Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Lundi, 7 octobre 2002)

2 (L'audience est ouverte à 14 heures 20.)

3 ((Audience publique.)

4 (Déclarations liminaires de la défense.)

5 M. le Président (interprétation): Madame la Greffière, je vous prie de

6 citer l'affaire.

7 Mme Philpott (interprétation): Affaire IT-98-29-T, le Procureur contre

8 Stanislav Galic.

9 M. le Président (interprétation): Merci, Madame la Greffière.

10 Bonjour à tous et à toutes dans ce prétoire. Les parties ont sans doute

11 reçu les copies de la décision qui a été rendue, décision rendue sur la

12 requête de rejeter les requêtes concernant l'Article 98bis. Cette décision

13 n'accepte que partiellement la requête concernant les trois tirs

14 embusqués, ce qui veut dire que l'heure est venue pour que la défense

15 présente ses moyens de preuve à décharge, mais il nous faut d'abord

16 discuter de certaines questions.

17 Avant de ce faire, par contre, je vais donner la possibilité à la défense

18 de faire leur déclaration liminaire qui, normalement, se fait avant la

19 présentation des moyens de preuve à décharge, des moyens de preuve de la

20 défense. Et, si j'ai bien compris, vous avez divisé la tâche en deux: la

21 première partie sera couverte par Me Pilipovic et l'autre partie sera

22 faite par Me Piletta-Zanin. Si je puis vous demander, qui désire commencer

23 avec la déclaration liminaire?

24 Mme Pilipovic (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Bonjour,

25 Messieurs les Juges, à tous et à toutes.

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1 Honorables Juges, conformément à l'Article 84 du Règlement de procédure et

2 de preuve, la défense se prépare à la présentation de ses moyens à

3 décharge. La défense a une déclaration liminaire à vous présenter. Nous

4 avons déjà derrière nous 13.000 pages qui contiennent des témoignages et

5 des dépositions de plus de cents témoins qui ont été entendus devant cette

6 Chambre. Nous avons un grand nombre de documents grâce auxquels

7 l'accusation a essayé de démontrer ce qu'il désire démontrer: donc les

8 éléments de preuve qui accusent le général Galic disant qu'entre le 10

9 septembre et environ le 10 août 1994, il aurait mené une campagne

10 prolongée de bombardements et de tirs embusqués contre les zones civiles

11 et la population civile et les objectifs civils. Alors que l'accusation,

12 dans les points 1 à 7, tire les conclusions légales que Stanislav Galic

13 est responsable d'avoir répandu la terreur envers les populations civiles,

14 qui est contraire à l'Article 51 du protocole supplémentaire et qui est

15 également sanctionné par le statut 3 du Statut ainsi que l'Article 5 du

16 Statut du Tribunal visant à dire qu'il s'agit d'actes inhumains

17 conformément à l'Article 7 du Statut.

18 L'accusation affirme que, pendant 44 mois, le Corps Sarajevo de Romanija a

19 mené une campagne de terreur qui visait à tuer et à semer la terreur

20 envers la population civile. L'accusation affirme que, dans l'histoire, on

21 n'a jamais vu une telle campagne qui a eu pour but de ramener la

22 population civile au Moyen Age.

23 Le Procureur n'a pas pu prouver l'existence de quelque campagne que ce

24 soit et surtout pas une campagne qui avait pour but de ramener la

25 population dans les circonstances ou dans les conditions qui prévalaient

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1 au Moyen Age. Chaque guerre comporte certaines difficultés et il est

2 absolument impossible, dans des circonstances de guerre urbaine, d'essayer

3 de trouver des circonstances, de trouver une vie normale qui règne pendant

4 la paix.

5 L'accusation prétend que l'ex-Yougoslavie, l'armée de l'ex-Yougoslavie,

6 l'ex JNA a pris des positions stratégiques autour de Sarajevo et que la

7 ville a été bloquée et, comme on le dit de façon populaire, a été tenue

8 sous, a été encerclée et montrant aux yeux de tous ce que faisait l'ex

9 JNA.

10 Dans la présentation de ses moyens à défense, la défense tentera de

11 prouver que rien de cela n'est vrai et ne permettra pas que les documents

12 falsifiés des médias restent tels qu'ils le sont et que la non-vérité

13 reste écrite. Il est tout à fait possible de comprendre que seule la JNA

14 aurait pu arrêter la guerre entre les parties belligérantes, ce qu'a

15 affirmé également M. Cyrus Vance. La JNA, qui s'est retirée, a pu

16 permettre aux forces musulmanes qui, au cours de toute la guerre, a essayé

17 de tenter pour que la guerre se prolonge en violant tous les accords, en

18 essayant d'internationaliser la guerre.

19 La défense désire, à ce moment-ci, demander à la régie technique de faire

20 passer la cassette qui porte la cote FF1, n°18.

21 M. le Président (interprétation): On m'informe que la Greffière a bien

22 coté les séquences vidéo et nous pouvons procéder avec les cotes que vous

23 avez énumérées. Je prie à la régie technique de nous montrer cette

24 cassette vidéo.

25 (Projection de la vidéo sans traduction.)

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1 Mme Pilipovic (interprétation): De nombreux exemples nous montrent de

2 manière très claire quelle campagne médiatique a été menée à l'encontre

3 des Serbes durant le conflit en Bosnie-Herzégovine ou plutôt, sur le

4 théâtre des opérations de Sarajevo. Cette campagne ne se fondait pas sur

5 des faits, elle était fondée plutôt sur des événements de pure fiction et

6 des données falsifiées; ce que nous pourrons voir grâce aux bandes vidéo

7 que nous aurons l'occasion de voir. Hélas! Cette vérité sur une guerre

8 sale et médiatique, qui a été menée par les dirigeants politiques et

9 militaires de Bosnie-Herzégovine, a beaucoup de mal à être connue du

10 public aujourd'hui.

11 La défense espère que cette Chambre de première instance, grâce aux

12 éléments de preuve qui lui seront présentés, pourra s'assurer quelle est

13 la quantité de contrevérité qui est contenue dans de nombreux rapports,

14 qu'elle pourra voir que le public n'a été informé que de la vérité que la

15 partie bosniaque souhaitait lui présenter, tandis que les rapports

16 officiels des Nations Unies ont été soit passés sous silence, soit ont été

17 composés et rédigés de manière erronée.

18 Depuis le tout début, les Serbes ont été qualifiés "d'agresseurs", même

19 s'il est clair qui a commencé la guerre, à savoir que c'est durant un

20 mariage qu'il y a eu un assassinat qui a déclenché la guerre. Par la

21 suite, ce sont des manipulations des médias qui se sont poursuivies. On a

22 inventé le terme et la notion de "purification ethnique", on a affirmé que

23 seuls les Serbes perpétraient cela, on a constitué une image en noir et

24 blanc sur les bons et les mauvais, on a créé l'image montrant que les

25 Serbes n'existaient pas en Bosnie alors, qu'au contraire, les Serbes y

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1 vivent depuis des siècles et y possèdent 70% des terres. Pour la plupart,

2 on s'est servi d'images inventées ou erronées sur les événements qu'on a

3 cherché à placer par l'intermédiaire des agences de presse. Les

4 journalistes ignoraient ce qui se passait réellement sur le terrain parce

5 qu'ils ne se rendaient pas vraiment du côté de Sarajevo, qui était

6 contrôlée par les Serbes.

7 D'autres part, les médias ont passé sous silence des crimes flagrants en

8 Bosnie commis sur les Serbes, perpétrés à l'encontre des Serbes.

9 La bande effet 19, s'il vous plaît, à présent. Juste pour que tout le

10 monde en soit informé, il y a quelque petites pauses dans cette vidéo.

11 (Projection de la vidéo sans traduction.)

12 (Fin de la projection.)

13 Tout ceci a contribué à créer une image erronée sur les événements de

14 Bosnie-Herzégovine. Le Procureur a cherché à montrer une image banalisée

15 des causes du conflit, en nous présentant que le conflit qui s'est déroulé

16 dans la ville même de Sarajevo et dans les alentours, une ville qui a

17 connu auparavant une vie multiethnique, calme en apparence, sans qu'il y

18 ait de risque que le conflit de Slovénie et de Croatie se produise sur

19 place. Se reporter à la page du compte rendu d'audience 563.

20 Le Procureur affirme que la paix s'est terminée le 6 avril, au moment où

21 la communauté européenne a reconnu l'indépendance de la Bosnie-

22 Herzégovine. Autrement dit, que cela s'est produit début avril 1992,

23 lorsque les habitants de Sarajevo ont vu les forces de la JNA conduire des

24 exercices dans les alentours de Sarajevo. La défense démontrera que la

25 paix de Sarajevo et en Bosnie a été menacée et remise en question bien

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1 plus tôt grâce à des préparatifs à grande échelle qui ont été menés par

2 des formations paramilitaires des Musulmans qui ont été constituées selon

3 les lignes de l'organisation politique du parti politique ou plutôt, plus

4 précisément, de l'aile militante du SDA. Le Procureur ferme les yeux

5 devant le fait que M. Safer Halilovic dans son livre intitulé "Une

6 stratégie rusée" présente des données tout à fait claires et non

7 contestables, disant que c'est sur les bases des "Bérets verts" qu'a été

8 constituée la Ligue patriotique dès 1991 et que c'est jusqu'en 1992 que

9 des unités armées ont été constituées à la tête desquelles se trouvaient

10 des gens qui avaient un passé criminel avéré. Toute la ville a été...dans

11 toute la ville se sont déployées ces unités, voire dans toute la Bosnie.

12 Ainsi jusqu'au mois d'avril 1992, une armée musulmane paramilitaire a bel

13 et bien été formée. A l'époque, elle comptait 150.000 soldats. La question

14 est de savoir qui avait besoin de cette armée et pour quelles raisons?

15 D'après les affirmations de Safer Halilovic en date du 7 et 8 février

16 1992, dans le village de Mehurici, près de Travnik, une réunion militaire

17 s'est tenue où des plans ont été constitués, plans concernant des

18 municipalités des régions. Conformément à ces plans, il fallait préparer

19 des attaques menées par la JNA qui, auparavant, d'après un scénario connu

20 par avance, devaient être qualifiées "d'armée d'agresseurs". L'armée du

21 parti politique d'Alija Izetbegovic devait assurer la prise du pouvoir

22 ainsi que son maintien à la tête de l'Etat. Cependant, il ne s'agissait

23 pas d'un Etat qui allait continuer à être, comme jusqu'à ce moment-là, un

24 Etat commun des Croates, des Serbes et des Musulmans, mais qui devait

25 seulement devenir un Etat musulman où ne trouveraient leur place que ceux

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1 qui accepteraient de vivre selon les règles d'une infime majorité

2 musulmane. Tout ceci s'est passé à l'insu des Serbes qui ont été pris de

3 court par les recommandations de SDA, plus précisément de M. Alija

4 Izetbegovic demandant que les jeunes hommes musulmans n'acceptent pas leur

5 mobilisation, n'acceptent pas de faire leur service militaire. Il est

6 également pris de court par les activités des dirigeants du SDA qui ont

7 remplacé l'état-major de la Défense territoriale de Bosnie-Herzégovine

8 afin de placer à des postes de responsabilité les hommes loyaux du SDA.

9 C'est ainsi qu'a commencé concrètement le processus du partage de la

10 défense territoriale de la Bosnie-Herzégovine, qui est donc devenue une

11 défense territoriale divisée en partie musulmane et en partie serbe.

12 Grâce à la déposition de ces experts, la défense prouvera qu'il est

13 indispensable de replacer dans un contexte historique constitutionnel et

14 militaire le conflit de Bosnie-Herzégovine afin de comprendre entièrement

15 comment ce partage de Sarajevo s'est produit, comment a évolué la

16 situation par la suite et ces événements qui se sont produits, se sont

17 produits d'une manière toute différente, ont un caractère tout différent

18 que ce que le Procureur a affirmé. Par le truchement de la déposition de

19 l'expert Robert Donia, le Procureur a tenté de présenter des causes du

20 partage politique de la ville de Sarajevo. Cependant, cet expert a

21 présenté une opinion tout à fait erronée. Il a présenté une opinion qui ne

22 se fonde pas, qui ne se fonde nullement sur des événements réels. Il

23 affirme de manière tout à fait erronée, sans aucun argument, que "la

24 campagne de régionalisation menée par le SDS a été la cause de toutes les

25 divisions en Bosnie-Herzégovine et, plus tard, plus particulièrement à

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1 Sarajevo".

2 Cet expert affirme que les dirigeants du SDS se sont employés à consolider

3 le pouvoir du parti sur le territoire le plus vaste possible et qu'ils ont

4 cherché à séparer ce territoire ou à l'extraire du territoire qui était

5 sous le contrôle effectif des autorités de la République. Ce disant, cet

6 expert passe sous silence le fait que, d'après les dispositions

7 constitutionnelles de la constitution qui étaient à l'époque en vigueur en

8 Bosnie-Herzégovine, s'agissant des questions qui étaient relatives à

9 l'égalité des trois peuples, des Serbes, des Croates et des Musulmans, eh

10 bien, qu'il était prévu une manière de prise de décisions qui empêchait

11 que l'un quelconque de ces trois peuples se retrouve minoritaire. Il

12 n'empêche que la décision la plus grave, la décision sur l'indépendance de

13 la Bosnie-Herzégovine a été prise par les Musulmans et les Croates,

14 contrairement à l'avis des Serbes et grâce à une procédure qui était

15 contraire au règlement de l'assemblée de l'époque, qui prévoyait la prise

16 de décisions par la voix du consensus. Cette décision a été adoptée lors

17 d'une session de l'assemblée qui s'est tenue du 11 au 15 octobre. La

18 décision a été appelée "mémorandum sur la souveraineté de la Bosnie-

19 Herzégovine" et elle a constitué une menace de réduire le peuple serbe au

20 statut d'une minorité nationale. A l'époque, les représentants du peuple

21 serbe, conformément à l'amendement 70, alinéa 10, amendement à la

22 constitution de la Bosnie-Herzégovine, ont demandé que cette décision soit

23 communiquée au conseil chargé de veiller à l'égalité nationale, que ce

24 conseil devait donner son avis. Et par la suite, le président de

25 l'assemblée M. Momcilo Krajisnik a terminé les travaux de l'assemblée pour

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1 la journée en cours. Il n'empêche que les représentants musulmans et

2 croates ou, plutôt de leurs partis politiques, ont continué, ont poursuivi

3 la session de l'assemblée de manière illégale et anticonstitutionnelle, en

4 l'absence des représentants serbes à l'assemblée et qu'ils ont adopté donc

5 la décision que je viens de citer.

6 La réponse à ce genre de comportement de la part des représentants des

7 Musulmans et des Croates a été la constitution des organes de pouvoir dans

8 des communes, dans des municipalités où les Serbes étaient majoritaires.

9 Le peuple serbe s'est organisé de cette manière, ce qui s'est traduit dans

10 les faits par une division politique de la ville de Sarajevo. Ainsi, ont

11 cessé de fonctionner les organes commun à tous niveaux, à tous les niveaux

12 de l'organisation de l'Etat, ce qui a par la suite constitué des

13 fondements pour une division territoriale de la ville de Sarajevo ainsi

14 que d'une régionalisation qui a été menée d'après les dispositions

15 constitutionnelles et de manière légale.

16 Le Procureur affirme que le 7 avril 1992 les Serbes ont proclamé la

17 République serbe de Bosnie-Herzégovine, mieux connue à partir du mois

18 d'août 1992 sous le nom de la Republika Srpska de Bosnie-Herzégovine et

19 qu'ils ont exigé la majeure partie du territoire. Ils ont revendiqué la

20 majeure partie du territoire de cette République (se reporter au

21 transcript page 563.)

22 Le peuple serbe se fondant sur son droit à l'autodétermination a pris la

23 décision de constituer son propre Etat. Il n'a pas revendiqué la majeure

24 partie du territoire de l'ex Bosnie-Herzégovine car il ne savait pas à qui

25 s'adresser pour exiger cela puisqu'il possédait dores et déjà la majeure

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1 partie des territoires, comme nous avons pu le voir dans la bande vidéo

2 que nous avons visionnée car, d'après le cadastre, plus de 70% des terres

3 étaient la propriété des Serbes.

4 Le Procureur affirme que l'objectif de la Republika Srpska s'agissant de

5 Sarajevo est devenu clair suite à l'assemblée du peuple serbe qui s'est

6 tenue le 12 mai 1992, que c'est ce jour-là qu'a été constituée l'armée de

7 la Republika Srpska qui a effectivement transformé les unités de la JNA

8 qui se trouvaient sur place ainsi que d'autres unités loyales à la

9 Republika Srpska, les a transformées donc en commandement de l'armée

10 Republika Srpska et que cette armée s'est opposée à l'armée du

11 Gouvernement de Bosnie-Herzégovine, plus tard connue sous l'armée de

12 Bosnie-Herzégovine. Il est exact qu'en date du 12 mai 1992, une assemblée

13 de la Republika Srpska s'est tenue, que lors de cette assemblée, les

14 objectifs de la Republika Srpska ont été clairement articulés. Lors de

15 cette assemblée, pour ce qui est de la ville de Sarajevo, il a été décidé

16 que tout comme la partie musulmane elle allait proclamer Sarajevo sa

17 capitale, puisque c'est à Sarajevo que vivaient 180.000 Serbes.

18 Compte tenu de leurs droits historiques, ethniques, leurs droits de

19 propriété sur les terres dans la ville de Sarajevo, les Serbes étaient

20 tout à fait fondés de considérer qu'une partie de cette ville leur

21 revenait. Par contre, il est tout à fait faux -et c'est ce que la défense

22 tentera de prouver-, il est tout à fait faux que la VRS a été formée des

23 unités qui restaient de la JNA avec les autres unités qui étaient loyales

24 à la Republika Srpska. Il est tout à fait clair qu'avec l'ex JNA qui s'est

25 retirée, aucune autre unité de la JNA n'existait plus et que, sur le

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1 territoire de Sarajevo à ce moment-là, on avait procédé à la formation des

2 unités qui s'étaient divisées en Défense territoriale et ça a été formé

3 par la population locale qui, par la suite, est devenue l'armée de la VRS.

4 Eu égard à ce fait, et le fait d'avoir le droit de vivre dans la ville

5 dans laquelle leurs familles ont vécu pendant plusieurs siècles, les

6 Serbes ont décidé de défendre leur partie de la ville. La défense prouvera

7 que Sarajevo en tant que ville n'avait pas été bloquée, n'avait pas été

8 encerclée et qu'il n'y avait pas de plan organisé pour procéder à

9 l'autorisation (sic) de ces citoyens mais que la ville avait été divisée

10 selon les lignes ethniques. Avec les premières barricades qui avaient été

11 érigées et, après l'événement qui est survenu à Barcarsija à partir du 1er

12 mars 1992, événement qui a été l'introduction au conflit de Sarajevo

13 -c'est ce que nous avons d'ailleurs vu sur l'extrait vidéo-, il a été vu,

14 c'est-à-dire que l'on n'a pas contribué ou on a plutôt fait une division

15 selon la division ethnique de la ville de Sarajevo et c'est selon ces

16 lignes que la Défense territoriale qui du côté serbe défendait leur propre

17 territoire sous le commandement de la VRS. Et donc il y avait des lignes

18 de séparation qui existaient entre les parties belligérantes et de ce

19 fait, il existait également des lignes qui divisaient la ville de

20 Sarajevo. Ces lignes n'avaient pas été déplacées de façon importante au

21 cours de la guerre à l'exception de quelques exceptions plus petites qui

22 pouvaient faire en sorte que les deux parties belligérantes pouvaient

23 avoir certains avantages tactiques. La défense prouvera que le droit des

24 Serbes était légitime, ce qui a d'ailleurs été confirmé de la part du côté

25 serbe par l'Accord de Dayton selon lequel Republika Srpska a été reconnue

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1 et que Sarajevo était leur ville.

2 L'accusation affirme que, par la suite, des combats entre la VRS et

3 l'armée de la BiH ont eu lieu et que les deux armées se sont battues sur

4 les positions PAT et que les lignes sont restées statiques et qu'aucune

5 des deux parties ne pouvait donner le coup fatidique.

6 A la page 564 du compte rendu d'audience, nous pouvons lire la chose

7 suivante: "L'accusation affirme que l'armée de la BiH, c'est-à-dire le 1er

8 Corps de l'armée de la BiH était composé par plus de 75.000 soldats qui

9 étaient engagés dans les combats, alors que le Corps de Romanija ne

10 comptait que 18.000 soldats.

11 Le Procureur affirme plus loin que le Corps Romanija de Sarajevo tenait

12 des positions élevées autour de Sarajevo et qu'il possédait beaucoup plus

13 d'artillerie et que c'est les raisons pour lesquelles l'armée de la BiH

14 avait plus d'hommes et que le SRK avait plus d'armements techniques. La

15 seule chose qui est véridique et qui sort des affirmations de l'accusation

16 et la seule chose que la défense accepte est le nombre d'hommes, car tous

17 les documents affirment que le 1er Corps de l'armée de la BiH comptait

18 75.000 hommes, desquels 40.000 hommes se trouvaient dans la même ville,

19 alors que le Corps Sarajevo de Romanija comptait 18.000 soldats qui

20 étaient dispersés le long de la ligne de front qui était d'une longueur de

21 237 kilomètres.

22 Toutes les autres affirmations du Procureur sont tout à fait non fondées.

23 L'encerclement de Sarajevo n'était pas planifié car le côté serbe estimait

24 que la ville de Sarajevo devait être divisée, ce qui a été fait.

25 Le côté serbe avait effectivement plus d'armes lourdes, mais ne possédait

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1 pas beaucoup plus d'artillerie, tel que l'a affirmé le Procureur car les

2 éléments de preuve prouveront qu'elle n'avait que certains avantages

3 relatifs concernant l'artillerie qui, dans une guerre urbaine, n'a pas

4 d'avantages particuliers. Il est tout à fait non fondé lorsque le

5 Procureur affirme que le Corps Sarajevo de Romanija avait occupé toutes

6 les parties élevées les plus dominantes autour de Sarajevo.

7 La défense prouvera que le 1er Corps de l'armée de la BiH, et tout au long

8 du conflit, a contrôlé le Mont Grdonj dans la zone des sept bois. Le Mont

9 Hum, Zuc, la montagne Igman, le Mont Mojmilo, Velika et Mala, Colina Kapa

10 et Debelo Brdo. Depuis ces positions, il disait qu'il contrôlait toutes

11 les positions des armées serbes et l'ensemble de la ville de Sarajevo.

12 Lorsqu'on prend en compte que le 1er Corps contrôlait la plus grande

13 partie de Dobrinja, Alipasino Polje, Cengic Vila, Marijin Dvor, c'est-à-

14 dire toutes les parties de la ville dans lesquelles il y avait le plus de

15 bâtiments de construction qui, pour la plupart, servaient pour placer des

16 nids de tireurs embusqués, des nids de mitrailleuses, pour également

17 placer les unités de commandement du 1er Corps, il est tout à fait clair à

18 ce moment-là.

19 Les éléments de preuve prouveront que l'armée de Republika Srpska, c'est-

20 à-dire le Corps Sarajevo de Romanija ne comptait pas, n'avait pas ces

21 avantages tactiques et militaires mais que c'était bien le contraire.

22 L'avantage d'avoir occupé les positions élevées autour de Sarajevo était

23 plutôt donné aux éléments du 1er Corps, et c'est la raison pour laquelle

24 elle possédait un avantage opérationnel sur les forces de la VRS. Les

25 forces de Sarajevo de Romanija étaient obligées de répliquer avec

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1 l'artillerie et ce, seulement vers les positions militaires et après que

2 les unités du 1er Corps de l'armée de la Bosnie-Herzégovine prenaient des

3 actions; c'est-à-dire attaquaient simplement pour répliquer à ces attaques

4 afin de pouvoir maintenir les 75.000 soldats autour de Sarajevo. Car, dans

5 le cas contraire, si un tel nombre de soldats sortaient du champ de

6 bataille de Sarajevo, cela voudrait dire que l'armée de la VRS perdrait.

7 Le Procureur affirme que, pendant le conflit, il y avait des activités

8 militaires légitimes à Sarajevo, mais, néanmoins, affirme qu'une campagne

9 intentionnelle de semer la terreur envers la population civile existait

10 avec l'exception que, de temps en temps, le pilonnage était fait pour que

11 certains civils soient ciblés et que, d'autres fois, on aurait procédé à

12 un feu non sélectif envers les civils.

13 A la page 568 du transcript, nous pouvons lire que les éléments de la

14 défense peuvent affirmer que ce qu'affirme le Procureur n'est pas fondé,

15 que le Procureur, en démontrant ses éléments à charge, n'a pas pu prouver

16 quelles étaient ces activités militaires non légitimes, contrairement aux

17 activités militaires légitimes. Eu égard au fait qu'à Sarajevo il y avait

18 une guerre et des combats quotidiens, le Procureur aurait dû faire une

19 différence très claire entre ce que représente une action militaire

20 légitime et non légitime. Il aurait fallu que le Procureur nous indique de

21 façon très claire quelles étaient les actions qui étaient non illégitimes

22 pour que nous puissions estimer, nous puissions voir ce qu'il veut

23 vraiment dire.

24 La défense prouvera qu'à Sarajevo, il s'agissait d'une guerre urbaine, car

25 les lignes de séparation passaient par la ville et que les deux armées

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1 n'étaient divisées que par la rivière Miljacka et par une rue ou que, de

2 temps en temps, il n'y avait qu'un bâtiment qui séparait les deux parties

3 belligérantes. Et il y avait des positions dans lesquelles les deux armées

4 se trouvaient soit dans le même bâtiment ou autour d'un bâtiment tel que,

5 par exemple, le stade du club de football Zeljez Nicar ou le cimetière

6 juif.

7 La défense demandera à ce que l'on montre la photographie sur le

8 rétroprojecteur qui porte la cote MFI25.

9 (Intervention de l'huissier.)

10 Ce bâtiment que nous voyons sur le rétroprojecteur, sur cette

11 photographie, est situé à Gravica. Autour de cet immeuble, des combats

12 très sérieux ont eu lieu, très violents, car les deux parties

13 belligérantes avaient à l'intérieur de ce bâtiment leurs positions. De

14 temps en temps, il arrivait que seul un mur sépare les deux parties

15 belligérantes. Nous en parlerons plus tard au cours de la présentation des

16 moyens à décharge.

17 Pendant les combats, pour ce bâtiment, des centaines de balles auraient pu

18 se perdre et auraient pu provoquer des conséquences non voulues.

19 Je demanderai que l'on enlève cette photographie, je vous prie.

20 (Intervention de l'huissier.)

21 Eu égard au fait que le 1er Corps de l'armée de Bosnie-Herzégovine

22 comptait environ 40.000 soldats armés, environ 15.000 policiers à

23 Sarajevo, les éléments de preuve de défense démontreront que, pour le

24 fonctionnement d'un tel nombre de soldats, il était nécessaire d'avoir

25 plusieurs positions où l'on pourrait placer ces derniers et avoir des

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1 postes de commandement, de sorte qu'à n'importe quel moment dans la ville,

2 il y avait plus de mille cibles militaires légitimes qui auraient pu faire

3 la cible d'une attaque à n'importe quel moment.

4 Le plus grand nombre de telles installations militaires était situé dans

5 des bâtiments qui, autrefois, abritaient des civils. Simplement, pour vous

6 donner un exemple je vais vous citer: par exemple, le poste de

7 commandement de la 6e Brigade de montagne était situé, se trouvait dans la

8 rue Ivana Krndelja à Hrasno; le poste de commandement de la 2e Brigade

9 motorisée était situé dans le studentski dom de Nedzarici; le poste de

10 commandement de la Brigade Sultan Fatih était situé dans le bâtiment de

11 l'ancien bâtiment qui se trouvait au sein de la faculté politique; le

12 poste de commandement Mahmud Bucalja se trouvait dans l'école primaire de

13 Ilija Gorbic à Bistrik. Et plusieurs autres endroits dont nous allons

14 faire état seront mentionnés par des témoins de la défense.

15 C'est la réponse pour laquelle, donc, le commandement du 1er Corps ne

16 s'est pas conformé à l'Article 58 des protocoles additionnels des

17 Conventions de Genève 1, qui voulait dire qu'il était absolument

18 nécessaire d'éliminer la population civile, de repousser la population

19 civile autour des installations militaires pour les éliminer de ces

20 opérations, les évacuer. Eu égard au fait que le Corps, le commandement du

21 1er Corps de l'armée de la Bosnie-Herzégovine avait décidé de ne pas

22 placer leurs positions dans les zones belligérantes, et étant donné qu'ils

23 se trouvaient dans une ville, il est possible qu'on aurait pu faire des

24 erreurs.

25 L'affirmation donc du Procureur que l'on ait procédé à un ciblage

Page 13199

1 intentionnel de civils et d'installations civiles est tout à fait

2 inacceptable. Tel qu'il est inacceptable lorsqu'on entend le Procureur

3 affirmer qu'on ait procédé, qu'on ait ciblé de façon non sélective la

4 population civile.

5 Il faut également tenir compte que, dans telles ou telles circonstances

6 d'une guerre urbaine au cours desquelles l'armée de la Bosnie-Herzégovine

7 a très souvent œuvré et s'est souvent servie de mortiers mobiles ainsi que

8 d'autres armes d'artillerie lourde, contre lesquelles il a fallu

9 absolument répliquer depuis des armes lourdes de sorte à ce que l'on

10 puisse répliquer à l'attaque, il est très difficile de parler du principe

11 de restriction et de l'adoption du principe de restriction. Car, comme on

12 l'a déjà mentionné plus tôt, il était très difficile de réaliser ceci à

13 cause du comportement des dirigeants militaires et politiques de la

14 Bosnie-Herzégovine qui ne se conformaient pas aux lois de la guerre, ne se

15 sont pas conformés aux Conventions de Genève. C'est la raison pour

16 laquelle ils ont procédé de façon illégale.

17 La défense souhaite dès à présent montrer le manque de fondement des

18 propos du Procureur disant que M. le général Galic pourrait être

19 responsable également pour un recours abusif à la force, à savoir le 1er

20 Corps de Bosnie-Herzégovine disposait -comme cela a été dit- d'un nombre

21 considérable de pièces d'artillerie qui ont été utilisées pour mener des

22 attaques directes contre les positions de l'armée de la Républika Srpska

23 et qui ont été déployées de manière habile à travers toute la ville.

24 De manière fréquente, voire pratiquement tous les jours, ils ont été

25 utilisés comme des points de feu particulièrement mobiles. Très souvent,

Page 13200

1 le feu était ouvert à proximité des lieux de culte, de monuments

2 culturels, historiques, centres de santé et toute une série d'endroits

3 comparables. Nos éléments de preuve montreront que ceci a été fait de

4 manière intentionnelle afin de provoquer, depuis ces positions de tir, des

5 tirs de riposte de la part des unités du Corps de Sarajevo Romanija et

6 ensuite, pour créer par l'intermédiaire des médias, l'idée que l'armée de

7 la Republika Srpska attaque des cibles civiles, voire même des hôpitaux.

8 Les commandants des forces des Nations Unies étaient au courant de cela.

9 Mais, pour tout un tas de raisons, ils n'ont pas fait part de cela au

10 public, ce qui a créé une image erronée des Serbes, des crimes commis par

11 des Serbes, comme nous le verrons des propos faits par Lord Owen dans une

12 bande vidéo qui concerne le comportement du général Morillon, dont la

13 lettre est mentionnée, et nous l'avons déjà versée au dossier ici.

14 Je souhaite visionner la bande MFI20, s'il vous plaît.

15 (Projection de la bande vidéo.)

16 (Diffusion de la vidéo, pas de traduction.)

17 (Fin de la projection.)

18 En utilisant des pièces d'artillerie ainsi que des mortiers légers, y

19 compris des mortiers de 82 millimètres, les unités du 1er Corps de l'armée

20 de Bosnie-Herzégovine ont appuyé ainsi les actions menées par

21 l'infanterie. Il est tout à fait clair que les unités du Corps de Sarajevo

22 Romanija ont riposté à ces actions en ouvrant le feu depuis les armes

23 adéquates et comparables.

24 Dans ce contexte d'échanges de feux permanents, en profondeur, sur le

25 théâtre des opérations de Sarajevo qui doit être évalué d'après les règles

Page 13201

1 de la doctrine militaire, car les forces qui étaient déployées en

2 profondeur, les forces logistiques qui devaient fournir un soutien aux

3 soldats qui étaient déployés sur la première ligne de front étaient

4 déployées en profondeur; donc cela va de soi. Eh bien, c'est à cause de

5 cela qu'il y a eu un certain nombre d'omissions. On n'a pas évacué la

6 population civile des zones d'opérations militaires comme cela a été

7 présenté par un témoin du Procureur, le commandant du 1er Corps d'armée.

8 Donc cela a pu entraîner des victimes civiles éventuelles et le nombre de

9 ces victimes était considérablement inférieur que ce qui a été présenté à

10 l'époque dans les médias. Ceci a pu se produire à cause d'un certain

11 nombre d'erreurs collatérales ainsi que vu le fait que les civils -qui n'y

12 étaient pas habilités- circulaient dans la zone des opérations en assumant

13 eux-mêmes le risque que cela encourrait.

14 Les preuves présentées par la défense montreront que les unités du Corps

15 de Sarajevo Romanija n'ont pas reçu l'ordre d'ouvrir le feu à l'encontre

16 d'un objectif civil quel qu'il soit, qu'il n'y a pas eu de tir

17 intentionnel sur des cibles civiles et que les preuves qui ont été

18 présentées jusqu'à présent par le Procureur ne sont pas fiables en ce

19 sens. Les victimes civiles éventuelles qui peuvent être considérées comme

20 des conséquences inévitables des échanges de feu dans des conditions de

21 guerre en zone urbaine, il a été tenu compte de ces civils de la part des

22 commandements en place des unités du Corps Sarajevo Romanija. Ils

23 estimaient que par des actions ponctuelles, éventuellement le nombre de

24 victimes civiles serait réduit par rapport à l'avantage militaire

25 escompté. Ces victimes étaient négligeables, compte tenu du fait que ces

Page 13202

1 civils résidaient dans la zone concernée de manière contraire à la loi. Le

2 comportement donc militaire était conforme aux Conventions de Genève.

3 Les actions qui ont été menées en réponse aux offensives lancées par

4 l'armée de Bosnie-Herzégovine ont été menées de manière légitime. Le

5 Procureur n'a pas cité un seul exemple, par exemple de pilonnage montrant

6 qu'il y a eu des victimes du côté de la population civile. Il s'est

7 contenté d'affirmer que cela s'est produit lors de cinq incidents cités,

8 dont il sera tout particulièrement question. Il ne peut pas être question,

9 donc, d'omission du côté du commandement des unités du Corps de Sarajevo

10 Romanija et encore moins du côté du général Galic qui, comme nous le

11 prouverons, a demandé de manière absolue et stricte de la part de ses

12 unités de respecter toutes les règles de la guerre.

13 Monsieur le général Galic n'a jamais reçu une seule protestation faisant

14 part d'incidents de tireurs embusqués isolés sur la base desquels il

15 aurait pu mener une enquête détaillée pour savoir de quelle position et

16 avec quel objectif le feu a été ouvert. L'affirmation du Procureur disant

17 que les unités des individus faisant partie du Corps de Sarajevo Romanija

18 ont agi de manière intentionnelle à l'encontre des civils est

19 inacceptable.

20 Il est encore moins acceptable l'affirmation qu'il s'agit d'une campagne

21 qui a visé des civils ou qu'il s'agit de meurtres intentionnels ou

22 d'autres actes inhumains qui ne constituent pas le meurtre.

23 Les preuves présentées par le Procureur ont montré que l'armée de Bosnie-

24 Herzégovine était équipée en fusils à lunette, de telle façon qu'elle

25 avait un avantage certain compte tenu du nombre de ces armes et compte

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1 tenu de leur qualité, compte tenu également des positions où les nids de

2 mitrailleuses ont été installés et également compte tenu des nids de

3 snipers. Ajoutons à cela le fait que les unités de snipers ou de tireurs

4 embusqués de l'armée de Bosnie-Herzégovine ont été déployées à tous

5 niveaux de l'échelle militaire, voire certaines placées sous le

6 commandement direct du commandant du Corps ou bien placées sous le

7 commandement du commandant des unités spéciales de la police.

8 Alors, l'armée de la République était amenée à prendre en compte, de

9 manière tout à fait sérieuse, ce problème. C'est pour cela qu'il y a eu

10 constitution de détachements anti-snipers à une phase ultérieure du

11 conflit car, au préalable, et en dépit de ces tentatives, elle n'a pas pu

12 répondre de manière adéquate aux actions menées d'une manière organisée

13 par des tireurs embusqués de l'armée de Bosnie-Herzégovine qui ont été

14 constitués pour combattre les snipers de l'armée de Bosnie-Herzégovine, et

15 non pour agir de manière intentionnelle contre les civils.

16 Les preuves du Procureur qui ont été présentées afin d'affirmer, de

17 confirmer les incidents de tireurs embusqués cités -ainsi que les preuves

18 de la défense qui seront présentées au cours de sa présentation des

19 éléments de preuve- montreront de manière tout à fait claire qu'aucun de

20 ces incidents ne s'est produit de la manière dont cela a été présenté par

21 le Procureur.

22 Nous disposons, en ce moment, de votre décision concernant la requête de

23 la défense demandant l'acquittement suite à la présentation des éléments

24 de preuve et dans laquelle vous avez décidé que les faits cités, sous n°7,

25 12 et 19, ne sont pas tels que le Procureur ait présenté des preuves au-

Page 13204

1 delà de tout doute raisonnable pour que le général Galic puisse être

2 considéré comme responsable.

3 Cela signifie que, dans la suite de cette procédure, il est nécessaire que

4 la défense présente que, dans les 23 incidents qui restent, il n'y a pas

5 non plus d'éléments nous permettant de considérer que le général Galic

6 puisse être tenu pour responsable.

7 Les preuves de la défense montreront qu'il n'y a pas un seul paramètre

8 sérieux permettant de fonder l'affirmation du Procureur disant qu'il s'est

9 agi de tirs intentionnels à l'encontre de ces civils.

10 Aucun d'eux n'a vu l'endroit d'où les tirs sont partis. Ils ne sont pas en

11 mesure de confirmer la trajectoire du feu. Certains de ces éléments, de

12 toute évidence, sont le résultat des ricochets, alors que tous les autres

13 événements sont, sans aucun doute, le résultat des balles perdues. La

14 défense prouvera que toutes les personnes blessées se sont trouvées dans

15 les zones où il y a eu échanges de tirs et, donc, elles ont pu être

16 blessées de manière accidentelle. La défense prouvera de manière

17 matérielle physique qu'il n'a pas été possible d'agir depuis certaines

18 zones où étaient déployés les soldats de l'armée de la Republika Srpska,

19 en direction des parties de la ville où il y a eu des blessés, d'après les

20 affirmations du Procureur.

21 Les allégations de l'accusation selon laquelle la profession, l'âge et

22 l'origine ethnique ne jouaient aucun rôle pour les tireurs embusqués, que

23 des enfants eux-mêmes étaient touchés alors qu'ils jouaient et que les

24 gens étaient… se voyaient tirer dessus alors qu'ils étaient dans leur

25 jardin ou dans leur appartement ou quand ils allaient ramasser du bois ou

Page 13205

1 lorsqu'ils traversaient la rue ou lorsqu'ils allaient chercher de l'eau au

2 canal. Avec tout le respect que nous devons aux victimes, toutes ces

3 allégations montrent que l'accusation est victime de la campagne

4 médiatique qui a été menée afin de faire croire au monde entier que la

5 seule occupation des forces serbes, c'était de s'attaquer aux civils.

6 En d'autres termes, on oublie que c'était la guerre et qu'en temps de

7 guerre, lorsqu'il y a des combats, on ne peut pas avoir les mêmes

8 activités qu'en temps de paix. On ne peut pas aller tout simplement voir

9 ses amis, aller jouer dans la rue ou aller n'importe où. La guerre a ses

10 propres règles qui s'appliquent non seulement aux participants immédiats

11 des événements de la guerre, mais ce sont des règles qui contraignent

12 aussi la population civile à s'adapter et il faut, notamment, l'éloigner

13 des zones de combats parce que, si les populations civiles restent dans

14 les zones de guerre, elles sont automatiquement menacées.

15 D'autre part, l'accusation n'a pas prouvé que les 23 autres incidents

16 répertoriés se sont passés exactement dans ces circonstances que je viens

17 de souligner. L'accusation n'a absolument pas prouvé que ces gens avaient

18 été visés délibérément. Elle n'a pas prouvé, non plus, que ceux qui

19 avaient tiré étaient des Serbes et des Musulmans. (Page 567 du compte

20 rendu d'audience). Les civils n'ont jamais été visés délibérément et les

21 circonstances dans lesquelles les 23 incidents se sont produits - nous

22 allons d'ailleurs donner des éléments de preuves supplémentaires à ce

23 sujet - les circonstances montrent qu'il n'y avait pas d'intention

24 délibérée de tirer à vue, de tirer directement sur les personnes

25 concernées. Le nombre de personnes tuées ou blessées à Sarajevo est très

Page 13206

1 différent de celui qui a été présenté par les autorités de Bosnie-

2 Herzégovine et par les représentants de certains médias.

3 Les médias ont accepté sans réserve ce genre de chiffres. Peut-être parce

4 qu'ils avaient déjà décidé de se mettre du côté de la partie musulmane,

5 alors malheureusement l'accusation, elle aussi, a accepté sans discuter

6 ces chiffres en affirmant qu'à Sarajevo, des milliers de personnes avaient

7 trouvé la mort ou avaient été blessées. Or, les chiffres sont facilement

8 manipulables.

9 Cassette MFI21, s'il vous plaît.

10 (Diffusion de la vidéo, pas de traduction.)

11 Fin de la projection.

12 La défense montrera au moyen d'une méthode de statistiques différentes de

13 celles qui ont été utilisées par un expert de l'accusation, un expert qui

14 d'ailleurs travaille au sein du Bureau du Procureur, ce que la défense

15 estime être totalement inacceptable. La défense montrera aux moyens

16 d'autres méthodes statistiques que les chiffres qui nous sont donnés ne

17 peuvent pas s'élever à des milliers de morts, à des milliers de blessés à

18 Sarajevo, comme l'affirme l'accusation. Et en acceptant ces chiffres,

19 l'accusation s'inscrit dans une stratégie d'allégations non fondées qui

20 ont été répandues par les médias pendant le conflit. Les médias qui ont

21 été manipulés aux dépens des forces serbes pendant le conflit. La méthode

22 de traitement des données nous permettant d'obtenir le nombre des victimes

23 par rapport au nombre total des habitants de Sarajevo au moment de la

24 guerre nous montrera que le chiffre en question, le nombre de victimes est

25 un chiffre qui ne pourrait être considéré comme résultant d'une campagne

Page 13207

1 consistant à viser délibérément les civils.

2 La défense estime que les éléments de preuve qu'elle présentera montreront

3 que l'affirmation de l'accusation au sujet de l'existence d'une campagne

4 de tirs embusqués est complètement inacceptable, même si l'on accepte que

5 les 23 incidents répertoriés reflètent la souffrance des civils, et le

6 fait qu'ils soient tombés, victimes de tir d'armes à feu. Mais cependant,

7 même si on accepte cela, on ne peut pas considérer que cela confirme

8 l'existence d'une campagne délibérée au-delà de tout doute raisonnable.

9 Les affirmations généralisées de l'accusation selon lesquelles il s'agit

10 d'exemples de ce qui se déroulait ailleurs, cela ne suffit pas. Il faut en

11 effet prouver chaque fait, il faut prouver que quelqu'un a été blessé,

12 quand, comment, dans quelles circonstances. Sur tout ceci plane encore un

13 grand doute. La défense va montrer que l'accusation n'a pas été en mesure

14 de prouver ses accusations et les affirmations selon lesquelles il

15 existait une campagne d'emploi de tireurs embusqués contre des civils est

16 complètement infondée, est complètement inacceptable. Au moment où ces

17 événements ont eu lieu, les intervalles qui ont lieu entre ces incidents,

18 les lieux très éloignés, très variés où ont eu lieu ces 23 incidents

19 répertoriés comme on les connaît et qui figurent à l'annexe 1 de l'Acte

20 d'accusation, on ne peut nullement dire donc que tout ceci puisse suffire

21 à prouver l'existence d'une campagne. Pour qu'il y ait campagne, il faut

22 que des incidents de ce style aient lieu chaque jour pratiquement. Il faut

23 que les incidents aient lieu dans certains lieux et en grand nombre. Pour

24 prouver qu'il y a eu intervention de tireurs embusqués, il faut prouver

25 que des tirs sont venus des positions occupées par le Corps Romanija de

Page 13208

1 Sarajevo. Or, la Chambre de première instance en l'espèce ne dispose pas

2 d'éléments de preuve dans ce sens et la défense estime qu'on ne peut

3 accepter l'existence d'une telle campagne et nous pensons que la Chambre

4 en sera convaincue après la présentation de nos éléments de preuve.

5 En dressant un tableau simplifié de l'intervention et des actions des

6 tireurs embusqués et en affirmant que tous les tirs réalisés au moyen

7 d'armes de petits calibres étaient des tirs venant de tireurs embusqués, y

8 compris les canons antiaériens et les mortiers, en faisant tout cela, on

9 voit bien que l'accusation réalise qu'elle n'est pas en mesure de prouver

10 que les civils faisaient l'objet d'une campagne délibérée de la part de

11 tireurs embusqués. La défense estime que cette démarche est complètement

12 erronée et que le terme de "tirs embusqués", tel qu'il est utilisé par

13 l'accusation, n'est pas acceptable. La défense le montrera.

14 Et nous espérons qu'à la fin de la présentation de nos moyens, la Chambre,

15 elle aussi, verra d'une autre manière l'utilisation de ce mot de "tirs

16 embusqués". La défense citera à la barre des experts en balistique, ceci

17 afin de définir tout à fait clairement les différences qui existent entre

18 les tirs embusqués et l'utilisation d'autres types d'armes.

19 En effet, il est absolument essentiel de déterminer dans quelles

20 circonstances, à quels endroits, à quel moment on peut effectivement

21 parler de l'intervention d'un tir éventuel d'un tireur embusqué et

22 déterminer à quel moment cela n'est pas possible. Et dans ces

23 circonstances, ou plutôt ceci sera extrêmement utile à la Chambre de

24 première instance lorsqu'il s'agira de déterminer si l'accusation a prouvé

25 ces allégations relatives à l'existence d'une campagne consistant à

Page 13209

1 prendre systématiquement pour cible les civils afin de les tuer.

2 La défense estime que les moyens de preuve qu'elle va présenter montreront

3 qu'il est impossible d'arriver à une conclusion dans ce sens.

4 La question du comportement des membres du Corps Romanija de Sarajevo et

5 des meurtres délibérés de civils et la relation qui existerait entre ces

6 deux éléments, tout cela n'est pas acceptable. Pourquoi? Parce que la

7 défense montrera qu'il n'existait pas d'intention délibérée de tuer les

8 civils. Une telle conclusion deviendra incontournable une fois que toutes

9 les circonstances des divers incidents seront évaluées avec soin, en

10 particulier, lorsqu'il s'agira de se demander d'où les tirs ont été

11 réalisés et lorsqu'il s'agira de se pencher et de tenir compte

12 sérieusement des contradictions qui figurent dans les déclarations des

13 témoins de l'accusation.

14 Pour établir déclaration délictueuse, il n'est pas nécessaire, il n'est

15 pas suffisant à l'accusation de se référer aux déclarations de certains

16 témoins qui affirment avoir été pris pour cible par des tireurs embusqués.

17 Non, il faut que les faits soient établis. Il faut que les faits montrent

18 au-delà de tout doute raisonnable que la personne qui a reçu la balle, la

19 personne sur laquelle on a tiré, a été visée par quelqu'un qui avait pour

20 intention délibérée de tuer la personne en question.

21 La question de l'intention ne pourra peut-être pas être tranchée sur les

22 conclusions des témoins, des témoins qui ignorent d'où viennent les tirs

23 et pourquoi on tire sur eux et d'où vient la balle.

24 La défense, à cet égard, présentera des éléments de preuve montrant qu'il

25 y a eu des échanges de tirs et qu'il est possible que des civils aient été

Page 13210

1 les victimes aléatoires de ces échanges de tirs. C'est le cas de figure où

2 l'on voit des gens se trouvant dans des opérations de combat. D'ailleurs,

3 peut-on véritablement dire qu'il s'agit de civils? Parce que les éléments

4 de preuve qui nous ont déjà été présentés ont montré qu'il existait des

5 soldats qui étaient habillés en civil dans ces zones. Et de ce fait, il

6 était difficile de les distinguer des civils, surtout vu la distance qui

7 séparait les victimes de ces tirs et ceux dont on affirmait qu'ils avaient

8 tiré sur ces victimes, et surtout vu le type d'équipement et le type

9 d'armes utilisées. La défense montrera que les membres des unités du Corps

10 Romanija de Sarajevo n'ont pas ouvert le feu avec l'intention de blesser

11 des civils, quels qu'ils soient, ou pour leur causer des blessures se

12 résumant à des actes inhumains -comme nous l'affirme l'accusation-.

13 La défense montrera, dans le cadre de la présentation de ses moyens, qu'il

14 n'existait aucun plan ayant pour objectif d'utiliser les tirs embusqués

15 contre des civils et la défense montrera que le général Galic n'a jamais

16 donné l'ordre à quiconque de tirer sur les civils. La défense montrera que

17 le général Galic n'a jamais reçu de grief, quel qu'il soit, lui indiquant

18 des actions impropres de la part des unités placées sous son commandement.

19 Et nous montrerons en particulier que le général Galic n'a jamais été

20 informé de cas où des civils auraient été victimes d'incidents

21 particuliers. La défense montrera que le général Galic n'a jamais eu

22 connaissance de comportements impropres de certains membres de ses unités

23 qui l'auraient mené à ouvrir une enquête si cette conduite avait été

24 passible de sanctions.

25 Et, d'autre part, nous montrerons que le général Galic n'a pas manqué à

Page 13211

1 ses responsabilités qui consistaient, en cas de soupçon de crime, à lancer

2 une enquête. Ou bien qu'il n'a pas fait preuve de responsabilité aux vues

3 des organismes chargés du système judiciaire militaire.

4 Il faut savoir que le général Galic était situé à quatre échelons dans

5 l'échelle du commandement par rapport à ses hommes. Nous allons prouver

6 que le général Galic, en dehors des ordres généraux qu'il avait -et qui

7 stipulaient qu'il ne fallait pas cibler les civils-, en tant que

8 commandant du Corps ne pouvait pas donner de tels ordres et qu'il n'avait

9 pas d'informations selon lesquelles ces ordres n'étaient pas respectés et

10 que, même s'il avait reçu des informations dans ce sens, il aurait pris

11 toutes les mesures pour faire en sorte que ces informations soient

12 vérifiées.

13 La défense va montrer que le général Galic, lorsqu'il a demandé la

14 vérification de certaines informations, a invariablement reçu la réponse

15 qu'aucune action n'avait été entreprise par aucune des unités ou aucune

16 personne nécessitant la mise en place d'une enquête.

17 Il est clair que dans de telles circonstances le général Galic ne saurait

18 être tenu pénalement responsable au titre des activités de tirs embusqués

19 aux vues des dispositions de l'Article 7.1 et 7.3 du Statut du Tribunal.

20 L'Acte d'accusation reprend contre le général Galic des charges au titre

21 des mêmes crimes commis au même moment, mais avec l'emploi d'armes tels

22 que des obus ou des mines, de tirs directs ou indirects; le Procureur n'a

23 donné que cinq incidents de ce type causés par des tirs de mortier.

24 Ce simple fait nous montre que le Procureur n'a présenté aucun élément de

25 preuve démontrant que les membres du Corps de Sarajevo Romanija aient

Page 13212

1 utilisé leurs armes ou leurs pièces d'artillerie afin de toucher de

2 manière directe, donc qu'ils aient utilisé un canon ou un char. Il en

3 ressort que ces armes n'ont été utilisées lors d'aucune opération

4 militaire illégitime.

5 Messieurs les Juges, vous avez tranché conformément à l'Article 98bis de

6 notre Règlement en estimant que le Procureur a présenté un nombre

7 suffisant d'éléments de preuve qui, si ces éléments étaient adoptés,

8 constitueraient un ensemble factuel raisonnable permettant la condamnation

9 par rapport aux incidents de pilonnages répertoriés. Dans la suite de ce

10 procès, la défense présentera des éléments de preuve qui réfuteront le peu

11 de preuves que le Procureur a présenté afin d'étayer le bien-fondé de la

12 responsabilité pénale du général Galic, s'agissant des événements qui sont

13 répertoriés comme incidents de pilonnage. La défense a engagé une équipe

14 d'experts de la plus haute renommée scientifique et militaire qui

15 s'appuieront sur des exemples concrets afin de rejeter toutes les

16 affirmations du Procureur concernant les tirs de mortiers depuis les

17 positions des unités du corps de Sarajevo Romanija et, en particulier,

18 s'agissant des affirmations très générales et jamais étayées des experts

19 qui ont été citées par le Procureur, qui ont présenté leurs points de vue

20 sans s'aider d'une seule information scientifique. Nous vous présenterons

21 à présent la pièce MFI26.

22 M. le Président (interprétation): Maître Pilipovic, le moment de la pause

23 approche. Combien de temps dure cette pièce MFI26, à peu près?

24 Mme Pilipovic (interprétation): Il s'agit d'un dessin, ce n'est pas une

25 bande.

Page 13213

1 M. le Président (interprétation): Très bien. Nous verrons cela et, par la

2 suite, nous ferons une pause. Vous avez parlé pendant 1 heure 25 minutes à

3 peu près.

4 (Intervention de l'huissier.)

5 Mme Pilipovic (interprétation): Nous voyons à présent, sur le

6 rétroprojecteur, un dessin, l'un des dessins qui seront utilisés par un

7 expert qui sera cité par la défense. Il s'agit des éléments de preuve qui

8 seront présentés par la défense, à savoir que les obus qui sont tombés à

9 Alipasino Polje n'ont pas été tirés des positions occupées par des membres

10 du Corps de Sarajevo Romanija déployés à Nedzarici. Il ressort très

11 clairement de ce schéma, qu'il n'y a pas de possibilité de vision directe

12 de l'endroit où sont tombés les obus, car il y a un obstacle qui se trouve

13 devant et qui est constitué par des immeubles élevés. Il est donc

14 impossible d'accepter l'affirmation du Procureur disant que cet incident

15 permet de prouver l'intention de tuer ou de blesser qui que ce soit.

16 Personne n'était en mesure de savoir que des enfants se trouvaient sur

17 place et que c'est sur eux qu'allait tomber l'obus.

18 Par le truchement de la déposition de cet expert, la défense prouvera

19 également que Nedzarici, comme lieu de provenance du tir, n'est pas

20 plausible. Nous prouverons également qu'il n'y a pas eu de victimes

21 intentionnelles dans les incidents de pilonnages répertoriés.

22 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, si le moment est propice, nous

23 pourrions faire une pause à présent. Il me semble que j'en ai pour une

24 quinzaine de minutes encore pour terminer mon discours liminaire. C'est

25 mon collègue qui prendra la parole par la suite.

Page 13214

1 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Ierace?

2 M. Ierace (interprétation): J'ai besoin de quelques points

3 d'éclaircissement s'agissant du compte rendu d'audience. Je me suis levé

4 parce qu'il m'a semblé que la défense aurait dû fournir à l'accusation

5 tout document qu'elle se proposait de présenter pendant son discours

6 liminaire. Il est vrai que nous avons reçu une bande vidéo de deux heures

7 avant le début de cette audience d'aujourd'hui. Si j'ai bien compris,

8 plusieurs extraits que nous avons vus proviennent de cette bande. Nous

9 n'avons pas vu le schéma que nous voyons à présent sur le rétroprojecteur.

10 Je demanderai à la défense de nous communiquer les documents que n'avons

11 pas encore.

12 M. le Président (interprétation): Oui, Maître Pilipovic, avez-vous fourni

13 des exemplaires de tous les documents que vous allez utiliser pendant

14 votre déclaration liminaire? Les avez-vous communiqués à l'accusation?

15 Mme Pilipovic (interprétation): Monsieur le Président, c'est le 10

16 septembre que nous avons communiqué au Procureur une copie de la bande

17 vidéo. Il me semble qu'il s'agit de la bande n°8, c'est celle-ci qui a été

18 communiquée au Procureur. Quant à la photographie, la photographie que la

19 défense a présentée, celle-ci a également été communiquée au Procureur.

20 S'agissant enfin de ce schéma, je ne pourrais pas l'affirmer avec 100% de

21 certitude puisque cela fait partie des analyses faites par les experts,

22 mais je communiquerai cela à l'autre partie pendant la pause.

23 M. le Président (interprétation): La Chambre espère qu'il n'y aura pas de

24 nouvelles plaintes de ce genre après la pause, donc que tous les documents

25 que vous allez utiliser auront été communiqués au Procureur. Je vous prie

Page 13215

1 donc de revenir ici à 16 heures 20.

2 (L'audience, suspendue à 15 heures 50, est reprise à 16 heures 25.)

3 M. le Président (interprétation): Maître Pilipovic, veuillez poursuivre.

4 Mme Pilipovic (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Président.

5 La défense prouvera que M. le général Galic n'a jamais donné l'ordre à

6 l'artillerie ou aux mortiers d'agir contre la population civile. Au

7 contraire, l'ordre exprès était donné de n'agir que lorsqu'il s'agit

8 d'empêcher une action déjà lancée par l'armée de Bosnie-Herzégovine, de

9 n'agir qu'à l'encontre des cibles militaires. Par la suite, nos éléments

10 de preuve prouveront que la plupart des problèmes ont été suscités par

11 l'événement de Markale, que ceci a suscité le plus de manipulations. Même

12 Lord Owen y a contribué avec sa prise de position disant qu'il ne fallait

13 pas divulguer publiquement le fait que les Musulmans ont fait cet

14 événement car ceci pouvait ralentir le processus de négociation, voire

15 l'interrompre. Mais on le verra sur notre bande vidéo, dans le public, les

16 Serbes n'y sont pour rien, ils ne sont nullement coupables.

17 Je vous prierai à présent de nous montrer la bande MFI 22.

18 M. le Président (interprétation): Je n'ai plus rien sur mon portable,

19 j'aurais besoin d'aide de la technique, s'il vous plaît. Mais entre temps,

20 on peut poursuivre.

21 Mme Pilipovic (interprétation): La fin du discours de la défense était de

22 dire que les Serbes sont restés considérés comme coupables par l'opinion,

23 malgré le fait qu'ils n'étaient pas coupables.

24 (Diffusion de la vidéo, pas de traduction.)

25 (Fin de la diffusion.)

Page 13216

1 Les experts de la défense prouveront que cette mine n'a pas été tirée des

2 positions du Corps de Sarajevo Romanija. Ces experts mettront en doute

3 même le fait que les conséquences auraient pu être dues suite à

4 l'explosion d'une mine de mortier. Dans le cadre de la propagande et de la

5 guerre psychologique menée par les pouvoirs musulmans, il y a eu la mise

6 en scène d'autres incidents et ce, dans un contexte d'événements

7 politiques importants, l'objectif de ces campagnes était de ternir dans

8 toute la mesure du possible l'image des Serbes.

9 Je vous prie, à présent, de nous présenter la bande MFI23.

10 (Diffusion de la vidéo.)

11 (Pas de traduction.)

12 (Fin de la vidéo.)

13 En présentant ces éléments de preuve, la défense montrera que les autres

14 incidents répertoriés de pilonnages ne sont pas, eux non plus, une

15 conséquence de l'activité des unités du Corps de Sarajevo Romanija. Dans

16 le contexte de tous les éléments de preuve qui seront présentés par la

17 défense, il ressort sans aucun doute qu'il ne sera pas possible d'accepter

18 l'affirmation du Procureur selon laquelle M. le général Galic pourrait

19 être pénalement responsable pour les pilonnages, que ce soit conformément

20 à l'Article 7.1 ou que ce soit conformément à l'Article 7.3 des Statuts de

21 ce Tribunal par rapport à la responsabilité du supérieur hiérarchique.

22 Dans tous les aspects du commandement, le général Galic a appliqué de

23 manière stricte le règlement. Il n'a pas omis d'entreprendre des mesures

24 qui s'imposaient compte tenu du fait qu'il occupait un poste au sein du

25 système du commandement. Il n'existe aucun document des archives du Corps

Page 13217

1 de Sarajevo Romanija qui aurait été analysé par les experts en matière de

2 doctrine militaire et qui laisserait entendre que M. le général Galic

3 aurait planifié, incité ou approuvé une action impropre, de quelque ordre

4 de que ce soit.

5 En revanche, de nombreux documents montrent que le général Galic a ordonné

6 que l'on s'abstienne d'entreprendre une action contraire au règlement, une

7 action quelconque à l'encontre des civils ou des objectifs civils. Les

8 relations avec la Forpronu, avec les observateurs des Nations Unies

9 relevaient de la compétence de l'état-major de l'armée de la République.

10 Ce n'est qu'à quelques occasions rares que cette communication est passée

11 par des officiers de liaison, l'officier de liaison du Corps d'armée. Et

12 il s'agit d'une question importante lorsqu'on tient compte du fait que le

13 général Galic devait être informé d'un certain nombre de griefs. La

14 défense prouvera que le général Galic, au moment où il a reçu

15 l'information, a toujours entrepris des mesures nécessaires afin que l'on

16 mène une enquête approfondie au sujet des cas cités. Il y a eu nombre de

17 cas où l'état-major ne s'est pas adressé au général Galic, où des

18 questions contestées ont été résolues au plus haut niveau du commandement

19 de l'armée de la Republika Srpska et de la Forpronu.

20 La question de la responsabilité du général Galic, s'agissant de la

21 terreur à l'encontre de la population civile, comme cela est cité au chef

22 1 de l'Acte d'accusation, est une question qui ne peut pas être perçue

23 dans un contexte aussi étroit comme cela a été fait par le Procureur en se

24 satisfaisant de ne prendre en compte que les affirmations des témoins

25 disant que les citoyens de la ville avaient peur et en se satisfaisant des

Page 13218

1 résultats de l'analyse de l'expert, le Dr Turner, qui a parlé de la peur

2 ou plutôt de la terreur d'un point de vue théorique sans avoir fait, en

3 tant que psychiatre, un seul entretien psychiatrique avec quelqu'un de

4 Sarajevo, sans parler d'autres méthodes d'observation sur la base

5 desquelles on aurait pu savoir si les personnes en question ont vraiment

6 été victimes de la peur qui aurait pris des proportions de la terreur.

7 Toute peur ne constitue pas une terreur. Les citoyens de Sarajevo ont vécu

8 dans des circonstances de guerre. Il ne fait aucun doute qu'ils ont

9 parfois éprouvé de la peur, mais cette peur n'était certainement pas de

10 l'intensité qui aurait pu être qualifiée d'extrême et qui doit exister

11 auprès de la plupart des citoyens pour qu'on puisse parler de terreur.

12 La seule existence de la peur auprès de la plupart des habitants n'est pas

13 une raison suffisante pour qu'on puisse affirmer qu'il y avait une terreur

14 provoquée par les pilonnages ou les tirs des tireurs embusqués, ce qui

15 aurait pu correspondre aux chefs d'accusation formulés par le Procureur.

16 D'après la défense, il serait nécessaire de prouver l'existence de

17 l'intention afin de semer la terreur sur les civils par la voie du

18 pilonnage ou de l'activité des snipers. La défense se propose de prouver

19 que cette intention n'a pas existé par le simple fait qu'il n'y a jamais

20 eu de tirs orientés à l'encontre des civils ou de cibles civiles;

21 l'intention a été toujours de ne viser que des cibles militaires. Il n'y a

22 jamais eu d'intention de terroriser les civils.

23 La défense se propose de poser à la fin la question de peine cumulative à

24 l'encontre du général Galic. Mais d'ores et déjà, il est possible

25 d'affirmer que les éléments de preuve de la défense prouveront que le

Page 13219

1 général Galic ne peut pas être considéré responsable pour la terreur sur

2 les civils. Il n'y a pas eu intention de ce genre.

3 La défense se propose de prouver, à l'aide de ces éléments de preuve, que

4 le général Galic a accepté le poste de commandant du Corps de Sarajevo

5 Romanija. Il n'a pas pu s'opposer à la décision qui a été prise qu'il

6 prenne ce poste, qu'il s'est retrouvé dans une situation qui était une

7 situation de désordre militaire, -on peut la qualifier ainsi-. C'étaient

8 les premiers mois après la formation de l'armée de la Républika Srpska à

9 partir des unités de la Défense territoriale. Il s'agissait uniquement

10 d'hommes qui vivaient dans cette région qui ont défendu leur propriété,

11 leur maison, et qui n'étaient pas ou très peu militairement formés.

12 C'était l'époque où il n'y a pas eu de discipline militaire, où les

13 officiers n'étaient pas en place et où ce sont essentiellement des

14 officiers de réserve qui n'étaient pas des soldats de profession qui ont

15 occupé des postes. C'était le moment où de nombreux groupes paramilitaires

16 ou des individus paramilitaires ont agi; ils n'étaient pas disciplinés et

17 ils ont terni l'image de l'armée par leur comportement. C'était un moment

18 où il était, de toute évidence, mis en place une émission des structures

19 politiques des autorités locales au sein des unités militaires.

20 En un mot, le général Galic, en tant que commandant du Corps, avait besoin

21 de toutes ses connaissances en matière de doctrine militaire afin

22 d'éliminer tous ces éléments négatifs; parfois il n'y est pas parvenu dans

23 la totalité. A l'aide de ses collaborateurs, il a mis en place cependant

24 un minimum de discipline militaire nécessaire. Il a mis sous son

25 commandement des groupes paramilitaires et il a démembré les autres. Et un

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1 certain nombre d'individus ont été tenus responsables pour leurs actes.

2 Enfin, la défense souhaite présenter un certain nombre de faits qui seront

3 contenus dans une bande vidéo qui ne prendra que sept minutes; il s'agit

4 de faits qui ne seront pas communiqués par des propos de la défense afin

5 de ne pas être pris pour subjectifs. Il s'agit d'autres participants ou

6 témoins de ce qui s'est passé avant la guerre ou autour de cette guerre,

7 qui prendront la parole pendant cette guerre, qui ont analysé les

8 événements relatifs à la guerre et qui montreront sous une autre lumière

9 les causes de la durée aussi longue de cette guerre, montrant que cette

10 guerre aurait pu être évitée si la communauté internationale avait été

11 objective et neutre. La bande MFI24, s'il vous plaît.

12 (Diffusion de la vidéo, pas de traduction.)

13 (Fin de la diffusion vidéo.)

14 M. le Président (interprétation): Maître Piletta-Zanin, si je ne m'abuse,

15 je présume que c'était la séquence vidéo que voulait nous montrer Me

16 Pilipovic, n'est-ce pas? Et si je comprends bien, vous allez maintenant

17 prendre la parole? Je vous prie de commencer.

18 M. Piletta-Zanin: Merci beaucoup. Monsieur le Président, Messieurs les

19 Juges. La défense d'abord entend vous remercier pour la récente décision

20 rendue ce 3 octobre. Nous constatons que nous allons en définitive, nous

21 semble-t-il, dans le bon sens puisque, par trois fois déjà à ce jour,

22 votre Chambre a prononcé l'acquittement. Il y a un élément sur lequel

23 j'entends m'attarder quelque peu: c'est la notion de plan.

24 S'il y a eu un plan à Sarajevo, ça n'est très certainement pas d'un plan

25 de Corps dont il s'agit, et certainement pas de ce plan de Corps visant

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1 prétendument à l'élimination des populations musulmanes. On en a

2 passablement discuté, mais, apparemment, on n'en a rien prouvé. C'est un

3 plan et une campagne bien antérieurs à l'année 1992 qui allaient

4 consister, comme on vient de le voir dans ces derniers extraits, à

5 organiser depuis cette date le démantèlement de ce qui avait été la Bosnie

6 pluriethnique.

7 Interprète: Maître Piletta-Zanin, pourriez-vous parler dans le micro, les

8 interprètes ne vous entendent pas?

9 M. Piletta-Zanin: Un plan destiné, disais-je, à organiser le démantèlement

10 de la Bosnie pluriethnique pour en faire une Bosnie quasi monoethnique.

11 Mais s'il s'est trouvé un plan aussi, c'est vraisemblablement également

12 celui de la collectivité internationale, cette même collectivité

13 internationale qui a aujourd'hui instauré votre Tribunal, ce Tribunal,

14 notre Tribunal, qui a la tâche de juger le général Galic. Une collectivité

15 qui, à l'époque, s'est très peu souciée et sans doute trop peu souciée de

16 cette dissolution de l'ancienne Yougoslavie, quand elle n'a pas plus

17 simplement souhaité, -et la défense se doit de l'indiquer-, souhaité en

18 accélérer le processus pour des motifs d'opportunités politiques. Cela a

19 été fait alors même qu'au regard de l'Histoire, personne ne pouvait

20 raisonnablement ignorer les risques que l'on prendrait, c'est-à-dire celui

21 d'un conflit où on allait nécessairement précipiter cette ancienne

22 Yougoslavie. Et s'il se trouve des responsabilités, il faut d'abord

23 regarder quelles sont les nôtres. Quand je dis "quelles sont les nôtres",

24 j'entends bien là celles de la collectivité internationale. Ces faits, qui

25 sont pour partie nécessairement antérieurs à la période visée dans l'Acte

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1 d'accusation, sont néanmoins importants pour essayer de comprendre comment

2 et pourquoi un homme, un officier qu'on appelle parfois un "homme

3 d'honneur", s'est trouvé dans l'obligation d'obéir au sein d'une tourmente

4 qu'il n'a ni voulue, ni provoquée et dont, certainement, il n'a pas été le

5 complice.

6 Lorsque l'Histoire passe, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, nous

7 savons qu'elle fait peu cas des hommes. Mais après que l'Histoire s'est

8 déroulée, après qu'elle est passée, ce sont ces mêmes hommes -puisqu'il va

9 bien falloir justifier la guerre- qui rechercheront des coupables et, en

10 général, c'est dans le camp des vaincus qu'on en trouve le plus ou qu'on

11 les trouve le plus volontiers. Par contre, le Droit aujourd'hui et les

12 Juges désignés par la collectivité internationale, ces Juges que vous

13 êtes, devront s'employer, nous semble-t-il, à démontrer qu'à l'aube du 21e

14 siècle, la justice internationale, qui en quelque sorte ouvre ces portes

15 cette année, eh bien, cette justice quelque que soit les faits reprochés à

16 un accusé, est bien au-dessus. Bien au-dessus de toute considération

17 politique d'une part, et surtout que cette justice internationale ne

18 saurait en aucun cas se résumer à l'application à nos yeux simplistes d'un

19 syllogisme qui serait le suivant: premièrement, les soldats serbes ont

20 tiré sur la ville; deuxièmement, il y avait des civils à Sarajevo;

21 troisièmement, par conséquent, les soldats serbes ont délibérément conduit

22 une campagne sur des civils.

23 Ce schéma nous paraît bien simple et la défense va s'atteler à démontrer

24 non seulement qu'il n'y a pas eu de plan, comme le soutien ou l'a soutenu

25 l'accusation, mais qu'en plus, il n'y a certainement pas eu de campagne.

Page 13223

1 Il s'agit, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, d'un exercice

2 particulièrement difficile. Pourquoi? Parce que voici que la défense va

3 devoir faire la preuve de quelque chose qui n'est pas, nous savons que les

4 juristes appellent cela dans leur jargon "l'approbatio diabolica" et c'est

5 là notamment la raison du nombre des témoins militaires cités par la

6 défense. Pourquoi? Eh bien, parce qu'il faudra bien que chacun de ces

7 témoins viennent nous dire, concernant la petite fraction de ligne dont il

8 avait la garde ou la responsabilité, que concernant ce petit secteur, il

9 n'avait jamais reçu d'instructions d'ouvrir le feu sur tel ou tel autre

10 objectif civil. Et cet exercice, nous devrons le faire non pas une seule

11 fois, mais de le répéter de manière structurée et systématique pour

12 apporter la preuve par le nombre même de ces témoignages que jamais de

13 telles instructions n'avaient existé.

14 Par ailleurs, ces témoins pourront prouver le nombre très élevé -Me

15 Pilipovic vous l'a rappelé tout à l'heure- des cibles littéralement

16 éparpillées dans tout Sarajevo. Ce qui fait que réduire le nombre des

17 témoins de la défense, ce serait porté déjà atteinte à son droit.

18 Pas de plan, mais tout aussi bien pas de Sarajevo assiégée. Nous l'avons

19 vu, les médias internationaux ont fait chorus pour présenter de Sarajevo

20 l'image d'une ville assiégée de toute part avec, pour simplifier, des

21 assaillants serbes d'une part, désignés comme agresseurs dans la néo

22 phraséologie de la présidence. Bien évidemment, sur les auteurs tirant

23 aveuglément sur la ville, et de l'autre côté, des défenseurs pris sous ce

24 feu, rien n'est plus beau que cette vision schématique qui a l'avantage de

25 la clarté, mais rien n'est plus faux aussi. Et il suffira ici de rappeler

Page 13224

1 que l'accusation a été dans l'incapacité de fournir des chiffres sur

2 lesdits quartiers, lesdits secteurs administratifs que composait Sarajevo

3 pour la simple raison qu'une grosse moitié -six secteurs- était d'un côté

4 de la barrière et les autres secteurs de l'autre. Il n'y avait pas de

5 sièges, il y avait une partition de la ville. Et ce qui sera

6 particulièrement déterminant dans la cause de la défense, c'est d'établir,

7 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, à quel point les lignes -je

8 fais référence à cet immeuble que nous avons vu pris en photographie tout

9 à l'heure, littéralement déchiré entre les deux parties-, à quel point les

10 lignes de conflit étaient voisines et à quel point cela allait impliquer

11 des réactions militaires que nos experts viendront nous exposer.

12 Quant à ces images que nous avons tous peut-être encore en mémoire ou à

13 l'esprit, de citoyens devant affronter l'hiver, ses rigueurs et les

14 difficultés de tout genre pour sortir, se procurer du bois de chauffe,

15 couper des arbres dans les rues, eh bien, il faut que nous soyons très

16 attentifs également à ce que votre Chambre, votre Chambre a indirectement

17 qualifié "d'exploitation de la misère" en posant un certain nombre de

18 questions à certains témoins. Car quelle était cette ville assiégée ou

19 prétendument assiégée, et c'est là un des arguments de la défense, dont

20 les hôpitaux servaient -et nous le prouverons- de prisons pour ses sous-

21 sols et de places de tirs pour ses alentours?

22 Il faut que l'on comprenne cette vérité qui est que le Serbe n'a pas été

23 un tireur fou, fanatique et assoiffé de sang, mais qu'il y avait dans

24 cette guerre civile des réalités difficiles à croire, mais qu'il faudra

25 bien qu'on expose et qu'il faudra bien que l'on prenne en compte.

Page 13225

1 A cet égard et dans la mesure où tout particulièrement les bombardements

2 sont concernés, la défense non seulement prouvera qu'aucune instruction

3 spécifique, de viser spécifiquement des objectifs civils leur ait été

4 donnée, mais surtout elle fait référence à ces dépositions qui reviendront

5 également dans le cadre de la défense selon lesquelles la destruction des

6 installations urbaines, des équipements urbains, est plutôt le fait du

7 politique que du militaire. Et lorsqu'on dit "du politique", c'est du

8 politique à l'intérieur plutôt que du politique à l'extérieur.

9 Aussi, la défense va-t-elle s'attacher à établir que les forces adverses

10 aux troupes que commandait le général Galic, lorsqu'elles bombardaient,

11 commettaient également, elles aussi, et dans une mesure non négligeable,

12 des erreurs de tirs, des dommages collatéraux.

13 Or, si de telles erreurs ont été commises et dans une mesure relativement

14 importante, la défense entendra par là prouver tout aussi bien la réalité

15 de son affirmation selon laquelle, dans une telle guerre urbaine, de tels

16 dommages collatéraux, de telles erreurs sont non seulement parfaitement

17 possibles, mais, hélas, le lot quotidien.

18 La défense ne cache pas qu'à ce jour aucune procédure n'a jamais été

19 ouverte contre qui que ce soit pour ces bombardements, ce dont elle voit

20 ici un indice plus qu'important des faits qu'elle expose.

21 Il y a un autre aspect sur lequel la défense entend également faire porter

22 les enquêtes, c'est celui du devoir du militaire. Au combat, le premier

23 devoir d'un chef militaire est de tout faire, tout faire ce qui est

24 légalement possible s'entend, pour gagner la guerre ou à tout le moins ne

25 pas la perdre. Sarajevo est au centre de la guerre, et qui tient Sarajevo

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1 tient la Bosnie dont elle était l'un des théâtres.

2 L'obsession de tout chef militaire -et je crois que ceci n'a pas été

3 jusqu'à présent suffisamment exposé-, son vrai cauchemar, c'est

4 l'infériorité numérique. C'est la situation où se trouvait le général

5 Galic dont le rapport des forces armées était celui de 400%, quatre fois

6 plus de soldats opposés à l'armée du général Galic. S'il est vrai qu'on ne

7 sait jamais ce que donne la fortune des armes, il est vrai également, il

8 est vrai également -pardonnez-moi- que ce devoir d'un commandement est de

9 tout faire dans ces circonstances pour diminuer cette proportion pour

10 chercher à rééquilibrer le rapport des forces, afin d'éviter ce qui ne

11 serait rien d'autre que la défaite annoncée ou la chronique d'une bataille

12 perdue d'avance. Dans cette situation, -et les experts vous le diront-, le

13 devoir premier d'un chef militaire, c'est lorsque les armées s'enterrent.

14 Et c'était le cas, à Sarajevo, de chercher à atteindre ces soldats par les

15 moyens techniques en sa possession, et ces moyens, ce ne sont rien d'autre

16 que des tirs indirects, des bombardements, des tirs de lancement.

17 Dans la réalité historique, nous avons beaucoup de cas où les armées se

18 sont enterrées, retranchées. On a cité déjà, je crois, le Bois des Dames;

19 on pourrait citer Verdun, mais on pourrait tout aussi bien maintenant

20 citer les campagnes d'Afghanistan: c'est exactement le même problème.

21 Lorsque l'on veut diminuer ce rapport des forces ou atteindre l'armée

22 adverse, on doit s'en donner les moyens. Et la défense s'attachera à

23 prouver, non seulement que cela était légitime mais que c'était du devoir

24 du général Galic, premier point. Mais, en second lieu, que pour atteindre

25 des armées terrées, il faut un nombre de coups extrêmement élevés et que

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1 ce n'est certainement pas avec un tir ou deux tirs ou trois tirs de

2 grenades qu'on pourra obtenir cet objectif militaire, le rééquilibrage des

3 forces.

4 Cette réalité, qui est aussi la réalité d'une guerre de tranchées à

5 Sarajevo, eh bien, cela explique, dans une certaine mesure, et pour

6 l'essentiel, le rapport des tirs entre les deux armées, puisque, bien

7 évidemment, d'un côté le général Galic et ses troupes essayaient de

8 diminuer ce rapport des forces, alors que, de l'autre côté -et cela, les

9 troupes de Sarajevo dites "de la présidence" l'avaient parfaitement

10 compris-, ces troupes allaient chercher à provoquer l'épuisement des

11 moyens militaires de leurs opposants en provoquant de tels tirs. En

12 d'autres termes, l'une comme l'autre des armées s'étaient lancées dans une

13 espèce de spirale des bombardements, l'une provoquant l'autre et l'autre

14 devant naturellement chercher à la diminuer.

15 C'est la raison pour laquelle nous entendrons aussi certainement des

16 témoignages sur le travail forcé établi par les autorités de la présidence

17 à Sarajevo: travail forcé sur les zones de tranchées afin de créer des

18 tranchées, d'établir ses lignes de défense, travail forcé qui était

19 parfois le fait de populations musulmanes et parfois le fait de

20 populations croates ou serbes.

21 Il demeurera cependant toujours dans cette procédure des zones d'ombre que

22 nous devrions tous chercher à comprendre. Comprendre, cela veut dire

23 prendre les faits, les saisir à bras-le-corps, essayer de les examiner

24 sans se laisser tromper ou égarer par ce que l'on a pu croire, on a pu

25 entendre, on a pu lire, ce que les médias internationaux ont pu dire;

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1 c'est-à-dire, en d'autres termes, d'essayer de laisser parler la raison

2 dans le vrai contexte des faits et c'est à quoi la défense va s'atteler.

3 Mais la justice internationale ne pourra faire l'économie dans ce procès

4 de questions telles que le trafic d'armes, organisé semble-t-il, de

5 manière extrêmement structurée en Bosnie; de questions telles que l'envoi

6 de troupes dites "Moudjahidin" qui répandaient la terreur auprès,

7 notamment, des soldats serbes, de ceux que l'on appelait les "Afghans" qui

8 sont réapparus plus récemment sur la scène internationale, et surtout, on

9 ne pourra en aucun cas faire l'économie de ces tirs "amis", c'est-à-dire

10 de ces tirs des forces de la présidence sur elle-même, sur ses propres

11 citoyens ou sur ses propres territoires.

12 Certes, on peut se demander s'il est concevable, envisageable qu'un chef

13 d'Etat prenne de telles décisions. Il n'est pas interdit de faire

14 référence à l'Histoire et je suis certain que l'accusation ne me

15 contredira pas tout à l'heure si on devait en reparler, si je devais

16 évoquer l'affaire Enigma et Coventry. Il y a des exemples historiques

17 frappants. Je pense que Sarajevo est appelée à rentrer dans cette

18 catégorie d'événements.

19 Bref, d'un côté, une partie tendant à vouloir faire accréditer son statut

20 de victime et de l'autre, un agresseur, mais tout cela dans le cadre d'une

21 campagne parfaitement orchestrée et qu'il nous faudra bien démonter un

22 jour ou l'autre. Ce qui est certain pour la défense, c'est que le prisme

23 de la justice s'accorde très mal, et nous allions dire trop mal, de tout

24 autre éclairage que celui du droit, d'une part, et de la raison, d'autre

25 part. Et cette raison ne pourra en aucun cas faire l'économie du fait que,

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1 dès décembre 1992, c'est la paix que les troupes serbes offraient à leurs

2 adversaires.

3 On ne pourra pas non plus se demander autre chose que de savoir s'il n'y

4 avait pas, au titre d'une campagne, celle d'une réelle exploitation de la

5 misère humaine, de l'exploitation de ses propres citoyens contraints pour

6 certains de travailler sur la ligne de front, comme on l'a dit et comme on

7 le re-prouvera dans la cause de la défense. Ces questions-ci devront être

8 sinon soulevées à tout le moins, dénoncées.

9 Si nous avons eu l'occasion de dire du côté de la défense que les vérités

10 démontrées tendent à devenir vénéneuses, il faut rappeler sans doute que

11 celles que l'on crie trop fort sont souvent mensongères. En définitive,

12 elles n'en sont plus crédibles. Il nous faudra sans doute à tous du

13 courage pour voir les faits, les examiner, les comprendre et surtout

14 rejeter ce confort qui pourrait nous amener à croire trop facilement ce

15 que l'on a voulu nous faire croire.

16 Dernière chose, enfin, s'il devait rester un seul témoignage, la défense

17 évoquerait volontiers celui de cette personne qui avait perdu un de ses

18 proches et qui, las de l'existence, avait décidé de venir s'offrir comme

19 une espèce de victime expiatoire sur la ligne de front. Je crois qu'il y

20 est retourné à plusieurs reprises. Eh bien, cette personne est allée, elle

21 s'est présentée à l'adversaire serbe désarmée et vêtue sans doute en

22 civil. Eh bien, ce que nous savons de cela, c'est que, comme elle était un

23 civil et que comme elle était reconnaissable en tant que tel, alors même

24 qu'elle s'est offerte aux tirs ennemis sur la ligne du front, elle n'a

25 jamais été visée, par conséquent, jamais été atteinte. Pourquoi? Sans

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1 doute parce que c'était un civil.

2 Il y a là matière à réflexion et j'aimerais que la défense puisse parvenir

3 à nous permettre de conduire cette réflexion jusqu'au bout.

4 Toute dernière chose, et dans cette ligne de la réflexion, il y a 10 ans,

5 il y a 10 ans, les deux Allemagnes se réunissaient et pas plus tard

6 qu'hier, à Berlin, s'inaugurait une place qui s'appellera la Place de

7 Paris, la Place de Paris. Il y a 10 ans à Sarajevo des événements

8 éclataient et la défense regrette, -mais il s'agit là d'un fait, à ses

9 yeux, plus qu'important-, la défense regrette que des noms comme Emile

10 Zola, comme Goethe ou La Benevolencija aient été littéralement gommés,

11 rayés de la carte pour être remplacés par d'autres dans un mécanisme qui,

12 à lui seul, démontre mieux que tout ce que la défense s'emploiera à

13 vouloir prouver.

14 Je vous remercie de votre attention.

15 M. le Président (interprétation): Merci, Maître Piletta-Zanin.

16 Etant donné que vous avez terminé de prononcer votre déclaration liminaire

17 au début de la présentation de vos moyens, je crois que l'une des

18 premières choses à faire maintenant, c'est d'évoquer un certain nombre de

19 questions au sujet des premiers témoins que nous allons voir à la barre,

20 parce qu'il y a encore des décisions à prendre à ce sujet. Cependant, je

21 pense qu'il convient de passer à huis clos pour se faire.

22 M. Ierace (interprétation): Avant de le faire, Monsieur le Président, je

23 me demande s'il serait possible d'évoquer deux questions relatives à

24 l'interprétation, voire au compte rendu d'audience.

25 M. le Président (interprétation): Maître Piletta-Zanin, vous devez être

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1 aux anges en entendant M. Ierace s'exprimer de la sorte?

2 M. Piletta-Zanin: Monsieur le Président, il s'agit d'une descente aux

3 enfers, j'en ai peur, parce que je viens de jeter un oeil sur le

4 transcript et je vois que ce n'est pas tout à fait ce que j'ai dit sur

5 Berlin. Je félicitais Berlin d'avoir eu cette idée grandiose d'ouvrir une

6 place qui s'appellera "la Place de Paris" et je regrettais à Sarajevo que

7 des noms comme Goethe, Zola et la Benevolencija soient rayés de la carte,

8 voilà. Maintenant, c'est la vie.

9 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Ierace.

10 Moi, par exemple, la page 38, ligne 6, il me semble qu'il y a eu une

11 confusion au sujet de ceux qui avaient 400% d'équivalent des forces des

12 autres, etc. Mais la confusion est pratiquement impossible parce qu'en

13 fait, c'est exactement le contraire. La traduction nous a dit le contraire

14 de ce qui a été dit par l'orateur, mais, s'il y a des éléments qui peuvent

15 entraîner une certaine confusion, n'hésitez pas à nous les signaler.

16 M. Ierace (interprétation): Oui, il y a un élément particulier qui se

17 trouve à la page 14, ce qui a été dit par

18 Me Pilipovic où on pouvait entendre: "Il n'y avait pratiquement aucune

19 zone dans la ville qui pouvait être considérée comme cible légitime du

20 point de vue militaire". (Fin de citation.)

21 M. le Président (interprétation): C'est donc à la page 14 du compte rendu

22 d'audience, ligne…?

23 M. Ierace (interprétation): Je pense en effet que c'est à la page 14,

24 ligne 16.

25 M. le Président (interprétation): Je vois en effet. Ligne 16, on peut lire

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1 la chose suivante et j'imagine Me Pilipovic que ce n'est pas ce que vous

2 aviez l'intention de dire puisqu'on peut lire, je cite: "Pratiquement, il

3 n'y avait aucune zone dans la ville qui pouvait être considérée comme une

4 cible militaire légitime". (Fin de citation.)

5 J'imagine qu'en fait, vous souhaitiez dire qu'il n'y avait aucune zone

6 dans la ville qui ne pouvait pas être considérée comme une cible légitime.

7 Oui, c'est tout à fait logique dans le contexte des autres observations

8 que vous avez faites. Autre chose, Monsieur Ierace?

9 M. Ierace (interprétation): Une seule et dernière chose, page 5, lignes

10 25, où l'on lit la chose suivante, je cite: "Il n'y aurait de la place que

11 pour ceux qui accepteraient de vivre conformément aux règles édictées par

12 une majorité musulmane insignifiante". (Fin de citation.)

13 Ce sont les quatre derniers mots pour lesquels je souhaiterais avoir

14 quelque éclaircissement.

15 M. le Président (interprétation): Oui, là, je souhaiterais moi aussi avoir

16 quelques explications car j'ai des doutes. Moi, j'ai compris les choses

17 suivantes de la manière suivante, à savoir qu'il n'y aurait plus de place

18 que pour ceux qui accepteraient de vivre conformément aux règles d'une

19 majorité, qui n'était qu'une très faible majorité si on la comparait, par

20 exemple une majorité de 35% contre une minorité de 33%, voilà ce que j'ai

21 compris. Est-ce que c'est ce que vous aviez l'intention de dire? Moi, j'ai

22 compris la chose, le terme de majorité insignifiante. C'est comme cela que

23 j'ai compris la chose. C'est cela, bien.

24 M. Ierace (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

25 M. le Président (interprétation): Ceci étant maintenant expliqué, je

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1 souhaite cependant évoquer un autre passage qui risque de créer la

2 confusion. Page, 24, ligne 8, on peut lire que dans le cadre de la

3 présentation de ces moyens-là: "L'accusation va montrer qu'il n'existait

4 aucun plan destiné à utiliser des tireurs embusqués contre les civils".

5 (Fin de citation.)

6 Je pense qu'en fait, c'est la défense qui entend prouver cela. Bien, nous

7 en avons terminé des observations au sujet du compte rendu d'audience et

8 je souhaiterais que nous passions à huis clos. Oui, Maître M. Piletta-

9 Zanin, vous souhaitiez intervenir?

10 M. Piletta-Zanin: Oui, j'avais préparé effectivement une liste et je

11 pensais que selon la jurisprudence préalable de votre Chambre, j'en ferai

12 part à la fin de la séance. Mais je peux le faire maintenant, je peux le

13 faire plus tard, c'est comme vous le souhaitez, il s'agit de petites

14 choses…

15 M. le Président (interprétation): S'il s'agit d'éléments mineurs qui ne

16 sont pas susceptibles de semer la confusion dans les esprits, parce que

17 jusqu'à présent les erreurs qui ont été signalées étaient telles qu'elles

18 ne pouvaient qu'entraîner la confusion; donc, peut-être, s'il s'agit

19 d'erreurs mineures, pourriez-vous les remettre à ceux qui travaillent sur

20 le compte rendu d'audience ce soir. Maintenant, je souhaiterais que nous

21 passions à huis clos aux fins de prendre un certain nombre de décisions.

22 (Audience à huis clos partiel.)

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18 (Audience publique avec mesures de protection à 18 heures 17.)

19 (Le témoin DP1 est introduit dans le prétoire.)

20 M. le Président (interprétation): Les mesures de protection étant

21 octroyées, je répète qu'il faudrait également faire en sorte que les

22 déformations des traits du visage soient mises en place, les procédures

23 visant à faire en sorte que la déformation des traits du visage existent.

24 Je veux vérifier si les mesures faisant en sorte que les déformations des

25 traits du visage sont mises en place, existent. Je vois que oui, très

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1 bien.

2 Bonjour, Témoin. Je ne vais pas vous adresser la parole en employant votre

3 nom à l'instant, puisque des mesures de protection vous ont été octroyées.

4 Je vais donc vous appeler témoin DP1. Mais puis-je d'abord vous demander,

5 avant de déposer, de faire une déclaration solennelle conformément au

6 Règlement de procédure et de preuve et de faire une déclaration

7 solennelle?

8 Témoin DP1 (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la

9 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

10 M. le Président (interprétation): Veuillez vous asseoir.

11 Témoin DP1, avant de procéder à votre audition par les parties, la Chambre

12 souhaiterait vous poser une question. La Chambre a été informée, il y a

13 quelques instants, qu'un article a été publié récemment mentionnant votre

14 nom. C'est un article qui jette le blâme sur les journalistes pour ce

15 qu'ils ont écrit dans les journaux et que c'est les journalistes et les

16 reporters qui devraient être traduits en justice. J'aimerais savoir si

17 vous avez la copie de cet article, une copie.

18 Témoin DP1 (interprétation): Oui, cet article est avec moi, mais je sais

19 qu'il y a environ un mois, dans le journal "Slobodna Bosna", dans le cadre

20 d'un feuilleton, ce que vous venez de dire a été mentionné et on voit mon

21 nom apparaître dans un encadré.

22 M. le Président (interprétation): Est-ce qu'il vous serait possible

23 d'obtenir un exemplaire de cet article? Par exemple, pour la journée de

24 demain, est-ce que quelqu'un serait en mesure de vous envoyer une copie de

25 cet article soit par fax ou par une autre façon?

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1 Réponse: Je peux essayer d'établir un lien téléphonique avec Banja Luka

2 demain. Je pourrais peut-être demander à une personne particulière de

3 faire les recherches et, s'il lui est possible, de l'envoyer par fax, par

4 exemple.

5 Question: Nous vous serions bien gré si vous pouviez faire de votre mieux

6 pour essayer de fournir à la Chambre une copie de cet article. Vous nous

7 direz ce qu'il en est des résultats de votre démarche.

8 Réponse: Oui.

9 M. le Président (interprétation): Nous sommes maintenant en huis

10 clos partiel. Nous allons maintenant revenir en audience publique, ce qui

11 ne veut pas dire que les mesures de protection sont abolies; elles sont

12 toujours en effet appliquées et votre visage subira une déformation; nous

13 ne verrons pas votre visage à l'écran et votre voix sera également

14 déformée. Et nous ne vous appellerons pas par votre nom, donc témoin DP1,

15 nous allons commencer votre audition par l'interrogatoire principal et

16 nous allons vous montrer la pièce D170.

17 Maître Pilipovic, en fait il s'agirait de la pièce 1700?

18 Mme Pilipovic (interprétation): Oui, Monsieur le Président.

19 M. le Président (interprétation): Bien, je vois que nous sommes en

20 audience publique de nouveau, je vous prie de commencer, Maître Pilipovic.

21 Mme Pilipovic (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Avant de

22 poser des questions au témoin, je demanderai à ce que l'on présente à ce

23 même témoin une feuille de papier.

24 (Intervention de l'huissier.)

25 Vous pouvez commencer.

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1 (Interrogatoire principal du Témoin DP1 par Me Pilipovic.)

2 Monsieur, les détails qui se trouvent sur cette feuille de papier sont-ils

3 exacts?

4 Témoin DP1 (interprétation): Oui.

5 Mme Pilipovic (interprétation): Merci. Monsieur le Président, la défense

6 demanderait au témoin de se présenter à la Chambre. C'est la raison pour

7 laquelle la défense vous demande la permission de passer à huis clos

8 partiel pour que le témoin puisse vous donner des informations sur lui. Il

9 s'agit de son lieu de résidence, de l'endroit où il habitait et où il

10 travaillait avant le début du conflit et pendant le conflit.

11 M. le Président (interprétation): Très bien, nous allons passer à huis

12 clos partiel, le témoin pourra ainsi décliner son identité et tel que vous

13 l'avez indiqué, après avoir entendu de qui il s'agit, nous pourrons

14 retourner en audience publique.

15 (Audience à huis clos à 18 heures 20.)

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15 (Audience publique avec mesures de protection à 18 heures 27.)

16 Je vois que nous sommes en audience publique. Je vous écoute, Maître

17 Pilipovic, vous pouvez continuer.

18 Mme Pilipovic (interprétation): Merci.

19 Monsieur DP1, vous nous avez dit avoir habité à Sarajevo, vous nous avez

20 également donné l'adresse, vous nous avez également expliqué que vous avez

21 vécu à Sarajevo même avant le début du conflit. J'aimerais vous demander,

22 s'il vous est possible de nous répondre de façon brève: selon vous, à quel

23 moment le conflit a-t-il commencé à Sarajevo?

24 Témoin DP1 (interprétation): Vous parlez du début du conflit armé? Selon

25 moi, il a commencé dans les premiers jours du mois de mai 1992. Il y a eu

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1 un incident qui est survenu dans la rue Dobrovoljacka, mais pour ce qui

2 est des conflits politiques et spirituels, ils ont commencé avec la

3 formation des partis nationaux si vous voulez, comme je les appellerai,

4 des "partis chauvinistes".

5 Question: Témoin DP1, lorsque vous parlez du conflit armé, lorsque vous

6 nous dites que, selon vous, il a commencé au mois de mai 1992, pourriez-

7 vous nous dire si l'on parle de ce conflit politique qui, selon vous,

8 existait déjà avant le mois de mai? De nouveau, selon vous, y a-t-il eu

9 des incidents qui ont provoqué ou qui, plutôt, vous menaient à croire

10 qu'il y aurait des conflits armés un jour?

11 Réponse: Avec la formation des partis nationaux, comme ils étaient très

12 tolérants et qu'on commençait à parler d'une haine contre les différentes

13 nations, on avait commencé à voir certains symboles de l'époque fasciste

14 qui réapparaissait. Cela avait formé, avait contribué à un goût amer et

15 plusieurs personnes avaient commencé à faire de la contrebande d'armes à

16 feu. Il y avait plusieurs incidents, non seulement dans les rues, mais il

17 y avait des incidents dans plusieurs institutions et également dans

18 l'assemblée nationale où les représentants des trois peuples

19 s'insultaient, étaient agressifs verbalement les uns envers les autres, et

20 ainsi de suite. Mais selon moi, je crois qu'au tout début du mois de mars,

21 lorsqu'il y a eu un meurtre d'un Serbe et lorsqu'un prêtre a été blessé,

22 je crois que c'est à ce moment-là que tout a vraiment commencé. Cela a

23 fâché énormément de gens, puisqu'on n'a pas trouvé l'auteur de ces crimes

24 et les barricades avaient été mises en place pour la première fois, à ce

25 moment-là. Et la première division ethnique de Sarajevo s'est formée à ce

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1 moment-là. C'est là qu'on a divisé la ville en deux, il y a eu deux

2 séparations politiques, deux divisions politiques.

3 Maintenant, les événements quant à enlever ces barricades, ces barricades

4 démontraient… délimitaient les endroits où habitait la population serbe ou

5 la population musulmane et, donc, la JNA essayait de démanteler ces

6 barricades. Des fois, elle arrivait à le faire, d'autres fois non, mais

7 elle était empêchée de procéder… de faire son travail.

8 Question: Monsieur DP1, dans votre réponse, il y a quelques instants, vous

9 avez parlé de la JNA. J'aimerais vous demander si vous, personnellement,

10 étant donné que vous étiez dans la ville de Sarajevo, est-ce que vous avez

11 remarqué… avez-vous été témoin oculaire d'une activité particulière des

12 soldats de la JNA dans la ville?

13 Réponse: Malheureusement, j'étais de ces citoyens qui croyaient encore

14 qu'il était possible de garder un état et que la JNA, même si elle était

15 le seul facteur intégrant dans ce pays, qu'elle était encore capable

16 d'empêcher les conflits armés qui se présentaient. Voyez-vous, à Sarajevo,

17 la situation était très particulière et je la vivais comme une réalisation

18 de deux concepts politiques: l'une qui voulait abolir l'ancien Etat et qui

19 voulait former une coalition sur cette base, et l'autre qui essayait de

20 maintenir l'ancien Etat. De toute façon, ils s'exprimaient verbalement,

21 mais les circonstances étaient telles que, avec la formation des partis

22 nationaux, on avait objectivement commencé à former des forces

23 paramilitaires et parapolicières. A ce moment-là, je n'étais pas encore

24 convaincu de ce fait, mais plus tard, plus particulièrement en lisant le

25 livre de M. le général Sefer Halilovic, j'ai appris de ce livre que, déjà

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1 au printemps 1991, -donc un an avant le début du conflit ou de la guerre-,

2 on avait procédé à la création, afin de pouvoir protéger le peuple

3 musulman, d'une forme de ligue patriotique qui comptait plus de 60.000

4 hommes armés. C'est ce que j'avais lu. Je ne sais pas combien d'autres

5 partis nationaux existaient, mais il était incontestable que des choses

6 bizarres survenaient. Et pour vous donner un bon exemple, je peux vous

7 dire que, au début du mois de mars 1992, il m'est bien difficile de

8 m'exprimer verbalement, j'ai des problèmes avec la gorge, j'avais consulté

9 le Dr Maxim Lucic qui est un médecin très connu. Il était un ami de mon

10 épouse et il travaillait dans l'hôpital militaire et lorsqu'on a terminé

11 l'examen, il a dit qu'il était complètement consterné, qu'il vivait dans

12 une panique, dans la peur totale et complète, car on le menace de tous les

13 côtés, la menace existe partout. Je lui ai demandé: "Quelle menace? Mais

14 de quoi parlez-vous?" Il m'a emmené jusqu'à la fenêtre et il m'a montré

15 que tous les bâtiments qui se trouvaient autour de l'hôpital militaire,

16 soit que les murs étaient troués. Donc qu'il y avait des trous dans ces

17 murs. Et il m'a expliqué que le personnel de l'hôpital militaire était

18 constamment ciblé parce que, derrière les trous, il y avait des personnes

19 armées qui pointaient leurs armes envers l'hôpital militaire.

20 Question: Monsieur le Témoin, pourriez-vous me répondre de manière plus

21 brève. Lorsque nous avons évoqué l'armée populaire yougoslave, pourriez-

22 vous me donner un complément d'information: où était stationnée la JNA?

23 Réponse: Il y avait plusieurs casernes à Sarajevo, dont six plus

24 précisément. Il y avait une caserne au centre, puis il y avait une caserne

25 à Bistrik, et puis il y en avait aussi quelques-unes en périphérie de la

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1 ville, puis à Lukavica, dans la caserne Viktor Bubanj aussi. Eh bien, il y

2 en avait plusieurs. Suffisamment pour que je puisse estimer qu'ils étaient

3 en mesure de sauver la ville, d'empêcher qu'il y ait un conflit.

4 Question: Pour en revenir à la réponse que vous avez donnée précédemment,

5 vous avez dit que vous êtes allé à l'hôpital militaire, que l'on vous a

6 mis en garde en vous disant que cet hôpital était encerclé et qu'il était

7 placé sous le contrôle de personnes armées. Pourriez-vous nous préciser, à

8 ce moment-là, avez-vous appris qui étaient ces hommes en armes?

9 Réponse: Eh bien, je pense que, dès ce moment-là, on savait tout. On

10 savait que la Ligue patriotique existait, que les Bérets verts existaient,

11 que le HOS était en place, que le HVO existait aussi, ainsi que des forces

12 serbes. Cependant, ils se trouvaient dans la partie de la ville où la

13 population était en majorité musulmane et, de toute évidence, d'après les

14 informations que j'ai reçues, les "Bérets verts" et la Ligue patriotique

15 étaient en train d'assiéger cette ville. C'est ce que j'ai appris de la

16 bouche des gens que je connaissais, des amis que j'avais parmi les

17 Musulmans. On m'a dit que c'était la fin de la Yougoslavie et l'armée

18 populaire yougoslave, qu'ils étaient bloqués et qu'il y avait un plan

19 selon lequel ils allaient soit rendre les armes et se rendre même, soit

20 qu'ils allaient être liquidés.

21 Question: Au début de votre déposition, vous avez dit que d'après vous, le

22 conflit armé a commencé à Sarajevo début mai. Vous faisiez référence à

23 quel conflit armé lorsque vous citiez ces dates du début du mois de mai?

24 Réponse: C'est à la télévision et pratiquement en direct que j'ai vu ce

25 qui s'est passé rue Dobrovoljacka. Ensuite, d'après ce que j'ai compris,

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1 deux parties se sont constituées, deux fronts, ou plutôt un front avec

2 deux ennemis qui se faisaient face. A partir de cette date, en 1992, les

3 combats se sont déroulés pratiquement de manière incessante et avec de

4 plus en plus d'intensité. Je pense donc que c'est la date du début d'un

5 conflit réel entre les deux parties belligérantes.

6 Question: Monsieur DP1, vous venez de nous esquisser la situation qui a

7 prévalu à Sarajevo en mars-avril et bien au mois de mai 1992. Pourriez

8 vous nous dire si vous avez pu remarquer vous-même des hommes en armes,

9 des soldats en ville?

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13 (Le Procureur se lève, le témoin s'interrompt).

14 M. Ierace (interprétation): Objection! S'agissant de la question… de la

15 question précédente, je cite la ligne 17: durant cette époque, à savoir

16 début 1992, on a demandé au témoin s'il a vu des hommes en armes. Le

17 témoin a répondu en décrivant les endroits et où il croyait… au moins

18 s'agissant d'une unité d'artillerie, donc il croyait qu'il y avait là des

19 unités militaires qui étaient stationnées mais il n'a pas expliqué comment

20 il a appris cela, il n'a pas dit s'il les a vues ou non. Ma collègue lui a

21 demandé par la suite : "Témoin, vous avez vécu dans ce quartier où vous

22 avez vu des installations militaires où des hommes armés étaient

23 stationnés". Mon objection est la suivante: j'aimerais savoir si le témoin

24 dépose sans faire la distinction entre la source des informations, à

25 savoir est-ce que c'est des choses qu'il a vues lui-même ou bien est-ce

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1 que c'est quelque chose qu'il a appris? Il s'est référé également à un

2 commandant également qui a vécu apparemment dans le même bâtiment que lui.

3 Je vous remercie.

4 M. le Président (interprétation): Maître Pilipovic, nous accordons

5 l'objection. Pourriez-vous poser des questions au témoin de telle façon

6 que nous puissions savoir de manière tout à fait claire quelle est la

7 source des informations que le témoin nous confère, à savoir quelles sont

8 les choses qu'il a vues, quelles sont les choses qu'il a entendues. Je

9 vous demanderai de préciser cela, de diriger un peu plus le témoin, et

10 s'il vous plaît, vous avez mentionné une fois le nom de la rue que vous

11 habitiez, vous avez mentionné cela à huis clos, on prendra des mesures

12 afin que cela soit expurgé du procès-verbal. Mais je voudrais vous

13 rappeler qu'il est dans votre intérêt que les mesures de protection

14 puissent fonctionner, et je vous le rappelle aussi, Maître Pilipovic, à

15 vous: posez les questions de telle manière que le témoin ne soit pas amené

16 à citer des choses qui ne devraient pas sortir dans le public. Veuillez

17 poursuivre.

18 Mme Pilipovic (interprétation): Je vous remercie Monsieur le Président.

19 Ma question suivante devait être celle-ci: le témoin a-t-il vu des hommes

20 armés? Donc c'est la raison pour laquelle je lui posais cette question.

21 Monsieur le Témoin, lorsque vous avez parlé des endroits où, d'après vous,

22 étaient stationnés des soldats, voulez-vous dire que vous les avez vus

23 vous-même? Avez-vous vu ces endroits et ces soldats là-dedans ou bien est-

24 ce que c'est quelque chose que vous avez appris de la part de quelqu'un

25 d'autre?

Page 13259

1 Témoin DP1 (interprétation): Je l'ai vu moi-même et puis ça a duré

2 suffisamment longtemps pour que tous ceux qui souhaitaient le voir aient

3 la possibilité de le voir.

4 Question: Vous, vous dites que vous l'avez vu là-bas et vous dites aussi

5 que cela a duré longtemps. Pourriez-vous nous préciser à partir de quel

6 moment avez-vous commencé à voir à ces endroits que vous avez cités, à

7 partir de quel moment y avez-vous vu des soldats? Donc, des hommes qui

8 d'après vous sont des soldats et qu'est-ce qui vous a permis de savoir

9 qu'il s'agissait bien de soldats?

10 Réponse: A l'école dentaire où l'unité est venue un peu plus tard, eh

11 bien, c'était un cas à part, mais dans tous les autres lieux, les unités

12 étaient stationnées depuis le tout début du conflit.

13 Question: Lorsque vous dites que c'est depuis le tout début du conflit que

14 les unités se sont trouvées à ces endroits, voulez-vous nous préciser le

15 mois, à partir de quel mois en 1992, -puisque je pense que vous faites

16 référence à 1992-, à partir de quel mois y avez-vous vu des soldats?

17 Réponse: Depuis le début du mois de mai 1992.

18 Mme Pilipovic (interprétation): Vous dites que c'est à partir du mois de

19 mai 1992 dans le quartier que vous habitiez donc, vous avez vu des

20 soldats. Pourriez-vous à présent nous décrire l'aspect de ces soldats?

21 Quels habits portaient-ils? Etaient-il en uniforme? Si oui, de quel

22 uniforme s'agissait-il? Avaient-ils des insignes et des armes?

23 Témoin DP1 (interprétation): Ces soldats qui étaient placés sous le

24 commandement de Juka Prazina portaient des uniformes noirs. Les soldats

25 commandés par le commandant que j'ai cité, portaient des uniformes de

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1 camouflage. Il y a avait aussi des soldats dans certaines unités qui

2 portaient un uniforme orange ou rouge, eh bien, c'était le début de la

3 guerre et il y avait un grand nombre d'unités différentes. La seule chose

4 que je puisse dire, c'est que je les ai vus comme je viens de le décrire,

5 c'est ce genre d'hommes que je voyais. S'agissant de leurs armes, eh bien,

6 là où il y avait Jusuf Pusina, il y avait toujours aussi autour de lui des

7 hommes armés qui portaient des "éclairs" (phon), enfin des armes de ce

8 genre, enfin partout à Sarajevo il y avait des armes.

9 M. le Président (interprétation): Je vous prie de vous rapprocher des

10 micros pour que les interprètes puissent mieux comprendre vos propos.

11 Témoin DP1 (interprétation): Merci.

12 Mme Pilipovic (interprétation): Monsieur DP1, vous venez de décrire ces

13 soldats qui portaient des uniformes distincts, ainsi que des armes, c'est

14 ce que vous avez vu. Avez-vous vu également à Sarajevo des hommes en civil

15 qui portaient cependant une arme?

16 Réponse: Oui.

17 Question: Vous répondez par l'affirmative. Pouvez-vous nous dire où et

18 quand vous avez vu ce genre d'hommes?

19 Réponse: Pendant la deuxième moitié du mois d'avril, et surtout début mai,

20 il y a eu un certain nombre d'hommes en armes qui sont venus fouiller des

21 maisons, qui faisaient irruption dans des appartements; ils rentraient,

22 ils portaient des armes. Eh bien, il m'est arrivé d'en croiser. Il m'est

23 arrivé également de croiser des hommes aux postes de contrôle. Dès le

24 début du conflit, il y a eu un certain nombre de postes de contrôle qui

25 ont été érigés, et c'est là qu'il y avait aussi des hommes en civil mais

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1 armés, qui étaient postés.

2 Question: Monsieur DP1, vous avez décrit la situation dans le quartier où

3 vous habitiez, vous nous avez décrit ces endroits où il vous est arrivé de

4 voir des hommes en armes, donc qui appartenaient à l'armée. J'aimerais

5 savoir s'il y a d'autres endroits qui, à votre connaissance, étaient

6 utilisés par l'armée. Pourriez-vous nous préciser de quels lieux il

7 s'agit?

8 Réponse: A l'époque, je ne circulais pas en ville, je me contentais

9 d'aller de chez moi au travail dans un premier temps. Puis, ensuite,

10 j'allais de chez moi chercher à manger. Donc je peux dire que j'en ai

11 entendu parler mais que, moi-même, personnellement, je n'en ai pas vus.

12 Question: Dans l'immeuble où vous travailliez, y avait-il l'armée, des

13 soldats?

14 Réponse: Oui. Début août, M. Jovan Divjak qui, à l'époque, était

15 commandant adjoint de l'armée de Bosnie-Herzégovine, est venu dans ce

16 bâtiment. Il nous a réunis, les gens qui étaient responsables de cette

17 entreprise. Il nous a demandé, il nous a ordonné d'évacuer les employés du

18 rez-de-chaussée, de l'entresol, parce que c'est là-bas qu'il allait

19 installer le quartier général, l'état-major, et c'est ce qui s'est passé.

20 Par la suite, on a installé des blocs en béton à cet endroit, et l'armée a

21 emménagé dans ces locaux; en fait c'était le personnel du grand état-

22 major. J'ai arrêté de m'y rendre, mais j'ai appris que c'est ce qui s'est

23 passé.

24 Mme Pilipovic (interprétation): Vous dites que les étages inférieurs ont

25 été vidés pour pouvoir accueillir l'armée, il s'agit du bâtiment où vous

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1 travailliez. Vous êtes en train de nous dire que vous aviez continué à

2 travailler par la suite? Et si oui, quels sont les étages que vous avez

3 occupés pendant votre travail?

4 M. Ierace (interprétation): Il y a peut-être un problème de traduction: la

5 question qui a été posée attirait l'attention du témoin sur l'immeuble où

6 il habitait. Mais, compte tenu de la réponse, je ne comprends plus s'il

7 s'agissait de la maison où il vivait ou de la maison où il travaillait. Et

8 la dernière question de ma collègue se réfère au bâtiment ou il

9 travaillait.

10 M. le Président (interprétation): A en juger d'après le compte rendu,

11 Maître Pilipovic, page 69, ligne 16, il est question du bâtiment que le

12 témoin habitait, donc de savoir s'il y avait des soldats qui étaient

13 stationnés. Et d'après la réponse, il est question du bâtiment où il

14 travaillait.

15 Mme Pilipovic (interprétation): Oui, c'est cela, c'est comme ça que j'ai

16 posé ma question. Peut-être qu'il y a eu une erreur de traduction.

17 M. le Président (interprétation): Cela a été tiré au clair, poursuivez.

18 Mme Pilipovic (interprétation): Monsieur DP1, vous êtes en train de dire

19 que les deux premiers étages ou trois, comme vous l'avez dit, du bâtiment

20 où vous travailliez, étaient des étages où l'on a installé l'armée.

21 Témoin DP1 (interprétation): L'armée a installé un contrôle à l'entrée,

22 mais les employés ont continué à venir travailler puisqu'il s'agit d'un

23 bâtiment de six étages.

24 Question: Puisque nous sommes en train de parler de l'armée et de

25 l'armement, j'aimerais savoir si, dans le quartier où vous viviez où vous

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1 voyiez des soldats, j'aimerais savoir si vous y voyiez également des

2 armes. Et si oui, pouvez-vous nous préciser de quelle armée il s'agissait?

3 Réponse: Je vous ai dit qu'il m'est arrivé de croiser des hommes en armes,

4 des soldats en armes. Si je puis situer ça dans le temps –et ce n'est pas

5 chose facile-, je dirai que c'est au moment du changement à la tête du

6 Gouvernement et à la tête de la République de Bosnie-Herzégovine. Donc,

7 c'est à partir du moment où c'est M. Siljadzic qui est venu occuper un

8 poste de direction, eh bien, c'est à partir de ce moment-là que l'on ne

9 voyait plus d'hommes en armes circuler en ville, contrairement à la

10 période précédente.

11 Question: Pouvez-vous nous préciser le moment dans le temps?

12 Réponse: Certainement, après le mois de septembre 1992, mais je ne peux

13 pas vous préciser cela davantage. Peut-être était-ce plus tard, peut-être

14 plus tard.

15 Mme Pilipovic (interprétation): Je vous ai demandé si, dans cette partie

16 de la ville où il vous est arrivé de voir des soldats ou des hommes en

17 armes, s'il vous est arrivé également d'y apercevoir des armes?

18 Témoin DP1 (interprétation): Des armes et des pièces d'artillerie. Une

19 seule fois, une seule fois il m'est arrivé de voir un mortier et ce

20 mortier était placé à bord d'un camion; ce camion traversait la ville.

21 Mais sans aucun doute, il y a eu aussi un certain nombre de pièces

22 d'artillerie. En fait, je ne peux parler que des pilonnages, enfin, des

23 endroits qui étaient pilonnés le plus souvent. J'évoque là le tunnel au

24 pied du Mont Kosevo, eh bien, cette partie-là a été souvent pilonnée. Et

25 les gens disaient qu'il y avait en fait comme une espèce d'exercice

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1 militaire, que des pièces d'artillerie se trouvaient en fait à bord de

2 voitures, de trains placés sur les rails, et que cela était déplacé de

3 temps à autres pour tirer à partir de cela.

4 M. Ierace (interprétation): Objection! Il s'agit de nouveau d'une

5 information de seconde main, indirecte donc, et j'estime qu'il s'agit d'un

6 élément de déposition qui n'aide pas grandement la Chambre de première

7 instance.

8 Dans la première partie de sa réponse, il y a des éléments qui ne

9 suscitent pas mon objection. Donc le témoin dit qu'il a vu personnellement

10 un camion et qu'il y avait à bord de ce camion un mortier. Mais, à partir

11 de ce moment-là, le témoin se réfère à des choses dont il n'a pas une

12 connaissance directe; il s'agit de suppositions.

13 (Les Juges se concertent sur le siège.)

14 M. le Président (interprétation): Monsieur Ierace, j'ai l'impression que

15 votre objection concerne plutôt la réponse que la question. Mais mis à

16 part cela, je pense que nous pourrions peut-être trouver une solution.

17 M. Ierace (interprétation): Je n'ai pas pu soulever une objection au sujet

18 de la question, mais la question consistait à demander au témoin s'il

19 avait vu des choses; donc c'est la réponse plutôt qui posait problème.

20 M. le Président (interprétation): Premièrement, en tant que telles, les

21 dépositions indirectes ne doivent pas être rejetées par ce Tribunal.

22 D'autre part, Maître Pilipovic, lorsque les informations de deuxième main

23 où l'ouï-dire ne concerne pas des éléments particuliers mais plutôt des

24 choses d'ordre général, et lorsque les sources de cet ouï-dire sont aussi

25 dites de manière générale, eh bien, lorsqu'il s'agit d'évaluer la valeur

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1 probante de la déposition, nous serons amenés évidemment à n'accorder à ce

2 genre de déposition que très peu de poids.

3 Par conséquent, je vous demanderai d'aider le témoin à ce qu'il réponde de

4 telle manière que cela nous aide réellement. Donc vous pourriez peut-être

5 aussi l'interrompre. Si vous pensez qu'il peut donner davantage de

6 détails, même s'il s'agit d'informations indirectes, eh bien, de toute

7 façon, il ne fait aucun doute que cela pourra aider la Chambre.

8 Et, s'agissant du témoin, j'aimerais qu'il nous dise au premier chef ce

9 qu'il a vu lui-même. Donc cela ne veut pas dire que les choses qu'il a

10 entendues de la part d'autres personnes n'auraient aucune pertinence, cela

11 pourrait être au contraire tout à fait pertinent. Mais je demanderai au

12 témoin d'écouter attentivement les questions pour pouvoir répondre de la

13 meilleure façon en se fondant sur sa propre expérience et ses propres

14 observations.

15 Maître Pilipovic, posez plus de questions au sujet de la source des

16 informations que possède le témoin. Je vous prie de poursuivre, mais il

17 est 19 heures.

18 Mme Pilipovic (interprétation): Oui, justement j'allais lui poser ce genre

19 de question.

20 M. le Président (interprétation): Oui, nous allons donc poursuivre demain.

21 Monsieur DP1, vous venez à peine de commencer avec votre déposition. Vous

22 allez poursuivre demain. Nous allons commencer à 14 heurs 15, et je vous

23 prie de ne pas entrer en contact avec l'une ou l'autre des parties qui

24 vous poseront des questions.

25 Et un autre point que j'ai oublié: l'on nous a dit que vous risquez

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1 d'avoir quelques soucis de santé. Je vous invite à nous informer sans

2 hésitation aucune de toute gêne que vous pourriez avoir, et je voudrais

3 m'assurer que tout soit mis en place pour que vous puissiez résoudre tout

4 problème que vous pourriez éventuellement avoir pour pouvoir surmonter ces

5 difficultés. Donc n'hésitez surtout pas.

6 Je tiens à informer les parties au sujet d'un autre point. Madame la

7 Greffière, s'il vous plaît, pourriez-vous raccompagner le témoin? Et je

8 voudrais que les mesures de protection, donc la déformation des traits du

9 visage, restent en place.

10 (Le Témoin DP1 est reconduit hors du prétoire.)

11 (Audience publique.)

12 (Questions relatives à la procédure.)

13 Je souhaiterais informer les parties de la chose suivante: il s'agit du

14 calendrier des audiences. Nous avons compris que les parties souhaitaient

15 siéger plutôt le matin que l'après-midi. Est-ce que c'est bien compris ou

16 est-ce que vous préférez le contraire?

17 M. Ierace (interprétation): Je m'exprime en mon nom personnel et je trouve

18 personnellement que le système des semaines alternées est assez propice

19 aux dispositions que l'on peut prendre sur un plan personnel, mais ce

20 n'est pas un facteur décisif, bien entendu.

21 M. le Président (interprétation): Oui, j'informe les parties que dans la

22 semaine du 21 octobre, c'est-à-dire le 21, 22 -et ce n'est pas encore sûr

23 le 25 si nous siégions-, mais en tout cas, on pourrait siéger le matin, le

24 21 et le 22. Et pour la semaine du 4 novembre, c'est-à-dire à partir du

25 mardi, à partir en fait du 5 novembre jusqu'au 8 novembre, nous aurions la

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1 possibilité éventuellement de siéger le matin. Même chose sans doute pour

2 la semaine du 2 décembre, c'est-à-dire le 2, le 3, le 4 et le 6 décembre

3 puisque nous ne siégerons pas le 5. Je souhaiterais demander aux parties

4 de bien vouloir consulter leurs agendas pour voir s'il y a des éléments

5 qui les empêcheraient de siéger le matin pendant les jours que je viens de

6 vous dire.

7 M. Piletta-Zanin: Monsieur le général Galic m'a soufflé dans mon dos que,

8 pour des raisons qui sont liées à sa santé, lui également préférerait dans

9 la mesure du possible que l'on siégeât en matinée, merci.

10 M. le Président (interprétation): Maintenant, il faut mettre en balance

11 les problèmes de santé de l'un et les dispositions relatives à la vie

12 privée de l'autre: beaucoup de problèmes! Mais nous n'allons pas y passer

13 une éternité à ce stade parce qu'il nous faut terminer l'audience. En tout

14 cas, je vous ai donné les dates et je vous demande d'y réfléchir.

15 M. Ierace (interprétation): Encore une question d'intendance, puisque nous

16 n'avons pas reçu la liste des pièces à conviction et des témoins pour la

17 semaine prochaine.

18 M. le Président (interprétation): Oui, sept jours, n'est-ce pas. Je

19 voudrais savoir demain à quel moment ces documents ont été communiqués ou

20 à quel moment la défense va communiquer les documents relatifs à la

21 semaine prochaine ou si ces documents ont déjà été communiqués. Je

22 voudrais m'informer demain, être informé dès le début de l'audience de

23 demain matin.

24 Mme Pilipovic (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les

25 Juges, la défense a communiqué ou plutôt va communiquer dans une heure,

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1 avant une heure déjà, ces pièces. C'est peut-être déjà fait parce que nous

2 avons donné des informations, des instructions dans ce sens à nos

3 collaborateurs.

4 M. le Président (interprétation): La Chambre disposera également d'un

5 exemplaire. J'espère que vous avez indiqué sur cette liste les mesures de

6 protection demandées, sinon je vous demande le faire car nous voulons être

7 prévenus au sujet de tous les témoins qui demandent des mesures de

8 protection.

9 Puisqu'il est 19 heures 05 et qu'il n'y a rien d'autre d'urgent à traiter,

10 je vais maintenant lever l'audience jusqu'à 14 heures 15 demain.

11 (L'audience est levée à 19 heures 07.)

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