Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 24 février 2010

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.

  5   [Le témoin vient à la barre]

  6   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

  8   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Veuillez vous asseoir.

  9   La déclaration solennelle que vous avez prononcée hier vaut toujours.

 10   Je pensais que vous alliez justement dire ça, Maître Djurdjic.

 11   M. DJURDJIC : [interprétation] Effectivement, Monsieur le Président. J'en

 12   ai quasiment terminé. Juste un point administratif. Il y a une erreur. Nous

 13   en avons informé le bureau du Procureur. Lorsque le compte rendu d'audience

 14   du témoin a été chargé, D001-3778, il s'agit de D723 sous pli scellé; et

 15   D011-4037 devrait être D724. Pourrait-on apporter ces corrections, s'il

 16   vous plaît. D723 et D724 sont donc les nouvelles cotes.

 17   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.

 18   Madame Petersen.

 19   Mme PETERSEN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 20   LE TÉMOIN : MOMIR STOJANOVIC [Reprise]

 21   [Le témoin répond par l'interprète]

 22   Contre-interrogatoire par Mme Petersen : 

 23   Q.  [interprétation] Bonjour. Je m'appelle Paige Petersen. Je vais vous

 24   poser un certain nombre de questions.

 25   R.  Bonjour.

 26   Q.  En 1998 et 1999, avez-vous rencontré l'accusé dans cette affaire, le

 27   général Djordjevic ?

 28   R.  Oui. En 1998, j'ai vu l'accusé, M. Djordjevic, une fois.

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  1   Q.  Attendez. Essayons de voir un petit peu de quoi il retourne. Vous

  2   l'avez vu une fois en 1998; c'est bien cela ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Quand était-ce ?

  5   R.  J'ai rencontré M. Djordjevic fin juillet 1998 dans le bureau du chef

  6   d'état-major du Corps de Pristina, le général Lazarevic. Lorsque je suis

  7   entré, ils étaient assis, ils prenaient un café et ils discutaient de

  8   manière informelle.

  9   Q.  S'agissait-il d'une réunion ou s'agissait-il de discussion informelle

 10   entre lui et le général Lazarevic ?

 11   R.  C'était une conversation informelle.

 12   Q.  Connaissiez-vous personnellement le général Djordjevic ?

 13   R.  Non, je ne le connaissais pas personnellement. Ce que je savais par

 14   contre, c'est qu'il était chef du secteur de la sécurité publique du

 15   ministère de l'Intérieur de la Serbie.

 16   Q.  Merci. Donc vous saviez qui il était, même si vous ne le connaissiez

 17   pas personnellement ?

 18   R.  Oui, absolument.

 19   Q.  Vous l'aviez vu à la télévision ou dans le cadre de vos fonctions ?

 20   D'où le connaissiez-vous ?

 21   R.  J'avais entendu parler de lui dans le cadre de mes fonctions, mais

 22   aussi dans les médias.

 23   Q.  Pendant la période des bombardements de l'OTAN, savez-vous quelles

 24   étaient les fonctions officielles du général Djordjevic ?

 25   R.  Après la période des bombardements de l'OTAN, M. Djordjevic était chef

 26   du secteur du MUP de la Serbie et assistant du ministre au ministère de

 27   l'Intérieur.

 28   Q.  Et est-ce qu'il occupait ce poste pendant les bombardements de l'OTAN ?

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  1   Est-ce que vous vous en souvenez ?

  2   R.  Pour autant que je sache, il a occupé ce poste même après les

  3   bombardements de l'OTAN.

  4   Q.  Je veux simplement préciser la période des bombardements de l'OTAN.

  5   Est-ce que, d'après vous, tel était son poste à ce moment-  là ?

  6   R.  Pendant les bombardements de l'OTAN, pour autant que je le sache, il

  7   était ministre assistant de l'Intérieur de la République de Serbie et il

  8   était responsable de la sécurité publique.

  9   Q.  Et pendant la période des bombardements de l'OTAN, avez-vous vu le

 10   général Djordjevic au Kosovo ?

 11   R.  Pendant les bombardements de l'alliance Atlantique, je n'ai pas vu M.

 12   Djordjevic dans la région du Kosovo-Metohija.

 13   Q.  Etant donné le poste qui était le sien à l'époque, s'il était allé au

 14   Kosovo à l'époque, l'auriez-vous su ?

 15   R.  Etant donné ses fonctions à l'époque, je n'avais nullement besoin de

 16   savoir quelles étaient ses visites. Mais étant donné que c'était un

 17   officiel de haut rang, je pense que j'aurais été informé de ses visites au

 18   Kosovo-Metohija.

 19   Q.  Savez-vous si le général Djordjevic s'est rendu au Kosovo le 16 avril

 20   1999 ?

 21   R.  Non.

 22   Q.  Savez-vous si le général Djordjevic est allé au Kosovo le 18 avril 1999

 23   ?

 24   R.  Non. Ce qui est possible, c'est que M. Djordjevic se soit rendu

 25   brièvement au Kosovo en compagnie du ministre de l'Intérieur, mais je ne

 26   dispose d'aucune information en la matière.

 27   Q.  Merci. Alors, j'aimerais pour l'heure vous signaler que le général

 28   Djordjevic a témoigné dans le cadre de cette affaire et qu'il est allé au

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  1   Kosovo à ces deux dates, 18 et 19 [comme interprété] avril. Donc peut-on

  2   dire, Monsieur, que lorsque le général Djordjevic est allé au Kosovo, vous,

  3   vous n'en étiez pas forcément directement informé; peut-on dire cela ?

  4   R.  Oui, on est d'accord.

  5   Q.  Maintenant, quelle est votre relation, à ce jour, avec le général

  6   Djordjevic ?

  7   R.  Écoutez, il n'y a pas de relation. Je comparais ici simplement comme

  8   témoin à décharge.

  9   Q.  Donc ce n'est pas quelqu'un que vous connaissez très bien, ou que vous

 10   connaissez finalement ?

 11   R.  Je ne suis pas tout à fait d'accord avec vous. Ce n'est pas quelqu'un

 12   que je connais bien. Pour autant, ce n'est pas quelqu'un que je ne connais

 13   pas. La fonction de ministre assistant de l'Intérieur et de chef du secteur

 14   de la sécurité était une fonction publique, et donc pendant les années

 15   1990, j'ai régulièrement entendu parler du général Djordjevic.

 16   Q.  Merci. Alors, vous venez de nous dire qu'en 1998 et 1999, vous étiez le

 17   chef du département de sécurité dans le commandement du Corps de Pristina;

 18   est-ce exact ?

 19   R.  Non, pas du département de la sécurité, mais de la section de sécurité.

 20   Q.  D'accord, la section de sécurité. Fort bien. Avant cela, début 1993,

 21   vous étiez le chef adjoint de la section de sécurité du Corps de Pristina;

 22   est-ce exact ?

 23   R.  Oui. De 1993 à 1996, j'ai effectivement été chef adjoint de la section

 24   de sécurité dans le commandement du Corps de Pristina.

 25   Q.  A quel moment en 1998 êtes-vous devenu chef ?

 26   R.  Je ne suis pas devenu chef en 1998. C'est en 1996 que je suis devenu

 27   chef.

 28   Q.  Fort bien. Alors, dans votre déposition lorsqu'on vous a demandé si

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  1   vous étiez chef en 1998 et 1999, c'est effectivement la position que vous

  2   occupiez, mais simplement, vous l'occupiez depuis plus longtemps que cela;

  3   c'est cela ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Quand êtes-vous devenu chef en 1996 ?

  6   R.  Le 12 avril 1996.

  7   Q.  Très bien. Vous nous avez dit que l'une des fonctions de la section de

  8   sécurité, c'était d'assurer la sécurité pour les commandants du corps;

  9   c'est exact ?

 10   R.  L'une des missions de la section de sécurité du Corps de Pristina

 11   consiste à s'occuper de toutes les questions de sécurité pour les haut

 12   gradés, y compris les commandants du Corps lorsqu'ils sont basés quelque

 13   part ou lorsqu'ils sont en déplacement.

 14   Q.  Alors, qui d'autre dans le secteur de sécurité s'occupait des questions

 15   de sécurité ? On peut parler plus précisément de 1999, lorsqu'il y avait le

 16   général Lazarevic, le commandant du Corps de Pristina. Qui d'autre ?

 17   R.  La section de la sécurité s'occupait de garantir la sécurité des

 18   commandants du Corps ainsi que pour le chef d'état-major du Corps. Il y a

 19   toute une liste de personnes dont il fallait assurer la sécurité lorsqu'ils

 20   étaient basés quelque part ou lorsqu'ils étaient en déplacement, et ces

 21   deux personnes-là sont en haut de la liste. Toutefois, tout cela se fait

 22   par le biais des unités de police militaire, dont je m'occupais

 23   personnellement.

 24   Q.  Donc ma question est la suivante : quel était votre rôle par rapport à

 25   ces questions de sécurité ? Comment assurez-vous la sécurité de ces

 26   personnes ?

 27   R.  Dans la section de sécurité du commandement du Corps de Pristina, il y

 28   a deux chefs assistants, mes assistants à moi donc. L'un d'entre eux

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  1   s'occupe du contre-renseignement. Il s'occupe de la mise en place de

  2   certaines mesures pour que certains agents ne puissent pas faire certaines

  3   choses. Et l'autre s'occupe des questions de sécurité pour l'état-major,

  4   d'un point de vue professionnel évidemment, et il s'occupe également des

  5   unités de police militaire. Cet assistant utilise les unités de police

  6   militaire pour assurer la sécurité des personnes qui jouissent de cette

  7   protection; en la matière, le commandant du Corps et le chef d'état-major.

  8   Q.  Donc les détails de sécurité provenaient de l'unité de police

  9   militaire, n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Etiez-vous chargé de ces questions de sécurité au quotidien et de toute

 12   la logistique qui va avec en fonction des lieux où se trouvait le général

 13   Lazarevic ?

 14   R.  Non, ça n'était pas dans mes fonctions. C'était la fonction de mon

 15   assistant chargé de l'état-major et des questions de sécurité. Il y avait

 16   des vérifications qui étaient faites, et on choisissait donc les personnes

 17   les plus aptes à mener cette fonction dans la police militaire.

 18   Q.  Donc je pense que vous ne saviez pas forcément où se trouvait le

 19   général Djordjevic au quotidien, n'est-ce pas ? C'est ce que vous venez de

 20   nous dire, grosso modo, dans votre déposition.

 21   R.  Oui, c'est vrai. Les supérieurs ne doivent pas forcément rendre compte

 22   à leurs subordonnés. C'est l'inverse qui s'applique. Lorsque le général

 23   Lazarevic me disait où il était, évidemment, là j'étais au courant. Mais

 24   dans certaines situations, étant donné qu'il était mon supérieur, il

 25   n'était pas dans l'obligation de me dire où il était ou de me parler de ses

 26   activités.

 27   Q.  Pendant la période des bombardements de l'OTAN, est-ce que le secteur

 28   de sécurité a assuré la sécurité pour le commandant de la 3e Armée, le

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  1   général Pavkovic ?

  2   R.  Non. Le général Pavkovic, commandant de la 3e Armée, pendant les

  3   bombardements de l'OTAN lorsqu'il était dans la zone de responsabilité du

  4   Corps de Pristina, il était toujours placé sous l'escorte du Bataillon de

  5   la 3e Police militaire, qui est sous le commandement de la 3e Armée et qui

  6   est basé à Nis. Moi, j'avais un certain nombre d'obligations à remplir

  7   uniquement lorsqu'il y avait des demandes pour renforcer sa sécurité. A ce

  8   moment-là, nous prêtions main-forte au général Pavkovic et nous

  9   choisissions les gens dans le Corps de Pristina et dans le bataillon de

 10   Police militaire. Toutefois, ces demandes étaient rares.

 11   Q.  Qu'est-ce qui aurait fait que cela aurait été le cas, qu'on vous ait

 12   demandé d'accroître le niveau de sécurité dont jouissait le général

 13   Pavkovic ?

 14   R.  La sécurité ou la sûreté du général Pavkovic aurait pu être menacée.

 15   Cela pouvait être le cas lorsqu'il allait au Kosovo, lorsqu'il rendait

 16   visite à différentes unités qui étaient proches des zones de combat.

 17   Q.  Donc vous avez dit que cela arrivait rarement. Mais à combien de

 18   reprises est-ce que cela est arrivé ?

 19   R.  Je ne sais pas. Je ne me souviens pas. Disons, dès lors que le général

 20   Pavkovic était dans la zone frontalière ou dès lors qu'il devait aller du

 21   Kosovo vers la zone de Metohija, étant donné que toutes les routes étaient

 22   menacées par des attaques des terroristes albanais.

 23   Q.  Donc est-ce que c'est plutôt de l'ordre d'une fois ou deux qu'il a

 24   fallu augmenter son niveau de sécurité ou est-ce que l'on parle plutôt

 25   d'une dizaine ou d'une quinzaine de fois ?

 26   R.  Pendant l'agression de l'OTAN, le général Pavkovic s'est rarement rendu

 27   sur les lignes de front au Metohija. Je pense que c'est vraiment très rare.

 28   Maintenant, quant à savoir combien de fois est-ce que c'est arrivé, j'avoue

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  1   que là je ne sais pas.

  2   Q.  Merci. Alors, si vous ne connaissiez pas son emploi du temps au

  3   quotidien au général Lazarevic, c'est la même chose pour le général

  4   Pavkovic ? Vous ne connaissiez pas non plus son emploi du temps au

  5   quotidien, n'est-ce pas ?

  6   R.  Je n'avais pas besoin de connaître l'emploi du temps du général

  7   Pavkovic ni ses activités du fait qu'il était commandant de la 3e Armée.

  8   Mon service de sécurité ne s'occupait pas de tout cela. Selon le règlement

  9   intérieur, j'aurais dû connaître les déplacements du général Lazarevic,

 10   mais il avait le droit de m'informer ou non de ses déplacements ou de

 11   demander d'être escorté par la police militaire. Cela dépendait de lui.

 12   C'est lui qui décidait s'il voulait m'informer de là où il se trouvait.

 13   Q.  En dehors des règlements, ce qui est intéressant, c'est de savoir ce

 14   qui s'est passé dans le cadre de cette affaire. Dans les faits, est-ce que

 15   vous saviez où se trouvait le général Lazarevic au quotidien ? Est-ce qu'il

 16   vous en informait ou est-ce qu'il ne vous en informait pas ?

 17   R.  Le général Lazarevic, pendant toute l'agression de l'OTAN, disposait

 18   d'une unité de police militaire qui n'a pas changé. Ils l'escortaient

 19   constamment. Si ses déplacements étaient considérés comme étant à risque et

 20   s'il fallait davantage de personnel, il me demandait à moi de lui fournir

 21   ce personnel. Donc c'étaient constamment les mêmes personnes qui

 22   l'escortaient et qui garantissaient la sécurité du général Lazarevic.

 23   Q.  Donc pour simplifier, en dehors des moments où il demandait davantage

 24   de sécurité, vous ne suiviez pas forcément chacun de ses déplacements,

 25   n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui, c'est ça.

 27   Q.  Merci. Quand vous étiez au Kosovo, est-ce que vous avez travaillé

 28   étroitement avec le général Pavkovic ? Je parle de toute la période que

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  1   vous avez passée au Kosovo, de 1993 à 1999.

  2   R.  J'ai travaillé avec le général Pavkovic à compter de 1996 parce qu'il

  3   est arrivé au Kosovo-Metohija en 1996 et il y a pris la fonction de chef de

  4   l'organisme des opérations dans le commandement du Corps de Pristina.

  5   Pendant un certain temps, le général Pavkovic, en tant que commandant du

  6   corps, était mon supérieur direct. Même chose pour ses autres assistants,

  7   j'ai donc travaillé avec le général Pavkovic. En janvier 1999, lorsqu'il a

  8   été nommé commandant de la 3e Armée, je n'ai plus eu de contact avec le

  9   général Pavkovic.

 10   Q.  Plus aucun contact ?

 11   R.  Non, non, pas plus aucun contact. Ecoutez, de temps en temps, il nous

 12   arrivait de nous rencontrer par hasard ou s'il rendait visite à telle ou

 13   telle unité et que j'étais sur place, évidemment là nous étions en contact.

 14   Mais je n'ai plus eu aucun contact avec le général Pavkovic en 2000 lorsque

 15   j'ai terminé l'école nationale de défense. J'ai été nommé à d'autres

 16   fonctions au service de Sécurité, même si jusque-là toute ma carrière avait

 17   été faite dans le service.

 18   Q.  Est-ce que vous pourriez dire que vos relations de travail quand vous

 19   commencez en 1996 avec le général Pavkovic, est-ce que vous pouvez dire que

 20   dans le cadre de ces relations de travail c'était quelqu'un qui vous

 21   respectait ?

 22   R.  Le général Pavkovic respectait mon professionnalisme.

 23   Q.  Vous écoutait-il ?

 24   R.  La plupart du temps, il acceptait nos propositions, mais il avait la

 25   prérogative - comme tout commandant - de les rejeter. Il lui incombait

 26   d'écouter nos propositions et d'en tenir compte, mais il n'était pas obligé

 27   de les suivre.

 28   Q.  Mais d'après vous, est-ce que de manière générale il vous prenait au

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  1   sérieux ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Comment décririez-vous le général Pavkovic en tant que dirigeant ?

  4   R.  Comme je vous l'ai dit, j'ai rencontré le général Pavkovic en 1996, et

  5   je dirais qu'il est l'un des meilleurs officiers au sein de l'armée de la

  6   RFY. Je le dis sans réserve étant donné que j'ai été basé dans dix

  7   garnisons tout au long de ma carrière. J'ai ainsi connu de nombreux

  8   supérieurs hiérarchiques. C'était un homme très courageux, compte tenu du

  9   fait que lorsqu'il était commandant du corps, il se rendait fréquemment sur

 10   les lignes de front lors des combats. Mais comme toute personne, il avait

 11   aussi des défauts.

 12   Q.  Est-ce que vous caractériseriez votre relation de proche ?

 13   R.  De façon générale, le général Pavkovic n'était proche de personne au

 14   sein des services de Sécurité. Je pense que cela remonte à une période qui

 15   a précédé son arrivée au Kosovo-Metohija, d'après ce que j'ai entendu dire.

 16   D'ailleurs, il avait eu quelques difficultés avec le service de Sécurité

 17   alors qu'il était à Belgrade. Par conséquent, il avait des réserves vis-à-

 18   vis du service de Sécurité de manière générale, et dès lors, à mon égard

 19   aussi étant donné que je faisais partie de ce service. Au sein de la VJ,

 20   l'on estimait de façon générale que compte tenu de la nature même des

 21   tâches qui incombaient au service de Sécurité, la moindre erreur pouvait

 22   être très préjudiciable. C'est le sentiment qui dominait parmi certains

 23   officiers, dont le général Pavkovic.

 24   Q.  Etait-ce parce que vous étiez censés les dénoncer au cas où ils

 25   auraient commis un crime ?

 26   R.  Oui. Chacun de nos membres, quel qu'ait été son rang ou son grade,

 27   avait l'obligation de dénoncer sans tarder tout crime dont il avait

 28   connaissance, et cela se rapportait à tous les niveaux du commandement.

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  1   Q.  Pendant la période que vous avez passée au Kosovo, est-ce que vous avez

  2   collaboré d'une manière étroite avec le général Lazarevic ?

  3   R.  Oui. J'étais proche du général Lazarevic. Dans le contexte militaire,

  4   par exemple, l'on a de meilleures relations avec certaines personnes

  5   qu'avec d'autres. Je dirais que j'avais une très bonne relation

  6   professionnelle avec le général Lazarevic et qu'il était un professionnel

  7   de haut vol.

  8   Q.  Etiez-vous proche de lui ?

  9   R.  Non. J'ai toujours essayé d'avoir des relations avec mes supérieurs

 10   hiérarchiques conformes aux règlements et normes professionnels. J'essayais

 11   de ne pas avoir des relations trop personnelles. J'étais subordonné au

 12   général Pavkovic comme au général Lazarevic. Je leur témoignais le respect

 13   que l'on doit à ses supérieurs hiérarchiques et je les informais

 14   régulièrement de tout ce qui se passait dans mon domaine de compétence.

 15   Q.  Je pense que nous devrions préciser quelque chose, parce qu'à la page

 16   précédente, à la page 11, ligne 22, vous avez dit que vous étiez proche du

 17   général Lazarevic.

 18   Je pense que nous devrions préciser ce qu'il en est. Est-ce que vous êtes

 19   en train de nous dire que dans le cadre de votre relation professionnelle,

 20   vous étiez proche de lui, mais que vous n'étiez pas intimes en dehors du

 21   contexte du travail ?

 22   R.  Oui, je confirme ce que vous venez de dire. J'étais proche de lui dans

 23   le cadre de notre vie professionnelle. Mais en dehors du travail, je ne le

 24   fréquentais pas.

 25   Q.  Merci. Dans votre opinion, est-ce que le général Lazarevic vous

 26   respectait sur le plan professionnel ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Il écoutait ce que vous aviez à dire ?

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  En tant que chef de la sécurité du Corps de Pristina, qui au juste vous

  3   adressait des rapports ?

  4   R.  En tant que chef de la section de la sécurité du Corps de Pristina, je

  5   recevais des rapports de mes subordonnés directs de l'organe de sécurité au

  6   sens technique. Les organes de sécurité des brigades subordonnées en

  7   l'espèce et des bataillons subordonnés. Après le mois de juillet 1998, un

  8   poste de commandement avancé a été créé à Djakovica. Il y avait toujours un

  9   opérationnel chevronné qui y travaillait qui présentait régulièrement des

 10   rapports concernant ce poste de commandement avancé. Quant aux brigades du

 11   Corps de Pristina, plusieurs groupes de combat avaient été mis sur pied. Au

 12   sein de ces groupes, il y avait des organes de sécurité auxquels il

 13   incombait de faire rapport à l'officier chargé de la sécurité de la

 14   brigade. Et à son tour, ce chef de la sécurité de la brigade me

 15   transmettait ces informations.

 16   Q.  Ainsi, chaque brigade cantonnée au Kosovo avait en son sein des

 17   officiers qui étaient membres de l'organe de sécurité; est-ce exact ?

 18   R.  Chaque brigade du Corps de Pristina basée au Kosovo-Metohija était

 19   dotée d'un officier responsable de l'organe de sécurité, puis il y avait un

 20   autre officier administratif ou un soldat. Lorsque les groupes de combat

 21   ont été mis sur pied, ces groupes étaient également dotés d'un officier qui

 22   exerçait la fonction de responsable de la sécurité.

 23   Q.  Ainsi, les officiers chargés de la sécurité au sein d'une unité de

 24   combat transmettaient des rapports à la brigade, et les responsables de la

 25   sécurité au sein des différentes brigades vous faisaient rapport; est-ce

 26   exact ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  A quel rythme ces rapports vous étaient-ils soumis ?

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  1   R.  Comme je l'ai dit à plusieurs reprises, il incombait aux responsables

  2   de la sécurité des brigades tous les matins et tous les soirs d'utiliser

  3   leurs moyens de communication, leur matériel pour me soumettre leurs

  4   rapports. Et ils devaient rédiger un rapport écrit sur l'état d'avancement

  5   des opérations antiterroristes.

  6   Q.  J'aimerais juste m'assurer que je vous ai bien compris. En dehors des

  7   opérations antiterroristes, est-ce qu'ils vous faisaient rapport tous les

  8   matins et tous les soirs ou bien est-ce que c'était uniquement la pratique

  9   dans le cadre d'une opération antiterroriste ?

 10   R.  Tous les jours en 1998 et en 1999, tant le matin que le soir, ils me

 11   faisaient rapport oralement ou par télégramme et ils me soumettaient aussi

 12   les documents prescrits par les règlements de service. Il y avait des

 13   rapports oraux, puis des télégrammes, et ensuite des rapports beaucoup plus

 14   détaillés. Nos règles sur la méthodologie précisent comment ces

 15   informations devaient être réunies, de quel type d'informations il

 16   s'agissait, la fiabilité de ces informations, comment elles devaient être

 17   traitées ou analysées, ainsi que les mesures proposées sur la base de ces

 18   informations et quelles requêtes étaient adressées à la section de sécurité

 19   du Corps de Pristina.

 20   Q.  Est-il exact que dès lors vous receviez un coup de fil chaque matin et

 21   chaque soir suivi de ces autres choses que vous venez d'énumérer ?

 22   R.  Il y avait les rapports oraux, et comme je l'ai dit, ensuite, je

 23   recevais des rapports écrits.

 24   Q.  Merci. Et quel type d'informations vous était communiqué par ces

 25   officiers des organes de sécurité ?

 26   R.  Il leur incombait de m'informer de tout renseignement concernant la

 27   sécurité au sein d'une unité ou une zone de responsabilité. Chaque brigade

 28   au Kosovo-Metohija avait sa propre zone de responsabilité. Les organes de

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  1   sécurité qui étaient responsables de la frontière albanaise avaient

  2   également l'obligation de faire rapport concernant la situation à la

  3   frontière.

  4   Q.  Lorsque vous parlez de "renseignements se rapportant à la sécurité,"

  5   qu'est-ce que cela comprend ?

  6   R.  Je vais tenter de vous expliquer. Prenons l'exemple d'une opération

  7   antiterroriste. L'officier responsable de la sécurité devait s'entretenir

  8   avec moi dans la matinée pour me dire que tel jour, telle opération était

  9   projetée, impliquant telle force et avec un objectif précis. Normalement,

 10   dans la soirée, l'opération avait été menée à bien et le chef de la brigade

 11   m'informerait des progrès réalisés, de l'état d'avancement de l'opération,

 12   si des soldats avaient été tués, quelles mesures avaient été prises par les

 13   terroristes siptar, est-ce que certains d'entre eux avaient été faits

 14   prisonniers, des actes illicites avaient-ils été commis par l'armée dans le

 15   cadre de l'opération, y avait-il eu des défaillances au sein du

 16   commandement. Il leur incombait de me transmettre toutes ces informations

 17   dans les meilleurs délais, un rapport écrit détaillé concernant toute

 18   opération menée à bien.

 19   Q.  Donc l'une de leurs responsabilités était de vous faire rapport sur

 20   tout comportement illicite de la part des soldats de la VJ ?

 21   R.  Oui, toute question se rapportant aux activités du service de sécurité

 22   militaire.

 23   Q.  Lorsqu'il n'y avait pas d'opération en cours, quel type d'informations

 24   vous était donné dans le cadre de ces rapports qui vous étaient faits deux

 25   fois par jour, le matin et le soir ? Est-ce que l'on vous transmettait des

 26   renseignements concernant l'UCK ?

 27   R.  Il ne s'agissait pas vraiment de renseignements, car le service des

 28   renseignements militaire s'en occupait. J'étais membre de la section de

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  1   contre-espionnage, et la section de sécurité, ce n'est pas la même chose.

  2   Les organes de sécurité qui m'étaient subordonnés avaient l'obligation de

  3   me présenter des rapports oraux et écrits, mais de tels rapports

  4   concernaient, pour la plupart, la situation des différentes unités, les

  5   soldats blessés, les infractions à la discipline, parfois des actes

  6   illicites. Néanmoins, lorsque aucune opération n'était en cours, ces

  7   rapports concernaient souvent des renseignements qui avaient été rassemblés

  8   concernant certains endroits, les effectifs, la composition ou les membres

  9   des terroristes albanais ou leurs objectifs.

 10   Q.  J'aimerais maintenant vous parler de la relation entre la section de

 11   sécurité et les bataillons de la Police militaire. Hier, vous avez dit

 12   qu'au sein du Corps de Pristina, lorsque l'on parle de la police militaire,

 13   il s'agit essentiellement du 52e Bataillon de la Police militaire, n'est-ce

 14   pas ?

 15   R.  Non, non, non. Outre ce 52e Bataillon, et je parle de l'année 1998, il

 16   faut le garder à l'esprit, il y avait au sein du Corps de Pristina deux

 17   autres compagnies de Police militaire, dont l'une était la 549e Brigade

 18   motorisée à Prizren et l'autre unité de classe A était la 125e Brigade

 19   motorisée, que l'on dénommait la 125e Compagnie de Police militaire. A la

 20   veille de l'agression de l'OTAN, outre ces deux brigades, qui en leur sein

 21   avaient des compagnies de Police militaire, toutes les autres brigades ont

 22   mobilisé leurs propres compagnies de Police militaire, et ces compagnies de

 23   Police militaire étaient subordonnées à leurs commandants de brigade

 24   respectifs. Le 52e Bataillon de la Police militaire était une unité qui

 25   était attachée au corps, mais qui était indépendante, une unité

 26   indépendante directement subordonnée au commandant du corps.

 27   Q.  Directement subordonnée au commandant du Corps de Pristina ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Vous nous avez dit hier -- ou il y a deux jours, que le service de

  2   sécurité militaire est, du point de vue technique, responsable de la police

  3   militaire; est-ce exact ?

  4   R.  Non. Le service de sécurité militaire est responsable du Contre-

  5   espionnage et de la Sécurité concernant l'état-major dans toute unité, y

  6   compris le 52e Bataillon de la Police militaire. Pour ce qui est des

  7   opérations, qui était responsable de la sécurité au sein du 52e Bataillon -

  8   -

  9   Q.  J'aimerais juste préciser, le 22 février, à la page 7 du compte rendu,

 10   donc la page 7 concernant ce jour-là, à la ligne 14, on vous a demandé :

 11   "Quelles sont les attributions de la police militaire comparées à celles de

 12   la police ?"

 13   Et vous avez répondu :

 14   "Du point de vue technique, le service de sécurité militaire est

 15   responsable de la police militaire et de son travail, les aspects

 16   techniques du travail de la police militaire."

 17   Je vous demande simplement de confirmer que c'est bien le cas.

 18   R.  Je vais être plus précis. Vous m'avez demandé : qui était responsable

 19   de la sécurité au sein du 52e Bataillon du point de vue opérationnel ?

 20   C'est ce que j'essayais de vous expliquer. Il s'agissait de mon assistant

 21   pour la sécurité de l'état-major qui aurait été chargé de fournir le

 22   matériel nécessaire et de former les unités de police militaire de manière

 23   générale, responsable aussi de toutes les questions se rapportant au

 24   personnel. Donc du point de vue technique, oui, il était responsable de la

 25   police militaire, et cela, non seulement au sein du 52e Bataillon, mais

 26   aussi toutes les autres compagnies dans les brigades.

 27   Q.  Je crois qu'il y a deux jours, vous nous avez dit aussi que les

 28   officiers responsables de la sécurité, y compris vous-même, ne pouvaient

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  1   pas donner d'ordres à une unité, même une unité de police militaire; est-ce

  2   exact ?

  3   R.  Oui, tout à fait, s'agissant de décider de la manière dont une unité

  4   allait être affectée. Les officiers de la sécurité militaire n'avaient

  5   aucun pouvoir sur une unité, y compris l'unité de la police militaire. Seul

  6   le commandant de brigade pouvait donner de tels ordres. Pour ce qui est du

  7   52e Bataillon, seul le commandant du Corps de Pristina avait le pouvoir de

  8   donner des ordres à ce bataillon, puisque l'unité lui était directement

  9   subordonnée.

 10   Q.  Dans l'affaire Milutinovic, vous nous avez dit - à la page 162 de la

 11   pièce, votre déposition dans le cadre de cette affaire - que le service de

 12   Sécurité formulait des propositions quant à l'utilisation des unités de la

 13   police militaire, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Je vais vous en donner lecture. Au compte rendu, à la page 5, ligne 15,

 16   vous avez dit :

 17   "Les organes du service de sécurité militaire, d'un point de vue technique

 18   et professionnel, étaient chargés des organes de la police militaire."

 19   Puis, on vous a demandé :

 20   "Est-ce que les organes du service de sécurité militaire ont le droit

 21   de donner des ordres à la police militaire ?"

 22   Vous avez répondu :

 23   "Non. Seul le commandant de l'unité qui comprend des unités de police

 24   militaire a le droit de le faire. Les organes du service de sécurité

 25   militaire proposaient au commandant de l'unité la manière dont les unités

 26   de la police militaire pourraient être utilisées."

 27   Est-ce bien ce que vous avez dit, Monsieur ?

 28   R.  Oui.

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  1   Mme PETERSEN : [interprétation] Pourrions-nous voir la pièce de

  2   l'Accusation 1341.

  3   Q.  Il s'agit du procès-verbal de la réunion du collège de l'état-major

  4   général de la VJ du 25 février 1999.

  5   Mme PETERSEN : [interprétation] Pourrions-nous voir la page 15 en anglais,

  6   et je crois la page 15 en B/C/S également, même s'il m'a été difficile de

  7   vérifier si cela correspond bien. Je crois que c'est à la page 15, mais si

  8   ce n'est pas le cas, je suis sûre que mon éminent confrère m'en avisera.

  9   Pourrions-nous voir le bas de la page 15 en anglais.

 10   Q. L'on peut y voir que le général Dimitrijevic va prendre la parole. A

 11   cette époque, quelles étaient les fonctions du général Dimitrijevic ?

 12   R.  Le général Aleksandar Dimitrijevic, à l'époque, était responsable de

 13   l'administration de la sécurité au sein de l'état-major général de la VJ.

 14   Q.  Il était donc le supérieur hiérarchique de votre supérieur

 15   hiérarchique; est-ce exact ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Alors, je demanderais à Me Djurdjic de vérifier que nous avons bien la

 18   bonne page. Très bien. Passons à la page suivante en anglais où l'on peut

 19   voir ce qu'il dit au juste. Il dit :

 20   "Concernant le départ d'un bataillon antiterroriste de la 72e Brigade

 21   spéciale, je trouve qu'il est tout à fait inadéquat que personne ne m'ait

 22   consulté à ce sujet. J'ai été informé d'un ordre écrit et de l'envoi de la

 23   meilleure unité antiterroriste seulement après qu'elle soit arrivée sur

 24   place, et cela démontre bien que cette unité n'a pas été utilisée de

 25   manière adéquate" --

 26   M. DJURDJIC : [interprétation] Je voudrais juste signaler qu'en fait, c'est

 27   la page 14 en B/C/S. On voit la suite à la page 15. Mais ce que lit à

 28   l'heure actuelle le Procureur se trouve à la page 14 en B/C/S.

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  1   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.

  2   Mme PETERSEN : [interprétation] Merci, Maître Djurdjic.

  3   Q.  Je ne veux pas lire tout ce passage. L'on voit que le général Curcin

  4   prend la parole, puis le général Ojdanic, puis le général Dimitrijevic de

  5   nouveau, qui dit :

  6   "Il est prescrit clairement que les unités de la police ne doivent

  7   être déployées que sur proposition de notre part, et on peut partir du

  8   principe que nous savons mieux que quiconque comment ces unités devraient

  9   être utilisées. Donc je formule une objection parce que l'on aurait dû nous

 10   consulter."

 11   Monsieur le Témoin, conviendriez-vous que les responsables de la sécurité

 12   prenaient très au sérieux leur droit de proposer l'utilisation ou

 13   l'affectation des unités de la police militaire ?

 14   R.  Permettez-moi de vous expliquer ce que veut dire ici le général

 15   Dimitrijevic. Hier, dans le cadre de ma déposition, j'ai dit que le

 16   bataillon antiterroriste, un des bataillons appartenant à la 72e Brigade

 17   spéciale pendant l'offensive de l'OTAN, avait été resubordonné à la 3e

 18   Armée, et puis le Corps de Pristina. Etant donné que le service de la

 19   sécurité militaire, conformément aux règlements, a pour l'essentiel trois

 20   types d'activités, dont le contre-espionnage, par ailleurs, le terrorisme,

 21   et en troisième lieu, le crime organisé, alors si on examine de plus près

 22   leur deuxième domaine de compétence, le terrorisme, le service de Sécurité

 23   proposait aux commandements comment utiliser de la manière la plus

 24   opportune les unités antiterroristes. En l'espèce, que dit ici le général

 25   Dimitrijevic, cela peut se résumer ainsi. Pourquoi l'unité avait-elle était

 26   détachée de la 72e Brigade et resubordonnée au Corps de Pristina sans qu'il

 27   ne soit consulté ? Je vous rappelle néanmoins que la Brigade des Gardes, la

 28   72e Brigade spéciale et celle des Parachutistes relevaient d'un autre

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  1   corps, que l'on appelait le Corps des Forces spéciales. Ce corps était basé

  2   à Belgrade. Ce qu'il dit ici, enfin, il se plaint auprès du général

  3   Ojdanic, qui était le chef de l'état-major général à l'époque. Il demande

  4   pourquoi le bataillon antiterroriste a-t-il été envoyé ailleurs, détaché

  5   sans son consentement préalable ? Puis, il se plaint aussi du fait que le

  6   chef d'état-major de la 3e Armée avait sans doute formulé cette

  7   proposition. A qui pensait-il ? Le général Ljubisa Stojmirovic qui, avant

  8   d'entrer en fonction en tant que chef de l'état-major de la 3e Armée, était

  9   commandant du Corps des Forces spéciales.

 10   Donc que dit au juste Dimitrijevic ? Que le général Stojmirovic avait

 11   obtenu du chef de l'état-major général que ce bataillon soit détaché au

 12   Corps de Pristina, et cela minimisait, pour ainsi dire, l'importance du

 13   général Dimitrijevic lui-même.

 14   Q.  Apparemment, il réaffirme le droit du secteur de sécurité de proposer

 15   la manière dont ces unités militaires devaient être utilisées; est-ce exact

 16   ? Il indique clairement qu'il aurait dû être consulté à ce sujet ?

 17   R.  S'il vous plaît, ce qu'il dit, c'est qu'il aurait dû être consulté,

 18   mais que l'on ne devait pas nécessairement lui poser la question. Car

 19   chaque commandant supérieur a le droit inviolable de prendre une décision,

 20   car Dimitrijevic est subordonné à Ojdanic, et le bataillon n'aurait pas pu

 21   être déployé sans la décision du chef d'état-major. Donc le général Ojdanic

 22   ne devait pas lui demander nécessairement. Mais d'après un bon comportement

 23   militaire et conformément à un règlement non écrit de bonnes relations, il

 24   aurait pu le faire, mais il n'était pas tenu de le faire.

 25   Q.  Hier, on vous a montré une série de télégrammes --

 26   Mme PETERSEN : [interprétation] Je n'ai plus besoin de cette pièce.

 27   Q.  -- télégrammes de la section de sécurité du Corps de Pristina, donc

 28   vous, je crois, et la section de sécurité de la 3e Armée. Souvent, ces

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  1   documents prenaient la forme de télégrammes; est-ce exact ?

  2   R.  Oui, pour la plupart, c'étaient des télégrammes.

  3   Q.  Bien.

  4   Mme PETERSEN : [interprétation] Peut-on examiner maintenant D749, s'il vous

  5   plaît, la première page en anglais et en B/C/S.

  6   Q.  Monsieur, on vous a montré cela il y a deux jours. Apparemment, c'est

  7   un télégramme du département de sécurité du commandement du Corps de

  8   Pristina en date du 19 décembre 1999; ai-je raison de dire cela ?

  9   R.  Oui.

 10   Mme PETERSEN : [interprétation] Peut-on examiner la dernière page en B/C/S.

 11   Il s'agit de la page 3 dans la version électronique.

 12   Q.  Je vois qu'il n'y a pas de signature sur cette page; est-ce exact ?

 13   R.  Oui, c'est exact. Et je vais vous l'expliquer, avec votre permission.

 14   La plupart des télégrammes ne sont pas signés, mais il existe des documents

 15   originaux dans les archives. Car lorsque j'écris mon télégramme, c'est dans

 16   la soirée, et je fais un résumé pour le commandement supérieur pour la

 17   journée en question. Je donne ce texte aux personnes chargées du chiffrage

 18   ou du codage des documents, et eux, ils reçoivent mon télégramme dans cette

 19   version-là. Mais moi, je garantis l'authenticité de toutes ces données, car

 20   vous pouvez voir mes initiales, ce qui indique que c'est moi qui avais

 21   rédigé ce télégramme. C'était d'ailleurs le cas avec la plupart des

 22   télégrammes.

 23   Q.  Donc vous dites que ce télégramme est un télégramme authentique malgré

 24   le fait qu'il n'a pas de signature ?

 25   R.  Absolument authentique.

 26   Q.  Merci, Monsieur. Hier -- ou plutôt, vous avez déposé pendant deux

 27   jours, donc je ne suis plus sûre si c'était hier ou avant-hier, mais à un

 28   moment donné de votre déposition, lorsque nous nous sommes penchés sur ce

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  1   télégramme du secteur de sécurité, apparemment plusieurs de ces télégrammes

  2   contenaient des informations émanant du secteur de la Sûreté de l'Etat;

  3   est-ce exact ?

  4   R.  Nous avons échangé les données de manière régulière. Il y avait des

  5   données du service de la Sûreté de l'Etat, il y avait des données du 14e

  6   Groupe de Contre-espionnage, mais j'avais fait un résumé de tout cela au

  7   sein d'un même télégramme.

  8   Q.  Bien, Monsieur.

  9   Mme PETERSEN : [interprétation] Peut-on maintenant se pencher sur la pièce

 10   à conviction de l'Accusation numéro 65 ter 02945.

 11   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] En attendant, page 23, ligne 21, vous

 12   avez dit que la date de la dernière pièce est le 19 décembre 1999. Or,

 13   c'est 1998.

 14   Mme PETERSEN : [interprétation] Vous avez tout à fait raison, Monsieur le

 15   Président. Merci.

 16   Q.  Monsieur, est-ce bien votre photo qui figure dans cet article ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  S'agit-il d'une interview que vous avez accordée à Nedeljni Telegraf,

 19   et je crois que la date est le 22 décembre 2000 ?

 20   R.  2000.

 21   Q.  Bien. Merci, Monsieur. Peut-on examiner la 5 en anglais, et en B/C/S,

 22   il s'agit de la page 4, le premier paragraphe de la première colonne. En

 23   B/C/S, les caractères sont très petits, donc je vais lire cela en anglais.

 24   Je ne suis pas sûre si vous pourrez suivre.

 25   Dans cet article, vous critiquez le MUP et d'autres en raison du fait

 26   qu'ils n'ont pas répondu de manière appropriée au terrorisme au Kosovo

 27   pendant sa montée dans les années 1990. Et à la page 5, au milieu du

 28   paragraphe en anglais, vous dites :

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  1   "Ce qui est vrai, c'est que la Sûreté de l'Etat a fourni certaines

  2   informations à l'armée concernant les directions de l'entrée des

  3   terroristes et des armes de l'Albanie au Kosovo à travers la frontière.

  4   Cependant, j'affirme en toute responsabilité que la plupart des

  5   informations n'étaient pas exactes. Nous avons agi sur la base de ces

  6   informations à plusieurs reprises en engageant des forces importantes, mais

  7   presque à chaque fois, il s'est avéré que ceci n'était nécessaire. Ainsi,

  8   nous avons fatigué les gens, et peut-être nous avons laissé certaines

  9   directions d'entrée ouvertes. Pas une seule fois cette question n'a été

 10   posée, la question de savoir quelle était la fiabilité des informations et

 11   si les informations qu'ils nous fournissaient étaient fiables et

 12   vérifiées."

 13   Est-ce exact ?

 14   R.  Oui, c'est ce que j'ai déclaré. Mais il faut peut-être clarifier

 15   quelque chose. Souvent, les représentants du service de la Sûreté de l'Etat

 16   nous transmettaient des informations indiquant qu'une certaine route vers

 17   l'Albanie était censée recevoir un convoi de bétail dans le cadre duquel

 18   des armes allaient être transportées. Nous avons dû envoyer des unités en

 19   les retirant de leur déploiement de combat afin de tendre des embuscades et

 20   y passer toute la journée. Et plusieurs fois, de telles informations se

 21   sont avérées très incorrectes, car tout simplement il n'y a pas eu de

 22   terroristes qui passaient par là. Ceci a provoqué une exténuation

 23   supplémentaire de nos forces, et je fais référence à cela dans l'entretien.

 24   Q.  Merci. Maintenant, pour ce qui est de votre rôle au sein du

 25   commandement du Corps de Pristina. Vous faisiez partie de ce commandement ?

 26   R.  Certainement.

 27   Q.  Et quelles étaient les réunions auxquelles vous avez assisté en cette

 28   qualité ?

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  1   R.  Vous parlez par rapport à l'interview ou simplement au sujet des

  2   réunions du Corps de Pristina ?

  3   Q.  Non, ma question ne porte pas sur cette pièce à conviction. C'est un

  4   nouveau sujet. Je parle des réunions régulières. Je suis sûre que vous avez

  5   eu des réunions différentes, mais quelles réunions régulières étaient

  6   celles auxquelles vous avez assisté dans le cadre du commandement du Corps

  7   de Pristina ?

  8   R.  J'étais d'office membre du commandement du Corps de Pristina, constitué

  9   du chef de l'état-major du corps d'armée, du chef du département des

 10   opérations, de l'assistant du commandant chargé de la logistique,

 11   l'assistant du commandant chargé des questions de morale, le chef de la

 12   section de sécurité, de même que l'assistant du commandant chargé des

 13   affaires de garnison. Et s'agissant des réunions du collège du commandant

 14   du corps, elles étaient tenues de manière régulière au cours de l'année

 15   1998. Après l'agression de l'OTAN, elles ne se tenaient plus de manière

 16   régulière. Il n'y a plus jamais eu des réunions aussi compréhensives avec

 17   l'assistance de toutes ces personnes.

 18   Au cours de l'année 1998, je soumettais des rapports concernant tous

 19   les aspects liés à la sécurité au sein des unités et liés aux informations

 20   que j'avais recueillies sur le terrain. J'ai également mené à bien des

 21   analyses et proposé des mesures au commandement du corps. En 1999, le

 22   commandement du Corps de Pristina n'était jamais à une seule localité. Il

 23   était dispersé. Par exemple, l'organe de la logistique était à un endroit,

 24   l'organe chargé des questions de morale était au deuxième endroit et

 25   l'organe opérationnel au troisième endroit. En général, ils étaient tous

 26   dans la région de Pristina. Et donc en raison des raids aériens et de la

 27   situation dans les unités qui changeait sans cesse, en raison des

 28   mouvements et en raison de nombreux problèmes au sein du corps, il n'était

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  1   pas possible d'avoir la réunion du collège entièrement constitué. Au cours

  2   de l'année 1999, il y a eu des réunions du corps du collège. Par exemple,

  3   lorsqu'il fallait prendre des décisions, le chef de l'état-major et le

  4   commandant se réunissaient et nous appelaient individuellement s'ils

  5   avaient besoin de nous.

  6   Et puis, sur ma propre initiative, lorsque j'avais des informations

  7   importantes pour la sécurité, j'étais tenu de trouver le commandant et de

  8   lui transmettre ces informations.

  9   Q.  Etiez-vous au courant des actions que le Corps de Pristina

 10   planifiait pour ces unités, compte tenu de votre capacité et de vos

 11   fonctions ?

 12   R.  Non, pas nécessairement. Je recevais certaines informations de

 13   l'organe opérationnel, qui était censé planifier de telles actions et

 14   élaborer des cartes. Cependant, si je ne savais pas les détails des plans

 15   d'action, à chaque fois au moins, j'en ai été informé une fois l'action

 16   accomplie.

 17   Q.  Est-ce que vous avez participé en quelque qualité que ce soit à

 18   la planification des actions du Corps de Pristina ?

 19   R.  Dans la partie concernant l'état-major où l'on élabore le plan de

 20   l'action, je n'ai jamais participé. Cependant, j'ai participé aux actions

 21   qui précèdent à la prise de la décision. Autrement dit, à chaque fois que

 22   l'on m'a demandé de fournir l'évaluation de la situation sur le plan de la

 23   sécurité dans une région où une action était planifiée, il fallait que je

 24   fournisse des informations concernant la présence des terroristes, leur

 25   nombre, leurs armes, leurs plans, leurs déploiements, de même que toute

 26   information concernant leurs fortifications. Et je transmettais de telles

 27   informations à l'organe opérationnel qui tenait compte de cela lors de la

 28   planification de l'opération. Il devait décider quelles étaient les forces

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  1   dont nous avions besoin et de quelle manière il fallait mener à bien

  2   l'action en question.

  3   Q.  Apparemment, il s'agissait là des informations plutôt importantes

  4   dont il fallait disposer avant une action antiterroriste. Est-ce que vous

  5   êtes d'accord avec cela ? Il est important de savoir ce à quoi vous faisiez

  6   face.

  7   R.  Les actions antiterroristes n'étaient pas planifiées uniquement sur la

  8   base de mes données. Il y a eu des données obtenues par le biais de

  9   l'échange avec l'état-major du MUP au Kosovo-Metohija. Il y avait des

 10   données émanant de la Sûreté de l'Etat; de la sécurité publique; du 14e

 11   Groupe de Renseignement, qui n'était pas placé sous mon commandement; puis

 12   aussi des organes de sécurité de la région militaire, qui n'étaient pas

 13   placés sous mon commandement, mais sous le commandement du la 3e Armée.

 14   Puis, certaines informations venaient des commandants qui étaient sur le

 15   terrain et rencontraient sans cesse des terroristes.

 16   Mis à part, il y avait le service de Contre-espionnage, et puis il y

 17   avait aussi le service de Renseignement au sein du commandement du Corps de

 18   Pristina. Donc lorsque toutes ces informations arrivaient à l'organe

 19   opérationnel, c'est seulement à ce moment-là qu'ils commençaient à faire

 20   les plans portant sur une action antiterroriste spécifique.

 21   Q.  Et ces autres sources d'information, est-ce que leurs informations

 22   arrivaient jusqu'à vous, car toutes ces personnes ne venaient pas au

 23   commandement du Corps de Pristina pour des réunions ? Donc est-ce que vous

 24   receviez et regroupiez toutes ces informations afin de les transmettre ?

 25   R.  Non. Excusez-moi. Ce micro ne fonctionne pas.

 26   Donc ma réponse est non. Les informations du 14e Groupe de Contre-

 27   espionnage, des organes de Renseignement et des organes de sécurité de la

 28   région militaire, et puis celles du secteur de la Sûreté de l'Etat, il ne

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  1   m'était pas nécessaire que tout ceci passe par moi pour que je les

  2   transmette aux organes de commandement du Corps de Pristina. Il est exact

  3   de dire que j'ai échangé des informations avec eux, mais parfois peut-être

  4   le commandant du Corps de Pristina appelait le chef du secteur de la Sûreté

  5   de l'Etat pour demander une évaluation ou bien il pouvait appeler le

  6   commandant du 14e Groupe de Contre-espionnage pour recevoir des

  7   informations. Donc on échangeait des informations, mais il n'était pas

  8   nécessaire pour nous d'avoir toutes les informations particulières pour ce

  9   qui est des organes du Renseignement, parce qu'ils étaient à part et

 10   suivaient une autre méthode, puisque l'assistant du commandant chargé du

 11   Renseignement était subordonné au commandant du Corps de Pristina lui

 12   aussi. Il l'informait de la situation en Albanie, dans la région

 13   frontalière, et des autres questions relevant de ses compétences.

 14   Q.  Je parle concrètement de la planification d'une opération et de votre

 15   rôle s'agissant de l'évaluation de cela. Est-ce que vous nous dites

 16   qu'avant une opération, plutôt que d'obtenir toutes les informations

 17   concernant la sécurité de vous, ils entendaient tout cela de la part des

 18   groupes différents ?

 19   R.  Non. De manière générale, ils recevaient leurs informations du secteur

 20   de sécurité du Corps de Pristina et ils considéraient que ces informations

 21   étaient extrêmement fiables, car dans la pratique, ces informations se sont

 22   avérées être exactes à un niveau très élevé. Mais le commandant a le droit

 23   aussi de s'adresser aux commandants de brigade qui sont sur le terrain pour

 24   obtenir leur opinion, et puis aux autres sources. Une fois que toutes ces

 25   informations concernant l'emplacement des terroristes, leurs plans et leurs

 26   déploiements réunis avant l'opération antiterroriste, il faut savoir que la

 27   plus grande partie des informations émanait du secteur de sécurité du Corps

 28   de Pristina pour ce qui est donc de la planification de toute action

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  1   antiterroriste.

  2   Q.  Est-ce que vous pouvez nous aider à clarifier cela, je pense que dans

  3   votre déposition dans l'affaire Milutinovic, page 143, on vous a posé la

  4   question suivante :

  5   "Avez-vous participé à la préparation ou planification des actions de

  6   combat ou de manœuvres des unités différentes du Corps de Pristina ?"

  7   Et vous avez dit :

  8   "J'ai participé dans la partie qui concernait la transmission des

  9   informations et des connaissances concernant les emplacements, les plans,

 10   les intentions, la puissance des terroristes albanais et j'ai envoyé ces

 11   informations au chef du département chargé des opérations du commandement

 12   du corps."

 13   Est-ce une déclaration exacte concernant votre rôle et la planification

 14   pour ce qui est des opérations ?

 15   R.  Oui, je ne vois rien de contestable. Il n'y a pas de différence entre

 16   cela et ce que je dis aujourd'hui. Le département opérationnel et son chef

 17   sont le cerveau de toute planification des opérations menées par le Corps

 18   de Pristina. Et comme je viens de dire, j'ai transmis les informations au

 19   chef opérationnel qui faisait un suivi avec le commandement du corps et le

 20   commandant du corps, car tous les commandements ne participaient pas à

 21   cela. Seuls les officiers dont le commandant du Corps avait besoin

 22   participaient à cela.

 23   Q.  Merci, Monsieur. Apparemment, il était important que ces informations

 24   soient aussi actuelles que possible, qu'elles soient mises à jour. Est-ce

 25   que vous êtes d'accord avec cela ?

 26   R.  Ces informations étaient mises à jour de manière très, très suivie. Les

 27   supérieurs hiérarchiques et les membres de notre personnel étaient très

 28   compétents. Je pense que nous avons eu des informations extrêmement fiables

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  1   tout au long de l'année 1998 et 1999. Maintenant, c'est une autre question

  2   de savoir comment ces informations ont été utilisées. Après la guerre, les

  3   dirigeants terroristes ont publié plusieurs livres, comme le livre de

  4   Ramush Haradinaj, et suite à la lecture de cela, j'ai pu conclure

  5   qu'effectivement, à l'époque, nous avions de très bonnes informations.

  6   Q.  Ma question est quelque peu différente. Je suis sûre que vos

  7   informations sont bien mises à jour, mais je vous demande s'il était

  8   important que les commandants et le commandement du Corps de Pristina

  9   reçoivent les informations mises à jour concernant telle et telle actions

 10   antiterroristes ? Est-ce exact qu'il était important qu'ils reçoivent de

 11   telles informations ?

 12   R.  Oui, entièrement. Ils demandaient toujours de recevoir des

 13   informations, et nous, nous étions toujours sur le terrain. Par conséquent,

 14   le rythme de travail était extrêmement intense et rapide.

 15   Q.  Donc avant une opération antiterroriste, je suppose qu'ils devaient

 16   savoir si les terroristes avaient changé de positions, s'ils avaient eu des

 17   renforts, s'ils avaient obtenu de meilleures armes. Ce genre

 18   d'informations, il était important de le transmettre ?

 19   R.  Ceci est exact partiellement. Il est exact de dire qu'ils étaient

 20   censés avoir aussi de telles informations, tel que vous venez d'expliquer.

 21   Mais surtout, ils devaient connaître les localités, les agglomérations, les

 22   cartes géographiques et topographiques contrôlées par le corps terroriste

 23   sur le terrain, avec quelles forces, de quelle manière leur système de la

 24   défense était organisé sur le plan du génie militaire et sur le plan de

 25   minage, qui était le commandant de ces forces, quel était le nombre

 26   d'effectifs, quelles étaient les armes dont ils disposaient, quel était le

 27   niveau moral de troupes au sein de ces forces et leurs orientations,

 28   quelles étaient leurs actions planifiées dans la période à venir. Ensuite,

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  1   est-ce que dans leurs rangs existaient des experts, des mercenaires

  2   étrangers ou des instructeurs venant des pays étrangers; tel était parfois

  3   le cas. Quel était leurs rapports avec les états-majors terroristes

  4   militaires, quelles étaient leurs routes de retraite, et cetera. C'étaient

  5   les aspects qui étaient étudiés, analysés et évalués de manière continue.

  6   Q.  Et le commandement avait besoin d'avoir ces informations immédiatement,

  7   non pas deux semaines avant ou une semaine avant. Ils devaient savoir

  8   immédiatement quelle était la situation sur tous ces plans-là; est-ce exact

  9   ?

 10   R.  Oui, au quotidien et en temps réel.

 11   Q.  Merci.

 12   Mme PETERSEN : [interprétation] Je crois que le moment de la pause est

 13   arrivé. Mais avant de faire la pause, j'aimerais verser au dossier la pièce

 14   de la liste 65 ter de l'Accusation cote 02945.

 15   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Fort bien.

 16   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Cette pièce portera la cote P0154

 17   [comme interprété].

 18   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous allons observer une pause et nous

 19   reprendrons nos travaux à 11 heures.

 20   [Le témoin quitte la barre]

 21   --- L'audience est suspendue à 10 heures 31.

 22   --- L'audience est reprise à 11 heures 07.

 23   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Djurdjic.

 24   M. DJURDJIC : [interprétation] Monsieur le Président, mon explication qui

 25   n'était pas très précise concernant une question administrative,

 26   visiblement, n'a pas convaincu. Donc je crois que ma consœur O'Leary va

 27   pouvoir expliquer.

 28   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, effectivement, je pense qu'il

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  1   faut laisser aux experts expliquer les choses qui relèvent d'une certaine

  2   expertise. Je m'en rends compte au quotidien.

  3   Maître O'Leary.

  4   Mme O'LEARY : [interprétation] Je ne suis certainement pas une experte,

  5   mais en tout cas je voudrais simplement que l'on remplace D723, qui est

  6   placé sous pli scellé, et D724, qui sont les comptes rendus d'audience de

  7   l'affaire Milutinovic et al. Il y a certaines des pièces qui manquaient

  8   dans le compte rendu d'audience du 11 décembre 2007. Nous venons de les

  9   charger à nouveau, et nous allons donc pouvoir les verser au dossier

 10   maintenant.

 11   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien.

 12   [Le témoin vient à la barre]

 13   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Madame Petersen.

 14   Mme PETERSEN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 15   Q.  Donc dans le compte rendu d'audience de l'affaire Milutinovic, vous

 16   avez dit, page 5, ligne 5, que :

 17   "Les organismes des services de sécurité militaire participaient aux

 18   actions qui précédaient la mise en place des procédures pénales."

 19   Est-ce que vous vous rappelez avoir dit cela ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Pour parler simplement, est-ce que ça veut dire que vous et votre

 22   section enquêtiez sur des crimes ?

 23   R.  Ce que ça veut dire, c'est qu'avec les membres de mon département, dès

 24   que nous trouvions un crime, nous informions immédiatement nos supérieurs

 25   hiérarchiques, et ensuite nous prenions les mesures nécessaires pour lancer

 26   une procédure pénale, l'objectif étant d'arrêter les auteurs de ces crimes

 27   ou à tout le moins d'empêcher l'auteur du crime de s'échapper. Ça veut dire

 28   protéger la scène du crime, ça veut dire recueillir toutes les

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  1   informations, essayer de jeter de la lumière sur le crime. Et l'auteur

  2   était arrêté, le cas échéant, et remis aux autorités judiciaires

  3   compétentes, et ensuite nous redonnions toutes nos instructions au juge

  4   d'instruction.

  5   Q.  Vous protégiez donc la scène du crime ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Et quand vous dites que vous recueilliez des informations qui auraient

  8   été utiles, est-ce que cela veut dire entendre des témoins et recueillir

  9   des éléments de preuve physiques ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Quelle était votre responsabilité concernant ces éléments de preuve ?

 12   Est-ce que vous les préserviez ?

 13   R.  Normalement, la procédure consistait à informer les autorités

 14   judiciaires compétentes, le Procureur. Nous l'informions de ces éléments de

 15   preuve, et ces éléments de preuve étaient remis aux autorités judiciaires

 16   compétentes.

 17   Q.  Cette enquête - et j'utilise le terme "enquête" pour décrire ce dont

 18   vous venez de nous parler - est-ce que vous pensez que le terme est

 19   adéquat, "enquête" ? Est-ce que vous pensez que votre unité menait des

 20   "enquêtes" à l'époque ?

 21   R.  Ce terme n'est peut-être pas tout à fait adéquat, mais il s'agissait de

 22   recueillir les informations idoines et de recueillir des éléments de preuve

 23   qui auraient pu permis d'établir la lumière sur les faits.

 24   Q.  Ecoutez, nous n'avons pas besoin de répéter tout cela à chaque fois.

 25   Peut-être pourrait-on utiliser le terme "enquête" tout simplement, qui

 26   s'appliquerait à ce dont on parle ?

 27   R.  Soit.

 28   Q.  Oui. Qu'est-ce qui faisait qu'on entamait une telle  enquête ?

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  1   R.  On entamait une enquête en recueillant des informations pour établir

  2   les faits autour d'un crime. L'équipe, ensuite, se rendait sur place pour

  3   préserver le site, protéger le site et prendre un certain nombre de mesures

  4   concernant l'enquête. Et puis, l'équipe de médecins légistes établissait un

  5   compte rendu criminel. Et toute personne qui était au courant du crime

  6   était entendue. Il y en a un certain nombre de mesures qui étaient prises.

  7   Il y avait des enregistrements. Tout objet, tout ce qui aurait pu aider à

  8   mener l'enquête était recueilli. Il y avait toute une série de procédures,

  9   d'étapes à respecter.

 10   Q.  Mais dans un premier temps, au départ, comment étiez-vous mis au

 11   courant d'un crime qui nécessitait une enquête ?

 12   R.  Par deux biais -- ou plutôt, par plusieurs biais. Parfois, un

 13   commandant d'une unité nous signalait un crime ou alors tout membre d'une

 14   unité nous signalait tel ou tel crime ou alors nous utilisions nos

 15   opérationnels pour recevoir des renseignements selon lesquels un crime

 16   avait été commis sans que l'officier supérieur de cette unité ne soit

 17   forcément au courant de ce crime.

 18   Q.  Pour bien comprendre, lorsque vous parlez des opérationnels dans

 19   l'unité, est-ce que ce sont les gens qui sont dans l'organisme de sécurité

 20   ou est-ce que vous parlez de gens qui sont des opérationnels et qui étaient

 21   étrangers à l'unité ?

 22   R.  Les organismes de sécurité de toute unité - et cela s'applique à tout

 23   service de toute armée dans le monde - travaillent ni plus ni moins avec

 24   les mêmes méthodes, à savoir qu'il y a une méthodologie qui est recommandée

 25   pour le recueil d'informations et de renseignements. Alors, la procédure en

 26   la matière, quelle est-elle ? Il s'agit de travailler avec des agents ou

 27   des associés, comme on les appelle. Ces postes existent pour chacune des

 28   unités. Dès lors que quelque chose se passe et dès lors qu'il peut y avoir

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  1   une activité ennemie au sein de l'armée ou à l'extérieur de l'armée, cela

  2   s'appliquait.

  3   Q.  Donc ces associés au sein des unités vous disaient si certains des

  4   soldats rencontraient l'UCK, par exemple, ou allaient déserter; c'est une

  5   possibilité, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui. Ils nous le disaient dès lors qu'ils disposaient de telles

  7   informations.

  8   Q.  Vous nous avez dit que les organismes de sécurité et les brigades vous

  9   rendaient compte tous les jours et tous les soirs. Est-ce que c'était une

 10   source d'information pour les crimes commis par les unités de la VJ ?

 11   R.  Oui. Cela passait par mes subordonnés, les organismes de sécurité dans

 12   les brigades, et cela permettait d'établir si un crime avait été commis ou

 13   pas.

 14   Q.  Alors, pour simplement vérifier que j'ai bien compris, vous recueilliez

 15   des informations auprès de vos subordonnés et des organismes de sécurité

 16   dans ces unités; il y avait potentiellement un commandant qui vous disait

 17   si tel ou tel soldat avait commis un crime; ou alors un officier pouvait

 18   venir vers vous et vous dire : Ecoutez, voilà, un crime a été commis; ou

 19   alors vos associés auraient pu dire : Il se passe quelque chose dans cette

 20   unité. Est-ce que c'était ça vos sources fondamentales d'informations qui

 21   entraînaient ensuite une enquête ?

 22   R.  Oui, sinon nous pouvions utiliser la chaîne de commandement. Comme vous

 23   l'avez dit, si l'un des commandants signale cela à l'un de ses chefs de

 24   sécurité, à moi par exemple, son chef de sécurité. Ou les officiers de

 25   sécurité faisaient leur travail dans leurs unités, ils recevaient de telles

 26   informations, et ensuite ils faisaient remontrer cette information et nous

 27   la signalaient.

 28   Q.  Quels types de crimes relevaient de votre secteur de votre autorité et

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  1   de vos compétences et pour quels types de crimes meniez-vous des enquêtes ?

  2   R.  Tout type de crimes commis dans l'exercice de ces fonctions.

  3   Q.  Donc vous vous penchiez peut-être dans un premier temps exclusivement,

  4   corrigez-moi si je me trompe. Mais vous vous intéressiez aux crimes commis

  5   par la VJ, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui, c'est exact en partie. Bon nombre de crimes qui étaient commis par

  7   la VJ, commis par quelque membre que ce soit de la VJ, mais aussi les

  8   crimes qui étaient commis contre les unités de commandement, les

  9   institutions ou les membres de la VJ.

 10   Q.  Donc dans ces cas-là, il s'agissait de terroristes ou autres qui

 11   essayaient de s'en prendre à la VJ; est-ce qu'on peut dire les choses ainsi

 12   ?

 13   R.  Non. Les activités ennemies et clandestines au sein de l'armée, ça ne

 14   relevait pas seulement du terrorisme. Il y avait différentes possibilités.

 15   Il y avait des activités de renseignement, des activités terroristes, les

 16   liens au crime organisé pour une zone donnée et les membres de l'armée. Il

 17   y avait un règlement concernant les travaux effectués par les organismes de

 18   sécurité qui précisait toutes ces procédures. Il ne s'agissait pas

 19   simplement de crimes commis par des terroristes et qui visaient les unités

 20   de l'armée ou les commandements de l'armée. Il s'agissait de tous les

 21   autres crimes commis au sein de l'armée ou contre l'armée, donc c'est plus

 22   large.

 23   Q.  Une question d'ordre général que j'aimerais vous poser pour bien

 24   comprendre. J'ai l'impression, d'après votre description de vos travaux,

 25   que vous aviez deux fonctions importantes. L'une était le renseignement ou

 26   le contre-espionnage - je ne suis pas trop sûre - des informations qui

 27   auraient pu nuire à la VJ, comme les activités de l'UCK ou le fait de

 28   savoir si certains rencontraient l'UCK ou si des soldats de la VJ ne

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  1   respectaient pas les règles. Donc vous aviez ça d'un côté, n'est-ce pas ?

  2   R.  Les travaux des services de Sécurité sont conciliés en deux parties.

  3   Tout d'abord, il y a le contre-espionnage. J'en ai parlé tout à l'heure. Et

  4   ça, c'est quelque chose de très important, parce que quasiment 90 % de

  5   notre activité relève de cette activité justement. Donc ça, c'est clair,

  6   c'est le côté contre-espionnage militaire. Ensuite, au sein du contre-

  7   espionnage, il s'agit d'empêcher les agents d'entreprendre quelque action

  8   que ce soit contre l'armée ou des sites de l'armée ou contre la défense du

  9   pays d'une manière générale. Et l'autre partie, c'est suivre et intercepter

 10   toute activité terroriste au sein de l'armée ou contre l'armée. Le

 11   troisième volet consiste à intercepter et suivre toute activité criminelle

 12   au sein de l'armée ou contre l'armée et contre des facteurs extérieurs au

 13   sein du territoire. L'autre fonction dont vous me parlez aujourd'hui

 14   consiste à prendre des mesures préventives au sein du commandement et des

 15   institutions des unités. Normalement, c'est quelque chose de plus large qui

 16   relève de la sécurité et de la sûreté. Par exemple, avoir des unités de

 17   police qui protègent des sites militaires ou des haut gradés ou éviter que

 18   des armes ne soient volées, éviter des actes de sabotage, et j'en passe.

 19   Q.  Le contre-espionnage, ça comprend donc des informations concernant

 20   l'UCK, et ça, c'est considéré comme du contre-espionnage, n'est-ce pas?

 21   Peut-on dire cela?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Est-ce que vous compreniez également dans le contre-espionnage le

 24   recueil d'informations quant à savoir si des unités de la VJ ou des soldats

 25   de la VJ commettent des crimes ? Et par crimes, je ne parle pas de crimes

 26   contre l'armée, comme trahison, désertion, que sais-je, mais je parle de

 27   crimes contre autrui, contre la population ? Est-ce que cela relève du

 28   contre-espionnage ?

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  1   R.  Absolument.

  2   Q.  Merci. Alors, concernant ces crimes commis par la VJ, est-ce qu'il vous

  3   incombait d'enquêter sur tous les types de crimes commis par la VJ?

  4   R.  Oui, c'était mon devoir. J'avais l'obligation d'enquêter sur tous

  5   crimes commis par quelque membre de l'armée que ce soit. Effectivement,

  6   c'est quelque chose qui relevait des services militaires.

  7   Q.  Donc ça comprenait des crimes commis contre les civils, n'est-ce pas ?

  8   R.  Naturellement.

  9   Q.  Cela comprend, par exemple, le fait de savoir si un militaire a tué un

 10   civil ? Est-ce que cela en aurait fait partie ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Le viol ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Pillage ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Le fait de chasser des gens de chez eux, est-ce que vous auriez dû

 17   enquêter sur une affaire comme celle-ci si c'était commis par un membre de

 18   la VJ ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Pendant la période des bombardements de l'OTAN et en amont de ces

 21   bombardements en décembre [comme interprété] 1998, le MUP et la VJ

 22   travaillaient main dans la main, n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Simplement pour corriger le transcript, je voulais dire MUP, M-U-P, et

 25   la VJ travaillaient donc main dans la main.

 26   Pendant ces actions coordonnées entre le MUP et la VJ, est-ce que les

 27   organismes de sécurité de ces unités vous signalaient tout crime qui aurait

 28   pu être commis par le MUP ?

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  1   R.  Non. Là encore, j'aimerais vous rappeler le règlement intérieur qui

  2   régit ce que font les organismes de sécurité. Ils s'occupent simplement de

  3   leurs propres membres. Quiconque, y compris les officiers de sécurité, dès

  4   lors qu'ils rencontraient une information concernant des crimes qui étaient

  5   commis, devaient le signaler à leurs supérieurs hiérarchiques ou à leurs

  6   officiers hiérarchiquement placés au-dessus d'eux. En l'occurrence, ça

  7   aurait été moi. En fait, cela ne s'applique évidement que s'ils voient de

  8   tels actes. Mais dans le cadre de leurs fonctions au départ, ils n'étaient

  9   pas là pour suivre ce que faisait le MUP. Ça, c'est les services de

 10   Sécurité de l'Etat qui se chargeaient de suivre ou de surveiller ce que

 11   faisait le MUP.

 12   Q.  Un témoin de la Défense, M. Gojovic, nous a parlé du devoir de tous les

 13   officiers militaires dès lors qu'ils étaient au courant d'un crime, de le

 14   signaler. Est-ce que vous en êtes conscient ? Est-ce que vous pourriez nous

 15   en dire un peu plus sur cette règle ?

 16   R.  Je vais essayer de vous expliquer. Admettons qu'il y a une action

 17   conjointe menée par le MUP et l'armée. Bien souvent, ils ne travaillent pas

 18   exactement de la même manière ou sur les mêmes zones. Il y a un effort de

 19   coordination entre ces deux organismes. Si une telle action est menée et

 20   s'il y a des militaires chargés de la sécurité qui découvrent des

 21   informations qui démontrent qu'un membre du MUP a commis un crime ou a

 22   violé les dispositions du droit international de la guerre, cette personne

 23   avait l'obligation de le signaler immédiatement au commandant de l'unité de

 24   l'armée qui était impliqué dans cette affaire et de le signaler également

 25   aux officiers de sécurité supérieurs, à savoir moi. Ensuite, j'aurais

 26   renvoyé ces informations aux autorités du MUP et aux autorités de la

 27   sécurité de l'Etat.

 28   Q.  Donc si un officier de sécurité découvre un crime, il est tenu de vous

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  1   le signaler, n'est-ce pas ?

  2   R.  Oui. Toutefois, il ne peut pas lancer une enquête ou prendre une autre

  3   mesure. Ça aurait été illégal. C'est contraire au règlement, parce qu'il y

  4   a d'autres organismes qui s'occupent de cela, des organismes de sécurité du

  5   ministère de l'Intérieur qui sont chargés de cela, et dont le service de

  6   Sécurité de l'Etat était une composante.

  7   Q.  Merci. Vous êtes d'accord pour dire que si dans le cadre d'une action

  8   coordonnée où la VJ soutient le MUP, si dans le cadre d'une telle action le

  9   MUP commet à plusieurs reprises des crimes, c'est quelque chose qu'il vous

 10   faudrait savoir, n'est-ce pas ?

 11   R.   Je ne suis pas sûr de la façon dont vous présenter les choses quand

 12   vous dites à plusieurs reprises. Quoi qu'il en soit, concernant les

 13   informations sur tout agissement illégal dont nous étions informés, nous

 14   devions effectivement le signaler.

 15   Q.  Et lorsque de telles informations concernant une personne qui était

 16   membre du MUP, une fois qu'un rapport avait été fait à ce sujet, que se

 17   passait-il alors ? Qui était compétent ?

 18   R.  Lorsque l'on recevait des informations concernant une infraction

 19   commise par un membre de l'armée, ceux à qui il incombait de prendre des

 20   mesures étaient les commandants qui étaient hiérarchiquement supérieurs. En

 21   l'espèce, les organes compétents étaient ceux de la sécurité de l'Etat et

 22   du ministère de l'Intérieur.

 23   Q.  Et si le MUP commettait des crimes, vous-même, vous ne vous en occupiez

 24   pas ?

 25   R.  Non, nous n'avions pas l'obligation juridique de le faire.

 26   Q.  Lorsque vous obteniez des informations selon lesquelles un membre de la

 27   VJ avait commis un crime, une fois que vous en aviez été informé et aviez

 28   diligenté une enquête, que se passait-il ensuite ?

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  1   R.  Si on apprenait qu'un membre de l'armée avait commis un crime précis,

  2   tout d'abord, nous en informions le commandant compétent, puis nous

  3   prenions un certain nombre de mesures afin que l'auteur de l'infraction

  4   soit arrêté dans les meilleurs délais, afin de l'empêcher de prendre la

  5   fuite. Nous nous rendions ensuite sur le lieu du crime pour le sécuriser

  6   avec l'appui de la police militaire. Si l'auteur de l'infraction était

  7   arrêté et des éléments de preuve recueillis sur le lieu du crime, il était

  8   remis au juge d'instruction. Si l'auteur du crime n'était pas identifié ou

  9   avait pris la fuite, nous réunissions également des éléments de preuve sur

 10   le lieu du crime, nous rédigions un rapport pénal à l'encontre d'un auteur

 11   non identifié, puis nous prenions des mesures pour tenter d'identifier

 12   l'auteur de l'infraction et nous prenions aussi d'autres mesures de suivi.

 13   Q.  Et à quel moment est-ce que vous étiez dessaisi de l'enquête ?

 14   R.  Mon rôle ne consistait pas uniquement à rédiger un rapport pénal et à

 15   remettre le dossier au tribunal compétent. Nous devions aussi prendre les

 16   mesures requises par le juge d'instruction, si notamment il fallait arrêter

 17   une personne, interroger des témoins, prendre quelque mesure que ce soit

 18   qui pourrait aboutir à une inculpation formelle.

 19   Q.  Ainsi, la section dont vous étiez responsable jouait un rôle jusqu'à

 20   l'inculpation. Est-ce que vous aviez encore un rôle à jouer jusqu'à ce que

 21   la personne soit condamnée ou l'affaire   classée ?

 22   R.  Une fois l'inculpation prononcée, nous ne pouvions agir que sur ordre

 23   du procureur, sinon nous ne pouvions pas prendre d'autres mesures.

 24   Q.  Merci. Nous avons parlé il y a quelques instants de l'obligation de

 25   tout officier chargé de la sécurité de vous faire rapport s'il apprenait

 26   que le MUP avait commis un crime. A quelle fréquence est-ce que cela se

 27   produisait pendant la période des bombardements de l'OTAN ? Arrivait-il

 28   fréquemment que vous appreniez de vos officiers de la sécurité que le MUP

Page 11866

  1   avait commis des crimes dans le cadre des opérations ?

  2   R.  Vous voulez sans doute me demander avec quelle fréquence cela se

  3   produisait --

  4   Q.  Oui, avec quelle fréquence ou combien de fois, si vous arrivez à nous

  5   le dire.

  6   R.  Cela arrivait très rarement. Les zones de combat des unités de l'armée

  7   ne correspondaient pas aux zones d'activités des unités du MUP. Les axes

  8   d'engagement et les activités concernées ne se regroupaient pas forcément.

  9   Les organes de la sécurité s'intéressaient principalement aux activités de

 10   l'armée. Toutefois, si nous obtenions des informations de ce type, et

 11   cetera; mais concernant des cas d'indiscipline ou le fait que des membres

 12   du MUP avaient procédé au pillage de biens albanais, nous en avisions le

 13   commandant de leur groupe, et à son tour, il était censé en informer le

 14   commandant compétent au sein de l'unité du MUP qui avait participé à cet

 15   acte.

 16   Q.  Et vous nous affirmez que cela ne s'est produit que rarement ?

 17   R.  Cela dépend du type d'infractions que vous envisagez. S'il s'agit de

 18   simples infractions au pénal, cela s'est produit fréquemment. Si vous me

 19   parlez plutôt de crimes pouvant être qualifiés de traitements inhumains,

 20   cela s'est produit très rarement.

 21   Q.  Ce qui nous intéresse surtout en l'espèce, ce sont les crimes commis à

 22   l'encontre des civils au Kosovo. Avec quelle fréquence avez-vous reçu des

 23   rapports de la part de vos organes de sécurité selon lesquels le MUP

 24   commettait des crimes à l'encontre de la population civile, et plus

 25   particulièrement la population civile albanaise ?

 26   R.  Je ne peux, en fait, pas me souvenir de telles informations. Cela dit,

 27   j'ai reçu des informations concernant un problème de coordination avec le

 28   MUP. Il y était dit qu'à certains endroits, suite aux combats, aucune

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  1   mesure d'assainissement n'avait été prise. A certains endroits, des

  2   cadavres ont été retrouvés. C'est la raison pour laquelle on a communiqué

  3   ces informations par la filière du commandement et du service de Sécurité.

  4   Je transmettais toujours de telles informations à l'état-major du MUP ainsi

  5   qu'à la Sûreté d'Etat à Pristina. Et le commandant du corps en faisait de

  6   même.

  7   Q.  Lorsque vous parlez d'assainissement et des mesures d'hygiène suite aux

  8   combats, est-ce que vous entendez par là le fait de nettoyer le terrain,

  9   d'enlever les cadavres ?

 10   R.  Dans l'armée, il y avait un règlement concernant des mesures

 11   d'assainissement et d'hygiène à prendre suite aux combats, en particulier

 12   les unités qui devaient y participer, les mesures à prendre, les services

 13   concernées et les procédures. L'armée était responsable des mesures

 14   d'assainissement et d'hygiène dans les endroits où elle avait mené des

 15   activités de combat, alors que les unités du MUP étaient responsables de ce

 16   type de mesures d'assainissement dans les secteurs où elles étaient

 17   impliquées dans les combats.

 18   Q.  Et lorsque vous parlez de mesures d'assainissement et d'hygiène, est-ce

 19   que vous voulez dire le fait de se débarrasser des cadavres ?

 20   R.  Oui, tout à fait. Le fait de trier et d'évacuer les cadavres, la

 21   procédure à suivre, l'évacuation des blessées aussi. Parfois, il y avait

 22   aussi des cadavres d'animaux. Donc il y avait là toute une série de mesures

 23   à prendre.

 24   Q.  Merci. Lundi, à la page 16, ligne 6 du compte rendu, l'on vous a posé

 25   des questions concernant l'historique de l'UCK au Kosovo, et vous avez dit

 26   :

 27   "Les grands moments qui étaient à l'origine de la dégradation de la

 28   situation au Kosovo-Metohija cette année-là," je crois qu'il s'agissait de

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  1   l'année 1998, "il s'agissait, en fait, de deux grands événements…"

  2   Vous en avez parlé à la page 16, ligne 13. Vous avez dit :

  3   "Le groupe terroriste commandé par Jashari en février à Likosane a attaqué

  4   un véhicule du ministère de l'Intérieur de la Serbie lors d'une embuscade."

  5   Je me demande s'il ne s'agit pas d'une erreur de traduction. Je ne

  6   pense pas qu'il s'agissait du ministre de l'Intérieur, le ministre

  7   Stojilkovic, mais plutôt du ministère de l'Intérieur, n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui, c'est exact. Il s'agissait d'un véhicule de patrouille du

  9   ministère de l'Intérieur. Les membres du MUP effectuaient une patrouille.

 10   Il ne s'agissait pas d'un véhicule du ministre de l'Intérieur.

 11   Q.  Merci. Puis, vous avez dit :

 12   "Ils ont tué quatre policiers et blessé deux policiers dans les

 13   affrontements qui ont suivi pendant la nuit. La visibilité était très

 14   mauvaise, le chaos régnait, mais l'on a pu riposter à l'attaque, et

 15   ultérieurement, grâce aux actions menées par le MUP, la maison d'Adem

 16   Jashari a été encerclée à Prekaz. A ce moment-là, il a été liquidé. Cette

 17   liquidation d'Adem Jashari était de la plus haute importance, parce que les

 18   séparatistes albanais ont choisi de recourir exclusivement à la force pour

 19   réaliser leurs objectifs proclamés."

 20   Monsieur, cette dernière phrase n'est pas tout à fait limpide à mon sens.

 21   Est-ce que vous entendez par là que la liquidation d'Adem Jashari a incité

 22   les séparatistes albanais à recourir à la force, ou est-ce que vous vouliez

 23   dire autre chose ?

 24   R.  Les terroristes albanais au Kosovo-Metohija, par le passé, donc avant

 25   même cet incident -- et je fais allusion à la période remontant à 1990

 26   lorsque la République du Kosovo avait été proclamée et la décision prise de

 27   mettre sur pied une police parallèle. J'ai parlé aussi de l'année 1993

 28   lorsque des membres d'un groupe illicite, de terroristes furent arrêtés.

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  1   Ils ont reconnu avoir projeté de mettre sur pied des brigades composées de

  2   500 hommes et de créer des zones opérationnelles au Kosovo qui

  3   coïncidaient, de manière insolite, avec les zones opérationnelles qui ont

  4   été créées en 1998 et 1999.

  5   J'ai dit aussi qu'en 1994, ils ont pris la décision définitive, donc le

  6   mouvement national pour le Kosovo, ils ont décidé qu'afin d'assurer ou

  7   d'obtenir l'indépendance du Kosovo, il fallait recourir à la violence. Ils

  8   ont même compilé une étude consistant en trois volumes, et je crois que

  9   l'Accusation en dispose. Dans cette étude, ils énoncent de manière

 10   détaillée la stratégie et les tactiques qu'ils envisageaient d'utiliser

 11   dans ce qu'ils appelaient leur guerre de libération pour se débarrasser de

 12   l'occupant. Ce sont les tactiques qu'ils ont employées en 1998 et 1999.

 13   L'assassinat d'Adem Jashari n'a fait que mettre le feu aux poudres, et cela

 14   a marqué le début de la mise en œuvre de leur programme.

 15   Q.  Plus précisément, comment le meurtre d'Adem Jashari a-t-il aggravé la

 16   situation, à votre avis ?

 17   R.  J'aimerais vous expliquer. Il n'est pas exact de dire que, dans le

 18   siège de l'attaque visant le véhicule du MUP à Likosane, cette autre action

 19   a été menée. En fait, la maison d'Adem Jashari a été encerclée quelques

 20   jours plus tard. Et les affrontements ont duré plusieurs jours. Il a été

 21   tué parce qu'il refusait de se rendre au MUP. Adem Jashari symbolisait la

 22   résistance. Il symbolisait l'indépendance du Kosovo aux yeux des Albanais.

 23   Dès les années 1980, il avait commis des attaques terroristes à

 24   l'encontre des membres du MUP. Bon nombre des membres du MUP à Srbica et

 25   Donji et Gornji Prekaz ont été tués dans des embuscades tendues par son

 26   unité terroriste. Un grand monument a été érigé en son honneur au lendemain

 27   de la guerre au Kosovo. C'est la raison pour laquelle l'on peut affirmer

 28   que ce moment fut un moment très important, car leur principale figure

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  1   extrémiste avait été tuée. Comme je l'ai dit hier, au mois de mars, après

  2   le meurtre d'un membre de l'état-major principal qui se trouvait en Suisse,

  3   cet état-major principal de l'UCK, un certain nombre des membres de l'état-

  4   major principal ont été envoyés au nord de l'Albanie, dirigés par Hashim

  5   Thaqi, Ramush Haradinaj et Kadri Veseli, ils ont été transférés au Kosovo

  6   avec pour objectif d'organiser une rébellion armée des Albanais du Kosovo.

  7   Q.  Monsieur, pendant l'offensive ou l'action menée à l'encontre de

  8   l'enceinte de Jashari, Adem Jashari n'est pas le seul à avoir été liquidé,

  9   n'est-ce pas ? De nombreux membres de sa famille ont été tués pendant cette

 10   offensive, n'est-ce pas ?

 11   R.  L'armée n'a pas participé à cette action qui a été le fait du MUP, mais

 12   j'en ai été informé de manière détaillée. M. Jashari s'était barricadé dans

 13   deux maisons familiales. Après plusieurs jours de combat, jours pendant

 14   lesquels on l'avait sommé de se rendre, il n'a pas permis aux membres de sa

 15   famille de quitter la maison. Il ne leur a pas permis de se rendre aux

 16   autorités. Il a d'ailleurs, de ses propres mains, tué son cousin ou son

 17   neveu qui souhaitait quitter la maison et se rendre. Il y a une note

 18   officielle à ce sujet. Il l'a tué de ses propres mains. Il était tellement

 19   fanatique et il haïssait les Serbes à tel point qu'il était disposé à

 20   liquider sa famille toute entière plutôt que de leur permettre de se

 21   rendre. Son frère a également été tué lors de cette action et d'autres

 22   personnes encore. Je ne me souviens pas des noms précis. Quoi qu'il en

 23   soit, il a en effet tué son cousin qui voulait se rendre aux organes de la

 24   sécurité.

 25   Q.  Pourrions-nous voir la pièce de l'Accusation 741 afin de planter le

 26   décor. Pourrions-nous voir la page 35 en anglais et la page 36 en B/C/S, au

 27   deuxième paragraphe.

 28   Il s'agit d'une pièce qui est versée au dossier de cette affaire, un

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  1   rapport rédigé par "Human Rights Watch" intitulé "Violations du droit

  2   humanitaire," diffusé en octobre 1998 par "Human Rights Watch". Examinons

  3   le dernier paragraphe à la page 35 en anglais, et au début du deuxième

  4   paragraphe à la page 36 en B/C/S :

  5   "La police a attaqué Prekaz et l'enceinte Jashari une fois encore le 5 mars

  6   1998, cette fois-ci de façon mieux préparée et déterminée. Les éléments de

  7   preuve suggèrent que l'offensive ne visait pas à arrêter les Albanais armés

  8   considérés comme des 'terroristes' par le gouvernement, mais comme Amnesty

  9   International en a conclu dans son rapport concernant la violence à

 10   Drenica, elle visait à 'éliminer les suspects et leurs familles.'"

 11   Pouvons-nous passer à la page suivante.

 12   "Les témoignages réunis par les groupes de défense des droits de l'homme et

 13   des journalistes indiquent plusieurs cas d'exécutions extrajudiciaires et

 14   de meurtres illicites imputables à un usage excessif de la force.

 15   "Quelque 58 Albanais de souche ont péri dans cette offensive, y

 16   compris 18 femmes et dix enfants de moins de 16 ans, et ont ensuite été

 17   sommairement enterrés par la police avant que les autopsies ne puissent

 18   être effectuées."

 19   Je sais, Monsieur, que vous n'avez pas eu connaissance de ce rapport

 20   de "Human Rights Watch," mais il est donc estimé que 58 Albanais de souche

 21   ont été tués lors de l'attaque, y compris 18 femmes et dix enfants qui

 22   avaient moins de 16 ans, mais saviez-vous qu'un nombre aussi élevé de

 23   personnes ont trouvé la mort lors de cette attaque dirigée contre

 24   l'enceinte Jashari ?

 25   R.  Je vous donnerai la réponse suivante. Lors du récolement qui a précédé

 26   ma déposition ici, j'ai pu lire le rapport de "Human Rights Watch" dans ses

 27   détails. J'estime que ce rapport est superflu à plusieurs égards. Tout

 28   d'abord, il parle de victimes au Kosovo-Metohija, ces victimes devraient

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  1   être identifiées par leurs prénoms et noms de famille et autres données,

  2   tout comme les criminels ou auteurs de crimes sont toujours identifiés par

  3   leurs noms et prénoms. Je n'ai pas lu ce passage précisément, mais ailleurs

  4   dans ce même rapport, il me semble que la recherche effectuée par cette

  5   organisation visait à ce que toutes les victimes au Kosovo-Metohija qui ont

  6   trouvé la mort dans le cadre d'actions terroristes et antiterroristes ainsi

  7   que ceux qui ont trouvé la mort près de la frontière ou à cause des

  8   bombardements de l'OTAN ou ceux qui ont été liquidés par les terroristes

  9   albanais, car certains Albanais avaient refusé d'être mobilisés, en fait,

 10   ils voulaient dépeindre toutes ces victimes comme des personnes qui sont

 11   mortes en raison de traitements inhumains et en raison de violations du

 12   droit international et le droit international de la guerre.

 13   En l'espèce, en ce qui concerne Prekaz et l'enceinte familiale Jashari, je

 14   sais que le même jour le site a été visité et inspecté par un certain

 15   nombre d'ambassadeurs accrédités auprès de la RFY. Ils sont entrés dans la

 16   maison de Jashari, et avant de voir ce rapport, je n'avais jamais entendu

 17   dire que des organes du MUP avaient tué puis enterré plus de 50 Albanais

 18   dont les corps n'ont pu être autopsiés. Tout d'abord, il n'y avait même pas

 19   autant de gens dans ces deux maisons, la maison de M. Jashari et celle de

 20   son frère.

 21   Mme PETERSON : [interprétation] Pourrions-nous passer à la page 40 en

 22   anglais. Je ne suis pas sûre de la page en B/C/S. Mais la traduction n'est

 23   sans doute pas essentielle puisqu'il ne s'agit que de noms.

 24   Q.  Monsieur, vous avez dit que les noms des victimes n'étaient pas

 25   précisés. Mais si l'on examine cette liste, l'on voit une personne de 74

 26   ans, une personne de 72 ans, on voit un enfant de 13 ans, un enfant de 11

 27   ans, un adolescent de 16 ans, un enfant de 12 ans, un enfant de 8 ans, un

 28   autre enfant de 7 ans. Plus loin, 16 ans, 12 ans.

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  1   Ainsi, vous en conviendrez, Monsieur, qu'il y a dans ce rapport des noms de

  2   personnes et leur âge également qui étayent les affirmations que l'on

  3   trouve dans ce rapport ?

  4   R.  Avec tout le respect que je dois aux victimes énumérées ici et toutes

  5   les victimes décédées au Kosovo-Metohija, j'aimerais attirer votre

  6   attention sur le fait que oui, il est exact que des noms figurent ici, des

  7   noms d'enfants aussi, ce qui est fort regrettable, mais j'aimerais avancer

  8   une autre thèse. Est-ce que toutes ces personnes ont réellement été tuées

  9   pendant l'attaque menée contre l'enceinte familiale Jashari ou tuées

 10   pendant toutes les actions entreprises en 1998 et 1999 ?

 11   Q.  Il s'agit là d'une liste de personnes qui ont été tuées lors de

 12   l'attaque à Donji Prekaz, qui a eu lieu entre le 5 et le 7 mars, voilà ce

 13   qui y est dit. Quelques autres personnes ont été tuées dans un village à

 14   proximité, mais je ne m'y réfère pas en l'occurrence.

 15   R.  Tout dépend de la période pendant laquelle "Human Rights Watch" a mené

 16   cette enquête. Deux, trois ou dix jours ou un an après l'événement qui a eu

 17   lieu ?

 18   Q.  Je vais vous poser la question suivante alors : est-ce que ceci

 19   coïncide à vos connaissances de ce qui se passait au cours de l'action

 20   menée dans l'enceinte de Jashari ?

 21   R.  Non, ceci ne coïncide pas avec mes connaissances de l'époque.

 22   Q.  Bien. Peut-on revenir à l'article paru dans Nedeljni Telegraf. Je ne me

 23   souviens pas de la pièce à conviction. Il s'agissait de la pièce 02945 en

 24   vertu de l'article 65 ter. On m'informe que c'était P1543. Peut-on montrer

 25   en anglais la page 13. Est-ce que vous pouvez défiler la page vers le bas.

 26   En B/C/S, il s'agira de la page 3. Peut-on montrer le bas de la page,

 27   l'encadré. Je vais lire cette partie de votre interview accordée au

 28   Nedeljni Telegraf. Vous dites :

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  1   "Dès au moment du premier conflit avec l'UCK, les membres du MUP se sont

  2   montrés incapables et incompétents. La première attaque organisée des

  3   membres de l'UCK contre les membres du MUP de la Serbie a eu lieu le 28

  4   février 1998 et a eu lieu dans le village de Likosane, près de Glogovac. A

  5   cette occasion, quatre membres du MUP ont été tués alors que deux ont été

  6   blessés. Dans ce conflit qui a duré deux jours, il a été démontré que les

  7   membres du MUP ne sont pas capables de confronter de manière efficace la

  8   montée du terrorisme dans la zone de Kosmet. En raison d'une mauvaise

  9   planification, les unités antiterroristes du MUP et du service de la Sûreté

 10   de l'Etat utilisaient trop de force dans une action qui s'est suivie et

 11   dont le but était de neutraliser les groupes terroristes d'Adem Jashari

 12   dans le village de Gornji Prekaz, près de Srbica. Un tel usage de la force

 13   a abouti aux victimes civiles non nécessaires, ce qui a provoqué une

 14   réaction et une montée rapide du terrorisme dans l'ensemble du Kosovo-

 15   Metohija, et notamment dans la région de Drenica."

 16   Avez-vous déclaré cela devant le Nedeljni Telegraf ?

 17   R.  Oui, c'est la déclaration que j'ai faite auprès de Nedeljni Telegraf.

 18   Mais tout à l'heure, vous avez montré un document avec 80 ou 100 victimes.

 19   Moi, à l'époque, je disposais des informations sans avoir participé à

 20   l'armée ni elle avait participé non plus. D'après mes informations, dans

 21   cette action, il y a eu environ 30 victimes. Comme je l'ai dit hier et

 22   aujourd'hui, en raison de la visibilité, en raison du brouillard, c'était

 23   vers le milieu de la nuit que le véhicule du MUP a été attaqué. C'est à ce

 24   moment-là qu'une partie des civils a péri en raison des tirs, mais non pas

 25   deux ou trois jours après l'attaque contre la maison de la famille Jashari.

 26   Il y a eu une attaque contre le véhicule du MUP en raison de la mauvaise

 27   visibilité et du brouillard dans le village de Likosane. A ce moment-là,

 28   certains civils ont été atteints. Mais ceci n'était pas le résultat de

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  1   l'attaque contre la maison de la famille Jashari, au moins d'après ce que

  2   me suggéraient mes informations à l'époque.

  3   Q.  Monsieur, juste afin d'obtenir une information précise, le rapport du

  4   "Human Rights Watch" ne parle pas de 100 victimes, mais de 58, juste pour

  5   clarifier.

  6   Examinons la suite de votre déclaration dans le Nedeljni Telegraf, où

  7   il est dit :

  8   "En raison la mauvaise planification, les unités antiterroristes du

  9   MUP et du service de la Sûreté de l'Etat utilisent trop de force dans

 10   l'action qui s'est suivie, dans le but de neutraliser le groupe terroriste

 11   d'Adem Jashari dans le village de Gornji Prekaz, près de Srbica. Un tel

 12   usage de la force a résulté en victimes civils non nécessaire…"

 13   Est-ce que vous êtes d'accord avec moi que vous ne parlez pas ici de

 14   l'embuscade initiale des véhicules du MUP ? Vous critiquez ici l'action qui

 15   s'est ensuivie contre Adem Jashari ?

 16   R.  Oui, je suis d'accord avec vous là-dessus. Cependant, il s'agit

 17   là d'un article de presse, et non pas du document original. Et je dis ici

 18   qu'il est question de l'action qui a suivie après l'attaque contre le

 19   véhicule du MUP. Mais je suis d'accord avec ce que vous dites. Les données

 20   concernant les victimes, vous avez dit 58 -- et même une victime aurait été

 21   de trop. Mais je vous dis qu'à l'époque, en 1998, en février, d'après les

 22   informations que j'ai pu recueillir auprès du MUP et du service de Sûreté

 23   de l'Etat, d'après mes informations, il y avait environ 30 victimes.

 24   Q.  Monsieur, vous dites que c'était simplement un article de presse, non

 25   pas un document original. Mais si nous examinons la première page, c'est la

 26   page 1 en anglais, et si nous passons à la page 1 en B/C/S aussi, nous

 27   pouvons trouver la partie pertinente -- non, je pense qu'en anglais nous

 28   n'avons toujours pas la page 1. Merci.

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  1   Et au premier paragraphe, il est écrit :

  2   "Même si ce n'est pas habituel - c'est même un précédent - qu'un

  3   membre du service de sécurité militaire parle devant la presse de questions

  4   aussi importantes, j'ai toutefois décidé de ce faire en raison de la vérité

  5   concernant les combats au Kosovo-Metohija et à cause de tous ces hommes

  6   sous mes ordres que j'envoyais à des endroits les plus dangereux, jour et

  7   nuit, pour que nous puissions avoir des informations exactes et mises à

  8   jour concernant les séparatistes, les terroristes et les mentors étrangers

  9   et ce qu'ils préparaient pour nous afin de parler et dire la vérité. Je

 10   vais répondre à toutes vos questions à condition que vous me permettiez de

 11   dire pendant cinq, six minutes ce qui me tracasse."

 12    Donc vous avez parlé avec eux, car vous avez souhaité dire la vérité de ce

 13   que vous avez vu au Kosovo-Metohija; est-ce exact ?

 14   R.  Oui, c'est ce que l'ensemble de l'article suggère. Je ne conteste pas

 15   cela.

 16   Q.  Merci, Monsieur. Et est-ce que vous savez que le général Djordjevic

 17   faisait partie de l'état-major qui avait élaboré le plan d'action contre

 18   l'enceinte Jashari ?

 19   R.  Non, je ne le savais pas.

 20   Q.  Merci. Je vais passer à un autre sujet. Je souhaite vous poser quelques

 21   questions au sujet de quelques noms et vous demander si vous connaissiez

 22   ces personnes au cours de la période pertinente, période des bombardements

 23   de l'OTAN. Est-ce que vous connaissez Sreto Camovic ?

 24   R.  Sreto Camovic, chef du département de la Sûreté d'Etat de Djakovica,

 25   oui, je le connaissais.

 26   Q.  Et Nikola Micunovic ?

 27   R.  Oui, je connaissais Nikola Micunovic.

 28   Q.  Et quelles étaient ses fonctions ?

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  1   R.  Je pense qu'il avait le grade de commandant. Il était un employé du

  2   service au sein du département militaire de Djakovica. Donc le département

  3   militaire de Pec avait une branche, en fait, à Djakovica.

  4   Q.  Merci, Monsieur. Et je crois que vous avez parlé de Sergej Perovic

  5   hier. Vous le connaissiez ?

  6   R.  Sergej Perovic, capitaine de 1ère classe, était le chef de la sécurité

  7   au sein de la 52e Brigade de roquettes et d'artillerie de la Défense

  8   antiaérienne.

  9   Q.  Est-ce qu'il avait la responsabilité de soumettre ses rapports le matin

 10   et le soir à vous ?

 11   R.  Oui, du fait même qu'il était le chef de la sécurité au sein de la

 12   Brigade.

 13   Q.  Merci, Monsieur. Et Veroljub Zivkovic, le connaissiez-  vous ?

 14   R.  Le colonel Veroljub Zivkovic était le chef de l'état-major du Corps de

 15   Pristina en 1999.

 16   Q.  Et où était-il situé pendant les bombardements de l'OTAN ?

 17   R.  IL était stationné à Djakovica et il était le commandant du poste de

 18   commandement avancé à Djakovica.

 19   Q.  Et Stevo Kopanja ?

 20   R.  Stevo Kopanja était le commandant du 52e Bataillon de la Police

 21   militaire.

 22   Q.  Apparemment, vous connaissez ces personnes et vous savez ce qu'elles

 23   étaient. Est-ce que vous-même vous étiez souvent à Djakovica au cours de la

 24   campagne des bombardements de l'OTAN ?

 25   R.  Oui, en 1998 et 1999, je n'ai eu de cesse de me déplacer, tout comme

 26   c'était le cas de tous mes officiers de sécurité. Nous n'allions pas

 27   travailler au bureau à l'époque. Nous étions un peu partout. C'est moi qui

 28   dirigeais le travail de l'équipe des officiers de sécurité en 1998 et 1999.

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  1   Car la situation s'aggravait, il devenait plus difficile de se déplacer. Je

  2   commençais à passer plus de temps dans la garnison de Djakovica aussi.

  3   Q.  Donc pendant la période des bombardements de l'OTAN, vous étiez dans la

  4   garnison de Djakovica à quelle fréquence ?

  5   R.  Vous me posez cette question au bout de 13 ans ? Eh bien, disons, deux

  6   fois par mois. Peut-être quatre ou cinq fois au total.

  7   Q.  Et à chaque fois, c'était une visite qui durait un jour, ou est-ce que

  8   vous êtes resté plus longtemps ?

  9   R.  Non. Chaque fois, c'étaient des visites d'un jour. A chaque fois,

 10   c'était au poste de commandement avancé où tous les chefs, commandants de

 11   brigades, venaient. La seule brigade qui y était était la 52e Brigade

 12   d'artillerie, et puis les commandants des bataillons frontaliers. Ils me

 13   soumettaient leurs rapports et l'on convenait des missions à suivre.

 14   Q.  Monsieur, lorsque vous avez voyagé entre Pristina et Djakovica, cela

 15   prenait combien de temps ?

 16   R.  Très longtemps parfois. Mais afin d'arriver jusqu'à Djakovica, ça

 17   dépendait des fois, car les routes étaient interrompues à la fois entre

 18   Djakovica et Pec, Pristina et Pec, Pristina et Prizren. La seule route qui

 19   était sans cesse contrôlée par nous passait par le mont Strbac vers

 20   Prizren, ensuite de Prizren vers Djakovica. Mais si vous me demandez quel

 21   est le temps dont j'ai besoin afin d'arriver jusqu'à Djakovica dans des

 22   conditions normales, une heure et demie environ. Mais dans des conditions

 23   de guerre, il fallait compter certainement sur trois heures.

 24   Q.  Merci, Monsieur. Vous avez grandi à Djakovica; est-ce exact ?

 25   R.  Oui. J'ai terminé l'école primaire et l'école secondaire là-bas. Je

 26   suis né là-bas. Et ensuite, je suis allé étudier à l'académie militaire.

 27   Q.  Et vous avez grandi dans quelle partie de Djakovica ?

 28   R.  Pendant mon enfance, j'étais dans un village. Puisque je suis

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  1   originaire d'une famille qui s'est implantée au Kosovo-Metohija en 1933,

  2   j'étais dans un village qui s'appelle Dobrivare [phon] qui est sur les

  3   rives de la rivière de Beli Drim, à l'est de Djakovica, à environ 13

  4   kilomètres. Et après 1968, nous étions à Djakovica même, dans la ville.

  5   Notre maison était juste à côté de la gare routière et juste à côté de

  6   l'une des deux casernes qui existaient à l'époque à Djakovica.

  7   Q.  A l'époque des bombardements de l'OTAN, est-ce que vous aviez toujours

  8   une maison à Djakovica ?

  9   R.  Oui. J'avais une maison à Djakovica jusqu'au retrait de l'armée et de

 10   la police. Après, toutes les maisons serbes, dont la mienne, ont eu leur

 11   toit qui a été incendié. Après, j'étais informé du fait qu'un Albanais s'y

 12   était installé, ayant fait des rénovations. C'était une maison que mon père

 13   et mon frère possédaient de manière conjointe. Cette maison a été vendue en

 14   2005 suite à l'initiative de mon oncle. En ce moment, j'ai deux

 15   appartements à Djakovica qui appartiennent à mes frères, et j'ai au total

 16   12 hectares de terre, et mon père n'a pas du tout l'intention de vendre

 17   cela.

 18   Q.  Donc avant les bombardements de l'OTAN, vous n'avez pas eu l'intention

 19   de vendre votre maison ?

 20   R.  Non, pas avant 2005. D'ailleurs, les traces de cela existent dans le

 21   cadastre.

 22   Q.  Merci. Vous avez parlé hier d'une personne nommée Nike Peraj. Vous le

 23   connaissiez bien ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Et je crois que dans l'affaire Milutinovic vous l'avez décrit en tant

 26   qu'un ami de longue date; est-ce exact ?

 27   R.  Ecoutez, une connaissance de longue date.

 28   Q.  Si vous souhaitez que l'on passe à huis clos partiel pour une partie de

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  1   vos réponses, faites-le-moi savoir.

  2   R.  Non, non. Nous avons apprécié les hommes qui aidaient le service de

  3   Sécurité au Kosovo. Lorsque je dis "ami," c'était une connaissance de

  4   longue date et une connaissance connue aussi par mes prédécesseurs au

  5   Kosovo. Je vais vous donner un exemple de la raison pour laquelle je dis

  6   cela. En 1957, j'étais chez lui. J'ai assisté à un mariage lorsque son

  7   neveu se mariait. J'étais l'invité d'honneur. Il y avait plusieurs Serbes

  8   qui y ont assisté. Ensuite, il venait souvent chez moi à Djakovica

  9   lorsqu'on faisait la rakija, il venait nous voir. Donc c'était quelqu'un de

 10   très ouvert qui fréquentait souvent les Serbes et les Albanais.

 11   Q.  Et vous avez dit hier que vous avez rencontré son père aussi; est-ce

 12   exact ?

 13   R.  Oui. Je connais à la fois son père et son frère.

 14   Mme PETERSEN : [interprétation] Peut-on passer brièvement à huis clos

 15   partiel, s'il vous plaît. J'aurais une ou deux questions seulement.

 16   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Huis clos partiel.

 17   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 18   [Audience à huis clos partiel]

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  6   [Audience publique]

  7   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous allons lever l'audience et

  8   reprendre notre travail à 13 heures.

  9   [Le témoin quitte la barre]

 10   --- L'audience est suspendue à 12 heures 31.

 11   --- L'audience est reprise à 13 heures 01.

 12   [Le témoin vient à la barre]

 13   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Madame Petersen.

 14   Mme PETERSEN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 15   Q.  Monsieur, j'aimerais vous poser des questions sur une autre personne,

 16   Milos Djosan. Je crois que vous l'avez mentionné hier.

 17   R.  Milos Djosan, un colonel, commandant de la 52e Brigade antiaérienne.

 18   Q.  Hier, on vous a montré la déclaration de Nike Peraj, et vous dites

 19   avoir lu cette déposition ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Vous avez corrigé une chose au paragraphe 6. Cette description de Milos

 22   Djosan vous semblait incorrecte, n'est-ce pas ?

 23   R.  Je ne vois pas à quelle description vous faites allusion.

 24   Q.  Attendez, je vais la retrouver. Dans la pièce P313, au paragraphe 6, on

 25   nous dit que le colonel Milos Djosan était le commandant de la 52e Brigade

 26   antiaérienne, qu'il était responsable des unités de la VJ dans la

 27   municipalité de Djakovica et qu'il était également responsable des unités

 28   de réserve du MUP. Et vous avez dit que ça n'était pas juste, n'est-ce pas

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  1   ?

  2   R.  Oui, absolument.

  3   Q.  Je voulais simplement vous donner des informations supplémentaires.

  4   Dans le témoignage de Nike Peraj en février de l'an dernier, c'est la page

  5   du compte rendu d'audience 1 189, il corrige ce paragraphe. Il dit :

  6   "Il faudrait dire 'colonel Milos Djosan,' qui était commandant de la 52e

  7   Brigade antiaérienne, et il n'était responsable que de cette brigade. Il

  8   n'était pas responsable des unités de réserve du MUP."

  9   Ensuite, il poursuit, la question suivante étant :

 10   "Peut-on dire qu'il était responsable pour les unités de réserve de

 11   la VJ ?"

 12   Et il répond :

 13   "Il était responsable pour les forces régulières et pour les forces de

 14   réserve s'agissant de la VJ."

 15   Maintenant, Monsieur, à entendre ces corrections, est-ce que vous diriez

 16   toujours que ce paragraphe est injuste ou est-ce qu'il a été corrigé ?

 17   R.  Le colonel Milos Djosan était responsable de la 52e Brigade

 18   d'artillerie, qui comprenait également des conscrits qui avaient été

 19   mobilisés, et il ne s'occupait des conscrits que dans sa brigade.

 20   Q.  Merci. Une autre question. Juste avant la pause, nous avons parlé de

 21   Nikola Micunovic, n'est-ce pas, et vous nous avez dit que vous le

 22   connaissiez ?

 23   R.  Oui. Nikola Micunovic travaillait au secrétariat militaire à Pec, à

 24   Djakovica.

 25   Q.  Connaissiez-vous le surnom de Nikola Micunovic ?

 26   R.  Non.

 27   Q.  Vous n'avez jamais entendu qu'on l'appelait parfois Dragan ?

 28   R.  Non.

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  1   Q.  Monsieur, en 1999, connaissiez-vous un individu qui portait le nom de

  2   Milutin Prascevic ?

  3   R.  Non, pas en 1999, mais je le connaissais de bien avant.

  4   Q.  Non, je m'excuse, je voulais dire 1998. Est-ce que vous le connaissiez

  5   en 1998 et jusqu'en 1999 ?

  6   R.  Oui, absolument. C'est quelqu'un de la famille de ma femme. C'est le

  7   frère de son oncle.

  8   Q.  Est-ce que vous avez un nom pour décrire ce lien de parenté ?

  9   R.  Le père de ma sœur et le père de Milutin Prascevic étaient frères.

 10   Q.  Très bien. Donc c'est quelqu'un de votre famille ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Pendant combien de temps avez-vous connu M. Prascevic ?

 13   R.  Depuis mon mariage en 1982.

 14   Q.  Pouvez-vous nous expliquer quel était son métier ?

 15   R.  Milutin Prascevic était officier dans un bureau des services de lutte

 16   contre le crime du SUP à Djakovica.

 17   Q.  Très bien. J'aimerais vous donner davantage d'information et obtenir

 18   votre réponse. Hier, lorsque l'on vous a montré la déclaration du témoin

 19   Nike Peraj, au paragraphe 58, on parle de Prascevic, et on dit :

 20   "Il était le chef de la sécurité de l'Etat à Djakovica."

 21   Et vous avez dit que c'était une erreur, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui, c'est totalement faux. Le chef de la sécurité de l'Etat, c'était

 23   M. Camovic.

 24   Q.  Merci. Et dans le témoignage de Nike Peraj, au compte rendu d'audience

 25   page 1 191, on lui demande s'il voulait rectifier sa déclaration, et il dit

 26   concernant le paragraphe 58 :

 27   "Ce n'est pas exact. Milutin Prascevic n'a jamais occupé cette poste.

 28   C'était un inspecteur, et non pas un inspecteur haut placé, c'était un

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  1   simple inspecteur. Et là encore, je le répète, un inspecteur, pas un

  2   inspecteur haut placé."

  3   Est-ce que cela vous semble juste, d'après ce que vous savez ?

  4   R.  Je le connais très bien. C'est un membre de ma famille. Il travaillait

  5   dans un bureau pour lutter pour la prévention de la criminalité du SUP à

  6   Djakovica, en civil.

  7   Q.  Donc votre réponse est qu'il travaillait pour le MUP à Djakovica, qu'il

  8   travaillait dans un bureau en face d'un inspecteur, mais vous êtes d'accord

  9   pour dire qu'il travaillait pour la police à Djakovica ?

 10   R.  Il travaillait au secrétariat de l'Intérieur à Djakovica, et je vous ai

 11   déjà dit ce qu'il faisait.

 12   Q.  Merci. Alors, une question qui va vous sembler idiote peut-être, mais

 13   il faut que je la pose quand même pour le compte rendu d'audience. Est-ce

 14   que vous savez que M. Prascevic a été tué en 1999 ?

 15   R.  Oui. C'est ma famille qui me l'a dit, parce qu'à l'époque, ma famille

 16   habitait à Djakovica ainsi que la famille de Prascevic. J'ai appris qu'il

 17   avait été tué dans une embuscade non loin de Djakovica. C'est plus tard que

 18   j'ai appris les circonstances de sa mort.

 19   Q.  Lorsque vous dites "une embuscade," par qui était orchestrée cette

 20   embuscade ?

 21   R.  Ecoutez, je ne dispose pas de ces informations et je n'ai jamais

 22   enquêté. Ce que je puis vous dire, c'est ce que sa femme et ses cousins

 23   m'ont dit. Ils avaient probablement été informés par les représentants du

 24   MUP. Ce qu'ils m'ont dit, c'est qu'avant qu'il ne soit tué, il y avait eu

 25   un incident. A Djakovica, une patrouille du MUP a été attaquée. Par

 26   téléphone Motorola, ils ont demandé du soutien du MUP. Et sans attendre les

 27   autres, ils se sont assis dans un véhicule, et il est allé sur place pour

 28   aider son camarade. C'est lors de cette intervention qu'il a été tué.

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  1   Q.  Est-ce que cette attaque était une attaque, à votre avis, de l'UCK ?

  2   R.  A l'époque, ce n'est pas la conclusion que j'ai tirée. Je ne me

  3   souviens pas de la date de sa mort, mais je crois que c'est en 1998, au

  4   moment où les terroristes étaient ni plus ni moins partout. Mais je n'ai

  5   jamais réussi à savoir qui l'avait tué.

  6   Q.  Est-ce qu'il n'a pas été tué en avril 1999 ?

  7   R.  C'est possible. Ces événements datent, et je dois dire que j'ai du mal

  8   à me souvenir de la date précisément. Il est effectivement possible que,

  9   comme vous le dites, ça ait été en avril 1999.

 10   Q.  Vous êtes en train de nous dire qu'il a été tué dans une embuscade lors

 11   d'une attaque, mais vous ne savez pas si cette attaque a été menée par des

 12   terroristes de l'UCK ?

 13   R.  Non, je ne sais pas. Tout ce que je sais, et je dois dire que je ne

 14   m'en suis pas trop occupé, c'est qu'il a été tué dans une embuscade alors

 15   qu'il allait aider ses confrères qui avaient été eux-mêmes pris dans une

 16   embuscade auparavant. Alors, j'imagine que ce sont des terroristes qui

 17   l'ont tué, mais je ne peux pas tirer cette conclusion avec certitude.

 18   Q.  Qui d'autre, en avril 1999, aurait pu prendre le MUP en embuscade et

 19   lui tirer dessus ?

 20   R.  En 1999, seuls les terroristes tiraient sur le MUP.

 21   Q.  Vous êtes donc en train de nous dire qu'un membre de votre famille a

 22   été tué dans une embuscade et que, ma foi, vous n'avez rien fait pour

 23   essayer de trouver les auteurs de cet attentat ?

 24   R.  Madame, vous persistez à me demander si j'ai pris des mesures alors que

 25   je n'étais pas en mesure de prendre ces mesures, justement. Milutin

 26   Prascevic travaillait le MUP. Le MUP aurait dû prendre des mesures pour

 27   enquêter sur ce malheureux événement. Ils ont probablement fait tout ce

 28   qu'ils pouvaient faire. Ils ont mené une enquête sur site, et cetera. Mais

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  1   pour autant que je m'en souvienne, il avait été blessé à la tête et il est

  2   mort alors qu'on le conduisait à l'hôpital. Je n'ai pas lancé de mesures

  3   d'enquête. Ce n'était pas de ma responsabilité.

  4   Q.  Peut-être, effectivement, n'était-ce pas de votre responsabilité

  5   d'enquêter sur la mort d'un officier du MUP, mais est-ce que votre travail,

  6   après tout, n'était pas de chercher à savoir ce que faisait l'UCK, surtout

  7   les auteurs de cet attentat, n'est-ce   pas ?

  8   R.  En 1999, j'avais beaucoup de pain sur la planche, si bien que je ne

  9   savais pas trop hiérarchiser les choses par rapport à la fonction qui était

 10   la mienne. Alors, mener une enquête pour laquelle je n'avais pas de

 11   compétence, ce n'était pas possible. Si sa famille m'a dit comment il avait

 12   été tué, cela me suffit.

 13   Q.  Alors, dans votre témoignage ici même, c'est que en tant que chef du

 14   Renseignement, alors que vous étiez censé savoir ce que faisait l'UCK,

 15   lorsque l'un des membres de votre famille a été tué dans une embuscade par

 16   l'UCK, vous n'avez pas pris de mesures particulières pour essayer de savoir

 17   qui était les auteurs de ce meurtre ?

 18   R.  Milutin Prascevic était membre du MUP, et non de l'armée de la RFY.

 19   S'il avait été membre de l'armée, à ce moment-là, j'aurais eu l'obligation,

 20   en agissant conjointement avec la police militaire, d'enquêter sur tous les

 21   aspects de son décès. Toutefois, en tant que parent, il me suffisait de

 22   connaître les circonstances de son décès. Les organes du MUP avaient

 23   communiqué toutes les informations dont ils disposaient, qu'ils avaient pu

 24   réunir au cours de l'enquête avec les membres de sa famille. Pourquoi

 25   aurais-je mené une enquête ? Selon votre logique, à chaque fois qu'un de

 26   mes proches a été tué, j'aurais dû dire "Eh bien, tant pis. Les organes du

 27   MUP ne sont plus compétents," et j'aurais mené ma propre enquête en tant

 28   que citoyen privé.

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  1   Q.  Monsieur, savez-vous combien d'autres personnes ont été tuées en même

  2   tant que votre parent ?

  3   R.  Non, je ne le sais pas. Je pense qu'il y a eu d'autres personnes tuées,

  4   mais je n'en suis plus certain. Cela fait longtemps. Tout de même, je crois

  5   que certains ont été blessés, et peut-être qu'il y a eu un autre décès.

  6   Q.  Merci. Avez-vous fait le voyage jusqu'à Djakovica pour assister à

  7   l'enterrement de Prascevic ?

  8   R.  Oui, je suis allé à Djakovica pour présenter mes condoléances, mais je

  9   n'ai pas assisté à l'enterrement même. J'y suis allé dans la matinée dudit

 10   jour pour présenter mes condoléances à sa famille, puis je suis rentré à

 11   Nis. L'agression de l'OTAN battait son plein, et en raison de mes

 12   attributions, je n'avais pas de temps à consacrer à de telles choses.

 13   Q.  Très bien. Vous vous souvenez dès lors que cela s'est produit pendant

 14   l'agression de l'OTAN, et donc non pas en 1998.

 15   R.  Oui, c'était une erreur de ma part.

 16   Q.  Merci. Etes-vous resté seulement un jour à Djakovica lorsque vous vous

 17   y êtes rendu pour présenter vos condoléances ?

 18   R.  Une matinée seulement. J'ai rendu visite à sa famille dans la cour de

 19   l'enceinte familiale. Il y avait une centaine de personnes présentes. Je

 20   n'y ai passé que peu de temps pour exprimer mes condoléances, et puis je

 21   suis rentré pour m'acquitter de mes fonctions.

 22   Q.  Et pendant le temps que vous avez passé à Djakovica pour présenter vos

 23   condoléances, avez-vous vu Nike Peraj ?

 24   R.  Autant que je le sache, Nike Peraj s'entendait très bien aussi avec

 25   Milutin Prascevic. Je me rendais rarement à Djakovica étant donné que je

 26   travaillais à Pristina. Ma famille s'y trouvait. Mais je sais que parfois

 27   ils se voyaient en dehors du travail. Et le jour des condoléances, j'ai

 28   croisé Nike Peraj, qui était assis sur un banc avec d'autres personnes de

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  1   la même localité. Donc il y était venu aussi pour exprimer ses

  2   condoléances.

  3   Q.  Vous souvenez-vous de l'identité de ces autres personnes avec qui Nike

  4   Peraj se trouvait ?

  5   R.  A Djakovica, la population était telle qu'il y avait le moins de Serbes

  6   de toute la région du Kosovo-Metohija. Ils ne représentaient que 3 %. Et à

  7   Djakovica, il y avait trois petites enclaves où se trouvaient des maisons

  8   serbes, dont l'une près de la gare routière. Il y avait d'autres citoyens

  9   sur place, des voisins, des parents, ma femme y était aussi, ses frères,

 10   donc toute la famille.

 11   Q.  Très bien. Merci. Hier, on vous a montré la déclaration de Nike Peraj,

 12   mais vous aviez déjà pris connaissance de cette déclaration auparavant,

 13   n'est-ce pas?

 14   R.  Oui, j'avais déjà pu lire cette déclaration avant de témoigner dans

 15   l'affaire Milutinovic. J'ai remarqué qu'il avait fait plusieurs

 16   déclarations.

 17   Q.  Je ne vous pose pas une question à ce sujet. Je vous pose des questions

 18   concernant la déclaration que vous avez relue hier, la pièce P313. Vous

 19   aviez déjà eu l'occasion de lire cette déclaration auparavant, n'est-ce pas

 20   ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Très bien. Et l'on vous a dit qu'au paragraphe 59, Nike Peraj avait dit

 23   que le jour, il a parlé donc de l'enterrement de Prascevic, il a dit qu'il

 24   vous a entendu dire en présence de Camovic, Micunovic, un autre dénommé

 25   Kovacevic et Perovic qu'il fallait tuer au moins une centaine de personnes

 26   et incendier des maisons en guise de représailles pour le meurtre de

 27   Prascevic. Je crois que vous avez une position très claire à cet égard.

 28   Vous dites que vous n'avez jamais tenu ces propos, n'est-ce pas ?

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  1   R.  Je vous en prie. Je réitère qu'une réunion de la sorte n'a jamais eu

  2   lieu. Je n'ai jamais assisté à une telle réunion, je n'ai jamais tenu de

  3   tels propos. La déclaration de Nike Peraj dans son intégralité résulte des

  4   pressions qu'il a sans doute subies après le retrait de l'armée. Les

  5   terroristes ont exercé une pression sur lui, et pour sa propre sécurité, il

  6   a été contraint de faire une telle déclaration.

  7   Q.  Monsieur, au paragraphe 60, et j'aimerais simplement m'assurer que les

  8   informations sont exactes, au paragraphe 60 de la pièce P313, Peraj

  9   explique que :

 10   "La réunion était officieuse. Une discussion au sein d'un groupe qui

 11   s'était réuni à une autre fin, et l'ordre donné par Stojanovic pourrait

 12   être décrit, en fait, comme un cri du cœur."

 13   Nous ne parlons donc pas d'une réunion officielle à laquelle vous auriez

 14   donné l'ordre à toutes les personnes présentes d'éliminer une centaine de

 15   personnes. Il s'agit plutôt d'un groupe qui s'est réuni pour une autre

 16   raison. Vous en avez discuté, vous étiez très émotif suite au décès de

 17   votre parent et vous auriez fait cette déclaration. Est-ce que vous vous

 18   souvenez de cela ?

 19   R.  Je le redis, il n'y a eu ni réunion formelle ni réunion informelle. Sur

 20   le plan émotionnel, je ne réagis jamais de la sorte.

 21   Q.  Merci. Si j'ai bien compris, une des raisons que vous avez citées pour

 22   lesquelles cela n'aurait jamais pu se produire, c'est que vous-même n'étiez

 23   pas habilité à donner des ordres. Vous n'aviez pas le pouvoir de commander.

 24   Ai-je bien compris ?

 25   R.  Je n'ai jamais eu le pouvoir de commander. Je n'étais pas habilité à

 26   donner des ordres. Cela dit, vous en tirez une conclusion erronée. Ce n'est

 27   pas que cela ne s'est pas produit, parce que je n'avais pas un tel pouvoir.

 28   Je vous dis simplement que c'est un mensonge manifeste de notoriété

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  1   publique. Aucune phrase de ce paragraphe n'est véridique.

  2   Q.  Je comprends bien que vous niez avoir dit cela. Cela dit, je crois que

  3   dans le cadre de votre déposition antérieure, vous aviez dit que de toute

  4   manière cela n'aurait pas pu se produire, car vous n'aviez pas le pouvoir

  5   de donner des tels ordres; est-ce exact ?

  6   R.  Tout ce que j'ai dit auparavant est véridique, tout comme tout ce que

  7   j'ai pu dire aujourd'hui.

  8   Q.  Très bien.

  9   Mme PETERSEN : [interprétation] Pourrions-nous maintenant voir la pièce

 10   P338, qu'elle soit affichée à l'écran. Pourrions-nous tout d'abord voir la

 11   page de garde, tant en anglais qu'en B/C/S, afin de pouvoir identifier le

 12   document.

 13   Q.  Comme vous pouvez le voir, il s'agit du journal de guerre concernant le

 14   52e Bataillon de la Police militaire. Pouvez-vous le voir ?

 15   R.  Oui.

 16   Mme PETERSEN : [interprétation] Pourrions-nous maintenant voir la page 6 en

 17   anglais, qui correspond à la page 9 en B/C/S. En B/C/S, c'est parfait. En

 18   anglais, est-ce qu'on peut voir l'entrée concernant le 13 avril 1999.

 19   Q.  L'on peut y lire qu'une compagnie a été créée, constituée d'une section

 20   de la 1ère Compagnie. Je crois qu'il s'agit du bataillon de la Police

 21   militaire. Peut-être pourriez-vous nous dire au juste ce que cela signifie,

 22   le 1er CVP ?

 23   R.  Compagnie de la Police militaire.

 24   Q.  Merci. Et l'on y voit aussi comment une compagnie de la Police

 25   militaire a été mise sur pied. Et plus bas, le dernier paragraphe entier, à

 26   partir du bas, on peut lire :

 27   "En arrivant au poste à la frontière Morina, le chef du département de la

 28   sécurité PRK nous a enjoint de prendre le contrôle du poste de frontière

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  1   dans le village de Kamenica. Cette tâche a été menée à bien…"

  2   L'on se réfère ici à vous-même, n'est-ce pas, Monsieur ?

  3   R.  Non. Moi, j'étais le chef de la sécurité. Vous souhaitez que je fasse

  4   un commentaire là-dessus ?

  5   Q.  Tout d'abord, je souhaite que l'on voie ça clairement. On y fait

  6   référence à vous en tant que chef de sécurité; est-ce exact ?

  7   R.  C'est exact.

  8   Q.  Bien. Ne s'agit-il pas là d'un exemple où vous confiez une tâche à une

  9   compagnie de Police militaire, et ensuite ils  l'exécutent ?

 10   R.  Non. Ceci n'est pas un exemple où j'aurais donné une mission à la

 11   compagnie de la Police militaire. Chaque unité tient un journal de guerre.

 12   Celui-ci est le journal de guerre du 52e Bataillon de la Police militaire.

 13   Ce n'est pas le commandant qui tient ce journal, mais souvent ce sont les

 14   officiers chargés de cela par le commandant. Et ces journaux de guerre sont

 15   souvent imprécis et assez souvent écrits de manière non conforme.

 16   Visiblement, celui qui écrivait ce journal -- et compte tenu du fait qu'une

 17   compagnie de Police militaire contient 100 hommes, ils peuvent le confirmer

 18   eux-mêmes. Moi, j'ai reçu pour tâche de la part du commandant du Corps de

 19   Pristina d'acheminer cette compagnie à la région de Morina et la remettre

 20   au lieutenant-colonel Goran Jevtovic, qui était l'un des officiers au poste

 21   du commandement avancé du Corps de Pristina de ce commandement à Djakovica.

 22   Et cette compagnie, conformément aux ordres donnés par le commandant du

 23   Corps, était censée lancer une attaque contre l'aile gauche des terroristes

 24   par rapport à la caserne de Morina, car le danger existait qu'ils renouent

 25   avec les terroristes à Junik et qu'ils réussissent à créer ce couloir dont

 26   j'ai parlé hier, par le biais duquel un grand groupe de terroristes

 27   pourrait passer. Ici, il est dit : Conformément à mon ordre, mais j'ai dit

 28   que : Non, j'ai transmis l'ordre du commandant du Corps de Pristina. C'est

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  1   ce que j'ai fait, et je n'ai pas été en charge de l'opération ni de l'ordre

  2   d'ailleurs. Mon travail était de remettre l'unité au lieutenant-colonel

  3   Jevtovic et aux autres officiers qui étaient à la caserne de Morina à

  4   l'époque.

  5   Q.  Donc vous avez transmis l'ordre du commandement du Corps de Pristina ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Souvent, lorsqu'un ordre est donné par un commandant d'unité, ça veut

  8   dire que l'ordre est reçu de l'échelon supérieur. Est-ce que vous êtes

  9   d'accord avec cela ?

 10   R.  Chaque ordre est reçu de l'échelon supérieur.

 11   Q.  Bien. Et la personne qui transmet l'ordre émanant de l'échelon

 12   supérieur doit être autorisée pour ce faire, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui. Il m'a autorisé à conduire la compagnie là-bas et à transmettre

 14   cet ordre au lieutenant-colonel Jevtovic. Je suppose que le poste de

 15   commandement avancé de Djakovica savait de quelle manière par la suite il

 16   fallait utiliser cette compagnie. Je suppose qu'ils ont reçu le message par

 17   le biais de leurs moyens de communication.

 18   Q.  Donc vous êtes d'accord pour dire que ce n'est pas n'importe qui qui

 19   aurait pu transmettre un ordre à une unité ? La personne doit avoir une

 20   certaine autorité ?

 21   R.  Dans le cas précis, à mon avis, c'est le commandant du corps d'armée

 22   qui a donné l'ordre au chef de l'état-major, qui était le commandant au

 23   poste de commandement avancé, ordre d'accueillir cette compagnie et de

 24   l'utiliser conformément à leur accord précédent. Je ne suis pas tout à fait

 25   sûr de l'accord en question. Mon obligation était d'acheminer cette

 26   compagnie et de la remettre à l'endroit où ils devaient se présenter.

 27   Q.  Je pense que nous pouvons être d'accord pour dire que dans la partie du

 28   journal de guerre, où il est dit :

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  1   "Nous avons reçu pour tâche du département de sécurité de capturer le

  2   poste de contrôle. La tâche a été accomplie…"

  3   De leur point de vue, c'est vous qui leur aviez confié la tâche. Bien sûr,

  4   ceci émanait peut-être d'un commandant supérieur, mais ils ont répondu face

  5   à la tâche ce qu'ils ont entendu de vos lèvres, n'est-ce pas ?

  6   R.  Nous pouvons nous lancer dans des conjectures concernant tout type de

  7   théories. Mais peut-être cette personne qui a écrit cela n'a même pas

  8   entendu ma conversation avec le commandant de compagnie concernant la

  9   mission. Il est difficile pour moi de vous présenter toutes ces théories,

 10   mais je vous dis la vérité. Je ne commandais pas cette compagnie lors de

 11   l'opération ni une quelconque unité.

 12   Q.  Monsieur, soyons prudents par rapport à la terminologie employée. Je

 13   pense que nous comprenons que vous n'étiez pas un commandant d'unité qui

 14   menait des troupes au combat; c'est clair. Cependant, vous avez dit à cette

 15   unité de faire quelque chose. Vous leur avez confié la tâche de faire

 16   quelque chose à cette occasion. Peut-être c'est un ordre qui émanait de

 17   l'échelon supérieur - ça me paraît raisonnable - et ensuite, ils l'ont

 18   fait. C'est tout ce que je dis. On peut être d'accord là-dessus ?

 19   R.  Non, nous ne pouvons pas être d'accord là-dessus. Quel que soit

 20   l'échelon à partir duquel l'ordre a été donné, ce n'est pas moi qui ai

 21   donné personnellement cet ordre à cette unité. Je répète, j'ai transmis au

 22   lieutenant-colonel Jevtovic, qui avait déjà été informé par le poste de

 23   commandement avancé en raison du fait que le chef de l'état-major et le

 24   commandant avaient déjà entendu parler des combats à Kosare, je lui ai dit

 25   que cette compagnie devait y arriver. Ensuite, j'ai amené la compagnie et

 26   je suis rentré. Je suis parti. Je ne leur donnais pas d'ordres directs et

 27   je n'étais pas sur place au moment de la réalisation de cette mission.

 28   Q.  Je pense que nous avons un problème sémantique de nouveau. J'ai dit

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  1   simplement que vous avez relaté cet ordre à eux. Vous leur avez dit. Vous

  2   avez dit vous-même : "J'ai transmis cela à eux." Pour moi, c'est la même

  3   chose.

  4   R.  J'ai transmis l'ordre. Mais j'ai parlé avec le commandant de compagnie,

  5   et non pas avec les soldats qui étaient alignés. J'ai parlé avec leur

  6   commandant de compagnie. J'ai dit qu'ils devaient se rendre là-bas, que

  7   c'était ce que le commandant du corps m'avait dit, et qu'ensuite il fallait

  8   les remettre entre les mains du lieutenant-colonel Jevtovic.

  9   Q.  Et ensuite, c'est ce qu'ils ont fait, n'est-ce pas ? Ils ont fait ce

 10   que vous leur avez transmis ?

 11   R.  Pour autant que je le sache, oui. Et nous avons suivi dans nos rapports

 12   sans cesse les combats à Kosare, car nous avons eu beaucoup de pertes. Et

 13   d'après ces informations, ils se sont emparés de la côte C4. Il s'agit

 14   d'une élévation prédominante à la frontière entre la République d'Albanie

 15   et la République fédérale de Yougoslavie.

 16   Q.  Bien, Monsieur. L'on vous a posé des questions au sujet de l'opération

 17   dans la vallée de Caragoj, et je souhaite que l'on en parle un peu

 18   maintenant. Etes-vous d'accord pour dire qu'il y avait deux pelotons du 52e

 19   Bataillon de la Police militaire qui ont participé à cette action ?

 20   R.  Oui, deux pelotons du 52e Bataillon de la Police militaire qui étaient

 21   subordonnés à la 125e Brigade motorisée.

 22   Q.  Bien. Et le 52e Bataillon de la Police militaire était stationné, de

 23   son côté, à Pristina, le plus gros du bataillon; est-ce exact ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Bien.

 26   Mme PETERSEN : [interprétation] Je vais maintenant traiter d'une autre

 27   pièce à conviction. Je vois qu'il ne nous reste que cinq minutes. Je peux

 28   peut-être en traiter, ou peut-être nous pouvons terminer pour la journée

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  1   d'aujourd'hui.

  2   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je suppose que vous n'aurez pas

  3   terminé avec cette pièce à conviction d'ici là.

  4   Mme PETERSEN : [interprétation] Peut-être pas.

  5   [La Chambre de première instance se concerte]

  6   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Dans ce cas-là, nous allons lever

  7   l'audience et nous allons continuer notre travail demain matin, à 9 heures

  8   du matin.

  9   [Le témoin quitte la barre]

 10   --- L'audience est levée à 13 heures 45 et reprendra le jeudi

 11   25 février 2010, à 9 heures 00.

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