Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 16 juillet 2008

  2   [Audience publique]

  3   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  4   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 08.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tout le monde.

  7   Monsieur le Greffier, veuillez en appeler le numéro de l'affaire.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Madame, Monsieur, Monsieur le

  9   Président. Bonjour à tout le monde. Il s'agit de l'affaire IT-06-90-T, le

 10   Procureur contre Ante Gotovina et consorts.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

 12   Avant de vous donner la parole, Maître Misetic, pour poursuivre le contre-

 13   interrogatoire, j'ai quelques questions d'ordre procédural que j'aimerais

 14   rapidement aborder. Tout d'abord passons à huis clos partiel.

 15   Madame Rehn, vous ne comprendrez pas de quoi je parle de toute façon, donc

 16   pas besoin de demander qu'on vous fasse sortir du prétoire.

 17   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 18   [Audience à huis clos partiel]

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 11   [Audience publique]

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier. Il y

 13   avait également une demande aux fins de savoir le plus

 14   vite possible afin d'avoir des informations au sujet du document présenté

 15   au sujet de la déposition de Mme Rehn. Je regarde la liste fournie par M.

 16   le Greffier, il s'agit de la liste de toutes les demandes en souffrance

 17   portant ces documents, tout d'abord le numéro 142. Je ne sais pas si vous

 18   avez à votre disposition cette liste.

 19   Le premier, 142, est déjà versé au dossier. Il s'agit de la cote D669, donc

 20   maintenant c'est réglé; puis le deuxième, 2710, a déjà été versé au dossier

 21   en tant que P639, et si je m'abuse, Mme Mahindaratne; puis 147, 4312 a déjà

 22   été versé au dossier sous pli scellé; puis P643.

 23   Il reste encore 144, c'est 2820 de la liste 65 ter; puis 145, ce qui est

 24   4102; 146, ce qui est 4128; nous avons déjà parlé de 147; puis 148, 4232.

 25   J'ai cru comprendre qu'il n'y avait pas besoin d'observer la

 26   confidentialité, donc il s'agit d'une erreur, parce que je vois que la case

 27   de confidentialité a été cochée, donc ça peut être admis, n'est-ce pas ?

 28   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Oui.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il s'agit d'un document public.

  2   Puis nous avons 149, c'est 4367; puis 150, 4371; 151, 4394; 152,

  3   4450; 153, 4453; 154 est le numéro 5318 de la liste 65 ter; et puis 155 et

  4   3332.

  5   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je viens d'apprendre que même si nous

  7   avons parlé du document 4312, la décision finale n'a pas été prise aux fins

  8   d'admettre cette pièce qui est affichée au numéro 147 de la liste. La

  9   Chambre verse au dossier les numéros que je viens d'énumérer, à partir de

 10   144 jusqu'à y compris 155; et 147 est versé sous pli scellé; tous les

 11   autres documents sont versés au dossier en tant que documents publics. Les

 12   cotes ont déjà été assignées, P640 jusqu'à P642 y compris, ce sont des

 13   documents publics; puis P643 sous pli scellé; P644 jusqu'à P651 y compris,

 14   tous versés au dossier en tant que documents publics.

 15   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] J'aimerais juste attirer votre

 16   attention sur le document qui est maintenant enregistré sous la cote P650.

 17   Il s'agit du numéro 5318 de la liste 65 ter. Ce document a déjà été versé

 18   au dossier, et j'ai attiré votre attention hier là-dessus, sous la cote

 19   P477. Je le dis pour les besoins du compte rendu d'audience.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, cela m'a échappé. Madame

 21   Mahindaratne, excusez-moi.

 22   Monsieur le Greffier, la cote P650 est annulée et sera utilisée

 23   ultérieurement.

 24   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Rehn, il y a certaines formalités

 26   auxquelles nous devons prêter attention de temps en temps et merci d'avoir

 27   fait preuve de patience. Je souhaite également vous rappeler que vous êtes

 28   tenue de respecter la déclaration solennelle faite au début de votre

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  1   déposition.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, bien sûr, Monsieur le Président.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic, vous pouvez poursuivre.

  4   M. MISETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  5   LE TÉMOIN: ELISABETH REHN [Reprise]

  6   [Le témoin répond par l'interprète]

  7   Contre-interrogatoire par M. Misetic : [Suite]

  8   Q.  [interprétation] Bonjour, Madame Rehn.

  9   R.  Bonjour.

 10   Q.  J'aimerais attirer votre attention sur les pages 2 et 3 de votre

 11   déclaration, où vous parlez des choses que vous avez vues vous-même. A la

 12   deuxième page, le dernier paragraphe, au milieu, vous dites : "Y étaient

 13   comprises plusieurs visites que j'ai rendues au secteur sud et j'ai pu

 14   observer l'armée croate piller les biens civils."

 15   Je vais m'arrêter là. Est-ce que vous vous souvenez où vous avez vu

 16   l'armée croate en train de piller ? Dans quelle ville et quand ?

 17   R.  Comme je l'ai dit dans mon rapport, dans plusieurs notes il a été

 18   consigné que lors des visites, plusieurs villages ont été mis en cause, et

 19   je ne me souviens plus malheureusement de leurs noms. Ma première visite

 20   était dans le secteur nord en octobre 1995, et je m'y suis rendue avec deux

 21   observateurs des Nations Unies, un Norvégien et  Kényan. Ils m'ont montré

 22   ce qui s'était passé sur le terrain. Il y avait une femme paralysée qui a

 23   été frappée par une balle à travers la fenêtre --

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Excusez-moi de vous interrompre,

 25   mais je pense que Me Misetic s'intéresse exclusivement au secteur sud, donc

 26   étant donné que nous n'avons pas beaucoup de temps --

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je comprends. Excusez-moi. Parce

 28   que pour moi, ce que j'ai vécu représentante une totalité.

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  1   S'agissant du secteur sud, je me suis rendue plusieurs fois à Knin et

  2   dans les villages qui se trouvent dans les environs. Je ne me souviens pas

  3   de leurs noms. Malheureusement, je ne me souviens pas de leurs noms et

  4   c'est déjà bien que j'arrive à me rappeler mon propre nom. Donc cela s'est

  5   passé à plusieurs reprises. Je suis allée plusieurs fois.

  6   Je dois également vous rappeler quelle était ma méthode de travail. Dans

  7   les rapports nous avons mentionné les personnes haut placées que nous avons

  8   rencontrées, les hommes politiques et d'autres. Mais la plupart des gens

  9   que j'ai rencontrés étaient les gens que j'ai rencontrés dans la rue et

 10   j'ai parlé aux Croates et à quelques Serbes qui étaient rentrés. Ces actes

 11   de pillage sont quelque chose que j'ai pu voir à Knin et dans les villages

 12   dans les environs.

 13   M. MISETIC : [interprétation]

 14   Q.  Juste pour préciser quelque chose. Est-ce que ce sont des informations

 15   que vous avez apprises d'autrui ou bien vous étiez présente sur place au

 16   moment où les militaires pillaient les maisons ?

 17   R.  J'ai vu de mes propres yeux les militaires en train de piller. Et comme

 18   je me suis corrigée dans la deuxième déclaration, si je ne m'abuse, bien

 19   sûr, je ne pourrais pas dire qu'ils étaient membres de l'armée, parce que

 20   j'ai appris dans d'autres régions de l'ex-Yougoslavie que ce genre de

 21   vêtements étaient utilisés chaque fois que les gens pouvaient mettre la

 22   main dessus. Donc il se pouvait que c'était des civils qui portaient un

 23   uniforme militaire. Mais d'autre part, il y avait des véhicules qui

 24   indiquent qu'il était fort probable que c'était des membres de l'armée.

 25   Q.  D'accord. Est-ce que c'est quelque chose que vous auriez consigné dans

 26   votre rapport, par exemple, que vous avez vu de vos propres yeux des

 27   camions militaires ?

 28   R.  Je pense que c'est consigné dans l'un de mes rapports, et je l'ai

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  1   également dit dans ma déclaration. Parce que vous pouviez voir partout des

  2   camions et que les hommes étaient en train de prendre différents objets.

  3   Ils prenaient des cadres, des fenêtres, amenaient des réfrigérateurs, et

  4   ainsi de suite. Donc cela s'est passé à plusieurs reprises lorsque j'y

  5   étais.

  6   Q.  Bon. Je ne parle pas maintenant du procès-verbal ou de votre

  7   déclaration, mais je parle de vos rapports envoyés au secrétaire général.

  8   Si vous avez vu de vos propres yeux les soldats en train  de piller et les

  9   camions militaires, c'est quelque chose que vous auriez consigné dans l'un

 10   de vos rapports, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui, bien sûr. Dans les rapports nous disions toujours "nous," donc

 12   nous parlions au nom d'une équipe et je ne parlais pas en mon propre nom,

 13   mais je ne faisais que partie d'une équipe.

 14   Q.  D'accord. Dans le douzième paragraphe vous avez dit : "Presque chacune

 15   de ces maisons serbes était vandalisée, il était écrit dessus "Chetnik."

 16   Où est-ce que c'était ?

 17   R.  C'était surtout à Knin et dans les environs. Et il était évident que le

 18   peuple croate nourrissait une haine énorme à l'encontre des Serbes. Ils ne

 19   voulaient pas qu'ils rentrent. Et sur chaque maison croate, en revanche, il

 20   y avait le drapeau croate qui était mis sur place.

 21   Q.  Donc vous vous souvenez que pratiquement sur chacune des maisons serbes

 22   il était écrit "Chetnik" à Knin ?

 23   R.  Il serait une exagération que de dire que c'était sur chacune des

 24   maisons. Il m'était impossible de savoir quelles étaient les maisons qui

 25   étaient précédemment occupées par les Serbes. Mais il y en avait beaucoup

 26   où il était écrit en rouge "Chetnik."

 27   Q.  Dans votre déclaration, vous dites : "Je me souviens que nous devions

 28   faire attention en nous rendant dans les villages serbes, parce qu'on nous

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  1   a dit qu'il y avait des engins piégés dans les maisons serbes afin

  2   d'empêcher les Serbes d'y rentrer."

  3   Qui est-ce qui vous a dit cela ?

  4   R.  Ce sont des gens de mon équipe qui me l'ont dit. Lorsque je parle de

  5   "mon équipe," je pense au personnel de la Commission des Nations Unies

  6   chargée des droits de l'homme. Mais j'ai également parlé aux membres de

  7   l'armée et mon commandant chargé de la sécurité c'était un Finlandais qui

  8   m'accompagnait, s'intéressait, bien entendu. Il voulait absolument protéger

  9   ma sécurité, donc il pensait qu'il fallait que je fasse attention et qu'il

 10   ne fallait pas que je tombe sur un de ces engins piégés. Donc il a appris

 11   ces informations de la police et de l'armée.

 12   C'était une mise en garde très claire. Je me souviens que je suis allé dans

 13   une maison et qu'on m'avait dit qu'il fallait faire attention, parce que

 14   c'était une maison où voulaient rentrer les Serbes, mais on ne leur avait

 15   pas permis de rentrer. Ils étaient obligés de vivre dans une grange avec

 16   des animaux. C'était une situation fort peut agréable. Et lorsque je me

 17   suis rendue dans cette maison, on m'a dit qu'il fallait que je fasse très

 18   attention.

 19   Q.  Donc vous ne savez pas quelles étaient les maisons où se trouvaient les

 20   engins piégés; mais c'est quelque chose qu'on vous a dit tout simplement ?

 21   R.  Non, bien sûr, parce que si j'avais marché sur un de ces engins piégés,

 22   oui, dans ce cas-là, j'aurais su qu'il y en avait un, mais je ne l'ai pas

 23   fait.

 24   Q.  Mais je vous demande de savoir s'il y a des exemples. Est-ce que vous

 25   avez appris par la suite des informations selon lesquelles il y avait des

 26   engins piégés dans les maisons.

 27   R.  Oui. J'ai appris cette information, et ce sont surtout les gens

 28   travaillant pour les Nations Unies qui ont attiré mon attention sur ces

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  1   engins piégés. J'ai rencontré un couple, qui, tout de suite après être

  2   entré dans la maison, une bombe a été jetée dans leur maison et l'homme a

  3   fini à l'hôpital tandis que la femme était grièvement blessée. C'est elle

  4   qui m'a parlé de quelle manière les voisins les traitaient.

  5   Q.  Et ces maisons avec des engins piégés se trouvaient dans quel village

  6   ou quelle ville ?

  7   R.  Comme je vous ai dit, c'était dans la région de Knin, mais je ne me

  8   souviens pas des noms de ces villages.

  9   Q.  Est-ce que vous vous rappelez le nom de l'organisation de l'agence des

 10   Nations Unies qui vous a fourni cette information ?

 11   R.  Comme je vous ai dit, je ne me souviens pas, parce que tous les membres

 12   des organisations internationales échangeaient ce genre d'information entre

 13   eux. Il y avait des agences des Nations Unies qui étaient sur place, il y

 14   avait des gens qui travaillaient pour les droits de l'homme et ils ont

 15   appris de la part de la police et de l'armée qu'il y avait des risques pour

 16   leur sécurité. Donc c'était une information qui circulait entre les

 17   agences, et nous savions tous ce qui se passait sur place. Egalement, les

 18   organismes de l'Union européenne ont participé à ces discussions, en

 19   étaient au courant.

 20   Q.  Est-ce que vous pourriez nous donner le nom d'une personne à laquelle

 21   nous pourrions nous adresser pour savoir d'où provenait ces informations ?

 22   R.  J'imagine que ceux qui travaillaient à cette époque-là au sein des

 23   équipes pourraient trouver le nom de ces personnes.

 24   Q.  Dans votre équipe ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Est-ce que vous pourriez nous donner le nom des personnes qui ont

 27   travaillé dans votre équipe ?

 28   R.  Bien sûr. Il y avait Roman Wieruszewski. Donc Mamadi Diakite, que nous

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  1   avons déjà mentionné. Puis une personne qui était Sasa Milosevic, qui a

  2   travaillé pour le secrétariat local, ainsi que Susan Ashoor, puis Ravinder

  3   Joshi. Puis parfois il y avait des gens venant d'autres régions où se

  4   trouvait notre mission en Bosnie-Herzégovine, et au Kosovo et de Belgrade,

  5   et ainsi de suite. C'était une bonne équipe, les gens s'entraidaient.

  6   Q.  Vous avez parlé de Sasa Milosevic. Est-ce qu'il faisait partie du

  7   comité serbe d'Helsinki ?

  8   R.  Pas à ma connaissance. Il a travaillé pour nous, c'était quelqu'un du

  9   coin, un assistant secrétaire. Peut-être que maintenant il travaille là,

 10   mais en tout cas, je n'ai pas eu de ces nouvelles depuis je suis partie.

 11   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, peut-on afficher la

 12   pièce 1D40-0081.

 13   Q.  Madame Rehn, ceci concerne une partie de votre rapport du 7 novembre

 14   1995, premier paragraphe. Il est question de quelques milliers de Serbes,

 15   de Croates qui sont affamés et qui attendent de rentrer. Vous en avez parlé

 16   hier, me semble-t-il.

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Ici, il s'agit d'un article publié le 22 septembre 1995, il porte sur

 19   cette question : "Un policier croate a empêché neuf serbes âgés de rentrer

 20   chez eux dans la Krajina de Croatie, dit le comité d'Helsinki pour les

 21   droits de l'homme, vendredi. Ce groupe a été arrêté à Terezino Polje en

 22   Croatie du nord-est, à la frontière avec la Hongrie, a dit le comité, mais

 23   on ne sait pas exactement quand s'est produit l'incident."

 24   Ensuite il est dit ceci : "'Nous avons envoyé des lettres au

 25   gouvernement croate, ainsi qu'au bureau croate des réfugiés à propos de ce

 26   groupe, mais nous n'avons pas reçu de réponse, a dit M. Petar Mrkalj,

 27   directeur de l'antenne croate du comité d'Helsinki."

 28   Ceci a été dit le 22 septembre. Dans votre rapport du 7 novembre

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  1   1995, au paragraphe 41, vous parlez de cette question de Serbes, de Croates

  2   qui se trouvent à la frontière avec la Hongrie. En annexe, il est dit que

  3   le jeudi 12 octobre vous avez rencontré Petar Mrkalj, mentionné ici dans

  4   cet article.

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Je vous demande ceci : tout du moins à partir du 22 septembre

  7   1995, M. Mrkalj dit à l'agence France-Presse que le nombre de Serbes qui se

  8   trouvent en Hongrie et qui ont renvoyés, repoussés, s'élève à neuf.

  9   Pourriez-vous nous dire pourquoi vous avez parlé de plusieurs milliers de

 10   Serbes qui se trouvaient à cette frontière ?

 11   R.  Ce sont des informations que j'ai obtenues des chefs de mon

 12   bureau, notamment aussi des personnes qui travaillaient en Slavonie

 13   orientale. Il m'est aisé d'imaginer qu'il y avait à la frontière un chiffre

 14   qui n'est peut-être pas tout à fait exact, mais que ces gens attendaient en

 15   Hongrie. Je suis tout à fait d'accord avec vous, Monsieur l'Avocat, ce

 16   n'est pas exact.

 17   Mais ce sont des chiffres que j'ai obtenus de mon personnel qui m'ont

 18   dit qu'il y avait des gens qui attendaient en Hongrie et s'il ne s'agissait

 19   pas de milliers de personnes, c'était des personnes qui attendaient

 20   d'obtenir leurs papiers. Tout a été lié au droit immobilier, au titre de

 21   propriété. Ce n'était pas tant une question qui consistait à obtenir la

 22   confirmation de la nationalité. Vous avez tout à fait raison, je l'ai dit

 23   aussi, il faut aller à Belgrade pour obtenir des pièces d'identité. Mais

 24   les délais permis pour revendiquer ces titres de propriété, ces délais

 25   étaient très courts. Il fallait donc examiner la situation de ces gens qui

 26   attendaient quelque part pour pouvoir rentrer chez eux.

 27   Q.  Vous nous dites maintenant que vous n'êtes pas sûre du nombre de

 28   personnes qui se trouvaient en Hongrie --

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  1   R.  Non, je sais qu'ils étaient en Hongrie. Alors pour ce qui est de

  2   savoir si c'était à la frontière, là, je pense, que ce chiffre est exagéré.

  3   Car quand on parle de la frontière - bon, ce sont des gens qui sont là à

  4   attendre au poste-frontière, au poste de contrôle - donc il y en avait neuf

  5   comme c'est dit ici, c'est certain. Mais en Hongrie même, il y en avait bon

  6   nombre qui attendaient l'autorisation de revenir.

  7   Q.  Et là de nouveau il nous faudra contacter votre personnel pour savoir

  8   d'où viennent ces chiffres ?

  9   R.  Oui, tout à fait. S'il y a des choses que je n'ai pas vues moi-même, il

 10   faut que vous en parliez avec mon personnel. Je dois vous rappeler une fois

 11   de plus, il s'agissait d'une mission avec un rapporteur spécial, et même

 12   les rapporteurs spéciaux n'ont pas effectué de visites dans le pays dont

 13   ils font rapport parce qu'ils n'ont pas eu l'autorisation d'y aller. Mais

 14   ici, moi, je suis allée très souvent sur place.

 15   Pour ce qui est des autres renseignements, ils ont été recueillis par

 16   mon personnel. Nous en avons ensuite discuté, et je me suis assurée que

 17   c'était des informations vérifiées, que nous pouvions consigner dans un

 18   rapport. Parce que l'idée de ce rapport c'est de sensibiliser les

 19   gouvernements que nous consultions. Je pense que c'est une bonne méthode.

 20   Permettez-moi de dire ceci : je pense que nous avons accompli notre mission

 21   grâce à beaucoup de bonnes réponses, très solides, très détaillées,

 22   obtenues des gouvernements, et ceci a permis de prendre des mesures.

 23   Q.  Merci, Madame. Je ne veux pas vous offenser --

 24   R.  Vous savez, j'ai vu des gens plus coincés que vous dans ma vie.

 25   Q.  Je vais vous demander de peut-être nous fournir des questions plus

 26   concises.

 27   R.  Oui, c'est dans mon intérêt aussi.

 28   Q.  C'est ce que j'allais dire.

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  1   M. MISETIC : [interprétation] Je demande le versement de ce document,

  2   Monsieur le Président.

  3   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Pas d'objection.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une cote, Monsieur le Greffier.

  5   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D688, qui est versé au

  6   dossier.

  7   M. MISETIC : [interprétation]

  8   Q.  Page 4 de votre déclaration. Vous faites référence au rapport du

  9   secrétaire général de décembre 1995."Page 5, on dit que le nombre estimé de

 10   maisons détruites est de 5 000 et ceci vient des informations obtenues par

 11   les organisations internationales dont mon bureau, mon office. Je suis

 12   allée moi-même dans beaucoup de ces maisons dans la Krajina."

 13   Ces 5 000 maisons, c'était pour les deux secteurs, nord et

 14   sud ?

 15   R.  Je suppose.

 16   M. MISETIC : [interprétation] Prenons ce rapport qui porte la cote P477,

 17   477. Page 4.

 18   Q.  Paragraphe 14, voici ce que dit le secrétaire général dans ce rapport :

 19   "Il n'est pas possible de donner le chiffre exact, le nombre exact de

 20   maisons détruites par le feu dans les anciens secteurs nord et sud, même si

 21   l'estimation globale dépasse les 5 000. Partant d'observations faites par

 22   des équipes qui patrouillaient toute la Krajina, la MOCE estime que dans

 23   des zones rurales, 60 % des maisons de l'ancien secteur sud et 30 % des

 24   maisons de l'ancien secteur nord ont été détruites par le feu. Des

 25   observateurs militaires des Nations Unies ont visité 389 villages du

 26   secteur sud et ont découvert que sur 21 744 maisons, 16 857 maisons avaient

 27   été détruites par le feu ou avaient subi des dégâts; même si ce chiffre

 28   englobe des dégâts provoqués avant l'opération Tempête."

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  1   Le secrétaire général, tout comme vous dans votre rapport, vous partez de 5

  2   000 maisons détruites au lieu de vous baser sur le chiffre donné par les

  3   observateurs militaires, de 16 877. Pourquoi ? Est-ce que c'est parce que

  4   partant des chiffres des observateurs militaires vous ne saviez pas quelles

  5   étaient les maisons détruites avant ou après l'opération Tempête ?

  6   R.  Effectivement, c'est pour cela que nous avons fait preuve de beaucoup

  7   de prudence pour veiller à ne jamais exagérer, à gonfler des chiffres. Il

  8   était très difficile de procéder à une estimation quelle qu'elle soit pour

  9   savoir ce qui avait causé la destruction de maisons pendant l'opération

 10   Tempête. Vous l'avez dit à fort juste titre. Certaines maisons avaient été

 11   détruites auparavant, même si des experts en police scientifique, en

 12   médecine légale, savent quand quelque chose a été détruit, incendié, si

 13   c'est aujourd'hui ou plusieurs années de cela.

 14   Q.  Lors de la rédaction de votre rapport, vous aviez déjà la possibilité

 15   de consulter l'analyse de la MOCE sur le nombre d'édifices ou de maisons

 16   détruites par le feu ou de maisons qui avaient été endommagées avant de

 17   préparer votre rapport ?

 18   R.  Oui, bien entendu.

 19   Q.  Et si je vous ai bien compris, vous ne vous êtes pas servis de ces

 20   chiffres parce que vous ne vouliez pas exagérer ?

 21   R.  Oui, car nous ne savions pas exactement ce qui avait été provoqué par

 22   l'opération Tempête ou s'il y avait des choses qui avaient été détruites

 23   avant. Je crois m'en souvenir. Je pense qu'au sein de la communauté

 24   internationale, nous avions décidé de retenir ce chiffre de plus ou moins 5

 25   000 parce que ça montrait que c'était quand même beaucoup de maisons parce

 26   que 5 000 maisons, vous savez, ça fait vraiment beaucoup, énormément de

 27   destructions. Donc je pense que ça a été là la raison.

 28   Q.  Fort bien. Paragraphe 14 du rapport du secrétaire général, est-ce que

Page 6608

  1   ceci ravive vos souvenirs, est-ce que ça vous rappelle les conversations à

  2   propos de l'utilisation de 5 000, donc est-ce que c'était pour les deux

  3   secteurs nord et sud; c'est bien cela ?

  4   R.  Vous savez, je vous mentirais si je vous disais que je m'en souviens,

  5   mais je trouve que c'est tout à fait possible.

  6   Q.  Merci.

  7   M. MISETIC : [interprétation] Poursuivant l'examen de ce rapport -- non,

  8   excusez-moi.

  9   Q.  Nous devons revenir au rapport du 7 novembre 1995.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous en avez terminé de ces chiffres car

 11   j'aurais quelques questions à poser ?

 12   M. MISETIC : [interprétation] Oui.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit, Madame, que vous ne

 14   vouliez pas gonfler les chiffres. Ici, nous avons un nombre,  on parle de 5

 15   000, puis de plus de 15 000. Est-ce que vous estimiez que le chiffre plus

 16   élevé était exagéré, ou était-ce que vous vouliez donner des chiffres

 17   plutôt prudents pour éviter le risque de l'exagération ? Laquelle des deux

 18   options retenez-vous ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Je dirais plutôt que c'était pour éviter le

 20   risque de l'exagération, c'est ça qui nous faisait peur, car nous voulions

 21   être modestes, si j'ose dire, dans nos propos. Je pense que ça a donné une

 22   base plus solide à toutes sortes de revendications, si on ne pouvait pas

 23   soupçonner qu'il y avait des exagérations dans ce que nous disions. Mais je

 24   dois dire que ces chiffres ne me font pas sonner la sonnette d'alarme dans

 25   ma tête, si vous voulez. Vous savez, ces rapports sont truffés de détails,

 26   bien sûr, ils ne sont pas des plus récents, mais ceci ne m'alarme pas.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous comprends, Madame.

 28   Poursuivez, Maître Misetic.

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  1   M. MISETIC : [interprétation] Prenons la pièce P639, page 6.

  2   Q.  Paragraphe 11, on parle de "La suspension provisoire de la loi

  3   constitutionnelle sur les droits de l'homme et la liberté, les droits des

  4   communautés ethniques et nationales ou les minorités en République de

  5   Croatie …"

  6   Vers le milieu du texte, c'est dit : "La décision portant suspension

  7   des articles garantissant le statut particulier des districts où habitent

  8   surtout des minorités nationales, créer des institutions spéciales pour

  9   l'éducation et assure une représentation proportionnelle au parlement, dans

 10   le gouvernement et dans l'appareil judiciaire, mais assortit d'un point

 11   d'interrogation l'attitude des autorités croates à l'égard des minorités

 12   nationales en général et de la minorité serbe en particulier."

 13   Paragraphe 12 : "Le rapporteur spécial note avec inquiétude que

 14   l'article 60 de cette loi établissant le tribunal provisoire des droits de

 15   l'homme a été abrogé provisoirement."

 16   Puis nous avons la loi constitutionnelle, on dit : "Même si cette loi

 17   n'a jamais été vraiment appliquée, elle permettait cependant de garantir

 18   certains droits importants aux minorités nationales."

 19   Je vous demande ceci, on dit : "N'a jamais été pleinement appliquée,"

 20   est-ce que vous vous souvenez s'il y a une partie quelconque de cette loi

 21   qui n'a jamais été mise en application ?

 22   R.  Non, je ne me souviens pas.

 23   Q.  Est-ce que vous savez qu'en vertu de la loi, il devait y avoir des

 24   districts spéciaux qui devaient être créés surtout dans ce qui avaient été

 25   les secteurs nord et sud à l'intention de la communauté serbe de souche ?

 26   R.  C'est bien possible; mais je vous le rappelle, je ne me souviens plus

 27   exactement de ce qui était voulu par cette loi.

 28   Q.  Vous avez eu des conversations avec des interlocuteurs croates, vous

Page 6610

  1   souvenez-vous si quelqu'un vous a dit qu'il n'était pas possible

  2   d'appliquer cette loi à la suite de l'opération Tempête parce que la

  3   population serbe était partie ?

  4   R.  Je crois avoir copié toutes les lettres qui m'ont été écrites et ça n'a

  5   pas été mentionné dans ces lettres.

  6   Q.  Est-ce que vous êtes au courant du fait qu'en vertu de cette loi,

  7   toutes les institutions à l'échelon local, au niveau de ce qu'on appelait

  8   Kotar ou de la région de l'administration de la police, on devait avoir la

  9   même composition ethnique que celle qu'il y avait dans la population en

 10   1991 ?

 11   R.  J'espère que c'était l'idée. Moi-même je représente une minorité dans

 12   mon propre pays, et je sais parfaitement bien l'importance qu'il y a à bien

 13   défendre et de bien ancrer dans le marbre de la loi les droits des

 14   minorités.

 15   Q.  Oui, simplement je vais vous donner des chiffres. Si une ville

 16   particulière comptait 70 % de Serbes, 30 % de Croates, savez-vous que cette

 17   loi exigeait qu'il y ait sept policiers du poste de police qui soient

 18   Serbes et trois Croates ?

 19   R.  Oui, oui. C'est tout à fait dans le droit fil, d'autres lois concernant

 20   les minorités, y compris la mienne.

 21   Q.  Pour les enseignants, s'il y avait 70 % de Serbes, il fallait que sept

 22   enseignants sur dix soient Serbes ?

 23   R.  Oui, oui, je comprends bien ce que vous voulez dire, et quand les

 24   Serbes sont partis, il n'était plus d'actualité d'appliquer la loi. D'un

 25   autre côté, si on suspendait son application, ça voulait dire qu'on

 26   comptait sur le retour rapide des Serbes.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Permettez-moi de revenir à la question

 28   précédente. Me Misetic vous a demandé si vous étiez au courant du fait que

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  1   c'était une composante de la loi. Si j'ai bien compris votre réponse, vous

  2   avez dit que ce serait logique parce que ceci reflète ce qu'on trouve

  3   ailleurs aussi. Mais la question n'était pas celle-là, c'était plutôt de

  4   savoir si vous saviez que cette loi contenait ces dispositions.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, parce que nous en avons, bien entendu,

  6   discuté. Il fallait rétablir un équilibre entre les majorités et les

  7   minorités dans les instances officielles.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc vous étiez au courant de

  9   l'existence de ces dispositions dans cette loi ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 12   M. MISETIC : [interprétation]

 13   Q.  Même au cours de cette brève période, lorsque la sécurité dans le

 14   secteur nord et sud était mauvaise, cette loi ajoutait un facteur qui

 15   compliquait davantage encore les choses. En vertu de la loi, il fallait que

 16   dans toutes les institutions il y ait des Serbes qui participent à tous les

 17   échelons du gouvernement dans ces

 18   régions ? Vous êtes d'accord avec moi là-dessus.

 19   R.  Oui. C'est pour cela aussi nous n'avons pas adopté un libellé trop

 20   musclé. Nous disons que nous constatons avec inquiétude.

 21   Q.  Article 60 de la loi, c'est à cela que vous faisiez référence, est-ce

 22   que vous savez que ce genre de tribunal n'a jamais vu le jour ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Et vous savez que si ce tribunal n'a jamais vu le jour, c'est parce que

 25   dans la loi même il fallait qu'il y ait un accord international entre les

 26   républiques de l'ex-Yougoslavie pour que ce tribunal soit créé ?

 27   R.  Oui. Je pense que c'est le cas. Je le savais à l'époque.

 28   Pour moi, ce volet-là des droits était fortement axé sur le bureau de

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  1   l'ombudsman, j'étais fort contente qu'il y ait un ombudsman, je vous l'ai

  2   dit hier et ça a été fait parce que j'ai insisté.

  3   Q.  Vous vous souvenez que dans certains documents présentés par l'acte

  4   d'accusation, la Croatie vous a dit qu'elle n'allait pas établir un

  5   tribunal séparé, provisoire parce qu'elle allait bientôt adhérer au conseil

  6   de l'Europe et elle estimait, par conséquent, qu'il y avait déjà la cour

  7   européenne des droits de l'homme qui devait avoir compétence ?

  8   R.  Oui. Et je l'ai déjà dit à ce Tribunal, c'est pour ça que nous faisons

  9   part de notre préoccupation et ceci nous préoccupait effectivement, car à

 10   l'époque, nous ne savions pas ce qu'il allait en être de cette situation,

 11   comment elle allait évoluer.

 12   Q.  Merci.

 13   M. MISETIC : [interprétation] Page 14.

 14   Q.  Paragraphe 37 : "…le rapporteur spécial a eu des discussions avec les

 15   autorités croates concernant la loi récemment adoptée à propos de la prise

 16   de contrôle provisoire et de la gestion de certains établissements. Cette

 17   loi permet aux autorités croates de contrôler certains 'biens abandonnés'

 18   qui peuvent être donnés à des Croates déplacés à l'intérieur du pays à des

 19   réfugiés pour qu'ils en aient 'une utilisation temporaire.'"

 20   "Cette loi concerne surtout la situation qui s'est présentée dans les

 21   anciens secteurs et on parle des propriétaires."

 22   M. MISETIC : [interprétation] Page suivante.

 23   Q.  Paragraphe 38, on trouve une analyse assez brève du droit croate,

 24   dernière phrase, il est dit : "Cependant, cette loi sur les prises de

 25   contrôle temporaires et la gestion des propriétés constitue une

 26   confiscation de facto."

 27   Sur quoi vous êtes-vous basée pour conclure que cette loi équivalait à une

 28   confiscation dans les faits ?

Page 6613

  1   R.  Je me suis, dans une large mesure, appuyée sur mon propre vécu, j'ai

  2   parlé à beaucoup de gens surtout dans le secteur sud aux alentours de Knin.

  3   En effet, ceux qui avaient essayé de rentrer chez eux qui étaient déjà là

  4   parmi les Serbes, ils avaient déjà trouvé leurs maisons occupées par

  5   d'autres. Je comprends parfaitement bien que le gouvernement croate était

  6   confronté à beaucoup de problèmes, il y avait ceux qui s'étaient échappés,

  7   qui avaient fui la Bosnie-Herzégovine, les Croates de Bosnie-Herzégovine

  8   qui devaient bien être logés quelque part, il y avait beaucoup de réfugiés.

  9   Mais ce qui était tout à fait inacceptable c'est qu'il y a eu des

 10   situations où vous aviez des Croates qui avaient un appartement, une maison

 11   à Zagreb, qui pouvaient obtenir une résidence secondaire qui était la

 12   maison qui avait été abandonnée par un Serbe. Ça j'en ai fait l'expérience

 13   personnellement, j'ai parlé à ces gens; et je dois dire que je n'ai pas été

 14   particulièrement bien accueillie par ceux qui occupaient ces maisons.

 15   J'ai trouvé cela inacceptable. S'il y avait un dédommagement pour la perte

 16   du bien, bon, ça pouvait être encore être une tractation, mais--

 17   Q.  Fort bien. Seriez-vous d'accord avec moi pour dire que la confiscation

 18   c'est une saisie faite par le gouvernement sans compensation, sans

 19   dédommagement ?

 20   R.  Oui, c'est ce que c'est une confiscation; mais nous, nous estimons

 21   qu'il n'y avait pas de fondement à opérer ce genre de confiscation. Je vous

 22   l'ai déjà dit, je ne suis pas avocat, je ne suis pas juriste et tous ces

 23   concepts, je dirais, posent problème parce qu'il faut avoir étudié le droit

 24   pour bien les maîtriser.

 25   Mais ce qui nous a vraiment préoccupés, c'est le fait que les gens ne

 26   pouvaient plus rentrer chez eux, se réinstaller chez eux, parce que la

 27   maison était occupée par quelqu'un d'autre et ils ne pouvaient aucunement

 28   espérer pouvoir revenir s'ils n'avaient pas de dédommagement.

Page 6614

  1   Q.  Vous parlez de confiscation de facto. Vous vouliez dire que ce n'était

  2   pas une confiscation de jure ?

  3   R.  Apparemment.

  4   Q.  Connaissez-vous la différence entre la mise sous séquestre et la

  5   confiscation ?

  6   R.  Non.

  7   Q.  D'accord.

  8   M. MISETIC : [interprétation] Peut-on avoir le document de la liste 65 ter

  9   2502.

 10   Q.  Il s'agit ici d'une analyse juridique de cette loi, il se peut que vous

 11   ayez reçu ce document, puisque vous vous apprêtiez à rédiger ce rapport par

 12   Sasa Milosevic. Vous avez parlé de ce monsieur déjà. Il fait partie des

 13   destinataires de ce courrier électronique. Nous le voyons au document. Vous

 14   le voyez ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Apparemment, c'est une analyse juridique du décret sur la loi sur le

 17   droit des propriétés. C'est M. Wieruszewski qui a reçu, mais aussi M.

 18   Markhov l'a reçue le 23 octobre 1995.

 19   Voyez la rubrique au-dessus, on voit courrier électronique, le 6 octobre

 20   1995, transmis à Sasa Milosevic qui fait partie de votre personnel, et

 21   apparemment c'est le comité d'Helsinki de Belgrade qui l'envoie.

 22   Est-ce que vous vous souvenez si l'analyse dans votre rapport qui est faite

 23   sur le plan du droit se base sur ce document qui vient du comité

 24   d'Helsinki, transmis à M. Milosevic, puis à M. Wieruszewski dans l'attente

 25   de votre rapport ?

 26   R.  Je n'ai aucun souvenir de ce document. Je me demande si je ne l'ai

 27   jamais vu.

 28   M. MISETIC : [interprétation] Je demande le versement de ce document,

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  1   Monsieur le Président.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Mahindaratne.

  3   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Monsieur le Président, le premier point

  4   c'est que nous n'avons pas été avisé que ce document allait être présenté

  5   pour versement au dossier, par conséquent, je n'ai pas été en mesure de

  6   l'examiner. Pourrais-je avoir un instant pour le faire. Est-ce que ceci

  7   pourrait être repris plus tard.

  8   M. MISETIC : [interprétation] C'est un document 65 ter, Monsieur le

  9   Président, et je supposais que --

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, en tant que tel, un document 65 ter

 11   ne veut pas dire que vous allez l'utiliser comme élément de preuve. Je

 12   pense que la règle c'est qu'au commencement du contre-interrogatoire, vous

 13   informez la partie adverse de ce à quoi elle peut s'attendre en ce qui

 14   concerne les documents qui vont être utilisés au cours du contre-

 15   interrogatoire. Donc le fait d'être au courant d'un document en tant que

 16   tel, on peut le supposer, mais le fait d'être au courant du fait qu'il va

 17   être utilisé à ce moment-là, ça on ne peut pas le supposer d'avance.

 18   M. MISETIC : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président. Excusez-

 19   moi. Je pense que c'était simplement, donc indépendamment de ceci, les sept

 20   premières lignes --

 21   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, en fait, je suis en

 22   train de regarder le rapport tel qu'il apparaît en e-court et il leur a été

 23   communiqué.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Mahindaratne, si tel est le cas,

 25   nous avons perdu une minute sans bonne raison.

 26   M. MISETIC : [interprétation] Il s'agit du numéro 14 sur la liste e-court.

 27   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas

 28   d'objection à ce que ce document soit versé au dossier. Je prends le temps

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  1   de le regarder rapidement et je présente mes excuses si j'ai retardé les

  2   débats.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui.

  4   Maître Misetic, l'exemplaire de la version qui a été numérisée je pense que

  5   peut-être - là, je m'adresse à Mme Mahindaratne - il y a une partie de la

  6   marge qu'on ne voit pas, et puisque nous voyons ici le nom de Sasa

  7   Milosevic une ou deux fois peut-être dans l'original, et quelques lignes

  8   plus bas de l'origine -- Sasa Milosevic. Peut-être qu'il pourrait l'avoir

  9   transmis.

 10   Pourrions-nous avoir, s'il vous plaît, un exemplaire de ce document de

 11   façon à ce que nous soyons mieux en mesure de comprendre ce que c'est que

 12   ce document, d'où il vient et de quoi il parle.

 13   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Mais oui, Monsieur le Président, au

 14   cours de la suspension de la séance, je vais m'en occuper.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je pense que nous devrions lui

 16   donner une cote pour identification pour le moment. C'est au compte rendu.

 17   Il n'y a pas d'objection contre l'admission, mais la Chambre souhaiterait

 18   voir ce document, qu'on voie bien la gauche et la droite. Et ceci indique

 19   également -- ceci veut dire, Madame Mahindaratne, qu'il s'agit donc de la

 20   deuxième page sur huit pages. Je ne sais pas de quelle série il s'agit et

 21   je ne sais pas si ceci est pertinent pour les sept pages restantes.

 22   Monsieur le Greffier, ce serait le numéro…?

 23   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera le numéro D689, recevra une cote

 24   pour identification, Monsieur le Président.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

 26   Veuillez poursuivre, Monsieur Misetic.

 27   M. MISETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 28   Q.  Madame Rehn, passons à la page 4 de votre déclaration, au deuxième

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  1   paragraphe. Là encore, vous parlez du rapport du secrétaire général, je

  2   crois, qui est celui du 18 octobre 1995. Et vous relevez qu'il est dit que

  3   : "Les autorités croates ont donné des avertissements contre le retour des

  4   Serbes dans leurs maisons de la Krajina à cause d'une situation incertaine

  5   au point de vue sécurité. Ils ont dit qu'un retour en masse devait attendre

  6   une solution politique finale, un règlement politique final."

  7   Alors, en octobre, vous avez eu des conversations avec le HCR, n'est-ce pas

  8   ?

  9   R.  [inaudible]

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que ça voulait dire oui ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Excusez-moi. Je regardais le texte avec

 12   tant d'attention que je faisais simplement un geste de la tête.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce n'est pas une critique.

 14   M. MISETIC : [interprétation]

 15   Q.  Madame Rehn, vous êtes au courant du fait que le haut commissaire pour

 16   les réfugiés était Mme Sadako Ogata à ce moment-là ?

 17   R.  Oui. Nous avions beaucoup coopéré à l'époque.

 18   Q.  Est-ce que vous êtes au courant du fait que Mme Ogata, est-ce que vous

 19   connaissiez quelle était sa position en ce qui concerne les retours en

 20   masse ?

 21   R.  Non, je ne peux pas me rappeler ça. Je ne m'en souviens pas.

 22   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, pourrions-nous, s'il

 23   vous plaît, avoir le document 1D40-0054 à l'écran, s'il vous plaît.

 24   Q.  Vous allez voir tout en haut du document qu'il y a là une déclaration

 25   faite par Mme Ogata, le 10 octobre 1995, qui traite de la situation

 26   humanitaire, des problèmes humanitaires. Il s'agit d'un groupe de travail

 27   qui s'en occupe pour la conférence internationale sur l'ex-Yougoslavie.

 28   M. MISETIC : [interprétation] Est-ce que vous pourrez passer, s'il vous

Page 6619

  1   plaît, à la page 3.

  2   Q.  Au bas de ce paragraphe, on voit : "Permettez-moi maintenant de

  3   développer sur les questions de paix et du retour des réfugiés."

  4   Puis il y a une introduction.

  5   M. MISETIC : [interprétation] Si nous pouvons aller à la page suivante,

  6   s'il vous plaît.

  7   Q.  Au deuxième paragraphe, on dit : "De façon à pouvoir effectuer

  8   l'opération de retour, je dois souligner l'importance du fait d'avoir des

  9   principes humanitaires internationaux bien reconnus, reconnus sur le plan

 10   international. Pour commencer, il faut que ce soit des retours volontaires.

 11   Deuxièmement, les personnes ne doivent pas être utilisées comme des pions.

 12   L'intérêt de chaque réfugié doit être la force qui motive tout processus de

 13   rapatriement et non pas des considérations politiques."

 14   Le paragraphe suivant dit : "Deuxièmement, le rapatriement doit avoir lieu

 15   de façon organisée et par degré. Il faut qu'il ait lieu dans la dignité. Il

 16   faut prêter attention au fait d'assurer, par exemple, un hébergement

 17   adéquat et des services essentiels qui soient disponibles au lieu où ils

 18   reviendront."

 19   Puis le paragraphe suivant : "J'envisage le processus de rapatriement qui

 20   aura lieu en gros en trois phases. La première devait être le retour des

 21   personnes déplacées au sein de la Bosnie-Herzégovine et en Croatie. Et au

 22   cours de cette période postérieure à cette première période de

 23   réinstallation, il est vraisemblable qu'il y aura également des mouvements

 24   de population à la suite d'ajustements territoriaux entre les parties."

 25   Est-ce que ceci rafraîchit votre mémoire sur la façon dont on discutait de

 26   la question et ces groupes de travail sur l'ex-Yougoslavie, et Mme Ogata

 27   pouvait avoir discuté de ceci en ce qui concerne le processus selon lequel

 28   les réfugiés devraient revenir ?

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  1   R.  Il n'y a en fait aucun type de contradiction entre sa politique et ce

  2   dont j'ai rendu compte ou ce sur quoi j'ai fait rapport.

  3   Q.  Mais je ne parle --

  4   R.  Quelque chose que je trouve très important à mentionner, c'est le

  5   retour, le caractère volontaire, et ça c'est vraiment très important. Mais

  6   j'ai rencontré des réfugiés serbes en dehors de Belgrade, qui étaient dans

  7   des camps aux conditions vraiment terribles et qui voulaient sans aucun

  8   doute revenir chez eux. Donc toujours, mes rapports sont basés sur ce que

  9   je sais des personnes ordinaires, de la véritable population, non pas sur

 10   la façon de les déplacer simplement comme quelque chose, comme si on jouait

 11   avec des objets. Je ne dis pas que Mme Ogata fait cela, mais je pense que

 12   c'était très important que quoi que j'aie pu dire dans les rapports, il y

 13   avait les sentiments véritablement au niveau le plus élémentaire. Il ne

 14   s'agissait pas de haute politique ou de personnes politiques ni

 15   d'organisations internationales. Je dois également rappeler qu'un

 16   rapporteur spécial est quelqu'un de totalement indépendant des

 17   organisations des Nations Unies.

 18   Q.  Mais vous ne devriez jamais supposer que je vous pose une question

 19   parce que je penserais qu'elle est en contradiction avec ce que vous avez

 20   dit. Ce que je vous demande concerne la position du gouvernement croate

 21   telle qu'elle est en fait présentée dans votre propre déclaration de

 22   témoin.

 23   R.  Oui. Et c'est une très bonne chose. Mme Ogata a plus particulièrement

 24   mentionné ce fait, à savoir que les retours doivent être volontaires, la

 25   sécurité doit être garantie, et c'est ça que les autorités croates

 26   n'étaient pas prêtes à offrir. Ils n'étaient pas prêts à donner cette

 27   garantie à ce moment-là.

 28   Q.  Quelle garantie ?

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  1   R.  La garantie de la sécurité, à ce moment-là, pour ceux qui

  2   retourneraient chez eux.

  3   Q.  Parce que la situation de sécurité n'avait toujours pas --

  4   R.  Et spécialement parce que les Croates, là, ne voulaient pas leur

  5   permettre de revenir.

  6   Q.  Bien. Et bien --

  7   R.  C'était les voisins qui ne voulaient pas qu'ils reviennent.

  8   Q.  Bien. Maintenant, je vous pose la question en ce qui concerne la

  9   question du gouvernement croate disant que les retours en masse devaient

 10   attendre un règlement politique pour que la situation du point de vue

 11   sécurité soit améliorée. Et ceci, évidemment, était compatible avec ce que

 12   disait le HCR dans des groupes de travail sur l'ex-Yougoslavie, n'est-ce

 13   pas ?

 14   R.  Oui, mais de cette façon qu'ils ne pouvaient pas fournir et peut-être

 15   ils ne voulaient pas fournir une situation de sécurité suffisamment forte

 16   pour, ce qui reviendrait simplement parce qu'ils ne voulaient pas aller

 17   contre les vœux de leur propre population, c'est-à-dire le peuple serbe qui

 18   vivait là, et ils ne voulaient pas que ces gens-là reviennent. C'est tout à

 19   fait une question de règlement politique, comme vous l'avez dit. Ils ne

 20   voulaient la régler. Je connais si bien les politiques, les personnalités

 21   politiques, j'en été moi-même une. Donc ils regardaient à l'égard de leur

 22   population, de leurs électeurs, vraiment qu'est-ce que l'on veut faire. Et

 23   dans ce cas, leur propre population, c'est-à-dire le peuple croate qui se

 24   trouvait dans les villages, dans la ville de Knin, et ainsi de suite, ils

 25   ne voulaient pas de ces retours.

 26   Q.  Madame Rehn, je pense que nous avons examiné cela hier, mais après que

 27   le règlement politique ait été réalisé, au moment où vous avez présenté

 28   votre dernier rapport vous avez dit qu'il y avait des raisons d'optimisme à

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  1   la lumière de ce que le gouvernement croate avait fait après le règlement

  2   politique, après qu'il ait été réalisé; est-ce que c'est exact ?

  3   R.  Oui, plusieurs années ou quelques années plus tard et aujourd'hui, bien

  4   entendu, ils vont être membres bientôt de l'Union européenne; ce qui est un

  5   développement merveilleux.

  6   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais présenter

  7   ce document du HCR comme élément de preuve.

  8   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 10   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera le D690, Monsieur le Président.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le D690 est admis au dossier comme

 12   élément de preuve.

 13   Maître Misetic, lorsque Mme Rehn a dit que le gouvernement et les voisins,

 14   avant de dire que vous n'avez pas fait d'objection, vous avez dit que "les

 15   voisins," --

 16   M. MISETIC : [interprétation] Je ne sais pas pour le compte rendu.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le compte rendu ne rend pas compte de

 18   cela. Ensuite, le mot "voisins" également n'y paraît pas. Vous avez répété

 19   une réponse et ce n'est pas comme ça qu'on devrait procéder. Si vous

 20   regardez, ces mots manquent au compte rendu. Le mot qu'on trouve là, -- je

 21   crois qu'il y a le mot en tous les cas, "voisins," ne se trouve pas là.

 22   M. MISETIC : [interprétation] Je pense que nous voulons parler de la page

 23   28, ligne 17, Monsieur le Président.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous regardez à la page 28, ligne 18,

 25   on voit, ça se lit --

 26   M. MISETIC : [interprétation] Je vois.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Là vous avez dit "voisins."

 28   M. MISETIC : [interprétation] Oui, je comprends.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être qu'il vaut mieux que ça ne

  2   soit pas au compte rendu, parce que ça répète une partie de la réponse,

  3   qui, apparemment, est particulièrement heureuse ou non par rapport à un

  4   commentaire.

  5   M. MISETIC : [interprétation] Vous avez inséré le mot "gouvernement

  6   croate," qui n'est pas dans le compte rendu que je regarde. Elle a dit "les

  7   Croates…"

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] "Les Croates."

  9   M. MISETIC : [interprétation] C'est la raison pour laquelle je voulais

 10   éclaircir ce point de façon à ce que par la suite il n'y ait pas de

 11   malentendu. Je voulais clarifier ce que le mot "Les Croates" voulait dire.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quelques lignes avant cela il est

 13   question des "autorités croates," donc là il y a une référence très claire

 14   qui était faite même si le mot "autorités" n'était pas --

 15   M. MISETIC : [interprétation] Non, encore là, je veux dire je ne pense pas

 16   que -- le texte dit, je cite : "Les autorités croates n'étaient pas prêtes

 17   à donner ces garanties de sécurité," et elle ajoute : "…tout

 18   particulièrement, parce que les Croates là ne voulaient pas qu'ils viennent

 19   ou qu'ils reviennent."

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ensuite, vous avez demandé : "Quelle

 21   garantie ?" C'est une référence très claire à la ligne précédente

 22   concernant les garanties --

 23   M. MISETIC : [interprétation] Je fais une distinction, Monsieur le

 24   Président, entre la possibilité de fournir des garanties de sécurité et le

 25   fait de ne pas vouloir d'aucuns --

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, alors restons-en là. Mais peut-être

 27   en ne répétant pas la question on pourrait éviter ce type de risque.

 28   Veuillez poursuivre où vous avez demandé ce que ceci pourrait vouloir dire,

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  1   ceci ou cela. Donc veuillez poursuivre.

  2   M. MISETIC : [interprétation] Très bien.

  3   Q.  Madame Rehn, j'ai noté dans votre curriculum vitae que vous étiez

  4   également présidente d'un groupe de travail sur démocratisation et droits

  5   de l'homme de 2004 à 2005 chargé d'un pacte de stabilité pour l'Europe du

  6   sud-est; est-ce que c'est exact ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Et en tant que présidente de ce groupe ou de cette table ronde de

  9   droits humains ou de démocratisation, est-ce que ceci voudrait dire que

 10   vous aviez participé à des questions des droits humains dans l'ensemble de

 11   la Yougoslavie ?

 12   R.  Non. L'Europe du sud-est, donc l'Albanie, la Moldavie et d'autres

 13   étaient incluses là-dedans. Le pacte de stabilité pour l'Europe du sud-est

 14   a été créé en 1998 à Sarajevo, et il y avait trois tables qui s'occupaient

 15   de cela, l'une pour la démocratie, ainsi de suite. Donc à l'époque j'avais

 16   couvert l'ensemble de la région Europe du sud-est et, bien sûr, également

 17   la Croatie.

 18   Q.  Bien. Et ceci était en 2004 ?

 19   R.  Je pense que j'ai commencé en 2003 et que je l'avais quitté au début de

 20   2005.

 21   M. MISETIC : [interprétation] Je voudrais maintenant qu'on nous présente le

 22   document 1D40-0059.

 23   Q.  Vous notez que sur la page de couverture il y a là une réunion du

 24   Conseil de sécurité du 5 septembre 2002.

 25   M. MISETIC : [interprétation] Et page suivante.

 26   Q.  Dans la colonne de droite il y a trois paragraphes vers le bas, on dit

 27   : "A la réunion, le Conseil de sécurité entendra un briefing de M. Hedi

 28   Annabi, secrétaire général adjoint pour les opérations de maintien de la

Page 6625

  1   paix.

  2   "Je donne maintenant la parole à M. Annabi."

  3   M. MISETIC : [interprétation] Pourrait-on maintenant voir la page 5.

  4   Q.  Troisième paragraphe vers le bas, exposé de M. Annabi au Conseil de

  5   sécurité, qui dit - nous parlons maintenant des retours en masse des

  6   réfugiés au Kosovo - et il est dit : "Dans ce contexte, les déclarations

  7   faites par les Serbes du Kosovo, concernant les personnes déplacées, qu'ils

  8   ont l'intention de bloquer aux points de traverser, aux points des lignes

  9   frontières administratives avec le Kosovo plus tard, ce mois, parce que

 10   s'ils ne sont pas autorisés à retourner en masse sont une cause de

 11   préoccupation. Bien que l'impatience des personnes déplacées à l'intérieur

 12   est compréhensible, étant donné la situation qui est encore délicate, des

 13   relations intercommunales, toute action dans ce sens serait

 14   contreproductive et pourrait être dommageable au processus de retour. Il ne

 15   peut pas y avoir de retour en masse qui est artificiel.

 16   "La MINUK doit procéder de façon organisée sur la base du droit des

 17   individus à retourner là-bas de façon à ce que ceci puisse être réalisé.

 18   Ceci nécessite des préparatifs prudents sur le terrain de façon à s'assurer

 19   que l'infrastructure physique, c'est-à-dire les maisons, l'emploi, l'accès

 20   aux services publics soit bien en place pour accueillir ceux qui rentreront

 21   chez eux. Nécessite également de traiter soigneusement les relations avec

 22   les communautés voisines Kosovo Albanie, de façon à diminuer les incidents

 23   potentiels qui auraient trait à ces retours."

 24   Maintenant, étant quelqu'un qui s'est occupée non seulement la

 25   Croatie, mais également de l'ex-Yougoslavie et plus tard s'est occupée même

 26   après ce rapport concernant les droits de l'homme dans l'ex-Yougoslavie,

 27   vous avez été au courant du fait qu'il y avait une politique de retour

 28   spécifique structurée pour que des Serbes reviennent au Kosovo et que les

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  1   Nations Unies elles-mêmes étaient opposées à une politique de retour en

  2   masse des Serbes au Kosovo; c'est bien cela ?

  3   R.  Je crois que nous nous écartons beaucoup de la situation dont devaient

  4   traiter mes rapports, lorsque nous parlons des retours des Serbes au

  5   Kosovo. Parce que ce que j'ai appris tout au moins en étudiant les conflits

  6   dans le monde avec d'autres missions que j'ai dû accomplir pour l'ONU, un

  7   conflit n'est pas analogue à un autre et il n'est pas similaire. Et j'ai

  8   beaucoup de respect pour M. Steiner, qui est un ami, mais on peut faire

  9   référence à tout exposé de personnes importantes. Donc ceci c'est peut-être

 10   une question qui, certainement, était très importante ou jugée importante

 11   en ce qui concerne le Kosovo après l'intervention et les bombardements et

 12   tout ce qui s'est passé.

 13   Mais je ne vois pas qu'il doive y avoir une contradiction quelconque, parce

 14   que je n'ai pas demandé, moi, qu'il y ait des retours en masse.

 15   Personnellement, j'ai demandé qu'on assure la sécurité et que les retours

 16   soient volontaires. S'il y avait un très grand nombre, d'accord. Je crois

 17   que nous avons les mêmes principes.

 18   Q.  Ma question encore une fois : est-ce que vous étiez au courant, lorsque

 19   vous travailliez sur le pacte de stabilité de la politique des Nations

 20   Unies concernant les retours en masse ?

 21   R.  Oui, bien sûr, j'étais au courant. C'était en 2002, oui, j'ai commencé

 22   en 2003, il y avait d'autres personnes qui étaient des dirigeants de la

 23   mission de la MINUK au Kosovo.

 24   M. MISETIC : [interprétation] Je demande le versement de ce document au

 25   dossier du Conseil de sécurité, s'il vous plaît.

 26   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Pas d'objection.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D691, Monsieur le

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  1   Président.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D691 est admis au dossier comme élément

  3   de preuve.

  4   M. MISETIC : [interprétation] J'en aurai terminé juste à la suspension

  5   d'audience, Monsieur le Président.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon à entendre.

  7   M. MISETIC : [interprétation]

  8   Q.  Je voudrais également maintenant, à cause de ce que vous savez des

  9   événements de la situation au Kosovo, demander qu'on nous présente le

 10   document 1D40-0484.

 11   Madame Rehn, voilà un rapport de l'OSCE de décembre 1999 qui porte pour

 12   titre : "Comme on l'a vu, comment ça a été raconté." Ceci c'est la deuxième

 13   partie d'une analyse de l'OSCE de ce qui s'est passé entre le mois de juin

 14   et le mois d'octobre 1999 au Kosovo après que les Nations Unies et l'OTAN

 15   soient entrés au Kosovo. Je vais vous lire quelques passages de

 16   l'introduction.

 17   M. MISETIC : [interprétation] Ce document lui-même fait environ 400 pages,

 18   donc nous ne l'avons pas téléchargé, l'ensemble du document comme élément

 19   de preuve, bien qu'il soit disponible pour le Tribunal et si l'Accusation

 20   souhaite le consulter.

 21   Pourrait-on passer à la page 3, s'il vous plaît.

 22   Q.  Bien qu'il s'agisse d'un rapport de l'OSCE, le représentant spécial du

 23   secrétaire général, M. Bernard Kouchner a préparé l'introduction. Il était

 24   représentant du secrétaire général au Kosovo pendant cette période.

 25   Vous noterez au début que M. Kouchner dit : "Le présent rapport est une

 26   lecture qui décrit les violations des droits de l'homme détaillées par la

 27   division des droits de l'homme de l'OSCE pour la période concernant juin à

 28   octobre 1999 comprend des exécutions, des enlèvements, des tortures, des

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  1   traitements cruels, inhumains et dégradants, des arrestations arbitraires,

  2   des tentatives de limiter la liberté d'expression."

  3   La dernière phrase du paragraphe dit : "De telles violations aussi étendues

  4   des droits humains ont leur importance pour tout un chacun ici aux Nations

  5   Unies, pour l'administration intérim au Kosovo. Nous nous efforçons de

  6   créer, de rétablir l'état de droit et le respect pour les droits humains et

  7   de faire plus pour essayer d'atteindre les racines et les causes de ces

  8   abus."

  9   Le bas de la page c'est : "Dans de nombreux cas documentés dans ce rapport

 10   de l'OSCE, il y a des indications graves que les auteurs de violations des

 11   droits humains sont soit des membres de l'ancienne UCK, des personnes qui

 12   se font passer pour des membres de l'ancienne UCK ou des membres d'autres

 13   groupes albanais armés."

 14   "Dans de nombreux cas, jusqu'à présent, il a été impossible d'identifier

 15   exactement ceux qui étaient responsables."

 16   M. MISETIC : [interprétation] Page suivante, s'il vous plaît.

 17   Q.  M. Kouchner, dans ce premier paragraphe, troisième phrase dit : "La

 18   MINUK et nous-mêmes prenons des mesures concrètes, des mesures pratiques

 19   pour empêcher des violations. Néanmoins, la police civile internationale

 20   des Nations Unies et la KFOR ont besoin d'augmenter des activités qui sont

 21   déjà très importantes au Kosovo, qui sont fréquentes et visibles. Avec des

 22   patrouilles fréquentes et visibles et de développer des liens plus proches

 23   avec la communauté qui aideront à empêcher des violations et accroître la

 24   possibilité d'arrêter ceux qui sont suspectés d'avoir commis des violations

 25   des droits humains."

 26   M. MISETIC : [interprétation] Puis, deux pages plus loin, pas la page

 27   suivante mais celle d'après.

 28   Q.  Le haut de la page dit : "L'héritage au point de vue de violations des

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  1   droits de l'homme qui s'est passé avant, pendant et après le conflit est un

  2   héritage très lourd. Réussir à dire par rapport à la guerre est quelque

  3   chose de difficile, mais les problèmes sont multipliés ici aux racines des

  4   conflits sont essentiellement le fait de ne pas avoir tenu compte, c'est le

  5   fait d'avoir méprisé systématiquement et massivement les droits de l'homme.

  6   Ce rapport souligne maintenant à quel point la tâche est difficile. Les

  7   craintes de vengeance, les craintes, en général, sont particulièrement

  8   étendues au Kosovo après ce conflit. Ces craintes de vengeance, ces

  9   craintes ont conduit au fait qu'il y a des violations des droits de l'homme

 10   qui se poursuivent."

 11   Puis au dernier paragraphe : "Nous sommes fortement préoccupés par la

 12   situation des minorités. Si l'on regarde les tendances dans la criminalité,

 13   on voit une amélioration. Il y a une baisse partant de 50 meurtres au cours

 14   de chacune des premières semaines, il n'y a plus que trois meurtres au

 15   cours de la semaine dernière et ça on ne peut pas l'ignorer."

 16   Je m'arrête là.

 17   M. Kouchner, au Kosovo, six mois après que l'ONU soit entré au Kosovo, il

 18   dit : "Il y a une baisse passant de 50 meurtres au cours de chacune des

 19   premières semaines à trois meurtres la semaine dernière et on ne saurait

 20   l'ignorer."

 21   Est-ce que vous êtes au courant du fait qu'en Croatie le taux de meurtre --

 22   est-ce que vous connaissez ce qu'il était dans le secteur sud en août 1995

 23   ?

 24   R.  Non, pas après avoir entendu -- pas sans avoir un type de statistiques

 25   ici devant moi et là encore, je dois dire que toutes les situations varient

 26   les unes des autres.

 27   Q.  Bien. Est-ce que vous me permettrez --

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Je voudrais continuer sur ce point, comme ça on peut en terminer par --

  2   R.  Ce passage au Kosovo était évidemment très, très troublant mais peut-

  3   être surprenant.

  4   Q.  Poursuivons, Madame Rehn.

  5   Ça poursuit : "Il n'est pas juste de faire des comparaisons avec la

  6   situation qui existait avant ou après la guerre. A ce moment-là, et pendant

  7   au moins une décennie, il y a eu une politique systématique par

  8   d'apartheid, dans laquelle il y avait un statut sub-humain ou un statut de

  9   sous-communauté pour les Albanais au Kosovo. Ceci n'est plus le cas

 10   aujourd'hui. Peut-être que la situation semble toujours aussi mauvaise pour

 11   le Serbes ou les Rom qui vivent dans la crainte et qui ne peuvent pas avoir

 12   liberté d'aller et venir librement ou trouver une façon de protéger leurs

 13   enfants, mais ça n'est plus une question de politique. Tous les partis au

 14   Kosovo, tous les dirigeants, les Serbes et les Albanais ont déclaré quelle

 15   était leur position en faveur d'une société multiethnique et de la

 16   coexistence entre toutes les communautés.

 17   "Les crimes que nous voyons maintenant sont le fait d'individus. Aucun

 18   parti politique n'a revendiqué la responsabilité. Leurs représentants du

 19   Conseil transitoire au Kosovo ont condamné ces abus à chaque fois qu'ils

 20   ont eu lieu, et ont exprimé eux-mêmes leur préoccupation concernant ces

 21   actes d'intolérance. On ne peut pas exclure la possibilité qu'il y ait

 22   volontiers un double langage, mais nous ne pouvons pas le présupposer non

 23   plus."

 24   Je terminerai en posant cette question : M. Kouchner parle de la façon dont

 25   les dirigeants parlaient des défauts, des carences d'une société

 26   multiethnique et de la coexistence entre toutes les communautés; au début

 27   de mon contre-interrogatoire, nous avons présenté un enregistrement de ce

 28   que le président Tudjman vous a dit le 4 décembre 1995. Est-ce que vous

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  1   seriez d'accord avec moi que ce que le président Tudjman concernait la

  2   réconciliation entre les Serbes et les Croates; c'est bien cela ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Seriez-vous d'accord avec moi que c'est naturellement M. Kouchner qui

  5   le dit, bien sûr, mais qu'il était possible qu'il se soit trouvé dans un

  6   double langage et que cette possibilité ne puisse être exclue, mais que

  7   nous ne devrions pas la présupposer ? Est-ce que vous seriez d'accord avec

  8   ça ?

  9   R.  Oui. C'est très similaire à ce que j'ai ressenti avec mes discussions

 10   avec le président Tudjman et les membres du gouvernement de la Croatie.

 11   Q.  Je vous remercie, Madame Rehn. Merci d'avoir répondu à mes questions.

 12   M. MISETIC : [interprétation] Je demande maintenant que ceci soit versé au

 13   dossier comme élément de preuve.

 14   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.

 15   Je voudrais simplement demander que la Défense veuille bien télécharger la

 16   page couverture du document de façon à ce que nous puissions avoir un

 17   document complet à notre disposition.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic.

 19   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, franchement, lorsque

 20   je l'ai téléchargé, je n'avais pas de page de couverture, et maintenant sur

 21   le site de l'OSCE, j'ai essayé de le trouver pendant le week-end. Je vais

 22   essayer de le retrouver. C'est en tous les cas sur internet ou ça devait y

 23   être.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il ne s'agit pas d'une objection contre

 25   l'admission ?

 26   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Non, Monsieur le Président, il n'y a

 27   pas d'objection.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

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  1   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ça devient la pièce D692.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

  3   Madame Rehn, Me Misetic vous a arrêtée lorsque vous avez exprimé votre

  4   surprise concernant la comparaison qui a été faite. Si vous voulez ajouter

  5   quoi que ce soit à cela, vous êtes libre de le faire.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président, parce

  7   que j'étais -- oui, c'est vrai, j'étais un peu surprise. Parce que, comme

  8   je le disais, chaque situation, chaque conflit, malheureusement, présente

  9   des analogies en ce qui concerne les souffrances des civils, mais il faut

 10   dire également qu'ils sont très différents. Et lorsque le ministre Kouchner

 11   aujourd'hui était le premier à s'occuper de la MINUK, il était très clair

 12   qu'il était très troublé concernant la situation et qu'il avait entendu

 13   parler également toutes ces paroles aimables des différentes parties en

 14   cause.

 15   Bien sûr, si nous devions prendre les choses à la lettre aujourd'hui,

 16   tant d'années plus tard, il pourrait y avoir un autre ton dans cela. Il y a

 17   tant de situations différentes que je suis simplement surprise que la

 18   justice au Kosovo soit évoquée dans ce procès. Je pourrais avoir de très,

 19   très nombreux rapports de moi-même sur la situation ici maintenant et plus

 20   tôt, et je crois que ça n'a pas lieu d'être pour le présent procès.

 21   Je voulais simplement exprimer ma surprise.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

 23   Nous allons suspendre la séance, mais pas avant que j'aie fait verser

 24   officiellement au dossier le D692. Nous reprendrons à 11 heures.

 25   --- L'audience est suspendue à 10 heures 33.

 26   --- L'audience est reprise à 11 heures 03.

 27   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Monsieur le Président, si vous me

 28   permettez, pendant la pause j'ai examiné le courriel envoyé par la Défense,

Page 6634

  1   il s'agit d'un document de huit pages et, en fait, il y a sept pages de ce

  2   courriel. Je n'ai pas d'objection à son admission, à son versement au

  3   dossier. Cela dit, nous avons téléchargé les documents dans le système et

  4   il semblerait que le document n'y est pas, et nous sommes en train

  5   d'examiner l'original pour avoir de meilleures copies.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si les parties peuvent se mettre

  7   d'accord sur le fait de savoir qui l'a envoyé et quand, à qui, cela serait,

  8   bien entendu, très utile.

  9   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Je n'ai pas très bien compris dans le

 10   courriel s'il s'agissait d'un courriel envoyé depuis le bureau du comité

 11   d'Helsinki à Belgrade, mais peut-être que Me Misetic pourrait nous le dire.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. C'est un e-mail, mais il y a

 13   également une copie de cet e-mail qui a été apparemment envoyé par la

 14   télécopie et qui porte la date du 28 octobre. Donc essayons de l'analyser

 15   et de savoir comment ces communications se sont déroulées, et ensuite nous

 16   nous concentrerons davantage sur la teneur.

 17   J'aimerais que les parties m'en informent, m'informent s'il y a un accord

 18   là-dessus.

 19   Je regarde à droite, oui, Maître Kay, vous êtes le suivant.

 20   M. KAY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Rehn, c'est Me Kay, le conseil de

 22   M. Cermak qui va vous contre-interroger.

 23   M. KAY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 24   Contre-interrogatoire par M. Kay : 

 25   Q.  [interprétation] Madame Rehn, nous allons maintenant examiner un

 26   certain nombre de documents qui représentent une série de mesures prises

 27   par les ministères compétents de Croatie afin de mettre un terme à la

 28   commission des crimes, et ceci est pertinent pour un de vos rapports

Page 6635

  1   présentés.

  2   M. KAY : [interprétation] Et ce  n'est pas la peine de l'afficher, mais

  3   j'aimerais que les Juges tiennent compte de la cote P639, page 11,

  4   paragraphe 31.

  5   Q.  Tout d'abord, j'aimerais que l'on examine la pièce D49. Il s'agit d'un

  6   document qui porte la date du 18 août 1995 émanant du ministre adjoint de

  7   l'Intérieur et le document a été envoyé par le ministre Josko Maric.

  8   Tout d'abord, l'avez-vous jamais rencontré ?

  9   R.  Non, je ne m'en souviens pas. Il est possible, mais je ne m'en souviens

 10   pas. Je vous ai dit que j'ai une très mauvaise mémoire lorsqu'il s'agit des

 11   noms. Si je voyais son visage, peut-être que je pourrais me le rappeler.

 12   Q.  Je comprends tout à fait. C'est lui qui a envoyé ce document et il a

 13   travaillé au sein du ministère de l'Intérieur et il a également travaillé

 14   avec le MUP, le poste de police.

 15   M. KAY : [interprétation] Passons maintenant à la deuxième page.

 16   Q.  A la page 2 de ce document, vous pouvez voir qu'il est dit qu'il a reçu

 17   des informations portant sur les actes d'incendie des maisons, que des

 18   biens ont été enlevés, et il dit que ces actes ont été commis par des

 19   personnes portant l'uniforme de l'armée croate. Par la suite, il parle du

 20   fait que ces personnes étaient ou n'étaient pas membres de l'armée croate.

 21   Comme vous pouvez le lire, il dit que ces actes ont une incidence négative

 22   sur le plan politique en République de Croatie.

 23   M. KAY : [interprétation] Passons maintenant à la troisième page.

 24   Q.  Parce qu'il a donné un ordre dans lequel il a dit aux chefs

 25   d'administration de police de - et je précise que la Chambre connaît très

 26   bien la structure des postes de police et des chefs d'administration de

 27   police en Croatie. Mais ma question : connaissiez-vous la structure interne

 28   au sein de la police en

Page 6636

  1   Croatie ?

  2   R.  Bien sûr, nous le connaissions, et cette lettre a été envoyée avant que

  3   je n'aie pris mes fonctions là-bas le 18 août. Donc bien sûr, nous avons

  4   parlé de la manière dont fonctionnait le ministère de l'Intérieur et quelle

  5   était la structure au sein de ce ministère.

  6   Q.  D'accord. Nous allons examiner toute une série maintenant de documents

  7   allant d'août à septembre. Peu importe les dates précises. Il s'agit des

  8   ordres qui sont pertinents. Lorsque vous y rédigez vos rapports, il faut

  9   savoir que ces ordres étaient déjà mis en vigueur. Et vous pouvez voir

 10   qu'il s'agit d'un ordre dans lequel on veut organiser une rencontre avec la

 11   police militaire.

 12   Et dans le deuxième paragraphe on dit que les actes de pillage et

 13   d'incendie n'ont pas été enquêtés et qu'il faut mettre un terme à ce genre

 14   d'activité.

 15   Dans le troisième paragraphe on parle de la police militaire et des points

 16   de contrôle, des patrouilles mixtes composées de membres de la police

 17   civile et militaire qui devraient être organisées.

 18   Puis on parle également dans le quatrième paragraphe des enquêtes sur

 19   les lieux et que toutes sortes d'enquêtes opérationnelles et médico-légales

 20   doivent être organisées.

 21   Puis dans le cinquième paragraphe, il est dit que si la police

 22   militaire ne peut pas mener à bien les tâches précisées dans le quatrième

 23   paragraphe, la police civile doit le faire indépendamment du fait que

 24   l'auteur de ces actes porte un uniforme militaire ou pas.

 25   Puis passons maintenant à la quatrième page. On parle de la communication

 26   de cet ordre à toutes les parties pertinentes. Dans ce rapport dont je vous

 27   ai parlé tout à l'heure, vous avez appris de la part des autorités croates

 28   les plus haut placées que des mesures avaient été prises pour empêcher la

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  1   commission des crimes, n'est-ce pas ?

  2   R.  C'est exact.

  3   Q.  Merci. Passons maintenant à un autre document. Comme j'ai dit, il

  4   s'agit d'une série de sept documents, pour que vous ayez une meilleure

  5   perspective des événements.

  6   M. KAY : [interprétation] Il s'agit du document D584 enregistré aux fins

  7   d'identification. En date du 19 août 1995, sinon, c'est 4595 de la liste 65

  8   ter, si cette référence est plus simple.

  9   Q.  Nous allons examiner le document qui porte la date du 19 août émanant

 10   d'une de ces administrations de police, le destinataire est le MUP et le

 11   ministre adjoint, à savoir M. Moric. Dans ce document, on se réfère au

 12   document précédent qu'on vient d'examiner. Le document envoyé par le chef

 13   de l'administration de la police de Zadar, le chef évoque la réunion tenue

 14   entre les représentants de la police militaire et l'administration de la

 15   police Zadar-Knin. On peut constater que la police militaire a souligné

 16   qu'une action coordonnée à tous les points de contrôle n'est pas possible,

 17   parce qu'il n'y a pas suffisamment d'hommes qui pourraient y être de

 18   faction.

 19   Et la deuxième page de ce document est tout simplement la conclusion de ce

 20   qui vient d'être dit.

 21   Etiez-vous informée de la coordination entre la police militaire et la

 22   police locale ?

 23   R.  Cela est possible, mais je ne suis pas tout à fait sûre. Il est

 24   intéressant, compte tenu des dates, qu'ils avaient déjà pris des mesures et

 25   organisé des réunions avant d'avoir reçu la lettre du MUP.

 26   Q.  Oui. Et c'est pertinent pour les affaires et les questions que vous

 27   avez évoquées auprès du gouvernement, n'est-ce pas ?

 28   M. KAY : [interprétation] Passons maintenant à un autre document, à savoir

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  1   D50.

  2   Q.  C'est un document qui porte la date du 22 août, émanant du MUP, plus

  3   précisément de M. Moric, ministre adjoint, une fois encore envoyé aux

  4   administrations de police. On s'y réfère à la télécopie du 18 août.

  5   M. KAY : [interprétation] Passons maintenant à la deuxième page pour voir

  6   la teneur de ce document.

  7   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Monsieur le Président, il n'est pas dit

  8   qu'il s'agissait de "postes de police," mais "d'administrations de police."

  9   Il est important que nous ayons une terminologie précise.

 10   M. KAY : [interprétation] Je suis très reconnaissant à mon éminente

 11   consoeur.

 12   Q.  A la deuxième page, vous pouvez voir qu'on y fait état des maisons qui

 13   ont été brûlées, que les biens ont été saisis d'une manière illégale. M.

 14   Moric a envoyé cette lettre à la police militaire et il y décrit l'ampleur

 15   de ces phénomènes. L'administration de la police militaire a envoyé un

 16   ordre aux bataillons de police militaire leur ordonnant de se mettre en

 17   contact avec le MUP et les postes de police afin de résoudre ces problèmes.

 18   Et l'on demande qu'un système de surveillance et d'information soit mis en

 19   place entre la police et la police militaire. Le voyez-vous ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Puis nous avons une série de questions portant sur ces questions afin

 22   de savoir dans quelle mesure ces missions ont été menées à bien. Vous êtes

 23   d'accord avec moi, n'est-ce pas, que ce genre de mesures est justement ce

 24   que vous auriez approuvé à cette époque-là ?

 25   R.  Oui. Toutes ces mesures demandées sont exactement ce que nous

 26   souhaitions.

 27   Q.  Oui. Passons maintenant à la troisième page, où nous avons des

 28   informations portant sur des enquêtes. On dit qu'en fait il faut informer

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  1   au sujet de ces enquêtes. Et je pense que votre réponse serait identique, à

  2   savoir qu'à votre point de vue c'était quelque chose d'important.

  3   R.  Oui, c'est exact.

  4   Q.  Est-ce que quelqu'un dans votre équipe vous a informée de ces mesures

  5   précises lorsque vous êtes arrivée le 27 septembre ?

  6   R.  C'est tout à fait possible, mais je ne pourrais pas le confirmer, parce

  7   que c'était la première fois que je me suis rendue dans une région en

  8   guerre -- oui, avant, j'étais ministre de la Défense, mais ce n'est pas

  9   exactement la même chose. Là, j'étais confrontée à la réalité de ces

 10   événements, et je suis sûre que l'on m'avait dit quelles étaient les choses

 11   qui étaient demandées, et cela a été répété lors de mes réunions avec les

 12   représentants des autorités. Mais bien sûr, je n'ai pas eu accès à ces

 13   lettres et à toutes ces informations qui y figurent.

 14   Q.  Mais l'on peut dire que dans vos rapports au secrétaire général, vous

 15   n'avez pas eu ces informations, vous n'avez pas présenté tous ces détails ?

 16   R.  Non. Ils n'y figurent pas. Nous avons relaté ce que nous avons pu voir

 17   se produire dans les villages, et ces ordres de toute façon n'ont jamais

 18   été entièrement exécutés.

 19   Q.  Merci.

 20   M. KAY : [interprétation] Le document suivant est sous pli scellé, Monsieur

 21   le Président. Il faut prendre des mesures pour l'observer.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il ne faut pas le montrer au

 23   public ou bien la déposition doit être à huis clos partiel également ?

 24   M. KAY : [interprétation] La déposition peut être disponible pour le grand

 25   public.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc le document suivant

 27   est ?

 28   M. KAY : [interprétation] P502.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

  2   M. KAY : [interprétation]

  3   Q.  Le document que vous voyez à l'écran, Madame Rehn, est un document que

  4   je ne vais pas examiner en détail maintenant avec vous. Vous comprenez

  5   qu'il s'agit d'un document sous pli scellé. Vous comprenez pourquoi je

  6   procède de cette manière ?

  7   R.  Oui. Voilà, maintenant je vois la version en anglais.

  8   Q.  Ce n'est pas la peine d'entrer dans les détails, mais vous pouvez y

  9   lire que s'agissant des points de contrôle, la coordination, les

 10   patrouilles, ce sont des questions évoquées dans ce document.

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Ainsi que la coopération. Ce sont des mesures que vous auriez

 13   approuvées, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Merci.

 16   M. KAY : [interprétation] Nous n'avons plus besoin de dire davantage sur ce

 17   document. Je sais que la Chambre connaît très bien ce document.

 18   Passons maintenant au document D589, enregistré aux fins d'identification.

 19   Il s'agit du document 1302 de la liste 65 ter, et ce document n'est pas

 20   sous pli scellé.

 21   Q.  Il porte la date du 28 août émanant de l'administration de la police

 22   Zadar-Knin envoyé au ministre adjoint, M. Moric, qui était impliqué dans

 23   toute une série d'ordres émanant du MUP, et ce document porte sur le

 24   traitement des personnes portant l'uniforme militaire dans les zones

 25   libérées et l'on y fait état d'un grand nombre de personnes portant

 26   l'uniforme de l'armée croate, portant des armes et conduisant des

 27   véhicules.

 28   M. KAY : [interprétation] Passons maintenant à la deuxième page.

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  1   Q.  En haut de la page, on dit que ces personnes sont probablement en

  2   connivence avec les amis et membres de leurs familles lorsqu'ils prennent

  3   ces biens et les amènent. Sur la base des rapports écrits émanant des

  4   présidents des municipalités, on peut constater qu'il s'agit des gens qui

  5   falsifient des documents. Le voyez-vous ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Etes-vous d'accord pour dire que le gouvernement de Croatie, à cette

  8   époque-là, faisait face à une situation dans des zones libérées et qu'il

  9   était très difficile de gérer les problèmes administratifs afin d'imposer

 10   l'état de droit ?

 11   R.  Bien sûr que cela leur était difficile, et il était difficile de savoir

 12   qui était véritablement membre de l'armée et qui tout simplement portait un

 13   uniforme militaire. Je l'avais déjà dit lors de mes déclarations

 14   précédentes et lors de ma déposition aujourd'hui et hier. Il est toujours

 15   difficile d'administrer une région après le conflit.

 16   Q.  Oui. Et cela dépend, bien sûr, des ressources dont dispose le

 17   gouvernement, n'est-ce pas ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Allons un peu plus loin dans la page, il est dit qu'il est nécessaire

 20   que la police locale ou les personnes compétentes soient présentes lors des

 21   réunions que le général Cermak a tenu avec les représentants de l'ONURC, la

 22   police civile des Nations Unies et d'autres organisations internationales

 23   afin de s'assurer que la police est informée de tous les accords.

 24   Passons maintenant à la troisième page, il n'y a que deux lignes, mais il

 25   faut toujours terminer ses phrases. Donc les informer des accords conclus

 26   ce qui devrait rendre possible pour eux d'organiser et de planifier les

 27   tâches qui relèvent de leur compétence.

 28   Vous êtes d'accord avec moi que le ministère croate essayait de faire face

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  1   aux problèmes ?

  2   R.  Oui, c'est sûr qu'ils essayaient de le faire.

  3   M. KAY : [interprétation] Nous avons encore deux documents, P499, une fois

  4   encore sous pli scellé. Ce n'est pas la peine d'examiner plus en détail ce

  5   document.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il ne faut pas l'afficher à l'écran,

  7   mais pas la peine de passer en audience à huis clos partiel.

  8   Veuillez poursuivre.

  9   M. KAY : [interprétation] Oui. Merci.

 10   Q.  Nous pouvons tous examiner ce document. Je pense que vous pouvez de le

 11   voir à l'écran.

 12   R.  Oui, maintenant je le vois.

 13   Q.  Je ne vais pas l'examiner en détail.

 14   R.  Oui, oui, je comprends.

 15   Q.  Il porte la date du 1er septembre. Et qu'il y a des problèmes avec la

 16   police militaire. Passons maintenant à la deuxième page, on fait état de

 17   ces problèmes et vous pouvez lire que certaines personnes portent

 18   l'uniforme de l'armée croate et qu'il y a des unités qui procèdent au

 19   ratissage du terrain afin de détecter les unités paramilitaires qui étaient

 20   encore là. Ce n'est pas la peine de poursuivre.

 21   C'est un document que probablement vous n'avez pas vu, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui, je ne l'ai pas vu.

 23   Q.  Cela montre qu'il y avait toute une suite d'ordres qui émanaient du

 24   niveau du ministère ?

 25   R.  Oui, c'est exact et cela montre qu'il y avait des actions qui étaient

 26   prises.

 27   Q.  J'ai pris un instantané tout simplement.

 28   M. KAY : [interprétation] Il y a encore un autre document, D596. C'est

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  1   encore un document qui a été enregistré aux fins d'identification. C'est un

  2   document 2D04-0216. La traduction porte la cote 1A. C'est bien ça. Je

  3   m'habitue maintenant à lire les documents en B/C/S.

  4    Ce document porte la date du 19 septembre, il est adressé aux

  5   administrations de police. Vous voyez Zadar-Knin, puis Knin, et ce document

  6   renvoie à un télégramme précédent que la Chambre connaît bien. La référence

  7   au fait que le 15 septembre la police militaire n'est plus présente aux

  8   postes de contrôle d'entrée et de sortie de la zone libérée. S'agissant des

  9   activités de la police militaire, elles comprendront des patrouilles en

 10   voiture, il y a des contrôles obligatoires, rapports à faire

 11   obligatoirement à "nos" postes de contrôle, est-il dit, donc au poste du

 12   MUP, et la nécessité d'établir des communications radio est mentionné.

 13   Prenons la page 2, c'est toujours le ministre adjoint, M. Moric, qui a

 14   signé cette lettre qui parle, il dit ceci : "Il faut garder, conserver les

 15   postes de contrôle précédents même s'ils sont situés ailleurs…"

 16   C'est que des personnes avaient trouvé des moyens de contourner ces postes

 17   de contrôle et si c'est le cas, dit-il, il faut déplacer ces postes de

 18   contrôle, il faut des patrouilles en voiture et à pied pour effectuer les

 19   tâches habituelles de la police.

 20   Dernier document que je vous demande d'examiner, où se trouvent des

 21   informations des actions qui répondraient à vos desiderata, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui, ce serait bizarre si je disais le contraire, parce

 23   qu'effectivement c'est tout ce que nous voulions voir s'effectuer en

 24   pratique.

 25   Q.  Précisément, nous avons vu des documents qui viennent du niveau le plus

 26   élevé et qui descendent jusqu'aux échelons les plus élémentaires. Dans cet

 27   examen rapide des documents, nous sommes descendus jusqu'au niveau à

 28   l'échelon des postes de police de terrain, ce n'est pas simplement des

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  1   envois de documents d'un ministère à l'autre. Vous comprenez ça ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Est-ce qu'on vous a parlé de ces mesures au cours des réunions que vous

  4   avez eues?

  5   R.  Lorsque j'ai rencontré les ministres, je ne me souviens pas qu'ils

  6   aient évoqué des modalités aussi pratiques que celle-ci, ça aurait été

  7   utile qu'ils soient beaucoup plus précis parce qu'ils ont dit : "Nous

  8   faisons tout ce que nous pouvons, nous donnons des ordres aux postes de

  9   police, ainsi de suite. Tout le monde sait ce qu'il doit faire", ont-ils

 10   dit. Mais bien entendu, là vous me présentez des documents directs et la

 11   plupart de ces lettres sont de la plus grande confidentialité. Donc il est

 12   fort certain qu'ils ne voulaient pas me les montrer, même si ça avait été

 13   dans leur propre intérêt.

 14   Q.  La Chambre a été saisi des éléments de preuve, ceci est une infime

 15   portion, je vous parle de plusieurs centaines de documents, c'est pour ça

 16   que je vous parlais presque d'un instantané, d'un aperçu. Il aurait été

 17   sans doute utile à l'époque qu'on vous présente, pas moi, mais que

 18   quelqu'un vous présente ce que le système faisait, ce qui vous aurait

 19   permis d'en faire rapport, n'est-ce pas ?

 20   R.  Bien sûr, nous avons reçu des vues d'ensemble au niveau du ministère.

 21   Mais pour nous, bien entendu, ce qui comptait le plus c'est que ces ordres

 22   soient strictement, rigoureusement appliqués et la tendance était très

 23   claire. Chaque agent de police - est-ce qu'il y avait des femmes dans les

 24   forces de police, je ne sais plus - en tout cas, que chacun applique les

 25   ordres en dépit des pressions éventuellement exercées par des concitoyens

 26   croates du village.

 27   Q.  Ce matin vous avez parlé du problème que posaient les voisins ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Vous serez d'accord avec moi, c'est un problème qu'il est difficile de

  2   régler ?

  3   R.  Tout à fait. Bien souvent je l'ai dit, les agents de police sont des

  4   êtres humains avec leurs failles et leurs points forts aussi et il s'agit

  5   ici de choses qui sont difficiles à maîtriser, à aborder quand on vit dans

  6   un même quartier.

  7   Q.  Merci.

  8   M. KAY : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions, Monsieur le

  9   Président.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Maître Kay.

 11   Donnez-moi un instant, s'il vous plaît.

 12   Maître Kuzmanovic, êtes-vous prêt ?

 13   Madame Rehn, c'est maintenant Me Kuzmanovic qui défend M. Markac qui va

 14   vous interroger.

 15   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Merci.

 16   Contre-interrogatoire par M. Kuzmanovic : 

 17   Q.  [interprétation] Bonjour, Madame.

 18   Je vais aborder bon nombre de documents et je vais vous demander de faire

 19   preuve de patience pendant qu'ils s'affichent. Gardez ceci à l'esprit

 20   lorsque je vous pose des questions et lorsque vous y répondez.

 21   Avant d'aborder les documents, permettez-moi quelques questions de

 22   suivi à la suite de ce que vous avez déjà déclaré dans le cadre de votre

 23   déposition. Vous avez dit que lors d'une des visites que vous avez

 24   effectuées en Croatie, vous avez personnellement observé des actes de

 25   pillage; est-ce exact ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Qui était en votre compagnie dans votre groupe lorsque vous avez fait

 28   ces observations ?

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  1   R.  Lors de ma première visite, c'était au secteur nord et j'ai compris

  2   maintenant que je ne suis pas censée en parler.

  3   Q.  C'est exact.

  4   R.  Puis à la visite suivante, j'avais avec moi Roman Wieruszewski; l'agent

  5   chargé de ma sécurité, et de Laukkala qui était alors dans l'armée

  6   finlandaise. Nous avions avec nous un interprète, je ne me souviens plus du

  7   nom de l'interprète. Il y avait un chauffeur, c'était peut-être Sasa

  8   Milosevic, mais c'était peut-être quelqu'un d'autre, mais nous étions

  9   toujours en équipe, nous avions toujours une équipe des droits de l'homme.

 10   Q.  Est-ce que vous avez fait rapport de vos observations à un poste de

 11   police local qui aurait pu mener une enquête à la suite de ce rapport ?

 12   R.  Je ne l'ai pas fait directement, je n'ai pas présenté de rapport moi-

 13   même car c'était le personnel qui devait le faire. Mais je l'ai mentionné,

 14   bien entendu, chaque fois que j'ai rencontré l'administration au niveau

 15   ministériel.

 16   Q.  Lorsque vous avez procédé à ces observations, lorsque vous faisiez une

 17   visite en Croatie, n'est-il pas vrai de dire, qu'en tout cas au moment où

 18   ça s'est passé, vous n'en avez pas fait rapport à quelque autorité de

 19   police que ce soit ?

 20   R.  J'ai rencontré des agents de police, j'ai toujours rencontré la police

 21   pendant mes visites et j'en ai parlé. Mais je ne pourrais pas vous faire

 22   ici même une liste énumérant les actes que j'ai effectués, c'est-à-dire les

 23   rapports que j'aurais présentés. En tout cas, chaque fois que nous avons vu

 24   quelque chose, il y a un rapport qui a été fait après et qui était porté à

 25   l'attention des autorités croates à divers échelons. Mais je le répète, il

 26   me faut vous rappeler que mon travail - moi je vivais en Finlande - j'ai

 27   fait ces visites d'inspection financées par la commission des droits de

 28   l'homme, et après ça je suis rentrée en Finlande. Donc je n'étais pas sur

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  1   place pour prendre des mesures, j'étais un rapporteur et je faisais rapport

  2   de ce que j'avais vu.

  3   Q.  Merci. Avant de venir déposer à La Haye, avez-vous rencontré d'autres

  4   personnes que des représentants du bureau du Procureur à propos de votre

  5   déposition d'aujourd'hui ?

  6   R.  Bien entendu, lorsque j'ai été appelée la première fois en 2005, j'ai

  7   parlé avec un agent chargé de ma sécurité qui travaille désormais comme

  8   chef de la sécurité dans une entreprise privée. Nous en avons parlé, et

  9   nous avons comparé les impressions que nous avions recueillies à l'époque.

 10   Q.  Comment s'appelait-il ?

 11   R.  Il s'appelle Heljo Laukkala, vous avez son nom dans les documents.

 12   Q.  Avez-vous parlé à quelqu'un d'autre ?

 13   R.  Bien sûr, j'ai parlé de cela avec ma famille, avec mes enfants et mes

 14   petits-enfants, pas avec mon arrière-petite-fille parce qu'elle était trop

 15   petite à l'époque.

 16   Q.  Pendant le contre-interrogatoire de Me Misetic, vous avez eu une

 17   discussion sur ce qui s'était passé au Kosovo. J'ai une question à vous

 18   poser à ce propos. Un rapport vous a été lu ou une partie de ce rapport qui

 19   disait que la criminalité avait baissé de 50 meurtres par semaine jusqu'à

 20   peu près trois par semaine au cours d'une période de six mois. Est-ce que

 21   vous saviez qu'à ce moment-là les autorités chargées du maintien de la paix

 22   et de l'ordre public au Kosovo c'était la MINUK et la KFOR ?

 23   R.  Bien sûr que je le sais, parce qu'il y a eu des conseils du secrétaire

 24   général qui portaient sur la façon de renforcer les actions de la MUNIK.

 25   Bien sûr, après toutes ces années, j'ai fait un rapport sur le Kosovo et je

 26   sais bien effectivement ce qui s'est passé là-bas.

 27   Q.  Vous savez effectivement que la MUNIK et la KFOR étaient fort bien

 28   équipées, bien formées ? 

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  1   R.  Oui, parce que j'ai été plusieurs fois avec le contingent finlandais.

  2   Q.  Pendant l'interrogatoire principal vous avez fait part de vos

  3   impressions quant à savoir si le président Tudjman s'intéressait à la

  4   détresse des Serbes qui voulaient rentrer en Croatie, et vous avez pensé

  5   qu'il ne s'intéressait pas à la question.

  6   J'ai une question à vous poser à ce propos quant à savoir si le

  7   président Tudjman s'intéressait ou pas au retour des Serbes en Croatie, ils

  8   sont rentrés de toute façon. En tout cas, il y a 41 000 Serbes en tout qui

  9   sont rentrés à partir de janvier 2000, n'est-ce pas ?

 10   R.  Je pense que ce qui s'est passé en 1995 ne peut pas se comparer à ce

 11   qui s'est passé jusqu'en 2000, car à cette époque-là quand je faisais

 12   rapport il n'y avait pas une volonté très claire qui se manifestait afin

 13   que les Serbes reviennent en Croatie. Nous devons tous être reconnaissants.

 14   C'est peut-être que mon rapport sur la situation après l'opération Tempête

 15   en Croatie a peut-être de façon minime, peut-être, mais a quand même

 16   contribué à ce que les autorités réagissent.

 17   Q.  Je comprends.

 18   R.  Parce que, bien sûr, qu'il a dû y avoir des retours au pays jusqu'en

 19   2000, et ça n'a rien à voir avec le climat qui régnait en 1995.

 20   Q.  Mais que vous conviendrez que la question de savoir si le président

 21   Tudjman ne s'intéressait ou pas au retour des Serbes, ils sont quand même

 22   rentrés au nombre de 41 000 ?

 23   R.  Oui, sur 180 000.

 24   Q.  Savez-vous combien de Serbes il y a aujourd'hui en

 25   Croatie ?

 26   R.  Je ne sais pas, aucune idée, car maintenant je travaille dans un

 27   domaine tout à fait différent, en tout cas dans une région tout à fait

 28   autre du monde.

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  1   Q.  Est-ce que vous seriez surprise d'apprendre que depuis 1995 il y a

  2   quelque 120 000 Serbes qui sont rentrés en Croatie ?

  3   R.  Je suis très contente d'entendre ce que vous dites.

  4   Q.  Je voudrais maintenant consulter quelques documents avec vous.

  5   Manifestement, vous avez écrit plusieurs rapports --

  6   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Sur quoi s'est appuyé le conseil pour

  7   poser cette question ?

  8   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Nous avons eu la déposition de M.

  9   Galbraith et c'était la pièce qui porte la cote D420.

 10   Q.  On a longuement discuté, Madame Rehn, de diverses choses, par exemple,

 11   d'une amnistie à l'intention des personnes qui avaient participé au conflit

 12   en Croatie, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Est-ce que vous saviez qu'à partir d'octobre 1996 jusqu'en juin 1998 il

 15   y a eu près de 19 000 personnes qui ont bénéficié d'une amnistie de la part

 16   du président Tudjman ?

 17   R.  Je n'avais pas ces chiffres. Rappelez-vous que moi aussi j'ai quitté ce

 18   poste du rapporteur spécial fin 1997 lorsque je suis allée en Bosnie-

 19   Herzégovine.

 20   Q.  Et saviez-vous qu'il y a eu des décrets adoptés par le président

 21   Tudjman en faveur d'amnistie avant l'opération Tempête ?

 22   R.  Non, je n'ai pas connaissance de ces documents.

 23   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Pour ne pas perdre de temps, Monsieur le

 24   Président, et ne pas aborder ces documents, nous préparons des conclusions

 25   juridiques que nous présenterons en prétoire à propos de l'amnistie. Ça

 26   représente beaucoup de documents et il faut un certain temps pour en faire

 27   la traduction, mais je voulais dire, nous allons faire une proposition de

 28   versement ici même au prétoire.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kuzmanovic, bien sûr, il faudra

  2   donner la parole à l'Accusation pour voir si elle s'y oppose, mais je

  3   constate que nous passons beaucoup de temps sur la question de l'amnistie

  4   ici. Alors que moi, je comprends la déposition de Mme Rehn comme disant

  5   que, bien sûr, si des Serbes voulaient rentrer et s'ils craignaient qu'ils

  6   soient l'objet d'enquêtes, d'instructions ou de poursuites, parce qu'ils

  7   auraient été membres des forces armées de l'ARSK, que c'était là une des

  8   préoccupations, mais qu'il y en avait une autre; c'est que ceux qui

  9   n'auraient pas bénéficié d'une amnistie et qu'on soupçonnait d'avoir commis

 10   des crimes de guerre, que ce soit des Serbes ou des Croates, bien, qu'ils

 11   allaient être poursuivis. Et je relève qu'on a en fait déplacé l'axe

 12   principal des questions, en tout cas telles que moi, je le voyais.

 13   Mme Rehn se préoccupait surtout qu'il n'y ait pas d'enquêtes,

 14   d'instructions ni de poursuites diligentées contre des Croates qui étaient

 15   soupçonnés d'avoir commis des crimes de guerre, et que c'était là une

 16   préoccupation un peu différente de celle qu'avaient les Serbes qui

 17   craignaient d'être poursuivis, parce qu'ils avaient été loyaux à leur

 18   propre gouvernement ou n'avaient pas été dans les rangs de la bonne armée,

 19   que c'était là une préoccupation quelque peu différente.

 20   Les raisons de ces craintes, de cette peur de rentrer, ici en

 21   l'espèce, ne semblent pas tout à fait être la même chose que cette autre

 22   problématique qui est de savoir si on a déployé suffisamment d'efforts, si

 23   on en a fait assez pour enquêter et poursuivre des personnes soupçonnées

 24   d'avoir commis des crimes de guerre.

 25   M. MISETIC : [interprétation] Nous en avons parlé hier soir puisque ceci a

 26   été évoqué au prétoire hier, et nous ne voyons pas du tout quelle est la

 27   nature de la question, et c'est toujours cru aujourd'hui.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, je vais poser la question à Mme

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  1   Rehn. Est-ce que pour vous ce sont deux problèmes distincts, séparés ?

  2   Pourriez-vous nous dire quelle est la préoccupation qui vous gêne le plus ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est que, ici, dans le cas précis de

  4   l'opération Tempête, je voulais savoir ce qui était arrivé à ceux qui

  5   étaient partis. Mon inquiétude - et je n'avais pas de mandat pour parler de

  6   ce qui s'était passé avant, de bien ou de mal, avant de ce que les Serbes

  7   avaient fait à la Croatie, lorsqu'ils avaient pris le contrôle dans cette

  8   région de la Krajina - moi, je tenais à savoir ce qui était arrivé aux

  9   Serbes pendant l'opération Tempête lorsqu'ils avaient peur de rester. Peut-

 10   être qu'ils auraient pu rester, mais ils avaient peur, ils craignaient pour

 11   leurs vies, ils ont donc pris la fuite vers des pays voisins. Ils étaient

 12   au nombre de 180 000, on ne saura jamais exactement combien ils étaient. Et

 13   je voulais savoir quelles étaient les peurs qu'ils avaient à l'idée de

 14   rentrer chez eux. Avaient-ils peur de leurs voisins proches, mais avaient-

 15   ils aussi des craintes pour leur sécurité ?

 16   Puis cette question de la loi portant sur l'amnistie, elle n'a pas été

 17   comprise. Les Serbes n'ont pas compris qui était touché par l'amnistie et

 18   qu'ils n'étaient pas -- ça ce n'était pas clair, donc effectivement il

 19   s'agit de deux choses différentes. Vous avez tout à fait raison, Monsieur

 20   le Juge. Mais si ceci sème la confusion, et bien la confusion règne

 21   partout.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic, je ne pense pas qu'il

 23   convienne de procéder à un échange entre nous maintenant.

 24   M. MISETIC : [interprétation] Le problème c'est que puisque le témoin est

 25   encore ici, s'il y avait un problème on pourrait profiter de sa présence

 26   pour tirer le problème au clair. Peut-être pourrons-nous en discuter avant

 27   la prochaine pause de façon à ce qu'elle ne soit pas présente dans ce

 28   prétoire. Parce que, ici, je pense qu'on parle de torchons et de

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  1   serviettes. Nous ne voulons pas savoir quels étaient les motifs du témoin

  2   ou de la communauté internationale, c'est qu'il y a eu une loi générale

  3   d'amnistie qui avait été adoptée.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais parlons-en plus tard en l'absence

  5   du témoin. Je ne pense pas vous avoir mal compris. Vous dites que c'est

  6   comme si c'étaient des torchons et des serviettes, peut-être oui, mais moi,

  7   je pensais que le témoin parlait, elle, des torchons, et que vous, vous

  8   êtes passé aux serviettes. Enfin, c'est là mon inquiétude à moi.

  9   Peut-être que nous aurons plus tard l'occasion de voir quelle est la nature

 10   de mon problème, mais nous le ferons en l'absence du témoin.

 11   M. MISETIC : [interprétation] Fort bien.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez, Maître Kuzmanovic.

 13   M. KUZMANOVIC : [interprétation] La seule chose que j'aimerais ajouter

 14   c'est que nous parlons ici de façon abstraite encore. Ces propositions

 15   seront plus claires lorsque nous les déposerons. Nous allons le faire le

 16   plus vite possible.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pas de problème. Vous aurez sans doute

 18   déjà constaté que le témoin a souligné fort bien que même si elle ne

 19   connaît pas le côté abstrait, elle veut voir aussi des aspects concrets.

 20   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Puis le témoin a dit qu'elle n'était pas

 21   juriste. C'est la raison pour laquelle je voulais simplement vous

 22   l'indiquer.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Tant mieux pour elle sans doute.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je n'aurais pas le temps de tout étudier

 25   maintenant pour être vraiment tout à fait au courant.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et j'espère que nous n'allons pas avoir

 27   tous ces documents dans la demi-heure qui vient.

 28   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Non, pas du tout.

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  1   Prenons la pièce P39 [comme interprété].

  2   Q.  Ce document va bientôt s'afficher, mais c'est votre rapport du 7

  3   novembre 1995, rapport que vous présentez aux Nations Unies. J'ai quelques

  4   questions à vous poser à propos de ce document.

  5   N'est-il pas vrai que chaque fois que vous présentiez un rapport concernant

  6   la Croatie pendant la durée de mandat, la Croatie vous a envoyé une réponse

  7   écrite ?

  8   R.  Oui, tout à fait. Je l'ai déjà dit. C'était là une des raisons pour

  9   lesquelles nous faisons ces rapports, nous voulions obtenir des

 10   gouvernements de l'ex-Yougoslavie une réaction positive.

 11   Q.  Conviendrez-vous avec moi, qu'en tout cas, en ce qui vous concerne, le

 12   gouvernement croate a réagi de façon positive à vos rapports ?

 13   R.  Oui, tout à fait. Et je les en ai d'ailleurs grandement félicités dans

 14   mes rapports, je leur savais gré de leur coopération.

 15   Q.  Page six du rapport. Dites-moi si vous avez cette page sous les yeux.

 16   Si vous avez une copie sur support papier, Madame Rehn, c'est peut-être

 17   plus facile de la consulter, puisque ça dure un certain temps si on voit

 18   les pages à l'écran.

 19   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] C'est à l'intercalaire 5.

 20   M. KUZMANOVIC : [aucune interprétation]

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis prête.

 22   M. KUZMANOVIC : [interprétation]

 23   Q.  Page 6, paragraphe 13. Dans votre premier rapport, vous donnez un

 24   aperçu de ce qui s'est passé dans les anciens secteurs nord et sud avant

 25   l'opération Tempête, n'est-ce pas, pour placer le contexte historique ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Milieu de ce paragraphe 13, je lis : "Tout d'abord, presque toute la

 28   population croate a été forcée de partir, de quitter les deux anciens

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  1   secteurs à la suite de violations graves des droits de l'homme commises à

  2   leur encontre par les autorités serbes installées de facto. Deuxièmement,

  3   des réfugiés serbes et des personnes déplacées venant d'autres parties de

  4   la Croatie sont venus s'installer dans ces territoires.

  5   En dépit de tous les efforts faits ni la force de protection des Nations

  6   Unies, la FORPRONU, en Yougoslavie, ni l'opération de restauration de la

  7   confiance des Nations Unies, l'ONURC, n'a été à même de permettre le retour

  8   des réfugiés et personnes déplacées croates sur ces territoires, et tout

  9   comme une présence internationale n'a pas permis de fournir une protection

 10   efficace à la population non-serbe qui restait dans cette zone."

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est vous qui lisez toujours tellement

 12   lent, ce qui veut dire que les interprètes parviennent à vous suivre.

 13   M. KUZMANOVIC : [interprétation]

 14   Q.  Le gouvernement croate a répondu dans le document P684. Je veux que

 15   nous voyions ce document, le document P684.

 16   Est-ce que Mme le Procureur pourrait me donner l'intercalaire, ce qui

 17   permettrait au témoin de lire.

 18   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Vous parlez de P640 ?

 19   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Oui. J'avais dit 684, mais je pense que

 20   c'est 640 -- ou c'est plutôt 648. Oui, je suis peu dyslexique. Excusez-moi.

 21   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] C'est l'intercalaire 16.

 22   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 23   Mme MAHINDARATNE : [interprétation]

 24   M. KUZMANOVIC : [interprétation]

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 26   M. KUZMANOVIC : [interprétation]

 27   Q.  Prenez le sixième paragraphe, page 2, me semble-t-il. Après vous avoir

 28   entendue, nous comprenons mieux que vous êtes surtout intéressée à ce qui

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  1   s'est passé pendant et après l'opération Tempête, mais le gouvernement

  2   croate répond ceci. Il dit qu'il y avait plus de 600 civils qui avaient été

  3   tués par des paramilitaires serbes pendant le mandat FORPRONU au moment où

  4   il n'y avait pratiquement sur le plan technique pas de guerre.

  5   R.  Oui, c'est ce qui est dit ici. Et n'oubliez pas non plus que le

  6   rapporteur spécialisé c'est Tadeusz Mazowiecki, et personne d'autre, pas

  7   Mme Rehn.

  8   Q.  Oui, je l'avais compris. Revenons à votre rapport à vous. Je vais

  9   essayer de ne pas trop sauter d'un document à un autre, mais nous avons ici

 10   une réponse à votre rapport. Votre rapport, c'était le P639, et nous avons

 11   ici le document P648, qui est une réponse du gouvernement croate.

 12   Maintenant, prenons la page 8, paragraphe 22. On discute des informations

 13   fournies par les autorités croates le 30 août, information indiquant que

 14   durant l'opération Tempête, 526 Serbes ont été tués dont 116 étaient des

 15   civils; 211 soldats et policiers croates ainsi que 42 civils croates ont

 16   été tués; 907 personnes ont été placées en détention pour interrogatoire,

 17   et 704 personnes sont toujours en détention sur ce nombre.

 18   Nous avons une comparaison qui me pousse à vous poser cette question : est-

 19   ce que vous aviez les informations qui auraient tendance à réfuter ce que

 20   disent les autorités croates à propos du nombre des personnes tuées pendant

 21   l'opération croate, comme on l'a au paragraphe 22 ?

 22   R.  Je ne peux pas vous dire du tout si c'est faux ou juste parce que ce

 23   sont des informations que nous avons reçues. Je n'ai pas les chiffres au

 24   bout des doigts. Ce qui était intéressant ici, c'est que nous avons soulevé

 25   ces questions sans jamais recevoir de réponse définitive de la part des

 26   autorités croates.

 27   Q.  Si je vous indique ceci c'est que pendant ce mandat de la FORPRONU de

 28   l'ONURC, c'est qu'il n'y a pas eu de combat, mais il y a eu quand même

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  1   beaucoup de civils tués. Et pendant les opérations militaires pendant

  2   l'occupation serbe, et qu'en combat armé, comme le dit le paragraphe 22, en

  3   tout cas du côté croate, moins de personnes ont été tuées pendant cette

  4   période pendant la guerre.

  5   Je vous demande ceci : s'agissant du nombre de personnes tuées, vous avez

  6   dit, je pense, ne pas avoir d'autres informations à votre disposition pour

  7   confirmer ou réfuter ce nombre.

  8   R. Pendant le temps où j'étais là pour ce qui est de ce qui s'est passé

  9   avant, là je n'ai pas demandé à obtenir ces chiffres.

 10   Q.  Merci.

 11   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Pourrions-nous revoir le document P648,

 12   s'il vous plaît.

 13   Q.  La première page du document P648 est en fait une lettre de

 14   couverture de transmission. Le premier ministre adjoint, ministre des

 15   Affaires étrangères, M. Mate Granic. Est-ce que vous avez eu l'occasion de

 16   rencontrer M. Granic, Madame Rehn ?

 17   R.  Nous avons rendu compte de plusieurs réunions avec M. Granic.

 18   Q.  Oui. Je voulais simplement dire -- vous saviez qui c'était, n'est-ce

 19   pas ?

 20   R.  Oui, absolument. Je l'ai rencontré plusieurs fois.

 21   Q.  L'avant-dernier paragraphe de sa lettre indique : "Je me prévaux de la

 22   possibilité de réaffirmer l'engagement constant de mon gouvernement à

 23   l'égard du développement général du système démocratique, de la primauté du

 24   droit et des droits humains en Croatie."

 25   Ayant eu l'occasion de rencontrer M. Granic et de lui parler, est-ce que

 26   vous pensez qu'effectivement c'était ses sentiments quand il a écrit cela ?

 27   R.  M. Granic avait une très bonne équipe de collaborateurs autour de lui,

 28   et je me rappelle très bien que Mme Simunovic, en particulier, était très

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  1   attachée aux droits humains, c'était son assistante pour la question des

  2   droits humains. Je crois qu'il s'efforçait et voulait faire que les choses

  3   se passent comme il fallait. Je ne suis pas sûre qu'il pouvait réaliser

  4   tout ce qu'il promettait.

  5   Mais comme je l'ai dit, nous nous sommes réunis plusieurs fois, il était

  6   toujours disponible lorsque j'ai demandé qu'on se réunisse et c'est là une

  7   situation que j'ai beaucoup appréciée. Nous avions un véritable dialogue.

  8   Q.  Est-ce qu'il vous a semblé, de votre point de vue en traitant avec le

  9   Dr Granic, que le gouvernement croate, par son ministre des Affaires

 10   étrangères, était engagé à essayer d'améliorer les choses et faire qu'elles

 11   soient correctes ?

 12   R.  J'ai dit plus tôt et je dis à nouveau que lorsque j'ai insisté pour que

 13   l'on renouvelle dans le système quelque chose comme l'ombudsman, ça a

 14   immédiatement été accepté et on a fait progresser la situation. Il y a eu

 15   également d'autres mesures qui ont été prises et je dois dire que la façon

 16   dont ils ont réagi à mes rapports était toujours positive, apportait

 17   quelque chose de nouveau par rapport à ce qui était dit dans mes rapports.

 18   Vous devez vous rappeler que quelqu'un qui rend compte sur les droits

 19   humains doit être totalement objectif et neutre et regarder simplement si

 20   vraiment les choses se passent comme cela.

 21   Q.  C'est entendu. Mais avec ça, vous avez besoin de déterminer l'intention

 22   de quelqu'un, ce qu'il essaie de faire aussi, n'est-ce pas ?

 23   R.  Excusez-moi. Pourriez-vous répéter ce que vous avez dit ?

 24   Q.  Oui. Lorsque vous regardez et que vous évaluez ce que fait un pays,

 25   vous essayez de voir quelle est l'intention des personnes qui essaient

 26   d'accomplir ces objectifs, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui, bien sûr, je regarde l'intention, mais encore plus les résultats.

 28   Q.  Bien sûr. Mais comme nous pouvons le dire, tout au moins en ce qui

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  1   concerne le retour des réfugiés dont nous en avons entendu parler, les

  2   résultats ont été importants avec le temps, n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui. Mais pas pendant la période allant de 1995 à 1997.

  4   Q.  [inaudible]

  5   R.  Et c'est cette période-là que je couvrais.

  6   Q.  Compris. Le paragraphe 10 de votre -- ou plus exactement de la réponse

  7   de M. Granic -- en fait, excusez-moi, pas le paragraphe 10. Le paragraphe

  8   16.

  9   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Là encore pour le compte rendu, il s'agit

 10   du P648.

 11   Q.  Au paragraphe 17, M. Granic donne des renseignements statistiques

 12   concernant les dommages qu'a subis la Croatie pendant le guerre et

 13   l'occupation, et aussi parle dans une certaine mesure des incendies qui ont

 14   eu lieu sur le territoire après l'opération Tempête.

 15   Alors, à ce moment-là tout au moins, il n'y a pas de chiffre précis, vous

 16   avez parlé de certains chiffres concernant le nombre de maisons qui avaient

 17   été détruites dans le territoire. Mais il n'y a pas de chiffre précis que

 18   vous puissiez nous donner pour savoir combien de domiciles ont été détruits

 19   à la suite soit d'incendies criminels, soit de comportement des personnes

 20   après la guerre ?

 21   R.  Oui. Nous avons toujours cette estimation de 5 000 dont nous avons déjà

 22   parlé.

 23   Q.  Vous voyez ici que le gouvernement croate cite un chiffre différent,

 24   qui, je le suppose, vous trouverez que c'est un chiffre relativement bas, à

 25   savoir qu'il y avait certaines maisons qui ont  pris feu comme conséquence

 26   des opérations de guerre, tout au moins à cette date -- il y en a 715 qui

 27   étaient en partie ou totalement détruites, mais qui auraient été incendiées

 28   volontairement. A l'évidence, il y a une grande différence entre 715 et 5

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  1   000, mais est-ce que vous seriez d'accord avec moi qu'un chiffre précis

  2   devrait être quelque part entre les deux ?

  3   R.  C'est possible, c'est très possible. Mais je ne veux pas prendre de

  4   point de vue bien arrêté sur ce point, car il était impossible pour moi de

  5   vérifier sur place, comme c'est maintenant le cas, pour le savoir quand on

  6   a traité de ces questions.

  7   Q.  Bien. Madame Rehn, quand vous faisiez votre tournée, est-ce que vous

  8   avez pris des photographies ou quoi que ce soit de ce que vous avez vu ?

  9   R.  Il y a beaucoup de photographies.

 10   Q.  Que vous avez prises ?

 11   R.  Ce sont des photos prises à titre privé, oui, en particulier le

 12   commandant qui s'occupait de ma sécurité a pris des photos.

 13   Q.  Est-ce que vous savez si oui ou non c'était une politique de votre part

 14   en tant que rapporteur spécial de prendre des photographies de ces zones

 15   dans lesquelles vous aviez été envoyée pour les utiliser à des fins

 16   officielles ?

 17   R.  Ces photos sont prises à titre tout à fait privé, et elles n'ont pas

 18   été utilisées pour d'autre but. C'est de la documentation concernant une

 19   période de ma vie.

 20   Q.  Je comprends ça, Madame Rehn. Je vous demandais simplement s'il y avait

 21   une politique officielle sur le point de savoir si oui ou non un rapporteur

 22   spécial devrait photographier --

 23   R.  Non.

 24   Q.  Bien.

 25   R.  Certainement pas, tout au moins on ne m'a rien dit à ce sujet.

 26   Simplement à cause de la liberté dont jouit le rapporteur spécial, il y a

 27   eu vraiment des cas comme en Bosnie-Herzégovine où je suis allée contre les

 28   ordres explicites de la mission des Nations Unies d'aller dans un endroit

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  1   qui était dangereux et j'ai même des photos de là-bas.

  2   Q.  Madame Rehn, seriez-vous d'accord avec moi que tout au moins au cours

  3   de la période que vous avez passée en Croatie, personne ne vous a empêchée

  4   d'aller voir ce que vous vouliez vraiment voir ?

  5   R.  Je dois dire que c'était un vrai luxe d'être rapporteur spécial sur les

  6   droits humains dans l'ensemble de ce territoire, parce que même en Serbie-

  7   et-Monténégro, j'ai eu le droit d'aller où je voulais. J'ai obtenu cette

  8   autorisation directement du président Milosevic, et c'est quelque chose que

  9   mon prédécesseur n'avait pas.

 10   Q.  Bien sûr, je comprends cela. Je vous ai posé ma question plus

 11   précisément concernant la Croatie.

 12   R.  Oui, bien sûr. Je voulais simplement dire clairement qu'il n'y avait

 13   pas de limitations ou de limites pour moi dans le territoire correspondant

 14   à mon mandat.

 15   Q.  Si vous jetez un coup d'eau, Madame Rehn, au paragraphe 18 de la pièce

 16   P648, là encore, M. Granic dans sa réponse à votre rapport fournit des

 17   renseignements statistiques concernant des actes criminels de vol.

 18   Et il note dans la dernière phrase : "…certaines données du rapporteur

 19   spécial sont impossibles à vérifier parce qu'elles sont incomplètes et

 20   vagues."

 21   Serait-il juste de dire que cette observation concernant votre rapport du

 22   point de vue de la vérification est exacte ou non ?

 23   R.  Il y a eu des cas, comme le cas de Grubori, où il y a eu des

 24   destructions de beaucoup de choses, parce c'était très clair du point de

 25   vue de la vérification. Nous avons échangé de la correspondance, et je n'ai

 26   jamais pu obtenir ni obtenir jusqu'aujourd'hui une explication quelconque

 27   de qui étaient les auteurs. Donc ceci portait un petit peu atteinte à la

 28   compétence ou à l'exactitude --

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  1   Q.  Oui, je comprends.

  2   R.  -- de ce qu'il dit.

  3   Q.  Je comprends votre réponse. Mais ma question avait trait aux actes

  4   criminels, notamment de vols aggravés, qui sont notés au paragraphe 18, et

  5   rien d'autre. Il est vrai, n'est-ce pas, qu'en ce qui concerne les 1 054

  6   actes criminels de vol qui ont été enregistrés dans les territoires

  7   libérés, il y avait certaines données du reporteur spécial qui étaient

  8   impossibles à vérifier parce qu'elles étaient incomplètes et vagues; c'est

  9   exact ?

 10   R.  C'est tout à fait possible, parce que comme je l'ai dit si souvent

 11   avant, ces données ont été recueillies par mon personnel à l'occasion des

 12   discussions avec d'autres organes de l'ONU et d'autres organes avec ce

 13   qu'ils ont appris eux-mêmes, et il est possible que dans certains cas il

 14   ait été difficile de pouvoir obtenir des confirmations de l'administration.

 15   Q.  Si vous allez à la page suivante, Madame Rehn -- excusez-moi.

 16   R.  Vous pouvez me dire ce que vous voulez.

 17   Q.  Bien. Paragraphe 22, il est question là du fait que M. Granic, dans sa

 18   réponse, aurait dit qu'il y a quelque 3 millions de mines terrestres qui

 19   sont éparpillées dans toute la Croatie.

 20   Je veux dire, c'est un obstacle important dans de nombreux cas pour

 21   permettre à une population de revenir, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui. C'est quelque chose que j'ai pu ressentir moi-même lorsque je me

 23   déplaçais.

 24   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Pourrions-nous maintenant voir la pièce

 25   P650.

 26   Q.  Madame Rehn, voici votre rapport de décembre 1995. C'est votre deuxième

 27   rapport, n'est-ce pas ?

 28   R.  Ça doit être ça, oui.

Page 6665

  1   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Monsieur le Président, pour le compte

  2   rendu, bien qu'il ait été marqué en tant que P650, il s'agit d'un document

  3   qui est une pièce qui a déjà été présentée pour versement au dossier sous

  4   la cote P477, et ceci a été corrigé ce matin. Donc le numéro de pièce est

  5   le P477.

  6   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Je vous remercie pour cela. Je vous suis

  7   reconnaissant. Comme je l'ai dit, les chiffres ne sont pas mon fort.

  8   Q.  Pourrions-nous maintenant aller à la page --

  9   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Vous pouvez le retrouver, Madame Rehn,

 10   à l'intercalaire 19.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 12   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Merci beaucoup, Madame le Procureur.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, maintenant je l'ai.

 14   M. KUZMANOVIC : [interprétation]

 15   Q.  Merci. Pourriez-vous maintenant regarder la page 5, et au paragraphe

 16   18, en fait vous citez la réponse de M. Granic dans le rapport proprement

 17   dit, n'est-ce pas ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Il y avait des renseignements complémentaires que vous notez au

 20   paragraphe 19, qui indique : "Le 16 novembre," je regarde la quatrième

 21   ligne et la cinquième ligne du paragraphe 19.

 22   "Le 16 novembre, un fonctionnaire supérieur de la police croate a rendu

 23   compte aux Nations Unies que trois soldats croates avaient été arrêtés à

 24   propos de pillage, intimidation, harcèlement de civils dans le secteur. Ces

 25   trois avaient été transférés au quartier général militaire de Karlovac. Les

 26   observateurs des Nations Unies avaient été témoins d'incidents dans

 27   lesquels des biens avaient été confisqués de personnes se livrant au

 28   pillage par des membres de la police croate."

Page 6666

  1   Maintenant, qu'est-ce qui vous a été dit par les observateurs militaires de

  2   l'ONU ? Est-ce que vous pourriez me donner un peu plus de précisions sur ce

  3   que les observateurs de l'ONU ont fait et dont vous parlez ici ?

  4   R.  Non. Je ne peux pas vous dire parce que ça pouvait être d'un organe ou

  5   d'un autre. Toutes les organisations différentes opéraient sur place, donc

  6   je ne peux pas vous donner un éclaircissement précis sur qui c'était

  7   exactement.

  8   Q.  Paragraphe 20, vous avez noté, à la troisième ligne du bas, en allant

  9   vers la deuxième ligne du bas : "Les autorités croates ont fait des efforts

 10   pour confisquer et rendre des propriétés, mais il semble que ceci ait été

 11   insuffisant pour régler le problème compte tenu de sa magnitude."

 12   Pourriez-vous nous donner une indication de ce que vous vouliez dire par le

 13   fait que ça avait été insuffisant ?

 14   R.  Au paragraphe précédent, il est question du fait que des biens avaient

 15   été confisqués des mains de personnes se livrant au pillage par des membres

 16   de la police croate, mais rien de plus n'a eu lieu à ce moment-là; et si ma

 17   mémoire me sert correctement, ce qui est arrivé à ces biens en fin de

 18   compte était très peu clair pour nos observateurs.

 19   Q.  Bien. Donc vous parliez là d'un cas précis, et pas de quelque chose

 20   général ?

 21   R.  Non, je pense que c'est tout à fait général.

 22   Q.  Bien. Je vous remercie.

 23   Pourrions-nous aller maintenant à la page 10 de ce rapport; regardez le

 24   paragraphe 41, s'il vous plaît.

 25   R.  Oui.

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 19   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Pages 6669-6670 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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 23   [Audience publique]

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

 25   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je suis sur

 26   le point de commencer sur un autre thème, et je ne sais pas si le moment ne

 27   serait pas bon pour suspendre l'audience, c'est peut-être un peu tôt.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous nous donner une

Page 6672

  1   indication du temps dont vous avez encore besoin de façon à ce que nous

  2   puissions nous-mêmes voir si nous devrions suspendre la séance maintenant

  3   ou dans dix minutes.

  4   M. KUZMANOVIC : [interprétation] J'aurais besoin d'environ 20 minutes

  5   à une demi-heure tout au plus.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Mahindaratne, de combien de

  7   temps avez-vous besoin ?

  8   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai besoin de

  9   15 à 20 minutes pour le moment.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 11   [La Chambre de première instance se concerte]

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous nous aviez donné une estimation du

 13   temps nécessaire hier, Monsieur Kuzmanovic, et c'était --

 14   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Je pensais que c'était entre une heure et

 15   une heure et demie si je ne me trompe.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'une heure à une heure et demie.

 17   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Je sais que --

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Excusez-moi.

 19   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Je sais que vous savez combien de temps

 20   j'ai déjà utilisé, donc je ne voudrais pas --

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je vais vérifier ce point, bien

 22   entendu nous souhaiterions conclure le --

 23   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Mais certainement.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- la déposition de Mme Rehn, enfin ça

 25   dépend de savoir combien de questions vous auriez encore à poser.

 26   Donc il n'est pas nécessaire pour le moment de poursuivre, parce que vous

 27   n'auriez pas terminé avant la suspension d'audience. Toutefois, Maître

 28   Misetic, je vois que vous demandez la parole. Vous avez une autre question

Page 6673

  1   à l'esprit.

  2   M. MISETIC : [interprétation] Oui. Avant que le témoin ne parte, il y a une

  3   question qui doit être posée concernant un problème.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Donc nous allons tout d'abord

  5   demander à l'huissier d'escorter Mme Rehn hors de la salle d'audience et

  6   nous allons passer deux ou trois minutes sur cette question, puis nous

  7   reprendrons dans environ 20 minutes, et après cela, Maître Kuzmanovic, vous

  8   serez très encouragé à voir si vous pouvez terminer en 25 minutes et pas

  9   plus, s'il vous plaît.

 10   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Certainement, Monsieur le Président, j'ai

 11   compris.

 12   [Le témoin quitte la barre]

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic, nous parlons de cette

 14   question en l'absence -- en ce qui me concerne, je vois qu'il y a deux

 15   questions qui se posent pour le contre-interrogatoire.

 16   M. MISETIC : [interprétation] C'était pour clarifier certains points, qui,

 17   pour moi, sont confus.

 18   A la page 18, lignes 3 à 25 du compte rendu d'hier, Mme Mahindaratne a

 19   essayé de présenter au témoin la question de savoir si l'amnistie générale

 20   était censée couvrir seulement les actes de rébellion ou tous les crimes

 21   commis qui avaient un rapport avec le conflit armé, et le but de mon

 22   contre-interrogatoire était de démontrer, par le biais du témoin, que cet

 23   acte avait pour but d'être aussi large que possible, de couvrir tous les

 24   crimes, le nombre le plus large possible de crimes. Le fait qu'à la suite

 25   il y a eu cette question de motif politique qui était à la base pour la

 26   communauté internationale, était de voir si on pouvait avoir une couverture

 27   aussi vaste que possible. C'était mon intention lors du contre-

 28   interrogatoire, le point principal était que c'était l'intention d'avoir

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  1   une loi qui ait une portée aussi vaste que possible. 

  2   Les autres questions ont maintenant été présentées lorsque nous avons

  3   parlé des torchons et des serviettes, je pense que c'étaient des torchons,

  4   des torchons et des serviettes, des serviettes sur la base des questions

  5   que j'ai évoquées dans mon contre-interrogatoire. Les autres questions que

  6   la Chambre de première instance a eues, moi, je ne suis pas tout à fait au

  7   clair de savoir si la communication n'a pas donné lieu à des malentendus et

  8   j'ai l'intention de montrer cela, les questions qui ont été évoquées.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il se peut qu'il y ait eu une confusion

 10   lors de la séquence de l'interrogatoire. Je pensais que la loi d'amnistie

 11   suivait expressément les préoccupations qu'il n'y ait pas de poursuites

 12   pour les crimes de guerre, maintenant il est clair que les crimes de guerre

 13   - à ce que je comprends comme étant des crimes de guerre, des crimes contre

 14   l'humanité, des crimes internationaux - étaient exclus de la loi d'amnistie

 15   en tout état de cause. Dans quelle mesure est-ce que les vols et autres

 16   crimes ou délits de droits communs étaient exclus, ça c'est, bien entendu,

 17   une autre question.

 18   Mais je pense que le témoin a exprimé certaines préoccupations concernant

 19   des crimes internationaux comme ne devant pas faire l'objet de poursuite,

 20   et que cette question était de savoir exactement ce que couvrait

 21   l'amnistie. Ça c'est un autre point. Dans toute la mesure où ceci est

 22   clair, je n'ai pas d'autres problèmes.

 23   M. MISETIC : [interprétation] Je suis d'accord qu'aussi longtemps que ceci

 24   est clair, nous pourrons parler de cette question parce que le point

 25   concernant les crimes internationaux dans ce contexte est également un

 26   point qui devra être développé par la suite au cours du procès, et pour ce

 27   qui est du classement de ceci, de savoir qui dans le système croate était

 28   responsable de prendre la décision sur le point de savoir si quelque chose

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  1   était un crime international plutôt qu'un crime de caractère national.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

  3   M. MISETIC : [interprétation] Il y a toutes ces questions qu'il faudra

  4   développer.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et qui doit être poursuivi pour des

  6   crimes qui auraient été commis, dans quel contexte et dans quelle période.

  7   M. MISETIC : [interprétation] C'est exact. C'est exact, Monsieur le

  8   Président.

  9   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Monsieur le Président, si je pouvais

 10   simplement expliquer les raisons pour lesquelles j'ai exploré cette

 11   question avec le témoin c'était basé sur la présentation qui avait été

 12   faite directement par la Défense. Nous avons été alertés sur ces arguments

 13   et c'est la raison pour laquelle j'ai posé des questions au témoin sur ce

 14   point.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. 

 16   Pour le moment, je ne pense qu'il y ait beaucoup de confusion, même

 17   pas une petite confusion sur ce point. Donc nous pouvons en rester là en ce

 18   qui me concerne pour le moment.

 19   [La Chambre de première instance se concerte]

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En ce qui concerne les membres de la

 21   Chambre, nous allons suspendre la séance et nous reprendrons à une heure

 22   moins dix.

 23   --- L'audience est suspendue à 12 heures 31.

 24   --- L'audience est reprise à 12 heures 54.

 25   [Le témoin vient à la barre]

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kuzmanovic, veuillez poursuivre.

 27   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Merci.

 28   J'aimerais qu'on affiche le document P600. C'est le numéro de la liste 65

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  1   ter 309. Mais je suis quasiment sûr qu'il s'agit de la pièce P600. Peut-

  2   être que M. le Greffier pourrait le vérifiez.

  3   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] C'est à l'intercalaire 3.

  4   M. KUZMANOVIC : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche la deuxième

  5   page.

  6   Q.  Madame Rehn, c'est encore une réponse de la part du ministre Granic et

  7   du gouvernement croate s'agissant de votre rapport au Conseil de sécurité.

  8   Allons deux pages plus loin, à la page 4, nous avons la réponse à la

  9   quatrième page s'agissant des mesures prises contre les personnes et

 10   groupes ayant commis des crimes dans les zones libérées après l'opération

 11   Tempête.

 12   Et à la cinquième page dans ce même chapitre, dans le premier paragraphe.

 13   M. KUZMANOVIC : [interprétation] En bas à droite, il est indiqué que c'est

 14   la page "3" mais en fait c'est la page 5 du document. C'est la cinquième

 15   page du document. Merci.

 16   Q.  Nous avons des données statistiques fournies suite à votre rapport sur

 17   des -- il est dit les procédures judiciaires sont en cours devant les

 18   tribunaux militaires et civils contre 1 005 personnes qui sont accusées

 19   d'avoir commis des crimes pendant ou après l'opération Tempête. Puis il est

 20   fait état des phases dans lesquelles ces procédures se trouvent, où elles

 21   se trouvent -- où elles ont lieu, je veux dire, et également nous avons une

 22   annexe, je ne sais pas si c'est annexé à ce document de la liste 65 ter ou

 23   bien du document de la liste des moyens à charge.

 24   M. KUZMANOVIC : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche la dernière

 25   page à savoir la page 10 de la pièce P600.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kuzmanovic, le document que j'ai

 27   sous les yeux, oui, je vois qu'il y a une erreur.

 28   Veuillez poursuivre.

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  1   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, est-ce qu'il y a

  2   encore une page après cette page que nous voyons maintenant  qui est

  3   annexée ? Oui. Si oui, j'aimerais que l'on l'affiche, s'il vous plaît.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'après ce que je vois c'est un document

  5   qui a 31 pages.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  7   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Dans ce cas-là le document dans sa version

  8   dont je dispose n'est pas intégral. J'aimerais que l'on affiche le document

  9   3D00-1588. Non, excusez-moi, en fait j'aimerais que l'on reste avec le

 10   document qui est déjà affiché.

 11   Donc passons à la page 7.

 12   Q.  Il est fait état du retour des réfugiés et personnes déplacées, il est

 13   dit le 10 janvier 1996, il y avait un peu moins de 3 000 demandes pour le

 14   retour sur un total de 4 500 Serbes qui étaient partis, puis il est décrit

 15   comment ce processus se déroule, qu'il y a tous les jours 50 dossiers qui

 16   sont traités.

 17   Passons maintenant à la huitième page, dans le premier paragraphe, la

 18   quatrième ligne, il est dit, en fait le Dr Granic dit qu'il y a 180 000

 19   personnes déplacées en Croatie même et 192 500 réfugiés qui résident à

 20   l'heure actuelle sur le territoire de la République de Croatie. Donc outre

 21   les dossiers des Serbes qui souhaitent rentrer, ils ont en plus plusieurs

 22   centaines de milliers de personnes déplacées et réfugiés en Croatie, donc

 23   c'est une situation difficile, n'est-ce pas, Madame Rehn ?

 24   R.  Oui. J'ai déjà dit dans mes déclarations que vous devez vous rendre

 25   compte qu'il y avait un grand nombre de réfugiés et personnes déplacées en

 26   Croatie.

 27   Q.  En dépit du fait qu'il y avait des obstacles d'ordre bureaucratique

 28   pour que les réfugiés serbes rentrent, ils avaient déjà de grandes

Page 6678

  1   difficultés par rapport aux gens qui étaient déjà en Croatie, n'est-ce pas

  2   ?

  3   R.  Oui, je l'ai déjà dit.

  4   Q.  Sur la même page, il est dit que le gouvernement croate a annulé le

  5   délai que les Serbes devaient observer pour pouvoir rentrer et regagner

  6   leurs biens. Donc du moins, de ce point de vue,  cet obstacle d'ordre

  7   bureaucratique a été supprimé, n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  [aucune interprétation]

 10   R.  Mais il n'est pas dit combien de ces cas ont été terminés.

 11   Q.  Je veux dire que ce délai a été annulé, qu'il n'y en avait plus, qu'il

 12   a été aboli. Donc à partir de cette date, le 17 janvier 1996, il n'y avait

 13   plus de délai.

 14   Et vous n'avez pas d'informations selon lesquelles ce ne serait pas le cas,

 15   n'est-ce pas ?

 16   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Me Kuzmanovic est en train de déposer

 17   pour les besoins du compte rendu d'audience. Il a dit qu'il a --

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais ce n'est pas qu'il est en

 19   train de déposer. Il émet son opinion personnelle au sujet de l'information

 20   dont il dispose. La Chambre va, bien sûr, ignorer cela et ne va pas le

 21   traiter en tant que déposition, mais même si nous n'avons pas à notre

 22   disposition cette loi, dans sa version du 17 janvier 1996, cela nous aide à

 23   mieux comprendre ce que Me Kuzmanovic est en train de dire, même s'il pose

 24   des questions suggestives au témoin.

 25   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Oui, bien sûr, que je ne le considère pas

 26   comme preuve, mais je pense que cette preuve est déjà versée au dossier. Je

 27   ne pourrais pas vous donner la cote D de ce document, mais je le ferai

 28   avant la fin du jour. On en a déjà parlé lors de la déposition de M.

Page 6679

  1   Galbraith.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Savoir s'il y avait un effet

  3   rétroactif --

  4   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Evidemment.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- s'agissant de l'abolition de ce

  6   délai. Je ne m'en souviens pas précisément pour l'instant.

  7   Maître Kuzmanovic, veuillez poursuivre.

  8   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Merci.

  9   Q.  Pour finir sur ce sujet, Madame Rehn. Vous ne saviez absolument pas

 10   qu'il y avait un délai à part le nouveau délai qui a été fixé suite à cette

 11   loi, n'est-ce pas ?

 12   R.  Dans mes rapports, à plusieurs reprises j'ai parlé de ce délai de 90

 13   jours. Donc il est évident que l'une des choses que j'ai surtout critiquée

 14   s'agissant des autorités croates était justement ce délai de 90 jours.

 15   Q.  Saviez-vous qu'à un moment donné le parlement croate a promulgué une

 16   loi qui avait pour objectif d'abolir ce délai ?

 17   R.  Je ne le sais pas. Mais bien sûr, j'ai eu la réponse du gouvernement

 18   croate et le document que nous avons sous nos yeux est un document qui en

 19   traite. Donc je devais le savoir à l'époque.

 20   Q.  Je vous remercie.

 21   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Passons à la page 10 du même document,

 22   s'il vous plaît.

 23   Q.  Aujourd'hui et hier, nous avons parlé de la loi d'amnistie. Et dans le

 24   premier paragraphe, il est dit que : "Le président Tudjman, en éliminant

 25   les accusations criminelles à l'encontre de 455 personnes d'origine serbe

 26   détenues pendant et tout de suite après l'opération Tempête, le président

 27   Tudjman leur a octroyé le pardon. Il y avait des personnes qui étaient

 28   accusées de crimes devant les cours militaires à Zagreb, Split, Karlovac,

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  1   d'avoir commis la rébellion armée."

  2   Est-ce que cela vous précise la question d'amnistie promulguée par le

  3   président Tudjman le 31 décembre 1995 ?

  4   R.  Bien sûr que j'en étais au courant, mais ce qui m'inquiétait était la

  5   réaction des Serbes qui voulaient rentrer, parce que eux ne comprenaient

  6   pas très bien la situation. Ils ne savaient pas ce qui allait leur arriver

  7   et s'ils allaient être accusés une fois de retour ou pas.

  8   M. KUZMANOVIC : [interprétation] 3D00-1749. Je demande à ce qu'on affiche

  9   ce document à l'écran, s'il vous plaît, Monsieur le Greffier.

 10   Nous avons une traduction qui n'est pas dans sa phase finale de ce

 11   document. Et une fois la traduction finie, nous la présenterons pour

 12   pouvoir montrer sur quoi portait cette loi d'amnistie générale et quels

 13   étaient les actes qui étaient amnistiés. Je demande son versement au

 14   dossier.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Mahindaratne.

 16   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Je n'ai pas d'objection.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 18   M. MISETIC : [interprétation] Excusez-moi, mais je pense que nous avons

 19   versé cette loi en tant que pièce D680.

 20   M. KUZMANOVIC : [interprétation] La même loi, mon confrère ?

 21   M. MISETIC : [interprétation] Oui.

 22   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Excusez-moi, cela m'a échappé.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas-là, j'imagine que vous

 24   retirez votre demande.

 25   Veuillez poursuivre.

 26   M. KUZMANOVIC : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche 3D00-1588.

 27   C'est encore une réponse de la part du gouvernement croate. Le document est

 28   déjà versé au dossier, mais ce qui n'était pas versé au dossier sont les

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  1   dernières cinq pages de ce document 3D, à savoir un aperçu des enquêtes

  2   criminelles.

  3   J'aimerais que l'on affiche la cinquième page avant la fin.

  4   Q.  C'est un document rédigé par le Dr Granic en réponse à votre rapport,

  5   et cette réponse porte la date du 14 mars 1996. J'aimerais attirer votre

  6   attention sur cet aperçu des enquêtes criminelles qui sont en cours. Nous

  7   avons un tableau indiquant qui sont les auteurs des actes criminels et de

  8   quels actes il s'agit qui ont eu lieu après l'opération Tempête. Ensuite,

  9   nous avons encore sur les pages qui suivent, nous avons indiqué quelles

 10   sont les actions qui ont été prises.

 11   Est-ce que vous vous souvenez avoir reçu cet aperçu ?

 12   R.  Oui. Je pense que c'est inclus dans un des documents que nous avons

 13   sous les yeux.

 14   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Madame Mahindaratne, je ne sais pas si ce

 15   tableau a été annexé à la version originale de cette pièce ?

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est le tableau

 17   numéro 1.

 18   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Dans ce cas-là, je ne demande pas son

 19   versement en tant que pièce à conviction à part. Je voulais juste m'assurer

 20   que c'était déjà versé au dossier.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit que cet aperçu est

 22   présenté plus en détail par la suite, et ce n'est pas ce que j'ai trouvé

 23   dans le document.

 24   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Oui, vous avez raison. Ce que je voulais

 25   dire, c'est que cet aperçu est annexé au rapport. Je me suis mal exprimé.

 26   Q.  Dans cet aperçu, comme nous avons déjà pu voir, il est montré qu'il y a

 27   1 005 enquêtes criminelles qui sont indiquées en bas de la première page de

 28   cet aperçu.

Page 6683

  1   R.  Oui.

  2   M. KUZMANOVIC : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche le bas de la

  3   page.

  4   Q.  Ensuite on indique quel genre d'enquêtes criminelles sont en cours.

  5   Puis, entre autres, il est indiqué quelle est la situation s'agissant

  6   de l'ancien secteur sud. Il est dit qu'il y a 28 personnes qui sont

  7   inculpées d'avoir commis des crimes et qu'il s'agit du délit de vols

  8   qualifiés.

  9   Saviez-vous quel était le nombre total de personnes qui étaient soit

 10   accusées soit condamnées à cette époque-là, à part de ce que nous avons pu

 11   voir dans les rapports présentés ?

 12   R.  Je ne me souviens pas de cela, parce que cela était une manière de

 13   répondre aux demandes que j'ai présentées aux autorités et, bien sûr, que

 14   le bureau du rapporteur spécial souhaitait disposer de ces chiffres pour

 15   connaître la situation précise, mais maintenant je ne pourrais pas vous

 16   dire si j'ai appris quelque chose par la suite et ce que c'était.

 17   Q.  J'ai bien compris, mais s'agissant de Sibenik, Zadar, les tribunaux là-

 18   bas ont également eu affaire aux affaires qui avaient trait au secteur sud,

 19   n'est-ce pas. Le saviez-vous ?

 20   R.  Oui, j'ai ce document maintenant sous les yeux.

 21   M. KUZMANOVIC : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche la pièce P638,

 22   s'il vous plaît.

 23   Q.  C'est votre rapport qui porte la date du 14 mars 1996, Madame Rehn.

 24   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Est-ce que mon éminente consoeur pourrait

 25   indiquer à quel intercalaire se trouve ce rapport.

 26   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] L'intercalaire 4.

 27   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Merci.

 28   Q.  Madame Rehn, j'aimerais que vous examiniez la page 19, paragraphe 73,

Page 6684

  1   il est fait état du nombre de réfugiés serbes pour lesquels l'approbation a

  2   été faite. Il y a 2 100 sur 5 600 demandes qui ont été reçues. Il est

  3   indiqué qu'il y a encore plus de Serbes de Croatie qui souhaiteraient

  4   rentrer en Croatie. D'après votre expérience, même si ce processus a

  5   commencé lentement au départ, au fur et à mesure il s'est accéléré, n'est-

  6   ce pas, à l'époque où vous étiez le rapporteur spécial ?

  7   R.  Il a commencé immédiatement, mais lentement, et tout cela dépendait de

  8   la résistance que présentaient les villageois s'agissant du retour des

  9   Serbes.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kuzmanovic, juste pour les

 11   besoins du compte rendu d'audience, pour qu'il n'y ait pas de confusion,

 12   vous avez parlé de la pièce P638, mais ce document en fait porte la cote

 13   D669.

 14   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 15   J'aimerais que l'on affiche la pièce P645.

 16   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] C'est à l'intercalaire 13, Madame Rehn.

 17   M. KUZMANOVIC : [interprétation]

 18   Q.  Je sais que vous aviez quelques inquiétudes à propos d'expulsion

 19   d'appartements appartenant au ministère de la Défense. Regardez le

 20   paragraphe 25 de ce rapport, c'est la réponse du gouvernement croate que

 21   nous y trouvons s'agissant de la procédure à suivre. Dites-moi quand vous

 22   aurez retrouvé le texte.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kuzmanovic, est-ce qu'il y a eu

 24   des communications entre les parties quant à la pertinence de l'expulsion

 25   d'appartements de l'armée ? En effet, je pensais que c'était quelque chose

 26   qui n'était pas vraiment très important pour la thèse de l'Accusation ?

 27   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Pas pour des appartements militaires.

 28   J'essayais de démontrer un autre aspect, un autre volet de la question,

Page 6685

  1   mais nous n'avons pas parlé d'appartements militaires.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quel que soit notre avis sur la

  3   question, ça ne va pas faire de différence; c'est exact ?

  4   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Oui.

  5   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Je pensais que la question des

  6   appartements militaires, des expulsions des personnes qui s'y trouvaient

  7   n'était pas une chose contestée, si c'est le cas je ne vais pas insister.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce n'est pas non plus à des fins de

  9   démonstration. Vous pourriez vous en passer --

 10   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Tout ce que je peux faire, Monsieur le

 11   Président, c'est faire comprendre qu'on parle de violence dans le rapport.

 12   Et dans le procès-verbal, M. Jarnjak parlait du fait que la police civile

 13   pouvait s'occuper de la question plutôt que la police militaire, c'est ce

 14   que j'essayais de démontrer, c'est tout.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc c'est la compétence de la police

 16   qui est la question posée ici, et pas ce qui s'est passé; c'est bien cela ?

 17   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] C'est exact.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Fort bien. A vous de juger, Maître

 19   Kuzmanovic, dites-nous si vous estimez qu'il est utile de sonder davantage

 20   cette question de l'expulsion d'appartements militaires.

 21   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Non, nous allons vous faire ceci sous

 22   forme de requête déposée en prétoire.

 23   Je voulais vous rappeler les différentes lois et délais prévus versés

 24   par le truchement du témoin Galbraith : nous avions la pièce D422 qui

 25   parlait d'un délai de 90 jours; D425 c'est la cour constitutionnelle qui

 26   rend cela anticonstitutionnel; puis la pièce D424 -- D425 et D422 sont les

 27   deux pièces concernées.

 28   Prenons maintenant la pièce P640.

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  1   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Intercalaire 6.

  2   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Merci.

  3   Q.  Paragraphe 50. Dites-moi quand vous êtes prête.

  4   R.  Oui, fidèle au poste.

  5   Q.  Paragraphe 50 : "D'après l'office croate des personnes déplacées et des

  6   réfugiés, quelque 12 000 réfugiés serbes ont reçu l'autorisation de rentrer

  7   dans le pays à la date du 12 octobre 1996, surtout dans le cadre de la

  8   réunion familiale ou de la preuve de la citoyenneté."

  9   Par rapport à votre rapport précédent on a augmenté de plusieurs milliers

 10   là ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Ce qui veut dire que les obstacles bureaucratiques même s'ils

 13   existaient toujours diminuaient ?

 14   R.  Effectivement, ça s'améliorait sans arrêt, des pas ont été franchis

 15   dans le bon sens, dans la bonne direction.

 16   Q.  Nous avons d'autres informations --

 17   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Je vais passer à la pièce P651.

 18   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Intercalaire 21 [comme interprété].

 19   M. KUZMANOVIC : [interprétation]

 20   Q.  C'est votre dernier rapport du 14 janvier 1998, paragraphe 29, page 9,

 21   merci de faire preuve d'autant de patience lorsque vous essayez de trouver

 22   votre chemin dans les documents.

 23   R.  J'ai déjà vu ce document.

 24   Q.  Au paragraphe 29, vous dites ici : "Après plus deux ans d'observation

 25   des tendances en Croatie en matière du droit de l'homme, le rapporteur

 26   spécial estime que même s'il y a encore beaucoup de choses à faire, il y a

 27   de bonnes raisons de faire preuve d'optimisme quant à l'avenir."

 28   Un peu plus loin, vous parlez d'information statistique obtenue du

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  1   gouvernement croate "…à compter d'octobre 1997," dites-vous, "il y a eu en

  2   tout 5 580 procédures pénales qui ont été enclenchées dans le cadre des

  3   opérations militaires exécutées dans les anciens secteurs sud et nord," et

  4   dans les lignes suivantes vous dites quel est le stade auquel se trouvent

  5   ces procédures.

  6   Dans votre rapport final, celui-ci, est-ce que votre interlocuteur était

  7   encore Granic des Affaires étrangères ?

  8   R.  Lorsque j'ai quitté ces fonctions de rapporteur spécial, il est certain

  9   que je me concentrais sur la nouvelle mission qui m'avait été donnée, qui

 10   était une mission donnée directement par les Nations Unies en tant que SIG

 11   pour la Bosnie-Herzégovine. Mais j'étais le chef de la mission

 12   internationale pour la Bosnie-Herzégovine et en tant que tel j'ai été

 13   invité par le président Tudjman et était présent M. Granic, et ça c'était

 14   fait en 1998/1999.

 15   Q.  Le président Tudjman était toujours président de Croatie, à l'époque ?

 16   R.  Oui. Sinon, il ne nous aurait pas invité.

 17   Q.  Je voulais aborder un dernier sujet avec vous.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'espère que ça ne prendra pas plus

 19   d'une ou deux minutes. 

 20   Je vous ai dit 25 minutes, vous en avez maintenant utilisé 29 déjà.

 21   M. KUZMANOVIC : [interprétation] J'essaie de voir quels sont les documents

 22   D que j'ai. 3D00-1689.

 23   Q.  Je sais qu'on vous a posé une question à propos de la nature des actes

 24   d'amnistie. Ici, nous avons une traduction partielle de ce document qui

 25   fait 47 pages, fait par le président Tudjman.

 26   On voit que quelqu'un est accusé d'insurrection armée et qu'il va être

 27   dispensé de poursuites au pénal; nous avons ensuite une autre personne, un

 28   certain M. Babic, qui lui aussi sera exempté et dispensé alors qu'il était

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  1   accusé d'insurrection armée.

  2   J'espère que ceci dissipe la confusion qui régnait peut-être chez vous

  3   quant à la nature des chefs d'accusation retenus.

  4   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Je demande le versement de ce document et

  5   j'en ai ainsi terminé.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie. Merci de me fournir ces

  7   informations.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Excusez-moi, je n'ai pas vérifié toute

  9   la traduction, mais quand on dit que quelqu'un est dispensé de "poursuites

 10   pénales," c'est un peu surprenant. Il faudrait un autre document.

 11   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Oui, je suppose qu'il y aura un document

 12   portant sur les "poursuites".

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Fort bien. Il faudra vérifier la

 14   terminologie.

 15   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Je demande le versement.

 16   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Pas d'objection.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quelle cote ?

 18   M. LE GREFFIER : [interprétation] D693.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est versé au dossier.

 20   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Merci de m'avoir accordé ces quelques

 21   minutes supplémentaires.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic.

 23   M. MISETIC : [interprétation] Excusez-moi de poser une question d'ordre

 24   administratif. Nous avons essayé de repérer ce sujet dont parlait Me

 25   Kuzmanovic. Ce qui devait être 3D00-1588, je ne sais pas si cette pièce a

 26   déjà été versée au dossier par l'Accusation.

 27   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Ce tableau est en annexe à la pièce

 28   versée par l'Accusation. Je ne me souviens pas de la page exacte.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est un document de 33 pages ?

  2   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Un tableau avec une explication. Je

  4   pense que le tableau c'était le tableau numéro 1 en annexe.

  5   M. MISETIC : [interprétation] Est-ce qu'on peut avoir la cote de tout le

  6   numéro ?

  7   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] P600.

  8   M. MISETIC : [interprétation] Merci.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il me semblait que c'était le tableau

 10   numéro 1 et dans la pièce même c'est la vingt-sixième page sur un total de

 11   33 [comme interprété].

 12   Madame Mahindaratne, vous avez des questions supplémentaires ?

 13   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous essayer de terminer en 30

 15   [comme interprété] minutes, de cette façon on aura peut-être l'occasion de

 16   poser des question si elles n'ont pas encore été posées au témoin.

 17   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Oui, je voudrais que soit affiché la

 18   pièce D669.

 19   Nouvel interrogatoire par Mme Mahindaratne : 

 20   Q.  [interprétation] Madame Rehn, beaucoup de questions vous ont été posées

 21   sur l'amnistie générale. Si vous voulez voir le document dans le classeur,

 22   il se trouve à l'intercalaire 4.

 23   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Monsieur le Greffier va nous montrer la

 24   page 19, j'en suis sûre. Ne perdons pas de temps.

 25   Q.  Prenez le paragraphe 72, voici ce que vous y dites : "Le 30 décembre

 26   1995, le président de la Croatie a émis un décret amnistiant 451 Serbes de

 27   Krajina accusés de 'rébellion armée' pour leur soutien militaire présumé à

 28   ce qu'on a appelé la 'République de la Krajina serbe.' Cette décision du

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  1   gouvernement croate a été appréciée par le Conseil de sécurité dans une

  2   déclaration faite par le président le 8 janvier 1996. Néanmoins, le

  3   rapporteur spécial estime qu'une amnistie générale, qui n'a pas encore été

  4   décrétée, c'est une condition sine qua non pour que les Serbes de Croatie

  5   puissent revenir, car sinon ils vont craindre d'être poursuivis, parce

  6   qu'ils auraient servi dans l'armée de la soi-disant 'République de la

  7   Krajina serbe.'"

  8   Veuillez également prendre la page 26, paragraphe 109. Vous y faites des

  9   recommandations, notamment celle-ci : "Afin de renforcer la confiance et

 10   d'assurer la sécurité, les autorités croates devraient accroître le nombre

 11   de projets de suivi policiers et de projets humanitaires dans les anciens

 12   secteurs. Il faudrait décréter  une amnistie générale pour tous ceux qui

 13   ont combattu dans ce qu'on a appelé l'armée de la 'République serbe de

 14   Krajina' et assurer le retour des Serbes de Croatie que sont réfugiés

 15   aujourd'hui en République fédérale de Yougoslavie."

 16   Vous et la communauté internationale, qui voyez-vous comme étant

 17   bénéficiaire de cette amnistie générale que vous proposiez ? Pourriez-vous

 18   être brève parce que j'ai peu de temps.

 19   R.  Je serai très brève. C'est aussi de mon intérêt d'être concise. A mon

 20   avis, il est bien clair que nous avons pensé aux Serbes qui s'étaient

 21   échappés pour une raison ou pour une autre pendant l'opération Tempête, et

 22   qui fallait faire en sorte qu'il n'y ait pas d'obstacle pour que ceux-ci

 23   puissent bénéficier d'une amnistie générale. En fait, cela visait les

 24   Serbes. Bien sûr, ce qui a été évoqué pour cette loi devait être la même

 25   pour toutes les nationalités, c'est bien clair. Mais pour ma part, je

 26   pensais aux Serbes.

 27   Q.  Quels que groupe que ce soit pour ceux qui en bénéficieraient, est-ce

 28   que vous aviez l'intention que les actes que visait l'amnistie pourraient

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  1   avoir trait à des crimes de droit commun tels que le vol ou le pillage ?

  2   Est-ce que c'était ça l'intention, ou est-ce que vous aviez l'intention que

  3   ce soit des poursuites pour participation --

  4   M. MISETIC : [interprétation] C'est une question directrice, Monsieur le

  5   Président, là encore.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

  7   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Très bien, j'en reste là, Monsieur le

  8   Président. J'ai maintenant posé ma question.

  9   M. MISETIC : [interprétation] La question était déjà directrice, donc je

 10   vais demander qu'elle soit biffée ou au moins reformulée.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais voir.

 12   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Est-ce que je pourrais la reformuler,

 13   Monsieur le Président ?

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, un instant, s'il vous plaît.

 15   Oui, allez-y, Madame Mahindaratne. 

 16   Mme MAHINDARATNE : [interprétation]

 17   Q.  Est-ce que vous avez compris cette amnistie générale comme visant une

 18   amnistie également pour les poursuites concernant des crimes et délits de

 19   droit commun tel que le vol ?

 20   R.  C'est très difficile pour moi-même de --

 21   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président --

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous objectez encore à cette question ?

 23   M. MISETIC : [interprétation] De quoi veut-elle exactement parler ? Je veux

 24   dire, maintenant il faut que nous sachions -- cette loi n'a pas été adoptée

 25   avant le mois d'août. Donc elle l'interroge en contre-interrogatoire avec

 26   un document qui est du mois de mars. Elle lui demande son avis concernant

 27   une loi qui n'a pas été adoptée avant six mois plus tard.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui -- maintenant vous voulez parler de

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  1   la loi elle-même.

  2   Qu'est-ce que vous aviez à l'esprit en ce qui concernait l'amnistie à ce

  3   moment-là, à savoir que l'objectif devait être d'empêcher qu'il y ait des

  4   poursuites contre les personnes qui avaient activement participé ou qui

  5   avaient été membres des forces armées, qu'on appelait souvent les forces

  6   rebelles; ou est-ce que l'objectif devait être plus vaste et comprendre pas

  7   seulement ces personnes ou ces forces du type rébellion, mais aller au-delà

  8   pour s'appliquer également à des crimes de droit commun tel que le vol et

  9   autres crimes de ce genre ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président, pour

 11   avoir éclairci les choses pour moi. La question est tout à fait claire

 12   maintenant pour moi. Avec ma formation démocratique, il aurait été

 13   impossible pour moi de demander une amnistie pour des délits de droit

 14   commun. Il s'agissait d'une question concernant juste ceux qui avaient

 15   participé aux combats dans la Krajina.

 16   Donc mon opinion, tout au moins, c'est que je parlais, en particulier, moi,

 17   d'exclure, bien sûr, des crimes du point de vue de l'amnistie. Il

 18   s'agissait de la guerre -- de combats qui avaient eu lieu, et il ne fallait

 19   pas parce qu'on était simple soldat être poursuivi pour cette raison.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Alors, bien sûr --

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] De sorte que --

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc le fait d'avoir été un soldat dans

 23   le --

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- dans l'armée qui n'était pas la

 26   bonne, dans l'armée de la rébellion.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, dans l'armée qui n'était pas la bonne. Il

 28   y avait plusieurs armées.

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  1   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  2   Monsieur le Greffier, pourrais-je rapidement vous demander la présentation

  3   du document P639 ?

  4   Q.  Madame Rehn, ceci est à l'intercalaire 5, il s'agit de votre rapport du

  5   7 novembre. Vous regardez le paragraphe 41, où on pose une question

  6   concernant votre rapport dans le paragraphe 4, et il est dit : "Toutefois,

  7   le rapporteur spécial a fait remarquer que quelques milliers de réfugiés

  8   serbes de Croatie attendaient déjà en Hongrie de pouvoir revenir et étaient

  9   empêchés de le faire à cause de différentes mesures bureaucratiques mises

 10   en place par les fonctionnaires."

 11   A l'époque où vous avez écrit ce rapport, est-ce que vous avez reçu ces

 12   renseignements, notamment est-ce que ces personnes étaient là et

 13   attendaient depuis un certain temps ? Est-ce que vous avez perçu que

 14   c'était depuis un certain temps ? C'était ça les renseignements ? Est-ce

 15   que c'étaient des renseignements du moment ou -- est-ce que vous pouvez

 16   donner un cadre temporel ?

 17   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, c'est une question

 18   directrice et il y a quatre possibilités pour le témoin pour choisir l'une

 19   des possibilités qu'elles souhaitent prendre.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Si vous mentionnez toutes les

 21   possibilités, alors vous êtes encore en train de poser une question

 22   directrice concernant les possibilités qui s'ouvrent, en même temps c'est

 23   la raison pour laquelle vous ne devriez pas diriger le témoin.

 24   Madame Mahindaratne --

 25   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Monsieur le Président, c'était parce

 26   que je manquais de temps, et je voulais simplement restreindre les choses -

 27   -

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Bon, plus vous donnez de

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  1   possibilités, plus vous perdrez du temps. Essayez de reformuler la

  2   question. Je veux dire, s'il y a mal, le mal est déjà fait. Nous n'allons

  3   pas supprimer ça du compte rendu.

  4   Dans la mesure où vous avez compris la question de Mme Mahindaratne,

  5   pourriez-vous donner une réponse brève ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci. J'ai reçu les renseignements de

  7   diverses sources de mon personnel, ainsi que d'autres qui étaient des

  8   réfugiés serbes de Croatie et qui attendaient, qui essayaient d'obtenir la

  9   permission de revenir chez eux, et demander leur propriété. Je ne peux pas

 10   dire s'ils étaient là tout le temps ou depuis un certain temps ou si

 11   quelque chose s'était passé juste à ce moment-là où ils avaient, par

 12   exemple, traversé les frontières vers la Hongrie et attendu de pouvoir

 13   revenir en Croatie. Je suis désolée, je ne peux pas répondre à cela.

 14   Mme MAHINDARATNE : [interprétation]

 15   Q.  Madame Rehn, vous avez pris vos fonctions de rapporteur spécial le 27

 16   septembre 1995, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  On vous a posé des questions concernant le droit relatif aux biens et à

 19   la propriété. Même page, si vous regardez au paragraphe 38, vous parlez du

 20   droit applicable aux biens, à la propriété. Au paragraphe 39, vous dites :

 21   "Il reste peu clair de savoir ce qu'est le statut de ces biens ou

 22   propriétés quand les 90 jours seront échus, bien qu'il ait été stipulé que

 23   la propriété de biens non revendiqués fera l'objet d'une loi spéciale."

 24   Est-ce que vous avez jamais compris sur ce qui s'est passé si un

 25   propriétaire n'était pas revenu dans les 90 jours qui étaient prévus et

 26   qu'il réclamait un bien ou une propriété, ce qui devait arriver à ces biens

 27   ou ces propriétés ?

 28   R.  C'est quelque chose qui me préoccupait beaucoup sur ce qui allait

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  1   arriver à ces biens ou propriétés, parce que nous savions que les autorités

  2   croates avaient besoin non seulement de biens, mais également de maisons

  3   pour ces nombreuses centaines de milliers de personnes déplacées et

  4   également de réfugiés en Croatie. Mais bien sûr, pour nous il était

  5   important de savoir que les gens pouvaient se fonder sur le fait qu'ils

  6   n'avaient pas perdu leur droit concernant leur propriété. Je ne peux pas

  7   simplement répondre à ceci de cette manière, mais je peux dire que nous

  8   étions préoccupés.

  9   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai une toute

 10   dernière question.

 11   Q.  Que se passait-il si les demandeurs ou les propriétaires revenaient

 12   dans les trois mois, est-ce que comme vous ils étaient au courant de cette

 13   loi, d'après vos renseignements, est-ce qu'on leur rendait leurs biens ou

 14   leur propriété immédiatement, est-ce qu'il y avait d'autres conditions qui

 15   étaient exigées ?

 16   R.  Au niveau des principes et de la théorie, ils devaient récupérer leur

 17   bien ou leur propriété. Mais comme je l'ai décrit, il y avait des cas, et

 18   j'ai été témoin de cela moi-même, dans lesquels des personnes étaient

 19   revenues, qui avaient des droits à ces biens ou à ces propriétés, mais

 20   quelqu'un d'autre habitait leur domicile, et ils ne pouvaient pas les faire

 21   partir parce que ceux-là n'avaient aucun endroit où aller. Donc c'était une

 22   situation compliquée dans l'ensemble.

 23   Q.  Et je vous lis cette dernière phrase. Vous dites : "En outre, même si

 24   le propriétaire revenait dans le délai prévu, le bien ou la propriété

 25   n'était pas rendu tant que le ressortissant croate auquel cette propriété

 26   était prise recevait une autre maison appropriée qu'il puisse posséder et

 27   utiliser."

 28   R.  Oui.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic.

  2   M. MISETIC : [interprétation] Le témoin a donné sa réponse, elle n'était

  3   pas satisfaite de la réponse, maintenant elle est en train de lire le

  4   rapport.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je n'ai pas entendu la question de Mme

  6   Mahindaratne. Je ne sais pas quelle question elle voulait poser. Elle a dit

  7   qu'elle allait lire la dernière phrase, et c'est ça qu'elle a fait, et donc

  8   j'attends que la question suive. Mais je ne sais pas ce que concerne cette

  9   question, si le témoin se rappelle avoir lu ce texte avant ou si c'est elle

 10   qui l'a rédigé. Je n'ai pas entendu la question encore.

 11   Quelle serait votre question, Madame Mahindaratne ?

 12   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Et ceci sera la toute dernière.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez comprendre que Me Misetic va

 14   objecter très fortement à une question qui serait -- c'est la réponse que

 15   vous-même vous donneriez, parce qu'à ce moment-là ce ne serait pas une

 16   question directrice, ce serait un exemple classique de question directrice.

 17   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Non, Monsieur le Président, j'avais une

 18   question, mais Me Misetic ne m'a pas donné la possibilité.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Alors posez votre question et on

 20   s'attend à ce que ce ne soit pas une question directrice.

 21   Mme MAHINDARATNE : [interprétation]

 22   Q.  Madame Rehn, quelle était la base sur laquelle vous avez rendu compte

 23   qu'il y avait des biens qui devaient être rendus au propriétaire si

 24   l'occupant croate avait une autre propriété qui était convenable ?

 25   Maintenant, quelle était la base ? Est-ce que c'était inclus dans cette loi

 26   ou est-ce que c'était basé --

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maintenant vous commencez à poser des

 28   questions directrices, Madame Mahindaratne.

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je pourrais --

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous étiez en train de le faire et vous

  3   demandez quelle est la base de cela, puis vous commencez à faire plusieurs

  4   propositions au témoin, et évidemment c'est quelque chose qui ne peut pas

  5   plaire à Me Misetic.

  6   M. MISETIC : [interprétation] Oui, j'ai un peu l'impression de surgir comme

  7   un diable qui sort de sa boîte, Monsieur le Président.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Mais je dois dire que moi-même je m'y

  9   suis prise en ce sens que cette législation précise et ce qui allait se

 10   passer ensuite n'était pas clair pour moi, et je comptais sur cela pour

 11   voir le moment où un appartement aurait été rendu à son légitime

 12   propriétaire. Ils devaient l'obtenir. Mais je n'étais pas sûr que ça se

 13   passait dans tous les cas. C'est la réponse que je peux donner. Ce n'est

 14   certainement pas une réponse satisfaisante, mais je ne veux pas faire une

 15   déclaration différente.

 16   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Ceci conclut mes questions

 17   supplémentaires, Monsieur le Président.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 19   [La Chambre de première instance se concerte]

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le Juge Gwaunza a une question --

 21   Maître Misetic.

 22   M. MISETIC : [interprétation] Deux brèves questions, et je peux le faire en

 23   moins d'une minute, Monsieur le Président.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non. Je pense que nous allons maintenant

 25   donner la priorité aux Juges.

 26   M. MISETIC : [interprétation] Bien.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et nous verrons ensuite s'il reste du

 28   temps.

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  1   Juge Gwaunza.

  2   Questions de la Cour : 

  3   Mme LE JUGE GWAUNZA : [interprétation] Oui, Madame Rehn, si je pouvais vous

  4   référer à votre rapport du 7 novembre 1995.

  5   R.  Oui.

  6   Mme LE JUGE GWAUNZA : [interprétation] A la page 9, paragraphe 25, plus

  7   particulièrement le paragraphe 25(c), vous avez dit : "Le 12 août, il a été

  8   rapporté qu'un certain nombre de personnes âgées avaient été brûlées et

  9   mises à mort dans le village de Komic [phon]."

 10   Je voulais simplement vous demander si vous avez davantage de détails

 11   concernant cet incident.

 12   R.  Madame le Juge, je suis désolée, mais je ne me rappelle pas davantage à

 13   ce sujet. Il y a eu plusieurs meurtres, plusieurs meurtres brutaux pendant

 14   cette période en ce qui concerne des civils. Bien sûr, nous avons essayé de

 15   nous renseigner plus particulièrement à ce sujet. Je l'ai mentionné mais

 16   personne d'autre n'était intéressé à cela, l'affaire de Grubori plusieurs

 17   fois. C'est quelque chose -- je n'ai jamais obtenu les réponses voulues.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Rehn, je peux vous dire que dans

 19   cette salle d'audience l'incident de Grubori a reçu beaucoup d'attention

 20   jusqu'à présent. C'est simplement que --

 21   R.  Ceci me réconforte beaucoup.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, très bien.

 23   Juge Gwaunza.

 24   Mme LE JUGE GWAUNZA : [interprétation] Oui. Je vous remercie.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Nous n'avons pas d'autres

 26   questions, puisque Me Misetic a promis qu'il aurait besoin d'une minute

 27   pour deux questions.

 28   Maître Misetic, c'est à vous.

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  1   M. MISETIC : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président. Je

  2   suis reconnaissant.

  3   Contre-interrogatoire supplémentaire par M. Misetic : 

  4   Q.  [interprétation] Bonjour, Madame Rehn, est-ce que c'était votre

  5   intention en préconisant une loi d'amnistie générale que le gouvernement de

  6   la Croatie, en 1996, puisse poursuivre des Serbes, disons, pour avoir volé

  7   un réfrigérateur ou brûlé une maison en 1991 et 1995 ?

  8   R.  Ils ne pourraient certainement pas être en mesure de poursuivre, je

  9   pense que j'ai déjà répondu à cette question, que ma démocratie nordique

 10   vraiment ne permettait pas qu'il y ait amnistie pour des actes criminels.

 11   Q.  Donc votre réponse c'est que vous croyez que oui le gouvernement croate

 12   pourrait continuer à exercer des poursuites contre des Serbes pour le vol

 13   d'un réfrigérateur, par exemple ?

 14   R.  [inaudible]

 15   Q.  Est-ce que c'est un oui ?

 16   R.  Oui. J'ai déjà répondu à cette question.

 17   Q.  Donc ma dernière question maintenant pour vous. Est-ce que vous pensez,

 18   s'il y avait eu un cas, que les Serbes auraient ressenti une différence

 19   matérielle dans leur possibilité de revenir en Croatie et de ne pas avoir à

 20   faire face à des poursuites du gouvernement croate pour les mettre en

 21   prison dès leur retour ?

 22   R.  Oui, absolument, parce que c'était une partie importante de cela. Mais

 23   ce qui les préoccupait, c'était la liste qui était présentée. Parce que

 24   quand on n'est pas sur une liste et qu'on a fait partie de combats en tant

 25   que combattant ordinaire, on peut vraiment là être préoccupé de ce qu'il va

 26   vous arriver. Je pense que nous devons oublier la question des actes

 27   criminels ou délictuels civils. Nous devons nous concentrer sur ceci et sur

 28   ce qui s'est passé pendant l'opération Tempête et les combats.

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  1   Q.  Nous avons ici des questions plus vastes à traiter. Donc la question

  2   c'est que vous venez d'évoquer les listes. Est-ce que vous vous rappelez

  3   que la communauté internationale, et plus particulièrement les Nations

  4   Unies, auraient dit au gouvernement croate de compiler une liste de 25

  5   Serbes qui pourraient être poursuivis pour crimes de guerre et que pour le

  6   reste ils devaient être considérés comme bénéficiant d'une immunité de

  7   toute poursuite devant les juridictions croates; est-ce que c'est exact ?

  8   R.  Je parle en ce qui me concerne personnellement. Je pense que là encore

  9   il faut qu'on fasse une différence entre le rapporteur spécial et ses

 10   compétences, et non en tant que représentant la communauté internationale à

 11   un haut niveau, les Nations Unies et ses décisions, et cetera. Je trouve

 12   que c'est très important, il faut garder ceci à l'esprit, lorsque, moi, ça

 13   me place en tant que témoin dans une situation délicate pour répondre à des

 14   questions au nom des Nations Unies et de la communauté internationale, dans

 15   le contexte de ce qu'un rapporteur spécial doit avoir pour remplir sa

 16   mission.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic, vous avez utilisé 300 %

 18   de votre temps.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'en ai pris effectivement.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon. Bien sûr, Me Misetic n'a pas

 21   demandé une minute pour poser des questions, mais nous allons également

 22   entendre les réponses.

 23   Maître Kuzmanovic.

 24   M. KUZMANOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas de

 25   questions en ce concerne ceci. Mais la loi elle-même, pour le D428, qui est

 26   maintenant déposé au dossier, il y a une traduction en anglais, donc la

 27   Chambre peut elle-même décider si --

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Et nous n'allons pas demander au

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  1   témoin d'interpréter des textes juridiques.

  2   Madame Rehn, tout au moins, ceci conclut votre déposition devant cette

  3   Chambre. Je souhaiterais vous remercier d'être venue à La Haye et d'avoir

  4   répondu aux très, très nombreuses questions qui vous ont été posées par les

  5   parties, et pas si nombreuses que ça par les Juges. Je vous souhaite un bon

  6   voyage de retour chez vous.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président. Cela a

  8   été un plaisir de pouvoir travailler avec le Tribunal.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur l'Huissier, pourriez-vous, s'il

 10   vous plaît, escorter Mme Rehn hors de la salle d'audience.

 11   [Le témoin se retire]

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il reste une petite question de

 13   procédure que je souhaite évoquer brièvement. Cet après-midi -- pour

 14   l'après-midi du vendredi, il y a une audience qui a été prévue, et

 15   apparemment pour des questions pratiques, le greffe a demandé si l'accusé

 16   voulait être présent ou pas. Ceci n'est pas pris à l'initiative de la

 17   Chambre parce que la Chambre considère qu'une audience au titre de

 18   l'article 54 bis du Règlement pour la même audience, à moins qu'il y ait

 19   des demandes précises qui soient présentées quant à l'état de -- nous avons

 20   examiné la question de cette audience comme étant une audience ordinaire.

 21   Dans l'intervalle, la Chambre a été informée du fait que les accusés

 22   renonçaient à leur droit d'être présents, et d'après ce que j'ai compris,

 23   ils préfèrent ne pas être présents, et il y a un accusé qui a choisi d'être

 24   présent. Donc je dis ceci pour le compte rendu, que l'on se renseigne sur

 25   cette question pour laquelle la Chambre n'a pas agi spontanément, mais je

 26   comprends qu'il pourrait y avoir des raisons pratiques pour cela et que ça

 27   puisse créer une situation dans laquelle l'un des accusés pourrait dire :

 28   "J'étais au courant [comme interprété] du fait que l'autre viendrait,

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  1   enfin, quel que ce soit. Vous pouvez envisager ou réenvisager, je ne vous

  2   encourage pas à le faire. Mais si vous voulez réexaminer votre choix d'être

  3   présent ou de ne pas être présent, veuillez faire savoir cela le plus tôt

  4   possible au greffe, compte tenu des incidences pratiques. Ceci, si

  5   possible, pas plus tard que demain.

  6   M. MISETIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc nous allons lever la séance jusqu'à

  8   demain 17 juillet et ce sera à deux heures et quart de l'après-midi.

  9   Monsieur le Greffier, ce sera dans la salle d'audience numéro II où nous

 10   entendrons une déposition par vidéoconférence. Nous avons les motifs pour

 11   lesquels la décision demandée quant à une déposition par vidéoconférence

 12   pour le témoin 172, nos motifs sont prêts. Mais je comprends que pour

 13   toutes sortes de raisons pratiques, nous n'entendrons pas cette déposition

 14   quoiqu'il arrive ce vendredi, donc je ne veux pas davantage prendre de

 15   temps pour les interprètes et les sténographes pour le moment, mais les

 16   motifs sont prêts.

 17   Je lève l'audience jusqu'à demain, deux heures et quart,

 18   14 heures 15. La séance est levée.

 19   --- L'audience est levée à 13 heures 53 et reprendra le jeudi 17 juillet

 20   2008, à 14 heures 15.

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