Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 26 octobre 2009

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 14 heures 16.

  5   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour et bienvenue à nouveau. Nous

  6   allons reprendre nos travaux en écoutant un témoin qui a des mesures de

  7   protection, ce qui fait que nous devrons passer à huis clos. Et en

  8   attendant que nous passions à huis clos, j'aimerais vous rappelez que cet

  9   après-midi, nous avons une séance plénière des Juges, ce qui signifie que

 10   nous devons terminer à 16 heures 45. Et je suis sûr que nous allons pouvoir

 11   donc faire une séance d'une heure et demie. Nous aurons ensuite la pause

 12   habituelle, et ensuite nous reprendrons pour une heure, jusqu'à 16 heures

 13   45, et puis, nous terminerons notre audience pour aujourd'hui. Donc la

 14   journée sera brève.

 15   Demain nous allons siéger demain matin. En fait, le programme avait prévu

 16   que M. le Juge Baird siège à deux endroits à la fois au même moment. Alors,

 17   il a de nombreuses qualités, certes, mais il n'a pas le don d'ubiquité, ce

 18   qui fait qu'il siègera avec nous demain matin et ensuite il siègera dans

 19   une autre audience demain après-midi. Donc tout cela pour vous mettre en

 20   garde, pour vous dire que nous allons devoir nous réveiller de bonne heure

 21   demain, puisque nous siégerons demain matin.

 22   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos,

 23   Monsieur le Président.

 24   [Audience à huis clos]

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 20   [Audience publique]

 21   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bien.

 22   Madame Kravetz.

 23   Mme KRAVETZ : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 24   Interrogatoire principal par Mme Kravetz : 

 25   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur. Est-ce que vous pourriez décliner

 26   votre identité aux fins du compte rendu d'audience.

 27   R.  Je m'appelle John Harry Crosland.

 28   Q.  Je crois comprendre que vous êtes colonel à la retraite, que vous étiez

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  1   colonel pour l'armée britannique et que vous avez quelque 37 années

  2   d'expérience, n'est-ce pas ?

  3   R.  C'est exact.

  4   Q.  Et je crois comprendre que vous avez également eu la fonction d'attaché

  5   de la Défense à l'ambassade du Royaume-Uni à Belgrade et ce, entre le mois

  6   d'août 1996 et le 23 mars 1999; est-ce exact ?

  7   R.  C'est exact, Madame.

  8   Q.  Outre votre travail en tant qu'attaché de la Défense du gouvernement

  9   britannique, j'aimerais savoir si vous avez fourni au bureau du Procureur

 10   les 30 et 31 octobre 2006 une déclaration qui fait état de vos fonctions

 11   précisément pendant les années 1998 et 1999 ?

 12   R.  Oui, je le pense.

 13   Q.  Avez-vous eu la possibilité de revoir ces déclarations avant de venir

 14   aujourd'hui ?

 15   R.  Oui, tout à fait.

 16   Q.  Lors de la séance de récolement, la semaine dernière, vous aviez

 17   indiqué que vous souhaitiez apporter quelques corrections à votre

 18   déclaration. Et je me propose de vous donner lecture de ces corrections par

 19   souci d'efficacité et vous nous direz si ces corrections reprennent

 20   fidèlement ce qui devrait être indiqué dans votre déclaration.Mme KRAVETZ :

 21   [interprétation] Et j'aimerais indiquer, Monsieur le Président, que ces

 22   corrections ont également été apportées dans l'affaire Milutinovic.

 23   Toutefois, il y a eu quelques confusions dans cette affaire, dans l'affaire

 24   Milutinovic, à propos des dates de certains incidents et le témoin a

 25   demandé à pouvoir revenir sur ces corrections pour que tout soit bien

 26   clair, pour que le compte rendu d'audience soit bien clair.

 27   Q.  Donc la première correction vise les paragraphes 50 et 51. Lors de la

 28   séance de récolement, vous avez indiqué que ces paragraphes avaient été

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  1   fusionnés de façon tout à fait inappropriée et qu'il y avait des

  2   informations qui figuraient dans le paragraphe 50 et qui se trouvent

  3   maintenant dans le paragraphe 51. Je vais vous donner lecture du paragraphe

  4   50, qui devrait être comme suit, la première phrase devrait être comme suit

  5   :

  6   "Le 27 août 1998, j'ai montré à Ojdanic des photographies du pilonnage de

  7   Suva Reka qui avait été fait par la VJ juste avant. Sa réaction a été qu'à

  8   la force s'opposerait la force."

  9   Est-ce qu'il est exact que cette phrase dont je viens de vous donner

 10   lecture doit commencer le paragraphe ?

 11   R.  Oui, c'est exact.

 12   Q.  Et un peu plus tard, toujours pour le même paragraphe, il y a une

 13   phrase qui est comme suit :

 14   "Ojdanic a indiqué qu'à la force serait opposée la force et je lui ai

 15   indiqué que lors d'un autre incident, j'avais observé quatre heures de tirs

 16   directs et indirects sur Dunjic, Rznic et Glodjane, ce qui provoquait une

 17   détérioration de la sécurité et d'autres problèmes. Le général a accepté

 18   mes observations."

 19   R.  Oui, c'est tout à fait exact.

 20   Q.  Pour passer au paragraphe 51 maintenant, vous avez indiqué que la

 21   première phrase devrait être comme suit :

 22   "Aux environs du 28 septembre 1998, Lord Ashdown est également venu trouver

 23   directement M. Milosevic et ce, directement après sa visite au Kosovo, et

 24   je pense qu'il a fait des observations à M. Milosevic à propos du pilonnage

 25   de la partie ouest de Suva Reka, ainsi qu'à propos d'autres incidents dont

 26   il est question dans le paragraphe ci-dessus."

 27   Est-ce exact ?

 28   R.  Oui, c'est exact.

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  1   Q.  Pour parler maintenant du paragraphe 69, au bas de ce paragraphe, il y

  2   a une phrase qui est comme suit :

  3   "Il y a deux brigades de la VJ supplémentaires, la 211e Brigade de Nis et

  4   la 1ère Brigade blindée de Belgrade, qui n'avaient jamais été vues

  5   auparavant et qui n'avaient jamais été vues déployées dans la zone de

  6   Kursumlija."

  7   Et vous avez ajouté cette phrase :

  8   "Et une brigade blindée à Raska, qui est probablement la 37e Brigade

  9   motorisée, et ces brigades se trouvent sur les deux grandes voies d'accès."

 10   Est-ce exact ?

 11   R.  C'est exact. 

 12   Mme KRAVETZ : [interprétation] Pour que tout soit bien clair et pour que la

 13   Chambre comprenne bien cette déclaration, il y a un certain nombre de

 14   pièces à conviction auxquelles il est fait référence dans la déclaration

 15   qui se sont déjà vues octroyer une cote et je souhaiterais indiquer à la

 16   Chambre quelles sont les cotes, au cas où ces documents venaient à être

 17   mentionnés. Alors, vous avez dans un premier temps le paragraphe 35, ligne

 18   2. Il s'agit d'un paragraphe qui porte la date du 5 juin 1998. Il est écrit

 19   entre parenthèses "cote à attribuer." La cote 65 ter de ce document est la

 20   cote 02552 et le numéro ERN est indiqué dans la phrase.

 21   Ensuite, deuxièmement, vous avez au paragraphe 50, ligne 2, vous trouverez

 22   une référence à une pièce à qui on doit attribuer une cote. Il s'agit de la

 23   cote 65 ter pour un document dont je vais vous donner la cote ERN :

 24   R0636194, puis R0636195. Et pour ces deux pages ERN, nous avons la cote 65

 25   ter 02554.

 26   Il y a un autre document auquel il est fait référence à la ligne 1 du

 27   paragraphe 61. Il est question d'une cote qui doit être attribuée. La cote

 28   65 ter pour ce document est la cote 02553.

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  1   Au paragraphe 60, il y a une référence également à une cote 2166. Il s'agit

  2   d'une cote dans l'affaire Milutinovic et la cote pour ce document, en

  3   l'occurrence, c'est la cote P87.

  4   Vous avez, au paragraphe 73, une référence à trois ordres d'opération qui

  5   sont énumérés avec leurs numéros ERN correspondants. Vous avez donc pour le

  6   numéro ERN K0520028 la cote D105; pour la pièce K0520036, vous avez la cote

  7   P971; et la cote P970 correspond à la pièce K0520043.

  8   Et puis en dernier lieu, il y a une toute dernière référence qui est faite

  9   à cette pièce, au paragraphe 14, ligne 6, auquel il est fait référence de

 10   façon tout à fait inexacte comme étant la pièce P2166. Or, cette cote

 11   correspond au procès-verbal d'une réunion de l'état-major du MUP de

 12   Pristina, réunion qui a eu lieu le 17 février 1999. La cote exacte devrait

 13   être la cote P85.

 14   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Avant que vous ne poursuiviez, Madame

 15   Kravetz, pour la ligne 25, vous venez de citer la cote. Mais j'en pense

 16   qu'au lieu d'avoir 43 à la fin de cette cote, il faudrait y avoir 42; est-

 17   ce exact ?

 18   Mme KRAVETZ : [interprétation] Ah oui. Pour la cote K0520043 -- non, c'est

 19   42, effectivement.

 20   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] 42, Madame Kravetz ?

 21   Mme KRAVETZ : [interprétation] Oui, tout à fait.

 22   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie.

 23   Mme KRAVETZ : [interprétation] Il est fait référence au paragraphe 73.

 24   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 25   Mme KRAVETZ : [interprétation] Mais je vois que mon estimé confrère

 26   souhaite intervenir.

 27   M. DJURDJIC : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges.

 28   Je dois vous dire que je suis un tant soit peu perplexe après avoir entendu

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  1   Mme Kravetz, car elle m'avait donné une liste qui avait été communiquée;

  2   or, maintenant, elle nous donne des cotes pour des documents qui ne

  3   figurent pas sur la liste. En d'autres termes, les cotes de ces pièces

  4   figurent sur la liste ce sont des cotes qui ont été attribuées, n'est-ce

  5   pas ? Donc je suis d'accord avec l'approche qu'elle a retenue, mais cela

  6   signifie que tous les documents qui ont été utilisés dans l'affaire

  7   Milutinovic qui ont été versés au dossier par l'intermédiaire de ce témoin

  8   devraient être sur la liste. La Défense a quatre ou cinq documents qui

  9   n'avaient pas été considérés comme recevables dans l'affaire Milutinovic ou

 10   qui n'ont pas été considérés comme recevables en l'espèce, mais qui avaient

 11   été versés au dossier dans l'affaire Milutinovic, toujours par le

 12   truchement de ce témoin, donc nous, nous avons l'intention de demander le

 13   versement au dossier, tout comme l'Accusation le fait, si vous m'avez

 14   compris, Monsieur le Président.

 15   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Lorsque Mme Kravetz aura terminé de

 16   nous parler des documents qu'elle se propose de verser au dossier, je me

 17   pencherai sur ce que vous avez dit, mais nous allons dans un premier temps

 18   verser au dossier la déclaration précédente, qui est une pièce. Puis

 19   ensuite, nous verserons chacune des pièces qui ont déjà été versées au

 20   dossier au début de ce procès et auxquelles il est fait référence dans la

 21   déclaration. Et s'il y a des pièces supplémentaires que vous souhaiterez

 22   verser pendant votre contre-interrogatoire, Maître, vous pourrez tout à

 23   fait le faire.

 24   Je pense que maintenant nous allons nous occuper de la déclaration

 25   dont parlait Mme Kravetz.

 26   Mme KRAVETZ : [interprétation] Cela ne me pose aucun problème, Monsieur le

 27   Président. Je voulais juste confirmer avec le témoin qu'il accepte la

 28   teneur de ces déclarations comme correspondant à la réalité et la vérité.

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est tout à fait exact.

  2   Mme KRAVETZ : [interprétation] Je voudrais juste indiquer que les documents

  3   auxquels vient de faire référence mon estimé confrère ne sont pas des

  4   documents que nous avons l'intention d'utiliser pendant la déposition de ce

  5   témoin. Je me contentais de vous donner la cote de ces documents pour que

  6   la Chambre puisse y faire référence facilement, tout comme la Défense,

  7   d'ailleurs, puisqu'en fait, dans la déclaration, il n'était fait référence

  8   à ces documents qu'avec leur cote ERN. Donc je souhaiterais demander le

  9   versement au dossier de la déclaration.

 10   M. LE GREFFIER : [interprétation] Qui se verra attribuer la cote --

 11   L'INTERPRÈTE : -- la cote que l'interprète de la cabine française n'a pas

 12   saisie.

 13   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie. Lorsque vous aurez

 14   fini de nous présenter ces différentes déclarations, je demanderai à M. le

 15   Greffier d'attribuer toutes les cotes et d'indiquer tout cela dans un

 16   mémorandum bref qu'il adressera aux parties et à la Chambre.

 17   Mme KRAVETZ : [interprétation] Au début de l'audience d'aujourd'hui, nous

 18   avons fourni justement à la Défense et au greffier une liste des pièces que

 19   nous nous proposons de verser au dossier, et dans cette liste qui est assez

 20   succincte, d'ailleurs, nous indiquons également les numéros des paragraphes

 21   dans lesquels il est fait référence aux cotes. Donc cela a déjà été fait.

 22   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] C'est très utile. Je vois que la

 23   dernière cote qui a été donnée par M. le Greffier n'a pas été saisie par le

 24   compte rendu d'audience. Il s'agit de la pièce P1400, d'après ce que

 25   j'avais compris. Merci.

 26   Mme KRAVETZ : [interprétation] Je vous remercie.

 27   Q.  Monsieur, est-ce que vous avez déjà témoigné devant ce Tribunal dans

 28   l'affaire Milutinovic et consorts en février 2007 ?

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  1   R.  C'est exact.

  2   Q.  Et avant de venir ici, est-ce que vous avez eu la possibilité de

  3   consulter le compte rendu d'audience de votre déposition ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Vous avez consulté ce compte rendu d'audience. Si les mêmes questions

  6   venaient à vous être posées que celles qui vous ont été posées lors de

  7   votre précédente déposition, est-ce que vous y répondriez de la même façon

  8   ?

  9   R.  Oui, tout à fait.

 10   Q.  Je vous remercie.

 11   Mme KRAVETZ : [interprétation] Je souhaite demander le versement au dossier

 12   du compte rendu d'audience. Nous avons deux versions; nous avons la version

 13   expurgée, qui est la version 05211, et la version versée sous pli scellé,

 14   qui n'est pas expurgée, qui correspond à la cote 0521101. Il y avait une

 15   partie de la déposition qui a été expurgée parce que la déposition avait eu

 16   lieu à huis clos, et c'est exactement ce que nous avons expurgé, mais nous

 17   souhaiterions demander le versement au dossier des deux versions du compte

 18   rendu.

 19   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous allons, dans un premier temps,

 20   attribuer une cote à la version intégrale.

 21   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agissait de la cote 65 ter 0521101,

 22   qui se verra attribuer la cote P1401, versée sous pli scellé.

 23   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Et qu'en est-il de la version expurgée

 24   ?

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agissait de la cote 05211 de la

 26   liste 65 ter, qui se voit attribuer la cote P1402.

 27   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Madame Kravetz, je vous en prie.

 28   Mme KRAVETZ : [interprétation] Je vais donner lecture de notre résumé

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  1   concernant le témoin.

  2   Le témoin est un officier de l'armée britannique à la retraite. Entre

  3   1996 et mars 1999, il était l'attaché militaire britannique à Belgrade, en

  4   République fédérale de la Yougoslavie. Le témoin décrit comment les forces

  5   du MUP et de la VJ étaient présentes au Kosovo pendant son mandat à

  6   l'ambassade. Il décrit les endroits où ces forces ont été vues, leurs

  7   tactiques, les différents uniformes, les types d'armement et de véhicules

  8   utilisés. Le témoin fait également référence à l'escalade des tensions

  9   entre les forces serbes et les forces de l'UCK en 1998. Il fait référence

 10   aux opérations des forces serbes. Le témoin s'est déplacé dans tout le

 11   Kosovo en 1998 ainsi qu'au début de l'année 1999, et rappelle des moments

 12   où les forces du MUP et de la VJ ont utilisé, de façon disproportionnée et

 13   excessive, leurs forces, ce qui a provoqué des dégâts sans raison aux biens

 14   civils, avec des incidents de pillage et du bétail qui a été tué. Il décrit

 15   les mouvements de troupes en 1998 et en 1999.

 16   Il décrit également des réunions et des séances d'information qu'il a

 17   eues avec plusieurs officiers militaires yougoslaves supérieurs en 1998,

 18   notamment le général Ojdanic, le général Dimitrijevic et le général

 19   Perisic. Le témoin a présenté des griefs à la VJ à propos des tactiques

 20   extrêmement lourdes utilisées par les unités de la VJ pendant leurs

 21   opérations. Le témoin fait référence à la présence des unités de la VJ et

 22   du MUP qui opéraient à l'extérieur du Kosovo après les accords du mois

 23   d'octobre 1998. Il fait référence au renforcement de ces unités en 1999. Il

 24   décrit les actions de la VJ et du MUP à Podujevo en décembre 1998 et à

 25   Racak en janvier 1999, plus précisément.

 26   En dernier lieu, le témoin décrit la coordination opérée entre le MUP

 27   et la VJ lors des opérations de combat pendant l'offensive d'été de 1998 et

 28   les opérations mixtes précédant la campagne de l'OTAN.

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  1   J'en ai terminé, Monsieur le Président.

  2   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.

  3   Est-ce qu'il y a d'autres documents dont vous souhaitez demander le

  4   versement au dossier, à part le compte rendu d'audience ?

  5   Mme KRAVETZ : [interprétation] Je me propose, lors de mon interrogatoire,

  6   d'étudier certains documents. Ce sont des documents auxquels il est fait

  7   référence dans les déclarations. Ils se trouvent tous sur la liste qui a

  8   été remise au greffier ce matin.

  9   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous allons recevoir ces documents que

 10   vous avez maintenant identifiés. Ils deviendront des pièces. Des cotes leur

 11   seront attribuées et une liste de ces cotes sera fournie aux conseils, et

 12   ce, en temps voulu.

 13   Mme KRAVETZ : [interprétation] Je vous remercie.

 14   Monsieur le Président, si vous n'y voyez pas d'inconvénient, je

 15   souhaiterais demander à M. l'Huissier un classeur dans lequel se trouvent

 16   les documents sur lesquels nous allons nous pencher aujourd'hui, pour que

 17   le témoin puisse justement parcourir ces documents de façon plus facile et

 18   puisse y faire référence. Il s'agit de documents qui se trouvent tous sur

 19   notre liste d'information.

 20   J'aimerais également vous dire que le témoin a amené avec lui une

 21   carte, une carte du Kosovo, sa carte personnelle de la province du Kosovo,

 22   et il souhaiterait pouvoir y faire référence, à cette carte, s'il en

 23   éprouve, en tout cas, le besoin lors de sa déposition.

 24   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous verrons s'il en éprouvera le

 25   besoin.

 26   Mme KRAVETZ : [interprétation] Je vous remercie. Je voulais juste vous le

 27   dire, parce que cette carte se trouve devant le témoin.

 28   Q.  Monsieur, j'aimerais vous demander de faire référence au premier

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  1   intercalaire, l'intercalaire 1 de votre classeur. Il s'agit de la

  2   déclaration du témoin, pièce 02645 de la liste 65 ter.

  3   Mme KRAVETZ : [interprétation] Et j'aimerais vous demander d'afficher la

  4   page 7 pour la version anglaise, qui correspond à la page 9 de la version

  5   B/C/S.

  6   Q.  J'aimerais attirer votre attention sur le paragraphe 28. Au paragraphe

  7   28, vous faites référence au fait que le 5 mars 1998, vous avez vu le plus

  8   gros rassemblement des forces du MUP jusqu'à ce jour, avec plus de 200

  9   membres du MUP qui étaient présents au poste de contrôle de Komorane, et

 10   vous faites référence à l'attaque près de Serbica [phon] à Donje Prekaz où

 11   54 personnes ont été tuées.

 12   Est-ce que vous pourriez expliquer très rapidement à la Chambre

 13   comment il se fait que vous vous trouviez près de la propriété familiale de

 14   la famille Jashari ?

 15   R.  Lorsque les tensions ont commencé au Kosovo, les différents attachés

 16   militaires des pays de l'OTAN, les attachés militaires italiens, allemands,

 17   néerlandais, français, canadiens, américains et britanniques ont décidé de

 18   superviser les événements qui se déroulaient au Kosovo, et ce, afin de

 19   pouvoir présenter des rapports à leurs gouvernements respectifs, rapports

 20   sur la situation qui commençait véritablement, et les tensions qui

 21   commençaient à augmenter. Lorsque la présence de l'Armée de libération du

 22   Kosovo est devenue véritablement manifeste et apparente à partir de l'année

 23   1996, jusqu'au moment où l'incident de Donje Prekaz est survenu au début de

 24   l'année 1998, nous avons essayé de superviser les événements, et à cet

 25   occasion je me trouvais en mission avec l'attaché militaire américain. Nous

 26   savions que quelque chose s'était passé dans la zone de Drenica. Nous

 27   sommes arrivés de Pristina, nous avions emprunté l'accès routier principal

 28   vers Pec et nous nous trouvions au carrefour à Komorane. Là, nous avons pu

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  1   constater qu'il y avait un grand rassemblement de forces du MUP. On ne nous

  2   a pas autorisés à pénétrer dans ce secteur pour des raisons évidentes. Donc

  3   ensuite, nous avons poursuivi notre chemin vers Klina et nous avons fait

  4   une boucle au nord, en passant par Rudnik, et je dois dire que toute cette

  5   zone était quadrillée par le MUP, puisque cette opération avait commencé.

  6   Ce n'est qu'un peu plus tard que j'ai réussi à entrer dans le secteur

  7   de Donje Prekaz, c'est là que la demeure familiale de la famille Jashari

  8   avait littéralement été détruite, déchiquetée. Nous avons entendu d'autres

  9   sources que des personnes avaient été conduites à Pristina, et qu'ensuite

 10   des corps avaient été renvoyés, les corps des personnes qui étaient mortes.

 11   Ce sont ces corps justement que j'ai photographiés.

 12   Q.  Dans votre déclaration, vous faites référence au fait que le 5 mars

 13   1998, vous avez vu ce rassemblement de forces. Est-ce que c'est la première

 14   fois que vous vous déplaciez au Kosovo cette année-là ?

 15   R.  Non, ce n'était pas la première fois. Je pense que pour cette opération

 16   précise, il y avait eu une attaque de l'UCK qui avait été menée contre un

 17   poste de police à Rudnik, dans un premier temps. Je ne m'en souviens pas,

 18   mais il me semble qu'il y a eu deux ou trois membres du MUP qui ont été

 19   tués. En quelque sorte, cette opération était des représailles après cette

 20   attaque de l'UCK.

 21   Q.  Vous indiquez dans ce même paragraphe que vous pensiez que c'est le MUP

 22   qui avait effectué cette opération, et vous faites référence aux unités du

 23   SAJ et du JSO, deux unités spéciales du MUP qui auraient participé à cette

 24   opération avec la PJP. Sur quoi vous fondez-vous pour avancer cela ?

 25   R.  J'ai fait de nombreuses déclarations devant ce Tribunal, il y a de

 26   nombreux rapports que j'ai présentés à mon gouvernement ainsi qu'à

 27   Belgrade, et ce sont des détails qui, à l'époque, en 1998, étaient exacts,

 28   et je m'en tiens à ce que j'ai écrit dans ces rapports. Je dirais que oui,

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  1   ces unités y ont participé. Vous savez, il y a beaucoup d'eau qui a coulé

  2   sous les ponts depuis, puisque 12 années se sont écoulées.

  3   Q.  Je vous remercie. Au paragraphe suivant, vous indiquez - il s'agit du

  4   24 mars - que vous avez pour la première fois vu qu'il y avait des signes

  5   évidents de Serbes qui se rassemblaient pour mener à bien une attaque mixte

  6   dans la zone de Decani. Au paragraphe suivant, vous parlez de rassemblement

  7   de forces de la VJ, et ce, dans la zone de Decani, et vous parlez des

  8   forces de la VJ qui fournissent un appui feu pour la partie occidentale du

  9   Kosovo. Donc il s'agit du début de l'année 1998. Comment est-ce que vous

 10   compreniez le rôle des forces de la VJ au Kosovo ?

 11   R.  Il s'agit d'une opération initiale. Comme dans de nombreuses opérations

 12   menées contre des insurgés, en général, c'est la police qui s'en occupe.

 13   Dans ce cas, au Kosovo, il s'agissait du MUP. Mais en fait, il serait naïf

 14   de ma part de dire qu'il ne s'agissait pas d'une opération mixte, parce

 15   qu'il ne faut pas oublier qu'il s'agit d'un problème de sécurité interne,

 16   mais n'oubliez pas qu'au sein du Kosovo il y avait quelque 52 corps de

 17   l'armée, avec entre 15 à 20 000 soldats de l'armée yougoslave, de la VJ,

 18   qui étaient cantonnés eux-mêmes et basés au Kosovo. Donc il est tout à fait

 19   logique qu'il y ait eu coordination entre ces deux forces, le MUP et la VJ,

 20   et qu'en fin de compte les deux ont participé à cette opération qui est

 21   devenue une opération très, très complexe menée contre l'UCK.

 22   A Decani en particulier, il faut savoir qu'il s'agissait d'un

 23   déploiement d'artillerie. Je suppose que le but était de couvrir toute la

 24   partie occidentale jusqu'à Pec au nord, puis jusqu'à Djakovica vers le

 25   centre sud de cette zone. Je dirais que cela semblait tout à fait logique.

 26   Qui plus est, il y a eu une utilisation très lourde des forces, qui est une

 27   tendance, en fait, qui a persisté pendant toute l'année 1998, et ce,

 28   jusqu'en 1999.

Page 9167

  1   Q.  Vous faites référence au 52e Corps d'armée. A quelle unité ou à quel

  2   corps faites-vous référence, plus précisément ?

  3   R.  Il s'agit du 52e Corps, du Corps de Pristina, qui faisait partie de la

  4   3e Armée qui était basée elle-même à Nis, et au départ elle était commandée

  5   par le général Lazarevic et par le général Pavkovic également.

  6   Q.  Pour revenir à ma question, Monsieur, vous vous êtes rendu au Kosovo en

  7   1998, et je vous avais demandé comment est-ce que vous envisagiez le rôle

  8   des forces de la VJ au Kosovo, vu les informations que vous déteniez en

  9   tant qu'attaché militaire ?

 10   R.  Fondamentalement, la VJ avait quatre rôles. Comme je vous l'ai déjà

 11   dit, ils avaient une présence permanente dans cette zone, ce qui fait que,

 12   bien entendu, ils devaient protéger leurs propres bases, leurs propres

 13   zones d'entraînement et d'exercice, les frontières internationales avec

 14   l'Albanie et la Macédoine, ainsi que les lignes de communication entre ces

 15   deux bases, lignes de communication qui passaient par le Kosovo.

 16   Q.  Et est-ce que vous avez vu une modification du rôle de la VJ à un

 17   moment donné pendant l'année 1998 ?

 18   R.  Oui, oui, je pense que probablement en septembre et octobre, à

 19   l'automne, lorsqu'il a semblé que le MUP avait besoin de beaucoup plus

 20   d'aide pour pouvoir gérer la situation posée par l'UCK. Il y avait

 21   certaines compétences, certaines spécialisations dont ne disposait pas le

 22   MUP. Il n'avait pas, par exemple, de personnel formé dans le domaine de

 23   l'artillerie ou dans le domaine de l'utilisation des chars ou d'autres

 24   armes lourdes.

 25   Q.  Nous reviendrons sur ce sujet un peu plus tard pendant mon

 26   interrogatoire principal. J'aimerais vous demander maintenant de prendre

 27   l'intercalaire numéro 2 de votre jeu de documents.

 28   Mme KRAVETZ : [interprétation] Ce qui correspond à la pièce 00688, si vous

Page 9168

  1   pouvez le trouver, Monsieur. Je souhaiterais que le document soit affiché à

  2   l'écran également.

  3   Je voudrais simplement souligner que le document qui apparaît à

  4   l'écran a certaines additions, des additions qui ont été apportées dans le

  5   cadre de l'article 70, ce qui nous permet d'utiliser ces documents dans

  6   cette procédure. Donc pour tous les documents que nous utilisons

  7   aujourd'hui, vous verrez qu'il y a des notes de ce type.

  8   Q.  Monsieur, est-ce que vous reconnaissez ce document ? Nous voyons qu'il

  9   s'agit d'un document qui porte comme sujet : Kosovo, sitrep, et qui donne

 10   comme date 11-12 mai 1998. Il s'agit de l'intercalaire 2 du document.

 11   R.  Oui, je le vois.

 12   Q.  Pouvez-vous nous expliquer brièvement de quoi il s'agit dans ce

 13   document.

 14   R.  Pendant cette période, 1998 à 1999, Monsieur le Juge, j'ai fait quelque

 15   80 rapports écrits qui ont été envoyés par le biais de Belgrade à notre

 16   bureau du Commonwealth et au ministère de la Défense à Londres, et il

 17   s'agit d'un de ces rapports que nous appelons "Situation de rapports" qui

 18   fait état des événements survenus le jour de la date du rapport.

 19   Q.  Si vous prenez la deuxième page, sous le numéro 7, nous voyons le nom

 20   Donnelly sur ce rapport. C'est donc la personne qui a signé ce document.

 21   Est-ce que vous pourriez nous expliquer de quoi il s'agit.

 22   R.  L'ambassadeur Donnelly était l'ambassadeur à Belgrade pendant cette

 23   période, et comme je faisais partie de son équipe au sein de l'ambassade du

 24   Royaume-Uni à Belgrade, tous mes rapports devaient passer par son

 25   intermédiaire pour qu'il puisse faire ses commentaires politiques, si

 26   c'était nécessaire. Et comme je l'ai déjà dit, c'était une question, comme

 27   j'étais attaché militaire, je travaillais en tandem avec l'ambassadeur

 28   Donnelly, lui, le côté politique pour être sûr que nous produisions les

Page 9169

  1   rapports les plus précis possible pour une situation extrêmement délicate

  2   qui se produisait au Kosovo.

  3   Q.  Vous nous dites que vous travailliez en tandem avec l'ambassadeur

  4   Donnelly pour la rédaction de ces rapports. Quel était votre rôle dans la

  5   production de ces rapports ?

  6   R.  Comme j'étais attaché militaire et que je disposais d'une expérience

  7   considérable, je faisais mes remarques sur la situation militaire, et

  8   l'orientation que cela prenait, ce que nous pourrions faire pour aider. Et

  9   suite à cela, soit il l'acceptait et donc il ajoutait ses réflexions

 10   politiques sur la situation dans sa perspective à Belgrade.

 11   Q.  Peut-on donc décrire ce document que nous avons ici à l'écran et que

 12   vous avez sous les yeux comme étant un rapport de l'état de la situation de

 13   sécurité sur le terrain en se fondant sur les informations que vous aviez

 14   pu constater à l'époque ? Est-ce que c'est une bonne description ?

 15   R.  Oui, effectivement, c'est tout à fait correct.

 16   Q.  Pouvez-vous reprendre la page 1. Ce qui m'intéresse, c'est le

 17   paragraphe 2, qui se réfère à Ponosevac. J'attends que l'on puisse le

 18   présenter à l'écran.

 19   Vous faites ici certaines remarques au sujet du village de Ponosevac

 20   et je voudrais que vous me disiez quelques mots dans le paragraphe qui

 21   commence :

 22   "La route au sud de Ponosevac qui avait toute une série d'étuis à

 23   munitions, y compris des grenades."

 24   R.  Messieurs les Juges, la zone de Ponosevac est extrêmement isolée. Elle

 25   est proche de la frontière de l'Albanie, qui y a une station de police

 26   militaire, et c'était une zone où il y avait une grande activité déployée,

 27   tant de la part de l'UCK que par les forces du MUP. Ce jour-là, nous y

 28   étions donc et la route était vraiment revêtue de douilles et il y en avait

Page 9170

  1   une grande quantité. Il n'y avait aucun signe de vie de villageois. Il y

  2   avait eu beaucoup de dommages structurels apportés aux maisons par le tir

  3   de mortier. Il y avait des animaux morts dans les champs et toute la zone

  4   était désertée par la population locale.

  5   Q.  Pourriez-vous prendre le paragraphe 7 qui figure à la deuxième page de

  6   l'anglais. C'est un paragraphe qui commence par le terme "évaluation" et on

  7   dit :

  8   "La situation pouvait rapidement dégénérer…" et la dernière phrase,

  9   qui est celle nous intéresse : 

 10   "C'est qu'une action de terreur très forte dans la zone de Ponosevac,

 11   puisque il n'y a pas eu de changements tactiques."

 12   Est-ce que vous pourriez nous expliquer ce à quoi se réfère cette

 13   dernière phrase, ce qui montre que la tactique n'a pas changé ?

 14   R.  Pendant tout le conflit des Balkans, malheureusement, nous avons

 15   constaté des tactiques extrêmement lourdes. Souvent, ce sont les civils

 16   innocents qui en paient le prix, et nous avions espéré pouvoir éviter cela

 17   au Kosovo. Malheureusement, comme vous pouvez le voir à la lecture de ce

 18   rapport, même au début de cette période, nous étions revenus à cette

 19   période où l'on détruisait de façon tout à fait aléatoire les villages, où

 20   l'on bombardait. Et la raison pour laquelle j'ai remis cela en question,

 21   c'est parce que la raison qui sous-tendait cela, c'est que les forces de

 22   sécurité serbes étaient en train d'ouvrir la route pour éviter qu'il n'y

 23   ait des embuscades en faisant sauter les habitations le long de la route.

 24   Et tout ceci fait que la population qui ne s'intéressait pas à la présence

 25   de l'une ou l'autre partie dans la région, une fois que leurs maisons

 26   avaient été bombardées, ils n'allaient certainement pas soutenir la partie

 27   qui avait bombardé leurs maisons; et c'est ainsi qu'a commencé cette

 28   campagne où les villages ont été détruits et bombardés de façon aléatoire.

Page 9171

  1   Mme KRAVETZ : [interprétation] Je demande à ce que cette pièce soit portée

  2   au dossier sous la cote 00688.

  3   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Elle est reçue.

  4   Mme KRAVETZ : [interprétation] Elle figure sur ma liste de documents. Je

  5   voudrais simplement indiquer que d'autres documents figurent sur ma liste

  6   et donc je pense que les cotes seront assignées par la suite.

  7   Q.  Pouvons-nous maintenant passer au 65 ter 00687. C'est l'intercalaire 3

  8   dans votre dossier. Il s'agit de nouveau d'un rapport daté du 28 mai 1998.

  9   La première page, au bas de cette page, nous lisons qu'il y a un tour de

 10   deux jours dans le Kosovo occidental et ceci sous le "Résumé" dans une

 11   série d'opérations.

 12   Est-ce que vous avez participé à cette visite de deux jours ?

 13   R.  Oui, en effet.

 14   Q.  Nous voyons qu'il s'agit d'un rapport beaucoup plus détaillé que celui

 15   que nous venons de voir et qu'il comporte quatre pages. Est-ce que ce

 16   rapport aurait été rédigé de la même façon que celui dont vous avez parlé ?

 17   Nous aimerions que vous preniez la page 2 dans la version anglaise; c'est

 18   la page 6 dans la version B/C/S. Et il s'agit du point 4, qui porte comme

 19   référence : "Les incendies de maisons dans le village nord de Decani." Est-

 20   ce que vous pourriez nous expliquer de quoi il s'agit ? C'est au nord de

 21   Decani.

 22   R.  La route qui mène au nord de Djakovica, en passant par Decani, en

 23   allant vers la ville de Pec au nord, est devenue vraiment la ligne de front

 24   pour les affrontements entre l'UCK et les forces serbes. Et en termes

 25   militaires, il s'agissait d'une défense linéaire que les forces de sécurité

 26   serbes avaient essayé de mettre en place afin d'arrêter le renfort de l'UCK

 27   à partir de l'Albanie. Donc cette route allant de Djakovica en passant par

 28   Decani et à Pec, de part et d'autre de cette route, il y avait des combats

Page 9172

  1   pendant toute la durée de 1998; et la plupart des villages qui longeaient

  2   cette route, Prilep à Decani lui-même, les rues ont été détruites. Elles

  3   étaient aux mains des forces de sécurité serbes et elles ont été attaquées

  4   à intervalles réguliers par l'UCK, qui était également présente en force

  5   dans la même région.

  6   Q.  Si nous prenons la page 3 qui est maintenant affichée à l'écran, c'est

  7   la page 7 dans le rapport B/C/S, on se réfère à des incidents de maisons

  8   dans Dolovo. Est-ce que c'était similaire à la destruction de propriétés

  9   que vous avez vue dans la zone de Decani ?

 10   R.  Oui, comme je l'ai déjà dit, nous avons assisté à des attaques dans

 11   différentes régions; et les villages situés le long de la route principale

 12   étaient la cible de ces attaques et des dommages considérables ont été

 13   apportés à ces villages. Ceux-ci étaient répandus sur la plupart du

 14   territoire du Kosovo à ce stade.

 15   Q.  Je me réfère au même document et je voudrais que l'on prenne la

 16   dernière page. C'est la page 4 de ce rapport. C'est le paragraphe juste en

 17   dessous du 9, et dans la version B/C/S c'est la page 9, page 4 de la

 18   version anglaise. Et je voudrais attirer votre attention sur un paragraphe

 19   qui commence par: 

 20   "Pendant notre tour nous pensons que la VJ avait accordé son soutien

 21   et un certain nombre de véhicules avaient été repeints en bleu."

 22   Est-ce que vous pourriez nous faire une remarque sur ce qui figure dans ce

 23   paragraphe ?

 24   R.  Comme je l'ai indiqué au Tribunal, le noyau de Pristina de la VJ était

 25   toujours basé dans la province de Kosovo et de ce fait, ils avaient la

 26   capacité de fournir un soutien logistique. Il est tout à fait sensé

 27   d'utiliser les bases logistiques sur place et les différentes bases dont

 28   ils disposaient de façon tout à fait légitime à différents endroits du

Page 9173

  1   Kosovo. Divers véhicules, essentiellement des véhicules, des chars et

  2   essentiellement des véhicules de protection antiaérienne avaient été

  3   repeints en bleu pour couvrir la couleur VJ verte. Et je voudrais suggérer

  4   au Tribunal que des opérations de police normales ne requièrent pas de tirs

  5   antiaériens de 20, 30 et 40-millimètres des armements lourds. Ce type

  6   d'armement était utilisé pour faire sauter les villages dans des attaques

  7   surprises, comme je les appellerais.

  8   Q.  A quelle fréquence avez-vous vu ce type d'armement et ce type de

  9   véhicules qui avaient été repeints en bleu et qui étaient utilisés par les

 10   opérations de police de cette façon ?

 11   R.  Ceci est mentionné dans la plupart des rapports que j'ai versés au

 12   dossier et ceci était pendant l'année 1998 et 1999.

 13   Q.  Est-ce que vous en avez vu la preuve partout au Kosovo que ce type

 14   d'équipement était utilisé dans les opérations de police ou est-ce que

 15   c'était spécifique dans certaines zones ?

 16   R.  Non. Je pense que cela s'est produit partout au Kosovo.

 17   Q.  Dans votre expérience, quelle serait la signification qu'il faut

 18   octroyer à cela ? Nous parlons ici de la période de mai 1998 quand vous

 19   avez commencé à voir que la VJ accordait un soutien logistique au MUP ?

 20   R.  Effectivement, si l'on dispose d'outils logistiques, on va utiliser

 21   cette capacité logistique en vue de promouvoir et de mener à bien ses

 22   propres opérations. Je dirais que les choses sont différentes lorsque la VJ

 23   a commencé à soutenir par des tirs directs à partir de leurs chars et par

 24   des tirs indirects d'artillerie et se mêlent d'une opération visant à

 25   combattre des insurgés, ceci entraînera des dommages nettement plus

 26   importants mais également, cela entraînera des pertes de vies humaines du

 27   côté de la population civile.

 28   Q.  Vous vous êtes référé à la VJ qui a commencé à soutenir de façon

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  1   directe, par des tirs directs et indirects. Alors, quelle est la différence

  2   entre les deux ? Ici, je parle dans la perspective de quelqu'un qui n'est

  3   pas initié. Quelle est la différence entre le soutien par un tir direct ou

  4   un tir indirect ?

  5   R.  Le soutien par tirs directs pour les militaires, c'est par exemple

  6   lorsque l'on tire d'un char, donc on tire de façon directe sur une cible

  7   qui est effectivement présente dans votre ligne de mire. Et le tir indirect

  8   provient de l'artillerie ou par des tirs de mortier qui peuvent être montés

  9   ou qui peuvent viser les cibles; mais normalement, elles ne sont pas dans

 10   la ligne de mire.

 11   Q.  Alors, vous dites dans la même réponse que ceci entraînerait

 12   inévitablement aussi beaucoup plus de dommages, mais également des pertes

 13   de vie de la population civile. Est-ce que vous pourriez élaborer un peu ?

 14   R.  Dans toutes les opérations visant à contrer des insurrections, il y a

 15   différents niveaux de forces qui peuvent être déployés par les forces de

 16   sécurité. En général, les forces de sécurité commencent en utilisant un

 17   niveau minimal de force et puis on fait augmenter le niveau de force

 18   d'intervention en fonction des besoins. Je suggérerais que le fait

 19   d'utiliser des mortiers et des mortiers antiaériens sur des villages est

 20   une utilisation extrêmement forte et excessive du tir.

 21   Q.  Merci. Je voudrais maintenant passer de cette preuve, qui est le 00687

 22   et je vous demanderais de prendre l'intercalaire 4 de votre dossier.

 23   Mme KRAVETZ : [interprétation] Et j'aimerais que l'on affiche le 00685 à

 24   l'écran, qui est de nouveau un document qui figure sur la liste que je

 25   remettrai au greffier aujourd'hui.

 26   Q.  Nous voyons que ce rapport qui date du 30 juillet 1998 est présenté

 27   sous le même format que ceux que nous avons vus auparavant. Et je suppose

 28   que ce rapport a été rédigé de la même façon que les rapports sur lesquels

Page 9175

  1   vous vous êtes prononcé jusqu'à présent.

  2   R.  En effet, c'est correct.

  3   Q.  J'aimerais attirer votre attention sur le paragraphe à la première page

  4   qui porte comme intitulé "Résumé." Et je vous demanderais de vous tourner

  5   vers la deuxième phrase, à la fin de la deuxième ligne. On dit :

  6   "…une force nette qui s'était alignée pour une attaque sur Malisevo."

  7   Alors, est-ce que c'est quelque chose que vous aviez observé, donc, que ces

  8   forces s'étaient mises en place pour attaquer Malisevo ?

  9   R.  Oui, effectivement, nous étions arrivés d'Orahovac. Nous étions arrivés

 10   dans cette région. Nous étions allés en sortant de la zone détenue par les

 11   Serbes vers le nord, où nous pensions qu'il y avait un quartier général de

 12   l'UCK à Malisevo. L'UCK nous a escorté au siège de l'UCK. On nous a

 13   questionnés pendant un certain temps et puis on nous a relâchés pour

 14   continuer notre voyage vers le nord pour aller dans un village près de

 15   Lapusnik qui se trouve près de la route Pristina-Pec. C'est dans cette

 16   région que nous avons remarqué les déploiements de forces auxquelles nous

 17   nous référons dans ce rapport, y compris des chars, des T-55. Et il y avait

 18   également du déploiement de forces dans la zone de Kijevo, à l'ouest de

 19   Lapusnik. Et en parlant au commandant de cette force, il était clair qu'ils

 20   étaient non seulement légèrement surpris que nous soyons parvenus de

 21   Malisevo qui était son objectif. Et c'était clair que dès que nous serions

 22   partis de la zone, ils avaient l'intention de se diriger vers Malisevo.

 23   Q.  Vous vous êtes également référé à une autre force à Kijevo dans ce

 24   rapport. Vous parlez d'une JSO, PJP et le reste de la VJ qui était présent

 25   à Kijevo. Ce rapport se réfère à la période fin juillet 1998. A ce moment-

 26   là, est-ce que vous aviez observé des changements sur le terrain dans la

 27   façon dont les forces opéraient sur le terrain ? Et je me réfère surtout

 28   aux changements dans l'opération des forces VJ et MUP sur le terrain.

Page 9176

  1   R.  Oui. A cette période-là - comme d'ailleurs je l'ai dit dans divers de

  2   mes rapports - en théorie, l'UCK détenait à peu près 75 % du territoire du

  3   Kosovo. Il y a quatre axes principaux allant de l'ouest vers l'est et

  4   traversant le Kosovo. Au nord de Mitrovica allant vers l'ouest, vers Klina,

  5   cette route-là était bloquée à hauteur de Rudnik. Allant vers le sud, en

  6   venant de Pristina, en passant par Komorane pour aller à Lapusnik, et là,

  7   la route était également bloquée par l'UCK; et si l'on venait du sud de

  8   Pristina pour aller encore plus au sud vers Stimlje, l'UCK détenait

  9   également cette route. La seule route qui était ouverte pour la VJ pour

 10   approvisionner ses forces stationnées à l'ouest était la route qui venait

 11   de Pristina, au sud, donc en allant vers Urosevac et passant par les

 12   collines vers Prizren. C'était une route extrêmement longue et difficile

 13   parce qu'il y avait un certain nombre de cols de montagnes à traverser. Je

 14   dis que l'UCK contrôlait cette voie. Ils les avaient bloquées ces routes,

 15   et en termes militaires, leurs positions étaient relativement faibles sur

 16   les trois routes au nord, donc que j'ai indiquées figurant au nord du

 17   Kosovo.

 18   Je crois que les forces de sécurité serbes - et c'est elles qui

 19   devront répondre à cette question, moi je ne peux pas y répondre - les

 20   forces serbes se sont rendu compte qu'elles devraient intervenir pour

 21   reprendre le contrôle de cette zone. Et c'est pour cela que je suppose que

 22   la décision a été prise d'impliquer la VJ dans les opérations au jour le

 23   jour. Et ceci a culminé dans une poussée assez importante en septembre-

 24   octobre 1998, où de fait, ils sont parvenus à rouvrir ces axes routiers,

 25   mais comme dans beaucoup de conflits dans les Balkans, on dégage le

 26   terrain, mais si on ne reste pas et si on n'occupe pas les positions sur

 27   place, les positions sont reprises par la partie adverse.

 28   Q.  Pour préciser votre réponse, vous dites que l'UCK détenait 75 % du

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  1   territoire du Kosovo. Est-ce que vous nous dites que c'est à cause du

  2   contrôle des axes routiers que vous avez mentionnés ?

  3   R.  La situation était extrêmement changeante et fluide, et comme j'ai

  4   essayé de l'indiquer, il y avait un côté qui reprenait le contrôle et puis

  5   l'autre côté estimait qu'il devait reprendre le contrôle par rapport à

  6   cela. L'UCK ne disposait pas du même pouvoir de tir que la VJ ou les forces

  7   serbes. Et donc l'UCK utilisait une tactique de tirs aléatoires et il y

  8   aurait une réaction des forces de sécurité serbes, à juste titre, et la

  9   situation ainsi s'inversait et les Serbes reprenaient le contrôle. Mais

 10   ensuite, ils se retiraient dans leurs bases et le "contrôle" revenait à

 11   l'UCK.

 12   Q.  Donc, ce rapport spécifique que nous regardons ici, nous voyons qu'il y

 13   avait une force, un groupe d'assaut conjoint, MUP et VJ, qui se préparait à

 14   attaquer Malisevo. Est-ce que c'est la première fois que vous avez vu une

 15   telle opération conjointe ou les aviez-vous déjà vues avant dans les autres

 16   visites que vous avez faites au Kosovo ?

 17   R.  C'est la première fois que nous avons vu ce que j'appellerais deux

 18   groupes de combat qui regroupent 200 personnes environ, 100 ou 200

 19   personnes, des forces regroupées. Et ces forces c'étaient la VJ avec des

 20   chars et le MUP qui avait des forces nettement mieux formées et qui, donc,

 21   à ce moment-là, impliquaient également les unités JSO et SAJ.

 22   Mme KRAVETZ : [interprétation] Je sais que cet après-midi l'horaire n'est

 23   pas habituel, et si j'ai bien compris, nous avons une pause à 15 heures 15.

 24   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous pouvez continuer si vous le

 25   souhaitez.

 26   Mme KRAVETZ : [interprétation]

 27   Q.  Est-ce que vous pourriez, je vous prie, tourner la page, prendre la

 28   page suivante. Il s'agit de la page 3 en version B/C/S et 2 en anglais.

Page 9178

  1   Donc il s'agit du paragraphe numéro 3 et vous voyez qu'il y est question de

  2   : 

  3   "La mission qui a tourné vers l'ouest sur la route principale en

  4   direction de Pec…"

  5   Vous l'avez trouvé ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Et à la dernière phrase de ce paragraphe, il est indiqué :

  8   "La mission a poursuivi son chemin en direction de l'ouest le long de l'axe

  9   routier principal qui était une fois de plus détenu par une force mixte du

 10   MUP et de la VJ et ce jusqu'à Grebnik."

 11   Et il y a une référence à VCP, de quoi s'agit-il ?

 12   R.  Il s'agit d'un poste de contrôle où se trouvent des véhicules.

 13   Q.  Bien. Et j'aimerais vous poser une question à propos de ce paragraphe,

 14   le paragraphe qui commence par : 

 15   "Tous les villages à partir de Lapusnik vers l'ouest avaient subi des

 16   dégâts délibérés provoqués par des tirs de canons. De nombreuses maisons

 17   étaient en feu ainsi que des garages et de nombreux ateliers et commerces."

 18   Est-ce que vous pourriez nous indiquer ce à quoi il est fait référence

 19   précisément dans ce rapport ?

 20   R.  Oui, tout à fait. En fait, nous nous trouvions au Kosovo et plus ou

 21   moins quotidiennement, nous passions par des zones qui avaient été

 22   complètement détruites de façon tout à fait aléatoire, sans aucun motif. En

 23   général, cela se passait le long des routes principales et les villages qui

 24   étaient ciblés étaient tous les villages qui, d'après les Serbes, auraient

 25   protégé l'UCK. Donc il semblerait que dans ce secteur, tous les villages

 26   avaient été endommagés, il y avait des incidents quotidiens. Ils mettaient

 27   le feu aux champs de maïs, les stations d'essence étaient endommagées et

 28   les commerces étaient complètement dévastés.

Page 9179

  1   Q.  Et cette référence aux tirs HMG, il s'agit de tirs de mitrailleuses

  2   lourdes, n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui, c'est tout à fait exact.

  4   Q.  Page suivante, page 4 en anglais et en B/C/S. Et vous voyez qu'il est

  5   indiqué que : 

  6   "Tous les villages qui se trouvent de part et d'autre des axes

  7   routiers qui vont vers Malisevo ont subi des dégâts extrêmement

  8   importants."

  9   Donc c'est une observation que vous avez faite après une attaque ?

 10   Est-ce que vous êtes revenu à Malisevo ?

 11   R.  Oui, nous sommes revenus à Malisevo. Vous verrez qu'il est indiqué dans

 12   ce paragraphe qu'il y avait les membres de la mission que j'avais avec moi.

 13   Je voulais montrer aux membres de la mission les dégâts qui avaient été

 14   provoqués, des dégâts que l'on retrouvait partout au Kosovo.

 15   Q.  Et pourquoi est-ce que vous n'êtes pas resté à Malisevo lorsque vous

 16   avez vu qu'il y avait des préparatifs d'attaque ?

 17   R.  L'UCK ne nous a pas invités à rester. De toute façon, je ne pense pas

 18   que nous serions restés, mais nous avons été invités à partir. Donc nous

 19   avons poursuivi notre chemin vers le nord et puis ensuite, nous avons

 20   rencontré des forces de sécurité serbes, tel que je vous l'ai expliqué.

 21   Q.  A la même page, vers le bas de cette page, il y a ce paragraphe alpha

 22   "Il y a des questions --" en fait, cela se trouve au bas de la page 4 en

 23   version B/C/S et il est indiqué :

 24   "Loc/public…" Je pense que là vous faites référence à la population

 25   civile ?

 26   R.  Oui, c'est exact.

 27   Q.  Il est question d'opérations dans plusieurs villages qui sont

 28   mentionnés et il est indiqué que : 

Page 9180

  1   "Le nombre peut dépasser 100 000 au total."

  2   Pourquoi est-ce que cette information figure dans ce rapport ?

  3   R.  Il s'agit d'une évaluation qui a été établie, et l'évaluation du nombre

  4   de personnes qui étaient des personnes déplacées à l'intérieur du Kosovo.

  5   C'était un libellé que nous n'avions pas le droit d'utiliser à cette

  6   époque-là, mais il était absolument manifeste que les villageois étaient

  7   terrifiés, avaient été chassés, on leur avait fait peur. Donc ils vivaient

  8   à la dure, de l'autre côté de la frontière en Albanie, ou alors ils

  9   s'étaient rendus au Monténégro, à Crna Gora, donc au Monténégro.

 10   Mme KRAVETZ : [interprétation] J'aimerais maintenant aborder un autre

 11   sujet, donc un document différent.

 12   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien.

 13   Il va falloir que l'on baisse à nouveau les stores pour permettre au

 14   témoin de quitter le prétoire. Nous allons faire une pause et nous

 15   reprendrons à 15 heures 45.

 16    Donc, Monsieur Crosland, si vous n'y voyez pas d'inconvénient,

 17   restez là en attendant que les stores soient descendus, et ensuite

 18   vous pourrez quitter le prétoire et nous reprendrons à 15 heures

 19   45.

 20   [Le témoin quitte la barre]

 21   --- L'audience est suspendue à 15 heures 20.

 22   --- L'audience est reprise à 15 heures 46.

 23   [Le témoin vient à la barre]

 24   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Veuillez prendre place. LE TÉMOIN :

 25   [interprétation] Je vous remercie.

 26   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Madame Kravetz. Je vous en

 27   prie.

 28   Mme KRAVETZ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

Page 9181

  1   Je souhaiterais demander l'affichage de la pièce 00686.

  2   Q.  Il s'agit du document qui correspond à l'intercalaire 5 de votre

  3   classeur ou jeu de documents.

  4   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous avons maintenant retrouvé tous

  5   les documents qui ont été versés au dossier jusqu'à présent, donc à partir

  6   de maintenant, si vous voulez verser un document au dossier, il faudra

  7   demander officiellement son versement au dossier, Madame Kravetz.

  8   Mme KRAVETZ : [interprétation]

  9   Q.  Donc, nous voyons qu'il s'agit d'un rapport qui porte la date du 7 août

 10   1998. Je souhaiterais que vous vous penchiez sur la page numéro 2 de ce

 11   document, qui correspond également à la page 2 de la version B/C/S. Vous

 12   voyez, il s'agit du paragraphe 2 de la page 2, intitulé :

 13   "Population civile, destruction sans motif."

 14   Dans ce paragraphe, c'est la quatrième phrase ou la quatrième ligne,

 15   en fait, qui m'intéresse. Vous voyez qu'il est indiqué :

 16   "A partir de Grebnik vers Komorane, tous les villages qui se trouvent

 17   de part et d'autre de cette route ont été complètement détruits."

 18   Est-ce que vous pourriez nous dire quoi que ce soit à propos de ce

 19   paragraphe ?

 20   R.  Oui, tout à fait. Comme je vous l'ai déjà dit, pendant cette période,

 21   très malheureusement, d'ailleurs, il était absolument évident qu'une

 22   opération menée avec des armes très lourdes était en cours, ce qui fait que

 23   tous les villages qui se trouvaient de part et d'autre de la route avaient

 24   été détruits, et il faut savoir que cela était également le cas lorsqu'on

 25   prenait des routes latérales. Les récoltes avaient été brûlées, incendiées,

 26   le bétail tué, et comme je l'ai déjà dit, la zone était déserte et on ne

 27   voyait absolument pas de population civile.

 28   Q.  Est-ce que vous avez assisté à la destruction dont vous venez de

Page 9182

  1   parler, tout comme vous l'aviez fait à propos des autres rapports dont nous

  2   avons déjà parlé ? Vous l'avez vu, cela ?

  3   R.  Oui. Nous nous trouvions dans ce secteur de façon quasiment permanente,

  4   ce qui fait que nous étions en mesure d'évaluer les dégâts occasionnés, et

  5   ce, quasiment quotidiennement.

  6   Q.  Lorsque vous dites "Tous les villages qui se trouvaient de part et

  7   d'autre des routes principales," ce qui m'intéresse c'est qu'il y a une

  8   route dont il est question dans ce paragraphe. Il est question de tous les

  9   villages qui se trouvent de part et d'autre de cette route qui ont été

 10   détruits. De combien de villages est-il question, en fait ?

 11   R.  Ecoutez, je pense qu'à la fin des opérations en 1998, j'avais vu entre

 12   200 à 300 villages détruits d'une façon ou d'une autre.

 13   Q.  Et dans ce rapport, à combien de villages est-il fait référence, parce

 14   qu'il est question de la zone à partir de Grebnik vers l'est, vous vous en

 15   souvenez ?

 16   R.  Ecoutez, je ne m'en souviens pas précisément, mais je dirais que les

 17   bourgades les plus importantes, tout cela avait été dévasté.

 18   Q.  Vous nous avez dit que vous avez une expérience militaire, puisque

 19   votre carrière militaire a duré quelque 37 ans. Au vu de votre expérience

 20   et d'après ce que vous avez pu constater, d'après ce que vous avez pu

 21   observer, je pense aux destructions de villages, j'aimerais savoir si vous

 22   étiez d'avis qu'il y avait un objectif militaire qui sous-tendait cette

 23   destruction à laquelle on fait référence dans plusieurs rapports ?

 24   R.  Je pense avoir déjà dit au Tribunal à plusieurs reprises que lorsque

 25   vous avez une opération menée contre des insurgés, les forces de sécurité

 26   devaient maintenir la sécurité dans ce qui était cette province du Kosovo

 27   qui faisait partie de l'ex-Yougoslavie. Alors, la façon dont ils ont

 28   procédé pour maintenir cette sécurité face à cette menace de plus en plus

Page 9183

  1   importante émanant de l'Armée de libération du Kosovo, c'est à la Chambre

  2   d'en décider.

  3   Mais ce que j'ai dit et ce qui figure d'ailleurs dans ces différents

  4   rapports est que les destructions sans motif dans toute la province du

  5   Kosovo ne pouvaient pas véritablement aider les forces de sécurité serbes

  6   qui étaient censées aider la population civile, la population locale, et

  7   nous avons vu de plus en plus de personnes déplacées à l'intérieur du

  8   Kosovo. Ces personnes quittaient leur patrie, se cachaient dans différents

  9   endroits, notamment dans la vallée de Pagarusa, qui se trouve au nord de la

 10   zone de Suva Reka. Il faut également savoir qu'à un moment donné, il y

 11   avait environ, dans cette région, plus de 100 000 personnes, voire

 12   quasiment 400 000 personnes qui se trouvaient là. Il est extrêmement

 13   difficile de déterminer le nombre exact de ces personnes, car il y avait

 14   également des personnes qui s'enfuyaient vers l'ouest, vers l'Albanie, vers

 15   le Monténégro, et d'autres qui fuyaient vers le sud en direction de la

 16   Macédoine.

 17   Et comme je vous l'ai déjà dit, la situation était particulièrement

 18   mouvante, parce qu'il n'y avait pas suffisamment de personnel, en fait. Il

 19   faut savoir que lorsque les membres de la Mission de vérification au Kosovo

 20   sont arrivés, ils sont arrivés en octobre, l'une de leurs missions,

 21   justement, consistait à déterminer les lieux où se trouvaient ces personnes

 22   déplacées à l'intérieur du Kosovo.

 23   Q.  Et pour préciser votre réponse, Monsieur, à la ligne 25 du compte rendu

 24   d'audience, page 31, vous avez donné un chiffre, vous avez dit "quasiment

 25   400 000". Est-ce qu'il s'agit de 400 000 personnes déplacées à l'intérieur

 26   du Kosovo, à savoir de population civile ?

 27   R.  Oui, tout à fait exact.

 28   Q.  Et pour en revenir à ma question, j'aimerais savoir quels étaient --

Page 9184

  1   vous avez estimé qu'il y avait un but militaire qui sous-tendait ces

  2   opérations lorsqu'elles étaient effectuées dans cette province ?

  3   R.  Si vous perdez la confiance de la population civile lors d'une

  4   opération militaire, il vous sera extrêmement difficile de récupérer la

  5   confiance de cette population, notamment si vous avez occasionné ou

  6   provoqué des dégâts extrêmement importants aux foyers, aux maisons, aux

  7   ateliers et aux commerces. C'est ce qui s'est passé au Kosovo en 1998 et au

  8   début de l'année 1999.

  9   Q.  Pour en revenir aux documents, j'aimerais attirer votre attention sur

 10   le dernier paragraphe qui est intitulé "Dernière observation". Il en va de

 11   même pour la page de la version B/C/S. Il est question d'un grand convoi du

 12   MUP qui a été vu rentrant à Pristina arborant de grands drapeaux serbes.

 13   Alors, j'aimerais savoir si dans un premier temps vous avez, vous,

 14   été témoin oculaire de cette situation et est-ce que vous avez pu voir ce

 15   convoi arriver dans Pristina ou revenir à Pristina ?

 16   R.  Comme je vous l'ai déjà dit, dans tous les pays de cette région des

 17   Balkans, il y a toujours de fortes poussées de nationalisme, et lorsqu'il a

 18   été supposé que ces forces de sécurité serbes recommençaient à avoir un

 19   certain contrôle de la situation, lorsqu'elles revenaient vers leurs bases

 20   et que la relève était assurée par d'autres unités, ils étaient accueillis

 21   parce qu'ils avaient fait leur devoir pour les forces de sécurité. Et

 22   parfois, cela se manifestait par des drapeaux serbes que l'on arborait et

 23   de petites foules qui sortaient pour accueillir les soldats, ce qui est

 24   tout à fait compréhensible, d'ailleurs.

 25   Q.  C'est quelque chose que vous avez pu constater vous-même car il y est

 26   fait référence dans ce rapport ?

 27   R.  Oui, tout à fait.

 28   Q.  J'aimerais, avant de demander l'affichage du prochain document,

Page 9185

  1   demander le versement au dossier de cette pièce, 00686. Je pense d'ailleurs

  2   qu'une cote a déjà été attribuée à ce document.

  3   M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, tout à fait. Il s'agit de la cote

  4   P01408.

  5   Mme KRAVETZ : [interprétation]

  6   Q.  J'aimerais maintenant que nous nous penchions sur le document 00682,

  7   intercalaire 6 de votre classeur.

  8   J'aimerais attirer votre attention sur le bas de la première page,

  9   paragraphe 2, qui est intitulé "Concentration de personnes déplacées à

 10   l'intérieur du Kosovo." Est-ce que vous pourriez nous faire des

 11   observations à propos de ce paragraphe qui commence par les mots suivants :

 12   "Concentration de personnes déplacées à l'intérieur de la province,

 13   cela se situe entre 5 à 15 000 personnes…"

 14   R.  Je vous avais mentionné la vallée de Pagarusa, qui se trouve à 10

 15   kilomètres au nord de Suva Reka. Il s'agit d'une zone où les villageois qui

 16   avaient été déplacés à l'intérieur du Kosovo s'étaient réfugiés. Ils

 17   s'étaient enfuis vers cette zone pour fuir les opérations militaires qui

 18   étaient en cours, et je pense que, si ma mémoire ne m'abuse, en fait, ces

 19   personnes essayaient probablement de quitter la vallée de Pagarusa pour

 20   essayer de revenir dans les villages dont ils avaient été chassés, et ce,

 21   pour essayer de reprendre une vie normale.

 22   Q.  Tournez la page, je vous prie, vous y verrez les paragraphes 3 à 5, car

 23   il y est fait référence à des destructions de villages, et au paragraphe 6,

 24   j'aimerais savoir si vous avez évalué en quelque sorte le sort qui allait

 25   attendre cette population au cours des mois suivants, à savoir des mois

 26   d'hiver.

 27   R.  Ecoutez, cela était un souci extrêmement important pour les autorités,

 28   car les autorités se demandaient comment les gens allaient se débrouiller

Page 9186

  1   pendant l'hiver. Vous saurez certainement qu'au Kosovo l'hiver peut être

  2   très rigoureux avec beaucoup de neige qui recouvre de nombreuses zones. Et

  3   les membres de la Mission de vérification au Kosovo, lorsqu'ils sont

  4   arrivés en octobre, ainsi que les représentants des grandes ONG y étaient

  5   présents, pour essayer justement de prêter main forte, d'apporter un

  6   soutien à la population civile, peu importe que cette population ait été

  7   serbe ou albanaise, cela n'avait pas d'importance. Mais le problème était

  8   que ces personnes risquaient de ne pas avoir de logement adéquat au cours

  9   des mois à venir.

 10   Q.  Et si vous prenez le paragraphe 7, vous y trouvez un chiffre, le

 11   chiffre de 171 000 à partir du 3 septembre 1998. Est-ce qu'il s'agissait

 12   d'une estimation qui avait été faite pour évaluer le nombre de ces

 13   personnes déplacées à l'intérieur du Kosovo ?

 14   R.  Comme je vous l'ai déjà dit, essayer d'obtenir un chiffre exact était

 15   quasiment impossible. Mais il était en général reconnu qu'il y avait un

 16   grand nombre de personnes qui se trouvait au Monténégro, donc à Crna Gora,

 17   en Albanie, en Macédoine, ainsi qu'à l'intérieur de la province à

 18   proprement parler.

 19   Q.  Et ce chiffre précis était le chiffre des personnes qui se trouvaient

 20   au Kosovo ou est-ce que cela incluait également le nombre de personnes qui

 21   avaient franchi la frontière pour aller dans d'autres pays ?

 22   R.  Non, je suppose qu'il s'agissait du nombre de personnes qui se

 23   trouvaient sur le territoire du Kosovo.

 24   Q.  Regardez le nom qui se trouve au bas du document. Il s'agit de

 25   Landsman. Dans d'autres documents, nous avons vu le nom de M. l'ambassadeur

 26   Donnelly. Alors de qui s'agissait-il ?

 27   R.  De David Landsman, qui était l'adjoint du chef de la mission et qui

 28   signait les télégraphes lorsque M. l'ambassadeur Donnelly n'était pas

Page 9187

  1   présent, ce qui est une procédure tout à fait normale au sein de

  2   l'ambassade.

  3   Q.  Et vous nous avez déjà expliqué comment ces documents étaient préparés.

  4   Donc je suppose que ce document a été signé par David Landsman et qu'il

  5   avait été préparé de la même façon ?

  6   R.  Oui, tout à fait.

  7   Q.  J'aimerais maintenant vous montrer un tout dernier document.

  8   Mme KRAVETZ : [interprétation] D'abord, je souhaiterais demander le

  9   versement au dossier du document 00682.

 10   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Le document a été versé au dossier.

 11   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document a déjà une cote, la cote

 12   P01402.

 13   Mme KRAVETZ : [interprétation]

 14   Q.  Document suivant, document qui porte une date -- en fait, c'est la

 15   deuxième page du document qui m'intéresse. Il s'agit du document 00684.

 16   Est-ce que vous vous souvenez de cette réunion que vous avez eue avec

 17   le général Dimitrijevic en novembre 1998 ?

 18   R.  Oui, je m'en souviens.

 19   Q.  Et est-ce que vous vous souvenez quelle était la fonction du général

 20   Dimitrijevic à l'époque ?

 21   R.  Le général Dimitrijevic était le chef ou dirigeait en fait le service

 22   du contre-renseignement. Donc c'était un officier très, très haut placé

 23   dans la VJ.

 24   Q.  Dans ce paragraphe, vous indiquez que : 

 25   "Le général Dimitrijevic a admis que la VJ avait commis quelques abus

 26   pendant l'été, mais a également indiqué que la VJ avait dû intervenir afin

 27   justement de prêter main forte au MUP et de sauver le MUP."

 28   Et vous faites référence à cette réunion que vous avez eue avec le

Page 9188

  1   général et voilà ce que vous aviez dit au paragraphe 55 de votre

  2   déclaration :

  3   "Il savait que j'avais personnellement vu la coopération entre le MUP et la

  4   VJ pendant de nombreuses opérations et essayait de minimiser l'impact des

  5   actions de la VJ."

  6   Est-ce que vous pourriez nous expliquer pourquoi ou comment vous avez

  7   compris l'observation faite par le général Dimitrijevic lorsqu'il vous a

  8   dit qu'il essayait de minimiser l'impact des actions de la VJ ?

  9   R.  Comme j'ai déjà essayé d'expliquer à la Chambre, j'ai eu de nombreuses

 10   conversations, non seulement avec le général Dimitrijevic mais également

 11   avec le général Krga et avec le général Perisic. Le général Perisic était

 12   sur le point d'être remplacé par le général Ojdanic à l'époque. C'était le

 13   chef de l'état-major. Il y avait également le général Krga, qui était le

 14   chef du renseignement. Et je suppose que cela est expliqué par mon

 15   expérience, donc j'avais eu des réunions avec ces trois personnes, et ce,

 16   afin d'essayer de désamorcer en quelque sorte une situation qui était

 17   extrêmement complexe et particulièrement problématique en ce qui concernait

 18   le Kosovo.

 19   Et je vous ai également déjà dit que la VJ avait cantonné et basé

 20   dans la province du Kosovo quelques 20 000 membres qui faisaient parti du

 21   Corps de Pristina, et cela était inévitable avec l'accélération du conflit,

 22   ils étaient utilisés pour essayer de juguler le conflit. Malheureusement,

 23   comme nous l'avons déjà vu, l'utilisation de la force était excessive, les

 24   dégâts provoqués par les forces de sécurité serbes, dans leur intégralité,

 25   ces dégâts étaient énormes, étaient extrêmement importants, et je l'ai déjà

 26   indiqué à de nombreuses occasions et cela était manifeste pour toute

 27   personne qui se déplaçait à l'intérieur du Kosovo à cette époque-là. Et à

 28   cette époque-là, en novembre 1998, le général Dimitrijevic et le général

Page 9189

  1   Perisic, dans une certaine mesure, avaient indiqué qu'ils ne faisaient plus

  2   partie de la chaîne de commandement et que c'était le général Pavkovic qui

  3   avait un lien direct avec le président Milosevic, ce qui fait que les deux

  4   officiers les plus supérieurs de la VJ se trouvaient quand même dans une

  5   situation assez peu commune.

  6   Et puis, comme nous l'avons vu pendant tout le conflit des Balkans, les

  7   représailles émanant de part et d'autre des camps devenaient -- il y avait

  8   en fait une certaine escalade des représailles, et l'autre partie avait

  9   toujours tendance à réagir de façon particulièrement agressive. Et très

 10   malheureusement, cela était vrai au Kosovo. Je pense donc que les

 11   commentaires du général Dimitrijevic étaient qu'inévitablement la VJ avait

 12   été quasiment entraînée dans ce conflit.

 13   Q.  Et lorsque vous dites qu'il essayait de minimiser l'impact des actions

 14   commises par la VJ, est-ce que vous avez véritablement compris à quoi il

 15   faisait référence ?

 16   R.  Je l'ai indiqué de façon très, très claire dans mes rapports. Et

 17   d'ailleurs, j'ai présenté des preuves photographiques au général

 18   Dimitrijevic ainsi qu'au général Perisic, des preuves photographiques qui

 19   portaient sur les dégâts qui avaient été occasionnés et qui indiquaient que

 20   dans les différentes capitales, ces preuves photographiques avaient été

 21   envoyées, ce qui fait qu'en fin de compte, et cela était inévitable, des

 22   personnes seraient traduites en justice et devraient répondre de ces

 23   crimes.

 24   Q.  Donc vous avez compris son observation à ce sujet comme -- parce qu'en

 25   fait, vous avez essayé d'attirer son attention sur cette information, c'est

 26   cela ?

 27   R.  Oui, parce que comme je vous l'ai déjà dit, il ne semblait plus faire

 28   partie de la chaîne du commandement et il n'était pas particulièrement

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  1   réjouit par la situation au Kosovo. Mais comme je vous l'ai déjà dit,

  2   c'était une situation particulièrement mouvante, particulièrement volatile

  3   également. Et je l'ai dit à plusieurs reprises, il y a eu beaucoup trop

  4   d'usage de force et beaucoup trop d'actes de destruction. Mais je ne peux

  5   pas répondre au nom des commandants qui se trouvaient sur le terrain. Je

  6   suppose qu'ils avaient reçu l'ordre d'effectuer ces opérations.

  7   Q.  Je vous remercie et j'aimerais maintenant attirer votre attention sur

  8   votre déclaration qui se trouve à l'intercalaire numéro 1 de votre

  9   classeur. J'aimerais en fait que nous parlions des événements auxquels vous

 10   avez assisté au début de l'année 1999. Il s'agit de l'opération Racak. Vous

 11   y faites référence au paragraphe 67 de votre déclaration; page 14 de votre

 12   déclaration pour ce qui est de la version anglaise. Page 14, paragraphe 67.

 13   Au paragraphe 67, vous faites référence à votre premier déplacement au

 14   Kosovo, en 1999, et vous indiquez que cela a commencé le 12 janvier, a duré

 15   jusqu'au 14 janvier et qu'ensuite, vous y êtes revenu entre le 16 et le 17

 16   janvier. Vous indiquez que vous étiez au Kosovo après l'incident de Racak.

 17   Est-ce que vous pourriez, dans un premier temps, nous indiquer quand vous

 18   avez entendu pour la première fois ce qui s'était passé à Racak au mois de

 19   janvier 1999 ?

 20   R.  Messieurs les Juges, c'est un incident qui s'est déroulé à l'ouest de

 21   Stimlje, qui était véritablement la frontière du contrôle serbe. Et là,

 22   vous passiez en territoires qui étaient détenus par l'UCK. Si je ne

 23   m'abuse, juste avant cet incident, il y a trois membres du MUP qui avaient

 24   été assassinés sur la route alors qu'ils sortaient de Crnoljevo et allaient

 25   vers Stimlje. Cela a provoqué une réaction particulièrement importante de

 26   la part des forces de sécurité serbes. C'était une époque ou un moment où

 27   la Mission de vérification au Kosovo qui était placée sous l'égide de M.

 28   l'ambassadeur Walker et du général Drewienkiewicz ou DZ, comme nous

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  1   l'appelions pour abréger son nom, et c'est probablement la goutte d'eau qui

  2   a fait déborder le verre par rapport à l'OTAN et à l'aptitude ou la volonté

  3   de l'OTAN d'essayer de faire en sorte que cet incident se règle de façon

  4   pacifique.

  5   Alors il y a eu un vaste déploiement. Je suis arrivé l'après-midi le 31

  6   janvier. Les dégâts avaient déjà été provoqués et je pense que je me

  7   souviens de M. l'ambassadeur Walker qui revenait de la zone en montrant une

  8   extrême déception, et encore, ce n'est pas véritablement le mot le plus

  9   idoine que je pourrais utiliser. Mais sa déception par rapport à ce qui

 10   s'était passé, par rapport aux répercussions et au fait que les forces de

 11   sécurité serbes avaient plus ou moins, en quelque sorte, effectué cette

 12   opération particulièrement lourde en représailles par rapport à ces trois

 13   membres du MUP qui avaient été tués.

 14   Q.  Alors, pour préciser les dates, au début du paragraphe 67, vous vous

 15   trouviez au Kosovo - c'est ce que vous indiquez à ce paragraphe - entre le

 16   12 et le 14 janvier; puis vous avez effectué un deuxième déplacement au

 17   Kosovo entre le 16 et le 17 janvier. Puis, ensuite, je vois qu'il est

 18   question du 31 janvier. Est-ce qu'il n'y aurait pas peut-être un problème

 19   de date ?

 20   R.  Oui, je m'excuse. Il se peut que j'aie effectivement cité une date

 21   erronée. Je m'excuse.

 22   Q.  Alors, procédons par étapes. Vous nous dites que votre premier

 23   déplacement a eu lieu du 12 au 14 janvier. Vous vous souvenez pourquoi vous

 24   étiez au Kosovo, à ce moment-là ?

 25   R.  Oui. Nous sommes allés au Kosovo - c'était un autre déplacement vers le

 26   Kosovo - pour essayer de faire le point de la situation, essayer de voir ce

 27   qu'il en était de la Mission de vérification du Kosovo qui avait commencé

 28   et à qui j'avais donné quelques consignes et que j'avais également dirigée

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  1   quand elle était arrivée au Kosovo. Donc c'était une visite de liaison,

  2   comme toutes les autres visites pendant ma mission là-bas.

  3   Q.  Est-ce que vous avez fait cela entre le 12 et le 14 janvier, puis est-

  4   ce que vous êtes revenu à Stimlje et dans les environs du village de Racak

  5   ?

  6   R.  Oui, je pense que nous l'avons fait. Je m'excuse, il y a beaucoup de

  7   temps qui s'est écoulé depuis. De toute façon, j'allais et venais dans ce

  8   secteur quasiment quotidiennement parce que, comme je l'ai déjà indiqué,

  9   c'était la séparation entre la ligne de front entre les forces serbes et

 10   les forces de l'UCK.

 11   Q.  Au paragraphe 67, et cela figure à la page 15, au milieu du paragraphe

 12   67, toujours sur cette même page 15, voilà ce qui est indiqué, je cite :

 13   "D'après le nombre de soldats, à la fois le MUP et la VJ se concentraient

 14   dans ce secteur et il était évident qu'une opération était sur le point

 15   d'être lancée."

 16   Est-ce que vous, vous avez pu constater ce rassemblement des fores du MUP

 17   et de la VJ ? Est-ce que vous les avez vues se rassembler dans ce secteur

 18   ou est-ce que c'est une information que vous avez reçue ?

 19   R.  Si je ne m'abuse, je pense que je répondrais de façon affirmative aux

 20   deux questions que vous avez posées. Il y avait des rapports de la Mission

 21   de vérification du Kosovo dont la mission était justement d'observer ce qui

 22   se passait dans le secteur. Et j'étais là-bas pour essayer, moi, également,

 23   d'observer ce qui se passait. Donc ils me donnaient des éléments

 24   d'information et moi, je me rendais sur le terrain pour essayer de

 25   constater et de vérifier ce qu'ils m'avaient dit.

 26   Q.  Vous nous avez dit, toujours au même paragraphe, que vous êtes revenu

 27   entre le 16 et le 17 et que vous étiez au Kosovo après l'incident de Racak

 28   et que vous vous êtes rendu sur les lieux de cet incident. Pourquoi est-ce

Page 9193

  1   que vous êtes allé à Racak après l'incident ? Et est-ce que vous pourriez

  2   nous dire ce que vous avez pu voir lorsque vous y êtes arrivé ?

  3   R.  Comme je l'ai indiqué au Tribunal, l'ambassadeur Walker était

  4   extrêmement fâché et préoccupé du fait que sa mission -- enfin, on ne peut

  5   pas dire qu'il n'avait pas été à même d'arrêter ou d'empêcher la survenue

  6   de cet incident. Les conséquences étaient tout à fait claires. On savait

  7   que l'OTAN pourrait, après un incident de cette nature, prendre une action

  8   appropriée quelle que soit la nature de cette action. Le général DZ que je

  9   connaissais bien était également extrêmement préoccupé. Donc en tant

 10   qu'attaché militaire, j'étais tenu d'informer mon ambassadeur pour qu'il

 11   puisse faire son rapport à notre gouvernement, et de ce fait, je me suis

 12   rendu sur les lieux où le problème s'était produit pour constater de visu

 13   que ce dont on faisait rapport s'était effectivement bien produit.

 14   Q.  Et qu'est-ce que vous avez pu observer une fois que vous êtes arrivé

 15   sur place ?

 16   R.  Il était très difficile de s'en rapprocher car les forces de sécurité

 17   serbes étaient omniprésentes et il était clair que toute une série de

 18   personnes avaient été tuées. Et si je me souviens bien, il y avait plus de

 19   corps qui n'étaient pas apparents et visibles au moment où je m'y suis

 20   rendu.

 21   Q.  Dans votre déclaration, lorsque vous vous référez à cette opération

 22   dans le paragraphe 67, vous dites qu'il était tout à fait clair qu'il y

 23   avait eu un mouvement coordonné entre le MUP et la VJ et surtout, qu'il y

 24   avait une coopération entre le MUP et la VJ basée à Pristina, sous le

 25   commandement du général Lazarevic. Pouvez-vous nous dire pourquoi vous avez

 26   estimé qu'il s'agissait d'une action coordonnée à vos yeux, puisque vous

 27   avez fait cette évaluation dans votre déclaration ?

 28   R.  Dans toute opération de lutte contre la rébellion, comme je l'ai déjà

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  1   dit cet après-midi et à d'autres reprises aussi, il est tout à fait

  2   essentiel que les forces de sécurité qui sont utilisées à cet effet pour

  3   ces opérations extrêmement complexes, il est très important de disposer

  4   d'une cellule de coordination. Et une telle cellule de coordination aurait

  5   dû, logiquement, se trouver à Pristina où tant le MUP avait son siège et le

  6   Corps de Pristina également avait un siège ou un quartier général.

  7   La raison pour laquelle il faut une coordination est assez évidente.

  8   Si vous essayez de gagner une lutte antirébellion, il faut pouvoir informer

  9   la population locale de ce que vous êtes en train de faire, de ce qui se

 10   passe. Vous devez également coordonner l'action militaire entre les

 11   différents éléments de réponse aux insurgés, donc, votre force de lutte

 12   contre la rébellion. Donc je trouve qu'il est assez extraordinaire que l'on

 13   mentionne que les personnes : général Pavkovic, Lazarevic, Ojdanic, Lukic

 14   et Stevanovic ne se seraient pas trouvés ensemble pour mettre au point le

 15   plan pour le Kosovo.

 16   Q.  Donc c'est votre évaluation personnelle de la situation en vous fondant

 17   sur l'information que vous aviez sur la façon dont l'action s'est produite

 18   ?

 19   R.  Oui. Dans une opération de lutte contre la rébellion et dans ce type

 20   d'opération que j'ai connu partout au monde, c'est une procédure standard.

 21   Et il est tout à fait normal, d'ailleurs, de coordonner ces activités tant

 22   du point de vue militaire que du point de vue civil, ceci en vue d'aider la

 23   population civile et peut-être aussi pour permettre aux ONG, le cas

 24   échéant, de venir pour aider les personnes déplacées, et ceci requiert la

 25   présence d'un centre de coordination. Or, comme je l'ai dit, dans bon

 26   nombre d'autres domaines, on a vu la création d'un centre de coordination

 27   qui faisait partie d'une des pratiques standard.

 28   Q.  Je vous remercie.

Page 9195

  1   Mme KRAVETZ : [interprétation] Monsieur le Juge, je n'ai plus d'autres

  2   questions pour le témoin. Je me suis référée tout à l'heure à l'un des

  3   rapports que nous avons vus. C'est le dossier 65 ter 00684, et je voudrais

  4   verser cette pièce au dossier.

  5   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui.

  6   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le 65 ter s'est déjà vu attribuer la cote

  7   P01411.

  8   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Djurdjic.

  9   M. DJURDJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.

 10   Contre-interrogatoire par M. Djurdjic : 

 11   Q.  [interprétation] Bon après-midi, Mon Colonel.

 12   R.  Bon après-midi.

 13   Q.  Il me semble que vous comprenez et vous parlez encore le serbe. Je suis

 14   Veljko Djurdjic. Je fais partie de l'équipe de la Défense pour Vlastimir

 15   Djordjevic, et je suis accompagné par Marie O'Leary, autre membre de la

 16   Défense. Je vais essayer de faire un certain nombre de choses aujourd'hui.

 17   Puisque vous avez témoigné à diverses reprises devant la Cour, je vais

 18   essayer de vous poser des questions qui ne vous ont pas encore été posées.

 19   Mon Colonel, ayant lu les dépositions que vous avez faites jusqu'à présent,

 20   j'ai constaté que vous avez reçu une formation dans une académie militaire

 21   mais, concernant certains des faits que nous avons appris, je voudrais

 22   savoir si vous avez également eu une spécialisation civile. Est-ce que vous

 23   avez assisté à des cours dans une université ?

 24   R.  Non. J'ai fait mes formations secondaires au Royaume-Uni. Ensuite, j'ai

 25   fait mon service militaire comme simple soldat avant d'aller à Sandhurst,

 26   où j'ai reçu ma formation d'officier, où j'ai été assigné à mon régiment.

 27   Q.  Merci beaucoup. Mon Colonel, puis-je conclure que vous faisiez partie

 28   de l'infanterie et que vous étiez également spécialisé comme para ?

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  1   R.  En effet, oui, c'était bien le cas.

  2   Q.  Je vous remercie. Ayant lu vos déclarations, j'en conclus que vous avez

  3   reçu une formation à l'académie de Sandhurst, où vous avez été diplômé en

  4   1967. Est-ce bien le cas ?

  5   R.  Oui, c'est correct.

  6   Q.  Je vous remercie. Pendant une période de deux ans, vous avez ensuite

  7   été affecté dans une unité militaire. Est-ce bien le cas ?

  8   R.  En effet, c'est bien le cas.

  9   Q.  Merci. J'aimerais également savoir ce que vous avez fait après ces deux

 10   années de service militaire. Quel poste avez-vous occupé par la suite ?

 11   R.  J'étais un jeune officier, un lieutenant, et j'ai formé des soldats

 12   dans le régiment de parachutistes; ensuite, j'ai été muté à la sélection du

 13   service aérien spécial et, effectivement, j'ai fait la formation qui m'a

 14   permis d'être l'officier chargé de la sélection pour cette unité de

 15   parachutistes.

 16   Q.  Je vous remercie. S'agit-il là des tâches que vous avez effectuées au

 17   moment où vous êtes devenu attaché militaire à Madrid [comme interprété] ?

 18   R.  Non. J'ai eu différents types de fonctions au fur et à mesure que je

 19   prenais de l'expérience, ce qui est d'ailleurs usuel pour une carrière dans

 20   l'armée britannique.

 21   Q.  Merci. Jusqu'en 1996, avez-vous eu une expérience du combat, du feu ?

 22   R.  J'ai eu de nombreuses expériences partout au monde, dans différents

 23   théâtres d'opérations. Certaines de ces opérations sont classifiées et je

 24   ne peux donc pas en informer les membres de cette Cour.

 25   Q.  Y a-t-il des informations qui ne soient pas classées secrètes que vous

 26   pourriez partager avec cette Cour pour que nous en sachions plus de

 27   l'expérience que vous avez acquise au combat ? Et encore une autre chose :

 28   le gouvernement britannique vous a-t-il donné l'autorisation de lever le

Page 9197

  1   secret militaire ?

  2   R.  Je peux partager avec vous mes expériences en Irlande du Nord, au

  3   Moyen-Orient, mais le reste de mes expériences sont classées secrètes et je

  4   ne suis donc pas autorisé à parler de ces autres domaines.

  5   Q.  Je vous remercie. La raison pour laquelle je vous ai posé cette

  6   question c'est que dans les réponses que vous avez données au parquet, vous

  7   avez dit que vous avez participé à des opérations de maintien de la

  8   sécurité et que vous aviez une grande expérience dans ce domaine, et donc

  9   que vous savez qu'il y a toujours un centre de coordination. Je ne vais pas

 10   vous poser des questions sur les postes ni les positions que vous avez

 11   occupés lorsque vous avez effectué des tâches de renseignements. Ce qui

 12   m'intéresse, c'est votre expérience en tant que parachutiste ou en tant

 13   qu'officier d'infanterie. Est-ce que dans ces fonctions, vous avez

 14   participé à des opérations militaires qui étaient soit effectuées par votre

 15   pays ou par l'OTAN ? Bien sûr, les informations classées secrètes, je ne

 16   veux pas vous poser de question à ce sujet, ni vous demander de rompre le

 17   secret.

 18   R.  Je répète que j'ai participé à des opérations en Irlande du Nord, j'ai

 19   participé à des opérations au Moyen-Orient. J'ai participé à la guerre des

 20   Malouines et j'étais observateur au Kosovo entre 1996 et 1999, et je suis

 21   retourné avec la KFOR comme officier de liaison pour le général Mike

 22   Jackson.

 23   R.  Merci. Je voudrais à présent vous poser la question suivante : en tant

 24   qu'attaché militaire pour le Royaume-Uni, la Grande-Bretagne, étiez-vous

 25   considéré comme membre du personnel de l'ambassade du Royaume-Uni ?

 26   R.  Oui. Nous étions fonctionnaires de l'ambassade à Belgrade, et ce qui

 27   était plus important, nous étions également accrédités par le service de

 28   liaison, la FLS, à la VJ. Et au début de mon travail là-bas, j'ai été

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  1   présenté officiellement au général Perisic, qui était chef d'état-major à

  2   l'époque, c'est d'ailleurs une procédure usuelle pour tout attaché

  3   militaire qui rejoint son poste dans un pays hôte.

  4   Q.  Je vous remercie. Je ne suis pas expert dans ces questions, mais

  5   j'aimerais savoir si on vous a envoyé à l'ambassade britannique à Belgrade

  6   en qualité de membre du personnel des ministères des Affaires étrangères ou

  7   releviez-vous d'un autre ministère ?

  8   R.  Non. Tous nos attachés militaires sont en poste et ont été détachés par

  9   le ministère de la Défense et sont dès lors affectés pour un mandat de deux

 10   ans ou trois ans auprès d'une ambassade particulière.

 11   Q.  Je vous remercie, Mon Colonel. A présent, je voudrais savoir si en tant

 12   qu'attaché militaire, vous disposiez de votre propre personnel qui

 13   travaillait sur les dossiers dont vous vous occupiez et dans ce cas, de

 14   combien de personnel vous disposiez ?

 15   R.  J'avais un officier, un adjudant et il avait lui-même un assistant.

 16   Donc c'était en fait tout le personnel dont je disposais à Belgrade.

 17   Q.  Excusez-moi. Est-ce que cela signifie que vous aviez trois personnes ou

 18   bien est-ce que cela inclut l'adjudant ?

 19   R.  Non, non. Pendant les trois ans où j'ai été en poste à Belgrade, il y

 20   avait deux personnes qui allaient travailler sur place et il y avait un

 21   secrétaire qui restait stationné à Belgrade, ce qui est la procédure

 22   standard.

 23   Q.  Je vous remercie. Mon Colonel, puisque vous travailliez pour le

 24   ministère de la Défense, est-ce qu'à titre personnel, à partir de votre

 25   bureau de Belgrade, est-ce que vous envoyiez des rapports directs au

 26   ministère de la Défense à Londres ?

 27   R.  Oui. Comme je l'ai indiqué à la Cour, je faisais directement rapport à

 28   Belgrade, à l'ambassadeur, au départ à l'ambassadeur Roberts et ensuite à

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  1   l'ambassadeur Donnelly. Et je faisais partie de son équipe qui était

  2   assignée à l'ex-Yougoslavie, ce qui, d'ailleurs, est une procédure tout à

  3   fait standard pour tout pays où nous avons une ambassade qui compte un

  4   attaché militaire parmi son personnel diplomatique.

  5   Q.  Mon Colonel, pourriez-vous répondre directement à la question suivante

  6   : en tant qu'attaché militaire, envoyiez-vous directement des rapports au

  7   ministère de la Défense ?

  8   R.  Excusez-moi, je n'ai peut-être pas été clair. J'envoyais mes rapports

  9   par l'intermédiaire de mon ambassadeur parce que je faisais partie de son

 10   équipe. Et donc c'est par l'intermédiaire de mon ambassadeur que j'envoyais

 11   mon rapport au ministère de la Défense, et c'est la procédure standard qui

 12   est suivie partout au monde.

 13   Q.  Je vous remercie.

 14   M. DJURDJIC : [interprétation] Si possible, je voudrais que l'on présente

 15   maintenant le 65 ter 00688, qui a déjà été utilisé aujourd'hui, mais je ne

 16   pense pas qu'il s'est vu attribuer une cote.

 17   M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, il s'agit du document identifié

 18   comme P01404.

 19   M. DJURDJIC : [interprétation] Très bien.

 20   Q.  Mon Colonel, c'est à la page 1 de ma version et on y dit "Résumé."

 21   Qui est l'auteur de ce résumé ?

 22   R.  En haut du rapport, vous verrez "venant du représentant militaire

 23   britannique, Belgrade." En fait, c'est le représentant militaire

 24   britannique à Belgrade, donc cela émane de moi-même, en l'occurrence.

 25   Q.  Très bien. Pourriez-vous me dire si ce rapport dans sa totalité qui

 26   porte la date du 13 mai 1998, est-ce que ce rapport a été autorisé par

 27   vous-même ou est-ce que ce rapport inclut des parties qui ont été rédigées

 28   par l'ambassadeur lui-même ?

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  1   R.  Oui. Comme je ne vois que la première page, Monsieur le Juge, je ne

  2   peux malheureusement pas faire un commentaire complet. Mais comme je l'ai

  3   indiqué déjà à la Cour, en tant qu'attaché militaire, mon travail

  4   consistait à fournir les éléments sur la situation militaire au Kosovo,

  5   comme je la voyais sur une base quasi-quotidienne en 1998 et en 1999. Et

  6   mon ambassadeur ou l'ambassadeur suppléant, comme je l'ai déjà indiqué à la

  7   Cour, ajouterait ensuite tout commentaire politique qui lui semblait

  8   adéquat à la situation. Donc on peut dire que c'est un rapport conjoint que

  9   nous faisions à titre d'équipe faisant rapport sur une situation

 10   extrêmement complexe, qui s'est développée en 1998 et en 1999.

 11   Q.  Je vous remercie, Mon Colonel. J'aimerais vous faire remarquer autre

 12   chose. Il est tout à fait essentiel pour moi que vous me disiez quelle est

 13   votre connaissance directe des faits et quels sont les éléments que vous

 14   avez obtenus de sources autres ?

 15   M. DJURDJIC : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait nous remontrer la

 16   première page de ce document en langue anglaise.

 17   Q.  D'après la réponse que vous venez de me donner, on n'a pas pu constater

 18   quelle partie de ce document était autorisée par vous et quelle partie

 19   émanait de l'ambassadeur ou d'un suppléant ou d'une tierce personne. Est-ce

 20   que l'on peut prendre la première page de ce rapport. Quelle est la partie

 21   des informations que vous avez contribuée et quelle est la partie qui a été

 22   apportée par d'autres personnes ?

 23   R.  A la page 1 de ce rapport, je suppose, compte tenu du fait que ça s'est

 24   quand même produit il y a presque 11-12 ans, la majorité de l'information

 25   qui figure à la première et la deuxième page a été contribuée par moi-même,

 26   puisque cela porte sur une activité militaire. Car comme j'ai essayé de

 27   l'expliquer, je faisais partie d'une équipe et je travaillais pour mon

 28   ambassadeur en essayant de faire rapport de la façon aussi précise que

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  1   possible des événements que j'avais constatés. Et certains de ces rapports

  2   faisaient l'objet d'entretiens par le biais du FLS sur la situation qui de

  3   façon générale se détériorait dans la province du Kosovo.

  4   Q.  Je vous remercie, Mon Colonel, mais il y a encore une chose qui pour

  5   moi n'est pas tout à fait claire. Qui assume la responsabilité du contenu

  6   de ce télégramme qui a été envoyé par l'ambassadeur au ministère de la

  7   Défense et qui est signé par lui, mais qui néanmoins reprend les éléments

  8   qui sont votre rapport, il n'y a aucune intervention dans ce rapport par

  9   l'ambassadeur, et ceci est envoyé et signé par l'ambassadeur ?

 10   R.  Mais comme je l'ai indiqué, il y a une transition quasi-directe entre

 11   l'ambassadeur, qui est responsable de l'équipe diplomatique à Belgrade, et

 12   je fais partie de son équipe. C'est moi qui ai préparé le contenu militaire

 13   dans ce télégramme particulier, et l'ambassadeur, étant responsable de

 14   l'équipe dans sa totalité à Belgrade, a apposé sa signature, ce qui est la

 15   procédure tout à fait courante dans toutes nos ambassades partout au monde.

 16   Q.  Puis-je vous poser la question suivante, Mon Colonel : le 13 mai 1998,

 17   est-ce que vous étiez au Kosovo ou est-ce que vous étiez à Belgrade à cette

 18   date ?

 19   R.  Le rapport porte sur la visite que j'ai faite au Kosovo les 11 et 12

 20   mai. Le rapport a probablement été rédigé lors de notre retour à Belgrade

 21   et, dès lors, a été daté de ce jour-là, c'est-à-dire le 13 mai. J'avais

 22   probablement pris des notes soit sur un magnétophone automatique ou par

 23   voie de notes dans mon carnet, et ensuite, à mon retour à Belgrade, j'ai

 24   rédigé un rapport que l'ambassadeur ou son suppléant ont ensuite vu et par

 25   la suite, ce rapport a été envoyé aux différentes personnes, y compris au

 26   ministère de la Défense, comme procédure usuelle.

 27   Q.  Je vous remercie.

 28   M. DJURDJIC : [interprétation] Pourrions-nous -- il y a le P01404, c'est le

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  1   rapport du 28 mai, qui était sur la liste 65 ter. C'est le 00687. 1405.

  2   Q.  Mon Colonel, il s'agit ici d'un rapport, si je ne m'abuse -- et si je

  3   me trompe, corrigez-moi - c'est un rapport qui date du 28 mai 1998. Est-ce

  4   bien le cas ?

  5   R.  Oui, c'est la date du rapport, effectivement.

  6   Q.  Vous avez dit que vous avez personnellement assisté aux événements qui

  7   sont donnés dans ce rapport ?

  8   R.  [aucune interprétation] 

  9   Q.  Est-ce que vous pourriez me dire, s'il vous plaît, quand ce rapport a-

 10   t-il été rédigé ?

 11   R.  Comme vous voyez au bas de ce rapport, la première journée c'était le

 12   26 mai et il s'agissait d'un tour de deux jours dans le Kosovo occidental.

 13   Donc nous avons effectivement effectué ce tour le 26 et 27 mai, et le

 14   rapport a été rédigé probablement au retour, c'est-à-dire le 28 mai, à

 15   notre retour à Belgrade. Parfois, j'envoyais ces rapports par différents

 16   moyens de communication à Belgrade et je restais au Kosovo. Donc ceci

 17   pourrait peut-être vous aider à comprendre qu'il y a parfois des

 18   différences entre le moment où la visite s'est effectuée et le moment où le

 19   rapport a été envoyé au ministère de la Défense et à d'autres personnes.

 20   Q.  Merci, Colonel.

 21   M. DJURDJIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je pense que le moment

 22   est venu de lever l'audience pour aujourd'hui.

 23   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui. Je vous remercie, Maître

 24   Djurdjic. Nous devons lever l'audience du fait de la séance plénière avec

 25   les Juges. Mais avant que nous ne levions l'audience, j'aimerais vous

 26   indiquer que nous avons reçu une requête émanant de l'Accusation. Cette

 27   requête a trait au Témoin K-87 pour lequel l'on se propose d'utiliser

 28   l'article 92 quater. Et d'après ce que nous comprenons, il s'agit du

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  1   dernier témoin en l'espèce. Donc nous devons traiter cette question de

  2   façon rapide. La Chambre se propose d'entendre les arguments présentés par

  3   voie orale à la fois par la Défense et par l'Accusation à ce sujet à la fin

  4   de la déposition du témoin que nous entendons en ce moment. Cela se fera

  5   donc peut-être demain ou mercredi.

  6   Nous allons donc maintenant lever l'audience et nous reprendrons demain

  7   matin à 9 heures, et il ne faut pas oublier de descendre les stores avant

  8   que le témoin ne quitte la salle. Donc nous nous retrouverons demain matin

  9   à 9 heures, Monsieur Crosland.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 11   --- L'audience est levée à 16 heures 48 et reprendra le mardi 27 octobre

 12   2009, à 9 heures 00.

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