10   [Le témoin se retire]

 11   --- L'audience est suspendue à 11 heures 06.

 12   --- L'audience est reprise à 11 heures 44.

 13   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous vous êtes levé pour une raison

 14   particulière, Maître Djurdjic ?

 15   Y a-t-il des questions administratives à débattre, Madame Kravetz ?

 16   Mme KRAVETZ : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, deux

 17   questions. En premier lieu, je souhaite soumettre une requête orale pour

 18   ajouter un certain nombre de documents sur notre liste de pièces à

 19   conviction. Il s'agit des documents 05346 et 05350 sur la liste 65 ter. Il

 20   s'agit des rapports de la KDOM américaine. Quatre de ces documents portent

 21   la date de décembre 1998 et concernent les événements qui se sont déroulés

 22   dans la région de Podujevo. Le cinquième rapport porte la date de janvier

 23   1999 et concerne les événements qui se sont déroulés dans le village de

 24   Racak. Ces rapports ont été rédigés à l'époque des événements par la

 25   branche américaine de la KDOM et concernent directement la déposition de ce

 26   témoin concernant les événements pertinents. C'est la raison pour laquelle

 27   nous demandons que ces deux documents soient ajoutés sur notre liste de

 28   pièces à conviction.

Page 8154

  1   Je signale que les deux ont déjà été communiqués à la Défense, en

  2   version anglaise aussi bien qu'en version B/C/S. Nous avons appris

  3   également que ces documents étaient des documents publics, nous l'avons

  4   appris pendant la séance du récolement. Pendant l'entretien avec le témoin,

  5   nous avons appris que tous les rapports émis par la KDOM américaine

  6   pouvaient être lus sur leurs pages internet. Par le passé, ces documents

  7   avaient un caractère confidentiel et étaient traités en vertu de l'article

  8   70.

  9   Il faut dire que ces rapports ne nous avaient pas été remis avant ces

 10   quelques derniers jours. Ce sont, donc, des documents tout à fait nouveaux

 11   pour nous. Et nous avons communiqué à la Défense le fait qu'ils pouvaient

 12   accéder à ces documents sur la page web de la KDOM. Il se peut aussi qu'il

 13   y ait du matériel qui relève de l'article 68 dans ces documents.

 14   Voilà. C'était ma requête orale.

 15   Merci, Messieurs les Juges.

 16   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.

 17   Maître Djurdjic.

 18   M. DJURDJIC : [interprétation] Merci, Messieurs les Juges. J'ai déjà pris

 19   connaissance de toutes les informations qui viennent d'être dévoilées par

 20   Mme Kravetz. Je ne soulève aucune objection quant à sa requête.

 21   Toutefois, nous faisons face à un problème. Il s'agit d'une grosse liasse

 22   de documents, très volumineuse, et la Défense n'a pu accéder jusqu'à

 23   présent qu'aux documents en version anglaise. Par conséquent, nous n'avons

 24   pas eu le temps suffisant de les étudier. Donc, ma requête orale serait la

 25   suivante : si cela est possible, nous aimerions verser au dossier un

 26   certain nombre de documents qui ne figurent pas sur notre liste, comme l'a

 27   fait l'Accusation. Je demande également que notre interrogatoire commence

 28   demain plutôt qu'aujourd'hui, puisque nous n'avons pas eu suffisamment de

Page 8155

  1   temps pour nous préparer. Merci.

  2   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous n'avez pas précisé la nature de

  3   ces documents supplémentaires. Je m'efforce de suivre votre cours de

  4   pensée. Vous avez déclaré d'abord que vous faisiez face à de grands

  5   problèmes puisque vous deviez étudier des documents volumineux, puis

  6   ensuite, vous avez exprimé le désir d'ajouter d'autres documents. Donc, je

  7   n'arrive pas à suivre votre cours de pensée.

  8   M. DJURDJIC : [interprétation] Messieurs les Juges, nous avons été informés

  9   lundi que les documents du "State Department" américain concernant les

 10   documents de la KDOM de 1998 et 1999 ont été changés, que ces documents

 11   n'étaient plus confidentiels. Parmi ces documents, Mme Kravetz en a choisi

 12   cinq dont elle souhaite se servir pendant la déposition du témoin parce

 13   qu'ils sont pertinents. Nous ne soulevons pas d'objection à cet égard. Je

 14   crois m'avoir à présent exprimé clairement sur ce point.

 15   Toutefois, parmi les documents publiés ou devenus accessibles au public,

 16   comme ils sont très nombreux, nous n'avons pas eu le temps de les étudier

 17   tous. Sans aucun doute, nous aurons le désir de nous servir d'un certain

 18   nombre d'entre eux, mais nous n'avons pas eu le temps de les étudier et de

 19   les ajouter à notre liste. Donc, je demandais plutôt l'accord de Mme

 20   Kravetz pour ce faire. Ma requête n'était pas adressée aux Juges de la

 21   Chambre proprement dit.

 22   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Procédons par étapes. En premier lieu,

 23   quant à votre requête d'ajouter ces cinq documents à votre liste, nous

 24   faisons droit à votre demande. Ensuite, nous suivrons la situation ou les

 25   développements de la situation pour décider s'il convient de repousser à

 26   demain le début du contre-interrogatoire. Entre-temps, il nous sera

 27   également possible d'adopter une décision quant à l'ajout des documents

 28   dont vous souhaitez vous servir.

Page 8156

  1   Madame Kravetz.

  2   Mme KRAVETZ : [interprétation] Une autre question, Messieurs les Juges. Le

  3   représentant du gouvernement américain assistera à la déposition du témoin,

  4   et je souhaite obtenir une précision à cet égard. Est-il possible pour nous

  5   d'établir un contact avec le représentant du gouvernement américain pendant

  6   la déposition du témoin ? Ceci n'a pas été rendu très clair dans la

  7   décision adoptée par la Chambre. Si j'ai bien compris, Mme Karen Johnson,

  8   la représentante du gouvernement américain, souhaitera peut-être attirer

  9   notre attention sur quelques questions délicates qui peuvent survenir au

 10   cours de la déposition. Nous aimerions recevoir des orientations de la

 11   Chambre quant au comportement a adopté dans une telle situation.

 12   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Avez-vous des observations à faire,

 13   une objection à soulever quant à la possibilité pour les représentants du

 14   gouvernement américain de s'adresser à l'Accusation dans un temps de figure

 15   pareil ?

 16   M. DJURDJIC : [interprétation] Messieurs les Juges, j'ai bien compris que

 17   le représentant du gouvernement américain devait assister à la séance

 18   justement pour réagir au cas où un problème surviendrait quant à la nature

 19   confidentielle des données abordées. C'est le gouvernement américain qui a

 20   insisté là-dessus. Ce que je ne comprends pas est le point suivant, si tous

 21   ces documents ont déjà été rendus publics, je ne comprends pas en quoi cela

 22   est nécessaire sinon parce que les déclarations écrites avaient été données

 23   à l'époque en vertu de l'article 70, mais je ne suis pas sûr si les

 24   dispositions de cet article sont toujours applicables dans un cas de

 25   figure. C'est aux Juges de la Chambre de voir si les questions

 26   éventuellement posées par le représentant américain sont conformes aux

 27   dispositions de l'article 70, et c'est ma manière de comprendre les choses,

 28   corrigez-moi si je me trompe.

Page 8157

  1   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Djurdjic, les sujets

  2   répertoriés dans l'annexe A de notre décision doivent toujours être pris en

  3   considération. La décision qui avait été rendue publique a rendu accessible

  4   au public également un certain nombre de procès-verbaux qui ne vous ont pas

  5   encore été communiqués, mais cela ne change en rien la décision que nous

  6   avons déjà adopté concernant les sujets à aborder en séance publique. La

  7   seule question qui se pose en ce moment est la suivante, le représentant du

  8   gouvernement américain qui assistera à l'interrogatoire, peut-il avoir un

  9   échange avec l'Accusation en cas de problème au cas où l'Accusation

 10   souhaiterait poser des questions concernant un sujet délicat. Mme Kravetz a

 11   pris des précautions et nous a signalé ce problème, et elle vous le signale

 12   également.

 13   M. DJURDJIC : [interprétation] Mais je pense que c'est justement le rôle

 14   qui incombe aux représentants du gouvernement américain. Si jamais il

 15   soulève une objection, c'est aux Juges de la Chambre de décider si cela est

 16   acceptable ou non, et j'espère que les Juges de la Chambre réagiront de

 17   même au moment où je commencerai mon contre-interrogatoire.

 18   [La Chambre de première instance se concerte]

 19   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Les Juges de la Chambre estiment qu'il

 20   serait désirable de permettre au représentant du gouvernement américain

 21   d'avoir un échange avec le témoin; et si le témoin souhaite soulever une

 22   objection à la question posée, il peut le faire. Au cours de la déposition

 23   du témoin, il serait quand même préférable qu'il n'y ait aucun échange

 24   entre le représentant du gouvernement américain et les représentants du

 25   bureau du Procureur.

 26   Mme KRAVETZ : [interprétation] Très bien, Monsieur le Juge. Lorsque la

 27   représentante du gouvernement américain sera introduite dans la salle

 28   d'audience, j'aimerais qu'elle soit informée de la procédure appliquée.

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  1   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci. Il s'agit de Mme Johnson.

  2   Mme KRAVETZ : [interprétation] C'est exact.

  3   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.

  4   Mme KRAVETZ : [interprétation] Notre témoin suivant sera M. Shaun Byrnes.

  5   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  6   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour, Monsieur Byrnes. Pourriez-

  7   vous lire la déclaration solennelle qui vous est à présent présentée ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  9   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Lisez, s'il vous plaît, à haute voix

 10   le feuillet qui vous est présenté.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 12   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 13   LE TÉMOIN : SHAUN BYRNES [Assermenté]

 14   [Le témoin répond par l'interprète]

 15   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci. Veuillez vous asseoir.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 17   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Si je comprends bien, conformément à

 18   notre ordre précédent, Mme Johnson vous accompagne à titre du représentant

 19   du gouvernement des Etats-Unis. Puis-je préciser, Madame Johnson, afin de

 20   porter assistance, que votre rôle pourra peut-être être mené à bien de la

 21   façon suivante, à savoir que vous pourrez avoir une conversation avec le

 22   témoin s'il vient à se présenter une situation dans laquelle vous

 23   objecteriez à ce que le témoin pourrait peut-être avoir à répondre à la

 24   question qui a posée. Bien sûr, dans ce cas-là, vous pouvez le consulter ou

 25   plutôt ce dernier pourra vous consulter. Quant à savoir s'il faudra

 26   formuler une requête supplémentaire ou non sur une telle question au moment

 27   où elle se présenterait, cela dépendra des circonstances évidemment. Je

 28   souhaiterais vous prier de bien vouloir vous restreindre à des

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  1   consultations avec le témoin et à ne pas vous entretenir avec le

  2   représentant de l'Accusation, j'espère que cela pourra vous agréer.

  3   Mme JOHNSON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  4   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bien. Je crois que Mme Kravetz a des

  5   questions pour vous, Monsieur le Témoin.

  6   Mme KRAVETZ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  7   Interrogatoire principal par Mme Kravetz : 

  8   Q.  [interprétation] Monsieur le Témoin, pourriez-vous décliner votre

  9   identité.

 10   R.  Je suis Shaun Michael Byrnes.

 11   Q.  Si j'ai bien compris, vous êtes un fonctionnaire à la retraite du

 12   ministère des Affaires étrangères aux Etats-Unis, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  En 1998, vous avez été impliqué dans les travaux d'une mission qui

 15   était connue sous l'acronyme de la KDOM, une mission diplomatique

 16   d'observation au Kosovo, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  En avril 2007, avez-vous déposé devant ce Tribunal dans l'affaire

 19   Milutinovic concernant vos travaux en tant que membre de l'équipe

 20   américaine de la KDOM ?

 21   R.  Oui, j'ai déposé dans l'affaire Milutinovic et consorts.

 22   Q.  Avant de venir dans ce prétoire aujourd'hui, avez-vous eu l'occasion de

 23   passer en revue le procès-verbal de votre déposition précédente ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Et ce faisant, après avoir passé en revue votre déposition précédente,

 26   si les mêmes questions vous étaient posées aujourd'hui que celles qui ont

 27   été posées à l'époque, donneriez-vous les mêmes réponses ?

 28   R.  Oui.

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  1   Mme KRAVETZ : [interprétation] Messieurs les Juges, je voudrais demander le

  2   versement de ce procès-verbal. Je crois qu'il porte la cote provisoire de

  3   P1214. Je voudrais qu'il puisse être versé sous ce même numéro de cote en

  4   tant que document public. Je voudrais souligner qu'il y a des sections de

  5   ce compte rendu d'audience qui étaient initialement confidentielles mais,

  6   qui sous l'effet d'un ordre ultérieur de la Chambre, ont vu ce statut de

  7   confidentialité être levé. Nous soumettons l'ensemble du compte rendu pour

  8   qu'il soit versé en tant que pièce et dans le statut public.

  9   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci. Le compte rendu d'audience est

 10   versé.

 11   Monsieur le Témoin, l'aspect électronique de votre personnalité est en

 12   train d'interférer avec l'audience.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, ma personnalité, à ce

 14   jour, n'a jamais été décrite comme étant électronique, mais je pense que

 15   les mesures appropriées ont maintenant été prises pour éviter cela.

 16   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.

 17   Mme KRAVETZ : [interprétation] Alors, puisque notre témoin a été témoin au

 18   titre de l'article 92 ter, je vais procéder à la lecture, dans le prétoire,

 19   du résumé.

 20   Le témoin a été à la tête de la branche américaine de la KDOM d'août 1998 à

 21   mars 1999. Il dépose concernant le rôle qui était le sien dans le cadre de

 22   cette mission au Kosovo. Il fournit également des éléments concernant la

 23   structure et la chaîne de commandement de la VJ et du MUP au Kosovo en 1998

 24   et 1999.

 25   Pendant l'accomplissement de ses fonctions au Kosovo, M. Byrnes a eu des

 26   entretiens et des réunions avec les chefs de section de la VJ et du MUP, et

 27   il déposera également concernant ces réunions. Il parle des unités de la VJ

 28   et du MUP dans des opérations au Kosovo en 1998 et 1999.

Page 8162

  1   Le témoin fait état également d'occasions au cours desquels il s'est plaint

  2   auprès du général Lukic, le général du MUP, et d'autres représentants

  3   officiels concernant la conduite des unités du MUP pendant ces opérations.

  4   En octobre 1998, le témoin a conduit des négociations avec le MUP afin de

  5   parvenir à un accord sur les actions devant être entreprises par les forces

  6   de la RSFY et les forces serbes afin d'entrer en conformité avec la

  7   Résolution 1199 du Conseil de sécurité. Il décrit ces négociations et

  8   indique que le général Djordjevic était à la tête de la partie serbe. Le

  9   processus de négociations a mené à titre de conclusion à l'accord Byrnes-

 10   Djordjevic.

 11   Le témoin fournit également des éléments concernant l'incident de Podujevo

 12   en décembre 1998 et l'incident de Racak en janvier 1999.

 13   C'est la fin du résumé.

 14   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.

 15   Mme KRAVETZ : [interprétation]

 16   Q.  Monsieur Byrnes, vous nous avez dit au début de votre déposition que

 17   vous avez été impliqué dans les travaux de cette mission connue sous le nom

 18   ou l'acronyme de KDOM. Pourriez-vous pour commencer nous expliquer comment

 19   vous avez été impliqué dans les travaux de cette mission ?

 20   R.  On m'a demandé, à Washington, vers la fin du mois de juillet 1998, si

 21   je serais disposé à quitter ma fonction d'alors, qui était celle de

 22   ministre plénipotentiaire à notre ambassade de Rome afin de porter mon

 23   concours à cette mission qui venait justement de faire l'objet d'un accord.

 24   Washington souhaitait avoir quelqu'un qui disposait d'éléments et de

 25   connaissance concernant les affaires yougoslaves et balkaniques, et j'avais

 26   le rang et les connaissances appropriées. J'ai accepté cela.

 27   Q.  Et quand avez-vous commencé à intervenir dans le cadre de cette mission

 28   ?

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  1   R.  Je pense que je suis arrivé à Belgrade le 10 août 1998. Après un jour

  2   ou deux que j'ai pris à me repérer au sein de notre ambassade sur place,

  3   cela passait par un certain nombre de réunions avec des représentants

  4   officiels serbes, je suis arrivé à Pristina au Kosovo, me semble-t-il, le

  5   12 août et j'ai pris alors la tête de notre mission diplomatique dans le

  6   cadre de la KDOM.

  7   Q.  Quelle était la nature de votre mandat et en quoi consistait exactement

  8   votre rôle au sein de la branche américaine de la KDOM ?

  9   R.  Notre mandat était de fournir des informations exactes et objectives

 10   concernant les événements qui se produisaient sur le terrain au Kosovo. Ces

 11   informations devaient être fournies à Washington et aux capitales des pays

 12   prenant part aux Groupes de contact par l'intermédiaire de notre ambassade

 13   à Belgrade.

 14   Q.  Vous nous avez dit que vous étiez arrivé au Kosovo le 12 août à

 15   Pristina en fait. Est-ce que vous pourriez décrire très brièvement quelle

 16   était la situation sur le terrain au Kosovo au moment de votre arrivée ?

 17   R.  Nous étions confrontés à une situation d'insurrection de plus en plus

 18   intense sur le terrain au Kosovo.

 19   Q.  Pourriez-vous préciser ce qui se passait exactement à ce moment-là ?

 20   Pourquoi Washington a estimé nécessaire de mettre sur pied cette mission ?

 21   R.  Si vous me le permettez, je souhaiterais juste préciser quelques

 22   éléments de contexte. Notre mission émanait d'un accord auquel on est

 23   parvenu à la mi-juin à Moscou, accord passé entre le président Milosevic et

 24   le président de la Fédération de Russie, Boris Yeltsin. L'accord en

 25   question avait pour objectif, du point de vue des Russes, me semble-t-il,

 26   de prévenir une intervention supplémentaire de l'Occident suite à une

 27   intervention en 1995 en Bosnie. Il s'agissait également de mettre un terme

 28   aux violences croissantes entres les séparatistes albanais et les forces de

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  1   sécurité serbe qui donnaient lieu à des morts, de part et d'autre, et à un

  2   nombre croissant de personnes déplacées, principalement appartenant au

  3   groupe ethnique albanais, mais pas uniquement. Cela entraînait par ailleurs

  4   une attention croissante de la part de la presse occidentale.

  5   L'accord prévoyait une mission d'observation étrangère. On espérait

  6   que cela permettrait de réduire les violences et de gagner du temps pour

  7   essayer de trouver une solution politique. Cependant, les violences n'ont

  8   jamais véritablement cessé de croître. Je ne me rappelle pas les dates

  9   précises, mais notre envoyé spécial pour les Balkans, Richard Holbrooke,

 10   s'est rendu à Belgrade. Il me semble que c'était au début du mois de

 11   juillet. Il s'y est rendu pour rencontrer Milosevic afin d'essayer de

 12   trouver une solution, essayer de faire cesser cela.

 13   A cette étape-là, ils ont convenu qu'il faudrait permettre au comité

 14   international d'établir des missions d'observation diplomatiques

 15   officielles. Holbrooke savait très certainement que les ambassades des pays

 16   occidentaux qui étaient concernées, notamment celles des Etats-Unis, de la

 17   Grande-Bretagne, de la France et de la République fédérale d'Allemagne,

 18   manquaient de ressources pour fournir des observateurs sur le terrain au

 19   Kosovo de façon systématique. En d'autres termes, ces ambassades manquaient

 20   de ressources pour apporter une contribution significative. C'est pourquoi

 21   un accord a été signé pour que trois missions diplomatiques d'observation

 22   soient mises en place. L'une d'elle serait américaine, et je me suis trouvé

 23   à sa tête, et les deux autres devaient être une mission d'observation d'une

 24   part de l'Union européenne, et d'autre part de la Fédération de Russie.

 25   C'est ce qui m'a amené sur place.

 26   Par ailleurs, et de façon tout à fait générale, les instructions qui nous

 27   avaient été données étaient de fournir des informations objectives et

 28   précises sur les événements qui se produisaient. Je pense que l'on espérait

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  1   ainsi faire pression sur les deux parties afin qu'elles fassent preuve de

  2   mesures. Il me semble que l'objectif était de gagner du temps afin de

  3   mettre sous contrôle le conflit, si vous voulez, pour se donner du temps

  4   pour négocier et pour que les parties puissent parvenir à un accord qui

  5   soit acceptable pour les deux parties d'un point de vue politique.

  6   J'espère que ça répond à votre question.

  7   Q.  Merci. Alors vous vous êtes référé à l'existence de trois missions

  8   diplomatiques. Y avait-il une différence entre ces différentes missions ou

  9   alors, entre les deux autres missions et la mission américaine, de la KDOM,

 10   ou bien les trois missions étaient-elles porteuses du même mandat que vous

 11   avez décrit ?

 12   R.  Nous nous sommes efforcés de répondre tous au même mandat. La mission

 13   américaine avait l'avantage d'être plus volumineuse et de disposer

 14   davantage de ressources. La mission russe n'a jamais été très importante,

 15   je crois que tout au plus, elle a été composée de cinq ou six officiers qui

 16   manquaient même de véhicules pour leur transport. Vous deviez disposer de

 17   véhicules pour pouvoir intervenir dans des zones où un conflit était en

 18   cours. Mais nous avons coopéré de façon très étroite, les membres

 19   américains de la KDOM ont travaillé en coopération très étroite avec leurs

 20   homologues de l'Union européenne et de la Fédération de Russie.

 21   Je voudrais ajouter que la mission européenne de la KDOM a été

 22   installée sur le terrain avant les autres. La commission européenne avait

 23   mis en place une mission d'observation au Kosovo précédemment en avril, me

 24   semble-t-il. Ils disposaient de 10, 12 ou même 15 représentants et de

 25   véhicules sur place. A la tête de cette mission se trouvait un Britannique.

 26   Et la mission européenne d'observation ou la mission d'observation de la

 27   communauté européenne a simplement été renommée en mission européenne de la

 28   KDOM. C'est alors qu'ils ont ajouté des ressources à cette même mission.

Page 8166

  1   Q.  Alors, le 12 août lorsque vous êtes arrivé à Pristina, est-ce que la

  2   mission européenne de la KDOM était déjà sur place et fonctionnait-elle

  3   déjà ?

  4   R.  Oui, je pense qu'elle était déjà en fonctionnement.

  5   Q.  Je vous interrogeais à vrai dire à propos de la mission américaine de

  6   la KDOM.

  7   R.  Excusez-moi. Oui, l'essentiel de la mission américaine de la KDOM avait

  8   déjà été mis sur pied. Il s'agissait d'un très petit groupe de personnes,

  9   trois ou quatre véhicules également.

 10   Q.  Vous nous avez dit que votre mandat consistait à fournir des

 11   informations précises et objectives. Comment procédiez-vous pour obtenir de

 12   telles informations ?

 13   R.  Nous conduisions des patrouilles quotidiennes grâce aux véhicules dont

 14   nous disposions dans différentes parties du territoire du Kosovo, et cela,

 15   dans les parties où nous avions de bonnes raisons de croire qu'il y avait

 16   des conflits. Il s'agissait de véhicules tout-terrain. Nous avions trois ou

 17   quatre équipes. Nos équipes consistaient en deux officiers américains et

 18   d'un interprète qui était du cru. Les gens du cru étaient soit des Serbes,

 19   soit des Albanais. Mais dans tous les cas, ils devaient parler couramment

 20   les deux langues. Il ne s'agissait pas de conditions particulièrement

 21   difficiles à remplir pour nous.

 22   Ce que nous faisions généralement, c'est que nous faisons démarrer nos

 23   missions à 8 heures du matin, nous nous rendions dans les zones dont nous

 24   estimions qu'il fallait y exercer une surveillance, et nous pensions que

 25   nous pourrions apporter une contribution en nous interposant entre les

 26   parties, et nous resterions jusqu'à la tombée de la nuit sur place. Nous

 27   envoyions des instructions dans le sens du retour à la base à la tombée de

 28   la nuit. Washington et Bruxelles non plus ne souhaitaient pas que leurs

Page 8167

  1   personnels soient encore sur la route pendant la nuit.

  2   Nous restions dans ces zones, nous nous entretenions avec la population,

  3   nous collections des informations sur les événements ainsi que sur la

  4   situation humanitaire et les personnes déplacées et ainsi de suite. Ensuite

  5   nous revenions à notre base, je rencontrais alors les chefs de patrouilles

  6   qui me soumettaient de brefs rapports écrits. Ensuite, moi-même ou l'un de

  7   mes collègues rédigions ensemble un rapport qui était faxé quotidiennement,

  8   d'habitude c'était tard dans la soirée, soit à notre ambassade de Belgrade

  9   soit directement à Washington.

 10   Mais à cet égard, nous avons coopéré de façon très étroite avec l'Union

 11   européenne, surtout au début lorsque eux, comme nous, disposions de

 12   ressources très limitées et lorsqu'il semblait qu'il y avait pas mal de

 13   tensions et même un conflit en train de se dérouler au Kosovo. Tous les

 14   soirs je rencontrais mon homologue britannique qui s'appelait Nicholas

 15   Turnbull; nous mettions en commun les rapports émanant de nos activités du

 16   jour. Nous nous entretenions sur ce à quoi il convenait de s'attendre pour

 17   le jour suivant. Ensuite, nous nous partagions les tâches, car aucun

 18   d'entre nous ne disposait de suffisamment d'effectifs ou de véhicules pour

 19   couvrir l'ensemble du terrain. Donc nous affections des priorités aux

 20   différentes tâches ou aux différentes zones sur lesquelles il fallait

 21   envoyer les membres de nos équipes pour éviter des doublons.

 22   Q.  Comment obteniez-vous vos informations concernant les zones dans

 23   lesquelles il y avait un conflit en cours dans lesquelles vous estimez

 24   qu'il fallait exercer une surveillance particulière ? 

 25   R.  Généralement, cela provenait de nos observations du jour, des

 26   mouvements des unités de la police et de l'armée, le CICR avait également

 27   une mission sur place. Le HCR également. Ils avaient des équipes sur place

 28   pour assurer un suivi de la situation humanitaire. Nous avons toujours été

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  1   en contact avec eux. Ils nous ont souvent informés concernant le renfort de

  2   certaines unités, concernant des villages qui avaient été incendiés et

  3   d'autres événements similaires.

  4   Nous recevions également souvent des informations de sources albanaises.

  5   Des personnes nous appelaient en provenance de différents villages pour

  6   nous dire qu'il y avait eu un renforcement des forces de sécurité serbe

  7   dans leurs zones et qu'ils étaient préoccupés quant à l'évolution possible

  8   de la situation. C'était là les sources principales dont nous disposions.

  9   Q.  Et avez-vous également participé à ce type de patrouille journalière

 10   dans l'exercice de votre mission ?

 11   R.  Je l'ai fait, mais pas tous les jours. En gros, je sortais avec les

 12   patrouilles à peu près deux fois par semaine. J'estimais qu'il était

 13   important de le faire pour avoir une meilleure idée de ce qui se passait

 14   vraiment sur le terrain et, bien entendu, je souhaitais également évaluer

 15   la façon dont mes hommes travaillaient, ce qu'ils faisaient exactement, et

 16   je souhaitais vérifier s'ils faisaient vraiment tout ce qu'il fallait, tout

 17   ce qu'on attendait d'eux en terme de collecte d'informations, est-ce qu'ils

 18   s'entretenaient avec toutes les personnes avec lesquelles il fallait

 19   s'entretenir.

 20   J'étais en contact avec notre ambassadeur à Belgrade, parfois avec

 21   les ambassadeurs du Groupe de contact, et je ne voulais pas m'entretenir

 22   avec eux uniquement sur des informations de seconde main. Je voulais avoir

 23   ma propre expérience personnelle.

 24   Q.  Et lorsque vous n'étiez pas sur le terrain, où vous trouviez-vous,

 25   était-ce dans une banlieue de Pristina que vous étiez basé ? A Kosovo

 26   Polje, peut-être ? Pourriez-vous nous dire où vous trouviez-vous ?

 27   R.  Nous étions basés dans une banlieue de Pristina près de Kosovo Polje,

 28   peut-être à 6 kilomètres au sud-ouest de Pristina.

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  1   Q.  Vous avez parlé brièvement des rapports journaliers que vous faisiez en

  2   compilant des informations qui étaient ensuite envoyées à Washington et à

  3   différents organes et endroits. Est-ce que vous pourriez nous dire quel

  4   type d'informations étaient généralement incluses dans ce type de rapport

  5   journalier ?

  6   R.  Les rapports journaliers contenaient généralement un résumé de la

  7   situation au Kosovo. Il y avait une section qui abordait les situations de

  8   conflit. Ensuite, nous observions également ces conflits et leurs

  9   conséquences étaient également décrites. Nous avions également une partie

 10   du rapport qui était consacrée à la situation humanitaire et à celle des

 11   personnes déplacées. Cette information émanait de nos équipes sur le

 12   terrain qui étaient revenues en disant, par exemple, que le village X avait

 13   été attaqué ou mis sous pression par les forces de sécurité serbe, que la

 14   population était partie, qu'il s'agissait de 1 800 personnes et qu'il n'y

 15   avait plus personne sur place. C'était ce type d'informations.

 16   Nous incluions aussi le genre d'informations que nous recevions du CICR,

 17   ainsi que du HCR qui, tous deux, disposaient d'équipes sur le terrain

 18   assurant le suivi de la situation humanitaire. Washington ainsi que

 19   Bruxelles avaient exprimé leur intérêt pour ce type d'informations.

 20   Q.  Et si des événements importants s'étant déroulés un jour particulier

 21   avaient fait l'objet d'une observation, est-ce qu'ils étaient toujours

 22   inclus dans le rapport quotidien que vous envoyiez à Washington et

 23   Bruxelles ?

 24   R.  Oui, si nous en avions connaissance.

 25   Q.  Alors, pendant votre présence au sein de cette mission, avez-vous eu

 26   des contacts avec les autorités serbes, les autorités locales serbes ?

 27   R.  Oui, j'ai eu beaucoup de contacts avec elles.

 28   Q.  Aviez-vous eu quelque contact que ce soit avec des représentants du MUP

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  1   ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Quelles étaient les personnes précises avec qui vous avez été en

  4   contact ?

  5   R.  Mon principal contact était le général Streten Lukic qui avait la

  6   responsabilité des forces de la police serbe se trouvant au Kosovo. Parce

  7   que le général Lukic était, par ailleurs, régulièrement absent de Belgrade,

  8   j'ai eu également l'occasion de m'entretenir avec son adjoint. Je ne me

  9   rappelle plus son prénom, mais il s'appelait Mijatovic. Et ensuite, assez

 10   régulièrement, j'ai également eu l'occasion de rencontrer le chef de la

 11   police de Kosovo Polje. Le bâtiment où il était basé, son quartier général

 12   si vous voulez, se trouvait là-bas, et il était très bon ami avec les deux

 13   frères serbes qui étaient propriétaires de l'immeuble où il se trouvait.

 14   C'était un hôtel qui avait été reconverti en dortoir et il était souvent

 15   présent là-bas à l'heure du dîner. J'ai fait sa connaissance, nous nous

 16   sommes entretenus l'un avec l'autre et nous avions un rapport de

 17   coopération mutuelle.

 18   C'étaient là donc les représentants de la police serbe que je voyais

 19   régulièrement à Pristina. Bien sûr, quand je me rendais sur le terrain,

 20   j'avais aussi souvent des contacts avec des officiers de la police serbe.

 21   De temps en temps, j'avais également des contacts avec des représentants de

 22   la police serbe lorsque j'étais à Belgrade.

 23   Q.  Vous avez dit que votre contact principal était le général Streten

 24   Lukic. A quelle fréquence aviez-vous des entretiens et des réunions avec

 25   lui ?

 26   R.  C'était très fréquent. Souvent, sur une base quotidienne et parfois,

 27   lorsqu'il y avait des événements graves qui étaient en train de se

 28   produire, je pouvais également le voir plusieurs fois par jour.

Page 8171

  1   Je voudrais juste ajouter que lui-même, souvent, était à l'origine de

  2   l'appel téléphonique. Il m'appelait et demandait que l'on se voit. Mais la

  3   plupart du temps, c'était sur ma demande que nous nous voyions.

  4   Q.  Quelle était la nature de vos rencontres avec le général Lukic, et

  5   quels étaient les sujets abordés ?

  6   R.  Tout d'abord, nos réunions avaient pour but de nous entretenir de la

  7   situation en matière de sécurité dans la province et nous abordions

  8   également la question de la conformité des opérations du MUP avec les

  9   accords connus sous le nom d'accords d'Octobre. Nous avons aussi utilisé

 10   ces accords afin de soulever des objections ou d'attirer leur attention sur

 11   ce que nous considérions comme étant inacceptable, comme étant des

 12   comportements inacceptables de la part de la police serbe. Je pense ici,

 13   notamment, aux cas dans lesquels des villages ont été attaqués, des cas où

 14   les habitants en ont été expulsés, où les villages ont été incendiés. Je

 15   pense aux cas où des villages ont été incendiés après que les maisons

 16   avaient été pillées. Ces types de cas.

 17   Q.  Alors, vous vous êtes référé à des réunions qui ont précédé les accords

 18   d'Octobre et qui ont suivi la signature de ces mêmes accords. Alors, cette

 19   question particulière que vous venez d'évoquer, celle des attaques menées

 20   contre les villages et leurs habitants qui avaient été expulsés, cela a-t-

 21   il constitué le sujet de vos entretiens pendant les deux périodes, à la

 22   fois avant et après, ou bien pendant une seule de ces deux périodes ?    

 23   R.  Les entretiens concernant les comportements des membres des forces de

 24   la police ont eu lieu, me semble-t-il, pour l'essentiel avant la signature

 25   des accords d'Octobre. La raison en est la suivante. Les accords d'Octobre

 26   ont conduit à la mise en place de la Mission de vérification de l'OSCE au

 27   Kosovo. Et dès que cette mission a été mise sur place, elle a repris à sa

 28   charge les responsabilités pertinentes qui, jusque-là, avaient été celles

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  1   de la KDOM. Donc, les responsabilités qui avaient trait à la conformité, à

  2   la vérification de la conformité aux accords, conformément à l'accord entre

  3   Nick Turnbull, Sergey Lavrov, William Walker, moi-même et l'équipe de

  4   William Walker au sein de la MVK de l'OSCE.

  5   Q.  Merci. Je voudrais revenir à cette partie de votre réponse où vous avez

  6   évoqué les objections que vous avez soulevées concernant des comportements

  7   que vous estimiez inacceptables de la part de la police serbe. Lorsque vous

  8   soulevez ces objections, quelle était généralement la réaction du général

  9   Lukic ?

 10   R.  Le général Lukic rejetait généralement ces objections, et dans le

 11   souvenir que j'en ai, il expliquait souvent le comportement de ses forces

 12   de sécurité comme étant une conséquence de leur affrontement avec l'UCK.

 13   Q.  Et lorsque vous étiez sur place pendant cette période, je parle

 14   précisément de la période précédant les accords d'Octobre, leur signature,

 15   quels types d'unités du MUP avez-vous pu observer sur le terrain, si

 16   toutefois vous en avez vu ?

 17   R.  Nous avions aperçu des unités de la police qui étaient aux points de

 18   contrôle, aux postes de contrôle sur les routes. Et d'après les contacts

 19   que nous avions avec la police -- en fait, j'avais l'impression qu'il

 20   s'agissait d'officiers de police serbe régulière, en grande partie il

 21   s'agissait d'officiers de police qui étaient envoyés au Kosovo pendant 30

 22   jours, et ensuite ils rentraient chez eux à Kraljevo ou à Beograd ou à Novi

 23   Sad ou ailleurs. Ces personnes qui étaient aux postes de contrôle, ce sont

 24   ces gens-là que nous avions vus.

 25   Nous avons vu également des gens de la PJP, la police spéciale. Ils étaient

 26   habillés différemment et ils semblaient faire partie d'une unité organisée

 27   comme s'il s'agissait d'une unité militaire. Dans ma déposition précédente,

 28   je les ai décrits comme faisant partie de l'infanterie légère. Donc, il ne

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  1   s'agissait pas d'officiers de police rassemblés pour assurer un poste de

  2   contrôle. Mais il s'agissait d'une unité cohérente qui avait de

  3   l'infanterie légère, qui avait des mitraillettes, des mortiers antiaériens,

  4   et cetera. Donc, il s'agissait de formations quasi-militaires.

  5   Q.  Les tâches qu'elles accomplissaient, ces unités de la PJP, étaient-

  6   elles différentes de celles qui étaient accomplies par les officiers de

  7   police réguliers ?

  8   R.  Oui. Il me semblait que les officiers de police réguliers avaient des

  9   fonctions de surveillance, les points de contrôle, la sécurité dans les

 10   rues de Pristina et dans d'autres grandes villes.

 11   Alors que les unités de la PJP, en fait, étaient utilisées dans les

 12   opérations anti-soulèvement, dans les opérations de combat.

 13   Q.  Lors de vos patrouilles quotidiennes, avez-vous eu l'occasion de voir

 14   des unités de la PJP à l'oeuvre ?

 15   R.  Comme je l'ai dit dans ma déposition précédente, une fois j'ai vu une

 16   unité de la PJP qui venait de compléter une opération dans un village entre

 17   la ville de Kijevo à l'ouest de Pristina. Entre Kijevo et la ville de

 18   Malisevo.

 19   Q.  Ils venaient de compléter une opération, donc qu'entendez-vous par là,

 20   qu'est-ce que vous avez observé ?

 21   R.  Je me rappelle encore aujourd'hui, lorsque j'arrivais en bordure du

 22   village qui était en flammes avec mon équipe, j'ai pu voir qu'il n'y avait

 23   pas de combat en cours. On n'entendait pas de tirs. Il y avait des cars de

 24   couleur bleue du MUP ainsi que des camions de couleur bleue du MUP et des

 25   véhicules blindés. Je me rappelle que les "troupes" du MUP qui sortaient du

 26   village montaient dans les cars et se préparaient à quitter le village.

 27   Q.  Dans quel état se trouvait le village après cela ?

 28   R.  Le village était en flammes.

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  1   Q.  Aviez-vous observé des civils dans le village ou dans les environs ?

  2   R.  A part la police serbe, on n'a vu personne d'autre.

  3   Q.  Avez-vous porté à l'attention du général Lukic cet événement ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Quelle était son explication, a-t-il fourni une explication ?

  6   R.  En toute honnêteté, ce n'était ni la première ni la dernière fois que

  7   j'ai porté un tel incident à son attention. Il s'agissait d'une

  8   intervention plus personnelle de ma part puisque j'ai vu de mes propres

  9   yeux cet événement, mais je ne me rappelle pas précisément de ce qu'il a

 10   dit en réponse à ma question.

 11   Q.  Dernière question à ce sujet. Lorsque vous parliez de telles choses à

 12   M. Lukic, est-ce que vous observiez par la suite des changements quant à

 13   l'action des unités du MUP sur le terrain, ou est-ce qu'ils poursuivaient

 14   ce genre d'opérations par la suite ? Est-ce que les objections que vous

 15   formuliez avaient un quelconque impact ?

 16   R.  Sincèrement, non. Puis-je ajouter un commentaire ?

 17   Q.  Oui, Monsieur.

 18   R.  Peu de temps après mon arrivée, j'ai vu qu'avec le MUP, non pas avec

 19   l'armée yougoslave, il s'agissait d'un grand jeu du chat et de la souris,

 20   en fait. Permettez-moi de raconter une anecdote.

 21   Nous avions des missions qui allaient de lundi à vendredi, puis ensuite on

 22   se reposait ensuite le samedi et le dimanche pour réparer les véhicules et

 23   donner un peu de repos à notre personnel. Très rapidement, on avait

 24   l'impression que les forces de sécurité baissaient leurs activités à la fin

 25   de la semaine, et ensuite, le samedi et dimanche, lorsque nous n'étions pas

 26   sur le terrain, ils réactivaient et intensifiaient leurs activités. Donc,

 27   nous avions par la suite des rapports concernant ces incidents divers.

 28   Donc, Nick Turnbull et moi-même avons décidé par la suite de faire une

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  1   mission sept jours sur sept. Nous avons mis en place un calendrier pour

  2   s'occuper des véhicules tout de même, mais c'était fort intéressant,

  3   c'était un défi.

  4   Q.  Merci. J'aimerais avancer dans le temps et passer à octobre 1998. Vous

  5   avez mentionné les accords d'octobre. Etiez-vous impliqué dans les

  6   pourparlers qui ont eu lieu en octobre 1998 à Belgrade avec les autorités

  7   serbes pour essayer de contrôler de la situation sur le terrain ?

  8   R.  Vous faites référence aux pourparlers des 24 et 25 octobre à Belgrade ?

  9   Q.  Oui.

 10   R.  J'étais présent en tant qu'expert principalement. Au sein des

 11   pourparlers il y avait deux groupes de travail. L'un dirigé par le général

 12   Clark, et qui abordait des questions relatives au régime sous lequel la VJ

 13   exerçait ses activités.

 14   Le deuxième groupe de travail s'attachait à la façon dont la police serbe

 15   exercerait ses activités une fois les accords signés. Le chef de notre

 16   délégation était le général Naumann qui faisait partie du comité de l'OTAN

 17   à l'époque et qui avait accompagné le général Clark à Belgrade pour ces

 18   réunions.

 19   Q.  Comment se fait-il que vous ayez participé à ces pourparlers ?

 20   R.  C'est le général Clark et l'ambassadeur Holbrooke qui m'ont demandé de

 21   participer car ils souhaitaient qu'une personne qui avait des connaissances

 22   solides sur le terrain au Kosovo participe.

 23   Q.  Quel était l'objectif de ces négociations, de ces pourparlers ?

 24   R.  L'objectif ultime était d'arrêter les combats et de sauver les vies. Le

 25   deuxième était de laisser, selon mes estimations, 150 000 [comme

 26   interprété] à 200 000 personnes déplacées rentrer chez eux avant l'hiver.

 27   Il y avait beaucoup de préoccupations à New York et au sein des Nations

 28   Unies à Bruxelles et dans les grandes capitales de l'Europe, et ainsi qu'à

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  1   Washington, concernant l'éventuel désastre humanitaire, si les combats

  2   devaient continuer.

  3   Q.  Qui de la police serbe participait à ces négociations au sein du 2e

  4   Groupe de travail ?

  5   R.  Je ne connaissais pas les noms de tous les participants, mais ceux que

  6   je connaissais et que je reconnaissais étaient le général Djordjevic, le

  7   général Lukic, le général Stevanovic, et le colonel Mijatovic, qui était

  8   l'adjoint du général Lukic.

  9   Q.  Vous avez mentionné le général Lukic et le général Mijatovic. Quel

 10   était le poste, selon vous, qu'occupait le général Djordjevic à l'époque ?

 11   R.  C'était l'adjoint du ministre au sein du ministère de l'Intérieur de la

 12   Serbie, donc chargé des forces de la Sûreté de l'Etat.

 13   Q.  Pour ce qui est du général Stevanovic, quelles étaient ses fonctions ?

 14   R.  Stevanovic était l'adjoint du général Djordjevic. Lorsque je suis

 15   arrivé au Kosovo en août 1998, il me semblait qu'il était l'officier de

 16   police haut placé qui était directement responsable de Kosovo. Autrement

 17   dit, le général Lukic était son adjoint sur le terrain à Pristina.

 18   Cependant, à l'automne, Lukic est devenu formellement responsable. Il était

 19   le commandant de la police serbe à Pristina, au Kosovo, alors que le

 20   général Stevanovic est resté à Belgrade avec des responsabilités que je ne

 21   connais pas. En toute sincérité, je n'ai jamais vraiment compris quelles

 22   étaient ses fonctions à ce moment-là.

 23   Q.  Quelle était la relation entre le général Djordjevic et le général

 24   Lukic, selon vous ?

 25   R.  Le général Lukic était manifestement le subordonné du général

 26   Djordjevic.

 27   Q.  Durant ces négociations, quel était le rôle du général Lukic ? 

 28   R.  Le général Lukic participait à ces négociations, mais je ne me rappelle

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  1   pas de sa participation active.

  2   Q.  Je ne sais pas s'il y a un problème avec le compte rendu. Ma question

  3   était relative au général Djordjevic.

  4   R.  Le général Djordjevic était à la tête de l'équipe serbe chargée des

  5   questions relatives au régime sous lequel opérait la police serbe une fois

  6   les accords d'octobre ont conclu. Il était donc chargé de la partie serbe

  7   au sein de ce Groupe de travail.

  8   Q.  Combien de temps ces négociations ont-elles durées ?

  9   R.  Elles ont duré une journée et une grande partie de la nuit suivante.

 10   Q.  Quels étaient les principaux thèmes abordés lors de ces négociations

 11   avec le MUP ?

 12   R.  En somme, nous discutions de la définition des termes, des conditions.

 13   Q.  Spécifiquement --

 14   R.  Par exemple, qu'est-ce qu'un poste de contrôle, qu'est-ce qu'une route,

 15   par exemple. Je me rappelle lorsque la police serbe -- on devait limiter

 16   leurs activités à certains types de routes. On parlait, on a discuté de la

 17   façon dont on allait mettre en place les accords, des droits de la police

 18   serbe selon les conditions des accords.

 19   Donc, il s'agissait de définir de la façon la plus précise possible les

 20   conditions de l'accord afin de lever toute ambiguïté possible.

 21   Q.  Vous avez mentionné que le général Djordjevic était à la tête de

 22   l'équipe du MUP. Les questions dont vous venez de mentionner, est-ce que

 23   vous négociez directement avec lui, ou l'un des autres membres présents ?

 24   R.  Le général Djordjevic était le négociateur en chef. Le général Lukic,

 25   de manière très occasionnelle, était impliqué et disait quelque chose, mais

 26   en fait c'était le général Djordjevic qui était clairement en charge.

 27   Mme KRAVETZ : [interprétation] J'aimerais qu'on affiche maintenant la pièce

 28   P836 à l'écran.

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  1   Q.  Avez-vous le document à l'écran ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Est-ce que vous reconnaissez ce document ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Pouvez-vous nous dire de quoi il s'agit ?

  6   R.  Il s'agit d'un document sur lequel nous nous sommes mis d'accord après

  7   les négociations. C'est un peu le produit, en quelque sorte, de ces

  8   négociations, donc accord entre le KDOM et le MUP sur les conditions selon

  9   lesquelles la police serbe allait mener à bien ses activités.

 10   Q.  On aperçoit la signature du général Djordjevic, et également la vôtre.

 11   Alors, comment se fait-il que vous ayez signé ce document ?

 12   R.  Le général Clark et le général Naumann souhaitaient que je le signe,

 13   car j'étais sur le terrain. Le général Naumann avait négocié cela

 14   principalement, mais il n'était pas sur le terrain. Donc, ils souhaitaient

 15   que je prenne la responsabilité d'assurer que cet accord soit appliqué dans

 16   les faits. Le général Naumann ne pouvait pas faire cela à Bruxelles.

 17   Q.  Donc, c'est la raison pour laquelle vous étiez la personne qui était

 18   désignée pour signer cet accord avec le général Djordjevic ?

 19   R.  Oui, tout à fait.

 20   Mme KRAVETZ : [interprétation] Avant de poursuivre, Monsieur le Président,

 21   je ne sais pas à quel moment on aura la prochaine pause, si même il y aura

 22   une pause.

 23   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] C'est bien l'heure, mais je pense

 24   qu'on devait mettre à profit notre temps et de poursuivre jusqu'à 13 heures

 25   30, et ensuite lever l'audience à ce moment-là.

 26   Mme KRAVETZ : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président.

 27   Q.  Monsieur Byrnes, regardez le paragraphe numéro 1 du document. Il s'agit

 28   du démantèlement des points de contrôle, et la mise en place de 27 postes

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  1   d'observation.

  2   Alors, pourquoi était-il nécessaire de démanteler des postes de

  3   contrôle du MUP à ce moment-là ?

  4   R.  Afin de permettre aux personnes déplacées de rentrer chez eux.

  5   Q.  Il est question de 27 postes d'observation. Qu'est-ce que cela voulait

  6   dire ?

  7   R.  Ces postes d'observation n'étaient pas les points de contrôle. Les

  8   points de contrôle étaient des barrages routiers, en effet. Il s'agit de

  9   structures physiques de nature temporaire placées sur une route afin qu'un

 10   véhicule ou une personne voyageant sur cette route soit obligé de

 11   s'arrêter. Alors un poste d'observation était précisément là pour une

 12   structure physique, même simplement un trou dans le terrain, mais qui

 13   n'était pas sur une route. Donc la route en question devait être libre pour

 14   assurer le passage des véhicules et des personnes.

 15   Q.  Au cours de ces négociations, aviez-vous l'impression que le général

 16   Djordjevic avait des informations suffisantes relatives aux zones où les

 17   unités du MUP étaient déployées ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Qu'est-ce qui vous a fait croire cela ?

 20   R.  Le général Djordjevic avait fait démonstration d'une très, très bonne

 21   connaissance de la situation sur le terrain au Kosovo. C'était un

 22   professionnel. Il prenait au sérieux son travail en tant qu'adjoint au MUP

 23   et il connaissait les moindres détails des événements et ce que faisaient

 24   ses hommes sur le terrain.

 25   Q.  Y avait-il des questions spécifiques qui ont été abordées lors des

 26   négociations qui vous donnaient cette impression, qui laissaient croire

 27   cela ?

 28   R.  Oui. Les discussions sur l'emplacement des postes d'observation, la

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  1   proximité des routes, les points de conflit éventuels. Le général

  2   Djordjevic avait vraiment une maîtrise professionnelle des faits. Il

  3   maîtrisait très, très bien son sujet, et il négociait dur.

  4   Q.  Pourquoi ?

  5   R.  Il maîtrisait parfaitement la situation. Le général Clark et le général

  6   Naumann, ce sur quoi ils insistaient pourrait porter atteinte d'une manière

  7   très claire à la capacité des officiers de police du général Djordjevic de

  8   combattre l'UCK. Donc il s'agissait de véritables restrictions placées à

  9   l'endroit des officiers de police des unités de police serbe.

 10   Donc de son point de vue, il s'agissait d'une insurrection. Je

 11   comprends maintenant et je comprenais à l'époque pourquoi il souhaitait

 12   défendre ou préserver sa flexibilité pour traiter de questions qui

 13   pourraient se poser. Donc il était vraiment -- il négociait très, très

 14   fermement.

 15   Q.  Lors de ces négociations, est-ce que le général Djordjevic ou d'autres

 16   personnes du MUP vous fournissaient des informations relatives au nombre de

 17   personnel du MUP à l'époque ? Il s'agit de la fin octobre.

 18   R.  En toute sincérité, je ne me rappelle pas de ce fait-là lors des

 19   négociations.

 20   Q.  Est-ce que vous avez abordé cette question, le nombre de personnel du

 21   MUP autorisé au Kosovo après la conclusion de l'accord ?

 22   R.  Oui, cela se retrouvait dans un autre document sur lequel nous nous

 23   sommes mis d'accord. On a discuté et on s'est mis d'accord sur le nombre de

 24   policiers serbes qui pouvaient rester dans la province, ainsi que le nombre

 25   d'unités de la VJ et de leur équipement qui pouvaient rester dans la

 26   province.

 27   Q.  Lors de ces négociations, est-ce que le général Djordjevic a consulté

 28   une autre personne avant d'en arriver à un accord avec vous ?

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  1   R.  Je ne l'ai jamais vu consulter en dehors de la pièce dans laquelle nous

  2   nous trouvions, mais il a quitté la pièce à plusieurs reprises, donc je ne

  3   peux que présumer qu'il quittait la pièce pour consulter d'autres

  4   personnes.

  5   Mme KRAVETZ : [interprétation] Maintenant, j'aimerais qu'on affiche la

  6   pièce P837 à l'écran, s'il vous plaît.

  7   Q.  Est-ce que vous connaissez ce document, Monsieur ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  De quoi s'agit-il ?

 10   Mme KRAVETZ : [interprétation] Peut-être qu'on devrait montrer la deuxième

 11   page de ce document en anglais au témoin.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit d'un document reflétant les

 13   résultats des négociations qui ont eu lieu le 24 et le 25 octobre.

 14   Mme KRAVETZ : [interprétation] Maintenant, si l'on peut passer maintenant à

 15   la deuxième page, numéro II, paragraphe 1 :

 16   "Les autorités de la -- "

 17   Q.  Est-ce que vous vous rappelez pourquoi la date de février 1999 a été

 18   choisie en tant que date de l'accord ?

 19   R.  Cette date a été choisie car il y avait un grand nombre de forces de la

 20   sécurité publique serbe qui se rassemblaient à partir de mars 1998.

 21   Q.  Est-ce qu'il y avait des unités spéciales qui avaient été autorisées à

 22   rester au Kosovo après la conclusion de ces accords ?

 23   R.  Selon moi, selon les informations dont je me rappelle, c'est que les

 24   unités spéciales de la police devaient être retirées du Kosovo. Mais

 25   lorsque je regarde ce document à la page 2, le point 1, on voit que : 

 26   "Le nombre des unités spéciales de la police devait être réduit à

 27   leur nombre tel qu'il était en février 1998."

 28   Donc il s'agissait bien d'une disposition qui permettrait de garder

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  1   un certain nombre d'effectifs de la police spéciale dans la province à

  2   condition que leur nombre ne soit pas plus important que ce qu'il était en

  3   février 1998.

  4   Q.  Et à l'époque, saviez-vous quels étaient les effectifs de la police

  5   spéciale avant février 1998 ? Le MUP vous a-t-il fait suivre cette

  6   information ?

  7   R.  Oui, le MUP nous a communiqué cette information, mais nous n'avions

  8   aucune idée de l'exactitude de cette information. D'après mes souvenirs,

  9   nous ne savions pas du tout quels étaient les effectifs du MUP en février

 10   1998. Donc simplement, nous n'avions pas de point de repère.

 11   Mme KRAVETZ : [interprétation] Pouvons-nous passer à la page suivante, le

 12   premier paragraphe à la page suivante, dans la version anglaise c'est le

 13   paragraphe 2. En version B/C/S, je pense qu'il faut garder la même page.

 14   Q.  J'aimerais que vous regardiez le paragraphe 2, il est question

 15   d'équipement supplémentaire ou d'armements lourds amenés sur le territoire

 16   du Kosovo aux fins de la police spéciale ou de la VJ, et il est indiqué que

 17   tout ceci sera retiré du Kosovo. Pourquoi était-il nécessaire d'englober

 18   cette disposition dans le cadre de l'accord, vous en souvenez-vous ? 

 19   R.  C'était pour permettre à la police de revenir à ses fonctions

 20   habituelles.

 21   Q.  Et était-ce une question qui avait été posée concrètement à l'époque,

 22   cette question des armes lourdes qui devaient être remises par la VJ à la

 23   police et aux forces spéciales de la police pour que celles-ci puissent

 24   exécuter leurs opérations ? Etait-ce une question qui posait problème à

 25   l'époque ?

 26   R.  Oui, parce que les unités de police spéciale que nous avons pu observer

 27   sur le terrain disposaient d'équipement sur le terrain qui comprenait des

 28   armes lourdes. Donc ces équipements-là, selon nous, ne faisaient pas partie

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  1   de l'équipement habituel de la police. Je parle de mortiers, je parle de

  2   véhicules blindés pour le transport des personnes, d'armes antiaériennes

  3   qui étaient montées sur des camions ou sur véhicules blindés. Donc de façon

  4   générale, tout cet équipement ne fait pas partie de l'inventaire policier

  5   habituel.

  6   Selon nous, tout cet équipement était utilisé à l'encontre de la

  7   population, était dirigé contre la population. Nous souhaitions que les

  8   gens reviennent chez eux dans les villages et qu'ils quittent les prés, les

  9   montagnes et les forêts. Et ce qui nous préoccupait, c'est que si la

 10   population voyait la police équipée avec de telles armes, elle hésiterait à

 11   revenir dans les villages, chez eux.

 12   Q.  Etait-ce une question abordée pendant les négociations que vous avez

 13   menées avec le général Djordjevic, cela faisait-il partie des éléments du

 14   contexte général dont il a été question ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Et quelle était l'attitude adoptée par le MUP à l'époque à l'égard du

 17   recours aux armes lourdes et concernant leur transfert depuis la VJ entre

 18   les mains du MUP ?

 19   R.  On le voit d'après ce document, ils ont convenu de faire ce qui est

 20   stipulé dans ce point.

 21   Q.  Donc ils ont convenu de replier leurs effectifs et de rendre les armes

 22   ?

 23   R.  Ils ont signé le document.

 24   Q.  Très bien. J'aimerais maintenant que nous nous concentrions sur le

 25   paragraphe 5. Je sais que vous n'avez pas participé aux négociations avec

 26   la VJ, mais on voit que concernant la VJ, on fait état de tous les éléments

 27   de la VJ qui doivent rester au Kosovo ou revenir aux garnisons. La seule

 28   exception à cette règle générale, ce sont trois compagnies ainsi que

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  1   certaines lignées de communication répertoriées dans le texte. Avez-vous

  2   des éléments d'information qui me permettraient de comprendre pourquoi ces

  3   lignes de communication concrètes ont-elles été incluses dans cet accord,

  4   et pourquoi il a été permis à ces compagnies de rester déployées le long de

  5   ces lignes de communication, ou plutôt, le long de ces routes ?

  6   R.  Oui. En bref, la VJ a reçu l'autorisation d'avoir ces filiales, ces

  7   branches qui étaient déployées sur le terrain et qui avaient pour objectif

  8   de protéger les routes principales par le biais desquelles la VJ recevait

  9   des fournitures. Sur le plan local, ces routes étaient revêtues d'une

 10   importance stratégique. L'argument de la VJ, c'est que l'UCK posait une

 11   menace à cette route et si les routes étaient coupées, les unités de la VJ

 12   sur le terrain auraient été isolées. C'est la raison pour laquelle il leur

 13   a été permis de déployer ces unités sur le terrain.

 14   Q.  Merci.

 15   Laissons de côté ce document. Une fois signé cet accord, êtes-vous

 16   revenu au Kosovo ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Et quel a été votre rôle une fois cet accord passé ? Votre rôle est-il

 19   resté le même que dans les mois précédents la signature de l'accord ?

 20   R.  Mon rôle n'a changé que dans le sens suivant. Nick Turnbull et moi,

 21   personnellement, représentant de la KDOM européenne, sommes devenus les

 22   adjoints de la nouvelle mission de l'OSCE, la mission de la MVK. Il a déjà

 23   été convenu que cette mission doit être établie, mais n'avait pas encore

 24   été mise sur pied. Donc ma responsabilité consistait à suivre la mise en

 25   œuvre de la mission sur la base des accords passés au mois d'octobre.

 26   Q.  Lorsque vous parlez de "suivre la mise en œuvre" des accords, votre

 27   rôle consistait-il concrètement à avoir des contacts avec le MUP ou avec le

 28   MUP et la VJ ?

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  1   R.  Il ne s'agissait pas uniquement de suivre les plaintes formulées à

  2   l'époque, il s'agissait de contrôler le repli des unités de la VJ et des

  3   forces de la police spéciale de la province. Il s'agissait donc de

  4   s'assurer que l'accord a été mis en œuvre entièrement. Et oui, nous avons

  5   également eu des contacts avec la VJ.

  6   Q.  Avez-vous rencontré le général Djordjevic une fois passé l'accord ?

  7   R.  En toute sincérité, je n'en ai pas gardé un souvenir précis. Je sais

  8   que j'ai participé à une réunion large à Pristina à laquelle il a pris part

  9   également. La même chose vaut pour l'ambassadeur William Walker, qui se

 10   trouvait à la tête de la mission de la MVK de l'OSCE. Je sais que nous

 11   avons encore à faire le pourtour des responsabilités de toutes les parties

 12   et de nos obligations mutuelles. Bill Walker se trouvait à la tête de notre

 13   délégation, et j'imagine que j'ai dû le rencontrer à plusieurs reprises

 14   après la signature de l'accord, mais malheureusement, je ne m'en souviens

 15   plus. Je me trouvais à Pristina.

 16   Q.  Souvenez-vous qui a pris part à cette réunion ? Vous dites que cette

 17   réunion organisée à Pristina a compris un grand nombre de personnes.

 18   R.  Je pense que dans notre côté, j'y étais personnellement. Nicholas

 19   Turnbull était là de la part de la KDOM européenne; William Walker était

 20   là, ainsi que le colonel Michael Phillips, l'adjoint du responsable

 21   britannique; ensuite, l'adjoint du responsable de la MVK de l'OSCE;

 22   l'adjoint du responsable des opérations. Voilà, ce sont les personnes dont

 23   je peux me souvenir. De leur côté, il y avait Nikola Sainovic, le maire de

 24   Pristina, et le général Djordjevic. Je ne me souviens plus si le général

 25   Lukic était présent. Je crois qu'il était là, mais je ne m'en souviens pas

 26   avec précision.  

 27   Q.  Vous avez mentionné Nikola Sainovic. Selon vous, quelle était la

 28   fonction exercée par M. Sainovic à l'époque ?

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  1   R.  M. Sainovic était le vice-premier ministre et ses compétences

  2   comprenaient aussi des compétences sur le territoire du Kosovo. Il était

  3   l'homme numéro un chargé du Kosovo au sein du gouvernement.

  4   Q.  Avez-vous eu des contacts avec lui par la suite ou était-ce la seule

  5   fois où vous avez rencontré M. Sainovic ?

  6   R.  Pendant ces mois-là, je rencontrais M. Sainovic assez souvent.

  7   Q.  Et de façon générale, de quelle nature étaient les réunions que vous

  8   avez eues avec lui, ou les contacts que vous avez eus avec M. Sainovic ? 

  9   R.  De façon générale, nos contacts étaient les résultats des problèmes qui

 10   survenaient sur le terrain. De temps en temps, une crise survenait et

 11   chaque fois qu'une crise éclatait, bon, c'est un exemple, l'arrestation de

 12   20 soldats de la VJ par les membres de l'UCK, cela a provoqué des actes

 13   violents. Par conséquent, les accords du mois d'octobre étaient mis en

 14   danger et nous nous efforcions de calmer la situation et de trouver une

 15   solution politique à ces problèmes.

 16   M. Sainovic avait intérêt à trouver une solution politique à la

 17   crise, et comme le temps passait, notre relation s'est développée. Et même,

 18   il a souhaité qu'on organise des réunions à huis clos avec les

 19   responsables, les dirigeants de l'UCK pour étudier toutes les possibilités

 20   pour arriver à une sorte de cessez-le-feu plus simple. Malheureusement, il

 21   a été impossible d'organiser ceci.

 22   Q.  Et d'après vos connaissances, M. Sainovic exerçait-il une sorte

 23   d'autorité à l'époque ? Pouvait-il commander aux unités qui étaient

 24   déployées sur le terrain ? Je parle des unités de la VJ et du MUP.

 25   Exerçait-il une autorité sur ces unités ?

 26   R.  Seulement dans le sens où il était le représentant des autorités

 27   publiques au sein du gouvernement. Selon moi, il n'a jamais pu émettre des

 28   ordres à l'intention de l'armée ou du MUP, mais je souhaite votre réaction

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  1   sur ceci. C'était simplement mon impression personnelle. Je n'avais pas de

  2   connaissances précises sur le sujet et je n'ai jamais pu avoir accès à des

  3   documents qui préciseraient la situation telle qu'elle prévalait à

  4   l'époque. Mais évidemment, l'impression que j'ai eue a été influencée par

  5   l'expérience que j'ai acquise en travaillant dans la marine, puis en tant

  6   que fonctionnaire dans le ministère des Affaires étrangères.

  7   Q.  Et a-t-il exercé une influence sur les événements qui se déroulaient

  8   sur le terrain ? Par exemple, si vous formuliez une plainte, pouvait-il

  9   avoir un impact sur ce qui se passait sur le terrain ?

 10    R.  Absolument.

 11   Q.  Et de quelle manière ?

 12   R.  Je peux vous citer une anecdote pour que vous puissiez vous former une

 13   idée de la situation. Une fois, des soldats de la VJ ont été capturés, et

 14   nous nous sommes adressés directement à M. Sainovic pour trouver une façon

 15   de mettre ces gens à la liberté. L'UCK n'avait pas l'intention de laisser

 16   partir ces gens-là simplement parce que Bill Walker ou Shaun Byrnes ou

 17   quelque autre représentant de la communauté internationale leur diraient :

 18   Laissez partir ces gens-là. Et c'est pourquoi nous avons contacté Sainovic

 19   pour essayer de trouver une sorte de solution. Et c'est lui qui a participé

 20   à l'échange de prisonniers. C'est lui qui a réussi à réaliser ce projet. Il

 21   était clair qu'il exerçait une influence potable. Je ne pense pas que le

 22   général Lukic aurait pu s'en sortir. Au fond, il s'agissait d'une décision

 23   politique.

 24   Q.  Merci. Je voudrais maintenant passer à un sujet différent.

 25   Mme KRAVETZ : [interprétation] Le document 05346, s'il vous plaît. Et pour

 26   le moment, est-ce qu'on pourrait afficher juste la version anglaise pour le

 27   témoin. Je voudrais que l'anglais soit disponible.

 28   Q.  Avez-vous le document devant vous, Monsieur le Témoin ?

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Reconnaissez-vous ce document ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Pouvez-vous nous dire de quoi il s'agit ?

  5   R.  Il s'agit d'une copie de l'un de nos rapports journaliers.

  6   Q.  Nous voyons que cela porte la date du 19 décembre 1998. Alors, d'après

  7   ce que vous avez dit, j'ai cru comprendre qu'à l'époque, vous étiez

  8   toujours en train d'élaborer des rapports journaliers, en cette période

  9   donc; n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Alors, je voudrais attirer votre attention sur le premier paragraphe

 12   qui concerne un cessez-le-feu fragile qui a fait l'objet de pressions

 13   supplémentaires aujourd'hui, au moment où la VJ, l'armée de la RSFY a

 14   déployé un bataillon blindé à Podujevo.

 15   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Excusez-moi, Madame Kravetz.

 16   Maître Djurdjic.

 17   M. DJURDJIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons reçu une

 18   version de ce document mais pour l'accusé, il serait bon que nous ayons

 19   également une version en B/C/S et que cette dernière puisse être affichée.

 20   Moi, personnellement, je ne suis pas en mesure non plus de suivre très

 21   bien, bien que je l'aie sous version papier.

 22   Mme KRAVETZ : [interprétation] J'ai demandé que seule la version anglaise

 23   soit affichée pour le témoin mais bien entendu, nous pouvons également

 24   faire cela.

 25   Si nous pouvions également zoomer sur le paragraphe numéro 2 dans la

 26   version anglaise pour que le témoin soit capable de suivre.

 27   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 28   M. DJURDJIC : [interprétation] Alors, excusez-moi, je ne savais pas qu'il y

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  1   avait un problème pour le témoin. Mais dans ce cas-là, remettez peut-être

  2   la version intégrale au témoin et puis moi, je vais remettre à l'accusé la

  3   version papier, s'il est possible de procéder ainsi. Je ne savais pas où

  4   résidait le problème.

  5   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Cela est affiché dans toute la mesure

  6   de nos possibilités techniques, et je pense qu'il devrait être en mesure de

  7   suivre cela en serbe. Je remercie Mme Kravetz.

  8   Mme KRAVETZ : [interprétation] Puis-je vous demander de vous reporter au

  9   paragraphe numéro 2 de la première page qui a été affichée et non pas de la

 10   seconde.

 11   Q.  Monsieur, je voudrais donc attirer votre attention sur le second

 12   paragraphe de ce document. Il est dit que :

 13   "La VJ a dit à la KDOM qu'un groupe de combat blindé avait été amené

 14   dans la zone de Podujevo tôt dans la journée au titre d'un exercice

 15   d'entraînement, que des représentants de la VJ avaient échoué à informer la

 16   KDOM de ce mouvement en violation de l'accord de vérification au Kosovo."

 17   Alors, est-ce que vous vous rappelez cet incident ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Et en vous fondant sur le souvenir que vous en avez, que s'est-il passé

 20   à cette époque dont il est question, donc le 19 décembre ?

 21   R.  L'armée a déplacé un groupe de combat de la taille d'une compagnie à

 22   partir des casernes du Maréchal Tito à Pristina en direction d'une zone

 23   plus à l'est de Podujevo. Le convoi comprenait également des véhicules des

 24   forces de la police serbe.

 25   Q.  Et comment avez-vous appris l'existence de cet événement, de ce qui se

 26   passait ?

 27   R.  Nous l'avons directement observé.

 28   Q.  Très bien. Où vous trouviez-vous au moment où vous avez observé cela ?

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  1   Où étiez-vous basé au moment de l'observation de ce déploiement ?

  2   R.  Je ne me souviens pas de l'endroit précis, mais ce que je peux vous

  3   dire, c'est que la MVK de l'OSCE tenait des postes d'observation à

  4   proximité des endroits où la VJ était basée, où elle avait ses casernes;

  5   les passages, en fait. Donc, ces postes d'observation permettaient de

  6   suivre, de surveiller ce qui se faisait et si cela était conforme aux

  7   accords. Les mouvements faisaient donc l'objet d'une surveillance, les

  8   mouvements d'entrée et de sortie des casernes de la VJ et des véhicules de

  9   la VJ.

 10   Ensuite, ce groupe de combat a été déployé, a pris des positions dans la

 11   zone de Podujevo. Après cela, j'ai disposé l'un de nos véhicules juste à

 12   l'entrée d'un camp qu'ils avaient mis en place de façon à ce que nous

 13   puissions les suivre de près et les surveiller.

 14   Q.  Et est-ce que quiconque au sein de la KDOM ou de la MVK à cette époque

 15   a eu des contacts avec des officiers de la VJ pour essayer d'élucider ce

 16   qui était en train de se passer, et pourquoi ce déploiement était en cours

 17   ?

 18   R.  Oui. Je voudrais juste souligner que la MVK de l'OSCE était en plein

 19   fonctionnement à l'époque et avait pris à sa charge la responsabilité qui

 20   était celle de s'entretenir avec les autorités serbes au Kosovo, ainsi que

 21   la responsabilité relative aux questions de mise en oeuvre. Donc, d'une

 22   façon tout à fait officielle et formelle, elle traitait avec les autorités

 23   serbes.

 24   D'après ce dont je me souviens, c'est Bill Walker qui a mandaté le

 25   général Drewienkiewicz afin de suivre cet incident particulier. Il est

 26   resté en contact avec cette personne. Il s'agissait peut-être du général

 27   Loncar, mais je ne me rappelle pas exactement son nom. Mais Drewienkiewicz

 28   était en contact direct avec son homologue serbe pendant toute la période

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  1   de cet incident.

  2   Q.  Et nous voyons à partir de ce document que l'information reçue par le

  3   KDOM en provenance de la VJ était qu'il se serait agi d'un exercice, et

  4   c'est mis entre guillemets. Il y a une raison pour cela ?

  5   R.  Oui, il y a une citation entre guillemets, c'est parce qu'ils nous ont

  6   dit cela lorsque nous leur avons demandé.

  7   Q.  Merci.

  8   Mme KRAVETZ : [interprétation] Messieurs les Juges, pouvons-nous verser ce

  9   document. C'est la pièce 05346.

 10   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Le document est versé.

 11   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Messieurs les Juges, le document reçoit

 12   la cote P01246.

 13   Mme KRAVETZ : [interprétation] Pouvons-nous passer maintenant au document

 14   05347 et l'afficher à l'écran. Pouvions-nous zoomer sur les deux premiers

 15   paragraphes de la première page, s'il vous plaît.

 16   Q.  Monsieur, nous voyons que c'est là encore un rapport journalier qui

 17   porte la date du 20 décembre 1998. Donc, c'est un jour après la date du

 18   document précédent. Nous voyons qu'il y a une référence à la KDOM et la MVK

 19   qui surveillent les activités de la VJ et du groupe de combat blindé qui se

 20   livre à un exercice près de Podujevo. Et ensuite au paragraphe 2 il y a une

 21   mention du déploiement qui se poursuit, et une indication également quant

 22   au type de véhicules et d'effectifs déployés. Enfin, la dernière phrase dit

 23   : "L'exercice auquel procède le groupe comprend l'envoi de patrouilles

 24   munies d'armements lourds le long de l'axe Podujevo-Pristina."

 25   Alors, est-ce qu'à ce moment-là, c'est un jour après que vous avez été

 26   informés qu'il avait cet entraînement, cet exercice, est-ce que ce

 27   déploiement a fait l'objet d'observation de la part de vos observateurs ?

 28   Avez-vous toujours l'impression que la VJ déployait ses unités dans la zone

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  1   afin de procéder à un exercice ou avez-vous d'autres informations quant à

  2   ce qui se passait ?

  3   R.  Notre impression tout à fait claire à ce moment-là était qu'il ne

  4   s'agissait pas du tout d'un exercice, mais qu'il s'agissait d'une opération

  5   à laquelle il était procédé afin de protéger l'axe le plus stratégique

  6   reliant le Kosovo à la Serbie. Il s'agissait de la route entre Pristina et

  7   Podujevo, qui se poursuivait au-delà de la frontière avec la Serbie au sens

  8   strict, et se poursuivait jusqu'à Nis, où se trouvait le quartier général

  9   de la 3e Armée.

 10   Il avait également un chemin de fer qui courrait parallèlement cette route,

 11   et c'était la seule voie de chemin de fer importante qui traversait le

 12   Kosovo. Donc, sur ces deux axes se trouvait un enjeu considérable.

 13   L'approvisionnement des forces de sécurité serbe en dépendait, et d'autres

 14   aspects également. Ce chemin de fer était également important pour les

 15   mouvements des civils, ainsi que pour les échanges commerciaux. Donc, il

 16   était très important pour Belgrade d'assurer une continuité de circulation

 17   sur ces axes.

 18   La route subissait des pressions croissantes de la part de l'UCK dans cette

 19   zone. J'ignore s'il en est fait état dans ce rapport, je ne m'en souviens

 20   pas, mais le commandant de l'UCK dans la région de Lap conduisait des

 21   opérations particulièrement agressives. Il n'était pas particulièrement

 22   intéressé pour ce qui était de remplir les conditions des accords

 23   d'Octobre. L'UCK n'y était pas partie, bien entendu. Mais notre travail, et

 24   ensuite le travail de Bill Walker, pour une large part consistaient à

 25   vendre en quelque sorte cet accord à l'UCK et d'essayer d'obtenir que l'UCK

 26   joue le jeu dans les termes de cet accord. Donc, cet individu avait

 27   commencé à déployer ses troupes de plus en plus près de la route, et il y

 28   avait des incidents le long de cette route pendant la période qui a

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  1   précédé.

  2   En bref, c'était là la réplique des forces de sécurité serbe à ces

  3   agissements puisqu'il s'agissait d'un axe tout à fait stratégique, et ils

  4   étaient obligés d'assurer la continuité de la circulation et de défendre

  5   cet axe.

  6   Q.  Vous avez parlé des accords d'Octobre, et vous avez dit que des groupes

  7   de la taille d'une compagnie s'étaient vus accorder l'autorisation d'être

  8   déployés le long de certains axes de communication. Est-ce que l'axe

  9   Podujevo-Pristina-Nis était inclus dans ces axes ? Est-ce que des unités

 10   avaient l'autorisation d'être déployées le long de cet axe ?

 11   R.  Non. J'ai examiné les documents en me préparant, et j'ai vu que cet axe

 12   n'était pas compris dans la liste. Et je dois dire, dix ou 11 ans plus

 13   tard, que je ne peux m'empêcher de m'interroger au sujet de cette omission.

 14   Je n'ai pas d'information particulière à ce sujet, parce que pour ce qui

 15   est de ces déploiements et des modalités du déploiement des forces serbes,

 16   cela a fait l'objet de négociations qui ont été conduites par l'autre

 17   Groupe de travail dirigé par le général Clark, et je n'y ai pas participé.

 18   Nous avons négocié pendant toute la nuit concernant ces documents. Après

 19   cela, Slobodan Milosevic nous a invités un petit-déjeuner tardif, et tout

 20   le monde est remonté en avion et parti. Désolé de répondre de façon aussi

 21   indirecte. Mais je ne sais pas, d'un point de vue stratégique, je ne

 22   comprends pas pourquoi l'armée serbe n'a pas été autorisée à disposer d'un

 23   groupe de combat destiné à protéger cet axe manifestement le plus

 24   stratégique. Je l'ignore.

 25   Q.  Merci.

 26   Mme KRAVETZ : [interprétation] Messieurs les Juges, je vois qu'il est déjà

 27   13 heures 30. Je voudrais, avant la pause, que nous demandions le versement

 28   de ce document 05347.

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  1   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Le document est versé.

  2   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Messieurs les Juges, le document reçoit

  3   la cote P01247.

  4   Mme KRAVETZ : [interprétation] Ce serait un moment opportun pour faire une

  5   pause, Messieurs les Juges.

  6   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous avons utilisé le temps dont nous

  7   disposons sur la bande, Monsieur Byrnes, et nous devons lever l'audience

  8   avant le temps qui est normalement prévu. Notre programme a été quelque peu

  9   perturbé aujourd'hui, mais nous reprendrons nos débats demain matin à 9

 10   heures, et je vous prie d'être prêt à ce moment-là de revenir. Le greffier

 11   vous portera assistance pour tout détail supplémentaire se rapportant à la

 12   période qui nous sépare de demain matin, et Mme Johnson sera également avec

 13   vous.

 14   Donc, nous levons l'audience jusqu'à demain à 9 heures.

 15   [Le témoin quitte la barre]

 16   --- L'audience est levée à 13 heures 31 et reprendra le vendredi 21

 17   août 2009, à 9 heures 00.

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