Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Mercredi 23 janvier 2002.)

2 (Audience publique.)

3 (L'audience est ouverte à 9 heures 02.)

4 M. le Président (interprétation): Madame la Greffière d'audience, veuillez

5 énoncer le numéro de l'affaire.

6 Mme Philpott (interprétation): Affaire IT-98-29-T, le Procureur contre

7 Stanislav Galic.

8 M. le Président (interprétation): Je vous remercie, Madame la Greffière.

9 Tout d'abord, Général Galic, j'espère que les raisons pour lesquelles vous

10 étiez absent hier ne vous ont pas réservé de surprises désagréables; et

11 s'il y avait une raison ou une conséquence sur votre disponibilité à être

12 ici même dans le prétoire, veuillez en informer la Chambre puisque j'ai

13 compris que vous vous êtes absenté pour des raisons médicales, hier.

14 M. Galic (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,

15 Messieurs les Juges. J'aimerais remercier les Juges de m'avoir donné le

16 temps, hier, de subir cet examen médical. Je n'ai pas de nouvelles à vous

17 annoncer concernant ma santé, mais j'ai déjà informé mes avocats et je

18 tiens à vous en informer également.

19 Pour moi, il m'est difficile de porter une jaquette, j'aimerais vous

20 demander l'autorisation de porter une veste plus légère. Je pense que cela

21 rendrait moins difficile le problème que j'ai à la colonne vertébrale.

22 Merci beaucoup. Si vous me permettiez donc de porter une veste plus

23 légère.

24 M. le Président (interprétation): Oui, nous y prêterons attention,

25 Monsieur Galic. Veuillez vous rasseoir, s'il vous plaît.

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1 Deuxième question que j'aimerais aborder: si j'ai bien compris, il y a eu

2 hier une réunion entre les parties. J'espère que vous n'avez pas de

3 nouvelles à me donner à ce sujet, mais si tel était le cas, ce serait le

4 moment idéal pour en informer la Chambre.

5 Donc, si je comprends bien, il n'y a pas de nouvelles.

6 M. Ierace (interprétation): Le fait qu'il n'y ait pas de nouvelles à

7 donner, c'est en soi une bonne nouvelle.

8 M. le Président (interprétation): Je demande à l'accusation d'appeler le

9 prochain témoin.

10 M. Ierace (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les Juges, le

11 prochain témoin de l'accusation est M. le baron Aernout van Lynden, et ce

12 sera M. Waespi qui l'interrogera pour l'accusation.

13 M. le Président (interprétation): Je vous remercie Monsieur Ierace.

14 Monsieur l'huissier, ayez l'obligeance de faire entrer le témoin dans la

15 prétoire..

16 (Le témoin, M. Aernout van Lynden, est introduit dans le prétoire.)

17 M. le Président (interprétation): Bonjour.

18 M. van Lynden (interprétation): Bonjour.

19 M. le Président (interprétation): Pouvez-vous m'entendre dans une langue

20 que vous comprenez?

21 M. van Lynden (interprétation): Oui, je peux vous entendre.

22 M. le Président (interprétation): Je vous remercie. Selon le Règlement, il

23 vous est demandé de faire une déclaration solennelle dont le texte va vous

24 être donné. Veuillez lire cette déclaration.

25 M. van Lynden (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la

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1 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

2 M. le Président (interprétation): Veuillez vous asseoir Monsieur van

3 Lynden. Monsieur Waespi de l'accusation va tout d'abord vous interroger.

4 Veuillez procéder, Monsieur Waespi.

5 (Interrogatoire principal du témoin, M. Aernout van Lynden, par M.

6 Waespi.)

7 M. Waespi (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président et Messieurs

8 les Juges.

9 Bonjour Monsieur van Lynden, veuillez dire à la Cour votre nom en entier.

10 M. van Lynden (interprétation): Mon nom est Carol Didrik Aernout, baron

11 van Lynden.

12 Question: Quelle est votre nationalité?

13 Réponse: Je suis néerlandais.

14 Question: Et votre lieu de naissance, et votre date de naissance?

15 Réponse: Je suis né à Kennington à Londres le 31 décembre 1954.

16 Question: Quelle est votre profession?

17 Réponse: Je suis journaliste de guerre.

18 Question: Pendant combien de temps l'avez-vous été?

19 J'aimerais passer en revue votre éducation et votre parcours

20 professionnel. Vous avez été à l'école en Angleterre, vous avez eu une

21 formation militaire avec les marines néerlandais: est-ce que vous avez eu

22 une formation particulière?

23 Réponse: A l'université ou le corps des marines?

24 Question: Dans le corps des marines.

25 Réponse: Dans le corps des marines, j'ai effectué un service national

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1 pendant deux ans, une année de formation pour devenir deuxième lieutenant

2 et je suis devenu officier dans le corps de marines. Et puis j'ai été

3 formé pour devenir officier avec une spécialité dans les mortiers.

4 Question: En 1979, vous avez travaillé pour un journal néerlandais?

5 Réponse: J'ai commencé la profession de journaliste à La Haye pour le

6 service des Affaires étrangères, en tant que responsable pour l'Europe

7 méridionale et le Moyen-Orient. Je me suis rendu au Liban où la guerre

8 civile a commencé en 1975, et en septembre 1980 j'ai été à Bagdad lorsque

9 l'Irak a envahi l'Iran. J'ai couvert ce conflit-là également du côté

10 iranien. Et puis début 1981, j'ai commencé à travailler en tant que

11 journaliste free-lance au Moyen-Orient.

12 Question: Pour quelle organisation médiatique avez-vous travaillé?

13 Réponse: J'ai travaillé pour le journal Washington Post, la radio BBC et

14 puis pour le journal Observer en Angleterre.

15 Question: Et puis en 1998, vous avez rejoint Sky News d'abord en tant que

16 correspondant diplomatique et puis en tant que correspondant pendant les

17 Affaires étrangères?

18 Réponse: C'est exact.

19 Question: Qu'est-ce que Sky News?

20 Réponse: C'est une chaîne d'actualités 24 heures sur 24, basée à Londres,

21 qui émet par satellite, le satellite Astra. Si on a donc un satellite, on

22 peut voir cette chaîne dans toute l'Europe.

23 Question: Vous avez donc couvert pour Sky News la révolution en Roumanie,

24 au Liban et bien d'autres encore?

25 Réponse: En 1989, je suis retourné au Liban, notamment en raison de la

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1 crise avec les otages. En décembre 1989, je me trouvais en Roumanie, de

2 1990 à 1991 j'ai passé plusieurs mois en Arabie du Sud pour couvrir la

3 guerre du Golfe, et ensuite j'ai passé le plus clair de mon temps en ex-

4 Yougoslavie.

5 Question: Oui, alors, revenons-en justement à l'ex-Yougoslavie. En 1991,

6 vous êtes arrivé pour la première fois dans les Balkans, vous avez donc

7 couvert la guerre en Croatie, en Slovénie et également à Vukovar?

8 Réponse: J'ai tout d'abord été envoyé en Slovénie. Puis, je suis d'abord

9 rentré chez moi, et puis en l'espace de quelques jours j'ai de nouveau été

10 envoyé à Belgrade et puis j'ai passé la plus grande partie de cette année

11 à Belgrade avec quelques périodes de congé à domicile.

12 Puis, j'ai été basé à Belgrade où j'ai couvert la guerre du côté serbe, la

13 guerre qui a donc eu lieu en Croatie, et j'ai eu à plusieurs reprises, à

14 de nombreuses reprises l'occasion de visiter Vukovar.

15 J'ai également accompagné l'armée yougoslave aux alentours de Dubrovnik,

16 et puis j'ai également été avec les forces militaires à Banja et à

17 Ukrajna.

18 Question: Et pendant cette période que vous venez d'évoquer, est-ce que

19 vous avez eu l'occasion de rencontrer et de vous entretenir avec des

20 dirigeants civils et militaires? Pouvez-vous nous citer quelques noms?

21 Réponse: Eh bien, l'entretien de plus haut niveau que j'ai pu avoir a été

22 avec le général Karadzic qui était commandant en chef de l'armée

23 yougoslave. Sur le terrain, nous avons eu des entretiens avec des soldats,

24 avec Milan Martic et le capitaine Dragan, un homme qui se dénommait le

25 "capitaine Dragan" -un Serbe, je pense, qui est né en Australie, même s'il

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1 ne l'a jamais dit précisément-, et puis de nombreux soldats et des

2 personnes de grades différents dans les environs de Vukovar.

3 Question: Avez-vous eu l'occasion de discuter avec Slobodan Milosevic?

4 Réponse: En juillet 1991, on m'a accordé un entretien avec M. Milosevic et

5 j'ai donc mené un entretien avec lui; et j'ai aussi discuté avec lui après

6 l'entretien quand il m'a invité à boire un verre de whisky avec lui.

7 Question: Maintenant, revenons à Sarajevo, Monsieur van Lynden. Est-ce que

8 vous avez travaillé uniquement pour Sky News?

9 Réponse: Oui, bien que Sky News ait également des relations avec d'autres

10 organisations, notamment la télévision aux Pays-Bas, une organisation

11 intitulée RTL4 et puis, aux Etats Unis, CBS. Et donc, ces organisations-là

12 reprenaient mes reportages ou me demandaient de faire des commentaires,

13 mais ce n'était pas pour une rémunération supplémentaire, cela faisait

14 partie intégrante de mon travail en tant que correspondant de Sky News.

15 Question: Pouvez-vous me dire qui était membre de votre équipe?

16 Réponse: L'équipe, les enregistreurs sont les cameramen, les rédacteurs,

17 toutes les personnes qui rassemblaient les images pour un reportage, tous

18 ceux-ci venaient toujours de Londres: donc les membres de l'équipe de Sky

19 News, pas uniquement anglais, mais australiens et irlandais également. Et

20 à part cela, nous avions des producteurs qui venaient parfois

21 d'Angleterre. Il y avait aussi des personnes de nationalité yougoslave qui

22 nous accompagnaient sur le terrain pour nous aider, pour nous aider à

23 organiser les choses et, bien sûr, pour nous aider dans la traduction

24 puisque je ne parle pas le serbo-croate.

25 Question: Lorsque vous y étiez à Sarajevo pour couvrir le conflit, avec

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1 quelle fréquence faisiez-vous des rapports? Est-ce que c'était une fois

2 par jour?

3 Réponse: Au moins une fois par jour mais, en fonction de la question de

4 l'histoire concernée -puisque nous avions une chaîne qui diffusait 24

5 heures sur 24-, nous avions un délai chaque heure, et parfois il arrivait

6 que nous fassions plus d'un reportage par jour.

7 Question: Maintenant, vous l'avez peut-être déjà évoqué, mais afin

8 d'éclaircir cela, est-ce que Sky News a été diffusé en ex-Yougoslavie?

9 Réponse: On pouvait voir ces émissions si on disposait d'un satellite. En

10 1991 et je crois jusqu'en 1992, un accord a été signé datant de 1989 entre

11 Sky News et la télévision yougoslave qui donnait à la télévision

12 yougoslave le droit de diffuser Sky News. Et cela a certainement été fait

13 sur la troisième chaîne à Belgrade dans le courant de l'année 1991.

14 Question: Avant d'entrer dans les détails, j'aimerais savoir dans les

15 grandes lignes pendant combien de temps vous avez été à Sarajevo, dans

16 quelle période. Commençons avec l'année 1992.

17 Tout d'abord, il y a eu une période entre le mois de mai et le mois d'août

18 1992: où avez-vous résidé à Sarajevo?

19 Réponse: Lorsque je suis arrivé à Sarajevo en mai 1992, c'était la

20 première fois que je venais dans cette ville. Tout d'abord, je me suis

21 rendu à la présidence, il n'y avait pas d'hôtel dans la ville qui était

22 ouvert à l'époque. Donc ils m'ont trouvé une chambre dans ce qui avait été

23 une résidence du gouvernement pour des VIP, des invités étrangers. Et

24 cette même résidence a ensuite été transformée en résidence, lieu de

25 résidence pour le commandant de la Forpronu à Sarajevo. C'est un immeuble

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1 assez peu élevé à partir duquel il y a eu des bombardements pendant la

2 nuit. Nous nous sommes tout de suite rendu compte, mon cameraman et moi-

3 même, que nous ne pouvions pas y travailler, nous ne pouvions pas y

4 réaliser des reportages. Il n'y avait pas non plus de cave où nous aurions

5 pu nous réfugier.

6 Et le deuxième et le troisième jour à Sarajevo, nous nous sommes rendus à

7 ce qui avait été l'hôpital militaire, mais qui avait été gravement

8 endommagé par des tirs. Et nous y avons fait la connaissance du chirurgien

9 principal, et nous pensions pouvoir y travailler pendant la nuit pour

10 pouvoir filmer les bombardements parce que, juste devant l'hôpital, il y

11 avait une place, le Parlement Grbavica, les secteurs de Sarajevo contrôlés

12 par les Serbes; et à gauche, la vieille ville; à droite, la partie moderne

13 de Sarajevo. Tout cela, nous avions une vue panoramique sur toutes ces

14 choses. C'était un immeuble assez élevé.

15 Et à partir de ce moment-là, le chirurgien nous a donné l'accord de

16 pouvoir y rester, et j'ai donc passé presque chaque nuit à l'hôpital à

17 Sarajevo.

18 Question: Et où aviez-vous vos installations de montage?

19 Réponse: Cela dépendait. Nous avions différents endroits à différents

20 moments. Tout d'abord, la direction à Londres a pris la décision en mai

21 1992 parce que presque toute la presse mondiale avait fui Sarajevo: donc

22 le montage et notre liaison montante satellite devait rester à Pale

23 lorsque nous étions à Sarajevo. Mais cela voulait dire que, au quotidien,

24 mon cameraman et moi-même devions traverser les lignes pour, donc, donner

25 notre reportage au monteur; c'était manifestement dangereux, donc nous

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1 sommes revenus en juin à Sarajevo. C'est moi-même qui m'occupais du

2 montage, et ce, jusqu'au début du mois d'août où nous avons trouvé une

3 base pour y travailler à l'hôpital de Kosovo.

4 Après, quand je suis retourné fin octobre 1992, nous avions une base de

5 travail dans le centre de télévision à Sarajevo. Mais, comme je l'ai dit,

6 je passais toutes mes nuits dans ce que l'on dénomme maintenant l'hôpital

7 d'Etat, qui était l'ancien hôpital militaire de Sarajevo.

8 Question: En septembre 1992, vous étiez de nouveau à Sarajevo pendant

9 trois semaines et demie. Est-ce que vous connaissez les dates exactes?

10 Réponse: Je regrette, je ne connais pas les dates exactes; nous ne sommes

11 pas allés à Sarajevo, en tout cas pas du côté bosniaque.

12 Le but de cette mission était de couvrir la guerre du côté serbe, de

13 donner l'occasion aux Serbes de s'exprimer pour eux-mêmes sur leur point

14 de vue concernant la guerre. J'ai eu des discussions avec le docteur

15 Karadzic à Belgrade avant de me rendre en Bosnie, et il a donné son accord

16 pour que je me rende à Pale. Il a également donné son accord pour que les

17 personnes, sous ses ordres, nous permettent d'y travailler.

18 Nous avions, par le passé, essayé d'y travailler pendant quelques jours, à

19 Pale. Mais, à chaque fois, nous étions dès le départ presque tout de suite

20 arrêtés; il nous était impossible d'y effectuer notre travail. Et puis,

21 nous avons passé trois semaines et demies à Pale, dans la pension

22 olympique, et nous y avons couvert différents aspects de la guerre du côté

23 serbe.

24 Question: Maintenant, la troisième période que vous avez passée à

25 Sarajevo, ou couvert le conflit en 1992, c'est quand vous y êtes retourné

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1 fin octobre 1992. Et combien de temps avez-vous passé à Sarajevo, à cette

2 époque?

3 Réponse: Nous y sommes restés -si je me souviens bien-, jusqu'au 19 ou 20

4 décembre, donc juste avant Noël, et nous sommes partis pour Belgrade où il

5 y avait des élections; puis nous sommes rentrés chez nous pour une pause

6 d'hiver.

7 Question: Et en 1993, combien de temps avez-vous couvert Sarajevo?

8 Réponse: En 1993, j'ai d'abord été envoyé en Bosnie centrale, j'ai

9 effectué quelques voyages à Sarajevo, mais toujours assez courts -donc

10 deux, trois jours-, mais je n'ai pas couvert Sarajevo de manière aussi

11 étendue que je l'avais fait en 1992.

12 Question: Et très brièvement, en 1994, quelle a été votre présence à

13 Sarajevo?

14 Réponse: Encore une fois ma présence était sporadique, assez courte, même

15 si j'y ai passé quelques semaines après le mois de mars 1994, suite aux

16 premiers massacres.

17 Question: Maintenant, revenons dans les détails sur la période entre le

18 mois de septembre et le mois de décembre 1992.

19 En septembre 1992, avez-vous eu l'occasion d'avoir un entretien avec le

20 général Mladic?

21 Réponse: Oui.

22 Question: Vous souvenez-vous de la date exacte?

23 Réponse: Non.

24 Question: Etait-ce plutôt au début du mois de septembre ou mi-septembre?

25 Réponse: Certainement dans la première moitié du mois de septembre.

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1 Lorsque nous sommes arrivés à Pale, j'ai de nouveau rencontré le docteur

2 Karadzic, et comme nous souhaitions avoir accès aux forces militaires des

3 Serbes de Bosnie, il était logique que nous demandions un entretien avec

4 le général Mladic, le commandant, parce que cela m'aurait donné l'occasion

5 de donner au général Mladic l'autorisation de rencontrer certaines de ces

6 forces.

7 Cet entretien a été accordé, pas immédiatement mais assez rapidement. Donc

8 c'était certainement début septembre, parce que c'est à la suite de cet

9 entretien, de cet accord que nous avons pu accéder aux forces serbes de

10 Bosnie.

11 Question: Pouvez-vous nous décrire les circonstances dans lesquelles vous

12 avez rencontré le général Mladic?

13 Réponse: Oui, on nous a demandés de nous rendre à ce que l'on appelait "la

14 prison serbe de Bosnie", un chalet à Pale, c'est une station d'hiver, de

15 ski. C'était en milieu de journée, vers 13 heures, que le général Mladic

16 est arrivé. A l'origine, à l'appui de cartes, il nous a donné un briefing,

17 une séance d'information sur la situation militaire comme il la voyait en

18 Bosnie, à l'époque.

19 Puis, il nous a proposé de nous rendre ailleurs pour mener l'entretien. Et

20 nous avons été quelque peu surpris parce qu'il nous a emmenés en voiture à

21 une position d'artillerie qui surplombait Sarajevo, une position donc des

22 Serbes de Bosnie. Et c'est là où l'entretien a été effectué.

23 Question: Quelle est la distance entre Sarajevo et Pale?

24 Réponse: Il n'y a pas une très grande distance depuis Pale, vous ne pouvez

25 pas voir Sarajevo, mais il s'agit -je ne sais pas très bien-, à peu près

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1 15 kilomètres, bon, par la voie directe mais cette voie directe était

2 fermée en raison du conflit. Donc, si l'on voulait se rendre de Pale à

3 Sarajevo, cela pouvait prendre bien plus longtemps.

4 Question: Pouvez-vous décrire, pour la Chambre, ce que vous avez vu en

5 arrivant sur le site de l'entretien?

6 Réponse: Nous avons tout de suite observé que le site côtoyait un

7 cimetière, nous avons longé ce cimetière et puis, il y avait une position

8 d'artillerie. Nous avons été accueillis par le commandant de cette

9 position -si je me souviens bien, un lieutenant-colonel; et puis, il y

10 avait différents engins, différentes pièces d'artillerie l'une à côté de

11 l'autre qui étaient dans le sol. C'était donc une position qui avait été

12 préparée, et ils y avaient travaillé. Il y avait plusieurs bulldozers qui

13 préparaient d'autres positions sur le même site. Le général n'avait pas

14 d'objection à ce que nous filmions, nous avons eu la permission de filmer;

15 on nous a simplement demandé de ne pas filmer le cimetière.

16 Donc nous avons filmé, pendant que lui-même et le lieutenant-colonel

17 discutaient et se promenaient.

18 Il y avait une table en bois avec des bancs, et c'est là où nous nous

19 sommes assis et que nous avons mené l'entretien. Et puis, en dessous de

20 nous, se trouvait Sarajevo.

21 Question: Pouvez-vous nous dire combien de pièces d'artillerie vous avez

22 pu y observer?

23 Réponse: Je n'ai pas de chiffre exact, mais il y en avait en tout cas plus

24 de six.

25 Question: Et à quelle distance vous trouviez-vous de ces pièces?

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1 Réponse: Nous avons pu nous en approcher quand nous avons effectué

2 l'entretien, et bien évidemment les différentes pièces étaient éparpillées

3 -comme on peut s'y attendre pour une position d'artillerie-, et donc,

4 était à une certaine distance l'une par rapport à l'autre; et cette

5 position était dans la ligne de mire des Bosniaques qui se trouvaient à

6 Sarajevo. Raison pour laquelle les Serbes de Bosnie avaient donc quelque

7 peu éparpillé leurs différentes pièces, parce qu'il pouvait y avoir un

8 retour de tir. Donc ces canons, lorsque nous avons effectué l'entretien,

9 il y avait une distance de cinquante à quelque centaine de mètres qui nous

10 séparait de ces canons.

11 Question: Et l'entretien a duré combien de temps?

12 Réponse: Si je me souviens bien, nous avons utilisé plus d'une bande. Une

13 bande représente 30 minutes: donc je suppose à peu près 40 minutes, à peu

14 près cela.

15 Question: Quelle partie de cet entretien a été diffusée?

16 Réponse: Il a certainement été diffusé, si je me souviens bien, peut-être

17 3 minutes. Ce qui, pour une chaîne d'actualités où chaque bulletin

18 représente 30 minutes, est déjà assez long déjà: un dixième du bulletin a

19 été consacré à cet entretien. On a donc accordé pas mal d'attention à cet

20 entretien, mais on n'a pas pu diffuser l'entretien en entier parce qu'il y

21 avait évidemment d'autres sujets d'actualités d'autres parties du monde.

22 Question: Et quelle était la substance de l'entretien? Est-ce que vous

23 vous souvenez de ce qu'il a dit, en fait?

24 Réponse: Eh bien, nous lui avons demandé quelle était la situation

25 actuelle, ce qui se passait dans cette guerre, et il était manifestement

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1 très conscient qu'il allait gagner la guerre et, qu'en fait, la seule

2 solution pour la partie adverse était de se rendre. Il nous a dit qu'il

3 avait le pouvoir de les écraser s'ils ne se rendaient pas.

4 Et lorsque je lui ai demandé ce qu'il était convaincu de faire, il nous a

5 dit: "Je ne fais que défendre mon peuple". Sa mère vivait toujours dans un

6 village en Bosnie. Il a dit très clairement qu'il était lui-même Serbe de

7 Bosnie et qu'il avait le sentiment de défendre, comme je l'ai dit, son

8 peuple.

9 Je lui ai demandé si cela devenait sans objet puisqu'un Tribunal aurait pu

10 être institué, mais il a dit qu'il n'avait pas du tout peur d'être accusé

11 de commettre des crimes de guerre, et en fait, il a simplement ri en

12 disant: "Absolument pas!". Il n'acceptait pas du tout le principe d'un

13 Tribunal de guerre. Il n'acceptait pas du tout la notion qu'il aurait pu

14 commettre quelque crime de guerre que ce soit. Il nous disait qu'il ne

15 faisait que s'acquitter de ses obligations, de son devoir.

16 Question: Est-ce qu'il a dit quelque chose sur ses rapports avec Sarajevo?

17 Réponse: Non, pas directement dans l'entretien. Lorsque nous nous

18 promenions, lorsque nous avons regardé Sarajevo, c'était un endroit tout à

19 fait extraordinaire à notre avis…

20 Est-ce qu'on pourrait donner au conseil de la défense un peu d'eau, parce

21 qu'on tousse beaucoup?

22 Bon. Je continue.

23 Nous nous promenions donc, nous nous sommes arrêtés, nous avions une vue

24 sur Sarajevo. Et puis, il nous a dit qu'en fait Sarajevo se trouvait dans

25 la paume de sa main. Il nous a dit, bon, bien entendu c'était en serbo-

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1 croate, mais si j'ai bien compris, le général Mladic ne parlait pas du

2 tout l'anglais; nous n'avons pas pu communiquer directement. Mais, en

3 fait, il disait que la cité se trouvait dans la paume de sa main.

4 Question: Mais comment décririez-vous le général Mladic? Comment l'avez-

5 vous décrit dans votre rapport?

6 Réponse: Eh bien, ma première phrase était qu'il était un fléau pour

7 Sarajevo.

8 Question: Y a-t-il eu une réaction à cela?

9 Réponse: Il y a eu une réaction immédiate de la part de différentes

10 personnes à Pale qui pensaient que je ternissais le nom du général. Mais

11 plusieurs jours après l'entretien, eh bien, nous nous sommes vus par

12 hasard et en fait le général, eh bien, il en a ri, il semblait tout à fait

13 heureux du fait qu'on l'ait dénommé "le fléau de Sarajevo". Il en était

14 presque fier. Il semblait penser qu'il méritait ce titre.

15 Question: A quand remonte la dernière fois que vous avez vu le général

16 Mladic?

17 Réponse: La dernière fois que je l'ai vu était en février 1994.

18 Question: Pouvez-vous nous décrire les circonstances de cette rencontre?

19 Réponse: C'était pendant la crise, après le premier massacre du marché à

20 Sarajevo, quand l'OTAN a formulé son premier ultimatum aux Serbes de

21 Bosnie. et finalement, la crise a été désamorcée lorsqu'il y a eu

22 l'établissement de la zone d'exclusion de 20 kilomètres, zone d'exclusion

23 des blindés.

24 Et un matin, mon équipe a été interpellée par la présidence des Serbes de

25 Bosnie: on nous a demandé avec une équipe de la BBC de nous rendre à la

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1 présidence. Je pensais qu'il s'agissait là d'un entretien en commun avec

2 le correspondant de la BBC, John Simpson, avec le Dr Karadzic, donc le

3 dirigeant. Mais, en fait, c'était simplement une invitation à filmer le

4 cabinet de guerre des Serbes de Bosnie.

5 Ainsi, c'étaient les plus hauts officiers de l'armée serbe de Bosnie qui

6 ont assisté: le général Milutinovic, le général Gvero et le général Mladic

7 sont arrivés. Quand il est arrivé -mon cameraman-, mon producteur était

8 déjà sur place. Je me trouvais avec John Simpson.

9 Et le général Mladic, quand il m'a vu, m'a abordé de façon désagréable: il

10 m'a attrapé par l'épaule, il m'a craché quelques mots, en particulier "Zuc

11 et Gorazde".

12 Zuc est une colline au nord de Sarajevo qui, à la fin de 1992, avait été

13 reprise par les forces bosniaques. Et je me trouvais avec ces forces

14 bosniaques le jour où cette colline a été prise. J'ai donc fait un

15 reportage sur cette prise. Bon, ce n'était pas quelque chose

16 d'extraordinaire, mais c'était tout de même une défaite pour les Serbes de

17 Bosnie -que les Serbes de Bosnie n'ont jamais avouée.

18 Et puis il a dit le mot "Gorazde", ce qui était une allusion en fait qu'en

19 1993, j'avais traversé les lignes serbes pour aller à Gorazde. J'y suis

20 resté plusieurs semaines et puis, j'ai filmé un documentaire d'une demi-

21 heure sur cette enclave dans la Bosnie orientale.

22 Question: Avez-vous fait la connaissance de Radovan Karadzic?

23 Réponse: A plusieurs reprises.

24 Question: A quand est-ce que cela remonte?

25 Réponse: En été 1992, je l'ai rencontré à Londres; il y avait la

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1 conférence de Londres qui avait lieu à cette époque-là, en automne 1992.

2 C'était donc début septembre 1992, et ceci avant de me rendre à Pale dont

3 j'ai parlé tout à l'heure. Je l'ai rencontré à quelques reprises également

4 à Pale, c'était en septembre 1992 et ensuite en février 1994, après le

5 massacre sur le marché.

6 Question: Est-ce que, à un moment donné ou l'autre, vous avez interviewé

7 cet homme?

8 Réponse: Oui. Mais vous savez, M. Karadzic parlait très bien l'anglais, il

9 voulait bien parler l'anglais avec nous. Et, ce que nous avons souhaité,

10 c'est qu'il communique directement avec nous, ou par téléphone, avec nos

11 commentateurs ou nos correspondants à Londres, ou bien vite sur le

12 plateau, mais les questions ont été posées depuis Londres. Les interviews

13 que moi j'ai faites étaient très brèves, et en général, il s'agissait de

14 nouvelles ou d'une actualité très concrète d'un incident, mais je n'ai

15 jamais réussi véritablement à filmer ou à interviewer Karadzic dans la

16 caméra, ce qui a été fait avec Milosevic ou Mladic, par exemple.

17 Question: Savez-vous pourquoi Radovan Karadzic a été prêt à parler en

18 passant par votre programme Sky News?

19 Réponse: Tout simplement parce que c'était un programme qu'on pouvait

20 suivre également dans ce secteur, dans la région. Il avait considéré

21 également qu'il s'agissait d'une agence de presse qui était internationale

22 et de grande importance, de grande envergure. C'est la raison pour

23 laquelle il avait pensé également que nous étions à peu près dans la même

24 situation que CNN et BBC. Et, par notre intermédiaire, il pouvait

25 également exposer son point de vue en ce qui concerne la situation.

Page 2100

1 Question: Pendant la discussion que vous avez eue avec lui, est-ce que

2 Radovan Karadzic avait fait un commentaire, est-ce qu'il a parlé du destin

3 des non-Serbes à Sarajevo?

4 Réponse: Il avait fait des commentaires différents sur Sarajevo lors de

5 ces interviews, mais dans les conversations que j'ai pu avoir et qui ont

6 duré des heures et des heures également, il avait dit, de manière tout à

7 fait claire, que Sarajevo, à son opinion, appartient aux Serbes. Et je me

8 souviens qu'il avait dit également que tout ce territoire était serbe,

9 qu'il s'agissait des maisons serbes, qu'il s'agissait de la ville serbe,

10 et que c'est une ville qui leur appartient et qui doit rester la leur.

11 Il y avait des moments où il avait parlé également qu'il était prêt à des

12 compromis, mais d'après lui, les compromis sont en quelque sorte cette

13 possibilité d'ériger un mur comme le mur de Berlin à Sarajevo. Il a dit

14 qu'on allait jamais pouvoir vivre ensemble. C'est la raison pour laquelle

15 il faut ériger le mur comme le mur de Berlin, alors que moi, je lui ai

16 dit: "Ce n'est absolument pas permis, étant donné que nous avons commencé

17 à vivre dans un nouvel environnement". Il y avait la chute du mur de

18 Berlin en Europe, et de telles idées étaient complètement mal à propos.

19 Et quand je lui ai dit, je lui ai répété cela, il a dit: "Mais ils sont

20 tous les mêmes, les Croates, les Serbes, les Musulmans!".

21 "Tous ces groupes ethniques sont des peuples slaves", c'est ce que je lui

22 ai dit, alors que lui, il avait dit que des Musulmans n'étaient pas des

23 Slaves et que des Turcs. Et je cite "les ont niqués jusqu'à la mort", et

24 c'est ce que je répète, c'est ce qu'il avait dit, et que "c'est comme ça,

25 qu'il faut les considérer comme les Turcs".

Page 2101

1 Question: Est-ce que vous l'avez vous revu également en 1994?

2 Réponse: Oui, on m'avait dit qu'il fallait que je me rende à Pale, qu'il

3 fallait que je me rende à la présidence des Serbes de Bosnie. Et, au

4 moment où il est arrivé sur place, nous l'avons entendu, je dois dire

5 pendant plusieurs heures. Et ses premières paroles, il a dit: "Ah, non,

6 non, pas M. van Lynden". Mais, ensuite, il m'avait quand même accordé

7 cette interview devant les caméras. Nous n'avons pas eu de conversation ni

8 avant ni après. Dès que cette interview avait pris fin, on nous a demandé

9 de quitter les lieux.

10 Par conséquent, j'ai eu l'occasion de le voir à plusieurs reprises à cette

11 époque-là, mais nous ne nous sommes jamais entretenus pendant la crise.

12 Question: Est-ce que l'entretien que vous avez eu avec le général Mladic

13 avait eu des effets sur ce qui se passait par la suite, avec vous? Est-ce

14 que vous avez pu les visiter, les troupes?

15 Réponse: Oui, nous avons eu l'occasion de voir le général Mladic devant la

16 caméra. Il nous a dit que nous pouvions donc visiter la ligne du front et

17 les soldats serbes. Il pensait qu'il était indispensable également que

18 l'on puisse parler en leur nom et que l'on présente ce que, eux, ils

19 pensent. Nous avons visité les positions des Serbes de Bosnie, nous avons

20 été escortés par les deux policiers militaires, c'étaient bien évidemment

21 des Serbes de Bosnie. Ils nous ont escortés en permanence. Ils nous ont

22 permis de surmonter un certain nombre de problèmes qu'au début, à Pale, on

23 avait au niveau des points de contrôle.

24 Question: Pendant que vous avez filmé ces positions, est-ce que les

25 officiels ou d'autres militaires avaient posé des questions: pourquoi vous

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1 filmiez tout cela?

2 Réponse: Mais ceci n'aurait pas été logique de ne pas nous poser des

3 questions. Tous les officiers, tous les militaires sont toujours

4 préoccupés quand ils voient les caméras, les caméras de la télévision,

5 parce que c'est une peur, une angoisse bien évidemment qui est un réflexe

6 car on peut éventuellement filmer des positions qui auraient pu,

7 éventuellement, dévoiler leurs positions à la partie adverse. Et certes,

8 comme nous sommes arrivés comme une équipe de la télévision qui aurait pu

9 être suivie un petit peu partout, et comme le reportage aurait pu être

10 regardé aussi bien d'un côté que de l'autre. Certes, nous avons été

11 obligés de discuter là-dessus chaque fois quand on se rendait dans un

12 certain nombre de positions, dire également de quoi nous allions parler,

13 ce que nous allions filmer.

14 Et quand, par exemple, on nous emmenait pour voir les commandants des

15 compagnies, à ce moment-là, on s'entretenait avec les commandants de

16 compagnies pour dire à peu près ce que nous allions filmer, et nous

17 disions de façon tout à fait claire ce que nous allions filmer. En

18 général, c'est nous qui avons commencé les entretiens et qui disions que

19 nous étions parfaitement conscients également du danger que leurs

20 positions soient dévoilées.

21 Les cameramen également étaient parfaitement conscients des risques de ce

22 type-là, mais nous avons été donc conscients de cela. En aucune occasion

23 personne ne nous a dit, ni des membres de l'ex-JNA ni des Serbes de

24 Bosnie, que le fait que nous avons filmé les avait mis en danger ou leurs

25 positions et les effectifs également.

Page 2103

1 Il y avait un seul commentaire qui avait été fait et ceci, depuis Vukovar:

2 c'était quelqu'un qui était le porte-parole de l'armée yougoslave qui

3 était très préoccupé, parce qu'il y avait quelques destructions à Sarajevo

4 qui ont été vues mais qui n'ont pas été déblayées.

5 Question: Mais c'était en 1991?

6 Réponse: Oui, 1991.

7 Question: Et vous avez visité ces positions en septembre 1992?

8 Réponse: Oui, nous avons également visité Sarajevo, Grbavica, Hrasno,

9 ensuite Jevrejsko Groblje, le cimetière juif, ensuite Trebevic; ce sont

10 les positions qui se trouvaient tout à fait au-dessus de la ville. Puis,

11 j'ai visité également pendant trois jours les environs de Sarajevo à

12 Vogosca, à Ilidza, à Hadzici. Ensuite, nous avons visité des positions

13 différentes également dans les environs de Sarajevo.

14 Nous avons été escortés bien évidemment, tout le temps, par ces deux

15 policiers militaires. On nous avait dit également, ce sont ces policiers

16 qui nous ont dit que cela leur était parfaitement égal ce que les gens à

17 Pale allaient parler et allaient dire. En d'autres termes, on nous a

18 permis absolument de filmer tout ce que l'on voulait, de dire tout ce que

19 l'on a vu également.

20 Question: Nous pourrions peut-être commencer justement par cette visite de

21 Grbavica. Pouvez-vous nous dire à quel moment cela s'est passé?

22 Réponse: Non, je ne peux pas.

23 Question: Pourriez-vous nous dire quand, à peu près, en septembre, cette

24 visite a eu lieu?

25 Réponse: Je pense que c'était mi-septembre ou peut-être à la fin du mois

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1 de septembre.

2 Question: Est-ce que c'était avant ou après l'interview que vous avez eue

3 avec le général Mladic?

4 Réponse: Après. Nous n'avons pas vu les positions d'avoir cette interview

5 avec le général Mladic.

6 Question: Est-ce que, maintenant, vous vous souvenez comment cette visite

7 a-t-elle été arrangée? Est-ce que vous avez été accompagné, qui vous a

8 reçu?

9 Réponse: Mais ceci s'est passé par l'intermédiaire de la présidence des

10 Serbes de Bosnie. Nous avons introduit une requête, nous avons envoyé

11 quelqu'un donc pour discuter, pour voir comment on peut l'organiser. Il y

12 avait donc ces policiers qui nous ont escortés, comme je l'ai dit, et

13 auxquels on avait dit quel était l'itinéraire qu'il fallait suivre, par où

14 il fallait passer.

15 Nous avons commencé par conséquent par Grbavica. Ensuite, nous avons

16 commencé la montée vers Trebevic également, et nous nous sommes arrêtés

17 également à Lukavica, dans les casernes: c'est là où nous avons fait une

18 interview également avec les soldats dans les montagnes.

19 Par la suite, nous sommes descendus à Grbavica de nouveau et c'est là, une

20 fois de plus, où on nous a emmenés au poste de commandement. Ce sont les

21 postes de commandement qui se trouvaient en général dans des bâtiments

22 civils, pas dans des casernes.

23 Question: Comment saviez-vous qu'il s'agissait des commandants de

24 compagnie?

25 Réponse: Mais ils avaient des uniformes ou bien des emblèmes également

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1 qu'ils arboraient, des grades. Donc on pouvait donc les reconnaître. Mais

2 il s'agissait en général des grades que moi j'ai eu l'occasion de voir

3 également précédemment, quand je me rendais à Vukovar: il s'agissait des

4 grades de la JNA.

5 Question: Eh bien, pour le compte rendu, je pense qu'il serait utile de

6 consigner que vous avez montré à votre côté droit…

7 Réponse: Oui, mais je pense qu'il y avait des symboles, des emblèmes qui

8 ont été arborés sur les deux épaules.

9 Question: Mais est-ce que vous pouvez dire ceux qui se trouvaient à gauche

10 et ceux qui se trouvaient à droite?

11 Réponse: Je ne sais pas, mais je sais qu'il y avait des petites étoiles

12 d'un côté. Il y avait des bandes également, des rubans qui montraient s'il

13 s'agissait d'un lieutenant, du capitaine, du major, enfin…

14 Question: Mais est-ce qu'il y avait éventuellement des insignes arborés

15 sur la poitrine?

16 Réponse: Mais je ne me souviens pas véritablement. Mais j'ai l'impression

17 qu'il y avait quand même sur les manches, sur les bras, il y avait un

18 certain nombre de grades.

19 Il y avait également des militaires qui portaient sur la tête un certain

20 nombre d'insignes sur les couvre-chefs, mais c'était en 1991.

21 Je ne me souviens plus parce qu'il ne faut pas oublier qu'en 1991 il y

22 avait encore une étoile rouge et les Serbes ont commencé par la suite à

23 porter le drapeau serbe.

24 (Note de l'interprète: Le rythme à la mitraillette ne correspond pas à la

25 possibilité d'interpréter correctement. Il faut ménager des pauses car

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1 l'accusation et le témoin parlent la même langue.)

2 Question: Eh bien, Monsieur le Président, pour le compte rendu il serait

3 peut-être également utile de répéter qu'à un moment donné le témoin a dit

4 que, par moments, les militaires portaient des insignes sur les bras. Il

5 avait montré l'avant-bras. Il a dit également qu'il s'agissait de l'avant-

6 bras gauche ou droit.

7 Réponse: Mais il s'agissait des insignes qu'ils arboraient d'un côté ou de

8 l'autre, ou des deux côtés.

9 Question: Eh bien, il y avait également à droite de la poitrine qu'ils

10 portaient les insignes?

11 Réponse: Je ne me souviens pas tout à fait.

12 M. Waespi (interprétation): Mais est-ce que c'était à gauche ou à droite?

13 M. van Lynden (interprétation): Je ne me souviens pas.

14 M. le Président (interprétation): Pour qu'on soit au clair en ce qui

15 concerne les insignes que les militaires arboraient, est-ce que vous

16 pouvez nous préciser quelque chose? Si je me souviens, le témoin a bien

17 précisé qu'ils portaient des uniformes et qu'ils avaient des grades, ou

18 bien qu'ils avaient des étoiles, des galons; et il a parlé également des

19 deux épaules.

20 M. van Lynden (interprétation): Est-ce que je peux dire quelque chose? Il

21 y avait des uniformes qui étaient différents. Eh bien, la JNA standard,

22 l'uniforme, les grades normalement sont portés sur les épaules. Mais par

23 la suite, il y avait d'autres uniformes: il y avait des jaquettes, par

24 exemple, où il y avait des insignes qu'on avait attachés. Il s'agissait de

25 galons plutôt, et pas des étoiles. A ce moment-là, c'était attaché par

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1 Velcro.

2 M. le Président (interprétation): Est-ce que vous montrez maintenant à

3 droite ou à gauche?

4 M. van Lynden (interprétation): Excusez-moi, mais je ne suis pas tout à

5 fait sûr. J'ai montré spontanément le côté droit et le côté gauche.

6 M. le Président (interprétation): Excusez-nous, mais c'est surtout pour le

7 compte rendu que nous y insistons. Je ne sais pas si vous en êtes sûr. Ce

8 n'est pas tellement important.

9 M. Waespi (interprétation): Maintenant, nous allons passer aux positions…

10 Mais je vois que mon éminent confrère s'est levé et qu'il souhaite dire

11 quelque chose.

12 M. le Président (interprétation): Je vous en prie.

13 M. Piletta-Zanin: Merci, Monsieur le Président. Puisque nous parlons du

14 transcript, j'ai cru entendre dans une des langues que les traducteurs

15 demandent à nouveau qu'on puisse parler plus lentement entre question et

16 réponse. Merci.

17 M. le Président (interprétation): Oui, effectivement. Comme ceci n'est pas

18 indispensable de traduire en anglais, nous ne l'avons pas suivi. C'est la

19 raison pour laquelle je vais vous demander de bien vouloir tenir compte de

20 ce qui se passe également sur l'écran.

21 Par conséquent, attendez que le texte soit terminé sur l'écran, et c'est

22 comme cela que les interprètes des cabines qui y travaillent peuvent

23 suivre tout ce que vous dites et traduire tout ce que vous dites, que ce

24 soit tout consigné dans le compte rendu.

25 M. Waespi (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

Page 2108

1 Eh bien, auriez-vous l'amabilité de décrire à la Chambre ce que vous avez

2 pu constater sur ces positions?

3 M. van Lynden (interprétation): A Grbavica, on nous a emmenés dans

4 quelques bâtiments d'habitations. Nous avons visité quelques pièces, des

5 étages dans ces bâtiments. C'est là que nous avons pu voir les positions.

6 Il y avait des tireurs isolés, il y avait également des fusils

7 qu'utilisaient les tireurs isolés. Il y avait des sacs de sable. Les

8 pièces n'avaient pas de lumière, il y avait des abris, et les fenêtres ont

9 été pratiquement abritées. C'étaient des positions militaires dans une

10 guerre de la ville.

11 Question: Mais auriez-vous l'amabilité de nous dire également de quel type

12 donc de snipers, de fusils de tireurs isolés il s'agissait?

13 Réponse: En effet, il s'agissait des fusils à canon long et qui avaient

14 des crosses en bois. Moi, j'ai eu l'occasion également de voir d'autres

15 fusils qui avaient été fabriqués avec des crosses en matériaux différents,

16 pas obligatoirement en bois, mais il s'agissait des canons longs. Par

17 conséquent, il ne s'agissait pas de kalachnikovs.

18 Je ne suis aucunement expert en ce qui concerne les tireurs isolés, les

19 fusils qui ont été utilisés par les tireurs isolés, mais j'ai eu

20 l'occasion de les voir au Liban et ailleurs.

21 Question: Mais est-ce qu'il y avait également une lunette?

22 Réponse: Oui, tout à fait. Il y avait toujours une lunette en haut du

23 fusil.

24 Question: Avant de commencer à décrire ces positions, vous avez dit qu'il

25 s'agissait de bâtiments d'habitations. Qu'est-ce que vous sous-entendez

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1 par bâtiments d'habitations?

2 Réponse: Mais ce sont les appartements qui s'y trouvent.

3 Question: Il y avait combien d'appartements, combien d'étages?

4 Réponse: Il y en avait 5, 6, 7 étages, peut-être moins d'étages… des

5 petites maisons.

6 Question: Eh bien, nous allons revenir maintenant à l'armement dont vous

7 avez parlé tout à l'heure, quand vous avez parlé de lunette. Qu'est-ce que

8 vous avez sous-entendu là-dessus?

9 Réponse: C'est une lunette, comme je l'ai dit.

10 Question: Est-ce que vous avez vu des munitions également sur les

11 positions?

12 Réponse: Oui, pendant que nous y étions, nous n'avons pas eu le droit de

13 filmer. Nous avons pu voir les mortiers, nous avons vu des obus également

14 dans des caisses en bois qui ont été rangées à côté du bâtiment.

15 Ensuite, derrière le bâtiment, dans la cour, quelque peu plus loin par

16 rapport à la ligne de front, il y avait des armes d'artillerie

17 différentes. Il y avait des chars, il y avait des transporteurs blindés,

18 il y avait des mitrailleuses, il y avait des véhicules également sur

19 lesquels on avait pu voir des canons antiaériens de calibre 30 à 40

20 millimètres. Ensuite, il y avait des armes légères, il y avait des

21 munitions.

22 C'est ce que nous avons vu en général. Et il s'agissait des balles qui ont

23 été utilisées normalement pour les kalachnikovs. Comme vous le savez, les

24 tireurs isolés utilisent pour le fusil d'autres munitions. Mais il nous a

25 été permis à une occasion, tout au moins à mon cameraman, de faire une

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1 prise de vue à travers cette lunette télescopique, optique, et c'était

2 très difficile d'ailleurs, mais il avait réussi.

3 Moi, je tiens à préciser une fois de plus qu'il s'agissait des positions

4 sur les lignes de front. Nous avons pu voir sur le sol également des

5 douilles et nous avons pu constater qu'on avait tiré à partir de ces

6 positions.

7 Question: Est-ce que sur ces positions vous avez pu voir juste une

8 position, donc un endroit d'où l'on ouvrait le feu?

9 Réponse: Non, mais j'en ai vu plusieurs dans ces appartements, mais je

10 n'ai pas vu qu'on tirait au moment où nous y étions.

11 Question: Est-ce que vous avez eu l'occasion de regarder à travers? Est-ce

12 que vous avez pu constater également ce qu'on pouvait voir à travers ces

13 ouvertures d'où l'on tirait?

14 Réponse: Oui, on a essayé, tout au moins c'est mon cameraman qui avait

15 essayé.

16 Question: Et cela se trouvait où?

17 Réponse: C'était sur les positions à proximité de la rivière Miljacka,

18 c'était au milieu, au centre de la ville de Sarajevo, au milieu de

19 Sarajevo. Nous avons pu voir et nous avons traversé même le pont de la

20 rivière Miljacka.

21 Question: Est-ce que vous vous souvenez à quelle distance c'était?

22 Réponse: Je ne me souviens pas exactement, mais ce n'était pas très loin.

23 M. Waespi (interprétation): Maintenant, nous allons passer aux soldats.

24 Est-ce que vous pouvez nous dire ce que, eux, ils portaient? Est-ce que

25 vous vous souvenez des uniformes? Est-ce que vous pouvez nous décrire un

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1 soldat?

2 M. van Lynden (interprétation): Mais il s'agissait des mêmes uniformes,

3 comme j'ai vu sur les soldats de la JNA, qu'ils portaient à Vukovar.

4 M. le Président (interprétation): Monsieur Piletta-Zanin, je vous en prie.

5 M. Piletta-Zanin: Je veux objecter, Monsieur le Président! La question,

6 telle qu'elle est posée, ne permet pas de déterminer s'il s'agit de

7 soldats d'un camp précisément ou d'un autre camp. J'aimerais qu'on précise

8 la question.

9 M. le Président (interprétation): Auriez-vous l'amabilité –je m'adresse à

10 l'accusation- d'être un peu plus précis?

11 Moi, j'ai compris effectivement que le témoin avait donc raconté ce qui

12 s'était passé à Grbavica. Mais auriez-vous l'amabilité de le vérifier, de

13 reformuler votre question et d'être plus précis dans les questions que

14 vous posez?

15 M. Waespi (interprétation): Oui Monsieur le Président.

16 Monsieur van Lynden, nous avons donc parlé de ces positions de tireurs

17 isolés, est-ce que vous pouvez nous décrire l'un des tireurs isolés?

18 M. van Lynden (interprétation): Eh bien, tout d'abord, je dois dire que

19 nous étions à Grbavica, et j'avais décrit un soldat qui appartenait à

20 l'armée serbe. J'ai dit qu'ils portaient les mêmes uniformes comme les

21 uniformes portés par les membres de la JNA, les années qui avaient précédé

22 la guerre.

23 Moi, je n'ai pas pu constater qu'il y avait une différence, et je me dois

24 de dire également que les officiers en général portaient des uniformes qui

25 étaient très nets, ils portaient également des cartables avec des cartes.

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1 J'ai vu également, comme je vous ai dit précédemment, ce même type

2 d'uniforme et des couvre-chefs, par exemple, que l'on portait à l'époque

3 dans la JNA.

4 A l'époque, c'était l'étoile rouge, et par la suite c'était un drapeau, le

5 drapeau qui était blanc, bleu et rouge. Quelques hommes ne portaient pas

6 de bottines mais plutôt des chaussures de sport: nous avons pensé tout

7 simplement parce qu'ils se trouvaient dans des bâtiments, ils occupaient

8 les positions dans les bâtiments et pas dans les tranchées.

9 Question: Eh bien, est-ce que vous avez pu observer les cibles de manière

10 organisée? Et comment cela s'est passé?

11 Réponse: Eh bien, nous sommes restés toujours à Grbavica, comme je l'ai

12 dit, nous avons pu constater qu'ils avaient les talkies-walkies, ce sont

13 les toutes petites radios de transmission. Il y avait également d'autres

14 positions qui se trouvaient au-dessus de Sarajevo.

15 Et dans d'autres bâtiments, ils communiquaient avec ces gens-là se

16 trouvaient en haut. Par conséquent, il y avait dans les hauteurs des

17 positions, et ces gens-là qui étaient dans les bâtiments communiquaient

18 entre eux. Et les gens qui étaient sur les lignes de front ne décidaient

19 pas d'eux-mêmes sur quoi ils allaient ouvrir le feu et quelles seraient

20 leurs cibles.

21 Question: Comment ont-ils communiqué, entre les tireurs isolés et ceux qui

22 se trouvaient sur les positions en haut?

23 Réponse: Par la radio.

24 Question: Est-ce que vous avez pu également voir comment ces tireurs

25 isolés se protégeaient des feux qui ont été ouverts de l'autre côté des

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1 Bosniens?

2 Réponse: Oui, j'ai vu: dans un appartement, ils avaient mis une

3 marionnette et les tireurs isolés sont toujours à l'ombre, ils ne sont pas

4 visibles, ils ont fait une marionnette ou je ne sais pas, une poupée,

5 comme un clown, cela ressemblait à un homme. Et je me souviens, il y avait

6 même un couvre-chef en plastique noir qu'il portait. Ils plaisantaient là-

7 dessus, ils étaient très fiers, d'ailleurs, d'avoir organisé en quelque

8 sorte ce cirque.

9 Lorsqu'il s'agit d'autres positions, pas celles de Grbavica mais, par

10 exemple, pour parler du cimetière juif ou des positions qui se trouvaient

11 dans des immeubles d'habitations, des gens prenaient même des troncs

12 d'arbre pour se protéger contre des tirs. Quelquefois, ils le faisaient

13 également à l'intérieur même de ces bâtiments pour ériger de telles

14 fortifications. Je n'ai jamais vu cela avant, je veux dire en temps de

15 guerre.

16 Quelquefois, on utilisait également des miroirs, et ainsi on regardait ce

17 qui se passait en dehors pour voir si évidemment quelque chose se passait

18 ou s'il y avait quelque chose de nouveau sur la position.

19 J'ai déjà dit tout cela dans mes rapports pour parler de ce mannequin et

20 de ces miroirs.

21 Ceci est généralement utilisé lorsque, par exemple, sur le front vous avez

22 les deux lignes adverses qui ne sont pas loin l'une de l'autre, et lorsque

23 vraiment la bataille est menée sur le sol, au sol, et lorsqu'on peut

24 utiliser évidemment des miroirs. Mais pour moi, ces miroirs étaient

25 quelque chose de tout à fait nouveau.

Page 2114

1 Question: Est-ce que vous vous rappelez la date ou approximativement la

2 période où tout cela se passait, pour parler de ces miroirs?

3 Réponse: Oui. Comme je viens de dire, nous nous sommes rendus dans la

4 partie qui se trouvait sous le contrôle des Serbes de Bosnie et de

5 Sarajevo, et ainsi il a fallu demander évidemment une permission pour

6 filmer, pour tourner. Et nous avons été là-bas pendant plusieurs jours à

7 Grbavica, à Hrasno et sur les positions, non loin du cimetière juif.

8 Comme je vous l'ai déjà dit, ceci se passait vers la mi-septembre ou

9 plutôt vers la fin du mois de septembre.

10 Question: Est-ce que vous avez pu voir vous-même un incident ou, par

11 exemple, une position où il y avait stationnée également une mitrailleuse

12 ont été impliqués?

13 Réponse: Oui, lorsque tout ceci se passait à Hrasno, nous avons été amenés

14 non loin d'un bloc d'habitations auquel je me suis référé tout à l'heure

15 pour parler de Grbavica. Et la position ne se trouvait pas dans le

16 bâtiment même, mais il s'agissait plutôt de parler de tranchées, d'abris à

17 aménager en-dehors de la maison. Et lorsque, évidemment, mon producteur et

18 moi étions à parler avec l'officier qui nous y a emmenés, mon cameraman et

19 l'ingénieur du son nous ont amenés jusqu'à cette position où il y avait

20 ces armes, cette mitrailleuse et les soldats bosniens serbes.

21 Il y avait d'abord un servant de la mitrailleuse et l'autre à côté de lui,

22 un autre soldat qui suivait la situation avec évidemment une paire de

23 jumelles. Et on pouvait d'ailleurs voir que l'homme qui s'en est occupé

24 n'était pas vraiment un Bosnien serbe, un Serbe de Bosnie. Il était

25 plutôt, d'après son accent, quelqu'un qui serait venu de Serbie, de la

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1 région de Nis, par exemple.

2 Et comme je vous l'ai déjà dit, je n'étais pas vraiment sur la position,

3 j'étais à une vingtaine de mètres de la position. J'ai pu parler à

4 l'officier qui nous y a emmenés. Lorsque je lui ai demandé sur qui il

5 tirait, il a dit: "Sur les Moudjahidine". Disant "Moudjahidine", il

6 voulait désigner ses adversaires, les Musulmans de Bosnie.

7 Question: Est-ce que vous avez pu voir vous-même des quelconques

8 Moudjahidine?

9 Réponse: Oui. J'ai mentionné moi-même que je me suis rendu en Afghanistan,

10 mais pour parler de la situation de là-bas, je n'ai pas vu d'Afghans.

11 Question: Vous avez dit qu'il s'agissait d'un soldat, près de la

12 mitrailleuse, qui était de Serbie, de la région de Nis. Est-ce que vous

13 pouvez décrire sa tenue vestimentaire pour le bien de la Chambre

14 d'instance?

15 Réponse: Donc cet homme, ce soldat portait le même uniforme connu pour la

16 JNA, l'armée yougoslave populaire, si je me souviens bien. Il portait une

17 moustache et il n'était, enfin, pas, plus tout jeune: il devait avoir dans

18 les 40 ans.

19 Question: Vous avez dit qu'il devait être chef d'une compagnie ou un

20 officier commandant. C'est lui qui vous a montré cette position. Est-ce

21 que vous pouvez présenter mieux tout cela? D'où venait-il? Lui aussi

22 venait-il de Serbie?

23 Réponse: Il s'agit des positions de Hrasno où nous avons vu différents

24 chefs, officiers commandants par secteur, dans lesquels secteurs nous nous

25 sommes rendus. Nous avons pu voir différents officiers, évidemment, dans

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1 ces différentes localités.

2 Si je me souviens bien, l'homme qui a manipulé la mitrailleuse a été le

3 seul pour lequel le producteur qui Monsieur le Juge, je dois le préciser

4 était quelqu'un qui a fait ses études en linguistique, en philologie, à

5 Belgrade. Sa mère étant de Croatie, son père du Monténégro et lui étant né

6 en Bosnie, lui devait savoir beaucoup sur ces différents accents pratiqués

7 dans différentes régions de l'ancienne Yougoslavie.

8 Si je me souviens bien, une toute première fois où il a dit pour

9 quelqu'un, qui n'était pas de Bosnie, était notamment celui qu'il a

10 désigné comme étant de la Serbie du Sud.

11 Question: Peut-être pouvez-vous être précis pour nous dire à quel moment

12 tout cela s'était passé à Hrasno?

13 Réponse: Non, je ne peux pas vous le dire, je dirais que c'était vers la

14 mi-septembre 1992.

15 Question: Est-ce que vous vous souvenez d'un incident qui s'était produit

16 sur les bords de la rivière Miljacka, dans lequel fut impliquée une dame,

17 une femme plus âgée?

18 Réponse: Oui, je m'en souviens. C'était au moment où nous nous trouvions

19 près des immeubles d'habitations de Grbavica. Près de l'une de ces

20 positions-là, pendant que mon cameraman s'est occupé du tournage, il a pu

21 voir une personne âgée, une femme âgée qui s'était acheminée sur un des

22 ponts pour le traverser -il s'agissait de ces passerelles pour piétons-,

23 qui enjambait la rivière Miljacka, et cela, depuis la partie sous contrôle

24 des Serbes de Bosnie vers l'autre partie bosnienne.

25 Nous avons voulu savoir de quoi il s'agissait. Il n'y avait pas de tirs,

Page 2117

1 mais les soldats disaient qu'ils savaient ce qui allait se produire.

2 Or, à la surprise de tous, il a été dit que tout a été arrangé pour que

3 cette dame âgée, qui devait avoir plus de 60 ans, devait passer de l'autre

4 côté, le côté sous le contrôle des Musulmans. Et ceci lui a été autorisé.

5 Un des soldats a même précisé: "Nous ne voulons personne de ces gens-là,

6 tous ils doivent partir".

7 Question: Nous étions tout à l'heure à parler des positions de tireurs

8 embusqués. Peut-on voir un autre côté, peut-on parler peut-être de ces

9 foyers dangereux, surtout dangereux pour la population civile?

10 Réponse: Ecoutez, pour me faire bien entendre -à l'adresse évidemment des

11 avocats aussi-, je dois dire qu'il y avait des positions tenues par les

12 parties serbes de Bosnie, notamment à Grbavica où la situation était fort

13 dangereuse. Il y avait des gens qui habitaient toujours la région et qui

14 risquaient de se faire exposer à des tirs de snipers, des tirs de tireurs

15 embusqués. Mais ceci était beaucoup plus le cas de l'autre côté de

16 Sarajevo à cause du terrain.

17 Voyez-vous, la ville de Sarajevo semble allongée du point de vue de son

18 territoire, longeant la rivière Miljacka. Et ceux, les Serbes qui se

19 trouvaient dans les hauteurs, étaient en mesure de tirer littéralement sur

20 les rues de la nouvelle partie, des nouvelles agglomérations de Sarajevo

21 et de la vieille ville de Sarajevo.

22 Par exemple, ils pouvaient tirer sur les places telles Marindvor, le

23 square de Marindvor, et puis après, tout le long de la rue du Maréchal

24 Tito, boulevard Maréchal Tito; tous ces sites étaient exposés à des tirs

25 de tireurs embusqués.

Page 2118

1 Et puis, il y a là une espèce de rue non loin du bâtiment de la présidence

2 bosniaque où le gouvernement a érigé tout un mur moyennant les conteneurs

3 en métal, de sorte que les gens puissent évidemment y circuler sans être

4 la cible des feux.

5 Ensuite, non loin de la région connue sous le nom de "Skenderija", il y

6 avait également un territoire tenu par les Bosniens, lequel territoire sur

7 les bords de la Miljacka, pouvait se trouver sous les tirs.

8 Et pour parler des ponts, toujours près de Skenderija, en 1914, un de ces

9 ponts a été connu parce que c'est non loin de ce pont-là que François-

10 Ferdinand, l'archiduc autrichien, prince de la Couronne, a été tué dans un

11 attentat organisé par les Serbes de Bosnie.

12 Question: Est-ce que vous savez comment, est-ce que vous pouvez décrire

13 comment se présentaient toutes ces situations pour nous dire s'il y avait

14 des avertissements?

15 Réponse: Non, pas au début, lorsque je suis venu à Sarajevo en mai 1992.

16 Peut-être un peu plus ceci a été fait, parce que les gouvernements, les

17 autorités ont tout fait pour prendre des mesures de protection, notamment

18 en faveur des civils, des piétons.

19 Et puis après, dans des petites rues, des gens pouvaient par exemple

20 suspendre des tapis ou autre matériel du genre pour se faire protéger

21 moyennant une espèce d'écran, pour ne pas être vus, pour ne pas être

22 repérés. Mais ceci ne pouvait être fait que dans des rues relativement

23 étroites. Le square de Marindvor a toujours été exposé au danger, mais ce

24 n'est que là qu'on pouvait voir des signes d'avertissement portant sur des

25 tirs de tireurs embusqués.

Page 2119

1 Question: Est-ce que vous vous souvenez ce qui a été dit, très exactement,

2 sur ces poteaux ou signes?

3 Réponse: Non, je ne suis pas linguiste moi, je n'ai appris que quelques

4 mots de serbo-croate. On écrivait "sniper", S-N-A-J-P-E-R, parce que c'est

5 très près de l'anglais, mais ceci a été écrit en latin évidemment, et en

6 cyrillique également.

7 Question: Et où est-ce que vous les avez vues, ces inscriptions?

8 Réponse: J'en ai vu sur des pancartes en carton ou sur des pièces en bois,

9 par exemple, dont les dimensions se présentent comme suit.

10 (Le témoin montre.)

11 (Note de l'interprète: Pour préciser, il s'agira de pièces ou de pancartes

12 de 50 centimètres sur 50.)

13 Question: Vous avez décrit vos visites de positions tenues par les Serbes

14 de Bosnie. Est-ce que vous pouvez nous dire à quel moment vous les avez

15 faites, toutes ces tournées?

16 Réponse: En septembre 1992. Je me suis rendu sur le terrain qui se

17 trouvait sous le contrôle des Serbes de Bosnie peut-être pour une période

18 de trois jours. Nous nous sommes rendus, comme je l'ai déjà dit, vers

19 d'autres positions et d'autres localités dans les environs de Sarajevo.

20 Mais tout cela se trouve un peu plus loin du centre ville. Nous étions

21 également à Ilidza.

22 Donc nous en avons fait des tournées de ce genre. Et, en tout, on peut

23 dire que, pour parler de notre présence auprès de l'armée des Serbes de

24 Bosnie, eh bien, nous pouvons dire qu'il s'agissait d'une période d'une

25 dizaine de jours, parce qu'il y avait d'autres rapports à faire concernant

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1 la protection sanitaire, la protection et la prévention des civils.

2 Question: Vous avez dit que vous vous êtes rendu sur ces différentes

3 positions pour parler à des soldats et à des chefs commandants. Pour

4 parler de tous ces tireurs embusqués que vous avez pu voir, se trouvaient-

5 ils sous le contrôle, sous le commandement des Serbes de Bosnie ou pas?

6 Réponse: Il n'y a pas de doute, vraiment, de dire que tous ces soldats que

7 nous avons pu voir opéraient sous le contrôle strict d'une armée bien

8 articulée et sous forme d'une hiérarchie stricte. Nous avons pu voir, par

9 exemple des postes de commandement, les soldats que nous avons pu voir là-

10 bas étaient tous des professionnels. Ils se présentaient bien comme étant

11 vraiment des officiers chefs, officiers de l'armée yougoslave. Il n'y

12 avait aucune différence à observer entre les officiers que j'ai pu voir en

13 1991 et ceux que j'ai pu voir plus tard à Grbavica en 1992. Il s'agit

14 évidemment de gens bien formés faisant partie d'une armée organisée, et

15 évidemment sous un commandement militaire bien ordonné.

16 Evidemment, tous ces soldats n'étaient pas tous des professionnels. Je

17 veux dire qu'il y avait, pour parler de l'armée yougoslave, de ceux qui se

18 trouveraient sous les drapeaux, des conscrits. Mais il n'y a pas un seul

19 doute, aucun doute qu'il s'agissait là d'une force armée bien contrôlée.

20 Question: Parlons d'un autre sujet. Avez-vous peut-être pu être témoin

21 oculaire d'un incident où le feu a été mis à un bâtiment d'habitations?

22 Réponse: Est-ce que vous vous référez maintenant à l'incident de Sarajevo?

23 Si oui, la réponse est oui.

24 Question: A quel moment était-ce?

25 Réponse: Cet incident a eu lieu au moment où j'étais de retour à Sarajevo,

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1 cette fois-ci non pas dans la partie, dans la région sous le contrôle des

2 Serbes de Bosnie, mais qui se trouvait sous le contrôle des Bosniens, des

3 Musulmans. Ceci se passait en octobre, vers la fin octobre 1992.

4 Et puis l'incident auquel vous vous référez a eu lieu le 5 décembre 1992,

5 si je me souviens bien. Mais dans ma toute première déclaration, j'ai dit

6 que tout cela devait se passer en novembre 1992.

7 Question: Pourquoi est-ce que vous vous souvenez maintenant qu'il

8 s'agissait du 5 décembre 1992?

9 Réponse: Je suis hollandais. Or, qui dit hollandais dit saint Nicolas

10 comme fête importante célébrée le 5 décembre. C'est ainsi que j'ai pu me

11 rappeler ultérieurement.

12 Question: Pouvez-vous nous préciser le site où l'incident a eu lieu?

13 M. van Lynden (interprétation): Pas tout à fait vraiment, mais disons

14 qu'il s'agissait d'un bloc d'habitations qui longeait le boulevard

15 Maréchal Tito. Mais comment le décrire, ce site? Si seulement vous aviez

16 une carte à m'offrir, peut-être je pourrais le présenter mieux.

17 M. Waespi (interprétation): Je crois qu'on pourrait organiser cela.

18 M. le Président (interprétation): Est-ce que je comprends bien qu'il

19 s'agit évidemment de cette carte qui ne contient aucune annotation et qui

20 est donc en noir et blanc? Merci.

21 M. Waespi (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je

22 vous prie de patienter une seconde. Excusez-moi, Monsieur le Président,

23 Messieurs les Juges. Je crois que la carte qui est en effet la pièce à

24 conviction P648 pourrait être la plus appropriée pour être présentée au

25 témoin.

Page 2122

1 M. le Président (interprétation): Je crois qu'il me semble que nous devons

2 résoudre quelques problèmes d'ordre technique concernant le moniteur. Mais

3 c'est déjà fait.

4 Madame la Greffière d'audience me rappelle qu'il s'agit évidemment d'une

5 carte originale, sans annotation. Et si nous devons évidemment y apporter

6 quelques annotations, il nous faudra une nouvelle cote pour présenter cet

7 élément de preuve, pour parler de cette pièce à conviction qui est la

8 carte encore toujours en noir et blanc.

9 (L'huissier place la carte sur le rétroprojecteur.)

10 M. van Lynden (interprétation): (Hors micro)

11 M. le Président (interprétation): Pour que tout cela soit consigné dans le

12 compte rendu d'audience, est-ce que vous pouvez parler anglais, s'il vous

13 plaît? Je vous comprends bien.

14 M. van Lynden (interprétation): Je vous prie de m'excuser. Il s'agit de

15 cette région-là.

16 (Le témoin montre la région.)

17 M. Waespi (interprétation): Dès que vous l'aurez trouvé, donc le site

18 approprié, je vous prie d'y apporter une annotation avec un feutre bleu,

19 en y apposant une petite croix.

20 M. van Lynden (interprétation): Monsieur le Président, pour expliquer. Je

21 crois voir ici différentes régions auxquelles je me réfère. Je vois tout

22 d'abord l'ancienne caserne Maréchal Tito abandonnée par l'armée serbe

23 début juin 1992.

24 M. le Président (interprétation): Monsieur Waespi, toutes les fois où le

25 témoin aura à indiquer quelque chose pour expliquer de quoi il s'agit, je

Page 2123

1 vous prie de bien vouloir vous arrêter pour y faire apporter les

2 annotations nécessaires.

3 Nous avons un feutre bleu parce que le feutre noir est utilisé par le

4 conseil de la défense.

5 M. Waespi (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

6 Monsieur van Lynden, lorsque vous parlez évidemment du site qui est la

7 caserne, annotez une lettre T majuscule, il s'agit de Maréchal Tito, et

8 puis après peut-être un petit cercle autour.

9 (Le témoin s'exécute.)

10 Merci.

11 M. van Lynden (interprétation): Tout le long donc court le boulevard

12 Maréchal Tito.

13 Question: Est-ce que vous pouvez y apporter une annotation également?

14 Réponse: Oui, voilà: la route, comment elle se présente.

15 Question: Très bien. Peut-être est-ce que vous pouvez indiquer, enfin

16 marquer par une lettre B, en parlant donc cette fois-ci du boulevard

17 Maréchal Tito?

18 (Le témoin s'exécute.)

19 Merci.

20 Réponse: Si je me souviens bien, les bâtiments qui se trouvaient sous les

21 tirs se trouvaient grosso modo dans cette région-là.

22 Question: Est-ce que vous pouvez y apporter un cercle?

23 (Le témoin s'exécute.)

24 Est-ce que peut-être vous pouvez annoter également la lettre Y?

25 (Le témoin s'exécute.)

Page 2124

1 Merci. On y reviendra plus tard un peu, sur la carte.

2 Monsieur van Lynden, comment se fait-il que vous vous soyez trouvé sur ces

3 sites-là?

4 Réponse: La nuit précédente, nous étions avec le commandant des sapeurs-

5 pompiers de Sarajevo.

6 Question: Est-ce que vous vous souvenez peut-être de son nom?

7 Réponse: J'ai bien peur que non, parce que je ne retiens pas très bien les

8 noms.

9 Etant donné que nous avions prévu de faire une espèce de reportage sur les

10 sapeurs-pompiers, sur les problèmes auxquels ils doivent faire face

11 quotidiennement dans leur travail, eh bien il s'est fait que cette nuit-là

12 il n'y a pas eu de feu, pas d'incendie. Par conséquent les sapeurs-

13 pompiers ne devaient pas quitter leur quartier général.

14 Le lendemain, nous avons dû retourner dans notre base qui, à cette époque-

15 là, se trouvait au centre de la télévision. Il a fallu donc emprunter,

16 moyennant une voiture, la route qui mène à côté de la caserne Maréchal

17 Tito, en direction de l'aéroport. Et il a fallu traverser le square

18 Marindvor. Et lorsque nous étions sur le boulevard Maréchal Tito, nous

19 nous sommes rendu compte qu'il y avait du feu, un incendie dans un

20 appartement d'habitations, dans un bloc d'habitations, et on a réussi tant

21 bien que mal à garer les voitures derrière le bâtiment où il y avait des

22 magasins également. Et toutes les fois où on arrivait comme cela, on

23 pouvait voir par exemple les balles incendiaires visant toujours le

24 bâtiment en flammes, et ce sont justement ces balles incendiaires qui sont

25 la cause de l'incendie.

Page 2125

1 Question: Est-ce que vous pouvez retourner pour un certain temps sur la

2 carte pour nous montrer la direction depuis laquelle devaient être tirées

3 ces balles incendiaires?

4 (Le témoin s'exécute.)

5 Peut-être une fois de plus, vous pouvez indiquer le tout avec le feutre

6 bleu en y apposant une petite flèche qui devrait désigner la direction

7 depuis laquelle ont été tirées, enfin, toutes ces balles, et annotez

8 également une lettre Y.

9 Réponse: Si je peux dire quelque chose pour cette Chambre d'instance, tout

10 ceci n'est qu'approximatif -ce que je fais- parce que lorsque vous vous

11 trouvez sur le lieu où on a ouvert le tir, il n'y a vraiment pas de raison

12 pour laquelle un journaliste se hasarderait à regarder d'où viennent les

13 tirs. A peu près, on peut savoir où se trouvait le site, duquel site

14 venaient les tirs, et on tirait au-dessus de nos têtes.

15 Question: Une seconde, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, pour

16 consulter mes collègues.

17 Monsieur van Lynden, pour parler de distance vers le sud, à regarder vers

18 le sud: à quelle distance se trouvait ce bâtiment par rapport évidemment à

19 la ligne de front du conflit?

20 Réponse: Mais la distance n'était pas grande.

21 Question: Est-ce que vous pouvez être un peu plus précis?

22 Réponse: Peut-être qu'il s'agissait d'une centaine de mètres, de quelques

23 centaines de mètres.

24 Question: Est-ce que vous vous en souvenez?

25 Réponse: Peut-être un peu plus.

Page 2126

1 Question: Est-ce que vous vous souvenez d'où les tirs venaient?

2 Réponse: Eh bien, depuis les lignes tenues par les Serbes de Bosnie.

3 Question: D'après vous, le bâtiment d'habitations dont vous parliez,

4 était-ce un bâtiment militaire ou civil?

5 Réponse: C'était une cible civile.

6 Question: Comment est-ce que vous avez pu conclure cela?

7 Réponse: J'ai pu conclure parce qu'en venant là-bas j'ai pu voir beaucoup

8 de civils, nous avons pu leur parler. Tous ces gens-là habitaient ces

9 différents appartements des bâtiments d'habitations. Il s'agissait là de

10 leur foyer. Et nous avons pu tourner avec un homme, le prendre en vue, qui

11 se trouvait dans une situation désastreuse: il avait tout perdu dans

12 l'incendie, tous ses biens et sa propriété. Dans ce bâtiment, il y avait

13 plusieurs appartements à être touchés par le feu, à être avalés par le

14 feu.

15 Et nous avons pu parler ainsi aux gens pour vérifier si, vraiment, peut-

16 être des tirs avaient été également ouverts depuis ce bâtiment-là. Parce

17 que vous savez que les civils sont toujours écoeurés de voir que leurs

18 biens, leurs appartements sont utilisés dans ce sens-là car, dans ce sens-

19 là, l'adversaire n'a autre chose à faire que de tirer dessus. Par

20 conséquent, la population civile de Sarajevo ne pouvait pas faire autre

21 chose et nous pouvions être sûrs, si tel était le cas, que l'armée de BH

22 devait utiliser ces appartements et ces bâtiments pour tirer sur la partie

23 adverse.

24 Mais tous nous disaient qu'il n'y avait pas de tirs à partir de là-bas, et

25 que ce n'était qu'un bâtiment d'habitations et que, une première fois, on

Page 2127

1 a compris de quoi il s'agissait, eh bien, on a compris qu'il s'agissait

2 évidemment de balles incendiaires.

3 Question: Donc vous voulez dire qu'il n'y avait pas eu de tirs à partir de

4 ce bâtiment-là?

5 Réponse: Non.

6 Question: Est-ce que vous pouvez savoir combien de civils il y avait à

7 habiter ce bâtiment?

8 Réponse: Non, je ne peux vraiment pas vous préciser un chiffre quelconque,

9 surtout pas exact. Mais il s'agissait vraiment d'un immeuble d'habitations

10 assez grand. Je peux imaginer que plusieurs centaines de gens pouvaient

11 l'habiter, ce bloc d'habitations.

12 Question: Est-ce que vous avez pu voir des civils sortir de ce bâtiment

13 d'habitations pendant que le bâtiment se trouvait, évidemment, en flammes?

14 Réponse: Oui, j'en ai vu.

15 Question: Est-ce que vous pouvez être plus précis pour nous décrire la

16 situation, pour parler de ces gens-là?

17 Réponse: Oui, j'ai pu voir pas mal d'hommes, de femmes et d'enfants sortir

18 notamment de ce bâtiment d'habitations. Pourtant, ils n'empruntaient pas

19 la porte donnant sur le boulevard Maréchal Tito, mais ils sortaient par

20 l'autre porte, laquelle porte ne se trouvait pas sous le feu.

21 Question: Est-ce que vous avez pu filmer tout cela?

22 Réponse: Oui.

23 Question: Est-ce que les sapeurs-pompiers sont venus in situ?

24 Réponse: Oui, un peu plus tard, mais ils sont venus.

25 M. Waespi (interprétation): Est-ce que le bâtiment se trouvait toujours en

Page 2128

1 flammes lorsque les sapeurs-pompiers étaient venus?

2 M. van Lynden (interprétation): Oui, et on tirait toujours, encore

3 toujours sur le bâtiment.

4 M. le Président (interprétation): Monsieur Waespi, il est 10 heures 30.

5 J'aimerais bien que l'on fasse une première suspension d'audience. Je vous

6 prie de vous décider à le faire lorsque vous trouvez que le moment le plus

7 opportun sera venu pour avoir une pause.

8 Et, à part cela, je voulais également vous rappeler que cette Chambre

9 d'instance pourrait être utile aux deux parties, du fait que la Chambre

10 contrôle bien le temps d'audience. Or, voilà que vous avez déjà utilisé

11 plus de 50% du temps que vous avez estimé comme nécessaire pour interroger

12 ce témoin. Par conséquent, dites-nous le moment le plus opportun où on

13 pourrait peut-être faire une pause.

14 M. Waespi (interprétation): Oui, Monsieur le Président, je crois que j'ai

15 déjà fait plus que la moitié de l'interrogatoire principal. Je crois que

16 nous pouvons ensuite organiser la diffusion d'une cassette. Et peut-être

17 le moment est-il bon de suspendre l'audience.

18 M. le Président (interprétation): Oui, très bien. Alors, si le moment est

19 opportun, faisons une suspension d'audience et nous reprendrons le travail

20 à 11 heures.

21 (Le témoin, M. Aernout van Lynden, est reconduit hors du prétoire.)

22 (L'audience, suspendue à 10 heures 32, est reprise à 11 heures 02.)

23 M. le Président (interprétation): Madame Pilipovic, je vois que votre

24 collègue, Me Piletta-Zanin n'est pas ici, n'est pas parmi nous.

25 Faudrait-il l'attendre? Y a-t-il une raison pour laquelle nous ne devrions

Page 2129

1 pas procéder?

2 Mme Pilipovic (interprétation): Monsieur le Président, je pense que mon

3 collègue arrivera d'une minute à l'autre, il est toujours dans la Chambre

4 de la défense. Il est possible qu'il ait eu un peu de peine à sortir parce

5 que les portes étaient fermées à clef il y a un instant. Mais je pense que

6 nous pouvons procéder.

7 M. le Président (interprétation): Alors veuillez faire pénétrer le témoin

8 dans le prétoire. Monsieur Waespi, vous pouvez continuer, à moins qu'il

9 n'y ait un problème.

10 M. Waespi (interprétation): Il n'y en a pas.

11 M. le Président (interprétation): Très bien.

12 (Le témoin, M. Aernout van Lynden, est introduit dans le prétoire.)

13 M. Waespi (interprétation): Monsieur van Lynden, une ou deux questions

14 avant de visionner la vidéo. Y a-t-il eu d'autres tirs dirigés vers le

15 bâtiment après que les sapeurs-pompiers aient, avec succès, éteint

16 l'incendie ou du moins des parties de l'incendie?

17 M. van Lynden (interprétation): Ils n'avaient pas encore éteint l'incendie

18 dans son intégralité, mais il y a eu davantage de salves ou de tirs

19 incendiaires qui ont été dirigés vers le bâtiment. Donc les tirs ont

20 continué alors que les sapeurs-pompiers étaient sur place.

21 M. Waespi (interprétation): Et vis-à-vis de la position des sapeurs-

22 pompiers, où ont été dirigés les autres rafales, les autres tirs

23 incendiaires: en dessous de leurs positions, autour de leurs positions, à

24 côté?

25 M. van Lynden (interprétation): En dessous, d'après ce que nous avons pu

Page 2130

1 observer.

2 M. Waespi (interprétation): Si l'on pouvait visionner maintenant la

3 séquence vidéo, je crois qu'il s'agit d'une séquence d'une minute à peu

4 près. Il y a un compte rendu qui a été fourni à la défense et je crois

5 également aux Juges.

6 M. le Président (interprétation): Je ne me souviens pas avoir reçu un

7 compte rendu, un transcript de la vidéo. Ah, mais la Greffière dit que

8 nous en avons une copie. Voilà, très bien. Voilà, nous disposons de ce

9 transcript.

10 Veuillez continuer.

11 M. Waespi (interprétation): A titre d'information, nous n'allons que

12 montrer la partie dans laquelle on voit l'immeuble incendié. Cela commence

13 donc après le colonel égyptien, nous n'allons pas montrer cette partie-là.

14 On commence donc avec van Lynden, donc les deux paragraphes van Lynden.

15 Donc pas le transcript tout entier, mais seulement ces paragraphes.

16 M. le Président (interprétation): Oui, 5 minutes 56, si j'ai bien compris?

17 M. Waespi (interprétation): Oui, c'est tout à fait cela.

18 Si on peut voir la vidéo?

19 (Diffusion de la vidéo)

20 "Ces mots sont donc reflétés par la réalité dans la ville: des tirs

21 incendiaires serbes qui incendient toute une série d'immeubles,

22 d'habitations.

23 Un résident observe sa maison, tous ses biens sont détruits. Quelques

24 secondes plus tard, d'autres tirs incendiaires atteignent l'immeuble et

25 par ricochets, atteignent la rue qui est située en dessous.

Page 2131

1 Il s'agit là d'incendies arbitraires sur des cibles purement civiles.

2 Comme toujours, les sapeurs-pompiers, tout à fait remarquables, luttent

3 contre le feu, et ils ont pour une fois un approvisionnement en eau qui

4 n'est pas coupé. Mais pour le chef des sapeurs-pompiers, l'eau n'est pas

5 la principale préoccupation, il n'a presque plus d'essence, et il ne sait

6 pas s'il va pouvoir lutter contre l'incendie encore un jour.

7 La chute d'Otes.

8 Le pilonnage continue au centre de Sarajevo.

9 Encore une fois, l'impuissance totale des efforts internationaux en

10 Bosnie, les cessez-le-feu et le dialogue politique n'ont mené à rien, et

11 sans doute ne mèneront à rien jusqu'à ce que le monde occidental démontre

12 son engagement vis-à-vis de la fin de cette guerre.

13 Aernout van Lynden, Sky News, Sarajevo."

14 (Fin de la diffusion de la vidéo)

15 Monsieur van Lynden, est-ce que vous reconnaissez cette séquence?

16 M. van Lynden (interprétation): Oui.

17 Question: Est-ce bien là la séquence que vous aviez réalisée pour Sky

18 News?

19 Réponse: Cette séquence, toutes les vues des pompiers et de l'immeuble,

20 ces images directes ont été filmées par George Davis, un cameraman de Sky

21 News. Les autres images de positions plus éloignées -lorsqu'on voit

22 l'immeuble de côté- ont été prises par un cameraman de CCN à partir de

23 l'Holiday Inn.

24 Question: Qui était l'homme d'un certain âge que l'on voit sur la vidéo?

25 Réponse: Il était un habitant de cet immeuble d'habitations.

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1 Question: Et avez-vous discuté avec lui?

2 Réponse: Oui, mon producteur lui a parlé. Il ne parlait pas l'anglais ou

3 l'allemand ou le français ou une autre langue que je maîtrise.

4 Question: Il a donc parlé avec cet homme et d'autres civils sur les lieux.

5 Est-ce qu'il vous a décrit quels étaient leurs sentiments?

6 Réponse: Eh bien, manifestement, ils étaient très perturbés, ils avaient

7 également très peur -ceux qui se trouvaient dans l'immeuble lorsque les

8 tirs ont commencé et lorsqu'ils sont sortis de l'immeuble-, bien

9 évidemment ils avaient peur.

10 Il y avait aussi un sentiment très prononcé d'impuissance: ils avaient

11 l'impression de ne rien pouvoir faire, de ne plus maîtriser le cours de

12 leur vie, que des choses leur arrivaient qui étaient absolument en-dehors

13 de leur propre contrôle.

14 La plupart d'entre nous, nous essayons dans notre vie quotidienne de

15 maîtriser, de contrôler nos vies, mais ces gens-là dans cette situation

16 avaient perdu tout contrôle, et cela peut susciter un réel sentiment de

17 désespoir.

18 Bien entendu, ils ont souffert d'autres manières: ils n'avaient plus accès

19 à de la nourriture, à de l'eau, ils n'avaient plus de chauffage. A

20 Sarajevo, à l'époque, il faisait déjà très froid. Il y avait donc de

21 nombreuses raisons pour ce désespoir.

22 Mais lorsqu'on habite un immeuble, qu'on a créé un foyer et que ce foyer

23 est pris ainsi comme cible, il y a des sentiments de grande colère, mais

24 avant tout de désespoir.

25 Question: Pouvez-vous nous dire quelle était l'ampleur de ces tirs

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1 incendiaires? Ces tirs, étaient-ils plutôt petits, plutôt étendus? Est-ce

2 que vous avez une opinion à cet égard?

3 Réponse: Bien évidemment, on ne les prend pas dans les mains, mais comme

4 vous avez pu le voir, l'un de ces tirs a frappé un immeuble et puis par

5 ricochets, est retourné, a survolé ma propre tête et la tête de mon

6 cameraman –je me trouvais à côté de lui quand c'est arrivé- c'est

7 difficile de dire précisément, mais je dirais à peu près 15 centimètres,

8 de 10 à 15 centimètres en gros.

9 Question: Et compte tenu de votre formation militaire, pouvez-vous nous

10 indiquer de quel type d'arme de telles balles incendiaires de cette taille

11 auraient pu être tirées?

12 Réponse: J'aimerais insister sur le fait que, dans le corps de marines des

13 Pays-Bas, nous n'avons pas de telles balles incendiaires. Je savais que

14 l'armée yougoslave avait de tels projectiles incendiaires, j'avais vu de

15 telles balles utilisées. On parle ici de mitrailleuse lourde ou de canon

16 antiaérien qui sont assez larges. Il ne s'agit pas d'un fusil kalachnikof

17 standard, en tout cas, à mon avis. Je ne suis pas expert en matière de

18 projectiles incendiaires parce que, comme je l'ai dit, lorsque j'étais

19 dans l'armée nous n'avions pas de telles armes.

20 Question: Maintenant, passons à une autre question. Vous avez déjà décrit

21 des pièces d'artillerie lorsque vous interviewiez le général Mladic. Est-

22 ce qu'il s'agissait aussi d'armes que l'on pouvait utiliser à des fins de

23 bombardement?

24 Réponse: Oui, je crois que, comme je l'ai déjà décrit, sur la route qui

25 allait de Pale à Grbavica ou Hrasno, nous avons vu des armes lourdes dans

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1 les positions serbes sur le mont Trebevic. Avant tout, nous avons vu des

2 mortiers, et aussi en ville même, nous avons vu des mortiers de différents

3 calibres jusqu'à 120 millimètres. Et j'ai aussi vu des chars stationnés

4 derrière les immeubles dans ces secteurs contrôlés par les Serbes de

5 Bosnie, chars qu'on a utilisés à certaines occasions. Je dois ajouter que

6 je n'ai jamais vu ces chars utilisés avec mes propres yeux.

7 Les seuls véhicules lourds que j'ai vus moi-même, que j'ai pu filmer,

8 c'était un blindé de transport de troupes avec une mitrailleuse montée

9 donc sur ce blindé, et cette mitrailleuse a été tirée en direction de

10 l'autre côté de Sarajevo.

11 Question: Est-ce que vous avez vu des armes, des canons antiaériens?

12 Réponse: Oui. De façon générale, des canons à deux canons, à deux tubes

13 montés sur des camions utilisés de la même manière, en ce sens qu'ils

14 étaient cachés derrière des immeubles et puis, de temps en temps, on les

15 sortait afin de les utiliser. Mais je n'ai jamais vu un tel canon tirer,

16 en fait.

17 Question: Maintenant, vous avez vu la topographie de Sarajevo. Vous vous

18 trouviez debout avec le général Mladic, vous aviez déjà été dans la ville

19 même. Et sur la base de votre formation et de votre expérience, quel est

20 l'impact de la topographie ou les conséquences de la topographie pour

21 l'utilisation d'armes automatiques, et notamment pour le bombardement?

22 Réponse: Alors évidemment, le fait d'utiliser des mitrailleuses, des armes

23 lourdes, que ce soit des mortiers ou des pièces d'artillerie, le fait que

24 vous ayez une vue directe, que vous puissiez observer directement la

25 situation, cela facilite le tir et permet de tirer de façon bien plus

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1 précise.

2 Si on utilise de l'artillerie ou des mortiers, n'importe qui vous dira

3 qu'il faut au moins trois obus pour atteindre la cible, à moins d'avoir

4 beaucoup de chance. En général, il y aura un obus qui atterrira trop loin,

5 ou alors sur une position plus rapprochée. Donc en général, c'est

6 seulement le troisième obus qui atteint la cible visée. Parfois, il faut

7 même davantage de tirs.

8 Et si on ne peut même pas voir la cible, lorsque notamment on est en train

9 de tirer sur une cible qui se trouve de l'autre côté d'une colline, c'est

10 encore plus difficile à observer, et les observateurs devraient alors se

11 trouver dans une position particulière.

12 Bien souvent, compte tenu de la topographie de Sarajevo, les tireurs

13 serbes pouvaient voir directement, eux-mêmes, leur cible. Donc la

14 situation était bien différente de celle que j'avais vécue à Beyrouth ou

15 pendant la guerre en Iran ou en Irak ou à d'autres endroits de Bosnie.

16 Sarajevo était tout à fait exceptionnelle à cet égard parce que les Serbes

17 avaient un contrôle tout à fait particulier des zones qui surplombaient la

18 ville.

19 Question: Est-ce que vous avez à un moment quelconque vu des tirs de

20 mortiers dirigés contre des cibles mouvantes?

21 Réponse: Oui, en ce sens que nous-mêmes étions pris pour cible. Lorsque

22 nous conduisions le long du boulevard du Maréchal Tito, nous avons vu des

23 obus de mortier frapper ou atterrir soit devant, soit derrière notre

24 véhicule. A mon avis, ce qui se passait, c'est que les personnes

25 stationnées, positionnées dans les collines aux alentours nous observaient

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1 et pouvaient calculer en fait le temps qu'il nous faudrait pour arriver du

2 point A à un point B.

3 Et puis, en fait, ce qu'ils faisaient, c'était en quelque sorte, c'est

4 qu'ils opéraient des tirs embusqués mais à l'aide de mortiers. C'est en

5 tout cas ce que je crois.

6 Question: Maintenant, vous nous avez décrit la manière dans laquelle on

7 utilise normalement des pièces d'artillerie, différentes étapes: on

8 recule, on avance, etc.. Est-ce que vous avez vu l'armée serbe de Bosnie

9 utiliser ce type de tactique?

10 Réponse: Il ne s'agit pas là d'une tactique, c'est la manière dont on se

11 sert de pièces d'artillerie pour atteindre la cible visée. Il faut qu'il y

12 ait des personnes qui servent, qui jouent le rôle d'observateur. Et comme

13 je l'ai dit, il est très peu probable, à moins d'avoir énormément de

14 chance, d'atteindre immédiatement la cible visée.

15 Au mois de juin 1992, du point de vue dont nous bénéficiions dans

16 l'immeuble comme je l'ai dit, l'ancien hôpital militaire que l'on qualifie

17 maintenant d'hôpital d'Etat, j'ai pu observer les tirs d'artillerie

18 dirigés contre la caserne du Maréchal Tito, cette caserne qui avait été

19 évacuée par les forces serbes. Nous avons vu que les premiers obus ont

20 atterri le long de la voie ferrée, derrière la caserne, puis ont ciblé la

21 caserne elle-même, et donc, ont atteint leur cible. Et puis, il y a eu des

22 tirs concentrés sur la cible.

23 Et, à notre avis, lorsqu'ils ont évacué la caserne du Maréchal Tito, ils

24 n'ont pas pu retirer, prendre avec eux tout leur matériel. Et,

25 manifestement, ils voulaient détruire ce matériel qu'ils avaient dû

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1 laisser derrière eux, et détruire la base.

2 Donc il s'agissait de tirs très soutenus qui continuaient parfois toute la

3 nuit, même pendant plusieurs jours. Et, de façon générale, il s'agissait

4 de tirs extrêmement précis.

5 Une fois que les tireurs avaient trouvé leur cible, la portée exacte,

6 c'est-à-dire une fois que les premiers obus avaient atterri à côté, ils

7 ont pu viser correctement. Mais en même temps, donc de façon absolument

8 simultanée, j'ai vu des tirs, une pluie de tirs sur Sarajevo et non pas de

9 cette manière aussi concentrée; il s'agissait là d'obus dirigés vers la

10 ville sans objectif militaire, parce que, s'il y avait eu un objectif

11 militaire, le tir aurait été beaucoup plus soutenu.

12 Question: Vous avez parlé de la période du mois de juin, je présume juin

13 1992. Est-ce que vous avez vu des tirs similaires lorsque vous étiez à

14 Sarajevo?

15 Réponse: Lorsque j'étais à Sarajevo, sauf quand j'y étais en mars 1994, il

16 y avait toujours des tirs d'obus, mais je n'ai jamais vu de bombardement

17 intense, un bombardement aussi intense que celui dirigé sur la caserne

18 Maréchal Tito -sauf en juin 1992. Il s'agissait de tirs sporadiques,

19 quelques obus par-ci par-là, mais il n'y a jamais eu de tirs aussi

20 soutenus. Donc nous estimons qu'il s'agissait là de tirs qui n'étaient pas

21 dirigés contre une cible militaire, mais tout simplement à la ville et à

22 sa population.

23 Question: Quel était l'impact de ce système de tirs que vous venez de

24 décrire sur la population civile de la ville?

25 Réponse: Eh bien, les faits, ça a été de susciter la peur parmi toute la

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1 population parce que l'on craignait que, dès que l'on sortait de chez soi,

2 on était en danger, on n'était jamais en sécurité. Même s'il y avait un

3 immeuble qui vous séparait des forces serbes, cela voulait dire qu'avec

4 des pièces d'artillerie ou avec des obus de mortier on pouvait toujours

5 être atteints, parce que les tirs pleuvaient partout. Donc on avait

6 toujours peur d'être à l'extérieur.

7 Les êtres humains, jusqu'à un certain point, peuvent s'adapter aux

8 situations, s'habituent à des situations, apprennent à gérer la situation

9 au quotidien, mais la peur régnait toujours dès qu'on était à l'extérieur.

10 Et cela valait pour nous également. A l'origine, nous avions des

11 Wolkswagen qui n'étaient pas blindées. Après, nous avions des Land Rover.

12 Mais, dès que l'on sortait, on prenait des risques.

13 Question: Avançons un petit peu à une question connexe. L'eau, le gaz et

14 l'électricité: qui, à votre avis, maîtrisait cela au mois de septembre

15 1990, ou bien même plus tôt? Mais je vous parle précisément de la mi-

16 septembre 1992.

17 Réponse: Comme la ville était assiégée, je pense que la maîtrise était

18 entre les mains de ceux qui assiégeaient la ville, en d'autres termes, les

19 Serbes de Bosnie.

20 Question: En ce qui concerne l'accès à la nourriture, à d'autres services

21 de base qui sont essentiels à la vie quotidienne des civils, est-ce que

22 vous avez, à un moment quelconque, effectué un rapport à cet égard?

23 Réponse: Oui, à plusieurs reprises. Bien entendu, dans une ville,

24 l'approvisionnement en nourriture provient de l'extérieur. Et, une fois

25 qu'une ville est assiégée, eh bien, la nourriture devient très

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1 insuffisante. Et on pouvait constater cela dans les marchés: il n'y avait

2 plus de magasins ouverts à l'époque où je suis arrivé à Sarajevo, en mai

3 1992. Enfin, les magasins étaient fermés parce qu'ils étaient vides. Et,

4 de façon générale, l'approvisionnement en nourriture devait provenir de

5 l'extérieur.

6 Bien entendu, alors que la guerre s'est poursuivie et que le siège s'est

7 étalé sur trois ans et demi, eh bien, ceux qui avaient la chance d'avoir

8 un bout de jardin ont essayé de cultiver leurs propres légumes. Mais de

9 nombreux habitants de Sarajevo vivaient dans les appartements, et donc, ne

10 pouvaient pas le faire.

11 Question: Y avait-il de l'eau courante pour la population civile?

12 Réponse: Non, enfin, parfois il y en avait. Mais pour notre très longue

13 période, il n'y avait pas d'eau courante; ce qui voulait dire que les

14 habitants devaient sortir de chez eux, devaient quitter leur maison, leur

15 appartement pour aller chercher de l'eau ailleurs. Mais, à l'intérieur

16 même des foyers, il n'y avait bien souvent pas d'eau courante. Même à

17 l'hôpital, bien souvent le problème se posait.

18 Question: Et à Pale, quelle était la situation?

19 Réponse: A Pale, parfois il y avait des coupures d'électricité, mais il y

20 avait toujours de l'eau courante -pendant les périodes où j'y étais, en

21 tout cas.

22 Question: Je vous demande un instant de patience, Monsieur le Président.

23 (Le banc de l'accusation se concerte.)

24 Aviez-vous rédigé un rapport sur la malnutrition des enfants?

25 Réponse: Non seulement celle des enfants: ce que nous avons observé,

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1 c'étaient les conséquences du siège de la ville, et en fait,

2 l'alimentation en temps de guerre; quel impact est-ce que cela a sur la

3 population civile?

4 Nous avons interviewé le HCR qui approvisionnait la ville en nourriture et

5 qui nous a tout de suite dit qu'à aucun moment, il n'y avait pas un seul

6 jour où ils étaient capables d'approvisionner la ville de manière

7 suffisante pour nourrir toute la population civile.

8 Nous avons aussi eu l'occasion de discuter avec des professeurs, des

9 experts en nutrition, des experts en systèmes immunitaires qui nous ont

10 dit comment le système immunitaire, comment les défenses immunitaires des

11 gens sont affectées par la malnutrition.

12 Nous avons aussi discuté avec le chef de la maternité à Kosevo, l'hôpital

13 universitaire de Sarajevo, qui nous a montré des chiffres qui attestaient

14 que, à son avis en tout cas, parce que les mères étaient mal nourries, il

15 y avait plus de bébés mort-nés; d'ailleurs les chiffres avaient doublé

16 depuis le début des hostilités. Ce rapport a donc été rédigé vers la fin

17 1992. Il y a également eu davantage d'enfants nés à un poids insuffisant.

18 Et puis il a également répété le fait que le système immunitaire avait été

19 affaibli en raison du fait que les gens n'avaient pas assez à manger.

20 Question: Je vous remercie, Monsieur van Lynden.

21 Vous nous avez dit que vous avez passé une bonne partie de votre temps

22 dans l'hôpital d'Etat, vous y avez résidé. Est-ce que cet hôpital a été

23 bombardé? Et en particulier je me demande si l'hôpital a été bombardé par

24 des lance-roquettes ou ciblé par ces lance-roquettes?

25 Réponse: L'hôpital, l'ancien hôpital militaire est dans la ligne de mire,

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1 ou était dans la ligne de mire des forces serbes de Bosnie, et au début de

2 la guerre quand je suis arrivé à Sarajevo, cet hôpital a été maintes fois

3 pris pour cible, d'ailleurs pris pour cible aussi avec de l'artillerie

4 lourde. Je ne peux pas vous dire s'il s'agissait de pièces d'artillerie ou

5 alors d'un lance-roquettes multiple.

6 Lorsque j'y résidais, j'ai vu des tirs provenant de lance-roquettes

7 multiples qui émanaient des hauteurs de Sarajevo, les montagnes donc qui

8 surplombaient Sarajevo, et qui ont atterri tout près de l'hôpital. Et

9 c'est la période que j'ai déjà décrite après l'évacuation de la caserne

10 Maréchal Tito. Et à certains moments lorsque nous filmions la nuit, nous

11 craignions que l'hôpital ne soit visé et ne fasse l'objet de tirs.

12 A ma connaissance, l'hôpital n'a pas été frappé à ce stade. Le seul

13 projectile qui a frappé l'hôpital -outre certaines rafales- lorsque j'y

14 étais, eh bien, c'est arrivé vers la fin de 1992, lorsqu'il y avait un

15 générateur. Il y avait donc de l'électricité, les ascenseurs

16 fonctionnaient, et j'étais sur le point de monter dans l'ascenseur

17 lorsqu'il y a eu une déflagration importante et l'un des ascenseurs a été

18 frappé. Et nous pensons qu'il s'agissait là de tirs émanant de chars.

19 Question: Vous avez évoqué des lance-roquettes multiples qui tiraient.

20 Est-ce que vous savez de quelle période il s'agissait lorsque vous avez

21 observé cela?

22 Réponse: En juin 1992, on les voyait très clairement, et nous les filmions

23 tant le jour que la nuit.

24 Question: Les avez-vous vus à un moment ultérieur également?

25 Réponse: Non pas que je me souvienne, en tout cas pour ce qui concerne les

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1 lance-roquettes multiples. Il y avait certainement des tirs d'artillerie.

2 Mais bon, je devrais peut-être expliquer à la Chambre: la plupart des gens

3 s'imagineraient que c'est quelque chose de très simple pour un journaliste

4 de filmer ce genre de situation, mais des tirs d'artillerie -à moins que

5 les tirs ne soient très soutenus, ne soient dirigés vers un seul endroit-

6 c'est très difficile à filmer. Un obus qui atterrit ici, un autre par là à

7 500 mètres plus loin, tout cela rend le travail des cameramen très

8 difficile.

9 Nous avons vu des périodes de tirs très intenses pendant lesquelles il

10 nous semblait que la ville tout entière, Sarajevo tout entier faisait

11 l'objet de tirs et ce, en particulier pendant les premiers jours de juin

12 1992. Mais à d'autres périodes, nous avons témoigné des tirs sur

13 différents quartiers, mais ce n'était jamais aussi soutenu, aussi intense.

14 Il ne s'agissait pas de tirs concentrés, il s'agissait d'une ou deux

15 roquettes, plutôt des pièces d'artillerie sans doute qui atterrissaient

16 dans un secteur, dans un district, mais il nous était presque impossible

17 d'affirmer cela.

18 Nous n'avons donc pas de preuve ou de séquence vidéo qui atteste de cela.

19 Question: Lorsque vous vous trouviez à l'hôpital d'Etat, est-ce que vous

20 avez vu à un moment quelconque un tireur embusqué, qui opérait depuis

21 l'hôpital… des munitions qui étaient utilisées par des tireurs embusqués

22 qui tiraient à partir de l'hôpital?

23 Réponse: Non, lorsque nous avons d'abord visité l'hôpital, mon cameraman

24 et moi-même avons décidé que cela serait une bonne base de travail. Nous

25 avons fait très attention, nous avons vérifié si l'immeuble était utilisé

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1 par les forces militaires. Parce que si on allait installer une base au

2 dernier étage, nous ne voulions pas être au dernier étage d'un immeuble

3 militaire. J'ai même vérifié le toit -ce qui était d'ailleurs risqué parce

4 que cela nous mettait dans la ligne de mire-, et je n'y ai vu aucune

5 douille: ni douille ni personnel militaire dans l'hôpital, sauf ceux qui

6 étaient amenés à l'hôpital parce qu'ils étaient blessés.

7 Question: Est-ce que vous avez été au cimetière juif dans la première

8 partie de 1992?

9 Réponse: Oui, enfin pas dans le cimetière lui-même parce que le cimetière

10 était un terrain désert, mais des deux côtés, depuis la ville, donc du

11 côté bosnien, nous avons pu filmer le cimetière. Et après, comme je l'ai

12 décrit en septembre 1992 et puis en février 1994, nous y avons été emmenés

13 sur le côté bosnien et j'ai pu le voir de nouveau; nous pouvions très

14 clairement voir les tombes.

15 Question: Lorsque vous vous êtes rendu au cimetière juif ou dans les

16 alentours pour la première fois, est-ce que vous étiez accompagné?

17 Réponse: Oui, j'y suis allé pour la première fois en mai 1992, et oui,

18 j'étais accompagné, si je me souviens bien, par un policier.

19 Question: Est-ce que vous avez rencontré quelqu'un qui répondait au nom

20 d'Aleksic?

21 Réponse: Oui, je me souviens de l'homme qui s'appelait "Vojvoda". Il y

22 avait une réunion qui était grave (phon). Dès qu'il m'a aperçu, il a sorti

23 son revolver et m'a dit qu'il allait tirer si on ne partait pas.

24 Question: Est-ce que vous pouvez nous dire quelle était cette date?

25 Réponse: C'était en février 1994.

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1 Question: Est-ce que vous vous souvenez qui est Aleksic?

2 Réponse: Il s'appelait "Vojvoda".

3 Question: Et comment cela se fait-il que vous l'avez rencontré?

4 Réponse: Je ne sais pas si je l'avais appelé "le maître de la guerre", je

5 vous ai dit que son titre était "Vojvoda".

6 Eh bien, j'étais stationné à cette époque-là à Pale, et l'OTAN avait émis

7 son premier ultimatum aux Serbes, vu la situation qui régnait à Sarajevo

8 après le massacre sur le marché.

9 Eh bien, nous avons entendu que l'un des soldats de M. Aleksic a été tué

10 et qu'on allait organiser les obsèques. Si je me souviens bien, nous avons

11 été avec un membre du ministère de l'Information des Serbes de Bosnie.

12 J'avais mon équipe également qui a été accompagnée par une équipe de

13 Serbes.

14 Donc mon cameraman était de Belgrade et nous sommes descendus à Grbavica.

15 D'après ce qu'on nous a dit, nous sommes allés vers le cimetière juif, et

16 d'après ce qu'on nous a dit, Aleksic n'était pas au quartier général. Mais

17 les gens qu'il avait commandés, ils nous ont dit qu'effectivement il était

18 leur commandant, qu'il fallait attendre.

19 Il y avait un certain nombre de Russes également parmi eux. Ils ont dit

20 qu'ils étaient des volontaires dans la guerre. Il y avait même un

21 Japonais, Japonais qui s'appelait "chetnik japonais". Eh bien, ils se

22 référaient aux nationalistes serbes qui se sont battus au cours de la

23 Deuxième Guerre mondiale; comme ça, ils s'appelaient comme ça.

24 Question: Est-ce que vous savez qui avait commandé Aleksic lui-même,

25 enfin, ses soldats? Donc qui était supérieur à Aleksic?

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1 Réponse: Eh bien, par différence à d'autres soldats dont j'ai parlé tout à

2 l'heure, ces hommes ne portaient pas des uniformes de la JNA; ils ont été

3 vêtus de manière différente, ils avaient des armes également; ce n'étaient

4 pas des Kalachnikof mais c'étaient d'autres armes, G3S, fusils qui ont été

5 fabriqués en Occident et pas en ex-Yougoslavie.

6 Mais, personnellement, je n'avais aucun doute à ce sujet-là. Et

7 d'ailleurs, ceci nous a été confirmé également par un homme de Pale, qu'il

8 s'agissait des hommes qui ont été sous le contrôle de l'armée serbe de

9 Bosnie. Par conséquent, il ne s'agissait pas des unités indépendantes qui

10 pouvaient faire ce qu'ils voulaient.

11 Question: Mais comment avez-vous tiré cette conclusion?

12 Réponse: Il y avait un Serbe de Bosnie qui était membre des forces armées

13 de Bosnie, qui avait parlé avec moi et qui nous l'a dit, et qui me l'a

14 dit, qui l'a reconnu. Ensuite, il y avait un cessez-le-feu et puis il y

15 avait des négociations qui étaient en cours; il aurait pu se produire

16 qu'une des unités, par exemple, ne respecte pas le cessez-le-feu. Mais je

17 me souviens que, par la suite, ce que nous avons vu: à aucun moment, il

18 n'y a eu des personnes qui n'ont pas respecté le cessez-le-feu à cette

19 époque-là.

20 Question: Vous pouvez nous dire qui avait donc été le commandant

21 supérieur?

22 Réponse: Mais on nous a dit qu'ils étaient sous le commandement de l'armée

23 dans le département, dans le district.

24 Question: Mais quand vous parlez du massacre du marché, vous pensez à

25 Markale probablement, et l'incident qui a eu lieu sur le marché, en

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1 février 1994?

2 Réponse: Oui.

3 Question: Je vais terminer, Monsieur le Président, très vite.

4 Est-ce que, à ce moment-là, vous avez traversé Marindvor à un moment donné

5 ou l'autre, à cette époque-là?

6 (Le témoin hésite à donner la réponse.)

7 Mais après le mois de février 1994, après donc l'accord sur le cessez-le-

8 feu, est-ce que vous avez traversé donc Marindvor?

9 Réponse: Mais il ne s'agissait pas véritablement d'un accord de paix. Il y

10 avait un accord, il y avait les forces russes de la Forpronu qui ont

11 occupé les parties serbes de Sarajevo, et les forces serbes ont accepté de

12 retirer les pièces d'artillerie et les blindés dans une zone à distance de

13 20 kilomètres, par conséquent, de sortir de la zone d'exclusion et de

14 restituer les armes aux endroits qui ont été occupés, les points de

15 contrôle, par la Forpronu. Et c'est là où les échanges de tirs se sont

16 arrêtés.

17 Moi, personnellement, j'étais à Pale. Au moment où l'on a abouti à cet

18 accord, je me suis rendu à Sarajevo. Et, au mois de mars, c'est pour la

19 première fois, depuis que la guerre s'est déclenchée, j'ai traversé

20 Marindvor et le square; ce qui n'a pas été possible, ce qui aurait été

21 même ridicule au moment de la guerre. Mais, à ce moment-là, il n'y avait

22 pas de feu qui avait été ouvert, il n'y avait aucun danger.

23 Question: Mais de quel danger parlez-vous? Quelles étaient les positions

24 d'où l'on tirait sur ce carrefour, sur cette place Marindvor?

25 Réponse: Il s'agit d'une place qui est très grande, très ouverte, elle a

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1 été une des places les plus dangereuses à Sarajevo, à l'époque; c'est là

2 où on conduisait à une vitesse très rapide. Il y a des gens qui habitaient

3 l'Holliday Inn. Moi, personnellement, je n'y étais pas mais c'était très

4 dangereux.

5 Il y avait également un parking souterrain, mais on tirait pratiquement

6 quotidiennement à partir des positions des Serbes de Bosnie.

7 Question: Pourriez-vous nous dire de quelle partie, de quel tronçon donc

8 des positions on pouvait voir Marindvor, la place dont vous parlez?

9 M. van Lynden (interprétation): La place de Grbavica.

10 M. Waespi (interprétation): Et puis, il y a encore une question ou deux

11 questions, Monsieur le Président, et je vais conclure.

12 M. le Président (interprétation): Je vous en prie, allez-y.

13 M. Waespi (interprétation): Eh bien, une toute première question concerne

14 vos collègues: il y avait combien de journalistes, combien de

15 correspondants à Sarajevo? Et d'où ils venaient? Je pense bien évidemment

16 de la période pendant laquelle vous y étiez.

17 M. van Lynden (interprétation): Quand pour la première fois je suis allé à

18 Sarajevo, je pense que je l'ai déjà dit, il y avait très peu de

19 journalistes. Il y en avait beaucoup qui étaient déjà partis de Sarajevo,

20 il y avait quelques photographes qui étaient restés de Grande-Bretagne,

21 des Etats-Unis, de Nouvelle-Zélande.

22 Et puis, dans la deuxième période, il y avait des centaines et des

23 centaines de journalistes à Sarajevo. Et si vous prenez la guerre -donc à

24 partir du siège et toute la guerre-, il y avait des milliers de

25 journalistes qui ont traversé Sarajevo de tous les continents, de

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1 l'Europe, des Américains de l'Amérique latine, mais en général il y avait

2 des Européens.

3 Question: Et puis, à la dernière question, d'après tout ce que vous nous

4 avez relaté lors de votre déposition, tout ce que vous avez fait en

5 visitant également les troupes, les discussions avec les soldats, avec les

6 officiers, est-ce que vous avez tiré une conclusion en ce qui concerne la

7 discipline qui avait régné ou non au niveau des troupes serbes et des

8 forces armées serbes de Bosnie?

9 M. van Lynden (interprétation): Oui, j'ai pu tirer quelques conclusions,

10 c'est vrai. Pour ce qui concerne les officiers, je l'ai déjà constaté, il

11 s'agissait des officiers professionnels qui étaient à l'époque des

12 officiers de l'ex-JNA. Ils ont par conséquent essayé de contrôler de très

13 près les hommes.

14 Il y avait un autre problème effectivement auquel ils ont dû faire face,

15 c'était le fait qu'à tout moment, dans la majorité des cas, sur les

16 positions, les gens buvaient de l'alcool. Ce qui me préoccupait.

17 Bien évidemment ce n'est pas bien parce que si quelqu'un prend de l'eau-

18 de-vie, de Sljivovitza, bien évidemment vous n'allez pas respecter la

19 discipline strictement. Ce sont les problèmes que nous avons vus également

20 ailleurs au cours de la guerre et dans d'autres parties de la Bosnie.

21 Par ailleurs, il y avait un bon nombre de soldats, qui étaient donc des

22 conscrits, qui n'étaient pas des professionnels, mais en ce qui concerne

23 les officiers, c'étaient des professionnels, ils savaient très bien ce

24 qu'ils faisaient. Le plus souvent, les soldats également respectaient la

25 discipline.

Page 2149

1 M. Waespi (interprétation): Eh bien, nous allons en guise de conclusion

2 également peut-être montrer au témoin la carte. J'ai également quelque

3 chose sur laquelle j'aimerais attirer votre attention: une petite

4 correction.

5 La Greffière m'avait dit également qu'il y avait le chiffre qui n'a pas

6 été annoté correctement: il s'agit par conséquent de P3644.VL.

7 M. le Président (interprétation): Oui, effectivement. Il s'agit de la cote

8 qui a été attribuée originalement. Ensuite, on avait rajouté également le

9 nom du témoin.

10 M. Waespi (interprétation): Monsieur van Lynden, auriez-vous l'amabilité

11 de nous montrer maintenant la place Marindvor, et puis le cimetière juif,

12 et puis, si vous voulez bien une fois de plus, marquer avez un chiffre et

13 au moyen de feutre ces deux localités? Vous pourriez peut-être marquer la

14 majuscule M, la lettre M, pour la place Marindvor, et ensuite la lettre J

15 pour le cimetière juif.

16 (Le témoin s'exécute.)

17 M. van Lynden (interprétation): Excusez-moi, je pense que c'est de l'autre

18 côté de la rivière de Miljacka, par conséquent au sud de la rivière.

19 M. Waespi (interprétation): Pour le compte rendu, le témoin vient de

20 marquer la lettre J, et ceci donc angle assez droit, ensuite une flèche

21 également sud-est, et vous pouvez donc constater qu'il s'agit

22 effectivement de la direction sud-est. Je pense que ce n'était pas tout à

23 fait clair sur la carte.

24 Je vais vous demander, Monsieur le Témoin, également de bien vouloir

25 entourer d'un cercle le cimetière juif.

Page 2150

1 (Le témoin s'exécute.)

2 Le témoin vient donc de marquer la lettre J, d'entourer d'un cercle le

3 cimetière juif.

4 Monsieur le Président, je viens de terminer mon interrogatoire principal.

5 Nous allons proposer au versement au dossier les pièces à conviction, une

6 fois le contre-interrogatoire terminé, sauf si, Monsieur le Président,

7 vous dites autrement.

8 M. le Président (interprétation): En ce qui concerne l'admission de la

9 carte, ceci se fera une fois que le contre-interrogatoire sera terminé.

10 Maître Pilipovic, est-ce que vous êtes prête à contre-interroger le

11 témoin?

12 Maître Piletta-Zanin, je vois que vous vous levez.

13 M. Piletta-Zanin: Monsieur le Président, avec votre autorisation bien

14 évidemment, j'interrogerai directement ce témoin.

15 M. le Président (interprétation): Oui, je vous en prie. Bien sûr, vous

16 pouvez vous mettre d'accord entre vous.

17 M. Piletta-Zanin: Maître Pilipovic complétera si besoin était, ce qui

18 n'est pas impossible évidemment, mais le problème que nous avons est un

19 problème technique, Monsieur le Président. J'aimerais vous l'exposer.

20 Le témoin a indiqué certaines choses qui ont fait que je suis sorti tout à

21 l'heure en salle des avocats pour essayer d'imprimer du matériel que j'ai

22 dans mon laptop. La machine à imprimer de la salle n'a plus répondu

23 présente et des pièces que j'aurais voulu lui soumettre n'ont pas pu être

24 imprimées par la machine.

25 Comme il s'agit de pièces de l'accusation, deux possibilités: peut-être

Page 2151

1 par courtoisie de l'accusation, l'accusation pourrait-elle me sortir une

2 de ces pièces que techniquement je n'ai pas pu imprimer? Sinon je devrais

3 faire une pause et essayer de voir avec les services techniques ce qu'il

4 en est.

5 J'ai la référence précise, bien évidemment.

6 L'interprète: Maître Piletta-Zanin, si vous voulez bien également ménager

7 les pauses. Ce sont les interprètes qui vous le demandent.

8 M. le Président (interprétation): Je change de langue, Maître Piletta-

9 Zanin, c'est pour cela que je n'ai pas répondu avant de lire.

10 Est-ce que l'accusation peut nous aider? Je comprends qu'il s'agit donc

11 d'un certain nombre de documents qui auraient dû être imprimés.

12 Est-ce que vous pouvez commencer, Maître Piletta-Zanin? Ou bien vous

13 pouvez également marquer les pages, les numéros que vous auriez souhaité

14 qu'on imprime, et quelqu'un de l'accusation éventuellement pourrait vous

15 aider. C'est peut-être comme cela.

16 M. Waespi (interprétation): Quelles sont les pièces à conviction que vous

17 voudriez que je vous imprime?

18 M. Piletta-Zanin: S'il y a d'une seule page, confrère, dont le numéro est

19 ERNROO4-46717, il s'agit d'une lettre signée du général Morillon à M.

20 Alija Izetbegovic.

21 Je dis bien que ce sont pour des raisons techniques, malheureusement, que

22 je dois vous prier de bien vouloir le faire.

23 M. le Président (interprétation): L'accusation va nous aider: auriez-vous

24 l'amabilité de marquer tout cela sur le papier, comme cela il ne va pas y

25 avoir de confusion? Et vous remettez cela à l'accusation, s'il vous plaît.

Page 2152

1 (Maître Piletta-Zanin s'exécute.)

2 M. le Président (interprétation): Oui, je vous en prie, vous pouvez

3 procéder, Maître.

4 (Contre-interrogatoire du témoin, M. Aernout van Lynden, par Me Piletta-

5 Zanin.)

6 M. Piletta-Zanin: Baron van Lynden, bonjour. Je vous remercie d'être venu

7 ici comme témoin.

8 Vous avez, Baron, rédigé une première déclaration, en tout cas une

9 déclaration écrite à laquelle je me référerais: s'agit-il d'une

10 déclaration prise en date des 8, 10 mai 2001, et 28, 29 septembre 2001?

11 M. van Lynden (interprétation): Oui, effectivement. Je suis au courant des

12 déclarations dont vous êtes en train de parler.

13 Excusez-moi, mais j'aimerais vous demander, s'il vous plaît, de mettre en

14 marche mon écran, parce que ça ne marchait pas. Maintenant, ça va, ça va.

15 Merci.

16 Question: S'agissait-il d'un projet ou de votre déclaration définitive?

17 Réponse: Oui, c'est une déclaration en partie qui a été rédigée par

18 l'enquêteur du Tribunal, ce n'est pas moi qui l'ai rédigée en personne. Je

19 n'ai même pas rédigé un livre que j'ai l'intention de rédiger sur la

20 guerre en Bosnie.

21 Question: Donc, pour clarifier les choses, lorsque nous lisons dans cette

22 déclaration écrite des termes comme, et je vous cite: "world of terror"

23 -et je m'arrête pour la citation-, ce sont des termes utilisés par

24 l'enquêteur principalement?

25 Réponse: Non, ce sont les termes que moi-même j'ai prononcés.

Page 2153

1 M. Piletta-Zanin: J'ai entendu dire dans votre réponse "également". Est-ce

2 que vous confirmez ce "également"?

3 M. van Lynden (interprétation): Ce que je tiens à dire...

4 M. le Président (interprétation): Mais si le témoin peut répondre et nous

5 éclaircir un petit peu avec précision, il ne peut pas répondre avec un oui

6 ou un non. Laissez-le répondre.

7 M. van Lynden (interprétation): Eh bien, j'ai essayé de dire que

8 l'enquêteur avait pris les notes de ce que je disais. Par conséquent, en

9 ce qui concerne "la terreur de la guerre", c'est moi qui l'ai utilisé ce

10 terme. Mais, pour ce qui concerne la déclaration, ce n'est pas moi-même

11 qui l'ai rédigée, et ce ne sont pas vraiment toutes mes mémoires et tout

12 ce que j'ai pu moi-même observer, voir au cours de 1991 et plus tard.

13 M. Piletta-Zanin: Merci, Monsieur.

14 Baron, vous avez déclaré tout à l'heure -et je fais référence ici à la

15 page 28, ligne 16, je crois que c'étaient 10:03.57-, vous avez, en

16 répondant à une question, déclaré que des snipers tiraient sur des

17 Moudjahidine. Est-ce c'est bien exact dans votre souvenir?

18 M. van Lynden (interprétation): Oui, nous avons demandé -il s'agissait

19 d'un homme qui était à côté de la mitrailleuse-, à Hrasno, qui avait

20 ouvert le feu. Et nous, on lui avait demandé quelle était sa cible et sa

21 réponse était qu'il tirait sur les Moudjahidine.

22 M. Piletta-Zanin: Baron van Lynden, n'est-il pas exact que dans la

23 déclaration écrite citée précédemment, vous aviez précisé ce qui suit -je

24 cite: "Shutting at Mudjahidin snipers". J'insiste sur le mot "sniper". Je

25 peux vous soumettre votre déclaration, si vous le souhaitez.

Page 2154

1 M. van Lynden (interprétation): Je n'ai pas la déclaration sous mes yeux,

2 Maître, mais si vous dites que c'est comme ça que ça a été marqué, à ce

3 moment-là, j'ai probablement dit cela parce que c'est moi qui l'ai signée,

4 cette déclaration.

5 M. le Président (interprétation): Par conséquent, je vais vous proposer,

6 Maître, de bien vouloir citer à la lettre et entièrement cette partie pour

7 que l'accusation puisse vérifier la totalité de cette déclaration.

8 M. Piletta-Zanin: Je peux soumettre, si vous le voulez, le document

9 également au témoin.

10 M. le Président (interprétation): Non, non, bien sûr. Vous pouvez nous

11 dire la page. C'est tout.

12 M. Piletta-Zanin: Je cite littéralement en page 12 de la déclaration

13 précitée -et je cite maintenant-:

14 (interprétation): "On a répondu que ce sont les tireurs isolés de

15 Moudjahidine qui sont en train de tirer".

16 Ma question est la suivante: la réponse qu'on vous a donnée était bien

17 qu'ils tiraient donc sur des snipers de l'autre partie?

18 M. Waespi (interprétation): Excusez-moi, juste un point. Mon éminent

19 confrère vient de lire la phrase entière, et il avait commencé avec: "Au

20 moment où je lui ai demandé quelle était la cible sur laquelle il tirait",

21 eh bien le témoin voit tout cela dans un contexte général et ne voit pas

22 de simples citations comme cela extraites du contexte.

23 M. le Président (interprétation): Maître Piletta-Zanin, auriez-vous

24 l'amabilité de citer un peu plus, enfin le contexte, nous donner le

25 contexte? Nous ne pouvons pas lire la page en entier. Est-ce qu'il y a une

Page 2155

1 pertinence dans le contexte? Vous l'avez devant vous.

2 Dites-nous où vous voulez commencer, et dites-nous où vous voulez qu'il

3 s'arrête.

4 M. Waespi (interprétation): La phrase entière s'il vous plaît?

5 M. le Président (interprétation): Est-ce que vous voulez lire la phrase en

6 entier?

7 M. Piletta-Zanin: C'est ce que j'ai fait tout à l'heure, mais je le

8 refais. Je peux lire même la phrase qui précède si vous voulez.

9 M. le Président (interprétation): Oui s'il vous plaît, Maître. Je pense

10 que c'est mieux comme cela.

11 M. Piletta-Zanin: Il s'agit de la déclaration du dernier paragraphe de la

12 page 12 de votre déclaration qui disait ceci:

13 "Il était manifeste qu'ils avaient obtenu des ordres, qu'ils étaient

14 autorisés à tirer sur les cibles selon leur propre gré et choix. Et au

15 moment où je leur ai demandé où ils tiraient -je lis comme c'est marqué-,

16 donc quelle était la cible, où ils tiraient et sur quoi ils tiraient, ils

17 m'ont répondu par une phrase, n'importe laquelle, qu'ils sont en train de

18 tirer sur les snipers, de Moudjahidine.

19 J'aurais dû dire sur quoi ils avaient tiré."

20 M. le Président (interprétation): Je vous en prie. Maintenant vous pouvez

21 poser votre question.

22 M. Piletta-Zanin: J'ai lu "its", bien sûr parce que c'est écrit "its".

23 Mais ma question est la suivante: il est donc exact qu'en réponse à la

24 question que vous avez posée, il vous a été dit que ces soldats tiraient

25 sur des snipers et pas seulement sur des Moudjahidine?

Page 2156

1 M. van Lynden (interprétation): Non. Il ne s'agissait pas de deux choses

2 différentes. Il s'agit en effet d'une seule phrase que moi-même j'ai

3 prononcée. Ils n'ont pas dit que nous tirions sur les Moudjahidine et les

4 snipers, mais qu'ils tirent sur les snipers moudjahidine.

5 M. le Président (interprétation): Oui, mais j'ai compris qu'ils ont donc

6 tiré sur les snipers Moudjahidine, et pas tout simplement sur les

7 Moudjahidine. Et je pense qu'effectivement on vient de vous citer la

8 réponse: pendant que vous avez déposé, vous avez dit qu'ils tiraient sur

9 les Moudjahidine.

10 M. van Lynden (interprétation): Ce que je tiens à préciser, si j'ai bien

11 compris la question, ils ne tiraient pas uniquement sur les Moudjahidine

12 mais sur les snipers.

13 M. le Président (interprétation): Non mais la question qui vous est posée:

14 quelle était la réponse que vous avez entendue? Qu'ils avaient tiré sur

15 les Moudjahidine ou sur les snipers Moudjahidine?

16 M. van Lynden (interprétation): Je pense qu'ils ont dit qu'ils tiraient

17 sur les snipers Moudjahidine. Et dans d'autres, tout simplement ils ont

18 parlé des Moudjahidine.

19 M. le Président (interprétation): Est-ce que vous avez d'autres choses

20 s'il vous plaît à préciser Maître?

21 M. Piletta-Zanin: Sur ce point non, mais je pense qu'il y a peut-être une

22 différence entre ce que le témoin a déclaré ce matin et ce qu'il avait

23 déclaré avant.

24 M. le Président (interprétation): Oui, c'est tout à fait clair pour les

25 Juges professionnels. Merci Maître.

Page 2157

1 M. Piletta-Zanin: Baron van Lynden, pour revenir à cette question des

2 snipers, je ne crois pas vous l'avoir entendu dire, mais est-il exact ou

3 savez-vous s'il y avait par conséquent des unités de snipers du côté de

4 l'armée bosniaque?

5 M. van Lynden (interprétation): Oui, effectivement, il y avait des snipers

6 dans l'armée de Bosnie.

7 Question: Vous avez parlé de Moudjahidine, vous avez indiqué avoir été en

8 Afghanistan, est-il exact que par Moudjahidine, on désigne en règle

9 générale des combattants de la Guerre Sainte? Je dis bien en règle

10 générale?

11 Question: Oui. En général, Moudjahidine veut dire exactement ce que vous

12 venez de donner comme explication. Vous avez raison. Toujours est-il que

13 c'est un terme qui, dans les années 80, a été utilisé d'abord pour les

14 résistants afghans. Personnellement, en Bosnie, jamais pendant que j'y

15 étais, je n'ai entendu dire que les Bosniens s'appelaient eux-mêmes ou

16 leurs propres soldats, Moudjahidine. On utilise les deux Moudjahidine et

17 moudjahed.

18 Question: Vous avez déclaré, Monsieur le Baron, également dans votre

19 déclaration écrite, que les écoles avaient été fermées. Est-ce que vous

20 pouvez le confirmer devant cette Chambre, les écoles à Sarajevo bien

21 évidemment?

22 Réponse: Oui, au cours de la période pendant laquelle j'étais à Sarajevo,

23 les écoles ne fonctionnaient plus, et moi je me suis rendu à quelques

24 reprises dans les écoles. Effectivement, on n'a jamais trouvé qui que ce

25 soit dans les écoles.

Page 2158

1 Question: Baron, vous avez déclaré, tant ce matin que dans votre

2 déclaration écrite, que vous n'étiez pas satisfait du premier choix

3 d'habitations que vous auriez pu faire à Sarajevo et que vous aviez changé

4 de place. C'est bien exact? Pouvez-vous le confirmer?

5 Réponse: Oui, vous avez raison. Quand je suis arrivé en 1992, je n'étais

6 pas content.

7 Question: Baron, vous avez indiqué également que l'une des raisons de

8 votre mécontentement était la présence dans le voisinage de ce que l'on

9 appelle en français un quartier général, c'est-à-dire un "head quarters"?

10 Réponse: Oui, nous étions dans l'immeuble dont j'ai donné la description.

11 J'ai dit que, plus tard, c'était la résidence du général Morillon et

12 d'autres personnes qui y résidaient. Ce n'était pas le quartier général,

13 mais c'était un bâtiment qui a été utilisé à l'époque par la Défense

14 territoriale des Bosniens. C'était un des quartiers généraux de la Défense

15 territoriale. Et pendant que nous y étions, nous avons été une cible

16 potentielle.

17 Compte tenu du fait que c'était un bâtiment qui n'était pas très grand,

18 plutôt petit, je ne pouvais pas travailler là au cours de la nuit. Vous

19 savez que si vous êtes dans une maison qui n'est pas très haute, à ce

20 moment-là c'est très dangereux d'y habiter parce qu'il y a des obus qui

21 tombent. C'est la raison pour laquelle on a demandé un autre endroit.

22 Question: Baron, quelle était la distance, je vous prie, entre ce que vous

23 venez de décrire c'est-à-dire ce quartier général et l'habitation que vous

24 avez refusée?

25 Réponse: Si vous vous référez évidemment à l'hôpital militaire, enfin…

Page 2159

1 Question: Ce n'est pas ma question, Baron, pardonnez-moi. Vous venez de

2 mentionner un quartier général, et vous avez mentionné tout à l'heure ce

3 qui aurait pu être votre premier établissement à Sarajevo que vous avez

4 refusé. Entre ces deux points, A et B, quelle distance?

5 Réponse: Ce n'est pas que je l'ai refusé, cet établissement. Tout

6 simplement, j'ai déménagé, tout court. J'ai laissé là-bas pas mal de mes

7 affaires à moi pendant cette période qui courait du mois de mai jusqu'en

8 début juin.

9 Pour parler de la distance, il s'agissait de quelques centaines de mètres,

10 plusieurs centaines de mètres. Il y avait autour de ce bâtiment un parc.

11 Par conséquent, entre les deux points il pouvait y avoir de 200 à 300

12 mètres.

13 Question: Baron, pourriez-vous être plus précis sur la distance, dans

14 votre souvenir?

15 Réponse: Enfin, il faut dire que ce n'est pas vraiment la région dans

16 laquelle je pouvais déambuler à pied, on y allait en voiture à Sarajevo.

17 Et c'était peut-être justement un bâtiment qui se tenait très, très près.

18 Au début même, nous ne savions pas très bien ce qu'il y avait dans ce

19 bâtiment. Nous allons le découvrir plus tard pour savoir que c'était l'un

20 des quartiers généraux de la soi-disant Défense territoriale. Et tout ce

21 que je peux dire, il s'agissait d'une distance de quelques centaines de

22 mètres.

23 Question: Par conséquent, si je vous ai bien compris, c'est cette distance

24 de quelques centaines de mètres par rapport à un objectif potentiellement

25 militaire qui a motivé notamment votre déménagement? J'entends par là les

Page 2160

1 dangers que cela impliquait.

2 Réponse: Non. La principale raison pour laquelle j'ai dû déménager, c'est

3 que je ne pouvais y travailler, pour parler de là-bas. Tout simplement,

4 Sarajevo se trouvait sous les bombardements pendant toute cette période-

5 là. Alors là, je ne pouvais pas filmer tout cela à partir de ce bâtiment-

6 là.

7 Il y avait une autre raison. C'est que, si je devais rester dans ce

8 bâtiment-là, évidemment j'aurais pu être moi-même en mesure de dire que le

9 quartier général de la Défense territoriale pouvait se faire une cible.

10 Par conséquent, nous aussi avec! Voilà la raison principale.

11 Mais la raison principale, c'est qu'on ne pouvait pas filmer, tourner à

12 partir de ce bâtiment. Il a fallu monter, enfin, un peu plus haut.

13 Question: Baron, êtes-vous en connaissance d'autres quartiers généraux qui

14 se seraient situés dans les limites urbaines de Sarajevo?

15 Réponse: Oui. Dans ces différentes périodes de guerre, au cours de la

16 guerre, il y avait évidemment différents bâtiments dans lesquels nous nous

17 rendions pour avoir des contacts avec des militaires, avec des chefs, des

18 officiers chefs de la partie bosniaques. Par conséquent, je sais que ces

19 derniers évidemment utilisaient divers espaces pour en faire des quartiers

20 généraux dans le cadre du périmètre urbain.

21 Question: Baron, pourriez-vous, je vous prie, nous préciser quels espaces

22 ou quels types d'espace?

23 Réponse: Au centre ville, je dirais relativement non loin du bâtiment de

24 la présidence bosnienne. Il y avait des quartiers généraux, évidemment,

25 qui se trouvaient un peu plus loin par rapport au centre ville et dont

Page 2161

1 l'existence m'était connue.

2 Question: Je vous demanderai peut-être tout à l'heure de localiser sur une

3 carte, mais quel type d'installations était-ce? Vous avez mentionné tout à

4 l'heure plusieurs types, si je vous ai bien compris, de locations. Quel

5 type d'installations avez-vous pu examiner dans Sarajevo j'entends

6 toujours pour les quartiers généraux?

7 Réponse: Je n'ai pas très bien compris.

8 Question: Quartiers généraux.

9 Réponse: Vous vous référez donc à ces quartiers généraux. Par conséquent,

10 il s'agissait évidemment des quartiers généraux où se trouvaient les

11 locaux, les bureaux des quartiers généraux, où toutes ces différentes

12 opérations ont été planifiées. Il s'agissait de centres opérationnels, et

13 c'est là notamment que, souvent, il y avait aussi les sièges des services

14 de presse des Bosniens. Il y avait également y compris l'officier, enfin,

15 du commandement, je dirais, principal de l'armée bosnienne un peu plus

16 tard. En 1995, j'ai pu voir Rasim Delic dans un bureau au centre ville.

17 Question: Je n'en ai pas vu la réponse. Je la reformule. Quel type

18 d'installations, de quel type d'installations, de bâtiments, de locations

19 s'agissait-il, à votre connaissance toujours?

20 Réponse: Excusez-moi, mais il s'agissait de bâtiments de type normal,

21 aussi quelquefois de bâtiments dans lesquels se trouvaient des bureaux,

22 comme des espaces réservés à des affaires. Comme j'ai pu me rendre compte,

23 il s'agissait évidemment de bureaux préalablement, par conséquent il n'y a

24 pas seulement de l'armée qui les utilisait.

25 Question: Merci pour cette réponse, Baron. Vous avez été, je crois l'avoir

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1 entendu, sous-lieutenant dans l'armée hollandaise, et c'est en cette

2 qualité de sous-lieutenant que je vous adresse qui est la vôtre,

3 j'entends, que je vous adresse cette question.

4 Savez-vous combien d'hommes il y avait à Sarajevo dans l'armée dite

5 bosniaque?

6 Réponse: Tout d'abord, je n'étais pas là en qualité d'officier, enfin, de

7 militaire hollandais. Je n'ai pas été envoyé par une formation militaire

8 quelconque, non plus que par la Forpronu, pour être parfaitement clair.

9 J'ai quitté l'armée hollandaise en 1978 et, en outre, je n'étais plus dans

10 l'armée, je n'avais plus aucune expérience concernant l'armée.

11 Mais pour parler évidemment maintenant de chiffres, pour parler du côté

12 bosnien, nous n'avons jamais reçu aucune information du genre, pour parler

13 évidemment de civils et de militaires.

14 Mais pour ce qui est évidemment de Mustafa Hajrulahovic qui, lui, a été

15 chef commandant de l'une des unités, il s'agissait enfin du 1er Corps

16 d'armée, celui-là ne m'a jamais rien dit dans ce sens-là. Je suppose qu'il

17 devait y avoir plusieurs brigades, par conséquent plusieurs milliers

18 d'hommes dans ces effectifs. Mais je ne peux pas vous donner vraiment un

19 chiffre précis. C'est aux gens de la Forpronu qu'il faut poser de telles

20 questions. Ceux-ci pourraient peut-être répondre éventuellement à de

21 telles questions.

22 Question: Baron, vous avez partiellement déjà répondu à une seconde

23 question, mais nous allons peut-être la préciser. Vous venez d'indiquer

24 qu'il y avait à Sarajevo le 1er Corps d'armée et qu'un tel Corps pouvait

25 comprendre plusieurs brigades.

Page 2163

1 Pouvez-vous indiquer combien d'hommes en général incorporent une brigade?

2 Réponse: Au moment du début de la guerre, l'armée bosnienne n'existait

3 pas. Et vous devez comprendre que, lorsque vous posez une telle question,

4 on doit en être conscient. Par conséquent, au cours de la guerre

5 seulement, dans la foulée, l'armée bosnienne essayait de s'organiser de

6 façon pour ainsi dire classique, comme ceci a été le cas, pour parler de

7 l'organigramme, de l'ancienne JNA.

8 Mais pour parler évidemment des forces de ces unités, elles se

9 présentaient tout à fait autrement par rapport à ce qu'on pouvait espérer.

10 Pour une brigade, on devait espérer que celle-ci comprenne de 4 à 5

11 bataillons, mais on peut supposer que tout dépend de la situation.

12 Dans différentes armées, la situation est différente. Dans chacun des

13 bataillons, il devait y avoir de 3 à 4 compagnies. Dans ces compagnies, il

14 devait y avoir de 150 à 180 hommes. Mais je n'en ai pas vraiment parlé, ni

15 avec les Bosniens, ni avec les Serbes de Bosnie.

16 Vous venez de me poser une question à laquelle je ne peux absolument pas

17 répondre! Pour parler de chiffres, de termes précis, je n'en disposais

18 jamais, notamment en ce qui concerne la partie bosnienne de l'armée.

19 Et puis, sachez que la situation évidemment a évolué et changé avec le

20 temps.

21 M. Piletta-Zanin: Je comprends cela, Baron. Simplement, si vous ne le

22 savez pas, indiquez-nous peut-être simplement que vous ne le savez pas.

23 C'est simplement une raison pratique pour laquelle je vous prierai de

24 procéder comme cela.

25 Je fais référence maintenant à votre déclaration de ce matin, nous parlons

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1 de la déclaration que vous avez faite à 9:26:12, 9 heures 26 12. Nous

2 devions être en page 11, je pense, du transcript actuel, et vous avez

3 déclaré que les Serbes avaient éparpillé leurs pièces d'artillerie dans la

4 crainte de ce que leurs adversaires et je vous cite maintenant: "craignent

5 d'avoir des tirs".

6 Ma question est celle-ci: j'en déduis -et suis-je dans le vrai-, que

7 l'armée bosniaque disposait également d'artillerie?

8 Réponse: Tout d'abord, et en premier lieu, il s'agissait de positions

9 militaires de type normal. Et il faut dire, si jamais les Serbes avaient

10 concentré leurs pièces d'artillerie en un seul endroit, j'aurais été fort

11 étonné; il s'agissait de professionnels. Mais les autres devaient avoir

12 des pièces d'artillerie, je dirais à peine; autant que je sache, ils

13 n'avaient que quelques mortiers 120.

14 Personnellement, je n'en ai jamais vu pour parler de pièces d'artillerie

15 de Bosniens, pour parler de la ville proprement dite de Sarajevo. Oui, en

16 février 1994, j'en ai vu quelques pièces d'artillerie lourde, d'armement

17 lourd. Et je sais qu'il y avait des campagnes de collectes d'armes. Et, à

18 un de ces sites de collecte d'armes, j'ai pu voir à un moment où je me

19 suis rendu en 1994. Mais je n'ai pas vraiment vu de pièces d'artillerie

20 lourde.

21 Question: Baron van Lynden, n'avez-vous jamais vu, oui ou non, un tank du

22 côté de l'armée bosniaque?

23 Réponse: Oui. Mais évidemment qui dit char ne dit pas que ceci pouvait

24 être évidemment la possibilité d'ouvrir le feu contre ces positions

25 d'artillerie. Ce n'est qu'à partir des positions de l'artillerie qu'on

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1 pouvait tirer sur un char.

2 Question: D'accord. Mais je déduis de votre réponse -et je vous demande de

3 me dire si c'est exact-, que les troupes bosniaques disposaient, à tout le

4 moins, d'un tank?

5 Réponse: Oui.

6 Question: De quel type de tank, si vous le savez, il s'agissait?

7 Réponse: Si je me souviens bien, il s'agissait d'un char D65. Il n'y avait

8 pas autrement dit de M84, c'est-à-dire version yougoslave du char D72.

9 Question: Merci.

10 J'aimerais revenir à l'incident que vous nous avez décrit, c'est-à-dire

11 ces immeubles le long du boulevard Maréchal Tito.

12 Lorsque vous avez signé ou émis votre déclaration écrite, vous avez

13 indiqué aux enquêteurs que ce que vous aviez vu au tout début, c'était un

14 immeuble déjà en feu -partiellement bien évidemment. Est-ce exact?

15 Réponse: Oui.

16 Question: Monsieur le Baron, puis-je déduire de cette réponse que, par

17 conséquent, vous n'avez pas vu le début de l'attaque?

18 Réponse: Vous avez tout à fait raison, c'est-à-dire le bâtiment était en

19 flammes, on pouvait déjà voir la fumée qui s'y élevait.

20 Question: Merci.

21 Monsieur le Baron, par conséquent, si vous n'avez pas vu le début de

22 l'attaque, suis-je dans le vrai si je dis que vous n'avez pas pu voir non

23 plus ce qui aurait pu se passer juste avant? Pure question de logique.

24 M. van Lynden (interprétation): Oui, comme j'ai dit tout à l'heure,

25 j'étais à bord d'une voiture. Mais j'ai dit, entre autres, que nous avons

Page 2166

1 voulu nous en informer, enfin, de ce qui se passait là-bas.

2 M. Piletta-Zanin: Pardonnez-moi, Baron, mais j'essaie pour ma part d'être

3 aussi bref que possible.

4 Dans votre déclaration, à laquelle je me réfère, vous avez également

5 affirmé ce que je vais indiquer tout à l'heure -et je vous demanderai de

6 me confirmer si c'est exact, oui ou non; vous avez indiqué que, concernant

7 cet incident, on ne pouvait pas totalement exclure que l'immeuble ait été

8 utilisé pour des tirs de snipers?

9 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Waespi?

10 M. Waespi (interprétation): Monsieur le Président, mon honorable collègue

11 aimerait que ce collègue fasse un commentaire sur ce qui a été dit dans la

12 déclaration.

13 Je voudrais, en ce cas-là, qu'on soumette au témoin pour consultation la

14 déclaration ou le fragment auquel mon honorable collègue se réfère.

15 M. le Président (interprétation): Oui, ceci serait préférable, mais s'il

16 n'y a pas évidemment de problème. Si on ne conteste pas évidemment la

17 possibilité de voir ce fragment de la déclaration, alors là, le mieux

18 serait-il peut-être d'y revenir un peu plus tard. Il faut vérifier tout

19 d'abord.

20 Mais, en tout cas, nous aimerions entendre Me Piletta-Zanin citer

21 directement les fragments auxquels il se réfère.

22 Allez-y, Monsieur Waespi.

23 M. Waespi (interprétation): Je crois qu'il s'agit là d'un thème important,

24 par conséquent, j'aimerais que l'on entende citer Me Piletta-Zanin:

25 M. Piletta-Zanin: (hors micro) au témoin, afin qu'il l'identifie comme

Page 2167

1 étant sa signature, et qu'il lise simplement -il s'agit de 4 ou 5 lignes,

2 le passage en question.

3 Nous pourrions comme cela être certains, d'une part, du caractère

4 authentique de ce document; le témoin pourra le reconnaître de visu, et il

5 le lira directement.

6 M. le Président (interprétation): Monsieur Waespi, en effet, nous avons

7 déjà discuté de cela pour parler évidemment du contenu des déclarations.

8 Ces déclarations doivent être soit identifiées, soit versées au dossier.

9 Par conséquent, il serait bon si possible d'entendre donner lecture de ces

10 quelques lignes, je pense. Et vraiment, si vous insistez, je ne peux pas

11 vous en empêcher, si vous voulez bien sûr admettre ce document.

12 M. Piletta-Zanin: Je voudrais que le témoin lise cette phrase, cela nous

13 permettra simplement d'avoir la certitude qu'il s'agit bien de ce qu'il a

14 indiqué.

15 M. le Président (interprétation): Oui, mais cette Chambre ne peut pas

16 vérifier s'il s'agit d'une lecture correcte donnée de ce texte, car nous

17 ne disposons pas de ce texte, nous ne l'avons pas sous nos yeux.

18 Si vous voulez employer ce document, vous devez d'abord le présenter à

19 l'huissier et puis après procéder comme suit.

20 Peut-être que le mieux serait de surligner, de marquer les lignes

21 auxquelles vous vous référez et que vous voulez citer, passer le document

22 à l'accusation pour en donner lecture, pour faciliter le travail de nous

23 tous.

24 M. Piletta-Zanin: Voulez-vous que je donne le document maintenant à

25 l'accusation?

Page 2168

1 M. le Président (interprétation): Non, non, non, je crois que l'accusation

2 pourrait vous suivre. Donnez-lui tout simplement le document!

3 M. Piletta-Zanin: Vous avez déclaré in fine, vous avez déclaré alors même,

4 et là -je cite que-:

5 (interprétation): "On ne peut pas exclure de voir ces bâtiments utilisés

6 par les snipers de l'armée de Bosnie-Herzégovine. C'est enfin mon

7 opinion."

8 M. Waespi (interprétation): Monsieur le Président, juste pour le compte

9 rendu d'audience.

10 M. le Président (interprétation): Oui, je me suis rendu compte que du fait

11 que le transcript n'est pas présenté sous sa forme complète... Pouvez-vous

12 nous donner lecture de ce texte?

13 M. Piletta-Zanin (interprétation): Pour le transcript: "Il n'est pas exclu

14 de voir le bâtiment utilisé par les snipers de l'armée Bosnie-Herzégovine.

15 En tout cas, d'après moi, il n'y a pas vraiment de moyens ou de voies par

16 lesquelles on pourrait qualifier tout cela comme étant une opération

17 militaire à justifier."

18 M. van Lynden (interprétation): Oui, je m'en tiens à ce que j'ai dit.

19 Question: Par conséquent, il y avait une possibilité théorique à Sarajevo

20 que de tels bâtiments fussent utilisés comme position de snipers par

21 l'armée bosniaque?

22 Réponse: Evidemment, je suppose que vous avez voulu vous référer tout

23 simplement au bâtiment, pas au bataillon. Parce que, ce que nous lisons

24 dans le transcript, il s'agit de "bâtiment" en français et pas de

25 "bataillon".

Page 2169

1 En théorie, bien sûr, il y a toujours eu une possibilité de voir les

2 snipers de l'armée de Bosnie-Herzégovine utiliser ce bâtiment comme étant

3 leur position, et c'est ce que j'ai dit d'ailleurs et je ne l'exclus pas.

4 Question: Vous avez fait référence, Baron van Lynden, à l'attaque des

5 tours dites "Unis" ou "Unis" à Sarajevo, dans ce statement. Est-ce bien

6 exact?

7 Réponse: Oui.

8 Question: Pourriez-vous nous indiquer si ces tours dites "Unis" étaient

9 également des bâtiments très élevés?

10 Réponse: Oui, il y avait des bâtiments élevés.

11 Question: Pourriez-vous nous donner une indication approximativement?

12 Réponse: Approximativement 35, voire 40. Franchement, je n'ai pas compté

13 les étages.

14 Question: Merci de cette réponse, Baron. Etait-ce une position de laquelle

15 on avait une vue dégagée sur la ville, toujours les tours Unis?

16 Réponse: Oui.

17 M. Piletta-Zanin: Est-il imaginable de concevoir que ces bâtiments aient

18 pu être utilisés également comme des positions de tir?

19 M. van Lynden (interprétation): On peut se l'imaginer, mais j'ai pénétré

20 un de ces immeubles deux jours avant que la caserne du Maréchal Tito ne

21 soit évacuée. Et, d'après mes souvenirs, quatre ou cinq jours auparavant,

22 une des tours Unis avait été presque entièrement détruite par le feu.

23 Il y avait un problème si on voulait l'utiliser à des fins de tirs;

24 d'après ce que j'ai pu voir, les fenêtres ne pouvaient pas être ouvertes.

25 Il s'agissait d'un immeuble moderne où on comptait sur la climatisation.

Page 2170

1 Outre cela, je n'ai jamais, à quelque moment que ce soit, lorsque je

2 résidais dans l'hôpital militaire -ce qui est plus tard devenu l'hôpital

3 d'Etat, l'hôpital qui se trouve tout près de ces deux tours Unis-, je n'ai

4 jamais vu de tirs émanant de l'un ou l'autre de ces immeubles.

5 Pour être plus précis, on aurait aussi pu les utiliser lorsque la caserne

6 du Maréchal Tito était toujours occupée par les forces des Serbes de

7 Bosnie, on aurait pu les utiliser pour tirer sur la caserne militaire

8 parce qu'ils avaient une vue directe sur cette caserne. Et nous sommes

9 entrés dans ces tours, raison pour laquelle nous avons pu filmer la

10 caserne du Maréchal Tito.

11 C'est ce que nous avons fait, mais comme je l'ai dit, nous n'avons pas pu

12 ouvrir les fenêtres, nous avons dû filmer à travers la vitre.

13 M. le Président (interprétation): Maître Piletta-Zanin, auriez-vous la

14 gentillesse de nous dire quand nous pourrons faire une pause, de trouver

15 un moment opportun à cette fin?

16 M. Piletta-Zanin: Nous pourrons voir avec l'accusation ce petit problème

17 de pièces. Merci beaucoup.

18 M. le Président (interprétation): Oui, s'il vous plaît. Et, avant de

19 suspendre la séance, j'ai constaté qu'il y a parfois un débat, une sorte

20 de débat entre l'accusation et la défense. Et je demanderai au témoin de

21 bien vouloir répondre aux questions posées par les avocats de la défense.

22 Et s'il y a un tel point important qu'il faut absolument le dire, un point

23 supplémentaire, je vous demanderai alors de demander à la Chambre si,

24 outre votre réponse fournie aux questions de la défense, vous pouvez faire

25 des remarques supplémentaires. Mais j'aimerais bien tenter d'éviter qu'il

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1 y ait un débat entre les témoins et les avocats.

2 Nous allons donc suspendre la séance jusqu'à une heure moins cinq.

3 (L'audience, suspendue à 12 heures 35, est reprise à 12 heures 58.)

4 M. le Président (interprétation): Maître Piletta-Zanin, j'espère que le

5 problème des photocopies a été réglé. Je vous prie de procéder.

6 M. Piletta-Zanin: Baron van Lynden, j'aimerais revenir un peu sur des

7 questions techniques. Avez-vous remarqué quels étaient les uniformes dont

8 disposait l'armée bosniaque?

9 M. van Lynden (interprétation): A différents moments, les uniformes

10 étaient différents.

11 Question: Est-ce que cette armée bosniaques possédait également dans ces

12 cadres des officiers professionnels?

13 Réponse: Oui.

14 Question: Vous avez mentionné tout à l'heure, Baron van Lynden, un nom en

15 relation au 1er Corps d'armée stationné à Sarajevo. Ces militaires

16 professionnels étaient-ils souvent issus du cadre de l'ancienne JNA,

17 c'est-à-dire l'ancienne armée nationale yougoslave? Je me réfère tout

18 particulièrement à ce que vous avez déclaré en relation au 1er Corps

19 d'armée.

20 Réponse: Oui, d'après ce que je sais, Mustafa Hajrulahovic était officier

21 professionnel dans l'armée nationale yougoslave, et d'autres officiers ont

22 également servi dans cette armée. A ma connaissance, ils n'ont pas servi

23 dans d'autres armées.

24 Question: Je vous ai posé, Baron van Lynden, tout à l'heure certaines

25 questions sur les établissements des différents quartiers généraux dans la

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1 ville de Sarajevo. Vous en souvenez-vous? Pour le transcript, voulez-vous

2 articuler une réponse?

3 Réponse: Oui, je me souviens que vous m'avez posé cette question.

4 Question: Seriez-vous peut-être en position d'indiquer sur une carte

5 différentes situations, toujours en relation à des quartiers généraux,

6 c'est-à-dire "head quarters"?

7 M. van Lynden (interprétation): Je veux bien essayer. Comme je l'ai dit,

8 il y a plusieurs édifices, mais il ne s'agit pas toujours de quartiers

9 généraux, c'étaient parfois des quartiers généraux pour ainsi dire locaux.

10 Je peux très bien essayer, mais je ne suis pas sûr d'être très précis.

11 M. Piletta-Zanin: Monsieur le Président, pouvons-nous soumettre une carte,

12 étant précisé que le témoin se servira d'une autre couleur qui, je crois,

13 est le noir?

14 M. le Président (interprétation): Oui, le noir, c'est pour la défense. La

15 défense n'a rien contre le noir.

16 M. van Lynden (interprétation): J'aimerais insister sur le fait qu'il

17 s'agit d'une carte assez vague. Si on entrait à Sarajevo en voiture, on ne

18 pourrait pas s'orienter grâce à cette carte.

19 M. le Président (interprétation): Si vous pensez ne pas pouvoir identifier

20 de manière adéquate les emplacements sur cette carte, je propose que l'on

21 se serve d'une autre carte. Mais je ne peux pas reprocher à la défense de

22 ne pas avoir préparé une autre carte. Mais si vous aviez une autre carte…

23 M. Piletta-Zanin: Sous les yeux maintenant, nous avons peut-être une

24 carte, mais elle a déjà été préannotée par nous-mêmes. Je peux vérifier.

25 M. le Président (interprétation): Si je peux me le permettre, Maître

Page 2173

1 Piletta-Zanin, voyons jusqu'où on arrive et avec quelle précision. Si cela

2 s'avère insuffisant ou insuffisamment précis, on peut toujours changer et

3 se reporter à une autre carte.

4 Monsieur le Témoin, vous avez donc un feutre noir.

5 M. Piletta-Zanin: Baron van Lynden, pouvez-vous localiser sur cette carte

6 où étaient, à votre connaissance, situés les quartiers généraux, "head

7 quarters" du 1er Corps d'armée?

8 M. van Lynden (interprétation): Je ne peux pas dire ou affirmer que

9 c'était le quartier général du 1er Corps d'armée. Je connais un immeuble

10 où j'ai rencontré Mustafa Hajrulahovic, je ne sais pas si c'était le

11 quartier général ou non.

12 M. Piletta-Zanin: Pouvez-vous indiquer sur cette carte différents endroits

13 dont vous seriez à connaissance et qui correspondraient à des quartiers

14 généraux ou établissements militaires?

15 M. van Lynden (interprétation): Je ferai du mieux possible. Le premier

16 emplacement que je souhaiterais évoquer, c'est donc l'armée territoriale,

17 le quartier général ou la base de l'armée territoriale près de ma première

18 base, pour ainsi dire, ma première résidence à Sarajevo que j'ai évoquée,

19 donc, au mois de mai.

20 Comment est-ce que vous aimeriez que je marque cela? Au moyen d'un T?

21 M. le Président (interprétation): Maître Piletta-Zanin, veuillez orienter

22 le témoin.

23 M. Piletta-Zanin: Non. Je pense que nous allons utiliser une logique

24 chiffrée, ce sera beaucoup plus simple. Marquez simplement le chiffre 1 en

25 écriture arabe, je vous prie en écriture arabe, je vous prie sur cette

Page 2174

1 location. N'utilisez pas le 1 romain, utilisez le chiffre normal.

2 M. van Lynden (interprétation): Alors, en deuxième lieu, j'indique le nom

3 de façon très générale. Ce n'est pas du tout précis: donc deuxième endroit

4 que j'indique…

5 M. Piletta-Zanin: Pouvez-vous cercler précisément? Pouvez-vous cercler

6 parce que nous voyons mal? Voilà. Merci beaucoup. Et donc en utilisant

7 toujours une numérotation chronologique? Merci. Par la suite? Continuez,

8 je vous prie.

9 M. van Lynden (interprétation): Donc le n°2, là où j'ai rencontré Mustafa

10 Hajrulahovic. Encore une fois c'est très général. Il s'agit d'une petite

11 rue.

12 Et puis, en troisième lieu, je peux noter approximativement l'immeuble où

13 j'ai rencontré Rasim Delic, au début de 1995. Et je tiens à insister sur

14 le fait que tout cela est très imprécis.

15 M. le Président (interprétation): Oui, vous l'avez dit à plusieurs

16 reprises et nous le comprenons très bien.

17 M. Piletta-Zanin: Baron, voulez-vous mentionner maintenant le "head

18 quarter" que vous avez indiqué avoir été près de votre premier

19 établissement, à Sarajevo? Etablissement dont vous avez déménagé.

20 M. van Lynden (interprétation): Le chiffre 1.

21 Question: Baron, savez-vous si vous pouvez indiquer, ou plutôt, pouvez-

22 vous indiquer sur cette carte où se situe l'hôtel Holiday Inn?

23 Réponse: Est-ce que vous voulez que je note cela avec un chiffre "4"?

24 Question: Baron, quelle est la distance approximative, à votre

25 connaissance, entre l'hôtel Holiday Inn, n°4 sur cette carte, et la

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1 caserne du Maréchal Tito?

2 Réponse: Ils sont presque l'un à côté de l'autre, en tout cas très

3 proches. La caserne est un grand immeuble, donc cela dépend à quelle

4 partie on se réfère. Mais, en tout cas, ils sont très proches l'un de

5 l'autre. Et le "T" que j'ai inscrit sur la carte, c'est ainsi dont je me

6 souviens de la caserne Maréchal Tito.

7 Question: Baron, à votre meilleure connaissance, savez-vous si, à une

8 période suivant le mois de septembre 1992, l'hôtel Holiday Inn a pu être

9 utilisé également pour l'implantation de bureaux militaires?

10 Réponse: Non, je ne le sais pas.

11 Question: Je déduis de votre réponse que vous n'en n'avez pas

12 connaissance?

13 Réponse: Non.

14 Question: Et vous n'avez jamais entendu dire qu'il y aurait eu là des

15 bureaux militaires?

16 Réponse: Non, pas que je me souvienne. Je n'ai jamais logé au Holiday Inn.

17 La plupart des journalistes y ont logé, mais pas moi.

18 Question: Merci de cette réponse.

19 J'aimerais revenir sur le temps, ou dans le temps plutôt, et vous nous

20 avez indiqué -je crois-, être arrivé la première fois en mai 1992 à

21 Sarajevo. Est-ce exact?

22 Réponse: Je suis arrivé à Sarajevo en mai 1992, c'est exact.

23 Question: Vous m'avez indiqué il y a peu, Baron Lynden -van Lynden,

24 pardonnez-moi-, que, au début tout au moins, l'armée bosniaque n'était pas

25 parfaitement organisée. Vous ai-je bien compris? Ou parfaitement

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1 structurée?

2 Réponse: Au début de la guerre, il n'y avait pas d'armée bosnienne. Par

3 conséquent, elle a commencé à exister petit à petit.

4 Question: Par conséquent, suis-je dans le vrai, Baron van Lynden, si je

5 dis qu'au début des hostilités les forces bosniaques ne disposaient pas de

6 nombreuses structures militaires?

7 M. van Lynden (interprétation): Comme je l'ai dit, je n'y étais pas au

8 mois d'avril, j'y suis arrivé au mois de mai. D'après mes connaissances,

9 leur structure initiale était fondée sur la police et les forces de

10 Défense territoriale.

11 M. Piletta-Zanin: Ma question porte pour le moi de mai également.

12 M. le Président (interprétation): Maître Piletta-Zanin, vous avez posé la

13 question suivante: "si au début du conflit", donc le témoin a tout à fait

14 raison.

15 M. Piletta-Zanin: Je reformule en disant: Monsieur le Témoin, lors de

16 votre arrivée qui se situe peu après le début des hostilités, mai 1992? Et

17 la question est la même pour l'essentiel, je peux la rephraser mais c'est

18 la même. Donc sur cette période-là.

19 M. van Lynden (interprétation): Leurs structures étaient faibles. Dans la

20 mesure où celles-ci existaient, elles étaient faibles lors de ma première

21 visite à Sarajevo. Cela dit, j'ai vu ce qui ressemblait à une

22 organisation, une ébauche d'organisation, mais cela ne ressemblait pas du

23 tout à ce que l'on pouvait voir en automne 1992; là, il y avait eu des

24 modifications sensibles.

25 M. Piletta-Zanin: Je vous remercie de cette réponse.

Page 2177

1 Baron, vous avez déclaré dans la déclaration à laquelle je fais

2 référencer, c'est toujours la même, "qu'il y avait beaucoup d'hommes

3 maintenus à Sarajevo". Ce sont vos mots.

4 "Qu'il y avait beaucoup d'hommes", vous avez utilisé l'expression "un

5 grand nombre d'hommes dans l'armée bosniaque maintenue à Sarajevo".

6 M. Waespi (interprétation): Auriez-vous l'obligeance d'indiquer à quelle

7 page de la déclaration et puis, de bien vouloir citer les phrases

8 auxquelles vous faites allusion?

9 M. le Président (interprétation): Oui, en effet, il serait préférable de

10 citer de manière expresse et littérale.

11 M. Piletta-Zanin: Il s'agit de la page 5, mais j'ai devant moi la

12 traduction serbe, et c'est exactement ce à quoi je fais référence.

13 Je vais donc retrouver le texte en anglais qui devrait être à peu près

14 dans les mêmes pages. C'est exactement cela. Je le citerai donc en

15 anglais. Vous avez déclaré ceci:

16 (interprétation): "Il était facile de maintenir le siège puisque la

17 topographie permettait à un nombre assez limité de forces d'infanterie,

18 appuyées par l'artillerie, de maintenir un grand nombre de troupes

19 bosniennes qui se consacraient à la défense de Sarajevo."

20 (inaudible) vous-même des termes "grand nombre", c'est-à-dire "large

21 number", nous sommes bien d'accord sur cela?

22 M. van Lynden (interprétation): Oui.

23 Question: Merci. Lorsque vous vous référez à ce grand nombre de soldats

24 -dont nous savons que vous n'avez pas pu nous donner un chiffre précis

25 mais c'est normal-, savez-vous où, en général, ces soldats étaient

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1 localisés dans la ville?

2 Réponse: Sur les lignes de front en général.

3 Question: Y avait-il des endroits dans la ville où les soldats pouvaient

4 se retirer puisque, bien évidemment, ils ne restaient pas en perpétuité

5 sur la ligne de front?

6 Réponse: D'après mes connaissances, lorsque les soldats bosniens étaient

7 en position, ils étaient en position. Il ne s'agit pas d'un travail de 9

8 heures du matin à 5 heures du soir, où l'on rentre chez soi le soir.

9 S'ils étaient autorisés à rentrer à la maison, s'ils avaient des maisons à

10 Sarajevo -parce qu'évidemment il y avait aussi des réfugiés qui venaient

11 d'ailleurs à Sarajevo et qui faisaient partie de l'armée-, eh bien, si on

12 leur accordait deux ou trois jours ou plus, ils rentraient chez eux.

13 Mais si vous faites allusion à une grande caserne, eh bien, je n'ai pas

14 connaissance de l'existence d'une telle caserne.

15 Question: Vous n'avez pas connaissance de l'existence de cantonnement

16 particulier?

17 M. van Lynden (interprétation): Je n'ai pas connaissance d'une grande

18 caserne de l'armée bosnienne pendant la guerre, dans la ville. Je sais que

19 la plupart des soldats étaient sur les lignes de front.

20 M. Piletta-Zanin: Merci. Baron, nous parlons toujours de la ville de

21 Sarajevo. Pouvez-vous indiquer quelle était la longueur du front?

22 M. Nieto-Navia (interprétation): Dans le compte rendu, page 83, ligne 14,

23 je crois que le témoin dit: "Je sais que la plupart des soldats se

24 trouvaient sur les lignes de front."

25 M. Piletta-Zanin: Je m'excuse, je n'avais pas vérifié le transcript.

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1 Je reprends ma question, Baron van Lynden, qui était la suivante: vous

2 venez de nous parler des lignes de front en ville de Sarajevo. Quelle

3 était la longueur, selon votre connaissance mais approximative, des lignes

4 de front dans Sarajevo?

5 M. van Lynden (interprétation): Je ne pourrai pas vous dire combien de

6 kilomètres constituaient la ligne de front. Franchement, les

7 correspondants de guerre ne parcourent pas les lignes de front en essayant

8 de les mesurer! La ligne encerclait la ville, la ville était assiégée,

9 mais il ne s'agit pas de lignes droites. Donc je ne peux pas vous donner

10 un chiffre, je le regrette.

11 Question: Je vous remercie de cette réponse.

12 Je reviens, Baron van Lynden, aux questions d'équipement: saviez-vous si,

13 lorsque vous êtes arrivé presque au début de la guerre en mai 1992, les

14 troupes bosniaques étaient régulièrement pourvues d'uniformes notamment?

15 Réponse: A ma connaissance, à cette époque-là, il y avait quelqu'un de ces

16 troupes qui disposait des uniformes. J'ai pu voir les gens qui ne

17 portaient pas d'uniforme, qui étaient en civil, et comme je l'ai déjà dit,

18 l'armée de Bosnie-Herzégovine n'existait pas à l'époque. Ce n'est que plus

19 tard que vous auriez pu voir des unités entières qui auraient été vêtues

20 en uniforme.

21 Question: Vous avez indiqué -mais je veux vérifier sur le transcript-,

22 vous avez indiqué tout à l'heure que d'autres ne portaient pas l'uniforme,

23 nous parlons bien de militaires. Vous vous référiez à "troups"?

24 Réponse: Oui. Il y en avait qui avaient été armés. C'est ce que j'ai dit,

25 il y avait des hommes armés. S'ils faisaient partie d'une compagnie ou

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1 d'une brigade, ce que normalement nous aurions pu associer avec une armée.

2 Je ne sais pas, mais il y en avait qui étaient armées. Ils portaient

3 quelque part de l'uniforme, il y en avait qui étaient en civil, il y en

4 avait qui étaient en uniforme complet, mais c'était un petit peu mixte.

5 Question: Baron van Lynden, peut-être pourriez-vous répondre directement à

6 la Chambre et non pas directement à moi pour éviter qu'il y ait peut-être

7 des dialogues entre nous?

8 Avez-vous entendu, Baron van Lynden, que, du côté serbe, des victimes

9 civiles auraient été causées par des tirs de snipers bosniaques, c'est-à-

10 dire de l'autre armée?

11 Réponse: Oui. J'ai entendu, mais je n'ai pas vu.

12 Question: Avez-vous jamais reporté dans vos reportages qu'il y avait

13 également des tirs de snipers bosniaques quand je dis "également", je

14 parle par rapport à d'autres faits de guerre évidemment sur des

15 populations civiles serbes?

16 Réponse: Oui. Nous avons envoyé des rapports et des informations, nous

17 avons parlé des victimes civiles. Comme je vous ai déjà précisé, je ne

18 l'ai jamais vu moi-même: nous l'avons entendu pendant que nous étions à

19 Grbavica, de la part de la population civile, qu'il y avait des snipers

20 qui ouvraient le feu. Mais moi, je ne me suis jamais rendu à l'hôpital, je

21 n'ai jamais vu des victimes civiles personnellement. Je l'ai entendu dire

22 et j'en ai informé notre opinion publique.

23 Question: Je vous comprends donc bien si vous indiquez que vous n'avez

24 jamais vu de vos yeux de personnes civiles qui aient été victimes de tirs

25 snipers? Merci de votre réponse.

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1 Réponse: C'est correct, vous m'avez bien compris.

2 Question: Baron van Lynden, pouvez-vous situer sur la carte qui est

3 toujours à votre côté droit la région de Dobrinja, même de façon

4 approximative?

5 Réponse: Est-ce que je vais porter l'annotation, le n°5?

6 M. Piletta-Zanin: Si d'abord vous pouvez individualiser la zone, première

7 chose? Pouvez-vous me répondre, je vous prie?

8 M. van Lynden (interprétation): Voilà, c'est la région, en gros, la zone

9 générale.

10 M. le Président (interprétation): Je vois que sur cette carte il y a déjà

11 quelques annotations. Je ne sais pas si vous l'avez remarqué également,

12 Maître.

13 Je vois quelques cercles, et je ne me souviens pas que ces annotations

14 avaient été portées lors de l'interrogatoire principal, ce qui veut dit

15 qu'on avait remis au témoin une carte qui a été préannotée.

16 M. van Lynden (interprétation): Mais c'est maintenant que je viens de

17 porter les annotations.

18 M. le Président (interprétation): Excusez-moi, mais je n'ai pas vu parce

19 qu'on n'a pas vu sur l'écran, ce n'était pas sur le rétroprojecteur.

20 Je vous en prie, Maître, vous pouvez poursuivre.

21 M. Piletta-Zanin: Je vous remercie de votre observation, Monsieur le

22 Président, mais je pense que les choses sont claires.

23 Dans ce cercle donc, vous avez désigné maintenant, pour le transcript, la

24 zone de Dobrinja. Est-ce bien exact? Est-ce bien exact?

25 M. van Lynden (interprétation): C'est exact.

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1 Question: Pouvez-vous mettre un chiffre chronologiquement suivant le

2 précédent qui sera le n°5? Je vous en remercie.

3 (Le témoin s'exécute.)

4 Baron, en relation à cette zone, quelques questions. La première: saviez-

5 vous si, proche de cette zone, se trouvait également un quartier général

6 ou un établissement militaire des forces bosniaques?

7 Réponse: Oui, il y avait effectivement un quartier général dans les

8 casernes de Lukavica.

9 Question: Baron van Lynden, je vais revérifier ma question, mais je crois

10 vous avoir demandé si vous saviez s'il y avait un établissement militaire

11 des forces bosniaques. Je vais vérifier dans le transcript.

12 Réponse: Oui, oui.

13 Question: Je vais vous reposer la question formellement. Savez-vous si,

14 proche de cette zone n°5, et malgré votre enthousiasme à répondre, il y

15 avait un établissement militaire des forces bosniaques?

16 Réponse: Je sais que l'armée de Bosnie avait une base à Dobrinja, mais

17 vous, vous dites "à proximité"; vous parlez peut-être de Ali Pasino Polje,

18 c'est un endroit où, personnellement, je ne sais pas s'il avait abrité un

19 quartier général.

20 Question: Baron van Lynden, vous parlez de base militaire. Il s'agit donc

21 bien, pour être très précis, d'une base militaire bosniaque?

22 Réponse: Comme je l'ai déjà dit, à Dobrinja, à Dobrinja même il y avait

23 effectivement l'armée bosnienne, et il y avait une de leur bases. Mais la

24 question que vous m'avez posée, c'était de savoir s'il y avait à proximité

25 de Dobrinja, donc en ce qui concerne la proximité, je ne peux pas vous

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1 répondre.

2 M. Piletta-Zanin: Tout à fait, et je vous remercie de cette extrême

3 précision. Vous aurez l'occasion d'êtres encore plus précis maintenant en

4 m'indiquant, à l'intérieur de Dobrinja, où se trouvait cette zone

5 militaire.

6 M. van Lynden (interprétation): Je ne suis pas tout à fait sûr que je vous

7 ai bien compris, Maître, quand vous parlez de la base militaire, de la

8 zone militaire.

9 Monsieur le Président, Dobrinja, à un moment donné, a été assiégée

10 séparément, pas ensemble avec le reste de Sarajevo. Ce n'est qu'à la fin

11 du mois de juin 1992 que Dobrinja a été donc, en quelque sorte, rattachée

12 aux autres quartiers de la ville. Il y avait quelques bases qui

13 existaient, mais je ne parle pas de la zone militaire, je parle de la base

14 militaire.

15 M. le Président (interprétation): Oui, Maître, je pense que votre question

16 est quelque peu différente par rapport à ce vous disiez au début. Vous

17 avez d'abord parlé de la zone qui a été entourée par le témoin, ensuite

18 vous avez parlé du quartier général, et ensuite de la zone militaire.

19 Je vais peut-être vous aider, Monsieur le Témoin. Monsieur le Baron van

20 Lynden, pourriez-vous nous dire si, à Dobrinja, il y avait des militaires

21 ou des postes de commandement spécifiques à partir desquels les soldats

22 ont pu opérer?

23 Par conséquent, je ne vous pose pas la question de savoir s'il y avait une

24 présence militaire, mais s'il y avait des bases militaires à l'intérieur

25 de la zone de Dobrinja.

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1 M. van Lynden (interprétation): Eh bien, Dobrinja c'était une ligne de

2 front, il y avait une ligne de front, Monsieur le Président. Et, certes,

3 il y avait des soldats et, à proximité de la ligne de front, il y avait

4 des bases, il y avait un quartier général. Et moi, j'ai visité une seule

5 fois Dobrinja; c'était un tout petit bureau, je me souviens, et il y en a

6 peut-être d'autres et je n'étais pas au courant.

7 M. le Président (interprétation): Maître Piletta-Zanin, vous pouvez

8 poursuivre.

9 M. Piletta-Zanin: Merci, Monsieur le Président.

10 Je reformule la question que j'ai posée tout à l'heure: pouvez-vous, Baron

11 van Lynden, indiquer à l'intérieur de ce cercle précisément où se trouve

12 ce que vous venez de dire être ou avoir été une base militaire?

13 Si vous ne le pouvez pas, indiquez que vous ne le pouvez pas.

14 M. van Lynden (interprétation): Non, je ne peux pas, je suis désolé.

15 M. Piletta-Zanin: Vous avez mentionné la ligne de front en relation à

16 cette zone que vous venez de figurer sous le numéro 5. Pourriez-vous,

17 Baron, dessiner par un trait plein ou pointillé -comme vous le souhaitez-,

18 la ligne de front dans cette zone ou aux abords de cette zone?

19 (Le témoin s'exécute.)

20 M. le Président (interprétation): Est-ce que je peux vous demander,

21 Maître, juste quelque chose: à quelle période pensez-vous, Maître, quand

22 vous posez la question?

23 M. Piletta-Zanin: Monsieur le Président, nous nous référons, ici, à la

24 période d'après 1992, après l'arrivée de monsieur à Sarajevo, plus

25 particulièrement la période de septembre 1992 et les mois qui suivent.

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1 M. le Président (interprétation): Est-ce que c'est bien cela, de cette

2 période-là, Monsieur le Témoin, dont vous parlez?

3 M. van Lynden (interprétation): Excusez-moi, mais je ne vois pas sur

4 l'écran le compte rendu.

5 M. le Président (interprétation): Mais au moment où vous avez dessiné la

6 ligne de front, est-ce que c'est de la ligne de front depuis le mois de

7 septembre 1992 et de plus loin dont vous parlez?

8 M. van Lynden (interprétation): Oui, Monsieur le Président, mais c'est

9 tout à fait approximatif.

10 M. le Président (interprétation): Merci.

11 Eh bien, je n'ai peut-être pas prononcé véritablement de manière tout à

12 fait correcte, je n'ai pas peut-être prononcé correctement. Il est marqué

13 le mois suivant, alors qu'il s'agit de plusieurs mois, "les mois

14 suivants", donc au pluriel et pas au singulier.

15 M. Piletta-Zanin: Merci de cette observation, Monsieur le Président.

16 Baron, en relation tant à la zone frappée d'un chiffre 5 que celle qui

17 l'entoure et qui lui est presque périphérique, y avait-il à votre

18 connaissance des objectifs militaires, un ou des objectifs militaires

19 autres que cette base?

20 M. van Lynden (interprétation): Oui et sans aucun doute, il s'agissait de

21 la ligne de front. C'est la raison pour laquelle la ligne de front est une

22 cible militaire automatiquement.

23 Question: Bien évidemment, mais outre cette ligne que je viens d'indiquer

24 dans ma question et qui est donc la ligne de front, y avait-il proche de

25 ces deux zones, un ou plusieurs autres objectifs militaires?

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1 Réponse: Sans aucun doute, il y avait d'autres cibles. Il y avait quelques

2 quartiers généraux étant donné que les forces combattaient à Dobrinja,

3 mais moi personnellement je connais un seul bureau. Je ne sais pas combien

4 il y en avait au total.

5 Question: Suis-je correct, Baron, si je dis qu'il y avait plusieurs

6 quartiers généraux autour de cette zone? Ce que je crois déduire de votre

7 réponse.

8 M. van Lynden (interprétation): Je ne sais pas. Je vous ai dit que moi,

9 personnellement, je me suis rendu une fois dans un bureau militaire. Je ne

10 suis pas allé dans d'autres. Il y en avait peut-être davantage, mais je ne

11 le sais pas. Et on ne peut pas déduire quoi que ce soit de ce que je viens

12 de dire. Moi je ne le sais pas.

13 M. Piletta-Zanin: Justement vous venez de déclarer -je conserve le

14 français, mais je peux vous citer en anglais- "qu'il y avait sans aucun

15 doute plusieurs quartiers généraux" -et je vais même vérifier… je ne

16 trouve pas-, mais "à l'intérieur de cette zone".

17 M. le Président (interprétation): En anglais, c'est marqué: "Sans aucun

18 doute, il y avait quelques quartiers généraux". C'est en anglais.

19 M. van Lynden (interprétation): C'est ce que j'ai dit, mais je ne sais pas

20 combien il y en avait.

21 M. le Président (interprétation): Eh bien, ceci est quelque peu

22 contradictoire par rapport à ce que vous avez dit.

23 Le témoin a dit: "Il aurait pu y en avoir", mais il a dit quand même:

24 "Indubitablement, sans aucun doute, il y avait plusieurs quartiers

25 généraux dans cette zone étant donné que les forces opéraient à Dobrinja".

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1 Et ensuite, il a dit: "Ils auraient pu exister, mais moi je connais un

2 seul bureau où je me suis rendu. Effectivement, je ne sais pas combien il

3 y en avait au total".

4 Est-ce que j'ai donc raison de dire que vous, Monsieur le Témoin, vous

5 avez supposé qu'il y avait plusieurs quartiers généraux, mais que vous-

6 même vous avez vu un seul et que vous supposez qu'il y en avait

7 éventuellement plusieurs?

8 M. van Lynden (interprétation): Oui Monsieur le Président, c'est

9 exactement cela.

10 M. le Président (interprétation): Maître, vous pouvez poursuivre

11 maintenant.

12 M. Piletta-Zanin: Il nous paraissait utile de clarifier. Merci de l'avoir

13 fait pour moi.

14 Est-ce que le nom de Butmir vous dit quelque chose, Baron?

15 M. van Lynden (interprétation): Oui, ceci me dit quelque chose.

16 Question: Pouvez-vous nous indiquer très brièvement de quoi il s'agit?

17 Réponse: Butmir est un village qui se trouve à côté de l'aéroport de

18 Sarajevo, de l'autre côté de l'aéroport.

19 Question: Merci de votre réponse. Y a-t-il précisément à Butmir un

20 objectif militaire?

21 Réponse: Je n'ai jamais travaillé à Butmir. J'ai eu l'occasion de passer

22 en voiture à côté, je m'imagine qu'il aurait pu y avoir des soldats de

23 l'armée de Bosnie-Herzégovine. Depuis Butmir jusqu'à Dobrinja, il y avait

24 un tunnel qui avait été creusé. Je me souviens qu'au cours d'une nuit,

25 moi, tout à fait par hasard, je suis tombé sur la fin du tunnel à Butmir.

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1 Si vous voulez parler de cela, moi je veux bien.

2 M. le Président (interprétation): Maître Piletta-Zanin, j'aimerais vous

3 demander quelque chose. Est-ce que vous pouvez nous dire de combien de

4 temps vous avez besoin pour le contre-interrogatoire?

5 Il est presque moins le quart, et moi je pense qu'il serait utile

6 également de savoir si nous pouvons terminer ou non avec ce témoin

7 aujourd'hui. Et si vous avez besoin de plus de temps, à ce moment-là vous

8 pouvez nous le dire.

9 Je vois que vous avez d'abord hoché la tête, ensuite vous avez nié. Je ne

10 sais plus maintenant où est la réponse. Est-ce que vous pouvez nous dire

11 ce que signifie ce geste de la tête?

12 M. Piletta-Zanin: Monsieur le Président, merci beaucoup.

13 Premièrement, j'attends chaque fois le déroulement de la traduction.

14 Ensuite, j'ai répondu non à la première et oui à la deuxième.

15 La première était "si nous pouvons terminer maintenant?" C'est non. Et la

16 deuxième "est-ce qu'il nous faut plus de temps?" C'est oui. C'est pour

17 cela que j'ai effectivement dû hocher la tête.

18 M. le Président: Est-ce que vous pouvez trouver un moment pour finir le

19 contre-témoignage aujourd'hui en, disons, 4, 5 ou 6 minutes?

20 M. Piletta-Zanin: Je reviens sur cette carte, Baron van Lynden, voulez-

21 vous, je vous prie, indiquer par un chiffre 6 où se situe l'entrée du

22 tunnel de Butmir, s'il vous plaît?

23 M. van Lynden (interprétation): Je n'ai aucune idée, je ne peux pas vous

24 annoter le chiffre.

25 Question: Je reviendrai peut-être sur cette carte ultérieurement Monsieur

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1 le Président.

2 Baron van Lynden, vous avez indiqué avoir fréquenté les deux hôpitaux

3 principaux, à savoir ce qu'on appelle le "State Hospital" et Kosevo

4 hôpital, est-ce bien exact?

5 Réponse: Oui, c'est exact.

6 Question: Baron van Lynden, en votre qualité de journaliste cette fois,

7 avez-vous jamais entendu qu'à un moment ou à un autre, et plus

8 particulièrement au cours du premier mois de 1993, les troupes bosniaques

9 aient utilisé un hôpital à des fins militaires?

10 Réponse: Non.

11 Question: Avez-vous, Baron van Lynden, jamais entendu dire que le secteur

12 de l'hôpital dit "Kosevo" aurait été utilisé par les troupes bosniaques

13 afin d'y implanter des pièces d'artillerie par secteur -j'entends même le

14 bâtiment et ses accès?

15 M. van Lynden (interprétation): Qui dit hôpital de Kosevo, dit plusieurs

16 bâtiments; il n'y a pas qu'un seul bâtiment. Il s'agit évidemment d'une

17 clinique universitaire.

18 Deuxièmement, je n'ai jamais vu d'artillerie, de pièce d'artillerie

19 implantée là-bas. Ce que j'ai pu entendre dire, c'est que le bâtiment de

20 la maternité de cet hôpital s'était trouvé sur la ligne de front même. Je

21 ne peux pas en dire autant pour le reste des bâtiments de l'hôpital.

22 M. Piletta-Zanin: Je sais que l'heure court, mais nous pouvons maintenant

23 distribuer la pièce que nous avons eue; cela permettra aux parties de se

24 préparer pour le lendemain.

25 M. le Président (interprétation): Oui, bien sûr, vous pouvez distribuer ce

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1 document aux parties, et nous pouvons peut-être nous arrêter aujourd'hui

2 dans nos débats judiciaires pour poursuivre le travail demain matin.

3 Tout simplement, permettez-moi de rappeler aux deux parties que demain,

4 lorsqu'on en aura fini avec le contre-interrogatoire, évidemment si

5 nécessaire, il peut y avoir quelques questions supplémentaires à poser

6 dans le cadre de l'interrogatoire principal.

7 Ensuite, au sujet de la requête portant "visionnement" et vidéoconférence,

8 il faut dire que cette Chambre avait demandé à ce qu'un programme soit

9 établi, un calendrier, pour parler évidemment depuis maintenant jusqu'en

10 juillet. Nous aimerions bien qu'on en parle ici maintenant. Il s'agit de

11 deux faits que j'avais à vous communiquer.

12 Et maintenant, nous suspendons l'audience jusqu'à demain matin, 9 heures.

13 (L'audience est levée à 13 heures 47.)

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