Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mercredi 17 janvier 2007

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 16.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Isailovic, si j'ai bien

6 compris, vous avez quelques problèmes procéduraux à soulever avant que l'on

7 fasse rentrer le témoin. C'est bien cela ?

8 Mme ISAILOVIC : Excusez-moi.

9 Donc, le problème concernait les conversations interceptées, les entretiens

10 interceptés entre certaines personnes. Donc, c'était cela la question. La

11 Défense souhaite contester pour certaines raisons certains de ces

12 entretiens; c'était cela le problème. Donc après l'audience, moi, avec ma

13 consoeur, on a pu un petit peu éclaircir. Parce qu'il y a d'autres preuves

14 aussi dites contextuelles. Là, je ne conteste pas leur utilisation. Je suis

15 tout à fait d'accord. Le problème n'était pas dans la nature de ces preuves

16 contextuelles, mais justement le problème d'authenticité des entretiens

17 interceptés évoqués et proposés comme preuves contextuelles par ma

18 consoeur.

19 [La Chambre de première instance se concerte]

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Isailovic, il y a deux choses

21 que je tiens à vous dire. Normalement, le témoin n'a pas besoin d'être

22 absent pour ce type de faits. On peut très bien parler de cela devant lui.

23 Deuxièmement, si j'ai bien compris, certaines des conversations

24 interceptées, il y en a certaines que vous acceptez et d'autres dont vous

25 contestez l'authenticité; c'est bien cela ?

26 Mme ISAILOVIC : C'est bien cela, mais je n'ai rien dit dans le sens de

27 votre précédente intervention. Je n'ai pas parlé du témoin, ni de sa

28 présence du tout.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien.

2 Mme ISAILOVIC : [hors micro]

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons quand même continuer,

4 bien que le témoin ne soit pas là, mais pourriez-vous dire à la Chambre,

5 s'il vous plaît, quels sont les fondements qui vous permettent de contester

6 l'authenticité de ces conversations téléphoniques interceptées, sur quelle

7 base contestez-vous l'authenticité.

8 Mme ISAILOVIC : Monsieur le Président, là on n'a pas eu beaucoup de temps,

9 mais on a déjà certaines preuves qu'on va utiliser devant cette Chambre,

10 qui vont absolument dans le sens contraire de la possibilité que cette

11 personne -- il s'agit bien d'une personne dont le nom je ne vais pas

12 mentionner parce qu'il était prévu comme témoin à charge, et votre Chambre

13 n'a pas accepté sa comparution, pour certaines raisons plutôt, je pense,

14 formelles que matérielles. Pour cela, je ne mentionnerai pas son nom ici.

15 Parce qu'il était prévu qu'il témoigne sous pseudonyme et peut-être qu'il

16 peut encore comparaître devant vous. Justement, on a vraiment des indices

17 très graves qui nous montrent que peut-être cette conversation interceptée

18 où participe cette personne ne serait pas vraiment authentique.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Une minute.

20 [La Chambre de première instance se concerte]

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Whiting, vous voulez

22 prendre la parole ?

23 M. WHITING : [interprétation] Oui. Si vous me le permettez, j'aimerais

24 prendre la parole. Il y a deux points que j'aimerais soulever. Tout

25 d'abord, à notre avis, il s'agit d'une modification de la position de la

26 Défense en ce qui concerne les conversations téléphoniques interceptées

27 parce que lors de la Conférence préalable au procès, aux pages 222 et 223,

28 la Défense a indiqué qu'elle acceptait l'authenticité de toutes les

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1 conversations interceptées. Soyons honnêtes, il est vrai que j'ai bel et

2 bien dit : Avant que l'on laisse tomber nos témoins de conversations

3 interceptées, il faut d'abord nous assurer qu'il s'agit bien des mêmes

4 témoins. Or, j'ai fait une liste de tous les témoins à ce propos. Ils sont

5 sur notre liste. Tous les noms ont été communiqués à la Défense il y a très

6 longtemps, la plupart d'entre eux, c'était l'an dernier. Pour un, c'était

7 cette année, enfin, tous, en tout cas avant la Conférence de mise en état

8 où la Défense a dit qu'elle acceptait l'authenticité de toutes les

9 conversations interceptées. J'imagine que bien sûr la Défense a le droit de

10 changer d'avis. Cela, c'est normal. Ils ont le droit.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien sûr.

12 M. WHITING : [interprétation] Bon.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est à eux de préparer leurs

14 stratégies au mieux.

15 M. WHITING : [interprétation] Bon. Vous avez en tout cas notre position

16 pour ce qui est de ces témoins.

17 Maintenant, sachant que nous avons donné la liste de toutes les

18 conversations téléphoniques en l'espèce, il faudrait que la Défense nous

19 réponde, nous indique lesquelles ils contestent, ensuite nous répondrons,

20 bien sûr, de la façon adéquate, soit que nous citions éventuellement ces

21 témoins ou que nous trouvions une autre solution.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Etant donné que nous parlons

23 de ces conversations téléphoniques bien précises, les Juges aimeraient bien

24 entendre de la part de la Défense quelles sont les conversations

25 téléphoniques qu'elle accepte, et celles qu'elle rejette, et bien sûr avec

26 des raisons étayant leur choix.

27 M. WHITING : [interprétation] Oui, je suis tout à fait d'accord avec

28 vous, Monsieur le Président.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il faudrait que la Défense

2 s'acquitte de cette tâche, se concentre sur les conversations téléphoniques

3 interceptées qui sont présentées par l'Accusation et nous dire lesquelles

4 vous acceptez et lesquelles vous contestez, tout en étayant, bien sûr, vos

5 objections avec des arguments.

6 Monsieur Tapuskovic, vous avez la parole.

7 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, Monsieur le

8 Président, je sais très bien, puisque c'est quelque chose que j'ai appris

9 dans ce Tribunal, ce que signifie la parole dite, et les mots que l'on

10 prononce dans ce prétoire ne peuvent pas être modifiés. Il faut l'accepter;

11 c'est comme cela. Mais vous vous souvenez, je suis sûr, que le 10 janvier,

12 le premier jour du procès, en réponse à une question du Juge Robinson, j'ai

13 dit quelque chose. Je ne vais pas vous le répéter, bien sûr, puisque c'est

14 au transcript, mais vous avez conclu, Monsieur le Président, en laissant

15 l'Accusation et la Défense discuter du problème, en demandant

16 principalement que les deux parties arrivent à se comprendre, à savoir

17 exactement ce sur quoi ils étaient d'accord. C'est arrivé dans les sept ou

18 huit premières minutes de l'audience. Mais rien n'est encore clair.

19 Puisque aujourd'hui, M. Whiting nous a invités --

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Tapuskovic. Je tiens à

21 vous dire qu'en effet rien de ce qui s'est passé ici jusqu'à présent

22 n'affecte l'intégrité de la Défense, en aucun cas. Nous pouvons suivre la

23 procédure que j'ai élaborée, parce que cela nous permettra de ne pas perdre

24 trop de temps.

25 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Mais je voudrais répondre à votre question

26 quand même, Monsieur le Président. Je ne remets pas en cause quoi que ce

27 soit, puisque ma collègue va vous dire exactement quelles sont les

28 conversations téléphoniques qui vont être traitées aujourd'hui dans ce

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1 prétoire.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Merci.

3 Mme ISAILOVIC : Monsieur le Président, si vous souhaitez, maintenant --

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

5 Mme ISAILOVIC : -- j'indique les numéros des conversations qu'on va

6 accepter. Parce qu'on nous a proposé sous titre de preuves contextuelles,

7 dont la nature je ne conteste pas du tout, l'utilisation de cette sorte de

8 preuve devant votre Chambre, et je les ai mentionnées sur la liste que j'ai

9 obtenue du Procureur. On peut déjà, parce qu'il ne s'agit pas d'une

10 conversation interceptée, accepter ces 65 ter numéros 24130 -- non, non,

11 24130. Je vais procéder peut-être chiffre par chiffre, donc 2430 --

12 Mme EDGERTON : [interprétation] Il s'agissait de la P37. C'est ainsi

13 qu'elle a été cotée hier.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie, Madame Edgerton.

15 Mon collègue me dit que c'est le P38.

16 Qu'en est-il, Monsieur le Greffier, s'il vous plaît ?

17 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il s'agit bien du P38.

19 Mme EDGERTON : [interprétation] Je suis désolée. C'est en effet le P38.

20 Mme ISAILOVIC : La pièce suivante, c'est 65 ter, 595.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'était --

22 Mme ISAILOVIC : Il s'agit bien d'une conversation interceptée dont on ne

23 conteste pas l'authenticité.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pouvez-vous nous donner la cote,

25 s'il vous plaît ?

26 Mme EDGERTON : [interprétation] Le P39.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] P39.

28 Mme ISAILOVIC : La pièce suivante, pardon, c'est 2462, 65 ter numéro, et

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1 aussi en tant que --

2 Mme EDGERTON : [interprétation] Pour ce qui est du 2436 [comme interprété],

3 je ne l'ai pas présenté par le témoin d'hier, il s'agit d'un document

4 contextuel uniquement.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il ne s'agit pas d'un des documents

6 --

7 Mme ISAILOVIC : Je l'ai sur la liste que j'ai eue de la part du Procureur.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il semblerait que ce n'est pas un

9 document sur lequel ils comptent, en tout cas pas à cette étape, donc vous

10 n'avez pas besoin de vous en préoccupez. En tout cas, l'exercice ici n'est

11 pas utile en ce qui concerne cette pièce.

12 Mme ISAILOVIC : Parce que la dernière pièce que j'ai voulu mentionner,

13 c'est 2493. Mais là aussi, il s'agit de la pièce P42.

14 Mme EDGERTON : [interprétation] En effet, c'est bien la P42 depuis hier.

15 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] [hors micro]

16 Mme ISAILOVIC : Oui, oui, c'est cela.

17 Mme EDGERTON : [interprétation] A la lumière de --

18 [La Chambre de première instance se concerte]

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Soyons clairs. Pour ce qui est des

20 interceptes, des conversations téléphoniques que vous acceptez, il s'agit

21 des pièces P38, P39 et P42. Ce sont des cotes provisoires.

22 Mme EDGERTON : [interprétation] Le P38 n'était pas une conversation

23 téléphonique, il s'agissait d'un document de contexte. Ce sont mes notes,

24 bien sûr. Je m'étais déjà trompée une fois, et le Greffier m'a corrigée,

25 donc je ne suis plus sûre de rien.

26 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Puis-je demander --

27 Mme ISAILOVIC : [hors micro]

28 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Le P38 c'est -- enfin, il me

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1 semble en tout cas, un document qui semble être une conversation

2 téléphonique interceptée entre l'accusé et Ratko Mladic. C'est bien cela,

3 n'est-ce pas ?

4 Mme ISAILOVIC : [hors micro]

5 Mme EDGERTON : [interprétation] Nous aussi, pour nous c'est la P39. Nous

6 avons exactement les mêmes références que ma consœur.

7 [La Chambre de première instance se concerte]

8 Mme EDGERTON : [interprétation] Le document marqué comme P38 était le 2430,

9 donc la pièce 2430, et ce n'était pas une conversation téléphonique

10 interceptée.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.

12 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci, Messieurs les Juges.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Donc, les documents que vous

14 contestez sont le P38, P39 et P42; c'est bien cela, ou du moins, non, ce

15 sont ceux que vous acceptez, en revanche. C'est le P38, P39 et P42. Ce sont

16 les documents que vous acceptez ?

17 Mme EDGERTON : [interprétation] Avec confirmation de ma consœur, celles

18 qu'elle vient d'admettre, j'aimerais qu'on leur donne une cote définitive

19 et qu'on les verse au dossier.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pas de problème. Ils seront versés

21 au dossier maintenant.

22 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

23 M. LE GREFFIER : [interprétation] Les pièces suivantes, Messieurs les

24 Juges, sont versées au dossier : le document 65 ter 02430 marqué aux fins

25 d'identification comme P38 sera versé et aura la cote P38. Le document P595

26 marqué aux fins d'identification aura la cote P39, cote définitive. Le

27 document 65 ter 02493 marqué aux fins d'identification ayant la cote P42

28 aura maintenant la cote définitive P42.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maintenant, je souhaite évoquer ces

2 documents que vous n'acceptez pas et le fondement que vous avancez.

3 Mme ISAILOVIC : Monsieur le Président, j'ai déjà dit, il s'agit des

4 conversations interceptées dans lesquelles participait une personne dont le

5 nom je ne souhaiterais pas prononcer à -- peut-être à huis clos. Parce

6 qu'on a des indices graves sur cette personne --

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Si vous souhaitez --

8 Mme ISAILOVIC : Peut-être cela ne va pas s'éviter, parce qu'une fois

9 prononcée, ce nom, il serait clair de quelle conversation s'agit-il. Parce

10 que ces quatre conversations où cette personne était impliquée.

11 [La Chambre de première instance se concerte]

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Passons à huis clos partiel, et

13 veuillez les traiter un par un, s'il vous plaît.

14 Mme ISAILOVIC : La première conversation, accompagnée d'un transcript --

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que nous sommes à huis clos

16 partiel ?

17 M. LE GREFFIER : [interprétation] Pardonnez-moi, nous sommes maintenant à

18 huis clos partiel.

19 [Audience à huis clos partiel]

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13 Pages 507-512 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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1 (expurgé)

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3 [Audience publique]

4 Mme ISAILOVIC :

5 Q. Vous avez déjà abordé, je suppose, avec le Procureur, et maintenant il

6 s'agit d'un contre-interrogatoire sur les points abordés dans votre

7 déclaration, qui est une preuve pour nous devant cette Chambre. Je vais

8 vous poser quelques questions qui, toutes, rentrent dans le cadre de votre

9 déclaration, disons d'hier, mais elle ne date pas d'hier, elle date d'un

10 petit plus avant.

11 Je vais commencer par ce que vous dites dans votre curriculum vitae, qui

12 n'a pas beaucoup changé depuis votre déclaration, mais j'ai cru comprendre

13 qu'au moment de votre arrivée à Sarajevo, vous aviez déjà 19 ans

14 d'expérience militaire; est-ce que c'est vrai ?

15 R. C'est exact.

16 Q. Si j'ai raison, vous êtes arrivé à Sarajevo au mois de mai 1995 et vous

17 y êtes resté jusqu'au mois de juin 1996; est-ce exact ?

18 R. Jusqu'en mai 1996 --

19 Q. 1996 ?

20 R. Mai 1995 à mai 1996.

21 Q. Oui, mai, excusez-moi. Après, vous êtes resté dans le cadre de la

22 IFOR ?

23 R. C'est exact.

24 Q. C'est exact. Là, je voudrais vraiment succinctement aborder ce qui

25 était déjà dit, mais pour faciliter le travail de tout le monde, c'était

26 dans votre déclaration, et je demande à mon assistante, Mlle Jovanovic, de

27 nous montrer la pièce P27. C'est la déclaration de M. Fortin. Si on peut

28 voir, c'est le paragraphe 14 jusqu'au 14E. Mais rapidement, parce que je

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1 pense qu'on sera d'accord là-dessus, il s'agit des compétences du secteur

2 Sarajevo. Notamment, j'ai votre déclaration ici en anglais, mais je vais

3 essayer de lire soit en anglais peut-être, donc mon anglais et mon accent

4 est très mauvais.

5 [interprétation] -- "responsabilités du secteur, occuper le TEZ" --

6 [en français] -- d'exclusion totale en français, on le dirait; comme cela.

7 14A, oui, c'est bon. Après, vous avez --

8 [interprétation] "Maintenir les postes d'observation autour des trois zones

9 sûres, Sarajevo, Zepa et Gorazde, escorte des convois d'aide humanitaire à

10 Zepa et à Gorazde, monter la garde autour des WCP."

11 [en français] -- endroits de collection des armes lourdes. Est-ce que

12 c'est bien cela ?

13 R. C'est bien cela.

14 Q. [interprétation] Tâches pour les tireurs embusqués --

15 R. En gros, oui.

16 Q. Et dans le cadre de fonctions de compétence du secteur, vous avez eu

17 votre propre fonction, et là vous parlez dans votre déclaration, c'est

18 toujours le même document. Mais il faut voir maintenant les paragraphes 7 à

19 12. Là, 7 à 12. Oui, cela commence, oui.

20 Mais là ce qui m'intéresse surtout, vous dites :

21 [interprétation] "J'étais impliqué dans tout l'état-major exécutif, donc

22 accompagnais le commandant de secteur partout. Des réunions, des briefings,

23 des interviews avec les journalistes. Je prenais note de toutes les

24 réunions. J'offrais mes idées, mes conseils sur la situation ainsi que mes

25 impressions sur la situation, au commandant."

26 R. Oui, tout à fait.

27 Q. [en français] Je crois comprendre que vous avez accompagné le général

28 Gobilliard, qui était votre patron, si on peut le dire comme cela, partout.

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1 R. Presque partout et presque tout le temps, mais il y a eu des occasions

2 où je n'étais pas avec lui.

3 Q. Donc, c'était un travail où vous étiez vraiment lié au terrain, disons

4 au site de Sarajevo et des environnements; c'est bien cela ?

5 R. C'est bien cela.

6 Q. Vous dites dans le paragraphe 48 de ce même document -- c'est la page

7 10.

8 [interprétation] "Je suis arrivé à Sarajevo au cours du deuxième ou

9 troisième jour de l'offensive des Musulmans de Bosnie qui essayaient de

10 sortir de la ville."

11 [en français] Vous êtes arrivé à Sarajevo, selon vos dires, durant le

12 deuxième ou le troisième jour - vous n'étiez pas sûr - de l'offensive de

13 l'ABiH; c'est bien cela ?

14 R. C'est bien cela. C'est ce qu'on m'avait dit. Cela venait de

15 débuter, cette offensive.

16 Q. Est-ce que vous-même vous avez pu comprendre quand vous êtes

17 arrivé qu'il s'agissait bien des combats intenses ?

18 R. Tout à fait. D'ailleurs, il y avait beaucoup d'obus serbes qui

19 tombaient sur les hauteurs de Sarajevo à ce moment-là.

20 Q. Je suppose que lors de vos déplacements avec votre patron, général

21 Gobilliard, vous vous êtes familiarisé, je suppose, avec Sarajevo et ses

22 environnements ?

23 R. Surtout avec les postes d'observation et les endroits où on avait des

24 soldats des Nations Unies au début, par la suite, avec le reste de

25 Sarajevo.

26 Q. Est-ce qu'ils étaient bien, si j'ai bien compris, sur le territoire

27 contrôlé par les forces d'armée de Bosnie-Herzégovine et des unités de

28 l'armée de Republika Srpska ? Vous avez eu les postes sur deux

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1 territoires ?

2 R. En fait, les postes étaient sur la ligne, sur la limite entre les deux,

3 la ligne de confrontation.

4 Q. Donc maintenant, vous évoquez bien dans votre déclaration qu'on vient

5 de citer, et là je n'appelle pas sur l'écran, beaucoup de toponymes à

6 Sarajevo et aux environnements, pour citer quelques-uns, comme Debelo Brdo,

7 Nedzarici, Ilija; est-ce que c'est correct ?

8 R. Oui, c'est correct.

9 Q. Maintenant, je voudrais bien évoquer avec vous ces toponymes, notamment

10 ces toponymes.

11 Mme ISAILOVIC : Je demande qu'on mette à l'écran, mais à l'aide d'ELMO, la

12 carte que j'ai dans notre fameux recueil de cartes offertes par le

13 Procureur. C'est la carte, la deuxième qui est marquée. La deuxième qui est

14 marquée; la deuxième. Oui. Je ne vois pas sur mon écran.

15 Q. Vous voyez la carte. C'est la carte élaborée par la FORPRONU; vous êtes

16 d'accord ?

17 R. Oui. Cela ressemble à cela.

18 Q. Parce que là, c'est une carte offerte par nos confrères de

19 l'Accusation, et on voit bien qu'il est, disons pour moi, très confortable

20 pour se repérer, parce qu'elle a une ligne jaune. Est-ce que vous pouvez

21 expliquer qu'est-ce qu'elle représente ?

22 R. La ligne jaune représente le front bosniaque, et la ligne rouge le

23 front serbe.

24 Q. Ce sont ces deux fronts qui sont assez --

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce n'est pas le numéro 2. Ce n'est

26 pas la carte numéro 2, Madame Isailovic. Je crois que c'est le numéro 6.

27 Mme ISAILOVIC : Excusez-moi. Mais je n'ai pas -- parce que mon exemplaire

28 est là-bas.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez poursuivre. De toute

2 façon, c'est à l'écran.

3 Mme ISAILOVIC :

4 Q. Là, je voudrais bien voir avec vous quelques toponymes que vous,

5 d'ailleurs, mentionnez dans votre déclaration. Comme, par exemple -- est-ce

6 que je peux voir ? C'est quoi ? Je mets cela ? Oui, oui. Grbavica, est-ce

7 que vous pouvez nous montrer là Grbavica ?

8 R. Oui, c'est la zone bâtie au sud de Sarajevo ici.

9 Q. Oui. Et Nedzarici ?

10 R. Nedzarici ?

11 Q. Est-ce que, si on regarde ces deux endroits qui sont entourés de trois

12 côtés, disons, par -- il y a des lignes serbes et lignes de l'ABiH. Est-ce

13 qu'on pourrait éventuellement parler d'une sorte d'enclave, Nedzarici et

14 Grbavica, militairement parlé ? Quand vous voyez en tant que militaire un

15 territoire encerclé de trois côtés.

16 R. Disons, une enclave, c'est une zone où on ne peut pas sortir, et ce

17 n'est pas le cas dans ces deux zones-là. Ce sont plutôt des percées.

18 Q. Cela s'appelle des percées ?

19 R. Ce serait plus précis qu'enclave dans ce cas-là.

20 Q. Quelle est la caractéristique militaire d'une percée, s'il vous plaît ?

21 R. Comme je disais, contrairement à l'enclave d'où on ne peut pas sortir,

22 on est entouré, la percée, c'est une avancée --

23 Q. Par rapport à l'enclave ?

24 R. Oui, exactement. Mais ils ont une porte de sortie.

25 Q. Mais militairement parlé, est-ce que c'est une situation facile à tenir

26 militairement, disons pour les civils aussi ? Parce que vous pouvez me

27 confirmer, je suppose, que ce sont vraiment des sites densément peuplés ?

28 R. Ce n'est sûrement pas facile à tenir.

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1 Q. Merci. Sur cette carte, on peut voir aussi d'autres endroits que vous

2 mentionnez, et certains endroits que vous ne mentionnez pas, mais je

3 suppose que vous êtes familiarisé avec eux. Debelo Brdo, vous en parlez.

4 Est-ce que vous pouvez nous le montrer, s'il vous plaît.

5 R. Ici.

6 Q. Oui. Donc, il s'agit bien, si vous pouvez me confirmer, d'un mont d'une

7 hauteur 799 mètres. Est-ce que vous pouvez confirmer cela ?

8 R. Je peux confirmer que c'est une hauteur, effectivement, on avait un

9 poste d'observation là, mais pas l'altitude. Je ne me rappelle pas de

10 l'altitude.

11 Q. Oui. Est-ce que cela se situe derrière la ligne jaune sur le territoire

12 contrôlé par l'ABiH ?

13 R. Les postes d'observation qu'on avait étaient entre les deux lignes.

14 Pour ce qui est du site spécifique que vous appelez Debelo Brdo, je ne sais

15 pas exactement où il est.

16 Q. Est-ce que dans votre mémoire peut-être vous avez retenu quelle unité

17 tenait cette hauteur ?

18 R. Vous voulez dire serbe ou bosniaque ?

19 Q. Bon, si vous n'êtes pas sûr, on va passer. Est-ce que vous connaissez

20 peut-être une autre hauteur près de Debelo Brdo, mais plus à droite, donc

21 au nord-est sur cette carte, qui s'appelle Colina Kapa ?

22 R. Non. Cela --

23 Mme EDGERTON : [interprétation] Si je peux revenir un petit peu. Je suis

24 désolée pour l'interruption, mais si on peut en revenir à la page 21,

25 lignes 15 et 16. Il me semble que ma consoeur a demandé au témoin de dire

26 si c'était bien les Serbes ou les Bosniens. Il n'était pas sûr. Ensuite, ma

27 consoeur -- le témoin, il n'a pas été très clair. Le témoin n'a pas

28 vraiment répondu. Il faudrait peut-être reformuler la question afin d'être

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1 bien sûr.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Isailovic, vous avez bien

3 entendu cela ? Il faudrait reformuler la question à propos de qui détenait

4 ces points.

5 Mme ISAILOVIC : Je vais reposer la question.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez reposer la question,

7 s'il vous plaît.

8 Mme ISAILOVIC :

9 Q. Lieutenant-colonel, là peut-être on ne nous a -- j'ai cru comprendre

10 que j'ai compris, mais est-ce que vous pouvez re-répondre à ma question ?

11 Est-ce que vous êtes sûr quelle unité occupait cette hauteur qu'on nomme

12 Debelo Brdo, où vous aviez un poste d'observation ?

13 R. Non, je ne peux pas dire le point. Je ne sais pas le point spécifique

14 auquel vous vous référez, parce que le nom Debelo Brdo sur la carte s'étend

15 de part et d'autre des deux lignes, et je ne peux pas spécifier si le site

16 auquel vous vous référez était entre les mains serbes ou bosniaques. Par

17 contre --

18 Q. C'est ce que j'ai compris.

19 R. Par contre, je peux dire qu'on avait un poste d'observation français et

20 un poste d'observation russe sur ce site.

21 Q. Merci beaucoup. Donc, j'ai compris la même chose tout à l'heure. Je

22 pense que maintenant c'est clair. Il y avait une autre hauteur, c'était

23 Colina Kapa. Cela se situe au -- par rapport à Debelo Brdo, c'est au nord-

24 est. C'est un mont d'une hauteur de 966 mètres. Est-ce que vous vous

25 souvenez de ce mont ?

26 R. Non, je n'ai pas de souvenir de cet endroit.

27 Q. Merci. Est-ce que vous connaissez peut-être le mont Zuc, qui est marqué

28 ici --

Page 520

1 Mme ISAILOVIC : Peut-être si on peut bouger un petit peu la carte de

2 l'autre côté, oui, oui.

3 Q. C'est justement à votre écran, en haut, Zuc. Est-ce que vous voyez ?

4 R. Oui.

5 Q. Oui, c'est cela, c'est cela. C'est un mont qui est d'une hauteur de 830

6 mètres. Est-ce que vous souvenez de ce mont ?

7 R. Je me souviens du mont. Je me souviens qu'on avait une poste

8 d'observation, pas l'altitude exacte, non.

9 Q. Est-ce que vous souvenez -- là, vous voyez que c'est à l'intérieur de

10 la ligne jaune ? Vous pouvez me le confirmer ?

11 R. Effectivement.

12 Q. Ce mont était bien contrôlé par les unités de l'ABiH ?

13 R. C'est exact.

14 Q. Merci. Il y avait un autre mont qui n'est pas mentionné sur cette

15 carte. Ce mont, on le voit en premier quand on se rapproche de Sarajevo,

16 qui a la tour d'antenne de TV. C'est le mont Hum, cela s'écrit H-U-M. Vous

17 vous souvenez de ce mont ?

18 R. Oui, cela me dit quelque chose vaguement, mais --

19 Q. Quand on se rapproche de Sarajevo, vous voyez tout de suite un mont

20 avec l'antenne TV ?

21 R. Je suis arrivé par avion; je n'ai pas eu l'occasion d'arriver par la

22 route tellement souvent.

23 Q. Bon, mais si cela vous dit quelque chose. C'est un mont qui se trouve

24 juste à droite de Zuc et qui est d'une hauteur de 816 mètres. Peut-être

25 pouvez-vous vous souvenir plus facilement de Mojmilo, d'autant plus que

26 c'est un mont qui figure là sur notre carte, et maintenant c'est tout en

27 bas.

28 R. Hm-hm.

Page 521

1 Q. Au milieu et en bas. Oui. Donc, est-ce que vos souvenirs sont bons par

2 rapport à ce mont ?

3 R. Oui, on avait un poste d'observation là aussi, qui pouvait observer

4 l'aéroport notamment.

5 Q. Vous confirmez bien que ce mont se situait près de l'aéroport, disons

6 entre l'aéroport et ce mont se situait Dobrinja ?

7 R. Hm-hm, effectivement.

8 Q. C'est près de Nedzarici justement, et Dobrinja était le territoire

9 contrôlé par les unités de l'ABiH, y compris Mojmilo ?

10 R. C'est exact, y compris Mojmilo.

11 Q. --

12 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

13 Mme ISAILOVIC : Si vous voulez bien monter un petit peu jusqu'à ce que l'on

14 voie Igman, qui se situe à gauche, oui.

15 Mme EDGERTON : [interprétation] Peut-être que c'est la carte numéro 7.

16 C'est la carte numéro 7, Messieurs les Juges, je crois. Peut-être que ma

17 consoeur pourrait nous le dire, si c'est effectivement la carte numéro 7.

18 Mme ISAILOVIC : Trois ? D'après ce que j'entends de Mme l'Huissière, c'est

19 3. C'est la carte numéro 3. Vous l'avez maintenant sur ELMO.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

21 Mme ISAILOVIC :

22 Q. Lieutenant-colonel, avec cette autre carte qui nous montre un petit un

23 petit peu plus grand, on voit effectivement à gauche le mont Igman. Est-ce

24 que vous êtes d'accord que c'est la montagne qui un petit peu domine

25 Sarajevo ?

26 R. Du côté ouest, oui.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Laissez-le identifier ceci sur la

28 carte, s'il vous plaît, le mont Igman.

Page 522

1 LE TÉMOIN : [interprétation] --et à l'ouest.

2 Mme ISAILOVIC : On peut continuer.

3 Q. Vous pouvez confirmer que c'est la montagne la plus haute, à

4 l'exception de Bjelasnica qui est un petit peu plus loin.

5 R. Je ne peux pas confirmer de façon précise si c'est la plus haute

6 défensivement, qu'à l'ouest de la vallée où l'aéroport est situé, la petite

7 rivière ici, c'était une montagne très haute, très dominante.

8 Q. Merci. Là peut-être vous pouvez nous aider à identifier -- Mme

9 ISAILOVIC : Peut-être qu'on peut monter un petit peu plus la carte, oui.

10 Q. Là, si vous pouvez identifier au pied d'Igman une partie de Sarajevo

11 qui s'appelle Hrasnica. Est-ce que ce toponyme vous dit quelque chose ?

12 R. Oui, je me souviens bien du nom, mais l'endroit où il était situé, je

13 ne suis pas certain.

14 Q. Est-ce que vous pouvez sur cette carte, et par rapport à Igman, situer

15 Ilidza, peut-être ?

16 R. Je ne suis pas certain non plus.

17 Q. Lukavica ?

18 R. Lukavica, je ne suis pas certain.

19 Q. Est-ce que le nom de Lukavica vous dit quelque chose ? Vous avez eu à

20 traiter je pense avec cela.

21 R. Oui. C'était une baraque militaire, un baraquement occupé par les

22 Serbes. Puis c'est là où était l'officier de liaison du Sarajevo Romanija

23 Corps avec qui on faisait affaire régulièrement.

24 Q. Est-ce que peut-être vous vous souvenez : par rapport à quand vous vous

25 êtes déplacés, est-ce que vous ne vous êtes jamais rendus à Lukavica ?

26 R. Si, j'y suis allé à quelques reprises. J'avais l'habitude de naviguer

27 avec une carte qui avait plus de points de références, puis cela fait déjà

28 une douzaine d'années.

Page 523

1 Q. Est-ce que vous vous souvenez si vous voyiez Igman de Lukavica ?

2 R. Je ne sais pas.

3 Q. Merci. Au-dessous de l'aéroport, si vous pouvez me confirmer qu'il y

4 avait un tunnel au moment où vous étiez arrivé à Sarajevo ? Est-ce que vous

5 pouvez me confirmer cela ?

6 R. J'ai entendu parler du tunnel pendant un certain temps avant finalement

7 de voir une des embouchures du côté est. Je n'ai jamais pris le tunnel

8 comme tel. Je ne sais pas s'il débouchait vraiment jusqu'à l'autre côté.

9 Q. Mais vous avez entendu parler de ce tunnel ?

10 R. Oui.

11 Q. Est-ce que vous le connaissiez à l'époque ? Est-ce que vous souvenez de

12 cela, de sa fonction ? A quoi servait-il ?

13 R. Pas vraiment.

14 Q. On va passer à autre chose maintenant parce que du côté géographique,

15 on n'a pas pu avoir beaucoup d'éléments. C'était justement pour se situer

16 un petit peu dans cet environnement où vous étiez, durant une année entre

17 mai 1995 jusqu'au mai 1996. Dans votre déclaration, vous parlez de

18 certaines personnalités, et notamment --

19 Mme ISAILOVIC : Je vous demande, Mademoiselle Jovanovic, notre déclaration.

20 C'est la pièce sous cote P27. Si on peut y aller, c'est le paragraphe 40,

21 la page 8 de la déclaration.

22 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire qui était ce monsieur, dont le nom

23 n'est pas écrit correctement dans votre déclaration. On rencontre toujours

24 le même problème avec les noms slaves. En effet, ce monsieur, c'est le

25 paragraphe 40. Vous parlez de M. Aznadzic. En effet c'est M. Ajnadzic, donc

26 A-j-n-a-d-z-i-c.

27 Est-ce que vous vous souvenez de cet homme ?

28 R. Oui.

Page 524

1 Q. Qui était-il ?

2 R. Comme c'est écrit, il était le commandant du 1er Corps Bosniaque.

3 Q. Excusez-moi, je ne vous ai pas bien entendu. Il était commandant de --

4 R. Du Corps d'armée bosniaque.

5 Q. Oui, du 1er Corps, oui. Est-ce que vous avez eu des connaissances plus

6 précises sur ce 1er Corps de l'armée de Bosnie-Herzégovine ?

7 R. C'est le corps qui occupait Sarajevo.

8 Q. Est-ce que vous pouvez me confirmer que ce corps était constitué de

9 trois divisions ?

10 R. Je ne me rappelle pas du détail.

11 Q. Est-ce que vous avez entendu parler de la 12e Division du 1er Corps ?

12 R. Je ne me rappelle pas, non.

13 Q. Est-ce que vous vous souvenez peut-être d'une donnée sur ce 1er Corps

14 qui avait à peu près 75 000 soldats ?

15 R. Vous me surprenez. Je ne me rappelle pas de tels chiffres.

16 Mme ISAILOVIC : On a toujours notre carte, mais je demande la première,

17 s'il vous plaît.

18 Est-ce qu'on peut plus "focusser" sur la carte pour qu'on voie, non,

19 non, non, non, la moindre proportion pour qu'on voie la totalité de la

20 carte sur l'écran, s'il vous plaît. Oui, c'est cela.

21 Q. Tout à l'heure on a parlé de la ligne jaune. Vous m'avez dit que la

22 ligne jaune marque la ligne de limites des unités de l'ABiH.

23 R. C'est ce que j'ai dit, oui.

24 Q. C'est bien. Vous ne vous souvenez pas, mais on va en voir d'autres. Je

25 pense que ce n'est pas contentieux entre nous et le Procureur qu'il s'agit

26 bien de la 12e Division du 1er Corps qui se trouvait à l'intérieur de la

27 ligne jaune, avec 75 000 soldats qui n'étaient pas --

28 Mme EDGERTON : [aucune interprétation]

Page 525

1 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

2 Mme EDGERTON : [interprétation] Le lieutenant-colonel Fortin a déjà répondu

3 à la page 27, ligne 22. Il a dit qu'il ne se souvenait pas de cette 12e

4 Division du Corps. Je ne sais pas s'il peut répondre à ce type de question.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez poser une autre question,

6 s'il vous plaît.

7 Mme ISAILOVIC : Bon.

8 Q. Est-ce que vous vous souvenez qu'une des unités ou l'unité de 1er Corps

9 de l'armée de Bosnie-Herzégovine était située et fonctionnait militairement

10 dans les limites de lignes jaunes ?

11 R. Tout ce que je peux dire c'est qu'effectivement des éléments du 1er

12 Corps étaient situés à l'intérieur de la ligne jaune. L'individu qu'on a

13 rencontré à notre niveau, c'est-à-dire avec le général Gobilliard par la

14 suite, était le commandant du 1er Corps, le général Ajnadzic.

15 Q. Là mon argument est un petit peu maintenant différent. Maintenant qu'on

16 a vu qu'on a eu à l'intérieur de la ligne jaune des militaires, on a eu

17 tout un corps, le 1er Corps de l'ABiH, est-ce qu'on peut vraiment parler de

18 "safe area" quand on parle de cet intérieur de la ligne jaune ? Je vais

19 vous rappeler votre déclaration, c'est le paragraphe 14(b), on l'a déjà

20 évoqué parce qu'une des compétences de votre secteur était :

21 [interprétation] "Parmi vos responsabilités, vous deviez maintenir les

22 postes d'observation dans les zones de sécurité : Sarajevo, Zepa et

23 Gorazde."

24 Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Madame Edgerton.

26 Mme EDGERTON : [interprétation] Je crois qu'ici cela appelle des

27 conjectures de la part du témoin, à la page 29, ligne 5. Est-ce que nous

28 pouvons vraiment parler de cette zone protégée à l'intérieur de la ligne

Page 526

1 jaune ? Ce n'est pas une question à laquelle il peut répondre.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pourquoi pas ? C'est un homme qui

3 fait partie de l'armée. Je crois qu'il est tout à fait en mesure d'y

4 répondre. Je n'accepte pas votre argument.

5 Mme EDGERTON : [interprétation] Ecoutez, et c'est la façon dont la question

6 a été posée qui appelle la spéculation de la part du témoin. Comme le sait

7 cette Chambre et comme le savent les parties en présence ici que Sarajevo

8 ait été effectivement déclarée zone protégée en 1993 par les Nations Unies.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Telle n'est pas la question.

10 Vous pouvez répondre à la question, compte tenu de votre expérience,

11 Monsieur.

12 LE TÉMOIN : Pourriez-vous répéter la question ?

13 Mme ISAILOVIC :

14 Q. Je ne vais pas reprendre la totalité parce que cela va nous faire

15 perdre le temps. J'ai dit : est-ce qu'on peut bien parler de Sarajevo comme

16 "une des safe areas" proprement dite dans la mesure où à l'intérieur de

17 cette ligne jaune il y avait tout un corps ? Vous avez identifié cette

18 unité comme le 1er Corps de l'ABiH.

19 R. Pourquoi pas ? Ce sont les Nations Unies qui ont établi les "safe

20 areas," et puis les casques bleus étaient mandatés d'observer les lignes de

21 confrontation parce que c'est un conflit armé. Il y a deux parties qui sont

22 en conflit. Ce sont les Nations Unies qui mettent des forces en place pour

23 s'interposer et s'assurer de faire respecter les accords qui sont pris par

24 les deux, ou les trois parties dans certains cas.

25 Q. Si je vous dis que dans le sens la 4e Convention de Genève, je suppose

26 que l'armée canadienne aussi est préoccupée par son application, prévoit

27 les conditions pour qu'une zone puisse être la "safe area ?"

28 R. Je ne comprends pas votre question.

Page 527

1 Q. Il y a une convention de Genève, on est d'accord, qui prévoit les

2 conditions qui doivent être remplies pour qu'un territoire puisse être dans

3 le sens propre de mot, la zone de sécurité. Est-ce que vous êtes d'accord

4 avec moi qu'il existe bien une convention de Genève, et je pense que tous

5 les militaires de tous les pays s'occupent pas mal de ces conventions de

6 Genève ?

7 R. Je suis d'accord qu'il y a une convention de Genève et c'est vrai qu'on

8 se familiarise avec la convention, mais je n'en connais pas tous les

9 articles et je ne pourrais pas --

10 Q. Ce n'est pas grave, ce n'est pas grave, la Chambre connaît donc cette

11 convention.

12 [La Chambre de première instance se concerte]

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Isailovic, si je vous

14 ai bien compris, vous établissiez une différence entre la déclaration

15 formelle faite par les Nations Unies déclarant cette région, région

16 protégée, de savoir si la région était effectivement sûre ?

17 Mme ISAILOVIC : Vous avez raison, Monsieur le Président.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] J'aimerais que le liutenant-colonel

19 réponde à cette question car il doit être en mesure d'y répondre quelles

20 que soient les déclarations officielles.

21 Et sur la base de l'expérience que vous avez, et quelles que soient

22 les notions générales là-dessus, est-ce que c'était effectivement une zone

23 protégée ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que

25 c'était effectivement une zone protégée. Cette région avait été déclarée

26 comme telle, et on nous avait demandé d'agir dans ce sens ou sinon toute

27 cette région aurait été placée sous le contrôle serbe, et c'est justement

28 ce que les Nations Unies voulaient empêcher.

Page 528

1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous n'avez pas répondu à la

2 question, mais poursuivez, Maître Isailovic.

3 Mme ISAILOVIC : J'ai le document ici dans lequel on parle de "safe area",

4 et c'est un document qui, hier, a été admis comme document P21. Je vous

5 prie de le montrer. Ce n'est pas cela. Ce n'est pas cela. C'est le document

6 qui a le 65 ter, 2479.

7 Bon, ce n'est pas peut-être grave, parce qu'on a un document qui a

8 été accepté hier. J'ai cru noter le bon numéro hier pour cette occasion --

9 où le Général Smith -- il s'agit d'un mémorandum rédigé par le lieutenant-

10 colonel Fortin, et signé par lui, daté du 28 juin 1995. Donc, c'est la

11 réunion entre le général Smith et le colonel Meille du 28 juin 1995, 65

12 ter. Peut-être on peut nous aider, 2479. Donc, où effectivement, le général

13 Smith, après donc --

14 Mme EDGERTON : [interprétation] C'est la pièce P45. C'est ce que j'ai noté

15 hier.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie, Madame Edgerton.

17 Mme ISAILOVIC : C'est le deuxième paragraphe où effectivement le

18 général Smith -- [interprétation] Le général Smith pose des questions à

19 propos de la réaction à ces attaques.

20 [en français] Aujourd'hui, l'offensive et l'attaque contre le "télé

21 building" par l'armée de la Republika Srpska, il se demande --

22 [interprétation] si cela pourrait être perçu comme une riposte à l'attaque

23 de l'ABiH ou comme une simple violation de la zone protégée.

24 [en français] Justement, parce que vous n'avez pas pu nous répondre à

25 cette question de fait. Donc, s'il s'agissait de faits, d'une "safe area",

26 on va continuer.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Isailovic, je pense que nous

28 devons surtout faire une pause à l'heure actuelle. Puis-je vous demander

Page 529

1 encore combien de temps vous allez avoir besoin pour votre contre-

2 interrogatoire ?

3 Mme ISAILOVIC : Donc, je calcule le temps que j'ai déjà pris, et il me

4 semble une vingtaine de minutes ou peut-être j'ai tort. Donc, il me faudra

5 peut-être trois fois ce temps, disons une heure et 15 minutes. Je pense que

6 cela vous suffire.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je crois que vous avez passé bien

8 plus que 20 minutes déjà.

9 Mme ISAILOVIC : -- donc, surtout avec cette technique qui ne me marche pas

10 toujours.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vais en parler avec mes

12 collègues, mais, je vais devoir vous donner une limite de temps. Au vu des

13 circonstances, en tout cas, une chose est sûre, vous n'aurez pas 1 heure

14 20. Cela, c'est certain.

15 [La Chambre de première instance se concerte]

16 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

17 --- L'audience est suspendue à 15 heures 45.

18 --- L'audience est reprise à 16 heures 08.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez poursuivre, Madame

20 Isailovic.

21 Mme ISAILOVIC : On va passer tout de suite à un autre thème, et je demande

22 à mon assistante d'afficher le document 65 ter 2417.

23 Q. Est-ce que vous voyez ce document, Monsieur Lieutenant-colonel ?

24 R. Je ne sais pas si c'est le bon.

25 Q. Il s'agit d'un "weekly situation report," signé par M. David Harland.

26 Je vous demande d'aller à la page 2 et de lire le troisième paragraphe :

27 "Last Friday and Saturday, Bosnian troops attacked Serb positions all along

28 the confrontation line, attacking out of the city and into it from the

Page 530

1 southwest and north."

2 Après, il y a le paragraphe qui commence par : "By the end of the week, it

3 appeared that the Bosnians had made significant gains in only two areas: to

4 the north of the city in the Cemerska heights and to the south of the city

5 from the eastern slopes of Mount Igman."

6 A la fin -- presque à la fin :

7 [interprétation] "Les Serbes ont demandé aux Affaires civiles de leur

8 fournir 500 housses mortuaires, car ils s'attendaient à des victimes."

9 [en français] Est-ce que ce document prouve que vraiment il

10 s'agissait d'une offensive de l'ABiH très intensive ?

11 R. Oui.

12 Q. Est-ce que vous-même vous étiez témoin oculaire et de fait de cette

13 intensité ?

14 R. Oui, j'étais conscient que les Bosniaques tentaient de briser

15 l'encerclement de Sarajevo.

16 Mme ISAILOVIC : Je demande maintenant à mon assistante d'afficher le

17 document 65 ter 2503.

18 Q. Là, il s'agit aussi d'un "weekly situation report," rédigé par M. David

19 Harland, et on peut constater à la page 2 que -- et juste au début de la

20 page :

21 [interprétation] "Deux semaines avant de commencer l'offensive, il

22 semble que de peu de choses aient été obtenus."

23 [en français] Là, on est presque fin juin, et l'offensive continue.

24 Est-ce que vous pouvez le confirmer ? Je n'ai pas entendu.

25 R. Oui, oui.

26 Q. Maintenant, je vous demande juste de regarder ce document qui est à

27 votre écran, et peut-être je vais vous lire sur ce document que :

28 [interprétation] "Mercredi -- "

Page 531

1 [en français] Est-ce que vous voyez ?

2 [interprétation] "Les Musulmans de Bosnie ont essayé de lancer une

3 autre attaque pour sortir de la ville. L'attaque principale est venue de

4 l'ouest de la ville et se concentrait sur la zone de Nedzarici détenue par

5 les Serbes. Les endroits avoisinants, Stup et Rajlovac, ont aussi été

6 attaqués."

7 [en français] -- lire cela ?

8 R. Non, je ne vois pas le paragraphe en question.

9 Q. Est-ce que vous avez affiché --

10 R. Okay. Okay.

11 Q. Est-ce que vous voyez maintenant ? Est-ce exact ? Parce que dans votre

12 déclaration, et je demande là qu'on affiche la déclaration, paragraphes 65

13 -- 75 et 76.

14 R. Oui, c'est exact.

15 Q. Vous dites strictement la même chose. Vous dites :

16 [interprétation] "A 8 heures 30 le matin du 28 juin -- "

17 [en français] Dans votre déclaration --

18 [interprétation] -- "ont commencé à pilonner Stup et Nedzarici --"

19 [en français] C'est juste la partie où on a apporté la correction

20 hier.

21 R. Oui.

22 Q. Si on peut regarder maintenant la carte que vous avez déjà, et

23 voir peut-être où se situe Nedzarici.

24 R. [Le témoin s'exécute]

25 Mme ISAILOVIC : Est-ce qu'on peut avoir cette carte sur notre écran ? Peut-

26 être on peut serrer un petit peu l'image pour que ce soit -- oui, on

27 reproche.

28 Q. Est-ce que vous voyez maintenant Nedzarici ? Est-ce que vous pouvez

Page 532

1 montrer Nedzarici.

2 R. Oui, Nedzarici et Stup --

3 Q. Est-ce que vous pouvez montrer maintenant la PTT building où vous

4 étiez.

5 R. Oui. Ici.

6 Q. C'est assez proche, il me semble.

7 R. Oui.

8 Q. Est-ce que vous pouvez montrer aussi la TV building.

9 R. Oui, juste un peu à l'est de PTT.

10 Q. Maintenant, je voudrais bien aller sur le document qu'on a déjà vu,

11 c'est le document 65 ter 2053, et allez à la page 3. Là effectivement,

12 après le titre --

13 [interprétation] "Placement des armes bosniaques."

14 [en français] -- voir sur votre écran ?

15 R. Il faudrait baisser un peu le --

16 Q. Est-ce qu'on peut baisser -- baisser ce qu'il voit ?

17 R. Allez plus bas. Allez plus bas.

18 Q. Là, oui. Encore. Encore. Encore. Parce que c'est juste -- oui. Donc,

19 c'est juste après le sous-titre --

20 [interprétation] "Emplacement des armes bosniaques. Etant donné que

21 l'offensive des Musulmans de Bosnie a commencé il y a deux semaines, là un

22 grand nombre d'artilleries lourdes de l'armée de Bosnie est en opération

23 près des installations de la FORPRONU, et le nombre de ces armes a

24 augmenté."

25 [en français] Vous parlez aussi dans votre déclaration, dans le paragraphe

26 76 --

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Edgerton.

28 Mme EDGERTON : [interprétation] Messieurs les Juges, nous connaissons déjà

Page 533

1 bien le document, et j'aimerais soulever une objection pour ce qui est de

2 la référence à ce passage même du document. Cette extrapolation ne nous a

3 pas fait remarquer que le paragraphe qui porte sur ce sous-chapitre se

4 poursuit en fait et se conclut à la page suivante. Il n'y a pas que ce

5 paragraphe dans ce sous-chapitre, et je pense qu'il faudrait présenter tout

6 le passage au témoin afin qu'il ait la totalité du contexte.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je suis tout à fait d'accord avec

8 vous, en effet.

9 Avez-vous cela dans votre document ? Vous savez que cela continue à

10 la page suivante, ces deux passages continuent à la page suivante ?

11 Mme ISAILOVIC : [hors micro]

12 Mme EDGERTON : [interprétation] Et --

13 Mme ISAILOVIC : -- seulement, Monsieur le Président, là je ne suis pas

14 d'accord. Peut-être je veux autre chose parce que je continue avec la

15 déclaration de ce témoin, qui confirme strictement la même chose. Donc,

16 peut-être qu'on pourrait entendre cette partie de la déclaration, et après

17 vous allez voir mon argument.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien, très bien. Mais il faut

19 que toute la déclaration soit lue, tous les passages en entier quand même.

20 Mme ISAILOVIC :

21 Q. Maintenant, j'appelle votre attention sur le paragraphe 76. Là, vous

22 parlez :

23 [interprétation] "J'étais dans le bâtiment de PTT quand la roquette

24 est tombée sur le bâtiment de la télévision. L'explosion a été très forte.

25 Il y avait des mortiers des Musulmans de Bosnie dans les environs. Ils

26 étaient sur le terrain à environ 500 mètres derrière le bâtiment de la

27 télévision. L'armée des Musulmans de Bosnie mettait leurs mortiers où ils

28 le voulaient, dans l'hôpital Kosevo, au bâtiment des PTT."

Page 534

1 [en français] -- rapprocher ce qu'on a vu dans le rapport de M.

2 Harland, que l'ABiH pose les armes lourdes près des objets qui sont des

3 objets tenus par les positions tenues par la FORPRONU. Est-ce que c'est

4 cela le sens de ce que vous dites dans votre déclaration ?

5 R. Oui, oui, c'est ce que je voulais dire.

6 Q. Est-ce que peut-être sur votre carte, vous pouvez nous montrer

7 justement ces deux. Vous étiez dans le PTT building --

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Edgerton.

9 Mme EDGERTON : [interprétation] Avec tout le respect, je pense qu'on ne

10 peut pas faire de réconciliation avant que le témoin n'ait vu tout le

11 paragraphe -- enfin, tout le passage du document.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais de quel passage parlez-vous ?

13 Mme EDGERTON : [interprétation] Le paragraphe auquel mon éminente consoeur

14 fait référence est le paragraphe suivant. C'est tout d'abord en bas de la

15 page 3. C'est : "Emplacement des armes des Musulmans de Bosnie, un

16 problème." Cela, c'est la tête de chapitre -- enfin, du sous-chapitre.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quel est --

18 Mme EDGERTON : [aucune interprétation]

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce qu'il y a un numéro de

20 paragraphe sur ce document ?

21 Mme EDGERTON : [interprétation] Non. Malheureusement, les documents de M.

22 Harland n'ont pas été numérotés par paragraphe.

23 Mme ISAILOVIC : [hors micro]

24 Mme EDGERTON : [aucune interprétation]

25 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

26 Mme EDGERTON : [interprétation] Après le sous-titre : "Emplacement des

27 armes des Bosniaques est un problème. Sous ce sous-chapitre, page 3, vous

28 avez entendu, hier, M. Harland nous expliquer comment les rapports étaient

Page 535

1 structurés et organisés. La nouvelle tête de chapitre ne figure que plus

2 tard, à la page suivante. Il y a donc un paragraphe qui conclut le passage

3 dont nous avons vu uniquement le premier paragraphe. Je pense qu'il faut

4 absolument lire la totalité du chapitre au témoin afin qu'il puisse

5 remettre sa question dans le contexte.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Donc, il s'agit du paragraphe qui

7 commence par --

8 Mme EDGERTON : [interprétation] Cela commence à la page suivante et cela

9 commence par les mots "either way." "Il y a une augmentation du nombre

10 d'obus serbes atteignant les cibles de la FORPRONU. Le secteur ne considère

11 pas que ce soit en fait une riposte de la part des Serbes, mais des cibles

12 qui sont visées directement."

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous voulez que cela soit présenté

14 au témoin. En effet. Vous pourrez le faire lors des questions

15 supplémentaires de toute façon, mais je vais quand même lui présenter les

16 passages.

17 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui. Merci, Monsieur le Président.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La question est de savoir s'il peut

19 y avoir ensuite réconciliation une fois que le témoin aura lu la totalité

20 du passage.

21 Lieutenant-colonel, le passage auquel l'Accusation fait référence dit la

22 chose suivante : "Il y a eu un nombre de plus en plus important d'obus

23 serbes qui atteignent des cibles de la FORPRONU. Le secteur ne considère

24 pas qu'il s'agit d'une riposte de la part de Serbes, mais plutôt de tirs

25 visant directement l'objectif."

26 Maintenant que vous avez eu la fin du passage, quelle serait la

27 réponse que vous donneriez à Mme Isailovic ?

28 LE TÉMOIN : Comme je l'ai dit, l'armée de Bosnie avait mis beaucoup de

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1 mortiers. Ils étaient près d'établissements comme les PTT, comme la

2 télévision, mais c'était lors de l'offensive du printemps, pour essayer de

3 sortir de Sarajevo. Ils tiraient depuis nombreuses positions. Ils avaient

4 des mortiers un peu partout. Il y avait des mortiers qui tiraient plusieurs

5 obus d'une position, ensuite on les déplaçait pour les mettre ailleurs.

6 Donc, il est vrai qu'ils mettaient leurs mortiers un peu partout, mais je

7 pense vraiment que la riposte serbe, qui était la plupart du temps très

8 précise, je pense quand ils ont tiré sur des établissements, quand ils ont

9 atteint les établissements des Nations Unies, c'est parce qu'ils les

10 visaient.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.

12 M. LE JUGE MINDUA : Lieutenant, lorsque nous considérons le paragraphe 76

13 de votre déclaration, qui était à l'origine de la roquette qui est tombée

14 sur le PTT building ? Est-ce que vous le savez ?

15 LE TÉMOIN : Il était d'origine -- il arrivait --

16 M. LE JUGE MINDUA : La question que je voudrais poser par rapport à notre

17 acte d'accusation, est-ce que selon votre expérience sur le terrain,

18 c'était dû au fait qu'il y avait des armes bosniaques qui étaient dans les

19 environs et donc les forces serbes voulaient viser les armes bosniaques ou

20 c'était un tir délibéré sur le bâtiment de la télévision qui a occasionné

21 32 personnes blessées ?

22 LE TÉMOIN : Selon moi, c'était un tir délibéré. Sur le bâtiment en

23 question.

24 M. LE JUGE MINDUA : Merci.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Isailovic, vous pouvez

26 poursuivre.

27 Mme ISAILOVIC : Est-ce que je peux poser une question concernant le temps

28 qui m'était accordé ? Est-ce qu'on peut déduire ces dix minutes qu'on a

Page 537

1 eues pour les remarques ? Parce que vraiment je m'efforce à aborder toutes

2 les questions importantes.

3 [La Chambre de première instance se concerte]

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous avez encore 25 minutes.

5 Mme ISAILOVIC :

6 Q. Je vais continuer. Justement, j'ai voulu plutôt savoir pas quelle est

7 votre maintenant appréciation de tout cela, mais justement, est-ce qu'il

8 peut s'agir de ces mêmes - et vous l'avez déjà dit - de ces mêmes armes

9 lourdes dont vous parliez dans le paragraphe 76 dans votre déclaration, que

10 mentionne aussi M. David Harland, dans le peu importe toutes les autres

11 conséquences ?

12 R. C'est plus que probable, oui.

13 Q. Merci beaucoup, Monsieur. On a vu sur cette carte que vraiment tout

14 cela, Nedzarici, est-ce que peut-être Rajlovac aussi, vous connaissez ce

15 toponyme, Rajlovac ? Est-ce que cela vous dit quelque chose ?

16 R. Oui, oui.

17 Q. Est-ce qu'à votre avis c'est proche de PTT building et TV building ?

18 R. C'est à quelques kilomètres quand même.

19 Q. Oui. Vous saviez à l'époque peut-être que ce sont aussi des sites très

20 densément peuplés. Ce sont aussi des parties de ville, Nedzarici et

21 Rajlovac, parties de Sarajevo.

22 R. Rajlovac, je ne pourrais pas dire si c'était densément peuplé, mais

23 Nedzarici, je ne crois pas. Je ne crois pas que cela l'était au moment de

24 ces combats-là.

25 Q. Donc, vous croyez que Nedzarici, il n'y avait pas beaucoup de civils à

26 l'époque à Nedzarici ?

27 R. Pas au moment de la période qu'on examine, de juin 1995, non.

28 Q. Vous croyez que ces gens sont partis quelque part ?

Page 538

1 R. Oui.

2 Q. Merci. Maintenant, est-ce que -- et déjà M. le Juge Mindua vous a posé

3 une question qui va dans ce sens. Vous avez dit que vous croyiez que

4 c'était un tir de bombardement, un tir délibéré, mais quand même, est-ce

5 qu'en tant que militaire vous pouvez nous confirmer qu'il s'agissait

6 d'échanges de tirs, c'est-à-dire des combats entre les deux belligérants,

7 peu importe l'intensité de réponse donc la proportionnalité ? En fait est-

8 ce qu'il s'agissait des échanges ?

9 R. Oui, il y avait des échanges un peu partout parce qu'il y avait des

10 combats un peu partout autour de Sarajevo, oui.

11 Q. Oui mais, à cette époque, on a vu tout à l'heure de ce qu'on parlait à

12 8 heures 30, qu'il y avait une attaque contre Nedzarici et Rajlovac et à 9

13 heures on a eu cette bombe qui est tombée sur TV Building. Est-ce qu'on

14 pourrait militairement parler des échanges d'un combat, peu importe

15 l'intensité et la proportionnalité ?

16 R. Oui, on peut parler d'échange mais on ne peut pas vraiment faire le

17 lien avec le "targetting specific" des différents endroits.

18 Q. Merci. Vous avez parlé beaucoup aussi d'un problème qui a surgi --

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Une question, s'il vous plaît,

20 Madame Isailovic.

21 Pourriez-vous dire s'il vous plaît, Monsieur le Témoin, pourquoi vous

22 dites que le bâtiment de la télévision a été ciblé délibérément ? Pouvez-

23 vous étayer cela ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] D'après nos estimations, Monsieur le

25 Président, si je me souviens bien, on en a parlé entre nous au QG de

26 Sarajevo. On en a conclu qu'il s'agissait d'un ciblage direct puisque

27 d'ordinaire les tirs indirects des Serbes étaient assez précis.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui --

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1 Mme ISAILOVIC : Je peux continuer.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

3 Mme ISAILOVIC :

4 Q. Peut-être cela m'inspire une autre question. Est-ce que, parce que vous

5 parliez des armes lourdes posées un petit peu partout dans ce territoire

6 limité autour de PTT Building TV, dans vos connaissances, et vous parlez

7 même des mortiers autour, 500 mètres, vous dites dans votre déclaration

8 dans de -- Est-ce que peut-être vous pouvez nous montrer sur la carte la

9 position de ces mortiers, à peu près, parce que là vous avez le TV Building

10 et PTT building.

11 R. Le TV Building est ici sur la route.

12 Q. Hm-hm, oui.

13 R. Puis le champ derrière, environ 500 mètres, c'est là où il y avait des

14 mortiers pour une période de temps.

15 Q. Il y a une petite rivière. De quel côté de cette rivière ?

16 R. Du côté nord.

17 Q. Quand on dépasse par rapport au TV Building, on dépasse la rivière.

18 R. Hm-hm.

19 Q. Là on le voit, et je le sais par expérience que Bojako Potok c'est un

20 territoire densément peuplé, il y a des maisons.

21 R. Oui, juste immédiatement au nord, un peu plus loin, il y a de la place.

22 Selon mon souvenir, c'est là où ils étaient.

23 Q. Hm-hm. Est-ce que quand on met en position des armes lourdes, est-ce

24 que cela change en quelque sorte le caractère civil d'un objet ?

25 R. Je ne comprends pas la question.

26 Q. Parce qu'on peut avoir des objets militaires, des objets de caractère

27 civil, par exemple, un hôpital qui est un objet civil militairement parlé

28 ou par exemple TV Building ou PTT Building. Quand on positionne à proximité

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1 ou même à l'intérieur les armes, militairement parlant, qu'est-ce qui se

2 passe ? Est-ce que cela devient un objet civil ou non ?

3 R. Je ne crois pas que cela change la nature des objets ou des endroits.

4 Effectivement, si on veut lancer ces armes-là, on tombe dans le dilemme

5 éternel des dommages collatéraux.

6 Q. Bon. Merci, Monsieur le Lieutenant-colonel.On doit passer à autre chose

7 parce qu'on a parlé pas mal de cette malheureuse crise d'otages entre

8 l'armée de Republika Srpska et la FORPRONU. Vous étiez participant vraiment

9 dans tout ce qui s'est passé. Est-ce que vous pouvez me confirmer que cette

10 crise d'otages ou la prise d'otages a eu lieu après les bombardements de

11 l'OTAN des territoires contrôlés par l'armée de Republika Srpska, qui ont

12 eu lieu le 25 et le 26 mai 1995 ?

13 R. Oui, selon mon souvenir, oui, c'était tout de suite après.

14 Q. Hm-hm. Monsieur Harland, dans un document 65 ter 103, page 2, vraiment

15 si on peut le trouver rapidement, il nous parle de [interprétation]

16 "représailles des frappes aériennes de l'OTAN."

17 Mme EDGERTON : [interprétation] Pourrions-nous, s'il vous plaît, attendre

18 que le document s'affiche avant de poser la question ?

19 Mme ISAILOVIC : C'est la page 2.

20 Q. Dans votre déclaration, avant de voir ce que dit M. Harland.

21 Mme ISAILOVIC : Est-ce qu'on a le document ? Non.

22 Q. Vous dites dans votre déclaration peut-être vous allez vous souvenir

23 sans la voir, donc : Général Mladic a dit au général Janvier que la prise

24 d'otages est en rapport de cause à effet avec les bombardements de l'OTAN.

25 Il va relâcher les otages une fois que les bombardements cessent. Est-ce

26 que vous vous souvenez de cette partie de votre déclaration ?

27 R. Non, il faudrait que je la revoie.

28 Q. On la voit. Maintenant on a le rapport de M. Harland donc "the hostage

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1 crisis continues into--" Vous voyez la deuxième phrase. Il relie cette

2 prise d'otages, il la caractérise comme une riposte aux bombardements de

3 l'OTAN.

4 Maintenant, on passe à votre déclaration, paragraphe 65 et c'est la page

5 12.

6 Vous voyez ce document ? Le paragraphe 65 : "Le général Smith nous a dit

7 que le général Janvier s'était entretenu avec le général Mladic. Mladic,

8 semble-t-il, aurait dit que les otages étaient des prisonniers de guerre et

9 qu'il n'en libérait aucun jusqu'au jour où il y aurait des garanties par

10 écrit qu'il n'y aurait pu de frappes aériennes par l'OTAN."

11 -- général Smith --

12 R. Pardon avec l'interprétation là j'ai --

13 Q. Est-ce que vous avez entendu cela du général Smith ? Vous avez dit que

14 le général Janvier a parlé avec le général Mladic et il a mis un rapport

15 sur la prise d'otages et les bombardements de l'OTAN ?

16 R. Oui, le général Smith nous a rapporté cette conversation-là.

17 Q. Est-ce que vous pouvez nous confirmer que les bombardements de l'OTAN

18 étaient une mesure "punitive" contre l'armée de Republika Srpska ?

19 R. "Punitive," il faudrait peut-être définir de quel ordre c'était pour

20 tenter de mettre en vigueur les accords qui avaient été brisés, de

21 restaurer le --

22 Q. Oui, on a votre déclaration. Maintenant, c'est le paragraphe 33.

23 Vous dites, parce que vous parlez là des ultimatums que vous aviez

24 rédigés dans le cadre de votre fonction au sein du secteur. Donc, vous

25 dites : [interprétation] "Vers le 20 mai, lorsque les Serbes de Bosnie ont

26 commencé à utiliser des armes, nous avons écrit des lettres. Une des

27 lettres que j'ai écrite c'était un ultimatum pour qu'ils nous rendent les

28 armes dans la zone ou sinon, nous allions bombarder. Ils n'ont pas cessé,

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1 donc nous avons bombardé."

2 [en français] Est-ce que vous confirmez cela ?

3 R. Oui.

4 Q. Oui, il faut dire quelque chose pour le transcript, parce que si on ne

5 dit rien, on voit rien.

6 R. D'accord.

7 Q. Est-ce qu'on peut dire -- et on peut le lire dans le paragraphe 49 de

8 votre déclaration que : ["En réponse des attaques de l'armée bosniaque --"

9 [interprétation] "-- les Serbes de Bosnie ont commencé à tirer, en

10 utilisant les armes qui avaient été rassemblés dans les points de collecte

11 des armes en question."

12 R. Oui, c'est ce que j'ai écrit.

13 Q. Est-ce qu'à votre connaissance, l'OTAN n'avait jamais bombardé les

14 unités de l'ABiH ?

15 R. Non, je ne crois pas.

16 Q. Non. Est-ce qu'on peut dire que l'infraction commise par l'armée de

17 Republika Srpska était de répondre aux attaques de l'ABiH par aussi des

18 armes lourdes et d'utiliser les armes lourdes qui étaient gardées par la

19 FORPRONU ? Est-ce que c'était cela, l'infraction ?

20 R. Pouvez-vous reformuler la question ?

21 Q. Est-ce que l'armée de Republika Srpska avait commis cette infraction

22 d'avoir pris les armes lourdes gardées par la FORPRONU ?

23 R. Oui.

24 Q. Pour cette utilisation, ils étaient punis par les bombardements de

25 l'OTAN ?

26 R. C'est exact.

27 Mme ISAILOVIC : Maintenant, si on peut voir le document 65 ter 2364.

28 Q. C'est aussi une "weekly situation report" du 19 mai de M. David

Page 543

1 Harland. Ce rapport a été rédigé avant que les bombardements ne commencent.

2 Les bombardements de l'OTAN ont commencé le 25 et le 26 mai. Donc, il nous

3 dit dans ce rapport --

4 R. Je ne l'ai pas encore.

5 Q. Hm-hm, C'est la page 2. C'est le premier paragraphe au-dessous de :

6 "Fighting around the city."

7 [interprétation] "Deux parties ont commencé à utiliser les armes lourdes

8 dont ils disposent autour de la ville."

9 [en français] Dans le troisième paragraphe à la fin :

10 [interprétation] "Les deux côtés ont utilisé des armes lourdes,

11 reprenant les armes qui avaient été collectés dans les centres de collecte

12 des armes de ces --"

13 "Les combats étaient intenses et la plupart des armes lourdes étaient

14 dirigées vers les lignes de confrontation."

15 [en français] C'est bien cela ?

16 R. Oui, j'aimerais qu'on revienne au début de cette page.

17 Q. Au début de cette page. Donc : "Fighting --" parce que ce rapport se

18 situe avant les bombardements. C'est la situation précédait ce qui s'est

19 passé après. M. Harland rapporte l'utilisation des armes lourdes par les

20 deux parties. Je veux que vous me confirmiez que seulement une partie a été

21 punie par l'OTAN.

22 R. Oui.

23 Q. Merci. Je voudrais aborder, parce qu'il ne me reste pas beaucoup de

24 temps, juste une question de zone protégée -- pardon, zone d'exclusion

25 totale d'armes lourdes, et la question d'Igman. On peut voir au paragraphe

26 14(a) de votre déclaration que vous parlez de la structure et des

27 compétences de secteur Sarajevo dont vous étiez le membre. C'est 14(a),

28 notamment, "occupying the TEZ." Est-ce que vous pouvez expliquer un petit

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1 peu le système de ces zones de protection ? Je crois que vous êtes

2 spécialiste.

3 R. Il faudrait que vous soyez plus spécifique. Il faudrait que votre

4 question soit plus spécifique.

5 Q. Quel était le principe même de ces zones, que le secteur occupait ? Il

6 a dû occuper les zones d'exclusion totale. C'est quoi la notion ? Qu'est-ce

7 qu'on pourrait dire de ces zones d'exclusion totale ? Quelle était leur

8 nature ?

9 R. La nature première, c'était d'assurer la protection des populations en

10 évitant que des combats aient lieu à l'intérieur de ces zones-là ou que des

11 explosions de munitions soient dérivées à l'intérieur de ces zones-là.

12 Q. Hm-hm, l'idée était d'exclure les combats de ces zones; c'est cela ?

13 R. Et d'exclure les armes lourdes principalement.

14 Q. Principalement les armes lourdes. Parmi ces zones figurait notamment

15 Igman et la route d'Igman. Est-ce vrai ?

16 R. Oui, c'est vrai.

17 Q. Est-ce que vous pouvez me le confirmer ? Cela sort un petit peu de la

18 période pour laquelle vous étiez à Sarajevo, mais à partir d'août 1993, ce

19 système de zone d'exclusion totale fonctionnait.

20 R. Je ne suis pas tellement familier avec cette période-là. Evidemment,

21 c'était avant mon arrivée.

22 Q. De toute façon, c'était avant votre arrivée. Est-ce que j'ai raison

23 d'avancer que les belligérants, les deux côtés, n'étaient pas autorisés d'y

24 être ?

25 R. Comme il était dit plus tôt, ce concept-là de zone d'exclusion totale

26 s'est effondré peu de temps avant mon arrivée. Je ne me souviens --

27 Q. Je vous demande comme --

28 R. Je ne me souviens pas très bien de toutes les formalités du concept --

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1 Q. Oui, tout à --

2 R. -- parce qu'il s'est effondré peu de temps après mon arrivée.

3 Q. Non, parce que tout à l'heure, on a parlé des "safe areas" qui se sont

4 effondrés aussi après. On a un autre concept pour lequel la FORPRONU a été

5 désignée. Le concept s'effondrait, mais strictement parlant, le concept

6 était que les belligérants n'ont pas d'accès dans ces zones. Est-ce que

7 c'est bien cela ?

8 R. Comme je le disais plus tôt, pas d'armes lourdes et d'essayer d'éviter

9 les combats dans ces zones-là. Au au-delà de cela, je ne me rappelle pas.

10 Q. Pourtant, il ressort de votre déclaration, donc seulement rapporter ce

11 qui s'est passé, et à cette époque, à la lecture, il ressort quand même que

12 l'ABiH était présente dans ces zones, notamment à Igman et la route

13 d'Igman.

14 R. Oui, c'est le cas.

15 Q. Est-ce que vous pouvez me confirmer qu'ils ont utilisé cette zone pour

16 des buts militaires; pour le transport de militaires, des armes. Est-ce que

17 c'était le cas ?

18 R. Je ne peux pas vous le confirmer. Je ne l'ai pas vu. Principalement, ce

19 qui circulait là, à ma connaissance, ce sont les convois

20 d'approvisionnement pour la ville, dont les convois du UNHCR, les convois

21 de la FORPRONU, et il y avait aussi des convois civils bosniaques pour

22 réapprovisionner la ville. Je n'ai pas vu de convois militaires ou

23 d'armements bosniaques dans cette zone-là.

24 Q. Dans votre déclaration, dans le paragraphe 72, est-ce que vous pouvez

25 voir :

26 [interprétation] "Nous avions des problèmes de circulation." Vous

27 m'avez parlé même de bouchons sur le mont Igman, et vous dites que : "les

28 Musulmans de Bosnie montaient et descendaient le long de la route."

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1 R. [aucune interprétation]

2 Q. -- empêchaient un petit peu la FORPRONU d'utiliser cette zone qui lui

3 était décernée ?

4 R. En fait, la FORPRONU aurait dû pouvoir utiliser d'autres zones, la

5 route Swan [phon], l'aéroport notamment, et puis cela on en été empêché par

6 les Serbes. Mais effectivement, il y avait du trafic bosniaque sur la route

7 d'Igman.

8 Q. Si on peut aller un petit peu loin, c'est la page suivante. C'est le

9 paragraphe 68. Là, vous parlez d'un certain Hajrulahovic. Est-ce que vous

10 pouvez déjà nous dire qui est cet homme ?

11 R. Je me souviens du nom, mais je ne me rappelle pas sa fonction.

12 Q. A quelle unité il appartenait ?

13 R. C'était un militaire bosniaque.

14 Q. Bosniaque, oui. Là, si je peux reprendre vos mots :

15 [interprétation] "En juin 19 -- le 29 juin, [imperceptible] a

16 rapporté que Hajrulahovic lui avait dit que les mouvements dans le secteur

17 sur Igman étaient acceptables.

18 [en français] Ai-je raison de dire que M. Hajrulahovic avance un

19 petit plus d'autorité qu'il n'aurait dû avoir sur la zone occupée par la

20 FORPRONU ?

21 R. C'est ce qu'il aurait voulu --

22 Mme EDGERTON : [interprétation] Je crois que le témoin n'est pas en mesure

23 de répondre.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je souhaite entendre votre

25 objection.

26 Mme EDGERTON : [interprétation] Il a déjà dit à la page 51, lignes 21 à 24,

27 qu'il ne se souvenait pas quel était le poste qu'occupait M. Hajrulahovic.

28 Donc, je ne pense pas que le témoin, étant donné qu'il ne connaît pas cet

Page 548

1 homme et qu'il ne connaît pas le poste de cet homme, quelle était son

2 autorité, je pense qu'il n'est pas en mesure de répondre à la question.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Veuillez poser une autre

4 question, Maître Isailovic, s'il vous plaît.

5 Mme ISAILOVIC : Pour éclaircir. Moi, il ne m'intéresse pas le grade de M.

6 Hajrulahovic, mais son appartenance, et le témoin a répondu. Il a dit c'est

7 quelqu'un -- et ma question était, je peux la reformuler, mais je ne sais

8 pas dans quel sens. Est-ce qu'au sens du témoin, donc je lui demande son

9 opinion là-dessus, est-ce que M. Hajrulahovic, n'importe quel grade il

10 occupait à l'armée, mais qu'il n'était pas de la FORPRONU, "maître," qui

11 occupait ses zones, notamment Igman. Parce que là on ne voit que ce M.

12 Hajrulahovic qui crée l'emploi de la montagne, donc c'est lui qui fait

13 l'ordre là où il ne devait pas être présent. C'était cela ma question, donc

14 son opinion.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Témoin, est-ce que vous

16 pouvez répondre à cette question, s'il vous plaît.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux vous dire. Je l'ai écrit dans ma

18 déclaration. Ce représentant bosniaque a dit qu'il avait voulu limiter les

19 mouvements de la Force de réaction rapide sur Igman. Mais dans les faits,

20 ce n'est pas cela qui s'est passé. C'est la FORPRONU et la Force de la

21 réaction rapide qui a décidé d'utiliser Igman.

22 Mme ISAILOVIC :

23 Q. Merci. Là aussi, dans votre déclaration, dans le paragraphe 81, vous

24 rapportez l'entretien entre général Nicolai. Si je comprends bien, c'était

25 le chef, le "chief of staff" de M. Smith; c'est cela ?

26 R. C'est cela.

27 Q. Donc, il a eu la conversation avec M. Muratovic. Est-ce que c'est un

28 personnage du côté bosniaque ou serbe ?

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1 R. M. Muratovic était un --

2 Mme EDGERTON : [interprétation] Je suis désolée d'interrompre à nouveau,

3 mais je vois qu'il y a référence au paragraphe 91 sur le compte rendu. Or,

4 ce n'est pas le 91 puisqu'il a été expurgé. Donc, il s'agit --

5 Mme ISAILOVIC : [hors micro]

6 Mme EDGERTON : [interprétation] Donc, ce n'est pas le paragraphe 81. Non,

7 non, non. Très bien. J'ai compris, 81.

8 Mme ISAILOVIC : Mais le témoin a eu la bonne page.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La bonne référence est 81.

10 Mme ISAILOVIC :

11 Q. M. Muratovic, vous nous dites c'est un personnage du côté de l'ABiH

12 aussi ?

13 R. Non, c'est un civil bosniaque.

14 Q. C'est un civil. Et M. Nicolai, qui est un très haut placé de la

15 FORPRONU, il s'est entretenu avec M. Muratovic, qui est civil de Bosnie-

16 Herzégovine, sur l'utilisation de cette zone. Cela, c'est occupé par la

17 FORPRONU, c'est cela ?

18 R. Laissez-moi relire.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous n'avez plus beaucoup de temps,

20 Madame Isailovic. Je tiens juste à vous le faire remarquer.

21 LE TÉMOIN : Ce que je peux dire là-dessus, c'est que les Bosniaques encore

22 une fois ont exprimé ce souhait-là, mais un peu plus bas, je laisse

23 entendre que cela ne s'est pas résolu exactement comme ils l'auraient

24 voulu.

25 Mme ISAILOVIC :

26 Q. Mais ils continuaient à utiliser quand même Igman et route d'Igman.

27 Est-ce que vous pouvez confirmer cela ?

28 R. Oui.

Page 550

1 Q. Merci beaucoup, Monsieur Lieutenant-colonel Fortin.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Madame Isailovic.

3 Madame Edgerton, c'est à vous.

4 Nouvel interrogatoire par Mme Edgerton :

5 Q. [interprétation] Si je puis rapidement poser quelques questions

6 supplémentaires. Deux tout d'abord, qui portent sur votre témoignage. Il

7 s'agit ici de la page 43, à peu près au début des lignes 6, 7 et 8. Puisque

8 vous parlez de mortiers, puis d'armes lourdes et de mortiers lourds qui se

9 trouveraient près du bâtiment des PTT. Voici ma question : pourriez-vous

10 clarifier pour la Chambre de quelle arme exactement il s'agit, à votre

11 connaissance ? Quelles étaient ces armes que les Musulmans de Bosnie

12 avaient placées autour du bâtiment des PTT à l'époque de l'attaque ?

13 R. Si je me souviens bien, c'étaient des mortiers de 82 millimètres.

14 Q. Avez-vous eu un peu d'instruction à l'artillerie au cours de

15 votre carrière ?

16 R. Oui, oui. J'ai suivi un cours d'artillerie.

17 Q. Pouvez-vous nous dire si un mortier d'artillerie de 82 est une arme

18 lourde ?

19 R. Il s'agit d'un mortier léger. Mais pour ce qui est des zones

20 d'exclusion, toute arme de tir indirect était comprise dans la liste

21 d'armes lourdes, pour ce qui est de Sarajevo en tout cas.

22 Q. Lorsque vous répondiez aux questions relatives au bâtiment des PTT,

23 vous avez parlé de ciblage direct du bâtiment des PTT. Alors, j'aimerais

24 obtenir une aide supplémentaire de votre part. A votre avis personnel,

25 puisque vous étiez présent, à votre avis, est-ce que les Serbes de Bosnie

26 prenaient pour cible le bâtiment des PTT avec leurs mortiers ?

27 R. Je dirais que les Serbes étaient en général très précis avec leurs

28 mortiers. Ce jour-là, nous avons subi trois tirs de mortiers, deux qui

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1 visaient directement le bâtiment et un qui a touché le parking. La distance

2 la plus importante pour ces tirs était sans doute de 30 mètres, ce qui

3 constitue un tir assez précis. C'est la raison pour laquelle je dis qu'ils

4 visaient précisément le bâtiment des PTT.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ces mortiers où se trouvaient-ils

6 par rapport au bâtiment ? Est-ce qu'ils étaient exactement derrière le

7 bâtiment ou est-ce qu'ils étaient sur le côté du bâtiment ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Les mortiers des Musulmans de Bosnie étaient

9 au nord du bâtiment, c'est-à-dire à quelques centaines de mètres au nord.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Les tirs venaient d'où, de l'avant

11 ou de l'arrière ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois que les tirs provenaient de Lukavica,

13 mais je n'en suis pas sûr. Si c'était bien Lukavica, alors ils venaient de

14 l'arrière du bâtiment, Monsieur le Président.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que les mortiers étaient

16 immédiatement derrière le bâtiment ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] A quelques centaines de mètres, Monsieur le

18 Président.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] A quelques centaines de mètres

20 derrière ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

22 Mme EDGERTON : [interprétation] Une autre question portait sur les

23 incidents survenus à peu près à ce moment-là. Je veux parler du pilonnage

24 du bâtiment de la télévision et du bâtiment des PTT, et j'aimerais

25 soumettre au témoin un document que l'on devrait afficher sur les écrans.

26 C'est déjà une pièce à conviction, la pièce P18, dont je demande la

27 présentation. Je vois maintenant la version serbo-croate du texte à

28 l'écran, et je suppose que la version anglaise de ce document sera affichée

Page 552

1 ensuite. Ah, merci beaucoup.

2 Q. Lieutenant-colonel, je ne sais pas si vous avez déjà vu ce document,

3 mais j'aimerais en tout cas que vous consacriez quelques minutes à l'examen

4 de ce document qui est signé par le lieutenant-colonel Meille. Je vous

5 demanderais de nous dire quand vous en aurez terminé.

6 R. Oui, j'ai déjà vu ce document.

7 Q. Lieutenant-colonel, dans le premier paragraphe de ce document, en fait

8 dans les paragraphes un et deux, le lieutenant-colonel Meille décrit ce

9 qu'il qualifie d'infraction grave, à savoir des attaques contre la ville de

10 Sarajevo à l'aide de grenades très puissantes et d'artillerie. Je fais

11 appel à votre expérience de militaire, à votre expérience des mortiers, à

12 ce que vous saviez à l'époque, et je vous demande si le fait que les

13 Musulmans de Bosnie aient placé des mortiers de calibre 82 à 500 mètres

14 derrière le bâtiment des PTT, est-ce que cet acte était suffisant pour

15 entraîner des tirs correspondant au calibre et à la puissance décrite par

16 le colonel Meille dans ce document ?

17 R. Pas à l'endroit où les tirs ont frappé. Je vais m'expliquer sur ce

18 point. Les mortiers ne sont pas toujours l'arme la plus précise qui soit.

19 Mais en général, des tirs de mortiers, après quelques tirs d'essai,

20 finissent par atterrir là où ils sont censés atterrir. Quelques fois ils

21 sont un peu trop courts, mais lorsqu'ils sont précis après un certain

22 nombre de tirs d'essai, nous considérons qu'ils ne sont plus trop courts.

23 Et 300, 400 ou 500 mètres de distance représentent une cible différente; ce

24 ne sont pas des dommages collatéraux.

25 Q. Donc, un objet qui se trouve à 300, 400 ou 500 mètres de distance,

26 comme c'était le cas à l'époque, et je fais appel à votre expérience de

27 militaire, ne peut pas légitimement être qualifié de cible pour les tirs

28 qui ont touché le bâtiment des PTT et le bâtiment de la télévision, n'est-

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1 ce pas ?

2 R. C'est ce que j'ai dit en effet.

3 Q. Merci.

4 Mme EDGERTON : [interprétation] Je n'ai plus d'autres questions.

5 Questions de la Cour :

6 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur le Témoin, j'aimerais un

7 éclaircissement sur un point. Depuis l'endroit d'où les tirs étaient censés

8 provenir, est-ce que la cible, c'est-à-dire les mortiers des Musulmans de

9 Bosnie, était visible ou est-ce qu'il fallait pour les atteindre passer

10 par-dessus le bâtiment ?

11 R. On ne les voyait pas depuis le lieu d'où les tirs provenaient, mais on

12 pouvait observer ces tirs depuis un autre lieu.

13 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Bien sûr.

14 R. Et l'unité qui était prise pour cible pouvait se trouver ailleurs. Cela

15 c'est tout à fait possible.

16 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] J'aimerais encore un éclaircissement.

17 Je veux dire, est-ce que tout cela pouvait avoir une incidence sur la

18 précision du tir ? Si on ne voit pas la cible, est-ce qu'on doit faire des

19 calculs d'élévation pour utiliser un mortier ?

20 R. Bien, en général, les hommes qui utilisent des mortiers ne voient pas

21 la cible qu'ils visent parce qu'ils tirent à deux, trois ou quatre

22 kilomètres de distance, et ils tirent en général depuis des positions

23 protégées. Ils sont donc à l'arrière. Des observateurs ont pour tâche de

24 déterminer la cible et de déterminer les canons qui peuvent être utilisés

25 pour assurer une précision de tir suffisante.

26 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Donc, ils auraient pu viser les

28 mortiers des Musulmans de Bosnie qui se trouvaient à 500 mètres derrière le

Page 554

1 bâtiment et les avoir ratés ?

2 R. Ils auraient pu les rater après un tir, mais pas après tous les tirs

3 qui ont eu lieu.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Edgerton, vous avez quelque

5 chose à ajouter ?

6 Mme EDGERTON : [interprétation] J'aimerais rafraîchir la mémoire des Juges

7 quant à ce qui s'est passé hier. Dans le cadre des questions posées par les

8 Juges, je pense que l'occasion m'est donnée d'appeler l'attention de la

9 Chambre sur une pièce à conviction dont la Défense a admis l'authenticité

10 et qui a été versée au dossier aujourd'hui. Il s'agit de la pièce P42.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci beaucoup.

12 Mme EDGERTON : [interprétation] Et je vous demande encore un instant

13 d'indulgence, Monsieur le Président. Je remarque que la Défense a utilisé

14 deux documents au cours du contre-interrogatoire dont elle n'a pas demandé

15 le versement au dossier. Je pense que ceci pourrait être fait rapidement.

16 Ma commise aux audiences m'a donné comme numéro de référence PT00103 et

17 PT02364. Ce sont bien les numéros en question ?

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vais demander à Me Isailovic si

19 elle demande le versement au dossier de ces documents.

20 Mme ISAILOVIC : -- Mme Bosnjakovic pour cette identification des documents.

21 Je m'excuse, j'ai complètement oublié qu'il faut faire cela, donc je

22 demande le versement au dossier. Merci.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Quels sont les numéros

24 encore une fois ?

25 Mme ISAILOVIC : Disons que là je ne suis pas en mesure de vous --

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non, je demande une cote de la part

27 de M. le Greffier, en tant que pièce à conviction de la Défense.

28 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, le document 65

Page 555

1 ter, numéro 00103 devient la pièce à conviction D11, et le document 65 ter,

2 numéro 02364, devient la pièce à conviction D12.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

4 Lieutenant-colonel, votre déposition est arrivée à son terme. Nous vous

5 remercions d'avoir témoigné et vous pouvez maintenant vous retirer.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

7 [Le témoin se retire]

8 Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, j'en suis arrivée à

9 la fin de l'interrogatoire que j'étais chargée de mener au cours de

10 l'audience d'aujourd'hui.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

12 Mme EDGERTON : [interprétation] Nous sommes prêts à commencer l'audition du

13 témoin suivant. Mais j'aimerais faire remarquer l'heure, Monsieur le

14 Président, et demander l'indulgence de la Chambre car nous avons besoin de

15 quelques temps pour que je ferme mon ordinateur et que mon confrère qui me

16 succèdera allume le sien.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous avez ces quelques minutes.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je demande que l'on fasse

19 entrer dans la salle le témoin suivant.

20 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

21 le témoin suivant est Milan Mandilovic.

22 M. WAESPI : [interprétation] Monsieur le Président, s'il vous plaît.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

24 M. WAESPI : [interprétation] J'aimerais saisir l'occasion pour

25 présenter à la Chambre, M. Manoj Sachdeva, substitut du Procureur qui fait

26 partie de mon équipe. C'est la première qu'il intervient cette après-midi

27 devant vous.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.

Page 556

1 [La Chambre de première instance se concerte]

2 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je demande au témoin de

4 prononcer la déclaration solennelle.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

6 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

7 LE TÉMOIN: MILAN MANDILOVIC [Assermenté]

8 [Le témoin répond par l'interprète]

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez vous asseoir.

10 Monsieur Sachdeva, vous pouvez procéder.

11 M. SACHDEVA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

12 Interrogatoire principal par M. Sachdeva :

13 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur.

14 R. Bonjour.

15 Q. Pourriez-vous décliner vos noms et prénoms et indiquez quel est votre

16 lieu de naissance et votre date de naissance, je vous prie ?

17 R. Je m'appelle Milan Mandilovic, prénom Milan, nom de famille Mandilovic.

18 Je suis né le 16 juin 1949 à Novi Sad.

19 Q. Je m'apprête à vous poser quelques questions personnelles. M. SACHDEVA

20 : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je vous

21 demande l'autorisation de guider le témoin dans cette partie de

22 l'interrogatoire car ces questions ne font l'objet d'aucune contestation.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous y êtes autorisé.

24 M. SACHDEVA : [interprétation] Merci.

25 Q. Docteur Mandilovic, vous êtes chirurgien ORL, n'est-ce pas ?

26 R. Oui.

27 Q. Vous travaillez actuellement à l'hôpital d'Etat de Sarajevo, n'est-ce

28 pas ?

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1 R. C'est vrai.

2 Q. Vous avez obtenu votre diplôme de médecine en 1975, n'est-ce pas ?

3 R. C'est cela.

4 Q. Vous avez acquis votre diplôme de spécialiste en 1996, n'est-ce pas, en

5 oto-rhino-laryngologie ?

6 R. C'est exact.

7 Q. Avant cela, vous avez rejoint les rangs de l'armée nationale yougoslave

8 en 1978 dans le corps médical, n'est-ce pas ?

9 R. C'est exact.

10 Q. Vous avez obtenu finalement le grade de commandant ?

11 R. Oui, mais pas en 1978.

12 Q. Quand avez-vous obtenu ce grade de commandant ?

13 R. En 1989.

14 Q. Vous avez commencé à travailler à l'hôpital de la JNA à Sarajevo en

15 1992, n'est-ce pas ?

16 R. Exact.

17 Q. Pour que tout soit clair, je vous demande si dans la période qui va du

18 mois d'août 1994 au mois de novembre 1995, vous avez bien été chef du

19 département ORL de l'hôpital ?

20 R. C'est cela. C'est cela.

21 Q. Dans cette période en dehors de votre travail en tant que chef du

22 département ORL de l'hôpital, avez-vous accompli d'autres actions dans le

23 cadre médical en raison de votre obligation de travail ?

24 R. Oui, lorsqu'on est médecin en temps de guerre, il n'existe pas de

25 divisions du travail très précises, de sorte que quel que soit les

26 admissions à l'hôpital, on a pour tâche de s'occuper de tous les blessés

27 quels qu'ils soient et pas seulement des blessés qui relèvent de sa propre

28 spécialité. Par ailleurs, pendant la plus grande partie de la guerre, j'ai

Page 558

1 toujours en sus de mes activités en tant que chirurgien ORL, j'ai toujours

2 accompli également des tâches liées au pansement et à la supervision

3 d'autres blessés.

4 Q. Je vais maintenant vous poser quelques questions qui portent sur

5 l'hôpital où vous travaillez. Avant le début du conflit, c'est-à-dire en

6 avril 1992, est-ce que l'hôpital était un hôpital civil ou un hôpital

7 militaire ?

8 R. Un hôpital militaire.

9 Q. Ce statut a-t-il changé à quelques moments que ce soit ?

10 R. Le statut de l'hôpital a changé le 10 mai 1992.

11 Q. Est-il devenu un hôpital civil ?

12 R. Oui, il est devenu un hôpital civil.

13 Q. Quel a été son nouveau nom ?

14 R. Cet hôpital est d'abord devenu un hôpital d'Etat. Il y a eu un moment,

15 ce n'était pas particulièrement important, mais au moment où M. Mitterrand

16 est venu à Sarajevo, un certain nombre d'organisations humanitaires ont agi

17 dans le sens d'obtenir que cet hôpital soit rebaptisé "Hôpital français."

18 En fait, dans un certain nombre de documents officiels, cela a duré

19 quelques mois, c'est le nom qui a été donné à cet hôpital. Mais étant donné

20 l'aide humanitaire et les relations qui existaient avec d'autres

21 organisations, l'hôpital est finalement devenu un hôpital d'Etat, et il a

22 conservé son nom après la signature des accords de Dayton, c'est-à-dire à

23 partir de la fin de la guerre.

24 Q. Je vous remercie de cet éclaircissement. Même si le statut de cet

25 hôpital a changé, puisque l'hôpital est devenu un hôpital civil, est-ce que

26 pendant toute la guerre vous avez continué à y admettre des patients

27 militaires ?

28 R. Oui, nous admettions tous les patients qui arrivaient, indépendamment

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1 de leur sexe, leur âge, leur religion et de leur appartenance à la

2 population civile ou militaire.

3 Q. Je vais dans quelques minutes vous poser quelques questions

4 complémentaires au sujet des personnes qui étaient admises dans cet

5 hôpital.

6 M. SACHDEVA : [interprétation] Pour le moment, Monsieur le Président,

7 j'aimerais soumettre au témoin une carte géographique qui, dans la liasse

8 des documents 65 ter, porte le numéro 2738.

9 Monsieur le Président, je vous demande quelques instants

10 d'indulgence.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, en effet, nous attendons tous

12 l'affichage du document à l'écran.

13 M. SACHDEVA : [interprétation]

14 Q. Docteur Mandilovic, est-ce que vous voyez cette carte qui est

15 maintenant affichée sur votre écran ?

16 R. Oui, mais je la vois en tout petit. Il serait plus facile pour

17 moi, si elle pouvait être un peu agrandie.

18 Q. Oui.

19 M. SACHDEVA : [interprétation] Je demande un agrandissement de cette

20 carte. Je le demande à Mme l'Huissière. Merci.

21 Q. Est-ce que c'est bien la ville de Sarajevo qu'on voit sur ce plan ?

22 R. Oui.

23 Q. Seriez-vous en mesure de montrer où se trouve l'hôpital d'Etat sur ce

24 plan ?

25 R. Oui, puis-je montrer où se trouve l'hôpital sur l'écran ?

26 Q. Oui, pour le moment, c'est ce qui vous est demandé.

27 R. [Le témoin s'exécute]

28 Q. Je vous demanderais si vous le voulez bien de vous saisir d'un stylo ou

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1 d'un feutre et d'inscrire un cercle autour de l'endroit où se trouve

2 l'hôpital, puis d'écrire les lettres "SH" à côté de ce cercle.

3 R. [Le témoin s'exécute]

4 Q. Je vous demande maintenant si sur ce même plan, vous pouvez nous

5 montrer où se trouve l'autre hôpital, l'hôpital de Kosovo ?

6 R. Oui, je sais où il se trouve.

7 Q. Je vous demanderais de faire la même chose pour cet autre hôpital,

8 c'est-à-dire de tracer un cercle autour de son emplacement et d'inscrire

9 les lettres "KH" à côté du cercle.

10 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

11 Juges, je demande le versement au dossier de ce document.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le document est admis. Je demande

13 une cote.

14 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agira de la

15 pièce P46.

16 M. SACHDEVA : [interprétation] Le Dr Mandilovic pourrait peut-être signer

17 le plan de Sarajevo au bas du plan, avant que le document ne soit remis au

18 greffe.

19 Q. Pouvez-vous signer ce document, Docteur Mandilovic ?

20 R. [Le témoin s'exécute]

21 M. SACHDEVA : [interprétation] Je demande le versement au dossier.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Une cote, s'il vous plaît.

23 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

24 Juges, il s'agira de la pièce P46.

25 M. SACHDEVA : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

26 Q. Docteur Mandilovic, dans la période allant du mois d'août 1994 au mois

27 de novembre 1995, y avait-il à l'intérieur de l'hôpital des soldats en

28 armes ?

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1 R. Non.

2 Q. Vous est-il arrivé à quelque moment que ce soit de voir l'ABiH tirer

3 des tirs de mortier depuis le terrain sur lequel était situé l'hôpital dans

4 cette période ?

5 R. Non, jamais.

6 Q. Est-ce qu'à quelque moment que ce soit vous auriez vu ou remarqué des

7 chars de l'ABiH ou d'autres armes lourdes de l'ABiH à l'intérieur du

8 complexe de l'hôpital ou dans ses environs immédiats pendant cette

9 période ?

10 R. Je n'en ai pas vus et si vous me demandez mon appréciation personnelle,

11 je vous dirais qu'à mon avis, cela eut été absolument impossible, car

12 l'hôpital se trouve en pleine ville entre deux rues étroites, de sorte que

13 de tels équipements n'auraient eu aucune marge de manœuvre et n'auraient

14 pas pu circuler facilement. Mais en tout cas, quel que soit mon avis

15 personnel, je n'en ai pas vus.

16 Q. Je vous remercie de cet éclaircissement. Je vous demande à présent s'il

17 y avait d'autres équipements militaires dans le complexe de l'hôpital ou

18 aux environs immédiats pendant cette période, Docteur Mandilovic ?

19 R. Des équipements militaires, non. Mais à l'intérieur de l'enceinte de

20 l'hôpital, c'est-à-dire dans le parc qui entoure l'hôpital et qu'on voit

21 sur le plan, se trouvait un centre de convalescence destiné aux membres des

22 forces de l'ABiH.

23 Q. Qui en général travaillait dans ce bâtiment ?

24 R. Des médecins mobilisés et des infirmières mobilisées qui ne faisaient

25 pas partie du personnel de l'hôpital mais qui, si je ne m'abuse,

26 dépendaient du 1er Corps d'armée de l'ABiH.

27 Q. Y avait-il des soldats en armes à l'intérieur de ce centre de

28 convalescence ?

Page 562

1 R. Je n'en ai pas vus. Il est possible qu'il y ait des gardes de

2 permanence, mais enfin, des soldats en armes, vraiment je n'en ai pas vus.

3 Q. Toujours dans cette période qui va d'août 1994 à novembre 1995, je vous

4 demande à présent si l'hôpital d'Etat a subi des tirs de tireurs embusqués

5 ou des pilonnages.

6 R. Je ne saurais dire si l'hôpital a été pris pour cible par des tirs.

7 Dans la période que vous évoquez, l'hôpital a été touché en particulier

8 dans la partie principale du bâtiment qui constitue un immeuble de 12

9 étages. Cette partie du bâtiment a été frappée par les deux types de tirs

10 que vous venez d'évoquer. Je ne sais pas si ces tirs visaient précisément

11 l'hôpital ou pas. C'est difficile à dire.

12 Q. Quand vous dites "les deux types de tirs," pouvez-vous vous expliquer

13 plus en détail sur cette expression ?

14 R. Je veux dire que l'hôpital a été exposé à des tirs d'artillerie et à

15 des tirs de tireurs embusqués de temps à autre. Je ne saurais m'exprimer

16 d'une façon très précise au sujet de ces tirs car je ne suis pas expert en

17 la matière. Je ne voudrais pas préjuger de mon opinion, en l'exprimant

18 d'une façon trop précise. En tout cas, si on regarde l'hôpital, on voit

19 très aisément qu'il a subi un grand nombre de tirs destructeurs

20 d'intensités diverses.

21 Q. S'agissant du bâtiment en tant que tel, ces tirs destructeurs, où est-

22 ce qu'ils ont touché le bâtiment, dans quelle partie du bâtiment en voit-on

23 des traces ?

24 R. Pratiquement à tous les étages, de ces 12 étages. Dans ce bâtiment de

25 l'hôpital qui compte 12 étages, il n'y a pas eu un seul étage qui ne montre

26 pas aujourd'hui des signes des impacts de tirs destructeurs.

27 Q. Est-ce qu'un côté de l'hôpital a été plus souvent visé que l'autre par

28 ce genre de tirs ?

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1 R. La partie sud de l'hôpital a été visée beaucoup plus que les autres.

2 Q. La façade sud du bâtiment, elle regarde dans quel sens ?

3 R. La façade sud du bâtiment regarde vers Marijin Dvor, la grande place,

4 vers la rivière Miljacka et au-delà vers les pentes du mont Trebevic.

5 Q. Sauriez-vous nous dire d'où provenaient ces tirs de tireurs embusqués

6 et ces tirs d'obus éventuellement ?

7 R. Pendant toute la durée de la guerre, et pas seulement dans la période

8 qui fait l'objet de vos questions, je dis bien que pendant toute la durée

9 de la guerre, la zone de l'hôpital de façon générale et Marijin Dvor où se

10 situe l'hôpital ont été exposés à des tirs de tireurs embusqués qui

11 provenaient du cimetière juif et de Grbavica.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Sur quoi fondez-vous votre

13 affirmation ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, notre avis de fonde pour l'essentiel sur

15 le fait que pendant toute la durée de la guerre et pas seulement pendant

16 les mois qui intéressent l'Accusation, nous n'avons cessé d'admettre des

17 blessés qui venaient de lieux situés tout près de l'hôpital et qui selon

18 toutes les indications constatables avaient été blessés par des tirs de

19 tireurs embusqués. C'est ce qu'affirmaient les patients de même que les

20 personnes qui les amenaient à l'hôpital.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien, Monsieur Sachdeva, vous

22 pouvez poursuivre.

23 M. SACHDEVA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

24 Q. Docteur Mandilovic, dans votre dernière réponse à mes questions, vous

25 avez évoqué le secteur de l'hôpital juif et le secteur de Grbavica, je vous

26 demanderais de bien vouloir dire aux Juges de la Chambre, quelle était la

27 partie belligérante qui contrôlait ces deux secteurs ?

28 R. Pendant toute la durée de la guerre, ces deux zones étaient sous le

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1 contrôle de l'armée de la Republika Srpska.

2 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

3 je ne sais pas exactement à quelle heure vous avez l'intention d'ordonner

4 la pause, je ne vois pas de problème à poursuivre.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien, nous allons faire la pause

6 maintenant. Une pause de 20 minutes.

7 [Le témoin se retire]

8 --- L'audience est suspendue à 17 heures 33

9 --- L'audience est reprise à 17 heures 54

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur

11 Sachdeva.

12 M. SACHDEVA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Merci,

13 Messieurs les Juges.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le témoin est dans la salle ?

15 Pourquoi n'est-il pas dans la salle ?

16 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez poursuivre Monsieur

18 Sachdeva.

19 M. SACHDEVA : [interprétation]

20 Q. Docteur Mandilovic, un éclaircissement suite à la question que vous a

21 posée le président de la Chambre. Vous avez dit aux Juges de la Chambre que

22 les tirs des tireurs embusqués provenaient de Grbavica et du cimetière juif

23 pour autant que vous le sachiez.

24 J'aimerais maintenant vous demander sur quoi vous vous fondez pour affirmer

25 que ces tirs de tireurs embusqués provenaient de ces deux secteurs ?

26 R. Je pense avoir déjà répondu. Mais, peut-être n'ai-je pas été

27 suffisamment clair. Quand on m'amenait à un patient, il s'agissait le plus

28 souvent d'un blessé qui ne pouvait pas venir à l'hôpital tout seul. Il

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1 gisait sur la route et il fallait que quelqu'un l'amène jusqu'à l'hôpital.

2 Lorsqu'on apprenait de quel endroit venait le blessé, c'était pour nous une

3 indication suffisante quant aux endroits où il était plus facile de

4 traverser ou de circuler. A partir de là, nous avons estimé pouvoir en

5 déduire d'où provenaient les tirs.

6 Q. Le lieu dont vous parlez, ce lieu qui vous indique d'où peuvent

7 provenir les tirs, pourquoi en avez conclu que ces lieux d'où provenaient

8 les tirs étaient Grbavica et le cimetière juif ? En raison de quoi ?

9 Qu'est-ce que ces deux endroits avaient de particulier ?

10 R. Je crois que je pourrais répondre finalement la chose suivante :

11 ces deux endroits étaient en ville pratiquement. La ligne de front, c'était

12 la rivière Miljacka, tout près de ces deux endroits. Comme la ligne qui

13 nous séparait de l'ennemi, si je puis me permettre de l'appeler ainsi,

14 comme cette ligne était tout près, les tirs étaient très précis car la

15 distance de ces tirs était très courte.

16 Q. Quelle était la distance séparant Marijin Dvor de Grbavica, à peu

17 près, d'après vous ?

18 R. A vol d'oiseau, nous parlons de quelques centaines de mètres à

19 peine. Et le cimetière juif est encore plus près. Par ailleurs, depuis le

20 cimetière juif, on a un champ de vision tout à fait dégagé sur Marijin Dvor

21 et sur la gare ferroviaire. Le cimetière juif est un petit peu en altitude,

22 et donc il constitue un endroit idéal pour regarder du côté de l'hôpital et

23 de la gare. Il se trouve sur le mont Trebevic.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Sachdeva, j'aimerais un

25 éclaircissement. Ce témoin n'est pas un témoin qui relève de l'article 92

26 ter, n'est-ce pas ?

27 M. SACHDEVA : [interprétation] En effet, Monsieur le Président. Ce n'est

28 pas un témoin 92 ter.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Donc, vous procédez en ce moment à

2 son interrogatoire principal ?

3 M. SACHDEVA : [interprétation] Exactement. Et je prévois d'avoir encore 25

4 minutes d'interrogatoire principal.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.

6 M. SACHDEVA : [interprétation]

7 Q. Docteur, vous nous avez dit que pendant la guerre, et pas seulement

8 pendant la période séparant le mois d'août 1994 du mois de novembre 1995,

9 les 12 étages du bâtiment de l'hôpital avaient subi des tirs de tireurs

10 embusqués et des tirs d'obus. Vous rappelez-vous un incident particulier

11 survenu dans la période allant d'août 1994 à novembre 1995, c'est-à-dire un

12 pilonnage particulier qui vous a affecté personnellement ? Si vous vous en

13 souvenez, est-ce que vous pouvez parler de cet incident à la Chambre.

14 R. Le bâtiment, l'hôpital, a subi des dégâts importants, bien entendu. Je

15 tiens à être assez précis lorsque je parle de ce genre de chose, mais je

16 suis sûr que l'on ne saurait me reprocher de dire que les dégâts subis par

17 l'hôpital ont été importants en 1992 et 1993, c'est-à-dire dans la période

18 dont vous parlez. Toutefois, j'ai eu personnellement le malheur d'être

19 impliqué dans un événement particulier. C'était à la fin de l'été 1994. A

20 cette époque, il n'y avait pas d'électricité en ville. Les ascenseurs ne

21 fonctionnaient pas, donc je me suis engagé dans les escaliers, et quand

22 j'ai atteint le onzième étage du bâtiment, j'ai senti que tout le bâtiment

23 s'est mis à vibrer. Il n'y avait pas de vent, c'était un jour ensoleillé,

24 et à ce moment-là, j'étais dans l'obscurité la plus totale. Quand le jour

25 est réapparu et que j'ai jeté un coup d'œil à la collègue qui

26 m'accompagnait, qui était une infirmière en chirurgie, j'ai constaté

27 qu'elle et moi étions totalement couverts de suie. Nos vêtements étaient

28 recouverts d'une couche grise. Cet incident est le danger le plus grave que

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1 j'ai vécu moi-même durant la guerre, car je n'ai jamais été plus près d'un

2 point d'impact d'obus.

3 Q. Y a-t-il eu des blessés suite à cet incident ?

4 R. Non, non. Je n'ai pas été blessé. Une enquête a été menée par la suite

5 et elle a montré que le projectile avait pénétré dans une chambre qui se

6 trouvait au onzième étage, où il avait explosé. Comme la porte de la

7 chambre était fermée, pour ma part, j'étais dans la cage d'escalier, donc

8 je n'étais même pas encore dans le couloir qui menait à cette chambre, je

9 n'ai pas été blessé, et ma collègue non plus.

10 Q. J'aimerais maintenant vous poser des questions au sujet des tireurs

11 embusqués. Vous rappelez-vous un incident particulier au cours duquel des

12 gens qui se trouvaient à l'hôpital ont été frappés par tirs de tireurs

13 embusqués dans la période séparant août 1994 de novembre 1995 ?

14 R. Ce jour-là, le jour de cet incident, je me souviens très bien que je

15 n'étais pas de service. En général, nous avions 24 heures de travail,

16 suivies de 24 heures de repos. Le lendemain, lorsque je suis retourné au

17 travail, j'ai appris, en visitant les malades, que des tirs de tireurs

18 embusqués avaient touché deux patients qui avaient été atteints aux

19 extrémités. Je crois que c'était l'été 1995 que cela s'est passé. Ces

20 blessures étaient légères. Ces patients ont été touchés dans les tissus

21 mous, mais tout de même ils ont été touchés. Pour dire les choses

22 clairement, j'ajouterais que ceci ne s'est pas passé dans le bâtiment

23 central de l'hôpital, dans cette partie du bâtiment qui comporte 12 étages,

24 mais dans une annexe qui se trouve un peu à l'ouest, du côté de la gare de

25 chemin de fer, un bâtiment de quatre étages, et je crois que c'est le

26 troisième étage qui avait été touché.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic.

28 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je ne sais pas si

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1 mon collègue de l'Accusation pourrait demander au témoin de préciser la

2 date relative au premier incident décrit par le témoin.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne saurais vous donner la date exacte. Vous

4 pensez à cet incident au cours duquel j'ai indirectement été touché. C'est

5 bien ce dont vous parlez, n'est-ce pas ?

6 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Oui, en effet.

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne saurais vous donner la date de cet

8 incident. Je sais seulement que c'était tard dans l'été 1994. Cela, j'en

9 suis certain.

10 M. SACHDEVA : [interprétation] Je pense que le témoin l'avait déjà dit,

11 Monsieur le Président, à la fin de l'été 1994.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Veuillez poursuivre, Monsieur

13 Sachdeva.

14 M. SACHDEVA : [interprétation]

15 Q. Docteur, vous étiez médecin, vous travailliez dans cet hôpital, mais

16 vous étiez également citoyen de Sarajevo. Comment décririez-vous les

17 pilonnages et les tirs embusqués vécus par la ville de Sarajevo dans la

18 période séparant août 1994 de novembre 1995 ? Pourriez-vous nous le dire en

19 quelques mots, je vous prie.

20 R. Je crois que j'ai déjà prononcé une phrase qui traitait de ce sujet.

21 Les années 1994 et 1995 ont été un peu plus faciles, dirais-je, pour les

22 habitants de Sarajevo. Cela, c'est un fait. Si vous souhaitez que je

23 m'explique plus avant sur ce point, je peux le faire sans difficulté.

24 L'intensité des combats avait un peu diminué, grâce à des décisions

25 politiques sans doute. Les routes bleues ont partiellement été réouvertes,

26 et c'était ces routes bleues qui permettaient l'arrivée à Sarajevo d'aide

27 alimentaire et d'équipements médicaux. Je dis bien partiellement

28 réouvertes, car des parties de ces routes étaient très fréquemment fermées,

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1 mais elles étaient réouvertes peu de temps après. Plusieurs tentatives ont

2 été faites pour régler aussi le problème de l'approvisionnement en

3 électricité, grâce à la centrale Atlas. Donc, la situation s'était

4 légèrement améliorée.

5 C'était, cela dit, la troisième année de la guerre, donc la

6 population était épuisée déjà, étant donné toutes les répercussions qu'un

7 état de guerre peut entraîner. Passer une durée aussi longue enfermé dans

8 une ville, en manquant de toutes les conditions normales d'existence ou de

9 survie, en étant si près d'un front militaire, c'est vraiment

10 particulièrement pénible.

11 Q. Vous venez de dire que plusieurs tentatives ont été faites pour régler

12 les problèmes d'électricité. Je voudrais vous demander pour quelles raisons

13 il y avait nécessité d'intervenir sur les réseaux électriques. Pourquoi

14 est-ce que ce réseau électrique ne fonctionnait pas ?

15 R. Cela, je n'en sais rien. Mais ce qui est un fait, c'est que depuis le

16 mois de mai ou le mois de juin, je ne saurais vous le dire exactement,

17 depuis mai ou juin 1992, par conséquent, Sarajevo n'avait pas

18 d'électricité. Je ne dirais pas que l'électricité faisait défaut en

19 permanence, mais disons que de façon générale, il n'y avait pas

20 d'électricité dans la ville, pas plus qu'à l'hôpital d'ailleurs. Nous avons

21 fait tout notre travail à l'hôpital grâce à un générateur que nous avions à

22 notre disposition et que nous utilisions beaucoup. Et si je vous parle en

23 tant que simple citoyen, pas seulement en tant que personne travaillant à

24 l'hôpital, je vous dirais que nous avions très souvent l'espoir que

25 l'électricité allait revenir. On avait cet espoir pendant des périodes

26 assez longues, et puis tout d'un coup, même si l'électricité réapparaissait

27 quelques instants, elle disparaissait très rapidement ensuite parce que

28 quelque chose s'était passé, un incident avait affecté un pilon ou autre

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1 chose et il n'y en avait de nouveau plus. C'était vraiment pénible.

2 Q. Dans cette période, toujours la période août 1994, novembre 1995, je

3 vous demande si vous pourriez dire quelques mots quant à la fréquence à

4 laquelle les patients étaient admis dans votre hôpital après avoir été

5 blessés par des tireurs embusqués ou par des tirs d'obus ?

6 R. Nonobstant ce que j'ai dit tout à l'heure et que je maintiens, à savoir

7 que l'intensité des combats avait un peu diminué pendant la période dont

8 vous parlez, la guerre n'avait pas cessé et il y avait des moments

9 d'escalade. Personnellement, j'ai été témoin de deux événements dans la

10 période dont vous parlez, événements qui me sont restés en mémoire. Je dis

11 personnellement parce qu'il s'agissait de destructions qui ont eu lieu non

12 pas pour la première fois, mais pour une seconde fois. Ces dégâts ont été

13 énormes. D'autre part, tout cela s'est passé le 16 juin 1995, et je me

14 souviens très bien de cette date, tout simplement parce que c'est celle de

15 mon anniversaire. Ce jour-là, l'ABiH a commencé un effort destiné à lever

16 le siège de Sarajevo. Le lendemain, c'est également un jour dont je me

17 souviens très bien, qui est resté gravé dans ma mémoire, puisque c'est le

18 jour du massacre de Markale, qui a eu lieu à la fin du mois d'août 1995.

19 Q. Je vais vous poser des questions sur ces deux incidents dans quelques

20 instants. J'y reviendrai. Mais pour l'instant, j'aimerais que nous

21 revenions à la situation générale. Voici ce que j'aimerais savoir : est-ce

22 que l'hôpital admettait tous les jours ou toutes les semaines ou tous les

23 mois, disons une fois par jour, une fois par semaine, une fois par mois,

24 l'hôpital admettait-il des patients blessés par des tirs d'obus ou des tirs

25 de tireurs embusqués ?

26 R. Notre hôpital travaillait 24 heures par jour, sept jours sur sept. J'en

27 ai déjà parlé au début de ma déposition. L'hôpital admettait tous les

28 blessés, quels qu'ils soient. Je peux dire qu'il n'y a pas eu une semaine

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1 qui s'est écoulée sans que des blessés arrivent à l'hôpital, qu'ils aient

2 été blessés par tireurs embusqués ou à partir d'obus. Ils arrivaient de

3 lieux très divers, car il y avait trois hôpitaux qui proposaient des soins

4 chirurgicaux. Donc, en fonction du lieu d'où venaient ces blessés, en

5 fonction de la distance séparant leur lieu d'origine et l'un ou l'autre des

6 trois hôpitaux, ils choisissaient l'hôpital qui était le plus proche. Mais

7 s'agissant de l'hôpital où je travaillais, je peux vous dire avec certitude

8 qu'il ne s'est pas passé une seule semaine sans que l'hôpital admette des

9 gens blessés par tirs d'obus ou par tirs de tireurs embusqués. Bien

10 entendu, le nombre des admissions n'était pas identique toutes les

11 semaines, mais si on se penche sur les documents officiels de l'hôpital, on

12 peut voir avec une très grande précision quel était le nombre exact de ces

13 patients admis chaque semaine à l'hôpital.

14 Q. Les personnes qui étaient admises, comme vous l'avez dit semaine après

15 semaine, est-ce que vous pourriez nous donner une estimation du pourcentage

16 de ces patients qui étaient des militaires et du pourcentage de ces

17 patients qui étaient civils, dans la période dont je parle ?

18 R. Je crois, je dis bien je crois, que pendant toute la durée de la

19 guerre, et donc pas seulement pendant la période dont vous parlez, ce

20 pourcentage se situe à 80 % de civils, 20 % de militaires. Ce que je veux

21 dire donc c'est que le nombre de blessés civils a toujours été largement

22 supérieur au nombre de blessés militaires, en tout cas pour les patients

23 admis dans notre hôpital.

24 Q. Comment déterminiez-vous que ces personnes étaient des civils ?

25 R. L'un des critères tout à fait fondamentaux au moment de l'admission de

26 ces personnes, c'était bien sûr les détails qui les caractérisaient

27 personnellement, c'est-à-dire leur prénom, leur nom de famille, leur date

28 de naissance, leur lieu de résidence, leur âge, leur sexe; tout cela était

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1 enregistré à leur arrivée. Puis, il y a aussi le véhicule utilisé pour les

2 amener à l'hôpital. Si c'était une ambulance militaire, nous savions qu'il

3 s'agissait d'un militaire, mais si ces personnes arrivaient à bord d'un

4 véhicule appartenant à une organisation ou à une institution civile ou

5 qu'ils étaient amenés dans un véhicule appartenant à un particulier, qu'il

6 s'agisse d'un passant, d'un ami ou d'un membre de leur famille, nous

7 savions qu'il s'agissait de civils. Puis, les militaires avaient leur

8 livret militaire sur eux, qui établissait leur identité. Ils portaient en

9 général un uniforme, et en fonction de cela nous pouvions donc déterminer

10 si une personne était civile ou militaire.

11 Q. 80 % de civils, dites-vous, ont été admis dans votre hôpital. Ces 80 %

12 de civils, quelles étaient les blessures qu'ils présentaient ?

13 R. Voyez-vous, c'est une chose assez difficile à déterminer précisément,

14 mais disons qu'en principe, et je parle bien de Sarajevo et de la région de

15 Sarajevo, il y a deux types de blessure qui ont été constatées à l'hôpital

16 : des blessures dues à des éclats d'obus d'une part et des blessures dues à

17 des balles de fusil ou de canon d'autre part. La différence est assez nette

18 quant à la façon dont les tissus mous sont arrachés ou endommagés. Quand il

19 s'agit d'un obus, le trou qui est fait dans les tissus mous est très

20 important. Il a un diamètre très important. On constate à l'intérieur des

21 lésions de toutes sortes qui sont très importantes, comme des fractures des

22 membres inférieurs ou des éclatements de chair. Alors que lorsqu'il s'agit

23 d'une balle de fusil, on a un point d'entrée de la balle et parfois un

24 point de sortie, et le trou est d'un diamètre bien inférieur. Ce qui ne

25 veut pas dire, cela étant dit, que la blessure due à une balle soit

26 automatiquement moins dangereuse pour la vie du patient que la blessure due

27 à un obus. Beaucoup dépend également de la partie du corps qui a été

28 touchée. Mais en tout cas, la différence entre blessure due à un obus et

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1 blessure due à une balle est très facile à déterminer, c'est certain.

2 Q. Vous avez tout à l'heure évoqué le massacre survenu au marché en août

3 1995. Vous rappelez-vous la date exacte de cet incident ?

4 R. Je crois que cela s'est passé le 28 août 1995, le 28, ou je crois dans

5 la matinée. J'étais de service ce jour-là, je m'en souviens très bien.

6 Q. Je vous prierais de bien vouloir décrire à l'intention de la Chambre la

7 situation qui régnait dans votre hôpital ce jour-là, rapidement, si c'est

8 possible ?

9 R. C'était le matin et le silence régnait sur la ville et tout d'un coup

10 on a entendu une détonation très forte, impossible d'en déterminer la

11 distance. En même temps, de très nombreux véhicules automobiles se sont mis

12 en branle, des voitures de particuliers, des ambulances, des fourgons qui

13 n'ont cessé d'amener à l'hôpital des patients, des personnes qui

14 présentaient des blessures graves. Je dis bien blessures graves car, à

15 première vue, immédiatement, on a pu constater qu'il s'agissait de lésions

16 dues à des éclats d'obus.

17 Ces obus avaient touché ces personnes au visage, à l'abdomen, sur le

18 thorax, sur les jambes, un peu partout. Au fur et à mesure de l'arrivée de

19 tous ces véhicules qui amenaient des blessés, très rapidement, la réception

20 de l'hôpital s'est trouvée engorger. A ce moment-là, nous avons mis en

21 œuvre l'application de la doctrine de chirurgie de guerre ce qui est une

22 obligation dès lors qu'on voit arriver ensemble un très grand nombre de

23 blessés. Donc, nous nous sommes mis à pratiquer un tri, ce qui implique

24 d'examiner les patients en déterminant le pourcentage du corps qui est

25 atteint et ce critère détermine l'ordre de priorité qui sera appliqué à ce

26 blessé.

27 Qu'est-ce que cela veut dire concrètement ? Cela veut dire qu'à partir de

28 cet examen, de ce premier examen après avoir pratiqué ce premier examen sur

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1 toutes les personnes qui sont arrivées, on détermine qui sera traité en

2 premier et il s'agit des blessés dont la vie est le plus en danger.

3 Q. Quelques questions encore suite à votre réponse. Tout d'abord, à vol

4 d'oiseau, quelle était la distance entre votre hôpital et le marché ?

5 R. Peut-être 1 000 mètres -- 1 000 mètres à vol d'oiseau.

6 Q. Vous nous avez dit que les gens ont été emmenés, alors ces gens qui

7 sont arrivés et qui ont été emmenés, était-ce des civils, des militaires ou

8 un peu des deux ?

9 R. Là encore, la plupart étaient des civils. Je me rappelle avoir vu un

10 militaire ici ou là, mais c'était pour l'essentiel des civils.

11 Q. Pouvez-vous nous dire en gros combien de personnes ont été admises dans

12 votre hôpital ce jour-là ?

13 R. Si je me souviens bien, à ce moment-là, il y a eu 40 personnes qui sont

14 arrivées à l'hôpital. Bon, tous ces 40 bien sûr n'avaient pas tous des

15 blessures de la même gravité.

16 Q. J'ai une autre question plus générale à vous poser à propos de la vie

17 quotidienne à Sarajevo. Tout d'abord, en ce qui concerne les transports

18 publics, d'août 1994 à novembre 1995, vous est-il arrivé de prendre le

19 tramway ?

20 R. Non. Non, parce qu'en 1994, le tramway ne marchait plus. Je crois que

21 le fonctionnement a été rétabli à peu près pendant les négociations de

22 Dayton, quand elles ont été commencées, c'est-à-dire à la fin 1995. Je ne

23 peux pas vous donner la date exacte, mais je n'avais pas besoin de prendre

24 le tramway parce que je n'en n'avais pas besoin. Je pouvais emprunter un

25 autocar de l'hôpital qui avait été organisé par l'hôpital pour me rendre à

26 l'hôpital et pour rentrer chez moi. Nous avions beaucoup de chance parce

27 que nous pouvions utiliser ce transport qui avait été organisé pour nous.

28 Q. Au cours de cette période, y avait-il quand même des personnes qui

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1 prenaient le tramway ?

2 R. Oui. Là, je vous parle avec ma casquette de civil. Je me demande même -

3 - je me demandais à l'époque comment il se faisait que les gens n'aient pas

4 peur de prendre les trains, mais de monter à bord de ces trams qui

5 traversaient Marine Dvor d'est en ouest. Je suis sûr que tout ce qui est

6 documenté et peut être retrouvé. Je sais qu'il y a eu des incidents à bord

7 de trams. Certaines personnes ont été blessées très gravement alors qu'ils

8 étaient à bord de tramways et je sais que cela est arrivé. Malgré tout

9 cela, les tramways fonctionnaient, les gens les empruntaient.

10 Q. Vous nous parlez d'incidents, mais de quoi ? Pouvez-vous être plus

11 précis, s'il vous plaît ?

12 R. Il me semble que c'étaient des tirs embusqués ou d'autres tirs peut-

13 être qui avaient pris les tramways comme cible. Certaines personnes ont été

14 blessées et je me souviens d'avoir vu à l'hôpital puisque j'ai entendu des

15 blessés dire qu'ils avaient été blessés alors qu'ils étaient à bord de

16 trams. C'était vers la fin 1995. Il y avait d'ailleurs une couverture média

17 très forte de ce type d'incidents. Je me souviens d'avoir vu des tramways

18 détruits avec des taches de sang sur les sièges, et cetera.

19 Je me souviens très bien de ce type d'incidents et c'est pour cela

20 d'ailleurs que je ne prenais jamais le train.

21 Q. Pour ce qui est maintenant des tirs embusqués dans la ville, êtes-vous

22 au courant des mesures que prenaient les habitants de Sarajevo pour se

23 protéger des tirs des tireurs embusqués ?

24 R. Oui. Au fur et à mesure que la guerre se déroulait, les services en

25 charge de la Protection, enfin, donc de la protection civile, ont essayé

26 d'empêcher les tirs embusqués. Donc, dans les carrefours qui étaient encore

27 ouverts, dans les quartiers dont on a parlé récemment, il y a des

28 barricades en béton qui ont été érigés ou alors des conteneurs sur trois ou

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1 quatre rangées pour essayer d'éviter les tirs embusqués.

2 Q. Maintenant, voici mon avant dernière question : au cours de la guerre

3 et surtout au cours de la période de 1994 à 1995, les autorités de Bosnie-

4 Herzégovine, donc, le gouvernement de Bosnie-Herzégovine vous a-t-il à un

5 moment ou à un autre empêché de quitter la ville ?

6 R. Je ne me suis pas trouvé dans cette situation puisque j'avais demandé à

7 quitter la ville, mais, de toute façon, soyons réalistes, je n'aurais pas

8 pu partir. Il y avait une guerre. Des personnes qualifiées et spécialistes

9 n'ont pas le droit de partir comme cela. Enfin, c'est une hypothèse. Il me

10 semble que c'est ainsi en temps de guerre. De toute façon, je n'ai pas

11 demandé à partir.

12 Q. Très bien. Parlons maintenant des dossiers médicaux, des dossiers de

13 l'hôpital. Donc, au cours de votre travail à l'hôpital d'Etat, avez-vous

14 jamais vu des dossiers qui avaient été rédigés par l'hôpital ? Avez-vous,

15 vous-même, rédigé des dossiers médicaux qui auraient été détenus par

16 l'hôpital ?

17 R. La situation était très difficile puisque je vous l'ai bien indiqué

18 dans mes réponses précédentes. Mais nous savions bien que les dossiers

19 médicaux étaient essentiels. Ils étaient essentiels à la fois pour le

20 traitement et essentiels pour d'autres raisons, aussi. Donc, chaque

21 hôpital, chaque service, d'hôpital avait son propre protocole. Aux

22 admissions, il y avait un système de dossier. Donc, sur la base des

23 protocoles des services et des dossiers aux admissions, on peut savoir

24 exactement quel patient a été examiné ? Quelle était l'ordonnance du

25 médecin ? Quelles ont été les consignes qui ont été données quand la

26 personne a été admise à l'hôpital ? Combien de temps elle est restée, et

27 cetera.

28 Q. Pour ce qui est des dossiers médicaux de l'hôpital de Kosovo, avez-vous

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1 jamais eu l'occasion d'en voir ?

2 R. Oui, bien sûr. Très souvent. Je ne parle pas du dossier même des

3 registres de l'hôpital. Mais, très souvent, j'ai vu les dossiers médicaux

4 et conclusions des docteurs, et cetera, et je ne peux pas vous expliquer

5 pourquoi. En fait, c'était l'hôpital de Kosovo et notre hôpital, qui

6 étaient les seuls hôpitaux en ville, à l'époque, qui offraient toute

7 possibilité de traitement aux malades et aux blessés, et nous travaillons

8 en coopération très étroite. Donc, très fréquemment, un blessé était

9 examiné, soigné dans un hôpital, puis ensuite, allait dans l'autre

10 établissement pour les autres visites médicales pour différentes raisons,

11 soit parce que l'autre hôpital était plus près de son lieu de résidence, ou

12 parce qu'il y avait des pilonnages ou quoi que ce soit. Donc, pendant toute

13 la guerre, nous avons travaillé vraiment en très bonne intelligence. Mais

14 nous sommes aidés les uns et les autres.

15 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais que l'on

16 verse au dossier une série de dossiers médicaux de la part de ces deux

17 hôpitaux. Donc, l'hôpital d'Etat et l'hôpital de Kosovo. Il y a environ 70

18 à 100 pages, chaque page étant un dossier médical spécifique. Le témoin a

19 vu ces pièces lors du récolement. Il y a aussi donc un certificat qui a été

20 obtenu et qui contient la liste de ces dossiers. Donc, je vais montrer

21 juste le certificat au témoin, lui poser quelques questions à propos de ces

22 dossiers médicaux. Donc, sur toute cette centaine de pages dont est

23 composée cette liste.

24 L'autre alternatif serait d'afficher chaque document sur le prétoire

25 électronique, un par un. Mais nous pensons vraiment que cela risque de

26 prendre énormément de temps et il vaudrait mieux qu'il y ait plutôt une

27 cote provisoire qui nous serait donnée par le greffier pour la totalité des

28 dossiers.

Page 578

1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vais envisager cette option.

2 Monsieur Tapuskovic, qu'avez-vous à dire à propos de cette procédure, ou

3 cette procédure de versement de documents ?

4 Est-ce que vous souhaitez contester cette façon de procéder ?

5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

6 Juges, j'étais en train de me concentrer avant d'entamer mon contre-

7 interrogatoire, et nous étions en train de rechercher certains documents.

8 Donc, malheureusement, je n'ai pas suivi la conversation. J'en suis

9 absolument désolé. Si vous pouviez répéter, cela me permettrait de prendre

10 position.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Répétez donc, Monsieur Sachdeva,

12 s'il vous plaît, la procédure que vous aimeriez que nous employions.

13 M. SACHDEVA : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président. Tout

14 d'abord, j'aimerais dire que la Défense et moi avons bel et bien indiqué

15 aux juristes de la Chambre quels étaient les documents qui ont été montrés

16 au témoin lors du récolement et quelles étaient les pages qui ont été

17 communiquées à la Défense, 72 heures avant que le témoin ne dépose comme

18 vous l'avez demandé, Monsieur le Président.

19 Donc, ma suggestion est la suivante : plutôt que de regarder chaque

20 document en détail, un par un, sur l'affichage électronique, il serait

21 beaucoup plus simplement de demander au témoin s'il est toujours d'accord

22 avec le certificat qu'il a donné sous serment à propos de toutes ces pages

23 et de donner donc une cote générale au dossier entier. Ceci nous

24 permettrait de gagner du temps.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous avez copie du certificat,

26 Monsieur Tapuskovic.

27 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Absolument. Nous l'avions sous les yeux

28 d'ailleurs, aux côtés de ces ministres, mais nous avons remarqué quelques

Page 579

1 éléments qui n'ont pas été présentés, donc, qui n'ont pas été téléchargés

2 dans le système de prétoire électronique et qui n'existent pas. Donc, pour

3 ce qui est des enquêtes qui ont été effectuées le 8 novembre 1994, nous

4 avons retrouvé un document tout à fait précieux pour la Défense il y a

5 quelques secondes. Nous avons envoyé un e-mail à ce propos, d'ailleurs, à

6 l'Accusation. Nous n'avons pas d'autres choix que de verser ces deux

7 documents au dossier, mais nous considérons que ce document devrait

8 absolument être montré au témoin, alors qu'il n'a pas été présenté au

9 témoin. Or, c'est un document qui montre des choses. Je ne vous dis pas

10 qu'il faudrait lire ce document de A jusqu'à Z, mais, au dernier moment, je

11 peux dire de retrouver ces deux documents. Donc, je n'essaie pas d'obliger

12 qui que ce soit à faire des choses inutiles, mais c'est un document quand

13 même qui vous se révéler extrêmement utile pour la Défense. Après la

14 déposition du témoin, après son interrogatoire principal, nous avons

15 regardé un peu ce qu'il y avait sur le prétoire électronique pour nous

16 préparer pour notre contre-interrogatoire et je suis désolé. Mais nous

17 avons trouvé ce document qui n'est pas sur le prétoire électronique. Je

18 m'en excuse auprès de l'Accusation, mais il n'existe pas dans la liasse de

19 documents présentés au travers de ce témoin et porte donc sur une enquête

20 pénale décrite au titre --

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] En train de nous -- êtes-vous en

22 train de nous dire que ce document n'est pas fiable, n'est pas précis ?

23 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Pouvez-vous me donner une minute, s'il

24 vous plaît ? Le temps -- je consulte mes consoeurs.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Allez-y.

26 [Le conseil de la Défense se concerte]

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais avant de vous redonner la

28 parole, Monsieur Tapuskovic, je vous --

Page 580

1 Monsieur Sachdeva, qu'essayez-vous d'établir par le biais de ces dossiers

2 médicaux que vous voudriez voir versé au -- voudriez voir versé au dossier

3 en l'espèce ?

4 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, pour ce qui est de la

5 pertinence de ces dossiers médicaux, l'Accusation fait valoir qu'il traite

6 de deux incidents qui ont été mis en annexe de l'acte d'accusation modifié.

7 Il s'agit donc de dossiers médicaux, et nous faisons valoir que ce sont les

8 dossiers médicaux des personnes qui ont été bel et bien blessées au cours

9 de ces incidents qui font l'objet de l'annexe à l'acte d'accusation. Donc,

10 ma proposition -- bon, le document dont je parle, c'est un tableau, un

11 tableau Word de Microsoft Word. Ce n'est pas du tout l'enquête criminelle

12 du 8 août 1994. Ce n'est pas quelque chose qui se trouve sur la liste des

13 pièces. Là, je vous parle juste d'un tableau qui reprend un grand nombre de

14 documents en un seul, afin d'accélérer un peu la procédure.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien.

16 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Mais, Monsieur le Président, nous parlons

17 ici de documents qui -- nous parlons de documents qui portent sur les

18 blessures. Là je n'ai aucun doute que les dossiers médicaux, de toute façon

19 de tous les médecins, se trouvent au Tribunal depuis longtemps. Donc, si

20 toute cette discussion porte sur les dossiers médicaux, je ne conteste

21 absolument rien, et nous respectons absolument la décision que vous

22 prendrez à propos de la manière dont le -- tous ces documents seront versés

23 au dossier.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est juste un raccourci pour

25 pouvoir verser énormément de pièces en une seule fois.

26 M. SACHDEVA : [interprétation] C'est absolument cela, Monsieur le

27 Président.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Donc, il conviendrait de montrer le

Page 581

1 certificat au témoin.

2 M. SACHDEVA : [interprétation] Montrez donc cette certificat au témoin,

3 s'il vous plaît.

4 Q. Pouvez-vous passer à la dernière page de ce document ?

5 R. Pas de problème.

6 Q. Reconnaissez-vous votre signature sur ce document ?

7 R. Oui, c'est ma signature ainsi que la date.

8 Q. Pouvez-vous nous confirmer en regardant, feuilletant rapidement les

9 pages, que les pages qui sont sur ce document font référence à des dossiers

10 médicaux que vous avez bel et bien vus, et dont vous avez confirmé la

11 validité ? Pouvez-vous donc nous confirmer qu'il s'agit bien de références

12 à des dossiers médicaux valides, provenant des hôpitaux de Kosovo et de

13 l'hôpital d'état ?

14 R. Tout à fait. C'est en effet de l'hôpital de Kosovo et de l'hôpital

15 d'Etat. Je confirme tout cela.

16 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais donc que

17 ces documents, auxquels il fait référence dans ce tableau, soient versés au

18 dossier, et nous considérons que la façon la plus simple d'identifier les

19 pièces serait de donner une cote en

20 P à chaque page, et que chaque page donc soit identifiée par un numéro de

21 ERN bien spécifique.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pouvons-nous peut-être au moins en

23 voir un, juste pour avoir une idée de ces dossiers médicaux ? Au hasard,

24 choisissons le numéro 14.

25 M. SACHDEVA : [interprétation] Allez-y.

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Donc, au hasard, j'ai pris le numéro

27 14. La description est : "Service d'ophtalmologie, hôpital de Kosovo,

28 dossier d'admission."

Page 582

1 Donc, puis-je demander au témoin exactement ce à quoi fait référence cette

2 ligne sur le tableau que j'ai pris au hasard ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Voici ce que montre le dossier.

4 Il y a le nom du patient en entier, le diagnostique, et les conclusions du

5 médecin qui indique justement qu'il convient d'hospitaliser ce blessé ou ce

6 malade.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Un instant, je vous prie.

8 [La Chambre de première instance se concerte]

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] J'aurais une question à vous poser

10 car, même si on part du principe qu'il s'agit évidemment d'un tableau, je

11 me demande s'il ne serait pas plus utile pour la Chambre - prenons par

12 exemple le nom qui se trouve au regard du numéro 14 - de savoir quelle est

13 la nature exacte de la blessure qui est en cause.

14 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, l'Accusation ne voit

15 aucune difficulté à vous fournir ce genre de renseignement, mais

16 j'ajouterais simplement que le témoin est en train de valider la

17 crédibilité des documents officiels émanant de son hôpital. Il n'est est

18 pas nécessairement au stade de décrire le contenu de ces documents.

19 L'Accusation va ensuite citer à la barre des témoins qui viendront en

20 personne, ainsi que des témoins 92 ter dont certains étaient -- dont

21 certains sont des victimes d'incidents survenus à cet époque, et ils

22 parleront du contenu des documents de l'hôpital. Par ailleurs, vous verrez

23 également des gens qui ont été blessés au cours de ces incidents.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous ferrez appel à des témoins qui

25 parleront de leurs blessures suite aux différents incidents évoqués dans

26 ces tableaux ?

27 M. SACHDEVA : [interprétation] Absolument.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

Page 583

1 M. SACHDEVA : [interprétation] Bien sûr, je ne peux affirmer qu'ils ne

2 parleront chacun que d'un seul document.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Uh-huh.

4 M. SACHDEVA : [interprétation] Mais ils parleront, par exemple, aux cas où

5 ils ont été blessés, des causes de leurs blessures. Mais le témoin que vous

6 avez devant vous valide en fait les documents officiels de l'hôpital qu'il

7 a pu voir pendant son travail.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne vois pas d'objection à

9 admettre ce document. Donc, la Chambre l'admet.

10 M. SACHDEVA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Que proposez-vous, Monsieur

12 Sachdeva ? Que chaque partie obtienne un numéro de pièce à conviction

13 distinct ?

14 M. SACHDEVA : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] On peut le faire ici même, et le

16 greffe effectuera ce travail pendant la soirée. Mais pourquoi est-ce que

17 vous appliquez cette démarche ? Vous pensez que peut-être nous pourrions

18 par la suite avoir à faire référence à ces documents.

19 M. SACHDEVA : [interprétation] Absolument. Puis, aussi parce qu'il est

20 possible que des contestations surgissent plus tard quant au fait que ces

21 blessés auraient bien été blessés pour les causes évoquées par

22 l'Accusation.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais je voulais dire pourquoi. Est-

24 ce que vous voulez un numéro séparé pour chaque élément -- pour chacun de

25 ces tableaux.

26 M. SACHDEVA : [interprétation] Parce que le contenu de ces tableaux

27 n'est pas identique.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien.

Page 584

1 Bien, le greffe effectuera ce travail après la fin de l'audience ce

2 soir pour gagner du temps.

3 M. SACHDEVA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Puis-je

4 poursuivre.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Sachdeva.

6 M. SACHDEVA : [interprétation]

7 Q. J'aimerais soumettre au témoin un cliché tiré d'une vidéo.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Sachdeva.

9 M. SACHDEVA : [interprétation] J'en aurai terminé de mon

10 interrogatoire.

11 [Diffusion de la cassette vidéo]

12 M. SACHDEVA : [interprétation]

13 Q. Docteur, reconnaissez-vous le bâtiment que l'on voit sur cette

14 photographie ?

15 R. Oui, bien sûr. C'est la partie centrale de l'hôpital d'Etat de Sarajevo

16 que l'on voit ici.

17 Q. Quelle est la façade que l'on voit sur ce cliché ?

18 R. La façade sud qui regarde vers le mont Trebevic.

19 Q. Est-ce qu'on voit des dégâts sur cette façade du bâtiment ?

20 R. Oui, j'en vois bien sûr. Ils sont visibles. On voit qu'à chaque étage,

21 il y a peu ou prou de dégâts. Mais j'aimerais faire une observation

22 supplémentaire, si vous me le permettez. Cette photo ne date pas de la fin

23 de la guerre car à la fin de la guerre les dégâts étaient beaucoup plus

24 importants. Si vous regardez cette photographie avec attention, vous verrez

25 qu'on y voit encore quelques vitres intactes, toutes les fenêtres ne sont

26 pas brisées. Or, si vous aviez la même photographie pour la fin de la

27 guerre c'est-à-dire fin 1995, cette façade de l'hôpital n'avait plus une

28 seule vitre intacte.

Page 585

1 C'était une petite observation personnelle que je voulais ajouter car

2 j'avais l'habitude de regarder l'état de ce bâtiment et donc je vous livre

3 mon souvenir à ce sujet.

4 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

5 Juges, je demande le versement au dossier de ce cliché, si techniquement la

6 chose est possible.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P47, Monsieur le

9 Président, Messieurs les Juges.

10 M. SACHDEVA : [interprétation] J'en ai terminé de mon interrogatoire

11 principal, Monsieur le Président.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Sachdeva.

13 Il nous reste cinq minutes. Vous pouvez commencer le contre-interrogatoire,

14 Maître Tapuskovic.

15 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

16 Je vais m'efforcer de rassembler ma concentration sur au moins un

17 point et ce sera d'ailleurs pour nous l'occasion de soumettre une nouvelle

18 fois au témoin la carte numéro 6.

19 Je vous remercie, Madame, de m'avoir apporté ce pupitre, mais je

20 voudrais au préalable vous apportez quelques explications, Monsieur le

21 Président, Messieurs les Juges.

22 Contre-interrogatoire par M. Tapuskovic :

23 Q. [interprétation] Le Témoin Mandilovic a fait deux déclarations

24 préalables, dont l'une date du 11 février 2000, à une époque où les

25 périodes pertinentes et les événements pris en compte relevaient de la

26 nécessité de déterminer la responsabilité de

27 M. Galic dans ces événements.

28 La deuxième déclaration préalable faite par le Dr Mandilovic date

Page 586

1 d'il y a quelques jours, à savoir le 5 janvier 2007. Il l'a faite en langue

2 anglaise par visioconférence, si j'ai bien compris, ou par téléphone. Cette

3 déclaration préalable a été consignée par écrit en anglais.

4 Personnellement, je me pose la question de savoir quelles sont les

5 compétences exactes du Dr Mandilovic en langue anglaise ? Est-ce qu'il

6 parle vraiment bien l'anglais ?

7 R. J'ai fait ma déclaration préalable en serbo-croate.

8 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] J'aimerais une explication de la part de

9 l'Accusation car nous avons reçu la déclaration préalable de ce témoin en

10 langue anglaise et c'est seulement plus tard donc vendredi dernier que nous

11 en avons reçu la traduction. Malheureusement, c'est peut-être une erreur de

12 notre part peut-être n'avons-nous pas pris le temps nécessaire pour la

13 transmettre à l'accusé. Mais, en tout cas, savoir qui est responsable n'est

14 pas pertinent. L'objection que nous soulevons en ce moment vient du fait

15 que nous avons besoin d'une explication quant aux circonstances exactes

16 dans lesquelles la déclaration a été faite. Nous demandons ces explications

17 au bureau du Procureur, si c'est possible car il s'agit d'une déclaration

18 faite par téléphone en anglais et le témoin ne parle pas l'anglais.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Sachdeva ?

20 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, aucun problème.

21 Je vais vous apporter mon aide. D'abord, la déclaration préalable n'a pas

22 été faite par téléphone. Elle n'a pas été recueillie par téléphone. Elle a

23 été recueillie, comme vous le savez, par visioconférence, et c'est un

24 enquêteur qui a entendu le témoin avec l'aide d'un interprète à La Haye.

25 Ils ont conversé avec le témoin qui se trouvait au bureau des Nations Unies

26 à Sarajevo en compagnie d'un autre enquêteur et d'un autre interprète.

27 Comme nous l'avons dit, il y a eu donc interprétation simultanée des

28 questions posées et des réponses faites comme c'est le cas lorsque les

Page 587

1 déclarations préalables sont recueillies par le bureau du Procureur ici.

2 Comme c'est toujours le cas, les déclarations préalables sont consignées

3 par écrit en anglais et une fois que le témoin a eu la possibilité de

4 relire le texte avec l'aide d'un interprète, c'est ce qui s'est passé dans

5 le cas dont nous parlons.

6 Nous avons immédiatement communiqué le document à la Défense car

7 l'Accusation savait que le témoin devait arrivé assez peu de temps après,

8 donc nous avons communiqué la version anglaise immédiatement et elle a été

9 envoyée à l'Unité CLSS pour traduction officielle. Dès que la traduction a

10 été terminée, nous l'avons communiquée à la Défense.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Cela s'est passé quand ?

12 M. SACHDEVA : [interprétation] Vous parlez de ?

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] De la version traduite.

14 M. SACHDEVA : [interprétation] Je vais m'enquérir auprès de la commise aux

15 audiences. C'était le 10 janvier de cette année, Monsieur le Président.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

17 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

18 Q. Monsieur Mandilovic, il nous reste quelques petites minutes à peine

19 avant la suspension d'audience, j'aimerais que vous nous montriez une

20 nouvelle fois sur le plan numéro 6 sur l'écran, où se trouve l'hôpital ?

21 R. L'image pour moi n'est pas suffisamment bonne; elle est floue. Sur le

22 plan que vous avez fourni, il est impossible de situer l'hôpital.

23 D'ailleurs l'hôpital est tout autre bâtiment car on voit une espèce de

24 masse noire, et il est absolument impossible de déterminer le petit carré

25 qui correspond à l'hôpital.

26 Q. Mais vous pouvez peut-être le faire approximativement ?

27 R. Oui, je peux le faire approximativement ?

28 Q. Vous avez dit que l'hôpital a surtout été pris pour cible à partir de

Page 588

1 Grbavica. Chacun dans ce prétoire sait où se trouve Grbavica aujourd'hui,

2 et puis, vous avez parlé du cimetière juif. Est-ce que vous pouvez nous

3 montrer où se trouve le cimetière juif ?

4 R. Il est en face.

5 Q. Pouvez-vous, je vous prie, placer le pointeur à l'endroit où se trouve

6 le cimetière juif ?

7 R. Il est ici.

8 Q. Merci. Il est donc juste en dessus de Debelo Brdo, où se trouvaient les

9 forces musulmanes. Savez-vous que les forces musulmanes se trouvaient à

10 Debelo Brdo ?

11 R. Non. Non, Monsieur le Président. Non.

12 Q. Vous ne le savez pas ? Est-ce que je suis en droit de dire --

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Un instant, M. Sachdeva est debout.

14 M. SACHDEVA : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, peut-

15 être que c'est un peu tard, mais le témoin a déclaré il y a quelques

16 instants qu'il était pratiquement impossible pour lui de reconnaître quoi

17 que ce soit sur ce plan, pas seulement l'hôpital, mais quoi que ce soit

18 d'autre également. Donc, je me pose des questions quant à la valeur d'une

19 série de questions qui continue à être posée dans le même d'ordre d'idée, à

20 savoir demander au témoin d'indiquer l'emplacement exact de tel ou tel lieu

21 sur le plan ?

22 Mon collègue de la Défense pourrait peut-être soumettre à

23 M. Mandilovic le même plan que celui qui lui a été soumis par l'Accusation.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La question posée est la suivante :

25 est-il exact que les forces musulmanes se trouvaient à Debelo Brdo ? Savez-

26 vous que les forces musulmanes se trouvaient à Debelo Brdo ? A mon avis, la

27 réponse ne semble pas exiger que le témoin ait un plan sous les yeux.

28 M. SACHDEVA : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président. Je

Page 589

1 parlais des deux questions précédentes, antérieures à celle-ci, et je me

2 rends compte que je me suis levé un peu trop tard.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien. Que le témoin réponde.

4 Ensuite, nous suspendrons l'audience.

5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] J'ai reçu la réponse de la bouche du

6 témoin. Le témoin a dit ne pas savoir. D'ailleurs, je n'insiste pas

7 beaucoup sur ce point. M. Sachdeva avait raison. Je n'insiste pas pour que

8 les témoins nous disent qu'ils savaient que les forces musulmanes se

9 trouvaient à cet endroit. Nous entendrons d'autres témoins qui le

10 confirmeront. Mais je vous demande simplement, Docteur, car nous

11 connaissons la cote topographique de Debelo Brdo -- je vous demande si vous

12 êtes en mesure de confirmer que le cimetière juif se trouvait pratiquement

13 au pied de Debelo Brdo, mais en tout cas en dessous ? Oui ou non ?

14 R. Oui, en dessous, effectivement, de Debelo Brdo, mais je ne sais pas qui

15 tenait les flancs de Debelo Brdo.

16 Q. Je ne vous ai pas demandé cela. Je vous ai parlé de distances. Est-ce

17 que vous êtes déjà allé à Debelo Brdo ?

18 R. Non.

19 Q. Bien que vous vous soyez trouvé à Sarajevo ?

20 R. Non. Je n'y suis jamais allé.

21 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, l'heure est arrivé

22 de suspendre, je crois.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous devons, effectivement,

24 suspendre; 19 heures est déjà dépassé. Nous suspendons jusqu'à demain à 14

25 heures 15.

26 --- L'audience est levée à 19 heures 03 et reprendra le jeudi 18

27 janvier 2007, à 14 heures 15.

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