Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mercredi 13 juin 2007

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 03.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, poursuivez votre

7 interrogatoire.

8 LE TÉMOIN : GORAN KOVACEVIC [Reprise]

9 [Le témoin répond par l'interprète]

10 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour,

11 Monsieur le Témoin.

12 Interrogatoire principal par M. Tapuskovic : [Suite]

13 Q. [interprétation] Monsieur Kovacevic, je n'ai pas beaucoup de temps à ma

14 disposition, une vingtaine de minutes seulement, donc essayons si possible

15 de parcourir quelques sujets et avoir des informations de votre part.

16 Alors, d'abord, pouvez-vous dire aux Juges si après avoir quitté Pretis le

17 4 avril 1992, au fil de toutes ces années qui se sont écoulées depuis, est-

18 ce que vous êtes retourné voir cette usine de Pretis ?

19 R. Et bien, je suis passé, pas très souvent, quand j'ai eu le temps.

20 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] J'aimerais vous montrer un document de

21 l'Accusation en application du 65 ter 02026.

22 Q. Monsieur Kovacevic, est-ce que vous voyez ce document ? Vous voyez donc

23 qui l'a délivré et qui l'a signé, et veuillez nous le dire à haute voix.

24 R. C'est un document qui émane du secrétariat à l'économie de la

25 municipalité de Vogosca et c'est signé par son directeur, Motika Milorad,

26 enfin, le directeur de Pretis, excusez-moi.

27 Q. Quelle date a-t-on là ?

28 R. Le 20 septembre 1994.

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1 Q. J'aimerais maintenant que nous nous penchions sur la page 2. Voyez-vous

2 le titre ? Donnez-nous lecture, je vous prie, de ce titre.

3 R. "Potentiel de production des installations de Pretis."

4 Q. Pouvez-vous rapidement parcourir cette première page ? Du reste, vous

5 n'ignorez pas que ce document, je vous l'ai déjà montré avant

6 l'interrogatoire principal. Vous l'avez vu puisqu'on vous l'a montré,

7 n'est-ce pas ?

8 R. Oui.

9 Q. Pouvez-vous me dire à quoi se rapportent ces premières pages et

10 raconter, je vous prie, cela aux Juges le plus brièvement possible ?

11 R. Cette première page et les autres, puisque j'ai lu le document entier,

12 se rapportent au développement de Pretis après la Deuxième Guerre mondiale

13 jusqu'aux années 1990, à savoir jusqu'au début de ces conflits.

14 Q. Et ?

15 R. Et il est question du programme production de Pretis, allant donc de

16 l'industrie civile jusqu'à l'industrie militaire.

17 Q. Merci. Vous souvenez-vous de la branche de l'économie que cela

18 constituait ? Quel était, par exemple, le chiffre d'affaires ? Quelles

19 étaient les recettes en provenance des exportations ? Vous en souvenez-vous

20 ?

21 R. Ce dont je me souviens, c'est que c'étaient des montants très élevés. A

22 l'époque, c'étaient des dinars. Je ne sais pas trop vous dire, je n'ai

23 jamais été dans les finances, moi.

24 Q. Merci. Mais bon, cela est repris dans le document.

25 Ce que je voudrais, c'est que l'on nous montre la dernière page à présent,

26 et j'aimerais que vous portiez votre attention sur un passage, cinquième

27 paragraphe de la dernière page. Cela commence par : "Mise en place." Et

28 j'aimerais que vous donniez lecture de cette partie-là puis que vous nous

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1 répondiez et disiez si cela correspond bien à la situation dans laquelle

2 vous avez pu voir Pretis, cette usine de Pretis lorsque vous êtes retourné

3 la voir ultérieurement, comme vous nous l'avez dit. Oui, je vous prie de

4 donner lecture de ce passage qui commence par --

5 R. "Sanctions mises en place par la Serbie vis-à-vis de la Republika

6 Srpska qui sont traduites de façon catastrophique pour ce qui est de

7 l'approvisionnement en matières premières, étant donné que cette usine

8 était à 100 % orientée pour ses approvisionnements vers la Yougoslavie. Et

9 les difficultés sont notamment présentes pour ce qui est des pièces de

10 rechange, étant donné que les équipements modernes venaient de

11 l'importation, c'était importé, et qu'il est désormais difficile

12 d'importer."

13 Q. Est-ce que c'est ainsi que se présentait la situation que vous avez

14 constatée lorsque vous êtes retourné ultérieurement, lors des événements

15 survenus entre 1992 et 1995 ?

16 R. Pour ce qui est de la situation pendant la guerre, d'après ce que j'ai

17 pu constater en retournant çà et là vers Pretis, je dirais que la mise en

18 place des sanctions économiques n'a fait que détériorer cette situation.

19 Q. Merci.

20 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, j'aimerais que ce

21 document en application de 65 ter 02065 soit versé au dossier en guise de

22 pièce à conviction de la Défense.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

24 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera le D227, Messieurs les Juges.

25 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

26 Q. Etant donné que je n'ai pas beaucoup de temps, j'aimerais que nous nous

27 penchions rapidement sur un autre document. Vous avez parlé hier des

28 événements à Buca Potok, au village de Zuc, et des événements qui ont

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1 marqué les débuts du conflit en 1992. Alors, j'aimerais maintenant que l'on

2 se penche sur le 03263, un autre document en application du 65 ter.

3 Monsieur Kovacevic, je vous demande de vous pencher sur l'intitulé de ce

4 document. Donnez-nous en lecture, je vous prie, et dites-nous ce que cela

5 représente, si vous pouvez le faire.

6 R. Il s'agit d'un document émanant du ministère de l'Intérieur, et cela

7 est un bulletin des événements au quotidien. Cela porte un numéro qui est

8 le 104.

9 Q. Merci. Penchez-vous sur la date, je vous prie.

10 R. Le 3 juin 1992.

11 Q. Merci. Comme nous n'avons pas beaucoup de temps pour nous pencher sur

12 le document entier, j'aimerais que vous donniez lecture du paragraphe qui

13 commence par -- c'est le quatrième paragraphe, qui commence par le

14 qualificatif de l'ennemi ou : "L'ennemi…" Veuillez en donner lecture à

15 haute voix.

16 R. "Ces groupes ennemis se sont également attaqués de Pofalici et de Buca

17 Potok, se sont attaqués au village de Zuc. Cette attaque a été repoussée et

18 il y a eu des blessés."

19 Q. Je n'ai pas le temps de parcourir le tout, mais est-ce que cela

20 correspond à ce que vous avez dit au sujet du début des conflits, tel que

21 vous l'avez indiqué à l'occasion de l'interrogatoire principal au sujet de

22 Buca Potok, Pofalici et autres ?

23 R. C'est ce qui nous est montré ici. Je précise que dans le rapport, on ne

24 parle pas de Stevanovic Milojica, qui a été la victime. Tout le reste est

25 exactement ce qui s'est passé à Buca Potok. Zivkovic, Stevanovic et Rakic,

26 ce sont des familles qui ont fui du fait de l'attaque.

27 Q. Merci.

28 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je voudrais que ce

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1 document en application du 65 ter, le 032063, soit versé au dossier en

2 guise d'élément de preuve ou de pièce à conviction de la Défense.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Certes.

4 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera le D228, Messieurs les Juges.

5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

6 Q. Monsieur Kovacevic, il me reste vraiment fort peu de temps. Alors, vous

7 nous avez parlé des événements fin 1994. J'aimerais que brièvement vous

8 nous indiquiez comment ça se présentait entre décembre et mai. Vous en avez

9 déjà parlé, mais j'aimerais que vous étoffiez un peu votre propos.

10 R. Entre décembre 1994 et mai 1995, comme je l'ai dit, à mon avis il y

11 avait un cessez-le-feu de signé. Je n'en suis pas trop sûr, toutefois. Il

12 n'y a pas eu de combats du tout, ni de la part de l'ABiH ni de la part des

13 nôtres, ce qui fait que le cessez-le-feu a été respecté jusqu'à la fin mai.

14 C'est là qu'ont commencé les provocations qui, par la suite, ont dégénéré

15 pour donner lieu à une offensive à grande échelle.

16 Q. Merci. De quoi cela avait-il l'air, ce début d'offensive ? Qu'est-ce

17 qui s'est passé ? Pouvez-vous le dire aux Juges ?

18 R. L'ABiH a lancé une offensive sur toutes les lignes, à Nisici, en

19 direction de Hadzici, à Treskovica, sur notre ligne de front à nous, là où

20 j'étais, à Rajlovac, Zuc, Ilidza.

21 Q. Merci. Quand vous dites le champ de bataille de Rajlovac, jusqu'à ce

22 moment-là vous étiez menacés de quel côté pendant toute la guerre, je veux

23 dire, dans vos positions qui étaient les vôtres ?

24 R. Dans la plupart des cas, c'était du côté de Zuc, du plateau de Zuc.

25 Q. Merci. Lorsque cette offensive a commencé, est-ce que la menace, d'une

26 manière générale, venait d'ailleurs aussi ? Vous avez parlé de Hadzici,

27 vous avez parlé de Nisici. Y a-t-il eu des attaques auxquelles vous vous

28 attendiez du côté du plateau de Zuc, mais d'ailleurs également ?

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1 R. Etant donné que la zone de responsabilité que couvrait ma brigade -

2 excusez-moi - elle englobait la ligne de Nisici, il y avait des attaques

3 des deux côtés, puis il y a eu des attaques lancées depuis Igman au fil de

4 cette offensive.

5 Q. Merci. Etant donné que ces attaques ont commencé, je me propose de vous

6 montrer une pièce à conviction qui est déjà versée au dossier. Il s'agit du

7 document D159.

8 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je voudrais qu'on se penche dessus un

9 instant, D159.

10 Q. Dites-nous de qui émane ce rapport. Donnez-nous la date et lisez-le-

11 nous premièrement pour nous dire si cela correspond à ce qui s'est passé à

12 l'époque dont vous avez parlé et que vous avez d'ailleurs déjà décrite.

13 Donnez-nous lecture à haute voix, je vous prie, en-tête, date et --

14 premièrement.

15 R. Ce rapport porte sur les activités du commandement de la 12e Division.

16 La date est celle du 4 juillet 1995. C'est signé par le commandant de la

17 12e Division, le brigadier Friket Prevljak. Premièrement, on dit :

18 "Entre la période du 15 juin et le 3 juillet 1995, nous avons tiré avec

19 toutes les armes que nous avions à notre disposition en direction de plus

20 de 300 VT de l'ennemi."

21 Q. Est-ce que cela correspond aux positions auxquelles vous vous trouviez

22 vous-même ?

23 R. Justement, j'ai fait une pause pour parler d'armes et de matériel,

24 parce que quand on dit "armes" dans notre langue, on parle d'armes

25 d'infanterie, et quand on dit "autres pièces", cela veut dire pièces

26 d'artillerie.

27 Q. Pendant ces conflits, pendant la durée de l'offensive, étant donné ces

28 circonstances-là, dites-nous d'abord combien de combattants de votre

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1 peloton qui se trouvaient sur ces positions sont tombés. Savez-vous nous

2 dire s'il y a eu des victimes civiles qui avaient fui pour Pofalici et

3 d'autres endroits ? Pouvez-vous en parler ou vous ne pouvez-vous pas en

4 parler ?

5 R. Je sais personnellement qu'il y a eu un combattant de tué sur ma ligne

6 de front. Il s'appelait Radoslav Miskovic. Je sais aussi qu'il y a eu des

7 combattants de blessés, deux d'entre eux que je connaissais. Mais il y a eu

8 beaucoup de cas. Je n'ai pas tenu de registres, bien entendu, mais je sais

9 qu'il y a eu Dragan Krnjajic de blessé, Mirko Tambur et autres.

10 Q. Mais les civils ?

11 R. Les civils non aussi. Il y en a un qui a été tué devant sa maison,

12 Mirko Micukic, dans la cité.

13 Q. Pour finir, pouvez-vous me dire si vous avez contacté la population là-

14 bas en ce temps, la population qui avait fui ? Que disaient ces gens-là ?

15 Que racontaient-ils ? C'est ma dernière question pour vous.

16 R. Ce n'est pas Mirko Miskovic, mais Mirko Micukic. Je rectifie le compte

17 rendu.

18 Pour répondre à votre question de tout à l'heure, je dirais ce qui suit. La

19 population qui s'était réfugiée et qui avait survécu au calvaire de ces

20 localités à Pofalici et autres cités à Sarajevo, on s'attendait que l'ABiH,

21 bien plus nombreuse à l'époque que la nôtre, il y ait chute de nos lignes

22 et qu'il y ait massacre, expulsion, une Golgotha [phon] à nouveau. C'est à

23 cela que nous nous attendions.

24 Q. Merci.

25 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge. Je n'ai plus de

26 questions pour ce témoin.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous avez déclaré que l'ABiH était

28 en bien plus grande supériorité numérique que la vôtre. Pourriez-vous nous

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1 parler des armes que chacune des deux armées avait ? Quel était le niveau

2 d'armement de part et d'autre ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je dirais que je ne pourrais parler qu'en

4 hypothèse. J'ai dit que l'ABiH s'était emparée des casernes de la JNA. Je

5 l'ai dit hier, on a vu ces images dans tous les médias, lorsque la JNA n'a

6 tiré dehors, n'a extirpé que ses effectifs, les armes sont restées

7 derrière. Je ne pense pas qu'ils aient été sur ce plan-là en position

8 défavorisée par rapport à nous. Du moins, c'est mon avis.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Edgerton, vous avez la

10 parole.

11 Contre-interrogatoire par Mme Edgerton :

12 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Kovacevic.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Un instant.

14 Maître Tapuskovic, voulez-vous verser au dossier le dernier document

15 examiné ? C'est une question que j'adresse à Me Tapuskovic.

16 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, c'est déjà versé au

17 dossier depuis longtemps. C'est le D159.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Fort bien. Oui, Madame Edgerton.

19 Mme EDGERTON : [interprétation]

20 Q. Monsieur Kovacevic, vous avez entendu mon nom, Carolyn Edgerton, et je

21 vais vous poser quelques questions au nom de l'Accusation à propos de ce

22 que vous avez discuté aujourd'hui. Si à un moment donné vous trouvez ma

23 question peu claire, n'hésitez pas à me le dire, je serai ravie de la

24 reformuler ou de vous donner des éclaircissements. Est-ce que vous êtes

25 d'accord ?

26 Hier, vous avez un peu parlé de vos états de service militaire. Vous avez

27 dit que vous aviez été chef de section et que le chef de votre compagnie

28 s'appelait Sinisa Krsman, mais il se peut que je me sois trompée. C'était à

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1 partir de 1993. Vous avez parlé de la formation des unités militaires dont

2 vous faisiez partie en mai 1992, et j'aimerais revenir à cette différence

3 au niveau du temps.

4 Vous avez déjà dit que dans le cadre des accords portant sur

5 l'évacuation de la JNA et la cession de la caserne Jusuf Dzonlic, Viktor

6 Bubanj et maréchal Tito à Sarajevo, les gens de votre quartier ont commencé

7 à s'organiser sous le contrôle de l'état-major de la Défense territoriale,

8 et vous avez dit, je vous cite : "Nous avons constitué les unités. C'est

9 plutôt l'état-major de la Défense territoriale qui a organisé des unités.

10 Il y avait de combattants armés qui ont utilisé les armes laissées par la

11 JNA quand elle s'est retirée."

12 Vous vous en souvenez ?

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Dites oui ou non, Monsieur le

14 Témoin.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui.

16 Mme EDGERTON : [interprétation]

17 Q. Si j'ai laissé entendre que l'évacuation des casernes que vous avez

18 mentionnées s'est faite tout à fait à la fin du mois de mai 1992 alors qu'à

19 Rajlovac les Serbes ont commencé à s'organiser bien plus tôt que cela, est-

20 ce que vous seriez d'accord avec moi ?

21 R. Je ne sais pas vous donner une date exacte pour ce qui est du retrait

22 de l'armée de la caserne de Rajlovac. C'est ce que j'ai dit hier du reste

23 et je maintiens ce que j'ai déjà dit.

24 Q. Et si je vous disais que la municipalité serbe de Rajlovac a été

25 proclamée en tant que telle le 23 février 1992, avant le référendum sur

26 l'indépendance et avant la reconnaissance le 6 avril de la Bosnie-

27 Herzégovine et son indépendance, est-ce que vous seriez d'accord avec moi ?

28 R. Une fois de plus, je vous dis que je ne connais pas la date exacte. Je

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1 ne vois pas pourquoi je saurais cela. C'est une question qui concernait

2 l'administration locale de toutes les municipalités. C'est l'organigramme

3 des communautés locales et des municipalités. Pour ce qui est de la date

4 exacte de la création de cette municipalité serbe de Rajlovac, ça je ne

5 sais vraiment pas vous le dire. Je sais à peu près que c'était en début

6 1992, mais la date exacte, non. Mais cela relevait de l'autorité de

7 l'administration locale.

8 Q. Vous connaissez Radovan Karadzic. Il était président de la République

9 serbe de Bosnie-Herzégovine. Je crois que vous savez qui c'est, n'est-ce

10 pas ?

11 R. Oui, je sais cela.

12 Q. C'était une personnalité qui a figuré dans les médias pendant plusieurs

13 années, n'est-ce pas ? Je suppose que vous avez souvent entendu sa voix;

14 est-ce exact ?

15 R. Oui, dans les médias.

16 Q. Puisque c'est le cas, j'aimerais que nous écoutions une conversation

17 interceptée. Vous allez avoir la transcription de cette conversation, vous

18 pourrez ainsi suivre dans votre propre langue. Et la cote est 03232. Cette

19 conversation s'est tenue le 23 février 1992.

20 [Diffusion de la cassette audio]

21 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

22 "Grkovic [phon] : J'ai tout trouvé, les opérations sont finies, nous

23 pouvons commencer à imprimer ce soir et tout sera préparé demain.

24 "Karadzic : Il faut vérifier une fois de plus. Allez là-bas pour aider.

25 "Grkovic [phon] : Les aider ?

26 "Karadzic : Oui, les aider à créer une Bosnie-Herzégovine souveraine,

27 indépendante dans laquelle nous serions des esclaves. Les Serbes ne vont

28 pas participer, ne vont pas voter. Ce tract me semble bien. Oui, oui. Une

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1 copie a déjà été faite. C'est imprimé ?

2 "Grkovic [phon] : Oui.

3 "Karadzic : Amène-moi une copie, je le ferai plus tard. Je viens de rentrer

4 de Reljevo [phon].

5 "Réponse : A Rajlovac, devant Gargovic [phon], dans une heure ou deux.

6 "Karadzic : Il y a combien d'habitants ? Ce sera appelé la

7 municipalité serbe de Rajlovac avec Reljevo [phon]. Ça ira jusqu'à Vogosca,

8 Ilijas, au siège de la division, mais ça va inclure la municipalité serbe

9 de Vogosca ?

10 "Réponse : Non, non, ce sera différent. Ça ira jusqu'à la maison de

11 Joja [phon]. Il y aura aussi Grace [phon] qui est notre présidence

12 publique, et ça va aller jusqu'à Djakovici.

13 "Karadzic : Ce sont tous des hommes serbes ?

14 "Réponse : Oui, oui.

15 "Karadzic : Tu entres à la maison ?

16 "Réponse : Oui, oui, je vais dormir, peut-être. Ce serait mieux si on

17 se voyait vers 6 heures.

18 "Karadzic : D'accord, d'accord. Et c'est le 32 ?

19 "Réponse : Oui.

20 "Non, non, le 29.

21 "C'est d'accord. Au revoir."

22 [Fin de la diffusion de la cassette audio]

23 Mme EDGERTON : [interprétation]

24 Q. Est-ce que vous reconnaissez la voix de cet intervenant comme

25 étant celle de Radovan Karadzic ? Vous savez, le transcript du compte rendu

26 d'audience ne traduit pas des gestes.

27 R. Je n'en suis pas sûr. Je peux deviner. Je peux essayer de l'identifier,

28 mais je n'en suis pas sûr. Il ne faut pas non plus exclure la possibilité

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1 que ce ne soit pas lui. Si maintenant vous me tenez responsable, si vous

2 vous en tenez à ce que je vous dirai, jamais je ne dirai que c'est lui,

3 même après avoir entendu la conversation. Alors, vous dire si c'est lui ou

4 pas, je ne me souviens pas d'autres voix, même plus familières, alors a

5 fortiori celle du président Karadzic.

6 Q. Ici, on parle dans la conversation de Reljevo. Reljevo, ça se trouve

7 où, Monsieur Kovacevic ?

8 R. C'est une communauté locale de Rajlovac.

9 Q. Les deux locuteurs, Karadzic et M. Grkovic, vous l'avez vu, ont parlé

10 des délimitations de la municipalité serbe de Rajlovac qui allaient jusqu'à

11 la télévision, au nord jusqu'à Vogosca et à l'ouest jusqu'à Osijek.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Edgerton, je ne comprends pas

13 comment vous pouvez dire cela à ce monsieur. Vous dites : les deux hommes

14 qui parlaient dans cette conversation, Karadzic et l'autre, quel que soit

15 son nom. Parce que le témoin n'a même pas dit qu'il était d'accord pour

16 dire que c'était Karadzic.

17 Mme EDGERTON : [interprétation] C'est simplement à partir de ce qui est

18 consigné et ce qui était par écrit dans la transcription. C'est pour cela

19 que je l'ai utilisé, mais vous avez raison, Monsieur le Président.

20 Q. Ces deux personnes, ces deux locuteurs ont parlé de la délimitation

21 territoriale de la municipalité serbe de Rajlovac, jusqu'à la télévision,

22 au nord jusqu'à Vogosca et à l'est -- à l'ouest, pardon, jusqu'à Osijek.

23 Etes-vous d'accord pour dire que cela correspond bien au périmètre de la

24 municipalité serbe de Rajlovac telle que vous la connaissez ?

25 R. Je ne suis pas tout à fait sûr que c'était exactement la même chose,

26 mais s'il s'agit d'une conversation authentique, je suppose que c'est comme

27 cela. Moi, je n'étais pas informé, je n'avais pas de carte montrant la

28 municipalité serbe de Rajlovac. Cela ne m'intéressait pas, et je ne sais

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1 pas de quoi ces deux hommes ont pu avoir parlé, le président Karadzic et M.

2 Grkovic.

3 Et pour ce qui est de la carte de la municipalité de Rajlovac, je

4 l'ai bien vue à un moment donné, mais je ne sais pas exactement si elle

5 était comme celle qui a été montrée. On l'a montrée à la télévision. Même

6 si pour ce qui est des limites nord et ouest, c'est à peu près cela.

7 Mais je vous répète que moi, je n'avais rien à voir avec la

8 politique. Je ne sais pas ce qu'on décidait aux séances de l'assemblée

9 municipale et je vous ai déjà dit ce qu'il en était pour la carte.

10 Q. Si je comprends bien votre réponse, vous voulez dire ceci : même si à

11 votre connaissance il se peut que le périmètre ait été un peu plus réduit,

12 d'après ce que vous pensez, la limite nord et la limite ouest correspondent

13 plus ou moins à ce qui est dit dans cet conversation; c'est bien cela ?

14 R. Oui.

15 Mme EDGERTON : [interprétation] Est-ce que je peux demander le versement de

16 ce document en tant que pièce à charge, Monsieur le Président ?

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

18 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P769.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vois que Me Tapuskovic souhaite

20 intervenir.

21 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

22 Juges, c'est une pièce déjà versée, mais je fais une objection de principe.

23 Pour ce qui est de conversations interceptées à venir, si un témoin est à

24 même d'énoncer des certitudes à propos des intervenants, pas de problème.

25 Mais en principe, s'il n'est pas sûr, et bien on ne peut pas le tenir

26 responsable, il ne peut pas se prononcer.

27 Il faudrait peut-être utiliser un autre témoin pour reverser ce genre de

28 conversation interceptée. Bon, vous avez pris une décision, mais il se peut

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1 que ce même genre de document soit utilisé, et je demanderais à

2 l'Accusation de ne le faire qu'avec des témoins qui sont en mesure de

3 confirmer ces conversations en tant que telles. C'est ce que je voudrais

4 dire en tant que conseil de la Défense.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Si je l'ai déclarée recevable, c'est

6 parce que le témoin était d'accord avec ce qu'avançait l'Accusation, à

7 savoir que la délimitation de la municipalité mentionnée dans la

8 conversation qu'il a entendue correspond aux frontières ou aux

9 délimitations. C'est pour cette raison-là que j'ai déclaré le document

10 recevable.

11 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.

12 Peut-on montrer le document 65 ter 03256 ? Il s'agit de notes d'un discours

13 de commémoration pour ce qui est de la promulgation de la municipalité

14 serbe de Rajlovac, qui ont été récupérées une fois qu'il y a eu la

15 réintégration en 1996.

16 Q. Vous avez ce document ? Vous le voyez dans votre langue, Monsieur

17 Kovacevic ?

18 J'aimerais attirer votre attention sur la première phrase, première page.

19 Je vous la lis : "Nous nous sommes réunis le 23 février 1992 et nous avons

20 promulgué la municipalité serbe de Rajlovac."

21 Est-ce que votre mémoire est maintenant plus vive ? Est-ce que vous vous

22 souvenez de la date de la promulgation de la municipalité serbe de Rajlovac

23 ?

24 R. Ecoutez, je vous l'ai dit il n'y a pas longtemps, le 23 février, ici,

25 vous voyez que cela a été biffé et que cela a été rajouté. C'est peut-être

26 correct, ce ne l'est peut-être pas. Moi, je n'ai pas participé à cela, je

27 ne sais pas. Le président de la municipalité qui venait d'être élu a

28 participé. Il y a eu d'autres personnalités, comme on les appelait à

Page 6573

1 l'époque, qui ont participé. Moi, j'étais un simple citoyen et je n'ai pas

2 participé à la formation ni à la promulgation de cette municipalité serbe

3 de Rajlovac, je ne peux donc pas vous en dire grand-chose. On dirait que la

4 date a été rajoutée après. Cela ne veut pas dire que ce soit inexact, mais

5 je ne peux rien dire d'autre.

6 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Qui est l'auteur de ce document ? Qui

7 a fait ce discours, à quelle occasion ?

8 Mme EDGERTON : [interprétation] C'est dit dans le document même avec plus

9 de détails. C'est qu'on voulait commémorer la promulgation de la -- ou

10 célébrer, plus exactement, la promulgation de la municipalité serbe de

11 Rajlovac. Et ce document a été récupéré suite à la réintégration du bureau

12 de la municipalité serbe de Rajlovac, donc cela a été écrit par un membre

13 serbe de l'assemblée municipale.

14 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Est-ce qu'on a jamais fait ce

15 discours ? Il a été prononcé à un moment donné ?

16 Mme EDGERTON : [interprétation] Est-ce que vous voulez savoir s'il y a eu

17 cette réunion ? D'après notre enquête, effectivement il y a eu célébration,

18 mais nous n'avons pas présenté d'éléments de preuve en prétoire à cet

19 effet.

20 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Donc, on a un document dont on ne

21 connaît pas l'auteur. On ne sait pas si on l'a jamais lu. On ne sait pas si

22 cette réunion a eu lieu. Alors, qu'est-ce qu'on est censés croire ?

23 Mme EDGERTON : [interprétation] J'aimerais soumettre certains passages de

24 ce document au témoin. J'aimerais voir si ces passages correspondent aux

25 souvenirs du témoin pour ce qui est de ce qui s'est passé pendant la

26 période qui s'est terminée en mai 1992 lorsqu'il a parlé de la formation de

27 son unité territoriale.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic.

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1 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, Monsieur le Juge

2 Harhoff, j'aimerais bien que l'Accusation réponde à votre question,

3 Messieurs les Juges. Je pense qu'il est important de savoir qui a rédigé ce

4 document. C'est très important pour la poursuite du contre-interrogatoire

5 de ce témoin. On pourra peut-être montrer au témoin la dernière page de ce

6 discours, et il pourrait nous aider à découvrir l'auteur de ce document.

7 C'est vraiment essentiel pour nous parce que finalement va être demandé le

8 versement de ce document. Peut-être pourrait-on montrer au témoin la

9 dernière page pour demander à celui-ci qui l'a écrit.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est adressé à qui, Madame Edgerton

11 ?

12 Mme EDGERTON : [interprétation] Vous voyez les destinataires : "Messieurs,

13 chers invités."

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais c'est biffé ?

15 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui. Ce sont des notes prévues en vue d'un

16 discours pour célébrer la promulgation de la municipalité serbe de

17 Rajlovac. Indépendamment de l'auteur ou des destinataires, je pense que ce

18 document, je peux le présenter, car ils sont contenus des faits, et je peux

19 demander au témoin si ceci correspond à ses souvenirs.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Voyons la dernière page.

21 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] On ne voit pas qui est le

23 destinataire, qui est l'auteur, donc je pense que la fiabilité de ce

24 document est peut-être à mettre en cause. Nous allons délibérer.

25 [La Chambre de première instance se concerte]

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons vous autoriser à poser

27 vos questions au témoin.

28 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.

Page 6575

1 Q. Témoin, veuillez prendre la page 5 de la traduction en B/C/S,

2 paragraphe 4. En anglais, c'est à la page 6.

3 Je vous lis ceci. Est-ce qu'on peut -- voilà, voilà. Est-ce qu'on voit

4 partout le paragraphe ? "Grâce aux activités politiques tactiques, nous

5 avons réussi à prendre le contrôle des installations militaires et civiles

6 les plus importantes à Rajlovac."

7 R. Mais je n'ai pas entendu l'interprétation.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Recommencez, Madame Edgerton.

9 Mme EDGERTON : [interprétation]

10 Q. Vous m'entendez, maintenant ?

11 L'INTERPRÈTE : Les interprètes précisent qu'il faut trouver le bon passage

12 en B/C/S.

13 Mme EDGERTON : [aucune interprétation]

14 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

15 Mme EDGERTON : [interprétation]

16 Q. Regardez le paragraphe 4, me semble-t-il, de cette page. Je vous le lis

17 :

18 "Grâce à des activités tactiques politiques, nous avons réussi à

19 prendre le contrôle des installations militaires et civiles les plus

20 importantes à Rajlovac, même si dans certaines de celles-ci, il y avait des

21 unités bien organisées de la Défense territoriale."

22 Vous avez entendu ce que je viens de vous lire ? Vous voyez ce

23 passage devant vous ?

24 R. Oui.

25 Q. Et vous êtes d'accord avec ce qui est dit ici ?

26 R. Je vous l'ai déjà dit il y a quelques instants, je n'ai aucune idée de

27 l'auteur de ce document. Je ne vois vraiment pas pourquoi je devrais vous

28 dire si je suis d'accord ou pas d'accord parce que moi, je n'ai jamais

Page 6576

1 participé à tout cela. J'étais un citoyen. Je travaillais à Belgrade.

2 J'allais travailler à Belgrade en 1992 tous les jours, pour autant que ceci

3 soit de février 1992, ce qui n'est même pas sûr. Je suis allé travailler

4 régulièrement à l'époque --

5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Maître Tapuskovic.

7 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Dans le compte rendu d'audience, tout d'un

8 coup on parle de Belgrade. Personne n'a parlé de Belgrade.

9 L'INTERPRÈTE : Les interprètes s'excusent, mais c'est ce qu'ils ont cru

10 entendre le témoin dire.

11 Mme EDGERTON : [interprétation] Et il l'a dit aussi. Je l'ai entendu dire

12 Belgrade.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous parlez B/C/S ?

14 Mme EDGERTON : [interprétation] Je comprends assez bien.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Félicitations.

16 Mme EDGERTON : [interprétation] Mais cela fait longtemps que je suis ici.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pourrez peut-être aider

18 l'équipe de la Défense, là, parfois.

19 Mme EDGERTON : [interprétation] Cela sera peut-être mon avenir, là, qui

20 sait.

21 Q. Nous nous intéressions à vos propos d'hier. Vous aviez dit que l'état-

22 major de la Défense territoriale avait organisé des unités, armé des

23 combattants qui se sont servis des armes laissées par la JNA lorsqu'elle a

24 évacué les casernes de Rajlovac. Je reviens à cela. Ici, il est dit que

25 vous aviez réussi à prendre le contrôle des installations civiles et

26 militaires les plus importantes de Rajlovac, même si dans certaines de

27 celles-ci, il y avait des unités bien organisées de la Défense

28 territoriale. Est-ce que vous êtes prêt à marquer votre accord sur ce point

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1 ?

2 R. Je vous l'ai déjà dit hier. J'ai parlé de l'organisation d'unités

3 lorsque moi j'étais dans ce genre d'unités. Mais ce n'est pas la date qui

4 est indiquée dans ce document. Je ne peux pas marquer mon accord parce que

5 je ne connais pas ce document. Je ne suis au courant que de la période dont

6 j'ai parlé hier, lorsque moi j'étais participant à l'organisation des

7 unités sur la Défense territoriale.

8 Est-ce qu'il y avait des activités avant ou pas ? Là, je vous le dis

9 une fois de plus, pendant deux mois, moi, mais pas seulement moi, mais

10 pratiquement toute la ville de Sarajevo allait travailler régulièrement

11 dans les usines.

12 Pour ce qui est de ces activités, je n'ai pas de commentaires à vous

13 faire, rien à ajouter et rien à nier.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je pense que vous ne pouvez pas

15 aller beaucoup plus loin.

16 Mme EDGERTON : [interprétation] Je comprends, Monsieur le Président, et

17 comme ceci concernait uniquement la fiabilité du témoin, je ne vais pas

18 demander le versement de ce document pour le moment.

19 Q. Monsieur Kovacevic, pouvons-nous revenir à ce dont vous avez parlé

20 lorsque vous participiez à l'organisation des unités de la Défense

21 territoriale ? La Défense territoriale de Rajlovac, est-ce qu'elle ne s'est

22 jamais trouvée subordonnée au Corps Romanija-Sarajevo en mai 1992 ? Parce

23 que c'est de cette période-là précisément que vous avez parlé hier.

24 R. J'ai dit hier que la Défense territoriale, c'est comme cela qu'on

25 l'appelait à l'époque même si à l'époque elle était déjà divisée. Toutes

26 les municipalités avaient une Défense territoriale et toutes les

27 communautés locales avaient constitué des espèces d'unités au moment des

28 premiers affrontements.

Page 6578

1 En mai 1992, je l'ai dit hier, on a créé l'armée de Republika Srpska

2 au début du mois de mai, vers le 10. Moi, simple soldat, je ne pouvais pas

3 savoir qui était mon supérieur, qui était mon subordonné, sauf pour ce qui

4 est de mon supérieur immédiat. Mais étant donné que l'armée de la Republika

5 Srpska était établie, et bien ces unités de Rajlovac étaient sans doute

6 subordonnées au corps. Je ne sais pas si c'était votre question.

7 Mme EDGERTON : [interprétation] Si c'est le cas, je vais demander que vous

8 soit montré le document 03234. Excusez-moi, 03244, je m'excuse.

9 Q. Est-ce que vous avez maintenant le document à l'écran ?

10 R. Oui.

11 Q. Est-ce qu'on peut faire défiler lentement le document en B/C/S pour

12 passer à la deuxième page, mais de façon à ce que le témoin voie la

13 totalité du document ? Passez à la deuxième page seulement lorsqu'il vous

14 dira qu'il a eu le temps de lire ce document.

15 R. Qu'est-ce que vous voulez que je lise, quel paragraphe ? Ou vous voulez

16 que je lise tout le document ?

17 Q. Ce document n'est pas bien long. Vous avez le droit d'examiner tout ce

18 document, mais je vous demande de vous concentrer surtout sur le paragraphe

19 (e). Attendez. Excusez-moi. Dans votre texte à vous, oui, c'est le

20 paragraphe (e).

21 Mme EDGERTON : [interprétation] Je vois, Monsieur le Président,

22 qu'apparemment il y a une erreur dans la numérotation des paragraphes en

23 anglais. Je verrai à ce que ceci soit corrigé.

24 Q. Vous avez lu le paragraphe (e), Monsieur Kovacevic ?

25 R. C'est difficile à lire. Je pense que ce qui vous intéresse, c'est la

26 partie qui commence par : "La Brigade de Rajlovac…;" c'est ça ? Si c'est le

27 cas, je vais le lire maintenant.

28 Q. Merci.

Page 6579

1 R. Voilà. Je l'ai lu.

2 Mme EDGERTON : [interprétation] Prenons maintenant la dernière page du

3 document. Je voudrais que le témoin voie le signataire du document.

4 Q. Vous voyez la signature du monsieur qui commandait à l'époque le Corps

5 Romanija-Sarajevo, M. Tomislav Sipcic ?

6 R. Oui.

7 Q. Le 22 mai 1992, vous avez un ordre du général Sipcic restructurant en

8 fait les forces territoriales de la République serbe afin de constituer des

9 unités plus grandes. D'après ce que vous savez, cet ordre correspond-il

10 bien à la situation telle que vous l'avez en mémoire, telle qu'elle se

11 présentait à l'époque ?

12 R. Hier, je vous ai dit que d'après ce que je sais, et j'insiste une fois

13 de plus pour dire que j'étais un simple soldat à l'époque, je me trouvais

14 sur la ligne en dessous du plateau de Zuc. C'est la première fois que

15 j'entends parler de ceci. En fait, il se peut que j'en aie entendu parler,

16 mais j'avais oublié qui était le premier commandant du Corps Romanija-

17 Sarajevo. A l'époque, je ne le savais pas. Je ne le sais pas aujourd'hui

18 non plus.

19 Q. Je pourrais revenir à ce que vous aviez dit au départ.

20 R. Oui.

21 Q. Ce matin, vous avez déclaré que vous pensiez que la Défense

22 territoriale de Rajlovac était à cette époque-ci, à cette date-là donc

23 subordonnée au Corps Romanija-Sarajevo. Maintenant, vous avez vu ce

24 document; est-ce que vous voulez changer d'avis ?

25 R. Pour ce qui est de l'unité territoriale de Rajlovac, elle était déjà

26 sous la juridiction du Corps Romanija-Sarajevo au mois de mai. Pour cela,

27 j'ai dit que je pensais que si la VRS avait déjà été formée, que toutes les

28 unités de la Défense territoriale avaient été incorporées dans le système

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1 de la VRS. C'est ce que je pense, mais je ne suis pas certain à 100 %. Je

2 n'ai pas occupé un tel poste qui me permettait de savoir cela, la date de

3 la création, et cetera, et même jusqu'en juin elles n'étaient peut-être pas

4 encore incorporées, mais je ne le savais pas.

5 J'ai dit que je croyais que c'était le cas puisque l'armée avait été

6 créée le 12 juin, et selon la logique du système, il aurait fallu que

7 toutes les unités de la VRS soient incorporées dans une armée unique.

8 Encore une fois, je répète, c'est ce que "je crois", mais je ne suis pas

9 certain de cela.

10 Q. Monsieur Kovacevic, je ne suis pas tout à fait certaine si je vous

11 comprends bien. Est-ce que vous êtes en train de contester en fait la

12 véracité de ce document, même si ce document corrobore vos dires lors de

13 ces dépositions ?

14 R. Non, je ne conteste pas la véracité du document. Je vous dis simplement

15 que je n'ai pas connaissance de ce document. Il est sans doute véridique,

16 mais je ne peux pas le confirmer, à part de ce que j'ai dit. Je peux vous

17 confirmer ce que j'ai dit, mais je vous confirme que ce que j'ai dit est la

18 vérité. Je ne retire pas ce que j'ai dit, mais si cela est conforme avec le

19 document qui se trouve sous mes yeux, alors oui.

20 Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, puisque c'est le

21 cas, je demanderais que ce document soit versé au dossier.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

23 M. LE GREFFIER : [interprétation] En tant que pièce P770.

24 Mme EDGERTON : [interprétation]

25 Q. La Défense territoriale de Rajlovac a-t-elle été placée sous les ordres

26 de la Brigade de Rajlovac ?

27 R. Oui.

28 Q. Sous le commandement du Corps Romanija-Sarajevo ?

Page 6581

1 R. Oui. Si l'on croit que chaque unité militaire doit être incorporée, à

2 ce moment-là, oui. Mais je n'étais pas l'auteur de ces documents.

3 Q. Est-ce que vous savez où se trouvait d'ailleurs le QG de la brigade ?

4 R. Le commandement de la brigade se trouvait dans la caserne de Rajlovac.

5 Q. Vous souvenez-vous du commandant de la brigade, de son nom ?

6 R. Le premier commandant de la brigade, je me souviens bien de son nom de

7 famille, mais je ne me souviens plus de son prénom. C'était le capitaine de

8 première classe Vujasin.

9 Q. Bien.

10 Mme EDGERTON : [interprétation] Nous pourrions peut-être prendre le

11 document qui a été rédigé en 1992, et ce document porte le numéro ter

12 03248.

13 Q. Monsieur Kovacevic, vous voyez sous les yeux un ordre du commandement

14 de le RSK daté du 7 juin 1992.

15 Mme EDGERTON : [interprétation] Si l'on passe à la dernière page du

16 document, je vous prierais de prendre la page qui suit afin que le témoin

17 puisse voir la signature. En B/C/S, je vous prie. Je ne crois pas que c'est

18 la dernière page du document en B/C/S. Cela ne correspond pas avec la

19 traduction.

20 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

22 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Sur la liste, c'est une pièce présentée

23 par l'Accusation. Il est vrai que j'ai reçu ce document. J'en ai pris

24 connaissance, mais le document se termine sur la page que nous avons vue.

25 C'est sur cette page-là qu'il n'y a pas de signature, effectivement. Je

26 n'ai pas vu plus loin s'il y a la suite du document. Je ne l'ai pas reçue.

27 Sur cette page-ci, effectivement, il n'y pas de signature.

28 Mme EDGERTON : [interprétation] Je crois qu'il y a une erreur e-court.

Page 6582

1 Toutes les pages en B/C/S ont été téléchargées. A moins de la trouver

2 rapidement, nous pourrions y revenir plus tard, à la partie de 1992, si je

3 puis.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

5 Mme EDGERTON : [interprétation]

6 Q. Je vais maintenant sauter à l'année 1993, Monsieur Kovacevic. Votre

7 unité, si je comprends bien, était incorporée à la Brigade de Rajlovac, et

8 votre brigade avait été incorporée au Groupe tactique de Vogosca, qui plus

9 tard est devenu la 3e Brigade d'infanterie de Sarajevo; est-ce que c'est

10 exact ?

11 R. Oui.

12 Q. Et où se trouvait le QG du Groupe tactique de Vogosca ?

13 R. Je crois que c'était au motel Sonja, mais je ne suis pas sûr.

14 Q. Pourriez-vous relater aux Juges de la Chambre où se trouvait l'hôtel

15 Sonja afin qu'ils puissent s'y retrouver ?

16 R. Si effectivement le QG se trouvait au motel Sonja, et non pas Sanja, ce

17 motel se trouve à Vogosca, tout près du lotissement de Krivoglavci, près

18 d'un carrefour.

19 Q. Oui, vous voulez dire quelque chose, Monsieur Kovacevic ? Vous avez dit

20 quelque chose, mais cela n'a pas été entièrement interprété. Vous avez dit

21 quelque chose. Non ? D'accord.

22 L'INTERPRÈTE : Le témoin a dit "encore".

23 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.

24 Q. Est-ce que vous avez eu des contacts avec le commandement de le RSK à

25 partir de ce moment-là et jusqu'au moment où votre unité a été incorporée

26 au Groupe tactique de Vogosca ?

27 R. Non. J'avais des réunions avec le commandement de la compagnie. Des

28 fois, il y avait des réunions avec le commandement du bataillon, mais moi-

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1 même je n'ai jamais assisté à des réunions à un niveau supérieur, si vous

2 voulez, au niveau du commandement du corps ou de la brigade. Je n'ai pas eu

3 l'occasion d'assister à ce genre de réunion.

4 Q. Est-ce qu'il vous est jamais arrivé, pendant la période couverte par

5 l'acte d'accusation, c'est-à-dire entre le mois d'août 1994 et la fin de la

6 guerre, de rencontrer M. Dragomir Milosevic ?

7 R. Non, personnellement pas. J'ai fait sa connaissance par les médias, si

8 vous voulez. Le général, toutefois, venait, mais je n'ai pas eu l'occasion

9 de le voir. Il venait dans la zone de responsabilité de ma brigade, mais

10 personnellement je n'ai pas eu l'occasion de le voir.

11 Q. Comment savez-vous alors qu'il se rendait dans la zone de

12 responsabilité couverte par votre brigade ?

13 R. Je me souviens qu'il y avait une fête, je crois, à Vogosca. Lors de

14 cette fête, je me souviens qu'on nous avait informés que le général

15 viendrait assister à cette fête. Je me trouvais à ce moment-là sur les

16 lignes et je n'ai pas pu venir ni le rencontrer ni faire partie de cette

17 fête.

18 Q. Est-ce que vous vous souvenez à quel moment cela a pu avoir lieu ?

19 Etait-ce en 1994 ou peut-être en 1995 ou à un moment avant cela, une date

20 précédant ces deux années ?

21 R. Je ne le sais pas avec certitude. C'était vers la fin de 1994, je

22 crois, ou peut-être même en début de 1995. Je crois qu'il faisait froid.

23 C'est pour cela que j'ai dit que c'était soit fin 1994 ou début 1995,

24 puisque c'était l'hiver. Je me souviens que ce jour-là, il faisait froid.

25 Q. Très bien, merci. Vous souvenez-vous des fois où vous l'avez vu dans

26 les médias ?

27 R. S'agissant des médias, je le voyais. Mais non seulement le général

28 Milosevic; je pouvais voir dans les médias tous les officiers de l'armée

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1 serbe, des autorités serbes. Je pouvais voir également lorsqu'il y avait

2 des fêtes ou lorsqu'il y avait des événements importants sur le champ de

3 bataille, Ou, par exemple, pendant les offensives lancées par l'ennemi, le

4 général donnait des déclarations pour le peuple, pour l'armée. Il faisait

5 des déclarations pour la population et on pouvait le voir aux nouvelles, je

6 pouvais le voir.

7 Q. Fort bien.

8 Mme EDGERTON : [interprétation] Je vois que la dernière page du document a

9 été téléchargée sur le système du prétoire électronique et je propose de

10 passer à la page portant le numéro 03248. C'est la dernière page,

11 conformément à la traduction. Voilà que nous avons la dernière page du

12 document.

13 Q. Vous voyez, Monsieur Kovacevic, que ce document est un ordre signé par

14 Tomislav Sipcic, de nouveau, commandant du Corps de Romanija-Sarajevo à

15 l'époque, en date du 7 juin 1992, et l'ordre est destiné à la Brigade de

16 Rajlovac, entre autres. Est-ce que vous seriez d'accord avec cela ?

17 R. Oui.

18 Mme EDGERTON : [interprétation] Pourrait-on reprendre la page numéro 1, je

19 vous prie ? Je vois que la numérotation n'est pas la même. Je propose de

20 passer à la page 2 en anglais et de nous pencher sur le paragraphe 2

21 également.

22 Q. Alors, Monsieur Kovacevic, je souhaiterais attirer votre attention sur

23 le paragraphe 2. On peut y lire :

24 "Le Corps de Romanija-Sarajevo a pour tâche de," et le mot en votre langue

25 est "de nettoyer", "ocistiti", "des parties de Sarajevo où la population

26 serbe est majoritaire en déployant de façon fonctionnelle les forces; si

27 possible, de diviser la ville le long de la ligne Nedzarici-Stup-Rajlovac;

28 afin de sécuriser la zone de l'aéroport de Sarajevo et ses environs, de

Page 6585

1 faire le nettoyage 'izvrsiti ciscenje', Mojmilo, Butmir, Sokolovic Kolonija

2 et à Butmir."

3 Est-ce que vous voyez ceci, Monsieur Kovacevic ? Ce passage ?

4 R. Oui.

5 Mme EDGERTON : [interprétation] Je souhaiterais que l'on passe au

6 paragraphe 4 un peu plus bas dans les deux versions, et pour ce qui est du

7 paragraphe pertinent, il nous faudra passer à la page suivante en anglais.

8 Pour la phrase qui nous intéresse, il faudra passer à la page suivante en

9 anglais. Vous voyez, en fait je demanderais que l'on affiche la page

10 suivante en B/C/S également.

11 Q. Vous voyez que dans ce paragraphe, Monsieur Kovacevic, les forces de le

12 RSK ont reçu pour ordre de diviser la ville de Sarajevo en deux le long de

13 la ligne Nedzarici-Stup-Rajlovac et de prendre les installations

14 importantes. Est-ce que vous êtes d'accord avec ceci ?

15 R. Je ne sais pas ce que la personne qui a donné l'ordre de ce document

16 voulait dire. J'ai en fait pris connaissance d'autres passages, autres que

17 vous avez lus, mais on parle également du déblocage de la route Trnovo-

18 Lukavice. Donc, c'est -- je ne vois pas ce que l'auteur a voulu; couper la

19 ville en deux ou bien a-t-il voulu donner une priorité aux choses

20 stratégiques ? En fait, je ne suis qu'un simple soldat et je ne comprends

21 pas très bien ce genre de chose.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Isailovic, je vous écoute.

23 Mme ISAILOVIC : Monsieur le Président, je n'interviens que vraiment dans

24 des choses très importantes, donc là c'est la ligne 27, page 27, pardon, et

25 ligne 15 :

26 "[interprétation] Aussi cette bloquade [phon] de la route Zlatiste-

27 Pale" --

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Merci beaucoup.

Page 6586

1 Mme EDGERTON : [interprétation] Je reçois l'interprétation en langue

2 française.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Les interprètes pensent sans doute

4 que vous parlez couramment le français.

5 Mme EDGERTON : [interprétation] En fait, beaucoup plus que le B/C/S,

6 effectivement.

7 Q. Le paragraphe 5.6 nous informe qu'il y a eu des tâches spécifiques

8 données à la Brigade de Rajlovac de "tenir les lignes" et, plus loin au

9 paragraphe 5.7, de "défendre de façon persistante les positions et de se

10 préparer pour intervenir dans les régions au nord de Rajlovac et d'être

11 actifs en direction Rajlovac-Stup et de prendre une part active à cette

12 phase constituant de séparer la ville."

13 Est-ce que vous seriez d'accord pour dire que le document se lit comme

14 suit, Monsieur Kovacevic ?

15 R. Oui, c'est incontestable que c'est ce qui est écrit et je n'ai

16 absolument rien à vous dire là-dessus. Je ne peux pas être d'accord avec ce

17 document ou pas puisque je le vois pour la première fois, en fait. Je n'ai

18 jamais eu connaissance de ce document avant aujourd'hui, je n'en ai jamais

19 pris connaissance auparavant, mais j'ai dit hier qu'à cette époque-là j'ai

20 été blessé sur la ligne le 8 juin, sur la ligne pendant l'armée --

21 l'attaque de l'armée de l'ABiH sur Zuc, donc je suis un peu perdu par ce

22 que vous me posez. Je suis perplexe, je ne sais pas quoi vous répondre.

23 Q. Donc, l'armée de l'ABiH, cette offensive dont vous nous parlez, c'était

24 en fait le lendemain de cet ordre qui a été émis selon lequel le RSK devait

25 travailler à la division de Sarajevo ?

26 R. Effectivement, c'est arrivé le jour suivant, un jour après la date qui

27 figure sur cet ordre, et c'était dans ma zone de responsabilité à moi, la

28 zone de responsabilité de Rajlovac. Mais je ne sais pas si avant, il y a eu

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1 peut-être autre tentative sur la ligne Ilijas, Lukavica. Mais pour ce qui

2 est de ma zone de responsabilité, la zone de responsabilité de la Brigade

3 de Rajlovac, l'offensive a débuté exactement le 8 juin, le matin.

4 Q. Monsieur Kovacevic, sur la base de cet ordre qui est dirigé aux autres

5 brigades du Corps Romanija-Sarajevo, y compris le vôtre, si je vous disais

6 que la Brigade de Rajlovac n'était pas simplement debout là devant leurs

7 maisons comme vous nous avez dit hier, non seulement qu'ils défendaient

8 leur territoire, mais la Brigade de Rajlovac défendait également le

9 territoire dont ils s'étaient procuré dans le but d'assurer Sarajevo,

10 d'assurer la division de Sarajevo, que diriez-vous si je vous disais ceci ?

11 R. Je répondrais la même chose qu'hier. Les lignes, ces lignes-là, les

12 lignes pour lesquelles vous dites -- qui avaient été prises, ces lignes

13 avaient été posées et placées là sans conflit. Ces lignes n'avaient pas été

14 prises, elles avaient été placées devant nos maisons. Et à l'hôtel, ici,

15 j'ai un document qui me permettrait de confirmer la véracité de mes dires,

16 que ma maison était là et que la ligne était juste là, en face. La FORPRONU

17 avait même dessiné ces lignes, et ces lignes n'avaient pas bougé pendant la

18 durée de la guerre, pendant toute la durée de la guerre.

19 Donc, nous étions devant nos maisons, et pour ce qui me concerne,

20 enfin, c'est ce que je peux vous dire. Je vais vous montrer de nouveau sur

21 la même carte, si vous voulez, je vais vous montrer tous les villages, tous

22 les quartiers serbes. Il s'agissait des villages serbes, vous pouvez le

23 vérifier de cent façons, et vous pouvez voir que les lignes étaient

24 pratiquement devant les maisons, devant les villages.

25 Vous dites, par exemple sur ce territoire qui, selon vous, vous dites

26 que la Brigade de Rajlovac avait pris ou le Corps de Romanija-Sarajevo

27 avait pris ces endroits, en fait il n'y avait pas de prise, il n'y avait

28 pas de citoyens d'autres nationalités. Nous n'avons rien à prendre, nous

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1 étions sur nos terres, nous étions dans nos forêts, et c'est là que la

2 ligne avait été placée au début de la guerre. Et nous avons été attaqués,

3 comme je vous le dis, le 8 juin tôt dans la matinée. Justement, l'attaque a

4 été lancée sur ces endroits-là. Nous n'avons pas attaqué la ville, nous

5 n'avons pas coupé la ville, nous n'avons pas pris --

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.

7 Votre prochaine question, Madame Edgerton, je vous prie.

8 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui.

9 Q. Effectivement, je voulais en fait donner suite à quelque chose, enfin,

10 pour donner suite à quelque chose que vous avez dit sur le même sujet,

11 d'ailleurs vous avez déjà mentionné hier, vous avez dit il y a quelques

12 instants : "Dans la zone que," selon vous, "la Brigade de Rajlovac avait

13 occupée ou le Corps Romanija-Sarajevo avait occupée, en fait cette région

14 n'était pas du tout peuplée par d'autres, par des personnes d'autre origine

15 ethnique."

16 Monsieur Kovacevic, si je vous disais qu'en réalité, la région qui se

17 trouvait dans la Brigade -- qui était occupée par la Brigade de Rajlovac et

18 le Corps de Romanija-Sarajevo était densément peuplée par d'autres, par des

19 personnes d'autre appartenance ethnique jusqu'au point où il y avait des

20 gens qui vivaient dans des immeubles d'habitation et ils étaient

21 d'appartenance ethnique mixte, que diriez-vous si je vous disais cela ?

22 R. Je n'ai jamais dit que sur ce territoire qui était sous le contrôle du

23 Corps Romanija-Sarajevo, je n'ai jamais dit qu'il n'y avait pas de gens

24 appartenant à d'autres nationalités, mais j'ai simplement parlé de la

25 Brigade de Rajlovac.

26 Je dis encore une fois que dans la zone de responsabilité de la

27 Brigade de Rajlovac, je crois qu'à 97 % il y avait des Serbes, et 3 %,

28 c'était une population qui appartenait à d'autres nationalités. Donc, il

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1 n'y avait pas vraiment d'immeubles. Pour la plupart, c'étaient des maisons

2 détachées; pas pour la plupart, mais exclusivement, c'est une région où il

3 n'y a que des maisons, donc il n'y a pas d'immeubles.

4 Et de nouveau, je dois vous dire et je ne peux pas confirmer

5 maintenant à 100 % quel était le pourcentage, mais je crois que cette

6 région était peuplée à 97 % de Serbes et à 3 % d'autres nationalités. Pour

7 le Corps Romanija-Sarajevo, je ne le sais pas, je ne l'ai pas confirmé

8 hier, mais j'ai simplement parlé de la zone de responsabilité de la zone de

9 Rajlovac.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous écoute, Madame Edgerton --

11 Madame Isailovic.

12 Mme ISAILOVIC : Seulement qui manque dans le compte rendu, donc c'est page

13 30, ligne 18, après avoir dit :

14 [interprétation] "Etant donné que ces quartiers étaient peuplés par -

15 - en fait, constituent des maisons privées" --

16 [en français] -- et je le dirai en B/C/S.

17 [interprétation] "Non pas pour la plupart, mais exclusivement."

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Qu'est-ce qui a été omis après

19 "maisons privées" ? Est-ce que vous pourriez nous le dire ? Vous pouvez le

20 dire en B/C/S, décrire en B/C/S. Qu'est-ce qui manquait ?

21 Mme ISAILOVIC : La chose la plus sérieuse, c'est de reposer la question au

22 témoin à propos de forme de ces maisons, parce qu'il a parlé de maisons, de

23 pavillons, et pas de ce qu'on appelle nous, en France, HLM, donc il n'y en

24 a pas des HLM, mais des pavillons.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Témoin, pourriez-vous

26 nous dire, répéter ce que vous nous avez dit tout à l'heure s'agissant de

27 ces maisons ?

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Justement, ceci --

Page 6590

1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non, ne nous donnez pas un long

2 narratif, dites-nous simplement de quel type de maisons il s'agissait dans

3 ces régions.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est justement ce que j'ai dit.

5 C'étaient des maisons privées exclusivement; il n'y avait pas d'immeubles

6 d'habitation.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Donc, c'étaient des lotissements avec des

9 maisons de particuliers, des maisons détachées, des maisons privées, des

10 pavillons.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Et donc vous n'êtes pas d'accord

12 avec la proposition faite par le Procureur que c'était une région, car je

13 crois que le Procureur a dit qu'il s'agissait d'une région peuplée par des

14 habitants d'origine ethnique mixte, donc vous n'êtes pas d'accord avec

15 cette proposition-là ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'ai dit qu'il y avait un tout petit

17 pourcentage, donc je n'ai pas parlé de population mixte. Dans une partie de

18 cette -- sur une partie de ce territoire, il y avait des gens appartenant à

19 d'autres groupes ethniques, mais sinon c'était une structure ethnique

20 homogène.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Madame Edgerton.

22 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Messieurs les

23 Juges.

24 Q. Monsieur Kovacevic, ce que vous avez dit hier, c'était qu'il n'y avait

25 pas de Musulmans qui habitaient dans un rayon de 20 kilomètres. Mais en

26 fait, lorsqu'on parle de 20 kilomètres, c'est une distance très importante,

27 et 20 kilomètres est une distance qui élargit la périphérie de Sarajevo.

28 Donc, revenons maintenant aux membres d'autres groupes ethniques qui

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1 vivaient dans la zone qui était placée sous la zone de responsabilité de la

2 Brigade de Rajlovac. Et en disant ceci --

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Edgerton, le conseil de la

4 Défense souhaiterait dire quelque chose.

5 Oui, Maître ?

6 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, le Procureur a

7 exposé une thèse et a proposé certaines choses au témoin. Il faudrait

8 permettre au témoin de répondre à cette thèse. Il a dit qu'il n'y avait pas

9 d'habitants musulmans dans un rayon de 20 kilomètres. Permettez au témoin

10 de répondre à cette question.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous avez tout à fait raison.

12 Effectivement, c'était la question que vous avez posée au témoin, mais le

13 témoin n'a pas encore donné réponse à cette question, Madame Edgerton.

14 En fait, Monsieur le Témoin, la question était la suivante. Hier,

15 vous avez dit qu'il n'y avait pas de Musulmans habitant dans un rayon de 20

16 kilomètres.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas si je l'ai dit exactement comme

18 ça ou si j'ai dit qu'une population serbe était majoritaire dans un rayon

19 de 20 kilomètres. J'ai peut-être parlé de la majorité. Cela correspond avec

20 la zone de responsabilité de la Brigade de Rajlovac.

21 C'est un espace, si vous voulez, je vais vous expliquer, qui s'étend

22 d'Ilidza jusqu'à Ilijas, Sarajevo Polje, qui longe la rivière Bosna. Pour

23 revenir à ce que j'ai dit, il y a peut-être 6 ou 7 % des personnes

24 appartenant à d'autres groupes ethniques, mais le long de la Bosna, la

25 population est majoritairement serbe. C'est ce que j'ai dit hier, c'est ce

26 que j'ai cru dire hier, je crois, n'est-ce pas ?

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Maître Tapuskovic.

28 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que le

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1 Procureur devrait essayer d'élucider ce point, mais je demanderais que l'on

2 se plie à la même chose qui a été exigée de la Défense. Il faudrait montrer

3 le passage pertinent au compte rendu d'audience afin de citer littéralement

4 ce que le témoin a dit. Il n'est pas juste de demander au témoin

5 d'expliciter ce qu'il voulait dire, mais c'est le droit de l'Accusation,

6 l'Accusation peut poser ce genre de question, mais il faudrait montrer au

7 témoin le passage pertinent.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous avez tous les

9 éléments ? J'espère qu'on pourra quand même avancer.

10 Mme EDGERTON : [hors micro]

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Et bien, regardez quand même pendant

12 la pause, parce que l'heure est venue de faire la pause.

13 Nous allons maintenant suspendre l'audience.

14 --- L'audience est suspendue à 10 heures 31.

15 --- L'audience est reprise à 10 heures 54.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Madame Edgerton, poursuivez. Je

17 voudrais que nous abandonnions cette question. Vous savez, j'ai dit ceci,

18 vous avez dit cela, cette question des erreurs qu'on peut relever dans le

19 compte rendu d'audience. Voyons si on peut avancer. C'est la question.

20 Mme EDGERTON : [interprétation] D'accord, Monsieur le Président, je suis

21 tout à fait prête à le faire.

22 Q. Monsieur le Témoin, avant la pause, nous parlions de la zone de

23 responsabilité de votre brigade. Voici ce que je voudrais savoir. Cette

24 zone de responsabilité incluait-elle la ville de Vogosca ? C'est bien cela;

25 elle incluait la zone de Vogosca ? Vous pouvez répondre par oui ou par non,

26 ça suffit.

27 R. Je n'ai encore rien répondu, mais je vais vous répondre comme suit.

28 Probablement que si, mais ça ce n'est pas qui puis vous le confirmer. Je

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1 n'ai pas connaissance des différentes lignes de responsabilité.

2 Excusez-moi, c'est moi qui vous ai mal compris. J'ai compris votre

3 question. La Brigade de Rajlovac n'a pas englobé Vogosca.

4 Q. Mais elle incluait le village de Semizovac et celui de Svraka ?

5 R. Non, non plus.

6 Q. Et Svraka, ce village-là ?

7 R. Non plus, Svraka non plus.

8 Q. Et le village d'Ahatovici ?

9 R. Ça, oui.

10 Q. Celui de Dobrosevici ?

11 R. Oui aussi, c'est un village voisin.

12 Q. La zone d'Otes ?

13 R. Non.

14 Q. Parlons de Dobrosevici et d'Ahatovici. Il n'y avait pas de Musulmans

15 qui ont habité là depuis 1994 et en 1995, n'est-ce pas ?

16 R. Non.

17 Q. C'étaient des villages se trouvant dans la zone de responsabilité de

18 votre brigade, mais ils n'ont pas habité dans ces villages parce qu'ils

19 auraient été tués ou expulsés en 1992, n'est-ce pas ?

20 R. Je ne peux pas affirmer ce qui leur est arrivé, est-ce qu'ils ont été

21 tués ou expulsés. Ce que je sais, et je répète, la zone dans laquelle que

22 j'ai été, je n'ai pas été à Dobrosevici ni à Ahatovici, moi j'étais à Zuc.

23 Et dans ma zone de responsabilité, pour autant que je le sache, les

24 conflits sont survenus dans Dobrosevici et Ahatovici, entre l'armée de la

25 VRS et les Bérets verts, ou plutôt, on l'appelait la Défense territoriale,

26 de ces agglomérations.

27 Alors, ce qui s'est passé par la suite, ont-ils été tués ou expulsés, je

28 n'en ai aucune connaissance. Je n'ai pas participé à ces conflits pour ma

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1 part et ultérieurement je n'ai pas appris ou je n'ai appris rien de

2 particulier sur ces événements.

3 La zone de responsabilité, oui. Les unités qui se trouvaient sur

4 cette partie-là on pris part au conflit, mais mon unité à moi n'y a pas

5 pris part, ce qui fait que je ne sais pas s'ils ont été tués ou expulsés

6 comme vous l'avez très affirmativement dit. Moi, je ne peux pas l'affirmer.

7 Q. Trois mots auraient suffi pour répondre à la question, et vous auriez

8 été tout aussi clair, sans vouloir vous offenser, Monsieur Kovacevic.

9 Avançons. Une dernière période de 1992 m'intéresse. Parlons de l'incident

10 dont vous avez parlé à l'usine de Pretis en 1992, quand vous avez dit que

11 des armes avaient été prises. Mais vous ne l'avez pas vu, ça, n'est-ce pas,

12 vous-même ? Vous ne l'avez pas vu, n'est-ce pas ?

13 R. Je dois vous rectifier. Il ne s'agissait pas d'armes, mais de

14 munitions. Il s'agissait de prendre les munitions dans cette usine de

15 Pretis, parce qu'il n'y avait pas d'armes. Alors, moi, je ne l'ai pas vu,

16 au personnel, c'est exact.

17 Q. Donc, vous n'étiez pas là ?

18 R. Non.

19 Q. Vous ne savez pas si quelque chose a été pris parce que vous avez

20 seulement entendu en parler ou vous avez vu des reportages à la télé, donc

21 vous ne le savez pas, n'est-ce pas ?

22 R. Je vous ai dit comment j'ai appris cela, enfin, si cela a été pris et

23 qu'est-ce qu'on a pris. Je l'ai appris de la bouche des gens qui ont

24 sécurisé l'usine, un jour après l'attaque ou peut-être deux jours après

25 l'attaque - je ne sais pas quand est-ce que je suis allé pour la première

26 fois après l'attaque dans cette usine -, et on m'a raconté comment

27 l'attaque s'est déroulée. Mais 10 ou 15 ans après, maintenant on entend

28 Vikic à la télévision parler de cette attaque et de la prise de ce plan et

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1 de ces munitions de Pretis, parce que je n'ai pas eu à l'apprendre, j'ai

2 déjà vu cela à la télévision trois ou quatre fois depuis les accords de

3 Dayton à nos jours. A la télévision, ils le racontent.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Témoin, parlez un peu

5 plus lentement. N'oubliez pas les interprètes.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Certes.

7 Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Témoin, vous êtes du coin --

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, vous voulez

9 intervenir ?

10 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président,

11 et c'est bien parce qu'il a parlé si vite que l'on ne l'a pas consigné au

12 compte rendu, que ça fait des mois qu'il écoute Vikic se vanter à la

13 télévision de tout ce qu'il a sorti de l'usine de Pretis à l'époque. Et de

14 nos jours, à la télévision, on peut entendre M. Vikic le dire, et ça n'a

15 pas été consigné au compte rendu d'audience parce qu'il a parlé trop vite.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le témoin va nous le redire; nous

17 aurons ainsi ceci de lui-même. Et à un débit raisonnable, Monsieur, s'il

18 vous plaît.

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais vous répéter ce qui s'est passé ce

20 jour-là, ou alors est-ce que vous voulez que je répète ce que je viens de

21 dire, à savoir que j'ai vu Vikic à la télévision à plusieurs reprises se

22 vanter de cette opération ?

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Juste la dernière chose.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Au fil des années écoulées, au moins à trois

25 reprises j'ai vu Vikic, dans des émissions à la télévision de l'Etat, se

26 vanter de cette action de prise de munitions dans l'usine Pretis, et il a

27 affirmé que cela a permis de défendre la ville parce qu'ils avaient pris de

28 grandes quantités de fusées et de missiles antichars Osa 2. Et comme il le

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1 dit dans ses interventions, c'est ce qui a empêché une attaque de blindés

2 et de lance-missiles sur Sarajevo. Je l'ai vu à plusieurs reprises au

3 courant de ces quelques dernières années.

4 Mme EDGERTON : [interprétation]

5 Q. Si vous savez quelque chose à propos de cet incident, vous le savez

6 parce que vous le tenez d'autres sources; c'est bien clair, n'est-ce pas ?

7 R. Oui, mais de la part des participants aux événements, aux participants

8 directs.

9 Q. Le temps est peut-être venu d'entendre parler un autre participant aux

10 événements, le dirigeant serbe qui, en fait, organisait les serbes dans la

11 façon dont ils ont riposté ou répliqué à cet incident. J'aimerais vous

12 diffuser un extrait vidéo.

13 Mme EDGERTON : [interprétation] Nous avons Jovan Tintor.

14 Q. C'était une personne très influente à Vogosca et à Rajlovac. On

15 connaissait son nom dans toute la municipalité, n'est-ce pas ?

16 R. Oui et non. Je ne vois pas pourquoi il aurait eu tant d'influence. Ce

17 n'était pas un militaire et non plus un responsable civil, pas du moins

18 dans ma municipalité, mais le nom est connu.

19 Q. Mais il était membre et chef de la cellule de Crise de la municipalité

20 serbe de Vogosca, n'est-ce pas, Monsieur

21 Kovacevic ?

22 R. Oui, mais cette municipalité de Vogosca, c'est une municipalité serbe.

23 Moi, j'étais à Rajlovac, une autre municipalité, et j'ai travaillé à

24 Pretis, qui se trouve sur le territoire de la municipalité de Vogosca. Et

25 j'ai terminé avec mes activités professionnelles le 4 avril 1992.

26 Mme EDGERTON : [interprétation] Peut-on maintenant diffuser cet extrait ?

27 [Diffusion de la cassette vidéo]

28 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

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1 "Monsieur Tintor, l'ordre de Kucanjas [phon] n'est pas arrivé. Vous restez

2 à Vogosca, et il y a le récit de Pretis et Tas [phon]. Comment les Serbes

3 se sont-ils emparés de Pretis et comment de Tas [phon] ?

4 "Réponse : Le malheur du peuple serbe de Vogosca, c'est qu'un bon nombre de

5 positions clés, et à Pretis notamment il y avait des gens qui avaient une

6 foi aveugle au parti communiste, à l'égard du parti communiste et de cet

7 Etat yougoslave. Et M. Augusto Bajalo [phon], qui est à la tête de cette

8 usine, a été catégorique, et j'ai demandé à ce que notre peuple, nos gens

9 sécurisent l'usine parce qu'on nous avait annoncé qu'ils viendraient piller

10 l'usine de Pretis. Mais il a été catégorique, il a dit qu'il faisait

11 confiance aux Musulmans et au Croates et qu'il défendrait l'usine. Et c'est

12 arrivé et il s'est produit ce qui s'est produit. Il avait tort, il a eu

13 tort. Cette nuit-là, les Musulmans ont fait une incursion avec cinq, six

14 camions. Ils ont chargé les munitions et ils sont allés avec des soldats en

15 armes pour sortir. Alors, ils sont entrés, ils se sont rattachés à nos gens

16 de la sécurité, à qui ils faisaient confiance, et c'étaient des Musulmans

17 qui ont trahi. Et ils se sont rattachés donc aux Serbes et aux Musulmans

18 pour accéder à l'usine. A côté de la clôture, nous avons pu tout voir, tout

19 recenser, et on les a laissés charger les armes et les munitions.

20 Lorsqu'ils se sont dirigés vers la sortie de l'usine, on a ouvert le feu,

21 et là on a frappé très fort. Il y a eu 28 morts, 46 blessés, cinq ont été

22 capturés vivants, et vous vous souviendrez peut-être de cela au début de la

23 guerre, nous les avons livrés à nos autorités et ils ont été échangés par

24 la suite, mais ils ont été relâchés à Pale. Je ne sais pas s'ils ont été

25 échangés. Ils ont été relâchés, parce que ce sont des hommes orthodoxes

26 serbes qui ont laissé repartir ces gens. Mais ce sont des criminels, ils

27 ont essayer de piller l'usine et ils se sont attaqués à nous, et c'est

28 grâce à notre présence d'esprit et à nos forces de sécurité que nous avons

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1 réussi à défendre l'usine et que nous avons pu entrer dans l'usine et

2 prendre sur nous la totalité des effectifs de sécurité de l'usine."

3 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

4 Mme EDGERTON : [interprétation]

5 Q. Vous venez de voir M. Tintor, et c'était lui qui dirigeait les Serbes à

6 l'intérieur de cette usine. Vous l'avez entendu dire ceci : "Grâce à notre

7 présence d'esprit et grâce à notre sécurité, nous avons réussi à défendre

8 l'usine et nous y avons mis fin." Alors, est-ce que ses propos à lui vous

9 font changer d'avis ?

10 R. Non. Je pense qu'il y a quelque chose qui ne coïncide pas, mais cela ne

11 me fait pas modifier ma position. M. Tintor, ce qu'il vient de dire, je

12 l'ai dit hier. Ce n'est qu'à la troisième tentative d'accéder à l'usine que

13 ceci s'est passé, qu'ils les ont empêchés. Et il y a eu des blessés, cela,

14 je l'ai dit aussi. Lui dit qu'il y a eu des morts. Enfin, je ne sais pas,

15 moi. Je sais qu'à la troisième tentative, il y a eu des blessés, mais

16 Dragan Vikic ne le mentionne pas. Il ne mentionne pas le fait qu'il y ait

17 eu des blessés ou des morts. M. Jovan Tintor parle de la troisième

18 tentative d'intrusion, et ce sont ces Bérets rouges ou verts qui étaient

19 membres de la Défense territoriale, qui étaient comme une espèce d'unité

20 spéciale, et ils avaient voulu pour eux s'emparer donc d'une partie de ces

21 armes -- non pas des armes, mais des munitions, plutôt.

22 Et dans cette tentative, troisième tentative, il s'est passé ce que M.

23 Tintor vient de nous relater. D'après ce que moi je sais, et je me suis

24 entretenu aussi avec les forces de sécurité qui sont des connaissances à

25 moi, on a travaillé 10 ans ensemble, ils nous ont tirés d'un mauvais pas.

26 Les membres des forces spéciales, et les membres des forces territoriales

27 de Kobilja Glava ont essayé, et c'est là que les forces de sécurité se sont

28 organisées et qu'il y a eu conflit, comme le dit M. Tintor, avec des

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1 blessés.

2 Q. Monsieur Kovacevic, ce que vous nous dites, c'est que partant des

3 connaissances indirectes que vous avez, vous êtes prêt à contester ce qu'un

4 des organisateurs, ce qu'un des chefs serbes a dit; c'est bien cela ?

5 Répondez par oui ou par non.

6 R. Je conteste pour la partie où j'affirme que j'ai entendu cela de la

7 bouche de Dragan Vikic, parce que lui ne mentionne pas du tout ce conflit.

8 Q. Merci.

9 Mme EDGERTON : [interprétation] Le 03267, c'est le document que je voudrais

10 avoir maintenant. Merci.

11 Oui. Je demande le versement de cet extrait vidéo en tant que pièce à

12 charge, Monsieur le Président.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

14 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P771, Monsieur le

15 Président.

16 Mme EDGERTON : [interprétation] Pièce 03267. C'est le numéro de la pièce,

17 du document.

18 Q. Vous voyez devant vous, à partir du mois -- du 12 juin 1992, vous avez

19 un rapport du ministère de l'Economie de la République serbe de Bosnie-

20 Herzégovine qui dit, à la toute première ligne :

21 "Ceci dès que la guerre a éclaté en Bosnie-Herzégovine, l'usine Pretis est

22 restée intacte. Il y a eu quelques vols d'importance moindre de matériel,

23 d'outils, de pièces, de véhicules, et cetera."

24 Vous voyez ce document. Vous avez entendu M. Tintor et la version des faits

25 qu'il vous a présentée. Est-ce que vous maintenez malgré tout votre version

26 à vous ?

27 R. Je vous ai dit d'où venaient, d'où provenaient mes informations, et je

28 maintiens ce que j'ai vu de mes yeux à la télévision. Ce n'est pas mon

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1 récit à moi.

2 Mme EDGERTON : [interprétation] Je demande le versement de ce document,

3 Monsieur le Président.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, nous ne savons ni la

6 date ni qui est le signataire. On ne voit pas de date non plus. On ne voit

7 rien sur ce document. J'essaie de retrouver cela, mais il n'y a aucune date

8 et aucune signature.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Peut-on nous indiquer la date et la

10 signature, le signataire ?

11 Mme EDGERTON : [interprétation] Je viens de fournir la date : c'était celle

12 du 12 juin 1992. La signature, peut-on voir la deuxième page en B/C/S ?

13 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, sur ce document, il

14 n'y a aucune signature. On ne sait pas qui est-ce qui l'a signé et on ne

15 sait pas de quel type de document il s'agit, et c'est à ce sujet-là que je

16 voudrais formuler une objection.

17 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Madame Edgerton, est-ce que ce

18 document figure dans votre liste de pièces ?

19 Mme EDGERTON : [interprétation] Cela figurait dans la liste mise à jour qui

20 a été terminée ce matin et hier soir au conseil de la Défense, Messieurs

21 les Juges.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Voyons l'en-tête.

23 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je n'ai rien reçu

24 hier soir.

25 Mme EDGERTON : [interprétation] Toutes les parties ont reçu ceci, y compris

26 la Chambre par courrier électronique. Je l'avoue, c'était à 19 heures 11,

27 c'est à cette heure-là que le courrier électronique a été envoyé.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] A 19 heures 11.

Page 6601

1 [La Chambre de première instance se concerte]

2 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Ce document ne figurait pas dans la

3 liste d'hier.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Edgerton, qu'est-ce que le

5 témoin a dit à propos de ce document ?

6 Mme EDGERTON : [interprétation] Le témoin a déclaré qu'il avait entendu de

7 façon indirecte, par les médias, que soit des munitions ou des explosifs

8 avaient été emportés en grande quantité. C'est pour ça que je lui ai soumis

9 les deux premières phrases qui montrent qu'en fait il y a bien eu des vols,

10 mais de moindre importance où on a pris des paquetages, du matériel, des

11 outils. Puis, nous avons entendu M. Tintor. Nous voyons ce document. A

12 notre avis, ici, ce document présente tous les indices nécessaires de

13 fiabilité, et malgré tout le témoin campe sur sa position et s'en tient au

14 récit qu'ont fait les médias. C'est ce qu'il a dit dans sa réponse.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il n'a pas marqué d'accord avec

16 l'hypothèse que vous aviez formulée ou avec le contenu du document.

17 Mme EDGERTON : [interprétation] Il n'est pas d'accord avec ce qui est dit

18 dans le document qui affirmait et semblait être un rapport au ministère de

19 l'Economie sur la situation prévalant à Pretis.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce document n'est pas reçu au

21 dossier. Poursuivons.

22 Mme EDGERTON : [interprétation] Mme Bosnjakovic, la commis à notre affaire,

23 me dit que j'ai oublié de demander le versement du document 03248 dont nous

24 avons déjà discuté.

25 M. LE JUGE HARHOFF : [hors micro]

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce document-là est versé.

27 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P772.

28 M. LE JUGE MINDUA : Madame Edgerton, juste une question de clarification à

Page 6602

1 l'intention du témoin.

2 Monsieur le Témoin, à partir du 4 avril 1992 jusqu'à la fin de la guerre,

3 qui avait le contrôle de l'usine Pretis, "holding" ? Est-ce que c'est

4 l'ABiH ou le RSK ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Excusez-moi. Pretis était contrôlé par le

6 Corps d'armée de Romanija-Sarajevo.

7 M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup.

8 Mme EDGERTON : [interprétation] Deux domaines que je voudrais aborder

9 brièvement.

10 Q. Monsieur Kovacevic, vous n'avez jamais été à l'intérieur des lignes de

11 confrontation sur un territoire tenu par les Musulmans de Bosnie et à

12 Sarajevo pendant la guerre, n'est-ce pas ?

13 R. Non.

14 Q. Par conséquent, puisque vous ne vous êtes jamais trouvé à l'intérieur,

15 vous n'avez jamais vu ce qu'a fait ou ce qu'a pu faire le MUP. Vous ne

16 savez pas si le MUP a participé ou pas à des combats, je veux dire, à

17 l'intérieur des lignes de confrontation, n'est-ce pas ?

18 R. Je n'ai pas dit que je savais ce que le MUP a fait à l'intérieur des

19 lignes de conflit. Je disais qu'on les rencontrait aux lignes de

20 démarcations. J'ai eu connaissance d'un exemple. Nous avons abattu un homme

21 en uniforme de la police spéciale à Zuc, Ce qui fait que je sais qu'ils ont

22 participé au combat, mais je n'ai pas dit que je savais ce qu'ils avaient

23 fait à l'intérieur même de la zone contrôlée par l'ABiH. Est-ce qu'ils

24 étaient là pour régler la circulation ou pour être îlotiers, je n'en sais

25 rien.

26 Q. Vous avez déclaré qu'ils avaient participé à des combats pendant toute

27 la durée de la guerre, et cette affirmation s'appuyait sur ce seul exemple

28 que vous venez de donner; c'est bien cela ?

Page 6603

1 R. Il y en a eu un pour ce qui est de ceux dont je suis au courant moi-

2 même.

3 Q. Je vous remercie. Dernière question. Puisque vous n'avez jamais été à

4 l'intérieur des lignes de confrontation pendant la guerre, vous n'avez

5 jamais été à même de faire l'expérience personnelle des privations qu'ont

6 subies les civils de Sarajevo, pas d'eau, pas de gaz, pas d'électricité;

7 c'est bien cela, n'est-ce pas ?

8 R. Pour ce qui est du gaz, de l'électricité et de l'eau, pour information,

9 je dirais que c'était lié l'un à l'autre. Ça allait ensemble. On ne pouvait

10 pas -- des parties de Sarajevo, Hadzici, Rajlovac et autres qu'on ait

11 l'électricité, l'eau et le gaz et que Sarajevo, le centre-ville n'en ait

12 pas. A chaque fois que nous avions de l'électricité, de l'eau et du gaz,

13 ils en avaient aussi. Je ne vois pas la finalité d'autres questions pour ce

14 qui des souffrances de la population dans la ville parce que nous avons eu

15 les mêmes problèmes qu'eux; la population civile, j'entends. La structure

16 civile de cette population avait les mêmes problèmes que ceux des gens de

17 Sarajevo. On les avait chez nous.

18 Q. Monsieur Kovacevic, je ne veux pas vous offenser, mais je sais presque

19 exactement comment il y a un lien étroit entre le carburant, les

20 infrastructures. Mais je vous disais ceci : vous n'avez jamais été à

21 l'intérieur des lignes, ce qui fait que vous n'avez pas fait l'expérience

22 vous-même des privations, des souffrances de la population civile à

23 l'intérieur, n'est-ce pas ?

24 R. Ça, c'est bien exact.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous voulez dire quelque chose,

26 Maître Tapuskovic ?

27 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Oui, une petite observation. Au compte

28 rendu d'audience, on a noté et consigné le fait -- l'Accusation a dit : "Je

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1 sais." Mais l'Accusation ne peut pas témoigner ici. Elle a dit : "Je sais,"

2 et elle veut que le témoin lui confirme la chose et qu'il réponde dans ce

3 sens. Je ne pense pas qu'on puise poser la question en disant "je sais

4 telle et telle chose". Enfin, je veux bien comprendre qu'elle veut

5 démontrer qu'une chose découle d'une autre et essaie de le prouver, mais le

6 Procureur ne peut pas dire "je sais cela" et demander au témoin une réponse

7 pour le confirmer.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Aucune importance ne doit être

9 attachée à cette déclaration.

10 Vous avez d'autres questions ?

11 Mme EDGERTON : [interprétation] Non. Merci, Monsieur le Président. Pas

12 d'autres questions.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie. Le Juge Mindua a

14 une question.

15 M. LE JUGE MINDUA : Excusez-moi, Maître Tapuskovic.

16 Questions de la Cour :

17 M. LE JUGE MINDUA : Monsieur le Témoin, parlant de la production de l'usine

18 Pretis, "holding" --

19 R. Je n'ai pas de traduction. Ça y est, elle arrive.

20 M. LE JUGE MINDUA : Très bien. Je parle de la production de l'usine Pretis

21 Holding. Vous aviez dit qu'il y avait des mines, des munitions, des

22 explosifs, des missiles Osa ainsi que des bombes aériennes qui étaient

23 fabriquées et stockées dans les hangars ou dans les magasins.

24 Et le 4 avril, lorsque vous avez mis fin à vos activités

25 professionnelles, vous aviez dit qu'il y avait des bombes aériennes qui

26 étaient aussi dans ces magasins. Est-ce que vous confirmez ça ou pas ?

27 R. Je n'ai pas dit que je savais tout ce qu'il y avait. Je sais ce que

28 nous produisions et je sais ce qui a été entreposé. Au moment où j'ai

Page 6605

1 quitté les lieux, je ne savais pas exactement ce qu'il y avait au juste,

2 mais probablement sur l'assortiment entier il devait y avoir certaines

3 quantités d'entreposées. Je n'ai pas su combien au juste de tel ou tel

4 autre produit il y avait. Il devait forcément y en avoir parce qu'on a

5 produit jusqu'à ce jour-là.

6 M. LE JUGE MINDUA : Vous savez peut-être comment étaient utilisées ces

7 bombes aériennes ? Vous pouvez nous dire quelque chose là-dessus ?

8 R. Pour autant que je le sache, ces bombes aériennes je les ai vues dans

9 l'usine. Pour autant que je sache, ce sont des bombes qu'on jette depuis

10 l'aéronef.

11 M. LE JUGE MINDUA : Très bien. Selon votre version des faits, la production

12 aurait été volée par les forces spéciales de police du MUP de Bosnie-

13 Herzégovine, et selon la version du Procureur, cette production serait

14 restée dans l'usine. Mais selon votre expérience en tant qu'ancien employé

15 de l'usine et en même temps, en tant que militaire, auriez-vous appris

16 quelque chose par rapport à l'utilisation de ces bombes aériennes, soit par

17 l'ABiH ou par le RSK suite à ce vol ou non vol ?

18 R. Je ne sais pas. Je ne pourrais rien affirmer du tout à ce sujet. Je ne

19 sais pas. J'étais dans l'infanterie. J'étais un soldat dans une tranchée.

20 M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup.

21 R. Je vous en prie.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Tapuskovic, vous avez des

23 questions supplémentaires ?

24 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge. Au sujet des deux

25 documents qui ont été présentés par l'Accusation et qui ont été versés au

26 dossier comme éléments de preuve. Mais je vais commencer par le document

27 P772. Si le témoin peut se pencher sur la dernière page dudit document,

28 celle qu'on avait tout à l'heure.

Page 6606

1 Nouvel interrogatoire par M. Tapuskovic :

2 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin, au paragraphe 6, j'aimerais que

3 vous vous penchiez sur ce qui est écrit et que vous donniez lecture aux

4 Juges de ce deuxième alinéa du point 6.

5 R. "Il est strictement interdit de malmener la population civile non

6 armée, et les prisonniers doivent être traités conformément à la lettre de

7 la convention de Genève. Il est distribué un jeu de minutions et 1.5 PR."

8 Je ne sais pas ce que veut dire cette abréviation.

9 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Revenons à la page 1, je vous prie, du

10 même document.

11 Q. Monsieur Kovacevic, nous n'avons pas le temps de tout analyser, mais il

12 y a quelques instants, en réponse à certaines questions posées par le

13 Procureur, vous avez donné des réponses. Si vous examinez le point 2, vous

14 verrez qu'il s'agit du nettoyage de Mojmilo, de Sokolovic Kolonija, de

15 Dobrinja, et on énumère d'autres endroits également. Au cours de la guerre,

16 qui se trouvait sur les positions Mojmilo, Sokolovic Kolonija ? Qui était à

17 Dobrinja, qui se trouvait à Butmir ? Qui tenait ces positions ?

18 Parlons d'abord de Mojmilo et de Sokolovic Kolonija. Ici, on voit

19 qu'il est écrit "nettoyé". Qui tenait ces positions avec leurs canons tout

20 au long de la guerre ?

21 R. Pendant la durée de la guerre, ces positions étaient tenues par l'ABiH.

22 Q. Prenons la deuxième page. Ici, encore une fois, au point 5.1, on parle

23 de nouveau de Mojmilo. On dit : "Nettoyez Sokolovic Kolonija. "Nettoyez",

24 ce mot est assez clair en B/C/S. Lorsque vous avez pris vos positions aux

25 endroits où vous étiez, vous étiez dans les tranchées, est-ce que vous le

26 saviez à l'époque ou est-ce que vous l'avez appris plus tard, si tous ces

27 toponymes énumérés ici lorsqu'il s'agit de points géographiques, qui tenait

28 toutes ces positions ?

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1 R. Je vais répéter la réponse que j'ai donnée tout à l'heure. Tout ceci

2 était sous le contrôle de l'ABiH.

3 Q. Merci.

4 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Pourrait-on maintenant examiner brièvement

5 le document suivant qui porte la cote 770 ?

6 Q. Vous verrez à l'examen de ce document que l'on retrouve le mot "order".

7 Mais au point 1, si vous pouvez nous en donner lecture, je voudrais le

8 faire.

9 R. "Les unités de la Défense territoriale des forces de la défense serbe

10 de la République serbe de Bosnie-Herzégovine restructurées et reformées en

11 de larges groupes suivant les plans énumérés."

12 Q. Très bien. Et au point (e), qu'est-ce que vous voyez ? Pourriez-vous

13 nous en donner lecture, je vous prie ? Point (e) qui commence avec : "La

14 Brigade de Rajlovac…" Est-ce que vous voyez le passage ?

15 R. Oui.

16 Q. Bien, alors donnez-nous-en lecture.

17 R. "La Brigade de la Défense territoriale de Rajlovac devrait être créée

18 des habitants du territoire de Semizovac et Rajlovac."

19 Q. Alors, qu'est-ce qui est dit ici ? Pourriez-vous lire de nouveau ? De

20 quelles forces parle-t-on ?

21 R. Ce sont les forces de Défense territoriale. Voilà, je vais vous

22 redonner lecture.

23 "Jusqu'à présent, les unités de défense territoriale des forces de la

24 défense serbe de la République serbe de Bosnie-Herzégovine restructurées en

25 de plus larges groupes."

26 Q. Très bien, merci. Alors, qui s'est d'abord organisé pour en arriver à

27 cela ?

28 R. A en juger par ce document, c'est l'ABiH qui s'est d'abord organisée,

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1 et ensuite c'est la raison pour laquelle nos forces sont énumérées comme

2 des forces de la défense.

3 Q. Et que veut dire "TO" ?

4 R. C'est la défense territoriale. Ce sont les unités de la Défense

5 territoriale. C'est cela que cela veut dire, "TO".

6 Q. Merci. Je n'ai plus d'autres questions.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

8 Monsieur Kovacevic. Cela met fin à votre témoignage. Je vous remercie

9 de vous être déplacé, d'avoir déposé. Vous pouvez maintenant disposer.

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas eu d'interprétation, mais ce n'est

11 pas grave.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce que j'ai dit, c'est que ceci met

13 fin à votre témoignage. Les Juges de cette Chambre vous remercient de vous

14 être déplacé, d'être venu au Tribunal pour déposer. Vous pouvez maintenant

15 disposer.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, est-ce que votre

18 prochain témoin est disponible ?

19 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Un instant, je vous prie, Monsieur le

20 Président.

21 [Le conseil de la Défense se concerte]

22 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] C'est ma collègue qui vous informera de

23 cette -- d'une question de procédure.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous écoute, Maître Isailovic.

25 Mme ISAILOVIC : Juste une question qui -- il s'agit des mesures de

26 protection concernant ce témoin. C'est le Témoin T-47, donc il bénéficie

27 des mesures de protection octroyées dans le dossier Galic, et conformément

28 à votre décision, donc vous avez donné acte de cela et donc alors il

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1 bénéficie de la distorsion de l'image et de pseudonyme.

2 Mais, Monsieur le Président, on appelle -- on a vu le témoin lors de

3 son arrivée à La Haye, donc -- et M. T-47 nous a demandé de demander à la

4 Chambre donc de relever ces mesures, donc, parce qu'il n'a pas

5 d'inconvénient maintenant de témoigner donc sans ces distorsions d'image et

6 donc sous son nom, et donc on fait une requête orale en ce sens.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien, la Chambre est bien

8 heureuse d'entendre ceci. Le procès est censé être public, de toute façon.

9 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Ma collègue vous a déjà tout expliqué.

10 Notre prochain témoin est M. Samardzic Zoran.

11 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

12 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, avant que le témoin

13 ne pénètre dans le prétoire, je souhaiterais évoquer quelque chose qui

14 n'est pas relié nécessairement à ce témoin. Je voulais vous demander s'il

15 serait possible que notre prochain témoin soit le Témoin T-23, qui est un

16 témoin protégé. En fait, je demanderais que le prochain témoin soit le

17 Témoin T-31, au lieu d'entendre le Témoin T-23, donc de permuter la

18 comparution de ces témoins, car le Témoin T-023 a des obligations

19 personnelles, ou plutôt, le Témoin T-031 a des obligations personnelles et

20 souhaiterait terminer le plus tôt possible sa déposition. Je me suis déjà

21 entretenu sur ce sujet avec le Procureur.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Aucune objection, Monsieur

23 Tapuskovic.

24 Je demanderais que le témoin prononce une déclaration solennelle.

25 Mme EDGERTON : [interprétation] Excusez-moi, je ne suis pas tout à fait

26 certaine, je vois que l'écran est encore baissé. Est-ce que toutes les

27 mesures de protection sont -- est-ce que l'on renonce à toutes les mesures

28 de protection ?

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est ce que j'ai cru comprendre.

2 Alors, il faudrait peut-être lever le store de la galerie du public.

3 J'aimerais que le témoin prononce sa déclaration solennelle.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

5 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

6 LE TÉMOIN : ZORAN SAMARDZIC [Assermenté]

7 [Le témoin répond par l'interprète]

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Vous pouvez vous asseoir,

9 Monsieur le Témoin.

10 Maître Tapuskovic, vous pouvez commencer.

11 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président,

12 Messieurs les Juges.

13 Interrogatoire principal par M. Tapuskovic :

14 Q. [interprétation] Monsieur, je vais commencer mon interrogatoire

15 principal. Nous nous sommes déjà rencontrés, n'est-ce pas ? Avant que vous

16 n'entriez dans le prétoire, je vous ai déjà informé de parler le plus

17 lentement que possible, puisque je sais que vous bénéficiez d'un

18 tempérament assez vigoureux, donc attendez, je vous prie, que tout ce qui

19 est consigné au compte rendu d'audience soit consigné, attendez la course

20 du curseur, et puisque vous avez déjà témoigné devant ce Tribunal, vous

21 savez en fait comment les choses se passent, n'est-ce pas ?

22 R. Oui.

23 Q. Pourriez-vous décliner votre identité ?

24 R. Je m'appelle Zoran Samardzic. Je suis né le 31 mars 1953 à Nevesinje,

25 en Bosnie-Herzégovine.

26 Q. Merci. S'agissant de Sarajevo, Hadzici, lorsqu'on parle de cette

27 municipalité, vous y vivez depuis 1964; est-ce que c'est exact ?

28 R. Oui. Je suis venu de Nevesinje en 1964 de Hadzici avec mes parents.

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1 C'est là que j'ai fait mes études.

2 Q. Un instant, je vous prie. Allons-y étape par étape. Donc, vous avez

3 fait des études à l'école élémentaire. Ensuite, vous avez terminé votre

4 école secondaire et vous avez obtenu un diplôme dans le domaine de la

5 restauration à Sarajevo en 1970 ?

6 R. Oui. Est-ce que vous me permettez d'ajouter quelque chose ?

7 Q. Oui.

8 R. A la fin de mes études, j'ai obtenu un emploi en tant que restaurateur.

9 Q. Excusez-moi, je voulais vous poser une question concrète. Je voulais

10 que l'on parle de la JNA. Vous avez fait votre service militaire au sein de

11 la JNA immédiatement après vos études, et c'était en 1972, 1973; est-ce

12 exact ?

13 R. Oui.

14 Q. Où avez-vous travaillé jusqu'au début des conflits ? Expliquez-le-nous

15 en détail, je vous prie.

16 R. Oui, certainement. Lorsque j'ai terminé mon service militaire à la JNA

17 en 1973, il y a eu un poste dans le Remontni Zavod de Hadzici à Sarajevo,

18 et je suis devenu chef du restaurant, de la cantine de l'entreprise et du

19 restaurant qui y était rattaché. Et donc j'ai passé ma vie entière jusqu'à

20 la guerre, jusqu'en 1992 en tant que chef et restaurateur et j'ai toujours

21 occupé ce même poste.

22 Q. Pourriez-vous peut-être, pour éviter toute confusion, nous expliquer

23 quelque chose, même si j'ai informé l'Accusation de cela ? Notre enquêteur,

24 lorsqu'il a pris vos coordonnées personnelles et lors de l'entretien qu'il

25 a eu avec vous, il a noté que vous étiez technicien dans cette entreprise,

26 dans cet institut. Pourriez-vous nous expliquer ceci ?

27 R. Oui, certainement. J'ai eu un poste de directeur du restaurant chargé

28 de la cantine, et mon terme était "technicien directeur". Je ne me suis pas

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1 objecté à ce titre parce qu'on m'appelait "tehnicki rukovaoc". C'est comme

2 si j'étais quelqu'un, et non pas "tehnicki rukovodilac" en B/C/S, comme si

3 j'étais quelqu'un qui s'occupait d'une machine au lieu d'être cuisinier

4 chef, restaurateur.

5 Q. Combien d'années avez-vous travaillé dans cet institut ?

6 R. De 19 à 20 ans, de 1973 à 1992. Donc, j'ai -- enfin, en 1992, si vous

7 voulez, je peux vous expliquer ce qui s'est passé.

8 Q. Un instant, je vous prie. Qui travaillait dans cette entreprise, cet

9 institut ? Je vous prie de nous le dire, s'il vous plaît.

10 R. Cette institution qui était en fait un établissement, révision de

11 machines, il y avait 2 000 personnes qui y travaillaient. C'étaient des

12 personnes qui terminaient des études en génie mécanique, et ils étaient des

13 personnes chargées à la supervision des employés. Ils portaient le même

14 genre de tenue de travail que les employés.

15 Q. Et vous étiez chargé de la restauration, c'est-à-dire de la nutrition

16 de toutes ces personnes, n'est-ce pas ?

17 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Ma question a été peut-être trop directe.

18 Ce n'était peut-être pas une question adéquate. J'ai peut-être posé une

19 question suggestive. Monsieur le Président, mais je crois que je n'ai pas

20 abusé de cette façon de procéder.

21 Q. Alors, Monsieur, dites-nous, vous vous occupiez de quoi pendant 19 ans

22 exactement ?

23 R. Je m'occupais de l'alimentation et de la façon dont les autres employés

24 fonctionnaient au sein du restaurant. Je devais m'occuper de faire en sorte

25 que l'approvisionnement se fasse et que repas chauds soient disponibles à

26 un employé.

27 Q. S'agissant de ces ingénieurs qui étaient hautement qualifiés, c'étaient

28 des gens qui avaient un diplôme de génie, que faisaient-ils dans les

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1 bureaux où vous travailliez ?

2 R. Puisqu'il s'agissait d'une usine des forces terrestres de l'ex-JNA, les

3 unités venaient pour réparer leurs armes, et ces personnes techniques

4 venaient là. J'étais un civil qui travaillait dans cet institut, alors que

5 ces autres personnes, c'étaient des chefs de niveau supérieur, donc

6 c'étaient des militaires avec une formation technique.

7 Q. Y avait-il des officiers qui à l'époque s'occupaient de l'organisation

8 de l'armée au sens militaire du terme ?

9 R. Non, jamais, jamais puisque c'était une usine chargée d'examiner les

10 pièces de l'ex-JNA. Il n'y avait aucun officier chez nous qui s'occupait

11 des troupes. Je ne sais pas comment l'expliquer. C'étaient des ingénieurs

12 mécaniques et des ingénieurs électriques, mais ils étaient promus au rang

13 technique.

14 Q. Et qui assurait le financement de ces employés ? Qui rémunérait ces

15 personnes ? C'était sous le contrôle de qui exactement, cette usine ou cet

16 institut ?

17 R. Cet institut, cette entreprise était une firme qui avait été établie

18 selon le principe de l'acquisition et de la distribution des salaires, et

19 nous relevions du ministère de la Défense de l'ex-Yougoslavie.

20 Q. Je vous remercie de ces réponses bien précises.

21 Je n'ai pas de carte malheureusement à vous donner afin que vous nous

22 indiquiez où se trouvait votre entreprise, mais vous pourriez peut-être

23 vous tourner vers la carte qui se trouve derrière vous. Pourriez-vous nous

24 montrer où se trouve l'institut et où est Hadzici et où se trouvait donc

25 votre emploi, votre usine ?

26 Mme EDGERTON : [interprétation] Je pourrais peut-être venir en aide à Me

27 Tapuskovic. Je ne sais pas si cela pourrait lui venir en aide. On pourrait

28 peut-être télécharger cette carte sur le système du prétoire électronique.

Page 6614

1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. En fait, il faut être presque

2 contorsionniste pour pouvoir garder le contact avec le micro et regarder et

3 montrer des endroits sur la carte.

4 Mme EDGERTON : [interprétation] Si vous voulez, visuellement parlant, cela

5 pourrait être fort utile.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Remettez, je vous prie, cette

7 carte au conseil de la Défense.

8 Mme EDGERTON : [interprétation] Je n'ai pas vérifié le livre récemment, la

9 carte. Je ne sais pas si c'est une carte récente. La Défense choisira si

10 elle souhaite que l'on montre cette carte au témoin. De toute façon, on

11 pourra la télécharger sur le système du prétoire électronique.

12 Monsieur l'Huissier, est-ce que je pourrais encore une fois jeter un coup

13 sur la carte ? Nous pourrions peut-être la montrer sur le rétroprojecteur.

14 Non, le document n'existe pas encore sur le système du prétoire

15 électronique. Montrons le document sur le rétroprojecteur. Il s'agit d'une

16 carte.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Voici Hadzici.

18 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

19 Q. Merci. Pourriez-vous décrire aux Juges de la Chambre ce que

20 représentait Hadzici avant le début du conflit ? Nous aimerions comprendre

21 à qui appartenait Hadzici. Que s'est-il passé plus tard ? Pour pouvoir

22 parler de ce qui est arrivé plus tard, Hadzici représentait quoi exactement

23 ? Cette position, que représentait-elle, la position de Hadzici ?

24 R. Hadzici faisait partie de Sarajevo tout comme Ilidza, Dobrinja,

25 Nedzarici, Grbavica. Tout cela fait partie de Sarajevo. Certains

26 lotissements appartenaient plus au centre-ville de Sarajevo alors que nous

27 étions un peu plus loin. Nous faisions partie de Sarajevo. En 1992, quand

28 l'ABiH a pris Mojmilo, Stupsko Brdo, Zuc, il y a eu une division

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1 automatique en deux de la ville de Sarajevo. Moi qui étais habitant de

2 Sarajevo, je me sentais comme si je n'étais pas du tout un habitant de

3 Sarajevo, alors qu'eux se sentaient comme des habitants de Sarajevo.

4 Q. Lorsqu'il y a donc eu prise de ces positions, vous nous avez expliqué

5 ce qui s'est passé, je ne peux pas passer beaucoup trop de temps là-dessus,

6 mais nous y arriverons un peu plus tard, nous aborderons de nouveau ce

7 sujet, ce dont vous venez de nous parler. Ce que je voudrais savoir

8 maintenant c'est : dites-nous, que s'est-il passé dans cette usine où vous

9 travailliez ? Qu'est-il arrivé avec les personnes avec lesquelles vous avez

10 vécu et travaillé pendant toutes ces années ? Qu'est-il arrivé exactement

11 en 1992 ?

12 R. Hadzici --

13 Q. Ne parlez pas trop rapidement.

14 R. Hadzici, en tant que ville et mon usine, l'institut, vivait très

15 calmement. Tout était calme jusqu'en 1992. Le 14 février 1992, lorsqu'à la

16 suite d'un référendum sur la sécession lorsque le peuple musulman avait

17 répondu à l'appel, il y a eu des divisions par groupes.

18 Comme je vous ai dit, j'étais le directeur du restaurant de la

19 cantine. Il m'arrivait de parler aux personnes, je voulais savoir s'ils

20 étaient contents de la nourriture, si cela leur convenait.

21 J'ai vu qu'il y a eu une création de petits groupes. Dès que

22 j'approchais de la table de Musulmans qui prenaient le déjeuner à cet

23 endroit-là, ils arrêtaient de parler. Lorsque je me déplaçais de nouveau,

24 ils se mettaient à chuchoter. Je ne sais pas ce que c'était, mais on aurait

25 dit que c'était une sorte de manque de confiance. Je ne sais pas trop ce

26 qui se passait exactement.

27 Q. Ça s'est passé en février ?

28 R. Oui.

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1 Q. Je vais vous demander ceci : que s'est-il passé en mars et en avril ?

2 R. Dès les mois de mars et d'avril, les médias, la télévision ont montré

3 des événements survenus à Sijekovac et la détresse des civils qui s'y

4 trouvaient. Par conséquent, ceci a contribué à la recrudescence des

5 tensions à la Zavod et ceci a trouvé son apogée au mois de mai.

6 Q. Que s'est-il passé au mois de mai ? Est-ce que vous vous souvenez de la

7 date ?

8 R. Je m'en souviens comme si c'était aujourd'hui. C'était le 8 mai, vers

9 midi. Les membres de la communauté ethnique musulmane ont quitté la Zavod.

10 Il n'y a que 200 Serbes qui sont restés. Ils ont été un peu pris de

11 surprise. Ils étaient tout à fait interloqués devant ce qui se passait.

12 Personne n'a rien compris. Ce fut le cas jusqu'en début de soirée.

13 Vers 7 heures et demie du soir, on a commencé à entendre des tirs dirigés

14 sur la Zavod et Hadzici depuis le village de Dupovci. Je peux vous montrer

15 ceci sur la carte. C'est ici que se trouve Dupovci. Des tirs sont partis,

16 dirigés sur la Zavod. Sans aucune raison, on a été tout à fait pris de

17 court. Je vous l'ai dit il y a quelques minutes, mon usine réparait les

18 armes de l'ex-JNA. Parmi les gens qui étaient restés, nous avons pris des

19 armes qui, pour certaines, étaient en état de marche et d'autres pas, et

20 nous avons riposté.

21 Q. Merci. Dites-moi qu'est-ce qu'il y avait comme type d'armes dans

22 l'usine. Vous avez déjà dit que c'étaient des fusils qui n'étaient pas en

23 état de marche. Je vais vous poser d'autres questions à ce propos plus

24 tard. Mais dites-moi, maintenant, au cours des événements qui ont suivi,

25 est-ce qu'il y avait des armes en bon état de marche qui se trouvaient là,

26 dans l'atelier de réparation ? Est-ce qu'il y avait des armes qui

27 fonctionnaient ?

28 R. Oui. Puisque mon poste de travail était tout près, j'ai vu qu'il y

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1 avait deux chars, deux Praga, des canons de 30 millimètres. Je ne veux pas

2 semer de confusion, ce n'est pas un canon de 30 millimètres. Il y avait

3 aussi deux BRDP [phon]. Je ne sais pas du tout ce que c'était.

4 Q. Quel était l'état de fonctionnement du reste ?

5 R. Les armes ne marchaient pas, mis à part des armes légères, des fusils

6 automatiques.

7 Q. Que s'est-il passé le 8 mai ? Ça, c'était le 8 mai, ce que vous avez

8 dit, mais est-ce que vous vous souvenez de ce qui s'est passé après cette

9 date-là ?

10 R. Peu après, le 12 mai, quatre jours après l'attaque de la Zavod, tout

11 Hadzici a été attaqué. Il y a eu une offensive de grande envergure depuis

12 Pazarici vers la ville ainsi qu'à Zavod et sur les villages environnants.

13 Ça, ça s'est passé le 12 mai.

14 Q. Merci. Pourriez-vous nous indiquer approximativement où se trouve

15 Pazarici ? Où est-ce qu'on le voit sur la carte ? Si ce n'est pas le cas,

16 vous nous direz à peu près où c'est. C'est dans cette direction-là; c'est

17 ça ?

18 R. Oui, dans cette direction-ci.

19 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Le témoin a dit aussi que c'était dans la

20 direction de Gradac. Ceci va peut-être nous faciliter la tâche plus tard

21 puisque nous saurons exactement où c'est.

22 Q. Qu'est-ce qui s'est passé au cours des jours qui ont suivi ? Ici, vous

23 avez parlé du 12 mai. Qu'est-il advenu des officiers qui étaient comme vous

24 des employés, qui n'étaient pas de vrais officiers militaires ?

25 R. Déjà le 15 mai, ces officiers, ce personnel militaire technique et les

26 familles de ces personnes ont quitté Hadzici et Sarajevo. Il y avait parmi

27 eux des Serbes, des Macédoniens, des Croates, et chacun a exercé son droit

28 de rentrer dans son pays d'origine respectif. Il n'y a que nous qui sommes

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1 restés avec un seul officier, le lieutenant-colonel --

2 L'INTERPRÈTE : -- dont le nom n'a pas été saisi par les interprètes.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Témoin, vous parlez trop

4 vite. Vous avez parlé d'un lieutenant-colonel, et les interprètes n'ont pas

5 saisi le nom de ce monsieur. Pourriez-vous le répéter ? Allez-y.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit qu'après être partis de Hadzici et de

7 Zavod à Sarajevo, il n'y a qu'un officier qui est resté, qui était de Banja

8 Luka en Bosnie-Herzégovine. Il s'appelle Stevan Radivojesa. C'était un

9 ingénieur mécanicien. C'est le seul des officiers, entre guillemets, qui

10 est resté avec nous.

11 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

12 Q. Monsieur Samardzic, nous ne pourrons rien expliquer aux Juges si nous

13 deux, nous n'essayons pas de nous maîtriser et de parler plus lentement,

14 parce que sinon il n'y aura rien qui sera consigné au compte rendu.

15 Essayons de ralentir notre débit.

16 Qu'est-il advenu, je vous le demandais, des familles de ces officiers ?

17 R. Les familles sont parties avec ces hommes, sont parties de Hadzici et

18 de Sarajevo.

19 Q. Est-ce que vous avez précisé la date à laquelle ceci s'est passé ?

20 R. C'était le 15 mai 1992, aussitôt après l'attaque.

21 Q. Est-ce que vous avez reçu des nouvelles à propos de ce qui se passait

22 ailleurs, dans d'autres municipalités de Sarajevo ? Hadzici en étant une.

23 Est-ce que vous avez appris ce qui se passait dans d'autres municipalités ?

24 R. J'ai reçu des renseignements disant qu'il y avait des tirs aussi à

25 Ilidza, mais aussi à Nedzarici, à Grbavica.

26 Q. Est-ce que vous avez entendu parler de ce qui se passait à Pofalici,

27 dans ce quartier-là de Sarajevo ?

28 R. J'ai entendu dire qu'il y avait eu des victimes là aussi, que

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1 simplement on avait nettoyé Pofalici. Les gens qui ont réussi à s'échapper,

2 pour ainsi dire, ont sauvé leur peau, et ceux qui n'ont pas pu s'échapper

3 ont été tués. Il y a un nombre énorme de civils qui ont été tués.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mme Edgerton souhaite intervenir.

5 Mme EDGERTON : [interprétation] Pour dire deux choses, Monsieur le

6 Président, avec votre permission. Tout d'abord, c'est qu'il n'y a aucune

7 mention d'événements survenus à Pofalici pour ce témoin dans le résumé 65

8 ter. Deuxième point, les questions et réponses concernant Pofalici ne sont

9 pas du tout étayées, sont sans fondement. Et je ne vois pas la pertinence

10 d'événements survenus à Pofalici par rapport aux événements de Hadzici. Or,

11 d'après le résumé 65 ter, j'avais compris que c'est de cela qu'allait

12 parler le témoin.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Laissons le soin à Me Tapuskovic de

14 vous répondre.

15 D'abord, en ce qui concerne le résumé 65 ter qui ne mentionne pas Pofalici,

16 mais ce qui me semble plus important encore, c'est de savoir de votre part

17 quelle est la pertinence de la déposition de ce témoin.

18 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

19 Juges, je n'ai mentionné nulle part, dans aucun résumé, tous les endroits

20 qui constituent Sarajevo, sinon vous n'auriez plus qu'une liste de noms

21 dans le résumé, le nom des municipalités. Il n'y a pas un seul témoin pour

22 lequel j'ai dit que je ne voulais pas lui poser de questions à propos de sa

23 situation personnelle et de la situation de la zone dans laquelle cette

24 personne vivait lorsque le conflit a éclaté.

25 Je pense que c'est très utile pour que vous compreniez la situation

26 générale et pour permettre au témoin de parler de tout ce qui se trouve

27 dans le résumé, activités de combat, la participation du témoin, son

28 expérience personnelle, et cetera. Ici, en l'occurrence, ça ne concerne que

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1 Hadzici. Le témoin n'est jamais sorti de Hadzici. C'est une municipalité de

2 Sarajevo qui a eu le même destin que le reste de Sarajevo. Il dit que

3 lorsqu'il y a eu capture de Stup et de Mojmilo, soudainement il s'est

4 trouvé dans une ville qui ne s'appelait plus Sarajevo.

5 [La Chambre de première instance se concerte]

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Voici notre décision. Il ne faut pas

7 poser cette question, au motif que nous ne sommes pas convaincus de la

8 pertinence de cette question.

9 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

10 Q. Je vais m'abstenir d'aborder ce sujet qui a été votre vécu personnel;

11 or, c'est précisément ce que je voulais apprendre de votre part.

12 Après tout ceci, vous avez dit dans quelles conditions vous avez pris les

13 armes. Pourriez-vous nous dire en quelques mots ce qui s'est passé plus

14 tard, au cours des mois qui ont suivi, mai et après ?

15 R. Très bien. Après le 15 mai, je l'ai déjà dit, lorsque le personnel

16 technique et les familles ont quitté la Zavod, le 25 mai, il y a eu une

17 autre offensive violente. Là aussi, nous avons réussi à nous défendre, à

18 consolider nos rangs, à établir une ligne de défense.

19 Q. Merci. Pourriez-vous nous indiquer sur la carte l'emplacement de cette

20 ligne de défense ? Voyons d'abord où se trouvait cette ligne de Défense.

21 R. Vous parlez de cette ligne-ci ? Elle est immédiatement dans le village

22 de Dupovci dont j'ai parlé il y a quelques instants. Lorsque nous sommes

23 entrés et que nous avons établi cette ligne, cette ligne, elle traversait

24 même certaines maisons.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Edgerton.

26 Mme EDGERTON : [interprétation] Ceci va peut-être aider Me Tapuskovic, mais

27 maintenant nous avons un numéro qui est --

28 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas bien saisi le numéro.

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1 Mme EDGERTON : [interprétation] -- 2972. Ceci permettra peut-être -- c'est

2 2D. Donc, peut-être que le témoin pourra ainsi annoter la carte si elle est

3 diffusée à l'écran.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, il faudrait l'afficher à

5 l'écran.

6 Maître Tapuskovic.

7 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Oui, d'accord, mais je ne sais pas s'il

8 est possible d'annoter, ici. Oui, oui, mais je suis d'accord, bien entendu,

9 bien entendu.

10 Mme EDGERTON : [interprétation] Je répète la cote : 02792D. Est-ce qu'on

11 peut utiliser le système du prétoire électronique ? La voici.

12 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

13 Q. Est-ce que cette ligne, c'était la ligne où vous avez pris position ?

14 R. Oui.

15 Q. Dites-nous, vous venez de déclarer que vous avez d'abord subi des tirs

16 de Dupovci le 8 mai. Est-ce que vous pourriez entourer d'un cercle le lieu

17 de Dupovci ?

18 R. [Le témoin s'exécute]

19 Q. Et y ajouter la lettre "D" ?

20 R. [Le témoin s'exécute]

21 Q. Avant d'établir cette ligne que vous avez tracée, qu'est-ce que vous

22 avez trouvé là, sur place, à Dupovci ?

23 R. Dans les maisons, dans les caves, il y avait des petites fenêtres qu'on

24 avait recouvertes de couvertures, de matériel léger. Donc, on avait

25 l'impression qu'en fait, c'étaient des moyens de communication. Les gens

26 avaient établi des liens comme des tranchées pour passer d'une maison à

27 l'autre. On avait même enlevé du plancher pour creuser des tunnels

28 souterrains pour relier une maison à l'autre.

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1 On a trouvé des stocks de lait, de chocolat, de pansements, des pulls

2 de couleur olive avec sur la manche le drapeau rouge, bleu et jaune. C'est

3 en fait le drapeau allemand.

4 Q. Et vous, où avez-vous pris position sur la ligne ? Est-ce que c'était

5 ici ou ailleurs ? Si c'était ailleurs, on ne le verrait peut-être pas sur

6 la carte. Alors, pourriez-vous nous indiquer dans quelle direction vous

7 l'avez fait à partir de Dupovci ?

8 R. Je m'excuse auprès des Juges, mais j'ai vraiment beaucoup de mal à lire

9 des cartes. Je travaillais dans les services de logistique. Mais j'étais

10 cuisinier.

11 Et je suis sûr que je pourrais bien vous indiquer la bonne ligne. C'est une

12 ligne où se trouvaient ceux qui combattaient avec moi, mais moi j'étais

13 dans les cuisines.

14 Q. Mais votre position, elle était le plus près de quel lieu ?

15 R. Il y avait une -- un transformateur, un poste de transformation qui

16 était entre Zavod et Dupovci. C'était pratiquement au portail d'entrée de

17 l'usine, une espèce d'usine électrique.

18 Q. Mais est-ce que vous étiez sur la ligne de séparation ?

19 R. Après le 25 mai, après cette offensive dont j'ai parlé, j'ai été muté.

20 J'ai été envoyé sur la ligne de séparation, dans le village de Kasitici, au

21 pied du mont Igman.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] L'heure est venue de faire la pause,

23 Maître Tapuskovic.

24 --- La pause est prise à 12 heures 21.

25 --- L'audience est reprise à 12 heures 42.

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, à vous.

27 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

28 Q. Monsieur Samardzic, nous avons parlé de cette carte. Vous nous avez dit

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1 le nom de la localité à proximité de laquelle vous aviez vos positions.

2 R. C'est le village de Dupovci. C'est non loin de l'établissement.

3 Q. Non. Ça, vous nous l'avez déjà expliqué. Mais quand vous êtes arrivé à

4 vos lignes de démarcation, où est-ce que vous vous trouviez ?

5 R. J'étais dans le village de Kasitici.

6 Q. Merci. Alors, de Dupovci, j'aimerais que vous tiriez une flèche en

7 direction de l'endroit où vous vous êtes trouvé, parce que Kasitici, ça ne

8 se trouve pas ici.

9 R. Non, justement, ça ne se voit pas ici.

10 Q. Veuillez tirer une flèche entre Dupovci et l'emplacement de cette

11 localité de Kasitici.

12 Mme EDGERTON : [interprétation] Si je peux vous aider, j'ai une autre carte

13 avec Kasitici dessus. Et peut-être pourrions-nous donner aux Juges de la

14 Chambre le numéro 65 ter afin que ce soit affiché au prétoire électronique.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La coopération de l'Accusation est

16 tout à fait louable. Nous allons donc --

17 Mme EDGERTON : [interprétation] Avant que cela ne soit affiché, j'aimerais

18 qu'on le montre à M. Tapuskovic pour voir s'il serait intéressé par

19 l'utilisation de cette carte. Et Kasitici, ça se trouve --

20 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Oui, mais ce que je risque, c'est de

21 perdre pas mal de temps. Mon intention était de demander au témoin de nous

22 indiquer si c'était vers le sud ou vers l'est par rapport à Dupovci et

23 tirer une flèche pour qu'on sache --

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien. Allez de l'avant. Allons donc

25 de l'avant.

26 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

27 Q. Monsieur Samardzic, j'aimerais que vous nous montriez par votre flèche,

28 et par rapport à Dupovci, ça se trouve vers l'est ou vers le sud ? Tant

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1 pis, je vais utiliser ce que le Procureur m'a proposé et je remercie Mme le

2 Procureur. Je pensais que le témoin pourrait au moins nous montrer les

3 coordonnées, mais bon, ce n'est pas d'une importance aussi cruciale. Peut-

4 être cela pourrait-il nous aider à gagner du temps.

5 Q. Monsieur Samardzic, quand vous avez été sur les deux fronts la dernière

6 fois, quelle était la distance entre la ligne que vous teniez vous-même et

7 celle que tenait l'adversaire ?

8 R. Pas plus de 500 mètres, ce qui signifie que nous étions à 500 mètres

9 des lignes ennemies. Nous étions à 2 kilomètres du centre de Hadzici, et

10 eux ils étaient dans le sens, dans la direction de Pazarici. C'est donc 8 à

11 9 kilomètres de la population civile. Là, il n'y avait pas de population

12 civile du tout; il n'y avait que des militaires dans leurs tranchées, c'est

13 tout.

14 Q. Et vous, vous dites que vous étiez du côté opposé dans vos tranchées,

15 alors.

16 R. J'étais à Kasatici, je vous dis.

17 Q. Mais vous étiez dans une maison ou dans --

18 R. Non, j'étais dans une tranchée.

19 Q. Avez-vous eu, au moment des combats, ou plutôt, pouvez-vous décrire sur

20 cette ligne de démarcation quel a été votre modus operandi, vous, soldats ?

21 De quelle façon êtes-vous intervenus ?

22 R. Nous avions des fusils automatiques, des armes d'infanterie légère, et

23 c'est avec cela qu'on s'est battus. Pendant un certain temps, on avait les

24 deux chars dont j'ai parlé au tout début, et ces deux Praga, mais rien que

25 des armes d'infanterie. Les chars et les deux Praga n'étaient là que pour

26 nous apporter un soutien.

27 Q. Cela, vous nous l'avez déjà expliqué, pour ce qui est de ce qui s'est

28 passé à l'établissement où vous étiez. Mais qu'y avait-il à Pazarici avant

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1 le début des conflits ?

2 R. Dans la localité de Pazarici, il y avait une caserne. Je ne le savais

3 même pas. J'ai vécu si longtemps là-bas et je ne savais pas que c'était une

4 caserne destinée à l'entraînement des artilleurs. Et en 1992, par la force

5 des choses, un régiment de l'artillerie de Zadar a été transféré là.

6 Et cette caserne a été complètement bloquée. Cela a duré, me semble-

7 t-il, jusqu'au 21 mai 1992, date à laquelle il y a eu des blocages de la

8 caserne. Et ces jeunes qui ont été formés là ont été transportés par des

9 autocars, des autocars de l'établissement de révision du matériel, vers des

10 lieux sûrs. Je ne sais pas où. Mais il y avait deux collègues avec nous qui

11 conduisaient, Tesic Zivko --

12 L'INTERPRÈTE : Et un autre dont l'interprète n'a pas saisi le nom.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] -- et ils ont dit que dans cette

14 caserne, puisque c'est un centre de formation des artilleurs, il restait

15 bien des pièces d'artillerie lourde.

16 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

17 Q. Bon. Merci. Vous nous avez dit que vous avez bénéficié d'un soutien de

18 ces deux chars et des deux pièces quelque peu plus lourdes. Alors, de quoi

19 cela avait-il l'air ? Mais vous, vous dites que vous avez tiré juste à

20 l'arme d'infanterie, donc le soutien que vous avez reçu de la part de ces

21 pièces lourdes, par rapport à vous, où est-ce que ces pièces tiraient-elles

22 ? Où est-ce que ces obus tombaient-ils par rapport à l'emplacement où se

23 trouvaient vos effectifs à vous ?

24 R. Pour autant que je le sache, ces deux chars ont tiré en direction des

25 lignes avancées face à nous, donc vers les tranchées qui se trouvaient en

26 face. Ils nous apportaient leur soutien, et eux, sans cesse, s'efforçaient

27 de percer une percée dans nos lignes de défense. Et c'est arrivé de jour en

28 jour. Nous avons eu des combats âpres au quotidien, là-bas.

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1 Q. Mais sur les lignes où vous étiez, dites-moi à quelle distance de

2 Pazarici cela se trouvait-il ? A quelle distance les premières

3 constructions civiles se trouvaient-elles ?

4 R. A 8 ou 10 kilomètres, à peu près.

5 Q. Et les soldats qui étaient dans les tranchées en face ont-ils également

6 bénéficié d'un soutien à l'artillerie ?

7 R. Oui. Ils avaient sorti de cette caserne débloquée toutes les pièces qui

8 étaient restées là-bas. Ils ont pris cela, ils ont réparé. Mais il y avait

9 des calibres assez lourds, des obusiers de 152 millimètres.

10 Q. Bon. Dites-moi, lorsque eux tiraient, où est-ce que cela tombait-il,

11 enfin, les projectiles tirés par ces armes-là ?

12 R. Cela tombait rarement sur nos lignes à nous. Cela tombait sur la partie

13 urbaine de la ville, au centre même, au cœur même de Hadzici. Ils ont

14 pilonné la population civile.

15 Q. Dites-nous, je vous prie, jusqu'à quand vous êtes resté sur ces lignes

16 de démarcation.

17 R. J'y suis resté jusqu'en février 1993. C'est là qu'on a eu la

18 possibilité d'organiser l'alimentation de l'armée, et j'ai été placé à la

19 tête de cette cantine militaire et j'y suis resté jusqu'à la fin de la

20 guerre.

21 L'année 1993, elle, a connu bon nombre de batailles, et beaucoup d'obus

22 sont tombés sur le centre-ville de Hadzici. Et le 13 avril, qui a été

23 triste pour moi, et bien j'étais en visite chez un ami, et lui il a péri à

24 11 heures du matin dans la rue. En revenant de ma maison, j'ai retrouvé mon

25 enfant mort --

26 Q. Ralentissez, je vous prie.

27 R. -- et son collègue Srdjan.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez laisser au témoin une

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1 minute pour qu'il se ressaisisse. Peut-être un verre d'eau lui serait-il

2 utile.

3 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

4 Q. Monsieur Samardzic, êtes-vous à même de reprendre ?

5 R. [aucune interprétation]

6 Q. Malheureusement, je dois vous poser cette question parce qu'il convient

7 de faire en sorte que les Juges entendent ce qui s'est passé, ce que vous

8 avez vu et ceux qui, en sus de votre enfant, auraient péri.

9 R. Mon fils unique, Sasa, a péri. Il avait 13 ans. Et son collègue, Srdjan

10 Zuza --

11 Q. Un instant. Un instant.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Tapuskovic, doit-on

13 vraiment entrer dans ces détails ? Je ne vois pas en quoi cela est

14 véritablement nécessaire.

15 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vous comprends. Je n'ai pas besoin de

16 ces détails. J'ai des photos, je peux les montrer. Mais je n'ai pas eu

17 l'idée de faire en sorte que ceci se produise. Je n'ai pas demandé -- je

18 n'ai pas voulu jouer avec les sentiments d'autrui. Je n'y tiens pas du

19 tout. Ce témoin a perdu son fils unique, et moi je lui ai posé la question

20 de savoir si quelqu'un d'autre avait péri en sus de son fils. Alors, si

21 ceci n'a aucune espèce d'importance, je veux bien comprendre M. le Juge

22 Harhoff et la nécessité de ne point -- ou le souhait de ne pas en parler,

23 mais je ne comprends pas. Je demanderais au témoin alors de nous donner des

24 renseignements.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce qu'il y a eu d'autres

26 victimes, mis à part votre fils ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Un autre garçon, Srdjan Zuza. Je les ai

28 trouvés les deux en morceaux.

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1 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

2 Q. Votre fils, il avait quel âge ?

3 R. Treize.

4 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, il n'y a que quelques

5 jours que j'ai obtenu ce document qui ne parle que de la date du décès de

6 ce garçon, du fils du témoin. C'est le DD003762. C'est un document qui

7 importe à mes yeux pour qu'on puisse voir la date qui coïncide avec celle

8 de la mort de son fils. Cela n'a pas été traduit, mais ce que je voudrais,

9 c'est qu'on vous le montre. C'est un acte de décès daté du 13 avril 1993.

10 J'aimerais que ceci soit versé au dossier. Ce sera notre pièce à

11 conviction, le DD003762.

12 Mme EDGERTON : [interprétation] Ce que nous avons dit d'emblée, c'est que

13 nous avons accepté qu'il y avait un conflit armé. Nous avons cité des

14 témoins qui montraient les souffrances de la population à Sarajevo et aux

15 alentours. Cela fait partie de la cause présentée par l'Accusation. Ici,

16 vous avez un parent qui a perdu son fils. Je ne veux pas le faire souffrir

17 davantage. Bien sûr, si Me Tapuskovic estime qu'il doit présenter ces

18 éléments au dossier, à lui d'en juger, mais pour moi je pense pas que cela

19 ajoute quoi que ce soit.

20 [La Chambre de première instance se concerte]

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous pensons que c'est une

22 importance, disons, périphérique. Ce document sera versé au dossier, mais

23 nous exhortons à passer à un autre sujet.

24 M. LE GREFFIER : [interprétation] Maintenant, ce sera la pièce D229, alors

25 qu'au départ c'était le document IC DD003762.

26 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Peut-on donner une cote pour la carte ?

27 Pour la carte, est-ce que cela peut devenir une pièce de la Défense ?

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

Page 6629

1 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D230.

2 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Est-ce que je peux poser cette question ?

3 Je ne sais pas. Peut-être que c'est une question pertinente ou sans

4 pertinence, mais avant de passer à l'année 1994, à ce moment-là, suite à

5 ces actions militaires, est-ce qu'il y a eu d'autres victimes parmi les

6 civils ou pas ? Est-ce qu'aussi ceci est sans pertinence ? Est-ce que je

7 devrais m'abstenir de poser ce genre de question-là aussi ?

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, que le témoin réponde.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] En 1993, il y a eu des pertes aussi, des

10 victimes dans des appartements. Par exemple, dans un appartement dans le

11 centre de la ville de Hadzici, la mère d'un de mes amis a été tuée alors

12 qu'elle prenait un café dans son appartement du 1er étage. Il y a un obus

13 qui est venu du mont Igman et qui est tombé dans le parking et qui l'a

14 tuée, elle, dans son appartement. Elle s'appelait Ruzica Roncevic Ruza.

15 Cela a tué aussi ma voisine Savka Sarenac. Elle était debout sur son

16 balcon, dans mon immeuble, aussi en 1993. Après 1993 jusqu'en 1994, il y a

17 eu une trêve. Les trêves ont duré plus longtemps, mais il y avait quand

18 même de temps à autre des tirs sporadiques.

19 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

20 Q. En 1993 et 1994, comment se présentait la situation ? Disons,

21 commençons par 1994, la situation en matière d'approvisionnement en vivres.

22 R. J'étais le directeur de la cantine, et la Serbie imposait des

23 sanctions. Il est devenu très très difficile de trouver des ingrédients

24 pour les cuisines, pour la cantine militaire, pour préparer la nourriture

25 pour les soldats. C'était vraiment très difficile.

26 Je me souviens en 1994, au début de l'hiver, toutes les armes lourdes

27 autour de Sarajevo avaient été retirées. Il s'en est suivi une période de

28 cessez-le-feu interrompue par des tirs intermittents. En fait, le pilonnage

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1 constant du centre de Hadzici, ce n'était pas aussi intense qu'avant, mais

2 c'était quand même quotidien. Il tombait des obus tous les jours, au moins

3 10.

4 Q. Lorsque le général Dragomir Milosevic est devenu commandant du corps,

5 vous savez à quelle date cela s'est passé ?

6 R. Je pense que c'était en août, fin août 1994. Après cela et jusqu'en

7 mars 1995, il y a eu une espèce de trêve. J'insiste même, quand il y avait

8 des cessez-le-feu, il y avait des tirs violents. Je me souviens

9 parfaitement avoir vu de ma fenêtre, de chez-moi, en octobre 1994, Nevena

10 Sakota qui a été tuée en plein milieu de la rue. Elle avait 19 ans. Biljana

11 Krunic a été tuée aussi, aussi une jeune fille de 18 ou 19 ans. Un de mes

12 employés, Slavko Bujak, et je l'ai vu de mes propres yeux, a perdu une

13 jambe. Il est mort moins d'un an plus tard.

14 Au début de novembre 1994 --

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vois que Mme Edgerton s'est

16 levée.

17 Mme EDGERTON : [interprétation] Toute ma sympathie va aux victimes, bien

18 entendu. Mais rappelez-vous, je le rappelle, nous avons cité des témoins

19 dans la présentation de nos moyens. Or, on ne mentionne nulle part la ville

20 de Hadzici dans l'acte d'accusation dressé contre le présent accusé. Je

21 m'interroge donc sur la pertinence de cette déposition.

22 [La Chambre de première instance se concerte]

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce que vous faites valoir, Madame

24 Edgerton, c'est que pour ce qui est de la portée géographique de l'acte

25 d'accusation, Hadzici ne se trouve pas dans la zone couverte dans l'acte

26 d'accusation ? C'est ce que vous nous dites ?

27 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, oui, pas une seule mention.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vais voir ce que Me Tapuskovic a

Page 6631

1 à dire.

2 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, le témoin a très bien

3 expliqué que Hadzici faisait partie de Sarajevo. Hadzici a cessé d'être une

4 partie de Sarajevo après l'occupation d'une armée du mont de Stupsko Brdo

5 et aussi de Mojmilo. Hadzici, Ilijas, Nedzarici, Dobrinja, Grbavica, ce

6 sont autant de parties de Sarajevo que Zuc et Hum.

7 Je vais demander au témoin de nous dire ce qui s'est passé au mois de

8 novembre, ce qu'il savait.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais attendez, nous n'avons pas

10 encore pris de décision. Vous ne pouvez pas encore rien demander au témoin.

11 Attendez que je décide.

12 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je n'avais pas l'intention du tout de

13 poser cette question, Monsieur le Président, mais ces événements font

14 partie de ce qui se passait au cours de la période couverte par l'acte

15 d'accusation en ce qui concerne la responsabilité et la zone de

16 responsabilité de Dragomir Milosevic. Je parle de la zone de responsabilité

17 du Corps Romanija-Sarajevo.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous dites que Hadzici a cessé de

19 faire partie de Sarajevo après l'occupation par une armée du mont de Stup

20 ou de Mojmilo, et cetera. Vous parlez de quelle armée ?

21 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Mais c'est seulement ce qui s'est passé

22 dans la tête de certaines personnes et avec une certaine personne qui

23 pouvait penser que Hadzici ou Rajlovac pouvaient cesser d'être Sarajevo.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Répondez à cette question : quelle

25 était l'armée qui occupait certaines parties de Mojmilo et de Stup ? Et ça

26 s'est passé à quel moment ?

27 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] L'ABiH a occupé Mojmilo, Stupsko, divisant

28 ainsi Sarajevo en deux parties.

Page 6632

1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous parlons de quelle période ?

2 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] De 1992, de mai et de juin. Tout ceci

3 s'est passé, et c'est ainsi que c'est resté jusqu'à la fin de la guerre.

4 Mojmilo et Stupsko Brdo, entre le mont Stup, vous avez une ligne de

5 séparation qui a scindé Sarajevo en deux. Hadzici, Rajlovac, Vogosca,

6 Ilijas, ceci relevait de la zone de responsabilité du Corps Romanija-

7 Sarajevo, et tout ceci fait partie de Sarajevo.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Edgerton, est-ce que vous

9 avez une réponse ?

10 Mme EDGERTON : [interprétation] Simplement pour marquer notre accord et

11 pour dire que de l'avis de l'Accusation, c'était la VRS qui tenait Stup.

12 C'est la seule précision que je voulais apporter.

13 Sans vouloir offenser mon confrère, je pense qu'il parle d'une

14 division qui s'est peut-être produite dans l'esprit de certains. Comme il

15 l'a dit, Sarajevo n'a jamais cessé d'être une seule et même ville.

16 [La Chambre de première instance se concerte]

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, c'est vous-

18 même qui l'avez dit. Hadzici a cessé de faire partie de Sarajevo bien avant

19 la période couverte par l'acte d'accusation, quelle qu'en soit la raison.

20 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Une première chose, Messieurs les Juges,

21 mon estimée consoeur dit que c'était la VRS qui tenait le mont Stup.

22 L'armée de la Republika Srpska n'a jamais tenu le mont Stup. Pendant toute

23 la durée du conflit, c'est l'ABiH qui l'a tenu. Hadzici ne pourra jamais

24 cesser de faire partie de Sarajevo.

25 [La Chambre de première instance se concerte]

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Dites-nous en quoi les

27 éléments survenus à Hadzici sont importants au regard de l'essentiel des

28 chefs d'accusation retenus, à savoir le siège de Sarajevo. En quoi est-ce

Page 6633

1 important, en quelques mots ?

2 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je me dois de me

3 répéter. Hadzici n'a jamais cessé de faire partie de Sarajevo. Depuis des

4 siècles ou en tout cas depuis cent ans, ça faisait partie de Sarajevo. Et

5 je vous ai déjà expliqué dans quelles circonstances Hadzici ne s'est pas

6 retrouvé dans le centre de Sarajevo, même si les habitants de Sarajevo

7 pensaient que Hadzici faisaient partie du cœur même de Sarajevo. Il ne peut

8 pas y avoir de Sarajevo sans Hadzici, sans Ilijas, sans d'autres endroits.

9 C'est comme cela que c'était et c'est comme cela que ce sera. Et quoi qu'il

10 en soit, dans la zone de responsabilité de Corps Romanija-Sarajevo, on

11 avait cette position-là.

12 [La Chambre de première instance se concerte]

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, vous n'avez

14 pas répondu à la question que je vous avais posée. Je vous avais demandé de

15 montrer en quoi les événements survenus à Hadzici étaient essentiels pour

16 ce qui est des charges principales retenues, se trouvant au cœur même de

17 l'acte d'accusation, à savoir le siège de Sarajevo.

18 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] C'est précisément la question qui se pose.

19 Qui est-ce qui était assiégé et où est-ce que ceux qui étaient assiégés

20 l'étaient ? Est-ce que Grbavica était assiégé ? Est-ce que Nedzarici était

21 assiégé ? C'est à vous qu'il reviendra de juger et de répondre parce que de

22 l'avis de la Défense, Grbavica, Nedzarici, Dobrinja ont été assiégés, et

23 peut-être que le pire siège ce fut celui de Hadzici. Le terme de "siège" ne

24 veut rien dire dans ces conditions parce que tout le monde était assiégé à

25 l'époque, surtout après que le tunnel a commencé à être opérationnel.

26 [La Chambre de première instance se concerte]

27 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Une précision, Maître

28 Tapuskovic. Est-ce que vous vous souvenez de cet atlas de cartes que nous

Page 6634

1 avons reçu au début du procès ? Est-ce que vous vous souvenez de ces cartes

2 ? Vous les avez sur vous ?

3 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Il y a la carte numéro 10 utilisée par Mme

4 Ewa Tabeau. Je pense qu'il faudrait la regarder.

5 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Il y a dans cet atlas une carte

6 numéro 2.

7 Une précision, s'il vous plaît. Est-ce que vous pensez que ce procès porte

8 sur tout ce qui a pu se passer à l'intérieur de cette grosse ligne violette

9 qui inclut Hadzici à l'ouest, Trnovo au sud, Pale à l'est et, effectivement

10 là, Ilijas au nord ? Est-ce que c'est toute cette zone à votre avis qui est

11 incorporée et qui est englobée dans l'acte d'accusation ?

12 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, il est tout à fait

13 certain que toute cette zone, zone de responsabilité de le RSK, et sur tout

14 ce qui avant était Sarajevo : Ilidza, Hadzici, Novo Sarajevo. Tout ceci,

15 c'est Sarajevo, et il est difficile de voir qui encerclait qui. Si on

16 regarde telle ou telle partie, comme nous l'avons fait au cours du procès,

17 surtout après que le tunnel a commencé à être opérationnel et surtout en

18 fonction de votre appréciation, il sera difficile de savoir qui avait une

19 position dominante sur les collines --

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Utilisons l'acte d'accusation à

21 l'appui de ce que vous avancez. Quelle est la zone pertinente telle qu'elle

22 est présentée dans l'acte d'accusation ? Vous pourriez nous aider sur ce

23 point ? J'essaie de retrouver la partie pertinente.

24 La plupart des références concernent uniquement Sarajevo. On fait beaucoup

25 de références à la population civile de Sarajevo; ainsi, le paragraphe 24,

26 où il est allégué que les forces serbes ont mené une campagne d'artillerie,

27 et cetera, et de bombes aériennes modifiées qu'ils ont tirées sur la

28 population civile et les zones civiles de Sarajevo. Voyons le chef

Page 6635

1 d'accusation concernant la terreur. Il est fait une fois de plus référence

2 aux zones civiles et à la population civile de Sarajevo.

3 La question est donc de savoir ce qu'on entend par la mention de

4 "Sarajevo". Je me suis décidé. Je vais consulter mes collègues.

5 [La Chambre de première instance se concerte]

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Voici notre décision. La question

7 est recevable. Vous pouvez la poser, le Juge Harhoff ayant précisé qu'on

8 donne le bénéfice du doute à l'accusé. La question est autorisée.

9 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

10 Q. Monsieur Samardzic, vous avez déjà relaté ce qui s'était passé avant la

11 fin 1994. Après, comment s'est présentée la situation, notamment en matière

12 de nourriture, fin 1994, en 1995 ? Essayons ici de terminer ou d'être plus

13 concis.

14 R. Je vous ai dit que des sanctions avaient été imposées et qu'il devenait

15 de plus en plus difficile de s'en sortir, d'obtenir -- notamment, il

16 fallait obtenir certaines choses pour nourrir les soldats. Et d'après la

17 rumeur, même si je n'étais pas présent, donc je ne peux pas vous le dire

18 même si j'ai vécu à cet endroit toute ma vie, la rumeur disait qu'il y

19 avait un tunnel à Dobrinja, tunnel qui était utilisé fin 1994 et en 1995.

20 Et il y a eu une offensive de grande envergure en octobre 1995 qui a duré

21 jusqu'au mois de décembre de la même année. Puis, il y a eu une accalmie en

22 1995, et pendant cette accalmie, il y a un tunnel qui a été creusé et

23 utilisé uniquement par l'ABiH pour acheminer des troupes sur le mont Igman

24 et vers d'autres hauteurs proches.

25 Q. Comment se fait-il que vous sachiez tout cela ?

26 R. C'est ce que mes amis et co-combattants ont dit, parce qu'ils ont pu se

27 déplacer même si c'était très dangereux, parce qu'on tirait sans arrêt.

28 J'ai parlé à certains de ceux qui ont pu le voir eux-mêmes, le tunnel

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1 existait. On l'a vu à la télévision, mais même si je ne me souviens plus

2 exactement de la date. Ils se sont servis du tunnel pour déplacer les gens,

3 du matériel de guerre, des munitions.

4 Q. Dites-moi comment se présentait la situation à la fin décembre et dans

5 les mois suivant à Hadzici et dans votre région où vous habitiez.

6 R. Quand moi je parle de Hadzici, je ne cesse de penser à Sarajevo parce

7 que pour moi, j'étais un habitant de la ville de Sarajevo. Il y a eu un

8 cessez-le-feu, il a duré jusqu'au mois de juin 1995. Et je pense que c'est

9 le 15 juin qu'il y a eu une offensive généralisée de toutes les lignes de

10 front, de tous les flans contre le centre de Sarajevo, contre Ilijas et

11 contre Grbavica, donc tout ce qui faisait Sarajevo. C'était une offensive

12 généralisée. Jusqu'au début du mois de juin, il n'y avait pas eu de gros

13 incidents. Il y avait encore application du cessez-le-feu.

14 Q. Est-ce qu'à l'époque il y a eu des pertes, des victimes ? Inutile de

15 nous donner des noms.

16 R. Oui, il y a eu des pertes, des victimes, comme dans tout le conflit.

17 C'est forcé. Je sais qu'à Hadzici, pendant toute la guerre, plus de 220

18 civils ont été tués ainsi que plusieurs soldats. Je ne sais pas combien

19 exactement, mais il y a eu plus de 220 civils qui ont été tués. L'offensive

20 a duré pratiquement jusqu'aux accords de Dayton, jusqu'à la signature des

21 accords de Dayton. Et même après la signature, il y a eu des provocations.

22 Q. Qu'est-il advenu des gens qui sont restés là pendant toute la journée

23 du conflit ? Qu'est-ce qui s'est passé après les accords de Dayton à

24 Hadzici, à Ilidza, à Vogosca ?

25 R. Je suis parti de Hadzici en 1996, à la fin du mois de février, et je ne

26 suis plus jamais retourné. J'ai passé ma vie à Hadzici. En tant qu'enfant,

27 j'ai terminé mes études là-bas, j'y ai travaillé et après j'ai vécu la

28 tragédie dont je vous ai parlé tout à l'heure. Je ne veux plus rouvrir

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1 cette plaie. Mais je suis parti de là, toute la population de Hadzici est

2 partie de cet endroit, de cette municipalité. J'habite maintenant à Trnovo,

3 qui fait partie de la municipalité de Sarajevo.

4 Q. Merci, Monsieur Samardzic.

5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je n'ai plus

6 de questions pour ce témoin.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Edgerton.

8 Mme EDGERTON : [interprétation] Je vous prie de m'accorder quelques

9 instants, Monsieur le Président. Je voudrais consulter mes notes.

10 Contre-interrogatoire par Mme Edgerton :

11 Q. [interprétation] Monsieur Samardzic, est-ce que vous pouvez m'entendre

12 ?

13 R. Oui.

14 Q. Je vais vous poser des questions découlant de votre témoignage

15 d'aujourd'hui, et si vous ne comprenez pas mes questions, si vous ne

16 comprenez pas certains points, je vous prierais de nous le dire.

17 Un peu plus tôt aujourd'hui, à la page 22 de votre déposition, vous nous

18 avez parlé de l'endroit où se trouvait Hadzici. Je souhaiterais que vous

19 nous expliquiez, si vous pouviez nous donner une évaluation en kilomètres,

20 par exemple quelle était la distance entre le centre-ville de Sarajevo

21 jusqu'à Marin Dvor à vol d'oiseau, disons.

22 R. Je sais avec certitude que Marin Dvor, mon bâtiment, se trouvait à 24

23 kilomètres lorsqu'on s'y rend en voiture, donc si vous voulez que je vous

24 parle en termes de vol d'oiseau, il s'agirait de 10 à 12 kilomètres.

25 Q. Bien. Donc, 10 kilomètres à vol d'oiseau. Maintenant, j'aimerais savoir

26 quelle était la composition ethnique de la municipalité de Hadzici. Je

27 parle de la municipalité, n'est-ce pas ? Je ne parle pas de la ville de

28 Sarajevo même.

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1 R. La partie urbaine de la ville était mixte, 50-50, 50 % de la population

2 faisait -- en fait, excusez-moi. Les Serbes, les Musulmans et les Croates

3 habitaient dans la ville, mais les villages avec des habitants musulmans

4 étaient très nombreux autour de la ville. Donc, il y avait 70 % de

5 Musulmans dans la municipalité de Hadzici, alors que pour les autres,

6 c'étaient des Serbes et des Croates.

7 Q. Fort bien. Vous nous avez dit que jusqu'en 1992, vous viviez -- vous

8 aviez de bons rapports avec vos voisins. Tout le monde vivait avec des

9 représentants d'autres groupes ethniques, et en fait il y a eu une élection

10 municipale en 1991, n'est-ce pas ?

11 R. Et bien, il y avait le HDZ et le SDA, je ne sais pas, le SDS, et tout

12 d'un coup il y a eu une situation qui n'était pas tout à fait claire. On ne

13 savait pas très bien ce qui se passait. Il n'y avait plus de président de

14 la municipalité, il n'y avait pas président du comité exécutif. Je ne sais

15 pas de quelle façon la municipalité réussissait à fonctionner, l'assemblée.

16 Q. Et en fait, la municipalité serbe de Hadzici avait été proclamée en

17 avril de 1992, n'est-ce pas, déjà à cette époque-là ?

18 R. En 1992, au mois d'avril, oui. En fait, je crois que oui. Oui, je crois

19 que oui, puisque la police s'était également partagée. Je ne sais pas si

20 c'était en mars ou en avril. Je ne me souviens pas très bien. Donc, il y a

21 une scission au sein de la police, et c'était en fait un cauchemar général.

22 Je ne savais même pas comment l'assemblée municipale fonctionnait. Je ne

23 sais plus.

24 Q. Et les routes entre Sarajevo et Hadzici étaient coupées, n'est-ce pas,

25 et ce, déjà au début du mois d'avril 1992, n'est-ce pas ?

26 R. Oui, c'est tout à fait juste. Mais c'était sur des points. En 1992, en

27 mars et en avril, il y avait des points de contrôle composés de membres de

28 réservistes de la police de nationalité musulmane, alors que les Serbes se

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1 trouvaient à l'intérieur de la ville. Je ne sais pas ce qu'ils contrôlaient

2 pour ce qui est de la section interne de la ville, mais pour ce qui est de

3 l'entrée à Hadzici, il m'est arrivé à plusieurs reprises de me faire

4 arrêter par des policiers. On fouillait ma voiture. Donc, mes voisins, mes

5 amis, ceux avec qui j'avais grandi. Je n'avais jamais compris pourquoi,

6 puisque tout allait très bien jusqu'à cette date-là.

7 Q. Les Serbes étaient dans la ville et ils avaient leur propre force de

8 maintien de la paix, n'est-ce pas ?

9 R. Oui.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Isailovic.

11 Mme ISAILOVIC : Merci, Monsieur le Président.

12 Juste une remarque qui me semble utile. Donc, page 47, lignes 6 et 7,

13 peut-être qu'il faut reposer la question, parce que M. Samardzic a parlé de

14 la police donc qui l'a fouillé. Et c'était, il l'a dit, mais ce n'est pas

15 dans le transcript, ses camarades de classe, donc de son enfance, camarades

16 de classe.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Samardzic, est-ce que

18 vous pourriez répéter cette partie-là de votre déposition s'agissant de

19 cette fouille dont vous avez parlé ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, certainement.

21 J'allais par exemple à Ilidza, à Sarajevo. J'avais des amis là-bas. Il

22 m'arrivait de rentrer -- alors que je rentrais à la maison, à l'entrée de

23 la ville, je me faisais arrêter par une patrouille. J'arrête, bien sûr, en

24 tant que chauffeur. Je vois un uniforme. J'ouvre le coffre arrière, et

25 c'étaient mes collègues, des collègues avec lesquels je suis allé à l'école

26 élémentaire. C'étaient des gens plus âgés maintenant.

27 Il y avait par exemple Adis Dzankic, c'était un voisin qui habitait

28 dans le même immeuble que moi. J'avais remarqué que même ce jour-là, je ne

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1 sais pas si cela peut vous être utile, néanmoins j'ai demandé à sa mère :

2 "Où est Adis ?" Parce que sa mère s'appelait Adisa. Alors, je lui ai dit :

3 "Où est Adis ?" Elle m'a dit qu'il faisait partie de la police musulmane.

4 Elle me dit : "Mais il est là." Mais moi, je lui ai dit : "Je le vois tous

5 les jours. Lorsque je vais travailler il part de sa maison avec un fusil,

6 il revient sans fusil." Et elle était très étonnée. Et je l'ai remarqué et

7 j'ai remarqué que ces gens-là se comportaient de façon très étrange.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.

9 Oui, Madame Edgerton, je vous écoute. Vous pouvez poursuivre.

10 Mme EDGERTON : [interprétation]

11 Q. Pour ce qui est de la police serbe au centre-ville, ils fonctionnaient

12 depuis un bâtiment différent, séparé. Ils avaient leur propre bâtiment,

13 n'est-ce pas ?

14 R. Oui.

15 Q. Que pouvez-vous nous dire, Monsieur Samardzic, concernant un ultimatum

16 qui avait été émis par le SDS aux Musulmans de Hadzici, le 7 mai selon

17 lequel ces derniers devaient quitter la ville ?

18 R. Je n'ai pas connaissance de quelque ultimatum, mais je sais qu'ils

19 avaient déjà quitté la ville auparavant, les citoyens de nationalité

20 musulmane, déjà vers la fin du mois d'avril. Et ceci, je peux vous le

21 confirmer avec certitude puisque je l'ai vu de mes propres yeux. Je voyais

22 par exemple une femme, à côté d'elle deux enfants et un vieillard avec des

23 voitures tirées par des chevaux. Ils se rendaient par exemple vers la

24 forêt. J'avais vu quelque chose sur le char comme s'ils portaient quelque

25 chose avec eux. Plus tard, nous avions confirmé ceci. Plus tard, lorsque

26 nous sommes entrés dans les villages, les maisons étaient pleines. Donc,

27 ils prenaient peu de biens personnels avec eux. Ce sont vraiment les femmes

28 et les personnes âgées qui sont sorties.

Page 6641

1 Ce n'était pas un ultimatum lancé par le côté serbe. C'étaient eux

2 seuls qui avaient décidé de partir, et nous étions étonnés de voir que dans

3 le village -- il y avait tous ces villages. Nous n'avions pas compris, et

4 plus tard nous avions compris que ces personnes avaient quitté de leur

5 propre gré. Ils avaient laissé leur maison derrière.

6 Q. Monsieur Samardzic, est-ce que vous êtes en train de nous dire

7 que du meilleur de votre connaissance, il n'y a pas eu d'ultimatum lancé

8 par le côté serbe ?

9 R. C'est exact. C'est que j'ai dit, et je sais qu'un grand nombre de

10 personnes avait --

11 Q. Et en fait, Monsieur Samardzic, s'agissant de cette date du 7 mai, les

12 Serbes réservistes et les membres de la police serbe sont entrés dans le

13 bâtiment municipal de Hadzici, ils ont expulsé le personnel, et par la

14 suite ils ont fermé le bâtiment à clé, n'est-ce pas ?

15 R. Le 7 mai ? Non, croyez-moi, je n'ai aucune connaissance de cet

16 événement. Mais je ne sais pas. Je ne me souviens peut-être pas de

17 l'événement en question. Je ne sais plus. Je ne sais pas.

18 Q. Et vers cette date, la police serbe qui se trouvait devant le bâtiment

19 qu'ils avaient occupé ont pris une arme, un canon antiaérien et l'ont placé

20 devant ce poste de police, n'est-ce pas ? Et le canon était tourné vers le

21 côté extérieur; est-ce que c'est exact ?

22 R. Vous parlez d'un canon ? Je ne sais pas. Je ne comprends pas. De quel

23 canon vous parlez ?

24 Q. Je parle d'un canon antiaérien, Monsieur Samardzic.

25 R. C'est peut-être une arme de 12,7 millimètres. Ce n'est pas un canon. Au

26 début, il n'y avait pas de canons, non pas seulement au début, mais il n'y

27 avait pas de canons. C'était une mitraillette. Lorsque les obus

28 commençaient à tomber, on ne sait plus qui tirait depuis où.

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1 Q. Donc, si je comprends bien votre réponse, il y avait une arme qui avait

2 été placée devant le poste de police serbe à Hadzici avant le 8 mai; est-ce

3 que c'est exact ?

4 R. Si j'ai dit qu'il y avait des armes, je n'ai pas dit qu'on avait placé

5 une arme. Il existait peut-être une arme de ce calibre-là, mais il n'y

6 avait pas de canon. C'est ce que j'ai dit.

7 Q. Vous avez dit que les tirs ont commencé à se faire entendre à

8 l'intérieur de la ville vers 7 heures 30 du matin le 8 mai 1992. N'est-il

9 pas exact, Monsieur Samardzic, qu'à la suite de cet incident, les non-

10 Serbes de la ville de Hadzici ont été progressivement sortis de leurs

11 maisons et incarcérés dans des centres de détention ?

12 R. Je n'ai aucune connaissance de cela. Je sais seulement qu'une partie de

13 la population est partie de son propre gré vers Pazarici. Mais personne ne

14 les a chassées. Je peux vous garantir ceci avec ma propre vie. Il y avait

15 eu un très grand nombre de Musulmans qui sont restés derrière, enfin, il y

16 avait un très grand nombre de mariages mixtes et ces personnes sont restées

17 derrières, non pas parce qu'ils étaient particulièrement loyaux envers les

18 Serbes, mais ils sont restés là, dans leurs maisons, et plus tard ils

19 étaient employés dans toutes sortes de défense civile. Par exemple, Ismet

20 Nizic, mon collègue, il est déjà décédé maintenant, mais il travaillait à

21 l'approvisionnement de la nourriture pour la population serbe et la

22 population musulmane. Personne n'avait exercé de pression sur qui que ce

23 soit pour quitter leurs demeures. Il n'y avait pas de terreur d'exercée.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Madame Isailovic.

25 Mme ISAILOVIC : Monsieur le Président, encore une chose, donc page 50,

26 ligne 11, je lis dans le transcript : "Were married with Serbs" --

27 [interprétation] -- "étaient mariés avec les Serbes" --

28 [en français] -- mais vraiment -- très bien et j'écouterai très bien,

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1 très attentivement le témoin, donc je n'ai jamais entendu que quelqu'un

2 était "ozenjen" ou "udat Srbna" [phon]. Donc, le seul mot qui était

3 employé, c'était le "mariage mixte". Donc --

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous dites alors : "Un très grand

5 nombre de personnes qui sont restées derrière avec nous sont restées

6 puisqu'il s'agissait de mariages mixtes" ?

7 Mme ISAILOVIC : Le Président, mais il n'a pas employé, donc parce que je

8 suppose que le mariage peut être entre eux -- je ne sais pas, donc un

9 Français, Bosniaque ou un Serbe, un Croate ou un Suisse, disons, donc. On

10 n'a pas employé ce mot, donc à --

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous avons très bien compris, merci

12 beaucoup. Mais, Maître Isailovic, n'oubliez pas que le transcript est

13 corrigé à la fin de la journée. A moins de voir quelque chose de vraiment

14 frappant qui, pour vous -- quelque chose qui, pour vous, deviendra très

15 pertinent et pertinent pour ce qui est de votre interrogatoire ou contre-

16 interrogatoire, à ce moment-là je vous encouragerais de -- je propose de ne

17 pas le souligner puisque cela sera corrigé de toute façon plus tard. Il

18 faudrait peut-être simplement mentionner les choses qui sont vraiment très

19 importantes.

20 Mme ISAILOVIC : Je redis. Je n'interviens que vraiment que dans les choses

21 qui deviendront importantes après, non seulement pour peut-être

22 l'interrogation supplémentaire, mais aussi pour les écritures qui vont

23 suivre après dans notre cause.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Poursuivez, je vous prie.

25 Mme EDGERTON : [interprétation]

26 Q. Monsieur Samardzic, vous avez dit que vous n'aviez pas connaissance du

27 nettoyage ethnique, mais vous avez parlé d'un très grand nombre de non-

28 Serbes quittant la municipalité de leur propre gré. Monsieur Samardzic, je

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1 souhaiterais vous demander si êtes d'accord avec moi pour dire que les non-

2 Serbes qui sont restés à Hadzici --

3 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président --

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Ce témoin n'a jamais parlé de nettoyage

6 ethnique, ni une seule fois. Pas une seule fois il n'a pas du tout employé

7 ces termes. Je ne comprends pas comment peut-on lui poser une question liée

8 au nettoyage ethnique alors que ce témoin qui travaillait dans la

9 restauration n'a jamais mentionné le terme "nettoyage ethnique".

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Edgerton.

11 Mme EDGERTON : [interprétation] Je vais reformuler ma question.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, faites, je vous prie.

13 Mme EDGERTON : [interprétation]

14 Q. Monsieur Samardzic, lorsque je vous ai demandé si vous saviez que les

15 non-Serbes étaient déplacés de la ville de Hadzici, qu'ils avaient été

16 enlevés, transférés de leurs maisons au centre de détention de la

17 municipalité de Hadzici. Vous avez répondu que non. Vous avez dit qu'un

18 très grand nombre de non-Serbes tels femmes et enfants sont partis de leur

19 propre gré de la municipalité.

20 Alors, j'aimerais vous poser la question suivante. Est-ce que vous me

21 dites que vous n'aviez absolument aucune connaissance du fait que les non-

22 Serbes qui restaient dans la ville de Hadzici avaient été déplacés de leurs

23 maisons pour être placés dans des centres de détention dans la ville même ?

24 R. Je n'ai aucune connaissance de cela. Je crois qu'il n'y a pas eu de

25 choses semblables. J'étais plutôt préoccupé par la production de la

26 nourriture, mais je n'ai aucune -- j'étais préoccupé par mon travail, mais

27 personne n'a exercé de pression sur personne pour quitter Hadzici. Personne

28 ne dérangeait personne.

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1 Q. Alors, vous nous avez dit que vous n'étiez jamais parti de Hadzici,

2 mais j'aimerais savoir la chose suivante. Vous travailliez au centre

3 technique; où se trouve le centre sportif de Hadzici par rapport à

4 l'institut où vous travailliez ?

5 R. Le centre sportif se trouve en contrebas de l'institut de remontage.

6 Moi, j'étais pendant tout ce temps dans la cuisine. Je ne sais ce qui se

7 passait sur le centre sportif. Par la suite, j'ai été transféré sur les

8 lignes après la cuisine. J'en ai déjà parlé.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Edgerton, il est l'heure de

10 lever la séance. Cette séance est levée jusqu'à demain.

11 --- L'audience est levée à 13 heures 45 et reprendra le jeudi 14 juin 2007,

12 à 9 heures 00.

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