Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le jeudi 18 janvier 2007

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 14 heures 18.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous avons deux petits points

7 administratifs avant de poursuivre le contre-interrogatoire. J'aimerais

8 demander au greffier de l'audience de nous donner le résultat des travaux

9 qu'il a fait hier à propos de la numérotation de ces fameux dossiers

10 médicaux.

11 Je pense que vous voulez dire quelque chose, Monsieur Sachdeva ?

12 M. SACHDEVA : [interprétation] Oui, tout à fait. Bonjour. C'est quelque

13 chose que je voulais faire hier après la décision qui a été rendue par les

14 Juges à propos de ces fameux certificats. J'avais décidé que je pouvais

15 tout simplement demander à ce que ce soit versé au dossier.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien.

17 M. SACHDEVA : [interprétation] J'ai l'original.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous dites que c'est le certificat

19 qui va être versé au dossier, c'est bien cela ?

20 M. SACHDEVA : [interprétation] Tout à fait.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Il nous faudrait une

22 cote.

23 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, ce sera la cote P48. Pour ce qui est

24 des documents qui sont référencés dans ce certificat, ils seront numérotés

25 de P49 à P82, l'un après l'autre.

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Si j'ai bien compris, les parties

27 ont reçu copie du document montrant la numérotation de ces fameux dossiers.

28 M. SACHDEVA : [interprétation] Tout à fait.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Autre point administratif. Il porte

2 sur le dépôt de plusieurs requêtes aux fins d'obtenir des mesures de

3 protection déposées par l'Accusation. Ces requêtes portent sur deux témoins

4 qui doivent témoigner la semaine prochaine. La première requête a été

5 déposée le 17 janvier. La réponse de la Défense est attendue au 29 janvier

6 mais malheureusement le Témoin 35 doit témoigner lundi matin.

7 Il y a un problème, bien sûr. Le dépôt a été trop tardif, Monsieur

8 Whiting, je vous avertis qu'à l'avenir il faudra que vous fassiez en sorte

9 de déposer vos requêtes en temps et heure afin de permettre à la Défense de

10 répondre et avant, bien sûr, que le témoin ne vienne déposer.

11 Bien sûr, ce type de problèmes est traité de façon courante en prétoire et

12 rapidement.

13 Je vais demander à la Défense si vous pouvez répondre tout de suite.

14 Si vous pouvez répondre demain au moins, ce serait bien, demain à midi,

15 dans ce cas-là on peut retarder. La décision pourra être rendue cet après-

16 midi par oral et on pourra avoir le témoin lundi.

17 Mme ISAILOVIC : Merci, Monsieur le Président. Nous avons décidé de se

18 prononcer tout de suite oralement, par affirmative.

19 Pour les témoins qui sont déjà prévus, pour ne pas poser de problèmes

20 logistiques au Procureur qui rencontre les mêmes problèmes que nous, on est

21 d'accord pour l'instant pour ces deux témoins.

22 Le Procureur a déposé le 11 janvier une requête concernant le

23 témoignage de ces témoins en vertu de l'article 92 ter. Il s'agit des

24 témoins W83 et 36. Pour ces témoins, on est d'accord aussi qu'ils

25 témoignent en vertu de cet article.

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je prends bonne note de tout

27 cela, Madame Isailovic. Il y a une autre requête de mesures de protection

28 qui a été déposée le 18 janvier et qui porte sur le Témoin 62. Votre

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1 réponse est due le 30 janvier. Pouvez-vous nous répondre tout de suite sur

2 celui-là ?

3 Mme ISAILOVIC : Excusez-moi, Monsieur le Président. Est-ce que le Témoin 62

4 est aussi prévu pour les jours qui suivent ?

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, oui. Il est prévu pour lundi

6 matin.

7 Mme ISAILOVIC : Malheureusement, j'ai la liste -- mais bon, il faut peut-

8 être que je regarde. Est-ce que vous m'accordez juste un instant pour que

9 je voie sur la liste le numéro, de quel témoin s'agit-il ? C'est bon.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez tout simplement nous en

11 informer un peu plus tard. Comme cela, on peut immédiatement passer au

12 contre-interrogatoire afin de ne pas perdre de temps.

13 Mme ISAILOVIC : On va faire comme cela, merci.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Whiting, vous avez quelque

15 chose à rajouter ?

16 M. WHITING : [interprétation] Oui, tout à fait.

17 Tout d'abord, je tiens à m'excuser du dépôt tardif des requêtes. Vous

18 savez que ces demandes de mesures de protection ne viennent souvent que

19 quand on commence à planifier les comparutions, les dépositions et à faire

20 venir les témoins. Mais à l'avenir, nous ferons en sorte pour donner

21 suffisamment de préavis à la Défense.

22 Deuxièmement, je tiens à remercier la Défense d'être aussi bien veillant et

23 accommodant en ce qui concerne nos deux requêtes, puisqu'ils nous ont

24 répondu de façon affirmative, à la fois à la requête sur les mesures de

25 protection et sur la requête du 92 ter. Bien sûr, nous le garderons et nous

26 agirons de la sorte envers eux, si nous pouvons le faire.

27 Juste pour le compte rendu, je tiens à dire que les deux témoins qui

28 doivent témoigner au titre de l'article 92 ter sont les 83 et le 35, et non

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1 le 36. C'est juste pour que ce soit sûr.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je tiens à remercier les parties

3 d'être aussi coopératives. C'est bien sûr la tradition du barreau, mais

4 c'est quand même quelque chose que je tiens à souligner, merci.

5 Mme ISAILOVIC : Pour peut-être en finir, on est d'accord aussi pour le

6 témoin. On a vérifié, on est d'accord pour le témoin VW62. Merci.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.

8 Monsieur Tapuskovic, c'est à vous. Vous allez bénéficier d'une heure. Vous

9 avez une heure pour terminer votre contre-interrogatoire.

10 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'espère que

11 je parviendrai à respecter les délais. Je dois m'efforcer d'être aussi

12 efficace que possible. Vous avez apprécié le temps à une heure. J'espère

13 que cela nous suffira.

14 LE TÉMOIN : MILAN MANDILOVIC [Reprise]

15 [Le témoin répond par l'interprète]

16 Contre-interrogatoire par M. Tapuskovic : [Suite]

17 Q. [interprétation] Monsieur Mandilovic, je m'appelle Me Tapuskovic. Je

18 suis avocat à Belgrade, et je suis le conseil de la Défense de Dragomir

19 Milosevic. J'aimerais vous interroger au sujet ce certains thèmes abordés

20 hier, si vous pouvez nous faire part de votre expérience personnelle dans

21 ces domaines ou même si vous avez des éléments d'information de seconde

22 main, éventuellement. Je vous serais reconnaissant de répondre aussi

23 brièvement que possible, car le temps est ici un problème. Je suis certain

24 que vous voudrez bien agir comme je vous le demande.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Témoin, il faudrait que

26 vous répondiez par des mots et pas seulement par un hochement de la tête.

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Je comprends.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelle est votre réponse à la

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1 question qui vient de vous être posée ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai répondu à Me Tapuskovic que je

3 m'efforcerais d'agir selon ses instructions.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai été contraint

6 de modifier un peu l'ordre des questions que j'avais prévues de poser au

7 témoin. Je commencerai par un événement concret qui a une grande importance

8 pour mon client, Dragomir Milosevic. C'est un événement survenu le 8

9 novembre 1994 qui concerne le chef d'accusation numéro 1 dans l'acte

10 d'accusation. C'est le premier incident évoqué dans l'annexe relative aux

11 pilonnages. Ma première question portera sur cet événement.

12 Q. Monsieur le Témoin, vous avez décrit hier ce que je me permettrais de

13 qualifier votre expérience vécue la plus dure pendant la guerre à laquelle

14 vous avez survécu; c'est bien cela ?

15 R. Oui. J'ai décrit cet événement hier en réponse à une question de

16 l'Accusation.

17 Q. En effet. Pouvez-vous dire comment il est possible qu'une telle

18 expérience personnelle, qui justifie tout à fait que l'on se sente très mal

19 à l'aise, comment il est possible que vous ne vous rappeliez pas la date

20 d'un tel événement dans la mesure où c'est le seul et unique événement qui

21 a constitué une menace pour votre vie ?

22 R. Je ne parviens pas à me rappeler de la date. Il y a eu de nombreux

23 événements de cette nature, de nombreux pilonnages de la face sud de

24 l'hôpital. Pour moi, cela a été particulièrement difficile parce que je me

25 trouvais personnellement à l'étage qui a été touché. Je n'ai jamais, dans

26 ma vie, été plus près d'une explosion. C'est cela le problème. Des

27 événements de ce genre, il y en a eu de très grand nombre.

28 Q. C'était un obus qui a frappé l'hôpital ?

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1 R. Oui, il a frappé l'hôpital, en effet.

2 Q. Dans ce cas, je peux raccourcir encore mes questions. Dans la liste des

3 événements qui font l'objet de documents dont l'Accusation a l'intention de

4 faire des pièces à conviction et s'agissant plus particulièrement de cet

5 événement du 8 novembre 1994, l'Accusation vous a montré une série de

6 documents, n'est-ce pas ?

7 R. Quel genre de documents ?

8 Q. Des documents relatifs à une enquête judiciaire.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, les interprètes

10 vous demandent à vous et au témoin de ne pas parler en même temps.

11 Veuillez, je vous prie, ménager une pause entre les questions et les

12 réponses.

13 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

14 Q. Au point 3 de la liste de l'Accusation, on trouve un document relatif à

15 l'événement survenu le 8 novembre 1994. Ce document évoque une enquête

16 judiciaire, évoqué d'ailleurs par l'Accusation hier. Selon ce que je vois

17 dans la liste de l'Accusation, je crois comprendre que c'est un document

18 que l'Accusation vous a soumis, n'est-ce pas ?

19 R. Je n'ai pas vu ce document.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

21 M. SACHDEVA : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, je n'ai

22 pas évoqué la moindre enquête judiciaire hier au cours de mon

23 interrogatoire principal.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous déformez la réalité dans votre

25 description des choses, Maître Tapuskovic.

26 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] C'est possible. Dans ce cas, je vais

27 reformuler ma question.

28 Q. [aucune interprétation]

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1 R. [aucune interprétation]

2 Q. Vous ne savez rien, n'est-ce pas, de l'événement lié à l'obus qui a

3 touché la rue Livanjska et blessé un certain nombre de personnes à cet

4 endroit ?

5 R. Je ne me rappelle pas la date de cet incident.

6 Q. Si vous ne vous rappelez pas de la date, je vous demande si peut-être

7 le 8 novembre 1994 un blessé est arrivé à l'hôpital en compagnie de

8 d'autres personnes ?

9 R. Je viens de dire que je ne me rappelle pas la date. Croyez-moi, pendant

10 trois ans, les blessés ne cessaient d'arriver. Il est absolument impossible

11 de se rappeler de l'arrivée de chaque blessé et de la date de son arrivée.

12 Les pilonnages, les frappes d'obus où les blessés qui présentaient des

13 liaisons dues à des éclats d'obus étaient monnaie courante pendant toute

14 cette période. Même en faisant un très gros effort, je ne peux pas vous

15 dire exactement qui arrivait à l'hôpital et à quel moment.

16 Q. Vous rappelez-vous -- savez-vous que ce jour-là, le jour dont je parle,

17 les combats ont été très intenses et des tirs nourris ont eu lieu à

18 Sarajevo et dans ses environs ?

19 R. C'est possible, mais c'est quelque chose qui arrivait très souvent,

20 croyez-moi, Maître. Les tirs étaient très fréquents.

21 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

22 Juges, j'ai actuellement entre les mains un document de la FORPRONU qui

23 porte sur ce jour-là et sur ces événements survenus le 8 novembre. Il

24 ressort de ce document ce qui s'est exactement passé. Si en tant que

25 témoin, le médecin qui se trouve face à vous ne peut rien dire au sujet de

26 la date et il ne peut pas confirmer l'intensité des combats ce jour-là, je

27 crois qu'il m'est permis, compte tenu du temps qui coure, il m'est permis

28 de faire une proposition - je sais que le Procureur élèvera une objection -

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1 suite à cet incident, une enquête a été diligentée par la police bosniaque

2 et celle-ci a établi que le projectile concerné venait des positions serbes

3 - je parle toujours de l'événement survenu le 8 novembre - et la FORPRONU a

4 établi le contraire, à savoir que le projectile avait été tiré depuis la

5 ville et plus précisément depuis les positions de l'ABiH.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Sachdeva.

7 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, la Défense a raison

8 de penser que nous allons élever une objection. D'abord, le témoin n'a pas

9 confirmé avoir le moindre élément d'information au sujet d'un incident

10 survenu le 8 novembre. Deuxièmement, interrogé au sujet de l'intensité des

11 combats, il a répondu : "Peut-être. Les combats étaient très souvent d'une

12 grande intensité et les tirs étaient très fréquents." Ce qui n'est pas, à

13 mon avis, une confirmation qui a eu des combats ce jour-là en particulier.

14 [La Chambre de première instance se concerte]

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je suis assez d'accord avec

16 l'Accusation quant au fait que le fondement justifiant d'autres questions

17 dans le même ordre d'idée n'existe pas. Si vous souhaitez évoquer cet

18 incident et en parler au témoin, vous pouvez le faire et nous verrons si

19 cela lui rafraîchit la mémoire. Là, la Chambre n'a pas d'objection. Il vous

20 est permis par la Chambre soit de résumer l'incident et de demander au

21 témoin si cela lui rafraîchit la mémoire, pour éventuellement aller plus de

22 l'avant, mais faisons vite.

23 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vais essayer, Monsieur le Président.

24 Q. Selon le rapport que j'ai entre les mains, car les événements de ce

25 jour-là ont sans doute l'objet d'un certain nombre de documents, donc selon

26 ce rapport de la FORPRONU qui est très précis, l'événement est survenu le 8

27 novembre 1994 à 17 heures 25. J'ajouterais, je vous demande si vous vous en

28 souvenez car cela a peut-être fait l'objet d'articles ou de documents, donc

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1 ce même jour, il y a eu deux événements. Le deuxième événement était aussi

2 assez grave. Est-ce que ce que je viens de dire vous rappelle quelque

3 chose ?

4 R. Non, je suis désolé, je ne me rappelle pas.

5 Q. Très bien.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, il faut que vous

7 avanciez. Passez à autre chose.

8 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Bien sûr, Monsieur le Président. Tant pis

9 pour ce document, il sera évoqué à nouveau très rapidement et il en

10 ressortira les conclusions tirées par la FORPRONU. Vous avez raison. Je

11 comprends votre objection. Elle est tout à fait justifiée.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il ne vous appartient pas de

13 témoigner, Maître Tapuskovic.

14 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Ce n'est pas moi qui témoigne, mais le

15 document, Monsieur le Président. Je réutiliserai ce document plus tard.

16 Bien sûr, je sais que ce n'est pas mon rôle ici de témoigner. Les documents

17 parleront de cet événement. Je ne le ferai en aucun cas.

18 Q. Autre sujet, Monsieur le Témoin, la documentation médicale dont il a

19 déjà été question ici. Il y a un point qui m'intéresse à ce sujet : est-ce

20 que chacun des éléments qui constituent ce rapport médical a été vu et

21 analysé par vous, et est-ce qu'il reprend votre diagnostic et vos

22 conclusions, et est-ce qu'il est signé par vous ?

23 R. Vous parlez des documents qui ont été déposés ?

24 Q. Oui.

25 R. J'ai analysé tous ces documents, et je m'en tiens à ce que j'ai déjà

26 dit, à savoir qu'il s'agit de certificats provenant de l'hôpital de

27 Sarajevo.

28 Q. Mais ce ne sont pas des documents où on trouve mention du diagnostic

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1 prononcé par vous. Vous confirmez seulement que vous les avez reçus d'un

2 tiers; c'est bien cela ?

3 R. Oui. D'ailleurs parmi ces 100 documents à peu près, il y en a deux que

4 j'ai personnellement établis, rédigés de ma main, il y a 13 ans.

5 Q. Pour les autres, vous ne pouvez pas confirmer qu'ils sont à 100 %

6 conformes à la réalité ?

7 R. Je confirme qu'ils sont à 100 % conformes à la réalité. Je connais les

8 conclusions qui figurent dans ces documents. Je reconnais également

9 l'écriture de tous les médecins qui les ont signés.

10 Q. Je viens de recevoir un élément d'information de la part de

11 l'Accusation. Il m'a été communiqué hier ou avant-hier. Il y est question

12 du récit que vous avez fait lorsque deux personnes ont été blessées dans

13 les locaux de l'hôpital.

14 R. Oui, bien sûr. J'ai décrit cet incident.

15 Q. Connaissez-vous les noms et prénoms de ces personnes ?

16 R. Non, mais je suis sûr qu'on peut trouver ces noms et prénoms dans les

17 documents de l'hôpital.

18 Q. Vous avez dit que ces personnes avaient été blessées par un projectile

19 qui est entré par la fenêtre.

20 R. Oui, dans l'aile sud de l'hôpital, dans la partie basse du bâtiment,

21 dans l'aile qui regarde vers le mont Trebevic. Ces deux personnes ont été

22 blessées par des projectiles provenant d'armes d'infanterie, par des

23 balles.

24 Q. Très bien. J'aimerais maintenant que nous parlions de ce tramway que

25 vous avez invoqué hier dans votre déposition. Est-ce que l'intensité des

26 tirs contre les tramways a été différente dans les deux incidents dont vous

27 avez parlé hier lorsque je vous ai interrogé sur ce sujet ? Vous avez dit

28 que le deuxième incident s'était produit dans la période qui intéresse le

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1 général Milosevic. Est-ce qu'il y avait une différence d'intensité dans les

2 tirs essuyés par les tramways entre les deux périodes ?

3 R. Les services de tramway ont été réinstallés à Sarajevo très tard. Les

4 tramways allaient de l'est à l'ouest de la ville. Le service a repris

5 relativement tard. Si je me souviens bien, il n'a repris que pendant les

6 négociations de Dayton, au moment le plus intensif de ces négociations, au

7 moment où une trêve a été officiellement décrétée. Je me souviens que cet

8 incident s'est produit dans cette période précisément.

9 Q. Ce minibus qui vous transportait jusqu'à l'autobus, quel était son

10 itinéraire ? Si vous pouvez le montrer sur la carte qui vous a été soumise

11 hier.

12 R. Je peux indiquer l'itinéraire sur la carte si elle est suffisamment

13 claire.

14 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je demande qu'on montre la carte au

15 témoin.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Je reprends l'observation que j'ai faite

17 hier. J'espère qu'il en sera tenu compte, car ce plan puisqu'il s'agit d'un

18 plan, n'est pas clair ni très précis. Il est très difficile de montrer quoi

19 que ce soit sur ce plan, car toutes les rues n'y figurent pas. Je peux vous

20 décrire en grande ligne l'itinéraire suivi par le minibus.

21 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vous demanderais d'essayer d'indiquer

22 quel était l'itinéraire que suivait ce minibus, et je demanderais le

23 versement au dossier du plan avec cet itinéraire. Il faudrait qu'il y ait

24 une marque de l'intervention du témoin.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce plan a-t-il déjà reçu une cote ?

26 M. SACHDEVA : [interprétation] Il en existe une version électronique sur

27 laquelle le témoin pourrait apposer son annotation, mais je vais me

28 renseigner pour la cote.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il s'agit du plan numéro 6.

2 Je vais demander à l'Accusation d'essayer de trouver un plan plus

3 lisible de Sarajevo, car chacun convient ici que le plan qui est affiché à

4 l'écran en ce moment est très peu lisible.

5 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, nous essayerons de

6 nous conformer à vos instructions. Il existe un plan que j'ai utilisé hier

7 et dont je pense qu'il est plus lisible. Peut-être pourrait-il être

8 utilisé. Ma commis aux audiences m'informe qu'il s'agit du document PT2738.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Peut-on nous fournir le document

10 PT2738, qui apparemment est un plan plus lisible. Oui, oui, je comprends

11 qu'il faut quelques instants pour que le document s'affiche à l'écran.

12 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

13 Q. Ce que je vois à l'écran maintenant n'est pas le plan en question.

14 R. Non, je ne sais vraiment pas ce que c'est. Ce que je vois à l'écran, là

15 ce n'est pas le document dont nous avons besoin.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien. Revenons sur le premier plan

17 et demandons au témoin d'apposer ses annotations sur ce plan, s'il y

18 parvient, si cela lui est possible.

19 M. SACHDEVA : [interprétation] Le plan occupe tout l'écran en pleine page

20 actuellement. Peut-être que le témoin pourrait-il l'annoter.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous sommes revenus au plan initial,

22 que l'on voie maintenant sur les écrans.

23 M. SACHDEVA : [interprétation] Ce serait peut-être bon d'agrandir un peu

24 l'image.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien. Ce plan est meilleur.

26 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Oui. Mais, Monsieur le Président, j'ai un

27 certain nombre de questions à poser au sujet du plan, et ce plan ne me

28 conviendra pas.

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, non, je suis désolé. C'est un plan

2 beaucoup plus lisible. Excusez-moi. On y voit l'hôpital et la route que

3 j'empruntais, l'itinéraire suivi par moi pour me rendre à l'hôpital.

4 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

5 Q. D'accord. Montrez-nous cet itinéraire.

6 R. Ici se trouve l'hôpital. Voilà. L'itinéraire correspond à peu près à ce

7 que je viens de dessiner, mais ne me demandez pas une précision totale, car

8 le plan est vraiment très peu lisible.

9 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce

10 document.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

12 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] J'aimerais qu'une cote soit accordée à ce

13 document.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Monsieur le Greffier, peut-on

15 avoir une cote.

16 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

17 Q. Monsieur le Témoin, --

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que la cote a déjà été donnée

19 par le greffe ?

20 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, ce document est

21 admis et constituera la pièce à conviction de la Défense D13.

22 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Puis-je poursuivre ?

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, je vous en prie.

24 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

25 Q. Monsieur le Témoin, cet itinéraire correspond à peu près à celui du

26 tramway également, n'est-ce pas ?

27 R. Non, non. Pas du tout.

28 Q. Mais il est parallèle ?

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1 R. Parallèle, oui. C'est ce qu'on appelait à Sarajevo la route de la

2 liberté. Visiblement, vous ne vous êtes pas trouvé à Sarajevo à cette

3 époque-là. Cet itinéraire était parallèle à la route principale que l'on

4 voie ici, mais elle passait par l'arrière de la caserne du maréchal Tito et

5 elle passait devant la gare ferroviaire. Comme je l'ai déjà dit hier, à

6 tous les carrefours il y avait de grands barrages qui étaient destinés à

7 assurer la protection de la population contre les tireurs embusqués.

8 Q. Je vous remercie. Pouvez-vous me dire maintenant si, lorsque le minibus

9 dans lequel vous vous trouviez empruntait cet itinéraire, on vous a tirés

10 dessus à quelque moment que ce soit ?

11 R. Non, non, jamais.

12 Q. Merci. Hier, répondant aux questions de l'Accusation, et j'espère que

13 l'interprétation était bonne, je vous ai entendu dire que votre hôpital

14 était situé sur une place qui était à 1 000 mètres de la ligne de front.

15 R. Non, non, moins que cela. Je l'ai dit hier, et j'en avais déjà parlé

16 avant. La distance était environ de 500 mètres. Vous confondez, Maître,

17 entre deux distances dont j'ai parlé. J'ai répondu 1 000 mètres pour la

18 distance à vol d'oiseau séparant l'hôpital du marché de Markale. Mais

19 s'agissant de la distance entre l'hôpital et la ligne de front, je m'en

20 tiens à ce que j'ai dit hier, à savoir qu'elle était approximativement de

21 500 mètres à vol d'oiseau.

22 Q. Très bien. Dans votre déclaration préalable que vous avez faite devant

23 les enquêteurs du Tribunal le 11 février, vous avez dit que cette distance

24 était de quelques centaines de mètres et que c'est la raison pour laquelle

25 vous avez dû déménager dans l'aile opposée du bâtiment de l'hôpital, afin

26 d'être plus loin de la ligne de front. Donc, vous avez déménagé votre

27 service d'un endroit à l'autre à l'intérieur de l'hôpital, n'est-ce pas ?

28 R. Nous avons fait deux choses. Nous avons déménagé les patients, les

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1 employés et tout le matériel dans les étages inférieurs du bâtiment, et

2 même dans les sous-sols, afin de pouvoir face aux tirs d'artillerie

3 intenses qui prenaient l'hôpital pour cible.

4 Plus tard, le nombre des patients s'est accru, et nous n'avons plus

5 réussi à faire face. Donc, nous avons été contraints d'installer les

6 personnes les moins gravement atteintes dans les étages inférieurs du

7 bâtiment à partir du rez-de-chaussée.

8 Q. Merci. Je ne voudrais pas perdre de temps, mais j'ai encore quelques

9 questions à vous poser. La place que vous avez montrée sur le plan et pour

10 laquelle vous avez dit que l'hôpital se trouvait sur cette place, vous avez

11 indiqué également qu'elle était située à la distance évoquée par vous par

12 rapport au front, est-ce que ce que vous avez dit signifie que l'hôpital

13 était visé en tant tel et qu'il était face au front en réalité ?

14 R. Oui. L'entrée principale de l'hôpital faisait face au sud.

15 Q. Merci beaucoup. Vous avez déjà parlé de cela hier, je ne vais donc pas

16 m'étendre sur ce sujet. Mais est-ce que Colina Kapa et Debelo Brdo, ainsi

17 que le mont Trebevic évidemment, étaient des reliefs qui dominaient

18 l'hôpital ?

19 R. Qu'est-ce que vous voulez dire par "des reliefs" ?

20 Q. Il y avait deux collines, n'est-ce pas ? Debelo Brdo est une colline,

21 ainsi que l'autre nom que j'ai donné qui correspond aussi à une colline;

22 des collines qui font à peu près 1 000 mètres d'altitude; peut-être 1 000

23 pour l'une et 800 pour l'autre. Je ne me rappelle pas exactement. Mais est-

24 ce que c'étaient bien deux collines qui dominaient l'hôpital ?

25 R. Oui, oui.

26 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] J'aimerais maintenant que l'on soumette au

27 témoin le document D001078, à savoir la déclaration faite --

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le Juge Mindua a une question.

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1 M. LE JUGE MINDUA : Parce que nous parlons de tirs sur l'hôpital, en ce qui

2 concerne la période précisée dans l'acte d'accusation, c'est-à-dire du 10

3 août 1994 jusqu'au 21 novembre 1995, est-ce que vous pouvez nous dire avec

4 quelle régularité les tirs --

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Excusez-moi, il n'y avait pas

6 d'interprétation. Je vous demanderais de répéter votre question.

7 M. LE JUGE MINDUA : D'accord.

8 Je vous demandais de nous dire avec quelle régularité des tirs ont été

9 concentrés sur l'hôpital pour la période qui nous concerne, c'est-à-dire du

10 10 août 1994 au 21 novembre 1995; en d'autres termes, environ combien de

11 tirs y a-t-il eu ? Est-ce qu'il y a eu des périodes où il y en avait plus

12 ou moins ? Est-ce que c'était cyclique ou tout à fait par hasard ? Est-ce

13 que vous pouvez élaborer un tout petit peu, parce que je voyais que la

14 Défense voulait passer plus vite, alors ce point nous intéresse, et

15 évidemment nous dire en passant si, selon vous, c'était délibéré ou pas ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans ma déposition, j'ai déjà dit - et je

17 maintiens ce que j'ai dit - que la période dont nous parlons, entre 1994 et

18 1995, a été plus calme du point de vue du travail qu'il était possible

19 d'effectuer à l'hôpital. Puisque l'hôpital est en pleine ville, cela

20 implique que la vie au quotidien en ville était également plus calme.

21 Ce que je veux dire c'est que s'agissant des tirs contre l'hôpital et

22 contre d'autres parties de la ville, l'intensité de ces tirs dans cette

23 période était inférieure à d'autres moments. Mais nous ne pouvons pas dire

24 que l'hôpital n'a jamais été pris pour cible par ces tirs d'artillerie. Il

25 y a eu des pilonnages, il y a eu des fusillades, mais je ne saurais dire, à

26 la place que j'occupe ici aujourd'hui dans ce prétoire, si ces tirs et ces

27 pilonnages étaient délibérés ou pas contre l'hôpital.

28 La réalité, c'est que l'hôpital a essuyé des tirs, et ceci est repris dans

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1 un certain nombre de documents, notamment des photographies qui permettent

2 de ne pas s'appuyer uniquement sur la mémoire humaine qui manque de

3 puissance. Nous avons des photographies sur lesquelles nous nous appuyons

4 qui sont des documents historiques très importants.

5 M. LE JUGE MINDUA : [interprétation] Merci.

6 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

7 Q. Je parlais tout à l'heure d'un document qui apparaît à l'écran

8 d'ailleurs, et j'aimerais vous interroger au sujet d'un passage qui se

9 trouve en page 3 dans la version B/C/S, et dans la version anglaise du

10 texte, dernier paragraphe. Vous avez ce passage sous les yeux ?

11 R. Oui.

12 Q. Troisième paragraphe, en fait. Dans ce troisième paragraphe de la page

13 3, vous dites, je cite :

14 "Alors que la guerre à Sarajevo se rapprochait de plus en plus, j'ai

15 compris que je devrais prendre la décision de rester ou de partir."

16 R. Oui, je suis d'accord.

17 Q. Je cite : "Aucune pression n'a été exercée sur moi s'agissant de la

18 décision que je devais prendre, et finalement nous avons appris que si nous

19 souhaitions quitter l'hôpital d'Etat, nous pourrions le faire et que nous

20 n'en subirions aucune conséquence négative."

21 R. Oui.

22 Q. Est-ce que ce sont des représentants de l'armée populaire yougoslave

23 qui vous ont dit cela, puisque vous en étiez membre à l'époque en tant que

24 médecin appartenant à un corps médical ?

25 R. Oui, bien sûr.

26 Q. Maintenant, au paragraphe suivant de ce texte, je cite :

27 "Lorsque la JNA a quitté l'hôpital d'Etat, cela n'a créé aucune difficulté

28 pour moi s'agissant de revenir à Sarajevo, car j'étais citoyen yougoslave.

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1 Ma décision a été de rester à Sarajevo, ce que j'ai fait."

2 R. Oui. Je m'en tiens à ce qui est écrit dans ce document.

3 Q. Maintenant, le dernier paragraphe de cette page 3 du document --

4 R. Oui.

5 Q. Vous dites, je cite : "Il m'a été difficile de prendre la décision que

6 j'ai prise, car le fait de rester à l'hôpital alors que l'unité l'avait

7 quitté était synonyme de désertion."

8 R. Oui.

9 Q. Un peu plus loin, vous dites, je cite :

10 "Pour un soldat de métier, c'est une mesure qui n'est pas facile de

11 prendre. Ma décision de rester s'est appuyée sur deux choses." C'est bien

12 cela ?

13 Q. Oui.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Que --

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Pardonnez-moi, vous n'avez pas lu la

16 déclaration jusqu'à la fin.

17 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

18 Q. Je souhaitais faciliter la tâche des interprètes. Je vais vous poser

19 une question à propos de la fin de cette déclaration. Est-ce que ceci est

20 exact de cette citation ?

21 R. Oui, c'est ce que j'ai dit; c'est ce que j'ai signé.

22 Q. "Je suis médecin et c'est à moi de prodiguer des soins médicaux. C'est

23 la raison pour laquelle je suis resté, pour des raisons humanitaires. Si

24 j'étais parti, je partais vers l'inconnu. Je n'étais pas disposé à le

25 faire."

26 R. Je m'en tiens à ce que j'ai dit à l'époque.

27 Q. En d'autres termes -- puis-je vous demander une autre question encore,

28 s'il vous plaît ?

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1 R. Oui, je vous en prie.

2 Q. Si vous étiez parti, cela aurait signifié que vous seriez parti en

3 exil. Vous n'auriez plus d'appartement, plus d'amis. Vous seriez lancé dans

4 l'inconnu. Vous seriez devenu réfugié.

5 R. Oui, peut-être. Ce n'est pas ce que j'ai dit. Cela aurait pu être le

6 cas, mais cela ne correspond pas à ce que j'ai dit.

7 Q. Donc c'était quelque chose d'envisageable. Est-ce que c'était le cas de

8 110 000 personnes, 110 000 Serbes, qui ont dû quitter leurs foyers, leurs

9 maisons, leurs amis, et ces personnes ont laissé dernière elles un certain

10 nombre de parents proches au nombre de 40 000.

11 R. Je peux répondre à cette question, quoique ceci n'a rien à voir avec

12 des questions médicales. Je ne connais pas les chiffres. Les chiffres que

13 vous avez cités sont des chiffres à propos desquels je ne peux faire aucun

14 commentaire. Je sais qu'un certain nombre de Serbes sont restés. Un bon

15 nombre ont décidé de rester. Je sais que personne n'a été contraint.

16 Personne n'a été contraint à rester ou à partir, donc je ne peux pas

17 vraiment être entièrement d'accord avec ce que vous dites.

18 Q. Est-ce que vous pouvez convenir avec moi qu'un bon nombre de Serbes

19 sont partis au moment où les combats ont éclaté ?

20 R. Oui, tout à fait. Je m'en souviens. J'aimerais être très précis à cet

21 égard. Il n'y a pas que les Serbes qui sont partis. Il est important de

22 noter cela, pour avoir l'image d'ensemble des événements qui se sont

23 déroulés en 1992, en avril et en mai. Un nombre très important de Serbes

24 sont partis, mais des Musulmans et des Croates sont également partis. Mais

25 je suis sûr que la communauté internationale dispose de ces chiffres-là.

26 Ces chiffres indiquent clairement que des représentants de différentes

27 communautés ethniques, en Allemagne, en Autriche, aux Etats-Unis et aux

28 Pays-Bas sont venus s'installer dans ces pays-là. Donc, il ne faut pas

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1 avoir une vision trop limitée ici. Il n'y avait pas que les Serbes qui sont

2 partis. Un bon nombre de personnes sont parties.

3 Q. Je n'ai établi aucune distinction à cet égard; je souhaite tout

4 simplement vous poser cette question : est-il exact de dire que c'est

5 surtout des Serbes qui ont quitté Sarajevo lorsque la guerre a éclaté ?

6 R. Oui. C'est difficile à dire, mais je pense que ceci était effectivement

7 le cas.

8 Q. Vous viviez à Sarajevo, vous avez vécu à Sarajevo longtemps ?

9 R. Oui.

10 Q. Et toutes les personnes de différentes religions, de différentes

11 croyances religieuses vivaient là.

12 R. Oui.

13 Q. C'est une ville qui était connue par sa tolérance religieuse, n'est-ce

14 pas ?

15 R. C'est exact, oui.

16 Q. Parmi ces 40 ou 50 000 personnes qui sont restées, ces personnes sont

17 restées malgré le fait que leurs parents proches, leurs pères, leurs

18 enfants sont obligés de rester à Sarajevo. Est-ce que vous êtes au courant

19 de tel cas ?

20 R. Non, je ne connais pas de tels exemples. Je dois vous dire ceci : je

21 travaillais à l'hôpital avec beaucoup de Serbes. Vous pouvez le constater

22 d'après les fichiers des patients et les différents protocoles. Mais ceci

23 ne peut pas être écarté. Je ne peux pas vraiment être d'accord avec

24 l'argument que vous venez d'avancer.

25 Q. Si c'est le cas, pourriez-vous m'expliquer ceci : vous savez qu'ils y

26 vivaient un certain nombre de Serbes à Sarajevo.

27 R. Oui.

28 Q. Sans que cela ne réponde à une quelconque nécessité militaire, pensez-

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1 vous que les Serbes auraient tiré sur Sarajevo en sachant qu'un certain

2 nombre des leurs seraient tués ?

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, le témoin n'est

4 pas en mesure de répondre à ce type de question.

5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Très bien. Nous allons maintenant passer à

6 d'autres questions.

7 Q. Je vais revenir sur ce document. Il y a un point que j'aimerais

8 préciser avec vous. Cela porte sur ce que l'on trouve au premier paragraphe

9 à la page 4 dans la version anglaise. Vous dites que l'hôpital avait été

10 encerclé par les forces patriotiques et qu'un accord avait été conclu en

11 vertu de quoi la Défense serait encore rassurée. Combien de temps cet

12 hôpital a-t-il été assiégé ou bloqué par ces forces patriotiques en

13 Bosnie ?

14 R. D'après moi, cela a duré un mois environ. Mais j'aimerais être plus

15 précis. Il ne s'agit pas d'un siège à proprement parler. Les gens pouvaient

16 rentrer et sortir de l'hôpital. Le personnel de l'hôpital pouvait entrer et

17 sortir à loisir. Il y avait des gardes autour de l'hôpital qui montaient la

18 garde, mais qui n'empêchaient pas les gens de sortir et de rentrer. C'est

19 important de souligner ceci, car lorsqu'on utilise ce terme de "siège", ce

20 terme de siège a une autre connotation.

21 Q. Y a-t-il eu des coups de feu tirés à l'hôpital ? Est-ce qu'il y avait

22 des soldats de la JNA à l'intérieur de l'hôpital ou à l'extérieur ?

23 R. Il y avait des soldats vers la fin du mois d'avril et au début du mois

24 de mai à l'intérieur de l'hôpital. En réalité, c'était une unité spéciale

25 qui venait de Nis, qui était venue de l'aéroport de Pleso à Zagreb. Ils

26 étaient venus pour défendre l'hôpital. Pour autant que je m'en souvienne,

27 c'était une unité composée de 20 hommes.

28 Q. Y a-t-il eu des affrontements ? Y a-t-il eu des victimes parmi les

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1 soldats ?

2 R. Non, non, non. Je ne pense pas. Pour autant que je m'en souvienne, non.

3 Q. J'aurais besoin d'un certain temps pour présenter mes documents.

4 Est-il exact de dire que toutes les casernes en ville avaient été

5 soumises au blocus imposé par les unités patriotiques ?

6 R. Oui, pour autant que je m'en souvienne. Je n'étais pas moi-même dans

7 les casernes. J'étais à l'hôpital, ce qui est assez différent. Je souhaite

8 souligner cela. Je me suis trouvé à l'hôpital jusqu'au 3 mai, donc je

9 n'étais pas là lorsque l'hôpital a été placé sous leur contrôle. Je sais

10 cela des médias et des récits d'autres personnes.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Sachdeva.

12 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaitais

13 simplement qu'on apporte une clarification ici. J'aimerais savoir de quelle

14 année il s'agit, si le témoin parle du mois de mai et du mois d'avril.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Demandez au témoin de répondre à

16 cette question.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] 1992.

18 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je faisais référence à cette époque-là

19 également, lorsque les combats ont commencé. Je souhaite verser au dossier

20 le document DD00-0166. C'est en réalité un document qui émane du

21 secrétariat fédéral de la Défense nationale, qui est destiné à la

22 présidence de l'ABiH. C'est un document qui est en cours de traduction.

23 C'est un document très court. Je souhaite que le témoin consulte de façon à

24 ce que je puisse poursuivre mon contre-interrogatoire.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous en prie, et faites en sorte

26 que le témoin puisse voir le document.

27 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je souhaite simplement poser une seule

28 question au témoin à propos de ce document, où on peut lire ce qui est :

Page 613

1 Q. "Compréhensible" - nous sommes au troisième paragraphe - "C'est

2 compréhensible de recueillir l'approbation des conditions que nous avons

3 conclues lors des réunions à Skopje."

4 R. Je ne vois pas ce paragraphe.

5 Q. C'est le paragraphe 3 à la première page.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Sachdeva.

7 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite

8 simplement savoir pourquoi, quel est le fondement avancé qui justifie que

9 l'on montre ce document au témoin.

10 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] C'est précisément en raison de ce qu'a dit

11 le témoin lorsqu'il a parlé du fait que toutes les casernes étaient

12 encerclées par les forces patriotiques, et je crois qu'une explication

13 était justifiée. Je souhaitais savoir quelles étaient ces forces

14 patriotiques.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agissait des forces de la Défense

16 territoriale de l'ABiH.

17 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

18 Q. Ceci est une question à part. Cette lettre évoque les casernes qui ont

19 été encerclées; c'est vrai ou non ?

20 R. Je ne me suis pas retrouvé dans ces casernes, Monsieur Conseil de la

21 Défense.

22 Q. Vous m'avez dit avoir entendu parler de cela.

23 R. Oui, oui, oui, oui.

24 Q. Merci.

25 R. Je vous en prie.

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le témoin a dit qu'il ne se trouvait

27 pas dans la caserne, donc il ne peut pas confirmer la suggestion que vous

28 avancez.

Page 614

1 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Mais il en a entendu parler de façon

2 indirecte.

3 Q. Est-ce que ce qui est arrivé aux casernes est arrivé aux hôpitaux

4 également, à votre hôpital; autrement dit, qu'ils ont été encerclés par ces

5 forces patriotiques pendant un mois environ ? La même chose s'est produite

6 au niveau d'autres installations à Sarajevo, comme les installations

7 militaires ?

8 R. Je ne l'ai pas vu de mes propres yeux, mais je crois que c'est

9 effectivement le cas.

10 Q. Merci.

11 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je vais vous demander

12 - car nous avons des difficultés techniques pour lesquelles je ne suis pas

13 responsable - et je souhaite que vous me disiez combien de temps il me

14 reste pour mon contre-interrogatoire.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne vois pas que nous ayons des

16 difficultés techniques, et je pense qu'il n'y en a pas eu au cours de votre

17 contre-interrogatoire. Veuillez poursuivre. D'après mes calculs, il vous

18 reste sept à dix minutes.

19 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Nous avons perdu sept à huit minutes avec

20 cette carte. Je pense que, dans ces circonstances-là, je vais trouver -- il

21 m'est difficile de rattraper ce temps.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Donc, je vous accorde cinq minutes

23 supplémentaires, que vous pouvez rajouter au temps qui vous est accordé.

24 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] L'accusé vient de me souffler quelque

25 chose.

26 Q. Cet hôpital de jour était en réalité un hôpital militaire, n'est-ce

27 pas, à l'époque où ces événements se déroulaient, et cet hôpital a été

28 encerclé parce que c'était une installation, un hôpital militaire.

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1 R. Je n'ai jamais nié cela. L'hôpital était placé sous la Défense

2 territoriale de l'ABiH. Cet hôpital n'a pas été encerclé, parce qu'un

3 encerclement, c'est autre chose. Les gens rentraient et sortaient librement

4 lorsqu'ils devaient avoir des consultations. Mais c'est vrai que l'hôpital

5 était surveillé.

6 Q. Est-ce que les soldats pouvaient partir ?

7 R. Quels soldats ?

8 Q. Des soldats de la JNA.

9 R. Oui, ils étaient libres de rentrer ou de sortir.

10 L'INTERPRÈTE : L'interprète précise que les deux personnes parlent en même

11 temps.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Témoin, Docteur

13 Mandilovic et Maître Tapuskovic, vous parlez en même temps. Vous parlez la

14 même langue, et les interprètes ont du mal à vous traduire. Je vous demande

15 de marquer une pause entre les questions et les réponses.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous prie de m'excuser, Monsieur le

17 Président. Je vais faire de mon mieux.

18 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Nous avons énormément de choses à voir

19 ensemble, mais je vais devoir passer à un autre document, le document

20 DD000192.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Poursuivez, je vous en prie.

22 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Ceci est quelque chose que nous avons

23 reçue, mais pour laquelle nous n'avons pas pu nous préparer,

24 malheureusement. C'est la raison pour laquelle mon contre-interrogatoire

25 est aussi long.

26 C'est la déclaration qu'il a faite le 5 janvier de cette année, et

27 nous n'avons absolument pas pu l'évoquer avec l'accusé, ni établir des

28 comparaisons entre ces deux déclarations, ce qui nous a mis dans une

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1 situation très difficile et a rendu notre tâche très difficile pour ce qui

2 est du contre-interrogatoire de ce témoin. Je vais essayer de résumer et je

3 vais essayer de comparer les deux déclarations, car nous les avons reçues à

4 la veille du commencement du procès, et nous n'avons rien pu vérifier.

5 Je vais terminer mon contre-interrogatoire, mais je vais assortir mon

6 propos de conditions. Je souhaite que nous puissions consulter notre client

7 à un autre moment pour pouvoir aborder ceci avec M. Mandilovic lorsqu'il

8 aura le temps de revenir, parce que pour nous cela n'est pas une façon de

9 mener un contre-interrogatoire comme il se doit, puisque nous n'avons qu'un

10 temps limité qui nous a été accordé. C'est la raison pour laquelle je me

11 trouve face à ces difficultés. C'est à vous évidemment d'en décider.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais pourquoi soulevez-vous cette

13 question maintenant seulement, Maître Tapuskovic ? Vous n'en informez la

14 Chambre que maintenant. Vous ne dites que maintenant que vous avez reçu une

15 seconde déclaration à la veille du procès. Si vous avez bien géré votre

16 temps, vous auriez dû porter ceci à l'attention de la Chambre avant.

17 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] J'ai déjà soulevé cette question hier, et

18 je pensais avoir suffisamment de temps aujourd'hui, mais je ne voulais pas

19 rendre les choses difficiles. Mais c'est la première question que j'ai

20 abordée hier. J'ai dit que cette déclaration avait été recueillie par

21 vidéoconférence, ce qui nous avait placés dans une position difficile, car

22 nous ne pouvions pas mettre le doigt sur les choses importantes et faire

23 des comparaisons entre les deux déclarations. Dans une déclaration, il

24 parle d'une époque donnée et dans l'autre déclaration, il parle de Dragomir

25 Milosevic. C'est la raison pour laquelle nous avons ces difficultés. Je

26 l'ai évoqué hier.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez poursuivre votre contre-

28 interrogatoire.

Page 617

1 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vais devoir m'y confirmer. J'ai déjà

2 abordé cette autre déclaration, et si vous dites que je dois finir, je vais

3 finir maintenant. Il me semble que je ne vais pas pouvoir poser un certain

4 nombre de questions que j'avais l'intention de lui poser, mais je vais en

5 tout cas lui poser cette question-ci :

6 Q. Monsieur, vous avez évoqué un certain nombre de choses qui ont changé

7 par rapport à l'époque que vous décrivez.

8 R. Est-ce que vous voulez parler des années 1994 et 1995 ?

9 Q. Oui. Ce qui m'intéresse plus particulièrement, c'est l'époque qui

10 correspond à l'été de l'année 1995 et les événements qui se sont déroulés

11 au cours de l'été de l'année 1995.

12 R. J'en ai parlé hier et j'en ai déjà parlé. J'ai dit que l'année 1995

13 était l'année au cours de laquelle la population était épuisée et très

14 affaiblie sur un plan psychologique. Mais je ne peux pas dire que l'année

15 1995, si on la compare aux autres années, qu'elle était plus calme. Il y

16 avait des plus longues périodes où il n'y avait pas de coups de feu tirés.

17 Sans doute, c'est la pression de la communauté internationale. Nous avions

18 davantage de nourriture. Mais je n'ai jamais dit - et c'est quelque chose

19 que je confirme aujourd'hui - je n'ai jamais dit qu'il n'y avait pas de

20 combats intenses et qu'il n'y avait pas un pilonnage intense de la ville de

21 Sarajevo.

22 Dans ma déclaration, si vous vous en souvenez, j'ai évoqué deux événements

23 qui se sont déroulés en 1995, hier.

24 Q. Ma question ne portait pas là-dessus. Vous n'avez pas répondu à ma

25 question. Ce qui m'intéresse plus particulièrement, c'est dans ce sens que

26 j'ai posé ma question, c'est l'été de l'année 1995, mai, juin et juillet.

27 J'aimerais entendre quelque chose à ce sujet, car c'est la seule question

28 que je peux encore vous poser.

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1 R. Au cours de ces mois-là, le souvenir le plus important que j'ai, c'est

2 quelque chose que j'ai dit hier. L'élément le plus marquant dans mon

3 souvenir, c'est le 16 juin 1995. A l'aube de cette journée-là, il y a eu

4 une tentative qui visait à lever le blocus par les forces qui se trouvaient

5 à l'intérieur de la ville.

6 Q. Ceci s'est passé après une période relativement calme. Est-ce que vous

7 saviez que la trêve avait été imposée depuis le mois de janvier ?

8 R. Non, non, non, non. Ces documents d'ordre politique ou militaire ne

9 m'étaient pas accessibles à ce moment-là. Je n'aurais pas pu être au

10 courant de cela.

11 Q. Pendant l'été 1995, pouviez-vous constater que les tirs venaient des

12 deux côtés et que les fusillades avaient éclaté, et que l'intensité était

13 la même de part et d'autre ?

14 R. C'est difficile à dire. Je me trouvais à un endroit en particulier, et

15 le périmètre de la ville correspond à 60 kilomètres environ. Je ne sais pas

16 qui a commencé à tirer. Je ne suis pas compétent en la matière. Je ne me

17 suis pas trouvé sur les lieux. Je ne suis pas en mesure de vous en parler.

18 Tout ce que je puis vous dire c'est qu'à cette date-là, j'ai entendu des

19 explosions très fortes en ville; un nombre important d'obus sont tombés sur

20 la ville les 16, 17 et 18 juin, et le pilonnage était très intense au cours

21 de ces journées-là.

22 Q. Vous ne savez pas ce qui s'est passé du côté serbe ?

23 R. Je ne sais pas comment je pourrais vous dire quoi que ce soit sur ce

24 qui s'est passé du côté serbe.

25 Q. Mais au paragraphe 14 de votre déclaration, lorsque je vous ai posé la

26 question, vous avez dit ne rien savoir à propos d'événements politiques ou

27 militaires. N'avez-vous pas dit dans votre déclaration au paragraphe 14 --

28 peut-être que nous pourrions le regarder. A la page 4. Je vois maintenant

Page 619

1 que ce paragraphe est affiché sur nos écrans.

2 Vous avez dit que l'on parlait de paix et que chacun espérait que la

3 paix revienne, ensuite cette offensive a été lancée.

4 R. Est-ce que vous voulez parler du paragraphe 14 ? On peut lire, j'étais

5 de permanence lorsqu'il y a eu l'attaque contre Markale. Je me trouvais à

6 l'hôpital, et tout le monde était en état de choc.

7 Q. La question que je vous pose c'est ceci. Vous dites : "A ce moment-là

8 les gens étaient épuisés par la guerre et on parlait beaucoup de la paix."

9 C'est la question que je vous pose, et les événements de l'été sont arrivés

10 après.

11 R. Tout à fait.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La Chambre s'est penchée sur la

13 question. Nous allons vous permettre de poursuivre jusqu'à la pause si vous

14 avez besoin de ce temps supplémentaire.

15 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaitais

16 simplement vous poser une question, puisque nous parlons de cela. La date

17 du 16 juin, le paragraphe 14 parle en fait de l'incident de Markale qui a

18 eu lieu au mois d'août 1995. Je souhaite que le conseil de la Défense nous

19 précise ce point, s'il vous plaît.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelle est la date que vous avez à

21 l'esprit, Maître Tapuskovic ?

22 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je parle de l'été entier, de tout l'été de

23 1995. Je sais très bien ce qui s'est passé à Markale. Mais je tiens à

24 ajouter une petite chose, et je ne le répèterai pas d'ailleurs. Quand je

25 traite de documents, bien entendu, je sais que nous n'avons pas beaucoup ce

26 temps et je ne voudrais pas que le témoin ait à lire tout le document en

27 entier et ensuite lui poser des questions. Je voudrais juste qu'il

28 s'intéresse aux passages qui m'intéressent, ensuite je lui pose des

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1 questions. Si je ne pose pas la question correctement au témoin,

2 l'Accusation a tout le loisir de corriger cela et d'y remédier lors des

3 questions supplémentaires.

4 En ce moment, je pense que l'on est en train de transgresser mon

5 droit à poursuivre mon contre-interrogatoire de la façon qui me sied. Si

6 j'ai cité quelque chose de façon erronée, si j'ai fait quelque chose qui

7 n'est pas correcte, l'Accusation pourra toujours le traiter lors des

8 questions supplémentaires. Or, je n'ai pas cité de façon erronée le témoin

9 du tout, puisqu'ici nous parlons de Markale. Ma question au témoin était

10 qu'au même paragraphe --

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] De toute façon, je tiens quand même

12 à intervenir à ce propos, puisque les questions directrices ont un but bien

13 spécial et toute partie au cours des interrogatoires et contre-

14 interrogatoires a le droit de soulever une objection à la question qui est

15 posée, et non pas forcément parce que la question porte sur quelque chose

16 qui doit être uniquement traité dans des questions supplémentaires. Vous

17 pouvez poursuivre maintenant.

18 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Très bien.

19 Q. Voici ma question : le paragraphe 14 dit : "En 1995, les gens étaient

20 totalement épuisés par la guerre et il y avait beaucoup de rumeurs de

21 paix." C'est ce qui est écrit ici. Voici ma question : est-il vrai qu'il y

22 avait des rumeurs de paix et que les gens disaient bel et bien : "De toute

23 façon, nous allons bientôt avoir la paix" ?

24 R. Oui, les gens voulaient la paix. Ils voulaient sincèrement avoir la

25 paix. Mais il n'y a pas eu de paix avant les accords de paix de Dayton,

26 avant que ces accords ne soient véritablement appliqués.

27 Q. Vous dites quand même qu'il y avait des rumeurs de paix.

28 R. Bien sûr.

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1 Q. Mais pendant quatre mois, y a-t-il eu cessation des hostilités; vous le

2 savez ?

3 R. Non, absolument pas. Il n'y a pas pu avoir quatre mois de paix continue

4 à Sarajevo. Je ne peux pas être d'accord avec vous. Il était impossible

5 d'avoir une période de paix aussi longue, pendant quatre mois. Il y avait

6 peut-être quelques jours où il y avait un cessez-le-feu, puis ensuite les

7 hostilités reprenaient et s'envenimaient. La communauté internationale

8 intervenait à nouveau et essayait de calmer un petit peu le jeu. Quatre

9 mois, c'est extrêmement long, et je ne peux absolument pas être d'accord

10 avec votre estimation.

11 Q. Mais vous dites qu'il y avait des rumeurs de paix au cours de cette

12 période.

13 R. Oui, mais ce n'est pas la même chose. Les gens pensaient, on parlait de

14 paix. Il y avait des rumeurs de paix. On espérait la paix, mais il n'y

15 avait pas la paix.

16 Les gens suivaient tout ce qui se passait dans les médias. Il y avait

17 des observateurs internationaux, des journalistes à Sarajevo en grand

18 nombre. Sarajevo était pratiquement au centre du monde. Il y avait beaucoup

19 de pression. Les gens parlaient de la paix qui était absolument

20 indispensable et qui devait arriver.

21 Q. Qu'est-ce qui s'est passé ensuite ?

22 R. Je ne sais pas ce qui s'est passé. Tout ce que je sais, c'est qu'il y a

23 eu des combats, qu'il y a eu une escalade. Ensuite, par les médias, à la

24 fois par les médias nationaux et les médias internationaux, nous avons

25 appris qu'il y avait une tentative de lever le siège de Sarajevo. Mais à

26 l'époque, on ne le savait pas puisqu'on avait très peu de liberté de

27 mouvement. Je n'avais pas accès quand même aux hautes sphères politiques.

28 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, peut-être ai-je

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1 épuisé tout mon temps, ou est-ce que vous me laissez encore quelques

2 minutes de grâce ?

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous avais prévenu il y a peu de

4 temps que nous allons vous permettre d'aller jusqu'à la pause. Donc, vous

5 avez encore sept minutes, puisque la pause sera à 15 heures 45. Cela dit,

6 si vous avez terminé, nous allons passer aux questions supplémentaires.

7 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

8 Q. Monsieur le Témoin, vous pouvez dire au vu de ces documents quand même,

9 que la situation en ce qui concerne de l'approvisionnement en eau et

10 l'alimentation de l'électricité, elle s'était un petit peu améliorée.

11 R. Oui.

12 Q. Savez-vous que lors de cette période l'adduction d'eau provenant de la

13 Neretva fonctionnait assez bien par câble ?

14 R. Je ne savais pas vraiment. Je n'étais pas très au courant de ces

15 détails.

16 Q. A la fin de cette période, depuis la fin de 1994 et au-delà, les

17 parties qui avaient le plus grand besoin d'alimentation électrique ne

18 souffraient plus de coupures l'électricité. En tout cas, c'est qu'a dit le

19 président Izetbegovic.

20 R. Je ne sais pas du tout qui a dit cela. Tout ce que je sais, c'est qu'en

21 tant que citoyen dans ma maison et ainsi qu'en tant qu'employé de

22 l'hôpital, je ne savais pas tout et je n'étais pas dans ces cercles

23 autorisés, donc je ne peux pas vraiment vous répondre.

24 Q. Monsieur, j'ai reçu des centaines de pages qui sont ajoutées à votre

25 déclaration, et tous ces documents sont en serbe. Bien sûr, je ne peux pas

26 les verser au dossier de ce fait. Mais il y a un document qui porte sur le

27 début de 1995, et il y est dit que la plupart des problèmes de coupures

28 d'électricité venaient du climat extrêmement rigoureux qui avait eu lieu.

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1 Il y avait eu beaucoup de neige cette année-là, et c'est pour cela qu'il y

2 avait autant de coupures d'électricité, parce que les centrales électriques

3 ne pouvaient pas fonctionner.

4 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vais verser ce document de toute façon,

5 mais au travers d'un autre témoin, à un moment ultérieur. Mais je voulais

6 quand même que nous nous penchions un petit peu sur cette période de

7 l'année 1995. Souvent, le réseau ne fonctionnait plus.

8 Je vois que l'Accusation aimerait soulever une objection. Ils ont

9 l'air de penser que ce je dis n'est pas correct.

10 Q. Mais je vous demande si vous étiez au courant ou non de ces

11 problèmes de réseau électrique ?

12 R. Monsieur Tapuskovic, c'est la FORPRONU qui pourrait vous répondre,

13 puisque ce sont eux qui interprétaient la situation à tout moment.

14 Q. Oui. Mais, je vous ai lu quelque chose qui provient d'un document qui a

15 été rédigé par les équipes techniques et civiles des services publics de

16 Bosnie-Herzégovine.

17 R. Je ne suis pas au courant du document dont vous venez de me parler.

18 Tout ce que je sais, c'est ce que j'ai dit, et je maintiens mes propos.

19 Q. Maintenant, je ne sais pas très bien comment procéder. J'ai encore une

20 douzaine de questions à poser, mais je ne sais pas laquelle serait la plus

21 opportune. Je préfère donc m'en tenir là. Si ceci cause préjudice éventuel

22 à mon client, j'en assume pleinement la responsabilité.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Tapuskovic.

24 Monsieur Sachdeva, avez-vous des questions supplémentaires ?

25 M. SACHDEVA : [interprétation] Non, pas de questions supplémentaires,

26 Monsieur le Président.

27 Questions de la Cour :

28 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Mandilovic, j'ai une

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1 question à vous poser, une question dont le but est de mieux comprendre le

2 véritable problème qui se pose. Puisque dans la dernière partie du contre-

3 interrogatoire du conseil de la Défense, il semble qu'il y a des

4 incertitudes qui planent sur les conditions de vie qui prévalaient à

5 Sarajevo lors de la première moitié de l'année 1995, je trouve que votre

6 déclaration n'est pas très claire à ce sujet d'ailleurs, puisque d'un côté

7 vous avez dit à un moment que vous pensiez que 1995 avait été une année

8 relativement calme par rapport aux années précédentes. Donc, l'impression

9 que cela laisse, c'est que finalement les choses s'arrangeaient au début

10 1995, en tout cas.

11 Cela dit, vous avez aussi dit que le jour de votre anniversaire, qui

12 est le 16 juin, l'ABiH a essayé de briser l'encerclement. De ce fait, il y

13 a eu représailles venant de l'autre côté. Nous avons aussi parlé de

14 l'incident Markale II, qui a eu lieu en août.

15 J'aimerais vous poser la question suivante : ai-je vous bien compris

16 quand vous avez dit qu'au moins jusqu'à l'été 1995, les choses à Sarajevo

17 semblaient s'arranger, la situation était plutôt plus calme, plus

18 tranquille, que l'année précédente, 1994 ? Je pose cette question, et je

19 comprends bien qu'il n'y a jamais eu de période totalement calme. Il y

20 avait toujours les hostilités, il y avait pilonnages constants, il y avait

21 des tirs constants, mais j'ai cru comprendre qu'il semblait qu'au printemps

22 1995, les choses avaient l'air un peu plus calmes que l'année précédente.

23 Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous en dire un petit peu plus sur ce qui

24 se passait à Sarajevo au début 1995.

25 R. Je suis tout à fait d'accord avec vos propos et avec votre évaluation

26 de la situation, et je maintiens tout ce que j'ai dit. En effet, 1995, pour

27 toutes les personnes encerclées dans Sarajevo, c'était une année plus

28 facile à vivre. Mais, personnellement, j'apprécie beaucoup la façon dont

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1 vous avez présenté les choses, car il y avait en effet des combats

2 incessants en ville.

3 C'est ainsi, je voulais juste comparer 1992 et 1993 avec la fin de

4 1994 et l'année 1995. Quand on compare ces deux périodes, fin 1994 début

5 1995, c'était quand même des périodes plus faciles à vivre que les deux

6 autres années, 1992 et 1993. C'est certain. Mais il n'y a jamais eu de

7 situation tranquille où il n'y avait plus de danger; à aucun moment. Si

8 vous vouliez survivre, il fallait respecter certaines règles qui existaient

9 et que l'on s'était fixées. Il y avait des pénuries, des pénuries de tout.

10 Messieurs les Juges, j'ai déjà parlé des routes bleues, mais

11 j'aimerais y revenir quand même. Il y avait ces fameuses routes bleues qui

12 s'ouvraient, puis ensuite elles se fermaient pour des raisons inconnues de

13 tous. Quand les routes étaient ouvertes, on pouvait avoir un peu plus

14 d'approvisionnements, il y avait plus de nourriture, plus de fournitures

15 médicales, et cetera. En 1992 et 1993, il n'y avait pas de routes bleues.

16 On était totalement coupé du monde.

17 Mais je pense que vous avez vraiment été extrêmement juste dans vos

18 propos, car, en effet, il y avait toujours des combats, à tout moment.

19 Certes, il y avait parfois des interludes de calme entre deux escarmouches

20 ou entre deux manches de combat, si je puis dire. Si vous voulez parler en

21 termes pourcentage, il est vrai qu'il y avait, en 1994 et 1995, plus de

22 pourcentage de jours tranquilles que lors des années 1992 et 1993.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Mandilovic, vous avez

24 terminé votre déposition et vous pouvez maintenant quitter le prétoire.

25 Nous allons, de plus, faire une pause, et nous reprendrons avec un

26 autre témoin.

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

28 [Le témoin se retire]

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1 --- L'audience est suspendue à 15 heures 44.

2 --- L'audience est reprise à 16 heures 07.

3 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il faudrait que le témoin fasse sa

5 déclaration, s'il vous plaît.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

7 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

8 LE TÉMOIN: THORBJORN OVERGARD [Assermenté]

9 [Le témoin répond par l'interprète]

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Docherty, vous avez la

11 parole.

12 M. DOCHERTY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

13 Interrogatoire principal par M. Dochtery :

14 Q. [interprétation] Vous pouvez vous asseoir, Monsieur. Tout d'abord,

15 pourriez-vous nous dire exactement quel est votre nom ?

16 R. Je m'appelle Thorbjorn Overgard.

17 Q. Quelle est votre profession, s'il vous plaît, Monsieur Overgard ?

18 R. Je suis commandant de l'armée de l'air norvégienne.

19 Q. Quel est votre poste à l'heure actuelle au sein de la force de l'armée

20 de l'air norvégienne ?

21 R. Je suis commandant de base, de la base de l'OTAN la plus au nord de

22 l'Europe.

23 Q. Quel âge aviez-vous quand vous êtes devenu militaire ?

24 R. J'avais 17 ans.

25 Q. Avez-vous toujours été dans la même armée ?

26 R. J'ai commencé d'abord dans l'infanterie de l'armée de terre.

27 Q. Quand est-ce que vous êtes passé à l'armée de l'air ?

28 R. Je suis resté six ans avant de passer à l'armée de l'air.

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1 Q. En quelle année avez-vous rejoint l'armée de l'air ?

2 R. En 1992 [comme interprété].

3 Q. Avez-vous toujours été dans l'armée de l'air depuis lors ?

4 R. Oui.

5 Q. Quelques questions maintenant sur votre éducation. Avez-vous été à

6 l'université ?

7 R. Non, pas vraiment. Je suis allé à l'école de guerre.

8 Q. Rapidement, pourriez-vous nous dire quel est le rôle joué par l'école

9 de guerre dans la formation des officiers norvégiens ?

10 R. Il s'agit de l'école principale qui vous prépare à vos fonctions

11 d'officier supérieur, c'est ainsi qu'on peut commencer sa carrière.

12 Q. Si j'ai bien compris, il faut passer par l'école de guerre pour être

13 officier supérieur ?

14 R. Oui.

15 Q. Quel est le temps que l'on passe à l'école de guerre ?

16 R. Un an.

17 Q. Vous, vous avez quand même énormément de métier dans l'armée.

18 Connaissez-vous bien les armes légères de l'infanterie ?

19 R. Bien sûr.

20 Q. Connaissez-vous le type de munitions qui s'appelle les munitions de

21 7,62 ?

22 R. Oui.

23 Q. Pourriez-vous nous dire exactement à quoi font allusion ces chiffres

24 7,62 ?

25 R. Ce 7,62, c'est la taille de l'enveloppe de la balle. C'est la longueur

26 en fait de l'enveloppe dans laquelle est insérée la balle.

27 Q. Quel type d'armes utilise ce type de munitions, en général bien sûr ?

28 Je voudrais savoir de quel type d'armes on parle.

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1 R. On parle d'armes légères dont seraient équipés des fantassins.

2 Q. Connaissez-vous aussi les armes de calibre 12,7 ?

3 R. Oui.

4 Q. Là encore, les 12,7, j'imagine que c'est la longueur de l'enveloppe ?

5 R. Oui, tout à fait.

6 Q. Quel type d'armes utilise ce type de munitions ?

7 R. Au début, c'était uniquement les mitrailleuses lourdes, mais récemment

8 nous avons vu des snipers avec cela.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

10 Mme ISAILOVIC : J'ai l'impression que vraiment, cela va tellement vite

11 entre eux parce que le témoin et M. Docherty sont anglophones, cela va

12 tellement vite que ma traduction en français n'est pas très bonne. Merci.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Nous allons demander au

14 conseil et au témoin de ménager une pause entre question et réponse.

15 M. DOCHERTY : [interprétation] Si j'ai bien compris, nous parlons la même

16 langue, il s'agirait donc de parler un peu moins vite, et il est question

17 de ménager une pause.

18 Q. Monsieur Overgard, vous êtes officier et de ce fait vous êtes officier

19 de l'armée de l'air, connaissez-vous les types d'armes qui peuvent être

20 largués de façon aérienne ?

21 R. Oui.

22 Q. Avant octobre 1994, aviez-vous travaillé en tant qu'observateur

23 militaire des Nations Unies, OMNU ?

24 R. Non. J'ai rejoint le Corps des observateurs militaires des Nations

25 Unies en Finlande en mai 1994.

26 Q. Quand vous dites que vous avez rejoint ce cours pour les OMNU en

27 Finlande, qu'est ce que ce cours exactement ?

28 R. C'est un cours qui permet de recevoir un enseignement, c'est

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1 principalement dirigé aux officiers scandinaves. Mais il y d'autres pays

2 des Nations Unies qui sont aussi présents.

3 Q. Au cours d'une guerre, quel est le travail d'un OMNU ?

4 R. Il doit observer, enquêter et faire rapport directement au Conseil de

5 sécurité.

6 Q. Est-ce dangereux ?

7 R. Oui, puisqu'on n'a pas d'armes, et on doit vivre dans les villages avec

8 les villageois, dans la même zone qu'eux, on est donc confrontés aux mêmes

9 problèmes que les habitants du pays.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] A la ligne 13, dans la question, il

11 y a une référence au mot "owner" en anglais, et cela devrait être

12 "observer", observateur, et non pas "owner."

13 M. DOCHERTY : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

14 Q. Donc, avez-vous servi en tant qu'observateur en Bosnie ?

15 R. Oui.

16 Q. Où exactement ?

17 R. J'ai commencé d'abord à être formé à Zagreb. Ensuite, j'ai été envoyé

18 à Sarajevo après six jours à Zagreb. A Zagreb, en fait, on a juste vérifié

19 que mes compétences étaient suffisantes pour être OMNU.

20 Q. Pourriez-vous nous dire à quelle période vous avez travaillé en tant

21 que OMNU à Sarajevo ?

22 R. Je suis arrivé à Zagreb le 22 octobre 1994, et nous sommes repartis de

23 Zagreb à nouveau le 3 novembre 1995.

24 Q. Etiez-vous volontaire pour ce travail ou est-ce que c'est l'armée de

25 l'air norvégienne qui vous a envoyé et qui vous a muté en Bosnie ?

26 R. J'étais volontaire, puisqu'il me semblait que c'était extrêmement

27 intéressant de savoir exactement comment agir dans le cadre d'une guerre.

28 Q. Je vais poser quelques questions sur la formation que vous avez reçue

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1 en Finlande au début 1994. Pourriez-vous nous dire exactement quels étaient

2 les sujets qui étaient pris en compte lors de la formation ?

3 R. Différents types d'enquêtes sur différents événements, enquêtes sur des

4 accidents, sur des tirs, et analyse des cratères.

5 Q. Vous parlez "d'analyse de cratères". Qu'est-ce que c'est exactement ?

6 R. C'est pour analyser les cratères qui ont été laissés après tirs de

7 mortier ou tirs d'armes lourdes. Vous savez, les armes indirectes.

8 Q. Quelle est la longueur de ce cours finnois ?

9 R. Trois semaines.

10 Q. Au cours des trois semaines, combien de temps avez-vous passé à

11 analyser les cratères ?

12 R. Nous avons eu une formation intensive sur les cratères avec différents

13 exercices et différentes études de cas.

14 Q. A quoi cela sert de savoir analyser un cratère ? Quand on analyse un

15 cratère, quelles sont les questions que l'on se pose ?

16 R. On cherche à trouver l'origine, la source donc, savoir d'où le tir est

17 venu.

18 Q. Après avoir terminé ce cours, est-ce que vous vous sentiez compétent en

19 matière d'analyse de cratères ?

20 R. Oui.

21 Q. Quand vous êtes arrivé en Bosnie, avez-vous dû analyser des cratères ?

22 R. Oui, énormément de cratères.

23 Q. Vous êtes-vous jamais senti pénalisé lors de votre travail en Bosnie

24 par peut-être un manque de compétence ?

25 R. Non, jamais.

26 Q. Vous avez dit exactement à quel jour vous êtes arrivé dans les Balkans.

27 Mais quand est-ce que vous êtes arrivé exactement à Sarajevo même ?

28 R. Je suis arrivé vers le 30 -- non, c'est le 22. Enfin, je ne me souviens

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1 pas vraiment de la date, en fin octobre en tout cas, fin octobre 1994.

2 Q. Où étiez-vous cantonné quand vous êtes arrivé à Sarajevo ?

3 R. D'abord, j'ai été cantonné avec l'équipe Sierra Whisky 1. C'était en

4 dehors de Sarajevo, côté serbe.

5 Q. Combien de temps êtes-vous resté avec Sierra Whisky 1 ?

6 R. Environ dix jours.

7 Q. De la part de votre métier, connaissez-vous un peu la topographie de

8 Sarajevo ?

9 R. Oui.

10 Q. Pourriez-vous vous situer sur une carte de Sarajevo ?

11 R. Oui.

12 Q. Très bien.

13 M. DOCHERTY : [interprétation] Monsieur le Président, pourrions-nous avoir,

14 s'il vous plaît, la carte 2823 qui est une pièce 65 ter et la voir sur

15 l'écran.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pas de problème.

17 M. DOCHERTY : [interprétation]

18 Q. L'avez-vous sous les yeux ?

19 R. Non, pas pour l'instant.

20 Q. Je suis désolé, la carte met un petit moment à s'afficher.

21 Après Sierra Whisky 1, avez-vous été déplacé ailleurs ?

22 R. Oui. Ils avaient besoin d'autres observateurs juste avant Noël pour le

23 poste Sierra Sierra 2, alors je suis allé à Sierra Sierra 2 à Hrasnica avec

24 un néerlandais.

25 Q. On en train de vous donner un stylet et vous avez une carte sous les

26 yeux, c'est une carte de Hrasnica. Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous

27 indiquer exactement où vous étiez cantonné et marquer cet endroit à l'aide

28 du stylet.

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1 R. Nous étions dans une de ces maisons par là. Je crois que c'était ici.

2 Q. C'est là que vous avez fait le point rouge ?

3 R. Oui.

4 Q. Pour que ce soit plus visible, pourriez-vous encercler ce petit point

5 rouge.

6 R. [Le témoin s'exécute]

7 Q. De quel côté de la ligne de confrontation était Sierra Whisky 1 ?

8 R. C'était côté serbe.

9 Q. Je me suis trompé. Je vous demande Sierra Sierra 2 ?

10 R. Là, c'était une petite poche au sud côté de l'aéroport, c'était du côté

11 musulman.

12 Q. Vous étiez posté à cet endroit là pendant peu de temps, n'est-ce pas ?

13 R. Oui.

14 Q. Pourquoi est-ce que vous étiez sur le côté serbe pendant neuf ou dix

15 jours seulement ?

16 R. Ils ne savaient pas notre mettre en fait, puisque vous savez les gens

17 vont et viennent et on fait des équipes très hétérogènes avec plusieurs

18 nationalités. Après dix jours, on m'a transféré sur Hrasnica. Dans l'équipe

19 d'ailleurs, il y avait deux norvégiens, ce qui n'était pas correct.

20 Q. Il faut que toutes les personnes aient des nationalités différentes sur

21 une même équipe, c'est cela ?

22 R. Oui.

23 Q. Très bien.

24 M. DOCHERTY : [interprétation] Pourriez-vous maintenant conserver l'image

25 qui est à l'écran et lui donner une cote.

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

27 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P83.

28 M. DOCHERTY : [interprétation] Je vous remercie.

Page 634

1 Q. Combien de temps êtes-vous resté à Hrasnica ?

2 R. J'y suis resté jusqu'au 1er mai 1995.

3 Q. Au cours de vos sept mois à Hrasnica, avez-vous dû enquêter sur des

4 incidents dus à des tireurs embusqués ?

5 R. Oui.

6 Q. Sur des pilonnages ?

7 R. Oui.

8 Q. Sur les bombes aériennes ?

9 R. Oui, sur une d'entre elles.

10 Q. Je vais y revenir dans ce cas. Maintenant, voyons un peu à quoi tout

11 cela ressemble. Hrasnica se trouve au sud de l'aéroport, n'est-ce pas ?

12 R. Oui.

13 Q. Où se trouve le mont Igman par rapport à Hrasnica ?

14 R. Hrasnica se trouve juste entre le mont Igman et l'aéroport.

15 Q. Vous avez bien dit que c'est entre le mont Igman et l'aéroport ?

16 R. Oui.

17 Q. L'armée des musulmans de Bosnie était-elle cantonnée à Hrasnica ?

18 R. Oui.

19 Q. Y avaient-ils des cibles militaires à Hrasnica ?

20 R. Non, pas vraiment de cibles. Ils avaient certes leur QC qui était

21 proche de la ligne de front près d'Ilidza, et le siège du bataillon se

22 trouvait un peu plus à l'est.

23 Q. Au cours de votre séjour à Hrasnica, vous nous dites que vous avez dû

24 enquêter sur des incidents de tirs embusqués ?

25 R. Oui.

26 Q. Quand vous avez fait ce type d'enquêtes, pouvez-vous nous dire

27 exactement en quoi cela consiste ? Vous arrivez sur un lieu d'incident où

28 on a tiré sur quelqu'un. Qu'est-ce vous faites exactement ? Pouvez-vous

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1 nous expliquer comment cela fonctionne ?

2 R. Tout d'abord, on doit savoir comment se tenait la personne quand elle a

3 été atteinte, ensuite on doit voir le corps pour savoir quelles sont les

4 orifices d'entrée et sortie et les blessures entrée et sortie pour voir

5 d'où provenait le projectile. Ensuite, on détermine la direction du

6 projectile.

7 Q. Au cours de votre séjour à Hrasnica, la ville de Sarajevo était

8 assiégée, n'est-ce pas ?

9 R. Oui.

10 Q. Hrasnica aussi était assiégée ?

11 R. Oui.

12 Q. Est-ce que vous connaissiez l'emplacement des lignes de confrontation ?

13 R. Oui.

14 Q. Avez-vous enquêté sur des incidents de "sniping" à Hrasnica où vous

15 avez pu déterminer l'emplacement de la source qui serait provenu d'un autre

16 endroit que de territoires détenus par les Serbes de Bosnie ?

17 R. Non.

18 Q. Sur tous les incidents de "sniping" sur lesquels vous avez enquêtés au

19 cours de votre séjour à Hrasnica, pouvez-vous nous dire combien de fois un

20 soldat ou un membre des forces armées a été atteint ?

21 R. Pour ce qui est du "sniping", aucun.

22 Q. Passons maintenant au pilonnage. Ici, je parle d'artillerie et de

23 mortiers. Nous en viendrons plus tard aux bombes aériennes. Quelle était la

24 fréquence d'enquêtes sur les pilonnages ?

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Docherty, pourriez-vous

26 nous laisser une minute.

27 M. DOCHERTY : [interprétation] Je suis désolé, Monsieur le Président.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] J'ai besoin d'une minute.

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1 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez poursuivre.

3 M. DOCHERTY : [interprétation] Je vous remercie.

4 Q. Monsieur Overgard, la question que je vous ai posée était de savoir à

5 quelle fréquence vous avez enquêté sur des incidents de pilonnage lors de

6 votre séjour Hrasnica en tant qu'OMNU ?

7 R. A Hrasnica, surtout en novembre et début décembre 1994, c'était presque

8 tous les jours.

9 Q. Je vous poserai la même question à propos des incidents de "sniping" ?

10 R. C'était aussi extrêmement fréquent puisqu'il y en avait très souvent.

11 Il y avait énormément d'incidents de ce type. Peut-être pas tous les jours,

12 mais presque.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le Juge Mindua a une question.

14 M. LE JUGE MINDUA : Monsieur le Major, vous avez dit que vous avez aussi

15 fait des enquêtes sur les corps à l'occasion de tirs des tireurs embusqués.

16 Je voulais juste savoir, est-ce que vous travaillez aussi avec le médecin

17 légiste pour tirer vos conclusions ou vous travaillez de façon isolée ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] On travaillait avec la police civile de

19 Hrasnica. C'est eux qui inspectaient les corps. On ne les tournait pas, on

20 ne les bougeait pas. On regardait juste les corps pour savoir un petit peu

21 quels étaient les points d'entrée et de sortie de la balle.

22 M. LE JUGE MINDUA : [interprétation] Je vous remercie.

23 M. DOCHERTY : [interprétation]

24 Q. Pour poursuivre sur cette question, pouvez-vous faire la différence

25 entre une blessure d'entrée de balle et de sortie de balle ?

26 R. Oui, bien sûr. Quand la balle entre dans le corps, cela fait un trou

27 plus petit, puisque quand la balle sort du corps, elle a tendance à

28 emporter des morceaux de corps.

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1 Q. Donc, le trou est plus grand --

2 R. On voit très bien quel est le trou d'entrée, le trou de sortie.

3 Q. Je vous ai posé la question à propos d'incidents de sniping pour savoir

4 exactement quelle était la procédure à suivre. Pourriez-vous nous dire la

5 même chose pour les incidents de pilonnage ?

6 R. Oui, c'est très simple. On trouve un cratère. Dans le cratère, on va

7 trouver la queue de l'arme. Elle est encore là, la queue du projectile de

8 l'arme. C'est très important.

9 Q. Pourquoi est-ce que c'est important ?

10 R. Parce que quand cela arrive, quand cela atteint le sol, cela atteint

11 par un angle, et grâce à l'angle on peut déterminer d'où vient le tir. Pas

12 exactement, mais en général.

13 Q. Qu'en est-il de la forme du cratère. Est-ce que c'est utile aussi de

14 savoir toutes les choses qui ont été éjectées du cratère ? Est-ce que cela

15 doit être pris en compte ?

16 R. Oui. Puisque quand on est devant le cratère, il y a beaucoup plus

17 d'éclats d'obus qu'à l'arrière du cratère, bien sûr, parce qu'il y a un

18 angle à l'impact. Bien sûr cela projette les éclats à l'extérieur, les

19 côtés avant.

20 Q. Evidemment, malheureusement, notre sténotypiste ne peut pas écrire les

21 gestes que vous avez faits, donc je vais résumer ce que vous avez fait. La

22 matière est éjectée à l'avant du cratère. C'est bien cela, n'est-ce pas ?

23 R. On utilise aussi la boussole pour déterminer exactement la direction

24 d'où provient un élément.

25 Q. A partir de l'angle, avec la queue du projectile que vous avez

26 déterminée, ainsi qu'à partir de la direction que vous avez déterminée pour

27 l'expulsion des débris, est-ce que vous êtes en mesure de déterminer quel

28 est le mortier ou l'arme d'artillerie exacte qui a été utilisée pour

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1 tirer ?

2 R. Oui, nous le pouvons. On a une zone déterminée d'une façon générale,

3 pas avec une totale exactitude, mais de façon générale, mais on peut être

4 sûr que c'est de cette zone relativement limitée que provient le tir.

5 Q. Je vous pose maintenant une question au sujet des tireurs embusqués. Je

6 vais revenir sur les mortiers et le pilonnage plus tard. Pendant votre

7 séjour à Hrasnica, est-ce qu'il vous est arrivé d'enquêter sur des

8 incidents liés à des pilonnages dans lesquels la source des tirs était

9 déterminée comme étant située ailleurs que sur le territoire tenu par les

10 Serbes de Bosnie ?

11 R. Non.

12 Q. Au cours des incidents de pilonnage qui ont fait l'objet d'enquête de

13 votre part pendant votre séjour à Hrasnica, combien de membres des forces

14 armées ont trouvé la mort ?

15 R. Nous n'en avons pas vu beaucoup, cela est certain. L'enquête que nous

16 avons menée concernait normalement les civils. De telles enquêtes étaient

17 diligentées lorsque c'étaient des civils qui avaient été visés ou frappés.

18 Q. J'aimerais rappeler votre attention à présent sur un type d'arme

19 particulier qu'on appelle en général "des bombes aériennes". Est-ce que

20 vous savez de quoi je veux parler si j'utilise cette expression ?

21 R. Oui.

22 Q. Très bien. Pouvez-vous dire aux Juges de la Chambre ce que vous

23 entendez par le terme "bombes aériennes" ?

24 R. Je pense à des bombes du type ancien, c'est-à-dire des bombes qui sont

25 larguées sur une zone à partir d'un avion, et ces bombes aériennes

26 atterrissent quelque part dans une zone de largage.

27 Q. Est-ce qu'il y a eu des bombes aériennes -- ou plutôt, y a-t-il eu des

28 incidents liés à des bombes aériennes à Hrasnica pendant votre séjour là-

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1 bas ?

2 R. Oui, un incident.

3 Q. Quelle était la date de cet incident ?

4 R. Le 7 avril 1995.

5 Q. Est-ce que cette bombe a été larguée par un avion ?

6 R. Non. Je n'ai jamais vu avant ou après une bombe tirée à partir du sol.

7 Q. Mais comment est-ce que cela s'est fait ? Est-ce que vous avez pu

8 déterminer après votre enquête comment il a pu se faire qu'une bombe soit

9 déplacée de son lieu d'origine jusqu'à son point d'impact sans intervention

10 d'un avion ?

11 R. Oui. La bombe était attachée à six roquettes, et ces roquettes ont

12 servi de moteur à la bombe qui a été tirée à partir d'un camion du côté

13 d'Ilidza, de la ligne de front.

14 Q. Quand vous dites qu'elle a été tirée à partir d'un camion du côté

15 Ilidza, de la ligne de front, je vous demande : d'abord, si Ilidza était

16 sous le contrôle des Musulmans de Bosnie ou des Serbes de Bosnie ?

17 R. Sous le contrôle des Serbes de Bosnie.

18 Q. Très bien. Comment avez-vous obtenu le renseignement que vous venez de

19 nous communiquer au sujet de l'endroit d'où la bombe a été tirée ?

20 R. Les gens qui se trouvaient sur le mont Igman ont été témoins oculaires

21 de cet incident. Mon information provient de déclarations faites par des

22 témoins. Quand la bombe a atterri, toutes les fenêtres qui se trouvaient

23 dans le secteur ont éclaté sur plusieurs centaines de mètres. Ce n'était

24 pas de l'autre côté, ce n'était pas du côté est du cratère.

25 Q. Quelles sont les conclusions que vous avez pu tirer du fait que les

26 vitres des fenêtres ont éclaté surtout du côté est par rapport au point

27 d'impact ?

28 R. C'est un témoin qui nous a dit ce qui s'était passé, et nous avons

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1 conclu que ceci était exact.

2 Q. En d'autres termes, votre enquête a corroboré les dires du témoin qui

3 se trouvait sur le mont Igman.

4 R. Oui.

5 Q. Cette bombe a atterri dans quel secteur ?

6 R. Sur des maisons habitées par des civils.

7 Q. Est-ce que quelqu'un a trouvé la mort ?

8 R. Oui.

9 Q. Pouvez-vous nous dire si vous vous êtes rendu sur les lieux ?

10 R. Oui.

11 Q. Qu'avez-vous vu de vos yeux ?

12 R. Lorsque nous sommes arrivés, nous avons découvert une maison

13 complètement détruite. Il n'y restait plus rien. Il n'y avait plus une

14 seule brique debout, pas un seul mur debout. Mais la façade qui avait été

15 touchée par la bombe était totalement réduite en tout petits morceaux, en

16 tout petits fragments.

17 Q. Est-ce que vous avez vu des cadavres d'êtres humains dans ces débris ?

18 R. Oui, j'ai vu deux jambes qui sortaient d'une pile de pierres. Rien ne

19 bougeait. Mais comme j'ai pu le constater, le commandant local avait été

20 appelé. Il était là et il nous a dit que nous ne devrions pas être les

21 premiers à mener une enquête.

22 Q. Très bien. Lorsque vous dites "commandant local", il s'agit du

23 commandant des troupes musulmanes de Bosnie, de Hrasnica, n'est-ce pas ?

24 R. Oui. De la 4e Brigade mécanisée.

25 Q. Avez-vous quitté les lieux comme il vous le demandait ?

26 R. Oui.

27 Q. Vous êtes restés hors dans lieux combien de temps ?

28 R. Nous sommes retournés à notre cantonnement où il avait posté trois

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1 soldats qui devaient veiller à ce que nous restions à l'intérieur de notre

2 cantonnement.

3 Q. Combien de temps êtes-vous restés à l'intérieur de votre cantonnement ?

4 R. Jusqu'à la fin de la soirée.

5 Q. Le lendemain, est-ce que vous êtes retournés sur les lieux ?

6 R. Nous avons essayé d'y aller le matin, mais les soldats étaient de

7 nouveau là, donc nous avons dû négocier pour pouvoir nous déplacer. Nous

8 avons dû négocier notre liberté de circulation, et nous y sommes retournés

9 vers midi pour revoir la scène.

10 Q. Est-ce que c'est à ce moment-là que vous avez mené une enquête que vous

11 avez décrite depuis quelques minutes ?

12 R. Oui.

13 Q. En tant qu'officier des forces aériennes, je suppose que vous

14 connaissez bien le langage de bombes à partir d'avions.

15 R. Oui.

16 Q. Est-ce que vous avez vu le 7 avril 1995, quel était le système qui

17 permettait de guider cette bombe ?

18 R. Il n'y avait pas de système de guidage. Elle a été lancée dans la

19 direction en question.

20 Q. Qu'est-ce qui a déterminé --

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Un instant je vous prie.

22 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Excusez-moi,

23 Monsieur le Témoin. Je prie également le représentant de l'Accusation de

24 m'excuser. Nous devrions, je crois, déterminer une façon de procéder. Mais,

25 vous parliez il y a quelques instants, Monsieur le Témoin, du fait que vous

26 avez été maintenu dans votre cantonnement pendant plusieurs heures, si j'ai

27 bien compris, par trois soldats. Quel était le but poursuivi en

28 restreignant ainsi votre liberté de circulation et votre possibilité de

Page 643

1 vous rendre sur les lieux ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous n'avons jamais obtenu une réponse

3 satisfaisante sur ce point. C'est le commandant de la brigade de ce secteur

4 qui voulait que nous restions à l'intérieur. Je pense qu'il voulait que des

5 gens de Sarajevo arrivent d'abord sur les lieux, et il ne voulait pas que

6 nous gênions leur enquête. Je pense que des experts de bombes devaient

7 arriver.

8 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Merci.

9 M. DOCHERTY : [interprétation]

10 Q. Suite à la question posée par M. le Juge, Commandant, lorsque vous

11 meniez une enquête, était-il important que les gens n'entrent pas sur les

12 lieux faisant l'objet de l'enquête et ne perturbent pas lors d'un lancement

13 de ce qui se trouvait là avant la fin de l'enquête ?

14 R. Bien entendu, en effet, car il ne faut rien toucher. Si les gens

15 venaient, ils risquaient toucher à certaines choses. Donc, il nous est

16 apparu que la bombe venait d'une autre direction.

17 Q. Quand vous dites que des gens sont arrivés de Sarajevo, est-ce que,

18 d'après ce que vous avez compris, ces personnes venues de Sarajevo étaient

19 des experts en balistiques et en explosifs ?

20 R. Oui, nous avons parlé avec eux plus tard, et ils nous ont tout montré

21 des petits morceaux, des fragments qu'ils avaient recueillis.

22 Q. Est-ce que vous êtes d'avis qu'il était important que les lieux en

23 question ne soient perturbés par personne avant l'arrivée des experts --

24 R. En effet, absolument.

25 Q. -- des gens de Sarajevo ?

26 R. Nous avons enquêté plus ou moins ensemble. Nous sommes retournés sur

27 les lieux un peu plus tard ce jour-là.

28 Q. Ce genre de chose s'était déjà passé lors d'enquête antérieure, n'est-

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1 ce pas, quand vous aviez empêché les troupes musulmanes de Bosnie d'accéder

2 au lieu qui faisait l'objet d'enquête ?

3 R. Non. Non.

4 Q. C'est un événement qui n'est survenu qu'une fois ?

5 R. Hm-hm.

6 Q. Encore une fois, en tant qu'officier de l'air, est-ce que vous avez été

7 entraîné pendant les 20 années et plus que vous avez passées dans les

8 forces aériennes de Norvège à reconnaître les armes qui sont utilisables

9 dans telle ou telle situation particulière sur le champ de bataille ?

10 R. Oui.

11 Q. Est-ce que vous pourriez imaginer une situation sur un champ de

12 bataille dans laquelle une bombe aérienne de ce genre pourrait être

13 attachée à une roquette est considérée une arme acceptable ?

14 R. Non.

15 Q. Est-ce que ceci est dû au fait qu'il n'y a pas de possibilité de

16 guidage ?

17 R. Il n'y a pas de possibilité de guidage, et on ne sait jamais où une

18 telle arme ou un tel projectile peut exploser, ni à quel moment ?

19 Q. Est-ce qu'avant votre arrivée dans ce prétoire aujourd'hui vous avez vu

20 des photographies de cet incident survenu le 7 avril à Hrasnica ?

21 R. Oui.

22 Q. Très bien. A votre avis, ces photographies correspondent-elles

23 fidèlement à ce qui s'est passé ce jour-là, à ce que vous avez vu lors de

24 votre arrivée sur les lieux ?

25 R. Oui, en effet.

26 M. DOCHERTY : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

27 j'aimerais demander que le document 2719 de la liasse 65 ter soit affiché

28 sur les écrans. C'est une série de photographies, et nous avons indiqué

Page 645

1 dans notre liste de pièces à conviction potentielle quels sont les numéros

2 ERN des différentes photographies que je voudrais soumettre au témoin.

3 Je demanderais que le témoin nous dise, lorsqu'il aurait vu ces

4 photographies, si elles correspondent à la réalité, si elles sont exactes,

5 après quoi je demanderais qu'elles soient admises au dossier une fois

6 qu'elles auront été vues sur les écrans.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien. Commençons par la première.

8 M. DOCHERTY : [interprétation] Je crois que la première photographie porte

9 le numéro ERN 0094-5320.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous demanderez au témoin

11 de décrire ce que montre cette photographie ?

12 M. DOCHERTY : [interprétation] Je vous demande un instant, Monsieur le

13 Président, avant de répondre.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Docherty.

15 M. DOCHERTY : [interprétation] Nous procédons à quelques vérifications avec

16 la commis aux audiences pour voir si nous ne pourrions pas avoir une

17 photographie d'une qualité un peu supérieure que celle qui est actuellement

18 sur les écrans.

19 Je vous demande un instant, car il nous faudrait une meilleure

20 photographie. Si cela n'est pas possible, je suppose que nous devrions

21 continuer dans les conditions actuelles.

22 [La Chambre de première instance se concerte]

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Docherty, en quoi est-ce

24 que le fait de soumettre ces photographies au témoin est important pour la

25 démonstration de votre thèse ?

26 M. DOCHERTY : [interprétation] Cela permettrait d'illustrer le pouvoir

27 destructeur de l'arme qui a été utilisée, Monsieur le Président, car on y

28 voit des maisons en brique totalement détruites. Compte tenu des

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1 difficultés regrettables que nous avons à obtenir des photographies de

2 meilleure qualité, je m'en tiendrai si nous ne trouvons pas de

3 photographies de meilleure qualité, je m'en tiendrai à la présentation d'un

4 nombre limité de photographies au témoin grâce au rétroprojecteur.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Faites cela.

6 M. DOCHERTY : [interprétation]

7 Q. Commandant, je ne vais pas vous poser de questions détaillées sur ces

8 photographies, car je suis sûr qu'elles parlent d'elle-même, mais je me

9 contenterais de vous demander si ce qu'on voit sur cette photographie

10 correspond fidèlement de ce que vous avez vu de vos yeux lorsque vous êtes

11 arrivé sur les lieux à Hrasnica le 7 avril 1995.

12 R. Oui. C'est la maison que nous avons vue à notre arrivée.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce qu'il y avait une maison ou

14 deux maisons ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est une maison et derrière une espèce de

16 grange ou de remise.

17 M. DOCHERTY : [interprétation]

18 Q. Même question pour la photographie suivante --

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Isailovic est debout.

20 Mme ISAILOVIC : -- des meilleures photos, parce que -- ou, tout le monde a

21 la même chose sur les écrans ? Parce que là, je vois strictement rien.

22 Donc, je vois des --

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maintenant, il faut que vous appuyez

24 sur le bouton qui commande le rétroprojecteur.

25 Mme ISAILOVIC : Je m'excuse.

26 M. DOCHERTY : [interprétation] Photographie suivante, je vous prie.

27 Q. Commandant, je vous demande maintenant si d'autres maisons dans les

28 environs présentaient des dégâts, même si elles n'étaient pas totalement

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1 détruites ?

2 R. Oui. Les toits étaient en mauvais état. Il y avait aussi des trous dans

3 ces toits, comme après une tempête, et des fenêtres avaient éclaté.

4 Q. Ici, est-ce que nous voyons un gros plan de la photographie

5 précédente ?

6 L'INTERPRÈTE : Signe affirmative de la tête du témoin.

7 Q. Merci. Nous sommes arrivés à la dernière photographie.

8 M. DOCHERTY : [interprétation] Monsieur le Président, je demanderais que

9 les photographies que je vous montre maintenant, qui étaient indiquées sur

10 la liste des pièces à conviction de l'Accusation - il s'agit des

11 photographies de mauvaise qualité - j'en demande le versement au dossier.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien, elles sont admises.

13 M. LE GREFFIER : [interprétation] Est-ce que le représentant de

14 l'Accusation demande le versement au dossier de cette série de

15 photographies ensemble, en tant qu'une seule et même pièce à conviction ou

16 est-ce que chaque photographie doit constituer une pièce à conviction

17 distincte, avec une cote distincte ?

18 M. DOCHERTY : [interprétation] J'en demande leur versement en tant que

19 pièce collective.

20 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agira de la

21 pièce P84.

22 M. DOCHERTY : [interprétation]

23 Q. Commandant, est-ce que vous aviez déjà vu des bombes de ce genre tirer

24 sur la partie musulmane du front en Bosnie ?

25 R. Non.

26 Q. Est-ce que vous avez vu des lanceurs de telles armes du côté des

27 Musulmans de Bosnie sur la ligne de front ?

28 R. [réponse inaudible]

Page 648

1 Q. Enfin --

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelle était la réponse que vous

3 avez faite à cette dernière question ? A savoir, est-ce que vous avez vu de

4 tels lanceurs utilisés pour de telles armes du côté des Musulmans de Bosnie

5 sur la ligne de front ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous demanderais de répondre avec

8 des mots et pas simplement en hochant de la tête.

9 M. DOCHERTY : [interprétation]

10 Q. Sur le plan qui a été versé au dossier il y a quelques instants,

11 Commandant, il y avait un point de couleur verte à côté duquel était

12 inscrit le numéro 6. Vous vous rappelez ?

13 R. Oui.

14 Q. Est-ce que vous avez examiné ce document avant d'entrer dans le

15 prétoire ?

16 R. Oui.

17 Q. Est-ce que ce point de couleur verte indique d'une façon exacte le lieu

18 où tout cela s'est passé ?

19 R. Oui.

20 Q. A quelle distance se trouvait l'impact de la bombe aérienne par rapport

21 aux deux quartiers généraux militaires dont vous avez déjà parlé à

22 Hrasnica, à savoir le QG de la compagnie et le QG de la brigade ?

23 R. A une grande distance. Ce lieu d'impact était plus proche de notre

24 cantonnement, du lieu où était logée mon équipe.

25 Q. Je vous pose maintenant la même question quant à la distance qui

26 séparait le lieu où vous étiez logés de ces deux QG, en kilomètres, en

27 mètres, et dites-moi quelle était l'unité concernée.

28 R. Une centaine de mètres, dirais-je. Par rapport au QG de la compagnie,

Page 649

1 cette distance était supérieure à un kilomètre, ou en tout cas de 800 ou

2 900 mètres à peu près, par rapport au lieu où notre bataillon était logé.

3 Q. Très bien. Maintenant, je vais vous parler d'un autre incident. Est-ce

4 qu'un moment est arrivé où un incident lié à un tireur embusqué a eu lieu,

5 incident au cours duquel une fillette de 17 ans a été abattue, tuée par un

6 tireur embusqué de Hrasnica ?

7 R. Oui.

8 Q. Est-ce que vous avez vu cette jeune fille quand elle était encore en

9 vie ?

10 R. Oui.

11 Q. Est-ce que vous pourriez donner des détails à son sujet, alors qu'elle

12 était en vie ?

13 R. Elle marchait dans le secteur de Solakovici, où on avait commencé à

14 creuser pour passer sous l'aéroport de Sarajevo. Elle marchait vers

15 Solakovici.

16 Q. Est-ce que vous étiez au volant quand vous l'avez vue ?

17 R. Oui. Nous l'avons dépassée ce jour-là.

18 Q. Elle marchait de Hrasnica vers Solakovici, et à ce moment-là elle était

19 de quel côté par rapport à la ligne de front ?

20 R. Elle était à l'arrière ou à gauche.

21 Q. Sur la gauche ?

22 R. Oui.

23 Q. Plus tard, est-ce que vous avez enquêté sur cet incident lié à un

24 tireur embusqué et qui a causé la mort de cette jeune fille ?

25 R. Oui. J'ai été appelé par la police civile pour l'aider à inspecter le

26 corps de la victime.

27 Q. Combien de temps après l'avoir vue marcher vous a-t-on appelé pour

28 enquêter sur cet incident ?

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1 R. Une heure, au maximum.

2 Q. Est-ce que vous avez pu examiner son cadavre ?

3 R. Oui.

4 Q. Est-ce qu'il y avait un impact d'entrée de balle sur son corps ?

5 R. Il y avait un impact de calibre 12,7 ou 14,6. Je parle en millimètres.

6 L'orifice était de grande taille, aussi bien en entrée qu'en sortie. C'est

7 donc une arme d'un calibre supérieur à 7,62 qui a été utilisée.

8 Q. Qu'en est-il de la façon dont la balle a pénétré le corps ?

9 R. La balle a pénétré son corps dans la partie supérieure du corps, à

10 partir du dos, de droite vers la gauche.

11 Q. Est-ce que l'un ou l'autre de vos collègues de Sierra Sierra 1 a déposé

12 une protestation auprès des commandants militaires des Serbes de Bosnie au

13 sujet des tireurs embusqués, des pilonnages par obus ou des bombes

14 aériennes ?

15 R. Non. Les équipes ne sont pas chargées de ce genre de travail. Ce sont

16 les observateurs militaires des Nations Unies dont le QG était situé à

17 l'intérieur de Sarajevo dans le bâtiment des PTT qui ont envoyé ce genre de

18 protestation.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] J'aimerais vous demander quelle

20 était la taille de l'orifice d'entrée et de l'orifice de sortie ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] L'orifice lui-même, avec les zones

22 d'ecchymoses autour de l'orifice, s'étendait sur plus de 5 centimètres,

23 mais je ne me rappelle pas la taille exacte de l'orifice. Ce sont les

24 policiers qui ont procédé à ces mesures. J'étais seul à enquêter pour les

25 observateurs des Nations Unies parce que personne n'était venu avec moi.

26 Normalement, deux observateurs allaient toujours sur les lieux pour ce

27 genre d'enquête.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Donc, 5 centimètres pour l'orifice

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1 d'entrée ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Et l'orifice de sortie ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était un orifice de grande taille. Je dirais

5 10 à 20 centimètres de diamètre.

6 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Quel est le diamètre d'une balle de

7 calibre 12,7 ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je dirais 3 centimètres à peu près.

9 M. DOCHERTY : [interprétation]

10 Q. Deux choses encore, Commandant, et j'en aurai terminé. Est-ce que vous

11 connaissiez une route qui passait par le mont Igman pour redescendre sur

12 Hrasnica et ensuite sur Sarajevo ?

13 R. Oui. On l'appelait une route bleue, ou la route des convois.

14 Q. Est-ce que cette route a été utilisée pendant votre séjour à Hrasnica ?

15 R. Elle permettait l'entrée de tous les approvisionnements à Sarajevo,

16 Hrasnica, et en particulier des vivres qui arrivaient dans la ville.

17 Q. Est-ce que des civils essayaient d'utiliser cette route ?

18 R. Oui.

19 Q. Est-ce que vous avez vu des civils sur lesquels on a tiré à cette

20 occasion ?

21 R. Oui, souvent.

22 Q. Depuis l'endroit où vous vous trouviez à Hrasnica, est-ce que vous

23 pouvez dire s'il s'y trouvait des civils ?

24 R. Oui.

25 Q. Avez-vous pu conclure quelle était la partie qui tirait sur ces

26 civils ?

27 R. Les tirs contre la route des convois provenaient de la zone d'Ilidza,

28 du côté serbe.

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1 Q. Quand vous dites que vous avez pu déterminer qu'il s'y trouvait des

2 civils, à quelle distance étaient ces civils de l'endroit où vous vous

3 trouviez pour déterminer qu'il s'agissait bien de civils ?

4 R. A partir du lieu où était logée notre équipe, c'est-à-dire au pied du

5 mont Igman, donc à moins d'un kilomètre. Nous avons aussi pu observer ceci

6 à plusieurs reprises lorsque nous étions en opération avec Sierra Whisky 1,

7 dans la zone relevant de Sierra Whisky 1, à partir des aires, de ce côté-

8 là.

9 Q. Est-ce que vous avez eu des difficultés à déterminer que ces personnes

10 étaient des civils ?

11 R. Non.

12 Q. Est-ce qu'il y avait un pont dans le secteur de Butmir qui était

13 utilisé par les civils ?

14 R. Oui, c'était un point utilisé par les civils, par nous et par tous ceux

15 qui allaient à Sarajevo.

16 Q. Est-ce que vous avez pu voir des civils qui passaient par le pont

17 Butmir ?

18 R. Oui.

19 Q. De l'endroit où vous vous trouviez, est-ce qu'il vous était difficile

20 de déterminer qu'il s'agissait de civils ?

21 R. Non.

22 Q. Est-ce que vous avez déterminé du secteur tenu par quelle partie on a

23 tiré sur ces civils ?

24 R. Oui.

25 Q. Quel était ce secteur ?

26 R. Les tirs provenaient de la partie serbe, du côté Ilija.

27 Q. Ensuite, pendant votre séjour à Hrasnica, je me limite à ce séjour,

28 d'autres enquêtes ont été menées. Combien de morts de civils est-ce que

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1 vous avez pu constater suite à des incidents liés à des tireurs embusqués

2 ou à des pilonnages ?

3 R. Personnellement, il y en a eu entre 30 et 40.

4 M. DOCHERTY : [interprétation] Je n'ai plus de questions pour mon

5 interrogatoire principal, Monsieur le Président.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je dois vous informer que notre

7 attention, au Tribunal, a été appelée sur le fait qu'une tempête intense

8 frappe en ce moment le secteur. Donc, il a été donné conseil à tous les

9 employés du Tribunal d'être autorisés à quitter le Tribunal en raison des

10 conditions météorologiques très mauvaises. Les employés du Tribunal ont

11 donc reçu l'autorisation de quitter le Tribunal pour rejoindre leur

12 domicile dans les plus brefs délais. Mais le ministère de l'Intérieur a

13 lancé un conseil recommandant à la population de demeurer à l'intérieur. On

14 m'informe à l'instant qu'un message est en train d'être diffusé par les

15 haut-parleurs du Tribunal pour dire exactement ce que je viens de dire.

16 Compte tenu de tout cela, je propose que nous fassions une pause de

17 20 minutes, et suite à cette pause je vous ferai connaître la décision de

18 la Chambre quant à la poursuite ou non de notre audience.

19 Suspension de 20 minutes.

20 --- L'audience est suspendue à 17 heures 01.

21 --- L'audience est reprise à 17 heures 10.

22 M. LE GREFFIER : [aucune interprétation]

23 --- L'audience est levée à 17 heures 14 et reprendra le vendredi 19 janvier

24 2007, à 9 heures 30.

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