Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mardi 20 mai 2008

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tous et à toutes.

6 Monsieur le Greffier, veuillez appeler l'affaire.

7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,

8 Madame, Monsieur les Juges, bonjour. Il s'agit de l'affaire IT-06-90-T, le

9 Procureur contre Ante Gotovina et consorts.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur.

11 Monsieur Russo, êtes-vous prêt à reprendre votre interrogatoire principal.

12 M. RUSSO : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. l'Huissier est en train de chercher

14 le témoin pour l'accompagner dans le prétoire.

15 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Tchernetsky.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais vous rappeler que vous êtes

19 toujours tenu de respecter la déclaration solennelle que vous avez

20 prononcée hier au début de votre déposition.

21 M. Russo va poursuivre son interrogatoire principal.

22 Je vous en prie, Monsieur Russo.

23 M. RUSSO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

24 LE TÉMOIN: ALEXANDER TCHERNETSKY [Reprise]

25 [Le témoin répond par l'interprète]

26 Interrogatoire principal par M. Russo : [Suite]

27 Q. [interprétation] Monsieur Tchernetsky, hier nous avions commencé à

28 parler du pilonnage de la zone de Cetina en juillet 1995. Est-ce que vous

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1 vous souvenez de ces incidents ?

2 R. Oui.

3 M. RUSSO : [interprétation] Je souhaiterais que M. le Greffier affiche la

4 pièce 4938 de la liste 65 ter.

5 Q. En attendant que cela soit affiché, j'aimerais vous dire que nous avons

6 essayé d'agrandir les parties de la carte qui a été versée au dossier hier.

7 Il s'agit de la pièce P206.

8 M. RUSSO : [interprétation] Voilà, est-ce qu'on pourrait agrandir cela.

9 J'aimerais demander à M. l'Huissier de faire en sorte de vous donner le

10 stylet.

11 Q. Ce qui vous permettra de faire un cercle autour de la zone dont vous

12 parlez dans votre déclaration de témoin où vous indiquez qu'il s'agissait

13 d'une zone qui a été pilonnée en juillet 1995.

14 R. Il s'agit de ce secteur.

15 Q. Merci.

16 M. RUSSO : [interprétation] Je souhaiterais le versement au dossier de

17 cette carte.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous n'avez pas d'autres annotations à

19 demander.

20 M. RUSSO : [interprétation] Non.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pas d'objections.

22 M. KEHOE : [interprétation] Non, pas d'objections.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que je pourrais avoir une cote.

24 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, ce sera la pièce P207.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il s'agit d'un extrait de carte qui est

26 versée au dossier.

27 M. RUSSO : [interprétation] Je vous remercie.

28 Q. Est-ce que vous pourriez, Monsieur Tchernetsky, expliquer à la Chambre

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1 ce qu'était l'opération Récolte, et comment est-ce que cela s'est passé,

2 quels ont été ses antécédents ?

3 R. De temps à autre, la région de Cetina faisait l'objet de pilonnages,

4 notamment lorsque les récoltes ont commencé. La direction serbe et les

5 autorités serbes ont pris contact avec le QG de la FORPRONU pour protester,

6 pour s'insurger contre ces pilonnages et ont demandé une aide pour que soit

7 empêché d'autres pilonnages parce que de ce fait le paysan ne pouvait pas

8 effectuer les récoltes, les moissons.

9 Dès que les machines ont été sorties dans les champs, le pilonnage a

10 commencé à partir ce côté de la Bosnie. Pour que les paysans puissent

11 effectuer leur moisson, nous avons organisé une opération conjointe, il

12 s'agissait d'une opération conjointe entre les observateurs du secteur sud

13 et la police civile des Nations Unies.

14 Et comment est-ce que nous avons procédé ? Il y avait une patrouille qui

15 avait été affectée quotidiennement à un véhicule, sur le véhicule flottait

16 un drapeau qui était visible, et cette patrouille aidait les gens à faire

17 leur récolte ou leur moisson. Nous avons supervisé afin de voir s'il y

18 avait du côté de la Bosnie des chars ou des armes, mais je vais dire

19 lorsque nous étions présents là-bas, il n'y a pas eu de pilonnage. Il y

20 avait une patrouille qui était de service et qui travaillait jusqu'au

21 déjeuner; ensuite après le déjeuner, c'était la police civile. Nous avons

22 organisé un roulement. C'est une opération qui a duré pendant une semaine,

23 voire un peu plus longtemps.

24 Q. Je vous remercie. Avant que vous n'effectuiez cette mission, est-ce que

25 vous vous étiez déjà rendu dans la vallée de Cetina ?

26 R. Oui. C'est une zone qui appartenait à notre zone de responsabilité et

27 nous organisions régulièrement des patrouilles dans cette zone.

28 Q. Est-ce que vous pourriez dire si vous ou votre équipe d'observateurs

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1 militaires ont jamais fait l'objet de restriction de mouvement ou de

2 déplacement dans la zone de Cetina ?

3 R. Non, non. Dans la zone de Cetina, les autorités serbes n'ont absolument

4 pas entravé notre travail.

5 Q. Est-ce que vous pourriez indiquer à la Chambre quelle est, par exemple,

6 l'ampleur de la zone de Cetina qui était pilonnée ? Est-ce que vous

7 pourriez donner une idée de ce qu'était la vallée de Cetina à la Chambre ?

8 R. C'est une vallée qui avait une longueur de deux à trois kilomètres,

9 vous aviez des maisons qui étaient disposées sur trois côtés; à l'ouest, au

10 nord et à l'est. Au centre, il y avait un très vaste champ.

11 Pour ce qui est des dimensions, ce que je sais, c'est qu'avant l'opération

12 Tempête, il y avait environ 1 500 personnes qui résidaient dans ce secteur.

13 Q. Est-ce que vous êtes en mesure de dire à la Chambre s'il s'agissait

14 d'une région qui était essentiellement serbe ou croate ?

15 R. Il n'y avait que des Serbes dans cette région.

16 Q. Est-ce que vous pourriez dire à la Chambre ce qui faisait exactement

17 l'objet de pilonnage ? Où avez-vous pu constater les traces de pilonnage ?

18 M. KEHOE : [interprétation] Je m'excuse, mais la question c'était : qu'est-

19 ce qui fait l'objet de pilonnage par opposition à quelles ont été les

20 preuves indiquant qu'il y aurait eu des pilonnages. Il s'agit de deux

21 questions différentes. Je suppose qu'il ne se trouvait pas là lorsque les

22 pilonnages ont eu lieu. Donc il fait état d'éléments de preuve -- bon,

23 c'est une différente question lorsque l'on pose une question à propos

24 d'éléments de preuve. Je souhaiterais que Me Russo procède par étapes.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez entendu, procédez par étapes.

26 M. KEHOE : [interprétation] Dans une note en bas de page, le témoin a

27 indiqué qu'il n'était pas présent lors du pilonnage.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais même lorsque vous n'êtes pas

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1 présent, vous pouvez émettre --

2 M. KEHOE : [interprétation] Oui, oui, je sais, mais c'était la deuxième

3 partie de ma question.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez.

5 M. RUSSO : [interprétation]

6 Q. Est-ce que vous pourriez dire à la Chambre si vous avez jamais pu

7 constater des éléments ou des indications de pilonnages dans la zone de la

8 vallée de Cetina ?

9 R. Oui. J'ai observé les suites de pilonnages dans la vallée de Cetina; et

10 personnellement, deux fois je me suis rendu sur le terrain pour enquêter à

11 ce sujet.

12 Q. Est-ce que vous pourriez expliquer à la Chambre ce que vous avez

13 exactement vu, ce qui vous a permis de constater qu'il y avait eu des

14 pilonnages ?

15 R. Nous avions été affectés à des missions, et ce, par le QG du secteur,

16 on nous avait demandé de mener à bien des enquêtes après des incidents de

17 pilonnage. Nous avons pu observer les cratères. Nous avons trouvé des

18 traces d'éclats d'obus, et nous avons pu observer également des éclats

19 d'obus ainsi que les traces qu'ils avaient laissées sur des maisons et sur

20 des voitures.

21 Q. Est-ce que vous pourriez dire à la Chambre si, lorsque vous vous êtes

22 rendu dans la vallée de Cetina, il y avait des armes de l'armée de la RSK

23 dans le secteur ?

24 R. Dans la zone dont je parle il n'y a eu une seule patrouille qui a

25 trouvé des armes ou des traces d'artillerie.

26 Q. Est-ce que vous pourriez dire à la Chambre s'il y avait des positions

27 adoptées par des soldats de l'armée de la RSK dans les zones qui faisaient

28 l'objet de pilonnage ?

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1 R. Pendant toute la durée de ma mission sur le terrain dans ce secteur,

2 j'ai vu seulement une fois un soldat qui nous a dit qu'il était en

3 permission dans la vallée de Cetina, et il n'était pas armé.

4 Q. Est-ce que vous pourriez dire à la Chambre si, lorsque vous effectuiez

5 des patrouilles ou lorsque les équipes des observateurs militaires

6 effectuaient des patrouilles, vous avez jamais trouvé quoi que ce soit qui

7 aurait eu une importance militaire dans la vallée de Cetina ?

8 R. Dans le secteur que je vous ai montré il n'y avait pas d'armes, il n'y

9 avait pas d'artillerie, il n'y avait pas de soldats. Je dois dire que la

10 batterie d'armes la plus proche se trouvait à quelques kilomètres dans le

11 secteur de Kijevo, puis un peu plus près de la ligne de confrontation au

12 sud de Cetina, à peut-être six ou huit kilomètres de distance.

13 Q. Vous venez de mentionner le nom d'un endroit qui s'appelle "Kijevo".

14 Regardez sur votre écran, il y a Kijevo que l'on voit en haut à gauche.

15 Est-ce que c'est l'endroit dont vous nous parlez ? Ce n'est pas la

16 peine que vous fassiez un cercle autour. Je vous demande tout simplement

17 s'il s'agit de cet endroit-là ?

18 R. Voilà, c'est là. Cela se trouve à l'ouest, au nord-ouest de Cetina, à

19 plusieurs kilomètres de Cetina.

20 Q. Est-ce que vous pourriez dire à la Chambre ce qui se trouvait

21 exactement à Kijevo ?

22 R. Je ne m'en souviens pas exactement, mais dans le secteur de Kijevo,

23 pour autant que je m'en souvienne, nous avons vu un lance-roquettes qui

24 était en position.

25 Q. Monsieur Tchernetsky, si l'armée de la RSK tirait à partir de la zone

26 qui était placée sous la responsabilité de votre équipe, vers une zone

27 contrôlée par la HV ou par d'autres forces croates, est-ce que c'est

28 quelque chose que votre équipe d'observateurs militaires aurait eu pour

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1 tâche, ou est-ce que c'est quelque chose à propos duquel vous auriez dû

2 mener une enquête ?

3 R. Cela dépendait de la zone ciblée parce qu'en fait le secteur était

4 divisé en plusieurs zones de responsabilité parmi les différents groupes

5 d'observateurs militaires. Du côté croate, il y avait deux groupes

6 d'observateurs militaires, l'un à Sinj et l'autre à Sibenik. Alors si un

7 territoire était ciblé et que ce territoire n'était pas placé dans leur

8 zone de responsabilité, il ne leur appartenait pas de mener à bien une

9 enquête. Mais si le pilonnage provenait du côté serbe, s'il s'agissait

10 d'artillerie serbe et que cela tombait dans notre zone de responsabilité,

11 alors il nous incombait de mener une enquête, et ce, afin de savoir d'où

12 provenaient exactement les tirs et les pilonnages.

13 Q. Est-ce que vous pourriez dire à la Chambre si on vous a jamais demandé

14 de mener à bien une enquête sur des tirs effectués par l'armée de la RSK,

15 et ce, dans la vallée de Cetina ?

16 R. Je m'excuse, mais je n'ai pas compris votre question. Qu'entendez-vous,

17 vous venez de dire que la zone de Cetina était ciblée par l'armée de la

18 République de la Krajina serbe, c'est cela que vous voulez savoir ?

19 Q. Non, je m'excuse. Je pense que vous n'avez pas tout à fait compris ma

20 question. Ce que j'aimerais savoir c'est si on vous a jamais confié une

21 mission afin de mener à bien une enquête à propos des tirs de l'armée de la

22 RSK, tirs qui ciblaient la vallée de Cetina ?

23 R. Non, non, pas pendant que j'étais en mission dans le cadre des

24 observateurs militaires des Nations Unies. Le QG ne nous a jamais confié ce

25 genre de mission.

26 Q. Je pense que ma question était un peu plus précise que cela. J'aimerais

27 savoir si vous et vos observateurs militaires avez jamais mené à bien des

28 enquêtes à propos de pilonnages provenant de l'armée de la RSK, et qui

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1 provenaient de la vallée de Cetina, et qui étaient destinés à une zone ?

2 R. A ma connaissance - je n'étais qu'un simple observateur à l'époque -

3 mais à ma connaissance, disais-je, ce genre d'enquête n'a pas eu lieu, en

4 tout cas ce genre d'enquête n'a pas été demandé à notre groupe

5 d'observateurs militaires.

6 Q. Je vous remercie.

7 M. RUSSO : [interprétation] Je vais passer à un autre sujet. Je ne sais pas

8 si vous avez des questions à poser au témoin à propos de ce thème.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, je n'ai pas d'autres questions à

10 poser.

11 M. RUSSO : [interprétation] Merci.

12 Q. J'aimerais maintenant que nous parlions des événements dans la zone de

13 Strmica avant l'opération Tempête. Je pense d'ailleurs que vous y faites

14 référence dans votre première déclaration de témoin. Il s'agit de la page

15 2, paragraphe 4 de la pièce P204. Dans ce paragraphe vous indiquez que vous

16 vous êtes rendu assez fréquemment dans la zone de Strmica, et vous faites

17 référence à des tirs d'artillerie provenant du côté croate.

18 Est-ce que vous pourriez dire dans un premier temps à la Chambre

19 combien de fois vous vous êtes rendu à Strmica pour mener à bien une

20 enquête à propos de la zone pilonnée ?

21 R. Pour mener à bien une enquête à propos de pilonnages, je m'y suis rendu

22 deux fois dans cette zone.

23 Q. Est-ce que vous pourriez, toujours à l'intention de la Chambre, nous

24 indiquer si vous avez trouvé des indices de pilonnages qui se seraient

25 produits dans cette zone ?

26 R. Je dirais une fois de plus que nous avons pu découvrir des cratères qui

27 provenaient de l'explosion d'obus. Nous avons également trouvé des

28 immeubles et des bâtiments qui étaient partiellement endommagés par des

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1 pilonnages et qui comportaient des traces d'obus.

2 Q. Est-ce que vous pourriez dire à la Chambre quelles étaient les

3 structures qui avaient été touchées ou frappées par ces éclats d'obus ?

4 R. Il s'agissait de maisons, de maisons résidentielles qui étaient

5 endommagées. Lors d'une enquête, moi personnellement je me suis rendu là --

6 M. KEHOE : [interprétation] Je m'excuse, je m'excuse. Mais ces informations

7 à propos des structures qui ont été touchées dans la zone de Strmica ne

8 figurent dans aucune des déclarations, ne figurent dans aucune note de

9 récolement, cela ne figure nulle part.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo, qu'en est-il ?

11 M. RUSSO : [interprétation] Dans la déclaration du témoin, le témoin

12 indique que la zone de Strmica a été pilonnée et qu'il n'y avait pas de

13 positions militaires dans cette zone. Donc ce n'est pas exagéré que de

14 demander au témoin ce qui a été frappé par le pilonnage.

15 M. KEHOE : [interprétation] Il y a des routes qui passent par Strmica et il

16 y a d'autres structures dans Strmica. Le conseil vient de poser une

17 question à propos des maisons civiles, rien n'a été indiqué à ce sujet et

18 il n'est pas non plus indiqué que le témoin a procédé à une analyse des

19 cratères lorsqu'il se trouvait là.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'y a pas de cible militaire. La

21 question était assez générale. Je pense que c'est une précision que M.

22 Russo a tout à fait le droit de poser. Et si cela pose des problèmes, vous

23 pourrez revenir lors du contre-interrogatoire, et si vous avez besoin de

24 davantage de temps, vous pourrez toujours demander davantage de temps.

25 Poursuivez, Monsieur Russo.

26 M. RUSSO : [interprétation]

27 Q. Je m'excuse, Monsieur Tchernetsky. Vous avez été interrompu lorsque

28 vous apportiez votre réponse à ma question. J'aimerais réitérer cette

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1 question et de vous demander quels étaient les bâtiments et les structures

2 qui ont été touchés par le pilonnage.

3 R. Nous savions qu'il y avait eu des pilonnages parce que nous avons pu

4 observer des cratères qui étaient le résultat d'explosions d'obus. Nous

5 avons pu voir des maisons résidentielles, des établissements scolaires

6 également qui ont été touchés et endommagés par les obus.

7 Q. Est-ce que vous ou votre équipe d'observateurs militaires avez jamais

8 fait l'objet de restriction de mouvement ou de déplacement avant

9 l'opération Tempête dans la zone de Strmica ?

10 R. Non. En fait, ce qu'il faut savoir, c'est qu'à Strmica il y avait des

11 positions du Bataillon de Knin de la FORPRONU qui se trouvaient à la

12 périphérie de cette zone. Il s'agissait du Bataillon kényan, et nous, tout

13 comme les soldats de la FORPRONU, n'avons jamais eu de problèmes pour nous

14 déplacer dans la zone. Notre groupe d'observateurs militaires contrôlait

15 régulièrement ce secteur et des patrouilles étaient envoyées

16 quotidiennement.

17 Q. Je vous remercie. Vous décrivez dans votre déclaration un incident bien

18 précis, il s'agit d'un pilonnage à Strmica, vous étiez présent avec

19 d'autres personnes. J'aimerais que vous relatiez à la Chambre ce qui s'est

20 passé exactement ce jour-là.

21 R. Cela s'est passé à la fin du mois de juillet. On nous a confié une

22 mission, c'était le QG du secteur qui nous a confié cette mission et qui

23 consistait à aller nous enquérir à propos d'un pilonnage qui s'était

24 produit pendant la nuit, la cible avait atteint un quartier résidentiel de

25 Strmica. C'est une enquête que nous avons effectuée à la demande du

26 commandement de l'armée de la RSK, et nous avons pu compter sur la

27 coopération des unités militaires de l'armée de la RSK. Nous avons envoyé

28 deux véhicules à Strmica; et avant que nous n'arrivions au niveau des

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1 positions établies par le Bataillon kényan, ce qu'il faut savoir, c'est que

2 dans un premier temps, nous voulions entendre leur témoignage à ce sujet

3 puisque eux s'étaient trouvés positionnés là-bas à ce moment-là, et à ce

4 moment-là, le pilonnage a repris.

5 Je dois dire que c'était une attaque d'artillerie et de roquettes qui

6 était particulièrement impressionnante. Il s'agissait d'un barrage

7 d'artillerie et de mortiers. Nous nous sommes vus contraints à rebrousser

8 chemin, à essayer de sortir du secteur qui était ciblé ainsi par ces tirs

9 d'artillerie; mais étant donné que les obus ont commencé véritablement à

10 tomber tout près, nous avons abandonné nos véhicules et nous nous sommes

11 dissimulés derrière l'une des maisons qui se trouvait tout près. Le

12 pilonnage s'est poursuivi pendant un assez long moment, nous étions cachés

13 dans le sous-sol de cette maison. Dès que le pilonnage s'est un peu calmé,

14 nous nous sommes rapprochés des véhicules en essayant de rester cachés et

15 nous sommes partis très rapidement.

16 M. RUSSO : [interprétation] Monsieur le Greffier d'audience, je

17 souhaiterais que vous affichiez la pièce de la liste 65 ter 4936.

18 Q. En attendant que ce document soit affiché, je vous dirai qu'il s'agit

19 d'une photographie aérienne de la zone de Strmica, et j'aimerais vous

20 demander de regarder cette photographie aérienne et, si vous le pouvez,

21 est-ce que vous pourriez faire un cercle autour de la zone qui a été

22 pilonnée le jour de l'incident dont vous venez de nous parler.

23 R. Le pilonnage a commencé alors que nous nous trouvions là, à peu près

24 dans ce secteur. Les premiers obus sont tombés à peu près à cet endroit-là,

25 à l'ouest de la position investie par le Bataillon kényan.

26 Puis ensuite, vers le sud -- non vous pouvez effacer cela.

27 Bien. Voilà, vers le sud, disais-je. Nous étions soit ici ou là lorsque

28 nous avons abandonné nos véhicules et lorsque nous nous sommes cachés dans

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1 ce sous-sol. Le pilonnage a couvert tout ce territoire, voilà, ce que je

2 viens de dessiner.

3 Q. Monsieur Tchernetsky, vous avez indiqué "ici et ici," où vous avez

4 parlé des véhicules. Est-ce que vous pourriez, je vous prie, apposer une

5 croix au niveau de l'endroit où, d'après vous, vous avez abandonné vos

6 véhicules ?

7 R. Je ne m'en souviens pas précisément, voilà c'était à peu près là.

8 Q. Est-ce que vous pourriez faire un cercle au niveau de la position du

9 Bataillon kényan.

10 R. Voilà où se trouvait le Bataillon kényan.

11 Q. Est-ce que vous pourriez mettre les lettres "UN" auprès du petit cercle

12 que vous venez de dessiner.

13 R. [Le témoin s'exécute]

14 Q. Merci.

15 M. RUSSO : [interprétation] Je souhaiterais le versement au dossier de

16 cette pièce, Monsieur le Président.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maintenant nous avons une carte avec

18 beaucoup de cercles. Je vois que le témoin a indiqué dans le cadre de sa

19 déposition qu'il se trouvait à peu près au niveau de l'endroit où il a

20 ajouté les lettres "UN" sur la carte, lorsqu'il a, dans un premier temps,

21 fait l'expérience des pilonnages. Puis il a indiqué qu'à l'ouest de cette

22 position, là vous avez un cercle qui n'est pas parfait, vous avez l'endroit

23 où le pilonnage a eu lieu --

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'était le premier pilonnage, Monsieur

25 le Président.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est ce que j'essaie d'établir

27 pour le compte rendu d'audience. Donc c'est là que sont tombés les premiers

28 obus.

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1 Puis il y a le cercle qui est un peu plus vers le bas, le cercle qui a la

2 forme d'ovale nous indique où sont tombés les obus suivants. Ensuite, il y

3 a une croix qui a été faite, et le témoin a indiqué que c'est à ce niveau-

4 là qu'il a abandonné son véhicule, mais il avait indiqué également que cela

5 aurait pu se faire au niveau du point qu'il a dessiné un peu au nord de

6 cela. Finalement, le témoin a indiqué pour ce qui était de l'ensemble du

7 secteur, il a fait un cercle qui a la forme d'ovale et c'est la zone qui

8 correspond à la zone où est tombé tout le pilonnage.

9 Puis il a également indiqué où se trouvait positionné le Bataillon kényan.

10 M. RUSSO : [interprétation] Très bien. Je vous remercie.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il faudrait également lui attribuer un

12 numéro, Monsieur le Greffier.

13 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, ce sera la pièce à

14 conviction P208.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Aucune objection ? Je ne vois aucune

16 objection. La pièce à conviction P208 est versée comme élément de preuve.

17 M. RUSSO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

18 Q. Monsieur Tchernetsky, est-ce que vous pourriez nous dire s'il y a déjà

19 eu d'autres enquêtes dans la région de Strmica ou au moment où vous avez

20 assisté aux pilonnages, est-ce qu'il y a eu des armes de l'armée de la RSK

21 dans cette région ?

22 R. Pas dans la région de Strmica. Nous avons rencontré des unités

23 militaires et armées. Il s'agissait d'éléments de l'armée de la RSK. Ils

24 étaient dans le sud, beaucoup plus au sud.

25 Q. Y avait-il des positions des troupes de l'armée de la RSK ou des camps

26 de l'armée de la RSK dans cette région qui a fait l'objet de pilonnages ?

27 R. Nous n'avons pas mené d'enquête dans la région qui a été pilonnée, donc

28 je ne peux pas réellement vous répondre.

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1 Q. Je vous pose une question plus particulièrement sur la région que vous

2 venez d'indiquer et où sont tombés les obus ?

3 M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, il vient juste de

4 répondre.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Voyons si le témoin a bien compris la

6 dernière question.

7 Est-ce que vous avez fait des enquêtes dans les régions que vous avez

8 encerclées ? Vous avez dit : "Non, y avait-il des positions de l'armée de

9 la RSK dans cette région ?" Je pense qu'il y avait des troupes qui étaient

10 positionnées là.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai dit qu'à Strmica

12 dans la zone résidentielle de Strmica, nous n'avons pas vu d'unités

13 militaires ou d'armements de l'armée de la RSK. Après le pilonnage, nous

14 n'avons pas mené d'enquêtes dans la région qui était à l'ouest et qui

15 apportait son soutien pendant le pilonnage.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

17 M. RUSSO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

18 Q. Monsieur Tchernetsky, je pense que vous aviez indiqué qu'il y avait des

19 régions vers l'ouest qui apportaient un soutien pendant le pilonnage.

20 Quelles sont les régions, les lieux auxquels vous faites référence ? Est-ce

21 que ces régions à l'ouest figurent sur l'image que vous avez vue ici et que

22 vous avez sous les yeux ?

23 R. Oui. Ce que j'ai dit était la chose suivante : les régions qui

24 faisaient l'objet d'un pilonnage et qui étaient visées, nous n'avons pas

25 mené d'enquêtes dans ces régions. Nous ne nous sommes pas rendus dans cette

26 région.

27 Pour ce qui est de Strmica, dans le quartier résidentiel, il n'y avait pas

28 d'unités militaires ni d'armes appartenant à l'armée de la RSK.

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1 Q. Je suis maintenant un peu perdu avec votre réponse - et n'hésitez pas à

2 me corriger si je me trompe - les régions que vous avez encerclées sur

3 cette carte sont des régions qui ont fait l'objet d'un pilonnage pendant

4 que vous étiez sur place, n'est-ce pas ?

5 R. Oui.

6 Q. S'agit-il là de quartiers résidentiels où vous n'avez pas mené

7 d'enquêtes ?

8 M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, ce n'est pas ce qu'a dit

9 le témoin.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il y pas mal de confusion par rapport

11 aux réponses du témoin, donc M. Russo a parfaitement le droit de demander

12 des précisions.

13 Je vous en prie, Monsieur Russo.

14 M. RUSSO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

15 Q. Les régions que vous avez encerclées sont des quartiers résidentiels où

16 vous n'avez pas mené d'enquêtes ?

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maintenant, il semble qu'avec vos

18 questions vous créez encore plus de confusion.

19 M. RUSSO : [interprétation] Je m'excuse. Je vais poser la question

20 différemment. J'ai mal posé ma question.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tchernetsky, vous avez deux

22 cercles sur cette carte. Vous avez dit que c'est là où sont tombés les

23 obus. S'agit-il là des quartiers résidentiels dont vous avez parlé ou pas ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne dis pas qu'il s'agissait là de quartiers

25 résidentiels. Nous avons vu des explosions dans cette région; mais pour ce

26 qui se trouvait là-bas, j'avoue honnêtement ne pas pouvoir vous le dire.

27 Nous n'avons pas mené d'enquêtes sur l'impact et les résultats du

28 pilonnage, ce pilonnage en particulier, parce que nous avons simplement

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1 constaté de visu le pilonnage, et nous sommes retournés au QG et nous avons

2 fait rapport sur ce pilonnage intensif dans la région de Strmica avec des

3 roquettes d'artillerie.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une seconde, s'il vous plaît.

5 Oui, maintenant c'est clair. Au tout début de votre réponse, vous

6 avez dit qu'il s'agissait de la fin juillet, vous avez reçu comme mission

7 du QG du secteur de mener une enquête sur le pilonnage qui s'était produit

8 au cours de la nuit et qui visait les quartiers résidentiels de Strmica.

9 Lorsque vous êtes allé sur place, est-ce que vous avez pu voir de quel

10 quartier résidentiel il s'agissait, et qui est à l'origine de la mission

11 qui vous a été confiée pour mener une enquête ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous avons été envoyés dans cette région au

13 nord de Strmica. Je vais vous l'indiquer. Nous avons été envoyés dans la

14 région qui se trouve ici, là, dans cette région; mais nous ne sommes pas

15 arrivés dans cette région parce qu'il y a eu un autre pilonnage. Je vais

16 vous montrer maintenant à quel endroit.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

18 LE TÉMOIN : [interprétation] La région où nous devions aller se trouve au

19 nord de Strmica.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est la région où vous n'avez jamais pu

21 vous rendre; est-ce bien cela ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Est-ce que vous pourriez mettre là

24 une lettre R sur cette région ?

25 Monsieur l'Huissier, pourriez-vous aider peut-être le témoin.

26 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Là nous avons bien une lettre R.

28 Ensuite, vous avez dans vos autres réponses dit : "J'ai dit qu'à Strmica,

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1 le quartier résidentiel de Strmica, là nous n'avons constaté la présence

2 d'aucune unité militaire ou d'armements de l'armée de la RSK."

3 Quelle est la région à laquelle vous avez pensé lorsque vous nous avez

4 donné cette réponse, s'agissait-il de la même région ou d'un endroit

5 différent ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, la région de Strmica

7 est une zone peuplée qui s'étend jusqu'en bas de la route. Je peux vous

8 montrer cela sur la carte, il s'agit là de la région de Strmica. Et pour

9 nous, Strmica c'était toute la région.

10 Au départ, nous avions déjà fait des enquêtes dans cette région

11 lorsqu'il y avait eu des incidents de pilonnage, et nous avions constaté la

12 présence de cratères et vu des maisons endommagées par les obus.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Et vous avez dit que dans

14 cette région -- et vous avez dit que c'est la région la plus large indiquée

15 sur la carte. Est-ce que vous pourriez mettre un R et un 2 à cette région

16 autour de laquelle vous venez juste de tracer un cercle ?

17 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit que vous n'avez pas vu

19 d'unités militaires ou d'armements de l'armée de la RSK, est-ce que vous

20 faisiez référence à vos enquêtes précédentes ou à la journée que vous nous

21 avez décrite lorsque vous étiez venu pour mener une enquête.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] A la fois au cours d'enquêtes précédentes et

23 le jour où nous sommes arrivés pour mener une enquête sur ce pilonnage et

24 que nous avons nous-mêmes assisté à un pilonnage dans cette région que je

25 viens de marquer d'un cercle et où j'ai apposé un R2, nous n'avons vu

26 aucune unité militaire de l'armée de la RSK.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Cette réponse apparaît là encore à

28 la page 13, ligne 20. Et je considère que -- oui.

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1 Monsieur Russo, dans la mesure où c'est vous qui avez présenté la carte et

2 que ceci se rajoute à ce que le témoin avait déjà dit auparavant, je

3 propose que vous versiez cette pièce comme pièce à conviction.

4 M. RUSSO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, c'est ce que je

5 ferai.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, pas d'objections, M. Misetic ?

7 Monsieur le Greffier, cette carte marquée par le témoin a été marquée à

8 plusieurs reprises par le témoin.

9 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de la pièce à conviction P209,

10 Monsieur le Président.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La P209 est admise comme pièce à

12 conviction.

13 Nous pouvons continuer.

14 M. RUSSO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je vais

15 maintenant passer à autre chose. Je pense que la Chambre a obtenu ce

16 qu'elle voulait.

17 Q. Monsieur Tchernetsky, le 12 août, vous avez parlé dans votre première

18 déposition qui est la P204, à la page 4, au deuxième paragraphe.

19 Est-ce que vous vous souvenez de cet incident ? Vous aviez parlé de la

20 découverte d'un ou deux corps dans une maison à Knin.

21 R. Oui, je m'en souviens.

22 Q. Est-ce que vous pourriez expliquer à la Chambre les circonstances

23 entourant la découverte de ces deux cadavres ?

24 R. Le propriétaire de la maison où se trouvait notre bureau et où vivaient

25 les observateurs de l'ONU nous a demandé de vérifier ce qui se passait dans

26 la maison du voisin juste à côté et qui était une maison qui avait été

27 abandonnée. Car en passant devant la maison, elle avait l'impression

28 d'avoir senti quelque chose et vu quelque chose. Elle connaissait les

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1 propriétaires de cette maison et nous a donc demandé de vérifier et de voir

2 ce qui était à l'origine de cette puanteur, cette odeur qu'elle constatait.

3 Avec l'observateur polonais, nous sommes entrés - je ne me souviens pas de

4 son nom, c'était quelqu'un de notre équipe - nous sommes entrés dans cette

5 maison et nous avons constaté qu'il y avait deux cadavres là. L'un de ces

6 cadavres se trouvait dans une des pièces, assis sur un fauteuil, on lui

7 avait tiré dessus et nous avons vu des traces de sang. On lui avait tiré

8 une balle dans la tête. L'autre cadavre se trouvait dans la pièce voisine

9 et était allongé à côté d'une fenêtre ouverte. Ça sentait vraiment très

10 mauvais dans la maison. Les cadavres étaient probablement là depuis un

11 certain temps, la décomposition avait déjà commencé. Il faisait assez chaud

12 à ce moment-là.

13 Nous sommes sortis de cette maison et je suis ensuite allé au QG faire

14 rapport à nos chefs à propos de cet incident. L'on m'a demandé de remettre

15 cela entre les mains de la police civile des Nations Unies, car ceci

16 tombait sous la juridiction et était de la compétence de la police

17 militaire des Nations Unies qui était dans le même camp, donc je leur ai

18 également fait rapport. Ensuite de cela, je suis parti en patrouille.

19 Pour ce qui a pu se passer par la suite, mes collègues m'en ont parlé. La

20 police civile des Nations Unies est arrivée, puis est arrivée sur les lieux

21 également la police civile croate. Ils sont entrés dans la maison et les

22 cadavres ont été emportés. Voilà, c'est cela dont il s'agit.

23 Q. Merci. Dans votre deuxième témoignage, il s'agit de la pièce 205,

24 paragraphe 17, vous avez parlé de votre tentative d'aider les familles de

25 ces personnes décédées pour obtenir quelques informations. Est-ce que vous

26 pourriez expliquer à la Chambre les efforts que vous avez pu faire à ce

27 propos ?

28 R. Une des personnes qui avaient été tuées était une personne assez riche.

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1 Sa famille, qui avait quitté la région pendant l'opération Tempête et

2 s'était enfuie à Belgrade, n'avait pas d'argent, il ne lui restait aucun

3 argent. Donc ils ont pris contact avec moi à travers certaines personnes de

4 la famille me demandant d'obtenir des preuves pour pouvoir déclarer le

5 décès de cette personne et pouvoir ainsi toucher l'héritage.

6 A l'époque, j'appartenais déjà à une autre mission dans la mesure où notre

7 première mission était terminée, j'étais en permission et je me suis rendu

8 à Zagreb, et tous les documents de ma première mission avaient été déposés

9 dans les archives. Permission m'a été donnée d'entrer dans les lieux où

10 étaient détenues ces archives pour trouver les documents qui permettaient

11 de confirmer que nous avions constaté le décès de ces personnes.

12 Néanmoins, lorsque je me suis rendu dans la salle des archives, j'ai

13 constaté qu'un certain nombre de documents concernant les observateurs

14 militaires, à la fois à Podkonje qui était notre équipe et également les

15 observateurs de l'équipe des droits de l'homme, entre la période qui couvre

16 août à octobre 1995. Tous ces documents étaient manquants. Il y avait

17 plusieurs cartons de documents qui manquaient, même s'il avait été

18 effectivement inscrit là qu'ils devaient figurer dans les archives.

19 Le fonctionnaire qui travaillait aux archives lorsque je lui ai posé la

20 question pour savoir où se trouvaient ces documents, cet employé des

21 archives n'a pas pu me donner de réponse valable.

22 Suite à cela, sachant que les dossiers avaient été remis également à la

23 police civile des Nations Unies, j'ai essayé de trouver des documents

24 concernant cette enquête dans les archives de la police civile. A ce

25 moment-là, à Zagreb, nous avions une équipe de formation qui était encore

26 en place là-bas et qui avait préparé la police civile qui a mené cette

27 enquête, il y avait donc les archives de la police du secteur sud qui se

28 trouvaient dans leurs locaux.

Page 3192

1 Donc je me suis adressé au responsable de ce centre, qui m'a donné la

2 permission d'aller regarder ces documents. Lorsque je me suis penché sur

3 ces documents, j'ai trouvé des documents qui concernaient cet incident;

4 disons plutôt la boîte ou le carton où les documents devaient se trouver,

5 les documents concernant ces événements et l'enquête qui s'est déroulée en

6 août 1995.

7 Néanmoins, un grand nombre de documents, y compris les dossiers concernant

8 l'enquête manquaient. J'ai simplement trouvé le premier rapport du

9 responsable de la police civile qui était venu sur place. Il y avait

10 simplement son premier rapport de cet incident. J'ai demandé la permission

11 au chef de ce centre de faire une photocopie de ce document, et c'est là le

12 document que vous avez sous les yeux.

13 Ensuite, j'ai fait --

14 Q. Je voudrais vous arrêter là.

15 M. RUSSO : [interprétation] Monsieur le Greffier, si vous pouviez prendre

16 le document 65 ter 1754.

17 Q. Monsieur Tchernetsky, est-ce que c'est bien là le document que vous

18 avez trouvé ?

19 R. Oui, c'est tout à fait cela. C'est bien le document.

20 Q. Merci.

21 M. RUSSO : [interprétation] Monsieur le Président, je demanderais à ce que

22 ces pièces soient versées en tant que pièce à conviction.

23 M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je pense qu'il va

24 falloir que je vérifie. Je pense que j'ai utilisé ce document dans le

25 contre-interrogatoire ou les témoignages de la déposition de M. Flynn. Je

26 pense que c'est une pièce à conviction de la Défense. Il faut que je

27 revérifie à nouveau.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo, si vous pouviez garder

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1 cela à l'esprit, nous allons attendre un petit peu la vérification avant de

2 lui attribuer un numéro et voir s'il ne s'agit pas d'une pièce à conviction

3 de la Défense.

4 M. RUSSO : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

5 Q. Monsieur Tchernetsky, pendant que nous nous penchons là-dessus, je

6 voudrais passer à --

7 M. RUSSO : [interprétation] Je dois d'abord demander à la Chambre s'il y a

8 d'autres questions concernant cet incident, sinon je vais passer à autre

9 chose.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo, il y a un autre point;

11 84 et 85 sont donnés comme étant des éléments donnés en annexe à cette

12 déposition supplémentaire du témoin. Je pense néanmoins qu'il est correct

13 de dire que dans l'annexe A et B, confidentielles toutes les deux, des

14 éléments déposés par l'Accusation du 92 ter, nous avons trouvé des

15 documents en annexe, mais pas les numéros 84 et 85. Est-ce que vous

16 pourriez vérifier si tel est le cas ? C'est en tous les cas ce que nous

17 avions reçu. Peut-être pourrons-nous le faire avant la pause à venir.

18 M. KEHOE : [interprétation] Si vous permettez, Me Misetic a raison. Ce

19 document est bien le D65.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D65 alors.

21 M. KEHOE : [interprétation] Me Misetic a raison. Cela a été utilisé dans le

22 cadre de la déposition de M. Flynn le -- je ne me souviens pas très bien,

23 mais je pense qu'il s'agissait du 7 août 1995.

24 M. RUSSO : [interprétation] Pour préciser, ce document en particulier est

25 donné en annexe en tant que document AT-4 qui accompagne la déposition

26 supplémentaire du témoin.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous n'avions pas trouvé, mais

28 maintenant je l'ai sous les yeux. Donc nous pouvons continuer.

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1 M. KEHOE : [interprétation] Il ne s'agissait pas du 7 août 2008, mais du 10

2 août -- avril 2008. C'est en avril 2008 que nous avons reçu ce D68. Je

3 m'excuse.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Bien. Les choses sont plus claires,

5 Monsieur Russo. Nous pouvons donc avancer.

6 M. RUSSO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'allais passer à

7 autre chose, mais je ne savais pas si la Cour avait d'autres questions ou

8 pas concernant la découverte de ces deux cadavres.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pas pour l'instant.

10 M. RUSSO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

11 Q. J'aimerais maintenant demander au témoin, après avoir assisté à

12 l'opération "Storm", je voudrais que vous regardiez la première

13 déclaration. Il s'agit du document P204, page 3 au dernier paragraphe, où

14 vous avez parlé de cet incident et de l'incendie à Knin entre le 10 et le

15 12 août 1995.

16 Est-ce que vous vous souvenez de cet incident ?

17 R. Oui, je me souviens de cet incident.

18 Q. Si vous pouviez très brièvement expliquer à la Chambre ce qui s'est

19 exactement passé ce jour-là et ce que vous avez pu constater ?

20 R. A ce moment-là, notre groupe se trouvait encore dans la région du QG --

21 ou plutôt, utilisait les installations du QG. Nous n'avions pas

22 d'installations séparées à Knin.

23 Tard dans la soirée, nous avons reçu une information nous disant que tout

24 le voisinage était en feu. Je ne sais pas d'où venait cette information.

25 Peut-être que c'est quelqu'un qui l'a vu depuis le balcon de son immeuble,

26 mais je ne me souviens pas exactement maintenant. Donc soit on m'a attribué

27 une mission de la part des observateurs militaires du secteur ou est-ce que

28 c'est une mission qui m'a été donnée par notre responsable pour mener une

Page 3195

1 enquête sur cet incendie ?

2 Nous sommes allés mener une enquête avec mon collègue norvégien, Tor

3 Munkelien, et une autre personne nous a demandé si elle pouvait se joindre

4 à nous. Il s'agissait d'un journaliste anglais, Alun Roberts. Nous sommes

5 partis. Mais en arrivant au centre de Knin, nous avons été arrêtés là,

6 parce que la route était bloquée par des véhicules de la police. Nous ne

7 pouvions donc plus avancer, et bien qu'ayant tous les papiers valables en

8 tant qu'observateurs, nous n'avons pas été autorisés à aller plus loin, et

9 la police croate nous a demandé de faire demi-tour. Nous avons été escortés

10 par deux véhicules de la police croate vers notre camp.

11 Après cela, nous avons décidé de rebrousser chemin et de retourner là où il

12 y avait l'incendie pour voir ce qui se passait là-bas. Nous avons laissé

13 Alun Roberts là-bas, et moi et Tor, nous sommes revenus vers notre

14 véhicule, véhicule de patrouille et nous avons quitté la base. En quittant

15 la base, une voiture de police croate nous attendait. Ils ont commencé à

16 nous accompagner. Nous n'avons pas conduit en direction de Knin, mais

17 plutôt vers le sud, en direction de Drnis. La police croate est partie.

18 Nous avons fait demi-tour en retournant vers Knin. Moi, je connaissais très

19 bien la région. J'ai demandé où on était autour de nous. Donc on est

20 arrivés à partir du nord, et on est arrivés sur le site qui était en feu.

21 Pratiquement toutes les maisons du quartier étaient en feu. Vous aviez les

22 pompiers qui étaient là avec leurs voitures de pompiers. Il y avait aussi

23 des voitures de policiers qui étaient là. Ce qui nous a vraiment choqués

24 c'est qu'on a vu que personne ne faisait rien pour éteindre le feu.

25 Tor a pris plusieurs photos pendant que moi je parlais avec les policiers

26 en essayant de faire quelques manœuvres avec la voiture. J'ai essayé de

27 leur faire croire qu'on était perdus, donc j'ai demandé où on était. Tor a

28 réussi à faire quelques photos, ensuite on a continué. Il a donné nos

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1 photos à un reporter britannique, Alun Roberts; et que je sache par la

2 suite ces photos ont été publiées.

3 M. RUSSO : [interprétation] Monsieur le Greffier, je voudrais demander que

4 l'on présente le document 65 ter 4881.

5 Q. Monsieur Tchernetsky, est-ce que vous reconnaissez ce document ?

6 R. Oui, en effet.

7 Q. Est-ce bien le document qui se trouve dans l'annexe de votre deuxième

8 déclaration préalable en tant que document AT-3 ?

9 R. Oui, c'est bien cela.

10 Q. Pourriez-vous expliquer aux Juges les annotations qui figurent sur la

11 photo, qu'est-ce que cela signifie ?

12 R. La première annotation, c'est l'endroit où se trouvait notre équipe

13 après qu'on a réussi enfin à nous installer dans un bureau à nous.

14 Le numéro 2, c'est l'endroit où Tor, Alun Roberts et moi-même avons été

15 arrêtés lors de la première tentative de s'approcher de Knin.

16 Ensuite, la ligne en pointillé, c'est la route que nous avons empruntée à

17 partir de la base en direction de l'endroit où nous avons été arrêtés et on

18 a rebroussé chemin à partir de cet endroit-là.

19 Et l'autre ligne en pointillé, c'est la route -- la déviation que nous

20 avons prise pour retourner à Knin. Le numéro 3 correspond au foyer de

21 l'incendie. C'est très difficile d'être précis à ce point-là, mais ça se

22 trouve à peu près à cet endroit-là, c'est dans le quartier nord de la

23 ville.

24 Q. Bien, Monsieur le Témoin.

25 M. RUSSO : [interprétation] Je voudrais verser au dossier cette pièce à

26 moins qu'il y ait des questions des Juges.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'y a pas de questions.

28 Est-ce qu'il y a des objections ?

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1 Apparemment non.

2 Monsieur le Greffier.

3 M. LE GREFFIER : [interprétation] Cette pièce va recevoir la cote P210.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qui est versée au dossier.

5 M. RUSSO : [interprétation]

6 Q. Monsieur Tchernetsky, cet incident qui comprenait cet incendie ne

7 figure dans aucun des "sitreps". Est-ce que vous trouvez une raison pour ça

8 ?

9 R. Non, je ne saurais vous dire pourquoi. Je n'étais qu'un observateur

10 ordinaire. Je faisais mon travail. Pour quelles raisons cela ne figurait

11 pas dans les rapports, je ne sais pas.

12 Q. Est-ce que vous vous souvenez avoir écrit un rapport au sujet de cet

13 incident ?

14 R. Oui. Notre équipe était au QG. On travaillait au même endroit que là où

15 se trouvait le QG du secteur.

16 Q. Bien. Maintenant je voudrais passer à votre première déclaration

17 préalable - c'est la pièce P204, page 4 - le troisième paragraphe où vous

18 vous parlez de l'opération de ratissage de la police spéciale dans la zone

19 de la vallée de Plavno.

20 Est-ce que vous vous souvenez de cela ?

21 R. Oui.

22 Q. Pourriez-vous montrer ça sur la carte et je voudrais montrer la carte

23 tout entière.

24 M. RUSSO : [interprétation] Comme nous fait hier, tout d'abord la verser,

25 ensuite nous allons agrandir différentes portions de la carte et ceci va

26 être plus facile à suivre.

27 Tout d'abord, je voudrais demander la pièce 65 ter numéro 4879.

28 Q. Monsieur, est-ce que vous reconnaissez ce document ?

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1 R. Oui. C'est ma carte.

2 Q. Cette carte, est-ce que vous l'avez attachée à votre deuxième

3 déclaration en tant que pièce AT-1 ?

4 R. Oui.

5 M. RUSSO : [interprétation] Je vais demander que l'on verse au dossier

6 cette pièce.

7 M. KEHOE : [interprétation] Pas d'objection.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Personne d'autre ne s'est levé.

9 Monsieur le Greffier ?

10 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P211.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce P211 vient d'être versée au

12 dossier.

13 M. RUSSO : [interprétation] Très bien.

14 Monsieur le Greffier, à présent je vais vous demander de nous présenter la

15 pièce 65 ter 4939.

16 Q. Monsieur, la zone qui figure ici dans cette partie agrandie, vous

17 pouvez voir Plavno en bas, ensuite vers le nord, on voit Palanka.

18 C'est la zone où avait lieu cette opération de ratissage ?

19 R. Oui, c'est bien cela.

20 Q. Merci.

21 M. RUSSO : [interprétation] Je voudrais verser cela au dossier.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pas d'objections ?

23 Monsieur le Greffier.

24 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P212.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qui vient d'être versée au dossier.

26 M. RUSSO : [interprétation]

27 Q. Monsieur le Témoin, pourriez-vous expliquer aux Juges de la Chambre que

28 représentaient ces opérations de ratissage à l'époque, comment voyiez-vous

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1 cela ?

2 R. Que je sache, nous avons été informés de deux opérations de ratissage,

3 il y en avait une qui avait lieu dans la montagne de Dinara, et l'autre qui

4 se déroulait à Plavno.

5 Qu'est-ce que c'était vraiment que cette opération de ratissage ? Vous

6 bloquiez, encercliez toute la zone. Vous bloquiez toutes les sorties de la

7 zone. Ensuite, on ratissait toute la zone, tous les endroits qui étaient

8 habités, ainsi que le reste. Ce que j'ai appris des habitants du cru, on a

9 donné l'ordre à la population qui était encore là, parce qu'il n'y en avait

10 pas beaucoup, on leur a demandé de rester à l'intérieur de leur

11 agglomération parce que toutes les personnes trouvées à l'extérieur de leur

12 village allaient être tuées. De cette façon, les troupes de l'armée croate

13 pouvaient ratisser les zones à la recherche des soldats de l'armée de la

14 RSK qui étaient éventuellement encore là ou à la recherche des différentes

15 unités militaires qui se trouvaient encore dans la zone.

16 Q. Très bien, je vous remercie de votre réponse, mais vous vous basez sur

17 quoi pour dire cela.

18 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Qu'est-ce qu'il vient de nous dire là

19 exactement, quelle explication ?

20 Le fait que la population devait rester, que c'était l'ordre qu'ils ont

21 reçu ou de l'information qu'ils allaient être tués ?

22 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

23 M. RUSSO : [interprétation] On va procéder pas à pas.

24 Q. Vous avez dit que pendant ces opérations de ratissage du terrain,

25 toutes les sorties de la zone étaient bloquées. Où est-ce que vous avez

26 appris cela ?

27 R. Je l'ai vu de mes propres yeux. Je le sais par ma propre expérience, à

28 partir du moment où vous avez une telle opération dans les montagnes de

Page 3200

1 Dinara et dans la zone de Plavno.

2 Q. Vous avez dit aussi que toute la zone bloquée était passée au peigne

3 fin, y compris les agglomérations, tout le territoire, en tout cas.

4 D'où vous tenez cette information ?

5 R. Les informations allaient dans ce sens, je les ai reçues du QG de notre

6 secteur, qui les a reçues des autorités croates. Ils ont dit que pendant

7 une certaine période, la zone allait être bloquée, coupée, à cause d'une

8 opération particulière de ratissage.

9 Q. Et vous avez dit que dans cette zone, les habitants recevaient l'ordre

10 de rester dans leurs villages et si jamais ils se trouvaient à l'extérieur

11 des villages qu'ils allaient être "liquidés", tués.

12 D'où tenez-vous cette information ?

13 R. C'est quelque chose que nous avons appris directement des habitants.

14 Les habitants ont été mis en garde de ne pas quitter leurs foyers, leurs

15 villes et villages pendant ces opérations de ratissage. C'est quelque chose

16 que nous avons appris directement des villageois.

17 Q. Et d'où tenez-vous l'information que les gens qui n'allaient pas être

18 dans leurs villages, qui allaient être retrouvés éventuellement à

19 l'extérieur de ces villages, qu'ils allaient être tués ?

20 R. La même source. Les habitants du cru ont dit qu'on les a mis en garde,

21 que les autorités croates leur ont dit cela.

22 Q. Un dernier point par rapport à cela. Vous avez parlé de la découverte

23 de soldats de l'ARSK dans la zone de Podinarje, vous en avez parlé aux

24 pages 4 et 5 de votre déclaration.

25 M. RUSSO : [interprétation] Pourriez-vous, Monsieur le Greffier, nous

26 montrer la pièce 4937.

27 Q. Monsieur, est-ce bien la zone que vous voyez sur l'écran, la zone à

28 laquelle vous avez fait référence quand vous avez parlé des soldats trouvés

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1 ?

2 R. Oui, c'est bien cela.

3 Q. Merci.

4 M. RUSSO : [interprétation] Je voudrais verser cela en tant que pièce à

5 conviction.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'y a pas d'objection.

7 Monsieur le Greffier.

8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P213.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. La pièce P213 vient d'être

10 versée au dossier.

11 M. RUSSO : [interprétation] Merci.

12 Q. Monsieur, dans votre première déclaration, page 5, le premier

13 paragraphe, vous avez dit que vous avez décidé de ne pas parler de la

14 découverte de ces soldats, vous avez dit que vous leur avez donné une carte

15 pour qu'ils puissent partir en Bosnie.

16 Normalement, vous n'êtes pas censé faire cela.

17 M. KUZMANOVIC : [interprétation] C'est une question qui est directrice.

18 M. RUSSO : [interprétation] Je ne vois pas où est le problème.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kuzmanovic.

20 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Je pense qu'elle influence quand même le

21 témoin.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne sais pas. Est-ce que vous

23 contestez le fait que les fonctionnaires de l'OMNU ont la possibilité de

24 fournir des cartes aux soldats pour les aider ?

25 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Bien sûr que non, Monsieur le Président.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Donc ceci fait l'objet

27 d'accord entre les parties. On va voir ce que le témoin en pense.

28 Monsieur, est-ce que vous savez que ce que vous avez fait n'était pas en

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1 accord avec votre mandat en tant qu'observateur de l'OMNU?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Mais vous savez, c'était une réaction

3 spontanée. J'ai voulu aider ces gens qui étaient en danger de mort, et

4 c'est à cause de ce danger qu'ils encouraient que je n'ai pas respecté

5 strictement le mandat des observateurs de l'ONU et que je leur ai donné une

6 carte.

7 M. RUSSO : [interprétation] Merci de la réponse, et merci de la question,

8 Monsieur le Président.

9 Q. Avant cet incident, est-ce que vous avez jamais reçu des instructions

10 quant à ce vous deviez faire si jamais au cours de vos patrouilles vous

11 trouvez un soldat de l'armée de la Republika Srpska ?

12 R. Non.

13 Q. Est-ce que vous savez ce qui s'est passé avec ces soldats après que

14 vous avez réussi à négocier leur reddition ?

15 R. Oui. En présence des autres internationaux, nous avons remis ces

16 soldats aux autorités croates. Et un des soldats, que je sache, a été

17 libéré, on l'a laissé partir et on lui a fourni des documents lui

18 permettant de partir. En ce qui concerne les autres, ils ont été condamnés

19 et j'ai appris de mes collègues de l'équipe des droits de l'homme qu'ils

20 avaient été transférés de Knin à Zadar.

21 M. RUSSO : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais demander la

22 pièce P138.

23 Q. Ici on voit un "sitrep" de l'OMNU en date du 2 septembre, et c'est

24 quelques jours après que vous avez négocié la reddition de ces soldats. Et

25 vous allez voir que là on dit : "Les autorités croates ont continué à

26 garder en détention ces soldats, ces prisonniers de guerre dans l'école de

27 Knin. Il s'agit de la date du 28 août." On dit : "Ils ont été maltraités et

28 montrent des signes clairs de passages à tabac sur leurs visages. Vous

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1 voyez cela sur le rapport de la HRAT du 1er septembre."

2 Est-ce que vous avez été présent au moment où les membres de cette équipe

3 ont visité l'école le 1er septembre ?

4 R. Non. Je ne leur ai pas rendu visite. Ce sont les représentants de

5 l'équipe des droits de l'homme qui ont fait cela, et cette équipe avait

6 parmi eux nos observateurs, les OMNU, ainsi que les représentants de la

7 Croix-Rouge.

8 Q. Est-ce que vous savez quels sont les membres de votre équipe qui ont

9 fait partie de cette équipe des droits de l'homme ?

10 R. En ce qui concerne notre équipe à nous, je pense que Peter Marti y

11 était, c'est un capitaine suisse; et Ivo, je ne me souviens pas de son nom

12 de famille, c'était un capitaine serbe, et il faisait partie de cette

13 équipe des droits de l'homme.

14 Q. Merci.

15 R. C'est eux qui ont rendu visite à ces prisonniers de guerre.

16 Q. Merci.

17 M. RUSSO : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions pour ce témoin,

18 Monsieur le Président.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense que le mieux serait de prendre

20 la pause à présent.

21 Qui va commencer le contre-interrogatoire ?

22 M. KUZMANOVIC : [interprétation] C'est moi-même.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien, Monsieur Kuzmanovic. Pouvez-

24 vous nous dire de combien de temps vous allez avoir besoin pour cela ?

25 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Deux heures, deux heures et demie à peu

26 près.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Cayley ?

28 M. CAYLEY : [interprétation] Oui. Monsieur le Président, je pense que

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1 j'aurai besoin de moins, j'aurai besoin de trois quarts d'heure au maximum.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kehoe ?

3 M. KEHOE : [interprétation] Cela dépend des questions posées par mes

4 confrères, mais je pense que je vais avoir besoin de deux heures à peu

5 près.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Nous allons prendre une pause pour

7 commencer. Nous allons reprendre à 11 heures moins 10.

8 --- L'audience est suspendue à 10 heures 22.

9 --- L'audience est reprise à 11 heures 00.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les Juges s'excusent du retard. Puisque

11 notre réunion a duré plus longtemps que prévu, je n'ai pas revenir à temps.

12 C'était une réunion qu'on ne pouvait pas annuler.

13 Monsieur Kuzmanovic.

14 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, c'est le conseil de

16 M. Markac qui va vous contre-interroger à présent.

17 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Merci.

18 Contre-interrogatoire par M. Kuzmanovic :

19 Q. [interprétation] Monsieur Tchernetsky, je voudrais faire référence à

20 votre déclaration P204 en date du 18 mai 2002, c'est la quatrième page.

21 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Il s'agit du troisième paragraphe qui

22 commence par "Malheureusement…"

23 Q. Vous avez parlé tout à l'heure de l'opération de nettoyage du terrain.

24 Est-ce que vous en avez remarqué deux pendant votre période de travail

25 d'observateur militaire. Est-ce exact ?

26 R. Oui, c'est exact. J'ai été témoin d'une opération dans la zone de

27 Podinarje, puis il y a eu une deuxième à Plavno.

28 Q. Moi je voudrais parler de celle de Plavno, P204. Avant de parler de

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1 cela, vous étiez observateur militaire des Nations Unies entre le mois de

2 juin 2005 et le mois de décembre 1995; est-ce exact ?

3 R. Oui.

4 Q. Et pendant toute cette période vous avez dit ne pas avoir vu plus que

5 deux opérations de ratissage du terrain; est-ce exact ?

6 R. Oui, les opérations de ratissage ont eu lieu après l'opération Tempête.

7 C'était au mois d'août et au mois de septembre si mes souvenirs sont

8 exacts.

9 Q. Mais vous savez qu'il y avait des opérations de ratissage du terrain

10 qui avaient lieu aussi bien au mois d'août qu'au mois de septembre 1995 et

11 que c'était les unités de la police spéciale qui s'en occupaient ?

12 R. Par rapport aux unités qui ont participé directement aux opérations, je

13 ne sais pas. Mais le seul moment où j'avais des contacts personnels avec

14 une unité participant à une telle opération, cela a eu lieu à Podinarje,

15 d'ailleurs ceci se trouve dans ma déclaration. J'ai même donné le nom de

16 cette personne, colonel Vrsaljko, qui était le commandant de l'unité

17 spéciale Zadar-Knin. Alors qui était à la tête de l'opération à Plavno,

18 quelles étaient les unités qui y ont participé, je ne saurais vous

19 répondre. Puisque quand on est arrivés avec la patrouille des droits de

20 l'homme, parce qu'à ce moment-là on était en train d'acheminer l'aide

21 humanitaire à Plavno, on a été arrêtés, on a été arrêtés à cet endroit,

22 c'est-à-dire que les deux routes qui menaient à cet endroit avaient été

23 bloquées, et vous aviez les soldats de la police militaire qui étaient au

24 point de contrôle. On nous a refusé l'accès dans la zone, et on a dû

25 rebrousser chemin.

26 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Attendez, j'essayais de voir ce qui figure

27 dans le transcript.

28 Q. Merci, Monsieur. Est-ce que vous saviez que les opérations de ratissage

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1 de la police spéciale n'ont pas commencé avant le 21 août ? Est-ce que vous

2 le saviez ?

3 R. Je n'étais pas informé de la date officielle du début de ces

4 opérations. La première fois où j'avais quoi que ce soit à faire là-dedans

5 c'était au moment où un soldat de la RSK a été retrouvé dans la zone de

6 Podinarje. En réalité il y en avait plusieurs. Donc j'ai organisé le

7 processus qui consistait à les remettre aux représentants des organisations

8 internationales.

9 Au moment de la réunion d'information matinale, un membre senior des

10 observateurs militaires des Nations Unies nous a mis en garde sur le fait

11 que les autorités croates l'avaient mis en garde contre des opérations

12 spéciales de ratissage du terrain dans la zone qui allait être bloquée,

13 isolée.

14 Q. J'ai remarqué que vous avez la tendance de répondre longuement aux

15 questions que je vous pose. Je vous prie de bien vouloir restreindre vos

16 réponses à ce qui est nécessaire, pour aller plus vite.

17 R. Je vais essayer, je vais essayer de le faire.

18 Q. Pour revenir vers la pièce 204, page 4, le paragraphe qui commence par

19 : "Malheureusement". Dans votre déclaration préalable, mais vous disiez :

20 "Malheureusement, je ne me souviens pas de la date à laquelle les forces

21 spéciales de la police croate ont procédé aux opérations de ratissage du

22 terrain dans la vallée de Plavno. Nous étions en train d'effectuer notre

23 patrouille au moment où nous avons découvert cela."

24 Est-il exact que si ceci a eu lieu au mois d'août, qu'il est sûr que ceci

25 n'a pas pu avoir lieu avant le 21 août 1995 ?

26 R. Je ne suis pas sûr des dates.

27 Q. Mais vous avez dit que vous avez été arrêté par la police militaire,

28 c'est ce que vous avez dit tout à l'heure dans votre réponse ?

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1 R. Oui.

2 Q. C'était où exactement que vous avez été arrêté ? C'était un carrefour ?

3 R. C'était au carrefour où se croisait une route villageoise et la route

4 principale, la route qui mène vers la vallée de Plavno.

5 Q. Est-ce que vous avez pu observer toute l'opération de ratissage au fur

6 et à mesure qu'elle se développait ou est-ce que vous avez juste entendu

7 parler de cela, ensuite vous ne pouviez plus vous y rendre ?

8 R. Tout simplement on ne nous a pas donné la possibilité d'y rester, de

9 rester dans la zone.

10 Q. Vous avez dit que vous êtes revenu dans la zone de Plavno deux ou trois

11 jours après, après avoir été arrêté par les policiers de la police

12 militaire ?

13 R. Oui.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kuzmanovic, est-il possible de

15 voir la carte sur l'écran de sorte que le témoin puisse nous montrer

16 exactement où se trouve ce carrefour ?

17 M. KUZMANOVIC : [interprétation] J'avais l'intention de le faire, mais les

18 cartes que nous avons ne sont pas vraiment de la meilleure qualité, donc je

19 n'ai pas voulu.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] N'est-il pas vrai que nous avons une

21 autre carte qui est déjà versée au dossier, il s'agit de la carte qui

22 montre précisément la zone de Plavno ?

23 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Oui, c'est exact. Je vais essayer de

24 retrouver le numéro.

25 P212.

26 Q. Monsieur Tchernetsky, la carte qui figure à la pièce P212 -- non, je me

27 reprends.

28 En fait, il s'agit d'un extrait de votre carte, P212; c'est cela ?

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1 R. Oui, oui, c'est exact.

2 Q. Est-ce que vous pourriez faire un cercle bleu à l'endroit où vous avez

3 été arrêté par la police militaire d'après vos dires ? M. KUZMANOVIC :

4 [interprétation] Je pense que je vais demander à M. l'Huissier de vous

5 aider.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne pense pas pouvoir le faire

7 malheureusement, parce que le carrefour se trouve au sud du secteur que

8 l'on a sur la carte.

9 M. KUZMANOVIC : [interprétation]

10 Q. Donc le carrefour en question se trouve au sud de ce que nous avons sur

11 la pièce P212; c'est cela ?

12 R. Oui, au sud de l'endroit qui se trouve sur la carte. C'est là où se

13 trouve le carrefour, parce que la route principale va du sud vers le nord,

14 alors que la route qui passe par le village va vers la droite.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si nous avions toute la carte sur

16 l'écran, ce serait plus facile. Entre-temps, Maître Kuzmanovic, poursuivez.

17 Nous trouverons bien là le tronçon en question.

18 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Oui, c'est ce que je ferai.

19 M. RUSSO : [interprétation] Je ne sais pas si cela est trop grand pour le

20 rétroprojecteur.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, parce que je pense que cela a déjà

22 été versé au dossier. Nous pourrions l'agrandir; et puis cibler le secteur

23 en question.

24 M. RUSSO : [interprétation] Mais je ne pense que nous pourrions le faire

25 avec la fonction zoom.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors il faudra insérer tout cela dans

27 le système.

28 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Et la carte P211.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors si la 211 peut être affichée à

2 l'écran.

3 Entre-temps, poursuivez, Maître Kuzmanovic.

4 M. KUZMANOVIC : [interprétation]

5 Q. Nous allons avoir la pièce P211 à l'écran. Je vais vous poser quelques

6 supplémentaires à propos de l'opération dans la vallée de Plavno.

7 Alors, vous, vous-même, vous êtes revenu dans ce secteur trois jours plus

8 tard. Vous avez eu une conversation avec une femme, une femme âgée qui vous

9 a parlé de son mari; c'est cela ?

10 R. Oui, oui, c'est ainsi que les choses se sont passées.

11 Q. Est-ce que vous pourriez nous donner une idée de son nom ? Est-ce que

12 vous vous souvenez de son nom ?

13 R. Non, je ne me souviens pas de son nom, de toute façon, je n'ai pas

14 gardé de notes.

15 Q. Elle vous a relaté qu'elle essayait de trouver son mari, et vous ainsi

16 que votre collègue, M. Komper, avez essayé de trouver cet homme, mais en

17 vain ?

18 R. La première fois, lorsque nous avons essayé de le localiser, nous avons

19 appris où il s'était rendu. C'était une localité qui s'appelle Kozja Jama,

20 qui se trouve à une dizaine de kilomètres au nord de Palanka. Il y avait

21 juste dans cette localité un homme âgé qui était resté dans la localité en

22 question avec sa fille. Nous avons appris que l'homme qui était porté

23 disparu était effectivement venu les voir ce jour-là, mais était reparti.

24 Donc la première fois que nous sommes allés à Kozja Jama, nous ne l'avons

25 pas trouvé; mais la deuxième fois, Pavel Komper, qui faisait partie d'une

26 autre patrouille, est allé dans l'endroit qui avait été plus ou moins

27 indiqué par la femme. Ils avaient là un abri pour leurs moutons; et dans

28 cet abri, ils ont trouvé un corps, le corps de cet homme qui avait été tué;

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1 il y avait plusieurs moutons qui avaient été tués; et un chien.

2 Ensuite, ils ont aidé pour que le cadavre soit enlevé de cet endroit parce

3 qu'il était impossible en fait de parvenir à cet endroit à bord d'un

4 véhicule. Le corps a été transporté et a été rendu à cette femme.

5 Q. Monsieur Tchernetsky, cela ne fait l'objet d'aucun rapport de

6 situation, d'après ce que vous savez, n'est-ce pas ?

7 R. Je ne peux pas vous le dire. Le rapport relatif au fait que le corps

8 d'un homme qui avait été tué avait été trouvé, cela a été mentionné. Je

9 sais que cela a été mentionné, nous en avons parlé et on a parlé du rapport

10 d'ailleurs.

11 Et il y a un carte maintenant, là je peux vous montrer le carrefour où nous

12 avons été arrêtés alors que nous essayions de nous rendre dans la vallée de

13 Plavno.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kuzmanovic, je pense que le

15 témoin pourra nous indiquer où se situe le carrefour où il a été arrêté à

16 l'aide d'un marqueur bleu.

17 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Oui, tout à fait.

18 Q. Est-ce que vous pourriez le faire, Monsieur Tchernetsky, avec l'aide de

19 M. l'Huissier.

20 R. Voilà le carrefour en question.

21 Q. Vous avez indiqué le carrefour où vous avez été arrêté par la police

22 militaire et vous n'avez pas eu le droit de poursuivre votre chemin jusqu'à

23 Plavno; c'est cela ?

24 R. Oui, tout à fait.

25 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Je souhaiterais le versement au dossier de

26 ce document. Je souhaiterais obtenir une cote.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo, vous n'avez pas

28 d'objections, je suppose.

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1 Monsieur le Greffier d'audience, quelle en sera la cote ?

2 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la cote D217, Monsieur le

3 Président.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant que cela ne soit retenu comme

5 élément de preuve, j'aimerais savoir - je m'adresse aux parties - est-ce

6 que Plavno est une vallée ou un village également, parce que parfois on ne

7 voit pas très bien, il y a une légende sur la carte.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Plavno, c'est une vallée. Et dans cette

9 vallée, il y a de nombreux hameaux qui composent ce que nous appelons la

10 vallée de Plavno.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci de cette précision.

12 Le document D217 est versé au dossier.

13 Poursuivez, Maître Kuzmanovic.

14 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Je vous remercie.

15 J'essaie de retrouver le fil de mon contre-interrogatoire là où je me suis

16 interrompu.

17 Q. Monsieur Tchernetsky, nous nous étions interrompus juste avant que vous

18 n'identifiez le secteur sur la carte. Puis-je indiquer que vous n'avez pas

19 vu de rapport de situation sur lequel auraient figuré des informations

20 relatives à cet incident dans la vallée de Plavno; c'est cela ?

21 R. Je ne m'en souviens pas, et je ne suis pas en train d'affirmer que je

22 ne l'ai pas vu.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kuzmanovic, peut-être que vous

24 pourriez lire la dernière réponse du témoin avant que nous examinions la

25 carte; regardez, page 39, première ligne. Je vais vous en donner lecture.

26 Monsieur Tchernetsky, avant que nous ne réexaminions la carte avec le

27 carrefour, Me Kuzmanovic vous avait posé une question, il vous avait dit :

28 "Monsieur Tchernetsky, aucun de ces renseignements ne figurent dans un

Page 3213

1 rapport de situation, d'après ce que vous savez; est-ce exact ?"

2 Et vous avez répondu comme suit : "Je ne peux pas vous le dire. Le rapport

3 relatif au fait que le corps d'un homme qui avait tué a été trouvé, a été

4 mentionné. Je me souviens que nous avons mentionné ce rapport."

5 Voilà où vous vous étiez interrompu.

6 Poursuivez, Maître Kuzmanovic.

7 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Je vous remercie.

8 Q. Mais vous, vous-même, vous n'avez pas vu cet homme, n'est-ce pas ?

9 R. Non, je ne l'ai pas vu. Je n'ai pas vu cet homme.

10 Q. Votre collègue a trouvé cet homme; et d'après ce que vous savez, c'est

11 ainsi que s'est terminée votre participation à cette situation, n'est-ce

12 pas, c'est là où se sont arrêtées les choses pour vous, pour ce qui est de

13 cet incident ?

14 R. Mon collègue faisait partie de l'équipe de patrouille, il a trouvé le

15 corps et il a aidé à l'évacuation du corps. C'est tout.

16 Q. Dans votre déclaration, il n'est pas question de la façon dont cet

17 homme a été tué, si ce n'est qu'il ait indiqué qu'il a été trouvé et que

18 lorsqu'il a été trouvé, il était mort, il avait été abattu par tir ?

19 R. Oui. On lui a tiré dessus.

20 Q. D'après ce que vous savez, il n'y a pas d'élément de preuve relatif à

21 la personne qui l'aurait tué ?

22 R. Non. Il n'y a pas de témoins.

23 Q. Et vous conviendrez avec moi, Monsieur Tchernetsky, qu'attribuer la

24 mort de cet homme non identifié à des représentants des forces militaires

25 croates, qu'il s'agisse de la police spéciale, de la police militaire, de

26 l'armée croate, vous conviendrez avec moi que ce serait se livrer à des

27 conjectures, n'est-ce pas, que de faire ceci ?

28 R. C'est la version la plus vraisemblable parce qu'à ce moment-là, il y

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1 avait une opération de ratissage du terrain qui avait lieu, il n'y avait

2 absolument personne d'autre de l'extérieur de cette zone.

3 Q. Monsieur Tchernetsky, mais vous n'avez pas de noms de personnes qui

4 auraient participé à cette opération. Vous n'avez pas d'indices ou

5 d'éléments de preuve vous permettant de déterminer comment cet homme a été

6 tué, vous savez qu'on lui a tiré dessus. Mais ne convenez-vous donc pas

7 avec moi que c'est véritablement se livrer à des conjectures que d'essayer

8 de dire qu'il s'agissait de l'armée croate ou de la police spéciale croate

9 ou de tout autre personne qui aurait pu tirer sur cet homme ?

10 R. Certes, je n'ai pas d'éléments de preuve qui montreraient directement

11 qu'il avait été tué par des unités de la police spéciale croate.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je souhaiterais poser une question au

13 témoin ?

14 Lorsque vous dites le rapport, établissant qu'un homme tué avait été

15 trouvé, a été mentionné, est-ce que vous faisiez référence à un rapport

16 écrit ou est-ce qu'il s'agissait d'un rapport qui vous avait été présenté

17 oralement ? --

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, nous fournissions des rapports écrits

19 quotidiennement.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais lorsque vous dites : "Je me

21 souviens que nous avons mentionné ce rapport", est-ce que vous faites

22 référence à un rapport écrit ou est-ce que vous faites référence à des

23 informations qui vous ont été relayées par voie orale ?

24 Si vous ne vous en souvenez pas, dites-le nous.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne me souviens pas. Non, je ne me souviens

26 pas.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez, Maître Kuzmanovic.

28 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Merci.

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1 Q. Monsieur Tchernetsky, est-ce que vous avez parlé de cet incident à la

2 police civile pour qu'une enquête soit diligentée ?

3 R. Non. Nous avons informé notre QG, le QG qui s'occupait de nous.

4 Q. Monsieur Tchernetsky, je souhaiterais aborder un autre thème pour le

5 moment.

6 Je souhaiterais vous parler de façon générale de votre travail en tant que

7 observateur militaire des Nations Unies, à la fin de l'opération Tempête,

8 d'après votre déclaration du 18 mai, qui figure à la pièce P204, votre

9 tâche principale consistait à observer la situation et à établir des

10 rapports en cas de violations du droit humanitaire; est-ce exact ?

11 Je suppose que je vais vous en donner lecture, il s'agit de la page 3,

12 c'est au milieu de la page 3 de la déclaration P204.

13 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Je souhaiterais que cela soit affiché à

14 l'écran.

15 M. RUSSO : [interprétation] Je m'excuse. Le témoin a un document papier. Je

16 ne sais pas si cela lui facilite la tâche.

17 M. KUZMANOVIC : [interprétation]

18 Q. Prenez la page 3, vous voyez, juste au-dessus du milieu de la page, il

19 est indiqué : "Les tâches essentielles des observateurs militaires après

20 l'opération Tempête, qui sont comme suit : estimer la destruction provoquée

21 par l'opération militaire croate; deuxièmement, superviser le mouvement des

22 unités militaires croates; troisièmement, inscrire les civils serbes qui

23 sont restés dans le secteur; et quatrièmement, fournir une aide humanitaire

24 aux civils, et ce, en coopération avec le CICR et le Haut-commissariat pour

25 les réfugiés des Nations Unies.

26 Est-ce que cette lecture est conforme à ce qui est écrit ?

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Tout à fait, Maître Kuzmanovic.

28 M. KUZMANOVIC : [interprétation]

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1 Q. Monsieur Tchernetsky, en tant qu'observateur militaire des Nations

2 Unies, vous étiez obligé de faire preuve d'impartialité, n'est-ce pas ?

3 C'était une de vos obligations ?

4 R. En l'espèce, je dirais que pour le secteur sud, il y avait un mandat

5 qui avait été octroyé aux observateurs militaires des Nations Unies, après

6 l'opération Tempête, ce mandat avait été accompli, et on m'avait justement

7 confié les tâches que vous venez d'énumérer.

8 Dans le cadre de l'exécution de ces tâches, nous étions avant tout censés

9 être guidés par notre mission humanitaire, parce qu'auparavant c'était une

10 mission militaire et cela a évolué en mission humanitaire, c'était le

11 principe directeur qui nous régissait, car nous devions fournir

12 essentiellement de l'aide à la population.

13 Q. Mais vous aviez cette obligation d'impartialité, vous ne deviez pas

14 prendre le parti d'un camp, n'est-ce pas ?

15 R. Oui, c'est exact.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien entendu qu'il y a cette question de

17 l'impartialité -- je ne sais pas si on fournit, par exemple, des cartes à

18 un soldat, est-ce que cela transcende le mandat qui a été octroyé.

19 Nous n'allons pas passer cinq minutes à parler de l'impartialité du

20 mandat et de la mission des observateurs, je ne pense pas que cela soit

21 particulièrement utile pour la Chambre de première instance.

22 M. KUZMANOVIC : [interprétation] C'était la dernière question à ce sujet,

23 Monsieur le Président.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez déjà suffisamment perdu du

25 temps.

26 Poursuivez.

27 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Je m'excuse.

28 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire quelles étaient les modalités des

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1 rapports qui devaient être présentés après l'opération Tempête. Je pense à

2 ce que vous faisiez tous les jours, vous effectuiez une patrouille, il faut

3 savoir qui choisissait l'itinéraire. Je voulais savoir : c'était le QG qui

4 choisissait l'itinéraire ? Est-ce que vous pourriez nous expliquer, par

5 exemple, comment est-ce que les patrouilles étaient mises sur pied ?

6 R. Dans notre zone de responsabilité, il y avait plusieurs itinéraires

7 permanents qui faisaient l'objet de patrouille, et ce, de façon régulière.

8 De surcroît, lorsqu'il y avait des événements ou des circonstances qui

9 dépassaient le cadre ordinaire, ou lorsque nous recevions des consignes ou

10 des informations à ce sujet lorsqu'il s'agissait de notre zone de

11 responsabilité, nous mettions sur pied une patrouille séparée. Mais s'il

12 n'y avait pas de tâches supplémentaires, s'il n'y avait rien qui sortait de

13 l'ordinaire, nous nous contentions d'effectuer nos patrouilles conformément

14 aux itinéraires qui avaient été prévus et établis préalablement.

15 Q. Bien. J'aimerais savoir qui était la personne qui avait déterminé et

16 établi ces itinéraires qui étaient planifiés ?

17 R. Ces itinéraires étaient définis par le commandant de l'équipe et, bien

18 entendu, il fallait obtenir l'aval du commandant du secteur.

19 Q. Nous allons parler de votre équipe aux fins de ma question.

20 Vous, vous faisiez partie de l'équipe Podkonje, n'est-ce pas ?

21 R. Oui, c'est exact.

22 Q. Et pendant un jour classique, j'aimerais savoir comment est-ce que

23 votre équipe obtenait ses instructions sur l'endroit où elle devait se

24 rendre, comment procéder, combien est-ce qu'il y avait de personnes qui

25 faisaient partie d'une patrouille ?

26 R. En règle générale, le commandant du groupe définissait les tâches la

27 veille, il indiquait quels étaient les itinéraires; et le matin, lorsque

28 nous recevions les éléments d'information de la part du QG, s'il n'y avait

Page 3218

1 pas de tâches supplémentaires qui étaient attribuées, la patrouille

2 obtenait ces éléments d'information et elle partait dans le cadre de sa

3 mission le long des itinéraires qui avaient été établis.

4 Q. Avec quelle fréquence vous rendiez-vous dans un endroit précis ? Par

5 exemple, si vous prenez Plavno, combien de fois est-ce que vous y alliez ?

6 Une fois par semaine, deux fois par mois ?

7 R. Avant l'opération Tempête, nous y allions à raison d'une fois par

8 semaine, pas plus souvent.

9 Après l'opération Tempête, lorsque notre mission est devenue une mission

10 beaucoup plus humanitaire, dans la région de Plavno nous avons trouvé un

11 nombre assez important de résidents serbes qui étaient restés; et je dirais

12 que régulièrement, une ou deux fois par semaine, nous nous rendions dans ce

13 secteur pour pouvoir vérifier l'état des lieux et pour pouvoir fournir une

14 assistance humanitaire.

15 Q. A la fin de la journée lorsque la patrouille était terminée et était

16 revenue, est-ce que tous les membres de l'équipe présentaient leurs

17 observations à un officier de permanence, et ensuite l'officier de

18 permanence compilait un rapport des observateurs militaires ? C'est ainsi

19 que les choses se passaient, ou non ?

20 R. Oui, c'est exactement ainsi.

21 Q. Ensuite, le rapport des observateurs militaires était envoyé au QG à

22 Knin, c'est cela ?

23 R. Oui.

24 Q. Votre QG se trouvait à Knin, c'est ça, pour l'équipe Podkonje, le QG

25 était à Knin ?

26 R. Oui, à Knin.

27 Q. Lorsqu'il y avait un événement que vous considériez comme important, il

28 était répertorié dans votre rapport qui était envoyé au QG, par exemple, si

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1 une maison avait été incendiée ou si une personne avait été tuée, cela

2 faisait l'objet du rapport, n'est-ce pas ?

3 R. Oui, c'est exactement ainsi que les choses se passaient.

4 Q. Mais finalement combien de personnes de votre équipe établissaient le

5 rapport de l'équipe ?

6 R. Le rapport de l'équipe était rédigé par l'officier de permanence et

7 était ensuite remis au commandant de l'équipe. Pour ce qui est de notre

8 équipe elle était composée de 12 personnes.

9 Q. Qui était votre commandant pour votre équipe ?

10 R. Mais cela changeait. Les commandants de groupe changeaient. Pendant un

11 certain temps -- je suppose que c'est la période qui suit l'opération

12 Tempête qui vous intéresse surtout ?

13 Q. Oui.

14 R. Donc après l'opération Tempête, pendant un certain temps, c'était Felix

15 Anglada, un commandant espagnol. Puis il y a eu Peter Marti qui était un

16 officier militaire helvète ou suisse; ensuite c'est moi qui ai été nommé

17 commandant du groupe.

18 Q. Et qui était le supérieur, c'est ce que j'entends, c'est ce que

19 j'aimerais savoir en fait, qui était le supérieur le long de la voie

20 hiérarchique qui recevait, par exemple, le rapport ?

21 R. Le commandant du groupe présentait son rapport au commandant du secteur

22 sud. A l'époque c'était un colonel, un lieutenant-colonel norvégien,

23 Steinar.

24 Q. Est-ce qu'il y avait le commandant militaire adjoint ou l'observateur

25 militaire, M. Ermolaev ?

26 R. Oui, il était là pendant un moment.

27 Q. Et c'est lui qui était l'adjoint principal après l'opération Tempête

28 pour l'essentiel du mois d'août, pour ne pas dire quasiment pendant tout le

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1 mois d'août, n'est-ce pas ?

2 R. Oui, plutôt en août, parce qu'ensuite il a été muté.

3 Q. Pour ce qui est de la période qui nous intéresse, de la mi-août à la

4 fin du mois d'août, c'est lui qui était l'observateur militaire qui

5 épaulait en quelque sorte le colonel Hjertnes; c'est cela ?

6 R. Oui, peut-être, je ne m'en souviens pas exactement.

7 Q. A un moment donné, Monsieur Tchernetsky, toutes les équipes des

8 observateurs militaires ont dû effectuer une étude, un état des lieux pour

9 répertorier les dégâts dans votre zone de responsabilité, n'est-ce pas ?

10 R. Oui, on nous a affecté cette tâche.

11 Q. Et vous-même, vous y avez participé à cela en tant que membre de

12 l'équipe de Podkonje ?

13 R. Oui.

14 Q. Et l'ordre pour cette étude a demandé à chaque équipe d'établir ou de

15 placer en quelque sorte les dégâts pour les bâtiments, et ce, dans votre

16 zone de responsabilité ?

17 R. Oui.

18 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Est-ce que vous pourriez afficher la pièce

19 P63, je vous prie ?

20 Q. Monsieur Tchernetsky, est-ce que vous pourriez, je vous prie, étudier

21 le premier paragraphe qui commence par le mot : "Référence", je vais vous

22 donner lecture de la phrase qui se trouve juste en dessous.

23 Voilà ce qui est indiqué : "Ce QG demande à toutes les équipes d'effectuer

24 une étude à propos du nombre de maisons détruites ou pillées, des personnes

25 à appartenance ethnique minoritaire qui sont restées, des violations des

26 droits de l'homme pendant l'opération Tempête de l'armée croate ou plus

27 tôt."

28 J'aimerais vous poser une question, Monsieur Tchernetsky, d'après ce que

Page 3221

1 vous savez, il est indiqué à la fin "ou plus tôt," à la fin de cette

2 phrase. Cela signifie donc que dans le cadre de cette étude de dégâts, vous

3 deviez également évaluer les dégâts qui s'étaient produits pendant la

4 période allant de 1992 à 1995, et ce, pour ce qui est de la zone qui était

5 placée sous le contrôle des autorités de la Republika Srpska de la Krajina.

6 Est-ce exact ?

7 R. Non, non, ce n'est pas vrai. Ce que j'entendais lorsque j'ai dit "plus

8 tôt" c'est ce qui suit : les dégâts qui ont été occasionnés aux bâtiments,

9 et il ne faut pas oublier les blessures infligées aux personnes du fait de

10 ces pilonnages, et ce, avant l'opération, donc c'est la période qui précède

11 l'opération, c'est vers le mois de juillet. Donc il s'agissait des

12 pilonnages dont je parlais pendant la première partie de ma déposition.

13 Q. Donc vous nous indiquez que ces termes "ou plus tôt" n'incluent pas une

14 étude des dégâts des bâtiments ou des villages qui avaient été endommagés

15 ou détruits d'ailleurs pendant l'occupation serbe pendant les années 1992 à

16 1995 ?

17 R. Oui, oui, c'est mon point de vue.

18 Q. Est-ce que c'était le point de vue adopté par toutes les équipes ou

19 est-ce que c'est le point de vue de l'équipe à Podkonje ?

20 R. Je pense que toutes les équipes avaient le même point de vue.

21 Q. Vous conviendrez avec moi, Monsieur Tchernetsky, qu'il y a eu des

22 dégâts causés aux villages et aux bâtiments, et que ces dégâts ont été

23 produits entre les années 1992 et 1995 ?

24 R. Oui. Oui, ces dégâts existaient. Mais lors de l'évaluation des dégâts

25 nous n'avons pas inclus les bâtiments détruits, donc les dégâts qui avaient

26 été provoqués auparavant, parce qu'il était absolument manifeste du moment

27 où cela avait été provoqué.

28 Q. Est-ce que vous avez exclu les dégâts occasionnés auparavant ?

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1 R. Oui, nous les avons exclus, nous ne les avons pas pris en

2 considération.

3 Q. Comment est-ce que vous avez déterminé ce qui pour vous était un

4 bâtiment endommagé ? Quel était le niveau des dégâts qui devait exister

5 pour qu'un bâtiment soit reconnu comme "endommagé" ?

6 R. Nous avons divisé les dégâts en deux catégories : les dégâts mineurs,

7 c'est-à-dire les murs abîmés par les éclats d'obus et le verre, d'un côté;

8 et de l'autre côté la destruction totale c'est-à-dire les dégâts qui sont

9 tels que les bâtiments ne peuvent plus être utilisés comme habitation, ou

10 lorsque les toits ou les murs sont totalement endommagés.

11 Q. Lorsque vous essayiez de voir si quelque chose a été pillé et que vous

12 décidiez qu'il y a eu pillage, quels sont les critères que vous utilisiez ?

13 R. Nous sommes entrés dans ces bâtiments, en particulier lorsque nous

14 avons fait le tour des villages et des hameaux. Nous sommes entrés dans

15 pratiquement chaque maison, et nous avons constaté ce qu'il y avait dans

16 ces habitations, dans quel état se trouvaient ces habitations. Nous avons

17 fait ces tours fréquemment et nous avons pu constater qu'au début un

18 bâtiment était intact. Ensuite, les meubles et tout ce qui figurait à

19 l'intérieur de ces habitations disparaissaient. Par la suite, il y avait

20 des destructions, des dégâts à l'intérieur des bâtiments avec les vitres

21 des fenêtres qui étaient cassées, un certain nombre de choses à l'intérieur

22 avait été incendiées.

23 Q. Y a-t-il jamais eu d'étude sur les dégâts occasionnés aux bâtiments et

24 aux villages et qui aurait été différente de celle qui a été faite après

25 l'opération Tempête ?

26 Peut-être que ma question n'est pas très claire. Je vais la reformuler.

27 Est-ce qu'il y a eu une évaluation des dégâts ou un rapport des dégâts qui

28 aurait été fait par les observateurs de l'ONU ou par le QG des Nations

Page 3223

1 Unies du secteur sud concernant les dégâts occasionnés entre 1993 et 1995 ?

2 R. Je suis arrivé dans le secteur sud fin juin. Pendant l'exercice de mes

3 fonctions, ni mon équipe, ni le QG n'a eu à accomplir de telles missions.

4 Ce qui s'est passé avant moi, je ne savais pas.

5 Q. Lorsque vous avez fait vos études, est-ce qu'il y avait un formulaire

6 que vous deviez renseigner pour donner votre évaluation des dégâts ?

7 R. Non. Nous avions un vague formulaire qui nous permettait de faire

8 l'évaluation des dégâts. Nous travaillions avec ce formulaire qui était

9 composé de trois ou quatre colonnes.

10 Q. Qui vous a donné ce formulaire ?

11 R. Le QG.

12 Q. S'agissait-il d'un formulaire imprimé ?

13 R. Non. Au début, il s'agissait simplement d'instructions orales. Par la

14 suite, nous avions un formulaire standard.

15 Q. Combien de temps après le 17 août 1995 est-ce que vous avez commencé à

16 utiliser un formulaire standard ?

17 R. Je ne saurais pas dire. Peut-être trois ou quatre jours après, peut-

18 être un peu plus. Je ne sais pas.

19 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, est-ce que vous

20 pourriez nous donner la pièce P65.

21 Q. Monsieur Tchernetsky, est-ce bien là le formulaire que l'équipe de

22 Podkonje utilisait ?

23 R. Permettez-moi un instant. Oui.

24 Q. Est-ce qu'il s'agit là de votre écriture sur ce formulaire ?

25 R. Non.

26 Q. Est-ce que vous pouvez reconnaître l'écriture ? S'agit-il quelqu'un de

27 votre équipe à Podkonje ?

28 R. Je ne saurais pas dire.

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1 Q. Est-ce que c'est ainsi que vous remplissiez normalement un formulaire

2 comme celui-ci dans votre équipe ?

3 R. Oui.

4 Q. Combien de formulaires similaires pensez-vous avoir remplis ?

5 R. Je ne saurais pas dire.

6 Q. Plus qu'un seul, plus que celui-ci, n'est-ce pas ?

7 R. Oui, certainement. Chaque patrouille devait remplir un formulaire

8 similaire après avoir terminé sa mission, donc c'est quelque chose qui se

9 faisait au quotidien, après avoir fait le tour d'un secteur donné.

10 Q. Dans ce formulaire particulier, dans le secteur - il y a un chiffre,

11 mais il y a également la lettre C : "Le DTG a rendu visite," et là il

12 s'agit de Plavno. La dernière visite est notée comme étant la : "La 5, 1600

13 Bravo, septembre 1995." Est-ce que vous voyez cela ?

14 R. Je peux voir.

15 Q. Ensuite, sur ce document particulier, il n'y a pas d'autres dates

16 concernant d'autres visites après le 5 septembre 1995, n'est-ce pas ?

17 R. Non, je ne vois pas de date effectivement là. C'est un formulaire de

18 travail qui nous avait été donné pour rédiger notre rapport quotidien et

19 pour pouvoir faire des comparaisons et voir si, par la suite, il y avait

20 des dégâts infligés aux bâtiments. C'est la raison pour laquelle il y a une

21 colonne C qui figure dans ce formulaire. La date de cette dernière visite

22 jusqu'à la nouvelle. Ce qui nous permettait de faire des comparaisons.

23 Q. Oui. Ça nous le comprenons. Mais il n'y a pas de date pour la visite

24 actuelle sur ce formulaire; est-ce exact ?

25 R. Aucune date n'est indiquée. Il s'agit là d'un document de travail du

26 commandant de la patrouille qui était remis à l'officier de permanence pour

27 qu'il puisse rédiger son rapport.

28 Q. Juste pour avoir une idée, vous dites que vous avez aidé à remplir le

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1 P65. Lorsque vous alliez à Plavno et que vous alliez voir le village dans

2 ce P65, est-ce que vous y alliez tous ensemble et qu'ensuite vous comptiez

3 les bâtiments ? En fait, comment est-ce que vous procédiez dans la réalité

4 ?

5 R. Cela dépendait du nombre de véhicules que nous utilisions lorsque nous

6 partions en mission. Si nous n'avions qu'un seul véhicule, nous allions

7 jusqu'à un centre peuplé, nous faisions le tour à pied. Nous comptions,

8 nous évaluions, ensuite nous faisions un résumé de la situation. Si nous

9 avions plusieurs véhicules, deux ou plus, nous divisions la région en

10 secteurs et chacun couvrait un secteur. Toutes ces données ne sont pas le

11 résultat du travail d'une seule personne, mais de l'ensemble de la

12 patrouille.

13 Q. Pour le P65, s'il y avait un seul véhicule, vous mettiez toutes vos

14 informations sur un seul formulaire, mais s'il y avait plus d'un véhicule,

15 il y avait plus d'un formulaire par visite ?

16 R. Non, non. Il s'agit là du rapport d'une patrouille et la patrouille

17 pouvait être composée d'un, deux ou trois véhicules.

18 Q. Mais est-ce que l'on peut dire que pour chaque patrouille à laquelle

19 vous avez participé après le 17 août 1995, s'il y avait des dégâts à

20 évaluer chaque patrouille remplissait un formulaire ?

21 R. Je vous ai dit qu'au début nous n'avions pas ces formulaires, et nous

22 travaillions en partant des instructions qui nous étaient données; c'est-à-

23 dire les dégâts complets, partiels, les pillages, et cetera.

24 Par la suite, le QG a préparé et rédigé ces formulaires de sorte que les

25 évaluations des patrouilles et des équipes puissent être standard au moment

26 de l'évaluation des dégâts.

27 Q. Comment est-ce que vous pouviez vous assurer que le même bâtiment

28 n'était pas compté deux fois lorsque l'on évaluait les dégâts partiels ou

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1 complets ?

2 R. Nous essayions de faire en sorte que cela ne se produise pas, mais bien

3 entendu il n'y a pas de garantie, et l'on ne peut pas être sûrs que le même

4 bâtiment n'ait pas été compté deux fois, parce que l'erreur humaine existe

5 et il faut toujours tenir compte du facteur humain. Ce sont donc des

6 statistiques approximatives des évaluations.

7 Pour ce qui est du travail de notre équipe par la suite, il n'y avait pas

8 des douzaines d'entre nous qui étaient là, mais nous sommes allés dans

9 chaque habitation, chaque bâtiment. Nous avons évalué chacun de ces

10 bâtiments en essayant de faire au mieux pour rester objectifs.

11 Q. Monsieur Tchernetsky, je voudrais que vous regardiez maintenant

12 l'arrestation des soldats de l'armée de la RSK à Podinarje.

13 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Je voudrais d'abord que vous regardiez le

14 P130.

15 Q. Monsieur Tchernetsky, le P130 fait partie du rapport de situation du 28

16 août 1995, et qui parle de cette arrestation et de la remise de ces soldats

17 de l'armée de la RSK, et je voudrais voir cela plus en détail avec vous.

18 A la page 1, dans la section qui est soulignée, il est dit : "Un certain

19 nombre de soldats, y compris des soldats de l'armée de la RSK sont toujours

20 cachés dans les montagnes et souhaitent se rendre."

21 Vous saviez cela, fin août 1995, c'était quelque chose qui se

22 produisait dans le secteur sud, il y avait d'anciens soldats de l'armée de

23 la RSK qui continuaient de se cacher dans les montagnes, n'est-ce pas ?

24 R. Non, je n'étais pas au courant de cela. Et dans l'exercice de mes

25 fonctions, je dirais que ce n'était qu'une seule fois que j'ai trouvé des

26 soldats qui se cachaient dans les régions montagneuses de la région de

27 Podinarje.

28 Q. Ce n'est pas ce que je vous ai demandé, Monsieur Tchernetsky. Ce que je

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1 vous ai dit, c'est qu'en août ou le 28 août, et pas uniquement à Podinarje,

2 mais dans d'autres régions, il y avait un certain nombre de soldats qui se

3 cachaient dans les montagnes. Etiez-vous au courant de cela ?

4 R. Je vous ai bien compris, et tout ce que je peux dire, c'est répéter

5 simplement que je n'étais pas au courant et je ne savais pas s'il y avait

6 des soldats qui se cachaient tout autour de la Krajina ou pas. Je n'avais

7 connaissance que de ce cas unique, c'est-à-dire la fois où j'avais trouvé

8 neuf soldats qui se cachaient dans les montagnes autour de Podinarje. Je

9 n'ai pas connaissance d'autres situations similaires, ni de la part du QG,

10 ni d'autres sources.

11 Q. Donc vous n'étiez pas au courant d'autres opérations de police qui se

12 seraient déroulées à partir du 21 août 1995 dans différentes régions du

13 secteur sud où l'on essayait de capturer certains de ces soldats de l'armée

14 de la RSK ?

15 R. Je n'étais pas au courant de ces opérations jusqu'au jour même,

16 jusqu'au jour J où l'on a remis les soldats que j'avais trouvés en présence

17 d'autres organisations internationales aux autorités croates. Et ce n'est

18 que ce matin là, avant cette opération, que l'observateur militaire

19 principal du secteur sud m'a informé de la mise en place d'une telle

20 opération.

21 Q. Monsieur Tchernetsky, je ne pense pas que vous ayez compris ma

22 question. Je ne vous ai pas posé de question particulière concernant cet

23 incident ou cette date en particulier, mais je vous ai demandé, d'une façon

24 générale, concernant le secteur sud, est-ce que vous étiez au courant du

25 fait que les forces de la police du ministère de l'Intérieur étaient en

26 train de mener des opérations pour essayer de trouver des soldats qui se

27 cachaient dans la montagne ?

28 M. RUSSO : [interprétation] Je pense qu'il a donné une réponse assez simple

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1 à plusieurs reprises.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous êtes passé de sa connaissance de la

3 présence de soldats, et sans d'autre explication et vous êtes passé à

4 d'autres opérations, comme vous l'avez dit, il y a eu quelques opérations

5 pour essayer de capturer des soldats de l'ancienne armée de la RSK.

6 Vous faites référence, semble-t-il, à des soldats. Le témoin nous a

7 dit qu'il n'était pas au courant de cela. Donc en passant d'un sujet à

8 l'autre, vous mélangez les choses, et ainsi ce n'est pas très clair.

9 Il vaudrait mieux prendre les choses une par une. Le témoin a répondu

10 à une question concernant sa connaissance de la présence des soldats. Le

11 témoin nous a également dit quelque chose concernant ce qu'il savait et ce

12 dont il avait été informé concernant l'opération spéciale.

13 Essayons de garder ces choses bien séparées l'une de l'autre.

14 M. KUZMANOVIC : [interprétation] C'est ce que j'essayais de faire. Merci.

15 Q. Est-ce que vous pouvez me dire exactement quelles étaient vos

16 responsabilités lorsque vous avez trouvé ces soldats, quelles étaient vos

17 responsabilités ?

18 R. Pour ce qui est des responsabilités particulières et des procédures

19 spéciales lorsque nous trouvions des soldats, nous n'en avions aucune. Nous

20 n'avions reçu aucune instruction sur la question.

21 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Le rapport de situation, le P130, si vous

22 pouvez aller à la page 6, s'il vous plaît, au paragraphe E : ":Les rapports

23 de l'équipe d'observateurs des Nations Unies, l'équipe Podkonje…"

24 Q. Monsieur Tchernetsky, concernant ce rapport de situation du 28 août, il

25 est dit qu'à 10 heures vous avez trouvé quatre Serbes dans le village de

26 Milivojevici et six Serbes dans le village de Musica Stanovi, et ils ont

27 demandé aux observateurs des Nations Unies de les aider, de leur donner à

28 manger et de les transporter jusqu'au secteur sud du camp où se trouvait le

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1 camp de réfugiés.

2 A la page suivante, à la troisième ligne, il est dit : "Les

3 observateurs des Nations Unies ont été informés qu'il y avait un groupe

4 d'anciens soldats de l'armée de la RSK qui se cachaient dans le voisinage

5 et qui aimeraient déposer les armes et reprendre la vie civile," civile

6 étant indiqué par les trois lettres "civ".

7 Est-ce que -- j'aimerais comparer cela à ce que vous avez déclaré,

8 Monsieur Tchernetsky, dans le P204, à la page 4.

9 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Tout en bas de la page 4, si nous pouvions

10 regarder ce paragraphe.

11 Q. Il est dit : "Vers les 24, 25 août 1995, lors d'une patrouille dans la

12 région de Podinarje, j'ai trouvé un petit hameau entre Bukvin Stan et

13 Musica Stanovi où il y avait quelques familles serbes âgées. Et les

14 résidents m'ont donné l'information suivante, à savoir que plusieurs

15 soldats de l'armée de la RSK se cachaient" - et je continue à la page 5 -

16 "se cachaient dans les bois. Avec l'aide des soldats -- ou plutôt avec

17 l'aide des civils, j'ai rencontré deux de ces soldats et leur ai parlé."

18 Maintenant, votre rapport de situation du 28 août, c'est la première fois

19 où mention est faite de ces soldats de l'armée de la RSK. C'est-à-dire cinq

20 jours après le 24 août, si vous incluez le 24 en tant que date.

21 Est-ce exact, Monsieur Tchernetsky ?

22 R. Monsieur le Président, c'est que là ce sont des documents que je

23 n'avais pas; et lorsque je faisais ma déclaration, j'essayais au bout de

24 tant d'années de me souvenir de ce qu'il en était à l'époque; mais, bien

25 entendu, je ne pouvais pas me souvenir de dates exactes.

26 Je les avais trouvés avant. J'avais dit cela. Je leur ai donné la

27 possibilité de quitter le territoire de Krajina, et je n'avais pas fait

28 rapport à la Krajina. Ça je l'admets tout à fait librement.

Page 3231

1 Par la suite, lorsqu'ils ont cherché à sortir et ont échoué, ils sont

2 revenus, je leur ai parlé, je leur ai expliqué la situation, et j'ai

3 organisé la remise de ces soldats aux autorités croates avec la garantie

4 que leurs vies seraient sauves.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kuzmanovic, vous avez commencé

6 vos questions en posant une question qui avait déjà été posée par M. Russo.

7 Il avait répondu à cette question concernant les instructions s'il avait

8 trouvé des soldats.

9 Le témoin a clairement dit dans sa déclaration qu'il n'avait pas fait

10 rapport quelques jours auparavant sur la situation.

11 Maintenant, ce sont des questions qui jusqu'à présent n'ont apporté

12 aucun élément nouveau. Si vous voulez souligner le fait qu'il n'y a pas eu

13 de rapport immédiat, ça la Cour le sait, et cela est tout à fait clair.

14 Ensuite dire que le 28 août c'est cinq jours après, je pense que cela ne

15 rajoute rien par rapport à ce que nous savons déjà.

16 Je vous demanderais de continuer.

17 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Monsieur le Président --

18 Q. Monsieur Tchernetsky, dans votre déclaration vous avez dit que vous

19 n'avez pas fait rapport au QG, mais vous avez simplement fait rapport aux

20 civils pour organiser l'aide humanitaire. Vous n'avez pas fait rapport sur

21 les civils dans aucun des rapports de situation avant le 28 août; est-ce

22 exact ?

23 R. Vous voulez probablement dire que je n'ai pas parlé des soldats dans

24 mes rapports. Je n'ai pas compris votre question.

25 Q. Aucun des rapports de situation ne fait mention de l'aide humanitaire

26 apportée aux civils dans cette région, c'est-à-dire que vous avez dit dans

27 votre déclaration que vous avez parlé des civils, mais vous n'en avez pas

28 fait mention dans vos rapports de situation entre le 24 août et le 27 août

Page 3232

1 ?

2 M. RUSSO : [interprétation] Monsieur le Président, objection. La déposition

3 dit à plusieurs reprises que l'équipe a accepté un rapport de situation

4 concernant le secteur sud, qui a été envoyé à Zagreb, et le témoin a dit

5 qu'il n'a pas fait rapport parce que cela n'apparaissait pas dans la

6 vidéoclip du secteur sud du QG.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous savons que cela y était, et M.

8 Russo met l'accent sur le rapport et vous mettez beaucoup plus d'accent sur

9 le contenu qui parle d'aide humanitaire apportée aux civils.

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Avec votre permission, je souhaiterais

11 répondre à cette question.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, s'il vous plaît.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] A ce moment-là, une de nos tâches principales

14 était de chercher les Serbes qui pouvaient rester dans le territoire de

15 l'ancienne Krajina serbe, nous devions les inscrire sur une liste,

16 enregistrer leurs besoins et leur demander s'ils souhaitaient rester en

17 Krajina ou quitter la Krajina. Ce sont là les informations que nous

18 recueillions à l'époque. Il s'agissait là de notre tâche principale et nous

19 devions remettre cette information aux organisations internationales et au

20 QG. Si les personnes avaient une demande particulière, nous essayions

21 également de répondre à leur demande ainsi que nous le demandait le QG,

22 c'est-à-dire leur donner à manger, leur apporter une aide, appeler un

23 médecin, et cetera.

24 Dans ce cas particulier, nous recherchions des personnes, nous les

25 inscrivions sur une liste et nous recueillions des informations sur leurs

26 besoins.

27 M. KUZMANOVIC : [interprétation]

28 Q. Aucun de ces rapports de situation ne fait mention de la liste de

Page 3233

1 personnes qui seraient inscrites sur la liste entre le 24 et le 28 août.

2 Si nous devons passer en revue les rapports de situation, je le

3 ferai, Monsieur Tchernetsky, mais je constate que les rapports de situation

4 des 24, 25 jusqu'au 28 août ne font nullement mention d'informations sur

5 une aide humanitaire pour ces personnes ou le fait que vous les ayez

6 inscrits sur une liste.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il y a litige là-dessus

8 ?

9 M. RUSSO : [interprétation] Pas de litige.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez continuer, Maître

11 Kuzmanovic.

12 M. KUZMANOVIC : [interprétation]

13 Q. La carte que vous avez apportée aux soldats, c'est-à-dire celle que

14 vous avez amenée avec les positions militaires de la HV, c'est bien celle-

15 ci, pour essayer de les capturer [comme interprété]; c'est bien la même ?

16 R. Non, ce n'est pas exact. Il s'agissait d'une carte vierge qui était

17 utilisée par les observateurs militaires de l'ONU. C'était une carte tout à

18 fait vierge que l'on n'utilisait que pour s'orienter dans les territoires.

19 Pour ce qui est des positions militaires croates, je ne possédais pas ces

20 informations.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans votre déclaration préalable, vous

22 dites que vous leur avez donné la carte, vous leur avez montré une route

23 possible qu'ils pouvaient emprunter pour se rendre en Bosnie, et que deux

24 jours plus tard vous avez appris que ces soldats n'ont pas réussi à

25 atteindre la Bosnie. Là, on a vraiment l'impression que vous avez essayé de

26 les aider pour qu'ils puissent s'échapper en Bosnie.

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Monsieur

Page 3234

1 Kuzmanovic. Les choses sont assez claires. Nous ne demandons pas -- nous

2 souhaitons entendre les faits, c'est ce qui nous intéresse avant tout, ce

3 n'est pas en demandant au témoin d'aider les besoins des parties et

4 d'insister sur certains détails que vous allez vous rendre utile. Il s'agit

5 vraiment d'une question de poids à accorder et, vous savez, cela peut être

6 interprété de différentes façons.

7 Poursuivez, s'il vous plaît.

8 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Merci.

9 Q. Monsieur le Témoin, je voudrais me concentrer à nouveau sur la pièce

10 P130, page 7, en bas de cette déclaration on peut lire : "A 15 heures 45…"

11 A nouveau on parle du fait que l'on a remis les soldats de l'armée de

12 la RSK. Et là on peut lire : "Il y avait des hommes en âge de combattre qui

13 sont venus dans la cour où se trouvaient les OMNU et l'équipe des droits de

14 l'homme, et qu'ils habitaient tous dans la zone de Podinarje, ils s'étaient

15 échappés de leurs unités le 5 août."

16 Voici la question que je vais vous poser. Si vraiment ils étaient

17 habitants de cette zone de Podinarje, pourquoi aviez-vous besoin de leur

18 donner une carte, alors que Podinarje se trouve à peu près à cinq

19 kilomètres de la Bosnie ?

20 R. Oui, mais ils ne sont jamais rendus en Bosnie.

21 Q. Bien. Qui vous a dit qu'ils ne sont jamais allés en Bosnie ?

22 R. Ils habitaient à Podinarje. C'étaient des paysans ou des agriculteurs

23 avant d'être mobilisés pour être dans l'armée. Et quand on a parlé de la

24 possibilité pour eux de se rendre en Bosnie, ils m'ont dit qu'ils ne

25 savaient pas y aller, qu'ils ne savaient pas quelle route prendre pour s'y

26 rendre. L'un d'eux, si mes souvenirs sont exacts, je n'ai parlé qu'avec un

27 de ces soldats, il était plus ou moins capable de lire une carte

28 géographique. Je lui ai donné une carte pour qu'ils puissent s'orienter et

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1 se déplacer.

2 Q. Monsieur, il y a une carte à côté de vous.

3 M. KUZMANOVIC : [interprétation] C'est la carte numéro 30, elle se trouve

4 dans le dossier.

5 Je voudrais demander à l'huissier de la présenter sur le rétroprojecteur.

6 Q. Monsieur le Témoin, je vais vous demander d'examiner cette carte et de

7 nous montrer où se trouve Podinarje sur la carte.

8 M. KUZMANOVIC : [interprétation] C'est sur la droite, n'est-ce pas ?

9 Q. Et ce qui est en blanc là, juste au-dessus, c'est la Bosnie-

10 Herzégovine, n'est-ce pas ? Est-ce exact ?

11 R. Oui. C'est la frontière avec la Bosnie.

12 M. KUZMANOVIC : [interprétation] On n'a plus besoin de cette carte.

13 Q. Monsieur Tchernetsky, ce rapport sur la situation en date du 28 août, à

14 partir de la page 5, où vous parlez de : "L'équipe Podkonje des

15 observateurs de l'ONU" -- c'est la page 6, excusez-moi.

16 A la page 6, si vous lisez ce qui y figure jusqu'à l'avant-dernière page de

17 ce rapport, dans ce rapport on a l'impression que tout cela s'est passé en

18 un seul jour, à savoir le 28 août, qu'on les a trouvés ce jour-là, qu'on

19 les a donnés entre les mains des observateurs ce jour-là aussi, que tout

20 cela s'est passé en une seule journée, alors que cela a duré quatre jours,

21 n'est-ce pas ?

22 R. Oui.

23 Q. Monsieur, vous ne trouvez pas cela étonnant que dans ce rapport on fait

24 croire que tout cela s'est passé dans un seul jour alors que finalement

25 cela s'est passé en quatre jours, vous n'avez pas l'impression que là on

26 vous induit en erreur un peu quand vous lisez cela ?

27 R. Non, je ne pense pas, parce que ce rapport sur la situation a été écrit

28 par le QG du secteur, on résume les infos portant sur plusieurs jours. Donc

Page 3236

1 il résume les infos qui sont arrivées à une certaine date concernant une

2 période de temps.

3 Q. Mais sur la page de garde où on peut lire : "Rapport quotidien sur la

4 situation des observateurs militaires des Nations Unies émanant du QG."

5 C'est ce qu'on peut lire, c'est l'intitulé ?

6 R. Oui.

7 Q. Monsieur, la façon dont on a remis ces gens a mis en danger la vie des

8 civils qui s'y trouvaient, n'est-ce pas, vous serez d'accord avec moi là-

9 dessus ?

10 R. J'ai tout fait pour qu'il n'y ait pas de danger, pour que les civils

11 n'encourent pas de danger et pour préserver la vie des soldats. Tout

12 simplement, vu la situation, je n'avais pas d'autre situation parce qu'il

13 s'agissait d'assurer la sécurité, la sécurité des observateurs et des

14 membres de la communauté internationale.

15 Q. Le premier des quatre jours, vous ne les avez pas désarmés ?

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kuzmanovic, même s'il dit

17 "oui", on peut dans ce cas recommencer tout le travail. Ce n'est pas la

18 première question inutile que vous posez. Vous essayez de mettre l'accent

19 sur la mauvaise conduite de ce témoin qui ne s'est pas comporté

20 conformément à son mandat. Vous enfoncez des clous. Tout d'abord, on

21 apprend que Podkonje se trouve à cinq kilomètres de la frontière, ensuite

22 on voit cela sur la carte et on voit qu'elle se trouve même à quatre

23 kilomètres et demi, mais ce n'est pas vraiment utile pour les Juges de la

24 Chambre.

25 Essayer de vous concentrer sur les choses qui sont vraiment au cœur de

26 cette affaire.

27 M. KUZMANOVIC : [interprétation]

28 Q. Pourquoi vous n'avez pas fait participer la Croix-Rouge internationale

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1 à cet échange, Monsieur Tchernetsky ?

2 R. Nous l'avons fait, ils y ont participé ainsi que les représentants de

3 l'UNHCR, ainsi que l'OSCE. Mais comme vous le savez, les représentants de

4 la Croix-Rouge internationale, en fonction de leur statut et de leur

5 mandat, ne participaient pas aux opérations conjointes. Ils étaient

6 toujours complètement indépendants. Ce qu'on a fait, c'est qu'on leur a

7 fait connaître les infos au sujet de ces gens qui avaient été trouvés dans

8 certaines zones, ensuite ils ont poursuivi à agir de façon indépendante.

9 Je ne sais pas s'ils étaient vraiment avec nous sur le terrain, mais la

10 pratique a démontré que les représentants de la Croix-Rouge internationale

11 n'ont jamais participé aux opérations conjointes.

12 Comme il y a eu d'autres organisations qui étaient présentes dans la base

13 et qui ont participé à tout cela.

14 Q. M. Ermolaev, est-ce qu'il était avec vous pendant cette opération qui a

15 duré quatre jours ?

16 R. Non. M. Ermolaev travaillait au QG, et c'est là qu'il se trouvait.

17 M. KUZMANOVIC : [interprétation] La pièce P94, page 8, s'il vous plaît.

18 Q. Monsieur le Témoin, M. Ermolaev dit dans sa déclaration, pièce P94,

19 qu'il ne se souvient pas de la date exacte; mais que dans la zone indiquée,

20 huit à neuf soldats de l'armée de la RSK se sont rendus à l'équipe des OMNU

21 qui ont été envoyés pour patrouiller dans la zone de Dinara. Il dit que

22 vous faisiez partie de cette équipe, une équipe russe.

23 Ensuite, on peut lire qu'il a reçu un rapport de vous, M. Ermolaev a reçu

24 un rapport que vous lui avez envoyé, et par le biais de ce rapport, vous

25 l'avez informé de la zone où ils se trouvaient.

26 Est-ce que vous vous souvenez de cela ?

27 R. Mais non, je ne sais pas quoi vous dire parce que je ne suis absolument

28 pas au courant de cela. Il n'y est pas allé, pas avec moi en tout cas. J'y

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1 suis allé avec les membres de mon équipe, Pavel Komper, Peter Marti. Je ne

2 suis pas allé avec Ermolaev.

3 Q. Excusez-moi de vous poser la question. M. Ermolaev, dans sa déposition

4 préalable, dit que c'est vous qui lui avez envoyé le rapport initial. Est-

5 ce que vous niez cela maintenant ?

6 R. Non, j'ai informé le QG en passant par l'officier de garde. Tous les

7 rapports passaient par l'adjoint aux observateurs seniors. C'est comme cela

8 qu'il a reçu ce rapport.

9 Q. Monsieur le Témoin, quand vous avez retrouvé ces soldats pour la

10 première fois, pourquoi vous n'avez pas informé les autorités croates de

11 cela ?

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kuzmanovic, apparemment

13 vous n'avez pas très bien compris ce que je vous ai dit tout à l'heure,

14 n'est-ce pas ? Parce que vu comment vous poursuivez, j'ai l'impression que

15 vous n'avez pas compris.

16 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Je vais poursuivre.

17 Q. Monsieur le Témoin, je vais vous demander de vous référer à la deuxième

18 partie de votre déclaration où, à la page 5, la pièce P204, vous parlez

19 d'une autre patrouille à laquelle vous avez pris part et qui s'est rendue à

20 Podinarje le 30 et le 31 août 1995.

21 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Est-ce que l'on peut examiner cette

22 partie-là de votre déclaration ?

23 Q. Avant de parler de cela, Monsieur le Témoin, dans aucun des rapports du

24 30 ou du 31 août, on ne trouve aucune information corroborant ce qui est

25 dit ici dans votre déclaration préalable. C'est exact ? On peut les

26 parcourir, si vous le souhaitez.

27 R. Je ne les ai pas vus, donc je ne peux pas vous répondre.

28 Q. Si je vous disais qu'il n'y a rien dans ces rapports sur la situation,

Page 3239

1 à savoir P132, P133 et P135, vous n'auriez pas de raison de ne pas être

2 d'accord avec moi, n'est-ce pas ?

3 R. Je voudrais poser une question : est-ce qu'il s'agit de rapports sur la

4 situation venus du QG ou de l'équipe des OMNU ?

5 Q. Il s'agit des rapports quotidiens sur la situation venus du quartier

6 général du secteur sud des OMNU.

7 R. Selon toute vraisemblance, il s'agissait là d'incidents comprenant des

8 détails non significatifs et c'est pour cela qu'ils n'étaient pas inclus

9 dans le rapport. Cela dépendait du membre senior de l'équipe OMNU et de son

10 adjoint de décider, il leur appartenait de décider des informations qui

11 allaient figurer dans les "sitreps". Dans notre rapport, je suis sûr que

12 cette information y était.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kuzmanovic, je regarde l'heure.

14 On est assez près de la pause et je vous ai demandé avant la pause de

15 combien de temps vous aviez besoin, vous avez dit que vous aviez besoin

16 d'une heure, une heure et demie. Je pense que vous devez vraiment vous en

17 tenir, vu la façon dont vous utilisez le temps qui vous est alloué.

18 M. KUZMANOVIC : [interprétation] J'ai besoin d'encore une dizaine de

19 minutes.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous allez avoir 7 minutes. Ensuite on

21 va prendre une pause jusqu'à une heure moins dix.

22 M. KUZMANOVIC : [interprétation]

23 Q. Vous avez mentionné M. Stevo Macakana, comment le connaissez-vous,

24 comment vous savez qu'il s'appelait comme cela ?

25 R. C'est comme cela qu'il s'est présenté.

26 Q. Etait-ce la première fois que vous l'avez rencontré ?

27 R. Oui.

28 Q. Saviez-vous qu'il était membre de la police spéciale serbe ?

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1 R. C'est ce qu'il m'a dit, oui.

2 Q. Il vous a dit qu'il était membre de la police spéciale serbe ?

3 R. Oui.

4 Q. Mais vous n'avez pas mis cela dans votre déclaration préalable. C'est

5 très important de savoir qu'il y avait des membres de la police spéciale

6 serbe dans la zone de Podinarje, n'est-ce pas ? C'est important de le

7 savoir.

8 R. Pas serbe, mais croate. Il y a un malentendu ici. Vous parlez de Stevo

9 Macakana. C'est un représentant de la police spéciale croate, c'est comme

10 cela qu'il s'est présenté, Dzi-Bu, c'est ce qu'il a dit. Je me souviens de

11 cela, et je l'ai noté. Il ne s'agit pas là des forces serbes, mais croates.

12 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Je voudrais demander que l'on présente au

13 témoin la pièce 3D00-0110. C'est 3D00-0110. J'ai mis trop de zéros, là,

14 3D00-110. Excusez-moi.

15 [Le conseil de la Défense se concerte]

16 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Excusez-moi, je me suis trompé, vraiment.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans le système, nous avons toujours des

18 pièces à conviction à huit chiffres.

19 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Donc 3D00-0616 -- 0619. C'est cela.

20 Q. Monsieur le Témoin, c'est un document, un rapport spécial portant sur

21 les accusations portées contre Stevo Macakana, qui était membre de l'armée

22 de la région autonome serbe de la Krajina. Au mois de novembre 1992, M.

23 Macakana a été accusé d'avoir tué un civil croate, c'était en novembre

24 1992, un dénommé Milan Bulic.

25 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Est-ce que je peux demander une cote pour

26 ce document.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ensuite vous allez poser des questions ?

28 Est-ce qu'il y a des objections, Monsieur Russo ? Pas d'objection.

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1 Monsieur le Greffier.

2 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de la pièce D218.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

4 M. KUZMANOVIC : [interprétation]

5 Q. Monsieur Tchernetsky, Stevo Macakana, d'après cette information, était

6 membre de la milice de la Région autonome serbe, n'est-ce pas ?

7 R. Excusez-moi. Tout est possible. Je n'ai pas vérifié ce document, et

8 j'ai bien écrit les infos qu'il m'a communiquées en présence d'un autre

9 observateur, Ivo Maknanaje [phon]. C'était un capitaine tchèque.

10 Q. Et M. Macakana était un militaire serbe qui se trouvait à Podinarje,

11 n'est-ce pas, donc un militaire serbe dans la zone de Podinarje; exact ?

12 R. Excusez-moi. C'est à moi que vous posez cette question ?

13 Q. Oui, Monsieur Tchernetsky.

14 R. Non, il n'était pas serbe. Il faisait partie d'une équipe de deux

15 personnes dans un véhicule militaire de la police croate. Il avait un

16 uniforme et il était armé.

17 Q. Dans votre déclaration, vous dites - il s'agit de la pièce P204, page 5

18 : "Lors de cette patrouille au niveau de Grabovica Drazica, j'ai vu un

19 groupe de policiers de la police spéciale avec Stevo Macakana à la tête."

20 Quand vous parlez d'un groupe, finalement vous faites référence à deux

21 personnes; c'est cela ?

22 R. Oui, une équipe de deux, oui. Puis il y avait un autre soldat, un

23 ancien soldat que nous avons remis aux autorités croates qui était avec

24 eux.

25 Q. Et ce soldat a été libéré et il a réussi à revenir à Podinarje, et

26 c'est M. Macakana qui essayait de retrouver ses armes; est-ce exact ?

27 R. Il n'a pas été libéré. Ces deux policiers étaient là pour l'escorter

28 jusqu'à l'endroit où lui il avait laissé ses armes, d'après ce qu'il avait

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1 dit. Parce qu'il était censé leur montrer l'endroit où se trouvaient les

2 armes, les prendre et revenir.

3 Q. Est-ce que ces policiers de la police spéciale à la tête de laquelle se

4 trouvait Stevo Macakana, est-ce qu'ils étaient armés ?

5 R. Oui.

6 Q. Ils portaient un uniforme, n'est-ce pas ?

7 R. Un uniforme de camouflage. Enfin, un uniforme de camouflage, c'est ce

8 qu'ils portaient.

9 Q. Est-ce que vous saviez si les policiers de la police spéciale croate

10 portaient des uniformes de camouflage ?

11 R. Pendant l'opération de Podinarje avec la participation de la police

12 spéciale militaire, j'ai bien vu que leurs membres arboraient cet uniforme

13 à l'époque, au moment où ces soldats ont été remis aux autorités croates.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kuzmanovic, vous avez

15 transformé les sept minutes en dix.

16 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions. Ce

17 document était de toute façon versé au dossier. Nous avons déjà une cote.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il y a des objections ? Le

19 Greffier.

20 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On parle du document concernant Stevo

22 Macakana ?

23 M. KUZMANOVIC : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.

24 M. LE GREFFIER : [interprétation] Excusez-moi.

25 Il s'agit de la pièce D218.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce D218 est versée au dossier.

27 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Je vous remercie du temps supplémentaire

28 que vous m'avez accordé.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tchernetsky, nous allons

2 prendre une pause de 20 minutes.

3 Qui est le prochain conseil qui va interroger le témoin ?

4 M. CAYLEY : [interprétation] C'est moi, Monsieur le Président.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Donc nous levons la séance

6 jusqu'à une heure moins dix.

7 --- L'audience est suspendue à 12 heures 38.

8 --- L'audience est reprise à 13 heures 03.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tchernetsky, vous allez

10 maintenant répondre aux questions de Me Cayley, qui est le conseil de M.

11 Cermak.

12 Maître Cayley, c'est à vous.

13 M. CAYLEY : [interprétation] Oui, merci, Monsieur le Président.

14 Contre-interrogatoire par M. Cayley :

15 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Tchernetsky. Je n'ai pas beaucoup de

16 questions à vous poser, mais j'aimerais que vous reveniez sur le thème qui

17 a été abordé juste avant la pause, à savoir la découverte et l'arrestation

18 de ces neuf soldats de la RSK.

19 Ce matin, est-ce que vous vous souvenez que vous avez dit que les soldats

20 ont été remis aux autorités croates ? Vous vous souvenez avoir dit cela ?

21 R. Oui, oui, je me souviens.

22 Q. Vous avez dit qu'il y avait un soldat qui avait été remis en liberté ?

23 R. Oui.

24 Q. Et que vous aviez entendu que les huit autres soldats ont été

25 condamnés; vous vous souvenez de cela ?

26 R. Non, je ne sais pas quel fut le verdict du tribunal. Je sais qu'ils ont

27 été placés en détention dans une école. Pendant qu'ils se trouvaient dans

28 cette école, l'équipe des droits de l'homme leur a rendu visite ainsi que

Page 3245

1 des représentants de la Croix-Rouge, et ce sont eux justement qui m'ont

2 appris que ces personnes avaient été transférées à Zadar; probablement à la

3 prison de Zadar, je n'en sais rien.

4 M. CAYLEY : [interprétation] Je souhaiterais que soit affichée la pièce de

5 la Défense 100.

6 Q. Monsieur Tchernetsky, j'aimerais vous montrer très brièvement le

7 rapport d'enquête judiciaire qui porte justement sur ce dont vous venez de

8 nous parler.

9 Alors si vous regardez ce document, vous voyez que c'est la date du "6 juin

10 1995", ça c'est dans la version de la traduction française [comme

11 interprété]; mais si vous prenez la version originale, vous voyez que c'est

12 la date du "06.09.95". Donc là c'est une erreur. Donc le document ne date

13 pas du 6 juin 1995, mais bien du 6 septembre 1995.

14 Alors vous voyez qu'il s'agit d'un rapport d'enquête criminelle établi par

15 l'administration de la police de Zadar. Vous voyez cela ? La police de

16 Zadar-Knin.

17 R. Oui, je le vois.

18 Q. Donc il n'a pas été contesté par les parties que les noms qui sont

19 énumérés sont les huit soldats qui sont concernés par cet événement.

20 M. CAYLEY : [interprétation] Mais c'est la dernière page du document qui

21 m'intéresse avant tout -- non, je m'excuse, l'avant-dernière page. Je

22 m'excuse. C'est la page précédente en fait que je souhaiterais voir

23 affichée.

24 Q. Et je vous demanderais de bien vouloir lire le dernier paragraphe de

25 cette page, car je pense que cela va nous permettre de mieux comprendre ce

26 dont vous avez parlé. Donc c'est le dernier paragraphe de cette page.

27 Vous l'avez lu, Monsieur Tchernetsky, ce paragraphe ?

28 R. Oui.

Page 3246

1 Q. J'ai une question très simple à vous poser à ce sujet : à ce moment-là,

2 est-ce que vous saviez que l'administration de la police de Zadar-Knin

3 était le QG suprême de la police qui se trouvait à Knin ?

4 R. Je n'ai pas entendu l'interprétation.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pourriez répéter votre

6 question, et nous verrons si le témoin entend cette fois-ci

7 l'interprétation.

8 M. CAYLEY : [interprétation] Je vous remercie.

9 Q. A ce moment-là, en août et en septembre 1995, est-ce que vous saviez

10 que l'administration de la police Zadar-Knin était le QG supérieur pour le

11 commissariat de police local de Knin ?

12 R. Non, je ne le savais pas.

13 Q. Donc vous ne saviez pas non plus que c'était l'administration de la

14 police de Zadar-Knin qui était responsable pour diligenter des enquêtes

15 lorsque des crimes graves avaient été commis dans cette région ?

16 R. Non, je le ne savais pas.

17 M. CAYLEY : [interprétation] Je vous remercie. Nous pouvons passer à autre

18 chose.

19 Q. J'aimerais maintenant que vous réfléchissiez à l'épisode que vous avez

20 décrit et qui s'est déroulé entre le 10 et le 12 août 1995, à savoir les

21 tirs que vous avez observés à Knin.

22 Est-ce que vous pourriez, je vous prie, réfléchir à cet incident.

23 A propos de cet événement, Monsieur Tchernetsky, si vous le souhaitez

24 d'ailleurs, vous pourriez tout à fait prendre la page 3 de votre première

25 déclaration. La pièce P204. C'est le dernier paragraphe de la page 3, qui

26 porte sur ces événements.

27 Vous avez estimé que cela s'était passé entre le 10 et le 12 août 1995;

28 est-ce exact ?

Page 3247

1 R. Je ne suis pas en mesure de vous donner une date exacte, mais cela

2 s'est passé juste après mon retour de permission, au début de mon mandat,

3 et notre équipe se trouvait cantonnée au même endroit que le QG.

4 Q. Est-ce que vous avez cette déclaration avec la bonne page devant vous ?

5 R. Oui.

6 Q. Ce sont les trois dernières lignes de ce paragraphe qui m'intéressent.

7 Vous voyez qu'il est question de la location d'une maison, et ce, pour que

8 vous y établissiez votre bureau. Vous avez donc la femme dont le nom n'a

9 pas été mentionné, et vous voyez qu'il indique que son appartement à Cara

10 Lazara Sinska Cesta, son appartement avait été pillé et incendié.

11 J'aimerais savoir si la location de ce nouveau bureau s'est produite au

12 même moment que l'incendie dont il est question à Cara Lazara Sinska Cesta

13 ?

14 R. L'appartement a été incendié plus tard, après que nous avons loué un

15 nouveau bureau et --

16 Q. Non, non, vous n'avez pas compris ma question. Ce qui m'intéresse,

17 c'est la location de ce bureau. Donc, lorsque vous avez loué ce nouveau

18 bureau. J'aimerais savoir si cela s'est passé au même moment que vous avez

19 observé cet incendie dans le centre de Knin ?

20 R. Oui. Nous avons loué ce bureau. Mais pour des raisons de sécurité,

21 nombreux étaient les membres de notre équipe qui refusaient d'y rester

22 pendant la nuit. En règle générale, il n'y avait que trois ou quatre

23 personnes qui étaient de permanence pendant la nuit, pendant les premiers

24 jours en tout cas, alors que les autres regagnaient la base. Oui, c'était à

25 peu près pendant la même période.

26 M. CAYLEY : [interprétation] Est-ce que nous pourrions avoir la pièce de

27 l'Accusation 118, je vous prie ?

28 Q. Monsieur Tchernetsky, vous pouvez voir qu'il s'agit d'un rapport des

Page 3248

1 observateurs militaires qui porte la date du 13 août 1995. Le 12 août,

2 c'est une minute après midi, et pour le 13 août le rapport va jusqu'à 20

3 heures.

4 Vous voyez cela ?

5 R. Oui.

6 M. CAYLEY : [interprétation] C'est la dernière page de ce document qui

7 m'intéresse et que je souhaiterais voir affichée.

8 Q. Là vous voyez au dernier paragraphe que votre équipe, l'équipe

9 Podkonje, a présenté un rapport qui porte sur cette période, c'est le

10 dernier paragraphe comme je vous l'ai dit qui m'intéresse, qui est précédé

11 du mot "Admin" qui, je suppose, signifie administration, n'est-ce pas ?

12 R. Oui, c'est cela. Cela veut dire administration ou questions

13 administratives. Ça n'a rien à voir avec l'opération.

14 Q. Vous voyez que là il est indiqué que votre équipe a emménagé dans un

15 nouveau logement. Vous voyez cela, c'est écrit ?

16 R. Oui, je le vois.

17 Q. Est-ce qu'il est probable que ce soit vous qui ayez indiqué cela à

18 l'officier de permanence pour l'équipe Podkonje ?

19 R. Non. C'est le commandant de l'équipe qui a présenté ce rapport. A

20 l'époque, je n'étais pas le commandant de l'équipe.

21 Q. Est-ce que vous voyez qu'il est indiqué que la propriétaire est une

22 vieille femme serbe qui a été protégée par ses voisins croates lorsque

23 l'offensive croate s'est déplacée vers Knin ? Vous voyez cela ?

24 R. Oui, je le vois, et je peux tout à fait le confirmer. C'est ainsi que

25 les choses se sont passées. C'est ce qu'elle a dit.

26 Q. Pourrait-on avancer que vous auriez pu voir cet incendie, au vu des

27 informations de ce rapport, au plus tard le 13 août 1995 ? Ce serait la

28 toute dernière date que l'on pourrait envisager pour cet incendie ?

Page 3249

1 R. Je ne me souviens pas de dates précises, je n'ai pas tenu de carnet de

2 bord.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il semblerait, Maître Cayley, que vous

4 tirez des conclusions à partir des informations qui ont été présentées.

5 J'ai entendu le témoin dire que lorsqu'ils ont emménagé dans ce nouvel

6 immeuble, il n'y en avait que quelques-uns qui passaient la nuit dans cet

7 appartement, et les autres regagnaient la base. Je comprends également,

8 d'après sa déposition, que lorsqu'ils sont partis de la base des Nations

9 Unies, ils ont été arrêtés au niveau de là où l'on franchit la voie ferrée.

10 Je dois dire, puisque c'est une question logique, j'ai quelques

11 problèmes à suivre votre logique, parce qu'il y a une partie de l'équipe

12 qui est restée à la base des Nations Unies et l'autre partie --

13 Ce n'est pas logique, donc posez au témoin des questions à propos de

14 ce qu'il sait.

15 M. CAYLEY : [interprétation] Je pense que vous ne m'avez pas compris.

16 Je voulais savoir quel était au plus tard la date à laquelle il aurait pu

17 assister à cet événement. Et puisqu'il est question de logique et de

18 déclaration, et de location d'appartements, je voulais lui demander quelles

19 étaient au plus tard la date et l'heure où il aurait pu observer

20 l'incendie. Voilà.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais vous l'avez dans sa

22 déclaration ?

23 M. CAYLEY : [interprétation] Oui, c'est la page 3, les trois

24 dernières lignes.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai posé une question à ce sujet,

26 et il a dit que c'était plus tard, que c'était son appartement.

27 M. CAYLEY : [interprétation] Je vais poursuivre.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ça a suscité énormément de

Page 3250

1 confusion, vos questions. J'ai vraiment des problèmes à vous suivre, je

2 répète, si tant est que vous soyez logique.

3 Poursuivez.

4 M. CAYLEY : [interprétation]

5 Q. Pour ce qui est de l'observation de cet incendie, Monsieur

6 Tchernestky, est-ce que vous avez vous-même choisi cet itinéraire pour ce

7 jour-là, ou est-ce qu'on vous a donné l'ordre d'emprunter cet itinéraire,

8 est-ce qu'on vous a donné l'ordre d'effecteur une patrouille autour du

9 centre de la ville de Knin ?

10 R. Nous sommes allés directement vers le foyer de l'incendie. C'était

11 l'itinéraire le plus court que nous avons emprunté.

12 Q. Donc vous avez décidé vous-même d'emprunter cet itinéraire-là ce jour-

13 là. Ce n'est pas le commandant de votre équipe qui vous en avait donné

14 l'ordre ?

15 R. Non. J'ai reçu une mission, mais c'est moi qui ai choisi l'itinéraire

16 que j'allais suivre, parce que c'était l'itinéraire le plus direct et le

17 plus court.

18 Q. Lorsque vous avez essayé d'observer pour la première fois l'incendie en

19 question, vous avez été arrêté à un poste de contrôle, n'est-ce pas ?

20 R. Non. Au centre de la ville, près du pont ferroviaire, nous avons été

21 arrêtés.

22 Q. Mais c'est la police militaire qui vous a arrêté, n'est-ce pas ?

23 R. C'est la police civile qui nous a arrêtés, si je ne m'abuse.

24 M. CAYLEY : [interprétation] Est-ce que je pourrais vous demander une

25 petite seconde, Monsieur le Président ?

26 Q. La deuxième fois, lorsque vous avez observé l'incendie, est-ce

27 qu'il y avait des membres de la police militaire ou de la police civile

28 présents ?

Page 3251

1 R. Je ne sais pas qui portait l'uniforme de camouflage, je ne sais pas

2 s'il s'agissait de la police militaire ou de soldats; mais il y avait

3 également des membres de la police civile ainsi que les sapeurs-pompiers.

4 Q. Nous allons revenir sur votre première déclaration qui est la

5 déclaration P204, dernier paragraphe de la page 3.

6 Vous verrez, au milieu de ce paragraphe il est indiqué : "Nous avons réussi

7 à nous approcher du site, et ce, à partir de l'autre côté de Knin." Puis

8 vous dites : "Tor a pris l'appareil photo et a commencé à prendre des

9 photos alors que je parlais aux officiers de la police militaire."

10 Vous voyez cela ?

11 R. Oui, je peux le voir.

12 Q. Est-il exact que vous avez parlé à des officiers de la police militaire

13 ?

14 R. Ce n'était probablement pas un officier. Il y avait un ou deux hommes

15 qui portaient un uniforme qui sont venus vers moi lorsqu'ils ont vu notre

16 véhicule. D'ailleurs la conversation n'a pas duré très longtemps. Nous

17 avons fait semblant d'avoir perdu notre chemin, nous leur avons demandé

18 notre route, ils nous ont montré la route à emprunter et voilà, ça s'est

19 terminé pour cela.

20 M. CAYLEY : [interprétation] Est-ce que vous pourriez, je vous prie,

21 prendre la déclaration P205, il s'agit de votre deuxième déclaration,

22 déclaration du 6 décembre 2007. Et j'aimerais que vous preniez le

23 paragraphe 16.

24 Q. Vous verrez à la deuxième phrase qu'il est indiqué : "Je me souviens de

25 cet endroit comme étant le pont ferroviaire. Indiqué par le numéro 3 sur

26 l'annexe AT, vous avez l'emplacement où se trouvaient les appartements que

27 nous pouvions voir brûler lorsque nous avons été arrêtés par la police

28 militaire. Je sais qu'il s'agissait de la police militaire parce que leurs

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1 véhicules indiquaient cela."

2 Est-ce que vous vous souvenez d'avoir identifié la police militaire parce

3 qu'elle était avec des véhicules sur lesquels étaient les insignes, les

4 descriptifs de la police militaire, c'est ainsi que vous le savez ?

5 R. Vous savez, cela m'est difficile de vous le dire maintenant. Je vois le

6 décalage entre ma déclaration de l'année 2002 et celle de l'année 2007. Je

7 dois dire que j'ai vraiment du mal à me souvenir maintenant s'il s'agissait

8 de police militaire ou de police civile. En attendant, c'était la police

9 quand même.

10 Q. Vous avez donné différentes descriptions quant à la nature de ces tirs.

11 Aujourd'hui, vous avez dit que pratiquement tout le quartier était en feu.

12 M. CAYLEY : [interprétation] Il s'agit de la page 25, ligne 19.

13 Q. Dans la première déclaration que vous avez faite, vous dites, et je

14 vais vous citer ce que vous avez dit. C'est la troisième phrase, le dernier

15 paragraphe de la troisième page. Vous avez dit ce qui suit :

16 "On a pris la voiture directement pour le centre de Knin, on a vu tout un

17 quartier en feu ?"

18 Ensuite, dans votre deuxième déclaration, la pièce du Procureur 205, vous

19 donnez une description un peu différente, et là vous dites, au niveau de la

20 deuxième phrase du seizième paragraphe : "Marquée avec le chiffre 3 sur

21 l'annexe AT-3, c'est la localité où se trouvait le pâté de maisons que l'on

22 pouvait voir brûler au moment où nous avons été arrêtés par la police

23 militaire."

24 Il y avait combien de maisons que vous avez vues en feu ?

25 R. C'est difficile de le dire, il faisait nuit. Il y avait pas mal de

26 maisons qui étaient en feu. Toute cette zone a été encerclée par des gens

27 et par des véhicules. Et quand je parlais d'un "quartier", pour moi c'était

28 un pâté de maisons, des maisons de un à deux étages.

Page 3253

1 Q. Est-ce qu'on parle d'une maison, deux maisons, plusieurs maisons ?

2 R. Pas moins que 10.

3 Q. Pas moins que 10 maisons ?

4 Tout à l'heure vous avez dit que tous les événements importants étaient

5 communiqués au QG de l'OMNU à Knin, n'est-ce pas ?

6 R. Oui.

7 Q. Le fait d'incendier pas moins que 10 maisons, c'est quelque chose

8 d'important, n'est-ce pas ?

9 R. Oui, je le pense.

10 Q. On va regarder rapidement. Je ne veux pas vous montrer le rapport de

11 l'OMNU où l'on ne parle pas des événements à Podkonje, mais je vais vous

12 montrer ceux qui parlent des incendies de maisons ?

13 M. CAYLEY : [interprétation] Est-il possible d'avoir la pièce du Procureur

14 116, s'il vous plaît.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que cela est contesté, à savoir

16 que les dix maisons en feu ne se trouvent pas dans les "sitreps".

17 M. RUSSO : [aucune interprétation]

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non.

19 Les Juges savent que l'on fait état de maisons en feu dans de nombreux

20 "sitreps".

21 M. CAYLEY : [interprétation] Je voudrais lui montrer deux "sitreps" où on

22 parle des événements dont il parle. De toute façon je me vais finir avant

23 la fin de cette session.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Faites. Donc, vous faites référence à la

25 page 25, ligne 19 -- page 23, ligne 19.

26 M. CAYLEY : [interprétation] Exactement.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

28 M. CAYLEY : [interprétation]

Page 3254

1 Q. Monsieur le Témoin, ici il s'agit d'un rapport du QG de l'OMNU secteur

2 sud, P116, et il s'agit de quelque chose qui s'est produit à peu près

3 autour de 18 heures le 10 août et le 11 août 1995.

4 M. CAYLEY : [interprétation] C'est la page 11 de ce rapport qui nous

5 intéresse -- c'est la page 3.

6 Q. Au niveau du paragraphe 8, vous allez voir que la seule chose qui a été

7 rapportée au QG de l'OMNU par le "Team" de Podkonje, c'était le fait que la

8 patrouille essayait de réparer un relais radio.

9 M. RUSSO : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. Ce n'est pas

10 cela qui est dit. Ici, on dit que c'est ce que le QG

11 communique, et que ce n'est pas la seule chose que l'équipe a indiquée au

12 quartier général.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous poser la question de sorte

14 que l'on puisse lire cela --

15 M. CAYLEY : [interprétation]

16 Q. Est-ce que vous voyez ici que l'équipe de Podkonje a indiqué que la

17 patrouille a été envoyée pour réparer un relais radio ? Est-ce que vous

18 voyez cela ?

19 R. Oui. Mais c'était vraiment le dernier jour, entre le 10 et le 11. Je

20 vous dis que je ne me souviens pas de la date exacte de cet événement.

21 Q. J'ai raison aussi de dire qu'on a aussi fait état des restrictions de

22 mouvement des patrouilles de l'OMNU, n'est-ce pas ? Ceci figure dans tous

23 les rapports des OMNU, n'est-ce pas ?

24 R. Oui, ça aurait dû être comme cela.

25 Q. Si vous regardez le bas de cette page, vous pouvez voir les :

26 "Restrictions de mouvement."

27 R. Non, pas le 10. Le 10, on a fait mention de la relocalisation de la

28 patrouille administrative.

Page 3255

1 Q. Pourriez-vous voir ce rapport à l'endroit où l'on parle de

2 "restrictions de circulation" à la fin du rapport. Vous allez voir que la

3 seule chose qui est communiquée par l'équipe Podkonje est à l'effet qu'ils

4 avaient besoin d'une autorisation écrite pour se rendre à l'endroit où se

5 trouve le relais; est-ce exact ? Est-ce que vous le voyez ?

6 R. Oui, je le vois.

7 Q. Il n'y est pas dit, n'est-ce pas, qu'il y a des restrictions de

8 circulation sur l'équipe à Podkonje dans le centre de Knin ?

9 R. Oui, je le vois, le 10, entre le 10 et le 11.

10 Q. Maintenant on va examiner la pièce P117, qui comprend la période qui

11 vous intéresse.

12 Alors Monsieur, là vous allez voir que c'est un rapport du 11 août à 18

13 heures jusqu'au 12 août à 18 heures.

14 R. Oui, je le vois.

15 M. CAYLEY : [interprétation] Est-il possible d'examiner la troisième page.

16 Q. Et vous allez voir --

17 M. CAYLEY : [interprétation] Peut-on déplacer la page, s'il vous plaît, et

18 est-ce que vous pourriez agrandir la partie où l'on parle de l'équipe de

19 Podkonje, l'équipe des OMNU ?

20 Q. Est-ce que vous pouvez voir là, Monsieur, ce que l'on dit pour cette

21 période-là, à savoir si vers 11 août jusqu'à 6 heures du soir le 12 août,

22 et on indique que l'équipe de Podkonje a remarqué une maison en feu le 12

23 août à 16 heures 45.

24 Est-ce que vous le voyez ?

25 R. Oui, je le vois. Je dois répéter que je ne me souviens pas de la date

26 exacte, donc je ne peux pas vous répondre pourquoi c'est le cas. En tout

27 cas, c'est vrai que cet incident ne se trouve pas dans ces deux rapports.

28 Q. Et s'il est suffisamment important de signaler une maison en feu, il

Page 3256

1 sera encore plus important de signaler dix maisons en feu, n'est-ce pas ?

2 R. Certainement, certainement.

3 Q. Monsieur, M. Munkelein a déjà déposé en l'espèce. Il n'était pas à Knin

4 avant le 14 août 1995. Le saviez-vous ?

5 R. Je ne me souviens pas de la chronologie exacte, mais je sais qu'il

6 était avec nous. C'est vrai qu'il aurait pu venir plus tard, pas forcément

7 le 10, peut-être le 12, le 15, le 16.

8 Q. On va examiner à présent la pièce du Procureur 67.

9 M. CAYLEY : [interprétation] Je vais vous demander d'examiner la

10 deuxième page, paragraphe 9. Est-ce qu'on peut l'agrandir ?

11 Q. C'est la première fois que, dans un rapport de l'OMNU, on dit que

12 vous avez participé à une patrouille avec le commandant Munkelien, et on

13 voit là son prénom. On dit, commandant Tor. Vous voyez que cela a eu lieu

14 le 17 août.

15 R. Oui, en effet.

16 Q. Et ici on peut voir que l'équipe a pu remarquer une maison en feu dans

17 la ville de Knin à 200 mètres seulement du nouveau bureau de l'équipe.

18 R. Oui, je me souviens de cela.

19 Q. Est-il possible que vous vous soyez trompé au sujet de cela, que c'est

20 bien cela que vous avez remarqué entre le 10 et le 12 août 1995, pas autre

21 chose ?

22 R. Non. J'insiste avoir vu un feu important; tout un pâté de maisons était

23 en feu. C'était pratiquement dans la soirée. Il faisait déjà nuit, au mois

24 d'août.

25 Je ne me souviens pas de la date exacte, mais je suis sûr de cela, et

26 je suis sûr de l'endroit où cela se trouvait.

27 M. CAYLEY : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions, Monsieur le

28 Président, pour ce témoin. Je vous remercie.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Cayley.

2 On a un tout petit peu de temps. Monsieur Kehoe, est-ce que vous avez un

3 sujet que vous pouvez aborder en trois minutes ?

4 M. KEHOE : [interprétation] Non, pas vraiment.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tchernetsky, nous sommes

6 obligés de lever la séance pour la journée. Nous voudrions vous demander de

7 revenir demain le 21 mai à 9 heures du matin, mais je dois tout d'abord

8 demander à Mme l'Huissière de vous accompagner pour quitter ce prétoire.

9 Je vous demande de ne pas parler avec qui que ce soit au sujet de

10 votre déposition présente ou celle qui reste à venir, et je suis sûr que

11 vous allez pouvoir terminer votre déposition demain.

12 Vous pouvez suivre Mme l'Huissière, s'il vous plaît.

13 [Le témoin quitte la barre]

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je voudrais donner quelques

15 instructions aux parties quant à la façon de traiter des informations qui

16 ne figurent pas dans le rapport sur situation.

17 Nous avons deux cas de figure : un côté est que l'on n'a pas fait

18 état de quelque chose, ensuite il y a un autre cas de figure où on court le

19 risque de faire l'amalgame entre quelque chose que l'on dit au cours de la

20 déposition et quelque chose qui figure dans un rapport.

21 S'il s'agit d'un incident qui n'a pas fait l'objet d'un rapport et si

22 le témoin dit qu'une telle chose s'est produite effectivement entre le 10

23 et le 17 août, par exemple, il faut tout d'abord que les parties se mettent

24 d'accord sur l'événement, s'il figure ou non dans le rapport. Ensuite, on

25 n'a pas besoin de passer par tout cela. Vous pouvez dire au témoin qui a

26 dit quoi dans différents rapports et demander au témoin s'il a une

27 explication quant au fait que cet événement ne figure pas dans les

28 "sitreps".

Page 3258

1 Bien sûr, la situation ne sera pas la même s'il y a un risque de

2 faire un amalgame entre deux incidents. Dans ce cas-là, il faudrait parler

3 au témoin de l'incident en question qui fait l'objet du rapport. Ensuite

4 vous lui posez la question s'il ne pense pas avoir fait l'amalgame entre

5 deux incidents, comme vous l'avez fait d'ailleurs, Monsieur Cayley.

6 Enfin, ceci pourrait nous faire gagner du temps. Mais en partant de

7 l'hypothèse, évidemment, que les parties s'assoient avant la déposition du

8 témoin et se mettent d'accord sur les parties contestées par la Défense où,

9 par exemple, un incident n'aurait pas été consigné dans un rapport. Mais

10 comme il s'agit des éléments qui figurent dans des déclarations 92 ter, et

11 je ne pense qu'il est utile de faire l'inverse, à savoir de demander au

12 Procureur de consulter la Défense et de lui demander s'il est d'accord pour

13 dire qu'un incident ne se trouve pas dans un rapport sur la situation. Mais

14 vous savez, si l'on procédait comme cela on pourrait gagner du temps

15 vraiment.

16 --- L'audience est levée à 13 heures 44 et reprendra le mercredi 21 mai

17 2008, à 9 heures 00.

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